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in 2010 with funding from
University of Ottawa
http://www.archive.org/details/encyclopdieoud02alem
ENCYCLOPEDIE,
o u
DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES,
DES ARTS ET DES MÉTIERS.
TOME SECOND.
B = CEZ
ou
DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES,
DES ARTS ET DES MÉTIERS,
PAR UNE SOCIÉTÉ DE GENS DE LETTRES.
Mis en ordre & publié par M. DIDERO T, de l'Académie Royale des Sciences & des Belles-
Lettres de Pruffe ; & quant à la Partie Mathématique, par M. D'ALEMBERT,
de l'Académie Royale des Sciences de Paris , de celle de Pruffe , & de la Société Royale
de Londres.
Tantum ferles juncluraque pollet ,
Tantum de medio fumptis accedït honoris! HoRAT»
TOMESECOND.
Chez
PARIS,
rue Saint Jacques , à la Science.
Saint Jacques , à la Plume d'or.
Imprimeur ordinaire du Roy , rue de la Harpe.
Saint Jacques , à Saint Landry , & au Griffon.
M. D C C. L I.
AVEC APPROBATION ET PRIVILEGE DU R 0^
^ r'
> i
AVER TIS SEMENT
DES
EDITEURS.
LA reconnoiffance 8: l'équité nous obligent à commencer cet Avertiffement par an-
noncer les Savans qui ont bien voulu concourir à la compofîtion de ce fécond
Volume & des fuivans.
Nous ne pouvons trop nous hâter de publier que M. de Buffon nous a donné pour uri
des Volumes qui fuivront celui-ci l'article Nature ; article d'autant plus important , qu'il
paroitre dans les fujets qu'il traite.
M. le Chevalier de Jaucourt, que la douceur de fon commerce 6k la variété de
fes connoiffances ont rendu cher à tous les gens de Lettres , & qui s'applique avec un fuc-
cès distingué à la Phyfique 6k à l'Hiftoire Naturelle , nous a communiqué des articles nom-
breux , étendus , & faits avec tout le foin poiïible. On en trouvera plufieurs dans ce Vo-
lume , & nous avons eu foin de les désigner par le nom de leur Auteur. Ces articles font
les débris précieux d'un Ouvrage immenfe , qui a péri dans un naufrage , & dont il n'a
pas voulu que les relies fufîent inutiles à fa patrie.
M. de Mondorge, généralement eltimé par la fineffe de fon goût, & par fon amour
éclairé pour les Lettres 6k pour les Beaux- Arts , a donné fur la Gravure en couleur, un Mé-
moire important, dont on fera ufage à l'article Gravure.
M. Venel , dont nous avons parlé avec éloge dans le Difcours Préliminaire , & qui
nous avoit déjà communiqué plufieurs éclairciflemens utiles , ne s'ell pas borné à ce tra-
vail ; il a bien voulu fe charger d'un grand nombre d'articles , à la fin defquels on verra
fon nom , & dont quelques-uns fe trouvent déjà dans ce Volume.
M. l'Abbé de Sauvages, de la Société royale des Sciences de Montpellier, auteur de
plufieurs excellens Mémoires , imprimés dans le recueil de l'Académie des Sciences de
Paris , a fourni un morceau curieux fur les Toiles peintes , 6k un autre fur le Sel de marais.
Mais nous devons fur-tout beaucoup à une Perfonne , dont l'Allemand elt la Langue ma-
ternelle , 6k qui elt très-verfée dans les matières de Minéralogie , de Métallurgie , 6k de Phy-
fique ; elle nous a donné fur ces différens objets une multitude prodigieufe d'articles , dont
on trouvera déjà une quantité considérable dans ce fécond Volume. Ces articles font ex-
traits des meilleurs ouvrages Allemands fur la Chimie , que la Perfonne dont nous parlons
a bien voulu nous communiquer. On fait combien l'Allemagne elt riche en ce genre ; &
nous ofons en conféquence alTùrer que notre Ouvrage contiendra fur une fi vafte matière
un grand nombre de choies intéreilantes 6k nouvelles , qu'on chercheroit en vain dans nos
livres François.
Ce Savant ne s'efl: pas contenté de nous rendre un fi grand fervice. Il nous a fourni encore
plufieurs articles fur d'autres matières : mais il a exigé que fon nom demeurât inconnu ; c'eit
ce qui nous empêche de faire connoître au Public le nom de ce Philofophe citoyen , qui
cultive les Sciences fans intérêt , fans ambition , 6k fans bruit ; 6k qui , content du plaitîr
d'être utile , n'afpire pas même à la gloire fi légitime de le paroitre.
Les feules critiques auxquelles nous nous croyons obligés de répondre dans cet Ouvrage ,
confïitentdans les plaintes de quelques perfonnes à qui on n'aura pas rendu juftice. Nous tâ-
cherons d'y fatisfaire d'une manière digne d'elles 6k de nous ; 6k nous commencerons aujour-
d'hui par M. Vaucanfon. Cet illuitre Académicien , célébré dans l'Encyclopédie aux arti-
cles Automate 6c Androide , comme les hommes fupérieursle doivent être , s'eit plaint
avec raifon de l'article Asple , dans lequel on a fait fur un fimple oui-dire une expofition in-
fidèle 6k peu favorable d'une très-belle machine de fon invention , dont il a publié la descrip-
tion depuis, 6k dont on a paru vouloir partager la découverte, quoique fans aucune inten-
tion de la partager en effet , mais par un fimple mal-entendu qu'il importe peu de détailler
Tome II. A
*J
A VERTlSSEMENT,fsc.
ici. La confiance avec laquelle M. Vaucanlbn a bien voulu s'adrefTer à nous , a été reçue
de notre part avec tous les égards que l'on doit aux vrais talens ; il nous a paru aufïi fàtis-
fait de nos procédés , que nous l'avons été des tiens ; & nous fommes convenus de ré-
former cet article , & de distribuer avec le fécond volume la feuille corrigée. M. Vau-
canlbn a fait plus : il a bien voulu nous avertir de quelques erreurs où l'on ell tombé dans
ce même article , en fuivant à la lettre le règlement de Piémont , qui paffe néanmoins
pour le meilleur qu'il y ait en fon genre ; & ces erreurs feront rectifiées par la même occa-
fion dans la nouvelle feuille.
On a attribué par méprife dans le Difcours Préliminaire la dernière édition de Daviler
à M. Blondel ; il n'eft Auteur que des Planches. L'édition eft d'un homme de Lettres très-
connu par fon goût & par fes lumières , M. Mariette , dont le Traité des Pierres gravées
a été fi bien reçu du Public.
On ne doit point perdre de vue en lifant cet Ouvrage , i°. que chacun des Auteurs ré-
pond de (es articles , & ne répond que des liens : c'eft pour cela qu'on a defigné ceux de
chacun par une marque diftinétive ; 20. que l'Encyclopédie , quoiqu'elle renferme certai-
nement , & de l'aveu de tout le monde , un très-grand nombre de chofes qui lui font pro-
pres , ne peut & ne doit être néanmoins dans fa plus grande partie , qu'un recueil de ce qui
le trouve ailleurs. Plufieurs de ceux qui ont travaillé à ce Dictionnaire ont cité fort exac-
tement les fources où ils ont puifé ; les autres l'auroient dû faire fans doute : mais quand
les articles empruntés fans citation , font bien faits d'ailleurs , l'inconvénient qui réfuîte de
cette omifTion par rapport à l'Ouvrage , paroît allez léger. Au refte , il fera facile , fi le
Public le juge à propos , de donner dans un des Volumes fuivans la lifte des principaux
ouvrages qui ont fervi à la compofition de l'Encyclopédie ; on a déjà averti dans le Dif-
cours Préliminaire que tous les Dictionnaires ont été plus ou moins utiles , quoique plufieurs
des Auteurs n'y ayent eu nullement recours.
ïlj
CORRECTIONS ET ADDITIONS
Pour le Premier Volume.
D
A N S le Dificours préliminaire , page xlj. liane
31 & 33 , au lieu de ces mots , des nouvelles vues , li-
fe^ des vues nouvelles, ibid, ligne S J. depuis le mot
entr'autres , efface^ le rejle de laphrafe.
A Carticle ABDICATION, au lieu de Philippe IV.
lif. Philippe V.
A t article AbrA, ligne pénultième , au lieu de 16 ,
lif. 61.
AT article Acanthe , en Architecture , lig. 33 , au
lieu de Villapaude , lif. Villapande.
A l'article Acceptation , p. 68, col. 1, lig. 17,
au lieu de par lef quelles , lif. par laquelle.
Quelques erreurs de copijle s' étant gliffées dans Cim-
preffwn de la Table des Accords, article ACCORD
du volume précédent , on a cru devoir rétablir ici le
commencement de cette Table.
TABLE DE TOUS LES ACCORDS
reçus dans l'harmonie.
Accords fondamentaux.
Accord parfait , & fes dirivés.
Sa tierce au grave. Sa quinte au grave.
Le fon fondamental
au grave.
-ïï-
-G:
-P-
Jjl
Accord parfait. Accord de fixte. Accord de fixte quarte.
Cet accord conrtitue le ton, & ne fe fait que (ur
la tonique ; fa tierce peut être majeure ou mineure,
& c'elt ce qui conftitue le mode.
Accord Jenfible ou dominant , & fes dérivés.
Sa feptieme au gr.
-©•
Le Ton fondamental Sa tierce au Sa quinte au
au grave. grave. grave.
â
Accord lenfible. De fauffe quinte. De petite fixte De triton,
majeure.
Aucun des fons de cet accord ne peut s'altérer.
Accord de feptieme , & fis dérivés.
Le fon fondamental
au grave.
Sa tierce au
grave.
Sa quinte au Sa feptieme au gr.
grave. ^x.
m
a
n:
-|
Accord de feptieme. De grande fixte. De petite fixte De féconde,
mineure.
La tierce, la quinte, 8c la feptieme de cet accord
peuvent s'altérer.
Accord de fplieme diminuée , & fes dérivés.
Le fon fondamental
au grave.
Sa tierce au
grave.
Sa quinte au Sa feptieme au j
grave. £j_
H
3E#
Accord de feptieme De fauiTe quinte De tierce min. De féconde
diminuée. & fixte maj. & triton. fuperrlue.
Aucun des fons de cet accord ne peut s'altérer.
Accord de fixte ajoutée , & fes dérivés.
Le fon fondamental Sa tierce au Sa quinte au Sa fixte au grave»
au grave. grave. grave. _@. =
^h— m
X':
AccorG w uxte Accord ajouté Accord ajouté Accord ajouté
ajoutée. de petite lixte. de féconde. de feptieme.
Je joins ici par-tout le mot ajouté, pour distinguer
cet accord & fes renverfés des productions fembla-
bles de Y accord de feptieme.
Ce dernier renverfementqui porte le nom $ accord
ajouté dejeptieme , eft très-bon , & pratiqué par les
meilleurs Muficiens, même par tel qui le defaprouve ;
mais ce n'eft. pas ici le lieu de m'étendre fur ce fujet.
Accord de fixte fuperflue , &C
N. B. Voye^ à Carticle ACCORD le relie de la
table.
A Carticle ACCOUPLEMENT , ligne 5 , au lieu de
Manfard, lif. François Manfard.
Ibid. ligne \ 1 , au lieu de DesbrolTes , lif de BrolTe,
C'elt ainli que fe nommoit ce fameux architecte ,
qu'on a appelle mal-à-propos Desbrojjes dans le pre-
mier volume de l'Encyclopédie.
A Carticle ADRIANISTES , à la fin il faut Lindan,
au lieu de Lidan.
A Carticle Adrumete, au lieu de Byfance, lifiç
Byfacène.
A la fin de Carticle AGIR, ajoute^: cet article ell
tiré du Traité des premières vérités , dans le Cours des
Sciences du P. Bulrier , Jeluite.
Dans Cart. AGNUS ScYTHICUS ,p. 179 , col. 2,
lig. 28 <S° 19 , au lieu de Sigifmond, d'Hesberetein ,
lij. Sigifmond d'Herbeiliain. Ibid. page itfo , col. 1 ,
lig. 10 , au lieu J'après , lif. avant.
A Carticle ALASTOR , au lieu ^'Ophnéus & Dyc=
téus , lif. Orphnéus & Nyctéus.
A la fin de Carticle Alcôve , ajoute^: On a fait
alcôve maiculin , quoique Defpreaux ait dit une al-
côve enfoncée , en parlant du lit de la MollefTe ; parce
qu'il lemble que l'ufage fait aujourd'hui alcôve plus
mafeulin que teminin. Au refte on peut lui donner quel
genre on veut , cela eft affez indifférent ; l'étymolo-
gie de ce mot, qui eftpeu connue S: allez obfcure, ne
rournilîant fur ce point aucune décifion. Iln'en eft p3S
de même à' antichambre & à' 'automne, dont nous avons
fait le premier teminin , & le fécond mafeulin , con-
tre l'ulage qui paroît commencer à s'établir , & qui
néanmoins n'a pas encore pris le deffus. Il nous pa-
roît ridicule de taire chambre féminin, & antichambre
mafeulin : à l'égard d'automne , tout concourt à le
rendre maiculin ; les trois autres faifons qui font de
ce genre en notre langue, & l'étymologie autumnus
mu elt du maiculin. La terminailon par un e muet ne
prouve rien en faveur du genre ; car verre , tonnerre ,
ccc. & une infinité d'autres , font mafculins, quoique
termines par un e mua.
En général , c'eft fur-tout où nous en voulions
IV
venir , fl faut diftinguer dans les langues Pufage ab-
solument établi , de celui qui ne l'eft pas encore ,
& qui veut , pour ainfi dire , s'établir. On doit abfo-
lumentfe fonmertre au premier ; à l'égard du fécond,
on doit s'y oppofer quand il n'eft pas raifonnable.
Si nos pères avoient fuivi cette maxime , ils n'au-
roient pas laiffé vieillir une infinité de mots & de
conftruûions énergiques , dont nous regrettons au-
jourd'hui la perte.
Dans t article ALGEBRE , ligne 1 5 , au lieu d'avec
lif. contre. A la fin du mime article, ajoute^ : Cet ar-
ticle traduit en partie de Chambers, mais corrigé &
fort augmenté , a été tiré par cet auteur du Lexique
mathématique de Harris , un des ouvrages qui ont
été annoncés dans le Profpeclus comme ayant fervi
à la composition de l'Encyclopédie.
A la finie V article Ame , p. 340 , immédiatement
avant la lettre ( AT) ajoute^: Une partie de cet article
a été tirée d'un Traité de M. Jacquelot, fur l'exiftence
de Dieu.
Ame , en Lutherie , eft un petit morceau de bois
placé droit près du chevalet , entre les deux tables
des inftrumens à archet. Le fon de ces inftrumens
dépend en partie de la pofition de Vame.
A la fin de l article Amitié , ajoute^ : Voye^ le
Traité de la Soc. civile du P. Buffier.
A la fin de V article An, ajoute^ : Cet article traduit
de Chambers , & augmenté , a été tiré par l'auteur
Anslois des élémens de Chronologie de M. "Wolf.
A la fin de V article Ana , ajoute^;
Ana , ( Littérature. ) on appelle ainfi des recueils
des penfées , des difeours familiers , & de quelques
petits opufcules d'un homme de lettres , faits de ion
vivant par lui-même, ou plus fouvent après ia mort
par fes amis. Tels font le Menagiana , le Bolœana ,
&c. & une infinité d'autres. On trouve dans les Mé-
moires de Littérature de M. l'abbé d'Artigny , tome I.
un article curieux fur les livres en ana , auquel nous
renvoyons : tout ce que nous croyons à propos d'ob-
ferver , c'eft que la plupart de ces ouvrages contien-
nent peu de bon , affez de médiocre , & beaucoup de
mauvais ; que planeurs deshonorent la mémoire des
hommes célèbres à qui ils femblent confacrés , &
dont ils nous dévoilent les petiteffes , les puérilités ,
& les momens foibles ; qu'en un mot, félon l'expref-
fion de M. de Voltaire , on les doit , pour la plupart,
à ces éditeurs qui vivent des fottifes des morts.
Dans r article ANALOGIE , les deux premiers alinéa
& les deux derniers font de M. du Marfais.
A la fin de t 'article Anatomie , ajoute^ : La chro-
nologie des Anatomiftes qu'on trouve dans cet arti-
cle , plus exafte & plus complette que celle du dic-
tionnaire de Médecine de M. James , a été faite d'a-
près un mémoire communiqué par l'un des plus fa-
vans Se des plus refpeâables Médecins de l'Europe.
A l'article ANTIPODES , p. 513, lig. 50 , après ces
mots , du côté du fait , ajoute^ : Je dois avertir au
refte que, félon plufieurs auteurs, ce Virgile n'étoit
que prêtre , au moins dans le tems de cette affaire ,
& qu'il n'a été évêque de Saltzbourg que depuis; que
félon d'autres enfin, il n'a jamais été évêque ; quef-
tion très-peu importante dans le cas dont il s'agit.
Je fuis fort étonné , &c.
A l'article APPROCHES ,p. 558, col. 1 , ligne 23 ,
au lieu de ferpe , Ufi. fape.
A l'article APPROXIMATION , p. 559, col. 1 , li-
gne 11 , au lieu de -~0 , lif. j^-^.
A C article ARABES , on a écrit par mégarde en deux
ou trois endroits Iilamime pour /'ïllamifme , qui ejl la
mime chofe que le Mahométifme.
A l" article Arc A DE , en Jardinage } lig. 16 > au lieu,
de fendues , lif. formées.
A l'article ARCHITECTE,/. 616. col. 1, lig. 21,
au lieu de Desbroffes, lif. de Broffe.
lbid, lig. 14, après ces mots du Val-de-Grace , ajoùr
tei du Palais-royal.
A [article ARCHITECTURE , p. 618 , col. 1 , li-
gne 47 , au lieu de Cambray , lif. Chambray.
Dans la même page , col. 1 , lig. \ , au lieu de ces.
mots dont nous avons un excellent traité du Jardi-
nage , mette^ qui a defiiné les planches de l'excellent
traité du Jardinage de M. d'Argenville , dont il eft
parlé dans le Dilcours Préliminaire ,/>. xlij.
A la fin </'AristotÉlisme , ajoute^ : L'auteur a
cru pouvoir femer ici quelques morceaux de l'ou-
vrage de M. Deilandes , qui tont environ la dix- par-
tie de ce long article ; le refte eft un extrait fubftan-
tiel 6c raiionrïc de l'hiftoire Latine de la philofophie
de Brucker ; ouvrage moderne, eftim= des étrangers,
peu connu en France , bc dont on a fait beaucoup d'u-
fage pour la partie philofophique de l'Encyclopédie,
comme dans l'article Arabes , & dans un très-grand
nombre d'autres.
A l'article ARITHMÉTIQUE UNIVFRSELLE , pa-
ge GjG , col. 2 , lig. 57 ; & p. 677 , col. I , lig. 12 ,
on a mis par mégarde 40 au lieu de 60 } comme la fuite
du difeours le montre.
A l'article Arme, 2. 689, lig. 1 1, col. t. , à compter
<T en-bas , au lieu de Lerngei , lif. Langey.
A l'article ASTRONOMIE ,p. 784 , lig. 53 , au lieu
^'Achilles Sîatius , lif. Achillcs Tatius , comme il ejl
écrit plus bas , p. 787, col. 1 , vers la fin.
A la fin de l 'article AUDACE, ajoute^ : Nous difons
avec raifon qu'audace fe prend toujours en mauvaife-
part : en vain nous objedteroit-on qu'on dit quelque-
fois une noble audace ; il eft évident qu'alors l'épithete
noble détermine audace à être pris dans un fens favo-
rable ; mais cela ne prouve pas que le mot audace ,
quand il eft leul , fe prenne en bonne part. Il n'eil
prefque point de mot dans la langue , qui ne fe
puiffe prendre en bonne part , quand on y joint une
épitheie convenable : ainfi Flechier a dit une prudente
témérité , en parlant de M. de Turenne. Cependant un
écrivain aura raifon quand il dira que le terme de té-
mérité , & une infinité d'autres , fe prennent toujours
en mauvaife part. Il eft évident qu'il s'agit ici de ces
termes pris tout feuls , & fans aucune épithete fa-
vorable néceftaire pour changer l'idée naturelle que
nous y attachons.
A la fin de l'article AUGUSTINIENS , ou lit; ce fyf-
tème approche fort du Thomifme , pour l'état de na-
ture innocente , & du Molinifme , pour l'état de na-
ture tombée : les mots Molinifme & Thomifme font
ici vifiblement tranipofés.
N. B. Un mal entendu , qui n'aura pas lieu dans
ce volume & dans les fuivans , eft caufe que dans le
premier volume la lettre de M. l'abbé Yvon fe trou-
ve aux articles Agir, Amitié, Amour, Adultè-
re , Action , qui ont été fournis par une "auti : p . i ■
forme. Au refte les éloges qu'on a donnés dans le Dif-
eours Préliminaire aux différens auteurs de l'Ency-
clopédie, fuppofent que les articles qui ponent leur
nom , don; par conféquent ils répondent feuls, &
qu'on a dû croire leur appartenir , foient en effet à
eux. Le travail des éditeurs, comme éditeurs , con-
fifte uniquement à réunir & à publier l'ouvrage des
autres avec le leur : mais ils n'ont jamais prétendu
s'engagei , ni à réformer les articles faits par d'au-
tres , ni à remonter aux fources d'oii l'on a pu les
tirer.
ENCYCLOPEDIE
Tome I. page 762. 2. col. vers le bas , fupprime^ V article Asple tout entier, & fubjlitue^ce qui fuit :
* ASPLE, ou mieux ASPE , f. m. on donne ce nom
dans les Manufactures en foie de Piémont , indifférem-
ment au dévidoir fur lequel on tire les foies des co-
cons , & à celui qui dans les moulins fe charge de la
foie organcinée : le premier s'appelle afpe de filature,
& le fécond afpe de tors. Mais dans nos manufactures
-on a confervé à celui-là le nom (Tafpe ou à'afple , com-
me difent les ouvriers , & l'on a nommé guindre ce-
lui-ci. Le règlement de Piémont ordonne Y afpe de
tors de 9 onces de tour pour lesorgancins , &de 9 -^
pour les trames ; & Yafpe de filature de 48 onces au
plus, & de 40 au moins. Ces afpes font l'un & l'au-
tres des parallélépipèdes , dont la bafe eft un quarré,
& dont les angles font formés par quatre lames dont
une ou deuxlont mobiles, pour avoir la facilité d'en-
lever les écheveaux.Si on donne à la baie de Yafpe de
tors 14 de nos pouces de diagonale , on lui en trou-
vera 40 de tour ; il faudra que 40 de nos pouces équi-
valent à neuf onces de Piémont, & que Yafpe de fila-
ture en ait 21 3 \ de tour, ou environ 75 de diagona-
le ; dimenfion beaucoup plus grande que celle qu'il a
réellement. Trompé parcette contradiction du règle-
ment , nous n'avions donné qu'environ quinze de nos
pouces de circonférence à Yafpe de tors , tandis que
fa bafe en a vraiment quatorze de diagonale , ainli
que M. de Vaucanfon a eu la bonté de nous en aver-
tir ; nous faifant remarquer en même tems qu'il y
avoit faute dans le règlement , & qu'au lieu de neuf
onces de tour qu'on y affignoit à Yafpe de tors, c'étoit
29 qu'il devoit y avoir.
Ifajpe de tors dans les moulins achevant tous fes
tours en tems égaux , moins il aura de diamètre ,
moins fera grande la quantité de fil oude foie dévidée
dans un de fes tours de deffus les bobines fur fa cir-
conférence , & plus par conféquent elle fera torfe :
au contraire , plus fon diamètre fera grand , plus fe-
ra grande la quantité de foie qui parlera dans un de
fes tours de deffus les bobines fur fa circonférence ,
moins elle fera torfe. Mais il y a deux inconvéniens
qui rendent le tors variable : le premier , c'eft qu'à
mefure que l'écheveaulè forme fur Ya/pe ,Yépa'i(Yeur
de cet écheveau s'ajoûtant au diamètre de Yafpe , il
y a plus de foie portée de deffus les bobines fur fa
circonférence dans un inftant , que dans un autre
inftant égal ; d'où il s'enfuit que la foie eft moins
torfe à la fin qu'au commencent, & dans tout le tems
de la formation de l'écheveau : le fécond, c'eft que les
bobines mues fur elles-mêmes par le frotement n'ayant
aucun mouvement régulier, tordent irrégulièrement.
Pour remédier au premier inconvénient, les Pié-
montois font des écheveaux très-légers : en effet > ce
qu'ils appellent un marteau de foie , pefe environ huit
onces , & le matteau contient huit écheveaux : quant
au fécond, peut-être ne l'avoient-ils pas même ibup-
çonné.
Le célèbre M. Vaucanfon , fait pour imaginer &
perfectionner les machines les plus délicates , outre
la précaution de faire des écheveaux légers, a trou-
vé le moyen d'en répandre encore les fils fur une
zone de Yafpe plus large , & il a anéanti l'irrégu-
larité du mouvement des bobines , en armant de pi-
gnons les fufeaux , & en fubftituant au frottement
d'une courroie l'engrenage de ces pignons dans les
pas d'une chaîne. Quand les afpes ont achevé 2400
révolutions , & que chaque écheveau fe trouve avoir
2400 tours , une détente alors , fans qu'on touche au
moulin , recule fubitement les tringles où font atta-
chés les guides ; tous les fils de foie changent de pla-
ce fur Yafpe , & forment un nouvel écheveau à côté
du premier , & ainfi de fuite. Après chaque 2.400 ré-
volutions , & lorfquc tous les afpes font couverts d'é-
cheveaux , incontinent après le dernier tour du der-
nier écheveau , le moulin s'arrête de lui-même , tk.
avertit l'ouvrier par une fonnette de lever les afpes qui
font pleins, &c d'en remettre de vuides. Mais M. Vau-
canfon n'a point appliqué cette fonnette à chaque
bobine de fon moulin, pour avertir quand elles font
vuides , comme on l'a dit dans ce même article de
notre premier volume.
Telles font en partie les découvertes de M. Vau-
canfon : elles font trop bien à lui , pour que qui que
ce foit ofe y donner atteinte; & c'eft autant pour
défavoùer ce qui pourroit en avoir l'air dans l'article
afpe tel que nous l'avons d'abord publié , que pour
en réformer les inexactitudes , que nous le reftituons
tel que le voici,
— ^-^s —
PEDIE,
o u
AIRE RAISONNE
DES SCIENCES,
DES ARTS ET DES MÉTIERS-
B
f. m. (Gramm?) c'eft la féconde
lettre de l'alphabet dans la plu-
part des langues, &. la première
des confonnes.
Dans l'alphabet de l'ancien
Irlandois, le b eft la première
lettre , & l'a en eft la dix-fep-
' tieme.
Les Ethiopiens ont un plus grand nombre de let-
tres que nous , & n'obfervent pas le même ordre
dans leur alphabet.
Aujourd'hui les maîtres des petites écoles, en ap-
prenant à lire , font prononcer be, comme on le pro-
nonce dans la dernière fyllabe de tom-be , il tombe :
ils font dire auffi, avec un e muet, de, fe, me , pe ; ce
qui donne bien plus de facilité pour affembler ces
lettres avec celles qui les fuivent. C'eft une pratique
que l'auteur de la Grammaire générale du P. R.
avoit confeillée il y a cent ans, & dont il parle com-
me de la voie la plus naturelle pour montrer à lire
facilement en toutes fortes de langues ; parce qu'on
ne s'arrête point au nom particulier que l'on a donné
à la lettre dans l'alphabet, mais on n'a égard qu'au
fon naturel de la lettre , lorfqu'elle entre en compo-
fition avec quclqu'autrc.
Le b étant une confonne , il n'a de fon qu'avec
une voyelle : ainlï quand le b termine un mot, tels
' que Achab, Joab, Moab, Oreb, Job, Jacob, après avoir
formé le b par l'approche des deux lèvres l'une con-
tre l'autre , on ouvre la bouche &c on pouffe autant
d'air qu'il en faut pour faire entendre un e muet , &
ce n'ell qu'alors qu'on entend le b. Cet e muet eft
beaucoup plus foible que celui qu'on entend dans
fyllabe, Arabe, Eufebe, globe, robbe. V. CONSONNE.
Les Grecs modernes, au lieu de dire alpha , beta,
difent alpha , vita : mais il paroît que la prononcia-
tion qui étoit autrefois la plus autoriiée & la plus
générale , étoit de prononcer beta.
Il eft peut-être arrivé en Grèce à l'égard de cette
Tome II.
B
lettre , ce qui arrive parmi nous au b : la prononcia-
tion autoriiée eft de dire be j cependant nous avons
des provinces où l'on dit ve. Voici les principales
raifons qui font voir qu'on doit prononcer beta.
Eufebe , au livre X. de la Préparation évangélique ,
ch. v/. dit que V alpha des Grecs vient de Valepk des
Hébreux , & que beta vient de beth : or il eft évident
qu'on ne pourroit pas dire que vita vient de betkx
lur-tout étant certain que les Hébreux ont toujours
prononcé beth.
Euftathe dit que £« , /3h, eft un fon femblable au
bêlement des moutons & des agneaux , Se cite ce
vers d'un ancien :
Is fatuus perinde ac ovis be , be dicens incedit.
Saint Auguftin, au liv. II. de Docl. chrijl. dit que ce
mot Se ce fon beta eft le nom d'une lettre parmi les
Grecs ; & que parmi les Latins, beta eft le nom d'une
herbe : & nous l'appelions encore aujourd'hui beti
OU bete-rave.
Juvenal a aulîi donné le même nom à cette lettre :
Hoc difeunt omnes ante alpha & beta puellœ.
Belus, père de Ninus , roi desAffyriens, qui lut
adoré comme un dieu par les Babyloniens, eft ap-
pelle fiîiKcç, &C l'on dit encore la ftatue de Beel.
Enfin le mot alphabetum dont l'ufagc s'eft coniervé:
jufqu'à nous, fait bien voir que beta eft la véritable,
prononciation de la lettre dont nous parlons.
On divife les lettres en certaines claffes, félon les
parties des organes de la parole qui fervent le plus à
les exprimer; ainii le b eït une des cinq lettres qu'on
appelle labiales , parce que les lèvres font principa-
lement employées dans la prononciation de ces cinq
lettres, qui font b, p , m, f, v.
Le b eft la foible du p : en ferrant un peu plus
les lèvres , on fait p de b, Scfe de ve ; ainfi il n'y a
pas lieu de s'étonner li l'on trouve ces lettres l'une
pour l'autre. Quintilien dit que quoique l'on écrive
A
a B
obtinuit, les oreilles n'entendent qu'un p dans la pro-
nonciation, optinuit: c'eft ainfi que de fcribo on tait
Icnpfi- . r ■ ■ r
Dans les anciennes înfcnptions on trouve apjens
pour akfrns , pleps pour plebs , poplicus pour publi-
ais ^ &c. ■ ,
Cuias fait venir aubaine ou aubent d'advena, étran-
ger, par le changement de v en b : d'autres difent au-
baitis quafi alibi nati.On trouve berna au lieu de verna.
Le changement de ces deux lettres labiales v , b,
a donné lieu à quelques jeux de mots, entr'autres à
ce mot d'Aurélien , au fujet de Bonoie qui paflbit fa
vie à boire : Natus ejl non ut vivat ,fed ut bibat. Ce
Bonofe étoit un capitaine originaire d'Efpagne; il le
fit proclamer empereur dans les Gaules lur la fin du
IIIe. fiecle. L'empereur Pi obus le rit pendre, Si l'on
difoit , cejt une bouteille de vin qui ejl pendue.
Outre le changement du b enp ou en v, on trouve
aulîi le b changé en /ou en <p, parce que ce lont des
lettres labiales ; ainfi de 0p/x« eft venufremo, 6cau
lieu àefibilart on a dit fifilare, d'où eft venu notre
mot fiffler. C'eft par ce changement réciproque que
du grec <*V?« le^ Latins ont fait ambo.
Plutarque remarque que lesLacédémoniens chan-
geoient le ? en b ; qu'ainli ils prononçoient Bilippe
au lieu de Philippe,
On pourroit rapporter un grand nombre d'exem-
ples pareils de ces permutations de lettres ; ce que
nous venons d'en dire nous paroît iuffifant pour faire
voir que les réflexions que Ton fait fur l'étymôlogie,
ont pour la plupart un fondement plus lolide qu'on
ne le croit communément.
Parmi nous les villes où l'on bat monnoie , font
diftinguées les unes des autres par une lettre qui eft
marquée au bas de l'écu de France. Le B fait cor noî-
tre que la pièce de monnoie a été frappée à Rouen.
On dit d'un ignorant , d'un homme ians lettres ,
qu'i/ ne fait ni a ni b. Nous pouvons rapporter ici à
cette occafion, l'épitaphe que M. Ménage rit d'un
certain abbé :
Ci-deffous git monfîeur l'abbé
Qui ne Juvoit ni a ni b ;
Dieu nous en domt bientôt un autre
Qui j'ache au moins fa patenotre. (.F)
B , chez le* Grecs & chez les Romains , étoit une
lettre numérale qui fignifioif le nombre deux quand
elle étoit figurée Amplement; & avec un accent déf-
ions £, elle marquoit deux mille chez les Grecs.
B, dans les inferiptions, lignifie quelquefois binus.
On y trouve bixit pour vixit, berna pour verna ; par-
ce que les anciens , comme on l'a dit plus haut, em-
ployoient fouvent le b pour l'v confonne.
Les Egyptiens dans leurs hiéroglyphes , expri-
moient le b par la figure d'une brebis, à caufe de la
reflemblance qu'il y a entre le bêlement de cet ani-
mal & le Ion de la lettré b. {G)
B , FA , SI , ou B FA , B MI , ou Amplement B ,
cil ie nom d'un des fept ions de la gamme de l'Areîin ,
dans lequel les Italiens & les autres peuples de l'Eu-
rope répètent le b ; parce qu'ils n'ont point d'autre
nom pour exprimer la note que les François appel
lent fi. Voye?^ G A M M E .
B MOL ou BÉMOL , cara£tere de Mufique qui
a à peu-pi es la figure d'un b , & fait abbàifler d'un
k-ml-ton mineur la note à laquelle il eft joint.
Guy d'Arezzo ayant autrefois donné des noms à
'fix des notes de l'octave, lama la fêptieme fans autre
nom que celui de la lettre b, qui lui eft propre, com-
hne le c à Y ut, le d au ré , &c. Or ce b ie chantoit de
deux manières ; favoir, à un ton au-'deflus du la fé-
lon l'ordre naturel de la gamme, ou feulement à un
Terni-ton du même la, lorfqu'on vouloit conjoindie
les deux téu'acordes. Dans le premier cas le fi ion-
B
nant affez durement à caufe des trois tons confécu-
tifs , on jugea qu'il failoit à l'oreille un effet fembla-
ble à celui que les corps durs & anguleux font à la
main ; c'eft pourquoi on l'appella b dur, ou /• quarre^
b quadro : dans le fécond cas, au contraire, on trouva
que le y? étoit extrêmement doux à l'oreille; c'eft:
pourquoi on l'appella b mol , 8c par la même analo-
gie on Pauroit encore pu appeller b rond.
Il y a deux manières d'employer le /' mol : l'une
accidentelle, quand dans le cours du chant on le
place à la gauche d'une note ; cette note eft prelque
toujours la note ienfible dans les tons majeuis, &C
quelquefois la fixieme note dans les tons mineurs,
quand il n'y a pas à la clé le nombre de bémols qui
doit y être. Le b mol accidentel n'altère que la note
qu'il touche, ou tout au plus, celles qui dans la-même
melure le trouvent fur lé i h ;rdj iai.s aucun
figne contraire.
L'autre manière eft d'employer le b mol à la clé,
& alors il agit dans toute la fuite de l'air, 6c fur tou-
tes les notes qui lont placées parallèlement à lui iur
la même ligne ou dans le même efpace, à moins qu'il
ne foit contrarié accidentellement par quelque diefe
ou b quatre , ou que la clé ne change.
La pofition des b mois à la clé n'tft pas arbitraire :
en voici la raifom ils lont deftinés à changer le lieu
des lemi-tons de l'échelle : or ces deux iemi-tons doi-
vent toujours garder entr'eux un intervalle prelcrit,
c'eft-à-dire il faut que leurs notes homologues foient
entr 'elles à la diftance d'une quai te d'un côté, &
d'une quinte de l'autre ; ainfi la note mi intérieure
de ion lemi-ton, fait au grave la quinte du fi , qui
cil ion homologue dans l'autre femi-ton', 6c à l'aigu
la quarte du même fi ; & la note fi fait au grave la
quarte du mi, 6c à«l'aigu la quinte du même mi.
Si , par exemple , on donnoit un b mol au mi , le
fem:-ron changeroit de lieu, & ie trouve) oit deicendu
d'un degré eutie le ré 6c le mi b mol. Or dans cette
pofition il eft évident que les deux femi-tons ne gar-
deroient plus entr'eux la diftance preicrite ; car le ré
qui feroit la note inférieure de i"un , teroit au grave
la fixte du fi, for. homologue dans l'autre, & à l'aigu
la tierce du même /: ; £c ce (i feroit au grave la tierce
du ré, & à l'aigu la iixie du même ré : ainfi les deux
iemi-tons ieroient trop près d'un côté, 6c trop éloi-
gnés de l'autre.
L'ordre des b mois ne doit donc pas commencer
par mi , ni par aucune autre note de l'octave que par
fi , la ieule qui n'a pas le même inconvénient ; car
bien que le lemi-ton y change de place, & ceftant
d'être entre le fi 6c Vut, deicende entre le fi b mol
6c le la, toutefois l'ordre preferit n'eft point détruit ;
car le la dans ce nouvel arrangement ie trouve d'un
côté à la quarte , 6c de l'autre à la quinte de mi fon
homologue , & réciproquement.
La même ràifon qui fait placer le premier b mol
fur le y?, fait mettre le fécond fur le mi, 6c ainfi de
fuite , en montant de quarte , ou en delcendant de
quinte jufqu'au/è/, auquel on s'arrête; parce que
te b mol de Vut qu'on trouverait enfuite, ne diffère
point du// dans la pratique. Cela fait donc une fuite
de cinq b mois dans cet ordre :
1^345
/, mi, la, re, fol.
Toujours par la même raifon , on ne fauroit em-
ployer les derniers b mois à la clé , fans employer
aiifîi ceux qui les précèdent; ainfi le b mol du mi ne
le pôle qu'avec celui du//, celui du la qu'avec le3
deux précédens , &c.
Nous donnerons au mot ClÉ une formule pour
trouver tout d'un coup fi un ton ou un mode donné
doit porter des b mois à la clé , 6c combien.
B QUARRE ou BEQUARRE, figne de Mufique.
B A A
qui s'écrit ainii £f , & qui placé à ia gauche d'une
note, marque que cette note ayant précédemment
été baiffée par un b mol , ou hauffée par un diefe ,
doit être remife à fon élévation naturelle ou diato-
nique.
Le b quarre fut inventé par Guy dArezzo. Cet au-
teur qui donna des noms aux fix premières notes de
l'oftave , n'en laiffa point d'autre que la lettre b pour
exprimer le fi naturel ; car chaque note avoit dès-lors
la lettre correfpondante : &c comme le chant diato-
nique de ce fi eft affez dur quand il monte depuis le
fa , il l'appella Amplement b dur ou b quatre , par une
allufion dont j'ai déjà parlé au mot B MOL.
Le b quarre iervit dans la iuite à détruire l'effet du
b mol antérieur fur une note quelconque ; il fuffifoit
pour cela de placer le b quarre à la gauche de cette
note : c'eft que le b mol fe plaçant plus ordinaire-
ment fur ley^ , le b quarre qui venoit enfuite ne pro-
duifoit en le détruifant que fon effet naturel , qui
étoit de repréfenter la note fi fans altération. A la
fin on s'en Iervit par extenfion & faute d'autre figne ,
à détruire auiîi l'effet du diefe ; & c'eft ainfi qu'il
s'employe encore aujourd'hui. Le b quarre efface éga-
lement le diele ou le b mol qui l'ont précédé.
Il y a cependant une diftin&ion à faire. Si le diefe
ou le b mol font accidentels , ils font détruits fans
retour par le b quarre dans toutes les notes qui lui-
vent fur le même degré , jufqu'à ce qu'il s'y préfente
un nouveau b mol ou un nouveau diefe. Mais fi le
b mol ou le dièfe font à la clé , le b quarre ne les ef-
face que pour la note qu'il précède , ou tout au plus
pour la mefure où il fe trouve ; & à chaque degré
altéré à la clé , il faut fans ceffe un nouveau b quarre.
Tout cela eft affez mal imaginé : mais tel eft l'ufage.
Quelques-uns donnoientun autre fens au b quarre ,
& lui accordant feulement le droit de rétablir les
dieies ou b mois accidentels , lui ôtoient celui de
rien changer à la dilpolition de la clé ; de forte qu'en
ce lens le b quarre lur un fa diéfé , ou fur un // bé-
molilé à la clé , ne ferviroit que pour détruire un diefe
accidentel fur ce fi , ou un b mol fur ce fa , & figni-
fieroit toujours un fa diefe , ou unfibmol.
D'autres enfin le fervoient bien du b quarre pour
effacer le b mol , même celui de la clé , mais jamais
pour effacer le diefe. C'eft le b mol feulement qu'ils
employoient dans ce dernier cas.
Le premier ufage prévaut à la vérité ; ceux-ci font
plus rares & s'aboliffent tous les jours : mais il eft
bon d'y faire attention en lifant d'anciennes muli-
ques. ( S )
* B, en Ecriture; cette lettre confidérée dans fa
forme italienne , eft compofée de deux i l'un fur l'au-
tre , & conjoints avec l'o : dans fa forme coulée , c'eft
la tête de la féconde partie de 1'*, Yi & l'o : dans la
ronde , c'eft la quatrième & huitième partie de l'o ,
1'/, &c le fécond demi-cercle de l'o.
La première partie des deux premiers 6 , fe forme
par le mouvement limple des doigts , du plié & de
l'allongé : la féconde partie du même b , & le dernier
b en entier , fe forment par un mouvement mixte des
doigts & du poignet.
B A
* B A , ( Géog. mod. ) ville d'Afrique dans la Gui-
née , au royaume d'Arder.
BAAL ou BEL, ( Hijl. anc.) nom qui fignifieyèi-
gneur en langue Babylonienne, & que les Affyriens
donnèrent à Nemrod , lorfqu'après ia mort ils l'ado-
rèrent comme un Dieu. Baal étoit le dieu de quelques
peuples du pays du Chanaan. Les Grecs diient que
c'étoit Mars , & d'autres que c'étoit ou Saturne ou le
Soleil. L'hiftorien Jofephe appelle le dieu des Phéni-
ciens Baal ou Bel, dont Virgile parle dans l'Enéide
comme d'un roi de Tyr :
Tome II,
B A A ?
Implevitque mero pateram , quam Belus , & omnes
A Belofoltti.
Godwin , fondé fur la reffemblance des noms ,
croit que le Baal des Phéniciens eft le même que
Moloch : le premier iignifîe feigneur , & le fécond ,
prince ou roi. Cependant d'autres penfent que ces
peuples adoroient Saturne fous le nom de Moloch ,
ÔC Jupiter fous celui de Baal: car ils appelloient ce
dernier dieu , Baalfemen , le feigneur du ciel. Quoi
qu'il en (bit de ces différentes opinions , le culte de
Baal fe répandit chez les Juifs , & fut porté à Car-
thage par les Tyriens lés fondateurs. On lui facrifioit
des viftimes humaines, & des enfans, en mémoire
de ce que fe trouvant engagé dans une guerre dan-
gereuie , il para fon fils des ornemens royaux , Se
l'immola fur un autel qu'il avoit dreffé lui-même.
Jérémie reproche aux Juifs qu'ils brùloient leurs en-
fans en holocaufte devant l'autel de Baal ; & dans
un autre endroit , que dans la vallée d'Ennon ils fai-
foient paffer leurs enfans par le feu en l'honneur de
Moloch. Les Rabbins pour diminuer l'horreur de cette
idolâtrie , s'en font tenus à cette féconde cérémonie.
Non comburebant illos , difent - ils de leurs ancêtres ,
fed tantum traducebant illos per ignem. Mais ii dans le
culte de Baal il n'en coûtoit pas toujours la vie à
quelqu'un , fes autels au moins étoient fouvent teints
du fang de fes propres prêtres , comme il paroît par
le fameux facrifice oii Elie les défia. Incidebant fe
juxta ritumfuum cultris & lanceolis,donec profunderen-
turfanguine. Lib. III. Reg. Voye^ BELUS. (G)
* BAALA , ( Géog.fainte. ) ville de la Paleftine
dans la tribu de Juda , où l'arche fut en dépôt pen-
dant vingt ans. Il y eut dans la tribu de Juda une au-
tre ville de même nom , qui paffa enfuite dans celle
de Siméon.
Baala , montagne de la Paleftine , qui bornoit la
tribu de Juda du côté du Nord.
B AAL AM , ville de la Paleftine dans la demi-tribu
de Manaffés.
* B AAL-BERITH , ( Myth. ) Ce mot eft compofé
de Baal , feigneur , & de berith , alliance , Dieu de
F alliance. C'eft fous ce nom que les Carthaginois ,
& avant eux les Phéniciens , prenoient à témoin les
dieux dans leurs alliances.
* BAAL-GAD ou BAGAD, ou BEGAD , ( Hift.
anc. & Myth. ) idoles des Syriens ; leur nom eft com-
pofé de baal , feigneur , & de gad, hafard ou for-
tune , dieux de la fortune ou du hafard. Le dieu du ha-
fard eft , après le dieu du tonnerre , un de ceux qui
a du avoir le premier des autels parmi les hommes.
* BAAL-HASOR, ( Géog.fainte. ) lieu voifrn de
la tribu d'Ephraim , où Abfalon vengea le viol de
fa feeur Thamar.
* BAAL-HERMON , ( Géog.fainte. ) montagne
& ville au-delà du Jourdain , au nord de la tribu de
Manaffés.
B A ALITES , f. m. pi. ( Hift. anc. ) fede d'impies ,
parmi le peuple d'Ifrael. Ils adoroient Baal , ou l'i-
dole de Bel. Nous liions dans le troiiieme livre des
Rois , qu'Achab & Jefabel iàcrirïoient tous les jours
à cette idole; & qu'Elie ayant convaincu de fuperi-
tition les prêtres de ce faux dieu par un miracle qu'il
fit à la vue d'Achab & du peuple , ces facrificateurs
au nombre de quatre cens cinquante furent tous mis
à mort. Ancien Tejlament , III. liv. des Rois , ch. xviij,
Voyc^ Baal. (G)
* B A ALMEON , (Géog.fainte.) ville de la Palefti-
ne , bâtie par la tribu de Ruben.
•BAAL-PHARASIM , (Géog.fainte.) ville des
Phililtins dans la tribu de Juda.
* BAAL-THAMAR, (Géog.fainte.) plaine dans la
tribu de Benjamin , où toutes les tribus s'affemble-
rent pour venger l'outrage fait à la femme d'un Lé-
vite de la tribu d'Ephraim.
Aij
4 B A B
BAAL-TSEPHON. Voyei Beelzephon.
* BAAL-PEOR, eMyth. ) de Baal, feigneur, &
de Peor, nom d'une montagne ; dieu que les Arabes
adoraient fur la montagne de Peor : on croit que c'eft
le Piiapc des Grecs. On l'appelle encore
* BAAL-PHEGOR ou BEELPHEGOR, ou BEL-
PHEGOR. Voy&{ Belphegor.
* BAALTIS , i. f. (Mytk.) déeffe adorée des Phé-
niciens : on la fait fœur d'Aftarté , & femme de Sa-
turne, dont elle n'eut que des filles. On croit que ce
fut la diane des Grecs , révérée particulièrement à
Biblos fous le nom de Baaltis.
B AANITES , f. m. pi. ( Hifi. eccléf. ) hérétiques ,
fe&ateurs d'un certain Baanès , qui le difoit diiciple
d'Epaphrodite , &c femoit les erreurs des Manichéens
dans le ix. liecle, vers l'an 810. Pierre de Sicile,
Hifi. duManick. renaijfant. Baronius, A. C. 8 10. (G)
* B AAR , ( Géog. ) comté d'Allemagne en Suabe ,
dans la principauté de Furftemberg , vers la fource
du Danube & du Neckre , proche la forêt Noire &
les frontières du Brifgaw. On appelle quelquefois les
montagnes d'Abennow de l'on nom , montagnes de
Baar.
* BAARAS , ( Géog. & Hi(l. nat. ) nom d'un lieu
& d'une plante qu'on trouve fur le mont Liban en
Syrie , au-deflùs du chemin qui conduit à Damas.
Jofcphe dit qu'elle ne paroît qu'en Mai, après que la
neige eft fondue; qu'elle luit pendant la nuit comme
un petit flambeau ; que fa lumière s'éteint au jour ;
que fes feuilles enveloppées dans un mouchoir s'é-
chappent & difparoiffent ; que ce phénomène auto-
rife l'opinion qu'elle eft obfédée des démons , qu'elle
a la vertu de changer les métaux en or , & que c'eft
par cette raifon que les Arabes l'appellent Y herbe
d'or ; qu'elle tue ceux qui la cueillent fans les pré-
cautions néceffaires ; que ces précautions font mal-
heureufement inconnues ; qu'elle fe nourrit , lelon
quelques Naturaliftes , de bitume ; que l'odeur bitu-
mineufe que rend fa racine , quand on l'arrache , fuf-
foque ; que c'eft ce bitume enflammé qui produit fa
lumière pendant la nuit ; que ce qu'elle perd en éclai-
rant n'étant que le fuperflu de fa nourriture , il n'eft
pas étonnant qu'elle ne fc confume point ; que fa lu-
mière ceffe quand ce fuperflu eft confirmé ; & qu'il
faut la chercher dans les endroits plantés de cèdres.
Combien de rêveries ! & c'eft un des hiftoriens les
plus fages & les plus refpeûés qui nous les débite.
BAAT,f. m.(Co/«.) monnoie d'argentdu royaume
de Siam. Le baat fert aufli de poids ; fa forme eft un
quarré fur lequel font empreints des caraûeres affez
reffemblans à ceux des Chinois : mais ils font mal
frappés. Comme on altère fouvent le baat par fes
angles ou côtés,il ne faut le prendre ni comme poids,
nienpayementjfansen avoir fait l'examen. Son poids
eft de trois gros deux deniers & vingt grains, poids de
marc de France ; fon titre neuf deniers douze grains :
il vaut deux livres neuf fols fept deniers argent de
France. Cette monnoie a cours à la Chine ; on l'ap-
pelle tical. Foye^TiCAL.
* BABA , ( Géog. ) ville de la Turquie en Europe,
dans la baffe Bulgarie ftir la mer Noire, vers les bou-
ches du Danube , entre Proftoviza & Catu.
* BABEL , ( Hijl.facr. ant. ) en Hébreu confufion,
nom d'une ville & d'une tour dont il eft fait mention
dans la Genefe, chap. ij. fituées dans la terre de Sen-
naar, depuis la Chaldée, proche l'Euphrate, que les
defeendans de Noé entreprirent de conftruire avant
que de fe difperfer fur la lurface de la terre , & qu'ils
méditoient d'élever jufqu'aux cieux : mais Dieu ré-
prima l'orgueil puérile de cette tentative que les hom-
mes auroient bien abandonnée d'eux-mêmes. On en
attribue le projet à Nemrod, petit-fils de Cham : il fe
propofoit d'éternifer ainfi fa mémoire, & de fe prépa-
rer un afyle contre un nouveau déluge. Onbâtiflbit
B A B
la tour de Babel l'an du monde 1801. Phaleg , le
dernier des patriarches de la famille de Sem , avoit
alors 14 ans ; & cette date s'accorde avec les obfer-
vations céleftes que Callifthene envoya de Baby-
lone à Ariftote. Ces obfervations étoient de 1903
ans ; & c'eft préciiément l'intervalle de tems qui s'é-
toit écoulé depuis la fondation de la tour de Babel
jufqu'à l'entrée d'Alexandre dans Babylone. Le corps
de la tour étoit de brique liée avec le bitume. A pei-
ne fut-elle conduite à une certaine hauteur , que les
ouvriers ceflant de s'entendre , furent obligés d'aban-
donner l'ouvrage. Quelques auteurs font remonter à
cet événement l'origine des différentes langues : d'au-
tres ajoutent que lespayens qui en entendirent parler
conlufément parla fuite, en imaginèrent la guerre des
géans contre les dieux. Cafaubon croit que la diverfité
des langues fut l'effet & non la caufede la divifiondes
peuples ; que les ouvriers delà tour de Babel (a trou-
vant , après avoir bâti long-tems , toujours à la mê-
me diftance des cieux, s'arrêtèrent comme fe feroient
enfin arrêtés des enfans , qui croyant prendre le ciel
avec la main , auroient marché vers l'horifon ; qu'ils
fe difperierent , 6c que leur langue fe corrompit. On
trouve à un quart de lieue de l'Euphrate , vers l'o-
rient , des ruines qu'on imagine , fur allez peu de
fondement , être celles de cette fameufe tour.
* BABEL-MANDEL, ( Géog. mod. ) détroit ainfi
appelle de l'Arabe , bab-al-mandab , porte de deuil ,
parce que les Arabes prenoient le deuil pour ceux qui
le paffoient. Il eft à 1 z. 40. de latit. entre une île &
une montagne de même nom , & joint la mer Rouge
à l'Océan.
* BABEURRE , f. f. (Œconom. rufi.) efpece de li-
queur féreufe que laiffe le lait quand il eft battu , &
que fa partie graffe eft convertie en beurre. La ba-
beurre prife en boiflbn rafraîchit & humefte.
* BABIA , f. f. (Myth, ) déeffe révérée en Syrie ,
& furtout à Damas. On y donnoit le nom de babia
aux enfans ; ce qui a fait conje&urer que la babia
étoit déefie de l'enfance.
BABILLER , v. n. le dit en Vénerie d'un limier qui
donne de la voix : ce limier babille trop , il faut lui ôter
le babil, ou le rendre fecret.
* BABOLZA, (Géog. anc. & mod. ) ville de la
baffe Hongrie dans FEfelavonie , entre Paffega & Zi-
geth, vers la Drave. Baudrand croit que c'a été l'an-
cien Manfuetinium , ou pons Manfuetinus.
BABORD. Voyei Basbord.
BABOUIN , f. m.papio ( Hifi. nat. Zoolog. ) ; c'eft
ainfi que l'on appelle de gros finges qui ont des queues,
6c qui font différens des Cynocéphales : on diftingue
les babouins à longue queue , & les babouins à courte
queue. Voye^ SlNGE. ( /)
* BABUL , ( Géog. ) ville des Indes orientales ,
dans une île du fleuve Indus. Quelques-uns croyent
que c'eft Cambaya, & d'autres Patan.
* BABYCA , ( Géog. & Hifi. anc. ) lieu entre le-
quel & le Cnacion les Lacédémoniens tenoient leurs
affemblées. Ariftote dit que le Cnacion eft la rivière,
& que le Babyca eft le pont ; ce qui rend ce que l'on
vient de dire des Lacédémoniens entièrement inin-
telligible ; car entre un pont & une rivière quel el-
pace y a-t-il où un peuple puiffe s'affembler ?
* BABYLONE ou BABEL , ( Géog. anc. &mod. )
capitale ancienne de la Chaldée , dont il refte à pei-
ne quelques ruines. Voyei dans les hiftoriens anciens
& modernes les merveilles qu'on en raconte : ce dé-
tail eft hors de notre objet. On croit que Bagdat eft
au lieu où étoit l'ancienne Babylone : mais ce fait
n'eft pas confiant ; il y a fur les autres endroits où
on la fuppofe les mêmes incertitudes ; les uns en
font Felouge fur l'Euphrate , à caufe de fes grandes
ruines ; d'autres II ou Elle, à caufe d'un amas de Dé-
combres qu'on appelle encore la tour de Babel. „,-
BAC
* BABYLONE , ( Géog. anc. & mod. ) ville de l'E-
gypte près du Nil ; le grand Caire s'eft formé de fes
ruines.
Bac à. naviguer , c'en" en Marine un petit bâtiment
dont on le fert fur les canaux & les rivières pour por-
ter le brai & le goudron. ( Z )
Bac eft encore fur les Rivières un bateau grand ,
large & plat, dont on fe fert pour paffer hommes ,
bêtes 6c voitures.
11 y a aux environs de Paris pluiieurs bacs , dans
les endroits éloignés des ponts.
Bac , en Jardinage ; on appelle ainfi un petit baf-
fin , lbit quarré foit rond , placé d'efpace en efpace
dans les quarrés d'un potager , avec un robinet pour
arroler. A Verfailles , à Sceaux, il y en a dans cha-
que petit jardin. (K)
BAC A JET TREMPE , en terme de Brafieur, eft ce-
lui qui eft polé fur les chaudières & qui a trois trous,
un de chaque côté , pour pouvoir jetter d'une chau-
dière dans l'autre ; celui de devant eft pour jetter les
eaux chaudes des chaudières dans la cuve matière, par
le moyen de la gouttière à jet trempe. Voye^ BRAS-
SERIE & Cuve matière.
Bac A LA DÉCHARGE , dans les Brafferies , eft un
bac qui eft liir un des bords d'une des chaudières ,
dans lequel on jette les métiers lorfqu'ils font cuits
pour les laiffer refroidir. Voye^ BRASSERIE & MÉ-
TIERS.
Bac A FORMES, en terme de Rafinerie de fucre ,
c'eft une grande auge de bois très-lain , en planches
de quatre pouces d'épaifteur, longues de 8 à 9 , &
larges de 4 à 5 , dans laquelle on met les formes en
trempe. Voye^ Trempe & Formes.
Bac A CHAUX , en terme de Rafinerie de fucre , c'eft
un grand baffin en maffif de brique & de ciment , por-
tant 9 à 10 pies de long fur 4 à 5 de large , 6c 6
de profondeur, dans lequel l'on éteint la chaux
dont on a befoin dans les clarifications. Voye^ Cla-
rifier.
Bacasucre,«« terme de Rafinerie de fucre , n'eft
autre chofe que pluiieurs efpaces féparés par des
cloifons de planches , dans îefquelles on jette les
matières triées 6c forties des barils.
BAC À TERRE , en terme de Rafineur de fucre , c'eft
une auge de bois de même que le bac à tormes(foyei
Bac à formes )féparé en pluiieurs chambrettes où
l'on délaye la terre. Voye^ Terre. A chaque extré-
mité 6c au-deffus de ce bac , on voit une planche
percée au milieu , & qui fert de traverfe à deux bouts
de chevrons qui font attachés au plancher. C'eft dans
le trou de cette planche que s'emmanche un ballet
dont on fe fert pour palTer la terre par la coulereffe.
Voyt{ COULERESSE.
* BAC A , (Géog. fainte.) ville de la tribu d'Afer,
au pié du mont Liban.
* BAC A , ou BAZA , (Géog.) ville d'Efpagne , au
royaume de Grenade. Long. 15.34. ^at- 37- l8-
* BAÇAIM , (Géog.) ville d'Afie , avec port , au
royaume de Vifapour , fur la cote de Malabar. Long.
t)0. 40. lat. ig.
* BACALA , (Géog.) ville de la prcfqu'île de Ju-
catan, dans l'Amérique feptentrionale, près du golfe
d'Honduras , entre Valladolid & Salamanque.
* BACALAOS, (Géog.) terre de l'Amérique mé-
ridionale , dont on ne nous dit rien de plus.
* BACAR, (Géog. anc. & mod.) nom d'une vallée
fituée dans la partie feptentrionale du mont Liban ,
que les Latins appelloient hurea Thraconitis.
* BACAR , ou BAXAR, (Géog.) contrée duMo-
gol , fur le Gange. Becaner en eft la capitale.
* BAÇA-SERAY, ou BACHA-SERAI, (Géog.)
ville de la prefqu'ile de Crimée , dans la petite Tar-
tarie. Long. 32. Jo. lat. 46. 30.
. * BACAY, (Géog.) ville de l'Inde, delà le Gange,
BAC 5
capitale du pays de même nom , fur la rivière de
Pegu.
BACCALAURÉAT , f. m. le premier des degrés
qu'on acquiert dans les facultés de Théologie , de
Droit, 6c de Médecine. Vqye-^ Bachelier.
BACCARAT , (Géog.) ville de France , en Lor-
raine , fur la Meurte , entre Nanci & Eftival.
BACCARACH , (Géog.) ville d'Allemagne , dans
le bas Palatinat, furie Rhin. Long. zâ. lô. lat. 4Q.
àj.
BACH , (Géog.) ville de la baffe Hongrie , au
comté de Toln , iur le Danube.
BACCHANALES, adj. pris fubft. (Hijl. anc.) fêtes
religieufes en l'honneur de Bacchus, qu'on célébroit
avec beaucoup de folennité chez les Athéniens , où
l'on en diftinguoit de diverfes fortes ; d'anciennes ,
de nouvelles , de grandes , de petites , de printanie-
res, d'automnales, de nocturnes , &c. Avant les olym-
piades , les Athéniens marquoient le nombre des an-
nées par celui des bacchanales , autrement nommées
orgies , du mot Grec e'p>iî, fureur, à caufe de l'en-
thoufiafme ou de l'ivreffe qui en accompagnoit la
célébration : elles tiroient leur origine d'Egypte , 6c
furent introduites en Grèce par Melampe.
A Athènes l'Archonte régloit la forme & l'ordon-
nance des bacchanales , qui dans les premiers tems fe
paffoient fort fimplement : mais peu à peu on les
accompagna de cérémonies ou ridicules ou infâmes.
Les prêtreffes ou bacchantes couroient de nuit , à
demi-nues , couvertes feulement de peaux de tigres
ou de panthères paffées en écharpe , avec une cein-
ture de pampre ou de lierre ; les unes échevelées Se
tenant en main des flambeaux allumés , les autres
portant des thyrfes ou bâtons entourés de lierre &
de feuilles de vigne, criant 6c pouffant des hurlemens
affreux. Elles prononçoient fur-tout ces mots , e'uoÎ*
ZaCoi, ivoi e«k%é, ou « 1 «'*%«, ou m Beô^t. A leurs cris
fe mêloit le fon des cymbales , des tambours , & des
clairons. Les hommes en habits de fatyres fuivoient
les bacchantes, les uns à pié, d'autres montés fur des
ânes , traînant après eux des boucs ornés de guirlan-
des pour les immoler. On pouvoit appeller ces fêtes
du Paganifme le triomphe du libertinage 6c de la dif-
folution ; mais fur-tout les bacchanales nocturnes oii
il fe paffoit des choies û infâmes, que l'an 568 de
Rome , le fénat informé qu'elles s'étoient introdui-
tes dans cette ville , défendit fous les peines les plus
grieves de les célébrer. C'eft avec raifon que les pè-
res de l'églife ont reproché aux payens ces defordres
&ces abominations. (G)
BACCHANTES , prêtreffes de Bacchus , nom que
l'on donna d'abord à des femmes guerrières qui fui-
virent Bacchus à la conquête des Indes , portant des
thyrfes ou bâtons entortillés de pampres de lierre &
de raifins , 6c faifant des acclamations pour publier
les victoires de ce conquérant. Après l'apothéolé de
ce prince , elles célébrèrent en fon honneur les bac*
chanales. De-là les mylîercs de Bacchus furent prin-
cipalement confiés aux femmes ; & dans les ancien-
nes bacchanales de l'Attique , ces prêtreffes étoient
au nombre de quatorze. Il eft pourtant tait mention
dans l'antiquité d'un grand-prêtre de Bacchus, firef-
pe£té de tout le peuple , qu'on luidonnoit la première
place dans les ipectacles. Platon bannit de fa répu-
blique la danfe des bacchantes, Sileur cortège com-
polé de nymphes , d'egipans , de filenes, & de faty-
res , qui tous enfemble imitoient les ivrognes , 6c
prelque toujours d'après nature , fous prétexte d ac-
complir certaines expiations ou purifications reli-
gieufes. Ce philofophe penfe que ce genre de danfe
n'étant convenable ni à la guerre , ni à la paix ; &: ne
pouvant fervir qu'à la corruption des mœurs, il doit
être exclus d'un état bien police. Tacite racontant
les débauches de Meffaline & de fes femmes, en fait
é BAC
ce portrait tout femblable aux extravagances des
bacchantes. Feminœ pellibus accincla affultabant , ut
facrificantes vel infanientes bacchce. Ipfa crine fiuxo ,
thyrfum quatiens, juxtaqut Silius kedera cinclus , genre
cothurnos , jacere caput , flrepente circum procaci choro.
««Les femmes de Meffaline revêtues de peaux bondif-
» ibient & folâtroient comme les bacchantes dans
» leurs facrifices ; elle-même les cheveux épars agi-
» toit un thyrfe ; Silius ( ion amant ) étoit à les côtés ,
» couronné de lierre , chauffé d'un cothurne , jettant
*. la tête deçà & delà , tandis que cette troupe laicive
» danfbit autour de lui..» (G)
BACCHE , f. m. dans la Poëjie Greque & Latine ,
efpece de pie compofé de trois fyllabes ; la première
brève ,& les deux autres longues, comme dans ces
mots , egëjlâs ,• ava.ru
Le bacche a pris fon nom de ce qu'il entroit fou-
vent dans les hymnes compofées à l'honneur de Bac-
chus. Les Romains le nommoient encore cenotrius ,
tripodius,faltans, & les Grecs ;7«fia///3cç. Diom. ///.
pag. 4 J 5. Le bacche peut terminer un vers hexa-
mètre. l'oye{ PlÉ , &c (G)
* BACCHIONITES , f. m. pi. (Hifi. anc.)c'é-
toient , à ce qu'on dit , des philoibphes qui avoient
un mépris fi univerfel pour les chofes de ce bas mon-
de , qu'ils ne fe refervoient qu'un vaiffeau pour boire ;
encore ajoûte-t-on qu'un d'entre eux ayant apperçu
dans les champs un berger qui puifoit dans un ruif-
ièau de l'eau avec le creux de fa main, il jetta loin
de lui fa taffe , comme un meuble incommode & fu-
perflu. C'eft ce qu'on raconte auffi de Diogene. S'il
y a jamais eu des hommes auffi delintéreffés , il faut
avouer que leur métaphyfique & leur morale méri-
teraient bien d'être un peu plus connues. Après avoir
banni d'entre eux les diihnctions funeffes du tien &
du mien, il leur reftoit peu de chofe à faire pour n'a-
voir plus aucun fujet de querelles , & fe rendre auffi
heureux qu'il eit permis à l'homme de l'être.
* BACCHUS, (Myth.) dieu du Paganifme. On
diffingue particulièrement deux B-acchus : celui d'E-
gypte , fils d'Ammon, & le même qu'Ofiris; celui
de Thebes , fils de Jupiter & de Semelé , auquel on a
fait honneur de toutes les actions des autres. L'E-
gyptien fut nourri à Nifa , ville de l'Arabie heureufe ,
& ce fut lui qui fit la conquête des Indes. Orphée
apporta fon culte dans la Grèce , & attribua par adu-
lation les merveilles qu'il en racontoit à un Prince
de la famille de Cadmus. Voye^ Osiris.
Le Thébain acheva dans la cuiffe de fon père le
refte du tems de la groffeffe de fa mère , qui mourut
for fon feptieme mois. Euripide dans fes Bacchantes ,
dit que Jupiter dépofacet enfant dans un nuage poul-
ie dérober à la jaloufie de fa femme ; & Euffathe ,
qu'il fut nourri fur le mont Meros, qui fignifie cuiffe,
équivoque qui aura vraiffemblablement donné lieu
à la première fable. Bacchus alla à la conquête des
Indes à la tête d'une troupe de femmes & d'hommes
armés de thyrfes & de tambours. Les peuples effrayés
de la multitude & du bruit, le reçurent comme un
dieu ; & pourquoi fe feroient-ils défendus contre lui ?
il n'alloit point les charger de chaînes , mais leur ap-
prendre la culture de la vigne. On dit qu'il fit des
prodiges dans l'affaire des Géans. On le repréfente
îbus la figure d'un jeune homme , lans barbe , joufflu ,
couronné de lierre ou de pampre , le thyrfe dans une
main , & des grappes de railin ou une coupe dans
l'autre. On lui immoloit le bouc & la pie ; le bouc
qui mange les bourgeons , la pie que le vin fait par-
ler. La panthère lui étoit confacrée , parce qu'il fe
couvrait de fa peau. Voye^ Semelé , Bimater ,
Dionysils. Liber, Bromius, &c
BACHA,. PASCHA , ou PACHA, fobft. m. (Hi/l
mod. ) officier en Turquie. C'eit le gouverneur d'une
province^ d'une ville, ou d'un autre département ;
BAC
flOuS dîf ons le bâcha de Baiylone , le bâcha de Natotic%
le bâcha de Bender , &c.
Dans les bâchas font compris les beglerbegs , &
quelquefois les fangiacbegs, quoiqu'ils en foient quel-
quefois diftingués , & que le nom de bâcha fe donne
proprement à ceux du fecondordre,c'eft-à-dire à ceux
devant qui l'on porte deux ou trois queues de che-
val , qm font les enfeignes des Turcs ; d'où vient le
titre de bâcha à trois queues. Ceux-ci lont appelles be-
glerbegs , & les fangiacbegs ne font porter devant eux
qu'une queue de cheval attachée au bout d'une lan-
ce. Voye^ Beglerbeg 6- Sangiac.
Le titre de bâcha fe donne auffi par politeffe aux
courtifans qui environnent le grand-feigneur à Conf-
tantinople , aux officiers qui fervent à l'armée , &C
pour ainli dire , à tous ceux qui font quelque figure
à la cour ou dans l'état.
Le grand-feigneur confie aux bâchas la conduite
des armées ; & pour lors on leur donne quelquefois
le titre de feraskier ou de bach-bog , c'eft-à-dire général,
parce qu'ils ont fous leurs ordres d'autres bâchas.
Comme on ne parvient communément au titre de
bâcha que par des intrigues , par la faveur du grand-
viiir ou des fultanes , qu'on achette par des préfens
conlidérables , il n'elt point d'exaôions que ces offi-
ciers ne commettent dans leurs gouvernemens , foit
pour rembourfer aux Juifs les fommes qu'ils en ont
empruntées , foit pour amaffer des tréfors dont fou-
vent ils ne jouiffent pas long-tems, & qu'ils ne tranf-
mettent point à leur famille. Sur un léger méconten-
tement, un foupçon, ou pour s'approprier leurs biens,
le grand-feigneur leur envoyé demander leur tête ,
& leur unique réponfe eff d'accepter la mort. Leur
titre n'étant pas plus héréditaire que leurs richefles ,
les enfans d'un bâcha traînent quelquefois leur vie
dans l'indigence & dans l'obfcurité. On croit que ce
nom de pafcha vient du Perfan pait /chats, qui figni-
fie pie de roi , comme pour marquer que le grand-fei-
gneur a le piê dans les provinces où fes bâchas le re-
préfentent. Cependant ce titre n'elt en ufage qu'en
Turquie ; car en Perle on nomme émirs ou kams les
grands feigneurs & les gouverneurs de province. (6)
* BACHARA , ( Géog. ) ville de la grande Tar-
tarie en Afie , dans l'Usbech , fur une rivière qui va
le jetter dans la mer Cafpienne.
BACHE ou BACHOT , f. m. ce font de petits ba-
teaux dont on fe fert fur les rivières ; on nomme ainfî
ceux dont on fe fert à Lyon pour paffer la Saône. (Z)
Bâche, (Jardin. & Hydraul. ) c'eft un coffre ou
une cuvette de bois qui reçoit l'eau d'une pompe
afpirante à une certaine hauteur , où elle eff reprife
par d'autres corps de pompe foulante qui l'élevent
davantage. (K )
* Bâche , f. f. ( Comm. & Roui. ) grande couver-
ture de groffe toile que les rouliers & voituriers éten-
dent fur leurs voitures , pour garantir de la pluie &£
des autres intempéries de l'air ies marchandiles dont
elles font chargées. Cette couverture eff bandée par
des cordes qui partent de fon milieu & de fes angles ,
& qui fe rendent à différentes parties latérales de la
voiture. 11 y a entr'elle & les marchandifes un lit de
paille fort épais.
BACHELIER , f. m. ( Hifi. mod. ) dans les écri-
vains du moyen âge, étoit un titre qui fe donnoit,
ou à ceux d'entre les chevaliers qui n'avoient pas al-
lez de bien ou affez de vaffaux pour faire porter
devant eux leurs bannières à une bataille , ou à ceux
même de l'ordre desBannerets, qui, n'ayant pas en-
core l'âge qu'il falloit pour déployer leur propre ban-
nière , etoient obligés de marcher à la guerre fous la
bannière d'un autre; voye^ Banneret. Camden &
d'autres définiffent le bachelier, une perfonne d'un
rang moyen entre un chevalier & un écuyer , moins
âgé ôc plus récent que celui-là, mais iùpérieur à ce-
BAC
Iui-cî , vqyei Chevalier , &c. D'autres veulent que
le nom de bachelier ait été commun à tous les degrés
compris entre le fimple gentilhomme & le baron.
Quand l'amiral n'étoit ni comte , ni baron , il étoit
nommé bachelier ; &C « il eft à noter que quand l'ami-
» rai va par le pays pour aflembler vaiffeaux de
» guerre , ou pour autre affaire du royaume , s'il eft
» bachelier, il recevra par jour quatre chelins fter-
» lins ; s'il eft comte ou baron , les gages feront à
» proportion de l'on état & rang ».
Le titre de bachelier fe donnoit plus particulière-
ment à tout jeune homme de condition qui faifoit fa
première campagne , & qui recevoit en conléquence
la ceinture militaire.
Bachelier, fignifîoit encore celui qui dans le
premier tournois où il eût jamais combattu , avoit
vaincu quelqu'un.
On difoit anciennement bacheliers au lieu de bas
chevaliers , parce que les bacheliers formoient le plus
bas ordre de chevaliers ; ils étoient au-deflus des ban-
nercts, &c. Foye^ Chevalier.
On appelle maintenant ceux-ci équités aurati, à cau-
fe des éperons qu'on leur met lors de leur réception.
D'abord cette dignité ne fe donnoit qu'aux gens
d'épée : mais dans la fuite on la conféra aulfi aux gens
de robbe longue. La cérémonie en eft extrêmement
fimple. L'afpirant s 'étant mis à genoux , le roi le tou-
che doucement d'une épée nue , & dit ,yô/5 chevalier
au nom d& Dieu; &C après, avance , chevalier, foye^
Chevalier 6- Noblesse.
Bachelier , eft encore un terme dont on fe fert
dans les univerjités pour deiïgner une perfonne qui a
atteint le baccalauréat, ou le premier degré dans les
Arts libéraux 6c dans les Sciences, foye^ Degré.
C'eft dans le treizième liecle que le degré de ba-
chelier a commencé à être introduit par le pape Gré-
goire IX. mais il eft encore inconnu en Italie. A Ox-
ford , pour être reçu bachelier es Arts , il faut y avoir
étudié quatre ans, trois ans de plus pour devenir
maître es Arts , 6c lept ans encore pour être bachelier
en Théologie.
A Cambridge , il faut avoir étudié près de quatre
ans pour être fait bachelier es Arts , & plus de trois
ans encore avant que d'être reçu maître , & encore
fept ans de plus pour devenir bachelier en Théologie.
Il ne faut avoir étudié que fix ans en Droit pour être
reçu bachelier de cette faculté.
A Paris, pour palier bachelier en Théologie, il faut
avoir étudié deux ans en Ph lotophie, trois en Théo-
logie, & avoir foûtenu deux examens, l"un fur la
Philol'ophie , 6; l'autre fur la première partie de la
fomme de faint Thomas , qui comprend les traités de
Dieu , & des divins attribut s de la Trinité, & des anges.
Ces deux examens doivent le faire à un mois l'un de
l'autre , devant quatre docteurs de la faculté de Théo-
logie, tirés au fort , avec droit de ûiii'rage. Un feul
mauvais billet ne laifle au candidat que lu voie de l'e-
xamen public qu'il peut demandera ia faculté. S'il
le trouve deux fuffrages défavorables, il eft jrefufé
fans retour. Lorfque les examinateurs font unanime-
ment contens de la capacité, ;i choifit un prilident
à qui il fait figner les trK.es; & quand le fyndic les a
vilées, 6c lui a donné jour, i: doit les foûtenir dans
l'année à compter du jour de fon fécond examen.
Dans quelqu'une des écoles de la faculté , c'e'Và-dire,
des collèges ou des communautés qui font de fon
corps , cette thefe rouie fur les mêmes traités théolo-
giques , qui ont ferv i : à ce fécond e ::îmen,
& on la nomme tentative. Le préfident , quatre bache-
liers en licence, & i trsamis, y dilputent
contre le répondant; dix docteurs qu'on nomme cen-
seurs y affilient avec droit de fi
de licence l'ont auffi, mais pour la forme , leins voix
n'étant comptées pour rien. Chaque çenieur a deux
BAC 7
billets , l'un qui porte fufficiens , & l'autre incapax. Un
feul fufFrage contraire fuffit pour être refufé. Si le
candidat répond d'une manière fatisfaifante, il va à
laffemblée du premier du mois, qu'on nomme prima
menjis , fe préfenter à la faculté devant laquelle il
prête ferment. Enfuitele bedeau lui délivre les lettres
de baccalauréat, & il peut le préparer à la licence.
On diftingue dans la faculté de Théologie de Paris
deux fortes de bacheliers : l'avoir bacheliers du premier
ordre, baccalaurei primi ordinis , ce l'ont ceux qui font
leur cours de licence ; & ceux du fécond ordre, bac*
calaurei fecundi ordinis , c'eft-à-dire les ûmples bache-
liers qui afpirent à faire leur licence , ou qui demeu-
rent limplement bacheliers. L'habit des uns 6c des au-
tres eft lafoutane,le manteau long, 6c la fourrure
d'hermine doublée de foie noire.
Pour palier bachelier en Droit à Paris , il faut l'a-
voir étudié deux ans , 6c avoir foûtenu un acfe dans
les formes. Pour être bachelier en Médecine , il faut ,
après avoir été quatre ans maître es Arts dans l'uni-
verlîté , faire deux ans d'étude en Médecine & fubir
un examen , après quoi on eft revêtu de la fourrure
pour entrer en licence. Dans l'univerfité de Paris ,
avant la fondation des chaires de Théologie, ceux
qui avoient étudié fix ans en Théologie , étoient ad-
mis à faire leurs cours, d'où ils étoient nommés bac-
calarii curfores : &c comme il y avoit deux cours , le
premier pour expliquer la bible pendant trois an-
nées confécutives ; le fécond, pour expliquer le maî-
tre des fentences pendant une année ; ceux qui fai-
foient leur cours de la bible étoient appelles bacca-
larii biblici ; & ceux qui étoient arrivés aux fenten-
ces, baccalarii fententiarii. Ceux enfin qui avoient
achevé l'un 6c l'autre étoient qualifies baccalarii for-
mati ou bacheliers formés.
Il eft fait mention encore de Bacheliers d'É-
glise , baccalarii ecclefix , l'évêque avec les chanoi-
nes & bacheliers , cum conjîlio <S* conj'enfu omnium ca-
nonicorum Çuorum & baccalariorum. Il n'y a guère de
mot dont i'origine foit plus difputée parmi les cri-
tiques que celui de bachelier , baccalarius ou b.icca-
laureus : Martinius prétend qu'on a dit en latin l-acca-
laureus , pour dire bacca laured donatus, 6c cela par
allulîon à l'ancienne coutume de couronner de lau-
rier les poètes, haccis lauri, comme le fut Pétrarque
à Rome en 1341. Alciat 6c Vives font encore de ce
fentiment , Rhenanus aime mieux le tirer de baculus
ou baccilus , un bâton, parce qu'à ieur promotion ,
dit-il , on leur mettoit en main un bâton , pour mar-
quer l'autorité qu'ils recevoient, qu'ils avoient ache-
vé leurs études , & qu'ils étoient remis en liberté ; à
peu près comme les anciens gladiateurs, à qui l'on
mettoit à la main un bâton pour marque de leur con-
gé; c'eft ce qu'Horace appelle rude donatus. Mais
Spelman rejette cette opinion , d'autant qu'il n'y a
point de preuve qu'on ait jamais pratiqué cette cé-
rémonie de mettre un bâton à la main de ceux que
l'on ctéo'it bacheliers ; 6c d'ailleurs cette étymologie
conviendrait plutôt aux licentiés qu'aux bacheliers ,
oui font moins cenfés avoir combattu qu'avoir fait
un premier efiai de leurs forces , comme l'infinue le
nom de tentative que porte leur thefe.
Parmi ceux qui foutiennent que les r.
litaires font les plus anciens , on compte Cujas, qui
les fait venir de buccellarii, forte de cavalerie fort
e autrefois ; du Cange , qui les tire de b
ria , forte de fiefs ou de fermes qui contenoient plu-
lijurs pièces de terre de douze acres chacune, ou de
ce que deux bœufs pouvoient labourer. Selon lui les
poffeffeurs de ces bacca Ués bache-
liers. Enfin Cafeneuve & Hauteferre font venir ba-
cheliers de baculus ou bacillus, un bâton , à caule que
les jeunes ca\ aliers s'exerçoient au combat avec des
bâtonSj ainfi que les bacheliers dans les univcrllu»
8
BAC
s'exercent par des difputes. De toutes ces étymolo-
gies la première eft la plus vraiffemblable , puifqu'il
n'y a pas encore long-tems que dans l'univerfité de
Paris la thefe que les afpirans à la maîtrife es Arts
étoient obligés de foûtenir, s'appelloit Vaàc pro lait-
rea artium. Ainfi de bacca lauri , qui fignifie propre-
ment h fruit ou la graim de laurier , arbre confacré
de tout tems à être le fymbole des récompeniès ac-
cordées aux favans, on a fait dans notre langue ba-
chelier pour exprimer un étudiant qui a déjà mérité
d'être couronné. (G)
Bachelier, (Commerce.} c'eft un nom qu'on
donne dans quelques-uns des fix corps de marchands
de Paris, aux anciens &£ à ceux qui ont paffé par les
charges , & qui ont droit d'être appelles par les maî-
tres & gardes pour être préfens avec eux & les affil-
ier en quelques-unes de leurs fondions , particuliè-
rement en ce qui regarde le chef-d'œuvre des afpi-
rans à la maîtrife. AÏnfi dans le corps des marchands
Pelletiers le chef-d'œuvre doit être fait en préfence
des gardes, qui font obligés d'appeller avec eux qua-
tre bacheliers dudit état.
Le terme de bachelier eft auffi en ufage dans le mê-
me fens , dans la plupart des communautés des Arts
& Métiers de la ville de Paris. Voyei Communau-
té. (G)
* BACHER une voiture, (Commerce & Roulage. )
c'efl la couvrir d'une bâche, f^oye^ Bâche.
BACHIAN, (Géog. mod.) île des Indes orientales,
ïine des Moluques, proche la ligne.
BACHOT, fub. m. fur les rivières , c'eft un petit
bateau qui prend, en payant, les palTans au bord
d'une rivière & les met à l'autre bord ; il y en a fur
la Seine en plufieurs endroits. Voye^ Bachoteurs
& Bachotage.
♦BACHOTAGE, f. m. (Police.) c'eft l'emploi
de ceux qui ont le droit de voiturer fur la rivière
dans des bachots , au-deffus &c au-deflbus de la ville.
Foye{ Bachoteurs.
* BACHOTEURS , fub. m. (Police. ) ce font des
bateliers occupés fur les ports de Paris & en autres
endroits des rives de la Seine , à voiturer le public
fur l'eau & dans des bachots au-deffus &c au-deffous
de la ville. Ils font obligés de fe faire recevoir à la
ville : ils ne peuvent commettre des garçons à leur
place : leurs bachots doivent être bien conditionnés.
Il leur eft défendu de recevoir plus de feize perfon-
nes à la fois ; leurs falaires font réglés ; ils doivent
charger par rang ; cependant le particulier choifit tel
bachoteur qu'il lui plaît. Ils font obligés d'avoir des
numéros à leurs bachots. Un officier de ville fait de
quinze en quinze jours la vifite des bachots ; & il eft
défendu aux femmes & aux enfans des bachoteurs de
fe trouver fur les ports. On paye par chaque per-
fonne quatre fous pour Sève & S. Cloud; deux fous
pour Chaillot & Paffy ; deux fous ûx deniers pour
Auteuil; & ainfi à proportion de la diftance, & à
raifon de deux lois pour chaque lieue , tant en def-
cendant qu'en remontant. Le bachoteur convaincu
d'avoir commis à fa place quelqu'homme fans ex-
périence , ou d'avoir reçu plus de feize perfonnes ,
eft condamné pour la première fois à cinquante li-
vres d'amende, confiscation des bachots , trois mois
de prifon ; il y a punition corporelle en cas de réci-
dive & exclulîon du bachotage. C'eft au lieutenant
de police à veiller que les bachoteurs ne fe prêtent à
aucun mauvais commerce. Il leur eft enjoint par ce
tribunal de fermer leurs bachots avec une chaîne &
un cadenat pendant la nuit.
BACHOU, f. m. (terme de Boyaudier. ) c'eft ainfi
que ces ouvriers appellent des efpeces de hottes dans
lefquelles les boyaux de moutons ou d'agneaux font
portés de la boucherie dans leurs atteliers.
BACILE, criihmum, (Hijl, natur, bçtan,) genre
BAC
de plante à fleurs en rofe difpofées en ombelle ; ces
fleurs font compofées de plufieurs pétales arrangés
fur un calic-e , qui devient dans la fuite un fruit à deux
femences plates légèrement cannelées, qui fe dépouil-
lent ordinairement d'une enveloppe. Ajoutez aux ca-
ractères de ce genre , que les feuilles font charnues ,
étroites, & fubdivifées trois à trois. Tournefort,
infl. rei herb. Voye{ Plante. (V)
*BACKON, (Géog.) ville de la Moldavie, fur
la rivière d'Arari, proche des frontières de la Va-
la chie.
* BACLAGE, f. m. (terme de Comm. & de Rivière.)
c'eft l'arrangement fur les ports de Paris des bateaux
qui y arrivent les uns après les autres , pour y faire
la vente des marchandées dont ils font chargés. Bâ-
clage le dit auffi du droit qu'on paye aux officiers de
ville chargés de cet arrangement. Ils fe nomment dé-
bacleurs. fbye^DÉBACLEURS, DÉBACLER, DÉBA-
CLAGE.
* BACLAN, ( Géographie. ) pays de la Perfe dans
le Chorafan , près de Balche , & vers la rivière de
Gihon.
BACLER les ports y (Marine.) c'eft les fermer avec
des chaînes' & des barrières. (Z)
* BACLER un bateau (term. de Comm. & de Riv. )
c'eft placer dans le port un bateau commodément &
fûrement pour la charge & la décharge de fes mar-
chandifes ; ce qui s'exécute*en l'attachant avec des
cables & cordages à des anneaux fixés aux ponts &
fur le rivage pour cet effet.
BACONISME ou PHILOSOPHIE DE BACON.
Bacon, baron de Verulam & vicomte de S. Alban,
naquit en Angleterre l'an 1560. Il donna dans l'on
enfance des marques de ce qu'il devoit être un jour ;
& la reine Elifabeth eut occaiîon plufieurs fois d'ad-
mirer la fagacité de fon efprit. Il étudia la philofo-
phie d'Ariftote dans l'univerfité de Cambridge ; &
quoiqu'il n'eût pas encore feize ans , il apperçut le
vuide & les abfurdités de ce jargon. Il s'appliqua en-
fuite à l'étude de la politique & de la jurifprudence,
& fon mérite l'éleva à la dignité de chancelier fous
le roi Jacques premier. Il fut aceufé de s'être laiffé
corrompre par argent; & le roi l'ayant abandonné ,
il fut condamné par la chambre des pairs à une
amende d'environ quatre cents mille livres de notre
monnoie; il perdit fa dignité de chancelier, & fut
mis en prifon. Peu de tems après , le roi le rétablit
dans tous fes biens & dans tous les honneurs qu'il
avoit perdus : mais fes malheurs le dégoûtèrent des
affaires , & augmentèrent fa paffion pour l'étude.
Enfin il mourut âgé de 66 ans, & fi pauvre, qu'on
dit que quelques mois avant fa mort il avoit prié le
roi Jacques de lui envoyer quelques fecours , pour
lui épargner la honte de demander l'aumône dans fa
vieilleffe. Il falloit qu'il eût été ou bien defintéreffé
ou bien prodigue, pour être tombé dans une fi gran-
de indigence.
Le chancelier Bacon eft un de ceux qui ont le plus
contribué à l'avancement des Sciences. Il connut
très-bien l'imperfeefion de la Philofophie fcholafti-
que, & il enfeigna les feuls moyens qu'il y eût pour
y remédier. « Il ne connoiffoit pas encore la nature,
» dit un grand homme , mais il favoit & indiquoit
» tous les chemins qui mènent à elle. Il avoit me-
» prifé de bonne heure tout ce que les univeriités
» appelloient la Philofophie, & il faifoit tout ce qui
» dépendoit de lui , afin que les compagnies infti-
» tuées pour la perfection de la raifon humaine , ne
» continuaffent pas de la gâter par leurs quiddites ,
» leurs horreurs du vuide, leurs formes fubftanciel-
» les , & tous ces mots impertinens , que non-feule-
» ment l'ignorance rendoit relpeftables, mais qu'un
» mélange ridicule avec la religion avoit rendu fa-
» cres »,
II
BAC
Il compofa deux ouvrages pour perfectionner les
Sciences. Le premier eft intitulé de r accroi\jement &
de la dignité des Sciences : il y montre l'état où elles
fe trouvoient alors , & indique ce qui reftoit à dé-
couvrir pour les rendre parfaites. Mais il ajoute qu'il
ne faut pas efpérer qu'on avance beaucoup dans cet-
te découverte , fi on ne fe fert d'autres moyens que
de ceux dont on s'étoit fervi jufqu'alors. Il fait voir
que la Logique qu'on enfeignoit dans les écoles , étoit
plus propre à entretenir les difputes qu'à éclaircir la
vérité, & qu'elle enfeignoit plutôt à chicaner fur les
mots qu'à pénétrer dans le fond des choies. Il dit
qu'Ariftote , de qui nous tenons cet art , a accom-
modé fa phyfique à fa logique , au lieu de faire fâ
logique pour fa phyfique, 6c que renverfant l'ordre
naturel , il a aflujetti la fin aux moyens. C'eft au/fi.
dans ce premier ouvrage qu'il propofe cette céiebre
divifion des Sciences qu'on a fuivie en partie dans
ce Dictionnaire. Voye^ le Difcours préliminaire.
C'eft pour remédier aux défauts de la Logique or-
dinaire , que Bacon compofa fon fécond ouvrage in-
titulé Nouvel Organe des Sciences : il y enfeigne une
Logique nouvelle, dont le principal but eft de mon-
trer la manière de faire une bonne induction , com-
me la fin principale de la logique d'Ariftote eft de
faire un bon iyllogifme. Bacon a toujours regardé
cet ouvrage comme fon chef-d'œuvre , & il fut dix-
huit ans à le compofer. Voici quelques-uns de les
axiomes qui feront connoître l'étendue des vues de
ce grand génie.
« i. La caufe du peu de progrès qu'on a faits juf-
» qu'ici dans les Sciences , vient de ce que les hom-
» mes fe font contentés d'admirer les prétendus for-
» ces de leur efprit , au lieu de chercher les moyens
»> de remédier à fa foiblefTe.
» z. La logique fcholaltique n'eft pas plus propre
» à guider notre efprit dans les Sciences , que les
» feiences , dans l'état où elles font , ne font propres
» à nous faire produire de bons ouvrages.
» 3. La logique icholaltique n'eft bonne qu'à en-
» treicnir les erreurs qui font fondées fur les notions
» qu'on nous donne ordinairement : mais elle eft ab-
» folument inutile pour nous faire trouver la vérité.
» 4. Le Iyllogifme eft compofé de propoiïtions.
»> Les propoiïtions font compolées de termes , 6v les
» termes font les fignes des idées. Or fi les idées , qui
»> font le fondement de tout , font confufes , il n'y a
» rien de folide dans ce qu'on bâtit deffus. Nous n'a-
» vons donc d'efpérance que dans de bonnes induc-
» tions.
» 5. Toutes les notions que donnent la Logique
» & la Phyfique , font ridicules. Telles font ics no-
» tions de fubjlance , de qualité , de pefanteur , de lége-
» reté, &c
» 6. Il n'y a pas moins d'erreur dans les axiomes
» qu'on a formés jufqu'ici que dans les notions ; de-
» lortc que pour faire des progrès dans les Sciences,
» il eft néceffaire de refaire tant les notions que les
» principes : en un mot , il faut , pour ainli dire, re-
» fondre l'entendement ».
» 7. II y a deux chemins qui peuvent conduire à
» la vérité. Par l'un on s'élève de l'expérience à des
>» axiomes très-généraux , ce chemin eft déjà connu :
» par l'autre on s'élève de l'expérience à des axio-
» mes qui deviennent généraux par degrés , jufqu'à
» ce qu'on parvienne à des choies très-générales:. Ce
» chemin eft encore en friche ; parce que les hom-
» mes fe dégoûtent de l'expérience, & veulent aller
» tout d'un coup aux axiomes généraux , pour fc re-
» pofer.
» 8. Ces deux chemins commencent tous les deux
» à l'expérience & aux chofes particulières; mais ils
» font d'ailleurs bien différens : par l'un on ne fait
»> qu'effleurer l'expérience ; par l'autre on s'y arrête :
Tome II,
BAC 9
» par le premier on établit dès le fécond pas , des
» principes généraux & abftraits ; par le fécond , on
» s'élève par degrés aux choies univerfelles , &c.
» 9. Il ne s'eft encore trouvé perfonne , qui ait eu
» aflèz de force & de confiance , pour s'impofer la
» loi d'effacer entièrement de fon efprit les théories
» & les notions communes qui y étoient entrées avec
» le tems ; de faire de fon ame une table rafe , s'il
» eft permis de parler ainfi ; & de revenir fur les pas
» pour examiner de nouveau toutes les connoifi'an-
» ces particulières qu'on croit avoir acquifes. On
» peut dire de notre raifon , qu'elle eft obicurcie &
» comme accablée par un amas confus & indigeïtè
» de notions , que nous devons en partie à notre cré-
» dûlité peur bien des chofes qu'on nous a dites, au
» hatard qui nous en a beaucoup appris, & aux pré-
» jugés dont nous avons été imbus dans notre en-
» tance Il faut fe flatter qu'on réufTira dans
» la découverte de la vérité , & qu'on hâtera les
>» progrès de l'efprit , pourvu que , quittant les no-
» tiens abftraites , les Spéculations Métaphyfiques ,
» on ait recours à l'analyie , qu'on décompofe les
« idées particulières , qu'on s'aide de l'expérience,
» & qu'on apporte à l'étude tin jugement mûr, un
» efprit droit tk. libre de tout préjugé. . . . On ne
» doit efperer de voir renaître les Arts & les Scien-
» ces , qu'autant qu'on refondra entièrement les pre-
» mieres idées, & cjue l'expérience fera le flambeau
» qui nous guidera dans les routes obfcures de la vé-
» rite. Perfonne jufqu'ici , que nous fâchions , n'a dit
» que cette réforme de nos idées eût été entreprife,
» ou même qu'on y eût penfé ».
On voit par ces Aphoiilmes, que Bacon croyoit
que toutes nos connoijjances viennent des Jens. Les Pé-
ripatéticiens avoient pris cette vérité pour fonde-
ment de leur philofophie : mais ils étoient fi éloignés
de la connoître, qu'aucun d'eux n'a fû la dévelop-
per ; & qu'après pli.lieurs fiecles , c'étoit encore une
découverte à faire. Perfonne n'a donc mieux connu
que Bacon la caufe de nos erreurs : car il a vu que
les idées qui font l'ouvrage de l'efprit , avoient été
mal faites ; & que par conféquent , pour avancer
dans la recherche de la vérité , il falloit les refaire.
C'eft un conieil qu'il répète fouvent dans fon nou-
vel org.zne. « Mais pouvoit-on l'écouter, dit l'auteur
» de l'Effai fur l'origine des connoifTances humai-
» nés ? Prévenu, comme on l'étoit, pour le jargon
» de l'école , & pour les idées innées , ne devoit-on
» pas traiter de chimérique le projet de rcnouveller
» l'entendement humain ? Bacon propofoit une mé-
» thode trop parfaite pour être l'auteur d'une révo-
» lution; ot celle de Deicarte's devoit réufîïr, parce
» qu'elle laiflbit lubrifier une partie des erreurs. Ajoù-
» tez à cela que le philofophe Anglois avoit des oc-
» cupationsqui ne luipermettoient pas d'exécuter en-
» fièrement lui-même, ce qu'il confeilloit aux au-
» très. Il étoit donc obligé de fe borner à donner
» des avis qui ne pouvoient taire qu'une légère im-
>» prelîion fur des elprits incapables d'en fentir la fo-
» lidité. Defcartes au contraire , livré entièrement
» à la Philofophie , & ayant une imagination plus
» vive & plus féconde, n'a quelquefois lubttiuié aux
» erreurs des autres que des erreurs plus léduilantes ,
» qui , peut-être , n'ont pas peu contribué à fa répu-
» tation ».
Le foin que Bacon prenoit de toutes les Sciences
en général , ne l'empêcha pas de s'appliquer à quel-
ques-unes en particulier; & comme il croyoit que la
Philofophie naturelle eft le fondement de toutes les
aunes Sciences, il travailla principalement à la per-
fectionner. Mais, il fit comme ces grands Architectes,
qui ne pouvant fe refoudre à travailler d'après les
autres , commencent par tout abattre , &: élèvent en-
fuite leur édifice fur un delîein tout nouveau. De
io BAC
même , il ne s'amufa point à embellir ou à réparer
ce qui avoit déjà été commencé par les autres : mais
il fe propofa d'établir une Phyfique nouvelle , fans lé
fervir de ce qui avoit été trouvé par les anciens ,
dont les principes lui étoient fufpeârs. Pour venir à
bout de ce grand deflein , il avoit réfolu de faire tous
les mois un traité de Phyfique , & il commença par
celui des vents. Il fit enfuite celui de la chaleur , puis
celui du mouvement , & enfin celui de la vie & de
la mort. Mais , comme il étoit impoflible qu'un hom-
me feul fit toute la Phyfique avec la même exactitu-
de , après avoir donne ces échantillons pour fervir
de modèle à ceux qui voudroient travailler fur fes
principes , il fe contenta de tracer groflierement &
en peu de mots le deflein de quatre autres traités , &
d'en fournir les matériaux dans le livre qu'il intitula
Sylva fylvarum , où il a ramaffé une infinité d'expé-
riences , pour fervir de fondement à fa nouvelle phy-
fique. En un mot perfonne , avant le chancelier Ba-
con , n'avoit connu la Philoiophie expérimentale ; &
de toutes les expériences phyliques qu'on a faites de-
puis lui , il n'y en a prefque pas une qui ne foit in-
diquée dans fes ouvrages.
Ce précurléur de la Philofophie a été aufli un écri-
vain élégant , un hiflorien , un bel efprit.
Ses Eflais de morale font très-eftimés , mais ils
font faits pour inftruîre plutôt que pour plaire. Un
efprit facile, un jugement fain, le philofophe fenfé ,
l'homme qui refléchit y brillent tour-à-tour. C'étoit
un des fruits de la retraite d'un homme qui avoit
quitté le monde , après en avoir foûtenu long-tems
les profpérités & les difgraces. Il y a aufli de très-
belles choies dans le livre qu'il a fait de la Sagejfe des
anciens , dans lequel il a moralifé les fables , qui fai-
foient toute la théologie des Grecs & des Romains.
Il a fait encore Yhilloire de Henri VII. roi d'Angle-
terre, où il y a quelquefois des traits du mauvais goût
de fon flecle, mais qui d'ailleurs efl: pleine d'efprit, &
qui fait voir qu'il n'étoit pas moins grand politique
que grand philofophe. (C)
B A C O T I , i. 1. ( Hijloirc moderne. ) nom que les
peuples du Tonquin donnent à la grande Magicien-
ne, pour laquelle ils ont une extrême vénération, &
qu'ils confultent outre les deux fameux devins , le
Tayboutkle Tay-pkouthouy.hoii'quunQ mère , après
la mort de fon enfant , veut favoir en quel état efl
l'ame du défunt ; elle va trouver cette efpece de Si-
bylle, qui fe met aufli-tôt à battre fon tambour pour
évoquer l'ame du mort ; elle feint que cette ame lui
apparoît , ck lui fait connoître li elle efl bien ou mal :
mais pour l'ordinaire elle annonce , à cet égard , des
nouvelles coniolantes. Tavernier, voyage des Indes.
* B ACQUET , f. m. {Arts méchaniques) on donne
ordinairement le nom de bacquet à un vaifieau de
bois , rond , oval ou quarré , d'un pié & demi ou mê-
me davantage de diamètre , plus ou moins profond ,
fait de plufieurs pièces ou douves ferrées par des cer-
ceaux de fer ou de bois , & defliné à contenir de
l'eau ou des matières fluides. Le bacquet efl: à l'ufage
des Verriers , ils y rafraîchiflènt leurs cannes ; des
Cordonniers , ils y font tremper leurs cuirs ; des Braf-
feurs , ils y mettent de la bière , ou y reçoivent la le-
vure au fortir des tonneaux ; des Marchands de vin ,
ils y retiennent le vin qui s'échappe de la canelle des
pièces en perce ; des Marchands de poiflbn , ils y
con'fervent leur marchandée ; des Maçons , ils y
tranfportent le mortier au pié de l'engin , pour être
élevé de-là au haut des échaffaux ; des Carriers , ils
s en fervent pour tirer le moellon & les autres pierres
qu ils ne peuvent brider avec le cable ; & d'un grand
nombre d'autres ouvriers : nous allons faire mention
de quelques-uns;
Bacquet , ujîencile d' 'Imprimerie ,• ç'cft une pierre
BAC
de trois pies de long fur deux & demi de large , Cfciv
fée à trois pouces de profondeur,garnie fur Tes bords
de bandes de fer , & percée au milieu d'une de fes
extrémités ; l'Imprimeur, qui veut laver fa forme ,
bouche le trou avec un tampon de linge , la couche
au fond du bacquet, &c verfe deffus une quantité luffi-
fante de leflive pour la couvrir ; là il la brofle jufqu'à
ce que l'œil de la lettre foit net , après quoi il dé-
bouche le trou pour laifler écouler la leflive , retire
fa forme, & la rince avec de l'eau claire : ce bacquet
doit être pofé ou fupporté fur une table de chêne à
quatre pies bienfolides.
Bacquet , che^ les Marbreurs de papier , efl une
efpece de boîte ou caifle de bois , plate , fans cou-
vercle , quarrée , longue de la grandeur d'une feuille
de papier à l'écu , & de l'épaiflèur d'environ quatre
doigts : elle fe pofe fur la table ou l'établi du Mar-
breur , qui y verfe de l'eau gommée jufqu'à un doigt
du bord ; c'efl fur cette eau que l'on répand les cou-
leurs que doit prendre le papier pour être marbré.
Voye^ Planche du Marbreur en F. fig. première.
BACQUET , cke^ les Relieurs & Doreurs; c'efl un
demi-muid fcié par le milieu , où l'on met de la cen-
dre jufqu'à un certain degré, & par-deflus de la pouf-
fiere de charbon pour faire une chaleur douce , ca-
pable de lécher la dorure.
BACQUET, en terme de Chaudronnier, fe dit en gé-
néral de tous vaiflèaux de cuivre imparfaits , & tels
qu'ils fortent de la manufacture & de la première
main.
BACQUETER , verb. adt. en bâtiment, c'efl ôter
l'eau d'une tranchée avec une pelle , ou une écope.
BACQUETER Veau , en Jardinage , c'efl la répan-
dre avec une pelle de bois fur le gafon d'un baflin ,
pour arrofer le deflus des glailes. ( K )
BACQUETURES , f. f. pi. terme de Marchand de
vin , c'efl ainfi qu'ils appellent ce qui tombe des
canelles des tonneaux en perce , & des mefures
quand ils vendent & verfent le vin dans les bouteil-
les. Ils difent qu'ils envoyent ce vin au Vinaigrier ,
& ils le devroient faire.
* B ACTRE ( Géographie anc. & mod. ) rivière que
les modernes nomment Bufchian , ou Bachora ; elle
fe joint à notre Gehon , ou à l'Oxus des anciens.
* BACTRES ( Géographie anc. & mod. ) capitale
de la Battriane , fur le fleuve Bactre ; c'efl aujour-
d'hui Bag-dafan ou Termend : elle efl voifine du mont
Caucafe.
* BACTREOLE, f. f. cke{ les Batteurs d'or, rognures
de feuilles d'or ; on les employé à taire l'or en co-
quille. Voyt{ Or.
* BACTRIANE , f . f . ( Géographie anc. & mod. )
ancienne province de Perfe , entre la Margiane , la
Scythie , l'Inde & le pays des Meflagetes ; c'efl au-
jourd'hui une contrée de la Perfe , formée en partie
du Chorafan , & en partie du Mavaralnahar , ou plus
communément Usbeck , en Tartarie.
BACTRIENS , f. m. pi. peuples de la Baûriane.
* BACU , BACHIE , BACHU , BARVIE (Géog.y
ville de Perlé , fur la mer Cafpienne , & dans la pro-
vince de Servan. Il y a près de la ville une fource
qui jette une liqueur noire dont on fe fert par toute
la Perle , au lieu d'huile à brûler. Elle donne l'on nom
à la mer qu'on connoît fous celui de mer de Bacu ,
ou mer de Sala.
BACULOMETRIE , f. f. c'efl l'art de mefurer
avec des bâtons , ou des verges , les lignes tant ac-
ceflîbles qu'inacceflibles. Voye{ Accessible, Ar-
pentage , Mesure , Lever un plan , &c. (E )
* BADACHXAN ou BADASCHIAN, ou BUS-
DASKAN ( Géographie anc. & mod. ) ville d'Afie ,
dans 1e Mavaralnahar , dont elle efl: la capitale ;
BAD
quelques Géographes prétendent que c'eft l'ancienne
Baclres.
* BADAI ( Géographie & Hifloire. ) peuples de la
Tartarie déferte , qui adoroient le foleil * ou un mor-
ceau de drap rouge élevé en l'air , qui enétoit appa-
remment la bannière ou le fymbole.
*BADAJOZ ( Géographie. ) ville d'Efpagne , ca-
pitale de l'Eitramadure , fur la Guadiana. Long, il,
XJ. lat. 38. 33.
* BAD ARA ( Géographie. ) petite ville des Indes ,
capitale de la contrée du même nom , dans la pref-
qu'île de l'Inde , deçà le Gange , au Malabar , pro-
che Calicut.
* BADE ou BADEN ( Géographie. ) ville d'Alle-
magne , dans le cercle de Suabe. Long. 26. 54. Lai.
48.60.
*BADE. Le margraviat de Bade eft divifé en deux
parties , le haut & le bas margraviat ; il eft borné au
îeptentrion par le Palatinat & Pévêché de Spire ; à
l'orient , par le duché de "SVirtemberg & la princi-
fauté de Furftemberg ; au midi , par le Brilgaw ; à
occident , par le Rhin.
* BADE ou BADEN ( Géographie. ) ville de Suiffe,
dans le canton de même nom , fur le Limât. Long.
2.5. 55. lat. 4j. zy,
* BADE ou BADEN {Géographie.) ville d'Allema-
gne , dans l'archiduché d'Autriche , fur le Suechat.
Long. 34. 20. lat. 48.
* B ADEBOU ( Géographie. ) petit pays d'Afrique,
fur la côte de l'Océan , dans le pays des Nègres , au
nord de la rivière de Gambie.
BADELAIRE , f. f. vieux mot qu'on a confervé
dans le Blaion , & qui fignifie une épée faite en fabre ,
c'eft-à-dire , courte , large &c recourbée : on croit que
ce mot vient de baltearis , à caufe qu'un baudrier
étoit autrefois appelle baudel; d'où vient que quel-
ques-uns difent baudelaire. ( V )
* BADENOCH ( Géographie. ) petit pays de l'E-
cofle feptentrionale , dans la province de Murray ,
vers les montagnes & la petite province d'Athol.
•BADENWEILER ( Géographie. ) ville d'Allema-
gne , dans le Brifgaw , proche du Rhin. Long. z5.
20. lat. 4J. 55.
•BADIANE (Semence de) ou ANIS DE LA
CHINE ( Hilloire nat. & mat. med. ) c'eft un fruit
qui repréfente la figure d'une étoile ; il eft compolé
de fix , fept ou d'un plus grand nombre de- capfules
qui fe réunifient en un centre comme des rayons ;
elles font triangulaires , longues de cinq , huit & dix
lignes , larges de trois , un peu applatics & unies par
la bafe. Ces capfules ont deux écorces , une extérieu-
re , dure , rude , raboteufe , jaunâtre , ou de couleur
de rouille de fer; l'autre , intérieure, prefqu'offeufe,
lifle & luifante. Elles s'ouvrent en deux panneaux
par le dos , lorfqu'elles font feches 6c vieilles , & ne
donnent chacune qu'un leul noyau lifle , luifant , ap-
plati , de la couleur de la graine de lin , lequel , fous
une coque mince & fragile , renferme une amande
blanchâtre, graflé, douce, agréable au goût, & d'une
faveur qui tient de celle de l'anis & du fenouil , mais
qui eft plus douce. La capiule a le goût du fenouil ,
un peu d'acidité , & une odeur feulement un peu plus
pénétrante. Ce fruit vient des Philippines , de la Tar-
tarie ck. de la Chine ; l'arbre qui le porte s'appelle
panfipanfi ; fon tronc eft gros ci branchu ; il s'élève
à la hauteur de deux bradés ik plus. De fes branches
lbrtent quinze feuilles alternes , rarement crénelées ,
pointues , longues d'un palme, & large d'un pouce
& demi. Les fleurs font , à ce qu'on dit , en grappes ,
grandes comme celles du poivre , &: paroiflent com-
me un amas de pluiieurs chatons.
La femence de badiane donne de l'huile eflenticlle,
limpide , fubtile & plus pénétrante que celle d'anis ;
elle en a les propriétés. Les Orientaux lui donnent la
Tome If.
B A F
11
préférence ; elle fortifie l'eflomac , chafle les vents
& excite les urines. Les Chinois la mâchent après le
repas ; ils l'infufent aufli , avec la racine de ninzin ,
dans Peau chaude, & en boivent en forme de thé.
Les Indiens en tirent aujourd'hui un efprit ardent ani-
fé , que les Hollandois appellent anis arak, & dont on
fait grand cas.
BADIGEON , f. m. en Architecture , eft un enduit
jaunâtre qui fe fait de poudre de pierre de faint-Leu,
détrempée avec de l'eau : les Maçons s'en fervent
pour diftinguer les naiflances d'avec les panneaux ,
fur les enduits & ravallemens. Les Sculpteurs l'em-
ployent auflî pour cacher les défauts des pierres co-
quillieres , & les faire paroître d'une même couleur.
BADIGEONNER , c'eft colorer avec du badigeon.
un ravallement en plâtre , fait fur un pan de bois , ou
fur un mur de moellon, de brique, &c. La plupart
des ouvriers mettent au badigeon de l'ocre pour le
rendre plus jaune , mais il n'y en faut point , cette
teinte devant plutôt imiter la pierre dure d'Arcueil ,
qui eft prefque blanche , que celle de iaint-Leu , qui
eft plus colorée. (P)
BADINANT, adj. (Manège.) on appelle ainfi un
cheval qu'on mené après un carrofle attelé de fix che-
vaux, pour le mettre à la place de quelqu'un des au-
tres qui pourroit devenir hors d'état de lervir. On
l'appelle aufli le volontaire. (V)
* BADONVILLERS , (Géog.) ville de Lorraine ,
dans la principauté de Salmes.
* BADOULA, (Géog.) petite ville du royaume
de Candie , dans l'île de Ceylan , à douze lieues du
Pic d'Adam. ^ov^Adams' Pic.
* BADUKKA , (Hift. nat. bot.) nom propre du
Capparis , arbore/cens , indica , flore tetrapetalo. Le fuc
de fa feuille mêlé avec la graifle de fanglicr , forme
un Uniment pour la goutte ; la déco&ion des fleurs tk.
de la feuille purge & déterge les ulcères de la bou-
che ; &c le fruit pris clans du lait nuit à la faculté d'en-
gendrer dans l'un & l'autre fexe.
* BADWEISS , ou BADENVEISS , ville de Bo-
hême , cercle de Bethyn , près Muldav.
* B AEÇ A , (Géog.) ville d'Efpagne , dans l'Anda-
loufie , fur le Guadalquivir. Long. 14. 58. lat. 37.
45.
* BAECA , (Géog. mod.) ville du Pérou, dans la
province de Los Quixos , proche la ligne.
* BALTIQUE, (Géog. anc. & moi.) une des parties
dans lefquelles les Romains avoient divilé l'Elpagne.
La Taraconoife , & la Lulitanie étoient les deux au-
tres : la Bœtique fut ainli appellée du Bœtis , aujoiw-
d'hui le Guadalquivir , & comprenoit l'Andaloufie ,
avec la plus grande partie du royaume de Grenade.
* BAFFA, (Géog. anc. & mod.) ville de l'île de
Chypre, bâtie furies mines de Paphos la nouvelle.
Long. 50. lat. 34, 5o-
Il y a dans la même île un cap &: une petite île qui
ne font pas éloignées de Bafta , & qui portent le même
nom. Le cap s'appelle aufli Capo bianco , ôcs'appel-
loit jadis Drepanum promontorium.
* BAFFETAS , f. m. (Commerce.) toile grofle de
coton blanc , qui vient des Indes orientales. La meil-
leure eft de Surate ; la pièce a 1 3 aulnes | de long ,
fur j de large ; il y en a de moins large. On diflingue
les baffètas par les endroits d'où ils viennent, & par
Tannage qu'ils ont ; il y a des ba fêtas Orgaris , Nol-
faris, Gaudivis,Nerindes & Dabouis ; ils font étroits,
ils n'ont que \ de large , & \ aune de long ; il y a
des baffètas Narrow-Wifh de 13 aunes! de long ,
furf aune de large; Broad-With de 14 ™lnes de
long , fur \ de large ; Broad-Biw , & Narrov-Brov ,
quiVie font que des toiles écrites , les unes de 14 >'!.-
nés de long , fur f aune de large , & les autres de la
même longueur, fur \ de large. Il y a un auti .
Bij
il B A G
tas qui vient aurTi des Indes orientales , & qu'on noffl-
mc Shaub. f^oye^ SHAUB.
* BAFFIN:S-BAIE,o«BAIEDEBAFFIN,(G<V)
baie dans les terres arctiques : elle s'étend depuis le
jO jufquau 80 degré di latitude, foye^ BAIE.
* BAGAIA , BAGI , VAGAI , (Géog.) ville de
Numidie , en Afrique; elle s'appelloit auffi jadis Tkéo-
doric, de Théodore épouié de l'empereur Juftinien.
* BAGACE , f. f. (Sucrerie.) c'eft ainfi qu'on nom-
me les cannes , après qu'elles ont parlé au moulin.
On les conferve dans des hangars qu'on appelle ca-
fés, pour être brûlées fous les poelles à lucre , quand
elles feront feches. C'eft l'ouvrage des négrefles d'en
faire des paquets au fortir des cylindres du moulin :
on nourrit les chevaux , les bœufs , les cochons , avec
celles qui trop brifées & réduites en trop petits frag-
mens , ne peuvent entrer en paquets ; trois jours de
foleil fuffifent pour les lécher ; au lieu de paille &
de feuilles de cannes , on les met fous les premières
chaudières dans les endroits où le bois eft commun ,
& fous les dernières chaudières lorfque le bois eft
rare. Voye^ Sucre , Sucrerie.
* BAGAGE , f. m. on donne ce nom en général à
tout équipage de voyage ; &c il s'appbque particu-
lièrement à celui d'une armée. P'oye^ Armée
* BAGAMEDER , BAGAMEDRI , BAGAMI-
DRI , haute Ethiopie , ou partie de l'Abyffinie , com-
pris le Nil jufqu'à la fource de la Tacaze. Cette con-
trée eft diviiée en treize petites provinces , & le
Bashlo la fépare du royaume d'Amahara.
BAGAUDE, (Hifl. anc.) c'eil ainfi queles anciens
Gaulois , fur-tout depuis le tems de Diocletien , ap-
pelaient un larron ; & de-là eft venu le mot de ba-
gauda , ou bagaudia , qui , félon Profper en fa chroni-
que , & Salvien, liv. V. fignifîe un brigandage , une
émotion de peuple , une /édition , un foulevcment depay-
fans. (G)
* BAGDAD , (Géog.) ville d'Afie , fur la rive
orientale du Tigre. Long. 63. là. lat. Jj. là.
C'eft auffi une partie de la Turquie en Afie , & un
de fes gouvernemens généraux.
* BAGE-LE-CH AT E AU , (Géog.) ville de BrelTe,
du diocefe de Lyon. L'archiprètre de Bage-le-Ckdteau
eft compofé de la paroiffe de cette ville & de Pont-
de-Vaux , de S. Trivier, & d'autres paroifies moins
confidérables.
* BAGHARGAR,(GVoo\) grand paysdela grande
Tartarie ; il s'étend d'occident en orient ; il eft borné
au feptentrion par les Kaimachites, au levant par le
royaume de Tendu , au midi par la Chine, & au
couchant par le Thibet.
* BAGIAT , (Géog.) petit pays à l'occident de la
mer Rouge , compris entre l'Ethiopie ôc la Nubie.
* BAGNA-BEBUSSO , ou BILIBUSSA , (Géog.
anc. 6* mod.) ville de la Turquie en Europe , fur la
Stromona, dans la Macédoine , aux confins de la Ro-
manie & de la Bidgarie : c'étoit autrefois Heraclea
Sintica.
* BAGNAGAR,o«EDERABAD, o«GOLCON-
DE, (Géog.) ville d'Afie , au Mogol , capitale du
royaume de Golconde , proche la rivière de Nerva.
Long. £)(}. lat. là. 30.
* BAGNARA , (Géog.) ville maritime d'Italie , au
royaume de Naples, dans la Calabre ultérieure. Long.
33. 48. l*t- 38. là.
* BAGNAREA , (Géog.) ville dTtalie , dans le
patrimoine de S. Pierre , dans la terre d'Orviette.
Long. 2£>. 40. lat. 42. 36.
BAGNE , f. m. c'eft ainfi qu'on nomme dans
quelques Verreries en botiteilles , le poinçon dans lequel
on pafle au tamis la terre à pot au fortir du moulin ,
& la terre greffe bien moulue & bien épluchée , pour
faire de l'une & de l'autre la matière des pots. Voyx*
'Verrerie , & Pot.
B A G
* BAGNERES ,(Géog.) ville de France, au comté
de Bigorre , en Gafcogne , fur l'Adour. Long. ij.
42. lat. 43.30.-
. * B AGNI D'ASINELLO , ou BAINS DE VITER-
BE , (Géog. anc. & mod.) ces bains font dans le pa-
trimoine de S. Pierre, où quelques auteurs croyent
que ce fut l'ancienne ville d'Etrurie , appellée Fa-
num foltumnœ.
B AGNOLOIS ou B AGNOLIENS , f. m. pi. ( Hifl.
eccléf. ) fefte d'hérétiques qui parurent dans le vm.
fiecle , & furent ainfi nommes de Bagnols , ville du
Languedoc au diocefe d'Usés, où ils étoienten aflez
grand nombre. On les nomma auffi Concordois ou Go-
çoeois , termes dont on ne connoît pas bien la vérita-
ble origine.
Ces Bagnolols étoient des Manichéens. Ils rejet-
toient l'ancien Teftament & une partie du nouveau.
Leurs principales erreurs étoient, que Dieu ne crée
point les âmes quand il les unit au corps ; qu'il n'y
avoit point en lui de prefeience ; que le monde eft
éternel, &c. On donna encore le même nom à une
fe£te de Cathares dans le xill. fiecle. V. Cathares.
*BAGNOLS,( Géog. ) petite ville de France
dans le bas Languedoc , proche de la Oefe. Longit.
22. 13. lat. 44. 10.
*BAGOE, (Myth.) nymphe qui enfeigna , dit-
on , aux Tolcans à deviner par les foudres. Quel-
ques-uns croyent que c'eft la fibylle Erythrée, con-
nue fous le nom d'Hérophile : d'autres prétendent
que Bagoe eft poftérieure à Hérophile , la première
d'entre les femmes qui ait rendu des oracles.
*BAGRADE,( Géog. anc. & mod. ) fleuve de
l'ancienne Caramanie , connu maintenant fous le
nom de Tijîndon. Il a fa fource dans les montagnes
de cette province , pafle à Pafagarde , & fe jette dans
l'Océan Perlique.
Il y a en Afrique un fleuve du même nom ; les fa-
vans le nomment Bagrada , Bragada , Macar , Ma-
cra , Bucara, Pagrarda. Il couloit près d'Utique ; &
ce fut fur fes bords qu'un ferpent , dont la dépouille
étoit de cent vingt pies de long , arrêta, dit-on, l'ar-
mée d'Attilius Réçulus.
* BAGUE , f. f. ( Hifl. anc. & mod. ) c'eft un petit
ornement circulaire d'or, d'argent, & de quelques
autres matières , qu'on porte à un des doigts. L'ufage
ne paroît pas en avoir été fort commun en Grèce du
tems d'Homère. Ce poète , qui a mis en œuvre pref-
que tous les objets connus de fon tems , ne parle des
bagues ni dans l'Iliade , ni dans rOdyflee : mais les
Egyptiens s'en fervoient déjà ; car nous liions que
Pharaon donna à Jofeph fa bague à cacheter. Les plus
anciens Romains appelloient la bague ungulum ; &
les Grecs & les Romains ,fymbolum. La Mythologie
nous explique à fa manière l'origine des bagues à
pierre : elle dit que Jupiter inftruit par Prométhée
que l'enfant qu'il auroit de Thétis le déthroneroit ,
permit à Hercule de le détacher du Caucafe , mais à
condition que Prométhée porteroit toujours au doigt
une bague avec un petit morceau de rocher , afin qu'il
fût vrai qu'il y étoit toujours refté attaché , ainfi que
Jupiter l'a voit juré.
On faifoit des bagues de fer , d'acier , d'or , d'ar-
gent , de bronze , &c & on les portoit au petit doigt
de la main gauche , ou au doigt que nous nommons
V annulaire. II y en avoit de creufes & de folides. On
les chargeoit de pierres précieufes. Elles fervoient de
fceaux ; & leur figure ne varioit pas moins que leur
matière. Nous en avons repréfenté quelques-unes
dans nos Planches d'antiquités. Voye^ PI. J.fig. ix.
L'ufage des bagues s'eft tranfmis jufqu'à nous. Nous
en portons de fort riches. Voye^ fur leur ufage, tant
ancien que moderne , l'article Anneau.
Bagues & Joyaux , terme de £>>vit}{e dit des or«
B A G
nemens précieux des femmes , ou de l'argent même
qui leur eft accordé par contrat de mariage pour leur
en tenir lieu.
La ftipulation des bagues & joyaux eft fur-tout ufi-
tée en pays de Droit écrit , où elle tient lieu de la fti-
pulation de préciput , & fait partie des gains de fur-
vie, auffi-bien que l'augmentde dot. F. Préciput,
AUGMENT DE DOT, & GAIN DE SURVIE. {H)
Bague, c'eft, en Marine, une petite corde mife
en rond , dont on le fert pour faire la bordure d'un
œil de pié ou œillet de voile. Vqye^ Œil de pie ,
& (Eillet de voile. ( Z )
Bague , f. f. ( Manège?) c'eft un anneau de cuivre
qui pend au bout d'une efpece de potence , & qui
s'en détache facilement quand on eft affez adroit pour
l'enfiler avec une lance en courant à cheval de toute
fa vîtefle ; c'eft un exercice d'académie. Courir la
bague, Voye^ Courir. Avoir deux dedans, Voye%_
Dedans. ( V)
Bagues ; on appelle ainfi , dans les jeux a" anches
•de C Orgue , une frette ou un anneau de plomb D ,
(fig. 44. PL d'Orgue) fondé fur le corps du tuyau.
Cette bague a un trou pour parler la rafette a b , au
moyen de laquelle on accorde les jeux d'anches.
Foyt{ Trompette. Lorfque le tuyau eft placé
dans fa boîte A B , la bague D doit porter fur la
partie fupérieure de cette boîte , dans laquelle elle
entre en partie , èl doit y être ajuftée de façon que
l'air contenu dans cette boîte , ne puifte trouver
d'iftue pour fortir que par l'anche du tuyau. Voye^
Orgue.
BAGUENAUDIER , f. m. eolutea, (Hift. nat.)
genre de plante à fleur papilionacée. Il fort du calice
un piftil qui devient dans la fuite une capfule mem-
braneufe , enflée comme une veffie , dans laquelle il
y a des femences qui ont la forme d'un rein. Tour-
nefort, Infi.rei herb. Voye^ PLANTE. ( /)
Son bois eft clair , fes feuilles rondes, petites , d'un
verd blanchâtre, avec des fleurs jaunes. Cet arbre
fe dépouille l'hyver , & fe marcote ordinairement ,
quoiqu'il donne de la graine. Sa graine étant mitre,
devient jaune. (/Q
BAGUER , v. aft. terme de Tailleur , de Couturière ,
&c. c'eft arranger les plis d'un habit, & les arrêter
enfemble avec de la foie ou du fil.
* BAGUETTE , f. f. On donne communément
ce nom à un petit morceau ,de bois de quelques li-
gnes d'épahTeur , plus ou moins long , rond & flexi-
ble. On employé la baguette à une infinité d'ufages.
Le bois dont on la fait , varie félon fes ufages. On
en fait même de fer forgé.
Baguette divine ou divinatoire. On donne
ce beau nom à un rameau fourchu de coudrier ,
d'aune , de hêtre ou de pommier. Il n'eft fait aucune
mention de cette baguette dans les auteurs qui ont
vécu avant l'onzième fiecle. Depuis le tems qu'elle
eft connue , on lui a donné différens noms , comme
caducée, verge a" Aaron , &c. Voici la manière dont
on prétend qu'on s'en doit fervir. On tient d'une
main l'extrémité d'une branche, fans la ferrer beau-
coup , enforte que le dedans de la main regarde le
ciel. On tient de l'autre main l'extrémité de l'autre
branche , la tige commune étant parallèle à l'hori-
fon , ou un peu plus élevée. L'on avance ainfi dou-
cement vers l'endroit où l'on foupeonne qu'il y a de
l'eau. Dès que l'on y eft arrivé , la baguette tourne &
s'incline vers la terre , comme une aiguille qu'on
vient d'aimanter.
Suppdfé ce fait vrai, voici comment M. Formey
croit pouvoir l'expliquer par une comparaifon entre
l'aiguille aimantée & la baguette. La matière magné-
tique fortie du fein de la terre s'élève , fe réunit dans
une extrémité de l'aiguille , où trouvant un accès
facile , elle chaffe l'air ou la matière du milieu ; la
B A G
'?
matière chaftée revient fur l'extrémité de l'aiguille ,
& la fait pancher , lui donnant la direction de la ma-
tière magnétique. De même à peu-près , les particu-
les aqueufes , les vapeurs qui s'exhalent de la terre ,
& qui s'élèvent , trouvant un accès facile dans la tige
de la branche fourchue, s'y réunifient , l'appefan-
tiffent, chaifent l'air ou la matière du milieu. La
matière chaffée revient fut la tige appefantie , lui
■dorme la direction des vapeurs , & la fait pencher
vers la terre , pour vous avertir qu'il y a fous vos
pies une fource d'eau vive.
Cet effet, continue M. Formey , vient peut-être
de la même caufe qui fait pencher en bas les bran-
ches des arbres plantés le long des eaux. L'eau leur
envoyé des parties aqueufes qui chaffent l'air , pé-
nètrent les branches > les chargent, les affaifTent, joi-
gnent leur excès de pefanteur au poids de l'air fupé-
rieur , & les rendent enfin autant qu'il fe peut , pa-
rallèles aux petites colonnes de vapeurs qui s'élèvent.
Ces mêmes vapeurs pénètrent la baguette & la font
pencher. Tout cela eft purement conjectural.
Une tranfpiration de corpufcules abondans, gref-
fiers , fortis des mains & du corps , & pouffes rapi-
dement , peut rompre , écarter le volume , ou la co-
lonne de vapeurs qui s'élèvent de la fource , ou tel-
lement boucher les pores & les fibres de la baguette ,
qu'elle foit inacceffible aux vapeurs ; & fans l'action
des vapeurs , la baguette ne dira rien : d'où il i emble
que l'épreuve de la baguette doit fe faire fur-tout le
matin ; parce qu'alors la vapeur n'ayant point été
enlevée, elle eft plus abondante. C'eft peut-être
auffi pour cette raifon que la baguette n'a pas le même
effet dans toutes les mains , ni toujours dans la même
main. Mais cette circonftance rend fort douteux tout
ce qu'on raconte des vertus de la baguette.
On a attribué à la baguette la propriété de décou-
vrir les minières , les thréfors cachés , & qui plus
eft les voleurs & les meurtriers fugitifs-. Pour cette
dernière vertu , on peut bien dire credat Judœus Apel-
la. Perfonne n'ignore la fameufe hiftoire de Jacques
Aymar, payfan du Lyonnois , qui guidé par la ba-
guette divinatoire , pourfuivit en 1692 un meurtrier
durant plus de quarante-cinq lieues fur terre , & plus
de trente lieues fur mer. On fait aujourd'hui à n'en
pouvoir douter , & on le croira lans peine , que ce
Jacques Aymar étoit un fourbe. On peut voir le dé-
tail de fon hiftoire dans le dictionnaire de Bayle,
article Rhabdomancie. A l'égard des autres effets de
la baguette , la plus grande partie des Phyficiens les
révoquent en doute. ( O )
Baguette deMeper. ^js^Nepfr.
Baguette noire , ( Hijl. mod. ) L'huiffier de la
baguette noire , c'eft le premier huiflier de la chambre
du roi d'Angleterre , appelle dans le livre noir , lator
virgee nigree & kajliarius ; & ailleurs , virgi-bajulus.
Voye^ Huissier. Sa charge eft de porter la baguetu
devant le roi à la fête de S. George à Windfor. Il a
auffi la garde de la porte de la chambre du chapirre,
quand l'ordre de la Jarretière eft affemblé ; & dans
le tems que le parlement tient , il garde la chambre
des pairs. Sa marque eft une baguette noire , qui a un
lion d'or à l'extrémité. Cette baguette eft en Angle-
terre une marque d'autorité , comme les malles le
font en d'autres pays. ( G )
Baguette, en Architeclun , eft une petite mou-
lure compofée d'un demi-cercle , que la plupart des
ouvriers appellent afiragale. Voye^ ASTRAGALE. (P)
Baguette, che^ les Arquebufîers , c'eft un mor-
ceau de baleine ou de bois de chêne de la longueur
d'un canon de fufil : il a par en -haut le diamètre
du canon ; il eft ferré par le bout. Son autre extré-
mité eft menue & fort déliée; du relie il cil rond
dans toute fa longueur, & fert à bourrer un tu,d
quand on le charge.
H
BAG
Baguette , che^ les Artificiers. Il y ea a de plu-
sieurs fortes : les unes qu'on devroit appeller des fiou-
Ivirs ou refouloirs , font courtes , eu égard à leur grof-
feur , & tantôt marlives , tantôt percées , fuivant leur
axe ; elles font dcilinées à charger les cartouches des
fufées de toutes efpeces de matières combuftibles.
Les autres longues &t minces , fervent à diriger la
courfe des fufées volantes , & à les tenir dans une
fituation verticale , & la gorge d'où fort le feu , tour-
née en bas. Voyc^ Fusée volante, & Planche I.
de V Artificier ,fig. i. R, une baguette égale dans toute
fa longueur , pour rouler les cartouches. Voye^ C ar-
touche. Fig. 2. M, une baguette avec un manche
plus gros, pour les petites fufées ; &cfig. 3- une ba-
guette avec un manche plus petit , pour les greffes
fufées. Aoy£7 Artific. PL II. fig. 23 • une baguette à
charger , percée par le bout d'un trou A I , égal en
largeur & profondeur à la groffeur & à la longueur
de la broche qu'il doit recevoir entièrement : figure
24. une baguette à charger, plus courte d'un quart ,
percée dans fa longueur d'un trou 16 , dont l'ouver-
ture eft égale au diamètre de la broche , pris au tiers
de fa longueur , & profonde de la longueur du refte
de la broche : fig. 25. baguette à charger , diminuée
de la longueur d'un tiers plus que la précédente , &
percée d'un trou 3 c , dont l'ouverture eft égale au
diamètre de la broche pris aux deux tiers , &C pro-
fonde du tiers de fa longueur : fig. z6. baguette ap-
pellée le maj/ifi, longue de deux diamètres du cali-
bre ; & maftive , parce qu'elle ne fert qu'à charger
la partie de la fuiée qui eft au-deffus de la broche. Le
manche de ces baguettes doit être garni d'une virole
de cuivre , & non de fer , de peur d'accident.
Baguette , chéries Ciriers. Les Ciriers ont deux
fortes de baguettes : les baguettes à mèches , ôc les ba-
guettes à bougies ou chandelles. Ils enfilent dans les
premières leurs mèches , lorfqu'elles font coupées de
longueur : ils enfilent dans les fécondes leurs bou-
gies , quand elles font achevées. Outre ces deux for-
tes de baguettes , les Chandeliers en ont une troifie-
me, c'eft une baguette à tremper: c'eft celle fur la-
quelle les mèches font enfilées , lorfqu'ils font de la
chandelle à la main , en trempant à plufieurs reprifes
les mèches dans l'abyfme. Voye7^ Abvsme. Les ba-
guettes à bougies & à tremper font longues , légères
& flexibles. Celles à mèches font beaucoup plus
fortes.
Baguette, terme de Courroyeur ; c'eft un bâton ou
perche fur laquelle ces ouvriers étendent leurs cuirs ,
toutes les fois qu'ils ont été foulés à l'eau , afin de les
y faire lécher. Voye?^ CoURROYER.
Baguette, outil d 'Hongrieur ; c'eft un morceau
de bois affez long &c rond , mais qui diminue de grof-
feur en allant du milieu aux extrémités , comme un
fufeau. Il fert à ces artifans pour unir & applanir
leurs cuirs , en les roulant defîus avec le pié. Voye^
HONGRIEUR , & la figure E , Planche de FHongrieur.
Pour cet effet , les hongrieurs ont dans une cham-
bre une efpece d'élévation de planche ,fig. 5. Planche
de PHongrieur, a a g, fur le plancher ou le pavé , qui
va un peu plus en montant du côté du mur qu'à l'ex-
trémité oppofée: deux morceaux de bois, a fi, de ,
dreffés depuis le pavé jufqu'au plancher, à la diftance
d'environ trois pies l'un de l'autre , font joints à la
hauteur de quatre pies par un autre morceau de bois
h c , qui les traverfe. L'ouvrier étend Ion cuir F fur
cette efpece de parquet ; il y place fa baguette entre
les plis du cuir : alors il monte deffus , & en s'ap-
puyant avec les mains fur la traverfe de bois b c , il
foule le cuir en reculant , & répète la même opéra-
tion juiqu'à ce que ce cuir fort rendu maniable.
Baguettes de tambour , (Z,«/A.) ce font deux
morceaux de bois qui ont chacun un pié ou quinze
pouces de longueur , fur neuf lignes ou environ de
BAH
diamètre par le bout qu'on tient à la main , d'où ils
vont toujours en diminuant jufqu'à l'autre bout, qui
a la forme & les dimenfions d'une greffe olive ; ils
font tournés au tour, d'un bois dur & léger comme
l'ébene ; & l'on s'en fert pour battre la caiffe ou le
tambour, t'ye^ Tambour. VoyeT figures 16 & ij ,
Planche 2. de Lutherie.
Baguettes de tymballes ; ce font deux mor-
ceaux de bois de bouis , qui font garnis par un bout
de petites courroies capables de recevoir les deux
doigts du milieu , & deftinées à les manier commo-
dément , dont le fut eft partout à peu près de la mê-
me groffeur , & n'a pas plus de fept à huit pouces de
longueur , & qui font terminés chacun par une efpece
de tête de l'épaiffeur de trois à quatre lignes , du dia-
mètre de lept à huit , & de la forme d'un champignon
plat & arrondi par les bords, f^oye^ la même Planche
de Lutherie que nous venons de citer.
Baguette deTympanon, Psaltérion, &c.
ce font deux petits morceaux de bois de bouis , de
cornouiller ,d'ébene , &c. recourbés par un bout , &
quelquefois terminés de l'autre par un anneau ; d'une
ligne & demie ou deux au plus d'épaiffeur par le bout
qu'on tient à la main , d'où ils vont toujours en dimi-
nuant. Ils font recourbés par un bout, afin que ce
bout s'applique facilement fur les cordes qu'on veut,
fans toucher à d'autres : ils ont un anneau pour les
tenir plus commodément , en y plaçant le doigt. On
prend entre les doigts celles qui n'ont point d'an-
neaux.
Baguettes de tambourin, foit à cordes, foit
à caiffe. Ces baguettes ne différent guère de celles du
tambour que par les dimenfions. Celle du tambourin
à cordes eft plus courte & plus menue que celle du
tambour ; celle du tambourin à caiffe ou de Provence
eft plus menue , mais plus longue.
Baguette , bâton dont le Fauconnier fe fert pour
faire partir la perdrix des buiffons , & pour tenir les
chiens en crainte.
* BAHAMA,( Géog. mod. ) île de l'Amérique
feptentrionale , l'une des Lucayes , qui donne le nom
au canal de Bahama.
* BAHANA, ( Géog. ) ville d'Egypte fituée dans
la Thébaïde inférieure , près de Fium , fur un lac
formé de la décharge des eaux du Nil , & qu'on ap-
pelle mer de Jofieph.
BAHAR, BAHAIRE, ou BAIRE, f. m.(Comm.)
poids dont on fe fert à Ternata , à Malacca, à Achem,
& en plufieurs autres lieux des Indes orientales,
auffi-bien qu'à la Chine.
Il y en a de deux fortes , l'une qu'on appelle grand
bahar , & l'autre que l'on nomme petit bahar. Le pre-
mier revient à 48 1 livres 4 onces de Paris , de Straf-
bourg , d'Amfterdam , & de Beiançon; & le fécond à
401 livres 7 onces de Paris.
Le bahar de la Chine eft de 300 catis, mais qui
n'en font que 200 de Malaca, chaque catis de la Chi-
ne ne contenant que 16 taëls.Letaëlpefantuneréale
6c demie de huit , eft de dix mas ou maies , & cha-
que mas de dix condorins. Voy. Condorin, Mas,
Tael.
Le bahar de Moka , ville d'Arabie , eft de 420 li-
vres. (G)
* BAHEL SCHULLI , (Hift. nat. & bot. ) arbrif-
feau épineux qu'on appelle auffi GeniJlafpinoJ'a indica.
verticillata ,Jlore purpureo cœruleo , qui étoit aux Indes
dans les lieux aquatiques. Il y en a une efpece qui
vient dans les fables , dont les tiges & les feuilles
font d'un verd gai , & les fleurs font blanches , avec
une teinte d'azur.
Ray attribue à la décoction de fa racine & à fes
feuilles cuites & confites dans du vinaigre , la venu
d'exciter les urines , & de remédier à leur fuppref-
ûon , furtout û la décottioa s'eft faite dans l'huile du
BAH
ficus infernalis ; il ajoute que fes feuilles réduites en
poudre & prifes dans de l'huile tirée par exprefîion
des fleurs du ficus infcrnalis , réfolvent les tumeurs
des parties naturelles.
BAHEM. Dans le Ier livredes Machabées, il efl dit ,
que leroiDemetrius écrivit au grand prêtre Simon,
en ces termes : coronam auream & bahem quam mififlis ,
fufeepimus. Les uns croyent que ce nom bahem ligni-
fie des perles ; d'autres un habit. Le Grec , au lieu de
bahem, lit bainam , que Grotius dérive de bais, une
branche de palmier. Ce fentimentparoît le meilleur.
II étoit affez ordinaire d'envoyer ainfi des couronnes
& des palmes d'or aux rois vainqueurs en forme de
préfens. Machab. I. exiij. v. Jj. Syr. ad. i. Mack.
xiij. 3j. (G)
BAHIR, c'eft-à-dire illujlre. Buxtorf a remarqué
dans fa bibliothèque des Rabbins , que les Juifs ont
un livre de ce nom. Il ajoute que c'eit le plus ancien
de tous les livres des Rabbins ; qu'il y elt traité des
plus profonds myfteres de la cabale ; que ce livre n'a
point été imprimé ; qu'on en voit feulement plufieurs
paffages dans les ouvrages des Rabbins ; que l'auteur
fe nommoit Rabbi Nechonia Ben Hakkana , & qu'il
vivoit , félon les Juifs , en même tems que Jonathan ,
auteur de la paraphrafe Chaldaïque , c'elt-à-dire en-
viron quarante ans avant Jefus-Chrilt. Le même Bux-
torf s'efl fervi du témoignage de ce livre pour prou-
ver l'antiquité des points voyelles , qui iont écrits au
texte Hébreu de la bible : mais cette preuve eftmau-
vaife, le bahir n'étant point un ouvrage aufîî ancien
qu'il a prétendu. M. Simon a mis dans le catalogue
des auteurs Juifs, que l'on a depuis peu imprimé en
Hollande, un petit livre intitulé Bahir: mais il dit
qu'il n'y a pas d'apparence que ce foit l'ancien bahir
des Juifs , qui eit beaucoup plus étendu. (G)
* BAHREIN ou BAHRAIN , (Géog.) province de
l'Arabie heureufe , fur le golfe Perfique , avec île de
même nom.
BAHU , f. m. en Architecture ; c'eft le profil bombé
du chaperon d'un mur, de l'appui d'un quai , d'un pa-
rapet, d'une terraffe ou d'un foffé, & d'une baluf-
trade.
BAHU. On dit en terme de Jardinage , qu'une plate-
bande , qu'une planche , ou qu'une couche de terre
eft en bahu , loriqu'elle eil bombée fur fa largeur
pour faciliter l'écoulement des eaux , &c mieux éle-
ver les fleurs. Les platebandes fe font aujourd'hui en
dos d'une ou de carpe , c'elt-à-dire en glacis à deux
égoûts. (P)
* BAHURIN , (Géog. anc. & mod.) ville de la Pa-
lestine , de la tribu de Benjamin , fur une haute mon-
tagne, aux confins de la tribu deJuda; on l'appelle
aujourd'hui Bachori.
* BAHUS , ( Géog. ) ville de Suéde, capitale du
gouvernement de même nom , fur un rocher dans
une ile formée par la Gothelbe. Long. zq. zo. lat.
5y. 52.
BAHUTIER, f. m. ouvrier dont le métier elt de
faire des bahus , coffres , valifes , malles, &c. & au-
tres ouvrages de cette nature , couverts de peau de
veau , de vache , d'ours , &c. mais non de chagrin.
Les ouvrages en chagrin iont reiervés aux guaîniers.
Les bahutiers font de la communauté des coffretiers.
BAI , adj. ( Manège. ) poil de cheval tiran* fur le
rouge : ce poil a plufieurs nuances , lavoir , bai clair,
bai doré , bai brun , bai châtain , bai cerife , bai miroité
ou à miroir, lorfqu'on diftingue des taches rondes fe-
mées par tout le corps , &c d'un bai plus clair que le
refle du corps. ( V)
BAJAMO ( le ) Géog. petite contrée de l'île de
Cuba , une des Antilles. Voye^ Antilles.
BAIANISME. /^{Bayanisme.
B AJ ARIA , ( Géog. anc. & mod. ) rivière de Sicile
qu'on appelle encore Amirati ; elle le jette dans la
B A I
M
mer deTofcane à côté de Palerme. CeûVElcutherus
des anciens.
BAIE , BÉE , f. f. ou JOUR , terme a" Architecture :
on nomme ainfi toutes fortes d'ouvertures percées
dans les murs pour éclairer les lieux , comme croi-
fées , portes , &c On dit baie ou bée de croilée , &
baie ou bée de porte , &c. ( P )
Baie , f. f. en Géographie , petit golfe ou bras de
mer qui s'avance dans la terre , & dont le mi-
lieu en-dedans a plus d'étendue que l'entrée , ou ce
qu'on nomme Vembouchure de la baie. Telle elt la
baie d'Hudfon dans l'Amérique feptentrionale. Voyer
Golfe. (O)
Baie , f. f. bacca , ( Hijl. nat. bot. ) fruit mou ,
charnu, fucculent, qui renferme des pépins ou des
noyaux : tels font les fruits du laurier , du troène ,
du myrte , &c. Lorlquc de pareils fruits font diipo-
fés en grappe , on leur donne le nom de grains , au
lieu de celui de baie : par exemple , on dit un grain
de raijin , un grain defureau, &c. Tournefort. (/)
* Baie, (Géog. anc") villed'Italie dansce que nous
appelions aujourd'hui la terre de Labour , proche de
Naples , à l'occident. Il n'en reite rien qu'un lbùter-
rein appelle le Cento Camerelle, les cent petites cham-
bres , & quelques ruines du pont que Caligula vou-
lut conltruire fur le golfe qui léparoit 2?a/e de Pouz-
zol. On préfume que les Cento Camerelle fervoient
de cafernes à la chiourme Romaine.
BAIGNER , v. act. ( Gramm. ) c'eft plonger un
corps nud dans l'eau , ou plus généralement dans un
fluide, afin que fes parties en l'oient appliquées im-
médiatement à la peau. Voye-^ Bain.
Baigner, fe dit en Fauconnerie de l'oifeau de
proie, lorfque de lui-même il lé jette dans l'eau ou
qu'il fe mouille à la pluie , ou qu'on le plonge dans
l'eau quand on le poivre.
BAIGNEUR, f. m. (Hifl. anc. ) valet des bains
chez les anciens. Athénée dit que ces fortes de do-
meltiqucs avoient une chanfon particulière : mais
s'il étoit permis aux perfonnes qui fervoient aux bains
de chanter , il n'étoit point honnête à ceux qui fe bai-
gnoient d'en faire autant ; car Théophrafte , eh. iv.
des Caracl. failant la peinture de l'homme grolîïer , le
reprélente chantant dans le bain. ( G )
Baigneur , f. m. c'elt celui qui tient des bains
chez lui pour la commodité du public. Les Baigneurs
font appelles Etuvijles , & font corps avec les Per-
ruquiers-Barbiers.
* BAIGNEUX , ( Géog. ) ville de France en Bour-
gogne , diocefe de Dijon.
BAIGNOIRE,!', f. elt une cuve de cuivre rouge
de quatre pies & demi de longueur , fur deux & de-
mi de largeur , arrondie par les angles , ik qui a en-
viron 26 pouces de hauteur , fervant à prendre le
bain. Ces baignoires font étamées en-dedans pour
empêcher le verd-dc-gris , &: font (auvent décorées
en-dehors de peintures à l'huile relatives à leur ufa-
ge. Pour plus de propreté & de commodité , l'on pô-
le dans le dedans des linges piqués , des oreillers ,
&c. aux deux cotés de ces baignoires , dans lelquel-
les on le tient alhs: à leurs extrémités fupérieurcs»
font placés deux robinets à droite & à gauche , l'un
pour diltribuerde l'eau chaude amenée de l'etuve ,
l'autre de l'eau froide amenée duréfervoir. Au tord
de la baignoire elt pratiquée une bonde que l'on le-
vé pour faire écouler l'eau à mefure que l'on a bc-
loin d'en remettre de la chaude , ou de la renouvel-
1er, lelon le tems qu'on veut reltcr au bain. Cette
bonde fermée contient l'eau , & loriqu'elle elt levée
elle la précipite dans un tuyau de décharge , qui
l'expulfe dans les baffes cours ou dans les puifards
pratiqués exprès.
Ces baignoires font ordinairement placées dans
des niches qui prennent le phii fouventla forme d'un
i6
B A I
de leurs grands côtés, & font couvertes d'un balda-
tjuin ou impérial décoré de mouffeline , toile de co-
ton , toile peinte , ou perle , comme il s'en voit au
château de S. Cloud, de Sceaux , &c.
Par économie ces baignoires lé font quelquefois de
bois, & fe portent en ville chez les particuliers, lors-
qu'ils font obligés pendant l'hyver de prendre les
bains , par indifpofition ou autrement. ÇP )
M. Burette , dans les Mém. de VAcad. des Belles-
Lettres, remarque que dans les thermes des anciens
il y avoit deux fortes de baignoires ; les unes fixes , &
les autres mobiles ; & que parmi ces dernières on en
trouvoit de faites exprès pour être fufpendues en
l'air , & dans lefquelles on joignoit le plailir defe bai-
gner à celui d'être balancé , &c comme bercé par le
mouvement qu'on imprimoit à la baignoire. ( G )
Les baignoires de cuivre font l'ouvrage des chau-
deronniers ; les tonneliers font &. relient celles de
bois.
BAIGNOIRE , chéries Hongrieurs ; c'eft ainfi qu'ils
appellent la poelle dans laquelle ils font chauffer l'eau
d'alun & le firif qu'ils employent dans l'apprêt de
leurs cuirs. Voye? la vignette , PI. de VHongrieur.
* BAIGORR1, ( LE ) Géog. petit pays de France
dans la baffe Navarre , entre les confins de la haute
Navarre à l'occident , & le pays de Cife à l'orient.
* BAIKAL , lac de Sibérie d'où fort la rivière
d'Angara. Il a en long. iz5-i30.
BAIL , f. m. terme de Droit , eft une convention
par laquelle on transfère à quelqu'un la joiiiffance
ou l'ufage d'un héritage , d'une maifon , ou autre for-
te de bien , ordinairement pour un tems déterminé ,
moyennant une rente payable à certains tems de
l'année que le bailleur ftipule à fon profit , pour lui
tenir lieu de la joiiiffance ou de l'ufage dont il fe dé-
pouille. Il y a auffi des baux par lefquels on promet
de faire certains ouvrages pour un certain prix. Voy.
Louage , Location.
Le bail des chofes qui produifent des fruits eft ce
qu'on appelle bail à ferme. /^oyc^FERME.
Le bail des chofes qui ne rapportent point de fruits
eft ce qu'on appelle bail à loyer. Voye^ Loyer.
Chez les Romains les baux ne fe faifoient pas pour
un tems plus long que cinq années. Parmi nous ils
ne paffent jamais neuf ans, à moins qu'ils ne foient
à vie ou emphytéotiques. Voye{ Emphytéotique.
Les baux fe font pardevant notaire ou fous feing
privé. Ils font également obligatoires d'une & d'au-
tre manière : feulement s'ils ne font faits que fous
Signature privée , ils n'emportent point hypothèque
fur les biens du bailleur ni du preneur. Les Anglois
font auffi des baux de vive voix.
Tous ceux qui ont la libre administration de leur
bien en peuvent faire des baux ; ceux même qui n'en
ont que l'ufufruit le peuvent auffi ; tels qu'un mari ,
une femme douairière , un tuteur , un bénéficier ; Se
dans l'ufage commun, ceux qui entrent en joiiiffance
après eux doivent entretenir les baux qu'ils ont faits.
L'obligation de celui qui fait le bail eft de faire
jouir le fermier ou locataire de la chofe donnée à fer-
me ou à loyer , ou de lui payer des dommages & in-
térêts qui l'indemnifent de la perte qu'il fouffre par
l'inexécution du bail.
Mais il peut en demander la réfiliation , pour dé-
faut de payement ; ii le locataire ou fermier dégra-
de l'héritage qu'il tient à bail; fi la maifon tenue à
bail menace ruine , & qu'il y ait néceffité de la re-
bâtir ; fi le propriétaire d'une maifon de ville veut
occuper fa maifon en perfonne ; & dans tous ces cas
le propriétaire ne doit pas des dommages & intérêts
au fermier ou locataire.
Celui qui fuccede au propriétaire n'eft engagé à
entretenir le bail par lui fait , que quand il lui fucce-
de à titre univerfel; c'eft-à-dire, à titre d'héritier,
B A I
de donataire ou légataire univerfel ; mais non pas
s'il lui fuccede à titre fingulier , foit lucratif ou oné-
reux.
Le fermier ou locataire de fon côté eft obligé à
trois choies : i°. à joiiir en bon père de famille , à
ne point faire de dégradations dans les lieux dont il
a la joiiiffance , & même à y faire les réparations
locatives ou viagères auxquelles il s'eft obligé par
fon bail: z°. à payer le prix du bail, û ce n'eft que le
fermier ait foufîert des pertes confidérables dansl'ex-
ploitage de fa ferme par des cas fortuits; ce qu'on
appelle en Droit vimaires , du Latin vis major, com-
me grêle , feu du ciel , inondations , guerre , &c.
auquel cas l'équité naturelle exige qu'il lbit fait une
diminution au fermier : 30. à entretenir le bail , c'eft-
à-dire , à continuer l'habitation ou l'exploitage jus-
qu'à l'expiration du bail.
Lorfque le terme du bail eft expiré , fi le locataire
continue à occuper la maifon , ou le fermier à ex-
ploiter la ferme , quoiqu'il n'y ait point de conven-
tion entre les parties , le filence du propriétaire fait
préfumer un confentement de fa part , tk. cela forme
un contrat entre les parties qu'on appelle tacite ré-
conduclion. Voye^ RÉCONDUCTION.
Le bail à rente , fuivant la définition que nous avons
donnée du mot bail au commencement de cet arti-
cle , eft moins proprement un bail qu'une véritable
aliénation, par laquelle on transfère la propriété d'un
immeuble à la charge d'une certaine iomme ou d'u-
ne certaine quantité de fruits que le poffeffeur doit
payer à perpétuité tous les ans.
Le bail à rente diffère de l'emphytéofe en plufieurs
chofes , mais singulièrement en ce que de fa nature
il doit durer à perpétuité , moyennant la preftation
de la rente par le tenancier ; au lieu que l'emphytéo-
fe finit fouvent après un tems déterminé , comme de
99 ans , ou de deux ou trois générations. Voye\ Em-
PHYTÉOSE.
Bail Emphytéotique, voyei Emphytéose.
Bail a cheptel , voye^ Cheptel.
Bail judiciaire , voye^ Judiciaire.
On appelle auffi bail l'expédition même du trait»
appelle bail , qu'on levé chez le notaire devant le-
quel il a été paffé.
Bail eft encore fynonyme à ce qu'on appelle au-
trement baillie , ou garde-noble , ou bourgeoife. Voye^
Garde.
Bail , dans les anciennes coutumes , Signifie aufli
la tradition d'une chofe ou a" une perfonne à quelqu'un ;
en ce fens on dit qu'il y a bail quand une fille fe ma-
rie , parce qu'elle entre en la puiffance de fon mari ;
& quand fon mari meurt il y a desbail , parce qu'elle
eft affranchie par fa mort de la puiffance maritale.
Foye{ Desbail & Puissance maritale. ( H)
BAILE , f. m. m. terme de Palais ulité particulière-
ment en Béarn , oit il fe dit de certains huifliers fu-
balternes qui ne peuvent exploiter que contre les ro-
turiers , à la différence des veguers qui exploitent
contre les gentilhommes. Voye^ Veguer. ( H)
Bai LE , f. m. ( Polit. & Comm. ) nom qu'on donne
à Conftantinople à l'ambaffadeur de la république de
Venife réfident à la Porte.
Outre les affaires de politique & d'état dont ce mï-
niftre eft chargé , il fait auffi les fondrions de conful
de la nation auprès du grand Seigneur , & c'eft pro-
prement de lui que dépendent les autres confuls éta-
blis dans les échelles du levant , qui ne font pour la
plupart que des vice-confuls. Vqye^ Consul. (G)
B AILLE-BOUTE , f. f. c'eft parmi les Marins une
moitié de tonneau en forme de baquet. Les vaiffeaux
de guerre ont une baille amarrée à chaque hune,
pour y enfermer des grenades & autres artifices que
l'on couvre de peaux fraîches, s'il eft polîible, pour
les garantir du feu.
On
B A I
On met dans des bailles le breuvage que l'on diftri-
bue tous les jours aux gens de l'équipage. Il y a auffi
des bailles à tremper les écouvillons dont on fe lert
pour rafraîchir le canon. Il y a des bailles pour mettre
tremper le poiffon tk la viande falée.
On le lert quelquefois des bailles pour puifer l'eau
qui entre dans le rum ou fond de cale. ( Z )
BAILLEMENT, f. m, (Phyfiolog.) ouverture in-
volontaire de la bouche , occaiionnée par quelque
vapeur ou ventuoiité qui cherche à s'échapper , & té-
moignant ordinairement la fatigue , l'ennui , ou l'en-
vie de dormir.
Le remède qu'Hippocrate preferit contre le bâille-
ment , eft de garder long-tems fa relpiration. Il re-
commande la même chofe contre le hocquet. Voye^
HOCQUET. Suivant l'ancien fyftème , le bâillement
n'eft jamais produit fans quelque irritation qui dé-
termine les efprits animaux à couler en trop grande
abondance dans la membrane nerveufe de l'œfopha-
ge , qu'on a regardée comme le fiége du bâillement.
Quant à cette irritation , on la fuppofe occafionnée
par une humeur importune qui humeûe la mem-
brane de l'œfophage , & qui vient ou des glandes
répandues dans toute cette membrane , ou des va-
peurs acides de l'eftomac rafTemblées fur les parois
de l'œfophage. Par ce moyen les fibres nerveufes de
la membrane du gofier étant irritées , elles dilatent
le gofier , & contraignent la bouche à fuivre le mê-
me mouvement.
Mais cette explication du bâillement a depuis peu
donné lieu à une nouvelle plus méchanique & plus
fatisfaifante.
Le bâillement eft produit par une expanfion de la
plupart des mufcles du mouvement volontaire , mais
fur-tout par ceux de la relpiration. Il fe forme en
infpirant doucement une grande quantité d'air, qu'on
retient & qu'on raréfie pendant quelque tems dans
les poumons , après quoi on le laiffe échapper peu
à peu , ce qui remet les mufcles dans leur état na-
turel.
De-là , l'effet du bâillement eft de mouvoir , d'ac-
célérer & de diftribuer toutes les humeurs du corps
également dans tous les vaiffeaux, &c de dilpofer par
conféquent les organes de la fenfation Se tous les
mufcles du corps , à s'acquiter chatun de leur côté
de leurs fondions refpe&ives. Voy. Boerhaave, InJI,
méd.%. 638. (L)
Bâillement , f. m. ce mot eft auffi un terme de
Grammaire ; on dit également hiatus: mais ce dernier
eft latin. Il y a bâillement toutes les fois qu'un mot
terminé par une voyelle , eft fuivi d'un autre qui
commence par une voyelle , comme dans il m'obligea
à y aller; alors la bouche demeure ouverte entre les
deux voyelles , par la nécefîité de donner paflage à
l'air qui forme Tune , puis l'autre fans aucune con-
ionne intermédiaire ; ce concours de voyelles eft
plus pénible à exécuter pour celui qui parle , & par
coniéquent moins agréable à entendre pour celui
qui écoute ; au lieu qu'une confonne faciliteroit le
paflage d'une voyelle à l'autre. C'eft ce qui a fait
que dans toutes les langues , le méchaniime de la
parole a introduit ou l'elilion de la voyelle du mot
précédent, ou une confonne euphonique entre les
deux voyelles.
L'elilion fe pratiquoit même en profe chez les
Romains. « Il n'y a perlonne parmi nous, quelque
» greffier qu'il ioit , dit Cicéron , qui ne cherche à
» éviter le concours des voyelles, & qui ne les réu-
» mile dans l'occafion. Quodquidan latina linguafic
obj'ervat , ne/no ut tam rujïicus Jit , quin vocales nolit
conjungere. Cic. Orator. n. i5o. Pour nous, excepté
avec quelques monofyllabes, nous ne failons uiage
de l'elilion que lorf'que le mot fuivi d'une voyelle
eft termine par un e muet ; par exemple, unejincerc
Tome II*
B A I
17
amitié, on prononce fincer-amitié. On élide aufli Fi
de fi en fi il , qu'on prononce s'il; on dit aufli m'a-
mie dans le ftyle familier , au lieu de ma amie ou mon
amie : nos pères difoient m' amour.
Pour éviter de tenir la bouche ouverte entre deux
voyelles, & pour fe procurer plus de facilité dans la
prononciation , le méchaniime de la parole a intro-
duit dans toutes les langues , outre l'élifion , l'ufage
des lettres euphoniques , & comme dit Cicéron , on
a facrifié les règles de la Grammaire à la facilité de
la prononciation : Confuetudini auribus indulgenti li-
benter obfequor Impetratum ejl à confuetudine ut
peccare fuavitatis caufâ liceret . Cicer. Orator. n. i58.
Ainli nous difons mon ame , mon épée , plutôt que ma
ame , ma épée. Nous mettons un t euphonique dans
y a-t-il , dira-t-on ; Se ceux qui au lieu du tiret ou
trait d'union mettent une apoftrophe après le / , font
une faute : l'apoftrophe n'eft deftinée qu'à marquer
la luppreflion d'une voyelle , or il n'y a point ici de
voyelle élidée ou iùpprimée.
Quand nous difons}? l'on au lieu défi on, V n'eft
point alors une lettre euphonique , quoi qu'en dilè
M. l'abbé Girard , tom. I. p. 344. On , eft un abrégé
de homme ; on dit l'on comme on dit l'homme. On m'a
dit , c'eft-à-dire , un homme , quelqu'un m'a dit. On ,
marque une propofition indéfinie , individuum vagum.
Il eft vrai que quoiqu'il ioit indifférent pour le fens
de dire on dit ou l'on dit , l'un doit être quelquefois
préféré à l'autre , félon ce qui précède ou ce qui luit ,
c'eft à l'oreille à le décider ; & quand elle préfère
l'on au fimple on , c'eft fouvent par la raifon de l'eu-
phonie , c'eft-à-dire par la douceur qui réfulte à l'o-
reille de la rencontre de certaines fyllabes. Au refte
ce mot euphonie eft tout grec, su, bien, & <pmh,fon.
En grec le v , qui répond à notre n , étoit une lettre
euphonique, fur-tout après l\ &c Vi : ainli au lieu de
dire ux<xri àivS'pîç, vigtnti viri , ils dilent sj^cw àWW ,
fans mettre ce v entre les deux mots.
Nos voyelles font quelquefois fuivies d'un fon na-
fal, qui fait qu'on les appelle alors voyelles na/ales.
Ce fon nafal eft un fon qui peut être continué , ce
qui eft le caractère diftinûif de toute voyelle : ce fon
nafal laiffe donc la bouche ouverte ; & quoiqu'il ioit
marqué dans l'écriture par un n , il eft une véritable
voyelle : Se les poètes doivent éviter de le faire fui-
vre par un mot qui commence par une voyelle , à
moins que ce ne ioit dans les occafions où l'ufage a
introduit un n euphonique entre la voyelle naiaîe &
celle du mot qui luit.
Lorfque l'adjectif qui finit par un fon nafal eft fuivi
d'un fubftantif qui commence par une voyelle , alors
on met Yn euphonique entre les deux, du moins dans
la prononciation ; par exemple , un-n-enfant , bon-n-
homme , commun-n-accord , mon-n-ami. La particule
on eft aufli fuivie de Yn euphonique , on-n-a. Mais ii
le fubftantif précède, il y a ordinairement un bâille-
ment; un écran illuminé , un tyran odieux , un entretien
honnête , une citation équivoque , un parfum incommode;
on ne dira pas un tyran-n-odieux , un entretien-n-hon-
nêtt , &C: On cl it auffi un bafiin à barbe, & non un baf-
fin-n-à barbe. Je l'ai bien que ceux qui déclament des
vers où le poète n'a pas connu ces voyelles natales ,
ajoutent l'« euphonique , croyant que cette n eft la
confonne du mot précédent : un peu d'attention les
détromperait : car, prenez-y- garde , quand vous
dites il eft bon-n-homme , bon-n-ami , vous prononce I
bon & enfuite -n-homme , -n-ami. Cette prononciation
eft encore plus defagréable avec les diphthongues
nafales , comme dans ce vers d'un de nos plus beaux
opéra :
Ah ! j'attendrai long-tems, la nuit cfi loin encore ;
où l'aûeur pour éviter le bâillement prononce loin-n-
encon } ce qui eft une prononciation normande.
C
i8
B A I
Le b & le d font auffi des lettres euphoniques. En
latin ambirt eft compofé de l'ancienne prépofition
am , dont on fe fervoit au lieu de circitm , & de ire ;
or comme am étoit en latin une voyelle nafale, qui
étoit même élidée dans les vers , le b a été ajouté
entre am & ire , eupkoniœ caufâ.
On dit en latin profum , projumus , profiti ; ce verbe
eft compofé de la prépofition pro , &c dejhm : mais fi
après pro le verbe commence par une voyelle , alors
le méchanifme de la parole ajoute un d , profum , pro-
d-es , pro-d-ejl , pro-d-sram , &c. On peut faire de pa-
reilles obfervations en d'autres langues; car il ne faut
jamais perdre de vue que les hommes font par-tout
des hommes, & qu'il y a dans la nature uniformité &c
variété. (F)
BAILLER, v. neut. refpirer en ouvrant la bouche
extraordinairement & involontairement. Bâiller d'en-
nui, bâiller de jommeil. V. BAILLEMENT ci-dejfus. (Z.)
BAILLET, adj. (Manège.*) cheval baillet , eft celui
qui a le poil roux tirant fur le blanc. (^)
* BAILLEUL ou BELLE , ville de France , au
comté de France. Long, zo %5. lac. ào 46.
BAILLEUR , f. m. terme de Pratique, eu celui des
deux parties contractantes dans un bail , qui loue ou
afferme fa propre choie. Il eft oppolé à preneur. Voy.
Preneur. (H)
BAILLI , 1. m. ( Hijl. mod. & Jurijprud. ) on entend
en général par ce mot, un officier chargé de rendre
la juftice dans un certain diftrict appelle bailliage.
Vqye{ BAILLIAGE.
Ce mot eft formé de baile , vieux terme qui ligni-
fie gouverneur , du Latin bajulus qui a la même figni-
fîcation.
Pafquier afTùre que les baillis étoient originaire-
ment une forte de ïubdélégués , que l'on envoyoit
dans les provinces pour examiner fi les comtes , qui
alors étoient les juges ordinaires , rendoient exacte-
ment la juftice. Loyfeau rapporte plus vraiffembla-
blement l'origine des baillis , à l'ufurpation & à la
négligence des grands feigneurs , qui s'étant empâ-
tés de l'adminiftration de la juftice , & étant trop
foibles pour ce fardeau , s'en déchargèrent fur des
députés qu'on appella baillis. Ces baillis eurent d'a-
bord rinfpe&ion des armes ôt l'adminiftration de la
juftice & des finances : mais comme ils abuferent de
leur pouvoir , ils en furent infenfiblement dépouillés ,
& la plus grande partie de leur autorité fut trans-
férée à leurs lieutenans , qui étoient gens de robe :
en France les baillis ont encore une ombre de leurs
anciennes prérogatives , ôc font confidérés comme
les chefs de leurs diftri&s : c'eft en leur nom que la
juftice s'adminiftre ; c'eft devant eux que fe patient
les contrats & les autres aftes , & ce font eux qui ont
le commandement des milices.
C'eft de-là que les baillis d'Angleterre ont pris leur
nom & leur office : comme il y a en France huit Par-
lemens , qui font des Cours fuprèmes , des arrêts def-
quels il n'y a point d'appel ; & que dans le reflbrt de
plufieurs parlemens , ou de différentes provinces , la
juftice eft rendue par des baillis ou du moins par
leurs lieutenans : de même il y a en Angleterre diffé-
rens comtés , dans lefquels la juftice eft adminiftrée
par un vicomte ou shérif, qui paroit vraifîémblable-
ment avoir été appelle bailli , & fon diftrict bailliage.
Le bailli dans l'origine étoit donc un feigneur,
qui avoit dans l'étendue de fon bailliage, l'adminif-
tration de la juftice , le commandement des armes &
le maniement des finances. De ces trois prérogati-
ves , il ne leur relie plus que le commandement du
ban & de l'arriere-ban. Quant à l'adminiftration de
la juftice , ce ne font plus que des juges titulaires. Les
fentences & les commiffions s'expédient bien en leur
nom : mais ce font leurs lieutenans de robe qui ren-
dent la juftice. Les baillis des fiéges particuliers ref-
B A I
fortifians au bailliage général , ne font proprement
que les lieutenans de ceux-là.
On diftingue de ces baillis royaux , les baillis fei-
gneuriaux par la dénomination de haut-jufticiers.
Quelques-uns de ceux-ci reffortiffent aux bailliages
royaux , lefquels reffortiffent au parlement ; mais il y
a des baillis haut-jufticiers qui reffortiffent nuement
au parlement , tels font les baillis des duchés-pai-
ries. (H)
* Bailli ( Hijl. mod.) nom d'un grade ou di-
gnité dans l'ordre de Malte. On en diftingue de
deux fortes , les baillis conventuels Se les baillis capi-
tulâmes. Les premiers font les huit chefs ou piliers de
chaque langue. Voye^ Pilier & Langue. On les ap-
pelle conventuels , parce qu'ordinairement ils réfident
dans le couvent de la religion à Malte.
Les baillis capitulaires , ainfi nommés, parce que
dans les chapitres provinciaux , ils ont féance immé-
diatement après les grands-prieurs, font des cheva-
liers qui poffedent des bailliages de TOrdre. La lan-
gue de France a deux bailliages, dont les titulaires
font le bailli de la Morée ou commandeur de S. Jean
de Latran à Paris , & le grand tréforier ou comman-
deur de S. Jean en l'île proche de Corbeil. La langue
de Provence a le bailliage de Manofque ; & celle
d'Auvergne , le bailliage de Lyon. Il y a de même
des bailliages & des baillis capitulaires dans les autres
langues. V~oye^ Malte. (G)
BAILLIAGE , f. m. ( Jurij'p. ) eft tout le territoire
où s'étend la jurifdiclion d'un bailli. Un bailliage
principal en contient pour l'ordinaire plufieurs au-
tres , lefquels connoiffent des mêmes matières , &
reffortiffent à ce bailliage principal , lequel connoît
exclufivement aux autres en dernier reflbrt des cas
préfidiaux : car ces bailliages fupérieurs équivalent
pour l'autorité aux préfidiaux & aux fénéchauffées,
dont ils ne différent que par le nom. Voye^ Prési-
dial, & Bailli.
On appelle auffi bailliage l'office même du bailli.
On donne auffi le même nom au lieu où il tient fa
féance. ( H)
Baillie , f. f. ( Jurifprudence) terme de coutumes ,
eft fynonyme à garde-noble ou bourgeoife. Voyeç_
Garde.
Baillistre , f. m. ( Jurifprudence) vieux terme
encore ufité dans quelques coutumes , qui eft fyno-
nyme à tuteur ou gardien ; & eft dirivé de baillie , qui
dans les mêmes coutumes fignifie tutelle ou garde.
Voye^ Baillie.
BAILLIVAGE , ou Balivage, {. m. (Juri/prudence)
terme d'eaux & forêts , eft l'étiquette ou la marque
des baliveaux qui doivent refter fur pié dans les bois
coupés ou à couper. Voye^ Baliveau. ( //)
BÂILLONNÉ , adj. ( terme de Blafon ) il fe dit des
animaux qui ont un bâton entre les dents , comme
les lions , les ours , les chiens , &c.
Bourneus au pays de Vaux , d'argent au lion de fa-
ble bâillonne de gueules à la bordure componnée d'ar-
gent & de fable. ( V)
BAILLOGUES , f. f. c'eft ainfi que les plumajfiers
nomment des plumes de couleurs mêlées ; blanches ,
& noires , par exemple.
BAILLOTTE, f. f. ( en terme de Marine) c'eft un
feau.
BAINS ,f. m. (termed'Arc hiteclure) grands &fomp-
tueux bâtimens , élevés par les anciens pour l'orne-
ment & la commodité. Il faut diftinguer les bains en
naturels ou en artificiels. Les bains naturels font ou
froids comme l'eau des rivières , ou chauds comme
ceux des eaux minérales, propres à la guérifon de plu-
fieurs maux. Voyei Eaux Minérales , & plus bas
Bain en Médecine.
Les bains artificiels , qui étoient plutôt pour la pro-
preté du corps que pour la fanté , étoient chez les
B A I
anciens des édifices ou publics ou particuliers. Les
bains publics ont été en ufage en Grèce & à Rome ;
mais les Orientaux s'en fervirent auparavant. La
Grèce connoiffoit les bains chauds dès le tems d'Ho-
mère , comme il paroît par divers endroits de l'O-
dyffée ; & ils étoient ordinairement joints aux gym-
nafes ou paleftres , parce qu'en fortant des exerci-
ces on prenoit le bain. Vitruve a donné une deferip-
tion fort détaillée de ces bains , par laquelle il paroît
qu'ils étoient compofés de lept pièces différentes ,
la plupart détachées les unes des autres , & entre-
mêlées de quelques pièces devinées aux exercices.
Ces lept pièces étoient: i°. le bain froid ,frigida la-
yatio , en Grec Xourpov : i°. Yelœothejlum , c'elî-à-dire ,
la chambre oii l'on fe frottoit d'huile ; 30. le lieu de
rafraîchiffement,/r/g7<AwK/« ; 40. le propnigeum, c'eft-
à-dire l'entrée ou le veltibule de Yhypocaujlum ou du
poelle ; 50. l'étuve voûtée pour faire fuer, ou le bain
de vapeur , appelle tepidarium ; 70. le bain d'eau chau-
de, calida lavatio, auxquels il faudrait joindre Vapo-
dyterion , ou garde-robe , li toutefois ce n'eft pas la mê-
me choie que le tepidarium.
Quant aux bains détachés des paleftres , il refaite
de la defeription qu'en fait Vitruve : i°. que ces bains
étoient ordinairement doubles , les uns pour les hom-
mes , les autres pour les femmes ; du moins chez les
Romains , qui en ce point avoient plus confulté les
bienféances , que les Lacédémoniens , chez qui les
deux fexes fe baignoient pêle-mêle : 20. que les deux
bains chauds fe joignoient de fort près, afin qu'on
pût échauffer par un même fourneau , les vafes de
l'un & de l'autre bain : 30. que le milieu de ces bains
étoit occupé par un grand bafïin , qui recevoit l'eau
par divers tuyaux , & dans lequel on defeendoit par
le moyen de quelques degrés ; ce baffin étoit envi-
ronné d'une baluitrade , derrière laquelle régnoit une
efpece de corridor ^fchola , affez large , pour contenir
ceux qui attendoient que les premiers venus lortil-
fent du bain : j°. que les deux étuves , appellées la-
conicum & tepidarium , étoient jointes enfembîe : 6°.
que ces lieux étoient arrondis au compas, afin qu'ils
rectifient également à leur centre la force de la va-
peur chaude , qui tournoit & fe répandoit dans toute
leur cavité : 70. qu'ils avoient autant de largeur que
de hauteur jufqu'au commencement de la voûte , au
milieu de laquelle on laiffoit une ouverture pour
donner du jour , & on y lufpendoit avec des chaînes
un bouclier d'airain , qu'on hauffoit ou baiffoit à vo-
lonté , pour augmenter ou diminuer la chaleur ; 8°.
que le plancher de ces étuves étoit creux & fafpen-
du pour recevoir la chaleur de ïhypocaujle , qui étoit
un grand tourneau maçonné deffous , que l'on avoit
foin de remplir de bois & d'autres matières combuf-
tibles , & dont l'ardeur fe communiquoit aux étuves
à la faveur du vuide qu'on laiffoit fous leurs plan-
chers : 90. que ce fourneau fervoit non-feulement à
échauffer les deux étuves, mais auffi une autre cham-
bre appelles vafarium , lituée proche de ces mêmes
étuves & des bains chauds , ik dans laquelle étoient
trois grands vafes d'airain , appelles milliaria à caufe
de leur capacité ; l'un pour 1 eau chaude , l'autre pour
la tiède , & le troilîeme pour la froide. De ces vafes
partoient des tuyaux qui correlpondant aux bains ,
y portoient par le moyen d'un robinet l'eau , fuivant
les befoins de ceux qui fe baignoient.
A l'égard de l'arrangement ou dilpofition de ces
divers appartenons des bains , voici ce qu'on en fait :
on y voyoit d'abord un grand balîin ou \ ivier appelle
en grec Kc)-.vjjiC»(lf. à , en latin natatio & pi fana, qui oc-
cupoit le coté du nord , & où l'on pouvoit non-lculc-
ment le baigner, mais même nager très-commodé-
ment. Les bains des particuliers avoient quelquefois
de ces pifeines , comme il paroît par ceux de Pline &
de Ciceron. L'édifice des bains etoit ordinairement
Tome II,
B A I
!9
expofé au midi , & avoit une face très-étendue , dont
le milieu étoit occupé par Yhypocaufle, qui avoit à
droite & à gauche une fuite de quatre pièces fembla-
bles des deux côtés , & difpofées de manière qu'on
pouvoit paffer facilement des unes dans les autres»
Ces pièces nommées en général balnearia, étoient
celles que nous avons décrites ci-deffus. La falle du
bain chaud étoit une fois plus grande que les autres ,
à caufe du grand concours du peuple qui y abordoit,
& du long lejour qu'on y faifoit d'ordinaire.
Les anciens prenoient ordinairement le bain avant
fouper , & il n'y avoit que les voluptueux qui fe bai-
gnaffent à la fuite de ce repas. Au iortir du bain , ils
fe taifoient frotter d'huiles ou d'onguens parfumés
par des valets nommés alyptœ ou uncluarii. Les bains,
fi on en croit Pline , ne furent en ufage à Rome que
du tems de Pompée ; dès lors les édiles eurent loin
d'en faire conftruire plufieurs. Dion, dans la vie
d'Augufte , rapporte que Mécène fit bâtir le premier
bain public : mais Agrippa , dans l'année de Ion édi-
lité , en fît conitruire centfoixame & dix. A l'on exem-
ple, Néron, Vefpafien, Tite, Domitien, Severe ,
Gordien , Aurelien , Diocletien , & prefque tous les
empereurs , qui cherchèrent à fe rendre agréables au
peuple, firent bâtir des étuves & des bains avec le
marbre le plus précieux , & dans les règles de la plus
belle architecture , où ils prenoient plailir à fe bai-
gner avec le peuple : on prétend qu'il y avoit jufqu'à
800 de ces édifices répandus dans tous les quartiers
de Rome.
La principale règle des bains étoit d'abord de ne
les ouvrir jamais avant deux ou trois heures après
midi, enfuite ni avant le foleil levé, ni après le fo-
leil couché. Alexandre Severe permit pourtant qu'on
les tint ouverts la nuit dans les grandes chaleurs de
l'été, & ajouta même la libéralité à la complaifan-
ce , en foufniffant l'huile qui brûloit dans les lampes.
L'heure de l'ouverture des bains étoit annoncée au
fon d'une efpece de cloche : le prix qu'il falloit payer
pour entrer aux bains étoit tres-modique , ne montant
qu'à la quatrième partie d'un as , nommée quadrans ;
ce qui valoit à peu pies un iiard de notre monnoie.
Le bain gratuit étoit au nombre des largelles que les
empereurs taifoient au peuple à l'occaiion de quel-
que réjoùiffance publique : mais auffi dans les cala-
mités on avoit foin de lui retrancher cette commodi-
té , ainfi que le plailir des fpectaclcs. (G)
* Tout fe paffoit dans les bains avec modeftie : les
bains des femmes étoient entièrement iéparés de ceux
des hommes ; & ç'auroit été un crime , lî l'un des fe-
xes avoit paffé dans le bain de l'autre. La pudeur y
étoit gardée jufqu'à ce fcrupule , que même les en-
fans pubères ne fe baignoient jamais avecleurs pères,
ni les gendres avec leurs beaux-peres. Les gens qui fer-
voient dans chaque bain , étoient du lexe auquel le
bain étoit deitiné. Mais quand le luxe & la vie volup-
tueufe eurent banni la modeftie, ce que la débauche
fe fut gliffée dans toute la ville, les b.i:ns n'en furent
pas exempts. Les femmes s'y mêlèrent avec les hom-
mes , & il n'y eut plus de diitinftion ; pluueuj s perfon-
nes de l'un « l'autre (exe n'y alloient même que pour
fatisfaire leur vue , ou cacher leurs intrigi .
menoient des efclaves ou fervantes , pour u r< ei les
habits. Les maîtres des bains affectoient même d'en
avoir de plus belles, les uns que les autres » pour s .u-
tirer un plus grand nombre de chalaris.
Tout ce que les magiftrats purent faire d'abord,
ce fut de défendre à toutes perlbnnes de i-- tervirde
femmes ou de tilles pour garder lc> habits , ou pour
rendre les autres fervices aux /•..
notées d'infamie. Maisl'empereur Adrien défendit ab-
folumentce mélange d'hommes & de lemmesfousde
rigoureufes peines. Ma; - Uexandre Se\ ère
confirmèrent cette même loi ; 6c fous leur règne ,
Cij
ao BAI
les bains des hommes & ceux des femmes furent en-
core une fois féparés, & la modeftie y fut rétablie.
Les uftenciles ou inftrumens des tains , outre les
vafes propres à faire chauffer & à verfer l'eau , étoient
les baignoires, les étrilles. Fyfcr Baignoire,
Etrille.
Les bains particuliers , quoique moins vaftes que
les bains publics , étoient de la même forme , mais
fouvent plus magnifiques & plus commodes , ornés
de meubles précieux, de glaces, de marbres, d'or&
d'argent. On pouvoit s'y baigner à toute heure ; &
l'on rapporte des empereurs Commode & Galien ,
qu'ils prenoient le bain cinq ou fix fois le jour. Mém.
diCAcai. dis Belles Lettres , tomel. & III. (G)
* Parmi nous, les bains publics fur la rivière, ne font
autre chofe que de grands bateaux , appelles loue ,
faits de fapin, & couverts d'une greffe toile, autour
defquels il y a de petites échelles attachées par des
cordes , pour defcendre dans un endroit de la rivière
oii l'on trouve des pieux enfoncés d'efpace en efpa-
ce , qui foûtiennent ceux qui prennent le bain.
Nous appelions bains domejliques ceux que l'on pra-
tique dans la maifon des grands ou des particuliers :
ils fe prennent dans des baignoires de métal , dans
îefquelles l'eau eft amenée par des conduits de plomb
qui defcendent d'un réfervoir un peu élevé, rempli
de l'eau du ciel , ou par le fecours d'une pompe. Ces
tuyaux garnis de robinets , viennent, avant d'entrer
dans la baignoire, fe diftribuer dans une cuve placée
fur un fourneau , qui la tient dans un degré de cha-
leur convenable.
Ces bains font compofés d'un appartement diftri-
bué en plufieurs pièces: favoir, d'une anti-chambre
pour tenir les domeftiques pendant que le maître eft
au bain , d'une chambre à lit pour s'y coucher au for-
tir du bain, d'une falle oit eft placée la baignoire ,
d'un cabinet à foûpape ou d'une garderobe , d'un ca-
binet de toilette , d'une étuve pour fécher les linges
& chauffer l'eau , de dégagement, &c. Il eftaffez d'u-
fage de placer deux baignoires & deux lits dans ces
appartemens , ces bains ; le prenant ordinairement de
compagnie, lorfqu'oneft en fanté.
Ces bains doivent avoir un petit jardin particidier
pour faire prendre de l'exercice, fans être vu, aux
perfonnes qui prennent ces bains plutôt par indifpo-
îition que par propreté.
Ces appartemens font ordinairement décorés de
lambris , de peintures , dé dorure , & de glaces.
C'eft dans cette occafion qu'un Architecte qui a du
génie, peut donner carrière à fon imagination, ces
ibrtes de pièces n'étant pas fufceptibles de la fé-
vérité des règles de l'art. Au contraire j'eftime que
c'eft dans ces fortes de pièces feulement qu'il con-
vient de répandre de l'élégance & de l'enjouement :
dans l'ordonnance de la décoration de ces petits ap-
partemens , les Vateaux , les Lancrets , peuvent y
donner le ton , auflî-bien que les ornemens arabel-
ques, les plans de Chinois , les magots, &c. Tout eft
de leur reffort , pourvu qu'il y foit ajufté avec goût
& dilcemement. (P)
Bain de fanté ou de propreté ( en Médecine. ) Les
Médecins toujours attentifs à chercher des fecours
contre les maladies , remarquèrent les bons effets
qu'il produifoit, & le mirent au nombre de leurs
remèdes.
On ordonna le bain de différentes façons, c'eft-à-
dire , qu'il y en eut de chauds &: de froids , de géné-
raux & de particuliers.
Dans les bains généraux , foit chauds ou froids ,
le corps eft plongé jufqu'au-deffus des épaules; dans
les particuliers, on ne trempe que la moitié du corps,
ce qui s'appelle demi-bain. Celui oii on ne trempe que
les pies & une partie des jambes, s'appelle pédiluve.
On peut aulîi rapporter aux bains particuliers les di-
B A I
verfes efpeces de fomentations , & les douches. V~oyt\
Fomentation & Douche.
Les différentes qualités de l'eau, que l'on employé
pour le bain, en changent la propriété. Dans les cas
où on a intention de ramollir les libres , & de procu-
rer quelque relâchement dans toute l'habitude du
corps , le bain chaud d'eau douce fimple , ou mêlée
avec desmédicamensémolliens, fatisfera à cette in-
dication.
Quand il eft queftion de refferrer la texture des
fibres, de leur rendre le reflort qu'elles auront perdu,
rien de plus convenable que le bain d'eau froide ;
je déduirai par la fuite les railons de cette diverfité.
On a encore diviié les bains en domeftiques , qui
font ceux que l'on prend chez foi ou chez les Bai-
gneurs, & que l'on compofe de plufieurs façons; il
y en a de lait, de décodions de plantes émollientes,
d'eau de fon , &c. en bains d'eaux minérales , qui font
ou thermales ou acidulés , dont les effets font diffé-
rens , félon les principes que ces eaux contiennent :
en bains d'eau de rivière , de fleuve ou de mer ; & en
bains fecs , tels que ceux d'efprit de vin ; ceux de va-
peurs du cinabre , que l'on nomme fumigation. Voye^
Fumigation: ceux de marc de raifm, de cendres ,
de fels , de fable , &c. auxquels on peut encore join-
dre l'application des boues ou bourbes fur tout le
corps, qui fe pratique en quelques endroits.
Pour expliquer l'aftion des bains, il faut d'abord
pofer pour principe que l'eau qui en fait la bafe, pé-
nètre par fa fluidité prefque tous les corps , & fur-
tout ceux dont la texture eft aflez lâche , pour que
l'eau puiffe trouver entre les fibres dont ils font
compofés , des interftices que l'on appelle pores.
Koye{ Pore.
Le corps humain eft un de ceux dans lefquels on
en remarque en plus grand nombre ; la déperdition
de fubftance à laquelle il eft fui et par la tranfpira-
tion , prouve affez ce que j'avance. Lorfque le corps
fe trouve expofé à un certain volume d'eau capable
de le preffer de tous les côtés, & dont chaque goutte
a une pefanteur naturelle , elle s'inlinue dans chacun
de fes interftices , dont elle augmente la capacité par
le relâchement que procure l'on humidité : parvenue
après un certain tems julqu'à l'intérieur du corps ,
elle fe mêle avec le lang ; aidée d'ailleurs par les
contractions réitérées du cœur , qui augmentent à
proportion de la preffion, elle détruit la cohéfion trop
forte des molécules du fang , le fait circuler avec
plus de facilité, & le rend plus propre aux fecrétions ;
augmente celle des elprits animaux , fi néceffaire
pour l'entretien des forces & l'exécution de toutes
les fonctions , en même tems qu'elle met le fang en
état de fe dépouiller des parties nuifibles que fon
trop grand épaifliffement , ou fa trop grande lenteur
à circuler , y avoient amaffées.
Ces principes pofés , il ne fera pas difficile de dé-
duire les railons des phénorr :nes qu'on oblèrve , fé-
lon le degré de chaleur ou de froid des eaux qu'on
employé , & la différence des matières dont elles font
imprégnées. En augmentant la chaleur de l'eau fim-
ple , on lui donne un degré d'élafticité dont elle eft
redevable aux parties ignées qu'elle contient , & qui
la rendent plus pénétrante. Lorlqu'elle fe trouve char-
gée de parties ferrugineufes , &: chaudes en même
tems , fon reffort & fon poids font augmentées en rai-
fon réciproque de la chaleur, & de la quantité de fer
dont elle eft chargée , & qui la rend propre à guérir
plufieurs maladies qui ont pour caufe l'embarras du
lang dans fes couloirs. Si , au contraire , on employé
l'eau froide , les effets en feront différens ; car quoi-
que la fluidité & l'humidité foient la même , le froid
loin de dilater les pores de la peau , les refferre en
quelque forte , empêche une trop grande évacuation
par la tranlpiration , porte le calme dans la circula-
B A I
tîon du fang , lorfqu'elle eft déréglée , & détruit par
ce moyen les caules des maladies occafionnées par
ce dérangement. Willis nous en donne un exemple
dans ion traité de la Phrenéfie , à l'occafion d'une fille
qui tut guérie de cette maladie par un feul bain froid
que l'on lui Ht prendre : cette malade étoit dans cet
état depuis plufieurs jours ; les laignées , les délayans,
les amples boiffons émulfionnées , &c. n'avoient pas
pu diminuer la fièvre violente dont elle étoit atta-
quée , & la ibif qui la dévoroit. Le bain d'eau limple
pris dans la rivière, pendant un quart-d'heure, calma
tous les accidens , lui procura un lommeil tranquille,
& elle fut guérie fans avoir befoin d'autres remèdes.
On trouve dans la pratique plufieurs exemples de ces
guérifons miraculeules arrivées par hafard ; car iou-
vent des gens attaqués de phrenéfie fe font jettes
d'eux-mêmes dans des fontaines ou baffins, & ont été
guéris.
Ce que l'on peut encore afîurer , c'eft que l'ufage
des bains de rivière , pendant les chaleurs de l'été ,
eit un fur préfervatif contre les maladies qui régnent
ordinairement dans cette faifon.
Il relie à préfent a chercher la raifon des effets
du bain de mer , que l'on regarde comme le remède
le plus falutaire contre la rage , & que je tâcherai de
déduire des mêmes principes : ce qui ne fera pas im-
pofîible en faifant attention d'abord , que la fluidité
& l'humidité que nous trouvons dans l'eau commii7
ne, fe rencontre dans l'eau de mer ; que fa pefanteur
eft augmentée par le fel qu'elle contient , & qui lui
donne une qualité beaucoup plus pénétrante ; enfin,
que la terreur du malade , née de l'appareil & du
danger où il fe trouve lorlqu'on le plonge , fait un
contrafle capable de rétablir le dérèglement de l'ima-
gination , qui eft auffi dérangée dans ce cas , que dans
la phrenéfie la plus violente : d'ailleurs , on prend la
précaution d'aller à la mer pour y être plongé , lorl-
que l'on a le foupçon d'être attaqué de la rage , fans
en avoir de certitude. Voye^ Rage.
On conçoit aifément que les bains de vapeurs pé-
nètrent la texture de la peau , & parviennent par les
pores jufques à l'intérieur , où elles occasionnent à
peu près les mêmes effets que fi l'on avoit appliqué
les médicamens dont on les tire ; c'eft ce que l'on
éprouve de la part de l'efprit-de-vin , de celui de va-
peurs de cinabre , qui excitent même quelquefois la
îalivation, effet que produifent les frictions mercuriel-
les ; enfin celui de marc de raiiin en pénétrant , foit
par fa chaleur , foit par les parties fpiritueufes qu'il
contient , donne de nouveau aux fibres le reflort qu'-
elles avoient perdu , & les rétablit dans leur état na-
turel.
On doit prendre les précautions fuivantes pour ti-
rer quelque fruit de l'ufage du bain , de quelque ef-
pece que ce foit : il faut fe faire faigner & purger ,
le prendre le matin à jeun , ou fi c'eft le foir, quatre
heures après le repas , afin que la digeftion des ali-
mens foit entièrement finie ; fe repofer , ou ne faire
qu'un exercice très-moderé après que l'on eft forti
du bain; enfin ne fe livrer à aucun excès pondant tout
le tems que l'on le prendra , & dans quelque faifon
que ce foit , ne point fe baigner lorlque l'on eft fati-
gué par quelque exercice violent. V. Eaux,Eavx
THERMALES, EAUX ACIDULES ou FROIDES. (jV)
Bain , en Chimie , fe dit d'une chaleur modérée
par un intermède mis entre le feu & la matière fur
laquelle on opère , & ce bain eft différemment nom-
mé , félon les différens intermèdes qu'on y employé.
C'elt pourquoi on dit bain de mer , ou par corrup-
tion bain-marie , lorlque le vafe qui contient la ma-
tière fur laquelle on opère , eft pofé clans un autre
vaiiîeau plein d'eau, de forte que le vafe foit entou-
ré d'eau,& que ie vaiffeau qui contient l'eau, foit im-
médiatement pofé fur le feu. Voye^no>
BAI il
mie. On pourroit auffi employer d'autres fluides que
1 eau , comme l'huile , le mercure même , pour tranf-
mettre différentes chaleurs , ce qui feroit différentes
efpeces de bain-marie.
On dit bain de vapeur, lorfque le vafe qui contient
la matière eft feulement expoie à la vapeur de l'eau
qui eft fur le feu. Voye^ nos figures. Le bain de vapeur
dans un vaiffeau ouvert , ou qui laifle échapper la
vapeur qui s'exhale de l'eau , eft moins fort , c'eft-à-
dire , donne une chaleur plus douce que ne la donne
le bain-marie de l'eau bouillante : mais fi le vaiffeau
eft fermé exactement , & qu'on pouffe le feu deffous,
il devient plus fort que le bain-marie ; il tient alors
de la force de la machine de Papin , ce qui fait voir
qu'on peut taire un bain de vapeur très-fort , au lieu
que le bain-marie ne peut avoir que les différens de-
grés de chaleur de l'eau tiède , de l'eau chaude , de
l'eau frémiffante & de l'eau bouillante. Il eft vrai
que la chaleur de l'eau bouillante n'eft point une cha-
leur invariable ; elle eft différente félon que l'eau eft
différente , & fuivant la différente pefanteur de l'air.
L'eau bouillante qui tient en diffolution des fels , eft
plus chaude qu'une eau bouillante qui feroit fimple
& pure. Foye{ Digestoire.
La chaleur de l'eau bouillante eft plus grande quand
le baromètre eft plus élevé , c'eft-à-dire , quand l'air
eft plus pefant ; & elle eft moindre quand le baromè-
tre eft plus bas , c'eft-à-dire , quand l'air eft plus lé-
ger. L'eau bouillante , fur le fomir.et d'une haute
montagne , a moins de chaleur que l'eau bouillante
dans un fond , parce que plus l'air eft pefant , & plus
il prefîè fur la lùrface de l'eau , & par conféquent
plus il s'oppofe à l'échappement des parties de feu qui
font en mouvement dans l'eau, 6V qui la traverfent.
C'eft pourquoi la plus grande chaleur que puuTe avoir
l'eau , n'eft pas dans le tems qu'elle bout ie plus fort,
c'eft dans le premier inftant qu'elle commence à bouil-
lir. Ces connoiffances ne font pas inutiles : il tant y
faire attention pour certaines expériences.
On dit bain de fable ou de cendre , lorf qu'au lieu
d'eau , on met du fable ou de la cendre. Voyç{ nos
figures de Chimie.
Bains vaporeux, font termes de Médecine, qui ne figni-
fient autre chofe que ce qu'on entend en Chimie par
bain de vapeur. Le bain vaporeux eft une eipece d'é-
tuve qui fe fait en expolant le malade à la vapeur
chaude d'une eau médicinale , ou de décoctions d'her-
bes appropriées à la maladie qu'on veut guérir. (Jf)
Bain , en Chimie & à la Monnoie ; on dit qu'un
métal eft en bain , lorfque le feu i'a mis en état de
fluidité : c'eft alors qu'on le remue , ou qu'on le braf-
fe avec des cuillieres de fer, fi c'eft argent ou cuivre;
pour l'or, il ne le brade point avec le fer, mais avec
une efpece de quille faite de terre à creufet , Cv cuite.
Foyei Brasser , Brassoir , Quille.
Bain , eft un terme 'génétique , il le prend chez
un grand nombre d'Artiftes , & pour les Ûque . I
pour les vaiffeaux dans lefquels ils donnent qi
préparations à leurs o
Bain ou BouiN , terme ."Architecture ; on d
çonner à bain ou àbouin de mortier , lorfqu'on polo les
pierres, qu'on jette les n juons, Cv qu on ai
pavés en plein mortier. (P)
Bain, mettre a bain , en Maçonnerie, c'eft employer
à la liaifon des parties d
quantité de plâtre qu'il eit poffible ; on ie l
mot bain, parce qu'alors les pierres ou moellons .ont
entièrement couverts & em'uits de tout cote.
Bain , c eft ainfi que les Pluma-fiers appellent une
poelle de cuivre battu dans laquelle ils plongent ou
jettent les plumes qu'ils veulent mettre en couleur.
Ils donnent auffi ce nom à la matière colorante con-
tenue dans la poelle.
Bain, ie dit che^ les Teinturiers , ou de la cuve
il B A I
-qui contient les ingrédiens dans lefquels on met les
étoffes pour les colorer , ou des ingrédiens même con-
tenus dans la cuve ; ainlï l'on dit mettre au bain , &
l'on dit auffi bain d'alun , bain de cochenille , &c.
Bain ( chevaliers du ) ( Hijl. mod. ) ordre militaire
intitulé par Richard II. roi d'Angleterre , qui en fixa
le nombre à quatre , ce qui n'empêcha pas Henri IV.
fonfucceffeur de l'augmenter de quarante-deux ; leur
deviié étoit très in uno , trois en un feul , pour ligni-
fier les trois vertus théologales. Leur coutume étoit
<le lé baigner avant que de recevoir les éperons d'or:
mais cela ne s'obiérva que dans le commencement ,
& s'abolit enfuite peu à peu , quoique le bain fût l'o-
rigine du nom de ces chevaliers , & que leurs ftatuts
portaffent que c 'étoit pour acquérir une pureté de cœur
& avoir Vame monde , c'eft- à-dire pure. L'ordre de
chevaliers du bain ne le confère prefque jamais , fi ce
n'eft au couronnement des rois , ou bien à l'inftalla-
tion d'un prince de Galles, ou d'un duc d'Yorck. Ils
portent un ruban rouge en baudrier. Camden & d'au-
tres écrivains diiént que Henri IV. en fùtl'inftituteur
en 1399 , à cette occafion : ce prince étant dans le
bain , un chevalier lui dit que deux veuves étoient
venues lui demander jultice ; & dans ce moment il
fauta hors du bain en s'écriant que la jufiiee envers fes
fujeis étoit un devoir préférable au plaifir de fe baigner ,
& enfuite il créa un ordre des chevaliers du bain : ce-
pendant quelques auteurs Ibûtiennent crue cet ordre
exiftoit long-tems avant Henri IV. & le font remon-
ter jufqu'au tems des Saxons. Ce qu'il y a de certain ,
c'elt que le bain , dans la création des chevaliers ,
avoit été long - tems auparavant en ulage dans le
.royaume de France , quoiqu'il n'y eût point d'ordre
de chevaliers du bain.
L'ordre des chevaliers du bain , après avoir été com-
me enléveli pendant bien des années, commença de
renaître fous le règne de Georges premier , qui en
créa folennellement un grand nombre. (G)
BAJON, f. m. on appelle ainfi fur les rivières la
plus haute des planches ou des barres du gouvernail
d'un bateau foncet. (Z)
* BAI ONE. Voyei Bayone.
BAlONE,dite Baionade Gali^ia (Géog. anc. & mod.')
ville maritime d'Efpagne , dans la Galice , à l'em-
bouchure du Minho. Quelques Géographes la pren-
nent pour les Aqucz Celina de Ptolomée ; d'autres
veulent que ce foit Orenfe , fur la même rivière que
Baione : fa long, eft g. & fa lat. 41. 64.
BAJOYERS ou JOUILLIERES, f. f. pi. (Hydraul.)
font les ailes de maçonnerie qui revêtiffent l'efpace
ou la chambre d'une éclufe fermée aux deux bouts
par des portes ou des vannes que l'on levé à l'aide
de cables qui filent fur un treuil , que plulîeurs hom-
mes maneuvrent.
On pratique le long des bajoyers , des contreforts ,
des enclaves pour loger les portes quand on les ou-
vre , & des pertuis pour communiquer l'eau d'une
éclufe des deux côtés , fans être obligé d'ouvrir fes
portes. (K)
* On donne auffi, fur les rivières, le nom de ba-
joyers aux bords d'une rivière , près les culées d'un
pont.
B AJOIRE , f. f. à la Monnoit , c'eft une pièce , ou
médaille qui a pour effigie deux têtes de profil , qui
femblent être appuyées l'une fur l'autre , telle que
l'on en voit de Louis & de Carloman , de Henri IV
tk de Marie de Medicis.
BAJOUES f. f. pi. ou COUSSINETS, (Jrtsmé-
chaniques. ) ce font des éminences ou boffages , qui
tiennent aux jumelles d'une machine , telle que le
tire-plomb dont les Vitriers fe fervent pour fondre le
plomb qu'ils employent pour les vitres. Voye^ Tire-
plomb.
B AIRAM , f. m. (Hijl. mod.) nom donné à la gran-
B A I
de fête annuelle des Mahométans. Voye^ Fête , &c.
Quelques Auteurs écrivent ce mot plus conformé-
ment à l'orthographe orientale beiram; c'eft originai-
rement un mot Turc , qui fignifîe à la lettre un jour
de fête , ou unejolennité. C'elt la pâque des Turcs.
Les Mahométans ont deux bairams , le grand & le
petit , que Scaliger , Erpenius , Ricaut , Hyde, Char-
din , Bobovius , & d'autres écrivains Européens ,
prennent ordinairement l'un pour l'autre , donnant à
ce que les Turcs appellent le petit bairam , le nom de
grand; & au contraire. Le petit bairam dure trois jours,
pendant lefquels tout travail ceffe , & l'on s'envoye
des préfens l'un à l'autre avec beaucoup de marques
de joie. Si le lendemain du ramadhan fe trouve fi nébu-
leux & couvert qu'on ne puiffe pas voir la nouvelle
lune , on remet le bairam au lendemain : il commence
ce jour-là , quand même la lune leroit encore cachée ,
& il eft annoncé par des décharges de canon au fé-
rail , & au lbn des tambours & des trompettes dans
les places publiques. En célébrant cette fête , les
Turcs font dans leurs mofquées quantité de cérémo-
nies , ou plutôt de iîmagrées bifarres , & finiffent par
une prière folennelle contre les infidèles , dans la-
quelle ils demandent que les princes Chrétiens foient
extirpés ; qu'ils s'arment les uns contre les autres, &c
qu'ds donnent ainfi occalîon à la loi Mahométane
de s'étendre. On fe pardonne mutuellement les inju-
res , & l'on s'embraffe en dhant , Dieu te donne la
bonne pique.
Autant la rigueur du ramadham a été extrême ,
autant la débauche & l'intempérance règne pendant
les jours du bairam : ce ne font que feltins & réjoùif-
iances , tant dans le férail où le Sultan admet les
grands de l'empire à lui baifer la main , & marche
avec eux en pompe jufqu'à la grande molquée , que
dans la ville , où tous les Turcs jufqu'aux plus pau-
vres , tuent des moutons , auxquels ils donnent le
nom & agneau paj'cal , non fur le même fondement
que les'Juifs , mais en mémoire du facrifice d'Abra-
ham , dans lequel , difent-ils , l'ange Gabriel apporta
du ciel un mouton noir, qui depuis très - long - tems
avoit été nourri en paradis , & qu'il mit en la place
d'Ifaac. Voyei Ramadhan. ( G )
BAISÉ , bout baifé. On donne , dans les manufac-
tures où Con tire la foie , le nom de bout baifé à une
portion de fils de foie , compofée de deux fils ou da-
vantage , qui fe font appliqués l'un fur l'autre , félon
leur longueur pendant le tirage , & fe font collés en-
femble en fe fechant. Il eft très -important d'éviter
ce défaut. Une foie où les baifemens de fils auroient
été fréquens, fe devideroit avec peine. Voye-^ l'arti-
cle Tirage de soie.
Baisé , adj. ( Pajfement. ) fe dit du tiffu d'un ou-
vrage qui a été peu frappé par le battant , & où la
trame n'eft pas ferrée. Le baifé elt pofitivement le
contraire de frappé. Voye^ Frappe.
BAISE-MAIN , f. m. ( Hijl. anc. & mod. ) marque
d'honneur ou de reipett prefqu'univerfellement ré-
pandue par toute la terre , & qui a été également par-
tagée entre la religion & la fociété. Dès les tems les
plus reculés , on faluoit le foleil , la lune , & les étoi-
les en baifant la main. Job fe défend de cette iùperf-
tition : fi vidi folem autlunam & ofculatusfum
manum meam ore meo. On rendoit le même honneur
à Baal. Lucien , après avoir parlé des différentes for-
tes de facrifices que les perfonnes riches offroient aux
dieux , ajoute que les pauvres les adoroient par de
fimples baijé-mains. Pline de Ion tems mettoit cette
même coutume au nombre des ufages dont on igno-
roit l'origine : In adorando , dit-il , dexteram ad ofeulum
referimus. Dans l'Eglife même, les évêques ce les offi-
cians donnent leur main à baifer aux autres miniftres
qui les fervent à l'autel.
Dans la fociété , faction de baifer la main a toû-
B A I
jours été regardée comme un formulaire muet, pour
afTùrer les reconciliations , demander des grâces , re-
mercier de celles qu'on a reçues , marquer fa véné-
ration à les fupérieurs. Dans Homère , le vieux Priam
baifc les mains d'Achille , lorfqu'il le conjure de lui
rendre le corps de fbn fils Hedlor. Chez les Romains
les tribuns , les confuls , les dictateurs donnoient leur
main à baifer à leurs inférieurs , ce que ceux-ci appel-
loient acccdcre admanum. Sous les empereurs , cette
conduite devint un devoir ellentiel, même pour les
grands ; car les courtifans d'un rang inférieur étoient
obligés de le contenter d'adorer la pourpre en fe met-
tant à genoux , pour toucher la robe du prince avec
la main droite qu'ils portoientenfuite à leur bouche :
honneur qui ne fut enfuite accordé qu'aux confuls
& aux premiers officiers de l'Empire , les autres fe
contentant de faluer le prince de loin en portant la
main à la bouche , comme on le pratiquoit en ado-
rant les dieux.
La coutume de baifer la main du prince , eft en
ufage dans prefque toutes les cours de l'Europe , &
fur-toutenEfpagne, où dans les grandes cérémonies
les grands font admis à baifer la main du roi. Dap-
per , dans fon Afrique , afiure que les Nègres font en
pofleflion de témoigner leurs refpefts pour leurs prin-
ces ou chefs par des baije-mains. Et Fernand Cortez
trouva cette pratique établie au Mexique , où plus
de mille feigneurs vinrent le faluer en touchant d'a-
bord la terre avec leurs mains , & les portant en-
fuite à leur bouche. ( G )
BAISE -MAIN, en Droit, fignifie Y offrande qu'on
donne aux curés. Les curés de Paris , dit-on en ce fens ,
n'ont point la dixme : ils n'ont que le baife-main. Cette
expreflion vient de ce qu'autrefois en fe préfentant
à l'offrande , on baifoit la main du célébrant. ( i7)
BAISER , terme de Géométrie. On dit que deux cour-
bes , ou deux branches de courbes fe baifent , lorf-
qu'elles fe touchent en tournant leurs concavités vers
le même côté ; c'eft-à-dire , de manière que la conca-
vité de l'une regarde la convexité de l'autre : mais
fi l'une tourne fa concavité d'un côté , Si. l'autre d'un
autre côté , ou ce qui revient au même , fi les deux
convexités fe regardent , alors on dit fimplement
qu'elles fe touchent. Ainfi le point baijant &c le point
touchant font différens.
On employé plus particulièrement le terme de
baifer , pour exprimer le contadl de deux courbes qui
ont la même courbure au point de contacï , c'eft-à-
dire , le même rayon de développée. Le baifement
s'appelle encore alors ofculation. y. Osculation ,
Développée, Courbure, &c (O)
* B AISSAN , ( Géog. ) ville d'Afrique dans la Bar-
barie, à feize mille de Tripoli.
* BAISSER , abaiffer, ( Gramm. ) Baiffer {q dit des
objets qu'on veut placer plus bas , dont on a diminué
la hauteur, & de certains mouvemens du corps. On
baifft une poutre , on baiffe les yeux. Abaiffer fe dit
des chofes faites pour en couvrir d'autres ; abaifferlc
deflus d'une caflette ; abaiffer les paupières. Exhauf-
fer, élever , font les oppofés de baiffer; lever, relever,
font les oppofés d 'abaiffer. Baiffer eft quelquefois neu-
tre ; abaiffer ne l'eft jamais. On baiffe en diminuant ;
on le baiffe en fe courbant ; on s'abaiffe en s'humi-
liant ; les rivières baiffent ; les grandes perfonnes font
obligées de fe baiffer pour palier par des endroits
moins élevés qu'eux ; il eft quelquefois dangereux de
s' abaiffer. Synom. Franc.
Baisser les hanches, fe dit , en Manège , du che-
val. Voyc^ Hanches. (V)
Baisser la lance. Voye{ LANCE. ( V)
* Baisser la vigne , ( Agriculture. ) c'eft lier les
branches taillées à l'échalas.
BA1SSIERE , f. f. ( Vinaigrier. ) c'eft ainfi qu'on
appelle cette liqueur trouble & chargée , qui couvre
B A K
n
la lie de PépaiiTeur de quelques lignes , plus ou moins,
lorfqu'un tonneau d'huile ou de liqueur fermentée ,
quelle qu'elle foit , tire à fa fin. On dit baifjhre de
vin , de cidre , de bierre.
BAISSOIRS , f. m. pi. c'eft le nom qu'on donne
dans les Salines , aux réfervoirs ou magafins d'eau.
Le bâti en eft de bois de chêne & de madriers fort
épais , contenus par de pareilles pièces de chêne qui
leur font adoffées par le milieu. La fuperficie de ces
magafins eft garnie & liée de poutres auffi de chêne ,
d'un pié d'épaifleur, & placées à un pic de diftance
les unes des autres. Les planches & madriers qui les
compofent , font garnis dans leurs joints de chan-
touilles de fer , de moufle & d'étoupe, pouffées à force
avec le cifeau , & goudronnées. Le bâti eft élevé au-
defliis du niveau des poelles. Ce magafin d'eau eft di-
vifé en deux baiffoirs , ou parties inégales , qui abreu-
vent à Moyenvic cinq poelles par dix conduits. Voyt^
la quantité d'eau & le toifé de ces baij/oirs , à l'aiticle
Saline. Elles font élevées au-deflus du niveau des
poelles, & fupportées par des murs d'appui , diftans
les uns des autres de trois pies ou environ ; ce qui
en affûre la folidité. Voye^ Planche 1. des Salines ;
8 , 8 , les auges qui conduilent les eaux aux baijjoirs.
BAJULE , Bajulus , (Hift. anc.~) nom d'un magif-
trat du bas Empire. On croit que c'étoit le nom qu'on
donnoit aux perfonnes chargées de l'éducation du
préfomptif héritier de la couronne dans l'empire de
Conftantinople ; & l'on tire ce mot du Latin kaju-
lart , porter ; comme pour lignifier que les inftitu-
teurs de ce prince l'avoient porté entre leurs bras , &
on en diftinguoit de plufieurs degrés. Le précepteur
portoit le titre de grand bajule , & celui de bajule fim-
plement étoit donné aux foûprécepteurs. Si l'expref-
fion n'étoit pas noble , elle étoit du moins énergique
pour infinuer que l'éducation d'un prince eft un tar-
deau bien redoutable. (<? )
Bajule, {Hijl. mod. ) miniftre d'état chargé du
poids des affaires. Notre hiftoire remarque que Char-
lemagne donna Arnoul pour bajule , c'eft-à-dire pour
miniftre , à fon fils Louis d'Aquitaine ; & les Italiens
entendent par bajule d'un royaume , ce que les An-
glois nomment protecteur , ce ce que nous appelions
régent du royaume dans une minorité. ( G )
B AI VE , f. m. ( Hijl. mod. ) taux dieu des Lapons
idolâtres , qu'ils adorent comme l'auteur de la lu-
mière & de la chaleur. On dit communément que
c'eft le foleil ; d'autres croyent que c'eft le feu ; 6c
quelques-uns rapportent qu'autrefois parmi ces peu-
ples, le grand dieu Thor étoit appelle Thiermes ou
Aijke, quand ils l'invoquoient pour la conlervation
de leur vie , & pour être défendus contre les inllil-
tes des démons ; mais qu'il étoit nommé Baive , lorf-
qu'ils lui demandoient de la lumière & de la chaleur.
Ces idolâtres n'ont aucune figure particulière de ce
dieu , foit parce qu'il eft vifible de lui-même , ou plu-
tôt parce que félon les plus intelligens dans les n\ i-
tercs de cette fupcrftition , Thor & Baive ne font
qu'une même divinité , adorée fous différens afpefts.
Scheffer, hijl. de Laponie. (<?)
* BAKAN , ( Géog. ) ville de Perfe dans le Chir-
van , à l'extrémité du golfe de Guillan fur la mer
Cafpienne. Long. 8$. lat. 40. 20.
* BAKINGLE , ( Géog. ) l'une des Philippines
dans l'océan de la Chine, elle â. douze ou quinze
lieues de tour.
BAKISCH. Voyei Bacar.
* BALAATH ou BAALATH, (Géog./ainte.) ville
de Paleftine dans la tribu de Dan.
BALADIN , f. m. danftur farceur , bouffon , qui en
danfant, en parlant ou en agiflant , fait des pollures
de bas comique. Le bon goût lémbloit avoir banni des
fpeâacles de France ces fortes de caractères , qui y
étaient autrefois en ufage. L'opéra comique les y
*4
BAL
avoit fait revivre. La fagefle du gouvernement en
aboliflant ce fpe&acle , auffi dangereux pour les
mœurs que préjudiciable au progrès & à la perfec-
tion du goût , les a fans doute bannis pour jamais.
Voye[ Opéra comique. (5)
BALADOIRE , adj. danfe baladoire , il le décline :
ce font les danfes contre lefquelles les faints canons,
les Pères de l'Eglife & la difcipline eccléliaftique fe
font élevés avec tant de force : les Payens mêmes
réprouvoient ces danfes licencieufes. Les danleurs &
les danfeufes les exécutoient avec les pas & les geftes
les plus indécens. Elles étoient en ufage les premiers
jours de Tan &: le premier jour de Mai. foy. Danse.
Le pape Zacharie en 744 fit un décret pour les
abolir , ainfi que toutes les danfes qui fe taifoient
fous prétexte de la danle facrée.
Il y a plufieurs ordonnances de nos Rois qui les dé-
fendent , comme tendantes à la corruption totale
des moeurs. Recueil tTédits , ordonnances & déclara-
tions des Rois de France. (5)
* BALAGANSKOI , ( Géog. ) ville des Moscovi-
tes dans la Sibérie , partie de la grande Tartarie :
elle eft fur la rivière d'Angara , au 1 14. degré de Ion-
git. & au à O • de lat.
* BALAGNE ( la ) Géog. petite contrée fepten-
trionale de l'île de Corfe : Calvi en eft la capitale.
* BALAGUATE , ou BALAGATE , province
d'Afie au Mogol : Aurengabad en eft la capitale.
* BALAGUER , ( Géog. ) ville d'Efpagne dans la
Catalogne furlaSegre. Long. 18. zS.lat. 41.38.
* BALAI , f. m. en général , infiniment deftiné
principalement à ramafler des ordures éparfes , & à
en nettoyer les corps ou les lieux. Les balais domef-
tiques font faits, ou de petites branches de bou-
leau & de genêt attachées avec trois liens d'oiier ou
de châtaigner à l'extrémité d'un gros manche de bois
long & rond ; ou de joncs ficelles & fixés fur le man-
che avec un clou ; on les poifle fur la ficelle quand
ils doivent fcrvir aux cochers & palfreniers ; ou de
barbe de rofeaux ; ou de plumes , ou de crins , ou
poils de fangliers collés avec de la poix de Bour-
gogne dans une large patte de bois percée de plufieurs
trous, & emmanchée d'un long bâton placé perpen-
diculairement au milieu de la pâte. Ce font des Bû-
cherons qui font les premiers , & les Vergetiers qui
font les féconds. Les balais de bouleau fervent à net-
toyer les cours , les cuilines , les rues , & tous les en-
droits oii il s'amafte de grofles ordures. Les balais de
crin ou de poil ne s'employent que dans les appar-
temens frottés , où il fe fait plus de pouffiere que d'or-
dure. Les balais de plumes , félon que le manche en
eft court ou long , retiennent le nom de balai, ou
s'appellent houjfoirs. Les balais de plumes fervent
pour les glaces ôc les meubles , & ce font auffi les
.Vergetiers qui les font.
Les Orfèvres greffiers donnent le nom de balai à
un vieux linge attaché au bout d'un bâton qui leur
fert à nettoyer l'enclume.
Il y a encore d'autre fortes de balais : mais l'ufage
& la forme en font fi connus, qu'il feroit inutile d'en
faire mention plus au long.
BALAI du Ciel , en Marine , c'eft le vent de nord-
eft , qu'on appelle ainli à caufe qu'il nettoyé le ciel de
nuages. (-Z)
BALAI , ( Chirurgie. ) broj/cs ou vergettes de I'efto-
mac, inftrumentdont on peut fe fervir fort utilement
pour repoufler quelques corps étrangers arrêtés dans
î'œfophage , les retirer s'il eft poffible , ou changer
leur mauvaife détermination en une meilleure.
Cet infiniment eft compofé d'un petit faifeeau de
foies de cochon , les plus molles & les plus fouples ,
attachées à une tige de fil de fer ou de léton flexible.
Voye^ Plan. XXVIll. fig. 2. il a été inventé pour
balayer i'eftomac , ôc provoquer le vomillement.
BAL
Pour en faire ufage , on fait avaller au malade un
verre d'eau chaude , afin de délayer les mucofités
glaireufes qui féjournent dans I'eftomac ; on trempe
le petit balai dans quelque liqueur convenable , on
l'introduit dans I'œfophage , & on le conduit douce-
ment & avec précaution jufque dans I'eftomac ; on
lui fait faire des mouvemens en divers fens de haut
en bas & de bas en haut , comme on fait au pifton
d'une feringue ; puis on retire tout-à-fait l'inftrument:
le malade rejette la liqueur qu'il a bûe , &c les hu-
meurs que le balai a détachées des parois de I'efto-
mac.
Les Médecins étrangers qui fe fervent de cet inf-
trument, recommandent de réitérer cette opération
de tems en tems : ils prétendent que ce remède, qu'ils
regardent comme excellent & iupérieur à tous les
purgatifs , eft capable i'eul de conduire les hommes à
une extrême vieillefle , fi on le répète d'abord toutes
les femaines , puis tous les quinze jours , & enfin ré-
gulièrement tous les mois. Ces belles promefles n'ont
encore furpris la bonne foi de perfonne en France.
M. Houftet , membre de l'Académie royale de Chi-
rurgie , a vu en Allemagne un homme qui fe fervoit
de cet initrument pour gagner de quoi vivre : il fe
l'introduifoit dans I'eftomac ; il le tournoit en diver-
fes manières , comme font les Cabaretiers lorfqu'ils
rincent leurs bouteilles avec leur goupillon ; cet hom-
me le retiroit enfuite , tk. rejettoit par le vomiffement
la liqueur qu'il bûvoit auparavant. ( F)
Balai , f. m. c'eft ainfi qu'on nomme en Faucon*
r.erie la queue de l'ôifeau.
BALAIEURS PUBLICS , ( Police. ) gens établis
par la police pour le nettoyement des places & des
marchés. Voye^ Placier.
BALAIEUR d'un navire , ( terme de Marine. ) c'eft
celui qui eft chargé de le tenir net.
BALAIS , ( HÏJI. nat. ) rubis balais , rubinus balaf-
fius , pierre précieuiê mêlée de rouge & d'orangé. On
a donné à ce rubis le nom de balais , pour le diftin-
guer des autres rubis. Voye\_ Rubis.
On a prétendu dériver le mot balais du nom d'un
royaume où il fe trouve de ces rubis , & qui eft fitué
en terre ferme entre ceux de Pégu & de Bengale. Il
y a eu encore d'autres opinions fur cette étymologie.
* BALAMBUAN , ou PALAMBUAN , ( Géog.
mod. ) ville d'Afie dans les Indes fur la côte orienta-
le de l'île de Java , dans le pays de mêmes noms ,
dont elle eft capitale. Longit. 133. latit. méridion.
y. âo.
BALANCE , f. f. eft l'une des fix puifiances fim-
ples en Méchanique , fervant principalement à faire
connoître l'égalité ou la différence de poids dans les
corps pefans , & par conféquent leur marie ou leur
quantité de matière.
Il y a deux fortes de balance , 1' 'ancienne & la mo-
derne.
\J ancienne ou la romaine , appellée auffi pefon ,
conlifte en un levier qui fe meut fur un centre , &
qui eft fufpendu près d'un des bouts. D'un côté du
centre on applique le corps qu'on veut peier ; de
l'autre côte l'on fufpend un poids qui peut glifler le
long du levier , & qui tient la balance en équilibre ;
& la valeur du poids à pefer s'eftime par les divi-
fions qui font marquées aux différens endroits oii le.
poids glifiant eft arrêté.
La balance moderne , qui eft celle dont on f e fert
communément aujourd'hui , conlifte en un levier fut
pendu précifément par le milieu : il y a un plat ou
baffin fufpendu par une corde à chacun des deux
bouts du levier : dans l'un &: l'autre cas le levier eft
appelle jugum , traverfant ou jléau , dont les deux:
moitiés qui font de l'un & de l'autre côté de l'axe fe
nomment brachia , ou les bras, la partie par où on le
tient
BAL
tient trutina , anfc ou chaffc ; la ligne fur laquelle le
levier tourne , ou qui en divife les bras , s'appelle
Vaxe , ou eflieu. ; ôc quand on la confidere relative-
ment à la longueur des bras , on ne la regarde que
comme un point , &C on l'appelle A: centre de la balan-
ce } les endroits oùfe placent les poids le nomment
points de fufpenjton , ou d'application.
Le petit ftyle perpendiculaire au fléau , & qui fait
connoître , ou que les corps font en équilibre , ou
qu'ils pefent plus l'un que l'autre , s'appelle Y aiguil-
le , en Latin examen.
Ainfi dans la balance romaine le poids qui fert à con-
trebalancer ceux qu'on veut connoître, eft le mêmei,
mais s'applique à différens points ; au lieu que dans
la balance ordinaire le contrepoids varie , & le point
d'application eft toujours le même.
Le principe fur lequel la conftruction de l'une &
l'autre balance eft fondée eft le même, & le peut com-
prendre par ce qui fuit.
Théorie de la balance. Le levier A B ( Voy. Plan, de
"Michan. fig. p. ) eft la principale partie de la balan-
*e: c'eft un levier du premier genre , & qui au lieu
d'être pofé fur un appui en C, centre de fon mouve-
ment, eft fufpendu par une verge , qui eft attachée
au point C; de forte que le méchanifme de la balance
dépend du même théorème que celui du levier. Poy.
t,fcVlER.
Donc comme le poids connu eft à l'inconnu , ainfi
la diftance depuis le poids inconnu jufqu'au centre du
mouvement eft à la diftance où doit être le poids con-
nu, pour que les deux poids fe tiennent l'un l'autre
fcn équilibre ; & par conféquent le poids connu fait
connoître la valeur du poids inconnu.
Car comme la balance eft un vrai levier, fa pro-
priété eft la même que celle du levier ; lavoir , que
les poids qui y font fufpendus, doivent être en faifon
inverfe de leurs diftances à l'appui, pour être en
équilibre. Mais cette propriété du levier que l'expé-
rience nous manifefte , n'eft peut-être pas une chofe
facile à démontrer en toute rigueur. Il en eft à peu-
près de ce principe comme de celui de l'équilibre ;
on ne voit l'équilibre de deux corps avec toute la
clarté poffiblc que loricrue les deux corps font égaux,
& qu'ils tendent à fe mouvoir en fens contraire avec
des vitcffes égales. Car alors il n'y a point de raifon
pour que l'un fe meuve plutôt que l'autre ; & fi l'on
veut démontrer rigoureufement l'équilibre lorfque
les deux corps font inégaux , & tendent à fe mou-
voir en fens contraire avec des vîteffes qui foient
en raifon inverfe de leurs maffes , on eft obligé de
jappellcr ce cas au premier , où les maffes & les vî-
teffes font égales. De même on ne voit bien claire-
ment l'équilibre dans la balance que quand les bras
en font égaux & chargés de poids égaux. La meil-
leure manière de démontrer l'équilibre dans les au-
tres cas, eft peut-être de les ramener à ce premier,
fimple & évident par lui-même. C'eft ce qu'a fait M.
Newton dans le premier livre de fes Principes , fic-
tion première.
Soient , dit-il , {fig. 3. n°. 4. Méch.) OK, OL, des
bras de levier inégaux, auxquels foient iufpcndus
les poids A, P ,• fort fait OD — à OL , le plus grand
des bras, la difficulté fe réduit à démenrrer que les
poids A, P, attachés au levier LOD, font en équi-
libre. Il faut pour cela que le poids/* foit égal à la
partie du poids A qui agit fuivant la ligne DC per-
perpendiculaire à OD ; car les brasOX, OD, étant
égaux , il faut que les forces qui tendent à les mou-
voir , foient égales , pour qu'il y ait équilibre. Or
l'action du poids A , fuivant D C , eft au poids A ,
comme DC à DA , c'eft-à-dire, comme OK à OD.
Donc la force du poids A fuivant DC— — — — . Et
comme cette force eft égale au poids P, &c que OL
Tom, II,
BAL
25
:= OD, on aura — ^ =/", c'eft-à-dire, que les
poids A , P, doivent être en raifon des bras de le-
vier OL, OK, pour être en équilibre.
Mais en démontrant ainfi les propriétés du levier,
on tombe dans un inconvénient : c'eft qu'on eft
obligé alors de changer le levier droit en un levier
recourbé & brifé en fon point d'appui , comme on
le peut voir dans la démonftration précédente; de
forte qu'on ne dér.;ontre les propriétés du levier
droit à bras inégaux que par celles du levier courbe ,
ce qui ne paroit pas être dans l'analogie naturelle.
Cependant il faut avouer que cette manière de dé-
montrer les propriétés du levier eft peut-être la plus
exacte & la plus rigoureufe de tontes celles qu'on a
jamais données.
Quoi qu'il en foit , c'eft une chofe affez finguliere
que les propriétés du levier courbe , c'eft-à-dire dont
les bras ne font pas en ligne droite , foient plus fa-
ciles à démontrer rigoureufement que celles du le-
vier droit. L'auteur du traité de Dynamique, imprimé
à Paris en 1743 , a réduit l'équilibre dans le levier
courbe à l'équilibre de deux puiffances égales & di-
rectement oppolees : biais comme ces piarïances
égales & opposes s'évrmoù-iïent dans le cas du le-
vier droit, la ci. Monftiaùon pour ce dernier cas ne
peut être tirée qu'indirectement du cas général.
On pourreit démontrer les propriétés du levier
droit dont les puiffances font parallèles, en imagi-
nant îoure<- ces pu'ffances redu'.es à une feule , dont
la direction paffe par le point d'appui. C'eft aùifi que
M. Varignon en a ufé dans fa Mécanique. Cette mé-
thode entre plufieurs avantages, a celui de l'élégance
& de l'uniformité : mais n'a-t-elle pas auffi , comme
les autres, le défaut d'être indirecte , & de n'être pas
tirée des vrais principes de l'équilibre ? Il faut ima-
giner que les dueefions des puiffances prolongées
concourent à l'infini ; les réduire enfuite à une feule
par la décompofition , èc démontrer que la direction
de cette dernière paffe par le point d'appui. Doit-on
s'y prendre de cette manière pour prouver l'équili-
bre de deux puiffances égales appliquées fuivant des
directions parallèles à des bras égaux de levier ? Il
femble que cet équilibre eft auffi lîmple ôc auffi fa-
cile à concevoir, que celui de deux puiffances op-
pofées en ligne droite , Se que nous n'avons au-
cun moyen direct de réduire l'un à l'autre. Or , fi
la méthode de M. Varignon pour démontrer l'équi-
libre du levier eft indirecte dans un cas , elle doit
auffi l'être nécessairement dans l'application au cas
général.
Si l'on divife les bras d'une balance en parties éga-
les, une once appliquée à la neuvième divilîon de-
puis le centre , tiendra en équilibre trois onces qui
feront à la troiùeme de i'autre côté du centre ; &
deux onces à la fixieme diviiion agifïent auffi forte-
ment que trois à la quatrième, &c. L'action d'une
puifjancc qui fait mouvoir une balance , eft donc en
raifon coinpofée de cette même puiffance , & de fa
dillance du centre.
Il eft bon de remarquer ici que le poids preffe éga-
lement le point de fulpeniîon , à quelque diftance
qu'il en foit fufpendu, & tout comme s'il étoit atta-
ché immédiatement à ce point ; car la corde qui lul-
pend ce poids en eft également tendue à qii<
endroit que le poids y foit placé.
On fentbienâu refte que nous taifonsid abftrac-
tion du poids de la corde , &: que rîou ; né la regar-
dons que comme une ligne fans épaifleur , car le
poids de la corde s'ajoute à celui du corps qui y eft
attaché , & peut faire un effet très-fenfiblé , fi la corde
eft d'une longueur conlidérable.
Une balance eft dite être en équilibre , quand les
a&ions des poids fur les bras de la balanc. pour la
26
BAL
mouvoir, font égales, de manière qu'elles fe de-
truifent l'une l'autre. Quand une balance eft en équi-
libre, les poids qui font de part & d'autre font dits
équipondérans , c'eft-à-dire , qui fe contrebalancent.
Des poids inégaux peuvent fe contrebalancer auffi :
mais il faut pour cela que leurs diftances du centre
foient en raifon réciproque de ces poids ; enforte que
fi l'on multiplie chaque poids par fa diftance , les
produits foient égaux : c'eft fur quoi eft fondée la conf-
truction de la balance romaine , ou pefon. Voye^ Ro-
maine , ou Peson.
Par exemple , dans une balance dont les bras font
fort inégaux , un baffin étant fufpendu au bras le plus
court , & un autre au plus long bras divifé en parties
égales : fi l'on met un poids dans le baffin attaché
au plus petit bras, & qu'en même tems on place un
poids connu, par exemple une once, dans le baffin at-
taché au plus long bras, & qu'on faffe gliffer cebaffin
fur le plus long bras jufqu'à ce que les deux poids
foient en équilibre ; le nombre des divifions entre le
point d'appui &£ le poids d'une once , indiquera le
nombre d'onces que pelé le corps , & les fous-divi-
fions marqueront le nombre de parties de l'once.
C'eft encore fur le même principe qu'eft fondée la
balance trompeufe , laquelle trompe par l'inégalité des
bras ou des baffins : par exemple , prenez deux baf-
fins de balance dont les poids foient inégaux dans la
proportion de 10 à 9 , & fufpendez l'un & l'autre à
des diftances égales , alors fi vous prenez des poids
qui foient l'un à l'autre comme 9 a 1 o , & que vous
mettiez le premier dans le premier baffin , & l'autre
dans le fécond , ils pourront être en équilibre.
Plufieurs poids ïiifpendus à différentes diftances
d'un côté , peuvent fe tenir en équilibre avec un
poids feul qui fera de l'autre côté ; pour cet effet , il
faudra que le produit de ce poids par fa diftance du
centre , foit égal à la fomme des produits de tous les
autres poids multipliés chacun par fa diftance du
centre.
Par exemple , fi on fufpend trois poids d'une once
chacun à la deuxième , troifieme , & cinquième di-
vifion , ils feront équilibre avec le poids d'une once
appliqué de l'autre côté du point d'appui à la diftan-
ce de la dixième divifion. En effet , le poids d'une
once appliqué à la deuxième divifion fait équilibre
avec le poids d'un cinquième d'once appliqué à la
dixième divifion. De même le poids d'une once ap-
pliqué à la troifieme divifion fait équilibre à -^ d'on-
ce appliqués à la dixième divifion , & le poids d'une
once à la cinquième divifion fait équilibre au poids
d'une demi-once à la dixième divifion ; or un cinquiè-
me d'once avec ^ d'once & une demi-once , font
une once entière. Donc une once entière appliquée
à la dixième divifion , fait feule équilibre à 3 onces
appliquées aux divifions 2 , 3 , & 5 , de l'autre côté
du point d'appui.
Donc auffi plufieurs poids appliqués des deux cô-
tés en nombre inégal , feront en équilibre , li étant
multipliés chacun par fa diftance du centre , les fom-
mes des produits de part & d'autre font égales ; & fi
ces fommes font égales , il y aura équilibre.
Pour prouver cela par l'expérience , fufpendez un
poids de deux onces à la cinquième divifion , & deux
autres chacun d'une once à la deuxième & à la fep-
tieme ; de l'autre côté fufpendez deux poids d'une
once auffi chacun à la neuvième & dixième divifion.
Ces deux tiendront en équilibre les trois autres ; la
démonftration en eft à peu près la même que de la
proportion précédente.
Pour qu'une balance foit jufte , il faut que les points
de fulpenfion foient exactement dans la même ligne
que le centre de la balance, & qu'ils en foient égale-
ment diftans ; il faut auffi que les bras foient de lon-
gueur convenable , afin qu'on s'apperçoive plus ai-
BAL
fément s'ils font égaux , & que l'erreur qui peut ré»
fulter de leur inégalité , foit au moins fort petite ;
qu'il y ait le moins de frottement qu'il eft poffible
autour du point fixe ou centre de la balance. Quand
une balance eft trompeufe , foit par l'inégalité de fes
bras , foit par celle de fes baffins , il eft bien aifé de
s'en affûrer : il n'y a qu'à changer les poids qui font
dans chaque baffin , & les mettre l'un à la place de
l'autre ; ces poids qui étoient auparavant en équili-
bre, cefferont alors d'y être fi la balance eft trom-
peufe. Voye^ Appui
Balance de M. de Roberval, eft une forte de le-
vier , où des poids égaux font en équilibre, quoi-
qu'ils paroiffent fitués à des extrémités de bras de
leviers inégaux. Voye^ Levier.
Balance Hydrostatique, eft une efpece de
balance qu'on a imaginée , pour trouver la pefanteur
fpécifique des corps liquides & folides. Foye^ Gra-
vité , ou Pesanteur spécifique.
Cet infiniment eft d'un ufage confidérable pouf
connoître les degrés d'alliage des corps de toute ef-
pece t la qualité & la richeffe des métaux, mines,
minéraux , &c. les proportions de quelque mélange
que ce foit , &c. la pefanteur fpécifique étant le feul
moyen de juger parfaitement de toutes ces chofes.
Voyei Poids, Métal, Or, Alliage, &c.
L 'ufage de la balance hydrojlatique eft fondé fur ce
théorème iïArchimede , qu'un corps plus pefant que
l'eau, pefe moins dans l'eau que dans l'air, du poids
d'une maffe d'eau de même volume que lui. D'où il
fuit que fi l'on retranche le poids du corps dans l'eau ,
de fon poids dans l'air , la différence donnera le poids
d'une maffe d'eau égale à celle du lolide propofé.
Cet infiniment eft repréfenté dans les Planches
c\ Hydrojlatique , fig. 34. &c n'a pas befoin d'une def?
cription fort ample. On pefe d'abord dans l'air le
poids E , qui n'ert autre chofe qu'un plateau garni ou
couvert de différens poids , & le poids qu'on veut me-
furer , lequel eft fufpendu à l'extrémité du bras F, en-
fuite on met ce dernier poids dans un fluide , & on voit
par la quantité de poids qu'il faut ôter de deflùs le pla-
teau E , combien le poids dont il s'agit a perdu , &
par conféquent combien pefe un volume de fluide
égal à celui du corps.
Pour pefer un corps dans l'eau , on le met quelque-
fois dans le petit fceau de verre / K, & alors on ne
doit pas oublier de couler le plateau R fur le petit
plateau quarré H, afin que le poids de ce plateau ,
qui eft égal à celui du volume d'eau , dont le feau
occupe la place , puiffe rétablir l'équilibre.
A l'égard des gravités fpécifiques des fluides , on
fe fert pour cela d'une petite boule de verre G , de
la manière fuivante.
Pour trouver la pefanteur fpécifique d'un fluide ,
fufpendez à l'extrémité d'un des bras F un petit baf-
fin , & mettez dedans la boule G ; rempliffez enfuite
les deux tiers d'un vaiffeau cylindrique O P , avec
de l'eau commune : lorfque vous aurez mis la boule
dedans , il faudra mettre fur le plateau E , de pe-
tits poids, jufqu'à ce que les bras E , F, demeurent
dans une poiition horilontale.
Ainfi l'excès du poids de la boule fur celui d'un
égal volume d'eau , fe trouvera contrebalancé par
les poids ajoutés au plateau E, ce qui la fera demeu-
rer en équilibre au milieu de l'eau. Or concevons
à préfent cette boule ainfi en équilibre, comme fi
elle étoit réellement une quantité d'eau congelée
dans la même forme : fi à la place de l'eau qui envi-
ronne cette partie congelée , nous fubftituons quel-
qu'autre liqueur de différente pefanteur , l'équilibre
ne doit plus fubiiiler, il faudra donc pour le réta-
blir, mettre des poids fur celui des plateaux E , F,
de la balance qui fera le plus foible.
Ces poids qu'il aura fallu ajouter dans la balance ,
BAL
feront la différence en gravité de deux quantités ; ,
l'une d'eau , l'autre de la liqueur qu'cfn a voulu exa-
miner, & dont le volume eft égal à celui de la bou-
le de verre. Suppofons donc que le poids du volu-
me d'eau dont la boule occupe la place, foit de 803
grains ; fi nous ajoutons à ce nombre celui des grains
qu'il aura fallu ajouter fur le plateau auquel la boule
eft attachée, ou fi nous ôtons de 803 grains le nom-
bre de ceux qu'il auroit fallu mettre fur le plateau
oppofé , le relie fera le poids du volume du fluide
égal à celui de la boule , & la gravité fpécifique de
l'eau fera à celle de ce fluide comme 803 eft à ce
refte ; enfin fi on divife ce même refte par 803 , lé
quotient exprimera la gravité fpécifique du fluide ,
l'unité exprimant celle de l'eau.
Pour rendre ceci plus fenfible par un exemple,
fuppofons qu'on veuille favoir la gravité du lait :
plongeant dans cette liqueur la boule telle qu'elle
eft attachée à la balance, on trouve qu'il faut mettre
28 grains fur le plateau auquel elle eft fufpendue ,
pour rétablir l'équilibre : ajoutant donc 28 grains à
§03 , la fomme lera 83 1 ; &: ainfi la gravité fpécifi-
que du lait fera à celle de l'eau, comme 803 3831.
On peut donc par le moyen de la balance hydrofati-
que : i°. connoître la pefanteur fpécifique d'une li-
queur; 2°. comparer les pefanteurs fpécifiques de
deux liqueurs : 30. comparer les gravités fpécifiques
de deux corps folides ; car fi deux corps folides pe-
fent autant l'un que l'autre dans l'air , celui qui a le
plus de pefanteur fpécifique, pefera davantage dans
l'eau : 40. comparer la gravité fpécifique d'un corps
ïblide avec celle d'une liqueur ; car la gravité fpéci-
fique du corps eft à celle de la liqueur , comme le
poids du corps dans l'air, eft à ce qu'il perd de lbft
poids dans la liqueur. Voye^ aujji Aréomètre.
Le Docteur Hook a imaginé une balance hydrofati-
que qui peut être d'une grande utilité pour examiner
la pureté de l'eau, &c. Elle conlifte en un ballon de
Verre d'environ trois pouces de diamètre , lequel a
tin col étroit d'une demi-ligne de diamètre : on char-
ge ce ballon de minium afin de le rendre tant foit peu
plus pefant qu'un pareil volume d'eau , on le trempe
enfuite dans l'eau après l'avoir attaché au bras d'une
exafte balance, quia un contrepoids à l'autre bras. Ce-
la fait, on ne fauroit ajouter à l'eau la plus petite quan-
tité de fel , que le col du ballon ne s'élève au-deflus
de l'eau d'un demi-pouce plus qu'il n'étoit d'abord.
En effet , l'eau devenant plus pelante par l'addition
du fel , le ballon qui y étoit auparavant en équilibre ,
doit s'élever. Tranfa'cl. Pkilofoph. n°. igj.
Plufieurs favans fe font donné la peine de rédiger
en table les pefanteurs d'un grand nombre de matiè-
res tant folides que fluides : on doit aflûrément leur
favoir gré de ce travail , & l'on en fent toute la dif-
ficulté, quand on penfe aux attentions fcrupuleufes,
Se au tems qu'on eft obligé de donner à ces fortes de
recherches : mais leurs expériences , quelque exac-
tes qu'elles ayent été , ne peuvent nous fervir de rè-
gle que comme des à-peu-près ; car les individus de
chaque efpece varient entr'eux quant à la denlité ,
& l'on ne peut pas dire que deux diamans , deux
morceaux de cuivre , deux gouttes de pluie , foient
parfaitement femblables. Ainli quand il eft queftion
de favoir au jufte la pefanteur fpécifique de quelque
corps , il faut le mettre lui-même à l'épreuve ; c'eft le
fcul moyen d'en bien juger. Au refte on fera fans dou-
te bien-aife de trouver ici une table drefiée fur des
expériences fort exactes. Il fuffit de dire qu'elles font
de M. Mujjckcnibroek. Les pefanteurs fpécifiques de
toutes les matières énoncées dans cette table , font
comparées à celles de l'eau commune, & l'on prend
pour eau commune celle de la pluie dans une tempé-
rature moyenne; ainli quand on voit dans la table ,
eau de pluie 1 , 000. or de coupelle 19, 640. air 1 ,
Tome II,
BAL
27
OOi 4-, c'eft-à-dire, que la pefanteur fpécifique de
l'or le plus fin, eft à celle de l'eau, comme 19 4- à-
peu-près à 1 , & que la pefanteur de l'air n'eft pref-
que que la millième partie de celle de l'eau.
Table alphabétique des matières les plus connues , tant
folides que fluides , dont on a éprouvé la pefanteur
fpécifique.
Acier flexible & non trempé 7
Acier trempé 7
Agate d'Angleterre 2
Air o
Albâtre j
Alun 1
Ambre 1
Amiante . . 2
Antimoine d'Allemagne 4
Antimoine d'Hongrie 4
Ardoife bleue 3
Argent de coupelle 11
Bifmuth o
Bois de brefil
cèdre
orme
gayac
ébene
érable o
frêne o
bouis 1
Borax 1
Caillou 2
Camphre o
Charbon de terre 1
Cinabre naturel 7
artificiel 8
Cire jaune o
rouge 2
blanche 2
Corne de bœuf 1
cerf 1
Cryftal de roche . . . . 2
d'Iflande 2
Cuivre de Suéde 8
jette en moule 8
Diamant 3
Ecailles d'huître 2
Encens 1
Eau commune ou de pluie 1
diftillee o
de rivière 1
Efprit-de-vin reftifié o
de térébenthine o
Etain pur 7
allié d'Angleterre 7
Fer » • 7
Gomme Arabique 1
Grenat de Bohême 4
de Suéde 3
Huile de lin o
d'olive o
de vitriol 1
Karabé ou ambre jaune 1
Lait de vache » 1
Litarge d'or 6
d'argent 6
Magnefe 3
Marbre noir d'Italie 2
blanc d'Italie 1
Mercure *3
Noix de galle '
Or d'eflai ou découpé J9
de Guinée ï°
Os de bœuf I
Pierre fanguine 4
73?.
704.
512.
00 1 ~*
872.
714.
040.
913.
000.
700.
500.
091.
700.
030.
613.
600-
337-
177.
755-
84Ï-
03a.
720.
542.
995-
240.
300.
200.
995-
689.
500.
840.
875-
650.
720.
784.
000.
400.
092.
071.
000-
993-
009.
866.
874.
320.
471.
645.
375-
360.
978-
932.
913.
700.
o6j.
030.
000.
040.
53°>
704.
707.
593-
034.
640-
888»
656.
363,
iS BAL
Pierre calaminairc « 5» °Ô61.
à fufil opaque 2 > 541-
tranfparente 2j 641.
Poix *> M°-
Sang humain « I » 04°*
Sapin °> 5 5°-
Sel de glauber i> M^-
ammoniac !> 453*
gemme 2» J43*
• polychrefte 2> x4^-
Soufre commun 1 , 800.
TalcdeVenife . . . . . 2., 78o«
Tartre *> 849.
Turquoife 2., 5°8-
Verd-de-gris 1 , 7 » 4-
Verre blanc 3» I5°-
Verre commun *■> 620.
Vin de Bourgbgne . . . . o, 953.
Vinaigre de vin . . 1» on.
Vitriol d'Angleterre 1 , 880.
Yvoire », 825.
Cet article eft en partie de M. Formey. (O)
■ * Balancé ,' voye? Romaine -, Fléau, Peson ,
Porte-Balance. La balance commune n'eft autre
chofe quwnjliau fufpendu par le milieu , & foûtenant
par fes extrémités des plateaux ou balîins attachés
avec des cordes; Voyei fig. 5. du Balancier, une ba-
lance qui ne diffère de la commune que parce qu'elle
eft plus petite', & qu'elle a un porte-balance ;f,f, le
fiiau ou travefjin; l, la languette; p, un des pivots ;
il a fon correspondant ; b, le braïé; c, la chajje; q.q,
les deux baffins ou plateaux ; s , s, s, les cor J« qui
les foûtiennent ; r , r, les crochets ou anneaux qui em-
braffent les cordes.
La balance fine ou le trebuchet , ne diffère de la ba-
lance commune, que parce qu'étant deltinée à pefer
des matières précieulès , oir la moindre quantité de
îrop ou de trop peu , fait une différence confidérable
pour le prix; elle eft fort petite, & travaillée avec
la dernière précifiort.
Balance Jbùrde: celle-ci a les bouts de (on fieau
plus bas que fon clou; & fa chappe foùtenue en l'air
par une guindole ou guignole ; elle eft d'ufage dans
les monnoies.
Balance d'ejfai , c'eft la balance de la figure 5 en-
fermée dans une lanterne de verre avec Ion porte-
balance , comme on voit figure 7 ; comme on y pelé
l'or & l'argent , on a pris la précaution de la lanter-
ne , contre l'agitation que l'air pourroit caufer à lés
baffins.
Balance de chandelier : celle-ci quand elle eft pe-
tite, a les baffins en forme de féaux, on y met la
chandelle debout ; & quand elle eft grande , fes
baffins font prefqu'entierement plats , afin qu'on y
puiffe coucher la chandelle. C'eft du reffe la même
chofe que la balance commune.
En général , il y a autant de différentes fortes de
balances poffibies , que de moyens différens poffiblcs
d'établir & de rompre l'équilibre établi entre les
différentes parties d'un levier , ou d'un corps qui en
fait la fonction.
Balance , Libra^A'flron.') elt auffi un des douze
figues du zodiaque, préc'iiémeht oppofé au bélier:
on l'appelle Balance , parce qUe les jours & les nuits
font d'égale longueur lôrfqué le foleil entre dans ce
fi'gne , ce qui arrive à l'équinoxe d'automne.
Le catalogue Britannique met les étoiles de la conf-
tellatwn de la balance au nombre de 46. (O)
Balance , f. f. (e'nMydiolog.') eft le fymbole de
l'équité. La Jùftice la tient à la main. Celle que re-
prélente le feptieme figne du zodiaque fut à l'ufage
tfjJftrée ; ce fut-là qu'elle dépofa cette jufte balance,
lorlqu'elle fe retira de la terre au ciel, à l'approche
cîu fiecle de fer.
BAL
"Balance de Commerce, fignifie une égalité
entre la valeur des marchandées achetées des étran-
gers , &c la valeur des productions d'un pays trans-
portées chez d'autres nations.
Il eff néceffaire que cette balance foit gardée parmi
les nations commerçantes ; & fi elle ne peut l'être en
marchandées , elle le doit être en efpeces.
C'eft par ce moyen qu'on connoît fi une nation
gagne où perd par ion commerce étranger ou par
quelque branche de ce commerce, & par conféquent
ii cette nation s'enrichit ou s'appauvrit en le conti-
nuant.
Il y a diverfes méthodes pour arriver à cette con-
noifîancê.
i°. La plus reçue eff de prendre une exacte notion
du produit que rapportent à proportion les marchan-
difes exportées ou envoyées à l'étranger, & les mar-
chandiies importées, c'eff-à-dire celles qu'on a tirées
de lui. Si les premières excédent les dernières , il
s'enfuit que la nation qui a fait les exportations eft
en chemin de gagner , dans l'hypothele que l'excé-
dent eit rapporté en argent monnoyé ou non mon-
noyé ; & ainfi augmente le thréior de cette nation.
Mais cette méthode eit incertaine , parce qu'il eft
difficile d'avoir un compte véritable des marchan-
dées , foit importées foit exportées , les regiftres
des douanes ne pouvant pas les fournir à caufe des
contrebandes qui ie font particulièrement de mar-
chandifes belles & rares , comme points, dentelles,
joyaux , rubans , foies , toiles fines , &c. qu'on peut
cacher en un petit volume ; & même des vins, eaux-
de-vie, thé , 6-e. à quoi il faut ajouter les divers ac-
cidens qui affeûent la valeur du fonds foit forti foit
rentré , comme pertes faites fur mer , par marchés ,
banqueroutes , laiiies , &c. D'ailleurs , pour ce qui
concerne les négoces particuliers , il y a divers pays
où les ouvrages de nos manufactures que nous y en-
voyons ne font pas en grande confidération ; cepen-
dant ce que nous en rapportons eff néceffaire pour
pouffer notre commerce en général, comme le trafic
en Norvège pour dumairein & des provisions nava-
les. D'un autre côté le commerce de la compagnie
des Indes, orientales eft beaucoup plus avantageux ,
parce que les marchandées importées excédent de
beaucoup les marchandifes exportées , que nous
vendons beaucoup des premières aux étrangers , ôç
que nous en coniumons beaucoup dans le royaume ,
par exemple , des indiennes & des foies au lieu des
toiles & loies des autres pays, qui nous coûteroient
plus cher.
2.0. La deuxième méthode eft d'obferver le cours
du change ; car s'il eft ordinairement au-deffus de la
valeur intrinfeque ou de l'égalité des efpeces étran-
gères , nous perdons non-feulement par le change ,
mais encore par le cours général de notre commer-
ce. Mais cette méthode eft encore imparfaite , puif-
que nous trafiquons dans plusieurs pays où le cours
du change n'eft point établi.
30. La troifieme méthode , qui eft du chevalier
Jof. Child , fe prend de i'accroiflement ou de la di-
minution de notre commerce & de nos navires en
général ; car fi ces deux points viennent à diminuer,
quelque profit que puiffent faire des particuliers , la
nation perd , & elle gagne dans l'hypothele contraire.
Cet auteur établit comme une règle infaillible, que
dans toutes les parties du monde où le commerce eft
grand , continue fur ce pié & augmente de jour en
jour auffi-bien que le nombre des navires , par fuc-
ceffion de tems ce commerce doit être avantageux à
la nation, même dans le cas où un gros commerçant
fe ruine ; car quoi qu'il puiffe perdre, quelle multi-
tude de gens qui gagnent par fon moyen ! le roi , les
officiers des douanes ? les charpentiers de vaiffeau.
BAL
brafleurs, boulangers , cordiers-manufacturiers, cor-
diers, porteurs, charretiers, mariniers, &c.
4°. Une dernière manière eft d'obferver l'augmen-
tation & la diminution de notre argent , foit mon-
noyé foit en lingots : mais celle-ci cil la moins fen-
fible & la moins palpable de toutes ; car l'argent pa-
roît aux yeux du vulgaire plus abondant lorsqu'il en
a moins affaire , & plus rare félon que les occafions
de l'employer font plus fréquentés & plus avanta-
gcufes : par ce moyen il femble que nous ayons plus
d'argent lorfque nous avons moins de commerce :
par exemple , quand la compagnie des Indes orien-
tales a un grand débit à faire , l'argent le trouve pour
l'ordinaire plus rare à Londres , parce que l'occafion
engage les particuliers à en employer quantité qu'ils
avoient amaffé à cette intention. Ainfi un haut prix
d'intérêt fera que l'argent paroîtra plus rare , parce
que chacun auflî-tôt qu'il en peut raffcmbler quelque
iomme cherche à la placer. Child, Difc.fur le comm.
ck. ix. Chambers, Diclionn. (G)
B ALAN C E , en termes de teneurs de livres à parties dou-
bles , fignifie Y état final ou la folde du grand livre ou
livre de raifon, ou d'un compte particulier.
Balance, fe dit encore de la clôture de l'inven-
taire d'un marchand , qui fe lait 9 crédit & en dé-
bit, dans lequel il met d'un côté, qui eft la gauche,
l'argent qu'il a en caiffe , fes marchandifes , dettes
actives , meubles & immeubles ; & en crédit du côté
de la droite , fes dettes paflîves & ce qu'il doit payer
en argent; &z quand il a défalqué ce qu'il doit d'un
côté de ce qu'il a d'effets d'un autre , il connoît , tout
étant compenfé & balancé , ce qui doit lui relier de
net & de clair , ou ce qu'il a perdu ou gagné.
On fe fert quelquefois du mot de bilan au lieu de
balance , mais improprement. Bilan a une autre li-
gnification plus précife. Voye^ BILAN.
Balance , fignifie aufli la déclaration que font
les maîtres des vaiffeaux , des effets 6t autres mar-
chandifes dont ils font chargés. Ce terme eft en ufa-
ge en ce fens parmi les marchands qui trafiquent en
Hollande par les rivières du Rhin & de la Meufe.(G)
BALANCÉ, ad), terme de Danfe. Le balancé cil un
pas qui fe fait en place comme le pirouetté , mais or-
dinairement en préfence, quoiqu'on puiffe aufli le
faire en tournant. Comme ce n'eft que le corps qui
tourne , & que cela ne change aucun mouvement ,
je vais décrire la manière de le faire en préfence.
Il eft compoié de deux demi-coupés, dont l'un fe
fait en-avant , & l'autre en-arriere ; favoir , en com-
mençant vous pliez à la première pofition , & vous
portez le pié à la quatrième , en vous élevant deffus la
pointe; enfuite de quoi vous polez le talon à terre ;
& la jambe qui eft en l'air s'étant approchée de celle
qui eft devant , & fur laquelle vous vous êtes élevé,
vous pliez fur celle qui a fait ce premier pas , &
l'autre étant pliée fe porte en-arriere à la quatrième
pofition , & vous vous élevez deffus , ce qui h'nit
ce pas.
Le balancé eft un pas fort gracieux que l'on place
dans toutes fortes d'airs , quoique les deux pas dont
il eft compoié foient relevés également l'un & l'au-
tre, & de-là vient qu'il s'accommode à toutes fortes
de melures, parce que ce n eft que l'oreille qui aver-
tit de preffer les mouvemens ou de les rallentir. Voy.
Position.
Il eft fort ufité dans les menuets figurés aufli-bien
que dans les menuets ordinaires , de même qu'au
paffe-pié. On le fait à la place d'un pas de menuet ,
dont il occupe la même valeur ; c'eft pourquoi il
doit être plus lent , puifquc ces deux pas le font dans
l'étendue des quatre que le pas de menuet contient.
Voyei Menuet.
BALANCEMENT, f. m. Voye~x Oscillation.
BALANCER U croupe au pas ou au trot t fe dit , en
BAL
29
termes de Manège , du cheval dont la croupe dandine
à fes allures ; c'eft une marque de foibleffe de reins
tn
BALANCER; fe balancer dans l'air, fe dit, en Fau-
connerie , d'un oifeau qui refte toujours en une place
en obièrvant la proie.
B A L A N c E R le dit auffi , en Vénerie , d'une bête ,
qui, chaffée des chiens courans, eftlaffée ck vacille
en fuyant : on dit ce chevreuil balance.
Un lévrier balance quand il ne tient pas la voie
jufte , ou qu'il va & vient à d'autres voies.
Balancer. On dit dans les manufactures de foie
qu'une liffe balance , quand elle levé ou baiffe plus
d'un côté que d'un autre ; ce qui eft de conféquence
dans le travail des étoffes riches.
La liffe balancée ou qui ne baiffe pas jufte à un ac-
compagnage , fait que la dorure eft féparée ou bar-
rée. Voy?l ACCOMPAGNAGE, DORURE, ÉTOFFES
OR ET ARGENT.
* BALANCIER, f. m. ouvrier qui fait les différens
inftrumens dont on fe fert dans le commerce , pour
peler toutes fortes de marchandifes. On fe doute bien
que la communauté des balanciers doit être fort an-
cienne. Elle eft foûmife à la jurifdidfion de la cour
des monnoies ; c'eft là que les balanciers font admis
à la maîtrife ; qu'ils prêtent ferment ; qu'ils font éta-
lonner leurs poids, & qu'ils prennent les matrices de
ces petites feuilles de léton à l'ufage des joailliers &
autres marchands de matières , dont il importe de
connoître exactement le poids. Chaque balancier a
fon poinçon ; l'empreinte s'en conferve fur une table
de cuivre au bureau de la communauté & à la cour
des monnoies. Ce poinçon compofé de la première
lettre du nom du maître, furmontée d'une couronne
fleurdelifée , lert à marquer l'ouvrage. La marque
des balances eft au fond des baffins ; des romaines ,
au fléau; & des poids, au-deffous. L'étalonnage de
la cour des monnoies fe connoît à une fleur de lis
feule, qui s'imprime aufli avec un poinçon. D'autres
poinçons de chiffres romains marquent de combien
eft le poids. Les feuilles de léton ne s'étalonnent
point ; le balancier les forme fur la matrice , & les
marque de fen poinçon. Deux jurés font chargés des
affaires , des vilites , & de la difeipline de ce corps.
Us reftent chacun deux ans en charge ; un ancien fe
trouve toujours avec un nouveau. Un maître ne peut
avoir qu'un apprehti ; on fait cinq ans d'apprentif-
fage , & deux ans de fervice chez les maîtres. Il faut
avoir fait fon apprentiffage chez un maître de Paris ,
pour travailler en compagnon dans cette ville. Les
afpirans doivent chef-d'œuvre ; les fils de maître ex-
périence. Les veuves jouiffent de tous les droits de
la maîtrife , excepté de celui de faire des apprentis.
Les deux jurés balanciers ont été autorifés par des
arrêts à accompagner les maîtres & gardes des fix
corps des marchands dans leurs vifites pour poids &
mefures ; & il feroit très à-propos pour le bien public
qu'ils fiffent valoir leur privdége. Ils ont pour patron
S. Michel.
Balancier , f. m. ( en Méchanique') ; ce nom eft
donné communément à toute partie d'une machine
qui a un mouvement d'ofcillation , & qui fert ou à
ralentir ou à régler le mouvement des autres parties.
/ Vn '«( les articles fuivans.
Balancier: on donne ce nom dans les groffes
forges , à la partie ou anfe de fer F recourbée en
arc , paflee dans un crochet attaché à la perche élaf
tique G F , à l'aide de laquelle les foufflets font bail-
les 6v relevés alternativement par le moyen des chaî-
nes K F , K F, qui fe rendent deux à deux à des
anfes plus petites , ou à de petits crochets arcués &
fufpendus aux extrémités du babaiàtr F. /'. Grosses
FORGES , vignette de la Planche III. On voit dans la
. ///.la même machine : F eft la perche , E le
3°
BAL
BAL
balancer de k perche ; D D, les balanciers pins petits
des foufflets; ce ce, chaînes des petits balanciers on
des bafcules. » » «
BALANCIER ( *»w d'Horloger) c eft un cercle
<l'acierou deléton (jfc ^3-7^- ^ *0. d'Horlogerie)
qui dans une montre fert à régler & modérer le mou-
vement des roues. Voye^ Échappement.
Il eft compofé de la zone ABC que les horlogers
appellent le cercle des barettes B D , & du petit cercle
T qu'ils appellent le centre.
On ignore l'auteur de cette invention , dont on
.s'elt fervi pour la mefure du tems jufqu'au dernier
fiecle , où la découverte du pendule en a fait aban-
donner l'ufage dans les horloges.
On donne au balancier la forme qu'on lui voit
(fig. 4$)-yl. ) afin que le mouvement qu'il acquiert
neYe confume point à furmonter de trop grands frot-
lemens fur les pivots. La force d'inertie dans les corps
en mouvement , étant toujours la mafle multipliée
par la vîtefle, ( Foyei Inertie ) la zone ABC fort
diltante du centre de mouvement équivaut à une
malle beaucoup plus pelante. Il fuit de cette confi-
dération , qu'on doit autant qu'il eft pofîible , dil'po-
•fer le calibre d'une montre , de façon que le balan-
cier l'oit grand, afin que par-là il ait beaucoup d'iner-
tie. Foyei Calibre.
Voici à peu près l'hiftoire des différentes métho-
des , dont on a fait ufage dans l'application du ba-
lancier aux horloges , avant que l'addition du relfort
fpiral l'eût porté au degré de perfection , où il cil
parvenu fur la fin du dernier lîecle. Toute la régu-
larité des horloges à balancier vint d'abord de la for-
ée d'inertie de ce modérateur , & de la proportion
confiante qui règne entre l'action d'une force fur un
corps, & la réacfron de ce corps fur elle. Cet effet
réiultoit nécellairement de la difpofition de l'échap-
pement ( Voyei Échappement. Voyei Action cv
Réaction. Voyti Inertie. ) On attribue cette dé-
couverte à Pacifiais de Veronne. Voye^ HORLOGE.
Tous les avantages que les mefures du tems fai-
tes fur ces principes , avoient fur celles qui étoient
connues lorfqu 'elles parurent, telles que les clepfiy-
dres, fabliers & autres, n'empêchoient pas que leurs
irrégularités ne fulTent encore fort conliderables ;
elles venoient principalement , de ce qu'une grande
partie de la force motrice le confirmant à furmon-
ter le poids de toutes les roues, & la réfiftance eau-
fée par leurs frottemens ; la réaclion fe trouvoit tou-
jours inférieure à l'action , & le régulateur fuivoit
trop les différentes impreflions qui lui étoient com-
muniquées par le rouage qui lui oppofoit toujours
des obfiacles fupérieurs à la force qu'U en recevoit.
Voulant obvier à cet inconvénient , dans les hor-
loges deftinées à relier conftamment dans une mê-
me lituation , les anciens horlogers s'aviferent d'un
artifice des plus ingénieux : ils difpolérent le régula-
teur de façon , qu'il pût faire des vibrations indé-
pendamment de la force motrice; ils mirent en ulage
l'inertie du corps & fa pefanteur.
Ils polèrent l'axe du balancier ( voyq la fig. ZJ. PL
,5. d" Horlogerie) perpendiculairement à l'horif on, dif-
férent beaucoup de jeu à lès pivots en hauteur , paf-
ferent enfuite un fil dans une petite fente pratiquée
dans le pivot fuperieur au-deffus du trou dans lequel
il rouloit ; enfuite de quoi ils attachèrent les deux
bouts de ce fil à un point fixe, tellement que le ba-
lancier lùfpendu ne portoit plus fur l'extrémité de
■fan pivot inférieur. Si i'on tournoit alors le régula-
teur , les fils s'entortillant l'un fur l'autre , faifoient
élever le balancier tant-lbit-peu ; abandonné en-
fuite à lui-même , il defeendoit par l'on poids & les
détortilloit : or cela ne le pouvoit faire , fans qu'il
acquit un mouvement circulaire. Pourfuivant donc
i'a. route de l'autre côté , il entortilloit de nouveau
les fils, rctomboit enfuite, & auroit toujours conti-
nué de le mouvoir ainfi alternativement des deux
côtés , fi la réliltance de l'air , le frottement des fils
& des pivots n'eufient épuifé peu à peu tour fon
mouvement.
Cette méthode d'appliquer deux puiflances de fa-
çon qu'elles faffent faire des vibrations au régula-
teur, donne à ce dernier de grands avantages. Voye^
Ressort spiral.
La conltruction précédente auroit été bien plus
avantageule , fi ces fils toujours un peu élaftiques
n'eulfent pas perdu peu à peu de cette élafticité ;
de plus les vibrations de ce régulateur ne s'ache-
voient point en des tems égaux ; Se les petits poids
ou autrement dit régules P P qu'on mettoit à diffé-
rens éloignemens du centre du régulateur , pour fi-
xer la durée des vibrations , ne pouvoient procurer
une exaftitude alTez grande. En cherchant donc à
perfe&ionner encore le balancier , on parvint enfin
à lui afibeier un refibrt.
Remarque fur la matière du balancier. Quelques Hor-
logers prétendent , que le balancier des montres doit
être de laiton, afin de prévenir les influences que le
magnétiime pourroit avoir fur lui ; ils ne font pas
attention , que peair éviter un inconvénient auquel
leur montre ne fera peut être jamais expofée, ils lui
donnent des défauts très-réels ; parce que i°. le lai-
ton étant fpécifiquement plus pelant que l'acier, &
n'ayant point autant de corps , les balanciers de ce
métal ne peuvent être aufli grands ; & comme par-là
ils perdent de la force d'inertie , on eft obligé de
les faire plus pefans , pour que la malfe compenfe
la vîteffe ; d'oii il réfulte une augmentation confidéra-
ble de frottement fur leurs pivots ; z°. l'allongement
du cuivre jaune par fa chaleur , étant à celui de l'a-
cier dans le rapport de 17 à 10 , les montres oii l'on
employé des balanciers de laiton doivent , toutes cho-
fes d'ailleurs égales , être plus fufceptibles d'erreurs
par les différens degrés de froid , ou de chaud aux-
quels elles font expolées.
Remarque fur la forme du balancier. Comme par leur
figure les balanciers prélentent une grande étendue ,
& qu'Us ont une vîtefle beaucoup plus grande que
le pendule , leur mouvement doit être par con-
fisquent plus fufceptible des différences qui arrivent
au milieu dans lequel ils vibrent; ainfi après avoir
difpofé leurs barettes de façon que l'air leur oppofe
peu d'obftacles, il feroit bon encore ( dans les ou-
vrages dont la hauteur n'eft pas limitée ) de leur don-
ner la forme par laquelle ils peuvent préfenter la
moindre furface. Par exemple , le cercle du balan-
cier au lieu d'être plat, comme on le fait ordinaire-
ment, devroit au contraire être une efpece d'anneau
cylindrique , parce que le cylindre prélente moins
de furface, qu'un parallélépipède de même mafle
que lui , & d'une hauteur égale à l'on diamètre (T)
Balancier ( en Hydraulique ) eft un morceau de
bois frété par les deux bouts , qui fert de mouve-
ment dans une pompe , pour faire monter les trin-
gles des corps. ( K )
Balancier , ( Monnoyage. ) c'eft une machine
avec laquelle on fait fur les flancs les empreintes
qu'ils doivent porter , félon la volonté du prince.
Cette machine repréferttée Plan. I. du Monnoyage
fig. 2. eft compofée du corps S RR S : il eft ordinai-
rement de bronze , & toujours d'une feule pièce. Les
deux montans S S s'appellent jumelles. La partie l'u-
périeure 7Tqui ferme la baie ou ouverture A H9
s'appelle le fommier ; elle doit avoir environ un pie
d'épaiflèur. La partie inférieure de la baie eft de mê-
me fermée par un focle fondu avec le refte , en for-
te que les jumelles , le fommier & le focle ne for-
ment qu'un tout ; ce qui donne au corps plus de fo-
lidité <k de force quç fi les pièces étoient aflemblées,
BAL
Le focle a vers Tes extrémités latérales deux émi-
nences qui fervent à l'affermir dans le plancher de
Fattelier , au moyen d'un chaffis de charpente qui
l'entoure. Ce chaffis de charpente, dont les côtés
font prolongés comme on voit en A , fig. z. n°. z. eft
fortement fcellé dans le plancher , fous lequel eft un
maffif de maçonnerie qui foûtient toute la machine.
La baie eft traverfée horifontalement par deux
moifes ou planchers H, I, ordinairement fondus de la
même pièce que le corps. Ces deux moifes font per-
cées chacune d'un trou quarré dans lequel pane la
boîte E E. Les trous des moifes doivent répondre à
celui qui eft au fommier , qui eft fait en écrou à deux
ou trois filets ; cet écrou fe fait en fondant le corps
fur la vis qui doit y entrer , & qu'on enfume dans la
fonte pour que le métal ne s'y attache point.
Cette vis a une partie cylindrique qui paffe dans
le corps de la boîte E E , & y eft retenue par une
clavette qui traverfe la boîte, & dont l'extrémité eft
reçue dans une rainure pratiquée fur la furface de la
partie cylindrique. C'eft le même méchanifme qu'à
la prefle d'Imprimerie. Voy. Presse d'Imprimerie.
Si la boîte n'eft point traverfée par une clavette
qui la retienne au cylindre qu'elle reçoit, elle eft re-
pouffée par quatre refforts fixés fur la moifefupérieu-
re d'un bout , & appuyant de l'autre contre des émi-
nences réfervées à la partie fupérieure de chaque cô-
té de la boîte ; en forte qu'elle eft toujours repouffée
en-haut , ôc obligée de fuivre la vis à mefure qu'elle
s'éloigne.
Ce fécond méchanifme eft défectueux ; parce que
l'aclion du balancier, quand il preffe , eft diminuée
de la quantité de l'aûion des petits refforts employés
pour relever la boîte. La partie fupérieure de la vis
eft quarrée en A, & reçoit le grand levier ou la barre
B C, qui eft de fer ainfi que la vis. Cette barre a à fes
extrémités des boules de plomb dont le diamètre eft
d'environ un pié , plus ou moins , félon les efpeces à
monnoyer : car on a ordinairement autant de balan-
ciers que de différentes monnoies , quoiqu'on pût
les monnoyer toutes avec le même. Les extrémités
du levier , après avoir traverfe les boules de plomb,
font terminées par des anneaux D , femblables à
ceux qui terminent le pendant d'une montre , mais
mobiles autour d'un boulon vertical. On attache à
ces anneaux autant de cordes ou courroies de cuir
nattées en rond , qu'il y a d'ouvriers qui doivent fer-
vir la machine.
La partie inférieure E E de la boîte eft creufe : el-
le reçoit une des matrices ou coins qui porte l'em-
preinte d'un des côtés de la pièce de monnoie. Cette
matrice eft retenue dans la boîte avec des vis ; l'au-
tre matrice eft affujettie dans une autre boîte Havec
des vis. On pofe cette boîte fur le focle ou pas de la
baie : & qu'on ne foit pas étonné qu'elle ne foitque
polée ; l'adion de la vis étant toujours perpendicu-
laire , & le poids de la matrice affemblée avec la
boîte , très-confidérable , il n'y a aucune raifon pour
que cet affemblage fe déplace.
Devant le balancier eft une profondeur dans la-
quelle le monnoyeur place fes jambes , afin d'être
affis au niveau du focle , & placer commodément le
flanc fur la matrice.
Tout étant dans cet état , en forte que l'axe de la
vis , celui des boîtes E E H , foient dans une même
ligne perpendiculaire au plan du focle ; li on conçoit
que des hommes foient appliqués aux cordons dont
les extrémités du levier font garnies , & qu'ils tirent,
enlorte que la vis tourne du même fens dont elle en-
tre dans fon écrou ; la matrice dont la boîte fupé-
rieure eft armée s'approchera de l'autre; & lî l'on
place un flan fur celle-ci , comme on voit en H, il
fe trouvera pris ôc preffé entre les deux matrices d'u-
BAL
31
ne force confidérable , puifqu'elle équivaudra à l'ac-
tion de dix à douze hommes appliqués à l'extrémité
d'un levier très-long , & chargé par fes bouts de
deux poids très-lourds. Après que le flan eft mar-
qué , deux hommes tirent à eux des cordons dans un
fens oppofé , & font remonter la vis : le monnoyeur
faifit cet inftant pour chaffer le flan marqué de def-
fus la matrice H , & y en remettre un autre. Il doit
faire cette manœuvre avec adreffe & promptitude ;
s'il lui arrivoit de n'être pas à tems , il Iaifferoit le
flan fur la matrice , & ce flan recevroit un fécond
coup de balancier. Les flans ont été grailles d'huile
avant que d'être mis fur la matrice.
BALANCIER , ( terme de Papetier. ) c'eft un infini-
ment de fer à l'ufage de quelques manufactures de
papier dans lefquelles il tient lieu de la dernière pi-
le , appellée pile à l'ouvrier. Cet infiniment eft com-
pote de trois barres de fer , qui forment comme les
trois côtés d'un quarré ; favoir , deux montans 6c
une traverfe. La traverfe eft attachée au plancher
par deux anneaux de fer , & les deux côtés parallè-
les defeendent jufqu'à la hauteur de l'arbre de la
roue. L'une des deux eft terminée par une efpece de
crochet qui s'attache à une manivelle de ter qui eft
au bout de l'arbre du moulin ; l'autre branche eft
fort large par en-bas , & forme une efpece de grille
à jour. Le mouvement que la roue communique à
un des montans , fe communique auffi à la branche
terminée en quille ; &C cette branche va & vient con-
tinuellement dans une efpece d'auge remplie d'eau &
de pâte fine ; ce qui achevé de la délayer 6c de la
mettre en état d'aller en fortant de-là dans la chau-
dière.
BALANCIER , f. m. partie du Métier à bas , fixée
par deux vis fur chaque extrémité des épaulieres. Il
étoit compote dans les anciens métiers de deux bar-
res parallèles 14,14, 15,15, affemblées , comme
on voit Plan. III. fig. 1 . où celle d'en-bas eft termi-
née par deux petits crochets. On a corrigé le balan-
cier dans les métiers nouveaux, en fupprimant la
barre 15, 15, avec fon tenon , & en lui lubllituant
fur la barre 14 , 14, à égale diftance des épaulieres,
deux vis dont la tête percée & placée fous la barre
14, 14, peut recevoir deux petits crochets qui ont
les mêmes fondions que ceux de la pièce qu'on a
fupprimée , & qui donnent encore la facilité de hauf-
fer & de baiffer les crochets à diferetion. f^oye^ à
l'article Bas AU MÉTIER, à la féconde opération de
la main d'oeuvre , qu'on appelle le foncement de pic ,
l'ufage du balancier. Mais oblèrvez que fi cette faci-
lité de baiffer tk. de hauffer les crochets à diferetion
perfectionne la machine , en donnant lieu à un tâ-
tonnement à l'aide duquel on obtient le point de pré-
cilion qu'on cherche , on n'eut pas eu befoin de tâ-
tonner, s'il eût été poffible aux ouvriers qui conftnii-
fent les métiers à bas de fe conformer avec exacti-
tude aux proportions du modèle idéal qui exilloit
dans la tête de l'inventeur.
BALANClNES,oa VALANCINES , f. f. ( Mari-
ne. ) ce font des maneuvres ou cordes qui defeen-
dent des barres de hune & des chouquets , & qui vien-
nent former des branches fur les deux bouts de la
vergue , où elles parlent dans des poulies. On s'en
lert pour tenir la vergue en balance lorfqu'elle eft
dans fa lituation naturelle , ou pour la tenir haute &
baffe , félon qu'il ell à propos. Voye^ Plan. I. la fi-
tuation & la forme des balancines.
Balancines de la grande vergue , Plan. I. n°. 48.
Balancines de la vergue de milene , Plan. I.n . 4g.
Balancines de la civadiere , PI. I. n°. 5o. Les balan-
cines de la civadiere font amarrées au bout du beau-
pré , & fervent auffi pour border le perroquet. 11 y
a deux poulies courantes dont les cordes viennent le
terminer au château d'avant , cv outre cela aux deux
32 BAL
tiers de la vergue de civadiere il y a deux poulies
doubles , & de grands cordages pour tenir la vergue
ferme : le tout le rendant au château d'avant , elles
fervent à apiquer la vergue de civadiere lorfque l'on
va à la boidine. f^oyei Plan. I. le beaupré en Z ,& la
civadiere n° . 10.
Balancints de la vergue de perroquet de mifene ,
PL I. n°. 86.
Balancines de grand perroquet , PL I. n°. 85.
Balancints du grand hunier , voye^ PL I. vergue
du grand hunier , cot. S.
Balancines de la vergue de perroquet de foule ,
PL I. n°. 84.
Balancines de la vergue de foule , voye{ PL I. la
vergue de foule cotée 2.
Balancines de la vergue du perroquet de beaupré,
voye^ PL I. la vergue du perroquet de beaupré cotée 1 1 .
{Z)
BALANCINE de chaloupe , ( Marine. ) c'eft la ma-
neuvre ou corde qui foûtient le gui. Foyei Gui.
* BALANÇONS , f. m. pi. ( Œconom. ruft.) c'eft
ainfi qu'on appelle en Languedoc de petites pièces
de bois de fapin débitées : on les y eftime à trois
livres la douzaine.
* BALANÉOTE , ( Géog. anc. ) ville de la Cilicie
fur les confins de cette province : Jolephe qui en fait
mention ne dit rien de plus de la fituation.
* BALANGIAR , ( Géog. ) ville capitale de Tar-
tarie , au nord de la mer Cafpienne.
BALANT, f. m. ( Marine. ) le balant d'une ma-
«euvre eft la partie qui n'eft point halée : il fe dit
mifli de la maneuvre même lorfqu'elle n'eft point
employée. On dit tenir le balant d'une maneuvre, pour
dire V amarrer de telle forte quelle ne balance pas. (Z)
* BALANTES, f. m. pi. ( Géog.) peuples d'Afri-
que au pays des Nègres , fur la côte de l'Océan ,
Vers les Biffaux.
BALANUS MYREPSICA , voyei Nephriti-
CUM LIGNUM ou BEN.
* B ALAOU, f. m. {Hifl. nat.) poiflbn fort commun
à la Martinique ; il fe prend à la lueur des flam-
beaux : il eft de la grandeur de la fardine , excellent
au goût , & mal décrit par les auteurs.
* BALARES, f. m. pi. ( Hifl. anc. ) nom que les
habitans de l'île de Codé donnoient aux exilés , &
les habitans de Carthage à ceux de leur ville ou de
leur territoire , qui l'abandonnoient pour habiter les
montagnes de la Sardaigne.
BALARUC, ( Eaux de ) voyei Eau.
BALAUSTES , f. f . ( Mat. med. ) Les balaufles
font les fleurs du grenadier fauvage ; on en extrait le
lue de la même manière que de Thypocifte.
Elles font aftringentes comme les cytines , d'une
nature terreufe , épaiffifiantes , rafraîchiffantes , &
defliccatives : on les employé dans les flux de tou-
te efpece , comme dans la diarrhée , la dyflenterie,
& pour arrêter les hémorrhagies des plaies.
On doit les choifir nouvelles , bien fleuries & d'un
rouge vif: elles donnent de l'huile avec du fel effen-
tiel , & aflez de terre. (Ar)
* BALAUSTIER , f. m. ( Jardinage. ) c'eft ainfi
qu'on nomme le grenadier fauvage. Voye^ Grena-
dier.
* BALASSOR , f. m. ( Commerce. ) étoffe faite d'é-
corce d'arbre que les Anglois apportent des Indes
orientales : on ne nous dit point ni de quel arbre on
prend l'écorce , ni comment on la travaille.
BALATS , f. m. ( Marine. ) c'eft un amas de cail-
loux & de fable que l'on met à fond de cale , pour
que le vaifleau entrant dans l'eau par ce poids de-
meure en affiette ; c'eft ce qu'on appelle autrement
lefl. Voye^ Lest. (Z)
*BALBASTRO,( Géog. ) ville d'Efpagne au
BAL
royaume d'Aragon fur le Vero. Long. zy. 5o. lai,
41. 5o.
* BALBEC , ( Géog. anc. & mod. ) ville d'Afie
dans la Syrie ; il y a de beaux reftes d'antiquités.
Lon. 33. lat. 33. z5.
* BALCH , ( Géog. anc. & mod. ) ville de Perfe
fituée dans le milieu du Chorafan , fur la rivière de
Dehash. Quelques Géographes la prennent pour
l'ancienne Chariafpa , ou Zariafpa , ou Baftres.
BALCON , f. m. terme eTArchitecl. faillie pratiquée
fur la façade extérieure d'un bâtiment , portée par
des colonnes ou des confoles ; on y fait un appui
de pierre ou de fer qui , lorfqu'il eft de maçonnerie ,
s'appelle baluflrade ; & quand il eft de ferrurerie ,
s'appelle auffi balcon : il en eft de grands , de moyens
& de petits , félon l'ouverture des croifées ou avant-
corps qui les reçoit. Voye^ BANQUETTE , terme de
Serrurerie.
Ce mot vient de l'Italien balcone , formé du Latin
palcus , ou de l'Allemand palk , une poutre. Covar-
ruvias le fait venir de fict^Xuv ,/acere , lancer, fondé
fur l'opinion que les balcons étoient de petites tou-
relles élevées fur les principales portes des forteref-
fes , de defliis lefquelles on lançoit des dards, &c. fin-
ies ennemis. (P)
Balcons , en Marine , ce font des galeries couver-
tes ou découvertes , qu'on fait aux grands vaifleaux
pour l'agrément ou la commodité. Voye^ Galerie.
U)
* BALDIVIA , ( Géog. ) port & place confidéra-
ble du Chili , entre les rivières de Callacalla & de!
Potrero , à leur embouchure dans la mer du Sud.
Long. 306. 5z. lat. mérid. 3g. 58.
* B ALE , ( Géog. ) ville de Suifie , capitale du can-
ton de même nom. Long. z5. i5. lat. 4J. 40.
* BALEARES , f. m. pi. ( Géog. anc. & mod. ) îles
de la Méditerranée , près des côtes de Valence en
Efpagne , connues aujourd'hui fous le nom de Mayor-
que & Minorque. On donna le nom de Baléares aux
habitans de ces îles , à caufe de leur habileté à fe fer-
vir de la fronde ; puis celui de Gymnetes, & aux îles
celui de Gymnefies , parla même raifon.
BALEINE, f. f. balœna, {Hifl. nat.) poiflbn du
genre des cétacées, le plus grand de tous les ani-
maux : c'eft pourquoi on a donné le nom de baleine
aux plus gros poifîbns , quoique de difterens genres.
Les baleines que l'on prend fur la côte de Bayonne
& dans les Indes , ont environ trente-lix coudées de
longueur fur huit de hauteur ; l'ouverture de la bou-
che eft de dix-huit pies ; il n'y a point de dents , mais
il fe trouve à la place des lames d'une forte de corne
noire , terminées par des poils aflez femblables à des
foies de cochon , qui font plus courts en-devant qu'en
arrière. On a donné le nom de fanons aux lames qui
font dans la bouche. On les fend pour les employer
à ditférens ufages ; c'eft ce qu'on appelle la baleine
dont on fe fert pour faire des corps pour les femmes ,
les bufques , &c. La langue eft d'une fubftance fi
molle , que lorfqu'on l'a tirée hors de la bouche de
l'animal , on ne peut plus l'y faire rentrer. Les yeux
font à quatre aunes de diftance l'un de l 'autre ; ils
paroiflent petits à l'extérieur : mais au-dedans ils font
plus grands que la tête d'un homme. La baleine a deux
grandes nageoires aux côtés , il n'y en a point fur le
dos. La queue eft fi grande & fi forte , que lorfque
l'animal l'agite il pourroit , dit-on , renverfer un pe-
tit vaifleau. Le cuir de la baleine eft fort dur, & de
couleur noire ; il n'y a point de poils ; il s'y attache
quelquefois des coquillages , tels que des lépas & des
huîtres. Le membre génital eft proportionné à la
grofleur du corps. Rondelet.
On trouva près de l'île de Corfe , en 1620, une
baleine qui avoit cent pies de longueur. Son lard pe-
foit cent trente -cinq mille livres, Il fallut employer
les
BAL
les forces de dix-fept hommes pour tirer du corps de
i'animal le gros inteilin , dont la capacité étoit fi gran-
de , qu'un homme à cheval auroit pu y entrer. L'épi-
ne du dos étoit compofée de trente-deux vertèbres.
Cette baleine étoit femelle & pleine. On retira de la
matrice un fœtus qui avoit trente pies de longueur,
& qui pefoit quinze cents livres.
On dit qu'on a vu des baleines qui avoient jufqu'à
deux cents pies de longueur. Quelqu'énorme que cet
animal ioit par lui-même , je crois qu'on auroit vou-
lu l'aggrandir encore davantage par l'amour du mer-
veilleux. On prétend à la Chine qu'on y a vu des
baleines longues de neuf cents foixante pies ; d'autres
ont comparé ces grands poifîbns à des écueils , à des
îles flottantes, &c. Quoi qu'il en foit de ces relations ,
on affûre que les premières baleines qu'on a pêchées
dans le Nord , étoient beaucoup plus grandes que
celles qu'on y trouve à préfent; fans doute parce
qu'elles étoient plus vieilles. On ne fait pas quelle
efl la durée de la vie de ces animaux; il y a apparen-
ce qu'ils vivent très-long-tems.
L'eitomac de la baleine cil d'une grande étendue ;
cependant on n'y a pas vu des choies d'un grand vo-
lume. Rondelet dit qu'on n'y trouve que de la boue ,
de l'eau, de l'algue puante, & qu'on en a tiré quel-
quefois des morceaux d'ambre. Il foupçonnoit que
la baleine n'avaloit point de poiffons , parce qu'on
n'en avoit pas vu dans fon eftomac : mais Wïllugby
fait mention d'une baleine qui avoit avalé plus de
quarante merlus, dont quelques-uns étoient encore
tout frais dans fon eltomac ; d'autres difent que ces
grands poifîbns vivent en partie d'infecles de mer ,
qui font en affez grand nombre dans les mers du Nord
pour les nourrir, & qu'on a trouvé dans leur ellomac
dix ou douze poignées d'araignées noires , des an-
chois, & d'autres petits poiffons blancs, mais jamais
de gros. Les baleines mangent une très-grande quan-
tité de harengs.
On dit que ces poiffons s'élèvent perpendiculai-
rement fur leur queue pour s'accoupler ; que le mâ-
le &la femelle s'approchent l'un de l'autre dans cet-
te fituation ; qu'ils s'embraflent avec leurs nageoi-
res, 6c qu'ils relient accouplés pendant une demi-
heure ou une heure. On prétend qu'ils vivent en io-
ciété dans la fuite, & qu'ils ne le quittent jamais.
La femelle met bas dans l'automne. On afiûre qu'il
n'y a qu'un baleinon par chaque portée ; mais il ell
auffi gros qu'un taureau ; d'autres difent qu'il y en a
quelquefois deux ; la mère l'alaite en le tenant avec
fes nageoires , dont elle fe fert auffi pour le conduire
& pour le défendre.
M. Anderfon ell entré dans un détail tres-fatis-
faifant fur les différentes efpcces de baleines, dans
fon Hifloire naturelle cTIflande & du Groenland , &c.
Selon cet auteur, la véritable baleine de Groenland ,
pour laquelle fe font les expéditions de la pèche , a
des barbes & le dos uni. C'eft celle que Ray diitin-
gue par cette phrafe: balcena vulgaris edentula , dorfo
non pinnato. La groffeur énorme de ce poifibn fait
qu'il n'approche guère des côtes d'Iflande , & le re-
tient dans des abyfmes inacccffibles vers Spitzberg ,
& fous le pol du Nord. Il a jufqu'à foixante ou foixan-
te & dix pies de longueur. La tête feule fait un tiers
de cette malle. Les nageoires des côtes ont depuis
cinq jufqu'à huit pies de long ; la gueule efl horilbn-
tale, un peu recourbée vers le haut aux deux extré-
mités : elle tonne à peu-près deux demi-lunes ; elle a
trois ou quatre brafles de largeur ; fes coups font très-
violens, fur-tout lorfque ce poifibn ell couché fur le
côté: c'ell par le moyen de fa queue que la baleine
fe porte en avant; tk on efl étonné de voir avec
quelle vîtefie cette mafia énorme fe meut dans la
mer. Les nageoires ne lui fervent que pour aller de
côté. L'épidcrme de ce poilfon n'elt pas plus épais
Tome II,
A L
V>
que du gros papier ou du parchemin. La peau efl de
l'épaifieur du doigt, & couvre immédiatement la
graifle, qui efl épaiffe de huit pouces ou d'un pie ;
elle efl d'un beau jaune , lorfque le poifibn fe porte
bien. La chair qui fe trouve au - défions ell maigre
& rouge. La mâchoire fupérieure efl garnie des
deux côtés de barbes qui s'ajultent obliquement
dans la mâchoire inférieure comme dans un four-
reau, & qui embraflent, pour ainli-dire , la langue
des deux côtés. Ces barbes font garnies du côté" de
leur tranchant de plufieurs appendices , & font ran-
gées dans la mâchoire comme des tuyaux d'ormie .
les plus petites devant & derrière, & les plus gran-
des dans le milieu : celles-ci ont lix ou huit pies &
plus de longueur. La langue ell adhérente prefqu'en
entier; ce n'eil, pour ainfi dire, qu'un morceau de
graifle : mais il efl fi gros, qu'il fuffit pour remplir
plufieurs tonneaux. Les yeux ne font pas plus grands
que ceux d'un bœuf, & leurcryfhillindefféche n'ex-
cède pas la groffeur d'un gros pois ; ils font placés
fur le derrière de la tête, à l'endroit où elle ell le
plus large. Les baleines ont des paupières ce des four-
cils. On ne voit dans ces poiffons aucune apparence
d'oreilles au dehors , cependant ils ont l'ouie très-bon-
ne; & fi on enlevé l'épidcrme , on apperçoit derrière
l'œil, & un peu plus bas, une tache noire, & dans
ce même endroit un conduit , qui ell fans doute ce3
lui de l'oreille. Les excrémens de la baleine reficm-
blent affez au vermillon un peu humeclé ; ils n'ont
aucune mauvaife odeur. Il y a des gens qui les re-
cherchent, parce qu'ils teignent d'un joli rouge , &
cette couleur ell affez durable fur la toile. La baleine
mâle a une verge d'environ fix pies de longueur;
fon diamètre efl de fept à huit pouces à fa racine , &c
l'extrémité n'a qu'environ un pouce d'epaiffeur : cet-
te verge ell ordinairement renfermée dans un four-
reau. Les parties naturelles de la femelle reflemblent
à celles des quadrupèdes : l'orifice extérieur paroit
fermé pour l'ordinaire ; il y a de chaque côté une
mammelle qui s'allonge de la Longueur de lix ou huit
pouces, & qui a dix ou douze pouces de diamètre,
lorfque la baleine alaite fes petits. Tous les pécheurs
du Groenland afiùrent que l'accouplement de ces
poiffons fe fait comme il a été dit plus haut. M. Du-
dley rapporte dans les Tranfaclions philofophiques ,
n°- 38 J. article z. que la femelle fe jette fur le dos
& replie fa queue, & que le mâle fe pofe fur elle
& l'embrafie avec fes nageoires. Ce font peut-être,
dit M. Anderfon , des baleines d'une autre efpece que
celle du Groenland, qui s'accouplent ainfi. Selon
M.Dudley, l'accouplement ne fe fait que tous les
deux ans ; la femelle porte pendant neuf ou dix mois ,
6c pendant ce tems elle ell plus graffe , fur-tout lorf-
qu'elle ell près de fon terme. On prétend qu'un em-
bryon de dix-fept pouces ell déjà tout à-fait formé
& blanc : mais étant parvenu au terme, il efl noir
& a environ vingt pies de longueur. La baleine ne
porte ordinairement qu'un fœtus, & rarement deux.
Loriqu'elle donne à téter à fon petit, elle fe jette de
côté lur la furface de la mer, ec le petit s'attache à
la mammelle. Son lait ell comme le lait de vache.
Lorfqu'elle craint pour fon petit , elle l'emporte en-
tre les nageoires.
M. Anderfon décrit plufieurs autres efpeces de
baleines, qu'il appelle le nord-caper , legibbar, le "
/on Je Jupiter , le pflock-fifch , ècleknotenou knobbel-
pfih; & il rapporte auffi au genre des baleines la //-
corne de mer ou nerwal, le cachalot, le marjouin-Jbuf*
fleur ou tunin , le dauphin , & Vépée de mer. / byi I
tacée, Poisson. (/)
* Pêche de la baleine. Del - qui fe font
dans l'Océan & dans la Méditerrai us diffi-
cile fans contredit & la plus périlleufe efl ta
des baleines, Les Bafoues. & fuMout ceux qui babi-
• L
34 BAL
tentle pays de Labour, font les premiers qui Payent
entreprise, malgré l'âpreté des mers du Nord & les
montagnes de glace , au-travers delquelles il falloit
palier. Les Bafques font encore les premiers qui
ayent enhardi aux différens détails de cette pêche ,
les peuples maritimes de l'Europe , & principalement
les Hollandois qui en font un des plus importons ob-
jets de leur commerce, & y employent trois à qua-
tre cents navires, & environ deux à trois mille ma-
telots: ce qui leur produit des fommes très-confidéra-
bles; car ils fourninent feuls ou prefquefeuls d'huile
& de fanons de baleines. L'huile lert à brûler à la lam-
pe , à faire le favon , à la préparation des laines des
Drapiers , aux Courroyeurs pour adoucir les cuirs ,
aux Peintres pour délayer certaines couleurs, aux
gens de mer pour en grailler le brai qui lert à endui-
re & fpalmer les vaiïleaux, aux Archite&es & aux
Sculpteurs pour une efpece de détrempe avec céru-
fe , ou chaux qui durcit , fait croûte fur la pierre , &
la garantit des injures du tems. A l'égard des fanons ,
leur ufage s'étend à une infinité de chofes utiles : on
en fait des bufques, despiquùres, desparafols, des
corps & autres ouvrages.
Les Bafques qui ont encouragé les autres peuples
à la pêche des baleines , l'ont comme abandonnée :
elle leur étoit devenue prefque dommageable, parce
qu'ayant préféré le détroit de Davis aux côtes de
Groenland, ils ont trouvé le détroit, les trois der-
nières années qu'ils y ont été, tres-dépourvû de ba-
leines.
Les Bafques auparavant envoyoient à la pêche
dans les tems favorables , environ trente navires de
deux cents cinquante tonneaux , armés de cinquante
hommes tous d'élite , avec quelques moufles ou de-
mi-hommes. On mettoit dans chacun de ces bâti-
mens, des vivres pour fix mois, confiftans en bif-
cuit, vin, cidre, eau, légumes &c fardines falées.
On y embarquoit encore cinq à fix chaloupes , qui
ne dévoient prendre la mer que dans le lieu de la
pêche , avec trois funins de cent vingt brafles cha-
cun , au bout defquels étoit faille & liée par une bon-
ne épiflure , la harpoire faite de fin brin de chanvre ,
& plus mince que le fiinin. A la harpoire tient le har-
pon de fer dont le bout eft triangulaire oc de la figure
d'une flèche, & qui a trois pies de long, avec un man-
che de bois de fix pies , lequel fe fépare du harpon
quand on a percé ia baleine , afin qu'il ne puifle rel-
lortir d'aucune manière. Celui qui le lance fe met à
l'avant de la chaloupe, & court de grands rifques,
parce que la. baleine, après avoir été blefîée, donne
de furieux coups de queue & de nageoires, qui tuent
fouvent le harponneur, & renverlént la chaloupe.
On embarquoit enfin dans chaque bâtiment delti-
né à la pêche , trente lances ou dards de fer de quatre
pies , avec des manches de bois d'environ le double
de longueur ; quatre cents bariques tant vuides que
pleines de vivres ; deux cents autres en bottes ; une
chaudière de cuivre contenant douze bariques & pe-
fant huit quintaux ; dix mille briques de toutes efpe-
ces pour conftruire le fourneau , & vingt-cinq bari-
ques d'une terre grafle èc préparée pour le même
ufage.
Quand le bâtiment eft arrivé dans le lieu oùfe fait
le paflage des baleines, on commence par y bâtir le
fourneau deftiné à fondre la graille & à la convertir
en huile ; ce qui demande de l'attention. Le bâtiment
fe tient toujours à la voile , & on fufpend à les côtés
les chaloupes armées de leurs avirons. Un matelot at-
tentif eft en vedette au-haut du mât de hune ; & dès
qu'il apperçoit une baleine , il crie en langue Bafque
balia , balia; l'équipage fe difperfe aufli-tôt dans les
chaloupes , & court la rame à la main après la baleine
apperçue. Quand on l'a harponnée (l'adreife confifle
à le faire dans l'endroit le plus fenlible ) elle prend
BAL
la fuite &C plonge dans la mer. On file alors les fu-
nins mis bout à bout , & la chaloupe fuit. D'ordinaire
la baleine revient fur l'eau pour refpirer & rejetter
une partie de Ion fang. La chaloupe s'en approche au
plus vite, & on tâche de la tuer à coups de lance ou
de dard , avec la précaution d'éviter fa queue & fes
nageoires, qui feroient des bleflures mortelles. Les
autres chaloupes fuivent celle qui eft attachée à la
baleine pour la remorquer. Le bâtiment toujours à la
voile , la fuit auflî , tant afin de ne point perdre fes
chaloupes de vue, qu'afin d'être à portée de mettre à
bord la baleine harponnée.
Quand elle eft morte & qu'elle va par malheur
au fond avant que d'être amarrée au côté du bâti-
ment, on coupe les funins pour empêcher qu'elle
n'entraîne les chaloupes avec elle. Cette manœuvre
eft abfolument néceiîaire , quoiqu'on perde fans re-
tour la baleine avec tout ce qui y eft attaché. Pour
prévenir de pareils accidens , on la fufpend par des
funins dès qu'on s'apperçoit qu'elle eft morte , &c on
la conduit à un des côtés du bâtiment auquel on l'at-
tache avec de grollés chaînes de fer pour la tenir lur
l'eau. Auflitôt les charpentiers fe mettent deftus avec
des bottes qui ont des crampons de fer aux femelles,
crainte de glifler ; & de plus ils tiennent au bâtiment
par une corde qui les lie par le milieu du corps. Ils
tirent leurs couteaux qui font à manche de bois &
faits exprès ; &c à mefure qu'ils enlèvent le lard de
la. baleine fulpendue, on le porte dans le bâtiment,
& on le réduit en petits morceaux qu'on met dans la
chaudière , afin qu'ils foient plus promptement fon-
dus. Deux hommes les remuent fans cefle avec de
longues pelles de fer qui hâtent leur dilfolution. Le
premier feu eft de bois ; on fe lert enfuite du lard mê-
me qui a rendu la plus grande partie de ion huile ,
& qui fait un feu très- ardent. Après qu'on a tourné
6c retourné la baleine pour en ôter tout le lard , on.
en retire les barbes ou fanons cachés dans la gueule,
& qui ne font pas au-dehors comme plufieurs Natu-
raliftes fe l'imaginent.
L'équipage de chaque bâtiment a la moitié du pro-
duit de l'huile ; & le capitaine , le pilote & les char-
pentiers ont encore par-deflus les autres une gratifi-
cation fur le produit des barbes ou fanons. Les Hol-
landois ne le font pas encore halardés à tondre dans-
leurs navires le lard des baleines qu'ils prennent , &C
cela à caule des accidens du feu , qu'ils appréhendent
avec jufte raifon. Ils le tranlportent avec eux en ba-
riques pour le fondre dans leur pays , en quoi les
Bafques fe montrent beaucoup plus hardis : mais cet-
te hardiefle eft récompenlée par le profit qu'ils font,
& qui eft communément triple de celui des Hollan-
dois , trois bariques ne produifant au plus fondues,
qu'une barique d'huile. Voye[ le recueil de différens trai-
tés de Phyjïque , par M. Dellandes.
C'eft à un bourgeois de Cibourre , nommé Fran-
çois Soupite , que l'on doit la manière de fondre Se
de cuire les grailles dans les vaifleaux , même à flot
& en pleine mer. Il donna le delîêin d'un fourneau
de brique qui le bâtit fur le fécond pont : on met fur
ce fourneau la chaudière , & l'on tient auprès des
tonneaux d'eau pour garantir du feu.
Voici maintenant la manière dont les Hollandois
fondent le lard de baleine , qu'ils apportent par petits
morceaux dans des bariques. Une baleine donne au-
jourd'hui quarante bariques : celles qu'on prenoit au-
trefois en donnoient jufqu'à lbixante à quatre-vingts.
On voit , fig. première des planches qui fuivent cel-
les de notre hiftoire naturelle , une coupe verticale
des bacs , de la chaudière & du fourneau à tondre la
lard. On place les tonneaux A A pleins de lard qui a
fermenté , fur le bord du bac D ; on vuide ces ton-
neaux dans ce bac ; on y remue le lard afin de le dé-
layer, &. de le difpofer à lé fondre. On met le feu au
BAL
fourneau C , dont on voit le cendrier en E , & la gril-
le en F i on jette le lard du bac B dans la chaudière
G , placée dans un maffif de brique & de maçonne-
rie , fur le fourneau C. Les bacs 1,2,3, C1IU f°nt
tous moins élevés les uns que les autres , communi-
quent entr'eux par les gouttières H ; ils font pleins
d'eau fraîche. Lorfque le lard ell délayé , on le jette
du bac B , dans la chaudière G , comme on vient de
dire. Onl'ylailTe fondre ; à mefure qu'il le fond, l'hui-
le fe forme & s'élève à la furface. On la ramaffe avec
des cuillieres , & on la jette dans le bac 1 : à mefure
qu'elle s'amaffe dans le bac 1 , elle defcend dans le
bac 2 , & du bac 2, dans le bac 3 . Au fortir du bac 3 ,
on l'entonne dans des barriques pour être vendue.
On la fait pafTer fuccefTivement par ces bacs pleins
d'eau, afin qu'elle fe refroidifle plus promptement.
Après qu'on a enlevé l'huile, il refte dans la poelle
un marc , des grillons , ou , pour parler la langue de
l'art, des crotons. On prend ces crotons , èk on les
jette fur un grillage de bois dont un des bouts porte
fur le maffif de la chaudière , & l'autre bout à l'ex-
trémité d'un long bac qui correfpond à toute la lon-
gueur du grillage , & qui reçoit l'huile qui tombe des
crotons qui s'égouttent fur le grillage. Voye^fig. z.
A , bac où l'on met le lard au fortir des barriques.
JB, fourneau. C, cendrier. D, grille. E , chaudière.
G H , grillage à»égouttcr le croton. I K , bac qui re-
çoit les égouttures. Fig. j. plan des mêmes chofes.
A y bac à lard. C , chaudière. D E , grillage. F G ,
bac à égouttures.
Les Bafques , dans le commencement, faifoient la
pêche dans la mer Glaciale , ck le long des côtes de
Groenland , où les baleines, cru 'on appelle de grande
baie, font plus longues & pins grafles que dans les
autres mers : l'huile en ell auffi plus pure , ck les fa-
nons de meilleure qualité , fur-tout plus polis , niais
les navires y courent de très-grands dangers , à cau-
fe des glaces qui viennent fouvent s'y attacher , ck
les font périr fans reflburce. Les Hollandois réprou-
vent tous les ans de la manière du monde la plus
trille.
Les côtes de Groenland ayant infenfiblement re-
buté les Bafques , ils allèrent faire leur pêche en
pleine mer, vers File de Finlande, dans l'endroit
nommé Sarde , ck au milieu de plufieurs bas-fonds.Les
baleines y font plus petites qu'en Groenland , plus
adroites , s'il ell permis de parler ainli d'un pareil ani-
mal, ck plus difficiles à harponner, parce qu'elles
plongent alternativement , <k reviennent fur l'eau.
Les Bafques , encore rebutés, ont quitté ce parage ,
& ont établi leur pêche dans le détroit de Davis ,
vers l'île d'Infeo, fouvent environnée de glaces, mais
peu épaifîès. Ils y ont trouvé les deux elpcces de ba-
leines connues fous le nom de grandes baies , ck de
.Sarde. Foye^ la pèche des baleines , dans l'ouvrage de
M. Dellandes, que nous avons déjà cité.
La pêche des baleines , que nous avons apprife aux
Hollandois , ell devenue fi confidérable pour eux ,
qu'ils envoyent tous les ans fur nos ports lept à huit
mille barrils d'huile , ck du fa von à proportion.
Quelqu'utile que l'oit cette pèche , il s'ell paffé des
fiecles fans que les hommes ayent oie la tenter. C'é-
toit , au teins de Job , une entreprife qu'on regardoit
comme fi fort au-delîus de leurs forces , que Job
même fe fert de cet exemple pour leur faire fentir
leur foibleffe , en comparailôn de la toute-puifTance
divine. An extrahere poteris leviathan hamo , 6- /une
ligabis linguam ejus ? Numquid pones circulant in nari-
bus ejus , aut armilla perforabis maxillam ejus ? Num-
quid multiplicabit ad te preecs , autloquetur tibi mollia }
Numquid faciet tecum pactum , & accipics cum fervum
J'empiternum ? Numquid illudes ci quaji avi , aut ligabis
tum ancillis tuis ? Concident cum amici ? Dividcnt
illum negociatores } Numquid implebis fagenas pelle
Tome II,
A L
55
ejus , & gurgujlium pijcium capite illius } Pont fuper
cum manum tua m , mémento beili ; nec ultra addas loqui,
« Homme, enleveras-tu la baleine avec l'hameçon,
» ck lui lieras-tu la langue avec une corde ? Lui paf-
» leras-tu un anneau dans le nez , & lui perceras-tu
» la mâchoire avec le fer ? La réduiras-tu à la fup-
» plication ck à la prière ? Fera-t-eile un pade avec
» toi , & fera-t-elle tonefclave étemel? Te joùeras-
» tu d'elle comme de l'oifeau , ck fervira-t-elle d'a-
» nullement à ta fervante ? Tes amis la couperont-
» ils par pièces , & tes négocians la trafiqueront-ils
» par morceaux ? Rempliras-tu ton filet de fa peau ,
» & de fa tête , le réfervoir des poillbns ? Mets ta
» main fur elle ; fouviens-toi de la guerre , & ne
» parle plus ».
En vain les incrédules voudroient-ils mettre en
contradiction le difeours de Job avec l'expérience
d'aujourd'hui : il ell évident que l'Ecriture parle ici
d'après les notions populaires de ces tems-là , com-
me Jofué quand il dit, arrite-toi Soleil, L'exemple du
livre de Job ell bien choifi ; montre parfaitement
la hardieffe de la tentative des Bafques, ck prouve
qu'une exaûitude ferupuieufe ck peu néceffaire dans
des raifonnemens phyliques , nuiroit fouvent au lu-
blime.
Les anciens ne difent autre chofe des baleines , fi-
non qu'elles le jettent quelquefois d'elles-mêmes à
terre pour y jouir de la chaleur du lbleil qu'elles ai-
ment , & que d'autres échouent ou font poulTées fur
les bords de la mer, par la violence de les values.
Si Pline rapporte que i'empereur Claude a donné le
plaifir , au peuple Romain , d'une elpece de pêche
où l'on prit une baleine , il oblèrve en 'même tems
que ce monilre marin avoit échoué au port d'Ortie ;
qu'auffi-tôt qu'on l'apperçut dans le détroit, l'empe-
reur en fît fermer l'entrée avec des cordes & des fi-
lets , ck que ce prince , accompagné des archers de
la garde prétorienne, en fît monter un certain nom-
bre dans des efquifs & des brigantins , qui lancèrent
plufieurs dards à cet animal , dont il fut bielle à mort ;
que dans le combat , il jetta une fi grande quantité
d'eau par l'on évent ou tuyau , qu'il ert mit à fond
l'un des efquifs : mais cette hiitoire ell rappc^P
comme un fut rare & fingulier; ainli, il demeWc
toujours pour conllant que Fufage de cette pêche n'é-
toit pas commun.
Et pourquoi l'auroit-iï été ? on ne connoiflbit pref-
que pas , dans ces premiers tems , le profit qu'on en
pouvoit tirer. Juba , roi de Mauritanie , écrivant au
jeune prince Caïus Céfar fils d'Augufte , lui manda
qu'on avoit vu en Arabie des baleines de fix cens pies
de long & de trois cens foixante pies de large , qui
avoient remonté de la mer dans un fleuve d' Arcadie,
où elles avoient échoué. Il ajoute que les marchands
Alîatiques recherchoient avec grand foin la graiffé
de ce poillbn, & des autres poillons de mer;"qu'ils
en frottoient leurs chameaux pour les garantir des
grolles mouches appellées taons , qui craignent fort
cette odeur. Voilà , félon Pline, tout l'avantage que
l'on droit alors des baleines. Cet auteur fait enîùite
mention de quarante-deux fortes d'huile, ck l'on n'y
trouve point celle de ce poifîbn : on favoit encore li
peu profiter de ce poûTon , fous les règnes de Vefpa-
lien , de Tite , de Domitien & de Nerva , que Plutar-
que rapporte que plufieurs baleines avoient échoué en
donnant ùc travers aux côtes de la mer, comme un
vailleau qui n'a point de gouvernail ; que lui-même
en avoit vu dans l'île d'Ancire ; qu'une entre les au -
très , que les flots avoient jettée mr le rivage proche
la ville de Bunes, avoient tellement irttèôe l'air, par
fa putréfadfion , qu'elle avoit mis la pefte dans la
ville & dans les environs.
Voici comment on prétend que nos Bifcayens du
cap-Breton, pies de Bayonne, & quelques autres pê
36
A L
chcurs , ont été engagés à la pêche des baleines. Il pa-
roît tous les ans fur leurs côtes , vers l'hy ver, de ces
haleines apis, n'ont point d'évent, &qui iont fortgraf-
ies : l'occafion de pécher de ces poiffons le préfenta
donc dans leur propre pays , & ils en profitèrent. Ils fe
contentèrent de ces baleines pendant fort long-tems :
mais l'obfervation qu'ils firent enfuite , que ces monf-
trueux poifTons ne paroiffoient dans les mers de ce
pays-là qu'en certaines laitons , & qu'en d'autres
tems ils s'en éloignoient , leur fit naître le deffein de
tenter la découverte de leur retraite. Quelques pê-
cheurs du cap-Breton s'embarquèrent & firent voile
vers les mers de l'Amérique , & l'on prétend que ce
fut eux qui découvrirent les premiers les îles de Ter-
re-Neuve , & la terre-ferme du Canada , environ
cent ans avant les voyages de Chriflophle Colomb ,
& qu'ils donnèrent le nom de cap-Breton , leur pa-
trie , à une de ces îles, nom qu'elle porte encore.
Vqyei Corneil. "Witfl. Ant. Mang. Ceux qui font de
ce fentiment ajoutent que ce fut l'un de la nation de
ces Bifcayens qui donna avis de cette découverte
à Colomb , l'an 1491, & que celui-ci s'en fit hon-
neur : d'autres croyent que ce ne fut que l'an 1 504
que ce premier voyage fait entrepris par les Bafques,
auquel cas il feroit poitérieur à celui de Colomb.
Quoi qu'il enfoit, il eft certain qu'ils découvrirent ,
dans les mers qui font au nord de l'Amérique , un
grand nombre de baleines , mais en même tems ,
qu'ayant auffi reconnu qu'elles font encore plus
abondantes en morues, ils préférèrent la pêche de
ce dernier poiflon , à la pêche de l'autre.
Lorfque le tems approche où les navires baleiniers
doivent revenir , il y a toujours des matelots en len-
tinelle dans le port de Succoa. Les premiers qui dé-
couvrent un bâtiment prêt à arriver , fe hâtent d'al-
ler à fa rencontre, & le font payer un droit de 30
fous par homme. Quelque tems qu'il rafle , ils s'em-
barquent fans rien appréhender , ôc le chargent de
mouiller le bâtiment à un des endroits connus de la
bonne rade. «Il eft , dit M. Deflandes , ailé de voir
» que l'intérêt feul ne les guide point: rien , en effet,
» n'eft plus modique, fur-tout dans les mauvais tems,
m^ lorfque la mer brife contre une côte toute de
»^er , que la rétribution qu'on leur donne : mais ils
» feroient infiniment affligés de voir périr leurs com-
» patriotes , & c'eft un fervice d'humanité qu'ils le
» rendent mutuellement ».
* Baleine , ( le blanc de ) n'eft autre chofe qu'une
préparation de cervelle de cachalots , qui fe tait à
Bayonne & à Saint Jean de Luz. Prenez la cervelle de
cet animal ; fondez-la à petit feu ; jettez-la enfuite
dans des moules comme ceux des fucreries ; laiffez-
la égoutter lbn huile & fe refroidir ; refondez-la en-
fuite , & continuez de la faire égoutter & fondre jul-
qu'à ce qu'elle foit bien purifiée & bien blanche :
coupez-la enfuite & la remettez en écaille de la for-
me de celles qu'on nous vend. Il faut choilîr ces
écailles belles , blanches , claires , & tranfparentes ,
d'une odeur fauvagine , & fans aucun mélange de
cire blanche, & les tenir dans desbarrils ou des vaif-
feaux de verre bien fermés.
Je ne prétens point contiedire M. Pomet fur la
nature & la manière défaire le blanc de baleine , dit
M. James dans fon Dictionnaire de Médecine; j'ai
pourtant vu , ajoûte-t-il , du blanc de baleine qui n'a-
voit effuyé aucune préparation , & qu'on s'étoit con-
tenté de mettre dans des facs de papier pour en ab-
forber l'huile ; & je puis affiner que ce n'eft ni l'huile,
ni le fperme de la baleine , mais une lubftance parti-
culière qu'on trouve dans la tête de ce poiffon. On le
trouve auffi dans d'autres endroits que la tête; mais
il y eft moins bon. Foye^ à t 'article Cachalot , ce
qu'il y a de vrai ou de faux dans ce fentiment de M.
James.
BAL
Baleine , {le blanc de ) Mat. med. eft un remède
dans plufieurs cas ; on l'employé d'ordinaire pour les
meurtriffures , les contulîons internes, & après l'ac-
couchement; c'eft un balfamique dans plufieurs ma-
ladies de la poitrine; il déterge &. confolide : il eft
très-iùr & très-efficace dans les toux qui viennent
d'un catarrhe opiniâtre, d'érolîon, d'ulcération, auffi-
bien que dans les pleuréfies & les abfcés internes ;
c'eft un confolidant , lorfque la mucofité des inteftins
a été emportée par l'acrimonie de la bile , comme
dans les diarrhées & les dyffenteries. Il convient auffi
dans les ulcères des reins & pour Pépaiffiffement du
fang ; il ramollit & relâche les fibres ; il contribue
fouvent à l'expulfion de la gravelle , en élargiffant
les paffages; -on l'employé en forme d'éiechiaire &
de bol , avec des conferves convenables & autres
choies de cette efpece ; & lorfqu'on a eu le foin de le
mêler comme il faut, il eft difficile que le malade le
découvre fous cette forme : on le dilibut auffi par le
moyen d'un jaune d'œuf , ou bien on le réduit en
émulfion ; la dofe ordinaire eft d'environ demi-o;ros.
Employé à l'extérieur il eft émollient, confon-
dant ; il lert fur-tout dans la petite vérole , & l'on en
oint les pullules lorfqu'elles commencent à fe durcir,
après l'avoir mêlé avec de l'huile d'amandes douces.
Il n'y a pas long-tems qu'on s'en lert dans cette mala-
die , quoiqu'il ait été en uiage du teïns de Schroder ,
pour diffiper les crevaffes que laiffent la galle & les
pullules.
On l'employé fouvent comme un cofmétique dans
le fard , & dans les pâtes avec lefquelles on fe lave les
mains. (Ar)
Baleine, {en Agronomie. ) eft une grande conftel-
lation de l'hémifphere méridional fous les Poiffons ,
& proche de l'eau du Verfeau. V. Constellation.
Il y a dans la baleine 22 étoiles félon le catalogue
de Ptolomée ; 2 1 , lelon le catalogue de Tycho ; 22 ,
félon Heveihis; & 78, dans le catalogue Britanni-
que. (O)
B ALE VRES , f. f. pi. ( terme d'Architecture. ) du La-
tin bislabra , qui a deux lèvres ; c'eft l'excédent d'une
pierre fur une autre pi es d'un joint, dans la douille
d'une voûte , ou dans le parement d'un mur ; &c on
retaille les balevres en ragréant : c'eft auffi un éclat
près d'un joint occalionné dans la pierre , parce que
le premier joint étoit trop ferré. ( P)
Balevres , ( en Fonderie en grand. ) on donne ce
nom à ces inégalités qu'on apperçoit fur la fui-face
des pièces fondues , & qu'il faut reparer enfuite :
elles font occalîonnées dans là fonte en grand par les
cires , & les jointures des affiles : on a foin par cette
railon que les jointures des affiles tombent aux en-
droits de la figure les moins remarquables , afin que
les balevres en foient plus faciles à reparer; dans la
fonte en petit , les balevres viennent des défauts del'af-
femblage des pièces qui compofent le moule & les
cires. On a ainfi que dans la fonte en grand, l'atten-
tion de les écarter des parties principales , & la même
peine à les reparer.
* B ALI, (Géog.) ville d'Afie, capitale de l'île &
du royaume de même nom, aux Indes. Long.de F île
133-13*- *"*• 9-
* Bali , (Géog.') royaume d'Afrique, dans l'A-
byffinie : le fleuve Havafch le traverfe.
BALISCORNE , ou BASSECONDE , f. f. on don-
ne dans les grojfes forges ce nom à une pièce de fer
MX, fixée fur le deffus de la caiffe des foufflets par
des attaches de fer NN , qui l'embruffent : le bout
M en eft arrondi , &c'eft fur cette partie que portent
les cammes de l'arbre qui fait bailler la caiffe. Voye^_
Planche FI I. fig. l. des grojfes forges.
BALISES , f. f. ( termes de mer & de rivières. ) c'eft
une marque que l'on met fur un banc dangereux pour
avertir les yaiffeaux de l'éviter, Ces marques font v
BAL
différentes ; quelquefois c'eft un mât ou une pièce de
bois qu'on élevé deffus, ou aux extrémités ; d'autres
fois c'eft un tonneau flottant amarré avec des chaî-
nes Se des ancres fur le fond du banc : on met des ba-
lifes pour indiquer un chenal ou une parle dangereu-
fe : on fe fert également du mot de bouée pour expri-
mer ces marques.
Balise , fe dit aufîî de l'efpace qu'on eft obligé de
biffer le long des rivages des rivières pour le halage
des bateaux.
BALISER un chenal ou unepajfc , c'eft y mettre des
balifes. (Z)
BALISEUR , f. m. {terme a" Eaux & Forêts.} eft un
officier chargé de veiller aux terres des riverains , à
l'effet d'en reculer les limites du côté du bord de la
rivière, àladiftance preferite. V. Riverain. (H)
BALISIER , f. m. cannacorus , {Hifl. nat. bot.') gen-
re de plante à fleur liliacée monopétale en forme de
tuyau, divifée en fix parties, dont l'une forme une
forte de languette qui femble tenir lieu de piftil , &
qui a au fommet comme une étamine; le calice eft
en forme de tuyau; il embraffe la fleur, & devient
dans la fuite un fruit oblong ou arrondi, membra-
neux , divifé en trois loges , & rempli de femences
prefque fphériques. Tournefort, Injl. rei herb. Voye^
Plante. (/)
BALISTE, f. f. ( Art. milit. ) eft une machine de
guerre dont fe fervoient les anciens pour lancer des
traits d'une longueur ck. d'un poids furprenant; elle
chaffoit aufîî des balles ou boulets de plomb égaux
au poids des gros traits qu'elle lançoit.
Les écrivains de l'antiquité , au moins le plus
grand nombre , font oppolés les uns & les autres à
l'égard de la balijle & de la catapulte, f^oye^ Cata-
pulte. Ils confondent fouvent ces deux machines ,
qui fuivant M. le Chevalier de Folard différent beau-
coup entr'elles dans leur ufage comme dans leur conf-
trudtion.
Ammien Marcellin exprime la catapulte par le ter-
me de tormentum , & quelquefois cY onagre. Voy. ONA-
GRE. Froiffart fe fert de celui cY engin : celui-ci eft
trop général ; car on peut entendre par ce terme la
balijle & la catapulte. Il y a auffi des auteurs qui lui
ont donné le nom de feorpion : mais le feorpion chez
ceux qui paroiffent les mieux inftruits , n'eft autre
choie que la balifle. Voye?v Scorpion.
« La balijle , dit M. le Chevalier de Folard , dont
nous tirons la defeription fuivante, » formoit com-
» me un arc brifé ; elle avoit deux bras ,, mais droits ,
» & non pas courbes comme l'arc d'une arbalète,
» dont les forces agiffantes font dans les refforts de
» l'arc même dans fa courbure : celles de la balijle font
» dans les cercles comme celle de la catapulte: cela
» nous difpenfera d'entrer dans une deicnption trop
» détaillée de (es différentes parties. La figure entera
» infiniment mieux comprendre la ftructure & la puif-
» fance qui la fait agir, que l'explication ne pour-
» roit faire ». Vcye\ cette figure , PI. XII. de Fortifica-
tion : elle a pour titre Balifle Je flege. Voici le détail de
fes principales parties.
Une balifle de cette efpece lançoit des traits de
foixante livres , longs de trois pies neuf pouces ik.
neuf lignes : cela veut dire , s'il faut s'en fier à Vi-
truve, dit le Chevalier de Folard , « que les trous
v des chapiteau . étoient de huit pouces neuf lignes
» de diamètre, c'eil-à-dirc, le cinquième delà lon-
» gueur uirtrait. Elle eft compofée d'une bâte i , des
» dix montans 3 , 4, de quinze diamètres 6c dix li-
» gnes de hauteur fans les tenons des deux traver-
» ians 5,6: leur longueur eft de dix-fept diamètres
» dix lignes ; 7, font lus deux chapiteaux du traver-
» fant; 5 , 8, les chapitaux de celui d'en-bas 6 ; ces
» deux traverfans font foûtenus & fortifiés des deux
» poteaux équarris 9 ; de cinq diamètres de hauteur
B A L
J7
» fans les tenons , & de deux pies de greffent corn-'
» me les montans. L'intervalle d'entre les deu
» teaux 9, & les deux montans 3,4, où l'ont pia-
» ces les chapiteaux, eft de lept diamètres environ 5
» iofont les deux écheveaux de cordes de droit & de
» gauche; 1 1 les deux bras engagés dans le 1
» des cheveaux: leur longueur eftde dix diamètres ,
» compris les deux crochets qui font à l'extrémité de
>» chaque bras , où la corde, ou pour mieux dire, lé
» gros cable eft attaché comme la corde d'une
» 1ère. Ce cable doit être compofé de plulicurs cor-
» des de boyaux extrêmement tendu : il faut qu'il
» foit d'abord un peu court, parce qu'il s'allonge &
» fe lâche dans le bandage : on raccourcit en le tor-
» dant.
» Les bouts des bras n'ont point de cuilleron coin-
>> me celui de la catapulte ; à cela près ils doivent être
» femblables, parfaitement égaux dans leur molle" .
» dans leur longueur, dans leur poids, & il faut qu : •
» ne plient point dans le plus violent effort de leur
» teniion. Les traits 13 ne doivent pas moins être
» égaux en tous fens que les Bras, qui feront placés
» fur une même ligne parallèle , à même hauteur par
» conséquent, & au centre des deux écheveaux dans
» lefquels ils font engagés.
» Les deux montans 3 , 4, doivent être courbes à
» l'endroit 14 où ils frappent dans la détente. Dans
» cette courbure on y pratiquera les couffinets 15;
>> cet enfoncement fait que les bras fe trouvent pa-
» ralleles à Fécheveau , & qu'ils décrivent chacun
» un angle droit dans leur bandage, c'eft-à-dire dans
>» leur plus grande courbure, li importe peu, à l'é-
» gard des balijles, que les deux bras frappent de
» leurs bouts ou de leur milieu contre les deux coui-
» linets ; ainfi on peut , autant qu'on le juge à pro-
» pos, diminuer de la largeur desdeux chaflis où font
» placés les deux écheveaux de cordes, fans retran-
» cher de leur hauteur,
» L'intervalle d'entre les deux poteaux 9 , qui doit
» être au milieu des deux traverliins, oit l'on intro-
» duit l'arbrier 16 , doit être un peu plus étroit que
» l'arbrier, afin de pratiquer une entaille dans l'in-
» teneur des poteaux 9 de deux où trois pouces des
» deux côtés , afin de le tenir ferme. C'eft fur cet ar-
» brier que l'on place le gros trait &c que l'on pratique
» un canal parfaitement droit; la longueur le prend
» fur la courbure des deux bras avec la corde iz:
» ainfi on connoit la longueur qu'il faut donner au
» canal & jufqu'à l'endroit où la noix 17 de la dé-
» tente fe trouve placée pour recevoir la corde de
» l'arc à fon centre. Cette noix fert d'arrêt, & la dé-
» tente eft femblable à celles des arbalètes. 11 y a une
» choie à obièrver à l'égard de l'arbrier : il faut qu'il
» foit placé jufte à la hauteur de la corde qui doit l'ri-
» fer deffus; car fi elle étoit plus haute, elle ne pren-
'» droit pas le trait; & fi elle appuyoit trop fortement
» deffus, il y auroit du frottement fur le canal oii le
» trait cil étendu , ce qui diminueroit la puiilance qui
» le chaffe.
» A deux niés en-deçà de la détente efl le tr.iv il
» 1 8 , autour duquel fe dévide la corde ; & lorfqu'on
« veut bander la machine, on accroche la corde
» l'arc à fon centre par le moyen 2 fer
» 19. Cette main a deux crochets qui faififfentla eor-
» de en deux endroits pour l'amener. La diftance d un
» crochet à l'autre doit être plus grande que ia lar
» de la noix, qui doit avoir une ouverture au milieu
» comme celle des arbalètes , dans laquelle on inl
» duit le talon du trait contre la 1 prend à
» la noix.
» J'ai dit que les deux montans j
» pu\ es fur leur baie à tenons & à m h 1
» voient être appuyés & retenus ( ncoi s\
» fautes contreiichvï. Héron 6c Vitn
38
BAL
» mettent une efpece de table ou d'échafaudage 10 ,
» fiir lequel l'arbrier eft en partie ibûtenu , dont la
» hauteur jointe à l'épaifl'eur de l'arbrier devoit ar-
» river jufte à la hauteur de la corde n. Je crois,
» dit toujours M. de Folard , que cette table n'étoit
» faite que pour aider à foûtenir l'arbrier , qui de-
» voit être compoié d'une groffe poutre de leize dia-
» mètres & de deux pies de longueur , d'une de lar-
» geur& d'une d'épaifl'eur , conforme au trait qu'elle
» lançoit. Ajoutez la force extraordinaire du banda-
» ge, capable de faire plier la plus forte poutre, fi
» ion épaiiieur ne iurpaiïe fa largeur. J'imagine tou-
» tes ces raifons , pour prouver la néceflité de cette
« table, parce que je n'en vois aucune autre ; car à
» parler franchement, cette charpente paraît un peu
» fuperflue : mais comme il faut refpecter l'antiquité
» & l'expérience de ces fortes de machines que nous
» n'avons point, nous hafardons cette ftmeture dans
» ce qui nous a paru inutile , qui ne l'eft peut-être
» pas ».
Cette réflexion de M. de Folard eft d'autant plus
jufte , que les anciens s'étant expliqués d'une manière
fort obfcure fur les différentes machines de guerre
qui étoient en ufage de leur tems , il eit bien difficile
de fe flatter d'avoir deviné jufte tout ce qui concerne
ces machines : auffifîM. de Folard, dit un habile jour-
naliste , napas toujours donné dans le vrai à cet égard ,
toujours peut-on dire qu'on lui a de grandes obligations ,
& qu'il en a peut-être approché plus que tous ceux qui ont
travaillé avant lui fur le mémefujet. Bibliothèque rai-
fonnée des favans de l'Europe , tome V.
Au refte les anciens hiftoriens rapportent des ef-
fets de ces machines qui nous paroiflent prefqu'in-
croyables. M. de Folard a eu foin de les rapporter
dans lbn Traité de l 'attaque des places des anciens. Voy.
Catapulte. (Q)
BALISTIQUE, fubft. fem. ( Ord. encyclop. Enten-
dement, Raijbn , Philojbphie ou Science. Science de la
nature. Mathématiques. Mathématiques mixtes. Mécha-
nique. Dynamique. Dynamique proprement dite. Balif-
tique.) c'eit la feience du mouvement des corps pe-
fans jettes en l'air fuivant une direction quelconque.
Ce mot vient du Grec $-1xXù> , jacio , je jette.
On trouvera à l'article Projectile les lois de la
Balijliquc. La théorie du jet des bombes eft une par-
tie coniidérabie de cette feience, & c'eit principale-
ment cette théorie qu'on y traite. Nous avons là-dei-
fus pluiieurs ouvrages , VArt dejetter les bombes de M.
Blondel , de l'Académie des Sciences , un des pre-
miers qui aient paru fur cette matière ; le Bombardier
français par M. Belidor , &c Mais perfonne n'a traité
cette feience d'une manière plus élégante & plus
courte que M. de Maupertuis , dans un excellent mé-
moire imprimé parmi ceux de l'Académie des Scien-
ces de Paris de 1732 ; ce mémoire elt intitulé Balif-
tique arithmétique , & on peut dire qu'il contient en
deux pages plus de choies que les plus gros traités
que nous ayons fur cette matière. M. de Maupertuis
cherche d'abord l'équation analytique de la courbe
AMB (fig. 4J. Méch. ) , que décuit un project ile A
jette fuivant une direction quelconque^/?; il trou-
ve l'équation de cette courbe entre les deux coor-
données^ T, x, & T M,y , &: il n'a pas de peine à
faire voir que cette équation eft celle d'un parabo-
le. En faifantj- = o, dans cette équation, la valeur
correfpondante de x lui donne la partie A B du jet ;
pour avoir le cas ou la portée A B du jet elt la plus
grande qu'il eft poflible , il prend la différence de la
valeur de A B , en ne fanant varier que la tangente
de l'an<de de projection RAB ; & il fait enfuite cette
différence = o , fuivant la règle de maximis & mini-
mis , ce qui lui donne la valeur de la tangente de l'an-
gle deprojeftion, pour que ^5 foit la plus grande
qu'il eft poflible , & il trouve que cette tangente doit
BAL
être égale au rayon, c'eft-à-dire , que l'angle BAR
doit être de 45 degrés. Pour avoir la hauteur t m du
jet, il n'y a qu'à faire la différence dej = o, parce
que t m eit la plus grande de toutes les ordonnées.
Pour frapper un point donné n avec une charge don-
née de poudre , il iubftitue dans l'équation de la pa-
rabole , à la place de x , la donnée AI, & à la place
dej, la donnée In, & il a une équation dans la-
quelle il n'y a d'inconnue que la tangente de l'angle
de projeûion RA B , qu'il détermine par cette équa-
tion , &c. & àinii des autres.
Au refte , la plupart des auteurs qui ont traité juf-
qu'à prélent de la Baliflique, ou , ce qui eft prefque la
même choie , du jet des bombes , ne l'ont fait que dans
la fuppofition que les corps fe meuvent dans un mi-
lieu non réiiftant ; fuppofition qui eft allez éloignée
du vrai. M. Newton a démontré dans fes principes ,
que la courbe décrite p^r un projectile dans un milieu
fort réiiftant , s'éloigne beaucoup de la parabole ; &
la réiiftance de l'air eft affez grande pour que la dif-
férence de la courbe de projection des graves avec
une parabole ne foit pas inieniible. C'eft au moins
le fentiment de M.Robins, de la Société royale de
Londres ; ce favant a donné depuis peu d'années un
ouvrage Anglois , ietitulé A new principles ofgunnery ,
nouveaux principes d' 'Artillerie ; dans lequel il traite
du jet des bombes , & en général du mouvement des
projecfiles , en ayant égard à la réfiftance de l'air,
qu'il détermine en joignant les expériences à la théo-
rie , il n'y a point de doute que la BaliÇtique ne le per-
fectionnât confidérablement, ii on s'appliquoit dans
la fuite à envifager fous ce point de vue le mouve-
ment des projectiles. Voyt[ Résistance.
Selon d'autres auteurs , qui prétendent avoir aulîi
l'expérience pour eux, la courbe décrite dans l'air
par les projectiles eft à peu-près une parabole, d'où
il s'enfuit que la réfiftance de l'air au mouvement des
projectiles eft peu confidérable. Cette diverfité d'o-
pinions prouve la néceflité dont il ieroit de conftater
ce fait de nouveau par des expériences iùres Se bien
conftatées. (O)
BALIVEAU , f. m. {terme d'Eaux & Forets. ,) ligni-
fie un jeune chêne , hêtre ou châtaignier au deflbus
de quarante ans, refervé lors de la coupe d'un taillis.
Les ordonnances enjoignent d'en laifler croître en
haute-futaie feize par chaque arpent , afin de repeu-
pler les ventes. {H)
* On peut conlidérer les baliveaux par rapport aux
bois de haute-futaie, & par rapport aux taillis. Par
rapport au premier point, M. de Reaumur prétend
dans un mémoire fur l'état des bois du royaume ,
imprimé dans le recueil de l'Académie , année IJZI ,
que les baliveaux font une mauvaife reflburce pour
repeupler le royaume de bois de haute-futaie, parce
qu'une très-grande partie périt; car n'ayant pas pris
dans les taillis qui les couvroient toute la force né-
ceflaire pour réiifter aux injures de l'air , on ne peut
leur ôter cet abri fans inconvénient. Des hfieres en-
tières de jeunes futaies ont péri dans un hy ver froid ,
mais non exceiîivement rude, après qu'on eut coupé
pendant l'été d'autres lifieres qui les couvroient. Il
en arrive amant aux arbres rélervés au milieu de fo-
rêts abattues. Des baliveaux qui ont échappé aux in-
jures de l'air, peu échappent à la coignée du bûche-
ron ; il en abbat au moins une partie dans la coupe
fuivante du taillis : les morts lui donnent occafion
d'attaquer les vifs ; & il eft de notoriété que dans la
plupart des taillis, on ne trouve que des baliveaux de
deux à trois coupes. Mais indépendamment de cela,
dit M. de Reaumur, ces baliveaux ne feront pas des
arbres d'une grande reflburce ; ils ont peu de vigueur
& font tous rabougris. S'ils n'ont pas péri, ils font
reftés malades ; & quelque bon qu'ait été le terrein ,
jamais baliveau ne parviendra peut-être & n'eft par-
BAL
venu à devenir un arbre propre à fournir une longue
poutre , un arbre de preflbir , ni quelqu'autre iem-
blable pièce de bois. Cela ell sûr au moins par rap-
port aux baliveaux réfervés dans les taillis qu'on cou-
pe de dix ans en dix ans au plutôt. Ils ne font jamais
hauts de tige , &C croiflent toujours en pommiers.
Ces inconvéniens des baliveaux feront d'autant
moindres , que le taillis fera coupé dans un âge plus
avancé ; mais à quelqu'âge qu'on le coupe , on ne
peut pas efpérer que les baliveaux réparent les fu-
taies qui s'abbattent journellement.
Quant au fécond point , la confervation des taillis
par les baliveaux ; il ne faut , dit le même auteur ,
que parcourir les taillis oii les baliveaux ont été le
mieux confervés ; on trouvera qu'au- deflbus & tout
autour du baliveau , fur-tout quand il eft parvenu à
âge d'arbre , la place eft nette , & que les fouches
font péries , parce qu'elles fe font trouvées trop à
l'ombre : aufii , bien des particuliers qui fouhaitent
abattre leurs baliveaux , ne le fouhaitent que pour
conferver leurs taillis. Si les baliveaux donnent quel-
ques glands aux taillis , ils les leur font donc payer
cher ; d'ailleurs ces glands tombant au hafard fur la
furface de la terre, & la plupart fous l'arbre même,
ne réuffiflent guère.
M. de Buffon s'accorde en ceci avec M. de Reau-
mur. « On fait, dit cet académicien , dans un mé-
» moire fur la confervation & le rétablijjement des fo-
» rets, année 1739 , que le bois des baliveaux n eft
» pas de bonne qualité , & que d'ailleurs ces bali-
» veaux font tort aux taillis. J'ai obfervé fort fou-
» vent les effets de la gelée du printems dans deux
» cantons voifins des bois taillis. On avoit confervé
» dans l'un tous les baliveaux de quatre coupes fuc-
» ceffives ; dans l'autre on n'avoit réfervé que les
» baliveaux de la coupe aftuelle. J'ai reconnu que la
x gelée avoit fait un îi grand tort au taillis iurchargé
» de baliveaux , que l'autre taillis l'a devancé de près
» de cinq ans fur douze. L'expofition étoit la même :
» j'ai fondé le terrein en différens endroits , il étoit
» femblable. Ainfi, continue M. de Buffon , j'attri-
» bue cette différence à l'ombre & à l'humidité que
» les baliveaux jettoient fur le taillis , & à l'obftacle
» qu'ilsformoient au defféchement de cette humidité
» en interrompant l'aûion du vent & du foleil. Il fe-
» roit donc à propos de recourir à des moyens plus
» efficaces que les baliveaux , pour la reftauration de
» nos forêts de haute-futaie , & celle de nos bois tail-
» lis ». Voye{ FORÊTS , TAILLIS.
* BALKE ou BALKHE, ( Géog. ) ville d'Aile , au
pays des Usbecs , dans la province du même nom ,
fur la rivière de Dilhas. Long. 85. lat. 36. 40.
* BALLADE , f. f. ( Belles-Lettres. ) pièce de vers
diftribuée ordinairement en trois couplets , tous les
trois de même mefure & fur les mêmes rimes mafeu-
lines & féminines, afùijettie à un refrein qui fert de
dernier vers à chaque couplet , & terminée par un
envoi ou adrefle qui doit auffi finir par le refrein. Le
nombre des vers du couplet n'eft point limité. Ce
font ou des quatrains , ou des fixains , ou des hui-
tains , ou des dixains , ou des douzains ; l'envoi eft
ordinairement de quatre ou de cinq vers , mais quel-
quefois tous féminins. Voilà du moins les lois aux-
quelles Jean Marot s'eft conformé dans fes trois bal-
lades d'amour , dont les deux dernières font excel-
lentes ; elles font de vers de dix fyllabes ; c'eft la
mefure affeftée à cette forte d'ouvrage : il y a ce-
pendant des ballades en vers de huit fyllabes. On
ne fait plus guère de ballades , & je n'en fuis pas trop
furpris ; la ballade demande une grande naïveté dans
le tour, l'cfprit, le ftyle , & la penfée, avec une
extrême facilité de rimer. Il n'y a prelque que la
Fontaine qui, réunifiant toutes ces qualités, ait lit
39
BAL
faire des ballades & des rondeaux depuis Clément
Marot.
BALLE, f. f. fe dit en général de tout corps à qui
l'on a donné artiftement la figure fphérique , ainfi
on dit , une balle de paume » une balle de coton ,
&c.
* BALLE , f. f. ÇHi/I. anc. & gymnaf. ) infiniment
dont les anciens fe fervoient dans la danfe appelles
fphérijlique. Voye{ SphÉRISTIQUE.
Les différens jeux de balle produifoient parmi les
anciens différens effets relatifs à la confervation d^
la fanté. Les grands mouvemens que ces jeux occa-
fionnent , les rendent utiles lorlque l'exercice eft
néceffaire , & que les perfonnes font en état de le
fupporter. Ils donnent de la vigueur, & font allon-
ger les fibres mufculeufes & nerveufes ; auffi voit-on
qu'entre les jeunes gens , ceux qui y font exercés ,
font communément plus grands , plus forts, & plus
alertes que les autres, f^oye^ Exercice , Gymnas-
tique , Jeu.
Balle , dans VArt milit. comprend toutes fortes
de petites boules ou boulets pour les armes à feu ,
depuis le canon jufqu'au piftolet. Voye^ Boulet ,
Arme à feu, Canon, &c
Celles qui fervent pour les canons font de fer ;
celles des moufquets , carabines , & piftolets , font
de plomb. On a voulu fe fervir de balles de fer pour
ces armes : mais on a reconnu qu'outre leur légèreté
qui ne permet pas de tirer juite , elles ont encore le
défaut de rayer le canon du fufil.
Il faut remarquer que quoiqu'on dife ordinaire-
ment un boulet de canon, on dit auffi qu'une pièce de
batterie porte 36 , 33 , ou 24 livres de balle. On dit
encore charger le canon à balle , pour dire charger à
boulet. (Q)
* Les balles dont on charge les petites armes à feu ,
fe fabriquent de la même manière que les dragées
moulées , mais dans des moules plus grands. Voyc{
Varticle Fonte de la dragée au moule. Il y en a de 26
fortes différentes , numérotées félon la quantité ou le
nombre qu'il faut pour faire une livre pelant. La for-
te la plus grofie eft des huit à la livre ; la forte fui-
vante eft de feize à la livre , & chaque balle pefe
une once. La plus petite, qui approche beaucoup de
la dixième forte de dragée , eft des 1 20 à la livre.
Voye7^ la Table à Varticle cité.
On appelle balles ramées , deux balles attachées en-
femble par un fil de fer ; & balle de calibre , celle qui
eft de même groffeur que le calibre du fufil.
* Comme il importe aux chafieurs qui ont quel-
quefois occafion de tirer du poiffon dans l'eau , de
lavoir fi les balles y fouffrent ou non de la réfraction ,
je vais rapporter quelques expériences que M. Car-
ré , de l'académie royale des Sciences , a fait faire ,
& qu'on peut voir dans le recueil de cette académie
année 1705. On tira un fufil chargé à balte deux coups
dans un baffin de pierre plein d'eau , de deux pies
& demi de diamètre , profond de feize pouces, fous
un angle de 20 degrés & fous celui de 80 : mais le
grand effort de l'eau contre les parois du baffin où
l'on avoit mis les ais , le dérangèrent tellement qu'on
ne put lavoir fi les balles fouffroient quelque dérange-
ment dans la direction de leur mouvement. Le^ ex-
périences réitérées dans des bennes pleines d'eau ont
été accompagnées du même inconvénient : elles ont
été brilées fur le champ , & ce fuient les cerceaux
d en-bas que l'eau fit cafi'er.
On feroit tenté de croire que c'étoit la balle qui
faifoit bnfer les vaiffeaux en piiffant à travers les
ais , & non le mouvement de l'eau : mais l'expérience
qui fuit ne lailîe aucun doute que , .' ne fo t la der-
nière de ces caufes. Un coup fut tire dans unecaiffe
quarrée d'un pie de haut , & de fiac pouces d'épaif-
feur, dont les quatre ais qui faifoient la longueur
40
BAL
BAL
avoient chacun un pouce d'épaiffeur, & les deux
bouts en avoient chacun deux , afin d'y bien atta-
cher les autres avec force clous : on avoit rempli ce
vaiffeau par une petite ouverture ; les ais turent per-
cés par la balle fans en être brifés : mais l'eau s'en
tourmenta de manière qu'elle fit écarter ces ais les
uns des autres, & que la caiffe fut rompue.
Il fallut donc pour obtenir un réfultat exa£t fur la
réfraction, recommencer les expériences dansun bal-
fin de pierre : on en prit un dont la longueur intérieu-
re étoit de trois pies trois pouces , la largeur d'un pie
huit pouces , & la profondeur d'un pié & un pouce ;
on fit placer à fon côté le plus éloigné un ais pour
recevoir les balles ; un autre ais vertical & pareil
à celui-là occupoit le milieu du badin ; & au-deffus
du côté le plus voifin du tireur , un carton : l'arque-
bufe étoit arrêtée fixe à huit pies du badin. La balle
a percé le carton : mais elle eit tombée appiatie , à
peu près comme une pièce de douze fols , entre le
carton & le premier ais. Au fécond coup , la balle
s'eft divifée en trois morceaux applatis , fans avoir
atteint le premier ais. On a tiré deux autres coups
avec une forte charge , fans trouver de balles dans
le fond du badin ni contre les ais : ces balles avoient
près de quatre lignes de diamètre ; elles étoient
faites exprès pour l'arquebufe , & ne pouvoient en-
trer dans le canon qu'en les pouffant avec une ba-
guette de fer.
On a mis dans un réfervoir de 10 pies en quarré
deux ais parallèles entre eux & à l'honfon , & à un
pié de diltance l'un de l'autre : celui de deffus ne fai-
fant qu'un même plan avec la furface de l'eau , on a
tiré deux coups fur cet ais , fous un angle de 30 de-
grés , avec une égale charge de poudre ; le premier
avec une arquebufe dont le canon avoit trois pies
deux pouces fix lignes de long , ôc la balle trois lignes
\ de diamètre ; leVecond avec un fufil dont le canon
avoit trois pies dix pouces trois lignes de long , &C la
balle fept lignes de diamètre : la groffe balle a percé
les deux ais , & traverfé par conléquent toute l'éten-
due de l'eau qui étoit entre eux ; au lieu que la petite
n'a percé que l'ais fupérieur , & s'eft arrêtée appia-
tie fur fais inférieur : d'oii l'on a conclu que le fulil
étoit plus propre pour l'expérience de la rétraction
q*ie l'arquebufe.
On a attaché au-deffus du badin de pierre qu'on a
décrit plus haut , un fufil fur deux appuis fixes , dont
l'un étoit à cinq & l'autre à fept pies de diftance du
badin : on l'a affûré & rendu immobile fur ces ap-
puis : il faifoit avec l'honfon , ou la furface de l'eau
ou du badin , un angle de vingt degrés ; il étoit char-
gé du poids de trois deniers vingt grains de poudre ,
avec une balle de fept lignes de diamètre , qui pefoit
dix-fept deniers fix grains. La balle a percé le carton ,
le premier ais , & s'eft arrêtée dans le fécond : on a
vuidé l'eau , & les centres des trois trous le font trou-
vés exactement dans la même direction.
La même expérience réitérée a donné la même
choie : en augmentant la charge , on a remarqué
que la balle entroit moins ; & chaffée par fept deniers
fix grains de poudre , elle s'eft appiatie d'un côté , &
a peu frappé l'ais du milieu.
Chaflee de l'arquebufe avec la même charge, elle
s'eft divifée en deux parties , chacune inégalement
appiatie, fans avoir touché l'ais du milieu. Chadée
de la même arme avec la moitié de la charge , elle
n'a point atteint l'ais du milieu , &c n'a perdu que
peu de fa fphericité.
Une balle de fept lignes pouffée avec une forte
charge dans un réfervoir de 40 pies de diamètre ,
profond de fix pies , contre un linge parallèlement
étendu à la furface de l'eau, à deux pies de profon-
deur , eft reftée fur ce linge appiatie , mais fort iné-
galement.
La balle de même calibre , chaffée de la même ar-
me avec un tiers de poudre de plus, s'eit divifée en
plulieurs petits morceaux de la groffeur d'une len-
tille, &£ diveriement figurés.
La balle tirée perpendiculairement à la furface de
l'eau , s'eft appiatie affez régulièrement.
Quand on tire dans l'eau , il s'en élevé une quan-
tité plus ou moins grande , &c plus ou moins haut ,
félon la charge : quand la charge eft forte , l'eau s'é-
lève jufqu'à vingt pies.
La balle de fept lignes chadée par quatre deniers
de poudre ou environ, entre affez avant dans l'eau
fans perdre de fa fphericité ; chalïce par huit deniers
de poudre , elle en perd la moitié ; par douze deniers,
elle la perd entièrement ; &c par leize , elle fe diviie
en plulieurs parties.
D'où il s'enfuit i°. que la commotion communi-
quée à l'eau par la balle eft très-conlidérable ; en ef-
fet fi l'on tire fur une rivière , on en fentira le riva-
ge ébranlé fous les pies : 2.0. que plus la charge eft
forte , moins la balle fait de progrès dans l'eau : 3°.
qu'il n'y a point de réfraction fenfible : 40. par con-
léquent qu'il ne faut tirer dans l'eau , ni au -délions
ni au-deffus de l'objet qu'on veut atteindre : 50. qu'il
ne faut employer qu'une petite charge.
Mais on fait qu'une balle qui pallè à -travers un
morceau de bois mobile fur des gonds , & fort épais ,
ne fe défigure prefque pas , &c ne lui communique
aucune impullion ; tandis qu'il eft confiant par les ex-
périences qui précèdent, qu'elle s'applatit fur l'eau,
& occafionnc une grande commotion à tout le riva-
ge. D'où vient , peut-on demander , la différence de
ces phénomènes ? l'eau feroit-eile plus difficile à di-
viler que le bois ?
Voici comment je penfe qu'on pourroit répondre
à cette objection : qu'un corps mû ne communique
du mouvement , au moins de trandation , à un au-
tre , qu'autant que cet autre lui rélifte ou s'oppofe à
fon mouvement. Ayez un corps , même mou , ren-
dez-le réfiftant , & auffi-tôt vous lui communiquerez
beaucoup de mouvement , & à tout ce qui l'envi-
ronnera. Si vous enfoncez doucement un bâton dans
l'eau, vous la divilerez fans peine , & prefque fans
l'agiter ; fi vous la frappez avec impétuofité , vous
donnez lieu à fon élafticité , & en même tems à fa
réliftance ; vous lui communiquez beaucoup de mou-
vement, mais vous ne la divifez pas : voilà pour le
corps duide. Quant au corps folide , ce corps folide
ne peut réfifter à la balle qui vient le frapper 3 que
par l'adhélion de les parties : fi l'adhéfion de ces par-
ties n'eft rien relativement à la vîteffe de la balle qui
le vient frapper , il eft évident qu'il ne peut être mû
d'un mouvement de trandation , parce que rien ne
réfifte à la balle. Qu'on fuppofe une porte ouverte
percée d'un trou couvert d'une toile d'araignée ; fi
j'applique mon doigt contre les endroits folides de
la porte , ces endroits réfiftant à fon impullion , la
porte tournera fur les gonds & le fermera : mais elle
reftera immobile avec quelque vîtelfe que je porte
mon doigt contre elle , li je l'applique contre la toile
d'araignée : or tout le tiffu de la porte devient toile
d'araignée , relativement à la vîteffe d'une balle chaf-
fée par un fufil ; & l'adhélion des parties n'eft pas
affez grande pour donner lieu à l'élafticité.
Mais on pourra demander encore pourquoi l'é-
lafticité de l'eau frappée avec vîtedè a plutôt lieu ,
quoique fes molécules n'ayent prefqu'aucune adhé-
rence entr'elles , que l'élafticité du bois dont les mo-
lécules tiennent les unes aux autres très-fortement.
Il faut , je croi, recourir ici à la denfité , à la conf-
titution particulière des corps ; & de ces deux càufes ,
la dernière & la principale nous eft malheureufement
très-peu connue.
Balle À feu , eft dans l'Artillerie , un amas d'arti-
fice
BAL
fice de figure ronde ou ovale de différentes grofleurs ,
«qui fe jette à la main ou avec le mortier.
Manière la plus ufitée pour faire des balles à feu. L'on fe
fertpour faire des balles à feu d'une livre de falpetre ,
d'un quarteron de fleur de foufre,deux onces depouf-
fier broyé paffé par le tamis de foie , & mêlé avec
l'huile de pétrole ou huile de lin ; il faut en faire de
petites boules de la groifeur d'une balle , les percer
quand elles feront humides , y mettre de la corde
d'amorce en travers , les parler quatre à quatre
ou deux à deux , & les rouler dans le pouffier vif ,
après quoi cela prend feu.
Autre manière pour faire les balles à feu , qui peu-
vent s'exécuter dans les mortiers. Il faut avoir un porte-
feu d'un pié &C demi ou de deux pies de longueur ,
fuivant la groifeur dont on voudra faire la balle , fur
un pouce on un pouce & demi de diamètre , lequel
fera chargé d'une compofition que l'on aura faite
avec deux livres de falpetre , une livre de foufre ,
& demi-livre de poudre ; le tout bien pilé féparé-
ment , le parler dans un tamis bien fin , & après mê-
ler le tout enfemble autant qu'il fe pourra.
En cas que le feu foit trop lent , on y ajoutera un
peu de poudre pilée ; & s'il brûle trop vite , on y
ajoutera un peu de falpetre pour le faire durer da-
vantage. Le milieu de la balle fera un petit fac rem-
pli de même compofition. Les porte- feux feront paf-
ïés au-travers de ce lac ; & par-deflus, pour couvrir
la balle, on mettra de gros copeaux avec de la filafle,
que l'on fera tremper dans un grand chaudron ou
chaudière , dans laquelle on mettra 6 à 7 livres d'hui-
le de lin , & autant d'huile de térébenthine , avec
8 ou 9 livres de goudron ou poix que Ton fera chauf-
fer doucement, & qu'on remuera bien fouvent ; &
lorfque le tout fera bien lié , l'on fera tremper dans
la chaudière la filafle & les copeaux , que l'on met-
tra à part pour les faire lécher à demi ; & après on
fera tremper aulîï de la vieille toile bien grofliere ,
qui fcrvira pour envelopper la balle. Il faut avoir du
foufre pilé fans être pallé au tamis , & du falpetre,
& en jetter fur la toile , comme auffi fur la filafle &
les copeaux à part, pour que le feu foit plus clair.
Il faut obfervcr qu'il faut mettre de tems en tems du
fil de ter autour de la matière qu'on mettra dans la
boule pour la faire tenir , & ne la pas trop prelfer ,
parce que le feu leroit trop lent. Quand la matière
efl: un peu mouvante , la flamme en eft plus grande.
Si l'on veut davantage prefier le feu , il faut pren-
dre trois livres de poudre pilée , une livre de char-
bon pilé , mêler le tout enlemble , & après l'étendre
fur une table , & faire rouler la balle fur cette ma-
tière lorfqu'elle fera garnie de copeaux & de filafle,
&C après l'on mettra la toile par-delfus ; ou fi l'on ne
veut pas fe fervir de toile pour ia dernière envelop-
pe, l'on peut y faire une petite caille de bois d'en-
veloppe léger ; le tout dépend de la conduite de l'of-
ficier qui s'en doit fervir ; il peut ie corriger à la pre-
mière ou féconde balle qu'il tera jouer.
Autre manière de compofition de balles à feu qui fe
jettent avec le mortier , rapportée dans le Bombardier
François de M. Belidor. Pour compofer ces fortes de
balles il faut 30 livres de poudre , <; livres de poix-
blanche ou réfine , 10 livres de poix noire, 2 livres
de fuif de mouton , 2 livres d'étoupes , 4 grenadei
chargées , 4 cordes pour les montans , grofles envi-
ron comme le doigt, longues chacune de 6 pics &
demi ; 6 brafles de corde de la groifeur du petit doigt,
& delà toile pour un lac de 1 1 pouces de diamètre,
fur 22 pouces de hauteur.
Il tant faire fondre la poix dans une chaudière ou
marmite de fer ; & lorfqu'elle fera fondue , y jetter
les deux livres de fuif de mouton , que l'on aura eu
foin de faire bien hacher: le tout bien incorporé en-
femble , on le remuera de tems en tems avec la foa-
Tome II,
BAL
41
Iule de fer , & l'on en ôtera avec Fécumoire les corps
étrangers. On retire cette chaudière de deflus le feu
pour la porter la plus chaude qu'il fe peut , auprès
d'une autre chaudière de fer , que l'on aura fait en-
terrer de façon qu'il y ait un glacis autour d'environ
fix pouces , pour que la compofition que l'on verfe
doucement dans cette autre chaudière , ne s'écarte
pas. Il faudra échauffer la chaudière enterrée avec
un peu de braife , de façon qu'on la puifle toucher
de la main , &c la bien nettoyer avec un fac à terre
pour qu'il ne refte point de feu. Enfuite on y verfe
la compofition , fur laquelle on répand peu à peu les
trente livres de poudre , en faifant remuer toujours
avec deux fpatules ou pelles de fer rondes. Cette
poudre bien mêlée avec la compofition , on y met
l'étoupe par petits morceaux , faifant toujours re-
muer à force de bras pour qu'elle s'imbibe parfaite-
ment ; après quoi on formera la balle à feu. Pour cela
on noue les quatre cordes enlemble dans leur milieu,
ce qui forme huit montans ; on pôle le culot du lac fur
le nœud ; on met dans le fond environ un tiers de la
compofition , fur laquelle on met encore deux gre-
nades , que l'on couvrira d'un autre tiers de compo-
fition. On lie enfuite le fac avec une ficelle par le
haut à dix- huit pouces ou environ de longueur ; puis
on raflemble les huit montans , qu'on lie au-deflus du
fac avec une autre ficelle , obfervant que le fac foit
toujours bien droit ôc bien à-plomb fur l'on culot,
que les montan? foient également diflans les uns des
autres le long du lac. Ces précautions priles , on cor-
delle la bulle à feu , fermant le culot comme celui d'un
panier ; on continue julqu'à la moitié de la hauteur
de la balle , obfervant de bien tirer les montans à me-
lure que l'on monte les travers , qui doivent être
diflans de deux pouces les uns des autres. On lie les
montans à demeure avec de la ficelle , & on conti-
nue de cordeler jufqu'en haut , ferrant les montans
également , afin qu'ils reftent droits autant qu'il fe
pourra, & bien partagés.
Cette balle à feu qui doit avoir la forme d'un œuf
étant faite , on fait un anneau avec le refle des mon-
tans ; on les lie avec de la ficelle pour pouvoir y paf-
fer un levier , pour la tremper dans une chaudière où
efl pareille compofition que celle des tourteaux ,
pour la goudronner de tous côtés ; après quoi on la
met dans de l'eau pour la refroidir : on perce enfuite
deux trous auprès de l'anneau avec une cheville de
bois d'environ un pouce de diamètre & de cinq à
fix pouces de profondeur , obfervant que ces deux
chevilles puiflent fe joindre en un point. On a foin
de bien grailler les chevilles qui doivent relier dans
la balle julqu'à ce que l'on veuille l'exécuter , afin
qu'alors on puifle les retirer aifément. On remplit les
trous qu'elles laiflent , avec de la compofition pareille
à celle des fulées de bombe, obfervant de la battre
avec une machine de cuivre ou de bois , crainte d'ac-
cident : mais lorfque l'on ne veut pas garder long-
tems la balle à feu , on charge les fulées de fuite au
moment qu'elle efl froide , de la façon qu'il efl dit ;
on les coeffe avec de la cire préparée, y mettant à
chacune un petit bout de ficelle pour les reconnoître
au befoin. La balle à feu s'exécute dans le mortier
comme la bombe. Les bombardiers mettent le feu
en même tems aux fulées; & lorfqu'on les voit bien
allumées , on met le feu au mortier.
Quand on fe fert de balles à feu pour découvrir
les travailleurs de l'ennemi, il faut faire enforte de
pointer le canon de manière qu'elles ne montent point
fort haut, de crainte qu'elles ne s'entei ; ont. Elles fer-
vent auffi pour mettre le feu dans les mapalins à fou-
rage , de même que dans les maifons ; & en ce cas ,
on donne au mortier le degré d'élévation née.
pour que la balle tombe fur les toîts comme la bom-
be , & qu'elle les perce. On peut mettre dans la balle
A%
BAL
ùfeu avec les grenades, des bouts de canon de fil*
fils , de piftolets remplis de poudre & de balles. Les
grenades y font miles pour écarter ceux qui vou-
draient l'éteindre.
On peut encore mettre dans la balle à feu une bom-
be de fis pouces au lieu de grenades. On place pour
cet effet environ un tiers de composition au fond du
lac , fur laquelle on pofe un tourteau goudronné ,
enfuite la bombe la fufée en bas. On peut mettre aurïï
dans la balle à feu quatre lits de tourteaux &c de gre-
nades avec fulées.
Compofition de balles à feu qu on jette avec la main.
Il faut prendre fix livres de foufre tamifé , autant de
poulverin, autant de falpetre, & autant de crylïal
minéral , une livre &C demie de camfre , trois quar-
terons de vif-argent , une livre Se demie de colopha-
ne , trois livres d'huile de pétrole , fix onces de gom-
me Arabique , une livre & demie de fel ammoniac ,
& une demi-pinte d'efprit-de-vin. On fait diffoudre
le camfre dans l'efprit - de - vin , la gomme dans un
peu d'eau ; après quoi on y met de l'efprit-de-vin ,
on mêle bien enfemble le foufre , le poulverin , le
falpetre , le cryftal minéral , & la colophane , hu-
mectant de tems en tems cette compofition avec le
camfre diffous , la gomme & l'huile de pétrole.
Après que tout a été mis en pâte &c bien mêlé à
force de bras , on en fait des pelotes qui pefent en-
viron quatre livres. On partage le vif-argent en au-
tant de parties égales qu'on a fait de pelotes. On
perce chacune de ces pelotes de plufieurs petits trous
avec une cheville de bois graiffée ; on y met cette
partie de vif-argent , puis on reflerre les trous ; on
enveloppe la pelote avec un peu de filaffe & de l'é-
ioupe , & du papier gris que l'on entortille avec du
gros fil : on la trempe dans le goudron , enfuite on
la couvre d'une groffe toile , que l'on trempe une
féconde fois dans le goudron ; après quoi on la trem-
pe dans l'eau ; on y fait un trou avec une cheville
de bois graiffée qui ne pafTe pas le centre de la pe-
lote , & on le remplit de la compofition des fufées à
bombes. On fe fert de ces fortes de balles à feu pour
éclairerunterreinoccupéparl'ennemi. S.Remy. (Q)
Balle LUISANTE , cheç les Artificiers , on appelle
ainfi une efpece d'artifice femblable aux étoiles , &
qui n'en diffère que par la compofition , la groffeur ,
& la couleur du feu. Voici la manière de le faire.
Prenez fix onces de foufre , deux onces d'antimoi-
ne crud ; de falpetre , de colophane , & de charbon ,
de chacun quatre onces : ou bien de falpetre , de co-
lophane , de charbon , de chacun deux onces ; &
d'antimoine , de foufre & de poix noire , de chacun
une once.
Après avoir bien pilé ces matières , on les fera
fondre dans un vaiffeau de cuivre ou de terre ver-
niffée , dans lequel on jettera des étoupes de chanvre
ou de lin autant qu'il en faudra pour abforber toute
la matière fondue ; pendant qu'elle le refroidira , on
en fera des pelotons de la groffeur qu'on voudra , &c
on les amorcera de pâte de poudre écrafée , dans la-
quelle on les roulera, ou on les enveloppera de coton
d'étoupille : il faut cependant prendre garde de ne
pas faire ces balles li groffes qu'elles ne puiffent être
totalement confommées en retombant du pot d'une
fiifée volante , crainte qu'elles ne retombent en feu
fur les fpe&ateurs , ou fur des maifons où elles pour-
roient mettre le feu.
Balles a" Imprimerie ; ce font deux morceaux de
bois creufés , furmontés d'un manche auffi de bois ,
parfaitement reffemblant à un entonnoir. Le creux
-de cet infiniment fe remplit de laine bien nette &
bien cardée , laquelle y eft maintenue par deux cuirs
apprêtés & attachés avec de petits clous tout autour
de la bouche de l'entonnoir ; c'eft avec ces deux uf-
tenciles que l'on empreint d'encre la forme. Voye^
BAL
Planche IV. A qui repréfente les deux balles pofées
l'une fur l'autre fur les chevilles de la preffe.
Balles TEIGNEUSES , terme d'Imprimerie. Lorf-
que les cuirs neufs refuiént l'encre , faute de n'avoir
pas été affez corroyés , ce qui fait paraître fur les
balles des taches noires & blanches , on dit que ces
balles font teigneufes. Pour remédier à ce défaut , l'on
eft contraint de démonter & corroyer de nouveau
les cuirs, de lesfaupoudrer même de cendre pour im-
biber le trop d'humidité dont ils fe trouvent furchar-
gés en quelques endroits. Les balles peuvent encore
devenir teigneufes li la laine de dedans fort par les
bords ; car alors il fe forme une efpece de duvet , qui
f e mêle avec l'encre , & introduit fur la forme nom-
bre d'ordures qui empliffent l'œil de la lettre.
Balle , che^ Us Paumiers ; c'eft un corps fphéri-
que fait de chiffons de laine couverts de drap blanc
d'environ deux pouces & demi, ou trois pouces au
plus de diamètre , dont on fe fert pour joiier â la
paume: il doit être bien rond & bien ficelé. Les fta-
tuts des Paumiers ordonnent qu'il foit couvert de
drap neuf, & qu'il pefe en tout dix-neuf eftelins.
L'eftelin vaut la vingtième partie d'une once. Pour
faire la balle , il faut avoir du chiffon , une malle de
bois &c rinftrument appelle bilboquet. On prend du
chiffon , on en forme un peloton que l'on ficelle , on
le bat dans le bilboquet , afin de noyer la corde dans
l'étoffe dont il eft fait. Quand il a la groffeur conve-
nable , on le revêt de drap blanc : on le finit enfuite
fur le bilboquet , où on le remet pour abattre la cou-
ture de fon vêtement , & la balle eft faite. Voye^
Paumier , Bilboquet ; & la figure de cet infini-
ment dans la Planche du Paumier.
Balle, terme de Commerce; on appelle ainfi cer-
taine quantité de marchandifes enveloppées ou em-
paquetées dans de la toile avec plufieurs tours de
corde bien ferrés par-deffus , après les avoir bien
garnies de paille pour empêcher qu'elles ne fe bri-
fent ou ne fe gâtent par l'injure du tems.
On dit une balle d'épicerie , de livres , de papier,"
de fil , &c. & l'on met fur les balles des marques &
numéros , afin que les marchands à qui elles font en-
voyées puiffent les reconnoître.
Une balle de coton filé eft ordinairement de trois
ou quatre cents pefant. Une balle de foie crue pefe
quatre cents. Une balle de groffe toile eft de trois,
trois & demie ou quatre pièces.
Selon M. Chambers , une balle de laine en Angle-
terre eft la valeur de la charge d'un cheval , & con-
tient deux cents quarante livres de poids.
Vendre des marchandifes fous cordes en balles ou
en balles fous cordes , c'eft les vendre en gros fans
échantillon & fans les déballer.
On appelle marchandifes de balle certaines quin-
cailleries & autres ouvrages qui viennent de cer-
tains pays , particulièrement de Forés , & qui font
ordinairement fabriqués par de mauvais ouvriers.
Une balle de dez eft un petit paquet en papier , qui
contient une ou plufieurs douzaines de dez à jouer.
On nomme porte-balles les petits merciers qui vont
par la campagne , & qui portent fur leur dos des bal-
les de menue mercerie. ( G )
* Balle, ( (Economie rufliq. ) c'eft la pellicule qui
enveloppe le grain , & que les fléaux , le van & le
crible en détachent. Les laboureurs l'appellent me-
nue paille. On la mêle avec l'avoine des chevaux ;
on la donne en bûvée aux vaches ; elle peut nourrir
toutes fortes de beftiaux ; elle fait mûrir les fruits
& les conferve , & l'on en couvre la glace & la neige
que l'on réferve pour l'été.
BALLET , f. m. danfe figurée exécutée par plufieurs
perfonnes qui repréfentent par leurs pas & leurs gef-
tes une aft ion naturelle ou merveilleufe , au fon des
inftrumens ou de la voix.
BAL
Tout ballet fuppofe la danfe, & le concours de
deux ou de pluûeurs perfonnes pour l'exécuter. Une
peribnne feule , qui en danlant repréfenteroit une
aftion , ne formeroit pas proprement un ballet ; ce
ne feroit alors qu'une forte de pantomime. Voye\_
Pantomime. Et plufieurs perfonnes qui repréfen-
teroient quelque action fans danfe , formeroient une
comédie , & jamais un ballet.
La danfe , le concours de plufieurs perfonnes , &
la repréfentation d'une aftion par les geftes , les pas ,
Se les mouvemens du corps , font donc ce qui coniti-
tue le ballet. II eft une efpece de poëlie muette qui
parle , félon l'exprefîlon de Plutarque ; parce que
fans rien dire , elle s'exprime par les geftes , les mou-
vemens & les pas. Claufis faucibus , dit Sidoine Apol-
linaire, & loquente geftu , nutu , crure, genu, manu,
rotatu,toto in fchemate , vel femel latebit. Sans danie
il ne peut point exifter de ballet : mais fans ballet il
peut y avoir des danfes. Voye^ Danse.
Le ballet eft un amufement très-ancien. Son ori-
gine fe perd dans l'antiquité la plus reculée. On danfa
dans les commencemens pour exprimer la joie ; &
ces mouvemens réglés du corps , firent imaginer
bientôt après un divertiffement plus compliqué. Les
Egyptiens firent les premiers de leurs danfes des hié-
roglyphes d'action, comme ils en avoient de figurés
en peinture , pour exprimer tous les myfteres de leur
culte. Sur une mulique de caractère , ils compolc-
rent des danfes fublimes , qui exprimoient & qui pei-
gnoient le mouvement réglé des aftres , l'ordre im-
muable , Se l'harmonie confiante de l'univers.
Les Grecs dans leurs tragédies introduifirent des
danfes , & fuivirent les notions des Egyptiens. Les
chœurs qui fervoient d'intermèdes , danloient d'a-
bord en rond de droite à gauche , Se exprimoient
ainfi les mouvemens du ciel qui fe font du levant au
couchant. Ils appelloient cette danfe flrophes ou tours.
Ils fe tournoient enfuite de gauche à droite pour
repréfenter le cours des planètes , Se ils nommoient
ces mouvemens antijlrophes ou retours ; après ces deux
danfes , ils s'arrêtoient pour chanter : ils nommoient
ces chants épodes. Par-là ils repréfentoient l'immobi-
lité de la terre qu'ils croyoient fixe. foye{ Chœur.
Théfée changea ce premier objet de la danfe des
Grecs ; leurs chœurs ne furent plus que l'image des
évolutions Se des détours du fameux labyrinthe de
Crète. Cette danfe inventée & exécutée par le vain-
queur du Minotaure & la jeunefle de Delos , étoit
compofée dejtrophes & <1' ami flrophes , comme la pre-
mière , & on la nomma la danfe de la grue , parce
qu'on s'y fuivoit à la file , en faiiant les diverfes évo-
lutions dont elle étoit compofée , comme font les
grues lorfqu'elles volent en troupe. Voye\ Grue.
Les ballets furent conftamment attachés aux tragé-
dies Se aux comédies des Grecs ; Athénée les appelle
danfes philofophiques ; parce que tout y étoit réglé ,
& qu'elles étoient des allégories ingénieufes, Se des
repréfentations d'aftions , ou des choies naturelles
qui renfermoient un fens moral.
Le mot bail a vient de ce qu'originairement on dan-
foiten jouant à la paume. Les anciens, attentifs à tout
ce qui pouvoit former le corps , le rendre agile ou
robufte , & donner des grâces à les mouvemens ,
avoient uni ces deux exercices ; enforte que le mot
ballet eft venu de celui de balle : on en a fait bal , bal-
let, ballade , & baladin ; le ballar Se ballo des Italiens,
& le bailar des Efpagnols , comme les Latins en
avoient fait ceux de ballare , & de b allât or , &c.
Deux célèbres danfeurs furent en Grèce ies inven-
teurs véritables des ballets , Se les unirent à la tragé-
die & à la comédie.
Batile d Alexandrie inventa ceux qui repréfen-
toient les aftions gaies , Se Pilade imroduiiit ceux
Tome II,
BAL
4?
qui repréfentoient les a Étions graves , touchantes , &
pathétiques.
Leurs danfes étoient un tableau fidèle de tous les
mouvemens du corps, & une invention ingénieufe
qui fervoit à les régler , comme la tragédie en repré-
sentant les paffions, fervoit à rectifier les mouvemens
de l'ame.
Les Grecs avoient d'abord quatre efpeces de dan-
feurs qu'on nommoit hylarodes , fimodes , magodes, &
lyfiodes ; ils s'en fervoient pour compofer les danfes
de leurs intermèdes. V. ces mots à leurs differ. articles.
Ces danfeurs n'étoient proprement que des bouf-
fons ; Se ce fut pour purger la feene de cette indé-
cence , que les Grecs inventèrent les ballets réglés ,
Se les chœurs graves que la tragédie reçut à fa place.
Les anciens avoient une grande quantité de bal-
lets , dont les fujets font rapportés dans Athénée ;
mais on ne trouve point qu'ils s'en foient fervis au-
trement que comme de limples intermèdes. Voye^
Intermède. Ariftote, Platon, &c en parlent avec
éloge, Se le premier eft entré, dans fa Poétique, dans
un très-grand détail au fujet de cette brillante partie
des fpecîacles des Grecs.
Quelques auteurs ont prétendu que c 'étoit à la
cruauté d'Hyeron tyran de Syracufe , que les ballets
dévoient leur origine. Ils difent que ce prince foup-
çonneux ayant défendu aux Siciliens de fe parler,
de peur qu'ils ne confpirafient contre lui ; la haine
& la néceffité , deux fources fertiles d'invention , leur
ftiggérerent les geftes , les mouvemens du corps Se
les figures , pour fe faire entendre les uns aux au-
tres : mais nous trouvons des ballets , & en grand
nombre, antérieurs à cette époque; & l'opinion la
plus certaine de l'origine des danfes figurées, eft celle
que nous avons rapportée ci-deflus.
Le ballet pafTa des Grecs chez les Romains , & il y
fervit aux mêmes ufages ; les Italiens Se tous les peu-
ples de l'Europe en embellirent fucceftivement leurs
théâtres , Se on l'employa enfin pour célébrer dans
les cours les plus galantes Se les plus magn'fiques, les
mariages des rois, les naiffances des princes, & tous
les évenemens heureux qui intérefioienr la gloire Ôc
le repos des nations. Il forma feul alors un très-grand
fpeftacle , Se d'une dépenfe immenle , que dans les
deux derniers fiecles on a porté au plus haut point
de perfection & de grandeur.
Lucien qui a fait un traité de la danfe , entre dans
un détail tort grand des fujets qui font propres à ce
genre de fpectacle : il femble que cet auteur ait pré-
vu l'ufage qu'on en feroit un jour dans les cours les
plus polies de l'Europe.
On va donner une notion exa£te de ces grands
ballets , aujourd'hui tout-à-fait hors de mode ; on a
vu quelle a été leur origine , & leur fuccès ; on verra
dans la fuite leurs changemens , leur décadence , Se
le genre nouveau qu'elle a produit : des yeux philo-
fophes trouvent par-tout ces commencemens , ces
progrès , ces diminutions , ces modifications diffé-
rentes , en un mot , qui font dans la nature : ma
fe manifeftent d'une manière encore plus fenlible
dans l'hiitoire des Arts.
Comme dans fon principe, le ballet qÛ la repréfen-
tation d'une choie naturelle ou merveilleufe, il n'eft
rien dans la nature , Se l'imagination brillante des
Poètes n'a pu rien inventer, quinefùtdefonreflbrt.
On peutdivifer ces grands ballets en hiJloriqua,j.i-
buleux , &c poétiques.
Les fujets hifloriques font les aftions connues dans
l'hiitoire , comme le liège de Troie , les victoires
d'Alexandre, &c.
Les (ujetsjàbuleux font pris de la fable , comme le
jugement de Paris, les noces de Thctis ce Pelée, la
naiflance de Vénus, &c.
Les poétiques, qui loin les plus ingénieux , font de
44
BAL
plufieurs efpeces,& tiennent pour la plupart de l'his-
toire & de la fable.
On exprime par les uns les chofes naturelles , com-
me les ballets de la nuit , des i'aifons , des tems , des
âges, &c. d'autres font des allégories qui renferment
un fens moral, comme le ballet des proverbes , celui
des plaifirs troublés , celui de la mode , des aveugles, de
la curiojlté , &tc.
Il y en a eu quelques-uns de pur caprice , comme
le ballet des pojlures , & celui de bicêtre ; quelques au-
tres n'ont été que des expreSîîons naïves de certains
évenemens communs , ou de certaines chofes ordi-
naires. De ce nombre étoient les ballets des cris de
Paris , de la foire S. Germain , des pajfc-tems , du car-
naval, &c. Enfin l'hiftoire , la fable, l'allégorie , les
romans , le caprice , l'imagination , font les fources
dans lefquelles on a puifé lesfujets des grands ballets.
On en a vu de tous ces genres différens réuSfir, &c
faire honneur à leurs différens inventeurs.
Ce Spectacle avoit des règles particulières , & des
parties eSïentielles & intégrantes , comme le poëme
épique & dramatique.
La première règle eft l'unité de deffein. En faveur
de la difficulté infinie qu'il y avoit à s'afTujettir à une
contrainte pareille , dans un ouvrage de ce genre , il
fut toujours difpenfé de l'unité de tems & de l'unité
de lieu. L'invention ou la forme du ballet eft la pre-
mière de fes parties effentielles : les figures font la
féconde : les mouvemens la troifieme : la Mufique
qui comprend les chants , les ritournelles , & les fym-
phonies , eft la quatrième : la décoration & les machi-
nes font la cinquième : la Poëfie eft la dernière ; elle
n'étoit chargée que de donner par quelques récits les
premières notions de l'action qu'on repréfentoit.
Leur divifion ordinaire étoit en cinq actes ,& cha-
que acte étoit diviié en 3 , 6 , 9 , & quelquefois 1 2
entrées.
On appelle entrée une ou plufieurs quadrilles de
danfeurs, qui par leur danfe représentent la partie de
l'action dont ils font chargés. Voye^ Entrée.
On entend par quadrille , 4,6, 8 , & jufqu'à 1 2
danfeurs vêtus uniformément , ou de caractères dif-
férens, fuivant l'exigence des cas. f^oye^ Quadril-
le. Chaque entrée étoit compofée d'une ou plufieurs
quadrilles , félon que l'exigeoit le Sujet.
Il n'eft point de genre de danfe , de forte d'inftru-
mens, ni de caractère de lymphonie , qu'on n'ait fait
entrer dans les ballets. Les anciens avoient une fin-
guliere attention à employer des inftrumens différens
à mefure qu'ils introduiloient fur la fcene de nou-
veaux caractères ; ils prenoient un foin extrême à
peindre les âges , les mœurs , les parlions des perfon-
nages qu'ils mettoient devant les yeux.
A leur exemple dans les grands ballets exécutés
dans les différentes cours de l'Europe , on a eu l'at-
tention de mêler dans les orcheftres , les inftrumens
convenables aux divers caractères qu'on a voulu
peindre ; & on s'eft attaché plus ou moins à cette
partie , félon le plus ou le moins de goût de ceux oui
en ont été les inventeurs , ou des lbuverains pour
lefquels on les a exécutés.
On croit devoir rapporter ici en abrégé deux de
ces grands ballets , l'un pour faire connoître les fonds ,
l'autre pour faire appercevoir la marche théâtrale
de ces fortes de Spectacles. C'eft du favant traité du
P. Ménétrier Jéfuite , qu'on a extrait le peu de mots
qu'on va lire.
Le gris de lin étoit le fujet du premier ; c'étoit la
couleur de Madame Chrétienne de France , ducheffe
de Savoie , à laquelle la fête étoit donnée.
Au lever de la toile l'Amour déchire fon bandeau ;
il appelle la lumière , & l'engage par fes chants à fe
répandre fur les aftres , le ciel , l'air , la terre , &
l'eau , afin qu'en leur donnant par la variété des cou-
BAL
leurs mille beautés différentes , il puiffe choifir la plus
agréable.
Junon entend les vœux de l'Amour, & les remplit ;
Iris vole par fes ordres dans les airs , elle y étale l'é-
clat des plus vives couleurs. L'Amour frappé de ce
brillant Spectacle , après l'avoir confideré , fe dé-
cide pour le gris de lin , comme la couleur la plus
douce 6c la plus parfaite ; il veut qu'à l'avenir il
foit le fymbole de V amour fans fin. Il ordonne que les
campagnes en ornent les rieurs , qu'elle brille dans
les pierres les plus précieufes, que les oifeaux les
plus beaux en parent leur plumage , & qu'elle ferve
d'ornement aux habits les plus galans des mortels.
Toutes ces chofes différentes animées par la dan-
fe , embellies par les plus éclatantes décorations ,
foùtenues d'un nombre fort confidérable de machi-
nes furprenantes , formèrent le fonds de ce ballet,
un des plus ingénieux & des plus galans qui ayent
été représentés en Europe.
On donna le fécond à la même cour en 1634,
pour la naiffance du cardinal de Savoie. Le fujet de
ce ballet étoit la Ferita nemica délia apparenta folleva-
ta dal tempo.
Au lever de la toile on voyoit un chœur de Faux
Bruits & de Soupçons , qui précedoient l'Apparence
& le Menfonge.
Le fond du théâtre s'ouvrit. Sur un grand nuage
porté par les vents , on vit l'Apparence vêtue d'un
habit de couleurs changeantes , & parlemé de glaces
de miroir , avec des ailes , & une queue de paon ;
elle paroiffoit comme dans une elpece de nid d'011
fortirent en foule les Menfonges pernicieux, les Frau-
des , les Tromperies , les Menfonges agréables , les
Flatteries , les Intrigues , les Menfonges bouffons , les
Plaifanteries, les jolis petits Contes.
Ces perfonnages formèrent les différentes entrées ,
après lefquelles le Tems parut. Il chaffa l'Apparence,
il fit ouvrir le nuage fur lequel elle s'étoit montrée.
On vit alors une grande horloge à fable , de laquelle
fortirent la Vérité , & les Heures. Ces derniers per-
fonnages, après différens récits analogues au fujet,
formèrent les dernières entrées , qu'on nomme le
grand ballet.
Par ce court détail , on voit que ce genre de fpec-
tacle réuniffoit toutes les parties qui peuvent faire
éclater la magnificence &C le goût d'un fouverain ; il
exigeoit beaucoup de richeffe dans les habits , &c un
grand foin pour qu'ils fuffent toujours du caractère
convenable. Il falloit des décorations en grand nom»
bre , & des machines furprenantes. foye^ Décora-
tion, & Machine.
Les perfonnages d'ailleurs du chant & de la danfe
en étoient prefque toujours remplis parles Souverains
eux-mêmes , les Seigneurs & les dames les plus aima-
bles de leur cour ; & fouvent à tout ce qu'on vient
d'expliquer , les princes qui donnoient ces fortes de
fêtes ajoùtoient des préfens magnifiques pour tou-
tes les perfonnes qui y repréfentoient des rôles ; ces
préfens étoient donnés d'une manière d'autant plus
galante , qu'ils paroiffoient faire partie de l'action du
ballet, Voye^ SAPATE.
En France , en Italie , en Angleterre , on a repré-
fenté une très-grande quantité de ballets de ce genre :
mais la cour de Savoie Semble l'avoir emporté dans
ces grands ipectacles fur toutes les cours de l'Euro-
pe. Elle avoit le fameux comte d'Aglié , le génie du
monde le plus fécond en inventions théâtrales &
galantes. Le grand art des fouverains en toutes cho-
ses elt de Savoir choifir ; la gloire d'un règne dépend
prefque toujours d'un homme mis à fa place , ou d'un
homme oublié.
Les ballets repréfentés en France jufqu'en l'année
1671, furent tous de ce grand genre. Louis XIV. en fit
exécuter plufieurs pendant Sa jeuneffe , dans lefquels
BAL
il danfa lui-même avec toute la cour. Les plus célè-
bres font le ballet des Profpérités des armes de la Fran-
ce, danfé peu de tems après la majorité de Louis XIV.
Ceux d'Hercule amoureux, exécuté pour fon mariage ;
d'Alcidiane , danfé le ^Février 1 6 5 8 ; des Saifons ,
exécuté à Fontainebleau le 23 Juillet 1661; des
Amours déguifés, en 1664 , &c.
Les ballets de l'ancienne cour furent pour la plu-
part imaginés par Benferade. Il faifoit des rondeaux
pour les récits ; 6c il avoit un art fingulier pour les
rendre analogues au fujet général , à la perfonne qui
en étoJt chargée , au rôle qu'elle repréfentoit , & à
ceux à qui les récits étoient adreffés. Ce poëte avoit
un talent particulier pour les petites parties de ces
fortes d'ouvrages ; il s'en faut bien qu'il eût autant
d'art pour leur invention & pour leur conduite.
Lors de l'établifTement de l'opéra en France , on
conferva le fond du grand ballet : mais on en chan-
gea la forme. Quinault imagina un genre mixte , dans
lequel les récits firent la plus grande partie de l'ac-
tion. La danfe n'y fut plus qu'en fous-ordre. Ce fut
en 1 67 1 , qu'on repréfenta à Paris les Fêtes de Bacchus
& de l'Amour , cette nouveauté plût ; & en 168 1 , le
Roi & toute fa cour exécutèrent à Saint-Germain le
Triomphe de l'Amour, fait par Quinault, & mis en
mufique par Lully : de ce moment il ne fut plus quef-
tion du grand ballet, dont on vient de parler. La dan-
fe figurée , ou la danfe fimple reprirent en France la
place qu'elles avoient occupée fur les théâtres des
Grecs oc des Romains ; on ne les y fit plus fervir que
pour les intermèdes ; comme dans PJiché, le Maria-
ge forcé , les Fâcheux , les Pygmécs , le Bourgeois Gen-
tilhomme , &c. Le grand ballet fut pour toujours relé-
gué dans les collèges. Voye^ Ballets de Collè-
ge. A l'opéra même le chant prit le deffus. Il y avoit
plus de chanteurs que de danfeurs paffables ; ce ne
fut qu'en 168 1 , lors qu'on repréfenta à Paris le
Triomphe de C Amour , qu'on introduiiit pour la pre-
mière fois des danfeufes fur ce théâtre.
Quinault qui avoit créé en France l'opéra , qui en
avoit apperçu les principales beautés , & qui par un
trait de génie fingulier avoit d'abord fenti le vrai gen-
re de ce fpectacle (Voy»i Opéra) n'avoit pas eu des
vues aufli juftes fur le ballet. Il tut imité depuis par
tous ceux qui travaillèrent pour le théâtre lyrique.
Le propre des talens médiocres efl de fuivre fervile-
ment à la pifte la marche des grands talens.
Après fa mort on fît des opéra coupés comme les
fions , mais qui n'étoient animés , ni du charme de
fon ftyle , ni des grâces du fentiment qui étoit fa par-
tie fublime. On pouvoit l'atteindre plus aifément
dans le ballet, où il avoit été fort au-deiîbus de lui-
même ; ainfi on le copia dans fa partie la plus délèc-
tueufe jufqu'en 1697, que la Mothe , en créant un
genre tout neuf, acquit l'avantage de fe faire copier
à fon tour.
L'Europe Galante efl le premier ballet dans la for-
me adoptée aujourd'hui fur le théâtre lyrique. Ce
genre appartient tout-à-fait à la France , & l'Italie
n'a rien qui lui reffemble. On ne verra fans doute
jamais notre opéra parler chez les autres nations : mais
il eft vraiffemblable qu'un jour , fans changer de mu-
fique ( ce qui eft impoffible ) on changera toute la
conftitution de l'opéra Italien , 6c qu'il prendra la
forme nouvelle &C piquante du ballet François.
Il coniifte en 3 ou 4 entrées précédées d'un pro-
logue.
Le prologue & chacune des entrées forment des
a&ions fèparées avec un ou deux divertiffemens mê-
lés de chants , & de danfes.
La tragédie lyrique doit avoir des divertiffemens
de danfe & de chant , que le fonds de l'action amené.
Le ballet doit être un divertilVement de chant & de
danfe, qui amené une acuon , 6c qui Lui lert de fonde-
BAL
45
ment , & cette action doit être galante , intéreffante ,
badine , ou noble luivant la nature des fujets.
Tous les ballets qui font reliés au théâtre font en
cette forme , &c vraiffemblabiement il n'y en aura
point qui s'y foûtiennent , s'ils en ont une différente.
Le Roi Louis XV. a danfé lui-même avec fa cour ,
dans les ballets de ce nouveau genre , qui furent re-
préfentés aux Thuileries pendant fon éducation.
Danchet , en fuivant le plan donné par la Mothe ,
imagina des entrées comiques ; c'eft à lui qu'on doit
ce genre , fi c'en eft un. Les Fêtes Vénitiennes ont
ouvert une carrière nouvelle aux Poètes & aux Mu-
ficiens , qui auront le courage de croire , que le théa-
tre du merveilleux eft propre à rendre le comique.
Les Italiens paroiffent penfer que la mufique n'eft
faite que pour peindre tout ce qui eft de plus noble
ou de plus bas dans la nature. Ils n'admettent point
de milieu.
Ils répandent avec profufion le fublime dans leurs
tragédies , & la plus baffe plaifanterie dans leurs
opéra bouffons , & ceux-ci n'ont réufli que dans les
mains de leurs muficiens les plus célèbres. Peut-être
dans dix ans penfera-t-on comme eux. Platée, opéra
bouffon de M. Rameau, qui eft celui de tous les ou-
vrages le plus original & le plus fort de génie , dé-
cidera fans doute la queilion au préjudice des Fêtes
Vénitiennes & des Fêtes de Thalie, peu goûtées dans
leurs dernières reprifes.
Peut-être la Mothe a-t-il fait une faute en créant
le ballet. Quinault avoit fenti que le merveilleux
étoit le fond dominant de l'opéra. Voyer^ Opéra.
Pourquoi ne feroit-il pas auffi le fond du ballet r La
Mothe ne l'a point exclu : mais il ne s'en eft point
fervi. Il eft d'ailleurs fort fingulier qu'il n'ait pas
donné un plus grand nombre d ouvrages d'un genre
fi aimable. On n'a de lui que l'Europe galante qui l'oit
reliée au théâtre ; il a cru modefteir.ent fans doute
que ce qu'on appelle grand opéra, étoit leul digne de
quelque confîdération. Son efprit original l'eût mieux
fervi cependant dans un genre tout à lui. Il n'eft
excellent à ce théâtre que dans ceux qu'il a crées.
Voyei Pastorale 6- Comédie-Ballet.
Il y a peut-être encore un défaut dans la forme
du ballet créé par la Mothe. Les danles n'y font que
des danfes fimples ; nulle action relative au fujet ne
les anime ; on danfe dans l'Europe galante pour dan-
fer. Ce font à la vérité des peuples différens qu'on
y voit paroître : mais leurs habits plutôt que leurs
pas annoncent leurs divers caractères ; aucune adfion
particulière ne lie la danfe avec le refte de l'acle.
De nos jours on a halardé le merveilleux dans le
ballet, & on y a mis la danfe en aûion : elle y eft
une partie neceffaire du fujet principal. Ce genre,
qui a plû dans fa nouveauté , préfente un plus grand
nombrede reffourecs pouiTamuiementdufpeclateur,
des moyens plus fréquens à la poelïe, à la peinture,
à la mufique, d'étaler leurs richeffes ; &au théâtre
lyrique , des occafions de faire briller la grande ma-
chine , qui en eft une des premières beautés : mais
il faut attendre la reprife des Fêtes de l'Hymen & de
l'Amour, pour décider fi ce genre eft le véritable.
De tous les ouvrages du théâtre lyrique , le ballet
cil celui qui paroit le plus agréable aux François. La
variété qui y règne, le mélange aimable du chant
& de la darne, des adions courtes qui ne fauroient
fatiguer l'attention , des fêtes galantes qui fe fuece-
dent avec rapidité , une foule d'objets piquans qui
paroiffent dans ces fpeâacles, forment un enfemble
charmant , qui plaît également à la France 6c aux
étrangers.
Cependant parmi le grand nombre d'auteurs cé-
lèbres qui fe font exerces dans ce genre, il y en a
fort peu qui Payent tait avec fucces : ona encore
moins de bons ballets que de bons opéra , iî on on
46
BAL
excepte les ouvrages de M. Rameau , du fort def-
quels on n'oie décider , & qui conferveront, ou per-
dront leur fupériorité , félon que le goût de la na-
tion pour la mufique le fortifiera , ou s'affoiblira par
la fuite. Le théâtre lyrique qui peut compter à peu-
près fur huit ou dix tragédies dont la réuffite eft tou-
jours lûre , n'a pas plus de trois ou quatre ballets
d'une relfource certaine ; Y Europe galante , les Elé-
mens , les Amours des Dieux , &i peut-être les Feus
Greques & Romaines. D'où vient donc la rareté des
talens dans un pareil genre ? Eft-ce le génie ou l'en-
couragement qui manquent ? Plutarq. Sid. Appoll.
Athên. Arij}. Poétique. Platon. Hijl. de la danfe par
Bonnet. Lucien. L. P. Meneftrier, Jef. Traité des
Ballets , &c. (B )
Ballets de chevaux. Dans prefque tous les car-
roufels , il y avoit autrefois des ballets de chevaux qui
faifoient partie de ces magnifiques fpectacles. Pluvi-
nel , un des écuyers du roi , en fit exécuter un fort
beau dans le fameux carroufel de Louis XIII. Les
deux qui paiTent pour avoir été les plus fuperbes ,
font ceux qui furent donnés à Florence , le premier
en 1 608 , le dernier en 1615.
On lit dans Pline , que c'eft aux Sibarites que l'on
doit l'invention de la danfe des chevaux : le plaifir
étoit le feul objet de ce peuple voluptueux ; il étoit
i'ame de tous fes mouvemens , & de tous fes exerci-
ces. Athénée , d'après Ariftote , rapporte que les Cro-
toniates , qui faifoient la guerre à ce peuple , s'étant
apperçûs du foin avec lequel on y élevoit les che-
vaux , firent fecretement apprendre à leurs trom-
pettes les airs de ballet que les Sibarites faifoient dan-
fer à ces animaux dociles. Au moment de la charge,
lorfque leur cavalerie s'ébranla , les Crotoniates fi-
rent fonner tous ces airs diiférens , &c dès-lors les che-
vaux Sibarites , au lieu de fuivre les mouvemens que
vouloient leur donner les cavaliers qui les montoient,
fe mirent à danfer leurs entrées de ballet ordinaires ,
& les Crotoniates les taillèrent en pièces.
Les Bifaltes , peuples de Macédoine , fe fervirent
du même artifice contre les Cardiens, au rapport de
Charon de Lampfaque.
Les ballets de chevaux font compofés de quatre for-
tes de danfe ; la danfe de terre-à-terre , celle des cour-
bettes , celle des caprioles , & celle d'un pas &c un
faut.
La danfe de terre-à-terre eft formée de pas , & de
mouvemens égaux , en avant , en arrière , à volte fur
la droite ou fur la gauche , & à demi-volte ; on la
nomme terre-à-terre , parce que le cheval ne s'y éle-
vé point.
La danfe des courbettes eft compofée de mouve-
mens à demi élevés , mais doucement , en avant , en
arrière , par voltes & demi-voltes fur les côtés , fai-
sant Ion mouvement courbé , ce qui donne le nom à
cette efpcce de danfe.
La danfe des caprioles n'eft autre chofe que le faut
que fait le cheval en cadence à tems dans la main ,
& dans les talons , fe laiffant foûtenir de l'un , & ai-
der de l'autre , foit en avant en une place , fur les
voltes & de côté : on n'appelle point caprioles tous
les fauts ; on nomme ainfi feulement ceux qui lont
hauts & élevés tout d'un tems.
La danfe d'un pas & d'un faut eft compofée d'une
capriole &£ d'une courbette fort baffe ; on commen-
ce par une courbette , & enfuite , raffermi (fant l'aide
des deux talons , & foûtenant ferme de la main , on
fait faire une capriole , & lâchant la main Se chaffant
en avant , on fait faire un pas : on recommence après
fi l'on veut , retenant la main & aidant des deux ta-
lons , pour faire faire une autre capriole.
On a donné le nom d'airs à ces différentes danfes,
ainfi on dit air de terre-à-terrt , &c.
BAL
Dans ces ballets , on doit obferver, comme dans
tous les autres , l'air, le tems de l'air, & la figure.
L'air eft le mouvement de la fymphonie qu'on exé-
cute , & qui doit être danfée. Le tems des airs font les
divers paffages que l'on fait faire aux chevaux en
avant , en arrière , à droite , à gauche : de tous ces
mouvemens fe forment les figures . & quand d'un feul
tems fans s'arrêter , on fait aller le cheval de ces qua-
tre manières , on appelle cette figure faire la croix.
Ces partages , en terme de l'art , s'appellent /w/^
fades.
Les trompettes font les inftrumens les plus propres
pour faire danfer les chevaux , parce qu'ils ont le
loifir de prendre haleine lorfque les trompettes la re-
prennent , & que le cheval , qui eft naturellement fier
& généreux , en aime le Ion ; ce bruit martial l'ex-
cite & l'anime. On drefî'e les chevaux encore à dan-
fer au fon des cors de chatte , & quelquefois aux vio-
lons : mais il faut de ces derniers inftrumens un fort
grand nombre , que les fymphonies foient des airs de
trompettes , & que les baffes marquent fortement les
cadences.
Selon la nature des airs on manie les chevaux ter-
re-à-terre , par courbettes , ou par fauts. •
Il n'eft pas étonnant qu'on ch efîe des chevaux à la
danfe , puifque ce font les animaux les plus mania-
bles , & les plus capables de dilcipline ; on a fait des
ballets de chiens , d'ours , definges , d'éléphans , ce qui
eft bien plus extraordinaire. Voye?^ Danse. Elien ,
Martial , Athénée , Pline , Ariflote , Charon de Lamp-
faque , &c.
Ballets aux chanfons ; ce font les premiers bal-
lets qui ayent été faits par les anciens. Eriphanis ,
jeune greque , qui aimoit pafîionnément un chaffeur
nommé Menalque , compofa des chanfons par lef-
quelles elle fe plaignoit tendrement de la dureté de
fon amant. Elle le fuivit , en les chantant , fur les
montagnes & dans les bois : mais cette amante mal-
heureufe mourut à la peine. On étoit peu galant ,
quoi qu'en difent les Poètes , dans ces tems reculés.
L'aventure d'Eriphanis fit du bruit dans la Grèce ,
parce qu'on y avoit appris fes chanfons ; on les chan-
toit , & on repréfentoit fur ces chants les aventures,
les douleurs d'Eriphanis , par des mouvemens & des
geftes qui refîembloient beaucoup à la danfe.
Nos branles font des efpeces de ballets aux chan-
fons. Voye^ Branle. A l'opéra on peut introduire
des ballets de ce genre. Il y a une forte de pantomi-
me noble de cette elpece dans la troifieme entrée des
Talens Lyriques,qui a beaucoup réuffi,& qui eft d'une
fort agréable invention. La danfe de Tcrpjichore , du
prologue des Fîtes Greques &c Romaines , doit être
rangée auffi dans cette claffe. Le P. Ménétrier , traité
des Ballets.
Ballets de collège ; ce font ces fpectacles qu'on
voit dans les collèges lors de la diltribution des prix.
Dans celui de Louis le Grand , il y a tous les ans la
tragédie & le grand ballet , qui tient beaucoup de
l'ancien, tel qu on le repréfentoit autrefois dans les
différentes cours de l'Europe , mais il eft plus chargé
de récits , & moins rempli de danles figurées.
Il fert pour l'ordinaire d'intermèdes aux actes de
la tragédie ; en cela il rend afî'ez l'idée des intermè-
des des anciens.
Il y a plufieurs beaux ballets imprimés dans le fé-
cond volume du P. le Jay Jéfuite. On trouve le détail
de beaucoup de ces ouvrages dans le Père Méné-
trier , qui en a fait un favant traité , £v qui étoit
Thomme de l'Europe le plus profond fur cette ma-
tière. (B)
* BALLIMORE ( Géog. ) ville de la province de
Leinlter, en Irlande ; elle eft entièrement environ-
née d'un marais.
B ALLIN,f. m, {Commerce.) on nomme ainfi à Bour-
BAL
deaux, à Bayonne & dans les autres villes de com-
merce de la Guyenne , ce qu'on appelle à Paris em-
ballage. ( G )
* BALLINASLOE {Géog. ) petite ville delà Con-
nacie , en Irlande , fur la Sue , dans la province de
Rofcommon , à dix milles d'Athlane , fur le grand
chemin de Gallowai. »
* BALLINEKIL ( Géog. ) ville d'Irlande , dans la
province de Leinfter , au comté de la Reine.
* BALLON ( Géog. ) ville de France , au diocefe
du Mans , fur la rive droite de l'Orne. Long. ly. 3o.
lac. 48. 10.
* Ballon, f. f. on donne en général le nom de bal-
lon à tout corps fait par art , dont la figure eft fphé-
rique ou à peu près , & qui eft creux , de quelque ma-
tière qu'il foit compolé , & à quelque ufage qu'on
l'employé. Il ne faut pas croire que tout ce à quoi la
defcription précédente pourra convenir s'appellera
ballon , mais feulement que ce qu'on appelle ballon
aura la plupart de ces conditions.
BALLONS <& grenades , bombes & cailloux , font ,
dans V Artillerie , des efpeces de cylindres compolés
de chacune de ces différentes chofes , lefquelles s exé-
cutent avec le mortier. ( Q )
Ballon , terme d'Artificier ; les Artificiers appel-
lent ainfi une efpece de bombe de carton qu'on jette
en l'air comme une véritable bombe, par le moyen
d'un mortier. L'effet de cet artifice eft de monter
avec une très-petite apparence de feu, & d'en jetter
fubitement une grande quantité après être parvenu
au fommet de fon élévation, à la différence des bom-
bes , qui ne doivent crever qu'à la fin de leur chute.
Voyt{ Bombe. On les divife en ballons d'air , &
ballons d'eau.
Comme cet artifice eft fait pour être jette en l'air,
il eft évident qu'il n'y a point de figure qui lui con-
vienne mieux que la iphérique, qui préfente toujours
une furface & une réfiftance égale au fluide de l'air
de quelque côté qu'elle fe tourne ; c'eft pour cette
raifon qu'on fait les balles , boulets & bombes d'Ar-
tillerie rondes en tous fens , plutôt que cylindriques ;
cependant les Artificiers femblent préférer , pour les
ballons , la figure cylindrique à la fphérique , pour
leur donner plus de capacité & plus de commodité à y
ranger de certaines pièces d'artifices dont on doit les
remplir.
Lorfqu'on fait les ballons fphériques , il y a deux
manières de préparer les cartouches pour les remplir;
l'une eft de former deux hémifpheres qu'on remplit
chacune à part , qu'on applique enfuite l'une contre
l'autre , &c qu'on lie par des bandes de carton & de
toiles croifées & collées ; cette manière a des incon-
véniens pour la réunion qui devient difficile à caufe
des évafemens inégaux qui fe forment en chargeant.
L'autre eft de tonner le cartouche avec des fu-
feaux, & de ne les coller premièrement qu'à moitié,
ou aux deux tiers de leur longueur , enlorte qu'il y
refte une ouverture fuffilante pour y introduire la
main , fi elle eft nécefiairc pour l'arrangement , ou
feulement un trou de grandeur convenable pour y
introduire les artifices & la fulée de communication,
qu'on appelle le porte-feu. Lorfque tout eft en place ,
on replie les bouts des fufeaux à mefurc que le ballon
fe remplit , en le collant par le moyen des doubles
qui croifent fur les pièces de l'intérieur ; 6c enfin ,
pour le former tout-à-fait , on colle les pointes de
ces fufeaux fur le bout du porte-feu , qui fort d'en-
viron un pouce hors du ballon , ce qui affermit très-
bien toutes ces parties, & fournit le moyen d'arran-
ger & de remplir commodément & exactement tout
le vuide du ballon.
On commence par mettre au fond du ballon , une
certaine quantité de relien , ou de poudre grenée ,
proportionnée à fa grandeur , comme une ou deux
BAL
47
onces , mêlée d'un peu de poulverin pour fervir de
chaffe , qui fait crever la bombe & pouffe fa garnim-
re au-dehors : comme il eft à propos que cette chaffe
foit retenue où on l'a mife , & qu'elle ne fe répan-
de pas ailleurs lorfqu'on renverle ou qu'on remue
la bombe chargée , on la couvre d'un lit de coton
d'étoupille en feuille mince , c'eft-à-dire, Amplement
étendue fans être filée ; d'autres la renferment dans
un fac de papier plat , & mince , qu'on arrange de
manière qu'il occupe le fond.
On met enfuite au milieu un cartouche vuide po-
fant fur ce fac, pour y conferver le paffage du porte-
feu , & l'on arrange autour de ce cartouche , la gar-
niture du ballon , qui peut être de différentes efpeces
d'artifices.
La première eft celle dont l'effet produit la cheve-
lure , laquelle eft faite de cartouches de lardons , ou
de tuyaux de rofeaux coupés de la longueur du bal-
lon ^ & remplis d'une composition lente faite de trois
parties de poulverin , de deux de charbon & d'une
de foufre humecté d'un peu d'huile de prétrole , enfin
amorcés par le bas de pâte de poudre écrafée dans
de l'eau pure , ou de l'eau-de-vie , qu'on fera enfuite
fécher ; on arrange tous ces artifices dans le cartou-
che autour de celui qui fait le paffage du porte-feu ,
& après qu'il eft plein , on y introduit le porté-feu
tout chargé jufqu'à ce qu'il pofe fur la chaffe , &
comme il eft lié au couvercle , on colle ce couver-
cle par les bords déchiquetés , fur celui du cartou-
che , & le ballon eft fini.
La féconde efpece de garniture eft celle des fer-
penteaux , qu'on arrange comme les tuyaux de ro-
feaux dont nous venons de parler , la gorge en bas
fur la chaflé.
La troilieme eft compofée de fauciffons volans dont
on peut faire tirer les coups fucceffivcment en fai-
fant les gorges de matières lentes , toutes inégalement
longues , comme des tuyaux d'orgue ; & comme cet
arrangement laiffe du vuide fur les plus courts , on y
peut mettre des étoiles ou des étincelles de feu.
La quatrième efpece de garniture eft celle des étoi-
les , qu'on arrange par lits fur la poudre de la chaffe>
en les couvrant de poulverin mêlé d'un peu de char-
bon , & continuant ainfi jufqu'à ce que le ballon foit
plein.
La cinquième efpece eft celle des balles luifantes
qu'on arrange de même par lits , comme les étoiles.
Ballon ; les artificiers appellent ainfi de gros car-
touches , qu'on jette avec le mortier. On les remplit
ordinairement de ferpenteaux , qui font gros comme
des fufées par terre, mais non pas tout-à-fait fi longs.
On y met aufti deux petits fauciffons de la même lon-
gueur &c de la même grofîeur, qui ayant pris feu par
leur amorce font crever le cartouche. Celui-ci a par
le bas un porte-feu , à l'embouchure duquel il y a
une amorce faite avec du coton trempé dans de la
poudre comme l'étoupille.
Ce cartouche fe fait fur un gros rouleau de bois t
autour duquel on roule des cartes fortes , que l'on
colle avec de la colle forte pour les faire tenir enfem-
ble. Après l'avoir étranglé par le bas , on y fait un
trou pour le portc-teu , qui fe fait comme pour les
fufées par terre : fa composition eft cependant plus
lente, car elle eft femblable à celle des fufées volan-
tes. On remplit enfuite le cartouche de fèrpèflteaus ,
& quelquefois d'étoiles, après quoi on l'étrangle par»
dcffllS. Voyei SAUCISSON, FUSEE, ÉTOILE, SER-
PENTEAU, &C.
Voyei Planche de l'Artificier ,fig. 61. un ballon ou
bombe d'artifice fphérique ;fig. 65. un mbrtier à ballon ;
fig. 63. un ballon achevé & couvert, avec la fufée
qui doit y porter le tcu \fig. 64. la coupe d'un ballon
tout chargé, auquel le teù fe communique par le
porte-feu pratiqué au fond du ballon;, qui pôle lux
4§
BAL
la chafle dans le mortier ; Ufig. 66. un ballon d'ar-
tifice qui en enferme un autre.
Ballon, en Chimie, eft un gros vaifleau de verre
dans lequel on reçoit les efprits volatils qu'on diftille,
c'eft une efpece de récipient. Lorfque le vaifleau dans
lequel on reçoit ce que l'on diftille eft petit ou médio-
cre on l'appelle récipient; fi au contraire ce vaifleau
eft "rand, pour que les efprits fulphureux ou volatils
ayent la liberté de s'y mouvoir & de fe condenfer en
goutte contre une furface plus étendue , on l'appelle
ballon , parce qu'ayant le cou très-court & la figure
ronde , il reflemble à celle d'un ballon. {M)
Ballon, en Marine, c'eft une efpece de brigan-
tin , dont on fe fert dans le royaume de Siam ; ce font
des bâtimens fort étroits & d'une extrême longueur,
qui ont le devant & le derrière fort relevés & ornés
de fculpture ; il y en a de tout dorés , où l'on met
jufqu'à cent vingt & même cent cinquante rameurs.
Au milieu eft une efpece de petit dôme que les Sia-
mois appellent chimie , qui forme une chambre cou-
verte de riches étoffes . avec des rideaux de la même
étoffe. Quelquefois cette chirole eft furmontée d'une
pyramide ou d'un clocher fort haut. Les bords de ces
bâtimens font à fleur d'eau, & les extrémités qui font
recourbées s'élèvent fort haut , la plupart repréfen-
tant des figures de dragons , de ferpens , ou d'autres
animaux. Ces ballons ont pour l'ordinaire cent ou
cent vingt pies de long , & n'en ont guère que fix de
large ; ils vont avec beaucoup de vîtefle. (Z )
Ballons , f. m. pi. c'eft ainfi qu'on appelle chez
les potiers de terre , les mottes de terre préparées &C
prêtes à être miles en œuvre ; & dans les Verreries ,
les mottes de terre à pot , prêtes à faire des pots. Voy.
.Verrerie & Pot.
BALLOT, f. m. (Comm.) petite balle ou paquet
de marchandises. On le dit quelquefois des grofles
balles. Voye{ Balle.
Ballot ou Ballon, dans le commerce de verre
de Lorraine , fignifie une certaine quantité de tables
de verre plus ou moins grande, félon fa qualité. Le
ballot de verre blanc contient vingt-cinq liens , à rai-
fon de fix tables au lien ; le ballot de verre de couleur ,
feulement douze liens & demi , & trois tables au lien.
Foye{ Lien , Table , Verre.
Ballot, s'entend aufli dans le commerce des vian-
des boucanées que font les boucaniers de S. Domin-
gue , d'un certain poids que chaque paquet doit avoir.
Ordinairement le paquet eft de 60 livres de viande
nette, non compris l'emballage. Voy. Boucanier.
BALLOTADE , f. f. (Manège.) c'eft un faut qu'on
fait faire à un cheval entre deux piliers , ou par le
droit , avec juftefle , foùtenu de la main & aidé du
gras des jambes , enforte qu'ayant les quatre pies en
l'air , il ne montre que les fers de ceux de derrière ,
fans détacher la ruade & féparer. A la capriole , il
rue ou noue l'aiguillette ; à la croupade , il retire les
pies de derrière fous lui, au lieu de montrer fes fers
comme il fait en maniant à ballotade ; c'eft ce qui fait
leur différence. Quand un cheval eft lafle d'aller à
capriole , & que Ion grand feu eft pafle , il fe met de
lui-même à ballotades, puis à croupades, à moins que
le poinçon bien appuyé ne lui fafle noiier l'aiguil-
lette & continuer l'air des caprioles. Faire la croix
à ballotades , c'eft faire ces fortes d'airs ou de fauts
d'une haleine en-avant , en-arriere & fur les côtés ,
comme une figure de croix. La ballotade eft un faut
où le cheval lèmble vouloir ruer , mais ne le fait
pourtant pas ; ce n'eft qu'une demi-ruade , faifant
feidement voir les fers des jambes de derrière, com-
me s'il avoit envie de ruer. {V)
BALLOTE, (Hift. nat. bot.) genre de plante à
fleur monopétale labiée , dont la lèvre fupérieure eft
Creufée en forme de cuiÛiere , la lèvre inférieure eft
BAL
divifée en trois parties ; celle du milieu eft la plus
grande , fa figure approche de celle d'un cœur ; le
piftil fort du calice , il eft attaché comme un clou
à la partie poftérieure de la fleur , & il eft environné
de quatre embryons , qui deviennent autant de fe-
mences oblongues , renfermées dans une capfule qui
a fervi de calice à la fleur , & qui eft en forme de
tuyau à cinq faces. Tournefort , Inft. rei herb. Voyez
Plante. (/ )
BALLOTER, v. neut. (Hifl. mod.) manière de
donner ion fuffrage dans les élections , &c. par le
moyen de certaines petites balles de diverfes cou-
leurs ; en France on les nomme des ballotes : l'ufage
eft de les mettre fecretement dans une boîte. (Cr)
BALLOTER , v. acL dans les Fonderies de fer , c'eft
mettre la verge fendue en paquets. Pour cet effet
l'ouvrier fe place devant une table , telle qu'on la
voit au bas de la Planche F III. des groffes forges.
Cette table eft couverte de fourchettes de deux for-
tes ; les unes ont leur manche au milieu du crochet ,
d'autres l'ont à une des extrémités du crochet. C'eft
fur les premières que l'ouvrier commence le ballo-
tage ; quand le paquet ou la botte contient le nom-
bre de verges qui convient , il la jette fur les fécon-
des ; des fécondes il pafle fur les crochets fixés dans
l'épaifleur de la partie antérieure de fa table ou de
fon établi. Là l'établi a une chaîne , elle fert à l'ou-
vrier pour ferrer fa botte, en bien appliquer les bar-
res les unes contre les autres, & en placer mieux &
plus facilement les liens. Il la lie en trois endroits, au
milieu & vers les deux bouts : fes liens font de fer.
Ainfi dans la planche que nous venons de citer, lafg.
J. eft vers le haut un ouvrier qui ballote ; vers le bas
eft la table à balloter ; ce eu. cette table ; dddd font
quatre fourchettes, dont la queue eft à l'extrémité du
crochet : ee font deux fourchettes placées entre les
quatre précédentes , dont la queue eft au milieu du
crochet : ff font deux crochets fcellés dans l'épaif-
feur de la table : / la cifaille à couper les liens : kkk
trois bottes liées : h,i deux fourchettes féparées de
la table , une de chaque efpece.
BALOTRES , f. f. ou principale lijfe de Gabari ; ce
font, en Marine, de longues pièces de bois, qui dans
la conftrudtion d'un vaifleau , déterminent la forme
qu'il doit avoir ; c'eft pourquoi on les appelle aufli
formes de vaiffeau. (Z )
B ALOTIN , terme de Jardinage , efpece de citron-
nier. Voye{ Citronnier. (&)
* BALOWA, (Géog.) ville d'Afle, dans l'Indof-
tan, au royaume de Decan.
BALSARA. Voyei BASSORA.
BALSAMINE , balfamina , f. f. (ffijl. nat.) genre
de plante à fleur polypétale irréguliere. Cette fleur
eft compofée de quatre pétales ou de fix : dans celle
qui a quatre pétales , la fupérieure forme une forte
de voûte ; l'inférieure eft concave & terminée par
un prolongement en forme de queue. Les deux péta-
les des côtés font fort étendus & accompagnés d'une
oreille : les fleurs à fix pétales font très-rares : le pé-
tale inférieur n'a point de prolongement en forme de
queue : le piftil fe trouve au milieu de ces fleurs en-
tre deux petites feuilles. Quand la fleur eft paflee,
ce piftil devient un fruit arrondi des deux côtés dans
quelques efpeces, & reflemblant à une filique dans
quelques autres. Ce fruit a des fortes de muicles ,
qui le rendent élaftique lorfqu'il s'ouvre. Il renferme
des femences attachées à un axe ou placenta. Tour-
nefort , Inft. rei herb. Voye^ Plante. (/)
On peut repiquer la balfamine fur d'autres couches
pour l'avancer. On la tranfporte au bout de fix fe-
maines dans les parterres : on la place parmi les fleurs
baffes , afin de ne lui point ôter le foleil : on la met
aufli dans des pots : elle veut être fouvent arrofée.
m
BAL
BAL
49
* Le fruit de la balfamini et! de toutes Tes parties
celle dont on fait le plus d'ufage en Médecine : il
pane pour vulnéraire , rafraîchiflant , & un peu def-
ficcatif; il appaifc les douleurs , furtout celles des
hémorrhoïdes ; il efl bon extérieurement pour les
hernies, les brûlures , & les bleflures des nerfs. Le
baume tiré du fruit de cette plante trempé clans l'hui-
le & fecbé au foleil, et! excellent dans les bleflures,
les idcercs , les hémorrhoïdes , les ruptures , & les
maladies de la matrice.
* BALSAMIQUES, adj. pris fub. en Médecine ; on
donne ce nom à des remèdes d'une nature un peu
acre & chaude : cette clafle comprend les céphali-
ques , apoplectiques , antiparalytiques , cordiaux ,
ipiritueux , & autres. On met de ce nombre le bois
d'aloès , fa réline , fa teinture , fon aubier ; le fantal
citrin , fa teinture concentrée en baume liquide ; l'am-
bre gris , le liquidambar, le baume blanc , le fuccin,
le benjoin , le ilirax calamité , fa réfine ; le ftirax
blanc, le laudanum, fa réfine ; les baumes du Pérou,
de Copahu , de Tolu ; l'écorce vraie de quinquina ,
le cofhis amer, la cafcarille, la canclle , le girofle ,
la graine de paradis , les cubebes , le macis , la noix
mufeade, la farriette , le thym, la rue, le ferpolet, la
lavande , le nard celtique , l'origan , le dictamne de
Crète , la marjolaine , la mélifle , la molucque , la
camomille Romaine , le marum de Syrie , le batîlic ,
l'aurone, le fteechas , le fpicanar, le jonc odorant ,
les feuilles de laurier & de myrte , & toutes les hui-
les de ces Amples obtenues par la diltillation. Entre
ces compofitions , Hoffman compte les baumes apo-
plectiques de Crollius , de Sherzerus , de Zeller , fon
baume liquide de vie , l'efprit de baume du Pérou ,
les efprits de fuccin & de mairie , l'eau apoplectique
de Sennert , l'eau d'Anhalt , l'elfence d'ambre , les
efprits volatils huileux , faits en aromatifant ces ef-
prits avec les huiles de canellc , de macis tk de cèdre.
Ces remèdes augmentent la chaleur dans les foli-
des , & donnent de la volatilité aux fluides , confé-
quemment hâtent le mouvement progreflif du fang,
divifent les humeurs , réfolvent les obftru&ions , &
entretiennent la tranfpiration.
On peut les employer dans les maladies de la tê-
te , des nerfs, de l'cltomac , & du cœur ; à condi-
tion que les corps ne feront pas pleins de fang & d'hu-
meur, que le ventre fera libre , & qu'il n'y aura ni
grande jeunefle , ni tempérament fenfible &c porté à
la colère.
BALTAGIS, f. m. (Hijt. mod.') forte d'azamoglans
ou valets du férail, occupés à fendre , feier & porter
le bois dans les appartenons. Leur nom vient de baha,
qui en langue Turque fignirie hache ou coignee. Les
baltagis portent le bois partout le lérail , & jufqu'aux
portes de l'appartement des femmes , où les eunu-
ques noirs viennent le prendre, parce qu'ils ont feuls
droit d'y entrer. Le vifir Mehemet Kuperli fous Ach-
met III. avoit été baltagi ; & il en retint le nom même
dans fon élévation , félon la coutume des Turcs , qui
portent fans rougir le nom de leur première pro-
feflion. Guer, Mœurs & ufag. des Turcs, tom. II. (G)
* BALTE!, f. m. pi. (Hijl. anc.) c'eit ainli qu'on
appclloit chez lès anciens les précinclions des théâ-
tres & des amphithéâtres- Voyc^ Amphithéâtres
& Théâtres.
* BALTEUS , en Architecture , ceinture de la vo-
lute ionique. Vitrme , p. gj '.
* BALTIMORE, ( Gèog. ) ville d'Irlande dans la
province de Munfter , au comté de Corck. , fur la
baie de même nom.
* BALTIQUE , ( Mer ) Gèog. grand golfe entre
l'Allemagne & la Pologne , qui a au midi le Dane-
marck, la Suéde à l'occident, la Laponie au fepteri-
trion , la Bothnie , la Finlande , la Livonie , la Cur-
lande , une partie de la Pologne à l'orient , qui çom-
Tome II,
mimique à la mer de Danemarck par le Sund , le
grand & le petit Bêlt.
* B ALTRAC AN, ( Hifi. nat. bot. ) plante qui croît
dans la Tartarie , qui a, dit-on, la feuille de la rave,
qui poufle une tige plus grofle que le doigt , qui s'é-
lève de la longueur du bras , & qui a la graine du fe-
nouil , feulement plus grdffe , & d'une odeur forte.
Le baltracan s'ouvre dans la faifon ; fon écorce fe fé-
pare ; il répand alors l'odeur de l'oranger. Les Tar-
tares le mangent pour fe foùtenir en voyage , fans
fel ni autre aflaifonnement : fa tige eft un peu creufe,
& fon écorce d'un verd jaune. Barbaro , marchand
Vénitien , dont on a tire cette defeription li mal ar-
rangée , dit avoir trouvé du baltracan proche Croid
dans l'Albanie.
* BALUCLAVA ou JAMBOL , ( Géàg. anc. &
mod. ) port de Crimée fur la mer Noire. Long. J>-±.
40. lat. 4.4.60. Quelques Géographes penfent que
c'efl l'ancienne Pailacium.
* BALVE, ( Géog. ) ville de l'Allemagne dans le
duché de Veftphalie.
BALUSTRADE , f. f. en Architecture : on entend
par ce nom la continuité d'une ou plufieurs travées
debaluftres, féparés par des piédeftaux conflruits de
marbre, de pierre, de fer ou de bois , tenus de la hau-
teur des appuis. Voye{ Appui.
Les balujtrades de pierre ou de marbre fervent à
deux ufages dans le bâtiment : l'un pour fervir d'ap-
pui aux terrafles qui féparent l'inégalité de hauteui
de terrein , dans un parc , dans des cours , ou dans
des jardins ; l'autre pour tenir lieu de balcon ou d'ap-
pui évuidé à chaque étage d'un édifice , ou pour lui
fervir de couronnement lorfque les combles ne font
pas apparens, comme au palais Bourbon à Paris , au
château deVerfailles, & ailleurs ; cette décoration ne
devant pas avoir lieu lorfque la néceflité ou l'ufagé
exige des combles, malgré l'exemple qu'on en voit
au palais du Luxembourg.
La hauteur des premières balujtrades n'a d'autre
fujétion que celle d'être proportionnée à celle du cou-
de ou hauteur d'appui : celle des fécondes doit avoir
en général le quart plus un 6e de l'ordre qui les foii-
tient; c'eft-à-dire, la hauteur de l'entablement , plus
une 6e partie. Elles font compofées ordinairement
de trois parties principales ; lavoir, d'un foclc ou
retraite , d'un dez& d'une tablette ; ces trois parties
comprifes cnfemble doivent fedivifer en neuf, dont"
on donnera quatre a la retraite ou focle , quatre au
dez , & une à la tablette : mais comme cette hau-
teur de balujlrade tenue extérieurement du quart plus
un fixieme de l'ordre , feroit fouvent trop haute pour
fervir d'appui du côté des appartenons ou terrafles
fupérieurs d'un bâtiment, alors le fol des étages in-
térieurs peut être élevé jufqu'à la hauteur de la re-
traite, à 2 ou 3 pouces près.
L'on tait fouvent des balujtrades qui tiennent lieu
d'attique ou d'amortiflement aux étages fupérieurs'
d'un édifice , & dans lefquels on n'introduit point de
baluitres , ne devant les employer que lorlqu'il y a
des vuides dans le bâtiment; tels que font les croi-
fées , les portes, les entre-colonnes : or il elt quel-
quefois des bâtimens qui n'ont point d'ouvertures re-
marquables ; alors il faut fouftraire les baluflres dans
ces. balujtrades , pour leur donner un caraâefe de fo-
lidité qui réponde au relie de l'ordonnance : mais
quand on en fait ufage , il faut éviter d'en mettre
plus de onze dans une même travée , ou moins de
cinq, malgré l'exemple dif château de <- i-';;1"*}'» où
fon n'en voit dans quelques endroits que dei
quelquefois une ; ce qui marque un trop petit efpa-
ce vuide fur unie grande face de bâtiment d'une or-
donnance légère ; ce celui du château d'eau du Pa-
lais-royal à Paris, d'un caractère rultique , où l'or^
voit au contraire des travées qui en on: jnfqu
G
50
BAL
ce qui eft un défaut de convenance , qui me fait
avancer pour précepte que les baluftrades doivent
t-tre plus ou moins ornées , félon le caractere du bâ-
timent qui les reçoit ou qu'elles accompagnent ;
c'eft-à-dire , que leurs profils doivent fe reffenfir du
genre ruffique , folide , moyen , délicat , & compo-
fé , ainfi que les baluftres. Voye^ Balustre ; & fes
profils fuivant les cinq ordres , dans nos Planches
d'Architecture. (P)
BALUSTRE, f. f. termes d'Architecture , du Latin
balojlrum , fait du Grec &atXc<rtov , fleur du grenadier
fauvage à laquelle fa tige refTemble afléz , eft ordi-
nairement une petite colonne compofée de trois par-
ties principales ; favoir , le chapiteau , la tige , &
le pié d'ouche. On a foin que les balujlns , autfibien
que les baluftrades , fe reffentent du caractere de
l'édifice ; c'eft pour cela qu'on repréfente dans nos
Planches à peu près les cinq manières de les mettre
en uiage. Les tofeanes fe font volontiers quarrées
par leur plan , pour plus de rufticité ; quelquefois
même les doriques : mais les autres fe font toujours
rondes , à l'exception des plinthes , des pies d'ouches
& des chapiteaux ; malgré l'exemple de ceux du châ-
teau de Sceaux , où le tout eft cylindrique ; ce qu'il
faut éviter. Les membres principaux des balujlres
peuvent être ornés de moulures au choix de l'archi-
tecte : le genre fimple , élégant & orné qui eft répan-
du dans l'ordonnance du bâtiment , doit néanmoins
lui fervir de règles.
Pour trouver la proportion des principales parties
des baluflres en général, il faut divifer toute leur hau-
teur en 5 ; une fera pour celle du pié d'ouche D ; les
4 parties reftantes feront divilées de nouveau en 5 ,
dont une fera pour la hauteur du chapiteau E: enfuite
on divifera la diftance depuis E jufqu'en F encore
en 5 , dont 3 feront pour la hauteur du cou F, & les
deux autres pour la pance ou renflement G.
Le balujlre tofean étant le plus mafîif , on doit don-
ner à la largeur de fa pance les y de toute fa hau-
teur , pendant que le corinthien , qui eft le plus fe-
velte , n'en aura que le tiers ; la largeur des autres
fe trouvera entre fes deux extrêmes. Ces largeurs
ainfi trouvées pour la groffeur de la pance , on les
divifera chacune en 9 , dont 4 formeront celle du
cou , qui fervira aufîi pour la largeur la plus étroite
du pié d'ouche, ainli que l'exprime la ligne ponctuée
N : la largeur du plinthe du pié d'ouche fera égale à
celle de la pance , & celle du tailloir aura ~ ou 4-_
moins , félon le caractere du balujlre ; & leur écarte-
ment d'une pance à l'autre fera tenu de la largeur
d'un cou.
Il faut éviter les demi-baluflres dans l'ordonnance
des baluftrades , ainfi que celles qui ne peuvent être
que feintes : cette mutilation ou affectation eft con-
traire au bon goût ; je leur préfère les acroteres //,
qui en font l'office avec plus de vraifTemblance. f.
Acroteres.
Ces balujlres , ainfi que les baluftrades , fe font de
différentes matières ; ce qui les fait nommer balujlres
de pierre , de marbre , de bois , de fer , de bronze , &lc.
Celles qu'on employé à la décoration extérieure des
bâtimens , différent en général très-peu des exemples
<jue l'on a donnés dans les Planches : mais celles des
dedans varient à l'infini fuivant les endroits où elles
font placées , la richeffe de leur matière, & le génie
de l'architecte qui en donne lesdeffeins.
Les balujlres dans les rampes d'un efcalier font un
aiTez mauvais effet , à caufe de l'obliquité qu'occa-
fionnent ces rampes , aux moulures des pies d'ou-
ches &C aux chapiteaux des balujlres ; ce qui fait que
quelques architectes aiment mieux faire régner ces
moulures horifontales , malgré l'inclinaifon des fo-
cles & des tablettes , comme on l'a pratiqué au Pa-
lais-royal; d'autres, qui regardent l'un 6c l'autre
B A M
comme vicieux , admettent l'ufage des rampes de fer,
ce genre de rampe n'exigeant pas tant de févérité. Il
eft cependant vrai que cette dernière efpece n'a pas
à beaucoup près tant de dignité , & qu'elle ne pa-
roît toiérable que dans les efcaliers des maifbns des
particuliers ; ceux des maifons des grands étant or-
dinairement fufceptibles de peinture, de fculpture ,
& d'archite£ture , femblent exiger des rampes qui
s'affortiffent à leur magnificence. (P)
BALUSTRE , en Serrurerie , eft encore un ornement
qui fe pratique fous l'anneau d'une clé au haut de la
tige , & qui eft appelle balujlre , parce qu'il en a la
forme. Les clés de chef-d'œuvre ont ordinairement
leur tige en balujlre.
Balustre , en terme d'Orfèvre, eft une partie de la
monture d'un chandelier qu'on voit ordinairement
au milieu de cette monture. Elle eft plus grofïe en
haut qu'en bas , & fe termine à fes deux extrémités
par un nœud d'une groffeur proportionnée à l'ex-
trémité où il doit être, f^oye^ Nœud.
BALZANE, f. f, (Manège.) c'eft la marque de
poil blanc qui vient aux pies de plufieurs chevaux ,
depuis le boulet jufqu'au fâbot, devant & derrière.
Ce mot vient de l'Italien bal^ano. On appelle che-
val balzan, celui qui a des balzanes à quelqu'un de
fes pies , ou à tous les quatre. On juge de la bonté
& de la nature des chevaux , félon les pies où les
balzanes & rencontrent. Balzan s'applique à l'animal ;
cheval balzan. Balzane, c'eft la marque qui le diftin-
gue. Les termes de travat , tranjlravat , & chauffé trop
haut , appartiennent aux balzanes. Voye^ ces termes à
leurs lettres. Quelques cavaliers font allez fuperfti-
tieux pour s'imaginer qu'il y a une fatalité finiftre
attachée à la balzane du cheval arzel. ( V)
* BAM , ville de la Caramanie Perfique. Longit.
$4. lat.fept. z8. 30.
* B AMB A , (Gèog.) province d'Afrique au royau-
me de Congo.
Bamba , (Gèog. anc. & mod.) village de la vieille
Caftille , jadis Gueritum , ville de l'Elpagne Tarra-
conoife.
* BAMBERG , ( Gèog. ) ville d'Allemagne dans
la Franconie , au confluent du Mein & du Rednitz,,
Long. z8. 40. lat. 5o.
Il y a en Bohême une ville du même nom. Long.
34- 20. lat. 49. J>3>
* BAMBIAIE , f. m. ( Hifl. nat. Ornyth. ) oifeaif
qu'on trouve dans l'île de Cuba , qui ne s'élève pref-
que point de terre , qu'on prend à la courfe , & dont
la chair a bon goût. On ne nous dit rien de Ion plu-
mage , de fon bec , de fes pattes , de fes ailes , de fa
groffeur , &c. ni des autres caractères , que les Natu-
raliftes doivent faire entrer dans leurs deferiptions.
BAMBOCH ADES , f. f. en Peinture , fe dit de cer-
tains petits tableaux qui repréfentent des fujets cham-
pêtres & grotefques. L'étymologie de ce mot vient
de Bamboche , peintre Flamand , qui s'eft particulie-
ment adonné à ce genre. Son nom de famille étoit
Pierre de Laur : mais les Italiens lui donnèrent celui
de Bamboche , à caufe de la fingularité de fa taille.
(*)
* BAMBOU ou BAMBUCK, (Gèog. ) royaume
d'Afrique dans la Nigritie, borné au feptentrion par
les pays de Galam & de Kaffan, à l'occident par la
rivière de Feleme & les royaumes de Kantu & de
Kombregudu , au midi par celui de Mankanna , & à
l'orient par des terres inconnues.
* BAMBOUC', {Hifl. nat. bot.) bois extrêmement
noueux qui croît dans plufieurs endroits des Indes
Orientales. On dit que c'eft une efpece de canne
très - groffe & très - haute , dont les bamboches ou
cannes légères que vendent nos Tabletiers , ne font
que les plus petits jets. V. Tabaxifera arundo.
* BAMBOURG , PAMBOURG , PAINBOURG ,
BAN
( -Gêog. ànc. ■& mcd. ) bourg du cercle de Bavière en
Allemagne , dans le gouvernement de Buchaufen
fur PAchza , vers le nord du lac de Chiemzée. Quel-
ques Géographes croyent que c'eft l'ancienne Bada-
cum ou Augufla Badacum.
* BAMB YCATIENS , f. m. pi. ( Gcog. anc. ) peu-
ples voifins du Tigre , peut-être les habitans de Bam-
byce ou Hiérapolis.
* BAMFE, ( Géog. ) petite ville de PEcofle fep-
tentrionale dans la province de même nom, à l'em-
bouchure de la Doverne. Long. i5. z5.lat. 5 y. 48.
* BAMIA , ( Hijl. nat. bot. ) on l'appelle aufîi alcea
indica. Elle a la fleur large , pentapétale , avec un
vailfeau féminal afTez coniidérable , divilé en cinq
cellules qui contiennent des femences en forme de
reins. Sa feuille eft découpée , dentelée & attachée
à la tige par des pédicules. Elle croît en Egypte. On
fe fert de fa femence : elle eft d'un blanc laie ; elle
répand une odeur qui tient de celle du mule. Les
Egyptiens la font fécher, la broyent &: en mêlent la
poudre à leur caffé ; ils lui attribuent la vertu de for-
tifier la tête & l'eftomac. On en ule en fumigations.
BAN ,f. m. (terme de Jurifpr.) eft une proclamation
folennelle de quelque choie que ce foit. L'origine
du mot eft incertaine. Quelques-uns le tirent du
Breton , ban , clameur , bruit : d'autres du Saxon ,
pan , une choie étendue : d'où ban ; & bande , em-
ployée pour une bannière.
Bracf on fait mention de bannus régis , ban du roi ,
pour une proclamation de lîlence faite par les juges
de la cour avant le choc des champions dans un
combat.
Bans de mariage, font des avertifTemens folennels
de promenés de fuftirs mariages , donnés dans l'églife
paroifliale avant la célébration des mariages, afin
que s'il fe trouve quelque oppofition à faire contre
l'une ou l'autre des parties, comme pourrailon d'en-
gagemens précédens , ou autre caufe , il y ait lieu
de les faire.
La publication des bans fe fait à deffein de préve-
nir les mariages clandeftins. Par les lois de l'Eglife ,
les bans doivent être publiés trois fois à trois jours
difFérens aux lieux 011 les parties demeurent , à peine
de nullité de mariage. Il y a peine d'excommunica-
tion contre ceux qui connoiflant des empêchemens ,
ne les déclarent point.
Un curé ne fauroit être contraint à les publier lorf-
qu'il connoit dans l'un ou l'autre de ceux qui fe pré-
fentent au mariage quelque incapacité ou empêche-
ment.
Si les contraclans font majeurs , le défaut de pu-
blication de bans n'emporte pas tout feul la nullité
de mariage.
Ban , en termes de Palais , eft fynonyme à bannijfe-
ment : c'eft en ce fens qu'on dit , garder l'on ban , rom-
pre fon ban. (#)
* Ban de vendange, c'eft la publication faite au
prône par les curés des paroilTes de village , de
la permiffion accordée par le juge ou le feigneur
à tous les particuliers de faire vendanger leurs vi-
gnes. Le ban établi pour l'ouverture des vendange?',
eft fondé fur deux railons : Tune d'empêcher des gens
ignorans, ou preffés par la néceffité de recueillir les
raiiins avant leur parfaite maturité , & d'en faire de
mauvais vins ; l'autre , d'empêcher que ceux qui
vendangeraient les premiers , ne découvriflent &
n'expolaifent au pillage les vignes de leurs voifins.
Le ban de vendange fe publie fur l'avis des princi-
paux habitans des villages , & des vignerons les plus
habiles. Il anujettittous les habitans indiftinctement,
à moins qu'ils n'ayent acquis un titre exprès qui les
en difpenlé. Le leigneur feul peut vendanger un jour
avant l'ouverture portée par le ban. Il y a des coutu-
mes où les vignes enfermées de clos tk de murailles
Tome Hj,
B AN
5t
font exceptées de la loi du ban ; par-tout la contra-
vention eft punie par l'amende 6c la faifie des fruits.
Ban , ( Hijl. rnod. ) nom qu'on donnoit ancienne-
ment en Hongrie aux gouverneurs des provinces qui
relevoient de ce royaume , telles que la Dalmatie ,
la Croatie, la Servie. Selon Leunclavius, on n'ac-
cordoit ce titre qu'aux princes du fang de la maifon
de Hongrie ; & encore aujourd'hui , la dignité de ban
de Croatie eft remplie par un feignenr de la première
diftinéfion. Le pays dans lequel eft litué TemelVar,
s'appelle encore aujourd'hui le banat de TemelVar,
auquel fens le terme de banat équivaut à ceux de pro-
vince ou de gouvernement. Le ban avoit lbus lui un
vice-gérent , lieutenant général , ou lieutenant de rot
au gouvernement , qu'on nommoit vict-bahnuS, On
croit que ces deux noms font dérivés des mots bant
bando ou banno , dont on fe fervent dans le bas Empire
pour fignifier une bannière ou un étendart ; parce que
les habitans de ces provinces , en tems de guerre ,
étoient obligés de fe ranger fous la bannière ou Pè-
te ndart de leur gouverneur. Quelques Auteurs pré-
tendent que les Turcs ont confervé ce nom de ban j
& que les gouverneurs à qui ils le donnent , ont la
même autorité que les beglerbegs. Voye^ Begler-
BEG. (G)
Ban & ArrieRe-ban , ( An milit. & Hijl. mod. )
mandement public adrefte de la part d'un louverain
à fes vaifaux de le trouver en armes à un rendez-
vous pour lervir dans l'armée , foit en perfonne , foit
par un certain nombre de gens de pié ou de cheval
qui les repréfentent , à proportion du revenu ou de
la qualité de leurs fiefs.
Le ban{e rapporte aux fiefs , & V arrière- ban aux ar-
riere-fiefs, félon quelques-uns : mais d'autres croyent
que le ban eft le fervice ordinaire que chaque vaffal
doit félon la nature de les fiefs ; ôc que Y arriere-ban elt
un fervice extraordinaire que les vaifaux rendent au
roi ; d'autres qui font venir le mot d' 'arriere-ban , de
heri-bannum , proclamation du maître ou leigneur,
penfent qu'on ne doit mettre aucune diltinction entre
ban & arriere-ban.
Quoi qu'il en foit , ces alfemblécs de vafTaux con-
voqués par leurs feigneurs fur les ordres ou à la ré-
quilition du roi , ont commencé en France dès le
tems des rois de la féconde race , & il en eft fait men-
tion dans les capitulaires de Charlemagne : mais elles
ont été plus fréquentes fous les rois de la troilieme
race. Car on trouve dans la chambre des Comptes
plufieurs rôles pour le ban & Y arrière- ban, datés des
années 1216, 1236 , 1242, 1253 ,& 1272. Il pa-
roît par le dernier, que les feigneurs fieffés cités par
Philippe-le-Hardi , dévoient fe trouver à jour prefix
à Tours , avec un certain nombre de cavaliers Se de
fantaffins , dont les uns alloient à leurs dépens , les
autres étoient défrayés ; Se ceux qu'on difpenfoit dit
fervice , s'en rédimoient par une lomme d'argent ou
une certaine quantité de fourrage. Depuis ce prince
jufqu'à François I. on trouve encore plufieurs con-
vocations & rôles du ban & de Yarrierc-ran ; dans lef-
quels, outre les feigneurs laïques , font auffi compris
les archevêques, evèques, abbés, prieurs , chapitres,
les maires , confuls & échevins des villes. Les eccle-
fiaftiques étoient obligés d'aller ou d'envoyer au ban
& arriere-ban , à caufe des fiefs qu'ils poifédo:ent.
Lorfqu'ils y alloient eux-mêmes , ils combartoient en
perfonne ; témoin ce que Monftrelet raconte de Pierre
de Montaigu , archevêque de Sens , & Matthieu Pa-
ris , de Philippe de Dreux evèque de Béarnais , qui
portoient la cuiraffè 6c combattoient comme les fei-
gneurs & barons.
Dans la fuite , les eccléiiaftiqUesontété difpenfes
du ban & arrière ban par plufieurs lettres patentes , &C
entre autres par un acte du 29 Avril 1636 , entre
Louis XIII. & le clergé de France, moyennant cer--
< ij
5*
BAN
taines fubventions que le clergé a promis de payer
au roi dans les befoins de l'état. Les rois de France
ont auffi exempté de ce fervice les bourgeois de plu-
fieurs villes de leur royaume , les officiers du parle-
ment de Paris , les fécrétaires du roi , &c autres per-
fonnes privilégiées.
Autrefois l'aflemblée du ban & de Yarriere-ban fe
faiibit par des feigneurs de la première diftinclion
appelles miffidominici, envoyés ou députés du fouve-
rain ; enfuite par les bannerets fur les ordres du roi
ou du connétable. Depuis le roi a adreffé fes lettres
aux i'énéchaux & aux gouverneurs de province. En
1674 & en 1689, Louis XIV. ordonna à tous les
nobles , barons , chevaliers , écuyers , & autres non
nobles , communautés & autres vaffaux , de fe trou-
ver en armes au jour & au lieu qui leur feroient dé-
signés parle gouverneur & lieutenant général de fa
majelte en leur province , pour aller joindre le corps
des troupes fous la conduite du chef qui feroit choili
d'entre eux , afin de les commander fuivant la forme
accoutumée. De la Roque , traité du ban & arrière-
ban. Voye7^ Noblesse ( G )
Cette milice étoit affez bonne du tems de Louis
XI. parce qu'il s'en fervoit fouvent: elle commença
à dégénérer du tems de Louis XII. & de François I.
& elle tomba encore davantage fous Henri II.
On n'a point affemblé Y arriere-ban en France de-
puis 1674. M. de Turenne ne fut point content de
cette milice qui ne le conduilbit pas avec le même
ordre & la même obéiffance que les troupes réglées.
<Ç> , , ,
BANAL , terme de coutume , fe dit d'un moulin ,
four , preflbir ou autre choie femblable , que le fei-
gneur entretient pour l'ufage de fes cenfitaires , &
dont il peut les contraindre d'ufer. Voye7^ ci-deflbus
Banalité.
BANALITÉ , eft un droit qu'a le feigneur de con-
traindre leshabitansde fon territoire, d'aller moudre
leur blé à fon moulin , cuire à fon four , ou porter la
vendange à fon preflbir.
Dans la coutume de Paris , la banalité ne peut pas
s'exiger fans titre ; ôc ces titres ne font pas réputés
valables s'ils ne font avant vingt-cinq ans. (H)
* BANANIER, f. m. mufa, (Hift. nat. bot.) Voici
fes caractères. Sa racine pouffe des jets, fa tige meurt
après avoir donné fon fruit. Elle reffemble à un ro-
feau ; elle n'a point de branches : mais elle jette de
grandes feuilles , d'abord roulées comme au canna-
corus, mais fe développant dans la fuite , & formant
une elpece de couronne à fon fommet. Les fleurs &
les fruits font en grappes , Se enfermés dans une gaine
comme au palmier. Les fleurs ont plufieurs pétales
irréguliers & portés fur le fommet de l'ovaire. L'o-
vaire reffemble à celui du concombre ; il eit char-
nu , partagé en trois loges , bon à manger , rempli
de femences , & garni d'un long tuyau dont l'extrémi-
té eit arrondie. Boerhaave en diftingue deux efpeces.
Le fruit de cet arbre eit délicat ; on dit qu'il ne
fait jamais de mal en quelque quantité qu'on en man-
ge. Alpin nous affûre cependant qu'il ie digère diffi-
cilement ; c'eft la nourriture journalière des Indiens.
Ses teuilles font ii grandes, qu'elles peuvent fervir
de vêtement. La racine écrafée & bouillie dans du
lait, eit bonne pou»' abattre les vertiges ; fon eau mê-
lée avec du fucre appaife la chaleur brûlante des
reins ; la décoction du fruit adoucit la toux caufée
par des humeurs chaudes & acres. On s'en fert dans
les inflammations de la plèvre, du poumon, & des
reins ; enfin elle excite la femence, & provoque l'u-
rine. (V)
* BAN ARA ou BENARES, (Géog.) ville d'Ane,
au Mogol, dans le royaume de Bengale. Long. 101. -
30. lat. zG. 20.
BANAUÇON , f. m. m Architecture, nom du troi-
BAN
fieme genre de machine des anciens, qui fervoïent
à tirer des fardeaux. (P)
* B ANBURY , ( Gcog. ) ville d'Angleterre , fur la
rivière de Chernel, dans la province d'Oxford. Long.
16 . 10. lat. Sz. 9.
BANC , f. m. ( Gramm. ) ce mot fe prend com-
munément pour un long fiége , à dos ou fans dos ,
foûtenu fur plufieurs pies ; & c'eit du rapport que
d'autres machines ont avec fa figure ou avec fon
ufage , qu'elles ont pris le nom de banc.
Banc , ( terme deJurifprud. ) dans le chœur eft un
des droits honorifiques qui appartiennent au patron
d'une églife , ou au feigneur haut-jufticier dans la
haute juitice duquel elle eft fituée. Voyc\ Honori-
fiques (droits. )
On appelle au Palais meffieurs du grand banc , les
préfidens au mortier , parce qu'en effet le banc fur
lequel ils font affis cil plus élevé que les fiéges des
autres confeillers.
On appelle auffi bancs au Palais des efpeces de bu-
reaux où fe tiennent les avocats & procureurs pour
parler à leurs parties, (i/)
Banc du roi , (Hijl. mod. & Jurijprud.) tribunal
de juitice ou cour fouveraine en Angleterre. On l'ap-
pelle ainfi , parce qu'autrefois le roi y préfidoit en
perfonne fur un banc élevé , les juges étant aiïïs à fes
pies fur des bancs ou fiéges plus bas. C'eft dans cette
cour que l'on plaide les caufes de la couronne entre
le roi & fes fujets. Elle connoît auffi des crimes de
haute trahifon & des complots contre le gouverne-
ment. Ce tribunal eft compofé de quatre juges , dont
le premier s'appelle le lord chef de jujlice de la cour
du banc du roi. Sa jurildict ion eft générale , & s'étend
par toute l'Angleterre ; il n'y en a point dans ce
royaume de plus indépendante , parce que la loi fup-
pofe que le roi y préiide toujours. Il y a encore un
autre tribunal nommé le banc commun ou cour des corn-
muns plaidoyers , qui eft la féconde cour de juftice du
royaume , où l'on porte les affaires communes & or-
dinaires, c'eft-à-dire les procès de fujet à iujet. On y
juge toutes les affaires civiles , réelles , ôc perfonnel-
les, à la rigueur de la loi. Le premier juge de cette
cour ie nomme chef de lajuflice des communs plaidoyers
ou du banc commun. On y comptoit autrefois cinq ,
fix , fept, & jufqu'à huit juges ; leur nombre eft main-
tenant réduit à quatre , comme celui des juges du
banc du roi. (C7)
Banc, (Comm.) Les banquiers avoient autrefois
des bancs dans les places publiques & dans les lieux
où fe tenoient les foires; & c 'étoit où ils faifoient
leur commerce d'argent & de lettres de change.
Quand un banquier faiibit faillite , on rompoit fon
banc , comme pour avertir le public que celui à qui
avoit appartenu le banc rompu n'étoit plus en état
de continuer fon négoce ; & comme cet ufage étoit
très-ordinaire en Italie , on prétend que le terme de
banqueroute dont on fe fert en France , vient des
mots Italiens banco rotto, qui lignifient banc rompu, y.
Banqueroute. Dicl. du Comm. tome I. (C7)
Banc , en terme de Marine, eft la hauteur du fond
de la mer , qui s'élève quelquefois jufqu'à fa furface ,
ou qui n'eft couvert que de très-peu d'eau ; deforte
que les vaiffeaux ne peuvent paffer deffus fans
échouer. Il y a des bancs qui reftent entièrement à
fec , lorfque la mer eft baffe ; ce qui s'exprime en di-
fant que ces bancs découvrent. Il y a des bancs fur lef-
quels il y a affez d'eau pour que les plus grands vaif-
feaux puiffent y paffer en tout tems , & même y
mouiller , tels que le banc de Terre-neuve.
On appelle bancs déglaces , de gros glaçons flotans
qu'on trouve quelquefois à la mer. (Z)
BANC de galère , de galéajfe , de galiote , de brigan-
tin , & de tout bâtiment à ramer. C'eft le lieu pour
affeoir ceux qui tirent à la rame, foit forçat, bona-
BAN
voglie , ou matelot ; voye^ Planche II. le defîein d'u-
ne galère à la rame , & les forçats afïïs fur le banc.
Les galères ordinaires font à vingt-cinq bancs ; ce
qui fe doit entendre de vingt-cinq de chaque côté ,
faifant en tout cinquante bancs pour cinquante ra-
mes , & quatre ou cinq hommes fur chaque rame.
Les galéaffes ont trente-deux bancs , & fix à fept
hommes pour chaque rame.
De tous les bâtimens à rame , il n'y a que les gon-
doles de Vcnife qui n'ayent point de banc ; car les ra-
meurs nagent debout.
Banc de chaloupe; ce font les bancs qui font joints
autour de l'arriére de la chaloupe en-dedans pour
afTeoir ceux qui y font. (Z)
Banc à s'afleoir dans la chambre du capitaine. On
trouve un banc qui eft placé contre l'arriére du vaif-
feau. Il y en a encore un autre à ftribord ; c'eft par
l'endroit qu'occupe ce banc , & qu'on ôte alors que
l'on pafTe le gouvernail pour le monter; on le levé
aufïï lorfqu'on veut culcr de l'arriére ; les affûts en-
trent encore par-là. On y place quelquefois un tuyau
d'aifement à fix pouces du petit montant qui le foù-
tient , & à un pié du bord du vaiffeau.
Banc à coucher. Il y en a aufïï un dans la chambre
du capitaine. (Z)
Banc d'Hippocrate , ( en Chirurgie. ) machiné
dont on fe fervoit autrefois pour réduire les luxa-
tions & les fractures. C'étoit une efpece de bois de
lit fur lequel on étendoit le malade. II y avoit un ef-
fieu à chaque bout qui fe tournoit avec une mani-
velle ; on attachoit des lacs aux parties luxées ou
fraûurées d'un côté, & aux efïïeux de l'autre. En tour-
nant les efïïeux , les lacs qui s'entortilloient autour
faifoient l'exteniion & la contre-extenlion pendant
que le chirurgien réduifoit les os dans leur fituation
naturelle. La Chirurgie moderne a iimplifié les mé-
thodes de réduire les membres luxés ou fracturés , &
ne fe fert plus de cette machine dont on voit la def-
cription & la figure dans Oribafe. Voy. Extension
& MACHINE pour la réduction des luxations. (Y")
B ANC , ( en Architecl. ) c'eft la hauteur des pierres
parfaites dans les carrières.
Banc de VOLÉE ; c'eft le banc qui tombe après
avoir foûchevé.
Banc de ciel ; c'eft le premier & le plus dur qui
fe trouve en fouillant une carrière , & qu'on laide
foùtenu fur des piliers pour lui lervir de ciel ou de
plafond. (P)
Banc , ÇArdoife.} On entend par un banc dans les
carrières d'ardoife & autres, le long parallélépipè-
de formé par deux foncées. Les bancs s'élèvent les uns
au-deffus des autres , & forment à droite & à gauche
une efpece d'échelle ou plutôt d'efcalier. On ne peut
fixer ni la hauteur ni la largeur du banc , ou de cha-
que degré de cet efcalier ; elles varient l'une & l'au-
tre félon la profondeur, l'étendue & la nature de la
carrière. Les bancs ou parallélépipèdes d'ardoife n'ont
pas la même hauteur fur toute leur longueur. Ils vont
un peu en s'inclinant vers le fond de la carrière , &
forment une pente aux eaux vers la cuvette qui les
reçoit. La hauteur du banc eft de neuf pies dans nos
figures d'ardoife, & fa largeur fuit la même échelle.
La furface fupérietire du banc s'appelle nif. Voye^ les
articles Foncée, Cuvette, Nif, 6* Ardoise.
Banc de Cuve, ce font dans les B/affèries, les plan-
chers qui entourent les cuves. Voye^ Brasserie.
Banc , en terme de C ardeur , c'eft une planche d'en-
viron un pié de large, allant en pente par un bout,&
qui porte toutes les parties du roiiet. Voye^ CAR i >i R .
BANC A TIRER, (terme & outil de Chaineticr. ) Il
fert aux Chaînctiers pour paffer à la filière le lîl de
fer , de cuivre ou de laiton , qu'ils veulent employer à
des chaînes , & pour le diminuer de groffeur.
Ce banc à tirer eft fait comme ceux des Orfèvres 6v
BAN
5
autres , & eft compofé d'un banc , d'une pièce , du
moulinet, du noyau ôc de la filière. Voye\ Banc
d'Orfèvre.
Banc À COUPER, c'eft chéries Cloutiers d'épingles,
un banc de figure prefque quarrée, garni de rebords
plus hauts fur le derrière que fur les'côtés , & le de-
vant qui eft moins élevé que tout le refte. Les cil'ail-
les font attachées au milieu par une de leurs branches.
Voye^ Cisailles , & lafi-ure 13 du banc, PI. IL du
Cloutier d'épingles.
Banc À tirer , ( en terme cTEpinglier. ) eft une ef-
pece d'établi adofte d'un bout fur un billot fendu à
deux ou trois endroits pour y battre la filière. Voye^
Filière. Vers le même bout ou à l'autre , félon l'em-
placement, cilla bobile, voye^ Bobile; plus loin,
la filière arrêtée entre trois montans. Derrière elle,
on voit une pièce de bois plus haute que ces mon-
tans , avec un coin ; c'eft-là qu'on place la filière pour
en taire l'effai : enfin vers cette extrémité on voit le
tourniquet d'oii dévide le fil que l'on tire. Voye?^ la,
fig. PI. des Trifileries & de l'Orfèvrerie.
Banc, fervant aux Fondeurs de caractères d'Im-
primerie, eft une efpece de table oblongue d'envi-
ron deux pies èc demi , à hauteur d'appui , fermée à
l'entour par un rebord, excepté vis-à-vis l'ouvrier
où ce rebord finit; ce banc fert à recevoir les lettres
à mefure qu'on les fond, &de décharge pour plu-
fieurs choies néceffaires à l'ouvrier. Voyt{ la vignette
de la PI. I. du Fondeur de caractères , & la fig. 2. de la
même Planche qui le repréfente en particulier.
Banc d'Imprimerie , eft une efpece de table de
bois j longue environ de trois pies fur dix pouces de
large , foûtenue par deux tréteaux garnis de planches
tout au tour, en confervant cependant une ouvertu-
re pardevant qui forme un réceptacle ou bas d'armoi-
re ; ce banc eft toujours finie à la droite de l'Impri-
meur ; fur le premier bout il place le papier trempé
prêt à être imprimé ; à l'autre extrémité , il pofe cha-
que feuille au fortir de la prelTe : les Imprimeurs fe
fervent de la cavité de ce banc, pour ferrer la laine ,
les cuirs , les clous de balles , les blanchcts, Se autres
étoffes ou uftcnciles d'Imprimerie.
Banc à river , fig. Si. PI. XVI. de l'Horlogerie;
eft un infiniment dont les Horlogers fe fervent pour
river certaines roues fur leur pignon. On met la par-
tie B B de cet outil entre les mâchoires de l'étau, &
on fait entrer la tige du pignon fur lequel on veut
riverune roue dans un trou 7" convenable; on prend
enfuite un poinçon à m er , & on rabat la rivure à pe-
tits coups de marteau fur la roue que l'on fait tour-
ner avec le doigt, afin que les parties de la rivure
loient également rabattues de toutes parts.
Comme il eft important que les balanciers foierit
rivés bien droit fur leurs verges, & que ces verges,
vu leurs palettes,' ne pourroient point tourner clans
un trou comme la tige d'un pignon , on fait o '
renient ali milieu des bancs à river une creufure ron-
de L, dans laquelle on ajufte une petite plaque P à
ir, de telle forte qu'elle puific y tourner fans
beaucoup de jeu : on fait aufïï au centre de cette pla-
que une ouverture O, propre à recevoir le corps
d'une verge 6c une de fes palettes.
La petite plaque pouvant, comme il a e*.^ dir, tour-
ner dans fa creufure L, lorfqu'on ajufte une verge.
dans fa fente pour river le balancier fur fon affiette :
en tournant ce balancier, on fait tourner la plaque ,
& on le rive fur fa vergé, comme on fëroit une roue
fur fon pignon. On a lin outil de la même forme qui
s'ouvre en deux pour embraffer la tige d'un pi
fur laquelle c une affiette ; cette affiette re-
çoit une roue que l'on y rive, en rabattant fur la roue
■ & entaillée, la partie de l'alfiette qui l'ex-
cède. Comme la roue ou le pignon ne fauroient paf-
fer par les trous du /'.r'-v. on cil obligé d'en avoir un
54
BAN
qui fe fépare en deux , comme il a été dît ; ordinaire-
ment les deux pièces du banc font affemblées enfem-
ble à charnière , & peuvent s'ouvrir & fe fermer com-
me un compas. {T)
Banc À CRIC , ( en terme d'Orfèvre en groprie. ) fe
dit d'un banc à tirer, qui ne diffère du banc ordinaire ,
qu'en ce qu'au lieu de fangle, il eft garni d'une ef-
pece de cremailliere , & d'une boîte qui renferme un
arbre à chaque bout duquel on voit hors de la boîte
une manivelle. Cet arbre fait tourner une roue de
rencontre, qui s'engraine elle-même dans la cremail-
liere , qui le termine par un crochet qui retient la
main. Voye^ Cremailliere & Main.
Voye?K Planche dernière de l'Orfèvre, un banc à ti-
rer & un banc à cric , vignet.fig. 1.2. ouvriers qui tirent
de la moulure ; a tenaille à tirer; b moulure. Signet,
fig. 3, 4, autres ouvriers aubancà cric ;fd g g banc ,
t e pitons qui foùtiennent la filière , d le cric ,fiajîlie-
fe. Fig. 5. ouvrier qui dreffe les lames à la lime avant
que de les faire palier.
Développement du. banc à cric , fig. a b c b d efg >
mouvement hors de fa boîte; b b arbre oii l'on voit
deux quarrés pour les manivelles ; c fon pignon mon-
té, qui fait mouvoir la roue à dent ou le hériffon d ,
dont le pignon ou la lanterne s'engraine dans le cric/,
au bout duquel eft un crochet qui tient un anneau g,
où l'on met les branches de la tenaille à tirer ; m m la
cage ou boîte ; n n extrémités des vis qui fixent les
jumelles ;mm,oo, les jumelles ; p , étrier fur lequel
gliffe le cric ; q le hériffon ; r la lanterne ; h un des pi-
tons qui foùtiennent la filière ; i rondelle qui fe met
fous le banc & l'écrou.
Développement du banc à tirer , P P Q Q RR S
boîte à filière pour tirer des moulures ; p p le fom-
mier ; Q Q le chapeau ; R , R , les vis qui appuient
fur les filières, & les tiennent ferrées ; T clet pour
ferrer les vis; V, V, les vis; X, X, les filières à
moulures; Y Z autre boîte à filière peu différente de
la précédente ; i. filières de deffus; z. 3- 2.. filières
de deffous; 4. 4. autre filière; 5. morceau tiré en
rond ; 6 . morceau moulé. A banc à tirer ; B , B , pi-
tons qui foùtiennent les filières; C, C, aîles du mou-
linet ;HH G C F tambour fur lequel le roule la fan-
gle du moulinet; G, G, tourillons ; H, H, quarrés
des moulinets ; F corps du tambour ; I, I, deux pie-
ces quarrées qui s'ajuffent aux quarrés du tambour ,
entre les clefs & le moulinet; 5, t, deux tambours ;
«la rondelle; M, M, deux fupports du tambour;
N, O, filières.
L'affemblage & la fonction de ces deux machines
fe voit fi clairement dans la vignette , que ce que
nous en pourrions dire n'ajoûteroit rien à ce qu'elle
répré fente.
Banc À TIRER, {terme d'Orfèvre.') eft une pièce de
bois fur laquelle les Orfèvres tirent les fils d'or ou
d'argent qu'ils employent. Elle peut avoir cinq , fix ,
fept , huit, & neuf pies de long, douze à quinze pou-
ces de large , fur quatre d'épaiffeur. L'on perce fur
un bout de cette pièce deux trous qui fervent à met-
tre les poupées qui tiennent l'arbre où eft attachée la
fangle, & où l'on met l'aile. Voye^ POUPÉE , AR-
BRE, Sangle, 6- Aile.
Les deux autres trous qui font vis-à-vis l'un de l'au-
tre , fervent à mettre les poupées qui retiennent la
filière , & le troiiîeme eft pour recevoir les gratures
que la filière fait à l'or ou l'argent en les tirant : elles
■tombent dans un tiroir qui eft au-deffous. Il y a enco-
re quatre autres trous outre ceux-ci , pour les pies
qui foùtiennent le banc; ces pies ont environ deux
fur trois pouces d'équarriffage , & deux pies & demi ,
ou même trois pies & demi de long à deux pouces du
bas: fous ces pies l'on met une planche avec un re-
bord de quatre ou cinq pouces de haut , pour ferrer
BAN
les outils qui fervent au tirage. Voye^ Tirage , &
l' article fuivant.
Banc À DÉGROSSIR, (chéries Tireurs d'or.) eft un
banc fur lequel le dégrojfeur donne le troifieme tirage
à l'or par le moyen d'une bobine lur laquelle il le de-
vide , en le faifant paffer à travers une filière appli-
quée contre un faux-ras retenu dans un ajoux. Voyei
Faux-ras & Ajoux.
Banc À DORER , {cke{ les Tireurs d'or.) eft compo-
fé de deux parties , la tête & l'appui : la tête dans
laquelle il y a un morceau de bois en forme de demi-
cercle , tient dans un mur; les tenailles entrent dans
un trou pratiqué au milieu de ce cercle , par un bras ,
tandis que l'autre eft retenu par des chevilles de ter
fichées furie cercle. Les tenailles font appuyées dans
une encoche à l'autre extrémité du banc , & le lingot
qu'elles ferrent eft foùtenu par l'autre bout fur un
chenet , tandis qu'on le brunit & qu'on le dore. Voye^
Tireur d'or.
BANC ou SELLE À OURDIR, {en Paffementerie.}
c'eft un fiége deftiné pour l'ourdiffeur , & pour por-
ter la manivelle qui fait tourner Fourdiffoir: cette
manivelle a en bas une large poulie qui doit être pa-
rallèle à celle du moulin ; lur cette poulie eft paffée
une corde à boyau , qui après s'être croifée dans fon
milieu , va palier fur la poulie du moulin ; par le
moyen du croifement de cette corde , le moulin tour-
ne du même fens que la manivelle ; fi la corde lâche
par la fechereffe du tems ou de quelqu'autre maniè-
re, il n'y a qu'à reculer ce banc ; fi le contraire arri-
ve , on le rapproche ; il y a des ourdiffoirs où l'on fe
paffe de ce banc. Voye^ OURDISSOIR ; voye^ au/fi
PL de Passementerie.
Bancs , {dans les manufactures de foie.) ce font des
parties de Fourdiffoir. Des bancs, les uns font atta-
chés au montant, les autres font mobiles : il y a en-
tr'eux une roue cavée fur fa circonférence en deux
endroits différens ; les cavités font environ à un pou-
ce de diftance prife fur le diamètre. Il pafle dans ces
cavités une corde de boyau qui va envelopper la ca-
ge de Fourdiffoir, & lui donner le mouvement que
la roue cavée reçoit de Fourdiffeufe. Les bancs mo-
biles s'éloignent & s'approchent fuivant que la corde
a befoin d'être lâchée ou tendue, Voye^ Ourdis-
soir.
Banc ; on donne , dans les Verreries, ce nom à un
fiege fur lequel le maître s'affied pour taire l'embou-
chure, & poferla cordeline. Voye[ Planche de Verre-
rie VI. fig. ij. un ouvrier au banc. Le banc n'a rien
de particulier que les deux bras qu'on fait plus longs
qu'ils n'ont coutume d'être aux autres fiéges de cette
nature , afin que l'ouvrier puiffe y pofer & mouvoir
commodément fa canne , en faifant l'embouchure &C
la cordeline.
Banc, {en Vénerie. ) c'eft ainfi qu'on appelle les
lits des chiens.
Banc ; on entend par ce mot , dans les Salines, un
endroit clos , couvert , pratiqué au côté de la poelle,
& dont la porte correfpond à la pente de la chèvre ,
qui defeend par fon propre poids , & fe renverfe fur
le feuil du banc , lorfque fe fait la brifée. Le fel de-
meure dix-huit jours dans les bancs , avant que d'être
porté dans les magalins. Voye{ Brisée, Chèvre, <$•
SALINE ; &C Planche II, des Salines. Dans la coupe de
Fattelier / , / , font deux bancs.
Bancs (controlleurs des) ; officiers de falines : il y
en a deux. Leurs fonctions font d'enregiftrer par or-
dre de numéro, & date par date, tous les billets
de la délivrance journalière; les abattues en abrégé ,
par colonnes & ordre de poelles ; les fels à l'entrée &
à la fortie des bancs ; les bois de corde qui viennent
à la faline , & d'aflifter à toutes les livraifons de fels
des bancs & des magalins ; fe trouver à la brifée ;
faire porter les fels des bancs dans les magafins ; af-
BAN
BAN
Mer aux réceptions de bois & de fers ; en Un mot ,
veiller à tout ce qui concerne le fervice.
Banc de jardin. Rien n'eft linéceffaire dans lés
grands jardins , que les bancs : on en lbuhaiteroit à
chaque bout d'allée. Ils ont des places affeûées , tel-
les que font les renfoncemens , & les niches dans les
charmilles, les extrémités des allées , les terraffes &
les beaux points de vue. Il y a des bancs fimples, des
bancs à doffiers, 6c des bancs dont le dos le renverlé
du côté que vous voulez. On en fait de marbre, de
pierre , & de bois : ces derniers font les plus com-
muns ; on les peint à l'huile pour les conferver. (K)
* B a N c ( le grand ) , Géog. Banc de l'Amérique
feptentrionale , vers la côte orientale de Terre-neu-
ve ; c'eft le plus grand banc de fable qu'on connoiffe ;
il n'elî pas dangereux. Les Européens y font la pêche
des morues.
Banc aux baleines , auffi dans l'Amérique fepten-
trionale, à l'occident du grand banc, & au midi du
banc à vert.
Banc de rîle de fable , dans l'Amérique feptentrio-
nale , au midi de l'île 6c de l'Acadie, dans la mer de
la nouvelle France-.
Banc des lies, à l'Amérique feptentrionale, dans le
grand golfe de S. Laurent , en Canada , au-devant de
la baie des Chaleurs.
Banc à vert , en Amérique , près de la côte méri-
dionale de Terre-neuve , vis-à-vis des baies de Plai-
fance 6c des Trépaffés.
Banc jacquet ou le petit banc , en l'Amérique mé-
ridionale , à l'orient du grand banc.
Banc des perles , en l'Amérique méridionale , fur la
côte de Carracas , entre la ville de Rio de la Gâcha
& le cap de la Vêla.
Banc des perles , en Amérique , vers la côte de Ve-
nezuela , en allant de l'île Marguerite à celle de la
Tortue.
Banc de S. Georges , en l'Amérique feptentrionale ,
vers la nouvelle Angleterre & le cap de fable, fur la
côte de l'Acadie. On l'appelle aufîî banc aux Anglois.
Banc de Birnini , en l'Amérique , près de l'île Bi-
mini , une des Lucayes , 6c de celle d'Abacoa , vers
la Floride , fur la partie orientale de Bahama.
* BANCA (Géog.) , île d'Afie, dans les Indes, en-
tre celles de Sumatra 6c de Bornéo , avec ville 6c dé-
troit de même nom.
*BANCALIS (Géog.), ville de l'île de Sumatra,
au royaume d'Achem , vers le détroit de Malaca.
Long. nS. Lit. i. 5.
* BANCHE, f. f. (Hijl. nat.) pierre molle , mais
dure, comparée à la glaife ; M. de Reaumur , mém.
del'Acad. année ijiz,pag. iz8 > prétend que ce n'eft
autre chofe que de la glaife durcie & pétrifiée par
ce qu'il y a de vifqueux dans l'eau de la mer , & il le
prouve par la dilpolîtion de fes feuilles & fa couleur.
La hanche à fa furface fupérieure eft allez dure; un
peu au-delious elle eft un peu plus molle; plus on la
prend bas , moins clic efl dure 6c moins elle eft dif-
férente de la glaife ; en un mot, en s'approchant du
lit de pare glaife , elle paroît aufïi infenfiblement s'ap-
procher de la nature de cette terre , & cela par des
degrés lî infenfibles , qu'il n'efl pas poffible de déter-
miner précifément où la hanche finit , & où la glaife
commence. La hanche , de grile qu'elle efl, devient
blanche & dure lorfqu'elle n'eft plus humectée par
l'eau.
BANCO ou BANQUO (Commerce); mot Italien
qui lignifie banque. On s'en fert ordinairement pour
exprimer celle qui eft établie à Venife.
Le banco de Venife, qu'on appelle vulgairement
banco del giro , eft proprement un bureau du dépôt
public, ou une caille générale & perpétuelle ouverte
à tous marchands & négocians, & fondée par un
édit iolennel de la république , que tous payemens
55
pour marchandas en gros & de lettres de change
ne fe pourront faire qu'i« banco ou en billets de ban-
que ; & que tous débiteurs & créanciers feront obli-
gés , les uns de porter leur argent à la banque , les
autres d'y recevoir leur payement in banco Ou eti
billets de banque ; de forte que tous les payemens
fe font par un fimple tranfport des uns aux autres ;
celui qui étoit créancier fur le livre du banquo , de-
venant débiteur des qu'il cède fon droit à un autre,
qui eft enregiftré pour créancier à fa place ; de forte
que les parties ne font que changer de nom, fans qu'il
foit nécefTaire pour cela de faire aucun payement
réel & effeûif.
Il eft vrai qu'il fe fait quelquefois des payemens
en efpeces , fur-tout lorfqu'il s'agit du négoce en dé-
tail , ou que <les étrangers veulent avoir de l'argent
comptant pour emporter avec eux , ou que les né-
gocians aiment mieux avoir leur fonds en monnoie
courante , pour le négocier par lettres de change.
La nécefîîté de ces payemens effectifs a donné lieu
de pourvoir à un fonds d'argent comptant, qui bien
loin de diminuer le capital , l'augmente plutôt par la
liberté qu'il donne à chacun de retirer fon argent
quand il lui plaît.
Par le moyen de cette banque la république , fans
gêner la liberté du commerce 6c fans payer aucun
intérêt, fe trouve maîtrefie de cinq millions de du-
cats à quoi le capital de la banque eft limité, ce qui
monte à plus de trente millions de livres monnoie de
France ; elle répond du capital, & c'eft pour elle en
toute occafion une reffource fùre qui la difpenfe d'a-
voir recours à des importions extraordinaires , mê-
me dans les plus prenantes nécefîités. Le bon ordre
qui règne dans l'adminiitration du banco , prouve
également l'utilité & la folidité de cet établiffement.
Dans le banco , les écritures fe tiennent en livres ,
fous & deniers de gros. La livre vaut dix ducats de
banco , ou 240 gros, parce que le ducat eft compofé
de 24 gros. La monnoie de change s'entend toujours
ducat de banco, qui eft imaginaire, ioodefquelsfont
1 20 ducats monnoie courante. Ainti la différence des
ducats de banco & des ducats courans , eft de 20 pour
cent , étant défendu aux courtiers de traiter à plus
haut prix.
Le banco fe ferme quatre fois l'année ; favoir , le
20 Mars, le 20 Juin , le 20 Septembre, & le 20 Dé-
cembre , 6c chaque fois pour vingt jours : mais on
n'en négocie pas moins fur la place. Il y a encore des
clôtures extraordinaires qui lont de huit à dix jours,
pour le carnaval , la femaine fainte , 6c on le ferme
encore chaque vendredi de la femaine , quand il n'y
a point de fête , & cela pour faire le bilan. Voye^ Bi-
lan.
M. Savary, dans fon dictionnaire , explique la ma-
nière dont fe négocient ou fe payent les lettres de
change au banco, foyer le Dictionnaire du Commerce ,-
tom. I. pag. 8iy. (G)
* BANCOK (Géog.), fort d'Afie, au royaume
de Siam, dans les Indes. Long, il p. lat. ij. z5.
* BANDA (Géog.) , fept iles d'Afie , vers le qua-
trième degré de latitude méridionale.
BANDAGE , f. m. ( terme de Chirurgie.) eft l'appli-
cation d'une ou de plufîeurs bandes autour d'une
partie malade. L'utilité des bandages elt de contenir
dans une lituation naturelle les parties dérangées ,
de faire compreffion fur quelque vaiffea*i , de m.ur,-
tenir les médicamens , comprefTes , & autres pièces
d'appareil. Un feul bandage produit quelquefois les
trois effets en même tems.
Les bandages font différens , fuivant les parties fur
lefquelles on applique les bandes. Voyi Bande.
Par rapport à leurs ufages , il y a des banJagcs con-
tentifs , uniffans , incarnatifs , divjîjs , compre/fifs , er.~
pulfifs. Voyez ces mots.
5 5
BAN
La méthode de faire chaque barrage a des règles
particulières , dont le détail feroit trop long. Il ne
faut pas en général que les bandages lbient trop lâ-
ches ni trop terrés. Il faut avoir foin de garnir de
linge mollet ou de charpie les cavités fur lefquelles
on doit faire palier les bandes, afin que leur appli-
cation foit plus exaûe.
Pour bien appliquer une bande, on doit mettre la
partie en iituation , tenir le globe de la bande dans la
main , & n'en dérouler à mefure que ce qu'il en faut
pour couvrir la partie.
Pour bien lever la bande , il faut mettre la par-
tie en fituation , décoller les endroits que le pus ou
îefang a collés, recevoir d'une main ce que l'autre
aura défait , & ne point ébranler la partie par des
fecoulfes.
On divife les bandages en fimples & en compofés.
Le fimple fe divife en égal & en inégal. L'égal ell
appelle circulaire , parce que les tours de bande ne
doivent point fe déborder. L'inégal ell celui dont les
circonvolutions font inégales, & plus ou moins obli-
ques. On en fait de quatre efpeces , connues fous le
nom de doloire , de moufle ou obtus , de renverfé , & de
rampant'. Voye{ ces mots.
Le bandage eft dit compofé, lorfque plufîeurs ban-
des font coufues les unes aux autres en différens fens,
ou qu'elles font fendues en plufîeurs chefs ; telles font
le T pour le fondement , voye^ T ; le lufpenfoir pour
les bourfes , voye^ Suspensoir ; la fronde pour les
aiffelles , le menton , &c. ¥oyt{ Fronde.
Le bandage à dix-huit chefs eft un des plus com-
pofés : on s'en fert pour les fraftures compliquées
des extrémités. Ce font autant de bandes courtes ,
qui ne font que fe croifer fur la partie , & qui per-
mettent les panfemens fans déranger la partie bief-
fée. Voye^ la figure 10. Planche XXl.
On donne aulîi le nom de bandage à des inftru-
mens faits de différentes matières , comme fer, cui-
vre , cuir , &c. tels font le bandage pour contenir les
hernies ou defeentes , voye^ Braver; le bandage
pour la chute ou defeente de matrice , voy. Chute
de MATRiCE;le bandage pour les hemorrhoides ,
voyei Hemorrhoides ; celui pour la réunion du
tendon d'Achille , voyei Pantoufle.
Bandage de corps, eft une ferviette ou pièce
de linge en deux ou trois doubles , capable d'entou-
rer le corps ; voye^fig. i . Planche XXX. les extré-
mités fe croifent & s'attachent l'une fur l'autre avec
des épingles. Ce bandage fert à la poitrine & au bas-
ventre : on le ibûtient par le fcapulaire. KSckvv-
LAIRE.
Bandage pour la comprefîion de l'urethre , dont
M. Foubert fe fert à l'inftant qu'il doit faire l'opéra-
tion de la taille à fa méthode. PL IX.fig. 3. (Y)
Bandage ( terme de Fonderie ) ; les fondeurs en
grand donnent ce nom à un affemblage de plufîeurs
bandes de fer plat, qu'on applique fur les moules des
ouvrages qu'on veut jetter en fonte , pour empêcher
qu'ils ne s'écrafent & ne s'éboulent par leur propre
pefanteur. Voye^ FONDERIE & les Planches des figures
de bronze.
Bandage du BATTANT, en Paffementerie , eft
une greffe noix de bois, plate, percée de plufîeurs
trous dans fa rondeur, & de quatre autres trous dans
fon épaifTeur. Les trous de la rondeur fervent à in-
troduire, à qhoix & fuivant lebefoin, dans l'un d'eux
un bâton ou bandoir , qui tient & tire à lui la corde
attachée au battant. Lorfque le métier ne travaille
plus , on détortille cette corde d'alentour de ce bâ-
ton , qui s'en va naturellement par fa propre force
^'arrêter contre la barre d'en -haut du chaffis. Les
quatre trous de l'épaifTeur de cette noix , font pour
palier les bouts de deux cordes qui tiennent de part
cv d'autre au chaffis du métier. Ces cordes font fer-
BAN
rées fortement par les différens tours qu'on leur fait
faire avec la noix , au moyen du bâton ou bandoir
qu'on entonce dans les divers trous de la rondeur ,
6c qui mené la noix à diferétion. Deux cordes font
attachées à ce bâton , &c d'autre part aux deux épées
du battant , qui de cette manière eft toujours amené
du côté de la trame pour la frapper. Foye^ les Plan-
ches du Paffementier & leur explication.
Il y a encore le bandage du métier à frange , lequel
eft attaché au derrière du métier , comme il le voit
dans les Planches du PaJJementier ; il fert par la mobi-
lité d'une petite poulie qui eft à fon extrémité , à
faire lever & bailler alternativement les liffettes des
luilant & chaînettes qui ornent la tête des franges.
* BANDE , troupe , compagnie, ( Gramm. ) termes
fynonymes, en ce qu'ils marquent tous multitude de
perfonnes ou d'animaux. Plufîeurs perfonnes join-
tes pour aller enfemble, font la troupe ; plufîeurs per-
fonnes léparées de la troupe font la bande ; plufîeurs
perfonnes que des occupations , un intérêt , un em-
ploi , réunifient , forment la compagnie. Il ne faut pas
fe féparer de fa troupe pour faire bande à part. Il faut
avoir l'efprit & prendre l'intérêt de fa compagnie. On
dit une troupe de comédiens , une bande de violons , <Sc
la compagnie des Indes. On dit aulîi une bande dV-
tourneaux , des loups en troupe, deux tourterelles de
compagnie.
Bande, eft encore fynonyme à troupe. On dit d'une
troupe de loldats qui combattent fous le même éîen-
dart , que c'eft une bande.
Romulus divifa les légions par cohortes , & les co-
hortes en manipules , du nom de l'enfeigne fous la-
quelle elles combattoient , & qui étoit alors une poi-
gnée de foin au bout d'une pique , manipulus. Foye^
Enseigne & Légion.
M. Beneton croit que le mot de ban a donné ori-
gine à celui de bande. D'abord que le ban étoit pu-
blié , dit-il , tous les militaires d'un gouvernement
étant affemblés , on les partageoit en différentes ban-*
des ou compagnies ; les unes de cavaliers ou d'hom-
mes d'armes , les autres de foldats ou fantaffins , cha-
cune fous le commandement d'un ienior , c'eft-à-di-
re , du plus élevé ou du plus confideré d'entre tous
ceux qui compolbient la bande. . . . Du terme de ban
font venus ceux de bande & de bannière pour expri-
mer des hommes attroupés & des enfeignes. Une
bande étoit un nombre de foldats unis fous un chef,
& l'enfeigne qui fervoit à la conduite de ces loldats ,
étoit aulîi une bande ou une bannière. La bande en-
feigne donna fon nom à chaque troupe allez conlidé-
rable pour avoir une enfeigne. Les bandes ou mon-
tres militaires d'autrefois , étoient ce que nous ap-
pelions préientement des compagnies.
Ainfi dans nos hiitoriens , les vieilles bandes figni-
fient les anciens régimens , les troupes aguerries. II
y eft aulîi parlé des bandes noires, foit que leurs en-
feignes fulîént noires , foit qu'elles portaient des
écharpes de cette couleur , comme c 'étoit autrefois
la mode dans les armées pour diftinguer les divers
partis. ( G )
Bande ( Hifl. mod. ) ordre militaire en Efpagne,
inftitué par Alphonfe XI , roi de Caftille , l'an 1332.
Il prend Ion nom de banda , bande , ou ruban rouge ,
paffé en croix au-deffus de l'épaule droite , & au-
deffous au bras gauche du chevalier. Cet ordre n'é-
toit que pour les feuls cadets des maifons nobles. Les
aînés des grands en font exclus ; & avant que d'y
être admis , il falloit nécellairement avoir fervi dix-
ans au moins , foit à l'armée ou à la cour. Ils étoient
tenus de prendre les armes pour la défenle de la foi
catholique contre les infidèles. Le roi étoit grand maî-
tre de cet ordre , qui ne fublifte plus. (G)
Bande , f. f. ( Gramm. ) c'eft en général un mor-
ceau de drap , de toile , de fer , de cuivre 6c de toute
autre
BAN
autre matière , dont la largeur & l'épaiffeur font peu
confidérables relativement à la longueur.
Le mot bande prélente affez ordinairement à l'ef-
prit, l'idée d'attache & de lien; cependant ce n'eft
pas là toujours la détonation de la bande.
Les termes bande , lijîere , barre , peuvent être con-
fédérés comme fynonymes ; car ils déiignent une idée
générale qui leur eu commune , beaucoup de lon-
gueur fur peu de largeur & d'épaiffeur : mais ils font
différentiés par des idées acceffoires. La lifiere indi-
que longueur prife ou levée lur les extrémités d'une
pièce ou d'un tout ; bande, largeur prife dans la pièce,
avec un peu d'épaiffeur ; barre , une pièce ou un tout
même , qui a beaucoup de longueur fur peu de lar-
geur avec quelqu'épaifleuf. Ainfi on dit la lifiere d'un
drap ; une bande de toile ; une barre de fer.
BANDES de Jupiter ( en Aflronomie ) font deux
bandes qu'on remarque fur le corps de Jupiter, & qui
reffemblent à une ceinture ou baudrier. V. Jupiter.
Les bandes ou ceintures de Jupiter font plus brillan-
tes que le refte de fon difque , & terminées par des
lignes parallèles. Elles ne font pas toujours de la mê-
me grandeur , & elles n'occupent pas toujours la mê-
me partie du difque.
Elles ne font pas non plus toujours à la même dif-
tance : il femble qu'elles augmentent & diminuent
alternativement. Tantôt elles font fort éloignées l'u-
ne de l'autre ; tantôt elles paroiflent fe rapprocher :
mais c'eft toujours avec quelque nouveau change-
ment. Elles font fujettes à s'altérer de même que les
taches du Soleil : une tache très-confidérable que
M. Caffini avoit apperçue fur Jupiter en 1665 , ne
s'y conferva que près de deux années. Elle parut
pendant tout ce tems immobile au même endroit de
la furface. On en détermina pour lors la figure ,
aurïï bien que la fituation par rapport aux bandes.
Elle dilparut enfin en 1667 , & ne reparût que vers
l'an 167a , où l'on continua de l'appercevoir pen-
dant trois années confécutives. Enfin elle s'eft mon-
trée tk. cachée alternativement ; de manière qu'en
1708 , on comptoit depuis 1665 huit apparitions
complètes. C'eft par les révolutions de cette tache
obfervées un grand nombre de fois, qu'on a décou-
vert le tems de la révolution de Jupiter autour de
fon axe.
Il eft vraiffemblable que la terre que nous habi-
tons eft dans un état plus tranquille &c bien différent
de celui de Jupiter ; puifque l'on obferve dans la fur-
race de cette planète des changemens , tels qu'il en
arriverait fur notre globe , fi l'Océan par exemple
changeant de lieu venoit à fe répandre indifférem-
ment fur toutes les terres , enforte qu'il s'y formât
de nouvelles mers , de nouvelles îles , & de nouveaux
continens./«/?. ajîr. de M. le Monnier.
M. Huyghens a aufti découvert une cfpecc de ban-
de fort large dans la planète de Mars , qui eft beau-
coup plus foncée que le refte du difque , dont elle
n'occupe que la moitié. ( 0 )
BANDES ( en Architecture ) fe dit des principaux
membres des architraves , des chambranles , impof-
tes tk. archivoltes , qui pour l'ordinaire ont peu de
faillie & de hauteur lur une grande étendue. On les
nomme auln/i/tc, du latin/â/càzjdont Vitruve fe fort
pour exprimer la même choie. V^oyei Plate-bande.
On donne encore, dans les édifices bâtis de brique,
le nom de bande aux bandeaux de cette matière qui
font aux pourtours , ou dans les trumeaux des croi-
fées.
On dit auffi bande de colonne , lorfqu'on veut par-
ler du boffage dont on orne quelquefois le nud des
ordres ruftiques, comme aux colonnes du Luxem-
bourg pointillees ou vermiculées ; à celles du vieux
Louvre ; aux colonnes taillées d'omemens de peu de
Tome II,
BAN
57
relief, comme aux galeries du même palais du côté
de la rivière. Foye{ Bossages. ( P )
Bande ( en terme de Marine ) fignifie côté.
Bande du nord , c'eft-à-dire le côté du nord , ou
latitude feptentrionale.
Bande dufud, ou latitude méridionale.
Bande fe dit encore du côté ou flanc du vaiffeau :
avoir fon vaifleau à la bande , mettre fon vaiffeau à
la bande , c'eft le faire pancher fur un côté appuyé
d'un ponton , afin qu'il préfente l'autre flanc quand
on veut le nettoyer , ou lui donner le radoub , le
braier, & étancher quelque voie d'eau.
Tomber à la bande, c'eft tomber fur le côté.
Bande de Sabords ( terme de Marine ) c'eft tou-
te une rangée de fabords fur le côté du vaiffeau.
Bande, ou litre de toile goudronnée, qu'on met
quelquefois fur les coutures d'un vaiffeau.
BanDE(m termes de Chirurgie ) eft Une ligature
beaucoup plus longue que large , qui fert à tenir quel-
que partie du corps enveloppée & ferrée , pour la
maintenir dans un état lain , ou le lui procurer.
La bande confifte en trois parties , le corps tk les
deux extrémités , que quelques-uns appellent têtes ou
chefs ; & d'autres, queues. Il y a des bandes à un feul
chef, c'eft-à-dire , qui ne font roulées qu'à un bout ,
fig. 2i. PI- II. tk d'autres à double chef , fig. zz.
PI. II.
De plus , il y en a qui font roulées également ,
comme celles pour les fraûures & les diflocations ;
d'autres qui font divifées en plufieurs chefs , comme
celles pour la tête , le menton ; d'autres font compo-
fées de plufieurs bandelettes unies & coufues enfem-
ble , comme celles pour les tefticules. Quelques-unes
font fort larges , comme celles pour la poitrine , le
ventre , &c. d'autres étroites , comme celles pour les
lèvres , les doigts , &c. Guidon confeille de faire la
bande pour l'épaule , de lix doigts de large ; celle pour
la cuifle , de cinq ; celle pour la jambe , de cinq ; celle
pour le bras , de trois ; & celle pour le doigt , d'un.
Il a deux fortes de bandes , les unes font remèdes
par elles mêmes ; telles font celles qui fervent aux
fraclures fimples , à réunir les plaies , arrêter les hé-
morrhagies, &c. Les autres ne font que contentives ,
c'eft-à-dire qu'elles ne fervent qu'à contenir les mé-
dicamens. La matière des bandes eft ordinairement du
linge médiocrement fin , un peu élimé. Les bandes
doivent être coupées à droit fil , tk n'avoir ni ourlet
ni lifiere. Voye^ Bandage. ( J")
Bande, ( en Commerce. ) petit poids d'environ
deux onces dont on fe fert en quelques endroits de la
côte de Guinée pour peler la poudre d'or. Diclionn.
du Commerce , tom. I. p. 818. ( G )
Bande , en termes de Blafon , armoirie formée par
deux lignes tirées diagonalement ou tranfverlale-
ment , c'eft-à-dire, depuis le champ de l'écuffon à la
droite , julqu'au bas de la gauche , en représentation
d'un baudrier ou d'une écharpe paffee lur l'épaule.
La bande eft une des dix pièces honorables ordi-
naires : elle occupe la troifîeme partie du champ ,
lorlqu'il eft chargé , & la cinquième lorfqu'il eft uni.
Elle eft quelquefois dentelce, engrelée, &c les hé-
raults d'armes parlent d'une bande dextre & d'une
bande feneftre : une bande le divile en bandcU:tc , qui
eft la lixieme du champ ; an jarretière , qui oit la moi-
tié d'une bande ; en valeur, qui eft le quart de la ban-
de ; & en ruban , qui eft la moitié de la valeur. Ban-
de dextre elt celle qui fe nomme en terme propre &
abfolu bande , comme elle elt définie plus haut: le
mot dextre lui eft annexé par l'ufage, pour obvier à
des méprifes & la diftinguer de la bande fenejhe , qui
elt ce que les héraults d'armes François appellent bar-
re. Voy. Barre. (f )
BAN ûY. d'une [elle , lé dit en Manège de deux pie-
ces de fer plates , larges de trois ^o'gts , clouées aux
r H
$8
BAN
arçons pour la tenir en état. Mettre un arçon fur
bande , c'eft clouer les deux bouts de chaque bande
à chaque côté de l'arçon.Outre ces deux grandes ban-
des, l'arçon de devant en a une petite appellée bande
du garot,avec un croiffant pour tenir en état l'arcade
du warot. L'arçon de derrière a auffï une petite bande
pour le fortifier, (f)
Bande de derrière , en Bourferie , c'eft une £<z/z-
de de cuir attachée aux deux bouts de la cartouche
en-deffous , par laquelle on paffe une autre bande de
cuir qui fert à porter la cartouche. V. Cartouche.
Bande , cke^ les Imprimeurs , font deux grandes
tringles de bois de quatre pies & demi de long , fur
trois pouces de large , recouvertes de lames de fer
poli , ou à arrête , placées dans le milieu du berceau
de la prefTe , &c fur lefquelles roide le train. V. Ber-
ceau de Presse.
Bandes DE TOISES , dans les Salines , & particu-
lièrement à Moyenvic , ce font des cercles de fer
par lefquels le haut des poelles eft ceint & terminé.
BANDE DETOUR, terme de Pdtiffer'u, long mor-
ceau de pâte que les Pâtiffiers nomment ainfi parce
qu'il fe met autour d'une tourte ou d'une autre pie-
ce , pour en contenir les parties intérieures ou fupé-
rieures.
Bande fe dit encore en Pâtifferie d'un petit cordon
de pâte qu'on étend en croix fur une tourte , & dont
on forme plufieurs petits quarreaux qui fervent d'a-
grémens à la pièce.
Bandes de Billard, terme de Paumier ; ce font
quatre grandes tringles de bois rembourées de lifie-
res de drap , &C recouvertes de morceaux de drap
vert qui y font attachés avec des clous de cuivre :
on fixe ces bandes fur les bords de la table du billard
par-deffus le tapis , avec des vis qui entrent dans la
table ; ces bandes font rembourées d'une manière
bien ferme , afin de renvoyer les billes qui viennent
y frapper.
BANDÉ , adj. ( en Blafon. ) terme qui convient
à l'écuflbn également partagé en bandes : fi les par-
titions font en nombre impair , il faut d'abord nom-
mer le champ , enfuite le nombre de bandes. Voyeç_
Bande & Parti bandé. Miolans en Savoye , bandé
d'or& de gueules. (V)
BANDEAU , f. m. (e/z Architecture. ) plate-bande
unie qui fe pratique autour des croifées ou arcades
d'un bâtiment où l'on veut éviter la dépenfe , & qui
diffère des chambranles en ce que ceux-ci font ornés
de moulures , & que les bandeaux n'en ont point ,
à l'exception quelquefois d'un quart de rond , d'un
talon ou d'une feillure , que l'on introduit fur l'ar-
rête du tableau de ces mêmes portes ou croifées.
* Bandeau , f. m. c'eft ( en Artmilit. ) le nom
d'une des pièces de la ferrure de l'affût du canon ,
appliquée fur le flafque à l'endroit de la croce dont
elle imite le cintre. Elle fert à fortifier cette partie de
l'affût. Voye^ à r article Canon le détail & les pro-
portions des parties de l'affût. Dans celui d'une pièce
de huit livres de balles, le bandeau peut avoir 6 pies
9 pouces 6 lignes , de largeur 3 pouces 4 lignes, &
d'épaiffeur 3 lignes.
Bandeau , f. m. les ouvriers qui exécutent des
couronnes de fouverains , de quelque manière que
ce foit , entendent par le bandeau la partie de la cou-
ronne qui la termine circulairement par en-bas , &
qui ceint le front de celui qui la porte : ainfi, Planche
dernière de la Serrurerie en omemens , la partie de cou-
ronne q q qu'on voit chargée de diamans , eft le ban-
deau de la couronne.
Bandeau, en Menuifcrie , eft une planche mince
& étroite qui eft au pourtour des lambris par le haut,
& qui tient lieu de corniche lorfqu'il n'y en a point.
BANDELETTE , f, f. ( en Architecture. ) moulure
BAN
plate qui a ordinairement autant de faillie que de
hauteur, comme celle qui couronne l'architrave tof-
can & dorique , & qui fe nomme filet ou lijïeau , fé-
lon la place qu'elle occupe dans les corniches ou au-
tres membres d'architecture. ( P )
BANDER un arc ( terme a" Architecture ) ou une pla-
te-bande , c'eft en affembler les voufîbirs & claveaux
fur les cintres decharpente,& les fermer avec la clé.
On dit aufti bander un cable , en faifant tourner le
treuil d'un gruau ou la roue d'une grue pour élever
une pierre. ( .P)
Bander une voile ; c'eft ( en Marine ) coudre à la
voile des morceaux de toile de travers ou diagona-
lement , afin qu'elle dure plus long-tems. (Z )
BANDER , v. a£t. en terme de Bijoutier , c'eft redref-
fer une moulure , par exemple , en la bandant au banc
fans la tirer avec violence. Voye^ Banc.
Bander , v. au. en terme de Pdtiffier, c'eft garnir
une tourte de plufieurs petits cordons en croix.
BANDER le femple , dans les Manufactures en foie &
boutiques des Pafjementiers , c'eft donner aux cordes
du femple une tenfion telle qu'on puiffe prendre li-
brement les cordes que le lacs amené.
Bander , v. n. terme de Fauconnerie ; on dit de
l'oifeau qui fe tient fur les chiens faifant la creffe-
relle , cet oifeau bande au vent.
Bander une balle à la paume , c'eft enlever une
balle en mouvement ou arrêtée , & l'envoyer dans
les filets.
Bander les dames au trictrac , c'eft les charger ou
en trop mettre fur la même flèche. Voye^ Flèche.
* Bander , ( Géog. ) ville du Mogoliftan en Afie ,
dans le royaume & fur le golfe de Bengale, près de
Chatigan , &c à l'embouchure la plus orientale du
Gange.
* Bander-Abassi , ou Gomron , ( Géog. ) ville
maritime d'Afie dans la province de Kerman en Per-
fe , fur le golfe d'Ormus. Long. y5. lat. zj.
* Bander-Congo , ( Géog. ) ville maritime d'A-
fie en Perle , fur le golfe Perlique , dans la province
deFarfiftan.
BANDIER , terme ufité en quelques Coutumes, dans
la même fignification que banal. Voye^ Banal.
(#)
B ANDINS , f. m. pi. ( en Marine. ) ce font les lieux
où l'on s'appuie quand on eft debout dans la poupe,
& qui fortent , outre la longueur du corps , d'environ
une toile pour foûtenir avec les grandes confolesune
efpece de banc fermé par-dehors de petits baluftres ,
qu'ils nomment jaloujîe de meflre de poupe , & d'une
pièce figurée à jour qu'ils nomment couronnement. V.
dans la Planche III. fig. z. la lettre C qui marque les
bandins. ( Z )
BANDO , ou AZMER , voye{ Azmer.
BANDOIR, f. m. c'eft ainii que les Paffementiers
appellent le bâton qui paffe dans la noix du bandage
du battant. Voye^ Bandage.
BANDOULIERE , f. f. {Artmilit.) eft un large
baudrier de cuir pafîé par-deffus l'épaule droite , &
pendant en bas au-deffous du bras gauche , porté par
les anciens moufquetaires , tant pour foûtenir leurs
armes à feu , que pour le port de leurs cartouches ;
lefquelles étant mifes dans de petits étuis de bois ,
couverts de cuir , étoient pendues au nombre de 1 x
à chaque bandoulière.
Le mot eft originairement François , bandouiller ,
formé apparemment de bandoulier , une forte de ban-
dits infeftans particulièrement les Pyrénées ; lefquels
étoient autrefois diftingués par cette pièce de four-
niture , & étoient eux-mêmes ainli dénommés , quajî
ban de voliers , un bande de voleurs.
Les cavaliers portent encore la bandoulière de mê-
me que les foldats. Ces bandoulines font de buffle :
BAN
celles des premiers ont deux pouces de largeur, &
telles des autres feulement un pouce & demi.
Les gardes du corps du Roi portent auffi la ban-
doulière i &c lorfqu'ils l'ont à cheval , ils y attachent
leur moufqueton ou leur carabine. Cette bandoulière
eft toute unie & fans devife. Le fond eft d'argent ,
parce que la couleur blanche a toujours été la cou-
leur Françoife , foit dans les drapeaux , foit dans les
écharpes: c'eft pourquoi la bandoulière de la compa-
gnie Ecoflbife , qui eft la plus ancienne , eft de blanc
ou d'argent plein. Quand les autres compagnies fu-
rent inftituées , on ajouta une autre couleur à cha-
cune pour les diftinguer. La première & plus an-
cienne de ces compagnies, dont M. le duc de Ville-
roy eft aujourd'hui capitaine, a le verd ajouté à l'ar-
gent ; celle dont M. le duc de Luxembourg eft capi-
taine , a le jaune avec l'argent ; & celle de M. le duc
de Charoft > a le bleu avec l'argent. Daniel , hijl. de
milice Franqoife. Ce font les Ceinturiers qui font &
vendent les bandoulières. ( Q )
* BANDURA , ( Hijl. nat. bot. ) plante Indienne
qui refTemble à la gentiane par fa graine & par Ion
fruit ; mais particulièrement remarquable par une
gaine & follicule qui a la figure d'un pénis , de plus
d'un pié de long , & plus gros que le bras. Elle eft
attachée à l'arbre , & eft à moitié pleine d'une li-
queur agréable à boire. Sa racine eft aftringente ; fes
feuilles rafraîchiffent & humeftent ; le fuc qu'on
en tire , pris intérieurement , peut foulager dans les
fièvres ardentes ; & appliqué extérieurement , gué-
rir les éféfipeles & les autres éruptions inflamma-
toires.
* BANÉE, (Géog.fainte.) ville de la Paleftine
dans la tribu de Dan fur les confins de celles de Juda
& de Benjamin.
* BANGOR, (Géog. ) ville d'Angleterre dans la
{irincipauté de Galles au comté de Carnarvan , fur
c détroit de Menay, vis-à-vis l'île d'Anglefey. Long.
13. 4. lut. 53. 14-
* BANGUE ou chanvre des Indes , (Hijl. nat. bot.~)
Acofta dit que cette plante refTemble beaucoup à
notre chanvre ; que fa tige eft haute de cinq palmes ,
quarrée , d'un verd clair , difficile à rompre , & moins
creufe que celle du chanvre ; qu'on peut tiller , pré-
parer &c filer fon écorce, & qu'elle a la feuille du
chanvre.
Il ajoute que les Indiens en mangent la graine &
les feuilles pour s'exciter à l'acte vénérien.
Prife en poudre avec l'areca , l'opium & le fucre ,
elle endort ; avec le camfre , le macis , le girofle &
la mufeade, elle fait rêver agréablement; avec l'am-
bre gris , le mufe & le fucre en élecluaire , elle ré-
veille.
Elle croît dans rindoftan & autres contrées des
Indes orientales.
* BANIALUCH ou B AGNALUC , ville de laTur-
qùie en Europe , capitale de la Bofnie , fur les fron-
tières de la Dalmatie , proche la rivière de Setina.
Long. 35. 20. lut. 44. 20.
BANIANS ou BANJANS , f. m. pi. (Hijl. ecdêf.)
fecte d'idolâtres répandus dans l'Inde , mais principa-
lement dans le Mogol & dans le royaume de Cam-
baye. Us croyent qu'il y a un Dieu créateur de l'u-
nivers : mais ils ne laiflent pas que d'adorer le dia-
ble qui eft , difent-ils , créé pour gouverner le mon-
de & faire du mal aux hommes. Ils le repréfentent
fous une figure effroyable dans leurs mofquées , oh
leur bramine ou prêtre fe tient afîis auprès de l'au-
tel , & fe levé de tems en tems pour faire quelques
prières , & marquer au front ceux qui ont adoré le
diable. Il leur fait une marque jaune , en les frottant
d'une compofition faite d'eau & de bois de fandal >
avec un peu de poudre de riz broyé.
Leur dogme principal eft la métempfycofe ; auffi
Tome IL
BAN
59
ils ne mangent & même ils ne vendent point de
chair des animaux, de poiftbn , en un mot de tout
ce qui a eu vie , dans la crainte de vendre un corps
dans lequel pourrait avoir paffé l'ame de leur père.
Us fe font même un point de religion & un très-grand
mérite de délivrer les animaux des mains de ceux
qui veulent les tuer.
La purification du corps eft leur cérémonie la plus
effentielle : c'eft pourquoi ils fe lavent tous les jours
jufqu aux reins, tenant à la main un brin de paille
que le bramine leur donne pour chaffer le malin ef-
prit ; & pendant cette cérémonie , le bramine les
prêche. Ils regardent tous les hommes d'une religion
différente de la leur comme impurs , & craignent tel-
lement d'avoir communication avec eux, que fi ceux-
ci viennent à boire dans leur tafTe ou fimplement à
la toucher , les Banians la brifent ; & qu'ils tarri-
roient une fontaine ou tout autre réfervoir , dans le-
quel un Mahométan ou un Juif, &c. fe feraient bai-
gnés : lors même qu'ils fe touchent les ims les au-
tres , il faut qu'ils fe purifient avant que d'entrer chez
eux, de manger, &c. Us portent pendue à leur cou ,
une pierre nommée tamberan , percée par le milieu ,
& fufpendue par trois cordons. Cette pierre qui eft
de la grofleur d'un œuf, repréfente , difent-ils , leur
grand Dieu ; ce qui les rend fort refpectables à la plu-
part des Indiens. Les Banians font divifés en quatre-
vingts-trois caftes ou feftes principales , fans comp-
ter les autres moins confidérables qui fe multiplient
prefqu'à l'infini ; parce qu'il n'y a prefque point de
famille qui n'ait lès fuperftitions & fes cérémonies
particulières. Les quatre premières feues auxquelles
toutes les autres fe rapportent , font celles de Ceu-
rawath , de Samarath , de Brinow , & de Gocghi.
Voye{ Ceurawath , Brinow , &c. Mandeflo , tom.
II. d'Olearius. (G)
m * BANISTERE , f. f. ( Hijl. nat. bot. ) plante Amé^
ricaine dont la fleur eft en papillon , & fait place à
une femence unie , femblable à celle de l'érable.
Millet en diftingue cinq efpeces : elles aiment les
lieux chauds , les bois , & s'attachent aux arbres &
aux autres plantes. Quelques-unes ont quatre à cinq
pies de haut ; d'autres s'élèvent à huit, dix , douze ,
quatorze. Si elles ne rencontrent point d'appui, elles
fe rompent. Les trois premières efpeces font commu-
nes dans les bois de la Jamaïque : les deux autres ont
été trouvées aux Indes occidentales , proche Car-
thagene.
BANLIEUE, terme de Jurifpr. eft une lieue à
l'entour de la ville , au-dedans de laquelle fe peut
faire le ban , c'eft-à-dire , les proclamations de la
ville , & jufqu'où s'étend l'échevinage & juftice
d'icelle. (H)
* BANNASSES , f. f. pi. c'eft ainfi qu'on appelle
dans les Salines, des civières dont fe fervent les
focqueurs pour porter les cendres du fourneau
au cendrier. Voye^ Planche IV. Jîg. 28. une bannajfe.
Cette machine n'a pas beibin de delcription.
BANNE , f . f. ( Commerce. ) grande toile ou cou-
verture qui fert à couvrir quelque chofe , à la ga-
rantir du lbleil , de la pluie ou autres injures de
l'air.
Les marchandes Lingeres appellent auifibanne une
toile de cinq ou fix aunes de long , & d'environ trois
quarts de large , qu'elles attachent fous l'auvent de
leur boutique , & qui leur fert comme de montre.
Banne , qu'on nomrr.e auffi manne cv mznnett: , eft
un grand panier d'ofier fendu, plus long que large,
& de peu de profondeur , qui fert à embuher certai-
nes fortes de marchandifes.
Banne fe dit d'une grande toile dont on couvre
les bateaux de grains ou de drogues , d'épiceries &
d'autres marchandifes , pour les prelcrver du mau-
vais tems,
H ,i
6o
BAN
BAN
Banne eft encore la pièce de toile que les rouliers
& autres voituriers par terre mettent fur les balles ,
ballots 6c cailles qu'ils voiturent, pour les coni'erver.
(G)
Banne , f. f. voiture dont on fe fert pour tranfpor-
ter le charbon. Elle eiî à deux roues : la partie anté-
rieure de fon fond s'ouvre 6c fe ternie ; fe ferme tant
qu'on veut coni'erver la voiture pleine ; s'ouvre quand
on veut la vuider. Ses côtés lont revêtus de plan-
ches , vont en s'évafant , 6c forment une efpece de
boîte oblongue , plus ouverte par le haut que par le
bas , de quatre à quatre pies & demi de long fur deux
pies à deux pies & demi de large par le bas , & trois
pies à trois pies & demi de large par le haut , & fur
environ deux pies de hauteur perpendiculaire. Voyt\
PL de charbon , la banne ABCD, & le développement
de fon fond 6c de fon derrière , EFGHIKLM.
Banne. Voye{ Bâche.
BANNEAU , eft quelquefois la même chofe , ou
lin diminutif de la banne ; quelquefois c'eft une me-
fùre des liquides , & quelquefois un vaifl'eau propre
a les tranfporter. On s'en fert de cette dernière ef-
pece pour porter la vendange ; & les Vinaigriers qui
courent la campagne , ont auffi des banneaux , dont
deux font la charge d'un cheval : ceux-ci font cou-
verts par-defïïis , & ont en bas une canclle ou robi-
net pour tirer le vinaigre. Banneau eft auffi le nom
de tinettes de bois , qu'on met des deux côtés d'un
cheval de bât ou autre bête de fommc , pour tranf-
porter diverfes fortes de marchandées : il contient
environ un minot de Paris.
BANNERETS ou CHEVALIERS BANNERETS,
f. m. pi. ( Hijl.mod. & Art. mil. ) étoient autrefois des
gentilshommes puiffans en terre & en vaflaux , avec
lefquels ils formoient des efpeces de compagnies à
la guerre. On les appelloit bannerets, parce qu'ils
avoient le droit de porter bannière.
Il falloit pour avoir cette prérogative , être non-
feulement gentilhomme de nom 6c d'armes , mais
avoir pour vaft'aux des gentilshommes qui fuiviffent
la bannière à l'armée fous le commandement du ban-
neret. Ducange cite un ancien cérémonial manuf-
crit , qui marque la manière dont fe faifoit le cheva-
lier banneret, &c le nombre d'hommes qu'il devoit
avoir à fa fuite.
« Quand un bachelier , dit ce cérémonial , a gran-
»> dément fervi & fuivi la guerre , 6c que il a terre af-
» fez , & qu'il puifle avoir gentilshommes fcs hom-
» mes & pour accompagner fa bannier» , il peut lici-
» tement lever bannière , & non autrement ; car nul
» homme ne doit lever bannière en bataille , s'il n'a
» du moins cinquante hommes d'armes, tous l'es hom-
» mes &: les archiers , 6c les arbeleftriers qui y ap-
» partiennent ; & s'il les a , il doit à la première ba-
» taille où il fe trouvera , apporter un pennon de fes
» armes , & doit venir au connétable ou aux maré-
» chaux, ou à celui qui fera lieutenant de l'oit , pour
» le prince requérir qu'il porte bannière; & s'ils lui
m odroyent , doit fommcr les hérauts pour témoigna-
»> ge , & doivent couper la queue du pennon , &c.
» Voye^ Pennon ». Lors des chevaliers bannerets, le
nombre de la cavalerie dans les armées s'exprimoit
par celui des bannières , comme il s'exprime aujour-
d'hui par celui des efeadrons.
Les chevaliers bannerets ,{\\wàvA le P. Daniel , ne
paroilTcnt dans notre hiftoire que fous Philippe- Au-
gufte. Ils fubtirterent jufqu'à la création des compa-
gnies d'ordonnance par Charles VII. alors il n'y eut
plus de bannières , ni de chevaliers bannerets : toute
la gendarmerie fut mife en compagnies réglées. Voy.
Compagnies d'ordonnance & Hommes d'ar-
mes ; voye~ auffi NOBLESSE. (Q)
BANNETON , f, m. che^ les Boulangers, eft une
efpece de panier d'ofier fans ances , rond , & revêtu
en-dedans d'une toile. On y met lever le pain rond.
yoyw Planche du Boulanger ,fig. J.
Banneton , eft une efpece de cofre fermant à
clé , que les pêcheurs conftruifent fur les rivières
pour y pouvoir garder leur poiftbn. Il eft percé dans
l'eau & fert de réfervoir. On dit auffi bafcule ou bou-
tique.
BANNETTE, efpece de panier, fait de menus
brins de bois de châtaignier , fendus en deux 6c en-
trelacés les uns dans les autres , qui fert à mettre des
marchandées pour les voiturer 6c tranfporter. Sou-
vent on fe fert de deux bannettes pour les marchandi-
fes qui font un peu de conféquence : on en met une
deflbus , & l'autre deffiis qu'on nomme la coeffè ;
quelquefois on ne fe fert que d'une bannette avec
une toile par-deffiis.
Bannette , eft encore un terme ufité parmi les
Boucaniers François , pour lignifier un certain nom-
bre de peaux de taureaux , bouvarts , vaches , &c.
La bannette contient ou deux taureaux , ou un tau-
reau & deux vaches , ou quatre vaches , ou trois bou-
varts, autrement trois jeunes taureaux. On appelle
ces cuirs bannettes , à caufe de la manière dont ils font
plies.
BANNIE , f. f. fignifie en quelques coutumes , pu-
blication. On dit en Normandie banon dans le même
fens.
Banni fe dit auffi dans quelques coutumes adjec-
tivement , 6c fignifie publié ou crié en juftice. C'eft en
ce fens qu'on dit , une terre bannie , une efpave ban'
nie. (#)
* BANNIERES ,{.£.( Jurifpr. ) regiftres diftin-
gués de ceux des audiences , pour l'enregiftrement
de toutes les ordonnances & lettres patentes adref-
fées au Châtelet , & pour tous les autres aâes dont
la mémoire doit être confervée à la poftérité. Ils ont
été commencés en 1461 par Robert d'Etouteville >
prévôt de Paris : on les a continués ; on en étoit en
1722 au treizième volume. C'eft l'une des attribu-
tions du greffier des Infinuations , qui a été créé de-
puis ce tems , d'en être le dépofitaire 6c d'en déli-
vrer des expéditions.
Bannière ,f. f. terme de Marine. Voy. Pavillon.
Le mot de bannière n'eft en ufage que dans quelques
cantons de la Méditerranée , où l'on dit la bannière
de France , la bannière de Venife , pour dire le pavil-
lon de France , le pavillon de Venife. Mettre les per-
roquets en bannière. Voye^ PERROQUET. (■£)
BANNIMUS , ( Hijl. mod. ) mot de la balTe La-
tinité, qui exprime dans l'umverlité d'Oxford l'ex-
puliîon d'un membre qui a mérité cette peine. On
affichoit dans un carrefour ou autre endroit public ,
la fentence d'expullion, à ce que nul n'en prétendît
caufe d'ignorance. ( G )
BANNISSEMENT , f. m. ( Jurifprud. ) eft un exil
ordonné par un jugement en matière criminelle , con-
tre un acculé convaincu.
Le bannijfement eft ou perpétuel ou à tems.
Lorfqu'iî eft perpétuel , il équivaut à la déporta-
tion qui étoit en ufage chez les Romains ; il emporte
la mort civile , & conféquemment confifeation de
biens.
Mais quand il n'eft qu'à tems , il répond à peu près
à la relégation des Romains ; il ne fait point perdre
au banni les droits de citoyen , 6c n'emporte point la
confifeation de fes biens.
La peine du banni , cjui ne garde point fon ban , eft
la condamnation aux galères. (H)
* BANNOCHBURN oaBANNOCHRON (£<%.)
petite ville d'Ecofte , à deux milles de Sterling , lùr
une rivière de même nom.
BANQUE , {.(.{ Commerce. ) nous réunirons fous
ce titre pluiieurs expreffions 6l termes de commerce
BAN
ufités dans le trafic de la banque , comme avoir un
compte en banque , avoir crédit en banque , ouvrir un
compte en banque , donner crédit en banque , écrire une
partie en banque , créditer quelqu'un en banque , écritures
de banque.
Avoir un compte en banque , c'eft y avoir des fonds
& s'y faire créditer ou débiter , félon qu'on veut fai-
re des payemens à fes créanciers en argent , ou en
recevoir de fes débiteurs en argent de banque, c'eft-
à-dire , en billets ou écritures de banque.
Avoir crédit en banque , c'eft être écrit fur les livres
de la banque, comme ion créancier ; Scy avoir débit,
c'eft en être débiteur.
Ouvrir un compte en banque , c'eft la première opé-
ration que font les teneurs de livres d'une banque ,
lorfque les particuliers y portent des fonds pour la
première fois.
Donner crédit en banque ; c'eft charger les livres de
la banque des fommes qu'on y apporte , enforte qu'on
fait débiter fa caiffe , c'eft-à-dire , qu'on la rend dé-
bitrice à ceux qui y dépofent leur tonds.
Ecrire une partie en banque ; c'eft faire enregiiîrer
\lans les livres de la banque , le tranlport mutuel qui
ié fait par les créanciers & les débiteurs des fom-
mes ou de portions des fommes qu'ils ont en ban-
que, ce qu'on appelle virement de parties. Foye^S i-
EEMENT.
Créditer quelqu'un en banque , c'eft le rendre créan-
cier de la banque ; le débiter , c'eft l'en rendre débi-
teur.
Ecritures de banque ; ce font les diverfes fommes
pour lefquelles les particuliers , marchands , négo-
cians & autres, le font fait écrire en banque.
BANQUE d'emprunt, en Hollandois bankvanleenin-
ge ; c'eft une eipece de mont de piété établi à Amf-
terdarn , où l'on prête de l'argent aux particuliers qui
en ont befoin , moyennant qu'ils y dépofent des ga-
ges pour la fureté des fommes prêtées , & qu'ils
payent l'intérêt réglé à tant par mois par les bour-
guemeftres ou échevins ; c'eft ce qu'on appelle plus
communément la mai/on des lombards , ou le lom-
bard. Foyei Lombard.
Banque ( Commerce. ) fe dit encore de certaines
fociétés , villes ou communautés , qui fe chargent de
l'argent des particuliers pour le leur faire valoir à
gros intérêts , ou pour le mettre en fureté.
11 y a plufieurs efpeces de banques établies dans les
plus grandes villes commerçantes de l'Europe, com-
me à Venife , Amfterdam , Rotterdam , Hambourg ,
Londres , Paris , &c.
On peut voir ce que nous avons dit fous le mot
Banco, de celle de Venife, fur le modèle de laquelle
les autres ont été formées , & dans le Diclwnnaire du
Commerce , de Savary , les détails dans lelquels il en-
tre fur les banques d'Amlïerdam & de Hambourg ,
aufîi-bicn que fur celle qui fut érigée en France en
1716 , par le fieur LaW & compagnie , fous le nom
de banque générale , convertie en banque royale en
1718 , & dont les billets , qui avoient monté à la
fomme de deux milliards fix cens quatre-vingts-ieize
millions quatre cents mille livres , furent fupprimés
par arrêt du confeil du io Oâobre 1720. Nous ne
parlerons ici que de la banque royale d'Angleterre & de
la banque royale de Paris , fur le pie qu'elles fubfiltent
aujourd'hui , & ce que nous en dirons eft emprunté
du même auteur.
Banque royale d'Angleterre ; elle a les mêmes offi-
ciers que l'échiquier. Voye^ Échiquier. Le parle-
ment en eft garant ; c'eft lui qui affigne les fonds né-
ceffaires pour les emprunts qu'elle tait fur l'état.
Ceux qui veulent mettre leur argent à la banque
en prennent des billets , dont les intérêts leur (ont
ayés , jufqu'au jour du rembourfement , à raifon de
ix pour cent par an.
BAN
61
Les officiers de la banque royale font publier de tems
en tems les payemens qu'ils doivent faire , & pour
lors ceux qui ont befoin de leur argent le viennent
recevoir. Il eft cependant permis aux particuliers d'y
laitier leurs fonds , s'ils le jugent à propos , & les in-
térêts leur en font continués fur le même pié de fix
pour cent par an»
Comme il n'y a pas toujours des fonds à la banque
pour faire des payemens , ceux qui , dans le tems que
la caiffe de la banque eft fermée , ont befoin de leur
argent,négocient leurs billets à plus ou moins de per-
te , fuivant le crédit que ces papiers ont dans le pu-
blic , ce qui arrive ordinairement fuivant les circonf-
tances ÔC le bon ou mauvais fuccès des affaires de
l'état.
Banque royale de Paris eft celle qui fut établie en
cette ville par arrêt du confeil du 4 Décembre 1718,
dont le fonds ne pouvoit paffer fix cens millions. On
appelloit en France bureaux de la banque royale , les
lieux où fe faifoient les diverfes opérations de cette
banque, les payemens & les viremens de parties , foit
en débit, foit en crédit, pour ceux qui y avoient des
comptes ouverts. Les principaux de ces bureaux,
après ceux de Paris , furent placés à Lyon , à la Ro-
chelle , Tours , Orléans , & Amiens. Il y avoit deux
caiffes dans chaque bureau ; l'une en argent pour
acquitter à vue les billets , & l'autre en billets pour
fournir de l'argent à ceux qui en demandoient.
« Dans les états qui font le commerce d'œcono-
» mie , dit l'auteur de Yefprit des Loix , on a heureu-
» fement établi des banques qui , par leur crédit , ont
» formé de nouveaux lignes des valeurs : mais on
» auroit tort de les tranfporter dans les états qui font
» le commerce du luxe. Les mettre dans des pays
» gouvernés par un feul , c'eft fuppolêr l'argent d'un
» côté & de l'autre la puiffance , c'eft-à-dire , la fa-
» culte de tout avoir fans aucun pouvoir , & de l'au-
» tre le pouvoir fans aucune faculté ». Efprit des
Loix , tom. II. pag. y.
Les compagnies & les banques achèvent d'avilir
l'or & l'argent dans leur qualité de figne, en multi-
pliant par de nouvelles fictions , les repréfentations
des denrées.
Banque, trafic , commerce d'argent qu'on fait re-
mettre de place en place , d'une ville à une autre ,
par des correfpondans & commiffionnaires , par le
moyen des lettres de change.
Le mot banque vient de l'Italien banca , formé de
l'Efpagnol banco , un banc fur lequel étoient alfis les
changeurs , ou banquiers , dans les marchés ou pla-
ces publiques , ou d'une table fur laquelle ils comp-
toient leur argent , & qu'on nomme auifi en Efpa-
gnol banco. Guichard fait venir le nom de banque du
Latin abacus , table , buffet. Voye^ ABAQUE.
Il n'eft pas néceffaire en France , d'être marchand
pour faire la banque ; elle eft permife à toutes fortes
de perfonnes , même aux étrangers. En Italie , le com-
merce de la banque ne déroge point à la nobleffe ,
particulièrement dans les républiques.
Un négociant qui fait la banque , & qui veut avoir
de l'ordre , doit tenir deux livres principaux ; l'un ,
appelle livre des traites , pour écrire toutes les lettres
de change qu'il tire fur fes correfpondans ; & l'autre,
nommé livre des acceptations , fur lequel il doit écrire
par ordre de date , les lettres de change qu'il eft obli-
gé d'acquitter , en marquant le nom du tireur , la
fomme , le tems de l'échéance & les noms de ceux
qui les lui ont préfentées.
Banque , fe dit aufîi du lieu où les banquiers s'af-
fcmblent pour exercer leur trafic ou commerce ; on
nomme ce lieu différemment, lelon les pays: à Pa-
ris , c'eft la place du change ; à Lyon , le change ; A
Londres & à Rouen , la bourfe ; à Marfeille , la lo-
g',!kç.(G)
62 BAN
Banques à fil; ce font des greniers furies fron-
tières de la Savoie , voifines de la France , où l'on
débite du fel aux faux-fauniers François , à raifon de
ouatre fous la livre , argent de France , poids de Ge-
nève , qui eft de dix-huit onces à la livre , pendant
que les Savoyards le payent quatre fous de Piémont.
La livre de Piémont n'eft que de douze onces , ce qui
fait neuf deniers de plus fur l'argent , & un tiers fur
le poids , qui vaut un fou fept deniers , c'eft-à-dire ,
deux fous quatre deniers fur le tout ; ainli la différence
eft de plus de moitié. C'eft une des fuites des traités
par lefquels la France s'eft obligée à fournir à la Sa-
voie jufqu'à la concurrence de 45 à 50 mille minots
conduits & rendus dans les différens endroits indi-
qués par les traités.
La France fournit encore 5000 quintaux de fel de
Peccais à la ville de Genève , 6000 à la ville de Va-
lais ,-& 1 512 à la ville de Sion : mais aucun de ces
pays ne fait , du bienfait du roi , un ufage contraire
à fa destination , & les quantités fe confomment dans
le pays , foit par befoin , foit par bonne-foi.
BANQUE , fe dit che{ les Imprimeurs , du payement
qu'on fait du travail aux ouvriers de l'Imprimerie ;
le ]our àzlz banque eft le famedi : on entend auffi
par banque , la fomme entière que chaque ouvrier
reçoit.
BANQUE -, cke{ les Paffementiers , eft l'inftrument
propre à porter les rochets , ou bobines , pour our-
dir : il y a des banques de plufieurs fortes ; les unes ,
outre cet ufage , ont encore celui de pouvoir fervir
de plioir ; d'autres reflemblent affez à ces porte-
vailfelles appelles drefoirs, & ont , ou peuvent avoir,
double rang de broches ; les premières auroient auffi
cet avantage fi on perçoit des trous parallèles dans
la largeur des trois petites planchettes qui font vues
droites dans nos planches de Paffementerie , où font
repréfentées les deux fortes de banques dont nous ve-
nons de parler. En pratiquant ces trous parallèles ,
on auroit la facilité de mettre tant de rochets en ban-
que que l'on voudrait. On a , dans les mêmes plan-
ches , une troifieme forte de banque ; c'eft une eipece
de poteau quarré dont la largeur n'elt pas ablolu-
ment déterminée , puifque fi l'on vouloit y mettre
deux rangs de broches , il faudroit qu'il fût plus épais
que lorfqu'il n'y en auroit qu'un rang ; on tait entrer
dans ce poteau le bout pointu de ces broches , de
forte qu'elles y demeurent invariables : on les place
parallèlement les unes aux autres ; on en peut met-
tre tant qu'il en pourra tenir , en laifiant toutefois
une diftance telle que les bords des deux rochets ne
le puiflent toucher ; fans cette précaution ils s'empôr
cheroient mutuellement de fe mouvoir , ou met-
traient au moins les foies en danger de carier. Dans
le cas où ces bords de rochets , ou bobines ,fe trou-
veraient trop hauts , &C que ce frottement tàt inévi-
table , il faudrait pour lors efpacer davantage les
broches les unes des autres , en laifiant une place
vuide entre deux , on trouverait ainfi l'eipace dont
on avoit befoin : mais à quoi bon cette grande quan-
tité de broches,dira-t-on ? lorfqu'on aura lu à l'article
Ourdir , que l'on n'ourdifloit qu'avec feize rochets ;
il ne faut donc , continuera-t-on , que feize broches ,
ou tout au plus trente-deux , ce qui n'expofera plus
au frottement qu'on craignoit. Quoique la règle gé-
nérale foit d'ourdir à feize rochets , ou tout au plus
à trente-deux , comme le pratiquent plufieurs ou-
vriers qui par-là avancent plus vite de moitié , façon
de travailler qui doit être peu fuivie , parce qu'il elt
bien plus difficile de veiller fur trente-deux rochets
que fur feize , & par conféquent plus facile d'échap-
per un brin , ou même plufieurs qui viennent à caf-
iér : je n'en ferai pas moins pour la quantité de bro-
ches à cette banque ; car au même article Ourdir ,
ii l'endroit où il elt queltion des rubans rayés , on
BAN
voit qu'il faut , fuivant le befoin , changer de cou:
leur. En f uppoiant qu'on eût quatre couleurs à em-
ployer , & qu'il y eut foixante-quatre broches à la
banque , on auroit quatre couleurs fous la main tou-
tes fois qu'il faudroit qu'on en changeât : d'abord
deux fur la même face , ayant feize broches de cha-
que côté , puis en retournant la banque , encore deux
autres. On voit que ces broches ne font pas pofées
herilbntalement , mais qu'au contraire le bout exté-
rieur eft plus élevé que l'autre , en voici la raifon :
fi les broches étoient parallèles à l'horifon , les ro-
chets , par la vîtefle avec laquelle ils fe meuvent ,
( car il faut qu'ils faffent bien des tours pendant que
le moulin de l'ourdifibir n'en fait qu'un ) feroient en
danger de s'échapper des broches , inconvénient que
l'on évite par l'inclinaifon des broches : étant ainfi
placées , il elt bon d'ajufter à chacune un moule de
bouton , qui , par fa convexité , empêchera que le
rochet ne frotte en tant de parties contre la face plat-
te du poteau ; la planche d'en bas , qui lui fert de
bafe , eft revêtue des quatre côtés de triangles , ce
qui la rend propre à contenir les rochets , vuides ou
pleins , qu'on y veut mettre.
Banque , partie du bois de métier d'étoffe de foie.
C'eft un plateau de noyer de deux pouces environ
d'épaiffeur , d'un pié de largeur , Se deux pies de
long , dans lequel eft enclavé le pié de devant le mé-
tier ; ce plateau fert à repofer les navettes pendant
que l'ouvrier cefTe de travailler , & il retient le te-
nant de l'enfuple de devant. Verya^ à ^article Ve-
lours ciselé y l'explication détaillée des pièces du
métier.
Banque , ( en terme de Tabletier Corneder. ) eft une
efpece de banc triangulaire & à trois pies, fur lequel
l'ouvrier en peignes travaille à califourchons , & qui
a les mêmes parties , & le même ufage que l'âne.
Voye^ Ane , machine , defeription & figure.
Banque, (Commerce.') c'eft ainfi qu'on nomme
à certains jeux , comme à celui du commerce , les
cartes qui reftent après qu'on en a donné à tous les
joueurs le nombre qu'exige le jeu. La banque s'ap-
pelle à d'autres jeux, talon, ou fond. Voye^ Talon
& Fond.
BANQUE , adj. ( en Marine. ) quelques-uns appel-
lent ainfi un navire qui va pêcher la morue fur le
grand banc.
On dit auflî qu'on eft banque, pour dire qu'on eft
fur le grand banc ; & debanqué , lorfqu'on a quitté le
banc.
BANQUEROUTE , f . f . ( Commerce. ) eft l'aban-
donnement qu'un débiteur fait de tous fes biens à fes
créanciers pour caufe d'infolvabilité vraie ou feinte ;
car il y a deux fortes de banqueroutes , la banqueroute
forcée , & la frauduliufe.
La banqueroute forcée , qu'on appelle plus propre-
ment faillite , eft celle que fait néceflairement un
Marchand pour raifon des pertes qui l'ont rendu in*
folvable. Voye^ Faillite.
La banqueroute volontaire ou frauduleufe , qu'on ap-
pelle auffi Simplement banqueroute , eft celle qui le
fait avec fraude & malice ; l'infolvabilité du débiteur
n'étant qu'apparente, & les effets qu'il abandonne à
fes créanciers n'étant qu'une partie de fon bien ,
dont il s'eft réfervé le refte.
La banqueroute frauduleufe eft mife au rang des cri-
mes : mais ce crime demeure fouvent impuni, parce
que les créanciers aiment mieux traiter avec le ban-
queroutier , &c lui faire des remués , que de perdre
toute leur dette ; & dès qu'ils font d'accord , la juf-
tice ordinairement ne s'en mêle plus. Voye^ la peine
que les lois décernent pour la banqueroute frauduleufe
au mot Banqueroutier. {H)
BANQUEROUTIER, f. m. QÇmmerce.) eu la
BAN
qualification d'un marchand, banquier, ou autre
particulier qui a fait banqueroute.
Toutes les ordonnances prononcent la peine de
mort contre les banqueroutiers : mais dans Pillage elles
ne font point exécutées ; on fe contente pour l'ordi-
naire de les attacher au pilori , & de les envoyer en-
fuite aux galères. (H)
BANQUET, f. m. ( entermesde coutumes.') s'eft dit
autrefois du repas qu'un vaffal étoit obligé de four-
nir à fon feigneur une ou plusieurs fois l'année. (H)
Banquet , on appelle ainfi (en Manège & che^ les
Eperonniers.)la petite partie delà branche de la bride
qui eft au- défions de l'œil , qui eft arrondie comme
une petite verge , afiemble les extrémités de l'em-
bouchure avec la branche , & eft cachée fous le cha-
peron ou le fonceau. Voyt^ Chaperon, Fonceau,
&c. Ligne du banquet , eft une ligne imaginaire que
les éperonniers en forgeant un mors tirent le long
du banquet , & qu'ils prolongent de part & d'autre de
haut en bas , pour déterminer la force ou la toiblefle
qu'ils veulent donner à la branche pour la rendre
hardie ou flafque. La branche fera hardie , fi le trou
du touret eft au-delà de la ligne du banquet , à l'égard
de l'encolure ; & elle fera flafque ou foible , fi le
trou du touret eft au-deçà de cette ligne à l'égard de
l'encolure. Voye\ B.fig. 22. PI- de C Eperonnier.Voye^
Branche , Touret , &c. ( F")
BANQUETTE , f. f. (en architecture.) eft un petit
chemin relevé pour les gens de pié le long d'un
cfuai ou d'un pont , & même d'une rue , à côté du
chemin des chariots & voitures , comme les banquet-
tes du cours à Rome , & celle du pont-neuf, du pont-
royal , 6c d'autres à Paris. Les Romains appelloient
decurforia , toutes fortes de banquettes.
On appelle aufîi banquettes , des appuis de pierre
de 14 pouces de hauteur , pratiqués dans l'épaiffeur
des croifées & dans l'intérieur des appartemens ; on
s'y affied, & ils reçoivent en dehors des balcons de
fer , dont la hauteur réunie avec la banquette de pierre,
doit être celle du coude pour s'y appuyer commo-
dément. Voye{_ Appui.
Banquette eft encore le balcon qui pofe fur cet ap-
pui ; le nom de balcon ne fe donnant qu'à ceux qui
occupent toute îa hauteur depuis le defTus du par-
quet jufques au fommet defdits balcons. (P)
BANQUETTE, (en terme de Fortification. ) eft une
efpece de petit degré de terre que l'on conftruit fur
le rempart des ouvrages & fur le chemin couvert au
pié du côté intérieur du parapet : il fert à élever le
foldat pour qu! il puifîe tirer par-deffus le parapet.
La banquette a ordinairement 3 ou 4 pies de lar-
geur, avec untalud de même étendue ; elle eft éle-
vé de 2. pies fur le terre-plein du rempart. Lorfqu'on
eft obligé d'élever le parapet de plus de 6 pies &
demi ou 7 pies pour fe garantir de l'enfilade, on
conftruit alors deux banquettes , qui font deux elpe-
ces de degrés. Le parapet a toujours 4 pies & demi
de hauteur au-defius du terre-plein de la banquette lu -
périeure. (Q)
Banquette , (en Hydraulique.) eft un fentier
conftruit des deux côtés de la cuvette ou rigole d'un
aqueduc pour y pouvoir marcher &c examiner fi l'eau
s'arrête ou fe perd en quelque endroit : on donne
ordinairement 1 8 pouces de large à ces fortes de ban-
quettes. (K)
Banquette , ( en Jardinage. ) fe dit des palifia-
des balles à hauteur d'appui , qui ne doivent point
paffer ordinairement 3 ou 4 pies de haut ; elles fer-
vent dans les côtés des allées doubles , où étant ainfi
ravalées, elles n'interrompent point le coup d'ceil
entre la tige des arbres. On ylaili'e quelquefois d'ef-
pacc en eipace des boules échappées de la banquette
même. (K)
Banquette , partie du métier d'étoffes de foie ;
BAN
63
la banquette eft un morceau de bois de 6 pouces de
large& d'un pouced'épaifTeur;ilfertàl'ouvrierpour
s'afieoir quand il veut travailler ; il fait entrer cha-
que bout de fa banquette dans l'oreillon cloué à cet
effet au pié de devant le métier. Il feroit mieux que
l'oreillon ou porte-banquette , ne fût point cloué , mais
qu'il tut à couliffe, pour que l'ouvrier lehauflatou
baiffât fuivant fa taille ; il feroit encore à propos qu'il
pût avancer ou reculer la banquette.
Banquette , (en Menuiferie.) eft une boifure
qu'on pratique aux croifées. La tablette de deflûs fe
nomme dejjus de banquette ; & la partie de devant ,
devant de banquette.
BANQUIER, f. m. (Commerce. ) eft celui qi i ai:
la banque , c'eft-à-dire , négociant , commerçant ou
trafiquant en argent , qui iait des traites & renfiles
d'argent , qui donne des lettres de change pour
faire tenir de place en piace ; c'eft proprement un
marchand d'argent. Les Anglois les appellent remit-
ters , ceux qui font des remues. On les nommoit au-
trefois changeurs. Voye{ CHANGEUR & REMISE.
Il y avoit autrefois des elpeces de banquiers chez
les Romains , dont les fonctions étoient beaucoup
plus étendues que celles de nos banquiers ; car ils
étoient officiers publics , & tout à la fois agens de
change , courtiers , commiffionnaires , notaires , fe
mêlant d'achats & de ventes , & drefi'ant tous les
écrits & acles nécefTaires pour tous ces divers ob-
jets.
La différence du profit qu'il y a à tirer par une
place ou par une autre, fait l'art & l'habileté parti-
culière des nôtres. Voye^ C article Change. «< Les ban-
» quiers font faits pour changer de l'argent , & non
» pour en prêter. Si le prince ne s'en lert que pour
» changer lbn argent , comme il ne fait que de grof-
» fes affaires , le moindre profit qu'il leur donne
» pour leurs remiles devient un objet conlidérable ;
» & fi on lui demande de gros profits , il peut être
» fur que c'eft un défaut de Fadminiflration : quand
» au contraire ils font employés à faire des avan-
» ces » leur art confifte à fe procurer de gros profits
» de leur argent fans qu'on puifle les acculer d'u-
» fiure ». Ej prit des loix , tom. II. p. yi.
Les BANQUIERS ou Expéditionnaires en cour de Ro'
me , ( Hifi. mod. & Efroit canon. ) iont des officiers
qui font venir de Rome ou de la iégation d'Avignon
toutes les bulles, dif penfes, provilions , 8c autres ex-
péditions que le Pape s'eft réfervé d'accorder leul.
foyei Expéditionnaire. (H)
Banquier , ( terme de Jeu. ) c'eft celui qui taille
au pharaon , à Wbajjette , &c. & qui dans ces jeux a
toujours de l'avantage : les auties joueurs s'appellent
ponte. Foye{ Pharaon , Bassette , Pontf. (O)
* BANSE , f. m. (en Chauderonnerie.) longue mtln-
ne quarrée faite de branches d'ofier ou de châtai-
gner à l'ulage desChauderonniers : c'eit dans des ban-
fes qu'ils enferment & tranlportent leurs ouvrages.
♦BANTAM, (Géog.) ville d'Afîe aux Indes,
dans File de Java, capitale du royaume de même
nom, divifée en deux parties par une rivière. Long.
12-3- 3- lat. merid. 6. 2C.
* BANTON, (Géog.) île d'Alie dans l'Océan
oriental : c'ell une des Philippines, lituee vers la par-
tie méridionale de l'île Manille.
* BANTRI , ou bANTREI , ville maritime de la
province de Mommonie en h lande , au lud - ouclt :
elle donne Ion nom à la baie
BANVIN , 1". m. terme de Coutume ; c'eft une forte
de droit de banalité qui donne pouvoir au fe gneuf
de vendre le vin de Ion cru avant qu'aucun de les
vali'aux commence à débiter le lien , pourvu qu'il le
vende en là mailon feigneuriale, ce non ailleurs. (H)
BANZA, vryv;; S. Salvador.
* BAOBAB , ou HAHODA^ , (Hifi, nat. bot. )
64
B A P
fruit d'Afrique de lagroffeur du limon, femblableà la
courge, & renfermant des femences, dures, noires,
& arcuées par les bouts ; il a la pulpe de la courge ,
rouge , humide , & d'une acidité agréable , quand
elle'eft récente. Il eft bon à manger ; 6c dans l'Ethio-
pie on en corrige l'acidité avec le fucre ; il rafraî-
chit & defaltere : les Ethiopiens le prennent dans tou-
tes les maladies de chaleur , les fièvres putrides, &
les affecfions peftilentielles ; alors ou Ton mange la
pulpe avec du fucre , ou l'on boit le lue qu'on en
tire par expreflion , tempéré par le iucre ; ou l'on en
fait un firop dont on prend une doie convenable.
Au grand Caire , où l'on ne peut l'avoir dans fa fraî-
cheur , on réduit fa pulpe en une poudre qui reltem-
ble à de la terre rougeâtre , afti ingenîe, & d'un goût
qui n'eft pas éloigné de celui de la terre de Lemnos.
On ufe de cette poudre dans les fievies peftilemieî-
les , le crachement de fang , les lientei ies , les dyffen-
teries , le flux hépatique , & l'excès des règles : on
■ordonne alors une dragme de cette terre dans l'eau de
plantain ; d'autres la font prendre dans des décoc-
tions ou des infufions appropriées. Prolper Alpin ,
qui fait mention du fruit , dit avoir vu l'arbre , &
l'avoir trouvé aflez refTemblant à l'oranger par la
groffeur, les feuilles , & le refte de fon aipecfr
* BAPAUME, ( Géog. ) ville de France dans l'Ar-
tois. Long. 20. 30. âz. lat. 5o. 6. iz.
BAPTÊME , f. m. ( Théo!. ) facrement par le-
quel on eft fait enfant de Dieu & de l'Eglife , & qui
a la vertu d'effacer le péché originel dans les en-
fans , & les péchés actuels dans les adultes.
Le mot baptême en général fignifie lotion , immer-
sion, du mot Grec Ç**z]ti> , ou f&a.«rriÇa f je /ave, je
plonge ; & c'eft en ce fens que les Juifs appelloient
baptême certaines purifications légales qu'ils prati-
quoient fur leurs profélytes après la circoncifion.On
donne le même nom à celle que pratiquoit S. Jean
dans le defert à l'égard des Juifs , comme une diipo-
fition de pénitence pour les préparer , foit à la ve-
nue de J. C . foit à la réception du baptême que le Mef-
fie devoit inftituer , & dont le baptême de S. Jean
étoit abfolument différent, par fa nature , fa forme ,
fon efficace , & fa nécefîité , comme le prouvent les
Théologiens , contre la prétention des Luthériens &
des Calviniftes.
Le baptême de l'Eglife chrétienne eft appelle dans
les Pères de plulieurs noms relatifs à fes effets fpiri-
tuels , comme adoption , renaiffance , régénération , re-
mifflon des péchés , renouvellement de l'ejpril , vie éter-
nelle , indulgence , abfolution ; & par les Grecs , tan-
tôt 7TO.XI-) 3 tnata. 4^-âV , régénération de Pâme , & tan-
tôt xpiiJjuLa, , onction; foit à caufe de celles qu'on y pra-
tique, loit parce qu'il nous confacre à J. C. quel-
quefois ç>ti>T!<r/uct , & (parlcy-cç , illumination , trçça.-) )ç ,
Jigne ou marque ; & par les Latins falut , myftere , fa-
crement. Cyprian. Augujiin. Tertull. Cyrill. Jujlin.
Chryfojl. Clem. Alex. Eufeb. Ambrof. &c.
La définition que nous avons donnée au commen-
cement de cet article ne convient donc au baptême ,
qu'entant qu'il eft le premier des facremens de la loi
nouvelle : fa matière éloignée eft l'eau naturelle ,
comme de rivière , de fontaine , de pluie , &c. par
conféquent toute autre liqueur, foit artificielle , foit
même naturelle , telle que le vin , ne peut être em-
ployée comme matière dans ce lacrement; & les
exemples qu'on cite au contraire , ou font apocry-
phes, ou partoient d'une ignorance groffiere , jufte-
ment condamnée par l'Eglife. Voye-^ Matière.
Sa forme dans l'Eglife Greque coniifte en ces pa-
roles : baptifatur fervus vel ferva Dei N in notnine Pa-
tris, & Filii , & Spiritus (ancli ; & dans l'Eglife La-
tine , le prêtre en verfant de l'eau naturelle fur la tê-
te delà perfonne qu'il baptife,la nomme d'abord par
le nom que lui ont donné fes parrein èc marrei-
B A P
ne , & prononce ces mots : ego te baptlfo , in nominc
Patris , & Filii , & Spiritus fancii , amen. Cette forme
étant pleinement exprimée dans les Ecritures , Mat.
ch. xxviij. verf. ig. & atteftée parles écrits des plus
anciens Auteurs eccléfiaftiques, il s'enfuit que tout
baptême conféré fans une appellation ou invocation
expreffe des trois perfonnes de la fainte Trinité , eft
invalide. La doûrine des conciles y eft formelle ,
fur-tout celle du premier concile d'Arles tenu en 3 1 4 ;
& l'Eglife a mis une grande diftinction entre les héré-
tiques , qui dans leur baptême confervoient ou cor-
rompoient cette forme ; le contentant à l'égard des
premiers , lorfqu'ils revenoient dans fon fein , de les
recevoir par la cérémonie de l'impofition des mains,
& réitérant aux autres le baptême , ou plutôt leur
donnant le facrement qu'ils n'avoient jamais reçu.
yoye^ Rebaptisans.
Le baptême a été rejette totalement par plufieurs
anciens hérétiques des premiers fiecles , tels que les
Alcodrutes , les Marcofiens , les Valentiniens , les
Quintilliens , qui penfoient tous que la grâce qui eft
un don fpirituel , ne pouvoit être communiquée ni
exprimée par des fignes fenfibles. Les Archontiques
le rejettoient comme une mauvaife invention du
Dieu Scbahoth, c'eft-à-dire , du Dieu des Juifs, qu'ils
regardoient comme un mauvais principe. Les Seleu-
ciens& les Hermiensne vouloient pas qu'on le don-
nât avec de l'eau: mais ils y employoientlefeu, fous
prétexte que S. Jean Baptifte avoit afluré que le
Chrift baptiferoit fes difciples dans le feu. Les Ma-
nichéens & les Pauliciens le rejettoient également ,
aufîi bien que les Maffaliens. Le nombre des héréti-
ques qui ont altéré ou corrompu la forme du baptê-
me , n'eft pas moindre : Menandre baptifoit en fon
propre nom : les Eluféensy invoquoient les démons;
les Montaniftes y joignoient le nom de Montan leur
chef, & de Prifcille leur prophételfe , aux noms fa-
crés du Père & du Fils. Les Sabelliens , les Marco-
fiens, les difciples de Paul de Samofate , les Euno-
miens , & quelques autres hérétiques ennemis de la
Trinité , ne baptifoient point au nom des trois Per-
fonnes divines ; c'eft pourquoi l'Eglife rejettoit leur
baptême : mais , comme nous l'avons dit , elle admet-
toit celui des autres hérétiques , pourvu qu'ils n'al-
téraffent point la forme preferite , quelles que fuf-
fent d'ailleurs leurs erreurs fur le fond des myfteres.
La difeipline de l'Eglife fur la manière d]adminif-
trer ce facrement, n'a pas toujours été la même : au-
trefois on le donnoit par une triple immerfton ; &
cet ufage a duré jufqu'au xne fiecle. Il eft vrai que
dans le vie quelques Catholiques d'Efpagne s'en te-
noient à une feule immerfion , de peur , difoient-ils ,
que les Ariens n'imaginaflent que par la triple im-
merfion ils divifoient la Trinité à l'exemple de ces
hérétiques : mais cette raifon frivole ne changea gé-
néralement rien à l'ancien ufage. Celui de baptilèr
par infufion , ou en verfant l'eau fur la tète , com-
mença , félon quelques-uns , dans les pays fepten-
trionaux , & s'introduiiit en Angleterre vers le IXe
fiecle. Le concile de Calchut ou de Celchyth , tenu
en 816 , ordonna que le prêtre ne fe contenteroit
pas de verfer de l'eau fur la tête de l'enfant , mais
qu'il la plongeroit dans les fonts baptifmaux.
Les Ecrivains eccléfiaftiques parlent de plufieurs
cérémonies qu'on pratiquoit au baptême , qui font au-
jourd'hui abolies , ou dont il ne refte que de légères
traces ; comme de donner aux nouveaux baptifés du
lait & du miel dans l'Eglife d'orient ; & dans celle
d'occident , du miel & du vin , de les revêtir d'une
robe blanche , &c. de ne baptifer qu'à jeun , de don-
ner immédiatementaprès le baptême la confirmation
& l'euchariftie , &c.
Les Théologiens diftinguent trois fortes de baptê-
me ; le baptême d'eau , dont nous venons de parler ;
là
B A P
le baptême de feu , c'eft-à-dire , la charité parfaite
jointe à un ardent defir d'être baptifé , c'eft ce qu'on
appelle auffi le baptême du S. Efprit , qui fupplée au
baptême d'eau; & le baptême de fang , c'eft-à-dire ,
le martyre. On ne baptifoit autrefois les catéchumè-
nes qu'à Pâque & à la Pentecôte , excepté en cas de
néceffité.
Le miniftre ordinaire du baptême eft l'évêque ou
le prêtre : mais en cas de néceffité toutes perfonnes ,
même les femmes , peuvent baptifer.
Quelques-uns ont prétendu que dans la primitive
Eglife on ne baptifoit que les adultes : mais c'eft fans
fondement ; car quoiqu'on n'ait point dans l'Ecritu-
re de textes précis qui marquent que des enfansont
été baptifés , & que quelques anciens pères , com-
me Tertullien, fuffent perfuadés que de baptifer les
enfans avant qu'ils euflent atteint l'âge de raifon ,
c'étoit les expofer à violer les engagemens de leur
baptême ; &C qu'ainfi il étoit de la prudence & de la
charité de n'admettre à ce facrement que les adul-
tes : il eft néanmoins certain i°. que les Apôtres ont
baptifé des familles entières , dans lefquelles il eft
très-probable qu'il fe trouvoit des enfans : z°. que la
pratique acluelle de l'Eglife à cet égard eft fondée
fur la tradition des Apôtres , comme l'allure S. Au-
guftin , après S. Irénée & S. Cyprien. Ce dernier
fur-tout confulté par l'évêque Fidus , s'il ne feroit
pas à propos de fixer le tems du baptême des entans
au huitième jour après leur naiftance , comme celui
de la circoncifion l 'étoit chez les Juifs, en conféra
avec foixante-cinq autres évêques aflemblés en con-
cile à Carthage en 153 , Ôc répondit à Fidus : Quod
tuputabas elfe faciendum , nemo confentit : fed univerji
potius judicavimus , nulli hominum nato mifericordiam
Dei & gratiam denegandam. Quelqu'autoriiée que
fût cette pratique dans les premiers fiecles de l'Egli-
fe , il faut convenir qu'elle n'étoit pas généralement
obfervée à l'égard de tous les enfans des fidèles : les
catéchumènes même différoient plufieurs années à
recevoir le baptême. L'hiftoire eccléfiaftique nous ap-
prend que S. Ambroife ne fut baptifé qu'après avoir
été élu évêque de Milan. On fait que l'empereur
Conftantin ne reçut ce facrement qu'à l'article de la
mort , ôé qu'il eut en cela bien des imitateurs d'un
nom illuftre dans l'Eglife. Plufieurs différoient ainii
leur baptême le plus long-tems qu'ils pouvoient, mais
par des motifs très - différens ; les uns par un efprit
d'humilité, dans la crainte de n'être pas aiTez bien dif-
pofés pour recevoir dignement ce premier facrement;
les autres pour mener plus librement une vie déré-
glée , fe flattant d'en obtenir le pardon à la mort par
l'efficace du baptême. Les Pères s'élevèrent avec tant
de force contre les faufTes raifons cv le danger des dé-
lais dont on ufoit pour recevoir fi tard le baptême,
qu'ils réuffirent peu-à-peu à établir l'ufage qui fub-
iifte aujourd'hui.
Quoique Jefus- Chrift foit venu dans le monde
pour ouvrir à tous les hommes la voie du falut , ce-
pendant il étoit d'ufage & de règle dans la primitive
Eglife de refnfer le baptême à certaines perfonnes en-
gagées dans des conditions ou profeffions notoire-
ment criminelles , comme incompatibles avec la fain-
teté du Chriftianifme ; à moins qu'elles ne renonçaf-
fent à cette profeffion ou à cet état. De ce nombre
étoient les fculpteurs , fondeurs , ou autres ouvriers
qui faifoient des idoles ; les femmes publiques , les
comédiens , les cochers , gladiateurs, muficiens, ou
autres qui gagnoient leur vie àamufer le public dans
le cirque ou l'amphithéâtre ; les aftrologucs^ devins,
magiciens , enchanteurs , ceux qui étoient adonnés
aux crimes contre nature, ccux-mêmes qui étoient
tellement pafuonnés pour les représentations des jeux
& du théâtre , qu'ils refufafTent de s'en abftenir dès
qu'ils auroient embraffé la religion ; les concubinai-
Tome II,
B A P 65
res , ceux qui tenoient des lieux de débauche ; quel-
ques-uns même ont crû qu'on n'y admettoit pas les
gens de guerre : mais l'hiftoire eccléfiaftique ne laiffe
aucun doute que les Chrétiens n'ont pas confondu
une profeffion utile & honorable par elle - même ,
avec des arts ou des conditions réprouvées par la rai-
fon même. Bingham , orig. ecclef. liv. XL ch. v. §.
6. y. 8. 9.10.
On convient aujourd'hui qu'on ne doit pas bapti-
fer les enfans des infidèles , même fournis à la domi-
nation des princes Chrétiens , malgré leurs parens ,
à moins que ces enfans ne foient en danger évident
de mort ; parce que cette violence eft contraire au
droit naturel qu'ont les pères & les mères fur leurs
enfans ; & que d'ailleurs elle expoferoit le facrement
à Une profanation certaine , par l'apoftafie à laquelle
ces pères & mères engageroient leurs enfans.
Quelques-uns ont crû qu'on devoit conférer le
baptême aux morts , &c même qu'on pouvoit le rece-
voir à leur place , fondés fur ce paifage de S. Paul
aux Corinthiens /. epit. ch. xv. ver/'. Jo. alioquin quid
facïent qui baptijantur pro montas , Jî mortui non refur-
gunt : ut quid & baptijantur pro Mis ? paflao'e fans
doute mal entendu , oc qui à la lettre ne fignifie au-
tre chofe , finon qu'on peut pratiquer en mémoire
des morts des œuvres de pénitence qui leur obtien-
nent la rérrtiffion des péchés qu'ils n'ont pas fuffifam-
ment expiés en cette vie : car le mot de baptême ,
dans un fens général & ufité dans l'Ecriture , lignifie
quelquefois la pénitence , les afflictions & les fouf-
frances. AinlïdansS. Luc , Jefus-Chrift parlant de fa
paffion , l'appelle un baptême : ch. xij. verf. 50. bap-
tifmo habeo baptifari ; & dans S. Marc , ch. x. verf. 3 8.
poteflis .... baptifmo quo ego baptifor baptifari. (G~)
BAPTEME du tropique ou de la Ligne , {en Marine.}
c'eft une cérémonie ridicule, mais d'un ufage ancien
& inviolable parmi les gens de mer , qui la prati-
quent bien régulièrement fur ceux qui paftent pour la
première fois le tropique ou la ligne êquinocliale.
Chaque nation s'y prend diverfement, & même
les équipages d'une même nation l'exercent en dif-
férentes manières. Voici celle qui eft la plus ordinaire
parmi les équipages François.
Pour préparatifs , on met une baille au pié du grand
mât pleine d'eau de la mer ; le pilote pour l'ordinaire
fe met auprès, le vifage barbouillé, le corps revêtu
& tout entortillé de garcettes , dont quelques-unes
lui pendent des bras. Il eft accompagné de cinq ou
fix matelots habillés de même : il tient entre l'es mains
un livre de cartes marines tout ouvert ; aux environs
il y a des matelots avec des féaux pleins d'eau ; il y
en a fur les vergues & fur les hunes. On amené celui
qui doit être baptifé en grande cérémonie ; on le fait
alTeoir fur une planche tenue aux deux bouts par
deux matelots , & pofée fur la baille pleine d'eau ;
on lui fait jurerfur le livre que tient le pilote, de pra-
tiquer furies autres la même cérémonie , lorfque l'oc-
calion s'en trouvera ; & clans l'inftant les deux mate-
lots renverfent la planche, & font tomber l'homme
dans la baille ; en même tems ceux qui font à la hune
& fur les vergues lui jettent plufieurs féaux d'eau fur
le corps. Les officiers & les paflagers fe tachettent
d'une fi ridicule cérémonie, en donnant quelque ar-
gent aux équipages : mais on ne fait point de grâce à
ceux qui ne donnent rien. On demande cependant
permilfion au capitaine pour faire le baptême.
Un vaifleau qui n'a point encore paffe la lig
le tropique, y eft fournis: mais le capitaine le ra-
chette par quelques rafraîchiflèmens qu'il donne aux
gens de l'équipage, autrement ils couperoient 1 épe-
ron ou quelque autre partie du v.r.ileuu: mais au-
jourd'hui beaucoup de capitaines abolilfent cette ri-
dicule cérémonie. (Z)
* BAPTES , ( les ) Hijl. lut, nom d'une comédie
66
B A P
compofée par Cratinus , où ce poète railloit d'une
façon fanglante les principaux perfonnagcs du gou-
vernement. Lorfque Cratinus compofa fes baptes ou
plongeurs y la liberté de l'ancienne comédie étoit rel-
trainte à la cenfure des ridicules , & furtout des poè-
tes que le gouvernement n'étoit point fâché qu'on
décriât ; parce que de tout tems les hommes en place
ont haï les fatyriques & les plaifans. Cratinus fit un
effort pour rendre à la feene comique les droits dont
on l'avoit dépouillée : mais il fut la victime de fa
hardiefle. Il éprouva le châtiment auquel on dit
que M. deMontauûer, l'homme de la cour qui avoit
le moins a craindre de la fatyre , condamnoit tous les
fatyriques.il fut jette dans la mer, pies & mains lies.
Baptes , f. m. pi. ( Myth. ) prêtres de Cottytto ,
déene de l'impudicité fort révérée à Athènes , où
l'on célébroit fa fête pendant la nuit par des danles
lafeives, accompagnées de toutes fortes de débau-
ches. Les baptes furent ainfi nommés du mot Grec
ïx-'n: , qui fignifie laver ou tremper , parce qu'ils le
plongeoient dans de l'eau tiède , félon Suidas. Juvénal
en parle comme d'une troupe d'hommes li infâmes ,
que leurs déréglemens déplailoient à Cottytto , quoi-
qu'elle ne fût rien moins que la déene de la pudeur.
(S)
BAPTISTE, voyei ANABAPTISTES , CATABAP-
TISTES , He.MERO-BaPTISTES.
Hermites de S. Jean-Baptijle , voy. HERMITES. (G)
BAPTISTERE , f. m. ( Tkéol. ) c'eft le lieu ou l'é-
difice dans lequel on conferve l'eau pour baptifer. V,
Baptême.
Les premiers Chrétiens, fuivantfaintJuftin martyr
& Tertullien, n'avoient d'autres baptijleres que les
fontaines , les rivières , les lacs , ou la mer , qui fe
trouvoient plus à portée de leur habitation ; & com-
me fouvent la perfécution ne leur permettoit pas de
baptifer en plein jour , ils y alloient de nuit, ou don-
noient le baptême dans leurs maifons.
Dès que la religion Chrétienne fut devenue celle
des empereurs , outre les églifes , on bâtit des édifi-
ces particuliers uniquement défîmes à l'adminiftra-
îion du baptême , ëc que par cette raiion on nomma
baptijleres.
Quelques auteurs ont prétendu que ces baptijleres
étoient anciennement placés dans le veftibule inté-
rieur des églifes , comme le font aujourd'hui nos fonts
baptifmaux. C'eft une erreur. Les baptijleres étoient
des édifices entièrement féparés des batiliques, &
placés à quelque diftance des murs extérieurs de cel-
les-ci. Les témoignages de faint Paulin , de laint Cy-
rille de Jémfalem , de faint Auguftin , &c. ne permet-
tent pas d'en douter.
Ces baptijleres ainfi féparés ont fubfifté jufqu'à la
fin du vi. fiecle, quoique dès lors on en voye déjà
quelques-uns placés dans le veftibule intérieur de
l'églile , tel que celui où Clovis reçut le baptême des
mains de faint Remy. Cet ufage eft enfuite devenu
général , fi l'on en excepte un petit nombre d'églifes
qui ont retenu l'ancien , comme celle de Florence ,
& toutes les villes épifcopales de Tofcane, la métro-
pole de Ravenne , & l'églile de faint Jean de Latran
à Rome.
Ces édifices pour la plupart étoient d'une gran-
deur coniïdérable , eu égard à la difeipline des pre-
miers fiecles , le baptême nefe donnant alors que par
immerfion, & (hors le cas de nécefiité ) feulement
aux deux fêtes les plus iolemnelles de l'année, Pâ-
que & la Pentecôte. Le concours prodigieux de ceux
qui fe préfentoient au baptême , la bienieance qui de-
mandoit que les hommes fulFent baptifés féparément
des femmes , demandoient un emplacement d'autant
plus vafte , qu'il falloit encore y ménager des autels
où les néophytes reçufTent la confirmation & l'eu-
B A Q
chariftie immédiatement après leur baptême. Aufit
le baptijlere de l'églile de fainte Sophie à Conllanti-
nople etoit-il fi fpacieux, qu'il fervit d'afyle à l'em-
pereur Bafilifque, 8c deiale d'afiemblée à un concile-
fort nombreux.
Les baptijleres avoient plufieurs noms différens ,
tels que ceux de Pifcine , lieu d'illumination , &c tous
relatifs aux différentes grâces qu'on y recevoit par le
facrement.
On trouve peu de chofes dans les anciens auteurs
fur la forme & les ornemens des baptijleres, ou du
moins ce qu'on y en lit eft fort incertain. Voici ce
qu'en dit M. Fleury fur la foi d'Anaftafe , de Grégoire
oe Tours , & de Durand , dans fes Notes fur le pontifi-
cal attribué au pape Damafe. « Le baptijlere étoit d'or-
» dinaire bâti en rond , ayant un enfoncement où
» l'on defeendoit par quelques marches pour entrer
» dans l'eau ; car c'étoit proprement un bain. De-
» puis on fe contenta d'une grande cuve de marbre
» ou de porphyre , comme une baignoire ; & enfin on
» fe réduifit à un baflin , comme font aujourd'hui les
» fonts. Le baptijlere étoit orné de peintures conve-
» nables à ce facrement, & meublé de plufieurs vafes
» d'or & d'argent pour garder les faintes huiles &
» pour verfer l'eau. Ceux-ci étoient fouvent en foi-
» me d'agneaux eu de cerfs , pour repréfenter l'a-
» gneau dont le fang nous lave , & pour marquer le
» defir des âmes qui cherchent Dieu , comme un cerf
» altéré cherche une fontaine, fuivant l'expreflion
» àupfeaume 41. On y voyoit l'image de faint Jean-
» Baptille & une colombe d'or ou d'argent fufpen-
» due , pour mieux repréfenter toute l'hiftoire du
» baptême de Jefus-Chrift , & la vertu du faint-Efprit
» qui defeend fur l'eau baptifmale. Quelques-uns
» même difoient le Jourdain pour dire les fonts ».
Mœurs des Chrétiens , tit. XXXVI. Ce qu'ajoute Du-
rand , que les riches ornemens dont l'empereur Conf-
tantin avoit décoré le baptijlere de l'églile de Rome ,
étoient comme un mémorial de la grâce qu'il avoit
reçue par les mains du pape faint Sylveftre, eft vifi-
blement faux , puifqu'il eft aujourd'hui démontré que
ce prince fut baptifé à Nicomédie peu de tems avant
fa mort.
Il n'y eut d'abord des baptijleres que dans les villes
feules épifcopales ; d'où vient qu'encore aujourd'hui
le rit Ambroifien ne permet point qu'on fa fie la béné-
diction des fonts baptifmaux les veilles de Pâque & de
Pentecôte , ailleurs que dans l'églife métropolitaine ,
d'où les églifesparoifliales prennent l'eau qui a été bé-
nite pour la mêler avec d'autre, depuis qu'on leur a
permis d'avoir des baptijleres ou fonts particuliers.
Dans l'églife de Meaux les curés de la ville viennent
baptifer les enfans depuis le famedi faint jufqu'au fa-
medi fuivant fur les fonts de l'églife cathédrale. C'eft
un droit attaché à chaque paroiffe en titre & à quel-
ques fuccurfales : mais non pas à toutes celles-ci , non
plus qu'aux chapelles & aux monafteres , qui , s'ils en
ont, ne les pofledent que par privilège & par con-
celîion des évêques.
On confond aujourd'hui le baptijlere avec les fonts
baptifmaux. Anciennement on diilingr.oit exacte-
ment ces deux chofes , comme le tout & la partie.
Par baptijlere, on entendoit tout l'édifice où l'on ad-
miniftroit le baptême ; & les fonts n'étoient autre
choie que la fontaine ou le réfervoir qui contenoit les
eaux dont on fe fervoit pour le baptême. V. Fonts.
* BAQU1ER, f. m. (Comm. ) c'eft ainfi qu on ap-
pelle à Smyrne du coton de baffe qualité , dont la
valeur n'eft pas considérable , & qui ne s'y fabrique
pas en grande quantité.
BAR , en terme de Bâtiment, eft une efpece de ci-
vière avec laquelle des hommes portent des pierres
ordinairement de peu de grofleur.
B A R
Les 'ouvriers qui portent le bar fe nomment lar-
geurs. Voye^ Bardeur.
L'aftion de mettre la pierre fur le bar fe nomme
barder, Voye{ BARDER, (P)
* Le bar eft compofé de deux longues pièces de
i>ois équarries &c aflemblées parallèlement par qua-
tre ou fix traverfes de deux pies de long ou environ.
Ces traverfes n'occupent que le milieu des pièces
équarries,où elles forment un fond ouune grille fur la-
quelle on pofe les fardeaux ; le refte des pièces équar-
ries qui demeure ifolé va en diminuant , eft arrondi ,
. fe termine par une tête formant une coche ou un ar-
rêt en-deffbus, & fert de manche ou bras des deux
côtés de la grille ou du fond. L'arrêt de la coche re-
tient les bretelles des bardeurs , & les empêche de
s'échapper des bras. Quand les poids font lourds,
deux ou quatre maneuvres fe mettent aux bras , &
deux autres parlent encore un levier fous la grille :
ces derniers s'appellent arbalétriers.
Pour garantir les arrêtes & autres formes délicates
des pierres taillées ou fculptées, de l'impreffion des
traverfes, on couvre la grille de nattes. Ces nattes
s'appellent torches.
* Bar , ( Géog. ) ville de Pologne, dans la Podo-
lie , fur la rivière de Kow. Long. 46. lat. 4g. i5.
* Bar , ( duchl de ) Géog. contrée de France lituée
des deux côtés de la Meule , entre la Lorraine &c la
Champagne.
* Bar-le-duc, (Géog.) capitale du duché de
Bar; il y a haute & baffe ville : celle-ci eft fur la pe-
tite rivière d'Orney. Long. zj. lat. 48. 35.
* Bar- sur -Aube, ( Géog.) ville de France en
.Champagne, capitale duVallage. Long. zz. zo. lat.
48. 14.
* Bar-sur-Seine , ( Géog. ) ville de France, au
.duché de Bourgogne. Long. zz. lat. 48. 5.
* BARABA , (Géog.) grand lac d'Alie, au royau-
me de Sibérie , rempli d'un fel folide , que les Mofco-
vites coupent comme de la glace.
* BARABINSI okBARABINSKÔI, fubft. m. pi.
\ Géog. ) peuples de la Tartane , dans la partie méri-
dionale de la Sibérie , tributaires de la Mofcovie.
* BARACAQUE,f. m. (Hijl.mod.) nom de i'c&e
& de religieux Japonois , dont la prière & la médita-
tion eft l'occupation continuelle.
* BARACH , (Géog.Jkinte.) ville de la Paleftine ,
dans la tribu de Dan.
* BARACI , ( Géog. ) ville de l'île de Sardaigne ,
dont il ne refte que des ruines qu'on voit proche de
SafTari.
* BARACOA , (Géog.') ville de l'Amérique, dans
l'île de Cuba, avec un port, fur la côte feptentrio-
nale de l'île.
* BARAD , ( Géog.faïnte. ) ville de la Paleftine ,
dans la tribu de Juda , proche la fontaine d'Agar.
* BARAD AS , f. m. c'eft , en terme de Fleurijle, un
«œillet rouge-brun , à fleur large, grofle , feuillue , &c
en dôme ; ni blanc , ni carné , à panaches gros &c non
détachés. On ne lui laiffe que quatre à cinq boutons.
* ÈARA1CUS ou BURAICUS, (Myth.) furnom
qu'Hercule prit d'une ville d'Achaie , célèbre par l'o-
racle de ce héros : la manière dont fe rendoit cet ora-
cle, étoit finguliere. Après qu'on avoit fait fa prière
dans le temple , on prenoit quatre dez ; on les jettoit
au hafard ; les faces de ces dez étoient empreintes de
figures hiéroglyphiques ; on remarquoit bien les figu-
res amenées ; &c l'on alloit enfuite en chercher l'in-
terprétation fur un tableau où elles étoient expli-
quées. Cette interprétation pafToit pour la réponfe
du dieu. Voye^ à F article DÉ, en combien de fa-
çons quatre dez à lix faces peuvent être combinés :
vous trouverez 1296; l'oracle auroit dû avoir au
tant de réponfes ; mais il eu avoit bien moins &c
il étoit facile que la queftion de celui qui s'adref-
T'orne Ih
BAR
67
foit à l'oracle, fut de celles dont la répoftfe n'étoit
pas dans les dez: mais il falloit compter jufqu 'à 12.96,
pour fentir l'impertinence de l'oracle , & le peuple
ne fait pas compter li loin, & quand il le fauroit, il
s'en feroit un fcrupule.
* BAR ALIPTON , ( Log. ) nom par lequel on dé?
figne le premier mode indiredt d'argument de 1? pre-
mière figure. Le fyllogifme en baralipton , a les deux
premières propofitions univerfelles affirmatives , &
la troifieme particulière affirmative, foye^ Syllo-
gisme.
BARALLOTS , f. m. pi. (Théol.) nom qu'on don-
na à certains hérétiques qui parurent à Bologne en
Italie , & qui mettoient tous leurs biens en commun,
même les femmes & les enfans. Leur extrême faedi-
té à fe livrer aux plus honteux excès de la débau-
che , leur fit encore donner, félon Ferdinand de Cor-
doue, dans fon traité de Exiguis annonis, le nom d'o-
béiflans , obedientes. (G)
BARAMPOUR, voye[ Brampour.
* BARANCA DE MELAMBO, (la) Géog. ville
de l'Amérique , dans la province de Sainte-Marthe ,
en terre-ferme, firr la rivière de la Magdeleine, Long.
306. lat. 11.
* B AR.ANGE , f. f. c'eft ainfi qu'on appelle dans
les Salines , un mur d'environ trois pies de hauteur ,
placé en dedans du fourneau , entre les murs fur les-
quels la poelle eft pofée : il fert à la féparation des bois
6c des braifes.
BARANGES , f. m. pi. ( Hifl. anc. ) officiers qui
gardoient les clefs des portes de la ville où demeu-
roit l'Empereur de Conftantinople. On prétend que?
ce mot eft originairement Anglois , parce que ces
gardes des clefs étoient pour l'ordinaire tirés des îles
Britanniques. (G)
* BARANGUELIS , (le) Géog. anc. & mod. grand
étang d'Egypte, que les Latins nomment Jlagnum
magnum , Tenefœ Jinus , Sorbonis Palus, fur les fron-
tières de la Terre-fainte , vers la côte de la Méditer-
ranée ; on l'appelle le golfe de Tenefe , le Grand-étang ,
ou Stagnone. 11 avoit autrefois cent vingt mille pas ;
il eft aujourd'hui beaucoup moindre , ôi. l'on conjec-
ture qu'il fe remplira.
*BARANCIA, (la) Géog. grande rivière de
l'Amérique feptentrionale , qui a fa fource au Mexi-
que, traverfe le Méchoacan, le Gadalajara, la pro-
vince de Xalifco, & fe jette dans la mer Pacifique,
à l'entrée de la mer Vermeille. Sanfon l'appelle Ef-
quitlan.
. * BARANIWAR-, {Géog. ) petite ville de la baffe
Hongrie , au comté de même nom , entre Bude ce
Belgrade, furie ruifleau de Craflb. Long. 36. ZO.
lat. 46.
* BARANOVA , (Géog.) petite ville de Pologne ,
dans la haute Volhinie , fur la rivière de Slucks.
BARAQUE, f. f. (Architecture. ) lieu conftruit de
charpente, revêtue de planches de bateau, & couver-
te de dofles, & pratiquée près d'un grand attelier,
ou dans un grand chantier, pour ferviraux ouvriers
de magalin pendant l'hyver , & de retraite pendant
l'ete. (P)
Baraque , f. f. (en Art milit. ) eftune hute ou pe-
tite loge pour des foldats dans un camp. Voyc^ Hute.
Ce mot vient de barracas enEfpagnol, petite ca-
bane que les Pêcheurs font fur le bord de la mer. .
Celles pour la cavallcrie étoient autrefois appel-
pcllées baraques ; & celles pour l'infanterie, huttes:
mais le terme baraque eft à préfent ulite indirïerem-
ment pour les deux.
Pour faire les baraques, on fiche quatre perches
fourchues en terre , & on en met quatre autres en
travers; enfuite on élevé les murailles a\ ec des mot-
tes de terre , des claies , ou tout ce que le lieu fournit
de propre pour cela : ledefîùs eft couvert de chaume
l'A
68
BAR
ou de gafon, félon la commodité qu'on en a. Quand
l'armée eft en quartier d'hyver, les foldats font or-
dinairement des baraques; en été, ils fe contentent
de leurs tentes. (Q)
* BARASA , (Géog.fainte.) ville de la Paleftine,
dans la tribu de Gad.
BAR AT, f. m. (Commerce.') vieux mot François &
hors d'uiage, qui fignifioit autrefois tromperie , fourbe,
■tnenjbnge. C'eft de barat que vient le terme de barate-
rie , dont il y a un titre dans les ordonnances de la
Marine. ( G )
BARATHRE, f. m. (Hift. anc.) gouffre , lieu très-
profond dans l'Attique , où l'on avoit coutume de pré-
cipiter les fcélérats. Il étoit revêtu de pierre de taille ,
en forme de puits ; & dans le mur de revêtiffement,
on avoit (celle d'elpace en efpace , des crampons de
fer crochus , dont quelques-uns avoient la pointe en-
haHt, & d'autres de côté, pour accrocher & déchi-
rer les criminels dans leur chute. Ce nom chez les
Grecs efl encore commun à toute forte de gouffres ,
d'abîmes , & de concavités de la terre. (G)
BARATTE , f. f. ( (Economie ruftiq. ) vaiffeau fait
de douves , plus étroit par en-haut que par en-bas ,
& qui fert à battre la crème dont on fait le beurre.
L'ouverture de la baratte fe couvre avec une febille
trouée qui s'y emboîte , & parle trou de laquelle paf-
fe un long bâton qui fert de manche au bat-beurre.
Le bat-beurre eft un cylindre de bois épais d'envi-
ron deux pouces , percé de plufieurs trous , & emman-
ché de plat au bout d'un long bâton; les trous du cy-
iindre fervent à donner paffage au lait de beurre à
mefure que le beurre s'avance.
Ce font les Tonneliers qui fabriquent & vendent
les barattes ; & elles font à l'ufage des habitans de la
campagne.
BARATTERIE, f. f. {Commerce.) malverfation ,
tromperie. Voye^ Barat.
Barratterie de Patron , ( Comment. ) en ter-
mes de commerce de mer, fignifîe les larcins, dégui-
femens , & altérations de marchandifes que peuvent
caufer le maître &c l'équipage d'un vaiffeau, & gé-
néralement toutes les iupercheries & malverfations
qu'ils mettent affez fou vent en ufage pour tromper
ie marchand chargeur & autres intéreffés.
On trouve dans l'ordonnance de la Marine du mois
d'Août 1 68 1 , liv. II. & III. les détails des différentes
baratteries que peuvent commettre les patrons ou maî-
tres de vaiffeau , 6c les peines décernées contr'eux
dans ces occafions. (G)
* BARBA , (Géog.) petite ville du royaume d'Al-
ger, en Barbarie.
BARB AC ANNE , f . f . ( en Architecture. ) c'eft une
ouverture étroite & longue en hauteur, qu'on laiffe
aux murs qui foûtiennent des terres, pour y donner
de l'air, ou pour en faciliter l'entrée & la fortie des
eaux ; on la pratique fur-tout lorfque l'on bâtit en des
lieux fujets à l'inondation ; elle fe nomme auffi canon-
nière. &c ventoufe , ôien latin colluviarium. (P)
B arb ac anne , f. f. c'eft ainfi qu'on appelle enFor-
tif cation , les ouvrages avancés d'une place ou d'une
citadelle ; le principal ufage de la barbacanne , eft
d'être le boulevard des portes ou des murailles. Voye^
DÉFENSE.
Ce nom rend le promurale , ante murale , murus exte-
rior des Romains , & ce que les François nomment
contre-mur. Il dénote auffi un fort à l'entrée d'un pont
ou à la fortie d'une ville, avec une double mu-
raille , comme celle que l'on voit à Rouen à l'un des
bouts de fon pont de bateaux. C'eft pourquoi plu-
fieurs lui donnent encore le nom de barbacanne. Il étoit
d'uiage auffi pour fignifîer une ouverture des mu-
railles , par où l'on tire des coups de moufquet fur
l'ennemi ; mais on ne s'en fert plus à prélent, Voye^
Créneau & Embrasure. (Q)
BAR
*BARBADE, (Géog.)'ûeàe l'Amérique, & l'une
des Antilles. Long. Ji8. 40. lat. 13.20.
*BARBANÇON,( Géog. ) principauté dans le
Hainault.
* BARB AND A , (Géog. anc. ) ville jadis considé-
rable de la haute Egypte ; il n'en refte plus que quel-
ques ruines entre Girgio & Afna.
* BARBARA , (Log.) terme par lequel on défigne
le premier mode d'argument de la première figure :
un fyllogifme en barbara a fes trois proportions uni-
verielles affirmatives. Voyei Syllogisme.
* BARBARCA , (Hift. nat. bot. ) plante qui pouf-
fe plufieurs tiges à la hauteur d'un pié & demi , bran-
chues , creufes , plus petites que celles de la rave ,
& ayant quelque reffemblance à celles du creffon ,
vertes , noirâtres & luifantes ; fes fleurs font petites,
jaunes, à quatre feuilles difpofées en croix. Il leur
fuccede de petites gouffes tendres , rondes & lon-
gues , qui contiennent des femences rougeâtres : fa
racine eft oblongue , médiocrement groffe , & d'un
goût acre. Elle croît dans les champs , & on la culti-
ve dans les potagers.
Elle contient du fel effentiel & de l'huile ; elle eft
déterfive & vulnéraire ; elle excite l'urine ; elle eft
falutaire dans le feorbut, les maladies de la rate ôcla
néphrétique.
BARBARES, (Philofophie.) adj. c'eft le nom que
les Grecs donnoient par mépris à toutes les nations ,
qui ne parloient pas leur langue, ou du moins qui ne
la parloient pas auffi-bien qu'eux. Ils n'enexceptoient
pas même les Egyptiens , chez lefquels ils conteffoient
pourtant que tous leurs philofophes & tous leurs lé-
gislateurs avoient voyagé pour s'inftruire. Sans en-
trer ici avec Brucker , dans les différentes étymolo-
gies de ce terme , ni fans examiner s'il eft compofé
du bar des Arabes, qui fignifie defert , ou s'il eft déri-
vé du terme par lequel les Chaldéens rendent le fo-
rts ou l'extra des Latins ; je remarquerai feulement
que dans la fuite des tems , les Grecs ne s'en fervi-
rent que pour marquer l'extrême oppofition qui fe
trouvoit entr'eux & les autres nations , qui ne s'é-
toient point encore dépouillées de la rudeffe des pre-
miers fiecles , tandis qu'eux-mêmes, plus modernes
que la plupart d'entr'elles , avoient perfectionné leur
goût, & contribué beaucoup aux progrès de l'efprit
humain. Ainfi toutes les nations étoient réputées bar-
bares , parce qu'elles n'avoient ni la politeffe des
Grecs , ni une langue auffi pure, auffi féconde , auffi
harmonieufe que celle de ces peuples. En cela ils fu-
rent imités par les Romains, quiappelloient auffi bar-
bares tous les autres peuples, à l'exception des Grecs,
qu'ils reconnoiffoient pour une nation favante & po-
licée. C'eft à ptu-près comme nous autres François ,
qui regardons comme groffier tout ce qui s'éloigne
de nos ufages. Les Grecs & les Romains étoient ja-
loux de dominer plus encore par l'efprit, que par la
force des armes, ainfi que nous voulons le faire par
nos modes.
Lorfque la religion Chrétienne parut, ils n'eurent
pas pour elle plus de ménagement qu'ils en avoient
eu pour la philofophie des autres nations. Ils la trai-
tèrent elle-même de barbare ; & fur ce pié ils oferent
la méprifer. C'eft ce qui engagea les premiers Chré-
tiens à prendre contre les Grecs & les Romains, la
défenfe de la Philofophie barbare. C'étoit un détour
adroit dont ils fe fervoient pour les accoutumer peu-
à-peu à refpeder la religion Chrétienne, fous cette
enveloppe groffiere qui leur en deroboit toute la
beauté , & à lui foûmettre leur feience & leur or-
gueil. Tatien de Syrie, & difciple de S. Juftin, leur
a prouvé qu'ils n'avoient rien inventé d'eux-mêmes,
& qu'ils étoient redevables à ces mêmes hommes ,
qu'ils traitoient de barbares , de toutes les connoiffan-
ces dont ils étoient ii fort enorgueillis. « Quelle eft,
BAR
» leur réprOchoit-il malignement, la fcience parmi
» vous, qui ne tire ion origine de quelqu'étranger ?
» Vous n'ignorez pas que l'art d'expliquer les longes,
» vient de l'Italie ; que les Cariens le font les pre-
»> miers avifés de prédire l'avenir par la diverfe litua-
w tion des altres; que les Phrygiens Se les Iiauriens
» fe font iervis pour cela du vol des oifeaux, & les
» Cypriotes , des entrailles encore fumantes des ani-
» maux égorgés. Vous n'ignorez pas que les Chai-
»> déens ont inventé l'Aftronomie ; les Perles la Ma-
» gie; les Egyptiens la Géométrie , & les Phéniciens
» l'art des Lettres. Celiez donc , 6 Grecs , de donner
m pour vos découvertes particulières, ce que vous
»> n'avez fait que fiuvre & qu'imiter ». Quoi qu'il en
foit de ces reproches , il efi certain qu'ils font les pre-
miers inventeurs de cette Philolophie fyitématique,
qui bravant toute autorité , ne veut fe laifler condui-
re qu'à la lueur de l'évidence dans la recherche de la
vérité. La Philolophie des autres peuples, & même
des Egyptiens , n'étoit , ainfi que nous l'avons remar-
qué à l'article de Yame , qu'un amas de maximes ,
qui fe tranimettoient par tradition , & qui prenoient
iur les efprits le même afcendant que les oracles de
leurs dieux. Ce n'eit qu'en Grèce qu'on ofoit raifon-
ner ; Se c'elt aulîi là le léul pays où l'elprit fubtil &
rafiné enfantoit des fyltemes. La Philolophie des au-
tres peuples n etoit , à proprement parler, qu'une
Théologie myitérieufe. Ainii l'on peut dire que les
Grecs ont été les premiers philofophes, dans le fens
rigoureux que l'ulàgc attache à ce terme. (X)
Barbares (Lois) JuriJ'prudence ; ce font celles qui
furent faites lots de la décadence de l'empire Ro-
main , par les differens peuples qui le démembrèrent,
tels que lesGoths, les Vilîgoths, les Ripuariens, les
Francs-Allemands, Anglo-Saxons, &c. Voye^ au mot
Code.
On voit par ces lois la forme qui s'obfervoit dans
les jugemens. Ils fe rendoient dans de grandes affem-
blées , où toutes les perfonnes de diltinction fe trou-
voient. Pour les preuves , on fe fervoit plus de té-
moins que de titres , par la raifon qu'on ne faifoit
preiqu'aucun ufage de l'écriture , fur-tout dans les
commencemens. Faute de preuves on employoit le
combat , ou l'on faifoit des épreuves par les élemens.
Voyt{ Combat & Épreuve.
La principale matière de ces lois étoient les crimes,
& fur-tout ceux qui étoient les plus fréquens parmi
ces peuples brutaux , tels que le vol , le meurtre , les
injures , en un mot tout ce qui fe commet par vio-
lence : ce qui regarde les fucceflions ôc les contrats
y étoit traité très-fuccin£tement.
La qualité des peines qu'elles prononçoient elt re-
marquable. Pour la plupart des crimes elles n'ordon-
noient que des amendes pécuniaires , ou pour ceux
qui n'avoient pas de quoi payer, des coups de foiiet.
On ne puniffoit point alors de mort les criminels , à
moins qu'il ne fût queftion de crimes d'état. Aulïi ces
peines étoient-elles nommées comportions , comme
n'étant qu'une taxe de dommages & intérêts , faite
avec une exactitude furprenante : on y diltinguoit la
partie Méfiée ou mutilée, la profondeur, la largeur
de la plaie, ou le nombre des plaies.
Ces lois font écrites d'un ftyle li iimple Se fi court,
qu'il feroit fort clair fi tous les termes étoient latins :
mais elles font remplies de mots barbares , foit faute
de mots latins qui fuflent propres, foit pour leur fer-
vir de glofe. (H)
BARBARICA1RE, f. m. (Peinture & Tapiferie.)
Le barbaricaire elt un peintre qui exécute des repré-
fentations d'hommes Se d'animaux en tapifferie ou
avec des foies de différentes couleurs. La tapifferie
elt un genre de peinture, & l'on ne doit pas être fur-
pris que je donne le nom de peintre à ces excellcns
artifies , qui font avec l'aiguille des tableaux auffi
BAR
69
beaux que tous ceux que les peintres font avec le
pinceau. Voye^ LlSSE HAUTE 6* BASSE.
* BARBARICENS (les) f. m. pi. (Géog.), peu-
ple de l'île de Sardaigne , dans les montagnes ; on ap-
pelle leur quartier les barbarias : il elt divifé en trois
parties , la Barbaria-Bervi , au quartier de Valence ;
la BarbariaLolai, au même quartier ; mais l'un plus à
l'orient , & l'autre plus au feptentrion : la Barbaria-
Sevoli, dans les monts.
* BARBARIE , f. f. (Géog.) grande contrée d'A-
frique , enfermée entre l'Océan Atlantique , la mer
Méditerranée , l'Egypte , la Nigritie , Se la Guinée.
Sa longueur de l'orient à l'occident elt confidérable ,
mais fa largeur varie. Ses parties principales font les
royaumes de Tripoli , de Tunis , d'Alger , de Fez , de
Maroc , de Tafilet, & le Zara ou Defert. Ces états
ont un grand nombre de ports fur la Méditerranée ,
Se les royaumes de Fez Se de Maroc en ont même
quelques-uns fur l'Océan : ce font ceux de Tripoli ,
de la Goulette, de Tunis, d'Alger & de Salé, où l'on
fait le plus de commerce. II y a à Alger des mar-
chands de toutes les nations ; les Juifs y ont un quar-
tier. La marine des Algériens elt très-forte. On peut
tirer de-là des grains. Le commerce eft le même à
Couco : il fe fait en grains , olives , huiles , figues ,
raifins fecs , miel , Se cire. On y trouve aufii du fer ,
de l'alun , & de petits beftiaux. Il y a peu de né-
goce à Tripoli. Il vient de Barbarie des plumes d'au-
truche , de l'indigo , de l'or en poudre , des dattes ,
des raifins de damas, des cuirs tannés & non tannés ,
du cuivre , de la cire , de l'étain , des laines , des
peaux de chèvre , du corail , qui le pêche au baltion
de France; des grains, comme blés, orges, lèves,
millet ; des chevaux. On charge pour ces côtes des
draps, de l'écarlate, des velours, des taffetas , des
mouffelines , des foies apprêtées ; des épiceries , des
drogues , du coton , du tabac , du fucre , du bois de
campeche , du tartre , de l'alun , du foufre , de la
cochenille , du papier , de l'acier , du fer , du plomb ,
toutes fortes de quincaillerie. Il y a beaucoup d'a-
vantage d'aller acheter de ces voleurs , tout ce qui
n'elt pas à leur ufage , & qu'ils revendent de leurs
prifes. Il n'y a en Barbarie prefque que des monnoies
étrangères. Ils ont pourtant leurs burbas , leurs dou-
blas , leurs rubics, Se quelques -autres pièces. Le
commerce elt le même par-tout fur cette côte , ex-
cepté à Salé Se au baltion de France. L'or Se l'ivoire
qui viennent de Salé en Europe, y font apportés de
Sudan & de Gago en Guinée par des cafillas Arabes.
Les plumes d'autruches viennent de Sara. Le com-
merce de Tambou&on , capitale de Gago , fe lait fin-
gulierement , c'elt un échange d'or en fel. Le mar-
chand met fon fel à terre fur des nattes de jonc & fe
retire : le Nègre vient, il examine le tas de tel qui
lui convient , il met à côté la poudre d'or qu'il en
veut donner, Se fe retire à fon tour : le marchand le
rapproche ; fi la quantité d'or lui convient , il prend
une poignée de lel qu'il met à côté de l'or ; fi elle
ne lui convient pas il ne met rien ; il le retire en-
fuite : le Nègre le rapproche & emporte fon fel ou
augmente la quantité d'or, ou retire fon or, Se tout
cela fe fait fans parler. Le filence elt ordonné par la
loi, comme le fcul moyen de prévenir les querelles
entre les marchands, & il s'obfen e rigoureusement.
Le baltion de France fait faire la pêche du corail ,
& en trafique particulièrement, f'oyei à l'article Co-
rail cette ptcht Se ce commerce.
* Barbarie (merde), Géog. c'eft ainfi qu'on ap-
pelle toute la partie de la Méditerranée, qui baigne
les côtes des royaumes de Tunis , d'Alger . & de Fez ,
& qui s'étend jufqu'aux îles de Sicile &: de Sardaigne.
On ne comprend quelquefois fous ce nom , que ce
qui baigne les côtes d'Alger & de Fez.
* BARBARIE (Usjiiclus ou bajjes de ) , Geoe. anc.
7o BAR
& moi. ce font les ecueils du golfe de Sedra , qite les
anciens appdloient S'y nis magna ou major. On entend
auin par ce nom , quelquefois , le golfe de Sedra
même.
B ARBARIN , f. m. {Hifl. nat. Zoolog.) poiflbn de
mer, mieux connu fous le nom defurmulet. V. Sur-
mulet.
B arbarin , poiflbn de rivière , petit barbeau. V.
Barbeau. (/)
BARBARISME , f. m. {terme de Gramme) le barba-
rlfme efl un des principaux vices de rélocution.
Ce mot vient de ce que les Grecs & les Romains
appelloient les autres peuples barbares, c'efl-à-dire ,
étrangers; par conféquent tout mot étranger mêlé
dans la phrafe greque ou latine étoit appelle barba-
rifme. Il en efl: de même de tout idiotifme ou façon
de parler , Se de toute prononciation qui a un air
étranger ; par exemple , un Anglois qui diroit à Ver-
failles, efl pas le roi allé à la chaffe , pour dire le roi
tfefl-il pas allé à la chaffe ? ou jefuisfec , pour dire
j'ai foi/, ferait autant de barbarifmes par rapport au
françois.
Il y a aufli une autre efpece de barbarifme; c'efl
lorfqu'à la vérité le mot efl bien de la langue , mais
qu'il efl: pris dans un fens qui n'eft pas autorifé par
Fiïfagé de cette langue , enforte que les naturels du
pays font étonnés de l'emploi que l'étranger fait de
ce mot : par exemple , nous nous fervons au figuré
du mot d 'entrailles , pour marquer le fentiment ten-
dre que nous avons pour autrui ; ainfl nous difons
"il a de bonnes entrailles , c'eft-à-dire , il efl compatif-
'fant. Un étranger écrivant à M. de Fenelon , arche-
vêque de Cambrai, lui dit: Msr , vous ave^pour moi
des boyaux de père. Boyaux ou intejlins pris en ce
fens , font un barbarifme , parce que lelon l'uiage de
notre langue nous ne prenons jamais ces mots dans
le fens figuré que nous donnons à entrailles.
Ainfl il ne faut pas confondre le barbarifme avec le
folécifme ; le barbarifme efl: une élocution étrangère,
au lieu que le folécifme efl une faute contre la régu-
larité de la conflruttion d'une langue ; faute que les
naturels du pays peuvent faire par ignorance ou par
inadvertance , comme quand ils fe trompent dans le
genre des noms ou qu'ils font quelqu'autre faute con-
tre la fyntaxe de leur langue.
Ainfl on fait un barbarifme , i°. en difant un mot
tjui n'eft point du dictionnaire de la langue. -x°. En
prenant un mot dans un fens différent de celui qu'il
a dans l'ufage ordinaire , comme quand on fe fert
d'un adverbe comme d'une prépofition ; par exem-
ple , il arrive auparavant midi , au lieu de dire avant
-midi. 3°. Enfin en ufant de certaines façons de par-
ler, qui ne font enufage que dans une autre langue.
Au lieu que le folécifme regarde les déclinaifons ,
les conjugaisons , & la fyntaxe d'une langue , i°. les
déclinaifons , par exemple , les emails au lieu de dire
les émaux : i°. les conjugaifons , comme fi l'on difoit
il allit pour il alla : 30. la fyntaxe , par exemple ,je
'n'ai point de l'argent, pour je n'ai point d'argent.
J'ajouterai ici un paflage tiré du IVe livre ad He-
rennium, ouvrage attribué à Cicéron : La latinité, dit
Fauteur , confjic à parler purement , fans aucun vice
dans V élocution. « Il y a deux vices qui empêchent
» qu'une phrafe ne foit latine , le folécifme & le bar-
» barifme ; le folécifme , c'efl lorfqu'un mot n'efl pas
» bien confirait avec les autres mots de la phrafe ;
» & le barbarifme , c'efl quand on trouve dans une
» phrafe un mot qui ne devoit pas y paraître , félon
» l'ufage reçu ». Latinitas ef quœ ferma ncm purum con-
fervat , àb omni vitio rernotum. Vida i,i fermone , quo-
minus is latinus fit , duo pojfunt effe ,• jblecifmus & bar-
barij'rr.us. Soucifmus efl , cum verbis pluribus conj'equens
verbum fuperiori non accommodatur, Barbarifmus ejl ,
BAR
tum vsrbum àliquod vitiofe effertur. Rhëtoriconïm ad
Herenn. Lib. IV. cap. xij. {F)
* BARBAT A ou BARBUE , (Mytholog.) furnom
qu'on donnoit à Venus ; en effet , on la repréfentoit
quelquefois avec de la barbe & avec les deux fexes.
* BARBATH ou MARBATH {Géog. anc. & mod.y,
ville de l'Arabie heureufe , dans une petite province
nommé Sehagt ou Hadhramuth , qui efl l'Adramytene
des anciens,
. * BARB ATO ( Géog. ) , rivière de l'Andaloufie ,
en Efpagne, qui coule dans l'évêché de Cadis , & fe
jette dans l'océan Atlantique à Porto-Barbato.
* BARBATO ou PORTO-BARBATO {Géog. anc.
& mod.') , petite ville d'Efpagne , dans l'Andaloufie ,
fur l'Océan Atlantique, à l'embouchure de la rivière
Barbato. C'eft, félon quelques Géographes, la ville
Belo ou Bello des anciens ; d'autres veulent que Belo
ou Bello des anciens foit Conil ou Belona.
BARBE, le poil qui croît au menton & autres par-
tiesdu vifage, fur-tout des mâles adultes. V. Poil.
La barbe efl la première marque de puberté ; c'eft
un indice que la femence commence à fe faire ; elle
continue , fi le fang produit la même humeur proli-
fique : elle cefle de pouffer, ou tombe, fi cette fecré-
tion importante efl empêchée. On connoît par-là
pourquoi la barbe & les cheveux tombent fouvent
dans la vieilleffe. La voix d'un garçon reffemble à
celle d'une fille avant la fecrétion de la iemence ,
après quoi elle devient grave & rauque , & ce iymp*
tome paroît avant la barbe. (Z.)
La barbe a été aflujettie à diverfes coutumes & cé-
rémonies. Kingfon nous affûre qu'une partie confi-
dérable de la religion desTartares coniifle dans le
gouvernement de leur barbe; qu'ils ont tait une lon-
gue & fanglante guerre aux Perfans , & les ont dé-
clarés infidèles , quoique de leur communion à d'au*
très égards, précifément à caufe que ceux-ci ne fe
faifoient point la mouftache à la mode ou fuivant le
rit des Tartares.
Athénée remarque , d'après Chryfippe , que les
Grecs avant Alexandre , avoient toujours confervé
leur barbe , & que le premier Athénien qui coupa
la fienne , fut toujours après cela dans les médailles
furnommé le tondu , x^pw;- Plutarque ajoute qu'Ale-
xandre ordonna aux Macédoniens de fe faire rafer,
de peur que les ennemis ne les priffent par la barbe.
Quoi qu'il en foit , nous voyons que Philippe fori
père , ainfl que fes prédéceffeurs Amyntas & Arche-
laiis , font repréfentés fans barbe fur les médailles.
Pline obferve que les Romains ne commencèrent
à fe rafer que l'an de Rome 454, quand P. Ticinus
leur amena de Sicile une provifion de barbiers ; ii
ajoute que Scipion l'Africain fut le premier qui fit
venir la mode de fe rafer chaque jour.
Ce fut encore une coutume parmi les Romains de
fe faire des vifites de cérémonie , à l'occafion de la
première coupe de la barbe. Les jeunes gens commen-
çoient à fe faire couper la barbe depuis l'âge de 2 1 ans,
jufqu'à celui de 49 ; paffé 49 ans , il n'étoit plus per-
mis , félon Pline , de ne pas porter la barbe longue.
Ils enfermoient leur première barbe dans une petite
boîte d'or ou d'argent, qu'ils confacroient à quelque
divinité , & fur-tout à Jupiter Capitolin, comme Sué-
tone le remarque de Néron. Les 14 premiers empe-
reurs fe firent rafer jufqu'au tems de l'empereur
Adrien , qui rétablit l'ufage de porter la barbe : Plu-
tarque dit que le motif de ce prince fut de cacher les
cicatrices qu'il avoit au vifage.
Tous fes fuccefleurs l'imitèrent jufqu'à Conflan-
tin. Les barbes reparurent fous Héraclius, & tous les
empereurs Grecs l'ont portée depuis. Les Goths &
les Francs ne portoient qu'une mouftache , jufqu'à
Clodion , qui ordonna aux François de laiffer croître
leur barbe iv leurs cheveux , poux les distinguer des
BAR
Romains. Les anciens philofophes & les prêtres des
Ju.fs portoient de longues barbes. On veut que ce loit
auffi l'origine du nom des Lombards , Longobardi quaji
Longo-barbati. Il y a un canon du concile de Cartha-
ge, qui défend aux clercs de porter de longs cheveux
tC de longues barbes : clericus nec comam nutriat , nec
barbam ; ce qui fe concilie difficilement avec cette
leçon , nec barbam tundat. Grégoire VII. dit , que le
clergé d'Occident a toujours été raie. Aujourd'hui les
Occidentaux le font râler ; 6c les Grecs au contraire ,
les Turcs 6c prefque tous les Orientaux ont confer-
vé la mode de porter de longues barbes.
On uloit anciennement de grandes cérémonies en
béniffant la barbe , & l'on voit encore les prières qui
lé difoient dans la folennité de fa confécration , lorf-
que l'on tonfuroit un clerc. Voye{ Tonsure.
Les gens de qualité faifoient râler leurs enfans la
première fois par desliommes auffi qualifiés qu'eux ,
ou plus même ; & ceux-ci devenoient par ce moyen
les parreins ou les pères adoptifs des enfans. Voye^
Adoption.
Il eft vrai qu'anciennement , on devenoit parrein
du garçon précifément en lui touchant la barbe; auffi
voit-on dans l'hiftoire qu'un des articles du traité
entre Clovis 6c Alaric ,fut que ce dernier lui touche-
roit la barbe , afin de devenir le parrein de Clovis.
Voye{ Parrein.
A l'égard des eccléfiaftiques , la difeipline a confi-
dérablement varié fur l'article de la barbe ; on leur a
quelquefois enjoint de la porter , à caufe qu'il y a
quelque choie d'efféminé à le la faire , &c qu'une bar-
be longue fied bien à la gravité du clergé ; d'autres
fois on l'a défendue comme fufpecte de cacher de
l'orgueil fous un air vénérable. L'églife Greque &
la Romaine ont été long-tems aux prifes à ce fujet
depuis leur féparation. Ceux de l'églife de Rome fem-
blent avoir encore eu plus de goût pour fe rafer afin
de contredire les Grecs ; ils ont même fait certaines
conftitutions expreffes de radendis barbis.
Les Grecs , de leur côté défendent la caufe des
grandes barbes , avec un zèle ardent, & font très fean-
dalifés de voir dans les églifes Romaines , des images
de faints qui n'ont point de barbe. On trouve que par
les ftatuts de quelques monafteres , les moines laïques
dévoient laiffer croître leur barbe , 6c les prêtres fe
rafer ; & que l'on béniffoit, avec beaucoup de céré-
monies , les barbes de tous ceux qui étoient reçus dans
les couvens.
En certains pays ,c 'eft porter le deuil que de bif-
fer croître fa barbe, en d'autres c'en eft un que de fe
rafer. Le père le Comte remarque l'extravagance des
Chinois dans leur affeûation de porter de grandes bar-
bes , eux à qui la nature n'en a donné que de fort pe-
tites , qu'ils ont la folie de cultiver avec un grand
foin , enviant beaucoup le bonheur des peuples de
l'Europe à cet égard, & les conlidérant comme les
premiers hommes du monde , à caufe de leur barbe.
Les Ruffiens portoient encore leur barbe , il n'y
a que très-peu d'années , quand le Czar Pierre I. leur
ordonna de fe rafer : mais nonobftant Ion ordre , il
fut contraint de tenir fur pied un bon nombre d'of-
ficiers , pour la couper de haute lutte à ceux que l'on
ne pouvoit réduire autrement à s'en défaire. C'eft
une remarque de Saint-Chryfoftomc , que les rois de
Perle avaient leur barbe tiffue , & nattée avec un
fil d'or. Quelques-uns des premiers rois de France
faifoient noiier 6c boutonner leur barbe avec de l'or.
(G)
Barbe d'une Comète {AJlronom. ) c'eft le nom
qu'on donne à ces efpeces de rayons qu'envoyé une
comète, vers la partie du ciel où l'on mouvement
paroît la porter. V<rye{ Comète.
C'eft en quoi la barbe de la comète eft diftinguée
de fa queue , qui le dit des rayons pouffes vers la par-
BAR
71
tie d'où il femble que l'on mouvement l'éloigné.
Foyei Queue. En un mot la barbe de la comète eft
une elpcce de chevelure lumineule 6c rayonnante
qid la précède , 6c la queue eft une chevelure lumi-
neule & rayonnante qui la fuit. La caufe de la queue
des comètes & de leur barbe n'eft pas trop bien con-
nue, foyei fur ce fujet les conjectures des philofo-
phes , au mot Comète. ( O )
Barbe ou plutôt Barbette ( terme de l'Art mi-
litaire ) tirer en barbe ou à barbette , c'eft tirer le ca-
non par deffusle parapet, au lieu Je le tirer par les
embrafures ; auquel cas le parapet ne doit avoir
que trois pies & demi de hauteur, au-deffus de l'en-
droit où le canon eft placé. On fait ordinairement
de petites élévations de terre aux angles flanqués
des ouvrages pour y placer du canon qu'on tire à
barbette. Ces élévations font auffi appellées barbet-
tes. On donne ce même nom au canon , qui eft tiré
de ces élévations ; parce qu'on prétend que le canon
en tirant de-là , par-deffus ce parapet , lui fait pour
ainfi dire la barbe, en brûlant l'herbe de fa partie fu-
périeure. ( Q )
Barbe d'un vaijfeau ( Marine. ) les barbes d'un
vaiffeau font les parties du bordage de l'avant , au-
près du rinjot , c'eft-à-dire , vers l'endroit où l'étra-
ve s'affemble avec la quille.
Barbe , Sainte-Barbe , gardiznnerie , chambre des ca-
nonmers ; c'eft ainfi que le nomme ( en Marine ) la
chambre des canonniers , à caufe qu'ils ont choilî
Sainte Barbe pour patrone. Lafainte-barbe eft un re-
tranchement de l'arriére du vailîéau, au-deffus de la
fonte, 6c au-deffous de la chambre du capitaine. Le
timon paffe dans la fainte-barbe. Les vaiffeaux de
guerre y ont ordinairement deux fabords pratiqués
dans l'arcaffe ; on l'appelle auffi gardiennerie , à caufe
que le maître canonnier y met une partie de ce qui
regarde les uftenciles de Ion artillerie. Voj e^ PL JK
fig.l.xP. 107. (Z)
Barbe ( Manège ) on appelle ainfi un cheval de
Barbarie, qui a la taille menue & les jambes déchar-
gées , & qui eft fort cftimé pour fa vigueur 6c la vî-
tefté. Voyei Cheval.
Les barbes font ordinairement d'une taille déliée ,
& ont les jambes bien écartées. C'eft une maxime
que les barbes meurent , mais ne vieilliffent jamais ;
parce qu'ils confervent leur vigueur jufqu'à la fin :
c'eft pourquoi on en fait des étalons. Leur feu , félon
le duc de Newcaftle, dure autant que leur vie.
On dit que ces chevaux étoient autrefois fauva-
ges , & qu'ils couroient çà & là dans les forêts de
l'Arabie ; & que ce ne fut qu'au tems du Chèque If-
maël qu'on commença à les dompter pour la pre-
mière lois. Onaffùre qu'il y a des barbes en Afrique,
qui devancent les autruches à la courte, qu'on vend
ordinairement dix mille livres , ou comme dit Dap-
per , mille ducats, ou cent chameaux. On les entre-
tient toujours maigres,& on les nourrit fort peu avec
quelques grains & de la pâte , ou comme dit Dapper,
avec du lait de chameau qu'on leur donne loir 6c
matin. On conferve la généalogie des chevaux bar-
bes , avec le même foin qu'on fait en Europe celle
des grandes familles ; Se on ne les vend jamais lans
produire leurs titres de noblefte. Il y en a qu'on fait
defeendre en droite ligne de l'illuftre cheval du grand
Dalid.
La race des chevaux a fort dégénéré dans la Xu-
midic,les Arabes ayant été découragés de la-confes-
ver par- les officiers Turc;. , qui étoient ail.
s'en rendre maîtres. Les Tingitaniens & les Egyptiens
ont aujourd'hui la réputation de conlei \ ei la meil-
leure race, tant pour la taille que pour la beauté.
Les plus petits de ces derniers ont ordinairement
feize palmes , & tous font formes , l'uivant leur ma-
nière de s'exprimer , comme la gat<àile.
72
BAR
Les bonnes qualités d'un cheval de Barbarie ( ou-
tre celles qu'on lui fuppole de ne jamais le coucher,
& de ne point bouger lorf que le cavalier vient à laif-
ler tomber fa bride ) l'ont d'avoir une longue allure,
& de s'arrêter court , s'il le faut, en pleine courfe.
Le barbe n'eft pas û propre à être étalon pour avoir
des chevaux de manège, que pour des coureurs ; car
il engendre des chevaux longs & lâches : c'eft pour-
quoi il ne faut point avoir de la race pour le manè-
ge , s'il n'eft court de la tête à la croupe , fort , rac-
courci, & d'une grande vivacité ; ce qui le trouve
dans peu de barbes.
Barbe , ou Sous-barbe ( Manège ) eft la partie de
la tête du cheval , qui porte la gourmette. C'eft pro-
prement le bout ou plutôt la jonction des os ae la ga-
nache. Foye{ Ganache.
Barbes , ou Barbillons, (Markhallerie.) ce
font des petites excroiffances de chair longuettes , &
finiflant en pointe , qui lont attachées au palais lous
la langue du cheval , qui l'empêchent de manger , Se
qu'on ôte pour cette raiibn. ( V)
Barbe, (en Serrurerie*) eft une partie du pêne;
elle a la forme de dents, qu'on voit ordinairement à
fa partie inférieure, quelquefois à la fupéricure , & à
l'une & à l'autre. foye^Planche III. de Serrurerie, en
y&c en T. La clef en tournant dans la ferrure , les ren-
contre & fait avancer ou reculer le pèle ou pêne.
Il y a différentes îortes de barbes ; des barbes per-
dues , ou volantes ; ce font celies qui iont mobiles ,
& qui peuvent defeendre &c monter. Elles ne font
pas corps avec le pêne ; elles y font feulement ajul-
tées, & c'eft par le méchaniime qu'employé l'ou-
vrier qu'elles paroiffent ou difparoiifent. On trou-
vera à i'article Serrure , plulieurs exemples de ces
barbes. Foye^ SERRURE.
Barbe DE BOUC , tragopogon , (Hijl. nat. bot.)
genre de plante , dont la fleur eft à demi-fleurons
portés chacun fur un embryon , & foûtenus par un
calice fendu en plufieurs parties fans être écailleux.
Lorlque cette fleur eft paffée, chaque embryon de-
vient unefemence revêtue d'une membrane ou d'une
enveloppe garnie d'une aigrette , & attachée fur la
couche. Tournefort, Injl reiherb. Voye^ Plante. (/)
* Le tragopogon pratenfe , luteum , inajus , aime les
lieux champêtres , les prés , les pâturages , 6c les ter-
res graffes ; il fleurit en Mai &c en Juin , & il ne tarde
pas à répandre fa graine ; il redonne des fleurs en
Juillet & en Août.
Sa racine échauffe & humecte ; elle eft falutaire
dans les maladies de poitrine ; fon lue lactée aggluti-
ne les ulcères récens , pouffe par les urines , & excite
les graviers à fortir. Il y en a qui mangent la racine
cuite , quand elle eft tendre : mais ils font en petit
nombre.
BARBE DE CHEVRE , barba caprœ,( Hifl. nat. bot.")
genre de plante à fleur en rofe , compofée de plu-
fieurs pétales difpolés en rond; le piftil fort d'un
calice d'une feule pièce , & devient dans la fuite un
fruit compolé de plufieurs petites gaines raffemblées
en forme de tête. Chaque gaine renferme une femence
ordinairement oblongue. Tournefort, Injl. reiherb.
Voye?K Plante. (/)
* La barba caprœ , jloribus compaclis , a la feuille
d'un goût d'herbe falé &c gluant, & rougiffant un peu
le papier bleu ; la racine le rougit beaucoup ; elle
eft ftyptique & un peu amere. Il y a apparence que
le feï de cette plante approche du lel ammoniac ;
mais uni avec beaucoup de foutre & allez de terre.
Elle donne par l'analyie des liqueurs acides , du fel
volatil concret, beaucoup de foutre, & allez de terre ;
auffi elt-elie ludoririque , cordiale, & vulnéraire ; la
décoction de fa racine eft bonne dans les fièvres ma-
lignes. Le vin oii on l'a fait bouillir eft falutaire dans
les cours de ventre , la dyflenterie , le crachement
BAR
de fang, & les bleffures internes. Un gros de fon ex-
trait eft fudorifique : mais il en faut continuer l'ufage
pendant deux ou trois jours. Il en faut prendre un
gros le matin , autant l'apres-midi ; Se le foir, la même
dofe avec un grain de laudanum.
Barbe de Jupiter , barba Jovis , ( Hifl. nat. bot. )
genre de plante dont la fleur eft légumineufe ; le pil-
til fort du calice, & devient dans la fuite une fili-
que fort courte & prefqu'ovale , qui renferme une
lemence arrondie. Tournefort, Injl. ni herb. Voye^
Plante. (/)
* On ne lui attribue aucune propriété médici-
nale.
Barbe RENARD , tragacantka , (Hifl. nat. bot.)
genre de plante à fleur légumineuie ; le piftil fort
du calice , &c devient dans la fuite une filique divifée
félon fa longueur en deux loges remplies de quelques
femences qui ont ordinairement la figure d'un petit
rem. Ajoutez aux caractères de ce genre que les feuil-
les naiffent par paires fur une côte terminée par un
piquant. Tournefort, Injl. rei herb. Poye^ Plante. (/)
* La tragacantha croit dans les provinces méridio-
nales de la France & en Italie : mais elle ne donne
fa gomme que dans les pays orientaux.
On tire de la racine la gomme adragant des bou-
tiques. Foysi Adragant.
* Barbe a plufieurs autres acceptions : voici les
principales. Il fe dit des petites arrêtes qu'on remar-
que aux poiffons plats , & qui leur lervent de na-
geoires ; voye^ Poisson , Nageoires : des franges
mollettes dans les plumes font garnies depuis le haut
du tuyau jufqu'à l'extrémité ; voyez P L U M e : des
poils dont certains épis de blé lont hériffés ; voyeç
Blé , Épi : du poil de certaines étoffes, ou ufées ,
ou non ébarbées ; voye^ Draperie : de cette efpece
de duvet qui dénote la corniption & la moififfure des
confitures gâtées : des petites molécules métalliques,
ou grains de limaille , qui reftent attachés aux arrê-
tes de tous les corps métalliques limés , après qu'on
les a limés , & qu'on enlevé ou avec le frailoir , ou
avec la lime même, ou avec la pierre, ou avec le
bruniffoir.
BARBÉ , adj. (en termes de Blafon. ) fe dit des coqs
& des dauphins dont la barbe eft d'un autre émail
que leur corps.
Boucherat , dont il y a eu un chancelier , d'e-
zur au coq d'or bequé, membre , crèté & barbi de
gueules. ( y)
BARBEAU , f. m. barbus, ( Hifl. nat. Zoolog. )poif-
fon de rivière , ainli nommé parce qu'il a quatre bar-
billons , deux aux coins de la bouche , ck deux au
bout du mulèau , qui eft allongé 6c pointu. Le barbeau
n'a point de dents ; fes yeux font petits ; la prunelle
eft noire & environnée d'un cercle doré ; la fente
des ouies eft petite. On a remarqué que ce poiffon
vit allez long-tems hors de l'eau. La ligne qui s'étend
fur les côtés , depuis les ouies jufqu'à la queue eft
peu fenfible ; le dos eft d'une couleur mêlée de verd
& de jaune ; le ventre eft blanc. Il a une nageoire
fur le dos qui tient à un fort aiguillon ; deux au bas
des oiiies; deux autres fous le ventre qui font jau-
nes ; 6c au-delà de l'anus une autre nageoire qui eft
rougeâtre. La chair du barbeau eft blanche & molle;
il y a beaucoup d'arrêtés; elle eft d'affez bon goût,
fur-tout lorlque lepoiilbneftgros. Rondelet, Voyt^
Poisson. ( l)
* Barbeau, (Mat. med. ) il faut préférer les pe-
tits barbeaux aux grands : il faut pour être bons , qu'on
les ait péchés dans des eaux pures & loin des rives.
Le barbeau nourrit : mais il eft difficile à digérer ; les
parties les plus eftimées font le foie 6c la tête.
Le Barbeau , (Pêche. ) eft fort avide à l'appât :
mais il eft rulé , à moins que l'épouvante ne le prenne ;
alors il fe croit fort en sûreté s'il a la tête cachée ; la
pêche
BAR
pêche s'en fait de la même manière que celle dé l'an-
guille.
Barbeau , plante. Voyci Bluet.
* BARBECÎNS, (GVotr.) royaume d'Afrique, dans
la Guinée , vis-à-vis le cap-Vcrd. On dit que les filles
s'y font des cicatrices , & s'agrandiflent la bouche
en fe féparant les lèvres , pour fe rendre plus jolies,
BARBEIER , BARBOTER , FRISER , verb. neut.
on dit en Marine, la voile barbeie , lorique le vaiffeau
étant trop près du vent , le vent rafe la voile , & lui
étant prefque parallèle , la bat de côté & d'autre
fans la remplir. Cette agitation continue juiqu'à ce
qu'elle ait pris vent , & alors elle ne barbeie ou ne
friie plus. Quand on a mis le vent fur les voiles , il
faut qu'elles barbeient. Il ne faut pas confondre mettre
le vent , Reprendre le vent. Voye{ Vent. (Z)
* BARBELA , ( Géog. ) rivière d'Afrique , dans le
Congo : elle palîe à S. Salvador, & fe jette dans le
Zaire, un peu au-defuis de lbn embouchure dans l'O-
céan.
* BARBELIOTS , ou BARBORIENS, f. m. pi.
fecte de Gnoftiques, qui difoient qu'un Eon immor-
tel avoit eu commerce avec un efprit vierge appel-
lé Barbeloth , à qui il avoit accordé fucceffivement
la prefeience, l'incorruptibilité, tk la vie éternelle ;
que Barbeloth un jour plus gaie qu'à l'ordinaire , avoit
engendré la lumière, qui perfectionnée par fonction
de l'efprit, s'appelia Cluiji ; que Chrilt defira l'intel-
ligence & l'obtint ; que l'intelligence , la raiion , l'in-
corruptibilité , tk. Chrift s'unirent ; que la raiion &
l'intelligence engendrèrent Autogène ; qu'Autogène
engendra Adamas l'homme parfait , & fa femme la
connoiflance parfaite ; qu'Adamas & fa femme en-
gendrèrent le bois ; que le premier ange engendra le
S. Efprit, la Sagefîe, ou Prunic ; que Prunic ayant
fenti le befoin d'époux , engendra Protai chonte , ou
premier prince , qui fut iniolent &c fot ; que Pi otar-
chonte engendra les créatures ; qu'il connut charnel-
lement Arrogance , & qu'ils engendrèrent les vices
&c toutes leurs branches. Pour relever encore toutes
ces merveilles , les Gnôftiqftes les débitaient en Hé-
breu , & leurs cérémonies n'étoient pas moins abo-
minables , que leur doctrine étoit extravagante. Voy.
Théodoret.
BARBERIE , f. f. terme qui fe trouve employé
dans les ftatuts des maîtres Perruquiers , &c qui li-
gnifie Van de rafer & de faire la barbe & les che-
veux. Voye^ Barbier.
. * BARBERINO , ( Géog. ) ville d'Italie , dans la
Tofcane , dans le Florentin , au pie de l'Apennin , fur
la rivière de Siere. Long. z8. 55. lat. 44. 5.
BARBET , f. m. (Chafj'e. ) gros chien à poil frifé ,
qu'on inftruit à rapporter, qui va à l'eau, & qu'on
dreffe à la chafle du renard. On tond les barbets , &c
leur poil entre dans la compofition des chapeaux.
* BARBETS , f. m. pi. ( Géog. ) habitans des val-
lées du Piémont , de Luccrne , d'Angrone , de Pé-
roùfe, & de S. Martin.
. Barbet , poiffon de rivière , mieux connu fous le
nom de barbeau. Voye?^ BARBEAU. (/ )
* BARBEYRA , ( Géog. ) petite ville de France ,
dans le bas Languedoc , au diocèfe de CarcafTonne.
* B ARBEZIEUX , ( Géog. ) petite viUe de France,
en Saintonge , avec titre de marquifat.
BARBIER,f. m. artifan qui fait la barbe. II "y a à Paris
deux communautés, qui fui vant leurs ltatuts,ont droit
de tenir boutique ouverte pour faire la barbe , & d'y
mettre des baifins pour enfeigne.
La première eft celle des maîtres Chirurgiens ,
dont les bafhns de l'enfeigne doivent être jaunes : la
féconde eft celle des Perruquiers , dont les balîins
font blancs. Voye^ Chirurgie.
BARBIER, f. m. (Hijl. nat. Zoolog.) poiffon de
mer du genre appelle anthias , félon Rondelet. Voy.
Tome II,
BAR
73
Anthias. Voici comme il décrit ce poiffon. Le
corps eft de couleur rougeâtre , la tête eft ronde &
de différentes couleurs , le bec eft moufle , les dents
font petites ; il a fur le dos , allez près de la tête ,
une nageoire qui s'étend jufqu'à la queue , & dont
le premier aiguillon eft long , fort & tranchant : on
l'a comparé à un rafoir ; tk. c'eft pourquoi on a don-
né à ce poiffon le nom de barbier. Il a deux nageoi-
res auprès des oiiies ; deux autres fous le ventre lon-
gues & menues ; & enfin une autre au-delà de l'a-
nus. Toutes ces nageoires font de couleur ronfle. La
queue eft de la même couleur ; elle eft terminée par
deux nageoires. On a cru que lorfque le barbier étoit
pris à la ligne , il la coupoit avec ion aiguillon tran-
chant. Cela peut être : mais on a prétendu de plus
que les autres poiflbns de cette eipece venoient au
fècours de celui qui étoit pris , & le délivraient en
coupant la ligne. Des poiflbns fi intelligens pour-
roient bien aufli arracher l'hameçon du corps de celui
qui l'auroit avalé. Leur aiguillon feroit auffi propre
à cette opération qu'à la première. Si un de ces poif-
ions a jamais coupe une ligne par hafard, je ne lerois
pas furpris qu'on leur attribuât des aclions qui fup-
poient un deffein prémédité , tant le commun des
hommes eft porté à croire des chofes dénuées de
toute vraiffemblance. Voye^ Poisson. (/)
EARBILLE , f. f. ( à la Monnoie. ) ce font des efT
peces de petits fiJamens ou pointes qui font aux
flancs , & que l'on emporte en les agitant les uns
contre les autres dans un crible de fer.
BARBILLON , f. m. ( Hifi. nat. Zoolog. ) petit
barbeau , poiffon de rivière. Voye^ Barbeau. (7 )
Barbillon , ( Hijl. nat. Zoolog. ) barbe ou pen-
dant charnu qui fait partie du corps de certains poif-
fons. Le nombre & la poiition des barbiilons varient
dans les différentes efpeces ; ils font le plus fou-vent
autour de la bouche , comme dans le barbeau , le
furmulet , la baudroie , &c. Voye^ Rondelet , iiv,
III. ch. xxvj. ( / )
Barbillons , f. m. pi. ( Fauconn. ) eft une mala-
die qui furvient à la langue des oiieaux de proie ,
ce qui leur eft caulée, à ce qu'on croit, par un rhume
chaud qui tombe fur les glandes de la gorge , tk les
fait enfler.
* BJRBITON, (Hijl. ancienne. ) nom d'un inf-
trument des anciens. On ne fait point ce que c'étoit.
Les anciens tk les modernes l'ont fouvent confondu
avec la lyre. M. Dacier conjecture qu'il étoit à cor-
de ; &. fanant venir b^rbiton de barumiton , qui figniiîe
groj/e corde de lin , il en conclut que c'étoit un infini-
ment à groflès cordes : ce qu'il y a de certain , c'efl
que le lin étoit en ufage pour les inftrumens demuli-
que , avant que l'on eût trouvé l'art d'employer au
même uiage les boyaux des bêtes. Horace l'appelle
lesbien, Usboum barbiton , ode I. liv. I. & ode XXX H.
même livre, Lesbio primum modulate civi : « vous,
» b.ubiton, qui ave/, été touche la première fois par
» un citoyen de Lesbos » ; c'étoit Alcée, à qui il attri-
bue l'invention ciu barbiton.
* BARBONNE, ( Géog. ) petite ville de France
en Champagne, généralité de Châlons.
* BAKBORA, (Géog.) ville maritime d'Afrique
au royaume d'Adel , fur le détroit de Babel-Mandcl.
Il y a une île de ce nom qu'on appelle auiïï Alondi,
dans la mer Rouge , à l'occident de la baie de Bar-
bora. Lat. environ 10. 43. long. 64. J Z-
BARBOT , f. m. c'eft ainfi qu'on appelle fui les
galères celui qui t'ait le poil aux forçats.
» BARBOTE , f. f. borbata , ( H:jh nat. Z
poiflbn qui fe trouve dans des rivières & des lacs
dont les eaux font tranquilles. Il a un barbillon au
bout de la mâchoire inférieure ; les dents font cour-
tes & menues; le corps gluant ce couvert de petites
écailles ; fa couleur cil mêlée de roux & de brun,
K.
74
BAR
avec des taches noires ondoyantes. Ce poiflbn a
deux nageoires près des oiiies ; deux au-deflbus ; &
au-delà de l'anus une autre nageoire qui s'étend juf-
qu'à la queue. Il a fur le dos une pareille nageoire
qui fe prolonge jufqu'à la queue ; & devant cette
nageoire , une autre plus petite. La barbote refiem-
ble beaucoup au lote ; cependant elle a le bec plus
mince , la queue plus menue & plus pointue , & le
ventre plus gros. Le foie de la barbote eft fort grand
à proportion du corps du poiflbn. Rondelet. Voye{
Poisson, (i)
Barbote , {Mat. med.) Mujlela offic. Schrod. J30.
Le foie , le ventricule, & l'arrête de ce poiflbn , font
d'ufage en Médecine. Le foie fufpendu dans un vaif-
feau de verre , tk expofé à un degré modéré de cha-
leur , fe convertit en une liqueur jaune tort falutaire ,
pour difliper les taies & éclaircir la vue. On recom-
mande fon ventricule dans les maladies de l'utérus ;
il chafle les vuidanges & appaife la colique ; fon
arrête pulvérifée , guérit l'épilepfie , félon Schroder.
(N)
BARBOTINE , f. f. ( Hift. nat. bot. & mat. Med. )
femen contra , femen fanclum , ou femen fanclonicum ,
eft une femence menue, amere , chaude & deflicca-
tive , propre à faire mourir les vers qui s'engendrent
dans le corps humain , fur-tout dans celui des petits
enfans. Voye^ Ver.
Cette femence eft menue , brune , oblongue ,
amere , & d'une odeur forte & defagréable. Il faut
la choifir récente , verdâtre , d'un goût amer , aro-
matique & defagréable. Elle croît dans la Perfe , fur
les frontières de la Mofcovie. On nous l'apporte d'A-
lep , &c.
Les Naturalises ne font point d'accord fur la plante
qui produit cette femence , fur laquelle J. Bauhin a
donné une longue diflertation. Quelques auteurs
veulent que le femen contra foit la graine d'une efpe-
ce d'abfinthe appellée fantonicum ou marinum ab-
jinthium : d'autres difent qu'elle eft la graine de la
tanéfie ; d'autres enfin , celle de l'auronne.
Voici ce qu'en dit M. Tavernier, dans le fécond
tome de fes Voyages. « Pour ce qui eft de la femen-
» cine, ou poudre à vers , on ne peut pas la recueil-
» lir comme on fait les autres graines. C'eft une her-
» be qui croît dans les prés , & qu'il faut laifler mù-
» rir ; & le mal eft, que lorfqu'elle approche de fa
» maturité , le vent en fait tomber une grande partie
» entre les herbes , où elle fe perd : c'eft ce qui la
» rend chère.
» Comme on n'ofe la toucher de la main , parce
» qu'elle en feroit plutôt gâtée , & que même quand
» on en fait ufage , on la prend dans une écuelle ;
» lorfqu'on veut recueillir ce qui eftrefté dans l'épi ,
» on a recours à cet expédient. On a deux paniers à
>> ance ; & en marchant dans les prés , on fait aller
» un des paniers de la droite à la gauche , & l'autre
» de la gauche à la droite , comme fi l'on fauchoit
» l'herbe , & toute la graine tombe ainfi dans ces pa-
» niers ». V. Semen contra & Vermifuge. (V)
* BARBOUDE , (%.) île de l'Amérique , l'une
des Antilles , au nord d'Antigoa.
BARBOUILLER, v. ad. & neut. Quand il eft
actif , il eft fynonyme kfalirj quand il eft neutre ,
il eft fynonyme à mal parler, mal peindre , mal écrire.
Barbouiller , terme d'Imprimeur. Lorfqu'une
feuille imprimée eft atteinte de noir dans les mar-
ges , ce qui ne peut arriver que par l'inattention &
la mal-propreté de l'ouvrier de la preffe , on dit que
cet ouvrier barbouille , & que la feuille eft barbouillée.
Barbouiller , en Peinture, fe prend toujours en
mauvaife part : barbouiller un tableau ; il a barbouillé
ce tableau , &c. à moins qu'on ne parle d'un homme
dont le métier eft de barbouiller une porte , des mu-
railles , des treillages , &c, en ce cas on dit , un bar-
BAR
bouilleur. Barbouiller un jeu de paume , un plancher ,'
une menuiferie , &c. J'ai fait barbouiller ma maifon
depuis le haut jufqu'en bas.
BARBUE , f. f. rhombus lavis , ( Hifi. nat. Zoolog. )
poifTon de mer très-reflemblant au turbot , tant à l'in-
térieur qu'à l'extérieur , à l'exception des aiguillons.
La barbue n'en a aucun ni en-delius , ni en-deflbus :
elle eft plus large & plus mince que le turbot. Ronde-
let la nomme turbot fans piquans. Foye\ Tur.bot ,
Poisson. (/)
B ARBURES , f. f. fe dit , en grande Fonderie , de
toutes ces inégalités qu'on apperçoit fur une pièce
fondue au fortir de la foffe ou du moule , & qu'il faut
reparer au cifeau. Voye^ Grande fonderie &
Balevre.
BARBUS, adj. pris fubft. {Hifi. eccléf. ) c'eft ainfi
qu'on nommoit les frères convers de l'ordre deGram-
mont, parce qu'ils portoient la barbe grande. Com-
me ils avoient le maniement des biens temporels, ils
vouloient aufli ufurper le gouvernement de l'ordre ,
& réduire les prêtres fous leur obéiffance : mais ils
perdirent leur caufe. Mezeray , au règne de Philippe-
Augufie. { G )
* BARBUSINSKOI , ( Géog. ) ville d'Afie dans
l'empire Ruffien , fur le bord oriental du lac Bailcal ,
à l'endroit où la rivière de Barbuligga fe jette dans
le lac.
* BARBY , ( Géog. ) ville d'Allemagne dans la
haute Saxe , capitale du comté de fon nom fur l'Elbe.
* BARBYTHACE ou BARBYTACE, ( Géog. )
ancienne ville du royaume de Perle , dont Pline dit
que les habitans travailloient à amaifer de l'or pour
l'enfouir , non par avarice , mais par mépris , ôf dans
le deflein de priver les hommes d'un métal fi dange-
reux.
* BARCA , {Géog. ) grande contrée d'Afrique , à
l'orient du royaume de Tripoli.
B ARC ADE de chevaux , f. f. {Manège.') fe dit d'une
troupe de chevaux qu'on a achetés , & auxquels on
veut faire pafler la mer. ( V)
♦BARCELONE, ( Géog.) ville d'Efpagne , ca-
pitale de la Catalogne , fur la Méditerranée. Long,
iç). ôo. lat. 41. z6.
Barcelone , ( Géog. ) petite ville de France en
Guienne dans l'Armagnac.
* BARCELONETTE , ( Géog. ) petite ville de
France dans le Dauphiné , capitale de la vallée de
fon nom. Long. 24. Z3- lat. 44. 26.
* BARCELOR , ( Géog. ) ville d'Afie dans les In-
des , fur la côte de Malabar, entre Goa & Manga-
lor. Long. cj2. lat. 13. 4$.
* BARCELOS , ( Géog. ) ville de Portugal , avec
titre de duché , dans la province d'entre Douro &
Mino, fur la Sourille. Long, 9. 20. lat. 41.20.
* BARCENA , ( Géog. anc. & mod. ) lac de l'A-
byflinie en Afrique , au royaume d'Amara , fur les
confins du Zanguebar , fous la Ligne. On croit que
c'eft le Caloë de Ptolomée.
* BARCKSHIRE, ( Géog. ) province d'Angle-
terre au midi d'Oxford : Reading en eft la capitale.
* BARD , ( Géog. ) ville d'Allemagne dans la Po-
méranie citérieure , & dans la feigneurie de même
nom, avec château & port fur la mer Baltique.
B ARDANE,f. f.lappa, {Hifi.nat. bot.)genre déplan-
te dont la fleur eft à fleurons découpés , portés chacun
fur un embryon , & foùtenus par le calice. Ce calice
eft compofé de plufieurs écailles terminées chacune
par un crochet , qui attache ordinairement les têtes
de cette plante aux vêtemens. Lorfque la fleur eft
paflee , ces embryons deviennent des lemences gar-
nies d'aigrettes fort courtes.Tournefort , Infi. reiherb.
Voyei Plante. ( /)
* Bardane (la) ,perfonata lappa major, { Mat.
med. ) a la feuille amere ; le papier bleu n'en eft pas
BAR
feint. Son pédicule eft douçâtre ; fa racine a d'abord ie
même goût : mais enfuite on y découvre celui d'arti-
chaut. Elle rougit un peu le papier bleu ; ce qui fait con-
jecturer que le fel ammoniac y eft un peu plus dévelop-
pé quedans la feuille. On tire de cette plante par l'ana-
îyfe , du fel volatil concret ; & l'on peut penfer que
ion fel approche de l'ammoniac , & qu'il eft nittreux ,
puifqu'il y a détonation quand on brûle la feuille.
La bardant eft diurétique, fudorifique , pectorale ,
hyftérique , vulnéraire , fébrifuge. Sa racine & fa
feuille font falutaires dans la pleuréfie. On en fait
prendre l'eau à grands verres , après avoir fait pren-
dre les germes d'une douzaine d'œufs frais , délayés
dans un demi-verre de la même eau. Sa déco&ion
purifie le fang , & foulage ceux qui ont des maux
vénériens. Il faut la préférer dans la petite vérole ,
à la tifane de feorzonere.
Les Auteurs lui attribuent beaucoup d'autres pro-
priétés. Voye^Chifloire des Plantes des env. de Paris.
* BARDARIOTES , f. m. pi. ( Hift. anc. ) foldats
de la garde de l'empereur de Conftantinople. Ils
étoient vêtus de rouge , couverts d'un bonnet à la
Perfanne , appelle augurot , & bordé de drap couleur
de citron , & armés de bâtons & de baguettes , pour
éloigner le peuple du paflage de l'empereur. Ils veil-
loient aux portes du palais. Ils étoient Perfans d'o-
rigine. Ils avoient pris le nom de bardariotes , du fleu-
ve Bardarius , fur lequel un des empereurs , qu'on ne
nomme pas , les avoit tranfportés. Nicétas leur
donne les noms de bardouques & de manclavites. Leur
pofte à l'armée étoit au feptentrion de la tente impé-
riale , où ils faifoient la garde. Ils obéiffoient aupri-
micerius , ou comité de la cour. Macri penfe que les
bardariotes font les mêmes que les barbutes.
BARDE, f. f. ( Hifl.mod. ) c'eft, en vieux langa-
ge , l'armure des chevaux des anciens chevaliers &
foldats qui étoient équipés de tout point ; elle étoit
de fer ou de cuir , & couvroit le cou , le poitrail &
les épaules du cheval ; c'eft ce qu'on appelloit equi
cataphracli. ( G )
Barde ou Panneau (Manège & Sellier. ) longue
fellequi n'a ni fer, ni bois , ni arçons, èk qui eft faite
de grofTe toile piquée & bourrée. Grifon & plufieurs
autres auteurs Italiens , veulent qu'on fe ferve au ma-
nège d'une bardelle pour les poulains , & d'un cave-
çon à mettre fous leur nez ; c'eft une invention qui
ne fert qu'à perdre le tems ; on appelle en Italie
ceux qui trottent les poulains en bardelle , cavalcadours
O\\fco7^oni. (V)
* Barde ( île de ) Géog. île d'Alie , fur la côte
de Malabar , au nord & à peu de diftance de Goa.
Bardé , adj. terme de Blafon , il fe dit d'un cheval
caparaçonné.
Riperda, au pays de Groningue , de fable au cava-
lier d'or, le cheval bardé & caparaçonné d'argent.
* BARDEAU, f. m. (Couvreurs.) ces ouvriers ap-
pellent ainii de petits morceaux de mairin débité en
lattes de dix à douze pouces de long fur fix à fept de
.large ; dont ils ie fervent pour couvrir des bàtimens
peu confiderables. Si ces lattes font faites de douves
de vieilles futailles , on les appelle aufll des bardeaux.
* BARDENOCHE, f. f. ( Commerce. ) étoffe dont
il eft lait mention dans le tarif de la douanne de Lion ,
qui ie fabrique dans le royaume , mais qu'on ne
connoît point à Paris.
BARDER , verb. acl. c'eft, parmi les cuifiniers,
couvrir une pièce de viande d'une bande de lard cou-
pée fort mince , pour ralentir l'aôion du feu fur cette
pièce , qui fe lécherait trop fans cette précaution ,
ou même brûleroit , Cv pour en relever le goût.
Barder , c'eft , en Architecture , l'aftion de charger
une pierre fur un chariot , fur un bar( Voy»\ Bar &
Tome II.
BAR
75
Chariot ) pom la mener du chantier au pié du tas.
in
Barder un cheval ( Manège. ) c'eft lui mettre une
barde. Foye^B arde. Dans les carroufels , on voit des
chevaux bardés & caparaçonnés. K Carrousels.
(O
BARDES, f. m. pi. ( Hifl. anc. ) miniftres de la
religion chez les anciens Gaulois, qui habitoient dans
l'Auvergne & dans la Bourgogne , où ils avoient un
collège. Leur profeflion étoit d écrire en vers les ac-
tions immortelles des héros de leur nation, & de les
chanter au fon d'un infiniment qui refiembloit affez
à la lyre. Voici comme en parle Lucain :
Vos quoque qui fortes animas , belloqite peremptas
Laudibus in longum vates dimittitis œvum ,
P lurima fecuri fudillis carmina Bardi.
Les Bardes &c les Druides différaient en ce que
ceux-ci étoient les prêtres & les docteurs de la na-
tion , & que les Bardes n'étoient que poètes ou chan-
tres. Cependant l'autorité de ceux-ci , quoiqu'infe-
rieurc à celle des Druides, étoit fi refpectée des peu-
ples , qu'on racpnte qu'ils avoient fait quitter les ar-
mes à des partis prêts à fe charger. Larrey , Pafquier
& Bodin leur donnent le titre de prêtres & de phi-
lofophes ; & Olivier y ajoute celui d'orateurs , mais
fans fondement. Strabon , plus voifin du tems auquel
ont vécu les Bardes , compte trois fecres parmi les
Gaulois; les Druides, les Bardes, & les Evates. Les
Bardes , ajoûte-t-il , font chantres 6c poètes ; les Eva-
tes , prêtres & philofophes ; & les Druides , à la phi-
lofophie naturelle , c'eft-à-dire la Phyfique , ajoutent
la icience des mœurs. Mais Hormius réduit ces fec-
tes à deux claffes , les Bardes &c les Druides ; d'au-
tres n'en font qu'un corps, fous le nom générique de
Druides. Olivier , fondé fur ce que Tacite traitant
des mœurs des anciens Germains , fait mention de
leurs chants & de leurs poèmes hiftoriques , veut que
ces peuples ayent eu aufti des poètes nommés Bardes.
Bochart fait dériver ce nom de parât , chanter.
Camden convient avec Feftus que Barde fignitîe un
chantre , en Celtique Bard : d'autres tirent ce nom
de Bardus , ancien Druide , fils de Drys , le cinquiè-
me roi des Celtes. (G)
BARDESANISTES , f. m. pi. (Hifl. ecclêf. ) nom
d'une fe£te d'hérétiques , ainfi appelles de Bardefanes
Syrien , qui vivoit dans le fécond fiecle & demeurait
à Edefle , ville de Méfopotamie. Si l'on en croit faint
Epiphane , Bardefanes fut d'abord catholique , & fe
diftingua autant par fon favoir , que par fa piété ,
ayant écrit contre Marcion & d'autres hérétiques.
Eufebe , au contraire , en parle comme d'un homme
qui a toujours été dans l'erreur. Il fut d'abord enga-
gé dans celles de Valentin , en reconnut une partie ,
en retint une autre , & y en ajouta de nouvelles
de fon propre fonds. Quoiqu'il admît l'ancien &
le nouveau Teftament , il adoptoit auffi quelque
livres apocryphes; & dans un de fes écrits intitu-
lé du Deflin , il foûtenoit que les actions des hom-
mes étoient néceffitées , & que Dieu lui-même étoit
fujet au deftin. Il imagina aufti plufieurs générations
d'Eons, voye^EoN , & nia la réfurreefion des morta.
Ses feftateurs allèrent plus loin , & nièrent l'incarna-
tion & la mort de Jefus-Chrift , prétendant que c'e-
toit feulement un corps phantaftique qui éroit ne de
la vierge Marie , & que les Juifs avoient crucifié ,
par où ils retomboient dans l'heréfie de Marcion , que
leur maître même avoit combattue. Strumziiib a écrit
l'hiftoire des Bardcjanifles. (G)
BARDEUR , f. m. pi. terme de bâtiment, on nom-
me ainfi les ouvriers qui chargent les pierres far v.n
chariot , ou qui les portent , fur une civière ou fat un
bar , du chantier au pié du tas. / <m rç Bar. ( P)
* B ARDEVICK ( Géog. ) ancienne& grande vii-
Kii
76
BAR
le d'Allemagne , dans la baffe Saxe , maintenant
bourg , for la rivière d'Ilmeneau.
Il y a auffi un bourg de ce nom dans le comté de
Hollande.
BARDIS f. m. c' eu , en Marine , un batardeau
fait de planches fur le haut du bord d'un vaiffeau ,
pour empêcher l'eau d'entrer fur le pont lorfqu'on
couche ce vaiffeau fur le côté pour le radouber.
Bardis , ce font encore des féparations de plan-
ches , qu'on fait à fond de cale , pour charger des
blés & d'autres grains ; les unes fe font en travers ,
les autres en long. (Z )
* BARDIT ( Hijl. anc.) c'eft ainfi que le chant des
anciens Germains eft appelle dans les auteurs Latins
qui ont écrit de ces peuples. Les Germains n'ayant
encore ni annales ni hiftoires , débitoient toutes leurs
rêveries en vers : entre ces vers , il y en avoit dont
le chant s'appelloit bardit , par lequel ils s'encoura-
geoient au combat , & dont ils tiroient des augures ,
ainfi que de la manière dont il s'accordoit à celui de
leurs voix.
* BARDOCUCULLUS ou BARDAICUS CU-
CULLUS , félon Cafaubon ( Hijl. anc. ) partie du vê-
tement des Gaulois de Langres & de Saintes ; c'étoit
une efpece de cape qui avoit un capuchon commo-
de pour ceux qui ne vouîoient pas être connus dans
les rues. Martial lui donne la forme d'un cornet d'é-
pices. Il y en a , dit le lavant Père Montfaucon , qui
croyent , & non fans fondement , que ce capuchon
avoit une appendice, & qu'il tenoit à une cape ou à
la penula. Quoi qu'il en foit , on convient que le cu-
cullus étoit la même chofe que le bardocucullus ; que
cet ajuftement venoit des Gaulois ; qu'on s'en fervoit
particulièrement dans la Saintonge , & que la débau-
che en fît paffer l'ulage à Rome où on le trouva très-
propre pour courir la nuit, ôc incognito, des avan-
tures amoureufes :
Si noclurnus adulter,
Tempora fantonico vêlas adoperta cucullo,
Satyr. vin.
Je ne fai s'il refte encore en Saintonge quelque
veflige de l'ufage du cucullus &c de la cape : mais les
femmes du peuple portent encore aujourd'hui à Lan-
gres , une efpece de cape qui leur eft particulière ,
& dont elles n'ignorent pas l'avantage.
BARDOT ( Maréch. & Manège. ) on appelle ainfi
un petit mulet. ( f)
* B A R D T ( Gèog. ) ville d'Allemagne , dans le
duché de Poméranie , proche la mer Baltique. Long.
3». lat. 64. Z3-
* BAREITH ( Gèog. ) petite ville d'Allemagne , en
Franconie , dans le margraviat de Culmbach. Long.
Z<). 20. lat. 50.
* BARENTON ( Gèog. ) petite ville de France ,
dans la baffe Normandie , au diocefe d'Avranches ,
vers la fource de l'Ardée.
* BARFLEUR ( Gèog. ) ville de France , en Nor-
mandie, dans le Cotentin. Long, l6.z3-3a.lat.4g.
40. IJ.
* BAPJFOULS , f. m. pi. ( Commerce. ) étoffe qui fe
fait à Cantor , qui fert de vêtemens aux Nègres , &
qu'ils échangent avec les Européens , contre du fer.
* BARGA ( Gèog. ) petite ville de Tofcane , en
Italie , fur la rivière de Scorchio , dans le Florentin.
BARGE, oifeau. Foye^ Petit Corlieu.
BARGE , f. f. pi ( Manne. ) anciennement on fe
fervoit de ce mot pour dire une barque ou efquif: à
Londres , on dit encore la barge du maire.
* BARGELACH , f. m. ( Hijl. nu. Ornith. ) oifeau
de Tartarie , qui habite les lieux deferts , où il eft la
proie des faucons ; il a la groffeur de la perdrix ; la
forme de queue de l'hùondelle , oc les pies du pape-
guai , avec le vol très-rapide : aflemblage de carac-
BAR
teres qui , pouvant convenir à un grand nombre d'oj.
féaux , délignent allez mal le bargelach.
» BARGEMONT ( Gèog. ) ville de France , au
diocefe de Fréjus.
* BARGENY ( Gèog. ) ville de l'Ecoffe méridio-
nale , capitale de la province de Carriek. Long. iz.
38. lat. 55. 40.
*BARGUA DE REGOA (Gèog. anc. &mod.) ville
desCallaïcmesBracariens,appellée7tf/z/0£n^j;cen'e(l
plus qu'un petit village au quartier de Tra-las-mon-
tes , province de Portugal, à l'occident de Bragance.
BÂRGUETTE , f. f. pl.Jur les rivières , efpece de
bateau de quarante pies de long ou environ , qui fert
à paffer les chevaux , & à porter des cordages pour
la manœuvre de la rivière.
* B A R I ( Gèog. ) ville d'Italie , au royaume de
Naples , capitale de la terre de même nom. Long. 34.
3Z. lat. 41. Si.
*BARI(6Vog.)province d'Italie, au royaume de Na-
ples, bornée par le golfe de Venilè, la Capitanate , la
Baiilicate, &laterredeLecce. Barien eft la capitale.
* BARJAC (Gèog.~) petite ville de France , en Lan-
guedoc , diocefe d'Usés.
* BARIGA DE MORE , (. i. { Commerce. ) foie
que les Hollandois apportent des Indes orientales. Il
y a la fine & la commune ; elles viennent l'une ÔC
l'autre fur les vaiffeaux de la compagnie.
* BARJOLS ( Gèog. ) ville de France , en Proven-
ce. Long. 23. 50. lat. 43. 35.
* BARIQUICEMETO ( Gèog. ) contrée de la
Terre-ferme , dans l'Amérique méridionale & le mi-
di de la province de Venezuela , le long de la rivière
de Bariquicemeto , qu'on nomme auffi Baria , ou Rio
de S. Pietro , qui fe jette dans l'Orenoque.
* BARIS ( Gèog. ) ancienne ville de Pamphilie ,'
dans la Pifidie , contrée de l'Afie mineure , aux envi-
rons du mont Taurus.
* BARKAN ( Gèog. ) ville de Hongrie , proche le
pont de Gran.
* BARKLEY ( Gèog. ) ville d'Angleterre , dans la
province de Glocefter , fur la Saverne. Long. i5. IZ.
lat. 51.43.
* BARLEMONT ( Gèog. ) ville de Hainault dans
les Pays-bas , fur la Sambre , proche Mons.
* BARLENGA ( Gèog. anc. & mod. ) petite île de
Portugal , vers la côte de l'Eftramadure , vis-à-vis
Santarin. Il y en a d'autres du même nom , entre les-
quelles eft Barlengote ; toutes s'appellent les îles de
Barknga. Barlenga étoit connu des anciens fous le
nom de Londobris & cYErythia.
* BARLETTE ( Gèog. ) ville d'Italie , au royau-
me de Naples , dans la terre de Bari , fur le golfe de
Venife. Long. 34. z. lat. 41. 30.
* BARLINS . f. m. c'eft dans les manufactures en
foie , le nom d'un nœud qu'on fait au commencement
& à la fin des pièces pour les tordre , nouer ou remet-
tre. Foyei Tordre & Remettre.
BARLONG , adj. ulité , en Architeclurc , pour Signi-
fier un plan, ou un corps dont la bafe a plus d'étendue
à la face qu'au côté : oblong eft le contraire. ( P)
•BARLOVENTO (les îles de) Gèog. partie
feptentrionale des Antilles ; on les appelle auffi in fuie
ad ventum , parce qu'elles font expofées au vent. On
compte entre ces îles , Anguila , feint Martin , faint
Barîhelemi , faint Euftache , faint Chriftophle , Nie-
ves ou l'iie des Neiges , la Barbade , Antigoa , Mont-
ferrat , la Guadeloupe , la Deiîrade , la Marigr.lante,
la Dominique , la Martinique , fainte Lucie , faint
Vincent , la Barboude , Bequia , Grenadille , Grena-
de , ôc Tabago.
BARNABÏTES , f. m. pi. ( Hifl. eccl. ) congréga-
tion de clercs réguliers ainii nommés de l églile de
S. Barnabe à Milan , où ils firent leurs premiers exer-
cice». Ils reconnoiflent pour inftituteurs Jacques An-
BAR
toine Morigia , Barthelemi Ferrera , & François Ma-
rie Zacharie de Crémone , gentilshommes Milanois,
<pii jetterent les premiers fondemens de leur ordre en
1533. Ils furent alors approuvés par Clément VII.
& par Paul III. en 1553. Quoiqu'ils fbient vulgaire-
ment connus fous le nom de Barnabites , leur vérita-
ble titre eft celui de Clercs réguliers de la congrégation
de S. Paul. Ils portentl'habit noir, àpeu prèsfembla-
ble à celui des Jéfuites. Cette congrégation a produit
beaucoup d'hommes distingués parleur favoir & leur
piété. Les catéchifmes, les miffions,&l'inftruction de
la jeunefle dans les feiences & les lettres , font leurs
emplois ordinaires. Ils ont plufieurs collèges enltalie,
en Savoie , & quelques-uns en France ; fur-tout ce-
lui de Montargis , fondé par la libéralité des ducs
d'Orléans. (G)
BARNACLE , BARNAQUE , voye^ Bernacle.
BARNACLES , ( terme de BlafonAnglois. ) Voyei
Broyé.
* BARNAGASSE, ( Géog. ) royaume d'Afrique
entre la haute Ethiopie , le Nil & la mer Rouge , le
long de la côte d'Abex ; Barra en eft la capitale.
* BARNEVELDT , ( Géog. ) île de l'Amérique
dans le détroit de Magellan , au midi de la terre de
Feu. Long. 340. lut. 56. 20.
Il y a une autre île de même nom proche du Ja-
pon,/^. 34. 10.
* BARNSTABLE , ( Géog. ) ville d'Angleterre
dans le Devonshire,fur la rivière de Taw , avec port.
Long. 13.42. lat. 5i. 10.
* BAROCHE, ( Géog. ) ville d'Afrique dans les
états du Mogol , au royaume de Gufarate , fur la ri-
vière deNerdaba. Lat. zi. 53.
BarochÉ , adj. terme de Peinture dont on fe fert
pour exprimer que le pinceau n'a pas tracé nette-
ment un contour , & qu'il a éclaboufTé de la couleur
fur le fond ; on dit : vous barocke^ toujours vos con-
tours. Foyei Rechampir. (/?)
* B AROCO , ( Log. ) terme qui défigne le quatriè-
me mode d'argument de la féconde figure. Unfyllo-
gifme en baroco a la majeure univerfelle affirmative ,
6c la mineure &laconclufion particulières négatives.
Voye{ Syllogisme.
BAROMETRE, f. m. (Phyf. ) Le baromètre eft un
inftrument qui fert àmefurer la pefanteur de l'atmof-
phere &c les variations , & qui marque les change-
mens dutems. ^oye^ Atmosphère & Tems.
Ce mot elt compofé de Capot , poids , 6c de /utTpov ,
mefure. On confond ordinairement , quoique mal-à-
propos , le baromètre avec le barofeope : celui-ci ce-
pendant ne fait , fuivant la fignification du mot , que
marquer les altérations du poids de l'atmofphere : le
baromètre non-feulement marque ces altérations ,
mais encore les mefure. Voye^ Baroscope.
Le baromètre & les ufages font fondés fur l'expé-
rience de Toricelli , ainfi nommée de Toricelli ion
inventeur. On prend un tuyau de verre rempli de
mercure , dont un côté elt fermé hermétiquement ,
& dont l'autre bout qui elt ouvert elt plongé dans
une cuvette remplie de mercure : quand le poids de
l'atmofphere diminue , la furface du mercure qui fe
trouve vers le bout inférieur, 6c lur laquelle l'air
preffe,fe trouve moins comprimée: ainli le mercure
qui elt dans le tuyau defeend ; & au contraire fi le
poids de l'air augmente , le mercure monte ; car la
colonne de mercure fufpcndue dans le tuyau elt tou-
jours égale en pefanteur au poids de L'atmofphere qui
pelé deiïïis, comme il elt démontré à l'article Tori-
celli.
Dans cette explication nous fuppofons que la
preffionde l'air vienne uniquement de ion poids, qui
comprime les parties fupérieures fur les intérieures.
Cependant il eft certain que plufieurs cauies con-
courent à altérer la preiîion de l'air : en général lu
BAR
77
caufe immédiate de la preffion d'un fluide élaitique
tel que l'air , c'eft la vertu élaitique de ce fluide , &
non fon poids. On ne doit donc attribuer la fufpen-
iîon du mercure dans le baromètre au poids de l'air ,
qu'autant que ce poids eft la caufe principale de la
preffion de l'air. En effet le mercure du baromètre fe
lbûtient auflî bien dans une chambre exactement fer-
mée qu'en plein air; parce que l'air de cette cham-
bre, quoiqu'il ne porte pas le poids de l'atmofphe-
re , eit comprimé de la même manière que s'il le por-
toit. Si l'air demeure de même poids, 6c que la com-
preffion de fes parties vienne à augmenter ou à di-
minuer par quelque caufe accidentelle , alors le mer-
cure deicendra ou montera dans le baromètre , quoi-
que le poids de l'air ne foit pas augmenté. Traité
des fluides , Paris 1J44. p. 61.
Il y a différentes efpeces de baromètre, dont nous
allons détailler ici les principales.
Baromètre commun. La conftru&ion du baromètre
commun eft telle. On remplit de mercure un tuyau de
verre , fermé hermétiquement: par fa partie iupé-
rieure , ayant fon diamètre d'environ ~ de pouce ,
& fa longueur au moins de 3 £ ; on remplit ce tuyau
de manière qu'il ne refte point d'air mêle avec le
mercure , & qu'aucun autre corpu.fcule ne s'attache
aux parois du tuyau. Pour y réuiïir, on peut fe fer-
vir d'un entonnoir de verre terminé par un tuyau
capillaire , 6c remplir le tube par le moyen de cet
entonnoir.
On peut encore chafTer les bulles d'air par deux
autres méthodes: la plus ordinaire eft de remplir de
vif-argent tout le tube , à la réferve d'un pouce en-
viron qu'on laifle plein d'air; on bouche avec le
doigt l'orifice du tuyau , on lerenverfe , 6c en faifant
promener la bulle , on lui fait entraîner avec elle
toutes les petites bulles imperceptibles , après quoi
on achevé de remplir le tube. Muffch. ejf. de Pfryf.
L'autre méthode coniiite à faire chauffer un tube
prefque plein fur un braiier couvert de cendres ; on
le tourne continuellement ; & la chaleur raréfiant les
petites bulles d'air , les fait fortir par l'orifice.
Quand on a ainii rempli le tuyau jufqu'au bord,
on bouche exactement avec le doigt fon orifice , en
forte qu'il ne puiffe s'introduire d'air entre le doigt
6c le mercure ; enfuite on plonge le tuyau dans un
vaifîéau plein de mercure , de façon cependant que
le tuyau ne touche pas le fond du vafe : à la diftan-
ce de 28 pouces de la furface du mercure , font at-
tachées 2 bandes diviiées en 3 pouces , 6c ces pouces
font fubdivifés en un certain nombre de plus petites
parties; enfin on applique le tuyau fur une planche de
bois , pour empêcher qu'il ne fe brife : on laifle dé-
couvert le vaifleau où le tuyau eft plongé , ou fi l'on
veut on le couvre , afin qu'il n'y entre point de pouf-
fiere , & le baromètre eft achevé.
Au lieu de plonger lé tuyau dans un vaifleau , on
fe contente fouvent d'en recourber l'extrémité ,
de forte que le tuyau a deux branches verticales ,
dont l'une eft beaucoup plus petite que l'autre , & fe
termine par une efpece d'entonnoir fort large , qui fe
trouve rempli de mercure , fur la furface duquel l'at-
mofphere prefTe , 6c fait monter ou defeendre le mer-
cure du tuyau d'une manière d'autant plus fenfiWe ,
que la variation du poids de l'atmofphere eft plus
grande. C'eft le baromètre iimple ou ordinaire, f^oye^
Planche Pneumat. jig. 1 .
On a eflayé plufieurs fois s'il étoit pofTïble de ren-
dre les variations du baromètre plus fenfibles , afin de
pouvoir mefiirer la preffion de l'atmofphere avec
plus de jullefle ; ce qui a donné lieu a un grand nom-
bre de baromètres de différentes iti uctiu es , comme
le baromètre à roue , le baromètre diagonal , le baromè-
tre horifontal , &c.
Defeartes, 6c enfuite Huyghens, fe font t'en is d'un
78
BAR
tube AB,(fig. 2.) fermé enA,&c ayant «ne por-
tion CD plus groffe que le refte : la moitié de la par-
tie C D , de même que la partie fupérieure du tube^,
eft remplie d'eau ; & l'autre moitié de CD , de mê-
me que la partie inférieure du tube , eft remplie de
mercure. Il eft vrai que dans cette forte de baromètre
la colonne fufpendue étant plus grande , rendoit la
variation plus lcnfible : mais l'air renfermé dans l'eau
s'évaporant par degrés , rempliflbit l'efpace vuide du
haut du tube , & rendoit par-là la machine défec-
tueufe. Huyghens imagina donc qu'il valoit mieux
placer dans le baromètre le mercure & l'eau , de
la manière fuivante : A D G (fig. J. ) eft un tuyau
recourbé fermé hermétiquement en A , & ouvert en
G; les vahTeaux cylindriques BC & FE , font
égaux , & diftans d'environ 29 pouces l'un de l'au-
tre ; le diamètre du tuyau eft d'environ une ligne ;
celle de chaque vaifTeau eft de 1 5 , & leur profon-
deur d'environ 10 : le tuyau eft rempli de mercure ,
qui eft fufpendu entre le vaiffeau FE & le vaiffeau
B C , l'efpace qui refte jufqu'à A étant vuide d'air &
de mercure : enfin on verfe de l'eau commune mêlée
avec une fixieme partie d'eau régale ( pour que l'eau
ne fe geîe pas) dans le tuyau EFG, de manière
qu'elle contrebalance en partie le mercure CD F. Or
quand le mercure s'élève le long du tuyau A D ,
au-deffus du niveau du mercure qui eft contenu en
F E , ce mercure en s'élevant fait équilibre avec
l'atmofphere ; fi la prefiion de l'atmofphere augmen-
te , la colonne de mercure s'augmentera , conléquem-
ment l'eau defcendra ; li l'atmofphere preffe moins ,
la colonne de mercure defcendra , & l'eau montera.
Par là ce baromètre indique beaucoup mieux les plus
petites variations de l'air , que le baromètre commun :
car au lieu de deux pouces , le fluide pourra varier
beaucoup davantage ; ce qui vient tant de la grof-
feur des cylindres par rapport aux tuyaux , que de
la pefanteur de l'eau , qui eft moindre que celle du
mercure , & dont les variations doivent être par con-
féquent plus fenfibles; car 14 pouces d'eau équiva-
lent à un pouce de mercure. En élargiffant les diamè-
tres des cylindres , la variation fera encore plus fen-
fible. Il y a pourtant encore cet inconvénient , que
l'eau s'évaporera , & rendra les variations défec-
tueufes ; quoiqu'on puiffe en quelque façon prévenir
l'évaporation en mettant une goutte d'huile d'aman-
des douces fur la furface de l'eau.
Mais cette goutte d'huile produit un autre inconvé-
nient ; car elle s'attache aux parois du tuyau , & fait
par conféquent que l'eau après l'avoir traveriée , &
quelquefois s'être débordée , rend le tuyau opaque.
Le plus grand défaut furtout eft caufé par le froid &
le chaud , qui font que la liqueur du tuyau E F G eft
comme dans une boule , & un tuyau de thermomètre.
En effet , cette liqueur le raréfie par la chaleur , & fe
condenfe par le froid ; d'où ri arrive que la hauteur
de l'eau varie par la chaleur feule , & fait par confé-
quent varier le mercure ; de forte que les variations
de cette efpece de baromètre font prefqu'autant l'effet
de la chaleur que de la preffion de l'air.
On a tâché depuis peu de rendre ces baromètres
plus fimples , en iubftituant de l'eiprit-de-vin à l'eau ,
& des boules aux cylindres : mais l'efprit-de-vin eft
très-fujet à s'évaporer &c à fe dilater par la chaleur ;
& d'ailleurs le changement des cylindres en forme
de poires , empêche de faire des échelles juftes. Au
refte il eft viiîble que la marche de ce baromètre eft
contraire à celle du baromètre ordinaire ; tandis que
le mercure baiffe dans ce dernier , l'eau & l'efprit-
de-vin s'élèvent dans l'autre, & réciproquement.
Mujfck.
Ainfi les défauts auxquels ce baromètre peut être
fujet, ont obligé quelques autres à avoir recours au
baromètre horifontal ou rectangle AB CD (fig, 4.)
BAR
Ce baromètre eft formé de manière que la branche
B C foit verticale , & la branche CD horifontale.
Il eft joint par l'extrémité de fa branche perpendicu-
laire à un vaiffeau^ 5,& les variations fontmarquées
fur la branche horifontale CD : or l'intervalle ou l'ef-
pace de variation peut être aufîî étendu que l'on veut ;
car plus le tuyau B CD fera petit par rapport au vafe
A B, plus les variations du mercure dans le tuyau
A B, feront varier le mercure qui eft dans la partie
CD ; & par conféquent les plus petites variations
feront très- fenfibles. Le diamètre du tuyau CD étant
donné , il fera ailé de trouver le diamètre du vaiffeau
A B , tel que les parties de l'échelle horifontale dans
le tuyau DC, correfpondantes aux parties de l'é-
chelle du vaiffeau A B foient auffi grandes qu'on
voudra , & ayent entr'elles la même proportion que
les parties de l'échelle dans le vaiffeau A .S,puifque le
diamètre du vaiffeau eft à celui du tuyau en raifon
foû-doublée réciproque des parties de leurs échelles:
de même les diamètres de C D & A B étant.donnés ,
auffi bien que la hauteur du mercure dans le vaiffeau,
la hauteur du mercure dans le tuyau eft trouvée par
cette proportion ; comme le quarré du diamètre du
vaifTeau eft au quarré du diamètre du tuyau , ainfi
les parties de l'échelle du mercure dans le tuyau ,
font aux parties correfpondantes à l'échelle du mer-
cure dans le vaiffeau.
La conltruition de ce baromètre , de même que du
baromètre d'Huyghens , eft établie fur un théorème
d'Hydroftatique ; favoir , que les fluides qui ont la
même bafe , pefent en raifon de leur hauteur per-
pendiculaire , & non pas de la quantité de leur ma-
tière : ainfi la même pefanteur de l'atmolphere foû-
tient le vif-argent dont le tuyau A CD & le vafe AB
font remplis , comme elle auroit foûtenu le mercu-
re dans le feul tuyau ABC. Voye{ Hydrosta-
tique. Ce baromètre a auffi de grands défauts.
Car, en premier lieu, l'air s'introduit quelquefois
entre les particules du mercure dans le tuyau CD,
ck les écarte par conféquent les unes des autres lorf-
que le tuyau eft trop large. Pour remédier à cet in-
convénient, on ne donne qu'une ligne de diamètre,
ou même moins, la partie CD, on a foin que ce
petit tuyau foit neuf & bien net ., & on fe iert de
mercure qui foit bien purgé , à l'aide du feu , de tout
l'air qu'il contient: malgré tout cela, le mercure fe
falit avec le tems en-dedans par l'air qui y entre , ce
qui produit fort fouvent quelque féparation entre les
parties du mercure , lorfqu'il fe meut de D vers C, ou
du moins il s'en forme de petits globules , lefquels
s'arrêtent çà & là dans la partie antérieure du tuyau
qui fe trouve vuide.
Il fe préfente encore un autre inconvénient bien
plus conlidérable, qui vient du grand frottement du
mercure contre le verre , & qui empêche ce baromè-
tre d'être à beaucoup près auffi fenfible que le baro-
mètre ordinaire. En effet , d'habiles obfervateurs nous
affùrent avoir remarqué fouvent que fi le mercure
hauffe ou baiffe d'une demi-ligne ou d'une ligne en-
tière dans le baromètre ordinaire , il demeure encore à
fà même place dans le tuyau CD: mais fi la varia-
tion augmente dans le baromètre ordinaire , il fe fait
alors dans le tuyau CD un très-grand mouvement,
enforte que la marche de ce baromètre eft beaucoup
moins réglée que celle du baromètre ordinaire. Mujfck.
Ces raifons font que plufieursperlbnnes préfèrent
le baromètre diagonal , dans lequel l'efpace de varia-
tion eft beaucoup plus grand que dans le baromètre
commun , & duquel ils croyent les variations plus
régulières que celles des autres. Le Chevalier Mor-
land a imaginé pour cet effet un tuyau incliné B E C.
(7%. 3.) car il eft évident que le mercure s'élevant à
la même hauteur dans un baromètre droit , & dans un
baromètre recourbé , fes variations feront beaucoup
BAR
plus fenfibles dans le tuyau inciiné BEC, que fi ce
tuyau étoit vertical , & d'autant plus fenfibles , que
le tuyau fera plus incliné , puifque le mercure , pour
s'élever, par exemple, d'une ligne en hauteur per-
pendiculaire , aura trois ou quatre lignes ou même
davantage à parcourir dans la longueur du tuyau.
Cette invention eft pourtant fujette à plulieurs in-
convéniens ; caria furface du mercure dans le tuyau
B E, n'eft pas parallèle à l'horifon , mais elle eft con-
vexe & inclinée ; or cela pofé , il eft difficile de favoir
à quel point on doit fixer la hauteur du mercure. De
plus le coude qui eft en B , rend la furface du tuyau
fort raboteufe en cet endroit là , & les inégalités de
la furface produifant une réfiftance à l'abaiffement
ou à l'élévation du mercure , les variations de ce ba-
romètre ne font pas aufli promtes qu'elles le devroient
être. Ce dernier inconvénient eft d'autant plus grand,
que le tuyau BEC fait un plus grand coude en B ;
ainfi la fenfibilité , pour ainfi-dire , des variations de
ce baromètre eft alors compenfée par leur lenteur.
Mufck.
Baromètre à roue : c'eft une invention du docteur
Hook , qui rend les altérations de l'air plus fenfibles ;
il eft compofé d'un baromètre commun vertical , au-
quel on ajoute deux poids A &c B (fig.3.) pendus à
une poulie , dont l'un eft en liberté à l'air, & l'autre
reftant fur la furface du mercure dans le tuyau, s'é-
lève & s'abaifié avec lui. Le poids A communique
ion mouvement à la poulie , &: cette poulie a autour
de fon pivot une longue aiguille L K , qui montre fur
un grand cercle gradué MA O P , les variations de
la hauteur du mercure dans le baromètre. De plus , le
tuyau du baromètre eft furmonté d'un gros globe A B,
& la petite boule B , qui eft en liberté dans l'air, eft
à peu-près égale en pefanteur à la boule A. Comme
le globe A B a beaucoup de diamètre par rapport à
celui du tuyau, un abaifiement peu coniidérable du
mercure dans ce globe , peut faire monter le mercure
dans le tuyau FA, jufqu'à la hauteur de (fois pou-
ces. Supputons maintenant que toute la circoriféren-
ce de la poulie F D foit de trois pouces , elle fera
donc un tour lorfquc le mercure montera ou s'abaif-
fera de trois pouces, de forte que l'aiguille L K fera
alors un tour aufïi ; & fi le diamètre du cercle M N
O P eft d'un pié , le mercure ne pourra s'abaifler ou
s'élever de trois pouces, que l'aiguille ne parcoure
environ trois pies. Ce baromètre montre aflez bien les
variations confidérables de la hauteur du mercure :
mais auffi-tôtque le mercure vient à baifierou à mon-
ter dans le tuyau A F , & qu'il ne fait par conféquent
que commencer à devenir un peu convexe ou un
peu concave , la petite boule A n'a pas allez de mou-
vement pour faire tourner un peu la poulie SE),
parce que cette poulie eft fujette à quelque frotte-
ment fur fon axe : ce qui empêche d'appercevoir les
variations peu confidérables de la hauteur du mer-
cure : mais lorfque la poulie commence à fe mou-
voir , fon mouvement eft plus grand qu'il ne devroit
être alors. Voilà fans doute un inconvénient auquel
on ne peut remédier qu'avec beaucoup de peine. Ce
baromètre eft encore iujet à d'autres inconvéniens
qu'on a eu foin de marquer dans les Tranfaclions Phi-
losophiques , n. i85. p. 241. aufîï n'en fait-on aucun
ufage. Mufi'ch.
Baromètre conique : c'eft une machine plutôt cu-
rieufe qu'utile. Elle confifte en un tuyau conique ver-
ticalement placé , dont l'extrémité fupérieure , &
qui eft la plus petite , eft fermée hermétiquement.
Ce baromètre n'a point de vaifl'eau ou de badin, fa
figure conique y fuppléant, pourvu que l'extrémité
inférieure de ce tuyau ait un diamètre fort petit : car
alors le mercure fe foùtient de lui-même dans ce
tuyau,étant foùtenu par les particules de l'air,comme
par un pifton iblide ou un fond. Quand ce tuyau eft
BAR
79
rempli , fi le mercure s'y foùtient , fon poids eft équi-
valent au poids de l'atmofphere ; & fi l'atmofphere
varie , le mercure montera ou defeendra. Ainfi quand
le poids de l'atmofphere s'augmente , le mercure eft
chaflé dans la partie du tuyau la plus étroite; & par
ce moyen la colonne eft étendue , & fon poids eft
augmenté. Au contraire, quand l'atmofphere dé-
croît , le mercure s'abaifle dans la partie la plus large
du tuyau ; & par ce moyen fa colonne eft plus cour-
te , tk fa preflion conféquemment eft affaiblie.
Pour rendre ceci plus intelligible , fuppofons que
ce baromètre foit repréfenté par le tuyau A B (fi g. 6\)
qui eft conique , & que ce tuyau étant renverfé , fe
trouve rempli de trente pouces de mercure depuis A
jufqu'à C ; &c comme la variation du mercure dans le
baromètre eft de trente à vingt-fept pouces , fuppo-
fons que la même quantité de mercure A C dans la
partie inférieure du tuyau D B, ait la hauteur D B
de vingt-fept pouces ; alors il eft certain que , lorf-
que le mercure fe trouvera dans le baromètre ordi-
naire à la hauteur de trente pouces , le mercure dans
le tuyau A B occupera l'efpace A C; & quand le
mercure fera dans le baromètre à vingt-fept pouces ,
le mercure du tuyau occupera l'efpace D B ; ainfi la
variation du mercure dans le baromètre fera depuis A
jufqu'à D , qui eft un efpace de près de trente pou-
ces, pendant que cette variation ne fera que de tiois
pouces dans le baromètre ordinaire. Ce baromètre eft
de l'invention de M. Amontons. Mujfch.
L'inconvénient de ce baromètre eft que pour em-
pêcher le mercure & l'air de changer déplace, &de
fe mêler enlemble , il faut que le diamètre intérieur
du tuyau foit très -petit; & cette petitefle rend le
frottement de la liqueur fi fenfible , qu'elle peut l'em-
pêcher d'agir librement ; ainfi cet infiniment n'eft
guère bon que pour les Marins qui n'y regardent pas
de fi près , & qui s'en fervent depuis trente-cinq ans ,
parce qu'il eft fort commode. En effet , il fuffit de le
renverier lorfqu'on le veut garder ; &c quand on veut
connoître le poids de l'air , il fuffit de prendre le
tuyau à la main , & de le tenir dans une fituation ver-
ticale. Pour empêcher que le mercure n'en forte par
en-bas , comme il pourroit arriver dans les mouve-
mens violens du vaifieau , on met au-deflbus du
tuyau , proche de B , un peu de coton à travers le-
quel l'air parle librement ; 6c s'il arrive alors par
quelque accident qu'il tombe un peu de mercure de
la colonne A D , il fuffit de retourner le tuyau ; & ce
qui eft tombé fe rejoint d'abord à la colonne. Il y a
encore un autre baromètre à l'ulage des Marins. Ce
baromètre qui a été aufli inventé par le docteur Hook,
pour pouvoir fervir fur mer , 011 le roulis du vaifieau
rendroit les autres impraticables , n'eft autre chofe
qu'un thermomètre double , ou deux Uibes à demi rem-
plis d'ei prit-de-vin , dont l'un eft fermé hermétique-
ment par les deux bouts , & renferme une certaine
quantité d'air; & l'autre eft fermé par un bout, 6c
ouvert par l'autre. Or l'air, comme l'on fait , agit fur
l'efprit-de-vin , & le fait monter par deux raifons ; par
fa propre gravité, comme dans le tube deTorricel-
li ; 6c par la chaleur, comme dans le thermomètre. Si
donc les deux tubes font divilés par degrés , enforte
qu'ils s'accordent l'un avec l'autre au teins où l'air y
eft renfermé , il s'enfuit que lorfqu'ils s'accorderont
encore enfuite , la preflion de l'atmofphere fera la
même que dans le tems que l'air a été renfermé. *>i
dans le thermomètre qui eft ouvert à l'air, la liqueur
eft plus haute, en confidérant en même teins com-
bien l'autre s'élève ou s'abaifle par l'opération de la
chaleur ou du froid, on verra que l'air eft plus pe-
lant: au contraire, quand le thermomètre ouvert eft
plus bas en comparailon de l'autre, l'air eft plus lé-
ger que dans le tems que l'inftriiment a été divifé par
de-res. Mais U faut fe reflbuvcnir que la condenfa-
So
BAR
tion & la raréfaftion de l'air , fur quoi toute cette
machine eft établie , ne dépendent pas feulement du
poids de Patmofphere , mais qu'elles font auffi eau-
fées par l'aûion de la chaleur & du froid. C'eft pour-
quoi cette machine ne peut pas être nommée un baro-
mètre, mais plutôt un infiniment qui indique les al-
térations de l'air. Voyei Manomètre.
Cependant cet infiniment eft regardé comme étant
fort bon pour faire connoître fi le tems doit être
mauvais , de même que les changemens de vents ,
&C l'approche du froid. Tra/ifacl. phïlof. n°. 42g , p.
Z33-
Le baromètre Jlatique , dont fe font fervi Boyle ,
Otto de Guericke , &c. eft défectueux, tant par l'ac-
tion du chaud , que parce qu'il eft peu précis 8c peu
commode : il confifte en un affez grande bouteille de
verre, tenue en équilibre par un poids de cuivre ,
dans des baftins de balance fort légers : ces deux corps
étant d'égale pefanteur , mais d'inégal volume , fi le
milieu ou fluide dans lequel ils pefent également eft
changé , le changement de leur poids s'en fuivra ;
de forte que fi l'air devient plus pefant , le corps le
plus grand deviendra plus léger en apparence , par-
ce qu'il perdra plus de fon poids que le plus petit,
qui eft le plus denfe : mais fi le milieu eft plus léger ,
alors le corps le plus grand l'emportera fur le plus
petit.
Phénomènes du baromètre. Ces phénomènes
font différens , & les auteurs ne font pas plus d'ac-
cord fur leurs caufes , que fur l'ufage que l'on en
peut faire pour prédire les changemens de tems. Sur
le haut de la montagne de Snouden en Angleterre ,
qui a 1 240 toifes de hauteur , le dofteur Halley trou-
va le mercure de trois pouces huit dixièmes plus bas
qu'au pié ; d'où il paroît que le mercure baiffe d'un
■— de pouce par trente toifes. Derham a fait pareil-
lement des expériences de la hauteur du mercure
fur le haut &. au pié de cette montagne , &c croit
qu'il faut 3 2 toifes d'élévation perpendiculaire , pour
que le mercure baiffe du ^5 d'un pouce : d'où cet au-
teur a cru qu'on pouvoit tirer non-feulement la hau-
teur de l'atmofphere , mais aulîi une méthode pour
mefurer la hauteur des montagnes. Suivant cet au-
teur, fi le mercure ici bas eft à 30 pouces, à 1000
pies de hauteur , il fera à 28 -— pouces ; à 2000 pies ,
à 2.7 rf0> à 3000, 26 ^ ;à 4000, 25 ^; à 5000,
24 ^~ ; à un mille , 24 ^ ; à deux milles , 20 ^ ; à
cinq milles , 11 ^ ; à dix milles , 4 ^ ; à quinze
milles , 1 ^ ; à vingt milles , o ^ ; à trente milles ,
,-f^ ; à quarante milles , rz^- Mais on fuppofe dans ce
calcul que l'atmofphere eft par-tout d'une denfité à
peu près égale , & que fi on la divife en portions d'é-
gale hauteur , le poids de ces portions eft prefque le
même , ce qui eft bien éloigné d'être vrai ; car l'at-
mofphere devient continuellement moins denfe à
mefure qu'on s'éloigne de la terre , & ainfi une mê-
me quantité d'air occupe toujours un volume de plus
en plus grand. C'eft pourquoi û on divife l'atmof-
phere en différentes couches toutes d'une hauteur
égale , ces couches peferont d'autant moins qu'elles
feront plus éloignées du centre de la terre. M. Ma-
riotte , dans Ion effai fur la nature de Pair , a donné
tin calcul de la hauteur de l'atmofphere , fondé fur
les obfervations du baromètre faites au fommet des
montagnes. Ce calcul eft fondé fur ce principe , que
l'air fe condenfe en raifon des poids dont il eft char-
gé ; l'auteur trouve 1 5 lieues environ pour la hau-
teur de l'atmofphere , qui eft auffi à peu près la quan-
tité que M. de la Hire trouve par la théorie des cré-
pufcules. M. Mariotte ajoute auffi à fon calcul un
effai de méthode pour déterminer par les mêmes
principes la hauteur des montagnes : mais on regar-
da aujourd'hui affez généralement toutes ces métho-
des , comme plus çurieufes que fûres & utiles. l'oye{
Atmosphère.
B A R
On a trouvé que la plus grande hauteur au tarfa
mètre à Londres , étoit à trente pouces | , & fon plus
grand abaiffement à 28 pouces ; à l'obfervatoire
de Paris , fa plus grande élévation eft de 28 pouces
-—, & fa moindre 26 ~ fur la mefure du pié de Pa-
ris , qui eft plus grand de jf^ que celui de Londres :
ces obfervations s'accordent à celles qui ont été fai-
tes par M. Wolf à Hall en Saxe. A Alger le mercure
s'élève à 30 pouces -^ ou tV Par ^c vent de nord,
quoique ce vent foit iouvent accompagné de pluie
6c d'orage. Il eft vrai qu'il y a une expérience dans-
laquelle la hauteur du mercure furpaffe de beaucoup
ces nombres ; le mercure étant parfaitement purifié &
fufpendu dans un tube , à la manière de Torricelli,
monte à la hauteur de 75 pies , quoiqu'à la moindre,
fecouffe il baiffe à la hauteur ordinaire. Ce phéno-
mène n'a pas caufé peu d'embarras lorfqu'il a été.
queftion d'en découvrir la caule. Voici l'explica-
tion que M. Muffchenbroek en donne dans fes Ejjais
de Phyjique. Lorfqu'on a purgé le mercure de l'air
qu'il contient, il devient un corps beaucoup plus
denfe que lorfque l'air fe trouvoit placé entre fes
parties : ce mercure peut auffi alors s'attacher fort'
étroitement à la furface du verre ; ce qui fait que
fes particules y retient fùfpendues ; & comme ces
particules s'attirent très-fortement , elles foûtiennent
des particules voifines , &c le mercure demeure fuf-
pendu par ce moyen à une très-grande hauteur : mais
fi on fecoue le tuyau , alors les particules du mercu-
re qui étoient contiguës au verre en font détachées ,
& tout retombe. On peut voir dans l'ouvrage cité
l'explication plus détaillée de ce phénomène fingu-
lier , & la réfutation de toutes les autres hypothefes
qu'on a imaginées pour en rendre raifon.
M. Boyle remarque que les phénomènes du baro-
mètre font fi variables , qu'il eft extrêmement diffi-
cile de donner des règles générales de fon éléva-
tion , ou de fon abaiffement. Il iemble cependant que
ce foit une règle affez générale , que quand les vents
foufflent de bas en haut , le mercure eft le plus bas r
mais cela n'eftpas toujours vrai. L'illuftre M. Halley
nous a donné les obfervations fuivantes. Dans un
tems calme , quand il doit pleuvoir , le mercure eft
communément bas , & il s'élève quand le tems doit
être ferein. Quand il doit faire de grands vents ac-
compagnés de pluies , le mercure defeend plus ou.
moins bas , félon le vent qui fouffle. Toutes chofes.
égales , la grande élévation du mercure arrive quand
les vents foufflent de l'eft , ou du nord-eft. Apres que-
le vent a foufflé violemment , le mercure qui pendant
le tems que le vent fouffloit étoit fort bas , s'élève
avec rapidité. Dans un tems calme, pendant lequel
il gelé , le mercure fe tient haut. Dans les lieux
les plus expofés au nord , le mercure fouffre plus
de variation que dans les lieux expofés au midi : à
Naples il varie rarement de plus d'un pouce ; au-
lieu qu'à Upminfter il varie de 2 ~ pouces , & à
Petersbourg de 3 ^h, > Tranfact. Phil. n°. 434 , p.
401. Entre & proche les tropiques, le mercure ne
varie que peu ou point du tout.
Le doefeur Beal remarque , que toutes chofes éga-
les , le mercure eft plus haut dans l'hy ver que dans
l'été, & ordinairement le matin qu'à midi ; qu'il l'eft
encore dans un tems ferein un peu plus que devant
ou après , ou que quand il pleut ; &: qu'il defeend or-
dinairement plus bas après la pluie qu'auparavant :
s'il arrive qu'il s'élève après qu'il a plù , c'eft ordi-
nairement une indice, de beau tems. Il arrive cepen-
dant des changemens conlidérables dans l'air, fans
que le baromètre varie feniîblemeht.
Par rapport à l'ufage des baromètres , un habile
Phyficien remarque que par fon fecours, nous recou-
vrons la connoiffance qui eft dans les animaux , &c
que nous avons perdue , parce que nos corps ne font
point
BAR
point expofés à l'air comme les leurs : & parce que
nous nous livrons à l'intempérance , &c que nous cor-
rompons la fenfibilité de nos organes. Par rapport aux
prédirions des baromares , M.Halley déjà cité trouve
que l'élévation du mercure préfage le beau tems
après la tempête , & que le vent îbufTlera de l'eft ou
du nord-eft ; que fon abaiffement marque que ce
feront les vents de fud ou d'oueft qui régneront
avec la pluie , ou préfage des vents de tempêtes ,
ou tous les deux ; que dans l'orage , fi le mercure
vient à s'élever, c'eft une marque que la tempête
parlera bien-tôt.
M. Patrick remarque qu'en été l'abaiffement du
mercure annonce le tonnerre; & que quand l'orage
arrive immédiatement après la chute du mercure , il
eft rarement de longue durée : la même choie s'ob-
ferve du beau tems , s'il arrive immédiatement après
l'élévation du mercure. Enfin Derham comparant
avec fes obfervations celles que Scheuczer a faites à
Zurich , fur les baromètres , remarque que dans le
cours de l'année le mercure varie plus à Zurich ,
quelquefois d'un & même de deux pouces ; & il con-
clud de-là que la fituation de Zurich eft de près du
—^ d'un mille d'Angleterre plus haute que celle d'Up-
minfter. Il trouve d'ailleurs un accord remarquable
entre les obfervations faites à Zurich & les fiennes ;
un des baromètres fuivant à peu près les mêmes va-
riations que l'autre : cependant cet accord n'eft pas
fi parfait que celui des baromètres des endroits plus
proches , comme ceux de Londres , de Paris , &c.
Caufes des phénomènes du baromètre. Leshypothefes
par lefquelles on a voulu expliquer les phénomè-
nes du baromètre font prefque infinies. Il eft vrai
que le poids de l'atmofphere eft généralement regar-
dé comme la caufe principale des mouvemens du
baromètre , & les altérations de l'air comme la caufe
accidentelle ; cependant cette opinion n'eft pas fui-
vie univerfellement. Un favant auteur , par exem-
ple , regarde les changemens du baromètre , comme
étant caufés par le froid & par la chaleur. Il dit avoir
fouvent remarqué que dans les orages , &c. quand le
mercure eft bas , il fe divife 6c pouffe en en-haut des
particules, qu'il appelle des efpeces de pellicules ou d'é-
corchures; & il foùtient que toutes les fois que le
mercure defeend , il eft plus ou moins dégagé de ces
pellicules : que dans ce mouvement les parties du
mercure font refferrées enfemble , 6c que c'eft par
cette raifon qu'il defeend ; que de plus il s'échappe
alors de petites particules d'air , qui étoient renfer-
mées dans le mercure , & qui s'élevant dans la par-
tie fupérieurc du tuyau , forcent le mercure à def-
cendre , les colonnes en étant raccourcies parla fortie
de ces particules , & par leur pofition dans la par-
tie fiipérieure du tuyau : c'eft pourquoi , ajoùte-t-il ,
le mercure s'élève dans le tems très-froid à la même
hauteur que dans le tems tres-chaud , entre les deux
tropiques , parce qu'il eft dans fon état naturel ; & il
baiffe dans les degrés intermédiaires de chaud 6c de
froid , parce qu'il eft refferré , &: que fes parties font
comme refoulées & comprimées enfemble. Mais ce
lentiment ne rend pas de raifon fort vraifîemblable
des phénomènes.
Les variations de l'atmofphere doivent être regar-
dées comme la caufe de celles du baromètre : mais il
n'eft pas aifé de déterminer d'oii viennent ces va-
riations dans l'atmofphere , puifqu'il eft difficile de
trouver un feul principe dans la nature auquel on
puiffe rapporter des variations fi grandes 6c ri irré-
gulieres. Il eft probable que les vents qui fou filent
de tel ou tel endroit les occafionnent, de même que
les vapeurs & les exhalaifons de la terre : les chan-
gemens d'air dans les régions voiiines , & même le
flux & le reflux que la lune Occalionne dans l'air,peu-
.Vent y contribuer également.
Tome //;
BAR
81
Cette dernière caufe doit certainement entrer par-
mi celles qui produilent les variations du baromètre :
mais fon effet ne doit pas être fort confidérable à cet
égard ; quoique l'action de la lune élevé à une hau-
teur très-grande les eaux de l'Océan. Voici la raifon
de cette différence : fuppofons que l'eau s'élève en
pleine mer à la hauteur de 60 pies par l'action de la
lune : qu'on mette à la place de l'Océan l'atmofphere
ou tel autre fluide qu'on voudra , il eft certain qu'il
devra s'élever à peu près à la même hauteur ; car
l'atmolphere ayant moins de parties que l'Océan , il
y aura, à la vérité , une moindre malle à mouvoir,
mais aufîi la force qui agite cette maffe en attirant
chacune de fes parties , fera aufîi plus petite en mê-
me raifon. L'air s'élèvera donc à la hauteur de 60
pies en montant , & defeendra au-deffous de fa hau-
teur naturelle de l'efpace de 60 pies, c'eft- à-dire qu'il
variera en hauteur de 1 zo pies en tout. Or le mer-
cure étant 1 1000 fois plus pefant que l'air , une va-
riation de 1 20 pies dans une colonne d'air , ne doit
faire varier le mercure que d'environ deux lignes.
C'eft à peu près la quantité dont on trouve qu'il doit
hauffer fous l'équateur , dans la fuppolition que le
vent d'eft y faffe 8 pies par féconde. Or comme il y
a une infinité d'autres caufes qui font varier le ba-
romètre , il n'eft pas furprenant que l'on n'ait pas dis-
tingué la petite variation que l'action du foleil & de
la lune y peuvent produire en élevant ou en abaif-
fant les colonnes de l'atmofphere. Cependant il fe-
roit à fouhaiter que les obfervateurs s'y rendiffent
attentifs dans la fuite. Rech. fur les vents. Paris 1746.
Le lavant Halley croit que les vents &c les exha-
laifons fufiilent pour produire les variations du baro-
mètre ; & d'après cette opinion il en a donné une ex-
plication probable : nous allons donner la fubftance
de fon diicours fur ce fujet. i°. Ce iont, dit-il, les
vents qui altèrent le poids de l'air dans un pays par-
ticulier , & cela , foit en apportant enfemble & en
accumulant une grande quantité d'air , & en char-
geant ainfi l'atmofphere dans un endroit plus que
dans l'autre , ce qui arrive lorfque deux vents fouf-
flent en même tems de deux points oppofés ; luit en
enlevant une partie de l'air , 6c en déchargeant par-
là l'atmofphere d'une partie de fon poids, & lui don-
nant le moyen de s'étendre davantage ; foit enfin en
diminuant & foûtenant , pour ainfi dire , une partie
de la prefîion perpendiculaire de l'atmolphere , ce
qui arrive toutes les fois qu'un feul vent fouftle avec
violence vers un feul côté ; puifqu'on a expérimenté
qu'un fouftle de vent violent , même artificiel , rend
l'atmofphere plus légère , & conféquemment fait bail-
fer le mercure dans le tube qui le trouve proche de
l'endroit où fe fait ce fouffle , & même dans un tube
qui en eft à une certaine diftance. Voye^ Tranfaclions
Philofop. n°. 2Ç)Z.
20. Les parties nitreufes &C froides , & même l'air
condcnle dans les pays du Nord , 6c chaffé dans un
autre endroit , chargent l'atmofphere & augmentent
fa prcflion.
30. Les exhalaifons feches & pefantes de la terre
augmentent le poids de l'atmofphere & la force élaf-
tique , de même que nous voyons la pefanteur Ipe-
cifique des menftrues être augmentée par la diffo-
lution des fels & des métaux.
40. L'air étant rendu plus pefant &: plus fort par les
caufes que nous venons de rapporter, devient plus
capable de fupporter des vapeurs , qui étant mêlées
intimement avec lui & y furnageant, rendent le tems
beau & ferein ; au contraire l'air étant rendu plus
léger par les caufes oppofées à celles que nous ve-
nons de dire, devient hors d'état de foûtenir les va-
peurs dont il eft chargé , lefqtielles venant à fe pré-
cipiter en -bas , fe ramaflent en nuages , qui par la
fuite fe reuniffent en gouttes de pluie. Cela étant
8a BAR
ainfi , il paroît affez évident que les mêmes caufes
qui augmentent le poids de l'air, & le rendent plus
propre à Soutenir le mercure dans le baromètre , oc-
casionnent pareillement le beau tems & le chaud ; &
que la même cauSe qui rend l'air plus léger & moins
capable de ibûtenir le mercure , produit les nuages
& la pluie : ainfi , i°. quand l'air eft très-léger & que
le mercure du baromètre eft le plus bas , les nuées font
baffes & vont fort vite ; & quand après la pluie les
nuages lé diffipent & que l'air devenant calme & fe-
reinYeft purgé de lès vapeurs , il paroît extrême-
ment net , & on y peut voir des objets à une diftance
considérable.
2°. Quand l'air eft plus groffier & que le mercure
eu- haut dans le tube , le tems eft calme , quoiqu'il
foit en même tems quelquefois un peu couvert , parce
que les vapeurs font diSperSées également : s'il pa-
roît alors quelques nuages , ces nuages font hauts &C
le meuvent lentement ; & quand l'air eft très-grol-
fier & très-lourd , la terre eft ordinairement environ-
née de petits nuages épais , qui paroiffent y être for-
més par les exhalaifons les plus groffieres , que l'air
inférieur eft encore capable de Ibûtenir , ce que ne
peuvent plus faire les parties Supérieures de l'air, qui
font trop légères pour cela.
3°. Ainfi, ce qui eft caufe qu'en Angleterre, par
exemple , le mercure eft au plus haut degré dans le
tems le plus froid quand le vent eft nord ou nord-eft,
c'eft qu'alors il y a deux vents qui Soufflent en même
tems , & de deux points à peu près oppofés ; car il y
a un vent de fud-oueft conftant , qui fouffle dans l'O-
céan atlantique à la latitude qui répond à l'Angle-
terre ; à quoi on peut ajouter que le vent de nord y
amené l'air froid & condenfé des régions du nord.
4°. Dans les régions du nord la variation du mer-
cure eft plus fenfible que dans celles du midi , les
vents étant plus fréquens , plus violens , plus varia-
bles & plus oppofés l'un à l'autre dans les pays fep-
tentrionaux que dans les méridionaux.
Enfin , il s'enfuit de-là qu'entre les tropiques lava'
nation du mercure eft très-peu fenfible , parce que
les vents y font très-modérés , & qu'ils foufflent or-
dinairement dans le même fens.
Cette hypothefe , quoiqu'elle paroiffe propre à
expliquer plufieurs mouvemens du baromètre , n'eft
pas cependant à l'abri de toute critique ; car i°. fi le
vent eft le feul agent qui produife ces altérations , il
ne fe fera pas d'altération fenfible fi le vent ne l'eft
pas , & il n'y aura jamais de vent fenfible fans varia-
tion du mercure , ce qui eft contraire à l'expérience.
2°. Si le vent eft le feul agent, les altérations de
ia hauteur du mercure doivent être en différens fens
dans les différens lieux de la terre , félon que le vent
y fouffle ou n'y fouffle pas ; ainfi , ce qu'un tube per-
dra à Londres, fera regagné fur un autre à Paris, ou
à Zurich, &c, mais félon plufieurs Phyficiens, on re-
marque le contraire ; car dans toutes les obfervations
faites jufqu'à préfent, les baromètres de différens
lieux , diient-ils , s'élèvent & baillent en même
tems , de forte qu'il faut qu'il y ait une égale altéra-
tion dans le poids abfolu de l'atmoSphere , qui occa-
sionne ces variations. Ce fait eft-il bien vrai ?
Enfin , en omettant toute autre objeûion , la chute
du mercure avant la pluie , & fon élévation après la
pluie , femblent être inexplicables dans cette hypo-
thefe ; car en fuppofant deux vents contraires qui
chaffent les colonnes d'air qui font au-deffus de Lon-
dres, tout ce qu'ils pourront faire, fera de couper
une certaine partie de l'air qui eft au-deffus de Lon-
dres: en conSéquence il pourra arriver que le mercu-
re baiffe , mais il n'y a pas de raifon apparente pour
que la pluie s'enfiuve. Il eft vrai que les vapeurs pour-
ront s'abaiffer , mais feulement jufqu'à ce qu'elles
viennent dans un air de la même pefanteur Spécifique
BAR
qu'elles , & arrivées là , elles y refteront fans des-
cendre plus bas. Leibnitz a tâché de Suppléer au dé-
faut de cette hypothele , & d'en donner une nouvel-
le. Il prétend donc qu'un corps plongé dans un flui-
de , ne pefe avec ce fluide que pendant qu'il en eft
foûtenu ; de forte que quand il ceffe de l'être j c'eft-
à-dire qu'il tombe, Son poids ceffe de Saire partie de
celui Au fluide , qui par ce moyen devient plus léger.
Ainfi, ajoûte-t-il , les vapeurs aqueuSes , pendant
qu'elles Sont Soutenues dans l'air , augmentent Son
poids : mais quand elles tombent , elles ceffent de
peSer avec lui , & le poids de l'air eft diminué ; le
mercure baiffe donc , & la pluie tombe. Mais le prin-
cipe de Leibnitz eft faux , comme il paroît par les ex-
périences du docteur Defaguliers. D'ailleurs, en
fuppofant que les vapeurs par leur condenfation font
forcées de defeendre , & ceffent de pefer avec l'at-
molphere , elles baifferont jufqu'à ce qu'elles arri-
vent à la partie de l'atmoSphere , qui eft de la même
pefanteur fpécifique qu'elles, &, ainfi que nous l'a-
vons déjà dit au lujet de M. Halley , y refteront fuf-
pendues comme auparavant. Si le mercure baiffe ,
ce Sera Seulement durant le tems de cet abaiffement
des vapeurs ; car les vapeurs étant une Sois fixées &c
en repos , la première peSanteur renaîtra , pour ainiî
dire , ou Si elle ne revient pas , au moins la pluie ne
Suivra pas la chute du mercure*
Quelques auteurs , pour expliquer ces mêmes va-
riations , ont imaginé l'hypotheSe Suivante. Que l'on
Suppole un nombre de véficules d'eau flottantes Sur
une partie de l'atmoSphere , & Sur une partie déter-
minée de la Surface du globe terreftre ; par exemple ^
iuxA B,fig. z i ; fi les véficules Supérieures Sont con-
deniees par le Sroid des régions Supérieures , leur gra-
vité fpécifique s'augmentera & elles defeendront ; la
couche horifontale i , par exemple , defcertdra à 2 ,
2 à 3 , &c. là fe rencontrant avec d'autres véficules
qui ne font pas encore précipitées , elles s'amonce-
lent & fe changent en véficules plus grandes , com-
me il doit s'enfuivre des lois de l'attraction»
Si nous choififfbns le vent pour agent , fuppofons
qu'il fouffle horifontalement ou obliquement : dans
le premier cas les véficules 8 feront chaffées contre
9 , celles-ci contre io , &c. dans le Second cas la vé-
ficule 7 fera chaffée contre 4, 8 contre 3 , &c. par ce
moyen les particules s'augmenteront & formeront
de nouvelles & de plus grandes véficules qu'aupara-
vant; de forte que leur nombre, qui auparavant
étoit ; fi l'on veut , un million , fera alors réduit , par
exemple à 1 00000.
Mais la même réunion par laquelle leur nombre eft
diminué , augmente en quelque manière leur peSan-
teur Spécifique ; c'eft-à-dire qu'il y a plus de matiè-
res Sous d'égales SurSaces : ce qui eft aiSément prou-
vé par les principes géométriques ; car dans l'aug-
mentation de la maffe des corps homogènes, celle de
la Surface n'eft pas auffi grande que celle de la So-
lidité : celle de la première eft comme le quarré du
diamètre; & celle de l'autre, comme Son cube.
Or lorSque la même quantité de matière Se trou-
ve Sous une moindre Surface , elle doit perdre moins
de fon poids par la réfiftance du milieu : car il eft évi-
dent qu'un corps qui fe meut dans un fluide , perd
une partie de fa pefanteur par le frottement de les
parties contre celle du fluide. Or ce frottement eft
évidemment en raifon de la Surface ; c'eft pourquoi la
Surface devenant moindre à proportion de la maffe ,
la réfiftance l'eft auffi : conféquemment les véficu-
les , dont la pefanteur , avant la jon&ion , étoit égale
à la réfiftance du milieu , trouvant cette réfiftance
diminuée , defeendront avec une vîteffe proportion-
nelle à la diminution réelle de leur Surface.
Quand elles deScendent & qu'elles arrivent aux
parties plus groffieres de l'atmoSphere , par exenv
BAR
pk , aux points 4,5, &c. leur mafle & leur furface
font augmentées par de nouvelles réunions ; & ainfi
par de nouvelles & confiantes augmentations , elles
deviennent de plus en plus capables de furmonter la
réfiftance du milieu , &C de continuer leur chute à
travers toutes les couches de l'air jufqu'à ce qu'elles
atteignent la terre; leur mafle étant alors exceflive-
ment groflie , & forme des gouttes de pluie.
Maintenant dans la defcente des vapeurs , il faut
confidérer comment le baromètre eft affe&é par cette
defcente. Avant qu'aucune des véficules commence
à baiffer , foit par l'aftion du froid , ou par celle du
vent , elles nagent toutes dans la partie de l'atmof-
phere A B DC , &c pefent toutes vers le centre E.
Or chacune d'elles demeurant refpefrivement dans
une partie du milieu , qui eft d'une pefanteur fpécifi-
que égale , perdra une partie de lbn poids égale à
celle d'une partie du milieu qui auroit le même vo-
lume ; c'eft-à-dire , que chacune d'elles perdra toute
fa pefanteur : mais alors cette pefanteur qu'elles au-
ront perdue , fera communiquée au milieu qui pref-
fera fur la furface de la terre A B , avec lbn propre
poids joint à celui de ces véficules. Suppofez alors
que cette preflion conjointe agiffe fur le mercure
élevé dans le baromètre à trente pouces : par la réu-
nion des véficules , faite comme nous avons dit ci-
deflus , leur furface , & conféquemment leur frotte-
ment , eft diminué : c'eft pourquoi elles communi-
queront moins de leur pefanteur à l'air , c'eft-à-dire
une partie moindre que tout leur poids ; & con-
féquemment elles defeendront avec une vîtefle pro-
portionnelle à ce qui leur relie de pefanteur , ainiï
que l'on vient de le dire. Or comme les véficules ne
peuvent agir fur la furface de la terre A B que par
la médiation de l'air, leur action fur la terre fera di-
minuée en même proportion que leur acuon fur le
milieu ; d'où il eft évident que la furface de la terre
A B , fera alors moins preffée qu'auparavant ; & plus
les véficules garderont de leur poids qu'elles n'au-
ront point communiqué au milieu , plus elles accé-
léreront leur propre defcente ; c'eft-à-dire , que la vî-
tefle de l'abaiffement des véficules ira toujours en
augmentant : en effet , quand les véficules defeen-
dent , la mafle augmente continuellement , & au con-
traire la réfiftance du milieu & la preflion fur la terre
diminuent , & le mercure baillera par conféquent
pendant tout le tems de leur chute. De-ià il eft aifé
de concevoir que les véficules qui ont une tois com-
mencé à tomber , continuent ; que le mercure com-
mence à tomber en même tems , & qu'il continue 6c
cefle en même tems qu'elles.
On peut faire une objection contre ce fyftème ;
favoir , que les véficules étant mifes en mouvement ,
& heurtant contre les particules du milieu , rencon-
trent une réfiftance confldérable dans la force d'i-
nertie du milieu , par laquelle leur defcente doit être
retardée , & la preflion de Fatmofphere rétablie. On
peut ajouter que la preflion additionnelle fera plus
grande à proportion de la vîtefle de la chute des véfi-
cules , une impulfion forte étant requile pour iurmon-
ter la force d'inertie des particules contiguesdu mi-
lieu.
Mais les partifans de l'opinion que nous rappor-
tons , croyent pouvoir renverfer cette objection par
la raifon & l'expérience : car, difent-ils , outre que la
force d'inertie de l'air peut être très-foible à caule de
fon peu de denfité , nous voyons que dans l'eau , qui
eft un milieu fort denfe & non élaftique , un morceau
de plomb , en descendant à-travers le fluide, pelé con-
fidérablement moins que quand il y eftloûtenu en re-
pos. Cependant ce fait eft nié par M. Muflchenbroek.
Efays de Phyfaue, §. 234.
Nous avons cru devoir rapporter aflez au long
Cette explication qui , quoiqu'ingénieufe , n'a pas, à
Tome il.
BAR
83
beaucoup près , toute la précifion qu'on pourroit dé-
lirer. Mais dans une matière fi difficile , il ne nous
refte prefque autre chofe à faire , que d'expofer ce
que les philofophes ont penfé. Voye^ une d'îffertatïon
curieufe , de M. de Mairan , fur ce fujet , Bordeaux
171 5. Foye^ aujfi Muflchenbroek. Cet auteur regar-
de avec raifon les prédictions du baromètre , comme
peu fîires.
Voici, félon M. Muflchenbroek , la meilleure ma-
nière de faire un baromètre ordinaire ou commun ; ces
fortes de baromètres étant les meilleurs de tous , à ce
qu'il prétend. Premièrement , on doit prendre du
mercure bien pur , & être bien affûré qu'il ne foit
pas falfifié ; il faut le paflér par un cuir bien net , &
le verfer dans un poellon neuf & verni , que l'on cou-
vre d'un couvercle qui s'y ajufte bien. On doit met-
tre ce poellon couvert iur un feu de charbon bien
pur , &c faire bouillir le mercure : il devient alors
volatil , mais on le retient à l'aide du couvercle
qui eft pofé deflus. En faifant ainfi bouillir le mer-
cure , on le purifie de l'eau & de l'air qui fe tenoient
entre fes parties. On doit avoir des tuyaux de verre
nouvellement faits , dont on fe fert pour les baromè-
tres ; & afin qu'ils ne foient ni fales en-dedans , ni
remplis d'air , il faut avoir foin de les faire fceller her-
métiquement de chaque côté dans la Verrerie, avant
que de les tranfporter. Lorfqu'on voudra les remplir ,
on peut les ouvrir par un bout avec une lime , & les
tenir pendant ce tems-là près d'un feu oblong, pour
les rendre également chauds , & même fort chauds ,
afin que l'humidité & l'air qui tient aux parois , fe dé-
tache & fe diffipe. Si on néglige de prendre cette pré-
caution , l'air s'y attache avec tant de force , qu'il
ne peut être chafle par le mercure qu'on verte dans
le tuyau , mais il refte fufpendu en plufieurs endroits.
Pour réuflîr encore mieux à purger ce tuyau d'air,
on ne fera pas mal d'attacher à un fil d'archal un
morceau de chamois ou de cuir , & d'en former com-
me un pifton de pompe , que l'on fera pafler dans
le tuyau de haut en bas , & de bas en haut à diverfes
reprifes, pour détacher l'air qui y tient. Parce moyen,
le mercure qui eft tout bouillant, pourra alors diffiper
l'air, en le faifant fortir du tuyau chaud. On forme
enfuite d'un tuyau large de baromètre un petit enton-
noir de verre , & en l'allongeant on le réduit en un
tuyau capillaire , lequel doit être un peu plus long
que le tuyau qu'on doit remplir. Il faut d'abord bien
nettoyer la partie Supérieure de ce petit entonnoir ,
&c la rendre bienfeche & bien chaude en l'expofant
devant le feu : on l'introduit enfuite dans le tuyau du
baromètre, enforte qu'il pénètre jufqu'au fond , & on
verte alors le mercure tout bouillant dans ce petit en-
tonnoir , qui doit être bien chaud , afin que la cha-
leur du mercure ne le fafle pas fauter en pièces. Dès
qu'on verte le mercure , il fe précipite en bas , rem-
plit le tuyau , & s'élève enfuite lentement. On doit
avoir foin de verfer dans l'entonnoir fans aucune in-
terruption , afin que le mercure continue toujours de
tomber fans s'arrêter , & que l'air n'ait pas lieu de
s'infinuer entre fes parties. Lorfque le tuyau fe trouve
plein , on retire doucement le petit entonnoir. Voilà
de quelle manière en peut remplir le tuyau auflî jufle
qu'il eft poflible , & il paroît alors dans toute fa lon-
gueur de couleur brune , ck fans la moindre p<
bulle d'air. Si l'on n'a point de tuyaux fcellés , il feut
avant que de remplir celui dont on fe fert , le bien
nettoyer en-dedans , en le lavant avec de l'elprit-de-
vin bien rc&ifié, & en attachant au bas d'un fil de
laiton une petite couroie en manière de pifton de
pompe, que l'on pouffe fouvent dans le tuyau pour
en détacher l'air , qui fans cela ne manqueroit pas d'y
refler fufpendu. Après avoir ainfi nettoyé ce tuyau ,
on doit le faire lécher devant le feu, & le chauffer.
Baromètre portatif '3 eft un baromètre conftruit
Lij
84
BAR
de manière qu'on puiffe le transporter d'une place à
une autre , fans le déranger.
Il n'y a pas long-tems que le baromètre portatif êtdit
une choie peu commune ; à prêtent on en tait de
portatifs de toutes les fortes ; ils font tellement cons-
truits , que le mercure peut venir tout-à-fait jufqu'à
l'extrémité du tube , qui eft fermée hermétiquement :
cet artifice empêche le mercure de ballotter & de fe
répandre , & ne l'expofe point au danger de caffer le
tube. Pour cela on attache fur le bord de la cuvette
où plonge le tuyau , un cuir le plus fin que l'on peut ,
par le moyen duquel le mercure eft contenu dans la
cuvette , & on conftruit le baromètre de manière que
fa partie Supérieure fe termine par un long cou étroit ;
par ce moyen l'effort du mercure contre cette partie
devient beaucoup moins confidérable , & la partie
Supérieure du baromètre eft moins en danger de fe
briler. Mais un tel baiometre eft peu fîir.
Phofphore du baromètre. M. Picard découvrit le pre-
mier en 1 676 que le mercure de ton baromètre fecoiié
dans l'obicurité donnoit de la lumière : mais quand
on voulut faire l'expérience fur d'autres , il s'en trou-
va fort peu qui euflént ce privilège.
M. Bernoulli ayant fait l'expérience fur fon baro-
mètre , trouva qu'étant fecoiié fortement dans l'obi-
curité , il donnoit une foible lueur.
Comme l'on pouvoit foupçonner que la lumière ,
ou du moins une grande lumière , n'étoit fi rare dans
les baromètres , que parce qu'il n'y avoit pas un vuide
parfait dans le haut du tuyau , ou que le mercure n'é-
toit pas bien purgé d'air , il s'affûra par expérience
qu'avec ces deux conditions , des baromètres n'étoient
encore que très-foiblement lumineux ; & par conlé-
quent que ce n'étoit-là tout au plus que des condi-
tions , & qu'il falloit chercher ailleurs une véritable
caufe. De plus fon baromètre n'étoit en expérience
que depuis quatre femaines , lorfqu'il rendit de la lu-
mière ; & ainfi on ne peut pas dire que la raiion pour-
quoi plufieurs n'en rendoient pas, eft peut-être qu'il
y avoit trop peu de tems qu'ils étoient en expérience.
M. Bernoulli avoit remarqué que quand on fe-
coiioit le baromètre , & que par conléquent on faifoit
aller le mercure avec rapidité , tantôt au-deflus , tan-
tôt au-deflbus du point d'équilibre , la lumière ne fe
montroit que dans la defeente du mercure , & qu'elle
paroifîoit comme attachée à fa furtace iupérieure.
De-là il conjectura que quand par cette defeente il fe
forme dans un tuyau un plus grand vuide que celui
qui y étoit naturellement , il peut fortir du mercure
pour remplir ce vuide en partie, une matière très-
fine, qui étoit auparavant renfermée & difperiée dans
les interfaces très-étroits de ce minéral. D'ailleurs
il peut entrer dans ce même moment par les pores
du verre , plus grands apparemment que ceux du
mercure , une autre matière moins déliée , quoique
beaucoup plus déliée que l'air ; & la matière fortie
du mercure & toute raiîemblée au-deflus de fa fur-
face Iupérieure , venant à choquer impétueufement
celle qui eft entrée par les pores du verre , y fait le
même effet que le premier élément de Defcartes fur
le fécond, c'eft-à-dire , produit la lumière.
Mais pourquoi ce phénomène n'eft-il pas commun
à tous les baromètres ? Pour l'expliquer M. Bernoulli
imagina que le mouvement de la matière Subtile qui
fort du mercure avec impétuosité , loriqu'il delcend ,
pouvoit être détruit , affoibli , interrompu , par quel-
que matière hétérogène au mercure qui le leroit
amaffée fur fa Surface Iupérieure , & y auroit été
pouffée par ce minéral plus peiant qu'elle; que cette
eipece de pellicule ne manquoit pas de le former fur
le mercure , des qu'il n'étoit pas extrêmement pur ;
que même quelque pur qu'il fût de lui-même , il con-
traftoit en peu de tems par le feul attouchement de
l'air , les faletés qui composent cette pellicule ; qu'a-
BAR
fin qu'il les contractât en un inftant , il ne falloit que
le verfer en l'air de haut en bas , comme l'on fait or-
dinairement dans la conftrucTion des baromètres ; que
ce mouvement lui faiioit ramaffer dans l'air plus de
faletés qu'il n'auroiî fait durant plufieurs jours étant
en repos ; qu'enfin cela fuppofé , une méthode sûre
pour avoir un baromètre lumineux , étoit de le faire
d'un mercure bien pur, & qui fur-tout, quand on le
feroit entrer dans fon tuyau , ne traversât point l'air
& ne s'y fouillât point.
Le 1 uccès des expériences répondit à tout ce rai-
fonnement de M. Bernoulli, qu'il avoit fait fans au-
cune expérience préalable , excepté peut-être ce qui
regardoit la pellicule formée fur la Surface du vif-
argent.
En effet , fi on expofe du vif-argent dans quelque
vafe à l'air libre , on trouvera au bout de quelque
tems fa Superficie extérieure trouble & couverte d'une
pellicule très-mince, laquelle étant ôtée par le moyen
d'une plume nette , la furface redevient polie : mais
fi on le laille encore expoié à l'air , une autre pelli-
cule , d'abord Semblable à une toile d'araignée qui
s'épaiffit avec le tems , s'étendra par deffus. Cette
pellicule paroît au microlcope fort fèmblable à de
l'argent battu en feuille : eneffet,cen'elt qu'un tiffu
très-fin d'une efpece de moufle ou de poil très fin , qui
féparée du vif-argent par l'agitation de l'air , eft re-
pouflee à la furface ; & fe mêlant-là avec les corps
hétérogènes que l'air y amené , forme cette efpece
de pellicule. Cette pellicule paroît plus ou moins
dans toutes les liqueurs expoiées à l'air ; elle eft for-
mée par les corpufcules qui s'exhalent 6c retombent
enfuite deffus. Si on laiffe tomber de la hauteur d'un
pié feulement une goutte de vif-argent le plus net
qu'il Soit poifible , dans un vafe où il y en ait aufli de
fi net , que fa Superficie fbit polie comme celle d'un
miroir ; la goutte tombant Sur cette furface polie , la
ternira à l'endroit où elle tombera ; preuve que toute
nette qu'elle étoit, elle avoit été infectée de l'impu-
reté de l'air : ainli quand on fait tomber le vil-argent
goutte-à-goutte dans le baromètre , ces gouttes tom-
bant les unes fur les autres , font crever les petites
pellicules, qui bientôt après remontent à la iurface,
& Se mettent entre la Surface convexe du mercure
& la Surface concave du verre. En effet, fi le tuyau
étant ainli rempli , on le renverfe pour en faire le ba~
rometre en le fermant du bout du doigt , on verra que
le mercure en defeendant dans le tuyau , laiflera en
arrière des reftes de cette pellicule attachés aux pa-
rois du verre.
En Suppoiant que cette pellicule couvre exacte-
ment les pores de la Surface du vif-argent, il fera aile
de concevoir qu'elle bouche le paffage à la matière
renfermée dans le mercure , de même que le vif-ar-
gent qui pafle par les peaux de prefque tous les ani-
maux , n'y fauroit paffer quand on n'en ôte pas cette
peau fine que les Médecins appellent épiderme , ou
cuticule.
Rien de fi nuifible à l'apparition de cette lumière
que l'humidité ; car fi l'on fait entrer de l'eau dans le
tuyau , bien diSpoSé d'ailleurs , avec le vif-argent, ou
même de l'eiprit-de-vin reclilié ( quoique l'elprit-de-
vin Soit par lui-même inflammable ) ces matières fe
mettant dans le tuyau au haut du vif-argent , font l'ef-
fet de la petite pellicule , qui eft d'empêcher la lu-
mière. Il faut donc que le tuyau foit bien dégraifle
& net en dedans. Cela poié , voici deux manières
pour empêcher que le mercure ne contracte d'impu-
retés en paffant dansletuvau.
Première manière. Pour cela il faut plonger un tuyau
d'environ trois pies de long dans un vafe d'affez pe-
tite hauteur , plein de mercure , le faire tremper dans
ce mercure affez profondément , &c incliner ce tuyau
à la furface du mercure contenu dans le vafe , le plus
BAR
obliquement que le puiffe permettre la hauteur du
vafe (M. Bernoulli faifoit faire au fien un angle de
1 8 degrés à peu près avec l'horiion ) ; enûtite fucer
fortement par le bout fupérieur , de façon que le
tuyau s'empliffe à la fin tout entier de vif-argent.
Lorfqu'il en elt ainfi rempli , il faut faire boucher
avec le doigt par une autre perionne , le bout du
tuyau qui trempe dans le mercure , & lermer enfuite
foi-même aulîi avec fon doigt le bout fupérieur du
tuyau. (11 faut fucer tout de iuite, de peur qu'en re-
prenant haleine , on ne rende le dedans du tuyau
humide. ) Il eil évident qu'en ce cas le mercure n'a
point été fali par l'air, fi ce n 'eit peut-être la première
goutte qui elt montée , & qui a eifuyé toutes ces fa-
îetés ; auiîî faut-il laiffer entrer un peu de mercure
dans fa bouche ; auquel cas , cette première goutte
étant ôtée , le mercure fera le plus net qu'il piaffe
être. Le tuyau étant ainfi fermé avec le doigt parles
deux bouts , il faut le mettre tremper par fon extré-
mité dans un autre vafe plus étroit que le premier ,
& rempli de mercure à une hauteur plus grande que
le vafe dans lequel on avoit fait d'abord tremper le
tuyau. Si on porte le tuyau en cet état avec le vale
dans Pobfcurité , le moindre balancement y produira
une lueur capable d'éclairer à un pié de diitance ,
affez pour pouvoir lire un caractère d'une groffeur
médiocre.
IIe manière. Il faut mettre perpendiculairement un
tuyau fermé par un bout dans un vafe plein de mer-
cure , où il trempe par le bout ouvert , le pofer avec
ce vafe dans la même fituation , fous un récipient fait
exprès pour cela, enfuite en retirer l'air qui fortira
du tuyau parle vafe en faifant des bullesfur la iurrace
du mercure qui y elt contenu : lorfqu'on en aura retiré
le plus qu'il fera poiîible , il faudra le laiffer rentrer ;
il n'en pourra monter dans le tuyau à caule du mer-
cure où il trempe par fon bout ouvert. Cet air donc
pelant fur la furface du mercure contenu dans le va-
fe , fera monter le mercure clans le tuyau à la hau-
teur de 25 à 26 pouces , parce qu'on ne peut jamais
tirer tout l'air du récipient , & que l'air qui dans ce
cas relie dans le tuyau le condenie , & augmente
de force à melurc que le mercure y monte. Cet air
étant très-purifié à caule de fa dilatation , le vif-ar-
gent en y paffant demeurera net , & l'expérience de
la lumière réuffira aulîi bien que dans la première
manière, quoiqu'il y ait de l'air au haut du tuyau.
Quelqu'ingénieule 8c vraiffemblable que paroiffe
cette explication , néanmoins l'Académie des Scien-
ces à qui M. Bernoulli la communiqua ( voye^ ann.
1J01 & J'uiv. ) , remarqua pour lors que quelques
baromètres donnoient de la lumière fans avoir été
faits avec les précautions de M. Bernoulli , & que
quelques-uns faits avec les précautions rapportées
ci-deffus n'en donnoient point. C'en fut affez pour
qu'elle iulpendit ion jugement.
Il faut , lùivant le ly 1 terne de M . Bernoulli , 1 °. que
le mercure foit extièmement pur; 20. que le baro-
mètre foit confirait de manière que le mercure en y
tombant ne traverfe point l'air ; 30. que le vuide du
haut du tuyau toit aulîi parfait qu'il peut être ; car
il faut que le choc des deux matières fubtiles dont
parle M. Bcrnouilli , ne foit point affoibli par l'air,
qui étant fort greffier en comparaifon de ces deux
matières , feroit l'effet d'un lac de laine qui reçoit un
coup de canon. La différence d'effet des expériences
de Groningue & de Paris fur des baromètres qui pa-
roiffoient avoir les mêmes conditions , auffi bien que
le mercure qui y étoit enfermé , fit juger que le mer-
cure de M. Bernoulli ce celui des baromètres lumineux
de Paris , devoit avoir quelque choie de particulier,
& rellembler par quelqu'accident à du mercure que
l'on auroit rendu lumineux , en y mêlant , comme
on fait quelquefois , du phoiphore liquide. M. Ber-
BAR
85
noulli , fondé fur le fuccès de fes expériences , con-
jecture qu'il y a eu quelque faute dans celles de l'A-
cadémie. La méthode , par exemple , de remplir le
tuyau avec une bourfe de cuir, qu'on dit être équi-
valente à la fienne, a pourtant cela de différent , que
c'eft ici le mercure qui doit pouffer l'air devant
lui , lequel en faifant quelque petite réfillance , peut
laiffer attachées aux côtés du verre quelques relies
ou bulles d'air , qui fuffiront pour engendrer la pel-
licule ; au lieu que dans la méthode de M. Bernoulli
pour remplir le tuyau , l'air extérieur pouffe le vif-ar-
gent en haut , & le vif-argent ne fait que fuivre le
mouvement de l'air intérieur , qui par fa raréfaction
fort fans peine du tuyau ; peut-être auffi le tuyau de
l'Académie n'étoit-il pas bien net. Les amples tuyfeux
font , fuivant l'expérience , les meilleurs , parce
qu'outre que le mercure dans lin tuyau plus large ,
le meut plus librement que dans un tuyau étroit ,
où le frottement du mercure contre le verre diminue
la vîteffe de la defeente ; la pellicule , s'il s'en for-
me , doit auffi être plus épaiffe dans un tuyau étroit
que dans un autre; parce que ne pouvant s'étendre
en large , elle s'épaiffit en hauteur. Or le tuyau de
l'Académie n'étoit pas affez large , félon M. Ber-
noulli , n'ayant qu'une ligne & demie de diamètre.
Il elt difficile de remplir le tuyau de mercure avec
la bouche , fans y mêler un peu d'haleine ou de fa-
live ; pluiieurs n'y ont pu rénffir. M. Bernoulli dit
qu'il le faifoit aifément , pouvant d'ailleurs tirer ave*;
la bouche , d'un petit récipient , \ de l'air qu'il con-
tient, fans le trop efforcer. Il vaut mieux faire ces
expériences de nuit que de jour ; car quand on en-
tre tout d'un coup dans l'oblcurité , les yeux encore
frappés de l'éclat d'une grande lumière , ne peuvent
appercevoir la foible lueur du baromètre, qui paroit
affez pendant la nuit obfcure.
Quant aux baromètres qu'on dit n'avoir pas été faits
avec les mêmes précautions , & cependant donner
de la lumière , peut-être qu'en y jettant le vif-argent
on a tenu le tuyau fort obliquement à lhoriibn ,
pour laiffer couler doucement les gouttes de mercu-
re comme dans un canal ; ce qui empêche l'air de
l'infeder tant ; quoiqu'en ce cas il arrive fouvent
qu'il ne rend pas autant de lumière que des baromètres
taits par la fuction , ou dans la machine du vuide;
peut-être le mercure n'étoit-il pas bien purifié de
toute matière dont l'attouchement de l'air put for-
mer une pellicule.
Cette lumière paroit dans toute forte de vif-ar-
gent préparé à la manière de M. Bernoulli ; cela ne
vient donc point de quelque choie de particulier
dans le lien , qui enfermé dans le tuyau fans les con-
ditions propofées , ne rend que peu ou point de lu-
mière.
Une des principales raifons qui fait que la pellicu-
le du mercure empêche la lumière , c'eil peut - être
qu'on fecoue trop uniformément le mercure , fe con-
tentant de le balancer; auquel cas cette pellicule,
s'il y en a , ne fort point de la iuperficie du mercure,
& y demeure toujours attachée. Comme il *.
cile d'éviter cette pellicule des baromètres remplis
même à la manière de M. Bernoulli, il femble que fi
on pouvoit la crever , ce qui ié feroit en remuant le
mercure en tout fens , comme on fait l'eau d'une bou-
teille qu'on rince, il pourroit paroitre de la lumière.
En effet, ii on tire l'air d'une petite phiole pleine de
mercure , en la mettant fous la machine pneumati-
que , par le moyen d'un robinet cimente à ion cou ,
& qu'on agite en tout fens le mercure qui y elt con-
tenu , on voit une lumière bien plus vive que celle
du baromètre ; & cela arrive avec to ite forte de mer-
cure , excepté lorfque l'air n'eft p Bernent
tiré de la phiole , ou qu'on y en laiffe entrer un peu;
alors la lumière cil plus foible , Ôc diminue de plus en
S6
BAR
Plus , nonobftant l'agitation réitérée de la phiole ,
même jufqu'à difparoître entièrement ; après quoi il
faut tirer l'air de nouveau de la phiole , lî on veut
qu'elle paroifTe. On voit au jour le mercure de cette
phiole dont la lumière elt affoiblie , couvert d'une
pellicule épaiffe , & femblable à de la pâte mêlée de
pouffiere ; d'où il paroît qu'un peu d'air agité lalit
fort le mercure , & le couvre d'une peau affez épaiffe
pour empêcher abfolument la lumière : car s'il n'y a
point d'air, l'agitation ne fait que rendre le mercure
plus pur ; par-là fe délivre de tout ce qu'il pour-
rait contenir d'étranger , qu'il rejette à la liirface du
verre , qu'on voit auffi un peu trouble : ainfi le mer-
cure elt rendu de plus en plus lumineux.
Si le robinet de la phiole elt d'airain , le vif-argent
le corrompt : il faut donc , pour l'éviter , mettre un
bouchon de liège qui bouche exactement la phiole ,
& de la cire par-deffus , puis percer la cire & le bou-
chon de liège pour faire fortir l'air de la phiole fous la
machine pneumatique ; enfuite laiffant le récipient
deffus fans rendre l'air , faire fondre avec un verre
ardent la cire d'autour dutrou,qui le répandant alors
furie trou , le fermera. Voilà donc un nouveau phof-
phore perpétuel , & qui outre cela a l'avantage de
pouvoir fetranfporter dans une phiole bien bouchée ;
pourvu que i°. cette phiole ait été bien nette ; z°.
qu'on n'ait pas beaucoup remué le mercure avant
d'en tirer l'air; 30. qu'on tire le plus d'air qu'il foit
poffible.
M. Homberg a donné un autre raifon de la lumière
des baromètres. Souvent pour nettoyer le mercure on
fe fert de la chaux vive préférablement à de la li-
maille de fer ; alors le mercure qui s'élevant dans la
diltillation s'eft criblé au travers de cette matière ,
peut en avoir emporté des parties capables par leur
extrême délicateffe de fe loger dans fes interftices ;
& comme la chaux vive retient toujours quelques
particules ignées , il elt poffible que ces particules
agitées dans un lieu vuide d'air , où elles nagent li-
brement & fans être étouffées par aucune autre ma-
tière , produifent un éclat de lumière. En effet plu-
iieurs baromètres faits de mercure ainfi nettoyé étoient
lumineux : mais M. Homberg appuyoit davantage
fur le peu de néceffité des conditions de M. Ber-
noulli.
i°. Un mercure bien net ne contracte jamais d'im-
puretés à l'air : l'expérience le prouve. Il y a donc
lieu de croire que celui de M. Bernoulli n'étoit pas
bien net.
2°. Dans les baromètres lumineux anciens , le mer-
cure étoit entré en traverfant l'air.
30. M. Homberg ayant vuidé par la féconde mé-
thode de M. Bernoulli , un tuyau qui ne trempoit
prefque point dans le mercure , l'air en fortoit en
foûlevant par fon reffort le tuyau , & fe gliffant entre
fon bout & la liirface du mercure. L'air étant raréfié
jufqu'à un certain point , de façon cependant qu'on
pouvoit encore en tirer affez , ne fortoit plus , parce
qu'il n'avoit plus la force de foûlever le tuyau. Le
vuide du baromètre de M. Bernoulli n'étoit donc pas
auffi parfait qu'il pouvoit l'être.
Mais M. Bernoulli , outre les réponfes précéden-
tes, ajoute qu'il paroît que M. Homberg a trop en-
foncé le tuyau dans le mercure pour en tirer l'air ;
celui de M. Bernoulli étoit prefqu a fleur de mercu-
re , qui en effet y efl monté à 2.6 pouces , ce qui elt
prefque la hauteur ordinaire; outre que ce peu d'air
reliant dans le tuyau a notablement affoibli la lu-
mière , comme M. Bernoulli l'a remarqué depuis :
ainfi moins il y a d'air , plus la lumière elt grande &c
durable.
Quand le mercure de M. Bernoulli ne feroit pas bien
pur, l'air leroit toujours la caufe, finon naturelle, du
moins efficiente du défaut de lumière, puifque ce mê-
BAR
me mercure en produit étant enfermé fans air dans
le vuide. Mais M. Bernoulli a trouvé un fecret de le
rendre net en le lavant bien avec de l'eau : on met
fur le mercure cette eau , environ à la hauteur de
deux pouces ; on agite fortement le mercure qui fe
mêle avec l'eau , puis on le laiffe repofer ; & il re-
jette à la furface l'eau fale & noirâtre: on réitère la
lotion jufqu'à ce que l'eau ne paroiffe plus ou pref-
que point noirâtre , & alors le mercure efl net. L'ef-
prit de vin le lave plus vite & mieux que l'eau ; il s'efl
même trouvé un mercure fort épais , dans lequel il
y avoit apparemment quelque matière huileufe &
lulphureufe mêlée avec fes parties ; ce mercure n'eft
devenu affez net pour rendre de la lumière qu'à for-
ce de lotions expreffifd'efprit-de-vin. Le mercure de-
vient li pur par ce lavement même d'eau feule , qu'il
rend quelquefois de la lumière , même dans une phio-
le pleine d'air : mais cette lumière efl foible.
Ce mercure ainfi bien purifié , laiffe fortir de fes
pores affez de matière fubtile pour vaincre la réfif-
tance de l'air.
Il faut bien fécher le mercure ainfi lavé , en le fai-
fant pafler par un linge net ; car la moindre humidi-
té nuiroit à l'expérience.
Quelquefois le mercure même après l'agitation
conlerve en fes pores une matière gluante cachée ,
qui en les fermant ou les rendant roides , empêche la
matière fubtile de fortir , & par conféquent la lu-
mière de paroître. La roideur des pores peut faire
cet effet ; car il faut que les pores fe rétréciffent fou-
vent pour laiffer pafler cette matière : or s'ils ne font
pas flexibles ils ne pourront fe rétrécir. Cela étant, il
paroît que le mercure qu'on dit être devenu lumineux
par la diftillation à travers la chaux vive, avoit cette
roideur de pores caufée par quelque matière gluan-
te qu'il a laiffée dans la chaux , en s'y filtrant & s'y
purifiant par-là ; & c'eft à cette feule purification que
M. Bernoulli en attribue la lumière , & non pas aux
particules ignées de la chaux ; de plus ces corpufeu-
les ignées ne lui paroiffent guère vraiffemblables.
Ces parcelles ignées deviendroient enfin inutiles
par le fréquent ufage , comme on voit arriver aux
autres phofphores qui font lumineux par le moyen
de ces particules ignées ; ainfi ce phofphore perdroit
enfin fa vertu.
i°. Ces parcelles ignées affez petites pour fe loger
dans les pores du mercure , s'échapperoient quand
on fecoueroit la phiole , par les pores du verre bien
plus larges que ceux du mercure.
30. Cela pofé , la lumière paroîtroit également
dans la defeente & Fafcenfïon du mercure.
Dans l'explication , au contraire, de M. Bernoulli,
le mercure ne fait que prêter fes pores étroits à la
matière fubtile ; dès que cette matière en efl fortie
par l'agitation , il en revient auffi - tôt d'autres par
les pores du verre. Enfin M. Bernoulli gardoit de-
puis un an un de ces phofphores , qui n'avoit encore
fouffert aucune altération. Il croit même qu'une li-
queur auffi pelante que le mercure , pourroit don-
ner de la lumière : & cela pofé , fi on pouvoit ren-
dre l'or fluide , il feroit , félon lui , le plus propre à
en donner , étant le plus pelant de tous les corps , le
plomb fondu même en pourroit donner s'il étoit bien
pur.
Quant au mercure qu'on rend lumineux en le mê-
lant avec du phofphore artificiel , M. Bernoulli attri-
bue cette lumière au phofphore feul.
Toutes ces lumières artificielles font extrêmement
délicates. Il n'eit pas fur qu'en maniant une phiole ,
la lueur de la main ne paffe , quoiqu'en très-petite
quantité , au-travers les jointures du bouchon , & ne
nuife à la lumière. Il faut être dans ces expériences
fcrupuleux, défiant, & en quelque forte fuperlfitieux.
Voici un exemple remarquable de la délicateffe de
BAR
ces phofphorcs, M. Bernoulli avoit une phioîe qui
lu Kbit parfaitement & également depuis fix femai-
nes ; une miette du liège qui la bouchoit s'étoit
détachée & étoit tombée far la furface du mercure
où elle nageoit. M. Bernoulli brûla cette miette
de liège au foyer d'un verre ardent ; & le peu de
fumée qui en fortit , diminua confidérablement &
fans retour la vivacité du phofphore , où il n'étoit
arrivé nul autre changement. Cette pureté dont la
lumière a befoin , fut fouillée. M. Bernoulli a offert
à l'Académie de purifier le mercure dont elle fe fert,
& de le lui renvoyer lumineux. La confiance appa-
remment qu'on avoit en fa parole , a empêché qu'on
n'exécutât fa demande.
L'Accadémie en eft refté là jufqu'en 1713 , que
M. Dufay donna l'on fentiment particulier, joint à
Fhiftoire fuivante des fentimens des favans fur cette
matière , & à une manière iimple &c facile de ren-
dre les baromètres lumineux , qu'un Vitrier Allemand
lui avoit apprife. En 1706 , M. Dutal , Médecin , fit
inférer dans les Nouvelles de la république des Lettres ,
un mémoire , où il confirme la réufîîte des opé-
rations de M. Bernoulli , & croit que l'Académie
ne les a pas faites affez exactement. En 1708 , M.
Hauksbée, après avoir décrit un phofphore conf-
ftruit avec un globe vuide d'air, qu'il faifoit tourner
rapidement fur l'on centre , & qui par ce moyen ren-
doit beaucoup de lumière loriqu'on en approchoit
la main, croit que la lumière du baromètre n'eit caulée
que par les frictions du mercure contre les parois in-
térieurs du tube vuide d'air grofïier.
En 1710, M. Hartfoëker combattit les expérien-
ces de M. Bernoulli , niant tout , & n'apportant d'au-
tre raifon que la pureté du mercure , & la netteté du
tuyau ; ce qui , fuivant l'expérience , ne fuffit pas.
En 171 5 , Jean Frédéric Weidler combattit auffi
M. Bernoulli , difant que la pellicule que contracte le
mercure en pâffant par l'air , ne nuit en rien à la lu-
mière , qu'il croit ne venir d'autre choie que de la ré-
percufîion des rayons , qui quoique dans l'obfcurité ,
confervent leur même tenfion & leur même effort.
En 1716, Michel Heufinger dit dans une differta-
tion publiée lui" ce iiijct , que quelques baromètres où
l'on remarquoit des bulles d'air étoient lumineux ,
quoique moins , à la vérité , que ceux qui n'avoient
point d'air; les bulles d'air même , à ce qu'il dit , don-
nent quelquefois de l'éclat. La pureté du mercure n'eit.
pas encore néceffaire, puilque vingt-trois parties de
mercure mêlées avec cinq de plomb , ont rendu de
la lumière. Selon lui, les particules du merevire font
fpheriques , & les interftices de ces petits globes
contiennent beaucoup de matière fubtile , qui s'en
exprime lorfqu'on l'agite. Le mercure n'eit lumineux
que lorfqu'il defeend , parce qu'alors il abandonne la
matière fubtile contenue dans fes pores : mais en re-
montant il en abforbe une partie , & l'autre s'en va
par les porcs du verre.
En 1717, M. de Mairan attribua cette lumière au
foufre du mercure qui eft en mouvement , &c dit ,
qu'elle feroit beaucoup plus vive , s'il ne reftoit dans
les baromètres , les plus exactement vuides d'air, une
matière différente de la matière fubtile &C de l'air,qui
arrête le mouvement de ce foufre & la lumière qui
en refaite , ce qui arrive fur-tout lorfque le mercure
monte ; au lieu que quand il defeend , il y a une par-
tie du tuyau la plus proche de la furface du mercure
qui relie , au moins pour un moment , libre de cette
matière qui ne peut pas lùivre le mercure avec affez
de rapidité , cv qui par ce moyen donne lieu à ion
foufre de le développer. DiJ/'. furies Phofpk.
Il reftoit encore quelque incertitude fur la manière
de rendre les baromètres lumineux. Les conditions ab-
folument néceii'aircs font :
i u. Que le tuyau foit bien fec j on le nettoyé aifé-
BAR
87
ment avec du coton attaché au bout d'un fil de fer ;
la moindre humidité gâterait tout : mais ce n'eit ,
félon les obfervations de M. Dufay , qui a tourné de
bien des fens ces expériences , que l'humidité qui fe-
roit au haut & dans le vuide du tuyau , où la lumière
doit paroitre ; hors de là , le tuyau peut être humide
fans inconvénient.
i°. Que le mercure foit bien net : il faut faire paf-
fer le mercure par un cornet de papier dont l'embou-
chure foit fort étroite , il y dépofe fuffifamment fes
impuretés-.
30. Que le mercure foit bien purgé d'air : verfez
d'abord dans le tuyau un tiers de mercure que vous
devez employer, puis chauffez-le doucement & par
degrés , en l'approchant petit à petit du feu ; en le
remuant avec un fil de fer , vous aiderez la l'ortie des
bulles d'air qui font dans le mercure , & que la cha-
leur pouffe dehors ; verfez un fécond tiers auquel
vous ferez de même , & enfin un troifieme auquel
vous ne ferez rien. La purification des deux premiers
tiers fuffit pour le tout.
M. Dufay ne s'eft point apperçû qu'un différent
degré de chaleur donné au mercure , produisît de
différence fenfible dans la lumière. Voye{ , outre les
ouvrages déjà cités, la thefe de M. Bernoulli , de Mer-
curio lucente in vacuo , ibûtenue à Bâle en 1719, &
imprimée dans le recueil de les œuvres. Genev. 1 743 .
(0)
BARON , f. m. ( Hifi. mod. ) nom de dignité , hom-
me qui a une baronie. Voye^ Baronie. Baron eft un
terme dont l'origine & la première fignification eft
fort conteftée. Quelques-uns veulent qu'il fignifie
originairement ùv»p, homme ; d'autres un héros , un
homme brave : ceux-ci libertinus , un affranchi ; ceux-
là , un grand homme , un homme riche ; d'autres , un
vaffal. Ménage le fait venir de baro , que nous trou-
vons employé dans le tems de la pureté de la langue
Latine pour vir , homme brave , vaillant homme. De
là vint , fuivant cet auteur , que ceux qui avoient
leur place auprès du Roi dans les batailles , furent
appelles baroncs , ou les plus braves de t armée. Comme
les princes récompenfent ordinairement la bravoure
& la fidélité de ceux qui les environnent, par quel-
ques fiefs , ce mot fut enfuite employé pour déiïgner
quelques hommes nobles, qui tenoient un fief immédia-
tement du Roi. Ifidore , ck après lui Cambden , regar-
dent ce terme comme un mot qui a fignifie dans ion
origine, un foldat mercenaire. MM.de P. R. le font
venir de fiâpoç , poids ou autorité. Cicéron employé
le mot de baro pour marquer un homme flupide , bru-
tal. Les anciens Allemands parlent d'un baron com-
me nous d'un vilain ; & les Italiens momment barone ,
un gueux , un mendiant. M. de Marca fait venir baron
du mot Allemand bar , homme , ou homme libre :
d'autres en vont chercher l'étymologie dans les lan-
gues Hébraïque , Gauloife , Celtique : mais l'opinion
la plus probable cil qu'il vient de l'Efpagnol varo ,
homme brave , noble. C'eft de là que les femmes ap-
pellent barons leurs maris ; de même que les princes ,
i^ur^ fermiers. Dans les lois Saliques, comme elles
viennent des Lombards , le mot baron fignifie un hom~
me en général ; & l'ancien gloffaire de Philomenes
traduit baron par «1 >!p , homme.
Baron , eft employé en Angleterre dans une figni-
fication plus particulière, pour fignifîcr un j <:i gneur t
un lord ou pair de la dernière claffe , c'eft-à dire du
degré de nobleffe qui eft immédiatement au - deffous
des vicomtes, & au-deffus des chevaliers ce des ba-
îonets. Voye{ Noblesse, Pair, cvc
Les barons font feigneurs du parlement , pairs du
royaume , &joùiffent de leurs privilèges ; ils ne font
pas ceints de l'épée à leur création , & n'ont eu de
couronne à leurs armes que fous le règne de Charles
88
BAR
II. qui leur accorda un cercle d'or avec fix perles pla-
cées au bord.
Dans les anciennes archives , le terme de baron
comprenoit toute la nobleffe d'Angleterre ; tous les
nobles s'appelloient barons , de quelqu'autre dignité
qu'ils fuffent revêtus : c'eft pour cette raifon que la
charte du roi Edouard I. qui eft une expofition de
tout ce qui a rapport aux barons de la grande charte ,
finit par ces mots : Tejiibus archiepifcopis , epifcopis , ba-
ronibus , &c. La grande affemblée même de la no-
bleffe , qui eft compolee des ducs , des marquis , &
en outre des comtes & des barons , eft compriie fous
le nom de Y affemblée du baronage.
On diftingue les barons par leurs anciens titres, qui
poffédoient un territoire du roi , qui s'en réfervoit
toujours le titre en chef; & les barons par leur titre
temporel , qui tenoient les feigneuries , les châteaux &
places , comme chefs de leur baronie , c'eft-à-dire ,
par la grande fergenterie : en vertu de ces titres , ils
étoient anciennement convoqués au parlement : mais
à préfent ils ne font feigneurs lords du parlement ,
que quand on les y appelle par écrit.
Après la conquête , les barons furent diftingués en
grands barons & en petits barons , majores & minores ,
& il leur fut accordé d'être convoqués au parlement ;
les grands par une lettre immédiate du roi , les petits
par une lettre générale du grand shérif ou échevin ,
ïurle commandement du roi.
Les anciens diftinguoient les grands barons des pe-
tits , en accordant aux premiers haute &: même fou-
veraine jurifdi&ion , & aux féconds une jurifdiction
inférieure , & fur des matières de peu d'importance.
Les barons de F échiquier, font des juges au nombre
de quatre , auxquels eft commife 1'adminiftration
de la juftice dans les caufes d'entre le roi & fes fu-
jets , fur les matières qui concernent l'échiquier &
les revenus du roi. Ils font appelles barons , parce
que les barons du royaume étoient employés dans
cet office.
Leur fonction eft aufïï de voir les comptes royaux ;
ils ont pour cette fin des auditeurs fous eux , de mê-
me que pour décider des caufes qui regardent les re-
venus du roi , ces caufes appartenant en quelque fa-
çon à l'échiquier.
Les barons de t 'échiquier ont été jufque dans ces der-
niers tems des gens favans es lois , des anciens mai-
res , des perfonnages importans & éclairés ou cen-
fés tels , foit dans le clergé , foit à la cour ; majores
& difcretiores in regno,Jive de clero ejjent ,Jive de curid.
Les barons des cinq ports font maîtres de la cham-
bre des communes , élus par les cinq ports , deux
pour chacun. Voye^ Cinq ports. Ceux qui ont été
maires du château de Corfe dans le comté de Dor-
fet , font nommés barons. Les principaux bourgeois
de Londres avoient autrefois ce titre.
En France on entendoit anciennement par barons ,
tous les vaffaux qui relevoient immédiatement du
Roi ; ainfi ce mot comprenoit les ducs , les marquis ,
comtes , & autres feigneurs titrés & qualifiés , com-
me on le peut voir dans Aimoin & dans quelques-
unes de nos vieilles chroniques, où le Roi haranguant
les feigneurs de fa cour ou de fon armée , les appelle
mes barons. Mais maintenant on employé ce terme
dans une acception beaucoup moins générale , puif-
qu'il ne fignifie que le degré de la nobleffe , qui eft
immédiatement au-deffous des ducs , des marquis ,
des comtes ôc des vicomtes , quoiqu'il y ait en Fran-
ce & en Allemagne d'anciens barons qui ne voudroient
pas le céder à des nobles illuftrés depuis peu de ces
divers degrés de nobleffe. Nos auteurs font auffi men-
tion des barons de Bourges & d'Orléans , titres accor-
dés à quelques-uns des principaux bourgeois de ces
villes , comme à ceux de Londres , mais qui n'em-
portoient point avec eux de caractère de nobleffe ,
BAR
8c donnoient feulement à ces citoyens quelques pré^
rogatives , comme de n'être pas tenus de répondre
en juftice fur certaines chofes hors de l'enceinte des
murs de leur ville. Les trois premiers barons de Fran-
ce dans la nobleffe , étoient ceux de Bourbon , de
Conty , de Beaujeu: mais ces baronies ont été de-
puis reunies à la couronne. Dans le clergé il y a des
évêques, des abbés , & des prieurs barons ; foit qu'an-
ciennement les rois leur ayent accordé ce titre , foit
qu'ils poffedent par leurs libéralités des baronies , ou
qu'ils les tiennent en fief de la couronne. Voye^ No-
blesse. (G)
BARONET, f. m. {Hifl. mod.) degré d'honneur en
Angleterre , qui eft immédiatement au-deffous de celui
de baron , & au-deffus de celui de chevalier ; ils ont
le pas fur tous les chevaliers , excepté fur ceux de la
jarretière. Voye^ Chevalier, &c.
La dignité de baronet lé confère par patente ; c'eft
le moindre degré d'honneur qui foit héréditaire. Cet
ordre fut fonde par Jacques 1er en 161 1. Deux cents
baronets furent créés par ce prince , ik fixés pour tou-
jours à ce nombre ; cependant on dit qu'ils font au-
jourd'hui plus de huit cents.
On leur accorda plufieurs privilèges , pour être
poffedés par eux & par leurs héritiers mâles. Il leur
tut permis de charger leur écu des armes d'Ulfter,
qui lont une main de gueules dans un champ d'argent,
à condition qu'Us defendroient la province d'Lilfter
en Irlande contre les rebelles qui l'incommodoient
extrêmement. Pour cet effet ils furent obligés de le-
ver & d'entretenir à leurs dépens chacun trente fol-
dats pendant trois ans , ou de payer à la chambre
l'équivalent en argent ; cette fomme , à huit fols par
jour pour chaque loldat, faifoit 1095 livres. Ils font
maintenant exempts de cette obligation.
Les baronets prennent place entr'eux fuivant l'an-
cienneté. Selon les termes de leurs patentes, il ne
peut y avoir de degrés d'honneur établis entr'eux ;
il en eft de même entre les barons.
Le titre dejîr leur eft accordé par une claufe par-
ticulière ; cependant ils ne font pas faits chevaliers :
mais un baronet & fon fils aîné ayant l'âge néceffaire,
peuvent l'un & l'autre folliciter l'entrée dans l'ordre
de chevalier. (G)
BARONIE, 1. f. {Hifi. mod.) feigneurie ou fief de
baron, foit temporel foit fpirituel. Voye^ Baron.
Dans ce fens baronie eft la même chofe que ce que
l'on appelle honour en Angleterre.
Une baronie peut être confidérée comme une fei-
gneurie pofledée à condition de quelque fervice , mais
en chef par le roi: elle eft ce qu'on appelle autrement
grande Jérgenterie.
Les baronies d'Angleterre dans l'origine , étoient
mouvantes du roi même, chef & feigneur de tout
le royaume , & elles n'étoient pas tenues immédia-
tement d'un autre leigneur. Par exemple , le roi don-
noit à un homme l'inveftiture d'une grande feigneu-
rie dans le pays , pour que celui qu'il en inveftiffoit
en jouît , lui ôc les héritiers, comme la tenant du roi
& de fes fucceffeurs. Par le fervice de baron , il faut
entendre le fervice de vingt chevaliers , de quaran-
te , de foixante , plus ou moins , fuivant que le roi le
déterminoit par l'inveftiture. Dans les tems qui fui-
virent de plus près la conquête , lorf qu'un grand fei-
gneur , great lord, recevoit du roi l'inveftiture d'une
grande feigneurie, cette feigneurie étoit appellée ba-
ronie , mais plus ordinairement un honneur, honour,
comme Yhonour de Gloucefler , Yhonour de Walling-
ford , Y honour de Lancafler , Yhonour de Richemond , 6c
de même des autres. Il y avoit en Angleterre des ho-
nours déiignés par des noms Normands ou par d'au-
tres noms étrangers , c"eft-à-dire que quelquefois ils
avoient un nom Anglois , quelquefois un nom étran-
ger; cela arrivoit quand la même perfonne étoit fei-
gneur
BAR
gneur d'un ko'nour en Normandie ou dans quelqu'ali-
tre province étrangère , & en même tems feigneur
d'un honour en Angleterre ; par exemple , Guillaume
de Forz , de Force ou de Fortibus étoit feigneur de
X honour dy Alhrmale en Normandie ; il étoit aufîî Iei-
gneur de deux honours en Angleterre , favoir Y honour
de Holdcrncfs &cYhonouràe Skipton en Cravene. En
Angleterre on nommoit quelquefois ces honours du
■nom Normand, Yhonour d'Albemarle ou Y honour du
comte d'Albemarle. De même le comte de Bretagne
ctoit feigneur de Yhonour de Bretagne en France, &C
de celui de Richemond en Angleterre. On appelloit
quelquefois Yhonour àe Richemond du nom étranger,
1' 'honour de Bretagne ou Yhonour au comte de Breta-
gne , non qu'Albemarle ou la Bretagne fuflcnt en An-
gleterre , mais parce que la même perfonne étoit ref-
peclivement feigneur de chacun de ces honours en
France , &c de chacun de ces honours en Angleterre.
Voye^ Madox , hiji. des Baronies , &c.
Les baronies qui appartiennent à des évêques , &
qui font par quelques-uns dénommées regalia , parce
qu'elles dépendent abfolument de la pure libéralité
du prince , ne conlîftent point en une feule baronie ,
mais en plufieurs; car , tôt erant baroniœ , quot majora
prœdia.
Suivant Brafton, une baronie eft un droit indivifi-
ble ; c'en" pourquoi s'il s'agit de partager un héritage
entre co-héritiers , quoique l'on puifîe diviler quel-
ques maifons principales &c les pièces de terre qui en
dépendent: fi néanmoins la maifon principale eft le
chef-lieu d'un comté ou d'une baronie , on ne peut la
morceler; en voici la raifon : le partage de ces fortes
de biens anéantirait infenfiblement plufieurs droits
privatifs des comtés & des baronies, ce qui tourne-
rait au préjudice de l'état, qui eft compoie de comtés
& de baronies. ((?)
* Baronies (les), Giog. contrée de France,
dans le Dauphiné , ainfi appellée des deux baronies
de Meuoillon & de Montauban , dont elle eft com-
pofée.
BAROSCOPE , f. m. {Phyfiq. ) ce mot vient de
fiâpcç , onus , poids, & ntowés), video, je vois; ma-
chine inventée pour faire connoitre les changemens
du poids de l'atmofphere. Voye^ Baromètre.
Le barofeope ne fait qu'indiquer ou faire voir les
changemens du poids de l'atmofphere ; le baromètre
les mefure par des degrés ou divifions qui font pla-
cés le long du tuyau ; ainfi ces degrés ou divifions
font toute la différence du baromètre au barofeope.
Au refte il n'y a plus aujourd'hui de barofeope qui ne
foit baromètre , & ces deux noms défignent abfolu-
ment le même infiniment. (O)
BAROTINS. ^oy^BARROTINS.
BAROTS. Voyei Barrots.
* BARQUES , f. f. {Hifl. anc. & Navig.) petits
bâtimens , capables de porter fur les rivières & mê-
me fur la mer le long des côtes , Cv les premiers , fé-
lon toute apparence , que les hommes ayent conf-
truits. On navigea anciennement fur des radeaux ;
dans la fuite on borda les radeaux de claies faites
d'ofier ; telles étoient les barques d'UlyfTe, & celles
des ha'bitans de la Grande-Bretagne au tems de Cé-
iar ; ils font , dit-il , des carènes de bois léger , le rtfle
ejl de claies d'ojîer couvertes de cuir. Les anciens ont
donc eu des barques de cuir coufucs ; fans cela il n'eft
guère pofTïble d'entendre le cymbafutilis de Virgile :
mais ce qui doit paroître beaucoup plus incroyable ,
c'eft qu'ils en ayent eu de terre cuite. Cependant
Strabon , dont la bonne foi eft reconnue , dit des
Egyptiens , qu'ils navigent avec tant de facilite' , que
quelques-uns même Je fervent de bateaux de terre; 6c il
parloit d'un fait qui fe pafloit de Ion tems. Si Ton
croit aux barques de terre cuite. des Egyptiens fur le
Tome II,
BAR
89
témoignage de Strabon , on ne pourra guère rejetter
les bateaux de terre cuite , voguant à l'aide de ra-
mes peintes , fur lefquels Juvenal lance à l'eau les
Agathyrfes. Mais ce n'eft pas tout : les Egyptiens en
ont confirait avec la feuille même de cet arbre fur
laquelle ils écrivoient , & le philofophe Plutarque ra-
conte des merveilles de ces petits bâtimens ; il nous
aiTûre , dans fon traité d'Ifis & d'Ofiris , que les cro-
codiles, qui nuifoient fouvent à ceux qui alloient fur
de petites barques , refpecloient ceux qui montoient
des barques de Papyrus , en mémoire d'îlis, qui avoit
une fois navigé fur un bâtiment de cette efpece. Les
feuilles du papyrus étoient larges & fortes , & fur la
réfiftance qu'on leur trouve dans quelques livres an-
ciens qui en font faits , le P. Montfaucon a compris
qu'on pouvoit , en les coufant enfemble & en les
poifTant , en former des barques. Plufieurs auteurs
nous affûrent qu'aux Indes on en confirait d'un feul
rofeau à nœuds & vuide en -dedans ; mais fi gros ,
dit Héliodore , qu'en prenant la longueur d'un nœud
à un autre , & le coupant en deux par le milieu des
nœuds, on en formoit deux bateaux. Le témoignage
d'Héliodore eft un peu modifié par celui de Diodore
& de Quinte-Curce , qui nous font entendre , non
pas qu'on fît deux bateaux avec un morceau de can-
ne , mais qu'on faifoit fort bien un bateau avec plu-
fieurs morceaux de canne. Combien de faits dont
le merveilleux s'évanoiiiroit , ii l'on étoit a portée
de les vérifier ? Les Ethiopiens , à ce que dit Pline ,
avoient des barques pliables, qu'ils chargeoient fur
leurs épaules & qu'ils portoient au bas des énormes
chûtes d'eau du Nil , pour les remettre fur le fleuve &
s'embarquer. Scheffer croit que c'étoient des peaux
tendues par des ais circulaires , fans poupe ni proue.
Les fauvages d'Amérique creufent des arbres d'une
grandeur prodigieufe , fur lefquels ils s'embarquent
au nombre de 30 à 40 hommes, & s'en fervent, fans
autre préparation , pour faire par mer des voyages
de 70 à 80 lieues : voilà les premiers pas de la navi-
gation. Bien-tôt on fît les barques de matériaux plus
folides que la peau , la terre , & le jonc. Dans la fuite
on abattit les chênes, l'on affembla les planches &:
les poutres , & les mers furent couvertes de vaif-
lcaux. Mais qu'étoient-cc encore que les vaiiïeaux
des anciens en comparaifon des nôtres ? f^oy. Navi-
gation, Vaisseau, Bâtiment, & Canot.
Barque (Marine') ; on donne particulièrement ce
nom à un petit bâtiment de mer, qui n'a qu'un pont
&C trois mâts , le grand , celui de milene, & celui d'ar-
timon. Les plus grandes ne pafîént guère cent ton-
neaux; les barques de la Méditerranée font appareil-
lées à voiles latines ou à tiers point. En général on
donne le nom de barque à différens petits bâtimens
qui n'ont point de hune , & qui fervent à porter des
munitions , &£ à charger & décharger un navire.
Barque d'avis ; c'eft celle qu'on envoyé pour por*
ter des nouvelles d'un vaifTeau à l'autre.
Barque longue ; c'eft un petit bâtiment qui n'eft
point ponté , & plus bas de bord que les barques or-
dinaires, aigu par fon avant, & qui va à voiles & à
rames ; il a le gabarit d'une chaloupe. On l'appelle
en plufieurs endroits double chaloupe.
Barque droite ; c'efl un commandement qu'on fait à
ceux qui font dans une chaloupe , de fe placer éga-
lement , pour qu'elle aille droite fur l'eau fans pen-
cher plus d'un côté que de l'autre.
Barque en fagot ; c'eft tout le bois qu'il faut pour
conftruireune/W^w*:, qu'on porte taillé dans un vain
feau , & qu'on peut aflémbler dans le lieu où l'on en
a befoin.
Barque à eau ; ce font des petits bâtimens dont on
fe fert en Hollande pour tranfporter de l'eau douce
aux lieux où l'on en manque, Ôi. de l'eau de me pont
9°
BAR
faire du fel ; ils ont un pont , & on les remplit d'eau
juSqu'au pont. Voye^ Bateau.
Barque de vivandier ; c'eft celle qu'un vivandier
promené fur l'eau le long des quais ou autour des
Vaiffeaux, pour y vendre des vivres. (Z)
BARQUE , en terme de Brafferie , eft une efpece de
baflin de bois de chêne fait avec des planches , de fi-
gure quarrée ; il Sert aux Braffeurs à mettre leurs mé-
tiers lorsqu'ils les retirent des chaudières ou des
cuves.
BARQUEROLLE , BARQUETTE , f . f . ( Ma-
rine. ) bâtiment médiocre de voiture fansaucunmât,
qui ne va qu'à la rade &c de beau tems , Sans jamais
le haSarder en haute mer.
BARRA , ( Commerce. ) que l'on appelle quelque-
fois barro ; meSure de longueur dont on fe lért en
Portugal pour meiùrer les draps , lérges , toiles, &c.
les fix barras font dix cabidos ou cavidos , & chaque
-cabidos fait quatre Septièmes d'aunes de Paris. Foy.
Cabidos.
Barra eft encore une mefure de longueur qui fert
en quelques endroits d'ESpagne à mefurer les étoffes ;
c'eft la même chofe que la verge de Séville. Voye^
Verge. (G)
* Barra , ( Géog. ) île de l'Océan à l'occident de
l'Ecoffe. Long. 10. bat. 56. 40.
Il y a un petit royaume de ce nom dans la Ni-
gritie.
* Barra , ( Géog. ) ville del'AbyrTinie en Afri-
que , fur le lac de Zaflan , au royaume de Gorgan ,
entre Zaflan ôc Gorgan.
BARRACAN, f. m. (Commerce.} étoffe forte,
dont la chaîne eft de laine d'eftame, retorSe , la tra-
me à l'ordinaire , & qui fe fabrique comme le drap ;
le nombre des fils eft plus conSidérable , proportion
gardée , que dans les autres étoffes , parce que cel-
le-ci ne va point au foulon : il faut par la même rai-
ion qu'elle foit frappée extraordinairement fort. V.
la manufacture de drap à F article DRAPERIE. Elle eft
au fortir du métier telle qu'elle fera employée.
BARRACANÏERS , f. m. ouvriers qui font lebarra-
can. Voye^ BARRACAN.
BARRAGE , ( Commerce. ) droit établi pour la ré-
fection des ponts & partages , & particulièrement du
pavé. Ce droit s'appelle ainfi à caufe des barres ou
barrières qui traverfent le chemin aux entrées des
villes & autres lieux où ce droit eft établi. Il n'y a guè-
re que les voituriers qui le payent pour leurs char-
riots , charrettes , & chevaux de fomme. Il y a ce-
pendant des lieux où toutes les voitures en général,
& même les gens de pié , ont coutume de le payer.
Il eft inégal , & plus ou moins fort félon les lieux.
Les barrages , & entr'autres celui de Paris , appar-
tenans au Roi , formoient autrefois une ferme parti-
culière , qui eft maintenant réunie à celle des aides.
Le droit de barrage fe paye à Paris fur tout ce qui y
entre & arrive , foit par terre foit par eau. Voye^ fur
cette matière les détails dans lefquels entre M. Sa-
vary , Diclionn. du Commerce , tom. I. page 86z &
863.
BARRAGER , commis établi aux barrières pour
faire payer & recevoir les droits de barrage. Voye^
Barrage. (G)
* BARRAUX , ( Géog. ) ville de France dans le
Dauphiné , à l'entrée de la vallée de Grélîvaudan ,
fur l'Ifer.
BARRE , f. f. ce terme pris grammaticalement a
plufieurs acceptions différentes , entre lef quelles les
deux fuivantes font les plus générales. Il fe prend ou
pour un morceau de bois , de fer , ou d'autre matiè-
re, rend, quarré , ou à pans , dont la largeur &l'é-
paiffeur font peu confidérables par rapport à la lon-
gueur ; ou pour une ligne tracée foit fur la pierre
BAR
foit fur le papier. Dans le premier cas il change quel-
quefois de nom , félon la matière & la force ; &
quoique l'on dife une barre de fer ou de bois , on dit
un lingot d'or ou d'argent , une tringle de fer , un
fil d'archal. Voye^ plus bas d'autres acceptions du
mot barre.
Barre , en terme de Palais , dénote une enceinte
de menuiferie , haute de trois ou quatre pies , der-
rière laquelle les avocats font placés pour y plaider
des caufes. ^oye{ Cour.
On l'appelle en quelques endroits barre a" audience ,
& dans d'autres auditoire : eile répond à ce qui
étoit appelle parmi les Romains caufidica. On l'ap-
pelle barre parce qu'elle eft formée par une barriè-
re , appellée auffi par des auteurs cancelli , barreaux,
& caulœ , parc , par une métaphore prife d'un lieu
où parquent les moutons.
La dénomination de barre ou barreau eft aufîï don-
née aux bancs où les gens de loi ou les avocats font
affis. à caufe de la barre ou barrière qui fépare les
confeillers , des plaideurs , procureurs & autres.
En Angleterre les gens de loi qui font appelles
à la barre , c'eft-à-dire , qui ont leur licence pour
plaider , appelles licentiati , ou licentiés , font nonv
mes barriflers. Voye^kv>\OCk.T.
Barre s 'eft dit auffi d'une exception contre une
demande ou plainte. Voye^ Exception.
L'auteur des termes de pratique définit barre un
moyen rapporté par le défendeur dans un procès ,
par lequel l'acf ion du demandeur eft détruite pour
toujours.
On diftinguoit la barre en perpétuelle Se temporelle.
Barre perpétuelle eft celle qui éteint l'adion pour
toujours.
Barre temporelle , n'eft qu'une exception dilatoire.
ï'oyei Dilatoire. (H)
* Barre -sacrée , ( Hifi. anc. Myth. ) infini-
ment de bois en forme de caffette , partagé par deux
feeptres pofés en fautoir , dont les Égyptiens fe fer-»
voient dans leurs facrifices & pour leurs divinations»
Kirker. Obel. Pamph. & Œdip. jEgypt.
Barres , (Hijl. mod. ) mot dont On s'eft autre-
fois fervi pour exprimer un exercice d'hommes ar-
més & combattans enfemble avec de courtes épées,
dans un efpace fermé de barreaux ou barrières qui
les léparoient des fpecfateurs. ^ôyrçLiCE. (G)
Barres , (Jeu. ) eft encore le nom que les jeunes
gens donnent à un jeu qui confifte à fe féparer en
deux troupes , à venir fe provoquer réciproquement,
à courir les uns contre les autres entre des limites
marquées ; en forte que fi quelqu'un de l'un ou de
l'autre parti eft pris par fes adverfaires , il demeure
prifonnier jufqu'à ce que quelqu'un de fon parti le
délivre , en l'emmenant malgré les pourfuites du parti
contraire. (G)
Barres ( en Mufique ) , font des traits tirés per-
pendiculairement à la fin de chaque mefure fur les
lignes de la portée , pour féparer la mefure qui finit
de celle qui recommence. Ainfi les notes contenues
entre deux barres forment toujours une mefure com-
plète , égale en valeur & en durée à chacune des
autres mefures comprifes entre deux autres barres,
tant que le mouvement ne change pas. Mais comme
il y a plufieurs fortes de mefures qui différent con-
sidérablement en durée , les mêmes différences fe
trouvent dans les valeurs contenues entre les deux
barres de chacune de ces efpeces de mefures. Ainfi
dans la meSure à 3 tems qui Se marque par ce Signe \,
& qui Se bat lentement , la Somme des notes com-
prises entre deux barres doit faire une ronde & de-
mie ; & dans cette autre meSure à trois tems | , qui
Se bat vîte , la même Somme ne Sait que trois cro-
ches ; de forte que quatre fois la valeur contenue
BAR
«ntre deux barres de cette dernière mefure , ne font
qu'une fois la valeur contenue entre deux barres de
l'autre.
Le principal ufage des barres eft de distinguer les
mefures , & d'en indiquer le frappé qui le fait tou-
jours fur la note qui fuit immédiatement la barre. El-
les fervent aufTi dans les partitions à montrer les me-
fures correfpondantes dans chaque portée. Voy. Par-
tition.
Il n'y a guère que cent ans qu'on s'eft avifé de ti-
rer des barres de mefure en mefure : auparavant la
mufique étoit fimple ; on n'y voyoit guère que des
rondes , des blanches & des noires , peu de croches,
prefque jamais de doubles croches , avec des divi-
sions moins inégales ; la mefure en étoit plus aifée
à fuivre. Cependant j'ai vu nos meilleurs Muficiens
fe trouver embarraffés à bien exécuter l'ancienne
mufique d'Orlande & de Goudimel : ils fe perdoient
dans la mefure, faute des barres auxquelles ils étoient
accoutumés , & ne fuivoient qu'à peine des parties
chantées autrefois couramment par les Muficiens
d'Henry III. ( S )
Barre , en terme de Blafon , dénote une pièce ho-
norable qui reffemble de près à la bande , dont elle
ne diffère qu'en ce qu'elle eft plus étroite, & en ce
que la barre peut être placée dans telle partie du
champ qu'on veut ; au lieu que la fafee ou bande eft
confinée à un feul endroit. Voye^ Fasce. ( V")
Barre , en Fauconnerie , fe dit des bandes noires
qui traverfent la queue de l'épervier.
Barre , ( Commerce. ) mefure de longueur dont
on fe fert en Efpagne pour mefurer les étoffes , ainfi
qu'on fait de l'aune en France.
Il y a trois fortes de barres ; celle de Valence, celle
de Caftille , & celle d'Arragon.
La barre de Valence contient deux pies neuf pou-
ces fept lignes , qui font dix treizièmes de l'aune de
Paris ; de manière que treize barres de Valence font
dix aunes de Paris.
La barre de Caftille contient deux pies fept pouces
deux lignes &c un peu plus , qui font cinq îèptiemes
de l'aune de Paris ; ainli fept barres de Caftille font
cinq aunes de Paris.
La barre d'Arragon eft à quelques lignes près fem-
blable à celles de Valence & de Caftille ; en forte
que trois barres d'Arragon font deux aunes de Paris.
(G)
Barre , ( Marine. ) c'eft un amas de fable ou de
vafe qui fe forme à l'entrée des rivières ou des ports,
& qui la bouchent de façon qu'on n'y peut arriver
que de haute mer , ou quelquefois par des ouvertu-
res & des intervalles qu'on y trouve , & qui forment
des paffes qu'on appelle chenal. Ces fortes d'endroits
s'appellent havre de barre , rivière de barre. Voye^ HA-
VRE. (Z)
Barre : ce mot , dans la Marine, fe joint à plu-
fieurs autres, &c a des Significations particulières,
dont on peut voir ci-deflous les principales.
Barres d'arcaffe ; c'eft un terme commun à la gran-
de barre d'arcalTe , ou liffe de hourdi , & aux petites
barres d'arcaflè , ou barres de contr'arcaffe ou contre-
liffes ; elles font toutes à l'arcaffe du vaiffeau , & le
Soutiennent. La grande barre d'arcaffe eft la plus hau-
te , & pofe par ion milieu fur le haut de l'étambord,
& par les bouts fur les eftains ; c'eft le dernier des
bouts de l'arriére qui affermit la poupe. Voye^Và po-
sition de la grande barre d'arcafTc , PL IV.Jig. Z. &C
la forme de cette pièce, Plan. Vl.fig. Jf). Voye^
Lisse de hourdi.
Barres iïarcafjes , contreliffes , barres de contr'ar-
caffe ; ce font celles qui fe pofent au-deffous de la
liffe de hourdi; elles font affemblées à queue d'aron-
de dans les eftains ik. avec l'étambord par une en-
Tome II,
BAR
91
taille qu'on leur fait. Voye^_ leur pofition , Plan. IV.
fig.i. n° 11.
Barre de pont ; c'eft une autre barre d'arcafTe fur
laquelle on pofe le bout du pont du vaiffeau ; elle eft
parallèle & prefque femblable à la liffe de hourdi. V.
laPl.IV.fig. r.tfi 10.
Barre d'arcajfè de couronnement ; c'eft une longue
pièce de bois qui lie le haut du vaiffeau parfon cou-
ronnement. Voye^ PI. Ill.jîg. 1. le couronnement du
vaiffeau coté N N.
Barres de cabefian ; ce font des pièces de bois
quarrées qui fervent à faire virer le cabeftan. Voyc^
Cabestan.
Barres de virevattx , voye^ Vl RE VAUX.
Barres d'ecoutille ; ce font des traverfes de bois ,'
ou des pièces de bois étroites qui traverfent les pan-
neaux des écoutilles par-deffous , pour en tenir les
planches jointes : quelques-uns les appellent taquets
de panneaux.
Barre de Gouvernail, (Marine.) c'eftune lon-
gue pièce de bois , qui d'un bout entre dans une
mortoife qui eft dans la tête du gouvernail pour le
faire mouvoir , & l'autre bout eft attaché avec une
cheville de fer à une boucle de même métal à la barre
nommée manuelle , que le timonier tient. V. PI. IV.
Jig. l. la barre du gouvernail cotée 177.
Ce terme de barre eft équivoque ; on le prend quel-
quefois pour le timon , tx. quelquefois pour la ma-
nuelle ou la manivelle. V. Timon & Manivelle.
Changer la barre du gouvernail , c'eft la taire tour-
ner d'un autre côté.
Barre à bord : barre de gouvernail toute à bord,
c'eft-à-dire , pouffée contre le côté du vaiffeau , ou
auffi loin qu'elle peut aller.
Pouffe la barre à arriver ; c 'eft lorfqu'on veut or-
donner au timonier de pouffer la barre au vent , en
forte que le vent donne à plein dans les voiles pour
arriver.
Pouffe la barre à venir au vent, ou pouffe la barre fous
le vent ; c'eft afin de faire venir le vaiffeau au lof,
c'eft-à-dire , mettre la barre fous le vent pour virer.
BARRES de hune ( Marine. ) barreaux , tijfeaux ; ce
font quatre pièces de bois mifes de travers l'une fur
l'autre , qui font faillie autour de chaque mât, au-
deffous de la hune , pour la foùtenir , & même pour
fervir de hune aux mâts qui n'en ont point. Elles font
pofées en croix au-deffous du ton des mâts , & fer-
vent à foùtenir les haubans , les mâts de hune , les
perroquets , les effais & diverfes manœuvres Se pou-
lies. Elles font un peu arquées , le concave en dedans ;
voyeç_ à la Planche première , aux articles des M ATS ,
les chiffres iz , 13 &1 1-4, le ton , le chouquet & la hu~
ne ; au-deffous font placées les barres , barreaux ou
teffeaux. Leur croix traverfe le vaiffeau par le mi-
lieu 6c de bord à bord ; aux angles de ces barres , il
y a de petits cops de mouton, par où font amarres de
petits haubans qui traverfent aux grands haubans
pour les affermir , voye[ à la Planche première , le chif-
fre 14 , ces petits haubans.
Les barres des perroquets fervent à tenir le bâton
du pavillon. On donne autant de longueur aux barres
de hunes , que le fond de la hune a de largeur.
Les grandes barres de hune d'un vaiffeau de cent
trente-quatre pies de long de l'étrave à l'étambord, doi-
vent avoir cinq pouces & demi d'épais , & fept pou-
ces & demi de large ; toutes les autres font moins lar-
ges à proportion , & auffi plus plates & plus min-
ces ; leur longueur doit être d'environ neuf pies &
demi.
Celles du mât de mifene doivent avoir huit pies &
demi de long.
Celles du mât d'artimon , quatre pies & demi.
Celles de beaupré , quatre pies & demi , de même
que celles du grand mât de hune,
M ij
91
BAR
Celles du mat de hune d'avant doivent avoir trois
pies & demi.
Celles du perroquet de fougue, deux pies.
Celles du grand perroquet , & du petit beaupré ,
deux pies.
Celles du perroquet de mifene , un pie & demi au
moins.
Ces mefures ne font pas invariables ; il y a des
conllru&eurs qui prétendent que la longueur des bar-
res de hum , qui font placées dans la longueur de pou-
pe à proue , doit être du tiers de la largeur du vaii-
feau , que chaque fix pies de leur longueur leur doit
donner cinq pouces d'épaifTeur de haut en bas , &
que leur largeur doit être des quatre cinquièmes par-
ties de leur épaiïTeur.
A l'égard de celles qui font pofées dans la largeur
du vaifléau , ou qui le traverfent d'un bord à l'autre ;
elles doivent être un peu plus courtes , quoiqu'égales
en largeur : mais en épaifleur de haut en bas , elles
doivent avoir auffi un quart moins que de largeur.
Les barres de hune du mât de mifene doivent être
d'une fixieme partie plus courtes que celles du grand
mât. Les barres du mât d'artimon à peu près la moitié
de celles du grand mât , tant en longueur , largeur ,
qu'épaifTeur. Celles de beaupré , qui doivent être po-
fées tout-à-fait de niveau, ont les mêmes proportions
que celles de l'artimon , auffi-bien que celles du grand
mât de hune , & celles du mât de hune d'avant doi-
vent être d'une dixième partie plus petites.
Les barres de hune du grand perroquet doivent être
en toutes proportions de la moitié de celles du grand
mât de hune : il en doit être de même à l'égard des
barres du mât de hune d'avant : celles du perroquet
d'artimon doivent être un peu plus petites que celles
du grand perroquet , & celles du perroquet de beau-
pré leur doivent être égales.
Barres de cuifine ; ce font des barres de fer qui fer-
vent à foûtenir les chaudières qu'on met fur le feu ;
elles font pofées de long &c de travers dans les cuifi-
nes des vaifTeaux.
Barres ou Barrières des ports ( Marine. ) ce font
de longues poutres dont on ferme les entrées des
ports , mais plus fouvent on fe fert de chaînes. (Z)
Barre , terme de rivière , pièce de bois dans une
éclufe , qui foûtient les aiguilles.
Barre , terme de rivière , certain flot particulier à
la rivière de Seine ; ce flot efl haut environ de deux
pies , & vient fort impétueufement avec le flux de
la mer , ce qui le rend dangereux pour les batteaux
mal fermés.
La barre n'eft fenfible que jufqu'au Pont-de-1' Ar-
che.
Barres ( Manège. ) ce font les parties les plus hau-
tes de la gencive du cheval , où il n'y a jamais de
dents ; elles font fituées entre les dents mâchelieres
& les crochets de part & d'autre de la bouche ;
c'elt où fe fait l'appui du mors de la bride , qui fert
à conduire le cheval. C'efl un défaut à cet animal
d'avoir les barres rondes & peu fenfibles ; car encore
que le canon fnnple ( voye^ Canon ) porte fur la
langue , les barres ne laiflent pas d'en refïentir l'effet
au travers , tant elles font fenfibles & délicates. Il
faut aux chevaux qui ont les barres rondes & peu fen-
fibles , un mors qui en réveille le fentiment , tel qu'un
mors qui tient de l'entier , c'eft-à-dire , qui ne plie
point dans le milieu de la liberté de la langue. Les
barres tranchantes marquent une bouche extrême-
ment fine. On dit que la lèvre d'un cheval arme la
barre , pour dire qu'elle la couvre.
Barre ( Manège. ) c'efl: un morceau de bois gros
comme la jambe , rond & long de fept à huit pies ,
percé d'un trou à chaque bout , pour y arrêter deux
cordes , dont l'une s'attache à la mangeoire & l'au-
tre au poteau. F. Mangeoire , Pote av. Ce font
BAR
ces morceaux de bois qui féparent les chevaux Tu»
de l'autre dans une écurie : il font ordinairement fuf-
pendus à un pié & demi de terre. Les chevaux s'erre-
barrent quelquefois. Voye^ EMBARRER. ( V}
Barre d'appui ( Architecture. ) les ouvriers l'appel-
lent platte-bande d'appui ou plaque bande quarderonnéet
parce qu'il y a deux quarts de rond aux deux côtés
pour adoucir les arrêtes : c'elt , dans une rampe d'ef-
calier , ou un balcon de fer , la barre de fer applattie
fur laquelle on s'appuie, & dont les arrêtes font ra-
battues. (P)
* Barre de godet; c'efl une barre de fer plat en vo-
lute par fa partie faillante , & qui par l'autre bout qui
porte fur les entablemens efl à harpon ou à patte , &
qui a , à un pié de fa partie faillante , une bride pour
foûtenir les bords du godet de plomb , communément
dit gouttière.
* Barre de languettes ; c'efl une barre de fer plat
toute droite , qui fe pofe aux manteaux de chemi-
née , & fert à foûtenir la languette de la cheminée ,
ou fon devant ; elle efl plus en ufage pour les chemi-
nées de brique , que dans les autres ; parce que la bri-
que ne fe foûtenant pas par elle-même , comme le
plâtre , elle a befoin de cet appui.
* Barre de lintot ou Lintot ; c'efl une barre de fer
plat , ou quarré , qui fe pofe au lieu de lintots de bois
aux portes & aux croifées ; on en met auffi aux croi-
fées bandées en pierre , pour en empêcher l'écarte-
ment.
* Barre de trémie ; c'efl une barre de fer plat coudée
à double équerre à chacune de fes extrémités , &
dont l'ufage efl de foûtenir les plâtres des foyers des
cheminées ; elle fe place dans les trémies obfervées
dans les planchers , où elle pofe fur les folives d'en-
chevêtrure.
Barre , che^ les Fontainiers ; on appelle barre de
foudure une pièce étendue' en long , compofée de
plomb & d'étain , pefant environ 18 à 20 livres. V.
Soudure. (/C)
BARRE fendue , ou fondue ; verge de barre fondue ;
petite barre de deffous ; barre de derrière ; barre à aiguil-
les , &c. parties du métier à faire des bas. Voye-^ l'ar-
ticle Bas.
Barre , outil de Charron ; c'efl une efpece d'effieu
de fer de la longueur de quatre pies , de trois pouces
d'épaifTeur , quarré au milieu , &C arrondi par les deux
bouts ; il fert aux Charrons à conduire deux grandes
roues à la fois.
Barre {[Menuiferie. ) s'entend des pièces de bois
qu'on met aux contrevents, aux portes, &c. pour en-
tretenir les planches enfemble. Voyt^ 1 . z. Plane. IV.
di Menuiferie ,fig. J.
Barres à queues ( Menuiferie. ) ce font celles qui
entrent dans les montans , comme celles des portes
de granges , qui font à bâtis , & dont les barres font
emmanchées à queue d'aronde dans les montans.
Barre , che^ les Tonneliers , ell une pièce de bois
que ces ouvriers appliquent en travers fur chacun des
fonds d'une futaille, 6c qu'ils y affujettiflént avec des
chevilles qui appuient par un bout fur cette traverfe,'
& de l'autre entrent dans des trous pratiqués avec le
barroir, dans ce qu'on appelle le peigne du jable. La
barre fert à maintenir les douves des fonds , & empê-
che qu'elles ne fe déplacent de dedans le jable. Voye{
Peigne de jable & Barroir.
Barre , terme de Tourneur , efl un long morceau de
bois qu'on appelle auffi appui & fupport , que l'ou-
vrier a devant lui en tournant, & fur lequel il appuie
fes outils. Voyc{ Tour,
Barre à dégager ( Verrerie. ) il y a deux barres à dé-
gaSir i l'une grande, l'autre petite : elles ont l'une &
l'autre le même ufage. Les tifeurs s'en fervent pour
dégager la grille , & mettre le four en fonte. La gran-
de a onze pies de longueur fur quatorze lignes d e-r
BAR
païffeur , dans îa partie où elle eft quarrée ; cette par-
tie équarrie a vingt-deux pouces de long ; le refte eft
arrondi. La petite n'a que fept pies de long.
Barre à porter; c'eft. ainfi qu'on appelle , dans les
Verreries , un initi ument , ou barre , qui lert à tranf-
porter le port de l'anfe dans la tonnelle. Voye^ Ver-
rerie , Pot, Tonnelle.
Barre à repaffer ( Verrerie. ) infiniment de fer ou
de bois , dont on le lert dans la préparation des bri-
ques , pour la conftruction des fourneaux de Verre-
rie ou autres. Cette barre eft quarrée ; elle a neuf à
dix lignes d'épailîeur ; l'ouvrier la tient entre les
mains ; &c quand il a placé les briques feches dans la
boîte qui en détermine les dimenfions , il applique la
barre fur les bords de la boîte , il la tire fortement à
lui en fuivant toujours les bords , & enlevé dans ce
mouvement l'excédant de brique.
* Barre ( Géog. ) petite ville de France , dans le
Gévaudan , au diocefe de Mende.
BARRÉ (os ) Voyez Os & Hanche, & Dents
BARRÉES. Voyei DENT.
Barrés , adjetL ( Hift. eccléf. ) ancien nom des
Carmes , que l'on appelloit/nvcs Barrés , parce qu'ils
avoient des habits barrés &c bigarrés de blanc & de
noir, ce que l'on voit encore dans les vieilles pein-
tures du cloître de leur grand couvent de la place
Maubert à Paris. Voici quelle fut l'occafion de ces
fortes d'habits des religieux Carmes : les Sarrafîns ,
après s'être rendus maîtres de la Terre-fainte , dé-
fendirent à ceux de cet ordre de porter capuches
blancs , non plus qu'aucun autre habit blanc , parce
que le blanc étoit parmi eux une marque de diftinc-
tion & de noblefle.Les Carmes alors furent contraints
de fuivre la coutume des Orientaux , & de prendre
des manteaux barriolés : étant patTés en occident avec
cette forte d'habits , ils y furent appelles les frères
Barrés , nom qui eft demeuré à une rue du quartier
faint Paul , où ils eurent leur première maifon,jufqu'à
ce qu'ils furent tranfportés , fous le règne de Philippe
le Bel , à la place Maubert. Ils étoient venus en Fran-
ce fous le pontificat d'Honoré IV.environl'an 1285:
mais dans la fuite ces religieux reprirent leurs pre-
miers habits blancs, ainlî que Tritheme le remarque
de Laudibus Camelit. I. VI. Dominicus macer. Il y a eu
autrefois des gens d'églife qui portoient aufïi des ha-
bits bigarrés. On a vu dans le cabinet de M. Conrad ,
un abbé habillé partie de noir & de rouge, juiqu'au
bonnet , ainfi que les confuls de plulieurs villes. Le
concile de Vienne a défendu aux eccléiîaftiques de
tels habits , qui étoient appelles vejles virgata. ( G )
Barré ( en arme de B la fon ) le dit lorlque l'écu
eft divilé en forme de barres , en un nombre pair
de partitions , & qu'il eft compote de deux ou de
plulieurs couleurs, réciproquement mêlées. Il faut
dire le nombre de pièces ; par exemple , barré de tant
de pièces. Si les divifions font en nombre impair ,
il faut d'abord nommer le champ , & exprimer le
nombre des barres. Voyez Barre.
Barré Bandé , terme d'ufage, lorfque FécufTon
eft également divilé en barres & en bandes , par des
lignes tranfverfales , & des lignes diagonales , en va-
riant mutuellement les couleurs dont il eft formé.
C'eft ainli que l'on dit , il porte barré , bandé, or , &
fable. Contre-BARRÉ. /•'oy^; Contre. Urtieres en
Savoie , maifon éteinte , barré , d'or & de gueules ,
à la bande de lolanges accollées de l'un en l'autre. (V)
BARRÉ , adj. ( terme de Palais ) fynonyme à par-
tagé; ainfi lorlqu'on dit que les juges ou les avis font
barrés , c'eft-a-dire qu'il y a deux fentimens ouverts
par la chambre , lefquels font tous deux appuyés
d'un égal nombre de lùfFragcs. Voyez Partage.
Voyez ailfFl COMPARATEUR. ( H)
BARREAU , fubft. m. en terme de Palais , fignifioit
dans l'origine une barre de fer ou fermeture de bois à
BAR
9s
hauteur d'appui, qui féparoit l'enceinte où étoient
aftis les juges d'avec les parties extérieures du tribu-
nal où étoient les avocats , & autres praticiens: mais
par exteniion ce terme a fignifié dans la fuite le corps
même des praticiens , avocats, procureurs , &c. C'eft
dans ce dernier fens qu'on dit les maximes du barreau ,
l'éloquence du barreau. Quelquefois même ce mot eft
pris dans une plus grande étendue encore , comme
lynonyme au forum des Latins ; & alors il s'entend
collectivement de tous les officiers de juftice , magif-
trats & praticiens ; en un mot de tout ce qu'on ap-
pelle autrement gens de robe. (H)
BARREAU , f. m. ( en Architecture ) fe dit de toute
barre de fer ou de bois quarré , employée dans un
bâtiment. Voyez Barre.
Barreau Montant de Costiere, c'eftàune
grille de fer, dans l'endroit 011 porte le barreau, que
la porte de fer eft pendue ; & le barreau montant de
battement eft celui où la ferrure eft attachée.
Barreau , le dit en particulier des barres de fer , ou
de bois , qui grillent les fenêtres ou defTus de porte ,
ou qui font le même office dans les grilles ou portes
de fer.
Barreau à pique , ce font dans les grilles de fer des
barreaux qui palfent par la tra verte du haut , qui l'ex-
cédent & qui fe terminent en pointe.
Barreau à flamme , ce font dans les grilles de fer
des barreaux qui paffent par la traverfé du haut , qui
l'excédent & dont l'extrémité eft terminée en poin-
te, & repliées en ondes.
BARREAU , f. m. ( partie d'une preffe d 'Imprimerie^
c'eft une barre de fer , de quatre pouces de circon-
férence , quarrée par le bout qui traverfé la partie
fupérieure de l'arbre de la prefîe & la partie inférieu-
re de la vis , où il eft arrêté par des clavettes ; le
barreau eft coudé & arrondi dans le refte de la lon-
gueur , qui eft environ de trois pies ; fon extrémité
fe termine en pointe , mais elle eft garnie & revêtue
d'un manche de bois tourné , poli , de la longueur
d'un pié , fur fix à fept pouces de circonférence, &
plus gros dans fa partie fupérieure. C'eft de cet agent
que dépend tout le jeu d'une preffe ; on ne peut lans
lui faire mouvoir la vis dans Ion écrou , ni le pivot
dans fa grenouille. Voyez PI. quatrième de 1 "Imprime-
rie , fig. première & féconde BCD. D eft la poignée
du manche de bois.
* BARRE M E ( Géog. ) petite ville de France ,
dans la haute Provence , fur la rivière d'AfTc.
BARRELIERE , f. f. ( Hifl. nat. bot. ) genre de
plante , dont le nom a été dérivé de celui du P. Bar-
relier Jacobin , dont le nom eft bien connu des Bota-
niftes. La fleur de ce genre de plante eft monopé-
tale &C faite en forme de mafque ; la lèvre fupérieure
eft relevée & l'inférieure divilée en trois parties. Il
s'élève du fond du calice un piftil qui eft attaché
comme un clou à la partie poftérieure de la fleur, &
qui devient dans la fuite un fruit membraneux oblong
à quatre angles, compofé d'une leule capfule rem-
plie de lémences plates & arrondies. Plumier, noya
plant. Amer. gen. Voyez PLANTE. (/)
BARRER des articles fur fon livre , en terme
de Commerce , lignifie effacer, rayer les articles portés
en crédit fur un journal ou autre regiftre , pour faire
voir qu'on en a reçu le payement.
On barre aiiflî tout autre crédit , billet , obligation ,
quand on veut l'annuller. On appelle cette opération
barrer par ce qu'on nomme barres, les lignes ou traits
de plume , dont on croife ce qu'on veut qui demeure
inutile dans quelqu'acre ou regiftre. (6)
BARRER les veines d'un cheval ( Maréchal & Ma-
nège ) eft une opération qu'on fait fur elles pour ar-
rêter le cours des mauvaifes humeurs qui s'y jettent.
O n ouvre le cuir , on dégage la veine , on la lie def-
f us & deflbus , & on la coupe entre les deux liga-
tures.
94
BAR
Quoique je fois perfuadé du peu d'effet de cette
opération , je vais cependant la décrire , à caufe
qu'elle ne peut faire aucun mal , & qu'elle eft par
elle-même fort peu à craindre.
On barre les veines des cuifTes pour les maux de
jambes & des jarrets ; aux paturons pour les maux
de foie ; aux larmiers & aux deux côtés du cou , pour
ceux des yeux : on peut encore barrer en plulieurs
endroits. Dans toutes ces parties , excepté aux lar-
miers , on barre les veines de la manière que je vais
enfeigner , après quoi j'indiquerai la façon de prati-
quer la même opération fur les larmiers.
Quand oii veut barrer la veine de la CuilTe , on
abat le cheval (vôye{ Abattre ) enfuite on frotte
bien avec la main les endroits où l'on veut barrer ,
pour faire pouffer la veine , c'cft-à-dire , un peu au-
deffus du jarret & vers le milieu de la jambe ; ce qui
s'appelle barrer haut & bas : enfuite on fend la peau
en long dans ces deux endroits avec le biftouri ; &
ayant découvert la veine , on paffe par-deffous la
corne de chamois , avec laquelle on la détache dou-
cement , en allant & venant, de toutes les petites fi-
bres qui y font attachées : on la lie enfuite aux deux
endroits de deux nœuds , avec une foie en double ,
l'ayant fendue pour la faire faigner après la première
ligature , qui eft celle du jarret ; puis on la coupe en
haut &c en bas entre les deux ligatures : au moyen
de quoi la portion de veine qui eft entre deux ne re-
cevant plus de fang par la fuite , s'applatit & devient
inutile. Cette opération feroit bonne ,fi l'humeur qui
incommode la partie , n'y communiquoit que par
cette branche de veine , ce qu'on ne fauroit admet-
tre lorfqu'on fait l'Anatomie & le cours du fang ;
puisqu'elle s'y rend par une infinité de rameaux.
On ne barre point lorfque la partie eft enflée ; par-
ce que l'enflure refteroit indépendamment de l'opé-
ration , & qu'on auroit quelquefois bien de la peine
à trouver la veine.
Quand on barre les veines du cou , on le fait deux
doigts au-deffus de l'endroit où l'on faigne : il n'y a
qu'une circonftance à omettre , qui eft de ne pas
couper la veine entre les deux ligatures ; car s'il ar-
rivoit que la ligature d'en haut vint à couler , ce
qui peut aifément fe faire par le mouvement de la
mâchoire du cheval , celui-ci perdroit tout fon fang.
L'opération achevée , on remplit la plaie de fel.
On peut barrer les larmiers fans incifion : mettez
pour cet effet au cou la corde à faigner , les veines
s'enfleront ; paffez enfuite au-travers de la peau fous
la veine , une aiguille courbe enfilée d'une foie en
double ; faites-là fortir de l'autre côté : ôtez l'aiguille
& nouez la foie ferme , puis graiffez la partie , elle
enfle beaucoup ; mais l'enflure difparoît au bout de
neuf jours. L'endroit fe pourrit, la veine fe confoli-
de , l'endroit où l'on a fait la ligature tombe , & la
veine fe trouve bouchée.
Solleyfel enfeigne à arracher la veine du jarret :
mais comme il avertit en même tems qu'il y a du
rifque à courir, de la douleur &c de l'enflure à
effuyer , il engage plutôt à n'y pas fonger qu'à répe-
ter l'opération.
Le barrement de la veine eft très-bon pour ôter la
difformité des varices ; car comme celles-ci ne font
occafionnées que par le gonflement de la veine qui
paffe par le jarret , on empêche le fang d'y couler ,
au moyen de quoi la varice s'applanit &c ne paroît
plus.
Barrer les chevaux ( Manège ) c'eft les féparer
les uns des autres dans l'écurie , en mettant des bar-
res entr'eux. Voye{ Barre. ( f)
Barrer fe dit , en terme de ChaJJe , d'un chien qui ba-
lance fur les voies.
Barrer , ç'eft chei les Layetiers mettre des bar-
BAR
res de bois le long des couvercles pour mieux tenir
les planches dont ils font compofés.
Barrer une futaille , terme de Tonnelier ; c'eft ap-
pliquer des barres en-travers fur les douves des fonds,
6c les y affujettir avec des chevilles. Ce mot fe dit
auffi des trous qu'on fait avec le barroir dans les pei-
gnes du jable. f^oye^ Barre.
♦BARRETTE , f. f. (Hift. mod. eccléf.) bonnet
que le pape donne ou envoyé aux cardinaux après
leur nomination. En France , le Roi donne lui-même
la barrette aux cardinaux qui ont été faits à fa nomi-
nation. A Venife , ce font les nobles qui la leur por-
tent. La barrette étoit originairement un bonnet de
toile mince , & qui s'appliquoit exactement fur les
oreilles ; une efpece de béguin d'enfant , qui n'étoit
qu'à l'ufage des papes , & qui dans la fuite a été ac-
cordé aux cardinaux.
Barrette , en général veut dire , parmi les Hor-
logers , une petite barre : mais on donne ce nom à des
chofes très- différentes. C'eft ainfi que l'on appelle ,
par exemple , une très-petite barre que l'on met dans
le barrillet pour empêcher que le reffort ne s'aban-
donne. Voye^ lafig. 4g. 1 b , PI. X. de F Horlogerie.
Barrette l'une roue , fignifie encore, parmi les
Horlogers , ce que l'on appelle rayon dans une roue
de carroffe. Voye^ Roue. Au moyen de ces barrettes
on rend la roue beaucoup plus légère , en lui confer-
vant cependant une certaine force.
Barrette, s'entend aufîi, en Horlogerie , d'une
petite plaque pofée fur l'une ou l'autre platine , &
dans laquelle roule le pivot d'une roue , au lieu de
rouler dans le trou de la platine, foye^ lafig. 4J. b,
Plane he X. de i Horlogerie.
Elles font en général fort utiles , en ce que i°. elles
allongent les tiges des roues, & par là leur donnent
beaucoup plus de liberté ; & i°. qu'elles donnent
moyen de faire des figerons , chofe très - effentielle
pour conferver l'huile aux pivots des roues, f^oye^
Pivot , Tige , Tigeron , Platine , &c. Dans les
montres limples bien faites , il y a ordinairement
deux barrettes , l'une à la platine de deffus , & l'autre
à la platine des piliers. La première fert pour le pi-
vot de la roue de champ d'en haut , & l'autre pour
le pivot de cette roue , & celui de la petite roue
moyenne. ( T )
BARRICADE, terme de guerre , eft une efpece de
retranchement fait à la hâte avec des tonneaux ou
paniers chargés de terre , d'arbres , des paliffades , ou
chofes femblables, pour mettre une place ou un pofte
en état de fe défendre contre l'ennemi. On fait fervir
ordinairement à cet ufage des pieux ou des poteaux
traverfés de bâtons , & ferrés par le bout: on a cou-
tume de les planter dans les paffages ou brèches ,
pour arrêter également la cavalerie & l'infanterie.
Foye{ Palissade. ( Q )
BARRIERE , f. f. ( Gramm. ) fe prend ou pour un
affemblage de planches deftiné à fermer un paffage
à l'entrée d'une ville ou ailleurs ; c'eft en ce fens
qu'on dit, la barrière de Vaugirard, la barrière de Sève :
ou pour les limites d'un état ; l'on dit les Alpes fer-
vent de barrière à l'Italie : ou en différens autres fens ,
qu'on peut voir ci-deffous.
Barrière virginale , virginale clauflrum , en
Anatomie ; c'eft la même chofe que V hymen. Voye%_
Hymen. (Z.)
Barrière, Traité de la Politique , eft celui qui
fut conclu en 1716 entre l'empereur Charles VI. &
les Hollandois ; il contient 29 articles : en vertu de
ce traité, les Hollandois ont droit de mettre des gar-
nifons de leurs troupes dans les villes de Namur ,
Tournai , Menin , Furnes , "Warneton , Ypres , le
fort de la Knoque , & dans les villes de Dendermon-
de & de Ruremonde. La garnifon doit être moitié
BAR
Hollandoife , & moitié Autrichienne. Ces troupes
ou ceux qui les commandent en leur nom , font obli-
gés à prêter ferment de fidélité à la maiion d'Autri-
che , avant que d'entrer dans ces garnifons,
Barrière, (Commerce.) On appelle ainfi dans
les principales villes de France , particulièrement à
Paris , les lieux où font établis les bureaux des en-
trées , & oii les commis en reçoivent les droits , fui-
vant les tarifs ou pancartes réglées au confeil du roi.
On leur a donné le nom de barrières , parce que les
paflages par lefquels arrivent les voitures & les mar-
chandées fujettes aux droits , font traverfés par une .
barre de bois qui roule fur un pivot , & qui s'ouvre
ou le ferme à la volonté du commis.
Il y a à Paris foixante barrières , qui font toutes pla-
cées à la tête des fauxbourgs , & dans vingt-deux def-
quelles , outre les commis du barrage , il y a des com-
mis pour la douane qui examinent les lettres de voi-
ture , reçoivent les principaux droits , & veillent aux
intérêts des fermiers généraux. Les autres barrières
ne font , pour ainli dire , que des barrières fuccurla-
îes , pour tenir plus libres les premières, qui ne man-
queroient pas d'être embairaiVées s'il n'y avoit qu'el-
les qui fufîent ouvertes.
C'eft à ces foixante barrières que toutes les voitu-
res , &c ceux qui font chargés des denrées comprifes
dans les tarifs , doivent s'arrêter , fourFrir la vilite ,
& payer les entrées. Les commis ont même la per-
mifîion de vifiter les carrofles, berlines, chaifes , <S*c.
des particuliers , les porte-manteaux , vailles , cof-
fres , pour voir s'il n'y a point de marchandile de
contrebande. Voye^ fur cette matière le Diciionn. du
Comm. (G)
Barrière , en Architecture , eft un afTemblage de
pièces de bois qui fert de bornes ou de chaînes au-
devant , & dans les cours des hôtels &c palais. (P)
BARRIERES , en termes de Fortification , font des el-
peces de portes faites dans un paiTage ou un retran-
chement , pour pouvoir en défendre l'entrée , &
en faciliter la fortie.
On les fait communément de grands poteaux d'en-
viron quatre à cinq pies de long , & placés à la diftan-
ce de dix pies les uns des autres, avec des folives en
travers , afin d'empêcher les chevaux & les hommes
de forcer le partage. Dans le milieu eft une barre de
bois qui eft mobile , & que l'on ouvre & ferme à fon
gré. Les barrières qui ferment les portes ou les ouver-
tures des lignes de circonvallation , font à fléau tour-
nant fur un poteau , dont le fommet taillé en pivot ,
eft planté fur le milieu , où il partage l'ouverture en
deux partages égaux. Ce fléau bat contre les deux
autres poteaux plantés aux deux extrémités des paf-
fages , avec des entailles pattées , auxquelles il s'ac-
croche 6c fe ferme avec une cheville plate. Attaque
des places , de Vauban. ( Q )
Barrière, (Manège.) petit parc fermé où l'on
faifoit les joutes, les tournois, les courfes de bague ,
&c> Sitôt qu'un cheval de bague a franchi la barrière,
il court de toute fa force. ( V)
BARRIERE , en terme de Metteur-en-oeuvre , n'eft au-
tre chofe qu'une bande en manière d'anfette , dans
laquelle on arrête le ruban d'un bracelet. Vaye^ An-
SETTE.
BARRIL , (Commerce.) vaifleau oblong de forme
fphérique , ou plutôt cylindrique , lervant à contenir
diverfes efpeces de marchandifes, tant feches que li-
quides: il eft plus petit que le tonneau. V. Mesure.
Le barrit Anglois , mefure de vin , contient le hui-
tième d'un tonneau , le quart d'une pipe , la moitié
d'un muid , ce qui fait trente -une melures & demie
de celles que l'on nomme en Angleterre galions , &
qui contiennent quatre pintes de Paris. Le barrit con-
tient trente - lix gallons de bierre , ÔC trente - deux
d'aile. ^ov^Pipe, Tokneav, 6-f,
BAR
95
Le barrit de bierre > de vinaigre , ou d'autre liqueur
dont on veut faire du vinaigre , doit contenir trente-
quatre de ces mefures , fuivant l'étalon de la quarte
d'aile, réglé par l'ordonnance de Guillaume III. c.
xxj. dixième & onzième année de fon règne.
Le barrit de Florence eft une mefure de liqueurs
qui contient vingt bouteilles , ou le tiers d'une étoile >
ou Jtaïo. Savary l'appelley/dr.
Barrit eft encore en ulage pour figoifier une cer-
taine quantité de marchandifes , un certain poids qui
change fuivant la diverfité des denrées.
Le barrit de harengs doit contenir trente-deux gal-
lons , mefure de vin, c'eft-à-direfoixante-quatre pots
de Paris , ce qui fait environ vingt-huit gallons , fui-
vant l'ancienne règle > & cela va pour l'ordinaire au
nombre de mille harengs laites.
Le barrit de faumon doit contenir quarante-deux
gallons , ou quatre-vingts-quatre pots de Paris. Et le
barrit d'anguilles autant.
Le barrit de favon doit contenir deux cens cin-
quante-fix livres,
Nous nous fervons également en France du mot
de barrit pour une certaine quantité de marchandi-
fes. On dit un barrit d'efturgeon , de thon , d'anchois ;
un barrit ou caque de poudre pour les vaifleaux , eft
ordinairement de cent livres : on dit encore un bar-
rit àe chair falée ; un barrit d'huile d'olive ; un barrit
de câpres , d'olives , de vinaigre , de verjus , de mou-
tarde , pour dire un barrit plein de l'une de ces cho-
fes. (G)
Barril , ( Marine. ) Barrit de galère , c'eft un bar*
/■//qu'un homme peut porter plein d'eau , & dont il
fe fert pour en remplir les barriques , que l'on ne peut
tranfporter ou à la fontaine ou à la rivière , où l'on,
va faire l'eau.
Barrit de quart ; c'eft le barril de galère qu'on don-
ne plein d'eau le foir à ceux qui doivent taire le quart
de la nuit.
Barrils où l'on met les viandes.
Barrit de poudre ; c'eft fur mer , comme on la
déjà dit , cent livres de poudre miles dans un barril.
Barrils à bourfe ; c'eft un barril couvert de cuir ,
où le canonnier met de la poudre fine : on l'appelle
ainfi à caufe qu'il fe ferme comme une bourfe. (Z)
Barrils foudroyans 6- flamboyans , font
dans r Artillerie , des barrils remplis d'artifices qu'on
fait rouler fur l'ennemi lorfqu'il veut franchir les
brèches & monter à l'aflaut. ( Q )
Barril de trompes , terme d' Artificier > c'eft un
afTemblage de plufieurs artifices appelles trompes,
enfermés dans un barrilou fourreau de toile goudron-
née, pour les faire partir de deflus l'eau , où on le
fait enfoncer jufqu'au collet par le moyen d'un con-
tre-poids.
Barril à scier, ( Tonnelier.) c'eft un infini-
ment fur lequel les Tonneliers pofent les douves
qu'ils veulent rogner avec la feie. Il confifte en deux
moitiés de barrils a juftées l'une au-defîus de l'autre par
trois douves communes ; chacune de ces moitiés a
deux fonds , de forte que cet infiniment peut fervir
à trois ufages. i°. Il leur fert d'efeabeau pour feier
les douves qu'ils pofent deflus , en appuyant^ncore
un genou fur la douve pour Paflujettir. z°. Il peut
leur fervir de fiége pour s'afleoir dans leurs bouti-
ques ; & en troilieme lieu , il peut encore leur fervir
comme d'un réfervoir pour y ferrer ce qu'ils veu-
lent , au moyen d'un trou pratiqué au fond fupérieur
de chaque barrit. Cer infiniment a deux pies ou en-
viron de hauteur en tout. L'efpace qui eft entre cha-
que barril eft vuide , pour donner plus de légèreté à
la machine totale qui eft ronde , Se d'environ un pié
de diamètre. Voye{ PL II. du Tonnelier ,fig. z.
BARRILLAGE, f. m. (Commerce.) fe dit des petit?
96
BAR
BAR
barrils qui tiennent environ la huitième partie du
muicl & au-deffous.
En fait de commerce de falinc , barrillage s'entend
de toutes fortes de tonneaux ou futailles , comme
gonnes , hambourgs , barrils , demi-barrils , &c. Il y
a des contrôleurs du barrillage de la faline.
L'ordonnance des Aides de 1680, tit. 4. des en-
trepôts & du barrillage , détend exprefTément de faire
le barrillage , c'eft- à -dire de faire arriver du vin en
bouteilles , cruches ou barrils , ni vaiffeaux moindres
que muid, demi- muid, quart & huitièmes , à l'ex-
ception des vins de liqueur qui viennent en caiffe.
Il n'eft pas même permis aux débitans d'avoir chez
eux du vin en bouteilles , cruches & barrils. ( G)
BARRILLARD , f. m. (Marine.) c'eft ainfi qu'on
appelle fur les galères l'officier qui a foin du vin &
de l'eau.
B ARRILLATS, f. m. pi. dans les ports où il y a un
arfenal de Marine , on donne ce nom aux ouvriers
qui travaillent aux futailles.
BARRILLET, f. m. diminutif de barril, fe dit de
fout vàiffeau qui a la forme du barril , & qui eft plus
petit. Vqyt{ Barril.
Barrillet ou Caisse , (en Anatomie.) fignifîe
une affez grande cavité derrière le tambour de l'o-
reille ; elle eft doublée d'une membrane qui a plu-
fieurs veines & artères. On dit que dans les enfans
elle eft pleine d'une matière purulente ; elle a dans
fa cavité quatre petits os , qui font le marteau, l'en-
clume , l'étrier , &c l'orbiculaire. Voyt{ Oreille , &
Tympan. (L)
Barrillet, f. m. (Hydraulique.) eft un corps de
bois arrondi en dedans 6c en dehors , avec un clapet
poié fur le deffus. Ce corps loge dans une pompe à
bras qui n'a point de corps de pompe , & fert de fond
au jeu du pittoh, qui fait lever le clapet du barillet,
& enfuite le fait refermer ; & au moyen de la filaffe
dont il eft garni, l'eau ne peut retomber dans le puits
quand la loûpape eft fermée.
On appelle encore quelquefois barrillet le pifton
d'une pompe à bras qui n'a point de corps de pompe,
mais qui joue dans im tuyau de plomb , & qui tire
l'eau par afpiration d'un puits ou d'une citerne.
Ces fortes de barrillets font attachés à une ance de
fer fufpendue à une verge auffi de fer ; & ils ont fur
le deflùs un clapet qui s'ouvre & fe ferme à chaque
coup de pifton. Voye^ Pompe , Piston , Cla-
pet. (K)
Barrillet, nom queles Horlogers donnent à une
efpece de boîte cylindrique ou tambour , qui con-
tient le grand refTort. Voye^ la figure 46 , 4 J , 49.
Planche X. de V Horlogerie .
Il eft compofé de deux parties , du barillet B pro-
prement dit , & de fon couvercle C. Le barillet a
dans fa partie B un rebord pour empêcher la chaîne
de gliffer ; & dans le dedans vers le milieu de fa hau-
teur , un crochet auquel s'attache l'œil d'un bout du
refTort. Ce crochet eft tourné en fens contraire de
celui qui eft à l'arbre , afin que le refTort foit attaché
fixement à l'un & à l'autre : par ce moyen , on bande
le refTort, en faifant tourner le barillet; car on fait
mo uvoir en même tems le bout du refTort qui lui eft
attacha, & l'autre bout fixé à l'arbre étant immobi-
le , cette opération doit néceffairement produire cet
effet . Foy'e{ Crochet.
On diitingue dans les montres & dans les pendu-
les les barillets par les parties auxquelles ils fervent ;
comme barillet du mouvement , de la fonnerie , &c.
dans les pendules , fur-tout dans celles que l'on fait
en France , comme il n'y a pas de fufée , le barillet
eft denté à fa partie inférieure , & engrené dans le
pignon de la première roue du mouvement, ou de la
fonnerie ; de façon que le refTort étant bandé , fait
tourner le barillet , qui communique ainfi le mouve-
ment à toute la machine. Voyc^ lafig. io.Q,W , A
Voyei Montre , Ressort , Arbre de barillet,
Pendule, Sonnerie, &c ( T)
* BARRILLIER , f. m.(Hift. mod. ) nom d'un de
ces anciens officiers de l'échanfonnerie du roi & des
princes , qui avoient foin du vin. Il en eft parlé dans
l'état des officiers de l'échanfonnerie du tems de S.
Louis, en 1261.
BARRIQUAUT , f. m. ( Commerce. ) fe dit de cer-
taines petites futailles ou tonneaux , dont les gran-
deurs ne font point réglées : on dit un barriquaut de
fucre , un barriquaut de foufre , &c. ( G)
BARRIQUE , f. f. ( Tonnellier. ) tonneau Ou fu-
taille , fait de mairrain & cerclé de cerceaux de
bois liés avec de l'ofier, & propre à contenir plu-
fieurs fortes de marchandifes , & partievdierement
de l'eau-de-vie.
Les barriques n'ont pas de grandeur réglée par^-
tout : à Paris il faut quatre barriques pour faire trois
muids.
Ce font les Tonnelliers qui fabriquent & relient
les barriques.
Les quatre barriques de vin font à Paris trois muids,
à Bordeaux un tonneau fix tierfons , en Anjou deux
pipes. La barrique contient 210 pintes de Paris , ou
vingt-fix feptiers un quart de feptier ; ce qui revient
à 360 pintes de Hollande.
La barrique fe mefure encore par verges ou vettes,
& varie pour le nombre de ces verges ou vettes dans
prefque tous les endroits»
En Angleterre la barrique de vin ou d'eau-de-vie
eft de foixante & trois gallons , ce qui revient à 25a
pintes de Paris ; quatrede ces pintes faifant le gallon.
^ôj-.Gallon. On met les fardines& leur huile auffi-
bien que celle de morue en barrique. (G)
BARROYEMENT , f. m. vieux terme de Prati-
que , qui fignifîe un délai de procédure,
BARROYER , v. neut. vieux terme de Pratique ,
qui fignifioit à la lettre faire des procédures à la barrt
de la cour , & en général injlruire un procès. Il ne le
dit plus à préfent que par dérifion. (H)
BARROIR , f. m. (outil dont fe fervent les Tonne-
liers. ) c'eft un inftrument fait en forme de longue
tarriere , dont la mèche eft étroite & amorcée par le
bout. C'eft avec cet outil qu'on perce des trous au-
defîus du jable , pour y faire entrer les chevilles qui
tiennent les barres des futailles. Voye^ Planche II»
du Tonnelier , figure première.
BARROTÉ , adj. ( en Marine. ) on dit vàiffeau bar-
roté, lorfque le fond de cale eft tout rempli , ou rem-
pli jufqu'aux barrots.
BARROTS , ou Baux , (Marine.) Voyei Bau.
Quoiqu'on fe ferve indifféremment des termes de
baux & de barrots , il eft pourtant certain que ceux
qui font les plus exacf s , ne fe fervent de celui de bau.
que pour les folives du premier pont , & qu'ils em-
ployent celui de barrot pour les folives des autres
ponts. Voye{ Planche V ' I , figure 8. la forme de cette
pièce de bois.
Il y a les barrots des gaillards. Voye^ leur Jituation,
Planche IF. fig. prem. n°. 142.
Les barrots de la dunette, n°. i5l.
Les barrots du celtis , n°. 128. (Z)
BARROTINS , (Marine.) lattes à baux ; ce font
de petits foliveaux qu'on met entre les baux & les
barrots fous les ponts pour les foùtenir. Voye^ PI.
VI. fig. 10 , la forme de cette pièce de bois.
Barrotins du premier pont. Foye^ leur fltuation PI,
I F. fig. prem. n°. y 2.
Barrotins du fécond pont , n°. 120.
Barrotins des gaillards, n°. 143-
Barrotins d'ècoutilles , demi-baux ou demi-bar-
rots ; ce font en Marine des bouts de baux & de bar-
rots , qui fe terminent aux hiloires & qui font foûte--
nus
BAR
nus par des pièces de bois nommées arcboutans , mi-
fes de travers entre deux baux. Voye^ la forme de. cette
pièce Planche FI. figure il.
Barrotins de caillebotis y ce font de petites pie-
ces de bois qui fervent à faire les caillebotis , &
auxquelles on donne la tonture ou rondeur du pont
du vaifTeau en fa largeur. Voye^ Caillebotis. (Z)
* BARROU, (le) Géog. rivière d'Irlande , dans
la province de Leinfter; elle paffe à Caterlogh & à
Leighlin , reçoit la Nure 6c la Sheire , forme le Havre
de Waterford , & le jette dans la mer d'Irlande.
BARSANIENS , ou SEMIDULITES , f. m. plur.
(Jttift. eccléf.') hérétiques qui s'élevèrent dans le vie.
fiecie. Ils foûtenoient les erreurs desGadanaïtes, &
faifoient conlifter leurs facrifîces à prendre du bout
du doigt la fleur de farine , 6c à la porter à la bouche.
S. Jean de Damas , des Héref. Baronius A. C. iji.
n\y4.'G)
BARTAVELLE, f. f. (oifeau.) Perdrix rouge.
*BARTHELEMI, (Saint) Géog. petite ile de
l'Amérique , l'une des Antilles , au midi de celle de
S. Martin, lat. ij.
* BARTHELEMITES , f. m. pi. ( Hift. ecclef. )
clercs féculiers fondés par Bartheiemi Hobzauzer à
Saltzbourg, le Ier Août 1640, & répandus en plu-
fieurs endroits de l'Empire , en Pologne , & en Cata-
logne. Ils vivent en commun ; ils font dirigés par un
premier préfident , 6c des prélidens diocéfains : ils
s'occupent à former des eccléfiaftiques. Les préfidens
diocéfains font fournis aux ordinaires ; & iis ont fous
eux les doyens ruraux. Ces degrés de fubordi
& quelques autres , répondent avec fuccès au but de
leur inltitution : un curé Banhelemite a ordinairement
un aide ; & fi le revenu de fa cure ne fumt pas pour
deux , il y eft pourvu aux dépens des curés pl.is ri-
ches de la même congrégation : tous font engagés
par vœux à fe fecourir mutuellement de leur liiper-
flu , fans être privés cependant de la liberté d'en dif-
pofer par legs , ou d'en affilier leurs parens. Ce fonds
augmenté de quelques donations , fuffit à l'entretien
de plufieurs maifons dans quelques diocefes. Quand il
y en a trois , la première eft un féminaire commun
pour les jeunes clercs, où ils étudient les humanités ,
la Philolophie , la Théologie , & le Droit canoni-
que. On n'exige aucun engagement de ceux qui font
leurs humanités : les philofophes promettent de vi-
vre & de perfévérer dans l'inftitut ; les théologiens
en font ferment. Ils peuvent cependant rentrer dans
le monde avec la permiffion des fupérieurs , pourvu
qu'ils n'ayent pas reçu les ordres facrés. Les curés
& les benéticiers de l'inftitut habitent la féconde mai-
fon ; la troiiieme eft proprement l'hôtel des invalides
de la congrégation. Innocent XI. approuva leurs
conftitutions en 1680. La même année l'empereur
Léopold voulut que dans fes pays héréditaires ils
fuflent promus de préférence aux bénéfices vacans;
& le même pape Innocent XI. approuva en 1684 les
articles furajoûtés à leurs règles pour le bien de l'inf-
titut.
* BARUA , ( Géog. ) ville d'Afrique dans l'Abyffi-
nie , capitale du royaume de Barnagaflé , lituée près
du fleuve de Marabu.
BARUCH , ( Prophétie de ) Théolog. nom d'un des
livres de l'ancien Teftament , qui contient en fix
chapitres les prophéties de Baruck , fils de N->ri ou
Nerias , & difcipîe ou fecrétaire du prophète Jére-
mie. Nous n'avons plus l'exemplaire Hébreu de la
prophétie de Baruch: mais on ne peut clouter qu'il
n'ait écrit en cette langue , comme les frequens Hé-
braïfmes dont elle eft remplie le font connoître. On
en a deux verrions Syriaques : mais le texte Grec pa-
roît plus ancien. Les Juifs ne reconnoiflent point ce
livre pour canonique ; & on ne le trouve point dans
les catalogues des livres facrés d'Origene , de Mcli-
Tome II,
BAS
97
ton , de S. Hilaire , de S. Grégoire de Nazianze , de
S. Jérôme , & de Rufin. Mais dans le concile de Lao-
dicee, dans S. Cyrille, S. Athanafe, & S. Epiphane,
il eft joint à la prophétie de Jéremie. La prophétie de
Baruch doit être auffi coinprife fous le nom de ce der-
nier prophète, dans les catalogues des Latins; car
S. Auguitui , & plufieurs autres Pères , citent les pro-
pEçties de Baruch fous le nom de Jéremie. Dupin,
Dijfen.prélim. fur la Bible. ( G )
BARULES, f. m. pi. {Hift. ecd. ) certains héréti-
ques dont parle Sanderus , qui foûtenoient que le fils
de Dieu avoit pris un corps phantaftique ; que les
âmes avoient toutes été créées avant la naiflance du
monde , & qu'elles avoient toutes péché à la fois.
Sander. h&rêf. 149. ( G )
* BARUSSES , ( Géog. anc. & mod. ) cinq îles de
l'Océan oriental , qui , à en juger par ce que Ptolo-
mée en dit , pourroient bien être celles que nous con-
noiflons fous le nom de Philippines. Mercator croit
que ce font celles de Manclanao , Cailon , Sabut , &
les voifines de Circium ; & Baudrand , celles de Ma-
caffar, Gilolo , Ceram , & autres connues fous le
nom de Moluques.
BARUTH, ( Commerce. ) mefures des Indes qui
contient dix-lept gantans ; c'eft-à-dire cinquante à
cinquante-fix livres de poivre poids de Paris, f^oye^
Gantan. (<?)
* BARUTH, (Géog.) ancienne ville de Turquie
dans ta Syrie , fur le bord de la mer. Long. Sz. 60.
lat. 33. 30.
* BARWICK, ou BERWICK, (Géog.) ville
d'Angleterre dans le Northumberland , à l'embou-
chure de la Tweede.
* BARZOD , ( Géog. ) petite ville de la haute
Hongrie , dans le comté de même nom , fur la riviè-
re de Hernath. Le comté de Bar^od eft borné au
feptentrion par ceux de Sembin & de Torna ; à l'oc-
cident par ceux de Gomor & de Sag ; au midi par ce-
lui de Hcrwecz ; & à l'orient par celui de Chege.
* BAS, adj. terme relatif à la diftance , ou la di-
menfion en longueur confidérée verticalement: haut
eft le corrélatif de bas. L'ufagc , la coutume, les con-
ventions, l'ordre qui règne entre les êtres, & une in-
finité d'autres caules , ont affigné aux objets , foit de
l'art , foit de la nature , une certaine diftance ou di-
menfion en longueur confidérée verticalement. Si
nous trouvons que l'objet foit porté au-delà de cette
diftance ou dimenfion , nous difons qu'il eft haut ;
s'il refte en-deçà , nous difons qu'il eft bas. Il femble
que nous placions des points idéaux dans les airs ,
qui nous fervent de termes de comparaifon toutes
les fois que nous employons les termes bas Se haut
ou élevé. Nous diions d'un clocher qu'il eft bas , &c
d'une enfeigne qu'elle eft haute ; quoique de ces deux
objets l'enleigne foit le moins élevé. Que fignifîcnt
donc ici les mots haut & bas ? linon que relative-
ment à la hauteur ou à la diftance verticale à laquelle
on a coutume de porteries clochers, celui-ci eft bas ;
6c que relativement à la hauteur à laquelle on a cou-
tume de pendre les enfeignes , celle-ci eft haute. Voi-
là pour la diftance & pour l'art ; voici pour la di-
menfion & pour la n iture. Nous difons ce chêne eft
bas , 6c cette tulipe eft haute : ce qui ne fignifîe autre
chofe,finon que relativement à la dimenfion verticale
que le chêne &: la ttdipe ont coutume de prendre ,
l'un pèche par défaut , & l'autre par excès. C'eft
donc dans l'un & l'autre cas Poblervation 6c l'expé-
rience qui nous apprennent à faire un ufage conve-
nable de ces fo- rcs de mots, qu'il ne faudroit peut-
être pas définir, puifque l'exactitude , quand on fe
la propofe , rend la définition plus obfcure que la
chofe. Mais on n'écrit pas pour fes contemporains
feulement.
Bas , C Manne. ) les hauts 6c les bas du vaiiTeau;
V N
98
BAS
les hauts du vaiffeau , ce font les parties qui font fin-
ie pont d'en-haut ; & les bas, celles qui font deffous.
iZ)
B AS LE P AVI LLON , mettre bas le pavillon ( Marine )
-c'eft-à-dire abaiffer le pavillon pour fe rendre ou
pour faluer un vaiffeau plus puiffant à qui l'on doit
■cet honneur.
On dit de même avoir les mâts de hune à bas.(Z~)
Bas , adj. ( en Mufique. ) fignifie la même choie
eue grave, & eft oppofé à haut ou aigu : on dit ainfi
que le ton eft trop bas , qu'on chante trop bas , qu'il
faut renforcer les fons dans le bas. Bas lignifie aufîi
quelquefois doueement , à demi-voix, &c. 6c en ce
.iens il eft oppofé à fort ; on dit parler bas , parler
chanter ou plalmodier à bajje voix : il chantoit ou
parloit li bas qu'on ne l'entendoit point.
Coule^Ji lentement , & 'm'urthureçji bas ,
Qu'IJfé ne vous entende pas.
La Mothe , Opéra d,IJfé. ( S )
BAS , (Man.~) mettre bas , porter bas. Voy . PORTER.
Avoir les talons bas. Voye{ TALON. ( V)
BAS fe prend en Vénerie , en Chajfe , pour peu éle-
vé : on dit bas voler, ou bavoler, en parlant de la per-
drix , ou autres oifeaux qui n'ont pas le vol haut.
Bas , f. m. ( Bonneterie , & autres marchands , com-
me PeauJJîer, &c. ) c'eft la partie de notre vêtement
quifert à nous couvrir les jambes : elle fe fait de lai-
ne , de peau , de toile , de drap , de fil , de filofelle ,
de foie ; elle fe tricote à l'aiguille ou au métier. Voy.
pour les bas tricotés à l'aiguille, l'article Tri coter.
Voici la defeription du bas au métier, 6c la manière
de s'en fervir. Nous avertirions avant que de com-
mencer, que nous citerons ici deux fortes de Plan-
ches : celles du métier à bas , qui font relatives à la
machine ; 6c celles du bas au métier , qui ne concer-
nent que la main d'oeuvre. Ainfi la PL III. fig. y.
du métier à bas , n'eft pas la même Planche que la
PI. III. fig. y. du bas au métier.
Le métier à faire des bas eft une des machines les
plus compliquées & les plus conféquentes que nous
ayons : on peut la regarder comme un feul 6c unique
raifonnement , dont la fabrication de l'ouvrage eft
la conclufion ; aufîi regne-t-il entre fes parties une fi
grande dépendance , qu'en retrancher une feule , ou
altérer la forme de celles qu'on juge les moins im-
portantes , c'eft nuire à tout le méchanifme.
Elle eft fortie des mains de fon inventeur pref-
que dans l'état de perfection où nous la voyons ; &
comme cette circonftance doit ajouter beaucoup à
l'admiration, j'ai préféré le métier tel qu'il étoit an-
ciennement , au métier tel que nous l'avons , obfer-
vant feulement d'indiquer leurs petites différences à
mefure qu'elles fe préfenteront.
On conçoit , après ce que je viens de dire de la
liaiion & de la forme des parties du métier à bas ,
qu'on fe promettrait en vain quelque connoiffance
de la machine entière , fans entrer dans le détail 6c
la defeription de ces parties : mais elles font en û
grand nombre , qu'il femble que cet ouvrage doive
excéder les bornes que nous nous fommes preicrites,
& dans l'étendue dudifeours, & dans la quantité
des Planches. D'ailleurs, par où entamer ce dif-
conrs ? comment faire exécuter ces Planches? La
liaifon des parties demanderait qu'on dît & qu'on
montrât tout à la fois ; ce qui n'eft poffible , ni dans
le difeours , où les chofes fe fuivent néceffairement ,
ni dans les Planches , où les parties fe couvrent les
unes les autres.
Ge font apparemment ces difficultés qui ont dé-
tourné l'utile 6c ingénieux auteur du Spectacle de la
nature , d'inférer cette machine admirable parmi cel-
les dont il nous a donné la defeription : il a fenti
qu'il falloit tout dire ou rien; que ce n'étoit point ici
BAS
un de ces méchanifmes dont on pût donner des idées
claires & nettes , fans un grand attirail de Planches
tk de difeours ; 6c nous fommes reftés fans aucun fe-
cours de fa part.
Que le lecteur, loin de s'étonner de la longueur
de cet article , foit bien perluadé que nous n'avons
rien épargné pour le rendre plus court , comme nous
efpérons qu'il s'en appercevra, lorfqu'il coniidérera
que nous avons renfermé dans l'efpace de quelques
pages l'énumération & la defeription des parties ,
leur méchanifme , & la main d'œuvre de l'ouvrier.
La main d'œuvre eft fort peu de chofe ; la machine
fait prefque tout d'elle-même : fon méchanifme en
eft d'autant plus parfait & plus délicat. Mais il faut
renoncer à l'intelligence de ce méchanifme , fans
une grande connoiffance des parties : or j'ofe affûrer
que dans un métier , tel que ceux que les ouvriers
appellent un quarante-deux , on n'en compterait pas
moins de deux milles cinq cens , tk par-delà , entre
lefquelles on en trouverait à la vérité beaucoup de
femblables : mais fi ces parties femblables font moins
embarraffantes pour l'efprit que les autres , en ce
qu 'elles ont le même jeu, elles font très-incommo-
des pour les yeux dans les figures , où elles ne man-
quent jamais d'en cacher d'autres.
Pour furmonter ces obftacles , nous avons crû de-
voir fuivre ici une efpece d'analyfe , qui confifte à
diftribuer la machine entière en plufieurs affembla-
ges particuliers ; repréfenter au - deffous de chaque
affemblage les parties qu'on n'y appercevoit pas dif-
tinclement ; affembler fuccefïïvement ces affembla-
ges les uns avec les autres , & former ainfi peu-à-
peu la machine entière. On paffe de cette manière
d'un affemblage fimple à un compoié , de celui-ci à
un plus compoié, 6c l'on arrive fans obfcurité ni fati-
gue à la connoiffance d'un tout fort compliqué.
Pour cet effet nous divifons le métier à bas en deux
parties ; le fût ou les parties en bois qui foûtiennent
le métier, & qui fervent dans la main d'œuvre ; 6c
le métier même , ou les parties en fer , 6c autres qui
le compofent.
Nous nous propofons de traiter chacune féparément.
Mais avant que d'entrer dans ce détail , nous rap-
porterons le jugement que faifoit de cette machine
un homme qui a très-bien fenti le prix des inventions
modernes. Voici comment M. Perrault s'en exprime
dans un ouvrage , qui plaira d'autant plus , qu'on
aura moins de préjugés. « Ceux qui ont affez de gé-
» nie , non pas pour inventer de femblables chofes,
» mais pour les comprendre , tombent dans un pro-
» fond étonneraent à la vue des refforts prefqu'infi-
» nis dont la machine à bas eft compofée , 6c du
» grand nombre de fes divers 6c extraordinaires
» mouvemens. Quand on voit tricoter des bas , on
» admire la foupleffe 6c la dextérité des mains de
» l'ouvrier , quoiqu'il ne faffe qu'une feule maille à
» la fois ; qu'eft-ce donc quand on voit une machine
» qui forme des centaines de mailles à la fois , c'eft-
» à-dire , qui fait en un moment tous les divers mou-
» vemens que les mains ne font qu'en plulieurs heu-
» res ? Combien de petits refforts tirent la foie à
» eux , puis la laiffent aller pour la reprendre , 6c
» la faire paffer d'une maille dans l'autre d'une ma-
» niere inexplicable ? & tout cela fans que l'ouvrier
» qui remue la machine y comprenne rien, en fâche
» rien , & même y fonge feulement : en quoi on la
» peut comparer à la plus excellente machine que
» Dieu ait faite , &c ».
« Il eft bien fâcheux 6c bien injufte , ajoute M. Per-
» rault , qu'on ne fâche point les noms de ceux qui
» ont imaginé desmachinesfimerveilleules, pendant
» qu'on nous force d'apprendre ceux des inventeurs
» de mille autres machines qui fe préfentent û natu-
» Tellement à l'efprit , qu'il fuffiroit d'être venus des
BAS
» premiers au monde pour les imaginer ».
Il efl confiant que la machine à bas a pris naiffance
en Angleterre , & qu'elle nous efl venue par une de
ces fiipercheries que les nations Te font permiles de
tout tems les unes envers les autres. On fait fur fon
auteur & fur fon invention des contes puériles , qui
amuferoient peut-être ceux qui n'étant pas en état
d'entendre la machine , feroient bien ailes d'en par-
ler, mais que les autres mépriferoient avec raiion.
L'auteur du Dictionnaire du Commerce dit que les
Anglois fe vantent en vain d'en être les inventeurs,
8c que c'efl inutilement qu'ils en veulent ravir la gloi-
re à la France ; que tout le monde fait maintenant
qu'un François ayant trouvé ce métier fi utile & fi
furprenant , & rencontrant des difficultés à obtenir
un privilège exclufif qu'il demandoit pour s'établir
à Paris , pafTa en Angleterre , où la machine fut ad-
mirée & l'ouvrier récompenfé. Les Anglois devin-
rent fi jaloux de cette invention , qu'il fut long-tcms
défendu , fous peine de la vie , de la tranfporter hors
de l'île , ni d'en donner de modèle aux étrangers: mais
un François les avoit enrichis de ce préfent , un Fran-
çois le rellitua à fa patrie , par un effort de mémoire
& d'imagination, qui ne fe concevra bien qu'à la fin
de cet article ; il fit conftruire à Paris , au retour d'un
voyage de Londres , le premier métier , celui fur le-
quel on a conllruit ceux qui font en France & en
Hollande. Voilà ce qu'on penfe parmi nous de l'in-
vention du métier à bas. J'ajouterai feulement au té-
moignage de M. de Savari , qu'on ne fait à qui l'at-
tribuer en Angleterre , le pays du monde où les hon-
neurs qu'on rend aux inventeurs de la nation, leur
permettent le moins de relier ignorés.
DU FUST.
i . Les deux pies de devant qui foûtiennent le fiége
de l'ouvrier. Fig. i . Planche I.
2. Les deux pies de derrière,
3. La traverfe d'en-bas , à laquelle efl attachée la
patte qui arrête les marches.
4. La traverfe du haut du Juge.
5. La traverfe allcgie. On pratique ordinairement à
fa furface 5 , une eipece de rainure allez large , fur
laquelle l'ouvrier met les choies qui lui font commo-
des en travaillant.
6. La traverfe du contre-poids.
7. La traverfe d'en-bas.
8. 8. Les deux têtes du fût. Leur partie antérieure
devroit être en bifeau.
9. 9. Deux pattes de fer qui tiennent le métier fixe.
10. Le fiége de V ouvrier.
11. 11. Deux gouffets qui fervent à foûtenir le fiége.
14. Support du gouffet.
15. 15. Traverjes qui fervent de fupports aux gouf-
fets.
16. 16. Supports des monta ns de devant.
17. 17. Les deux montans de devant.
18. 18. Gouffets des montans & des pies de derrière.
19. 19. & 19. 19. Ouvertures pratiquées à chaque
ttte , pour y fixer les grandes pièces du métier.
20. 20. &c Les vis avec leurs oreilles , qui fervent
à tenir les parties du fut fermement affcmblées.
2 1 . Un arrêtant. Ainli V arrêtant efl , comme on
voit , un morceau de fer fendu d'une ouverture ob-
longue, qui lui permet d'avancer ou de reculer à
diferétion fous la tête de la vis , qui le fixe au côté
intérieur du montant , 6c terminé d'un bout par une
pointe dont l'ufage efl d'arrêter le crochet inférieur
de l'abattant, & de l'empêcher d'avancer trop en-
devant ; c'efl de cet ufage que cette pièce a pris le
nom d'arrêtant. Il y a un autre arrêtant à la furface
& à la hauteur correfpondante de l'autre montant.
22. Un petit coup. Le petit coup ell une eipece de
yis , dont la tête a une éminence ù laquelle on porte
Tome II,
BAS
99
le bout du crochet inférieur de l'abattant quand on
travaille : cette éminence efl coupée en plan incliné
vers le fond du métier , & permet au crochet de s'é-
chapper prcfque de lui-même.
23 . 23. Les êcrous à oreilles de V arrêtant & du petit
coup.
24. 24. Deux broches de fer, capables de recevoir
chacune une bobine.
25. Une bobine dans fa broche.
26. 26. Deux paffe- foies. Les paffe-foies font deux
morceaux de fer recourbés, comme on voit, & per-
cés de trous, par lefquels on fait parler la foie , qu'ils
dirigent & empêchent de s'attacher aux objets cir-
convoilins.
27. Un rouloir avec les crochets qui le fufpendent.
Le rouloir efl un infiniment qui fert à plier l'ouvrage
à mefure qu'il fe fait. Il faut y diflinguer plufieurs
parties. La barre 1,2, plate qui tient unis les côtés
3,4 par leurs extrémités fupérieures. La barre ronde
5 , 6 qui s'ajufle dans les trous percés aux extrémités
inférieures des côtés, comme nous Talions dire. La
noix 7 , la gâchette 8 , le reffort 9 , le bouton 1 0 , la trin-
gle 13 , 14; la barre ronde efl faite en douille par les
deux bouts ; la noix ce le bouton ont chacun une émi-
nence ou efpece de tourillon , par lefquels ils s'adap-
tent , l'un à un bout & l'autre à l'autre bout. Ces ef-
peces de tourillons font percés d'un trou, qui ont leurs
correfpondans à la douille qui les reçoit. On voit ces
trous 1 1 , 1 2 : on place dans chacun une goupille qui
traverfe la douille & les tourillons , & qui fixe le bou-
ton à l'une des extrémités de la barre ronde, &c la noix
à l'autre extrémité. D'où il arrive , que cette barre
pafTée dans les ouvertures pratiquées au bas des cô-
tés du rouloir, peut tourner dans ces ouvertures, mais
ne peut s'en échapper , & que la noix efl tenue appli-
quée au côté 3 , où l'extrémité de la gâchette entre
dans fes dents &c y refle engrainée, en vertu du ref-
fort qui pouffe fon autre extrémité.
L'extrémité de la gâchette peut bien s'échapper des
dents de la noix , & laifler tourner la barre ronde fur
elle-même, en un fens , mais non dans l'autre, c'efl-
à-dire que l'ouvrage peut s'envelopper fur elle, & ne
peut fe développer.
La tringle 1 3 , 14 fert à diriger l'ouvrage.
Vue du fût , dont on a féparé un des côtés pour
découvrir les parties fuivantes. Planche II. fig. 1
I . 2. 1 . Les trois marches.
3 . 3 . Qjiarrés de bois qui les féparent.
4. Qjiarrêde bois percé par le milieu , qui écarte de
la marche du milieu les deux autres.
5 . 5 . Extrémité de deux marches.
6. 6. Traverfe de bois, fur laquelle les marches 5, 5
peuvent agir.
7. Traverfe de derrière,
8. Crochet de fer qui part d'un bout de la ferrure ou
de l'anneau de l'extrémité de la marche du milieu ,
&c qui embrafle de l'autre bout la partie la plus baffe
de la petite anfe.
9. 9. Cordes qui partent de l'extrémité des marches
5,5, paflent fur le tambour de la roue 1 3 , & la font
mouvoir de gauche à droite , & de droite à gauche X
diferétion.
10. 10. Cordes qui partent des extrémités de la tra-
verfe 6, 6, &i la tiennent fufpendue en vertu de leurs
crochets 10 , 10 , qui s'arrêtent à ceux du balancier.
I I . Pane Je fer attachée à la traverfe 4, qui reçoit
un boulon, fur lequel font foûtenues les marches qu'il
traverfe , & dont l'extrémité qu'on n'apperçok pas
ell reçue dans un piton.
1 2. Patte de fer qui tient la roue fufpendue par une des
extrémités de fon axe ou arbre ; on conçoit bien que
l'autre extrémité efl lbùtenue de la même manière.
n. La roue avec ion arbrt &c fon tambour, dont elle
i Nij
ÏOO
BAS
ne l.iiffe appercevôif que le quarré.
14. La tige du contre - poids ; cette tige eft mobile
de bas en haut dans la patte 1 5.
1 5. La patte du contre-poids.
Fig. 2. Une poulie avec fon fil de foie. Cette poulie
n'eft autre choie qu'un fil de laiton, auquel on a fait
une boucle à chaque bout ; le fil de foie pane par ces
boucles , & le poids du fil de laiton l'empêche d'ap-
procher des objets circonvoilins , & l'aide à fe dévi-
der de deffus la bobine. Quand la poulie n'eft pas
affez lourde pour la foie , on y attache une carte.
Voilà le fût du métier ancien , auquel on n'a pref-
que point fait de changement depuis : on a feulement
lupprimé les quarrés qui féparent les marches ; on a
allegi les pattes qui fufpendent la roue. Au lieu de
donner une patte à la tige du contre-poids , on a percé
2a traverfe par le milieu d'un trou quarré , & l'on a
fait parler la tige par ce trou, dont on a garni l'ouver-
ture Supérieure d'une plaque de fer , afin qu'elle ne
fût point endommagée par la chute du contre-poids :
on en a encore amorti le coup , en attachant un mor-
ceau de cuir à la tête de la ùgt ou branche du contre-
poids: cette tête doit être elle-même percée; on ver»
ra dans la fuite par quelle raifon.
Voilà tout ce qui concerne le fut & fes parties.
Nous n'avons rien dit de leur alTemblage, parce qu'il
n'a rien de particulier , & qu'il eft tel qu'on le voit
dans les figures. Pafïbns maintenant au métier.
DU MÉTIER ET DE SES PARTIES.
Pour faciliter l'intelligence de cette machine , nous
allons diftribuer fes parties en plufieurs affemblages,
qui s'aflembleront eux-mêmes les uns avec les au-
tres , &c dont on verra réiulter peu à peu la machine
entière.
Premier AssEiMBLAGE. Plane. IL. fig. 3.
Les pièces entièrement femblables de part & d'au-
tre, 1 , II , 2 , 3 ; 1 , II , 2 , 3 , s'appellent les grandes
pièces , & ce font en effet les plus grandes qu'il y ait
dans le métier: elles forment le devant du métier par
leur faillie 1 ,11. 1 , II. & le derrière par leur hauteur
d'équerre 2,3; 2,3. Leur faillie 1 , 2 ; 1, 2 s'appelle
avant-bras. L'avant-bras a à fon extrémité 1,1, une
charnière , & à fon extrémité 2,2, une éminence
oblongue¶llélogrammatique, qu'on appelle Yo-
reille de la grande pièce. Cette oreille eft percée de plu-
fieurs trous , qui fervent à fixer par des vis la grande
pièce fur la tête àxifàt.
Les pièces entièrement femblables & femblable-
ment placées 4, 5 ; 4, 5, s'appellent les épaulieres ;
elles s'affemblent par leurs ouvertures quarrées avec
V arbre 6 , 7 , dont elles reçoivent les quarrés.
hapiece 6 , 7 s'appelle Y arbre ; les deux extrémités ,
dont on en voit une repréfentéejfg. 4. lont terminées
l'une & l'autre par un quarré 1 , & par un tourillon 2.
L'ouverture 5 quarrée des «/£«/«>•« 4, 5; 4, 5, reçoit le
quarré de Y arbre , dent le tourillon eft reçu dans le
nœud 3 ou 3 de la grande pièce : ainfi les épaulieres font
fixées fur Y arbre , mais Y arbre tourne dans les nœuds
3 , 3 des grandes pièces.
L 'arbre a dans fon milieu une faillie ou efpece d'o-
reille 8 , qu'on appelle le porte faix de l'arbre. On voit
à chaque nœud 3,3, des grandes pièces 1 , II , 2, 3 ;
i,II,2, 3 , un bouton en vis 9 , 9 , qui s'enlève &
permet de couler de l'huile dans le nœud 3 , 3 quand
il en eft befoin.
La PARTIE 10,10 s'appelle la barre de derrière d' en-
haut : elle s'attache , comme on voit ici , au derrière
des grandes pièces & en-dehors.
La PARTIE 11,11 s'appelle la barre de derrière d? en-
bas : elle s'attache , comme on voit, au derrière des
grandes pièces en-dedans.
L'ufage de ces deux barres eft de foûtenir le porte-
faix £ en-bas.
BAS
Le porte-faix d'en-bas , fig. 5. eft compofé de
plufieurs pièces : d'une roulette 1 attachée à la. pièce 2 ,
qui conferve le nom de porte -faix d'en-bas ; d'une
chappe 3 , qui palTe fur le porte-faix , qui y eft fixée,
& qui foùtient la roulette ; & d'un boulon 4 , qui tra-
verfe les côtés de la chappe & la roulette mobile fur
ce boulon.
Ce petit alTemblage fe fixe , fig. J. au milieu de la
barre d'en-haut &c de la barre d'en-bas , &C entre ces
barres, comme on le voit en 12.
LaPARTlE 13,13 s'appelle gueule de loup : lagueule
de loup eft fixée au milieu de la barre d'en-bas.
Les nouveaux métiers ont deux gueules de loup ,
attachées à la barre d'en-bas à des diftances égales
des grandes pièces. Les parties par lefquelles elles font
fixées à la barre , font ouvertes félon leur longueur ,
afin qu'elles puilfent , comme on l'a dit de Yarrrétant ,
giiffer fous la tête des vis qui les fixent , & s'arrêter
à telle hauteur qu'on délire : ce qui eft très-effentiel.
La partie 14, 14, 15 , 1 5 , fixée par deux vis fur
chaque extrémité des épaulieres , s'appelle le balan-
cier. Il eft compofé de deux barres parallèles 14 , 14 y
15, 15, qui font alTemblées , comme on voit , &dont
celle d'en-bas 15, 1 5 , eft terminée par deux petits
crochets.
On a corrigé ce balancier dans les métiers nou-
veaux ; on a fupprimé la barre 15,15 avec fon tenon,
& on lui a fubftitué fur la barre 14, 14, à égale diftan-
ce des épaulieres , deux vis arrêtées par des écrous à
oreilles , placés fur la furface fupérieure de cette
barre. La tête de ces vis fe trouve donc fous cette
barre. Cette tête percée peut recevoir deux petits
crochets ; & ces petits crochets font les mêmes fonc-
tions que ceux de la pièce 15,15 qu'on a fupprimée.
D'ailleurs , à l'aide des écrous à oreilles , on peuthauf-
fer & bailfer ces crochets à diferétion.
La PARTIE 16,16 s'appelle le grand rejfort. Son
extrémité 1 6 eft terminée par un petit tourillon , qui
entre dans l'enfoncement ou coup de pointe 1 6 du por-
te-faix d'en-bas ; & fon extrémité 16 s'ajufte par un
autre tourillon dans l'extrémité de la vis 17 , qui tra-
verfe le porte-faix d'en-haut, & à l'aide de laquelle il
eft évident qu'on peut bander ou relâcher à diferé-
tion le grand rejfort , dont l'effort tend à relever les
épaulieres avec le balancier , en faifant tourner Y arbre
fur lui-même.
Voilà le premier alTemblage : j'avertis qu'avant
de palfer au fécond, il faut avoir celui-ci très-fami-
lier ; finon les pièces venant à fe multiplier , & les
affemblages mal-compris s'affemblantenfuite les uns
avec les autres , formeront des malles confufes où
l'on n'entendra rien. On en jugera par le fécond af-
lemblage , qui ne diffère du premier que par un très-
petit nombre de pièces fur-ajoûtées , & qui commen-
ce toutefois à devenir un peu difficile à bien failir.
Second Assemblage. Planche LU. fig. i.
Cet alTemblage eft formé des pièces de i'affem-
blage précédent , auquel on a ajouté les pièces fui-
vantes.
Dans les nœuds 1, 1 des grandes pièces , font placées
les pièces 17, 18, 19; 17, i8,i9:ces pièces s'appel-
lent les bras depreffe ; elles font fixées dans les nœuds
1 , 1 par un boulon & par une goupille. Il taut diftin-
guer dans le bras de preffe trois parties : 1 7 , le noeud
de la charnière du bras ; ce noeud s'ajufte , comme on
voit , dans la charnière de l 'avant-bras de la grande pie-
ce , & s'y retient , comme nous avons dît : 1 8 , le croif-
fant du bras ; &l 19,1a patte.
La patte du bras de preffe eft garnie d'une vis avec
Yécrou à oreilles 20, 20; 20, 20: cette vis s'appelle
vis de marteau. Son extrémité inférieure vient frap-
per , dans le travail , fur la grande pièce : mais elle ne
permet au bras depreffe de defeendre , qu'autant qu'on
le juge à propos.
BAS
La PARTIE 21,21 ,fig. 2. s'appelle la grande anft.
Le lieu qu'elle occupe , & la faculté de fon jeu , exi-
gent le coude qu'on lui voit : elle fe fixe , comme on
vo\tfig. i. fur chaque patte des bras de preffe , aux
lieux 21, 2i.
La partie 22, zi,fig. 3. s'appelle la petite anfe.
Ses deux crochets fe placent aux deux angles du cou-
de de la grande anfe, comme on voit fi g. i.
La partie 23 , 23 s'appelle le crochet de la petite
anfe ,fig. 2. PL 3. S'il y avoit eu de la place , on le
verroit dans le coude de la petite anfe.
La partie 24, 24 qui part de l'extrémité, J%. 1.
de la branche ou tige du contre-poids , eft une cour-
roie de cuir qui vient parler fur la roulette du porte-
faix a" en- bas, &c s'attacher par fon extrémité 24, au
milieu du coude de la grande anfe.
La partie 25 ,fig. 1. eft un contre-poids attaché ,
comme on voit, à la branche ou tige 26 du contre-poids
qu'on doit reconnoître , & dont nous avons parlé à
propos au fût.
Le crochet 23 , 23 ,fig. -4. dont un des bouts
embraffe le coude de la petite anfe , tient par fon au-
tre bout à l'anneau de la marche du milieu , comme
on peut voir fi g. 1, PI. II.
Corollaire premier.
D'où il s'enfuit : i°. qu'en appuyant du pié fur
cette marche , fig. 1. PI. II. le crochet 23 , 23 ,fig. 1.
PI. II. fera tiré en-bas; que la petite anfe 22,22, fig. 1.
PI. III. le fuivra ; & que la petite anfe fera defeendre
la grande anfe 21, 21: mais la grande anfe 21, 21 ne
peut defeendre que les bras depreffe 17, 18, 19; 17,
18, 19 ; ou plutôt leurs vis de marteau 20 , 20 , ne
viennent frapper fur les grandes pièces 1 , II , 2 , 3 ; 1 ,
11,2, 3 ; que la courroie 24 , 24 qui parle fur la rou-
lette du porte-faix d'en-bas , ne foit tirée en embas ;
qu'elle ne fafle monter la tige ou branche 26 du con-
tre-poids , &c que cette tige n'entraîne en-haut le con-
tre-poids 25.
Corollaire II.
D'où il s'enfuit : 20. que fi on levé le pié de deffus
la marche , alors tous les mouvemens le feront en
iens contraire. Rien ne retenant plus le contre-poids
25 , il defeendra ; fa branche 26 defeendra avec lui ;
la courroie 24 , 24 avec la branche : mais la courroie
parlant fur la roulette , ne peut defeendre qu'elle ne
tire en-haut & ne fafle monter la grande anfe 21, 21.
La grande an je montera ; les bras depreffe ij , 18,19;
17, 18, 1 9 fe relèveront ; la petite anfe 22,22 mon-
tera ; fon crochet 23 , 23 la fuivra ; & la marche fui-
vra le crochet , fe relèvera , & tout fe reftituera dans
l'état que repréfente h fig- 1. de cette PL III.
Ce fécond affemblage forme ce qu'on appelle com-
munément la cage du métier, ("a carcaffe , fon corps,
lés parties grolfieres. Nous allons palier à ce que les
ouvriers appellent Vainc du métier. Les parties le mul-
tiplieront ici au point , que je ne peux trop confeiller
au lecteur de fe familiariler avec ce fécond aflembla-
ge , & avec le jeu & les noms de (es parties.
Troisième Assemblage, même PL III. fig. s.
On voit dans h figure 3. de cette planche , quatre
pièces affemblées. Les <i^ux pièces femblables 27 ,
28 , 29 ; 27 , 28 , 29 , s'a ppel lent porte-grilles ou cha-
meaux de la barre fondue : la pièce qu'on appelle bois
de grille , & dont nous allons parler, fe fixe fur leurs
parties 28 , 29 ; 28 , 29, par des vis &c des écrous à
oreilles. Les extrémités des vis parlent dans les ouver-
tures longitudinales qu'on y voit : on leur a donné
cette figure , afin qu'on pût les avancer ou reculer à
diferétion. La pièce 30, 30 s'appelle petite barre de
dejfous j & celle 31,31 > qui eft fixée fur le milieu
de la petite barre de deffous, eft un porte-roulette gar-
ni de la roulette , du boulon de la roulette } tk. de la gou-
pille du boulon.
BAS ioi
"La figure G. eft l'aflemblage des pièces précéden-
tes , & du bois de grille garni de fa grille. On voit 3 2 ,
3 2 ; 3 2, 3 2 , les vis qui traverfent le bois de grille 33,33,
qui parlent dans les ouvertures longitudinales des
parties 28 , 29 ; 28 , 29 des chameaux, & qui fixent
le bois de grille fur ces chameaux. La grofe pièce 33 ,
3 3 s'appelle bois de grille. La grille eft l'aflemblage de
deux rangées parallèles & perpendiculaires des pe-
tits reflbrts plantés dans le bois de grille. Il eft très-à-
propos de connoître la configuration de ces petits
reflbrts , & d'en examiner- l'arrangement. Ils font
planté;, parallèlement : ils biffent entre eux un petit
efpace ; & ceux qui forment la ligne de derrière ,
correfpondcnt exactement aux intervalles que bif-
fent entr'eux ceux qui forment la ligne de devant.
L'extrémité fupérieure de chacun de ces petits ref-
forts eft renverfée en-arriere , & forme une efpece
de plan incliné. La partie qui eft immédiatement au-
deffous de ce plan incliné eft une cavité , qu'on peut
regarder comme formée de deux autres petits plans
inclinés , dont la rencontre forme un angle , &c fait
le fond de la petite cavité. La partie qui eft immé-
diatement au-deffous de la petite cavité , eft un qua-
trième plan incliné , qui a le refte du refibrt pour fa
longueur.
La figure y. eft un des petits refforts de grille déta-
ché. La partie a b eft le premier plan incliné ; la par-
tie b c eft le fécond ; la partie c d eft le troilieme ;
&C la partie df eft le quatrième.
Là figure 8. eft ce qu'on appelle la barre fondue ou
fendue : barre fondue , parce que la partie inférieure
de fon chaflîs eft coulée &i remplie d'étain ; barre fen-
due, à caufe des ouvertures ou fentes que laiflent en-
tr'eux les petits quarrés de cuivre dont elle eft gar-
nie. Cette barre fondue ou fendue eft compofée de plu-,
lieurs pièces dont nous allons parler. 34, 34^4, 34,
font deux côtés du chajjis .'35, 3 5 ; 3 5 , 35, font deux
pièces de commodité qui s'ajuftent , comme on les voit
avec les deux côtés , & qui fervent à fupporter la
barre fondue .-36,36; 36,36, font deux charnières
dont l'ulage eft de recevoir les contre-pouces ; pièces
dont nous allons parler. On voit,_/%. r». une de ces
charnières : elle eft percée à fa partie inférieure de
deux petits trous , dans lcfquels on fait palier une
goupille qui traverfe en même tems les deux côtés
de la barre , 6c qui fixe la charnière entre ces côtés.
Les deux quarrés de la partie fupérieure font aulli
percés dans le milieu , de même que tous les quarrés
& autres parties prifes entre les côtés de la barre fon-
due. On dira tout à l'heure l'ulage de ces ouvertures.
Les pièces 37 , 37 , font deux autres charnières , toutes
femblables aux précédentes , & pareillement affem-
blées avec les côtés de la barre fondue ; mais dontl'u-
fage eft de recevoir d'autres pièces qu'on appelle tï-
rans .-38,38,38,38, &c. font les cuivres de la barre
fondue. On voit ,fig. 10. la forme d'un de ces cuivres.
Leur partie inférieure ou leur queue s'infère entre
les côtés de la barre fondue , & le quarré de la partie
fupérieure demeure fupporté fur ces côtés. Ces deux
parties font percées l'une & l'autre , comme on voit ,
& comme nous avons dit. Tous ces cuivres font exac-
tement femblables ;tous placés parallèlement les uns
aux autres , & laiffant tous entr'eux le même petit
intervalle. Quand on les a bien difpolés , on coule
de l'ctain dan^ le deffous du chaffis de la barre fon-
due ; cet étain rempliffant exactement le chalîîs, en-
tre clans les trous pratiqués aux queues des cuivres ,
& les fixe folidement dans la dilpolirion qu'on leur
a donnée. C'eft le nombre de ces cuivres qui mar-
que la fineffe d'un métier ; plus il y a de cuivres,
plus un métier eft fin. L'intervalle du premier au der-
nier cuivre eft ordinairement de quiii7C pouces. On
pourroit le prendre plu- grand: mais l'expérience l'a
déterminé de cette longueur. On divUe cet intervalle
iOl BAS
en parties de trois pouces ; & s'il y a dans chaque in-
tervalle de trois pouces vingt cuivres , on dit que le
métier eft un vingt; s'il y en a trente , on dit que le
métier eft un trente ; & ainfi de fuite. J'ai vu des mé-
tiers dont la barre fondue portoit jufqu'à quarante-
deux cuivres , par trois pouces.
On ajufte aux extrémités de la barre fondue la pièce
quarrée 39 , qu'on voit fig. il, percée dans le milieu
& allongée à fon angle inférieur en tourillon. Cette
pièce eft fixée à chaque extrémité de la barre fondue
par une vis & fon écrou. Cette vis traverfant les cô-
tés de la barre fondue avec la pièce à tourillon , fert en
même tems à ferrer ces côtés. La pièce 3 5 de la/g'.
il. eft la pièce de commodité , féparée de l'affemblage
de \difig. S-
La figure 1 . PL IV. eft un affemblage des porte-
grilles zj, 28 , 19 ; 17 , 28 , 29 ; de la petite barre de
deffous 30 , 30, qu'on ne voit pas ; de la roulette fi-
xée fur fon milieu , que le bois cache auffi : du bois
de grille , garni de fa grille 3 3 , 3 3 ; de la barre fondue^
entière 34,34;34,34, avec les pièces de commodité
35, 35; des charnières à contre-pouces 37, 37; des
charnières à tirans 3 6 , 3 6 ; des cuivres 3 8 , 3 8 , ère. des
quarrés à tourillon 39, 39.
J'obferverai ici que la barre fondue n'eft pas tout-à-
fait la même dans les nouveaux métiers , que dans
celui que je viens de décrire ; on a fupprimé les pie-
ces de commodité , & le quarré à tourillon n'a pas
tout-à-fait la même figure : la barre fe termine d'u-
ne façon un peu plus limple.
La pièce 40 s'appelle platine à ondes, fig. 2. il faut
diftinguer dans cette pièce plufieurs parties, qui ont
toutes leurs ufages , comme on verra dans la fuite, a,
la tête de la platine ; b ,fon bec ; c , le deffous du bec ;
d , la gorge ; e , le ventre jf, la queue.
On voit fig. 3 , une pièce qui s'appelle onde, 41.
On voit que l'onde eft fendue par la partie antérieu-
re , qu'elle a une éminence au milieu ; que cette émi-
nence eft percée , & que fa queue fe termine en poin-
te moufle. La tête de la platine à onde s'infère, s'at-
tache & fe meut dans la fente de la tête de l'onde ;
& ces deux pièces affemblées fe placent entre les in-
tervalles que laiffent entr'eux les cuivres de la barre
fondue , de manière que l'ouverture de l'éminence de
l'onde, réponde aux ouvertures des deux cuivres en-
tre lefquels elle eft placée , & que fa queue s'avan-
ce jufte au fond de la cavité d'un reflbrt de grille.
Co RO L LA I RE II.
Il s'enfuit de-là qu'il faut autant de platines à on-
des que d'ondes , autant d'ondes que de cuivres , au-
tant que de reftorts de grille ; & que les queues des
ondes doivent être alternativement un peu plus cour-
tes & un peu plus longues ; plus longues en celles
qui vont jufqu'au fond de la petite cavité des reftorts
de grille de la féconde rangée ; plus courtes en cel-
les qui ne vont qu'au fond de la petite cavité des
reftorts de grille de la première rangée.
On voit ,fig. 4. tous les intervalles laiffés entre les
cuivres remplis d'ondes garnies de leurs platines ,
40, 40, 40, &c. L'ufage des cuivres eft maintenant
évident ; on voit qu'ils fervent à tenir les ondes pa-
rallèles , & à les empêcher de vaciller à droite ou à
gauche.
On a repréfentt ,fig. 5. la pièce appellée un tirant,
qui doit remplir la charnière de barre fondue , que
nous avons appellée charnière de tirant , & que nous
avons chiffrée/^, l , 36. Le tirant 42 ,fig. 4 , reffem-
ble exactement à la partie antérieure d'une onde ; il
fait en deffus & en deffous les mêmes coudes : il a
l'éminence pareille & pareillement percée; il eft feu-
lement plus fort ; & au lieu d'avoir l'extrémité anté-
rieure fendue , il l'a propre à être ajuftée dans le
porte-tirant.
BAS
On voit ,fig. 4 ,1e tirant 42 dans fa charnière, dont
la figure n'eft pas inutile ; car on doit s'appercevoir
que fes deux quarrés font deftinés à tenir le tirant ,
parallèle aux ondes & non vacillant.
La pièce 43 , 44 , 45 ,fig. 4 , qu'on voit dans la char-
nière que nous avons chiffrée 37 ,fig.prem. s'appelle
contre-pouce : fa partie antérieure 43 , a la forme d'un
pouce ; elie eft chargée d'un contre-poids 44 : il y a
en deffous une éminence comme aux tirans & aux on-
des , & fa partie poftérieure 45 fe termine par un
quarré plat & percé dans le milieu.
Les contre-pouces , les tirans , les charnières des con-
tre-pouces , les charnières des tirans & toutes les ondes
avec les cuivres , font traverfées par une verge ron-
de , qu'on appelle verge de barre fondue. On voit en
46 l'extrémité de cette verge. Les tirans , les contre-
pouces & les ondes, peuvent fe mouvoir librement
fur elle ; & elle fert comme d'axe & de point d'appui
à toutes ces parties.
On a ajufté à l'extrémité de la barre-fondue , la rou-
lette 4J dans fon tourillon ,fig. 4.
La pièce 48 , 48 , qu'on voit, fig. 4, ajuftée par fes
extrémités quarrées , fur les extrémités de même figu-
re des contre-pouces , s'appelle la bafcule. Il faut que
le bec du contre-pouce avec le poids dont il eft char-
gé , foit plus lourd que la partie poftérieure avec la
partie de bafcule qu'elle foûtient ; car l'ufage du con-
tre-pouce & de fon contre-poids, eft de faire relever
la bafcule d'elle-même , quand en lâchant le pouce ,
on ceffe de preffer le contre-pouce en deffous , & d'ap-
pliquer la bafcule fur la queue des ondes.
Si l'on revient à la pièce de commodité de la bar-
re fondue , fig. 1 , on appercevra à l'extrémité de fa
partie poftérieure un petit tenon o ; c'eft fur ce petit
tenon qu'eft foùtenue la barre à chevalet, ou la ma-
chine 49 , 49, qu'on voit paflée fous la queue des
ondes ,fig. 4. Dans les métiers nouveaux, la barre
à chevalet ne porte que iur les grandes pièces.
On diftingue dans le chevalet plufieurs parties ;
50 , <jO , s'appelle la barre à chevalet ; 5 1 , la joue du
chevalet ; 52, le corps du chevalet ,"53, l's de la corde
à chevalet ; 54, la roulette de la barre à chevalet. Les
joues & le corps du chevalet tiennent enfemble : cet
affemblage eft mobile le long de la barre à chevalet :
c'eft la même corde qui part d'une des s 53 , paffe
fur une des roulettes 49 de la barre à chevalet, va s'en-
velopper fous la roue du fût 13 ,pl. 2 ,fig. prem. &
fe rend à l'autre s 5 3 ; elle eft cloiiée fous la roue.
Corollaire IV.
D'où il arrive qu'en appuyant fur la marche , 1 ,
5 , qui eft à gauche ,fig. 1. PL II. cette marche fai-
fant tourner le tambour de la roue 1 3 , de droit à gau-
che , la roue 1 3 tourne en même fens ; le corps du
chevalet , PL 4 , fig. 4. 5 1 , eft tiré en même fens ,
6 il va le long de la barre à chevalet 50, 50, de
droite à gauche , jufqu'aux arrêts 55,55 de la barre
à chevalet : c'eft le contraire , fi lorfque le chevalet eft
aux arrêts 55 de la barre à chevalet , on vient à ap-
puyer fur la marche qui eft à droite.
Corollaire V.
Mais le corps du chevalet faifant comble 51 , &
étant un peu plus élevé que la pofition prefqu'hori-
fontale des ondes , ou que les petites cavités des ref-
forts de grille où leurs queues font placées , ne peut
paffer fous ces queues fans les chaffer de ces cavi-
tés ; c'eft ce qui produit ce cliquetis allez long qu'on
entend , lorfque l'ouvrier travaille. Il eft caufé par
l'adtion du comble 5 1 du chevalet, contre le défions
de la queue des ondes ; par la réaûion des reftorts de
grille , des cavités defquels les queues des ondes ne
peuvent s'échapper , fans repouffer ces reflbrts & le
trouver enfuite fur le petit plan incliné , qui forme
BAS
leur extrémité & qui facilite cette réacTion ; & par
la chute de la tête des ondes fur une pièce dont nous
parlerons , & qu'on appelle la barre à moulina , con-
tre laquelle les têtes des ondes viennent frapper. C'eft
pour que cette chute fe faffe , qu'on a pratiqué en
deffous de Y onde entre fa tête & fon éminence, un
coude ou vuide. Moyennant ce vuide , l'onde n'eft
point gênée dans fon mouvement par la barre fondue ,
qui ne laiffe pas d'avoir de la largeur ; c'eft par cette
raifon qu'on a pratiqué le même coude , ou vuide
aux tirans.
La bafcule fert à faire fortir les queues des ondes
des cavités des refTorts de grille &c à les faire defcen-
dre ; & le chevalet , à les chaffer des mêmes cavités
& à les faire monter.
Dans les nouveaux métiers , comme il n'y a point
de pièces de commodité , la barre à chevalet porte lur
les longues pièces ; elle s'y fixe à l'aide de deux cha-
meaux , qui ont chacun une vis quarrée avec un pe-
tit tourillon , qui entre dans le deffous de la barre à
chevalet.
Voilà le troifieme affemblage , ou l'ame du métier.
Nous allons pafTer au quatrième , qui ne fera que
l'afTemblage du fécond & du troifieme ; de même
que le fécond n'étoit que l'afTemblage du premier 6c
de quelques autres parties.
Quatrième Assemblage , PI. 4,fig. 6.
Ce quatrième affemblage eft compofé du fécond
& du troifieme. C'eft la cage du métier dans laquelle
on a placé l'ame.
Nous avons donné ci-deffus un détail fi exacT des
parties de ces deux dirlércns affemblages & de la ma-
nière dont elles font affemblées , que nous pourrions
nous contenter d'obferver ici , que l'ame ou le troi-
fieme affemblage eft mobile dans le fécond ou dans
la cage ; que la barre fendue ou fondue ÔC toutes fes ap-
partenances font foûtenues par la gueule de loup ,13,
13 ,fig. 3 , PI. II. attachée à la barre de derrière
d'en bas , qui eft fixée aux hauteurs d'équerre des
grandes pièces , & par les deux roulettes 47, 47 ,fig.
6 , PL 4. placées aux extrémités de la barre fondue ;
que la roulette de la petite barre de deffous du bois
de grille entre & fe meut dans la gueule de loup ; que
les deux roulettes de l'extrémité de la barre fondue
parlent & fe meuvent fur les grandes pièces ; & que
l'afTemblage entier que nous avons appelle l'ame du
métier, peut s'avancer en devant ôc fe reculer en
arrière.
Mais pour faciliter au lccTcur l'intelligence de la
machine , nous allons lui rappeller toutes les pièces
de ce quatrième affemblage , avec leurs principales
correfpondances , dans l'ordre où il a vu naître cet
affemblage.
I, 2, 3 ; 1, 2,3. Les grandes pièces.
4, <j ; 4, 5. Les épaulieres fixées dans le quarré de
V arbre ,6,7.
6 , 7. L 'arbre mobile fur fes tourillons placées dans
Us nœuds 3,3, des grandes pièces.
8. Le porte-faix de l'arbre.
9. Bouton pour couler de l'huile dans le nœud.
10. 10. Barre de derrière <£ en-haut.
II. 11. Barre de derrière £ en-bas. Ces deux barres
fervent à fixer entr'clles le porte-faix d'en bas , avec
fa chappe & fa roulette.
12. Porte-faix d'en bas avec fa chappe & fa rou-
lette , fixés entre les barres de derrière.
1 3. Gueule de loup fixée à la barre tic derrière d'en-
bas , qui reçoit la roulette de la petite barre de def-
fous de la barre fondue.
14, 14, 15, 15. Le balancier fixé fur les épaulieres
à quelque diftance de leurs nœuds.
16, 16. Le grand refjort placé entre les deux por-
te-faix.
BAS
103
17, 18,19. J7» '8, 19. Les barres de preffe affem-
blées avec les grandes pièces.
20, 20. Vis de marteau avec fon écrou , placée fur
les pattes des bras de preffe.
21,21. Les extrémités de la grande anfe , fixées fur
les extrémités des bras de preffe.
21, 22. Les deux crochets de la petite anfe.
Le nœud 4 de Yépauliere droite , couvre la partie
de la courroie , qui prend au milieu de la grande anfe
& qui paffe fur la roulette au porte-faix d 'en-bas ;& la
barrefondue&ti'es parties empêchent qu'on ne voye la
fuite de la courroie , aller de deffus la roulette du por-
te-faix d'en bas , au fommet de la tige ou branche du
contre-poids : on n'apperçoit qu'une partie, 26, 26,
des branches de la petite anfe.
27, 28, 29. Un des chameaux ou porte-grille ; l'autre
eft cache par les platines à ondes.
Le bois de grille cache la petite barre de deffous 30,
3 1 . avec fon porte-roulette & fa roulette que reçoit la
gueule de loup; on n'apperçoit que l'extrémité 32. de
la vis qui fixe le bois de grille lur le chameau du côté
droit , que l'extrémité 3 3 . du bois de grille, & que les
extrémités des petits refforts plantés dans le bois de
grille &c formant la grille.
34. 34. Les extrémités des deux barres qui forment
le chaffis de la barre fondue.
35. Une des pièces de commodité qui foûtiennent le
chevalet par un piton qui entre dans un trou pratique
au-deffous de la barre à chevalet.
36. Un des quarrés de la charnière du tirant.
37. 37. Les quarrés des deux charnières des contre-
pouces. Les ondes 42 couvrent les cuivres de la barre
fondue.
38. Pièce quarrée prife entre les côtes de la barre
fondue, de l'angle inférieur, de laquelle part un tou-
rillon dont on voit 47 l'extrémité à travers la roulette
47 du côté droit.
39. 39. 39. Platines à ondes fixées àl'extrémité des
ondes.
40. Ondes.
41. 41. 41. Partie de la furface fupérieure des cuivres
de la barre fondue.
42. Un tirant dans fa charnière.
43 . 44, 45. Un contrepouce avec fon poids , dans
fa charnière.
46. L'extrémité de la verge qui traverfe les contrepou-
ces , les tirans , les cuivres & les ondes.
47. Roulettes de la barre fondue.
48. 48. La bafcule fixée fur les extrémités de der-
rière des contre-pouces.
On voit très-bien le chevalet 49. 50. 51. 52. 53.
54. avec toutes les parties : mais on ne voit point le
tourillon de la pièce de commodité qui le lupporte.
Voilà le détail de ce quatrième affemblage : j'y ai
rappelle toutes les parties dont nous avom fait men-
tion jufqu'à prélent; tant celles qu'on voit dans fa fi-
gure, que celles qu'on n'apperçoit point du tout, ou
qu'on n'apperçoit qu'en partie. Nous pouvons donc
pafTer maintenant au cinquième affemblage , & nous
tenir pour perfuadés que ce fera plutôt l'effet de l'i-
nattention du lecteur , ou plutôt celui de la compo-
fition de la machine, que notre faute , fi l'on ne nous
a pas entendus jufqu'à préfent.
Cinquième Assemblage. Planche V.
On voit dans la première figure de cette Planche
ce cinquième affemblage complet.
La pièce <j6 , 56 , figure 1 & 2, qui fert de bafe à
toutes les autres , s'appelle corps de barre à aiguilles :
ce corps de barre à aiguilles a une petite faillie ou
cordon qu'on apperçoit au lieu 57. On fixe lur cette
faillie la petite barre de h figure J, qu'on ne peut
appercevoir dans h\ figure première qu'on appelle queue
(Tarondedu corps de barre à aiguilles. La furtace infé-
rieure de cette pièce eft plate ; fa fupérieure eft un
104
BAS
BAS
talus ou bifeau un peu convexe ; ce bifeau eft tourné
vers le fond du corps de barre à aiguilles. On en verra
tout-à-1'heure l'ufage.
Les pièces 58 , 58 , figure première , font appcllées
par les ouvriers étochios , figure 4, 58; elles font pla-
cées fur le corps de barre qu'elles traverfent , par un
tenon quarré qui les tient fermes & immobiles fur
ce corps ; elles font au niveau de fa faillie , & elles
font appliquées exa&ement contre la queue d'aronde.
Les pièces 59 , 59, 5 9, figure première , &c. font des
plombs à aiguilles avec leurs aiguilles , rangés fur la
queue d'aronde, entre les deux étochios. On voit , figu-
re <j & 6 , un de ces plombs à aiguilles avec fes trois
aiguilles. On a pratiqué à ce plomb , en le coulant ,
une petite échancrure à fa partie antérieure de def-
fous. La queue d'aronde a exactement la forme de
cette échancrure ; enforte qu'elle remplit les échan-
Crures de tous les plombs à aiguilles. Il n'eft pas inu-
tile de remarquer que la partie poftérieure de deffus
du plomb à aiguille eft en talus.
Les pièces 60 , 60 , figure première , font des plaques
de barre à aiguilles : ces pièces font plates en deffus ;
mais leur partie antérieure de deffous , imite exacte-
ment le talus de la partie poftérieure de deffus du
plomb à aiguille. Les plombs à aiguille font donc fi-
xés inébranlablement entre les plaques & la queue
d'aronde ; entre les plaques qui s'appliquent exacte-
ment fur le talus de leur partie poftérieure , & la
queue d'aronde qui remplit les échancrures de leur
partie antérieure. Ces plaques font fixées fortement
fur le corps de barre par deux vis qui les traverfent
chacune, &le corps de barre.
Les pièces 61 , 6 2 ; 6 1 , 62 , s'appellent des corps de
Jumelles ; ces corps de jumelles font fixés fortement
par leurs pattes 62,62, fur le corps de barre à plati-
nes. Il faut y remarquer deux chofes ; leur extrémi-
té fupérieure , avec la faillie qui eft au-deffous , &
parallèle à cette extrémité. Cette configuration a fon
ufage , comme on verra dans la fuite.
Les jumelles des nouveaux métiers font mieux en-
tendues ; la plaque fupérieure 61 de la jumelle eft
percée au milieu & traverfée d'une vis qu'on peut
avancer ou reculer ; & au lieu d'une faillie S, S ,
telle qu'on la voit ici , elles ont une autre plaque pa-
rallèle & femblable à celle de l'extrémité 6 1 , percée
pareillement & traverfée d'une vis , dont la tête eft
au-deffous de la plaque , & qu'on peut auffi avancer
& reculer ; ce qui met moins de difficulté dans la
conftruftion du métier , & plus de facilité dans le
travail , comme on verra quand je parlerai de la main
d'eeuvre.
Les pièces 63, 63 , placées perpendiculairement
fur le corps de barre & parallèlement aux jumel-
les , s'appellent les moulinets.
Il y a dans les moulinets plufieurs parties à diftin-
guer : 64 , 64 , le corps du moulinet , qui fe termine
par un tenon quarré que le corps de barre reçoit dans
un trou quarré ; 6 5 , 6 5 , le reffort du moulinet. Ce ref-
fort eft mobile dans une charnière 66 , qui traverfe le
corps du moulinet de dehors en dedans. La queue de
ce reffort porte fur un autre reffort placé plus bas qui
la relevé ; 67. tenon qui traverfe le corps du moulinet,
& qui eft traverfe par l'arbre du moulinet qu'il tient
ferme & dirige ; 68. croifée du moulinet ; 69. roue den-
tée du moulinet ; 80. arbre du moulinet.
La pièce 81, 81, que traverfe l'extrémité en vis
de l'arbre à moulinet , s'appelle boîte à moulinet : c'eft
en effet une boîte , ouverte par fa partie antérieure,
& mobile le long du corps à moulinet, à l'aide de
l'arbre à moulinet. Cette boîte reçoit une barre de fer
quarrée 82, 82, appellée barre à moulinet , que le
rejfort courbe 83,83, 83 , fixé par fes extrémités aux
côtés des deux boîtes , tient dans l'état où on la voit.
Ce reffort courbe eft encore attaché par fon milieu
à la barre à moulinet. Cette barre peut fe mouvoir en
devant & en arrière : mais il eft évident que fi quel-
que puiffance la pouffe en arrière, le reffort la repouf-
fera en devant , & la reftituera dans la fituation où
on la voit dans cette figure , auffi-tôt que la puiffance
ceffera d'agir.
La barre à moulinet étant renfermée par fes extré-
mités dans les boîtes , fon reffort étant fixé par fes
extrémités au côté des boîtes , il eft évident que l'arA
bre de moulinet faifant monter ou defeendre les boî-
tes , fera pareillement defeendre ou monter avec
elles la barre & fon reffort. Fin du cinquième affem-
blage.
Sixième Assemblage.
Pour avoir le fixieme affemblage , il ne s'agit que
d'affembler cet affemblage avec le quatrième ; &
c'eft ce qu'on voit exécuté dans la figure y. de la même
Planche V.
Le corps de barre à aiguille 56 , 0 , eft fixé fur les
grandes pièces ; de manière que les platines à ondes
font paffées entre les aiguilles de deux en deux , &
font toutes voifines des plombs à aiguilles ; que les
jumelles font entre les bras deprejfe , & que l'extrémité
des jumelles eft appliquée fur les épaulieres, entre leurs
nœuds & les extrémités du balancier.
Corollaire VI.
On voit que fans la plaque de l'extrémité àes ju-
melles qui contient les épaulieres, le grand reffort fai-
fant tourner l'arbre du métier , emporteroit au der-
rière du métier, & les épaulieres tx le balancier qui leur
eft attaché.
Corollaire VIL
On voit encore qu'il eft à propos que cette plaque
Aes jumelles (bit traverfée d'une vis , dont l'extrémité
donne furies épaulieres ; car par ce moyen, on tien-
dra les épaulieres à telle hauteur qu'on voudra.
Corollaire VIII.
On voit en troifieme lieu que la faillie de la jumelle
ne fervant qu'à empêcher Yépauliere de defeendre trop
bas quand on travaille , il vaudroit mieux fubftituer
à cette faillie immobile telle qu'on la voit ici , une
autre plaque parallèle à celle du deffus delà jumelle,
& traverfée d'une vis , dont la tête feroit en deffous.
Par le moyen de cette vis , l'épauliere ne defeendroit
qu'autant qu'on le jugeroit à propos ; & l'on verra ,
quand nous parlerons de la main d'eeuvre , combien
il eft important de jouir de ces avantages , qu'on
s'eft procurés dans le nouveau métier.
Je crois qu'il eft affez inutile de rentrer dans une
énumération complète de toutes les parties dont ce
cinquième affemblage eft formé : il nous fuffira, après
ce que nous avons dit jufqu'à préfent , d'obferver
deux chofes ; l'une concernant cet affemblage , ôc
l'autre concernant les différences de l'ancien métier,
tel que nous le donnons ici , & du nouveau métier.
Cet affemblage eft formé de trois maffes impor-
tantes ; la cage avec fes appartenances , comme grande
anfe , petite anj'e , crochet de petite anfie , branche de con-
tre-poids, & contre-poids, &c.
L'ame ou la barre fondue avec fes appartenances , com-
me porte-grille , bois de grille , grille , platines à ondes t
ondes , tirans , contre-pouces , bajcule , &c
La barre à aiguilles avec fes appartenances , comme
aiguilles avec leurs plombs, jumelles , moulinets , boites,
barre à moulinet , rejfort à moulinet , &C.
Les différences de l'ancien métier & du nouveau,
font très-légères ; elles ajoutent à la vérité quelque
chofe à la perfeûion du métier ; mais elles ajoutent
encore davantage à l'honneur de l'inventeur : car on
remarquera que fi ce métier devoit être exécuté par
des êtres infaillibles dans leurs mefures , tk mis en
oeuvre
BAS
œuvre par des êtres infaillibles dans leurs mouve-
mens , il auroit fallu le laiffertel qu'il étoit. On s 'eft
feulement ménagé par les changemens qu'on y a faits,
la commodité de tâtonner, & d'atteindre dans k pra-
tique à cette précifîon géométrique que la machine
avoit dans l'efprit de fon inventeur. Paffons au fep-
tieme affemblage.
Septième Assemblage. PI. VI.
La fig. première , Planche VI. montre ce feptieme
affemblage tel que nous Talions détailler.
La pièce qu'on voit 84. 84../%. 2 &cfig. 3- s'appelle
barre à platine ; les groffes pièces 85. 85. auxquelles
elle eft fixée ,fig. 2. s'appellent abattans.
La pièce $6. 86. qu'on voit fig. 4. & qu'on n'ap-
perçoit pas ,fig. première, s'appelle le chaperon de la
barre àplatine ; il eft placé à la partie fupérieure pof-
îérieure de la barre à platine.
La pièce 87. 87. qu'on voit fig. 5. mais qu'on n'ap-
perçoit pas , fig. première , s'appelle queue a"aronde de
la barre à platine. Cette queue d'aronde le fixe à la fail-
lie 88. 88. ou au cordon qu'on voit à la barre à pla-
tine ,fig. 3. nous parlerons de fa figure & de fon ufa-
ge plus bas. Il fuffit de dire ici qu'elle fert à fixer les
platines à plomb , & qu'elle en eft couverte , de mê-
me que la queue d'aronde de la barre à aiguilles étoit
couverte des plombs à aiguilles , & fervoit à les fi-
xer.
La barre à platine a pareillement fes deux étochios
89. 89. fig. 2. fixés aux extrémités de la queue a"a-
ronde , & au niveau de la faillie , ou du cordon de la
barre à platine. On voit ,fig. 2. 89. 89. ces deux éto-
chios ; ils ont la même figure & le même ufage que
fur la barre, à aiguilles.
Les pièces qu'on voit ,fig. 2. 90. 90. & fig. 6. 90,
s'appellent porte-tirans ; ils ont une ouverture à la par-
tie fupérieure , par laquelle ils font attachés ,fig. 2.
fermement au corps de la barre àplatine , & une char-
nière à la partie inférieure , dont on verra l'ufage.
Les pièces qu'on voit, fig. 2. 91. 91.91. &cfig. y.
91. s'appellent platines à plombs avec leurs plombs à
platines ; elles font composées de deux parties , la fu-
périeure qu'on voit fig. 8. & qu'on nomme plomb à
platine , & l'inférieure qu'on voit fig. f). qu'on nom-
me platine à plomb.
Le plomb àplatine a deux fentes à fa partie large ,
& reçoit dans ces fentes deux platines à plomb qu'on
y fixe , enforte qu'il en réfulte le tout de la. fig. y. ce
tout a à fa partie poftérieure un petit crochet qu'on
"voit fig. 8. la queue d'aronde a à fa partie poftérieure
une entaille en biféau , toute femblable à ce crochet ,
enforte que tous les crochets des plombs à platines
rempliffent l'entaille ou le bifeau de la queue d'aron-
de , à laquelle ils demeurent fufpendus par leurs cro-
chets ; ils font appliqués du refte contre le corps de
la barre à platines.
On les fixe contre le corps de la barre à platines par
les plaques de barres à platines , 91. 92. & qui font elles-
mêmes fortement attachées par deux écrous & deux
vis , comme on vohfig. 2.
Les pièces 93. 93. qu'on voit, fig. 2. attachées
au corps de barres à platines par des éminences qui
entrent dans une charnière qui tient au corps de
barre à platines , & qui leur permet de le mouvoir ,
s'appellent pouces : on verra ci-après l'ulage des pou-
ces.
Paffons aux grandes pièces 85,85 ,fig. 2. on les
appelle abattans ; il faut y diftinguer plufieurs par-
ties: on voit fur leur furface antérieure une pièce 94,
94 , qu'on appelle garde platine ; fur leur furtace pof-
térieure une pièce 95,95 , qu'on appelle le croc/ut de
dedans de l'abattant , & fous leur partie intérieure ,
une pièce 96 , 96 , qu'on appelle le crochet de dejjous des
abattans. Il n'y a pas une de ces pièces qui n'ait fon
ufage relatif à fon lieu & à fa configuration : mais
Tome II,
BAS
ro5
cet ufage ne s'entendra bien que quand la machine
entière fera formée, & que nous traiterons de la main-
d'œuvre.
La pièce qu'on voit, fig. 2. 97 , 97 , fixée au bas des
abattans par fes extrémités , & recevant fur fon mi-
lieu les queues des platines à plomb , s'appelle la barre
à poignée. Les parties ab ,AB , font celles que l'ou-
vrier tient dans fes mains , dont les doigts paffent en
deffous , & le pouce en deffus , de manière qu'il puiffe
être appliqué contre la partie que nous avons appel-
lée pouce ; cette barre s'appelle auffi barre à boite ,
parce qu'elle forme une efpece de boîte dans laquelle
les queues des platines à plomb font enfermées.
On voit ,fig. 10. le deffus de cette boîte : les ex-
trémités de ce deffus font faites en coin , & s'ap-
pliquent dans les lieux cd, CD de la barre, jf^. 2. où
elles font retenues par deux goupilles dont on voit
les trous en e , £ , à la barre.
Ce deffus ne gêne pas les queues des platines à
plomb. Voilà toutes les parties qui forment le feptie-
me affemblage.
Il ne s'agit plus que d'ajouter cet affemblage au fi-
xieme affemblage pour avoir le huitième : c'eft cette
addition que nous allons confidérer.
Huitième Assemblage. Plane. VI.
On voit dans cette fig. 1. le feptieme affemblage
joint au fixieme.
L'extrémité fupérieure des abattans eft ajuftée dans
la charnière des épaulieres ; les tirans font pris dans la
charnière des porte-tirans ; les pouces répondent au-def-
fous de la partie antérieure des contre-pouces ; les pla-
tines à plomb rempliffent les intervalles vuides qui
reftoient entre les aiguilles. Il y a entre chaque aiguille
une platine ; il ne s'agit plus que d'attacher en A , a ,
fur les bras de prejfe , la pièce 98 , 98 , qu'on voit fig.
iz. & qu'on appelle la prefje ; que de placer toute
cette machine fur le fût , ou fur le bois , & que de
travailler.
Car voilà la machine entière & complette : voilà
ce qu'on appelle le métier à bas : voilà toutes fes par-
ties , & la manière dont elles s'affemblent ; il ne refte
maintenant que d'en expliquer le jeu , ou que de trai-
ter de la main-d'œuvre.
OliSERVATIOK.
Mais avant que de paffer au dernier affemblage ,
celui du métier avec fon fût , j'obferverai qu'il faut
une extrême précifîon dans la configuration des par-
ties du métier. Il faut que les intervalles que laiffent
entr'eux les cuivres , répondent bien exactement aux
rejforts de grille ; que l'épaiffeur des plombs à aiguilles
foit bien compallée pour qu'il n'y ait pas plus de
plombs à aiguilles que de platines à ondes, & que cha-
que platine à onde laiffe toujours entr'elle Se celle qui
la fuit trois aiguilles ; que les plombs à platines aplomb
foient bien compaffés , pour que l'épaiffeur d'un de ces
plombs foit double de l'épaiffeur <Tun plomb à ai-
guilles ; que les deux platines que porte chacun de ces
plombs , fe rencontrent bien dans les deux interval-
les que laiffent entr'elles les trois aiguilles prifes entre
chaque platine à ondes , & que toutes ces parties dé-
licates fe meuvent librement les unes entre les au-
tres.
Corollaire IX.
J'ai dit que l'intervalle de barre fondue fur lequel
font difpofés les cuivres étoit de quinze pouces : j'ai
travaillé chez le lieur Barrât, le premier ouvrier
dans fon genre , & le dernier qu'on verra peut-
être de la'même habileté , fur un quarante-cLu\ ,
c'eft-à-dire, un métier qui portoit fur chaque trois
pouces de barre fondue, quarante-deux cuivres. La
barre fondue entière avoit donc deux cens dix cuivre- ;
il y avoit donc deux cens dix ondes , deux cens dix
platines à ondes , quatre cens vingt platines à plomb ,
io6
BAS
& fix cents trente aiguilles. On verra dans la fuite que
chaque aiguille fait fa maille , & que par conséquent
l'ouvrier faifoit , ou pouvoit faire fur ce métier , fix
cents trente mailles à la fois.
Mais il eft à propos de donner ici la repréfentation
d'une aiguille : on en voit une dans cette planche ,
fig. il. il faut y diftinguer trois parties ; fon bec a ,
fa chaffe b,&£ (a queue c : fon bec eft élaftique , & quand
il elî prefïe , il lé cache dans la chaffe b ; la queue c
eft prife dans le plomb à aiguilles. Nous avons donne
à l'article Aiguille , la manière de travailler les ai-
guilles du métier. On a pour ce travail une machine
tout-à-fait commode , & très-curieufe ; elle eft de l'in-
vention du fieur Barrât , & il y a bien de l'apparence
qu'elle diffère peu de celle qu'a dû imaginer l'inven-
teur du métier ; car ce n'étoit pas allez que d'avoir
imaginé la machine ; fon exécution a dû offrir des
difficultés étonnantes , & elle n'a pu avoir lieu que
ces difficultés ne fuffent levées ; pour cet effet , il a
fallu trouver les moules des plombs à platines &. des
plombs à aiguille ; car s'il avoit fallu égaliler ces
plombs à la lime , on n'auroit jamais fini : il a fallu
trouver le moyen de pratiquer en tres-peu de tems
des chaffes à des aiguilles fines comme des cheveux.
Il ne faut donc pas regarder l'inventeur de la machi-
ne à faire des bas , comme un homme qui a imaginé
une choie leule , très-difficile à la vérité , & qui l'a
imaginée auffi parfaite prefque qu'elle le pouvoit
être; mais comme un homme qui , lui feùl , a encore
furmonté tous les oblfacies qui s'oppoloient à l'exé-
cution de la machine ; & ces obftacles font de nature
à ajouter beaucoup à l'honneur de celui-là fëul qui
les auroit furmontés. Il faut coniulter pour cet effet
les articles de ce Dictionnaire , Moule & Ai-
guille.
Neuvième Assemblage. Plane. VII.
Ce neuvième ailémblage eft la machine entière fur
(onfùt.
Elle eft compofée i°. de la cage , & de/es dépen-
dances.
2°. De Vame , & defes dépendances.
3°. D [es moulinets avec leurs dépendances.
40. Des abat tans , c-C de leurs dépendances.
Paffons maintenant à la main-d'œuvre.
. MAIN-D'ŒUVRE ou travail des bas fur le métier
à bas.
Je diviferai la main-d'œuvre en fept opérations prin-
cipales. La formation des mailles eft le but de ces fept
opérations. La première confifte à cueillir; la fécon-
de, à foncer au pié, & à former l'ouvrage ; la troifieme ,
à amener fous les becs ; la quatrième , à former aux pe-
tits coups ; la cinquième , à prejjer les becs , & à faire
pajjer la maille du derrière Jur les becs j la fixieme , à
abattre ; la leptieme , à crocher.
Première Opération. Cueillir.
Pour rendre cette opération & les fuivantes très-
intelligibles , j'ai fait repréienter les platines à ondes >
& les platines à plomb , en grand.
Il y a une petite opération préliminaire à toute au-
tre , c'eft de noiier la foie à la première aiguille , com-
me on voit Planche I. du bas au métier ,fig. i. tkfig. Z.
au point î , puis de la palier fous la féconde ai-
guille , & de lui faire faire un tour fur cette féconde
aiguille , en la ramenant deffus ; de la conduire fous
la troifieme aiguille , & de lui faire faire un tour fur
cette aiguille , en la ramenant deffus ; de la conduire
fous la quatrième aiguille , & de lui faire faire un tour
fur cette quatrième aiguille , en la ramenant deffus ,
& ainfi de fuite , jufqu'à ce qu'il n'y ait plus d'aiguil-
les , & placer ce commencement d'ouvrage fous la
gorge des platines , comme on l'y voit fig. première :
cela fait , voici comment on travaille.
BAS
Le premier mouvement du cueillir confifte à preru
dre la foie au fortir de deffous la dernière aiguille, 8c
de l'étendre fous les becs , comme on le voit en 3 , 4 ,
fig. première fkfig. J. & 2.
Le fécond mouvement , à prejfer fur la première
marche à gauche ou à droite , lelon le côté où fera
le corps du chevalet : s'il eft à droite , comme on le
luppole ici , on preffera du pié la première marche à
gauche ; il part de l'extrémité de cette marche une
corde qui paffe autour du tambour de la roue ; voy.
la PI. II. fig. 1 . n° q. cette corde 8 fera tourner le tam-
bour & la roue 13 de droite à gauche : mais il y a
autour de la roue une corde qui va de-là fur les rou-
lettes de la barre à chevalet , & de ces roulettes aux
5 du corps à chevalet ; Voye^ PI. IV. fig. 6 '. n°. 54, 5 4 ;
le corps à chevalet 5 1 même fig. gliffera donc le long
de la barre à chevalet 50 de droite à gauche : mais
comme le comble 5 2 du corps à chevalet eft plus haut
que la queue des ondes , il accrochera en paffant les
queues des ondes , les chaffera de la petite cavité c
des refforts de grille ,fig. 1. PI. IV. & le deffous de
la tête de toutes les ondes fera forcé de defeen-
dre fur la barre à moulinet , voye{ PL 5. fig. I. &fig. J»
6 s'y tiendra comme collé , par l'act ion du petit plan
incliné a b , qui termine les refforts de grille. Voye^
fig. 1. PI. IV. Or la tête des ondes ne peut defeen-
dre , que les platines à ondes qui font alfemblées avec
les ondes ne defeendent auffi : mais en defeendant ,
leurs becs rencontreront néceffairement la foie qu'on
a étendue deffous , l'entraîneront avec eux , comme
on voit PI. I. fig. 4. Ôt lui donneront la difpofition
qu'on lui voit fig. 4. à. ou 6. c'eft-à-dire, qu'elle
formera des boucles entre la féconde & la troifieme
aiguille , entre la cinquième & la fixieme , entre la
huitième & la neuvième, & ainfi de fuite. Fin de la
première opération,
II. Opération. Foncer du pié & former C ouvrage.
Lé premier mouvement de cette opération fe fait
du pié dont on a cueilli & des deux mains. L'ouvrier
prend la barre à poignée des deux mains , de manière
que les pouces (oient appliqués contre les pièces ap-
pellées pouces. Voye^ Pi. Vil. fig. 1 . les mains font en
AA,tk les pouces en B B. Il fait enfuite trois ac-
tions à la fois ; il preffe du pié la marche 15, fig. z.
Plan. II. dont il a cueilli ou fait marcher le corps à
chevalet de droite à gauche ; il tire des mains perpen-
diculairement en-bas la barre à poignée A A ,fig. I.
PL VII. & il preffe avec fes pouces fortement con-
tre les pouces B Byfig. 1. Pi. VII. voyons quel eft le
réfultat de ces aclions.
Il part des extrémités de la traverfe 6, 6, fig. i.Pl.
II. qui paffe fous les marches 1,2,3, des cordes 9 ,
9, avec leurs crochets 10, 10, qui vont prendre les
crochets du balancier 15, 15 , PI. H. fig. 3- la mar-
che 1,5, même Plan. fig. 1. étant preffée , preffe la
traverfe 6,6: d'ailleurs le balancier 14, 14, 15,15,
fig. 3. même PI. eft attaché fur les épaulieres , comme
on voit en 14, 14 ; les épaulieres reçoivent dans leurs
charnières les abat tans , PI. VI. fig. l. 85 , 8 5 ; 85 ,
85 : la barre à platines eft attachée aux abattans , mê-
me PI. & fig. l. n° 84 , 84. L'acf ion du pié fur la mar-
che tend donc à faire defeendre les abattans , & avec
les abattans , la barre à platines , avec la barre à plati-
nes , les platines à plomb ,91,91,91, même Plan,
fis-*- . ... ,. .
L'acf ion des mains qui tirent perpendiculairement
en-bas les abattans , tend auffi à faire defeendre les
abattans , la barre à platines , & les platines à plomb.
Les adf ions du pié & des mains conlpirent donc ici.
L'adion des pouces contre les pièces appellées pou-
ces , tend , fig. 6. PI. IV. à lever la partie antérieure
des contre-pouces 43 , 43 , par conféquent à taire
baiffer leur partie poftérieure 45 , ôc à appliquer la
BAS
BAS
10/
hafcule^S , 48 , fur les queues des ondes, ou à les fai-
re baifler, ou à relever leur tête , ou à relever les
platines à ondes.
Les trois a&ions combinées de ce mouvement ten-
dent donc à produire deux effets contraires ; l'un
d'abaifTer les platines à plomb , l'autre de relever les
platines à ondes.
Le fécond mouvement de cette opération confifte
à ménager doucement ces deux effets contraires, à
les combiner finement , & à faire enforte que les pla-
tines à ondes remontent d'entre les aiguilles , à peu
près de la même quantité que les platines à plomb y
descendent ; en forte que les becs des unes &c des au-
tres fe trouvent tous de niveau fous les aiguilles ,
comme on voit PI. 1. du bas au métier fig. y.
Il s'eft donc fait dans cette féconde opération une
nouvelle diftribution de la foie, comme on voit fig.
y. 8- &<). & formé une boucle entre chaque aiguille :
mais les nouvelles boucles s'étant formées aux dé-
pens des précédentes , elles font toutes égales & tou-
tes plus petites que les premières formées par les
feules platines à ondes.
C'étoit pour donner lieu à cette diltribution de la
foie entre toutes les aiguilles , au retréciffement des
boucles formées par les platines à ondes , & à la for-
mation des boucles faites parles platines à plomb aux
dépens des premières , que l'on a fait un peu relever
les platines à plomb ; car fi on n'eût point fait relever
les platines à plomb , que feroit-il arrivé? c'eft que
ces platines euffent tenu tendues fur les aiguilles les
portions de foie 1 , 2 ; 3 , 4, fig. 3. ou 1 , 2 ; 3 , 4 ,fig. 6.
PI. 1. du métier à bas , & que les platines à plomb FE,
D C , &c. venant à s'appliquer fur les mêmes por-
tions , auraient produit l'un ou l'autre de ces effets ,
ou enfoncé les trois aiguilles contenues fous chaque
portion , ou rompu la foie : au lieu que les platines à
ondes A B remontant un peu ,fig. 4. & 6. même PI.
lorfque les platines à plomb C D , E F ' , rencontrent
les portions de foie 1,2; 3,4, fig. G. & 6. elles font
defcendre fans peine cette foie fous les aiguilles , &
la diltribuent entr'elles fans les forcer. Mais chaque
boucle des platines à ondes ne perdant qu'autant de
foie qu'en prend chaque platine à plomb , 6c ces pla-
tines ceffantles unes de remonter, & les autres de
defcendre entre les aiguilles, lorfque leurs becs font
tous de niveau fur les aiguilles , comme on les voit
PI. I. du bas au métier ,fig. J.8. Q. toutes les bou-
cles font égales , & la foie fe trouve diftribuée entre
les aiguilles , comme on voit fig. y. & 8. La portion
1 , 2 faite à la mam fig. y. eft fous les gorges des plati-
nes, ck la portion 3, 4 fous les becs. Fin de la féconde
opération.
III. Opération. Amener l'ouvrage fous becs.
Cette opération s'exécute d'un feul mouvement ,
compofé de deux actions ; l'une de laiffer remonter
les abattans , & l'autre de tirer la barre à poignée en-
devant.
Il eft évident que pour baifTer les abattans , & met-
tre les platines à plomb de niveau avec les platines à
ondes , il a fallu vaincre l'action du grand reflort ;
car , PL VI. fig. 1. le grand reffort 16 , 16 , agif-
fant par fon extrémité fupérieure contre le portefaix
8 de X arbre 6 , 7, tend à le taire tourner : or Varbre ne
peut tendre à tourner qu'il ne donne le même effort ,
la même tendance aux épauliercs <; , 85 ; 85, 5 :
mais les épaulicres reçoivent dans leurs nœuds les
abattans 85, 8 5 ; 85, 85 : le grand reflort tend donc
à relever les abattans.
Ainli pour laiffer remonter les abattans , il n'eft
queftion que de lâcher des mains , ne point retenir
la poignée A B , 6c que de laiffer agir le grand ref-
fort ; obfervant , tandis que le grand reflort fait re-
monter les abattans , de tenir les pouces B B forte-
ment appliqués contre les contrepouces C C, PI. f II.
Tome IIt
fig. 1. car par ce moyen les pouces B B ne ceflant
point d'agir contre les contrepouces C C , la partie
antérieure des contrepouces e e fera levée à mefure
que les abattans remonteront; leur partie poftérieure
dd baiffera d'autant ; labafcule//fera toujours ap-
pliquée fur les queues des ondes ; la tête des ondes g g
fuivra le mouvemement de la barre à platine h h ,
qui remontera avec les abattans , & les platines à on-
des demeureront toujours de niveau avec les platines
à plomb.
L'autre adion dont le mouvement de cette troi-
fieme opération eft compofé , confifte à tirer la barre
à poignée A A en devant.
Cette action fe fait horifontalement : mais on ne
peut tirer la barre à poignée A B ,fig. 1. PI. kl. en
devant , que tout ce que nous allons dire ne s'enfui-
ve ; voyez PI. VI. fig. 1 . la barre à platine 84 , 84 , eft
tirée en devant , car elle eft attachée aux abattans ;
les platines a ondes s'avancent en même tems en de-
vant , & toujours parallèles aux platines à plomb ;
parce que la barre fondue eft contrainte d'avancer ,
en vertu des titans qui tiennent à elle d'un bout , &
de l'autre aux porte-tirans 50 , 90 , même PI. fig. 2.
qui font attachés à la barre à platines.
Par le mouvement compoié de ces deux aôions ,
lesbecs àes platines a £ s'élèvent au-deflusdes aiguil-
les, les défions des becs font amenés un peu au-delà
de leurs têtes c d, & la foie fe trouve dilpolée com-
me on la voit PI. I. du bas au métier , fig. 10. il. il.
mais alors la branche des crochets { de deflbus des
abattans eft appliquée contre les petits coups x fig.
I. Pi. VII. Fin de la troifieme opération,
IV. Opération. Former aux petits coups.
Le premier mouvement de cette opération con-
fifte à laiffer remonter l'extrémité des crochets j de
deflbus des abattans , aux petits coups x , Plan. VII.
fig. 1. Ce mouvement fe joint prefqu'au premier
mouvement de l'opération précédente : la furface .
en talus , ou le deflbus du petit coup x , fe trouve
alors appliqué à la furface en talus pareillement de
l'extrémité du crochet £. Mais comme le grand ref-
fort 16 , 16 , tend toujours à relever les abattans ,
il tend en même tems à féparer l'extrémité du cro-
chet 1 , de l'éminence du petit coup x.
Le fécond mouvement confifte à empêcher cette
féparation par de petites fecouffes , qui font un peu
glifferle talus de l'extrémité du crochet çfùr le talus
intérieur de l'éminence du petit coup x. Ces fecouf-
fes ont pour but de corrompre & corroyer la foie
fous les becs d'aiguilles , & de la tenir tendue en de-
vant, & prefque de niveau avec les becs, comme on
voit PI I. du bas au métier , fig. 10. u. iz.
Il faut toujours tenir les pouces de la main forte-
ment appuyés contre les pouces de la machine , afin
que les têtes des ondes demeurant toujours appliquées
à la barre à platines ; les platines à ondes & les platines
aplomb demeurent toujours de niveau; car cela eft
eflentiel , comme il eft facile de s'en appercevoir. Fin,
de la quatrième opération.
V. OPÉRATION. Donner le coup de prefife , & faire
pafier l'ouvrage de defjous la gorge des platines fur les
becs des aiguilles.
Le premier mouvement de cette opération con-
fifte à abandonner les abattans à eux-mêmes , tenant
toujours les pouces des mains fortement contre les
pouces B B de la machine , &: les platines à ondes bien
paralleks en tout fens aux platines aplomb. L'action
du grand reflort 16 , 16, fera remonter les abattons*
jufqu'à ce que les épaulicres 00 l'oient appliquées aux
arrétans de l'extrémité des jumelles p p , comme on
voit PI. Vil. fig. 1.
Mais lorfque les abattans feront remontés à cette
hauteur, alors le ventre n des platines correfpondra.
Oij
io8
BAS
ou fe trouvera à la hauteur des aiguilles , comme on
voit même PI. même fig. l . &C PL IL bas au métier ,
fig. l.ab.
Le fécond mouvement confifte à appuyer forte-
ment le pié fur la marche du milieu ; & voici le ré-
fultat de ce mouvement. La marche baiffe , tire à elle
le crochet de h petite anfe,ce crochet tire la petite an-
Je , la petite anfe tire la grande anfe , la grande anfe
fait defeendre les bras de la preffe , & la prefle fe trou-
ve appliquée fur les becs des aiguilles , dont elle
force les pointes à fe cacher dans les chaffes , com-
me on voit fig. 1. PL IL du bas au métier.
Letroifieme mouvement , c'eft tandis que la preffe
eft fur les becs des aiguilles , de faire paner l'ouvra-
ge qui eft contre les ventres des platines , comme on
voit PI. II. fig. i. au-delà des chaffes des aiguilles ,
comme on voitfig. 4. mime PI. ce qui s'exécute en
tirant la barre à poignée brufquement en devant , èc
horiibntalement.
Le quatrième mouvement , d'ôter le pié de deffus
la marche du milieu ; d'où il s'enfuit que rien n'em-
pêchera plus la grande anfe qui eft tirée en-haut par
la lifiere de cuir ou la courroie , qui paffe fur la rou-
lette du porte-faix a" en-bas, & qui fe rend à la bran-
che du contre-poids , de remonter & d'entraîner avec
elle & faire relever les bras de preffe; ce qui féparera
la preffe de-deffus les becs des aiguilles , & permettra
à la pointe de ces becs de fortir de leurs chaffes. Fin
•de la cinquième opération.
Sixième Op ération. Abattre L'ouvrage.
Il n'y a qu'un mouvement affez léger à cette opé-
ration , il conlifte à tirer la barre à poignée , & à faire
avancer les ventres àesplatines jufqu'entre les têtes des
aiguilles; il eft évident que ces ventres placés, com-
me on les voit, PI. II. du bas au métier , fig. 3. feront
paffer l'ouvrage, de l'état où on le voit, fur les becs
des aiguilles , fig. 4. 1,1, dans l'état où on le voit
fig:$-\,4, cm fig. 6. 5, 6.
Voilà la formation de la maille : la feptieme opé-
ration n'y ajoute rien ; elle reftitue feulement & le
métier èc l'ouvrage déjà fait, dans une pofition à
pouvoir ajouter de nouvelles mailles aux mailles
qu'on voit , ou dans l'état oii il étoit quand on a com-
mencé à travailler.
Septième Opération. Croc fier.
Cette opération n'a qu'un mouvement : mais c eft
le plus coniidérable & le plus grand de tous.
Quand on eft fur le point de crocher, le métier fe
trouve dans l'état fuivant : les ventres des platines
font au niveau des têtes des aiguilles, & par confé-
quent le deflbus des becs fort au-deffus des aiguilles ;
les crochets de-deffousdes abattans font au-deffus des
petits coups, comme on les voit PI. VII. fig. 1. &
les épaulieres fous les arrétans des jumelles , comme on
les voit même figure.
Pour crocher, on applique la branche du crochet £
de-deffous des abattans , contre les arrétans y ; on tire
perpendiculairement en-bas les abattans par la barre
à poignée A A ; tenant toujours les branches des cro-
chets appliquées à l'éminence t des arrétans qui diri-
gent dans ce mouvement : on fait defeendre de cette
manière les platines à ondes & les platines à plomb ,
jufqu'à ce que le haut de leurs gorges M, foit à la hau-
teur de N , ou des têtes des aiguilles : puis du même
mouvement continué horifontalement, on repouffe
en arrière les abattans auffi loin que l'on peut ; & l'on
laiffe remonter le métier qui va de lui-même , s'arrê-
ter au-deffbus de la barre à aiguilles , où il rencontre
un crochet prêt à recevoir celui qui eft placé au der-
rière des abattans, & qu'on appelle crochet de-defjus des
abattans.
Il eft évident que dans ce mouvement le haut de la
gorge M des platines a emporté avec lui l'ouvrage
BAS
qui étoit fous les b;cs, en le faifant gliffer le long de*
aiguilles ; que les becs des aiguilles font vuides ; que le
deflbus des becs des platines à ondes & des platines à
plomb , fe trouve entre les aiguilles; que l'ouvrage
fait eft caché pour celui qui ne voit le métier qu'en
face, 67. qu'il le voit alors comme il eft repréfenté
PI. II. fig. 8. du bas au métier, c'eft-à-dire, prêt à tra-
vailler de nouveau, ou à faire de gauche à droite ce
qu'il a exécuté de droite à gauche.
C eft maintenant qu'on doit avoir conçu comment
fe fait la maille , qu'il eft à propos de revenir fur les
parties du métier 6c fur leurs configurations, dont on
n 'étoit pas en état auparavant de bien entendre les
propriétés.
Commençons par les marches ; elles font au nom-
bre de trois, PI. II. fig. 1. du métier à bas; c eft la mê-
me corde qui va de la première 1 , 5. au tambour de
la roue 17. & de ce tambour à la troineme 1,5. d'où
il s'enfuit que fi l'on preffe du pié celle qui eft à gau-
che , on fera tourner la roue de droite à gauche , Se
qu'en prenant du pié celle qui eft à droite , la roue
tournera de gauche à droite.
C 'eft la même corde qui paffe fous la roue du fût ,
011 elle eft clouée, & qui va fe rendre d'un bout fur
une des roulettes de la barre à chevalet, & de l'autre
fur l'autre roulette, & s'attacher aux/ qui par-
tent du corps de ce chevalet, comme on voit PI. IV.
fig. 6. n°. 49. 49.
On conçoit actuellement ce que nous avons dit de
V arrêtant, ou de cette partie y t qu'on voit PI. VII.
fig. 1. Il a fallu néceffairement fe ménager la facili-
té de l'avancer ou de la reculer, en pratiquant à la
partie appliquée & fixée au montant une ouverture
longinidinale r : trop avancé en-devant , ou trop peu,
le tond des gorges àesplatines ne pourroit plus venir
chercher l'ouvrage abattu, en vuider les aiguilles,
l'entraîner derrière , & donner lieu à la continuation
du travail.
Au-deffbus de Y arrêtant , on voit la pièce appellée
le petit coup x , même Planche & même figure. Sans
ce petit coup, qui eft ce qui règle l'ouvrier, ouand
il forme l'ouvrage & corrompt la foie amenée fous les
becs des aiguilles ; il feroit expofé à avancer le deflbus
des platines trop en-avant , à caffer la foie , ou à rom-
pre les becs des aiguilles.
Voilà ce qu'il y a de plus remarquable fur le fût
& fes parties. Paffons au métier, Se parcourons fes
aflêmblages.
On s'eft ménagé aux gueules de loup 13. la même
commodité qu'aux arrétans, celle de les haufler &
baiffer à diferétion , afin d'ajufter convenablement la
barre fondue. PL II. fig. 3.
On fent de quelle importance eft le grand reflbrt
16, 16. c'eft par ion moyen que les abattans font rele-
vés fans que l'ouvrier s'en mêle. PL II. fig. 3. lavis
iy. qui fertà le bander ou aie relâcher, eft très-bien
imaginée.
Le balancier 14, 14, 15, 15, n'eft pas une pièce
inutile ; il met à portée le pié d'aider la main ; à vain-
cre la réiîftance du grand reflbrt toutes les fois qu'il
faut faire defeendre les abattans. Or ce mouvement
fe faifant Couvent, on n'a pu apporter trop d'atten-
tion à foulager l'ouvrier.
La patte du bras de preffe 17, 18, iÇ),fig- 1. PL III.
eft garnie d'une vis 20, 20, dont on va fentir toute
la finefle : fans cette vis , l'ouvrier , en donnant le
coup de preffe , feroit expofé ou à rompre toutes les
aiguilles , fi la preffe s'appliquoit trop fortement fur
elles, ou à ne pas cacher leurs becs dans leurs chaffes,
fi elle ne s'appliquoit pas affez. Mais qui le dirigera
dans cette opération ? les vis appliquées à l'extrémité
des bras de prejje , qui permettront à ces bras de def-
eendre fuffifamment , & à la preffe de s'appliquer
convenablement fur les becs £ aiguilles.
BAS
Mais c'eût été bien du tems de perdu pour l'ou-
vrier , & bien de la peine réitérée , s'il eût fallu re-
lever la prefle & la loûtenir : aufîi le relevé -t-elle
d'elle-même , à l'aide de la courroie panée de la gran-
de anfe fur la roulette Au porte -faix a" en-bas , & atta-
chée à la branche du contre-poids.
On s'en- encore ménagé aux porte-grilles , PI. III.
fig. 3. le même avantage qu'aux gueules de loup , &
qu'aux arrètans. Leur ouverture longitudinale x x ,
permet aufiî de les avancer ou reculer à difcrétion.
Le porte-roulette fixé, même fig. au milieu de la
petite barre de deffous , facilite avec les roulettes de
l'extrémité de la barre fondue , le mouvement en-ar-
riere ou en -devant, de tout ce qu'on appelle Yame
du métier, que l'ouvrier fait en travaillant avancer
ou reculer toutes les fois qu'il tire à foi ou repouffe
les abattans ; ce qui lui arrive très - fouvent. Aufli
louai-je beaucoup ceux qui ont diminué le poids de
ces parties , en ajoutant une roulette à la petite barre ,
& une gueule de loup à la barre de derrière , pour re-
cevoir la roulette ajoutée.
Il y a plufieurs choies à confidérer dans les reflorts
de grille. PI. III. fig. 6. Premièrement , ils font dif-
pofés fur deux rangées parallèles de manière que
les reflorts de la rangée de derrière répondent aux
intervalles que laiflent entre-eux les reflorts de la
rangée de devant : c'en: le feul moyen qu'il y eût
peut-être de leur donner la force qui leur eft nécef-
îaire pour l'ufage auquel ils font employés. Si on les
eût tous placés fur une même rangée , ils auraient
été plus petits & trop foibles. Voilà pour leur arran-
gement.
Secondement, ils font compofés de quatre plans
inclinés , difpofés à-peu-près en zig-zag. Lorfque la
queue de l'onde efl" chaffée de la cavité c , figure y.
même PI. par le corps du chevalet , elle écarte le ref-
fort , qui revient enfuite fur elle quand elle eft fortie ,
& qui la repoufl'e d'autant plus vivement , qu'alors
elle fe trouve fur un plan incliné a b ; c'eft le même
effet quand elle eft chaffée de fa cavité en - défions
par la bafcule : elle écarte pareillement le reffbrt qui
revient enfuite fur elle , avec d'autant plus de viva-
cité qu'elle le trouve encore fur un plan incliné c d.
La méchanique n'eft pas différente , quand chaffée
de fa cavité , foit en-deffus , foit en-deffous , elle y eft
ramenée ; elle ne peut y defeendre que par une efpcce
d'échappement fort prompt , puilqu'elle y eft tou-
jours conduite par un petit plan incliné c d , c b.
Ce n'eft pas une petite affaire que de bien difpo-
fer les cuivres de la barre fondue. Leur ufage eft d'em-
pêcher les ondes de vaciller dans leur mouvement de
chute. Si l'on a bien compris ce que j'ai dit jufqu'à
préfent , on doit s'appercevoir qu'il y a un rapport
bien déterminé entre le nombre des reflorts , les in-
tervalles qu'ils laiflent entr'eux ; le nombre des cui-
vres, leur épaiffeur; les ondes, leur longueur , leur
nombre , leur épaiffeur ; les platines à ondes , leur
nombre , leur épaiiîeur ; les platines à plomb , leur
nombre , leur longueur , leur épaiffeur ; les plombs à
platines , leur nombre , leur épaiffeur ; les aiguilles ,
leur nombre , leurs intervalles ; les plombs à aiguille ,
leur nombre , leur épaiffeur : & que l'une tic ces cho-
ies étant donnée, tout le refte s'enfuit. Il y a très-
peu d'ouvriers en état de combiner avec précilion
toutes ces chofes , fur-tout quand il s'agit de taire un
métier un peu fin; comme un quarante , un quarante-
un , un quarante-deux , &c.
La méchanique des contre-pouces 43 , 44, 45 , PI.
IF. fig. 4. mérite bien un coup-d'ceil. Ces pièces font
chargées à leur extrémité d'un contre-poids 44 , qui
ne permet à la bafcule d'agir fur les queues des on-
des , qu'à la volonté de l'ouvrier. Il y a lur les ondes
deux actions oppofées pendant tout le travail , îx el-
les ont leurs effets fuccelfivement , lelon les mouve-
BAS
109
mens des abattans. Ces deux actions font l'aûion de
la bafcule 48 , 48 , par le moyen des pouces & contre-
pouces fur la queue des ondes , & l'action de la barre à
platines fur leur tête. Lorfque l'ouvrier tire les abat-
tans perpendiculairement en bas , alors la barre à pla-
tine , ou fon chaperon , c'eft-à-dire cette petite plaque
qui lui eft appliquée par derrière & qui fait émincn-
ce , preffe fortement fur leurs têtes, les entraîne dans
la même direction , & les réduit dans le parallélifme
avec les platines à plomb , malgré Paftion des pouces
fur les contre-pouces , & celle des contre-pouces fur la
bafcule , & celle de la bafcule fur les queues des ondes :
mais lorfque l'ouvrier laiffe agir le grand reffort , &
que les abattans abandonnés à eux-mêmes font rele-
vés, alors rien ne s'oppofe à l'action des pouces , des
contre-pouces & de la bafcule, qui fublifte pendant tout
le travail; & les ondes fe relèvent, & leurs queues
rentrent dans leur cavité , ou defeendent au-deffous,
félon que l'ouvrier le veut.
Comme il falloit que dans tous les mouvemens les
platines à ondes & les platines aplomb raflent toujours
exactement parallèles en tout fens les unes aux autres,
quoique les platines à ondes appartinffent à la barre
fondue , & que les platines aplomb appartinffent à la
barre à platines , c'étoit donc néceffité que la barre fon-
due le prêtât & fuivît tous les mouvemens de la barre
à platines : c'eft ce qui s'exécute par le moyen des ti-
rans qui répondent d'un bout à la barre fondue , & de
l'autre à la barre à platines , & par le moyen des trois
roulettes de l'ancien métier, & des quatre du métier
nouveau , dont deux fe meuvent dans les gueules de
loup , &c deux fur les grandes pièces.
Paffons maintenant aux moulinets. Comme nous
n'en avons rien dit jufqu'à préfent, & que nous avons
cependant traité de prefque tout ce qui concerne la
main-d'œuvre , on leroit tenté de croire au moins que
ces parties & toutes celles qui leur appartiennent ,
comme la boite , la barre , & le reffort à moulinet, font
fuperflues , & qu'il n'y a pas non plus grand befoin
de jumelles. On va voir combien ce loupçon eft éloi-
gné de la vérité.
Pour bien entendre ce qui fuit , il faut examiner un
peu la configuration d'une onde en-deJJ'ous. On voit ,
PI. IV. fig. 3. que depuis a jufqu'à b elle eft comme
arrondie , & qu'elle eft évidée depuÎ6 b jufqu'à c. La
partie arrondie a b forme la tête. Lorfque le chevalet
paffant fous la queue de Yonde, fait defeendre cette
partie a b , elle s'applique fur la barre à moulinet 82 ,
82 , PL V.fig. 1. enlorte qtie toutes les têtes des on-
des font rangées fur la barre à moulinet , quand le corps
à chevalet a fait fa courle. D'où il s'enfuit évidem-
ment que plus cette barre fera haute , moins les tètes
des ondes delcendront, moins les platines à ondes at-
tachées à ces têtes delcendront entre les aiguilles ;
moins les becs des platines delcendront au-defibus des
aiguilles dans la première opération de la main-d 'œu-
vre ouïe cueillernent ; moins les boucles de foie for-
mées entre les aiguilles feront grandes ; moins les
mailles feront lâches : mais cette barre à moulinet étant
enfermée dans des boîtes 81,81, qui peuvent fe hauf-
fer ou le bailler à l'aide des arbres à moulinet 68,81;
68 , 81, qui les traverfent, on pourra donc hauffer ou
bailler cette barre à dilcrétion, & faire un ta.* plus
ou moins ferré. Voilà l'ufage de la barre en elle-mê-
me & de fa mobilité le long des corps de moulinet ;
mais ce n'eft pas fans raifon qu'on lui a attaché pol-
térieùrement un reffbrt 83 , 83 , 83 , à l'aide duquel
elle peut aller & venir dans les boites.
Pour fentir l'ufage de ce reffort & de la mobilité
de la barre dans lès boîtes , il faut relire ou le rappel-
ler la dernière opération de la main -d œuvre ou du
crochement : il coniifte à faire defeendre les platines
jufqu'à ce que leurs gorges l'oient un peu plus bas
que les têtes des aiguilles , &. que ces gorges puiflènt
no BAS
embraffer l'ouvrage qui remplit ces têtes , & le rem-
porter en-arriere.
Mais pour exécuter ces mouvemens , comme il y
a loin de la barre à moulinet, fur laquelle les têtes des
ondes étoient placées , jufqu'aux têtes des aiguilUs ,
il a fallu amener les têtes des ondes & les platines qui
y font attachées , en-devant ; c'eft ce que l'ouvrier a
fait , en tirant à lui la barre à poignée ou les abattans.
Il a fallu faire defcendre les platines, & par confé-
quent les têtes des ondes auxquelles elles font affcm-
blées, pour que les gorges des platines le trouvaffent
un peu au-deffous des têtes des aiguilles ; c'eft ce qu'il
a fait en tirant les abattans aufii bas qu'ils pouvoient
defcendre , & fe laiffant diriger par les arrêtans. C'eit
pour rendre polTible ce dernier mouvement , que l'on
a évidé les ondes en-dcffous ; car fi elles avoient été
par- tout de la même largeur, elles n'auroient pu def-
cendre ; la barre à moulinet fur laquelle elles auraient
continué de porter , les en aurait empêché : mais
en les évidant , elles ont celle de porter fur la barre à
moulinet, Se en les évidant affez, elles n'ont rien ren-
contré d'ailleurs qui les gênât dans leur defcente , &
qui empêchât la gorge des platines de parvenir juf-
qu'au-deffous des becs des aiguilles.
Mais ce n'étoit pas tout ; il falloit que ces gorges
remportaient l'ouvrage de défions les becs des aiguilles
en-arriere : pour cet effet, l'ouvrier tenant ces gorges
entre les têtes des aiguilles , les repouffe en-arriere :
mais en les repouffant en-arriere , qu'arrive-t-il ? c'eff
que le talon de l'échancrure des ondes rencontre la bar-
re à moulinet. Si cette barre à moulinet étoit immobile
dans les boîtes , elle arrêterait ce mouvement hori-
fontal , & l'ouvrage ne ferait point remporté en-ar-
riere par les gorges ; auffi l'a-t-on fait mobile : le ta-
lon de l'échancrure des ondes la fait reculer; l'ouvra-
ge eft remporté par les gorges ; les ondes fe relèvent ;
leurs talons ceffent d'appuyer contre la barre à mou-
linet ; le reffort circulaire qui agit contre cette barre
la reftitue dans fon premier état , & elle eft difpofée
à recevoir de rechef la tête des ondes dans leur chu-
te , qui fe fera au nouveau cueillement.
Voilà les ufages de ces parties, qui paroiffoient fi
fuperflues. On a dentelé la roue 69 du moulinet , fi-
gure première , Planche V. afin qu'on pût favoir de
combien on hauffoit ou baiffoit la barre à moulinet ,
& évaluer à peu près par ce moyen , de combien on
relâchoit ou refferroit les mailles, & relâcher & ref-
ferrer également de chaque côté. La partie 68 , 68 ,
qu'on appelle croifee du moulinet , iert de poignée à
Y arbre , & puis c'eft tout.
Il ne nous refte pins qu'un mot à dire des jumelles,
61, 61, fig. l. Plane. V. des platines tant à ondes qu'à
plomb , Se des gardes-platines. On a pratiqué aux/w-
melles 6 1 , 6 1 , deux arrêtans 5 , 5 , l'un en-deffus 6 1 , &£
l'autre en-deffous 5. L'ufage de celui de deffus eft de
contenir à une jufte hauteur les épaulieres & les abat-
tans qui y font affemblés , malgré l'aftion du grand
reffort. Voye[ même Planche , fig. y. L'ufage de celui
de deffous eft d'empêcher, dans le crochement , les
mêmes épaulieres, ainfi que les abattans & par confé-
quent les gorges des platines , à defcendre trop au-def-
fous des têtes des aiguilles , & de les brifer 6c fauffer
toutes.
Toutes les ûnuofités que l'on remarque aux plati-
nes, PI. IV. fig. 2. ont leur raifon. On peut diftin-
guer quatre lieux principaux dans ces parties : leur
bec b , qui prend la foie étendue fur les aiguilles &z
la fait defcendre entr'elles : le deffous du bec c , qui
amené la foie bouclée fous les becs & la corroie : le
ventre e , qui abat l'ouvrage : la gorge d , qui le re-
prend & le ramené en-arriere : la queue f , qui s'em-
boîte dans la barre à poignée , & l'empêche de vacil-
ler. S'il n'y avoit point de garde-platine 94 , 94 , Pi.
BAS
FI. fig. 2. quand , dans la troifieme opération,' on
amené l'ouvrage fur les becs avec le ventre des pla-
tines , ce ventre viendroit frapper contre la preffe
qui eft alors appliquée, & fe défigurerait : mais ie gar-
de-platine empêche ce choc ; il permet aux ventres
des platines d'approcher affez de la preffe , pour que
l'ouvrage foit bien amené fur les becs , mais non de
la frapper , en rencontrant lui-même affez-tôt pour
prévenir cet inconvénient, le bras deprejfe.
Il furvient en travaillant plufieurs accidens, & il
y a plufieurs autres chofes à obferver, dont je vais
faire mention.
Lorfqu'il fe rencontre des nœuds dans la foie ou
qu'elle fe caffe , on ne peut continuer l'ouvrage fans
faire ce que les ouvriers appellent une enture.
Pour enter, on étend bien fur les aiguilles la partie
du fil de foie qui tient à l'ouvrage , & l'on couche
l'autre partie, non pas bout à bout avec la première:
mais on la paffe entre la cinq , la fept , &c avant le
bout du fil qui tient à l'ouvrage; enforte que le fil le
trouve double fur ces cinq , fept aiguilles , & l'on
continue de travailler comme fi le fil étoit entier.
Tout bas fe commence par un ourlet , & voici
comment on s'y prend pour le faire. On paffe la foie
dans la tête de la première aiguille , Se on l'y ar-
rête en la tordant; on embraffe enfuite en-deffous les
deux fuivantes ; on la ramené en-deffus fur la pre-
mière ; puis on la paffe en-deffous, & on embraffe la
quatrième & la cinquième fur lefquelles on la ra-
mené , & fur la troifieme fous laquelle on la paffe ,
& on embraffe la fixieme & la feptieme fur lefquel-
les on la ramené , & fur la cinquième lous laquelle
on la paffe enfuite , & on embraffe la huitième &C
la neuvième , & ainfi de fuite.
Un bas n'eft pas par-tout de la même venue ; on
eft obligé de le rétrécir de tems en tems. Suppofons
donc qu'on ait à rétrécir d'une maille , on prend un
petit outil qu'on appelle poinçon , on s'en lert pour
porter la maille de la troifieme aiguille fur la quatriè-
me aiguille , la maille de la féconde fur la troifieme ,
la maille de la première fur la féconde, & la première
fe trouve vuide.
On demandera peut-être pourquoi on porte la troi-
fieme maille fur la quatrième aiguille , & non la pre-
mière fur la féconde tout d'un coup ; puifqu'il faut
qu'il fe trouve deux mailles fur une aiguille , pour-
quoi donner la préférence à la quatrième? Je répons
que c'eft afin que la lifiere foit plus nette ; car fi la
maille double fe trouvoit au bord de la lifiere , elle
tirerait trop. Il faut même , fi l'on veut que la lifiere
ne foit pas trop ferrée , bien repouffer l'ouvrage en-
arriere,& ne pas accoller la platine avec la foie quand
on la jette.
Au refte, on rétrécit d'une maille de chaque côté
du métier de quatre rangées en quatre rangées , &
l'on ne commence à rétrécir qu'à un pouce au-deffus
de la façon, ou de cet ornement qu'on pratique au-
deffus des coins.
Il arrive quelquefois , après le coup de preffe ,
qu'un bec d'aiguille ne fe relevé pas , mais demeure
dans fa chaffe ; lors donc qu'on a cueilli & qu'on vient
à abattre l'ouvrage , il y a une maille qui n'ayant pas
été mile dans la tète de l'aiguille , mais ayant paffé
par-deffus , ne fera pas travaillée , & qu'il faudra re-
lever ; il pourra même fe trouver plufieurs mailles
non-travaillées de fuite ; pour les relever, voici com-
ment on s'y prendra : on faifira la dernière qui eft
bien formée à l'ouvrage , avec le poinçon , & on la
paffera dans la tête de la tournille ou d'une aiguille
emmanchée,.puis on prendra avec le poinçon la bride
de deffus cette maille ; on paffera cette bride fur la
tournille ; à mefure qu'elle avancera le long du bec,
la bonne maille fortira de deffous, & bientôt la bon-
ne maille fe trouvera entièrement fo/tie & fort loin
BAS
du bec , & la bride à portée de parler defîbus. On l'y
fera donc parler ; puis quand elle y fera , on preffera
avec le poinçon le bec de l'aiguille & l'on le tiendra
dans la chafle ; cependant on tirera la tournille , ce
qui fera avancer fa bride dans la tête de la tournille
& parler la bonne maille par-deffus le bec, alors la
maille fera relevée : on continuera de cette manière
s'il y en a plufieurs de tombées , traitant toujours cel-
le qui fe trouvera dans la tête de la tournille comme
la bonne, & la bride d'au-deffus comme la mauvaife
ou comme la maille à relever ; & quand on en fera
à la dernière, on la mettra dans la tête de l'aiguille.
Voye\ cette maneuvre , Planche III. du bas au métier ,
figurez, 3. On entend -par bride, la petite portion de
foie , qui au lieu de parler dans la tête de l'aiguille ,
a parle par-deffus 6c n'a point été travaillée.
J'obferverai pourtant qu'il faut faire cette opéra-
tion en-deffous ou à l'endroit, c'eft-à-dire , du côté
de l'ouvrage qui ne regarde pas l'ouvrier , fans quoi
les mailles relevées formeront un relief à l'envers ,
& par conféquent un creux à l'endroit.
Il arrive encore qu'il fe forme des mailles doubles ;
cet inconvénient arrive de plufieurs façons : s'il y a
quelque groffeur dans la matière, fi une aiguille a le
bec de travers , s'il y a quelque aiguille fatiguée qui
ne prefTe pas , une aiguille n'aura point de maille 6c
fa voifine en aura deux.
Dans ce cas , de deux mailles on arrête la premiè-
re fous le bec de l'aiguille ; on fait tomber la fécon-
de ; cette féconde tombée , formera une bride qu'on
relèvera & qu'on portera fur l'aiguille vuide.
Il y a encore des mailles mordues ; on entend par
Une maille mordue , celle qui eft moitié dans la tête
de l'aiguille , moitié hors , ou qui eft à demi tombée.
On fait entièrement tomber la maille mordue , & on
îa relevé en plein.
Les ouvriers entendent par la tige du bas, ce pouce
d'ouvrage qui eft au-deffus des façons & fur lequel on
rétrécit.
Sur un métier de quinze pouces , on laiffe du mi-
lieu d'une façon au milieu de l'autre , cinq pouces &
un quart. Si le métier a moins de quinze pouces, la
diftance du milieu d'une façon au milieu de l'autre
diminuera proportionnellement.
Quand on travaille la façon , on continue de ra-
petiffer d'une aiguille de chaque côté de quatre en
quatre rangées. Pour reconnoitre les milieux des fa-
çons , on fait un peu lever les deux aiguilles qui les
indiquent.
On fait ufage dans les façons de deux efpeces de
mailles , qui ne font pas de la nature de celles dont le
refte du bas eft tricoté ; ce font les mailles portées &
les mailles retournées. On entend par une maille por-
tée, celle qui, fans fortir de fon aiguille, eft portée
dans la tête de celle qui la fuit immédiatement , en
allant vers la gauche de l'ouvrier; &c par une maille
retournée on entend celle qu'on fait tomber & qu'on
relevé fur la même aiguille, de manière qu'elle Éaflê
relief à l'envers & creux à l'endroit du bas. Pour cet
effet on n'a , comme nous l'avons dit à Poccafion des
mailles tombées , qu'à la relever du côté du bas qui
regarde l'ouvrier.
Les façons faites , il s'agit de partager les talons.
Pour cet effet on prend la maille des aiguilles qui
marquoient les milieux des façons, & on la jette fur
les aiguilles voifines, en allant à la gauche de l'ou-
vrier ; puis on prend la maille de chacune des aiguil-
les voifines de ces aiguilles vuides, en allant adroite,
& on la jette fur les aiguilles qui leur font voifines ,
en allant auffi à droite.
On a donc en deux endroits de la largeur du bas
deux aiguilles vuides , qui partagent cette largeur en
trois parties.
On travaille ces trois parties avec trois fils de foie
BAS m
féparés" , & qu'on jette chacun féparément. Jetter eft
fynonyme à cueillir.
De ces trois parties , celle du milieu eft pour le
defTus du pré , 6c les deux autres font les deux par-
ties du talon. On travaille le defTus fans le rapetiffer.
Pour les parties du talon , on les rétrécit chacune
d'une maille de fix rangées en fix rangées ; & cette
maille on la prend à leurs extrémités ou aux côtés
qui doivent fe réunir pour former la couture du ta-
lon , ou fur la première & la dernière ai<milles plei-
nes , ou fur l'aiguille pleine la plus à droite de l'ou-
vrier , & fur l'aiguille pleine la plus à gauche ; car
ce n'eft lu que plufieurs manières différentes de défi-
gner les mêmes aiguilles.
On continue de rapetiffer ou rétrécir les parties
du talon de la manière que nous avons dit , jufqu'à
ce qu'elles n'ayent plus chacune que deux: pouces
& demi. Alors on forme la pointe du talon, en ré-
trécilTant ces deux parties de la manière fuivante.
Pour la partie qui eft à droite de l'ouvrier , on compte
les aiguilles pleines en allant de droit à gauche , &
on jette la maille de la quatrième aiguille , fur la fixie-
me aiguille ; la maille de la troifieme aiguille auffi
fur la lixieme; la maille de la féconde aiguille fur la
cinquième, & la maille de la première aiguille fur
la quatrième , qui eft la feule qui refte vuide. Pour
la partie du talon qui eft à gauche , on compte les
aiguilles pleines , en allant de gauche à droite , 6c on
jette la maille de la quatrième aiguille , fur la fixieme
aiguille ; la maille de la troifieme aiguille pareille-
ment fur la fixieme ; la maille de la féconde aiguille
fur la cinquième , & la maille de la première aiguille ,
fur la quatrième qui eft la feule qui refte vuide. On
continue ces rapetiffemens fmguliers , trois , quatre ,
cinq fois , félon la finette du bas , & cela de quatre
en quatre rangées.
On finit les talons par une rangée lâche. Cette
rangée lâche fe fait en defeendant les platines , com-
me quand on veut croifer , & en repouflànt la barre
à moulinet avec le talon des ondes.
On avance enfuite fous les becs, en prenant b'.'p.
garde d'amener trop ; car on jetteroit le deffus du
pié en bas.
On a fait cette rangée lâche , afin de pouvoir , à
l'aide de la tournille, la divifer en deux & terminer
le talon. Pour cet effet , on prend la première maille
avec la tournille , & la maille fuivante avec le poin-
çon ; à mefure que la féconde parle fur le bec de la
tournille , l'autre fort de défions la tête. Celle-ci eft
loin du bec , quand celle-là eft à portée d'entrer def-
fous. On l'y fait donc entrer , & quand elle y eft , on
preffe le bec de la tournille avec le poinçon ; on tire
la tournille , 6c la première paffe fur le bec 6c forme
avec celle qui eft défions , le commencement d'une
efpecc de chaînette, qu'on exécute exactement, com-
me quand on relevé des mailles tombées ; avec cette
différence que les mailles tombées fe relèvent dans
une direction verticale , & que cette chaînette fe for-
me horifontalement.
Pour arrêter la chaînette, on fait fortir la dernière
maille qui eft fous la tête de la tournille , en avan-
çant la tournille ; on met le fil de foie à fa place : on
prelfe enfuite le bec de la tournille ; on tire la tour-
nille , & la maille paffe fur le bec & par conféquent
le fil de foie à travers elle. On recommence cette
opération plufieurs fois ; cela fait on jette bas les ta-
lons fans aucun dansicr , & l'on continue le deffus
du pie.
Avant que d'achever le bas , j'ob&rverai que l'on
pratique une rangée lâche , & fur ( S e quel-
ques autres à l'ordinaire, toutes les fois qu'on veut
©ter un ouvrage de deffus le métier , fans donner
lieu aux mailles de s'échapper.
Le deffus du pié s'achève comme on fa commen-
ii2 BAS
ce ; quand il eft achevé, on monte le talon fur le
métier , non par le côté de la lifiere de derrière, mais
par l'autre côté. Pour cet effet, on décroche le mé-
tier ; on tourne de ion côté l'endroit de l'ouvrage ;
on prend la féconde rangée de mailles après la lifie-
re & on la fait parler dans les aiguilles , en tenant
l'ouvrage d'une main au-deffus des aiguilles , &c fai-
fant palfer chaque maille de la rangée dans chaque
aiguille.
En s'y prenant ainfi , il eft évident que quand après
avoir croche 6c cueilli , comme on le dira , on abattra
l'ouvrage , l'envers fe trouvera vers l'ouvrier. Lorf-
que les mailles font paffées fur les aiguilles ; on laiffe
l'ouvrage fur elles , & on le repouffe fort avant vers
le derrière du métier , afin qu'il fe trouve dans la
gorge dis platines , lorfqu'on crochera en dedans ;
c'eft-à-dire fans avancer le métier en devant , en
tirant les abattans perpendiculairement : puis on pra-
tique une enture du côté de la façon : on double la
foie à cette enture , fur fept aiguilles feulement. On
cueille fur elle avec la main , de peur que l'ouvrage
qui eft fous les gorges qui font fort petites & qu'il
remplit, ne laiflaflent pas tomber les platines entre
les aiguilles , autant qu'il le faut pour la formation
des mailles. On amené fous les becs , & l'on achevé
l'ouvrage à l'ordinaire. Voilà comment on commen-
ce le coin : voici comment on le continue.
Après avoir cueilli une féconde fois , on rapetiffe
les coins , où l'on pratique ce que les ouvriers ap-
pellent les pajfemens , de la manière fuivante.
On prend la cinquième aiguille en comptant de la
pointe du coin , & l'on jette la maille fur la quatriè-
me aiguille ; puis on paffe la foie fur ces quatre ai-
guilles , & l'on forme quatre mailles avec le poinçon.
On prend enfuite la fixieme aiguille , & l'on jette
fa maille fur la quatrième ; puis on paffe la foie fur
ces quatre aiguilles , & l'on forme quatre autres mail-
les avec le poinçon. On prend enfuite la feptieme ai-
guille , & l'on jette fa maille fur la quatrième ; puis
on paffe la foie fur les quatre aiguilles , &c l'on forme
qnatre autres mailles avec le poinçon ; enfuite on
f>rend la huitième aiguille , & Von jette fa maille fur
a quatrième ; puis on paffe la foie fur ces quatre ai-
guilles , & l'on forme quatre dernières mailles avec
le poinçon.
Cela fait , il eff évident que l'on a quatre aiguilles
vuides , &c quatre aiguilles pleines ; on prend la qua-
trième des pleines , &C on h jette fur la neuvième ai-
guille ; la troifieme des pleines , & on la jette fur la
huitième aiguille ou la première des vuides; la fécon-
de des pleines , & ainfi de fuite. On fait là-deffus
deux rangées , & l'on recommence les mêmes paffe-
mens , jufqu'à ce que le coin ait deux pouces & demi
de large par le bas. On le finit par une rangée lâche ,
fur laquelle on fait quatre à cinq rangées à l'ordinai-
re , pour que la foie ne fe défile pas.
Pour former la maille fur les quatre aiguilles , on
paffe la foie dans leurs têtes , on repouffe l'ouvrage
au-delà des têtes ; puis avec le poinçon on preffe le
bec de chaque aiguille , on retire l'ouvrage , & la
maille formée à l'ouvrage paffe fur les têtes , &c for-
me de nouvelles mailles avec la foie qu'on y a mife.
Il ne reffe plus que la femelle à faire : pour cet
effet , on monte les coins par leur largeur bout-à-
bout , ce qui forme un intervalle de cinq pouces ;
c'eft là-deffus qu'on travaille la femelle à laquelle on
donne la longueur convenable.
Les grands bas d'hommes ont ordinairement tren-
te-neut pouces , depuis le bord de l'ourlet jufqu'à la
pointe du talon.
Les grands bas de femmes n'ont ordinairement que
vingt-neuf pouces , depuis l'ourlet jufqu'à la pointe
du talon.
Les grands bas d'hommes , depuis le bord jufqu'à
BAS
!a façon , portent 18 pouces ; les grands bas de fem-
mes , dix-neuf pouces.
La façon dans les grands bas d'hommes & les
grands bas de femmes , eft de deux pouces.
Le talon commence à la hauteur des coins , & il
a jufqu'à fa pointe , neuf pouces dans les hommes .
&c huit pouces dans les femmes.
Les coins ont pour les hommes & pour les fem-
mes , la même hauteur que les talons.
Les talons finis , on les met bout-à-bout & l'on
travaille la femelle , de neuf pouces & demi pour les
hommes , & de huit pouces & demi pour les femmes.
Apres les talons finis , on continue le deffus du
pié , à quatre pouces pour les femmes , &C à cinq
pouces pour les hommes.
Dans toutes ces dimenfions, on obferve les ré-
tréciffemens que nous avons preferits , dans l'article
de la main-d'œuvre , & qu'il eft inutile de répéter ici.
On voit , Planche II 1. du bas au métier ^fig. 10. un
modèle de façon ; il eft tracé fur un papier divifé en
petits quarrés de dix en dix. La ligne A B la par-
tage en deux parties égales ; chaque petit quarré re-
prélente une aiguille : le petit quarré A repréfente
l'aiguille qui marque le milieu de la façon , & chaque
rangée de mailles eft repréfentée par chaque rangée
de petits quarrés.
Pour exécuter la façon qu'on voit ici repréfentée »
il faut donc faire aux mailles marquées par chaque
petit quarré , quelque changement qui les diftingue
fur le bas : pour cet effet , on les porte , ou on les re-
tourne ; ainfi tous les petits quarrés marqués d'un
point défigneront des mailles portées ou retournées.
Nous avons déjà dit qu'une maille portée étoit cel-
le dont la foie paffoit fous deux têtes d'aiguilles , fous
la tête de lbn aiguille propre , & fous la tête de l'ai-
guille voifine , en allant de droite à gauche de l'ou-
vrier ; & que la maille retournée étoit celle qu'on fai-
foit tomber , & qu'on relevoit fur l'envers de l'ou-
vrage , enforte qu'elle étoit en relief fur l'envers , &
par conféquent en creux fur l'endroit.
Mais les mailles ne fe portent ou ne fe retournent
pas indistinctement partout. On voit évidemment que
des mailles qu'il faut altérer pour diftinguer la façon,
on ne peut porter celles qui fe fuivent immédiate-
ment. Quand il faut altérer la maille d'une aiguille,
fi celle qui lui eft voifine , en allant de droite à gau-
che , ne doit point être altérée , on peut ou la porter
ou la retourner : mais fi elle doit être auffi altérée , il
faut la retourner.
Ainfi dans le deffein de façon qu'on voit , toutes
les mailles de maffes noires doivent être retournées,
& toutes les mailles des autres maffes qui font rares,
& qui laiffent entr'elles des mailles qu'il ne faut point
altérer , peuvent être ou portées ou retournées.
Les ouvriers qui conftruifent des métiers à bas , fe
fervent d'inftrumens comme le rabot des verges , le
moule à repaffer les cuivres , le moule pour hacher
les platines, la fraife , la lime à queue d'aronde , le
chevalet pour les platines , le chevalet pour les cui-
vres , la machine à percer les aiguilles , & fon détail,
le moule à fondre les plombs à aiguilles & les plombs
à platines , le bruniffoir , les tourne-à-gauche , les
becs d'âne , les clouyeres , la chaffe-ronde , le poin-
tot , la tranche , les perçoires plate & ronde , les bro-
ches , la griffe , les mandrins , le moule à bouton , le
poinçon : entre ces inftrumens , il y en a qui font
communs au faifeur de métier , & à celui qui s'en
fert. On trouvera leurs ufages aux articles de leurs
noms , & leurs figures fur les planches du métier à
bas.
La première manufacture de bas au métier fut éta-
blie en 1 6 5 6 , dans le château de Madrid , au bois de
Boulogne. Le fuccès de ce premier établiffement don-
na
BAS
na lieu à l'érection d'une communauté de maîtres-
ouvriers en bas au métier ; & on leur donna des lta-
tuts. Par ces ftatuts, on régla la qualité & la prépa-
ration des foies , le nombre des brins de ces foies , la
quantité des mailles vuides qu'il faut laiffer aux li-
fieres , le nombre d'aiguilles fur lequel fe doivent
faire les entures , & le poids des bas.
Il fut ordonné trois ans d'apprentiflage & deux ans
de fervice chez les maîtres , pour le devenir ; la con-
noiflance du métier, & de fa main-d'œuvre , & un
chef-d'œuvre qui confiite en un bas façonné aux coins
& par-derriere.
Les ouvriers en bas ne travaillèrent qu'en foie juf-
qu'en 1 684,qu'il leur fut permis d'employer des laines,
le fil , le poil , le coton , à condition toutefois que la
moitié des métiers d'un maître feroient occupés en
foie , & les autres en matière dont le filage leroit fin.
Cette indulgence eut de mauvaifes fuites , & en 1 700,
fa Majefté ordonna à tous maîtres faheurs de bas au
métier de fe conformer au règlement iuivant.
I. Défenfe d'établir aucun métier ailleurs qu'à Pa-
ris , Dourdan , Roiien , Caën , Nantes , Oléron, Aix,
Touloufe , Nii'mes , Usés , Romans , Lyon , Metz ,
Bourges , Poitiers , Orléans , Amiens & Rheims , oit
ils étoient déjà établis.
II. De travailler dans lefdites villes & leur ban-
lieue fans être maîtres.
III. De faire basy caleçons , camifolles , &c. fur au-
tres métiers que des vingt-deux , à trois aiguilles par
plomb.
IV. D'employer des foies fans être débouillies au
favon , bien teintes , bien defléchées , nettes , lans
bourre , doubles , adoucies , plates & nerveufes.
V. D'employer de l'huile dans ledit travail.
VI. D'employer pour le noir des foies autres que
non teintes , dont les ouvrages feront envoyés faits
aux Teinturiers.
VII. De travailler en foie pure , ou en poil & lai-
ne , fur un autre métier que d'un dix-huit au moins ,
à trois aiguilles par plomb , & de mettre moins de
trois brins , deux de loie , ou poil , & un de laine.
VIII. De taire des ouvrages en laine , fil & coton
fur un autre métier que de vingt-deux , à deux ai-
guilles par plomb.
IX. De mettre dans les ouvrages de fil , coton , lai-
ne & caftor , moins de trois brins , 8c d'employer
aucun fil d'eftame , ou d'eftain tiré à feu , parmi les
trois fils.
X. De mettre en œuvre de mauvaife marchan-
dife.
XI. De manœuvrer mal.
XII. De négliger les lifieres , & de n'y point
laifier de maille vuide.
XIII. De faire les entures de moins que de cinq à
fix mailles , & de négliger de remonter les talons &
les bords.
XIV. De fouler les ouvrages au métier avec au-
tre chofe que du favon blanc ou verd , à bras ou aux
pies.
XV. Aux Foulcurs de fe fervir d'autres inftrumens
que de râteliers de bois ou à dents d'os , ôt aux Fou-
loniers de recevoir des bas.
XVI. De donner aux ouvrages moins de deux eaux
vives , après les avoir dégrailîés.
XVII. De fe fervir de pommelles & cardes de fer
pour apprêter , appareiller.
XVIII. De débiter aucun ouvrage fans porter le
plomb , qui montrera d'un côté la marque du maître ,
de l'autre celle de la ville.
XIX. Permifîîon aux privilégiés de fc diftinguer
par la fleur-de-lis jointe à l'initiale de leurs noms.
XX. Seront les articles ci-deffus exécutes à peine
de confifeation des métiers , & de cent livres d'a-
mende.
Tome II.
BAS
JI3
XXI. Défenfe aux maîtres de mettre en vente
d'autres marchandiles que celles qu'ils auront fabri-
quées , eux , leurs apprentifs ou compagnons.
XXII. Permiffion aux maîtres de faire peigner,
carder , filer , mouliner , doubler , &c. les foies dont
ils auront befoin.
XXIII. Détcnfe de tranfporter hors du royaume
aucun métier, fous peine de confifeation , & de mil-
le livres d'amende.
XXIV. Défenfe aux maîtres de bas au métier,
d'entreprendre fur ceux au tricot ; &. à ceux-ci d'en-
treprendre rien iur les premiers.
Louis X I V. en conîéquence de ces reglcmens ,
avoiteréé des charges d'impudeurs, de contrôleurs,
de viliteurs , de marqueurs , &c. Les marchands fa-
briquans en payèrent la finance , & en acquirent les
droits : mais comme la communauté étoit compoiee
de maîtres privilégiés & d'autres , cette acquifition
occafionna de la divifion entre les maîtres , les pri-
vilégiés fe tenant exempts des droits , & les non-pri-
vilegiés prétendant les y foûmettre. Louis XV. fixa
en 1720, la police de ces fabriquans , & fit ceffer
leurs querelles .11 voulut que les métiers difperfés dans
les lieux privilégiés , comme le faubourg faint An-
toine, le Temple, faint Jean deLatran, &c payafTent
trente livres par métiers ; que les brevets des appren-
tifs fuffent de cinq années. Les autres articles font re-
latifs à l'acquit des dettes de la communauté , Se aux
autres objets femblables. Voyei^ le Diclion. du Com-
merce.
Bas d'ejïame ; ce font ceux qui fe font avec du fil
de laine très-tors , qu'on appelle// d'ejiame ou d'ef-
tain. Voyc^ EsTAME.
Bas drappés ; ce font ceux qui fabriqués avec de la
laine un peu lâchement filée , qu'on appelle./?/ de cra-
me , ont paffé à la foule , 8t ont enluite été tirés au
chardon.
Bas à étrier ; ce font des bas coupés par le pic , qui
ne couvrent que la jambe : il y a encore des bas de
chamois , qui font du commerce des PeaufTiers , & des
bas de toile, qui font du commerce des Lingeres. On
n'exécute pas feulement des bas fur le métier, on y
fait auffi des culotes , des caleçons , des mitaines , des
vefles , & je ne doute pas qu'on n'y fît des habits.
Il eft évident , par les defleins qu'on exécvite aux
coins , qu'on pourroit y faire des fleurs &: autres def-
feins, & qu'en teignant la loie, comme il convient
qu'elle le toit, on imiteroit fort bien fur les ouvrages
de bas au métier , & le chiné 6c le flambé des autres
étoffes. Foyei Chiner è 1:lamblr.
* Bas ( tile de ) Gîog. petite île de la mer de Bre-
tagne, vis-à-vis Saint-I'ol-de-Léon.
Bas-BORD ( Marine. ) vaijfeau de bas-bord ; c'elt un
vaifleau peu élevé , & qui ne porte qu'un tillac , ou
couverte , & va à voiles & à rumes comme les galè-
res , galiotes & femblables bâtimens. Le brigantin ,
qui ne porte pas couverte , efl un vaifleau de bas-bord.
Bas-bord ou Bâbord (Marine.') c'elt le côté gau-
che du navire, c'elt-à-dire , celui qui relie à la gau-
che lorfqu'on elt à la poupe , & qu'on regarde la
proue ; il efl oppofé à Jlribord , qui efl le côté droit.
Bas-bord tout ; c'elt un commandement que 1 on
fait au timonnier de pouffer la barre du gouvernail à
gauche tout autant qu'il efl poffible.
BAS-BORDES ou B AS-BORD AIS ( Marine. ) on
appelle ainli la partie de l'équipage qui doit taire le
quart de bas-bord. Voyt\ 0 L'ART.
BAS-FOND , 1". m. ( Marine. ) c'ert un endroit de
la mer où le fond efl plus élevé , & fur lequel il n'y
a pas afïèz d'eau pour que les vaiffeaux puiflent y
pallèr fans échouer. Voyt{ Banc & Basses. (Z)
BAS-JUSTICIER , f. m. (.-■' --'•) «eigneur
de fief, quia droit de bafie-juftice. toy^ Justice.
Quelques coutumes lui accordent lur les denrées
1 14
BAS
ou les bcftiaux qui féjournent fur fa feigneurie , un
droit qu'elles appellent levage, voye{ Levage; les
efpaves immobihaircs, voyt[ Espave ; le droit de
banalité, & autres, voyei Banalité. {H)
BAS-MÉTIER, 1". m. {Rubanier-Pajjementier.) c'eft
celui fur lequel on fait quantité de petits ouvrages ;
il peut fe poier fur les genoux. Foyei Agrément.
BAS-OFFICIERS, f. m. pi. {Art mille. ) ce font
dans les compagnies de cavalerie & de dragons , les
maréchaux des logis , & dans l'infanterie , les fer-
gens. Ils n'ont point de lettres du roi pour avoir leur
emploi , qu'ils ne tiennent que de l'autorité du colo-
nel & de leur capitaine. {Q)
BAS-RELIEF , f. m. {en Architecture.') ouvrage de
fculpture qui a peu de faillie , & qui eft attaché lur
un fonds; on y repréfente des hiftoires, des orne-
mens, des rinceaux de feuillages , comme on en voit
dans les frifes , & lorfque dans les bas-reliefs il y a des
parties faillantes & détachées , on les nomme demi-
boffes. Foye{ SCULPTURE. {P)
BAS-VENTRE, f. m. tout ce qui eft au-deflbus
du diaphragme dans la cavité du ventre. Voyc{ Ab-
domen, (t)
* BASA AL , f. m. {Hijl. nat. bot.) nom d'un arbre
des Indes , qui croît dans les lieux labloneux , parti-
culièrement aux environs de Cochin ; il porte des
fleurs & des fruits une fois l'an , depuis la première
fois qu'il a commencé à produire, jufqu'à fa quinziè-
me année.
La décoction de fes feuilles dans l'eau , avec un
peu de gingembre , foulage dans les maux de gorge :
on frotte le front & les tempes des phrénetiques ,
avec fes baies frites dans le beurre. Ses amandes
tuent les vers.
* BAS AN, ( Géog. fainte. ) ancien pays de la Ju-
dée , enAfie, entre le Jourdain, la mer de Galilée,
le royaume de Galaad, & les montagnes d'Hermon ,
ou de Seïr ou du Liban. Moyfe le conquit fur Og , &
le donna à la tribu de Mariaffé ; il s'appella dans la
fuite Trachonite.
BAS ANNE , f. f. (Tannerie ou Megie.) c'eft une peau
de bélier , mouton ou brebis , paflee avec le tan ou
avec le redon. La bafanne a difterens ufages fuivant
les différens apprêts qu'elle a reçus : on en fait des
couvertures de livres , des porte-feuilles ; on en cou-
vre des chaifes , fauteuils , banquettes , &c. on l'em-
ployé auffi à faire des tapifleries de cuir doré. Voye\_
Cuirs.
Il y a plufxeurs fortes de bafannes ; favoir les bafan-
nes tannées ou de couche , les bafannes coudrées , les
bafannes chipées , les bafannes paifées en mefquis , &
les bafannes aludes.
Les bafannes tannées ou de couche , font celles qui
ont été étendues de plat dans la fofle , pour y être
tannées comme les peaux de veaux , mais qu'on n'y
a pas laiffées fi long-tems. On en fait des tapifTeries
de cuir doré.
Les bafannes coudrées, celles qui après avoir été
dépouillées de leur laine dans le plein , par le moyen
de la chaux , ont été rougies dans l'eau chaude avec
le tan. On en fait le même ufage que des bafannes
tannées.
Les bafannes chipées, celles auxquelles on a donné
un apprêt particulier appelle chipage. Voye{ Chi-
page.
Les bafannes pajfées en mefquis , celles qui ont été
apprêtées avec le redon, au lieu de tan. V. Redon.
Les bafannes appellées aludes, celles qu'on teint
ordinairement en jaune, verd ou violet, & qui font
fort velues d'un côté. On les appelle aludes, parce
qu'on fe fert d'eau d'alun dans les difterens apprêts
qu'on leur donne. Cette efpece de bafanne eft tout-
à-iait différente des autres ; on ne l'employé d'ordi-
BAS
naire qu'à couvrir des livres & des porte-feuilles d'é-
coliers. Foyei Tannerie 6* Megie.
*BASARUCO, f. m. {Commerce.) petite monnoie
d'étain, d'ufage aux Indes: il y en a de deux fortes;
les bons font d'un fixieme plus forts que les mauvais ;
trois bafarucos valent deux reys de Portugal. Voyt^
Rey.
* BASCAMAN, {Géog. fainte.) ville de la Palefti-
ne , de la tribu de Gad.
* BASCARA , {Géog.) ville de la partie de l'Afri-
que, que les Arabes appellent Aufath ou moyenne ,
ou le Biledulgerid.
* BASCATH , {Géog. fainte.) ville de la Paleftine,
dans la tribu de Juda , entre Lachis & Eglon.
B ASCHI ou B ACHI , f. m. ( Hijl. mod. ) chez les
Turcs , joint à un mot qui le précède , fignifie le chef
ou le premier d'un corps d'officiers du férail. Ainfï
bogangi bachi fignifie le chef des fauconiers, & bof
tangi bachi , le chef des jardiniers , ou fur-intendant
des jardins du grand-feigneur.
Bafchi-capou-oglani , nom qu'on donne à l'eunu-
que qui commande aux portiers de l'appartement des
fùltanes ; bafchi fignifîant chef, capou, porte, & oglan,
officier ou valet. RiCAUT, de Vempire Ottoman. {G)
BASCULE, f. f. {Méchanique.) eft une pièce de
bois qui monte , defeend, fe haufle , & fe baifle par
le moyen d'un effieu qui la traverfè dans ia longueur,
pour être plus ou moins en équilibre. Ce peut être
encore le contre-poids d'un pont-levis , ou d'un mou-
lin à-vent , pour en abattre le frein : elle a l'on axe ou
œil par où pafle un boulon qui la foûtient fur un bâti
de charpente. En général , bafade eft proprement un
levier de la première efpece , où le point d'appui fe
trouve entre la puiflance & la réfîftance. {K)
B A s c U L E , f. f. terme de Fortification , font deux
poutres ou folives , dont une partie s'avance en-de-
hors de la porte , & foûtient des chaînes attachées
au pont-levis ; & l'autre eft en-dedans de la porte ,
& foûtient des contre poids qui mettent la bafcule en
équilibre, enforte qu'en appuyant fur l'un des bouts ,
l'autre haufle. Voye^ Pont-levis. (Q)
Bascule, c'eft dans une grofle horloge, un le-
vier, dont un bout donne fur la roue de cheville d'u-
ne fonnerie, & l'autre tire un fil de fer ou de cuivre ,
pour faire lever le marteau. Voye^ l'article Hor-.
loge de clocher: voye^ auffi ïafig.à.Pl. II. de
f Horlogerie. {T)
Bascule, partie dubas-au-métier; wjc^Bas-au-
métier.
Bascule, terme de rivière , voyej Banneton.
Bascules du positif, ou Petit Orgue , repré-
fentées dans les Planches n°. zz. font des règles
A B de bois de chêne , de cinq ou fix pies de long ,
plus larges dans leur milieu qu'à leurs extrémités ; ces
règles font pofées de champ & par lé milieu fur un
dos d'âne F, qui eft garni de pointes G. Ces pointes
entrent dans un trou percé au milieu de la baj'cule. Ce
trou doit être un peu plus ouvert par le haut que par
le bas qui porte fur le dos d'âne ; & cela feulement
dans le fens de la longueur de la bafcule. A l'extrémi-
té B de la bafcule eft un petit trou percé verticale-
ment , deftiné à recevoir une pointe ou épingle , qui
eft emmanchée à l'extrémité inférieure de la pilote
E C ; les pilotes font des baguettes de bois de chêne,
de quatre ou cinq lignes de diamètre; leur partie
fupérieure traverfè une planche D , D , D,fig. zo.
percée d'autant de trous qu'il y a de pilotes, dont le
nombre eft égal à celui des touches du clavier , au-
deflbus defquelles elles doivent répondre ; enforte
que lorfque les pilotes font parlées dans les trous du
guide , leurs extrémités fupérieures portent contre le
deffbus des touches à un demi-pié près ou environ
de l'extrémité antérieure des touches. L'extrémité^
des bafcules répond fous le fommier du poiîtif , qui eft
BAS
garni en-deffous de pointes de fbr , entre-deux des-
quelles les bafcules fe meuvent. Ces pointes s'appel-
lent le guide des bafcules. Elles fervent en effet à les
guider dans leurs mouvemens.
Lorfque l'Organifte baiffe une touche du clavier,
elle comprime la pilote E C, qui fait baiffer l'extré-
mité B de la bafcule , & par conféquent hauffer l'ex-
trémité^, qui foule en-haut le petit bâton qui tra-
verfe la bourfette; ce qui fait ouvrir la foupape, la
foupape étant ouverte , laiffe aller le vent dans la gra-
vure du fommier. V. Sommier, Positif, Bour-
sette, &c.
Ces bafcules qui, du côté des pilotes, n'occupent
que la même étendue que le clavier, font divergentes
du côté du fommier du pofitif, où elles occupent la
même étendue que les loupapes de ce fommier. La
place de ces bafcules dans l'orgue > eft fous le pont qui
eft entre le grand orgue & le pofitif, fur lequel le liè-
ge de l'Organifte eft placé. L'extrémité qui porte les
pilotes , entre dans le pié du grand orgue , 6c l'autre
-extrémité dans le pofitif au-deftous du fommier.
Bascules brisées de l'orgue, repréfentées
fg.zff. PI. d'Orgue, font compolées des deux baf-
cules CH , HD , articulées eniémble par des en-
tailles à moitié bois, comme on voit en H; elles
font montées fur un châffis A B , dans lequel font
affemblées à queues d'aronde deux barres de bois E,
garnies de pointes , qui entrent dans le milieu des
bafcules , 6c qui leur lérvent avec le dos d'âne des
barres E E , de point d'appui. Au milieu du chaffis,
qui eft l'endroit où les deux bafcules fe réunifient ^
iont deux règles ou barres H G ; l'inférieure H eft
garnie de chevilles de fer, entre deux defquelles les
bafcules peuvent fe mouvoir. Cette barre avec les
pointes s'appelle le guide : vis-à-vis du guide & au-
deffus , eft une autre barre G , dont l'ufage eft d'em-
pêcher les bafcules de fortir d'entre les chevilles du
guide. Le contre-dos d'âne K fait la même fonction; il
iert à empêcher les bafcules HD de fortir des pointes
de la bârie E , vis-à-vis de laquelle il eft placé. Aux
deux extrémités C D des bafcules , on met des an-
neaux de fil de fer : ceux de la partie C doivent être
en-deflbus , pour recevoir la targette C L , qui dcf-
cend de la bafcule au clavier ; 6c ceux de la partie D
doivent être en-deffus , pour recevoir la targette D
M , qui monte de la bafcule au fommier
Les bafcules brifîes font une manière d'abrégé ( V.
Abrégé ) ; car elles font convergentes du côté des
targettes du clavier , où elles n'occupent pas plus
d'étendue que les touches du clavier auxquelles elles
répondent perpendiculairement ; & du côté de celles
du fommier elles font divergentes , & occupent la
même étendue que les ioûpapes auxquelles elles
communiquent par le moyen des targettes DM, &
des bourfettes. Voyc^ Boursettes & Sommier.
Lorfqu'on abaiffe une touche du clavier, la tar-
gette CL qui y eft attachée tire en en-bas l'extrémi-
té C de la bafcule C H , qui a ion point d'appui au
point E. L'extrémité C ne lauroit baiffer que l'au-
tre extrémité H ne levé : mais cette partie reçoit
l'extrémité de l'autre bafcule D H; par conféquent
elle doit l'élever avec elle vers la barre G ; ce qui
ne fe peut faire fans que la bafcule H D ne defeende,
& n'entraîne avec elle la targette D M , qui commu-
nique par le moyen d'une bourlctte à la foupape
correfpondante du fommier qui fera ainfî ouverte.
Lorfqu'on lâchera le doigt , le reffort qui renvoyé la
foupape contre la gravure , tirera en haut la tar-
gette MD , qui relèvera l'extrémité D de la bafcule,
& fera par conféquent baiffer l'autre extrémité H,
qui parce qu'elle appuie fur l'extrémité de l'autre
bafcule , la fera baiffer avec elle , & par conféquent
lever par l'autre extrémité C , qui tirera en en-haut
Tome II.
BAS
115
la targette CL, & la touche du clavier qui y eft at-
tachée.
Les bafcules ont différens noms , fuivant l'ufage
qu'on en fait.
La bafcule d'un loquet eft une pièce de fer d'en-
viron deux pouces de long , percée d'un trou qu ai-
re long , & potée au bout de la tige du bouton
ou du lafferet de la boucle d'un loquet à bafcule :
cette tige excède l'épaiffeur de la porte du côté ou
le battant doit être pofé , de l'épaiffeur de la bafcule
qui eft arrêtée fur la tige par une goupille ou un
écrou : on place enfuite le battant du loquet de façon
que la bafcule ait le plus gros de fa queue du côté où
la vis arrête le battant fur la porte ; & cela afin que
la tête du battant ait plus de poids pour retomber
dans le mentonnet. Il faut par cette même raifon
pofer la bafcule à deux pouces de la vis quittent la
queue du battant , de forte qu'en tournant le bouton
toit à droite foit à gauche , on faffe lever le battant.
Il faut remarquer qu'en tournant le bouton & la bou-
cle dans le même fens que l'on tourne la clé d'une
porte pour l'ouvrir , le battant fera plus doux à le-
ver ; 6c qu'au contraire on le trouvera plus rude en
tournant de l'autre fens : car la vis qui tient la queue
du battant eft ici le point d'appui ; 6c le battant pefe
d'autant plus que l'aftion de la bafcule fe fait fur lui
dans un point plus proche de cette vis.
Bafcule qui fert de fermeture aux vanteauxde por-
te ou d'armoire. Cette bafcule eft compefée de deux
Verroux , l'un pour fermer en entrant dans la tra-
verfe du haut, & l'autre pour fermer en entrant dans
la traverfe d'en-bas : ils font montés fur platines ;
leurs queues viennent fe joindre à la traverfe du mi-
lieu des vanteaux ; elles font coudées en croiffant ,
l'une d'un fens, & l'autre d'un autre fens , & per-
cées d'un trou à l'extrémité du croiffant; ces extré-
mités viennent fe pofer fur les étochios qui font à
chaque bout d'un T; ce T eft fur un étochio rivé fur
une platine quarrée qui s'attache fur le vanteau de
la porte ou armoire avec quatre ris ; le T ei\ per-
cé d'un trou dans fon milieu , entre les deux éto-
chios de l'extrémité de les bras.
Pour ouvrir ou fermer la bafcule, on prend un bou-
ton qui eft à l'extrémité de la main du T : li on meut
ou levé la bafcule verticalement , l'on ouvre ; fi on
la baiffe perpendiculairement, on ferme.
Cette bafcule eft couverte par la gâche encloifon-
née de la ferrure : lorfque la bafcule eft pofée à une
porte où il n'y a point de gâche, la platine eft or-
dinairement à panache & polie ; & l'étochio qui porte
la bafcule , à grand bouton plat , affez large pour cou-
vrir le T , avec les deux bouts des croiffans montés
fur les étochios du bout des bras du T.
La forte de bafcule dont nous venons de parler
peut être compofée de deux verroux à reffort , d'un
7* avec fa rivure , & d'une platine : mais tout s'exé-
cutera comme à la précédente.
Bafcule à pignon ; elle ne diffère de la précédente
qu'en ce que les queues des verroux font droites , &:
fendues de la quantité de la courfe des verroux , &
que les côtés de ces queues qui fe regardent font à-
dents ou à crémaillères , 6c s'engrainent dans un pi-
gnon compris entr'eux. Pour ouvrir cette bafcule , on
prend un bouton rivé fur la queue du verrou d'en-
bas , & en le levant il fait tourner le pignon , qui
fait defeendre le verrou d'en-haut , & monter le ver-
rou d'en-bas.
Foye{ Serrurerie, PI. V.fig. 5. une bafule 5,6,
7 , 8 , 9 ; 6 le bouton ; 6 , 7 , 8 , le T; 9 , 9 , les
verroux : hfig. 1,2,3,4, représente la même baf-
cule , avec fa platine à panache , la bafcult couverte.
Même Pl.Jig. I. eft une bafcule à pignon : H, H ,
le pignon ; 1 , K , les verroux à dents ,ED, GFi
extrémités des verroux.
Pij
ïi6
B A S
PI. Vit. Serrur. fig. A B CD E : A B , battant du
loquet ; E , bafculc ; D , bouton ; C C , crampon :
au lieu de bouton on a quelquefois un anneau ou
une boucle , comme on voit dans la^. F G.
BASE : la bafe d'une figure , en Géométrie , eft pro-
prement , & en général , la plus baffe partie de fon
circuit. Voye^ Figure.
La bafe clans ce fens eft oppofée aufommct, comme
à la partie la plus élevée.
On appelle bafe d'un triangle , un côté quelconque
de cette figure , quoiqu'à proprement parler , le mot
bafe convienne au côté le plus bas , fur lequel le
triangle eft comme appuyé : ainfi la ligne A B eft
la bafe du triangle A B 6"( Planch. Géom.fig. 68. ) ;
quoiqu'en d'autres occafions les lignes AC ou BC,
en puiffent être la bafe. Dans un triangle rectangle ,
la bafe eft proprement le côté oppofé à l'angle droit ,
c'eft-à-dire , Yhypothénufe. Voye-r HYPOTHÉNUSE. La
bafe d'un triangle ifolcele eft proprement le côté iné-
gal aux deux autres. La bafe d'un folide eft la fur-
face inférieure ou celle fur laquelle toute la figure
eft appuyée, ou peut être cenfée appuyée. Voycr
Solide.
Àinlî le plan D F E eft la bafe du cylindre A B
D E,(PL Géom.fig. 56. )
La bafe d'une fection conique eft une ligne droite
qui le forme dans l'hyperbole & la parabole par la
commune feclion du plan coupant , &c de la bafe dû
cône, Voye^ Cône 6-Conique.
Base diftinfte , en Optique , voye^ Distinct. (.£)
Base , f. f. en terme de Fortifications, fe dit de la lar-
geur des différens ouvrages de fortification par le
bas : ainfi l'on dit la bafe du rempart , celle du para-
pet , du revêtement , &c. Voye{ Rempart , Para-
pet , &c. ( Q )
Base du Cceur , en Anatomie , la partie fupé-
rieure & large de ce vifcere , d'où partent quatre
gros vaiffeaux , deux artères , l'aorte , & l'artère
pulmonaire ; & deux veines , la veine cave & la vei-
ne pulmonaire. Voyelles Planch. d'Anatom. &àl'art.
Anat. Leurs explications. V. auffîC(5.VR , AoRTE , &c.
On donne auffi ce nom à la partie principale de
l'os hyoïde , & au grand côté de l'omoplate. Voye^
os Hyoïde & Omoplate. (Z)
Base des sabords, c'eft en Marine le bordage
qui eft entre la préceinte & le bas des fabords. ( Z)
* B ASENTELLE , ( Géog. anc. ) ville d'Italie dans
la Calabre , où l'empereur Othon IL fut vaincu &
fait prifonnier.
* BASIEGES , ( Géog. ) petite ville de France , au
Languedoc , dans le diocèfe de Touloufe , entre cette
ville & Carcaffonne.
* BASIENTO , ( Géog. ) rivière du royaume de
Naples qui a fa fource près de Potenza , dans la Ba-
filicate , traverfe cette province , & fe jette dans le
golfe de Tarente.
B ASILAIRE, adj. pris f. en Anatomie , épithetes
de différentes parties qui font confidérées comme fer-
vant de bafes : c'eft dans ce fens que l'os facrum &
fos fphénoïde ont été appelles os bafilaires. Foy. Os
Sacrum & Sphénoïde. ( L )
Basilaire , ou Cunéiforme , apophyfe de l'os
occipital , qui s'articule avec l'os fphénoïde. Voye^
Occipital 6-Sphénoïde.
L'artère bafilaire s'avance fous la protubérance
annulaire , où elle diftribue plufieurs branches ; &
lorfqu'elle eft parvenue à l'extrémité de cette apo-
phyfe , elle fe divife en deux , & s'anaftomofe avec
les branches poftérieures de la carotide. Voyc-? Pro-
tubérance , Carotide, 6-e (I)
BASILE ( Ordre de S. ) ordre religieux , & le
plus ancien de tous. Il a tire fon nom , félon l'opi-
nion la plus commune, de S. Bafile , évêque de Céfa-
rée en Cappadoce , qui vivoit dans le ive fiecle, &
BAS
qui donna des règles aux cénobites d'orient, quoiqu'il
ne fut pas l'inftituteur de la vie monaftique , dont
long-tems avant lui l'hiftoire de l'Eglife fournit des
exemples fameux , fur-tout en Egypte.
Cet ordre a toujours fleuri en orient ; & prefque
tous les religieux qui y font aujourd'hui en fuivent
la règle. 11 paffa en occident environ l'an 1057. Le
pape Grégoire XIII. le réforma en 1 579 , Se mit les
religieux d'Italie , d'Efpagne , &de Sicile, fous une
même congrégation.
On dit que S. Bafile s'étant retiré dans la province
de Pont vers l'an 3 57, y refta jufqu'en 362. avec des
folitaires , auxquels il preferivit la manière de vivre
qu'ils dévoient obferver en faifant profelfion de la
vie religieufe. Enfuite Rufin traduifit ces règles en
Latin ; ce qui les fit connoître en occident , quoi-
qu'elles n'y ayent été fuivies qu'au XIe fiecle. Dans
le xve le cardinal Beffarion , Grec de nation, & re-
ligieux de l'ordre de S. Bafile , les réduilît en abrè-
ge, & les diftribua en 23 articles. Le monaftere de
S. Sauveur deMefïïne en Sicile eft chef d'ordre de
S. Bafile en occident ; & l'on aflure qu'on y récite
l'office en Grec. Le Mire, de Orig. Ordin. relig. (G)
BASILE , f. m. ( Menuifirie, ) eft la pente ou incli-
naifon du fer d'un rabot , d'une varlope , & généra-
lement de tous les outils de Menuifier qui font mon-
tés dans des fûts , & qui fervent tant à dreffer le bois
qu'à pouffer des moulures. La pente que l'on donne
à ces fers dépend de la dureté des bois ; pour les
bois tendres elle forme avec le deffous du fût un an-
gle de douze degrés , & pour les bois durs elle for-
me un angle de dix-huit degrés. On remarque que
plus l'angle eft aigu , plus il a de force ; à moins que
le bois ne foit fi dur , qu'il ne puiffe être coupé. Dans
ce cas , le fer fe place perpendiculairement au fut ;
& au lieu de couper , il gratte.
BASILIC , bafilifcus , f. m. {fiifl. nat.) animal fa-
buleux que les anciens mettoient au rang des fer-
pens ou des dragons : on le croyoitde médiocre grof-
feur , & on prétendoit qu'il avoit fur la tête des émi-
nences en forme de couronne. On a diftingué trois
efpeces de bafîlics ; les uns brùloient & enflammoient
tout ce qu'ils regardoient ; les autres caufoient par
le même moyen la terreur & la mort ; les bafîlics de
la troifieme efpece avoient la funefte propriété de
faire tomber la chair de tous les animaux qu'ils tou-
choient : enfin il y avoit une autre efpece de bafilic
qui étoit produit par les œufs des vieux cocqs , &c.
Toutes ces abfurdités n'ont été que trop répétées
par les Naturaliftes : on peut juger par ce que nous
en avons dit ici , que de pareils contes ne méritoient
pas d'être rapportés plus au long. (/ )
Basilic ,ocimum, (Hifl.nat. bot.*) genre de plante
à fleur monopétale labiée , dont la lèvre fupérieure
eft relevée , arrondie , crénelée , & plus grande que
l'inférieure , qui eft ordinairement rrifée ou légère-
ment échancrée. Il fort du calice un piftil , qui eft
attaché comme un clou à la partie poftérieure de la
fleur , & environné de quatre embryons qui devien-
nent dans la fuite autant de femences oblongues ,
enfermées dans une capfule qui a fervi de calice à
la fleur. Cette capfule fe divife en deux lèvres , dont
la fupérieure eft relevée & échancrée ; l'inférieure
eft dentelée. Tournefort, Inlî. rei herb. V. Plante.
On diftingué , en Jardinage , quatre fortes de bafî-
lics : trois domeftiques , dont l'un eft appelle le grand
bafilic ; l'autre, le petit; le troifieme, le panaché ; tic
le quatrième eft le fauvage , qui fe divife encore en
deux efpeces : tous fleuniiént l'été , tk viennent de
graine.
Les bafîlics ne craignent point d'être arrofés en
plein foleil : on les élevé fur couche & fous des clo-
ches au mois de Mai. Quand ils font en état d'être
BAS
îfanfplantés , on les porte en motte dans les parter-
res, & on en garnit les pots. Il faut en excepter le
petit bafilic , qui eft trop délicat & qui veut une terre
plus légère , compofée de deux tiers de terreau , &c
l'autre de terre de potager bien criblée. Onl'arrofe
fréquemment ; on coupe avec des cifeaux fa tête pour
l'arrondir , & on le fait lécher pour les courbouillons
de poiifon : d'autres le mettent en poudre pour fer-
vir à plufieurs fauces. ( K )
Basilic , {Artillerie.} étoit autrefois une pièce
de canon de quarante -huit livres de balle, qui pe-
ibit environ fept mille deux cens livres. Il ne s'en
fond plus de ce calibre en France : mais il y a en-
core plufieurs arfenaux dans leiquels il le trouve de
ces anciennes pièces. ( Q )
* BASILIC ATE , (la) Géog. province d'Italie
au royaume de Naples , bornée par la Capitanate ,
la Calabre citérieure , les terres de Bari , d'Otrante,
le golfe de Tarcnte , & les principautés. Cirenza en
elt la capitale.
BAS1LICON, (Pharmatie.) nom que les Apothi-
caires donnent à un onguent fuppuratif. Voici com-
ment il fe prépare. Prenez réfine de pin , poix na-
vale, cire jaune, de chaque une demi-livre ; huile
d'olive , une livre & demie : faites les fondre au bain-
marie ; partez enfuite le tout. Cet onguent eft nom-
mé auffi tetrupkarmacon : c'eft un des meilleurs lup-
puratifs que nous poffédions. Lemery ajoute à cette
formule la térébenthine de Venife.
Bafilicon veut dire royal , à caufe des grandes ver-
tus de cet onguent. (A7)
* BASILICUM , ( Hift. anc. ) efpece d'ajuftement
Ou de vêtement des anciens , dont la nature nous eft
encore inconnue.
B ASILIDIENS , f. m. pi. (Hift. ecclèf.) nom d'an-
ciens hérétiques , feûateurs de Bafilide , qui vivoit
Vers le commencement du II. ficelé.
Ce Bafdide étoit forti de l'école des Gnoftiques ,
dont le chef étoit Simon le Magicien. Il croyoit avec
lui que J. C. n'avoit été homme qu'en apparence ,
& que fon corps n'étoit qu'un fantôme ; qu'il avoit
donné fa figure à Simon le Cyrénéen , qui avoit été
crucifié en fa place.
Nous apprenons d'Eufcbe que cet impofteur avoit
écrit vingt - quatre livres fur les Evangiles , & qu'il
avoit feint je ne fai quels prophètes , à deux defquels
il avoit donné les noms de Bareaba & de Barcoph.
Nous avons encore les fragmens d'un évangile de
Bafilide.
Ses difciples prétendoient qu'il y avoit des vertus
particulières dans les noms , & enfeignoient avec
Pythagore &C avec Platon , qu'ils n'avoient pas été
inventés au hafard , mais qu'ils fignifioient tous quel-
que choie de leur naturel. Bafilide pour imiter Py-
thagore , vouloit que fes difciples gardaiTent le lilen-
ce pendant cinq ans. Voyt\ Nom , Pythagori-
cien, &c.
Suivant la doctrine de leur maître , ils croyoient
que l'ame étoit punie en cette vie des péchés qu'elle
avoit commis auparavant : ils enfeignoient la mé-
tempfycofe , & nioient la réfurreâion de la chair ;
parce que , difoient-ils, le falut n'avoit pas été promis
au corps. Ils ajoûtoient , que dans chaque homme il
y avoit autour de l'ame raifonnable plufieurs elprits
qui excitoient les différentes paffions ; que loin de les
Combattre il falloitleur obéir, & fe livrer aux delirs
les plus déréglés. Clément Alexandrin , Strom. liv. II.
&1K (G)
*BASILIGOROD, {Géog.) ville de l'empire
Ruffien dans la Tartarie Mofcovite , fur la rive droite
du Volga au confluent de la Sura.
* BÀSILIMPHA , ( Gcog. ) rivière de Diarbeck
dans la Turquie en Alie ; elle fe jette dans le Tigre ,
entre Molul & Tuiit.
BAS il?
* BASILÎNDE , f. f. (Myth.) nom d'une efpece
de tête que les Tarentins célébroient en l'honneur
de Venus. Pollux prétend , liv. IX. que c'étoit un jeu
des Grecs , dans lequel celui que le fort avoit fait roi ,
commandoit cmelque choie aux autres. Lex. Jurid.
Calv.
* BASILIPOTAMO , (Géog. anc. & mod.) rivière
de Grèce en Morée , dans la province de Sacanie :
elle reçoit d'autres rivières , & fe jette dans la mer
au golfe de Caftel-Rampani. Les anciens l'ont appel-
lée, ou Hemerus , ou Marathon , ou Eurotas.
BASILIQUE , f. f. ( Hift. anc. & mod. ) mot tiré du
Grec /Sair/AïJç, roi ; c'eft-à-dire, mai/on royale. C'é-
toit à Rome un bâtiment public & magnifique , où
l'on rendoit la juftice à couvert ; ce qui le diitinguoit
Au forum , place publique , où les magiftrats tenoient
leurs féances en plein air. Il y avoit dans ces bafili-
ques de vaftes falles voûtées , oc des galeries élevées
fur de riches colonnes : des deux côtés étoient des
boutiques de marchands , & au milieu une grande
place pour la commodité des gens d'affaires. Les tri-
buns & les centumvirs y rendoient la juftice ; & les
jurifconfultes ou légiftes gagés par la république , y
répondoient aux confultations. C'eft ce qu'a voulu
dire Cicéron dans une épitre à Attieus , bafilicam fut'
beo , non villam , fréquentai formianorum ; parce qu'on
venoit le confulter de toutes parts à fa maiion de cam-
pagne , comme s'il eut été dans une bafilique. Les
principales bafiliques de Rome étoient Julia , Porcia
Sifimini Sempronii , Cad , Lucii , ainfi nommées de
leurs fondateurs, & la banque, bafilica argentariorum.
G.i en conftruilit d'autres moindres pour les mar-
chands , & 011 les écoliers alloient faire leurs décla-
mations. Le nom de bafdique a palfé aux édifices dé-
diés au culte du vrai Dieu , & aux chapelles bâties
fur les tombeaux des martyrs : ce nom paroît fur-
tout leur avoir été affect é en Grèce. Ainfi l'on nom-
moit à Conftantinople la bafdique des faints Apôtres ,
l'églife oii les empereurs avoient tait tranfporter les
reliques de quelques Apôtres. Il étoit défendu d'y en-
terrer les morts , & les empereurs même n'avoient
leur fépulture que fous les portiques extérieurs , ou
le parvis de la bafdique.
Le nom de Bafilique lignifiant maifon royale , il eft
vifible que c'eft à caule de la louveraine majefté de
Dieu , qui eft le roi des rois , que les anciens au-
teurs eccléfiaftiqucs ont donné ce nom à l'Eglife ,
c'eft-à-dire au lieu où s'affcmblent les Fidèles pour
célébrer l'office divin.
Ce mot eft fouvent employé dans ce fens parfaint
Ambroife , S. Auguftin , S. Jérôme , Sidoine , Apolli-
naire , & d'autres écrivains du IV. &c du v. fiecle.
M. Perrault dit , que les bafiliques différoient des
temples en ce que les colonnes des temples étoient
en-dehors , & celles des bafiliques en-dedans. Poyt^
Temple.
Selon Bellarmin , tom. II. de fis controverfes , voici
la différence que les Chrétiens mettoient entre les
bafiliques & les temples. On appelloit bafiliques les
édifices dédiés au culte de Dieu & en l'honneur des
faints , fpécialcment des martyrs. Le nom de temples
étoit propre aux édifices bâtis pour y célébrer les
myfteres divins , comme nous l'apprennent S. Bail-
le , S. Grégoire de Nazianze, &c. Quelques anciens ,
comme Minutius Félix , dans fon ouvrage intitulé
Octavitii , ont foûtenu que le Chriftianilme n'avoit
point de temples , que cela n'étoit propre qu'au Ju-
daïfine & au Paganifme : mais ils parlent des temples
deftinés à offrir des facririces fanglans , &: à immoler
des animaux. Il eft certain que les lieux deftinés à
conferver & honorer les reliques des martyrs étoient
proprement appelles bafiliques , ÔC non pas temples.
Les Grecs font quelquefois mention des temples des
martyrs ; mais ils parlent des lieux qui étoient con-
ii8
BAS
facrés à Dieu & dédiés au culte des martyrs, Gom-
me confacrés à Dieu , ils étoient appelles temples ;
car c'eft à lui feul qu'on peut ériger des autels & of-
frir des facrifîces : mais comme deftinés à la vénéra-
tion des faints , ils avoient feulement le nom de ba-
jiiiques. ( G )
Basiliques, adj. pris fubft. (Jurifprud.) recueil
des lois Romaines , traduites en Grec par ordre des
empereurs Bafile & Léon , & maintenu en vigueur
dans l'empire d'Orient juiqu'à fa diflblution. Voye^
Droit civil.
Les bafdiques comprennent les inftitutes , le digef-
te , le code & les novelles , avec quelques édits de
Juftinien & d'autres empereurs. Le recueil étoit de
foixante livres, & s'appelloit par cette raifon i%wov
to. , foixante. On croit que c'eft principalement l'ou-
vrage de l'empereur Léon le philofophe , & qu'il l'in-
titula du nom de fon père , Baille le Macédonien, qui
l'entreprit le premier. Des foixante livres il n'en relie
aujourd'hui que quarante-un. Fabrolus a tiré en quel-
que façon le fupplément des dix -neuf autres du Sy-
nopfis bafilicon , &LC.
Basilique, adj. pris fubft. (Hijl. anc.) dans l'em-
pire Grec , dénomination qui le donnoit aux manda-
taires du prince , ou à ceux qui étoient chargés de
porter l'es ordres oC les commandemens. Voye^ Man-
dement. (G)
Basilique, adj. pris fubft. en Anatomit , nom
d'une veine qui naît du rameau axillaire , qui court
dans toute la longueur du bras. Foye^ les PI. dAnat.
& leur explication dans V article ANATOMIE.
La bafidique eft une des veines que l'on a coutume
d'ouvrir en faignant au bras. Voye^ PhlÉbotomie.
BASILIQUE ou bajïlica , eft , en Agronomie , le nom
d'une étoile fixe de la première grandeur dans la con-
ftellation du Lion : elle s'appelle aufîî Regulus & cor
Leonis , ou cœur du Lion. V. LlON. ( O )
* BASILISSA, ( Myth. ) nom fous lequel Venus
étoit honorée par les Tarentins.
* BAS1LUZZO , ( Géog. anc. & mod. ) île de la
mer de Tofcane , appeîlée jadis Herculislnfula: c'eft
une des îles célèbres de l'Ypare.
* BASIN , f. m. ( Commerce & Tijferans. ) étoffe
croifée , toute fil & coton ; la chaîne eft fil , la trame
coton. Il y a des bafins unis , figurés , ras & velus ; &
dans toutes ces fortes , on en diftingue une infinité
d'autres relativement à l'aunage & à la condition.
Les manufactures principales en font à Troies , à
Roiien , & dans le Beaujolois. Ils ne le travaillent pas
autrement que la toile , quand ils font unis : ils lé font
à la marche , quand ils font figurés ; le nombre de
liffes & de marches eft déterminé par la figure , &
c'eft la trame qui la fait ; parce qu'étant de coton &
plus groife que la chaîne , elle forme un relief, au
lieu que la chaîne fe perdrait dans la trame : les ve-
lus font tirés au chardon.
Il eft ordonné par les reglemens de donner aux ba-
fins unis ou rayés , demi- aune & un pouce de large
en peigne & furie métier; vingt -quatre portées de
quarante fils chacune , voye^ Portée & Peigne ;
6c vingt-quatre aunes de longueur : aux bafins à pe-
tites raies , cent foixante raies : aux bafins à trente-fix
barres , demi - aune un pouce de large en peigne ,
vingt-deux portées de quarante fils chacune , & trois
raies à chaque barre : aux bafins étrois , unis ck à pe-
tites raies , ou à vingt-cinq barres , demi-aune moins
r^ de large en peigne , vingt-quatre aunes de long :
aux unis , vingt portées : à ceux à petites raies , cent
quarante raies; & à chacune des vingt- cinq barres ,
trois raies : aux bafins à la mode , demi-aune un pou-
ce de large , & vingt-quatre de long ; s'ils font larges ,
demi-aune moins ~ de large , & vingt -deux aunes
de long ; s'ils font étroits , avec un nombre de por-
BAS
tées ou de raies convenable à la largeur & à leitf
degré de fineffe ; & à tous , la chaîne de fils de coton
filés fin , lans aucun mélange d'étoupe , chanvre ou
lin, les barres & raies de fil de coton retors.
Quoique les manufactures de France fournillent
d'excellens bafins , on en tire cependant de l'étranger.
Il en vient de Hollande , de Bruges , & des Indes. Les
bafins de Hollande font ordinairement rayés : ils font
fins & bons. Us portent de largeur cinq huitièmes
d'aune , & de longueur environ douze aunes. Ceux
de Bruges font unis , rayés à petites raies impercep-
tibles , à grandes raies ou barres de trois petites raies,
& à poil. Les unis ou à poil ont environ cinq douze
de large , & douze aunes de long ; & les rayés , un
pouce de moins f«ir la largeur, & les deux tiers de
moins fur la longueur. Il y en a de quatre lortes ,
qu'on diftingue à la marque. Ceux qui font marqués
à deux lions rouges s'appellent bafin double lion ; à un
feid lion , bafin fimple lion ; à un £ , bafin B ; â un C,
bafin C. Voye^ dans le dictionnaire de Commerce le dé-
tail de toutes ces marques.
Les bafins des Indes font blancs & fans poil ; les
uns croifés ck. ferges ; les autres à carreaux &: ouvrés.
Les meilleurs fe fabriquent à Bengale , Pondichery ,
& Belcafor.
Il n'eft pas befoin d'avertir que les barres dans ce
genre d'étoffe , ou plutôt de toile , font faites par
certains fils de chaîne filés plus gros que les autres ,
& placés à des diftances égales , & que les raies font
faites par des fils de la chaîne filés moins gros que
ceux qui forment les barres , mais plus gros que les
autres , placés à des diftances égales fur la barre.
BASIOGLOSE , adjett. prislubft. en Anatomie 3
nom d'une paire de mufcles de la langue; ils vien-
nent de la baie de l'os hyoide & de la partie voiûne
de la grande corne de ce même os , & s'infèrent aux
parties latérales de la racine de la langue. (V)
B ASIO-PHARYNGIEN, en Anatomie , nom d'une
paire de mufcles du pharynx. Voye\_ Hyo-pharyn-
GIFN. (Z.)
* BASIRI , {Géog.) rivière de Perfe qui arrofe la
province de Kirman , la ville de ce nom , celle de
Bafiri, & fe jette dans le golfe d'Ormus.
* BASKIRIE , (Géog.) contrée de la Tartarié
Mofcovite , bornée au nord par les Tartares de Tu-
men , à l'orient par les Barabinskoi , & par les terres
d'Ablai ; au midi , par la montagne de Sortora ; & à
l'occident par le duché de Bulgare.
* BASKRON , PASCATIR, owPASCHARTI,
( Géog. ) province de la Tartarié Mofcovite , bornée
à l'orient par les Kalmuks ; au midi par la grande No-
gaia ; au couchant par lariviere de Kam , & au nord
par la Permia Velchi , & par une partie de la Si-
bérie.
BASOCHE , f. f. (Jurijprud. ) eft la communauté
des clercs du Parlement de Paris, laquelle tient une
efpece de jurifdiftion , où fe jugent les différends qui
peuvent naître entre eux. Ils s'y exercent auffi à plai-
der des caufes fur des queftions difficiles ou fingulie-
res. La bafoche a entre autres officiers un chancelier
& un thréforier de la bafoche; il y avoit même autre-
fois un roi de la bafoche. ( H)
* BASQUES (les) f. m. pi. Géog. petit pays de
France , vers les Pyrénées , entre l'Adour , les fron-
tières d'Efpagne , l'Océan, &le Bearn; il comprend
le Labour , la baffe Navarre, & le pays de Soûle.
* BASRACH , Voyei Bassora.
* BASS , ( Géog. ) petite île d'Ecoffe, dans le golfe
d'Edimbourg.
* BASSANO, {Géog.) petite ville d'Italie , dans
l'état de Venife , au Vicentin , fur la rivière de
France.
BASSANO , ou BASSANELLO ,(Géog. anc. & mod.)
ville d'Italie, dans le patrimoine de S. Pierre , au
BAS
confluent du Nere & du Tibre , près du lac que les
anciens appelloient lacus Vadimenii.
BASSAREUS , adj. pris fubft. ( Myth. ) furnom
donné à Bacchus ; foit du Grec JZolvÇuv , crier , parce
que dans les myfteres les Bacchantes jettoient de
grands cris ; foit d'une forte de chauffure Lydienne
nommée baffareum. On donnoit auffi aux prêtreffes
de ce Dieu le titre de baffarides , que l'ancien fcho-
liafte tire d'une robe ou vêtement qui alloit jufqu'aux
talons, & que les Africains & les Thraces appelloient
baffyris & baffara. Mais Bochart dans Ion Chanaa-
na, liv. I. c. i$. dit que ce mot vient de l'Hébreu
baff'ar , qui fignifie la même choie que le rfuyâv des
Grecs , qui veut dire vendanger ; étymologie qui vaut
bien les deux précédentes. (G)
BASSE , ou BATURE , f. f. c'eft ( en Marine) un
fond mêlé de fable de roche ou de cailloux , qui pa-
raît à la furface de l'eau : quand on voit la mer brifer
défais , alors on nomme cet endroit bature ou bri-
fant. (Z)
Basse , adj. fém. Voye^ Bas.
Basse , adj. pris fubft. eft celle des parties de la
Mufique qui eft au-deftbus des autres ; la plus baffe
de toutes , d'où vient fon nom de baffe. t'oye^ Par-
tition.
La baffe eft la plus importante des parties ; parce
que c'eft fur elle que s'établit le corps de l'harmonie :
auffi eft-ce une eipece d'axiome parmi les Muficiens,
que quand la baffe eft bonne , rarement l'harmonie
eft mauvaife.
Il y a plufteurs éfpeces de baffes ; biffe fondamentale,
dont nous terons un article particulier.
Baffe continue , ainfi appellée parce qu'elle dure
pendant toute la pièce : (on principal ulage , outre
celui de régler l'harmonie , eft de foûtenir les voix ,
& de conferver le ton. On prétend que c'eft un Lu-
dovico-Viana , dont nous en avons un traité , qui au
commencement du dernier fiecle la mit le premier
en ufage.
Baffe figurée , qui au lieu de s'arrêter fur une feule
note, en partage la valeur en plufteurs autres notes
fous un même accord, f^oye^ Harmonie figurée.
Baffe contrainte , dont le fujet ou le chant , borné
à un petit nombre de mefures , recommence fans
ceffe , tandis que les parties fupérieures pourfuivent
leur chant & leur harmonie , & les varient de diffé-
rentes manières. Cette baffe appartient originaire-
ment aux couplets de la chaconne : mais on ne s'y
affervit plus aujourd'hui. La baffe contrainte defeen-
dant diatoniquement ou chromatiquement, & avec
lenteur , de la tonique à la dominante dans les tons
mineurs , eft admirable pour les morceaux pathéti-
ques : ces retours périodiques affeûent inienfible-
ment l'ame , & la difpofent à la trifteffe & à la lan-
gueur. On en voit de fort beaux exemples dans plu-
fteurs feenes des opéra François.
Baffe chantante , eft l'efpece de voix qui chante la
partie de la baffe. Il y a des baffes récitantes 6c des
baffes de chœur ; des concordans ou baffes-tailles , qui
tiennent le milieu entre la taille & la baffe ; des baffes
proprement dites que l'ufage fait encore appeller au-
jourd'hui baffe-tailles ; & enfin des baffe-contres , les
plus graves de toutes les voix, qui chantent la baffe
fous la baffe même , & qu'il ne faut pas confondre avec
les contre-baffes qui font des initrumens. Voye^ Con-
TRE-BASSE.
Basse fondamentale, eft celle qui n'eft for-
mée que des ions fondamentaux de l'harmonie ; de-
forte qu'au-deffous de chaque accord , elle fait en-
tendre le vrai fon fondamental de cet accord ; par
où l'on voit qu'elle ne peut avoir d'autre contextuie
que celle de la fucceffion fondamentale de l'har-
monie.
Pour bien entendre ceci , il faut favoir que tout
BAS
1 19
accord , quoique compofé de plusieurs fons , n'en a
qu un qui foit fondamental : favoir celui qui a pro-
duit cet accord , & qui lui fert de bafe. Or la baffe qui
règne au-deffous de toutes les autres parties, n'ex-
prime pas toujours les fons fondamentaux des ac-
cords : car entre tous les fons d'un accord , on eft
maître de porter à la baffe celui qu'on croit préféra-
ble , eu égard à la marche de cette baffe , au beau
chant , ou à l'expreffion. Alors le vrai fon fondamen-
tal , au lieu d'être à fa place naturelle, qui eft la
baffe, fe tranfporte dans les autres parties , ou même
ne s'exprime point du tout; & un tel accord s'appelle
accord renverfé. Dans le fond , un accord rcnverle ne
diffère point de l'accord diied qui Ta produit ; car ce
font toujours les mêmes ions: mais ces ions formant
descombinaiions différentes, on along-temspri5 ces
combinailons pour autant d'accords fondamentaux,
& on leur a donné différens noms , qu'on peut voir
au mot accord, & qui ont achevé de les diftinguer;
comme fi la tiiftéience des noms en produiibit réel-
lement dans les choies. M. Rameau a fait voir dans
fon traité de T Harmonie , que plufteurs de ces préten-
dus accoids n'étoient que des renvei iemens d'un leul.
Air.fi l'accord de lixte n'eft que l'accord parfait dont
la tierce eft tranfportéc à la b^ffe : en y portant la
quinte , on aura l'accoid de fixte quarte. Voilà donc
trois combina. ions d'un accord qui n'a que trois fons;
ceux qui en ont quatre, font fufceptibies de quatre
combinaiions ; car chacun des fons peut être porté
à la baffe : mais en portant au-deffous de celle-ci une
autre baffe, qui fous toutes les combinaifons d'un
même accord , préfente toujours le fon fondamental,
il eft évident qu'on réduit au tiers le nombre des ac-
cords confonans , & au quart le nombre des diflb-
nans. Ajoutez à cela tous les accords par fuppofition,
qui le réduilent encore aux mêmes fondamentaux ;
vous trouverez l'harmonie fimphnée à un point qu'on
n'eût jamais eipéré de l'état de confufifcr. où étoient
fes règles julqu'au tems de M. Rameau. C'eft certai-
nement , comme l'oblerve cet auteur , une choie tres-
étonnante qu'on ait pîipoufierla pratique de cet Art
julqu'au point où elle eft parvenue , fans en connoî-
tre le tondement , &c qu'on ait trouvé exactement
toutes les règles , avant que de trouver le principe
qui les produit.
La marche ou le mouvement de la baffe fondamen-
tale le règle fur les lois de la uicceffion harmonique;
de forte que fi cette baffe s'écarte de l'ordre prêtent ,
il y a faute dans l'harmonie.
Bien moduler & obferver la liaifon , font les deux
plus importantes règles de la b.ffejondamentale. ) oya
Harmonie & Modulation. Et la principale règle
méchanique qui en découle, eft de ne faire marcher
la baffe fondamentale que par intervalles conionans,
lice n'eft feulement dans un acte décadence rompue,
ou après un ateord de leptieme diminuée, qu'elle
monte diatoniquement. Quanta la defeente diatoni-
que, c'eft une marche interdite à la baffe Jonaumen ta-
ie, ou tout au plus tolérée dans le cas de deux accords
parfaits fépares par un repos, exprimé ou fous-enten-
du ; cette règle n'a point d'autre exception. Il eft vrai
que M. Rameau a fait defeendre diatoniquement la
baffe fondamentalt ions des accords de feptieme, mais
nous en dirons la raiionaux mots Cadence & Dis-
sonance.
Qu'on retourne comme on voudra une
mentait} li elle eft bien faite on n'y trouver.! jamais
que ces deux choies: ou des accords parfaits iur les
mouvemens confonans, fans Iei'quels ces accords
n'auroîent point de liaifon ; ou des accords diilonans
dans des ades de cadence; en tout autre cas, la dif-
fonance ne fauroit être ni bien placée ni bien famée.
Il s'enfuit de-là que la baffe fondamental* ne peut
jamais marcher que d'une de ces trois manières:
î2o BAS
i°. monter ou defcendre de tierce ou de fixte ; 2°. de
quarte ou de quinte; 30. monter diatoniquement au
moyen de la diffonance qui forme la liaifon , ou par
licence fur un accord partait. Toute autre marche
de la baffe fondamentale eft mauvaife.
Quoique la baffe fondamentale doive régner géné-
ralement au-deffous de la baffe continue, il eft pour-
tant des cas où celle-ci defeend au-deffous de la fon-
damentale ; tels font ceux des accords par fuppolition,
ainfi appelles , parce que la baffe continue fuppofe au-
deffous de l'accord un nouveau Ion qui n'eft point
de cet accord , qui en excède les bornes , & qui ainfi
fe trouve au-delfous de la baffe fondamentale. Voye^
Supposition.
La baffe fondamentale , qui n'en" faite que pour fer-
vir de preuve à l'harmonie , fe retranche dans l'exé-
cution , & fouvent elle y feroit un fort mauvais ef-
fet. Elle produirait tout -au -moins une monotonie
très-ennuyeufe par les retours fréquens du même ac-
cord, qu'on deguife ôc qu'on varie plus agréable-
ment , en le combinant différemment fur la baffe con-
tinue. (5)
En général, les règles rigoureufes de la baffe fonda-
mentale peuvent fe réduire à celles-ci.
i°. Il doit toujours y avoir au moins un fon com-
mun dans l'harmonie de deux fons fondamentaux
confécutifs. Voye\_ Liaison.
20. Dans toute dominante la diffonance doit être
préparée , à moins que la dominante ne foit tonique.
30. Toute dominante doit defcendre de quinte, &
toute fous-dominante doit monter de quinte. V. Dis-
sonance, Dominante , Sous-dominante , Pré-
parer , &c. On trouvera à ces articles les raiions de
ces règles.
Au relie la baffe fondamentale prend quelquefois
des licences ; on peut mettre de ce nombre les ac-
cords de feptieme diminuée , & les cadences rom-
pues, dont ofrpeut cependant donner la raifon. Voyc^
Septième diminuée & Cadence.
Règles de la baffe continue. La baffe continue n'eft
qu'une baffe fondamentale , renverfée pour être plus
chantante. Ainli dès que la baffe fondamentale eft faite,
on trouvera une baffe continue par le renverfement
dès accords. Voye^ Accord. Par exemple , cette
baffe fondamentale monotone ut fol ut fol ut fol ut, peut
donner cette baffe continue plus chantante ut fi ut ré
mi fa mi. La baffe continue n'eft obligée de fe confor-
mer à la baffe fondamentale, que lorfqu'elle approche
des cadences, ou qu'elle s'y termine. La baffe conti-
nue admet auffi les accords par fuppofition. Voye{ Ac-
cord & Supposition. Toute note qui porte dans
la baffe continue l'accord de fauffe quinte , doit mon-
ter enfuite diatoniquement ; & toute note qui porte
l'accord de triton, doit defcendre diatoniquement.
yoye{ Fausse-quinte &Triton. On trouvera les
raifons de toutes ces règles à leurs dîfférens articles.
Règles que doit obferver le deffus par rapport à la baffe
fondamentale. Toute note du deffus qui fait diffonance
avec la note qui lui répond dans la baffe fondamenta-
le, doit être préparée Ôtfauvée. Voye^ Harmonie ,
Dessus, Composition, Préparer, Sau-
ver, &c
La connoiffance de la baffe fondamentale , ou la rè-
gle pour trouver la baffe fondamentale d'un chant don-
né , dépend beaucoup de celle du mode , ou de la mo-
dulation, foy^ Mode. (O)
Basse de Viole, inftrument de Mufique. Voye^
Viole, & la table du rapport & de l'étendue des
inllrumens de Mufique. Cet inftrument a fept cordes,
dont la plus groffe à vuide eft à l'uniffon du la du ra-
valement des clavecins, ou du la du 16 pie. La plus
petite ou la chanterelle, eft à l'uniffon du rcqui fuit
immédiatement la clef de cfolut.
Basse de Flûte à bec, inftrument dont la figu-
BAS
re & la tablature eft entièrement femblable à celle
de Yd flûte-à-bec décrite à fon article , dont la baffe ne
diffère qu'en grandeur. Cet inftrument fonne l'otla-
ve au-deffous de la flùte-à-bcc , appellée taille. Son
ton le plus grave eft à l'uniffon du fa de la clef f ut
fa des clavecins, & il a une 13e d'étendue jufqu'au
ré à l'oct ave de celui qui fuit immédiatement la clé
de c fol ut. Foye{ la table du rapport de C étendue des
inflrumens de Mufique.
Basse de Flûte traversiere , repréfentée
PI. IX. de Lutherie , fig. 34. & fuiv. eft un inftru-
ment qui fonne la quinte au-deffous de la flûte tra-
verfkre, & qui lui eft en tout femblable , à cela près,
qu'il eft plus grand , & qu'il eft courbé dans la pre-
mière partie , pour que l'embouchure a foit plus près
de l'endroit où il faut poier les mains. Le coude B
qui joint la pièce où eft l'embouchure avec le refte
de l'inftrument, eft un tuyau de laiton qui entre par
chacune de fes extrémités dans des boîtes ou noix
pratiquées aux extrémités des pièces qu'U faut join-
dre. Les trous 1 , 2, 3 , 4 & 6 auxquels les doigts ne
lauroient atteindre, vu la grandeur de l'inftrument,
fe bouchent avec les clés que l'on voit vis-à-vis. Ces
clés font tellement fabriquées, que lorsqu'elles font
abandonnées à leurs reflorts , elles laiffent les trous
qui font vis-à-vis , ouverts , & que lorfque l'on ap-
puie deffus avec un doigt , Us font fermés , la foupa-
pe de ces clés étant entre la charnière & le point où
on applique le doigt ; au lieu qu'à la clef du mi b moly
c'eft la charnière qui eft entre la foûpape & l'endroit
où on pôle le doigt. Cet inftrument fert de baffe dans
les concerts de flûte. Son ton le plus grave eft à l'u-
niffon du fol qui fe trouve entre la clé de fut fa &
de c fol ut des clavecins; ce qui eft , comme on a dit
ci-devant , une quinte au-deffous des flûtes ordinai-
res qui ont deux pies de long. Voye{ Flûte TRA-
VERSIERE, & la tablature de cet inftrument, qui
fert pour celui-ci , obfervant toutefois de commen-
cer par le fol 5 e. On façonne cet inftrument qui eft de
bouis ou de quelqu 'autre bois dur, furie tour, com-
me tous les autres inflrumens à vent, f^qye^ l'article
Flûte traversiere & Tour à Lunette , & la
table du rapport & de l'étendue des inflrumens de Mu-
fique.
Basse des Italiens, c'eft le même inftrument
que celui que nous appelions baffe de violon. Voye^
Basse de Violon. Avec cette différence qu'ils l'ac-
cordent une tierce mineure plus bas, enforte que le
fon le plus grave de cet inftrument fonne l'uniffon
de Va mi la du 1 6 pié. Voye^ la table du rapport de re-
tendue de tous les inflrumens de Mufique.
Basse de violon, inftrument de Mufique en
tout femblable au violon , à l'exception des oiiies ,
qui font en C, au lieu qu'au violon elles font en S ,
& en ce qu'il eft beaucoup plus grand , & qu'on le
tient entre fes jambes pour en joiier. On le conftruit
fur le moule repréfenté fig. 2. PL XII. de Lutherie.
Foye{ Violon & Viole.
Cet inftrument fonne l'o&ave au-deffous de la
quinte de violon & la douzième au-deffous du vio-
lon , & l'uniffon des baffes du clavecin depuis le cfol
ut double oftave au-deffous de celui de la clé de c
fol ut ou l'uniffon du huit pié ouvert, Voye^ la table du
rapport de l'étendue des inflrumens de Mufique.
Basse ou Calade, f. f. (Manège.1) pente douce
d'une colline , fur laquelle on accoutume un cheval
à courir au galop , pour lui apprendre à plier les jar-
rets, (r)
Basse-contre, f. f. acteur qui dans les chœurs
de l'opéra & autres concerts chante la partie de baffe-
contre.
Il y a peu de baffe-contres à l'opéra ; l'harmonie des
chœurs y gagneroit , s'il y en avoit un plus grand
nombre. (2?)
Basse-
BAS
BASSE-COUR , f. f. terme d' 'Architecture ; on appelle
ainfi , dans un bâtiment conllruit à la ville , une cour
féparée de la principale, autour de laquelle font éle-
vés des bâtimens deftinés aux remifes , aux écuries ,
ou bien où font placés les cuifines , offices, communs ,
&c. Ces bajfes-cours doivent avoir des entrées de dé-
gagement par les dehors , pour que le fervice de leurs
bâtimens le puifTe faire commodément & fans être ap-
perçû des appartenons des maîtres ôc de la cour prin-
cipale.
Pour l'ordinaire ces bajfes-cours ont des iffues dans
la principale cour; mais la largeur des portes qui leur
y donnent entrée s'accordant mal avec l'ordonnance
d'un bâtiment régulier , il eft mieux que les équi-
pages , après avoir amené les maîtres près le veftibu-
le , s'en retournent par les dehors pour aller à leur
destination.
On appelle à la campagne baffe-cour, non -feule-
ment celles qui fervent aux mêmes ufages dont nous
\renons de parler , mais aufîî celles deftinées au pref-
foir , fellier , bûcher , ainfi que celles des beftiaux ,
des grains, &c. (P)
Basse-eau , ou Basse-mer (Marine) ; fe dit de
la mer retirée , & lorfque l'eau n'eft pas plus haute
qu'elle étoit avant que la mer commençât à monter ,
ce qui eft entièrement oppofé à plaine mer. (Z )
Basse-enceinte , f. f. c'eft la même choie que
la fauffe-braie , en terme de Fortification, V. FAUSSE-
Braie. (Q)
Basse-justice. (Jurisprudence.) Voyz^ Justice ,
& Foncière. V. aujjî ci-deffus Bas-justicier. (H)
Basse-taille , f. m. a£teur de l'opéra ou d'un con-
cert qui chante les rôles de baffe-taille. Voy. BASSE.
Ces rôles ont été les dominans ou en fous-ordre ,
dans les opéra , félon le plus ou le moins de goût que le
public a montré pour les afteurs qui en ont été chargés.
La baffe-taille étoit à la mode pendant tout le tems
que Thevenard a relié au théâtre : mais les composi-
teurs d'à prefent font leurs rôles les plus brillans pour
la haute-contre.
Les rôles de Roland, d'Egée, d'Hidraot, cTAmadis
de Grèce , ôcc. font des rôles de baffe-taille.
On appelle Tancrede l'opéra des baffe-tailles , parce
qu'il n'y a point de rôles de haute-contre , & que ceux
de Tancrede , cïArgant & â'IJ'menor font des rôles fort
beaux de baffe-taille.
Les Magiciens , les Tyrans , les Amans haïs font
pour l'ordinaire des baffes - tailles ; les femmes fem-
blent avoir décidé , on ne fait pourquoi , que la haute-
contre doit être l'amant favorifé , elles dilent que c'eft
la voix du coeur ; des fons mâles ÔC forts allarment fans
doute leur délicateffe. Le fentiment , cet être imagi-
naire dont on parle tant , qu'on veut placer par-tout,
qu'on décompofe fans ceffe fans l'éprouver , fans le
définir , fans le connoître , le fentiment a prononcé en
faveur des hautes-contre. Lorfqu'une baffe-taille nou-
velle fe fera mife en crédit, qu'il paroîtra un autre
Thevenard , ce fyftème s'écroulera de lui-même , &
vraifî'emblablement on fe fervira encore du fenti-
ment pour prouver que la haute-contre ne fut jamais la
voix du cœur. F. HAUTE-CONTRE. (B )
Basses-voiles , c'eft ainfi qu'on appelle en Ma-
rine , la grande voile 6c celle de milenc ; quelques-
uns y ajoutent l'artimon , qui ne doit pas y être com-
pris quand on dit amare^ les baffes-voiles ; car l'artimon
n'a point de coùets. (Z)
BASSÉE f. f. (Commerce.') , mefure dont on fe fert
en quelques lieux d'Italie , pour mefurcr les liquides.
La baj/ée de Vérone cilla lixieme partie de la brinte.
Foye^ Brinte. (G)
* BassÉe(/<z), Géog. ville des Pays-Bas François,
au comté de Flandre , fur les confins de l'Artois , &
fur un canal qui fe rend dans la Deule. Longit. 20.
3Q. lat.5û.J>3>
Tome II,
BAS ut
BASSE-LISSÊ. Voyei Lisse.
* BASSEMPOIN (Géog.), petite ville de France,
dans laGafcogne.
( * BASSENTO (Géog.) , rivière de la Calabre ci-
téneure , qui paffe à Cofenze , & fe joint au Grate.
* BASSESSE , abjection (Gramm.) termes fynony-
mes , en ce qu'ils marquent l'un Se l'autre l'état où
l'on eft: mais fi on les conftruit enfemble , dit M.
l'abbé Girard , abjection doit précéder baffeffe , & la
délicateffe de notre langue veut que l'on dife, état
d'abjection , baffeffe d'état.
L'abjection le trouve dans l'obfcurité où nous nous;
enveloppons de notre propre mouvement , dans le
peu d'eftime qu'on a pour nous , dans le rebut qu'on
en fait , & dans les fituations humiliantes où l'on nous
réduit. La baffeffe , continue le même auteur , fe trou-
ve dans le peu de naiffance , de mérite , de fortune
ôc de dignité.
Obfervons ici combien la langue feule nous don-
ne de préjugés , fi la dernière reflexion de M. l'abbé
Girard eft julle. Un enfant , au moment où il reçoit
dans fa mémoire le terme baffefje , le reçoit donc com-
me un figne qui doit réveiller pour la fuite dans fon
entendement les idées de défaut de naiffance , de mé-
rite , de fortune , de condition , & de mépris : foit
qu'il life , foit qu'il écrive, foit qu'il médite , foit qu'il
converfe , il ne rencontrera jamais le terme baffeffe ,
qu'il ne lui attache ce cortège de notions faufîès ;
6c les fignes grammaticaux ayant cela de particulier ,
en morale fur-tout , qu'ils indiquent non-feulement les
choies , mais encore l'opinion générale que les hom-
mes qui parlent la même langue , en ont conçue ,
il croira penfer autrement que tout le monde & fe
tromper , s'il ne méprife pas quiconque manque de
naiffance , de dignités , de mérite ôc de fortune ; &
s'il n'a pas la plus haute vénération pour quiconque
a de la naiffance , des dignités , du mérite & de la
fortune ; ÔC mourra peut-être , fans avoir conçu que
toutes ces qualités étant indépendantes de nous , heu-
reux feulement celui qui les poffede ! Il ne mettra au-
cune diltinttion entre le mérite acquis ôc le mérite
inné ; ôc il n'aura jamais fù qu'il n'y a proprement
que le vice qu'on puiffe méprifer, Ôc que la vertu
qu'on puiffe louer.
Il imaginera que la nature a placé des êtres dans
l'élévation , & d'autres dans la baffeffe ; mais qu'elle
ne place perfonne dans \ abjection ; que l'homme s'y
jette de fon choix , ou y eft plongé par les autres ; ÔC
faute de penfer que ces autres font pour la plupart in-
juftes ôc remplis de préjugés , la différence mal-fondée
que l'ufagc de fa langue met entre les termes baffeffe
Ôc abjection , achèvera de lui corrompre le cœur ÔC
l'cfprit.
La piété , dit l'auteur des Synonymes , diminue les
amertumes de l'état çYakjcclion. La llupidite empê-
che de lentir tous les defagrémens de la baffeffe d'état.
L'cfprit ôc la grandeur d'ame font qu'on le chagrine
de l'un , Se qu'on rougit de l'autre.
Et je dis moi que les termes abjection, baf/èf/è ,
lemblent n'avoir été inventés que par quelques hom-
mes injuftes dans le fein du bonheur, d'où ils inful-
toient à ceux que la nature, le hafard , ôc d'au-
tres caufes pareilles n'avoient pas également favori-
lés ; que la Philofophie foûtient dans V abjection où l'on
ell tombé , 6c ne permet pas de penfer qu'on puiffe
naître dans la baffeffe ; que le philolophe fans naiffan-
ce , fans bien , lans fortune , fans place , l'aura bien
qu'il n'ell qu'un être abject pour les autres hommes,
mais ne le tiendra point pour tel ; que s'il fort de l'é-
tat prétendu de baffeffe qu'on a imagine, il en fera
tiré par fon mérite feul ; qu'il n'épargnera rien pour
ne pas tomber dans Vab/câion , à caufe des inconvé-
niens phyiiques & moraux qui l'accompagnent ; mais
que s'il y tombe , fans avoir aucun mauvais ufage de
i22 BAS
fa raifon à fe reprocher, il ne s'en chagrinera guère
& n'en rougira point. Il y a qu'un moyen d'éviter
les inconvéniens de la baj/'ejje d'état & les humilia-
tions de Y abjection , c'elt de fuir les hommes, ou de ne
voir que fes iémblables. Le premier me iémble le
plus iùr , & c'elt celui que je choifirois.
BASSETS , f, f. pi. ( Chafe ) ce l'ont des chiens
pour aller en terre. Ils ont les oreilles longues, le
corps long , ordinairement le poil roux , les pattes
cambrées en dedans , & le nez exquis.
BASSETTE , f. f. forte de jeu de carte qui a été
autrefois fort à la mode en France ; mais il a été dé-
fendu depuis , & il n'eft plus en ulage aujourd'hui.
En voici les principales règles.
A ce jeu , comme à celui Au pharaon ( Voytr^ PHA-
RAON ) le banquier tient un jeu entier compolé de
52 cartes. Il les mêle, &c chacun des autres joueurs
qu'on nomme pontes , met une certaine lomme fur
une carte prile à volonté. Le banquier retourne en-
fuite le jeu, mettant le deffus défions; enibrte qu'il
voit la carte de deflbus : enluite il tire toutes les car-
tes deux à deux jufqu'à la fin du jeu.
Dans chaque couple ou taille de cartes , la pre-
mière eft pour le banquier , la féconde pour le pon-
te ; c'eft-à-dire que fi le ponte a mis par exemple lur
un roi , & que la première carte d'une paire loit un
roi , le banquier gagne tout ce que le ponte a mis
d'argent lur Ion roi : mais fi le roi vient à la iecon-
de carte , le ponte gagne , & le banquier eft obligé
de donner au ponte autant d'argent , que le ponte
en a mis fur fa carte.
La première carte , celle que le banquier voit en
retournant le jeu , eft pour le banquier , comme on
vient de le dire : mais il ne prend pas alors tout l'ar-
gent du ponte, il n'en prend que les 7, cela s'appelle
facer.
La dernière carte , qui devroit être pour le ponte ,
eft nulle.
Quand le ponte veut prendre une carte dans le
cours du jeu , il faut que le banquier baiffe le jeu ,
enlorte qu'on voye la première carte à découvert :
alors fi le ponte prend une carte ( qui doit être dif-
férente de cette première ) la première carte que ti-
rera le banquier fera nulle pour ce ponte ; fi elle vient
la féconde , elle lera facée pour le banquier ; fi elle
vient dans la fuite , elle fera en pure gain ou en pure
perte pour le banquier , l'elon qu'elle fera la premiè-
re ou la féconde d'une taille.
M. Sauveur a donné dans le Journal des Sça-
vans 1679, fix tables, par lelqu'elles on peut voir l'a-
vantage du banquier à ce jeu. M. Jacques Ber-
noulli a donné dans fon Ars conjeclandi l'analyfe
de ces tables , qu'il prouve n'être pas entièrement
exacf es. M. de Montmort , dans fon Ejfai d'ana-
lyfe fur les jeux de hafard , a aufii calculé l'avantage
du banquier à ce jeu. On peut donc s'inftruire à fond
fur cette matière dans les ouvrages que nous venons
de citer : mais pour donner là-deiius quelque teinture
à nos lecfeurs, nous allons calculer l'avantage du
banquier dans un cas fort fimple.
Suppolons que le banquier ait fix cartes dans les
mains , & que le ponte en prenne une qui foit une
fois dans ces fix cartes , c'eft-à-dire dans les cinq car-
tes couvertes : on demande quel eft l'avantage du
banquier.
Il eft vifible ( foye- Alternation 6* Combi-
naison ) que les cinq cartes étant delignées par a ,
b ,c ,d,e, peuvent être combinées en 1 20 façons dif-
férentes , c'eft-à-dire en 5 fois 24 façons. Imaginons
donc que ces 1 20 arrangemens lbient rangés fur cinq
colonnes de 24 chacune , de manière que dans la
première de ces colonnes a fe trouve à la première
place , que dans la féconde ce loit b qui occupe la
première place, c dans la troifieme, &c.
BAS
Suppofons que a foit la carte du ponte , la colon-
ne où la lettre a occupe la première place , eft nulle
pour le banquier ÔC pour les pontes.
Dans chacune des quatre autres colonnes la lettre
a fe trouve fix fois à la féconde place , fix fois à la
troifieme , fix fois à la quatrième & fix fois à la cin-
quième , c'eft-à-dire qu'en fuppofant A\z. mile du pon-
te , il y a 24 arrangemens qui font gagner — au
banquier , 24 qui le font perdre , c'eft-à-dire qui lui
donnent — A , 24 qui le font gagner , c 'eft-à-dire qui
lui donnent A, & 24 enfin qui l'ont nuls. Cela s'en-
fuit des règles du jeu expliquées plus haut.
Or , pour avoir l'avantage d'un joueur dans un
jeu quelconque , il faut i°. prendre toutes les com-
binailons qui peuvent le faire gagner , ou perdre ,
ou qui font nulles , & dont le nombre eft ici 1 20.
20. Il faut multiplier ce qu'il doit gagner ( en regar-
dant les pertes comme des gains négatifs ) par le nom->
bre des cas , qui le lui feront gagner ; ajouter enfem-
ble ces produits , & divifer le tout par le nombre to-
tal des combinaifons : voye^ Jeu , Pari ; donc l'avan-
tage du banquier eft ici
24 X \A + 24 X — A -f 24 X A
, 7j A ;
120
~j A , c'eft-à-dire que fi le ponte a mis par exemple
un écu fur fa carte , l'avantage du banquier eft de -fj
d'écu , ou de huit fous.
M. de Montmort calcule un peu différemment l'a-
vantage du banquier : mais ion calcul quoique plus
long que le précédent revient au même dans le fond.
Il remarque que la mile du banquier étant égale à
celle du ponte , l'argent total qui eft fur le jeu , avant
que le fort en ait décidé , eft 2 A ; dans les cas nuls ,
le banquier ne fait que retirer Ion enjeu , & le pon-
te , le lien , ainfi le banquier gagne A : dans le cas
où il perd , fon gain eft 0; dans les cas faces, il re-
tire A -f- * A ; dans les cas qui font pur gain , il re-
tire 2 A; ainfi le fort total du banquier, ou ce qu'il
peut efpérer de retirer de la fomme 2 A eft
i^xA+i^XjA+i^xo+i^XiA+i^xA ,
120
& comme il a mis A au jeu ; il s'enfuit que f$ A eft
ce qu'il peut efpérer de gagner, ou fon avantage.
Foye^ Avantage.
M. de Montmort examine enfuite l'avantage du
banquier lorfque la carte du ponte fe trouve , deux,
ou trois , ou quatre fois , &c. dans les cartes qu'il
tient. Mais c'eft un détail qu'il faut voir dans ion li-
vre même. Cette matière eft auffi traitée avec beau-
coup d'exactitude dans l'ouvrage de M. Bernoulli que
nous avons cité.
A ce jeu , dit M. de Montmort , comme à celui du
pharaon , le plus grand avantage du banquier , eft
quand le ponte prend une carte qui n'a point palTé ,
& fon moindre avantage quand le ponte en prend
une qui a paffé deux fois, f^oye^ Pharaon; fon
avantage eft aufll plus grand , lorfque la carte du
ponte a paffé trois fois , que lorfqu'elle a paffé feu-
lement une fois.
M. de Montmort trouve encore que l'avantage du
banquier à ce jeu eft moindre qu'au pharaon ; il ajou-
te que fi les cartes facées ne payoient que la moitié
de la mile du ponte , alors l'avantage du banquier
feroit fort peu conlidérable ; & il dit avoir trouvé ,
que le banquier auroit du défavantage fi les cartes
facées ne pavoient que le tiers. ( O )
BASSICOT , f. m. c'eft ainfi qu'on appelle dans
les carrières d'ardoife , une elpece d'auge , dont on (&
fert pour fortir les morceaux d'ardoife du fond de la
carrière. Voye^ à l'article Ardoise , l'ulage & la
delcription de ce vaifleau.
BASSIERS , f. m. pi. ( en terme de rivière ) efpecs.
BAS
d'amas de fable dans une rivière , qui empêche la na-
vigation. Il y en a un au bout du Cours-la-reine.
BASSIGNI ( le ) ( Géog. ) petit pays de France ,
dans la partie méridionale de la Champagne , & dans
le Barrois , dans le dioc. de Langres & celui de Toul.
BASSIN , f. m. fe dit en général ou d'un réfervoir
d'eau , ou d'un vaifleau deftiné à en puifer ou à en
contenir. Voy. ci-defïbus des définitions & des exem-
ples des différentes fortes de baffins.
Bassin ( en Architecture ) , c'eft dans un jardin un
efpace creufé en terre , de figure ronde , ovale , quar-
rée , à pans , &c revêtu de pierre , de pavé , ou de
plomb , & bordé de galon, de pierre ou de marbre,
pour recevoir l'eau d'un jet , ou pour fervir de réfer-
voir pour arrofer. Les Jardiniers appellent bac , un
petit baffln avec robinet , comme il y en a dans tous
les petits jardins du potager à Verfailles.
Bassin de fontaine , s'entend de deux manières ,
ou de celui qui eft feulement à hauteur d'appui au-
deffus du rez-de-chauffée d'une cour ou d'une place
publique : ou de celui qui cil élevé fur plulieurs de-
grés , avec un profil riche de moulures & de forme
régulière, comme ceux de la place Navone à Rome.
Bassin figuré , eft celui dont le plan a plufieurs
corps ou retours droits, circulaires ou à pans, comme
ceux de la plupart des fontaines de Rome.
Bassin à balufrade, celui dont l'enfoncement plus
bas que le rez-de-chauffée , eft bordé d'une balujlra-
de de pierre , de marbre ou de bronze , comme le
baffn de la fontaine des baffins d'Apollon à Verfailles.
Bassin à rigole , celui dont le bord de marbre ou
de caillou , a une rigole taillée, d'où fort d'efpace en
efpace un jet ou bouillon d'eau, qui garnit la rigole,
& forme une nappe à l'entourde la baluffrade, com-
me à la fontaine du rocher de Belvéder à Rome.
Bassin en coquille , celui qui eft fait en conque
ou coquille, & dont l'eau tombe par nappes ou gar-
gouilles , comme la fontaine de Paleftrine à Rome.
Bassin de décharge, c'eft dans le plus bas d'un
jardin , une pièce d'eau ou canal , dans lequel fe dé-
chargent toutes les eaux après le jeu des fontaines ,
& d'où elles fe rendent enfuite par quelque ruiffeau
ou rigole dans la plus prochaine rivière.
BASSIN de partage ou de dijlribution , c'eft dans
un canal fait par artifice, l'endroit où eft le fommet
du niveau de pente , & où les eaux le joignent pour
la continuité du canal. Le repaire où fe fait cette
jonftion eft appelle point départage. Il y en a un beau
à Verfailles au-deffus des réfervoirs du parc au cerf,
& un autre à Chambly , appelle le bajfin des fources.
Bassin de port de mer, c'eft un efpace bordé de
gros murs de maçonnerie , où l'on tient des vaifleaux
à flot, foyei plus bas BASSIN (Marine.)
Bassin de bain , c'étoit dans une falle de bain
chez les anciens , un enfoncement quarré long où
l'on defeendoit par degrés pour fe baigner; c'eft ce
que Vitruve appelle labrum.
Bassin à chaux , vaifleau bordé de maçonnerie ,
& plancheyé de dofles ou maçonné de libages , dans
lequel on détrempe la chaux. Mortarium dans Vitru-
ve, fignifie autant le baffln que le mortier. (P)
Conjlruclion des baffins des Jardins. On ne lauroit
apporter trop de foin à la conftrucfron des bajjins &
pièces d'eau ; la moindre petite fente qui augmente
toujours de plus en plus, peut devenir, par la pefan-
leur de l'eau , une fente confidérable.
On place ordinairement les baffins à l'extrémité ou
dans le milieu d'un parterre : ils ne font pas moins
bien dans un potager, dans une orangerie & dans les
bofquets. Leur forme ordinaire eft la circulaire , il y
en a cependant d'oftogones, de longs, d'ovales, &
de quarrés : quand ils paffent une certaine grandeur,
ils le nomment pièces d'eau , canaux , miroirs , vi-
viers , étangs & réfervoirs.
Tome II,
BAS
123
Pour la grandeur des baffins , on ne peut guère dé-
terminer de jufte proportion, elle dépend du terrein ;
& celle qui eft entre le jet & le bajffîn , eft déterminée
par la chute ôc la force des eaux : leur profondeur
ordinaire eft de 1 5 à 18 pouces , ou deux pies tout
au plus, 6c s'augmente quand ils fervent de réfer-
voirs.
On conftruit les baffins de quatre manières , en
glaife , en ciment , en plomb , & en terre franche :
foit le baffln A (fig.i. Jardin.) qu'on veut conftruire
en glaife , de fix toifes de diamètre dans œuvre ; fai-
tes ouvrir la place tracée fur le terrein , de ce qu'il
convient pour les épaifleurs du pourtour &c du pla-
fond ; le mur de terre B doit avoir un pié au moins ;
le mur de douve , ou d'eau C, dix-huit pouces , & le
corroi de glaife entre-deux, dix-huit de large, ce qui
fait en tout quatre pies , dont il faut augmenter de
chaque côté le diamètre pour la fouille : on a donc
huit pies en tout ; on creufera auffi , pour le fond ou
plat-fond àubajffln , deux pies plus bas que la profon-
deur qu'on lui voudra donner ; ces deux pies de fouil-
le feront pareillement occupés par le corroi de glai-
fe de dix-huit pouces , & les autres fix pouces feront
pour le fable & le pavé qu'on répandra deffus la
glaife ; ainfi ce bajffln creufé de fept toifes deux pies
de diamètre , & de quatre pies de bas , reviendra à
fix toifes d'eau dans œuvre , & deux pies de creux,
qui font l'étendue Se la profondeur requifes. Elevez
& adoffez , contre les terres , le mur B d'un pié d'é-
paifleur depuis le bas de la fouille , jufqu'à fleur de
terre ; bâtiflez de moellons , libages , ou pierres de
meulière avec du mortier de terre ; faites enfuite ap-
porter la glaife dans le fond du bajffln, que vous pré-
parerez en la rompant par morceaux , en y jettant de
l'eau j & la labourant deux ou trois fois fans y fouf-
frir aucunes ordures ; faites enfuite jetter par pelle-
tées la glaife contre le mur, & pétrir à pies nuds, de
dix-huit pouces d'épaifl'eur , & de fept à huit pies
environ de large , tout au pourtour de ce mur ,
pour y pofer , à dix-huit pouces de diffance , le mur
de douve C , qui doit porter fur une plate-forme &c
racinaux D D. Prenez du chevron de trois pouces
d'épaifieur , ou des bouts de planches de bateau ,
épais de deux pouces , 6c larges de cinq à fix ; enfon-
cez-les à fleur de glaife , de trois pies en trois pies ,
enforte qu'ils débordent un peu le parement du mur
en dedans le baffln , c'eft ce que l'on nomme les ra-
cinaux ; mettez enfuite deffus de longues planches
de bateau dont deux , jointes enfemble , feront de la
largeur du mur , lefquelles vous clouerez ou chevil-
lerez fur les racinaux ; vous poferez enfuite la pre-
mière affife du mur de douve , que vous élèverez à
la hauteur de l'autre , & de dix-huit pouces d'épaif-
feur , bâti avec du mortier de chaux 6c fable. On
remplira le vuide , ou l'efpace entre les deux murs Et
appelle le corroi , d'une glaife bien préparée, & on
la pétrira jufqu'à fleur de terre.
Pour travailler au plat-fond F, on remplira de glai-
fe toute l'étendue du bajffln pour y faire un corroi de
dix-huit pouces de haut , en recommençant à pétrir
les glaifes que l'on a d'abord étendues au-delà
des racinaux , & les liant avec celles du plat-fond ,
qu'on couvrira enfuite de fable , de cinq à fix pouces
de hauteur, avec un pavé garni d'une aire GG, d'un
pouce d'épaifl'eur de ciment , ou une blocaiile de
pierres plates pofées de champ & à fec dans le fable
pour nettoyer plus proprement le baffln , & empê-
cher le poiflbn de fouiller.
Les baffins de ciment (jig. 2. ) font conftruits d'u-
ne manière bien différente. On recule la trace du baf-
Jln, d'un pié neuf pouces dans le pourtour, & au-
tant dans le plat-fond, ce qui eft fiirHfant pour retenir
l'eau ; ainfi pour un baffln de fix toifes de diamètre ,
on fouillera fix toifes trois pies & demi , Ô: on creu-
124
BAS
fera un pié neuf pouces plus bas que la profondeur
qu'on a deflein de lui donner. Elevez & adoriez con-
tre la terre le mur de maçonnerie H , depuis le fond
jufqu'au niveau de la terre , & bâti de moellons & li-
bages , avec du mortier de chaux & fable tout au-
tour ; enfuite commencez le maffif du fond / , d'un
pié d'épaiffeiir , & conftruit des mêmes matériaux &
mortier; on joindra au mur, & au plat-fond, un maf-
fif ou chemile de ciment K , de neuf pouces d'épaif-
feur bâti de petits cailloux de vigne mis par lits , &
couverts de mortier de chaux & ciment , qu'il ne
faut point épargner , de manière que les cailloux ne
fe touchent point , & regorgent de mortier partout ;
il faudra enduire le tout avec du mortier plus fin ,
c'eft-à-dire , avec du ciment pafle au fas avant que
de le délayer avec la chaux , unir cet enduit avec
la truelle , &C le frotter enluite plufieurs jours avec
de l'huile.
Les bajjins de plomb ( fig. J . ) n'ont de fingulier ,
dans leur conftruftion , que les murs faits du mortier
de plâtre , parce que la chaux mine le plomb ; on
fera le mur de terre L , du double d'épaiffeur de ce-
lui du plat-fond M, & l'on pratiquera deflùs ces murs
les talles de plomb n,n ,n , qui feront jointes ensem-
ble avec des nœuds de foudure 0,0, o.
Les bajjins en terre franche font à peu près conf-
truits comme ceux de glaife , à l'exception que les
corrois feront plus larges , ayant trois & quatre pies,
& les murs d'un pié & demi ou deux , feront en mor-
tier de terre feulement , & fondés fur la maffe de
terre franche qui règne dans tout le terrein. Ces baj-
jins fe peuvent faire avec un feul mur du côté de
l'eau , en délayant la terre franche fur le bord , & la
coulant dans le corroi.
On aura foin d'entourer le pourtour des bajfins ,
de bordures de gafon , afin de préferver les corrois
de l'ardeur du foleil. ( K )
B A s s 1 N ( Marine. ) on donne ce nom , dans les
ports de mer , au lieu où l'on retire les vaifleaux pour
les mettre plus à l'abri , les radouber , les armer &
defarmer avec plus de facilité, ou y faire les répara-
tions néceflaires. Vbye{ PI. Vil. fig. 1 . Mar. un bajjin
eoté A A, & fa difpofition au milieu de l'arfenal. Il
y a deux fortes de bajjins ; les uns qu'on peut emplir
& mettre à fec à volonté , au moyen d'une éclufe
qui en ferme l'entrée ; & d'autres qui font tout ou-
verts , & dont le fond étant de vafe molle , fe remplit
d'eau quand la mer monte , & fe vuide quand elle
defeend. Voye{ Darse. ( Z )
BASSIN , en terme d'Anatomie , eft la partie la plus
inférieure de la cavité de l'abdomen : il eft ainli ap-
pelle de fa refiemblance à un bajjin ou à une aiguiè-
re, appellée pelvis en Latin. Voye{ Abdomen.
Le bajjin eft toujours plus large ou plus grand dans
les femmes que dans les hommes , pour faire place
à l'accrohTenient du fœtus. Voye^ Matrice.
Cette cavité eft très-bien fortifiée par les os , pour
mettre à couvert des injures du dehors les parties
qui y font contenues. Le bajjin eft formé ou environ-
né par les os des hanches , le coccyx , & l'os facrum.
Voye^ Hanche, Coccyx.
Le bajjin des reins eft un grand finus ou cellule
membraneufe dans la partie concave des reins. Voy.
l'article Aîi AT. les Planch. & leur explic. Voy. Reins.
Des douze mammelons des reins fortent douze ca-
naux appelles tuyaux membraneux , fijlulce membrana-
ceœ ; ils fe réunifient enfuite en trois grofles bran-
ches , d'où enfin il en rélulte une feule qui forme le
bajjin ; ce bajjin venant encore à fe contracter , fe ter-
mine en un canal membraneux appelle X uretère, Voy.
Mammelon & Uretère.
L urine étant féparée du fang par les canaux un-
itaires, auxquels elle a été apportée par les mamme-
ïofts , les tuyaux membraneux la reprennent pour la
BAS
reporter dans le bajfin , d'où elle fe décharge dans l'u-
rétere , & de-là dans la velue , &c. Voy. Urine , <Sv .
BASSIN OCULAIRE, infiniment de Chirurgie , pe-
tite foûcoupe ovale très-commode pour laver l'œil.
Sa matière eft d'argent ; fa conftru&ion confifte en
une petite gondole qui a environ un pouce cinq li-
gnes de long , fur dix ou onze lignes de diamètre,
plus élevé par les angles que dans le milieu , afin de
s'accommoder à la figure globuleufe de l'œil : elle
n'a pas plus de cinq lignes de profondeur , & eft mon-
tée fur un pié artiftement compofé , comme on peut
le voir dans la fig. 16. PI. XXI II. ce pié a environ
deux ou trois pouces de hauteur.
Pour fe fervir de cet inftrument , il faut le remplir
à moitié de la liqueur avec laquelle on veut bafiiner
l'œil , puis on le prend par le pié , & l'on baifle la
tête , afin de faire entrer le globe de l'œil dans la foû-
coupe , qui eft conftruite de façon à occuper toute la
circonférence de la cavité orbitaire : on ouvre enfui-
te l'œil , & la liqueur contenue dans ce bajfin le
mouille parfaitement.
Fabrice d'Aqua-pendente , célèbre Médecin-Chi-
rurgien , & profefieur d'Anatomie à Padoue , a le
premier imaginé l'application des remèdes aqueux
fur l'œil : il fe fervit d'abord de ventoufes communes
que l'on tenoit fur l'œil avec la main, comme le bajjin
oculaire dont on vient de parler ; ce qu'il remarqua
être fort incommode : il en fit faire avec des anfes
fur chaque côté , dans lefquelles on paflbit un cor-
don pour attacher le vafe derrière la tête. Ces petits
vaifleaux de cryftal faits de façon à s'appliquer exac-
tement fur la circonférence de l'orbite , lui parurent
exiger encoi^ une perfection ; car les liqueurs tiedes
fafiant tranfpirer la partie,& la matière de cette tranf-
piration ne trouvant aucune iflue, l'œil & les parties
qui Pavoifinentpouvoientfe gonfler par Pulagede ces
remèdes. Pour prévenir les fluxions , & autres acci-
dens qui feroient l'effet du défaut de tranipiration ,
il fit ajouter au-deffus de la gondole un petit tuyau
percé , par lequel on pût aufii verierles liqueurs con-
venables au moyen d'un entonnoir , après avoir mis
le vafe en fituation. L'auteur la nomme phiok ocu-
laire , & affûre avoir difiîpé des cataractes commen-
çantes par l'ufage des remèdes convenables appli-
qués par le moyen de cet initrument. ( Y )
Bassin ( vente au) Comm. nom que l'on donne à
Amfterdam aux ventes publiques qui fe font par au-
torité de juflice , & où préfide un officier commis
par les bourgue-meftres , qu'on nomme vendu-meej-
ter , c'eft-à-dire , maître de la vente. On appelle cette
vente vente au bajfin , parce qu'avant que de délivrer
les lots ou cavelins au plus offrant & dernier enché-
riffeur , on frappe ordinairement fur un bajfin de cui-
vre , pour avertir qu'on va adjuger. Voye?^ Vendu-
MEESTER. ((?)
Bassins d'une balance , font deux efpeces de plats
qu'on fufpend au bout des bras d'une balance , &
dans lefquels on met les poids qu'on veut peler. V-
Balance. (O)
Bassin , terme de Boulanger , eft une efpece de caf-
ferole à queue de tôle blanche , ou fer-blanc épais ,
dont on fe fert pour puifer l'eau dans la chaudière,
& la mettre dans le pétrin en quantité convenable.
Voy. PI. du Boulanger ,fig. 4.
BASSIN, infirument de Chapelier , c'eft une grande
plaque ronde de fer ou de fonte , qui fe place fur un
fourneau , pour bâtir les étoffes dont on compofe les
chapeaux.
Les Chapeliers ont aufii des bajfins à drefTer les
bords des chapeaux : ces bajfins ont au milieu une
ouverture ronde , afiez grande pour y faire entrer
les formes les plus larges. Ces baffins font ordinaire-
ment de plomb , & ont par-deflus deux mains , afin
que le chapelier puiffe les mettre fur les bords des
BAS
chapeaux, & les enlever facilement. V. Chapeau.
Voyt{ lafig. 4- PL du Chapelier.
Bassin a barbe , eft une efpece de plat creux ,
rond, & quelquefois ovale, dont les Barbiers-Perru-
quiers le lervcnt pour favonner le vifage des perfon-
nes qu'ils raient. Ce plat eft toujours échancré par
un de les côtés , afin de pouvoir être ferré près du
cou de la perfonnc qu'on favonne, de peur que l'eau
de favon qui tombe du vifage ne coule le long du
cou & fur les habits.
Les bajjlns à barbe fc font de plufieurs fortes de
matières ; il y en a de fayence , de porcelaine , d'é-
tain , de cuivre , d'argent , &c. Voye^fa fig. Plan, du
Perruquier.
Bassin , f. m. ( Lunetier. ) les Miroitiers-Lunetiers
fc fervent de divers baffins de cuivre , de fer ou de
métal compofé , les uns grands , les autres plus pe-
tis, ceux-ci plus profonds , ceux-là moins, fuivantle
foyer des verres qu'ils veulent travailler. Voyet les
fig. l. & z. PI. du Lunetier; la première reprélente
un bajjïn de fix pouces de foyer ; B le bajfin , A fon
profil : la féconde repréfente un bajfin de trois pou-
ces de foyer ; B eft le bajfin , & C fon profil. Ces
baffins font repréfentés dans les figures fcellées fur la
table de l'établi.
C'eft dans ces bajjins que fe font les verres con-
vexes : les fpheres , qu'on nomme autrement des
boules , fervent pour les verres concaves ; & le ron-
deau , pour les verres dont la fuperficie doit être pla-
ne & unie. Foye^ ces deux derniers outils à leurs
lettres.
On travaille les verres au baffin de deux maniè-
res: pour l'une l'on attache le bajfin à l'arbre d'un
tour , & l'on y ufe la pièce , qui tient avec du ci-
ment à une molette de bois , en la préfentant & la
tenant ferme de la main droite dans la cavité du baf-
fin, tandis qu'on lui donne avec le pié un mouve-
ment convenable : pour l'autre , on affermit le baffin
fur un billot ou fur un établi , n'y ayant que la mo-
lette garnie de fon verre qui foit mobile. Les bajjins
pour le tour font petits , & ne partent guère fix à iept
pouces de diamètre : les autres font très-grands , &
ont plus de deux pies de diamètre.
Pour dégroffir les verres qu'on travaille au bajfin,
on fe fert de grès & de gros émeri : on les adoucit
avec les mêmes matières , mais plus fines , & tami-
fées : le tripoli&la potée fervent à les polir: enfin
on en achevé le poliment au papier , c'eft-à-dire , fur
un papier qu'on colle au fond du bajfin. Quelques-
uns appellent ces baffins des moules, mais impropre-
ment. Foyei Miroitier & Lunette.
La manière la plus convenable pour faire ces baj-
jins , eft le fer & le laiton , l'un & l'autre le plus
doux qu'on puifle trouver : car comme ils doivent
être formés liir le tour , la matière en doit être trai-
table & douce , mais pourtant affez ferme pour bien
retenir fa forme dans le travail des verres. Ces deux
fortes de matières font excellentes , èv préférables à
toutes les autres : le fer néanmoins eft fujet à la
rouille , & le laiton ou cuivre jaune à fe piquer &
verdir par les liqueurs acres & falées ; c'eft pourquoi
ces deux matières demandent que les inftrumens
qui en font faits foient proprement tenus , bien
nettoyés & effuyés après qu'on s'en eft fervi.
L'étain pur Se fans alliage eu moins propre pour
le premier travail de verre qui eft le plus rude , à
caufe que fa forme s'altère aifément : on peut
cependant l'employer utilement après l'avoir allié
avec la moitié d'étain de glace. Le métal allié , qu'on
ne peut former au tour à caufe de la trop grande du-
reté, comme celui des cloches qui eft compofé d'é-
tain & de cuivre , ne vaut rien pour les formes dont
nous parlons.
On peut préparer ces deux matières à recevoir la
BAS
11 y
forme de deux manières , fuivant quelles font mal-
léables ou fufibles : elles demandent toutes deux des
modèles fur lefquels elles puiflent être formées , au
moins grofllerement d'abord, pour qu'on puhTe en-
fuite les perfectionner au tour. La matière malléa-
ble demande pour modèle des arcs de cercle , faits
de matière folide fur les diamètres des fpheres des-
quelles on veut les former. Celle qui eft fufible de-
mande des modèles entiers de matière ailée à for-
mer au tour ; comme de bois , d'étain , &c. pour en
tirer des moules dans lefquels on puifle la jetter pour
lui donner la forme la plus approchante de celle qu'on
defire ; car il eft enfuite fort ailé de la rendre régu-
lière , & de la perfectionner au tour.
Quoiqu'on puifle forger les formes de laiton ou
cuivre jaune à froid au marteau , je confeille cepen-
dant de les mouler en fonte , & de leur donner même
une épaifleur convenable à la grandeur de la fphere
dont on veut les former , aufli bien qu'à la largeur
de la fuperficie qu'on veut leur donner : première-
ment à caufe qu'étant forgées & écrouïes à froid ,
elles feroient aifément reifort fur leur largeur , &
qu'elles altéreroient par ce moyen leur forme dans
l'agitation du travail ; en fécond lieu , pour empê-
cher par cette épaifleur convenable que ce métal
s'échauffant fur le tour, ne fe roidiffe contre l'outil,
comme il fait pour l'ordinaire , le rejettant dehors
avec violence jufqu'à s'applanir , ou même devenir
convexe de concave qu'il étoit , s'il n'a pas une
épaifleur fuffifante pour réfifter à fon effort.
Pour faire les modèles qui doivent fervir à faire
les moules de ces platines , on ne fauroit employer
de meilleure matière que l'étain , à caufe qu'on peut
le fondre avec peu de feu , & le tourner nettement
fans altérer fa forme. Le bois néanmoins qui eft plein,
comme le poirier ou le chêne , qui eft gras 6c moins
liant étant bien fec , y peut fervir affez commodé-
ment: pour l'empêcher même de s'envoiler , & de fa
déjetter à l'humidité de la terre ou du fable qui fervent
à les mouler , aufli-bien que dans les changemens
de tems , il convient de l'enduire & imbiber d'huile
de noix , de lin , ou d'olive au défaut de ces deux pre-
mières, laiffant doucement lécher ces modèles d'eux-
mêmes , dans un lieu tempéré &: hors du grand air.
La meilleure manière de moider ces modèles , eft
celle oit l'on employé le fable. Tout cuivre n'eft pas
propre pour faire ces formes : on doit choifir celui
qui eft jaune , & qu'on nomme laiton doux ; on peut
aufli fe fervir d'étain pur d'Angleterre , ou de celui
d'Allemagne, allié avec moitié d'étain de glace. Le
fer bien aoux eft auflî fort propre pour faire les baf-
fins à travailler les verres.
M. Gouflîer a trouvé une méthode de donner aux
baffins & aux moules dans lefquels il fond les mi-
roirs de téiekopes, telle courbure qu'il peut (buhai-
ter , foit parabolique , elliptique , hyperbolique , ou
autre dont l'équation eft donnée. Cette méthode fe-
ra expliquée dans un ouvrage particulier qu'il doit
donnerai! public, fur l'art de taire de grands telclcopes
de réflexion , d'en mouler les miroirs , de manière
qu'ils fortent du moule prcfquc tout ache\ es.
Nous allons expliquer la machine dont il fe tert
pour concaver les formes ou bafjïns concaves de
courbure fphérique : cette machine eft la même que
celle dont il fe lert pour donner aux baffins ou aux
moules toute autre courbure , en y raifant feulement
quelques additions dont nous donnerons l'idée à la
fin de cet article.
Cette machine rcpréfentéej%..0-/3- PI- du Lune-
tier, eft proprement un tour en l'air, dont l'axe F H
eft vertical ; il paflé dans deux collets /"& H , fixes
l'un à la table & l'autre à la travcilè inférieure d'un
fort établi , qui eft lui-même fortement attaché au
mur de l'attclier.
Ï2'6
BAS
Le premier de ces collets F eft ouvert en enton-
noir, pour recevoir la partie conique de l'axe repré-
fenté en Ffig. i5. le fécond i/eft feulement cylin-
drique.
Vers la partie inférieure de l'axe , à deux ou trois
pouces du collet H , eft fixée une poulie G , fur la-
quelle pafTe la corde fans fin qui vient de la roue ho-
rifontale / , que l'on met en mouvement au moyen
du bras L , qui fe meut librement fur les pivots de
l'arbre R S. Ce bras comunique par le lien L K à
la manivelle excentrique de l'axe de la roue. Cette
méchanique eft la même que celle du moulin des La-
pidaires. Voyi{ Moulin.
La partie fupérieure de l'axe H F eu armée d'un
cercle de fer exactement tourné & centré fur l'axe
qui eft foûtenu par trois ou quatre branches , qui par-
tant de l'axe , vont s'attacher à fa circonférence. Il
appelle cette pièce main , qui eft repréfentée léparé-
ment Jig. i5. on en va voir la raifon , & combien il
eft effentiel qu'elle foit exactement centrée.
Aux deux côtés de la main font fixées fur l'établi
deux poupées D D ; la ligne qui joint ces deux pou-
pées doit paffer le centre de l'anneau de la main :
c'eft fur ces deux poupées que l'on fixe la règle de
fer MM , au moyen de deux vis n n , en forte qu'u-
ne de fes arrêtes foit un diamètre de la main dans
laquelle on place le bajjin , repréfenté Jig. 13. & 14.
cette dernière le repréfenté en profil , a a eft un re-
bord qui s'applique fur l'anneau de la main; on y fait
un repaire commun pour pouvoir replacer le bajjin au
même point où on l'a placé la première fois. Le baf-
fin doit être de laiton fondu , & tourné auparavant
fur le tour en l'air. Voye^ Tour en l'air.
Au-deffus du bajjin , dans la direction de l'axe H
F, eft fortement fcellée dans le mur une potence de
fer AB , à la furface fupérieure de laquelle eft un
petit trou de forme conique : ce trou doit être préci-
eusement dans la direction de l'axe H F , & autant
éloigné de la furface du bajfin F, que l'on veut que
le foyer du même bajjin le foit.
Le trou dont nous venons de parler reçoit la pointe
b de la vis a ,fig. 10. qui traverfe la partie fupérieu-
re de l'ouverture O du compas B C, Jig. o. Ce com-
pas eft formé par quatre règles de fer ou de bois, affem-
blées comme on voit en b, même Jig. La partie infé-
rieure Càa compas B C, repréfentée en grandjfg. //.
eft quarrée, & garnie de deuxfrettes de fer O F , qui
fervent , au moyen des vis qui les traverfent , à affu-
jettir le burin a b , qui eft aigu en b ; l'autre burin re-
préfenté./fg'. IX. eft arrondi , & fert à effacer les traits
que le premier peut avoir laifle fur le bajjin.
Toutes chofes ainfi difpofées , on applique le dos
du burin contre la règle de fer M M, qui eft courbée
en arc de cercle dont le centre eft la pointe de la vis
a . Pour qu'elle foit parallèle à la furface du bajjin ,
on avance ou on recule cette règle , en forte que
lorfque le dos du burin gliffe contre fon arrête , la
pointe du burin décrive exactement un diamètre du
bajjin.
Maintenant fi on fait mouvoir l'extrémité inférieu-
re du compas le long de la règle de fer M M, en mê-
me tems que le bajjin E eft mis en mouvement par
le moyen de la roue / , comme il a été expliqué , on
conçoit que la pointe du burin dont le compas eft
armé , doit emporter toutes les parties de métal du
bajjin qui excédent la furface fphérique concave qui
a pour centre le point autour duquel le compas fe
meut , qui eft la pointe du pivot de la vis a : mais
comme la pointe de cette vis eft par la conftruction
dans la direction de l'axe de rotation H F , 61
que la pointe du burin décrit un arc de cercle , cela
produit le même effet que fi un lecteur de cercle tour-
noit fur la ligne qui paffe par le centre & le milieu
de l'arc du fefteur , qui , comme il eft démontré en
BAS
Géométrie , décrit une furface fphérique.
Après que la pointe du burin a enlevé les parties du
métal qui excédoient la furface fphérique concave,
on efface les traits qu'elle peut avoir laiflés avec le
burin arrondi repréfenté j%. IX. que l'on met en pla-
ce du premier.
Pour décrire une furface paraboloïdale , hyper-
boloïdale , ou autre , il fuffit , comme on voit , de
trouver le moyen de faire décrire à l'extrémité du
burin la parabole, l'hyperbole , ou autre courbe dont
le fecteur , à caufe du mouvement de rotation du
bajjin , décrira la furface que la courbe engendreroit
en tournant fur fon axe: c'eft ce que M. Goufîier
exécute par le moyen de plufieurs leviers , qui font
hauffer ou baiffer le point de fufpenfion a du com-
pas , à mefure que fon extrémité inférieure C avance
de côté ou d'autre. Cette machine fera repréfentée &
expliquée dans l'ouvrage annoncé dans cet article.
BASSIN a"empli , en terme de rajinene de fucre , eft
un vafe de cuivre qui ne diffère du bajjin de cuite
que par fon embouchure qui fait le demi-cercle, foy.
BASSIN de cuite. On l'appelle bajjin d 'empli , par-
ce qu'il fert effectivement à faire les emplis , & à
tranfporter la cuite du rafraîchiffoir dans les formes.
Voyc{ Forme & Rafraichissoir.
BaSSIN de cuite eft , parmi les Rzjineurs de fucre ,
un vafe de cuivre tenant à peu près deux leaux, de
figure oblongue , arrondi vers fon extrémité où il eft
le plus profond , & angulaire vers fon embouchure.
Il eft garni de deux poignées , & furmonté de deux
hauts bords , qui diminuent jufqu'à l'embouchure où
ils n'excèdent plus le fond. Ce bajjin fert à tranfpor-
ter la cuite dans le rafraîchiffoir. Voye{ Cuite 6*
Rafraichissoir.
BASSIN à clairêe , parmi les Rajineurs de fucre , eft
un vafe rond , & également furchargé de bords tout
autour , & qui repréfenté affez la figure d'un feau :
vers fon fond il y a un commencement de tuyau, qui
fait même pièce avec le bajjin , dans lequel on em-
manche la dale. Voye{D ale. Ce bajjin fert à paffer
la clairée. foye^ ClairÉE & PASSER.
Bassins, Bassinets, ou Boutons d'or, ely-
chryjum , fleur baffe de diverfes couleurs , ordinaire-
ment jaunes , à dix feuilles sffez larges , & un godet
au milieu de la même couleur , & qui porte fa grai-
ne. Cette fleur demande beaucoup d'eau & de foleil ,
avec de la terre à potager : on la levé au bout de
trois ans pour en ôter le peuple. Il y en a de plu-
fieurs efpeces ; le fimple à fleur jaune , le bajjinet à
fleur d'écarlate , le double à fleur jaune , le bajjinet à
feuilles frangées , & le bajjinet rond. Ils fleuriffent
tous au printems. ( K )
BASSINE , BASSIN ( Gramm. ) ; bajfin a deux ac-
ceptions différentes , comme on peut voir par l'arti-
cle précédent ; bajjine n'en a qu'une. La bajjine eft tou-
jours un vaiffeau de cuivre d'une profondeur peu
confidérable , relativement à fon diamètre ; ce en
quoi elle diffère du bajjin , où le diamètre ôc la hau-
teur font plus proportionnés.
Bassine , en terme de Cirier ; c'eft un infiniment de
cuive de forme prefque ovale, dont les deux extrémi-
tés font applaties de manière que la mèche en parlant
au-deffus , ne s'éloigne pas trop du fond de la bajjine.
Cet uftenfile ne fert proprement qu'à faire fondre la
matière propre aux petites bougies. Voye^ la Jig. 3.
PI. du Cirier, Se la Jig- i- de la même Planche , qui
fait voir l'ulage de cette machine.
Bassine , en terme d'Epinglier-Aiguilletier , eft une
efpece de poelle profonde , reffemblant à une chau-
dière à confiture , dans laquelle au moyen de fes an-
fes , on remue & on fecoue les aiguilles dans de Peau
de favon bouillante. Voye^ Savonner.
Bassine , ujlenjile d' Imprimerie. Il y a dans une
Imprimerie bien montée deux fortes de bajfinzs ds
BAS
BAS
I27
cuivre : la plus grande doit contenir quelques voies
d'eau ; elle fert à tremper le papier : la petite fert à
ramoitir les balles , & à mettre tremper les cuirs. Au
défaut d'une bajfint à tremper le papier , on fe fert
d'une pierre creuiée, ou de baquets de bois : mais
ces derniers font fujets pendant l'été à de grands
inconvéniens.
BASSINER , v. a£L en Chirurgie ; c'en1 fomenter
en humeâant légèrement avec une liqueur tiède ou
chaude. (Y)
Bassiner, (Jardinage.') c'eft arrofer légèrement;
ce que l'on pratique aux couches de melons.
BASSINET , f. m. en Hydraulique , eft un petit re-
tranchement cintré que l'on ménage (ur les bords in-
térieurs d'une cuvette , pour y taire entrer la quantité
d'eau diftribuée aux particuliers par une ou plufieurs
auges de différens diamètres ; ce qui s'appelle jauger.
On appelle encore de ce nom un bajjin trop petit
pour le lieu. (A )
Bassinet des reins, voye^ Bassin.
Bassinet , terme d Arquebufier y c'eft un morceau
de fer plat en-dedans du corps de platine , où il s'at-
tache avec deux vis à tête ronde èk. plate, dont les
têtes n'excèdent ni d'un côté , ni de l'autre. Ce baffï-
net fort en-dehors , &c excède le corps de platine d'en-
viron un demi-pouce. Il eft de figure ronde en-def-
f bus , & la face de defïïis eft plate & creufée en rond.
Ce creux répond directement à la lumière du canon
de fufil, & fert pour mettre l'amorce qui y eft rete-
nue & enfermée par l'afliette de la batterie , qui vient
pofer fur cette face creufée du bajfinet.
Bassinet , en terme d'Orfèvre en grojferie , eft une
efpece de baffin qui furmonte la branche ou le corps
d'une pièce , par exemple , d'un chandelier. Le bajji-
net eft compofé de quarrés , de panaches , de collets ,
& d'un culot. Voye^ ces mots à leur article.
BASSON DE HAUTBOIS oufimplement BASSON ,
( Lutherie. ) eft un inftrumcnt de Muiique à vent &£
à anche , repréfenté.y%. 40. & 4.1. PL LX. de Luth.
Il eft compofé de quatre pièces de bois A, B, D, C,
perforées dans toute leur longueur. La première pie-
ce D d, qui eft percée intérieurement d'un trou co-
nique , qui va en s'élargiftant de D vers d,aun épau-
lement a b que l'on a ménagé en tournant l'extérieur
de la pièce. Cet épaulement eft percé de trois trous ,
qui communiquent au canal intérieur de la pièce.
Ces trous notés 1,2,3, fuivent pour gagner le ca-
nal ou tuyau D d, la direction des petites lignes ponc-
tuées que l'on voit auprès des trous. Aux deux extré-
mités de cette pièce font deux tenons D d garnis de
filaffe , pour les faire joindre exactement. Le tenon
D entre dans le trou du bocal E; comme on voit
dans les figures qui repréfentent le bajfon tout monté.
L'autre tenon d entre dans le trou K de la partie in-
férieure , qu'on appelle le cul , lequel eft la féconde
partie. Cette pièce eft percée de deux trous K C : le
premier K reçoit , comme nous avons dit , la pièce
D d; & le fécond C, qui eft plus grand , reçoit la pie-
ce B b par le tenon b. Les deux trous K Cde la pièce
K L vont dans toute fa longueur ; favoir , le trou
K en s'élargiftant de K vers L , & le trou C au con-
traire de L vers C : ces deux trous communiquent
l'un à l'autre vers L , enforte qu'ils forment un
tuyau recourbé. On perce les trous comme ceux de
tous les autres inftrumens à vent, foye{ Flûte.
Ces deux trous K Cqui traverfent d'outre en outre
la pièce K L lorfqu'on fabrique Finfti liment , font
enfuite rebouchés en L par un tampon de liège, ou
autre bois garni de filaffe , pour fermer exacte-
ment : or avant de reboucher le trou L , on abat un
peu de la cloifon qui fépare les deux trous K C; en-
forte que du côté de L ils ne forment qu'une feule
ouverture ; & que la communication que laiffe la
brèche de la cloifon , lorfque la pièce L eft rebou-
chée , foit à-peu-près égale à l'ouverture des tuyaux
en cet endroit , enforte que les deux canaux K C for-
ment un tuyau recourbé en L. On garnit de frettes
de cuivre eu d'argent les deux extrémités de cette
pièce K L , pour qu'elle ne fende point lorfqu'on met
en L le bouchon , & dans les trous K C, les pièces
D d & B b, appellées/^rife & grojjè pièces. Le cul eft
percé de fix trous ; les trois marqués 4,5,6, com-
muniquent au tuyau K de la petite pièce , en fuivant
la direction des lignes ponctuées qui partent des ou-
vertures de ces trous. Le trou marqué 7 , & qui eft
fermé par une clé que fon reffort tient appliquée fur
ce trou comme celle du mi-b de la flûte traverfiere
& qui ne débouche que lorfqu'on appuie avec le pe-
tit doigt fur la patte de cette clé , communique aufli
avec le tuyau K. Le trou marqué 8, au contraire,
communique avec le tuyau C, & eft toujours ouvert
quoiqu'il ait une dé d%,jïg. Si &2. Cette clé eft com-
pose de deux pièces principales; de la bafcule A C 9
ac, & de la foupape CD, c d. La bafcule^ C,«c, fait
charnière dans un tenon f g ,fig. 3 J . où elle eft traver-
fée par une goupille ou une vis // , qui lui laiffe la liber-
té de fe mouvoir. La foupape eft de même articulée
dans un tenon ,fig. à 4. parle moyen d'une vis qui tra-
verfe fes oreilles k k. Les tenons font fixés furie corps
de l'inftrument parle moyen de quelques vis qui le tra-
verfent, & vont s'implanter dans le corps de l'inftai-
ment. Ces tenons doivent être tellement éloignés les
uns des autres , que le crochet de la bafcule puiffe
prendre dans l'anneau de la foupape. Au-deffousde la
patte A de la bafcule , eft un reffort qui la renvoyé en
en-haut ; enforte que le crochet de la bafcule eft tou-
jours baiffé , & par conféquent l'anneau de la fou-
pape , dont le cuir D eft par ce moyen tenu éloigné
du trou e. Voy. lafig. âz. Mais lorfqu'on tient le doigt
appliqué fur la patte de la bafcule , on fait hauffer fon
crochet & l'anneau de la foupape , & par conféquent
baiffer cette même foupape D d , dont le cuir s'appli-
que & ferme exactement le trou e. Les trois clés du
bajfon qui ferment les trous 8 , 10 , 12, font conftrui-
tes de même ; elles ne différent que par les différen-
tes longueurs de leurs bafcules.
La groiîe pièce B b , comme la petite D d, eft
percée dans toute fa longueur d'un trou qui va en s'é-
largiftant de b en B , & terminée de même par deux
tenons B b. Le premier qui eft garni de filaffe , en-
tre dans le trou C, & l'autre B auffi garni , reçoit le
bonnet a A , qui eft entouré d'une frette de cuivre ou
d'argent , félon que les clés & les autres frettes en font
faites. Le bonnet eft percé d'un trou dans toute fa
longueur , lequel eft la continuation de celui de la
grofle pièce. La groffe pièce eft percée de trois trous
10, 1 1 , 12 , qui communiquent avec le trou inté-
rieur B b. Ces trous marqués 10 & 12, fe ferment
avec les clés brifées C 10, C 1 2 , lorfqu'on appuie le
doigt fur la patte de leurs bafcules.
A l'extrémité D de la petite pièce , on ajufte le bo-
cal e E , qui eft un tuyau de cuivre ou d'argent cour-
be , comme on voit dans la figure ; on fait entrer le
tenon E du bocal dans l'ouverture D de la petite
pièce, qui eft garnie d'une frette comme toutes les
parties qui en reçoivent d'autres. A l'extrémité t du
bocal on ajufte l'anche e F, compofée de deux lames
de rofeau lices fur une broche de fer de la grofleur
du bocal en e : on fait entrer l'extrémité de cette par-
tic à la place de la broche de ter qui a fervi de moule
à l'anche , à l'entour de laquelle on fait encore une
auu-e ligature £, qui peut couler le long des lames
dans l'eïpace de deux ou trois lignes. Cette ligature
ou anneau, qu'on peut a ppeller ufetu par analogie
à celles de l'orgue , fert .'i déterminer la longueur g F
des lames de l'anche qui doivent battre , & par con-
féquent à la mettre au ton. Voye{ Anche. La lon-
gueur du b.iflon prife depuis l'extrémité e de l'anche
123
BAS
a e du bocal jufqu'à l'extrémité A du bonnet , eft de
huit pies , réduits à quatre à caufe de la courbure en
i /. Les trous font percés dans la longueur de ce tuyau
qui s'élargit toujours depuis la pointe e du bocal juf-
qu'à l'extrémité A du bonnet , où ce trou peut avoir
deux pouces un \ ou ~ de diamètre , félon les diftan-
ces qui conviennent aux tons que ces trous doivent
rendre , lefquels font d'autant plus graves que les
trous font plus éloignés de l'anche. L'ordre des nom-
bres 1,2,3,4,5, &c marqués vis-à-vis des trous
du^^ô/zdansla figure , fuivent l'ordre des diftances,
qui font d'autant plus grandes , que le nombre qui eft
vis-à-vis eft plus grand. Voyt7^ la figure. Pour joiier de
cet infiniment , que l'on tient debout devant foi avec
les deux mains , il faut d'abord tourner le côté repré-
iénté par la figure ABC D , vers foi : on accroche
enfuite le ruban qui pafle dans l'anneau X , qui eft
à la frette fupérieure du cul CL, à un des boutons
de l'habit qui répondent à la partie fupérieure de la
poitrine , enforte que le trou 9 réponde vis-à-vis
la région ombilicale. L'inftrument doit pencher un
peu du côté gauche , pour que l'extrémité e du bocal
garnie de fon anche, fe préfente à la bouche avec
facilité : c'eft pour cela que le bocal eft mobile , &
peut fe tourner de différens fens. On porte enfuite la
main gauche vers la partie moyenne de l'inftrument ,
avec laquelle on embrafle la grotte pièce ; enforte
que le pouce de cette main bouche le 1 Ie trou , &
les doigts index , médius & annulaire de cette main ,
les trous 1, 2, },fig. AD & I qui répondent à la petite
pièce. Le pouce de la main gauche qui fert à bou-
^-
BAS
cher le 1 Ie trou , lequel répond à la grofle pièce , fert
aufli à toucher les deux clés brifées , avec lefquelles
on ferme le 10 & le 1 2e trou. Ce pouce doit pouvoir
tout à la fois appuyer fur les deux clés pour les fer-
mer, & boucher le 1 ie trou.
A l'égard de la main droite que l'on porte vers
la partie inférieure de l'inftrument , le pouce doit
boucher le 9e trou ; le doigt index le 4e ; le doigt
médius le 5e , & le doigt annulaire de cette main le
6e. Pour le petit doigt , on s'en fert pour toucher les
deux clés du 7e & 8e trou , obfervant que lorfqu'on
touche celle du 7e trou on l'ouvre , &c qu'au con-
traire on ferme le 8e lorfqu'on touche fa clé , à caufe
de la bafcule qui précède la foupape.
Après avoir poîé les doigts, onfouftlera dans l'an-
che, comme il fera expliqué à l'article haut-bois, &c
on obfervera d'augmenter le vent à mefure que l'on
monte fur cet inftrument. Cette règle eft générale
pour tous les inftrumens à vent. Quant à fon éten-
due , vqye{ la table du rapport de l'étendue de tous les inf-
trumens. Tous ceux qui jouent du baffon ne peuvent
pas faire cette étendue, foit qu'ils ne ménagent pas
allez leur vent , ou que l'inftrument n'y foit pas pro-
pre. Ainfi ils fe contentent de defcendre en bfajï, b
&c $, lefquels tons fe forment fans déboucher aucun
trou , par la feule manière de pouffer le vent dans
l'inftrument. Voye{ la tablature fuivante , où les notes
de Mulique font connoître quelle partie fonne cet
inftrument , & les caractères noirs & blancs qui font
deflbus , quels trous il faut fermer & ouvrir pour
faire le ton de la note qui eft deflus.
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y Fin de; la Tablature.
Les
BAS
Les agrémens fe font fur le baffon comme fur le
haut-bois & les autres inftrumens à vent , en exécu-
tant les notes que les agrémens renferment ; 6c les ca-
dences , en battant fur les trous de la note qui fert de
port de voix , 6c qui ne font point bouchés dans la
note fur laquelle on veut faire la cadence : ainfi pour
cadencerle fa première o£tave, qui fe forme en dé-
bouchant les 9 , 10, ii, 6c 12 trous, la cadence
étant préparée du fol , qui a de plus le huitième trou
de débouché , on battra furie huitième trou qui eft
la différence du fi 6c du fol , lequel reliera fermé en
Unifiant. Foye^ Haut-bois.
* BASSORA , ou BALSORA , ( Géog. ) grande
ville d'Afie , au-deflous du Confluent du Tigre 6c de
l'Euphrate } dans l'Irac-Arabi. Long. 66. lat. 30. 20.
BASTABLES (Terres.) adj. pi. (Hifi. mod.) ter-
res conteftées entre l'Angleterre 6c l'Ecofle : il étoit
autrefois incertain auquel de ces royaumes elles ap-
partenoient avant qu'ils fuflent unis. Ce mot a toute
l 'énergie de litigieux , 6c vient de battre.
BASTAGAIRE , f. m. nom de quelques officiers
des empereurs Grecs , dont la fonction étoit de veil-
ler fur les bagages de l'empereur. On nommoit aufli
dans Péglife de Conftantinople bafagaire , celui à qui
il appartenoit de porter l'image du Saint de l'églile ,
aux procédions , 6c dans les têtes folennelles. En ce
iens , bafagaire revient à notre porte-baniere , ou
porte-bâton de confirairie.
* BASTERNE , f. f. (Hifi. anc. & mod. ) voiture
traînée par des bœufs , en ufage fous les règnes an-
térieurs à celui deCharlemagne , 6c appellée bafierne ,
de peuples de ce nom qui habitoient anciennement
la Podolie , la Beflarabie , la Moldavie , 6c la Vala-
chie. Grégoire de Tours dit que la reine Denterie ,
femme du roi Theodebert , craignant que ce prince
ne lui préférât une fille qu'elle avoit eue d'un premier
lit , la fît mettre dans une bafierne , à laquelle on at-
tacha de jeunes bœufs qui n'avoient pas encore été
mis au joug , & qui la précipitèrent dans la Meule.
Ces fortes de litières étoient même plus anciennes que
ce tems ; & Ennodius parle dans un de fes vers , de la
bajlerne de la temme de BalTus. Symmaque écrivant
aux enfans de Nicomaque , les prie de tenir des baf-
ternes prêtes pour leur frère. M. l'abbé deVertot penfe
que nos premiers François , dans le tems qu'ils de-
meuroient au-delà du Rhin , avoient emprunté la
bajlerne des Cimmeriens qui habitoient les rives du
Bofphore , avant qu'ils en enflent été chafles par les
Getes. Voye^ le VIII. roi. des Mém. de l'Académie
des Infcriptions.
BASTI , f. m. (en Architecture. ) fe dit de l'aflem-'
blage des montans & traverfans qui renferment un
ou plulieurs panneaux, en Menuiferie ou Serrure-
rie : c'eft ce que Vitruve appelle replum. (P )
* BASTIA, (Géog.) petite ville maritime de la
Turquie en Europe , dans L'Albanie, vis-à-vis l'île
de Corfou , à l'embouchure de la Calamou. Long.
38.5. lat. 3g. 40.
B ASTI A, (Géog.) petite ville, ou bon bourg d'I-
talie , clans une petite île que forme le Panaro, au
duché de Modene , au-deflbus de cette ville.
* BASTIE, (la) Géog. anc. & mod. ville capitale
de l'île de Corfe. Long. zj. il. lat. 42. j3. on croit
que c'efl le Mantinum , ou Mantinorum oppidum des
anciens.
BASTILLE , f. f. (Fortification.) petit château à
l'antique, fortifié de tourettes. Voye^ Château &
Tour. Telle eft la bafiille de Paris, qui femble être
le feul château qui ait retenu ce nom : l'on commen-
ça de la bâtir en 1 369 , par ordre de Charles V. elle
tut achevée en 1383 fous le règne de fonfuccefleur,
6c lert principalement à retenir des prifonaiers
d'état.
Tome II,
BAS
129
On a auftï appelle autrefois bafilles , de petits forts
dont on environnoit les places dans les fiéges , pour
en tormer une efpece de circonvallation. C'eftainfi
que les Anglois afliégeoient Orléans , lorfque Jeanne
d'Arc , autrement la pucelle d'Orléans, leur en fît le-
ver le fiége fous Charles VII. ( Q )
BASTILLE , adj.. (en termes de Blafon.){e dit des
pièces qui ont des créneaux renverfés qui regardent
la pointe de Fécu. Belot en Franche-Comté, d'ar-
gent à lofanges d'azur au chef coufu d'or , bafiille de
trois pièces. ( V)
* BASTIMENTOS , (Géog.) petites îles de l'A-
mérique feptentrionale , proche la Terre-ferme, à
l'embouchure de la baie de Nombre de Dios.
BASTINGUE , baflingure , bafiinguere, f. f. ) Ma-
rine. ) c'eft la même chofe que pavois , ou paviers ,
& pavefade.
On prononce la lettre f dans ce mot baflingue.
C'eft une bande d'étoffe ou de toile que l'on tend au-
tour du plat-bord des vaiffeaux de guerre , 6c qui eft
foûtenue par des pièces de bois miles debout , que l'on
appelle pontilles; afin de cacher ce qui fe pafle fur
le pont pendant le combat. Voye^ Pavois.
On met des baflingues aux hunes ; on les double ,
& on les garnit entre les deux étoffes , de façon que
Iesballesde moufquet ne peuvent les percer.
BASTINGUER ; on dit le bafiinguer, lorfque pour
fe préparer au combat , on tend les baflingues : on fe
fert aufli de Matelots pour en tenir lieu , & mettre
ceux qui font fur le pont un peu à couvert de la mouf-
queterie. ( Z)
B ASTlON, f. m. ( en terme de Fortification. ) eft une
grande malle de terre ordinairement revêtue de ma-
çonnerie ou de galon, qu'on conftruit furies angles
de la figure que l'on fortifie , & même quelquefois
fur les côtés lorfqu'ils font fort longs. Sa figure eft à,
peu près celle d'un pentagone ; il eft compofé de
deux faces qui forment un angle faillant vers la cam-
pagne , 6c de deux flancs qui joignent les faces à l'en-
ceinte. Voyc^ Face & Flanc. Son ouverture vers
la place fe nomme/à gorge. Voye^ Gorge & DeMI-
GORGE.
Voye^ Planche première de Fortification ,fig.prem. le
baftion F G H IL, dont G H 6c H I font les faces-,
GF ckl Lies fanes, 6i F Kl la gorge. ^byqGoRGE.
L'angle GUI formé par les faces G H6cHI , eft
appelle Y angle flanqué du bafiion ; l'angle H G F for-
mé d'une face 6c d'un flanc , le nomme Vatigle de l'é-
paule ,6c G F £ formé d'un flanc & de la partie E F
de l'enceinte , le nomme l'angle du flanc; là partie
E F cp.ù joint enfemble deux bafwns, eft appelle
courtine : ainfi l'angle du flanc eft formé du flanc 6c
de la courtine.
Les parties F K 6c L A du prolongement des cour-
tines E F 6c L M, font appellées les demi-gorges du
bh(lion,6c l'angle F KL qu'elles font entr'elles, l'an-
gle du centre du bafiion ; la ligne K H compriie entre
l'angle flanqué H, & l'angle du centre A, le nomme
la capitale du bafiion.
Les bajlions n'ont guère commencé à être en ufage
que dans le tems de François premier & Charles-
Quint , c'eft-à-dire vers l'an 1 500 ou 1 520. On leur
a d'abord donne le nom de boulevards , & on les a
fait très-petits.
Ce qui a donné lieu à la figure du bafiion , eft cette
maxime eflentiellc de la Fortification,^/"'/^ doity
avoir aucune partie de l'enceinte d'une place qui ne Joit
vue & défendue de quelque autre.
Les anciens pour flanquer ou défendre toutes les
parties de l'enceinte des villes, élevoient de diftance
en diftance des tours rondes ou quarrees P , P,B,
B , ( Planche prem. de Fortifie, fi g. 2. ) telles qu'on en
trouve encore dans les vieilles iortifications. Les par-
R
130
BAS
BAS
ties H G , / C de ces tours flanquoient ou défendoient
les parties de l'enceinte comprifes entre elles. Il n'y
avoit que la partie extérieure F G des tours quarrées
qui n'étoit pas exactement défendue des flancs des
tours oppoiées , ( c'eft le nom qu'on avoit donné aux
côtés H G , & D F des tours ) mais on y remédioit
en faifant faillir la partie fupérieure de la muraille
fur celle du pié ; entre cette partie l'aillante ou fupé-
rieure , & l'inférieure , on pratiquoit des ouvertures
par où le foldat découvrait le pié du mur. Ces fortes
d'ouvertures en faillie fe nommoient mâchicoulis ou
majficoulis : on en trouve encore aujourd'hui dans
les vieilles fortifications , & dans la plupart des an-
ciens châteaux. Voyei Redoutes à mâchicoulis.
Après l'invention de la poudre , & lorfqu'on eut
trouvé la manière de s'en fervir pour l'attaque des
places, il fallut , pour s'oppofer à la violence du ca-
non , donner plus d'épaifleur aux murs des tours &
des autres parties de la fortification. Les faillies en
mâchicoulis ne purent fe conferver contre la violen-
ce de cette machine. ; & par-là le côté extérieur des
tours demeuroit fans défenfe. Il reftoit du moins une
efpece de petit triangle au pié de ce côté , moindre
à la vérité dans les tours rondes que dans les quar-
rées, mais toujours plus que fuffifant pour y attacher
le mineur , par où l'ennemi pouvoit , fans grand obl-
tacle de la part de l'afïïégé , fe procurer l'entrée de la
place. C'eft ce qui engagea les ingénieurs à chercher
quelqu'expédient pour remédier à ce défaut. Le plus
fimple fut de terminer le côté extérieur des tours par
deux lignes , qui formant un angle faillant vers la
campagne , renfermeroient l'efpace qui n'étoit point
vu des flancs. Cette correction eft la véritable origi-
ne de la figure de nos baflions , qui , comme on le
voit , n'eft point arbitraire , mais fondée fur les ma-
ximes de la fortification ; & il en réfulte la détenfe
de toutes les parties de l'enceinte : car les flancs dé-
fendent les faces & la courtine , & ils le défendent
àiilu" réciproquement.
La grandeur des angles & de toutes les parties du
baflion a fourîert différentes variations , fuivant le
tems & les idées particulières des ingénieurs , ainfi
qu'on peut le voir dans le précis des inftru&ions ou
fyftèmes qui font à la fuite du mot Fortification.
On ne peut guère fixer d'une manière abfolue la va-
leur de toutes ces parties , parce qu'elles changent
fuivant les difFérens polygones : mais pour en don-
ner une idée , on peut établir ,
i°. Que le flanc doit avoir au moins 20 toifes, &
qu'il peut aller jufqu'à 30.
20. Que la demi-gorge doit être égale aux flancs ,
& qu'ainfi elle peut avoir depuis 20 jufqu'à 30
toifes.
30. Que les faces doivent avoir au moins 40 toifes,
& au plus 60.
A l'égard des angles du baflion , l'angle flanqué peut
être aigu ou obtus , pourvu que dans le premier cas
il n'ait pas moins de 60 ou 70 degrés , & dans le fé-
cond pas plus de 1 50. Sa grandeur dépendait reftede
l'angle de la circonférence du polygone que l'on for-
tifie rlorfqu'il eft un peu obtus, il donne lieu d'aug-
menter la gorge du baflion ; 6c une grande gorge eft
plus avantageuse qu'une petite, non feulement parce
qu'elle donne plus d'efpace au baflion , mais parce
qu'alors on peut y conftruire un retranchement plus
grand & plus folide , pour difputer pié à pié à l'en-
nemi le terrein du baflion.
L'angle de l'épaule eft celui qui mérite le moins
deconfidération dans le baflion,pcLrce qu'il fe trouve
déterminé par l'angle flanqué & celui du flanc.
Ce dernier angle exige une attention toute parti-
culière. S'il eft aigu , comme dans le fyftème d'Er-
rard , le flanc ne peut défendre la face du baflion op-
pofé : s'il eft droit , il la défend trop obliquement : il
doit donc être un peu obtus , pour que le foldat dé-
couvre devant lui la face 6c le foffé du baflion qu'il
doit défendre. Voye^ DÉFENSE.
L'angle du flanc ne doit pourtant pas être trop ob-
tus , parce qu'alors le flanc pourroit être battu du
bord du fofié oppofé , &c de la partie du foflé vis-à-
vis l'épaule du baflion.
Il y a des bajlions de plufieurs efpeces ; favoir , de
fimples , à flancs concaves & à orillons , de vuides ,
de pleins, de plats , &c.
Le baflion JimpU eft celui dont les flancs font en
ligne droite.
Le baflion à flancs concaves & à orillons, eft ce-
lui dont les flancs couverts font difpofés en ligne
courbe , & dont l'épaule eft arrondie. Voye^ lesconf-
tructions de M. de Vauban , ù la fuite du mot For-
tification.
Les baflions vuides font ceux dont le rempart eft
mené parallèlement aux flancs & aux faces , de ma-
nière qu'il refte un vuide dans le milieu du baflion ;
c'eft dans ce vuide qu'on place ordinairement les
magafins à poudre. Voye^ Magasin.
Les baflions pleins font ceux dont toute la capacité
fe trouve remplie par les terres du rempart. C'eft fur
les baflions pleins qu'on élevé des cavaliers. Voy. Ca>
VALIER.
Les baflions pleins font bien plus favorables que
les vuides pour fe retrancher : le principal avantage
de ces derniers eft de donner plus de facilité pour
aller au-devant du mineur ennemi : mais les retran-
chemens qu'on y conftruit ne peuvent être excellens;
car le peu de largeur du rempart ne permet pas de
les faire affez grands pour être bien foûtenus ; & fi
on les place à la gorge , ils fe trouvent commandés
des logemens que l'affiégeant pratique fur le rem-
part.
Le baflion plat eft un baflion conftruit fur une ligne
droite , & dont par conféquent les deux demi-gorges
ne font point d'angle. On n'employé ces fortes de
baflions que lorfque les côtés des places fe trouvent
trop longs pour que les baflions des extrémités puif-
fent fe flanquer réciproquement. Ces baflions ont plu-
fieurs inconvéniens : il eft difficile de leur donner la
même étendue qu'aux autres baflions ; & d'ailleurs
l'ennemi peut enfiler leurs courtines d'une même bat.
terie.
Outre les baflions dont on vient de parler , il y a
encore les baflions détachés , les coupés , les régu-
liers , & les irréguliers , &c.
Le baflion détaché eft un baflion qui eft ifolé à l'é-
gard de l'enceinte : telles font les contregardes des
tours baflionnées de Landau & duNeuf-Brifac. L'avan-
tage de ces baflions eft de pouvoir être foûtenus juf-
qu'à la dernière extrémité , parce que leur prife ne
donne point d'entrée dans la place : mais ils ont auffi,
comme les autres dehors,le defavantage d'avoir avec
la place des communications difficiles , & par lef-
quelles on ne peut que défiler.
Le baflion coupé eft celui dont la pointe eft retran-
chée , 6c qui au lieu de cette pointe a un ou deux
angles rentrans : il n'eft d'ufage que lorfque l'angle
flanqué du baflion fe trouve trop aigu , c'eft à-dire ,
au-deiîbus de 60 degrés ; ou lorfque qtielqu'obftacle
qu'on trouve dans le terrein ne permet pas de le ter-
miner à l'ordinaire.
Le baflion régulier eft celui quia fes faces égales,
fes flancs de même ,& fes angles de l'épaule 6c du
flanc égaux entr'eux : c'eft celui qui fe trouve dans
les fortifications régulières.
Le baflion irrégulier a de l'inégalité dans {es faces ,
fes flancs , ou fes demi-gorges , de même que dans
fes angles du flanc & de l'épaule : c'eft ce baflion qui
eft le plus ordinaire, parce qu'il s 'employé dans les
BAT
A T
ï 3 ï
fortifications irrégulieres , qui font bien plus com-
munes que les régulières. ( Q )
* Bastion, le dit en Médecine, des parties qui fer-
vent d'enveloppe & comme de rempart à d'autres :
tel eft le thorax , par rapport au cœur & aux pou-
mons , & le crâne , qui lemble tait pour défendre le
cerveau.
* Bastion de France, ( Géog. ) place d'Afrique
fur la côte de Barbarie , au royaume d'Alger , au
nord-eft de Bonne.
* BASTOGNACK , ou BASTOGNE , ( Géog. )
petite ville des Pays-bas dans le duché de Luxem-
bourg. Lon. 23.30. lut. io. 10.
* BASTON , ( Géog. ) ville de l'Amérique fep-
tentrionale dans la nouvelle Angleterre , mieux con-
nue fous le nom de Bojion.
BASTUDE , f. f. ( Pêche. ) c'eft une efpece de fi-
let dont on fe fert pour pêcher dans les étangs fa-
lés. L'ordonnance de 168 1 fait défenfes aux pêcheurs
qui fe fervent d'engins , appellés//t72j2re5, de prendre
les poiflons enfermés dans les bajludes , à peine de
punition corporelle. (Z)
* BASVILLE , ( Géog. ) ville de l'Amérique avec
port , dans la Martinique.
* BASURURE , ( Géog. ) rivière de l'Amérique
méridionale dans le pays des Caraïbes : elle fe jette
dans la rivière des Amazones.
BAT, BATTOLOGIE, BUTUBATA , (Gram.)
En expliquant ce que c'eft que battologie, nous fe-
rons entendre les deux autres mots.
Battologie, fubft. f. c'eft un des vices de l'élocu-
tion ; c'eft une multiplicité de paroles qui ne difent
rien ; c'eft une abondance ftériie de mots vuides de
fens , inane multiloquium. Ce mot eft Grec , jâaiWo-
yla. , inanis eorundem repetitio ; & fionloXeytco , verbo-
fusfum. Au ch. vj. de S. Matthieu, v. y. Jefus-Chrift
nous défend d'imiter les payens dans nos prières, &
de nous étendre en longs difeours & en vaines répé-
titions des mêmes paroles. Le Grec porte , //« 0ar-
loXoy mVmte , c'eft-à-dire , ne tombe^ pas dans ta batto-
logie ; ce que la vulgate traduit par noiite multum
loqui,
A l'égard de l'étymologie de ce mot , Suidas croit
qu'il vient d'un certain Battus, poëte fans génie, qui
répétoit toujours les mêmes chanfons.
D'autres difent que ce mot vient de Battus , roi
de Libye , fondateur de la ville de Cyrene, qui avoit;
dit -on, une voix frêle & qui bégayoit : mais quel
rapport y a t il entre la battologie &c le bégayement ?
On tait aufti venir ce mot d'un autre Battus , paf-
tcur , dont il eft parlé dans le //. livre des Métamor-
phofis d'Ovide, v. y 02. qui répondit à Mercure :fub
illis montibus , inquit , erant , & erantfub montibus illis.
Cette réponfe qui répète à-peu-près deux fois la mê-
me chofe , donne lieu de croire qu'Ovide adoptoit
cotre ctymologie.Tout cela me paroît puérile. Avant
qu'il y eût des princes , des poètes , & des palpeurs
appelles Battus, & qu'ils fullcnt alTez connus pour
donner lieu à un mot tiré de quelqu'un de leurs dé-
fauts , il y avoit des difeurs de rien ; &c cette manière
de parler vuide de fens , étoit connue & avoit un
nom; peut-être étoit -elle déjà appellée battologie.
Quoi qu'il en foit , j'aime mieux croire que ce mot
a été formé par onomatopée de bath , efpece d'in-
terjection en ulage quand on veut faire connoître
que ce qu'on nous dit n'eft pas raiionnable , que c'eft
un difeours déplacé , vuide de fens : par exemple ,
fi l'on nous demande qu'a-t-il dit ? nous répondons
bath , rien ; patipata. C'eft ainfi que dans Plaute ,
( Pfeudolus , acl. I. Je. 3. ) Calidore dit : quid opus
èjl? à quoi bon cela ? Pfeudolus répond : Potin aliam
rem ut cures ? vous plait-il de ne vous point mêler de
Tom. II.
cette affaire ? ne vous-en mettez point en peine , laif-
fez-moi faire. Calidore réplique^.... mais Pfeu-
dolus l'interrompt en difant bat : comme nous dirions
ba, ba , ba , difeours inutile , vous nefay<{ ce que vous
dites.
Au lieu de notre patipata , où le p peut aifément
être venu du b , les Latins difoient butubata , & les
Hébreux H'013 VSf2 bitubou , pour répondre à une fa-
çon de parler futile. Feftus dit que Nœvius appelle
butubata ce qu'on dit des phrafes vaines qui n'ont
point de fens , qui ne méritent aucune attention: bu-
tubata Nozvius pro nugatonis pofuit , hoc efl nullius di-
gnationis. Scaliger croit que le mot de butubata eft
compofé de quatre monofyllabes , qui font fort en
uiage parmi les enfans , les nourrices & les imbéci-
les ; lavoir bu , tu , ba , ta : bu , quand les enfans de-
mandent à boire ; ba oupa, quand ils demandent à
manger ; ta ou tatam , quand ils demandent leur père,
où le / fe change facilement enp ou en m, maman :
mots qui étoient auffi en ufage chez les Latins , au
témoignage de Varon & de Caton ; & pour le prou-
ver, voici l'autorité de Nonius Marcellus au mot
buas. Buas , potionem pofuam parvulorum. Var. Cato ,
vel de liberis educandis. Cum cibum ac potionem buas ,
ac papas docent & matrem mammam , & patrem tatam.
Bat , f. m. ( Commerce. ) petite monnoie de billon
de Suille , dont on ne peut que difficilement évaluer
la valeur. Plufieurs cantons en fabriquent à différens
titres & poids. Pour donner la valeur d'un bat , celui
de Zuric vaut deux fous & cinq iixiemes de denier,
argent de France. Il faut encore diftinguer les bons
bats des communs.
Bat , ( Manège & Maréchallerie. ) c'eft une efpece
de felle de bois qu'on met fur les ânes , mulets Se
chevaux , pour y ajufter des paniers ou autres ma-
chines deftinées à porter des fardeaux. Les bâts com-
muns ne font autre chofe qu'une efpece d'arçon com-
pofé de deux fûts de bois , joints avec des bandes de
même matière. Chaque fût eft accompagné d'un cro-
chet , pour tenir les cordes qui foùtiennent aux deux
côtés du bât des paniers, des ballots ou des échelet-
tes. Le deffous du bât eft garni de panneaux : on y
ajoute une fangle , ou bien on fait paffer un furftix
par-delTus. On attache au hit de derrière une cour-
roie qui fert de croupière, foye^ Panneau , Sur-
faix, Croupière.
Un cheval de bât eft un cheval deftiné à porter
des fardeaux fur un bât , foit à la guerre, en route ,
ou dans les meffageries. ( y")
* Bat, f. m. che^ les marchands de pot (fon , c'eft
la queue du poiflbn : le grand poiflon , dilent-ils, fe
meiùre entre queue & bat.
* BATA , ( Géog. ) ville d'Afrique , capitale de la
province de même nom au royaume de Congo.
BATADEUR , f. m. au jeu de Revertier, font les
dames qui font furcafe fur la même flèche où il y en
a déjà d'accouplées. Elles font nommées batadeur ,
parce qu'elles fervent à battre les dames découver-
tes , fans qu'on foit obligé à fe découvrir foi-même.
* BATAILLE , COMBAT , ACTION, Gramm.
La bataille eft une adion plus générale , & ordinaire-
ment précédée de préparations : le combat eft une
aciion plus particulière , & moins prévue. On peut
dire que la bataille de Pharfalles & le combat des Ho-
races & des Curiaces font des actions bien connues.
Ainii aciion femblc le genre , & bataille & combat des
efpeccs : bataille a rapport aux difpolîtions , & com-
bat à Yaclion : on dit l'ordre de bataille , & la chaleur
du combat ; combat fe prend au figuré , bataille ne s'y
prend point. On ne parlerait point mal, en difant, il
s'efl paffé en-dedans de moi un violent combat entre
la crainte de l'otfenfer , & la honte de lui céder ; mais
Rij
1J
BAT
il feroit ridicule d'employer en ce fens le terme de
'bataille ; celui à? action ne convient pas davantage.
BATAILLE, f. f. (Ordre encycl. Entend. Rai fon,
Phitofi ou Science , Science de la nat. Mathématique ,
Mathématiques pures , Géométrie, Tactique. ) c'eft dans
F 'Art militaire , une action générale entre deux armées
rangées en bataille , qui en viennent aux mains dans
une campagne affez vafte pour que la plus grande
partie puiffe combattre. Les autres actions des trou-
pes , quoique lbuvent plus meurtrières que les batail-
les , ne doivent , félon M. de Feuquieres , fe nommer
que des combats.
Ainfi , fuivant cet officier, l'attaque d'un polie ou
d'un village retranché , ne doit point s'appeller ba-
taille , mais un combat. Voye^ Ordre de bataille
6* Armée.
Une bataille perdue eft celle dans laquelle on aban-
donne le champ de bataille à l'ennemi , avec les morts
& les bleflés. Si l'armée fe retire en bon ordre avec
fon artillerie & les bagages , le fruit de la bataille fe
borne quelquefois à avoir effayé fes forces contre
i'ennemi , & au gain du champ de bataille : mais 11
l'armée battue eft obligée d'abandonner fon canon
& de fe retirer en defordre , elle n'eft plus en état de
reparoître devant l'ennemi qu'elle n'ait réparé fes
pertes ; il fe trouve par là maître de la campagne , &
en état d'entreprendre des fiéges : c'eft cette fuite
qui décide ordinairement du fuccès des batailles, dont
il n'eft pas rare de voir les deux partis s'attribuer l'a-
vantage.
Un grand combat perdu , dit M. de Feuquieres,
quoique plus fanglant qu'une bataille, emporte rare-
ment la perte de toute l'artillerie , & prefque jamais
celle des bagages ; parce que les armées n'ayant pu
s'aborder par leur front , il eft certain qu'elles n'ont
pu fouffrir que dans la partie qui a combattu ; & que
quoique pour attaquer ou pour foûtenir on ait fuc-
ceffivement été obligé de fe fervir de nouvelles trou-
pes tirées du front qui ne pouvoient combattre , l'ac-
tion n'ayant pu cependant devenir générale , elle n'a
pu produire qu'une plus grande ou moindre perte
d'hommes , fans influer fi abfolument fur la fuite d'u-
ne campagne & fur la décition pour la fupériorité ,
que le peut faire une bataille rangée : elle ne peut
produire ni la perte générale des bagages , ni celle
de l'artillerie , mais feulement ce qui peut s'en être
trouvé fur le terrein où les troupes ont combattu.
Mémoires de Feuquieres.
Il fuit de là qu'un général qui craint de fe com-
mettre avec un ennemi en rafe campagne , doit cher-
cher des poftes de chicane , où fans faire agir toute
fon armée , il puilTe attaquer l'ennemi fans s'expofer
au hafard de perdre une bataille. Mais il faut conve-
nir que li par ces elpeces de batailles on ne fe met pas
en danger d'être battu entièrement, on ne peut non
plus battre entièrement l'ennemi , & l'empêcher de
reparoître après le combat comme avant, pour s'op-
pofer aux entreprifes qu'on peut former.
L'hiftoire des batailles n'eft proprement que l'hif-
toire des défauts & des bévues des généraux : mais
il eft heureufement affez ordinaire que les mépri-
fes des deux généraux oppofés fe compenfent réci-
proquement. L'un fait une fauffe démarche ; l'autre
ne s'en apperçoit pas , ou il n'en fait tirer aucun avan-
tage : de - là il n'en refaite aucune conféquence fâ-
cheufe:
Les Mémoires de M. de Feuquieres/Kr la guerre , ne
font , pour ainfi dire , qu'un récit des inadvertances
& des fautes des deux partis : à peine fait-il mention
d'un leul général , excepté Turenne , le grand Condé
& Luxembourg , dont la conduite foit autre chofe
qu'un tiffu continuel de fautes. Créqui & Catinat, en
Certaines occalîons , en faifoient de grandes , félon ce
même officier , mais ils favoient les compenfer par
BAT
une conduite judicieufe en d'autres occafions. M. le
chevalier de Folard trouve auffi très -peu de géné-
raux dont la réputation foit nette à tous égards. Le
marquis de Feuquieres , dont la grande capacité dans
la guerre paroît par fes Mémoires , eût été un généraL
du premier ordre , dit M. de Folard , s'il eût plu à
certaines gens , à qui fon mérite faifoit ombrage , de s,em~
preffer un peu moins à travailler à fa dijgrace & à le per-
dre dans Fefprit du roi , après f 'avoir gâté dans fefprit du
miniflre ; ce qui fit perdre à ce prince un des meilleurs &
des plus braves officiers généraux de fes armées , & qui le
fervoit mille fois mieux & avec plus de courage & tf in-
telligence que fes indignes ennemis.
Manière de difpofer les troupes dans une bataille ran-
gée. Lorfqu on a formé le deffein d'aller à l'ennemi ,
& qu'on eft à portée de le pouvoir combattre, « il
» faut difpofer les troupes pour arriver devant lui
» en bataille , fur deux lignes : l'infanterie au centre ,
» & la cavalerie fur les ailes , fi le terrein le permet ;
» parce qu'il y a des pays îi coupés & fi fourrés ,
» qu'il faut mettre des brigades d'infanterie ou de
» dragons aux flancs de la droite & de la gauche ,
» pour empêcher l'ennemi d'en approcher. Il y a
» d'autres fituations partagées par des plaines & des
» buiffons , où l'on place dans les intervalles d'infan-
» terie , des efeadrons pour la foùtenù & profiter du
» terrein que l'on veut difputer.
» Quand il y a de la difficulté à pénétrer l'enne-
>> mi , & que l'on veut emporter un pofte , forcer
» une droite , une gauche , ou le centre , on doit dil-
» pofer les troupes de manière , qu'elles fe" présentent
» également de toutes parts à l'ennemi , pendant que
» le plus fort de l'armée arrive en colonne fur l'en-
» droit que l'on veut pénétrer , qu'on attaque vive-
>t ment & fans relâche. Un ennemi qui n'eft point
» prévenu de cette difpofition , fe trouve bien-tôt
» renverfé par un nombre fupérieur , & on le pour-
» fuit avec ordre , pour achever de le mettre en dé-
» route.
» Il y a d'autres fituations qu'il faut abfolument
» rechercher avant d'attaquer l'ennemi. S'il eft pofté
» dans des pays fourrés & coupés de haies & de foffés,
» où fon infanterie peut avoir beaucoup d'avantage,
» il faut le tourner ou le déplacer , de manière que
» la cavalerie fur laquelle on compte beaucoup ,
» puiffe agir & partager le mérite d'une aftion , qu'il
» vaut mieux différer quelque tems , que de s'expo-
» fer à la manquer. Lorfque le général a des troupes
» de confiance à la droite , & qu'il connoît que le ter-
» rein de la gauche de fon champ de bataille eft avan-
» tageux pour les y faire combattre , il doit les y por-
» ter , & mettre à la droite les troupes de la gauche :
» ce font des difpofitions qu'il faut faire quelquefois ,
» pour mieux s'oppofer aux forces de l'ennemi , fui-
» vant l'avantage que la fituation du lieu donne, & le
» pro;etque le général forme pour attaquer ; c'eft de
» quoi le coup d'œil décide.
» Il faut autant qu'il eft poffible , avoir un corps
» de referve compoié de bonnes troupes , cavalerie
» & infanterie. La cavalerie doit être en troilieme
» ligne en bataille, derrière le centre de l'infanterie
» de la féconde ligne , pour être en état de fe porter
» oii elle feroit utile , fans rien déplacer de la féconde
» ligne ; il faut dérober , s'il eft poffible , à l'ennemi
» la connoiffance de cette difpofition. Dans le mo-
» ment que la première ligne s'ébranle pour com-
» battre , on fait auffitôt paffer les bataillons de la
» réferve par les intervalles de la cavalerie de la fe-
» condc ligne , pour fe porter brufquement dans les
» intervalles des efeadrons de la première , en joi—
» gnant Péfcadron le plus proche de la droite & de
» la gauche de l'infanterie de cette ligne. Suivant
» cette difpofition , qui peut être inconnue à l'enne-
» jni , on peut par le feu de l'infanterie , mettre un
BAT
►> grand defordre dans fa cavalerie , lorfqu'eile vient
» au coup de main. Si l'infanterie refte dans la mê-
;> me difpofition , elle favorife toujours le retour de
» la cavalerie , ou elle marche pour attaquer en
» flanc l'infanterie ennemie de la première ligne
» qu'elle déborderait.
» II faut obferver, en mettant en bataille la pre-
» miere ligne , de laifler aux deux ailes de cavalerie
» des intervalles affez fpacieux pour ne rien dépla-
» cer devant l'ennemi , lorfque l'infanterie de la ré-
» ferve vient s'y porter. Le général doit faire recon-
» noître de fort prés les flancs de l'armée ennemie
» pour les déborder , les entamer , & les replier fur
» le centre, rien n'eft plus avantageux, & ne déci-
» de plus promptement de la victoire ; l'ennemi ne
» peut plus s'étendre , ni difpofer du terrein dont il
» étoit le maître , il s'y voit reflerré : les troupes n'y
» combattent plus qu'avec contrainte , ne fe recon-
» noiffant plus dans la mêlée , & ne cherchent qu'à
» fe faire jour pour fe fauver.
>► Lorfqu'on a pénétré la ligne par quelque en-
» droit, il eft très à propos de faire avancer dans le
» même moment des troupes de la féconde ligne ,
» s'il n'y en a pas du corps de réferve qui foient à
» portée pour partager l'ennemi , & profiter de cet
» avantage par la fupériorité , fans quoi on lui don-
» ne le tems de fe rallier & de réparer les defordres
» où il fe trouve. Il faut abfolument conferver un
» grand ordre dans tous les avantages que l'on rem-
» porte , afin d'être plus en état de jetter la terreur
» dans les troupes ennemies , & empêcher leur ral-
» liement ; la difpofition doit être faite de manière ,
» que fi la première ligne étoit pénétrée , la fecon-
» de puiffe la fecourir , obfervant toujours les in-
» tervalles nécefiaires pour faire agir les troupes , ôt
» les former derrière celles qui feront en ordre : on
» doit attaquer la bayonnette au bout du fufil , les
» troupes qui ont pénétré la première ligne , les
» prendre de front, & par leurs flancs, afin de les
» renverfer , & remplir à l'inftant le même terrein
» qu'elles occupoient ; c'ell dans des coups fi impor-
» tans , que les officiers généraux les plus proches
» doivent animer par leur préfenec cette action , &
» faire couler des troupes de ce côté-là , pour les
>> former fur plufieurs lignes , & rendre inutile l'en-
» treprife de l'ennemi. Un général a bien lieu d'être
» content des officiers qui ont prévenu &c arrêté ce
» premier defordre par leur diligence & leur valeur.
» Il faut que le corps de réferve foit à portée de
» remplacer les troupes aux endroits où elles auront
» été priiés , afin que l'ennemi ne voie rien de dé-
» rangé , & qu'il trouve par-tout le bon ordre Se la
» même réfiltancc.
» Les commandans des régimens doivent avoir
» des officiers fur les ailes &c au centre , pour conte-
» nir les foldats,& les avertir, que le premier qui
» fe dérangera de fa troupe pour fuir ou autrement ,
» fera tué lùr le champ , afin que perfonne ne puifl'c
» fortir de fon rang : avec cette précaution , on fe
» prélente toujours à l'ennemi avec beaucoup d'or-
» dre.
» Dans un jour de bataille , le pofte du général ne
» doit pas être fixé ; il elt obligé de le porter dans
» les endroits où fa prélence eft utile , foit pour fur-
» prendre l'ennemi par quelques attaques, foit pour
» fecourir une droite , une gauche ovi le centre , qui
» commenceroient à s'ébranler ; ou taire avancer
.» des troupes pour réparer ce qui ieroit dérangé,
» parcourir la première ligne, y animer les troupes,
» &c en même tems jetter le coup d'œil fur les tor-
» ces &c la fituation de L'ennemi , pour en découvrir
» le foible , & en profiter par des détachemens que
» l'on fait marcher.
» Tous les lieutenans généraux & maréchaux de
BAT
r3î
» camp doivent être aux pofi.es marqués par l'ordre
» de bataille , pour conduire les troupes des ailes &
» du centre de l'armée ; les brigadiers à la tète de
» leurs brigades pour les faire mouvoir fuivant les
» ordres qu'ils en reçoivent, ou l'occafion ; & lorf-
» que dans l'action ils font partagés par un mouve-
» ment brufque de l'ennemi , ils doivent prendre fur
» le champ le parti de le faire jour , rejoindre leurs
» troupes , ou de fe jetter dans quelque pofte, pour
» empêcher l'ennemi de pénétrer plus loin : par ces
» démarches hardies & faites à propos , on répare
» le defordre qui peut être arrivé.
» Le major général de l'infanterie , les aides-ma-
» jors , le maréchal-de-logis de l'armée , de la cavale-
» rie , des dragons , & le major de l'artillerie , doi-
» Vent tous fuivre le général pour porter les ordres ,
» & les faire exécuter promptement ; le capitaine
» des guides doit auffi l'accompagner pour conduire
» les troupes , & lui expliquer la fituation du pays.
» Les colonels , lieutenans-colonels , majors de bri-
» gades , aides-majors des régimens , doivent tous
» avoir une grande attention de fe tenir à leur trou-
» pe , & de faire obferver un grand filence pour bien
» entendre le commandement , & le taire exécuter
» dans l'inftant même. C'eft une choie efîentielle
» pour bien combattre l'ennemi & le prévenir dans
» les démarches.
» Dans le tems même que l'on fait une difpofition
» pour combattre , tout le canon de l'armée doit fe
» placer par brigade devant la première ligne , 8c
» autant qu'il eft poffible devant L'infanterie aux en-
» droits les plus élevés , pour faire feu fur tout le
» front de l'armée ennemie. Lorfque toutes les lignes
» s'ébranlent pour charger, l'on peut le (ervir de pe-
» rites pièces dans les intervalles de l'infanterie y
» pour faire des décharges à portée de l'ennemi , &
» rompre fon premier rang ; après cette décharge , les
» officiers d'artillerie les font rentrer auffi- tôt dans
» l'intervalle des deux lignes , pour les faire rechar-
» ger, & les avancer loriqu'on leur ordonne.
» Il eft très-important que les officiers généraux
» expliquent à ceux qui commandent les troupes
» fous eux , ce qu'ils doivent faire pour attaquer l'en-
» nemi , fuivant la difpofition que le général a ré-
» glée , afin que dans une affaire de cette conléquen-
» ce , tout agiffe & foit animé du même efprit , &c
» qu'au cas que quelques officiers généraux fuffent
» tués ou blefies , on fût toujours en état de fuivre
» le même ordre pour combattre. Il faut auffi que
» l'on fâche , en cas de befoin , le lieu de la retraita,
» & l'ordre pour fe rallier de nuit ; ce lont des cho-
» fes trop importantes pour les oublier.
» On doit obferver , lorfque les troupes vont au
» combat , de ne pas permettre que les officiers des
«régimens détachent des foldats des compa-r.;..-.
» pour la garde de leurs équipages ; on y laiflé au plus
» les éclopis , & les valets pour en avoir foin , avec
» un détachement de l'armée : mais lorfqu'on pré-
» voit une action , il faut abfolument renvoyer au
» moins les gros bagages fous une place , pour ne
» pas s'affoiblir inutilement ». Obfervations fur C Art
de faire la guerre fuivant les maximes des plus grands
généraux.
Le fuccès des batailles ne dépend pas toujours de
L'habilité du gênerai, & il lui eft difficile de fe trou-
ver par-tout pour donner les ordres qui peuvent être
neceiiaircs.
» Lorfque deux armées s'ébranlent pour le char-
» ger, dit M. le maréchal de Puyfégur , dans fon li-
» vrc de l'Art de la guerre , que peut faire le gênerai ?
» courra-t-il le long de la ligne , ou re(tera-t-il en
» place ? il n'a pour lors d'autre avantage fur les of-
» liciers généraux inférieurs, que celui de commaii-
» der par préférence le» troupes qui font fous fa
334
BAT
» main. Pendant ce tems-là on vient lui dire qu'une
» telle partie de l'on armée a battu celle de l'enne-
» mi qu'elle avoit en tête, ou bien que fa gauche eft
» en déroute , & que l'infanterie qui la joignoit a
» ployé. Je demande, dit toujours l'illuftre maréchal
» de Puyfégur , quel part ce général peut avoir alors
» au gain ou à la perte de la bataille ? Cependant pour
» marquer dans î'hiftoire la fupériorité d'un général
» fur un autre , on dit qu'il l'a battu en bataille ran-
» gée , quoiqu'à dire la vérité , ce foient ces actions-
« là dans lefquelles le général a le moins de part. Ce
» font , il eft vrai , les généraux qui choififfent les
» portes , & qui ordonnent les difpofitions pour com-
» battre : mais l'exécution de leur ordre 6c l'action
*> font totalement l'affaire des troupes , non-feule-
»> ment dans des armées également étendues ; mais
>» même dans celles dont les forces font fort difté-
» rentes.
» Auffi les généraux qui n'ont pas grande reffour-
» ce dans leur favoir , préferent-ils toujours les ba-
* tailles aux autres actions de la guerre , qui donnent
» moins au hafard & qui demandent plus d'habileté.
»> Au contraire ceux qui font favans dans la guerre ,
» cherchent par préférence les actions où ils peuvent
» foûtenir les troupes par leur intelligence & fans fe
» commettre aux évenemens ; ce qu'ils ne peuvent
»> faire que quand les armées ont peu d'étendue ,
» c'eft-à-dire qu'elles ne font pas trop nombreufes.
Art de la guerre par M. le maréchal de Puyfégur.
M. de Folard penfe fur les armées nombreufes ,
comme le favant maréchal que nous venons de citer.
» Ces armées innombrables & les évenemens prodi-
» gieux qu'elles produifent , plaifent & amufèntcom-
» me les romans : mais elles inftruifent peu les gens
» de guerre. Il y a par-tout à apprendre dans les pe-
» tites guerres ; & c'eft dans celles-ci uniquement
» que la fcience & l'intelligence paroiffent le plus
» particulièrement. Il faut même plus de l'une & de
» l'autre que dans les grandes , dont le nombre fait
» tout le mérite .... M. de Turenne difoit quune
» armée qui pajjoit cinquante mille hommes , devenoit in-
» commode au général qui la commandoit , & aux fol-
» dats qui la compofoient. Rien n'eft plus vrai & plus
» judicieux que cette maxime. Les mauvais géné-
» raux cherchent toujours à réparer par le nombre
»> le défaut de leur courage & de leur intelligence.
» Ils n'ont jamais affez de troupes quoique l'ennemi
» en ait moins. Ils épuifent toutes les garnifons d'u-
» ne frontière , & les vivres en même tems pour
» groffir leurs armées , gagner l'avantage du nom-
» bre & l'avoir bien au-delà S'ils ne font rien
» avec des forces fi fupérieures , ils nous font juger
» que c'eft à bon droit qu'ils fe défient d'eux-mêmes,
» qu'ils fe rendent juftice , & que leur hardiefTe n'eft
» pas telle qu'ils la vantoient On voit peu
» de grandes armées qui réuffiffent lorfqu'on fe dé-
» fend bien : elles fe difîipent d'elles - mêmes ; on
» voit bien -tôt la confufion & le defordre s'y in-
» troduire par la faute de paye , par la difette & les
» maladies : leur propre grandeur entraîne leur rui-
» ne. Comment, fur Polybe ».
Suivant la remarque d'un auteur célèbre, la perte
réelle fourferte clans une bataille , c'eft à-dire la mort
de quelques milliers d'hommes , n'eft pas aura funefte
à l'état que fon mal d'opinion, ou le découragement
qui l'empêche d'ufer des forces que la fortune lui a
laiffées. Conjidérations fur les caufes de la grandeur des
Romains , par M. de Montefquieu.
M. de Turenne difoit qu'il eftimoit plus un géné-
ral qui confervoit un pays après une bataille perdue ,
que celui qui l'avoit gagnée & n'avoit pas iïien pro-
fiter. Il avoit raifon. Ceux de cette dernière efpece
ne iont pas rares : appariât nefcire eos viclorià uti , dit
-Tite-Live. Mais ceux qui pouffent les avantages d'u-
BAT
ne victoire auffi loin qu'ils peuvent aller, comme M»
le Prince'& M. de Turenne , ne fe trouvent pas par-
tout. ... Se fervir de l'occafion , eft une marque in-
faillible de l'habileté & du courage d'un général d'ar-
mée. L'occafion , dit Tacite , eft la mère des grands
évenemens , opportunus magnis conatibus tranjitus re-
rum. En effet , une victoire décifive & complète
nous conduit à une foule d'entreprifes & de grands
deffeins , qui réfultent tous de la première victoire.
Une armée n'eft pas abyfmée & anéantie pour avoir
perdu & abandonné le champ de bataille , fon canon ,
fes morts & fes bleffés. Ceux qui fuient à -travers
les campagnes ne font pas morts ; ils font diffipés au-
jourd'hui , ils peuvent fe réunir demain , trois ou qua-
tre jours après , quinze ou vingt , fi l'on veut , fe ral-
lier , prendre de nouvelles forces > de nouvelles efpé-
rances , & revenir plus braves &: plus réfolus qu'au-
paravant , par la honte de leur défaite, ou parl'a-
dreffe des généraux. Que ne faut-il pas pour rendre
une bataille décifive Ôc complète ? elles ne le font
prefque jamais : on voit l'ennemi en fuite , atterré ,
vaincu , foulé aux pies ; il fe relevé en peu de tems :
on diroit que le victorieux n'a marché que fur des
refforts.
Une bataille n'eft complète & décifive qu'autant
qu'on en fait profiter dès l'inftant que la victoire s'eft
déclarée fans nulle équivoque , qu'aucun corps ne
refte en entier , que tout s'enfuit , que tout court à
la débandade. Le général victorieux doit bienfe gar-
der alors de faire un lieu de repos du champ de ba-
taille; mais imiter ce que fit Céfar dans toutes fes
victoires , & particulièrement dans celle de Pharfale.
Il n'a pas plutôt vaincu Pompée, que fur le champ
il marche à l'attaque de fon camp qu'il emporte. Ce
n'eft pas encore affez : il le fuit fans relâche à marche
forcée ; il oblige l'ennemi de s'embarquer ; il y monte
auffi & avec la même promptitude , de peur qu'il ne
lui échappe. Belle leçon pour les victorieux , qui ne
le font jamais qu'à demi.
On doit laiffer là tous les bleffés , les gros baga-
ges , la groffe artillerie , enfin tout ce qui peut retar-
der la marche d'un feu! moment ; camper fur les tra-
ces des vaincus , afin qu'ils n'ayent pas le tems de fe
reconnoître & de recourir aux reffources.
Ordinairement une armée battue cherche fon fa-
lut par différentes routes & diverfes retraites. On
doit partager fon armée en plufieurs corps dans un
très - grand ordre , les envoyer aux trouffes des
fuyards , tâcher de les atteindre pour les accabler &
ruiner le tout. Si les vaincus fe réunifient & fe raffem-
blent fous le canon de la place la plus voiiine , il faut
l'attaquer brufquement à la faveur de la nuit, ou
dans le plein jour : on effuie un feu de paffage ; mais
dès qu'on eft aux mains , ce feu n'a plus lieu. Enfin
il faut confidérer qu'il y a certaines bornes d'où l'on
ne fauroit s'écarter après une victoire. Il y a un cer-
tain point jufqu'où il eft permis de fuivre fes avanta-
ges. Ce n'eft pas connoître fes forces , ni même cel-
les de fes ennemis , que de n'ofer aller jufque-là , ou
de vouloir aller plus loin , lorlque la défaite n'eft pas
entière. Bien des généraux ont été battus après une
victoire , faute de connoître la jufte étendue qu'ils
auroient pu lui donner. Commentaire fur Polybe , par
M. le chevalier Folard. ( Q )
Bataille navale , eft une bataille donnée fur
mer. Voye^ Combat naval.
Bataille , (Jurifpr. ) s'eft dit dans le même fens
que combat , lorlque les duels étoient autorifés en juf-
tice. Voyei Combat. ( H)
Bataille , (Peinture.) on fe fert de ce mot au
figuré pour lignifier les repréfentations des batailles
en peinture & en fculpture. Les batailles d'Alexandre
qui font dans les galeries du Louvre parle Brun , font
miles au nombre des morceaux de Peinture les plus
BAT
achevés qui foient en-deçà des Alpes. Mais perfonne
n'a fi bien réuffi dans les batailles , dont les figures
foient habillées à la Françoife , que Wandermeulen ,
illuftre peintre Flamand. Il deffinoit les chevaux mieux
que qui que ce foit , & il excelloit particulièrement
dans les payfages & les repréfentations des pays
plats. Il avoit été choifi pour peindre les conquêtes de
Louis XIV.
On appelle P-eintresde batailles , ceux qui fe livrent
à ce genre de repréfentations. ( R )
BATAILLE , cheval de bataille, ( Manège. ) eft un
cheval fort & adroit, que l'on réferve pour les occa-
sions où il faut combattre. (^)
Batailles , f.f.pl. c'eft ainfi qu'on appelle, dans
Us groffes Forges , la galerie qui règne autour de la
charge ou du haut de la cheminée. Ainfi PI. V-fig- *•
des grojfes Forges , l'efpace F F font les batailles.
BATAILLÉ , en terme de Blafon , fe dit d'une clo-
che dont le battant eft d'un autre émail qu'elle n'eft.
Bellegarde, d'azur à une cloche d'argent, bataillé
de fable. {F)
BATAILLON , f. m. dans CArt militaire , eft un
nombre d'hommes à pié , affemblés pour agir ôc com-
battre enfemble , comme s'ils ne faiioient qu'un feul
& même corps.
« La première chofe qui fe préfente à examiner
»> dans le bataillon, c'eft le nombre d'hommes dont
« il doit être compofé.
» On a d'abord obfcrvé qu'une troupe formée d'un
» grand nombre d'hommes , ne pourroit fe mouvoir
» avec facilité ; mais auffi , fi elle en a un trop petit
h nombre , elle ne fera capable d'aucun effet conii-
» dérable : il faut donc que le nombre des hommes
w du bataillon permette de le faire mouvoir avec fa-
» cilité ; que ces hommes foient auffi en affez grande
» quantité pour faire une efpece de corps folide, qui
» puifie attaquer avec fermeté & foûtenir les difté-
»» rens chocs auxquels il eft expofé.
» Il n'eft pas aile de fixer ce nombre d'une manie-
» re précife & géométrique ; il dépend des coutumes
» des peuples qui font la guerre , de leurs armes , de
» la manière de s'en fervir , & de leur façon de com-
» battre : auffi les ufages ont-ils été fort differens fur
» ce point. Mais à préfent toutes les nations de l"Eu-
» rope, hors les Turcs, fuivant à-peu-pres le même
» ordre à cet égard ; les termes mêmes de bataillons
» & tic/cadrons font employés dans toutes les lan-
}> gués.
» Depuis Iong-tems il paroît que parmi nous le
» nombre des hommes du bataillon eft à - peu - près
» fixé à fept cens : mais chez les différentes nations
» de l'Europe , les uns ont leurs bataillons plus forts ,
» &c les autres moins. En France , dans les deux der-
» nieres guerres qui ont précédé la mort de Louis
» XIV. les bataillons étoient compofés de treize com-
» pagnies de cinquante hommes chacune , ce qui fai-
» foit fix cents cinquante hommes ; ils avoient plus
» de quarante officiers.
» Dans la guerre de 1733 ils étoient compofés de
*» feize compagnies de quarante hommes chacune ,
t> & d'une dix-leptieme de quarante-cinq , ce qui fai-
j» foit fix cens quatre-vingt-cinq hommes, non com-
» pris cinquante-deux officiers.
» Dans la guerre de 1741 ils étoient compofés de
» même , excepté qu'ils n'avoient que trente-quatre
» officiers. Le fonds des bataillons François a été au-
» trefois plus confidérable.
» Il faut obierver que pendant la guerre, les ba-
» taillons étant. formés au commencement de la cam-
y> pagne fur le pié preferit par le prince, & que ces
» bataillons n'étant point ordinairement recrutés pen-
» dant le cours de la campagne , il arrive par la perte
» que leur caufent les actions de la guerre , les mala-
BAT
'35
» dies , &c. qu'ils ne font prefque jamais complets-
» Dans le nombre des hommes fixé pour le batail-
» Ion, il y a une compagnie de grenadiers attachée
» laquelle eft fouvent employée à des ufages parti-
» culiers , & qui n'agit pas toujours avec le bataillon.
» On appelle grenadiers , des loldats choilis fur
>) tout un régiment par rapport à la valeur & à la
» force du corps. Ils font'deftinés aux fatigues &
» aux emplois périlieux de la guerre. Le nom de gre-
» nadiers leur vient des grenades dont ils fe iervoient
» autrefois. Voye-^ Grenadier.
» Les foldats iont affemblés & arrangés dans le
» bataillon par rang & par file. Ainfi leur nombre &
» leur diftance conftituent fa forme & felpace qu'il
» occupe fur le terrein.
» Du tems de Louis XIII. les bataillons étoient fur
» huit rangs : ils ont été enfuite réduits à lix. Les der-
» nieres ordonnances de Louis XIV. les fixent à cinq ;
» mais l'ufage , même de l'on tems , les a fixés à qua-
» tre. A l'égard de leur diftance , les ordonnances
» militaires en diftinguent de deux lortes ; lavoir ,
» pour paroitre & pour combattre.
» Les diftances />o«/-/wo/m: font fixées pour l'in-
» tervalle d'un rang à un autre ^ à la longueur de
» deux hallebardes , ce qui fe prend pour douze pies
» en y comprenant la profondeur ou l'epaiileur des
» hommes du devant de la poitrine au dos. Les mê-
» mes ordonnances ne prelcrivent rien par rapport
» aux files ; & en efiet leur diftance eft allez difficile
» à évaluer exaftement : mais il paroit que l'ufage le
» plus ordinaire a toujours été de compter trois pies
>» pour l'intervalle d'une file à une autre , en com-
» prenant dans cette diftance l'efpace occupé par un
» homme , c'eft-à-dire du milieu d'un homme au mi-
» lieu de celui de la file fuivante,
» Lorfqu'il s'agit de combattre , les officiers s'ap-
» prochent autant qu'il eft polfible du bataillon , 6c
» les rangs fe ferrent jufqu'à la pointe del'épée , c'eft-
» à-dire , que le fécond rang doit toucher le bout des
» épées du premier , ce qui ne donne guère que trois
» pies pour Fépaiffeur du rang & pour l'on intervalle,
» Les files s'approchent autant qu'il eft polfible , en
» confervant la liberté du coude ; ce qui veut dire ,
» comme on l'entend ordinairement , que la file &
» fon intervalle doivent occuper environ deux pies.
» On voit par là que le bataillon occupe alors beau-
» coup moins d'elpace qu'auparavant.
» Les officiers chargés du foin de formel" les batail-
» Ions, ne paroifient pas s'embarraffer beaucoup à
» préfent de la diftance des rangs,- parce qu'elle peut
» être changée fort aifément dans un inftant, & fur-
» tout diminuée ; c'eft pourquoi ils laiffent prendre
» douze pies pour cette diftance : mais à l'égard de
» celle des files , comme il faut plus de tems pour la
» changer , ils la fixent à deux pies pour l'épaifTeur
» de la file & pour fon intervalle, ce qui eft un ef-
» pace luffifant pour combattre.
» Il fuit de là que pour favoir l'efpace que le ba-
» taillon occupe fur le terrein , il faut compter deux
» pies pour chaque homme dans le rang , &: douze
» pics pour l'épaifTeur du rang , jointe à fon inter-
» valle.
>» Ainfi fuppofant un bataillon de fix cents cinquante
» hommes fans compter les officiers , & que ce butail-
» Ion foit CÔmpofé de cinq rangs , on trouvera les
» hommes de chaque rang, en divifant fix cens cin-
» quante par cinq, ce qui donnera cent trente hom-
» mes par rang ; multipliant enfuite ce nombre par
» deux , on aura deux cens foixante pies , ou qua-
» rante-trois toiles deux pics pour l'étendue de cha-
•> que rang.
>» A l'égafd de la profondeur des cinq rangs , com-
» me ils ne forment que quatre intervalles , elle eft
T36
A T
BAT
■» de quarante-huit pies ou de huit toiles } non com-
>'pris l'efpace occupé par les officiers.
» Si le bataillon n 'eft que fur quatre rangs , il n'aura
» que trente-fix pies de profondeur , attendu que les
>> ran«s ne donneront que trois intervalles : mais alors
» fon front augmentera; car lix cents cinquante divi-
y> £és par quatre , donnent cent foixante - deux hom-
» mes par chaque rang : multipliant ces hommes par
» les deux pies qu'ils occupent furie terrein , on aura
* trois cents vingt-quatre pies, ou cinquante-quatre
» toiles pour le iront du même bataillon.
» Ce modèle de calcul ou de fupputation peut
» fervir pour toutes fortes de bataillons dont le nom-
y bre d'hommes fera connu , de même que celui des
» rangs : dans tous les cas il tonnera toujours un
» reclangle beaucoup plus étendu fur une dimen-
» fion que fur l'autre ». Ejfai fur la Caflramétation ,
par M. le Blond.
Bataillon quarré , eft un bataillon dont les
foldats font arrangés de manière que les rangs font
égaux aux files , en forte que les quatre côtés qui le
terminent contiennent le même nombre d'hommes.
Voye^ File.
Il y a deux fortes de bataillons quarrés ; favoir , à
centre plein , &C à centre vuide.
Le bataillon quarré à centre plein , eft celui dont les
hommes font placés tout de fuite , ne laiffant que
l'intervalle ordinaire des rangs & des files.
Le bataillon quarré à centre vuide , eft celui qui laiffe
dans fon centre un efpace vuide de foldats , & qui
eft affez confidérable eu égard au terrein occupé par
le bataillon.
Le bataillon quarré à centre plein eft très-aifé à for-
mer. Ceux qui ont quelque connoiffance de l'extrac-
tion de la racine quarrée , n'y peuvent pas être em-
barraffés ; car extrayant la racine quarrée du nombre
d'hommes dont le bataillon doit être compofé, on
trouve d'abord la quantité dont chaque côté doit
être compofé.
Ce bataillon eft affez peu d'ufage dans la Tadlique
moderne.
i°. Parce que le feu des ennemis, & principale-
ment celui du canon , y peut faire un très-grand de-
fordre.
2°. Parce que les foldats du centre ne peuvent
prelque pas le fervir de leur feu contre l'ennemi.
M. le chevalier de Folard eft prefque le feul qui en
prefcrive l'ufage : fa colonne n'eft autre chofe
que deux ou trois bataillons à centre plein placés fans
intervalle les uns derrière les autres. V. Colonne.
Le bataillon à centre vuide préfente , comme celui
qui eft à centre plein , des hommes de tous côtés. On
prétend que le fameux Maurice de Naffau a été le
premier qui ait trouvé l'ufage de vuider le centre des
bataillons.
Le bataillon à centre vuide n'a pas plus de difficulté
dans fa formation que celui à centre plein : un exem-
ple fuffira pour en donner une idée.
Soit un nombre d'hommes quelconque , comme
i zoo , dont on veut faire un bataillon quarré à centre
vuide , de manière que le côté du quarré vuide , par
exemple , ait douze hommes.
Il faut retrancher deux unités du nombre 1 2 , par-
ce que le côté du quarré vuide , s'il étoit rempli
d'hommes , en contiendrait deux de moins que le der-
nier rang intérieur de la partie du quarré qui eft rem-
plie : ôtant donc 2 de 1 2 , il refte 1 o qu'il faut quar-
rer,& l'on aura 100, que l'on ajoutera au nombre
donné 1200. Ces deux nombres ajoutés enfemble
donneront 1 300 , dont on extraira la racine quarrée
qu'on trouvera être 36; il reliera quatre hommes
qu'on pourra placer dans le centre du bataillon.
\ Racine.
J36.
400.
6 6
Refte 4. Voye{ Racine quarrée,
Préfentement pour former le bataillon, je confédé-
ré que s'il étoit plein , & qu'il fût de 1 300, toutes les
files & tous les rangs feroient de 36 hommes : mais
il doit y avoir un vuide dans le milieu du bataillon de
dix hommes ; donc dans cet endroit les files n'auront
que 26 hommes; c'eft-à-dire , 36 moins 10: mais
ces dix hommes doivent diminuer également les de-
mi-files du milieu ; elles n'auront donc chacune que
1 3 hommes ; d'où il fuit qu'il n'y aura dans cet exem-
ple que 1 3 rangs de 3 6 hommes dans le bataillon , à
commencer de la tête & de la queue du bataillon , &
de la droite à la gauche. Arrangeant ainfi le bataillon,
il reliera le vuide demandé ; & alors chaque côté du
quarré intérieur fera de 1 2 hommes , c'eft-à-dire ,
de deux hommes de plus à chaque côté que le côté
10 n'en a.
Pour la preuve il fuffit de confidérer qu'ayant ajou-
té au nombre propofé , le nombre d'hommes qu'oc-
cuperoit l'efpace qu'on veut laiffer vuide dans le ba-
taillon , on peut alors regarder le nombre propofé
augmenté de ce dernier , comme le nombre d'hom-
mes dont il faut extraire la racine quarrée ; laquelle
racine donnera le nombre des hommes , des rangs &
des files d'un tel quarré. Or retranchant vers le milieu
le nombre qu'on a ajouté à chaque file , il reliera ,
pour le bataillon difpofé en quarré , le nombre d'hom-
mes qui avoit d'abord été propofé : cela eft évident.
On peut par cette même méthode, lorfqu'un nombre
d'hommes eft donné , en former un bataillon quarré
qui paroiffe d'un bien plus grand nombre d'hommes:
car fi l'on a , par exemple , 1 200 hommes , dont on
veuille former un bataillon quarré qui paroiffe 3000,
on extraira la racine quarrée de ce dernier nombre ,
laquelle fera trouvée de 54 , avec un refte 84 qu'on
peut négliger ; ce nombre feroit celui des hommes de
chaque rang , de chaque file d'un bataillon quarré à
centre plein de 3000 : mais comme on a ajouté 1 800
hommes au nombre donné 1 200 , il faut retrancher
du dedans de l'intérieur du bataillon l'efpace qu'oc-
cuperoient ces 1 800 hommes. Pour cela il faut ex-
traire la racine quarrée de 1800, laquelle eft 42 ;
c'eft le nombre d'hommes qu'il faut retrancher des
files du milieu du bataillon plein. Ces files font de 54 ,
defquelles ôtant 42 , il refte 1 2 , dont la moitié 6 eft
le nombre des rangs de la tête & de la queue du ba-
taillon , de même que de ceux de la droite & de la
gauche. Ainfi par cette formation les 1 200 hommes
donnés occuperont l'efpace d'un bataillon à centre
plein de 3000 ; & ils feront rangés fur fix de hauteur
ou de file fur chaque côté du bataillon. Traité de l'A-
rithmétique & de la Géométrie de l'officier par M. Le-
blond.
Bataillon rond , eft celui dont les foldats font
rangés circulairement , en formant pluficurs circon-
férences concentriques.
Ce bataillon a été fort en ufage parmi les Romains ;
c'eft ce qu'ils appelloient in orbem : on en voit plu-
fieurs exemples dans les commentaires de Céfar. Feu
M. le maréchal de Puyfegur faifoit cas de ce ba-
taillon.
Bataillon triangulaire , eft un corps de
troupes difpofé en triangle , & dont les rangs aug-
mentant également , forment une progreffion arith-
métique.
Si
BAT
Si le premier rang eft un , & que les autres aug-
mentent chacun d'une unité , le bataillon formera
un triangle qui aura les trois côtés égaux ; c'eft-à-di-
re , quil léra équilatéral ; autrement il formera un
triangle quelconque.
ProbLme pour la formation du bataillon triangulaire,
équilatéral : un nombre d'hommes quelconque , par exem-
ple , 400, étant donné pour en former un bataillon équi-
latéral , trouver le nombre des rangs dont il fera corn-
pofé.
Comme dans ce bataillon le premier rang eft 1 , le
fécond 2 , le troiiieme 3 , &c. il s'enfuit que ce pro-
blème le réduit à trouver le nombre des termes d'u-
ne progreffion arithmétique dont le premier terme
eft 1 , la différence auffi 1 ,•& la fomme 400. Voyc{
Progression arithmétique.
Solution. Soit le nombre des termes de la pro-
greffion reprélenté par n , le dernier fera auffi n ;
car il fera l'unité prife autant de fois qu'il y a de
termes.
Cela pofé , la fomme des extrêmes de la progref-
fion fera 1 -j- « , laquelle multipliée par le nombre
des termes n , donnera n -\- n n , ou nn -f- n , pour le
double de la fomme de la progreffion ; c'eft-à-dire ,
que cette expreffion n n -\- n , fera égale à deux fois
400 , ou à 800. Or n n eft le quarré du nombre des
termes de la progreffion , n en eft la racine : donc
800 contient le quarré du nombre des termes de la
progreffion , plus la racine de ce quarré.
Il fuit delà que pour avoir la valeur de n , ou le
nombre des termes de la progreffion, il faut extraire
la racine quarrée de 800 , de manière qu'il y ait un
refte égal à la racine , ou qui la contienne.
Extrayant donc la raci-] 8100 \
ne quarrée de 800 , on 400 (
trouve 28 avec le refte 16 : I 4g
mais , comme ce refte eft ■ ■■
plus petit que la racine 28, I Refte 16.
on met 7 à la place de 8. f
Et achevant l'opération , I
on a le refte 7 1 , qui con- 1
tient la racine 17 ; ainfi 27
eft le nombre des termes ou I
des rangs du bataillon. J Refte
Pour le prouver , il faut chercher quelle eft la fom-
me de la progremon dont le premier terme eft 1 , le
fécond 2, & le nombre des termes 27.
Puifque le nombre des]
termes eft 27 ; donc lui |
ajoutant le premier 1 , la
fomme des extrêmes fera |
1 4- 27 = 28 , dont la j
moitié 14 étant multipliée
par 27 , nombre des ter-
mes , donnera 378 poiir le
nombre des hommes du \
bataillon propofé. Comme
le nombre donné étoit 400,
on voit qu'il refte 22 hom-
mes qui ne peuvent entrer
dans le bataillon , tk. qu'on
peut employer ailleurs, &
en former un peloton fé-
paré. J
Il fuit de la rélblutiondu problème précédent , que
pour former des bataillons triangulaires iquilateraux ,
il faut quelque nombre de foldats , que Ton ait pour
cet effet, le doubler, & enfuiuen extraire la racine quar-
rée : mais de manière qu'il y ait un refle égal à la racine ,
ou qui la contienne , Cv qu'alors cette racine fera le
Tome II.
BAT
ï37
28.
8ioo\
400 j 27-
47-
7*-
14.
27-
98.
28.
378.
nombre des rangs du bataillon, dont tous les côtés
7 ol
V9
670.
6 9.
49.
feront égaux.
Si l'on a , par exemple , '
785 hommes à difpofer
amiï en bataillon triangu-
laire équilatéral , on com-
mencera par les doubler,
ce qui donnera 1570. On 1
extraira la racine quarrée 1
de ce nombre ; on la trou- I
vera de 39 avec 49 qui la j p ,, "
contient : donc 39 eft le I
nombre des rangs de ce ba-
taillon. J
On déterminera de la même manière celui de tous
les autres de la même efpece que l'on pourra pro-
pofer.
Remarque. Si on fuppofe que la différence qui rè-
gne dans la progreffion eft 2, c'eft-à-dire, que le
premier terme étant toujours 1 , le fécond eft 3 , le
quatrième eft 5 , &c. le dernier terme fera ( n étant
toujours le nombre des termes ) n — 1 multiplié
par 2 , plus 1, ou 2 n — 2 + 1 ; & ajoutant à ce ter-
me le premier 1 , la fomme des extrêmes fera 2 n
— 2 4- 1 + 1 ; expreffion qui fe réduit à 2 n , dont
la mcitié étant multipliée par le nombre des termes,
donnera le nombre de la progreffion n n. Ainfi nom-
mant S la fomme de la progreffion , on a n n =. S ,
c'eft-à-dire, le quarré du nombre des termes é^al à
la fomme de la progreffion ; & par conféquent n qui
eft la racine quarrée de n n , eft égal à celle de S -y
en forte que n = \/S.
D'où il fuit que dans une progreffion arithmétique
dont le premier terme eft 1 , & le fécond 3 , le nom-
bre des termes eft égal à la racine quarrée de la fom«
me des termes.
Ainfi , fi l'on donne 400 *;
hommes pour former un
bataillon triangulaire, dont
le premier rang eft 1 , &
le iecond 3 , ce qui eft la
féconde efpece des batail- '^
Ions triangulaires , on trou- 1
vera le nombre des rangs
de ce bataillon , en ex-
trayant la racine quarrée
de 400. Or cette racine eft
20 , donc ce bataillon au-
ra vingt rangs.
4i
4
o o\
J
Pour le prouver, confidérez que ce dernier rang
fera 1 4- 19 X 2 ou 39, & qu'en y ajoutant i,on au-
ra 40 pour la fomme des extrêmes , laquelle étant
multipliée par 10, moitié du nombre des termes,
donnera 400 pour la tomme de la progreffion , c'eft-
à-dire , le nombre propofé.
542
4
1
142
43
Si l'on a de même 542 )
pour former un bataillon |
triangulaire de même efpe- I
ce , on extraira la racine |
quarrée de ce nombre, la- V
quelle fera trouvée de 23. 1
C'eft donc le nombre des ■ ■
termes de cette progref- Refte . . 13
fion. J
On le prouvera comme dans l'exemple précédent,
en contidérant que le der- ]
nier terme fera i + zxn 23
= 45. ajoutant à ce terme j 23
le premier 1 , on aura 46 , |
qui fera la fomme des ex- j 69
i38
BAT
trèmes, dont la moitié 23 ^
multipliée par le nombre
des termes , donnera 529,
auquel ajoutant le relie
1 3 , on aura le nombre
propofé 542.
46
Rcfte.. 13
541
On opérera de même pour tous les autres batail-
lons de môme efpece , quel que foit le nombre dont
on voudra les former.
On voit par ce qui vient d"être enfeigné fur les
bataillons triangulaires , qu'ils ne font pas plus diffici-
les à calculer que les bataillons quarres. PÎufieurs of-
ficiers leur donnent la préférence fur ces bataillons,
parce qu'ils préfentent un plus grand front , & qu'ils
font également face de tous côtés. Mais comme il
eft difficile de faire marcher des foldats dans cet or-
dre , M. Bottée les croit préférables aux bataillons
quarres, feulement dans les cas où il faut combattre
de pié terme , & fe donner un grand front ; ou lorf-
que la fituation du terrein exige cette difpofition. On
pourra voir dans cet auteur la manière de les former
par des mouvemens réguliers, arithmétique 6* Géom.
de l'officier par M. Le Blond. ( Q )
* B ATALES , f. m. pi. ( Hijl. anc. ) nom que les
anciens donnoient aux hommes lafcifs & eiféminés ,
d'un certain Batale joueur de flûte , qui exerçoit fon
art avec mollette & diffohition , & qui parut le pre-
mier fur la fcene en chauffure de femme. Les enne-
mis de Demofthene l'appelloient batale.
* BATANOMES , f. f. (Commerce.) toileslongues
de vingt-huit pies la pièce , &C dont la largeur varie ;
elles fe vendent au Caire vingt médins. Voye^ MÉ-
dins & Caire.
BATARD , f. m. ou ENFANT NATUREL, {Hifl.
anc. mod. & Jurifprud. ) qui eft un terme plus adouci,
eft celui qui eft né hors d'un légitime mariage.
Il y a de deux fortes de bâtards ; les uns fimples ,
tels que ceux qui font nés de deux perfonnes libres ,
c'eft-à-dire non engagées dans le mariage , ou dans
un état qui les oblige à la continence ; mais qui pou-
voient contracter mariage enfemblc : les autres font
ceux qui font nés d'autres conjonctions plus crimi-
nelles , comme les bâtards adultérins & les incejlueux.
Les bâtards adultérins font ceux dont le père ou la
mère, ou tous les deux étoient engagés dans le ma-
riage. On appelle même adultérins les enfans des prê-
tres ou des religieufes.
Les bâtards incefueux font ceux dont le père & la
ntere étoient parens à un degré auquel le mariage eft
prohibé par les canons.
Les bâtards en général ne font d'aucune famille ,
& n'ont aucuns parens ; ils ne iuccedent dans la plus
grande partie du royaume ni à leur père ni à leur
mère , & encore moins aux parens de l'un ou de l'au-
tre , en exceptant le Dauphiné & quelques coutumes
particulières, où ils iuccedent à leur mère.
Ils ne peuvent pas même recevoir de leurs père ou
mère naturels des legs universels ou donations con-
sidérables : mais ils en peuvent recevoir de médio-
cres proportionnément aux facultés du père ou de la
mère. C'eft à la prudence des juges de décider fi elles
font modérées ou excettives.
Pour les bâtards adultérins & incejlueux , ils ne peu-
vent recevoir que des alimens : mais auffi peuvent-
ils même les exiger t'oit de leur père naturel, foit de
fes héritiers , s'il eft mort fans y avoir pourvu ; du
moins jufqu'à ce qu'ils ayent appris un métier , 8c
qu'ils ayent été reçus maîtres.
Comme par le droit commun les bâtards ne Iuc-
cedent à perlbnnc , perfonne non plus ne leur fucce-
de , li n'ayant point d'enfans , ils décèdent fans avoir
difpofé de leurs biens par donation ou par tefta-
ment ; en ce cas leur fucceftion appartient aux ici-
BAT
gneurs haut-jufticiers , pourvu que les trois condi-
tions fuivantes concourent enfemble : qu'ils foient
nés dans la juftice du feigneur , qu'ils y foient décé-
dés , & que leurs biens y foient ; l'une de ces trois
conditions manquant , c'eft au roi qu'elle appar-
tient.
Du refte ils font capables de toutes fortes de con-
trats , & entre autres de mariage ; ils peuvent difpo-
ler librement de leurs biens , foit entre-vifs , foit par
teftament ; ils ne font incapables ni d'offices ni de
dignités : mais ils ne peuvent avoir des bénéfices fans
difpenfe , à moins qu'ils ne foient légitimés. Voye^
LÉGITIMATION.
■ Chez les Athéniens , une loi de Solon exciuoit du
droit de bourçeoilie non-«feulement les enfans nés des
concubines , mais encore tous ceux qui n étoient pas
nés d'un père & d'une mère Athéniens. Cette loi
fouffrit de tems en tems quelques atteintes de la part
de ceux qui eurent affez de crédit pour faire aggré-
ger leurs bâtards au corps des citoyens. Tel fut The-
miftocle , dont la mère étoit de Thrace. Pericles re-
nouvella cette loi dans toute fa rigueur , & condam-
na cinq mille bâtards à être vendus comme efcla-
ves : mais la pefte lui ayant enlevé fes enfans légiti-
mes , il demanda lui-même au peuple la révocation
de la loi en faveur d'un bâtard qu'il avoit d'Afpafie.
On la lui accorda , &c cet exemple eut des fuites per-
nicieules : bientôt il n'y eut plus de diftinûion enr
tre les enfans légitimes & les bâtards , entre les fem-
mes Athéniennes & les étrangères : ce qui jetta le
trouble & la confufion dans toutes les familles.
En France , les bâtards ou fils naturels du roi , font
princes , lorfqu'il s'en reconnoît le père ; ceux d'un
prince ou d'un homme de qualité , iont gentilshom-
mes : mais ceux d'un gentilhomme ne font que rotu-
riers; & dans cette qualité, ils font fujets à la taille.
Suivant le droit Romain , la mère fuccédoit à fon
enfant bâtard ; mais ce droit mettoit une grande dif-
férence entre les bâtards qu'il qualifioit nothi , ou Am-
plement bâtards , & ceux qui étoient fpurii.
La loi ne reconnoiffoit point ces derniers , & leur
refufoit jufqu'à la nourriture , parce qu'ils étoient
les fruits d'une proftitution publique , tk ians pères
qui fuflent bien connus pour tels de leurs mères même,
par la raifon que is non habet patrem , cui pater efl po-
pidus. Les autres étant nés dans le concubinage , qui
reffemble au mariage , héritoient de leurs mères , &
pouvoient exiger des alimens de leurs pères naturels.
On les confidéroit comme des créanciers domefti-
ques , & des perfonnes que l'on devoit traiter avec
d'autant plus d'humanité , qu'elles étoient les inno-
centes productions des crimes de leurs parens.
Les pères n'avoient point l'autorité paternelle fur
leurs bâtards , parce que n'étant, difoit-on, pères que
pour le plaifir, ce plaifir devoit être leur unique ré-
compenfe.
Anciennement à Rome , les enfans naturels étoient
abfolument exclus de la fucceftion de leurs pères ab
intejlat, mais ils pouvoient être inftitués héritiers.
Les Empereurs Arcadius & Honorius firent une ex-
ception en faveur des enfans naturels, & les admirent
au douzième de la fucceftion à partager avec leur mè-
re , quand il y avoit des enfans légitimes ; enfuite
Juftinien les admit à ce partage pour une moitié , &
voulut qu'ils enflent un iixieme de l'hérédité ab intef-
tat , lorfqu'il y avoit des enfans légitimes.
Les bâtards pouvoient être légitimés, foit par un ma-
riage fubfequent, ou par lettres de l'empereur. En
France le roi feul a le droit de légitimer de i t ■'- ards ,
& de les rendre habiles à fuccéder. Foycr_ Légiti-
mation.
En Angleterre ce droit privatif appartient au roi
Si au parlement.
BAT
. -L'empereur Anaftafe permit aux pères de légiti-
mer leurs bâtards par la ieule adoption : mais ce pri-
vilège fut aboli par Juftin & Juftinien , de peur qu'une
telle condefcendance n'autorifât le concubinage.
Le pape a quelquefois légitimé des bâtards , lefaint-
fiége a même en certaines occafions , ulé de difpenfe
par des considérations Spirituelles , non- feulement
envers des perfonnes dont la naiffance n'étoit pas lé-
gitime , mais encore envers des bâtards adultérins , en
permettant leur promotion à l'épifcopat.
Les bâtards non légitimés peuvent difpofer de leurs
biens par donation entre-vifs , & par teitament ; ceux
qu'un mariage fubféquent a légitimés , font dans le
même état, & joùiffent des mêmes droits que ceux
qui font nés dans le mariage : mais les bâtards légiti-
més par lettres du prince , ne font réputés ni légiti-
mes, ni capables de fuccéder, qu'à l'égard des pa-
rens qui ont confenti à cette légitimation.
Le Pape Clément VII. défendit par fa bulle à un
certain prêtre de réfigner l'on bénéfice à Ion bâtard.
Les armes d'un bâtard doivent être croifées d'une
barre, d'un filet, ou d'une traverfe, de la gauche à
la droite. Ils n'avoicnt point autrefois la permiffion
de porter les armes de leur père.
Les bâtards ne peuvent être préfentés à des béné-
fices fimples , ni admis aux moindres ordres , ni pol-
feder plus qu'un fimple bénéfice , à moins qu'ils n'en
ayent obtenu difpenfe du pape , ni être revêtus d'au-
cune charge fans lettres du prince.
Un bâtard, fuivant le droit d'Angleterre, ne peut
être héritier de fon père à Yimmeuble, & ne fauroit
avoir d'autre héritier que Y hoir de fon corps. L'enfant
engendré par celui qui dans la fuite en époufe la mè-
re , eft un bâtard en droit , quoiqu'il foit réputé lé-
gitime par l'églife. Si celui qui vient d'époufer une
femme, décède avant la nuit fans avoir couché avec
elle , &c qu'enfuite elle faffe un enfant , il en eft cen-
fé le père , & l'enfant eft légitime. Si un époux ou
une femme fe marie ailleurs , les enfans qui naifl'ent
de cette polygamie pendant la vie de l'autre con-
joint , font bâtards. Si une femme ayant quitté fon
mari pour fuivre un adultère , a de celui-ci un en-
tant , tandis que fon mari eft dans l'enceinte des qua-
tre mers , l'enfant eft légitime , & fera fon héritier à
Y immeuble. Si quelqu'un fait un bâtard dans le baillia-
ge de Middelton , dans la province de Kent, fes biens
meubles & immeubles font confifqués au profit du
roi. (H)
Bâtard de racage, c'eft, en Marine, une cor-
de qui fert à tenir &c à lier un affemblage de bigots &C
de raques , dont le tout pris enfemble porte le nom
de racage , qui lert à amarrer la vergue au mât. Foye^
Racage. (Z)
* Bâtard, en Mufîque, c'eft ainfi que Broffart
appelle le mode hyper-éolien , qui a fa finale en bfafi,
& conféquemment fa quinte faillie ou diminuée dia-
toniquement , ce qui le chaffe du nombre des modes
authentiques ; & le mode hyper-phrygien , dont la fina-
le eft en / Ht fa, ik. la quarte fuperflue, ce qui l'ôte
du nombre des modes plagaux.
Bâtard, en Jardinage, fe dit de toute plante fau-
vage , ou qui n'eft pas cultivée , &C même du fruit
qu'elle donne.
Bâtard, en Fauconcrie, fe dit d'un oifeau qui
tient de deux elpeccs , comme du facre & du lanier.
. BATARDE ou BASTARDELLE, f. f. en Marine;
on appelle ainfi les galères qui ont l'extrémité de la
poupe plate & élargie, pour les distinguer de celles
qui ont l'extrémité de la poupe aiguë , qu'on appelle
fubtiles.
Bâtarde, Bastarde, (voile) en Marine, c'eft la
plus grande des voiles d'une galère; elle ne fe porte
que lorfqu'il y a peu de vent , parce que de vent frais,
les voiles ordinaires fuffifent. (Z)
Tome II,
BAT
J39
*BAtàRDE (laine) en Bonneterie ; c'eft ainfi qu'on
appelle la féconde forte parmi celles qui fe lèvent de
deffus le vigogne. Il fe dit auffi des laines communes
du Levant.
Bâtarde , (pâte) en terme de Boulanger bifeuitier ;
c'eft celle qui, n'étant ni dure ni molle, a pris une
certaine confiftance qui n'eft connue que de l'ou-
vrier, & qu'on ne peut guère expliquer aux autres.
BATARDE, (largeur en Draperie.) fe dit de celle
des draps ou autres étoffes , qui n'eft pas conforme
aux ordonnances. Ainfi les draps d'une aune demi-
quart , font de largeur bâtarde & fujets à confifeation.
Bâtarde, féconde forte de dragée fondue au
moule ; elle eft entre la petite royale & la grolfe roya-
le. Foye^ l'article Fonte de la dragée au moule.
Bâtardes, en terme de Rafineur defucre, font les
fucres produits des firops qui font émanés des matiè-
res fines. Voici la manière dont on les travaille: la
cuite s'en fait comme celle des fucres primitifs , on
tranfporte la cuite dans des rafraîchiffoirs , en allant
de l'un à l'autre , c'eft-à-dire , en mettant à la ronde
dans chacun d'eux le même nombre de baffins. Foye^
Bassins d'empli. Avant d'être emplis, les formes
bâtardes font trempées , tapées, fondées & plantées.
Foye^ ces mots à leur article. Le rafraîchiffoir d'où on
commence à prendre la cuite , eft remué fans ceffe&C
à force de bras par un feul ouvrier, pendant que d'au-
tres portent la cuite, & n'en verfent dans chaque for-
me que le tiers d'unbaffin. Il faut deux ferviteurs pour
emplir une rangée. Foye[ Serviteur. Ils commen-
cent chacun par un bout, fe rejoignent au centre ,
vont de forme en forme regagner leur bout, d'où ils
reviennent enfemble au centre , pour retourner au
bout, & continuent cette maneuvre jufqu'à ce que
les formes foient mifes à hauteur. Foye^ Mettre à
Hauteur. On les remplit en obfervant la même ma-
neuvre, afin de mêler le firop avec le grain qui tom-
be toujours au fond du rafraîchiffoir , malgré le mou-
vement qu'on lui donne. Enfuite quand elles font froi-
des , on les monte. Foyer Monter. On les met fur le
pot, fans les percer; mais après les avoir détapées,
voyei Detaper , on les couvre de terre , on les chan-
ge; on les plante, mais on ne les plamote point.
Les bâtardes font rafinées avec les matières primiti-
ves , & les lirops qu'on en a recueillis fervent à faire
des vergeoifes. Foyez_ tous ces mots à leur article.
Bâtarde , en terme de Rafinerie defucre; c'eft une
groffe forme qui tient quelquefois jufqu'à deux cents
livres de matière : on emplit les bâtardes des firops
recuits , qui produifent une efpece de fucre que l'on
appelle auffi bâtardes. Foye^ BATARDES.
Bâtarde, ( lime. ) en terme de Bijoutier, font cel-
les qui font d'un degré au-deffous des rudes, &c dont
on ne fait ufage qu'après elles. Il y en a de toutes gran-
deurs & de toutes formes.
Bâtarde (Ecriture.) Foye^ Ecriture.
D E M I-B ATARDES, en terme de Bijoutier , font
des limes , qui ne font ni trop rudes , ni trop douces ;
mais qui tiennent le milieu entre les limes bâtardes &
les douces. Il y en a de plufieurs grandeurs &c de plu-
Sieurs formes.
BATARDE AU, f. m. terme de rivière & de mer, c'eft:
une efpece de digue faite d'un double rang de pieux
joints par des planches, tk dont l'intervalle eft rempli
de terre ; on s'en fert pour détourner l'eau d'une ri-
vière.
On donne auffi le nom de batardeau à une efpece
d'échataut fait de quelques planches qu'on élevé fur
le bord d'un vaiffeau, pour empêcher l'eau d'entn.r
fur le pont, lorfqu'on couche le vaiffeau fur le cùté
pour le radouber. (Z)
Batardeau (le) eft , dans la Fortification , ua
Sij
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BAT
BAT
maffif de maçonnerie qui traverfe toute la largeur
du fofTé : on le place ordinairement vis-à-vis les an-
gles laillans des battions & des demi-lunes , & fur le
prolongement des capitales de ces ouvrages.
On tait des bdtardeaux dans les foffés d'une place ,
pour en retenir l'eau & empêcher qu'elle ne s'écoule
par les endroits du foffé qui le trouvent plus bas que
les autres.
Pour qu'un bâtardeau foit bon & folide , il doit
avoir depuis 15 pies jufqu'à 18 pies d'épaiïTeur. On
le confinait vis-à-vis les angles laillans des ouvrages
de la fortification ; parce que dans tout autre endroit
il pourroit fervir de couvert à l'ennemi dans le paf-
fage du fofîe contre le feu de la place. Sa partie fupé-
rieure forme une efpece de toit en dos d'âne , & elle
fe nomme la cape du bâtardeau. On conftruit fur le
milieu de la cape une petite tour d'environ 6 ou 7
pies de hauteur , &c d'autant de diamètre ; elle fert à
empêcher qu'on marche fur la cape , & elle s'oppofe
ainli à la dcfertion des foldats. Voyeir un bâtardeau en
D , PL IV. de Fortifie, fig. 3. ( Q )
BATARDIERE , f. f. (Jardinage. ) eft un lieu de
paffage ; c'eft la place dans un jardin où l'on tranl-
plante des arbres tout greffés tirés de la pépinière , &C
que l'on y met en réferve.
Pour les mieux lever en motte dans la fuite , on
les plante à 6 ou 7 pies de diftancel'un de l'autre fur
des alignemens tirés au cordeau.
Les fruits à noyau font ordinairement féparés d'a-
vec ceux à pépin.
On les levé pour être tranfportés trois ans après
avoir été greifés dans la pépinière.
On laboure & on taille ces arbres, qui donnent
fou vent de très-beaux fruits. ( K )
BATARDISE , f. f. ( DROIT DE ) terme de Jurifpr.
eft le droit qu'ont les fouverains en France , & en
certains cas les feigneurs haut-jufticiers , de s'appro-
prier la fucceffion des bâtards moris fans enfans &
fans avoir dilpolé de leur bien par donation ou or-
donnance de dernière volonté, ^oye^ Bâtard. (H)
BATATE, TOPINAMBOUR ou POMME DE
TERRE , f. f. ( Hifi. nat. & Jard. ) On en diftingue de
trois efpeces ; celle d'Efpagne , celle de la Virginie ,
èc celle du Canada. La première a pafféde Newfound-
land dans les jardins d'Efpagne. Elles ont toutes les
trois à-peu-près les mêmes propriétés médicinales.
On doit les choifir graffes , bien nourries , ten-
dres , rougeâtres en-dehors , blanches en-dedans , &c
d'un goût approchant de celui de l'artichaut. Elles
nourrifîènt , elles humectent beaucoup , elles adou-
cirent les acrimonies de la poitrine : mais elles en-
gendrent des humeurs groffieres , ôc excitent des
vents.
Ces fruits ou plutôt ces racines font émollientes ,
& bonnes pour prévenir ou difliper les maladies qui
proviennent de la rigidité des fibres ; c'eft un aliment
convenable à ceux qui font beaucoup d'exercice , &
aux gens bilieux , ci à tous ceux dont les humeurs
font trop acres & trop agitées.
Batate cathartique ou Cacamote hana-
quiloni , ( Med. ) Les racines prifes à la dofe de
deux onces fur le point de fe mettre au lit , purgent
doucement & fans danger. On dit que cette batate
eft douce & agréable au goût , & ne le cède en rien
à nos pois. ( A7)
* BATAVES , f. m. pi. ( les ) Hijl. mod. & Gêog.
Il eft fait mention de ces peuples dans les commen-
taires de Céfar , & autres écrivains anciens. Ils oc-
cupoient une partie de la Hollande méridionale , une
partie du duché de Gueldre & de la ieigneurie d'U-
trecht. On entend aujourd'hui parifowvtMlesHolian-
dois.
# BATAVIA, (Gêog.) ville d'Alie dans l'île de
Java, au royaume de Bantan. Long. 224. 30. lat.
merid. G. 10.
* Batavia , ( Gêog. ) nom d'une rivière de la
terre Auftrale , dans la province appellée Carpenta-
ria , vers la mer.
BATAYOLLES , f. f. pi. ( Marine.) ce font des
pièces de bois , ou gros bâtons quarrés d'environ qua-
tre pouces , & de la hauteur de trois pies , qui font at-
tachées perpendiculairement par le dedans aux baca-
las. Voyei la Planche II. n° . ig. ( Z)
BATE, i.f. en terme de Fourbi[/eur,eû. cette partie po-
lie & luilante d'un corps d'épée , fur laquelle on mon-
te la moulure. Voyei Corps dTipée, & Moulure.
BATE d'une boite de montre. Voye{ BOÎTE DE MON-
TRE , Se la fig. IZ. PI. XII. de l'Horlogerie.
BATE , en terme de Aletteur-en-ceuv re j c'eft la partie
élevée perpendiculairement fur le fond de la boîte
ou tabatière , qui en fait les côtés & le contour, &
qui forme la cuvette. Voye^ Cuvette & Boîte.
BATES ou ROUELLES , terme de Potier-d'Etain; ce
font des plaques d'étain jettées en moule toutes pla-
tes ; elles fervent à faire des pièces de rapport. Voye^
Pièces de rapport.
BATEAU , BATEAUX , f. m. On nomme ainfi ,
en terme de Marine , diverfes fortes de petits vaiffeaux
que l'on mené à la voile & à la rame , mais qui font
faits plus matériellement & plus forts que les cha-
loupes : l'on a auffi de grands bateaux portant mâts ,
voiles & gouvernail , 6c qui ne peuvent aller qu'à
la voile.
Il y a différentes efpeces de bateaux , auxquels on
donne différens noms, fuivant leur forme , leur ufage,
& les lieux où l'on s'en fert. Ainfi on peut renfermer
fous ce nom , la chaloupe , la barque , Yefquif, le canot y
le paquebot , le coche- d'eau , le bac , lejtibot, \apata~
che , la gondole , le ponton , la felouque , le bateau-mar-
nois , le bateau -fioncet , le chaland , le bateau defelle,
le bateau depojle , le bachot, la nacelle , le batelet , &c.
& quelques autres.
Bateaux À EAU , ( Marine. ) Les bateaux ou bar*
ques à eau font deltinés en Hollande à amener de
l'eau douce dans les lieux où il n'y en a pas , comme
l'on fait à Amfterdam pour les braifeurs de bierre , &
quand l'eau de pluie manque : on s'en fert encore
pour aller quérir de l'eau de mer dont on fait du fel.
Ceux qui amènent de l'eau douce font fort plats , Se
enfoncent dans l'eau prefque jufqu'au bord , ou du
moins à un pié du bord , lorfqu'ils font chargés : ils
ont un peu de relèvement à l'avant & à l'arriére , &
il y a des trous dans le carreau par où s'écoule l'eau
qui y tombe ou qui y entre de dehors : les coutures
en font tort bien calfatées ou goudronnées : on y fait
entrer l'eau par un trou qui elt deffous, qu'on bou-
che quand le bateau eft plein.
Ceux qui amènent de l'eau falée , font faits à la
manière des femaques , & matés en fourche. ( Z )
* Bateaux maires ; c'eft ainfi qu'on appelle
ceux qui font deltinés au tranfport des fels.
* Bateaux de poste ; c'eft ainfi qu'on appelle
ceux qui font établis fur la Loire & fur le Rhône. Ils
font étroits & plats , & font une très - grande dili-
gence.
* Bateaux de selles ; c'eft ainfi qu'on appelle
à Paris de grands bateaux longs , plats , & garnis à
leurs extrémités de deux roues à godets , qui pui-
lent de l'eau & la jettent dans des canaux qui la con-
duifent fur des bancs & ailleurs oii peuvent en avoir
befoin les blanchiffeufes , à l'ufage defquelles font
ces bateaux: elles y vont laver leur linge en payant.
* Bateaux (aisde) ; ce font ceux qui provien-
nent du déchirement des vieux bateaux. Les menui-
fiers les achètent , & s'en fervent par-tout où le bois
neuf n'eft pas nécefTaire. Le commerce en eft confi-
BAT
dérable dans tontes les grandes villes où il y a des
ports.
BATELÉE, f. f. ( Marine. ) terme dont on fe fert
fur les rivières , pour dire charge entière de bateau.
BATELIERS, f. m. pi. (Manne.) On donne ce
nom à ceux qui conduisent les bateaux fur les ri-
vières. (Z )
* BATEMBURGIQUES , f. m. pi. (Hift. mod. )
nom de coureurs , qui clans le feizieme fiecle pillè-
rent les églifes , renverferent les autels , & firent
beaucoup de dégâts fous la conduite d'un ibldat fé-
ditieux.
* BATENBOURG , ( Géog.) ville des Provinces
Unies au duché de Gueldre fur la Meule, entre Ra-
venftein & Megen.
BATER un cheval , un mulet , ou un âne ; ( Marèch.
& Manège. ) c'eft lui attacher le bât fur le dos : le dé-
bdter ; c'eft lui ôter le bât de deffus le dos. ( V\
BATH , BATHUS , ou EPHA, ( Hift. anc. ) me-
fure des Hébreux , qui contenoit la dixième partie du
chore ou gomor , c'eiï-à-dire vingt-neuf pintes , cho-
pine , demi-feptier , un poiiîbn, & cette fraction de
pouce, H&8-. _
Quelques critiques ont imaginé qu'il y avoit chez
les Hébreux deux fortes de baths ; l'un f acre , qui ne
fervoit qu'au temple ; & l'autre ordinaire , ufité dans
le commerce & plus petit que le premier. Le pre-
mier , difent-ils , contenoit un bath & demi ordinaire ;
ce qu'ils effayent de prouver par ce qu'il eft dit dans
le ///. liv. des Rois, ch. vij. v. z6 '. que la mer d'airain
de Salomon contenoit deux mille baths ; & qu'on lit
dans les Paralipomenes , liv. II. ch. iv. v. 3. qu'elle
tenoit trois mille mefures ou trois mille baths. Mais
on concilie aifément ces deux palfages , en difant que
la coupe ou cuvier de la mer d'airain contenoit deux
mille baths , comme le dit le III. livre des Rois , &
que le pié de ce vafe qui étoit creux en contenoit
encore mille , ce qui failoit en tout trois mille , com-
me le portent les Paralipomenes. Calmet, DiÛ. delà
Bible ,tom. I. p. 2<)(). Voye^ MER D'AIRAIN. (C)
* Bath , ( Géog. ) ville d'Angleterre en Sommcr-
fetshire,fur l'A von. Long. ;3. 10. lat. ai. 20-
Bath ( eaux de ). Vbye^ Eau.
* BATHA , ( Géog. anc. & mod. ) petite ville du
royaume d'Alger en Barbarie , dans la province de
Telenfin, fur la rivière de Mina. Quelques-uns la
prennent pour l'ancienne Vaga ou Vago.
*Batha , Bath , Bachia, ( Géog. ) ville de
Hongrie , capitale du comté du même nom , fur la
rive occidentale du Danube, à cinq lieues du con-
fluent de la Drave. Long. jy. lat. 46 . 40.
B ATHANÉE , ( Géog.fainu. ) contrée de la Thra-
conite dans la tribu de Manaffé, au-delà du Jour-
dain.
* BATH ASECK , ( Géog. ) ville de la baffe Hon-
grie dans le comté de Tolna , fur la Sarvitze. Il y en
a qui prétendent que c'eft la même ville que Batha.
Voyi^ Batha.
BATH-KOL, c'eft-à-dire fille de la voix, ( Hijl.
une. ) c'eft ainfi que les Juifs appellent un oracle,
dont il eft fouvent fait mention dans leurs livres , fur-
tout dans le Talmud. L'auteur du fupplémcnt aux cé-
rémonies des Juifs, a remarqué qu'ils admettent dif-
férentes fortes d'infpirations , & qu'ils croyent com-
munément que la prophétie ou infpiration divine a
duré chez eux jufque vers la quarantième année du fé-
cond temple , à laquelle fuççeda une autre forte d'inf-
piration, qu'ils nomment bath-kol. Les Rabbins, com-
me Buxtorf l'a obfervé dansfon grand dictionnaire ,
dilent qu'après la mort d'Aggée , de Zacharie , & de
Malachie , le faint-Efprit fe retira d'Ifrael ; mais que
cependant ils eurent l'ufage de la fille de la voix: &
ils ne manquent point d'hiftoires pour appuyer cette
rêverie. Poye{ Buxtorf fur le mot bath-kol.' ( G )
BAT
141
* BATHMONSTER , ( Géog. ) ville de Hongrie
au comté de Bath , fur la rive orientale du Danube.
BATHOS, ( Géog. & Myth. ) vallée de la Macé-
doine , près du fleuve Alpha , où l'on croyoit que
les géans avoient combattu contre les dieux : on y
faifoit des facrifices au bruit d'éclairs & de tonnerres
artificiels.
BATI , f. m. c'eft ainfi qu'on appelle , en Menuife-
rie , les battans , les montans , tk traverfes d'une partie
de lambris d'une porte ou d'un guichet de croifée
affemblés , foit que les panneaux y foient ou non.
Bâti , chc{ les Tailleurs ; c'eft le gros fil qui a fervi
à bâtir un habit. Voye^ Bâtir. Ainfi ils difent, ôte^
le bâti de cet habit , pour ote^ le fil avec lequel on en a
aiïemblé les morceaux.
* BATICALA , ( Géog. ) royaume des Indes fur
la côte de Malabar , au nord du royaume de Ca-
nara. Long. gj>. 60. lat. 14. 8.
* BATICALO ou MATICALO , ( Géog. ) ville
d'Afie dans la partie orientale de Pile de Ceylan ,
capitale du royaume de même nom , fur la rivière
de Batecalo. Long. gg. 33. lat. y. 33.
BATIER , f. m. ouvrier qui fait & vend des bâts
de mulets & autres bêtes de fomme. Les bâtiers font
partie de la communauté des Selliers. V. Sellier.
BATIMENA , ( Géog. ) royaume de la prefque
île des Indes au-delà du Gange , dans le Malabar ,
vers les montagnes & le royaume de Cochin.
BATIMENT , f. m. ( Architecl. ) on entend fous ce
nom tous les lieux propres à la demeure des grands &
des particuliers , aufii bien que les édifices facrés , pla-
ces publiques, portes de ville, arcs de triomphe,
fontaines , obélifques , &c. conftruits tous de pierre,
ou de pierre & de bois de charpente , & dans les-
quels on employé le marbre , le bronze , le fer , le
plomb , ôc autres matières. Ces dirférens bâtimens.
paflent pour réguliers ou pour irréguliers , félon la
forme des plans qui les compofent. Ainfi on dit qu'un
bâtiment eft régulier , lorfque fon plan eft quarré , ou
de forme oblongue , pourvu que fes côtés oppofés ,
fes avant-corps, pavillons tk arrierc-corps , foient
égaux , & bâtis avec lymmétrie : au contraire on dit
qu'il eft irrégulier , lorfque fon plan n'eft pas renfer-
mé dans des lignes parallèles entr'ellcs , tel qu'eft un
plan triangulaire , ou celui qui n'a qu'un pavillon ,
qu'une aile à l'une de fes extrémités , & qui n'en a
point à fes côtés oppofés.
Ces mêmes bâtimens prennent encore dirférens
noms , eu égard à leur fituation : on les appelle i/o-
lés , lorfqu'ils font entourés de rues , de jardins ,
ou de grandes cours , comme eft celui de l'Ob-
fervatoire ; flanqués ou adojfés , lorfqu'ils touchent à
quelqu'autre grand édifice , tels que ceux qui font
mitoyens au Palais-royal ou au Luxembourg ; en-
foncés , lorfque leur fol eft plus bas que la nie , ou
les maifons adjacentes , tels que ceux qui font conf-
truits dans les rues baffes du Rempart, à la porte S.
Honoré , Montmartre , S. Denys , &c.
On ajoute ordinairement au terme de bâtiment ^
celui de fon ufage en particulier : par exemple , on
appelle bâtimens civils , ceux qui fervent de demeures
aux princes , aux miniftres , aux prélats, &z en géné-
ral ceux qui font relatifs à la fociété ; au contraire-
on appelle bâtimens militaires , ceux qui font confa-
crés à l'art de la guerre , tels que les portes de ville,
les arfenaux, cafernes , baftions, guérites, &c. on
appelle bâtimens hydrauliques, ceux qui l'ont deftinés
à contenir les machines pour élever les eaux , foit
pour l'utilité publique, comme celui du pont Notre-
Dame ; foit pour les embeiliffemens des maifons
royales , tels que ceux de la Samaritaine &de Mar-
ly : bâtimens publics, ceux qui font deftinés à rendre la
juftice , ou à l'ufage du public , comme le Palais à Pa-
I41
BAT
ris, l'Hôtel-de-vilIe , les fontaines de Grenelle &<des
Innocens , ou autres de cette efpece : bdtimens du
commerce , ceux où les négocians s'affemblent cer-
tain jour de la femaine , pour s'y tenir en correfpon-
danec avec les étrangers ; c'eft ce qu'on appelle bour-
fi, banque , &c.
Bdtimens de Marine , font ceux qui font deftinés à
la conftruftion des vaiffeaux , dans lelquels font com-
pris les magafins , arfenaux , corderies , aufîi bien
que ceux où l'on tient ces vaiffeaux en fureté , com-
me les ports , moles , bafîins , &c. batimens rufiiques &
champêtres , ceux qui à la campagne font deftinés à
contenir les beftiaux , les grains , les jardins potagers,
vergers , légumiers , connus fous le nom de fermes ;
ils font ordinairement voifins de quelque terre con-
fidérable : enfin on appelle bdtimens particuliers,
Ceux qui font deftinés à la demeure des habitans d'u-
ne ville ou d'une province , qui n'ont point d'autre
objet qu'une commodité relative à l'état & à la con-
dition de leur propriétaire.
On dit aufîi d'un bâtiment qu'il eft triple , double,
demi double , ou fimple , lorfque dans fa profondeur
entre cour & jardin , il eft partagé par trois , deux ,
une & demie , ou une feule pièce ; comme on dit bâ-
timent en aile , lorfque l'on pratique ou ajoute après
coup à un bâtiment un ou plulieurs étages, en retour
de fa façade principale.
On dit encore qu'un bâtiment eft feint , lorfqu'on
veut parler d'une aile aftéftée contre un mur mi-
toyen , fans autre utilité que la fymmétrie , loit que
cette affectation fe faffe en peinture ou en maçonne-
rie , comme celle que l'on a pratiquée à l'hôtel de
Beauvilliers àParis; de même on appelle bâtiment rui-
né, celui qui par vétufté ne laiffe plus que quelques
fragmens de fon ancienne ordonnance , tels que les
ruines de Tivoli , ou la plupart des anciens châteaux
aux environs de Paris , dont il ne refte plus que quel-
ques veftiges.
Des parties effentielles qui compofent la plupart
des bdtimens dont nous venons de parler , on en dif-
tingue trois de préférence , lavoir , la folidité, la com-
modité , & l'ordonnance ; la première a pour objet
la connoiffance de l'emploi & de la qualité des ma-
tériaux , & doit être confidérée comme la plus im-
portante partie du bâtiment , connue fous le nom de
confiruciion ; la féconde confifte dans l'art de diftri-
buer les plans félon la dignité du perfonnage qui
fait bâtir , connue fous le nom de dijlribution ; la troi-
fieme confifte dans l'art de donner de la proportion,
de l'harmonie & de l'accord aux parties d'un bâti-
ment , pour que réunis enfemble ils concourent à fai-
re un beau tout ; & c'eft ce qu'on appelle décoration.
Foye{ la définition de chacun des termes dont on
vient de parlera leurs différens articles. (P)
Bâtiment , (Marine. ) on entend ordinairement
par ce mot toutes fortes de navires ou vaiffeaux, de-
puis le plus petit jufqu'au plus grand , lorfqu'ils ne
font pas vaiffeaux de guerre. Il y a cependant beau-
coup de gens qui l'attribuent également aux vaif-
feaux de guerre & aux vaiffeaux marchands.
Bâtiment ras , c'eft un bâtiment qui n'eft pas ponté.
Bâtiment délicat , c'eft un navire foible de bois.
(Z)
BATIR , v. a. & n. terme cTArchuecl. fe dit & de la
dépenfe que fait un particulier pour élever ou ref-
taurer un bâtiment , & du travail de l'architecïe char-
gé de la conduite des ouvrages. Aufîi dit-on de quel-
qu'ouvrage d'importance , un tel prince a bâti tel édi-
fice , Se que tel architecte a bâti tel monument , par-
ce qu'il en a donné les deffeins.
On dit encore qu'un entrepreneur bâtith\cn. , lorf-
que fes batimens lont conftruits avec choix de bons
matériaux , & avec le foin & la propreté que l'art
demande. Poyei Bâtiment. (P)
BAT
Bâtir ou Bassetir , termede Chapelier, c'eft façon**
ner le feutre fur le baffin pour en former les quatre
capades : quand elles ont été bien marchées 8Î feu-
trées , on les joint enfemble & on en compofe un tout
qui reffemble affez à une chauffe à hypocras , après
quoi on foule , & on dreffe le chapeau fur une forme
de bois avec l'avaloire , la pièce , & le choque. V.
Chapeau , Avaloire , Pièce , & Choque.
Bâtir , terme de Tailleur, qui fignifîe affembler
les pièces d'un habit en les coulant à grands points
avec du gros fil , avant que de les coudre à demeure
avec de la foie ou du fil plus fin.
BATISSOIR , f. f. injlrument de Tonnelerie ; c'eft
un cercle de fer plus ou moins grand , félon les ou-
vrages , dont le tonnelier fe fert pour affembler les
douves d'une futaille qu'il veut conftruire.
* BATISTE, f. f. ( Comm. ) toile de lin fine &
blanche qui fe fabrique en Flandre & en Picardie :
on en diftingue de trois fortes ; il y a la batijie claire ,
la moins claire , & la hollandée ; les deux premières
ont deux tiers , ou trois quarts & demi de large , & fe
mettent par pièces de fix à fept aunes ; la hollandée
porte deux tiers de large , & douze à quinze aunes
de long. De quelque longueur que les ouvriers faffent
les batijles claires , les courtiers les réduifent à douze
aunes , & ces douze aunes en deux pièces de fix. Les
morceaux enlevés de ces pièces fe nomment couponsy
s'ils font de deux aunes jufte ; s'ils ont plus ou moins
de deux aunes , on les bâtit , & on les vend comme la
pièce. Les batijles viennent des manufactures envelop-
pées dans des papiers bruns battus ; chaque paquet
eft d'une pièce entière , ou de deux demi-pièces : on
en emplit des caiffes de fapin , dont les ais font af-
femblés avec des chevilles au lieu de clous, ce qui eft
très-commode ; car en clouant les ais , on pourroit
aifément percer les pièces. L'on fait avec cette toile
des fichus , des mouchoirs , des furplis , &c.
BATMAN ou BATTEMANT , f. m. ( Comm. )
poids de Turquie. Il y en a de deux fortes ; l'un eft
compofé de fix ocquos, chaque ocquo pelant trois li-
vres trois quarts de Paris ; en forte que ce premier
batman eft de vingt-deux livres & demie.
L'autre eft pareillement compofé de fix ocquos ;
mais chacun de ces ocquos ne pelé que quinze on-
ces, qui eft trois quarts moins que le premier : ce der-
nier batman ne revient donc qu'à cinq livres dix
onces.
Le quintal , qui eft aufîi un poids de Turquie , pe-
fe trente batmans. Voye^ Quintal & OCQUO.
Batman eft auffi un poids de Perlé ; il y en a de
deux fortes , ainfi qu'en Turquie ; l'une qu'on nom-
me batman de chahi ou cheray , & qui eft le poids du
roi ; & l'autre qui s'appelle batman de Tauris , du nom
d'une des principales villes de Perle.
Le batman de chahi fert à pefer tant les chofes né-
ceffaires à la vie , que les charges des bêtes de fom-
me : il pefe douze livres & demie de Paris.
Celui de Tauris , qu'on ne met en ufage que pour,
les marchandifes de négoce , pefe moitié moins que
le batman de chahi , & n'eft par conféquent que de
fix livres un quart.
Telle eft la proportion de ces poids avec les nô-
tres , félon Tavernier : mais Chardin y met quelque
différence ; car il ne fait le batman de Tauris que de
cinq livres quatorze onces de Paris, & le batman de
chahi , ou le batman du roi , que de douze livres dou-
ze onces. (G)
* BATOCHINE , ( Géog. ) partie de File de Gi-
lolo , l'une des Moluques.
* BATOCKS, ou BATOGGI , f. m. pi. ( Hijl.
mod. ) font deux bâtons minces dont on le fert à
Mofcow pour battre les criminels jufqu'à la mort :
lorfque quelqu'un eft condamné à ce fupplice , on lui
ôte fes habits, & on ne lui laiffe que la chemife;
BAT
un des exécuteurs s'afîîed fur fa tête , & un autre
fur fes jambes , tandis qu'un troifieme frappe jufqu'à
ce que le patient ait reçu la dofe de coups prefcrite
par le magiflrat.
* BATON , Cm. fe dit en général d'un morceau
de bois rond, tourné au tour ou non tourné , Se s'ap-
plique à beaucoup d'autres choies qui ont la même
forme. Ainfi on dit en Tableterie , un bdton cT ivoire,
un bâton d'écaillé , pour un morceau d'ivoire ou
d'écaillé rond ; chez les Marchands de bois , un bâton
de coteret , pour un morceau du menu bois de chauf-
fage , fait des petites branches des arbres ; chez les
Epiciers un bâton de cajje , un bâton de cire dEfpagne ;
chez les Gantiers , un bâton à gant ; voye^ plus bas ;
un bâton de jauge , pour l 'infiniment qui fert à mesu-
rer les tonneaux ; un bâton de croifure , chez les Haute-
liciers , pour la baguette qui tient leurs chaînes croi-
fées ; chez les PâtiJ/iers & Boulangers , un bâton , pour
le morceau de bois que l'on met en travers fur le
pétrin , Se fur lequel on meut le fas pour en tirer la
farine ; chez les Fondeurs, un bâton ,.pour le rouleau
qui leur fert à corroyer enfemble le fable & la terre
qui entrent dans la façon de leurs moules. Voye^ la
fuite de. cet article.
Bâton , f. m. ( Hijl. anc. & mod. ) efl un infini-
ment dont on fe fert ordinairement pour s'appuyer
en marchant. Le cardinal Bona obferve , dans fon
traité des Liturgies , qu'autrefois ceux qui fe fer-
voient de bâton dans l'églife pour s'appuyer , étoient
obligés de le quitter , & de fe tenir debout , feuls &
droits , dans le tems qu'on lifoit l'évangile , pour té-
moigner leur refpecl par cette poflure , Se faire voir
qu'ils étoient prêts d'obéir à Jefus-Chrifl, & d'aller
par-tout où il leur commanderait d'aller.
On fe fert fouvent auffi d'un bâton comme d'une
efpece d'arme naturelle, offenfive Se défenfive. Les
Lacédémoniens ne portoient jamais d'épée en tems
de paix , mais fe contentoient de porter un bâton épais
& crochu qui leur étoit particulier.
S. Evremont obferve que chez les Romains les
coups de bâton étoient une façon modérée de punir
les efclaves , Se qu'ils les recevoient par-dcfïùs leurs
habits.
Les Maîtres-d'armes , Se les gens fufccptibles du
point d'honneur ,croyent qu'il efl bien plus honteux
de recevoir un coup de bâton qu'un coup d'épée ;
à caufe que l'épéc efl un infiniment de guerre , & le
bâton un infiniment d'outrage.
Les loix de France punifïent bien féverement les
coups de bâton. Par uu règlement des Maréchaux de
France fait en 1653 , au iujet des fatisfaclions & ré-
parations d'honneur , il efl ordonné que quiconque
en frappera un autre du bâton , fera puni par un an
de prifon , qui pourra être modéré à fix mois en
payant 3000 livres , applicables à l'hôpital le plus
prochain : outre cela L'aggreffeur doit demander par-
don à genoux a l'offenlé , &c. tout prêt à recevoir de
lui un égal nombre de coups de bâton; & il y a cer-
tains cas où ce dernier peut être contraint de les don-
ner, quand même il aurait trop de généralité pour
s'y réloudre de lui-même.
Par un autre règlement des Maréchaux de l'an-
née 1679, celui qui frappe du bâton après avoir re-
çu des coups de poing dans la chaleur de la difpute,
efl condamné à deux ans de prifon; & à quatre
années , s'il a commencé à frapper à coups de poing.
La loi des Frilbns ne donne qu'un demi-fou de
compolition à celui qui a reçu des coups de bâton ;
Se il n'y a fi petite blcffure pour laquelle elle n'en
accorde davantage. Par la loi Salique , fi un ingénu
donnoit trois coups de bâton à un ingénu, il paj oit
?" fous ; s'il avoit fait couler le iang , il étoit puni
comme s'il eût biche avec le fer , Se il payoit quinze
fous, La peine Se l'indemnité le mefuroient fur
BAT
M3
la grandeur des blelTures. La loi des Lombards éta-
blit différentes compofitions pour un coup, pour
deux, trois, quatre : aujourd'hui un coup en vaut
mille.
La conflitution de Charlemagne , inférée dans la
loi des Lombards , Veut que ceux à qui elle permet
le duel , combattent avec le bâton j peut-être fût-ce
un ménagement pour le clergé ; ou que , comme on
étendoit l'ufage des combats , on voulut les rendre
moins fanguinaires. Le capiudaire de Louis le Dé-
bonnaire donne le choix de combattre avec le bâton
ou avec les armes : dans la fuite , il n'y eut que les
ferfs qui combatifîént avec le bâton.
Déjà je vois naître Se le former les articles parti-
culiers de notre point d'honneur , dit l'auteur de l'ef-
prit des lois , tome II. page zoz. L'accufateur com-
mençoit par déclarer devant le juge qu'un tel avoit
commis une telle a&ion , Se celui-ci répondoit qu'il
en avoit menti; fur cela le juge ordonnoit le duel :
la maxime s'établit que , lorfqu'on avoit reçu un dé-
menti , il falloit fe battre.
Quand un homme avoit déclaré qu'il combattrait ,
il ne pouyoit plus s'en départir , fans être condamné
à une peine : autre règle qui s'enfuivit ; c'eit que
quand un homme avoit donné fa parole , l'honneur
ne lui permettoit plus de fe rétrader.
Les gentilshommes fe battoient entr'eux Se avec
leurs armes ; les villains fe battoient à pié Se avec le
bâton. Le bâton devint donc un infiniment outra-
geant ; parce que celui qui en avoit été frappé, avoit
été traité comme un villain.
Il n'y avoit que les villains qui combatifîént à vi-
fage découvert ; ainfi il n'y avoit qu'eux qui puffent
recevoir des coups au vifage ; de-là vint qu'un fouf-
flet fut une injure qui devoit être lavée par le fang ;
parce que celui qui l'avoit reçu , avoit été traité
comme un villain.
Voilà comment par des degrés infenfibles , fe font
établies les lois du point d'honneur, & avant elles les
différences entre les inflrumens contondans. Le bâton
cil devenu une arme deshonorante quelquefois pour
celui qui s'en fert , 8c toujours pour celui avec qui
l'on s'en efl fervi.
Bâton ,(Hi/l. mod. ) efl quelquefois une marque
de commandement Se un attribut de dignité ou d'em-
ploi : tels font les bâtons de maréchaux de France , de
maîtres d'hôtel, de capitaines des gardes , d'exempts,
&c Celui de maréchal efl fleurdelifé ; le roi l'envoyé
à celui qu'il élevé à ce grade militaire ; les maîtres
d'hôtel , les capitaines des gardes , les exempts, &c.
peuvent être méconnus pour ce qu'ils (ont, s'ils s'ex-
pofent à l'exercice de leurs charges, fans leurs bâtons;
c'efl-là l'ufage principal du bâton.
Bâton de gardes de nuit qui courent les rues de
Londres , en criant l'heure qu'il efl. Celui qui tient
le manoir de Lambourn , dans le comté d'Efî'ex , doit
le fervice du bâton, c'efl- à-dire , qu'il efl obligé de
fournir une charge de paille fur une charrette tirée à
fix chevaux , deux cordes , deux hommes armés de
pié en cap , pour garder le bâton quand on le porte
à la ville cXAibridge , &c. Camb. lit. Efft .
Bâton traînant, {Hijl. mod.) ou Bâton à
QUEUE; Edouard premier, roi d'Angleterre, rendit
fous ce titre un édit contre les ufurpateurs des terres,
lefquels pour opprimer les propriétaires véritables,
tranfportoient ces terres ulurpées à de grands ici-
gneurs ; contre ceux qu'on loiioit pour maltraiter Se
outrager les autres; contre les violateurs de la paix ,
ravifîeurs, incendiaires , Se duelliiles; contre ceux
qui vendoient à taux poids Se à faillies melures , &
autres malfaiteurs. Cette efpece d'inquifition tut exé-
cutée avec tant de rigueur , que les amendes qui en
provinrent , apportèrent au rai des threlors îm-
menfes.
144
BAT
On appelloit/K£fî à bâton traînant, ceux qui étoient
chargés de l'exécution de cet édit , foit par rapport
à la manière rigoureufe & fommaire dont ils fai-
foient leurs exécutions , foit par rapport au bâton
qu'ils portoient comme une marque de leur autorité,
& qu'ils tenoient à la main en jugeant les malfai-
teurs. (G)
* Bâton, (en Mythol.) on diftingue particuliè-
rement Y augurai &C le pajioral : Y augurai , appelle par
ïes Latins iituus , étoit façonné en crofle par le bout ;
il fervoit à l'augure pour partager le ciel dans les ob-
fervations ; celui de Romulus avoit de la réputation
chez les Romains : ceux d'entre eux qui ne fe pi-
quoient pas d'une certaine force d'eiprit , croyoient
qu'il avoit été confervé miraculeuiement dans un
grand incendie. Quintus tire de ce prodige & de la
croyance générale qu'on lui accordoit , une grande
objection contre le Pyrrhonifme de Ion freie Cice-
ron , qui n'y répond que par des principes généraux
dont l'application vague ieroit fouvent dangereufe :
Ego Philojbplri non arbitror teftibus utiqui aut cafu veri,
aut maittiafalfificlique ejje pojjunt. Argumentis & ra-
tionibus oportet , quart quidque itafit , âocere ; non even-
tis , Us prœfertim qttilnis mihinon liceat credcre. . . omitte
igitur lituum Romuli , quem maximo in incendia negas
potuijfe comburi .... Nil débet ejje in Philofophia com-
mendtiis fabellis loci. lllud erat Philofophi , totius au-
gura primum naturam ipfam videre , deinde imentio-
nem , deinde conflantiam . . . quaji quidquam fit tain vai-
lle , quam nihilj'apere vulgare? aut quaji tibi ipjiinju-
dicando placeat inuldtudo.
Ciceron a beau dire ; il y a cent mille occafions où
la forte d'examen qu'il propofe ne peut avoir lieu ;
où l'opinion générale, la croyance non interrom-
pue , & la tradition confiante , font des motifs luffi-
îans; où le jugement de la multitude eft aufli sur que
celui du philofophe : toutes les fois qu'il ne s'agira
que de fe fervir de les yeux , fans aucune précaution
antérieure ,fans le befoin d'aucune lumière acquife,
fans la néceflité d'aucune combinailon ni induftion
fubféquente , le payfan eft de niveau avec le philo-
fophe : celui-ci ne l'emporte fur l'autre que par les
précautions qu'il apporte dans l'ulage de les fens ;
par les lumières qu'il a acquifes, & qui bientôt ôtent
à fes yeux l'air de prodige à ce qui n'eft que natu-
rel ; ou lui montrent comme furnaturel ce qui eft
vraiment au-deflùs des forces de la nature , qui lui
font mieux connues qu'à perfonne ; par l'art qu'il a
de combiner les expériences , d'évaluer les témoi-
gnages , & d'eftimer le degré de certitude , & par
l'aptitude qu'il a de former des inductions ou de la
fuppofition , ou de la vérité des faits.
Le bâton pajioral eft de deux fortes : c'eft ou celui
qu'on voit dans les monumens anciens à la main des
Faunes , des Sylvains ; en un mot des dieux des bois
& des forêts : il eft long , noueux , & terminé en
crofle : ou c'eft la croife même que nos évêques
portent à la main dans les jours de cérémonie ; c'eft
un aflemblage de différentes pièces façonnées d'or
& d'argent , entre lelquelles on peut diftinguer le
bec de corbin ou la crofle d'en-haut , les vaies , les
fonds de lanterne , les dômes , les douilles , & les
croifillons.
Il y a encore des bâtons de chantre & de confrairie.
Le bâton de confrairie, n'eft autre choie qu'un long
morceau de bois , tourné au tour , façonné , doré ,
ou argenté, à l'extrémité duquel eft fichée l'image
du patron de la confrairie.
Le bâton de chantre en ulage dans quelques cathé-
drales , reffembie aflez au bâton pajioral , quant à la
richefle , & même quant à la forme , à l'exception
qu'il n'eft pas terminé en haut par la croife , mais
qu'il a quelqu'autre forme relative , foit à la dignité
du chantre , loit aux prérogatives de l'églife.
BAT
Bâton , in terme de Blafon , forte de bande qui n'a
qu'un tiers de la largeur ordinaire. Voye[ Bande.
Le bâton ne va pas d'un côté à l'autre de l'écuflbn,
comme fait la bande ou l'écharpe , mais il eft coupé
court en forme de tronçon; il eft d'ufage pour mar-
quer la bâtardij'e. (F)
Bâtons à deux bouts ; ce font de longs bâtons
que les gardes des forêts & des parcs , &c. portent
comme une marque de leur emploi, ôc dont ils le fer-
vent aufli comme d'une arme.
BATONS ou BacL'LI , en Pharmacie, comyoïwxons,
façonnées en cylindre , ayant la figure de bacons. C'eft
ainli que l'on figure les magdaleons des emplâtres offi-
cinales.
C'eft fous cette figure que l'on met les chandelles
gaUmques , les bougies medicamenteufes. Voye^ CHAN-
DELLE, Bougie.
C'eft aufli fous cette forme qi:e l'on réduit certai-
nes préparations bechiques, ou que l'on ordonne
dans la toux , comme le lue de i églifle de Blois , les
tablettes ou bâtons de lucre d'orge. Poyvr Tablet-
tes , Suc de Reglisse. (N)
B A T O N d'Arpenteur; voye^ EQUERRE à? Arpen-
teur. (£)
Bâton de Jacob , infiniment dont on fe fert en
mer pour mefurer les hauteurs des aifres. On l'ap-
pelle autrement arbalcjlrille, Voye{ Arbalestril-
le. (T)
Bâton À mèche, (Marine.) c'eft une mèche
qu'on entretient toujours brûlante fur le château-d'a-
vant.
Bâton de Pavillon, ou d'Enseigne (Mari-
ne.) c'eft un petit matereau , ou longue gaule de fa-
pin, ou d'autre bois léger, qui fert à arborer le pa-
villon. Voye{ en la ligure & la pofition dans la PI. I. à
la lettre G.
Bâton de Girouette, c'eft un matereau très-
petit, ou gaule, dans lequel eft p'.antée la verge de
fer qui tient la girouette. Voye^ à la Planche I. les gi-
rouettes marquées g.
Bâton de Flamme , c'eft un bâton qui n'eftlong
qu'autant que la flamme eft large par le haut. C'eft ce
bâton qui la tient au haut du mât.
Bâton de Vadel, Bâton ou Manche de Gui-
pon, (Marine.) ce font certains bâtons oii l'on atta-
che les bouchons d'étoupe ou de penne , dont fe fert
le calfateur pour goudronner ou braier le vaifleau.
Bâtons de Neper. ^ov^Neper.
Bâton, en Architecture , c'eft une moulure ufitée
dans la baie des colonnes. Aov^Tore.
Bâton, enMufique, eft une barre épaifle qui tra-
verle perpendiculairement une ou plulieurs lignes de
la portée, & qui, félon fes différentes longueurs, fé-
lon le plus ou le moins de ces lignes qu'elle embrafle ,
exprime un plus grand ou moindre nombre de me-
fures qu'on doit compter en lîlence.
Anciennement, les bâtons repréfentoient autant
de différentes valeurs de notes, depuis la ronde juf-
qu"à la maxime qui en valoit huit , & dont la durée
en filence s'évaluoit parunbâton, qui, partant d'une
ligne , traverfoit trois intervalles , & alloit joindre la
quatrième ligne.
Aujourd'hui le plus grand bâton eft de quatre me-
fures ; il faut que , partant d'une ligne , il traverié la
fuivante, ôv arrive à la troilieme ainli:
m
On le répète une fois , deux fois , ou autant de fois
qu'il faut pour exprimer huit niefures , ou douze , eu
tout autre multiple de quatre, Cv l'on ajoute 01
renient
I<>
BAT
rement au-defTus un chiffre qui dif-
penfe de compter ta valeur de tous
ces bâtons. Ainfi ces marques indi-
quent un fdence de feize meuires.
Le plus petit bâton eft de deux menues , & s'étend
feulement d'une ligne à la voifme ,
en cette forte ,
A T
M5
P=ff
Les autres moindres fdences comme d'une mefure,
d'une demi-mefure , d'un tems , &c. s'expriment par
les mots de paufe, demi-paujè , foupir , &c. Voye^ ces
mots. Il eft aifé de comprendre qu'en combinant tous
ces fignes, on peut exprimer à fa volonté des fdences
d'une durée quelconque. Voye^ Silence.
Il ne faut pas confondre avec les bâtons des fdences,
d'autres bâtons précifément de même figure, qui , fous
le nom de paufes initiales , fervoient dans nos ancien-
nes mufiques à déterminer le mode , c'eft-à-dire , la
mefure, & dont nous parlerons au mot Mode.
Bâton de Mesure, eft un bâton fort court, ou
même un fimple rouleau de papier, dont le maître
de Mufique le fert dans un concert pour régler le
mouvement , & marquer la mefure & les tems. Voye^
Battre la mesure. (S)
Bâtons de Chasse, ce font ceux que l'on porte
quand on va courre.
Bâton À EGRISER, parmi les Diamantaires , eft
un morceau de bois tourné , compofé d'une tête fur
laquelle on cimente le diamant pour l'égrifer ; plus
bas eft un collet ou efpace beaucoup moins gros , qui
eft proprement la place du pouce & de l'index de
l'ouvrier. Au-deffous de ce collet eft la poignée grof-
fe à pouvoir remplir la main. Il fe termine en pointe
comme le petit bout d'un fufeau. Voye?^ KL. PI. I. du
Diamantaire , fig. 6. qui représente une portion d'é-
tabli, fur laquelle font montés deux égrifoirs. Voye^
Egrisoir.
BATON À CIMENTER , terme de Lapidaire, eft un
morceau de bois , gros par un bout & menu par l'au-
tre , où les Lapidaires enchâffent leurs cryftaux &
leurs pierres par le moyen d'un maftic. V. lajig. i$.
PI. du Lapidaire. Ce maftic n'eft autre choie qu'un
mélange de ciment &c de poix réfine.
BATON, en terme de Formier , c'eft un petit cylindre
garni d'une peau de chien de mer , dont on fe fert
pour frotter les formes ou autres ouvrages. Voye^
FROTTER , voyc^fîg. i. PI. du Formier-Talonnier.
Bâton à Gant , autrement Retournoir , ou
Tourne-gant, eft un morceau de bois fait en for-
me de fufeau long , dont les Gantiers fe fervent dans
la fabrique de leurs gants. Ils font ordinairement dou-
bles quand on s'en fert. Voye^ Gant & Tourne-
GANT.
Bâtonner un gant , ou réformer un gant, c'eft après
l'avoir fini, l'élargir fur le réformoir avec des bâtons
faits exprès, & appelles bâtons à gant, afin de lui
donner plus de forme.
BATON ADRESSER, c'eft, parmi les Orfèvres en
grojjbie , un rouleau dont on fe fert pour mettre de
niveau une plaque de métal mince, & qui voile au
gré de l'air. Voye^ Voiler. Voyt^ Pi. I. fig. 4.
BATON À TOURNER , en Paffementerie, eft un lîm-
ple bâton rond , de 7 à 8 pouces de long , aflez menu ,
qui a à 3 ou 4 lignes de l'un de les bouts, une peti-
te rainure tout à Fentour de lui-même , pour rece-
voir & tenir les deux bouts d'une moyenne ficelle ,
qui n'eft point coupée par fon autre bout ; ce bout
de ficelle non coupé s'introduit, fe fixe dans le petit
trou du bout de l'enfuple & s'enveloppe fur ce bout ,
jufqu'auprès»du bâton à tourner, qui fert ainli par le
mouvement de la main droite , à taire tourner l'en-
Tome II.
fuple fur le ployoir , lorfque l'on ploie les pièces re-
levées fur le billot , au fortir de deffus l'ourdiflbir.
Bâton ( en terme de Planneur ) eft un morceau de
bois de tremble ou de tilleul , fur lequel les Planneurs
nettoyent leurs marteaux.
Bâton rompu ( en Serrurerie ) eft un morceau
de fer quarré ou rond , coudé en angle obtus ; l'an-
gle eft plus ou moins obtus , félon l'endroit où le
morceau de fer doit être appliqué.
BATON DE SEMPLE (partie du métier d'étoffe dé
foie. ) Le bâton defemple eft rond , il a un pié &C de-
mi de long. On y attache les cordes de femple les
unes après les autres , & on les y fixe avec un nœud
courant. Pour cet effet , on double les cordes & on
forme une boucle double. Le bâton defemple eft pla-
cé au bas du métier , à l'extrémité inférieure des cor-
des defemple. Voye{ la defeription du métier à r article.
Velours.
Bâton DE RAME (partie du métier d' étoffe de foie")
Le bâton de rame a deux pies de long ; il eft de la mê-
me forme que celui du femple , & on y attache les
cordes de rame de la même manière que celles du
femple. Voye^la defeription du métier àl 'art. VELOURS.
Bâton de Gavassiniere, eft celui auquel on
arrête la gavaffiniere , pour difpofer la tireuie à tra-
vailler.
BATON de PREUVE ( en terme de Rafineur defucrè)
eft une efpece de bâton plat par un bout , allant ou
s'élargiflant un peu jufqu'à l'extrémité du même cô-
té. L'autre bout qui lui fert de manche eft rond , ôc
commence un peu plus haut que la moitié du bâton.
C'eft fur ce bâton trempé dans fa cuite , V. cuite,
que le rafineur prend la preuve & fait l'effai de la
matière. Foye{ Preuve. Il fert encore à battre dans
la chaudière à cuite, voye^ Chaudière à cuite,'
lorfque le lucre monte avant de prendre fon bouillon.
Bâton de croisure (Tapiffïer) eft un bâton
rond , ordinairement de bois de laule. On en tait de
diverfe longueur , mais tout d'un pouce de diamè-
tre. Les Hauteliffiers s'en fervent pour croifer les
fils de leurs chaînes. Voye^ Haute-lisse.
* Bâton ( Isle ) ou Buton ( Géog. ) île d'Afie,"1
dans la mer Indienne, à l'orient de l'île de Macaffar
ou Celebes , entre celles de "Wawani , Ccelinea , &
Cabinus.
BATONNÉE , f. f. BATONNÊE d'eau (en Mur. )
c'eft la quantité d"eau qu'on puife à la pompe , cha-
que fois qu'on fait jouer la brimbale. ( Z )
BATONNER , v. ac. ( en termes de Palais ) c'eft
foùligner un endroit d'un acte ou d'une pièce , pour
avertir le juge ou autre qui la lira, de faire une fin-
guliere attention à cet endroit. ( H")
BATONNIER des Avocats (Hijl. mod. ) eft un des
anciens de fa compagnie , qui pendant une année pré-
fide aux afièmblées & députations de fes confrères ,
comme le doyen , dans quelques autres compagnies ;
il n'eft que primus inter pares , & n'a aucune jurifdic-
tion fur l'ordre. Il ne peut point faire de reglemens
fcul , ni agir de fa propre autorité pour faire exécu-
ter ceux qui font faits ; il n'a que la fimple voie de
repréfentation & de remontrances. Ce qui donne
plus de confidération à fa place , c'eft la confection
du tableau ou lifte, qu'il dreffe pendant fon année
de tous les avocats fuivant le Palais , qui ont droit
d'y travailler. Voye^ Tableau.
On l'appelle apparemment Bâtonnier , à cauje du
bâton de la confrairie de Saint Nicolas, dont il eft
le chef, l'étant des avocats mêmes , qui tous en font
confrères nés. (#)
BATONNIERS , ou Huissiers à Baguette,
commis par le maréchal du banc du roi d'Angleterre,
pour accompagner les juges &: porter à la main une
baguette ou un bâton, dont le bout lupencur eft gar-
ni ^d'argent : ils accompagnent aufli les pnlonruers
I4<5
BAT
BAT
que l'on conduit aux tribunaux , ou que l'on ramène
en prilbn.
Ce nom fe donne aufli quelquefois à ceux qu'on
appelle ordinairement bâtons , qui font des gardes
des officiers de la flotte du Roi , & qui fe trouvent
dans les cours royales , tenant à la main une baguette
peinte, pour garder les prifonniers dans les priions ,
& pour les accompagner en public quand ils ont la
permiffion de fortir. Voyt?^ Bâton.
BATONNET {jeu d'enfant') : il fe joue avec deux
èdtonsj l'un long , affez gros , rond & long d'une aul-
ne ou environ ; l'autre plus petit, rond, aiguifé par
les deux bouts , & long de quatre à cinq pouces. On
tient à la main le gros bâton ; on frappe fur une des
extrémités pointues du petit qu'on appelle bâtonnet ;
le bâton s'élève en l'air ; & l'adrefle du jeu confifle à
le frapper , tandis qu'il eft en l'air , & à l'envoyer bien
loin. Si on ne l'atteint pas, ou û on ne l'envoyé pas,
en l'atteignant , à une certaine diflance , on cède le
Bâtonnet à fon adverfaire , &C l'on fe fuccede ainfi al-
ternativement.
* BATRACHITE , f. f. (Hift. nat. ) pierre qui fe
trouve, dit-on, dans la grenouille. On lui attribue de
grandes vertus contre les venins : mais l'exiftence
de la pierre n'eft pas encore conftatée.
BATRACHOMYOMACHIE, f. m.(Belles-Let.)
combat des grenouilles &des rats ; titre d'un poëme
burlefque , attribué communément à Homère.
Ce mot ell formé de trois autres mots grecs , /Sarpa-
yjç, grenouille, /jZ; , fouris ou rat , & fj.<t%n ; combat.
Le fujet de la guerre entre ces animaux eft la raort
de Plicarpax , jeune rat , fils de Toxafter , qui étant
monté fur le dos dePhyfignate grenouille, pour aller
viliter fon palais où elle l'avoit invité de venir, fut
faifi de frayeur au milieu de l'étang , chancela , lâ-
cha fa conductrice &c périt. Les rats foupçonnant Phy-
iignate de perfidie , en demandent fatisfaftion , dé-
clarent la guerre , & livrent bataille aux grenouilles
qu'ils auraient exterminées , fi Jupiter & les autres
dieux en préfence defquels fe donnoit le combat ,
n'enflent envoyé au fecours des grenouilles des can-
cres qui arrêtèrent la fureur des rats.
Suidas fait honneur de ce poëme à Pigrez ou Ti-
grés d'Halicarnafle , frère de l'illuftre Artémife , & le
nom de ce Carien fe lit à la tête d'un ancien manuf-
crit de la bibliothèque du Roi. Etienne Nunnélîus &
d'autres favans modernes , penfent aufli qu'Homère
n'en eft point l'auteur. Cependant l'antiquité dépofe
en faveur de ce poète , Martial le dit expreflement
dans cette épigramme.
Perlege Meonio cantatas carminé ranas ,
Et frontem nugis folvere difee meis.
Stace eft du même fentiment ; & ce qui femble
confirmer l'opinion des anciens à cet égard , c'eft que
dans le flecle dernier, on déterra près de Rome , dans
des anciens jardins de l'empereur Claude , un bas-re-
lief dArchelaùs, fculpteur de Pryene, repréfentant
un Homère avec deux rats , pour fignifier qu'il étoit
auteur du combat des rats.
Quoi qu'il en foit , feu M. Boivin , de l'académie
Françoife &i de celle des Belles-Lettres , a traduit ce
petit poëme en vers François ; & fa traduction eft
aufli exa&e qu'élégante : à cela près que pour la
commodité de la rime , il a quelquefois donné aux
rats & aux grenouilles , des noms différens de ceux
qu'ils ont dans le texte Grec. ( G )
* BATSK A ( Géog. ) grande contrée de la Hon-
grie , entre le Danube & le Théifs.
* B ATT A ( Géog. ) province du royaume de Con-
go , en Afrique , une de fes fix parties ; bornée au
ieptentrion par les contrées de Sundi & de Pango ; à
l'occident par celles de Pemba , & au midi parle lac
d'Aquelonda. Elle eft arrofée par la rivière de Bar-»
bêla.
* BATTAGE des blés , ( (Economie rujlique. ) Laif-
fez fuer vos blés dans le tas ; tenez-les engrangés pen-
dant trois mois , hors la quantité que vous deftinez à
la femaille ; celui que vous aurez fait battre quelques
jours après la moiflbn , vaudra mieux pour cet ufage :
fuivez la manière de battre de votre pays. En Gafco-
gne & en Provence , vous laiflêrez fécher vos gerbes
fur le champ ; vous aurez un nubilaire ou un appentis,
fous lequel vous puifliez mettre votre grain à cou-
vert dans le tems de pluie. Ces appentis 6c cette ma-
nière de fécher le blé , & de ne le lever du champ
que pour le battre , vous difpenferont d'avoir des
granges ; il ne vous faudra que des greniers. Préfé-
rez le battage au fléau. Il eft auflî avantageux & plus
Ample que celui oii les gerbes font foulées par des
chevaux , des mulets , ou des bœufs fur un aire ; ou
coupées & foulées par deux grofies planches épaif-
fes de quatre doigts , & garnies de pierres à fufil tran-
chantes , qui feroient traînées par des bœufs. Le pre-
mier eft en ufage en Gafcogne , en Itahe , en Pro-
vence; & le fécond en Turquie. En Champagne , en
Bourgogne, &c. nous nous fervons du fléau; nous
battons pendant l'hyver, nous prenons des hommes
de journée ; ils font l'un à un bout de la grange , l'autre
à l'autre bout ; la gerbe eft entre-deux , & ils frappent
alternativement fur l'épi de la gerbe , avec l'inftru-
ment appeïléjléau. Foye^ à l'article Flé au , 1 a deferip-
tion de cet inftrument. Quand le blé eft battu , il faut
le vanner, Voy. Vanner. Quand il eft vanné on le
crible. Voy. Crible & Cribler. Plus le grain eft net,
mieux il fe garde. Quand il eft criblé , on l'expofe à
l'air , pour que le refte de fa chaleur fe diflîpe.
Battage , en Draperie ; c'eft une des prépara-
tions que l'on donne aux laines avant que de les em-
ployer à la fabrication des draps. Cette préparation
fuccede au triage. Voy. Triage & Draperie. Elle
conflfte à les porter fur une claie de corde , & à les
battre, comme on voit PL de Draperie. A , la claie ;
B B , ouvriers battant les laines. Cette opération a
deux objets; le premier, de faire ouvrir la laine, ou
de la féparer par les coups de baguette ; le fécond ,
de la purger entièrement de la poufliere. Vqye^ C arti-
cle Draperie.
Battage , f. m. en termes de Salpétrier , fe dit du
tems qu'on employé à battre la poudre dans le mou-
lin. Les pilons font de bois , & armés de fonte , & les
mortiers de bois , creufés dans une poutre : quand ils
font de fer, il en arrive fouvent des accidens. Pour
faire la bonne poudre , il faut un battage de vingt-
quatre heures à 3 500 coups de pilons par heure, fi
le mortier contient 16 livres de compofition. Le bat-
tage eft moins rude l'été que l'hy ver , à caufe que
l'eau eft moins forte. Voyei Moulin À poudre.
BATTANS , f. m. pi. terme d' 'Architecture ; ce font
dans les portes & les croifées de menuiferie ,les prin-
cipales pièces de bois en hauteur, où s'aflemblent les
traverfes.
On appelle auflî battans , les venteaux des portes.
On dit une porte à deux battans , lorfqu'elle s'ouvre en
deux parties. Les Latins appelloient ces portes bifo-
res. (/>)
Battant de pavillon , ( Marine. ) On entend par
le battant du pavillon , fa longueur qui voltige en Pair.
On appelle le guindant fa largeur ou la hauteur qui
règne le long du bâton. ( Z )
BATTANT, terme de Fondeur de cloches ; c'eft une
mafle de fer un peu plus longue que la cloche , &
d'une pefanteur proportionnée au poids de la cloche.
Le battant eft terminé par en-bas par une mafle arron-
die, & va en diminuant jufqu'en- haut , où il fe ter-
mine par une elpece d'anneau , dans lequel on pafle
le brayer pour attacher le battant à l'anfe de fer qui
BAT
eft au cerveau de la cloche en-dedans. Voye{ A O ,
fig. 6. PL de la Fonte des cloches , 6t t 'article Fonte
DES CLOCHES.
Battans , en Menuifer'u ; ce font les mentans des
croifées , des guichets de portes , &c. c'eft-à-dire les
pièces de bois dans lefquelles les traverles s'emman-
chent, & qui forment la hauteur.
BATTANS à feuillures , dans le même métier ; ce font
ceux qui au lieu de noix ont une feuillure pour fer-
mer fur les dormans.
Battans menau ; font ceux dans les croifées qui
portent les efpagnolettes.
Battans à noix ; font ceux qui ont une languette
arrondie , qui entre dans une feuillure faite dans les
dormans : c'eft ce qu'on appelle croifée à noix.
Battant , partie effentielle de tous les métiers à
ourdir , fbit de TilTerans , de Drapiers , de Paflemen-
tiers , de Manufacturiers en foie , &c. & c'eft toujours
un infiniment ou chafïïs dans la partie inférieure du-
quel s'ajufte le peigne : entre les dents du peigne paf-
fent les fils de la chaîne; & ces dents par le moyen
du poids du battant, qui eft de cent livres dans les
étoffes riches , fervent à ferrer la trame dans l'étoffe ,
à l'y faire pour ainfi dire entrer, & à la rendre plus
forte. Voye{ métier de TlSSERANS , métiers de PAS-
SEMENTIER, de Drapier, de Manufacturiers
en Soie.
Il y a deux efpeces de battans ; le battant Jlmple , &
le battant brifé : le battant brifé ne fert qu'aux métiers
de velours uni ; les deux lames ou côtés du chafïïs
font coupés à deux ou trois pouces au-deffous de la
poignée ; & à cette partie du bois des lames enlevées,
on a lubftitué deux courroies un peu fortes. Cette
brifure elt nécefTaire pour faire drefTer le fer du ve-
lours & le ramener fur fa canelure. Vqyut Velours.
Lô battantjimple eft celui où les lames ou côtés du
chafïïs ne font point coupés , & font tout d'une pièce.
Battant, en Pajj'ementerie; c'eft le chaiïis qui
porte le peigne pour frapper la trame : dans le mé-
tier au battant , ce n'eft point l'ouvrier qui frappe lui-
même ( comme dans l'ouvrage au moule qui le frap-
pe avec un doigtier de cuivre) il ne fait que pouffer
avec la main le battant pour donner paffage à la na-
vette , le battant eft ramené de lui-même par la force
du bandage qui l'oblige de venir frapper la trame; ce
qui foulage beaucoup l'ouvrier.
Battant de locquet , en Serrurerie; c'eft une barre
de fer où l'on diftingue deux parties ; l'une appellée
la tête, & l'autre la queue. La queue eft percée , &
s'attache fur la porte avec une vis ou un clou ; l'au-
tre ou tête paffe dans le cramponet , & le ferme dans
le mentoneti
Il y en a qui ont la tête faite en mentonet ; d'au-
tres font droits , félon les lieux où on les pofe.
BATTE , f. f. infiniment commun à un grand nom-
bre d'ouvriers , chez qui il a la même fond ion , mais
non la même forme : elle varie , airili que fa matière ,
félon les différentes matières à battre. La batte des
Plâtriers &c des pileurs de ciment eft une groffe maffe
de bois emmanchée, bandée d'un cercle de fer , &
garnie de clous. Celle des Jardiniers eft tantôt à-peu-
près comme celle des Carreleurs, tantôt comme un
battoir de lavandières : c'eft un morceau de jois d'un
pied &c demi de long , épais d'un pied & demi , &
large de neuf pouces , emmanché d'un long bâton
dans le milieu. On s'en tert pour battre les ai.ées qui
font en recoupe ou en falpetre. Celle qui eft plus
courte, fert à plaquer du galon. Voye\ la Planche
de Jardinage. Celle des Maçons n'eft qu'un long bâ-
ton, terminé comme une petite maflue: celle des
Carreleurs eft une règle d'environ quatre pies de
long , large de cinq, & d'un pouce & demi d'épais ,
dont ils lé fervent poux frapper & mettre de niveau
leurs carreaux : celle des Vanniers eft toute de fer,
Tome JI,
BAT
147
ronde par le bout , terminée par l'autre en maffe
& s'employe à chaffer & ferrer les ofiers entre les
montans ; le petit bout de cette batte qui fe tient à la
main , a un arrêt pour qu'elle loit mieux empoignée:
celle des Tapiffiers n'eft qu'une baguette ou deux cor-
des repliés , dont ils écharpiffent la bourre & la lai-
ne qui ont déjà fervi : celle des Potiers -de -terre eft
un battoir. La batte-à-beurre eft faite d'un long man-
che , ajufté dans le milieu d'un rondin de bois de cinq
pouces ou environ de diamètre , fur un pouce d'é-
pais , percé de plufieurs trous ; voye^ fon ufage à l'ar-
ticle Beurre. Les Blanchiffeufcs ont leur batte ou
battoir ; ce n'eft qu'une pelle plate à manche court,
dont elles frappent leur linge pour en faire fortir l'eau
&lafaleté. La batte-à-bœuf des Bouchers n'eft qu'un
bâton rond dont ils battent les gros beftiaux quand
ils font tués ou foufflés , pour en attendrir la chair.
La batte à Fondeur eft ïïnguliere , fa pelle eft triangu-
laire. Voy. à l'article Fondeur en terre fon ufage ;
voyei aufïï les articles fuivans , où l'on définit plus
exactement quelques-unes des battes précédentes , &
quelques autres dont nous n'avons pas parlé.
Batte , ( Architecture. ) nom que les ouvriers de
bâtiment donnent à un morceau de bois fait en forme
de maffue d'Hercule, avec lequel ils battent le plâtre.
Batte , autre efpece d'outil qui fert à battre &c à
affermir les allées avant d'y mettre le fable, (f)
Batte , Ç Marbreur de papier. ) eft un bâton dont
une des extrémités eft enfoncée dans une portion de
cylindre, coupé tranfverfalement. Les Marbreurs fe
fervent d'une batte K pour broyer & délayer la gom-
me adragante dans une efpece de pot à beurre L ,
avant que de la verfer dans le baquet. Voye^ la fig.
K L dans le bas de la Planche du Marbreur.
Batte à recaler , fert aux Menuifiers à recaler ou
dreffer les onglets des cadres.
Battes , ( Manège &■ Sellier. ) Les battes font des
parties d'une felle à piquer élevées fur les arçons ,
fur le devant & le derrière , afin que le cavalier fe
tienne ferme , & que les fecouffes du cheval ne l'é-
branlent point : ordinairement les felles n'ont point
de batte de derrière. On dit chauffer une batte , pour '
dire qu'on met le liège de la felle dans la batte, afin
de tenir la batte en état. Le mot de liège vient de ce
qu'autrefois cette partie de la felle étoit de liège ;
car aujourd'hui elle eft de bois. (>^)
BATTE , outil de Facteur d'orgue , eft une forte rè-
gle de bois bien dreffée fur le plat , dont ils fe fer-
vent pour redreffer les tables de plomb fur l'établi,
& les ployer fur les mandrins. Voye^ la fig. 65. PI,
d'Orgue, &C 1' 'article ORGUE.
Batte , ( Rubanier. ) inftmment de fer en forme
de forte lime , mais uni & égal dans toute la lon-
gueur, lervantpour la fabrique des peignes. Cetinf-
tniment eft emmanché dans un manche de bois : il y
a de ces battes plus ou moins fortes , fuivant la ne-
cclïïté. f'oye^ Peigne.
Batte de jeu de Paume, c'eft un infiniment qu'on
appelle plus communément battoir , ou plutôt c'eft
la partie antérieure du battoir qui frappe la balle.
Voye^ Palmier.
Batte , terme de Potier de terre, c'eft une efpece de
maillet plat à quatre angles , & d'une même pièce
avec ion manche. Il fert à travailler le carreau.
Batte , en terme de Vannerie , eft un morceau de
feraffez lourd, & défigure quarrée , dont les Van-
niers fe fervent pour preffer leur olier de façon qu'il
n'y ait entre les brins qu'un très-petit intervalle ,
point du tout même fi l'on peut.
Batte , a la Monnaie , ce font des efpeces de fa-
bres de bois quarrés par le bout , d'environ deux pies
fur trois ou quatre pouces de large , & un pouce &
demi d'épaiffeur, avec un manche arrondi. Ces bat-
tes fervent à fouler & preffer les fables dont on fait
i48
BAT
tes moules , & leur faire prendre la forme à force de
frapper le iable.
Batte lessive, ou Batte-queue, petit oifeau
mieux connu fous le nom de bergeronnette. Voye^ BER-
GERONNETTE. ( /)
BATTÉE , f. f. c'en- le nom que les Relieurs don-
nent à une portion d'un livre qu'ils battent fur la
pierre : on met les différentes battées dans une preffe,
avec un ais entre chaque battit pour les façonner.
* BATTEL , ( Géog. ) ville d'Angleterre dans la
province de Suffex.
BATTELLEMENT , f. m. en Architecture, eft le
dernier rang des tuiles doubles par où un toit s'é-
goutte dans un chèneau ou une gouttière. C'eft le
ftillicidium des Latins. ( P )
Battemens , f. m. pi. en Médecine , agitations &
palpitations réciproques du cœur & du pouls. Voye.7^
Pouls.
Quelques médecins distinguent quatre-vingts-un
différentes fortes de battemens iimples , & quinze de
-battemens compofés : ils diient que le pouls en a foi-
xante par minute , dans un homme d'une conftitu-
tion bien tempérée : mais ils ne font point d'accord à
ce iiijet avec l'expérience générale. Voye^ Pouls.
(A0
Battement , en Arckiteclure , eft une tringle de
bois ou barre de fer plate , qui cache l'endroit où
les deux venteaux d'une porte de bois ou de fer fe
joignent. (P)
BATTEMENS , en Horlogerie, fe dit du coup que
donne à la couliffe l'étochio qui eft à la (circonfé-
rence du balancier lorsqu'il décrit de grands arcs, y.
Renversement.
Il ne doit point y avoir de battemens dans une mon-
tre , ou s'il y en a , ils doivent être fort légers , &
feulement lorfqu'elle eft nouvellement nettoyée ;
fans cela on aura beaucoup de peine à la régler.
Battement eft aufïi fynonyme à vibration : mais il
ne fe dit que de celles du balancier des montres ;
dans les pendules on fe fort toujours du mot de vi-
bration.
Le nombre des battemens qu'une montre doit don-
ner par heure a été long-tems incertain chez les Hor-
logers ; tantôt ils fixoient ce nombre à quelque chofo
de moins que 16000; tantôt ils le portoient juiqu'à
18000: enfin l'expérience a paru montrer que 17000
& quelque choie étoit le nombre le plus convenable.
Dans le premier cas les montres étoient fujettes à
varier par les fecouffes & par la chaleur ; dans le fé-
cond , le balancier devenant trop léger , & les inéga-
lités du roiiage étant augmentées à caufe de l'aug-
mentation des frottemens , ces deux caufes produi-
foient d'autres variations. Voye^ Vibration. (7")
Battement d'épée , en Efcrime , eft une atta-
que qui fe fait en frappant avec la lame de fon épée
celle de l'ennemi. Les battemens d'épié fe font tou-
jours de pié ferme , en dégageant ou fans dégager ,
fur les armes ou fous les armes.
Battemens d'épée en dégageant , fe font comme
les battemens Jîmples , excepté qu'on commence par
dégager. Voye^ Battement d'épée.
Battement d'épée de tierce , fans dégager fur les
armes ou fous les armes. Il fe fait en frappant d'un coup
fec du fort du faux tranchant fur celui de l'épée de
l'ennemi , en faifant un mouvement en avant com-
me quand on part ; &c au même inftant on allonge
l'eftocade de tierce ou de féconde fans quitter fon
épée.
Nota que dans l'inftant que vous frappez fur l'épée
de l'ennemi , il peut dégager ou la forcer : s'il déga-
geoit, alors vous ne rencontreriez pas fon épée ; c'eft
pourquoi en pareil cas , au lieu de pouffer l'eftocade
de tierce ou de féconde, vous allongerez une eftocade
de quarte ow*le quarte baffe ; ôc s'il force l 'épée, yous
BAT
porterez l'eftocade de quarte ou de quarte baffe en
dégageant. Voyt\ Premier Dégagement forcé.
BATTEMENT d'épée de quarte , fans dégager fur les
armes ou fous les armes. Il fe fait en frappant un coup
fec du fort du tranchant fur le fort de l'épée de l'en-
nemi , (on frappe ce coup en faifant un mouvement
en avant comme quand on pare ) & au même inftant
on allonge l'eftocade de quarte ou de quarte baffe
fans quitter la lame.
Nota que dans l'inftant que vous frappez fur l'é-
pée de l'ennemi , il peut dégager ou la forcer, & alors
vous ne rencontreriez pas fon épée ; c'eft pourquoi
en pareil cas , au lieu de pouffer l'eftocade de quarte
ou de quarte baffe , vous allongerez votre eftocade
de tierce droite ou de féconde ; & s'il force l'épée ,
vous porterez l'eftocade de tierce ou de féconde.
Foyei Premier Dégagement serré.
Battemens , en terme de Danfe , ce font des mou-
vemens en l'air que l'on fait d'une jambe , pendant
que le corps eft pôle fur l'autre , & qui rendent la
danfe tres-brillante , fur-tout lorfqu'ils font faits avec
légèreté.
La hanche & le genou forment & difpofent ces
mouvemens : la hanche conduit la cuiffe pour s'é-
carter ou s'approcher ; & le genou par fa flexion
forme le battement, en fe croifant foit devant foit
derrière l'autre jambe qui porte.
Suppofé donc que vous foyez fur le pié gauche ,
la jambe droite en l'air & bien étendue, il faut la
croifer devant la gauche , en approchant la cuiffe &
en pliant le genou , & l'étendre en l'ouvrant à côté ;
plier du même tems le genou en croifant derrière ,
puis l'étendre à côté , & continuer d'en faire plu-
sieurs de fuite , tant d'une jambe que de l'autre. On
mêle les battemens avec d'autres pas ; ils en rendent
la danfe beaucoup plus gaie.
Battemens funples. On fait , par exemple un coupé
en avant du pié gauche, & la jambe droite qui eft
derrière vient faire un battement en frappant la jam-
be gauche , & fe reporte du même tems en arrière
à la quatrième pofition. Ce battement Te fait les jam-
bes étendues, parce qu'aux demi-coupés que l'on fait
en avant , on doit être élevé fur la pointe , & les
jambes tendues; c'eft dans ce même tems que vous
faites ce battement: alors la jambe droite fe portant
en arrière , le talon gauche fe pofe à terre , & donne
la liberté au pié droit de fe porter à la quatrième
pofition , comme on le voit à l'article des coupés. V.
Coupé.
Il y a encore des battemens qui fe font différem-
ment des autres ; ce n'eft que des hanches qu'ils fe
forment, comme les entrechats , les caprioles , &£ au-
tres pas de ballet.
BATTERIE ( Art milit. ) on appelle ainfi dans
l'Art militaire tous les endroits 011 l'on place du ca-
non & des mortiers , foit pour tirer fur l'ennemi , foit
pour la deftrucf ion ou l'attaque des places de guerre:
ainfi une batterie de canon eft une batterie qui ne con-
tient que des canons , & une batterie de mortiers eft cel-
le qui eft deftinée au fervice des mortiers.
Dans un combat , on tire le canon à découvert fans
qu'il y ait aucune élévation de terre qui couvre ceux
qui le chargent , &c qui le font maneuvrer. Comme
il n'a pas ordinairement alors de pofition fixe , &
qu'il en change , fuivant que le général le croit né-
ceffaire , on ne peut lui pratiquer d'épaulement. Il
n'en eft pas de même dans l'attaque des places ; le ca-
non s'établit fixement dans les lieux où on le juge uti-
le ; & il eft ablblument nécelfaire , pour qu'on puilfe
le fervir fùrement , qu'il foit derrière un parapet affez
épais pour réfifter à l'effort du canon de la place.
La conftruft ion de ce parapet , qu'on appelle or-
dinairement épauUmentf eft proprement celle de la
BAT
BAT
149
laiterie. On en donnera ici le détail tel que M. de Vau-
ban le donne dans fon traité de T attaque des places.
Il faut , autant que l'on peut , que le lit du canon ,
c'eft-à-dire , l'endroit ou le terrein fur lequel il efl
placé , foit élevé de quelques pies au-deffiis du niveau
de la campagne.
Il faut donnerait parapet trois toifes d'épaifleur ,
&C fept pies 6c demi de hauteur.
On conftruit ces parapets de terre &c de fafeines ,
ou fauciflons.
On les trace avec un cordeau , ou avec de la mè-
che j parallèlement aux parties de la fortification
qu'on veut détruire. Cela fait, on prend de la terre
fur le devant de la batterie , en y pratiquant pour cet
effet , un petit foffé . On fait alternativement un lit
de terre bien foulé , &c un lit de fafeines mifes en bou-
tijj'es , c'eft-à-dirc couchées , félon leur longueur, dans
la largeur du parapet ; on les attache bien folidement
cnfemble par des piquets qui les lient de manière que
tous ces différens lits ne font qu'un feul & même
corps. On pofe des fafeines en parement , c'efl-à-dire,
couchées , félon leur longueur , le long de tous les
côtés du parapet ; elles font attachées fortement avec
des piquets à l'intérieur du parapet.
On élevé d'abord ce parapet jufqu'à la hauteur de
deux pies & demi ou trois pies , & l'on commence
enfuite les embrafures du côté intérieur de la batterie.
Elles fe font de dix-huit pies en dix-huit pies , afin
que le merlon , ou la partie de l'épaulement qui efl
entre les embrafures , ait affez de folidité pour rélif-
ter à l'effort du canon. Ces embrafures ont trois pies
d'ouverture du côté intérieur de la batterie, & neuf
du côté extérieur.
Les embrafures étant ainfi tracées , on achevé
d'élever le refle de l'épaulement , & l'on donne à la
partie du parapet plus élevée que les embrafures , la
pente ou le talud convenable pour que les merlons
ne s'éboulent pas dedans.
On appelle genouilliere delà batterie, la partie du
parapet depuis le niveau de la campagne , jufqu'à
l'ouverture des embrafures , dont les joues font les
deux côtés de l'épaiffeur de l'épaulement qui termi-
nent l'embrafure de part 6c d'autre.
Le parapet , ou l'épaulement , étant achevé , on
prépare les plattes-formes vis-à-vis les embrafures.
( Voye^ Platte-forme.) Lorfqu'elles font ache-
vées , on y fait conduire le canon.
La fig. 10. de la Planche VIII. de VArt milit. met-
tra au fait de tout ce qui concerne les batteries de ca-
non.
Elle repréfente le plan d'une batterie avec les plat-
tes-formes , & le canon pofé deffus vis-à-vis les em-
brafures ; & la fig. première de la Planche IX. fait voir
le profil d'une batterie avec une pièce de canon dans
fon embrafure , 6c prête à tirer.
On ajoutera ici , pour plus de détail , la manière
fuivante de conflruire une batterie de canon devant
une place affiégée ; elle efl tirée des Mémoires d 'Ar-
tillerie de M. de Saint-Remy.
Le commiffaire qui doit commander la batterie ,
commence par reconnoître le terrein avec quelques
officiers de ceux qui doivent y fervir, & enfuite il
fait provifion de toutes les choies néceffaires , com-
me des outils à pionniers de toutes fortes , le double
de ce qu'il y aura de travailleurs ; il doit en prendre
des qualités qu'il jugera à propos , félon le terrein ,
c'eft-à-dire , pour une terre graffe 6c de gafon , beau-
coup de bêches.
Dans du fable, beaucoup de pelles de bois ferrées.
Dans des pierres , ou dans la terre terme , des
hoyaux ou pics-hoyaux.
Des ferpes , maffes , haches & dcmoifelles , deux
de chaque façon par pièce ; des fafeines & des pi-
quets. Les fafeines doivent être de cinq à fix pies de
longueur , & environ dix pouces de diamètre , à cha-
cune trois bons liens.
Les piquets doivent être de trois pies & demi de
longueur , & un pouce & demi de diamètre par le
gros bout.
Lorfque le commifTairc fera fur le terrein deftiné
pour la batterie, il la tracera avec de la mèche & des
fafeines , & obfervera qu'elle foit parallèle à ce qu'on
lui aura marqué de battre. Il donnera dix -huit ou
vingt pouces d'épaiffeur à l'épaulement , fuivant les
bonnes ou méchantes terres ; & fuppofé que la batte-
rie foit de fix pièces , il faudra prendre vingt toifes
de terrein ; & pour diligenter la batterie , il faudra du
moins quatre-vingts travailleurs , qui feront partagés
moitié d'un côté , moitié de l'autre , & environ à
trois pies l'un de l'autre.
A l'égard des commilTaires & officiers qui feront
deitinés pour la batterie , il les portera de diflance en
dillance d'un & d'autre côté , afin de faire travailler
les foldats avec diligence ; après quoi il faudra jetter
la terre pour faire l'épaulement : ceux qui feront dans
le dedans de la batterie tireront de la terre de loin
pour ne pas s'enfoncer ; & ceux du dehors & du cô-
té de la place feront un foffé d'environ dix pies de
large & fix pies de profondeur , afin de trouver beau-
coup de terre , tant pour fe mettre à couvert du feu
de la place , que pour faire l'épaulement.
Il fera laiflèr entre le foffé & la fafeine qui aura
fervi à tracer la batterie , une berme d'environ trois
ou quatre pies , afin d'avoir plus de facilité à jetter la
terre fur l'épaulement pour raccommoder la batterie
lorsqu'elle fera éboulée par le foufle du canon de la
batterie même , & par le canon de la place.
Lorfqu'on aura affez jette de terre du fofTé fur
l'épaulement , ou que le jour commencera à faire voir
de la place les travailleurs , alors le commiffaire les
fera retirer de derrière , 6c les fera paffer devant pour
toujours jetter de la terre fur l'épaulement avec les
autres , 6c enfuite fafeiner le devant de la batterie ,
auffi-bien que les deux extrémités qu'il faut taire en
petit épaulement ; & pour cet effet , il fera faire un
petit foffé de côté & d'autre , afin d'avoir de la terre,
tant pour fe couvrir des pièces de la place , qui peu-
vent battre en rouage , que pour empêcher la com-
munication & les partages , qui font incommodes ,
des tranchées à la batterie ; & cette terre fervira aurtï
pour emplir & fortifier les merlons des deux bouts.
Lorfque le parement de la batterie fera fafeiné de
trois pies de hauteur , qui doit être celle de la ge-
nouilliere, il partagera les vingt toifes de terrein , qui
font cent vingt pies , en treize parties.
La première fera de neuf pies , pour le premier
merlon.
La féconde , de deux pies , pour une embrafure.
La troifieme , de dix-huit pies , pour le merlon
d'entre deux pièces , 6c tout le refte de même.
Ce fera encore pour le dernier merlon , neuf pies.
Il donnera de l'ouverture à Pembralure en dehors
de neuf pies, après quoi il partagera les embrafures
aux commiffaires & aux officiers qui leront avec lui,
fuivant qu'il fe pratique ordinairement , afin que les
commiffaires fanent fafeiner «S: piqueter avec foin
leurs embrafures ; on obfervera de mettre toujours
trois bons piquets par chacune fafeine contre les liens.
Il prendra garde, de tems à autre , que les commiffai-
res ouvrent & dégorgent les embralures, de maniè-
re qu'elles puifient battre en ligne dire&e, ce qui leur
aura été marqué ; après quoi il fera toujours fafeiner
& jetter de la terre à hauteur de iix pies ; & en cas
que la batterie (bit battue de quelque cavalier ou baf-
tion élevé , il la fera hauffèr de fept à huit pies, au-
tant qu'il en fera befoin. /•/■•'
Quand les embrafures feront bien taicinees &
dégorgées , & qu'il ne reliera plus de terre que. pour
ijo
A T
BAT
s'empêcher d'être vu de la place , on travaillera aux
plattes-formes , & l'on commencera à mettre le terrein
de niveau, enforte qu'il n'y relie aucunes pierres,
s'il le peut ; après quoi l'on doit pofer le heurtoir qui
fera de neuf pieds de longeur , fur neuf à dix pouces
en quarré , & enfuite le premier madrier qui fera de
neuf pies & £ de longueur, fur un pié de large &C deux
pouces d'épailfeur.
Le fécond fera de dix pies de longueur.
Le troifieme de dix pies & {.
Et tous les autres en fuivant jufqu'au nombre de
dix-huit , & toujours un demi-pié de plus les uns
que les autres , pour rendre la platte-forme depuis
les heurtoirs jufqu'au dernier madrier de recul , de
dix-huit pies de long , & dix-huit pies de large
au recul.
La platte-forme fera relevée depuis le heurtoir juf-
qu'au dernier madrier de recul de neuf à dix pouces,
& bien arrêtée au recul par deux gros piquets de
bois de charpente ; après quoi il pourra demander
à faire marcher le canon du grand parc , qui doit
être armé pour chaque pièce de deux lanternes &
deux refouloirs, autant d'écouvillons & de coins de
mire, & de huit leviers.
Les canoniers ordonnés pour mettre le feu au
canon , doivent avoir chacun deux dégorgeoirs , deux
fournimens , deux boute-feux ; & pour toute la bat-
terie , quelques tireboures du calibre des pièces.
Il faudra choifir un endroit pour un grand magafin
à poudre pour toute la batterie , derrière un foffé
relevé , ou redan de terre , & s'il n'y en a point ,
faire un épaulement à cinquante pas de la batterie.
Quelques-uns même font d'avis de porter ce ma-
gafin à cent pas, pour mettre à couvert une cin-
quantaine de barrils de poudre, & la fentinelle pour
les garder.
Il faudra auili avoir un petit magafin à poudre de
deux pièces en deux pièces , qui puifTe contenir deux
tonneaux de poudre, éloigné du recul des pièces
d'environ dix à douze pas, & couvert de fafcines,
avec un petit boyau de chaque côté pour y entrer ,
en cas que l'on foit vu de la place.
Il eft néceffaire que le canon arrive à nuit fer-
mante à la batterie avec toutes les munitions , & qu'il
y ait au moins de quoi tirer cent coups de chaque
pièce. Ces munitions feront mifes dans le grand ma-
gafin près la batterie , & dans les petits que l'on aura
faits à dix pas des platte formes ; & l'on ne perdra
aucun temps pour faire placer les pièces , afin qu'elles
puiffent être logées & en état de tirer la nuit même,
ii le général l'ordonne , ou à l'ordinaire à la pointe
du jour.
Le commhTaire doit avoir foin , fur toutes chofes ,
de vifiter de temps en temps les grands & petits
magafins ; afin qu'en prenant des mefures juftes , il
ne lui manque rien , ni poudre , ni boulets , ni four-
rage. Il faut même qu'il ait toujours des fafcines &z
des piquets pour raccommoder le foir les épaule-
mens & les embrafures ; & fur tout , que les platte-
formes foient bien nettes, & qu'il ne s'y répande
point de poudre , non plus que dans les magafins,
afin de ne point courir le rifque du feu qui arrive
fouvent fans toutes ces précautions.
Lorfque le canon eft prêt à tirer , on fait détruire
le côté extérieur des embrafures qu'on a laiffé ex-
près d'une très-petite épaiffeur , & feulement pour
cacher ou mafquer la batterie ouïes embrafures: ou
bien l'on tire le canon qui détruit bientôt cette ef-
pece de petit rideau. C'eft ce qu'on appelle démaf-
quer une batterie.
Pour tout ce qui concerne le fervice d'une batte-
rie de canon , voye^ Charge & Canon.
La table fuivante qui eft auffi tirée des mémoires
d'artillerie de M. de Saint-Remy , peut être fort utile
pour donner une connoiffance éxa£le de toutes les
chofes néceffaires à la conftruclion & au fervice
des batterries de canon.
Batteries du chemin couvert, font celles
qu'on établit fur la partie fupérieure du glacis peur
battre en brèche, lorfqu'on eft maître du chemin
couvert.
Ce qu'il y a d'effentiel à obferver dans ces batte-
ries, c'ell d'en ouvrir les embrafures , enforte qu'elles
découvrent bien toutes les parties de la place qu'elles
doivent battre , & qu'elles ayent une allez grande
pente du derrière au devant pour plonger julqu'au-
bas des revêtemens que l'on veut ruiner. Comme
leur conftruclion eft fort dangereufe , parce qu'elle
le fait fous le feu du rempart de la place , on les maf-
que quelquefois , c'eft-à-dire , qu'on met devant les
endroits où elles s'établiffent, des facs à laine, ou
quelqu'autre choie qui cache les travailleurs à l'en-
nemi. l'oye{ Batterie à ricochet, voye{ auffi.
PL XII. de l'Art milit. le plan des batteries du che-
min couvert.
Batterie de Mortier ; c'eft un lieu préparé
pour tirer les mortiers fur une place alîiégée. Ces
batteries ne différent de celles du canon , qu'en ce
qu'on ne fait point d'embrafures à leur épaulement.
Les plattes-formes de ces batteries ont un pié de
longueur & fix de largeur : le devant fe pofe à deux
pies de l'épaulement de la batterie.
Le magafin à poudre pour le lervice de la batterie ,
doit être derrière à quinze ou vingt pas, comme aux>
batteries de canon, avec un boyau de communica-
tion pour y aller en fureté. On met des planches ou
des fafcines avec de la terre deffus pour le garantir
du feu.
Les bombes chargées fe mettent à côté du même
magafin à cinq ou fix pas de dillance.
Pour ce qui concerne la manière de charger le mor-
tier & de le pointer, voye{ Mortier & Bombe.
Inflruclion de M. Camus des Touches , pour le fervice
d'un mortier de dou-{e pouces , à unjiége. Lorfque la bat-
terie eft conftruite , & que les mortiers y font logés ,
on affemble tout ce qui ell néceffaire pour l'exécu-
tion. Savoir : une provilion de bombes chargées ; une
botte de fourrage ; de la terre douce ; deux couteaux
de bois ou fpatules ; une bêche ; un pic-hoyau ; un
balai ; quatre leviers ; une demoifelle ; un crochet ;
une curette ou racloir; un quart de cercle ; deux bou»
te-feux ; deux coins de mire : chaque mortier doit être
auffi fourni , & avoir à portée de quoi remplacer
dans le befoin. Le Magafin à poudre fera dans le mi-
lieu de la batterie, vingt ou vingt-cinq pas derrière ;
& s'il faut un boyau pour y communiquer fans être
vu, on le tirera du milieu de la batterie, ou de quatre
mortiers en quatre mortiers, fi la batterie eft confidé-
rable; obfervant de lailfer un terre-plein entre le
mortier & le commencement du boyau , afin qu'on
puiffe fe remuer dans la batterie.
Les bombes chargées feront à côté du magafin à
quelques pas de diftance , la fufée renverfée enterre.
Les armes du mortier feront couchées à droite 6c à
gauche.
Pour fervir un mortier de douze pouces , il faut
un cadet bombardier, & quatre fervans. Le cadet &
ces quatre fervans doivent être placés comme il fuit,
avec ce qui fert au fervice du mortier.
A la gauche du mortier, f A la droite du mortier.
Deux fervans.
Une botte de fourrage.
De la terre douce.
Un couteau ou lpatule.-
Une bêche.
Un balai.
Le cadet.
Deux fervans.
Une demoifelle.
Un crochet.
Une curette ou racloir.
Un couteau ou fpatule,
BAT
t)eux leviers. | Un fac à poudre.
Un picq-hoyau.
I Deux leviers.
Les deux boutefeux feront mis derrière le mor-
tier. Le cadet bombardier doit avoir un quart de cer-
cle & un dégorgeoir. Il a loin d'aller chercher la pou-
dre dans un lac au petit magafin. Il charge le mortier
avec une mefure, après avoir mis Ion dégorgeoir
dans la lumière , & demande à l'officier qui comman-
de , à combien de poudre il veut qu'on charge ; il la
met dans la chambre du mortier , & l'égale bien avec
la main. Le premier fervant de la gauche lui fournit
un bouchon de fourrage; le premier de la droite lui
donne la demoifelle : le cadet refoule un petit coup
le fourrage qu'il a mis fur la poudre. Le premier fol-
dat de la gauche lui fournit de la terre douce fur la
bêche, pour mettre dans la chambre, &c achever de
la remplir.
Le cadet, après avoir placé cette terre, la refou-
le à petits coups, puis de plus fort en plus fort, juf-
qu'à ce que la chambre foit pleine , & fait fur la fu-
perfîcie un lit pour affeoir la bombe. Le premier fol-
dat de la droite remet la demoilelle en ion lieu. Le
fécond fervant de la droite, & celui de la gauche ,
prennent un levier & le crochet, & apportent la
bombe chargée; ils aident le cadet à la placer: le
cadet pofe la bombe bien droite dans l'ame du mor-
tier. Le premier fervant de la gauche lui fournit de
la terre pour mettre autour de la bombe avec le cou-
teau ou fpatule , que le premier de la droite lui don-
ne. Le cadet place la terre autour de la bombe, de
manière que fon centre le trouve , s'il ell poffible ,
dans l'axe de l'ame du mortier, que les anfes ibient en
haut & tournées fuivant l'alignement des tourillons.
Lorfque la bombe elt placée dans le mortier, le
cadet pointe en s'alignant fur le piquet planté au haut
de Fépaulement , & qui fert à s'ajufler ; & pour cela
les quatre fervans enfcmble prennent chacun un le-
vier; le premier de la droite & celui de la gauche ,
embarrent devant, & les deux autres derrière : tous
enlemble pouffent le mortier en batterie, fuivant le
commandement de l'officier ou du cadet; enfuite les
deux premiers fervans lui paffent un levier fous le
ventre , pour le baiffer & le hauffer fuivant les de-
grés de hauteur que l'officier ou le cadet veulent lui
donner ; & le fécond fervant de la gauche pouffe ou
retire le coin de mire pour cet effet , au commande-
ment qu'il en reçoit. Ce deuxième fervant avec fon
camarade delà droite, prennent chacun un levier
pour donner du flafque. Le mortier pointé, le cadet
retire fon dégorgeoir de la lumière , il amorce avec de
la poudre fine, & met un peu de poulverin fur le
baifinet, & iur la fufée de la bombe, après avoir
graté la compofition avec la pointe de ion dégor-
geoir , afin que le feu y prenne promptement. Le pre-
mier fervant de la droite prend le boutefeu , met le
feu à la fufée. Le premier fervant de la gauche , met
le feu au mortier au commandement de l'officier ou
du cadet, qui nefe donne que quand la fufée elt bien
allumée. Lorfque fon coup n'a pas beaucoup de por-
tée , il laiffe brûler quelque tems la fufée , & ordon-
ne le feu au mortier fuivant l'ertimation du tems
qu'elle doit encore durer, enforte qu'elle puiffe cre-
ver au moment après qu'elle ell tombée ; la longueur
de la fufée le connoît en comptant 1,2,3, &c- éga-
lement depuis fon commencement julqu'à fa fin. Le
cadet ou l'officier, en donnant le commandement, le
tiennent à portée de pouvoirobferver leur coup, pour
fc corriger, &c mieux ajuller dans la fuite. Quand la
bombe cil partie ,1e premier fervant de la droite net-
toyé le mortier avec la curette ou racloir , & un bou-
chon de fourrage, que celui de fa gauche lui donne.
Le fécond fervant de la gauche, a le foin de balaye*
toujours pendant qu'on fert la pièce, afin qu'il ne
BAT
151
relie point de poudre qui puiffe mettre le feu à !a batte-
ne. Les deuxlèconds fervans prennent chacun un le-
vier, les placent fous le ventre du mortier pour lé
mettre debout, & en état d'être rechargé. Le cadet
va à la poudre avec un fac, charge le mortier avee
la meiure, &c. chacun reprend le même polie 6k les
mêmes fondions enfeignées ci-deffus. Pour charger
les bombes , on les emplit de poudre avec un en-
tonnoir , on fait enfuite entrer la fufée par le petit
bout dans la lumière de la bombe , & on l'enfonce
avec un repouffoir de bois à coups de maillet de bois,
& jamais de fer.
Les petits mortiers fe fervent à proportion comme
celui de douze pouces. Ceux à grenades font lu vis
par un feu] homme; à l'égard du pierrier, il ne faut
que trois hommes. La différence qu'il y a de fon fer-
vice à celui du mortier, ell qu'au lieu de la bomfce ,
on met des pierres dans l'ame , fous lefquelles on pla-
ce un plateau ou une pierre platte , lefquels couvrent
la chambre. Ces pierres font arrangées jufqu'à la
bouche; quelquefois en les met dans un panier. Il
faut faire un amas de pierres à portée de la batterie ,
& dans la batterie même , & fur-tout en avoir quel-
ques unes de larges pour mettre au fond du pierrier :
ces pierres tiennent lieu de plateaux, il faut aufTi
que chaque pierrier foit muni d'une bonne civière
pour aller chercher les pierres.
Le pierrier fe met en batterie, & fe pointe comme
un mortier : le principal Bombardier a loin de bien
arranger les pierres ; & foit qu'on fe ferve du panier
ou qu'on ne s'en ferve pas , il faut qu'il y ait de la
terre autour pour ajuller la charge , ainli qu'on en
ufe autour de la bombe. Chacun de meffieurs les
commandans de l'école peuvent réduire l'exercice
du mortier à la voix ou au tambour : mais il faut ob-
ferver que chacune des fonclions foit dans l'ordre de
la préfente inflruclion.
Les foldats fervans qui fe trouveront le plus d'in-
telligence , feront quelquefois employés aux fonc-
tions de cadets ; on les changera de place de tems en
tems , afin qu'ils fâchent fervir également dans les
polies de droite ou de gauche , de premier ou de fé-
cond fervant. Les officiers & les (ergens tiendront
chacun dans leur devoir, & lurtout veilleront à la
propreté de la batterie; enforte qu'il n'y ait point de
poudre à terre , ou fur la platte-tormc qui puiffe cail-
ler aucun danger ; le feu ell bien plus à craindre dans
une batterie de mortiers , à caule des bombes char-
gées qui s'y trouvent : les plus exactes précautions
y font néceffaires.
Il ell à remarquer qu'une platte-forme de mortiers
ne peut avoir trop de lblidité : delà dépend la juflelTe
du mortier ; il faut que les lambourdes ayent au moins
fix pouces en quatre.
Récapitulation des différentes fonclions des cadets bom-
bardiers & foldats , dans l'exécution du mortier de dou^c
pouces.
Cadet va chercher la poudre; met le dégorgeoir
dans la lumière; charge le mortier; met le fourrage
fur la poudre , refoule avec la demoilelle fur le four-
rage ; refoule la terre douce; pofe la bombe, & met
de la terre à Pentour ; s'aligne fur ce qu'il veut bat-
tre; donne l'élévation avec le quart de cercle ; retire
le dégorgeoir de la lumière; amorce &; gratte la com-
pofition de la fufée ; ordonne le tcu au mortier ; c b-
ferve le coup.
Premier fervant de la gauche : donne le fourrage au
cadet , fournit la terre douce pour la chambre , don-
ne la terre pour mettre autour de la bombe , embar-
re fur le devant de l'affût pour l'alignement du mor-
tier fur le piquet, paffe un levier (bus le ventre du
mortier pour l'élévation , met le feu au mortier, don-
ne du fourrage à Ion camarade pour nettoyer.
Premier fervant de la çauJu : donne la dcmoifella
i5i
BAT
au cadet, la remet en fa place, donne le couteau ou
(patule , embarre au-devant de l'affût pour l'aligne-
ment fur le piquet, paffe un levier fous le ventre du
mortier pour l'élévation , prend le boute-feu , & met
le feu à la fufée , nettoyé le mortier avec la curette.
Deuxième fervant à la gauche : va chercher la bom-
be chargée, aide au cadet à la placer, embarre au
derrière de l'affût pour l'alignement, pouffe ou retire
le coin derrière pour l'élévation , prend un levier &
met le mortier debout.
Deuxième fervant de la droite : va chercher la bombe
chargée , aide au cadet à la placer , embarre au der-
rière de l'affût pour l'alignement , prend un levier ,
&c met le mortier debout , balaye la batterie. Mcm.
d'Artillerie de S. Remy, troijîeme édition.
Batterie à ricochet, c'efl celle qui eft def-
tinée à tirer le canon à ricochet.
On dit qu'on tire le canon à ricochet, lorfqu'on le
charge d'une quantité de poudre capable feulement
de chaffer ou porter le boulet vers le commencement
des faces des pièces attaquées. Il faut pour cela que
le canon foit pofté dans le prolongement de ces fa-
ces. Le boulet tiré de cette manière va en roulant &
en bondiffant , & il tue ou eftropie tous ceux qu'il
rencontre dans le cours de fon mouvement. Il fait
bien plus de defordre en allant ainfi mollement , que
s'il étoit chaffé avec force ou raideur.
Les batteries à ricochet ont été inventées par M. le
maréchal de Vauban : il commença à les employer
au fiege d'Ath en 1697. Voici ce qu'il preferit tou-
chant ces batteries, dans fon traité de ¥ Attaque des
places.
Pour tirer à ricochet il faut mettre les pièces fur la
femelle , c'eft-à-dire à toute volée , & charger avec
des mefures remplies & raclées avec exactitude, ver-
fant la charge dans la lanterne, & la conduilant dou-
cement au fond de la pièce , fur laquelle on coule la
bourre, appuyant deffus avec le refouloir lans battre.
La pièce étant chargée de la forte, pointée & polée
fur la femelle , comme il eft dit ci-deffus , il n'y aura
plus que le trop ou le trop peu de charge qui puiiTe
empêcher le coup d'aller où l'on veut. Mais on a
bien-tôt trouvé la véritable charge qu'il lui faut ; car
en chargeant toujours de même poudre & de médi-
re , on l'augmente ou diminue juiqu'à ce qu'on voie
le boulet entrer dans l'ouvrage, effleurant le fommet
du parapet, ce qui fe voit aifement, parce qu'on con-
duit le boulet à l'œil. Quand on a une fois trouvé la
vraie charge, il n'y a qu'à continuer : comme la pièce
ne recule pas, au moins fenfiblement , à caufe de
cette charge qui eft beaucoup plus petite que la char-
ge ordinaire , tant que la même poudre dure , le bou-
let fe porte toujours où il doit aller.
Obfervez auffi que quand on change de poudre , il
faut prendre garde au ricochet, & le régler de nou-
veau ; & quand il eft trop fort , c'eft-à-dire quand il
élevé confidérablement , il fera bon de Pabaiffer &
d'employer pour cet effet le coin de mire , & aug-
menter la charge afin de le roidir un peu davantage ;
il en devient plus dangereux : mais il faut prendre
garde à deux chofes ; l'une , de ne pas trop roidir ,
parce qu'il pourrait paffer fans plonger ; & l'autre ,
qu'il raie toujours les paniers dont les foldats affiégés
fe couvrent ; & quand il en abat quelqu'un , il n'elt
que meilleur ; car c'efl la perfection de bien tirer
que de rafer toujours le fommet du parapet le plus
près qu'il eit poffible , fans le toucher ; un peu d'ex-
périence & d'attention l'ont bientôt réglé.
Il faut encore bien prendre garde à une chofe , c'efl
que le ricochet ne doit pas taire bond im le parapet
des faces prolongées , mais fur le rempart qui efl der-
rière ; c'efl pourquoi il faut toujours laiffer quatre
toifes ou environ, depuis le devant des pièces que
J'on bat juiqu'à l'endroit où l'on pointe. Quand il y
BAT
a lieu de changer -d'objet & de battre en revers fur
le chemin couvert , ou dans le foffé ou fur l'arriére
des battions , il n'y a qu'à donner un peu de flalque
à la pièce , la repointer , & toujours l'abattre fur la
femelle , &C remonter enluite le ricochet juiqu'à ce
qu'on foit ajufté , après quoi il n'efl plus néceffaire
d'y retoucher. Quand les pièces font dirigées fur ce
qu'on veut battre , comme elles ne reculent point ,
on peut les affermir pour la nuit & le jour , & quand
même il faudrait les contenir par des tringles clouées
fur les plattes-formes pour mieux s'en aifùrer , cela
n'en ferait que mieux.
Le nombre des pièces aux batteries à ricochets doit
être depuis cinq juiqu'à huit ou dix ; fi l'on en met-
toit moins, le ricochet ferait trop lent, & laifferoit du
tems à l'ennemi , dont il pourrait fe prévaloir pour
travailler à les retranchemens.
Par cette raifon on ne doit jamais permettre de
tirer en falve , mais toujours un coup après l'autre
par intervalles égaux.
On ne doit jamais non plus tirer à ricochet qu'on
ne charge avec des mefures, c'efl de quoi on doit
être abondamment fourni.
Les mefures néceflaires doivent être de fer-blanc,
comme celles dont on mefure le fel ; favoir, d'une
once , de deux , de trois , de quatre , de huit qui font
la demi-livre , & de feize onces qui font la livre.
Cette quantité par chaque pièce doit fuffire , &
même on pourrait fe contenter de moins ; car s'il s'a-
git de charger d'une once , vous en aurez la mefure,
û de deux , vous l'avez auffi ; fi de trois , de même ;
fi de quatre , vous l'avez encore ; û de cinq , ajoutez
un à quatre ; fi de fix , ajoutez deux à quatre ; fi de
fept , ajoutez trois à quatre ; la huitième fait la demi-
livre , qui répétée deux fois fait la livre ; trois fois
fait la livre & demie ; quatre fois font deux livres.
II vaut mieux néanmoins avoir quelques mefures
de plus pour ne point tâtonner , & les faire toutes
numéroter avec bien de l'exactitude. On eft bientôt
accoutumé au ricochet, qui eft la meilleure & la plus
excellente manière d'employer utilement le canon
dans les lièges.
Les propriétés de ces batteries dans les commence-
mens d'un liège , font ,
i°. De démonter promptement les barbettes &
toutes les autres pièces montées le long des faces
des battions & demi-lunes , qui peuvent incommo-
der la tranchée , en battant à pleine charge.
2°. De plonger les foffés , y couper les communi-
cations de la place aux demi-lunes , principalement
s'ils font pleins d'eau.
30. De chaffer l'ennemi des défenfes de la place
oppofées aux attaques , en battant à ricochet.
40. De chaffer l'ennemi des chemins couverts , &
de l'y tourmenter tellement par la rupture des pallif-
fades, en les plongeant d'un bout à l'autre, qu'il foit
obligé de les abandonner.
50. De prendre le derrière des flancs & des cour-
tines qui peuvent s'oppofer aux paffages des foffés ,
& les rendre inutiles.
6°. D'être d'une grande ceconomie, en ce qu'elles
peuvent fervir tant que le fiége dure, fans qu'on foit
obligé de changer les batteries.
70. De conlommer fept ou huit fois moins de pou-
dre , & de ne tirer jamais inutilement.
8°. De tirer plus jufte & plus promptement , &
bien plus efficacement que par toutes les autres ma-
nières de battre.
Après les batteries à ricochet, il n'en faut pas d'au-
tres que celles du chemin couvert ; car pour ce qui
elt de rompre les défenfes, outre qu'elles font de lon-
gue dilculîîon, c'efl une erreur, on ne le fait jamais;
&c il n'arrive point qu'un parapet à l'épreuve foit
affez râlé pour que l'on ne s'en puùTe plus fervir.
D'ailleurs
BAT
D'ailleurs cela eft inutile quand le ricochet eft bien
placé & qu'il fait fon devoir : ainfi toutes les autres
batteries néceffaires doivent s'établir fur le haut du
parapet du chemin couvert , 6c fe doivent border ;
elles font toutes de même efpece , mais elles ont dit—
férens nfages.
Les premières en ordre doivent être les àeuxd, d ,
(Planche XVII. de VArt milit. fig. i .) quatre pièces
chacune deftinées à l'ouverture de la demi-lune C ;
on les place de part & d'autre de fon angle , à peu
près dans les endroits marqués d, d ; 6c quand la de-
mi-lune eft prife , on les peut changer de place , en
les mettant un peu à droite & un peu à gauche , pour
enfiler fon foffé , afin de pouvoir battre en brèche les
épaules des baftions , comme on le voit en e, t.
Après que les brèches font faites , foit à la demi-
lune , foit aux baftions , & bien éboulées , on tient ces
batteries en leur premier état, toujours prêtes à battre
le haut jufqu'à ce qu'on en foit le maître ; on biaife
même les embrafures pour aggrandir les brèches ,
obfervant que pour faire brèche avec le canon , il
faut toujours battre enfalve, 6c le plus bas qu'on peut,
mais jamais le plus haut, parce que cela attire des
ruines au pié qui rompent l'effet du canon. Pour bien
faire , il ne faut pas que la fape ait plus de fix à fept
pies de haut. On ne doit jamais quitter le trou qu'on
bat, qu'on ne l'ait enfoncé de 8 à 10 pies au moins ,
après quoi on leur fait élargir la brèche , comme on
l'a dit ci-deffus , ce qui eft une affaire de vingt-quatre
heures au plus : on peut donc dire que les batteries des
demi-lunes ont trois ufages :
Le premier, eft celui d'ouvrir la pièce attaquée.
Le fécond , de battre le haut de la brèche.
Et le troifieme , d'ouvrir le corps de la place par
des orillons.
Les fécondes batteries en ordre font celles mar-
quées h , h , {Planche XV II. de VArt milit. fig. i .) , qui
s'établifTent fur le haut du chemin couvert , devant
les faces des baftions A B qu'on veut ouvrir.
Les bombes peuvent aufîi fe tirer à ricochet. M M.
les commandans de l'école d'artillerie de Strasbourg
ont fait en 1 723 dés expériences à ce fujet, rapportées
de cette manière dans le Bombardier François. « Pour
» tirer les bombes à ricochet, on fe fert de mortiers
» de huit pouces montés fur des affûts de canon. Les
» batteries que l'on fait pour cela , fe placent fur le
» prolongement des branches du chemin couvert , ou
»> de tout autre ouvrage , mais principalement du
M chemin couvert , parce que les bombes y font un
» fi grand ravage , qu'il n'eft prefque pas poffible de
» pouvoir y tenir. Elles rompent les palliflades , les
» tambours 6c réduits que l'on fait dans des places
» d'armes rentrantes, 6c caufent bien plus de defor-
» dre que les boulets ; car non-feulement elles font
» plus grofTes & plus pelantes , mais après avoir fait
» plufieurs bonds , elles crèvent à l'endroit oii elles
» viennent fe terminer &c ne s'enterrent point. Leurs
» éclats font toujours meurtriers ; d'autre part ces
» mortiers peuvent être fervis avec beaucoup plus
» de célérité que les canons; car il n'eft queftion que
» de mettre la poudre dans fa chambre , la bombe
» defîus , & tirer ; & comme cela peut fe faire en 3
» ou 4 minutes , une batterie de deux mortiers fervie
» de cette façon , pourra jetter trente ou quarante
» bombes par heure. Je laiffe à penfer , ajoute M.
» Belidor , fi un chemin couvert étoit croifé par de
» femblables /'.i«i.T/«, quelle eft la garniion qui pour-
» roit s'y maintenir, l'avantage qu'on auroit de l'at-
» taquer de vive force , & combien on auroit de ta-
» cilité pour avancer les travaux. »
» Comme il faut éviter que les bombes ne s'enter-
» rent en tombant , parce qu'elles ne feroient point
» le ricochet , les mortiers ne doivent jamais être
» pointés au-defîus de 1 z degrés : mais on peut fe
Tome II,
BAT
r53
» fervir de tous les angles que le mortier peut faire
» avec l'horifon entre 8 & 1 2 degrés , & choifir le
» plus convenable à la charge dont on fe fervira ,
» relativement à la diftance dont on fera de l'endroit
» où les bombes doivent commencer à bondir. Les
» épreuves faites à Strasbourg peuvent fervir de re-
» gle à ce fujet. Voici en quoi elles confiftent.
» On a conftruit une batterie à 70 toifes de l'angle
» faillant du chemin couvert de la demi-lune du po-
» lygone de cette école : un mortier pointé à 9 degrés
» au-deffus de la ligne horifontale , 6c chargé de 1 3
» quarterons de poudre , a jette les bombes fur le gla-
» cis , à 2 , 4 , 6 , 8 toifes du parapet du chemin cou-
» vert , d'où elles fe relevoient & alloient plonger
v dans la branche entre les deux traverfes , & de-là
» dans la place d'armes rentrante contre un petit ré-
» duit qu'on y avoit fait.
» L'on a pointé enfuite à 10 degrés avec la même
» charge , & après 5 ou 6 coups répétés de cette
» manière , l'on a obfervé que les bombes tomboient
» dans la place d'armes faillante , d'où elles fe rele-
» voient & alloient plonger, comme les précédentes,
» dans la branche entre les deux traverfes , & de-là
» dans la place d'armes rentrante. Enfin on a pointé
» le mortier à 1 1 degrés toujours avec la même char-
» ge , & après 5 ou 6 coups réitérés , on a obfervé
» que les bombes tomboient encore dans la branche ,
» entre les deux traverfes ; d'où elles fe relevoient ôc
» alloient pafîer par-deffus le refte du chemin cou-
» vert : ce qui a fait conduire que la manière la plus
» avantageufe & la plus convenable de faire agir ce
» ricochet, étoit de ménager la direction du mortier;
» de forte que les bombes pûflént tomber fur la crê-
» te du chemin couvert , ou dans la place d'armes
» faillante , moyennant quoi elles faifoient toujours
» un grand effet.
» On a éprouvé fi la fufée ne s'éteindroit point j
» foit par la chute des bombes , ou par le frottement
» du ricochet en roulant ; & pour cela on en a fait
» tirer plufieurs avec des fufées allumées , qui ont
» toutes réuffi, ayant été entièrement confumées. »
Batteries en rouage , font celles qu'on defti-
ne à démonter les pièces de l'ennemi.
Batteries enterrées , font celles dont les
plattes-formes font enfoncées dans le terrein de la
campagne; de manière que ce terrein fert de parapet
ou d'épaulement à la batterie , & qu'on peut y pra-
tiquer des embrafures.
Batteries directes , font celles qui battent à
peu près perpendiculairement les côtes des ouvra-
ges devant lefquels elles font placées.
Batterie meurtrière. Voye^ Batteries de
revers.
Batteries de revers, font celles qui battent
le derrière d'un ouvrage , & qui voyent le dos de
ceux qui le défendent. Elles font aufîi appellées bat-
teries meurtrières , à caufe qu'elles font les plus dan-
gereufes , & qu'il eft fort difficile de fe parer ou met-
tre à couvert de leur canon.
Batteries en éc harpe, font celles dont les tirs
font un angle au plus de 20 degrés avec les faces ,
ou les côtés des pièces qu'elles battent. On les ap-
pelle aufTi quelquefois batteries de bricole ; parce que
le boulet ne faif ant , pour ainfi dire , qu'effleurer la
partie fur laquelle il eft tiré , fe réfléchit dans les en-
virons , à peu près comme le fait une balle de bil-
lard , qui a frappé la bande obliquement.
Batterie d'enfilade , eft celle qui découvre
toute la longueur de quelque partie d'un ouvrage de
fortification; enforte que le boulet peut prendre par
le flanc ou le côté, tous ceux qui font placés fur ce
cote , & qui font face au parapet.
Batteries en croix , ou Batteries croi-
sées , ou encore en chapelet, font dans VArt mk
Y
'54
BAT
litaire des batteries qui fe croifent pour battre la mê-
me face ; enforte que l'une achevé ce que l'autre a
commencé d'ébranler. ( Q )
Batteries ( Marine.) c'eft une quantité de ca-
nons placés des deux côtés du vaiffeau, à Ton avant
& à ion arrière.
Les gros vaiffeaux de guerre ont trois batteries ; la
première qui eft la plus baffe , porte les canons du
plus tort calibre. La leconde eft au-deffus de la pre-
mière , c'eft-à-dire au fécond pont , Ôc porte des ca-
nons d'un moindre calibre. La troilieme eft fur le
dernier pont , ou pont d'en-haut ; chaque rang étant
ordinairement de quinze fabords , fans y comprendre
ceux de la fainte barbe , & les batteries qui font fur les
châteaux. La première batterie, qui eft la plus baffe ,
doit être pratiquée affez haut, pour que dans le gros
tems elle ne foit pas noyée , c eft-à-dire qu'elle ne le
trouve pas fous l'eau , ce qui la rendrait inutile.
Voye^ à la PL I. Mar. la manière dont les batteries
font diipofées dans un vaiffeau du premier rang.
Batterie trop basse ou Batterie noyée,
fe dit d'un vaiffeau qui a fon premier pont , & fes
fabords trop près de l'eau.
Batterie basse , fe dit de la batterie du premier
pont.
Batterie haute , fe dit de la batterie du pont
d'en-haut.
Batterie entre deux ponts ou seconde
Batterie.
Mettez la batterie dehors , c'eft-à-dire , mettez les
canons aux fabords.
Mettez la batterie dedans , c'eft-à-dire , ôtez les
canons des fabords pour les remettre dans le vaif-
feau. (Z)
Batterie ( terme d Arquebujîer) c'eft un morceau
de fer large d'un bon pouce , qui eft reployé en équer-
re plate , dont les faces extérieures font un peu ar-
rondies ; les intérieures font exactement plates : la fa-
ce de deffous fert pour couvrir le baffinet & empê-
cher l'amorce de fortir : celle qui la furmonte fert
pour faire fortir du feu de la pierre & allumer l'a-
morce. La partie qui couvre le baiîinet a une petite
oreille plate, qui eft percée d'un trou où fe place une
vis qui affujettit la batterie au corps de platine , &
qui ne l'empêche point de fe mouvoir en tournant
deffus la vis. Le bout de cette oreille forme un petit
talon qui eft fait en rond , & qui pefe fur le reffort
de la batterie.
Batterie ( en Boiffellerie ) c'eft le pie, ou le def-
fous , ou fond du tamis. On l'appelle peut-être ainii,
parce que l'on remue le tamis en le battant par en
bas fur une table , &c pour mieux faire paffer ce
qui eft dedans.
Batterie ( terme de Chapelier) qui fignifîe l'en-
droit où on foule les chapeaux, & oii font établis le
fourneau , la chaudière &; les fouloirs. On dit une
batterie à deux , à quatre , à huit, &c. pour défigner
une foulerie où deux, quatre, huit , &c. ouvriers
peuvent travailler à la fois. Voye^ Foulerie. Foyar
auffi Chapeau.
Batterie, fe dit dans les Manufactures à pa-
. pier , à poudre , & autres , de la chute des pilons dans
les mortiers. Ainfi arrêter la batterie, c'eft empêcher
les pilons de tomber dans les mortiers. Voye7^ Mou-
lin À Papier, Moulin à Poudre.
Batterie {che£ les Chapeliers & Bonnetiers) eft
fynonyme à foulerie. Voye^ Chapelerie & BON-
NETERIE.
BATTEURS D'ESTRADE , ( Art militaire. ) font
des cavaliers que le général envoyé pour reconnoî-
tre les environs du camp qu'il occupe , & les ave-
nues ou chemins par où l'ennemi pourroit s'avancer
pour l'attaquer. Ces troupes doivent fe porter en-
•avant avec beaucoup de cirçonfpe&ion, afin qu'elles
BAT
ne foient pas coupées par l'ennemi , qui pourroit en-
fuite tomber fur le camp Se le furprendre. Elles doi-
vent auffi fouiller exactement les bois & tous les en-
droits fourrés des lieux où elles paffent, pour s'af-
fûrer qu'il n'y a point d'ennemis cachés. Voye^ Re-
CONNOÎTRE. (Q)
Batteur , 1. m. nom commun dans les Arts mé-
chaniques , à un grand nombre d'ouvriers dont l'em-
ploi eft d'écrafer , de pulvérifer , ou d'étendre : &
pour les diftinguer les uns des autres , on ajoute au
terme batteur celui de la matière, & l'on dit batteur
de plâtre , de loude , d'étain , d'or , &c.
Le batteur de plâtre, eft celui qui écrafe le plâtre
après qu'il eft cuit : pour cet effet il en étend à terre
une certaine quantité , qu'il frappe avec fa batte juf-
qu'à ce qu'il l'oit affez menu pour être gâché.
Le batteur de foude , eft celui qui chez les Epiciers
pile la foude dans un mortier de fer avec un pilon
de même matière.
Le batteur d'étain , eft celui qui chez les Miroitiers
étend fur un marbre l'étain qui doit être appliqué
en feuilles très-minces derrière les glaces.
Le batteur d'or , eft celui qui réduit fur le marbre
l'or dans ces feuilles très-minces qu'on vend par li-
vrets , & qui fervent à dorer la plupart des ouvrages
qui fe font en argent , en cuivre , en bois , &c. On
trouvera à l'article Battre l'or une defeription
étendue du métier du batteur d'or.
Les Batteurs-d'or à Paris font un corps de maîtres-
marchands , ayant des ftatuts , privilèges & regle-
mens , fuivant lefquels ils fe conduifent dans leur
communauté : ils ne font pas plus de trente envi-
ron , dont les uns ne battent que de l'or unique-
ment , & les autres l'argent ; ayant néanmoins le
choix de l'un ou de l'autre commerce , & pouvant
même les faire tous deux à la fois.
* Batteur en grange ; c'eft à la campagne l'ou-
vrier ou l'homme de journée qui frappe le blé avec
un fléau , pour faire fortir le grain de l'épi. V. Blé.
B ATTITURES , f. f. {Mat. med.) écailles des mé-
taux qui s'en leparent en les batçant : elles ont les
mêmes ufages en Médecine que les métaux dont on
les tire. ( A^ )
BATTOIR, f. m. {Arts mèchaniq.) infiniment
de bois plat, large & quarré , qui eft plus ou moins
épais , félon les différens ufages auxquels il doit être
appliqué , & qu'on tient à la main par le moyen d'un
manche rond & tout d'une pièce , avec l'autre partie
que j'appelle lapelle. Les Blanchiffeufes & autres ou-
vriers ont leurs battoirs, foye^ Batte.
Battoir , terme de Paume , eft un infiniment rond
ou quarré par un bout, garni d'un long manche , le
tout couvert d'un parchemin fort dur : on s'en fert
à la longue paume pour chaffer les balles.
Battorie , f . f . ( Comm.) nom que les villes An-
féatiques donnent aux comptoirs ou magafins qu'el-
les ont hors de chez elles. Les principales de ces bat-
tories font celles d'Archangel , de Novogrod , de Ber-
ghen , de Lisbonne , de Venife & d'Anvers. Elles en
a voient auffi une à Londres : mais il y a déjà du tems
qu'elles s'en font retirées à caufe des impofitions ex-
ceffives qu'on mettoit fur leurs marchandifes. ( G )
* BATTRE , frapper, ( Gramm. ) Battre marque
plufieurs coups ; c'eft avoir frappé que d'en avoir don-
né un. On n'eit point battu qu'on ne foit frappé ; on eft
quelquefois frappéfans être battu. Battre fuppofe tou-
jours de l'intention ; on peut frapper fans le vouloir.
Le plus violent frappe le premier ; le plus foible doit
être battu. Frapper eft toujours un verbe aftif ; battre
devient neutre dans fe battre : car fe battre ne fignifîe
point fe frapper foi-même de coups redoublés , mais
feulement combattre quelqu'un. La loi du prince dé-
fend de fe battre en duel ; celle de Jefus-Chrift dé-
fend même de frapper.
BAT
BATTRE , en termes de CArt militaire , lignifie atta-
quer une place , un ouvrage , &c. avec beaucoup
d'artillerie. Voye{ Batterie.
Battre en brèche ; c'eft ruiner avec le canon le re-
vêtement ou le rempart de quelque ouvrage que ce
foit , pour y faire une ouverture par laquelle on
puifle y entrer.
Battre par camarade , eft quand plusieurs pièces de
canon tirent tout à la fois fur un même ouvrage , foit
d'une même batterie , foit de pluiieurs.
Battre enfalve; c'eft tirer toutes à la fois les diffé-
rentes pièces d'une batterie , avec lefquelles on bat
un ouvrage en brèche.
Battre en écharpe ; c'eft battre un ouvrage fous un
angle au plus de 20 degrés.
Battre de bricole ; c'eft battre un ouvrage par ré-
flexion, c'eft- à- dire faire frapper le boulet à une
partie du revêtement , enforte qu'il puifle le reflé-
chir , & le porter à celle qu'on veut détruire ou in-
commoder.
Battre enfappe ; c'eft battre un ouvrage par le pié
de fon revêtement. ( Q )
Battre la chamade. Voyt^ CHAMADE.
Battre la mefure , en Mufique ; c'eft en marquer
les tems par des mouvemens de la main ou du pié ,
qui en règlent la durée , tk qui rendent toutes les
mefures femblables parfaitement égales en tems.
Il y a des mefures qui ne fe battent qu'à un tems ,
d'autres à deux , à trois , & à quatre , qui eft le plus
grand nombre de tems que puifle rentermer une me-
fure : encore cette dernière efpece peut-elle toujours
fe rélbudre en deux mefures à deux tems. Dans tou-
tes ces différentes mefures , le tems frappé eft tou-
jours fur la note qui fuit la barre immédiatement ;
celui qui la précède eft toujours levé , à moins que
la melure ne foit à un feul tems.
Le degré de lenteur ou de vîtefle qu'on donne à la
mefure , dépend i°. de la valeur des notes qui la
compofent ; on voit bien qu'une mefure qui contient
une ronde , doit fe battre plus pofément tk durer da-
vantage que celle qui ne contient que deux croches :
%°. du cara&ere du mouvement énoncé par le mot
François ou Italien , qu'on trouve ordinairement à la
tête ae l'air. Gravement , gai, vite , lent , &c. font au-
tant d'avertiflemens fur les manières de modifier le
mouvement d'une efpece de mefure.
Les mufleiens François battent la mefure un peu
différemment des Italiens : ceux-ci dans la mefure à
quatre tems , frappent fucceflivement les deux pre-
miers tems, tk lèvent les deux autres ; ils frappent
aufli les deux premiers dans la mefure à trois tems ,
& lèvent le troilieme. Les François ne frappent ja-
mais que le premier tems , & marquent les autres
par différens mouvemens de la main à droite & à
gauche : cependant la MuliqueFrançoilc auroit beau-
coup plus beloin que l'italienne d'une menue bien
marquée ; car elle ne porte point fa cadence par elle-
même ; le mouvement n'en a aucune précilion natu-
relle ; on le prefl'e , on le ralentit au gré du chanteur.
Tout le monde eft choqué à l'opéra de Paris du bniit
defagréable tk continuel que fait avec Ion bâton ce-
lui qui bat la mefure. Sans ce bruit perfonne ne la
fentiroit : la Mulîque par elle-même ne la marque
point ; aufli les étrangers n'appcrçoivent-ils prelque
jamais la mefure dans les mouvemens de nos airs. Si
l'on y réfléchit bien, on trouvera que c'eft ici la dif-
férence fpécifique de la Mufique Françoifc & de l'I-
talienne. En Italie , la mefure eft Famé de la Mufi-
que ; c'eft elle qui gouverne le muiieien dans l'exé-
cution : en France , c'eft le muiieien qui gouverne la
mefure , tk le bon goût coniîfle à ne la pas même
laifler fentir.
Les anciens , dit M. Burette , battoient la mefure
en pluiieurs façons : la plus ordinaire çonfiftoit dans
Tome II,
BAT
Mî
le mouvement du pié , qui s'élevoit de terre & la
frappou alternativement , félon la mefure des deux
tems égaux eu inégaux {Voye-^ Rythme ) : c'étoit
ordinairement la fonûion du maître de Mufique ap-
pelle Coryphée , Kopuçaîof ; parce qu'il étoit placé au
milieu du chœur des mufleiens , tk dans une fituation
élevée, pour être vu & entendu plus facilement de
toute la troupe. Ces batteurs de mefure fe nommoient
en Grec vAs./.-rLr.u tk ttcSc-^oçu , à cauie du bruit de
leurs pies ; Bw-wapio* , à caute de l'uniformité , & lî
l'on peut parler ainfi , de la monotonie du rythme
qu'ils battoient toujours à deux tems. Ils s'appelloienf
en Latin pedarii , podarii , pedicularii. Us garniflbient
ordinairement leurs pies de certaines chauflures ou
fandales de bois ou de fer, deftinées à rendre la per-
euflion rythmique plus éclatante , & nommées en
GrCC y.pobmÇia. , Kpovrra.Xa. , ;:fcii7mu. ; & en Latin pc-
dicula , fcabella ou fcabilla , à caufe qu'ils reflem-
bloient à de petits marche-piés , ou de petites efca-
belles.
lis battoient la mefure non-feulement du pié , mais
aufli de la main droite , dont ils réuniflbient tous les
doigts pour frapper dans le creux de la main gau-
che ; & celui qui marquoit ainli le rythme s'appel-
loit manudiiclor. Outre ce claquement de main tk le
bruit de fandales , les anciens avolent encore pour
battre la mefure , celui des coquilles , des écailles
d'huîtres , & des oflemens d'animaux , qu'on frap-
poit l'un contre l'autre , comme on fait aujourd'hui
les caftagnettes , le triangle , tk autres pareils inftru-
mens. ( S )
Battue , a plufleurs fens dans le Manège , oîi l'on
dit qu'un cheval bat à la main ou bégaye , pour mar-
quer un cheval qui n'a pas la tête ferme , qui levé ie
nez , qui branle & fecoue la tête à tout moment en
fecoiiant fa bride. Les chevaux turcs tk les cravates
fontfujets à battre à la main. Un cheval ^f à la main ,
parce qu'ayant les barres trop tranchantes , il ne peut
fouffrir la fujétion du mors , quelque doux qu'il foit.
Pour lui ôter l'envie de battre à la main , Se lui affer-
mir la tête , il n"y a qu'à mettre fous fa muferole une
petite bande de fer plate &t tournée en arc , qui ré-
ponde à une martingale. Cet expédient au refte ne_
fait que fufpendre l'habitude ; car la martingale n'eft
pas plutôt ôtée, que le cheval retombe dans fon vi-
ce. Voye^ Martingale. On dit aufli, qu'un cheval
bat la poudre ou la poujjiere , lorfqu'il trépigne , qu'il
fait un pas trop court , tk avance peu : ce qui le dit
de tous fes tems & mouvemens. Un cheyal bat la pou-
dre au terre-à-terre , lorfqu'il n'embrafle pas allez de
terrein avec les épaules , tk qu'il fait tous fes tems
trop courts , comme s'il les raifort dans une place.
Il bat la poudre aux courbettes , lorfqu'il les hâte trop
& les fait trop bafles. Il bat la poudre au pas , lors-
qu'il va un pas trop court , & qu'il avance peu , foit
qu'il aille au pas par le droit, ou fur un rond, ou
qu'il paflege. On dit enfin qu'un cheval bat du flanc ,
quand il commence à être pouAit. Le battement des
flancs du cheval eft une marque de plufleurs mala-
dies. Battre des flancs , c'eft les agiter avec violence.
(O
Battre Peau , terme de Chajfe ; quand une bête eft
dans l'eau , alors on dit aux chiens , il bat l'tau,
Se faire battre ; c'eft fe faire chafler long-tems dans
un même canton: on dit , ce chevruùl s'efl fa::
long-tems.
* Battre, dans les Arts méchaniques, a différentes
acceptions : tantôt il fe prend pour forger , comme
chez prelque tous les ouvriers en métaux ; tantôt
pour ècrafer , comme chez prefque tous les ouvriers
qui employent la pierre , les minéraux . les foflfles.
On bat le beurre ; voy t j Be 1 RRE. On bat le tan ; voy.
Tan. On&tfengrang< ; voyt{ Battage. On bat des
pieux pour les enfoncer • \oy^ Mouton . On bat le
ij6
BAT
BAT
papier , l'or , l'argent , les livres , &c. voye^ ci-dejfous
quelques autres lignifications du même terme , ou
quelques-unes des précédentes plus détaillées.
* Battre Por, Purgent, le cuivre {Ordre encyc. En-
tend. Métn. Hifl. Hifi. de la Nat. employée , Arts Mé-
dian, Art dt battre Por. ) ; c'eft l'action de réduire
ces métaux en feuilles extrêmement minces, mais
plus ou moins cependant, félon le prix qu'on fe pro-
pofe de les vendre : cette aûion s'appelle batte , ÔC
l'ouvrier batteur.
Les opérations principales font la fonte , la forge ,
le tirage au moulin , & la batte. On peut appliquer
ce que nous allons dire de l'or aux autres métaux
ductiles.
L'or qu'on employé eft au plus haut titre , & il eft
difficile d'en employer d'autre : l'alliage aigrit l'or ,
le rend moins ductile ; & l'ouvrier qui l'allieroit s'ex-
poferoit à perdre plus par l'inutilité de l'on travail ,
qu'il ne gagnerait par le bas alloi de la matière. Les
Batteurs d'or le prennent en chaux chez l'affineurde
la monnoie , à vingt-quatre carats moins un quart ,
ou à cent trois livres l'once. Il y en a qui préfèrent
à cet or les piaftres , & autres anciennes pièces d'Ef
pagne : ils prétendent que même en alliant l'or de
ces monnoies , il fe bat mieux & plus facilement que
celui qu'ils font obligés d'acheter à cent trois livres
l'once. Il y a trois fortes d'or en feuille ou battu ,
l'or pâle , l'or fin ou verd , & l'or commun. On em-
ployé l'or dans toute fa pureté , & comme il vient
de l'affinage dans l'or fin battu : il y a quatre gros de
blanc ou d'argent fur l'once d'or , dans l'or pâle ou
verd ; & jufqu'à douze grains de rouge, ou de cuivre
de rofette , & frx grains de blanc ou d'argent dans
l'or commun.
On fond l'or dans le creufet avec le borax, com-
me on voit PI. du Batteur d'or fig, z. & quand il a ac-
quis le degré de fulion convenable , on le jette dans
ta lingotiere <z, qu'on a eu grand foin de faire chauf-
fer auparavant pour en ôter l'humidité , & de frotter
de fuif.
Ces précautions font nécefTaires ; elles garantif-
fent de deux inconvéniens également nuifibles ;
l'un en ce que les parties de la matière fondue qui
toucheraient l'endroit humide pourraient rejaillir fur
l'ouvrier ; l'autre en ce que les particules d'air qui
s'infmueroient dans l'effervefcence caulée par l'hu-
midité entre les particules de la matière , y produi-
raient de petites loges vuides ou foufflures , ce qui
rendrait l'ouvrage défectueux. Après la fonte on le
fait recuire au feu pour l'adoucir, & en ôter la graifiê
de la lingotiere.
Quand la matière ou le lingot eft refroidi , on le
tire de la lingotiere pour le forger. On le forge fur
une enclume b qui a environ trois pouces de large,
fur quatre de long, avec un marteau c qu'on appelle
marteau à forger : il eft à tête & à panne ; il peie en-
viron trois livres ; fa panne peut avoir un pouce &
demi en quarré , & fon manche lîx pouces de long.
Si l'ouvrier juge que ce marteau ait rendu fa matière
écroiiie , il la fait encore recuire : d eft le bloc de
l'enclume.
Ou l'on deftine la matière forgée & étirée au mar-
teau à pafler au moulin , ou non : fi l'on fe fert du
moulin, il fuffira de l'avoir réduite fur l'enclume à
l'épaifleur d'environ une ligne & demie , ou deux
lignes , au plus. Le moulin eft compoié d'un banc
très-folide , vers le milieu duquel le fixe avec de
fortes vis le chaffis du moulin : ce chaffis eft fait de
deux jumelles de fer d'un demi-pouce d'épaiffeur,
fur deux pouces & demi de largeur , & quatorze pou-
ces de hauteur. Ces jumelles font furmontées d'un
couronnement , qui avec la traverle inférieure fer-
vent à confolider le tout. Le couronnement 8z les ju-
melles font unis par de longues & fortes vis. Dans
les deux jumelles font enarbrés deux cylindres d'a-
cier , polis , de deux pouces de diamètre , fur deux
po-ices & demi de longueur; le fupérieur traverfe
des pièces à couiiffes , qui à l'aide d'une vis placée
de chaque côté , l'approchent ou l'écartent plus ou
moins de l'inférieure , félon que le cas le requiert :
l'axe du cylindre inférieur eft prolongé de part &
d'autre du chaffis ; à fes deux extrémités équarnes
s'adaptent deux manivelles d'un pié & demi de rayon,
qui mettent les cylindres en mouvement. Les cylin-
dres mobiles fur leur axe étendent en tournant la ma-
tière lerrée entre leurs furfaces , & la contraignent
de glifier par le mouvement qu'ils ont en fens con-
traires.
L'artifte fe propofe deux chofes dans le tirage ; la
première d'adoucir les coups de marteau qui avoient
rendu la furface du métal inégale & raboteufe ; la
ieconde d'étendre en peu de tems le métal très-éga-
lement. Les ouvriers luppléoient autrefois au moulin
par le marteau ; & quelques-uns fuivent encore au-
jourd'hui l'ancienne méthode.
Ceux qui fe fervent du moulin obtiennent par le
moyen de cette machine un long ruban , qu'ils rou-
lent fur une petite latte ; ils le preffent fortement fur
la latte , afin qu'il prenne un pli aux deux côtés de
la latte , qu'ils retirent enfuite ; & afin que le ruban
ne fe détortille pas, qu'il conferve fon pli aux em-
droits où il l'a pris , & que les furfaces de fes tours
relient bien exactement appliquées les unes fur les
autres , ils font deux ligatures qui les contiennent
dans cet état , l'une à un bout , & l'autre à l'autre :
ces ligatures font de petites lanières de peau d'an-
guille. Cela fait , avec le même marteau qui a fervi
à forger ils élargiffent la portion du ruban comprife
entre les deux ligatures , en chalfant la matière avec
la panne vers les bords, d'abord d'un des côtés du
ruban , puis de l'autre ; enfuite ils frappent fur le mi-
lieu pour égalifer l'épaifleur , & augmenter encore
la largeur.
Lorfque la portion comprife entre les ligatures eft
forgée , ils ôtent les ligatures , ils infèrent leurs doigts
au milieu des plis , & amènent vers le milieu les por-
tions qui étoient d'un & d'autre côté au-delà des li-
gatures ; de manière que quand les ligatures font re-
miiès , ce qui eft précifément au-delà des ligatures ,
eft la partie forgée qui étoit auparavant comprife ea-
tr'elles ; & que ce qui a été amené entr'elles , eft la
partie qui n'a pu être forgée , qui formoit le pli , &C
qui étoit au-delà des ligatures. Il eft évident que cette
portion doit former une efpece de croiffant : on for-
ge cette portion comme la précédente, en commen-
çant par les bords , & s'avançant vers le milieu d'un
& d'autre côté , puis forgeant le milieu , jufqu'à ce
que le ruban fe trouve également épais & large dans
toute la longueur : cette epaiffeur eft alors à peu près
d'une demi-ligne , ou même davantage.
Si l'on ne fe fert point du moulin , on forge juf-
qu'à ce que la matière ait à peu près l'épaifleur d'une
forte demi-ligne , puis on la coupe tout de luite en
parties qui ont un pouce & demi de long , fur un pou-
ce de large ; ce qu'on ne fait qu'après le tirage au
moulin , quand on s'en fert. Ces portions d'un pou-
ce 6c demi de long fur un pouce de large , &: une de-
mi-ligne & davantage d'épais , s'appellent quartiers z
on coupe ordinairement cinquante - lix quartiers ;
l'ouvrier prend entre fes doigts un nombre de ces
quartiers, capable de former l'épaifleur d'un pouce
ou environ, il les applique exactement les uns fur
les autres , & il leur donne la forme quarrée fur l'en-
clume & avec la panne du marteau , commençant
à étendre la matière vers les bords , s'avançant en-
fuite vers le milieu, en faifant autant à l'autre côté,
forgeant enfuite le milieu , & réduifaiit par cette ma-
nière de forger réitérée tous les quartiers du mêma
BAT
paquet , & tous à la fois , à l'épaifTeur d'une feuille
de papier gris , & à la dimenfion d'un quarré dont
Je côté auroit deux pouces.
Lorfque l'or eft dans cet état, on prend des feuillets
de vélin , on en place deux entre chaque quartier ;
ainli pour cela feul les cinquante-lix quartiers exigent
cent douze feuillets de vélin : mais il en faut encore
d'autres qu'on met à vuide en-deffus & en-defibus ;
& fur ces feuillets vuides , tant cn-deffus qu'en-def-
fous , on met encore deux feuillets de parchemin.
Cet afTemblage s'appelle le premier caucher ; & les
feuillets vuides , avec les feuillets de parchemin ou
fans eux , s'appellent emplures. Ainli voici donc la
difpofition & l'ordre du premier caucher ; deux feuil-
lets de parchemin , une vingtaine plus ou moins de
feuillets de vélin vuides ; un quartier , deux feuillets
de vélin ; un quartier , deux feuillets de vélin ; & ain-
fi de fuite julqu'à la concurrence de cinquante-lix
quartiers , une vingtaine de feuillets de vélin vuides,
& deux feuillets de parchemin. L'uiage des emplures
eft d'amortir l'action des coups de marteau lur les
premiers quartiers , & de garantir les outils. Les Bat-
teurs d'or entendent par ies outils l'aflèmblage des
feuillets de vélin. Le caucher fe couvre de deux four-
reaux ; le fourreau eft une enveloppe de plufieurs
feuillets de parchemin appliqués les uns fur les au-
tres, & collés par les deux bouts , de manière qu'ils
forment une elpece de fac ouvert. On a deux four-
reaux ; quand on a mis le caucher dans un , on fait
entrer le caucher & ce premier fourreau dans le fé-
cond , mais en fens contraire : d'oii il arrive que quoi-
que les fourreaux foient tous les deux ouverts , ce-
pendant ils couvrent par-tout le caucher. Voy.fig. 6.
un caucher, & fig. y. & 8. les fourreaux. Mettre les
fourreaux au caucher, cela s'appelle enfourrer. Les
feuillets de vélin ck. de parchemin font des quarrés
dont le côté a quatre pouces.
Le caucher ainfi arrangé , on le bat fur un marbre,
comme on voit fig. 2. ce marbre eft noir ; il a un pié
en quarré , & un pié & demi de haut. On ajufte à fa
partie fupérieure une eipece de boîte F, ouverte du
côté de l'ouvrier : cette boite s'appelle la caiJJ'e ; elle
eft faite de lapin , & revêtue en-dedans de parche-
min collé : le parchemin collé qui s'étend juique fur
le marbre , n'en laiffe appercevoir au milieu delà
caiffe que la portion c. La caille eft cmbrafiée du cô-
té de l'ouvrier par une peau h que l'ouvrier relevé
fur lui , & dont il fe fait un tablier. Quand il travail-
le, cette peau ou tablier reçoit les lavurcs.On entend
par les lavures , les parties de matière qui lé déta-
chent d'elles-mêmes , ou qu'on détache des cauchers.
Comme l'aûion continuelle d'un marteau de dou-
ze à quinze livres fur une malle de pierre d'un poids
énorme , ne manquerait pas d'ébranler à la longue
les voûtes d'une cave , s'il s'en trouvoit une immé-
diatement deflbus ; dans ce cas , il eft prudent de l'é-
gayer, fort par une forte pièce de bois, foit par un
maftifde pierre , placé fous l'endroit qui correspond
au marbre du batteur d'or.
Il faut que la furface du marbre & du marteau foit
fort unie , fans quoi les cauchers ou outils , c%: les
feuilles d'or feroient maculées. On bat le premier
caucher pendant une demi-heure , en chaffant du cen-
tre à la circonférence , le retournant de tems en rems,
& appliquant au marbre la furface fur laquelle on
frappoit, & frappant fur l'autre. Le marteau dont
on lé fert dans cette opération s'appelle marteau plat,
ou à degroffîr : il pelé quatorze à quinze livres ; la
tête eft ronde , cv tant foit peu convexe : il a lix pou-
ces de haut , & va depuis fa tête julqu'à fon autre
extrémité tin peu en diminuant , ce qui le fait paraî-
tre cône tronqué : la tête a cinq pouces de diamètre
ou environ. L'ouvrier a l'attention de défourrer de
tems en tems fon caucher, év d'examiner en quel état
BAT
>■?
font les quartiers. Une faut pas efpérer qu'ils s'éten-
dent tous également ; il en trouvera qui n'occupe-
ront qu'une partie de l'étendue du feuillet de vélin ;
d'autres qui l'occuperont toute entière ; d'autres qui
déborderont : il pourra, s'il le veut, ôter les avant-
derniers , & il fera bien d oter les derniers : il eft
évident qu'après cette foultraftion le caucher fera
moins épais. Mais on empêchera les fourreaux d'être
lâches, en inférant de petits morceaux de bois dans
les côtés , entr'eux & le caucher.
On continuera de battre jufqu'à ce qu'on ait ame-
né les quartiers reftant à i'étendue ou environ des
feuillets de vélin qui les féparent: cela fait, la pre-
mière opération de la batte fera finie. Si on lauToit
delafleurer les quartiers au-delà des outils , ceux-ci
pourraient en être gâtés.
Au fortir du premier caucher les quartiers font par-
tagés en quatre parties égales avec le cileau. On a
donc deux cents vingt-quatre nouveaux quartiers ,
dont on forme un fécond caucher de la manière fui-
vante : on met deux feuillets de parchemin , une
douzaine de feuillets de vélin vuides ou d'emplures ;
un quartier , un feuillet de vélin ; un quartier, un
feuillet de vélin ; & ainfi de fuite jufqu'à cent douze
inclufivement : une douzaine d'emplures , deux feuil-
lets de parchemin ; deux autres feuillets de parche-
mins , une douzaine d'emplures ; un quartier , un
feuillet de vélin; un quartier, un feuillet de vélin ;
ckainlî de fuite julqu'à cent douze incluiivement,dou-
ze emplures & deux feuillets de velin.
D'oii l'on voit que le fécond caucher eft double
du premier, & qu'il eft féparé parle milieu en deux
parts diltinguées par quatre feudlets de parchemin ,
dont deux Unifient la première part , ce lui appar-
tiennent , & deux appartiennent à la féconde part ,
& la commencent : en un mot il y a dans le milieu
du fécond caucher quatre feuillets de parchemin en-
tre vingt-quatre emplures de vélin , douze d'un cô-
té & douze de l'autre. Au refte il n'y a pas d'autre
différence entre le premier caucher & le fécond : il
a les deux fourreaux aulfi, il ne s'enfourre pas diffé-
remment, & les feuillets de vélin lont de la même
forme & de la même grandeur.
Ce fécond caucher enfourré comme le premier,
on le bat de la même manière, avec le même mar-
teau , & pendant le même tems que le premier : ob-
fervant non-feulement d'oppoler tantôt une des fa-
ces , tantôt l'autre au marteau & au marbre : au mar-
bre celle qui vient d'être oppolce au marteau ; au
marteau celle qui vient d'être oppolée au marbre:
mais encore de défourrer de tems en tems, de féparer
les deux parts du caucher, afin de mettre en d
la lace de l'une & de l'autre part qui étoit en-de-
hors , & en-dehors celle qui étoit en-dedans ; &c d'e-
xaminer attentivement quand les quartiers dcfafleu-
rent les outils : lorfque les quartiers defalleurent les
outils , alors la féconde opération fera finie.
On def emplit le fécond caucher ; pour cet effet , on
a à côté de foi le caucher même : on écarte les deux
parchemins & les emplures ; on prend la première
feuille d'or que l'on rencontre , cC on l'etend fur un
coulfin ; on enlevé le fécond feuillet de velin . cv l'on
prend la féconde feuille d'or qu'on pofe fur la pre-
mière ; mais de manière que la féconde foit plus re-
culée vers la gauche que la première : on ôte un au-
tre feuillet de vélin, ce l'on prend une troilîemc
feuille d'or que l'on étend fur la féconde , de manière
que cette troifieme foit plus avancée vers la droite
que la féconde : en un mot , on range les tcuilles en
échelle; on faitenforte qu'elles r.c le débordent point
en-haut, mais qu'elles fe déboulent toutes à
uche d'un demi-pouce ou environ .
un couteau d'acier, émouflé par le bout, 6é à l'aide-
d'une pince de bc-is léger quOQ voit fig. 10. on le*
5S
BAT
prend toutes quatre à quatre , & on les coupe en
quatre parties égales; ce qui donne huit cents quatre-
vingts-feize feuilles.
Quand cette divifion eft faite , voici comment on
arrange ces huit cents quatre-vingt-feize feuilles : on
lailTe-là les feuillets de vélin ; on en prend d'une au-
tre matière qu'on appelle baudruche, & dont nous
parlerons plus bas ; on met deux feuillets de parche-
min , quinze emplures de baudruche , une feuille
d'or , un feuillet de baudruche ; une feuille d'or , un
feuillet de baudruche , & ainfi de fuite jufqu'à quatre
cents quarrinte-huit inclulivement ; puis quinze em-
plures , puis deux feuillets de parchemin ; puis en-
core deux feuillets de parchemin , puis quinze em-
plures, puis une feuille d'or, puis un feuillet de bau-
druche, puis une feuille d'or , puis un feuillet de bau-
druche , & ainfi de fuite , jufqu'à quatre cents qua-
rante-huit inclulivement , puis quinze emplures de
baudruche , & enfin deux feuillets de parchemin :
cet afTemblage s'appelle chaudret.
D'où l'on voit que le chaudret , ainfi que le fécond
caucher , eft divilé en deux parts au milieu , dans
l'endroit où il fe rencontre quatre feuillets de parche-
min , dont deux appartiennent à la première part du
chaudret , & la finiffent, & deux à la féconde part,
& la commencent.
Le feuillet du chaudret a environ cinq pouces en
quarré ; il eft de baudruche , matière bien plus dé-
liée & bien plus fine que le vélin ; c'eft une pellicule
que les Bouchers ou les Boyaudiers enlèvent de def-
ius le boyau du bœuf : deux de ces pellicules minces
collées l'une fur l'autre , forment ce qu'on appelle
h feuillu de baudruche ; & ces feuillets de baudruche
-& de parchemin difpofés comme nous venons de le
preferire, forment le chaudret ■ le chaudret s'enfourre
comme les cauchers.
On bat environ deux heures le chaudret : le mar-
teau eft le même que celui des cauchers ; on obferve
en le battant tout ce qu'on a obfervé en battant le
fécond caucher ; je veux dire de défourrer de tems
en tems , d'examiner fi les feuilles d'or defafleurent
ou non ; de mettre en-dedans les faces des deux parts
qui font en-dehors , & celles qui font en-dehors , de
les mettre en-dedans ; de battre félon l'art , en chaf-
fant du centre à la circonférence , &c. Lorfqu'on
s'apperçoit que toutes les feuilles defafleurent , la
troiiieme opération eft finie.
Alors on prend le chaudret défourré avec une te-
naille a bc , qu'on voit j%. _o. on ferre le chaudret par
un de fes angles , entre les extrémités a de la tenaille,
on empêche la tenaille de fe defferrer, en contraignant
une de fes branches c , d'entrer dans un des trous de
la plaque x , attachée à l'autre branche b ; on a à
côté de foi un couffin d'un pié de large , fur deux pies
& demi à trois pies de long , couvert de peau de
veau , comme on le voit en i , 2 , fig. 3 '■> on levé les
feuillets de baudruche de la main gauche ; & de la
droite , on enlevé avec une pince de bois qu'on voit
fig. 10 -, les feuilles d'or; on les rogne avec un cou-
teau d'acier , & on les range par échelle fur le couf-
fin ; on les divife en quatre parties égales ; ce qui
donne quatre fois huit cents quatre-vingt-ieize feuilles
d'or ; on diviie ce nombre de quatre fois huit cents
quatre-vingt-feize feuilles en quatre portions d'envi-
ron huit cents feuilles chacune , & l'on arrange ces
huit cents feuilles d'or de la manière fuivante, afin
de continuer le travail.
On prend deux feuillets de parchemin , vingt-cinq
emplures de baudruche , une feuille d'or , un feuil-
let de baudruche ; une feuille d'or , un feuillet de
baudruche, & ainfi de fuite, jufqu'à huit cents inclu-
fivement , puis vingt-cinq emplures , & enfin deux
feuilles de parchemin. Cet affemblage forme ce qu'on
appelle une moule ; les divilions du chaudret en qua-
BAT
tre donnent de quoi former quatre moules qui fe
travaillent l'une après l'autre, & féparément.
La feuille de la moule a fix pouces en quarré ,
comme difent les ouvriers très-improprement , c'eft-
à-dire a la forme d'un quarré , dont le côté a fix
pouces ; on Fenfourre , ôe on la bat plus ou moins de
tems ; cela dépend de plufieurs cauf es ; de la difpofi-
tion des outils , de la température de l'air , & de la di-
ligence de l'ouvrier : il y a des ouvriers qui battent
julqu'à deux moules par jour. Chaque moule ne con-
tient que huit cents feuilles d'or ; quoiqu'il dût y en
avoir quatre fois huit cents quatre-vingt-leize pour les
quatre ; ce qui fait plus de huit cents pour chacune :
mais partie de cet excédent s'eft brilé dans la batte ,
quand il eft arrivé que la matière étoit aigre , ou
qu'elle n'étoit pas allez épaiffe pour fournir à l'ex-
teniion ; partie a été employée à étouper les autres.
On appelle étouper une feuille , appliquer une pièce
à l'endroit foible où elle manque d'étoffe.
C'eft ici le lieu d'obferver qu'il importoit allez
peu que les cinquante-iix premiers quartiers qui ont
fourni un fi grand nombre de feuilles , fuffent un peu
plus forts ou un peu plus foibles les uns que les au-
tres ; la batte les réduit néceflairement à la même
épaiffeur : la feule différence qu'il y ait, c'eft que
dans le cours des opérations , les forts defafleurent
beaucoup plus que les foibles.
On commence à battre la moule avec le marteau
rond qui pelé fix à iept livres , qui poi te quatre pou-
ces de diamètre à la tête , & qui eft un peu plus con-
vexe qu'aucun de ceux dont on s'eft lervi pour les
cauchers & le chaudret ; il s'appelle marteau à com-
mencer ; on s'en fert pendant quatre heures ; on lui
fait fuccéder un fécond marteau qui pelé quatre à
cinq livres , qui porte deux pouces de diamètre à la
tête , & qui eft encore plus convexe que les précé-
dens ; on l'appelle marteau à chajfer, &l'on s'en fert
pendant une demi-heure ; on reprend enfuite le mar-
teau à commencer ; on revient au marteau à chaffer,
dont on fe fert pendant encore une demi-heure , &
l'on paffe enfin au marteau à achever. Le marteau à
achever porte quatre pouces de diamètre à la tête ,
eft plus convexe qu'aucun des précédens , & pefe
douze à treize livres. On a eu raifon de l'appeller
marteau à achever ; car c'eft en effet par lui que finit
la batte.
On obferve aufîi pendant la batte de la moule , de
la frapper tantôt fur une face , tantôt fur une autre ;
de défourrer de tems en tems , & d'examiner li les
feuilles defafleurent : quand elles defafleurent tou-
tes, la batte eft finie. Il ne s'agit plus que de tirer l'or
battu d'entre les feuillets de la moule , & c'eft ce que
fait la fig. J. & de les placer dans les quarterons.
Pour cet effet, on fe fert de la tenaille de h fig- g.
on ferre avec elle la moule par l'angle , & l'on en
fort les feuilles battues les unes après les autres , à
l'aide de la pince de bois de la fig. 10. on les pofe
fur le couffin ; on fouffle deffus pour les étendre; on
prend le couteau de la fig. il. fait d'un morceau de
rofeau 5 ; on coupe un morceau de la feuille en li-
gne droite ; ce côté de la feuille qui eft coupé en li-
gne droite , fe met exactement au fond du livret &C
du quarteron , que la feuille déborde de tous les au-
tres côtés ; on continue de remplir ainfi le quarte-
ron ; quand il eft plein , on en prend un autre , & ainfi
de fuite. Lorfque la moule eft vuide , on prend un
couteau , & l'on enlevé tout l'excédent des feuilles
d'or qui paraît hors des quarterons ou livrets; &l'oa
emporte ce que le couteau a laiffé , avec un morceau
de linge qu'on appelle frottoir.
Les quarterons dont on voit un , fig. 5. font des li-
vrets de vingt-cinq feuillets quarrés ; il y en a de deux
fortes: les uns, dont le côté eft de quatre pouces;
d'autres , dont le côté n'eft que de trois pouces ck de*
BAT
mi. Un livret d'or dont le côté eft de quatre pouces ,
fevend quarante fous; un livret pareil d'argent, fe
vend fix Tous.
Quatre onces d'or donnent les cinquante-fix quar-
tiers avec lefquels on a commencé le travail. Il y a eu
dans le cours du travail , tant en lavures qu'en rognu-
res ou autrement , dix-fept gros de déchet. Ainfi qua-
tre onces moins dix-fept gros , pourraient fournir trois
mille deux cents feuilles quarrées , de chacune trente-
fix pouces de furface: mais elles ne les donnent que de
1 6 pouces en quarré ; car les feuilles qui fortent de la
moule de 36 pouces en quarré , s'enferment dans un
quarteron de 16 pouces en quarré. Ainfi l'on ne cou-
vriroit qu'une furface de 41200 pouces quarrés ,
avec quatre onces d'or, moins dix-fept gros , ou deux
onces un gros : mais on en pourroit couvrir une de
115100 pouces quarrés.
Pour avoir de bons cauchers , il faut choifir le meil-
leur vélin , le plus fin , le plus ferré 6c le plus uni. Il
n'y a pas d'autre préparation à lui donner, que de le
bien laver dans de l'eau froide , que de le laifTer lé-
cher à l'air, & que de le parler au brun; on verra
plus bas ce que c'eft que le brun.
Quant à la baudruche , ou à cette pellicule qui fe
levé de defTus le boyau de bœuf, c'eft autre choie :
elle vient d'abord pleine d'inégalités & couverte de
graifTe; on enlevé les inégalités en parlant légère-
ment fur fa furface le tranchant moufle d'un couteau.
Pour cet effet , on la colle fur les montans verticaux
d'une efpece de chevalet ; le même inftrument em-
porte aufli la graiffe. Quand elle eft bien égale & bien
degraiffée , on l'humecte avec un peu d'eau ; & l'on
applique l'une fur l'autre deux peaux de baudruche
humides. L'humidité fuffit pour les unir indivilible-
ment. Le batteur d'or paye foixante-quinze livres les
huit cents feuilles; cela eft cher, mais elles durent:
quatre mois , fix mois , huit mois de travail continu
les fatiguent, mais ne les ufent point.
Avant que de les employer, le Batteur d'or leur
donne deux préparations principales : l'une s'appelle
le fond , &c l'autre confifte à les faire fuer. Il com-
mence par celle-ci ; elle confifte à en exprimer ce
qui peut y refter de graille. Pour cet effet, il met
chaque feuille de baudruche entre deux feuillets de
papier blanc ; il en fait un afl'cmblage coniidcrable
qu'il bat à grands coups de marteau. L'effort du mar-
teau en fait fortir la graiffe , dont le papier fe charge
à l'inftant. Donner le fond aux feuillets de baudru-
che, c'eft les humeôer avec une éponge, d'une in-
fufion de canclle , de mulcade , & autres ingrédiens
chauds & aromatiques; l'effet de ce fond eft de les
confolider , 6c d'en rcflerrer les parties. Quand on
leur a donné le fond une première fois , on les laiffe
fécher à l'air, 6c on le leur donne une féconde fois ;
quand elles font lèches , on les met à la prefle 6c on
les employé.
Les Batteurs donnent en général le nom d'outils
aux affemblages, foit de vélin, (bit de baudruche ;
& quand ces afl'emblages ont beaucoup travaillé, ils
difent qu'ils font las ; alors ils ceffent de s'en fervir.
Ils ont de grandes feuilles de papier blanc qu'ils hu-
mectent, les uns de vinaigre, les autres de vin blanc.
Us prennent les feuillets de baudruche las; ils les
mettent feuillets à feuillets entre les feuilles de pa-
pier blanc préparées ; ils les y laiffent pendant trois
ou quatre heures : quand ils s'apperçoivent qu'ils
ont affez pris de l'humidité des papiers blancs, ils
les en retirent , & les diilribuent dans un outil de par-
chemin , dont chaque feuillet eft un quarré , dont le
coté a douze pouces. Ils appellent cet outil plane ;
Pour faire fécher les feuillets de baudruche enfer-
mes entre ceux de la plane , ils battent avec le mar-
teau la plane pendant un jour. Puis ils lesbruniffent,
ou donnent le brun ; c'eft-à-dire , qu'ils prennent du
BAT
M9
gypfe ou de ce foffile qu'on appelle miroir d'âne, qu'on
tire des carrières de plâtre ; qu'ils le font calciner,
qu'ils le broyent bien menu , & qu'avec une patte de
lièvre, ils en répandent furies feuillets de baudru-
che, d'un & d'autre côté.
Le brun fe donne aufli aux outils de vélin.
Il faut que les outils de baudruche foient preffés &
féchés toutes les fois qu'on s'en fert ; fans quoi l'humi-
dité de l'air qu'ils pompent avec une extrême facilité,
rendroit le travail pénible. Il ne faut pourtant pas les
faire trop fécher; la baudruche trop feche eft perdue.
On a pour preffer & fécher en même tems la bau-
druche, un infiniment tel qu'on le voit fig. 4. La par-
tie M N O P peut contenir du feu. C'eft une efpece
de vaiffeau de fer; le fond q eft une plaque de fer. Ce
vaifl'eau 6c fa plaque peuvent fe baiffer & fe hauffer
en vertu de la vis tu} la bride a b c eft fixe fur la pla-
que inférieure q r s ; on infère entre ces plaques les
outils enfermés entre deux voliches; on ferre la pref-
fe ; on met du feu dans le vaiffeau fupérieur , dont la
plaque m no p fait le fond ; & l'on pofe la plaque in-
férieure q r s , fur une poêle pleine de charbons ar-
dens : les outils fe trouvent par ce moyen entre deux
feux.
Quant aux outils de vélin , quand ils font très-hu-
mides , on les répand fur un tambour; c'eft une boî-
te faite comme celle 011 l'on enfermeroit une chau-
frette , avec cette différence qu 'elle eft beaucoup plus
grande & plus haute ; & qu'au lieu d'une planche per-
cée , fa partie fupérieure eft grillée avec du fil d'ar-
chal ; on étend les feuillets de vélin fur cette grille ,
6c l'on met du feu dans le tambour.
Il paroît que les Romains ont pofledé l'art d'éten-
dre l'or: mais il n'eft pas aufli certain qu'ils l'ayent
pouffé jufqu'au point 011 nous le pofledons. Pline
rapporte que dans Rome on ne commença à do-
rer les planchers des maifons, qu'après la ruine de
Carthage, lorfque Lucius Mummius étoit cenfeur;
que les lambris du capitole furent les premiers qu'on
dora; mais que dans la fuite le luxe prit de fi grands
accroiffemens, que les particuliers firent dorer les
plat-fonds & les murs de leurs appartenons.
Le même auteur nous apprend qu'ils ne tiroient
d'une once d'or, que cinq à fix cents feuilles de quatre
doigts en quarré ; que les plus épaiffes s'appelloient
bracteœ Prœnejlinœ , parce qu'il y avoit à Prenefte une
ftatue de la Fortune, qui étoit dorée de ces feuilles
épaifl'es; & que les feuilles de moindre épaifléur fe
nommoient bracleœ quœjloriœ. Il ajoute qu'on pouvoit
tirer un plus grand nombre de feuilles que celui qu'il
a défigné.
Il étoit difficile d'affujettir les batteurs d'or à la
marque. La nature de leur ouvrage ne permet pas de
prendre cette précaution contre l'envie qu'ils pour-
roient avoir de tromper, en chargeant l'or qu'ils em-
ploycnt, de beaucoup d'alliage : mais heureufement
l'art même y a pourvu ; car l'or fe travaillant avec
d'autant plus de facilité, 6c ayant d'autant plus de
ductilité, qu'il eft plus pur, ils perdent du côté du
tems & de la quantité d'ouvrage , ce qu'ils peuvent
gagner fur la matière , & peut-être même perdent-ils
davantage. Leur communauté paye mille écus à la
monnoie pour ce droit de marque.
Quoiqu'il ne s'agifTe que de battre, cette opéra-
tion n'eft pas aufli facile qu'elle le paroît; & il y a
peu d'arts où le favoir-faire foit fi fenlible ; tel habile
ouvrier fait plus d'ouvrage & plus de bon ouvrage
en un jour , qu'un autre ouvrier n'en fait de mauvais
en un jour 6c demi.
Cependant le meilleur ouvrier peut avoir contre
lui la température de l'air; dans les tems pluvieux ,
humides, pendant les hyvers nébuleux, les vélins &
les baudruches s'humectent, deviennent molles, &■
ï6o
BAT
rendent le travail très-pénible. C'eft à la Phyfique
à chercher un remède à cet inconvénient.
Il ne me refte plus qu'une obfervation à faire, c'eft
fur la découverte de la baudruche. Comment les hom-
mes fe font-ils aviiés d'aller chercher fur le boyau
du bœuf cette pellicule déliée, fans laquelle ils au-
roient eu bien de la peine à étendre l'or? Ce ne font
fûrement pas des confidérations philosophiques qui
les ont conduits là. La baudruche étoit-elle trouvée
avant qu'on l'employât à cet ufage ; ou bien eft-ce
le befoin qu'on en avoit qui l'a fait chercher ?
Battre, intermède C ardeur de laine , c'eft prépa-
rer la laine pour être huilée , en la fecoùant fur
une claie avec des baguettes , pour en ôter la pouf-
fiere.
Battre , en terme de Filajper, c'eft écrafer & adou-
cir la filafle à coups de maillet de bois.
Battre une allée, c'eft après qu'elle eft régalée ,
en affermir la terre avec la batte , pour la recouvrir
enfuite de fable.
Battre la CHAUDE, terme a" ancien monnoyage ;
avant la découverte du laminoir, on battoit les lin-
gots d'or , d'argent, &c. fur l'enclume à grands coups
de marteau, après avoir été retirés du moule; en-
fuite on les donnoit aux ouvriers afin de recevoir les
préparations néceffaires pour être empreints.
Battre , en terme de Potier ; c'eft étendre à la main
un creufet , par exemple , fur fon moule. Voye^
Moule.
Battre du Papier, terme de Papetier , fignifie
Vapplatir , & le rendre uni en le battant fur la pierre
avec un marteau pelant, dont le manche eft court
& la maffe large. Voye\ Papier.
Dans les manufactures de papier, on fe fert pour
■battre le papier & le lifter , d'un marteau , ou plutôt
d'une groffe maffe de bois B fort pelante, emmanchée
d'un long manche C auffi de bois , auquel l'arbre de la
roue du moulin à papier , donne le mouvement par
le moyen de plufieurs leviers ou morceaux de bois ,
qui fortent de cet arbre, de qui appuient fur l'extré-
mité du manche du marteau ; l'ouvrier A eft affis
dans un creux , afin d'avoir les mains de niveau à la
pierre D , fur laquelle il change le papier continuel-
lement de place , pour le faire battre également par-
tout : il a autour de lui différentes piles de papier
G G G , defquelles les unes font le papier qu'il a re-
tiré de deffous le marteau ; & les autres celui qu'il
doit y mettre.
Battre Us livres pour les relier : le batteur doit
tenir de la main droite un marteau pefant environ
neuf à dix livres , & de la main gauche une partie
du livre , que l'on nomme une battée, tel que PI. I.
du Relieur , figure A. Son ouvrage eft d'applatir les
feuilles du livre avec art , pour que le livre foit fa-
cile à s'ouvrir. Il y a des papiers fort difficiles à unir.
Battre les cartons ; on bat fur la pierre à battre
les cartons quand ils font attachés au volume , pour
•en applanir toutes les inégalités.
Battre les ficelles ; lorlque les ficelles font paffées
dans les cartons , on en applatit les bouts avec le
marteau à endoffer fur la pierre à parer, pour éviter
qu'elles faflent de l'élévation fous la couverture.
On dit auffi rabbaifier les ficelles.
Battre les plats ; lorlque le livre eft marbré fur
Je plat & que la couleur eft feche , on bat le plat fur
la pierre à battre avec le marteau à battre pour mieux
effacer toutes les inégalités, s'il en eft refté , & pour
renforcir la couverture.
Battre devant , fe dit chez les ouvriers qui s'oc-
cupent à battre un morceau de ter fur l'enclume , de
.-ceux qui aident le forgeron avec de gros marteaux ,
àc qui font placés devant lui ou à les cotés.
Battre du tan; terme de Taneur, qid lignifie con-
tajjer de l'écorce de chêne dans des mortiers , ou la
B A T
faire réduire en poudre fous les pilons d'un moulin.
Voye{ Tan.
Battre une dame au jeu du revertier , c'eft mettre
une dame fur la même flèche où étoit placée celle de
fon adverfaire. Quand toutes les dames font battues
hors du jeu , on ne peut plus joiier , à moins qu'on
ne les ait toutes rentrées.
* Battre au tric-trac, c'eft en comptant de la droite
à la gauche les points amenés par les dés, tomber de
la flèche la plus voiline d'une de fes dames , lur une
flèche de fon adverfaire où il n'y ait qu'une dame ,
cette dame découverte eft battue, ïi le dernier point
d'un des dés ou de tous les deux tombe lur elle.
On peut battre de trois façons ; d'un dé , de l'autre ,
& des deux enfemble.
On bat par doublets , lorfqu'on a amené le même
point des deux dés , comme deux quatre , deux cinq ,
&c.
On bat à faux , lorfqu'en comptant les points ame-
nés par les deux dés , le dernier point de l'un & de
l'autre des dés tombe fur une flèche de l'adverfaire
couverte de deux dames.
On gagne fur une dame battue Amplement & d'une
façon, dans le grand jan , deux points; de deux fa-
çons , quatre ; de trois façons , fix.
On gagne lur une dame battue par doublets dans
le grand jan , quatre points ; lix dans le petit jan.
Quand on bat à faux , on perd ce qu'on eût gagné
en battant bien.
On bat le coin comme une dame , quand on a le
fien & que l'adverfaire ne l'a pas.
On bat les deux coins quand on n'a que deux da-
mes abattues , & que les points amenés par l'un ÔC
l'autre dés tombent tous les deux fur le coin.
On gagne quatre points quand on bat le coin ou
les deux coins Amplement ; lix quand on les bat par
doublets.
On en perd autant fi on bat le coin à faux ; ce qui
arrive quand on n'a que deux dames abattues., & que
l'adverfaire a fon coin.
Il y a encore d'autres manières de battre. Voye^
Trictrac, Dame, Flèche, &c
BATTU, adj. (Marine.) vaiffeau battu de la tem-
pête , fe dit d'un vaiflèau qui ayant effuyé des coups
de vent , fe trouve tourmenté ou maltraité par la
mer. (Z)
Battu , adj. fe dit , dans les manufaclures de foie ,
des ouvrages où il eft entré beaucoup d'or & d'ar-
gent : on dit ce brocard ejl tout battu d'or.
Battu , adj. pris fubft. fe dit che{ les Tireurs d'or,
du trait d'or ou d'argent quand il eft écaché. Voye^
Trait & Tireur d'or.
Battu, Pas battu. roye^PAS.
* B ATT\JE(faire la), dans les endroits où l'on tire
la foie. Voye^ les articles Soie & TlRAGE. C'eft l'o-
pération qui luccede au tirage , & à la léparation des
cocons. Elle coniifte à fouetter avec un balai les co-
cons dans la baffine pleine d'eau chaude, & placée
devant la machine à tirer la foie , afin d'en féparer
& démêler des brins ou fils , & en commencer ou
continuer le tirage. Voye^ Soie.
* Battue, f. î.{Chajf.') manière de chafler le loup ;
c'eft la plus dangereulè pour les chaflèurs & pour les
loups; pour les chaflèurs, parce que li celui qui con-
duit cette chafle les dilpoie mal, ils font expofés à
s 'entretuer ; pour les loups , parce que les loups effa-
rouchés par une multitude d'enfans & de femmes de
tout âge , qui font armés de bâtons & qui traquent
toute une forêt , font tous chaflès & forcés de pafler
devant les tireurs.
Battue [Pèche); le poiffon s'enfonce dans la
boue pendant l'hyver ; on reconnoît fa groffeur par
le creux qu'il y fait, On appelle ce creux la battue du
poifion%
♦BATUECAS
BAT
* BATUECAS ou LOS BATUECAS {Géog.) ,
peuples d'Efpagne , clans le royaume de Léon, au
diocefe de Coria, dans une vallée qu'on appelle le
val de Batuecas , couverte par des montagnes pref-
qu'inacccfiibles , entre Salamanque au Septentrion ,
Coria au midi , la rivière de Tormes au levant , &
la roche de France au couchant. Il n'y a pas plus de
1 50 ans qu'ils ont été découverts par le duc d'Albe.
On conjecture que ce font des, reftes des anciens
Goths, qui s'étoient réfugiés dans cette vallée entre
des montagnes fort hautes , où ils avoient échappé
aux Maures. D'autres difent au contraire que ce tut
là que le retirèrent plufieurs anciens Efpagnols ou
Ibères dans le tems de 1'invafion des Goths , & où
eux & leurs defeendans vécurent feparés du com-
merce du refte des humains , jufqu'à ce que le hafard
les fît découvrir par un fugitif , lous le règne de Phi-
lippe 1 1. qui leur envoya des eccléfiaftiques pour
leur prêcher le Chriftianifme 8cleur faire changer de
mœurs. Ils font cependant encore aujourd'hui peu
policés , & fi greffiers , que les Efpagnols difent d'un
homme ruitre qu'il vient des vallées de Batuecas.
BATTURE , f. f. (Marine.) c'efl" un endroit où le
fond s'eieve & que la mer couvre, mais où il n'y a
pas allez d'eau pour qu'on y puiffe pafler fans dan-
ger. Voyei Basse. (Z)
Batture, compofiiion qu'on métairies ouvrages
de Peinture à plat ou de bofiage , comme la fculpture ,
& fur laquelle on applique de l'or ou du cuivre en
feuilles.
Cette compofition s'employe chaude , & fe fait
avec la colle de Flandre & du miel jaune, autant de
l'un que de l'autre : on y ajoute du vinaigre dans la
quantité qu'on juge néceflaire pour la faire couler.
w
B ATURIN, {Géog.) ville de l'Ukraine , fur la
Defne , autrefois résidence du général des Cofaques.
* BATUSABER, {Géog.) ville d'Afie , dans les
Indes , dans la partie méridionale de la prefqu'île de
Malaca.
* BATZEN, {Commerce.) monnoie d'Allemagne ,
qui efl en ufagefur les bords du Rhin & en Suabe.
22 y bat^en valent un florin & demi d'Empire, ce qui
revient environ à 3 livres 1 5 fols argent de France ;
ainfi un bat^en fait quelque choie de plus que trois
fous de notre monnoie.
BAU , BAUX , B ARROTS , c'efl , en Marine ou
conjlruction de vaijfeaux , une folive qui elt mile avec
plufieurs autres lcmblables par la largeur ou par le
travers du vaifleau, d'un flanc à l'autre , pour affer-
mir les bordages & foûtenir les tiilacs. Voyei PI. V.
fig. l. dans la coupe tranfverfale d'un vaiiléau, les
biiux n" 69 6c 1 19 , &C dans la Plane, l^.jig. 1. dans
la coupe longitudinale d'un vaifleau fous les n° 1 1 9
& 69 , la Situation de ces baux & leur nombre.
Le bout de chaque bail porte Sur des pièces de char-
pente apj.ei;ées cowbâtcns ou courbes, qui Sont d'une
triangulaire , & qui entretiennent les baux ou
barrots avec les Vomies , voye^ dans la PI. V. fig. 1.
les courbâtons n° 7c , ce les vuigres n° 31 ; &c dans la
Planche IF. fig. 1. n° 70 les courbes ou cour bâtons du
premier pont.
De part & d'autre des écoutilles il y a des barotins
ou demi-baux, qui Se terminent aux hiloircs , & qui
font Soutenus par des areboutans ou pièces de bois
miSes de travers entre deux baux. Foye^ Planche IF.
fig. 1. n° 73 , les areboutans du premier pont , & n°
77 les hiloires du premier pont.
Il faut remarquer qu'on ne Se Sert ordinairement
du mot bau , que pour le premier pont , & de celui
de barrot pour les autres ponts. Foye^ B.\RROT.
Pour donner l'épaifleur & la largeur aux baux du
premier pont , la plupart des conflructeurs mettent
un pouce &c la huitième partie d'un pouce pour cha-
Tome II,
BAT
16:
que dix pies de la longueur du vaifleau , prife de l'é-
trave à l'étambord , chaque dix pies de long leur don-
ne un pouce de tonture. Il y a auffi plufieurs conf-
truercurs qui ont pour règle de donner aux baux l'é-
paifleur de l'étrave prife en-dedans.
Il y a d'autres charpentiers qui proportionnent les
baux par la largeur du vaifleau. Ils donnent à ceux
du premier pont, par chaque cinq pies de largeur
deux pouces d'épaifleur de haut en-bas: mais ils leur
donnent un peu plus de largeur fi le bois le permet ;
& comme ceux qui font à l'avant & à l'arriére n'ont
pas tant de largeur que les autres , on peut les tenir
un peu moins épais fi l'on veut. Ces mêmes charpen-
tiers veulent qu'on leur donne fix à Sept pouces de
rondeur , & qu'on fafle le faux pont fur ce même
modèle ; ils veulent que les baux ou barrots du haut
pont foient un tiers moins larges & moins épais que
ces premiers , mais ils leur donnent un peu plus de
rondeur ; ils pofent les baux à trois ou quatre pies
l'un de l'autre, hormis ceux qui font aux côtés des
écoutilles des vaifleaux marchands , qui chargent tou-
tes fortes de marchandifes & de gros balots ; ceux-
là fe pofent à Sept pies de diflance l'un de l'autre.
Les bouts des baux furmontent de cinq pouces ou
cinq pouces & demi les ferre-banquieres , & font aS-
femblés à queue d'aronde. Foye^ la Planche F. fie. z.
au n° 68 & 69, le bau & le lerre-banquiere du pre-
mier pont.
Au devant & au derrière des baux de dale & de
lof, on pofe des courbes à l'équerre , & il y en a une
autre au-deflus du bau de dale , qui cft potée le long
de la ferre-gouttiere & le long de la barre d'arcaflë,
La ferre-goiutiere fente dans le jarlot qu'on fait dans
cette courbe.
Maître bau , {Marine. ) c'efl celui qui étant le
plus long des baux , donne par Sa longueur la plus
grande largeur au vaifleau ; il eft pôle à l'embelle ou
au gros du vaifleau , fur le premier gabarit.
Faux bau, {Marine. ) ce font des pièces de bois
pareilles aux baux , qui lbnt mifes de ixs. pies en fix
pies, fous le premier tillac des grands vaifleau:; , pour
fortifier le fond du bâtiment & former le faux pont.
Vqyei la PI. F.fig.prem. les faux-baux cotés 38,8c
dans la PI. IF.fig.prem. fous la même cote 38.
On pofe le plus fouvent les faux-baux à t,OiS pies
& demi au-deflbus des baux du premier pont , c'eft-
à-dire dans un vaifleau de 1 34 pies , pris de l'étrave
à l'étambord ; & par conséquent de 1 3 pies ou 1 3
pies T de creux depuis le premier pont , & l'on Suit
à peu près cette proportion dans de plus grands vaif-
feaux. C'efl: fur ces faux --baux qu'on fait fouvent un
faux pont, dans lequel on pratique un retranche-
ment derrière le grand mât , oit le faux pont a le plus
de hauteur ; les ibldats y couchent.
Bau de dale, {Marine.) c'efl celui qui efl le der-
nier vers l'arriére.
Bau de Lof, c'efl celui qui efl le dernier vers
l'avant fur l'extrémité. ( Z )
^ BAVAROIS , ( les ) f. m. plur. {Géog. ) peuples
d'Efpagne , connus anciennement lbus le nom de
Boiens ou Boiares. Ce font les premiers des anciens
Germains qui ayent pafle les Alpes , pénétré dans la
Grèce , & qui ayent paru en armes fur les rives du
Tibre & du Thermodon. En 493 , ils occupoient la
partie du Norique, qui étoit le long du Danube , ou
ce que nous appelions la haute & moyenne Autriche t
avec la féconde Pvhetie , contrée fituée entre l'CEin
& le Lech. Ces peuples ont eu & confervé de tout
tems une haute réputation de bravoure. Leurs an-
cêtres vainquirent les peuples du midi , & leurs def-
eendans arrêtèrent les courfes des peuples du Nord.
* BAUBIS, chiens {Chaffi.) c'efl ainii qu'on appel-
le des chiens drefles au lièvre , au renard , Se au San-
glier. On leur coupe prefque toute la queue. Ils l'on;
X
i6î
B A U
plus bas de terre & plus longs que les autres , de
-«orge effroyable. Ils heurlent fur la voie. Ils ont le
nez'dur , & le poil demi-barbets.
*BAUCIS & PHILEMOiN (Afyth.) Il y eut autre-
fois dans une cabane de la Phrygie un mari & une
femme qui s'aimoient. C'étoient Phikmon & Baucis.
Jupiter & Mercure parcourant la terre en habit de
pèlerins, arrivèrent dans la contrée de nos époux : il
étoit tard ; Si les dieux auroient paffé la nuit expofés
aux injures de l'air , fi Phikmon & Baucis n'avoient
pas été plus humains que le refte des habitans. Jupi-
ter touché de la piété de Phikmon & de Baucis, ÔC
irrité de la dureté de leurs voifins , conduifit les
époux fur le fommet d'une montagne , d'où ils vi-
rent le pays fubmergé, à l'exception de leur ca-
bane qui devenoit un temple. Jupiter leur ordonna
de faire un fouhait , & leur jura qu'il feroit accom-
pli fur le champ. Nous voudrions, Citent Phikmon
& Baucis, fervir les dieux dans ce temple, nous aimer
toujours , & mourir en même unis. Ces fouhaits méri-
toient bien d'être écoutés ; auffi le furent-ils. Phik-
mon & Baucis fervirent long-tems les dieux dans
le temple ; ils s'aimèrent jufque dans l'extrême vieil-
lerie ; & un jour qu'ils s'entretenoient à la porte du
temple , ils forent métamorphofés en arbre. La Fon-
taine , Prior , & le docteur Swift , ont mis en vers
cette fable : la Fontaine a célébré Phikmon & Bau-
cis , d'un ftyle fimple & naif , fans prefque rien chan-
ger au fujet. Prior & Swift en ont fait l'un & l'au-
tre un poëme burlefque & fatyrique ; la Fontaine
s'eft propofé de montrer , que la piété envers les
dieux étoit toujours récompenfée : Prior , que nous
n'étions pas allez éclairés pour faire un bon fouhait ;
& Swift , qu'il y a peut-être plus d'inconvénient à
changer une cabane en un temple , qu'un temple en
une cabane. Que dHnftrucHons dans cette fable ! L'a-
mour conjugal , la tranquillité, &le bonheur, réfu-
giés dans une cabane ; la leniibilité que les indigens
ik. les malheureux ne trouvent que chez les petits ;
la cabane changée en temple , parce que les deux
époux y rendoient par leur union le culte le plus pur
aux dieux ; la fimplicité de leurs fouhaits, qui montre
que le bonheur eft dans la médiocrité & dans l'obf-
curité , & combien les hommes font infenfés de le
chercher û loin d'eux-mêmes.
* BAUD , f. m. chajfe , race de chiens-courans qui
viennent de Barbarie. Ils chaffent le cerf. Ils font or-
dinairement tout blancs : on les appelle auffi chiens
muets , parce qu'ils ceflènt d'aboyer , quand le cerf
vient au change.
* BAUDEQUIN, f. m. ( Comm. ) petite mon-
noie , de la valeur de fix deniers ou environ , ain-
û appellée , à ce qu'on conjecture , d'un baldaquin
ou dais fous lequel le roi y étoit repréfenté. Elle étoit
en ufage au commencement du quatorzième fiecle.
* BAUDET , f. m. c'eft ainfi que les fcieurs de
planches appellent les tréteaux ou chevalets , fur lef-
quels ils placent leurs pièces élevées pour travailler.
* Baudir les Chiens ( chajfe) c'eft les exciter
du cor & de la voix. On bandit auffi les oifeaux.
* BAUDOSE , f. f. efpece d'infiniment de Mufi-
que à plufieurs cordes , dont Aimery du Peyrat , ab-
bé de Moifac , fait mention dans une vie de Charle-
magne, manuferite. Voye^ n°. 1343 , de la biblio-
thèque du Roi , quidam baudofam concordabant.
BAUDRIER , f. m. c'eft chez les Ceinturiers , une
bande de cuir large de quatre ou cinq doigts , le plus
fouvent enjolivée , qui prend depuis l'épaule droite
& fe vient rendre au côté gauche , & qui eft compo-
lée de la bande oc de deux pendans , au-travers des-
quels on paffe lepée.
Le Baudrier ( Hijl. anc. ) eft une partie de l'ha-
billement des gens de guerre qui,fert à porter leur
épée. Les militaires qui étoient admis aux feftins de
B A U
l'empereur ou des généraux d'armées , avoîent cou-
tume de quitter leurs baudriers ou ceinturons avant
que de fe mettre à table. Trebellius Pollion rap-
porte , que dans un repas que l'empereur Gallien don-
noit à plufieurs officiers , le jeune Salonin , fils de ce
prince , leur enleva leurs baudriers dorés & conjlellés ,
auratos conjlellatofque balteos. M. Baudelot dans les
Mémoires de l'Académie des Belles-Lettres , croit que
ces baudriers conjlellés étoient des ceinturons chargés
de pierres précieufes & de lames d'or & d'argent ,
fur lefquelles étoient gravées quelques figures myfté-
rieufes de fignes céleftes , fuivant les idées fuperfti-
tieufes de la théologie payenne , ou qui avoient été
fabriquées fous l'afpect de quelques conftellations.
Tertullien en décrivant quelques ceintures femble
vouloir parler de ces talifmans , latent in cingulis Jma-
ragdi. Or Pline & Marcellus Empiricus attribuent
beaucoup de vertus aux figures d'aigles &c de feara-
bées qu'on gravoit fur ces pierres ,Jmaragdi. Les gens
de guerre auffi fuperftitieux que d'autres , pouvoient
avoir d'autant plus de foi à ces pierres conftellées ,
dont leurs baudriers étoient enrichis , qu'on croyoit
communément que c'étoit par la vertu d'un fembla-
ble amulete que Milon de Crotone avoit été invin-
cible dans les combats ; & que l'hématite autre ef-
pece de pierre précieufe , n'étoit pas moins falutaire
pour repouffer les ennemis & les vaincre ; recher-
ches que cet académicien appuie des témoignages de
plufieurs anciens auteurs. Sans prétendre diminuer
le mérite de toutes ces découvertes ingénieufes , j'ha-
farderai que comme dans le paffage de Trebellius
Pollion , auratos balteos fignih"e des baudriers ornés ou
enrichis de dorure ; conjlellatos y lignifie tout Ample-
ment qu'ils étoient parfemés à? étoiles en broderie , &
qu'apparemment Cafaubon qui n'y a point entendu
de myftere , a crû que ce fens fe préîentoit de lui-
même & n'avoit pas befoin d'explication. ( G )
BAUDROIE, rana pifeatrix , f. f. ( Hijl. nat.
Zoolog. ) poiffon de mer ainfi nommé ; parce que fa
bouche eft fi grande qu'on l'a comparée à un bau-
drier : on lui a donné le nom de rana , parce qu'il
reffemble au têtard ; & on a ajouté celui de pifeatrix ,
parce qu'il eft bon pêcheur. La baudroie eft plate Se
de couleur brune ou enfumée ; fa tête eft groffe ,
ronde , applatie & garnie de plufieurs aiguillons ; l'ou-
verture de la bouche eft au-devant de la tête & non
pas en deffous ; la mâchoire inférieure & la langue
font plus longues que la mâchoire fupérieure , c'eft
pourquoi la bouche eft toujours ouverte : chaque mâ-
choire a des dents longues , pointues & recourbées
en dedans ; il s'en trouve fur le palais & fur la lan-
gue. Les yeux font placés fur le deffus de la tête,
dirigés de côté , & environnés d'aiguillons. Il y a
au-devant des yeux deux barbillons , qui font fort
menus à leur naiffance & plus gros à leur extrémi-
té ; on prétend que par le moyen de ces barbillons ,
la baudroie eft avertie de l'approche des petits poif-
fons lorfqu'elle eft dans le fable ou dans l'eau trou-
ble. Elle a deux nageoires au milieu du corps, une
de chaque côté , & une ouverture pour les ouies auffi
de chaque côté , recouverte par une peau. La queue
eft épaiffe , charnue, & terminée par une feule na-
geoire ; il s'en trouve une autre fur le deiîus de la
queue. Il y a de petits prolongemens charnus , qui
pendent des deux côtés de la tête & de la queue, &c
qui font placés à quelque diftance les uns des autres.
Ce poiffon fait des œufs ; fa chair eft de mauvais
goût & de mauvaile odeur. Lorfqu'on a tiré les en-
trailles par la bouche & qu'on a étendu le corps , on
voit le jour au-travers ; & fi on met une chandelle
au dedans , il paroît fort hideux : c'eft pourquoi les
Italiens l'ont nommée diavolo di mare. Rondelet.
Voyt{ Poisson. (/)
BAUDROYER , y. act. vieux terme fynonyme
B A U
à courroyer ou préparer les cuirs , colorés feulement.
BAUDROYEUR , f. m. ouvrier qui courroyoitles
cuirs de couleur. La communauté des Baudroyeurs eft
unie à celle des Courroyeurs , qui le qualifient maî-
tres Baudroyeurs- Courroyeurs.
BAUDRUCHE , f.m. entermede Batteur d'or; c'eft
une pellicule d'un boyau de bceuf apprêtée, dont ils
font les feuillets de leurs outils. Voye^ Battre l'or.
BAVER , v. neut. ( Jardinage. ) le dit d'une eau
qui vient en décharge, ou d'un jet qui ne s'élève pas
haut. (K )
BAVETTE, f. f. che^ les Bcyaudiers , eft un uften-
cile qui dépend en quelque façon du tablier , quoi-
qu'il en foit féparé ; c'eft une efpece de plaftron com-
pofé de vieux chiffons que ces ouvriers mettent de-
vant eux pour garantir leur poitrine , & empêcher
que leurs habits ne foient gâtés. Les Boyaudiers fuf-
pendent la bavette à leur cou, & le l'attachent derriè-
re eux avec des cordons.
Bavette , terme de Plombier ; c'eft ainfi qu'on ap-
pelle une forte de plate-bande de plomb qui couvre
les bords des cheneaux.
Bavette , le dit auffi des plaques de plomb , qui
fe mettent au-deflbus des bourfeaux qui fervent d'or-
nement fur les couvertures d'ardoifes.
BAVEUSE , bavofa ,(.(.( Hifi. nue. Zoolog.) poif-
fon de mer ainfi appelle à Àntibes , parce qu'il eft
Toujours couvert d'une bave gluante : il n'a point
d'écaillés ; il eft liflé & moucheté , le dos eft brun 6c
le ventre de couleur blanchâtre. Il a deux nageoires
près des ouies , & deux au-deflbus , une fur le dos ,
qui s'étend depuis la tête jufqu'à la queue, & une au-
tre qui va depuis l'« nus jufqu'à la queue. Ce poiflon
refTemble beaucoup à celui que l'on nomme perce-
pierre & coauillade. Rondelet. Voyt{ Percepierre ,
COQUILLADE , POISSON. (/)
* B AVEY ( Géog.) petite ville de France , dans le
Haynault.
* B AU G E , f. f. (Commerce.') efpece de droguet
d'une demi-aune de large au fortir du foulon , qui fe
fabrique en Bourgogne, fur des rats ou peignes de trois
quarts, avec de la laine grofîîere, & du fil filé gros.
* B A U G E , {.{. ( (Economie rujlique. ) c'eft de la
terre franche mêlée avec de la paille & du foin ha-
chés. On pétrit ce mélange , on le corroie , & l'on
s'en fert où le plâtre Se la pierre font rares. Les murs
font ou de bauge , ou de cailloux lies de bauge. Ces
derniers ne s'en appellent pas moins murs de bauge.
La plupart des chaumières ne font pas conftruites
d'autre chofe. Quand la bauge eft foûtenue par de la
charpente , comme dans les granges , les érables &
d'autres bâtimens , cela s'appelle torchis ; parce que
cette charpente n'étant pour l'ordinaire qu'un aflém-
blage de perches & de pieux lattes , pour remplir &
confolider cette efpece de grillage , on fe fert de bâ-
tons fourchus & de branches d'arbres qu'on enduit
de bauge , & qui reïlemblent afTez alors à une torche ;
on infère ces torches dans les entailles & ouvertu-
res de la charpente : quand le mur eft plein , on le
crépit du haut en bas avec de la bauge pure &c bien
corroyée ; on l'unit avec la truelle , & l'on blanchit
le tout , fi l'on veut , avec du lait de chaux ; ce cloi-
fonnage eft de peu de dépenfé , & il eft d'autant plus
folide que les paliflbns ou palats , c'eft ainfi qu'on
appelle les bâtons ou rameaux qu'on enduit de bauge,
iont plus courts , &c par confequent les perches &c
pieux qui forment la charpente plus ferrés : il ne faut
point employer de bois verd dans cette manière de
bâtir ; car il fe déjette, & donne lieu à des creva fies &
à la chute des murs. Que les paillions ou palats foient
de chênes ; que la terre foit bien délayée , & qu'elle
foit en une pâte ni molle ni dure : voila les condi-
tions principales à obferverdans la manière de faire
&; d'employer la bauge,
Tome U.
B A U
163
* Bauge f. f. (Chaffe.) c'eft le lieu où la bête noi-
re , comme le fanglier , fe couche tout le jour : c'eft
ordinairement un endroit bourbeux & touffu de la
forêt.
* B AUGE ( Géog. ) ville de France , en Anjou , fur
le Coefnon , à quatre lieues de la Flèche.
Bauge (Géog. ) ville de France, dans la BrefTe ,
dont elle étoit autrefois la capitale , à une lieue de
Mâcon.
*BAUGENCI ( Géog. ) ville de France , dans l'Or-
léanois proprement dit , avec titre de comté.
B AUHINE , bauhinia , genre de plante dont le nom
a été dérivé de celui de Jean &c Gafpar Bauhin ; la
fleur des plantes de ce genre eft polypétale irrégu-
liere , compofée pour l'ordinaire de cinq pétales tous
rangés du même côté ; il s'élève du fond du calice un
piftil recourbé &c entouré d'étamines auffi recour-
bées ; il devient dans la fuite une filique remplie de
lemences qui ont la forme d'un rein. Plumier, nova,
plant. Americ. gen. foye^ PLANTE. (/)
* BAVIERE , ( Géog. ) état confidérable d'Alle-
magne , avec titre de duché , borné au feptentrion
par la Bohème & le haut Palatinat ; à l'orient par
l'Autriche , l'archevêché de Saltzbourg , & l'évêché
de PafTau ; au midi par l'évêché de Brixen & le Ti-
rol ; à l'occident par le Lech. Il a environ 50 lieues
d'occident en orient , & 3 5 du midi au feptentrion :
fes principales rivières font le Danube , l'Inn , l'Ifer,
& le Lech. La Bavière fe divife en haute , où eft la
régence de Munich , capitale de Bavière ; & en
bafîe , oii font les trois régences de Burckhaufen ,
Landshut, &c Straubingen.
B A v 1 E R E , ( Cercle de) partie de l'Allemagne
beaucoup plus étendue que la Bavière ; comprenant
outre la Bavière , le haut Palatinat, l'archevêché de
Saltzbourg , les évêchés de Frizingue , de PafTa-w , &
de Ratisbonne, avec le duché de Neubourg. Elle eft
bornée à l'orient & au midi par le cercle d'Autri-
che , & à l'occident & au feptentrion par les cercles
de Franconie & de Suabe , & parla Bohème.
Bavifre , (Palatinat de) partie du Nortgaw , dont
la capitale eft Amberg.
II ne faut pas confondre, comme on voit,la Bavière,
foit avec le cercle , foit avec le Palatinat de même
nom.
* BAUMANN, (Caverne de ) ; elle eft proche
de Goflar , dans le comté de Blanckenburg , fous un
rocher. On dit qu'on y trouve des pierres auxquelles
la nature a donné la figure d'os d'animaux , & d'au-
tres formes bifarres ; il y a fix grottes qui communi-
quent les unes aux autres, & s'étendent fous terre à
une très-grande profondeur ; on ajoute fur ces grottes
beaucoup de choies fabuleufes , qu'il eft inutile de
rapporter ici.
* B AUM ARIS, ( Géog. ) ville fituée dans l'ile d'An-
glefeey.
BAUME, plante. Voyei Mente. (/)
Baume , proprement dénote une lubftance hui-
leufe , réfineule , odoriférente , provenant des inci-
fions de certaines plantes , d'une vertu fouveraine
pour la cure des plaies & de divers autres maux.
Nous l'appelions quelquefois par manière de dis-
tinction , baume naturel. Nous dilons baume de la Mé-
que , baume du Pérou , de Tolu, de Copahu, d'ambre
liquide , à quoi peut être ajouté le baume de Car-
pathie.
BAUME de Giléad, eft des plus eflimés , quoi-
qu'il y ait des auteurs qui veulent que celui du 1 e-
rou ne lui foit point inférieur en vertu. On le tire
par incifion d'un arbre du mime nom , qui croît en
Egypte & dans la Judec , mais principalement dans
l'Arabie Heurcufe , & qui eft d'une fi grande valeur,
qu'il fait partie du revenu par culiei du ^rand-fei-
gneur , fans la perniiffion duquel il n'eft point permis
X.j
164
B A U
B A U
d'en planter ou cultiver aucun. L'incilion par la-
quelle cet admirable lue coule , le t'ait pendant la ca-
nicule. Théophrafte dit qu'elle doit être faite avec
des clous de fer ; Pline avec du verre ; parce que,
dit-il, le fer fait mourir la plante. Tacite nous dit
que lorfque les branches font pleines de fève , leurs
veines lèmblent appréhender le fer , & s'arrêter
quand une incifion eit faite avec ce métal , mais cou-
ler librement lorfqu'elles font ouvertes avec une
pierre , ou un têt de cruche caffée. Enfin , Marmol
dit que les veines doivent être ouvertes avec de l'i-
voire ou du verre. Le fuc elt d'abord d'une couleur
fombre ; il devient enfuite blanc , enfin vert , & peu
à peu d'une couleur d'or , & quand il eft vieux , de
la couleur de miel : il eft de la confiftance de la té-
rébenthine ; fon odeur elt agréable & très-vive ; fon
goût amer , piquant , & aftringent : il fe difibut ai-
fément dans la bouche , 6c ne laine point de tache
fur le drap.
Il eft à remarquer que le fuc qui nous eft apporté
pour du baume, n'eft pas proprement la gomme , ou
pleurs de l'arbre , extraites par incifion , parce qu'il
n'en rend que peu de cette façon ; mais elt préparé
du bois & des branches vertes de l'arbre diltillées ;
èc toutefois il fe trouve même fouvent fophiftiqué
avec de la térébenthine de Chypre & d'autres refî-
nes & huiles , ainfi qu'avec du miel , de la cire, &c.
Outre cela , il y a pareillement une liqueur extraite
de la femence de la plante , qu'on fait paffer fouvent
pour le véritable baume, quoique fon odeur foit beau-
coup plus foible, & fon goût beaucoup plus amer.
Le baumier elt à peu près de la hauteur du grena-
dier ; fes feuilles femblables à celles de rue , toujours
vertes ; fes fleurs blanches , & en forme d'étoiles ,
d'où fortent de petites cofiès pointues , renfermant
un fruit femblable à l'amande , appelle carpo-balfa-
inum , comme le bois eft appelle xylo-balfamum , &
le fuc opo-balfamum. Voye^ OpO-BaLSAMUM , Crc
Le carpo-balfamum entre dans la compolition de la
thériaque de Venife , & n'a guère d'autre ufage dans
la Médecine : on doit le choifir d'un goût aromati-
que , & d'agréable odeur, Voye^ Carpo-Balsa-
MUM. Le xylo-balfamum , qui comme les autres pro-
ductions du baumier , elt apporté du Caire , entre
dans la compofition des trochifques hedychrois ; il
eft apporté en petits fagots , ayant l'écorce rouge ,
le bois blanc ,réfineux & aromatique. Voye^ Xvlo-
BALSAMUM.
Il y a pareillement un baume de la Mcque , qui eft
une gomme feche 6c blanche , refîemblante à la cou-
perofe , fur-tout quand elle eft vieille. Elle eft ap-
portée de la Meque , au retour des caravanes de pè-
lerins & marchands Mahométans, qui vont là par dé-
votion au lieu de la naiflance de leur prophète. Elle
a toutes les vertus du baume de Giléad , ou de la Ju-
dée , & eft probablement le même baume , qui elt
feulement endurci, & dont la couleur eft altérée.
Baume du Pérou , eft de trois efpeces , ou plutôt
un même baume à trois différens noms : favoir , baume
dincifion , qui eft une réfme blanche & glutineufe
provenant d'une incifion faite dans l'arbre , & enfuite
épaiffie 6c endurcie. Il eft excellent pour les plaies
récentes, fraîches, & reffemble beaucoup kVopo-
balfamum , à l'odeur près qui le diftingue. Baume fec,
qui fe diftille des bouts de branches coupées, auxquel-
les font attachés de petits vaifteaux pour recevoir la
liqueur , qui eft d'abord femblable à du lait , mais
rougit étant expofée au foleil. Son ufage principal
eft dans la compofition du lait virginal, qui fe fait
beaucoup mieux avec ce baume , qu'avec lejiorax ou
le benjoin. Enfin le baume de lotion , qui eft noirâtre ,
eft tiré de l'écorce, des racines , & feuilles de l'arbre
hachées ôc bouillies enkmble : on s'en f ert pour les
plaies comme du baume blanc , & il eft fort eniifagé
chez les Parfumeurs , à caufe de fon odeur.
Baume de Copahu, ou de Copaiba , vient du Bréfil,
dans des bouteilles de terre : il y en a de deux fortes ;
l'un eft clair & liquide ; l'autre eft d'une couleur plus
fombre & épais : le premier eft blanc , d'une odeur
rénneufe ; l'autre tire un peu plus fur le jaune ; tous
deux font admirables pour les plaies ; les Juifs s'en
fervent après la circoncinon pour étancher le fang.
Baume de Tolu , eit une réfme liquide, qui à me-
fure qu'elle vieillit , devient de la couleur & de la
confiftance de la colle de Flandre. Elle fe tire par in-
cifion de quelques arbres qui croiffent dans la Nou-
velle Eipagne , où les habitans la reçoivent dans de
petits vaifteaux de cire noire : elle relfemble au bau-
me de Gilêad pour le goût & pour l'odeur, félon qu'elle
devient vieille ; elle prend la confiltance d'un baume
fec.
Baume d'ambre liquide , eft une réfine claire &C
rouge , produite par un arbre de la nouvelle Efpa-
gne , appelle par les naturels du pays ofofol ; il ref-
femble à l'ambre gris, fur-tout par l'odeur, d cii vient
fon nom. Le nouveau baume eft liquide , & eft nom-
mé huile d'ambre liquide : mais quand il eft vieux ,
on l'appelle baume d'ambre liquide ; il vient des deux
Efpagnes en barrils , 6c eit très-rare parmi nous.
On le trouve fouverain pour les plaies , particu-
lièrement pour les fiitules à l'anus : il reffemble au
baume de Tolu par l'odeur 6c la couleur, & eft expri-
mé de la même manière que l'huile de laurier , d'un
fruit rouge qui croît dans l'île de Saint-Domingue.
Baume , eft aufïï appliqué à de certaines compo-
rtions faites par les Chimiftes & Apothicaires, princi-
palement lorfqu'il y entre des ingrédiens balfamiques
6c confolidans , en imitation des baumes naturels.
Ceux-ci font appelles par manière de diitin&ion ,
baumes factices ou artificiels. Nous avons deux diffé-
rentes comportions de baumes , en imitation du bau-
me véritable d'Egypte ; l'un par Matthicle , l'autre
par Furicus Cordus. Pomet a aufïï donné une mé-
thode d'imiter le baume naturel.
Baume de Saturne , eft un fel ou fucre de plomb
difîbut dans l'huile ou efprit de térébenthine , ge-
nièvre ou femblables , digéré jufqu'à ce que la ma-
tière ait acquis une teinture rouge. On dit qu'il ré-
fîfte à la putréfaction des humeurs , & qu'il eft propre
à nettoyer & cicatrifer les ulcères. (A)
Baume de foufre ; c'eft une difîblution du foufre
par une liqueur huiieufe. On peut employer pour
cette opération toute forte d'huile : mais de toutes
les huiles , l'huile de térébenthine eft la plus conve-
ble pour tirer une teinture du foufre.
Le baume de foufre térébenthine elt le plus en ufage.
Pour le faire , on met dans un petit matras deux on-
ces de fleurs de foufre , on verfe deffus huit onces
d'huile de térébenthine , on place le matras fur un
feu de fable , & on fait un feu de digeftion cinq ou
fis heures ; & après avoir laiiîé refroidir le tout, on
fépare le baume d'avec le reite du foufre qui ne s'eft
point diffous , en verfant à clair la liqueur qui a une
couleur de rubis.
Le baume de foufre eft en ufage lorfqu'il y a ulcère
aux poumons après une fluxion de poitrine , une
pleuréfie , une péripneumonie , après l'empyeme &
la vomique, en général lorfqu'on foupçonne un ab-
cès dans l'intérieur , & qu'on juge que la matière
peut prendre la route des urines ou celle de la trant-
piration. Il faut donner tous les matins , & quelque-
fois tous les après-midi , du baume de foufre dans de la
conferve de violette , de rofe, ou de fleurs de pié-de-
chat , depuis une goutte jufqu'à dix.
Les femmes peuvent ufèr de ce remède dans le
tems même de leurs règles ; il ne les arrête pas , au
contraire ; mais il faut avoir l'attention de ne le pas
B A U
donner lorfqu'il y a de la fièvre ; & quand même il
n'y auroit pas de fièvre, il leroit contraire s'il y avoit
de la lecherelfe : dans ce cas la térébenthine fans iou-
fre convient mieux. Ou bien on fait le baume dz foufre
avec l'huile d'amandes douces : mais pour peu qu'il
y ait dilpoiition à la fièvre , autre que la fièvre lente ,
ces remèdes ne conviennent point.
Il eft bon de remarquer que les baumes de foufre
mettent le fang en mouvement , ôc qu'ils font perni-
cieux lorfqu'il y a éréfipele ou difpofition à l'créli-
pele.
Lorfque pour faire le baume de foufre on fe fert de
l'huile d'anis , on le nomme baume de foufre anijé. Ce
baume eft bon dans les maladies d'eftomac ôt des in-
teftins: il eft moins defagréable que les autres. Lori-
qu'on fait le baume de foufre avec l'huile de fuccin ,
on le nomme baume de foufre fucciné : on l'employé
lorfqu'il y a complication par maladies de nerfs.
On fait aujourd'hui un grand ufage du baume blanc
de Canada ; mais les baumes de foufre m'ont paru
beaucoup plus efficaces , dans la pratique de la Mé-
decine, pour les ulcères du poumon, 6c pour ceux
des reins. Lorfqu'on deftine le baume de loutre pour
être employé dans les maladies des reins , de la veffie
& de la matrice , on le prépare avec l'huile de ge-
nièvre.
On fait peu d'ufage extérieurement du baume de
foufre, quoiqu'il y fut fort utilement employé dans
plufieurs occasions: il eft vulnéraire & déterlifen
vuidant les extrémités des vaiffeaux rompus ; il di-
vife les humeurs vifqueufes & purulentes , &c les fait
couler ; ce qui s'appelle déurger.
On peut faire un baume de ioufre pour l'ufage ex-
terne : on prend pour cela une once de fleurs de iou-
fre ; on verfe dellûs de l'huile de lin , ou de l'huile de
noix fix onces, des huiles de milpertuis , de jufquiame
& de pavot blanc , de chaque deux gros ; & on fait
digérer le tout enfemble pour faire la diflblution du
foufre. Malouin , Traité de Chimie. (M)
BaUME du Pérou artificiel : prenez huile d'olive
une livre 6c demie , fantal rouge une demi-once : fai-
tes bouillir jufqu'à ce que l'huile foit d'un rouge fon-
ce : dilfolvez-y cire jaune une livre , térébenthine
fine une livre & demie , baume du Pérou une once.
Ces baumes tiennent lie» des naturels , & font en
grand ufage pour l'extérieur. La plupart des pharma-
copées font remplies de ces eipeces de baumes. Voici
la defeription de ceux dont on le fert le plus ordinai-
rement.
B AUME cTJrceus : prenez fuif de bouc deux livres ;
térébenthine de Venife , gomme élemi , de chaque
une livre & demie; graiffe de porc une livre : faites
fondre le tout enfemble , panez , &z vous aurez le
baume : c'eft un très-bon digeftif , 6c le plus en ufage
dans la cure des plaies.
Baume du Commandeur: prenez racine d'angéli-
que de Bohème , fechée & coupée par petits mor-
ceaux , une demi-once ; fleurs de milpertuis léchées ,
une once; efprit-de-vin rectifié, deux livres quatre
onces : faites-les digérer au foleil ou au bain -marie
dans un vaiffeau fermé , en remuant de tems à autre
le mêla "à ce que la teinture foit parfaite-
ment tirée : pafïez enfuite ; 6: dans la colature ajou-
tez myrrhe, oliban , de chaque demi-once: faites
digérer comme auparavant ; 6c enfuite prenez ltyrax
calamité deux onces , benjoin choili trois onces ,
baume de folu une once , aloès fuccotrin demi-once :
ajoutez , fi vous le jugez à propos, ambre gris fix
grains : mettez en poudre ces drogues, 6c les ;cttcz en-
suite dans la teinture ci-demis énoncée ; faites-les en-
core digérer pendant quarante jours au foleil ; filtrez,
cv eonlervez la colature pour l'ufage.
Ce baume eft un grand vulnéraire, dctcrlif éx in-
carnatif, appliqué à l'extérieur; &pris<à l'intérieur
B A U
165
dans du vin ou dans quelqu'autre liqueur, il eft ex-
cellent contre les coliques, les dévoiemens, lesvo-
miflemens; il elt propre pour exciter les règles : en-
fin on lui attribue , comme à tous les nouveau \ re-
mèdes , de grandes venus , qui font toujours relati-
ves aux indications qui le préfentent dans les ma-
ladies : on peut en faire un alexitaire , un ftomachi-
que , & enfin un diaphorétique.
Baume ou Onguent de genièvre : prenez huile
d'olive trois livres , eau rolé une livre , cire neuve
demi - livre , térébenthine une livre , fantal rouge
en poudre deux onces : faites bouiliir le tout dans
un pot de terre neuf , avec trois demi - feptiers de
vin rouge ; étant refroidi , on féparera le baume du
vin. Voye{ Mémoires de C Académie iyoz.
Baume de Lucatelli : prenez de la meilleure huile
d'olive que vous pourrez trouver , deux livres - •
vin de Canarie , deux livres ; lang de dragon pul-
vérifé , une once : faites bouillir ces drogues jufqu'à,
conlomption du vin : ajoûtez-v cire jaune une livre ,
térébenthine de Venife une iivre & demie , fantal
rouge en poudre deux onces , baume du Pérou deux
onces ; mêlez-les ôc faites-les fondre enfemble, &
ne mettez le baume qu'après avoir retiré le mélange
du feu.
Ce baume eft un excellent vulnéraire employé
dans les ulcères internes 6c externes , dans les tuber-
cules , & dans les ulcères & les hémorrhagies inter-
nes. On l'applique fur les plaies & les contufions.
Baume odoriférant : prenez pommade fans odeur
une once ; faites-la fondre à petit feu dans une tafle
de porcelaine , & ajoûtez-y peu-à-peu cire blanche
un gros ; le tout étant bien mêlé , retirez le vaifTeau r
lorfque le mélange commencera à s'épailfir , verfez-y
hiuie eiîentielle de citron un gros : remuez la ma-
tière, pour que le mélange foit plus parfait : mettez
le vaiffeau dans l'eau froide , pour qu'il fe refroidifle
plutôt ; 6c le baume étant tout-à-fait froid , ferrez-le
dans de petites boîtes , où il foit bien bouché.
Il fe garde plufieurs années fans fe corrompre : on
peut au lieu de pommade & de cire, employer l'huile
exprimée de noix mufeade , après l'avoir lavée fi
long -tems dans l'eau qu'elle devienne blanche. Ce
baume eft propre à ranimer ; c'eft un grand cordial :
on en peut faire un pareil avec toutes les efpeces
d'huile ellèntielle.
Baume pectoral : prenez benjoin , myrrhe , baume
du Pérou, iâfran, mufeade, teinture de fel de tartre,
gomme ammoniaque , de chaque deux gros ; huile
d'anis , de macis , de fenouil , de chaque dix gouttes.
Cette compolition peut fe donner liquide , en l'éten-
dant davantage avec l 'efprit-de-vin.
BAUME polychrefie: prenez efprit- de -vin quatre
livres ; faites-y infufer à petit feu en remuant , gom-
me de gaiac douze onces ; ajoûtez-y enfuite baume
du Pérou , térébenthine , de chaque deux onces.
BaUM E préparé par la décoclion des bois réfineux bal-
ftmiques : prenez râpures de fantal , de bois de rofe ,
de genévrier , de failafras , de bois de vie , racine de
lalleparcilte , de chaque une once ; racine de pimpre-
ne le, d'angélique, canelle, clous de girofle, râpu-
res de bois d'aloès , de chaque deux gros ; mêlez ces
drogues , ôc faites-les bouillir avec du vin rouge dans
un vailTcau fermé. Cette décoclion peut êtred'ulage
comme les baumes.
Baume fol/de ôc aftringent : prenez baume de Co-
pahu , de Tolu , fuccin , maltic , oliban, cachou , terre
figillée, antimoine diaphorétique , corail prépare ,
de chaque un gros ; huile de faflafras d^\ gouttes:
prépare! ces drogues félon l'art; il produit des effets
admirables clans la gonorrhée.
BAUME verd de Mets ou Je MademoifiUe Feuillet :
prenez huile de lin par expreffion , d'olive , de cha-
que une livre , de laurier une once , térébenthine de
i66
B A X
Venife deux onces ; liquéfiez le tout à petit feu ; &
quand elles feront refroidies , ajoutez- y huile diftil-
îée de baies de genièvre une once & demie , verd de
gris trois gros , aloès fuccotrin en poudre deux gros ,
vitriol blanc pulvérifé un gros & demi , huile de gi-
rofle un gros ; faites-en un baume félon l'art. Il eft pro-
pre pour mondifier les plaies & les ulcères , pour les
incarner &C les cicatrifer , contre la morfure des bêtes
venimeufes : on en fait chauffer , & on en met dans la
plaie avec la barbe d'une plume.
Ce baume a été inventé en premier lieu par M.
Duclos , Médecin de Mets ; Mademoifelle Feuillet
l'a fait appeller de fon nom , l'ayant mis en vogue à
Paris. Lemery , Pliarmacop. univerf.
BAUME vulnéraire : prenez effence de myrrhe,
fuccin, gomme élémi, fantal rouge , baume du Pé-
rou , de Tolu , huile d'armoife , lbmmités de mille-
feuilles , d'hypericum , de chaque une once : on
mêle ces drogues avec cinq quarterons d'huile & de
vin , & on en fait un baume excellent en les digérant
for un feu modéré. Hoffmann les diftille & en tire un
efprit qu'il préfère au baume de Lucatelli.
Ce baume eff un excellent vulnéraire & ftomachi-
que ; on en peut ufer intérieurement comme exté-
rieurement.
On n'auroit jamais fait , fi on vouloit détailler tous
les baumes artificiels qui ont été découverts par les
auteurs qui nous ont laine des difpenfaires. Lemery
en compte foixante-treize efpeces différentes dans la
Pharmacopée univerfelle , en y comprenant quelques-
uns de ceux dont nous avons parlé plus haut. On en
trouve un grand nombre d'autres dans les difpenfai-
res étrangers. (A7')
* Baume (la/aime), grotte fur une montagne de
France en Provence , entre Aix , Marfeille & Toulon.
Ce lieu eft très-fréquenté , parce que les peuples font
imbus du préjugé que la Magdeleine y eft morte.
* Baume les nones, (£«%/-.) ville de Franche-
Comté en France , fur le Doux.
* Baunach , (Gcog. ) rivière deFranconie.
BAVOIS, f. m. ancien terme de Monnoie , étoit la
feuille de compte où l'on marquoit l'évaluation des
droits de feigneuriage , foiblage , braffage , &c. félon
le prix courant que le prince par fes ordonnances ,
avoit preferit pour l'or , pour l'argent , & pour le bil-
lon en œuvre ou hors d'œuvre.
BAVOLET , f. m. (terme de Marchande de mode.^)
c'eft la féconde pièce d'une coeffure, mais qui n'a
point de barbe , &: qui forme feulement le deffus de
tête ; au refte ce bavolet eft garni & pliffé comme la
pièce de deflbus; c'eft auffi iur lui que l'on monte le
fer qui forme le gros pli du milieu.
* BAUSK. (Geog.) ville importante de Curlande ,
fur les frontières de Pologne au nord , fur la rivière
de Mufza. Long. 42. 14. lat. 56. 30.
* BAUTZEN ou BUDISSEN (Giog.) , ville d'Al-
lemagne , capitale de la haute Luface , fur la Sprée.
Long. 32. 13. lat. 5i. 10.
* BAXANA, plante Indienne, ainfi caraftérifée
dans les auteurs , baxana, arbor fruclu venenato , radïce
venenorum antidoto.
Baxana , arbre à fruit vénéneux, & à racine
anri-vénéneufe ; on le trouve à Queyonne , proche
Ormuz. On dit que fon fruit luftbque , en quelque
petite quantité qu'on en prenne , & que fon ombre
eft mortelle fi l'on s'y tient pendant un quart d'heure :
mais Ray traite ces effets de fables , fur ce que dans
d'autres contrées on attribue à la racine , aux feuil-
les & au fruit du même arbre , des propriétés falutai-
res. Au refte que cet arbre fpit ou auffi pernicieux
ou auffi utile qu'on le dit, il n'eft pas moins confiant
qu'il en faudrait une autre defeription que la précé-
dente, & quêtant qu'une plante, étrangère fur-tout ,
ne nous fera pas mieux connue que par une phraie ,
B A Y
telle que la précédente , c'eft précifément comme fi
elle n'exiftoit pas.
* BAXEA (Hift. anc. & Antiq.) , efpece de chauf-
fure ancienne , du nombre de celles qui s'attachant
fur le pié avec des bandes , ne le couvraient pas en-
tièrement. Plaute en a fait mention : mais on croit
que le baxea de Plaute étoit une forte de fandale à
l'ufage des philofophes. Arnobe parle de baxées faites
de feuilles de palmier.
* BAYA ou BAJA (Géog.), ville de la baffe Hon-
grie, dans le comté de Bath , près du Danube. Long.
3J. lat. 46. 25.
B AYANISME ou BAI ANISME , f. m. {ffift. eccléf.
& Tliéol.") erreur de Baïus 6c de fes difciples.
Michel Baïus ou de Bay, né en 1 5 1 3 à Melin , dans
le territoire d'Ath en Haynault , après avoir étudié
à Louvain & paffé fucceffivement par tous les gra-
des de cette univerfité , y reçut le bonnet de docteur
en 1 5 50 , & fut nommé l'année fuivante , par Char-
les V. pour y remplir une chaire d'Écriture fainte ,
avec Jean Heffels , fon compagnon d'étude & fon
ami. Il enfeigna dans fes écrits & fit imprimer di-
verfes erreurs fur la grâce , le libre arbitre, le péché
originel, la charité, la mort de Jefus-Chrift , &c.
Elles font contenues dans 76 propofitions , condam-
nées d'abord en 1 567 par le pape Pie V.
On peut rapporter toutes les propofitions de Baïus
à trois chefs principaux. Les unes regardent l'état
d'innocence ; les autres l'état de nature tombée ou
corrompue par le péché ; & les autres enfin l'état de
nature réparée par le fils de Dieu fait homme ôc
mort en croix.
i°. Les anges & les hommes font fortis des mains
de Dieu juftes & innocens : mais Baïus & fes difci-
ples ont prétendu que la deftination des anges & du
premier homme à la béatitude célefte, que les grâces
qui les menoient de proche en proche à cette dernière
fin , que les mérites qui réfultoient de ces grâces ,
& la récompenfe qui étoit attachée à ces mérites,
n'étoient pas proprement des bienfaits non dûs ou des
dons gratuits; que ces dons étoient inféparables de la
condition des anges & du premier homme , & que
Dieu ne les leur devoit pas moins qu'd devoit à ce
dernier la vue , l'oiiie , & les autres facultés naturel-
les. Tout cela eft appuyé fur ce principe fondamental
de Baïus , que ce n'eft point par une deftination acci-
dentelle ci arbitraire que la vifion ou joiiiflance in-
tuitive de Dieu a été préparée aux anges & au pre-
mier homme, mais en vertu du droit de leur création
dans l'état d'innocence, & par une fuite de leur con-
dition naturelle : qu'une créature raifonnable & fans
tache ne peut avoir d'autre fin que la vifion intuitive
de fon Créateur ; que par conféquent Dieu n'a pu ,
fans être lui-même l'auteur du péché , créer les an-
ges & le premier homme que dans un état exclufif
de tout crime , ni par coniéquent les deftiner qu'à la
béatitude célefte : que cette deftination étoit à la vé-
rité un don de Dieu , mais un don que Dieu ne pou-
voit leur refùfer fans déroger à fa bonté , à fa fainte-
té , à fa juftice. Telle eft la doctrine de Baïus dans fon
livre de prima hominis jujlitid , fur-tout chap. viij. &C
elle eft exprimée dans les propofitions 21 , 23 , 24,
26, 27, 55 , 71, ôc 72, condamnées parla bulle de
Pie V. 20. Si Dieu n'a pu créer les anges & l'homme
dans ce premier état, fans cette deftination eflèntiel-
le , il eft évident qu'il a été dans l'obligation indifpen-
fable de leur départir les moyens néceffaires pour ar-
river à leur fin ; d'où il réfulte que toutes les grâces,
foit actuelles foit habituelles , qu'ils ont reçues dans
l'état d'innocence , leur étoient dues comme une fuite
naturelle de leur création. 30. Que les mérites des
verms & des bonnes actions étoient de même efpece,
c'ert-à-dire , naturels , ou ce qui revient au même , le
fruit de la première création, 40. Que la félicité éter-
B A Y
r.elle attachée à ces mérites étoit de mêrrie ordre ,
c'eft-à-dire une pure rétribution, où la libéralité
gratuite de Dieu n'entroit pour rien ; en un mot
qu'elle étoit une récompenfe & non pas une grâce.
Dans ce fyftème , les dons divins gratuits n'avoient
donc point de lieu dans l'économie du falut des an-
ges & du premier homme , puiique tout y éteit dû
& un apanage néceffaire de la nature innocente.
50. Enfin, par rapport à cet état Baïus & fes diiei-
ples ont erré fur ce qui concerne la connoiffance des
devoirs , l'exemption des fouffrances , & l'immorta-
lité , en foûtenant que l'homme innocent étoit à l'a-
bri de l'ignorance, des peines & de la mort en vertu
de fa création , & que l'exemption de tous ces maux
étoit une dette que Dieu payoit à l'état d'innocence
ou un ordre établi par la loi naturelle toujours inva-
riable , parce qu'elle a pour objet ce qui eft effentiel-
tiellement bon&jufte. C'eft la doctrine expreffe des
propofitions 53 , 69, 70 , & 75 de Baïus. Voye^t le P.
Duchefne, hijl. du Baïanifme , liv. II. pag. tyj. 18 0.
& liv. IV. pag. 356 . & 361. & le traité hijtorique &
dogmatique fur la doctrine de Baïus , par /'abbé de la
Chambre , tom. I. chap. ij. pag. 4p. & fuïv.
11°. Quant à l'état de nature tombée , voici les
erreurs de Baïus &de fes feftateurs fur la nature du
péché originel , fa transfufion , & fes fuites. i°. Dans
leur fyftème le péché originel n'eft autre choie que
la concupifcence habituelle dominante. i°. Cette idée
fuppofée , la transfufion du péché d'Adam n'eft plus
un myftere qui révolte la raifon ; ce n'eft plus l'effet
du violement d'une loi de Dieu qui ait attaché le fort
des hommes à la fidélité de leur premier père. Ce pé-
ché fe tranfmet de la même manière que l'aveugle-
ment , la goutte , & les autres mauvaifes qualités
phyfiqucs de ceux dont on tient la naiffance : cette
communication fe fait indépendamment de tout ar-
rangement arbitraire de la part de Dieu ; tout péché
par fa nature ayant la force d'infecter le tranfgreffeur &
toute fa pojlérité , comme a fait le péché originel, prop.
-50. & cependant ce dernier efl en nous fans aucun
rapport à la volonté du premier père , prop. 46. Sur les
fuites eu péché originel Baïus dit, i°. que le libre
arbitre fans la grâce n'a de forces que pour pécher , prop.
2.8. 2°. qu'il ne peut éviter aucun péché , prop. 29. que
tout ce qui en fort, même l'infidélité négative, efl un péché;
que l'efclave du péché obéit toujours à la cupidité domi-
nante ; que jufqu'à ce qu'il agiffe par l'imprefiion de
la charité, toutes fes actions partent de la cupidité &
font des péchés. Prop. 34.36. 64. 68. &c. 30. qu'il
ne peut y avoir en lui aucun amour légitime dans
l'ordre naturel , pas même de Dieu , aucun acte de
juftice, aucun bon ufage du libre arbitre, ce qui pa-
roît dans les infidèles , dont toutes Us actions font des
péchés , comme les venus des philofophes font des vices.
Prop. 25. & 26. Ainfi , félon Baïus , la nature tombée
& deftituée de la grâce eft dans une impuiffance gé-
nérale à tout bien , & toujours déterminée au mal
que fa cupidité dominante lui propole. Il ne lui refte
ni liberté de contrariété , ni liberté de contradiction
exempte de nécefiïté : incapable d'aucun bien, elle
ne peut produire d'action qui ne foit un péché ; & né-
ceflîtée au mal , clic s'y porte au gré du penchant qui
la domine , & n'en eft ni moins criminelle ni moins
puniffable devant Dieu. Voye^ le P. Duchefne , hijl.
du Baïanifme , liv. II. pag. 180. l8z. & liv. IV. pag.
361. & 36 7 • & fe traité hijlorique & dogmatique déjà
cité , pag. 54. &fuiv.
• 111°. Les erreurs de Baïus, d'Heffels , & de leurs
fectateurs , ne iont pas moins frappantes quant à
l'état de nature réparée par le rédempteur: ils difent
formellement , que la rétribution de la vie éternelle s'ac-
corde aux bonnes actions , fans avoir égard aux mérites
de Jejus-Chrijl ; quelle n cil pas même , à proprement par-
ler , une grâce de Dieu, mais l'effet & la fuite de la loi
B A Y
167
naturelle , ps. r laquelle il a été établi par un jufle jugement
de Dieu , dès la première infïtution du genre humain , que
le royaume célefle feroit le J'alaire de Cobéiffance à la loi ;
que toute bonne œuvre efl de Ça nature méritoire du ciel,
comme toute mauvaije efl de fa nature méritoire de la dam-
nation ; que les bonnes œuvres ne tirent pas leur mérite de
la grâce d adoption , mais uniquement de leur conformité
à la loi ; que le mérite ne fe prend pas de l'état de grâce ,
mai: feulement de Cobéiffance à la loi ; que Us bonnes ac-
tions des catéchumènes , qui précèdent la rémiffion de leurs
péchés, comme la foi & la pénitence, méritent la vie éter-
nelle. Prop. 11. 12. 13. 18.69.
La juftirication des adultes , félon Baïus , de juflif
cap. vïij. & dejuflit. cap. iij. & iv. confiire dans la
pratique des bonnes œuvres & la rémiffion des pé-
chés. La rémiffion des péchés peut s'entendre de la
coulpe & de la peine éternelle ou temporelle : l'o-
béiflance à la loi juftifie fans remettre la peine éter-
nelle ; pour la coulpe , elle paffe avec la peine du
péché. Enconféquence les Baianifes ontavancé, que
le pécheur pénitent nef point vivifié par le miniflere du.
prêtre qui l'abjout, & qu'il n'en reçoit que la rémiffion de
la peine ; qve Us facremens de baptême & de pénitence
ne remettent point la coulpe , mais la peine feulement ;
qu'ils ne confèrent point la grâce janclifiante ; qu'il peut
y avoir dans Us pénitens & les catéchumènes une chari-
té parfaite ,fans que leurs péchés leur foient remis ; que
la charité , qui efl la plénitude de la loi , nef pas tou-
jours jointe avec la rémiffion des péchés ; que le catéchu-
mène vit dans la juftice avant que d'avoir obtenu la ré-
miffion de fes péchés ; quun homme en péché mortel peut
avoir une charité même parfaite , fans ceffer d'être fujet
à la damnation éternelle ; parce que la contrition , mê-
me parfaite , jointe à la charité & au dejir du factementy
ne remet point la dette de la peine éternelle , hors le cas
de néceffité ou de martyre , fans la réception acluelU du
facrement. Prop. 31. 54. 55. 67. 68. &c.
Comme dans le fyftème de Baïus on eft formelle-
ment juftifie par l'obéiffance à la loi , ce dofteur &
fes difciples difent qu'ils ne reconnoiffent d'autre obéif-
fance à la loi que celle qui coule de Cefprit de charité ;
Prop. 6. point d'amour légitime dans la créature raifon-
nable , que cette louable charité que le S. EJpril répand
dans le cœur , & par laquelle on aime Dieu ; & que tout
autre amour efl cette cupidité vicieufe qui attache au mon-'
de, & que S. Jean réprouve. Prop. 38.
Enfin leur doctrine n'eft pas moins erronée fur le
mérite & la valeur des bonnes œuvres , puifqu'ils
avancent d'un côté que dans F état de la nature réparée
il n'y a point de vrais mérites qui ne Joïent gratuitement
conférés à des indignes ; & que de l'autre ils préten-
dent que les bonnes œuvres des fidèles qui Us jujtifient ,
ne peuvent pas fatisfaire à la julîice de Dieu pour les pei-
nes temporelles qui refient à expier après la rémiffion des
péchés , ni les expier ex condigno : ces peines , félon
eux, ne pouvant pas erre rachetées , même par Usfouf-
frances des Saints. Prop. 8. 57. 74. Voye^ les auteurs
cités ci-deffus : voye? auffi C abrégé du Trait, de la grâce
de Tournely par M. Montagne , doéL de Sorb. de la
maifon de S. Sulpice.
Ce fyftème , comme le remarque folidement ce
dernier théologien, eft un compofé biiarre & monf-
nueux de Pélagianifnme , quant à ce qui regarde i e-
tat de nature innocente , & de Luthéraniime Se de
Calvinifme pour ce qui concerne l'état de nature tom-
bée. Quant à l'état de nature réparée , tous les len-
timens de Baïus , fur-tout fur la juftification . l'effica-
ce des facremens , &c le mérite des bonnes œuvres .
font fi directement oppofesà la doctrine du concile
de Trente , qu'ils ne pouvoient éviter les différentes
csnfures qu'ils ont elhr - ■
En effet , dès 1 5 52 Ricard Tapper , Joffe Ravef-
tein , Richtou , Cuner , 6c d'autres docteurs de Lou-
vain , /élevèrent contre Baïus &: Heffels , qui répaiv
î68
B A Y
BAZ
doient les premières femences de leurs opinions. En
1560 , deux gardiens des Cordeliers de Flandre en
déférèrent 18 articles à la faculté de Théologie de
Paris , qui les condamna par fa cenfure du 27 Juin
de la même année. En 1 567 parut la bulle de Pie V.
du premier Oclobre , portant condamnation de 76
propofitions qu'elle cenfuroit inglobo, mais fans nom-
mer Baïus. Le cardinal de Granvelle , chargé de l'e-
xécution de ce décret , l'envoya à Morillon fon vi-
caire général , qui le préfenta à l'univerfité de Lou-
vain le 29 Décembre 1 567. La bulle fut reçue avec
refpeft , & Baïus même parut d'abord s'y foùmettre :
mais enfuite il écrivit une longue apologie de la doc-
trine qu'il adreffa au pape , avec une lettre du 8 Jan-
vier 1 569. Pie V. après un mûr examen , confirma le
1 3 Mai fuivant fon premier jugement , & écrivit un
bref à Baïus pour l'engager à ïé foùmettre fans ter-
giverfation. Baïus hérita quelque tems, & fe fournit
enfin en donnant à Morillon une révocation des pro-
pofitions condamnées. Mais après la mort de Joffe Ra-
vellein , arrivée en 1 570 , Baïus & fes difciples re-
muèrent de nouveau : Grégoire XIII. pour mettre fin
à ces troubles , donna une bulle le 29 Janvier 1 579 ,
en confirmation de celle de Pie V. fon prédéceflèur,
& choiiit pour la faire accepter par l'univerfité de
Louvain, François Tolet Jéfuite, Se depuis cardinal.
Baïus rétradla alors fes propofitions, & de vive voix,
& par un écrit figné de fa main, & daté du 24 Mars
1 580. Dans les huit années fuivantes qui s'écoulèrent
jufqu'à la mort de Baïus, les conteflations fe réveil-
lèrent , & ne furent enfin affoupies que par un corps
de doctrine dreffé par les Théologiens de Louvain ,
& adopté par ceux de Douai. Jacques Janfon , pro-
feffeur de Théologie à Louvain , voulut reffulciter
les opinions de Baïus, & en chargea le fameux Cor-
nélius Janlénius , fon élevé , qui dans fon ouvrage
intitulé Augujîinus , a renouvelle les principes & la
plupart des erreurs de Baïus. Voye^ Chijioire du Baia-
nij'me par le P. Duchelhe , qui rapporte tous ces éve-
nemens dans un détail que la nature de cet ouvrage
ne nous permet pas d'imiter. Voy. Jansénisme. (G)
BAYART , f. m. terme de Rivière , infiniment qui
fert à deux hommes pour porter différens fardeaux.
BAYE ou BAIE, f. f. ( Marine. ) c'ell un bras de
mer qui fé jette entre deux terres , & qui s'y termine
en cul-de-fac , par un ventre ou enfoncement plus
grand que celui de l'ance , & plus petit que celui du
golphe. FoyeiBAJE. (Z)
Bayes, f. f. ( Marine. ) bayes d'unvaijfèau , ce font
les ouvertures qui fe font dans fa charpente , comme
celles des écoutilles , les trous par où les mâts paf-
fent, 6-c. (Z)
* Baye de tous les saints , ( Géog. ) grande
baie fur la côte méridionale du Bréiil , proche Saint-
Salvador.
* BAYELTE , f . f . ( Commerce. ) efpece de flanel-
le grofHere & fort large dont on fabrique enplufieurs
endroits de France : elle ell faite de laine non croi-
fée , fort lâche , & tirée à poil d'un côté.
* BAYEUX , ( Géog. ) ville de France dans la
Normandie , capitale du Beffin , fur la rivière d'Au-
re. Long. iG.Sy. c). lat. 4g . 16. 30.
* BAYON , ( Géog. ) ville de Lorraine fur la Mo-
felle, à cinq lieues de Nancy.
* BAYONNE, roycv Baionne.
B AYONNETTE , f. f. ( Art milit. ) dague courte ,
large , façonnée en forme de lancette , ayant au lieu
de poignée un manche creux de fer , pour la fixer
au bout d'un moufquet , de forte qu'elle n'empêche
ni de tirer ni de charger.
Les bayonnettes font d'un grand ufage aux dra-
gons & aux fufdiers , loriqu'ils ont confommé leurs
provilïons de poudre & de balles.
On dit que la bayonnettt a été inventée à Bayonne.
Les troupes françoifes font très-redoutables, la bayon-
nette au bout du fufil.
On fe fert du même infiniment à la chatte du fan-
glier : mais on le fait plus grand pour cet exercice
que pour le fervice militaire. ( Q )
* BAZ , ( Géog. ) petite île à l'occident de l'Irlan-
de , vis-à-vis le comté de Defmond en Mommonie ,
au nord de la baie de Dingle. Les Irlandois la nom-
ment Blafquo.
* BAZ A ou BASA , ( Géog.') ville d'Efpagne au
royaume de Grenade près du Guadalentin , fur les li-
mites de la Murcie & de la Cailille.
* B AZ AC , f. m. ( Commerce. ) coton filé très-beau
& très-fin qui vient de Jcrufalem , ce qui l'a fait ap-
peller coton de Jérufalem : il y a le demi & le moyen
ba-yac , qui font d'une qualité fort inférieure au baçac
fimple ou de la première forte.
* BAZADOIS , ( le ) Géog. province de France
qui fait partie de la baffe Gafcogne , entre la Guien-
ne propre , l'Agénois , & le Condomois. Bazas en efl
la capitale.
BAZAR ou BAZARI , ( Commerce. ) lieu defliné
au commerce parmi les Orientaux , particulièrement
chez les Perfans. Les uns font découverts , comme
les marchés d'Europe , & fervent aux mêmes ufa-
ges , mais feulement pour y vendre les marchandi-
i'es les moins précieufes & de plus grand volume ;
les autres font couverts de voûtes fort élevées , &
percées par des efpeces de dômes qui y donnent du
jour : c'ell dans ces derniers où les marchands de
pierreries , de riches étoffes , d'orfèvrerie , & d'au-
tres femblables marchandifes , ont leurs boutiques :
quelquefois même les efclaves s'y vendent , quoi-
que ce barbare commerce fe faffe auffi dans les ba-
zars découverts. Furetiere dit que ce terme efl pure-
ment Arabe , &t lignifie achat & échange de marchan-
dife , & fe dit par extenfion des lieux où fe fait le
trafic.
Le ba~ar ou maidan d'Ifpaham efl une des plus bel-
les places de toute la Perle , & furpaffe même tou-
tes celles qu'on voit en Europe : mais nonobflant fa
grande magnificence , il faut avouer que le ha^ar de
Tauris ell la place la plus valle que l'on connoiffe :
on y a plufieurs fois rangé trente mille hommes en
bataille. Il contient plus de quinze mille boutiques,
& pâlie fans contredit pour le plus fuperbe de la
Perle. On appelle dans cette dernière ville le ba^ar
des pierreries , kaiferié , c'eft-à-dire , marché royal. V.
Maidan. (G)
* BAZARIE , ( Hifi. anc. & Géog. ) province des
Scythes dont les habitans formoient des parcs de bê-
tes fauves & d'autres animaux : ils choifuToient pour
cet effet de grandes forêts arrofées d'eau , ils les fer-
moient de murailles , & les garniffoient de tours oh
les chaffeurs le retiroient. Alexandre le grand entra
dans un de ces parcs où l'on n'avoit point chaffé
depuis quatre cents ans, & y fut attaqué par un
lion qu'il eut le bonheur de tuer.
* BAZAS , ( Géog. ) ville de France , capitale du
Bazadois en Gafcogne , fur un rocher. Lon. ij. zo.
lat. 44. zo.
* BAZ AT , f. m. coton qui vient de Leyde : il y a
le ba^at de la première forte , l'ordinaire & le moyen.
Le premier ell le plus beau.
* BAZIOTHIA , ( Géog.Jainte. ) ville de la Pa-
lefline dans la tribu de Juda. Samfon croit que c'ell
la même que Bethfabée.
* BAZUNA , ( Géog. ) ville maritime de l'Océan
éthiopique ou oriental , fituée entre les Cafres & le
Zanguebar. On dit que fes habitans ne fe nourriffent
que de lerpens & de grenouilles.
BAZZARUCO , voyei Basaruco.
BAZZO , f. m. ( Commerce. ) petite monnoie de
billon qui a cours en Allemagne : elle a différentes
empreintes,
B D E
empreintes , félon les différens états. Elle vaut Un fou
fix deniers quatre cinquièmes argent de France.
B D
BDELLIUM , ( mat. Med. ) gomme aromatique
apportée du levant, & d'ufage en Médecine. On
croit que ce mot eft formé de l'Hébreu bedollach ,
que les traducteurs ont rendu par bddlium. On écrit
aufïï bedellium , bcddla, ptdlium ,petalium , megalium,
Se tdinum.
Ce nom fe trouve dans les anciens Naturalises &
dans l'Ecriture : mais y eft-il pris dans le même fens
que dans nos langues ? cela eft fort douteux. Moyle
dit que la manne eft de la couleur du bddlium ; tk
Jofephe expliquant ce pafiage, prétend que e'eft la
gomme d'un arbre femblable à l'olivier , & que la
manne dont furent nourris les Juifs dans le defert lui
reiîèmbloit. Mais Scaliger & d'autres auteurs rejet-
tent cette conjecture , Se avouent qu'ils ignorent ce
que c'eft que le bddlium dont il eft fait mention dans
l'Ecriture. (A7)
. * Diofcoride en diftingue de trois fortes ; l'un en
larmes , tranfparent , femblable à la colle de tau-
reau , gras en-dedans , facile à fondre , fans bois &
fans ordure , amer au goût , odorant quand on le
brûle , de la couleur de l'ongle , & produit par un
arbre du pays des Sarrafins : l'autre en mânes graf-
fes , noires , fordides , de la couleur de l'afpalathe ,
Cv apporté des Indes : le troifieme, fec,réiineux, livi-
de, St tiré de la ville de Pctra. Galicn reconnoît
deux bddlium ; l'Arabique, & le Scythique. Pline dit
qu'il y a dans la Bactriane un arbre noir , de la gran-
deur de l'olivier , avec la feuille du chêne , &c la for-
me ôc le fruit du figuier fauvage , appelle bddlium ,
êc donnant une gomme tranfparente femblable à la
cire , odorante , grade au toucher , amere au goût ,
mais fans acreté : il ajoute qu'il y avoit auiïï de cette
gomme dans l'Arabie , aux Indes , dans la Médie ,
oc à Babylonc.
Si l'hiftoire du bddlium eft trcs-obfcure dans les
anciens , elle n'eft pas plus claire dans les modernes ;
il y en a qui le confondent avec la myrrhe , d'autres
avec la gomme animé ; il y en a même qui font fi-
gnifîer au mot bddlium , elcarboucle , ou cryftal.
G. Bauhin en compte fix efpeces différentes. Dale
le décrit ou comme une fubltance gommeufe &c ré-
ïineufe , grade , tenace , gluante , noirâtre , & ref-
icmblant à la myrrhe, dont elle imite la couleur &
le goût , & il fait venir ce bddlium de l'Arabie , de la
Médie & des Indes : ou comme une fubltance réfi-
neufe , un peu dure , noirâtre , friable , en gouttes
durcies , de la même odeur & du même goût que la
précédente ; 6c il le fait venir de Ganea. Pomet pré-
tend qu'on a dans les boutiques fous le nom de bdd-
lium des réfines d'efpeces différentes : mais M. Geof-
froi dit que le bddlium des boutiques eft la même
choie que la première efpcce de Dale , &c qu'il
n'y a rien de certain fur l'arbre qui le porte.
B E
* BEALT , ( Géog. ) petite ville d'Angleterre dans
la principauté de Galles, fur la rivière de Vye.
* BEAN , ( Géog. faintt ) ville de la tribu de Gad ,
dont les habitans tourmentèrent cruellement les Juifs
dans le teins des guerres des Macédoniens. Elle fut
détruite par Judas Machabee.
* BEAT , ( S. ) Gcog. petite ville de France au
comté de Comminges , au confluent de la Garonne
& de la Pique : toutes les maifons y font bâties de
marbre. Long. 18. 16. lot. 42. So.
BEATIFICATION, f. f. ( Théol.) afte par lequel
le pape déclare qu'une peilbnne , dont la vie a été
tomt II,
BEA
169
fainte , accompagnée de quelques miracles , &c jouit;
après fa mort du bonheur éternel. La béatification dif-
tere de la canonifation en ce que dans la première le
pape n'agit pas comme juge , en déterminant l'état du
béatifié , mais feulement en ce qu'il accorde a certai-
nes perfonnes , comme à un ordre religieux , à une
communauté , &c. le privilège de rendre au béatifié
un culte particulier , qu'on ne peut regarder comme
fuperftitieux , dès qu'il eft muni de fecau de l'autori-
té pontificale ; au lieu que dans la canonifation , le
pape parle comme juge , & détermine ex cathedra l'é-
tat du nouveau faint.
La cérémonie de la béatification a été introduite
lorfqu'on a penle qu'il étoit à propos de permettre à
un ordre ou une communauté, de rendre un culte par-
ticulier au fujet propofé pour être canoniie , avant
que d'avoir une pleine connoiflance de la vérité des
faits , & à caufe de la longueur des procédures qu'on
obferve dans la canonifation. V. Canonisation.
♦BEATITUDE, BONHEUR, FELICITE,
( Gramm. ) termes relatifs à la condition d'un être qui
penfe 6c qui fent. Le bonheur marque un homme riche
des biens de la fortune ; la félicité , un homme content
de ce qu'il en a ; la béatitude , l'état d'une ame que la
préfence immédiate de fon Dieu remplit dans ce mon-
de-ci ou dans l'autre ; état qui feroit au-deflus de toute
exprefïïon fans doute , fi nous le connoiffions. Le bon'
heur excite l'envie ; la félicité fe fait fentir à nous feuls ;
la béatitude nous attend dans une autre vie. La joui/Tan-
ce des biens fait la félicité ; leur ponefîïon le bonheur ;
la béatitude réveille une idée d'extafe & de ravine-
ment, qu'on n'éprouve ni dans le bonheur ; ni dans la
félicité àc ce monde. C'eft aux autres à faire notre bon-
heur ; notre félicité dépend davantage de nous ; il n'y
a que Dieu qui puiife nous conduire à la béatitude*
Le bonheur efl pour les riches , dit M. l'abbé Girard
dans fes Synonymes ; la félicité pour les fages ; & la
béatitude pour les pauvres d'efprit.
* BEAU , adj. ( Métaphyfiquc.') Avant que d'entrer
dans la recherche difficile de l'origine du beau , je re-
marquerai d'abord , avec tous les auteurs qui en ont
écrit , que par une forte de fatalité , les chofes dont
on parle le plus parmi les hommes , font a fiez ordinai-
rement celles qu'on connoît le moins; Cv que telle"
eft, entre beaucoup d'autres, la nature du be.tu. Tout
le monde raifonne du beau : on l'admire dans les ou-
vrages de la nature : on l'exige dans les productions
des Arts : on accorde ou l'on refufe cette qualité à
tout moment; cependant fi l'on demande aux hom-
mes du goût le plus fur & le plus exquis , quelle eft fon
origine , fa nature , fa notion précife , fa véritable
idée , fon exa&c définition ; ii c'eft quelque chofe
d'abfolu ou de relatif; s'il y a un beau eflentiel , éter-
nel , immuable , règle & modèle du beau iubalterne ;
ou s'il en eft de la beauté comme des modes : on voit
auflitôt les fentimens partagés ; & les uns avouent
leur ignorance , les autres fe jettent dans le fcepticil-
me. Comment fe fait-il que prefque tous les hommes
foient d'acord qu'il y a un beau ; qu'il y en ait tant cn-
ti "eux qui le tentent vivement où il eu , Se que li peu
fâchent ce que c'eft?
Pour parvenir, s'il eft pofîible , à la folution de ces
difficultés , nous commencerons par expofer les tlitte-
rens fentimens des auteurs qui ont écrit le mieux fur
le beau i nous propoferons enfùite nos idées lur le
même fujet, 6c nous finirons cet article par des ob-
fervations générales fur Pentendement humain & les
opérations relatives à la queftion dont il s agit.
Platon a écrit deux dialogues du beau , le Phèdre S{
le grand Hippias : dans celui-ci il enfeigne plutôt ce
que le beau n'eft pas, que ce qu'il eft; & dans l'au-
tre, il parle moins du Uau que de l'amour naturel
170
BEA
qu'on a pour lui. Il ne s'agit dans le grand Hippias
que de confondre la vanité d'un fophifte ; & dans le
Phèdre , que de parler quelques momens agréables
avec un ami dans un lieu délicieux.
S. Auguftin avoit compofé un traité fur le beau :
mais cet ouvrage eft perdu , & il ne nous relie de
S. Auguftin fur cet objet important , que quelques
idées éparfes dans fes écrits , par lefquelles on voit
que ce rapport exact des parties d'un tout entr'elles ,
qui le conftitue un , étoit , félon lui , le caractère dif-
îinctif de la beauté. Si je demande à un architecte , dit
ce grand homme , pourquoi ayant élevé une arcade
à une des ailes de fon bâtiment , il en fait autant à
l'autre : il me répondra fans doute , que c'ejl afin que
les membres de fon architecture Jymmétrifent bien enfemble.
Mais pourquoi cette fymmétrie vous paroît-elle né-
ceffaire ? Par la raifon quelle plaît. Mais qui êtes-vous
pour vous ériger en arbitre de ce qui doit plaire ou
ne pas plaire aux hommes ? & d'où favez- vous que
la fymmétrie nous plaît ? J'en fuis fur , parce que les
chofes ainfi difpofées ont de la décence , de la jufieffe , de
la grâce ; en un mot parce que cela ejl beau. Fort bien :
mais dites-moi, cela eft-il beau parce qu'il plaît ? ou
cela plaît-il parce qu'il eft beau ? Sans difficulté cela
plaît , parce qu'il ejl beau. Je le crois comme vous :
mais je vous demande encore pourquoi cela eft-il
beau ? & fi maqueftion vous embarraffe , parce qu'en
effet les maîtres de votre art ne vont guère jufque-
là , vous conviendrez du moins fans peine que la fi-
militude , l'égalité , la convenance des parties de vo-
tre bâtiment , réduit tout à une efpece d'unité qui
contente la raifon. Cefi ce que je voulois dire. Oui :
mais prenez-y garde , il n'y a point de vraie unité
dans les corps , puifqu'ils font tous compofés d'un
nombre innombrable de parties , dont chacune eft
encore compofée d'une infinité d'autres. Où la voyez-
vous donc cette unité qui vous dirige dans la conl-
tructionde votre deffein ; cette unité que vous regar-
dez dans votre art comme une loi inviolable ; cette
unité que votre édifice doit imiter pour être bcau,mais
que rien fur la terre ne peut imiter parfaitement ,
puifque rien fur la terre ne peut être parfaitement
un. Or,de là que s'enfuit-il ? ne faut-il pas reconnoître
qu'il y a au-deffus de nos efprits une certaine unité
originale , fouveraine , éternelle , parfaite, qui eft la
règle effentielle du beau , & que vous cherchez dans
la pratique de votre art ? D'où S. Auguftin conclut ,
dans un autre ouvrage , que c'ejl F unité qui confiitue ,
pour ai nfi dire , la forme & reffencedubeau en tout genre.
Omnis porro pulchritudinis forma , unitas ejl.
M. Wolf dit , dans fa Pfychologie , qu'il y a des cho-
fes qui nous plaifent , d'autres qui nous déplaifent ;
&: que cette différence eft ce qui conftitue le beau èc
le laid : que ce qui nous plaît s'appelle beau , & que
ce qui nous déplaît eft laid.
Il ajoute , que la beauté confifte dans la perfection ;
de manière que par la force de cette perfection , la
chofe qui en eft revêtue eft propre à produire en nous
du plaifir.
Il diftingue enfuite deux fortes de beautés , la vraie
& l'apparente : la vraie eft celle qui naît d'une per-
fection réelle ; &c\" apparente, celle qui naît d'une per-
fection apparente.
Il eft évident que S. Auguftin avoit été beaucoup
plus loin dans la recherche du beau que le philofophe
Lebnitien : celui-ci femble prétendre d'abord qu'une
chofe eft belle , parce qu'elle nous plait ; au lieu qu'elle
ne nous plaît que parce qu'elle cQ. belle ; comme Pla-
ton & S. Auguftin l'ont très-bien remarqué. Il eft vrai
qu'il fait enfuite entrer la perfection dans l'idée de la
ïeauté: mais qu'eft-ce que la perfection ? le parfait eft-
il plus clair & plus intelligible que le beau.
Tous ceux- qui le piquant de ne pas parler Ample-
ment par coutume §t fans réflexion , dit M. Crouzas ,
BEA
voudront defeendre dans eux-mêmes, & faire atten-
tion à ce qui s'y pafle , à la manière dont ils penlent ,
& à ce qu'ils fentent lorfqu'ils s'écrient cela ejl beau ,
s'appercevront qu'ils expriment par ce terme un cer-
tain rapport d'un objet , avec des fentimens agréables
ou avec des idées d'approbation , & tomberont d'ac-
cord que dire cela ejl beau , c'eft dire , j'apperçois
quelque chofe que j'approuve ou qui me fait plaifir.
On voit que cette définition de M. Crouzas n'eft
point prife de la nature du beau , mais de l'effet feu-
lement qu'on éprouve à fa préfence : elle a le même
défaut que celle de M. Wolf. C'eft ce que M. Crou-
zas a bien fenti ; aufli s'occupe-t-il enfuite à fixer les
caractères du beau : il en compte cinq, la variété , l'u-
nité , la régularité , l'ordre , la proportion.
D'où il s'enfuit, ou que la définition de S. Auguf-
tin eft incomplète , ou que celle de M. Crouzas eft re-
dondante. Si l'idée d'unité ne renferme pas les idées
de variété, de régularité , d'ordre & de proportion , & ft
ces qualités font effentielles au beau , S. Auguftin n'a
pas dû les omettre : fi l'idée d'unité les renferme , M.
Crouzas n'a pas dû les ajouter.
M. Crouzas ne définit point ce qu'il entend par va-
riété ; il femble entendre par unité , la relation de tou-
tes les parties à un feul but ; il fait confifter la régula-
rité dans la poiîtion femblable des parties entr'elles ;
il défigne par ordre une certaine dégradation de par-
ties , qu'il faut obferver dans le paflage des unes aux
autres ; & il définit la proportion , l'unité ajfaij'onnée de
variété , de régularité et d'ordre dans chaque partie.
le n'attaquerai point cette définition du beau par
les chofes vagues qu'elle contient ; je me contenterai
feulement d'obferver ici qu'elle eft particulière , &
qu'elle n'eft applicable qu'à l'Architecture , ou tout
au plus à de grands touts dans les autres genres , à
une pièce d'éloquence , à un drame , &c mais non
pas à un mot, à unepenfée , à une portion d'objet.
M. Hutchefon , célèbre profeffeur de Philofophie
morale dans l'univerfité de Glafcou , s'eft fait un fyf-
tème particulier : il fe réduit à penfer qu'il ne faut
pas plus demander quefl-ce que le beau , que deman-
der qu'ejl-ce que le vifible. On entend par vifible , ce
qui eft fait pour être apperçû par l'œil ; & M. Hutche-
fon entend par beau , ce qui eft fait pour être faifi par
le fens interne du beau. Son fens interne du beau , eft
une faculté par laquelle nous diftinguons les belles
chofes , comme le fens de la vue eft une faculté par
laquelle nous recevons la notion des couleurs & des
figures. Cet auteur & fes fectateurs mettent tout en
œuvre pour démontrer la réalité & la néceffité de ce
fixiemejens ; &t voici comment ils s'y prennent.
i°. Notre ame , difent-ils , eft païfive dans le plai-
fir & dans le déplaifir. Les objets ne nous affectent
pas précifément comme nous le fouhaiterions ; les
uns font fur notre ame une impreffion néceffaire de
plaifir ; d'autres nous déplaifent néceffairement : tout
le pouvoir de notre volonté fe réduit à rechercher
la première forte d'objet , & à fuir l'autre : c'eft la
conftitution même de notre nature , quelquefois indi-
viduelle , qui nous rend les uns agréables & les au-
tres defagréables. Voye^ Peine cv Plaisir.
20. Il n'eft peut-être aucun objet qui puiffe affec-
ter notre ame , fans lui être plus ou moins une oc-
cafion néceffaire de plaifir ou de déplaifir. Une figu-
re , un ouvrage d'architecture ou de peinture , une
compofition de mufique , une action , un fentiment ,
un caractère , une expreffion , un difeours ; toutes
ces chofes nous plaifent ou nous déplaifent de quel-
que manière. Nous fentons que le plaifir ou le déplai-
fir s'excite néceffairement par la contemplation de
l'idée qui fe préfente alors à notre efprit avec toutes
fes circonftances. Cette impreffion fe fait , quoiqu'il
n'y ait rien dans quelques-unes de ces idées de ce qu'on
appelle ordinairement perceptions Jenfibles ; & dans
BEA
celles qui viennent des fens, le plaifir ou le déplaiiir
qui les accompagne , naît de l'ordre ou du deiordre ,
de l'arrangement ou défaut de fymmétrie , de l'imi-
tation ou de la bifarrerie qu'on remarque dans les ob-
jets ; & non des idées (impies de la couleur, du fon ,
& de l'étendue, confidérées folirairement. V. Goût.
3°. Cela pôle , j'appelle, dit M. Hutchefon , du
nom de fins internes , ces déterminations de l'ame à fe
plaire ou à fe déplaire à certaines formes ou à certai-
nes idées , quand elle les confidere : & pour diftin-
guer les fens internes des facultés corporelles connues
ions ce nom, j'appelle fiens interne du beau , la faculté
qui difeerne le beau dans la régularité , l'ordre & l'har-
monie ; 6c fiens interne du bon, celle qui approuve les
affections, les actions, les caractères des agens rai-
fonnabîes 6c vertueux. Voye^ Bon.
4°. Comme les déterminations de l'ame à fe plaire
ou à fe déplaire à certaines formes ou à certaines
idées , quand elle les confidere , s'obfervent dans
tous les hommes , à moins qu'ils ne foient fhipides ;
fans rechercher encore ce que c'eit que le beau , il eu
confiant qu'il y a dans tous les hommes un fens natu-
rel & propre pour cet objet ; qu'ils s'accordent à trou-
ver de la beauté dans les figures , auffi généralement
qu'à éprouver de la douleur à l'approche d'un trop
grand feu , ou du plaifir à manger quand ils font
preffés par l'appétit , quoiqu'il y ait entr'eux une di-
vcrfité de goûts infinie.
50. Auffi-tôt que nous naiflbns , nos fens externes
commencent à s'exercer & à nous tranfmettre des
perceptions des objets fenfibles ; 6c c'eft là fans doute
ce qui nous perfuade qu'ils font naturels. Mais les ob-
jets de ce que j'appelle des fens internes , ou les fens du
beau & du bon, ne le préfentent pas fi-tôt à notre efprit.
Il fe parle du tems avant que les enfans refléchiflent ,
ou du moins qu'ils donnent des indices de réflexion
fur les proportions , reflemblances 6c fymmétries ,
fur les affections 6c les caractères : ils ne connoiffent
qu'un peu tard les chofes qui excitent le goût ou la
répugnance intérieure ; & c'eft: -là ce qui fait imagi-
ner que ces facultés que j'appelle les fens internes du
beau & du bon , viennent uniquement de l'inftruction
& de l'éducation. Mais quelque notion qu'on ait de
la vertu & de la beauté , un objet vertueux ou bon eft
une occafion d'approbation & de plaifir , auffi natu-
rellement que des mets (ont les objets de notre appé-
tit. Et qu'importe que les premiers objets fe foient
préfentés tôt ou tard ? (i les fens ne fe développoient
en nous que peu-à-peu & les uns après les autres , en
feroient-ils moins des fens 6c des facultés ? & ferions-
nous bien venus à prétendre , qu'il n'y a vraiement
dans les objets vifibles , ni couleurs , ni figures , par-
ce que nous aurions eu bîfoin de tems & d'inffruc-
tion pour les-y appercevoir , & qu'il n'y auroit pas
•entre nous tous , deux perlbnnes qui les y apperce-
vroient de la même manière ? Voye^ Sens.
6°. On appelle fienfiaiions, les perceptions qui s'ex-
citent dans notre ame à la préfenec des objets exté-
rieurs , 6c par l'imprelîion qu'ils font fur nos orga-
nes. Voyt^ Sensation. Et lorfquc deux perceptions
différent entièrement Tune de l'autre, & qu'elles n'ont
•de commun que le nom générique de fenfation , les
facultés par lefquelles nous recevons ces différentes
perceptions , s'appellent des fins différais. La vue &
4'oûie , par exemple, délignent des facultés différen-
tes , dont l'une nous donne les idées de couleur , &
l'autre les idées de ion : mais quelque différence que
■les fons ayent entr'eux , 6c les couleurs cntr'elles ,
on rapporte à un même fens toutes les couleurs,
& à un autre fens tous les fons ; & il paroît que nos
fens ont chacun leur organe. Or fi vous appliquez
l'obfcrvation précédente au bon Se au beau , vous ver-
rez qu'ils font exactement dans ce cas. ^oye^ Bon.
. 7°. Les défenfgurs du fins interne entendent par
Tome II,
BEA
r7i
beau, l'idée que certains objets excitent dans notre
ame , 6c par le fens interne du beau , la faculté que
nous avons de recevoir cette idée ; & ils obfervent
que les animaux ont des facultés femblables à nos fens
extérieurs , & qu'ils les ont même quelquefois dans
un degré fupérieur à nous ; mais qu'il n'y en a pas
un qui donne un (îgne de ce qu'on entend ici par fins
interne. Un être , continuent-ils , peut donc avoir en
entier la même fenfation extérieure que nous éprou-
vons , fans obferver entre les objets, les reflemblan-
ces & les rapports ; il peut même difcerner ces ref-
lemblances & ces rapports fans en reflentir beau-
coup de plaifir ; d'ailleurs les idées feules de la figure
& des formes, &c. font quelque chofe de diftinct du
plaifir. Le plaifir peut fe trouver où les proportions
ne font ni confidérées ni connues; il peut manquer,
malgré toute l'attention qu'on donne à l'ordre &: aux
proportions. Comment nommerons-nous donc cette
faculté qui agit en nous fans que nous fâchions bien
pourquoi ? fiens interne.
8°. Cette dénomination eft fondée fur le rapport
de la faculté qu'elle défigne avec les autres facultés.
Ce rapport confiltc principalement en ce que le plai-
fir que ie fens interne nous fait éprouver, eft différent
delà connoiflance des principes. La connoiflance des
principes peut l'accroître ou le diminuer: mais cette
connoiflance n'eft pas lui ni fa caufe Ce fens a des
plaifirs néceflaires, car la beauté & la laideur d'un ob-
jet eft toujours la même pour nous , quelque deflein
que nous puiflions former d'en juger autrement. Un
objet defagréable , pour être utile, ne nous en paroît
pas plus beau; un bel objet, pour être nuifible, ne
nous paroît pas plus laid. Propofez-nous le inonde
entier , pour nous contraindre par la récompenfe à
trouver belle la laideur , & laide la beauté ; ajouter
à ce prix les plus terribles menaces , vous n'appor-
terez aucun changement à nos perceptions 6c au ju-
gement du fiens interne : notre bouche loiiera ou blâ-
mera à votre gré , mais le fiens interne reliera incor-
ruptible.
9°. Il paroît de-là , continuent les mêmes fyfléma-
tiques , que certains objets font immédiatement & par
eux-mêmes, les occafions du plaifir que donne la
beauté ; que nous avons un fens propre à lesgoûter;
que ce plaifir eft individuel , & qu'il n'a rien de c • m-
mun avec l'intérêt. En effet, n'arrive-t-il pas en cent
occafions qu'on abandonne l'utile pour le beau? cette
généreufe préférence ne le remarque-t-elle pas quel-
quefois dans les conditions les plus méprifées ? Un
honnête artifan fe livrera à la fatisfaclion de faire un
chef-d'œuvre qui le ruine, plutôt qu'à l'avantage de
taire un mauvais ouvrage qui l'enrichiroit.
io°. Si on ne joignoit pas à la coniîdération de
l'utile, quelque fentiment particulier, quelqu 'effet
fubtil d'une faculté différente de l'entendement & de
la volonté , on n'eftimeroit une maifon que pour fon
utilité , un jardin que pour fa fertilité , un habille-
ment que pour fa commodité. Or cette eftimation
étroite des choies n'exifle pas "même dans les enfans
& dans les fauvages. Abandonnez la nature à elle-
même , & le fens interne exercera fon empire : peut-
être fe trompera-t-il dans fon objet, mais la fenfa-
tion de plaifir n'en fera pas moins réelle. Vue philo-
fophic auftere, ennemie du luxe, brifera les ftatues,
renverfera les obéliiques, transformera nos palais en
cabanes, & nos jardins en forêts: mais elle n'en !ui-
tira pas moins la beauté réelle de ces objets ; le iens
interne fe révoltera contr'elle , & elle fera réduite à
ie faire un mérite de fon courage.
C'cftainiî, dis-je, que Hutche'ibn& l'es lédateurs
s'efforcent d'établir la néceifité du fins interne du beau:
mais ils ne parviennent qu'à démontrer qu'il y a quel-
que choie d'obfcur & d impénétrable dans le plailir
que le beau nous caufe ; que ce plailir (emble inde-
Yi]
1J1
BEA
pendant de la connoiflance des rapports & des per-
ceptions ; que la vite de l'utile n'y entre pour rien ,
& qu'il fait des enthouliaftes que ni les récompenfes
ni les menaces ne peuvent ébranler.
Du refte , ces philolbphes distinguent dans les êtres
corporels un beau abfolu 6c un beau relatif. Ils n'enten-
dent point par un beau abfolu , une qualité tellement
inhérente dans l'objet , qu'elle le rende beau par lui-
même , fans aucun rapport à l'ame qui le voit & qui
en juge. Le terme beau , femblable aux autres noms
des idées fenfibles ,' défigne proprement , félon eux ,
la perception d'un efprit ; comme le froid & le chaud ,
le doux ôc l'amer, font des fenfations de notre ame ,
quoique fans doute il n'y ait rien qui reffemble à ces
fenfations dans les objets qui les excitent , malgré la
prévention populaire qui en juge autrement. On ne
voit pas, difent-ils, comment les objets pourroient
être appelles beaux, s'il n'y avoit pas un efprit doiié
du fens de la beauté pour leur rendre hommage. Ainfi
par le beau abfolu , ils n'entendent que celui qu'on re-
Connoît en quelques objets , fans les comparer à au-
cune chofe extérieure dont ces objets (oient l'imita-
tion & la peinture. Telle eft, difent-ils, la beauté que
nous appercevons dans les ouvrages de la nature ,
dans certaines formes artificielles , & dans les figu-
res , les folides , les furfaces ; & par beau relatif , ils
entendent celui qu'on apperçoit dans des objets con-
fidérés communément comme des imitations & des
images de quelques autres. Ainfi leur divifion a plu-
tôt Ion fondement dans les différentes fources du plai-
fir que le beau nous caufe, que dans les objets; car il
eft confiant que le beau abfolu a , pour ainfi dire , un
beau relatif, & le beau relatif un beau abfolu.
Du beau abfolu , félon Hutchefon & fis feclateurs.
Nous avons faitfentir, difent-ils, la néceflîté d'un
fens propre qui nous avertit par le plaifir de la préfen-
ce du beau ; voyons maintenant quelles doivent être
les qualités d'un objet pour émouvoir ce fens. Il ne
faut pas oublier, ajoûtent-ils, qu'il ne s'agit ici de
ces qualités que relativement à l'homme ; car il y a
certainement bien des objets qui font fur eux l'im-
preffion de beauté , & qui déplaifent à d'autres ani-
maux. Ceux-ci ayant des fens & des organes autre-
ment conformés que les nôtres , s'ils étoient juges du
beau , en attacheroient des idées à des formes toutes
différentes. L'ours peut trouver fa caverne commo-
de : mais il ne la trouve ni belle ni laide ; peut-être
s'il avoit le fens interne du beau la regarderoit-il com-
me une retraite délicieufe. Remarquez en paffant ,
qu'un être bien malheureux , ce feroit celui qui au-
roit le fens interne du beau, & qui ne reconnoîtroit
jamais le beau que dans des objets qui lui feroient
nuifibles : la providence y a pourvu par rapport à
nous ; & une chofe vraiement belle, eu allez ordi-
nairement une chofe bonne.
Pour découvrir l'occalion générale des idées du
beau parmi les hommes , les feftateurs d 'Hutchefon
examinent les êtres les plus fimples , par exemple ,
les figures ; & ils trouvent qu'entre les figures , celles
que nous nommons belles, offrent à nos lens l'unifor-
mité dans la variété. Ils aflùrent qu'un triangle équi-
latéral eft moins beau qu'un quarré ; un pentagone
moins beau qu'un exagone , & ainfi de fuite , parce
que les objets également uniformes font d'autant plus
beaux, qu'ils font plus variés ; & ils font d'autant plus
variés , qu'ils ont plus de côtés comparables. Il eft
vrai, difent-ils , qu'en augmentant beaucoup le nom-
bre des côtés , on perd de vue les rapports qu'ils ont
entr'eux & avec le rayon; d'où il s'enfuit que la beau-
té de ces figures n'augmente pas toujours comme le
nombre des côtés. Ils fe font cette objedion, mais ils
ne fe fondent guère d'y répondre. Ils remarquent feu-
lement que le défaut de parallélisme dans les côtés
«les eptagones 6c des autres polygones impairs en di-
BEA
minue la beauté : mais ils foûtiennent toujours que ,
tout étant égal d'ailleurs , une figure régulière à vingt
côtés furpafle en beauté celle qui n'en a que douze ;
que celle-ci l'emporte fur celle qui n'en a que huit ,
6c cette dernière fur le quarré. Ils font le même rai-
fonnement fur les furfaces & fur les folides. De tous
les folides réguliers , celui qui a le plus grand nom-
bre de furfaces eft pour eux le plus beau , & ils pen-
fent que la beauté de ces corps va toujours en décroif-
fant jufqu'à la pyramide régulière.
Mais fi entre les objets également uniformes, les
plus variés font les plus beaux ; félon eux , récipro-
quement entre les objets également variés , les plus
beaux feront les plus uniformes : ainfi le triangle équi-
latéral ou même ifofcele eft plus beau que le fcalene ;
le quarré plus beau que le rhombe ou lofange. C'eft
le même raifonnement pour les corps folides régu-
liers , & en général pour tous ceux qui ont quelque
uniformité, comme les cylindres, les prifmes, les obé-
lifques , &c. & il faut convenir avec eux , que ces
corps plaifent certainement plus à la vue que des fi-
gures groffieres où l'on n'apperçoit ni uniformité , ni
lymmétrie , ni unité.
Pour avoir des raifons compofées du rapport de
l'uniformité & de la variété, ils comparent les cercles
& les fpheres avec les ellipfes & les fphéroïdes peu
excentriques ; & ils prétendent que la parfaite uni-
formité des uns eft compenfée par la variété des au-
tres , Se que leur beauté eft à peu près égale.
Le beau , dans les ouvrages de la nature , a le mê-
me fondement félon eux. Soit que vous envifagiez ,
difent-ils, les formes des corps céleftes, leurs révo-
lutions , leurs afpeûs ; foit que vous defeendiez des
cieux fur la terre , & que vous confidériez les plantes
qui la couvrent, les couleurs dont les fleurs font pein-
tes , la ftrudf ure des animaux , leurs efpeces , leurs
mouvemens , la proportion de leurs parties , le rap-
port de leur méchanifme à leur bien être ; foit que
vous vous élanciez dans les airs & que vous exami-
niez les oifeaux & les météores ; ou que vous vous
plongiez dans les eaux & que vous compariez entre
eux les poiflons , vous rencontrerez par-tout l'uni-
formité dans la variété , par -tout vous verrez ces
qualités compenfées dans les êtres également beaux,
& la raifon compolée des deux , inégale dans les êtres
de beauté inégale ; en un mot , s'il eft permis de parler
encore la langue des Géomètres , vous verrez dans
les entrailles de la terre , au fond des mers , au haut
de l'atmofphere , dans la nature entière & dans cha-
cune de fes parties , l'uniformité dans la variété , &
la beauté toujours en raifon compofée de ces deux
qualités.
Ils traitent enfuite de la beauté des Arts , dont on
ne peut regarder les productions comme une vérita-
ble imitation , telle que l'Architefture , les Arts mé-
chaniques , & l'harmonie naturelle ; ils font tous leurs
efforts pour les affujettir à leur loi de l'uniformité dans
la variété ; & fi leur preuve pèche, ce n'eft pas par le
défaut de 1 enumération , ils defeendent depuis le pa-
lais le plus magnifique jufqu'au plus petit édifice ,
depuis l'ouvrage le plus prétieux jufqu'aux bagatel-
les, montrant le caprice par-tout où manque l'unifor-
mité , & l'infipidité où manque la variété.
Mais il eft une claffe d'êtres fort différens des pré-
cédens, dont les feftateurs d 'Hutchefon font fort em~
barrafles ; car on y reconnoit de la beauté , & cepen-
dant la règle de l'uniformité dans la variété ne leur
eft pas applicable ; ce font les démonftrations des vé-
rités abftraites & univerfelles. Si un théorème con-
tient une infinité de vérités particulières qui n'en font
que le développement, ce théorème n'eft proprement
que le corollaire d'un axiome d'où découle une infi-
nité d'autres théorèmes ; cependant on dit voilà un
beau théorème , & l'on ne dit pas voilà un bel axiome.
BEA
Nous donnerons plus bas la folution de cette diffi-
culté dans d'autres principes. PafTons à l'examen du
beau relatif, de ce beau qu'on apperçoit dans un objet
confidéré comme l'imitation d'un original, ielon ceux
de Hutchefon & de fes fectateurs.
Cette partie de fon lyftème n'a rien de particulier.
Selon cet auteur , & félon tout le monde , ce beau ne
peut confifter que dans la conformité qui fe trouve
entre le modèle & la copie.
D'où il s'enfuit que pour le beau relatif, il n'eft pas
néceflaire qu'il y ait aucune beauté dans l'original.
Les forêts, les montagnes , les précipices, le cahos , les
rides de la vieilleffe , la pâleur de la mort , les effets
de la maladie , plaifent en peinture ; ils plaifent aufîi
cnPoëfie : ce qu'Ariftote appelle un caractère moral ,
n'eft point celui d'un homme vertueux ; & ce qu'on
entend par fabula bene morata , n'eit autre choie qu 'un
poëme épique eu dramatique , où les actions , les fen-
timens , & les difeours font d'accord avec les carac-
tères bons ou mauvais.
Cependant on ne peut nier que la peinture d'un
objet qui aura quelque beauté abfolue , ne plaife ordi-
nairement davantage que celle d'un objet qui n'aura
point ce beau. La feule exception qu'il y ait peut-
être à cette règle , c'eft le cas où la conformité de la
peinture avec l'état du fpectateur gagnant tout ce
qu'on ôte à la beauté abfolue du modèle , la peinture
en devient d'autant plus intéreffante ; cet intérêt qui
naît de l'imperfection , eft la raifon pour laquelle on
a voulu que le héros d'un poëme épique ou héroïque
ne fût point fans défaut.
La plupart des autres beautés de la poëfie & de
l'éloquence fuivent la loi du beau relatif. La confor-
mité avec le vrai rend les comparaifons , les méta-
phores , & les allégories belles , lors même qu'il n'y
a aucune beauté abfolue dans les objets qu'elles repré-
sentent.
Hutchefon infifte ici fur le penchant que nous
avons à la comparaifon. Voici félon lui quel en eft
l'origine. Les pallions produifent prefque toujours
dans les animaux les mêmes mouvemens qu'en nous ;
& les objets inanimés de la nature , ont louvent des
politions qui reflemblent aux attitudes du corps hu-
main , dans certains états de l'ame ; il n'en a pas fallu
davantage , ajoute l'auteur que nous analyfons , pour
rendre le lion fymbole de la fureur, le tigre celui de
la cruauté ; un chêne droit , & dont la cime orgueil-
leufe s'élève jufques dans la nue , l'emblème de l'au-
dace ; les mouvemens d'une mer agitée , la peinture
des agitations de la colère ; &: la mollciTe de la tige
d'un pavot , dont quelques gouttes de pluie on fait
pencher la tête , l'image d'un moribond.
Tel eft le lyftème de Hutchefon , qui paraîtra
fans doute plus fingulierque vrai. Nous ne pouvons
cependant trop recommander la lecture de fon ou-
vrage , fur-tout dans l'original ; on y trouvera un
grand nombre d'obfcrvations délicates fur la manière
d'atteindre la perfection dans la pratique des beaux-
Arts. Nous allons maintenant expofer les idées du
père André Jéfuite. Son effaifur le beau eft le fyftème
le plus fuivi , le plus étendu , & le mieux lié que je
connoifte. J'oferois aftùrer qu'il eft dans fon genre
ce que le traité des beaux Arts réduits à un feul princi-
pe eft dans le fien. Ce font deux bons ouvrages aux-
quels il n'a manqué qu'un chapitre pour être excel-
lens ; & il en faut favoir d'autant plus mauvais gré à
ces deux auteurs de l'avoir omis. M. l'abbé Batteux
rappelle tous les principes des beaux Arts à l'imita-
tion de la belle nature : mais il ne nous apprend point
ce que c'eft que la belle nature. Le père André diftri-
bue avec beaucoup de fagacité & de philofophie le
beau en général dans fes différentes efpcces ; il les dé-
finit toutes avec précilion : mais on ne trouve la dé-
finition du genre , celle du beau en général , dans au-
BEA
llï
cun endroit de fon livre , à moins qu'il ne le fafle
confifter dans l'unité comme S. Auguftin. Il parle fans
celle d'ordre , de proportion , d'harmonie , &c. mais
il ne dit pas un mot de l'origine de ces idées.
Le père André diftingue les notions générales de
l'efprit pur , qui nous donnent les règles éternelles
du beau ; les jugemens naturels de l'ame où le fenti-
ment fe mêle avec les idées purement fpirituelles ,
mais fans les détruire ; & les préjugés de l'éducation
& de la coutume , qui femblent quelquefois les ren-
verfer les uns & les autres. Il diilribue fon ouvrage
en quatre chapitres. Le premier eft du beau vifible;
le fécond , du beau dans les mœurs ; le troilîeme , du
beau dans les ouvrages a"efprit , tk. le quatrième , du
beau mufîcal.
Il agite trois queftions fur chacun de ces objets ;
il prétend qu'on y découvre un beau effentiel, abfo-
lu, indépendant de toute inftitution , même divine ;
un beau naturel dépendant de l'inftitution du Créa-
teur , mais indépendant de nos opinions & de nos
goûts ; un beau artificiel & en quelque forte arbitrai-
re , mais toujours avec quelque dépendance des loix
éternelles.
Il fait confifter le beau effentiel , dans la régularité,
l'ordre , la proportion , la fymmétrie en général ; le
beau naturel , dans la régularité , l'ordre , les propor-
tions , la iymmétrie , obfervés dans les êtres de la na-
ture ; le beau artificiel , dans la régularité , l'ordre , la
fymmétrie , les proportions obfervées dans nos pro-
ductions méchaniques , nos pantres , nos bâtimens ,
nos jardins. Il remarque que ce dernier beau eft mêlé
d'arbitraire &d"ablolu. En Architecture par exemple,
il apperçoit deux fortes de règles, les unes qui décou-
lent de la notion indépendante de nous, du beau ori-
ginal & effentiel , & qui exigent indilpenfablementla
perpendicularité des colonnes , le parallélifmc des
étages, la fymmétrie des membres, le dégagement èc
l'élégance du delTein, & l'unité dans le tout. Les au-
tres qui font fondées fur des obfervations particuliè-
res , que les maîtres ont faites en divers tems , & par
lefquelles ils ont déterminé les proportions des par-
ties dans les cinq ordres d' Architecture : c'eft en con-
féquence de ces règles , que dans le tofean la hauteur
de la colonne contient fept fois le diamètre de fa ba-
fe , dans le dorique huit fois , neuf dans l'ionique ,
dix dans le corinthien , ôc dans le compofite autant ;
que les colonnes ont un renflement , depuis leur naif-
fance jufqu'au tiers du fût ; que dans les deux autres
tiers , elles diminuent peu à peu en fuyant le chapi-
teau; que les entre-colonnemens font au plus de huit
modules , & au moins de trois ; que la hauteur des
portiques , des arcades, des portes & des fenêtres eft
double de leur largeur. Ces règles n'étant fondées
que fur des obfervations à l'œil Ôi fur des exemples
équivoques , font toujours un peu incertaines & ne
font pas tout-à-fait indifpenfables. Auiu voyons nous
quelquefois que les grands Architectes fe mettent au-
defïïis d'elles, y ajoutent, en rabattent, & en imagi-
nent de nouvelles félon les circonftances.
Voilà donc dans les productions des Arts , un beau
effentiel, un beau de création humaine, & un beau de J'y f-
ùme : un beau effentiel , qui confifte dans l'ordre ; un
beau de création humaine , qui confifte dans l'applica-
tion libre Si. dépendante de Partifte des lois de l'or-
dre, ou pour parler plus clairement, dans le choix de
tel ordre ; & un beau defyfleme, qui naît des oblerva-
tions , & qui donne des variétés même entre les plus
favans artiftes ; mais jamais au préjudice du btau njjen-
tiel, qui eft une barrière qu'on ne doit jamais iran-
chir. Hic murus aheneus eflo. S'il eft arrivé quelquefois
aux grands maîtres de fe biffer emporter par leur
génie au-delà de cette barrière, c'eft dans les occa-
fions rares où ils ont prévu que cet écart ajoûteroit
plus à la beauté qu'il ne lui oteroit ; mais ils n'en
174
BEA
ont pas moins fait une faute qu'on peut leur repro-
cher. A
Le beau arbitraire fe fous-divife félon le même au-
teur en un beau de génie , un beau de goût , & un beau
de pur caprice : un beau de génie fondé fur la connoil-
fance du beau ejfent'ul , qui donne les règles inviola-
bles • un beau de goût, fondé fur la connoiffance des
ouvrages de la nature & des productions des grands
maîtres , qui dirige dans l'application & l'emploi du
beau ejjentiel ; un beau de caprice , qui n'étant fondé
fur rien , ne doit être admis nulle part.
Que devient le fyfteme de Lucrèce & des Pyrrho-
niens , dans le fyfteme du père André ? que reite-t-il
d'abandonné à l'arbitraire ? prelque rien : auffi pour
toute réponfe à l'objection de ceux qui prétendent
que la beauté eft d'éducation & de préjugé , il fe con-
tente de développer la fource de leur erreur. Voici,
dit- il , comment ils ont railbnné : ils ont cherché dans
les meilleurs ouvrages des exemples de beau de ca-
price , & ils n'ont pas eu de peine à y en rencontrer ,
& à démontrer que le beau qu'on y reconnoilîoit étoit
de caprice : ils ont pris des exemples du beau de goût,
& ils ont très-bien démontré qu'il y avoit auiîi de
l'arbitraire dans ce beau} &c fans aller plus loin, ni
s'appercevoir que leur énumération étoit incomplè-
te , ils ont conclu que tout ce qu'on appelle beau,
étoit arbitraire & de caprice ; mais on conçoit ai-
fément que leur conclufion n'étoit jufte que par rap-
port à la troiiieme branche du beau artificiel, & que
leur raifonnement n'attaquoit ni les deux autres bran-
ches de ce beau , ni le beau naturel, ni le beau ejjentiel.
Le père André parle enfuite à l'application de l'es
principes aux mœurs , aux ouvrages d'efprit & à la
Mufique ; &c il démontre qu'il y a dans ces trois ob-
jets du beau , un beau ejfentiel, abiblu & indépendant
de toute inftitution , même divine , qui fait qu'une
chofe eft une ; un beau naturel dépendant de l'inl-
titution du créateur , mais .indépendant de nous ;
un beau arbitraire , dépendant de nous , mais fans pré-
judice du beau ejfentiel.
Un beau ejfentiel dans les mœurs , dans les ouvra-
ges d'efprit & dans la Mufique , fondé fur l'ordonnan-
ce , la régularité , la proportion , la juftefie , la dé-
cence , l'accord , qui fe remarquent dans une belle
action , une bonne pièce , un beau concert , & qui font
que les productions morales , intellectuelles tk. har-
moniques font unes.
Un beau naturel, qui n'eft autre chofe dans les
mœurs , que l'obfervation du beau ejjentiel dans no-
tre conduite , relative à ce que nous fommes entre
les êtres de la nature ; dans les ouvrages d'efprit ,
que l'imitation & la peinture fidèle des productions
de la nature en tout genre ; dans l'harmonie , qu'une
foûmifhon aux lois que la nature a introduite dans
les corps fonores , leur réfonnance tk la conforma-
tion de l'oreille.
Un beau artificiel, qui confifte dans les mœurs à fe
conformer aux ufages de fa nation , au génie de fes
concitoyens , à leurs lois ; dans les ouvrages d'ef-
prit , à refpecter les règles du difeours , à connoître
la langue , & à fuivre le goût dominant ; dans la Mu-
fique , à inférer à propos la difibnance , à conformer
fes productions aux mouvemens tk aux intervalles
reçus.
D'où il s'enfuit que , félon le P. André , le beau
ejfentiel & la vérité ne fe montrent nulle part avec
tant de profufionque dans l'univers; le beau moral,
que dans le philofophe chrétien ; & le beauintellecluel,
que dans une tragédie accompagnée de mufique &
de décorations.
L'auteur qui nous a donné Yejfaifur le mérite & la
vertu , rejette toutes ces diftinâions du beau , & pré-
tend , avec beaucoup d'autres , qu'il n'y a qu'un
beau , dont l'utile eft le fondement : ainfi tout ce qui
BEA
eît ordonné de manière à produire le plus parfaite-
ment l'effet qu'on fe propofe , eft fuprèmement beau.
Si vous lui demandez qu'eft-ce qu'un bel homme , il
vous répondra que c'eft celui dont les membres bien
proportionnés confpirent de la façon la plus avan-
tageufe à l'accompliffement des fondions animales
de l'homme. Voy. Effai fur le mérite & la vertu , pag.
48. L'homme , la femme, le cheval , & les autres
animaux, continuera- t-il , occupent un rang dans la
nature : or dans la nature ce rang détermine les de-
voirs à remplir ; les devoirs déterminent l'organifa-
tion ; & l'organifation eft plus ou moins parfaite ou
belle , félon le plus ou le moins de facilité que l'ani-
mal en reçoit pour vaquer à fes fonctions. Mais cette
facilité n'eit pas arbitraire , ni par conféquent les for-
mes qui la conftituent , ni la beauté qui dépend de
ces formes. Puis defeendant de-là aux objets les plus
communs , aux chaifes, aux tables , aux portes , &c.
il tâchera de vous prouver que la forme de ces ob-
jets ne nous plaît qu'à proportion de ce qu'elle con-
vient mieux à l'ufage auquel on les deftine; & fi nous
changeons fi louvent de mode , c'eft-à-dire , fi nous
fommes fi peu conftans dans le goût pour les formes
que nous leur donnons , c'eft , dira-t-il , que cette
conformation la plus parfaite relativement à l'ufage,
eft très-difficile à rencontrer ; c'eft qu'il y a là une
efpece de maximum qui échappe à toutes les fineffes
de la Géométrie naturelle & artificielle , & autour
duquel nous tournons fans ceffe : nous nous apper-
cevons à merveille quand nous en approchons &
quand nous l'avons pafle , mais nous ne fommes ja-
mais fûrs de l'avoir atteint. De-là cette révolution
perpétuelle dans les formes : ou nous les abandon-
nons pour d'autres , ou nous difputons fans fin fur
celles que nous conlervons. D'ailleurs ce point n'eft
pas partout au même endroit ; ce maximum a dans
mille occafions des limites plus étendues ou plus
étroites: quelques exemples fuffirorit pour éclair-
cir fa peniee. Tous les hommes, ajoûtera-t-il , ne
font pas capables de la même attention , n'ont pas la
même force d'efprit; ils font tous plus ou moins pa-
tiens , plus ou moins inftruits , &c. Que produira
cette diverfité ? c'eft qu'un fpedtacle compoié d'Aca-
démiciens trouvera l'intrigue d'Héraclius admirable,
& que le peuple la traitera d'embrouillée ; c'eft que
les uns reltraindront l'étendue d'une comédie à trois
a&es , & les autres prétendront qu'on peut l'étendre
à fept ; & ainfi du refte. Avec quelque vraiffemblan-
ce que ce lyfième foit expolé , il ne m'eft pas pota-
ble de l'admettre.
Je conviens avec l'auteur qu'il fe mêle dans tous
nos jugemens un coup d'œil délicat fur ce que nous
lommes, un retour imperceptible vers nous-mêmes,
& qu'il y a mille occafions où nous croyons n'être
enchantés que par les belles formes , & où elles font
en effet la caufe principale , mais non la feule , de
notre admiration ; je conviens que cette admiration
n'eft pas toujours aufii pure que nous l'imaginons :
mais comme il ne faut qu'un fait pour renverfer un
fyftème , nous fommes contraints d'abandonner ce-
lui de l'auteur que nous venons de citer, quelqu'at-
tachement que nous ayons eu jadis pour fes idées;
tk voici nos raifons.
Il n'eft perlonne qui n'ait éprouvé que notre at-
tention ie porte principalement lur la fimilitude des
parties , dans les choies mêmes où cette fimilitude ne
contribue point à l'utilité : pourvu que les pies d'une
chaile l'oient égaux & lolides , qu'importe qu'ils ayent
la même figure ? ils peuvent différer en ce point , fans
en être moins utiles. L'un pourra donc être droit , &
l'autre en pic de biche ; l'un courbe en-dehors , &C
l'autre en-dedans. Si l'on fait une porte en forme de
bierre , fa forme paroîtra peut-être mieux alfortie
à la figure de l'homme qu'aucune des formes qu'on.
BEA
îtiit. De quelle utilité font en Architecture les imita-
tions de la nature & de fes productions ? A quelle fin
piacer une colonne & des guirlandes où il ne fau-
drait qu'un poteau de bois , ou qu'un maflif de pier-
re ? A quoi bon ces cariatides ? Une colonne eft-elle
dertince à faire la fonction d'un homme , ou un hom-
me a-t-il jamais été deffiné à faire l'office d'une co-
lonne dans l'angle d'un veflibule ? Pourquoi imite-
t-on dans les entablemens, des objets naturels? qu'im-
porte que dans cette imitation les proportions foient
bien ou mal obfervées ? Si l'utilité eit le feul fonde-
ment de la beauté , les bas-reliefs , les cannelures , les
vafes , & en général tous les ornemens , deviennent
ridicules & fuperflus.
Mais le goût de l'imitation fe fait fentir dans les
choies dont le but unique eft de plaire ; & nous ad-
mirons fouvent des formes , fans que la notion de
l'utile nous y porte. Quand le propriétaire d'un che-
val ne le trouveroit jamais beau que quand il com-
pare la forme de cet animal au fervice qu'il prétend
en tirer ; il n'en eft pas de même du palfant à qui il
n'appartient pas. Enfin on difeerne tous les jours de
la beauté dans des fleurs, des plantes, & mille ouvra-
ges de la nature dontVufage nous elt inconnu.
Je fai qu'il n'y a aucune des difficultés que je viens
de propofer contre le fyfl ème que je combats , à la-
quelle on ne puifle répondre : mais je penfe que ces
réponfes feroient plus fubtiles que folides.
Il fuit de ce qui précède, que Platon s'étant moins
propofé d'enfeigner la vérité à les difciples , que de
defabufer fes concitoyens fur le compte des fophif-
les , nous offre dans fes ouvrages à chaque ligne des
exemples du beau , nous montre très-bien ce que ce
n'eft point , mais ne nous dit rien de ce que c'eit.
Que S. Auguftin a réduit toute beauté à. l'unité ou
au rapport exact des parties d'un tout entr 'elles , &
au rapport exact des parties d'une partie confidérée
comme tout , &c ainfi à l'infini ; ce qui me femble
conftituer plutôt l'effence du parfait que du beau.
Que M. Wolf a confondu le beau avec le plaifir
qu'il occafionne , & avec la perfection ; quoiqu'il y
ait des êtres qui plailent fans être beaux , d'autres qui
font beaux fans plaire ; que tout être loit fufceptible
de la dernière perfection , & qu'il y en ait qui ne font
pas fuceptibles de la moindre beauté: tels font tous les
objets de l'odorat ôc du goût , coniidérés relative-
ment à ces fens.
Que M.Crouzas en chargeant fa définition du beau,
ne s'eft pas apperçû que plus il multiplioit les carac-
tères du beau , plus il le particularifoit ; & que s'é-
tant propofé de traiter du beau en général , il a com-
mencé par en donner une notion , qui n'eft applica-
ble qu'à quelques efpeces de beaux particuliers.
Que Hutchefon qui s'eft propofé deux objets , le
premier d'expliquer l'origine du plailir que nous
éprouvons à la prélence du beau ; & le fécond , de re-
chercher les qualités que doit avoir un être pour oc-
calionner en nous ce plailir individuel, & par con-
féquent nous paroître beau ; a moins prouvé la réalité
defonpxiemefens, que fait fentir la difficulté de dé-
velopper fans ce fecours la lource du plailir que nous
donne le beau ; & que fon principe de ^uniformité
dans la variété n'eff pas général ; qu'il en fait aux fi-
gures de la Géométrie une application plus lubtile
que vraie , & que ce principe ne s'applique point du
tout à une autre forte de beau, celui des démonftra-
tions des vérités abffraites &£ univerfelles.
Que le fyffème propofé dans Vejfaifur le mérite &
fur la vertu , où l'on prend l'utile pour le feul & uni-
que fondement du beau , eff plus défectueux encore
qu'aucun des précédens.
Enfin que le père André Jéfuite , ou l'auteur de
Yeffaifur le beau, eff celui qui jufqu'à prélent a le mieux
approfondi cette matière , en a le nùeux connu l'éten-
BEA
175
due Se !a difficulté , en a pofé les principes les plus
vrais 6c les plus folides , &. mérita le plus d'être lu.
La feule choie qu'on pût defirer peut-être dans ton
ouvrage , c'étoit de dé veloper l'origine des notions qui
fe trouvent en nous de rapport , d'ordre , de fymmé-
trie : car du ton fublime dont il parle de ces notions,
on ne fait s'il les croit acquifes 6c factices, ou s'il les
croit innées : mais il faut ajouter en fa faveur que
la manière de fon ouvrage , plus oratoire encore que
philofophique , l'éloignoit de cette difcufïïon , dans
laquelle nous allons entrer.
■ Nous naiflbns avec la faculté de fentir & de pen-
fer: le premier pas de la faculté de peniér , c'eft d'e-
xaminer les perceptions , de les unir, de les compa-
rer, de les combiner, d'appercevoir entr'elles des
rapports de convenance & difeonvenance , &c. Nous
nailfons avec des befoins qui nous contraignent de
recourir à difterens expédiens , entre lefquels nous
avons fouvent été convaincus par l'effet que nous en
attendions , 6c par celui qu'ils produifoient , qu'il y
en a de bons , de mauvais , de prompts , de courts ,
de complets , d'incomplets , &c. la plupart de ces ex-
pédiens étoient un outil , une machine , ou quel-
qu'autre invention de ce genre : mais toute machine
luppofe combinaifon , arrangement de parties ten-
dantes à un même but , &c. Voilà donc nos befoins ,
& l'exercice le plus immédiat de nos facultés , qui
conipirent auiïi-tôt que nous naiiîbns à nous donner
des idées d'ordre , d'arrangement , de fymmétrie ,
de méchanifme , de proportion , d'unité : toutes ces
idées viennent des fens , & font factices ; & nous
avons paffé de la notion d'une multitude d'êtres ar-
tificiels & naturels , arrangés , proportionnés , com-
binés , fymmétrilés , à la notion pofitive & abftraite
d'ordre , d'arrangement , de proportion , de combi-
naifon , de rapports , de fymmétrie , & à la notion
abffraite & négative de dilproportion , de delordre
& de cahos.
Ces notions font expérimentales comme toutes les
autres : elles nous font aufli venues par les fens ; il
n'y auroit point de Dieu, que nous ne les aurions pas
moins : elles ont précédé de long-tems en nous celle
de fon exiftence : elles font aufli politives , aufli dis-
tinctes , aufli nettes , aufli réelles, que celles de lon-
gueur , largeur , profondeur , quantité , nombre :
comme elles ont leur origine dans nos befoins & l'e-
xercice de nos facultés , y eût - il fur la furface
de la terre quelque peuple dans la langue duquel ces
idées n'auroient point de nom, elles n'en exifferoient
pas moins dans les efprits d'une manière plus ou
moins étendue , plus ou moins développée , fondée
(vv un plus ou moins grand nombre d'expériences ,
appliquée à un plus ou moins grand nombre d'êtres ;
car voilà toute la différence qu'il peut y avoir entre
un peuple & un autre peuple , entré un homme 8c
un autre homme chez le même peuple ; & quelles
que foient les expreflions lublimes dont on fe ferve
pour défigner les notions abftraites d'ordre , de pro-
portion , de rapports , d'harmonie ; qu'on les appelle,
fi l'on veut , éternelles , originales , fouveraines , règles
effcntielles du beau ; elles ont pafle par nos fens pour
arriver dans notre entendement,de même que les no-
tions les plus viles ; 6c ce ne lont que des abitractions
de notre efprit.
Mais à peine l'exercice de nos facultés intellec-
tuelles , & la néceflité de pourvoir à nos befoins par
des inventions , des machines , &c eurent-ils ébau-
ché dans notre entendement les notions d'ordre, de
rapports , de proportion , de liaifon , d'arrangement ,
de fymmétrie , que nous nous trouvâmes environ-
nés d'êtres où les mêmes notions étoient , pour ainfi
dire , répétées à l'infini ; nous ne pûmes faire un pas
dans l'univers fans que quelque production ne les ré-
tjd
BEA
Veillât ; elles entrèrent clans notre ame à tout inf-
tant & de tous côtés ; tout ce qui le paffoit en nous,
tout ce qui exiftoit hors de nous , tout ce qui fub-
fiftoit des ficelés écoulés , tout ce que l'induftrie , la
réflexion , les découvertes de nos contemporains ,
produifoient fous nos yeux , continuoit de nous in-
culquer les notions d'ordre , de rapports , d'arran-
gement, de fymmétrie, de convenance, de difeon-
venance , &c & il n'y a pas une notion , fi ce n'eft
peut-être celle d'exiftence , qui ait pu devenir auffi.
familière aux hommes , que celle dont il s'agit.
S'il n'entre donc dans la notion du beau foit abfolu,
foit relatif ', foit général , foit particulier, que les no-
tions d'ordre , de rapports , de proportions , d'arran-
gement, de fymmétrie, de convenance, de dilconve-
ftance ; ces notions ne découlant pas d'une autre four-
ce que celles d'exiflence, de nombre , de longueur ,
largeur , profondeur, & une infinité d'autres , fur lef-
quelles on ne contefte point , on peut , ce me fem-
ble , employer les premières dans une définition du
beau , fans être acculé de fubftituer un terme à la
place d'un autre , & de tourner dans un cercle vi-
cieux.
Beau eft un terme que nous appliquons à une in-
finité d'êtres : mais quelque différence qu'il y ait en-
tre ces êtres , il faut ou que nous fafîions une faillie
application du terme beau , ou qu'il y ait dans tous
ces êtres une qualité dont le terme beau foit le figne.
Cette qualité ne peut être du nombre de celles qui
conftituent leur différence fpécifîque ; car ou il n'y
auroit qu'un leul être beau, ou tout au plus qu'une
feule belle efpece d'êtres.
Mais entre les qualités communes à tous les êtres
que nous appelions beaux , laquelle choifirons-nous
pour la choie dont le terme beau eft le figne ? La-
quelle ? il eft évident, ce me fenible ,que ce ne peut
être que celle dont la préfence les rend tous beaux ;
dont la fréquence ou la rareté , fi elle eft fufcepfible
de fréquence & de rareté , les rend plus ou moins
beaux ; dont Fabfence les fait ceffer d'être beaux ; qui
ne peut changer de nature , fans faire changer le beau
d'efpece , & dont la qualité contraire rendroit les
plus beaux defagréables & laids ; celle en un mot par
qui la beauté commence , augmente , varie à l'infini ,
décline , & difparoît : or il n'y a que la notion de rap-
ports capable de ces effets.
J'appelle donc beau hors de moi , tout ce qui con-
tient en foi de quoi réveiller dans mon entendement
l'idée de rapports ; & beau par rapport à moi , tout ce
qui réveille cette idée.
Quand je dis tout , j'en excepte pourtant les qua-
lités relatives au goût & à l'odorat ; quoique ces qua-
lités puiffent réveiller en nous l'idée de rapports, on
n'appelle point beaux les objets en qui elles rendent ,
quand on ne les confidere que relativement à ces
qualités. On dit un mets excellent, une odeur délicieufe ;
mais non un beau mets, une belle odeur. Lors donc qu 'on
dit , voilà un beau turbot , voilà une belle rofe , on con-
fidere d'autres qualités dans la rofe & dans le turbot
que celles qui font relatives aux fens du goût & de
l'odorat.
Quand je dis tout ce qui contient en foi de quoi ré-
veiller dans mon entendement Vidée de rapport , ou tout
ce qui réveille cette idée , c'eft qu'il faut bien diftinguer
les formes qui font dans les objets , oc la notion que
j'en ai. Mon entendement ne met rien dans les cho-
ies ; & n'en ôte rien. Que je penfe ou ne penf e point
à la façade du Louvre, toutes les parties qui la corn-
pofent n'en ont pas moins telle ou telle forme , &
tel & tel arrangement entr'elles : qu'il y eût des hom-
mes ou qu'il n'y en eût point , elle n'en feroit pas
moins belle ; mais feulement pour des êtres poffibles
conftitués de corps &. d'efprit comme nous ; car pour
BEA
d'autres , elle pourroit n'être ni belle ni laide , où
même être laiae. D'où il s'enfuit que , quoiqu'il n'y
ait point de beau abfolu, il y a deux fortes de beau par
rapport à nous , un beau réel , & un beau apperçâ.
Quand je dis, tout ce qui réveille en nous Vidée de rap*
ports, je n'entens pas que pour appeller un être beau,
il faille apprétier quelle eft la forte de rapports qui y
règne ; je n'exige pas que celui qui voit un morceau
d'Architecture foit en état d'affûrer ce que l'Archi-
tecte même peut ignorer, que cette partie eft à celle-
là comme tel nombre eft à tel nombre ; ou que celui
qui entend un concert, fâche plus quelquefois que ne
fait le Muficien, que tel fon eft à tel f on dans le rapport
de 2 à 4, ou de 4 à 5 Ml iufnt qu'il apperçoive & fente
que les membres de cette archite&ure, & que les fons
de cette pièce de mufique ont des rapports , foit en-
tr'eux, foit avec d'autres objets. C'eft l'indétermina-
tion de ces rapports, la facilité de les faifir, & le plaifir
qui accompagne leur perception , qui a fait imaginer
que le beau étoit plutôt une affaire de lentiment que de
raifon. J'oie affûrer que toutes les fois qu'un principe
nous fera connu dès la plus tendre enfance , & que
nous en ferons par l'habitude une application facile
& fùbite aux objets placés horsue nous, nous croirons
en juger par fentiment : mais nous ferons contraints
d'avouer notre erreur dans toutes les occafions 011 la
complication des rapports & la nouveauté de l'objet
fufpendront l'application du principe : alors le plai*
fir attendra pour fe faire fentir , que l'entendement
ait prononcé que l'objet eft beau. D'ailleurs le juge-
ment en pareil cas eft prefque toujours du beau re-
latif, & non du beau réel.
Ou l'on confidere les rapports dans les mœurs , &
l'on a le beau moral , ou on les confidere dans les ou-
vrages de Littérature, & on a le beau littéraire; ou on
les confidere dans les pièces de Mufique , Ôc l'on a le
beau mufical ; ou on les confidere dans les ouvrages
de la nature, &: l'on a le beau naturel; ou on les con-
fidere dans les ouvrages méchaniques des hommes ,
& on a le beau artificiel; ou on les confidere dans les
repréfentations des ouvrages de l'art ou de la nature,
& l'on a le beau d'imitation : dans quelqu 'objet , &
fous quelque afpe£t que vous confidériez les rapports
dans un même objet, le beau prendra difîérens noms.
Mais un même objet, quel qu'il foit, peut être
confidere folitairement & en lui-même , ou relative-
ment à d'autres. Quand je prononce d'une fleur
qu'elle eu belle , ou d'un poiffon qu'il eft beau, qu'en-
tens-je ? Si je confidere cette fleur ou ce poiffon fo-
litairement ; je n'entends pas autre chofe , finon que
j'apperçois entre les parties dont ils font compotes ,
de l'ordre,de l'arrangement,de la fymmétrie,des rap-
ports ( car tous ces mots ne défignent que différen-
tes manières d'envifager les rapports mêmes ) : en ce
fens toute fleur eft belle , tout poiffon eft beau ; mais
de quel beau } de celui que j'appelle beau réel.
Si je confidere la fleur & le poiffon relativement à
d'autres fleurs & d'autres poiflons; quand je dis qu'ils
font beaux , cela fignifîe qu'entre les êtres de leur
genre, qu'entre les fleurs celle-ci, qu'entre lespoif-
fons celui-là , réveillent en moi le plus d'idées de
rapports , & le plus de certains rapports ; car je ne
tarderai pas à faire voir que tous les rapports n'étant
pas de la même nature , ils contribuent plus ou moins
les uns que les autres à la beauté. Mais je puis afTûrer
que fous cette nouvelle façon de confidérer les ob-
jets , il y a beau & laid : mais quel beau , quel laid }
celui qu'on appelle relatif.
Si au lieu de prendre une fleur ou un poiffon , on.
généralife , &: qu'on prenne une plante ou un ani-
mal ; fi on particularité & qu'on prenne une rofe &
un turbot, on en tirera toujours la diftindion du beau
relatif, &; du beau réel.
D'où l'on voit qu'il y a plufieurs beaux relatifs , &
qu'une
BEA
qu'une tulipe peut être belle ou laide entre les tuli-
pes , belle ou laide entre les fleurs, belle ou laide entre
les plantes , belle ou laide entre les productions de la
nature.
Mais on conçoit qu'il faut avoir vu bien des rofes
& bien des turbots , pour prononcer que ceux-ci font
beaux ou laids entre les rofes Se les turbots ; bien des
plantes & bien des poiffbns , pour prononcer que la
rofe & le turbot font beaux ou laids entre les plantes
& les poiffons ; & qu'il faut avoir une grande con-
noiflance de la nature , pour prononcer qu'ils font
beaux ou laids entre les productions de la nature.
Qu'eft-ce donc qu'on entend , quand on dit à un
artifte , imite^r la belle nature ? Ou l'on ne fait ce qu'on
commande , ou on lui dit : fi vous avez à peindre une
fleur, & qu'il vous foit d'ailleurs indifférent laquelle
peindre , prenez la plus belle d'entre les fleurs ; fi
vous avez à peindre une plante , & que votre fujet
ne demande point que ce foit un chêne ou un or-
meau fec , rompu , brifé , ébranché , prenez la plus
belle d'entre les plantes ; fi vous avez à peindre un
objet de la nature , & qu'il vous foit indifférent le-
quel choiiir , prenez le plus beau.
** D'où il s'enfuit , i°. que le principe de l'imitation
de la belle nature demande l'étude la plus profon-
de & la plus étendue de fes productions en tout
genre.
z°. Que quand on auroit la connoifTance la plus
parfaite de la nature , & des limites qu'elle s'eft pref-
crites dans la production de chaque être , il n'en fe-
roit pas moins vrai que le nombre des occafions où
le plus beau pourroit être employé dans les Arts d'i-
mitation, feroit à celui où il faut préférer le moins
beau , comme l'unité eft à l'infini.
3°. Que quoiqu'il y ait en effet un maximum de
beauté dans chaque ouvrage de la nature , confidéré
en lui-même ; ou , pour me lervir d'un exemple , que
quoique la plus belle rofe qu'elle produile , n'ait ja-
mais ni la hauteur , ni l'étendue d'un chêne , cepen-
dant il n'y a ni beau , ni laid dans fes productions ,
confidérées relativement à l'emploi qu'on en peut
faire dans les Arts d'imitation.
Selon la nature d'un être , félon qu'il excite en
nous la perception d'un plus grand nombre de rap-
ports , & félon la nature des rapports qu'il excite , il
cil joli , beau , plus beau , très-beau ou laid; bas , petit ,
grand , élevé ,Jublime , outré , burlefyue ou plaij'ant ; &
ce feroit faire un très-grand ouvrage , & non pas un
article de dictionnaire , que d'entrer dans tous ces
détails : il nous fuffit d'avoir montré les principes ;
nous abandonnons au lecteur le foin des conféquen-
ces &£ des applications. Mais nous pouvons lui aliïi-
rer , que foit qu'il prenne fes exemples dans la natu-
re , ou qu'il les emprunte de la Peinture, de la Mo-
rale, de l'Architecture , de la Mufique, il trouvera
toujours qu'il donne le nom de beau réel à tout ce
qui contient en foi dequoi réveiller l'idée de rapports ;
éc le nom de beau relatif, à tout ce qui réveille des
rapports convenables avec les choies , auxquelles il
en faut faire la comparaiîon.
Je me contenterai d'en apporter un exemple , pris
de la Littérature. Tout le monde fçait le mot lublime
de la tragédie des Horaees , qu'il mourût. Je demande à
quelqu'un qui ne connoît point la pièce de Corneille,
ck qui n'a aucune idée de la réponié du vieil Horace ,
ce qu'il penle de ce trait au il mourut. Il cil évident
que celui que j'interroge ne lâchant ce que c'eft que
ce qu'il mourût; ne pouvant deviner li c'eft une phra-
fe complète ou un fragment , Cv appercevant à peine
entre ces trois termes quelque rapport grammatical ,
me répondra que cela ne lui paroit ni beaurà Awi.Mais
fi je lui dis que c'efl la réponfe d'un homme conlulté
fur ce qu'un autre doit fane dans un combat , il com-
mence à appercevoir dans le repondant une lorte
Teint II,
BEA
i77
de courage , qui ne lui permet pas de croire qu'il
foit toujours meilleur de vivre que de mourir ; & le
qu'il mourut commence à l'intérefTer. Si j'ajoute qu'il
s'agit dans ce combat de l'honneur de la patrie ; que
le combattant eft fils de celui qu'on interroge ; que
c'eft le feid qui lui refte ; que le jeune homme avoit
à faire à trois ennemis , qui avoient déjà ôté la vie
à deux de fes frères ; que le vieillard parle à fa fille ;
que c'eft un Romain: alors la réponfe qu'il mourût ,
qui n'étoit ni belle, ni laide, s'embellit à mefure que
je développe fes rapports avec les circonftances , &
finit par être fublime.
Changez les circonftances & les rapports, & fai-
tes paffer le qu'il mourut du théâtre François fur la
feene Italienne , & de la bouche du vieil Horace dans
celle de Scapin , le qu'il mourût deviendra burltfque.
Changez encore les circonftances , & fuppofezque
Scapin foit au fervice d'un maître dur, avare & bour-
ru , & qu'ils foient attaqués fur un grand chemin par
trois ou quatre brigands. Scapin s'entuit ; fon maître
fe défend : mais prefle par le nombre , il eft obligé
de s'enfuir aufïi ; & l'on vient apprendre à Scapin
que fon maître a échappé au danger. Comment , dira
Scapin trompé dans fon attente; il s'eft donc enfui :
ah le lâche ! Mais lui répondra-t-on , ftul contre trois
que voulois-tu qu'il fit } qu'il mourût, répondra-t-il ; &C
ce qu'il mourût deviendra plaij'ant. Il eft donc conf-
tant que la beauté commence, s'accroît, varie , dé-
cline & difparoît avec les rapports , ainfi que nous
l'avons dit plus haut.
Mais qu'entendez-vous par un rapport, me deman-
dera-t-on? n'eft-ce pas changer l'acception des ter-
mes , que de donner le nom de beau à ce qu'on n'a
jamais regardé comme tel ? II femble que dans notre
langue l'idée de beau foit toujours jointe à celle de
grandeur, ck que ce ne foit pas définir le beau que de
placer fa différence fpécifique dans une qualité qui
convient à une infinité d'êtres, qui n'ont ni gran-
deur , ni fublimité. M. Crouzas a péché , lans doute ,
lorfqu'il a chargé fa définition du beau d'un fi grand
nombre de caractères , qu'elle s'eft trouvée reftreinte
à un très-petit nombre d'êtres : mais n'eft-ce pas tom-
ber dans le défaut contraire , que de la rendre fi gé-
nérale , qu'elle femble les embrafTer tous , fans en ex-
cepter un amas de pierres informes , jettées au halard
fur le bord d'une carrière ? Tous les objets, ajoûtera-
t-on , font iùfceptibles de rapports entre eux , entre
leurs parties , & avec d'autres êtres ; il n'y en a
point qui nepuiiîènt être arrangés, ordonnés, fym-
métrifes. La perfection eft une qualité qui peut con-
venir à tous : mais il n'en eft pas.de même de la beau-
té ; elle eft d'un petit nombre d'objets.
Voilà , ce me femble , linon la feule , du moins
la plus forte objection qu'on puiflé me faire , & je
vais tâcher d'y répondre.
Le rapport en général eft une opération de l'en-
tendement , qui confidere foit un être , foit une qua-
lité , en tant que cet être ou cette qualiré fuppoie Fe-
xiftenced'un autre être ou d'une autre qualité. Exem-
ple : quand je dis que Pierre eft un bon perc , je confi-
dere en lui une qualité qui iuppole l'exiftence d'une
autre , celle de fils ; & ainlî des autres rapports , tels
qu'ils puhTent être. D'où il s'enfuit que , quoique le
rapport ne foit que dans notre entendement ,
à la perception, il n'en a pas moins fon rondement
dans les choies ; &c je dirai qu'une chou
elle des rapports réels , toutes les fois qu'e
revêtue de qualités qu'un être constitué de corps &
d'efprit comme moi , ne pou: roit confidérer (ans iup-
poièr l'exiftence ou d'autres êtres, ou d'autres qua-
lités , foit clans la choie même , foit hors d'elle ; 6c je
distribuerai les rapports en réels & en apptrçus. Mais
il y a une troifieme forte de rapport- , ce fora :
ports intellectuels o\xJiéujs i ceux que l'enter..
r78
BEA
humain fembie mettre dans les chofes. Un ftatuaire
jette l'œil fur un bloc de marbre ; Ion imagination
plus prompte que fon cifeau , en enlevé toutes les
parties liiperflues , & y dii'cerne une figure : mais
cette figure elt proprement imaginaire & fictive ; il
pourroit faire fur une portion d'cfpace terminée par
des lignes intellectuelles , ce qu'il vient d'exécuter
d'imagination dans un bloc informe de marbre. Un
philoiophe jette l'œil fur un amas de pierres jettées
au hafard ; il anéantit par la penfée toutes les parties
de cet amas qui produifent l'irrégularité , & il par-
vient à en faire fortir un globe , un cube , une figure
régulière. Qu'en: -ce que cela fignifie ? Que quoique
la main de l'artiftc ne puifle tracer un deffein que fur
des furfaces renflantes , il en peut tranfporter l'ima-
ge par la penfée fur tout corps ; que dis-je , fur tout
corps ? dans l'efpace & le vuide. L'image , ou tranf-
portée par la penfée dans les airs , ou extraite par
imagination des corps les plus informes , peut être bel-
le ou laide : mais non la toile idéale à laquelle on l'a
attachée , ou le corps informe dont on l'a fait iortir.
Quand je dis donc qu'un être eft beau par les
rapports qu'on y remarque , je ne parle point des
rapports intellectuels ou fiftifs que notre imagina-
tion y tranfporte , mais des rapports réels qui y iont ,
& que notre entendement y remarque par le fecours
de nos fens.
En revanche , je prétens que quels que foient les
rapports , ce font eux qui conftitueront la beauté, non
dans ce fens étroit où le joli eft l'oppofé du beau ,
mais dans un fens , j'ofe le dire , plus philofophique
& plus conforme à la notion du beau en général , &
à la nature des langues & des chofes.
Si quelqu'un a la patience de raffembler tous les
êtres auxquels nous donnons le nom de beau , il s'ap-
percevra bientôt que dans cette foule il y en a une
infinité où l'on n'a nul égard à la petiteffe ou la gran-
deur : la petitefle & la grandeur font comptées pour
rien toutes les fois que l'être ell folitaire , ou qu'é-
tant individu d'une efpece nombreufe , on le confi-
dere folitairement. Quand on prononça de la pre-
mière horloge ou de la première montre qu'elle étoit
belle , faifoit-on attention à autre choie qu'à fon mé-
chanifme , ou au rapport de fes parties entre-elles ?
Quand on prononce aujourd'hui que la montre eft
belle, fait -on attention à autre choie qu'à fon ufage
& à fon méchanifme. Si donc la définition générale
du beau doit convenir à tous les êtres auxquels on
donne cette épithete , l'idée de grandeur en eft ex-
clue. Je me fuis attaché à écarter de la notion du
beau , la notion de grandeur ; parce qu'il m'a femblé
que c'étoit celle qu'on lui attachoit plus ordinaire-
ment. En Mathématique , on entend par un beau pro-
blème, un problème difficile à réfoudre ; par une belle
folution, la folution fimple & facile d'un problème
difficile & compliqué. La notion de grand, defubli-
me , Relevé , n'a aucun lieu dans ces occafions où
on ne laiffe pas d'employer le nom de beau. Qu'on
parcourre de cette manière tous les êtres qu'on nom-
me beaux : l'un exclura la grandeur , l'autre exclura
l'utilité ; un troifieme la fymmétrie ; quelques - uns
même l'apparence marquée d'ordre & de fymmé-
trie ; telle feroit la peinture d'un orage , d'une tem-
pête , d'un cahos: & l'on iera forcé de convenir, que
la feule qualité commune , félon laquelle ces êtres
conviennent tous, eft la notion de rapports.
Mais quand on demande que la notion générale
de beau convienne à tous les êtres qu'on nomme tels ,
ne parle-t-on que de fa langue , ou parle-t-on de tou-
tes les langues ? Faut-il que cette définition convienne
feulement aux êtres que nous appelions beaux en Fran-
çois , ou à tous les êtres qu'on appellerait beaux en
Hébreu , en Syriaque , en Arabe , en Chaldéen , en
Grec , en Latin , en Anglois , en Italien , 6c dans tou-
BEA
tes les langues qui ont exifté , qui exiflent , ou qui
exifteront? & pour prouver que la notion de rapports
eft la feule qui reftercit après l'emploi d'une règle
d'exclufion auffi étendue , le philofophe fera-t-il forcé
de les apprendre toutes ? ne lui fiiffit-il pas d'avoir
examiné que l'acception du terme beau \ ,me dans
toutes les langues ; qu'on le trouve appliqué là à une
forte d'êtres , à laquelle il ne s'applique point ici ,
mais qu'en quelque idiome qu'on en faffe ufage , il
fuppofe perception de rapports ? Les Anglois difent
a Jinejlavour, a fine woman , une belle femme , une
belle odeur. Où en feroit un philofophe Anglois , fi
ayant à traiter du beau , il vouloit avoir égard à cette
bifarrerie de fa langue ? C'eft le peuple qui a fait les
langues ; c'eft au philofophe à découvrir l'origine
des chofes ; & il feroit affez furprenant que les prin-
cipes de l'un ne fe trouvafîent pas fouvent en con-
tradiction avec les ufages de l'autre. Mais le princi-
pe de la perception des rapports , appliqué à la na-
ture du beau , n'a pas même ici ce dei'avantage ; &C
il eft fi général , qu'il eft difficile que quelque choie
lui échappe.
Chez tous les peuples, dans tous les lieux de la
terre , & dans tous les tems , on a eu un nom pour
la couleur en général , & d'autres noms pour les
couleurs en particulier, & pour leurs nuances. Qu'au-
roit à faire un philoiophe à qui l'on propoferoit
d'expliquer ce que c'efl qu'une belle couleur } finon
d'indiquer l'origine de l'application du terme beau à
une couleur en général , quelle qu'elle foit , & en-
fuite d'indiquer les caufes qui ont pu faire préférer
telle nuance à telle autre. De même c'eft la per-
ception des rapports qui a donné lieu à l'invention
du terme beau ; & félon que les rapports & Fefprit
des hommes ont varié , on a fait les noms joli , beauf
charmant , grand ,fub lime , divin, & une infinité d'au-
tres, tant relatifs au phyfique qu'au moral. Voilà les
nuances du beau : mais j'étens cette penfée , & je dis :
Quand on exige que la notion générale de beau
convienne à tous les êtres beaux, parle-t-on feulement
de ceux qui portent cette épithete ici & aujour-
d'hui , ou de ceux qu'on a nommés beaux à la naif-
fance du monde , qu'on appelloit beaux il y a cinq
mille ans , à trois mille lieues , & qu'on appellera
tels dans lesfiecles à venir ; de ceux que nous avons
regardés comme tels dans l'enfance , dans l'âge mùr ,
&: dans la vieilleffe ; de ceux qui font l'admiration
des peuples policés , & de ceux qui charment les fau*
vages. La vérité de cette définition fera-t-elle loca-
le , particulière , & momentanée ? ou s'étenùra-t-elle
à tous les êtres , à tous les tems, à tous les hommes,
& à tous les lieux ? Si l'on prend le dernier parti ,
on fe rapprochera beaucoup de mon principe, oc l'on
ne trouvera guère d'autre moyen de concilier en-
tr'eux les jugemens de l'enfant & de l'homme fait :
de l'enfant , à qui il ne faut qu'un veftige de fymmé-
trie & d'imitation pour admirer & pour être recréé ;
de l'homme fait , à qui il faut des palais & des ou-
vrages d'une étendue immenfe pour être frappé : du
fauvage & de l'homme policé ; du fauvage , qui eft
enchanté à la vue d'une pendeloque de verre , d'une
bague de laiton , ou d'un braffelet de quincaille ; &
de l'homme policé , qui n'accorde lbn attention
qu'aux ouvrages les plus parfaits : des premiers hom-
mes , qui prodiguoient les noms de beaux , de magni-
fiques , &c. à des cabanes, des chaumières, & des
granges ; & des hommes d'aujourd'hui , qui ont ref-
treint ces dénominations aux derniers erîbrts de la
capacité de l'homme.
Placez la beauté dans la perception des rapports ,
& vous aurez l'hiftoire de l'es progrès depuis la naif-
fance du monde jufqu'aujourd'hui : choifuTez pour
caractère différentiel du beau en général , telle autre
qualité qu'il vous plaira , &c votre notion fe trouve-
BEA
ira tOut-à-coup concentrée dans un point del'efpace
6c du tems.
La perception des rapports eft donc le fondement
du beau ; c'eft donc la perception des rapports qu'on
a délignée dans les langues ibus une infinité de noms
différais , qui tous n'indiquent que différentes fortes
de beau.
■ Mais dans la nôtre , & dans prefque toutes les au-
tres , le terme beau le prend iouvent par oppoiition
à joli ; 6c fous ce nouvel afpecl , il lemble que la
quefiion du beau ne loit plus qu'une affaire de Gram-
maire , & qu'il ne s'agiile plus que de fpécifier exac-
tement les idées qu'on attache à ce terme. Voye{ à
l 'article fuivant BEAU oppojé ajotï.
Après avoir tenté d'expofer en quoi confifte l'ori-
gine du beau, il ne nous relie plus qu'à rechercher
celle des opinions différentes que les hommes ont de
la beauté : cette recherche achèvera de donner de
la certitude à nos principes ; car nous démontrerons
que toutes ces différences résultent de la divcrlité
des rapports apperçîts ou introduits , tant dans les
productions de la nature , que dans celles des arts.
Le beau qui réfulte de la perception d'un feul rap-
port , ell moindre ordinairement que celui qui résul-
te de la perception de plulieurs rapports. La vue
d'un beau vilage ou d'un beau tableau , affecte plus
que celle d'une feule couleur ; un ciel étoile , qu'un
rideau d'aliir; unpaylage , qu'une campagne ouver-
te ; un édifice , qu'un terrein uni ; une pièce de mu-
fique , qu'un fon. Cependant il ne faut pas multiplier
le nombre des rapports à l'infini ; & la beauté ne luit
pas cette progrelïion : nous n'admettons de rapport
dans les belles choies , que ce qu'un bon efprit en peut
failir nettement & facilement. Mais qu'eft-ce qu'un
bon efprit ? oit eft ce point dans les ouvrages en-de-
çà duquel , faute de rapports , ils font trop unis , &
au-delà duquel ils en font chargés par excès ? Pre-
mière fource de diverfité dans les jugemens. Ici com-
mencent les conteftations. Tous conviennent qu'il y
a un beau , qu'il ell le réfultat des rapports apperçûs :
mais félon qu'on a plus ou moins de connoiffance ,
d'expérience, d'habitude déjuger, de méditer, de
voir, plus d'étendue naturelle dans l'efprit, on dit
qu'un objet eft pauvre ou riche , confus ou rempli ,
meiquin ou chargé.
Mais combien de compofitions où Partifte eft con-
traint d'employer plus de rapports que le grand nom-
bre n'en peut faifir , & oii il n'y a guère que ceux de
fon art, c'clt-à-dire, les hommes les moins dilnofés
à lui rendre juftice, qui connoiffent tout le mérite de
fes productions ? Que devient alors le beau } Ou il ell
préienté à une troupe d'ignorans qui ne font pas en
état de le ientir , ou il ell fenti par quelques envieux
qui fe taifent ; c'eft-là fouvent tout l'effet d'un grand
morceau de Mufique. M. d'Alembcrt a dit dans le
Difcours préliminaire de cet Ouvrage, Difcours qui
mérite bien d'être cité dans cet article , qu'après
avoir fait un art d'apprendre la Mufique , on en de-
vroit bien taire un de l'écouter : & j'ajoute qu'après
avoir fait un art de la Poëiie 6c de la Peinture , c'cll
en vain qu'on en a fait un de lire & de voir ; 6c qu'il
régnera toujours dans les jugemens de certains ou-
vrages une uniformité apparente, moins injurieufe
à la vérité pour Partifte que le partage des fenti-
mens , mais toujours fort affligeante.
Entre les rapports on en peut diftingtier une infinité
de fortes : il y en a qui fe fortih'ent , s affoibliffent , &
fe tempèrent mutuellement. Quelle différence dans
ce qu'on pehfera de la beauté d'un objet , li on I
fit tous , ou fi l'on n'en faifit qu'une partie ! S.
'fource de divcrlité dans les jugement. Il y en a d'in-
déterminés & de déterminés : nous nous contentons
des premiers pour accorder le nom de beau, to.ites
les fois qu'il n'eil pas de l'objet immédiat 6c unique
Tome II,
BEA 179
de la feiencè ou de Part de les déterminer. Mais
cette détermination ell l'objet immédiat & unique
d'une feience ou d'un art , nous exigeons non-feule-
ment les rapports , mais encore leur valeur : voilà
la raifon pour laquelle nous difons un beau théorème,
& que nous ne difons pas un bel axiome ; quoiqu'on
ne puilTe pas nier que l'axiome exprimant un rap-
port, n'ait auffi fa btauté réelle. Quand je dis , en Ma-
thématiques , que le tout ell plus grand que fa par-
tie , j'énonce affùrément une infinité de propofi-
tions particulières , fur la quantité partagée : mais
je ne détermine rien fur l'excès julle du tout fur fes
portions ; c'eft prefque comme li je diiois : le cylin-
dre ell plus grand que la fphere inlcrite , & la fphere
plus grande que le cône inferit. Mais l'objet propre
& immédiat des Mathématiques eft de déterminer
de combien l'un de ces corps eft plus grand ou plus
petit que l'autre ; & celui qui démontrera qu'ils font
toujours entr'eux comme les nombres 3,2,1, aura
lait un théorème admirable. La beauté qui confiile
toujours dans les rapports , fera dans cette occalion
en raifon compofée du nombre des rapports , 6c de
la difficulté qu'il y avoit à les appercevoir ; & le
théorème qui énoncera que toute ligne qui tombe
du fommet d'un triangle ifofcele fur le milieu de fa
bafe , partage l'angle en deux angles égaux, ne fera
pas merveilleux : mais celui qui dira que les afymp-
totes d'une courbe s'en approchent fans celle fans ja-
mais la rencontrer , & que les efpaces formés par
une portion de l'axe , une portion de la courbe , l'a-
fymptote , & le prolongement de l'ordonnée , font
entr'eux comme tel nombre à tel nombre , fera beau.
Une circonllance qui n'eil pas indifférente à la beau-
té , dans cette occafion & dans beaucoup d'autres ,
c'eft Paclion combinée de la furprife 6c des rapports,
qui a lieu toutes les fois que le théorème dont on a
démontré la vérité paffoit auparavant pour une pro-
pofition fauiTe.
Il y a des rapports que nous jugeons plus ou moins
effentiels ; tel cil celui de la grandeur relativement
à l'homme , à la femme , 6c à l'enfant : nous difons
d'un enfant qu'il ell beau , quoiqu'il foit petit ; il faut
abfolument qu'un bel homme loit grand ; nous exi-
geons moins cette qualité dans une femme ; 6c il eft
plus permis à une petite femme d'être belle , qu'à un
petit homme d'être beau. Il me iemble que nous con-
fidérons alors les êtres, non-feulement en eux-mêmes,
mais encore relativement aux lieux qu'ils occupent
dans la nature , dans le grand tout ; & félon que ce
grand tout eft plus ou moins connu , l'échelle qu'on
le forme de la grandeur des êtres ell plus ou moins
exacte : mais nous ne lavons jamais bien quand elle
cil julle. Troifieme fource de diverlité de goûts &
de jugemens clans les arts d'imitation. Les grands maî-
tres ont mieux aime que leur échelle fut un peu trop
grande que trop petite : mais aucun d'eux n'a la même
échelle , ni peut-être celle de la nature.
L'intérêt , les palïïons, l'ignorance, les préjugés ,
les ufages , les moeurs , les climats , les coutumes ,
les gouvernemens, les cultes, les évenemens , em-
pêchent les êtres qui nous environnent , ou les ren-
dent capables de reveiller ou de ne point réveiller
en nous plulieurs idées , anéantiflent en eux des rap-
ports très-naturels , &y en établiffent de capricieux
6c d'accidentels. Quatrième fource de diveruté dans
les jugemens.
On rapporte tout à fon art & à fes connoiffances :
nous faifons tous plus ou moins le rôle du critique
d'Apelle; & quoique nous ne connoiffions que la
chauffure , nous jugeons aufîi de la jambe ; ou quoi-
que nous ne connoirfions que la jambe , nous descen-
dons auffi à la chauffure : mais nous ne portons pas
feulement ou cette témérité ou cette oftentation de
détail dans le jugement des productions de l'art ; cet»
Z.j
i8o
BEA
les de la nature n'en font pas exemptes. Entre les tu-
lipes d'un jardin, la plus belle pour un curieux fera
celle où il remarquera une étendue , des couleurs ,
une feuille , des variétés peu communes : mais le
Peintre occupé d'effets de lumière , de teintes , de
clair obfcur , de formes relatives à fon art , néglige-
ra tous les caractères que le fleurifte admire , & pren-
dra pour modèle la fleur même méprifée par le cu-
rieux. Diverfité de talens &£ de connoiffances , cin-
quième fource de diverfité dans les jugemens.
L'ame a le pouvoir d'unir enfemble les idées qu'elle
a reçues léparément , de comparer les objets par le
moyen des idées qu'elle en a , d'obferver les rap-
ports qu'elles ont entr'elles , d'étendre ou de refler-
rer les idées à fon gré , de confidérer féparément cha-
cune des idées Amples qui peuvent s'être trouvées
réunies dans la fenfation qu'elle en a reçues. Cette
dernière opération de l'ame s'appelle abjlraîlion. V.
Abstraction. Les idées des fubftances corporelles
font compofées de diverfes idées Amples , qui ont fait
enfemble leurs irnpreflions longue les fubltances cor-
porelles fe font préfenîées à nos fens : ce n'eft qu'en
îpécifiant en détail ces idées fenfibles , qu'on peut dé-
finir les fubftances. Voye^ Substance. Ces fortes de
définitions peuvent exciter une idée affez claire d'une
fubftance dans un homme qui ne l'a jamais immédia-
ment apperçûe , pourvu qu'il ait autrefois reçu fépa-
rément , parle moyen des fens , toutes les idées Am-
ples qui entrent dans la compofition de l'idée com-
plexe de la fubflance définie : mais s'il lui manque la
notion de quelqu'une des idées Amples dont cette
fubftance eft compofée , & s'il eft privé du fens né-
ceffaire pour les appercevoir , ou fi ce fens eft dépra-
vé fans retour , il n'eft aucune définition qui puiiîe
exciter en lui l'idée dont il n'auroit pas eu précédem-
ment une perception fenfible. Voye^ Définition.
Sixième fource de diverfité dans les jugemens que
les hommes porteront de la beauté d'une defeription ;
car combien entr'eux de notions faufles , combien
de demi-notions du même objet !
Mais ils ne doivent pas s'accorder davantage fur
les êtres intellectuels : ils font tous repréfentés par
des lignes ; & il n'y a prefqu'aucun de ces fignes qui
foit allez exactement défini , pour que l'acception
n'en foit pas plus étendue ou plus reiierrée dans un
homme que dans un autre. La Logique & la Méta-
phyfique feroient bien voifines de la perfection , A le
Dictionnaire de la langue étoit bien fait : mais c'eft
encore un ouvrage à defirer; & comme les mots
font les couleurs dont la Poëlie & l'Eloquence fe fer-
vent , quelle conformité peut-on attendre dans les ju-
gemens du tableau , tant qu'on ne faura feulement
pas à quoi s'en tenir fur les couleurs & fur les nuan-
ces ? Septième fource de diverfité dans les jugemens.
Quel que foit l'être dont nous jugeons ; les goûts
6c les dégoûts excités par l'inttruction , par l'éduca-
tion, parle préjugé , ou par un certain ordre factice
dans nos idées, font tous fondés fur l'opinion où nous
fomme^ que ces objets ont quelque perfection ou quel-
que défaut dans des qualités , pour la perception des-
quelles nous avons des fens ou des facultés convena-
bles. Huitième fource de diverfité.
On peut aflùrer que les idées Amples qu'un même
objet excite en différentes perfonnes , font auffi dif-
férentes que les goûts &c les dégoûts qu'on leur re-
marque. C'eft même une vérité de fentiment ; & il
n'eft pas plus difficile que plufieurs perfonnes différent
entr'elles dans un même inftant , relativement aux
idées Amples , que le même homme ne diffère de lui-
même dans des inftans différens. Nos fens font dans un
état de viciftitude continuelle : un jour on n'a point
d'yeux , un autre jour on entend mal ; & d'un jour à
l'autre, on voit, on fent, on entend diverfement.
Neuvième fource de diverfité dans les jugemens des
BEA
hommes d'un même âge , & d'un même homme en
différens âges.
Il fe joint par accidenta l'objet le plus beau desidées
defagréables : A l'on aime le vin d'Elpagne , il ne faut
qu'en prendre avec de l'émétique pour le détefter ;
il ne nous eft pas libre d'éprouver ou non des nau-
fées à fon afpect : le vin d'Elpagne eft toujours bon ,
mais notre condition n'eft pas la même par rapport à
lui. De même , ce veftibule eft toujours magnifique ,
mais mon ami y a perdu la vie. Ce théâtre n'a pas
cefle d'être beau , depuis qu'on m'y a Afflé : mais je ne
peux plus le voir , fans que mes oreilles ne foient en-
core frappées du bruit des Afflets. Je ne vois fous ce
veftibule , que mon ami expirant ; je ne fens plus fa
beauté. Dixième fource d'une diverfité dans les juge-
mens , occafionnée par ce cortège d'idées accidentel-
les , qu'il ne nous eft pas libre d'écarter de l'idée prin-
cipale. Pojl equltem fedit atra cura.
Lorfqu'il s'agit d'objets compofés, Scquipréfentent
en même tems des formes naturelles &c des formes
artificielles , comme dans l'Architecture , les jardins ,
les ajuftemens , &c. notre goyt eft fondé fur une au-
tre affociation d'idées moitié raifonnables , moitié
capricieufes : quelque foible analogie avec la démar-
che , le cri , la forme , la couleur d'un objet malfai-
fant, l'opinion de notre pays, les conventions de
nos compatriotes , &c. tout influe dans nos jugemens.
Ces caules tendent-elles à nous faire regarder les
couleurs éclatantes & vives , comme une marque de
vanité ou de quelqu'autre mauvaife difpofition de
cœur ou d'efprit : certaines formes font-elles en ufa-
ge parmi les payfans , ou des gens dont la profefïïon,
les emplois , le caractère nous font odieux ou mépri-
fables ; ces idées acceffoires reviendront malgré nous,
avec celles delà couleur & de la forme ; &c nous pro-
noncerons contre cette couleur & ces formes , quoi-
qu'elles n'ayent rien en elles-mêmes de defagréable.
Onzième fource de diverfité.
Quel fera donc l'objet dans la nature fur la beauté ,
duquel les hommes feront parfaitement d'accord ?
La ftructure des végétaux ? Le méchanifme des ani-
maux ? Le monde ? Mais ceux qui font le plus frap-
pés des rapports , de l'ordre , des fymmétries , des
liaifons , qui régnent entre les parties de ce grand
tout , ignorant le but que le créateur s'eft propofé en
le formant , ne font-ils pas entraînés à prononcer qu'il
eft parfaitement beau , par les idées qu'ils ont de la di-
vinité ? & ne regardent-ils pas cet ouvrage, comme
un chef-d'œuvre, principalement parce qu'il n'a man-
qué à l'auteur ni la puiffance ni la volonté pour le
former tel ? Voye{ Optimisme. Mais combien d'oc-
cafions où nous n'avons pas le même droit d'inférer
la perfection de l'ouvrage , du nom feul de l'ouvrier ,
& oii nous ne laiffons pas que d'admirer ? Ce tableau
eft de Raphaël , cela fùffit. Douzième fource , Anon
de diverfité , du moins d'erreur dans les jugemens.
Les êtres purement imaginaires, tels que le fphynx,
la fyrene , le faune , le minotaure , l'homme idéal, &c.
font ceux fur la beauté defquels on femble moins par-
tagé, & cela n'eft pas furprenant : ces êtres imagi-
naires font à la vérité formés d'après les rapports que
nous voyons obfervés dans les êtres réels ; mais le
modèle auquel ils doivent reffembler, épais entre
toutes les productions de la nature , eft proprement
par tout & nulle part.
Quoi qu'il en foit de toutes ces caufes de diverA-
té dans nos jugemens , ce n'eft point une raifon de
penfer que le beau réel , celui qui conlifte dans la per-
ception des rapports , foit une chimère ; l'application
de ce principe peut varier à l'infini , Se les modifica-
tions accidentelles occalionner des diiî'ertations &
des guerres littéraires : mais le principe n'en eft pas
moins confiant. Il n'y a peut-être pas deux hommes
fur toute la terre , qui apperçoivent exactement les
mêmes rapports dans un même objet , Se qui le jugent
BEA
Jieau au même degré : mais s'il y en avoit un feul qui
ne fût affefté des rapports dans aucun genre , ce feroit
un flupide parfait ; & s'il y étoit infcnlible feulement
dans quelques genres , ce phénomène décéleroit en
lui un défaut d'oeconomie animale, &c nous ferions
toujours éloignés du fcepticifme , par la condition
générale du refte de Pefpece.
Le beau n'eft pas toujours l'ouvraee d'une caufe
intelligente : le mouvement établit ïbuvent, foit dans
un être confidéré folitairement , foit entre plufieurs
êtres comparés entr'eux , une multitude prodigiculc
de rapports furprenans. Les cabinets d'hiftoire natu-
relle en offrent un grand nombre d'exemples. Les
rapports font alors des réfultats de combinaifons for-
tuites , du moins par rapport à nous. La nature imite,
en fe jouant , dans cent occalions , les productions de
l'art; & l'on pourrait demander, je ne dis pas fi ce
philofophe qui fut jette par une tempête furies bords
d'une île inconnue , avoit raifon de s'écrier , à la vue
de quelques figures de Géométrie : courage, mes amis,
"voici des pas a" hommes ; mais combien il faudrait re-
marquer de rapports dans un être, pour avoir une
certitude complète qu'il eft l'ouvrage d'un artifte ; en
quelle occafion un feul défaut de fymmétrie prou-
verait plus que toute fomme donnée de rapports ;
comment font entr'eux le tems de l'action de la cau-
fe fortuite , & les rapports obfervés dans les effets
produits ; & fi , à l'exception des oeuvres du Tout-
puiffant , il y a des cas oit le nombre des rapports ne
puiffe jamais être compenfé par celui des jets.
*Beau,Joli, (Gramme) le beau oppofé h joli, eft.
grand , noble & régulier ; on l'admire : le joli eft fin ,
<. Icat ; il plaît. Le beau dans les ouvrages d'efprit,
fuppofe de la vérité dans le fujet , de l'élévation dans
les penfées, de la juft efTe dans l'exprefîîon , de la nou-
veauté dans le tour, & de la régularité dans la con-
duite : l'éclat & la fingularité furrifent pour les rendre
Jolis. Il y a des choies qui peuvent être jolies ou belles,
telle eft la comédie ; il y en a d'autres qui ne peuvent
titre que belles, telle eft la tragédie. Il y a quelquefois
plus de mérite à avoir trouvé une jolie chofe qu'une
l\ 'le; dans ces occalions, une choie ne mérite le nom
de belle , que par l'importance de fon objet ; & une
chofe n'eft appellée jolie , que par le peu de confe-
quence du fien. On ne fait attention alors qu'aux
avantages, & l'on perd de vue la difficulté de l'inven-
tion. II eft fi vrai que le beau emporte fouvent une idée
de grand , que le même objet que nous avons appelle
beau , ne nous paraîtrait plus que joli, s'il étoit exé-
cuté en petit. L'efprit eft un Jaijeur de jolies chofes;
mais c'eft l'ame qui produit les grandes. Les traits in-
génieux ne font ordinairement que jolis ; il y a de la
beauté par-tout où l'on remarque du fentiment. Un
homme qui dit d'une belle chofe qu'elle eft belle , ne
donne pas une grande preuve de difeernement ; celui
qui dit qu'elle eft jolie , eft un fot , ou ne s'entend
pas. C'eft l'impertinent de Boileau , qui dit que le
Corneille efl joli quelquefois.
* BEAUX , adj. pris fubft. (Hijl. méd. ) Les An-
glois ont fait un fubftantif de cet adjectif François ;
& c'eft ainfî qu'ils appellent les hommes occupés de
toutes les minuties qui lémblcnt être du feul reffort
des femmes, comme les habillemens recherchés, le
goût des modes & de la parure ; ceux , en un mot , à
qui le foin important de l'extérieur fait oublier tout
le relie. Les beaux font en Angleterre , ce que nos pe-
tits-maîtres font ici; mais les petits maîtres de France
pofTedent l'efprit de fm olité , 6c l'art des bagatelles
6v des jolis riens , dans un degré bien fupéricur aux
heaux de l'Angleterre. Pour corriger un petit-maître
Anglois,il n'y aurait peut-être qu'à lui montrer un
petit-maître François : quant à nos petits-maîtresFran-
- cois , je ne crois pas que tout le phlegme de l'Angle-
terre puifTe en venir à bout.
B E A
îSt
* BE AUCAIRE , (Géog.) ville du bas Languedoc ,'
fur le bord du Rhône. Long. zz. 18. Ut. 43. 43.
BEAUCE, (Géog.) province de France entré
le Perche , l'île de France , le Bléfois & l'Orleanois.
BEAU-CHASSEUR , en Vénerie, fe dit d'un chien
qui crie bien dans la voie , & qui a toujours en chaf»
iant la queue retournée fur les reins.
* BEAUCOUP, PLUSIEURS , (Gramm.) termes
relatifs à la quantité : beaucoup a rapport à la quantité
qui le meiure ; Slplujîeurs à celle qui fe compte. Beau-
coup d'eau ; plufieurs hommes. L'oppoié de beaucoup
eft peu ; l'oppoié de plufieurs eft un. Pour qu'un état
foit bien gouverné, nous difons qu'il ne faut qu'un
*eul chef, plufieurs miniftres , beaucoup de lumière &
I d'équité.
BEAU-FILS ou BELLE-FILLE, ( Jurijpr. ) nom
d'affinité, quife dit du fils ou delà fille de quelqu'un
qui fe remarie en fécondes noces , par rapport à celui
ou celle qui époufe le veuf ou la veuve.
Beau-fils & belle-fille fe difent aufli quelquefois du
gendre & de la bru. Voye[ Gendre & Bru.
f BEAU-FRERE ou BELLE-SŒUR , autre nom
d'affinité , dont on fe fertpour exprimer l'alliance de
l'un des conjoints avec le frère ou la fœur de l'autre.
B EAU-PERE ou BELLE-MERE , eft le terme qui
correspond à ceux de beau-fils ou belle-fille , dans les
deux fens exprimés ci-deflus au mot Beau-fils (H)
* BEAUFORT , (Géog.) petite ville d'Anjou. Lon.
ij. z6.lat.4y.z6.
* Beaufort, (Géog.) ville de Savoie , fur la ri-
vière d'Oron. Long. Z4. 18. lat. 43. 40.
* Beaufort, (Géog.) petite ville de France en
Champagne , avec titre de duché. Elle porte main-
tenant le nom de Montmorenci.
BEAUJEU , (Géog.) ville de France dans le Beau-
jolois fur l'Ardicre. Long. zz. 10. lat. 46. g.
* BEAUJOLOIS, (Géog.) petit pavs de France
entre la Saône & la Loire , le Lyonnois & la Bour-
gogne. Ville-franche en eft la capitale.
* BEAULIE, (Géog.) petite ville d'Ecofle, dans
le comté de Rofs.
BEAU-LIEU, (Manège.) on dit qu'un cheval porte
en beau-lieu, lorfqu'il porte bien fa tête.
* Beau-lieu, ( Géog.) nom dedeux petites villes
de France , l'une en Touraine fur l'Indre, l'autre dans
la vicomte de Turenne , fur la Dordogne.
Beau ou beau-parer ou beau-partir, porter beau ou en
beau lieu. Foye^ Parer, Partir.
BEAU PAS, voye^xs.
BEAUX-JARRETS , voyè^ Jarret.
BEAUX MOUVEMENS, yoyel Mouvement
* BEAUHARÇHÈS, (Géog.) petite ville de Fran-
ce dans la généralité d'Aufch, élection de Rivière-
Verdun.
* BEAUMARIS, ( Gépgy) ville d'Angleterre , ca-
pitale de file d'Anglefey , fur le détroit de Menay.
Long. 13. 4. lat. 53. zo.
* BEAUMONT, (Géog.) petite ville des Pays-
Bas dans le Hainaut, entre la Sambe & la Meule ,
avec titre de comté. Long. zi. 5i. Lit. 3q. ; 2.
Beaumont-le-Roger, (Géog.) ville de haute
Normandie. Long. 18.z6.lat. 49. z.
Beaumont-le-Vicomte, (Géog.) ville du Mai-
ne , fur la Sarte. Long. iy. 40. lat" 48. 11.
Bf.aumont-sur-l'Oise , ville de l'île de France,
fur la pente d'une montagne : avec titre de comte.
Long. 1$. $8. ây. lat. 3o. 8. 38.
Il y a encore en France une petite ville de même
nom , dans le Périgord , avec titre de comté.
* BEAUNE, ( Géog.) ville de France en Bour-
gogne. Long. 22. ZO. lat. 4y. z.
•BEAUFORT, ( Géog. ) petite baie d'Afrique,
en Cafrerie. Les Porugais l'appellent la baya hermofa.
Beaufort, (Géog.) port de l'Amérique, fur la
i8i BEA
côte méridionale de l'île Efpagnole ; on l'appelle dans
le pays elpuerto hermofo.
BEAUPRÉ , f. m. {Marine.) c'eft un mât qui eft
couché lur l'éperon à la proue des vaiffeaux ; Ion pié
eft enchâffé lur !e premier pont, au-deffous du châ-
teau d'avant , avec une grande boucle de fer & deux-
chevilles auffi de fer, qui fortent entre deux ponts,
Voyci la pofition de ce mât & les dépendances, PI. I.
en Z. Voyc{ auffi la PL IF fig. première ,n°zol. Ces
figures donneront une idée plus claire de ce mot &
de ce qui le concerne, qu'un difcours plus étendu.
Le beaupré s'avance au-delà de la proue ; il eft cou-
ché fur l'étambraie , & paffe au-delà de l'éperon au-
tant qu'il eft nécefiaire pour donner du jeu à la voi-
le , afin qu'elle ne s'embarraffe point avec l'éperon ;
il eft appuyé fur l'étrave ou accotté fur un couffin ,
& couché fur l'étambraie. ( PI. IF. fig. 1. n° ZlO. )
Quelquefois il paffe entre les bittes , & fon pié eft
contre le mât de mifene , s'affermiffant ainfi l'un &
l'autre ; car fans cela on pourroit ne pas entrer le
beaupré fi avant dans le vaiffeau. Il y a au mârtle mi-
fene un gros taquet , qui entre dans les petits blocs
avec une entaiile , & qui vient finir fur ce beaupré.
Il a 1 2 pouces de large , & 4 pouces d'épais , avec un
collier de fer fur le bout.
Pour affermir encore le beaupré, on lefurlie, &
on couvre d'une peau de mouton cette liure ou fai-
iine , afin de la conferver. Cette liure ou failine tient
le beaupré avec l'aiguille de l'éperon.
Beaupré SUR poupe, terme de Marine, pour dire
qu'un vaiffeau fe met le plus près qu'il peut de l'ar-
riére d'un autre.
Pajjir fur le beaupré d'un autre vaiffeau. Foye{
Passer.
Petit beaupré, perroquet de beaupré, tourmentin ; c'eft
le mât qui eft arboré fur la hune de beaupré.
Voile de beaupré , voye^ Cl VADIERE. (Z)
BEAU-REVOIR, f. m. fe dit , en terme de Ckafe, de
l'aftion du limier , iorfqu'étant fur les voies il bande
fort fur la bête & fur le trait.
* BEAUTÉ , f. f. terme relatif; c'eft la puiffance Ou
faculté d'exciter en nous la perception de rapports
agréables. Vziàxtagréables, pourme conformer àl'ac-
ception générale & commune du terme beauté: mais
je crois que, philofophiquement parlant , tout ce qui
peut exciter en nous la perception de rapports , eft
beau. Foye^V article Beau. La beauté n'eu pas l'objet
de tous les fens. Il n'y a ni beau ni laid pour l'odorat
& le goût. Le P. André , Jéfuite , dans fon EJfaifur le
beau , joint même à ces deux fens celui du toucher :
mais je crois que fon fyftème peut être contredit en
ce point. Il me femble qu'un aveugle a des idées de
rapports , d'ordre , de fymmétrie , &: que ces notions
font entrées dans fon entendement par le toucher ,
comme dans le nôtre par la vue, moins parfaites peut-
être & moins exactes : mais cela prouve tout au plus
que les aveugles font moins affeftés du beau , que nous
autres clair-voyans. Foye{ l'article Aveugle. En un
mot , il me paroît bien hardi de prononcer que l'aveu-
gle ftatuaire qui faifoit des buftes reffemblans , n'a-
voit cependant aucune idée de beauté.
* BEAUVAIS , ( Géog. ) ville de France , capitale
du Beauvoifis, dans le gouvernement de l'île de Fran-
ce, fur leTherain. Lon. 1 o. 44. 4Z. lat. 4.6. z6. z.
* BEAUVOIR-SUR-MER , ( Géog. ) petite ville
maritime de France en Poitou , avec titre de mar-
-quifat.
* BEAUVOISIS ou BEAUVAISIS, {Géog.) petit
pays de France , dont Beauvais eft la capitale.
* BEAWDLEY , {Géog.) ville d'Angleterre , dans
la province de "SVorcefter.
* BEBRE ou CHABRE , ( Géog. ) rivière du Bour-
bonnais en France , qiu a ia fource vers Montmorii-
BEC
lon, reçoit le Val & le Teiche , paffe à la Paiiffe &
à Jaligne , & fe jette dans la Loire.
* BEBRIACUM , ( Géog. anc. & mod. ) ville voi-
fine de Crémone , dont Plutarque a fait mention dans
la vie d'Othon. Les uns prétendent que c'eft nôtre
Bina , d'autres veulent que ce foit Canetto.
BEC , f. m. ( Hifl. nat. Ornitholog. ) partie de la
tête des oiieaux, qui leur tient lieu de dents. Il y a
des oifeaux dont le bec eft dentelé à peu près comme
une fcie : mais ces fortes de dents font bien différen-
tes de celles des quadrupèdes , qui font logées dans
des alvéoles. Non-feulemeni le bec fert aux oifeaux
pour prendre leur nourriture ; mais c'eft auffi pour
eux une arme offenfive : de plus ils arrangent leurs
plumes avec leur bec , & il y en a quelques-uns qui
s'en aident comme d'un crochet pour élever les corps,
& qui fe laiffent tomber fur cette partie dure lors-
qu'ils veulent defcendre à une petite diftance ; tels
lont les perroquets.
Les becs des oifeaux font fort différens les uns des
autres par la grandeur , la figure , &c & ces différen-
ces font lî feniibles , qu'on en a fait des caractères dif-
tinûifs dans les diviiîons méthodiques des oiieaux.
Foye^ OiSEAU, & la Plan. FUI. où les principales
figures des becs des oifeaux font expofées , félon la
méthode de M. Barre , dans fon Ornithologie. (/)
* Bec , f. m. ce terme tranfporté par métaphore
de la partie de la tête des oifeaux, qui porte ce nom,
à une inimité d'autres productions naturelles & arti-
ficielles , fe dit ordinairement départies fondes, an-
térieures & pointues.
Bec a ciseaux, oifeau, Foyei Bec croisé.
Bec courbe, oifeau mieux connu lous le nom
à'avoceta. Foye^ AvOCETA.
Bec CROISÉ , f. m. loxia , ( Hifl. nat. Ornithol.'}
oifeau qui ne diffère guère du verdier ; il pefe une
once & demie : il a environ fix pouces de longueur
depuis la pointe du bec jufqu'à l'extrémité de la queue :
le bec eft noir , dur , épais , & fort ; il eft crochu en-
deffus & en-deffous ; cette figure eft particulière à
cet oifeau à l'exclufion de tout autre. Foyei la Plan-
che VIII. fig. 10. les deux pièces du bec font cour-
bées à leur extrémité en fens contraire l'une de l'au-
tre ; de forte que l'extrémité de la pièce inférieure eft
recourbée en-haut , & celle de la pièce fupérieure
l'eft en-bas. La fituation de ces pièces n'eft pas tou-
jours la même dans tous les oifeaux de cette efpece :
il y en a dont la pièce fupérieure paffe à droite en fe
croifant avec la pièce inférieure , & dans d'autres
elle fe trouve à gauche ; c'eft à caufe de cette con-
formation qu'on a donné à ces oifeaux les noms de
bec croifé & de bec à cifeaux. La mâchoire inférieure
& la langue font femblables à la mâchoire & à la
langue du pinfon ; les ouvertures des narines font
rondes , les trous des oreilles font grands , l'iris des
yeux eft de couleur de noifette , les pattes font bru-
nes , les ongles noirs ; le doigt extérieur tient au doigt
du milieu à fa naiffance. Le milieu des plumes de la
tête & du dos eft noir , & les bords font verds ; il y
a auffi fur la tété une légère teinte de couleur cen-
drée ; le croupion eft verd , le menton cendré , la.
poitrine verte , & le ventre blanc ; mais les plumes
qui fe trouvent fous la queue , font en partie noires
ou brunes. Il y a dix-huit grandes plumes dans cha-
que aile ; elles font noirâtres à l'exception des bords
extérieurs des premières plumes qui font verdâtres ;
la queue a environ deux pouces de longueur ; elle eft
compofée de douze plumes noires , dont les bords
font verdâtres.
On dit que cet oifeau change trois fois de couleur
par an; qu'il eft verd en automne , jaune enhyver,
&: rouge au printems. Gefner rapporte que les plu-
mes de la poitrine , du cou, & du ventre , prennent
d'abord une couleur rouge , qui devient enfuite jau;
BEC
ne , & qiieleur couleur varie principalement en hy-
ver. D'autres affùrent que ces oifeaux changent tous
les ans de couleur; qu'ils font tantôt jaunes, tantôt
verds , tantôt rouges ou cendrés. Ce qu'il y a de plus
vraiffemblable , c'eft que ce changement de couleur
dépend de l'âge del'oiieau, oudeslaifons de l'année.
Au rapport d'Aldrovande , le bec-croijé eft fort vora-
ce ; il aime beaucoup le chénevi ; il mange aufli des
femences de fapin , il niche fur cet arbre aux mois de
Janvier & de Février ;il ne chante que quand il gelé
ou qu'il fait très-froid , tandis que les autres oifeaux
gardent le filence ; au lieu qu'il le tait en été , tandis
que tous les autres chantent , &c. Ces derniers faits
mériteroient d'être obfervés avec attention. On dit
que d'un ou de deux coups de bec, ces oifeaux fen-
dent par le milieu les pommes de fapin , & qu'enfuite
ils en mangent les femences , ce qui caufe un grand
dommage dans les jardins. Le chant du bec-crolfé eft
afTez agréable : on trouve ces oifeaux en grande
quantité , &C pendant toute l'année en Allemagne ,
en Bavière , en Suéde , en Norvège , & il en vient
quelquefois beaucoup fur la côte occidentale de
l'Angleterre , où ils font un grand dégât dans les
vergers. Willughby , omit. Voye^ OiSEAU. (/)
GROS-BEC , f. m. Coccothrojles , ( Hijl. nat.
Ornith. ) oifeau ainfi nommé pour la grofléur de l'on
bec relativement à celle du corps. Il eft d'un tiers plus
grand que le pinfon ; fon corps eft court ; il pefe en-
viron une once trois quarts : il a fept pouces de lon-
gueur depuis la pointe du bec jufqu'au bout des on-
gles , & un pie d'envergure : la tête eft groffe en
comparaifon du corps ; le bec eft gros , dur , large à
la bafe , & très-pointu à l'extrémité ; fa longueur eft
d'environ trois quarts de pouce ; il clt de couleur de
chair , ou de couleur blanchâtre ; la pointe eft noi-
râtre , l'iris des yeux eft de couleur cendrée ; la lan-
gue femble avoir été coupée à l'extrémité comme
celle du pinfon : les pattes font d'une couleur rouge-
pâle ; les ongles font longs , fur-tout celui du doigt
du milieu ; le doigt extérieur tient à fa naiflance au
doigt du milieu : les plumes qui fe trouvent auprès
de la bafe du bec , font de couleur orangée ; celles
qui occupent l'efpace qui eft entre le bec tk. les yeux
font noires ; la même couleur eft dans les mâles fur
les plumes qui font autour de la mâchoire inférieure ;
la tête eft d'une couleur jaune rouffâtre ; le cou de
couleur cendrée ; le dos roux , à l'exception du mi-
lieu de chaque plume qui eft blanchâtre : le croupion
eft de couleur jaune cendrée ; la poitrine , & princi-
palement les côtés , font d'une couleur cendrée , lé-
gèrement teinte de rouge ; les plumes font blanchâ-
tres fous la queue ôc fous le milieu du ventre. Il y a
dix-huit grandes plumes dans les ailes, dont les neuf
ou dix premières font blanches dans le milieu feule-
ment fur les barbes intérieures : dans les fuivantes
la couleur blanche de ces barbes ne s'étend pas juf-
qu'au tuyau ; les trois dernières plumes font rouftes ;
la pointe des plumes depuis la féconde jufqu'à la di-
xième, eft de couleur de gorge de pigeon; les fix ou
fept plumes qui fuivent , ont le bord extérieur de cou-
leur cendrée. Tout le relie de ces dix-huit grandes
plumes eft de couleur brune ; la queue eft courte ;
elle n'a qu'environ deux pouces de longueur ; elle eft
compofée de douze plumes ; les barbes intérieures
de la partie fupérieure de chaque plume font blan-
ches ; les barbes extérieures font noires dans les pre-
mières plumes de chaque côté de la queue, 6i. rouf-
sâtres dans celles du milieu.
Ces oifeaux font fort communs en Italie , en Fran-
ce , en Allemagne ; ils reftent en été dans les bois &
fur les montagnes ; en hyver ils defeendent dans les
plaines ; ils carient avec beaucoup de facilité les
noyaux de ccrifes 6c d'olives ; ils vivent pour l'or-
dinaire de femence de chénevi, de panis, &c, ils man-
BEC
183
gent aufu les boutons des arbres. On dit que c'eft fur
leur fommet que ces oifeaux font leurs nids, & que
les femelles y dépofent 5 ou 6 œufs.
Il y a une efpece de gros-bec dans les Indes, fur-
tout en Virginie ; il eft à peu près de la grofleur du
merle ; fon bec eft un peu plus court que celui du
nôtre ; il a une belle crête fur la tête. Cet oifeau eft
d'une belle couleur écarlate , qui eft moins foncée
fur la tête & fur la queue que fur le refte du corps;
fon chant eft fort agréable , Willughby , Omit. Voye{
Oiseau. (/)
Bec DE GRUE, Géranium , ( Hijl. nat. bot. )
genre de plante à fleur en rofe , compofée de plu-
fleurs pétales difpofés en rond ; il s'élève du calice
un piftil qui devient dans la fuite un fruit en forme
d'aiguille , dont le noyau a cinq rainures fur fa lon-
gueur ; dans chacune de ces rainures eft attachée une
capfule terminée par une longue queue. Ces capfu-
les fe détachent ordinairement de la bafe du fruit
vers la pointe , tk fe recoquillent en-dehors : chacu-
ne renferme une femence ordinairement oblongue.
Tournefort, Injl. rei herb. Voyc^ Plante. (/)
Bec d'oie , nom que l'on a donné au dauphin , à
caufe de la reflemblance de fon bec , ou plutôt de les
mâchoires avec le bec d'une oie. Coy. Dauphin. (/)
Bec ou TUYAU de fentonnoir, en Anatomie , c'eft
une production très-mince de la fubftance des parois
de la cavité que l'on appelle entonnoir, qui s'épanouit
autour de la glande pituitaire où elle fe termine. V.
Pituitaire. (Z)
Bec ( Blafon ) on appelle becs en termes de Bla-
fon , les pendans du lambel. Voye^ La M B EL. Ils
étoient autrefois faits en pointes ou en râteaux , &
ils ont aujourd'hui la figure des goûtes qui font au-
deffous des triglyphes dans l'ordre dorique. Voye^_
Ordre dorique. (^)
B E c , f. m. ( Géog. ) nom que nous donnons à
pluiieurs pointes de terre , où deux rivières fe joi-
gnent ; ainfi nous difons le bec tfambes , de l'endroit
où la Garonne &: la Dordogne fe rencontrent.
Bec ( en terme de Bijoutiers , & autres artijlcs ) c'eft
une petite avance , telle qu'on la voit aux tabatières ,
ou de même matière que la tabatière , & loudée fur
le devant du delfus , par laquelle on ouvre la boîte en
y appuyant le doigt ; ou de matière différente & at-
tachée au même endroit. On donne le nom de bec
à un grand nombre d'autres parties acceiïoires dans
les ouvrages des artiftes.
Double Bec, forte de cuilliere à Fufage des
Ciriers. Voye^ PI. du Ciritr ,jig, ij.
BEC ( en Ecriture ) fe dit de la partie fendue de la
plume , qui fert à tracei des caractères fur le pap'er.
Il y a quatre fortes de becs : la première , où les
parties du bec font coupées d'égale longueur , & pa-
rallèlement ; la féconde , où elles (ont roupées en an-
gle ; la troilieme , où l'angle eft plu 1 ble ; la
quatrième , où le bec eft tres-menu tk cor.' i inégale-
ment. La iere eft pour l'expcdition ; la a e pour le
ftyle aifé ; la troilieme pour le ftyle régulier , & la
dernière pour les traits d'ornement.
Bec ( en terme cTEpinglier fabriquant d'aiguilles
pour les bonnetiers ) fe dit de l'extrémité pliée & re-
courbée, qui entre dans la châlïe de l'aiguille ; c eu
proprement la pointe , 011 le crochet de l'aiguille.
Foyei Bas au Métier.
Faire le bec ( en terme <F Eptngtier-AigttitleBtr} c eft
avec une tenaille arcuer le bec d'une aiguille en for-
me de demi cercle , dont la concavité eft en dehors,
tk la convexité en dedans, ou regarde le corps de
l'aiguille & la châffe.
BEC d'Ane ( chc\ les Serruriers ) c'eft une efpece
de burin à deux bileaux , qui forme le coin , mais
dont les côtes fupérieures vont en s'arrondi::
en s'évafant. Sa largeur eft ordinairement de trois
ï84 BEC
à quatre lignes au plus. Son ufage eft pour commen-
cer à ébaucher les cannelures & mortoifes qu'on pra-
tique aux grofîès barres ; le bec à! âne renflant mieux
en pareil cas que les autres burins. Il fert auffi à re-
fendre les clés : mais alors il eft très-petit & très-
menu.
Bec d'Ane ( che{ les Arquebufiers ) c eft un petit
outil d'acier dont la figure n'eft guère différente du
bec d'âne des Menuifiers : ils s'en fervent pour for-
mer des mortoifes clans le bois ; & ils en ont de tou-
tes grofleurs , depuis celle du bec d'âne des Menui-
fiers , jutqu'à la moindre groffeur.
Bec d'Ane ( chéries Menuifiers & les Charpentiers)
eft un outil d'acier , de la même forme que les pré-
cédens , & qu'ils employent au même ufage. Voye^
Menuisier. PL I. fig- J-
Ce font les Taillandiers qui font les becs d'âne.
Voyei PL II du Taillandier , fig. prem. un bec d'âne.
K K eft fa queue , / fa tige.
Les Tonneliers ont auffi des becs d'âne , & cet outil
eft commun à prefque tous les ouvriers en bois.
Les Tourneurs en ont de deux fortes , de droits &
de ronds , terminés l'un & l'autre par une efpece
particulière de bifeau, qui ne diffère que par l'ar-
rête du tranchant, qui eft perpendiculaire à la lon-
gueur de l'outil dans le droit , & qui eft arrondie en
demi-cercle dans le rond. Voye^ Biseau, & les fig.
PL I. du tour.
Bec de Canne ( terme de Cloutier ) c'eft une ef-
pece de clou à crochet qu'on nomme auffi clou à pi-
geon. Le crochet en eft plat & reffemble à un bec de
canne. Ces clous fervent à attacher les paniers à pi-
geons dans les volets. Voye^Pl. du Cloutier , fig. iy.
Bec de Canne , outil qui fert aux Menuifiers à
dégager le derrière des moulures ; il ne diffère du bec
d'âne qu'en ce qu'il eft plus foible de tige , & plus
étroit & plus allongé par le bec. Voye^ PL I. Menuifi.
figure S.
Bec DE Corbin, ou les Gentilshommes au bec
de corbin ( Hifi. mod. ) officiers de la maifon du roi ,
inftitués pour la garde de la perfonne de fa Majefté.
Ils n'étoient que cent au commencement: mais quoi-
qu'on en ait depuis doublé le nombre , on les a tou-
jours appelles les cène gentilshommes. Ils marchent
deux à deux devant le roi aux jours de cérémonie ,
portant le bec de corbin ou le faucon à la main ; &
dans un jour de bataille , ils doivent fe tenir auprès
du roi : chaque compagnie a fon capitaine , l'on lieu-
tenant , & d'autres officiers. ( G )
Bec de corbin : on donne en général, ce nom
dans les Arts , à tout ce qui eft recourbé & terminé
en pointe. Cette expreffion eft tirée du bec du cor-
beau i ainfi quand on dit, cela eft fait en bec de corbin ,
c'eft comme fi l'on difoit , cela imite la forme du bec
du corbeau.
Bec de Corbin ( Marine ) c'eft un infiniment
de fer , fait en crochet , avec lequel un calfat tire la
vieille étoupe d'une couture , ou d'entre les joints
de deux bordages. ( Z )
Bec de Corbin, Bec de Canne, Bec de
LÉSard , font des inftrumens de Chirurgie en forme
de pincettes , qui ne différent pas effentiellement du
bec de grue , dont on donnera plus bas la description.
Leur ufage eft le même , & on ne leur a donné tous
ces différens noms qu'à raifon de la différente lon-
gueur ou largeur des branches antérieures. On ne
trouve plus ces inftrumens que dans les anciens arlè-
naux de Chirurgie. Les bornes qui font preferites pour
chaque matière , ne permettent pas de donner des
deferiptions de ces inftrumens ; on peut les voir dans
le Traité d'Opérations de M. Dionis , à l'article de
l'extraction des corps étrangers. Foyei PL XXX. de
Chirurgie, fig,z.3. & 4. la confiru3ion.de quelques-unes
de ces pincettes. Voye^ TlRE-BALLE. ( X")
BEC
Bec de Corbin , ( Jardinage ) figure faite en cro-
chet ou en bec d'oifeau , qui entre dans la composi-
tion des parterres de broderie. V. Parterre. (K )
%. Bec de Corbin, (outil d'Arquebuficr) c'eft un
cifeau emmanché , comme le bec d'âne , &c. dont le
fer eft recourbé par en bas, comme un bec de cor-
beau. Le bout du bec eft plat & tres-tranchant. Les
Arquebufiers s'en fervent pour nettoyer une mor-
taiSe , &c fculpter des ornemens fur un bois de fufil.
Bec de Corbin , (terme de Chapelier) c'eft une
efpece de crochet de bois , qui fait partie de l'arçon
des Chapeliers : le bec de corbin foûtient par un bout
la corde de l'arçon , & fert à arçonner ou faire vo-
ler l'étoffe fur la claie. Voye^ la fig. 16. PL du Chap.
Bec de Gorcin, (Manège) eft un petit mor-
ceau , de fer de la largeur d'un pouce , & qui en a 3 ou
4 de long, que l'on Soude à un des fers de derrière ,
pour empêcher un cheval boiteux de marcher fur
l'autre fer de derrière. ( Z )
Bec de Grue Musqué. Voye7^ Herbe à Ro-
bert.
Bec de Grue , c'eft un infiniment dont fe fer-
vent les Chirurgiens dans leurs opérations , parti-
culièrement pour tirer des balles de plomb & au-
tres corps étrangers hors des plaies. Voye^ Tire-
balle. Le bec de grue eft une pincette compofée de
deux branches unies enfemble par jonchon paffée.
Voye^Pl. III. fig. 3. La branche qui reçoit fe nom-
me branche femelle, & on appelle branche mâle celle
qui eft reçue. La jonclion de ces deux pièces forme
le corps de l'inftrument, qui paroît au-dehors d'une
figure quarrée ; les furfaces Supérieure ck inférieure
de ce quarré ont environ cinq lignes de longueur ,
& les latérales excédent cette mefure d'une ligne :
le corps de l'inftmment fe divife en parties antérieu-
res & parties poftérieures.
Les parties poftérieures font regardées comme le
manche de l'inflrument, elles font différemment con-
tournées ; la branche mâle eft toute droite, ôc la fe-
melle eft doucement courbée dans toute fa longueur ;
ce qui l'éloigné de deux pouces ou environ de la
branche mâle , lorfque la pincette eft fermée , & aug-
mente considérablement la force de l'inflrument. Ces
branches font plattes , pour préfenter plus de Surface
à la main & aux doigts qui doivent les empoigner.
Leurs races intérieures font planes : mais l'extérieure
eft légèrement arrondie pour s'accommoder à la fi-
gure creuS'e de la main. La longueur de ces branches
eft de cinq à fix pouces ; leur épaiffeur près du corps
eft de trois lignes, & leur largeur eft de cinq : mais
en s'approchant de l'extrémité , elles diminuent d'é-
paiffeur &c augmentent de quelques lignes en largeur.
Ces pincettes font naturellement écartées par un
fimple reffort très-élaftique; c'eft une languette d'a-
cier battue à froid , afin d'en reflerrer les pores &c lui
donner par-là beaucoup d'élafticité. Ce reffort eft:
percé d'un trou à fon talon , pour y paffer un clou
qui traverfe aufli la branche mâle de la pincette , &
qui efl fi exactement rivé & limé fur la Surface Supé-
rieure qu'il n'y paroît point.
Il nous refte à examiner la partie antérieure ou le
bec de l'inflrument. Il commence à la partie antérieu-
re du corps au-delà de la jonction , par une tète ar-
rondie fur les faces Supérieure & intérieure , mais
applattie fur les côtés. Cette tête eft formée par deux
demi-cercles , dont le plus grand le trouve à la par-
tie Supérieure ou branche femelle , & l'autre à l'infé-
rieure ; ces deux cercles mis enfemble , font un trou
horifontal qu'on appelle l'ail de la pincette : mais lorf-
que l'inflniment eft ouvert , ils reflèmblent avec le
bec à une gueule béante.
Le refte du bec eft deux branches pyramidales , dont
le commencement a environ deux lignes & demie
d'épaifleur ÔC cinq lignes de large ; elles l'ont exac-
tement
BEC
tement planes en dedans , arrondies en dehors , &
Vont un peu en diminuant dans l'efpace de trois pou-
ces pour fe terminer par une pointe moufle & très-
arrondie. Ces deux lames qui forment le bec font lé-
gèrement courbées en dedans ; ce qui fait que l'inftru-
ment étant fermé , on voit un efpace entre ces deux
lames ou branches , qui devient moins confidéra-
ble à mefure qu'il approche de l'extrémité du bec ; ce
qui fait que ces branches fe touchant par leur extré-
mité , pincent avec plus d'exacf itude. Cette descrip-
tion eft extraite du traité d'injlrumens de M. de Ga-
rengeot , Chirurgien de Paris. ( Y )
BEC-DE-LlEVRE , {terme de Chirurgie.') cft une dif-
formité dans laquelle la lèvre fupérieure eft fendue
comme celle des lièvres. Cette diviflon qui arrive
auflî quelquefois à la lèvre inférieure , vient d'un vi-
ce de conformation avant la naiflance, ou par acci-
dent, comme chute, coup, incifion, &c. Le bec-de-
lievre accidentel eft ancien ou récent : l'ancien eft ce-
lui dans lequel les bords de la plaie n'ayant point
été réunis , fe font cicatrifés à part fans fe joindre :
le récent eft celui dont les bords font encore fan-
glans. Celui-ci fe guérit par le bandage unifiant , fila
plaie eft en long, ou par la future entre-coupée, fi
elle a une autre direction. Ces deux moyens de réu-
nion n'ont lieu que lorfqu'il n'y a point de déperdi-
tion de fubftance ; & dans ces cas le traitement du
bec-de-lievre accidentel & récent ne diffère point de
celui qui convient à une plaie fimple. Voye^ Plaie.
Le bec-de-lievre de naiflance, celui qui eft acciden-
tel & ancien, & celui qui eft accidentel récent, &
dans lequel il fe trouve perte de iubftance , exigent
la future entortillée, parce que dans les deux pre-
miers cas il faut rafraîchir les bords de la diviflon ,
avant de procéder à la réunion ; & que la future en-
tre-coupée n'eft point capable d'afliijettir les deux lè-
vres de la plaie, lorfqu'il y a déperdition de fub-
ftance.
Pour rafraîchir les lèvres de la diviflon d'un bec-de-
lievre de naiflance ou accidentel ancien , on fe fert des
cifeauxou du bittouri: on approche enluite les deux
plaies récentes, ayant foin de les mettre bien au ni-
veau l'une de l'autre : un aide les foûtient dans cette
fituation , en avançant avec les mains les deux joues
vers la diviflon. La peau prête aflez pour cette ap-
proximation, quelque déperdition de fubftance qu'il
y ait. Les lèvres de la plaie étant bien rapprochées,
le chirurgien polo l'extrémité du pouce & du doigt
indicateur de la main gauche, au côté droit de la di-
viflon: il prend avec le pouce & le doigt indicateur
de la main droite, une aiguille convenable, ( Voye\
Aiguille) qu'il fait entrer dans le côté gauche, à
quelques lignes delà diviflon, pour traverfer la plaie,
en approchant le plus qu'on peut de la membrane in-
terne de la lèvre, afin de procurer également la réu-
nion de toute l'épaifleur de cette partie. La pointe
de l'aiguille doit foi tir entre les deux doigts de la main
gauche , qui appuient légèrement fur la peau , &
qui la tendent au côté droit de la diviflon: la fortie
de l'aiguille doit être à la même diftance du bord droit
de la plaie , que l'on entrée l'eit du bord gauche. Pour
réunir un bec-de-lievre, il lu Ait ordinairement de met-
tre deux aiguilles : la première doit fe pafler un peu
au-deflus du bord rouge de la lèvre, & l'autre près
de l'angle fupérieur de la plaie. Lorfquc les aiguilles
font placées, on prend un fil ciré , qu'on tait tourner
Amplement deux ou trois fois autour de la première
aiguille qu'on a mile, en le faifant pafler alternati-
vement fous fa tête & fous fa pointe. Le même Al
fert à faire pareillement deux ou trois tours lous les
extrémités de l'aiguille fupérieure ; <> te les deux
bouts du Al par une rofette à cote de L'angle fupé-
rieur de la plaie : on met une petite comprefle ou une
petite boule de cire, fous la pointe de chaque aiguil-
Torne II.
BEC
185
le, pour empêcher qu'elle ne blefle; & on en met au-
tant fous les têtes pour leur fervir d'appui.
On couvre la diviflon avec un petit lambeau dé
toile, imbibé de baume vulnéraire, & on maintient
le tout avec une petite bandelette à quatre chefs >
dont le plein pofe fur l'appareil , & dont les extrémi-
tés s'appliquent au bonnet , en fe croifant de chaque
côté , de façon que le chef fupérieur croife l'infé-
rieur, & aille s'attacher latéralement au bonnet, au^
deflbus de celui-ci. On appelle ce bandage une fron-
de , il eft Amplement contentif. Quelques praticiens
le préfèrent à l'unifiant, parce qu'il eft moins fujet à
fe déranger. Je crois cependant qu'il faudrait préfé-
rer un bandage, qui, en tendant à rapprocher les
joues vers les lèvres , foulageroit beaucoup les points
de future. Voyc^ Fronde.
Pendant l'opération qui vient d'être décrite, le
malade doit être alfis fur une chaife , tk avoir la tête
appuyée fur la poitrine de l'aide Chirurgien , dont
les mains rapprochent les joues , & les pouffent l'une
contre l'autre vers la divilion.
Quelques heures après l'opération & l'application
de l'appareil, on fait faigner le malade pour préve-
nir l'inflammation. On lui défend exactement de par-
ler; on tâche d'éloigner de fa vue tout ce qui pour-
rait le déterminer à cette a&ion ou à rire; on ne lui
donne du bouillon que rarement , & dans un biberon
ou cuilliere couverte , parce que l'aclion des lèvres
nuiroit beaucoup à la réunion. L'éternuement peut
occafionner beaucoup de defordre après l'opéra-
tion du bec-de-lievre. Si un enfant fe trouve dans le
cas de cette opération , on confcille de l'empêcher
de dorrrïir une nuit , & on opère le lendemain au ma-
tin. Par ce moyen il pourra relier tranquille après
l'opération; ce ftratagème paroit pouvoir aflurer la
réunion : elle eft ordinairement faite au bout de 24
ou 36 heures; on ôte alors les aiguilles, & on con-
tinue le bandage uniffant ; on pourrait même conte-
nir les lèvres de la plaie avec des languettes de toile
couvertes'd emplâtre agglutinatif. On peut lire dans
le premier volume des Mémoires de l'Académie royale
de Chirurgie , des obiervations flngulieres de M. de la
Faye, & de plufleurs autres Académiciens, fur les becs*
de-lievre venus de naiflance , & fur diflérentes métho-
des de corriger ces difformités : on y trouvera des
moyens de remédier au déchirement qui furvient lorf-
que les points d'aiguille manquent , ù qu'il n'eft plus
poflible de pratiquer la future entortillée par le défaut
de folidité des parties qui dévoient la foûtenir. ( J")
BECASSE, f. ï.fcolopax, (Hijl. nat. Ornith. ) oi-
feau qui eft moins gros que la perdrix. Toute la par-
tie lupérieure eft bigarrée de trois couleurs, qui font
le roux, le noir & le cendré. Depuis le bec jufqu'au
milieu de la tête , les plumes font prefque toutes de
couleur ronfle mêlée de noir; la poitrine & le ventre
font de couleur cendrée , & il y a des lignes tranl ver-
fales d'un brun obfcur ; le deAbus de la queue eft
un peu jaune; le menton eft de couleur blanchâtre
mêlée de jaune : il y a une ligne noire depuis les yeux
jufqu'au bec : le derrière de la tête efl prefqu'entie-
rementnoir, avec deux ou trois bandes tranlvcrfales
de couleur de terre cuite. Il y a vingt-trois grandes
plumes dans les ailes , elles font noires , &: ont des
taches tranfverfales de couleur rouffe; les petites plu-
mes qui lont fous les ailes, ont des bandes tranlver-
fales de deux couleurs , qui font le cendré & le roux.
La queue a environ trois pouces trois lignes de lon-
gueur, elle efl compofée de douze plumes, dont les
pointes font blanches fur la face intérieure , &: de cou-
leur cendrée fur la face fupérieure ; les bords lem-
blent avoir des entailles ou des dents de couleur rouf-
fe , le relie efl noir.
Le bec a trois pouces de longueur ; il cft d'un brun
obfcur à fon extrémité, mais auprès de la tête cette
Aa
i86
BEC
couleur eft moins foncée, & tire fur la chair; la-
Partie fupérieure du bec eft un peu plus longue que la
Partie inférieure ; la langue eft tendineufe ; le palais
eft tuberculeux ; les oreilles font grandes & bien ou-
vertes ; les yeux font placés plus haut , & plus en ar-
rière que dans les autres oifeaux ; c'eft pourquoi la
bécajfe ne les blefle pas lorfqu'eJle fouille dans la terre
avec fon bec : les jambes, les pattes, les doigts font
d'un brun pâle , les ongles font noirs ; le doigt de der-
rière eft fort court , &c fon ongle eft le plus petit de
tous.
Au printems cet oifeau quitte notre pays : mais il
s'accouple auparavant. Le mâle & la femelle fe lui-
vent par tout : ils vivent dans les forêts humides , le
îong des petits ruiiïeaux & des haies. On dit que dans
les jours nébuleux , ils ne ceflent d'aller & de venir
en volant: leurs œufs font longs, de couleur rou-
geâtre , pâles & bigarrés d'ondes ôc de taches bien
foncées.
La femelle eft un peu plus grande , & pefe plus que
le mâle , &c fa couleur eft plus foncée. Ils ont environ
treize pouces de longueur depuis la pointe du bec ,
jufqu'à l'extrémité de la queue ; l'envergure eft de
deux pies : la chair de la becaffe eft excellente , la cuil-
fe eft le meilleur morceau. Willughby , Ornithologie.
Voyei Oiseau. (/)
* On prend les bécajfes à la pentiere ; fi vous avez
des bois taillis, & proche de-là une haute futaie, cou-
pez-en quelques arbres dans le milieu ; faites-y une
clairière ou pafTée de fept à huit toiles ; & fermez vo-
tre paftee par la pentiere , comme vous la voyez dans
la figure de nos planches de chaffe. Ebranchez deux-
arbres A B ; ajoûtez-y deux perches C D , CD ; ayez
des boucles de verre , comme elles font n° 3 . ces bou-
cles ferviront à fufpendre votre filet aux lieux D,D ;
attachez les extrémités E E de votre filet, aux pies
des arbres A , £ , par deux cordes lâches ; liez des
cordes F, F, les deux autres extrémités G , G; faites
paiTer ces cordes dans vos boucles de verre ; qu'elles
le rendent l'une & l'autre en un même lieu R , à fept
ou huit toiles de la pentiere ; faites-là une loge , avec
cinq ou fix branches d'arbres ; que cette loge foit ou-
verte vers le filet. Quand une bécajje le viendra jet-
ter dans la pentiere , le chafTeur caché lâchera les ex-
trémités R des cordes ; alors le filet tombera , & la
bécajfe n'aura pas le tems de s'en debarralîer. Les bé-
cajjes ne volent prelque jamais de jour; elles reftent
dans les bois, pour n'en fortir que le loir à l'appro-
che de la nuit.
On peut aulîi les prendre aux lacets dans les bois ,
ou le long des ruifleaux ; ces lacets n'ont rien de par-
ticulier.
Les bécajfes fe mangent rôties , fans être vuidées :
quand on en veut faire un ragoût, on ne les lailîe
cuire à la broche qu'à moitié ; on les dépecé ; on les
met dans une caflerole avec du vin , des câpres , des
champignons , du fel &c du poivre , & on les lailîe
bouillir jufqu'à ce que la cuiffon foit achevée. Le fal-
mi fe fait prelque de la même manière ; on ajoute feu-
lement des truies & des anchois, & on lie la faufle
avec le foie & les entrailles de la bécajje.
La bécajfe confrdérée comme aliment , palTe pour
être nourriflante , reftaurante & fortifiante : mais elle
ne fe digère pas fi aifément que les oifeaux dont la
chair eft blanche ; fes fels font fort exaltés par fon
exercice continuel, ce qui fait que fa chair fait du
bien à ceux qui regorgent d'acides. Ses cendres paf-
fent pour lithontriptiques. La bécajpne fe digère moins
bien , elle a au refte les mêmes propriétés que la pré-
cédente. Poyei BÉCASSINE. (N)
BÉCASSE DE MER , hcematopus , (Hifl. nat. Ornith.')
oifeau de la grofleur de la pie ou de la corneille ;
cette reiîemblance de grofleur jointe à celle des cou-
leurs , a fait donner à cet oifeau le nom de pie de mer.
BEC
Il pefe dix-huit onces, il a dix-huit pouces de lon-
gueur depuis la pointe du bec jufqu'à l'extrémité de
la queue ou des pattes.
Le bec eft droit , long de trois pouces, applati fur
les côtés, terminé en pointe, &c de couleur rouge :
dans une autre bécajje de mer , qui étoit peut-être plus
jeune que celle qui a fervi à cette delcription, le bec
étoit noirâtre depuis la pointe jufqu'au milieu de fa
longueur. La partie fupérieure du bec eft un peu plus
longue que l'inférieure ; l'iris des yeux ôc les tarfes
des paupières font d'un beau rouge ; dans un autre
ils étoient de couleur de noifette : les pies lont rou-
ges, cet oileau n'a point de doigts de derrière , & le
doigt extérieur tient au doigt du milieu par une mem-
brane. On a vu des oifeaux de cette elpece , qui
avoient les pattes d'un brun pâle , peut-être étoient-
ils jeunes. Les ongles font noirs , de même que la tê-
te, le cou, la gorge, julqu'au milieu de la poitrine,
& le dos. Le refte de la poitrine , le ventre &c le crou-
pion font blancs. Il y avoit dans une autre bécajje de
mer, une grande tache blanche fous le menton, &
une autre petite fous les yeux : la queue eft en par-
tie noire & en partie blanche : la première des gran-
des plumes de l'aile eft noire, à l'exception du bord
intérieur qui eft blanc : dans les autres plumes , l'ef-
pace qu'occupe le blanc , augmente de plus en plus
jufqu'à la vingtième qui eft entièrement blanche, de
même que les trois fuivantes ; mais depuis la vingt-'
troifieme , la couleur noire reparoît fur les plumes
qui fuivent. Les petites plumes de l'aile qui recou-
vrent les grandes du milieu , font blanches , ce qui
forme un trait blanc tranlverlal fur l'aile.
On trouve dans l'eftomac de la bécajfe de mer des
patelles entières , ce qui prouve qu'elle fait la prin-
cipale nourriture de ce coquillage. On voit fréquem-
ment cet oifeau fur les côtes occidentales de l'An-
gleterre ; fa chair eft noire 6c dure. "SVillughby , Omit.
Voyc{ Oiseau. (/)
BÉC ASSE,Jcolopax,(HiJt. nat. Ichthiolog.') poiflbn
de mer. Il a été ainfi nommé , parce que Ion bec eft
long comme celui de l'oifeau appelle bécajje. On lui a
aulîi donné le nom d' 'éléphant , par une comparaifon
plus éloignée que l'on a faite du bec de ce poiflbn
avec la trompe de l'éléphant. Ce poiflbn a le corps
rond , de couleur rouge , couvert d'écaillés ron-
des: il y a auprès de la queue un grand aiguilion
garni de dents comme une lcie , du côté de la queue
qui eft menue. Ce poiflbn eft petrt. Rondelet. Koye^
Poisson & Becune. (/)
BÉCASSE , eft un infiniment dont les Vanniers fe
lervent pour renverger leurs ouvrages de clômre.
Voye{ Renverger. Cet outil n'eft autre choie qu'u-
ne verge de fer couibée en arc de cercle, dont le
bout leroit un peu prolongé en ligne droite : l'autre
bout iert de tige à la partie coudée , & fe termine par
une queue qui s'emmanche dans un morceau de bois.
Voye^ la Planche du Vannier.
BÉCASSINE , f. f. gallinago minor , ( Hifl. nat.
Ornith. ) oileau qui pelé environ quatre onces : il a
un pié de longueur depuis la pointe du bec jufqu'à
l'extrémité des pattes , & feulement onze pouces , fi
on ne prend la longueur que jufqu'au bout de la
queue ; l'envergure eft de fept pouces.
Une bande blanche mêlée de roux , occupe le mi-
lieu de la tête, & de chaque côté on voit une tache
de couleur mêlée de brun & de roux. Il y a au-def-
fus des yeux une autre bande , de la même couleur
que celle du milieu de la tête, & une autre entre les
yeux & le bec , qui eft de couleur brune. La couleur
des plumes qui font au-deflbus du bec eft L'anche ;
le cou eft de couleur brune mêlée de roux ; la poitri-
ne & le ventre font prelque entièrement blancs ; les
grandes plumes qui lortent de l'épaule , s'étendent
prelque jufqu'à la queue ; leurs barbes intérieures
BEC
font noires & un peu luifantes ; la pointe de ces plu-
mes eft de couleur roulle , 6c les barbes extérieures
font d'un roux pâle , ce qui forme alternativement
des bandes de différentes couleurs. Les plumes qui
couvrent le clos font de couleur brune ; elles ont des
lignes tranlverfales de couleur blanchâtre. Les plu-
mes qui couvrent la queue font rouffes , avec des li-
gnes noires tranfvcrlales. Les plus grandes des plu-
mes qui recouvrent les ailes lont de couleur brune,
à l'exception de la pointe qui eft blanche ; & les pe-
tites font panachées de noir & de roux pâle. Il y a
dans chaque aile vingt -quatre grandes plumes ; le
bord extérieur de la première eft blanc preique jui-
qu'à la pointe ; l'extrémité de celles qui fuivent eft
un peu blanchâtre , mais cette couleur eft beaucoup
plus claire lur les plumes qui le trouvent depuis la
onzième jufqu'à la vingt-unième ; au relie toutes ces
plumes font rouffes : enfin les dernières ont des li-
gnes tranlverfales , dont les unes font noires , & les
autres de couleur blanche mêlée de roux.
La queue eft compofée de douze plumes : elle pa-
roît très -courte , parce qu'elle eft recouverte pref-
cju'en entier par les plumes qui l'environnent. La
pointe de fes plumes extérieures eft blanche , & le
refte eft traverlé par des bandes de couleur brune ,
& des bandes de couleur pâle pofées alternative-
ment ; leur bord extérieur eft d'un blanc plus clair ;
les plumes qui fuivent de chaque côté jufqu'à celles
du milieu font preique de la même couleur , excepté
que la pointe eft moins blanche , que le brun appro-
che plus du noir, & que la bande blanche du haut eft
un peu rougeâtre. La pointe des plumes du milieu eft
blanchâtre ; au-deffus du blanc il y a une bande bru-
ne qui eft fuivie d'une tache rougeâtre avec des ta-
ches brunes dans le milieu: le refte de la plume eft
preique entièrement noir , à l'exception d'une ou
deux taches rougeâtres qui font fur les bords exté-
rieurs. Le bec de la bécaffîne a près de trois pouces de
longueur ; il eft noir à la pointe ; il eft un peu applati
& parfemé de petits grains. La langue eft pointue.
L'iris des yeux eft couleur de noilette. Les pattes
font d'un verd pâle. Les ongles font noirs. Les doigts
font longs & féparés dès leur naiffance ; celui de der-
rière eft très-petit.
Ces oifeauxfont paffagers, au moins pour la plupart.
Ils nichent dans les marais. La femelle fait d'une feule
ponte quatre ou cinq œufs. La bccajjine vit dans les
lieux marécageux 6c le long des petits ruiffeaux. Sa
chair eft très-tendre & d'un goût excellent. Villugh-
by, Omit. Voye{ OlSEAU. (/)
* On apprête les bkaftines comme les bécaftes ,
quand on les veut manger rôties : mais pour les met-
tre en ragoût , on les fend en deux fans les vuider ;
on les paffe à la poelle au lard fondu , avec poivre &
ciboule : on y fait enfuite dilliller du jus de champi-
gnon , avec un peu de celui de citron ; & le ragoût
eft fait , quand les blca.ftft.nes font achevées de cuire ;
car il faut obferver qu'elles doivent être à moitié rô-
ties avant que d'être fendues en deux.
* BECCABUNGA , ( Hift. nat. bot. ) Il y a deux
plantes de ce nom ; le grand & le petit beccabunga. Le
grand a la racine iibreule , blanche & rampante; la
tige couchée à terre, cylindrique, fongueufe, rougeâ-
tre & branchue; Cv la feuille rangée par paires op-
pofées fur les nœuds, arrondie , longue d'un pouce 6c
plus , liffe , luifante , épaiffe , crénelée , & d'un verd
fonce. De l'aiffelle de la feuille il fort des pédicu-
les longs d'un palme ou d'un palme Cv demi , chargés
de fleurs difpofées en épi , d'une foule pièce , en ro-
lètte bleue, partagée en quatre parties percées dans
le centre , à deux étamines lurmontees d'un fomxnet
bleuâtre , avec un piftil qui le change en un fruit
membraneux de la forme de cœur applati , long de
-BEC
187
trois lignes, divifé en loges qui contiennent plufieurs
petites graines applaties.
Le petit beccabunga ne diffère du grand qu'en ce
que l'a tige , fa feuille & fa fleur lont plus petites.
On les trouve, par l'analyle chimique , compofés
d'un fol effentiel talé , vitriolique , doux 6c tempéré ,
peu diffèrent du fol admirable de Giauber, délayé
dans beaucoup de phlegme , & enveloppé d'une allez
grande portion d'huile.
On leur attribue la vertu d'échauffer , d'exciter les
urines & les règles , de brifer le calcul , & de hâter la
fortie du fœtus : on s'en fert encore pour le feorbut ;
mais on ne l'ordonne qu'aux malades d'un tempéra-
ment lèc 6c chaud.
BECCADE , f. f. (Fauconnerie. ) Les fauconniers
diient faire prendre la beccade à 1 oifeau , pour dire lui
donner à manger.
BEC-FIGUE , f. m.ficedula , ( Hift. nat. Ornith. )
beccafigo à Florence ; très-petit oifoau qui eft à peine
de la groffeur de la linote ordinaire. Le corps eft
court. La tête , le dos , les ailes 6c la queue , font de
couleur cendrée ou de feuille morte mêlée de verd;
& dans quelques - uns de ces oifeaux , elle eft d'un
brun verdâtre. Les grandes plumes des ailes font de
couleur brune ou gris de fouris ; leurs tuyaux font
noirs ; les bords extérieurs font verdâtres. La queue
a environ deux pouces de longueur ; elle eft brune.
Le ventre eft blanc ou de couleur argentée ; celle de
la poitrine eft un peu plus foncée , avec quelque
teinte de jaune. Le bec eft court ; la pièce fupérieure
eft noire , & l'inférieure bleuâtre. Le dedans de la
bouche eft rouge. Les pattes font courtes , de cou-
leur bleuâtre , 6c quelquefois plombée.
Il eft allez difficile de diftinguer cet oifeau par le
moyen de la delcription , parce qu'il n'y a rien dé
tranché dans fes couleurs : auffi y a t-il plufieurs for-
tes d'oifeaux que l'on rapporte aux mêmes noms de
bec-figue & de ficedula. Willughby, Omit. Voy. TÈTE
noire. Le bec-figue eft excellent à manger : il fe nour-
rit de figues , de raifin , &c. F6ye[ Oiseau. ( /)
* Pour l'apprêter , on le plume ; on lui coupe la
tête 6c les pies ; on le rôtit à la broche : à mefure
qu'il cuit on le faupoudre de croûte de pain râpée
6c mêlée de fel , & on le mange au verjus de grain 6c
au poivre blanc.
BECHARN, oifeau. Pbyrç Flamand. (/)
BECHE , infecte. Voyei Lisette. (/)
Bêche , f. f. (Jard.) eft un outil de fer tranchant ;
large , applati , d'environ un pic de long fur huit à
neuf pouces de large, 6c emmanché d'un bâton de
trois pies de long. Il "eft à l'ufage des Jardiniers , qui
s'en fervent pour labourer la terre. . . . ( K ) Voye^
PI. du Jardinier.
Les Artilleurs ont aufti leur bêche ; elle leur fert à
préparer les endroits où des batteries doivent être
placées. Voy e^ Art milit. PI. XVII. (Q)
Ce font les Taillandiers qui les font. Il y en a de
rondes & de quarrées. Les rondes entrent plus faci-
lement dans la terre; les quarrées leparent des mor-
ceaux de terre plus étendus. Pour s'en fervir, on
les tient à la main ; on les place dans l'endroit qu'on
veut cultiver, 6c on les fait entrer en pouffant avec
le manche , & en aidant cette action avec le pié qu'on
appuie à la partie fupérieure de la bêche , à côté de la
douille où le manche eft reçu. Voye^ PI. VII. du Tail-
landier , en B 6c en D , une bêche ronde 6c une beche
quarrée.
* Beche , (Céog.) rivière de Hongrie , qui le jette
dans le Danube près de Belgrade.
BECHET,efpece de chameau. /". Chameau. (/)
* BECHIN, (Géog.) petite % ilie de Bohême, du
cercle de même nom. Long. 32. J3. lat. 4p. 14.
* BECHIQUES, adj. nom qu'on donne, en Me*
A a ij
i88
BEC
dccine , à tous les remèdes indiqués dans la toux' : il
vient de 0af , toux.
Quincy donne , dans fa Pharmacopée , la prépara-
tion du trochifque fuivant, que M. James dit préfé-
rable à tout autre , & falu taire dans toutes fortes de
toux. Prenez des quatre grandes femences froides
écolTées , de chacune deux onces ; graine de pavot
blanc , une once ; mettez le tout dans un mortier de
marbre ; verfez deffus une quantité fuffifante de jus
de régliffe délayé dans de l'eau-roie , & de la confil-
tance d'un firop : faites une pulpe douce ; parlez cette
pulpe par un tamis,après y avoir ajouté quatre ou cinq
onces de pulpe de régliffe : ajoutez enfuite ftorax
diffous & paffé , une once ; poudre d'iris , trois on-
ces ; graine d'anis , une once ; fenouil , une once ;
fucre fin , deux livres & demie : mettez le tout en
une pâte , & faites-en des tablettes , dont vous pour-
rez ulér à diferétion.
* BECHIRES , f. m. pi. (Géog. ) peuples de Scy-
thie , dont Pline a fait mention.
BECK, (Commerce.} c'eft un poids d'ufage en An-
gleterre pour peler des marchandées lèches. Lebeck
tient deux gallons ou feize livres d'Angleterre. Voye^
Gallon.
* BECKEN ou BECKUM, ( Géog.) petite ville
de l'évêché de Munfter en Veftphalie.
* BECKENRIEDT , (Géog.) ville de Suiffe dans
le canton d'Underwaldt.
BECQUÉ , adj. en termes de Blafon, fe dit des oi-
leaux dont le bec eft d'im autre émail que le corps.
Guiffray Vachat en Bugey , d'afur au griffon d'or ,
becqué d'argent. ( V)
BECQUILLON, f. m. en Fauconnerie, te dit du bec
des oifeaux de proie , lorfqu'ils font encore jeunes.
Cetoifeau n'a encore que le becquillon.
* BECSANGIL , ( Géog. ) province d'Afie , qui
fait partie de la Natolie , bornée au feptentrion par
la mer Noire , à l'occident par la mer de Marmora
& l'Archipel , au midi par la Natolie propre , & à
l'occident par la province de Bolli.
BECTACHIS , f. m. pi. (Hijl. mod.) efpece de re-
ligieux chez les Turcs , ainfi nommés de Haji Beâak
leur fondateur , fameux par de prétendus miracles
& des prophéties. Il vivoit fous le règne d'Amurat I.
qui lui envoya , dit-on , la nouvelle milice qu'il vou-
loit former d'enfans enlevés aux Chrétiens , afin qu'il
la délignât par un nom ; & il nomma ces foldats Ja-
niffaires : foit en mémoire de cet événement , loit par-
ce que lesBccfachis ne font pas fort réguliers fur l'heu-
re de la prière , les Janiffaires trouvent leur dévotion
fort commode , & font très-attachés à leur fe£te.
Les Beclachis font habillés de blanc , & portent des
turbans de laine , dont la leffe eft tortillée comme une
corde. Ils croyent honorer lingulierement l'unité de
Dieu en crian hâ, c'eft-à-dire qu'il vive. Ces moines
fe marient , demeurent dans les villes & dans les
bourgs : mais par leur inltitut ils font obligés de voya-
ger dans les pays éloignés. Ils doivent à tous ceux
qu'ils rencontrent le ga^el , efpece de chant affeftueux
qui par allégorie eft appliqué à l'amour divin ; & Yel-
ma , qui eft une invocation d'un des noms de Dieu
qui font chez eux au nombre de mille &c un. Guer ,
mœurs des Turcs , tom. I.
Ricaut , dans Ion ouvrage de l'empire Ottoman ,
fait mention d'une autre fefte Mahométane , fuivie
par quelques Janiffaires , & nommée Beclafchijles de
Beûas , aga des Janiffaires , au commencement du
règne de Mahomet IV. Ou les nomme autrement
Zcratites , & le vulgaire les appelle Munfconduren ,
c'eft - à - dire ceux qui éteignent la chandelle ; parce
qu'on les aceufe d'avoir indifféremment commerce
avec toutes fortes de perfonnes dans leurs aflém-
blées , & d'y permettre Fincefte à la faveur de l'obf-
curité. Au refte ils obfervent la loi de Mahomet pour
B E D
ce qui régarde le culte divin : mais ils penfent qu'il
n'eft pas permis de donner des attributs à Dieu , ni
de dire qu'il eft grand , qu'il eft jufte ; parce qu'il eft
un être très - limple , & que nos idées n'approchent
point de la fimplicité de fon effence. Ce mélange
monftrueux de fpiritualité rafinée & de libertinage ,
fait que cette fecte eft très-peu fuivie. ( G)
* BECUIBA NUX , noix de Becmba , ( Hijl. nat.
bot. ) efpece de noix brune , commune au Brélil , de
la groffeur d'une noix muicade , pleine d'une aman-
de huileufe , couveite d'une coque ligneufe. On met
cette amande au rang des balfamiques.
BECUNE ou BEKUNE , f. f. ( Hijl. nat. Ichthiol.)
poiffon de mer auquel on a auffi donné le nom de
brochet de mer , parce qu'il reffemble à notre brochet ,
& que fa chair en a le goût. Il y a des bécunes que
l'on appelle bécajfes de mer, parce qu'elles ont le bec
allongé. On pêche la bécune fur la côte d'Or en Gui-
née , fur les rivages avec de grands filets , dans les
mois d'Oftobre & de Novembre. Celle que l'on nom-
me bécajfe de mer fe trouve fur les côtes de l'Améri-
que ; elle a jufqu'à huit pies de longueur. Ce poif-
fon eft fort dangereux par fa morfure fur- tout , parce
qu'd mord hardiment fans s'épouvanter du bruit , ni
des mouvemens que l'on peut faire pour l'écarter.
On dit que fa chair eft fouvent un poilon auffi dan-
gereux que l'arfenic , & on prétend que c'eft lorf-
que la bécune s'eft nourrie de mançeuille fur les côtes
des îles de l'Amérique. ( / )
* BECZAU , ( Géog.) ville de Bohême fur la ri-
vière deTopel.
BECZKÀ , f. f . ( Commerce. ) mefure dont on fe
fert en Pologne pour les marchandées lèches & hu-
mides. La bec^ka de Vilna tient 3 50 livres de grain,
& celle de Smolensko 325 livres.
BEDA , ( Métallurg. ) on nomme ainli au Potoli
une mine d'or ou d'argent, lorfqu'elle eft mêlée de
fer. Voye{ Mine. (M)
BECHOTTER , (Jardinage.) Voyei BEQUILLER.
* BED ARIEUX , ( Géog. ) ou BEC D'ARIEUX ,
ville de France , dans le Languedoc , au diocele de
Beziers , fur la rivière d'Obe. Long. zo. 64. lat. 43.
39-
* BED AS , ( Géog. & Hijl. mod. ) peuples d'Afie ,
dans l'ile de Ceylan. Ils habitent une grande forêt au-
près de la mer, au nord-eft de l'île. Ce font des fau-
vages blancs , fort adroits à tirer de l'arc. Ils apprê-
tent leur viande avec du miel ; ils la mettent avec
cet affaifonnement dans un trou d'arbre , bouché d'un
tampon, où ils la laiffent pendant un an; après quoi,
ils l'en retirent & la mangent. Il y a beaucoup d'abeil-
les dans leurs forêts ; ils n'ont aucune demeure fixe ;
ils errent , habitant tantôt un lieu, tantôt un autre.
* BEDBUR , ( Géog. ) petite ville du duché de
Juliers.
BEDEAU , f. m. ( Hijl. mod. ) bas officier , fer-
gent , qui fomme les perlonnes de paroître ou de ré-
pondre.
Bedeau , fe dit encore d'un officier fubalterne
dans les univerfités , dont la fonction eft de marcher
devant le recteur & les autres principaux , avec une
maffe , dans toutes les cérémonies publiques.
Les uns difent que bedelli vient par corruption de
pedelli , parce que les bedeaux lervent & courent à
pié ; les autres font dériver ce nom de pedo feu
baculo , parce qu'ils portent une baguette ; ils for-
ment pedellus de pedurn, efpece de baguette , qui eft
leur fymbole ; & de pedellus , ils font le nom bedel-
lus. Il en eft qui s'imaginent en avoir trouvé l'éty-
mologie dans l'Hébreu bedal , ordonner , ranger , dif-
pofer. Spelman , Voffius , & Somner , dérivent be-
deau du Saxon bidel, crieut public ; c'eft dans le mê-
me l'ens que certains anciens manulcrits Saxons, nom-
ment les évêques bedeaux de Dieu , Dei bedalli.
B E D
Le traducteur du nouveau Teftament Saxon rend
exaclor , par bydele ; & ce mot eu" employé dans les
lois d'Ecolfe , pour fignifier la même choie.
Dans les églilc'j 6c paroiffes, on nomme bedeaux de
bas officiers laies , vêtus de longue robes de drap
rouge ou bleu , portans fur la manche gauche une
plaque d'argent ou un chifre en broderie, qui repré-
sente l'image où le nom du patron de cette églile ; ils
ont à la main droite une verge ou baleine garnie de
viroles & de plaques d'argent , précèdent le clergé
dans les cérémonies , & fervent à maintenir le bon
ordre pendant l'office , en chalfant les mendians , les
chiens , &c (G)
*BEDEGUAR, ( ffift. nat. & mat. med. ) nom
que quelques auteurs qui ont écrit de la matière mé-
dicale , ont donné aux excroilfanccs fpongieufes du
laurier fauvage. On dit que les cendres du bedeguar
font bonnes dans la gravelle 6c dans la dyfurie , 6c
qu'elles font dormir , li on en tient fous l'oreiller.
* BEDER , (Géog ) ville d'Afie , dans les états du
Mogol, capitale des Talingas. Long. <)5. 10. Lat. 16.
60.
* BEDESE ou Romo , ( Géog. ) rivière d'Italie ,
qui a la lource dans la Tofcane , entre la Romagne,
arrole Forli , prend le nom à' Acquedatto , 6c fe jette
dans le golfe de Venife , au-delfus de Ravenne.
* BEDFORD , ( Géog. ) ville d'Angleterre , dans
la province de même nom, avec titre de duché fur
l'Ouie. Long. ij. lac. Sz. 8.
* BEDFORDSHIRE , ( Géog. ) petite province
d'Angleterre, dont Bedford eft la capitale.
* BEDIZ-VELEZ , ou BELZ , ( Géog. anc. &
mod. ) ville d'Afrique , au royaume de Fez , fur la
côte de la Méditerranée , avec port 6c château. On
la prend pour l'ancienne Acrath.
* BEDOUINS , L m. pi. (Géog. & Hift. mod.) peu-
ples d'Arabie, qui vivent toujours dans les deferts &
fous des tentes. Ils ne font fournis qu'aux émirs leurs
princes , ou aux cheiks , autres feigneurs fubalternes.
Ils fe prétendent defeendus d'Ifmaél. Celui d'entre
leurs fouverains , qui a le plus d'autorité , habite le
deiert , qui eft entre le mont Sinaï 6c la Mecque- Les
Turcs lui payent un tribut annuel , pour la îîireté des
caravanes. Il y a des Bédouins , dans la Syrie , la
Paleftine , l'Egypte & les autres contrées d'Afie &
d'Afrique. Ils font Mahométans, ils n'en traitent pas
plus mal les Chrétiens. Ils font naturellement gra-
ves , férieux , 6c modeftes. Ils font bon accueil à l'é-
tranger ; ils parlent peu , ne médifent point , & ne
rient jamais ; ils vivent en grande union. Mais fi un
homme en tue un autre , l'amitié eft rompue entre
les familles , 6c la haine eft irréconciliable. La barbe
eft en grande vénération parmi eux ; c'eft une infa-
mie que de la rafer : ils n'ont point de gens de jufti--
ce. L'émir , le cheik , ou le premier venu termine
leur différend : ils ont des chevaux & des efclaves.
Ils font alfez peu de cas de leur généalogie ; pour
celle de leurs chevaux , c'eft toute autre chofe. Ils
en ont de trois efpeces ; des nobles , des méfalliés &
des roturiers. Ils n'ont ni médecins, ni apothicaires.
Ils ont tant d'averfion pour les lavemens , qu'ils ai-
meraient mieux mourir que d'uler de ce remède. Ils
font fecs, robuftes & infatigables. Leurs femmes font
belles , bien faites & tort blanches. Voyelle Diclionn.
géog. de M. de Vofgien. A juger de ces peuples fur ce
qu'on nous en raconte, il eft à prelumerque n'ayant
ni médecins , ni jurifconfultes, ils n'ont guère d'autres
lois que celles de l'équité naturelle , c\: guère d'au-
tres maladies que la vieilleffe.
BEEL-PHEGOR ou BEL-PEHOR , f. m. (MyÂ.)
fauffe divinité que les Israélites adoraient à l'imita-
tion des Moabites , félon le récit que Moyfe en fait au
ch.xxv des nombres. Selden croit que c'étoit un faux
dieu des Moabites «Si des Kudianites , &. le même qui
BEE
189
eft feulement nommé peor au chapitre qui vient d'être
cite , 6c au xxxj du même livre , comme encore au.
xxij deJofué. Une lettre hébraïque y , dont la pronon-
tiation eft difficile , & qui fe change lbuvent en g
dans les autres langues , a fait auflï qu'on l'a nommé
phegor. Origene , Homel. xx fur Le livre des nombres ,
dit qu'il n'a rien pu trouver dans les écrits des Hé-
breux , touchant cette idole de faleté & d'ordure.
Beel-phegor , dit-il , eft le nom d'une idole qui efi adorée
dans le pays de Madian , principalement par les femmes.
Le peuple d"Ifrael fe dévoua à (on fervice , & fut
initié dans fes myfteres. Origene ajoute , que Beel-
pliegor marque une efpece de turpitude & de vilainie.
Le rabbin Salomon de Lunel , autrement Jarchi , dans
fon commentaire fur le xxv des nombres , croit que
ce nom lignifie faire fes ordures devant quelqu'un ,
& que les idolâtres faifoient cette falle aefion de-
vant Beel-phegor. Le célèbre Moyfe , fils de Maimon ,
approche de Ion fentiment , & l'explique un peu plus
au long dans fon livre intitulé More Neuockim, partie J.
ch. xlvj. que Buxtorf le fils a traduit en Latin. On a
encore allégué d'autres railons du nom de cette ido-
le. Quelques-uns croyent qu'elle s'appelloit ainli , à
cauie qu'elle avoit la bouche ouverte. Philon juif eft
de cette opinion ; & il femble , qu'au lieu de Beel-phe-
gor , il avoit lu Baal-piaghor, ce qui peut fignifier la
bouche ou l'ouverture fupérieure de la peau. Saint
Jérôme fur U 4 & le f> du prophète Ofée , & au L. livre
contre Jovinien , chapitre xi/, croit que le beel-phegor
des Moabites & des Madianites eft le même que le
Priape des Grecs & des Latins. Ifidore eft de cette
opinion au Vil 1. livre des origines ; & Rufin au 111.
livre fur Ofée. Ces auteurs prouvent par les endroits
de l'écriture fainte , où il eft parlé des fornications
des Moabites & des Hébreux , que ces deux idoles ,
Beel-phegor 6c Priape, étoient honorées avec d'infâmes
cérémonies. Ils allèguent auffi le chapitre ix. du pro-
phète Ofée , oii ceux qui fervoient Beel-phegor font ac-
culés de commettre des impudicités , & de faire des
chofes abominables. Le père Kircher fuit aufli le fen-
timent de S. Jérôme , & dit que cette infâme idolâ-
trie étoit venue d'Egypte , où les Hébreux avoient
vu les déteftables cérémonies d'Ofiris. Scaiiger con-
jecture que le nom de phegor fut donné en dérifion
au dieu des Moabites, qui s'appelloit Baal-kécm , le
dieu du tonnerre , que les Hébreux appellerent par
mépris le dieu du pet, comme ils changèrent le nom
du dieu d'Accaron, Beel^ibub , qui fignifie le dieu des
mouches , en celui de beel^ebul, dieu des excrémens ; 6c
comme ils donnèrent à Bethel, où étoient les veaux
d'or de Jéroboam , le nom de beth-aven, maifon d'ini-
quité. Voffius, après S. Jérôme, croit que phegor eu.
le dieu Priape ; d'autres fe perfuadent que cette ido-
le reçut fon nom de quelque prince qui fut mis an
nombre des dieux , ou de quelque montagne de même
nom , car il y avoit dans le pays de Moab une mon-
tagne qui s'appelloit phegor ; & l'on croit que baal y
avoit un temple, où on lui offrait des facrifices. Ba-
lac , dit Moyfe , nomb. chap. xxiij. verfetz8 , condui-
Jit Balaam au fommet de Phegor, qui regarde vis-à-vis du
de/ert de Jefimon. Theodoret , fur lepfeaume cv , fait ve-
nir de-là le nom de beel-phegor, & Suidas en donne fié-
tymologie en ces termes : Beel , ceft Saturne ; Phegor
le lieu ou il étoit adoré ; & de ces deux noms , a été formé
celui de Beel-phegor : car , comme Jupiter a été appel-
lé Olympien & Mercure Cyllenien , à caufe des mon-
tagnes de Thelfalie & d'Arcadie , où ils étoient ado-
rés , il y a apparence que Baal étoit appelle ^f^-
phegor , à caufe du mont Phegor, où on lui facrilioit.
Il eft fait mention au ch. xxxjv du Dtuteronomc de la
maifon de phegor , ou de bceth-phegor, qui etoit dans le
pays de Moab , auprès de la vallée dans laquelle Moy-
fe fut enfeveli. Les noms de bethdagon, de beth she-
mesh , &c. femblent eue des preuves que Beel-phegor
1,90
BEE
fe peut prendre là pour la montagne où étoit le tem-
ple de l'idole; car les Hébreux appellent un temple
betk , c'eft-à-dire , mai/on. Les Moabites offraient les
facrifices à Beel-phegor, dont il eft parlé dans les Nom-
bres , chap. xxv. ver/ht z. Les filles de Moab invitèrent
les Ifraélites à leurs facrifîces , ils mangèrent , & adorè-
rent leurs dieux , & Ifrael fut invité aux myferes de Beel-
phtaor. Et dans le pleaume cv. ils furent initiés à Beel-
phegor, & ils mangèrent les facrifices des morts. Par ces
facrifices des morts , quelques-uns entendent leslacri-
fices offerts à Beel-pkegor , qui étoit un dieu mort.
D'autres entendent par-là les cérémonies des funé-
railles , & les offrandes que les Moabites faifoient
aux morts. Selden prétend que Peel-phegor étoit le
dieu des morts, ou le Pluton des Grecs ; & que les
offrandes que l'on t'ailbit aux mânes pour les appai-
fer , font ces facrifices des morts , dont il eft parlé en
cet endroit. Le père dom Augultin Calmet conjec-
ture que Phegor elt peut-être le même qu'Adonis , ou
Ifiris, dont on célébrait les fêtes comme des funé-
railles des morts , avec des lamentations & des pleurs
& d'autres cérémonies lugubres ; & il prétend que la
défenle que Moyfe fait aux Hébreux, Lévit. xix. defe
râler , Se de fe faire des incifions dans la chair pour
les morts , a rapport au culte de Beel-phegor. Cela
paroît affez vraiffemblable , & il eft certain que l'on
honorait ainfi Adonis : mais il fe peut faire que deux
différens dieux ayent eu le même culte dans deux
diverfes habitations , & il paroît que les Hébreux
n'appelloient pas Adonis Phegor, mais Thammus. Le
même Bénédittin donne encore une autre conjecture
fur le dieu Phegor , en prétendant que c'eft VOrus des
Egyptiens , fils d'Ilis. Mais toutes ces conjectures
n'ont rien de certain. Confultez Voffius , de l'idolâ-
trie des payens , livre II. chap. vij. Voye{ BAAL. Sel-
den, deDiisSyris. DomAugufiin Calmet , Diffcrtation
fur les Nombres. (G)
BEELZEBUB , ( Myth. ) c'eft-à-dire , dieu mou-
ihe , ou dieu de la mouche , étoit le nom d'un célèbre
dieu des Accaronites, dont il eft parlé au IV. liv. des
Rois ch.j. Quelques auteurs ont crû que les Juifs
lui avoient donné ce nom par dérifion , parce que
dans le temple de Jérufalem on ne voyoit point de
mouches fur les viâimes. Scaliger eft de cette opi-
nion. Mais il cil bien plus probable que les Accaro-
nites avoient eux-mêmes donné ce nom à leur dieu ;
ce qu'on peut prouver par les paroles d'Ochofias,
qui envoya confulter ce dieu beel^ebub ; il .n'y a au-
cune apparence qu'il eût voulu confulter un dieu
dont il le moquoit. Maldonat eft de ce dernier fen-
îiment dans Ion commentaire fur le ch. x. de S.Matt.
Cette idole étoit donc appellée le dieu mouche , ou
de la mouche , parce qu'on l'invoquoit contre les mou-
ches. Ceux d'Arcadie facrifîoient tous les ans à un
dieu femblable appelle Myagros. Les Juifs par l'hor-
reur qu'ils avoient pour cette idole , appellerent le
diable beel^ebub ; on lit néanmoins dans la plupart
des exemplaires Grecs du nouveau Teftament , beel-
çebul, qui lignifie un dieu <£ excrément : ce que les Juifs
auraient pu faire du mot beel^ebub , par mépris pour
cette idole , comme on la dit dans l'article précé-
dent. Au refte on pourrait croire qu'il faut aulîi bien
lire beel^ebub dan? le nouveau Teftament comme dans
J'ancien ; &quc beelçebuleû une ancienne erreur des
copifles Grecs. Voyt[ 1>aal.( G )
BEELZEPHON , ou BAAL-TSEPHON ,(Myth.)
idole des Egyptiens. Ce mot eft compofé de beel ,
feigneur ou dieu , & de tfephon , caché , ou lefepten-
trion , comme qui diroit le dieu caché , ou le dieu du
nord. On donna auffi ce nom au lieu où cette idole
étoit placée , fur les confins de l'Egypte vers la mer
Rouge. Rabi Aben-Ezra dit que c'étoit un talifmnn
d'airain que les magiciens de Pharaon avoient fait
pour empêcher que les Ifraélites ne fortifient de TE-
B E G
gypte. D'autres difent que les Egyptiens drefToient
de ces talifmans en tous les endroits par où les enne-
mis pouvoient aifément faire irruption dans l'Egyp-
te , afin que leurs efforts fuffent arrêtés par la force
magique de ces idoles. Il y en a qui croyent que
cette idole de beelçephon avoit la figure d'un chien , &
qu'elle aboyoit lorfque quelqu'Ifraélite paffoit par
ce lieu pour s'enfuir. Kircher , Œdipus ÂLgiptiacus ,
tome I. (G~)
* BEEMSTER , ( Géog. ) c'eft une petite étendue
de pays dans la Hollande feptentrionale , vulgaire-
ment appellée Noort-Hollande:c étoit autrefois un lac
que l'on eft parvenu à deffécher , èc dont l'induftrie
des habitans a fait un des plus rians féjours de l'u-
nivers.
* BEENEL , ( Hifi. nat. bot. ) arbriffeau toujours
verd qui croît dans le Malabar : on lui attribue quel-
ques propriétés médicinales , fur lefquelles il ne faut
pas compter tant qu'on n'aura pas de la plante une
meilleure defcripîion.
* BEER-RAMATH , ( Géog.fainte. ) ville dePa-
leftine dans la tribu de Siméon.
* BEESH A , ( Hifi. nat. bot. ) efpece de bambu qui
croît au Malabar : on dit des merveilles de fa décoc-
tion pour l'éroiion des gencives } les maux de dents ,
& la fuppreffion des règles.
* BÉFORT , ( Géog. ) ville de France capitale du
Sundgaw, au haut d'une montagne. Lon, 24. 3z. 30.
lat.4y.3S. 18.
BEFROY , f. m. {Art. milit. ) c'eft dans les villes
de guerre ou dans les places à portée de l'ennemi ,
une tour, clocher, ou autre lieu élevé , où il y a une
cloche qui fonne lorfqu'on apperçoit l'ennemi , ou
qu'on veut affembler les troupes. Dans les villes de
guerre on fonne la cloche du béfroi à la pointe du jour
pour l'ouverture des portes. Voy. Ouverture des
Portes. (Q)
Befroy , ( Charpenterie. ) eft la charpente d'une
tour ou d'un clocher dans laquelle les cloches font
fufpendues. Voy. lafig. y. PI. de la Fonderie des clo-
ches , & Tan. Fonte des cloches.
BEGAYER , v. n. ( Manège. ) c'eft la même chofe
que battre à la main par l'incommodité de la bride.
Foyei Battre à la main. (F)
* BEG-ERI , ( Géog. anc. & mod. ) petite île d'Ir-
lande près de Wexford, dans un petit golfe formé
par la rivière de Slany , à fon embouchure. Les Géo-
graphes font partagés entre Beg-Eri & Bardefei , & ils
ne lavent laquelle des deux lut l'ancienne Andros ,
Edros , ou Hedros.
BEGGHARDS ou BEGGUARDS , BEGUINS &
BEGUINES , ( Hifi. ceci. ) fous tous ces noms on
comprend une feue d'hérétiques qui s'élevèrent en
Allemagne fur la fin du xme fiecle , & auxquels
quelques auteurs donnent pour chef Dulcin ou Dou-
cin : mais il ne faut pas les confondre avec les Dul-
ciniftes. Voye^ Dulcinistes.
Les principales erreurs des Begghars, Béguins, &
Béguines , étoient que l'homme peut acquérir en cette
vie un tel degré de perfection , qu'il deviendra en-
tièrement impeccable, & ne pourra plus avancer
dans la grâce ; parce que fi quelqu'un y croiffoit tou-
jours , il pourrroit être plus partait que J. C ; que
quand on eft arrivé à ce degré de perfedion on ne
doit plus prier ni jeûner , mais qu'alors la fenfualité
eft tellement foûmife à Pefprit&à la raifon, qu'on
peut librement accorder à fon corps tout ce qu'on
veut : que ceux qui font en ce degré de perfection ,
& qui ont l'efprit de liberté , ne font point fournis
à l'autorité des hommes, ni obligés aux commande-
mens de PEglifè ; parce que là où eft l'efprit du Sei-
gneur , là eft la liberté : qu'on peut obtenir en cette
vie la béatitude finale , comme on l'obtiendra dans
l'autre : que toute nature intellectuelle eft heureufe
BEG
en foi , & que Pâme n'a pas befbin de lumière de
gloire pour voir Dieu &c joiiir de lui : que c'elt être
impartait que de s'exercer à la pratique des vertus ,
l'ame parfaite les ayant exclues : qu'à l'élévation du
corps de J. C. les parfaits ne doivent ni fe lever ni
lui rendre aucune marque de refpeft , parce que ce
feroit une imperieclion que de deicendre de la pure-
té & de la hauteur de leur contemplation pour pen-
fer à l'euchariftie , à la paffion ou à 1 humanité de
J. C.
Le pape Clément V. condamna ces fanatiques dans
le concile général de Vienne tenu en 1 3 1 1. Comme
ils portoient l'habit religieux , fans garder ni le céli-
bat ni aucune obfervance monaftique, on les a quel-
quefois confondus avec ceux dont nous allons parler
dans l'article fuivant.
Begghards , Béguins , & Béguines , font aufTî
les noms qu'on a donnés aux religieux du tiers ordre
de S. François. On les appelle encore à préfent dans
les Pays-bas, Begghards , parce que long-tems avant
qu'ils enflent reçu la règle du tiers ordre de S. Fran-
çois, & qu'ils fuffent érigés en communauté réguliè-
re , ils en formoient cependant dans plufieurs villes,
vivans du travail de leurs mains , & ayant pris pour
patrone fainte Begghe , fille de Pépin le vieux , &
mère de Pépin de Herftal, laquelle fonda le monafte-
re d'Andenne , s'y retira , & y mourut , félon Sige-
bert, en 692. ATouloufe on les nomma Béguins,
parce qu'un nommé Barthclemi Bechin leur avoit don-
né fa maifon pour les établir en cette ville. De cette
conformité de nom le peuple ayant pris occafion de
leur imputer les erreurs des Begghards &c des Béguins ,
condamnés au concile de Vienne , les papes Clé-
ment V. & Benoit XII. déclarèrent par des bulles ex-
prefles que ces religieux du tiers ordre n'étoient nul-
lement l'objet des anathèmes lancés contre les Beg-
ghards & les Béguins répandus en Allemagne. Il y a
encore aujourd'hui dans plufieurs villes de Flandre
des communautés de filles qu'on nomme Béguines,
& leurs maifons font appellées béguinages. Voye^ BE-
GUINES. (G)
* BEGIE ou BEGGIE , ( Géog. ) ville d'Afrique au
royaume de Tunis , fur la pente d'une montagne.
Long. zy. lac. .37.
BEGLER BEG , f. m. ( Hijl. mod. ) nom qu'on don-
ne en Turquie au gouverneur général d'une grande
étendue de pays. Ce mot fe trouve écrit diverfement
dans les auteurs : Begterbeg , Beylery^ & Begheler-
Beghi ; il {\«mReJèigneur des Jeigneurs .
Les Beglerbegs font autant de viccroisqui comman-
dent à tout un royaume ; leur autorité s'étend égale-
ment fur la guerre, fur la juftice , ck fur la police : ils
ont au-defTous d'eux d'autres gouverneurs particu-
liers, foit d'une province , fdit d'une grofTe ville ,
qu'on nomme fanjacsoujanjiacs. Après le grand-vifir,
lesBeglerbegs feuls ont le pouvoir de publier dans leurs
départemens les ordonnances impériales , & d'y tenir
la main. Par tout l'empire , hors de l'enceinte de
Conftantinople , ils peuvent faire décapiter , ou pu-
nir de tel autre genre de mort ou châtiment que bon
leur femble, les coupables qu'on leur amené, fans que
le bâcha du lieu puiffe s'y oppofer ; il a feulement la
liberté de fe plaindre à la Porte s'ils abufent de leur
autorité.
Autrefois il n'y avoit que deux Beglerbegs dans tout
l'empife ; celui d'Europe ou de Homélie , 6v celui de
Natolie en Alic : mais l'empire s'étant accru, le nom-
bre des Beglerbegs s 'eft auflî augmenté en Alie ; celui
de Romelie eft refté feul en Europe , cv femble re-
préfenter l'empereur Grec. Il eft le plus éminent de
tous les Beglerbegs; car quoique tous les vifirs à trois
queues joimTcnt de ce titre , il ici t cependant à ca-
raclériler plus particulièrement le Beghrleg de Rome-
lie, gouverneur général de toutes les provinces Eu-
BEG
191
ropéennes dépendantesdu grand-Seigneur; le Begler-
beg de Natolie & celui de Syrie , qui fait fa réfidence
à Damas. Le gouverneur de Bude & celui de l'Ara-
bie Pétrée portoient autrefois ce titre ; & fi quelques
bâchas le prennent aujourd'hui , c'eft fans l'aveu de
la cour qui ne les traite que de plénipotentiaires.
Guer. mœur. & ujag. des Turcs, tome II. {G)
BEGONE, f. f. bégonia , ( Hijl. nat. bot. ) genre
de plante dont le nom a été dérivé de celui de M. Bé-
gon , & qui a été obfervée par le père Plumier. Les
rieurs des plantes de ce genre font de deux fortes :
l'une eft ftérile, & compofée de quatre pétales grands
& étroits ; l'autre eft en rofe , compofée de plufieurs
pétales difpofés en rond fur un calice garni de feuil-
les , qui devient dans la fuite un fruit à trois angles,
ailé , divifé en trois loges , & rempli de petites fe-
mences. Tournefort , lnji. rei herb. app. Voye~^ Plan-
TE. (/)
BEGUILL , ( Hijl. nat. bot. ) fruit de la grofTeur
d'une pomme, & couvert d'une écorce rude & noiieu-
fe , fous laquelle il y a une pulpe femblable au fruit
de l'arboufier.
BEGUINES , f. f. ( Hijl. mod. ) c'eft le nom qu'on
donne dans le Pays-bas à des filles ou veuves , qui
fans faire de vœux fe raffemblent pour mener une vie
dévote &. réglée. Pour être aggregée au nombre des
béguines, il ne faut qu'apporter fuffifamment de quoi
vivre. Le lieu où vivent les béguines s'appelle béguina-
ge ; celles qui l'habitant peuvent y tenir leur ménage
en particulier , ou elles peuvent s'affocier plufieurs
enfemble. Elles portent un habillement noir, allez
femblable à celui des autres religieufes. Elles fuivent
de certaines règles générales , & font leurs prières en
commun aux heures marquées ; le refte du tems eft
employé à travailler à des ouvrages d'aiguille , à faire
de la dentelle, de la broderie, &c. & à foigner les
malades. Il leur eft libre de fe retirer du béguinage ,
& de fe marier quand il leur plaît. C'eft ordinaire-
ment un eccléiiaftique qui leur eft prépofé , &C qui
remplit les fonctions de curé du béguinage. Elles ont
aurïï une lupérieurc, quia droit de les commander,
& à qui elles font tenues d'obéir tant qu'elles demeu-
rent dans l'état de béguines.
Il y a dans plufieurs villes des Pays-bas des bégui-
nages fi vaftes & fi grands , qu'on les prendroit pour
de petites villes. A Gand en Flandre il y en a deux ,
le grand & le petit , dont le premier peut contenir
jufqu'àSoo béguines.
Il ne faut pas confondre ces béguines avec certai-
nes femmes qui étoient tombées dans les excès des
Béguins & desBegguards,qui furent condamnés com-
me hérétiques parle pape Jean XII. &: dont il ne refte
plus aucun veftige. Voyei Begghards.
B E G U, adj. {Manège.) Un cheval begu eft celui
qui, depuis l'âge de cinq ans jufqu'à ta vieillerie,
marque naturellement 6c fans artifice à toutes les
dents de devant : il s'y conferve un petit ceux Si
une marque noire, qu'on appelle germe dejeve, qui
aux autres chevaux s'efface vers les lix ans. Les che-
vaux begus ont les dents plus dures que les autres
chevaux , ce qui fait que quand ils ont une rois mar-
qué , ils marquent toujours également auv pinces ,
aux dents moyennes , &c aux coins. Les jumens lont
plus fujettes à être bègues que les chevaux ; cv parmi
les chevaux Polonois , Hongrois, & Cravates, on
trouve force chevaux begus. Les maquignons nient
qu'il y ait des chevaux begus. Pour diftinguer les be-
gus des jeunes chevaux , on examine s ils ont les
dents courtes , nettes , & blanches ; c'eft alors un li-
gne de jcunelTe. S'ils ont les dents longues, jaunes,
craffeufes & décharnées, quoiqu'ils marquent encore
à toutes les dents de devant, c'eft un ligne que ces
chevaux font vieux & bigus. ( t )
BEHEMOTH , f. m. ce mot lignitie en généra) ±u
ï9î
B E H
defommt , & toute autre forte de bétail : il fe prend ,
félon les rabbins , dans Job , pour un bœuf d'une gran-
deur extraordinaire. Les docteurs talmudiftes 6c les
auteurs allégoriques des Juifs , & entr'autres R. Elie-
zer dans fes chapitres , difent que Dieu créa ce grand
animal , appelle behemoth , le fixieme jour , & qu'il
paît fur mille montagnes pendant le jour , que l'herbe
de ces mille montagnes repouffe pendant la nuit , &
cme les eaux du Jourdain lui fervent pour boire. Ils
ajoutent que ce behemoth a été deftiné pour faire un
grand banquet aux juftes à la fin du monde. Les Juifs
îes plus fenfés favent bien à quoi s'en tenir fur ce
conte : mais ils difent que c'eft une allégorie qui dé-
signe la joie des juftes , figurée par ce feftin. Cette
théologie fymbolique tient quelque chofe du ftyle des
anciens prophètes : nous en voyons même des exem-
ples dans le Nouveau-Teftament. Mais les rabbins
propofent trop cruement leurs allégories, & y ajou-
tent certaines circonftances qui les rendent le plus
-jfouvent ridicules. Samuel Bochart a montré dans la
féconde partie de fon Hiero^. liv. V. chap. xv. que
lebehemothde Job eu f hippopotame. Rab. Eliezer, Job,
Ludolf , hijî. de ÏAby (finie. ( G )
* BEHEMOTH,(ffi/?.«^.) c'eft le nom que l'on a
donné à l'animal , auquel on prétend qu'ont apparte-
nu les os qui fe trouvent en Ruffie & d'autres con-
trées , fur-tout du Nord ; fes dents font d'un ivoire
plus beau que celui qui vient des Indes. Les Turcs
& les Perfans en font des manches de poignards &
des poignées de fabre , qu'ils eftiment autant que ii
elles étoient d'argent. Voye^ Éléphant.
BEHEN, (en Pharmacie. ) racine médicinale, en
grande eftime , fur-tout chez les Arabes , à caufe de
fes vertus cardiaques, aromatiques, & aléxitériales.
Il y a deux efpeces de behen; favoir, le behen al-
bum ou blanc , qui eft infipide , faifant peu d'impref-
fion fur la langue , ou celle d'une petite amertume
feulement qu'il laiffe après lui. Les botaniftes mo-
dernes prétendent que c'eft la même choie que notre
lychnis terre/tris ; d'autres veulent que ce foit propre-
ment le papaver fpumeum. Le behen rouge , behen ru-
brum , a des fibres , eft brun par-dehors & rouge en-
dedans : on préfume qu'il n'eft point différent de
notre lemonium maritimum majus, ou lavande marine.
L'un & l'autre viennent du Levant; ils ont les mêmes
vertus : on les fubftitue réciproquement ; il faut les
choifirfecs,& d'un goût aromatique aftringent. (N)
* Le behen blanc eft la racine d'une plante qui s'ap-
pelle jacea orientalis , patula , carthami facie , flore lu-
teo magno ; elle eft longue , noiieufe , fans chevelure ;
elle s'étend de côté & d'autre comme la régliffe , à
laquelle elle reffemble par fa figure ôc par fa groffeur,
mais elle eft plutôt blanche que jaune. De la racine
s'élève une tige unique, de la hauteur d'une coudée,
à la partie inférieure de laquelle naiftént de grandes
feuilles, longues, épaiffes , femblables à celles de la
patience , foûtenues par de longues queues. Les feuil-
les ont vers leur baie quatre découpures , deux de
chaque côté : mais les feuilles qui naiflent de la par-
tie fupérieure de la tige l'cmbralfent fans queue, com-
me dans la perce -feuille ordinaire & le mouron de
Crète. Lefommetde cette tige fe partage en plufieurs
rameaux garnis de petites feuilles , qui portent cha-
cun une fleur compolée de plufieurs fleurons , profon-
dément découpés, jaunes, pofés fur un embryon, &
renfermés dans un calice écailleux , fans épines , jau-
ne. Cet embryon fe change dans la fuite en une fe-
mence en aigrette.
On ne fait rien fur l'origine du behen rouge ; au fen-
timent des Arabes , l'un & l'autre fortifie , engraiffe,
forme la femence , eft utile dans le tremblement , pro-
duit encore d'autres effets falutaires.
* BEHER, (Géog.) ville du Semigalle, en Cour-
i:u\de.
B E I
BEHIMA, (Hifl. nat. bot.) herbe qui croît dans la
province de Tremecen , en Afrique ; elle engraifle
fort promptement les chevaux & le bétail , à qui on
n'en laiffe manger que jufqu'à ce qu'elle loit en épi ;
car alors elle les étrangleroit.
BEHOURD ou BEHOURT ou BOHOURT , f. m»
(H'fl. mod.) mot dont l'origine & la racine font affez
obfcures , mais qu'on rencontre fréquemment dans
nos anciens romans , pour fignifier un combat que
l'on faifoit à cheval la lance au poing , ou une courfe
de lances dans les réjoiiiffances publiques. Dans la
baffe Latinité on l'a appelle behordium, en vieux Gau-
lois behourt & tournoy, & l'on difoit behorder , behour-
der, &c border, pour marquer les exercices oii la jeune
nobleffe combattoit avec des lances & des boucliers.
Les Efpagnols en ont retenu quelque chofe dans le
jeu qu'ils nomment cannas. On appelloit aulïî dits de.
behourdeis, ce que d'autres auteurs ont nommé en bon-
ne Latinité dits hafliludii. Parmi les gens de la campa-
gne & labourgeoifiedes petites \\\\es ,\cbehourd étoit
un jour affigné pour jouter avec des cannes & de
longs bâtons non ferrés, ce qui le pratique encore en
Angleterre à certains jours de l'année ; & Monct af-
fûre que le même ufage avoit autrefois lieu en France
le premier & le fécond Dimanche de carême ; & d'au-
tres ajoutent , que pour exprimer un exercice à peu
près femblable , les Florentins fe fervent du terme ba-
gordare. ( G )
* BEJ A ou BEJER , (Géog.) contrée de Barbarie,
dans le royaume de Tunis.
* Beja, (Géog.) ville de Portugal , dans l'Alentejo ,
près du lac de même nom ; long. 10. 10. lat. Jj. 58.
On dit qu'il y a dans ce lac une efpece de poiffon bon
à manger, qui prélage la pluie & la tempête, & l'an-
nonce par des mugiffemens femblables à ceux du tau-
reau ; d'autres attribuent ces mugiffemens & le bruit,
précurfeurs des mauvais tems , à l'agitation des eaux
du lac.
BÉJ AUNE , fub. m. fe dit , en Fauconnerie , des oi-
feaux niais & tout jeunes , qui ne favent encore rien
faire ; béjaune ou bec-jaune fignifie ignorance. Ce ter-
me , bejaune , vient des petits oifeaux qui , avant d'ê-
tre en état de lortir du nid , ont le bec jaune.
* Béjaune ou Becjaune, (Hifl. mod.) c'eft ainfi
qu'on nomme communément le régal qu'un officier
donne à fes camarades en entrant dans un régiment :
on dit payer Ion béjaune.
* BEICHLINGEN , (Géog.) ville d'Allemagne , au
comté de même nom , dans le cercle de haute Saxe.
Long. 29. 20. lat. 5i. 20.
* BEID-EL-OSSAR ou BEID-EL-SSAR, plante
Égyptienne , dont on trouvera la defcription & les
propriétés dans Prolper Alpin & dans Veflingius.
Elle croît aux environs d'Alexandrie; fes feuilles cou-
pées rendent un lue laiteux : on s'en fert pour dé-
pouiller les peaux de leur poil ; pour cet effet on les
laiffe macérer dans ce fuc.
Le fruit de la plante eft environné d'un duvet ou
coton fort doux , dont on fait des lits , des couffins ,
&c des mèches. Les abeilles le repofent volontiers fur
le beid-el-offar.
* BEIDHAH, (Géographie.') ville de la province
de Perlé proprement dite , proche Schiraz.
* BEIGE, f. f. (Commerce.) ferge noire, grife ou
tannée , que l'on fabrique en Poitou avec la laine ,
telle qu'on l'enlevé de deffus le mouton , tant à la
chaîne qu'à la trame. Elle doit avoir trente-huit à
trente-neuf portées , & chaque portée vingt fils.
* BEILE ou BEIE , (Géog. anc. & mod.) ville d'A-
frique , au royaume de Tunis , entre Conftantine &
Tunis. On croit que c'eft la Bulla regia des anciens.
* BEILSTEIM , (Géog.) petite ville d'Allemagne ,
dans la Veteravie , avec titre de comté , entre Mai-
pourg, Naffau, tk. Coblentz.
* BEIRA ,
BEL
* BEIRA, (Géog.) province de Portugal , bornée
au feptentrion par les provinces entre Minho 6c Dou-
ro , 6c Tra-los-Montes ; au midi par l'Eftramadure
Portugaise ; à l'orient par l'Eftramadure Eipagnolo ;
à l'occident par la mer. Elle a environ 30 lieues en
long , fur autant en large : fa capitale eft Coimbre.
* BEIRE , (Géog.) petite ville de France , en Bour-
gogne , au bailliage de Dijon.
BEISTY , ou BlSTI , fubft. m. (Commerce.') petite
monnoie d'argent billoné , à très-bas titre , que beau-
coup d'auteurs ont traitée de monnoie de compte. Le
beijly eft rond, frappé de quelques caractères bifarres
& fans ordre ; il vaut argent de France un fou cinq
deniers deux neuvièmes.
BEIZA , ou BEIZATH , ( Hift. anc. ) mot Hébreu
qui fignifîe un zuf, & auffi une certaine mefure ufi-
tée parmi les Juifs. Ils difent que l'œuf contient la fi-
xieme partie du log , & par conféquent trois pouces
cubes, & cette fraction de pouces ér**rb- f°yel
Log. Le beiçath elt auffi une monnoie d'or ufitée par-
mi les Perles , & qui pefe quarante dragmes. Le P.
Calmet prétend que c'eft de ce mot, & non delà
ville de Bylance , qu'eft dérivé le mot befam ou be-
Jàn, nom d'une autre monnoie d'or auffi en ufage ,
du moins autrefois en orient ; un befam valoit deux
dinars , & chaque dinar vingt ou vingt-cinq dragmes.
foyt^ Bezant , Dinar , Dragme. (G)
* BEKAVA , ou BEKAWA, ( Géog.) petite ville
de Pologne , dans le Palatinat de Lublin.
* BEKIA , ( Géog. ) île de l'Amérique feptentrio-
nale , une des Antilles , qui n'eft guère fréquentée
que par quelques Caraïbes de S. Vincent qui y font
la pêche , & y cultivent de petits jardins ; elle man-
que d'eau-douce, 6c abonde en vipères dangereufes.
Lat. iz. Z4.
* BELA , ( Géog. ) petite ville de Hongrie.
* BELALC AZAR, ( Géog. ) petite ville du royau-
me d'Andaloufie.
^ BELANDRE, ou BELANDE, f. m. (Marine.)
c'elt un petit bâtiment fort plat de Varangue , qui a
fon appareil de mâts & de voiles femblable à l'appa-
reil d'un heu : fon tillac ou pont s'élève de poupe à
proue d'un demi-pié plus que le plat-bord. Outre
qu'entre le plat-bord & le tillac , il y a un efpace d'en-
viron un pié & demi qui règne en-bas , tant à {tri-
bord qu'à bâbord. Les plus grands belandres font de
80 tonneaux , & fe conduilent par 3 ou 4 hommes
pour le tranfport des marchandifes ; ils ont des fe-
melles pour aller à la bouline comme le heu. Voye{
Heu. (Z)
BELATUCADRUS , f. m. ( Myth. ) nom d'une
faun"e divinité honorée autrefois en Angleterre , dont
il elt tait mention dans une infeription trouvée fur
une vieille pierre dans la maifon du lïeur Th. Dikes,
dans le comté de Cumberland, qui porte : Deofanclo
Belatucadro Aurelius Diatova aram ex voto pofuit. L.L.
M. M. On trouve encore fur une autre pierre cette
inlcription au même Belatucadrus : Belatucadro Jul.
Civilis Ope. V.S.L. M. & fur une troifieme qui a
échappé au recueil des inferiptions de Gruter , &
que Cambden a communiquée. On lit dans cette der-
nière : Deo Belatucadro lib. votum fecit Jolus. Selden
dans fon ouvrage de Diis Syris , croit que ce Bela-
tucadrus cil le même que Belenus & Abellion , nom
que les Payens donnoient au foleil qu'ils adoroient
particulièrement. Gérard Jean Voffius elt du même
îentiment dans fon livre de Origine & progrejfu Idolo-
latr. lib. II. c. IJ. Voye^ BELENUS. (G)
* BELBAIS, ( Géog. anc. & mod. ) ville d'Egypte,
à l'une des embouchures du Nil ; c'étoit autrefois
Pclufe.
* BELBINE , ou BELENTINE , ( Géog. anc. ) ville
fituée à l'entrée de la Laconie , vers le nord , près
Tome II,
BEL
193
de PEurotas. Plutarque en fait mention dans la vie
de Cléomenes.
* BELBO , ( Géog. ) rivière du duché de Milan.
* BELBUCH , & ZEOMBUCH , ( Myth. ) divi-
nités des Vandales. C'étoient leur bon & leur mau-
vais génie : Belbuch étoit le dieu bianc , & Zeombuch
le dieu noir : on leur rendoit à l'un & à l'autre les
honneurs divins. Le Manichéifme elt un fyflème
dont on trouve des traces dans les fiecles les plus re-
culés , & chez les nations les plus fauvages ; il a la
même origine que la Métcmpfycofe , les defordres
apparens qui régnent dans l'ordre moral & dans l'or-
dre phyfique ,que les uns ont attribués à un mauvais
génie , & que ceux qui n'admettoient qu'un fcul gé-
nie , ont regardés comme la preuve d'un état à venir ,
où les choies morales feroient dans une polîtion ren-
verlée de celle qu'elles ont. Mais ces deux opinions
ont leurs difficultés.
Admettre deux dieux, c'eft proprement n'en ad-
mettre aucun. Voye-^ Manichéisme. Dire que l'or-
dre des chofes fubfiftant et! mauvais en lui-même ,
c'elt donner des foupçons fur l'ordre des chofes à ve-
nir ; car qui a pu permettre le defordre une ibis ,
pourroit bien le permettre deux. Il n'y a que la ré-
vélation qui puiffe nous raffûrer; & il n'y a que le
Chriftianifme qui joiiine de cette grande prérogati-
ve. Voyei Immortalité & Ame.
* BELCASTRO , ( Géog. anc. & mod. ) ville d'I-
talie , au royaume de Naples , dans la Calabre ulté-
rieure, fur une montagne. Long. J4. 4.5. lat. Je). G.
On la prend pour la Chôma des anciens : mais il y a
peu d'apparence qu'elle ait été bâtie fur les ruines
de la Petilia , dont il eft parlé dans Strabon , Pline ,
Ptolomée , & Pomponius Mêla.
* BELCHITE, ( Géog. ) petite ville d'Efpagne, au
royaume d'Arragon, fur la rivière d'Almonazir. Long.
IJ. lat. 41. ig.
* BELEDIN , f. m. ( Commerce. ) coton filé , d'une
médiocre qualité & de peu de débit.
* BELELACS , f. m. pi. ( Commerce. ) efpcces de
taffetas qui fe fabriquent au Bengale : leur aunage elt
de quarante cobres de longueur, deux de large.
BÉLEMNITE. Nous ne pouvons mieux faire que
de rapporter ici l'article de M. Formey , fecrétaire
de l'académie royale des Sciences & Belles-Lettres
de PrufTe , fur la bélemnite, qui nous a été remis ma-
nuferit.
» Bélemnite ( Hijl. nat. ) ce nom vient de la
» reffemblance de cette pierre avec le fer d'une fle-
» che. Elle porte auffi celui de daclylus idoeus , à caufe
» de fa conformité avec un doigt de la main , 6c du
» mont Ida, où Pline dit qu'on la trouve ; & celui
« de lapis lyncis , ou lyncufius pris de la fabuleufe ori-
» gine que les anciens lui donnoient ; parce qu'ils
» penfoient bonnement que c'étoit de l'urine de lynx
» changée en pierre. D'autres lui ont donné avec auffi
» peu de fondement le nom de pierre de tonnerre , pen-
» lant qu'elle tomboit du ciel. On trouve la bélemnite
» dans toutes fortes de lits de terre, de fable, de marne
>» &dc pierre , prefque toujours accompagnée de co-
» quillagcs ou d'autres dépouilles de l'Océan , & fou-
» vent un peu applaties, à demi caffiées, ou autre-
» ment défigurées par les mouvemens violens des
» couches de pierre ou de terre qui les ont compri-
» mées , comme il eft arrivé à un grand nombre de
» coquillages, & à d'autres productions marines.
» Il y a des bélemnites qui font chargées de petites
» huîtres & de petits tuyaux de vers marins , dont la
» nature eft d'être néceflaii ement attaches aux corps,
» où ils naiffent, vivent cv meurent lans changer de
» place; d'autres ont été ronges par de petits înfec-
» tes, comme cela arrive fouvent aux huîtres X aux
» autres coquilles de mer. Les bcUmnites font en gé-
>• néral d'une figure fort régulière ; elles différent
Bb
194
BEL
m néanmoins en trois manières entr'elies. Il y en a
» de parfaitement coniques, d'autres prefque cylindn-
» ques , dont la pointe paroît au haut après une efpe-
» ce d'arrondiflement , qui les fait rellèmbler à un
» doigt de la main ; les dernières ont un renflement
» à peu près comme les fufeaux. Leur longueur efl
» depuis environ deux pouces jufqu'à huit & davan-
» tage , & leur grofleur depuis celle d'une plume mé-
» diocre jufqu'à trois & quatre pouces de circonfé-
» rence ; leur couleur bien que différente ne peut
>, point fervir à les diftinguer , puifqu'elle dépend
» uniquement des lieux où on les trouve. Elles ont
>» toutes une cannelure plus ou moins marquée , qui
» règne depuis la baie jufqu'à la pointe , mais dont
» l'enfoncement va toujours en diminuant ; & c'eff.
>» cette cannelure qui tait qu'elles fe tendent tacile-
» ment en long. Toutes celles qui font entières , ont
» à leur baie une cavité de figure conique , qui dif-
» fere en largeur & en longueur , félon que ces pier-
» res font plus grofles & plus longues. Cette cavité
>♦ efl fouvent vuide & quelquefois pleine de fable ,
» de cryftaux & d'autres matières. 11 y en a auiîi qui
» renferment une alvéole fort curieufe , compofée de
» plufieurs petites coupes femblables aux verres des
» montres de poche , enchâflees l'une dans l'autre ,
» & qui toutes enfemble forment un cône parfaite-
» ment convenable au vuide de la pierre ; ce qui fait
» que quoique ces alvéoles foient de différentes ma-
» tieres , tous les auteurs qui en ont parlé croyent
» qu'ils appartiennent véritablement à la bélemnite, &
» qu'ils fe font formés dans fa cavité.
» Leur flxuchire inférieure eit toujours abfolument
» la même. Elles font toutes compoiées de plufieurs
» couches très-régulierement rangées , comme les
» aubiers des arbres , & ii minces qu'il faut une lou-
» pe pour les diftinguer avec quelque exactitude.
» Leur matière forme par les filets prefquc imper-
» ceptibles des rayons qui vont du centre à la cir-
» conférence. Ces rayons partent d'un très-petit
» tuyau , qui occupe toute la largeur de la pierre ,
» & qui n'eft bien vifible que dans les plus tranfpa-
» rentes ; d'horifontaux qu'ils font d'abord , ils s'éle-
» vent enfuite peu à peu vers la circonférence , fur-
» tout en approchant de la pointe. C'eft-là la raifon
» pourquoi la partie de la pierre du côté de la baie
» paroît creuie , 6c l'autre paroît convexe , quand
» on l'a coupée en travers. Le demi-diametre de la bé-
» lemnite qui regarde la cannelure , eit toujours plus
» court que celui qui lui efl oppofé ; & l'on remar-
» que par intervalles des lignes longitudinales , qui fe
» terminent en cône autour du petit tuyau. On peut
» facilement féparer les couches de ces pierres en
» les mettant fur un charbon allumé , ou à la flamme
» d'une chandelle. Elles iont en dedans & en dehors
» d'un parfait poli , & deviennent blanches lorfqu'el-
» les font expofées au feu. Il en fort une mauvaife
» odeur , comme de corne brûlée , ou d'urine de
» chat , quand on les frotte l'une contre l'autre ; mais
» fur-tout quand on les bride.
» On agite la queftion ; li ces pierres font de vrais
» minéraux , ou li elles appartiennent à quelque ani-
v mal , & en ce cas à quelle de fes parties on doit
» les rapporter. Il faut lire là-deiïïis les Lettres philo-
» Jbphiques fur la formation des fils & des cryflaux , &c.
» par M. Bourguet. Ce favant deNeuf-châtel y éta-
-> blit d'une manière qui me paroît démonitrative ,
» que les békmnites n'appartiennent point au règne
» minéral , vu que les corps les plus réguliers que ce
» règne fourniiîe ne gardent point une fymmétrie
» auiîi parfaite dans leur ftruc"fure. Il compare la bé-
» lemnite à la flalaclite , qui eft_ de toutes les pierres
» celle qui en approche le plus ; & il fait voir qu'il
» reite encore une énorme différence entr'elies. Cela
» le conduit à conjecturer que c'eft une dent d'ani-
BEL
» ma! ; & quoiqu'on ne puifle pas encore indiquer
» l'animal auquel elles ont appartenu , la grande con-
» formité qu'a la bélemnite avec les dents d'autres ani-
» maux , & particulièrement avec les dents droites
» du crocodile , met cette conjecture dans une fort
» grande vraiffemblance. La cavité de figure coni-
» que que les bélemnites entières ont à leur bafe , efl en
» effet femblable à celle qu'on voit aux dents du cro-
» codile & duphjfeter, aux défenfes de l'éléphant , èk.
» du poiifon nahrwal. La cannelure de la même pierre
» a beaucoup de rapport avec celles des dents de la
» feie du Jpadon , qui font enchâfTées dans cette lon-
» gue défenfe, comme dans une mâchoire. Enfin fes
» petits filets font de même nature que ceux de la
» ftrufture intérieure de l'émail des dents de prefque
» tous les autres animaux. Quant à Y alvéole , fes cou-
» pes répondent aux couches de la bélemnite par le
» moyen des lignes longitudinales , qui forment d'ef-
» pace en efpace de petits cônes qui marquent peut-
» être les divers tems de fon accroiffement. M. Bour-
» guet répond enfuite aux difficultés de M. Scheuchçer,
» & de quelques autres Phyficiens. Enfin il explique
» la formation & le méchanifme organique de la bé-
» lemnite d une manière fort plaufible. Comme les ani-
» maux auxquels ces dents appartiennent , croiffent
» pendant toute leur vie , il n'eft pas étonnant qu'il
» y ait des bélemnites fi différentes en grofleur & en
» longueur ».
Nous ajouterons feulement à cet article l'opinion
de M. Woodward & celle de M. le Monnier le Méde-
cin, de l'académie royale des Sciences. M. Vood-
ward rapporte dans fa lettre fur F Origine, la nature & la.
conflitutwn de la bélemnite, que M. Lhwyd prétendoit
qu'elle fe forme dans le pinceau de mer ou dans le co-
quillage appelle dentale. Notre auteur réfute ce fen-
timent par la raifon qu'on ne voit jamais aucunes
traces du moule dans lequel la bélemnite fe feroit for-
mée , comme on voit celle du moule des autres pé-
trifications ; que le prétendu moule de la bélemnite
devrait être bien apparent autour de celles qui ont
près de deux pies de longueur , ôc environ deux
pouces de diamètre à l'endroit le plus gros ; & que
cependant il n'en a apperçû aucun veftige dans des
bélemnites de cette grandeur qu'il a obfervées.
M. Woodward répond enfuite à ceux qui croyent
que les bélemnites font des cornes d'animaux ou des
dents de poiflbns : il foûtient que ce ne font pas des
cornes , parce que la plupart n'en ont pas la figure ;
& pour le prouver , il fait mention des trois princi-
pales cfpeces de bélemnites , qui font la bélemnite co-
noïde, qui efl: la plus commune ; la bélemnite en forme
de fufeau , & la bélemnite cylindrique terminée en poin-
te par les deux bouts ; & il conclut que fi toutes ces
bélemnites reflemblent à des cornes , il n'y a rien qui
ne puifle y reffembler. Le même auteur ne croit pas
qu'il foit à préfumer que la bélemnite ibitune corne,
parce qu'on la trouve dans la terre avec des coquil-
les , des dents & d'autres parties d'animaux; puif-
qu'il s'y trouve aufli bien d'autres chofes qui ne font
certainement pas des cornes. Il nie que toutes les bé-
lemnites ayent une odeur de corne brûlée , c 'eft-à-
dire une odeur animale : il aflûre que les bélemnites
d'Angleterre n'ont ordinairement aucune odeur , &:
que toutes celles qu'il a trouvées dans la craie n'en
ont point du tout ; & il croit que les bélemnites n'ont
que l'odeur qui leur a été communiquée par des ma-
tières falines , fulphureufes ou bitumineufes avec lef-
quelles elles ont féjourné. Enfin M. "Woodward foû-
tient que les bélemnites ne font ni des cornes ni des
dents ; parce que leur pefanteur fpécifique efl: diffi>
rente de celle des cornes & des dents : les raifons
qu'il en donne font tirées de fes principes fur l'Hii-
toire naturelle de la terre.
C'efl; en conféquence de ces mêmes principes que
B E L
M. 'Wôodvard met la bélemnite dans la clafTe des corps
talqueux , parce que fa pefanteur eft égale à celle de
ces corps. La couleur jaune de certaines bélemnites eft
femblable à celle de quelques talcs , fpars , &c autres
productions minérales.
. La fubftance de la bélemnite, dit M. Woodward, n'eft
pas coriace & tenace comme celle des animaux, mais
friable & caftante comme celle du talc , &c. à la vue
elle paroit minérale ; & on en eft convaincu par les
épreuves chimiques: fa tiffure, ajoute le même au-
teur , eft directement contraire à celle des dents , &
des autres parties folides des animaux ; fes fibres cou-
pent diamétralement fon axe , au lieu que celles des
dents , des os , des cornes , &c. font parallèles à leur
axe. Le talc fibreux ou cannelé , le gypfe ftrié , le
fpar talqueux , l'amiante , l'alun de plume , &c. ont
leurs fibres tranfverfales comme celles des bélemnites.
L'auteur cite un exemple remarquable de cette tiffu-
re , qu'il a obfervée dans quelques ftalaâites compo-
fées d'un fpar talqueux , qui font fufpendues dans
des grottes foûterreines ; il en a vu plulleurs qui
étoient cannelées.
De tout ceci M .\Vood\rard conclut affirmativement
que les bélemnites ne peuvent venir d'un animal.
Quand on lui objefte qu'elles ont été altérées comme
d'autres pétrifications , il répond que cela n'eft pas
poffible , parce qu'il en feroit refté au moins quel-
qu'une fans altération , comme il y a tant de coquilles
fofiïles qui ne font pas pétrifiées.
Les tuyaux vermiculaires , & les coquilles d'huî-
tres qui lont attachées fur quelques bélemnites , ne
prouvent rien pour leur origine ; puifque l'on trouve
les mêmes choies fur des cailloux , des pyrites , &c.
D'ailleurs li la bélemnite étoit une dent de poiffon , on
trouverait au moins quelques veftiges de cette dent,
ou quelques marques de fon adhérence à une mâchoi-
re. On aura beau dire que cette dent aura été féparée
de la mâchoire, M. "Woodward ne conçoit pas que ce-
la puiffe être pour toutes les bclemnites qui font fi nom-
breufes , tandis que toutes les vraies dents fofiïles
font reconnoiffables à ces mêmes marques qui man-
quent aux bélemnites. Géographie , Phyjîque , &c. pa-
g'363.
M- Le Monnier n'eft point oppofé au fentiment de
M. "Woodward , pour l'origine de la bélemnite ; il la
croit appartenante au règne minéral. Il en a vu dans
le Berri qui étoient entièrement folides , & d'autres
qui étoient creufes en-dedans : celles-ci avoient une
cavité conique comme la furface extérieure de la bé-
lemnite ; l'axe du cône extérieur étoit double de celui
du conc intérieur ; de forte que la pointe de la bélem-
nite étoit entièrement folide , & cette folidité alloit
toujours en diminuant jufqu'aux bords de la baie ,
qui n'étoit qu'une lame tranfparente , & mince com-
me une feuille de papier; cette cavité étoit remplie
d'une terre très-fine , jaune , graffe & humide , qui pa-
roiffoit être , pour ainfi dire , la matrice des bélem-
nites. M. Le Monnier n'a pas vu d'apparence que ces
bélemnites fuffent des tuyaux , des pointes d'hérifîbn
de mer, non plus que des dents du fouffleur ; il lui a
femblé au contraire que ce font des productions de
Ja terre , comme des ftalaftites ou des pyrites. M. le
Monnier appuie cette conjecture lur ce que les bé-
lemnites incruftées dans la pierre ôc dans la craie , &
qui n'ont pour ainfi dire plus de vie , ne renferment
point de cette terre jaune & humide ; que cette mê-
me terre le trouve par-tout oii il y a des bélemnites en
certaine quantité ; & que le feuillet mince , tranfpa-
rent & fragile qui termine la bélemnite , peut être re-
gardé comme un ouvrage en train , auquel la nature
n'a pas encore mis la dernière main. M. le Monnier
fait parfaitement que l'on trouve avec les bélemnites
des cornes d'ammon , 6c d'autres coquilles, telles que
les gryphytes , les pétoncles, les cames, &c, mais il
Tomt H,
BEL
195
fait remarquer qu'on rencontre auflï dans les mêmes-
endroits du gypfe & des pyrites. Mérid. de l'Obfery,
de Paris , &c. Obferv. cTHifi. nat. p. iz5. &fmv.
On voit par cet expofé,que les Naturaliftes ne font
point d'accord fur l'origine & la nature de la beiem-
mte : on n'a pas encore prouvé d'une manière déci-
five que ce fort un minéral ou une pétrification ori-
ginaire du règne animal. ( 7 )
Bélemnite , ou Pierre de Lynx , (Mat. med.j
Les Allemands la croyent bonne contre le cochemar
& le calcul des reins ; ils en ordonnent Ja poudre de-
puis un gros jufqu'à un gros & demi. ( N)
* BELINGELA , (Hifi. nat. bot.) c'eftun fruit qui
fe trouve en Afrique & en Amérique : les racines
font groffes & courtes , fes feuilles grandes , d'un
verd obfcur, & remplies de veines brunes tirant fur
le pourpre. Elle porte deux ou trois fleurs blanches
mouchetées de rouge : le fruit à l'extérieur eft rond,
uni & brillant comme une pomme ; le dedans eft
plein de chair, & contient beaucoup de femences.
Les habitans du Brefil en font un très-grand cas. Il
n'eft pas fain de le manger crud : mais en le faifant
cuire , & l'affaifonnant avec du poivre & de l'huile,
il prend un goût aigrelet & agréable , qui a quelque
rapport avec celui du citron.
BELENOIDE , apophyje bélenoide , voyeir S T Y-
L O ï D E. (Z,)
BELENOS ou BELENUS, (Mytk. ) nom que les
Gaulois donnoient au foleil , qu'ils appelloiem auffi
Mithra. On croit que c'eft le même que le baal de l'E-
criture , & le Belus des Affyriens. Elias Schedius per-
luadé que le nom de Belenus étoit myftérieux , julque
dans les lettres qui le compolent , les a conlïderées
félon leur valeur dans les nombres ( à la manière des
anciens Grecs, dont les caractères étoient, dit-on ,
en ufage parmi les Druides ) , & a trouvé qu'elles
faifoient trois cens loixante-cinq jours; tems de la
révolution du foleil autour de la terre.
B » ^ s v 0 ç
2 8 30 5 50 70 200
L'on voit plufieurs inferiptions rapportées par Gnt-
ter & par d'autres antiquaires, qui prouvent que Be-
lenus étoit la même divinité que le foleil ou Apollon ;
entr'autres celle-ci :
Apollini Beleno. C. Aquileunf. feli.x . (G)
* BELER , ( Géog. ) rivière de Catalogne qui fe
jette dans la Méditerranée proche de Barcelone.
* BELER AN, ( Géog. ) île de la mer Méditerra-
née , proche d'Yvica.
* BELESME , ( Géog. ) ville de France allez an-
cienne , dans le Perche. Lon. iy. 14. i$. lut. 48. 22.
32.
BELETTE, f. f. muftela domejlica , ( Hifl. nat.
Zoolog. ) petit animal quadrupède dont on a donné
le nom à un genre entier de quadrupèdes , genus
mujlelinum. Les animaux de ce genre font carnaf-
fiers : mais ils différent des autres animaux carnal-
fiers , en ce qu'ils font plus petits , qu'ils ont le corps
plus mince &£ plus long , la tête plus petite & plus al-
longée , Si. les pattes plus courtes ; de forte qu'ils
lemblcnt être faits pour fe gliffer cvs'infmuer à tra-
vers les plus petites ouvertures ; cv en effet ils pénè-
trent dans des endroits dont l'entrée eft fi étroite >
qu'on ne croiroit pas qu'il leur fût poffible d'y en-
trer.
La belette eft plus petite que le putois ; le dos &
les côtés du corps font de couleur rouffe , la gorgé
& le ventre font blancs ; & cette couleur s'et
puis le bout de la mâchoire inférieure , julqu*à l'e sc-
trémité des pattes de derrière fur leur cote intérieur ;
car le côté extérieur , Cv prèiquë tout le relte du
corps eft roux ; le mufeau relfemble à celui du chien,,
Bbij
196 BEL
de ferfe que la mâchoire fupérieure efr plus avancée
■que l'inférieure. La Mette a des foies en forme de
■rncaftache. Ses dents l'ont au nombre de trente-
deux ; fix incifives , deux canines , & huit molaires
dans chaque mâchoire ; les canines font longues &
fortes : les yeux font petits & noirs ; les orcilies cour-
tes & larges , arrondies , couvertes de petit poil fort
épais : ce" qu'il y a de fmgulier, c'eft que la partie
pofrérieure de la conque ell dcuble, c eft-à-d;re,
compofée dedéttx panneaux qui forment une forte de
poche dont l'entrée ell au bord de la conque. La queue
ell alTez femblable à celle d'un fat , quoique beau-
coup plus courte : les pies font larges à proportion
de la grofTeur de l'animal ; il y a cinq doigts à cha-
que pie, & un petit ongle à chaque doigt. La belette
ell un animal fort vif & loi t agile ; elle habite dans les
greniers, clans les vieux muis, dans les étables, &
flirtant dans les trous en terre : elle cherche avec avi-
dité les œufs des pigeons , des poules , &c. pour les
manger. Elle fe nourrit le plus fou vent de rats , de ier-
pens, de taupes; elle les iiirprend dans leurs trous ,
parce qu'elle efl faite de façon qu'elle y pénètre aliè-
nent; 6c elle efr. affez courageufe pour attaquer des
animaux plus gros qu'elle , comme lontles gros rats,
car on prétend qu'elle leur donne la chalTe de quelque
efpece qu'ils l'oient. L'agilité delà belette & la fineffe de
fon inltinct, lui donnent aulîi de l'avantage fur les
chauvëfouris ec fur d'autres oifeaux , dont on prétend
qu'elle fuce le fang après qu'elle les a tués. Ray. Al-
drovande. V. FOUINE, PUTOIS, QUADRUPEDE. (/)
La belette eil d'uiage. Après en avoir ôté les boyaux,
l'avoir lalée & fait lécher à l'ombre , deux gros de
cet animal préparé , comme on vient de dire , paifent
pour un remède efficace contre le venin du lèrpcnt,
6c contre toute forte de poilon. Son ventricule rem-
pli de femence de coriandre, & gardé pendant un
tems convenable, eilfaiutaire contre fepilepfie Si la
morfure des ferpens.
La belette caicinée dans un pot de terre , eft utile
contre les douleurs de la goutte ; fon fang diminue
les tumeurs fcrophuleuies lorlqu'on l'applique deffus;
fes cendres mêlées avec du vinaigre ont la même
vertu. Diofcoride. (A7)
* EELEZO , ( Géog. ) ville & palatinat de la Po-
logne.
"* BELFAST, ( Géog. ) ville d'Irlande au comté
d'Antrim , avec château 6c port.
* BELFOP«TE , ( Géog. anc. & mod. ) village du
royaume deNaples, dans la calabre ultérieure, près
de la rivière de Metramno , au midi de Mileto, On y
voit encore les ruines de l'ancienne Subc'tnum ou Sub-
Jicinum des Brutiens.
♦BELGARD ou BELGRAD, {Géog.) ville du
duché de Poméranie, fur le Perlante.
* BELGES ou BELGIQUE , ( Géog. & HiJÎ. anc. )
peuples qui habitoient une des trois parties de la
Gaule, qu'on appella Belgique. La Belgique fut ioùdi-
vilée dans la luite en Belgique première , Belgique fé-
conde, Germanie inférieure, & Germanie lupérieu-
re. Céfar la place entre le Rhin, l'Océan, & les ri-
vières de Seine & de Marne. On donne aujourd'hui
le nom de Belgique à la baffe Allemagne , qui com-
prend les dix-lept piovinces des Pays-bas.
* BELGRADE, ( Géog. anc. & mod. ) ville de la
Turquie Européenne, capitale de la Servie , au con-
fluent du Danube & de la Save. Long. 38. 30. lac
4Ô. Quelques-uns croyent que c'eit le Taurinum des
anciens.
* Belgrade, (Géog.') petite ville de la Turquie
Européenne, dans la Romanie, fur le Bofphore de
Thrace. Long. 40. 30. lat. 41. 21.
* BELGRADO , {Géog.) petite ville d'Italie , dans
le Frioul & l'état de Vernie. Long. 30. 35. lat. 46.
_ * Belgrado , {Géog.) petite nviere de la Roma-
tiie, en Turquie.
BEL
*EELÎ, voyei Covalam ; c'eft tin grand arbre
fruitier qui rciicmbie affez au coignaiiler , qu'on ap-
pelle aulfi ferifoli Bengalenjïum.
BELIA.L, f. m. ( Myth. ) nom d'une idole des Si-
doniens. S. Paul donne ce nom à Satan ou au démon.
S. Jérôme dit que par les enfans de bélial , on doit en-
tendre les enfans du démon , c'eft-à-dire ,les méchans.
C'eil en ce iens que les deux fils d'Heli , Ophni & Phi-
nées, font appelles J?/« belial. Reg. I. c. ij. v. 1 1. Par-
mi les imprécations que Semeï fait à David fuyant de*
vant Ablalon, il l'appelle homme de fang , homme de
bélial, vir belial; c'elt- à-dire, cruel & méchant. //•
Reg. c. xvj. verf. y. Aquila explique ce mot par celui
d'apojlat : il renferme, félon d'autres, une elpece
d'injure qui répond à nos mots François de fainéant
& de vaurien. Gregorii lexic.far.ee. (G)
BELIC , f. m. terme de Blafon , qu'on employé quel-
quefois au lieu de gueules , pour lignifier couleur rou-
ge. On dit auffi b-.hf. Voye^ GUEULE. {V)
BELIER, f. m. ar'us , { HijL nat. Zoolog. ) animal
quaduipede qui eu le maie de la brebis , qui porte le
nom d'agneau dans les premiers tems de fa vie , & qui
prend celui de mouton iorfeiùl a é:é coupé- L'agneau,
le bélier , la brebis & le mouton , appartiennent donc
à un feul genre que les Naturaliit.es appellent ovimtm
genus, ovillum pecus, le genre des brebis. Ce genre
porte le nom de la femelle & non pas celui du mâle,
fans doute parce qu'on élevé bien plus de femelles
&C de mâles coupés , que de mâles entiers. Car il y a
des troupeaux de moutons & des troupeaux de bre-
bis : mais jamais on n'a vu des troupeaux de béliers ;
on n'en garde qu'autant qu'il en faut pour féconder
les femelles.
Quoi qu'il en foit de la dénomination du genre ,
je crois que fa defeription doit être à l'article du bé-
lier, ne fût-ce que parce que les cornes font un des
caractères génériques. Les animaux du genre dont il
s'agit ici font partie du bétail : ils font couverts de
laine au lieu de poil ; leurs cornes font creufes , ri-
dées, recourbées, & quelquefois contournées enfpi-
ralc. La femelle a deux mammelles. Ces animaux
n'ont pas le quart de la groffeur du bœuf; ils font lâ-
ches & timides : cependant les béliers montrent du cou-
rage, îiirtout Iorfque leurs cornes commencent à pa-
rc, re : ils le battent les uns contre les autres à coups
de tête & de cornes ; & ils font quelquefois affez har-
dis pour attaquer des hommes, îurtout Iorfqu'ils cou-
vrent les femelles. Ils en peuvent féconder dès l'âge
d'un an : mais les agneaux qui en viennent ne font
pas auffi bien conditionnés que ceux qui ont été pro-
duits par un bélier de trois ans. Quoique les brebis
n'entrent en chaleur que vers le commencement de
Novembre, cependant les béliers s'accouplent avec
elles , & les fécondent en tout tems , lorlqu'on leur
en donne la liberté. Ils font très-propres aux femelles
depuis l'âge de trois ans jufqu'à huit ; & un feul peut
fulfîre à trente & même à cinquante brebis , & quel-
quefois jufqu'à foixante, & plus. On ne doit les laif-
fer enfemble qu'autant de tems qu'il en faut pour
l'accouplement, afin de ménager les forces du mâle
& des femelles.
Les meilleurs béliers font ceux qui ont la tête grof-
fe , le nez camus , le front large , les yeux noirs &
gros, les oreides grandes, le corps long & élevé ,
l'encolure & le rable large, le ventre grand , les tei-
ticulesgios, & la queue longue. Ils doivent avoir
beaucoup de laine, même dans les endroits où il y
en a ordinairement le moins ; c'eft-à-dire, fur le ven-
tre, la queue & les oreilles, 6c fur la tête jufqu'au-
tour des yeux. Quoique la toiion du bélier io\t entiè-
rement blanche, on prétend qu'il ne produit que des
agneaux tachetés, s'il a la moindre tache à la langue
ou au palais. Les béliers qui ont des cornes parlent
pour être plus ardens 6c plus propres à féconder les
BEL
BEL
brebis , qr.e ceux qui n'en ont point; & on croît que
'cette différence eft fort fenfiblc dans les pays froids ,
8c même dans les climats tempérés : mais les béliers
cornus font plus incommodes & plus dangereux dans
le troupeau que les autres ; parce qu'ils le battent
plus fouvcnt, non-feulement contre les autres mâles,
mais aufîi contre les brebis , & qu'ils les bleffent.
Pour arrêter leur fureur , & les empêcher de doguer,
©n leur perce les cornes avec une tarriere près des
oreilles , à l'endroit où elles fe courbent. Il y a en-
core un autre moyen , qui eft de pofer fur leur front
& d'attacher à la racine des cornes , un morceau de
planche garni de pointes de fer tournées du côté du
front, qui piquent l'animal toutes les fois qu'il donne
un coup de tête.
Lorique les béliers ont paffé huit ans, & qu'ils ne
font plus propres à la multiplication de leur efpece,
on les fait tourner & on les engraiffe : mais leur chair
a toujours de l'odeur & du goût de celle du bouc , &
elle n'eft jamais aulîl bonne que celle du mouton , ni
même que celle de la brebis, fsye^ Aldrovande & la
Mai/on rufiique. Voy. AGNEAU , MoUTON, BREBIS,
Quadrupède. (/)
BÉLIER , aries, (Aflron?) le bélier eft le premier des
douze lignes du zodiaque ; il donne fon nom à la dou-
zième partie de ce cercle. V. Signe. Les étoiles qui
forment cette conftellation, font dans le catalogue de
Ptolomée au nombre de 18 , dans celui deTicho au
nombre de 21 , & dans le catalogue Britannique au
nombre de 65. Voyt{ Printems, Equinoxe. (O)
Bélier, f. m. (Art. milit.') machine dont les an-
ciens fe fervoient pour battre les murailles des ou-
vrages qu'ils attaquoient. Arles , arietaria machina.
Le bélier étoit une groffe poutre ferrée par le bout
en forme de tête de bélier. On s'en fervoit pour battre
les murailles , en le pouffant à force de bras , par le
moyen de cables ou de chaînes, avec lefquels il étoit
fufpendu. On faifoit jouer le bélier fous une galerie,
à laquelle on donnoit le nom de tortue , ou dans une
tour de bois deftinée à cet effet. V. cette tour , Plan-
che XI. de l'Art militaire. Il y avoit des béliers fufpen-
dus, & d'autres qui ne l'étoient pas. Voici la deferip-
tion du bélier fulpendu , fuivant M. le chevalier de
Fclard.
Le bélier fufpendu étoit compofé d'un feul brin de
bois de chêne 2 , PL XII. allez femblable à un mât
de navire , d'une longueur &c d'une groffeur prodi-
gteufe , dont le bout étoit armé d'une tête de fer fon-
du 3, proportionnée au refte , & de la figure d'une
tête de bélier ; ce qui lui fit donner ce nom , à caufe
qu'elle heurte les murailles commeje bélier fait de fa
tête tout ce qu'il rencontre. Tous ceux que l'on voit
fur les monumens Grecs & Romains paroiffent fous
cette forme. La tête du bélier , dit Vitruve , portait
quatre bandes de fer longues environ de quatre pies , par
le/quelles elle étoit attachée au bois. A l'extrémité de
chacune de ces bandes 4, il y avoit une chaîne 5 de
même métal , dont un des bouts étoit attaché au cro-
chet 6, &: à l'autre extrémité des quatre chaînes il
y avoit un cable , dont un des bouts de chacun étoit
fortement amarré au dernier chaînon ; ces cables
étoient allongés le long de la poutre béliere julqifi
l'arriére 7 le long de la poutre , liés ierrément tous
les quatre enfemble par une petite corde , qui les
contenoit fermes & bandés autant qu'il étoit poffi-
ble , ainfi qu'on le pratique ordinairement fous les
brancards d'une chaile de polie , pour leur donner
plus de force.
A l'extrémité de ces cables, il devoit y en avoir
Un autre, & un trelingage 8 au bout* c'eft-à-dire ,
un cordage qui finit par plulieurs branches, à cha-
cune defquelles il y avoit plulieurs hommes pour ba-
lancer la machine. Pour fortifie* da vantât <■ le bélier,
on faifoit une liure de plulieurs tours de corde 9 à la
*97
diftance d'environ deux pies d'une liure à l'autre ;
les tours de chaque cordage liés auffi ferrement &
près à près qu'il étoit poffible, & fans déborder. Ce
bélier ou poutre béliere , devoit être d'une groffeur con-
forme à fa longueur; Vitruve lui donne quatre mille
talens de pefanteur, c'eft-à-dire , quatre cents quatre-
vingts mille livres, ce qui n'eft pas exorbitant. Cette
terrible machine, comme Jofephe l'appelle, étoit ba-
lancée en équilibre comme la branche d'une baian-
ce , avec une chaîne ou de gros cables 10 qui la te-
noientfufpendue. Cette chaîne ou ces cables doubles
étoient amarrés au milieu d'une puiffante poutre de
travers 1 1 , pour tenir fufpendue & comme en l'air
une maffe fi prodigieufe. On faifoit pour ioùter.ir la
poutre traverfante une bafe 1 2 , non pas telle que Jo-
lephe & Vitruve larepréfentent, mais en quarré lon<*
de trente ou quarante pies , & quelquefois davanta-
ge , fur plus ou moins de largeur félon la longueur de
la poutre. Les auteurs varient fur ces propon
comme dans tout le refte ; car il ne faut point cher-
cher l'uniformité dans ceux qui ont écrit des machi-
nes de guerre ; on ne manque jamais de trouver les
auteurs en contradiction entr'eux fur les mêmes cho-
fes ; parce que la plupart ont écrit fans expérience ,
& d'autres , après les changemens qui ont été faits
dans ces machines.
Sur les deux côtés de cette bafe on élevoit dix gros
poteaux de 2 5 à 3 o pies de haut , fans les tenons , dont
quatre faifoient les encognures ; ces poteaux étoient
joints en-haut par quatre fablieres pour recevoir les
bouts des poteaux , de même qu'ils l'étoient par en-
bas , avec les poutres qui faifoient le premier chaffis
ou la bafe ; fur cet affemblage de montans & de tra-
verfans , & les fablieres qui alloient de chacun des
poteaux à l'autre oppofé , on paffoit la poutre de tra-
vers dont j'ai déjà parlé , polée entre deux coins de
bois de chaque côté , traverfées de fortes chevilles
de fer, & de puiffantes équ erres , qui fervoient à re(-
ferrer & tenir ferme les deux bouts de la poutre tra-
verfante qui fbûtenoit la béliere.
Toute cette charpente, qui prenoît quelquefois le
nom de tortue béliere à comble plat, & le plus fou-
vent à comble aigu , étoit couverte de manière dif-
férente félon les forces des affiégés. On l'envelop-
poit quelquefois d'un tiffu d'olier verd enduit de ter-
re graffe, & recouvert d'un rideau de peaux fraîche-
ment écorchées, que l'on doubloit d'autres peaux où
l'on mettoit entre deux de l'hetbe marine piquée com-
me nos matelas , ou de la mouffe , le tout trempé
clans du vinaigre, afin que cette couverture fût à
l'épreuve des pierres & des dards , dont les affiégés
n'étoient pas chiches : car ces rideaux matelaffés étant
fufpendus à un pié de la charpente , rompoient la
force des coups des machines ; & lorique la place en
étoit abondamment fournie, on garnilîoit les côtés
de charpente de forts madriers , indépendamment des
mantelets.
Comme le comble foufrroit le plus par les mafTes
affreufes chaffées par les groffes catapultes , qui fai-
foient autant de defordre que nos mortiers, on le cou-
vroit de madriers revêtus de claies enduites de mor-
tier ou d'argille , pétrie avec du crin & de la bourre.
Traité de f attaque des places des ancien*, parM. le che-
valier de Folard. Vqye^ Plane. XI I. de t Art militaire,
une tour avec ion pont & Ion bélier renfermé dedans.
A^je^dw^r HELEPOLE. (Q)
BELIÈRES , lubft. f. pi. ea terne de Metteur en œu-
vre, le dit de certains petits anneaux d'or ou d'argjnt
auxquels on fufpend une pendeloque ou un pendant.
On nomme béliere du talon celle qui reçoit l'une ou
l'autre de ces choies ; & ■ - --u cliquet , celle qui
paffe fous le tendon de l'oreille, 6c retient toujours
la boucle du même coté. V. Cliquet & Talon.
* BELILLA , {H>Jî> ****, bot.) aibriffeau Indien qui
198
BEL
porte des baies, oc fur le compte duquel on ne tant
point : on lui attribue une foule de propriétés médi-
cinales qu'on peut voir dans le diûionnaire de Méde-
cine; nous ne les rapporterons point ici, parce que
nous n'ajoutons pas beaucoup de foi aux propriétés
des choies qui nous paroiflent auffi peu connues que
le belilïa , dont on n'a qu'une phrafe botanique.
BELïN, {Marine) foye^ Blin»
* BELINGE , f. f. (Commerce) tiretaine greffiers ,
fil & laine , qui le fabrique à Beauchamp le vieil , en
Picardie. .„./!. r ,
* BELINZONA, (Géog.) ville de la SuuTe, fur le
Tefin , aux frontières du Milanois.
* BELITZ ( Gêog. ) petite ville de la Marche de
Brandebourg , fur l'Ada.
* BEL1ZANA ( Myth. ) nom fous lequel les Gau-
lois adoroient Minerve , inventrice des Arts. Elle
ëtoit repréfentée , fans lance & fans égide, revêtue
d'une tunique fans manches ; les pies croilés , & la
'tête appuyée fur fa main droite ; comme une fem-
me qui médite. On auroit pu lui ôter encore fon
cafquc & fon aigrette.
* BELLAC ( Gêog. ) petite ville de France , dans
la Marche , fur la petite rivière d'Unicon. Long. i8.
•48. lat. 46. 4.
BELLADONE, f. f. belladona { Mjt. nat. bot. )
genre de plante à fleur monopétale en forme de clo-
che découpée fur l'es bords. Il s'élève du calice un
piftil , qui eft attaché comme un clou à la partie
' poftérieure de la fleur , dont la bafe devient dans la
fuite un fruit prefque rond , mou , partagé en deux
loges par une cloiton mitoyenne. Ce fruit renferme
plufieurs femences attachées à un placenta. Tourne-
fort, Inji. rti herb. Voyc7^ Plante. (/)
Belladone ou Solanum, UthaU offic folanum
maniacum multis , feu belladona. J. B. j. 6 II. Les
fruits & les feuilles auffi bien que les tiges de cette
plante font aflbupiflans , & très - dangereux : leur
ufage intérieur eft très -équivoque. On lit dans les
Mémoires de r Académie 1703 , que des enfans ayant
mangé de ces fruits eurent une fièvre violente avec
des convulfions & des battemens de cœur terribles ;
ils perdirent la connoiffance & les fens , & tombèrent
dans une aliénation d'efprit. Un petit garçon de qua-
tre ans mourut le lendemain ; on lui trouva trois
plaies dans l'eftomac avec des grains de folanum écra-
fés , & des pépins enfermés dans les plaies , le cœur
livide , nulle lérofité dans le péricarde : ces faits fu-
rent atteftés par M. Boulduc.
Le remède à ces maux eft le vomiflement , pro-
curé en buvant de l'eau miellée , ou du vinaigre en
grande quantité.
Les feuilles & les fruits font bons appliqués ex-
térieurement , font adoucifians & réfolutifs ; on s'en
"fert fur les hémorrhoïdes &fur le cancer : on les fait
"bouillir avec le faindoux , & on en compofe une
pommade pour les ulcères carcinomateux, &c pour
les durillons des mammelles. Ces avis font de Mrs.
Ray & Tournefort.
Les peintres en mignature font macérer le fruit ,
& en préparent un beau vert. ( N)
* BELLAGINES okBILAGINES, fub. f. pi.
'( Jurifprudence. ) c'eft le recueil des loix municipales
des Goths , ainfi appelle par Diceneus des mots
Saxons £/,qui fignihe habitation , bourg ou ville , Se
lagen, loi.
BELLA MORESKOY-LEPORIE. V. Lepoiue.
* BELLANO ( Géog. ) ville fur le lac de Comc,
dans le Milanois.
* BELLA-POLA ( Géog. ) île fituée dans le gol-
phe de Napoli , en Morée.
BELLE , EMBELLE , f. f. ( Marine. ) c'eft la par-
tie du pont d'en-haut , qui règne entre les haubans
BEL
de mi'fene & les grands haubans ; & qui ayant fon'
bordage & Ion plat-bord moins élevé que le refte de
l'avant & de l'arriére , laifle cet endroit du pont
prefque à découvert parles flancs. Pendant un com-
bat on met des pavois & des garde - corps pour fer-
mer ou boucher la belle. C'eft ordinairement par la
belle qu'on vient à l'abordage. Voyt^ Herpe & Em-
BELLE.
La belle eft prefque toujours au tiers du vaifieau
ou à l'endroit où Ton prend le gros du vaifleau. P'oy.
PI. I. L'efpace entre les lettres L & K eft la belle.
Aborder en belle; voye{ A BORDER. {Z)
BELLE , terme de rivière , forte de perche de frêne
dont on fe fert fur les bateaux pour foûtenir les ban-
nes ou toiles.
Belle de nuit , ( Hifl. nat. bot. ) plante qui doit
fe rapporter au genre appelle jalap. V. Jalap. (/)
Cette plante eft fort commune dans les jardins ,
011 elle orne les parterres & les boulingrins. On l'ap-
pelle quelquefois merveille du Pérou. Elle s'élève de
deux pies , eft aflez garnie de feuilles pointues Ô£ d'un
beau verdj les fleurs de couleur rouge ou de jaune &
de blanc , forment un tuyau évafé en entonnoir à
cinq parties qui font jointes enfemble avec deux ca-
lices , dont le premier lui fert d'enveloppe , & le fé-
cond d'un appui , qui devient un fruit rempli de fe-
mence. La belle de nuit ne fleurit qu'en automne , &
ne s'épanouit que le loir , d'où elle a pris fon nom.
On la tranfplante dans les parterres parmi les plan-
tes de la grande efpece , à l'ombre fi l'on peut : on la
met encore dans des pots. Elle fe feme fur couche à
claire voie , & demande à être arrofée. ( K )
* BELLEGARDE , ( Géog. ) ville de France en
Bourgogne fur la Sône , avec titre de duché.
Bellegarde , ( Géog.) ville de France dans le
Rouffillon, au-deffus du col de Pertuis fur la fron-
tière de Catalogne , entre Ceret & Jonquieres. Long.
20. 30. lat. 42. 20.
* BELLE-ISLE , (Géog.) île de France à frx lieues
de la côte de Bretagne , dans l'évêché de Vannes ,
d'environ fix lieues de long fur deux de large.
BELLE-FACE , ( Manège.) Voye{ CHANFREIN.
BELLERIES , {Médecine.) efpece de myrobolans.
Voye{ Myrobolans.
* BELLEVILLE , ( Géog. ) petite ville de France
dans le Beaujolois , près de la Sône. Long. 22. 16.
lat. 45. 5.
* BELLEY ou BELLAY , {Géog.) ville de France ,
capitale du Bugey , proche le Rhône. Long. 23. 20.
lat. 45.43.
* BELLICULE, f. f. {Hift. nat.) c'eft une efpece
de limaçon de mer ou poiflbnà coquille umbiiicaire,
blanche avec des taches jaunes , ou jaune avec des.
raies noires.
BELLIDASTRUM, {Htft. nat. bct.) genre de
plante qui ne diffère de la pâquerette que parce que
l'es femences lont garnies d'aigrettes , & que la cou-
che de la fleur n'eftpas faite en pyramide. Nova plan-
tartan gênera , &c. par M. Micheli. Voye^ Plante.
* BELLIGAMME, ( Géog. ) contrée du royaume
de Jafnapatman , dans l'île de Ceylan.
* BELLINUS , ( Myth. ) c'eft le même que Bele-
nus. Koye-K BeLtNTjs. De tous les pays de la Gaule
oii Bellinus avoit des autels , il n'y en avoit aucun
oii il fut plus révéré qu'en Auvergne.
BELLIS ou MARGUERITE, leucanthemum. Voy.
Marguerite.
* BELLOC , ( Géog. ) petite ville de France en
Eéarn , fur le gave de Pau.
BELLON , f. m. ( Médecine. ) maladie extrême-
ment commune en Derbyshire , à laquelle les ani-
maux, la volaille & les hommes font fujets ; en gé-
néral elle reçne dans toutes les contrées infeâées de
BEL
l'odeur de la mine de plomb : c'eft pourquoi on dif-
tingiie un certain efpace autour des lieux où l'on
travaille la mine de plomb , que l'on appelé lafphirc
du bdlon. Il eft très-dangereux pour tout animal de
paître dans cet intervalle. Les fymptomes concomi-
tans de cette maladie font la langueur , la foibleffe >
des douleurs insupportables , des tiraillemens dans
le ventre , & généralement la conftipation. Elle eft
ordinairement mortelle. La méthode de la guérir la
plus heureufe , eft d'ordonner aux malades la crème
ou les cryftaux de tartre en petite dof'e , mais fré-
quemment réitérés ; par exemple , deux ou trois fois
par jour. Il faut remarquer que le fucre de faturne
pris avec excès , produit la même maladie : elle a
été occafionnée dans des perfonnes à qui on l'avoit
ordonné, pris en remède contre les fleurs blanches.
Voyei Plomb. (N)
BELLONAIRES , (Hifl. anc.) prêtres de Bellone ,
la déeffe des combats. Lorfqu'on les admettoit au
facerdoce , ils fe faifoient des incifions à la cuiffe ou
au bras ; & recevant dans la paume de la main le
fang qui fortoit de cette bleffure , ils en faifoient un
facrifice à leur déeffe. Cette cérémonie violente ne
fut plus que fimulée dans la fuite. Ces prêtres étoient
des fanatiques , qui dans leurs enthoufiafmes prédi-
foient la prife des villes , la défaite des ennemis , &C
n'annonçoient que meurtre & que carnage. (G)
BELLONE , f. f. bdlonia , (Hifl. nat. bot.) genre de
plante dont le nom a été dérivé de celui de Pierre
Bellon , médecin de Caen , qui a écrit fur les arbres
conifères , & fur d'autres parties d'hiftoire naturelle.
La fleur des plantes de ce genre eft monopétale ,
rayonnée & découpée : il s'élève du fond du calice
un piftil , qui eft attaché comme un clou au milieu
de la fleur. Le calice devient dans la fuite un fruit
dur d'une figure ovoide pointue , rempli de petites
femences. Plumier , Nova plant. Amer. gen. Voye^_
Plante. (/)
Bellone , (Myth. ) déeffe de la guerre , qu'on
repréfentoit armée d'un cafque & d'une cuiraffe , les
cheveux épars & en defordre , avec une pique à la
main & un flambeau , ou une efpece de fouet enfan-
glanté. Communément fes temples étoient hors des
villes , parce qu'on la regardoit comme une divinité
turbulente : Arnobe même l'a mife au nombre des
divinités infernales. Elle en avoit un à Rome près
de la porte Carmentale , oit le fénat donnoit audien-
ce publique aux ambaffadeurs qu'il ne jugeoit pas à
propos de recevoir dans la ville. Il y avoit dans ce
temple une petite colonne nommée bellica , fur la-
Suelle on mettoit une pique lorfqu'on étoit prêt de
éclarer la guerre à quelque ennemi ; ou , comme
d'autres prétendent, par-deffus laquelle les confuls
ou les féciaux lançoient un javelot le plus loin qu'ils
pouvoient , comme s'ils l'euffent jette dans le pays
ennemi , pour déclarer la guerre. ( G )
BELLONS , (Hifl. mod.) c'eft une efpece de lam-
pe ufitée en Efpagne , que l'on place fur un pié d'ar-
gent ou d'autre métal fort évafé. Chaque lampe a
huit ou dix tuyaux par où l'on fait paffer la mèche ;
ce qui fait que ces lampes éclairent parfaitement ;
& pour augmenter encore la lumière, on place der-
rière une plaque d'argent bien polie , qui la refléchit.
On y brûle ordinairement de l'huile très-pure.
* BELLUNO , ( Géog. ) ville d'Italie , capitale
du Bcllunois dans la Marche-Trévifanc , fur la Piave.
Long. 2Ç). 45. lat. 46. g.
* BELMONT , (Géog. ) petite ville de France
dans le Quercy , généralité de Montauban.
* BELNAUX, f. m. pi. (Œconom. mfi. ) ce font
des efpeces de tombereaux qui fervent à la campa-
gne au tranfport des fumiers dans les terres. Com-
me ils font lourds, on leur préfère les charettes.
* BELOÉRE , ( Hifl. nat. bot. ) plante Indienne ,
BEL
ï99
toujours verte. Nous ne dirons rien de fes proprié-
tés , parce qu'on ne nous en apprend pas affez pour
la connoître.
BELOM ANTIE ,(.f.( Divination. ) efpece de di-
vination qui fe feifoit avec des flèches ; du Grec /3s-
*oç , arme de jet , dard, flèche , &C. & juanw* , divina-
tion. Elle étoit fort en ufage chez les Orientaux pour
prendre les augures, furtout avant que de commencer
les expéditions militaires. « Le roi de Babylone , dit
» Ezéchiel en parlant de Nabuchodonolbr , s'eft ar-
» rêté à la tête des deux chemins ; il a mêlé des fle-
» ches dans un carquois pour en tirer un augure
» de la marche qu'il doit prendre. Le fort eft tombé
» fur Jérufalem , & lui a fait prendre la droite ».
D'où il s'enfuit que la belomande fe pratiquoit de
cette forte. Celui qui vouloit tirer un augure fur fon
entreprife prenoit plufieurs flèches , fur chacune def-
quelles il écrivoit un mot relatif à fon deffein & pour
ou contre ; il brouilloit enfuite & confondoit ces flè-
ches dans un carquois ; & la première qu'il tiroit le
décidoit , fuivant ce qu'elle portoit écrit. Le nom-
bre des flèches n'étoit pas déterminé ; quelques-uns
le font monter à onze : mais Pocockius , dans Ion Ejfai
fur rhijloire des Arabes , remarque que ces peuples ,
dans une efpece de divination femblable à la belo-
mande, & qu'ils nomment ala^alam , n'employent
que trois flèches ; l'une fur laquelle ils écrivent ces
mots : le Seigneur m'a commande ; fur la féconde ceux-
ci: le Seigneur m a empêché ; & ne marquent rien fur
la troifieme. Si du vafe oit ils ont mis ces trois flèches
ils tirent du premier coup la première ou la féconde,
c'en eft affez pour leur faire exécuter le deffein qu'ils
ont projette , ou pour les en détourner. Mais fi la troi-
fieme leur tombe d'abord fous la main , ils la remet-
tent dans le vafe jufqu'à ce qu'ils en ayent tiré une
des deux autres , arin d'être abfolument décidés. Voy.
Divination.
Il eft encore mention dans le prophète Ofée , ch.
vj. d'une efpece de divination qu'on faifoit avec des
baguettes , & qui a plus de rapport à la rhabdomantic
qu'à la belomande. Voye^ Rhabdomantie. Grotius
& S. Jérôme confondent ces deux fortes de divina-
tions , & prouvent que la belomande eut lieu chez les
Mages , les Chaldéens , les Scythes ; que ceux - ci la
tranfmirent aux Sclavons , de qui les Germains la re-
çurent. (G)
BELOUSES , f. f. pi. ( Paumier. ) ce font des trous
pratiqués fur la table d'un billard, dans lefquels on
tâche de faire entrer les billes en les frappant avec
d'autres billes. Il y a ordinairement fix beloufes fur
une table de billard, lavoir une à chaque coin, &
deux autres dans le milieu de la longueur des deux
grands côtés.
BEL-OUTIL, f. m. che^ les Orfèvres & Us Bijou-
tiers ,c 'eft une efpece de petite enclume trés-étroite ,
fort longue , un peu convexe &c portative , à deux
cornes longues , l'une ronde &c l'autre quarrée : c'eft
de là que plufieurs artiftes l'appellent auffi bigorne ou
bigorneau. Elle fert au même ufage que la bigorne ;
mais à des ouvrages concaves qui ont beaucoup de
longueur, & dont l'entrée doit être fort étroite. Les
deux bigornes ou cornes longues lont féparées par
un petit quarré oblong. II y a des outils d'Oi -fe\ rg
qui portent le même nom de bel-outil, & qui n ont
qu'une corne; le refte depuis l'origine de la corne,
eft un quarré oblong & étroit , d'une forme un peu
convexe, & qui va en s'allongeant & en conlervant
la même forme. Voye^ Orfèvre , Planche I. £*• II.
BELT , ( Géog. ) nom de deux détroits de Dane-
mark , dont l'un eft appelle le grand Belt , & l'autre
le petit Belt.
* BELTZ ou BELTZKO, (Géog.) ville de Po-
logne, dans le palaùnat de même nom. Long. 41.
44. lat. 5o, 30.
2oo BEL
BELVEDERE , f. m. ( Architecture. ) mot italien
qui fignifie belle vue; c'eft ordinairement un petit bâti-
ment fitué à l'extrémité d'un jardin ou d'un parc pour
y prendre le frais, s'y mettre à l'abri de l'ardeur du fo-
leil ou des injures du tems. Les belvédères ne font com-
pofés, pour la plupart, que d'un ialon percé à jour,
ainli qu'il s'en voit dans plulieurs de nos maifons
royales ; ou bien d'une feule pièce à pans , ellipti-
que ou circulaire , fermée de portes & croifées , com-
me eft celui de Sceaux , nommé le pavillon de l'aurore ;
ou enfin ils font compofés de plulieurs pièces , lavoir
de veftibules , lalons , cabinets , chambres à coucher,
garde-robbes , tels qu'on l'a pratiqué à la ménagerie
de Sceaux, nommée ainfi parce que ce bâtiment eft
fitué au milieu du jardin potager , dans lequel font
diftribuées les baffes-cours de la ménagerie.
Lorfqu'un bel alpect , une campagne fertile , des
prés , des valons , étalent avec éclat les dons de la na-
ture , & que ces points de vue , qui font les délices
de la campagne , fe trouvent éloignés du château
d'une diftance allez confidérable , alors on diftribue
plulieurs appartemens dans ces belvédères pour s'y
raffembler par choix &c fans tumulte : mais dans ce
cas on nomme ces bâtimens trianons. V. Trianon.
La décoration extérieure d'un belvédère doit être
tenue fimple & ruftique ; 6c leur intérieur , au lieu de
lambris , doit être revêtu de marbre ou de pierre de
liais , à moins que ces pavillons par leur proximité
ne foient aviez près du château , pour être fouvent
vifités dans les différentes faifons par les maîtres ou
par les étrangers. ( P )
On appelle auffi très-fouvent belvédère, en jardi-
nage , un fimple berceau élevé fur quelque monta-
gne ou terrafle ; ce peut être auffi une éminence ou
platte-forme élevée ck foûtenue par des talus de ga-
fon , pour jouir de la belle vue dont le belvédère a pris
fon nom. On voit un fort beau belvédère en torme de
palais , dans les jardins de Bagnolet, & dans ceux de
Meudon , de S. Cloud , ôc de Marly : on en trouve
tout de gafon. (K )
Belvédère , f. f. ( Hijl. nat. bot. ) plante qui doit
être rapportée au genre nommé patte d'oye. Foye^
Patte d'oye. (i)
La belvédère, linaria , {Jardinage, ) eft une plante
que les Latins appellent linaria , qui jette plufieurs ti-
ges à la hauteur de deux pies , garnies de feuilles lem-
blables à celles du lin. Ses fleurs font jaunes , fermées
en-devant par deux lèvres en forme de mâchoires.
Il s'élève du calice un piftil qui fe change en un fruit
à deux baies remplies de femences.
Cette plante le multiplie par la graine que l'on
feme en pleine terre pour la replanter. On la trouve
dans les lieux incultes , & on la met iur une platte-
bande ou dans des pots : elle aime allez l'ombre &
forme un buiffon. ( K )
* Belvédère (Géog.) , ville de Grèce, capitale
de la province de même nom , dans la Morée. La
province elt fituée fur la côte occidentale de la mer.
* BELUS (Myth.) , c'étoitla grande divinité des
Babyloniens. S'il eft vrai que la tour de Babel lui ait
fervi de temple, le Paganifme n'a point eu d'autels
plus anciens que ceux de Belus. Les rois de Babylone
y amaflérent iuccefîïvement des threfors immenfes ,
que Xercès pilla au retour de fon expédition de Grè-
ce. Ce fut alors que le temple fut démoli : il en refte
une belle deicription dans le premier livre d'Hérodo-
te. Les prêtres de Belus avoient perfuadé aux habi-
tans de Babylone , que le dieu honoroitde la préfen-
ce toute vierge Babylonienne , qui le rendoit dans
un lit magnifique qu'on avoit dreflé dans le lieu du
temple le plus élevé ; & toutes les nuits Belus avoit
une compagne nouvelle. Ce Belus , qui accueilloit
fi bien les filles de Babylone , étoit le foleil pen-
dant le jour, ou la nature elle-même qu'on adoroit
BEN
fous fon nom. Dans la fuite , le premier roi des Af-
fyriens , qui porta le nom de Belus , ayant été mis au
rang des dieux , on confondit ce Belus avec la gran-
de divinité des AfTyriens. Il y eut beaucoup d'autres
princes de ce nom ; & Cicéron appelle du nom de
Belus , le cinquième de fes Hercules.
* BELUTES (les) f. m. plur. (Géog.) peuple de
voleurs & de vagabonds , qui vivent fous des tentes,
& fe tiennent aux environs de Candahar, entre les
frontières de Perle & de l'empire du Mogol.
* BELUTTA TSJAMPACAM , {Hijl. nat. bot.)
c'eft le nom d'un grand arbre qui croît au Malabar.
Voye^ dans le dictionnaire de Médecine fes proprié-
tés merveilleufes contre les ferpens , les humeurs pi-
tuiteufes du cerveau , la difficulté de tranfpirer , la
toux , la conftipation , les douleurs des membres , &c
* BELZELINGEN, (Géog.) ville de SuifTe, dans
le canton d'Uri.
* BELZIC , (Géog.) petite ville de Pologne , dans
le palatinat de Lublin.
* BELZIEH , (Géog.) ville de l'éleaorat de Saxe.
* BEME, f. m. (HÏjl. mod.) autel des Manichéens
ou jour de fête qu'ils célébroient en mémoire de la
mort de Manés leur fondateur. Berne en général li-
gnifie auffi fan£tuaire. De tous les laïcs , il n'y avoit
chez les Grecs que l'empereur qui pût entrer dans le
berne.
* BEMILUCIUS , (Mythol.) furnom d'un Jupiter
jeune & fans barbe , qui avoit les autels dans la pro-
vince que nous nommons la Bourgogne, aux environs
de l'endroit où eft maintenant l'abbaye de Flavigny.
BÉMOL, en Mufique. Foyer^ B. MOL. (S)
* BEN , iubft. m. {Hijl. nat. bot.) petite noix de la
grofléur d'une aveline , de figure tantôt oblongue ,
tantôt arrondie , triangulaire , couverte d'une coque
blanchâtre, médiocrement épaiffe , fragile, conte-
nant une amande affez groffe , couverte d'une pelli-
cule fongueufe , blanche , de la confiftance d'une ave-
line. On eftime celle qui eft récente , pleine , blan-
che , & fe lépare aifément de fa coque : on l'apporte
d'Egypte.
C'eft le fruit d'un arbre appelle glans unguentana,
qui a deux fortes de feuilles , l'une fimple , & l'autre
branchue. La branchue , prife depuis l'endroit oit elle
tient à la tige , eft compolée d'une côte molle , plian-
te , cylindrique , grêle , femblable au petit jonc ou
à un rameau de genêt, mais une fois plus menue; de
cette côte fortent des queues ou petites côtes d'un
palme & plus de longueur, fort écartées les unes des
autres , mais toujours rangées deux à deux , garnies
chacune de quatre ou de cinq conjugaifons de feuil-
les , qui fe terminent auffi en une pointe fort menue.
Le tour enfemble forme la feuille branchue : mais ces
rameaux de feuilles en portent d'autres petites à leurs
nœuds , toujours pofées deux à deux , de figure & de
grandeur différentes ; caries premières font à pointes
moufles, comme les feuilles du tournefol ; celles qui
font au milieu font plus pointues & lémblables à cel-
les du myrte ; & celles qui font à l'extrémité font
plus petites & plus étroites, & approchent de celles
de la renoiiée. Elles tombent toutes en hy ver ; d'a-
bord les petites feuilles , puis toute la feuille bran-
chue ; c'eft pourquoi Aldinus Vappellefeuille. Si c'é-
toit une branche , dit cet auteur , elle ne tomberoit
pas. La racine de cette plante eft épaiffe, femblable
en quelque façon à celle du navet, noire en-dedans,
& peu branchue. Le fruit , félon Bauhin , eft une goul-
fe longue d'un palme, compolée de deux coffes, cy-
lindrique , grêle , partagée intérieurement en deux
loges , renflée depuis fon pédicule jufqu'à ion milieu ,
contenant une noilétte dans chaque loge. Cette gouf-
fe eft pointue ou en forme de ftylet,recourbée en bec à
fon extrémité , rouffâtre en-dedans , brune ou cendree
en-dehors ,
BEN
en-dehors , cannelée & ridée dans toute fa longueur,
coriace , flexible , de la nature des écorces , iniipide ,
un peu aflringente & fans lue. Chaque loge contient
une noifette de médiocre groffeur , triangulaire , la-
quelle renferme fous une coque & fous une pellicule
blanche &c fongueufe une amande triangulaire , grai-
fe , blanchâtre , un peu acre , amere , huileufe , & qui
provoque le vomiflement.
On trouve par l'analyfe , que la noix de ben con-
tient beaucoup d'huile épaifle , une certaine huile ef-
fentielle, acre & brûlante, en petite quantité à la vé-
rité , mais unie à un fel ammoniacal : c'eft cette huile
fubtile & acre qui purge & fait vomir.
La noix de ben eft contraire à l'eftomac , trouble
les vifeeres , purge avec peine & lentement , & a
quelque caufticité. Les parfumeurs vantent ion huile,
parce qu'elle fe rancit difficilement , & qu'étant fans
odeur, elle ne gâte point celle des fleurs.
Voici comment on tire les odeurs des fleurs par le
moyen de cette huile : on prend un vaiffeau de verre
ou de terre , large en-haut, étroit par bas; on y met
de petits tamis de crin par étage ; on arrange fur ces
tamis des fleurs par lits , avec du coton cardé bien
menu & imbibé d'huile de ben : on laifTe le tout dans
cet état pendant quatre heures , puis on jette les fleurs.
On en remet d'autres avec le même coton, & l'on
réitère jufqu'à ce que l'huile foit fuffilamment impré-
gnée de l'odeur des fleurs : on finit par exprimer l'hui-
le du coton.
Il y a une autre efpece de noix de ben , appellée
mouringou ; elle croît fur un arbre haut d'environ 25
pies, & gros d'environ 5 pies. Voye^ fa defeription
à l'article Mouringou.
* BENA ou BECCABENA, royaume de Nigritie.
* BENA ou BENE, {Gêog. ) petite ville du Pié-
mont , avec titre de comté. L. zh. 30. lat. 44. zq.
* BENACHUS , {Géog. anc. & mod.) un des plus
grands lacs de l'Italie, dans l'état de Venife. Nous
l'appelions aujourd'hui lac de Garde.
* BENADKY, (Gêog. ) petite ville de Bohême.
* BENARES, (Gêog.) ville de l'Indoftan, fur le
Gange; c'eft où les bramines tiennent leurs écoles.
BÈNARI , oifeau. Voyei Ortolan. ( / )
BENATAGÉ , f. m. c'eft ainiî qu'on nomme dans
les falines la fonction des bénatiers. F. Bénatiers
& Benate.
BENATE,f. f. {terme de Saline.') c'eft une efpece
de caille d'oiier, capable de contenir douze pains de
fel. On donne aufîî le nom de benate à la quantité de
fel qui entre dans la benate. Voye^ Bénatiers.
BENATH , f. f. {Médecine. ) nom que les Arabes
donnent à de petites puftules qui s'élèvent fur le corps
pendant la nuit après la fueur, (V)
BENATIERS , f. m. pi. ouvriers occupés dans les
falines de Moyenvic , au nombre de dix-huit , à affem-
bler des bâtons de bois avec des ofiers & de la ficelle ,
& à en former des efpeces de paniers capables de
contenir douze pains de fel , ce qu'on appelle une be-
nate. Foyei Benate.
* BENAVARRI, (Géograplûe) ville d'Efpagne, au
royaume d'Aragon. Long. iH. 10. Ut. 41. 55.
* BENAVENTE, {Géog.) ville d'Efpagne , au
royaume de Léon , dans la tierra de Campos , a\ ce-
ntre de duché , fur la rivière d'Ezla. Long. iz. 30.
lut. 4Z. 4.
* BENAUGE , {Géog.) petite contrée de la Guien-
ne , province de France , le long de la Garonne , au
midi de Bordeaux , en allant vers l'orient.
* BENDA, {Géog.) ville de la Macédoine, appar-
tenante aux Turcs.
*BENDARMARSSENokBENJARMASEN,
{Géog.) ville d'Aiîe, capitale du royaume de même
nom , dans l'île de Bornéo , fur la rivière de Benjar-
maflé. Long. 131, ZQ. lat, mérid, 2. 40.
Tome II,
BEN 20Î
* BENDER ou TEKIN, {Gêog.) ville de la Tur-
quie Européenne , dans la BefTarabie , fur le Nieller.
* BENDERICK , {Gêog.) ville & port fur le golfe
Perfique.
* BENDIDIES, adj. pris fubft. {Mytkol.) fêtes
qui fe célébroient à Athènes, dans le Pyrée, en l'hon-
neur de Diane bendis ; elles y furent apportées par
des marchands qui fréquentoient les côtes de la
Thrace. Voye^ Bendis.
* BENDIMIR, {Géographie) fleuve de Perfe , qui
tombe clans le golfe de Bengale.
* BENDIS , ( Mythol. ) nom que les peuples de
Thrace donnoient à Diane. Les uns prétendent qu'ils
entendoient par ce mot la terre ; d'autres la lune. Les
fêtes qu'on célébroit en fon honneur différoient peu
des bacchanales ; elles précédoient de quelques jours
les panathénées , & elles fe faifoient dans le Pyrée.
BENEDICTINS , f. m. pi. {Hift. ecclêf. ) moines
ainfi nommés de S. Benoît, Benediclus , dont ils fuivent
la règle.
C'eft aux Bénédictins proprement que convient le
nom de moines , monachi ; & les plus éclairés d'entre
eux , tels que les PP. Mabillon , Martenne , Ruinard ,
&c. s'en font fait honneur à la tête de leurs ouvra-
ges ; celui de religieux convenant plus particulière-
ment aux autres ordres & congrégations. V. Moi-
nes 6- Religieux.
Dans le droit canon les Bénédictins font appelles
moines noirs à caufe de la couleur de leur habit , par
oppofition à celle des ordres blancs. Ils n'étoient con-
nus autrefois en Angleterre que fous ce nom. Cet
habit eft compofé d'une robbe & d'un fcapulaire
noirs , avec un petit capuce de même couleur , qu'ils
portent dans l'intérieur de leurmaifon & en voyage.
Au chœur & lorfqu'ils vont en ville , ils mettent par-
deflus une ample chappe de ferge noire à grandes
manches, avec un capuchon qui fe termine en pointe.
L'ordre de Saint-Benoît a été florifTant dès l'a naif-
fance. Il fubfifle depuis plus de treize cens ans avec
un éclat qui a été rarement obfcurci ; également dit
tingué par les feiences & par la piété , il a été l'afyle
des lettres dans les fiecles où il fembloit qu'elles n'en
dûfîènt avoir aucun , & a donné à l'Eglife un très-
grand nombre de faints, de fouverains pontifes , de
cardinaux, patriarches, archevêques, évoques, &c.
Les réformes qu'y ont introduit en divers tems
pluiîeurs perfonnages éminens en fainteté , l'ont par-
tagé en plirfieurs branches ou congrégations. Saint
Odon , abbé de Cluny , commença la réforme de cet
ordre vers l'an 940 , & de là eft venu l'ordre ou la
congrégation de Cluny. Celle de Sainte Jufline de
Padoue & du Mont-Cafîîn , s'efl: établie en Italie en
1408 , & s'eft renouvellée en 1 504. Celle de Saint
Maur en France a commencé en 162 1 , & s'efl de-
puis foûtenue avec beaucoup de gloire : elle a pro-
duit ces hommes dont les noms ne périront jamais
dans la république des lettres , qui nous ont donné
d'excellentes éditions de prefque tous les PP. de
l'Eglife, & beaucoup d'autres qui fe diflinguent
encore par leur vertu & leurs lumières. La ré-
formé de Saint Vanne & de Saint Hydulphe , établie
en Lorraine en 1600, s'efl auflî rendue célèbre par
les lavans ouvrages qui en fontfortis ; tels que ceux:
de dom Calmet Cx de dom Rémi Ceillier.
L'ordre de Saint-Benoit a été la tige de pluiîeurs
autres , dont les plus conlidérables font ceux de Ca-
maldoli , de Valombreufe , des Chartreux , de Cî-
teaux , de Grammont , des Céleflins , &c qui ont
rendu de grands fervices à la religion , ou par leur
doctrine , ou par l'édification de leur vie, & qui fui-
vent tous pour le fond la règle de S. Benoît, foye^
Camaldules , Chartreux , Cîteaux , &c.
Il y a auffii des religieufes appellées Bénédictines ,
dont on attribue l'inffitution à fainte Scholafliquc ,
Ce
202 BEN
fœur de S. Benoît : elles fuivent la règle de ce pa-
triarche des moines d'Occident. ( G )
BÉNÉDICTION, f. f. ( Théol. ) l'aûion de bénir ,
c'eft-à-dire de fouhaiter quelque choie d'heureux ,
foit par des lignes , (bit par des paroles. Cette céré-
monie a été en ufage de toute antiquité , tant parmi
les Juifs que parmi les Chrétiens.
Les Hébreux entendent fouvent fous ce nom les pré-
fens que fe font les amis ; apparemment parce qu'ils
font d'ordinaire accompagnés de bénédictions 6c de
complimens de la part de ceux qui les donnent , & de
ceux qui les reçoivent. Voye{, Gen. xxxiij. z. Jofué ,
xv. 19. 1. Reg. xxv. zj. xxx. z6. IV.Reg. v. là. &c.
les bénédictions folennelles que les prêtres donnoient
au peuple dans certaines cérémonies. Par exemple ,
Moyfe dit au grand-prêtre Aaron : Quand vous bénire^
les en/ans d'Ifraël , vous direct que le Seigneur vous bé-
nijfe & vous conferve ; que le Seigneur faffe briller fur
yous la lumière de/on vifage ,• qu'il ait pitié de vous ,
qu il tourne fa- face fur vous , & qu il vous donne fa paix.
U prononçoit ces paroles debout à voix haute , & les
mains étendues & élevées. Les prophètes & les hom-
mes infpirés , donnoient auffi fouvent des bénédictions
aux ferviteurs de Dieu & au peuple du Seigneur. Les
pfeaumes font pleins de pareilles bénédictions. Les pa-
triarches au lit de la mort , béniflbient leurs enfans
& leur famille. Le Seigneur ordonne que le peuple
d'Ifrael étant arrivé dans la terre promife , on aflem-
ble toute la multitude entre les montagnes d'Hébal
& de Garizim , & que l'on falfe publier des bénédic-
tions pour ceux qui obfervent les lois du Seigneur fur
la montagne de Garizim , & des malédictions contre
les violateurs de ces lois fur la montagne d'Hébal.
C'eft ce que Jofué exécuta après qu'il eut fait la con-
quête d'une partie de la terre deChanaan. Fqye^ l'ar-
ticle HÉBAL , Num. vj. Z4. Genef. xxvij. xlix. Tob.
vij. y. Deut. xj. Jofué , &c.
Bénédiction fignifîe auiïï abondance. Celui quifeme
avec épargne moijfonnera peu ; & celui qui feme avec bé-
nédiction , moiffonnera avec bénédiction , avec abondan-
ce. Et encore : Je les ai priés de pafler chez vous , afin
que cette bénédiction que vous ave^ promife foit toute prête,
& qu 'elle foit , comme elle eft véritablement , une bé-
nédiction , & non un don a" avarice ; & Jacob fouhaite
à fon fils Jofeph, les bénédictions du ciel , ou la pluie
& la rofée en abondance ; les bénédictions de Vabyfme ,
l'eau des fources ; les bénédictions des entrailles & des
mammelles , la fécondité des femmes & des animaux.
Et le Pfalmifte : vous remplirez tout animal de bénédic-
tion , de l'abondance de vos biens. Cor. ix. 6. à. Gen.
xlix. là. Pf. cxliv. 16. D. Calmet , Di3. de la bibl.
tom.Lpag.30c). (G)
* BENEFICE , GAIN , PROFIT, LUCRE, ÉMO-
LUMENT , ( Grammaire..^) Le gain femble dépendre
beaucoup du hafard ; le profit paroît plus fur ; le lucre
eft plus général , & à plus de rapport à la paillon ; l'é-
molument eft affe£té aux emplois ; le bénéfice femble
dépendre de la bienveillance des autres. Le gain eft
pour les joiieurs ; le profit pour les marchands ; le lu-
cre pour les hommes intérefies ; V émolument pour cer-
taines gens de robe & de finance ; & le bénéfice pour
celui qui revend fur le champ. Le joueur dira ,J'ai
peu gagné ; le marchand ,y'e ri ai pas fait grand profit ;
l'employé , les émolumens de mon emploi font petits ; le
revendeur , accordez-moi un petit bénéfice : & l'on peut
dire d'un homme intéreflé, qu'il aime le lucre.
BÉNÉFICE, f. m. ( Droit canoniq. ) office ecclé-
fiaftique auquel eft joint un certain revenu qui n'en
peut être féparé. Ce nom vient de ce qu'au commen-
cement les évêques donnoient quelquefois aux ecclé-
fiaftiques qui avoient long-tems fervi , quelque por-
tion des biens de l'Eglife pour en joiiir pendant un
tems , après lequel ce fonds revenoit à l'Eglife ; ce
qui reflembloit aux récompenfes que les empereurs
BEN
accordoient aux foldats Romains en confidération de
leurs fervices ; d'où l'on appelloit ces foldats , milites
beneficiarii ; & d'où quelques auteurs tirent l'origine
de nos fiefs. Ce nom a pafle enfuite aux ecclélïafti-
ques , à qui on a donné de femblables fonds pour iùb-
fifter. Leur véritable origine ne paroît pas avoir pré-
cédé le vin. fiecle , où l'on fit le partage des biens
d'Eglife. On ne laifle pourtant pas que de trouver
quelques veftiges des bénéfices dès l'an 500 , fous le
pape Symmaque : on voit qu'alors on donna à un
clerc qui avoit bien fervi l'Eglife , un champ en fonds
qu'il pofféda , & dont il tira fa fubfiftance. On trouve
de plus dans un canon du premier concile d'Orange ,
tenu en 441 , quelques traces de la fondation des bé-
néfices & du droit de patronage , tant eccléiiaftique
que laïque : mais ce n'étoit pas l'ordinaire avant le
vin. lîecle; communément les eccléfiaftiqucs fubfif-
toient des revenus des biens des églifes &c des obla-
tions des fidèles que l'évêque diftribuoit entre eux.
Du tems de Charlemagne, les curés & les autres mi-
niftres de l'Eglife joùilîbient de revenus fixes & cer-
tains , & percevoient des dixmes ; & cette coutume
s'établit dans tout l'Occident. Ce fut alors que ces ti-
tres eccléfiaftiques furent appelles bénéfices , & que
chaque clerc eut un revenu attaché à fon titre.
Les bénéfices font ou féculiers ou réguliers. Lçsfécu-
liers font l'évêché , les dignités des chapitres ; favoir ,
la prévôté, le doyenné , l'archidiaconné , la chancel-
lerie , la chantrerie ; les charges d'écolâtre ou capri-
col , ou théologal , de thréforier , de chefeier , &c les
canonicats , qui font des places de chanoines , ou fans
prébende , ou avec prébende , ou avec femi-prében-
de. Les autres bénéfices féculiers , les plus ordinaires ,
font les fimples cures,les prieurés-cures,les vicaireries
perpétuelles , les prieurés fimples, &les chapelles.
Les bénéfices réguliers font l'abbaye en titre ; les
offices clauftraux qui ont un revenu affefté , comme
le prieuré conventuel en titre , les offices de cham-
brier , aumônier , hofpitalier, facriftain , célérier &c
autres femblables. Les places de moines anciens &
non -réformés , font regardées prefque comme des
bénéfices. On ne donne pourtant proprement ce nom
qu'aux offices dont on prend des provhions.
On divife encore les bénéfices en bénéfices facerdo-
taux , bénéfices à charge d'âmes , & bénéfices fimples. Les
bénéfices facerdotaux font des bénéfices ou dignités ecclé-
fiaftiques , qu'on ne peutpofleder fans être prêtre,
ou en âge de l'être du moins dans l'année. Les béné-
fices à charge d'ames font ceux dont le pourvu a jurif-
diction fur une certaine portion de peuple , dont l 'inf-
truftion eft confiée à les foins ; tels font les évêchés
& les cures. Enfin les bénéfices fimples font ceux qui
n;ont ni charge d'ames,ni obligation d'aller au chœur,
& qui par conféquent n'obligent point à réfidence ;
telles font les abbayes ou prieurés en commende , &
les chapelles chargées feulement de quelques méfies ,
que l'on peut faire célébrer par d'autres.
Il y a des irrégularités qui empêchent de pofïeder
des bénéfices ; telles que la bâtardife , la bigamie , la
mutilation , le crime public pour lequel on peut être
repris de juftice , & le crime eccléiiaftique , comme
l'héréfie , la fimonie , la confidence , &e. qui empor-
tent privation du bénéfice. Les cafuiftes difputent fur
la pluralité des bénéfices : quelques-uns la croyent il-
légitime ; le plus grand nombre la croit permife , &
l'Eglife la tolère. En Angleterre , la plupart des bé-
néfices ont été fupprimés du tems de la réformation ,
parce qu'alors les biens eccléfiaftiques ont pafle
dans les mains des laïques. Fleury , Inflit. au Droit
eccléf. tom. I. part. II. ch. xiv. xix. & xxviij '.
BÉNÉFICES CONSISTORIAUX , grands bénéfices ,'
comme les évêchés , abbayes & autres dignités , ainiî
appelles , parce que le pape en donne les provifions
après une délibération faite dans le confiftoire des
BEN
BEN
cardinaux. On donne ce nom en France aux digni-
tés eccléfiaftiques dont le R.oi a la nomination , lui-
vant le concordat fait entre le pape Léon X. & Fran-
çois I. mais ce concordat n'a fait que renouveller un
droit que les rois de France avoicnt poflcdé dès le
commencement de la monarchie. Grégoire de Tours ,
Aimoin , & nos anciens hiftoriens , font pleins d'exem-
ples qui prouvent que nos rois de la première race
difpoloient des évêchés. Ils en parlent en ces termes :
talis epijcopus ordinatus efiljufiju régis , ou afifenfu régis ,
ou decreto régis. Cet ulage continua fous la féconde
race. Loup, abbé de Ferrieres , rapporte que le roi
Pépin obtint le confentement du pape pour nommer
aux grandes dignités eccléfiaftiques ceux qu'il en
jugeroit les plus capables pour le bien de fon état.
Hincmar , archevêque de Rheims ., & Flodoard, par-
lent auiïi de ces nominations. C'eft ce qu'on voit en-
core dans le fécond concile d'Aix-la-Chapelle , tenu
fous Louis le Débonnaire. Les rois fucceffeurs d'Hu-
gues Capet, en uferent ainfi , comme le témoigne ,
en plulieurs endroits de fes épîtres , Fulbert , évëque
de Chartres , qui vivoit dans le xi fiecle, du temsdu
roi Robert. Il eft vrai que dans le xn , les papes dif-
poferent de plulieurs de ces bénéfices : mais vers le
commencement du xiii, fous Philippe Augufte , les
élections eurent lieu , de forte néanmoins que le roi
les autorifoit , & l'évêque élu ne pouvoit être con-
facré fans le confentement du prince. Le concordat
n'a donc fait que rendre au roi-le droit de nomina-
tion aux grands bénéfices , que quelques-uns difent ap-
partenir au roi de France en qualité de Roi; parce
que le choix des prélats eft une chofe importante
pour la conlervation de l'état, &c que ce monarque
eft le premier patron & protecteur des églifes de ion
royaume. Les autres rois & princes fouverains joiiif-
ient d'un pareil droit ; & cette nomination a eu lieu en
Hongrie, en Efpagne, dans les Pays-Bas, à Venife &
en Savoie. Elle étoit auffi en ufage en Angleterre &c
en EcolTe avant la réformation , & le roi y nomme
encore aux archevêchés & évêchés : mais on ne peut
plus appcller ces dignités bénéfices confifioriaux , de-
puis que le pape n'en donne plus la confirmation.
Pithou , Traité des Libert. de CEgl. Gallic. ( G )
BÉNÉFICE , en terme de Droit civil, fignifie en gé-
néral une exception favorable accordée par la loi
ou parle prince, qui rend l'impétrant habile à une
fonction ou une qualité dont il étoit incapable à la
rigueur. Tels font le bénéfice d'âge, voye^ Age; le
benéjice de cejjlon , voye^ CESSION ; de divifion , voye^
Division; de difcujjion, voyei Discussion; <ïin.
ventaire , voye^ INVENTAIRE ; &c.
Bénéfice fe prend auffi quelquefois pour un fimple
privilège ou droit favorable. C'eft en ce fens qu'on
dit , que le bénéfice du vendeur fert à l'acheteur. (H)
BÉNÉFI CE , ( Commerce. ) fignifie avantage , gain ,
profit. On dit qu'un marchand a du bénéfice fur le mar-
ché ou la vente de certaines marchandifes.
Quand on dit qu'un banquier fait tenir de l'argent
d'une place à l'autre avec bénéfice, cela doit s'enten-
dre qu'au lieu de demander quelque chofe pour l'é-
change , il donne du profit. Quand le change eft au
pair , il n'y a ni bénéfice ni peite.
On nomme bénéfice d'aunage , le profit qui fe ren-
contre fur Tannage des étoffes , des toiles , &c. Il y a
des endroits où, quoique l'aune foit égale à celle de
Paris , on ne lailfe pas de trouver un bénéfice conlidé-
rable fur Tannage , par la bonne inclure que donnent
les fabriquans pour attirer les marchands. Ainli , par
exemple , à Rouen on donne vingt-quatre aunes de
toile pour vingt aunes , ce qui eft quatre aunes de bon
ou de benéjice fur chaque fois vingt aunes. Voyat Au-
NAGE. (G)
BÉNÉFICES , f. m. ( Hifi. anc. ) terme dont les an-
ciens ie lervoient pour lignifier les fonds de terre qu'on
Tome II.
203
donnoit aux vieux foldats ou vétérans, pour récom.
penfe de leurs fervices ; & c'eft de là qu'on appelloit
ces foldats bénéficiant milites. Les Turcs en ufent en_
core aujourd'hui de même à l'égard de leurs fpah:s
outimariots. Voye^ Spahi & Timariot. {G)
BÉNÉFICIABLE , adj. ( Chimie. ) profitable ; il fe
dit ordinairement d'une mine. On dit qu'une mine
eft bénéficiable , lorfqu'on veut dire qu'elle peut être
exploitée avec profit ; qu'on en peut tirer du bénéfice.
Pour rendre une mine bénéficiable, il faut en féparer
ce qui détruiroit le métal , ou ce qui Tempêcheroit
de fe féparer de fa mine. ( M )
BÉNÉFICIAIRE, adj. pris fubft. terme de Droit,
qui ne fe dit qu'en un feul cas , à favoir en parlant
de l'héritier qui a pris des lettres de bénéfice d'in-
ventaire, f^oyei Inventaire.
En pays coûtumier, l'héritier pur & fimple en li-
gne collatérale exclut le bénéficiaire ; fecùs en ligne
direde : mais en pays de Droit écrit, l'héritier pur
& fimple n'exclut pas le bénéficiaire , même en colla-
térale.
L'héritier bénéficiaire a Tadminiftration de tous les
biens de la fucceffion , dont il doit un compte aux
créanciers & légataires , pour le reliqua duquel , s'il
fe trouve redevable , ils ont hypothèque fur fes pro-
pres biens , du jour qu'il a été déclaré héritier béné-
ficiaire. (H)
* Bénéficiaires , f. m. pi. {Hifi. anc.) c'eft ainfi
qu'on appelloit dans les troupes Romaines ceux qui
lervoient volontairement, foit pour obtenir les bon-
nes grâces & la faveur des coniuls , foit pour obtenir
quelque récompenfe des chefs. Ils étoient rangés fous
les drapeaux dans les cohortes ; ils ne montoient point
la garde ; ils étoient difpenfés de travailler aux forti-
fications & aux campemens. Ils faifoient l'office de
centurions , en cas de befoin , & portoient comme
eux la branche de vigne. Le terme bénéficiaire fe prend
en ditférens fens , & tout ce que nous venons de dire
de leurs fondions a été fujet à bien des changemens.
BÉNÉFICIAL , qui concerne les bénéfices. Cet
adjeftif ne fe trouve employé qu'au féminin , ainli
l'on dit des caufies , des matières bénéficiâtes : mais on
ne diroit pas des codes bénéficiaux . (H)
BÉNÉFICIATURES , f. f. plur. {terme de Droit ec-
cléjiajliq.) fortes de bénéfices amovibles , qui ne peu-
vent fe réfigner , & peuvent vaquer par Tabfence ,
comme les bénéfices de chantres ou vicaires, chorif-
tes, chapelains. Les bénéficiaires ne peuvent être ap-
pellées qu'improprement bénéfices ; ce font plutôt des
places deftinées à des prêtres chargés pour ce de ren-
dre un fervice actuel à Téglife, &que le chapitre peut
deftituer, s'ils y manquent pendant deux mois de fui-
te , fans qu'il foit nécelîaire de faire précéder aucune
monition canonique ; monitions fans lefquelles , fui-
vant le droit commun , on ne pourroit pas priver de
fon bénéfice un véritable bénéficier.
On appelle auffi les bénéficiatures , bénéfices ferfs.
Voyci BÉNÉFICE. (H)
BÉNÉFICIER , v. neut. en Chimie , c'eft exploiter
les mines avec bénéfice, avec profit. (M)
* BENESCHAU , (Geog.) il y a deux villes de ce
nom ; Tune dans le royaume de Bohême , & l'autre
en Silcfie.
* BENEVENT, (Géog.) ville d'Italie, au royau-
me de Naples , près du confluent du Sabato & du Ca-
lorc. Long. Jz. zj. lat. 41. 6.
* Benevent, {Géog.) petite \ ille de Fiance , dans
le Limofin.
BÉNEVOL, adj. (terme de Droit eccléfiajlique.) eft
un ade par lequel un fupérieuro&roye une place mo-
nacale dans fa maifon, à un religieux d'un autre or-
dre , qui eft dans le deffein de le faire transférer dans
le fien. Il doit avoir ce binivol , pour être en crat
d'obtenir le bref de tranllation, de peur qu'il ne le
C c ij
2o4 BEN
trouve fans cloître & fans demeure fixe. Voyt{ Gl-
rovage. (H)
* BENFELD , (Gfog.) ville de France , en Alface,
fur FM. Lon. z5. i5. lat. 48. 14.
* BENGALE , (Géog.) royaume d'Afie , aux Indes,
fur le wolfe de même nom. 11 eft traverié par le Gan-
ge , &"habité par des Gentils & des Mahométans très-
difïblus. Les femmes y font bien faites, fort parées ,
& très-voluptueufes.
Il prend l'on nom de fa capitale , qui eft fituée fur
une des bouches du Gange. Le commerce s'y lait ,
tant par les étrangers que par les habitans. On y
trouve des marchands de tous les endroits de l'Afie.
On y prend des foies , du poivre , du riz, du falpe-
tre , des bois de teinture , la terra-merita , les lac-
ques, des cires, de l'indigo, du camphre, de l'efqui-
ne , de l'aloès , de la gomme-gutte , & des cannes.
Les villes les plus marchandes du Bengale , font Kaf-
fambazar, Ougli , Pipeli, & Bellezoor : on y ajoute
Patna , quoiqu'elle ne foit pas du Bengale. On trouve
à Ougli les marchandifes les plus prétieufes des Indes.
Il fe fait des foies en grande quantité à KafTambazar.
Choupar, de la dépendance de Patna, fournit le fal-
petre. Il faut porter au Bengale de l'argent du Japon ,
du cuivre , de l'étain de Malaca , du vermillon , du
mercure , du plomb , des tables, des cabinets vernis ,
de la porcelaine , de l'écarlate , des miroirs, des draps,
de l'ivoire , des épiceries , & même des oifeaux. On
tire encore du Bengale du borax , des tapifferies , des
couvertures, des fruits , du beurre , des diamans , &C
autres pierres ; mais fur-tout des coutils , des bafins,
& des toiles. Ces dernières marchandifes font les ob-
jets les plus importans de fon commerce. Ce com-
merce fe fait intérieurement par les Benjans , voye?
Benjans ; l'extérieur , par les vaiffeaux Hollandois
particulièrement.
* BENGALI , (Hifi. nat. bot. ) c'eft une plante du
Brefil ; fes racines font courtes & grofles , les feuilles
ont la couleur & l'odeur des feuilles de choux ; elle
porte deux ou trois fleurs monopétales & hexagones.
Le fruit eft de la grandeur d'une pomme , fort agréa-
ble au goût, mais dangereux, parce qu'il eft trop
froid.
* BENGEBRES (les), f. m. pi. (Géog.) peuples
d'Arabie , qui n'oni point de demeure fixe ; ils font
des courtes continuelles , & attaquent fouvent les ca-
ravanes qui vont à la Meque.
* BENGI-EIRI , (Hifi. nat. bot. ) efpece de ricin
Indien , toujours verd , & qui croît dans le Malabar.
C'eft encore une de ces plantes auxquelles on attribue
d'autant plus de propriétés , qu'on les connoît moins ;
& l'on a raifon , car il eft difficile d'être démenti.
* BENGUELA, {Géog.') royaume d'Afrique, fur
la côte occidentale , entre le royaume d'Angola & le
Jaga , avec ville de même nom, qu'on appelle auffi
S. Philippe ou le vieux Benguela.
* BENJANS , f.m. plur. (Hifi. mod. & Commerce.)
forte d'Indiens répandus dans toute l'Afie , par les
mains defquels fe fait tout le commerce. Ils font le
courtage pour les compagnies de France , d'Angle-
terre , & de Hollande. Ils ne le cèdent en rien pour
l'expérience , pour l'habileté & l'avidité du gain , ni
aux Arméniens ni aux Juifs. Ils font auffi la banque.
Ils ont beaucoup de crédit, & font d'affez bonne foi.
Ils ont des caiffes où l'on peut dépofer en fureté fon
argent.
* BENI-ARAX,(GV0£.) ville d'Afrique, au royau-
me d'Alger. Long. ij. lat. Ji.
* BENIGHEIM , (Géog.) ville du duché de Wir-
temberg , en Suabe.
BENIN, adj. ulîté en Médecine, il fe donne aux
maladies dont les fymptomes ne font point fâcheux ,
& dans lefquelles le malade n'eft pas expofé à un
grand danger. C'eft dans ce fens que les auteurs ont
BEN
diftingué la petite vérole en bénigne & maligne. La
fièvre fe divife auffi en fièvre fimple ou bénigne , &
en fièvre maligne. Voyc{ Fièvre.
Bénin , fe dit auffi d'un médicament doux , c'eft-à-
dire, dont l'action n'eft pas violente. (N)
* Bénin , (Géog.) capitale du royaume de même
nom , en Afrique , fur le golfe de Guinée ou de Saint
Thomas. Le roi de Bénin eft puifiaut, il peut mettre
en peu de tems 1 00000 hommes fur pie ; il ne le mon-
tre en public qu'une fois l'an , alors on honore fa pré-
fence en égorgeant quinze ou feize efclaves. Quand
il meurt, la plupart des princes de fa cour le fuivent
au tombeau : on tue un bon nombre de fujets pour
leur faire compagnie , & on enterre avec le monar-
que fes habits & fes meubles. Les Beniniens ont du
courage & de la générofité , cependant ils font tous
efclaves , & portent une incifion fur le corps , en
ligne de fervitude. Les hommes n'oîent porter d'ha-
bit , qu'ils ne l'ayent reçu du roi ; les filies ne fe vé-
rifient que quand elles font mariées ; c'eft leur époux
qui leur donne le premier habit ; ainfi les rues font
pleines de perfonnes de l'un & de l'autre lexe toutes
nues. Le privilège du monarque d'être accompagné
fous la tombe par les principaux feigneurs de fa cour,
s'étend à ceux-ci : on immole fur leurs cadavres une
partie de leurs efclaves. Les jours fuivans on célèbre
des fêtes fur leur tombeau , & l'on danfe au fon du
tambour. Ces peuples ne rendent aucun culte à Dieu;
ils prétendent que cet être étant parfaitement bon de
fa nature , n'a pas befoin de prières ou de facrifices :
mais ils adreffent les unes & les autres au diable , par
la raifon contraire. Ils ont des idoles. Bénin eft près
de la rivière Formofa. Long. %6. lat. y. 40.
Les Européens n'y font pas grand commerce , ce-
pendant on en pourroit tirer des étoffes de coton, du
jafpe , des femmes , des peaux de léopard , & du co-
rail. Il faudroit leur porter des étoffes riches , des
draps rouges , de l'écarlate , des pendans d'oreilles ,
des miroirs , des pots de terre , des fruits , du cuivre ,
& du fer. Les Hollandois font ce commerce. Les au-
tres commerçans de l'Europe y font moins fréquens ,
parce qu'ils n'y font point attirés par l'or , les cuirs,
les efclaves , &c. & autres marchandifes prétieufes ,
pour lefquelles ils s'expoferont plutôt à de grands
dangers , que d'avoir affaire aux tranquilles & fidèles
habitans du Bénin , qui n'ont que des chofes commu-
nes à leur donner. Ils fe font fait une loi particulière
de ne point vendre d'hommes : ils ont moins de feru-
pule pour les femmes , foit qu'ils en fafient moins de
cas dans leur pays , foit qu'ils connouTent affez bien
les contrées éloignées , pour favoir que l'efclavage
n'y eft pas fort dur pour elles.
* BENINGANIO {Hifi. nat. bot.), fruit qui croît
dans la baie de S. Augultin. Il eft de la grofleur du
limon , & rouge au-dedans : on peut en manger.
BENJOIN, (Hifi. nat. & mat. méd. ) ben^oinum
offic. fubftance réfineufe inflammable , quelquefois
rougeâtre , d'autres fois d'une couleur pâle, & ordi-
nairement fort fale ; d'une odeur agréable , tant foit
peu acre au goût , & fort employée dans les parfums.
Elle vient des îles Philippines & de Sumatra : les an-
ciens ne l'ont pas bien connue. Le benjoin convient
dans les afthmes , il atténue le phlegme qui embar-
raffe les poumons , il eft falutaire dans les ulcères de
ce vifeere : mais on donne la préférence à fes fleurs
dans les maladies internes.
On doit choifir le benjoin pur & débarraffé de par-
ties hétérogènes , autant qu'il fera poffible : on doit
rejetter celui qui eft noir & fans odeur.
Préparation du Benjoin. La teinture de benjoin fe
fait en verfant fur une quantité de benjoin réduite en
poudre de l'efprit-de-vin , & le raifant bouillir jufqu'à
ce que la teinture foit fort riche. Cette teinture eft
chaude , odoriférante } amere , & baiiamique ; elle
B EN
elt cordiale , fudorifique , &c. Le lait virginal fe pré-
pare en veriânt quelque goutte de cette teinture fur
une grande quantité d'eau ; il en naîtra fur le champ
un mélange blanc , laiteux , opaque , appelle pour
cette railbn lait virginal. Ce lait elt un cofmétique
innocent: ii on s'en lave le vifage, il prendra une
couleur douce Si vermeille , & fe couvrira d'une peau
claire & brillante , fi on le laiffe fécher defliis.
La réfine de benjoin elt bonne , prife à l'intérieur ,
pour fondre & refondre les obitruûions de la poitrine;
elle entre pour cette raifon dans les pilules de Morton.
Les fleurs tirées par la fublimation font pectorales ,
mais fur-tout dans l'aithme humide : elles atténuent
& rélolvent les vifeofités des bronches : on les prend
fous toutes fortes de formes : elles donnent une odeur
agréable à toutes les compofitions où elles entrent.
La dofe ell depuis trois grains jufqu'à dix ou douze.
* On en trouve de deux fortes dans les boutiques:
le premier s'appelle amygdalo'ide ; il elt pâle , d'un
rouge brun , & contient des grains blancs comme
des amandes ; l'autre elt noirâtre & n'a point de ta-
ches, ou très-peu. L'arbre qui donne le benjoin ell
grand ; il a la feuille du citronier , plus petite cepen-
dant , moins luifante , & blanchâtre en-deflbus , &
la fleur du laurier , & les porte renfermées au nom-
bre de cinq , dans une enveloppe commune qui n'a
point de pédicule , compofé de quatre feuilles , &
affez femblable à celle qui entoure la fleur du cor-
nouiller. Chacune de ces fleurs a un pédicule auffi
long que l'enveloppe, avec un calice propre, dé-
coupé en fix. quartiers jaunes & très-étroits , huit ou
neuf étamines de la longueur du calice, placées au-
tour d'un embryon ovoïde, furmonté d'un ïlyle Am-
ple. Cet embryon occupe le fond du calice , & les
étamines naiffent de fes bords : fes fruits font des
noix de la groffeur des mufeades , arrondies , appla-
ties , compofées d'une écorce charnue , moins épaiffe
que celle des noix ordinaires, raboteufes en-dehors,
& cendrées , vertes en-dedans , & d'une coque un
peu applatie, cendrée, dont lafubftance ell: plus min-
ce & plus tendre que celle de la noifette. Cette co-
que renferme une amande blanchâtre ou verdâtre in-
térieurement , & couverte d'une peau rougeâtre &
ridée.
Quant a la manière de recueillir fa réfine, quand
l'arbre a cinq ou fix ans , on lui fait des incifions
longitudinales & un peu obliques , qui pénètrent juf-
qu'au bois dans la partie fupérieure, à la couronne
du tronc , vers l'origine des branches. C'eft par ces
incifions que coule la réfine , d'abord blanche , té-
nue , glutineufe, tranfparente ; peu à peu elle fe fige,
fe durcit , & devient jaune & rougeâtre. Si on la lé-
pare de l'arbre à tems , elle elt belle & brillante ; fi
l'on tarde trop, elle devient laie & brune. Le même
arbre n'en donne pas plus de trois livres, & n'en don-
ne qu'une fois ; on le coupe après la première récol-
te, & l'on en plante un autre , parce que les jeunes
arbres donnent plus de relïne & la donnent meilleure
que celle des vieux arbres.
BENITIER , f. m. en Architecture , elt un vafe de
marbre de figure ronde ou ovale , & ifolé , porté fur
une efpece de balultre ; ou une coquille fur quelque
confole,& attachée à un pilier à l'entrée d'une églife.
(/J)
* BENNE, f. f. (Commerce.') c'ell une voiture qui
fert de mefure à charbon dans la Flandre. La benne
contient 25 vaux ou 18 queues, & la queue 1 man-
nes. Pour faire une benne de charbon , il faut au moins
fix cordes de bois ; la corde de bois revient rendue
à Namur à dix efcalins , & la benne a feize florins.
On nomme aufli benne un petit vaifieau qui lert à
charger des bêtes de fomme , pour tranfporter des
grains , de la chaux, la vendange, &c. elle tient deux
minots.
B E O
205
* BENOIT-DU-SAUT , ( S. ) Gèog. petite ville
de France au diocefe de Bourges.
BENOITE , f. f. caryophillata , ( Hift. nat. bot. )
genre de plante à fleur en rofe , compolée de plufieurs
feuilles difpofées en rond , qui fortent des échancru-
res d'un calice d'une feule pièce , & en forme de baf-
fin. Le piltil s'élève du milieu de ce calice , & devient
dans la fuite un fruit prefque rond , fur lequel font
attachées plufieurs femences , terminées chacune
par un prolongement en forme de queue. Tournef.
Injî. rei herb. foye^ Plante. ( /)
BENOITE , caryophillata offic. germ. 842. La be-
noîte ell; amere ; elle donne au vin où elle a inrufé
un goût & une odeur agréable , & le rend plus cor-
dial ; elle appaife les douleurs des inteftins ; elle en:
céphahque <k alexipharmaque. La racine , qui efl la
feule qu'on employé , rougit le papier bleu; ellefent
le clou de girofle : le fel approche du fel ammoniac ,
mais il efl: tort chargé d'acide , & enveloppé de beau-
coup d'huile effenfielle & de terre. Le vin de la be-
noîte nommé ci-defliis, elt ftomacal , apéritif, vulné-
raire , & déterfif. L'extrait de cette plante a les mê-
mes vertus: on l'ordonne dans les rhûmatifmes. (A7)
* BENSHEIM, (Gèog. ) petite ville d'Allemagne
dans l'éleétorat de Mayence , fur un ruifieau. Lon.
26. lâ.lat. 4g. 4g.
* BENTHEIM , ( Gèog. ) petite ville d'Allema-
gne avec château , au comté de même nom , dans
le cercle de "Weltphalie , fur le Vecht. Lon. 24. 43.
lat. 5z. 23.
* BENTIVOGLIO , ( Gèog. ) petite ville & châ-
teau d'Italie dans le Bolonois. Lon. 2g. 4. lat. 44.
37-
* BÉORI , f. m. ( Hift. nat. ) animal des Indes oc-
cidentales qui reffemble à un veau , dont la peau elt
épaiffe & dure, & qui vit d'herbes fauvages. C'eit
tout ce qu'on dit de cet animal, peut-être mieux con-
nu & décrit par les Naturaliltes fous un autre nom.
BÉOT ARQUE , f. m. ( Hift. anc. ) nom de digni-
té chez les Thébains. Thebes étant la plus conlide-
rable ville & la capitale de la Béotie , les magiùn.ts
& généraux qui y étoient charges du gouvernement
portoient pendant leur adminifiration le nom de tèo-
tarques , c'eft-à-dire , commandans ou gouverneurs
de la Béotie. Ce mot elt compofé du nom de la pro-
vince , & du Grec *fx*n , commander. (G)
* BÉOTIE, ( Gèog. anc. & mod. ) province de
Grèce dite aujourd'hui Stramulipe ; on la place ordi-
nairement dans l'Achaie ou la Livadie. Elle étoit
renfermée jadis entre la Phocide , la Theffalie , la
Doride , l'Attique , la mer Egée , ou l'Archipel & le
Négrepont. On la divii'oit en haute ce balle : la haute
comprenoit la ville de Lebadia , dite aujourd'hui
Bodia , Cheronée , Orchomene , Platée , Amphiclée,
Leuftres , Hyampolis, Coronce , Thefpie , &c. la
baffe comprenoit Thebes capitale du pays , qu'on
appelle aujourd'hui Stires, Phocie, Mycaleffus ou
Malacafla , Anthedon , Tanagrada , &c.
BÉQUARRE, en Muftque, voye^ B QUARRE. (S)
BEQUETTE , 1. f. dans plufieurs Arts mèchaniques,
tels que celui du Damajquineur , de Y Epinglier , du
Serrurier, du Plombier, du Chainetier, de VU
&c. & même du Verrier; ce font des pinces ou te-
nailles à main à branches rondes & recourh
dont les pointes, appellées aufli becs , font courtes,
fortes, rondes, & coniques toutes deux, ou routes
deux plates, ou l'une ronde èc l'autre plate. -
Bf.QLETTE de Chainetier & d'Epi,:
BEQUETTE de Chainetier ; c'efi un outil de la lon-
gueur de lept ou huit pouces ; la partie d'en-b.
te comme celle des pinces ordinaires, cit convexe
&z plate ; fes branches jointes de même aux
tiers par un clou rivé , ont la facilite de s'ouvrir Se
de le tei mer ; chaque bec de la partie haute ell ror. J ,
ao6
BEQ
de la groffeur du doigt : le Chainetier s'en fert pour
contourner & former les gros chaînons.
Bequette d'Epir.glur, c'eft une efpece de te-
nailles dont une mâchoire eft pyramidale & l'autre
ronde, & diminuant de groffeur vers fon extrémité.
Elle fert à tourner le fil de fer ou de laiton comme il
plaît à l'ouvrier , ioit qu'il faffe des crochets , des por-
tes , des claviers , & des hameçons. Voye^ ces mots
à leur article. Cet outil fe nomme aufii bec -d'âne. &
de canne.
Bequette de Fondeur de petit-plomb ; c'eft encore
une forte de petite pince dont l'ouvrier fe fert pour
tirer la branche du moule. V. Branche & Moule.
BEQU1LLER, v. act. (Jardinage.) eft le même
que béchotter , pour fignifîer le petit labour que l'on
donne tous les mois aux orangers & aux autres ar-
bres encaiffés , afin de rendre meuble la terre , qui eft
trop battue fur la fuperficie d'une caiffe , & que les
arrofemens puiffent pénétrer jufqu'aux racines de
l'arbre.
Ce labour doit être fort léger , fait à la houlette
autour d'un arbre encaiffé , femblable à celui que l'on
appelle binagt en fait d'entretien de bois & de pépi-
nière.
On peut encore bèquiller une planche de laitue , de
chicorée , de fraifier, d'afperges, avec une ferfoûet-
te ; ce qui ne produit toujours qu'un très-petit labour.
BEQUILLON , f. m. terme de Fleurijle , qui lignifie
les petites feuilles arrondies qui garniffent le dedans de
l'anémone , c'eft-à-dire qui fortent de la peluche de
certaines anémones. Un béquillon pour être beau,
doit être large & arrondi par le bout ; c'eft une mar-
que que la fleur eft forte. ( K )
* BER , ( Hijl. nat. bot. ) grand arbre ou pommier
des Indes , qui porte beaucoup de feuilles , de fleurs ,
& de fruit. Il a la feuille femblable à celle du pom-
mier , d'un verd obfcur & blanchâtre par le bas , &
velue comme celle de la fauge ; la fleur petite , blan-
che , à cinq pétales , & fans odeur; & le fruit com-
me la jujube , mais plus agréable au goût. On le trou-
ve fur les côtes de Malabar & de Malaca. On le nom-
me aufii Malaïo. On dit qu'on trouve fur cet arbre la
gomrne lacque ; & l'on attribue à les feuilles la qua-
lité d'arrêter le cours de ventre.
BERACA, ( Hijl. eccléf. ) c'eft le mot qui défigne
la bénidiûion que donne, parmi les Juifs lur le boire
& fur le manger , celui qui fe trouve être le plus qua-
lifié de i'affemblée.
* BER.AMS, f. m. (Comm.) toile toute fil de coton,
unie ou rayée, qui vient de Surate. La blanche porte
dix-neuf aunes lur fept huitièmes de large : la rayée ,
qui eft de couleur, a onze aunes \ fur trois quarts.
* BERAR , ( Gèog. ) province de l'empire du Mo-
gol en Âfie , près du royaume de Bengale. Shapour
en eft la capitale.
* BERAUN, ( Gèog. ) ville de Bohême , capitale
du cercle de même nom, fin une rivière. Long. Ji.
66. lat. 60. z.
* BER AY , ( Géog. ) ville de France dans la haute-
Normandie , avec titre de comté , fur la Carantone.
Long. 18. zo. lat. 49. 6.
*BERBICE, (la) Gèog. rivière de l'Amérique
en Terre-Ferme , qui fe jette dans la mer du Nord , au
6. 30.de latitude. Les Hollandois y ont des établiffe-
mens fort confidérables : ils y ont fait , ainfi qu'à Su-
rinam , de grandes plantations de cafté. Ils ont ap-
porté du cafte de Moka ; ils ont cultivé ce cafte dans
leurs ferres d'Amfterdam ; & quand les plantes ont
été allez fortes pour fupporter le voyage , ils les ont
tranfportées à Surinam & à Berbice.
» BERCAD , ( Gèog. ) ville de Pologne dans le
palatinat de Braclav.
BERCE, oifeau. Voye^ GORGE-ROUGE. (/)
BER
BERCE , f. î.jphondylium , ( Hijl. nai. bot. ) genre
de plante à fleurs en rofe , difpofées en ombelle. Cha-
que fleur eft compofée de plulieurs feuilles inégales
faites en forme de cœur , difpofées en rond & foûte-
nues par un calice. Ce calice devient dans la fuite
un fruit compofé de deux grandes femences appla-
ties , ovoïdes , échancrées par le haut , & cannelées.
Ces femences quittent ordinairement leurs envelop-
pes , & font marquées de quelques traits à l'endroit
par où elles le touchent. Tournefort , Inji. rei herb.
f^oyei Plante. (/)
Sphondyliumvulgarehirfutum, C. B. P. 16 J.Toixrn.
Lnjl.jzo. LesPolonois & les Lithuaniens font bouil-
lir les feuilles &l les graines de la berce dans l'eau ; &
en y ajoutant un ferment , ils en tirent une forte boif-
fon , qui fait la bierre des pauvres.
La berce eft d'une qualité acre comme la férule &c
la thapfie : quelques-uns la regardent comme émoi-
liente.
Sa racine eft bonne en décoction dans la paiTion
hyftérique : elle purge l'humeur pituiteufe , guérit ia
jauniffe , l'orthopnée , l'épilepfie.
Son huile eft bonne contre les maux de tête , la
phrénéfie , la léthargie : on l'applique en embroca-
tion. (A^)
BERCEAU , f. m. ( coupe dis pierres & Architecî. )
eft une voûte cylindrique quelconque , dont la cour-
bure peut être de différente efpece. Lorfqu'elle eft
circulaire , on l'appelle plein cintre. Les arches des
ponts font pour la plupart des berceaux cylindriques ,
principalement lorfque leur longueur excède leur lar-
geur, foye^ Cintre. (L>)
Berceau , infiniment à l'ufage des Graveurs dans
la manière noire : il eft emmanché dans un morceau
de bois de la longueur de quatre pouces , & de la for-
me d'un cœur allongé , du milieu duquel partiroit
une efpece de tige évuidée , & propre à être reçue
entre les doigts , & à la furface poftérieure duquel
on auroit pratiqué un gros bouton , propre à s'appli-
quer dans le creux de la main. Cet outil , qui reilem-
ble à une petite bêche quarrée , eft en bifeau d'un
côté ; & de l'autre il eft lillonné de traits parallèles
entr'eux , qui forment autant de petites dents à l'arc
convexe qui termine fa partie iupérieure. Le gra-
veur prend cet inftrument , applique la convexité
de fon arc perpendiculairement à la furface du cui-
vre fur lequel il fe propofe de graver , 6c le balan-
çant également de droite à gauche fur des lignes qu'il
a tracées pour lui fervir de guide , il couvre toute la
furface de fon cuivre de petits points ; ce qu'on ap-
ipellejàire le grainage. Voye{ GRAINAGE ; voye^ GRA-
VURE en manière noire ; voye^ aulîi PI. V. de Gravure >
fi§- 5- <S- zo. Il y a des ouvriers qui emmanchent au-
trement leur berceau ; ce n'eft qu'une petite poire ,
femblable à celle qui fert de manche aux burins. On
a des berceaux de toute grandeur , pour fatisfaire à
toutes fortes de grainage. foye^ auftî la Planche des
outils dans la manière noire.
Berceau ou Tonelle, (Jardinage.) ces deux
mots font fynonymes : celui de tonelle eft plus an-
cien. C'eft une longueur d'allée couverte , formant
une treille ou bien un cabinet de verdure , fait de
charmille ou de treillage , garnie de jafmins , che-
vrefeuils , rofiers , chaffelas , verjus , &c.
On les fait de charpente, de perches, 6k d'écha-
las: fouvent ces berceaux font quarrés par-deflus ,
pour y mettre de la vigne & du verjus ; mais ils font
moins beaux que les cintrés. (K)
Berceau d'eau , (Jardinage). On appelle ainfi
dehx rangées de jets obliques , qui en fe croifant for-
ment des efpeces de berceaux , fous lefquels on peut
fe promener fans craindre d'être mouillé. ( K)
Berceau de prejfe d 'Imprimerie en lettres ; ce font
deux pièces de bois à rainures , pofées fur champ ,
B E R
aiTemblées aux deux extrémités par deux traverfes
plates. La figure d'un berceau de preffe eft celle d'un
chaffis quarré long , dans le vuide duquel font pla-
cées les bandes , qui font deux autres pièces de bois
de même longueur , pofées à diilance égale , 6ê re-
vêtues fur leur plat de fer à arrête ou en lame. Ce
berceau eft foûtenu d'un bout par un pié qui lui eft
propre ; il eft appuyé par le milieu fur un fommier
mobile , &: à l'extrémité fur une des barres de bois
du train de derrière , où il entre comme dans une
mortoife , & y eft retenu ou par un écrou , ou par
une barre de bois qui le traverfe , pofée derrière le
fommier. Voye{ PL IV. fig. z. G g qui repréfente le
pié du berceau ; kk m , dont on ne voit que les côtés
nkk ; m le quatrième oppofé à k k , lui eft en tout
femblable.
BERCELLE , f. f. outil XEmaillcur; c'eft une ef-
pece de petite pincette dont ces ouvriers fe fervent
quand ils veulent tirer l'émail à la lampe : elle eft
faite d'un feul morceau de fer qui eft replié en deux :
les branches font plates & un peu pointues. Voye^
Email ; voyei aujjî Moule.
BERCER, (se) v. paf. en Manège, fe dit d'un
cheval qui fe laiffe aller nonchalamment d'un côté &
d'autre au pas & au trot , imitant pour ainfi dire , le
mouvement qu'on fait faire au berceau pour endor-
mir un enfant. Ce dandinement marque très-fouvent
un cheval mou & fans vigueur. ( V)
B E R C H E , f. f . ( Marine. ) forte d'artillerie
dont on fe fervoit anciennement dans les navires.
C'étoient de petites pièces de canon de fonte verte.
Il y en avoit de fer fondu qu'on appelloit barces. Ces
fortes de canons ne font plus en ulage. ( Z )
BERCHEROCT, f. m. ( Commerce.) poids dont
on fe fert à Archangel & dans tous les états du Czar
de Mofcovie , pour pefer les marchandifes d'une
grande pefanteur ou de grand volume. Le bercherocl
pefe quatre cens livres mofeovites , qui rendent en-
viron trois cens vingt-huit livres , poids de Paris. (G)
* BERCHITURÎA , ( Giog. ) ville de Sibérie fur
la rivière de même nom, à la frontière de Rufïïe.
* BERCHTOLSGADEN , ( Géog. ) ville d'Alle-
magne dans la préfecture de même nom , enclavée
dans l'archevêché de Saltzbourg , & iituée fur l'Aha.
Long. JO. 40. lat. 4J. Jo.
* BERCKEL , (Géog.) rivière qui prend fa fource
dans l'évêché de Munfter , Se fe jette dans l'Iflel à
Zutphen.
* BERCKHEIM , ( Géog. ) ville de France en
Alface.
BERCOWTTZ , ( Commerce. ) L'on nomme ainfi
en Ruffie un poids ufité dans ce pays pour charger
des navires. Le bercowit-^ pefe dix pudes ou quatre
cens livres de Ruffie.
BERDIN ou BERLIN, coquillage. Voye^ Pa-
I.ETTE. (/)
* BERDISH, f. f. ( Hijl. moi. ) efpece de hache
légère que les Mofeovites ont coutume de porter en
guife d'armes.
* BERDOA , ( Géog. ) peuple de brigands , & de-
fert de même nom en Barbarie , au midi du royaume
de Tripoli.
* BERDOE ou BERDOA , ville d'Afie dans la
Perfe, province de Grandja. Long. 66. 30. lat. 41.
* BEREBERES ou BREBERES , ( les ) Géog. &
Hijî. mod. peuples d'Afrique qui vivent fous des ten-
tes à la manière des Arabes , dans les différentes con-
trées de la Barbarie, mais fur-tout au midi des royau-
mes de Tunis & de Tripoli. Ils font braves Se fe pi-
quent de noblelfe : ils le difent defeendus de la tribu
des Sabéens, qui parlèrent de l'Arabie heureufe en
Afrique fous la conduite de leur roi Melec-Ifriqui ;
qui , félon quelques-uns , a donné fon nom à l'Afri-
que. Il y a des Berebcres lédentaircs.
B E R
207
^ * BERECINTHE ou BERECINTHIE , (Myek.)
c'eft ainfi que la mère des dieux fut appellée de Béré-
cinthe , montagne de Phrygie, le lieu de fa naiflance.
Son culte dura dans les Gaules jufqu'au quatrième
fiecle. On plaçoit Bérécinthe fur un char attelé de
bœufs , & on la promenoit dans les champs & dans
les vignes , pour la confervation des biens de la terre.
Le peuple liiivoit en foule , chantant & danfant de-
vant le char.
* BERECZ , ( Géog. ) ville de la Tranfylvanie.
BERENG ARIENS, f. m. pi. (Hijl. eccUf. ) héré-
tiques ainfi nommés de leur chef Berenger, archidia-
cre d'Angers , thréforier & écolâtre de S. Martin de
Tours , dont il étoit natif, & qui vivoit dans le XIe.
fiecle. Cet héréfiarque fut le premier qui ofa nier la
préfence réelle de Jefus-Chrift dans l'Euchariftie :
condamné fucceffivement parplufieurs papes &plu-
fieurs conciles , il rétrafta fes erreurs , & figna trois
différentes fois des profefîions de foi catholiques
qu'il abjura autant de fois : mais enfin on croit qu'il
mourut fincerement converti 8c defabufé de fes er-
reurs. A celle dont nous venons de parler, 8ê qui
étoit la principale , il ajouta celles de combattre
les mariages légitimes , foùtenant que l'on pouvoit
ufer de toutes fortes de femmes ; il attaquoit auffi
le baptême des enfans , qu'il regardoit comme nul.
Lanfranc & Guimond lés contemporains , écrivi-
rent contre lui avec beaucoup d'avantage :ce dernier
expofe ainfi les fentimens 6c les variations des Be-
rengariens fur le facrement de l'Euchariftie. « Tous ,
» dit-il , s'accordent à dire que le pain & le vin ne
» font pas changés eflentiellement : mais ils différent
» en ce que les uns difent qu'il n'y a rien abfolument
» du corps 8e du fang de Notre Seigneur dans le facre-
» ment , & que ce n'eft qu'une ombre Se une figure.
» D'autres cédant aux raifons de l'églife , fans quitter
» leur erreur , difent que le corps & le lang de Jefus-
» Chrift font en effet contenus dans le facrement ,
» mais cachés par une efpece d'impanation afin que
» nous les puiffions prendre ; &C ils difent que c'eft
» l'opinion la plus fubtile de Berenger même. D'au-
» très croyent que le pain Se le vin font changés en
» partie ; quelques-uns fcûtiennent que ces élémens
» font changés entièrement , mais que quand ceux
» qui fe présentent pour les recevoir , en font
» indignes, alors la chair Se le fang de Jefus-Chrift
» reprennent la nature du pain Se du vin ». Gui-
mond. contr. Bereng. bibliot. PP. pag. 3zj.
On voit clairement par cet expolé que les Beren-
gar'uns ont été les précurfeurs des Luthériens Se des
Cal vinifies ; & par la conduite de l'Eglife à l'égard
des premiers , il eft ailé de décider quelle étoit alors
fa foi ; & qui eft coupable d'innovation à cet égard,
ou des Catholiques ou des Proteftans.
Au relie, quelques efforts qu'enflent fait les Be-
rengariens pour répandre leur doctrine en France , en
Italie, S: en Allemagne, les auteurs contemporains
remarquent que ces hérétiques étoient en fort petit
nombre ; & il feroit difficile de prouver qu'il en reliât
encore lorfque Luther & Calvin parurent. On peut
confulter le dictionnaire de Moreri à l'article Beren-
ger , fur ce qui concerne la perfonne & les diverles
aventures de cet héréfiarque. (6 :)
*BERENZNOE, ou BERESINA , (Géog.) ri-
vière qui a fa fource en Lithuanie , Se le jette dans
le Nieper.
* BERESOVA , (Géo;.) ville de la Samogitie,
en Mofcovie , fur POby.
* BERG, (duché de) Géog. contrée d'Allemagne;
fur le bord oriental du Rhin , dans le cercle de Well-
phalie. DulTeldorp en eft la capitale.
* BERGA , ( Géog. ) petite ville de Catalogne ,
fur la rivière de Lobrega.
* BERGAM ASC , ( Géog.) province d'Italie , dans
loS
B E R
l'état de Venife, borné par le Breffan , la Valteline,
bc le Milanez. Bergame en eft la capitale.
B ERG AME , f. t. ( Tapiffier. ) groffe tapifferie , qui
fe fabrique avec différentes fortes de matières filées ,
comme bourre de foie , laine , coton , chanvre, poil
de bœuf, de vache, ou de chèvre. C'eft proprement
un tiiïïi de toutes ces fortes de fils , dont celui de la
chaîne eft ordinairement de chanvre , qui fe manu-
facture fur le métier , à peu près comme la toile.
Quelques-uns prétendent que le nom de bergame lui
a été donné , de ce que les habitans de Bergame en
Italie en ont été les premiers inventeurs.
Roiien & Elbceuf fourniffent une quantité confidé-
rable de bergames de toutes les couleurs & nuances ;
les unes en façon de point d'Hongrie ; les autres à
grandes barres chargées de fleurs & d'oifeaux , ou
d'autres animaux ; d'autres à grandes & petites bar-
res unies, fans aucune façon ; & d'autres qu'on ap-
pelle chine & écaille , parce qu'elles font remplies de
façons qui imitent le point de la Chine & les écailles
de poiflbn. Il s'en fait une forte particulière à Roiien,
que l'on nomme tortin , à caufe qu'il y entre de la
laine torfe ; il s'en fait aufïï quelques-unes à Touloufe.
Les hauteurs les plus ordinaires des bergames font une
aune & demie , une aune trois quarts , deux aunes ,
& deux aunes & demie. Ils'en fait néantmoins quel-
ques-unes de deux aunes trois quarts ; mais cette
dernière hauteur eft peu commune , ne s'en taifant
guère que pour les marchands qui les commandent ;
il y en a de fines , de moyennes , de groffes , ou com-
munes. Ceux qui en font commerce font les mar-
chands Merciers, les Tapiffiers , & les Fripiers ; mais
il n'y a guère que les premiers qui les tirent directe-
ment des lieux où elles fe fabriquent.
Il vient de Tournay une forte de bergame à la Ro-
maine , ou bergame de Flandre , qui fe fabrique par
bandes & bordures , dont on fait des tapifTeries beau-
coup plus eftimées que celles de Roiien 6c d'Elbœuf.
Foye{ Tapisserie.
* Bergame , (Géog. ) ville d'Italie, dans l'état
de Venife , capitale du Bergamafc. Long. zy. 8. lat.
46. 4Z.
BERGAMOTTES ,{.(.( Jardinage. ) on prétend
que l'origine de l'oranger bergamotte vient d'un Italien
qui s'avila d'enter une branche de citronnier fur le
tronc d'un poirier bergamotte ; ce qui tait que les ci-
trons qui en proviennent tiennent des qualités , des
vertus , & des propriétés du citronnier 6c du poirier ;
en effet , la bergamotte eft une orange différente des
autres , & qui a une odeur bien plus agréable. On
l'appelle fouvent cédrat. ( K. )
Bergamotte , nom d'une forte d'effence, ex-
traite d'un fruit que produit le citronnier enté fur le
tronc d'un poirier de bergamotte ; c'eft préciiément le
fluide huileux de ces citrons exprimé avec les doigts.
Voyei Essence, &c
Il y a aufïï une efpece de tabac en poudre , à qui
l'on donne le même nom , & qui n'eft qu'un tabac
pur légèrement frotté de cette effence. Voye^ Tab a c .
* BERGAS , ( Géog. anc. &mod. ) ville de la Tur-
quie Européenne , dans la Romanie , fur la rivière de
Lariffe. Long. 46. lat. 41. iy. anciennement Arca-
diopolis , Pyrgus.
* BERG-BITTENHEIM , ou BERGBIETEN ,
petite ville de la baffe Alface.
BERGE, f. m. (Architecl.) c'eft ainfi qu'on ap-
pelle les bords ou levées des rivières & grands che-
mins , qui étant taillées dans quelques côtes , font ef-
carpées en contre-haut , ou dreffées en contre-bas
avec talud, pour empêcher l'éboulement des terres ,
& retenir les chauffées faites déterres rapportées. (P)
Berge, (Marine.") les Marins fe fervent aufïï
quelquefois du terme de berges , pour défigner les ro-
chers élevés à pic fur l'eau. Il y a fur la côte de Poi-
B E R
ton des rochers que l'on appelle les berges d'Olonne."
* BERGtN , ( Géog. ) capitale de la Norvège ,
dans la province de Bergenhus , avec château , 6c un
port très-profond. Long. 23. l5. lat. 60. il.
Bergen, ( Géog. ) petite ville d'Allemagne, en
Poméranie , vis-à-vis de Stralfund . capitale de l'ile
de Rugen. Long. 31. 30. lat. 54. 30.
Il y a encore une ville de ce nom dans la baffe-
Saxe , à trois lieues de Daneberg ; une autre au
duché de Juliers , entre Juliers & Cologne , 6c une
troilieme près de Francfort fur le Mein.
BERGENHUS , ( Géog.) province de Norwege ,
la plus occidentale entre le gouvernement d'Agger-
hus & la mer. Bergen en eft la capitale.
BERGER , f. m. (Œconom. rujlé) eft celui qui garde
un troupeau : il faut qu'il foit levé de grand matin ;
qu'il faffe fortir les beftiaux à la fraîcheur ; qu'il con-
noiffe les bons endroits pour les y conduire ; qu'il ait
un bon chien ; qu'il ne laiffe point répandre fon trou-
peau dans les blés ; qu'il ait foin d'avoir de bons bé-
liers; qu'il fâche aider une brebis à agneler; qu'il
puiffe médicamenter les brebis malades; qu'il s'en-
tende à leurs maladies , & qu'il ne fe laiffe point fur-
prendre par les loups. On peut lui confier depuis
cent jufqu'à cent cinquante brebis ; on lui fera net-
toyer la bergerie une ou deux fois l'an, au mois de
Mars & à la fin d'Août ; il tiendra un fac de f el pendu
dans la bergerie , afin que les brebis pour qui ce fe-
roit un remède , puiffent l'aller lécher ; & il veillera
foigneuf ement à ce que les couleuvres ne tètent point
fes brebis , foit dans la bergerie , foit aux champs.
* BERGERAC , ( Géog. ) petite ville de France ,
dans le Périgord , fur la Dordogne. Long. 18. y. lat.
45.
BERGERETTE , oifeau. ^ov^Bergeronnette.
* BERGERIE , f . f . ( ûconom. ruftiq. )lieu où l'on
héberge les beftiaux ; on donne cependant plus com-
munément le nom Jetable aux lieux où l'on héberge
les gros beftiaux , réfervant celui de bergerie pour
celui où l'on héberge les bêtes à laine , les boucs 6c
les chèvres. Les bergeries fe bâtiffent affez légère-
ment ; leur expofition la meilleure eft au midi ; les
uns les font fans planchers , d'autres avec des plan-
chers qui fervent de greniers aux fourages ; les bef-
tiaux font plus chaudement dans celles-ci , fur-tout 11
l'on a l'attention de faire les planchers bas ; il faut
que leur aire foit unie & fans pierre ; qu'elle aille en
pente du fond vers la porte , afin que l'urine defeende
d'elle-même ; qu'elle ne caule point de mal aux pies
des brebis , & que leur laine n'en foit pas gâtée : on
n'y donnera du jour que par une petite fenêtre de
deux pies en quarré. Quand on a des brebis dont la
laine eft fine 6c prétieufe , on fait l'aire de la bergerit
de planche , & on y pratique des trous pour fervir
d'écoulement aux eaux. Il faut avoir deux bergeries y
ou en couper une en deux, afin de féparer les agneaux
de leur mère , & mettre aufïï les béliers à part.
BERGERONETTE, f. f. Motacillafiava (Hifi. nat.
Ornithol. ) cet oifeau eft de la grofîeur & de la figure
de la lavandière ; il pelé 5 gros : il a environ 6 pou-
ces de longueur , depuis la pointe du bec jufqu'à l'ex-
trémité de la queue. Le deffous du corps de cet oi-
feau eft de couleur jaune ; le deffus eft d'un verd
obfcur à l'exception du milieu du dos qui eft noirâ-
tre. Le fommet de la tête eft d'un verd jaunâtre ; il
y a au-deffus des yeux une ligne jaune qui s'étend
jufque derrière la tête. La queue a environ deux pou-
ces 6c demi de longueur ; elle eft compofée de douze
plumes : les deux du milieu font plus pointues que
les autres. L'extérieure de chaque côté eft blanche
fur la moitié de fa longueur & plus ; les autres font
noires , elles font toutes d'égale longueur. Les ailes
reffernblent à celles de la lavandière pour la forme.
Il y a
B E R
Iî y a dix-huit grandes plumes dans chacune ; la fei-
zieme eft plus longue, que celles qui l'ont auprès , &c
ion bord eft blanchâtre. La pointe des petites plu-
mes du milieu eft d'un verd blanchâtre; le refte des
ailes eil brun. Le bec ert noir ; la langue eft four-
chue fans être déchiquetée : l'iris des yeux eft de cou-
leur cendrée , mêlée de couleur de noifette ; les pat-
tes font noirâtres. Le doigt extérieur tient au doigt
du milieu à la naiflance : l'ongle du doigt de derrière
eft allongé comme dans les aloiiettes. On trouve des
oifeaux de cette efpece dans lesquels. le jaune ou le
verd font plus foncés que dans les autres. La berge-
ronette niche dans les blés ; elle fait fon nid avec des-
hesbes, & elle met une couche de poil fous les œufs.
La femelle fait d'une feule ponte quatre ou cinq
œufs , parfemés de taches & de lignes brunes difpo-
fées irrégulièrement.
Il y a une autre efpece de bergeronette , motacilla ci-
mrea an jlava altéra. Aid. qui eft de la même gran-
deur que la précédente; elle a le bec droit , noir,
mince & pointu , les yeux verdâtres , les paupières
blanches ; il y a au-deflus des yeux une ligne blan-
châtre , la tête eft petite & un peu brune: le defîus
du corps eft de couleur cendrée ; les ailes font noirâ-
tres, Se traverfées par une ligne blanchâtre peu appa-
rente ; le menton &c la gorge font de couleur mêlée
de blanc & de cendré ; celle de la poitrine & du ven-
tre eft d'un blanc laie : il y a du jaune foncé fur le
croupion. La queue eft plus longue que tout le refte
du corps. La première plume de chaque côté eft
blanche, les deux plumes qui fuivent ont les barbes
intérieures blanches & les extérieures noirâtres ; &
les fix plumes du milieu font entièrement noirâtres.
Les cuifTes & les pattes font d'un brun pâle ; les on-
gles font crochus &c celui de derrière eft le plus long.
Cette defeription a été faite fur une femelle : le mâ-
le eft peu différent , il a feulement une tache noire
fous le menton. Ces oifeaux le trouvent le long des
fleuves qui roulent fur le gravier , & ils vivent d'in-
feûes d'eau. "Willughby, omit. Voye^ OlSEAU. (/)
* BERGINUS ( Myth. ) divinité particulière aux
habitans de Brefie , en Italie , où elle avoit un temple
& une prêtreflè. On la voit dans un monument ha-
billée à la romaine.
* BERG-OP-ZOOM ( Géog. ) ville des Pays-bas,
dans le Brabant Hollandois & le Marquifat de même
nom , en partie fur une montagne , tk en partie fin
la rivière de Zoom. Long. zi. 45. lit. 5i. Jo.
BERGREICHENSTÉIN ( Giog. ) ville de Bohè-
me , dans le territoire de Prague.
BERG-St.-VINOX ( Giog. ) ville & abbaye des
Pays-bas , dans le comté de Flandre , fur la Côme ,
au pié d'une montagne. Long. 20. 3. lai. 3o. 5y.
BERGSTRASS ( Giog. ) petit pays au-delà du
Rhin , appartenant en partie aux électeurs de Mayen-
ce & Palatin, &c au Landgrave de Darmftadt. Il s'y
trouve un chemin planté de noyers des deux côtés,
qui va depuis Darmftadt jufqu à Heidelbexg , c'eft-
à-dire l'cfpace de 1 1 lieues.
BERG-ZABERN , petite ville de France , en Al-
face. Long. z5. z5- lat. 4g. 4.
BERI BERI ( Hifl. mit. ou Médecine ) c'eft le nom
d'une maladie à laquelle on eft fujet dans les Indes
Orientales , & qui emporte en très-peu detems ceux
qui en font attaqués ; elle rcllemble beaucoup à l'a-
poplexie.
BERICHOT , oifeau. Voye^ ROITELET. (7)
BÉRIL , f. m. Beryllus ( Hijl. nat. ) pierre précieu-
fe de couleur d'eau de mer , c'eft-à-dire de couleur
mêlé de verd & de bleu : c'eft pourquoi les modernes
lui ont donné le nom d'aiguë marine. f "je- AlGUE
marine. Les anciens diitinguoient plufieurs lortes
de bérils. Les plus beaux étoient ceux dont la cou-
leur approchoit le plus de celle de l'eau de la mer.
Tome II,
B E R
209
Après ceux-là on eftimoit le plus ceux qui étoient
pâles & qui avoient des reflets de couleur d'or , chry-
foberylli. On en reconnoiflbit une forte qui étoit de
couleur encore plus pâle , & que l'on appelloit chry-
foprajus. Ceux que l'on nommoit acroides étoient plus
vefds ; il y erravoit aufli que l'on comparoit à la ci-
re & à l'huile pour l'apparence ; & d'autres que l'on
trouvoit femblables au cryftal. Mais la plupart de ces
pierres portent à préfent d'autres noms que celui de
béril, &c appartiennent à d'autres genres. Plin. lib.
3J. chap. 5. Boetii de Boot gemmarum , hijl. lib. II.
chap. Ixjx & Ixx. ( /)
La manière de le contre-faire eft de mêler à la
matière , dont on fait le cryftal faâice lorfqu'elle eft
en fonte , une certaine quantité cTœs ujlum ou de cui-
vre calciné par trois fois avec le foufre. Voye^ Crys-
tal factice. On réduit ce cuivre calciné en pou-
dre très-déliée; on y joint un peu de faffre pareille-
ment réduit en poudre : on jette petit à petit & à dif-
férentes reprifes, ce mélange dans la matière ou frit-
te du cryftal factice : on remue bien le tout , & l'on
continue à mettre des deux poudres combinées , juf-
qu'à ce que le verre ou cryftal ait pris une couleur
telle qu'on la demande. Les dofes en grand font de
mettre fur 60 liv. de matière de verre , une livre & -*-
de cuivre calciné , & quatre onces de faffre. (— )
*BERINGEN, (Géog.) petite ville du pays de
Liège.
* BERLAS , (Géog.) petite ville de France , dans
le haut Languedoc , au diocefe de Caftres.
BERLE, f. f.Jium, (Hijl. nat. bot.) genre de plan-
te à fleur en rofe & en ombelle , compolée de plu-
fieurs reuilles ordinairement égales, difpofées en ro-
fe, & foutenues par un calice. Ce calice devient un
fruit arrondi , qui renferme deux femences applaties
d'un côté , arrondies & cannelées de l'autre. Ajoutez
au caractère de ce genre , que les feuilles font rangées
par paires fur une côte terminée par une feule feuille.
.Tournefort, Infl. rei herb. f'oye^ PLANTE. (/)
* BERLIN , ( Géog. ) ville d'Allemagne , capitale
de l'éleftorat de Brandebourg, & rélidence du roi de
Prufle , fur la Sprée qui tombe dans l'Elbe , & qui com-
munique à l'Oder par un canal, dont l'entrée eft à
Francfort. Long. Ji. y. iS. lat. J>Z. 63.
BERLINE, f. f. (Sellier-Carroffler.) efpece de voi-
ture de la nature des carroffes, fort en ulàge depuis
peu, & tirant ion nom de la ville de Berlin en Alle-
magne , quoique certaines perfonnes en attribuent
l'invention aux Italiens , & prétendent en trouver l'é-
tymologic dans berlina, nom que ceux-ci donnent à
une elpece de théâtre fur lequel on fait fubir à des
coupables une ignominie publique. La berline eft une
allure très-commode en voyage; elle eft plus légère
qu'un char, & moins fujette à verier. Le corps en eft
élevé fur des flèches, 6c fulpendu par des bandes de
cuir ; elle a une efpece d'etriers on de marchepié pour,
y entrer; & au lieu de portières, des paravents que
l'on baiflè lorique le teins eft mauvais, & que l'on
élevé lorlqu'il fait beau. Voye^ le'i PI. du Sellier. Il
y a des berlines à un & à deux fonds.
* BERLINGES, {Géog.) îles de l'Océan, proche
la cote île Portugal.
B E R L I N G O T , f. m. ( Sellier- Carrojjler. ) petite
voiture de la forme de la berline , mais beaucoup plus»
légère. Voye^ Berline.
* BERLINICKEN, {Géog.) petite ville de la Mar-
chc-de-Brandebourg , fur les frontières de Poméi anie.
BERME , f. f. en' Architecture , eft un chemin qu'on
laifle entre une levée &C le bord d'un canal ou d'un
toile , pour empêcher que les terres de ia le\ ee, ve-
nant à s'ébouler , ne remplirent le canal ou foiîè. (P)
BERME , en Fortification , efl un efpace large de qua-
tre à cinq pies , au dehors, entre ie pie du rempart ,
cv le côte du folle : Ion uiage ell de recevoir la terre
Dd
2io B E R
qui s'éboule du rempart , & d'empêcher qu'en tom-
bant elle ne comble le foffé. On l'appelle auffi lifiere
& relais.
On plante ordinairement un rang de paliflade fur
îa btrmt , afin d'empêcher l'ennemi de s'y établir ai-
fément. On la fortifie encore quelquefois par une haie
vive , qui lui fert d'une excellente défenfe. L'enne-
mi eft obligé de la détruire avec le canon. Les paliffa-
des & cette haie vive afïïirent auffi la place contre
l'efcalade , ôc rendent cette entreprife plus difficile.
(<2)
BERME . f. f. terme d'Amydonnurs; c'eft un tonneau
dans lequel ces artifans mettent les recoupes de fro-
ment ou le froment dont ils compofent l'amydon ,
pour y fermenter ou y recevoir les autres prépara-
tions. Foye{ Amydon.
BERMIERS & BERMIERES ; c'eft ainfi qu'on ap-
pelle dans les falines , des ouvriers & des ouvrières
occupés à tirer & à porter la muire au tripot. Voye^
Tripot, Muire, & Saline.
* BERMUDES ( les ) Géog. îles de l'Amérique
feptentrionale, vis-à-vis la Caroline, découvertes en
1522 ou 27 , par Jean Bermudez Efpagnol.
BERMUDIENNE, f. f. Bermudiana, {Hift.-nat. bot.)
genre de plante à fleur liliacée , compofée de fix pé-
tales. Le calice devient un fruit triangulaire , qui s'ou-
vre en trois parties , & qui eft intérieurement parta-
gé en trois loges remplies de femences arrondies.
Tournefort, Injl. reiherb. Voye^ Plante. (/)
BERNACLE, oifeau. Voye^ Cravant. (/)
Bernacle , f. f. concha anatifera, (Hijl. nat. ) co-
quillage , dont la coquille eft compofée de cinq pie-
ces. M. Needham la décrit dans fes nouvelles obfer-
vations microfeopiques. Cette production fe trouve
dans la mer : on y peut diftinguer trois parties diffé-
rentes; le pédicule, la coquille , & l'animal qui eft
renfermé dans la coquille. Le pédicule eft une forte
d'étui cylindrique qui a jufqu'à fix pouces de lon-
gueur, il eft noirâtre tk compact: c'eft par l'une des.
extrémités de cette forte de pédicule , que le bernacle
adhère aux rochers & auxvaifleaux. Le diamètre de
la cavité du pédicule n'eft pas proportionné à celui
de la circonférence extérieure , parce que le tuyau
eft formé par plufieurs membranes compofées de fi-
bres longitudinales qui s'étendent quelquefois au dou-
ble de leur longueur ordinaire. Lorfque ces fibres fe
defTechent après la mort de l'animal , elles fe durcif-
fent, & deviennent rudes & grenues comme du cha-
grin. « La coquille tient au pédicule , elle paroît être
» bivalve en apparence : mais fi on l'examine un peu
» attentivement, on découvre bientôt que chacun
» de fes côtés eft compofé de deux pièces adhéren-
»> tes l'une à l'autre par une fine membrane , qui en
» tapiffe toute la furface concave, & qui s'infinuant
» entre chaque divifion , joint ces pièces enfemble ,
» de façon que l'animal a l'avantage de pouvoir at-
» tirer à foi l'eau & la nourriture; & pour cela, il
» n'eft pas néceffaire que les deux battans de fa co-
» quille s'éloignent l'un de l'autre , comme ceux des
» huîtres & des moules ; ils en font empêchés par
» une charnière courbe & concave , dans les bords
» de laquelle ils font engrenés , & qui s'étend au-
» de-là de la moitié de leur circonférence : mais ils
» forment un angle à chacune de leurs divifions , &
» par-là ils laiffent entr'eux une ouverture qui a à
» peu près la figure d'un rhomboïde. Ainfi tout ce qui
» eft attiré par lé jeu des cornes du poifîbn , eft aiié-
» ment retenu dans cette cavité. Lorfque l'animal eft
» tranquille , fa coquille eft toujours ouverte , parce
» qu'il a continuellement beioin de nouvelle eau ,
» qu'il fuce & qu'il rejette alternativement; ce qu'on
» peut remarquer par le jeu de deux antennes cor-
» refpondantes , qui reffemblent à celles de quelques
» infettes , & dont le mouvement répond aftez bien à
B E R
» celui des ouïes des autres poifTons ». Nouv. obfervl
microfeop. pag. ZZO. & ZZl.
La tête de l'animal eft au moins garnie d'une ving-
taine de petites cornes ou bras de différente lon-
gueur ; lorfqu'on voit ces prolongemens par le moyen
du microfeope, ils paroiffent frangés; au lieu d'être
rangés circulairement autour de la bouche, ils font
tous placés à côté; lorfqu'ils fe contractent, ils for-
ment des courbes irrégulieres enfermées les unes dans
les autres. Il y a plufieurs incifions fur le côté conca-
ve, & on voit dans les intervalles compris entre ces
incifions , des touffes de poil allez femblables à de pe-
tites broffes. M. Needham croit que lorfque l'animal
les agite toit au-dedans de là coquille , foit au-dehors,
il forme dans l'eau un courant , & que par ce moyen
il attire les animalcules dont il fe nourrit. La tête hé-
riftee de ces fortes de cornes peut lortir au-dehors de
la coquille , & rentrer au-dedans.
Il y a au milieu du groupe de ces cornes , précifé-
ment au-deffus de la bouche , une trompe qui renferme
une forte de langue longue & ronde, à peu-près comme
celle du pivert. La bouche du bernacle eft compofée
de fix lames qui peuvent s'écarter les unes des autres,
& qui font dentelées comme une feie fur leur bord
convexe ; ces lames font difpofées en cercle , & fixées
par l'une de leurs extrémités ; leur arrangement eft tel
qu'en s'élevant & s'abaiffant alternativement , leurs
dents fe corréfpondent; elles font appliquées les unes
contre les autres , de façon qu'elles forment une ou-
verture pliffée ; le corps du bernacle eft aflez reflem-
blantà une petite huître.
En l'ouvrant, M. Needham a trouvé dans plufieurs
une excroifîance bleue placée de chaque côté & im-
médiatement au-deffous du groupe des cornes. Ces
excroiffances , vues au microfeope , ont paru être un
fac membraneux rempli de petits globules bleus d'une
figure ovoïde & uniforme , & aflèz femblables au frai
des autres poiffons. M. Needham foupçonne que les
bernacles fe multiplient comme les polypes, c'eft-à-
dire , par une forte de végétation : mais il ne l'afTûre
pas , parce qu'il n'a pas pu acquérir des preuves con-
vaincantes fur ceux qu'il a vu. morts ; cependant il en
a trouvé lix ou fept en groupe intimement joints en-
femble par leur extrémité, & qui reflémbloient plu-
tôt à des rejettons que produit une même racine , qu'à
des branches qui naiffent d'un même tronc , ou à des
petits qui fortent du corps de la mère : mais il n'a pas
pu déterminer fi cette forte d'union vient de ce que
la multiplication de cet animal eft analogue à celle
du polype , ou fîmplement de ce que différentes por-
tions de fraife touchent & croifîent fans s'écarter les
unes des autres.
M. Needham fait mention d'une autre efpece de
bernacles plus petite que la précédente. « On les trou-
» ve auffi adhérentes aux rochers & aux vaiffeaux ;
» ils différent principalement des autres, en ce que
» la coquille qui renferme immédiatement leur corps
» avec le pédicule fur lequel il eft fixé , eft logée
» dans une autre coquille univalve , qui a la forme
» d'un cône tronqué, qui s'attache contre le fond
» des vaifîeaux , comme celle d'un gland de mer avec
» laquelle il eft aifé de la confondre, page. iz5 ». Au
refte ces petits bernacles font affez reffemblans aux
grands.
M. Needham fait obferver qu'il y a beaucoup d'a-
nalogie entre ces bernacles &les animalcules à roues,
dont M. Leuwenhoek a découvert deux efpeces, &
les polypes à pennaches de M. Trembley. On a ap-
pelle le bernacle, concha anatifera , parce qu'on croyoiî
autrefois qu'il fortoit de ce coquillage une efpece de
canard. Voye^ Cravant. (/)
* BERNAGE , f. m. ((Economie rufliq.) On entend
par ce mot , dans les campagnes oii il eft en ufage ,
des mélanges de grains, qui fe font pour la nom-
B E R
iiture des beftiaux , & qui fe femcnt avant Fhyver.
BERNARD -L'HERMITE , cancellus , animal du
genre des cruftacées , aufïï appelle UfoLdat. Il n'eft
pas recouvert en entier d'une taie comme les autres
cruftacées , ayant par conféquent des parties molles
à découvert. Il fe réfugie dans les coquilles vuides
qu'il rencontre , & c'eft toujours dans celles qui font
tournées en vis ; il fe loge aufïï dans les zoophytes
qui ont des cavités propres à le recevoir , ou dans
d'autres choies qu'il trouve convenables pour le met-
tre à l'abri de tout ce qui pourroit le bleffer , & affez
légères pour qu'il puiffe fe déplacer avec fa logelorf-
qu'il veut changer de lieu. Il vit folitaire , c'eft pour-
quoi on lui a donné le nom de bernard-f /termite ; ce-
lui defoldat vient fans doute de ce qu'il fe tient dans
fa coquille comme un fentinelle dans fon porte , ou
de ce qu'il fe revêt & qu'il s'arme , pour ainfi dire ,
d'une coquille étrangère.
Le corps de cet animal eft allongé comme celui
des langouftes ; il a deux cornes longues & menues
de couleur jaune, celle du refte du corps eft mêlée
de rouge & de jaune. Ses yeux font afTez élevés ; fa
bouche eft entourée de petits filamens : il a deux lon-
gues pattes qui ont des ferres courtes ; l'une de ces
pattes eft prcfque toujours plus groffe que l'autre.
Rondelet prétend que la gauche eft toujours la plus
groffe : mais il y en a aufïï qui ont au contraire la pat-
te droite plus grofTe que la gauche. Le bernard-l'her-
mite a de chaque côté deux autres jambes longues ,
courbes & pointues ; ce qui fait en tout fix jambes ,
qu'il allonge en fortant à demi de fa coquille , & qu'il
accroche quelque part lorfqu'il veut changer de lieu ;
c'eft aufïï par le moyen de ces pattes , qu'il iailit les
petits poiffons ou les infe&es dont il fe nourrit. Cet
animal a, outre ces lîx jambes, trois prolongemcns
de chaque côté au-delà de la poitrine ; ces prolon-
gemens n'ont chacun que le tiers de la longueur de
chaque jambe; ils font mous , & ils tiennent à la par-
tie du corps qui n'eft recouverte que par une peau
ince. Le refte a une efpece d'écaillé plus molle
que celle des écreviffes. Rondelet a diftingué les mâ-
les des femelles par les œufs qu'il a vu attachés au-
dehors du corps de la femelle pendant l'été, lorfque
le bernard C kermite fort au-dehors de fa coquille. Voye^
Rondelet. lib.XVHI. des poijj'ons, &lesMém. de l 'Aca-
démie royale des Sciences , année ijio.pag. 466.
Il y a dans les îles de l'Amérique des bernard-fher-
m'ue qui ont trois ou quatre pouces de longueur. On
rapporte que cet animal vient une fois chaque année
fur le bord de la mer, pour y jetter les œufs & chan-
ger de coquille ; car il eft obligé de quitter la coquille
dans laquelle il sétoit logé, parce qu'ayant grofïï
pendant l'année , il fe trouve gêné dans cette coquil-
le. Alors il fe tranfporte fur le rivage , & il cherche
une nouvelle coquille qui puiffe lui convenir. Dés
qu'il en a rencontré une , il fort de l'ancienne , il ef-
iàye fon nouveau logement ; & s'il eft convenable ,
il s'en empare & y refte : mais il ei\ fouvent obligé
d'entrer dans plusieurs coquilles avant que d'en trou-
ver une qui lui foit proportionnée. S'il arrive que
deux bernard-llicrmin s'arrêtent à la même coquille ,
ils fe la difputent ; le plus foible eft contraint de la
céder au plus fort. Cet animal fait un petit cri lorf-
qu'on le prend. Il faut éviter qu'il ne faififfe le doigt
avec fa lêrre ; car il l'air beaucoup de mal, & ne lâ-
che que très-difficilement. Les habitans du pays le
mangent, & le trouvent très-bon: mais on dit qu'il
cil pernicieux pour les étrangers. Vqyc[ Hiji. gén,
des Antilles , par le P. du Tertre. Aojt^CRUSTACÉES.
^ ,„*
* BERNARD , (le grand Saint) Geog. mon-
tagne de Suiffe 5c de Savoie, entre le Valais & le val
d'Aoft, à la fource de la Drance Cv de la Doria.
*BERNARDIA, (Hiji nat, bot. ) plante ainli ap-
Tome II,
B E R *n
pellée par M. Guillaume Houftoun, du nom de M.
Bernard de Jufficu, dcmonftrateur en Botanique au
Jardin-royal de Paris. Elle eft mâle & femelle : la plan-
te mâle produit de petits chatons qui tombent quand
ils font mûrs. La femelle a des fleurs dont le pétale eft
couleur de vermilion : ces fleurs font fuivies d'un fruit
à trois coques, femblables à celles du ricin. On en
compte de quatre efpeces.
BERNARDINS, f. m. pi. (Hiji. éccléf. ) religieux
fondés par S. Robert, abbé de Molefme, & enfuite
deCîteaux en Bourgogne, d'où ils font nommés Re-
ligieux de Citeaux. Leur ordre eft une réforme de ce-
lui de S. Benoît: mais parce qu'il a été fort étendu
par S.Bernard, abbé de Clairvaux, on les appelle
Bernardins, nom fous lequel ils font plus connus en
France, que fous celui de Cijlerciens. Foye^ Cister-
ciens. 41s portent une robe blanche avec un feapu-
laire noir par-deffus , &: hors du cloître une robe noi-
re avec un capuce de même couleur , dont la pointe
leurdefcend par derrière jufqu'à la ceinture. Au chœur
ils font vêtus d'une large robe blanche à grandes man-
ches, avec un chaperon blanc.
On compte en France cinq abbayes de Bernardins,
chefs d'ordre : favoir, Cîteaux, Clairvaux , Ponti-
gny , la Ferté, & Morimont. Les ordres d'Alcantara
6c de Calatrava en Efpagne , font compris dans l'or-
dre de S. Bernard, aufïï-bien que les Feuillans, nou-
velle réforme commencée au xvie. fiecle. Les rein
gieufes appellées Bernardines , fuivent la règle defaint
Benoît ; & font vêtues de blanc comme les Bernar-
dins. (G)
BERNAUDOIR , f. m. (Bonneterie) c'eft un grand
panier d'ofier, à claire voie, rond & oblong, dont
l'ufage eft pour nettoyer les brins de laine que l'on
ramaffe deffous la claie , après que la laine eft bat-
tue : on prend ces brins , on les met dans le bernau-
doir, & avec une baguette on les agite circulaire-
ment jufqu'à ce qu'ils (oient ouverts & affez nets pour
être ajoutés au refte de la laine battue, f'oye^ Planche
du Bonnetier ,jîg. 1. un bernaudoir.
*BERNAW, ( Giog. ) petite ville d'Allemagne,"
dans l'électorat de Brandebourg , à deux lieues de Ber-
lin. Il y en a encore deux autres de même nom , l'une
dans l'éveché de Ratisbonne; & l'autre dans le haut
Palatinat.
*BERNBOURG, (Geog. ) petite ville d'Allema-
gne, du cercle delà haute Saxe, & dans la principau-
té d'Anhalt , fur la rivière de Sara. Long. jç>. lat. 3/.
33.
*BERN-CASTEL, (Ge'og.) petite ville d'Allema-
gne, dans l'élcftorat de Trêves, furlaMofelle, entre
Trarbach & Weldens.
B E R N E , ( Marine. ) mettre le pavillon en berne ,
c'eft hiffer le pavillon au haut du bâton de pavillon,
& le tenir ferlé. On met ordinairement le pavillon en
berne pour appeller la chaloupe, & c'eft en général
un fignal que les vaùTeaux pavillons donnent aux in-
férieurs, pour les avertir de venir à bord de leur pa-
villon; on s'en fert aufïï pour divers autres fignaux.
Voyt{ Hisser & Ferler. (Z)
* Berne» ( Canton de) Geog. le fécond Se le
plus grand des trei7e cantons Suiffes , d'environ foi-
xante lieues de long, fur trente dan > fa plus grande
largeur. I! fe divilè en deux parties principales : l'une
qu'on appelle le pays Allemand; C\i l'autre,
Romand, ou plus communément le pays - Li
pays Allemand fe partage en trente-cinq gouverne-
mens, &: le pays de Vaud en treize,. Les Btrn
encore quatre gouverneraens par indivis
bourgeois. Berne eft la capitale du canton.
Berne, (Geog.) ville de Suiffe, capitale du can-
ton de même nom, dans une longue prefqu'ile for-
mée par l'Aar. Long, zà, 10. Idt. 4J.
Ddij
si2 B E S
* BERNÊEK,(6Vo£.) il y a deux villes de ce nom,
l'une , dans la Francome ; l'autre, dans la Stirie.
* BERNEZO, (Géog.) petite ville du Piémont.
* BERNN, (Geog.) petite ville de la Poméranie.
* BERNSTADT , (Géog.) petite ville de Silefie,
fur le Y/cida.
* BERNSTEIN,(<SV0g\) ville de la nouvelle mar-
che de Brandebourg.
* BERNTHALER , {Commerce.) écu du canton de
Berne. Il vaut quelque choie de moins que les écus
d'Empire, appelles ryxdalers ; c'elt- à-dire, qu'il ne
vaut pas tout-à-fait cinq livres de notre monnoie.
* BEROE, (Myth.) une des nymphes, qui accom-
pagne dans Virgile, Cyrene mère d'Ariftée.
* BERRE , (Géog.) petite ville de France , en Pro-
vence, avec titre de baronie, au diocefe d'Arles.
L0ng.22.6z.lat.43.3z.
* BERRI, (Géog.) province de France, avec titre
de duché , bornée au iéptentrion par l'Orléanois , le
Blaifois & le Gatinois, à l'orient par leNiveinois &
le Bourbonnois , au midi par le Bourbonnois & la
Marche, Se à l'occident par la Touraine & le Poi-
tou. Elle le divile en haut & bas Berri. Bourges en
eft la capitale.
* BERRUYERS , f. m. pi. (les) Géog. anc. mod. &
Hijl. peuples du Berri. Ils occupoient jadis toute la
Celtique , & y formoient la plus puiffante monarchie
des Gaules. Bourges en étoit capitale.
* BER.S , ( Pharmacie. ) électuahe des Egyptiens ,
qui leur excitoit un délire gai &l momentanée.
* BERSABÉE ou EEER.SEBA, (Géog.fainte.) vil-
le de la Paleftine , vers Gaza , qu'on a priie depuis
pour Gibelin. Berfabée lignifie puits dujerment. Elle
fut ainfi appellée , parce qu'Abraham & Abimelech
y jurèrent l'alliance qu'Ifaac confirma dans la fuite ,
foit avec Abimelech, foit avec l'on fucceffeur. Elle
fut du partage de la tribu de Simeon. Ce n'elt plus
qu'un village qu'on nomme Gallyn ou Bethgeblin.
*BERSÂRIENS ou BEVERARIENS, fub.m. pi.
{Hijl. mod. & anc.) bas officiers de la cour de Char-
lemagne. Quelques-uns prétendent que les berfariens
étoient aulïi les mêmes que ceux que les anciens ap-
pelaient befiiarii. f^oyei Bestiaru. Et ils enten-
dent par beverariens , ceux qui chaiïbient le caftor.
* BERSELLOoh BRESELLO, (Géog.) ville d'Ita-
lie , dans le Modénois , proche le confluent de la Lin-
za & du Pô. Long. z8. Lat. 44. 55.
* BERSIAMITES, (les) f. m. pi. (Géog.) peuples
de l'Amérique leptentrionale, au Canada, fur les
bords de la rivière de S. Laurent.
* BERSUIRE , (Géog.) petite ville de France, dans
le bas Poitou. Long. iy. 3. lat. 46. 5z.
* BERT1NORO , ( Géog. ) ville d'Italie , dans la
Romagne , fur une colline. Long. zj. IJ. lat. 44. 8.
EERTONNEAU,/w/o«. Foye^ Turbot. (I)
BERlOIS, f. m. c'elt ainfi qu'on appelle, dans
les carrières d'ardoife, les cordes qui font attachées au
bafficot, & qui fervent à l'enlever hors de la carriè-
re , par le moyen de l'engin. Voye^ Van'icle Ardoise.
* BERTRAND , (Saint ) Géog. ville de France,
enGafcogne, fur la Garonne. Long. i%. 8. lat. 43. 3.
* BES , f. m. (Hiji. anc.) une des pièces qui ne
contenoient qu'une portion de l'as des Romains. Le
bes étoit de huit parties de l'as divifé en douze , ou
de ~r de l'as. Cette valeur du bes étoit la même, foit
qu'il fût queftion de l'as pondéral, ou de l'as menfu-
ral, ou de l'as monnoie. f^oye^ As.
BESAIGUE , f. f. eft un outil dont fe fervent les
Charpent'urs pour dreffer & réparer leurs bois lorf-
qu'ils les ont refaits à la coignée , & à faire les te-
nons, les mortoifes , &c. Elle eft faite par un bout
comme un cifeau à un tranchant, 6c par l'autre
comme un bec-d'âne ; dans le milieu eft une douille
qui lert à l'ouvrier pour la tenir ; fa longueur eft
BES
environ de trois pies & demi. Voye^ la figure S.
Planche des outils du Charpentier.
* BESANÇON , ( Géog. ) ville de France , capi-
tale de la Franche-Comté ; elle eft divifée en haute
& baffe ville. Long. 23. 44. lat. 47. 18.
II y a à cinq lieues de Befançon une grande caver-
ne creufée dans une montagne , couverte par le def-
fus de chênes & d'autres grands arbres , dont on
trouve trois récits dans les Mémoires de l'Académie ;
l'un dans les anciens Mémoires , tom. II. le fécond
dans le recueil de 1 7 1 2 , & le troifieme dans celui de
1726. Nous invitons les lecteurs crédules de les par-
courir tous les trois ; moins pour s'inftruire des parti-
cularités de cette grotte qui ne font pas bien mer-
veilleufes , que pour apprendre à douter. Quoi de
plus facile que de s'inftruire exactement de l'état
d'une grotte ? Y a-t-il quelque choie au monde fur
quoi il ibit moins permis de fe tromper , & d'en impo-
ier aux autres ? Cependant la première relation eft
fort chargée de circonftances ; on nous affine , par
exemple , qu'on y accourt en été avec des charriots
& des mulets quitranfportent des proviiions de gla-
ce pour toute la province ; que cependant la glacière
ne s'épuife point, & qu'un jour de grandes chaleurs
y reproduit plus de glaces qu'on n'en enlevé en huit
jours ; que cette prodigieufe quantité de glace eft
formée par un petit ruiffeau qui coule dans une par-
tie de la grotte ; que ce ruiffeau eft glacé en été ; qu'il
coule en hy ver ; que quand il règne des vapeurs dans
ce foùterrain , c'eft un figne infaillible qu'il y aura
de la pluie le lendemain ; & que les payfans d'alen-
tour ne manquent pas de confulter cette efpece lin-
guliere d'almanach, pour favoir quel tems ils auront
dans les différens ouvrages qu'ils entreprennent.
Cette première relation fut confirmée par une fé-
conde ; 6c la grotte conferva tout fon merveilleux ,
depuis 1699 jufqu'en 1 7 1 2 , qu'un profeffeur d'Ana-
tomie & de Botanique à Befançon y defeendit. Les
fingularités de la grotte commencèrent à dilparoître ;
mais il lui en refta encore beaucoup : le nouvel ob-
fervateur loin de contefter la plus importante , la
formation de la glace, d'autant plus grande en été,
qu'il fait plus chaud , en donne une explication , &
prétend que les terres du voifmage , & fur-tout celles
de la voûte , font pleines d'un lel nitreux , ou d'un
fel ammoniac naturel ; & que ce lel mis en mouve-
ment par la chaleur de l'été , fe mêlant plus facile-
ment avec les eaux qui coulent par les terres & les
fentes du rocher, pénètre julque dans la grotte; ce
mélange , dit M. de Fontenelle, les glace précifé-
ment de la même manière que fe font nos glaces ar-
tificielles ; & la grotte eft en grand , ce que nos vaif-
feaux à faire de la glace font en petit. Voilà, fans
contredit , une explication très-fimple & très-natu-
relle ; c'eft dommage que le phénomène ne foit pas
vrai.
Un troifieme obfervateur defeendit quatre fois
dans la grotte , une fois dans chaque failbn , y fit des
obi ervations , & acheva de la dépouiller de les mer-
veilles. Cène fut plus en 1726 , qu'une cave comme
beaucoup d'autres ; plus il fait chaud au-dehors,
moins il fait froid au-dedans : non-leulement les eaux
du ruiffeau ne fe glacent point en été , & ne fe dégè-
lent point en hy ver , mais il n'y a pas même de ruif-
feau ; les eaux de la grotte ne font que de neige ou
de pluie ; & de toutes fes particularités , il ne lui
refte que celle d'avoir prefque sûrement de la glace
en toute faifon.
Qui ne croiroit fur les variétés de ces relations ,
que la grotte dont il s'agit étoit à la Cochinchine ,
& qu'il a fallu un intervalle de trente à quarante ans ,
pour que des voyageurs s'y fuccédaffent les uns aux
autres , & nous déîrompaffent peu à peu de fes mer-
veilles r cependant il n'eft rien de cela ; la grotte eft
B E S
dans notre voiûnage ; l'accès en eft facile en tout
tems ; ce ne font point des voyageurs qui y descen-
dent ; ce font des philofophes , & ils nous en rappor-
tent des faits faux , des préjugés , de mauvais rai-
fonnemens , que d'autres philofophes reçoivent , im-
priment , & accréditent de leur témoignage.
BESICLES , f. f. pi. {Lunetier. ) c'eft ainfi qu'on
appelloit autrefois les lunettes à mettre fur le nez. Il
y en a de deux fortes ; les unes dont le verre eft con-
vexe eu plan convexe , fervent pour les perfonnes
qui ont la vue longue , c'eft-à-dire qui ne distinguent
bien que les objets éloignés. A royc{ Presbyte , Con-
vexe , Lentille , Verre, &c les autres dont le
verre eft concave ou plan concave, fervent pour
ceux qui ont la vue courte , c'eft-à-dire , qui ne dif-
tinguent bien que les objets fort proches. Voye^
Myope, &c. Les premières grouillent l'objet ,
parce qu'elles rendent les rayons plus convergens
qu'ils n'étoient avant que de traverfer le verre ; les
autres le diminuent , parce qu'elles rendent les rayons
moins convergens. f^oyeir Convergent. Dans le
premier cas , l'angle viluel eft augmenté par la con-
vergence augmentée des rayons ; dans le fécond il
eft diminué par la diminution de cette même conver-
gence : mais ces deux efpeces de lunettes font voir
l'objet plus diftinclement qu'à la vue fimple. On en
trouvera les raifons aux articles déjà cités , Presby-
te , Myope , Vision , &c ( O )
* BESIGHEIM,(G<%.) ville d'Allemagne , en
Soiiabe , au duché de Wirtemberg , au confluent de
l'Entz & du Ncclcre , entre Hailbron & Studgard.
BESLERIE, f. f. bejleria, (Hifl. nat. bot.) genre
de plante dont le nom a été dérivé de celui de Bafile
Bélier , pharmacien de Nuremberg. La fleur des plan-
tes de ce genre eft monopétale irréguliere , à deux
lèvres ou en mafque ; il s'élève du fond du calice un
piftil qui eft attaché comme un clou à la partie pol-
îérieure de la fleur , & qui devient dans la fuite un
fruit mou , charnu, ovoïde , & rempli de petites fe-
mences. Plumier , Nova plant. Amer. gen. Voye^
Plante (/)
* BESLIS , f. m. {Hift- mod. ) c'eft ainfi qu'on ap-
pelle en Turquie les valets-de-pié des gouverneurs
ik. des bâchas ; on en prend fouvent pour en faire des
janiflaires.
* BESOIN , f. m. c'eft un fentiment defagréable ,
occalionné par l'abfence apperçûe , & la préfence
defirée d'un objet. Il s'enfuit de-là , i°. que nous
avons deux fortes de befoins; les uns du corps, qu'on
nomme appétits ; les autres de l'efprit , qu'on ap-
pelle defirs : z°. que puisqu'ils font occafionnés par
l'abfence d'un objet , ils ne peuvent être fatisfaits
que par fa préfence : 30. que puifquc l'abfence de
l'objet qui occalionnoit le befoin étoit defagréable ,
la préfence de l'objet qui le fatisfait eft douce :
40. qu'il n'y a point de plailir fans befoin : <j°. que
l'état d'un homme qui auroit toujours du plaifir , fans
avoir jamais éprouvé de peine , ou toujours de la
peine , fans avoir connu le plaifir , eft un état chimé-
rique : 6°. que ce font les alternatives de peines & de
phiiiirs, qui donnent de la pointe aux plailïrs & de
l'amertume aux peines : 70. qu'un homme né avec
un grand chatouillement qui ne le quitteroit point,
n'auroit aucune notion de plailir : !S°. que des fen-
fations ininterrompues ne feroient jamais ni notre
bonheur ni notre malheur: 90. que ce n'eft pas feu-
lement en nous-mêmes que les befoins (ont la fource
denos plailirs cvde nos peines , mais qu'ils ont donné
lieu à la formation de la fociété , à tous les avanta-
ges qui l'accompagnent , & à tous les defordres qui
la troublent. Supposons un homme formé & jette
dans cet univers comme par hafard, il repaîtra d'a-
bord les yeux de tout ce qui l'environne ; il s'appro-
chera ou s'éloignera des objets , félon qu'il eu fera
B E S M}
diverfement affecté : mais au milieu des mouvemens
de la curiofité qui l'agiteront , bientôt la faim fe fera
fentir , & il cherchera à fatisfaire ce befoin. A peine
ce befoin fera-t-il fatisfait, qu'il lui en fur viendra d'au-
tres qui l'approcheront de les femblables, s'il en ren-
contre : la crainte , dit l'auteur de YEfprit des lois ,
porte les hommes à fe fuir ; mais les marques d'une
crainte réciproque doivent les engager à fe réunir. Ils
le réunifient donc ; ils perdent dans la fociété le fenti-
ment de leur foibleffe , & l'état de guerre commence.
La fociété leur facilite & leur allure la poffeifion des
choies dont ils ont un befoin naturel : mais elle leur
donne en même tems la notion d'une inimité de be-
foins chimériques , qui les preffent mille fois plus vi-
vement que des befoins réels , & qui les rendent peut-
être plus malheureux étant raflemblés qu'ils ne l'au-
roient été difperfés.
* Besoin, Nécessité, Indigence, Pauvreté,
Disette , ( Gram. )La pauvreté eft un état oppofé à
celui d'opulence ; on y manque des commodités de la
vie ; on n'eft pas maître de s'en tirer ; ce n'eft pas
un vice en foi , mais il eft pis devant les hommes.
Uindigence n'eft autre choie que l'extrême pauvreté;
on y manque du néceffaire. La difette eft relative
aux alimens : le befoin & la nécefficé , font des termes
qui feroient entièrement fynonymes l'un à pauvreté,
6c l'autre à indigence , s'ils n'avoient pas encore quel-
que rapport aux fecours qu'on attend des autres : le
befoin feulement preffe moins que la néceffité ; on mé-
prile les pauvres; on a pitié des indigens ; on évite
ceux qui ont befoin , & l'on porte à ceux qui font
dans la néceffité. Un pauvre avec un peu de fierté ,
peut fe palier de fecours ; Y indigence contraint d'ac-
cepter ; le befoin met dans le cas de demander; la né-
ceffité dans celui de recevoir le plus petit don. Si l'on
examine les nuances délicates de ces différens états ,
peut-être y trouvera-t-on la raifon des fentimens
bilarres qu'ils excitent dans la plupart des hommes.
BESON , f. m. (Commerce.) mefure des liquides
dont on fe fert en quelques lieux d'Allemagne , &
particulièrement à Augsbourg : douze befons font le
je , & huit maffes le befon. Voye{ JE & Masse. ( G )
BESOGNE , f. f. terme de Rivière ulité dans les an-
ciennes ordonnances pour tous les officiers des ports,
qui fignifie exercice , travail. Les mouleurs de bois ne
peuvent avoir qu'une befogne à la fois. Befogne fe dit
auiîi d'une elpece de bateau foncet.
BESORCH, f. m. ( Commerce. ) monnoie d'étain
alliagée qui a coursàOrmus ; elle vaut trois deniers
argent de France.
Le beforch eft la dixième partie d'un Pays. Voye^
Pays.
* BESS AN , (Géog.) petite ville de France en Lan-
guedoc , au dioceied'Agde.
* BESSARABIE ou BUDZIAC , ( Géog. ) petite
contrée entre la Moldavie , le Danube , la mer Noire ,
&. la petite Tartarie.
* BESSE , ( Géog. ) ville de France en Auvergne,
élection de Clermont.
BESSI , ( Commerce. ) petite monnoie qui fait un
demi-foldo ; il en faut quarante pour faire une lira.
BESSIERES , (Géog.) ville de France dans le bas
Languedoc, audioceie deToulouie.
M3ESSIN , ( LE ) Géog. petit pays de France dans
la baffe Normandie , proche la mer. On le àr
haut & bas : Baveux en eft la capitale.
BESSON, BOSSON, BOUCHE, BOUGE, (Ma-
rine. ) c'eft la rondeur des baux & des tillacs , cV: pro-
prement tout ce qui eft relevé hors d'oeuvre & qui
n'eft pas uni. Voyt{ Bau 6Tillac. (Z)
BESTIAIRES, f. m. pi. ( ffèft. •—• ) chez les an-
ciens Romains , étoient des hommes qu'on ;
pour combattre contre des bêtes fauvages , ou bien
nue la juitice avoit condamnes à cette punition. Noui
M
B E T
diftinguens communément deux fortes de hfiiaires ;
les premiers étoient condamnés aux bêtes, foit com-
me ennemis faits plafonniers » on comme efclaves &c
coupables de quelque crime énorme : on les expofoit
les uns & les autres aux bêtes tout nuds & fans déien-
fes ; il ne leur fervoit même de rien de vaincre les
■bctes & de les tuer ; car on en lâchoit toujours de nou-
velles fur eux,& le combat ne finiffoit que par la mort
des condamnés. Mais il arrivoit rarement qu'il en
fallût deux pour le même homme ; deux hommes
étoient fouvent vaincus par une feule bête. Cice-
ron parle d'un lion qui en maflacra lui feul deux cens.
Les bejliaires qui fuccédoient aux premiers s'appel-
loient içttyol , & les derniers texeeço) ; chez les Ro-
mains, mendiant. V. GLADIATEUR, AMPHITHEA-
TRE , &c.
Les Chrétiens étoient des bcjliaires de cette efpe-
ce ; quelques - uns même d'entr'eux , bien que ci-
toyens Romains, n'en étoient pas exempts, quoi-
qu'ils dûffent l'être fuivant les lois.
La féconde efpece des bejliaires étoit compofée ,
ainli que l'obferve Seneque , de jeunes gens qui pour
acquérir de l'expérience au maniement des armes ,
combattoient quelquefois contre les bêtes , & quel-
quefois les uns contre les autres ; ou des braves qui
vouloient bien s'expofer à ces dangereux combats
pour montrer leur courage & leur adreffe. Auguite
excita les jeunes gens de la première qualité à ce gen-
re d'exercice ; Néron s'y expofa ; & Commode pour
en être forti vainqueur, acquit le titre d'Hercule Ro-
main.
Vigenere ajoute deux autres efpeces de bejliaires :
les premiers qui l'étoient par état, combattoient pour
de l'argent ; les féconds qui le préfentoient armés ,
& plufieurs enfemble , combattoient en liberté con-
tre un certain nombre de bêtes. ( G )
BESTIALITE , ( en Doit. ) elt le crime d'un hom-
me ou d'une femme qui auroit un commerce charnel
.avec une bête. Ce crime le punit par le feu : on brûle
même l'animal qui a été l'infiniment du crime. (#)
BESTIAUX, voyei BÉTAIL.
BESTION ou LION , f. m. {Marine.) c'efl le bec
ou ia pointe de l'éperon à l'avant des porte-vergues.
Les matelots donnent ce nom à la figure qu'on y
.met, & qui communément reprefente quelqif animal.
Quelques-uns le nomment le lion , parce qu'autre-
fois la plupart des vaiffeauxHollandoisportoient à la
pointe de l'éperon la figure de cet animal. Aujour-
d'hui Ton y metdifférehres fortes de figures, V. PL. I.
en N , la figure d'un centaure qui elt à la pointe de
l'éperon du vaiffeau le centaure. Les Efpagnols y met-
tent affez fouvent la figure de quelque laint ou iain-
Je , dont le vaiffeau porte le nom. (Z)
* BETAIL , f. m. (QLconom. rujl.~) on comprend
fous ce terme toutes les bêtes à quatre pies qui 1er-
vent à la nourriture de l'homme & à la culture des
terres. On les distribue en bêtes à cornes & en bêtes
à laine. Les bêtes à cornes font les boeufs & les va-
ches ; & les bêtes à laine font les moutons & les bre-
bis : on peut y ajouter les boucs & les chèvres. Il elt
inutile de s'étendre fur les fecours & fur les revenus
qu'on tire des beftiaux ; voye^ aux articles B CE U F ,
Vache, Mouton, Brebis, Bouc, Chèvre,
Agneau, ce qui concerne ces animaux. Voye^aujfi
Berger & Bergerie.
* BETANCOS , ( Géog. ) petite ville d'Efpagne
dans la Galice, fur le Mandéo. Long. g. 40. Lat.
* BETE , ANIMAL , BRUTE , ( Gramm. ) Bête(e
prend fouvent par oppofition à homme ; ainfi on dit :
l 'homme a une ame , mais quelques philojbplus nen ac-
cordent point aux bêtes. Brute elt un terme de mépris
qu'on n'applique aux bêtes & à l'homme qu'en mau-
yaife part. Il s'abandonne à toute la fureur dej'on pen-
B E T
chant comme la brute. Animal elt un terme générique
qui convient à tous les êtres organifés vivans : Yanu
mal , vit, agit , Je meut de lui-même, &c. Si on confi-
dere Y animal comme penfant , voulant, agiffant, ré-
fléchiffant, &c. on reftraint fa fignification à l'efpece
humaine ; fi on le confidere comme borné dans tou-
tes les fondrions qui marquent de l'intelligence & de
la volonté , & qui femblent lui être communes avec
1 efpece humaine , on le reftraint à bête : fi on confi-
dere la bête dans Ion dernier degré de itupidité , &
comme affranchie des lois de la raifon 'ôcàç l'honnê-
teté félon lefquelles nous devons régler notre con-
duite , nous l'appelions brute.
On ne fait fi les bêtes font gouvernées par les lois
générales du mouvement , ou par une motion parti-
culière : l'un & l'autre fentiment a fes difficultés. V,
V article Ame des Bêtes. Si elles agiffent par une mo-
tion particulière , li elles penfent , fi elles ont une
ame, &c. qu'eft-ce que cette ame ? on ne peut la fup-
pofer matérielle : la fuppofera-t-on Spirituelle ? Affù-
rer qu'elles n'ont point d'ames , & qu'elles ne penfent
point , c'eft les réduire à la qualité de machines ; à
quoi l'on ne femble guère plus autorité , qu'à pré-
tendre qu'un homme dont on n'entend pas la langue
elt un automate. L'argument qu'on tire de la per-
fection qu'elles mettent dans leurs ouvrages elt tort ;
car il fembleroit , à juger de leurs premiers pas ,
qu'elles devroient aller fort loin , cependant toutes
s'arrêtent au même point ; ce qui elt prefque le ca-
ractère machinal. Mais celui qu'on tire de l'unifor-
mité de leurs productions ne me paroît pas tout-à-fait
aulîi bien fondé. Les nids des hirondelles & les ha-
bitations des caftors , ne fe reffemblent pas plus que
les maifons des hommes. Si une hirondelle place Ion
nid dans un angle , il n'aura de circonférence quel'arc
compris entre les côtés de l'angle ; fi elle l'applique
au contraire contre un mur , il aura pour melure la
demi-circonférence. Si vous délogez des caftors de
l'endroit où ils font, & qu'ils aillent s'établir ailleurs;
comme il n'elt paspolîible qu'ils rencontrent le mê-
me terrein , il y aura néceffairement variété dans les
moyens dont ils nieront, & variété dans les habita-
tions qu'ils le conftruiront.
Quoi qu'il en foit , on ne peut penfer que les bêtes
ayent avec Dieu un rapport plus intime que les au-
tres parties du monde matériel; fans quoi, qui de
nous oferoit fans lcrupule mettre la main fur elles ,
& répandre leur fang? qui pourrait tuer un agneau
en lùreté de confeience ? Le fentiment qu'elles ont,
de quelque nature qu'il foit , ne leur f ert que dans le
rapport qu'elles ont entr'elles , ou avec d'autres êtres
particuliers , ou avec elles-mêmes. Par l'attrait du
plaifir elles confervent leur être particulier ; & parle
même attrait elles confervent leur efpece. J'ai dit at-
trait du plaifir , au défaut d'une autre expreffion plus
exacte ; car li les bêtes étoient capables de cette mê-
me lenfation que nous nommons plaifir , il y auroit
une cruauté inoiiie à leur faire du mal : elles ont
des lois naturelles , parce qu'elles font unies par des
befoins, des intérêts, &c. mais elles n'en ont point
de pofitives, parce qu'elles ne font point unies par
la connoiffance. Elles ne femblent pas cependant fui-
vre invariablement leurs lois naturelles ; & les plan-
tes en qui nous n'admettons ni connoiffance ni lenti-
ment , y font plus foûmifes.
Les bêtes n'ont point les fuprèmes avantages que
nous avons ; elles en ont que nous n'avons pas : el-
les n'ont pas nos efpérances , mais elles n'ont pas nos
craintes : elles fubiffent comme nous la mort , mais
c'elt fans la connoître ; la plupart même fe conferveat
mieux que nous , & ne font pas un auffi mauvais ula-
ge de leurs pallions. Foye^ les articles Ame & ANI-
•MAL.
* Bêtes, (Combat des ) Hfi. anc. Les corn-
BES
bats des bétcs fe faifoicnt dans les amphithéâtres , les
cirques , & autres édifices publics. Les bêtes qui y fer-
voient étoient ou domeltiques & privées , comme le
taureau , le cheval , l'éléphant , &c. ou fauvages ,
comme le lion, l'ours, le tigre, la panthère, 6-c. el-
les combattoient ou contre d'autres de la même ef-
pece , ou contre des bêtes de différentes efpeces , ou
contre des hommes : ces hommes étoient ou des cri-
minels , ou des gens gagés , ou des athlètes. On tenoit
les bêtes enfermées dans des cachots ou caveaux ran-
gés circulairement au rez de chauffée des arènes ; on
les appelloit caves : les plus furieufes étoient attachées
par les jambes avec des inftrumens de fer. Les crimi-
nels qui fortoient vainqueurs du combat des bêtes
étoient quelquefois renvoyés abfous ; mais pour l'or-
dinaire ce combat étoit regardé comme le dernier
fupplice. Foye{ BESTIAIRES.
Les profanes condamnoient au fupplice des bêtes
les premiers Chrétiens, qui loin de fe défendre, fe
laiffoient maffacrer comme des agneaux.
Mais les bêtes féroces ne fervoient pas feulement
dans les amphithéâtres; il y avoit chez les Grecs & les
Romains des gens qui les apprivoifoient, leur appre-
noient des tours de foupleffe, & les rendoient doci-
les au joug , fi l'on en croit les monumens & les Poè-
tes. On voit dans plufieurs morceaux antiques des
léopards , des lions , des panthères , des cerfs , &c.
attelés. On lit dans Martial que les léopards ont été
fubjugués , les tigres conduits avec le foiiet , les cerfs
bridés , les ours emmulelés , les fangliers conduits au
licou , les bifontes , ou taureaux fauvages , mis aux
chars , &c.
Les Grecs, dit le favant père de Montfaucon, l'em-
portoient fur les Romains dans cet art , ainfi qu'en
plufieurs autres : on vit dans la feule pompe de Pto-
lemée Philadelphe , vingt-quatre chars tirés par des
éléphans , foixante par des boucs , douze par des
lions , fept par des orix , cinq par des bufles , huit par
des autruches , &: quatre par des zèbres.
L'empereur Eliogabale fit tirer forr char par quatre
chiens d'une grandeur énorme ; il parut en public
traîné par quatre cerfs ; il fit une autre fois atteler des
lions & des tigres : dans ces occafions il prenoit les
habits des dieux auxquels ces animaux étoient confa-
crés. Foyei Amphithéâtre, Cirque, Théâ-
tre, Gymnase, Gymnastique, Athlète,
Lutte , Lutteur.
BÈtes , (Chajfe. ) Les chaffeurs diftribuent les bê-
tes en fauves, en noires, & en rouffes ou carnacieres :
les fauves font les cerfs, les dains, les chevreuils,avec
leurs femelles oc faons ; les noires font les fangliers ôc
les marcaffins. Les bêtes fauves & noires compofent
la grande venailon. Les bêtes rouffes ou carnacieres ,
font le loup , le renard , le blaireau , la fouine , le
putois , &c. il elt permis à tout le monde de les chât-
ier &c tuer. Foye{ Venaison.
BÊTE chevaline , ( Manège. ) c'eft la même
chofe que cheval: mais cela ne le dit que d'un cheval
de paylan , ou de peu de valeur. Bête bleue , eft une
exprefïion figurée cv proverbiale , qui lignifie un che-
val qui n'elt propre à rien. ( V)
Bete , jeu de la bête ou de l'homme , ( Jeu. ) Il fe
joue à trois , quatre , cinq , fix , & même fept : mais
dans ce dernier cas il faut que le jeu foit compole de
trente-lix cartes , & que la tourne foit la dernière du
jeu de celui qui mêle : mais le mieux c'eft de la jouer
a cinq ëc à trois. Le jeu de cartes , quand on n'elt que
cinq , ne doit contenir que trente-deux cartes ; Se à
quatre & à trois on ôté les fept. Le roi eft la princi-
pale cartedu jeu de la bêu ; la dame le luit ec emporte
le valet, qui levé l'as, celui-ci le dix , & ainli des
autres. Celui à qui il écheoit de mêler les cartes ,
les fait couper à l'ordinaire au premier de fa gauche,
& en diltribue cinq à chaque joueur , en tel nombre
BES
21 5
à la fois qu'il lui plaît. Il y a de l'avantage à joiier en
premier. Quand les cartes font ainfi données , l'on
tourne la première du talon que l'on y laiffe retour-
née , parce qu'elle eft la triomphe pendant tout le
coup.
• En commençant, chaque joiieur met devant foi une
fiche & deux jettons , l'un pour le jeu , & l'autre pour
le roi de triomphe , quoique celui qui l'a ne joiie
pas ; fuffifant pour cela que le coup fe joiie ; & celui
qui mêle y en ajoute un troifieme , qui le fait recon-
noître pour avoir mêlé les cartes. Celui qui ga«ne tire
les jettons & une fiche, & ainfi des autresà tous les
coups, jufqu'à ce que toutes les fiches foient gagnées ;
après quoi chacun en remet une autre , ôc l'on re-
commence comme auparavant. Celui qui fait joiier,
& a toutes les mains , gagne tous les jettons , tout ce
qui eft fur jeu, fût-ce des bêtes qui n'y auroient pas
été miles pour le coup , & même les fiches ; & outre
cela chaque joueur eft encore obligé de lui payer un
jetton : s'il ne fait pas toutes les mains , il n'a pour l'a-
voir entrepris , que la peine & le chagrin de ne les
avoir pas faites. Mais lorfque celui qui fait joiier ne
levé pas trois mains , ou les deux premières , lors-
qu'elles font partagées entre les joueurs , il fait la bê-
te , c'eft-à-dire, qu'il met autant de jettons qu'il en
auroit tiré s'il eût gagné. Ainfi fi le coup étoit fim-
ple , c'eft-à-dire , qu'il n'y eût pas fur le jeu des bêtes
faites précédemment , & fi l'on étoit cinq , celui qui
feroit la bête ne la feroit que de onze jettons, parce que
la fiche & le jetton que chacun met devant foi en fait
dix, & celui qui mêle met le onzième. Cependant il
peut avoir été réglé entre les joueurs de mettre moins
devant foi ; alors la bête feroit proportionnée au nom-
bre de jettons fixé.
L'on voit que dans les onze jettons dont nous ve-
nons de parler plus haut , nous ne comprenons pas
celui qui eft deftiné pour le roi de triomphe , qu'il
laifferoit cependant , fi faifant joiier il perdoit le coup :
mais quand le roi les tire , chaque joueur en met de
nouveaux pour le coup luivant. Toute bête fimple
doit aller fur le coup où elle a été faite ; & s'il y en
avoit plufieurs fimples faites d'un même coup , elles
iroient toutes cnlemble. Mais les bêtes doubles doi-
vent aller les unes après les autres dans les coups fui-
vans , & toujours les plus groffes les premières.
Lorfqu'ily a une bête fur le jeu, les autres joueurs ne
mettent point de jettons , excepté celui qui mêle , qui
donne le fien à l'ordinaire. Celui qui gagne lorfqu 'il y
a une bête double au jeu, levé outre la bête une fiche, &
tous les jettons qui font au jeu ; & fait la bête propor-
tionnellement au gain , lorlqu'il perd. Quand nous
avons dit que pour gagner il falloit au moins faire les
deux premières mains, c'eft bien entendu qu'aucun
des joueurs n'en fait trois ; puifqu'alors on perd com-
me fi on les eût faites le dernier.
Il arrive affez fouyent dans ce jeu que deux joueurs
fe dilputent le i;ain du coup, parce que celui qui a
fait joiier d'abord , n'empêche point de joiier auffi
quiconque fe trouve un allez beau jeu pour l'empor-
ter fur lui & fur tous les joueurs qui le liguent contre
lui en faveur du premier joueur; parce que le fécond
rifque de perdre le double de ce qui eft au jeu : ce qui
tait voir qu'on ne dit point contre , lans un très-
beau jeu. On n'elt plus rCc u à le dire , quand une lois
la première carte eft jettee. Toute l'habileté des
joueurs confilte à forcer celui qui fait joiier à fur-
couper, ou à le défaire de leurs bonnes cartes a pro-
pos , pour donner plus de force à ceux qui font en
état de le taire perdre ; ce qui cependant n'elt de loi
que dans le cas Ou il n'y a point de vole à craindre.
On doit au contraire garder tout ce qui peut l'em-
pêcher, lorfquon en eit menace. ( )n doit encore four-
nir de la couleur jouée ; couper li l'on n'en a point ;
& li quelque autre avoit déjà coupé, il faudroit le
2l6
B E T
faire d'une triomphe plus haute que la première , ft
l'on pouvoit.
Lorfque tous les joiieurs ont vu leur jeu & paffé ,
chacun peut aller en curieufe , en mettant un jetton
au jeu. Voye\ Curieuse & Aller en curieuse.
La curieufe eft également avantageufe pour tous les
joiieurs , & n'eft pas un moindre agrément du jeu de
bête : mais on doit le contenter d'en voir une. Nous
avons déjà dit , que celui qui avoit le roi de triom-
phe retiroit les jettons qui lui font dcftinés ; celui qui
retourne ce roi a le même privilège , pourvu toute-
fois , en l'un & l'autre cas , que le jeu fe joiie : celui
qui fait la dévole , double tout ce qui eft au jeu ;
fait autant de bêtes qu'il auroit pu en gagner , &
donne un jetton à chaque joiieur.
Pour faire joiier au jeu , il faut avoir en main un
jeu dont on puiffe faire trois mains , ou deux tout au
moins , que l'on doit fe hâter de faire le premier pour
gagner. L'expérience apprendra bientôt quels font
les jeux qu'on peut joiier.
Celui qui renonce fait la bête ; celui qui donne
mal en eft quitte pour un jetton à chacun , & retait :
lorfque le jeu de cartes eft faux , le coup où il eft
trouvé tel eft nul ; mais les précédens font bons.
BÊTE ( au jeu de ). La bête défigne la perte que fait
un joueur qui ne fait pas trois mains ou les deux pre-
mières , quand un autre joiieur en fait trois.
Bete Jimple ; c'eft une bête faite en premier lieu,
fimplement fur l'enjeu de chaque joueur.
BÊTE double; fe dit d'une bête faite fur une autre
bête, non-feulement de l'enjeu de chaque joueur , mais
encore de la bête qui étoit au jeu Ôt qu'on lé propoioit
de tirer.
BÊTE de renonce ; c'eft le double payement qu'on
eft obligé de faire de tout ce qui s'enlève du jeu dans
un coup ordinaire , pour n'avoir pas fourni de la cou-
leur qu'on demandoit.
* BETELE, betela-codi, Hort. Malab. BETRE ou
TEMBOUL ; plante qui grimpe & qui rampe com-
me le lierre. Planche XXIX. Hifl. nat. figure 3. Ses
feuilles font allez femblables à celles du citronnier ,
quoique plus longues & plus étroites à l'extrémité :
elles ont des petites côtes qui s'étendent d'un bout à
l'autre, comme il y en a dans celles du plantain. Le
fruit A du betele eft afTez femblable à la queue d'un
léfard ou d'un loir : ce fruit eft rare , & on le préfère
à la feuille. On cultive cette plante comme la vigne ,
& on lui donne des échalas pour la foûtenir ; quel-
quefois on la joint à l'arbre qui porte l'areqne , ce qui
fait un ombrage fort agréable. Le bétele croît dans
toutes les Indes orientales , & fur-tout fur les côtes
de la mer. Il n'y en a point dans les terres , à moins
qu'on ne l'y ait planté.
Les Indiens mâchent des feuilles de bétele à toute
heure du jour , & même de la nuit : mais comme ces
feuilles font ameres , ils corrigent cette amertume
en les mêlant avec de l'areque & un peu de chaux ,
qu'ils enveloppent dans la feuille. D'autres prennent
avec le bétele des trochifques , qui portent le nom de
tàte : ceux qui font plus riches , y mêlent du camfre
de Bornéo , du bois d'aloès , du mufc , de l'ambre
gris , &c. Le bétele , ainfi préparé , eft d'un li bon
goût, & a une odeur li agréable , que les Indiens ne
peuvent pas s'en paffer ; prefque tous en ufent , au
moins ceux qui peuvent s'en procurer. Il y en a auffi
qui mâchent de l'areque avec de la canelle. & du gi-
rofle : mais c'eft ordinairement de l'areque avec un
peu de chaux enveloppée dans la feuille de bétele ,
comme nous l'avons déjà dit. Ils crachent après la
première maftication une liqueur rouge , qui eft tein-
te par l'areque. Ils ont par l'ulage du bétele , l'haleine
fort douce & d'une très-bonne odeur, qui fe répand
au point de parfumer la chambre où ils iônt. On pré-
tend que fans l'ufage du bétek ou d'autres aromates ,
B E T
ils auroient naturellement l'haleine fort puante : mais
cette maftication gâte leurs dents , les noircit , les ca-
rie & les tait tomber : il y a des Indiens qui n'en ont
plus à 25 ans, pour avoir fait excès du betele.
Lorfqu'on fe quitte pour quelque tems , on fe fait
préfent de bétele, que l'on offre dans une bourfe de
foie ; & on ne croiroit pas avoir fon congé , fi on n'a-
voit reçu du bétele. On n'ofe pas parler à un homme
élevé en dignité , fans avoir la bouche parfumée de
bétele : il feroit même impoli de parler à fon égal fans
avoir pris cette précaution , qui empêche la mauvaife
odeur qui pourroit venir de la bouche ; & fi par ha-
fard un homme fe préfente fans avoir mâché du bé-
tele , il a grand foin de mettre fa main devant fa bou-
che en parlant , pour intercepter toute odeur defa-
gréable ; ce qui prouve bien que les Indiens font fuf-
pecf s de mauvaife haleine. Les femmes , & fur-tout
les femmes galantes , font grand ufage du bétele , &
le regardent comme un puiiîànt attrait pour l'amour.
On prend du bétele après le repas pour ôter l'odeur
des viandes ; on le mâche tant que durent les vifi-
tes ; on en tient à la main ; on s'en offre en fe faluant
& à toute heure : enfin toujours du bétele. Cela ne
vaudroit-il pas mieux que notre tabac , au moins
pour l'odeur ; & fi les dents s'en trouvoient mal , l'ef-
tomac en feroit plus fain & plus fort. Il y a dans ce
pays-ci plus de gens qui manquent par l'eftomac que
par les dents. Ray , hifl. pi. app. p. 19 ij.
* BETELFAGUI ou BETHELSAKI , ( Géog. )
ville d'Afie dans l'Arabie heureufe , environ à dix
lieues de la mer Rouge. Long. 65. lat. i5. 40.
* BETHLÉEM , (Géog.fainte.) en Paleftine , ville
fameufe par la naiffance de Jefus-Chrift, n'eft plus
aujourd'hui qu'un village fur une montagne , à deux
lieues de Jérufalem.
* Bethléem , ( Notre-Dame de ) Hifl. mod. ordre
militaire inftitué par Pie II. le 18 Janvier 1459. Ma-
homet II. ayant pris Lemnos, Calixte III. la fît re-
prendre par le cardinal d'Aquilée ; & fon fucceffeur
Pie II. pour la cenferver , créa l'ordre de Notre-Da-
me de Bethléem. Les chevaliers dévoient demeurer à
Lemnos , & s'oppofer aux courfes que les Turcs fai-
foient dans l'Archipel & le détroit de Gallipoli : mais
peu de tems après l'inftitution , Lemnos fut reprife
par les Turcs , & ce grand deffein s'évanoiiit.
BETHLÉÉMITES , (les frères) Hifl. eccléf.
c'eft un ordre qui a été fondé dans les îles Canaries
par un gentilhomme François nommé Pierre de Be-
tencourt , pour fervir les malades dans les hôpitaux.
Le pape Innocent XI. approuva cet ordre en 1687,
& lui preferivit de fuivre la règle de Saint Auguftin.
L'habit eft femblable à celui des Capucins , hormis
que leur ceinture eft de cuir ; qu'ils portent des fou-
liers , & qu'ils ont au cou une médaille , repréfen-
tant la naiffance de Jefus-Chrift à Bethléem.
* BETHULIE , ( Géog.facrêe. ) ville de la tribu
de Zabulon dans la Terre-Sainte : elle eft fameufe
par l'hiftoire de Judith.
* BETHUNE , ( Géog. ) ville de France au comté
d'Artois, fur la petite rivière de Bietle.' Long. zo.
18. 8.lat.5o. 31. 66.
* BETLlS,(Géog.) ville d'Afie , capitale du
Curdiftan , fur la rivière de Bendmahi. Long. 60.
10. lat. 3j. 20.
BETOINE , f. f. betonica , ( Hifl. nat. bot. ) genre
de plante à fleur en gueule , dont la lèvre fupérieure
eft relevée , pliée en gouttière , & échancrée pour
l'ordinaire : l'inférieure eft divifée en trois parties ,
dont la moyenne eft fort grande & échancrée. II
fort du calice un piftil qui eft attaché comme un
clou à la partie poftérieure de la fleur , & entouré
de quatre embryons , qui deviennent dans la fuite
autant de femences oblongues , enfermées dans une
efpeçe de capfule qui a fervi de calice à la fleur :
ajoutez
B E T
ajoutez au caractère de la lêtoim , que fes fleurs font
verticillées , & forment des épis au bout des tiges.
Tournefort , lnfl. ni herb. Voye^ Plante. ( / )
Elle eft céphaîique , hépatique , vulnéraire , bonne
contre les convulfions, les affections des nerfs : on en
prend en guife de tabac. Les feuilles fraîches de bétoine
broyées , s'appliqueront avec fuccès fur les bleffures
récentes. Elle eft pleine de foufre , avec un peu de
fel volatil huileux, & de terre. La tifanne faite avec
fes feuilles , la conferve , & l'eau des fleurs , le firop
des fleurs & des feuilles, le fuc & l'extrait convien-
nent dans les vapeurs , la feiatique , la goutte , la
jauniffe , la p3ralyfie. Ils procurent Fexpeôoration ,
■& font cracher les matieres'purulcntcs ; ils conioli-
dent les ulcères intérieurs ; rétabliffent les fondions
des premières voies ; pouffent par les urines le vent ,
les obftructions. Les Chirurgiens la font entrer dans
les emplâtres & cataplafmes céphaliques.
Emplâtu de bétoine. Prenez bétoine verte , pimpre-
nelle , aigremoine ,fauge , pouliot, petite centaurée ,
"orvale , de chaque fix onces ; d'encens , de maftic ,
de chaque deux gros ; d'iris , d'ariftoloche ronde , de
chaque fix gros ; de cire, de térébenthine , de réfine
de pin , de chaque fix onces ; de gomme élemi , de
goudron , de chaque deux onces ; de vin blanc , trois
livres. Broyez bien d'abord dans un mortier toutes
les plantes ; laiffez- les en macération pendant une
femaine dans le vin ; remuez-les enfuite , èc les faites
bouillir : tirez enfuite le fuc par expreflîon ; paffez-
le , & le faites bouillir jufqu'à la diminution d'un
tiers : .ajoutez le goudron , la cire fondue , la réfine ,
les gonimes, & enfin le dernier de tous les ingrédiens,
la térébenthine : faites bouillir doucement le tout ;
retirez-le de deffus le feu , & le laiffez refroidir ; alors
répandez deffiis l'iris & l'ariftoloche réduite en poudre
très -fine : battez bien le tout enfemble, enforte qu'il
foitde la confiftance d'un emplâtre. Cet emplâtre eft
réfolutif,fondant, déterfif&incarnatif : on l'employé
beaucoup dans les maladies de la tête. (A')
BETOIRES , f. m. pi. ( (Economie ru/liq. ) On en-
tend par ce mot, dans les campagnes où l'on s'en fert,
des trous creufés en terre d'efpace en efpace , com-
medes puits, qu'on emplit enfuite de pierrailles. On
y détermine le cours des eaux par des rigoles, afin
qu'elles fe perdent dans les terres. Dans les grandes
Baffe-cours on les fait de pierre ; on les place de ma-
nière que la faumure du fumier n'y pénètre pas ; on
les couvre d'une grille de fer à mailles ferrées ; on
ne laiffe à cette grille qu'une petite ouverture, afin
que les eaux partent feules , & que les groffes ordu-
res foient arrêtées.
* BETSCH AW , (Géog.) ville de Bohême , abon-
dante en mines d'étain.
* BETSKO , (Géog.) petite ville de la haute Hon-
grie.
* BETTE , f. f. (HiJI. nat. bot.) On diftingue trois
fortes de bettes ; la blanche , la rouge , & la bette-rave.
La bette ou poirée blanche , beta alba, a la racine
cylindrique , ligneufe , de la groffeur du petit doigt ,
longue , blanche ; la feuille grande , large , liffe ,
épaiffe , fucculentc , quelquefois d'un verd blanc ,
quelquefois d'un verd plus foncé ; la faveur nitreu-
fe, une côte épaiffe & large ; la tige haute de deux
coudées, grêle, cannelée, branchue ; la fleur placée à
l'aiffelle des feuilles fur de longs épis , petite , compo-
fée de plufieurs étamincs garnies de fommets jaunâ-
tres , & dans un calice à cinq feuilles un peu verd ,
qui fe change en un fruit prefque fphérique , inégal
& boffelé , qui contient deux ou trois petites graines
oblongues , anguleuies , rougeâtres , &c inégalement
arrondies.
La bette ou poirée rouge , beta rubra vulgaris , a la
racine blanche ; la feuille plus petite que la précé-
Tom. II.
B E U
217
dente , fort rouge : c'eft par là qu'on la diftingue de
la bette blanche.
La bette-rave , beta rubra radiée rapœ: elle a la ti^e
plus haute que la bette ou poirée rouge ; fa racine eft
groffe de deux ou trois pouces , renflée , & rouge
comme du fang en-dehors & en-dedans.
On cultive toutes ces efpeces dans les jardins. La
première donne les cardes dont on fait ufage en cui-
fme : on fait cas des racines de bette-rave ; qu'on man-
ge en falade & autrement : on fe fert en Médecine
de la bette blanche.
On trouve par l'analyfe , que la bette eft compo-
fée d'un fel effentiel , ammoniacal , nitreux , mêlé
avec une terre aftringente & de l'huile , & délayé
dans beaucoup de phlegme. Ses feuilles deffechees
& jettées fur les charbons ardens, fuient comme le
nitre. On compte la bette blanche entre les plantes
émollientes.
* BETUWE ou BETAV , ( Géog. ) eft une des
trois parties qui compofent la Gueldre Hollandoife:
c'eft le pays qui fe trouve entre le Rhin & le Leck.
BETYLES, f. m. pi. ( HiJI. anc. ) pierres fameu-
fes dans l'antiquité , dont on fit les plus anciennes
idoles , qu'on croyoit animées, auxquelles même on
attribuoit des oracles. Bochart tire l'origine des béty-
les de cette pierre myftérieufe de Jacob , fur laquelle
ce patriarche repofant pendant la nuit , eut une vi-
fion , & qu'à fen réveil il oignit d'huile ; d'où le lieu
fut appelle Bethel. Les bétyles étoient d'une groffeur
très-médiocre , de figure ronde , avec des cannelures
fur leur furface ; & on les croyoit defcendiib du ciel.
On leur attribuoit mille vertus fingulieres , & entre
autres celles de faire prendre des villes & gagner des
batailles navales aux généraux qui les portoient.
Voye^ dans les Mém. de C Acad. des Belles-Lettres, les
favantes recherches qu'a faites fur cette partie de la
Mythologie M. Falconct , un des plus illuftres mem-
bres de cette Académie. ( G )
* BEVELAND , ( Géog. ) île des Provinces-Unies
en Zélande : l'Efcaut la divife en deux parties , dont
l'une s'appelle Zuyd-Beveland , & l'autre Noort-Be~
yeland.
* BEVERLAY , ( Géog. ) ville d'Angleterre dans
la province d'Yorck. Long. ij. lat. 63. 48.
* BEVERGEN , ( Géog.) ville d'Allemagne dans
le cercle de Weftphalie , au duché de Munfter , à
neuf lieues de cette ville.
* BEVERUNGEN , ( Géog. ) ville d'Allemagne
au diocefe de Paderborn , & au confluent de la Beve
& du "Wefer. Long. zj. lat. ôi. 40.
* BEUR ATH , (Géog.) ville de Bohême au comté
de Glatz.
BEURICHON, oifeau. Foyt[ RoitELÈT. (/)
* BEURRE, (HiJI. & œconom. rufiiq.) fubftance
graffe , onctueufe , préparée ou féparee du lait , en le
battant. Voye^ Lait.
Le beurre fe fait en Barbarie, en mettant le lait ou
la crème dans une peau de bouc , fufpendue d'un cô-
té à l'autre de la tente , & en le battant des deux cô-
tes uniformément. Ce mouvement occafionne une
prompte réparation des parties onctueufes d'avec les
parties féreufes. Voyages de Shaw , page Z41. Ce n'a
été que tard, que les Grecs ont eu connoiffance du
beurre: Homère, Théoerite , Euripide, & les autres
poètes n'en font aucune mention; cependant ils par-
lent fou vent du lait 8c du fromage : A idiote qui a re-
cueilli beaucoup de choies fur le lait & le fromage,
ne dit rien du tout du beurre. On lit dans Pline, que
la beurre étoit un mets délicat chez les nations barba-
res, & qui diftinguoit les riches des pauvres.
Les Romains ne fe fervoient du beurre qu'en re-
mède , & jamais en aliment ; Scockius oblerve que
c'eft aux Hollandoisque les habitans des Indes orien-
tales doivent la connoiffance du beurre; qu'en Efpa-
Ee
îiS
BEU
gne on ne s'en fervoit de fon tems qu'en médicament
contre les ulcères ; & il ajoute qu'il n'y a rien de meil-
leur pour blanchir les dents , que de les frotter avec
du beurre.
Clément d'Alexandrie remarque que les anciens
Chrétiens d'Egypte brûloient du beurre dans leurs
lampes , fur leurs autels, au lieu d'huile ; & les Abyl-
finiens , fuivant Godignus , confervent cette prati-
que. Dans les églilés Romaines il étoit permis ancien-
nement pendant les fêtes de Noël , de fe fervir de beur-
re au lieu d'huile , à caufe de la grande confommation
qui fe faifoit de cette dernière dans d'autres ufages.
Scockius écrivit un volume aflez gros , de butiro
& averfione cafei,fur le beurre & fur l'averfion du fro-
mage, où il traite de l'origine & des phénomènes du
beurre. Il a recherché fi le beurre étoit connu du tems
d'Abraham, & fi ce n'étoit pas le mets avec lequel
il traita les Anges : il examine comment on le prépa-
rait chez les Scythes, d'où viennent lés différentes
couleurs; il enfeigne comment il faut lui donner la
couleur naturelle , le battre, le faler , le garder, &c
La partie du Suffolk, en Angleterre, qu'on appelle le
haut Suffolk , eft un terrein riche, tout employé à des
laiteries ; elle paife encore pour fournir le meilleur
beurre , & peut-être le plus mauvais fromage d'Angle-
terre : le beurre eft mis en barrils , ou affaifonné dans
des petites caques, & vendu à Londres, ou même
envoyé aux Indes occidentales , d'où les voyageurs
nous difent qu'on l'a quelquefois rapporté aura bon
qu'au départ.
Voici la manière dont on fait le beurre dans nos
campagnes : quand le lait eft refroidi & un peu repo-
fé , on en \ a lever la crème avec une grande cueil-
lere bien nette, & on la met dans un pot jufqu'à ce
qu'on l'employé. Pour faire le beurre, on jette la crè-
me dans une baratte, voyei Baratte. Il faut que la
■baratte foit bien lavée : on bat cette crème avec la
batte-beurre, jufqu'à ce qu'elle s'épaiflîfle. S'il arrive
que les grandes chaleurs l'empêchent de prendre
promptement; alors tirez une vache, & jettez de fon
lait chaud une jufte quantité dans la baratte; ou, fi
vous êtes en hyver, approchez un peu la baratte du
feu tandis que vous battrez. Il y en a qui penfent
que la crème prend plus promptement , fi l'on met
dans la baratte une pièce d'argent. Quand le beurre
fera bien fait 6c bien lavé avec de l'eau , on le ferre-
ra dans un lieu propre & frais.
Le beurre du mois de Mai eft le plus eftimé & le
meilleur ; celui qu'on fait en été entre les deux No-
tre-Dame , vient après : celui du commencement de
l'automne eft moins bon que les précédens; mais il
vaut mieux que celui qui fe fait plus tard. Il faut le
choifir d'une odeur & d'une faveur douce : quant à
la couleur , il faut qu'elle foit jaune , mais d'une jau-
ne peu foncé.
On a deux fortes de beurre : le falé & le fondu.
Pour faler le beurre , prenez-en deux livres à la fois ;
étendez-le avec un rouleau fur une table bien nette ;
faupoudrez-le de fel bien égrugé ; pliez-le en trois ou
quatre ; pétriffez-le bien ; étendez le de nouveau ; fa-
lez une féconde fois & pétrifiez; goûtez-le enfuite,
& s'il vous paroît affez l'aie , prenez un pot de grès ,
couvrez le fond de fel , mettez y votre beurre , & fer-
mez votre pot avec un autre lit de fel ; ou faites une
faumure de fel fondu dans l'eau, & verfez-la deflus;
renouveliez de tems en tems cette faumure ; mettez
fur cette faumure quelques doubles de papier, &
placez votre pot dans un lieu frais.
Pour faire fondre le beurre , il faut le mettre dans
un chaudron , fur un feu clair & modéré ; le faire
bouillir jufqu'à ce qu'il foit cuit ; l'écumer , & le ver-
fer dans des pots de grès. Il fe gardera pendant deux
ans entiers, quoiqu'on n'y ait point mis de fel.
La Bretagne eft celle de nos provinces qui pafle
BEU
pour fournir le meilleur beurre. Il nous vient dans
de petits pots de terre grife , couvert d'un lit de fel
blanc.
Beurre, en Chimie; les Chimiftes employent ce
mot pour fignifier plufieurs de leurs préparations ,
comme le beurre d'antimoine , celui d'arfenic , de ci-
re , de faturne , &c. par rapport à la confiftance de
ces fubftances , qui approchent de celle du beurre.
Le beurre d'antimoine fe fait avec une partie d'an-
timoine crud qu'on met en poudre dans un mortier ;
enfuite on le broyé fur le porphyre , en y mêlant peu-
à-peu deux parties de fublimé corrofif. On met ce
mélange dans une cornue de verre qui eft lutée , &
dont la moitié refte vuide. On laiflè la cornue en cet
état dans un lieu humide, fans la boucher, pendant
deux ou trois jours ; enfuite on la place dans un bain
de fable ; on y ajufte un récipient, & après avoir luté
les jointures, on donne un feu doux , qu'on augmente
peu , mais qu'on continue long-tems , c'eft-à-dire ,
jufqu'à ce qu'il ne paroifle plus découler rien par le
bec de la cornue. En laiflant le mélange dans la cor-
nue, avant que de la mettre au feu, la matière s'hu-
mecfe un peu à l'air, & l'acide qui eft dans le fubli-
mé corrofif, commence à agir fur l'antimoine , & s'y
joint plus intimement. Par cette précaution , on a aufiî
un beurre moins épais. Si malgré cela , il venoit aflez
épais pour s'amafler dans le cou de la cornue , il fau-
drait en approcher un charbon allumé, qui fera fon-
dre le beurre, & le fera tomber plus promptement
dans le récipient. On voit aufli que pour prévenir cet
inconvénient de l'embarras du beurre dans le cou de
la cornue , ce qui la feroit cafler , & donnerait des
vapeurs fort dangereufes, il eft néceflaire d'employer
pour faire cette opération , une cornue dont le col
foit large & court. On doit avertir l'artifte qu'il faut
qu'il évite foigneufement de refpirer de la poudre qui
s'élève en broyant le fublimé corrofif avec l'antimoi-
ne; il lui fuffit pour cela de détourner la tête, & de
broyer doucement & également.
Le beurre d 'antimoine expofé à l'air , y prend de
l'humidité & fe liquéfie. Lorfque le beurre d' antimoine
reflemble plus par fa confiftance à l'huile qu'au beur-
re, on le nomme Yhuile glaciale d'antimoine. Il faut
avoir foin de mettre dans la cornue le mélange , de
façon qu'il ne refte rien dans le col , parce que s'il
y reftoit quelque chofe du mélange, cela faliroit le
beurre.
Si on a un beurre d'antimoine qui foit brun & épais,
on le reefifie pour l'éclaircir & l'avoir plus coulant ,
& on le reefifie dans une cornue à feu doux; c'eftee
qu'on nomme beurre d'antimoine rectifié.
Bafile Valentin reclifioit trois fois le beurre d'anti-
moine avec de l'efprit-de-vin ; il les mettoit digérer
enfemble pendant trois mois avant que de rediftiller ;
& il ajoûtoit de nouvel efprit-de-vin à chaque diftila-
tion. Le beurre d'' antimoine devient par ce moyen li-
quide , & rouge comme du fang.
Duchefne qui appelloit antidote polychrefle , le beurre
d'antimoine, le reftifioit trois fois aufiî, laiflant cha-
que fois le réfidu , & il cohoboit fur ce beurre d'anti-
moine de l'efprit d'hydromel vieux, jufqu'à ce qu'il
fût doux. Enfin il tirait l'efprit par la diftillation, juf-
qu'à ce que ce qui reftoit fût en confiftance d'huile ;
& il le faifoit prendre comme fébrifuge , depuis une
goutte jufqu'à fix.
La quantité du beurre d'antimoine qu'on retire eft
le tiers du mélange qu'on a employé pour le faire ,
c'eft-à-dire , que li on a employé quatre onces d'anti-
moine & huit onces de fublimé corrofif, on en reti-
re quatre onces de beurre d' antimoine ; on doit même
en tirer quatre onces & demie.
Il faut obferver que le récipient qu'on met pour
recevoir le beurre, doit être fec; s'il étoit humide,
le beurre s'y mettrait en pouflîere.
B E U
Dans cette opération, le beurre d'antimoine diftille
plus alternent que le mercure, parce que l'efprit de
fel, en divifant l'antimoine, multiplie les furfaces ;
& au contraire, en quittant le mercure, les globules
de celui-ci fe rapprochent , & de cette manière le
mercure devient moins volatil , &c l'antimoine moins
pefant.
L'efprit de fel marin eft le diflblvant propre de
l'antimoine; c'en1 une des convenances que les Al-
chimiftes trouvent qu'il a avec l'or; l'acide du fel
marin ayant plus de rapport avec l'antimoine qu'a-
vec le mercure, il quitte celui-ci pour diffoudre l'an-
timoine.
Le beurre d'antimoine eft la partie métallique de
ce minéral , divifée & réduite en une confiftance mol-
le , par le moyen de l'acide du fel marin : c'eft pour-
quoi on peut le faire avec quelque préparation d'an-
timoine que ce foit, pourvu qu'elle contienne la par-
tie métallique de l'antimoine , & fous quelque forme
qu'elle la contienne : mais on n'employé plus pré-
fentement , pour faire le beurre d 'antimoine , que l'an-
timoine crud , parce qu'on ne fait plus le beurre d'an-
timoine , que pour faire le cinabre d'antimoine. Voye^
Cinabre d'Antimoine.
On compte jufqu'à fept manières différentes de
faire le beurre d'antimoine ; & on peut dire qu'il y en
a autant qu'on peut trouver de moyens d'unir l'aci-
de du fel marin avec la partie métallique de l'anti-
moine. On peut, par exemple, fe fervir de la chaux
d'argent , c'eft-à-dire , de l'argent diflbus dans l'eau-
forte , & précipité par l'acide du fel marin : on eft af-
furé que le beurre d'antimoine préparé par ce moyen ,
ne contient ni mercure , ni foufre grofller. Il faut pren-
dre trois parties de chaux d'argent & une de régule.
Le beurre d'antimoine fait avec le régule , eft moins
épais que celui qu'on fait avec l'antimoine crud , &
il eft plus pur lorfqu'on le fait avec l'antimoine crud;
il pane prcfque toujours dans le beurre un peu de fou-
fre de l'antimoine.
Le beurre d'antimoine a été employé autrefois pour
ronger les mauvaifes chairs des ulcères; c'eft un cauf-
tique plus convenable que n'eft le précipité, parce
que l'antimoine par lui-même eft bon a mondifier les
ideeres. Il n'y a que dans le cas d'ulcères véné-
riens , pour lefquels le précipité de mercure eft plus
propre.
On (ait la poudre d'algaroth avec le beurre danti-
moiru. Voyc^ ALGAROTH , ANTIMOINE. (A/)
* Beurre de Zinc, (Chimie.') on entend par beur-
re de {inc, la malle jaunâtre qui refte au fond de la
cornue , lorfqu'on veut faire la concentration de l'ef-
prit de fel , en rediftillant une diflblution des fleurs
de {inc dans cet acide.
Beurre , (en Pharmacie.') fe dit de plufieurs pré-
parations qui ont la confiftance d'un onguent , & qui
le préparent de ditfércns ingrédiens. Le beurre d'anti-
moine préparé par la Chimie , eft fort différent de
ceux dont nous parlons ; car c'eft un violent caufti-
que. Les beurres fe préparent dans la Pharmacie ga-
léniquc de la façon luivante.
Beurre de cacao; prenez des amandes douces ou de
cacao quantité luffifante ; faites-les rôtir dans une
poelle de fer ; nettoycz-lcs de leur peau ou écorce ;
Lroyez-les enfuite iur le porphyre chauffe ; prenez
cette pâte , & faites-la bouillir dans l'eau au bain-
maric , jufqu'à ce que vous voyez la graille ou l'huile
fe léparcr & lurnager: biffez enfuite refroidir \ otre
eau ; ramafl'ez la graille ou l'huile qui fera figée. Com-
me cette graiiïe eft un peu ronfle , on peut la faire
fondre plufieurs fois de fuite dans l'eau au bain-marie.
On en peut préparer de même de toutes les femences
3ui ont beaucoup d'huile , comme les beurres de noix,
e noifettes , de noyaux de pêche , d'abricot. Ces leur-
Tome II.
B E Y
219
res ne font que des huiles figées ; ils nous paroiffent
meilleurs que les huiles par expreflîon. (N)
BEVAU , ou BIVEAU , f. m. du mot Latin bivium ,
chemin fourchu : c'eft le modèle d'un angle quel-
conque reûiligne , curviligne , ou le plus fouvent
mixte , pour former l'angle que font deux furfaces
qui fe rencontrent. Lorfqu'elles font planes , on fe
fert pour biveau d'une faufle équerre à branches mo-
biles , ou d'une fauterelle : lorfqu'une des deux fur-
faces eft courbe ou toutes les deux , le biveau eft un
infiniment de bois fait exprès en forme d'équerre
ftable , dont les branches ne s'ouvrent ni ne fe fer-
ment. (B)
* BEUTHEN, ( Géog.) il y a deux villes de ce
nom en Siléfie ; l'une eft fameufe par une mine d'ar-
gent.
* BEUTHNITZ, (Géog.) petite ville de l'élefto-
rat de Brandebourg.
BEUVANTE, f. f. on nomme ainfi dans le com-
merce de mer un droit qu'un maître de barque ou de
navire fe réferve lorfqu'il donne fon vaifleau à fret :
ce droit fe règle fuivant la grandeur & le port du
vaifteau. Aux maîtres de barque on retient la place
pour mettre deux ou trois barriques de vin , & aux
maîtres de navire quatre ou cinq barriques. Au lieu
de ce droit de réferve , les marchands chargeurs don-
nent ordinairement aux maîtres de barque ou de
vaiffeau une demi-barrique ou une barrique entière
de vin , pour empêcher que lui ni fes matelots ne boi-
vent le vin du chargement. On convient aufli quel-
quefois pour la beuvante depuis cinq fous jufqu'à huit
fols par tonneau. (G)
* BEWDLEY, ( Géog. ) ville d'Angleterre, dans
la province de Vorcefter , fur la Saveme. Long. zi.
10. lat. 5z. 24.
BEXUGO , ( Hift. nat. bot. ) racine du Pérou, far-
menteufe , de la groffeur du doigt , femblable à la
viorne dans fes endroits les plus déliés ; on lui attri-
bue la vertu purgative , & l'on dit que les Indiens la
préfèrent au méchoacan.
BEY , ou BEG , f. m. (Hift. mod.) eft le gouverneur
d'un pays ou d'une ville dans l'empire des Turcs:
les Turcs écrivent begh ou btk ; mais ils prononcent
bey , qui fignifie proprement/;/g/7£K/- , & s'applique
en particulier fuivant l'ulage à un feigneur d'un éten-
dart qu'ils appellent dans la même langue fangiakbeg
ou bey : fangiafek , qui chez eux fignifie etendart ou
bannière , marque de celui qui commande en quelque
partie confidérable d'une province, & qui a un grand
nombre de fpahis ou de cavalerie fous les ordres.
Chaque province de Turquie eft divifée en fept
fangiackis ou bannières , dont chacune qualifie un
bey , & tous ces beys font commandés par le gouver-
neur de la province , que l'on appelle aufli beghiler ,
beghi , ou bey 1er bey , c'eft-à-dire , feigneur des feigneur s
ou beys de la province, Foye{ Begler-Beg. Ces
beys ont beaucoup de rapport aux bannerets que l'on
avoit autrefois en Angleterre : le bey de Tunis en eft
le prince ou le roi ; & ce titre équivaut à ce que l'on
appelle à Alger le dey.
Dans le royaume d Alger,chaque province eft gou-
vernée par un bey ou vice-roi , que le fouverain éta-
blit & dépofe à fon gré ; mais dont l'autorité dans
Ion département eft delpotiquc , & qui dans la iaifon
de recueillir le tribut des Arabes, eft affilié d'un corps
de troupes qui lui eft envoyé d'Alger. Foyages dt
Shaw.
* BEYUPURA , (Hift. nat. Ichthyol. ) poiflbn de
la mer du Brefil , qui a le dos noir , le ventre blanc ,
Sêla forme d'efturgeon de Portugal : il eft long de i\x
ou fept paumes : on le pèche à l'hameçon dans la
pleine mer. Il eft gras, fain , &?de bon goût.
* BEZA , (Myth.) divinité adorée à Abyde , à l'ex-
trémité de la Thébaïde. Ses oracles fe confultoient
E e ij
220 B E Z
par des billets cachetés. On porta à l'empereur Conf-
tunce quelques-uns de ces billets , qui occafionnerent
des perquifitions très-rigoureufes , & l'emprifonne-
ment de beaucoup de monde. On y coni'ultoit appa-
remment l'oracle ïiirla durée de l'empire , ou fur le
fuccès de quelque conspiration contre l'empereur.
BEZANT ou BIZANT , f. m. ( Hift. & Comm. )
une lbrte de monnoie frappée à Byfance dans le tems
des empereurs Chrétiens. Voye^ Monnoyage &
Monnoie.
Le btfant eft d'un or pur & fin à vingt-quatre ka-
rats ; mais on n'eft point d'accord fur la valeur : de-
là vient que l'or offert à l'autel par le roi d'Angle-
terre les jours de fêtes , s'appelle encore bezant ou
binant.
Du Peyrat dit que les béants n'ont été reçus en
France que fous la troilieme race de nos rois , depuis
Louis le jeune qui apporta des bêlants d'or pris fur
les Arabes & autres infidèles qu'il avoit vaincus ; de
forte que les rois commencèrent à s'en fervir au jour
de leur facre ôt couronnement , où l'on en préfen-
toit treize à l'offrande. Henri II. en fit forger exprès
pour cette cérémonie, valant environ un double du-
cat la pièce. Un double ducat étoit alors ce que nous
appelions un louis. Il eft encore fait mention dans
notre hiftoire de huit cents mille bêlants d'or payés
aux Sarrafins pour la rançon de S. Louis & des fei-
gneurs faits prifonniers avec lui. M. l'abbé Goujet,
dans fin fupplément de Moréri , prouve par des char-
tes & d'autres monumens de notre hiftoire , que fous
Philippe le hardi, en 1282 , le bêlant fut évalué à
huit fous tournois, & fous Philippe le bel, en 1 297,
à neuf fous. (G*)
Bezant , f. m. on appelle ainfi dans le Blafon une
pièce d'or ou d'argent fans marque : elle eff ronde &
plate ; & les paladins François en mirent de fembla-
bles fur leur écu , pour faire connoître qu'ils avoient
fait le voyage de la Terre-fainte. ( f )
BEZANTÉ , adj. terme de Blafon ; il fe dit d'une
pièce chargée de bezans , comme une bordure be\an-
tée de huit pièces. Voye{ Bezant.
Rochefort en Angleterre , écartelé d'or & de gueu-
les , à la bordure beçantée d'or. ( V )
BEZESTAN , f. m. ( Commerce. ) on nomme ainfi
à Andrinople , & dans quelques autres principales
villes des états du grand-Seigneur , les lieux où les
marchands ont leurs boutiques, & étalent leurs mar-
chandifes. Chaque forte de marchand a le fien ; ce
qui s'entend auffi des ouvriers qui travaillent tous
dans le même endroit. Ce font ordinairement de
grandes galeries voûtées , dont les portes fe ferment
tous les loirs. Quelquefois les concierges ou gardiens
de ces be^eftans , répondent des marchandifes pour
un droit allez modique qu'on leur paye pour chaque
boutique.
Les be^eftans d'Andrinople font très - beaux , fur-
tout celui où fe vendent les étoffes , & un autre où
font les boutiques des cordonniers.
A Conftantinople on donne le même nom , ou ce-
lui de bc^eftin , à des efpeces de halles couvertes , où
fe vendent les plus riches ôc les plus précieufes mar-
chandifes.
Il y a deux beçejlins dans cette capitale de l'empire
Ottoman ; le vieux & le nouveau : le vieux a été bâ-
ti en 146 1 , fous le règne de Mahomet II. Il y a peu
de marchandifes fines : on y vend des armes , & des
harnois de chevaux affez communs.
Le btieflin neuf eft deftiné pour toutes fortes de
marchandifes ; on n'y voit guère cependant que les
marchandifes les plus belles & les plus riches , com-
me de l'orfèvrerie , des fourrures , des vertes , des
tapis , & des étoffes d'or , d'argent , de foie , & de
poil de chèvre. Les pierres précieulcs & la porcelaine
n'y manquent pas non plus.
B E Z
Ce dernier, qu'on nomme auffi le grand be{ejïin ,
eft bâti en rond , tout de pierre de taille : il y a qua-
tre portes , qui ne font ouvertes que pendant le jour;
on y enferme pendant la nuit des gardes pour ia fû-
rete des boutiques. Chaque corps de métier a fa pla-
ce affignée , hors de laquelle perfonne ne peut ven-
dre , ni même expofer en vente les mêmes fortes de
marchandifes. C'eft dans ce berejïm que les mar-
chands François , Anglois , Hollandois , ont leurs bou-
tiques de draperie.
Les marchandifes font en grande fureté dans ces
lieux , & les portes en font fermées de bonne heure.
Les marchands Turcs qui y ont des boutiques , vont
coucher chez eux dans la ville: pour les marchands
Chrétiens ou Juifs , ils fe retirent au-delà de l'eau ,
&c reviennent le lendemain matin. Voye^ Bazar.
BhZET , au jeu du Trictrac , eft la même chofe que
deux as.
* BEZETTA , ( Comm. ) c'eft ainfi qu'on nomme
du crépon ou du linon très-fin teint avec de la co-
chenille. Les meilleurs viennent de Conftantinople,
& font d'un rouge très-vif: on le contrefait à Stral-
bourg. Les dames s'en fervent quelquefois pour fe
farder , après l'avoir un peu trempé dans l'eau : on
peut auffi l'employer pour colorer les liqueurs à l'ef-
prit-de-vin. La laine de Portugal , qui n'eft autre
chofe que du coton coloré avec de la cochenille,
fert auffi aux mêmes ufages.
* BEZIERS , ( Géog.) ville de France au bas Lan-
guedoc ,fur une colline près de l'Orbe. Lon. zo. 5z.
3a.lat.43. 20.41.
BÉZOARD , f. m. {Hift. nat.) pierre qui fe trouve
dans le corps de certains animaux. Les premières
pierres connues fous le nom de béqoard , furent ap-
portées de l'Orient. Il en vint enfuite d'autres de l'A-
mérique, auxquelles on donna le même nom: mais
comme elles n'étoient pas abfolument femblables
aux premières , on les nomma bé^oards occidentaux ,
pour les diftinguer des bé^oards orientaux. Les uns
& les autres font polis à l'extérieur ; cependant il y
en a qui font inégaux & rudes. Les be\oards font affez;
tendres , & ils teignent en couleur jaune , verdâtre ,
ou olivâtre le papier frotté de craie, de cérufe ou de
chaux , Iorfqu'on les. frotte deffus : ils s'imbibent
d'eau & d'efprit-de-vin , & troublent ces liqueurs.
Leur fubftance eft pierreufe & compolée de couches
concentriques. Ils font de groffeur & de figure diffé-
rentes. Il y en a qui reffemblent à un rein ou à une
fève ; d'autres font ronds, oblongs , ou ovoïdes , &c.
Les lames formées par les couches concentriques des
béçoards , font de couleur verdâtre ou olivâtre , ta-
chetée de blanc dans leur épaiffeur. On les écrafe fa-
cilement fous la dent ; elles font glutineufes , & tei-
gnent légèrement la falive. Toutes les lames n'ont
pas la même couleur , ni la même épaiffeur. Lors-
qu'on cafte un be\oard , ou Iorfqu'on lui donne un
certain degré de chaleur , il fe trouve des lames qui
s'écartent 6c fe féparent les unes des autres. Il y a au
centre de la plupart des be\oards, une maffe dure ,
graveleufe & affez unie : on y trouve des pailles ,
du poil , des marcaffites , des caillons , des matières
graveleufes unies enfemble , & auffi dures que la
pierre ; du talc , du bois , des noyaux , prefque fem-
blables à ceux des cerifes, des noyaux de myrobo-
lans , &c. des fèves revêtues d'une forte de membra-
ne formée par la matière du bé^oard , fous laquelle
l'écorce de la fève fe trouve léchée après avoir été
.gonflée. Quelques béroards fonnent comme des pier-
res d'aigle , parce que la première enveloppe de là
fève ayant été defféchée , le noyau devient mo-
bile. Les fruits qui fervent de noyau fe pourriffent
quelquefois , & fe réduifent en pouffiere. Il y a des
auteurs qui ont vanté , je ne fai pourquoi , l'efficacité
B E Z
de cette poufîîere. On a cm que les noyaux de ma-
tière étrangère dévoient indiquer que les bé^oards
avoient été apprêtés , & qu'ils étoient faftices : mais
cette opinion n'elt pas fondée. Il ferait auiîi aifé de
taire un noyau de matière femblable à celle du relie
du be\oard , que d'employer pour noyau des corps
étrangers , qui pourroient déceler l'art : il eft même
très - naturel que des noyaux de fruits ou d'autres
corps qui fe trouvent dans l'eftomac des animaux
qui produifent les be\oards , y occafionnent leur for-
mation. On prétend que pour reconnoître les bc\oards
faétices , il faut les éprouver avec une aiguille rou-
gie au feu ; fi elle entre aifément dans la fubflance
du béipard , c'eft une marque qu'il eft faux : au con-
traire fi elle brunit feulement l'endroit où elle ell ap-
pliquée fans pénétrer , c'eft une preuve que le be\oard
eft bon. On croit que les bons font de médiocre grof-
feur , de couleur brune , qu'ils jauniffent la chaux
vive , qu'ils verdifTent la craie, qu'ils ne fe difTolvent
point dans l'eau , qu'ils font compofés de lames fines
& difpofées par couches , &c. mais toutes ces mar-
ques font fort équivoques ; il eft. très-pofîible de don-
ner les mêmes qualités à des bè^oards falfifiés avec
du plâtre ou d'autres matières femblables : cepen-
dant on peut diftinguer les be\oards naturels des fac-
tices. Les premiers font très-reconnoiffables pour les
gens qui en ont vu beaucoup ; leur couleur n'eft ni
trop pâle , ni trop foncée : ils ont le grain fin , leur
furface eft polie , & leur tiffii ferré ; de forte que les
lames dont ils font compofés, ne fe féparent pas trop
aifément les unes des autres. On juge par le poids du
bé^oard, s'il a pour noyau un caillou ou une matière
légère , telle que du poil ou des fubftances végétales.
Le béçoard occidental elt d'une couleur pâle , & quel-
quefois gris - blanc : il s'en trouve dont les lames
iont épailïes & ftriées dans leur épaifTeur.
On ne fait pas précifément quels font les animaux
qui portent les be\oards d'Orient & d'Occident. Il pa-
roît que ceux qui viennent d'Egypte , de Perle , des
Indes & de la Chine , font produits par une efpece
de bouc , que les Perfans nomment paran ; ou par
une chèvre fauvage plus grande que la nôtre , que
Clufius nomme capricerva, parce qu'elle a autant d'a-
gilité que le cerf. Le be\oard d'Amérique vient aufîi
d'une chèvre.
Comme on a donné le nom de be\oard à plufieurs
chofes très-différentes les unes des autres , on pour-
roit en faire plufieurs claffes. La première compren-
drait les be\oards d'Orient & d'Occident. On met-
trait dans la féconde toutes les pierres qui font tirées
des animaux , & qui approchent des bé^oards par leur
ftructure & leur vertu : tels font les bé^oards de finge ,
de cayman, &c. les yeux d'écrevifles , & toutes les
différentes fortes de perles. La troifieme chiffe com-
prendrait les matières qui font figurées comme le be-
^eard, fans en avoir les vertus : telles font la pierre ti-
rée de la veffie de l'homme , celles des reins , de la
véficule du fiel , & celles qui fe trouvent dans la vé-
licule du fiel des bœufs & des autres animaux. Les
égagropiles feraient dans la quatrième claffe. Voye^
Egagkopile. Et dans la cinquième , les bhoards
folliles. /'oye^BÉZOARD FOSSILE. Mém. dcVAcad.
royale des Sciences, ann. ijio. page 2j3. par M.
Geoffroy le jeune. (/)
Bezoard minéral, pierre de couleur blanche
ou cendrée , de figure irrégulierc , & le plus fouvent
arrondie : elle eft compoiée de différentes couches
friables , placées fiiccclllvement les unes fur les au-
tres. Il y a quelquefois au centre de la pierre un petit
noyau pierreux, un grain de fable, une petite co-
quille , ou un morceau de charbon de terre. Ces pier-
res font de la groffeur d'une aveline , d'une noix , ou
même d'un ceuf d'oie. On en trouve en plufieurs en-
droits : en France, auprès de Montpellier ; en Sicile,
B E Z
221
autour du mont Madon ; en Italie , dans le territoire
de Tivoli ; en Amérique, dans la nouvelle Efpagne,
dans le fleuve de Detzhuatland ; d'où on en tire de
fort grofîes ; & en bien d'autres endroits : car le be-
zoard folTile ne doit pas être plus rare que la pierre
Ammite. (/)
BEZOAR-MINERAL , ( Chimie. ) c'eft un remède
connu dans la Pharmacie : il fe fait avec le beurre
d'antimoine dont on prend trois onces , fur lefquel-
les on verfe bien doucement égale quantité d'efprit
de nitre , qu'on en retire parla diftillation au feu de
fable ; on reverfe enfuite cet efprit de nitre deffus le
réfidu avec une once de plus ; on réitère ces diftil-
lations & cohobations trois ou quatre fois ; cela fait,
on réduit en poudre le réfidu , & on le calcine dans
un creufet ; on le lave enfuite dans plufieurs eaux ,
ou on brûle de l'efprit-de-vin par-delTus. Cette pré-
paration de l'antimoine eft un très-grand fudorifique,
qui a même plus d'efficacité que l'antimoine diapho-
nique, roj^ /'am'cfe Antimoine. (— )
Bezoar martial, ( Chim. ) fe fait en mettant
dans le creufet une partie de limaille de fer, avec
deux partiesd'antimoine;on y ajoute un peu de nitre,
qu'on allume pour faciliter la fonte, qui doit être li-
quide : on a foin de remuer doucement avec une ba-
guette de fer qui puiffe aller jufqu'au fond du creu-
fet ; par ce moyen le régule qui eft en fufion ronge
la baguette , & tourne en feories avec elle. Pour fa-
ciliter l'opération , il eft bon d'y jetter de tems en
tems du nitre. Après avoir tenu le mélange en fu-
fion pendant une demi-heure , il faudra retirer la ba-
guette de fer. Si on voit qu'il n'en part plus d'etin-
celles , & qu'elle ne diminue plus par le bout , on y
jettera encore un peu de nitre ; & la matière étant
devenue très-îiquide , il faudra la verfer, la réduire
en poudre après qu'elle fera refroidie : on prend une
cuillerée de cette poudre , qu'on jette dans deux
fois fa quantité de nitre mife en fonte dans un autre
creufet ; on vuide de nouveau la matière , on la lave
dans de l'eau chaude , on l'édulcore &: la feche. On
dit que ce bezoar martial eft un excellent remède pour
la jauniflè, les hypochondres , &c. (— )
Bezoar solaire ou d'or , ( Chimie. ) fe fait en
verfant une folution d'or faite dans l'eau régale , ou
la folution d'une chaux d'or dans l'efprit de Ici fin-
huit fois , ou fuivant Zu-elfer , fur quatre fois autant
de beurre d'antimoine ; on les laiffe en digeftion pen-
dant quelque tems ; on fixe alors la matière avec de
l'efprit de nitre , & on tire le diffolvant par la diftil-
lation : ce n'eft autre choie que le bezoar minerai uni
à une chaux d'or.
BEZOAR LUNAIRE , ( Chimie. ) fe fait ainli : pour
chaque once de beurre d'antimoine , on dillbut
une dragme d'argent dans l'efprit de nitre , & on
s'en fert pour précipiter la poudre ; ce qui donne un
bezoar minerai mêlé avec la lune cornee. (— )
Bezoar jovial ou d'étain. (CAânie.)
le procédé de Stahl. On tait fondre enfemble parties
égales de régule d'antimoine & d'étain bien pur, on
broyé enfuite & pulvérife le mélange , qu'on fait ful-
miner par parties avec trois fois autant de nitre à
grand feu pendant une demi-heure; pendant ce tems
on a foin de remuer avec un bâton ; cela étant tait,
on vuide le creufet , on laiffe refroidir la matière ,
on la fait diffoudre dans l'eau, ou à l'air par dtii*
quium; l'on aura par-là une poudre grile qui eft le be-
zoar d'étain. Voyc^ Carticle ANTI-HECTIQUE. (-)
BÉZOLE, f. f. beiola, (ffift. rut. Ieh:hyol.)po\f[on
qui fe trouve dans le lac de Laufane; il elt allez ref-
femblant au lavaret, vov^Lavaret : cependant fa
couleur eft moins blanche, & un peu teinte de bleu ;
la tête eitplus petite , le mufeau plus pointu, le ven-
tre plus large & plus (aillant ; la chair eft plus molle
222 B I A
& de moindre qualité : auffi ce poiffon n'eft - il pas
recherché. Rondelet. Voye^ Poisson. (/)
B H
* BHAVAM,f. f. ( Hijl. mod. ) déeffe des Indiens ;
c'eft la puiffance à laquelle ils donnent pour époux
le puiffant. Il paroît que ce n'eft là qu'une manière
myfterieufe de défigner ou la matière & la forme ,
ou les caufes & les effets. Voye^ Kircher, Chin. illujl.
■pag. l6l.
B I
* BIA , f. m. (Commerce.*) coquille blanche qui fert
de monnoie aux Indes. Les Siamois lui donnent ce
nom à la Chine : mais dans le refte des Indes , on l'ap-
pelle coris. Voye^ Coris. Neufbia ou coris valent
un denier, argent de France.
* BIAFARA, (Géog.) royaume d'Afrique, dans la
baffe Ethiopie , dont les habitans font idolâtres. Long.
3j. 5o. lat. 6. 10.
* BI AFARES , f. m. pi. (Géog.) peuples d'Afrique ,
fur la côte de Guinée , vis-à-vis les îles de Bifagos.
* BIALA , (Géog.') ville du palatinatdeRava , dans
la grande Pologne.
* Biala, ( Géog.) ville du palatinat de Briefcia ,
dans le grand duché de Lithuanie.
* BI ALOGROD , ( Géog. ) ville de la Beffarabie ,
fur le Niefter, appartenante aux Turcs ; cette ville
s'appelle auffi Akerman. Long. 4g. 20. lat. 46. 24.
* BI ALOGRODKO , ( Géog.) ville capitale de l'U-
kraine , fituée en "SVolhinie , fur la rivière d'Onetz , qui
fe jette dans le Don , elle appartient aux Mofcovites.
BIAIS , f. m. en Architecture , on entend par ce nom
les obliquités ou angles faillans, qu'on ne peut évi-
ter dans un mur de face ou mitoyen, à caule du cou-
de que forment fouvent les rues d'une ville ou d'un
grand chemin , ou le terrein de fon voilin avec le
lien , par une fuite des partages qui ont été faits avant
l'acquifition. (F)
Biais , Biaiser , (Jardinage.) c'eft à l'art qu'il ap-
partient de racheter les biais d'un jardin , qui forment
des alignemens irréguliers & des formes bifarres , &c
c'eft ce qu'on zppelle fauver un biais.
Dans les pièces couvertes , comme font les bof-
quets , une ligne droite que forme une paliffade , re-
dreffe un biais qui fe perd dans les quarrés de bois.
Dans les lieux découverts , tels qu'un parterre ,
un boulingrin , le biais paroît un peu plus , mais il fe
fauve dans l'étendue, & on ne peut juger que par
le plan , de l'irrégularité du terrein.
On rejette le biais fur les plattes-bandes dans les
petits jardins , en régularifant la pièce du milieu , &
on redreffe les plattes-bandes par un trait de buis ;
des lifieres de bois & de broffailles rachètent le biais
des murs ; & les coudes des allées qui ne peuvent s'a-
ligner , fe corrigent par le moyen d'un berceau ou
d'un banc places à propos dans l'angle.
Pour rendre le biais plus tolérable d'un quarré long
dont deux côtés oppolés font inégaux , entrez par le
petit côté, la perfpeûive racourcirale grand. (K)
B I AI S , ( Manège.) aller en biais, c'eft-à-dire, les
épaules avant la croupe. Faire aller un cheval en biais.
La leçon du biais au paffager. Si les épaules font avant
la croupe , le cheval eft en biais , & a la croupe un peu
en dehors. Mettre le cheval en biais, tantôt à une
main , & puis le pouffer en avant ; tantôt à l'autre ,
& puis le pouffer de même en avant , & réitérer cela
de main en main & en avant , lui fait obéir la main
& le talon , & eft une excellente leçon ; mais d'autant
qu'il eft mis en biais , il faut que les parties de devant
aillent toujours avant celles de derrière. La manière
de faire aller im cheval en biais ; de lui faire faire
des courbettes en biais ; de le mettre au pas en biais ,
& en courbette en biais, eft fort détaillée dans New-
B I B
caflle. Pour aller en biais, il faut aider auffi à toutes
mains le cheval de la rêne de dehors , & foùtenir ,
c'eft-à-dire , le tenir ferme , fans lui donner aucun
tems : car le cheval le prend mieux qu'on ne peut le
lui donner. Il faut auffi l'aider de la jambe de dehors ;
c'eft-à-dire, qu'il faut que la rêne & la jambe foient
d'un même côté, & toujours en dehors. (V)
* BIALOZERKIEW, (Géog.) ville du palatinat
de Kiovie , en Pologne, fur la rivière de Roft.
* BIALY-KAMEN, (Géog.), petite ville de la
Ruffie , fur la rivière de Bug.
BIAN, eft un terme ufité dans Ie5 coutumes d'An-
jou, de Poitou, d'Angoumois, & de S. Jeand'Ange-
ly , pour lignifier ce que nous appelions corvée. Voye?^
Corvée. (H)
* BIANA, (Géog.) ville d'Afie , dans les états du
Mogol ; on y trouve d'excellent indigo ; elle eft à 20
lieues d'Agra. Long. gS. 30. lat. 46. Z4.
* BI ANDR A ou BI ANDRATE ,(Géog. ) petite ville
du Milanois , fur les frontières du comté de Verceil.
* BIARQUE, f. m. (Hifl. anc.) intendant des vi-
vres, à la cour des empereurs deConftantinople.Sa
charge s'appelloit biarchie , de /3/pç, vie, & àçyji,
chefi c'étoitla même dans le palais de l'empereur,
que celle du prœfeclus annonce dans Rome.
BIATHANATES, du grec Ciaba.vd]o) , fuicides , ou
ceux qui fe tuent eux-mêmes. Poye* Suicide.
Le doyen de S. Paul de Londres a compofé, fous
le titre de Biathanatus , un ouvrage imprimé à Lon-
dres , in- 40. dans lequel il entreprend de prouver cet-
te propolition , ou plutôt cet étrange paradoxe : que
lefuicide nefl pas jï ejfentiellement un péché, qu'il ne
puiffe jamais ccjjer de fétre. (G)
BIBA , (Hijl. nat. bot.) c'eft le nom qu'on donne à
l'arbre qui produit Yanacardium. Voy. V article Ana-
carde. (/)
* BIBBY, ( Hifl. nat. bot. ) arbre qui croît dans la
terre-ferme de l'Amérique, dont il fort beaucoup
d'un jus auquel les Anglois donnent auffi le nom de
bibby ; fon tronc eft droit, de la groffeur de la cuiffe,
de foixante à foixante-dix pies de haut , fans bran-
ches ni feuilles jufqu'au fommet , &c chargé de poin-
tes ; le fruit croît au-deffous , & tout au-tour de l'en-
droit où les branches commencent à pouffer : le bois
en eft très-dur , & noir comme de l'encre. Les Indiens
ne font pas dans l'ufage de le couper : mais ils le brû-
lent pour en avoir le fruit, qui eft blanchâtre, hui-
leux , & de la groffeur d'une noix de mufeade ; on le
pile dans des mortiers de bois; on le fait cuire, &c
on le paffe à la chauffe ; lorfque ce jus eft refroidi ,
on en ôte une huile limpide très-amere, qui nage à
la furface; les fauvages s'en fervent pour fe frotter ,
& y mêlent des couleurs pour fe peindre le corps.
Lorfque cet arbre eft encore jeune, ils y font une in-
cifion, &il en fort beaucoup de jus, qui reffemble à
du petit lait ; il a un goût aigrelet , mais affez agréa-
ble ; les Indiens le boivent après l'avoir laiffé repo-
fer pendant quelques jours.
* BIBEN, (Géog.) ville de l'Iftrie, dans le comté
de Mitterburg.
* BIBER, ( Géog.) petite rivière, dans le duché
de Magdcbourg.
* BIBERACH , (Géog.) ville libre 6k impériale de la
Soùabe , à quatre lieues d'Ulm, fur la rivière de Rufs,
& le ruiffeau de Biber. Lons,. 27.32. lat. 48. 4.
* BIBERISCH,(Gt%. ) petite rivière de laMif-
nie , qui tombe dans la Moldave à Noffen.
* BIBERTEICH, {Géog.) petite ville de Silène,
dans la principauté de Croffen.
•* BIBESIE & EDESIE, f. f. (Mith.) déeffes des
banquets : l'une préfidoit au vin , & l'autre à la bon-
ne-chere.
BIBLE , f. f. ( Théol. ) t«#&u'<* , pluriel de jS/fo/cr,
livre; c'elhà-dire , les écritures ou livre par excellence,
B I B
'Voyei E c riture. C'eft le nom que les Chrétiens
donnent à la collection des livres facrés , écrits par
Finfpiration du faint-Efprit. La Bible le divife géné-
ralement en deux parties ; favoir, l'ancien ik. le nou-
veau Tcftament. On appelle livres de l'ancien Tejla-
ment , ceux qui ont été écrits avant la naiffance de
Jefus-Chrift , &c qui contiennent , outre la loi & l'hif-
toire des Juifs , les prédictions des prophètes touchant
le Mefîie , & divers livres ou traités de morale. Le
nouveau Teftament contient les livres écrits depuis
la mort de Jefus-Chrift par les apôtres ou fes dilci-
ples.
Suivant la décifion du concile de Trente ,fejf. 4.
les livres de l'ancien Tcftament font le Pentatcuque ,
qui comprend les cinq livres de Moyfe , lavoir la
Genefe , l'Exode , le Lévitique , les Nombres , & le
Deuteronome : viennent eniuite les livres de Jofué ,
des Juges, de Ruth , les quatre livres des Rois, les
deux de Paralipomenes , le premier & le fécond d'Ef-
dras ; ceux de Tobie , de Judith , d'Efther , de Job ; le
Pfeautier de David , contenant cent cinquante pfeau-
mes ; les Proverbes, l'Eccléfiafte, la Sageffe, l'Ec-
cléfialliquc , le Cantique des cantiques , Haïe , Jéré-
mie & Baruch ; Ezéchiel , Daniel , les douze petits
Prophètes , & les deux livres des Macchabées : ce
qui fait en tout quarante-cinq livres.
Le nouveau Teftamcnt en contient vingt -fept ,
qui font les quatre Evangiles , le livre des Aûes des
Apôtres , les quatorze épîtres de S. Paul , l'épître de
S. Jacques , les deux épîtres de S. Pierre , les trois
épîtres de S.Jean, l'épure de S. Jude, & l'Apoca-
lypfe. Tel eft à préfent le canon ou catalogue des
Écritures reçu dans l'Eglife catholique ; mais qui n'eft
pas admis par toutes les fedes ou lociétés qui le font
féparées d'elle. Voye{ Canon.
Quant à l'ancien Tcftament , il y a une grande
partie des livres qu'il contient , qui ont été reçus
comme facrés &c canoniques par les Juifs & par tous
les anciens Chrétiens : mais auiïi il y en a quelques-
uns que les Juifs n'ont pas reconnus , & que les pre-
miers Chrétiens n'ont pas toujours reçus comme ca-
noniques ; mais qui depuis ont été mis par l'Eghle
dans le canon des Livres facrés. Ces derniers font les
livres de Tobie, de Judith, le livrede la Sageffe , l'Ec-
cléfiaftique, 6c les deux livres des Macchabées : quel-
ques-uns même ont douté de l'authenticité des livres
de Baruch & d'Efther. Tous ces livres ont été écrits
en langue Hébraïque , à l'exception de ceux que les
Juifs ne reconnoiffoient point. Les anciens caractè-
res étoient les Samaritains : mais depuis la captivité
on s'eft fervi des nouveaux caractères Chaldécns.
Ils ont été traduits plufieurs fois en Grec ; la verlïon
la plus ancienne 6c la plus authentique , eft celle des
Septante , dont les apôtres mêmes le font fervis. Voy.
Septante & Version.
' Quoique la plupart des livres du nouveau Tcfta-
ment ayent auffi été reçus pour canoniques dès les
premiers tems de l'Eglife , on a douté cependant de
l'authenticité de quelques-uns , comme de l'épître
aux Hébreux , de celle de S. Jude , de la féconde de
S. Pierre , de la féconde & de la troiiîeme de S. Jean ,
& de l'Apocalypfe. Tous les livres du nouveau Tcf-
tament ont été écrits en Grec , à l'exception de l'é-
vangile de S. Matthieu & de l'épitre aux Hébreux ,
qu'on croit avoir été originairement écrits en Hé-
breu. C'eft le fentiment de S. Jérôme, contre Lequel
quelques critiques modernes ont foûtenu , que tout
le nouveau Tcftament avoit été écrit en Syriaque :
mais cette opinion eft également deftituée de preu-
ves & de vraisemblance.
Les exemplaires de la Bible s'étant extrêmement
multipliés , l'oit par rapport aux textes originaux ,
foit par rapport aux verrions qu'on en a faites dans
la plupart des langues mortes ou vivantes , cette di-
B I B aa3
vifion eft la plus commode pour en donner une idée
nette au lecïeur. On diftingue donc les Bibles fdon
la langue dans laquelle elles font écrites , en Hébraï-
ques , Greques , Latines , Chaldaïques , Syriaques ,
Arabes , Cophtes , Arméniennes , Perfiennes , Mof-
covites , &c. & celles qui font en langues vulgaires:
nous allons traiter par ordre 6c féparément de cha-
cune.
Les Bibles Hébraïques font ou manuferites ou
imprimées. Les meilleures Bibles manuferites font
celles qui ont été copiées par les Juifs d'Efpagne ;
celles qui l'ont été par les Juifs d'Allemagne étant
moins exattes , quoiqu'en plus grand nombre. Il eft
facile de les diftinguer au coup d'œil. Les premières
font en beaux caractères bien quarrés ; comme les
Bibles Hébraïques de Bomberg , d'Etienne , & de Pian-
tin. Les autres en caractères femblables à ceux de
Munfter & de Gryphe. M. Simon obferve que les
plus anciennes Bibles Hébraïques n'ont pas 6 ou 700
ans. Le rabbin Menahem , dont on a imprimé quel-
ques ouvrages à Venii'e en 16 18 fur les Bibles Hé-
braïques , en cite pourtant un grand nombre , dont
l'antiquité ( à compter de fon tems ) remontoit déjà
au-delà de 600 ans. On trouve plufieurs de ces Bi-
bles manuferites dans la bibliothèque du Roi , dans
celle des Jéfuites de Paris , & dans celle des PP. de
l'Oratoire de la rue Saint-Honoré.
Les plus anciennes Bibles Hébraïques imprimées ,
font celles qui ont été publiées par les Juifs d'Italie ,
fur-tout celles de Pefaro & de Brefce. Ceux de Por-
tugal avoient commencé d'imprimer quelques parties
de la Bible à Lisbonne , avant qu'on les cfiaffât de ce
royaume. On peut remarquer en général , que les
meilleures Bibles Hébraïques font celles qui font im-
primées fous les yeux même des Juifs , fi foigneux à
obferver jufqu'aux points & aux virgules , qu'il eft
impoffible qu'on les furpaffe en exactitude. Au com-
mencement du xvi. liecle, Daniel Bomberg impri-
ma plufieurs Bibles Hébraïques , in-fol. & in-40. à Ve-
nife , dont quelques-unes font très-eftimées des Juifs
& des Chrétiens. La première fut imprimée en 1 <j 1 7 :
elle porte le nom de fon éditeur , Félix Pratenm ,• &
c'eft la moins exaûe. La féconde le fut en 1 526 ; on
y joignit les points des Mafforctes , les commentaires
de différens rabbins , & une préface Hébraïque de
Rabbi Jacob Benchajim. En 1548 , le même Bom-
berg imprima la Bible in-fol. de ce dernier rabbin v
c'eft la meilleure & la plus parfaite de toutes : elle
eft diftinguée de la première Bible du même éditeur ,
en ce qu'elle contient le commentaire de Rabbi D.
Kimchi fur les chroniques ; ce qui n'eft pas dans l'au-
tre. Ce fut fur cette édition que Buxtorf le père im-
prima à Bâle en 16 18, fa Bible Hébraïque des Rab-
bins : mais il fe gliffa , fur-tout dans les commentai-
res de ceux-ci, plufieurs fautes; car Buxtorf altéra
un allez grand nombre de leurs partages , peu favo-
rables aux Chrétiens. La même année parut à Venife
une nouvelle édition de h Bible Rabbiniquc de Léon
de Modene , rabbin de cette ville, qui prétendit avoir
corrigé un grand nombre de fautes répandues dans
la première édition. Mais outre que cette Bible eft
fort inférieure & pour le papier 6c pour le caractère
aux autres Bibles de Venue , elle paffa parles mains
des Inquisiteurs , qui ne la laifferent pas eu ion en-
tier, quant aux commentaires des Rabbins.
La Bible Hebra. :/ue de R. Etienne eft eftimee pour
la beauté des caractères: mais elle eft trop infidèle.
Plantin a auffi imprimé à Anvers différentes Bibles
ffctraîqjus fort belles, dont la meilleure eft celle de
1566 in-4°. Manafle Ben [firael, lavant Juif Portu-
«:iis , donna à Amllerdam deux éditions de la Bible
en Hébreu , l'une in-*?. & l'autre «-8°. La première
eft en ikux colonnes , & par-là plus commode pour
le lecteur. En 1634 , Rabbi Jacob Lombrofo en pu-
ai4
B ï B
blia à Venife une nouvelle édition în-^. avec de
petites notes littérales au bas des pages , où les mots
Hébreux font expliqués par des mots Efpagnols.
Cette Bible eft fort eitimée des Juifs de Conltanti-
nople. On y a distingué dans le texte par une petite
étoile , les endroits où il faut lire le point camés par
un camés hatouph , c'eft-à-dire par un o & non par
un a. De toutes les éditions des Bibles Hébraïques
in- 8°. les plus belles & les plus correctes font les
deux de Joleph Athias , Juif d'Amlterdam ; la pre-
mière de 1 66 ï , préférable pour le papier ; l'autre
de 1667, plus fidèle: néanmoins Vander Hoogt en
à publié une en 1705, qui l'emporte encore fur ces
deux-là.
Après Athias, trois Proteftans qui favoient l'Hé-
breu , s'engagèrent à revoir & à donner une Bible
Hébraïque. Ces trois auteurs étoient Claudius , Ja~
blonski , & Opitius. L'édition de Claudius fut publiée
à Francfort en 1677, /Vz-40. On trouve au bas des
pages les différentes leçons des premières éditions :
mais l'auteur ne paroît pas allez profond dans la ma-
nière d'accentuer, fur-tout pour les livres de poéfie ;
& d'ailleurs cette édition n'ayant pas été faite fous
fes yeux , fourmille de fautes. Celle de Jablonski pa-
rut à Berlin, àï-40. en 1699. L'impreffion en étoit
fort nette , & les caractères très-beaux : mais quoi-
que l'auteur prétendit s'être fervi de l'édition d'A-
thias & de celle de Claudius , pluiieurs critiques trou-
vèrent néanmoins la fienne trop relTemblante à l'é-
dition zVz-40. de Bomberg , pour ne le foupçonner pas
de l'avoir fuivi peut - être trop fervilement. Celle
d'Opitius fut auffi imprimée //2-40. à Keil en 1709 :
mais la beauté du papier ne répondoit pas à celle des
caradteres ; d'ailleurs l'éditeur ne fit ufage que de ma-
nuicrits Allemands , négligeant trop ceux qui font
en France , défaut qui lui étoit commun avec Clau-
dius & Jablonski. Ces Bibles ont pourtant cet avan-
tage, qu'outre les diviilons , foit générales , foit par-
ticulières , en Paraskes & Pemkim , félon la manière
des Juifs , elles ont encore les divifions en chapitres
& en verfets , fuivant la méthode des Chrétiens ; auffi
bien que les keri-ketib , ou différentes façons de lire ,
& les fommaires en Latin ; ce qui les rend d'un ufa^e
très -commode pour les éditions Latines & les con-
cordances. La petite Bible i/z-feize de Robert Etienne
eft fort eftimée par la beauté du caradtere : on doit
obferver qu'il y en a une autre édition à Genève
qui lui eft pareille , excepté que l'impreffion en eft
mauvaife , & le texte moins correft . On peut ajou-
ter à ce catalogue quelques autres Bibles Hébraïques
fans points in-S°. ôc z/2-24. fort eftimées des Juifs, non
qu'elles foient plus exactes , mais parce que la peti-
teffe du volume les leur rend plus commodes dans
leurs fynagogues & dans leurs écoles. Il yen a deux
éditions de cette forte , l'une de Plantin in-%°. à deux
colonnes , & l'autre z/z-24. imprimée par Raphalen-
gius à Leyde en 16 10. On en trouve auffi une édition
d'Amlterdam en grands caradteres , par Laurent, en
163 1 ; & une autre in-iz. de Francfort , en 1694 ,
avec une préface de Leufden : mais elle eft pleine
de fautes.
' Bibles Greques. Le grand nombre de Bibles que
l'on a publiées en Grec , peut être réduit à trois ou
quatre claffes principales ; favoir celle de Complute
ou d'Alcala de Henarès ; celle de Venife , celle de
Rome , & celle d'Oxford. La première panit en 1 <j 1 5
par les ordres du cardinal Ximenès , & fut inférée
dans la Bible Polyglotte , qu'on appelle ordinairement
la Bible de Complute : cette édition n'eft pas exadte
parce qu'en plufieurs endroits on y a changé la ver-
îion des Septante , pour le conformer au texte Hé-
breu. Onl'a cependant réimprimée dans la Polyglotte
d'Anvers , dans celle de Paris, & dans IV/2-40. connu
fous le nom de Bible de Vatable. y. POLYGLOTTE.
B I B
La féconde Bible Greque eft celle de Venife qui parut
en 1 5 18 , où le texte Grec des Septante a été réim-
primé conformément à ce qu'il étoit dans le manuf-
crit. Cette édition eft pleine de fautes de copiff.es ,
mais ailées à corriger. On l'a réimprimée à Stras-
bourg , à Bâle , à Francfort, èc en d'autres lieux , en
l'altérant toutefois en quelques endroits pour fuivre
le texte Hébreu. La plus commode de ces Bibles eft
celle de Francfort, à laquelle on a ajouté de courtes
fcholies, dont l'auteur ne s'eft pas nommé, mais qu'on
attribue à Junius : elles fervent à marquer les diffé-
rentes interprétations des anciens traducteurs Grecs.
La rroifieme eft celle de Rome en 1 5 87 , dans laquelle
on a inféré des fcholies tirées des manuferits Grecs
des bibliothèques de Rome , & recueillies par Pierre
Morin. Cette belle édition fut réimprimée à Paris en
1628 par le P. Morin de l'Oratoire , qui y joignit l'an-
cienne verfion Latine de Nobilius , laquelle dans l'é-
dition de Rome étoit imprimée léparément avec les
commentaires. L'édition Greque de Rome fe trouve
dans la Polyglotte de Londres ; & on y a ajouté en
marge les différentes leçons tirées du manuferit d'A-
lexandrie. On Ta auffi donnée en Angleterre /Vz-40.
. &//Z-12. avec quelques changemens. Eos l'a encore
publiée en 1709 à Francker , avec toutes les différen-
tes leçons qu'il a pu recouvrer. Enfin la quatrième
Bible Greque eft celle qu'on a faite en Angleterre d'a-
près un exemplaire très-ancien , connu fous le nom
de manuferit d' 'Alexandrie ; parce qu'il avoit été en-
voyé de cette ville. Elle fut commencée à Oxford
par le docteur Grabe en 1707. Dans cette Bible , le
manuferit d'Alexandrie n'eft pas imprimé tel qu'il
étoit , mais tel qu'on a cru qu'il devoit être ; c'eft-à-
dire , qu'on l'a changé aux endroits qui ont paru être
des fautes de copiftes , & que l'on a auffi changé les
mots qui étoient de différentes dialectes: quelques-
uns ont applaudi à cette liberté ; d'autres font con-
damnée , prétendant que le manuferit étoit exact, &C
que les conjectures ou les diverles leçons avoient été
rejettées dans les notes dont il étoit accompagné.
yoye{ Septante.
Bibles Latines. Quoique leur nombre foit en-
core plus grand que celui des Bibles Greques , on
peut les réduire toutes à trois claffes ; favoir , l'an-
cienne Vulgate , nommée auffi Itala, traduite du Grec
des Septante ; la Vulgate moderne , dont la plus
grande partie eft traduite du texte Hébreu ; 8c les nou-
velles verfions Latines faites fur l'Hébreu dans le
XVIe fiecle. De l'ancienne vulgate, dont on fe fer-
voit dans la primitive Eglife, & fur-tout en occident,
jufqu'après le tems du pape S. Grégoire le grand, il
ne refte de livres entiers que les Pleaumes , le livre
de la SagelTe , & l'Eccléfialte , & desfragmens épars
dans les écrits des Pères , d'où Nobilius a tâché de la
tirer toute entière ; projet qui a été exécuté par le
P. Sabathier, Bénédictin. On trouve un grand nom-
bre d'éditions différentes de la vulgate moderne, qui
eft la verfion de S. Jérôme faite fur l'Hébreu. Le
cardinal Ximenès en fit inférer dans la Bible de Corn'
plute , une qui eft altérée & corrigée en plufieurs en-
droits. La meilleure édition de la vulgate de Robert
Etienne , eft celle de 1540, réimprimée en 1545,
où l'on trouve en marge les différentes leçons des di-
vers manuferits dont il avoit pu avoir connoiflance.
Les docteurs de Louvain l'ont revue, y ont a;oùté de
nouvelles leçons inconnues à Robert Etienne : leur
meilleure édition eft celle qui contient à la fin les
notes critiques de François Lucas de Bruges. Toutes
ces corredtions de la Bible Latine furent laites avant
le tems de Sixte V. & de Clément VIII. depuis les-
quels perfonne n'a ofé faire de changement au texte
de la vulgate , fi ce n'eft dans des commentaires &
des notes léparées. Les corrections de Clément VIII.
en 1 592, font celles que l'on fuit dans toute l'Eglife
catholique,
B I B
cathoiique ; car de deux réformations qu'a fait ce
pontife , on s'en eft toujours tenu à la première. Ce
fiit d'après elle que Plantin donna ion édition , ôc
toutes les autres furent faites d'après celle de Plan-
tin; de forte que les Bibles communes font d'après
les corrections de Clément VIII. Il y a un très-grand
nombre de Bibles Latines delà troifieme claffe faites
depuis deux fiecles , & comprenant les verrions des
originaux des livres facrés : la première eft celle de
Sanctez Pagninus, Dominicain ; elle fut imprimée à
Lyon in-4 '. en i <j%8 , & elt fort eftimée des Juifs.
L'auteur la perfectionna , & l'on en rit à Lyon une
belle édition in-fol. en 1 542 , avec des fcholies fous
le nom de Michael V~dla.novj.nus , auteur de ces fcho-
lies , que M. Chambers croit être Michel Servet ,
brûlé depuis à Genève. Servet prit ce nom parce
qu'il étoit né à Villa-nueva en Aragon. Ceux de Zu-
rich donnèrent auiïï une édition i/z-40 '. de la Bible de
Pagninus , & Robert Etienne la réimprima in-fol.
avec la vulgate en 1 557. On en trouve encore une
verfion de 1 586 en quatre colonnes , fous le nom de
Vatable , qu'on a inférée dans la Bible en quatre lan-
gues de l'édition d'Hambourg. On range auiïï au
nombre des Bibles Latines la verfion de Pagninus ,
corrigée ou plutôt rendue littérale par Arias Monta-
nus , avec l'approbation des docteurs de Louvain, in-
férée par ordre de Philippe II. dans la Polyglotte de
Complute , & enfuite dans celle de Londres. Il y en
a eu différentes éditions in-fol. in-40. & in-S°. aux-
quelles on a ajouté le texte Hébreu de l'ancien Tefta-
ment, & le Grec du nouveau : la meilleure eft celle
de 1 571 in-fol. Depuis la réformation les Proteftans
ont aurïï donné plufieurs verfions Latines de la Bi-
ble : les plus eftimées parmi eux font celles de Munf-
ter , de Léon Juda , de Caftalion , &c de Tremellius ;
les trois dernières ont été louvent réimprimées ; &
celle de Caftalion l'emporte pour la beauté du La-
tin,que quelques critiques trouvent pourtanttrop af-
fecté : fa meilleure édition eft celle de 1 ^73. La ver-
fion de Léon Juda , corrigée par les Théologiens de
Salamanque , a été jointe à l'ancienne édition pu-
bliée par Robert Etienne , avec des notes de Vata-
ble. Celles de Junius & de Tremellius font préférées,
fur-tout par les Calviniftes; & il y en a un très-
grand nombre d'éditions. On pourroit ajouter pour
quatrième claffe des Bibles Latines , comprenant l'é-
dition de la vulgate corrigée fur les originaux , la
Bible d'Ifidore Clarius ou Clario , écrivain catholi-
que , Se évêque de Fuligno dans l'Ombrie. Cet au-
teur peu content des corrections de l'ancien Latin ,
a réformé cette dernière traduction aux endroits qu'il
a crû mal rendus ; fon ouvrage imprimé à Veniie en
j 541 , fut d'abord mis à l'index , enfuite permis , oc
réimprimé àVenife en 1 564, à l'exception de la pré-
face & des prolégomènes. Plufieurs proteftans ont
fuivi cette méthode. André & Luc Oliander entr'au-
tres ont publié chacun une nouvelle édition de la
Vtdgate , corrigée iur les originaux.
Bibles Orientales. On peut mettre à la tête
des Bibles Orientales la verfion Samaritaine , qui
n'admet de l'Ecriture que le Pentateuque. Cette ver-
fion eft taite fur le texte Hébreu-Samaritain , un peu
ut du texte Hébreu des Juifs , & dans une lan-
gue qui elt à peu près la même que la Chaidaïque.
i re Morin de l'Oratoire eft le premier qui ait
fait imprimer ce Pentateuque Hébreu des Samari-
tains avec la ve'lion ; l'un & l'autre fe trouvent
dans les Polyglottes de Londres & de Pans. Les Sa-
maritains ont outre cela une verfion Arabe du Pen-
tateuque , qui n'a point été imprimée , & qui elt mê-
me fort rare. On en trouve deux exemplaires dans
la bibliothèque du Roi. L'auteur fe nomme Abulaid,
& a ajouté en marge quelques notes littérales. Ils
ontauiii l'hiftoire de Jofué, mais différence du livre
Tome II,
B L B 225
de Jofué que nous reconnoifibns pour canonique , ti-
tre qu'ils n'accordent pas au livre qu'ils ont tous le
même nom.
Bibles Chaldéennes. Ce font feulement des
glofes ou des exportions que les Juifs ont faites lorf-
qu'ils parloient la langue Chaidaïque. Ils les nom-
ment targumim , ou les paraphrafes ; parce qu'en effet
ce ne font point de pures verfions de l'Ecriture. Les
meilleures font celles d'Onkelos , qui n'eft que lur le
Pentateuque , & celle de Jonathan , fur tous les li-
vres que les Juifs appellent Prophètes ; c'eft-à-dire ,
fur Jofué , les Juges, les livres des Rois , les grands
& les petits Prophètes. Les autres paraphraies Chal-
déennes font la plupart remplies de fables : on les a
inférées dans la grande Bible Hébraïque de Veniie &
de Bâle. Mais on les lit plus ailément dans les Poly-
glottes, où l'on a mis à côté la traduction Latine. V 'oy.
Targum.
Bibles Syriaques. En 1561 Jean Albert Wid-
manftadius fit imprimer à Vienne en Autriche tout le
nouveau Teftament en très-beaux caractères Syria-
ques , & cette verfion a été inférée dans la Bible de
Philippe IL avec la traduction Latine. Gabriel Sio-
nite a publié aufïï à Paris en i<jx-j une très-belle édi-
tion des Pfeaumes en Syriaque , avec une verfion
Latine. Quant à l'ancien Teftament , les Syriens en
ont deux fortes de verfions : la première faite fur le
Grec des Septante , n'a jamais été imprimée ; l'autre
qui a été prife fur le texte Hébreu , a été imprimée
pour la première fois dans la grande Bible de le Jay,
& eniiiite dans la Polyglotte d'Angleterre. Elle eft en
ulage chez les Chrétiens d'orient, qui luivent le rit
Syrien.
Bibles Arabes. Il y a un très-çrand nombre de
Bibles Arabes , dont les unes font à Pillage des Juifs
dans les pays où ils parlent l'Arabe; les autres à l'u-
fage des Chrétiens du levant qui parlent cette lan-
gue. Les premières ont toutes été faites lur l'Hébreu,
les autres lur d'autres verfions , comme celle des Sy-
riens lur le Syriaque , lorique cette dernière langue
n'a plus été entendue du peuple ; celie des Copines
fur leur langue naturelle, quoqu'elle tut aufli bien
entendue du peuple que des prêtres. En 15 16 Au-
guftm Juftiniani , évêque ue Nebis , c nna à Gènes
une verfion Arabe du Pleautier , avec le texte Hé-
breu & la paiaphrale Chaidaïque , en y ajoutant les
interprétations Latines. La verfion Arabe de toute
l'Ecriture fe trouve dans les Polyglottes de Paris &C
de Londres. Il y a une édition entière de l'ancien
Teftament , imprimée à Rome en 1671 par ordre de
la Congrégation^ Propagandàfide, mais qu'on a vou-
lu raire quadrer avec la Vulgate , & qui par conlé-
quent n'eft pas toujours exactement conforme au tex-
te hébreu. Les Bibles Arabes de 1 Europe ne lont pas
non plus tout-à-tait les mêmes que celles de l'orient :
plufieurs favans penlent que la verfion Arabe du
vieux Teftament qui elt imprimée dans les Pol\ glot-
tes , eft au moins en grande partie celle de S
Gaon Rabbin, qui vivu.t au commencement du di-
xième fiecle; & la raifon qu'ils en donnent eft qu'A-
Ben Ezra , grand antagonifte de Saadias, cite quel-
que-, partages de cette vei lion que l'on trouve dan»
les verfions Arabes des Polyglottes: mais d'autres
penlent que la verfion Arabe de S ladias ne fublifte
plus. En 1612 Erpenius imprima un Pentateuque
Arabe , que l'on appelloit aufli le Pentateu^
Mauritanie , parce qu'il étoit à 1'ulage des Juifs de
Barbarie: la verfion en eft.très-litterale , è\: parte
pour fort exacte. On a aufli publié les quatre 1. \ an-
géliftes en Arabe avec une verfion Latine , in-fol. à
Rome en 1 59 1 . Cette verfion a été réimprimée de-
puis dans les Polyglottes de Paris 6c de Londres ,
avec quelques changemens faits par Gabriel S;onite.
Erpenius donna auiïï à Leyde en 16 16 un nouveau
¥t
îi6
B I B
Teftament Arabe en entier, tel qu'il l'avoit trouvé
dans un manulcrit.
Bibles Cophtes. Ce font les Bibles des Chré-
tiens d'Egypte , qu'on appelle Cophtts ou Coptes , &
qui font écrites dans l'ancien langage de ce pays-là.
Il n'y a aucune partie de la Bible imprimée en Coph-
te : mais il y en a plufieurs manuferits dans les gran-
des bibliothèques , & fur-tout dans celle du Roi.
Cette ancienne langue Cophte n'étant plus entendue
depuis très-long-tems par les Cophtes mêmes , ils li-
fent l'Ecriture dans une verfion Arabe , comme on le
voit par les Bibles Cophtes manulcrites qui font à la
bibliothèque du Roi.
Bibles Ethiopiennes. Les Ethiopiens ont aufli
traduit quelques parties de la Bible en leur langue ,
comme les Pfeaumes , les Cantiques , quelques cha-
pitres de la Genefe, Ruth, Joël , Jonas , Malachie,
& le nouveau Teftament , qui ont été imprimés d'a-
bord léparément , puis recueillis dans la Polyglotte
d'Angleterre. Cette verfion a été faite fur le Grec
des Septante , peut-être même fur le Cophte , qui a
lui-même été pris des Septante. Le nouveau Tefta-
ment Ethiopien , imprimé d'abord à Rome en 1 548,
eft très-inexad : on n'a pas lailié que de le faire pal-
fer avec toutes les fautes dans la Polyglotte de Lon-
dres.
Bibles Arméniennes. Il y a une très-ancienne
verfion Arménienne de toute la Bible , qui a été faite
d'après le Grec des Septante par quelques do&eurs
de cette nation dès le tems de S. Jean Chryfoftome.
Comme les exemplaires manuferits coùtoient beau-
coup, Olchan ou Ulcham , évêque d'Ufchouanch,
un de leurs prélats r la fît imprimer en entier /'/z-40.
à Amlterdam en 1664 , avec le nouveau Teftament
in-S°. On avoit cependant imprimé long- tems aupa-
ravant le Plëautier Arménien.
Bibles Persannes. Quelques-uns des Pères fem-
blent dire que toute l'Ecriture fut d'abord traduite
en langue Perfanne : mais il ne refte rien de cette
ancienne verfion , qu'on fuppofe faite d'après celle
des Septante. Le Pentateuque Perfan imprimé dans
la Polyglotte de Londres, eft l'ouvrage de Rabbi
Jacob , Juif Perfan. Dans la même Polyglotte le
trouvent les quatre Evangéliftes en Perfan , avec la
traduction latine : mais cette verfion paroît être
très-moderne , peu exa&e , & ne méritoit pas d'être
publiée.
Bibles Gothiques. On croit généralement que
Ulphilas ouGulphilas, évêque des Goths qui habi-
toient dans la Mcefie, & qui vivoit dans le IVe fie-
cle , rit une verfion de la Bible entière pour l'es com-
patriotes , à l'exception toutefois des livres des Rois
qu'il ne voulut pas mettre entre les mains de cette
nation allez belliqueule par elle-même , craignant
que les guerres & les combats dont il y eft fait men-
tion ne l'excitaffent à avoir toujours les aimes à la
main , & à juftifîer cette conduite par l'exemple des
anciens Hébreux. Quoi qu'il en loit , on n'a plus rien
de cette ancienne verfion que les quatre Evangélif-
tes , qui furent imprimés i/z-40 . à Dordrecht en 1 66 5
d'après un très-ancien manulcrit.
Bibles Moscovites. La Bible Mofcoviteeû une
Bible entière en langue Sclavone faite lur le Grec :
elle fut imprimée à Oftravie en Volhinie aux dépens
de Conftantin Baiïle duc d'Oftravie, pour Pulage des
Chrétiens qui parlent le Sclavon , dont la langue
Molcovite eft un dialecfe. On la nomme communé-
ment la Bible Molcovite.
Le nombre des Bibles en langue vulgaire eft fi pro-
digieux , & d'ailleurs elles lont li connues, que nous
n'avons pas jugé néceflaii e d'en traiter expi effément.
Voyt^ le livre de Kortholtus Allemand , intitulé de
varits Bibliorum ediiionibus. R. Elias Levita, le P. Àlo-
nn. Simon , Hijl. critiq. du vieux & du nouv, Te/lam.
B I B
Bibliot. des aut. ecclef. des trois prem.Jïec. par M. Du*
pin , tome I. Bibliot. jacr. du P. le Long ; & celle que Dom
Cal/net a Jointe à fon diclionn. de la Bible. (Ct)
* Comme nous ne nous fommes pas propofés feu-
lement de faire un bon ouvrage , mais encore de
donner des vues aux auteurs , pour en publier fur
plufieurs matières de meilleurs que ceux qu'on a ,
nous allons finir cet article par le plan d'un traité
qui renfermeroit tout ce qu'on peut defirer fur les
queftions préliminaires de la Bible. Il faudroit divifer
ce traité en deux parties : la première leroit une cri-
tique des livres & des auteurs de l'Ecriture lainte :
on renfermeroit dans la féconde certaines connoif-
fances générales qui font néceffaires pour une plus
grande intelligence de ce qui eft contenu dans ces
livres.
On diftribueroit la première partie en trois fec-
tions : on parleroit dans la première des queftions
générales qui concernent tout le corps de la bible :
dans la féconde , de chaque livre en particulier & de
fon auteur : dans la troilieme , des livres cités , per-
dus , apocryphes , & des monumens qui ont rapport
à l'Ecriture.
Dans la première de ces feftions , on agiteroit fix
queftions. La première feroit des différens noms qu'on
a donnés à la Bible, du nombre des livres qui la com-
polent , & des clalfes différentes qu'on en a faites.
La leconde, de la divinité des Ecritures ; on la prou-
veroit contre les payens & les incrédules : del'infpi-
ration & de la prophétie ; on y examineroit en quel
fens les auteurs lacrés ont été infphés ; li les termes
lont également infpirés comme les choies ; fitout ce
que ces livres contiennent eft de foi , même les faits
hiftoriques & les propofitions de phyfique. La troi-
fieme leroit de l'authenticité des livres lacrés , du
moyen de diftinguer les livres véritablement cano-
niques d'avec ceux qui ne le font pas ; on y exami-
neroit la fameufe controverfe des Chrétiens de la
communion Romaine , & de ceux de la communion
Pioteftante, fevoir fi TEglife juge t 'Ecriture ; onexpli-
queroit ce que c'eft que les livres deutérocanoni-
ques ; dans quel fens & par quelles raifons ils font ou
doivent être nommés deutérocanoniques. La quatriè-
me feroit des différentes verfions de la bible & des di-
verfes éditions de chaque verlion : on y parleroit
par occafion de l'ancienneté des langues & des ca-
ractères ; on en rechercherait l'origine ; on examine-
rait quelle a été la première langue du monde; fi l'Hé-
braïque mérite cette préférence. S'il n'étoit pas pofïï-
ble de porter une entière lumière fur ces objets , on
déterminerait du moins ce qu'on en voit diftin&e-
ment ; on rechercherait jufqu'où l'on peut compter
fur la fidélité des copies , des manuferits , des ver-
fions , des éditions , & fur leur intégrité ; s'il y en a
d'authentiques outre la vulgate , ou lîelle eft la feule
qui le foit ; on n'oublierait pas les verfions en lan-
gues vulgaires ; on examineroit li la leclure en eft
permife ou défendue , & ce qu'il faut penler de l'o-
pinion qui condamne les traductions des livres facrés.
La cinquième feroit employée à l'examen du ftyle
de l'Ecriture , de la fource de Ion obfcurité , des dif-
férens fens qu'elle fouffre , & dans lelquels elle a été
citée par les auteurs eccléliaftiques; de fuiage qu'on
doit faire de ces fens , loit pour la controverfe , foit
pour la chaire ou le myftique : on y difeuteroit le
point de conicience , s'il eft permis d'en faire l'appli-
cation à des objets profanes. La fixieme & dernière
queftion de la ieftion première de la première par-
tie , traiteroit de la divilîon des livres en chapitres
& en verfets , des différens commentaires , de I'ufage
qu'on peut faire des rabbins, de leur talmud, de leur
gemare , & de leur cabale ; de quelle autorité doivent
être les commentaires & les homélies des pères fur
l'Ecriture j de quel poids font ceux qui font venus
B I B
ilcpuis , Se quels font les plus utiles pour l'intelligen-
ce des Ecritures.
La féconde fedlion feroit divifée en autant de pe-
tits traités qu'il y a de livres dans l'Ecriture : on en
feroit l'analyfe Se la critique ; on en eclairciroit l'hif-
toire ; on donnerait des diilertations fur les auteurs ,
les tems précis, Se la manière dont ils ont écrit.
La troifieme feélion comprendtoit trois quefrions :
la première, des livres cités dans l'Ecriture ; on exa-
minerait quels étoient ces livres , ce qu'ils pouvoient
contenir , qui en étoient les auteurs , enfin tout ce
que les preuves & les conjectures en pourroient in-
diquer: la féconde, des livres apocryphes qu'on a
voulu faire palier pour canoniques, l'oit qu'ils fub-
fiflent encore , ou qu'ils ayent été perdus , foit qu'ils
ayent été compofés par des auteurs Chrétiens , ou
des ennemis de la religion : la troifieme, des monu-
mens qui ont rapport à l'Ecriture , comme les ouvra-
ges de Philon , de Jofephe , de Mercure Trifmegille,
& de plufieurs autres ; tels font aufîî les oracles des
libylles, le iymbolc des apôtres , Se leurs canons.
Tel feroit l'objet Se la matière de la première
partie ; la féconde comprendrait huit traités : le
premier feroit de la Géographie facrée : le fécond ,
de l'origine & de la diviiion des peuples ; ce feroit
un beau commentaire fur le chapitre x. de la Genc-
fe : le troilicme , de la chronologie de l'Ecriture , où
par conféquent on travaillerait à éclaircir l'ancienne
•chronologie des empires d'Egypte , d'AlTyrie , & de
•Babylone , qui fe trouve extrêmement mêlée avec
celle des Hébreux : le quatrième , de l'origine & de
la propagation de l'idolâtrie ; celui-ci ne iëroit , ou
je me trompe fort , ni le moins curieux , ni le moins
phiîofophique, ni le moins (avant : le cinquième , de
l'hiltoire naturelle relative à l'Ecriture , des pierres
précieufes dont il y ell fait mention , des animaux,
des plantes , Se autres productions ; on rechercherait
quels font ceux de nos noms auxquels il faudrait rap-
porter ceux fous lefquels elles font défignées : le li-
xieme , des poids , des mefures , Se des monnoiesqui
ont été en ufage chez, les Hébreux , jufqu'au tems de
Notre Seigneur , ou même après les apôtres : le fep-
îicme , des idiomes diiîerens des langues principales,
dans lefquels les livres faints ont été écrits ; des para-
fes poétiques & proverbiales , des figures , des allu-
mons , des paraboles ; en un mot , de ce qui forme
une bonne partie de l'obfcurité des prophéties & des
évangiles : le huitième feroit un abrégé hiitorique ,
qui expolcroit rapidement les différens états du peu-
ple Hébreu jufqu'au tems des apôtres ; les différen-
tes révolutions furvenues dans ton gouvernement ,
i'es ufages, fes opinions , fa politique, les maximes.
Voilà une idée qui me paraît allez juite Se allez
■étendue pour exciter un (avant à la remplir. Tout ce
qu'il dirait là-deflus ne feroit peut-être pas nouveau :
tnais ce feroit toujours un travail eflimablc Se utile
tau public , que de lui présenter dans un feul ouvrage
complet, fous un même ltyle, félon une méthode
claire & uniforme, Se avec un choix judicieux, des
matériaux difperfés, Se la plupart inconnus, recueil-
lis d'un grand nombre de favans.
Qu'il me foit permis de m'adreffer ici à ceux qui
n'ont pas de l'étendue de la Théologie, toute l'idée
qu'ils en doivent avoir. Le plan que je viens de pro-
pofer a fans doute c!e quoi furprendre par la quan-
tité de matières qu'il comprend ; ce n'eil pourtant
qu'une introduction à la connoilïance de la religion:
le Théologien qui les poflede ne fe trouve encore qu'à
«te du grand édifice qu'il a à parcourir; une
feule thefe de licence contient toutes les queitions
dont je viens de parler. On fe perfuade fauilement
aujourd'hui qu'un Théologien n'ell qu'un homme
qui fait un peu mieux ion catéchiime que les autres ;
& fous prétexte qu'il y a des myfteres dans notre re-
Tor IL
B I B
2 2*7
ligion , on s'imagine que toute forte de raifonnemen-
lui font interdits. Je ne vois aucune feience qui des
mande plus de pénétration , plus de jullefïe, plus de
fineffe , & plus de iubtilité dans l'efprit , que la Théo-
logie ; fes deux branches font immenfes , la fcholaf-
tique & la morale ; elles renferment les queitions les
plus intéreffantes. Un Théologien doit connoître les
devoirs de tous les états ; c'elt à lui à difeerner les
limites qui féparent ce qui efl permis d'avec ce qui
ell défendu: lorfqu'il parle des devoirs de notre re-
ligion, fon éloquence doit être un tonnerre qui fou-
droyé nos pallions , & en arrête le cours ; ou doit
avoir cette douceur qui fait entrer imperceptible-
ment dans notre ame des vérités contraires à nos pen-
chans. Quel refpect Se quelle vénération ne méritent
pas de tels hommes ! Et qu'on ne croye pas qu'un
Théologien , tel que je viens de le peindre , foit un
être deraifon. Il ell forti de la faculté de Théologie
de Paris plufieurs de ces hommes rares. On lit dans
les faites les noms célèbres Se à jamais refpeclables
des Gerfons , des Duperrons , desRichelieux , & des
BolTuets.Elle ne celle d'en produire d'autres pour la
confervation des dogmes Se de la morale du Chrif-
tianifme. Les écrivains qui fe font échappés d'une
manière inconfidérée contre ce qui fe palle fur les
bancs de Théologie , méritent d'être dénoncés à cet-
te faculté , Se par elle au clergé de France : que pen-
fera-t-il d'un trait lancé contre ce corps refpe&able ,
dans la continuation obfcure d'un livre deftiné tou-
tefois à révéler aux nations la gloire de YEglife Gal-
licane , dont la faculté de Théologie ell un des prin-
cipaux ornemens? Ce trait porte contre une thefe
qui dure douze heures , Se qu'on nomme Sorboniquc :
on y dit plus malignement qu'ingénieufement , que
malgré fa longueur elle na jamais ruiné la fan té de
perfonne. Cette thefe ne tua point l'illuitre BolTuet :
mais elle alluma en lui les rayons de lumière qui
brillent dans fes ouvrages fur le mérite , fur la julti-
fication , Se fur la grâce. Elle ne fe fait point , il effc
vrai , avec cet appareil qu'on remarque dans certains
collèges : on y ell plus occupé des bons argumens Se
des bonnes réponfes , que de la pompe Se de l'olten-
tation ; moyen sûr d'en impofer aux ignora ns : on
n'y voit perfonne poflé pour arrêter le cours d'une
bonne difficulté ; Se ceux qui font prépofés pour y
maintenir l'ordre, font pluscontens de voir celui qui
foûtient un peu embarrafïé fur une objection très-
forte qu'on lui propofe , que de l'entendre répondre
avec emphafe à des minuties. Ce n'ell point pour
éblouir le vulgaire que la faculté fait foùtenir des the-
fes;c'eit pour conltaterle mérite de ceux qiriSipirent à
l'honneur d'être membres de fon corps : aulîi ne voit-
on point qu'elle s'emprelfe à attirer une foule d'ap-
probateurs ; tous les Licenciés y dilputent indifférem-
ment : c'ell que ce font des acles d'épreuve Se non
de vanité. Ce n'ell point fur un ou deux traités qu'ils
foùtiennent , les feuls qu'ils ayent appris dans leur
vie ; leurs thefes n'ont d'autres bornes que celles de
la Théologie. Je l'ai que l'auteur pourra fe défendre,
en difant qu'il n'a rien avancé de lui-même ; qu'il
n'a fait que rapporter ce qu'un autre avoit dit : mais
excuferoit-il quelqu'un qui dans un livre rapporterait
tout ce qu'on a écrit de vrai ou de faux contre fon
corps ? Nous efpérons que ceux à qui l'honneur de
notre nation Se de l'églife de France ell cher, nous
l'auront gré de cette cfpcce de digreffion. Nous rem-
plifTons par-là un de nos principaux engagemeûs;
celui de chercher Se de dire , autant qu'il ell en nous,
la vérité, foye^ Faculté, Licence, Théolo-
gie.
* BIBLIO , (Géog.) ville Se château de Portugal ;
à peu de dillance de Bragance.
BIBLIOGRAPHE, f.m. ce mot \ient du Grec,
Si lignifie une perfonne verlee dans la connoilïance
F'f ij
ai8 B I B
& le déchiffrement des anciens manufcrits fur l'é-
corce des arbres , fur le papier , & fur le parchemin.
S'caliger, Saumaile, Cafaubon , Sirmond,Petau, &
Mab filon , étoient habiles dans cette forte de fcien-
ce , à laquelle on donne le nom de bibliographie.
BIBLÏOMANE , f. m. c'efl un homme poffédé de
la fureur des livres. Ce caractère original n'a pas
échappé à la Bruyère. Voici de quelle manière il le
peint dans le chap. xiij. de fon livre des Caractères ,
où il paffe en revue bien d'autres originaux. Il feint
de fe trouver avec un de ces hommes qui ont la ma-
nie des livres ; & fur ce qu'il lui a fait comprendre
qu'il a une bibliothèque , notre auteur témoigne quel-
qu'envie de la voir. » Je vais trouver , dit-il , cet
» homme , qui me reçoit dans une maifon , où dès l'ef-
» calier je tombe en foibleiTe d'une odeur de maro-
» quin noir dont fes livres font tous couverts. Il a
» beau me crier aux oreilles, pour me ranimer, qu'ils
» font dorés fur tranche , ornés de filets d'or , & de
» la bonne édition , me nommer les meilleurs l'un
» après l'autre , dire que fa galerie eft remplie à quel-
» ques endroits près , qui font peints de manière ,
» qu'on les prend pour de vrais livres arrangés fur
» des tablettes , & que l'œil s'y trompe ; ajouter qu'il
» ne lit jamais, qu'il ne met pas lepié dans cette ga-
» lerie ; qu'il y viendra pour me faire plaiiir: je le
v remercie de fa complaifance , & ne veux, non plus
» que lui , vifiter fa tannerie , qu'il appelle bibliotke-
» que ». Un bibliomane n'eft donc pas un homme qui
fe procure des livres pour s'inftruire : il eft bien éloi-
gné d'une telle penfée , lui qui ne les lit pas feule-
ment. Il a des livres pour les avoir , pour en repaî-
tre fa vue ; toute fa feience fe borne à connoître s'ils
font de la bonne édition , s'ils font bien reliés : pour
les chofes qu'ils contiennent, c'eft un myftere auquel
il ne prétend pas être initié ; cela eft bon pour ceux
qui auront du tems à perdre. Cette poffeition qu'on
appelle bibliomanie , eft fouvent auffi difpendieufe
que l'ambition & la volupté. Tel homme n'a de bien
que pour vivre dans une honnête médiocrité , qui fe
réfutera le fimple néceflaire pour fatisfaire cette
paillon.
BIBLIOMANIE , f. f. fureur d'avoir des livres , &
d'en ramaffer.
M. Defcartes difoit que la Iedure étoit une con-
verfation qu'on avoit avec les grands hommes des
fiecles pafles , mais une converlation choifie , dans
laquelle ils ne nous découvrent que les meilleures de
leurs penfées. Cela peut être vrai des grands hom-
mes : mais comme les grands hommes font en petit
nombre, on auroit tort d'étendre cette maxime à
toutes fortes de livres & à toutes fortes de lectures .
Tant de gens médiocres & tant de lots même ont
écrit, que l'on peut en général regarder une grande
colledion de livres dans quelque genre que ce foit ,
comme un recueil de mémoires pour fervir à l'hit
toire de l'aveuglement & de la folie des hommes ; &
on pourroit mettre au-deflus de toutes les grandes
bibliothèques cette infeription philofophique : Les
petites maifons de Vefprit humain.
Il s'enfuit de-ià que i'ameur des livres , quand il
n'eft pas guidé par la Philoiophie Se par un efprit
éclairé , eft une des pafilons les plus ridicules. Ce fe-
roit à peu près la folie d'un homme qui entafferoit
cinq ou fix diamans fous un monceau de cail-
loux.
L'amour des livres n'eft eftimable que dans deux
cas; i°. lorfqu'on fait les eftimer ce qu'ils valent ,
qu'on les lit en philofophe , pour profiter de ce qu'il
peut y avoir de bon , & rire de ce qu'ils contiennent
de mauvais ; 2°. lorfqu'on les poflède pour les au-
tres autant que pour loi , & qu'on leur en lait part
avec plaifir & fans réferve. On peut fur ces deux
points propofer M. Fajconet pour modelé à tous
B I B
ceux qui poftedent des bibliothèques, ou qui en pof-
féderont à l'avenir.
J'ai oui dire à un des plus beaux efprits de ce
fiecle , qu'il étoit parvenu à fe faire , par un moyen
allez fingulier , une bibliothèque très-choifie , allez
nombreuie , & qui pourtant n'occupe pas beaucoup
de place. S'il achette , par exemple, un ouvrage en
douze volumes , où il n'y ait que fix pages qui méri-
tent d'être lues , il fépare ces fix pages du refte , Se
jette l'ouvrage au feu. Cette manière de former une
bibliothèque m'accommoderoit allez.
La pafiion d'avoir des livres eft quelquefois pouf-
fée jufqu'à une avarice très-fordide. J'ai connu un
fou qui avoit conçu une extrême pafiion pour tous
les livres d'Aftronomie , quoiqu'il ne lût pas un mot
de cette feience ; il les achetoit à un prix exorbitant,
&£ les renfermoit proprement dans une cafiette fans
les regarder. Il ne les eût pas prêté ni même laifle
voir à M. Halley ou à M. le Monnier , s'ils en eufient
eu beloin. Un autre faifoit relier les fiens très-pro-
prement ; & de peur de les gâter , il les empruntoit
à d'autres quand il en avoit befoin , quoiqu'il les eut
dans fa bibliothèque. Il avoit mis fur la porte de fa
bibliothèque , ite ad vendentes : aufii ne prêtoit-il
de livres à perfonne.
En général , la bibliomanie , à quelques exceptions
près , eft comme la pafiion des tableaux , des curio-
fités , des maifons ; ceux qui les pofledent n'en joiiif-
fent guère. Aufii un Philofophe eh entrant dans une
bibliothèque , pourroit dire de prefque tous les li-
vres qu'il y voit , ce qu'un philofophe difoit autre-
fois en entrant dans une maifon fort ornée , quant
multis non indigeo , que de chofes dont je n'ai que
faire! (O)
* BIBLIOTHECAIRE, f. m. celui qui eft prépofé
à la garde , au foin , au bon ordre , à l'accroifiement
des livres d'une bibliothèque. Il y a peu de fonctions
littéraires qui demandent autant de talens. Celle de
bibliothécaire d'une grande bibliothèque , telle , par
exemple, que celle du Roi, fuppofe la connoiflance
des langues anciennes & modernes , celle des livres ,
des éditions , &c de tout ce qui a rapport à l'hiftoire
des Lettres , au commerce de la Librairie , & à l'Art
typographique.
BIBLIOTHEQUE/, f.ce nom eft formé de tifixoç;
livre, 6c de Bûxti , th&cà , repojïtorium ; ce derniers mot
vient deTi'ôn/^i,pono, 6c fe dit de tout ce qui fert à
ferrer quelque choie. Ainfi bibliothèque , félon le fens
littéral de ce mot , fignifie un lieu deftiné pour y met-
tre des livres. Une bibliothèque eft un lieu plus ou
moins vafte , avec des tablettes ou des armoires où
les livres font rangés fous différentes clafles : nous
parlerons de cet ordre à l'article Catalogue.
Outre ce premier fens littéral , on donne aufii le
nom de bibliothèque à la collection même des livres.
Quelques auteurs ont donné, par exteniion & par mé«
taphore,lenomde£iM0r/zL'^z<!É à certains recueils qu'ils
ont faits, ou à certaines compilations d'ouvrages.Tel-
les font la bibliothèque rabbinique , la bibliothèque des
auteurs eccléfiaftiques , bibliotheca patrum , &c.
C'eft en ce dernier fens que les auteurs eccléfiafti-
ques ont donné par excellence le nom de bibliothèque
au recueil des livres infpirés , que nous appelions
encore aujourd'hui la bible, c'eft-à-dire , le livre par
excellence. En effet , félon le fentiment des critiques
les plus judicieux, il n'y avoit point de livres avant
le tems de Moyfe , & les Hébreux ne purent avoir de
bibliothèque qu'après fa mort : pour lors fes écrits fu-
rent recueillis &c confervés avec beaucoup d'atten-
tion. Par la fuite on y ajouta plufieurs autres ou-
vrages.
On peut diflinguer les livres des Hébreux , en li-
vres facrés , & livres profanes: le feul objet des pre-
miers étoit la religion; les derniers traitoient de la
B I B
I
philofophie naturelle , 8c des connoifTances civiles
ou politiques.
Les livres-facrés étoient cenfervés ou dans des en-
droits publics, ou dans des lieux particuliers : par
endroits publics , il faut entendre toutes les fynago-
gues , & principalement le temple de Jérufalem, où
i'on gardoit avec un refpcdl: infini les tables de pierre
fur lefquels Dieu avoit écrit fes dix commandemens ,
& qu'il ordonna à Moyfe de dépofer dans l'arche
d'alliance.
Outre les tables de la loi , les livres de Moyfe &
ceux des prophètes furent confervés dans la partie la
plus fecrete du fanftuaire , où il n'étoit permis à per-
sonne de les lire ni d'y toucher; le grand-prêtre feul
avoit droit d'entrer dans ce lieu facré , & cela feule-
ment une fois par an : ainfi ceslivres facrés furent à l'a-
bri des corruptions des interprétations ; auffi étoient-
ils dans ia fuite la pierre de touche de tous les autres ,
comme Moyfe le prédit au 3 ze. chapitre du Dcutéro-
nome , où il ordonna aux lévites de placer fes livres
au-cledans de l'arche.
Quelques auteurs croyent que Moyfe étant prêt à
mourir , ordonna qu'on fît douze copies de la loi ,
qu'il distribua aux douze tribus : mais Maimonidcs
aiîïire qu'il en fît faire treize copies , c'eft-à-dire dou-
ze pour les douze tribus, &c une pour les lévites , &c ,
qu'il leur dit à tous , en les leur donnant , receve^ le
livre de la loi que Dieu lui-même nous a donne. Les in-
terprètes ne font pas d'accord û ce volume facré fut
dépofé dans l'arche avec les tables de pierre , ou bien
dans un petit cabinet féparé.
Quoi qu'il en foit , Jofué écrivit un livre qu'il ajou-
ta enfuite à ceux de Moyfe. Jofué X IF. Tous les pro-
phètes firent auffi des copies de leurs fermons & de
leurs exhortations , comme on peut le voir au chapi-
tre xv. de Jérémie , & dans plusieurs autres endroits
de l'Ecriture : ces fermons &c ces exhortations furent
confervés dans le temple pour l'inftruâion de la pof-
térité.
Tous ces ouvrages compofoient une bibliothèque
plus eftimable par fa valeur intrinfeque , que par le
nombre des volumes.
Voilà tout ce qu'on fait de la bibliothequcfacrée qu' on
gardoit dans le temple : mais il faut remarquer qu'a-
près le retour des Juifs de la captivité de Babylone ,
Néhémie raffembla les livres de Moyfe , & ceux des
Rois &£ des Prophètes , dont il forma une bibliothèque ;
il fut aidé dans cette entreprife par Efdras, qi
fentiment de quelques-uns , rétablit le Pentatei'que ,
& toutes les anciennes écritures faintes qui avoient
été difperfées lorfque les Babyloniens prirent Jéruia-
lem , & brûlèrent le temple avec la bibliothèque qui y
étoit renfermée : niais c'eft furquoi les favans ne ibnt
pas d'accord, 'lia effet , c'eft un point très - difficile à
déci.
Quelques auteurs prétendent que cette bibliothè-
que fut de nouveau rétablie par Judas Machabéc,
parce que la plus grande partie en avoit été brûlée
par Antiochus , comme on lit chap.j. du premier Livre
des Macchabées. Quand même on conviendroit qu'elle
eût fubfifté jufqu'à la deftruclion du fécond temple,
on ne fauroit cependant déterminer le lieu où elle
était dépofée : mais il cft probable qu'elle eut le mê-
me fort que la ville. Car quoique Rabbi Benjamin af-
firme que le tombeajtfta prophète Ezéchiel avec la bi-
bliothèque dupremierVdu fécond temple, fe voyoient
encore de fon temsdansun lieu ntué fur les bords de
l'Euphratc; cependant ManafTés de Groningiie, &
pluiieurs autres perfonnes , dont on ne fauroit révo-
quer en doute le témoignage, &£ qui ont fait expies
le voyage de Méfopotarhie , affinent qu'il ne relie au-
cun vefnge de ce que prétend avoir vu Rabbi Benja-
min , & que dans tout le pays il n'y a ni tombeau ni
bibliothèque hébraïque.
119
Outre la grande bibliothèque , qui étoit confervéé
religieufement dans le temple , ii y en avoit encore
une dans chaque fynagogue. Actes des Apôtres , xv.
Luc iv. 16. 1 j. Les auteurs conviennent prefqu'una-
nnnement que l'académie de Jérufalem étoit compo-
fée de quatre cents cinquante fynagogues ou collè-
ges , dont chacune avoit fa bibliothèque , où l'on alloit:
publiquement lire les écritures faintes.
Après ces bibliothèques publiques qui étoient dans
le temple & dans les fynagogues , il y avoit encore
des bibliothèques facrées particulières. Chaque Juif en
avoit Une , puisqu'ils étoient tous obligés d'avoir les
livres qui regardoient leur religion,& même de tranf-
crire chacun de fa propre main une copie de la loi.
On voyoit encore des bibliothèques dans les célè-
bres univerfités , ou écoles des Juifs. Ils avoient auffi
pluiieurs villes fameufes par les feiences qu'on y cul-
tivoit, entr'autres celle que Jofué nomme la ville des
Lettres , & qu'on croit avoir été Cariatfepher , fituée
fur les confins de la tribu de Juda. Dans la fuite celle
de Tiberiadc ne fut pas moins fameufe par fon école :
& il eft probable que ces fortes d'académies n'étoient
point dépourvues de bibliothèques.
Depuis l'entière difperfion des Juifs à la ruine de
Jérufalem & du temple par Tite , leurs docteurs par-
ticuliers ou rabbins ont écrit prodigieufement , &
comme l'on fait, un amas de rêveries & de contes
ridicules : mais dans les pays où ils font tolérés & où
ils ont des fynagogues, on ne voit point dans ces lieux
d'afîemblées , d'autres livres que ceux de la loi : le
thalmud &lcs paraphrafes , non plus que les recueils
de traditions rabbiniques , ne forment point de corps
de bibliothèque.
Les Chaldéens & les Egyptiens étant les plus pro-
ches voifins de la Judée , furent probablement les
premiers que les Juifs inftruiiirent de leurs feiences ;
à ceux-là nous joindrons les Phéniciens & les Arabes.
Il eft certain que les Sciences furent portées à une
grande perfection par toutes ces nations , & fur-tout
par les Egyptiens , que quelques auteurs regardent
comme la nation la plus fa vante du monde, tant dans
la théologie payenne que dans la phyiique.
Il eft donc probable que leur grand amour pour
les lettres avoit produit de favans ouvrages &c de
nombreufes collections de livres.
Les auteurs ne parlent point des bibliothèques de la
Ch aidée ; tout ce qu'on en peut dire , c'eft qu'il y
avoit dans ce pays des favans en pluiieurs genres ,
Se fur-tout dans l'Aftronomie , comme il paroît par
une fuite d'obfervations de 1900 ans que Califthe-
nes envoya à Ariftote après la prife de Babylone par
Alexandre. Voye^ Astronomie.
Eufebe , de Prœp. evangel. dit que les Phéniciens
étoient très-curieux dans leurs collections de livres ,
mais que les bibliothèques les plus nombreufes & les
mieux choilies étoient celles des Egyptiens , qui fur-
paflbient toutes les autres nations en bibliothèques aufîi
bien ([n'en l'avoir.
Selon Diodorc de Sicile , le premier qui fonda une
bibliothèque en Egypte , fut Oiymandias , fucceffeur
de Prothée & contemporain de Priam roi de Troie.
Pierius dit que ce prince aimoit tant l'étude , qu'il fît
conftruirc une bibliothèque magnifique , ornée des fta-
tues de tous les dieux de l'Egypte, c'-: fur le frontif-
picc de laquelle il fit écrire ces mots , le Threjbr des re-
nie.!::; Je l'âme : mais ni Diodorc de Sicile ni les autres
hiftoriens ne difent rien du nombre de volumes qu'el-
le contenoit ; autant qu'on en peut juger elle ne pou-
voit pas être fort nombreufe , vu le peu de livres qui
exiftoient pour lors, qui étoient tous écrits par les
prêtres ; car pour ceux de leurs deux Mercures qu'on
1 :gardoit comme des ouvrages divins ,on ne lescon-
noît que de nom , & ceux de Manethon lont bien pof-
térieurs au tems dont nous parlons. 11 y avoit une très-.
230
B I B
belle bibliothèque à Memphis , aujourd'hui le grand
Caire , qui étoit dépofée dans le temple de Vulcain :
c'eft de cette bibliothèque que Naucrates aceufe Ho-
mère d'avoir volé l'Iliade 6c l'Odyfféc,& de les avoir
enfuite donnés comme les propres productions.
Mais la plus grande & la plus magnifique bibliothè-
que de l'E<*vpte, & peut-être du monde entier, étoit
celle des Ptolomées à Alexandrie ; elle fut commen-
cée par Ptolomée Soter , & compofée par les foins de
Demetrius de Phalere , qui fit rechercher à grands
frais des livres chez toutes les nations , & en forma ,
félon S. Epiphane , une colleclionde 54800 v*olumes.
Joiéphe djt qu'il y en avoit 200 mille , & que Deme-
trius efpéroit en avoir dans peu 500 mille ; cependant
Eufebe affûre qu'à la mort de Philadelphe , fucceffeur
de Soter , cette bibliothèque n'étoit compofée que de
cent mille volumes. Il eft vrai que fous fes fucceffeurs
elle s'augmenta par degrés , & qu'enfin on y compta
jufqu'à 700000 volumes : mais par le terme de volu-
mes , il faut entendre des rouleaux beaucoup moins
chargés que ne font nos volumes.
Il acheta dé Nelée , à des prix exorbitans , une
partie des ouvrages d'Ariftote , & un grand nombre
d'autres volumes qu'il fit chercher à Rome & à Athè-
nes , en Perle , en Ethiopie.
Un des plus précieux morceaux de fa bibliothèque
étoit l'Écriture fainte, qu'il fit dépofer dans le prin-
cipal appartement , après l'avoir fait traduire en grec
parles foixante-douze interprètes , que le grand-prê-
tre Eléazar avoit envoyés pour cet effet à Ptolomée ,
qui les avoit fait demander par Ariftée , homme très-
iavant & capitaine de fes gardes. ^ov^Septanje.
Un de fes fucceffeurs , nommé Ptolomée Phlfcon ,
prince d'ailleurs cruel , ne témoigna pas moins de
paffion pour enrichir la bibliothèque d'Alexandrie. On
raconte de lui , que dans un tems de famine il refufa
aux Athéniens les blés qu'ils avoient coutume de ti-
rer de l'Egypte , à moins qu'ils ne lui remiffent les
originaux des tragédies d'Efchyle , de Sophocle , &
d'Euripide , & qu'il les garda en leur en renvoyant
feulement des copies fidèles , & leur abandonna quin-
ze talens qu'il avoit confignés pour sûreté des origi-
naux.
Tout le monde fait ce qui obligea Jules Céfar , af-
fiégé dans un quartier d'Alexandrie , à faire mettre
le feu à la flotte qui étoit dans le port: malheureufe-
ment le vent porta les flammes plus loin que Céfar
ne vouloit ; & le feu ayant pris aux maifons voifmes
du grand port , le communiqua de-là au quartier de
Bruchion , aux magalins de blé & à la bibliothèque qui
en faifoient partie , & caufa l'embrafement de cette
fameufe bibliothèque.
Quelques auteurs croyent qu'il n'y en eut que
400000 volumes de brûlés , & que tant des autres
livres qu'on put fauver de l'incendie que des débris
de la bibliothèque des rois de Pergame , dont 200000
volumes furent donnés à Cléopatre par Antoine , on
forma la nouvelle bibliothèque du Serapion , qui de-
vint en peu de tems fort nombreule. Mais après di-
verfes révolutions fous les empereurs Romains , dans
lefquelles la bibliothèque fut tantôt pillée & tantôt ré-
tablie ; elle fut enfin détruite l'an 6 50 de Jefus-Chrift ,
qu'Amry , général des Sarrafins, fur un ordre du ca-
life Omar , commanda que les livres de la bibliothè-
que d'Alexandrie fuffent diftribués dans les bains pu-
blics de cette ville , & ils fervirent à les chauffer pen-
dant fix mois.
La bibliothèque des rois de Pergame dont nous ve-
nons de parler , fut fondée par Eumenes & Attalus.
Animés par un efp'rit d'émulation , ces princes firent
tous leurs efforts pour égaler la grandeur & la magni-
ficence des rois d'Egypte , & fur-tout en amaffant un
nombre prodigieux de livres , dont Pline dit que le
nombre étoit de plus de deux cents mille. Volaterani
B I B
dit qu'ils furent tous brûlés à la prife de Pergame ;
mais Pline & plufieurs autres nous afïurent que Marc
Antoine les donna à Cléopatre , ce qui ne s'accorde
pourtant pas avec le témoignage de Strabon , qui dit
que cette bibliothèque étoit à Pergame de fon tems ,
c'eft-à-dire, fous le règne de Tibère. On pourroit
concilier ces différens hilloriens , en remarquant qu'il
eft vrai que Marc Antoine avoit fait tranfporter cette
bibliothèque de Pergame à Alexandrie , & qu'après la
bataille d'Actium , Augufte , qui fe plaifoit à défairo
tout ce qu'Antoine avoit fait , la fit reporter à Per-
game. Mais ceci ne doit être pris que fur le pié d'une
conjecture , aufîi-bien que le fentiment de quelques
auteurs , qui prétendent qu'Alexandre le grand en
fonda une magnifique à Alexandrie , qui donna lieu
par la fuite à celle des Ptolomées.
Il y avoit une bibliothèque conlidérable à Suze en
Perfe , où Métofthenes confulta les annales de cette
monarchie , pour écrire Fhiftoire qu'il nous en a laif-
fée. Diodore de Sicile parle de cette bibliothèque ;
mais on croit communément qu'elle contenoit moins
des livres de feiences , qu'une collection des lois , des
chartes , & des ordonnances des rois. C'étoit un dé-
pôt femblable à nos chambres des comptes.
Nous ne favons rien de pofitif fur l'hiftoire de
, Grèce , avant les guerres de Thebes &c de Troie. II
feroit donc inutile de chercher des livres en Grèce
avant ces époques.
Les Lacédémoniens n'avoient point de livres ; ils
exprimoient tout d'une façon fi concife oc en li peu
de mots , que l'écriture leur paroiffoit fuperflue , puif-
que la mémoire leur fùffifoit pour fe fouvenir de tout
ce qu'ils avoient befoin de favoir.
Les Athéniens , au contraire , qui étoient grands
parleurs, écrivirent beaucoup ; & dès que les Scien-
ces eurent commencé à fleurir à Athènes , la Grèce
fut bientôt enrichie d'un grand nombre d'ouvrages
de toutes efpeces. Val. Maxime dit , que le tyran Py-
fiftrate fut le premier de tous les Grecs qui s'avifa de
faire un recueil des ouvrages des favans ; en quoi la
politique n'eut peut-être pas peu de part ; il vouloit
en fondant une bibliothèque pour Pillage du public ,
gagner l'amitié de ceux que la perte de leur liberté
faifoit gémir fous fon ufurpation. Cicéron dit , que
c'eft à Pyfiftrate que nous avons l'obligation d'avoir
raffemblé en un feul volume les ouvrages d Homère ,
qui fe chantoient auparavant par toute la Grèce par
morceaux détachés & fans aucun ordre. Platon attri-
bue cet honneur à Hipparque, fils de Pyfiftrate. D'au-
tres prétendent que ce fut Solon ; & d'autres rappor-
tent cette précieufe collecuon à Lycurgue & à Zeno-
dote d'Ephefe.
Les Athéniens augmentèrent considérablement
cette bibliothèque après la mort de Pyfiftrate , & en
fondèrent même d'autres : mais Xercès , après s'être
rendu maître d'Athènes , emporta tous leurs livres en
Perfe. Il eft vrai que fi on en veut croire Aulugelle ,
Seleucus Nicator les fit rapporter en cette ville quel-
ques fiecles après.
Zuringer dit , qu'il y avoit alors une bibliothèque
magnifique dans l'île de Cnidos , une des Cyclades:
qu'elle fut brûlée par l'ordre d'Hippocrate le Méde-
cin ; parce que les habitans refuferent de fuivre fa
doûrine. Ce fait au refte n'eft pas trop avéré.
Cléarque , tyran d'Héraclé^C difciple de Platon
& d'Ifocrate , fonda une blbllofàque dans fa capitale ;
ce qui lui attira l'e'ftime de tous fes fujets , malgré
toutes les cruautés qu'il exerça contre eux.
Camérarius parle de la bibliothèque d'Apamée com-
me d'une des plus célèbres de l'antiquité. Angélus
Rocha , dans fon catalogue de la bibliothèque du Va-
tican , dit qu'elle contenoit plus de 20000 volumes.
Si les anciens Grecs n'avoient que peu de livres,'
les anciens Romains en avoient encore bien moins.
B I B
Par la fuite ils eurent , auffi bien que les Juifs , deux
fortes de bibliothèques , les unes publiques , les autres
particulières. Dans les premières étoient les édits 6c
les lois touchant la police & le gouvernement de l'é-
tat : les autres étoient celles que chaque particulier
formoit clans fa maifon , comme celle que Paul Emile
apporta de Macédoine après la défaite de Perlée.
Il y avoit auffi des bibïiothzques iàcrées qui regar-
doient la religion des Romains , 6c qui dépendoient
entièrement des pontifes 6c des augures. Pour les li-
vres dont elles étoient conipolées , voye^ Livre.
Voilà à-peu-près ce que les auteurs nous appren-
nent touchant les bibliothequespubÏKiucsdtîs Romains.
À l'égard des bibliothèques particulières , il eft certain
qu'aucune nation n'a eu plus d'avantages ni plus d'oc-
cafions pour en avoir de très-confidérables , puifque
les Romains étoient les maîtres de la plus grande
partie du monde connu pour lors.
LTiiftoire nous apprend qu'à la prife de Carthage ,
le fénat fit préfent à la famille de Regulus de tous les
livres qu'on avoit trouvés dans cette ville , 6c qu'il
fit traduire en Latin 18 volumes , compotes par Ma-
gon, Carthaginois, fur l'agriculture.
Plutarque affûre que Paul Emile diftribua à fes
enfans la bibliothèque de Perlée , roi de Macédoine ,
qu'il mena en triomphe à Rome. Mais Ifidore dit po-
litivement , qu'il la donna au public. Afinius Pollion
fit plus, car il fonda une bibliothèque exprès pour l'u-
fage du public , qu'il compofa des dépouilles de tous
les ennemis qu'il avoit vaincus , & de grand nombre
<le livres de toute efpece qu'il acheta : il l'orna de
portraits de lavans , & entr'autres de celui de Varron.
Varron avoit auffi une magnifique bibliothèque.
Celle de Cicéron ne devoit pas l'être moins , fî on
fait attention à lbn érudition , à ion goût , 6c à fon
rang: mais elle fut conlidérablcrnent augmentée par
celle de fon ami Atticus , qu'il préféroit à tous les
thréfors de Créfus.
Plutarque parle de la bibliothèque de Lucullus com-
me d'une des plus coniidérables du monde , tant par
rapport au nombre de volumes , que par rapport aux
fuperbes ornemens dont elle étoit décorée.
La bibliothèque de Céfar étoit digne de lui , &rien
ne pouvoit contribuer davantage à lui donner delà
réputation , que d'en avoir confié le foin au lavant
Varron.
V.i.'iiite fonda une belle bibliothèque proche du
temple d'Apollon , furie mont Palatin. Horace ,Ju-
vénal , & Perle , en parlent comme d'un endroit où
les poète1, avoient coutume de réciter & de dépoter
leuis ouvrages :
Scripta Palatinus quœcunqtu recepit Apollo ,
d
Vefpafien fonda une bibliothèque proche le temple
de la Paix , à l'imitation de Célar & d'Augulie.
Mais la plus magnifique de toutes ces anciennes
bibliothèques , étoit celle de Traj.in , qu'il appella de
fon propre nom , la bibliothèque Ulpienne : elle fut
fondée pour l'ufage du public ; tk félon le cardinal
Volaterani , l'empereur y avoit fait écrire toutes les
belles actions des princes & les décrets du fénat, fur
des pièces de belle toile , qu'il fit couvrir d'ivoire.
Quelques auteurs afïïirent que Trajan fit porter à
Rome îous les livres qui le trouvoient dans les villes
conquiîcs , pour augmenter fa bibliothèque : il eit pro-
bable que Pline le jeune,lbn favori, l'engagea à l'en-
richir de la lorte.
Outre celles dont nous venons de parler , il y avoit
encore à Rome une bibliothèque conlidérable , fondée
par Simonicus , précepteur de l'empereur Gordien.
Ifidore &C Boece en font des éloges extraordinaires:
ils difent qu'elle contenoit 80000 volumes choilis ;
& que l'appartement qui la renfermoit ; étoit pavé
B I B
23I
de marbre doré , les murs lambriffés de glaces & d'i-
voire ; 6c les armoires &C pupitres , de bois d'ébene
& de cèdre.
Les premiers Chrétiens occupés d'abord unique-
ment de leur falut , bridèrent tous les livres qui n'a-
voient point de rapport à la religion. Ailes des Apô-
tres ... Ils eurent d'ailleurs trop de difficultés à com-
battre pour avoir le tems d'écrire 6c de fe former des
bibliothèques. Ils confervoient feulement dans leurs
églifes les livres de l'ancien 6c du nouveau Tefta-
ment , auxquels on joignit par la fuite les actes des
martyrs. Quand un peu plus de repos leur permit de
s'adonner aux Sciences , il fe forma des bibliothèques.
Les auteurs parlent avec éloge de celles de S. Jérô-
me , 6c de George, évêque d'Alexandrie.
On en voyoit une célèbre à Céfarée , fondée par
Jules l'Africain , & augmentée dans la fuite par Eu-
febe , évêque de cette ville , au nombre de 20000 vo-
lumes. Quelques-uns en attribuent l'honneur à faint
Pamphile , prêtre de Laodicée , & ami intime d'Eu-
iebe ; & c'eit ce que cet hiltorien femble dire lui-mê-
me. Cette bibliothèque fut d'un grand fecours à S. Jé-
rôme , pour l'aider à corriger les livres de l'ancien
Teltament : c'ell-là qu'il trouva l'évangile de S. Mat-
thieu en Hébreu. Quelques auteurs dilent que cette
bibliothèque fut difperfée , '6c qu'elle fut enfuite réta-
blie par S. Grégoire de Nazianze , 6c Eulebe.
S. Augultin parle d'une bibliothèque d'Hippone.
Celle d'Antioche étoit très- célèbre : mais l'empe-
reur Jovien , pour plaire à la femme, la fit mal-
heureufement détruire. Sans entrer dans un plus
grand détail fur les bibliothèques des premiers Chré-
tiens, il fuffira de dire que chaque égiile avoit la bi-
bliothèque pour l'ufage de ceux qui s'appliquoient aux
études. Eufebe nous l'attelle: 6c il ajoute , que pref-
que toutes ces bibliothèques , avec les oratoires où
elles étoient confervées , furent brûlées & détruites
par Dioclétien.
Paflbns maintenant à des bibliothèques plus confi-
dérables que celles dont nous venons de parler ; c'elt-
à-dire , à celles qui furent fondées après que le Clirif-
tianifme fut affermi fans contradiction. Celle de Conf-
tantin-le-Grand , fondée, lelon Zonaras, l'an 336,
mérite attention : ce prince voulant réparer la perte
que le tyran fon prédécelTeur avoit caulée aux Chré-
tiens , porta tous fes foins à faire trouver des copies
des livres qu'on avoit voulu détruire. Il les fit tranf-
crire , 6c y en ajouta d'autres, dont il forma à grands
frais une nombreufe bibliothèque à Conftantinople.
L'Empereur Julien voulut détruire cette bibliothèque
& empêcher les Chrétiens d'avoir aucuns livres, afin
de les plonger dans l'ignorance. Il fonda cependant
lui-même deux grandes bibliothèques , l'une à Conl-
tantinople , & l'autre à Antioche , fur les frontifpi-
ces desquelles il fit graver ces paroles : Alii quidem.
equos amant , alii aves , alii feras ; mihi verb à puerulo
mirandum acquirendi & pojjîdendi libros infedit dejide-
rium.
Théodofele jeune ne fut pas moins foigneux à aug-
menter la bibliothèque de Conltantin -le -Grand : elle
ne contenoit d'abord que 6000 volumes : mais par
fes foins 6c fa magnificence , il s'y en trouva en peu
de tems 1 00000. Léon l'Iiaurien en fit brider plus de
la moitié, pour détruire les monumens qui ai
pu dépofer contre fon herelie fur le culte des image-..
C'eft dans cette bibliothèque que fut dépofée la copie
authentique du premier concile général de
On prétend que les ouvrages d'Homère y étoient auffi
écrits en lettres d'or, 6c qu'ils furent brûles loi (que
les Iconoclaltesdétruifiren't cette bibliotheque.il y a\ oit
auffi une copie de; e\ angiles , félon quelques auteur?,
reliée en plaques d'or du poids de quinze h\
enrichie de pierre
Les nation* barbares qui inondèrent l'Europe , dé-
231
B I B
truifirent les bibliothèques & les livres en général ; leur
fureur fat prefque incroyable , & a caufé la perte ir-
réparable d'un nombre infini d'excellens ouvrages.
Le premier de cestems-là qui eut du goût pour les
lettres, futCafîîodore, favori &£ miniftre de Théo-
doric, roi des Goths qui s'établirent en Italie, & qu'on
nomma communément Ojlrogots. Cafliodore fatigué
du poids du miniftere , le retira dans un couvent qu'il
fit bâtir , où il conlacra le refte de lés jours à la prière
& à l'étude. Il y fonda une bibliothèque pour l'ufage
des moines , compagnons de fa folitude. Ce fut à-
peu-près dans le même tems que le pape Hilaire , pre-
mier du nom , fonda deux bibliothèques dans l'égliie de
Saint-Etienne ; & que le pape Zacharie I. rétablit celle
de Saint-Pierre , félon Platine.
Quelque tems après, Charlemagne fonda la fien-
ne à l'Ifle-barbe près deLyon.Paradin dit, qu'il l'en-
richit d'un grand nombre de livres magnifiquement
reliés ; & Sabellicus , auffi-bien que Palmerius , aliù-
rent qu'il y mit entr'autres un manuient des œuvres
de S. Denys , dont l'empereur de Conltantinople lui
avoit fait prélent. Il fonda encore en Allemagne plu-
sieurs collèges avec des bibliothèques , pour l'inftruc-
tion de la jeunelTe : entr'autres une à Saint- Gai en
SuiiTe , qui étoit fort eftimée. Le roi Pépin en fonda
une à Fulde par le conleii de S. Boniface , l'apôtre de
l'Allemagne : ce fut dans ce célèbre monaftere que
Raban-Maur & Hildebert vécurent & étudièrent
dans le même tems. Il y avoit une aune bibliothèque
à la Wriiîen près de "Worms : mais celle que Char-
lemagne fonda dans l'on palais à Aix - la - Chapelle ,
furpaffa toutes les autres ; cependant il ordonna avant
de mourir qu'on la vendît , pour en dift ribuer le prix
aux pauvres. Louis le Débonnaire Ion fils , lui luc-
céda à l'empire & à ion amour pour les Arts & les
Sciences , qu'il protégea de tout l'on pouvoir.
L'Angleterre , & encore plus l'Irlande, pofTédoient
alors de lavantes & riches bibliothèques , que les incur-
sions fréquentes des habitans du Nord détruifirent
dans la fuite : il n'y en a point qu'on doive plus re-
gretter que la grande bibliothèque fondée à York par
Egbert, archevêque de cette ville ; elle fut brûlée
avec la cathédrale , le couvent de Sainte -Marie, &
plufieurs autres maifons religieufes , fous le roi Etien-
ne. Alcuin parle de cette bibliothèque dans fon épître
à l'égliie d'Angleterre.
Vers ces tems , un nommé Gauthier ne contribua
pas peu par l'es foins & par l'on travail à fonder la bi-
bliothèque du monaftere de Saint-Alban , qui étoit très-
confidérable : elle fut pillée aulïï-bien qu'une autre ,
par les piratés Danois.
La bibliothèque formée dans le xn.fiecle par Richard
de Burg, évoque de Durham, chancelier & thréforier
de l'Angleterre , fut auffi fort célèbre. Ce l'avant pré-
lat n'omit rien pour la rendre aufîi complète que le
permettoit le malheur des tems; & il écrivit lui-même
un traité intitulé Philobiblion , fur le choix des livres
& fur la manière de former une bibliothèque. Il y re-
préfente les livres comme les meilleurs précepteurs ,
en s'exprimant ainfi : Hifunt magijlri, qui nos injlruunt
fine virgis & ferulis , fine choiera , fine pecunià : fi ac-
cedis, non dormiunt ;fi inquiris, nonfe abfcondunt ; non
obmurmurant ,fi oberres ; cachinnos nejciunt ,fi ignores.
L'Angleterre poffede encore aujourd'hui des bi-
bliothèques tres-riches en tout genre de littérature &
en manulcrits fort anciens. Celle dont on parle le
plus,eftla célèbre bibliothèque Bodleiene d'Oxford,
élevée , fi l'on peut le fervir de ce terme , fur les fon-
demens de celle du duc Humphry. Elle commença
à être publique en 1602 , &. a été depuis prodigieu-
fement augmentée par un grand nombre de bienfai-
teurs. On allure qu'elle l'emporte fur celles de tous
les louverains 6i de toutes les univerfités de l'Euro-
B I B
pe , fi l'on en excepte celle du Roi à Paris , celle de
l'Empereur à Vienne , & celle du Vatican.
Il lemble qu'au XIe fiecle les ScieHces s'étoient
réfugiées auprès de Conftantin Porphyrogenete ,
empereur de Conftantinople. Ce grand prince étoit
le protecteur des mufes , &c les fujets à Ion exemple
cultivèrent les Lettres. Il parut alors en Grèce plu-
fieurs favans , & l'empereur toujours porté à chérir
les Sciences , employa des gens capables à lui raf-
fembler de bons livres , dont il forma une bibliothè-
que publique , à l'arrangement de laquelle il travail-
la lui-même. Les chofes furent en cet état jufqu'à ce
que les Turcs le rendirent maîtres de Conftantino-
ple ; auiTi-tôt les Sciences forcées d'abandonner la
Grèce , le réfugièrent en Italie , en France , & en
Allemagne , oii on les reçût à bras ouverts ; & bien-
tôt la lumière commença à le répandre fur le refte
de l'Europe , qui avoit été enfevelie pendant long-
tems dans l'ignorance la plus groffiere.
La bibliothèque des empereurs Grecs de Conftan-
tinople n'avoit pourtant pas péri à la prile de cette
ville par Mahomet II. Au contraire ce l'ultan avoit
ordonné très-expreffément qu'elle fût confervée , &
elle le fut en effet dans quelques appartemens du fé-
rail jufqu'au règne d'Amurath IV. que ce prince,
quoique Mahométan peu fcrupuleux , dans un vio-
lent accès de dévotion , facrifia tous les livres de la
bibliothèque à la haine implacable dont il étoit ani-
mé contre les Chrétiens. C'eft - là tout ce qu'en put
apprendre M. l'abbé Sevin , lorfque par ordre du roi
il rit en 1719 le voyage de Conftantinople , dans l'ef-
pérance de pénétrer jufque dans la bibliothèque du
grand-feigneur, & d'en obtenir des manulcrits pour
enrichir celle du Roi.
Quant à la bibliothèque du férail , elle fut commen-
cée par le fultan Selim , celui qui conquit l'Egypte,
& qui aimoit les Lettres : mais elle n'eft compoiée
que de trois ou quatre mille volumes, Turcs, Ara-
bes, ou Perfans, fans nul manuferit Grec. Le prince
de Valachie Maurocordato avoit beaucoup recueilli
de ces derniers , & il s'en trouve de répandus dans
les monafteres de la Grèce : mais il paroît par la re-
lation du voyage de nos Académiciens au levant ,
qu'on ne fait plus guère de cas aujourd'hui de ces
morceaux précieux, dans un pays où les Sciences &
les beaux Arts ont fleuri pendant fi long-tems.
Il eft certain que toutes les Nations cultivent les
Sciences les unes plus, les autres moins; mais il n'y
en a aucune où le lavoir l'oit plus eftimé que chez
les Chinois. Chez ce peuple on ne peut parvenir au
moindre emploi qu'on ne l'oit favant , du moins
par rapport au commun de la nation. Ainfi ceux qui
veulent figurer dans le monde font indifpenfable-
ment obligés de s'appliquer à l'étude. Il ne fuffit pas
chez eux d'avoir la réputation de favant , il faut l'ê-
tre réellement pour pouvoir parvenir aux dignités
& aux honneurs ; chaque candidat étant obligé de
fubir trois examens très-féveres , qui répondent à nos
trois degrés de bachelier, licentié, &: doefeur.
De cette nécelîité d'étudier il s'enfuit, qu'il doit
y avoir dans la Chine un nombre infini de livres
& d'écrits; & par conféquent que les gens riches
chez eux doivent avoir formé de grandes biblio-
thèques.
En effet , les hiftoriens rapportent qu'environ deux
cents ans avant J. C. Chingius , ou Xius , empereur
de la Chine , ordonna que tous les livres du royau-
me ( dont le nombre étoit prefqu 'infini ) lùiï'ent brû-
lés , à l'exception de ceux qui traitoient de la méde-
cine , de l'agriculture , & de la divination , s'imagi-
nant par-là faire oublier les noms de ceux qui l'a-
voient précédé , & que la poftérité ne pourroit plus
parler que de lui. Ses ordres ne furent pas exécutés
avec tant de loin, qu'une femme ne pût fauver les
ouvrages
B I B
ouvrages de Mentais , de Confucius furnommé le
Socrate de la Chine , &c de plufieurs autres, dont elle
colla les feuilles contre le mur de la. mailon , où elles
relièrent jufqu'à la mort du tyran.
C'elt par cette railon que ces ouvrages pafîent
pour être les plus anciens de la Chine , 6c fur-tout
ceux de Confucius pour qui ce peuple a une extrê-
me vénération. Ce philofophe lailTa neuf livres qui
font , pour ainfi dire , la fource de la plupart des ou-
vrages qui ont paru depuis Ion tems à la Chine , &
qui ibnt ii nombreux, qu'un feigneur de ce pays (au
rapport du P. Trigault ) s'étant fait Chrétien , em-
ploya quatre jours à brûler fes livres , afin de ne rien
garder qui fentît les fuperltitions des Chinois. Spizel-
lius dans Ion livre de re litteraria Sinenfium , dit qu'il
y a une bibliothèque fur le mont Lingumen de plus
de 30 mille volumes , tous compofés par des auteurs
Chinois , & qu'il n'y en a guère moins dans le tem-
ple de Veachung , proche l'Ecole royale.
Il y a plufieurs belles bibliothèques au Japon ; car
les voyageurs alîïirent qu'il y a dans la ville de Na-
rad un temple magnifique qui elt dédié à Xaca , le
fage, le prophète, &le légiflateurdu pays; & qu'au-
pie ;de ce temple les bonzes ou prêtres ont leurs ap-
partciuens , dont un elt lbûtenu par 24 colonnes, &
contient une bibliothèque remplie de livres du haut
en bas.
Tout ce que nous avons dit eft peu de chofe en
comparaifon de la bibliothèque qu'on dit être dans le
monalTere de la Sainte-Croix, fur le mont Amara
en Ethiopie. L'hiftoire nous dit qu'Antoine Brieus &c
Laurent de Crémone furent envoyés dans ce pays
par Grégoire XIII. pour voir cette fameufe biblio-
thèque , qui elt divilée en trois parties , & contient
en tout dix millions cent mille volumes , tous écrits
fur de beau parchemin , & gardés dans des étuis de
foie. On ajoute que cette bibliothèque doit Ion origi-
ne à la reine de Saba , qui vifita Salomon , & reçut
de lui un grand nombre de livres , particulièrement
ceux d'Enoch fur les élémens , & fur d'autres fujets
ph'i olophiques , avec ceux de Noé fur les fujets de
Mathématique &C fur le Rit facré;&: ceux qu'Abraham
compofa dans la vallée de Mambré , oii il enfeigna la
Philofophie à ceux qui l'aidèrent à vaincre les rois
qui avoient fait prifonnier fon neveu Lot, avec les
livres de Job , 6c d'autres que quelques-uns nous al-
fùrcnt être clans cette bibliothèque , aulîi bien que les
livres d'Efdras , des Sibylles , des Prophètes 6c des
grands prêtres des Juifs , outre ceux qu'on fuppofe
avoir été écrits par cette reine 6c par ion fils Mémi-
lech , qu'on prétend qu'elle eut de Salomon. Nous
rapportons ces opinions moins pour les adopter , que
pour montrer que de très-habiles gens y ont donné
leur créance , tels que le P. Kircher. Tout ce qu'on
peut dire des Ethiopiens , c'elt qu'ils ne le fondent
guère de la littérature profane , 6c par conféquent
qu'ils n'ont guère de livres Grecs ni Latins fur des
lujets hiltoriques ou philofophiques ; car ils ne s'ap-
pliquent qu'à la littérature facrée , qui tut d'abord
extraite de livres Grecs, & enfuite traduite dans leur
langue. Ils font fchifmatiques & fectateurs d'Euty-
chès & de Neltorius. Voye^ Eutychiens, Nesto-
RIENS.
Les Arabes d'aujourd'hui ne connoilfent nullement
les lettres : mais vers le dixième fiecle , & fur -tout
fous le règne d'Almanzor, aucun peuple ne les cul-
tivoit avec plus de luccès qu'eux.
Après l'ignorance qui régnoit en Arabie avant le
tems de Mahomet, le calife Almamon fut le premier
qui tit revivre les fciences chez les Arabes : il fit tra-
duire en leur langue un grand nombre des livres
qu'il avoit forcé Michel III. empereur de Conltanti-
nople , de lui laitier choilir de fa bibliothèque 6c par
tout l'empire , après l'avoir vaincu dans une baïaÛle.
Tome H.
B I B
a33
Le roi ManzOr ne fut pas moins alïidu à cultivei
les lettres. Ce grand prince fonda plufieurs écoles
& bibliothèques publiques à Maroc , où les Arabes le
vantent d'avoir la première copie du code de Jufti-
nien.
Eupennas dit que la bibliothèque de Fez elt compo-
fée de 31 mille volumes ; 6c quelques-uns prétendent
que toutes les décades de Tite-Live y font , avec les
ouvrages de Pappus d'Alexandrie , fameux Mathé-
maticien ; ceux d'Hippocrate , de Galien , & de plu-
fieurs autres bons auteurs , dont les écrits ou ne font
pas parvenus jufqu'à nous , ou n'y font parvenus que
très-imparfaits.
Selon quelques voyageurs il y a à Gaza une autre
belle bibliothèque d'anciens livres , dans la plupart
defquels on voit des figures d'animaux & des chiffres,
à la manière des Egyptiens ; ce qui fait préfumer que
c'elt quelque relie de la bibliothèque d'Alexandrie.
II y a une bibliothèque à Damas , oii François Rofa
de Ravenne trouva la philofophie myftique d'Arif-
tote en Arabe , qu'il publia dans la fuite.
On a vu par ce que nous avons déjà dit , que la bi-
bliothèque des empereurs Grecs n'a point été conler-
vée, & que celle des fultans elt très-peu de chofe; ainli
ce qu'on trouve à cet égard dans Baudier, & d'au-
tres auteurs qui en racontent des merveilles , ne doit
point prévaloir fur le récit fimple &: lincere qu'ont
fait fur Iemêmefujet les favans judicieux qu'on avoit
envoyés à Conftantinople , pour tenter s'il ne fieroit
pas pofîible de recueillir quelques lambeaux de ces
précieufes bibliothèques. D 'ailleurs , le mépris que les
Turcs en général ont toujours témoigné pour les
fciences des Européens , prouve allez le peu de cas
qu'ils feroientdes auteurs Grecs & Latins : mais s'ils
les avoient eus en leur pofTefîion, on ne voit pas
pourquoi ils auroient refiilé de les communiquer à
la requifition du premier prince de l'Europe.
Il y avoit anciennement une très-belle bibliothèque.
dans la ville d'Ardu-il en Perfe , 011 réfiderent les
Mages , au rapport d'Oléarius dans Ion Itinéraire. La
Boulaye le Goux dit que les habitans de Sabea ne le
fervent que de trois livres , qui font le livre d'Adam,
celui du Divan , & l'Alcoran. Un écrivain Jéfuite
alTùrc aufîi avoir vît une bibliothèque luperbe à Al-
ger.
L'ignorance des Turcs n'eft pas plus grande que
n'eft aujourd'hui celle des Chrétiens Grecs , qui ont
oublié jufqu'à la langue de leurs pères, l'ancien Grec.
Leurs évêquesleur défendent la lecture des auteurs
Payens , comme fi c'étoit un crime d'être lavant ; de
forte que toute leur étude eft bornée à la lecture des
aftes des fept fynodes de la Grèce , & des œuvres de
faintBafile,de faint Chryfoftome, èede faim Jean de
Damas. Ils ont cependant nombre de bibliothèques t
mais qui ne contiennent que des manuferits , l'im-
prelfion n'étant point en ulage chez eux. Ils ont une
bibliothèque fur le mont Athos , & plufieurs autres où
il y a quantité de manuferits , mais très-peu de livres
imprimés. Ceux qui voudront l'avoir quels font les
manuferits qu'on a apportés de chez les Grecs en
Fiance , en Italie, & en Allemagne, & ceux qui rel-
tent encore à Conlîantinople entre les mains de par-
ticuliers, 6c dans l'île de Pathmos, & les autres des
de l'Archipel, dans le monaftere de fainte Baûle à
Caffa , anciennement Théodolia , dans la Tartane
Crimée , & dans les autres états du grand-Turc , peu-
vent s'initruirc à fond dans l'excellent traité du père
Poitevin , intitulé cpparatus facer, 6c dans la relation
du voyage que tit M. l'abbé Sevin à Conlt.mtmople
en 1729 : elle elt inférée dans les Mémoires Je l'aca-
démie des Belles-Lettres , tome l 11.
Le grand nombre des bibliothèques, tant publiques que
particulières, qui font aujourd'hui un des principaux
Qrnemens de l'Europe, nous entraineroit dans un de-.
*34
B I B
tail que ne nous permettent pas les bornes que nous
nous fommes preferites dans cet ouvrage. Nous nous
contenterons donc d'indiquer les plus confidérables ,
foit par la quantité , foit par le choix des livres qui
les compofent.
De ce nombre font à Copenhague la bibliothèque
de l'univerlité, & celle qu'y a fondée Henri Rant-
zau, gentilhomme Danois.
Celle que Chriftine , reine de Suéde, fonda à Stoc-
kholm, dans laquelle on voit, enîr'autres curiofités,
une des premières copies de l'Alcoran ; quelques-uns
veulent même que ce foit l'original qu'un des fultans
Turcs ait envoyé à l'empereur des Romains : mais
cela ne paroît guère probable.
La Pologne r»e manque pas de bibltotheqv.es ; il y
en a deux très-confidérables , l'une à Vilna , fondée
par planeurs rois de Pologne, félon Cromer & Bo-
zuis , & l'autre à Cracovie.
Quant à la Ruffic , il eft certain qu'à l'exception
de quelques trahésfur la religion en langue Scîavon-
ne, il n'y avoit aucun livre de Sciences, & même
prefque pas l'ombre de Littérature avant le Czar
Pierre I. qui , au milieu des armes , faifoit fleurir les
Arts & ies Sciences , & fonda plufieurs académies en
différentes parties de fort empire. Ce grand prince fit
un fonds très-a nfidérable pour la bibliothèque de Ion
académie de Pt iersbourg , qui eft très-fournie de li-
vres dans toutes fortes de Sciences.
La bibliothèque royale dePetershofeftune des plus
belles de l'Europe ; &c le cabinet de bijoux 6c de cu-
riofités eft ineftimable.
La bibliothèque publique d'Amfterdam feroit beau-
coup plus utile , fi les livres y étoient arrangés avec
plus d'ordre & de méthode : mais le malheur eft qu'on
ne fauroit les trouver fans une peine extrême. La col-
lection eft au reite très-eftimable.
Il y en a dans les Pays-bas plufieurs autres fort cu-
rieufes, telles que celles des Jéfuites &des Domini-
cains à Anvers. Celle des moines de faint Pierre à
Gand, celle de Dunkerque , celle de Gemblours
abondante en anciens manuferits , auxquels Erafme
& plufieurs autres favans ont fouvent eu recours.
Celles d'Hardenvick,d'Ypres, de Liège, deLouvain,
de Leyde, &c.
Il y a deux bibliothèques publiques à Leyde ; l'une
fondée par Antoine Thilius ; l'autre , qui eft celle de
l'univerlité , lui a été donnée par Guillaume I. prin-
ce d'Orange. Elle eft fort eftimée par les manuferits
Grecs, Hébraïques , Chaldéens, Syriaques, Perfans,
Arméniens, & Ruftiens, que Jofeph Scaliger laiiTa à
cette école , où il avoit profeffé pendant plufieurs an-
nées. La Bible Compluteniîenne n'eft pas un de fes
moindres ornemens ; elle fut donnée par Philippe IL
roi d'Efpagne au prince d'Orange , qui en fît préfent
à l'univerlité de cette ville. Cette bibliothèque a été
augmentée par celle de Holmannus , & fur-tout du
célèbre Ifaac Vofîius. Cette dernière contenoit un
grand nombre de manuferits précieux , qui venoient ,
à ce qu'on croit , du cabinet de la reine Chriftine
de Suéde.
L'Allemagne honore & cultive trop les Lettres ,
pour n'être pas fort riche en bibliothèques. On compte
parmi-les plus confidérables celles de Francfort-fur-
l'Oder, de Leypfic, de Drefde , d'Ausbourg, de Baie
en Suiflé, où l'on voit un manuferit du nouveau-
Teftament en lettres d'or , dont Erafme fit grand ufa-
ge pour corriger la verlion de ce faint livre. Il y a
encore à Bâle les bibliothèques d'Erafme , d'Amef-
bach, & de Feche.
La bibliothèque du duc de "Volfembuttel eft com-
posée de celles de MarquardusFreherus , de Joachim
Cluten, & d'autres collections curieufes. Elle eft très-
coniîdérable par le nombre & la bonté des livres , &
par le bel ordre qu'on y a mis : on afture qu'elle con-
B I B
tient cent feïze mille volumes, & deux mille manuf-
erits Latins , Grecs , & Hébraïques.
Celle du roi de Pruffe à Berlin eft encore plus nom*
breufe que celle du duc de "Wolfembuttel, & les livres
en font aufîï mieux reliés. Elle fut fondée par Frédéric
Guillaume , éledeur de Brandebourg ; & elle a été
confidérablement augmentée par l'acceffion de celle
du célèbre M. Spanheim. On y trouve, entr'autres
raretés , plufieurs manuferits ornés d'or & de pierre-
ries , dutems de Charlemagne.
Il y a encore en Allemagne un fort grand nombre
d'autres bibliothèques très-curieufes , mais dont le dé-
tail nous meneroit trop loin. Nous finirons par celle
de l'empereur à Vienne , qui contient cent mille vo-
lumes. Il y a un nombre prodigieux de manuferits
Grecs , Hébraïques , Arabes, Turcs , & Latins. Lam-
batius a publié un catalogue du tout, & a gravé les
figures des manuferits , mais elles ne font pas fort in-
téreflantes. Cette bibliothèque fut fondée par l'empe-
reur Maximilien en 1480: la bibliothèque remplit huit
grands appartemens , auprès defquels en eft un neu-
vième pour les médailles & les curiofités , où ce qu'il
y a de plus remarquable eft un grand bafiin d'éme-
raude. Cette bibliothèque fut bien enrichie par celle
du feu prince Eugène, qui étoit fort nombreufe.
Veniiè a une célèbre bibliothèque , qu'on nomme
communément la bibliothèque de S. Marc,oii l'on con-
ferve l'évangile de ce faint, écrit,à ce qu'on prétend,
de fa propre main , & qui après avoir été long-tems à
Aquilée où il prêcha la foi , fut porté à Venife : mais
dans le vrai il n'y en a que quelques cahiers , & en-
core d'une écriture fi effacée, qu'on ne peut diftin-
guer fi c'eft du Grec ou du Latin. Cette bibliothèque
eft d'ailleurs fort riche en manuferits : celles que le
cardinal Beffarion & Pétrarque léguèrent à la répu-
blique , font aufîï dans la même ville, & unies à celle
que le fénat a fondée à l'hôtel de la monnoie.
Padoue eft plein de bibliothèques : en effet , cette
ville a toujours été célèbre par fon univerfité , & par
le grand nombre de favans qui lui doivent la naif-
fance. On y voit la bibliothèque de S. Juftin , celle de
S. Antoine, & celle de S. Jean de Latran. Sixte de
Sienne dit qu'il a vu dans cette dernière une copie de
l'épître de S. Paul aux peuples de Laodicée, ôc qu'il
en fît même un extrait.
La bibliothèque de Padoue fut fondée par Pignorius ;
Thomazerius nous en a donné un catalogue dans fa
Bibliotheca.
Il y en a une magnifique à Ferrare , 011 l'on voit
grand nombre de manuferits anciens & d'autres mo-
numens curieux de l'antiquité , comme des ftatues ,
des tableaux , & des médailles de la collecf ion de
Pierre Ligorius, célèbre architecte , & l'un des plus
favans de fon fiecle.
On prétend que dans celle des Dominicains à Bo-
logne , on voit le Pentateuque écrit de la main d'Ef-
dras. Tifiard,dans fa grammaire Hébraïque , dit l'a-
voir vu fouvent, & qu'il eft très-bien écrit fur une
feule grande peau : mais Hottinger prouve claire-
ment que ce manuferit n'a jamais été d'Efdras.
A Naples les Dominicains ont une belle bibliothè-
que , où font les ouvrages de Pontanus , que fa fille
Eugénie donna pour immortalif er la mémoire de fon
illuftre père.
La bibliothèque de S. Ambroife à Milan fut fondée
par le cardinal Frédéric Borromée : elle a plus de dir
mille manuferits recueillis par Antoine Oggiati.
Quelques-uns prétendent qu'elle fut enrichie aux dé-
pens de celle de Pinelli : on peut dire qu'elle n'eft
inférieure à aucune de celles dont nous avons parlé,
puilqu'elle contenoit il y a quelques années 46 mille
volumes, & iz mille manuferits , fans compter ce
qu'on y a ajouté depuis. Elle eft publique.
La bibliothèque du duc de Mantoue peut être mife
B I B
au nombre des bibliothèques les plus curleufes du mon-
de. Elle fouffrit à la vérité beaucoup pendant les
guerres d'Italie qui éclatèrent en 1 70 1 ; & fans doute
elle a été tranfportée à Vienne. C'eft-là qu'étoit la
fameufe plaque de bronze couverte de chiffres Egyp-
tiens & d'hiéroglyphes , dont le favant Pignorius a
donné l'explication.
La bibliothèque de Florence contient tout ce qu'il
y a de plus brillant , de plus curieux , & de plus inf-
tmftif : elle renferme un nombre prodigieux de li-
vres & de manufcrits les plus rares en toutes fortes
de langues ; quelques-uns font d'un prix ineftima-
ble : les ftatues , les médailles , les buftes , & d'autres
monumens de l'antiquité y font fans nombre. Le mu-
faum Florentinum peut feul donner une jufte idée de
ce magnifique cabinet ; & la defcription de la biblio-
thèque mériteroit feule un volume à part. Il ne faut
pas oublier le manufcrit qui fe conferve dans la cha-
pelle de la cour; c'eft l'évangile de S. Jean qui, à ce
qu'on prétend , eft écrit de fa propre main.
Il y a deux autres bibliothèques à Florence , dont
l'une fut fondée en l'églife de S. Laurent par le pape
Clément VI I. de la famille de Médicis , & eft ornée
d'un grand nombre de manufcrits Hébraïques , Grecs,
& Latins.
L'autre fut fondée par Cofme de Médicis dans
l'églife de S. Marc qui appartient aux Jacobins.
Il y a une très-belle bibliothèque à Pife , qu'on dit
avoir été enrichie de 8000 volumes qu'Aide Manu-
ce légua à l'Académie de cette ville.
La bibliothèque du roi de Sardaigne à Turin eft très-
curieufe par rapport aux manufcrits du célèbre Pierre
Ligorius , qui deffina toutes les antiquités de l'Italie.
Le pape Nicolas V. fonda une bibliothèque à Rome
compofée de fix mille volumes des plus rares : quel-
ques-uns difent qu'elle fut formée par Sixte-Quint ,
parce que ce pape ajouta beaucoup à la collection
commencée par le pape Nicolas V. Il eft vrai que
les livres de cette bibliothèque furent difperfés fous le
pontificat de Calixte III. qui fuccéda au pape Nico-
las ; mais elle fut rétablie par Sixte IV. Clément
VII. Léon X. Elle fut prefque entièrement dé-
truite par l'armée de Charles V. fous les ordres du
connétable de Bourbon & de Philbert prince d'O-
range , qui faccagerent Rome avant le pontificat de
Sixte-Quint.
Ce pape qui aimoit les favans & les lettres ,
non-feulement rétablit la bibliothèque dans l'on an-
cienne fplendeur : mais il l'enrichit encore d'un grand
nombre de livres & d'excellens manufcrits. Elle ne
fut pas fondée au Vatican par Nicolas V. mais elle y
fut tranfportée par Sixte IV. & enfuite à Avignon ,
en même tems que le S. Siège, par Clément V. &c
de-là elle fut rapportée au Vatican fous le pontificat
de Martin V. oii elle eft encore aujourd'hui.
On convient généralement que le Vatican doit
une grande partie de la belle bibliothèque à celle de
l'électeur Palatin , que le comte de Tilly prit avec
Heidelberg en 1612. D'autres cependant préten-
dent, & ce femble avec raifon , que Paul V. qui étoit
pour lors pape, n'eut qu'une, très-petite & même la
plus mauvaiic partie de la. bibliothèque Palatine; tous
les ouvrages les plus eftimables ayant été emportés
par d'autres , & principalement par le duc de Ba-
vière.
La bibliothèque du Vatican, que Baronius compare
à un filet qui reçoit toutes fortes de poifîbns tant
bons que mauvais , eft divifée en trois parties: la
première eft publique , & tout le monde peut y avoir
recours pendant deux heures de certains jours de la
fémainc : la féconde partie eft plus feercte ; &c la troi-
fieme ne s'ouvre jamais que pour certaines perfon-
rcs; de forte qu'on pourroit la nommer le fancluaire
duFatican. Sixte quint l'enrichit d'un très-grand nom-
Tome II,
B I B
23 5
bre d'ouvrages , foit manufcrits foit imprimés , & la
fit orner de peintures à frefque par les plus grands
maîtres de fon tems. Entr'autres figures emblémati-
ques dont le détail feroit ici trop long , on voit toutes
les bibliothèques célèbres du monde repréfentées par
des livres peints , & au-deflous de chacune une inf-
cription qui marque l'ordre du tems de leur fonda-
tion.
Cette bibliothèque contient un grand nombre d'ou-
vrages rares &c anciens , entr'autres deux copies de
Virgile qui ont plus de mille ans ; elles font écrites
fur du parchemin ; de même qu'une copie de Téren-
ce , faite du tems d'Alexandre Sévère & par fon or-
dre. On y voit les actes des Apôtres en lettres d'or.
Ce manufcrit étoit orné d'une couverture d'or enri-
chie de pierreries , & fut donné par une reine de Chy-
pre au pape Alexandre VI. mais les foldats de Char-
les V. le dépouillèrent de ces riches ornemens lorf-
qu'ils faccagerent Rome. 11 y a auffi une bible Gre-
que très-ancienne ; les épigrammes de Pétrarque écri-
tes de fa propre main ; les ouvrages de S. Thomas
d'Aquin traduits enGrec par Démétrius Cydonius de
Theffalonique ; une copie du volume que les Perfes
ont fait des fables deLocman, que M. Huet a prouvé
être le même qu'Efope : on y voit auffi les premières
copies des ouvrages de Tacite , qui ne furent décou-
vertes que fous le pontificat de Léon X.
Outre le grand nombre d'excellens livres qui font
l'ornement de la bibliothèque du Vatican , il y a en-
core plus de dix mille manufcrits dont Angélus de
Rhocca a publié le catalogue.
Quelques-uns rapportent que Clément VIII. aug-
menta considérablement cette bibliothèque , tant en li-
vres imprimés qu'en manufcrits ; en quoi il fut aidé
parFulviusUrfinus; que Paul V. l'enrichit des manuf-
crits du cardinal Alteni , & d'une partie de la biblio-
thèque, Palatine; & qu'Urbain VIII. fit apporter du
collège des Grecs de Rome un grand nombre de li-
vres Grecs au Vatican , dont il fit Léon Allatius bi-
bliothécaire.
Il y avoit plufieurs autres belles bibliothèques à Ro-
me , particulièrement celle du cardinal François Bar-
berini , qui contenoit , à ce qu'on prétend , vingt-
cinq mille volumes imprimés , & cinq mille manuf-
crits. Il y a auffi les bibliothèques du palais Farnefe ,
de fainte-Marie in ara ae/i,de fainte-Marie fur la
Minerve , des Auguftins , des Pères de lOratoire , des
Jéfuites, du feu cardinal Montalte , du cardinal Sfor-
za ; celles des églifes de la Sapienza , de la Chieza-
nova, de fan-Ifidore , du collège Romain , du prince
Borghefe , du prince Pamphili , du connétable Colon-
na , & de plufieurs autres princes , cardinaux , fei-
gneurs, & communautés religieufes , dont quelques-
unes font publiques.
La première & la plus confidérable des bibliothè-
ques d'Efpagne , eft celle de l'Efcurial au couvent de
S. Laurent , fondée par Charles V. mais conlidéra-
blement augmentée par Philippe II. Les ornemens
de cette bibliothèque font fort beaux ; la porte eft d'un
travail exquis , & le pavé de marbre ; les tablettes
fur lcfquellesles livres font rangés font peintes d'une
infinité de couleurs , & toutes de bois des Indes : les
livres font fuperbement dorés : il y a cinq rangs d'ar-
moires les unes au-deflus des autres, où les livres
font gardés ; chaque rang a cent pies de long. On y
voit les portraits de Charles V. de Philippe II. Phi-
lippe III. & Philippe IV. & plufieurs globes dont l'un
reprçfente avec beaucoup de précifion le cours des
aftres, eu égard aux différentes polirions de la terre.
II y a un nombre infini de manufcrits dans cette bi-
bliothèque , & entr'autres l'original du livre de S. Au-
guftin furie baptême. Quelques-uns penfentque les
originaux de tous les ouvrages de ce perc font à la
bibliothèque de l'Lfcurial , Philippe II les ayant ache-
Ggij
2.^6
B I B
tés de celui au fort de qui ils tombèrent lors du pil-
lage de la bibliothèque de Muley Cydam , roi de Fez
& de Maroc, quand les Eipagnols prirent la forte-
refTe de Carache où étoit cette bibliothèque. C'eft. du
moins ce qu'allure Pierre Daviti, dans la généalo-
gie des rois de Maroc , où il dit que cette bibliothè-
que contenoit plus de quatre mille volumes Arabes
fur difFérens fujets , & qu'ils furent portés à Paris
pour y être vendus : mais que les Parifiens n'ayant
pas de goût pour cette langue , ils furent enfuite por-
tés à Madrid, où Philippe II. les acheta pour la bi-
bliothèque de l'Efcurial.
Il y a dans cette bibliothèque près de trois mille
manufcrits Arabes , dont Hottinger a donné le cata-
logue. Il y a auffi nombre de manufcrits Grecs & La-
tins : en un mot c'eft une des plus belles bibliothèques
du monde.
Quelques-uns prétendent qu'elle a été augmentée
par les livres du cardinal Sirlet, archevêque de Sar-
ragolïe , & d'un ambalïadeur Eipagnol ; ce qui l'a
rendu beaucoup plus parfaite : mais la plus grande
partie fut brûlée par le tonnerre en 1670.
Il y avoit anciennement une très-magnifique bi-
bliothèque dans la ville de Cordoue , fondée par les
Maures , avec une célèbre académie où l'on enfei-
gnoit toutes les feiences en Arabe. Elle fut pillée par
les Efpagnols lorlque Ferdinand chafla les Maures
d'Efpagne , où ils avoient régné plus de 600 ans.
Ferdinand Colomb , fils de Chriilophe Colomb, qui
découvrit le premier l'Amérique , fonda une très-
belle bibliothèque , en quoi il fut aidé par le célèbre
Clénard.
Ferdinand Nonius , qu'on prétend avoir le premier
enfeigné le Grec en Eipagne , fonda une grande &
enrieufe bibliothèque , dans laquelle il y avoit beau-
coup de manufcrits Grecs qu'il acheta fort cher en
Italie. D'Italie il alla en Eipagne , où il enfeigna le
Grec & le Latin à Alcala de Henares , & enfuite à
Sa'amanque , & laifTafa bibliothèque à l'univerlité de
cette ville.
L'Efpagne fut encore enrichie de la magnifique
bibliothèque du cardinal Ximenès à Alcala , oii il fon-
da auffi une univerfité qui efi devenue tres-célebre.
C'eft au même cardinal qu'on a l'obligation de la
verfion de la Bible connue fous le nom de la Com-
plu.tenfie.nne.
Il y a auffi en Efpagne plufieurs particuliers qui
ont de belles bibliothèques ; telles étoient celles d'A-
rias Montanus , d'Antonius Auguft inus , favant ar-
chevêque de Tarragone , de Michel Tomaiîus , &
autres.
Le grand nombre de favans & d'hommes verfésdans
les dirférens genres de littérature, qui ont de tout tems
fait regarder la France comme une des nations les
plus éclairées, ne laifTe aucun lieu de douter qu'elle
ait été auffi la plus riche en bibliothèques : on ne s'y eil
pas contenté d'entaffer des livres , on les a choilis
avec goût & difeernement. Les auteurs les plus ac-
crédités ont rendu ce témoignage honorable aux bi-
bliothèques de nos premiers Gaulois : ceux qui vou-
draient en douter, en trouveront des preuves incon-
teftables dans fHiltoire littéraire de la France par les
RR. PP. Bénédictins , ouvrage où règne la plus pro-
fonde érudition. Nous poumons faire ici une longue
énumération de ces anciennes bibliothèques : mais
nous nous contenterons d'en nommer quelques-unes ,
pour ne pas entrer dans un détail peu intéreffant
pour le plus grand nombre de nos leûeurs. La plus
riche ôtla plus confidérable de ces anciennes biblio-
thèques , étoit celle qu'avoit Tonance Fcrréol dans fa
belle maifon de Pruliane , fur les bords de la rivière
du Gardon , entre Nifmes & Clermcnt en Auvergne.
Le choix & l'arrangement de cette bibliothèque fai-
foient voir le bon goût de ce feigneur , èvfon amour
B I B
pour le bel ordre : elle étoit partagée en trois claffes
avec beaucoup d'art ; la première étoit compofée
des livres de piété à l'ufage du fexe dévot , rangés
aux côtés des fiéges deftinés aux dames ; la féconde
contenoit des livres de littérature , & fervoit aux
hommes ; enfin dans la troifieme claffe étoient les
livres communs aux deux fexes. Il ne faut pas s'ima-
giner que cette bibliothèque fut feulement pour une
vaine parade ; les perfonnes qui fe trouvoient dans
la mailbnen faifoient un ulage réel & journalier: on
y employoit à la lecture une partie de la matinée ,
ôc on s'entretenoit pendant le repas de ce qu'on
voit lu , en joignant ainfi dans le difeours l'érudition
à la gaieté de la converfation.
Chaque monaftere avoit auffi dans fon établifTe*
ment une bibliothèque , & un moine prépofé pour en
prendre foin. C'elt ce que portoit la règle deTarnat
& celle de S. Benoît. Rien dans la fuite des tems ne
devint plus célèbre que les bibliothèques des moines :
on y confervoit les livres de plufieurs fiecles , dont
on avoit foin de renouveller les exemplaires ; & fans
ces bibliothèques il ne nous refteroit guère d'ouvra-
ges des anciens. C'eft de-là en effet que font for-
tis prefque tous ces excellens manufcrits qu'on voit
aujourd'hui en Europe , & d'après lefquels on a don-
né au public , depuis l'invention de l'Imprimerie ,
tant d'excellens ouvrages en tout genre de littérature.
Des le VIe liecle on commença dans quelques mc-
nafteres à lubftituer au travail pénible de l'agricul-
ture , l'occupation de copier les anciens livres , &
d'en compoier de nouveaux. C'étoit l'emploi le plus
ordinaire, & même l'unique, des premiers cénobi-
tes de Marmoutier. On regardoit alors un monafte-
re qui n'auroit pas eu de bibliothèque , comme un fort
ou un camp dépourvu de ce qui lui étoit le plusné-
ceffaire pour fa défenfe : clauflrum fine armario , qua-
fi cajlrum fine ar marnent ario. Il nous relfe encore de
précieux monumens de cette fage & utile occupa-
tion dans les abbayes de Cîteaux & de Clairvaux ,
ainfi que dans la plus grande partie des abbayes de
l'ordre de S. Benoit.
Les plus célèbres bibliothèques des derniers tems
ont été celles de M. de Thou ; de M. le Tellier , ar-
chevêque de Reims ; de M. Butteau , fort riche en
livres fur l'hiftoire de France ; de M. de Coiflin,
abondante en manufcrits Grecs; de M. Balufe, dont il
fera parlé tout-à -l'heure à l'occafion de celle du Roy ;
de M. Dufay , du cardinal Dubois , de M. Colbert,
du comte d'Hoym , de M. le maréchal d'Etrées , de
meilleurs Bigot , de M. Danty d'Ilnard , de M. Tur-
got de S. Clair , de M. Burette , & de M. l'abbé de
Rothelin. Nous n'entrons dans aucun détail fur le
mérite de ces différentes bibliothèques , parce que les
catalogues en exiftent , & qu'ils ont été faits par de
fort favans hommes. Nous avons encore aujourd'hui
des bibliothèques qui ne le cèdent point à celles que
nous venons de nommer : les unes font publiques ,
les autres font particulières.
Les bibliothèques publiques font celle du Roi , dont
nous allons donner l'hilîoire , celles de S. Victor , du
collège Mazarin , de la Doctrine - chrétienne , des
Avocats , & de S. Germain des prés : celle-ci eft une
des plus confidérables , par le nombre & par le mé-
rite des anciens manufcrits qu'elle poffede : elle a été
augmentée en 17 18 des livres de M. L. d'Etrées , &
en 1710 de ceux de M. l'abbé Renaudot. M. le car-
dinal de Gefvres légua fa bibliothèque à cette abbaye
en 1744, fous la condition que le public en joùiroit
une fois la femaine. M. l'évèque de Mets , duc de
Coiflin , lui a auffi légué un nombre confidérable de
manufcrits, qui avoient appartenu ci-devant au chan-
celier Seguier.
Les bibliothèques particulières qui joùifTentde quel-
que réputation , foit pour le nombre foit pour la qua*
B I B
lité des livres , font celle de fainte Geneviève , à la-
quelle vient d'être réuni , par le don que lui en a fait
M. le duc d'Orléans , le riche cabinet des médailles
que feu M. le Régent avoit formé ; celles de Sorbon-
ne, du collège de Navarre , des Jéfuites de la rue
S. Jacques & de la rue S. Antoine , des prêtres de l'O-
ratoire, & des Jacobins. Celle de M. Falconet, infi-
niment précieufe par le nombre & par le choix des
livres qu'elle renferme , mais plus encore par l'ufage
qu'il en fait faire , pourroit être mile au rang des bi-
bliothèques publiques , puifqu'en effet les gens de let-
tres ont la liberté d'y aller faire les recherches dont
ils ont befoin , & que fouvent ils trouvent dans la
converfation de M. Falconet , des lumières qu'ils
chercheroient vainement dans fes livres.
Celle de M. de Boze efl peut-être la plus riche col-
lection qui ait été faite de livres rares & précieux
dans les différentes langues : elle efl encore recom-
mandable par la beauté & la bonté des éditions , ain-
fi que par ia propreté des reliures. Si cette attention
efl un luxe de l'elprit , c'en efl un au moins qui fait
autant d'honneur au goût du propriétaire, que de
plaifir aux yeux du fpeftatcur.
Après avoir parlé des principales bibliothèques con-
nues dans le monde , nous finirons par celle du Roi , la
plus riche & la plus magnifique qui ait jamais exifté.
L'origine en efl affez obfcure : formée d'abord d'un
nombre peu confidérable de volumes, il n'eft pas aifé
de déterminer auquel de nos rois elle doit fa fonda-
tion. Ce n'eft qu'après une longue fuite d'années &
diverfes révolutions , qu'elle eil enfin parvenue à ce
degré de magnificence & à cette efpece d'immenfité ,
qui éterniferont à jamais l'amour du Roi pour les Let-
tres , & la protection que les miniflres leur ont ac-
cordée.
Quand on fuppoferoit qu'avant le xiv. fiecle les
livres de nos rois ont été en affez grand nombre pour
mériter le nom de bibliothèques, il n en feroit pas moins
vrai que ces bibliothèques ne fubfiftoient que pendant
la vie de ces princes : ils en difpoioient à leur gré ;
& prcfque toujours difîipées à leur mort , il n'en paf-
foit guère à leurs fuccefTeurs , que ce qui avoit été
a l'ufage de leur chapelle. S. Louis qui en avoit raf-
femble une affez nombreufe , ne la laiffa point à fes
enfans ; il en fît quatre portions égales , non compris
les livres de fa chapelle , & la légua aux Jacobins &
aux Cordelicrs de Paris , à l'abbaye de Royaumont ,
& aux Jacobins de Compiegne. Philippe le Be! & fes
trois fils en firent de même ; ce n'eft donc qu'aux rè-
gnes fuivans que l'on peut rapporter rétabliffement
d'une bibliothèque royale , fixe , permanente , deflinée
à l'ufage du public, en un mot comme inaliénable, &
comme une des plus précieufes portions des meubles
de la couronne. Charles V. dont les thrélors littérai-
res confiitoient en un fort petit nombre de livres qu'a-
voit eu le roi Jean , l'on prédeceffeur, eft celui à qui
l'on croit devoir les premiers fondemens de la biblio-
thèque royale d'aujourd'hui. Il étoit lavant ; Ion goût
pour la Ic&ure lui fît chercher tous les moyens d'ac-
quérir des livres, aulîi fa bibliothèque fut-elle conlidé-
rablement augmentée en peu de tems. Ce prince tou-
jours attentif au progrès des Lettres, ne le contenta
pas d'avoir rafièmblé des livres pour la propre ins-
truction ; il voulut que fes iiijcts en prolitaiVcnt , cv
logea fa bibliothèque dans une des tours du Louvre ,
qui pour cette raifon fut appel lee /..' tour de la librai-
rie. Afin que Ton put v travailler à toute heure , il
ordonna qu'on pendît à la voûte trente petits chan-
deliers & une lampe d'argent. Cette bibliothèque etoit
compolee d'environ 910 volumes, nombre remar-
quable dans un tems où les Lettres n'avoient fait en-
core que de médiocres progrès en France , & 011 par
conféquent les livres dévoient être affez rares.
Ce prince tiroit quelquefois des livres de fa biblio-
B I B
237
theque du Louvre , & les faifoit porter dans fes diffé-
rentes maifons royales. Charles VI. fon fils , & fon
fuccefléur , tira auffide fa bibliothèque plufieurs livres
qui n'y rentrèrent plus : mais ces pertes furent répa-
rées par les acquifitions qu'il faifoit de tems en tems.
Cette bibliothèque relia à peu près dans le même état
jufqu'au règne de Charles VII. que par une fuite des
malheurs dont le royaume fut accablé , elle fut tota-
lement diffipéc , du-moins n'en parut-il de long-tems
aucun veftige.
Louis XI. dont le règne fut plus tranquille, donna
beaucoup d'attention au bien des lettres ; il eut foin
de raffembler, autant qu'il le put, les débris de la li-
brairie du Louvre ; il s'en forma une bibliothèque qu'il
augmenta depuis des livres de Charles de France , fon
frère , & félon toute apparence de ceux des ducs de
Bourgogne , dont il réunit le duché à la couronne.
Charles VIII. fans être favant eut du goût pour les
livres ; il en ajouta beaucoup à ceux que fon père
avoit raffemblés , & fingulierement une grande par-
tie de la bibliothèque de Naples , qu'il fît apporter en
France après l'a conquête. On diftingue encore au-
jourd'hui , parmi les livres de la bibliothèque du Roi ,
ceux des rois de Naples & des feigneurs Napolitains
par les armoiries , les fouferiptions, les fignatures ou
quelques autres marques.
Tandis que Louis XI. & Charles VIII. rafTem-
bloient ainli le plus de livres qu'il leur étoit pofîible ,
les deux princes de la maifon d'Orléans , Charles, &
Jean comte d'Angoulème, l'on frère, revenus d'An-
gleterre après plus de 25 ans de prifon, jetterent, le
premier à Blois , & le fécond à Angoulème , les fon-
demens de deux bibliothèques , qui devinrent bien-tôt
royales , & qui firent oublier la perte qu'on avoit
faite , par la difperfion des livres de la tour du
Louvre , dont on croit que la plus grande partie
avoit été enlevée par le duc de Betfort. Charles en
racheta en Angleterre environ foixante volumes, qui
furent apportés au château de Blois , & réunis à ceux
qui y étoient déjà en afTez grand nombre.
Louis XIÏ. fils de Charles , duc d'Orléans , étant
parvenu à la couronne , y réunit la bibliothèque de
Blois , au milieu de laquelle il avoit été , pour ainfi
dire , élevé; & c'eft peut-être par cette confidération
qu'il ne voulut pas qu'elle changeât de lieu. Il y fit
tranfporter les livres de fes deux prédéceffeurs Louis
XI. & Charles VIII. & pendant tout le cours de fon
règne il s'appliqua à augmenter ce thréfor, qui de-
vint encore bien plus confidérable lorfqu'il y eut fait
entrer la bibliothèque que les Vifcomti & les Sforce ,
ducs de Milan, avoient établie à Pavic , & en outre
les livres qui avoient appartenu au célèbre Pétrar-
que. Rien n'eft au-deffus des éloges que les écrivains
de ce tems-là font de la bibliothèque de Blois ; elle étoit
l'admiration non-feulement de la France , mais en-
core de l'Italie.
François premier, après avoir augmenté la biblio-
thèque de Blois, la réunit en 1544 à celle qu'il avoit
commencé d'établir au château de Fontainebleau plu-
fieurs années auparavant : une augmentation fi con-
fidérable donna un grand lufire à la bibliothèque de
Fontainebleau, qui étoit déjà par elle-même allez
riche. François premier avoit fait acheter en Italie
beaucoup de manuferits Grecs par Jérôme Fondule,
homme de lettres, en grande réputation dans ce tems-
là ; il en fit encore acheter depuis par l'es ambaffa-
deurs à Rome & à Venife.Ces miniflres s'acquiterent
de leur commiifion avec beaucoup de loin 6c d'intel-
ligence ; cependant ces différentes acquifitions ne for-
moient pas au-delà de 400 volumes, avec une qua-
rantaine^ manuferits orientaux. On peut juger de-
là combien les livres étoient encore peu communs
alors , puifqu'un prince qui les recherchoit avec tant
d'emprelfement, qui n'épargnoit aucune dépenfe, Se
i38 B I B
qui employoit les plus habiles gens pour en amaf-
fer , n'en avoit cependant pu raffembler qu'un fi petit
nombre , en comparaison de ce qui s'en eft répandu
en France dans la fuite.
La paffion de François premier pour les manufcrits
Grecs , lui fit négliger les Latins & les ouvrages en
langues vulgaires étrangères. A l'égard des livres
François qu il fit mettre dans fa bibliothèque , on en
peut faire cinq claffes différentes : ceux qui ont été
écrits avant fon règne ; ceux qui lui ont été dédiés ;
les livres qui ont été faits pour fon ufage , ou qui lui
ont été donnés par les auteurs ; les livres de Loùife
de Savoie , fa mère ; & enfin ceux de Marguerite de
Valois , fa fceur ; ce qui ne fait qu'à peu près 70 vo-
lumes.
Jufqu'alors il n'y avoit eu, pour prendre foin de la
bibliothèque royale, qu'un (impie garde en titre. Fran-
çois premier créa la charge de bibliothécaire en chef,
qu'on appella long-tems , & qui dans fes provifions
s'appelle encore maître de la librairie du Roi.
Guillaume Budé fut pourvu le premier de cet em-
ploi , & ce choix fit également honneur au prince &
à l'homme de lettres. Pierre du Chaftel ou Chatellain
lui fuccéda ; c 'étoit un homme fort verfé dans les lan-
gues Greque & Latine : il mourut en 1 5 5 1 ; & fa pla-
ce fut remplie, fous Henri II. par Pierre de Montdo-
ré, confeiller au grand conlèil , homme très-favant,
fur-tout dans les Mathématiques. La bibliothèque de
Fontainebleau paroît n'avoir reçu que de médiocres
accroiffemens tous les règnes des trois fils de Henri II.
à caufè, lans doute, des troubles & des divifions que
le prétexte de la Religion excita alors dans le royau-
me. Montdoré , ce lavant homme , foupçonné & ac-
culé de donner dans les opinions nouvelles en ma-
tière de religion , s'enfuit de Paris en 1 567, & fe re-
tira à Sancerre en Berry, où il mourut de chagrin trois
ans après. Jacques Amyot, qui avoit été précepteur
de Charles IX. & des princes fes frères , fut pourvu ,
après l'évafion de Montdoré , de la charge de maître
de la librairie. Le tems de fon exercice ne fut rien
moins que favorable aux Arts &c aux Sciences : on ne
croit pas , qu'excepté quelques livres donnés à Henri
III. la bibliothèque royale ait été augmentée d'autres
livres que de ceux de privilège. Tout ce que put faire
Amyot , ce fut d'y donner entrée aux favans , & de
leur communiquer avec facilité l'ufage des manufcrits
dont ils avoient befoin. Il mourut en 1 593, & fa char-
ge paffa au préfident Jacques- Augufte de Thou , fi cé-
lèbre par l'hiltoire de fon tems qu'il a écrite.
Henri IV. ne pouvoit faire un choix plus honora-
ble aux lettres : mais les commencemens de fon règne
ne furent pas affez paifibles , pour lui permettre de
leur rendre le luftre qu'elles avoient perdu pendant
les guerres civiles. Sa bibliothèque fouffrit quelque
perte de la part des fa&ieux ; pour prévenir de plus
grandes diffipations , Henri IV. en 1595 , fit tranf-
porter au collège de Clermont à Paris la bibliothèque
de Fontainebleau, dont auffi-bien le commun des fa-
vans n'étoit pas affez à portée de profiter. Les livres
furent à peine arrivés à Paris, qu'on y joignit le beau
manufcrit de la grande Bible de Charles le chauve.
Cet exemplaire , l'un des plus précieux monumens
littéraires du zèle de nos rois de la féconde race pour
la religion , avoit été confervé depuis le règne de cet
empereur , dans l'abbaye de S. Denys. Quelques an-
nées auparavant le préfident de Thou avoit engagé
Henri IV. à acquérir la bibliothèque de Catherine de
Medicis, compofée de plus de 800 manufcrits Grecs
& Latins ; mais différentes circonftances firent que
cette acquiiition ne put être terminée qu'en 1599.
Quatre ans après l'acquiûtion des manufcrits de la
reine Catherine de Medicis , la bibliothèque paffa du
collège de Clermont chez les Cordeliers, où elle de-
meura quelques années en dépôt. Le préfident de
B I B
Thou mourut en 16 17 , & François de Thou fon fils
aîné , qui n'avoit que neuf ans , hérita de la charge
de maître de la librairie.
Pendant la minorité du jeune bibliothécaire, la di-
rection de la bibliothèque du Roi fut confiée à Nicolas
Rigault, connu par divers ouvrages eftimés. La bi-
bliothèque royale s'enrichit peu fous le règne de Louis
XIII. elle ne fit d'acquifitions un peu confidérables ,
que les manufcrits de Philippe Hurault , évêque de
Chartres , au nombre d'environ 418 volumes , &
1 10 beaux manufcrits Syriaques , Arabes , Turcs &
Perfans , achetés , auffi-bien que des caractères Syria-
ques , Arabes & Perfans , avec les matrices toutes
frappées , des héritiers de M. de Brèves , qui avoit
été ambaffadeur à Conftantinople. Ce ne fut que fous
le règne de Louis XIII. que la bibliothèque royale fut
retùée des Cordeliers , pour être mife dans une gran-
de maifon de la rue de la Harpe, appartenante à ces
religieux.
François de Thou ayant été décapité en 1642 , l'il-
lultre Jérôme Bignon , dont le nom feul fait l'éloge ,
lui fuccéda dans la charge de maître de la librairie.
Il obtint en 165 1 , pour fon fils aîné , nommé Jérôme
comme lui , la furvivance de cette charge. Quelques
années après , M. Colbert , qui méditoit déjà fes
grands projets , fit donner à fon frère , Nicolas Col-
bert, la place de garde de la librairie, vacante par
la mort de Jacques Dupuy. Celui-ci légua fa biblio-
thèque au Roi. Louis XIV. l'accepta par lettres pa-
tentes , regiftrées au parlement le 16 Avril 1657.
Hippolite , comte de Bethune , fit préfent au Roi ,
à peu-près dans le même tems , d'une colle&ion fort
curieufe de manufcrits modernes , au nombre de
1923 volumes , dont plus de 950 font remplis de let-
tres & de pièces originales fin l'hiftoire de France.
À un zèle également vif pour le progrès des Scien-
ces & pour la gloire de fon maître, M. Colbert joi-
gnoit une paffion extraordinaire pour les livres : il
commençoit alors à fonder cette célèbre bibliothèque ,
jufqu'à ces derniers tems la rivale de la bibliothèque
du Roi : mais l'attention qu'il eut aux intérêts de l'u-
ne , ne l'empêcha pas de veiller aux intérêts de l'au-
tre. La bibliothèque du Roi efl redevable à ce miniftre
des acquifitions les plus importantes. Nous n'entre-
rons point ici dans le détail de ces diverfes acquifi-
tions : ceux qui voudront les connoître dans toute
leur étendue , pourront lire le mémoire hiftorique
fur la bibliothèque du Roi , à la tête du catalogue , pag.
z6. &fuiv. Une des plus précieufes efl: celle des ma-
nufcrits de Brienne ; c'eft un recueil de pièces con-
cernant les affaires de l'état , qu'Antoine de Lomenie,
fecrétaire d'état, avoit raffemblées avec beaucoup
de foin en 340 volumes.
M. Colbert trouvant que la bibliothèque du Roi
étoit devenue trop nombreufe pour relter commo-
dément dans la maifon de la rue de la Harpe , la fit
tranfporter en 1666 dans deux maifons de la nie Vi-
viennc qui lui appartenoient. L'année fùivante le ca-
binet des médailles , dans lequel étoit le grand recueil
des eit ampes de l'abbé de Marolles , & autres rare-
tés , fut retiré du Louvre & réuni à la bibliothèque du
Roi , dont ils font encore aujourd'hui une des plus
brillantes parties. Après la difgrace de M. Fouquet,
fa bibliothèque , ainfi que les autres effets , fut faille Se
vendue. Le Roi en fit acheter un peu plus de 1300
volumes , outre le recueil de l'hiftoire d'Italie.
Il n'étoit pas poffible que tant de livres imprimés
joints aux anciens , avec les deux exemplaires des
livres de privilège que fourniffoient les Libraires , ne
donnaffent beaucoup de doubles : ce tonds feroit de-
venu aufïi embarraffant qu'inutile , fi on n'avoit fon-
gé à s'en défaire par des échanges. Ce fut par ce
moyen qu'on fit en 1668 l'acquifition de tous les
manufcrits Se d'un grand nombre de livres imprimés
B I B
qui étoient dans la bibliothèque du cardinal Mazaiin.
Dans le nombre de ces manuferits , qui étoit de 2 1 5 6-
il y en avoit 102 en langue Hébraïque , 3 43 en Ara-
be , Samaritain , Perfan , Turc , 6c autres langues
Orientales ; le relie étoit en langue Grequc, Latine ,
Italienne , Françoife , Efpagnole , &c. Les livres im-
primés étoient au nombre de 3678. La bibliothèque
du Roi s'enrichit encore peu après par l'acquiiition
que l'on fit à Leyde d'une partie des livres du lavant
Jacques Golius, &l parcelle de plus de 1200 volu-
mes manuferits ou imprimés de la bibliothèque de M.
Gilbert Gaumin , doyen des maîtres des requêtes ,
qui s'étoit particulièrement appliqué à l'étude S>C à
la recherche des livres Orientaux.
Ce n'étoit pas feulement à Paris & chez, nos voifins
que M. Colbert faifoit faire des achats de livres pour
le Roi ; il fît rechercher dans le Levant les meilleurs
manuferits anciens en Grec , en Arabe * en Perfan ,
& autres langues Orientales. Il établit dans les diffé-
rentes cours de l'Europe des correspondances , au
moyen desquelles ce miniftre vigilant procura à la
bibliothèque du Roi des threfors de toute efpece.
L'année 1 670 vit établir dans la bibliothèque Royale
un fonds nouveau , bien capable de la décorer & d'é-
ternifer la magnificence de Louis XIV": ce font les
belles cfiampes que fa Majefié fît graver, & qui fer-
vent encore aujourd'hui aux préfens d'eftampes que
le Roi fait aux princes , aux rniniitres étrangers , &c
aux perfonnes de diftiucf ion qu'il lui plaît d'en grati-
fier. La bibliothèque du Roi perdit M. Colbert en 1683.
M. de Louvois, comme furintendant des bâtimens ,
y exerça la même autorité que (on prédéceffeur , &
acheta de M. Bignon , confeiller d'état , la charge
de maître de la Librairie , à laquelle fut réunie celle
de garde de la Librairie, dont s'étoient démis vo-
lontairement MM. Colbert. Les provifîons de ces
deux charges réunies furent expédiées en 1684, erl
faveur de Camille le Tellier , qu'on a appelle Y abbé
de Louvois.
M. de Louvois fit , pour procurer a la bibliothèque
du Rot de nouvelles richefles , ce qu'avait fait M. Col-
bert. Il y employa nos miniilres dans les cours étran-
gères ; & en effet on en reçut dans les années 1685 ,
1686 , 1687 , pour des fommes confîdérables. Le père
Mabillon qui voyageoit en Italie, fut chargé par le
Roi d'y raflembier tout ce qu'il pourrait de livres : il
s'acquitta de fa commiifion avec tant de zèle & d'e-
xactitude, qu'en moins de deux ans il procura à la
bibliothèque Royale près de 4000 volumes imprimés.
La mort de M. de Louvois arrivée en 169 1 , ap-
porta quelque changement à l'adminillration de la
bibliothèque du Roi. La charge de maître de la Librai-
rie avoit été exercée jusqu'alors fous l'autorité & la
direction du furintendant des bâtimens : mais le Roi
fît un règlement en Juillet 1 69 1 , par lequel il ordon-
na que M. l'abbé dj Louvois joiiiroit Ôc feroit les
fonctions de maure de la Librairie , intendant & garde
du cabinet des livres , m tnuferits , médailles , &c. 6*
garde de la bibliothèque Royale , fous ^autorité de fa
Ma; e/lè feulement.
En 1697 , le P. Bouvet , Jéfuite-MifTionnaire , ap-
porta 49 volumes Chinois, que l'empereur de la Chi-
ne envoyoiten préfent au Roi. C'eli ce petit nombre
de volumes qui a donné lieu au peu de littérature
Chinoiie que l'on a cultivée en France : mais il s'elt
depuis confidérablement multiplié. Nous ne finirions
pas fi nous voulions entrer dans le détail de toutes les
acquittions de la bibliothèque Royale , 6c des préfens
fans nombre qui lui ont été faits. A l'avènement de
Louis XIV. à la couronne, ta bibliothèque étoit tout
au plus de 5000 volumes ; 6c à fa mort , il s'y en trou-
va plus de 70000, fans compter le fond:, des plan-
ches gravées 6c des eiiampes : accroiiîèment immenfe
Se qui étonneroit il l'on n'avoit vu depuis la même
B I B
2J0
bibliothèque recevoir à proportion des augmentations
plus conlidérabies.
L'heureufe inclination du Roi à protéger les let-
tres & les feiences , à l'exempte de fon bifayeul ; l'em-
prefTement des miniftres à fe conformer aux vues de
(a Majcflé ; l'attention du bibliothécaire & de ceux
qui font fous fes ordres à profiter des circonftances ,
en ne laiffant , autant qu'il eft en eux , échapper au-
cune occafion d'acquérir; enfin la longue durée de
la paix , tout femble avoir confpiré dans le cours du
prefent règne à accumuler richefles fur richefles dans
un threfor, qui déjà du tems du feu Roi n'avoit rien
qui lui fût comparable.
Parmi les livres du cabinet de Gallon d'Orléans *
légués au Roi en 1660 , il s'étoit trouvé quelques vo-
lumes de plante &c d'animaux que ce prince avoit
fait peindre en mignature fur des feuilles détachées
de vélin par Nicolas Robert , dont perfonne n'a égalé
le pinceau pour ces fortes de fujets : ce travail a été
continué fous M. Colbert & jufqu'en 1728 , tems au-
quel on a celle d'augmenter ce magnifique recueil*
Depuis quelques années il a été repris avec beau-
coup de fuccès , & forme aujourd'hui une fuite de
plus de deux mille cinq cens feuilles , repréfentant
des fleurs, des oifeaux, des animaux ; &: des papil-
lons.
La bibliothèque du Roi perdit en 1718 M. l'abbé
de Louvois, & M. l'abbé Bignon lui fuccéda. Les
feiences & les lettres ne virent pas fans efpérance
un homme qu'elles regardoient comme leur protec-
teur , élevé à un pofte fi brillant. M. l'abbé Bignon
prefqu'aufli - tôt après fa nomination , fe défît de fa
bibliothèque particulière pour ne s'occuper plus que
de celle du Roi, à laquelle il donna une collection
allez ample &c fort curieufe de livres Chinois, Tar-
tares Se Indiens qu'il avoit. Il fignala fon zèle pour
la bibliothèque du Roi dès les premiers jours de fon
exercice , par l'acquifition des manuferits de M. de la
Marre , & ceux de M. Balufe , au nombre de plus
de mille. Le grand nombre de livres dont fe trouvoit
compofée la bibliothèque du Roi , rendoit comme im-
poifible l'ordre qu'on aurait voulu leur donner dans
les deux maifons de la rue Vivicnne : M. l'abbé de
Louvois l'avoit repréfenté plufieurs fois ; & dès le
commencement de la régence il avoit été arrêté de
mettre la bibliothèque dans la grande galerie du Lou-
vre : mais l'arrivée de l'Infante dérangea ce projet ,
parce qu'elle devoit occuper le Louvre.
M. Pabbé Bignon en 1 72 1 profita de la décadence
de ce qu'on appelloit alors le fyflcme , pour engager
M. le régent à ordonner que la bibliothèque du Roi lût
placée à l'hôtel de Nevers rue de Richelieu , où avoit
été la banque. Sur les ordres du prince , on y tranf-
porta fans délai tout ce que l'on put de livres : mais les
différentes difficultés qui fe préfenterent, furent caufe
qu'on ne pût obtenir qu'en 17 24 des lettres patentes,
parle/quelles fa Majelté atîecla à perpétuité cet hô-
tel au logement de fa bibliothèque. Perfonne n'ignore
la magnificence avec laquelle ont été décorés les vaf-
tes appartemens qu'occupent aujourd'hui les livres
du Roi : c'elt le fpectacle le plus noble ce le plus bril-
lant que l'Europe offre en ce genre. M. l'abbé Sal-
lier , profcileur royal en langue Hébraïque , de l'A-
cadémie Royale des InfcriptionscvBelles-lett- v
des quarante de l'Académie Françoife, «Se nomme
en 1 726 commis à la garde des livres 6c manuferits ,
ainlî que M. Meiot , auflî membre de l'Académie des
Belles-lettres , font de tous les hommes de lettres at-
tachés à la bibliothèque du Roi , ceux qui lui ont rendu
les plus grands fervices. La magnificence des bâti-
mens eu due , pour la plus grande partie , à leurs
follicitations : le bel ordre que l'on admire dans l'ar-
rangement des livres , ainli que dans l'excellent ca-
talogue qui en a été fait , cfl du à leurs connoiflan-
24°
B I B
ces : les accroiffemens prodigieux qu'elle a reçus de-
puis 25 ans , à leur zèle ; l'utile facilité de puifer dans
ce threfor littéraire , à leur amour pour les lettres , &
à l'eftime particulière qu'ils portent à tous ceux qui
les cultivent. C'eft du mémoire hiftorique que ces
deux favans hommes ont mis à la tête du catalogue
de la bibliothèque du Roi , que nous avons extrait tout
ce qui la concerne dans cet article. Nous invitons à
le lire ceux qui voudront connoître dans un plus grand
détail les progrès & les accroiffemens de cette im-
menfe bibliothèque.
Pendant le cours de l'année 17x8 il entra dans la
bibliothèque du Roi beaucoup de livres imprimés : il
en vint de Lisbonne, donnés par MM. les comtes
d'Ericeira ; il en vint auffi des foires de Leipfic &
de Francfort pour une fomme confidérable. La plus
importante des acquiiitions de cette année fut faite
par M. l'abbé Sallier , à la vente de la bibliothèque
Colbert : elle confiftoit en plus de mille volumes.
Mais de quelque mérite que puiffent être de telles
augmentations, elles n'ont pas l'éclat de celle que
le miniftere fe propofoit en 1728.
L'établiffement d'une imprimerie Turque à Conf-
tantinople , avoit fait naître en 1727 à M. l'abbé Bi-
gnon, l'idée de s'adreffer, pour avoir les livres qui
lbrtiroient de cette imprimerie , à Zaïd Aga , lequel ,
difoit-on , en avoit été nommé le directeur , & pour
avoir auffi le catalogue des manuferits Grecs &c au-
tres qui pourroient être dans la bibliothèque du grand-
feigneur. M. l'abbé Bignon l'avoit connu en 1721 ,
pendant qu'il étoit à Paris à la fuite de Mehemet Ef-
fendi fon père , ambaffadeur de la Porte. Zaid Aga
promit les livres qui étoient actuellement fous la
preffe : mais il s'exenfa fur l'envoi du catalogue , en
affùrant qu'il n'y avoit perfonne à Conftantinople
affez habile pour le faire. M. l'abbé Bignon com-
muniqua cette réponfe à M. le comte de Maurepas,
qui prenoit trop à cœur les intérêts de la bibliothè-
que du Roi pour ne pas faifir avec empreffement &
avec zèle cette occalion de la fervir. Il fut arrêté
que la difficulté d'envoyer le catalogue demandé ,
n'étant fondée que fur l'impuiffance de trouver des
fujets capables de le compofer , on envoyeroit à
Conftantinople des favans , qui en fe chargeant de
le faire , pourroient voir &c examiner de près cette
■ bibliothèque.
Ce n'eft pas qu'on fût perfuadé à la cour que la
bibliothèque tant vantée des empereurs Grecs exiftât
encore ; mais on vouloit s'affûrer de la vérité ou de
la fauffeté du fait : d'ailleurs le voyage qu'on pro-
jettoit avoit un objet qui paroifToit moins incertain ;
c'étoit de recueillir tout ce qui pouvoit refter des mo-
numens de l'antiquité dans le Levant , en manulcrits,
en médailles, en inferiptions , &c
M. l'abbé Sevin & M. l'abbé de Fourmont , tous
deux de l'Académie des Inferiptions & Belles-lettres ,
furent chargés de cette commiffion. Ils arrivèrent au
mois de Décembre 1728 à Conftantinople : mais il
ne purent obtenir l'entrée de la bibliothèque du grand-
feigneur ; ils apprirent feulement par des gens dignes
de foi , qu'elle ne renfermoit que des livres Turcs &
Arabes , &; nul manuferit Grec ou Latin ; & ils le
bornèrent à l'autre objet de leur voyage. M. l'abbe
Fourmont parcourut la Grèce pour y déterrer des
inferiptions & des médailles ; M. l'abbé Sevin fixa
fon féjour à Conftantinople : là fécondé de tout le
pouvoir de M. le marquis de Villeneuve , ambafla-
deur de France , il mit en mouvement les confuls &
ceux des échelles qui avoient le plus de capacité ,
& les excita à faire chacun dans fon diftrict quelques
découvertes importantes. Avec tous ces fecours , &
les foins particuliers qu'il fe donna , il parvint à raf-
fembler en moins de deux ans plus de fix cents ma-
Biifcrits en langue Orientale : mais il perdit l'eipé-
B I B
rancede rien trouver des ouvrages des anciens Grecs,'
dont on déplore tant la perte. M. l'abbé Sevin re-
vint en France , après avoir établi des correfpon-
dances néceflaires pour continuer ce qu'il avoit com-
mencé ; & en effet la bibliothèque du Roi a reçu pref-
que tous les ans depuis fon retour plufieurs envois
de manuferits, foit Grecs , foit Orientaux-. On eft re-
devable à M. le comte de Maurepas de l'établiffe-
ment des enfans ou jeunes de langue qu'on élevé à
Conftantinople aux dépens du Roi : ils ont ordre de
copier & de traduire les livres Turcs, Arabes & Per-
fans ; ufage bien capable d'exciter parmi eux de l'é-
mulation. Ces copies & ces traductions font adreflees
au miniftre , qui après s'en être fait rendre compte ,
les envoyé à la bibliothèque du Roi. Les traductions
ainfi jointes aux textes originaux , forment déjà un
recueil affez confidérable , dont la république des
lettres ne pourra par la fuite que retirer un fort grand
avantage.
M. l'abbé Bignon non content des threfors dont la
bibliothèque du Roi s'enrichiffoit , prit les mefures les
plus fages pour faire venir des Indes les livres qui
pouvoient donner en France plus de connoiffance
qu'on n'en a de ces pays éloignés , où les feiences ne
laiffent pas d'être cultivées. Les directeurs de la com-
pagnie des Indes fe prêtèrent avec un tel empreffe-
ment à fes vues , que depuis 1729 il a été fait des
envois allez confidérables de livres Indiens , pour
former dans la bibliothèque du Roi un recueil en ce
genre , peut-être unique en Europe.
Dans les années fuivantes , la bibliothèque du Roi
s'accrut encore par la remife d'un des plus précieux
manuferits qui puiffe regarder la monarchie , intitulé
Regiflre de Philippe Augujle , qu'avoit légué au Roi
M. Rouillé du Coudray , conleiller d'état ; & par
diverfes acquiiitions confidérables : telles font celles
des manuferits de S. Martial de Limoges , de ceux de
M. le premier préiîdent de Mefmes , du cabinet d'ef-
tampes de M. le marquis de Beringhen; du fameux
recueil des manuferits anciens & modernes de la bi-
bliothèque de M. Colbert, la plus riche de l'Europe,
fi l'on en excepte celle du Roi & celle du Vatican ;
du cabinet de M. Cangé , collection infiniment cu-
rieufe , dont le catalogue eft fort recherché des con-
noiffeurs.
Pour ne pas donner à cet article trop d'étendue ,
nous avons crû devoir éviter d'entrer dans le détail
des différentes acquifitions , & nous renvoyons en-
core une lois au mémoire hiftorique qui fe trouve à
la tête du catalogue de la bibliothèque du Roi.
M. Bignon , maître des requêtes , l'un des quarante
de l'Académie Françoife , & defeendant de M. Bignon
à qui nous avons eu occafion de donner les plus
grands éloges , héritier de leur amour pour les let-
tres , comme il l'eft des autres grandes qualités qui
les ont rendus célèbres , exerce aujourd'hui avec
beaucoup d'intelligence & de diftinûion la charge
de maître de la librairie du Roi.
On a vu par ce que nous avons dit , avec combien
de zèle plufieurs miniftres ont concouru à mettre la
bibliothèque du Roi dans un état de fplendeur & de
magnificence qui n'a jamais eu d'exemple. M. de
Maurepas eft un de ceux fans doute à qui elle a eu
les plus grandes obligations. M. le comte d'Argenfon
dans le département de qui elle eft aujourd'hui , ami
des lettres & des favans , regarde la bibliothèque du
Roi comme une des plus précieufes parties de lbn ad-
miniftration ; il continue par goût ck par la fupério-
rité de fes lumières, ce qui avoit été commencé par
fon prédéceffeur : chofe bien rare dans les grandes
places. Qu'il foit permis à notre reconnoiftance
d'élever la voix & de dire : Heureufe la nation qui
peut faire d'auffi grandes pertes , &i les réparer auffi
facilement !
BIBLISTESJ
B I C
BIBLISTES , S. m. pi. ( Hijl. ecclef. & Théo!. ) nom
donné par quelques auteurs aux hérétiques qui n'ad-
mettant que le texte de la Bible ou de l'Ecriture iain-
te , (ans aucune interprétation , rejettent l'autorité cie
rlon & celle de FEgliSe pour décider les contro-
verSes de religion. Voye{ Tradition, Eglise. (G)
* BIBRA ou BEBRA , ( Géog. ) petite ville de Thu-
ringe , à deux lieues de Naumbourg.
* BIBRACTE, {Géog. anc. mod. & Myth.) an-
cienne ville desEduens , qu'on croit être aujourd'hui
Autun. Il paroît par une inscription trouvée à Autun
même , qu'il y a eu auffi une dédie de ce nom.
* BICANER , ( Géog. ) ville d'Ane dans les états
du Mogol , fur le Gange ; c'eft la capitale de la pro-
vince de Bacar. Loti. zoo. 20. lai. 28. 40.
* BICARS , f. m. pi. ( Hifi. mod. ) pénitens In-
diens qui paffoient toute leur vie nuds , laiffoient
croître fcrupuleufement leurs cheveux & leurs on-
gles , & portoient partout une écuelle de terre pen-
due à leur cou : Lorsqu'ils étoient preffés de la raim
ils s'arrêtoient aux portes , & on rempliffoit leur
écuelle de riz cuit. Ces eSpeces de gueux étoient très-
communs clans l'Inde pendant le IXe fiecle.
* BICC ARl , ( Géog. anc. & mod. ) petite ville de
la vallée de Mazara en Sicile , entre la Source du Bic-
cari & celle de la Belice. Quelques Géographes pré-
tendent que c'eft l'ancienne Hyccarum.
BICEPS , adj. nom que les Anatomijles ont donné
aux mulcles qui Sont divilés par l'une de leur extré-
mité en deux portions diftinctes qu'ils ont appeilées
têtes.
Le biceps du coude eft Situé le long de la partie in-
terne du bras ; une de Ses têtes vient de la partie Su-
périeure de la cavité glénoide , & paSTe dans la fi-
nuoiîté de l'humérus, entre les tendons du grand pec-
toral & du grand dorSal , comme dans une gaine ;
l'autre tête vient de l'apophySe coracoïde , & s'unit
avec la première vers le milieu de la partie interne
du bras : ce muScle va enSuite s'inSérer par un Sort
tendon à une tubéroSité qui Se remarque un peu au-
deflbus de la tête du radius, après avoir fourni quel-
ques fibres tendineuSes , qui par leur épanouiffement
forment une aponévroSe qui s'étend Sur la partie Su-
périeure oc interne des muicles qui Sont •Situés Sur le
cubitus.
Le biceps de la jambe eft fitué le long de la partie
poftérieure de la cuiffe ; la plus longue tête vient de
la tubérofité de l'ifchium ; la Seconde de la ligne
âpre , au-deffous du tendon du grand Scffier; il s'in-
fère a la partie Supérieure & postérieure du tibia &c
roné. (L)
BICHE, S. f. ( Hijl. nat. ZcoL ) femelle du cerf.
/ ï ; .., ( l RF. ( 1 )
BlCHE, f. S. ( Hijl. nat. Ichthyol. ) glaucus primus
Rond. poùTon de mer qui a le ventre blanc & le dos
bleu , d'où lui vient Son nom Latin ; le corps eft lonç,
L ventre plat, 6c le dos voûté : il a une ligne droite
qui s'étend depuis les oiiies juSqu'à la queue ; Ses
ecail les font fi petites , qu'elles ne parodient bien dis-
tinctement qu'après qu'il a été delîéché. La bouche
cil petite ; les mâchoires Sont garnies de petites poin-
tes ; les yeux Sont de médiocre grandeur : il a deux
ces auprès des oiiies qui Sent courtes Se larges,
6c qui Semblent être dorées , «S: deux autres nageoi-
res en-deffous. Ce poiffona Sur le dos, du côté de la
tête , Six aiguillons courts &£ pointus , dont le pre-
mier e!Î dirigé en avant, les autres Sont tournés en
arrière. li s'en trouve Sous le ventre près de l'anus
deux autres , que ce poiffon abaiffe & renferme dans
une gaine. Il a Sur le dos une nageoire qui s'étend
depuis le dernier aiguillon juSqu'à la queue ; la par-
tie antérieure de cette nageoire eft plus élevée que
le relie , & marquée par une tache noire : il y a une
autre nageoire tous le ventre , qui occupe l'elpace
Terne II,
B I C
241
qui eft depuis l'anus juSqu'à la queue ; cette nageoire
eft Semblable à celle du dos. La queue eft terminée
par deux nageoires^'ouverturede l'anus eft en Sorme
de tente. On donne auffi à ce poiflbn le nom de der-
bio. Il a juSqu'à trois coudées de longueur. Sa chair
eft blanche, & de bon goût. Rond. Foyer PoiSSON
(/)
* Biche , ( Myth. ) Symbole de Junon conServa-
trice. Les payens croyoient (car quelles Sables ne
Sait-on pas croire aux hommes ) que des cinq biches
aux cornes d'or , 6c plus grandes que des taureaux,
que Diane pourSuivit dans les Sorêts de Theffalie ,
elle n'en prit que quatre qu'elle attacha à Son char ,
& que Junon Sauva la cinquième. La biche aux pies
d'airain & aux cornes d'or du mont Menale étoit con-
Sacrée à Diane ; & c'eut été un Sacrilège que de la
tuer. Eurifthée ordonna à Hercule de la lui amener.
Le héros la pourSuivit pendant un an, l'atteignit en-
fin fur les bords du Ladon , la porta à Mycenes , 6c
accomplit le quatrième de fes travaux.
BICHET , f. m. ( Comm. ) quantité ou mefure de
grains , qui eft différente fuis ant les lieux où elle eft
en ufage. Le bichet n'eftpas une mefure réelle , telle
que peut être le minot à Paris ; c'eft une mefure fac-
tice compofée de plufieurs autres mefures.
A Tournus le bichet eft de feize mefures ou boiS-
feaux du pays , qui font dix-neuf boilTeaux de Paris
& un peu plus.
Le bichet de Beaune auffi-bien que celui de Tour-
nus , ie diviie en ieize mefures ou boiffeaux du pays,
mais qui ne rendent à Paris que dix-huit boiffeaux.
Celui de Verdun , compofé de huit mefures ou
boiffeaux , rend quinze boiffeaux de Paris ; 6c le bi-
chet Aq Châlons fur Sône , qui contient huit mefures
du pays , eft égal à quatorze boiffeaux de Paris.
En quelques autres endroits de France , 6c notam-
ment à Lyon , le boiffeau le nomme bichet , quoique
fort différent des autres bichets dont on vient de
parler.
On fe fert auffi du bichet dans quelques endroits
de l'Alface 6c des trois évéchés: mais preSque par-
tout il varie pour la capacité &c le poids , Selon la
nature des grains : ainfi à Sarebourg le bichet de fro-
ment peSe 23 livres poids de marc, celui de meteil
22 , celui de Seigle 21 , & celui d'avoine 146 livres ;
6c à Toul le bichet de froment pefe 134 , de meteil
129, de feigle 1 19 , 6c celui d'avoine feulement 80
livres.
Bichet fe dit auffi en quelques endroits d'une me-
fure de terre qui s'eftime par celle d'un bichet de grain
qu'on y peut femer. Voye?_ Arpent. (G)
* BICHOV , ( Géog. ) fortereffe dans le Palati-
nat de Meiilau en Pologne , fur le fleuve Nieper.
* BICIOS , ( Hijl. nat. Injeclol. ) l'on appelle ain-
fi dans le Brelil un infecte fort petit & fort incommo-
de qui entre parles pores, s'infinue entre cuir & chair,
6c caufe des douleurs très-confidérables.
* B1CONGE, ( Hijl. anc. ) c'étoit une mefure
ufitée chez les anciens Romains ; elle contenoit dou-
ze Sextiers. Voyci CONGE.
* BICORNIGER , adj. ( Myth. ) c'eft ainfi qu'on
a Surnommé Bacchus , qu'on trouve quelqueSois re-
préfenté avec deux cornes , Symbole des rayons du
Soleil , ou de la Sorce que donne le vin.
BICQUETER , ce mot Se dit ( en Fenerie ) des
chèvres qui Sont leurs petits.
B I C O Q U E , S. S. c'eft ainfi qu'on appelle, dans
VArt militaire , une petite place mal fortifiée & Sans
defenSe. ((>)
* B I C U R E ( Géog. ) petite rivière de l'île de
France , dont les eaux loin très-bonnes pour les tein-
tures en écarlate..
* BIDACHE( Géog. ) petite ville de France ,
dans la bafle Navarre , proche le pays de Labour.
Hh
141
B I D
* BIDASSOA ( Géog. ) rivière d'Efpagne fur les
frontières de France , qui prend fa iource dans les
Pyrénées , tk le jette dans la mer entre Andaye &
Fontarabie. Cette rivière eft commune à la France
6c à l'Efpagne , depuis la convention de Louis XII.
& Ferdinand le catholique ; c'eft elle qui iorme file
des Failans , appellée Ue de la Conférence , depuis celle
que Louis XIV. & Philippe IV. y eurent eniemble.
BIDAUX, f. m. pi. {Hift.mod. ) terme de l'an-
cienne milice Françcile , pour deiigner un corps d'in-
fanterie , dont on failoit allez peu de cas. La chroni-
que de Flandre en parle au lui et de la bataille ôc de
la prile de Furnes en 1297. Jean de Gaure , qui s'é-
toit retiré dans cette ville ne vouloit point le rendre ;
mais Us bidaux lui jaillirent au col par-derrière , l'a-
battirent ôc le tuèrent. Guillaume Guyart, qui en fait
auffi mention fous les années 1298 , 1302 & 1304,
femble faire entendre qu'ils tiroient leur origine des
frontières d'Efpagne.
De Navarre & devers Efpagne
Reviennent bidaux à grans routes.
Il paroît par le même auteur , que ces foldats por-
toient pour armes deux dards tk une lance, & un
coutel à la ceinture. M. de Cafeneuve prétend après
Joan. Hoclemius, drns lés geftes des évèques de Ton-
gres , liv. 1. chap. xxjv. que les bidaux étoient ainfi
appelles à binisdardis, des deux dards qu'ils portoient.
Ne pourroit-t-on point croire que ce nom leur étoit
donné à caufe du pays d'où ils iortoient , des envi-
rons de la rivière de BidajJ'oa } Il eft certain du moins
que les auteurs les appellent plus ordinairement bi-
daux , bidaldi , que bidarii ; & Hocfemius eft le feul
qui leur ait donné ce fécond nom latin , pour l'appro-
cher davantage de fa prétendue étymologie. Il paroît
que les bidaux n'étoient pas de fort bonnes troupes ;
fouvent ils lâchoient pié , & lançoient leurs dards en
s'enfuyant. Bidaux retraient , c'eft-à-dire senfuyent&t
dards ruent , dit le même poète que nous avons déjà
cité ; & le continuateur de Nangis rend à peu près
le même témoignage à leur bravoure à la bataille de
CafTel , où il dit que les bidaux s'étant mis à fuir
félon leur coutume, caulerent quelque delordre dans
l'armée Françoiie : ce qui fait voir que ces bidaux
étoient des troupes légères, plus propres à harceler
l'ennemi qu'à l'attendre de pié ferme. Ménage a parlé
de ces bidaux dans Ion étymologie au mot pitaux.
Mémoire de VAcad. tom. X. dans une note. ( G )
* BIDBURG ou BIEDBURG, ( Géog. ) petite
ville du duché de Luxembourg.
* BIDERT-CAPP, ( Géog. ) petite ville fur la
Lohn, à 3 lieues de Marpurg , à la mailon de Heffe-
Darmftadt.
BIDENS ou TESTE CORNUE (Hijl.nat. Bot.)
genre de plante dont la fleur eft ordinairement com-
poiée de fleurons , c'eft-à-dire de plulieurs pétales
polés fur des embryons & loûtenus par le calice ;
il y a quelquefois des demi-fleurons à la circonfé-
rence. Les embryons deviennent dans la fuite des fe-
mences qui font terminées par deux pointes. Tour-
nefort Injl. rei herb. Voye^ Plante. ( / )
B1DENTALES, f. m. pi. (Hift. anc.) prêtres chez
les anciens R.omains. Les bidentales étoient des prê-
tres infatués pour faire certaines cérémonies, lorlque
la foudre étoit tombée quelque part & les expiations
preferites. Voye^r Tonnerre. La première & la prin-
pale de leurs fonctions , étoit le lacrifice d'une brebis
de deux ans, qui en Latin s'appelle bidens. De-là le
lieu frappé de la foudre s'appelloit bidemal; il n'étoit
point permis d'y marcher : on l'entouroit de murail-
les ou de palifTades : on y drelfoit un autel ; & les
prêtres qui faiioient ces cérémonies étoient nommés
bidentales , du même mot bidens. Ce nom le trouve
dans les inferiptions antiques, à emonijanclo deo Fi.dio
B I D
facrum Sex. Pompeiusfp.f.col. Mujfianus quinquennalls
de cur. bidentalis donum dédit. (G)
BIDET , f. m. ( Manège ) on appelle ainfi un che-
val de la plus petite taille. Bidet depojie, eft un petit
cheval de polte fur lequel on monte , 6c qu'on n'at-
telle point à la chaile de pofte. Bidet pour la bague ,
eft un petit cheval deftiné dans une Académie à mon-
ter pour courre la bague. Un bidet ne. pafïe guère trois
pies & demi de haut. Double bidet , eft un cheval entre
le bidet oc la taille ordinaire : il ne paffe guère quatre
pies & demi de haut. Les chevaux de cette taille fer-
vent ordinairement pour la promenade , l'arquebuie ,
& aux melfageries. Les meilleurs bidets viennent de
France. (^)
Bidet , f. m. ( en terme de Cirier) c'eft un infini-
ment de boùis , à peu près fait comme un fufeau ,
taillé à plufieurs pans par un bout pour former les
trous d'un cierge paical , où l'on met les clous d'en-
cens : de l'autre , il eft rond pour former les creux ,
& les angles des flambeaux, yoy.lafig. Pl.duCirier.
BlDET , ou charger le bidet ( au tnclrac ) le dit de
l'aftion par laquelle un joiieur met un grand nombre
de daines fur une même flèche. Ce terme autrefois
affez ulîté , n'eft plus d'ufage à préfent.
* BIDGOSTI, ou BYDGOSTY ou BROM-
BERG , ville de la grande Pologne.
* BIDIMA , ( Géog. ) l'une des îles des Larrons
dans l'Océan oriental.
BIDON , f. m. ( Commerce ) mefure des liquides
qui tient environ cinq pintes de Paris ; ce terme n'eft
guère d'ufage que parmi les équipages de marine ,
où ce vafe lert à mettre le vin qu'on donne à cha-
que plat de matelots. C'eft une efpece de broc de
bois relié de cercles de fer. Voye^ Broc. (G)
* BIDOURLE,( Géog. ) petite rivière du bas
Languedoc , qui le jette dans la mer Méditerranée.
* BIDOUZE,( Géog. ) rivière de laGafcogne,
qui fe jette dans la Gave près de Bayonne.
* BIECZ ( Géog. , petite ville de Pologne , dans
le Palatinat de Cracovie , fur la rivière de "Wiieloke;
elle eft remarquable par fes mines de Vitriol. Long.
38. 53. lat. 4g. 3o.
* BIEL , ou BIEN , ( Géog. ) ville de Suiffe fur 1*
Schufs , entre Soleure 6c Neufchâtel , dans le voili-
nage d'un lac , qui porte le même nom.
* Biel , ( Géog. ) petite ville d'Efpagne , dans le
royaume d'Aragon.
* BIELA , ville de l'empire Ruffien , capitale de
la province de même nom , fur la rivière cTOpska.
Long. S 2. 2à. lat. 55.
* Biela , ( Géog. ) ville de Bohème , à 7 lieues de
Prague.
* Biela, ( Géog. ) il y a deux rivières de ce nom;
l'une en Bohême , tk l'autre en Silelîe , & qui tombe
dans la Viftule.
* BIELA-OZERO,( Géog. ) c'eft un duché de la
Mofcovie , entre ceux de Novogrod-Veliki & de
Wologda , avec la capitale de même nom , près d'un
lac qui a 22 lieues de long & 12 de large. Long. 56.
40. lat. 58. 55.
* BÏELEFELD , ( Géog. ) capitale du comté de
Ravensberg en Weftphalie , à 5 lieues de Minden.
* BIELICA , ( Geog. ) petite ville du Palatinat de
Troki en Lithuanie.
* BIELLA ou BIELA , petite ville d'Italie dans
le Piémont , capitale duBellelè , près de la rivière de
Cerva. Long. z5. 33- lat- 4$- 2.2.
BIELLE , 1. f. ( dans les Arts méchaniques ) c'eft
une pièce de fer tournante dans l'œil d'une mani-
velle , laquelle à chaque tour fait faire un mouve-
ment de vibration à un varlet fur fon effieu , en le
tirant à foi ou le pouffant en avant : il y a des biel-
les pendantes attachées aux extrémités d'une pièce
de bois , lelquelles font accrochées par une des ex-
B I E
trémiîés à un varlet , &c par l'autre à un des bouts
d'un balancier. (X.)
* BIELSKO ( Géog. ) grande ville de la Polo-
gne , dans le Palatinat , & fur la rivière de même
nom. Long. 41. 41. lat. 5z. 40.
* BIELSKY ( Géog. ) ville forte & principauté
de Mofcovie, furl'Opska, entre Refchow , Smolens-
ko , Novogrod & la Lithuanie.
BIEN, 1. m. (en Morale. ) eit équivoque : il figni-
fie ou le plaifir qui nous rend heureux , ou la caufe du
plaifir. Le premier fens eft expliqué à l'article Plai-
sir ; ainfi dans l'article préfent nous ne prendrons le
mot bien que dans le lecond fens.
Dieu feul , à proprement parler , mérite le nom
de bien; parce qu'il n'y a que lui feul qui produife
dans notre ame des fenfations agréables. On peut
néanmoins donner ce nom à toutes les chofes , qui ,
dans l'ordre établi par l'auteur de la nature , font les
canaux par lefquels il fait pour ainfi dire couler le
plaifir jufqu'à l'ame. Plus les plaifirs qu'elles nous
procurent font vifs , folides , & durables , plus elles
participent à la qualité de bien.
Nous avons dans Sextus Empiricus l'extrait d'un
ouvrage de Crantor fur la prééminence des différens
biens. Ce philofophe célèbre feignoit qu'à l'exemple
des déeffes qui avoient fournis leur beauté au juge-
ment de Paris , la richeffe , la volupté , la fanté , les
vertus , s'étoient préfentées à tous les Grecs raffem-
blés aux jeux olympiques , afin qu'ils marquaient
leur rang , f uivant le degré de leur influence fur le
bonheur des hommes ; la richeffe étala fa magnifi-
cence , & commençoit à éblouir les yeux de les ju-
ges , quand la volupté repréfenta que l'unique mérite
des richeffes étoit de conduire au plaifir. Elle alloit
obtenir le premier rang , la fanté le lui contelta ; fans
elle la douleur prend bientôt la place de la joie : en-
fin la vertu termina la diipute , & fit convenir tous
les Grecs , que dans le fein de la richeffe , du plaifir,
& de la fanté , l'onferoit bientôt, fans le fecours de
la prudence & de la valeur, le jouet de tous les en-
nemis. Le premier rang lui fut donc adjugé , le fé-
cond à la fanté , le troifieme au plaifir , le quatrième
à la richeffe. En effet , tous ces biens n'en méritent le
nom , que lorfqu'ils font fous la garde de la vertu ;
ils deviennent des maux pour qui n'en fait pas ufer.
Le plaifir de la paffion n'eft point durable ; il eft fujet
à des retours de dégoût & d'amertume : ce qui avoit
amuic , ennuie : ce qui avoit plu, commence à dé-
plaire : ce qui avoit été un objet de délices , devient
fouvent un fujet de repentir & même d'horreur. Je
ne prétens pas nier aux adverfaires de la vertu & de
la morale , que la paffion & le libertinage n'ayent
pour quelques-uns des momens de plaifir : mais de
leur côté ils ne peuvent dilconvenir qu'ils éprouvent
fouvent les fituations les plus fâcheufes par le dégoût
d'eux-mêmes & de leur propre conduite , par les au-
tres fuites naturelles de leurs parlions , par les éclats
qui en arrivent, par les reproches qu'ils s'attirent,
par le dérangement de leurs affaires , par leur vie qui
s'abrège ou leur fanté qui dépérit , par leur réputa-
tion qui en fouffre , &: qui les expofe fouvent à tom-
ber dans la mifere. « L'empereur Vinceflas , nous
» dit l'auteur de YEjJai fur Le mérite & la venu , trou-
» voit du goût aux voluptés indignes qui faifoient
» fou occupation , & à l'avarice qui le dominoit.
» Mais quel goût put-il trouver dans l'opprobre avec
» lequel il fut dépofé , & clans la paralyiie où il lan-
» guit à Prague , & que les débauches avoient atti-
» rée ! Ouvrons les annales de Tacite, ces faites de
» la méchanceté des hommes : parcourons les re-
» gnes de Tibère , de Claude , de Caligula , de Né-
» ron , de Galba , & le deltin rapide de tous leurs
» courtifans ; & renonçons à nos principes , fi dans
» la foule de ces fcélerats infignes qui déchirèrent les
Tome II.
B I E
■4Î
» entrailles de leur patrie , & dont les fureurs ont
» enfanglanté tous les partages , toutes les lignes de
» cette hiftoire , nous rencontrons un heureux. Choi-
» fiffons entr'eux tous. Les délices de Caprée nous
» font-elles envier la condition de Tibère ? Remon-
» tons à l'origine de fa grandeur, fuivons fa fortune,
» conlidérons-le dans fa retraite , appuyons fur fa fin ;
» & tout bien examiné , demandons-nous , fi nous
» voudrions être à prêtent ce qu'U fut autrefois , le
» tyran de fon pays , le meurtrier des fiens , l'efclave
» d'une troupe de proftituées , & le protecteur d'une
» troupe d'efeiaves. Ce n'eft pas tout : Néron fait
» périr Britannicus fon frère , Agrippine fa mère , fa
» femme Odtavie , fa femme Poppée , Antonia fa
» belle-fœur , fes inltituteurs Séneque & Burrhus.
» Ajoutez à ces affaffinats une multitude d'autres cri-
» mes de toute efpece ; voilà fa vie. Auffi n'y ren-
» contre-t-on pas un moment de bonheur ; on le voit
» dans d'étemelles horreurs ; fes tranfes vont quel-
» quefois jufqu'à l'aliénation de l'efprit; alors il ap-
» perçoit ieTénare entr 'ouvert ; il le croit pourfuivi
» des furies ; il ne fait où ni comment échapper à
» leurs flambeaux vengeurs ; & toutes ces fêtes monf-
» trueufement fomptueufes qu'il ordonne, font moins
» des amufemens qu'il fe procure , que des diitrac-
» tions qu'il cherche ». Rien, ce lemble, ne prouve
mieux, que les exemples qu'on vient d'alléguer, qu'il
n'y a de véritables biens que ceux dont la vertu rè-
gle l'ufage : le libertinage & la paflion fement notre
vie de quelques inftans de plaifirs: mais pour en eon-
noître la valeur , il faut en taire une compenfation
avec ceux que promettent la vertu & une conduite
réglée ; il n'eft que ces deux partis. Quand le pre-
mier auroit encore plus d'agrément qu'on ne lui en
fuppofe , il ne pourroit fenfément être préféré au fé-
cond ; il faut pefer dans une jufte balance lequel des
deux nous porte davantage au but commun auquel
nous afpirons tous , qui elt de vivre heureux , non
pour un feul moment , mais pour la partie la plus
conlîdérable de notre vie. Ainfi quand un homme
fenfuel offufque fon efprit des vapeurs grofîieres que
le vin lui envoyé , & qu'il s'enivre de volupté , la
morale n'entreprendra pas de l'en détourner , en lui
dil'ant amplement que c'elt un faux plaifir, qu'il eft
paffager oc contraire aux lois de l'ordre : il répon-
drait bien-tôt , ou du moins il fe diroit à lui-même ,
que le plaifir n'eft point faux , puifqu'il en éprouve
actuellement la douceur; qu'il elt fans doute paffager,
mais dure allez pour le réjouir ; que pour les lois de
la tempérance & de l'honnêteté, il ne les envie à
perfonne , dès qu'elles ne conviennent point à fon
contentement , qui elt le feul terme où il afpire. Ce-
pendant lorfquc je tomberais d'accord de ce qu'il
pourroit ainii répliquer, fi je pouvois l'amener à
quelques momens de réflexions , il ne ferait pas
Ipng-tems à tomber d'accord d'un autre point avec
moi. il conviendrait donc que les plaifirs auxquels
il fe livre fans mefuie, èv d'une manière effrénée,
font fuivis d'inconvéniens beaucoup plus grands
que les plaifirs qu'il goûte : alors pour peu qu'il
fade ulage de la raifon , ne conclurra-t-il pas que
même par rapport à la fatisfaction & au conten-
tement qu'il recherche, il doit fe priver de certai-
nes fatisfaûions & de certains plaifirs ? Le plai-
fir payé par la douleur, difoit un des plus délicats
Epicuriens du monde , ne vaut rien & ne peut rien
valoir: à plus forte raifon, un plaifir payé par une
grande douleur,ou un feul plaifir paye par la privation
de mille autres plaifirs ; la balance n'eft pas égale. Si
vous aimez votre bonheur , aimez-le conltamment ;
gardez-vous de le détruire par le moyen même que
vous employez afin de vous le procurer. La rai ion
vous eft donnée pour faire le dilcernement des ob-
jets où vous le devez rencontrer plus complet &c
H h ij
144
B I E
plus confiant. Si vous me dites que le fentiment du
préfent agit uniquement dans vous & non pas la
penfée de l'avenir, je vous dirai qu'en cela même
vous n'êtes pas homme ; vous ne l'êtes que par la
raifon & par l'ufage que vous en faites : or cet ufa-
ge confifte dans le ibuvenir du paffé & dans la pré-
voyance de l'avenir , aufli-bien que dans l'attention
au préfent.
Ces trois rapports du tems font effentiels à notre
conduite : elle doit nous infpirer de choifir dans le
tems préfent pour le tems à venir , les moyens que
dans le tems paffé nous avons reconnus les plus pro-
pres à parvenir au bonheur; ainfi pour y arriver , il
ne s'agit pas de regarder précifément en chaque ac-
tion que l'on fait , ou en chaque parti que l'on em-
braffe , ce qui s'y trouve de plaifir ou de peine. Dans
les partis oppofes de la vertu ou du vice , il fe trou-
ve de côté &c d'autre de l'agrément &c du defagré-
ment : il faut en voir le réfultat dans la fuite générale
de la vie , pour en faire une jufte compenfation. Il
faut examiner , par exemple, ce qui arriverait à deux
hommes de même tempérament & de même condi-
tion , qui fe trouveroient d'abord dans les mêmes oc-
cafions d'embraffer le parti de la vertu ou de la vo-
lupté : au bout de foixante ans , de quel côté y aura-
t-il eu moins de peine ou moins de repentir, plus de
vraie fatisfa&ion & de tranquillité ? S'il fe trouve que
c 'eft du côté de la fageffe ou de la vertu , ce fera con-
duire les hommes à leur véritable bonheur , que d'at-
tirer leur attention fur un traité de morale qui contri-
bue à cette fin. Si la plupart des hommes , malgré le
defir empreint dans leur ame de devenir heureux ,
manquent néanmoins à le devenir , c'eft que volon-
tairement féduits par l'appas trompeur du plaifir pré-
fent , ils renoncent , faute de prévoir l'avenir & de
profiter du paffé , à ce qui contribueroit davantage
à leur bonheur dans toute la fuite de leur vie. Il s'en-
fuit de tout ce que nous venons de dire , que la vertu
eft plus féconde en fentimens délicieux que le vice ,
& par conféquent qu'elle eft un bien plus grand que
lui , puifque le bien le mefure au plaifir , qui feul nous
rend heureux.
Mais ce qui donne à la vertu une fi grande fupé-
riorité fur tous les autres biens , c'eft qu'elle eft de
nature à ne devenir jamais mal par un mauvais ufa-
ge. Le regret du paffé , le chagrin du préfent , l'in-
quiétude fur l'avenir , n'ont point d'accès dans un
cœur que la vertu domine ; parce qu'elle renferme
fes defirs dans l'étendue de ce qui eft à fa portée ,
qu'elle les conforme à la raifon , & qu'elle les foû-
met pleinement à l'ordre immuable qu'a établi une
fouveraine intelligence. Elle écarte de nous ces dou-
leurs , qui ne font que les fruits de l'intempérance ;
les plaiiirs de l'efprit marchent à fa fuite , & l'accom-
pagnent jufque dans la fojitude & dans Padverfité :
elle nous affranchit, autant qu'il eft poffible , du ca-
price d'autrui & de l'empire de la fortune ; parce
qu'elle place notre perfection , non dans une poffef-
fion d'objets toujours prêts à nous échapper , mais
dans la poffeffion de Dieu même , qui veut bien être
notre récompenfe. La mort , ce moment fatal qui de-
fefpere les autres hommes , parce qu'il eft le terme de
leurs plaifirs & le commencement de leurs douleurs ,
n'eft pour l'homme vertueux qu'un paffage à une
vie plus heureufe. L'homme voluptueux & pafîion-
né ne voit la mort que comme un fantôme affreux ,
qui à chaque inftant fait un nouveau pas vers lui ,
empoifonne fes plaifirs , aigrit fes maux , Se fe pré-
pare à le livrer à un Dieu vengeur de l'innocence.
Ce qu'il envifage en elle de plus heureux , feroit
qu'elle le plongeât pour toujours dans l'abyfme du
néant. Mais cette honteufe efpérance eft bien com-
battue dans le fond de ion ame par l'autorité de la
révélation , parle fentiment intérieur de ion indivi-
B I E
fibilité perfonnelle , par l'idée d'un Dieu jufte Se tout-
puiffant. Le fort de l'homme parfaitement vertueux
eft bien différent : la mort lui ouvre le fein d'une in-
telligence bienfaifante , dont il a toujours refpefté
les lois &c reffenti les bontés. Voye^ Sagesse 6*
Vertu. (X)
BIENS , en termes de Jurifprudence , & fur-tout dans
le Droit civil , font toutes fortes d'effets , richeffes ,
terres , poffefîions , &c. Voye^ Effet.
i°. Il y a deux fortes de biens ; les meubles &c les
immeubles. FoyeiMhVBLE & IMMEUBLE.
Les droits incorporels qui en effet ne font ni meu-
bles ni immeubles , fe rapportent eux-mêmes à l'une
ou l'autre de ces deux claffes , fuivant les divers rap-
ports qu'ils ont avec les meubles ou les immeubles
corporels : ainfi la faculté de réméré eft une a£Uon
immobiliaire , parce qu'elle tend à l'acquifition d'un
immeuble ; au lieu qu'un billet ou une obligation eft
réputée meuble , parce qu'elle a pour objet une fom»
me de deniers qui eft mobiliaire.
2°. Les biens fe divifent encore en propres , pater-
nels , héréditaires , ou de patrimoine ; en acquêts , ou
biens acquis , & en conquêts, Voye^ Propre , AC-
QUÊT 6- CONQUÊT.
Les biens fe divifent encore en corporels & incorpo-
rels (voyei Corporel 6* Incorporel )& enfin en
biens nobles, & en roturiers. Voye{ Noble , Rotu-
rier, &c.
Biens adventices, font tous ceux qui procèdent
d'ailleurs que de fuccefiion de père ou de mère ,
d'ayeul, ou d'ayeule. Voye^ Adventice.
Biens dotaux , dotalia , font ceux qui procèdent
de la dot, & dont l'aliénation n'eft pas permife au
mari. Voye-^ Dot.
Biens de fugitifs, font les biens propres d'un hom-
me qui fe fauve pour crime , & qui après fa fuite dûe-
ment prouvée ck conftatée , appartiennent au roi,
ou au feigneur du manoir. Voye^ Fugitif.
Biens paraphernaux , font ceux defquels la femme
donne la joiiiffance à Ion mari , à condition de les
retirer quand il lui plaît. Foyei Paraphernaux.
Biens profeàices , font ceux qui viennent de la fuc-
cefîion diredle. Voye^ Profectice.
Biens vacans, font ceux qui fe trouvent abandon-
nés , foit parce que les héritiers y renoncent, ou que
le défunt n'a point d'héritier. Voye^ Vacant. (H)
* On diftribue encore les biens en biens de ville &
biens de campagne : les biens de ville font les maifons
de ville , les marchandifes , les billets , l'argent , &c.
Les biens de campagne font les rentes feigneuriales ,
les champarts , les dixmes inféodées , les rentes fon-
cières , &c. les terres labourables , les vignes , les
prés , les bois , & les plants. Voye^ Maison , Mar-
chandise, &C. Foyei RENTE, CHAMPART, &C.
Voye?^ Terres labourables, Vignes , &c (H)
* BlEN , ( homme de) homme a" honneur , honnête
homme. ( Gramm. ) Il me femble que V homme de bien
eft celui qui fatisfait exa&ement aux préceptes de fa
religion ; ['homme d'honneur, celui qui fuit rigoureu-
fement les lois & les ufages de la fociété ; & Y honnête
homme , celui qui ne perd de vue dans aucune de fes
actions les principes de l'équité naturelle : l'homme
de bien fait des aumônes; l'homme d'honneur ne man-
que point à fa promeffe ; l'honnête homme rend la juf-
tice , même à Ion ennemi. L'honnête homme eft de
tout pays ; l'homme de bien & l'homme d'honneur ne
doivent point faire des chofes que l'honnête homme
ne fe permet pas.
* Bien , Très , Fort , ( Gramm. ) termes qu'on
employé indiftinûement en François , pour marquer
le degré le plus haut des qualités des êtres , ou ce
que les Grammairiens appellent lefuperlatif: mais ils
ne défignent ce degré ni de la même manière , ni
avec la même énergie. Très me paroît affeûé parti-
B I E
culierement au fuperlatif , & le rcpréfenter comme
idée principale ; comme on voit dans le Très -haut ,
pris pour M Etre fuprème. Fort, marque moins le fu-
perlatif, mais affirme davantage : ainfi quand on dit
il eft fort équitable , il femble qu'on faffe autant au
moins d'attention à la certitude qu'on a de l'équité
d'une perfonne , qu'au degré ou point auquel elle
pouffe cette vertu. Bien , marque encore moins le
fuperlatif que très ou fort : mais il eft fouvent accom-
pagné d'un fentiment d'admiration , il efl bien hardil
Dans cette phrafe , on déligne moins peut - être le
degré de la hardieffe, qu'on n'exprime l'étonnement
qu'elle produit. Ces diftinftions font de M. l'abbé Gi-
rard. Il remarque de plus que très eil toujours pofi-
tif; mais que fort & bien peuvent être ironiques ,
comme dans : c'eft être fort fage que de quitter ce qu'on
a pour courir après ce qu'on ne fauroit avoir ; c'eft
être bien patient que de Jbuffrir des coups de bâton
fans en rendre : mais je croi que très n'eft point du
tout incompatible avec l'ironie , 6c qu'il eft même
préférable à bien 6c h fort en ce qu'il la marque moins.
Lorfque fort 6c bien font ironiques , il n'y a qu'une
façon de les prononcer ; 6c cette façon étant ironi-
que elle-même , elle ne laiffe rien à deviner à celui
à qui l'on parle. Très , au contraire pouvant fe pro-
noncer quand il eft ironique , comme s'il ne l'etoit
pas, enveloppe davantage la raillerie , 6c laiffe dans
l'embarras celui qu'on raille.
BIENFAITEUR & BIENFAITRICE, en Droit ,
fe dit de ceux qui ont fondé ou doté une églife , ibit
paroiftiale ou conventuelle. Foye^ Fondateur &
Patron. (H)
BIENHEUREUX, ce terme a diverfes acceptions.
En Théologie , il lignifie ceux à qui une vie pure &
exempte de toutes louillures , ouvre le royaume des
cieux. Qui pourroit peindre l'étonnement de l'ame,
lorfque la mort venant à déchirer tout-à-coup le voile
qui l'environne dans un corps mortel , & à rompre
tous les liens qui l'y attachent, elle eft admhe à la
vifion claire 6c intuitive de la divinité i là le dévoi-
lent à les yeux les profondeurs mcompréhenlibles
de l'Être divin, la grandeur ineffable de fon unité,
& les richeffes infinies de fon clience : là difparoil-
fent les contradictions apparentes des mylteres, dont
la hauteur étonne notre raiton, 6c qui îont envelop-
pés & comme fcellés pour nous dans fes Ecritures :
là s'allume dans l'ame cet amour immenle , qui ne
s'éteindra jamais , parce que l'amour divin fera fon
aliment éternel. V. Paradis, Vision intuitive.
Le :erme de bienheureux eft auiîi pris pour ceux à
qui l'Eglife décerne dans les temples un culte , lubor-
donné néanmoins à celui qu'elle rend à ceux qu'elle
a canonifés. La béatification eft un degré pour arrive*
à la canonifation. f^oye? ces articles.
Bienheureux fe dit , en Morale , de ceux qui coulent
dans une heureufe tranquillité des jours purs &
exempts de nuages & de tempêtes , vaye[ Bonheur ;
ou plutôt bienheureux s'applique à des evenemens
particuliers ; heureux à tout le fyfteme de la vie.
On eft bienheureux d'avoir échappe à tel danger; on
eft heureux de fe bien porter. ( Â')
* BIENSEANCE, f f. en Mon;/*. La bienféance en
général confifte dans la conformité d'une action avec
le tems , les lieux , & les perfonnes. C'eft l'ufage qui
rend fenfible à cette conformité. Manquer à la bien-
féanct , expofe toujours au ridicule, 6c marque quel-
quefois un vice. La crainte de la gêne tait fouvent
oublier les bienféances. Bienféance ne le prend pasleu-
lement dans un fens moral : on dit encore dans un
fens phyfique, cette pièce de terre c/l a nui bienféance ,
quand ion acquilition arrondit un domaine , embel-
lit un jardin , &c. Malheur à un petit fouverain dont
les états font à la bienféance d'un prince plus puiffant.
Bienséance, f. m. terme d 'Architecture, On fe fert
B I E
24 5
de ce nom d après Vitruve , pour exprimer l'afpeft
dun édifice dont la décoration eft approuvée &
1 ordonnance fondée fur quelque autorité • c'eft ce
que nous appelions convenance. V. Convenance
Koyei auj/i Aspect. (P)
BIEN 1 ENANT , terme de Palais ', fynonyme kpof.
Jejjeur ou détenteur. Voyer l'un & l'autre. ( H\
BIENVEILLANCE, f. f. ( Morale. ) La bLveU.
lance eft un fentiment que Dieu imprime dans tous
les cœurs par lequel nous fommes portés à nous
vouloir du bien les uns aux autres. La f ocieté lui doit
fes liens les plus doux & les plus forts. Le principal
moyen dont s 'eft lervi l'auteur de la nature pour éta-
blir & conferver la focieté du genre humain , a été
de rendre communs entre les hommes leurs biens &
leurs maux , toutes les fois que leur intérêt particu-
lier n'y met point obftacle. 11 eft des hommes en qui
l'intérêt, l'ambition, l'orgueil empêchent qu'il ne
s'élève de ces mouvemens de bienveillance. Mais il
n'en eft point qui n'en portent dans le cœur les fe-
mences prêtes à éclorre en faveur de l'humanité &
de la vertu , dès qu'un fentiment fupérieur n'y fait
point d'obftacle. Et s'il étoit quelque homme qui n'eût
point reçu de la nature ces précieux germes de la
vertu, ce ferait un défaut de conformation fem-
blable à celui qui rend certaines oreilles infenfibles
au plaifir de la mufique. Pourquoi ces pleurs que
nous verfons fur des héros malheureux ? avec quelle
joie les arracherions-nous à l'infortune qui les pour-
fuit ! leur fommes-nous donc attachés par les liens
du fang ou de l'amitié ? Non certainement : mais ce
font des hommes & des hommes vertueux. Il n'en
tant pas davantage pour que ce germe de bienveil-
lance que nous poitons en nous-mêmes , fe dévelop-
pe'en leur faveur. (X) •
Bienveillance , ( Hifl. mod. ) terme ilfité dans
les ftatuts 6c dans les chroniques d'Angleterre pour
fignifier un prélent volontaire que les fujets font à
leur fouverain , chacun y contribue à proportion de
fa fortune. Voye^ SUBSIDE & Taxe.
La bienveillance prife dans ce fens , équivaut à ce
que les autres nations appellent fubfidium charitati-
vum, que les tenanciers payent quelquefois à leur
feigneur , le clergé aux éveques.
En France on appelle ce fecours don gratuit. Dans
les befoins de l'état , le clergé affemblé loit ordinai-
rement , foit extraordinairement , accorde au roi un
don gratuit indépendamment des décimes & autres
importions dont il eft chargé , & le recouvrement de
ces fommes eft reparti furies provinces eccléfiafti-
ques. Dans les provinces d'Etats , outre les fubfides
ordinaires , à la tenue des états on accorde auffi au
roi un don gratuit plus ou moins fort, félon les cir-
conftances. Voye^ Aides. (G)
* BIERNEBURG , ( Géog. ) ville de la Livonie.
* BIERRE , f. f. efpece de boiffon forte ou vineu-
fe, faite, non avec des fruits , mais avec des grains
farineux. On en attribue l'invention aux Egyptiens.
On prétend que ces peuples , privés de la vigne ,
cherchèrent clans la préparation des grains, dont ils
abondoient , le fecret d'imiter le vin, & qu'ils en ti-
rèrent la bierre. D'autres en font remonter l'origine
jusqu'aux tems des fables, 6c racontent que Cerès ou
* >liris en parcourant la terre, Oliris pour rendre les
hommes heureux en les inftuiifant , Cerès pour re-
trouver la fille égarée , enfeignerent l'art de taire la
bierre aux peuples à qui , faute de vignes, elles ne pu-
rent enfeigner celui de faire le vin: mais quand on
laiffe là les tables pour s'en tenir à l'hiftoire, on con-
vient que c'eft de l'Egypte que l'ulàge de la bierre a
paffé dans les autres contrées du monde. Elle rut d'a-
bord connue fous le nom de boifion Pclujienne, du
nom de Pelufe , ville fituée proche l'embouchure du
Nil, où l'on faifoit la meilleure bierre. Il y en a eu de
46
B I F
deux fortes : l'une , que les gens du pays nommoient
{ythum ; & l'autre , carmï. Elles ne différoient que
dans quelque façon , qui rendoit le carmi plus doux
èc plus agréable que le lythum. Elles étoient , félon
toute apparence , l'une à l'autre, comme notre bierre
blanchi à notre bierre rouge. L'ufage de la bierrc ne tarda
pas à être connu dans les Gaules , & ce fut pendant
Ion **-tems la boifîbn de les habitans. L'empereur Julien
gouverneur de ces contrées, en a fait mention dans
une allez mauvaife épigramme. Au tems de Strabon
la bierre étoit commune dans les provinces du nord ,
en Flandre , & en Angleterre. Il n'ell pas furprenant
que les pays froids , où le vin & le cidre même man-
quent, ayent eu recours à une boiilon taite de grain
& d'eau ; mais que cette liqueur ait palîé juiqu'en
Grèce , ces beaux climats fi fertiles en railin , c'eft
ce qu'on auroit de la peine à croire , fi des auteurs
célèbres n'en étoient garans. Ariftote parle de la
bierre & de fon ivreffe ; Théophralte l'appelle oïvcç
KptSîi;, vin d'orge; Efchyle & Sophocle , Çvd-oç fyvTw.
Les Elpagnols bùvoient auffi de la bierre au tems de
Polybe. Les étymologies qu'on donne du mot bierre
font trop mauvaifes ppur être rapportées ; nous nous
contenterons feulement de remarquer qu'on l'appel-
loit auffi cervoife , cervitia ; quant à les propriétés , fes
eipeces , &C la manière de la faire. Voye^ L'article
Brasserie.
* BIERVLIET , (Géog.) fortereffe avec port , dans
une île de la Flandre Hoilandoife , à peu de diftance
de 1'Eclufe. Long. zi. iz. lac. 5i. 25.
* BIES-BOS , (Géog.) on nomme ainfi une grande
étendue d'eau , formée autrefois par une inondation
de la mer; elle eft entre Dordrecht & Gertruydem-
berg , dans la Hollande méridionale.
* B I ESE , (Gicg.) rivière d'Allemagne , dans la
vieille marche de Brandebourg , qui le jette dans
l'Aland.
* BIESENTHAL , (Géog.) petite ville entre Berlin
ck; Bernau.
* BIES-SCADI,(G70£.)c'eltune partie des monts
Krapacks , qui léparent la Ruffie d'avec la Tranfil-
vanie.
* BIESSEN, (Géog.) ville de la haute Alface , à
peu de diitance du Rhin.
*BIETALA, (Géog.) ville & fortereffe de la gran-
de Tartarie , fur les frontières du royaume de Baran-
tola ; c'eft le lieu de la réfidence du grand lama ou
pontife des Tartares.
•BIETIGHEIM, (Géog.) petite ville avec un
château fur l'Ens , dans le duché de Wirtemberg.
BIEVRE. Voyei Castor.
BlEVRE, oifeau. Foyt7L HARLE. (/)
* Bievre , (Géog.) petite rivière de l'île de Fran-
ce , qui fe jette dans la Seine près de Paris.
BIEZ , f. m. (Arts méchaniq. & Hydrauliq.) eft un
canal élevé & un peu biaifé , qui conduit les eaux
pour les faire tomber lur la roue d'un moulin ; fa fi-
gure qui approche d'une bierre , fait croire que fon
nom en eft tiré.
On appelle arriere-bie^ les canaux qui font au-delà
en remontant. (K )
* BIFERNO, (Géog.) rivière du royaume de Na-
ples , dans le comté de Molife ; elle fe jette dans le
golfe de Venife.
BIFFER , en terme de Palais & même dans le langage
ordinaire , eft lynonyme à rayer ou effacer. (H)
* BIFORMIS, adj. (Mythol.) épithete que l'on
donnoit à Bacchus, parce qu'on le repréfentoit tan-
tôt jeune tantôt vieux , avec de la barbe ou fans bar-
be ; à moins qu'on n'aime mieux la faire venir des ef-
fets du vin , qui rend les uns trilles & furieux , les au-
tres aimables & gais.
BIFRE. Foyei Castor. (/)
BIGAME , adj. pris fubft. (Droit canoniq.) qui a
B I G
été marié deux fois , du Grec S'iycifj.ot, dont la racine
eft ■) kfiw , fe marier.
Selon la difcipline la plus confiante de l'Eglife , les
bigames font irréguliers & inhabiles à être promus aux
ordres facrés : ils ne peuvent pas même exercer les
fondions des ordres mineurs , félon le concile de Gi-
ronne.
On a quelquefois donné le nom de bigames à ceux
qui ont époulé une veuve , une femme publique ou
une temme répudiée ; & ils n'étoient pas moins cen-
lés irréguliers, que ceux qui avoient époulé fucceffi-
vement deux femmes , parce qu'on penfoit qu'une
elpece d'incontinence dans une veuve qui convole,
ou le deshonneur certain de la femme, rejailliffoit fur
le mari. Harmenopule met au nombre des bigames,
ceux qui après s'être fiancés à une fille , contractent
mariage avec une autre ou époufent la fiancée d'un
autre homme. S. Thomas décide que l'évêque peut
difpenler de la bigamie pour les ordres mineurs &
les bénéfices fimples : mais Sixte V. & le concile de
Trente ont décidé le contraire. Les clercs qui con-
tractent un mariage après avoir reçu les ordres fa-
crés , font auffi appelles bigames par reffemblance ,
quoiqu'il n'y ait point de véritable mariage. Le pape
Alexandre III. permet de rétablir dans les fondions
de leur ordre ceux qui font tombés dans cette faute,
après la leur avoir fait expier par une longue & ri-
goureufe pénitence. ThomaJJ'. difcipl. de régi. part. I.
liv. II. ch. viij. & part. IV. liv. II. ck. xx. Le terme
bigame fe prend encore dans un autre fens. Voy. BI-
GAMIE. (G)
BIGAMIE , f. f. (Jurifp.) eft la poffeffion de deux
femmes vivantes en même tems , contractée par le
mariage. Voye^ Mariage.
Ceux qui étoient convaincus de bigamie chez les
Romains, étoient notés d'infamie; & anciennement
ils étoient punis de mort en France. V. Polygamie.
Ce terme , en Droit , s'entend auffi de deux maria-
ges lucceffifs, ou du mariage de celui qui époufe une
veuve. Ce font , lelon les canoniftes , deux empêche-
mens de parvenir aux ordres ou à un évêché, à moins
qu'on n'en ait difpenfe. Ce point de difcipline eft fon-
dé fur ce que dit S. Paul , qu'un évêque n'ait qu'une
feule femme, /. Timoth. iij. z. Apojl. conjl. ij. iS.
Il y a deux fortes de bigamie : la réelle , quand un
homme fe marie deux fois ; & Y interprétative , quand
un homme époufe une veuve ou une femme débau-
chée , ce qui eft regardé comme un fécond mariage.
C'eft pourquoi le P. Doucine diftingue & remarque
qu'Irenée ayant été marié deux lois , doit avoir été
en ce lens coupable de bigamie , & qu'il fut évêque
de Tyr , contre la difpolîtion expreffe des canons. Il
montre , avec S. Jérôme , que ceux qui époufent deux
femmes, après qu'ils ont été baptifés , font bigames :
mais S. Ambroilè & S. Auguftin dilent expreffément
que celui-là eft bigame, qui époufe une femme qui
avoit déjà été mariée , foit avant loit après le baptê-
me. Hill. du Nellorianifme.
Les canoniftes prétendent même qu'il y a bigamie
qui opère l'irrégularité , fi un homme , après que fa
femme eft tombée en adultère , a commerce avec
elle , ne fût-ce qu'une fois.
Il y a une autre forte de bigamie par interpréta-
tion , comme quand une perlonne , qui eft dans les
ordres facrés ou qui s'eft engagée dans quelque or-
dre monaftique , le marie. Le pape en peut difpen-
fer , du-moins y a-t-il des occalions où il le fait. Il y
a auffi une forte de bigamie fpirituelle , comme quand
une perfonne poffede deux bénéfices incompatibles,
comme deux évêchés, deux cures, deux chanoine-
ries, fub eodem teclo , &c. (H)
BIG ARR ADIER , f. m. (Jardinage.) eft une efpece
d'oranger , dont les fruits d'un goût amer , que l'on
appelle bigarrades , font chargés de cornes éc d'ex-
B I G
eroifïances : la manière de les élever & de les culti-
ver eft la même que pour les orangers. (A )
BIGARRÉ , adj. en termes de Blajon , le dit du pa-
pillon 6c de tout ce qui a diverfes couleurs.
Ranerolles en Picardie , de gueules à un papillon
d'argent, miraillé & bigarré de fable. (A')
BIGARREAU, BIGARREAUTIER , cerafa duraci-
na; c'elt une efpece de cerifier. Foye^ Cerisier. (/£)
•BIGARRURE, DIVERSITE, VARIÉTÉ DIF-
FÉRENCE , ( Gramm. ) tous ces termes fùppofent
pluralité de choies comparées entr'elles. La différence
îuppofe une comparaison de deux ou plufieurs cho-
fes , entre lefquelles on apperçoit des qualités com-
munes à toutes , par lefquelles elles conviennent, &
des qualités particulières à chacune 6c même peut-
être oppoiées , qui les diftinguent. Diverflté, marque
afîémblage ou fucceffion d'êtres différens & conli-
dérés fans aucune liaifon entr'eux. Cet univers eft
peuplé d'êtres divers. Variété, fe dit d'un affembla-
ge d'êtres différens , mais coniidérés comme parties
d'un tout , d'où leur différence chaffe l'uniformité ,
en occalionnant fans ceffe des perceptions nouvel-
les. Il re^ne entre les fleurs de ce parterre une belle
variété. Biganure ne dhîere de variété , que comme le
bien & le ma! ; 6c il lé dit d'un alîémblage d'êtres
diiférens , m lis coniidérés comme des parties d'un
tout mal alTorti & de mauvais goût. Quelle différence
entre un homme 6c un autre homme ! Quelle diverflté
dans les goû's ! quelle bigarrure dans les ajuilemens !
BIGARRURES, f. f. (en Fauconnerie) lont des ta-
ches roulTes ou noires , ou des divcrlités de couleur,
qui rendent le pennage d'un oileau de proie bigar-
ré ; on dit ce faucon a beaucoup de bigarrures.
B I G E , f. m. ( Ht fi. anc. ) chariot à deux che-
vaux de front. Les Romains le nommoient bijuga ,
parce que les deux chevaux y étoient unis par le
même joug. La courfe des chars à deux chevaux fut
introduite dans les jeux olympiques en la xcm.
olympiade ; mais l'invention en étoit beaucoup plus
ancienne : puifque dans l'Iliade les héros combattent
fur ces fortes de chars. ( G )
* BIGE <J , ( Géog. ) royaume & ville dépendans
de l'empire du Japon , dans l'île de Niphon.
* BIGENIS, ( Géog. ) ville de Sicile , dans le val
de Démona , lur la rivière de Caflio-réale.
BIGNEToa BEIGNET, f. m. (Patffer) forte de
pâtiiTerie friande qui le fait de la manière luivante.
Prenez un litron de fleur de farine , fix œufs , de l'eau ,
oudelabierre,oudu lait, la valeur d'un demi-ieptier;
délayez le tout enfemble; ajoutez du lel convena-
blement ; prenez des pommes ue reinette, une demi-
douzaine des plus belles ; peiez-ies ; coupez-les par
ruelles ; ôtez les pépins 6c la pépinière ; trempez vos
nielles dans la pâte, ayez du fam-doux fondu tout prêt,
jettez vos ruelles de pommes enduits de pâ;e dans le
fain-doux; faites cuire ; (aupoudrezde lucre, 6c ler-
vez. Il y en a qui mettent le lucre dans la pâte.
On peut lé palier de pommes, 6c faire des beignets
avec la pâte feule , dont on enduit les tranches de
pommes. Au relie , il y a une infinité de façons de
faire des beignets.
BIGNONE , f. f. ( Hifl. nat. ) bignonia genre de
plante , dont e nom a été dérive de celui de M. l'ab-
bé Bignon , bibliothécaire du roi. La fleur des plan-
tes de ce genre cil monopétale irréguliere en forme
de tuyau ouvert par les deux bouts , 6c reffemblantc
aux fleurs labiées. Le piltil fort du calice & cil at-
taché comme un clou a la partie poltéricure de la
fleur. Ce piltil devient dans la fuite un fruit ou une
fihque partagée en deux loges par une cloilon mi-
toyenne, 6c remplie de femences applatics pour l'or-
dinaire , 6c garnies de deux ailes membraneufes.
Tournefort. Injl. reiherb. Foyer Plante. (/)
* BIGONZO ( Hiji. mod. Commerce ) on nomme
B I G
247
ainfi à Venife une mefure de vin qui y eft en ufage ;
le bigonro contient 4 quarti ou 16 Jécclu , ou environ
63 livres de liquide : mais lorfqu'il s'agit d'eau-de-
vie , un bigon7t ne vaut que 14 fecchi ou 56 livres.
BIGORNE , 1. f. ( dans les Arts méckaniaues en mé-
taux , comme fer , cuivre , argent , or , acier , &c. ) c'eft
tantôt la partie d'une enclume, tantôt une enclume
dont le corps eft long & menu ; à fa partie fupérieu-
re font deux branches qui font une elpece de 7 avec
le corps ; une de ces branches ou bras eft en cône ,
& l'autre en pyramide. Son pie dont la partie fupé-
rieure eft en embafe , fe termine en pointe & fe fi-
che dans un billot lur lequel la bigorne eft poiée. Le
milieu d'entre les branches forme une table quarrée,
qui fait la fonction d'enclume. Il y a des bigornes de
différentes groiTcurs. Les groiTes lervent à tourner 6c
contourner à chaud les giolles pièces de fer, qui ne
peuvent recevoir la forme circulaire fur la bigorne
de l'enclume ; parce que le corps de l'enclume qui
lui fert de baie eft trop gros. Les petites bigornes qui
fe polent fur les établis lervent à tourner & contour-
ner à froid les pièces petites Voye^ nos PL. a Orfè-
vre , de Coutelier, de Serrurier , de Taillandier , 6c vous
y trouverez & des enclumes à bigornes , 6c des bigor-
nes féparées en cent endroits.
Bigorne de Charron : cette bigorne n'a rien de par-
ticulier ; elle eft placée lur un billot de bois , & lert
aux charrons pour former les têtes des vis , quand ces
têtes font percées , & d'autres ouvrages de la même
nature.
BIGORNE à chantepure, outil de Ferblantier ; c'eft
une bigorne qui n'a qu'une gouge longue d'environ
quatorze ou quinze pouces, groffe à la baie d'un bon
pouce, & finiffant en pointe; cette bigorne iert aux
Ferblantiers pour an ondir & former en cône la^tieue
d'une chantepure. Voye^ lafig. y. PI. du Ferblantier.
BlGORNE groffe, autre outil de Ferblantier. Cette
bigorne n'a qu'une gouge : mais cette gouge eft ainfi
que la précédente , groiTe de fix pouces , longue de
deux pies , & lert aux Ferblantiers pour forger en
cône les marmites & les grofles caffetieres. Voye^ PI.
du Ferblantier , fig. _0 .
Bigorne, autre outil de Ferblantier; c'eft un
morceau de fer monté par le milieu fur un pivot aufîi
de fer , de façon que la bigorne forme deux bras , dont
l'un eft rond , & l'autre eft à vive quarre , c'eft à-dire
plat. Les Ferblantiers s'en lervent à diiférens ulages
de leur métier : au milieu de cette bigorne eft auiîi
percé un trou qui lert pour river; & ri y a vers la
partie quarrée plufieurs entailles un peu creufes fai-
tes dans le large de la bigorne , du côté plat ou à vive
quai 1 e , qui lervent pour plier les bords d'une pièce
de fer-blanc. Voyer lesfg. 3. (S. & J. PI. du Ferblan-
tier, qui reprélentent trois foi tes de bigornes.
La bigorne des Fourbifleurs eft auffi une enclume
à deux longs bras , finiiTant en pointe , 6c fervant à
tourner en rond les grofles pièces.
Bigorne , PI. Xtl. de [ 'Horlogerie , efpece d'en-
clume , dont les Horlogers, les Orfèvres 6c d'autres ar-
tiftes fe fervent. La partie C de cet outil fe met dans
l'étau , & les cornes A B lervent à forger des viro-
les ou des pièces courbées.
Bigorne à nœuds (en terme d'Orfèvrerie) font des
bigornes lur lefquelles on reftraint les nœuds d'une
pièce , voyei Nœuds ; fes deux bras fe terminent
par un bouton recourbé en haut , fur lequel s appuie
la partie de la pièce où l'on veut former le nœud.
Bigorne à pot à l'eau 6c autres vaùîéaux de la
même elpece , c'eft parmi les Orfivres en grojjcrie,
une bigorne dont une des extrémités eft un peu ar-
rondie lur le deffus feulement , & forme un petit cou-
de pours'infinuer plu* ailémentdans le vailieau pen-
dant qu'on en retraint le ventre. L'autre extrémité
eft recourbée environ d'un pouce ; c'eft fur ceile-ci
248
I G
qu'on place les bouges qui font trop petites pour
être planées au marteau.
BIGORNE à tourner ( en terme d^Orfevre en grojfe-
riej c'eft une bigorne, dont l'extrémité de la même
groffeur que le milieu , eft arrondie à fa furface fur
laquelle on courbe les dents des fourchettes , &
autres ouvrages dont la concavité doit être uni-
forme. Il y a une infinité d'autres bigornes , & dont
les noms varient félon les ufages qu'on en tait : mais
ce font prefque toutes des cônes de fer ou d'acier ,
dont la bafe & la hauteur font entr'eux dans une pro-
portion déterminée par la nature de l'ouvrage qu'on
doit travailler fur elles.
BIGORNER , verb. act. c'eft finir de reparer les
pièces fur la bigorne , comme un anneau de clef,
après qu'il a été percé. Cet anneau s'ouvre fur la
bigorne; ainfi des autres pièces femblables, ouvertes
& circulaires.
* BIGORRE ( Gcog. ) comté en Gafcogne , au
pié des monts Pyrénées , qui le féparent de l'Ara-
gon. Tarbe en eft la capitale.
BIGOT , adj. pris fub. ( Hijl. & Mor. ) nom qu'on
donnoit à une perfonne opiniâtrement attachée à
une opinion. Ce mot vient de l'Allemand bey-Gott ,
ou de l'Anglois by-God , qui lignifient également par
Dieu.
Camden rapporte une origine afTez finguliere de
ce mot : il dit que les Normands furent appelles bi-
gots , à l'occafion du duc Raoul ou Rollon , qui rece-
vant en mariage la princefle Gifla ou Gifele , fille de
Charles le fimpie , roi de France , & avec elle l'in-
veftiture du duché de Normandie , refufa de baifer
les pies du roi en ligne de vaflelage , à moins que le
roi lui-même ne l'aidât à faire cette a£Hon ; 6c que
prefle de rendre l'hommage en la forme ordinaire ,
il répondit : no by God, non par Dieu ; & que de-là
le roi prit occaiion de l'appeller bigod ou bigot ; nom
qui pafla enfui te à fes fujets.
Dans un fens moral bigot eft un terme odieux , qui
fignifie un faux dévot , une perfonne qui fcrupuleu-
fement attachée aux pratiques extérieures de la Re-
ligion , en viole les devoirs eflentiels. (G)
Bigot , en Marine, c'efl une petite pièce de bois
percée de deux ou trois trous , par où l'on paflé le
bâtard pour la composition du racage : il y en a de
différentes longueurs. Quelques-uns prononcent vi-
gots ; & d'autres les appellent virfaux , ou berceaux.
<Z)
Bigot , ( Commerce. ) en Italien bigontia ; mefure
pour les liquides dont on le fert à Venile. Le bigot eft
la quatrième partie de l'amphora , & la moitié de la
botte. Il faut quatre quartes ou quartoni pour le bi-
got , &c quatre trichauiera pour la quarte. Voy. Am-
PHORA. (G)
EIGUE, f. f. en Marine , c'eft une grofle & lon-
gue pièce de bois que l'on palfe dans les fabords aux
cotés des vaifleaux , lorfqu'il y a quelque chofe à
faire , foit pour les foulever , foit pour les coucher.
Bigues ; ce font aufli les mâts qui foûtiennent
celui d'une machine à mater. ( Z )
* BIGUBA , ( Giog. ) royaume de la Nigritie en
Afrique , arrofé par le fleuve Niger.
BIGUER un cheval , ( Manège. ) c'eft le troquer
but-à-but , le changer de la main à la main. ( V")
* BIHACH ou WIHICZ , ( Gcog. ) ville forte de
la Croatie appartenante aux Turcs , fur la rivière
d'Unna. Long. 33. Sx. lat. 44. 35.
BIHOREAU , f. m. ( Hijl. mu. Ornith. ) ardea ci-
nerea minor ; cet oileau a le dos , le defliis de la tê-
te , & le bec noirs ; le cou eft de couleur cendrée ;
la'gorge & le ventre font jaunes : il a une ligne blan-
che qui s'étend depuis les yeux jufqu'au bec , & une
hupe qui pend derrière la tête , & qui eft compofée
de trois plumes qui ont cinq pouces de longueur. Les I
B I L
ailes 6k la queue font de couleur cendrée , ck les pat-
tes d'un verd jaunâtre. Willughby croit avoir vu en
Hollande un petit oileau de cette efpece qui avoit
été pris dans le nid ; les pattes étoient vertes , & dé-
garnies de plumes julcju'à un pouce au-deflus de l'ar-
ticulation ; le doigt extérieur tenoit au doigt du mi-
lieu à la naiflance par une membrane ; l'ongle du
doigt du milieu étoit dentelé feulement du côté inté-
rieur , comme dans le héron gris ; l'iris des yeux
étoit d'un beau jaune ; les grandes plumes de l'aile
éroient noires, & avoient la pointe blanche ; les plu-
mes de la queue étoient d'un brun cendré , & elles
avoient la pointe blanche ; les plumes du dos & du
cou étoient noirâtres, à l'exception du tuyau qui
étoit roux ; il y avoit fur le cou des bandes roufles
allez larges ; les petites plumes de l'aile avoient la
pointe mêlée de blanc & de roux ; le menton étoit
blanc ; le ventre avoit la même couleur , Se étoit par-
lemé de taches noires ; les plumes de la gorge étoient
en partie noires , & en partie blanches. Il eft à croire
que les couleurs de cet oiieau changent avec l'âge ,
comme celles des autres. Ses œufs font blancs. On a
appelle cet oifeau nyclicorax , parce qu'il fait enten-
dre pendant la nuit des fons très-défagréables &c très
difeordans. Willughby, Ornith. V. OiSEAU. (/)
* BIJON , f. m. ( Hijl. nat. ) li l'on perce jufqu'au
cœur avec une tarière l'arbre appelle melche , il en-
fort une liqueur qu'on peut fubftituer à la térében-
thine, parce qu'elle a les mêmes propriétés : c'eft cette
liqueur qu'on appelle bijon.
BIJOUX , en Droit, voye^ BAGUES & JOYAUX.
Bijoux , f. m. pi. on entend parce terme tous les
ouvrages d'Orfèvrerie qui ne fervent que d'ornement
à l'homme ; comme tabatière , pomme de canne ,
étui , flacon , tablettes , navette , panier à ouvrage ,
&c. cette partie n'étant qu'un talent de mode & de
goût , ne peut avoir aucune règle fixe , que le capri-
ce de l'ouvrier ou du particulier qui commande.
BIJOUTIER , f. m. le Bijoutier s'appelle aufli
Joïtaillier ; & c'eft celui qui trafique de toutes fortes
de pierreries , de petits &z de jolis tableaux , de vafes
de porcelaine, &c. Les Bijoutiers prennent la faint
Louis pour le jour de leur fête , & ne font qu'un corps
avec les Orfèvres. On eft reçu Joùaillier-Bijoutier au
Châtelet devant le Procureur du Roi , après avoir
fait trois ans d'apprentiflage. Voy. Orfèvre.
BUS , f. m. ( Commerce. ) poids tout enlemble &
mefure dont on fe fert fur la côte de Coromandel,
auxlndes orientales. C'eft la huitième partie du man.
Un biis contient cinq céers , & un céer vingt-quatre
tols. /'ojq Man. (G)
BIL ou BILL , terme de Droit uûtê en Angleterre,
qui lignifie la déclaration par écrit d'un grief ou préju-
dice que le complaignant a louffert de la partie qu'il
dénonce , ou la dénonciation d'un délit commis en-
vers lui , par contravention à quelque loi ou règle-
ment de l'état.
Ce bit ordinairement fe préfente au mylord chan-
celier, fur-tout lorfqu'il s'agit d'injures atroces faites
à des perfonnes ayant juriidiftion : ce qui eft établi
par les réglemens qui concernent cette matière. Ce
bit contient l'expolition du fait & des dommages qui
en réfultent, avec la fupplique d'une permiluon de
procéder contre le défendeur, pour en obtenir la ré-
paration civile. Voye^ CHANCELIER & CHANCEL-
LERIE.
Le bil , en Parlement , fignifie un projet d'acte ou
d'arrêté , contenant des propositions que l'on pré-
lente d'abord aux chambres , afin qu'elles y loient ap-
prouvées , & puis au Roi , pour leur donner force de
loi. Voye{ PARLEMENT.
BlL de proj'eription , BlL d'appel, voye^ l'art. PROS-
CRIPTION , Appel. (H)
BILAN, f. m. ( Commerce. ), livre dont les mar-
chands ,
B I L
chands ; négocians & banquiers fe fervent pour écri-
re leurs dettes actives &c paflives.
Ce livre eft du nombre de ceux qu'on appelle li-
vres d'aides , ou livres auxiliaires ; & il fe tient en dé-
bit & en crédit , ainfi que le grand livre. On lui don-
ne divers autres noms, comme livre des échéances, li-
vre des mois ou des payemens , carnet. Foye^ Carnet,
Livre des Echéances, &c
Autrefois les marchands, négocians & banquiers
de Lyon , portoient fur la place du change un petit li-
vre qu'ils appelloient bilan des acceptations , lur le-
quel ils écrivoient toutes les lettres de change qui
étoient tirées fur eux à mefure qu'elles leur étoient
préfentées.
On appelle dans la même ville Ventrée ou l'ouver-
ture du bilan , le fixieme jour du mois des payemens,
jufqu'a u dernier jour duquel mois inclufivement on
fait le virement des parties ; chaque négociant écri-
vant de fon côté fur fon bilan les parties qui ont été
virées. Le bilan que les négocians portent fur la pla-
ce du change pour ce virement, s'appelle auflî carnet.
Voye^ Carnet & Virement.
Si un marchand ou négociant qui a coutume de
porter fon bilan fur la place , ne s'y trouvoit pas au
tems des payemens ordinaires , & fans caufe légiti-
me , il feroit réputé avoir fait faillite : & lorfqu'en
cas de faillite il veut s'accommoder avec fes créan-
ciers, il doit leur préfenter fon bilan, c'eft-à-dire,
un état au vrai de fes affaires.
Bilan fe dit encore de la folde du grand livre ou
d'un compte particulier , ou de la clôture d'un in-
ventaire , mais improprement ; on fe fert mieux du
terme de balance. Voye^ Balance. (G)
* BILES AO,(GVo£\) ville capitale & port delà Bif-
caye, à l'embouchure du Nervio qui s'y jette dans l'O-
céan , appelle en cet endroit merde Bifcaye. Il s'y fait
un très-grand commerce. Long. 14.30. lat. 4.3. 23.
* BILBER ou BERBER, ( Gèog. ) ville de Perfe
dans la province de Segiftan , à la fource de la riviè-
re d'Ilmentel.
BILBOQUET , f. m. terme d'ouvrier de Bâtiment ;
ils appellent ainli les petits carreaux de pierre , qui
ayant été fciés dans une pierre tendre , ou tranchés
dans une pierre dure , relient dans le chantier , 6c ne
font propres qu'à faire du moilon.
Ils donnent encore ce nom aux moindres carreaux
de pierre provenant des démolitions d'un vieux bâ-
timent. (/>)
Bilboquet, en terme de Doreur, eft un morceau
d'étoffe fine attaché à un petit morceau de bois quar-
ré , pour prendre l'or & le mettre dans les endroits
les plus difficiles, comme dans les filets quarrés, dans
les gorges 6c les autres lieux creux. Voye^ PI. du Do-
reur,JiS. iy.
Bilboquet, à la Monnoie , eft un morceau de fer
en forme d'ovale , tres-allongé , comme on le voit en
AB , PI. V.fig. 2. au milieu duquel eft un cercle en
creux de la grandeur du flanc que l'on veut ajufter,
& au centre un petit trou £, pour repoulfer le flanc
en-dehors , lorlque le flanc fe trouve trop attaché au
bilboquet. Il eft facile de concevoir le refte de cet inf-
iniment , qui n'a rien que de tres-limple.
Il y a autour d'une longue table une quantité de
bilboquets , où les taillereffes & les ajuileurs liment
les flancs. Voyt-t Ajuster , 6-Tailleresses.
Bi lboquet, terme d'Imprimerie : on défigne par ce
mot certains petits ouvrages de ville qui s'impriment,
tels que les billets de mariage , de bout-de-1'an , ou
adrefîes de marchands, avis au public, &c.
Bilboquet ; c'eft ciaç les Paumiers ia partie A de
l'inftrument appelle chèvre , fig. iS. cette partie eft
fixée perpendiculairement lur le banc B : fon fom-
met eft tourné en globe , dont la partie fupérieure eft
concave. C'eft dans cette concavité que le Paumier
Tome II.
B I L 249
| frappe fa balle , l'arrondit, & la forme quand il l'a
j faite. Voyei Chèvre.
Bilboquet ou Moule ; c'eft un infiniment dont
les Perruquiers fe fervent pour frifer les cheveux qu'ils
deftinent â faire des perruques. Cet infiniment eft
un morceau de bois tourné , long d'environ deux pou-
ces , arrondi par les extrémités : il eft de la groffeur
du pouce par les deux bouts , & un peu plus menu
par le milieu : c'eft fur ce milieu qu'on roule les che-
veux pour les frifer. Fbye{ la Planche du Perruquier.
Bilboquet, f. m. {Jeu ) petit bâton tourné , avec
une cavité à chacun de fes bouts ; on jette en l'air une
petite boule attachée à un fil qui tient au milieu du
bilboquet , & on tâche de la faire retomber & refter
dans une des deux cavités.
BILE , dans l'économie animale , eft une liqueur
jaune & amere , féparée du fang dans le foie , &
portée par les pores biliaires dans le conduit hépati-
que , & dans la vélicule du fiel, & eniuite déchargée
par le conduit commun ou canal cholidoque , dans ie
duodénum. Voye{ Foie , &c. Ce mot vient du Latin
bilis , que quelques-uns font Venir du Grec fc* , vio-
lence ; parce que les gens bilieux font mjets à la co-
lère ; d'autres le font venir du Latin bullin , bouillir.
On diftingue deux fortes de bile , V hépatique & la
cyflique : la première , plus particulièrement appel-
lée bile , eft féparée immédiatement dans le foie,
d'où elle eft rapportée dans le conduit hépatique :
la féconde appellee/?*;/ , eft féparée pareillement dans
le foie , d'où elle coule par le conduit cyftique dans
la véficule du fiel. Voye^ Fiel, Vésicule, Pore, &c
Voici ce qui a donné lieu à cette diftinction. Mal-
pighi regardoit comme une des fources de la bile , les
glandes de la véficule du fiel , & du conduit cyfti-
que & hépatique. Bartholin a aufti décrit ces glan-
des , mais Reverhorft n'en fait point mention , 6c
Ruifch n'a repréfenté que quelques lacunes fembla-
bles à des cryptes , &c. Sylvius avoit autrefois affir-
mé que lu bile étoit produite dans la véficule par l'ar-
tère hépatique ; d'autres ont penlé avec Malpighi ,
que cette bile étoit léparée par les glandes de la véfi-
cule du fiel ; mais Seger a fait voir par expérience ,
que la véficule refte vuide dans un chien vivant ,
dont on a hé le canal cyftique , ou qu'on n'y trouve
que du mucus , que rien ne coule des artères dans la
capacité vuide de la véficule , qui a été encore trou-
vée vuide , quand le canal cyftique obftrué , ou le
foie skirrheux , ont empêché qu'il ne fe fit une aufîî
abondante lécrétion de bile qu'à l'ordinaire : delorte
qu'il eft probable que ces glandes féparent plutôt
un mucus qui enduit le tiflu réticulaire de la vé-
ficule , & le met à l'abri de l'acrimonie mordi-
cante que la bile acquiert en croupiffant. Refte
donc que la bile qui le trouve dans la véficule du
fiel foit apportée par des conduits particuliers ou
par le canal cyftique. Il n'eft pas douteux que ces
conduits qu'on nomme hépati-cyjliques ne fe décou-
vrent dans la plupart des animaux : mais quant à
la diftinction qu'en fait Bianchi en cyfl-hépatiqua , \ e-
nant des principales branches du conduit hépatique ,
& s'inlérant autour du col de la vélicule, pour y por-
ter là bile, & en hépati-cyfliques , venant des plus pe-
tits rameaux du canal hépatique pour s'ouvrir çà &
là au fond de la véficule, & y porter la bile ; cette
diftinction ne paroit pas avoir lieu dans l'homme &
dans les animaux femblables à l'homme. En effet , il
eft démontré qu'il n'y a pas de canal intermédiaire
entre le conduit hépatique 6c la vélicule dans l'hom-
me ni dans le chien ; car le tbuffle pouffé parle ca-
nal cholidoque , ne change rien dans la véficule ,
le canal cyftique étant lié ; au lieu que dans le bœuf
on la voit fur le champ s'élever , ttc. L 1
que paffe donc dans la vélicule du fiel parle conduit
cyftique comme on peut le déduire de ce que nous
li
a50
B I L
venons de dire : par conféquent la différence qui s'ob-
ferve entre la bile hépatique & la cyjlique,ne peut pro-
venir que de ce que celle-ci reçue dans la véficule du
fiel y féjourne ; la partie la plus fine s'en exhale ; le rel-
te comme il arrive à une huile légèrement alkaline
dans un lieu chaud , devient acre , fe rancit , s'épaii-
fit , devient plus amer , & d'une couleur plus foncée.
La véiicule ne touche point à l'eftomac , mais au
commencement du duodénum en defcendant. Lorf-
que l'eftomac diftendu vient à occuper dans le bas-
ventre qui eft déjà très-rempli , un plus grand efpa-
ce, il prefle le foie, & le duodénum comprime la
véiicule du fiel , & en exprime le lue qu'elfe con-
tient. Ainfi la bile coule de la véfkule dans le canal
cholidoque par un chemin libre , & avec plus de fa-
cilité fi l'homme eft debout ; parce qu'alors le fond
de la véficule eft fupérieur.
On a crû que la bile ne le féparoit pas du fang, mais
du chyle ; il n'y a pas de raifon qui prouve ce fenti-
ment. II peut le faire qu'une portion du chyle pafle
dans les veines méfaraïques ; cependant la plus gran-
de partie pafle dans le réfervoir & dans le canal tho-
rachique : de plus , dans les animaux qui meurent
de faim , il fe fépare une grande quantité de bile.
La bile eft filtrée par ^ramifications de la veine-
porte , ou par celle de l'artère hépatique : les auteurs
qui ont foûtenu que c'étoit des artères que la bile fe
féparoit , n'ont apporté aucune raifon que celle de
l'analogie de toutes les autres fécrétions qui le lont
par des artères. Il eft conftant que la bile vient de la
veine-porte: car i°. les ligatures qu'on a faites à l'ar-
tère hépatique , n'ont pas fupprimé la filtration de la
bile : i°. les inje&ions faites dans le foie par la veine-
porte , fortent par le pore biliaire : mais celles que
l'on fait par l'artère hépatique paflent plus difficile-
ment ; cependant il faut avoiier que la même diffi-
culté ne s'oppofe pas au fouffle : 3 °. il y a une étroite
liaifon entre les ramifications du canal biliaire & de
la veine-porte ; 40. il y a une grande difproportion en-
tre les ramifications du canal biliaire & celles de l'ar-
tère hépatique , lefquelles font moins grofles qu'elles
ne devroient l'être à l'égard de l'aflemblage des pores
biliaires : 50. la veine-porte a une conformation ar-
térielle. Toutes ces raifons font voir que la bile fe fil-
tre dans les extrémités de la veine-porte ; on pourroit
ajouter à tout cela , qu'en gonflant par le fouffle la
veine-porte , toutes les véficules crèvent , & l'air fe
glifle entre la membrane commune & la propre.
Pour favoir pourquoi la filtration de la bile fe fait
par des veines & non par des artères, il faut exami-
ner tout ce qui arrive au fang autour des inteftins.
i°. Le fang eft en trop grande quantité dans le mé-
fentere , dans les parois du ventricule , dans la rate ,
dans le pancréas , &c. 20. Le lang perd fa partie la
plus fluide , qui s'échappe par les couloirs ; refte
donc la partie rouge , la lymphe groffiere , & la ma-
tière huileufe la moins ténue. 3°.Par des obferva-
tions réitérées , nous pouvons prouver que lorlque
dans ces circonftances ainfi détaillées , le fang eft
échauffé dans quelque couloir par fon long féjour &
par la lenteur du mouvement; il s'y forme une ma-
tière gommeufe , favonneufe , pénétrante : il faut
donc que cette matière étant formée dans les parties
qui envoyent leurs veines à la veine-porte , elle fe
fépare des veines , ou qu'elle rentre dans le fang ar-
tériel : or il eft néceflaire pour dépurer le fang &
pour la digeftion , que cela n'arrive pas ; donc il faut
que les veines faflent la fécrétion de la bile.
Il y a différentes opinions fur la manière dont la
bile eft fépaiée dans le foie : quelques-uns croyent
que les pores des glandes fécretoires du foie ont une
certaine configuration & une certaine grandeur , à
laquelle les parties de la bile qui coulent avec le fang,
iont pi o[; 01 données , de manière qu'elles y lont adrru-
B I L
fes , tandis que toutes les autres gliffent par-deflus*
D'autres avec Sylvius & Heifter, ne trouvant aucune
différence dans la configuration , & croyant que les
pores de tous les vaifleaux font circulaires , & que
toutes fortes de particules peuvent palfer au travers,
fi elles ne font pas d'un volume trop confidérable ,
ont eu recours à une autre hypothefe ; ils ont donc
fuppofé qu'il y avoit un ferment dans le foie, par le
moyen duquel les particules du fang qui paflent à
travers les conduits fécretoires , prenoient la forme
de la bile: mais c'eft réfoudre une queftion par
une nouvelle. D'autres ont eu recours a une autre
hypothefe , &C ont afiuré que les différentes parties
dont le fang de la veine-porte eft compofé , font tou-
tes appliquées aux ouvertures des canaux fécretoi-
res qui fe trouvent aux extrémités de la veine-porte
& à celles de l'extrémité des ramifications de la vei-
ne-cave ; que les pores de la veine-cave étant trop
petits, & ceux de la veine-porte aflez grands pour ad-
mettre certaines parties , elles font par ce moyen fé-
parées des autres , & qu'expolées alors à l'action des
vaifleaux biliaires , il en réfulte une humeur diffé-
rente du fang , que l'on appelle bile , &c. Le docteur
Keil penfe que la fécrétion de la bile vient d'une at-
traction violente entre les parties dont elle eft com-
pofée ; & il obferve que fi l'artère cœliaque avoit
porté au foie tout le lang deftiné à la fécrétion de
la bile , la vîtefle du fang dans cette artère , par rap-
port à fon peu de diftance du cœur , auroit empê-
ché la fécrétion d'une humeur vifqueufe , comme la
bile : c'eft pourquoi, la nature a deftiné la veine-
porte à cet ufage ; & c'eft par elle que le fang eft por-
té des branches des artères méfentériques & cœlia-.
ques au foie ; en conféquence de quoi , le fang a beau-
coup de chemin à taire à travers les inteftins , l'efto-
mac , la rate , & le pancréas , avant que de parvenir
au foie. Ainfi fa vîtefle eft extrêmement dimi-
nuée ; & les particules qui doivent former la bile y
ont un tems luffifant pour s'attirer les unes les au-
tres , & pour s'unir avant que d'arriver aux vaif-
leaux qui les féparent. Mais la nature prévoyante a
encore cherché à diminuer cette vîtefle du fang , en
rendant les capacités de tous les rameaux d'une ar-
tère prifes enfemble plus grandes que celle de cette
artère : ainfi la fomme des branches produites par
l'aorte , eft à l'aorte comme 102740 à 1 00000 ; &
même comme fi cette proportion étoit encore infuf-
fifante , elle a encore pris foin d'augmenter le nom-
bre des branches de l'artère méfentérique. En effet
fi on examine ces branches dans un cadavre , on trou-
vera que la fomme des branches eft plus que le dou-
ble de celle du tronc : c'eft pourquoi la vîtefle du
fang eft moindre de moitié dans les branches que
dans le tronc. Cet auteur montre encore par un au-
tre calcul, que le fang eft au moins 26 minutes à
paffer de l'aorte au foie ; au lieu que dans l'artère
qui va directement de l'aorte au foie , il n'eft guère
plus que la moitié d'une féconde à faire ce chemin;
favoir le 243 7 du tems qu'il met à fon autre paffage :
d'où il paroît que le fang n'eft pas en état de former
la bile quand il court directement de l'aorte au foie ,
& qu'il falloit plus de tems , & un mouvement plus
lent , pour pouvoir féparer les parties bilieufes. Il
ajoute que fi les humeurs avoient exifté dans les
glandes en même qualité qu'on les trouve après la
fécrétion, la nature n'auroit pas tant travaillé pour
retarder la vîtefle du fang. D'ailleurs la bile tire un
autre avantage del'ufage delà veine-porte ; car en
traverfant tant de parties avant que d'arriver au
foie , elle dépofe beaucoup de fa lymphe ; & par
ce moyen , les particules étant forcées d'être plus
proches les unes des autres , font plus vivement unies.
Tout cela eft bien fyftématique.
Quant à la quantité de la bile qui fe fépare dans le
B I L
foie, nous ignorons, comme Fobferve très-bien le doc-
teur Haller , la vîteffe avec laquelle le fang du méfen-
tere circule ; nous ignorons les caufes qui peuvent le
retarder ou l'accélérer : nous n'avons pas pour nous
guider des diamètres affez exactement pris , &C qui
foient affez conftamment vrais , <k. toujours les mê-
mes ; & par coniéquent nous ne pouvons rien pro-
noncer en général fur la quantité de bile qui fe filtre
par le foie dans un efpace donné , fans rifquer de
nous tromper dans tous nos calculs.
Voyons maintenant les expériences que l'on a fai-
tes fur la bile.
On fait par expérience que la bile mêlée avec des
acides, change elle-même de nature avec eux. La plu-
part des efprits acides minéraux & le mercure fubli-
mé , coagulent la bile & la font diverfement changer
de couleur. Elle fe diffout par les fels acides, fi ce
n'eft dans certains animaux herbivores , dans lefquels
il doit naturellement fe trouver beaucoup d'acide ;
& c'elt peut-être pour cette raifon que l'huile de tar-
tre par défaillance coagule la bile cyftique du bœuf,
fuivant Haller ; feul cas , à la vérité , où cette hu-
meur m'ait paru contenir en foi un acide , qu'aucune
autre épreuve ne développe & ne manifefte , & qui
eft apparemment fi peu confidérable , que la bile n'en
corrige guère moins les qualités acefcentes des her-
bes dont vivent ces animaux ; car d'ailleurs c'eft un
fait confiant que les autres alkalis , & principale-
ment les alkalis volatils , augmentent les propres
qualités de la bile , fon goût , fa couleur , fa fluidité ;
indice évident de l'affinité qui fe trouve généralement
entre la bile &c les matières alkalines. Mais que la bile
foit mêlée avec de l'eau , ou qu'elle foit pure , le mé-
lange des fels , même fimples , la fait paffer à-peu-
près par les mêmes changemens , & à fon tour elle
ne communique pas moins fes vertus aux autres fucs
qui fe mêlent avec elle dans les inteftins. Au contrai-
re , l'eau fervant de diffolvant à la bile , la rend plus
propre à atténuer les huiles , la térébenthine , & tant
d'autres corps gras, réfineux, ennemis de l'eau, &
à les divifer en une fi grande ténuité , que tous ces
corps qui ne pouvoient auparavant fe mêler à l'eau ,
s'y unifient enfuite parfaitement. Ce n'eft donc que
par cette faculté de mêler les huiles avec l'eau ,
que cette humeur peut les détacher des corps aux-
quels elle adhéroit , & que le fiel de bœuf fait tout
ce que le meilleur lavon pourroit faire. Le favon
commun eft fait d'huile tirée par expreffion , & de loi
rixe ; le favon de Starkey eft compofé d'huile diftil-
lée , & de fel fixe ; enfin ce favon qui eft communé-
ment connu fous le titre defoupe de Vanhelmont , eft
fait de fel alkali volatil , & d'huile très-atténuée. Or
la bile eft compolée d'huile humaine , telle que notre
fang la donne , & du fel qu'il fournit , qui eft une ef-
pece de fel ammoniac volatil ; & par coniéquent cette
humeur approche plus du dernier favon que des au-
tres, & doit agir comme un vrai favon humain. C'eft
une vérité que les Teinturiers mêmes n'ignorent pas :
il y a long - tems qu'ils ont obfervé qu'ils ne pour-
roient jamais faire prendre la teinture aux laines ré-
centes , parce qu'elles font fort grafTcs , s'ils n'a voient
foin auparavant de les laifTer tremper clans une leffive
urineufe & bilieule , jufqu'à ce que tous les pores de
la laine (oient purgés en quelque forte des matières
poifTeufes &: rances qui les bouchent ; îk ils s'y pren-
nent auffi de la même manière, avant que de tein-
dre les étoffes tachées d'huile , & principalement
ces fils de foie qu'on tire des capliiles glutineufes qui
fe trouvent dans la bouche des vers - à - foie ; parce
qu'en effet la glu qui fe prépare dans les petits vaif-
feaux inteftinaux de ces capfules , enduit ces fils d'un
Uniment vifqueux qui ne le marie point avec l'eau.
La myrrhe , la réline , les gommes bdellium , fagape-
num , opopanax , la gomme lacque , les peintures ,
Tome II,
l L
251
les fards , toutes les matières gluantes broyées avec
de la bile fur une pierre de porphyre , fe détrempent
facilement dans l'eau ; & bien des choies qui feraient
inutiles autrement , deviennent par cet art propres
à defhner , à farder , &c. Il y a long-tems qu'on a vu
que le fiel de bœuf pouvoit être employé au lieu de
gomme gutte pour les peintures fines : mais pour
le mêler, il faut toujours une certaine agitation.
L'huile & l'eau font deux corps plus pefans que la
bile : de là vient que fans quelque trituration , il n'efl
pas pofïïble de les mêler tous trois enfemble ; mais
le moindre broyement fuffit pour faire ce mélange ;
& les intefHns n'en manquent pas , puiiqu'ils ont un
mouvement périftaltique très-propre à procurer ce
broyement. Drelincourt a tiré de la bile { d'eau ,
~ d'huile & de fel volatil , ^ de fel fixe. Pechltn,
~ d'eau ; Verheyen -f d'eau , empreinte dVr d'huile ,
j^t d'huile empyreumatique, point ou très-peu de fel
volatil , de fel fixe impur ~ = à ~6l , de terre ^~-9 :
d'autres dilènt avoir tiré de la bile des efprits inflam-
mables , des fels volatils en affez grande quantité „
du foutre , un peu de fel fixe , & de la terre ; & après
la putréfaction , des fels volatils & des efprits. Pour-
quoi n'ont-ils pas donné les poids exafts de chacune
de ces matières ? Baglivi parle auffi de beaucoup de
fels volatils & fixes. Boerhaave ayant expolé à une
chaleur douce une certaine quantité de bile cyflique ,
obierva qu'il s'en évapora les \ de fon poids fous la
forme d'une eau ou d'une lymphe à peine fétide ou
acre. Le réfidu formoit une mafle gluante, luilan-
te , d'un jaune tirant fur le verd , amere , qui ne fer-
mentoit ni avec les acides , ni avec les alkalis. Cette
efpece de glue diftillée , donna beaucoup d'huile ,
mais peu de fel volatil. De douze onces de bile, il
fortit neuf onces d'eau , deux onces \ d'huile , & un
ou deux gros de fel fixe : ce qui revient à | d'eau ,
plus d'j d'huile , & un ou ^ de fel. Les expériences
fur leiquelles l'on peut compter , font ici précifément
celles qui s'accordent le mieux enfemble , & nous
apprennent clairement que l'eau fait toujours la plus
grande portion de la bile , que l'huile eft environ §•
de l'eau , le fel volatil — ; dans une bile récente &
non putréfiée , l'huile empyreumatique ~, le ici rixe
,4-j. Voyons fi le favon ordinaire n'offrirait pas à peu
près les mêmes proportions. Il eft beaucoup plus acre
que la bile ; le Ici lixiviel &l'huile,font en partie égale
dans le favon. Suppofons qu'on mette partie
d'huile d'olive, ou autre ; & d'huile de tartre par dé-
faillance , pour faire ce favon commun : ce qui fe-
rait fuivant Dale , une proportion triple de celle qui
fe trouve dans la bile ; Sx. fuivant Boerhaave, une pro-
portion plus conlidérable : car de trois onces d'huile ,
on met cinq fcrupules de fel fixe ; de forte que dans
le favon, l'huile eft au fel comme 1920a 100: mais
dans la bile de l'homme , l'eau eft à l'huile comme
10 à 2 ; au lel , comme 72 à 1 , ou un peu moins.
La bile avoit fans doute befoin d'une grande quan-
tité d'eau , pour ne pas former un vrai lavon folide
qui fe coupât au couteau comme le favon ordinaire ,
& dont on eut pu fe fervir fans le détremper. C'eft
en effet un lavon , mais fluide , & tel en un mot , qu'il
n'a befoin ni d'eau , ni d'un délayement étranger ,
pour tous les ufages auxquels il eft deftiné par la na-
ture. Remarquez que dans tout ce que nous avons
dit , il ne s'agit que d'une bile fraîche & bien con-
ditionnée, que la maladie n'a aucunement altérée,
& que la putréfaction n'a pas changée : car fi toutes
les parties du corps humain folides ou liquides une
fois corrompues donnent beaucoup de fel volatil ,
eft il lurprenant que la bile naturellement plusalcalef-
centequ'aucun autre lue , fourniffe une grande abon-
dance de ce même fel ? Je ne doute pas que tant de
contradictionsqui fe trouvent dans les auteurs au fujet
de l'analyfe chimique de la i:U, ne viennent fou vent
Iiij
252
I L
de ce que les uns auront opéré fur une bile fraîche ,
& les autres fur une bile vieille & comme pourrie ;
ibuvcnt auffi de l'inexactitude ou de l'ignorance
des artiftes ; pour ne rien dire de la mauvailè foi de
ceux qui ont des fyflèmes favoris à protéger.
Huile. Le rélidu de l'évaporation de la diftillation
de la bile eft fi huileux , qu'il en eft inflammable. Les
calculs de la véficule du fiel prennent lèu,&: même fe
confumenttoutentiers.J'aiobfervé la même choie lur
d'autres calculs fortis par les felles à la fuite de vio-
lentes coliques duodénales & hépatiques , & qui con-
féquemment étoient faits d'une bile hépatique plus
aqueufe , épaiffie & putréfiée , foit dans le méat cho-
lidoque , foit dans l'inteftin. Homberg n'a t-il pas tiré
de la bile une graine verte & folide ? Hartman n'a-
t-il pas vu dans les cochons un globe de graille à
l'endroit de la véficule ? enfin l'origine de la bile , qui
eft conftamment l'huile de Pépiploon fondue , n'eft-
elle pas la preuve évidente de ce que nous avan-
çons , pour ne pas répéter ici les expériences pré-
cédentes ?
Sel. Il s'en trouve très-peu dans la bile, & toujours
de diverfe nature. L'un , iuivant la nature du iel hu-
main , a de l'affinité avec le fel ammoniac , dont il
ne diffère qu'en ce qu'il s'alkalife par la diftillation
feule : l'autre eft un fel fixe terreftre ou mêlé de ter-
re , comme on l'a déjà infinué. On ne découvre au
microfcope ni l'un ni l'autre , fuivant le témoignage
vérifié de Leirwenhoeck. L'amertume de la bile ne
vient point de fon fel , mais de fon huile , qui à force
d'être broyée & échauffée dans les vaiileaux qui la
préparent, dans le tamis qui la filtre , & le réfervoir
qui la garde , devient rance & arrière : ce qui eft con-
firmé par les deux faits fuivans. La bile du lion & des
autres animaux féroces eft très-amere , parce qu'elle
fubit dans leurs vaiileaux l'action de rellbrts très-
violens ; au lieu que dans les perfonnes fédentaires ,
& qui ont le fang doux, on la trouve le plus fouvent
aqueufe & infipide.
Les efprits de la bile font une huile fi atténuée ,
qu'elle coule comme l'eau & avec l'eau , qu'elle rend
laiteufe , comme on l'a vu dans les expériences de
Vieuffens & de Verheyen. En effet, la blancheur du
lait vient de l'huile étroitement unie à l'es parties :
auffi cette blancheur diminue & difparoît avec l'hui-
le , comme le fait voir clairement la coagulation
du lait , dont la férofité dépouillée des parties hui-
leufes qui font le beurre ôc le fromage , devient en-
fin verdatre. Il y a de plus beaucoup d'air dans la
bile. Un calcul de la véficule du fiel , donne 648 fois
plus d'air que fon volume ; ceux de la veffie urinaire,
comme un peu moins rares , ou plus compactes , en
contiennent un peu moins : cela ne paile pas 645 ,
fuivant les expériences de Haies.
La bile eft une liqueur très-importante pour l'ceco-
nomie animale. Le docteur Woodward, qui a obfervé
très - exactement fes effets par tout le corps , ne fait
pas difficulté d'attribuer plulieurs maladies à la mau-
vailè difpofition de la bile : il la regarde comme une
des principales fources de la vie de l'animal ; d'où il
conclut qu'elle eft le principe effentiel de la bon-
ne ou mauvaiie difpofition du corps : mais les anciens
ne la regardoient que comme un excrément inutile.
Plufieurs des modernes , à caufe de la petite quan-
tité de la bile, ont cru fauffement que cette fécrétion
n'étoit pas la feule fonction à quoi un vifcere auffi
confidérable que le foie , tût deftiné. Le docteur Keil
obferve que dans un chien , dont le canal cholidoque
étoit preique auffi gros que celui de l'homme , il fe
filtra environ deux dragmes de bile par heure : ainfi
il eft à croire que dans un homme il s'en doit féparer
une plus grande quantité.
Il fe trouve de la bile dans tous les animaux , même
dans les pigeons , &c. qui n'ont point de véficule du
B I L
fiel ; puifque leur foie eft toujours très-amer. M. Tau-
vry remarque que la bile devient une des caufes prin-
cipales de la foif , en fe mêlant avec la falive. P'oye^
Soif.
Quelquefois la bile devient verdatre , de jaune
qu'elle étoit ; quelquefois de couleur de verd de gris
pâle , femblable au jaune d'ceuf , & cela fans aucune
autre caufe apparente , qu'une émotion , une con-
vulfion , ou un mouvement violent des efprits.
Ces émotions caufent de grandes maladies , comme
le vomiffement , le dégoût , la mélancholie , les foû-
pirs , les cardialgies , des vents , la diarrhée , la dyf-
îenterie , les maladies aiguës, & des fièvres très-dan-
gereufes. Quelquefois la bile devient noire , & alors
elle prend le nom de chokr, & elle a le goût d'un vi-
naigre très-acide ; quelquefois elle reffemble à du fang
pourri , qui corrode , brûle , détruit , diffout , occa-
fionne des inflammations , des gangrenés , des mor-
tifications , des douleurs vives , & des fermenta-
tions violentes. Boerhaave diftingue trois fortes de
bile noire : favoir i°. la plus douce , provenant d'un
mouvement trop violent du fang , d'oii elle prend
fon nom iïadujie , ou bile brûlée. La féconde eft dans
un degré d'altération plus grand que la première , &
vient des mêmes caufes qui agiffent avec plus de
force. La troifieme eft une bile corrompue & bi filée ,
qui , fi elle devient de couleur verdatre ou pâle , eft
la plus mauvaiie de toutes.
La trop grande évacuation de bile , foit par haut ,
ou par bas , ôte à la chylification fon principal inftru-
ment, & par là empêche la digeftion , la fécrétion,
& l'éjection des excrémens , occafionne des aigreurs ,
des friflbns , des foibleffes , la pâleur , l'évanoûifie-
ment; & fi, lorfqus la bile eft préparée , elle ne fe
décharge pas comme il faut dans les inteftins , elle
caufe la jauniffe. Voyeir Jaunisse. (Z.)
* BILEDULGERID , (Géog.) l'une des cinq gran-
des contrées de l'Afrique ; elle eft bornée au fepten-
trion par la Barbarie , à l'orient par l'Egypte , à l'oc-
cident par la mer Atlantique , & au midi par les dé-
ferts de Zara. Elle eft fertile en riz , en dattes , en
chameaux, & en chevaux. Les habitans font Maho-
métans & Juifs , & leurs rois font tributaires de Tu-
nis, d'Alger, & de Tripoli.
* BILHON ou BILLON , {Gêog.) petite ville de
France , dans l'Auvergne. Long. zi. lat. 4$. jG.
BILIAIRE, adj. en Anatomie , nom d'un conduit
qu'on appelle auffi hépatique, voye^ HÉPATIQUE:
il eft enveloppé avec la veine -porte dans un faif-
ceau commun de nerfs & de petites membranes. Il
eft fait de diverfes tuniques, l'externe, enfuite la cel-
lulaire, dans laquelle rampent de petits vaifleaux qui
partent des petits troncs voifins des artères & des
veines. Les fibres tranfverfes dont parle Gliffon , fe
dérobent preiqu'à la vue. La membrane interne eft
veloutée Ôt iemblable en général à la tanique réti-
culaire de la véficule du fiel. Son tronc droit Se an-
térieur eft placé auprès de la veine-porte. Il monte
en-devant, & au-delà de la divifion de la veine-por-
te ; il fe divife lui-même en deux rameaux, dont l'un
à droit , l'autre à gauche , accompagnent toujours
la veine-porte, & donnent des rejettons qui eleortent
les petits rameaux jufqu'à la fin & jufques dans les
membranes des ligamens & de la véficule du fiel ,
toujours enveloppés de la membrane de Gliffon , de
laquelle tous les vaiileaux du toie tirent une mem-
brane propre &c commune. C'eft pourquoi s'il y a
cinq branches de la veine-porte, il y en a autant des
principaux rameaux des pores biliaires. Haller , com-
ment. Boerh.
Les pores biliaires , font des canaux qui ont leur
fource dans les glandes du foie ; ils s'unifient en plu-
fieurs troncs d'une grandeur égale aux branches hé-
patiques , & les accompagnent toutes à travers la
B I L
fubftance entière du foie , enveloppés dans la mê-
me capfule que la veine-porte.
Ces branches font grandes comme une paille de
froment ; les plus grandes le font affez pour contenir
le petit doigt : on les peut distinguer de la veine-
porte par ce qu'elles contienent; elles font toujours
pleines de bile. Outre la capfule qui leur eft com-
mune avec la veine-porte , chacune d'elles a une tu-
nique épaiffe & blanche, qui lui eft propre , comme
l'enveloppe mufculeufe d'une artère.
Sur le côté concave du foie fe rencontrent diver-
fes ramifications , dont un feul tronc eft formé : on
le nomme aufïï le canal ou proprement le pore biliai-
re; il eft de la groffeur d'une plume d'oie : il rencon-
tre à deux pouces en descendant le conduit cyftique,
& forme avec lui ce que nous appelions duclus com-
muais, qui defeendant en ligne perpendiculaire d'en-
viron quatre pouces , va fe décharger dans le duodé-
num au moyen d'une infertion oblique , & fouvent
par la même ouverture que le conduit pancréatique.
Le pore biliaire communique avec la véiicule du
fiel par un conduit que le do£teur Gliflbn a le pre-
mier décrit ; Blaife & Perrault en ont parlé dans la
fuite : le dernier l'a nommé le conduit cyjl-hépatique ;
Verheyen en remarqua deux, trois ou quatre en des
bœufs , ôc l'on dit qu'on a trouvé pareille chofe dans
un chien. F. Conduit cyst-hépatique. Quant
à l'homme, les plus habiles anatomiftes avouent n'a-
voir jamais rien apperçû de pareil. (L)
* BILIBERTO , (Géog.) ville d'Efclavonie , fur le
Danube , à peu de diftance d'Efleck.
BILIEUX , EUSE , adj. qui abonde en bile ; une
humeur bilieufe , un tempérament bilieux.
Il eft aufïï liibft. les bilieux font fujets à de grandes
maladies. Foyei BlLE & TEMPÉRAMENT. (L)
* BILIMBI, f. m. (Hifl. nat. bot.) nom d'un petit
arbre de la hauteur de huit à dix pies , appelle par
Bontius billingbing, & par les botaniftes Européens,
malus Indica fruclu pentagono. Il eft commun dans les
jardins du Malabar ; il porte fleur & fruit toute l'an-
née ; il eft fécond depuis la première année de fa
plantation, jufqu'àla quinzième, & par-delà.
Bontius dit qu'on en fait un Sirop qui eft bon dans
les maladies chaudes du foie , Ôc dans l'intempérie in-
flammatoire du fang. On l'emploie aufïï dans la dé-
coction du riz non pelé, comme un remède excellent
dans les fièvres ardentes & continues ; car il contri-
bue beaucoup à étancher la foif , ôi à calmer l'effer-
vefeenec de la bile. Le fruit étanche la foif, la racine
excite le vomifTement , la décoction des feuilles ex-
cite la fueur & fait Sortir la petite vérole ; elle donne
un bain Salutaire dans les douleurs des membres.
Ray, hijl. plant. (N )
* BILIN oaBELIN , (Géog.) petite ville du royau-
me de Bohême.
* BILINA , (Géog.) lac & rivière de Suéde , dans
la province de Hellingland.
* BILINLOKA, (Géog.) ville de Moldavie.
* BILITZ , {Géog.) petite ville ôî château , dans
la haute Silélie , au point de rencontre de la Polo-
gne , de la Hongrie , 6c de la Sileiie.
BILL. Foyei Bil.
BILLARD , f. m. jeu d'adreffe & d'exercice , qui
conlifte à faire rouler une balle d'ivoire pour en fi up-
per une autre ôc la faire entrer dans des trous appel-
les beloufes.
Billard , fe dit aufïï de la table fur laquelle les
joueurs s'exercent. Le billard eft compote de quatre
parties principales ; lavoir, la table , le tapis , le fer,
ôc les bandes. La table eft quarrée , oblonguc , gar-
nie de quatre bandes ou rebords de bois , rembourrés
de litières de drap , oc couvertes d'un drap verd , at-
tachées en-deffus avec des clous de cuivre. Auxqua-
I L
253
tre coins de la table ôc au milieu des longues bandes
font pratiqués des trous ou des beloufes pour rece-
voir les billes ; ôc aux deux tiers de la longueur de
la table vers le haut , eft un fer appelle pafje. Voye^
Table, Tapis, Bande, Passe, Belouse, Bille.
Il eft inutile de donner ici les règles du billard ;
celles qui font établies aujourd'hui fe trouvent par-
tout , Ôc la nature de ce jeu n'empêche point qu'on
n'en puiffe inftituer de tout autres.
Billard , fe dit aufïï de la maffe ou du bâton re-
courbé avec lequel on pouffe les billes. Il eft ordi-
nairement de bois de gayac ou de cormier, garni par
le gros bout ou d'ivoire ou d'os Simplement. On peut
même fe paffer de ces garnitures. On tient cet inltru-
ment par le petit bout , & l'on poufle la bille avec
l'autre bout.
BILLARDEPv , terme du jeu de Billard, qui Signifie
pouffer les deux billes en même tems avec la maffe.
Le joueur qui billarde perd un point, c'eft-à-dire,
qu'on marque un point pour Son adverSaire , ôc le
coup eft nul , Suppofé qu'il ait mis la bille de Son ad-
verSaire dans la beloule : mais il perd deux points ,
s'il y met les deux billes.
Billarder , v. n. (Manège.) fe dit d'un cheval
lorSqu'en marchant il jette Ses jambes de devant en-
dehors.
BILLE, poiffon de mer. Voye^ Tourd. (/ )
Bille , (Marine. ) éguillette d'efeoit ou de coiiet ;
c'eft un bout de menu cordage, où il y a une boucle
& un nœud ; Son ufage eft de tenir le grand coiiet aux
premiers des grands haubans lorSqu'il ne Sert pas. (Z )
Bille, les Chamoifeurs ôc les Marroquiniers appel-
lent bille un morceau de bois ou de fer rond , qui a
ordinairement un pouce ôc demi de diamètre , & un
pié & demi de longueur, dont ils fe fervent pour tor-
dre les peaux , ôc en faire Sortir toute la graiffe , la
gomme , & l'eau , & qu'ils employent dans les diffé-
rentes façons qu'ils ont à donner aux peaux. Voye\
Chamois.
BlLLES à moulures , (terme d'Orfèvre en tabatières.)
ce font des morceaux de fer plat, d'une ligne d'épaii-
feur tout au-plus , modelés dans le milieu , entre lei-
quelles on tire la matière où l'on veut faire des mou-
lures.
Billes , f. pi. (Œconom. rufliq.) on donne le nom
de billes , à la campagne , aux rejetions qu'on trouve
aux pies d'un grand nombre d'arbres , ôc qu'on en-
levé pour les mettre en pépinière : la méthode en eft
fort, bonne.
BlLLES , terme de Paumier , ce font de petites bou-
les d'ivoire de deux pouces ou environ de diamètre ,
faites au tour & de même groffeur , avec lefquellcs
on joue au billard. Ces billes font diftinguées par de
petits points pratiqués vers un des pôles de la bille ;
ces points fervent à les faire reconnoître pendant le
jeu.
Bille, eft un terme de Paumier , qui lignifie un
coup du jeu de billard , par lequel on fait entrer dans
une beloule la bille de l'on adverlaire , Sans lui taire
frapper les bandes.
Bille , terme de rivière , petit bachot ou nacelle ,
que l'on attache avec un bout de cincenelle à la tête
d'un batteau marnois dans les rivières d'Amont-Pa-
ris, ôc dans lequel on met trois ou quatre compagnons
de rivière , qui n'ont chacun que deux avirons.
* Bille, (Géog.) petite rivière qui prend la four-
ce entre le duché dcHolftein & de Lawembourg, &
forme avec un des bras de l'Elbe l'île de Bilhxerder.
B1LLER , (Marine.) c'eft attacher la corde qui lert
à tirer les batteaux fur les rivières, à une pièce de
bois courbe qui eft derrière le cheval.
BlLLER, fe dit de la façon que les Cluimoifeurs &
les Maroquiniers donnent à leurs peaux en les tor-
dant avec la bille. Vqyt^ Chamois.
254
B I L
Biller, e/2 Charpenurie, c'eft faire tourner en
pouffant à droite ou à gauche une pièce de bois ou
quelqu'autre groffe maffe , après l'avoir mife en ba-
lance fur un chantier ou fur une pierre.
* BILLERBECK, (Géog.) petite ville de l'évêché
de Munfter en "SVeftphalie.
BILLET ( en droit ) eft. une promeffe ou obliga-
tion fous iignature privée, par laquelle on s'engage
à faire ou payer quelque chofe. Il faut pour en de-
mander le payement en juftice : i°. qu'il foit con-
trôlé par un commis établi à cet effet : 2°. que l'écri-
ture en foit reconnue par la partie qui l'a faite , ou
vérifiée par experts , à l'exception des billets de chan-
ge pour lefquels il n'eft befoin ni de reconnoiffance
ni de contrôle. Voyt^ Change.
On appelle auffi billets , quantité d'autres petits ac-
tes faits fous fignature privée , fans aucune forma-
lité. \H)
Le mot billet fe prend en différentes acceptions.
Nous allons parcourir les principales.
BlLLET de Banque, voyei BANQUE.
Billets de Marchandifcs , expofition de différen-
tes efpeces de marchandifcs , & de leur prix , dont
le vendeur donne le détail à l'acheteur.
BlLLET de Cargaifon ou connoijfement , afte privé ,
que figne un maître de navire , en reconnoiffant qu'il
a reçu dans fon bord les marchandées de quelqu'un ,
& s'obligeant de les remettre en bon état au lieu oii
elles font deftinées.
Il en eft ordinairement de trois fortes. Le premier
que garde le marchand ; le fécond , que l'on en-
voie au fafteur à qui elles font deftinées ; & le troi-
fieme , que retient le maître.
Billet de Venu : lorfqu'une perfonne a befoin
d'une fomme d'argent , elle met des marchandées
entre les mains d'un prêteur, en gage de l'emprunt,
en lui donnant ce billet , qui l'autorife à vendre les
chofes ainfi livrées , fi la fomme qu'elle emprunte
n'eft point acquittée avec les intérêts dans le tems
preicrit.
Billets de Provijlons , liberté accordée par le bu-
reau de la douane aux marchands , pour leur per-
mettre de fe munir , fans payer certains droits , de
chofes dont ils ne peuvent fe paffer dans leurs
voyages.
BlLLET de fouffrance , privilège accordé par la
douane d'Angleterre à un marchand de trafiquer d'un
port d'Angleterre à l'autre fans payer les droits.
Billet d'Entrée, détail de marchandées tant fo-
raines qu'Angloifes paffées au bureau.
Outre les différentes efpeces de billets dont nous
venons de faire mention , il y en a un li grand nom-
bre d'autres , que rémunération en leroit infinie.
Il y a pluiieurs efpeces de billets dont les mar-
chands , banquiers , & négocians fe fervent dans le
commerce , lefquels opèrent divers effets.
Les uns font caulés pour valeur reçue en lettres-
de-change ; les autres portent promettes d'en four-
nir , d'autres font conçus pour argent prêté , & d'au-
tres pour marchandées vendues : mais de ces diver-
fes fortes de billets , il n'y en a que deux qui foient
réputés billets de change , les autres n'étant regardés
que comme de iimples promeffes , qui cependant peu-
vent être négociées , ainli que les billets de change ,
pourvu qu'ils foient payables à ordre ou au porteur.
La première efpece de billets de change , font ceux
qui font caulés pour valeur reçue en lettres-de-chan-
ge , c'eft-à-dire lorfqu'un marchand ou banquier four-
nit à un autre négociant des lettres-de-change pour
les lieux dans lefquels il a befoin d'argent ; & que
pour la valeur de ces lettres , il donne fon billet de
payer pareille fomme au tireur.
Cette première forte de billet doit faire mention
de celui fur qui les lettres ont été tirées , Se de celui
B I L
qui en aura payé la valeur , & fi le payement a été
fait en deniers ou marchandifes ou autres effets , à
peine de nullité ; c'eft-à-dire que faute d'être conçus
en ces termes , ils ne font plus regardés comme billets
de change , mais feulement commejîmples billets pour
argent prêté , qui n'ont pas les mêmes privilèges ,
art. zj. & z8. de VOrdon. de l6~3.
La deuxième efpece de billets de change, font ceux
qui portent pour laquelle fomme je promets fournir let-
tre-de-change fur une telle ville. Ils font très-utiles dans
le commerce, & doivent auffi faire mention du lieu
où les lettres de-change doivent être tirées , fi la valeur
en a été reçue , & de quelles perfonnes , à peine de
nullité. Ceux au profit defquels font faits ces billets de
change , ou au profit defquels les ordres font paffés ,
peuvent contraindre les débiteurs à leur fournir les
îettres-de-change , & au refus leur faire rendre l'argent
qu'ils ont reçu , & leur faire payer ce qu'il leur en
coûteroit pour a voir leur argent par lettres-de-change
dans les lieux defignés par leur billet.
Les billets que l'on nommoit autrefois billets en
blanc , c'eft-à-dire où l'on laiffoit en blanc le nom de
celui à qui ils dévoient être payés pour être remplis
toutes fois & quantes , & fous quel nom il plairoit à
celui au profit duquel ils étoient faits , & dont la caule
portoit fimplement valeur reçue fans exprimer la va-
leur , non-feulement ne font plus en ufage , mais font
ablblument défendus ; car comme après avoir pafîé
en pluiieurs mains il n'étoit pas polîible d'en décou-
vrir l'origine , il étoit ailé de s'en lervir pour un com-
merce uluraire.
On a tâché d'introduire dans le commerce d'au-
tres billets , qui ne font pas moins dangereux que les
précédens pour couvrir l'ufure ; ce font les billets
payables au porteur , fans faire mention ni de qui on a
reçu la valeur , ni quelle forte de valeur a été reçue.
Les plus fûrs de tous les billets dans le commerce ,
font ceux qui font faits à une perfonne précife ou à
fon ordre , pourvu qu'ils portent ces mots effentiels ,
valeur reçue d'un tel, & que la valeur y foit exprimée.
En voici un modèle conforme à l'ordonnance de 1 673 .
Je payerai au ZO du mois prochain au fleur Pierre
Doré , marchand de cette ville , ou à fon ordre , la fomme
de dou^e cents livres , valeur reçue de lui en deniers comp-
tans. Fait , &c.
Endoffer un billet , c'eft le fouferire ou fe charger
du payement. Un billet négocié , eft celui qui a paffé
en main tierce au moyen de l'ordre qui a été mis au
dos : tout billet payable au porteur , eft aufîi cenfé bil-
let négocié. Faire courir un billet , c'eft le négocier ou
chercher à emprunter de l'argent par le moyen des
agens de change ou autres perfonnes.
Sur les billets en général 6c la police aûuelle du
royaume à cet égard , voye^ le Dictionnaire du com-
merce , tom. I.pag. Ç)Ç)J & fuiv.
Les marchands Perla ns font leurs billets & pro-
meffes , en mettant leur lceau au bas & leur nom en
haut. Les témoins attellent le fceau du contractant
en y joignant le leur. Il n'y a qu'entre marchands
que ces lortes de billets foient valables , quoique non
faits en juftice.
Billets de l'Epargne, (ont d'anciens billets , man-
demens ou referiptions , dont le payement avoit été
autrefois affigné fur l'épargne du roi ; mais qui ayant
été fupprimés au commencement du miniftere de M.
Colbert , font devenus depuis furannés & de nulie
valeur dans le commerce.
Billets, font encore des efpeces de paffe-ports
que l'on prend aux portes & barrières des villes où
il y a barrage , lorfqu'on veut faire paffer de bout des
vins & des beftiaux à travers de ces villes. Voyt{
Passe-de-bout.
Billets Lombards , ce font des billets d'une fi-
gure Se d'un ufage extraordinaire , dont on le fert en :
B I L
Italie &£ en Flandre, Se qui depuis l'année 171 6 Te
font auiîi établis en France. Les billets lombards d'Ita-
lie , qui l'ont de parchemin coupé en angle aigu de la
largeur d'un pouce ou environ par le haut , 6c finif-
fant en pointe par le bas fervent principalement lorf-
que des particidiers veulent prendre intérêt à l'ar-
mement d'un vaiffeau chargé pour quelque voyage
de long cours ; ce qui fe pratique ainli. Celui qui
veut s'intéreffer à la cargaiion du navire , porte ion
argent à la caiffe du marchand armateur, qui enre-
gilt e fur fon livre de caiffe , le nom du prêteur & la
femme qu'il prête ; enfuite il écrit fur un morceau
de parchemin , de la largeur de douze ou quinze li-
gnes , &£ de fept ou huit poncés de longueur , le nom
& la fomme qu'il a enregistrée ; & coupant ce par-
chemin d'un angle à l'autre en ligne diagonale , il en
garde une moitié pour fon bureau , & délivre l'au-
tre au prêteur pour le rapporter à la caiffe au retour
du vaiffeau , & le confronter avec celui qui y cil
relié , avant que d'entrer en aucun payement , foit
du prêt foit des profits. Ceux qui prêtent fur gages
en Flandre font à peu près la même chofe. Ils écri-
vent fur un pareil morceau de parchemin le nom
de l'emprunteur & la fomme qu'il a reçue ; & l'ayant
coupé en deux , ils en donnent la moitié à l'emprun-
teur , & coulent l'autre moitié fur les gages , afin de
les lui remettre en rendant la fomme ftipulée.
Billets de lu caifj'e des emprunts. Voye^ Caisse
DES EMPRUNTS.
Billets de la banque royale. Il y a peu de différen-
ce pour l'ufage entre le billets lombards d'Italie & les
billets de la banque royale deFrance : mais il y en a quel-
qu'une pour la forme , ces derniers n'étant que de
papier , & fe coupant du haut en bas en deux par-
ties égales ; enforte néanmoins que la coupure relie
dentelée : précaution fûre contre la friponnerie de
ceux qui voudroient les contrefaire. D'ailleurs les
moitiés de ces billets , qui demeurent aux bureaux de
la banque font reliées en des regiftres ; & au bas de
chaque partie du billet qui fe délivre au porteur ,
eil l'empreinte d'une efpece de iceau.
BlLLETS de monnoie. Billets occaiionnés par la
retonte générale des monnoies ordonnée par Louis
XIV. en Juin 1700 , & qui n'ayant pu fe faire affez
promptement pour payer toutes les vieilles elpeces
qu'on portoit aux hôtels des monnoies, les directeurs
ou changeurs en donnèrent leurs billets particidiers
qui devinrent dettes de l'état; & en 1703 , il fut or-
donné qu'ils porteraient intérêt à huit pour cent :
mais ces papiers s'étant trop multipliés par le trafic
ifluraire qu'en firent les agioteurs, ils furent fuppri-
més ou convertis en rentes lur la ville , ou tirés du
commerce par d'autres voies.
Billets de l'état , lont des billets qui ont com-
mencé prefqu'en même tems que le règne de Louis
XV. pour acquitter les dettes immenics contractées
fous le règne précédent. Ces dettes qui montoient
à pluficurs centaines de millions ayant été payées en
partie par divers moyens, le 101 les réduifit à un
capital de 150 millions, qu'il le chargea de payer,
& en fit , pour ainli dire , les billets aux intéreffés. Ces
nouveaux billets furent appelles billets tic l'état ; par
ce que le roi en rit la dette , & qu'il promit de les
payer iur les revenus de l'état ; au lieu qu'aupara-
vant ce n'étoient que des billets de particuliers , quoi-
que faits pour des fommes fournies pour les beloins
de l'état. La plupart de ces billets ont été depuis re-
tirés, loit en taxes fur les gens d'affaire, foit en ac-
tions de la compagnie d'occident, foit eivrentes via-
gères lur l'hôtel de ville de Paris , loit enfin par des
loteries qui s'y tiroient tous les mois. Dictionnaire
du commerce , tom . I.pag. 0.^2, &c.
Billets Échiquier. (G)
* Billl. iji.mod, & Police) c'elt
B I L
25 5
une attcflation de fanté accordée dans les tems con-
tagieux , par un confeil qu'on inilitue alors fous le
nom de confeil de fanté Ce billet contient le lieu d'où
le porteur eil parti , fon nom , fa qualité , fa demeu-
re , la date de ion départ , l'état de fanté de la ville,
du bourg ou village d'où il vient, & la permiffion
de le recevoir où il fe prélêntera avec ce billet ; au
bas duquel il aura pris certificat de tous les lieux
où il aura dîné , foûpé & couché.
BILLETER, v. adl. ( Commerce ) attacher des
étiquettes , mettre des billets aux étoffes ; c'eil fur
ces billets que les marchands , particulièrement ceux
qui font le détail , mettent les numéro & les auna-
ges des pièces entières , fuivant les factures des cem-
miffionnaires qui leur en font les envois , & qu'ils
écrivent chaque jour ce qui a été levé de celles qui
ont été entamées. (G)
BILLETIER , 1". m. ( Police. ) commis qui expé-
die & délivre les billettes. Voye^ Billette.
Ce terme eil principalement en ufage à Bour-
deaux , pour les commis des fermes du Roi qui ont
la garde des portes. Il y a dans cette ville jufqu'à 24
billetiers , difperfés aux quatorze portes de la ville ,
pour les garder depuis fix heures du matin jufqu'à lix
heures du feir ; après quoi elles font abandonnées à
la diredlion des portiers qui font aux gages de la ville.
Les fondions des billetiers l'ont de prendre garde à
tout ce qui entre & fort , & de tenir des regiftres
plus ou moins , fuivant l'importance &: la qualité de
leurs polies, foye?^ en le détail dans le Dictionnaire du
commerce , tome 1. page f)33.
Il y a deux commis qu'on appelle contrôleurs des bil-
letiers , dont les fonclions font d'examiner le travail
des billetiers , & de voir s'ils lont lédentaires à leur
porte. (G)
BILLETTE , f. f. nom qu'on donne dans la doua-
ne de Bourdeaux à l'acquit que le commis délivre aux
marchands pour juilifier du payement des droits de
fortie, ou , comme on y parle , t'es droits d'iffue de
marchandées qu'il veut faire embarquer pour en-
voyer à l'étranger. Ces billets duraient autrt
mois entier , après lequel il étoit permis de les renou-
veller li les marchandiles n'avoient pûètre envoyées :
préfentement le commis y ajoute la claufe , non va-
lable après trois jours. (Cr)
Billettes , en Blajbn , pièces d'une figure quar-
rée moins larges que longues.
On dit que les billettes font couchées ou renver-
fées , lorique leur côté le plus long eil parallèle au
haut de l'écuffon , & que le plus court eil perpendi-
culaire. On fuppofe qu'elles repréientent des pièces
de drap d'or ou d'argent plus longues que larges ,
placées à quelque diftance par manière d'ornement
lur les habits , & de-là tranfportées dans les écuffons.
Quoique Guillim penleque la billette repiéiente une
lettre cachetée. On dit qu'un écu eil billette lorlqu'il
eil femé de billettes. Il porte d'argent billette à la croix
de bruyère engrêlée de gueules.
Bloom dit qu'il faut exprimer le nombre des bil-
lettes lorfqu'elles ne paffent pas celui de dix.
Billettes , f. f. c'eil ainli qu'on appelle dans
les Verreries à vitre le bois dont on le fert pour chaut-
fer les fours ; il eil fendu plus menu que le cotret ,
& n'a que dix-huit pouces de longueur.
BILLETTES , f. f. pi. terme de Forgcur J\-.
AqyqDrZ.
BiLLETTÉ , en terme de Blafon , fe dit du champ
femé de billettes. Voyt^ Billette.
Conflansd'Auchy, &: Brenne, d'azur au lion d'or,
l'écu billette de même. (^)
* BILLIGHE1M , ( Géog. ) petite ville du bas Pa-
(atinat , à deux lieues de Landau.
* BILLINGHAM , ( Géog. ) petite ville de la pro-
vince de Northumberland , au nord de l'Angleterre.
i56
B I L
* BILLON , f. m. ( Monnayage. ) c'eft un compo-
fé de métal précieux & d'autres qui le font moins ,
où la quantité du métal précieux eft moindre que celle
des autres métaux; ainfil'or dont le titre eft au-deflbus
de douze karats, eft billon ; l'argent qui eft au-def-
fous de fix deniers , eft billon : l'un s'appelle billon
d'or; l'autre billon d'argent. Il faut appliquer la même
notion de billon , par-tout où le mot billon eft em-
ployé.
On.étoit autrefois fi fcrupuleux fur la pureté de
l'or & de l'argent , que l'on donnoit le nom de bil-
lon à l'or au-deflbus de l'étalon, ou de 21 karats,
&c à l'argent au-deffous de dix deniers.
BILLON AGE , f. m. à la Monnaie , eft le crime de
fur-achat des matières d'or , d'argent , monnoies ,
foit pour les tranfporter hors du royaume , foit pour
les changer de nature. Voye?L BlLLONEUR.
BILLONEUR , à la Monnaie ; on nomme ainfi
ceux qui fans qualité fur-achetent les matières d'or
ou d'argent. Les lois prononcent des peines contre
ceux qui font convaincus du crime de billonage. V.
BlLLONAGE.
BILLION, f. m. ( Arithmtt. ) on donne ce nom en
Arithmétique au chiffre qui occupe la dixième place
d'une fuite horifontaîe de chiffres , en commençant
de la droite vers la gauche , ainfi qu'on en eft conve-
nu dans la numération. Voye^ Numération.
Dans le nombre 4310567827, compofé de dix
chiffres , le chiffre 4 qui eft le dixième en commen-
çant par la droite , fignifîe quatre billions : or un bil-
lion vaut dix fois cent millions , de même qu'un mil-
lion vaut dix fois cent mille , &c. fuivant l'inftitution
de la valeur locale des chiffres. (£ )
BILLOS , droit d'Aides qui fe levé fur le vin en
quelques provinces de France , particulièrement en
Bretagne; il ne fe paye que par les cabaretiers, &
autres qui vendent des vins. On n'employé guère ce
terme fans le faire précéder par celui d'impôts ; ainfi
l'on dit impôts & billos: il fe levé auffi en quelques
lieux fur la bierre , le cidre , & autres boiflbns. Ce
droit n'eft pas partout un droit royal , & il y a des
feigneurs & des villes qui en joùiffent. (G)
BILLOT , f. m. on donne ce nom dans plufieurs
'Arts méchaniques à un tronçon d'arbre plus ou moins
gros , à pies ou fans pies , mais dont le diamètre eft
toujours très-confidérable relativement à la hauteur :
quant à fes ufages , voyelles articles qui iuivent.
Billots , ( Marine.') ce font des pièces de bois
courtes qu'on met entre les fourcats des vaiffeaux
pour les garnir en les conftruifant ; c'eft ce qu'on ap-
pelle pièces de rempliffage. Voye^Pl. IV. fig. 1. n°
16. & 17. les foureats , & n° 18. les pièces de rem-
pliffage.
Billot d'appui du mât de beaupré , voye^ fa figure &
fa fituation , PL IV. fig. Z./A94. (Z)
Billot , ( Manège. ) morceau de bois rond de cinq
à fix pouces de long , fur un pouce de diamètre , &
muni à chaque bout d'un anneau de fer pour y atta-
cher un cuir On met pour l'ordinaire de Yaffafœtida
autour du billot ; & après l'avoir couvert d'un linge,
on le met comme un mors dans la bouche du che-
val , & l'on paffe le cuir par-deffus fes oreilles com-
me une têtière. Uaffàfatiaa fe fond dans la bouche
avec la falive , & réveille l'appétit au cheval dégoû-
té. Le billot lans ajfafœtida,eû la bride des chevaux
de charrette. On appelle auffi billots les barres de
bois rondes qu'on attache aux chevaux que l'on cou-
ple , & qui coulent tout le long de leurs flancs. ( V)
BlLLOT à charger , c'eft un infiniment d' 'Artificier
qui tient lieu d'enclume pour foùtenir les moules ou
culots des fùfées , que l'on y charge à grands coups
de maillets , pour éviter le retentùTement qui en ré-
fulteroit fur un plancher ou un corps creux.
Billot , terme de Ceinturier: c'eit un morceau de
B I L
bois quarré de la longueur de dix-huit pouces , fur
fix pouces de haut & autant de large , qui porte leur
enclume , & dont la furface du deffus eft creulée un
peu , & forme plufieurs petites cafés où ces ouvriers
mettent leurs rivets & boutons. Voye?_ la fig. â. Plan,
du Ceinturier.
Billot de Ckainetier : c'eft un morceau de bois
rond de la hauteur de deux pies & demi , fur trois pies
ou environ de circonférence ; ils s'en fervent au lieu
d'enclume , parce qu'ils n'ont jamais rien à forger au
feu , ni rien de trop gros.
Billot de Charron avec f on marchepié ; c'eft un pe-
tit tréteau de la hauteur d'un pié , & environ de deux
pies de long, qui fert aux Charrons à différens ufages.
Voyez la fig. J . PI. du Charron.
Billot de Cordonnier , tronçon d'arbre fur quoi
les cordonniers battent les femelles. Voy. Buisse.
Billot de Ferblantier , c'eft un gros cylindre de
bois de la hauteur de trois pies , fur trois pies de cir-
conférence , qui a la face de deffus & deffous plate ;
la face de deflbus eft percée de plufieurs trous ronds
& quarrés , dans lefquels ces ouvriers placent les bi-
gornes & les tas , pour les affujettir & les rendre fia-
bles. Voyez PI. dOrfevrerie.
Billot , infiniment de Gabier. Voy. Chevllon.
Billot , partie de la preffe des Imprimeurs entail-
le-douce. A'oye^IiMPRiMERiE en Taille-douce.
Billot, dans l'Orgue, font de petits morceaux de
bois plats qui ont une queue : au milieu de la face
plate de ces petits morceaux de bois efi un petit treu
rond , qui fert à recevoir les pointes ou pivots des
rouleaux de l'abrégé. La queue des billots fert à les
attacher fur la table de l'abrégé , en la faifant entrer
dans des trous pratiqués à cet effet , & les y rete-
nant avec de la colle forte. Voyez V article Abrège,
& la fig. A A n°. 11.
Billot, efi auffi un morceau de bois cubique d'en-
viron 14 pouces de dimenfion, à la face de deffus
duquel on perce un trou qui ne doit pas traverfer
d'outre-en-outre. A la face du billot qui regarde le
dedans de l'orgue , eft un autre trou qui va rejoindre
le premier. Le trou de la face de deflus fert à rece-
voir le pié du tuyau de montre des grandes tourel-
les ; & celui de la face latérale fert à recevoir le por-
te-vent qui porte le vent du fommier au tuyau. Voy.
la fig. 1. PI. d Orgue.
Billot d'Orfèvre, eft un morceau de tronc d'ar-
bre de deux à trois pies de haut , & qui porte plus
ou moins de diamètre , à proportion de l'enclume ou
du tas qu'on veut y placer. Il eft ordinairement d'or-
me ; & quand il fatigue beaucoup , on prend une
fouche que l'on met debout , l'on y fait un trou de
la profondeur que l'on veut qu'entre l'enclume , que
l'on affujettit avec des coins de peur qu'il ne fe fen-
de ; l'on y met des cercles de nerfs de bœuf frais ,
qui en fe léchant le ferrent fortement : l'on cloue en-
core autour des lanières affez lâches pour contenir
les manches des marteaux , &c les tenir à la portée
de la main de l'ouvrier.
Billot des Rubankrs, eft à peu près fait comme
l'enfuple , excepté qu'il n'a point de moulures au bout
comme elle ; il n'y a qu'une petite éminence à cha-
que bout pour contenir la foie que l'on met deffus :
il fert à relever les pièces ourdies de deffus l'ourdif-
foir ; lefquelles pièces y reftent jufqu'à ce qu'on les
ployé furies enfuples.
BlLLOT à refouler' des Tabletiers-Cornetiers ; c'eft
une groffe pièce de bois au milieu de laquelle on a
fait une encoche , de la grandeur des plaques entre
lefquelles on refoule les cornets. Voyez Refouler.
BILLOT à redreffer, des Tabletiers Cornetiers , eft
une partie de tronc d'arbre plantée debout , au mi-
lieu de laquelle on a percé un trou propre à recevoir
les ouvrages fur le mandrin. Voyez Mandrin. H eft
aifé
B I M
?ifé de concevoir que les cornets qui ne font encore
que dolés, voyqDoLÉs, fe redreffent en effet contre
les parois du billot , en frappant à grands coups de
marteau fur le mandrin qui eft dans le cornet , &C
plus haut que lui. Coye*_ la Planche II. figure 3.
Billot de Tailleur, c'eft un petit cube de bois
dont ils fe fervent pour mettre fous les emmanchu-
res qu'ils veulent repafTer. Voye^ Emmanchure 6*
Repasser.
* BILLY, (Géogr.) petite ville de France dans le
Bourbonnois.
* BILSEN, (Géogr.~) petite ville de l'évêché de
Liège entre Maltricht &c Haffelt. Long. 23. iz. lat.
ÔO.48.
* BILZIER, (Géogr.) ville de laRomanie, dans
la Turquie , en Europe , à 10 lieues d'Andrinople.
* BIMATER , ( Myth.) épitheteque l'on donnoit
à Bacchus , & par laquelle on faifoit entendre que
Jupiter l'ayant porté deux mois dans fa cuiffe , lui
avoit fervi de mère pendant ce tems , ôc qu'il en
avoit eu deux.
* BIMBLOTERIE , f. f. ( Commerce ) c'eft l'art
de faire des colifichets d'enfans & de les vendre. Bim-
bloterie vient de bimblot , colifichet. Il y a deux fortes
de bimblots : les uns qui confittent en petits ouvrages
fondus d'un étain de bas aloi , ou de plomb ; ce font
des affiettes , des aiguières &c autres pièces de petits
ménages d'enfant , des encenioirs , des calices , des
burettes, &c. les autres confident dans toutes ces ba-
gatelles , tant en bois , qu'en linge , étoffe , & autres
matières , dont on fait des jouets , comme pou-
pées, chevaux, carroffes, &c. Ce font les Merciers
qui font le trafic des derniers bimblots ; les maîtres
Miroitiers-Lunetiers Bimblotiers ont le privilège des
autres. Pour favoir jufqu'où va le commerce de ces
bagatelles , il ne faut que fe rappeller la prodigieufe
quantité qui s'en vend depuis le commencement de
l'année jufqu'à la fin , & furtout la confommation
qui s'en fait dans les premiers jours de l'an.
* BIMBLOTIER , f. m. (Commerce.} marchand de
limbloterie. Voye^ BlMBLOTERlE.
BIMEDIAL, (en Mathématiques ) quand deux-
lignes, comme AB &c BC ( Fig. 3. de Géom. ) com-
mcniurables feulement en puiffance, font jointes cn-
femble ; la toute A C eu irrationnelle par rapport à
l'une des deux AB ou BC, & on l'appelle ligne
première bimédiale. Euclide , liv. X. propof. 38. Voye{
COMMENSURABLE , IRRATIONNEL, PUISSANCE.
(*)
* BIMILIPATAN, (Géogr.) ville de la peninfule
de l'Inde , en deçà du Gange , dans le royaume de
Golconde , fur le golphe de Bengale.
* BIMINI , (Geogr.) une des îles Lucayes, dans
l'Amérique feptentrionale , au midi de l'île de Ba-
hama. Latit. z5. longit. 298.
* BINAGE, f. m. (Agriculture.) c'eft ainfi qu'on
appelle le fécond labour que l'on donne aux terres
à grains. Si celles à blé ont eu leur premier labour
avant l'hyver, elles reçoivent le binage après que les
froids font paffés èc que les eaux font écoulées , &
quand la terre commence à s'ouvrir & à fe renou-
velle!'. Si elles n'ont eu leur première façon qu'après
l'hyver, on leur donnera la deuxième, ou le binageun
mois ou fix femaines après. Voye^ Agriculture.
BINAIRE. L'A RITHMÉTique binaire eit
une nouvelle forte d'Arithmétique que M. Leibnitz
fondoit fur la progreffion la plus courte &: la plus
fimple ; c'eft celle qui fe termine à deux chiffres. Le
fondement de toute notre Arithmétique ordinaire
étant purement arbitraire, il eft permis de prendre un
autre progreffion, qui nous donne une autre Arithmé-
tique. On a voulu que la fuite première & fondamen-
tale des nombres allât jufquà dix, &c. que la fuite in-
finie des nombres fut une fuite infinie de dixaines; mais
Tome II,
B I N
45?
iî eft vifible que d'avoir étendu la fuite fondamen-
tale des nombres jufqu'à dix , ou de ne l'avoir pas
étendue plus loin ; c'eft une inftitution qui eût pu être
différente ; & même il paroît qu'elle a été faite affez
au hafard par les peuples , & que les Mathématiciens
n'ont pas été confultés : car ils auroient pu aifément
établir quelque chofe de plus commode. Par exem-
ple , fi l'on eût pouffé la fuite des nombres jufqu'à
douze , on y eût trouvé fans fraction des tiers & des
quarts , qui ne font pas dans dix. Les nombres ont
deux fortes de propriétés , les unes effentielles , les
autres dépendantes d'une inltitution arbitraire , & de
la manière de les exprimer. Que les nombres impairs
toujours ajoutés de fuite, donnent la fuite naturelle
des quarrés ; c'eft une propriété effentielle à la fuite
infinie des nombres, de quelque manière qu'on l'ex-
prime. Mais que dans tous les multiples de 9 , les ca-
ractères qui les expriment additionnés enlemble , ren-
dent toujours neuf, ou un multiple de neuf, moindre
que celui qui a été propofé ; c'eft une propriété qui
n'eft nullement effentielle au nombre 9 , & qu'il n'a
que par ce qu'il eft le pénultième nombre de la pro-
greffion décuple qu'il nous a plû de choifir.
Si l'on eût pris la progreffion de douze , le nom-
bre 11 auroit eu la même propriété ; ainfi dans toute
l'arithmétique binaire , il n'y auroit que deux carac-
tères 1 & o. Le zéro auroit la puiffance de multiplier
tout par deux , comme dans l'Arithmétique ordinai-
re il multiplie tout par dix. 1 feroit un ; 10, deux $
1 1 , trois ; 100, quatre ; 1 o I , cinq ; 1 1 o , fix ; 1 1 I ,
fept ; 1 000 , huit ; 1 00 1 , neuf; 1 o 1 o , dix , &c. ce qui
eft entièrement fondé fur les mêmes principes, que les
expreffions de l'Arithmétique commune. II* elt vrai
que celle-ci feroit très incommode par la grande quan-
tité de caractères dont elle auroit befoin , même pour
de très-petits nombres. Il lui faut par exemple qua-
tre caractères pour exprimer huit , rue nous expri-
mons par un feul. Auffi M. Lelbnit^ ne vouloit-il
pas faire paffer fon Arithmétique dans un ufifge po-
pulaire ; il prétendoit feulement que dans les recher-
ches difficiles , elle auroit des avantages que l'autre
n'a pas , & qu'elle conduiroit à des fpéculations plus
élevées. Le P. Bouvet , Jéfuite , célèbre miffic^
de la Chine , à qui M. Leibnit-^ avoit écrit l'idée de
fon arithmétique binaire, lui manda qu'il étoit très-
perfuadé que c'étoit-là le véritable fens d'une ancien-
ne énigme Chinoife , laiffée il y a plus de 4000 ans ,
par l'empereur Folù , fondateur des Sciences à la
Chine , auffi bien que de l'empire , entendue appa-
remment dans fon fiecle , & plufieurs fiecles après
lui ; mais dont il étoit certain que l'intelligence b'etoit
perdue depuis plus de 1000 ans, malgré les recher-
ches & les efforts des plus favans lettrés , qui n'a-
voient vu dans ce monument , que des allégories
puériles & chimériques. Cette énigme confilte dans
les différentes combinaifons d'une ligne entière , &
d'une ligne brifée , répétées un certain nombre de
fois , foit l'une , foit l'autre. En fuppofant que la li-
gne entière lignifie 1 , & la brifée o, on trouve les
mêmes expreffions des nombres , que donne l'Arith-
métique binaire. La conformité des combinaifons des
deux lignes de Fohi , ce des deux uniques caractères
de l'Arithmétique de M. Leibnit^, frappa le P. Bou-
vet , 6c lui fit croire que Fohi & M. Lcibnit^ avoient
eu la même penlee.
Nous devons cet article à M. Formcv , qui l'a tiré
de l'hiftoire de l'Académie des Sciences de Paris,
année 1701. t'oyez ÉCHELLES ARITHMÉTIQUES,
au mot Arithmétique.
Cette arithmétique feroit, comme on vient de
le dire, peu commode: il faudrait trop de caractères
pour exprimer d'affez petits nombres. Cependant fi
le lecteur elt curieux d'avoir une méthode pour trou-
ver dans cette arithmétique la valeur d'un nombre
Kk
ajS
B I N
donné , ou pour exprimer un nombre quelconque ,
la voici en peu de mots.
On commencera par faire une table des différen-
tes puifiances de z, fçavoir i°ou i, 2,4,8,
16, 32, 64, 128, &c que l'on pouffera le plus
loin qu'il fera poffible : cela polé ,
Soit donné par exemple le nombre 1 10 101 , dont
on veut favoir la valeur , comme ce nombre a fix
chiffres , je prends la fixieme puiffance de 2 , qui
eft 32, & qui fera repréfenté par le chiffre 1 , qui
eft le plus à gauche ; le chiffre fuivant 1 indiquera
la f puiffance 16 ; le chiffre fuivant o ne donnera
rien ; le chiffre fuivant 1 indiquera la 3e puiffance,
c'eft-à-dire 4 ; le chiffre fuivant o ne donnera rien ;
enfin le dernier chiffre 1 donnera 1 : ainfi le nom-
bre propofé équivaut à la fomme des nombres 32,
16 , 4 , 1 , c'eft-a-dire 5 3 ; & ainii des autres,
Préfentement je fuppofe qu'on veuille exprimer
ie nombre 230 par l'arithmétique binaire, je cherche
d'abord la plus grande puiffance de 2 contenue
dans 230, c'eft 128; & comme 128 eft la 8e puif-
fance de 2 , je vois que le nombre 230 exprimé
comme on le délire aura 8 chiffres. Je mets donc
1 pour le premier chiffre à gauche :
j'ôte 128 de 230, il me refte 102; & comme 64,
qui eft la puiffance de 2 qui fuit immédiatement
128, fe trouve dans 102, cela me fait voir que je
dois encore mettre
1 à la féconde place à gauche :
je retranche 64 de 102, il me refte 38; or 3 2 qui
eft la puiffance de 2 après 64, eft encore dans 38 ;
ainfi je mets
1 à la 3e place à gauche:
je retranche 32 de 38, il me refte 6 ; or 16 qui eft
la puiffance après 32 , n'eft point dans 6 ; je mets
donc
o à la 4e place :
je retranche S de 6 ; ôc comme il n'y eft pas 3 je
mets encore
o à la 5 place :
je retranche 4 de 6 , ce qui me donne
1 à la 6e place:
enfin il me refte 2, qui s'exprimera par
1 à la 7e place ;
& comme il ne refte rien , on aura
o à la 8e place :
donc 230 fera exprimé par
iii 00 1 1 o
Il eft vifible qu'à l'imitation de cette arithmétique
on peut en imaginer une infinité d'autres, ou les
nombres feront exprimés par plus ou moins de chif-
fres. Fbyei ARITHMÉTIQUE & ECHELLES ARITH-
MÉTIQUES.
Soit en général , n le nombre de caractères d'une
arithmétique quelconque , enforte que o , 1,2,
3 , n—\ foient ces caractères; & foit
propofé de trouver la valeur d'un nombre quelcon-
que par exemple b c d e f, exprimé avec les ca-
ractères de cette arithmétique , on aura b c d e /■=.
bxn4 + cxn 3 + dxn * -f- exn+f, & ainfi des
autres.
Si oh veut exprimer un nombre quelconque A
par cette même arithmétique , foit nP la plus gran-
de puiffance de n contenue dans A, foit divifé A
par nP; foit a le quotient & le refte r, foit enfuite
divifé r par n P— l , b le quotient & le refte s ; foit
enfuite divifé s par n P—z , le quotient c , & le refte
q ; & ainfi de fuite, jufqu'a ce qu'on arrive a un
refte K , qui foit ou o ou moindre que n , on au-
ra A = a b c . . . . K , & le nombre des chiffres
B I N
fera p-\- I. &c. Voye^ Mem. acad. IJ41 , une mé-
thode de M. de Buffon pour faire ce calcul par les
logarithmes. (O )
BINARD , f. m. ( Maçonnent ) charriot fort à
quatre roues , où les chevaux font attelés deux à
deux, & qui fert à porter de gros blocs de pierre.
* BINAROS , ( Géog. ) petite ville du royaume
de Valence en Efpagne , fur les frontières de Cata-
logne. Long. iy. 55. lat. 40. 24.
B IN AS C O , ( Géog. ) petite ville du Duché de
Milan , entre Pavie & Milan.
BINCHE , ( Géog. ) ville ancienne du Hainaut ,
fur la rivière de Haine , à trois lieues de Mons. Long.
21. 50. lat. 5o. 23.
BINDHAVEN , ( Géog. ) ville d'Angleterre , dans
le comté de Carlingford.
BINDON, ( Géog.) ville d'Angleterre, dans la
province de Dorfet.
BINETTE, (Jardin.) Voyt^ Serfouette. (K)
* BINGASI , ( Géog. ) ville maritime d'Afrique ,
au royaume de Tripoli. Long. Jj. 40. lat. 32. 20.
BINGEN , ( Géog. ) ville d'Allemagne , dans l'é-
leftorat de Mayence , fur le bord du Rhin. Long. 25.
18. lat. 50. .3.
BINGLEY , ( Géog, ) ville d'Angleterre , dans la
province d'Yorck.
BINNENLANDSE PASS. (Commerce) c'eft ainfi
qu'on nomme à Amfterdam & dans les autres villes
de la domination des états généraux des Provinces-
Unies , des paffeports fans lefquels on ne peut tranf-
porter une marchandise d'une ville dans une autre ,
qu'elle ne paye l'entrée & la fortie. Ce papier coûte
vingt fols. Il faut le rapporter au bout de fix femai-
nes acquitté , par des commis qui atteftent que les
marchandifes font arrivées au lieu de leur destina-
tion.
BINOCLE , ou TÉLESCOPE BINOCULAIRE ,
c'eft un télefcope par lequel on peut voir les objets
avec les deux yeux en même tems. Voye^ Téles-
cope. Il eft compofé de deux tuyaux, qui contien-
nent chacun des verres de même force. On a crû
qu'il repréfentoit les objets plus clairs & plus grands
que le télefcope monoculaire , & cette raifon a enga-
gé plufieurs auteurs à en traiter affez au long , entr 'au-
tres le P. Antoine-Marie de Réita , Capucin , dans fon
Oculus Enoch & Eliœ ; & après lui le P. Chérubin
d'Orléans , auffi Capucin , dans le tome onzième de fa
Dioptrique oculaire , qui a pour titre , de la Vijlon par-
faite : mais on a reconnu que ces fortes de télefcopes
étoient plus embarraffans qu'utiles ; auffi la plupart
des meilleurs auteurs qui ont traité de la Dioptrique ,
n'en ont fait aucune mention.
On fait auffi desmicrofcopes binocles : mais comme
ils ont les mêmes inconvéniens que les télefcopes de
cette efpece ; ils font fort rares & très peu en ufage.
(O-T)
BINOCULAIRE. Voye{ Binocle.
BINOME, f. m. ( Algèbre ) c'eft une quantité
compoiée de deux parties , ou de deux termes liés
par les fignes -J- ou *-. Voye^ Monôme. Ainfi a + e
&C 5 — 3 font des binômes.
Si une quantité algébrique a trois parties, comme
a-\-b-\- c, on l'appelle trinôme. Si elle en a davan-
tage, on la nomme quadrinome , &c. & en général
multinome. Voye^ TRINOME.
M. Newton a donné une méthode pour élever en
général un binôme a -\- b , à une puiffance quelcon-
que m , dont Fexpofant foit un nombre entier ou
rompu , poiitif ou négatif.
Voici en quoi cette formule coniifte ,
(a A-b)m-am+ma b + — "— a m~* b* +
B I N
B T O
La feule infpection des termes en fait voir la loi
mieux qu'un long difcours.
Il eft vilible que lorfque m eft un nombre entier,
cette fuite le réduit à un nombre fini de termes ; car
foit par exemple m = z ; donc m — z = o , donc
tous les termes qui fuivront les trois premiers fe-
ront s= o , puifqu'ils feront multipliés chacun par
m — 2.
M. le Marquis de l'Hôpital , dans fon Traité des
Scellons coniques, liv X. a démontré cette formule
pour le cas où m eft un nombre entier. M. l'Abbé
de Molieres l'a démontré aufïi dans les Èlémcns de
Mathématiques. Enfin l'on en trouve encore une dé»
monftration par les combinaifons dans les Elémcns
d'Algèbre de M. Ciairaut.
Lorfquc m eft un nombre négatif ou une fraction,
la fuite eft. infinie , & pour lors elle ne repréfentè
la valeur de (ti-\-b)m que dans le cas où elle eft
convergente , c'eft-à-dire, où chaque terme eft plus
grand que le fuivant. foye^ SÉRIE ou Suite ; voye^
aujjî Convergent, Divergent, &c.
Soit , par exemple , un quarré imparfait a a -\- b,
dont il faille extraire la racine quarrée ; il n'y aura
qu'à élever a a -j- b à la puiffance \ ; car tirer la
racine quarrée, ou élever à la puiffance^, c'eft la
même chofe. Voye^ Exposant. Ainfi on aura
259
bz X aaT~
+i x£-i
=t a A £—r, &c. formule ou fuite infinie qui
approchera de plus en plus de la racine cherchée.
De même fi on veut extraire la racine cube de
aï-\-b, il faudra élever cette quantité à l'expo-
fant y ; & on trouvera
(aï+by = a+^- **
&c.
3 a'- ,«5»
& ainfi des autres. Mais ces fériés infinies ne font
bonnes qu'autant qu'elles lont convergentes.
Soit n le rang qu'occupe un terme quelconque
dans la fuite du binôme a+b élevé à la puiffance quel-
conque m , on trouvera que ce terme eft au fuivant
comme 1 eft à — X ir^L±_ ; d'où il s'enfuit que
pour que la férié foit convergente , c'eft-à-dire que
les termes aillent toujours en diminuant, il faut que
b x (/m — /z-J-i) foit toujours plus petit que na.
Ainfi pour pouvoir trouver la racine approchée
de aa-\-b par la formule précédente, il faut que
^ X ( f — /z-f-i), pris pofitivement , (bit plus petit
que naa, n étant un nombre entier quelconque.
De. même pour extraire par cette formule la ra-
cine de a > -f- b , il faut que b x ( ± — n -\- 1 ) , pris
pofitivement, foit toujours plus petit que nas. (O)
* BINOT,f. m. (Agricult.Jc'eû ainfi qu'on appelle
dans quelques campagnes, une forte de charrue fans
coutre tk. fans oreilles , avec laquelle on écorche la
terre , ou on lui donne quelques demi-labours pour
J.i retourner & la difpofer aux labours pleins. Voye^
Agriculture.
* BINOTIS , f. m. ( Agruult. ) demi-labours, ou
première façon légère que l'on donne aux terres à
grains , pour les difpofer aux labours pleins. Ces
demi-labours fe donnent avec le binot>à,oii ils ont
été appelles binotis. Voye^ Labour , Agricultu-
re, 6- Binot.
* BINSDORFF , ( Géog. ) petite ville de la balle
Stiric , clans la feigneuriede Hohenberg.
* BIRITAMBARU , ( Hijl. nat. bot. ) efp«
convolvulus qui croît dans le Malabar , l'île de ( ey-
lan j & d'autres contrées des des Orientales. La phrafe
Tome II.
botanique eft toute la defeription qu'on nous en don-
ne ; voici cette phrafe : convolvulus maritimus ^eyla-
nicus , folio crajjo , cordi for/ni, pes caprx Lujhanis. On
dit qu'une dragme de réfine de fa racine donnee dans
un jaune d'eeut, ou dans quelqu'émulfion appropriée,
évacue les eaux dans l'hydropifie ; effet que l'extrait
de fa racine préparé avec l'efprit- de-vin produit auf-
fi. Malgré cette vertu cathartique de la racine , on
affûte que les lapins , les dains & les boucs , tant pri-
vés que fauvages, mangent les feuilles. Ray. Hijh
plant.
BINTAN , ( Géog. ) île d'Afie dans les Indes orien-
tales , au fud de la prefqu'île de Malaca. Long. izr.
20. Lit. 1.
Bintan ou ViNTANE, contrée de l'île de Cey-
lan , fur la rivière de Trinquilimal , remplie de fo-
rêts , & habitée par des fauvages.
BINTENGAPORT , ( Géog. ) petite ville , avec
un port dans l'île d'Yla en Écoffe.
BIOGRAPHE , f. m. ( Littéral. ) terme formé du
Grec Qioç vie , & de « pàtpa , j'écris. Il eft confacré dans
la Littérature pour exprimer un auteur qui a écrit la
vie particulière d'un ou de plufieurs perlbnnages cé-
lèbres : tels font parmi les anciens , Plutarque & Cor-
nélius Népos , qui ont écrit les vies des hommes il-
luftres , Grecs & Romains ; & parmi les modernes
Léti , qui nous a donné les vies d'Élifabeth , de Char-
les V. de Sixte V. de Cromvel; M. Fiechier , M.
Marfollier, M. de Voltaire, M. l'abbé de la Blette-
rie , &c.
* BIOPHIO, ou BIOBIO, ( Géog.) rivière du
Chili , dans l'Amérique méridionale , quife jette dans
la mer du Sud.
BIORNEBORG , ( Géog. ) ville de Suéde dans la
Finlande , fur la rivière de Ktim près de ion embou-
chure , dans le golfe de Bothnie. Long. 40. 5. lotit,
62. 6.
BIORNO , ( Géog. ) ville de la Finlande méridio-
nale avec port , fur le golfe de Finlande.
BIORKO , ( Géog. ) île dans le golfe de Finlande,
vis-à-vis de l'embouchure de la Niera.
BIPARTITION, voy.-.: BlSSECtiON.
BIQUADRATIQUE, adj. (Algèbre.) on donne
ce nom à la puiffance qui eft immédiatement au-def-
fùs du cube , c'eft- à -dire au quarré-quarré , ou à la
quatrième puiffance f. Puissance, Racine,
Ouarré-quarré , &c. (E)
BI-QUINTILE, adj. ( AJlron. ) c'eft un afpeade
deux planètes quand elles font à 144 degrés de dit—
tance l'une de l'autre. Voye?^ Aspect.
On appelle cet afpeâ bi-quintile , parce que les
planètes font alors éloignées l'une de l'autre de deux
fois la cinquième partie de 360 degrés , c'eft-à-dire
de deux fois 72. degrés , ou 144. ( O )
* BIR , ( Géog. ) ville de la Turquie Afiatiquc dans
le Diarbeclc, avec un château fur l'Euphrate. Long.
55.36. lat.36. 10.
* BlRCKENFELD , ville & principauté d'Alle-
magne dans le Hundsruck , appartenante au prince
Palatin, duc de Deux-ponts. Longit. 24. 3$. latit.
49- 35.
* BIREME , f. f. ( Hi(!. & Mar. anc. ) forte de na-
vire à L'ufage des anciens; appellée bireme,
qu'elle étoit à deux rangs de rames. Les favans font
tort partages fur la difpofition de ces rangs de rames,
& furie nombre des rames de chaque rang, f oye[ là-
deffus l'excellent ouvrage de M. Deflandes fur la Ma-
rine des anciens ; & dans les antiquités expUqt \
lavant P. Montfaucon, vol. IKpag. 242. d<
res de bircmes ,• où il paraît qu'il régnoil quèlqi
une baluftrade fur les deux cures du vaiffeau , &
qu'une partie des rames du même côté étoit plus
élevée que l'autre partie ; les unes partant des vui-
des de la baluftrade , Içs autres d'ouvertures prati-
K k ij
i6o
B I R
quées fort au-deflbus. On ne compte à l'une de ces
biremes que fix rames deffus &C fix rames deffous. Il
paroît démontré par quelques endroits de Thucydide,
eue la bircme n'étoit pas encore inventée au tems de
la guerre de Troie ; & iélon Dymafte , cité par Pline ,
que lesErythréens conftruifirentla première. SchefFer
a fort bien remarqué que le mot bireme a deux lens
différens dans les anciens , & qu'il fe prend ou pour
un petit efquif à deux rames , ou pour un grand bâti-
ment à deux rangs de rames. Les biremes s'appelloient
aufli , félon quelques-uns , dicrotes.
* BIRGI , ( Géog. ) petite rivière de Sicile qui fe
jette dans la mer près du cap de Coco.
BIRGI - ACILINO , ( Géog. ) petite rivière de Si-
cile dans le Val-di-Mazara.
* BIRK A ou BIRTOXIN , (Géog.) ville du royau-
me de Suéde , capitale de la province de Oft-Gothie
ou Gothie orientale.
BIRMINGHAM , ( Géog. ) ville d'Angleterre dans
la province de "Wannck, remarquable par fon com-
merce en fer. Long. 16. lat. 5z. ji.
BIROTA ou BIROTUM, (Hift.anc.) chariot à
deux roues qu'on atteloit de trois mulets , & fur le-
quel on pouvoit charger environ le poids de deux
cents livres. Conftantin le Grand en ordonna l'ulage
pour la commodité du public , & fit détenfe d'y met-
tre plus de deux quintaux pelant. Valentinien , par
une autre ordonnance , régla que quand on voudroit
fe fervir de cette voiture pour voyager , on ne pour-
roit la charger que de deux perfonnes , ou de trois au
plus. Pancirol. not. Imper. Orient. ( G )
* BIRR , ( Géog. ) petite ville du comté de Marr
au nord de l'Ecoffe , fur la Dée.
* BIRSEN ou BIRTZE , ( Géog. ) ville de la Sa-
mogitie dans le grand duché de Lithuanie.
BIRVIESKA , ( Géog. ) ville d'Efpagne dans la
vieille Caftille, capitale du pays de Bureva.
BIS , dans le Commerce , eftun terme ufité particu-
lièrement lorfque par mégarde on a cotté dans un li-
vre deux feuillets du même nombre : en ce cas on
met bis à côté du chiffre qui marque le nombre de
l'un des deux feuillets , pour faire connoître qu'il eft
employé doublement ; parce que bis en Latin fignifie
deux fois. La même choie s'oblerve à l'égard des nu-
méros que l'on met fur les pièces d'étoffe , lorique
l'on en a mis deux fois un même , pour n'être pas
dans l'obligation de réformer toute une fuite de cot-
tes & de numéros. ( G )
BISACCIA-, (Géog. ) petite ville d'Italie dans le
rovaume de Naples. Long. jj. S. lat. 41. 3.
BISACRAMENTAUX,adj. pris fubft. (Hift. eccl.)
nom donné par quelques théologiens à ceux des héréti-
ques qui ne reconnoiflent que deux facremens, le bap-
tême & l'euchariftie ; tels que font les Calviniftes.(G)
BISAGE , f. m. ( Teinture. ) façon qu'on donne à
une étoife , & qui confiite à la faire paifer d'une pre-
mière couleur dans une autre. Le bifage eft permis aux
Teinturiers du petit teint.
BISAGOS , (Géog.') îles d'Afrique proche de la
côte de Guinée , dont la principale eft celle de For-
mofa. Long. 2. lat. 11.
BISALTES , f. m. pi. ( Hift. & Géog. anc. ) peu-
ples de Scythie fans aucune demeure fixe , & vivant
de lait mêlé avec du fang.de cheval. Virgile en a fait
mention au ///. livre des Géorgiques.
BISANTAGAN , (Géog.) ville d'Afie dans l'Indof-
tan , au royaume de Cambaye.
BISBAL , ( Géog. ) petite ville de la Catalogne en
Efpagne.
* BISCACHO, f. m. (Hift. nat. ) animal du Pé-
rou , qui a la queue de l'écureuil & la chair du lapin ,
& dont il faut attendre du tems & des obfervateurs
une meilleure defeription.
BISCARA , ( Géog. ) ville d'Afrique au royaume
B I S
d'Alger, dans la province de Labez. Long. zj. 10*
lat. J5. 10.
BISCAYE , ( Géog. ) province d'Efpagne , qui a
au nord la mer de Bifcaye , à l'occident les A.fturies ,
au midi la Caftille vieille , & à l'orient le territoire
d' Avala : elle eft riche en mines de fer , & contient
21 villes enfermées de murailles. On prétend que le
langage qu'on y parle eft l'ancienne langue Celtique,
qui eft commune aux Bifcayens avec les Bas -Bre-
tons , & ceux qui habitent la province de Galles en
Angleterre. Bilbao en eft la capitale.
Biscaye , ( la nouvelle) Géog. province du Me-
xique dans l'Amérique feptentrionaîe, dans l'audien-
ce de Guadalaxara, aux Efpagnols.
Biscaye, ( merde ) Géog. c'eft une partie de
l'Océan qui environne ia partie feptentrionaîe de
l' Efpagne.
BISCHBURG , ( Géog. ) petite ville de la Pruffe
Ducale ou Polonoife.
BISCHMARCK, ( Géog.) petite ville de la Po-
méranie , près de Stargard.
BISCHOFFS-HEIM , ( Géog. ) ville d'Allemagne
dans le cercle du bas Rhin , dans l'éledorat de
Mayence. Long. zy. y. lat. ^o. 40. Il y a deux
autres villes de ce nom , l'une en Franconie , l'autre
en Souabe.
BISCHOFFS-LACK , ( Géog. ) ville de la haute
Carinthie , entre les rivières de Pollent év de Zaher.
BISCHOFFS-TEIN , ( Géog. ) petite ville & châ-
teau de la Prufte.
BISCHQFFS-WERDA , (Géog.) petite ville d'Al-
lemagne dans le cercle de ia haute -Saxe en Miihie ,
à une lieue de Drelde.
BISCHOFFS-ZELL , ( Géog.) ville de Suiffe dans
le Turgaw. Long. z6. ij. lat. j.y. JJ.
BISCHWEILER , ( Géog. ) ville & château de la
baffe-Alface , proche de Strasbourg.
* BISCITE , (Hift. mod. ) c'eft un lieu couvert à
Conftantinople où font une infinité de boutiques ,
remplies de toutes fortes de marchandilés , & furtout
d'équipages pour les chevaux.
* BISCOTINS, f. m. (Pdtijferie.) forte de pâthTerie
friande qui fe fait de la manière fuivante. Prenez du
lucre félon la quantité de bifeotins que vous voudrez
faire , faites le cuire à la plume; prenez une demi-li-
vre de farine , pouffez-la dans le lucre ; remuez , fai-
tes une pâte ; parfemez une table du lucre en poudre ;
étendez deffus votre pâte , pétrifiez - la ; quand elle
fera dure, pilez-la dans un mortier avec un blanc
d'eeuf , de la fleur d'orange , un peu d'ambre ; incor-
porez bien le tout ; divilez votre maffe en petites bou-
les ; jettez ces boules dans de l'eau bouillante ; enle-
vez-les avecl.'éeumoire quand elles nageront à la fur-
face ; laiffez-les égouter : pofez-les enfuite fur du pa-
pier , & les faites cuire à four ouvert. Cela fait , vous
aurez ce qu'on appelle des bifeotins.
BISCUIT , f. m. ( terme d'ouvriers de bâtiment. ) ce
font des cailloux qui fe trouvent dans les pierres à
chaux, & qui reftent dans le baffm après que la chaux
eft détrempée. (P)
Biscuit , (Marine.) c'eft du pain qu'on cuit deux
fois pour les petits voyages , & quatre fois pour les
voyages de long cours , afin qu'il fe conferve mieux.
On le fait un mois avant l'embarquement ; & furies
vaiffeaux du roi , il eft de farine de froment épurée
de fon , & de pâte bien levée. Le bifeuit écralé & en
miettes s'appelle machemoure. Voy. Machemoure.
Pour conferver le bifeuit , il faut de tems en tems le
faire lécher & lui faire prendre l'air.
Faire du bifeuit , aller faire du bifeuit ; c'eft en ter-
mes de Marine, en aller faire provifion lorlqu'on craint
d'en manquer. (Z)
* Ce bifeuitie pétrit de la manière fuivante. Onprend
du froment de trois ou quatre mois , on le fait mou-
B I S
dre; on n'employé la farine que quinze jours après
qu'elle eft venue du moulin. Quand on veut l'em-
ployer , le boulanger fépare de la malle environ vingt
livres de levain : le levain eft un morceau de pâte pris
du levain de la dernière fournée faite entre onze heu-
res & midi. A quatre heures il met ce levain dans le
pétrin ; il verfe deffus environ dix pots d'eau plus que
tiède , fur-tout en hy ver ; il délaye le tout en y ajou-
tant une quantité de farine fuffilante , pour en obte-
nir une pâte qui ne foit ni dure ni molle ; il ramaile
cette pâte dans un coin du pétrin , 6c l'environne de
farine pour l'empêcher de s'affaiffer ; il la lailfe lever
dans cet état pendant cinq ou lix heures , puis il re-
commence à ajouter de l'eau , de la farine , & à dé-
layer derechef. A une heure après minuit , il ajoute
une troifieme fois de l'eau & de la farine , à la con-
currence de trente livres : toutes ces préparations
donnent une maile de cent vingt livres, il divile cette
malle en deux parts : l'une fervira pour le levain à la
féconde fournée : l'autre fervira pour faire le bijeuit
de la première. A chaque fournée il augmente tou-
jours la malle de levain de ioixante livres , excepté
à la dernière , où la part de pâte deftinée pour tane
le bifeuït , eft de cent livres ; & l'autre deftinée au le-
vain, n'eft que de vingt. Il faut un huitième plus de
levain en hyver qu'en été. Le boulanger prend la
maffe de pâte deftinée pour le bijcuit ; il y verle de
l'eau chaude , la délaye , la met en eau blanche 6c
épaiffe , y pouffe de la farine à deux ou trois repri-
fes, remue , pétrit , agite en tout fens, trappe à coups
de plat de main , manie, remanie , ramaile toute la
pâte en un tas , la divile en quatre, continue de la
travailler , raffemble ces quutie parties en un feul
tas , travaille ; divile encoie en quatre parties , qu il
rejoint derechef en un tas; travaille, tue la pâte du
pétrin , 6c la jette fur une table , où un autre boulan-
ger la tourne , & manie ju qu à ce qu'elle foit ferme
& bien reffuyée. Alors on la met en galette. On don-
ne à 1.1 galette quatorze onces de pâte , qui le rédui-
fent pai la cuiffon à huit ou neuf onces. On divile
toute la pâte en petites malles de quatorze onces ,
propres i faire au! i le galettes ; on tourne & re-
tourne ces pel tes m (Tes i mefure qu'on les fépare ,
pour achever de les affermir ; on applatii enluite
avec un billot , dont le milieu elt un peu plus gros
que les bouts , ce qui rend les galettes un peu con-
caves , & ne leui laiffe que quatre à cinq lignes de-
paiffeur par les bords. On les marque en croix avec
un infiniment qu'on appelle croijoire ou peigne ; on
les retourne ; on les couche à côté les unes des au-
tres ; on ies laiffe repolèr une demi-heure ; 6c lorf-
que le four elt chaud , on les pique de cinq à fix
coups d'un infiniment de ici à >intes , qu'on
appelle piquet ; 6c on les enfourne quand on s'elt ap-
perçû qu'elles ont affez levé . C'eft L'habitue e de tra-
vailler qui apprendra quand le four eft allez ch.iiid ,
& que les galettes auront affez levé.
Le four eit conitruit de brique ; fa forme n'eft pas
différentedes autres fours à boulanger. M ,i deux pies
& demi de haut, depuis la clé de la ^ ùte jufqu'à la
foie ; fa bouche , deux pies de haut lur deux de bâte ;
la foie , neuf pies de large fur neuf & demi de pro-
fondeur; l'hofiil , trois pies de hauteur , le feu , deux
pies de diftance depuis la hauteur de la bouche du
four jufqu'au manteau de la cheminée ; le manteau ,
huit pouces au-deffus de la bouche.
Après avoir tiré les brades èv' écouvillonné , le
boulanger enfourne les galettes à cote les unes des
autres ; ferme le four , c\: jette quelques pelletées de
braiie contre la porte. Au bout d'un quart-d'heure il
examine ii fon bifeuit a pris couleur: s'il le trouve
affez jaune , il laiffe le four ouvert pendant un quart-
d'heure ; il écarte les brailes qui etoient contre la
porte , puis il la referme : au bout d'un quart-U'heurc
B I S
261
ou environ, il tire quelques galettes des premières
enfournées , & les rompt ; fi elles font cuites , elles
feront rouilâtres en-dedans par les bords; & le peu
de mie contenu entre les croûtes , fera fpongieux &
Iec : on preffe cette mie ; fi on la trouve réfutante 6c
feehe , la galette eft cuite.
Lorique la galette eft cuite, on la porte à la foute
qu'on a bien nettoyée , 6c qu'on a fait chauffer pen-
dant quatre jours : les foutes font des lieux pratiqués
fur les fours , boiiés haut & bas ; & bien calfatés.
On l'y laiffe un mois 'pour le reffuyer,& autant pour
le raffeoir. On le contente en Provence , au lieu de
l'enfermer dans une foute , de l'étaler à l'air dans un
grenier , dont on obf'crve de fermer les fenêtres dans
les tems humides. Il ne faut par four qu'un gindre ou
maître de pelle , 6c deux pétriffeurs , qui font chacun
leurs trois tournées par jour.
Le bijcuit lé traniporte dans les vaiffeaux par un
tems fec ; on l 'enferme auffi dans des foutes doublées,
calfatées , natées & échauffées pendant fix jours 6c
fix nuits : on les laiffe enfuite repofer pendant trois
ou quatre jours, après quoi on les remplit.
* Biscuit, f. m. ( Pdtiffier. ) forte de pâtifferie
friande qui fe fait de la manière fuivante. Prenez huit
œufs , caffez-les dans un vaiffeau plat, battez-les,
jettez-y une demi-livre de fucre en poudre , autant
de farine , plutôt moins que plus, délayez; faites
une pâte blanche , bien battue , & fans aucun pâton ,
arroiez cette pâte d'un peu d'eau de fleur d'orange
en la battant; ayez des moules en lofanges , ou quar-
rés longs de fer blanc , enduifez-les de beurre légè-
rement , verfez votre pâte dans ces moules , iaupou-
drez-la de fucre , mettez au four , faites cuire à four
ouvert ; aptes la cuiffon , glacez avec du fucre en
poudre , 6c laiffez refroidir.
* B I s CUIT, (terme commun aux Faycnciers , aux Po-
tiers de terre , & ouvriers en Porcelaine ; ) c'eft le nom
qu'ils donnent à la pâte qu'ils employent à faire leurs
vaiffeaux, & fur laquelle ils appliquent enluite la
couverte, ^oyei Couverte , cv Poterie de ter-
re , Fayence , & Porcelaine.
BISE , f. f . ( Marine. ) vent de nord-eft ; c'eft un
vent iec & fro:d qui fouffle dans l'hyver, entre l'eft
6c le leptentrion. ( Z)
Bise , ou Bize , f. f. ( Commerce. ) eft un poids qui
fert dans le royaume de Pégu à peler les marchandi-
fes : il revient à deux livres cinq onces , poids de
Venife , ou trois livres neuf onces du poids léger
de la même ville. Chaque ii/êpefecent tecalis. Voye-r^
Tecali. Au-deffous de la bi/'e le plus petit poids eft
l'aboccho , qui ne pefc que douze tecalis & demi ; l'a-
gito pefe deux abocchi , & deux agiti la demx-bi/i ,
c'efl à-dire cinquante tecalis. ( G)
BISE , adj. ( Teinture. ) on dit d'une étoffe qui a
repaffé une leconde fois à la teinture , qu'elle eft
bijee.
* BISEAU , f. m. chez prefque tous les ouvriers en.
fer & en acier, fe dit d'un petit talud que l'on pratique
foit à la lime, l'oit à la meule, l'oit à la poliffoire ;
mais plus ordinairement à la meule, tout le long du
tranchant d'un infiniment qui doit couper. On die
lever un bifeau ; & cette opération précède prefque]
1rs la formation du tranchant ; il y a même des
inftrumens où le tranchant relie en bifeau plus ou
moins court ,lelon que la matière qu'ils oru à couper
elt plus ou moins dure ; telles (ont les forces , les ci-
failles, &c. On ne le laiffe pas aux petits ciieaux, ou
du moins il y eft prefqu 'infenlible.
BlSE AU , ( en terme Je Diamantaire. ) l'ont les prin-
cipales faces qui environnent la table d'un brillant ;
ces bifeaux font encore recoupes par en bas en plu-
lieurs petites facettes qu'on appelle indifféremment
cijeaux recoupes } oujàcêttcs recoupées.
ï6ï
B ï S
BlSEÀU, {Jardinage & Architecture.)Voye^Cvi.XU-
FRAIN.
BlSEAU, (uflencik d'Imprimerie.') c'eft un mor-
ceau de bois long , large de douze à quinze lignes
dans fa partie la plus large , fur fept à huit lignes d'é-
paifTeur , très-uni d'un côté & de l'autre , qui va en
diminuant depuis fa tête jufqu'à fon extrémité. Il y
en a de taillés pour la couche droite , & d'autres
pour la couche gauche ; ainfi ils ne peuvent être
changés de côté ; ils font plus ou moins longs , lui-
vant la grandeur de l'ouvrage. Le côté uni du bifeau
foûtient une des extrémités des lignes , & l'autre
côté donne la facilité de ferrer la forme avec les
coins. Foye^ Planche XLfig. 5. lettre K Lfig. 6. let-
tre L , M ,fig. y. lettre M, N.
Biseaux , {dans l'orgue. ) c'eft le diaphragme qui
eft placé entre le corps du tuyau & fon pié. Voye^
les articles BOURDON de 1 6 pies, ou 8 pies bouché , &
Montre de 16 pies , où les deux fortes de bifeaux
font décrits.
Biseau , outil dont les Tourneurs fe fervent : il eft
d'acier ; le tranchant en eft formé par un plan incliné
en angle aigu à la longueur de l'outil, & dont l'arrê-
te eft aufli oblique à cette même longueur : il y en
a de droits , de gauches , de ronds , de revers. Voyt%-
th les figures Planche I. du Tour. Tous ces outils font
emmanchés dans des manches de bois garnis de vi-
roles.
BISEGLIA , ( Géog. ) ville d'Italie , au royaume
de Naples , dans la terre de Bari , près le golfe de Ve-
nife. Long. J4. ig. lat. 41. 18.
* BISENTINA , ( Géog. ) petite île dans le lac de
Bolfena , dans l'état de l'Eglife.
B IS ER, v. n. (agriculture. ) c'eft baiffer , noir-
cir, dégénérer d'année en année; les Laboureurs
prétendent que le froment le meilleur bift tk finit par
devenir meteil tk feigle , même dans les terres les
plus fortes ; aufli recommandent-ils de les réveiller
par la nouveauté du grain , tk d'en aller chercher
au loin pour cet effet , au moins tous les trois ou qua-
tre ans. Mais le froment , qnoique plus fiijêt à bi/èr
que les autres grains , ne bife pas leul ; la même chofe
arrive aux avoines dans les terres froides , où l'on
n'obtient qu'une avoine folle , qui donne beaucoup
d'épis & de paille , tk point de grain. Voye^ l'article
Avoine.
BISERTE , ( Géog. anc. & mod. ) ville maritime
d'Afrique , dans le royaume de Tunis ; c'étoit autre-
fois la même qu'Utique. Lon. 28- 10. lat. Jy. 20.
BISET , f. m. ( Hifi. nat. Ornith. ) columba livia -,
ôifeau qui reflemble beaucoup à notre pigeon ; mais
il eft un peu plus petit , les pies font rougeâtres , tk
le bec eft blanchâtre ; il y a un peu de couleur pour-
pre auprès des narines ; les plumes iont par tout le
corps de couleur cendrée , à l'exception du bout de
la queue qui eft noirâtre , & des plumes du milieu
qui font un peu roufs âtres ; le deflbus du cou tk les
cotes paroiflent de couleur de pourpre & de couleur
t'erdâtre à différens afpeâs ; le deffus du cou eft de
couleur cendrée teinte de pourpre ; les quatre plus
longues plumes de l'aile font noirâtres & légèrement
teintes de roux ; les plus petites font cendrées ; celles
du milieu font à moitié de couleur cendrée , & l'au-
tre moitié qui eft celle du deffus eft noirâtre , & les
plumes qui font les plus proches du corps font rouf-
sâtres. Cet oifeau a près de quatorze pouces de lon-
gueur depuis la Dointe du bec jufqu'à l'extrémité de
la queue ; il diffère du pigeon ramier, en ce qu'il eft
beaucoup plus petit , ck. qu'il n'a point comme celui-
ci de taches blanches autour du cou S: dans les ailes.
■\Villughbi, Ornith. Voye^ OlSEAU. (/)
BISETTE , f. f. ( Commerce. )efpece de dentelle de
fil de lin blanc , tres-baffe , & de peu de valeur ; elle
B I S
fe travaille fur le couffin à l'épingle, & àufuieaUjJ
comme les autres dentelles.
BISEURS , f. m. ( Teinture. ) c'eft ainfi qu'on ap-
pelloit autrefois les maîtres Teinturiers du petit-teint,
parce qu'il n'étoit permis qu'à eux de faire le bifage
& réparage.
BISHOPS-CASTLE , ( Géog.) petite ville d'An-
gleterre , de l'évéché de Hereford , dans le Shrop-
shire.
BISIGNANO , ( Géog. ) ville d'Italie, au royau-
me de Naples , dans la Calabre , avec titre de prin-
cipauté. Long. 34. io. lat. 3ç). Jy.
BISMARCK , ( Géog. ) petite ville d'Allemagne,
dans la vieille marche de Brandebourg , fur la Biefe.
BISMUTH , (Chimie & Minéralogie.) c'eft un demi
métal ou métal imparfait , qui paroît être un affem-
blage de cubes afiez grands , formés par de petites
lames minces , appliquées les unes fur les autres : fa
couleur reflemble afiez à celle de Fétain & de l'ar-
gent; mais lorfqu'il a été expofé quelque tems à l'air
il devient bleuâtre ; il a beaucoup de reffemblance
avec le régule d'antimoine & avec le zinc : le bifmuth
eft très-caffant ck facile à réduire en poudre ; il n'eft
point de demi-métal fi aifé à fondre ; en effet il fuffit
de l'approcher d'une chandelle pour qu'd fe mette à
couler.
On trouve beaucoup de bifmuth en Saxe , dans les
mines de Sneeberg & de Freyberg , ainfi que dans
prefque toutes les mines d'où on tire du cobalt ; il
eft ordinairement lié à une pierre dure dans fa mine,
qui eft pelante, d'une fonte tantôt dure tantôt aifée,
brillante comme de l'argent , & dont les fignes dif-
tinctifs font d'être de couleurs très-variées , comme
jaune , verdâtre , rougeâtre , tk de couleur de gorge
de pigeon ; il s'en trouve de blanche ou de couleur
d'argent lans aucun autre mélange : les Allemands
l'appellent mijfpickel, mais c'eft un minéral purement
arfenical. La vraie mine de bifmuth contient , i° beau-
coup d'arlenic ; 20 une partie iemi-métallique ou ré-
guline ; 3°une terre pierreufe & vitrifîable, qui don-
ne une couleur bleue au verre. M. Henckel n'y veut
point admettre de foufre.
Il paroît que les anciens n'ont eu aucune connoif-
fance du bifmuth ; Agricola Fa confondu avec une ef-
pece de mine de plomb , qu'il nomme pyrites plumbi
cinereus ; d'autres l'ont appelle étain cendré fiannum
cinereum : on le trouve fouvent défigné par étain de
glace. On l'a fouvent qualifié de marcaffite , par ex-
cellence , & de teclum argenti , parce que Fon fioup-
çonne affez ordinairement une mine d'argent dans
fon voifinage. Quelques naturaliftes ont prétendu
qu'il ne fe trouvoit que dans les mines d'étain: mais
cette opinion eft mal fondée , attendu qu'il eft cer-
tain qu'il eft très-fouvent pur & fans mélange d'au-
cun étain ou autre métal. Lazare Ercker croit que le
bifmuth n'eft qu'une mine d'argent qui n'a pu parve-
nir à maturité. Il paroît qu'on ne lui a donné tant de
noms différens , & qu'on n'a eu fur fon compte des
opinions fi variées , qu'à caufe des rapports tk de la
reffemblance qu'il a avec plufieurs autres métaux.
Il eft vrai en effet que le bifmuth contient ordinai-
rement de l'argent , mais c'eft en fi petite quantité ,
qu'il eft plus avantageux de le travailler pour d'au-
tres ufages.
Le bij'muth a beaucoup de rapport avec le plomb ;
fi on le diffout dans du vinaigre , il l'adoucit comme
lui, & produit un fucre tout-à-fait lemblable à celui
de faturne : mais il fe diffout beaucoup plus facile-
ment que le plomb dans l'efprit de nitre , ck y produit
une effervefeence confidérable , ce qu'on ne remar-
que pas dans le plomb.
Le bifmuth a la propriété de fe mêler très-facile-
ment à tous les métaux , même les plus durs ; c'eft ce
qui lui amérité quelquefois le nom d'aimant des mi-
B I S
taux i mais il les rend plus légers & plus caftans en
raifon de la quantité qu'on y en a ajoutée. Si on en
mêle au cuivre dans la fonte , il le blanchit ; fi on le
joint à l'étain , il le rend plus fonore , plus blanc , Si
lui donne une confiftance approchante de celle de
l'argent : c'eft ce qu'on peut remarquer viliblemcnt
dans l'étain d'Angleterre , qui fe fait , dit-on , par le
mélange d'une certaine quantité de bifmuth , de ré-
gule d'antimoine , Se d'étain , Se même une portion
de cuivre. Nonobftant la facilité qu'a le bifmuth de
fe mêler avec tous les métaux , une fingularité bien
remarquable , c'eft qu'à la fonte, quelque choie qu'on
fafl'e , on ne peut venir à bout de l'unir au zinc , tan-
dis qu'il paroît avoir tant d'affinité & de rapport avec
ce demi-métal, que quelques naturaliftes les ont con-
fondus & les ont pris l'un pour l'autre.
Le bifmuth facilite considérablement la fonte des
métaux , qu'il pénètre & qu'il divife ; c'eft ce qui a
donné lieu de croire qu'on pourrait s'en fervir avec
fuccès au lieu de plomb pour coupeller. C'eft cette
même qualité qui fait que lorfqu'il a été fondu avec
de l'argent, de l'étain ou du plomb , ces métaux font
rendus par-là plus propres à s'amalgamer avec le vif-
argent ; & fi on vient enfuite à palier l'amalgame au
chamois, on remarque que le vit-argent entraîne vifi-
blement avec lui beaucoup plus de métal qu'il n'au-
roit fait fans cela.
On dit que les droguiftes , lorfqu'ils font de mau-
vaife foi , lavent tirer avantage de la connoiffance
qu'ils ont de cette dernière propriété du bifmuth , dont
ils fe fervent pour fallifîer leur mercure & en augmen-
ter le poids.
Pour tirer le bifmuth de fa mine , il ne faut pas plus
de travail que pour tirer l'antimoine de la fienne :
lorfque la mine eft riche, il fuffit de la cafter en mor-
ceaux , de la mettre dans un pot de terre ou de fer ,
& d'allumer un feu de bojs tout autour ; fi elle eft
pauvre Se d'une fonte plus dure , il faut y joindre du
flux noir , du fel commun , Se du fiel de verre , Se la
traiter comme on fait l'étain ou le plomb , en obfer-
vant de donner un feu modéré ; car il n'en faut que
peu pour réduire en feories les matières hétérogènes
qui y font mêlées , outre qu'il fe réduit en chaux 6c
le volatilile aifément au grand feu.
Lorlque le bifmuth eft en fonte , l'arfenic , dont il
abonde , s'en féparc par fublimation, & c'eft en quoi
ce minéral reffemblc beaucoup au cobalt, à qui il eft
quelquefois fi étroitement uni dans la mine , qu'il eft
très-difficile de les féparer. Voye^ Carticle Cobalt.
En effet , ils contiennent l'un Se l'autre non-feule-
ment beaucoup d'arfenic , mais encore ils ont tous
les deux pour bafe' une terre bleue , propre à faire le
bleu d'émail ; on la voit même dans quelques mines
de bifmuth toute formée avant que de les travailler.
Cette terre bleue que le bifmuth dépofe à la fonte ,
Se que les Allemands appellent wifmuth graupen (fa-
rine de bifmuth} en fait la baie; c'eft fuivant M. Henc-
kel , une terre fixe , effentielle au bifmuth Se au cobalt,
à qui elle eft intimement unie ; cette terre eft non-
métallique , attendu que quelque peine qu'on fe foit
donnée , on n'a jamais pu en tirer la moindre partie de
métal. Encore une chofe qui eft commune à ces deux
minéraux, c'eft que s'ils demeurent pendant quelque
tems entaffés tels qu'ils fortent de la mine, foit qu'ils
foient expolés à l'air, foit qu'on les mette à couvert ,
ils produifent des vapeurs d'une odeur arlénicale tres-
fenfible Se très-dangereufe , ce fleuriiïent de couleur
de fleurs de pêcher. Le même M. Henckel dit qu'on
en peut faire des cryftaux ou du vitriol , non-ieule-
ment verds, mais encore d'un beau rouge pourpre ;
ce qui fe fait , fuivant M. Pott, en verlant de l'eau
fur la mine du bifmuth , ou en la laiffant expofée à la
rofée ou à la pluie. On tire auffi du bifmuth un ma-
giftere ÔC des fleurs qui font un bon cofmétique. V.
B I S
:6j
l'article Blanc DE Bismuth. Le bifmuth diffous dans
l'efprit de nitre Se précipité par l'eau, donne une
poudre blanche qu'on recommande pour les mala-
dies inflammatoires. Mais il paroît qu'attendu l'ar-
fenic dont ce demi-métal abonde , l'ufage interne en
doit être regardé comme fort fufpect. Voye^ l'excel-
lente Dijfertation de M. Pou fur le bifmuth , ^imprimée
à Berlin en IJ3Ç). (— )
L'on peut auffi, fuivant M. Pott, faire du vitriol
de bifmuth d'une autre façon ; c'eft en prenant i { par-
tic' de bifmuth en poudre , & une partie d'huile de vi-
triol : on les met en diftillation ; on en tire tout le
flegme à feu modéré ; on calcine le réfidu qu'on pul-
vérife enfuite ; on rêverie deffus le flegme qui en a
été diftillé la première fois, en y joignant autant ou
même plus d'eau commune ; on filtre le produit ; on
le fait évaporer , Se on laiffe la cryftallifation fe faire.
Le bifmuth diffous dans l'efprit de nitre , donne une
encre de fympathie fort curieufe , qui eft de l'inven-
tion de M. Hellot de l'Académie royale des Sciences.
Voye^t 'article ENCRE DE SYMPATHIE.
Les Alchimiftes font très-grand cas du bifmuth, Se
le regardent comme une matière très-digne de leurs
recherches ; ils ont cru pouvoir en tirer l'alkaheft ou
leur diffblvant de tous les métaux, Se même le remè-
de univerfel. On le trouve déligné dans les livres des
adeptes, fous les noms de mine brillante de faturne ,
de dragon de montagne, Aç. fleur dis métaux, Aeleclrum
ïmmaturum , & dejiiturne philofophique. (— )
BISNAGAR, {Gèogf) grandi ville d'Afie, dans les
Indes, capitale d'un royaume de même nom, appellée
auffi Carnate. Longit. gf>. Jo. lat. ij. 20.
BISNOW, (Hifl. mod.) nom d'une fecle de ban-
jans , dans les Indes. Ils appellent leur dieu ram-ram,
Se lui donnent une femme. Us parent leurs idoles de
chaînes d'or , de colliers de perles , Se de toutes for-
tes de pierreries. Ils chantent dans leurs agoges ou
mofquées des hymnes en l'honneur de ces divinités,
accompagnant leurs chants de danfes , du ion des
tambours , des flageolets , des baffins de cuivre , Se
d'autres inftrumcns , dont ils jouent pendant leurs
prières. Ce dieu n'a point de lieutenant comme ce-
lui de la fecle de Samarath: mais il fait tout par lui-
même. Ces banjans ne vivent ordinairement que
d'herbes Se de légumes , de beurre frais , & de lait.
Leur meilleur mets eft Yatfchia , qui eft compofé de
citrons confits au fel avec du gingembre , de l'ail ,
Se de la graine de moutarde. Ceux de cette fecle fe
mêlent la plupart de marchandife , Se entendent mer-
veilleufement bien le commerce. Leurs femmes ne
fe brûlent point fur le bûcher de leurs maris, comme
celles de la fecle de Samarath : mais elles demeurent
toujours veuves. Mandefo , tom. II. d'Olcarius. (G)
BISON , f. m. (Hifl. nat. Zoolog.) bœuf fauvage ,
dont les anciens ont fait mention : on l'a comparé au
bœuf ordinaire pour la forme principale du corps Se
pour la grandeur, Se au cheval Se au lion pour la cri-
nière. On a prétendu qu'il eft indomptable Se plus
prompt à la courfe que le taureau. Selon le rapport
des différens auteurs qui ont parlé du bifon, il a les
cornes pointues Se recourbées à l'extrémité comme
un hameçon , la langue rude comme une râpe , la
tête courte, les yeux grands, ardens Si menacans,
le front large , S: les cornes allez éloignées l'une de
l'autre pour que trois gros hommes puiffent s'affeoir
entre les deux , le dos boflû, le poil noirâtre, Se non
rouge ni roux , à ce que prétend Aldrovande.
On a donné le nom de tifon aux taureaux fauvages
d'Amérique , que les habitans de la Floridenomment
butrons. Ces bijbns ont les cornes longues d'un pie , le
dos boffu comme le chameau , le poil long Se roûfsâ-
tre , Se la queue femblable à telle du lion. II paroît
que ces taureaux d'Amérique font de la même efpece
que ceux dont les anciens ont fait mention fous le
264
B I S
nom de bifon, & qu'ils ont dit être fréquens in tracîu
faltûs hercynïi, & dans tout le nord. Les Amériquains
fe vêtiflent de la peau de leurs bœufs, & s'en font des
couvertures pour fe défendre de la rigueur du froid.
Voye\_ Aldrov. de Quad. biful. pag. J3j. &fuiv. Ray,
Quad.Jynop. pag. Jl. ^oyêjTAUREAU. (/ )
Les cornes du bïfon font eftimées ludorifiques tk
propres pour réfifter au venin , fi on les prend en pou-
dre , depuis un fcrupule jufqu'à un gros ; la fiente en
eft fort réfolutive. (A'')
BlSON , en termes de Blafon , eft la même chofe que
bujle. Tête de bïfon couronné. (V )
BISQUAINS , f. f. plur. ( Commerce. ) ce font des
peaux de moutons garnies de leur laine , qui ont été
panées & préparées chez les Mégifiiers. C'eft avec
ces peaux que les Bourreliers font des couvertures
aux colliers des chevaux de tirage. Voye^ Housse.
BISQUE, f. m. terme de Paumier , qui fignifie l'a-
vantage qu'un joueur fait à un autre , en lui donnant
un quinze pour toute chofe ; & le joueur qui reçoit
cet avantage , peut prendre ce quinze dans tel endroit
de la partie que bon lui fembie. Ainfi prendre bien fa
bifque, fignifie placera propos ce quinze.
Bisque , f. f. (Cuifine.) forte de potage en ragoût ;
on en fait de gras & de maigres ; aux écreviffes , en
légumes, comme lentilles, &c. c'eft toujours une pu-
rée qu'on répand fur le potage, ou fur d'autres mets,
& cette purée ne le fait pas autrement que les autres.
foyei Purée.
BISSE, f. f. terme de Blafon, efpece particulière de
ferpenr, qu'on appelle blfcia en Italie. Quelques-uns
veulent que ce foit de fon fifflement qu'on lui ait don-
né ce nom. D'autres difent qu'il vient du mot fran-
çois bis , qui fignifie gris cendré, à caufe que ces for-
tes de ferpens fontprefque tous de cette couleur. (^)
BISSE AUX, ÇGéog.) île d'Afrique, fur la côte
de Nigritie , habitée par des Nègres. Il y a neuf rois
dans cette île qui a quarante lieues de circuit.
BISSECTION, f. f. en Géométrie, eft la divifion
d'une étendue quelconque , comme un angle, une li-
gne , &c. en deux parties égales ; c'eft ce qu'on nom-
me autrement bipartition. Voye-^ Division, &c. {£)
BISSEXTILE, adj. année bifextile, en Chronolo-
gie, eft une année compofée de trois cents loixante-
fix jours ; elle arrive une fois en quatre ans par l'addi-
tion d'un jour dans le mois de Février, pour retrou-
ver lesfix heures que le foleil employé dans un an au-
delà des trois cents foixante-cinq jours qu'il met or-
dinairement dans fon cours annuel, lefquelles fix
heures en quatre ans , font vingt-quatre heures , &
par conféquent un jour entier. Par cette addition la
longueur de l'année eft à très-peu près la même que
celle de la révolution de la terre autour du foleil. V.
An.
Le jour ajouté de la forte fe nomme auffi biffextil ,
Céfar l'ayant fixé au jour qui précède le 24 Février,
qui chez les Romains étoit le fix des calendes de Mars.
Le 24 Février fe cômptoit deux fois cette année ,
& on difoit par conféquent deux fois {bis) le lixieme
des calendes de Mars ,fexto calendas Mardi ; c'eft pour
cette raifon que le jour intercalaire & l'année où il
eft inféré , font l'une & l'autre nommés bifextiles.
Comme dans cette année Février a 29 jours , le jour
de S. Matthias, qui eft le 24 de ce mois dans Tannée
ordinaire, fe célèbre alors le 25 ; & l'année bifextile
a deux lettres dominicales, dont l'une fert jufqu'à la
vigile de S. Matthias , l'autre jufqu'au refte de l'an-
née, foyer LETTRE DOMINICALE.
Si l'année folaire étoit véritablement & exactement
de 365 jours , 6 heures, l'année commune fe retrou-
veroit exactement au bout de quatre ans avec l'an-
née folaire ; mais l'année folaire étant de 365 jours
5 heures 49 minutes, il s'en faut 44 minutes que ces
deux années ne s'accordent au bout de quatre ans.
B I S
Les Aftronomes chargés par Grégoire XIII, de la
réformation du calendrier , obfervant donc que le bif
fextile en quatre ans , ajoûtoit 44 minutes à l'efpace
de tems que met le foleil à retourner au même point
du zodiaque, & trouvant que ces minutes furnumé-
raires formeroient un jour en 1 3 3 ans , réfolurent de
prévenir le changement qui s'introduiroit ainfi peu à
peu dans les faiions, & pour cela ils ordonnèrent ,
que dans le cours de 400 ans , on retrancheroit trois
bifextiles ; ce fut pour cette raifon que l'année 1700
ne le fut point ; 1 800 & 1 900 ne le feront pas non
plus : mais 2000 le fera , & ainfi du refle. Foye^ Ca-
lendrier Grégorien. (O)
* BISSUS , f. m. (Hifl. nat. anc. ) matière propre à
l'ourdiffage , Se plus précieufe que la laine. Les plus
habdes critiques n'ont pas encore bien éclahciceque
les anciens entendoient par le bifus. Ils en ont feule-
ment diftingué de deux lottes : celui de Grèce , qui
ne fe trouvoit que dans l'Elide , & celui de Judée
qui étoit le plus beau. L'auteur nous apprend que ce-
lui-ci fervoit aux ornemens facerdotaux , Se même
que le mauvais riche en étoit vêtu : mais comme ,
fous les noms de bif us , ieb ns ont confondu les
cotons , les ouates , en un mot toui ^ qui fc filoit &
étoit plus prétieux que la laine , il n'eft pas aifé de di-
re au jufte ce que c'étoit, & s'il ne s'en tiroit pas du
pinna marina , coquillage ou efpece de grande moule
de deux pièces , larges , arrondies par en-haut , poin-
tues par en-bas, fort inégales en dehors , d'une cou-
leur brune & liffe en-dedans , tirant vers la pointe
fur ia couleur de nacre de perles, longues depuis un
pié jufqu'à deux & demi, portant à l'endioit le plus
large environ le tiers de leur longueur ; & garnies
vers la pointe du côté oppofé à la charnière, d'une
houpe longue d'environ lîx pouces , plus ou moins ,
léionla grandeur du coquillage, compofée de plu-
fieurs filamens d'une foie fort déliée & brune , qui , re-
gardés au microicope , pafoiffent creux ; qui donnent,
quand on les brûle , une odeur urineule comme
la loie ; & qu' Ariltote qui les nomme bif us , ou foie ,
des coquilles qui les portent, nous dit qu'on peut
filer: il n'y a donc guère de doute que cette loie n'ait
et : employée pour Tes habits des hommes riches dans
un tems où la foie n'étoit que peu connue , & que les
anciens ne l'ayent nommée bifus, foit par fa rellem-
blance avec le bifus, dont ils riloient des étoffes pré-
cieules , foit qu'elle fut elle-même le bifus dont ils fai-
foient ces étoffes. Ce qu'il y a de certain , c'eft que le
bifus du pinna marina , quoique filé groffierement ,
paroît beaucoup plus beau que la laine , & appioche
affez de la foie : on en fait encore à prelent des bas ,
& d'autres ouvrages qui feraient plus précieux , fi la
foie étoit moins commune. Pour filer le biffus, on le
laifle quelques jours dans une c?.ve, afin de l'amol-
lir & de l'humeitei , pu.j un ie peigne pour en fépa-
rer la bourre & les autres ordures; après quoi on le
file comme la foie.
Les poilïbns qui donnent le biffus , s'en fervent peur
attacher leurs coquilles aux corps voifins ; car, com-
me ils font plantés tous droits lùr la pointe de leur
coquille, ils ont befoin de ces filamens qu'ils étendent
tout autour, comme les cordages d'un mât, pour le
loûtenir dans cette lituation.
De quelque manière que le pinna marina forme fes
filamens, Rondelet nous dit qu'ils font plus beaux &
plus foyeux que ceux des moules , & qu'ils en diffé-
rent autant que la foie diffère de l'étoupe. V. Pinna
Marina , & les Mémoires de f Académie desfeiences ,
année ijll. pag. 204.
BISTI, voyei Beisti.
BISTOQUET , f. m. {Paumier.') inftrument pour
jouer au billard : c'eft une e'pece de malle fort pe-
lante & épaifle , dont la queue eft plate & recour-
bée. On s'en fert pour frapper la bille d'un coup fec ,
lorfqu'elle
B I S
lorfqu'elle eft avancée fur le tapis , & qu'on s'eft in-
terdit l'ufage de la maffe ordinaire.
BISTORTE, f. f. bijlona, {Hijl. nat. bot.) genre
déplante dont la fleur n'a point de pétales; elle eft
compolée de pluiieurs étamines qui fortent d'un ca-
lice découpé. Le piftil devient une ïemence ordinai-
rement triangulaire, & renfermée dans une envelop-
pe qui a fervi de calice à la fleur. Ajoutez au carac-
tère de ce genre, que les fleurs font difpofées en épi,
& que les racines font charnues, tortues, repliées
ordinairement les unes fur les autres , & garnies de
chevelu. Il le trouve des efpeces de ce genre , qui ,
outre les fleurs & les femences, portent des tuber-
cules qui pouffent de petites feuilles & de petites ra-
cines. Tournefort , Injl. rei herb, Voye{ PLANTE. (/)
Bijlorta radia minus intorta , J. B. J. 638. Ses ra-
cines font feules en ufage ; elles font defficcatives , af-
tringentes, bonnes dans toutes les efpeces de pertes
& de flux, dans le piflement de fang & l'incontinen-
ce d'urine ; on les croit alexipharmaques , falutaires
dans les fièvres peftilentielles ; elles renflent au poi-
fon, & l'on peut s'en fervir dans les morfures & pi-
quures d'animaux venimeux. (A/)
BISTOURI , f. m. infiniment de Chirurgie, en for-
me de petit couteau , deftiné à faire des incifions : on
en a de droits & de courbes. On conffdere deux par-
ties à cet infiniment; la lame & le manche : la lame
doit être d'un bon acier bien trempé. La partie de
la lame qui eft oppofée à la pointe , fe nomme le ta-
lon ; c'eft un quarré allongé percé dans Ion milieu
pour y paffer un clou. L'extrémité poftérieure du ta-
lon fe termine par une queue fort courte , qui finit
par un petit rouleau ou par une petite lentille de
deux lignes de diamètre, pour s'arrêter fur la châlTe
avec fermeté, & empêcher que la lame ne tourne
comme celle d'un rafoir. La partie tranchante du bif-
touri droit eft perpendiculaire , & Ion dos forme une
ligne oblique , & a une ligne d'épaiffeur à fa bafe ; il
va infenfiblement en diminuant jufqu'à la pointe. On
confidere en outre à la lame d'un bijlouri le bifeau &c
l'évuidé. Le bifeau eft une petite furface plate qui
commence à la bafe de la lame , &c qui accompagne
le dos de chaque côté dans prelque toute la longueur.
Cette furface fe fait par la meule ; elle a environ une
ligne de diamètre, &c va infenfiblement fe perdre
avant d'être arrivée à la pointe. On appelle l'évuidé
Fefpace qui eft compris depuis le bifeau jufqu'au tran-
chant, il eft un peu cave ; il s'étend depuis le talon
jufqu'à la pointe ; il eft fait par la rondeur de la meu-
le ; fon utilité eft de rendre le tranchant plus fin , en
diminuant de la matière. Fig. 1. PL II.
Le bijlouri courbe doit avoir les mêmes qualités :
la courbure n'en doit pas être fort grande ; il faut
qu'elle commence dès fa bafe, qu'elle fe continue in-
lenfiblement jufqu'à la pointe, &c que dans tout le
trajet, la courbure n'excède pas trois lignes. Le tran-
chant eft dans la courbure. Fig. 2. PI. II.
Je me fers dans plufieurs cas , & furtout dans l'ex-
tirpation des cancers , d'un bijlouri courbe , tranchant
fur fa convexité. Cet infiniment a beaucoup d'avan-
tage , parce que le tranchant agit tout-à-la-fois dans
toute fa longueur; &c dans les bijlouris ordinaires, il
n'y a prefque que la pointe qui loit d'ufage.
Le manche des bijlouris eft compote de deux lames
d'écaillé de la même configuration que la lame. Elles
font percées à leur bafe d'un trou qui doit être moins
large que celui du talon fur lequel elles s'appliquent,
Cv auquel elles font unies par un clou de fil de laiton
rivé fur deux rofettes d'argent. L'extrémité de la châl-
fe eft aufli percée , & les deux pièces font jointes par
un clou rivé pareillement.
Les dimeniions des bijlouris peuvent varier ; ils
ont communément deux pouces au plus de tranchant,
& les autres parties font proportionnées à celle-ci.
Tome II,
B I S
265
Il y a des bijlouris boutonnés par leur extrémité ;
on s'en fert dans les cas oii l'on craint de piquer les
parties par la pointe de rinftrument : on fe fert aufli
de bijlouris à deux tranchans pour l'ouverture des ab-
cès, l'opération du féton, &c. Fig. 3. PI. II.
Bistouri à la lime , eft un inftrument de l'in-
vention de M. Petit; c'eft un couteau dont la lame a
deux pouces & demi de longueur, dont le tranchant
eft moufle, & qui n'a été trempé qu'après avoir été
fabriqué. La pointe de ce bijlouri eft terminée par un
petit bouton. Il eft monté fur un manche d'ivoire
taillé à pans. L'ufage de ce bijlouri eft de dilater les
étranglemens dans différentes opérations, comme
dans les hernies, &c. ce qu'il exécute fans aucun dan-
ger, parce que fon tranchant , qui eft moufle , ne cou-
pe que les parties qui réliftent. PL III. fig. ij.
Bistouri gajlrique , eft un inftrument inventé
par M. Morand pour dilater les plaies du bas-ventre,
afin de réduire les parties qui en font forties. Cet
inftrument eft compolè de deux pièces ; une fixe , &c
une mobile : la pièce fixe eft femblable à un manche
de cifeaux , excepté qu'elle eft plus longue ; elle eft
terminée d'un côté par un anneau , & de l'autre par
un ftylet ou une fonde boutonnée, & un peu recour-
bée : la pièce mobile eft plus courte ; elle eft compo-
fée d'une lame dont le tranchant eft extérieur , &
d'un petit manche au bout duquel eft un anneau fem-
blable à celui de la pièce fixe ; la partie antérieure de
la lame eft jointe à la pièce fixe par une petite char-
nière à jonction paflée ; l'union de la pièce mobile à
l'immobile eft à deux pouces de diftance du bout du
.ftylet. ( Voyti fig. 4. PL VI. ) Pour fe fervir de cet
inftrument , on le tient par les anneaux comme des
cifeaux ; on porte perpendiculairement le ftylet dans
l'endroit où l'on veut dilater , Sdorfqu'ileftentré aufli
avant qu'il eft néceflaire,on éloigne la partie mobilede
l'immobile , afin de couper avec le tranchant les par-
ties qui font l'étranglement. Cet infiniment réunit la
fonde & le bijlouri qui occupoient les deux mains
du chirurgien. C'eft un grand avantage , puifque l'o-
pérateur en fe fervant du bijlouri gajlrique , peut ran-
ger de l'autre main lesinteftins, & le difpenfer d'em-
prunter le fecours d'une main étrangère, qui n'eft
jamais fi fûre que la fienne.
Bistouri herniaire , eft un bijlouri courbe caché
dans une cannule qui n'eft plus en ufage, pour dila-
ter l'anneau du mufcle oblique externe dans l'opéra-
tion de la hernie. Feu M. de la Peyronie , premier
chirurgien du Roi , a changé la deftination de cet inf-
trument, lequel au moyen de quelques corrections
qu'il y a faites, eft fort convenable pour l'opération
du phymofis.
Cet infiniment eft compofé de deux pièces princi-
pales; d'une cannule d'argent ou d'acier, & d'un bif-
touri. Voycifig. i5. & 16. PL III.
La cannule eft arrondie, longue de quatre pouces,
épaiffe de quatre lignes à fa partie poftérieure ; elle
va inlenfiblement en diminuant pour fe terminer par
une pointe un peu moufle. Cette cannule eft un peu
courbe dans toute fa longueur ; fa partie fupérieure
& poftérieure eft plate depuis le manche, à la lon-
gueur de quatorze lignes : on obferve dans le plus
large de cette furface un trou taraudé pour recevoir
une vis qui fert à attacher un reffbrt : cette furface
plate eft bornée par une éminence olivaire qui s'é-
lève du corps de la cannule à la hauteur de trois
lignes, & qui peut avoir trois lignes &C demie d'épaif-
feur , fur cinq lignes de longueur.
La cannule eft fendue à jour, fuivant l'épaifleur de
fon corps ; de manière que cette fente règne fupé-
rieurement depuis la fin de la furface plate jufqu'à
l'extrémité antérieure de la cannule, coupant dans ce
chemin l'emmenée olivaire en deux ; & intérieure-
ment elle fe termine à quatre ou cinq lignes de l'ex-
i66
BIS
trémité antérieure ; de forte que ce qui refte de la
cannule eft coupé en talud , & ne parôît point du
côté de fa convexité.
L'éminence olivaire qui efl coupée en deux par la
fente que nous venons d'obferver , eft percée diamé-
tralement & dans fon milieu , ayant une de fes ailes
tournée en écrou pour recevoir une vis faillante.
La partie poflérieure de la cannule fe termine par
une foie maftiquée dans un manche d'ébene ou d'i-
voire tourné en pommette ; il doit être allez gros ,
Se de la longueur de deux pouces quatre lignes.
Il y a en outre une petite lame d'acier battue à
froid pour faire refîbrt ; fa figure efl pyramidale ;
elle efl très-mince , large de deux lignes & demie
vers fa bafe , & d'une bonne ligne & demie à fat
pointe, qui eft moufle & arrondie ; fa longueur eft
de quatorze lignes ;elle eft recourbée dans fon milieu,
de manière que la pointe s'éloigne de l'axe. Ce ref-
fort efl percé à fa bafe pour le paflage d'une vis qui
s'engage dans l'écrou qui efl pratiqué à l'endroit le
plus large de la furface plate de la cannule, pour fixer
& attacher une extrémité du reflbrt fur la cannule ,
tandis que ion autre extrémité éloignée de l'axe de
la cannule pouffe la pièce de pouce dont nous allons
parler.
La féconde pièce principale de cet infiniment efl
le biflouri ou la lame : on y confidere deux parties ;
la lame tranchante & le talon : la lame efl fort étroi-
te , elle n'a point de bifeau , tout efl évuidé ; fa poin-
te efl fort allongée &C fort aiguë , ce qui efl tort utile
pour l'opération du phymofis. La féconde partie de
la lame efl le talon ; on y obferve une crête arron-
die de trois lignes de haut , fur cinq lignes de lon-
gueur, fituée perpendiculairement fur la partie fupé-
rieure du talon : cette crête efl percée dans fon mi-
lieu par un trou qui la traverfe : fur le fommet de
cette crête efl attachée horiiontalement une pièce
de pouce , ou petite plaque légèrement convexe ,
longue d'un pouce cinq lignes^ôc large d'environ fept
à huit lignes à fa bafe.
La jonction de la lame avec la cannule efl telle ,
que la première efl entièrement cachée dans latente
■de la cannule ; & la crête fe trouvant entre les deux
pièces de l'éminence olivaire , elle y efl arrêtée par
une vis faillante qui traverle les deux pièces & la
crête de la lame. Cette jonction forme une charnière ;
lorfqu'on appuie fur la pièce de pouce , on l'appro-
che du manche en forçant le reflbrt ; le tranchant de
la lame fait en même tems la bafcule , & il fort de
dedans la fente de la cannule : dès qu'on celle d'ap-
puyer fur la pièce de pouce , la pointe du reflbrt s'é-
lève avec vîtefle, & fait rentrer la lame dans la can-
nule.
La vis qui attache le reflbrt fur la furface plate de la
cannule doit avoir une petite rainure ou échancrure
fur le milieu de fa tête , afin de pouvoir être démon-
tée par le moyen d'un tourne-vis. Mais la vis fail-
lante qui fait l'eflieu de la charnière doit avoir un
manche en forme de petite aile , pour pouvoir fép'a-
rer aifément dans le befoin la lame , & retirer la can-
nule.
Cet inil rument , qu'on a nommé bijiouri herniaire
parce qu'il a été imaginé pour faire la dilatation des
étranglemens dans les hernies , n'eil point propre à
cet ufage , parce que ces obflacles font extérieurs
( Voye^ Hernie) , & que ce bijiouri couperoit inté-
rieurement beaucoup au-delà des obflacles ; incon-
vénient qui l'a fait proferire de l'ufage auquel il avoit
été deftiné.
M. de la Peyronie qui a fait ajouter la vis ailée,
qui a beaucoup de prife & qu'on peut facilement
ôter, au lieu d'une vis perdue qui tenoitla lame mon-
tée fur la cannule, s'eft fervi de cet infiniment pour
l'opération du phymofis ; il introduifoit ce bijiouri
BIS
avec la cannule au-delà de la couronne du gland, fans
courir rifque de piquer le malade : il ôtoit enfuite la
vis & retiroit doucement la cannule , de forte que la
lame relloit feule entre le prépuce & le gland ; il la
prenoit par fa petite plaque avec la main droite , & le
pouce &c le doigt index de la main gauche étant ap-
pliqués aux deux côté de l'endroit où il jugeoit que
la pointe de l'inflniment forriroit , il perçoit le pré-
puce , paflbit aufli-tôt le doigt index derrière le dos
du bijiouri , & achevoit l'opération en retirant à lui
le bijiouri avec les deux mains, foye^ Phymosis.
M. leDran a imaginé un bijiouri herniaire , dont
la lame efl cachée dans une fonde creufe ; le talon
de la lame efl relevé & retiré en arrière en fortant
de la fonde creufe , lorfqu'on appuie le pouce fur la
plaque ; & cela fans que la pointe puiflë fortir
de la fonde , au moyen d'une queue d'aronde
qui termine la lame , &c qui coule dans deux rainu-
res. Voye^ fig. 3. Planche VI. deux petites ailes qui
font aux parties latérales du corps de cet infiniment,
& qui aflujettiflént & défendent l'inteilin , lorfqu'on
a introduit dans l'anneau la fonde creufe où la lame
efl renfermée. (£)
BÏSTOURNER un cheval , (Maréchallerie. ) c'efl
lui tordre violemment deux fois les tefticules ; ce
qui les fait defiécher , les prive de nourriture , & ré-
duit le cheval au même état d'impuifl'ance que fi on
l'avoit châtré. Voyt^ Châtrer. ( V")
* BISTOW, ( Géog. ) petite ville du duché de
Meklembourg.
BISTRE , terme de Peinture , couleur bnine & un
peu jaunâtre dont les Deflinateurs fe fervent pour
faire le lavis. Voye^ Lavis. On s'en fert encore pour
peindre en mignature. Pour faire le bijlre on prend
de la fuie de cheminée ; on la broyé avec de l'urine
d'enfant fur l'écaillé de mer , jufqu'à ce qu'elle foit
parfaitement affinée ; on l'ôte de défais la pierre
pour la mettre dans un vaifleau de verre de large
encolure , & on remue la matière avec une fpatu-
le de bois , après avoir rempli le vaifleau d'eau clai-
re : on la laifle enfuite repofer pendant une demi-
heure; le plus gros tombe au fond du vaifleau , &
l'on verfe doucement la liqueur par inclinaifon dans
un autre vaifleau ; ce qui refle au fond efl le bijlre le
plus groflier , que l'on jette : on fait de même de ce
qui efl dans le fécond vaifleau ; on remet la liqueur
dans untroifieme , & on en retire le bijlre le plus fin ,
après l'avoir laifle repofer pendant trois ou quatre
jours. On doit procéder de la même manière pour
faire toutes les couleurs dont on doit fe fervir en la-
vis , afin d'avoir des couleurs qui ne faflent point
corps furie papier ; ce qui feroit un mauvais effet à
l'œil ; car la propreté que demande le deffein ne fouf-
fre que les couleurs tranfparentes.
On prépare encore le bijlre en faifant bouillir la
fuie de cheminée cinq ou lix gros bouillons avec de
l'eau à diferétion , dans un chaudron expofé fur un
grand feu ; on la remue de tems en tems avec un pe-
tit bâton ; au relie on s'en fert comme ci-deffiis. (iï)
* BISTRIKZ, ( Géog. ) comté dans la haute
Hongrie, dont la capitale porte le même nom, fur le
Gran.
BISTRICKZ, (Géog.) ville forte de la Tranfilva-
nie , capitale du comté de même nom , fur la rivière
de Bijlrici. Long. 4Z.33- ***. 43. 33.
* BISZESTIA ou BECZEST1E, ( Hijl. mod. )on
nomme ainli en Rufîie la punition impolée à ceux qui
ont injurié quelqu'un : elle coniifle dans une amende
pécuniaire proportionnée au rang de celui qui a re-
çu l'injure ; fi c'ell un boyard, l'amende va quelque-
fois à deux mille roubles : fi celui qui a tait l'injure
eft infolvable, on l'envoyé à celui qu'il a lélé , qui
eft maître d'en faire un efclave , ou de lui faire don-
ner le knoute.
B I T
* BITBOURG , ( Gêog. ) ville du duché de Lu-
xembourg , fur les frontières de l'électorat de Trê-
ves. Long. 24. 13. lat. âo.
* BITCHU ou BITCOU , ( Gêog. ) ville de l'île
de Niphon au Japon, & capitale d'un petit royau-
me de même nom , fitué fur le golphe de Méaco.
* BITCH ou BICHE, ( Géog. ) ville fortifiée &
comté du pays de Vauge , qui a au nord &c à l'orient
le duché de Deux-ponts , l'Alface au midi , & le
comté de Sanverden au couchant. Long. z5. 14. lat.
49. 5.
* BITETTO , ( Géog. ) petite ville du royaume
de Naples , dans le territoire de Bari. Lon. 34. z6.
lat. 41. 8.
* BITHIES , f. m. pi. ( Géog. & Hijl. ) peuples de
Thrace ainfi nommés du fleuve Bithis. Il y a eu dans
la Scythie des femmes de ce nom qui avoient , dit-on ,
à un des yeux la prunelle double , la figure d'un che-
val à l'autre , & le regard û dangereux , qu'elles
tuoient ou enforceloicnt ceux fur qui elles l'atta-
choient. Voye^ cette fable dans Pline, liv. VII. c. ij.
* BITHYNARQUES , f. m. pi. ( Hifl. anc. ) Les
payens avoient des prêtres qui faifoientles fondions
facerdotales dans plufieurs villes à la foi.-. , oc quel-
quefois dans toute une province : ces hommes joùif-
ioient d'une grande autorité , & portoient le nom de
la province dans laquelle ils exercoient ; ainfi les
Bithynarques étoient les louverains pontifes de la L^-
thynie.
* BITHYNIE , ( Géog. anc. & mod. ) c'étoit autre-
fois un royaume de l'Aile mineure , èk il fait aujour-
d'hui partie de laNatolie.
Bithynie , ( Géog. anc. & mod. ) contrée de l'A-
fie mineure voiiine du Pont & de la Troade , & fi-
tuée vis-à-vis la Thrace. Elle s'eft appellée Bebrycie,
Mygdonie , & s'appelle aujourd'hui le Becfangil.
* BITILISE , ( Géog. ) ville d'Alie dans la Géor-
gie , fur les frontières de la Perfe. Elle appartient
aux Turcs.
* BITO, (Géog.) ville & royaume d'Afrique dans
la Nigritie , arrofé par le Niger.
BITONTO , ( Géog. ) petite île affez peuplée du
territoire de Bari , clans le royaume de Naples. Lon.
34. ZZ. lat. 41. 13.
BITORD , f. m. menue corde de deux fils. Voye^
V article CoRDERlE.
BITTE , f. f. terme de Rivière , pièce de bois ronde
fur le devant d'un batteau foncet, fervant à fermer
le batteau.
Bittes grandes & petites, en Marine; on nomme
ainii une machine compofée de deux fortes pièces de
bois longues ÔC quarrées nommées piliers , qui font
Fofées debout fur les varangues , l'une à ftribord &
autre à bâbord , & d'une autre pièce qui les traverfe,
Cv que l'on appelle traverfin, qui les affermit & les en-
tretient l'une avec l'autre ; & encore de courbes qui
les appuient & les fortifient. Voye^ PI. VI. n°. 17. &
29. la figure des bittes , & la difpofition des pièces
qui les compofent. Voye^ leur fituation Plan. IV, fig,
2. n°. 86. 87. 88. 89. & l'explication qui contient
le nombre , l'arrangement & les proportions des
pièces dont les bittes font compolécs : fe trouvant
jointes à la figure , il cil inutile de les répéter ici ;
il fuffitd'y renvoyer PI. VI. n°. 17. 28. & 19.
Bittes fe prend aufïi quelquefois en particulier
pour les piliers. Voye^ Piliers DE BlTTES.
LAifage des bittes cil de tenir les cables lorfqu'on
mouille les ancres, ou qu'on amarre le vaiffeau dans
le port.
Il y a de grandes & de petites bittes ; les grandes
font à l'arriére du mât de tnifene , & ne s'e
que jufqu'entre deux ponts, où elles fervent à amar-
rer le cable. Voyei Pl- lV-fiS' l- n°- 86-
Les petites bittes , qui font les unes vers le mât de
Terne II,
B I V
207
rnrfcne , & les autres vers le grand mât , s'élèvent
jufque fur le dernier pont , & elles y fervent à amar-
rer les écoutes des deux huniers. (Z)
BITTEN , ( Géog. ) c'eft un certain diftrict dans
le duché de Courlande.
* BITTERFELD , ( Géog. ) ville de Saxe fur la
Moldave.
BITTER le cable , (Marine.) c'eft lui faire faire un
tour fur les bittes 6c l'y arrêter. Filer k cable Jur Us
bittes , eft le contra: ; e de le buter , & fignifie le lâcher,
BiTTON , ( Manne. } c'eft une pièce de bois ron-
de & haute de deux pies 6c demi , par où l'on amarre
une galère à terre. (Z)
BiTTON, terme de Rivière , pièce de bois ronde
près le gouvernail , fervant à fermer un batteau
foncet.
BITTONNIERESc>VITONNIERES,voy^
Angltlleres.
* Bïï UME,f. m.(Hijl. nat.) matières qui appar-
tiennent toutes au règne minéral: elles font inflamma-
bles ; on les trouve dans la terre & dans les eaux fous
diverfes formes : on les divhe en folides & en liquides.
Les liquides font le naphte ou pétrole, le pijajp/ialte ou
poix minérale, &c. les folides (ont le bitume de Judée >
['ambre-gris, V ambre-jaune , le jayet , & le charbon de
terre. Le pétrole & le pifîalphalte fe trouvent dans les
eaux. Voyei Pétrole & Pissasphalte. On tire les
autres du fein de la terre. Voy. Ambre, Jayet, As-
phalte, &c. Quoiqu'ils foient tous d'une confif-*
tance aiTez dure , il eft pi cuvé qu'ils ont commencé
par être liquides , & qu'ils ne fe 1u.1t durcis que par
fuccefïïon de tems. Il n'y a que les huiles qui puif-
fent dilîbudre les bitumes lolkles, & fe mêler avec les
baumes liquides. Ils font formés pour la plupart na-
turellement, & prefque fans aucun mélange : quand
il leur arrive d'être enveloppes de matières étrangè-
res , il faut employer le fecours de l'art pour les ti-
rer des corps qui les comiennent. On met au rang
des bitumes le loutre & les lues arfenicaux, parce
qu'ils en ont prefque toutes les propriétés , & qu'ils
font d'une nature plus analogue au bitume qu'à tout
autre corps. Voyei Arsenic <S- Asphalte.
BITURIGES , f. m. pl. ( Géog. & Hijt. anc.) peu-
ples de l'ancienne Gaule : il y avoit les Bituriges Vi*
bifeiens, qui decupoient ce qu'on appelle aujourd'hui
la Guienne propre , 6c les Bituriges cubiens , qui habi*
toient le Berry , où leur nom s'eft conlerv e.
BIVALVE , adj. ( Hifi. nat. Conchiliog. ) c'eft par
ce mot que l'on delîgne les coquilles qui font compo*
fées de deux pièces , pour les diftinguer des unival-
ves cv des multivalves. Voyeur Coquille. ( / )
*BIVAR, (Gêogé) ville d'Efclavonie dans l'ileMe-
tabar, formée par la Sa\ e.
* BIVONA, (Gêog. ) petite ville de Sicile , avec
titre de duché.
BIVOUAC , ou BIOUAC , ou BIHOUAC , ( ter-
me de Guerre. ) c'eft une garde qui ell fur pie pendant
la nuit lorfqu'on eft proche de l'ennemi, pouiVop-
pofer àfesentreprifes. Cette gardefe fait quelquefois
par toute l'armée lorfque l'ennemi eft proche. Lorf-
que le prince Eugène s'approcha des lignes de Phi*
hsbourg en 1734 , toute l'armée coucha au bivouac
pendant plus de quinze jours, pour être en étal de
s'oppofer à les attaques, que la proximité de foq
camp lui permettoit de faire . imoment,
Lorfque les troupes couchent au ont
pas détentes; les foldats font armés & habillés «
pour être prêts au premier co nmandement. Lever U
bivouac , c'eft renvoyer l'armée dans les tenl
On fait auffi le bivou . affiége une pla-
ce, pour empêcher i. :s enn. 1 . . [uel->
que choie dans la ville, ou pour prévenir lesfurpri-
fes & les attaques du camp,
Llij
268
B I Z
B L A
Ce mot vient , à ce qu'on prétend , de l'Allemand
wey-wach , qui lignine double garde. ( Q )
* BIUTHERE, (Géogr.) petite rivière de la Ro-
manie , dans la Turquie, en Europe, qui le jette dans
îa mer de Marmara.
*BIXA, (Hift. nat. bot.) arbriffeau qui croît
au Brefil , de la grandeur à peu-près d'un citronier ;
on l'appelle auiîî changuarica ou pamaqua. Sa feuille
eft verte &c hériffée , & relTemble à celle de l'orme ;
J'écorce du tronc &c des branches eft d'un jaune
rougeâtre ; le bois en eft blanc & armé de pointes.
Cet arbre porte des fleurs compoiées de cinq feuil-
les , d'un rouge pâle comme les rôles, fur lelquelles
fe forment des gonfles de la groffeur d'une amande
verte , qui s'ouvrent lorlque le fruit eft mûr ; il y a
dedans des grains d'un beau rouge, lemblables à des
grains de raifin, excepté qu'ils font plus arrondis;
en ne faifant que les laver dans l'eau, ils lui donnent
une couleur de carmin. La racine eft d'un goût fort,
mais agréable ; les Indiens s'en fervent au lieu de
fafran. Cet arbre eft verd pendant toute l'année , il
porte fon fruit au printems , c'eft alors qu'on le
coupe ; on prétend qu'il en fort du feu comme d'un
caillou lorfqu'on le frappe. Son écorce lert à faire
des cordes auiîi bonnes que celles de chanvre ; la
graine prife intérieurement arrête le cours de ventre,
& calme les ardeurs de la fièvre.
B1ZA , f. m. (Commerce.) monnoie d'argent du Pé-
gu , qui a cours pour un demi-ducat & quelque choie
de plus; le biça vaut cinq livres cinq lous cinq deniers,
argent de France. Il y a aufli des doubles fetça qui
font d'or , mais très-rares , & le plus fouvent altérés.
* BIZACENE (la) Géogr. ancienne contrée de
l'Afrique , bornée à l'orient par le fleuve Triton , à
l'occident par la Numidie , au midi par la Libye in-
térieure ; c'eft aujourd'hui une partie du royaume
de Tunis.
* BIZARRE , FANTASQUE , CAPRICIEUX ,
QUINTEUX , BOURRU , (Gramm.) termes qui
marquent tous un défaut dans l'humeur ou l'efprit ;
par lequel on s'éloigne de la manière d'agir ou de
penfer du commun des hommes, Lefantajque eft di-
rigé dans fa conduite & dans les jugemens par des
idées chimériques qui lui font exiger des choies une
forte de perfeûion dont elles ne font "pas iuicepti-
bles , ou qui lui font remarquer en elles des défauts
que perfonne n'y voit que lui : le bigarre, par une
pure affectation de ne rien dire ou faire que de fin-
gulier : le capricieux , par un défaut de principes qid
l'empêche de le fixer : le quinteux , par des révo-
lutions lubites de tempérament qui l'agitent ; &c
le tour ru , par une certaine rudeffe qui vient moins
de fond que d'éducation. Le fantajque ne va point
fans le chimérique ; le bigarre lans l'extraordinaire ;
le capricieux , fans l'arbitraire ; le quinteux , fans le
périodique ; le bourru, fans le maullade , & tous ces
caractères font incorrigibles.
BlZE, farda f. f. (Hift. nat. Ichthyologie. )
poifibn de mer reffemblant à la pélamyde : il eft lifté
& lans écailles , à l'exception des endroits qui font
fous les nageoires placées auprès des oûies: c'eft-
là feulement qu'il a des écailles qui font diftinguer
la bife de la pélamyde , qui n'en a nulle part. Au refte
ces deux porflbns lont fi lemblables , que l'on pren-
droit ailément l'un pour l'autre. Cependant la chair
de la bi^e n'eft pas fi tendre que celle de la péla-
myde, & fes dents lont plus grandes &z plus cour-
bées au dedans de la bouche. Rondelet. Foye- PÉ-
LAMYDE. Poisson. (/)
BizÉ à deux têtes, (outil de Cordonnier.) il eft
de buis & lert à régler la trépointe du deniere du
foulier. Voye^ la jig. 4 , PI. du Cordonnier-Bottier.
* BIZrfcANI ou bIZEhAMI , (Hft. mod.) on
nomme ainfi à la cour du grand-tei^neur un cer-
tain nombre de fourds & muets : ils font en état
non feulement de fe faire entendre par fignes , mais
encore de tenir un difeours fuivi de cette façon.
Au refte l'ulage de parler par fignes eft fi commun
dans le lérail , que prefque tout le monde y entend
ce langage. On choifit quelques uns de ces birjba-
nis pour fervir de bouffons 6c amufer fa hauteffe.
BIZEGLE , ( cke{ les Cordonniers ) eft un morceau
de buis qui lert à liffer le devant des femelles. Voye^
la Jig- â , Planche du Cordonnier-bottier.
* BIZU , (Géog.) ville d'Afrique , en Barbarie, au
royaume de Maroc , capitale de la province d'Eskur.
B L
* BLABE , ( Gîog. anc. ) ile du bofphore de Thra-
ce, vers l'Aiie & la Chalcédoine, proche du pro-
montoire appelle Lcmbus.
* BLACKBORN , (Géog. ) petite villede la pro-
vince de Lancaftre en Angleterre.
* BLACKWATER , ( Géog. ) il y a deux riviè-
res de ce nom en Irlande, &£ une en Angleterre
dans le comté d'Efiex.
_ * BLADNOCK , ( Géog. ) rivière de l'Ecofle mé-
ridionale dans le comté de Galloway.
* BLAFFERT ou PLAPPERT , (Commerce.) pe-
tite monnoie uiitee en Allemagne dans l'éleétorat
de Cologne. Le blaftert vaut 4 albus, & 45 albus
font un écu d'Empire ou ryxdaller: nous évaluons
le blaffert à trois fols \~} de deniers de notre argent.
* BLAINVILLE , (Géog.) ville de Lorraine , fur la
rive méridionale de la Meurthe , proche Luneville.
BLAIREAU , TAISSON , f. m. (Hift. nat. Zoolog.)
taxus , mêles ; animal quadrupède. On en a diftingué
deux efpeces , dont l'une refiemble par le mufeau à
un chien , taxus caninus ; & l'autre à un cochon , ta-
xus Juillus : on a aufti prétendu que celui-ci avoit le
pié fourchu , au contraire de l'autre qui a des doigts.
Aldrovande a donné des gravures de ces deux ef-
peces : li elles exiftent réellement toutes les deux ,il
eft certain que celle qui refiemble au porc , eft bien
plus rare que l'autre qui eft bien conrue & fort fré-
quente. Le blaireau qui refiemble au chien parle mu-
leau , a le corps gros & racourci , le cou court , le
poil rude & long à peu près comme des loies de co-
chon ; la couleur des poils du dos eft d'un jaune fort
pâle à leur racine , brun ou noir dans le milieu , 6c
jaune blanchâtre à l'extrémité ; de forte que le dos de
cet animal eft mêlé de noir 6c de blanc : c'eft pour-
quoi on lui a donné le nom de grifart. Le poil des cô-
tés Se du ventre eft d'un jaune pâle ; celui de la gorge,
des épaules & des pattes eft prefque noir. Il y a une
bande blanche qui s'étend depuis ie fommet de la tête
julqu'au bout du mufeau : de chaque côté de cette
bande , on en voit une autre qui eft noire & de figure
pyramidale , dont la pointe eft en-avant ; ces deux
bandes s'étendent depuis les narines jusqu'aux oreil-
les , en pafiant par-deftûs les yeux : au délions de ces
bandes noires , le poil eft blanchâtre fur les lèvres.
La queue eft courte , grolie , 6c garnie de poils longs
& forts. Les oreilles lont courtes , arrondies , & allez
lemblables à celles duratdomeftique. Les yeux font
petits. Les dents de ce blaireau font lemblables à cel-
les du chien. Il a le mufeau fort pointu , & le derrière
de la tête large , à peu-près comme le renard. Les pat-
tes font courtes ; les ongles des pies de devant lont
plus longs que ceux des pies de derrière : c'eft à l'aide
■ ands ongles que le blaireau creufe en terre
comme les lapins, 6c y fait des terriers qu'il habite.
Il eft carnaffier; il fe nourrit de lapins, des oifeaux
qu'il peut attraper , 6c. Cet animal a fous la queue
au-deffus de l'anus un a ;hce , qui com-
munique dans une forte de bourfe ou cie lac allez
peu profond. Cette cavité eft garnie de poils , & en-
B L A
duîte d'une matière gratte qui a une odeur defagréa-
ble. Lorfque le blaireau eft attaqué par d'autres ani-
maux , il fe couche fur le dos , tk ne préfente à fon
ennemi que les griffes & les dents. Sa morfure eft
très-forte. On dit que les femelles de cet animal por-
tent pendant environ trois mois ; qu'elles mettent bas
en automne , lorfque les feuilles des arbres tombent ;
tk qu'il y a deux ou trois petits à chaque portée. Ray,
Jynop. quad.pag. i85. Aldrovande, dequad. digitaux,
"lib. II. cap. xj. Voyei Quadrupède. ( / )
La chaffe du blaireau fe peut faire avec des baf-
fcts : fi le terrier eft fur un lieu élevé , on y doit faire
entrer le chien par l'ouverture d'en-bas, afin d'obli-
ger l'animal à fortir par celle d'en -haut ; alors les
chiens fe jettent fur lui , & les chaffeurs doivent l'af-
fommer , & prendre garde de n'en pas être mordus.
Les blaireaux fe prennent auffi avec des collets.
On donne avec fuccès les cendres de cet animal
dans les maladies des poumons , dans les crachemens
de fang. Son fang féché & mis en poudre , eft eftimé
bon contre la lèpre , &paffe pour un préfervatif con-
tre la pefte. Sa graiffe calme les douleurs des reins
qui proviennent du calcul : elle appaife l'ardeur des
fièvres , & remédie aux contractions tk aux roiblef-
fes des articulations tk des nerfs. On l'employé dans
les douleurs de rhùmatifme. ( A7)
Blaireau , en terme de Doreur fur bois , eft une ef-
pece de pinceau dont le poil eft dur , qui fert à époul-
îeter les pièces dorées , 6c à en faire tomber l'or
inutile.
* BLAIRIE, (droit de) c'eft celui qu'ont quel-
ques feigneurs de permettre à leurs habitans de me-
ner paître leurs beftiaux fur les chemins publics , les
terres à grains , & les prés de leurs terres , après l'en-
tière dépouille. On appelle encore ce droit, droit de
vaine pâture.
Il ièmble que la vaine pâture foit de droit com-
mun : il y a même des cantons oii l'on ne peut met-
tre fes prairies en regain , tk en empêcher la vaine
pâture après l'enlèvement de la première herbe ,
qu'en bâtiffant tk en habitant fur le terrein de la prai-
rie : mais il y a d'autres cantons où la vaine pâture
ou le droit de Mairie fuit la haute juftice , & où les
jufticiables font obligés de l'acquérir par une rede-
vance qu'ils payent au feigneur.
* BLAISOIS, (le) Géog. province de France,
bornée au nord par" la Beauce , à l'orient par l'Or-
léanois , au midi par le Berry , à l'occident par la
Touraine : Blois en eft la capitale.
BLAME , f. m. en Droit , elt un jugement qui pro-
nonce une corrccYion verbale contre l'accule. Cette
correction eft infamante , tk toujours accompagnée
d'amende. Il fe prononce en ces termes : N. (le juge
nomme le coupable par fon nom ) la cour te blâme ,
& te rend infâme.
BLAME, en Jurifprudence féodale , eft l'improbation
que fait le feigneur de l'aveu tk dénombrement que
fon nouveau vafl'al lui a fourni. Ce blâme conlifte en
deux points : à marquer ce que le \ allai a mis de trop
dans Ion dénombrement ; par exemple, s'il y a com-
pris la juftice qu'il n'a pas , & qui appartient au fei-
gneur dominant ; s'il a mis au nombre des arrière-
fiefs des terres qui font mouvantes en plein h'et , c'eft-
à-dire immédiatement du feigneur dominant , cv au-
tre choie de cette nature : le fécond point conlifte à
marquer ce que le valial a omis dans fon dénombre-
ment. Voyei Adveu. ( H)
* BLAMMUYSER , 1. m. {Comm.) c'eft une mon-
noie ufitée dans les Pays-Bas ; on L'appelle M\;\\p!a-
quetuoudemi-ej câlin: ellevaloil ei-<lc\ ant environ fix
fous & demi de noue argent. Depuis quelques an-
nées,cette monnoie a été mile au blllon dans les pays
fournis à la république cies Provinces-Unies, & l'uia-
gey en eft ablolument défendu. Pour les Pays-Bas Au-
B L A iG9
trïchiens , on s'eft contenté d'en fixer la valeur à en-
viron la moitié de celle qu'elle avoit auparavant.
* BLAMONT , ( Géog. ) petite ville de Lorraine
fur la rivière de Vezaize. Long. zj.. 20. lot. 48. 33,
BLANC, adj. pris fubft. (Ph-fîq. ) l'une des cou-
leurs des corps naturels. /^jk{ Couleur.
On ne peut pas dire exactement que le blanc foit
une couleur fimple & unique , car c'eft le compofé
de toutes les couleurs ; ainfi que l'a prouvé M. New-
ton , qui a fait voir que les corps ne paroiffent blancs
qu'autant qu'ils refléchiffent des rayons de toutes les
couleurs. Voye^ Couleur.
Les corps noirs s'échauffent plus aifement que les
blancs , par la raifon qu'ils abforbent les rayons de
toutes les couleurs ; au lieu que les blancs en ren-
voyent de toute efpece. Voye^ Noir.
C'eft ce qui fait qu'un papier noir eft plutôt en-
flammé qu'un papier blanc , lorfqu'on le préfente au
miroir ardent , tk que les étoffes noires que les tein-
turiers expofent au foleil , font bien plutôt feches que
k$ blanches. Voye^ CHALEUR. (O)
* BLANC , ( couleur en Peinture. ) Le plus commun,
eft celui qu'on appelle blanc a"£fpagne ou de Rou\n .■
on le trouve chez les épiciers -droguiftes par gros
pains. Ce n'eft qu'une terre ou marne blanche qui
fe fond très-facilement dans l'eau. Pour la purifier &
lui ôter tout le gravier qui y eft mêlé , on la fait fon-
dre ou diflbudre dans de l'eau claire dans quelque
vaiffeau bien net ; ce qui fe fait très-facilement fans
aucune manipulation. Quand elle eft diflbute avec
beaucoup d'eau, on la remue bien , & on la laine
repofer un peu de tems , pour que tout le gravier
tombe au fond du vaifleau : alors on verfe toute l'eau
blanche dans des vaifleaux bien nets , tk on la laiffe
repofer julqu'à ce que l'eau foit devenue claire , &
que tout le blanc foit tombé au fond du vaifleau : on
ôte enfuite toute l'eau du vaifleau fans agiter le fond ;
& quand elle eft prefque feche , on la met en pains ,
qu'on laiffe lécher à l'air. Ce blanc eft d'un grand ufa-
ge pour la détrempe : mais il ne peut fervir à l'huile ,
parce qu'il manque de corps quand il y eft mêlé.
Le blanc qu'on appelle craie , eft à-peu-près ce la
même nature , à la referve qu'il eft plus dur , tk qu'on
s'en fert en quelques lieux peur bâtir: mais on peut le
réduire comme la marne. Ce blanc s'appelle blanc de
craie.
Il y a un troifieme blanc fort commun ; c'eft du
marbre blanc bien pulvérilé : on ne l'employé que
dans la peinture à frelque.
Blanc de plomb ou Céruse, eft une forte de
rouille que donne le plomb , ou plutôt c'eft du plomb
diflbus par le vinaigre. ( ette couleur eft d'un grand
ul'age pour les Peintres. Voyt^ Plomb.
Le blanc de plomb ou blanc de cérufe , eft un
blanc parfaitement beau. Dans les ouvrages à dé-
trempe , où il y a plulîeurs teintes ou nuances à
faire , on mêle le blanc de plomb avec le blanc de
Roiien ; car il a plus de corps , tk fe travaille plus
facilement. Mais pour la peinture à l'huile , on n'em-
ployé que du blanc de plomb.
On a deux manières de faire le blanc de plomb :
dans la première on réduit le plomb en lames minces
qu'on trempe dans du vinaigre fort, cv qu'on
tous les jours pour en ôter la rouille formée fur la
furface ; répétant cette opération jufqu'à ce que le
plomb ait entièrement difparu : dans la fecon
forme avec les petites lames de plomb des rouleaux
femblables à des rouleaux' de papier, en obfervant
feulement de laitier un peu ntre chaque
du rouleau ; on fufpend ces lames dans le mi-
lieu d'un pot det. nd duquel eft du vinai-
gre; on ferme enfuite exactement ce pot, o*: on l'en-
ferme dans du fumier pendant trente jours, après
quoi on l'ouvre^ & on y trouve le plomb comme
170
B L A
calciné & réduit en ce qu'on appelle cèrufe ou blanc
de plomb ; on le divife en monceaux, & on le fait
lécher au foleil.
On fe fert du blanc de plomb dans la peinture à
l'huile & clans la peinture en détrempe. La couleur
qu'il donne eft belle, mais il eft un peu dangereux
pour ceux qui le broyent & pour ceux qui l'em-
ployent, parce qu'il peut être mis au rang des poi-
fbns: il leur occafionne une maladie appellée coli-
que de plomb. Vqye{ COULEUR.
Le blanc de plomb eft aufli un cofmétique : les fem-
mes s'en fervent pour fe blanchir la peau ; on en fait
le fard. Les revendeufes à la toilette font ce blanc de
plomb en mettant du vinaigre & de l'orge perlé le plus
beau, dans un vaiffeau qui ait un couvercle de plomb.
Elles placent le tout dans cet état dans un lieu chaud :
ïa vapeur du vinaigre calcine le plomb , & fait un
blanc que ces femmes détachent pour leur commer-
ce: elles prétendent que l'orge qu'elles joignent au
vinaigre, empêche que le blanc de plomb n'ait de mau-
vais effets. Celles qui n'ont pas le moyen d'avoir
cette efpece d'orge perlé , qui eft la plus chère , y
fubftituent le riz. ( M )
La cèrufe ne doit être autre chofe que le blanc
deplombbvoyé , fi elle eft bien pure : mais elle peut
être mélangée avec une partie du blanc de Rouen
ou de craie , fans qu'on puiffe s'en appercevoir faci-
lement, ii ce n'eft par la fuite ; car après qu'elle a été
employée à l'huile, elle noircit. On peut abfolument
reconnoître fi elle eft mélangée , parce que fi l'huile
avec laquelle on l'a broyée n'eft pas vieille , & que
le blanc foit gras , cela vient de la craie. C'eft pour-
quoi ceux qui veulent avoir de beau blanc de plomb
pour la peinture à l'huile , doivent toujours le faire
broyer quand il eft en écaille.
Blanc, ou Magistère de Bismuth, (Chimie.')
Voici, fuivantM. Pott, la meilleure façon de le faire :
on prend une partie de régule de bifmuth puivérilé,
on verfe par-deffus bien doucement & à plufieurs
reprifes deux parties d'efprit de nitre bien pur & bien
dégagé de l'acide vitriolique, pour que lemagijîere
foit bien blanc ; car fans cela il prendrait une cou-
leur grife ; on prend garde qu'il n'arrive point d'ef-
fervelcence. Peu de tems après la folution, il fe for-
mera des cryftaux blancs ; ou fi on ne veut pas at-
tendre la formation de ces cryftaux , on n'aura qu'à
précipiter la folution avec huit parties d'eau claire
toute pure ; on fait par là tomber une chaux blan-
che , qu'on lave dans plufieurs eaux pour l'éciulco-
rer ; on la fait lécher enfuite à l'ombre : car fi on le
faifoit au foleil ou au feu , la chaux perdrait de fa
blancheur. Si on met cette chaux calciner, elle
devient blanche & brillante comme du talc folié ;
c'eft ce qu'on appelle blanc de bifmuth , blanc £Efpa-
gne , ou blanc de perles. Cette chaux eft regardée
comme un grand cofmétique ; on s'en fert comme
d'un fard pour cacher les difformités du vifage , &
on prétend qu'elle blanchit le teint.
Lorfqu'on veut employer cette chaux pour des
ufages de médecine , on la met en diftillation avec
de l'eau-forte affoiblie par moitié ou plus d'eau com-
mune , ou bien l'on en fait plufieurs cohobations
avec l'efprit de vin. Cela produit , fuivant quelques-
uns, un bon remède pour les maladies inflammatoi-
res : mais il vaut mieux de s'en défier à cauie de l'ar-
fénic qui eft toujours attaché au bifmuth , & qui ne
peut guère produire de bons effets dans le corps hu-
main.Lorfqu'on applique extérieurement cette chaux,
on trouve qu'elle eft defficcative , aftringente , &
propre à nettoyer les ulcères ; on en vante aufli
beaucoup l'ufage pour les maladies de la peau , com-
me galle, rougeurs , dartres & boutons , après avoir
préalablement préparé le corps par des purgations.
On la mêle pour cet effet avec des pommades ou du
B L A
beurre de cacao , ou de l'eau-rofe ; mais ce remède
nelaiflè pas d'endommager la peau à la longue , c'eft
pourquoi il vaut mieux en bannir entièrement l'ufa-
ge même extérieur.
Les fleurs de bifmuth fe tirent , fuivant M. Lemery,
en réduifant le bifmuth en poudre , & y mêlant partie
égale de tel ammoniac : on met ces deux matières
fur le feu , & il le fait une fublimation ; on prend ce
qui a été fublimé , on le diffout dans de l'eau , on pré-
cipite la folution avec de l'efprit de fèl ammoniac ,
ou de l'huile de tartre ; il tombe au fond une poudre
blanche qu'on appelle fleur ou fucre de bifmuth ; on
s'en fert pour les mêmes ufages que le magijiere pré-
cédent. (— )
Blanc des Carmes; ce blanc n'eu autre chofe
que de la chaux de Senlis fort blanche &paffée dans
un tamis très-fin. Quand elle eft claire comme du lait,
on en donne cinq ou fix couches : mais il faut que
chacune de ces couches foit bien feche avant que
d'en appliquer une nouvelle ; il faut aufli les bien
frotter avec la brofle ; après cela on frotte l'ouvrage
avec une brofle de poil de fanglier , ou avec la pau-
me de la main ; c'eft ce qui lui donne ce luilant qui
en fait tout le prix.
On fait dans les Indes un blanc plus pur encore &
plus luifant avec de la chaux vive mêlée avec du
lait & du fucre , dont on enduit les murailles que l'on
polit avec une pierre d'agate. Cet enduit les rend
d'un poli qui imite la glace , 6c dont le plus beau blanc
des Carmes n'approche pas.
Blanc , (che^ les Batteurs d'or. ) ce n'eft autre
chofe que de l'argent dont ils allient quelquefois l'or,
malgré l'infidélité qu'il y a & le danger de ne pou-
voir plus le travailler & le mettre en feuilles. Voye^
Batteur d'or.
Blanc , (en terme de Doreur fur bois. ) fe fait avec
du plâtre bien battu qu'on lafle à un tamis très-fin ,
& qu'on affine à force de le noyer dans de l'eau. On
en tonne enfuite des pains qu'on laiflè fécher ; on le
délaye avec de l'eau pour s'en fervir , & on l'appli-
que à plufieurs couches fur les ouvrages deftinés à
être dorés , afin de remplir les traits des outils , &£
rendre la dorure égale & unie. Voye^ Blanchir.
Blanc , donner le blanc, ( che^ les Fayenciers. ) c'eft
couvrir le bifeuit de l'émail de la fayence. Voye^
Fayence.
Blanc , ( chéries Fondeurs en lettres d'Imprimerie. }
les blancs font partie du moule à fondre les caractères
d'Imprimerie , & en font les deux principales pièces ;
elles forment le corps du caractère : par exemple , lï
c'eft un moule pour fondre du cicero , les blancs font
jufte de Pépaifleur du corps de cicero. Fbyei Corps.
Ces blancs font égaux entre eux 6c arrêtés fur la lon-
gue pièce d'un bout par une vis , &c de l'autre par
une pieeequ'on nomme potence, qui traverfe ce blanc ,
la longue pièce & la platine par un trou quarré , pra-
tiqué égal dans ces trois pièces , dont cette potence
remplit les vuides , & eft fortement arrêtée par-def-
fous la platine avec une vis & un écrou qui les unit
enlêmble ; toutes ces parties font de fer. Voye^ Lon-
gue pièce, Platine.
Blanc a encore une autre acception , chez les mê-
mes ouvriers : on dit des lettres en fonte qu'elles ont
blanc deffus , deflbus, ou deffus & deflbus : une my
par exemple a blanc deffus & deflbus , & le corps de
cette lettre doit être coupé de ces deux côtés ; un b
n'a blanc que deflbus , parce que le trait s'élève au-
deffus de ceux de Y m ; on ne le coupe par conféquent
que deflbus : le q dont le trait occupe la partie infé-
rieure du corps a blanc deffus , ck fe coupe ue ce côté.
Ainfl des autres lettres , dont les traits occupent les
parties fupérieures ou inférieures du corps ; les pla-
ces vuides s'appellent blancs, & fe coupent pour laif-
B L A
fer l'œil ifolé, & que rien ne nuife à l'imprefîîon.
Voye{ Couper.
On appelle encore blanc , des réglettes minces de
fonte ou de bois que l'on met à l'Imprimerie entre
chaque ligne de caractère , pour les éloigner un peu
les unes des autres, & laiffer par-là plus de blanc
entre elles ; ce qui le fait ordinairement pour la
poëfie.
On dit une fonte portant fon blanc , lorfqu'un carac-
tère eft fondu fur un corps plus fort qu'il n'a coutu-
me d'être ; comme lorfcru'on fond le caractère de
petit-romain fur le corps de cicero. Cet œil de petit-
romain qui fe trouve par-là fur un corps plus fort
qu'il n'a coutume d'être , laiffe entre les lignes plus
de blanc que s'il étoit fondu fur fon corps naturel :
cela évite d'ajouter des chofes étrangères pour écar-
ter les lignes , & eft beaucoup plus propre & plus
sûr. Voye^ CORPS.
Blanc , che^ les Facteurs d'orgue, eft une compofi-
tion dont ils fe fervent pour blanchir les parties qu'ils
veulent fouder; c'eft un mélange de colle, d'eau, &
de blanc d'Efpagne. Pour faire le blanc propre à blan-
chir les foudures , on met de l'eau dans une terrine ,
dans laquelle on jette du blanc d'Efpagne réduit en
poudre , voyi[ l 'article B L A N c : on met enfuite
la terrine fur le feu , qui ne doit point échauffer la
compofition jufqu'à la faire bouillir , ce qui la ren-
drait inutile. On verfe enfuite dedans un peu de col-
le fondue , que l'on mêle bien avec la compofition,
qui fe trouve ainfi achevée. Pour en faire l'effai , on
en met un peu fur une bande d'étain poli : fi le blanc
s'écaille , c'eft une marque qu'il eft trop collé ; s'il
s'efface , on connoît qu'il n'a pas affez de colle. Il
vaut mieux mettre de la colle petit-à-petit , que d'en
mettre trop , parce qu'il faudroit remettre de l'eau &C
du blanc, &c faire rechauffer le mélange, que l'on
connoît être bon, lorlqu'en tortillant le morceau
d'étain fur lequel on fait l'effai, il ne s'écaille ni ne
s'efface point.
Autrement , prenez du blanc d'Efpagne réduit en
poudre dans une terrine de terre vernifîée ; verlêz def-
îiis du vinaigre en quantité fuffifante pour détremper
le blanc , vous aurez une compofition qui n'a point
befoin d'épreuve. Pour employer ce blanc , qui ne
s'écaille ni ne s'efface jamais, il faut en prendre avec
tin pinceau, & paffer ce pinceau fur les vives ou ar-
rêtes des pièces que l'on veut fouder , en forte qu'el-
les en foient couvertes. On met une féconde couche
fur l'étain , après que la première eft fechée , enfuite
on gratte, avec la pointe à gratter , le blanc &c même
la furface des pièces à fouder , dans tout Fefpace que
l'on veut que la foudure occupe. Après que les pie-
ces font fondées , on fait chauffer de l'eau dans un
chaudron , dans laquelle on trempe un linge , avec
lequel on lave la foudure & le blanc , que l'on ôte
par ce moyen. Lorfque ce font des tuyaux d'étain
que l'on foude , il faut qu'ils foient blanchis en-de-
dans pour empêcher la foudure d'y entrer. Lorfqu'on
veut ôter le blanc qui eft dedans les tuyaux où l'on ne
peut pas fourrer la main , on attache au bout d'une
baguette un linge , avec lequel on emporte le blanc
que l'on veut ôter.
Blanc , en terme de Pratique , fe dit en quelques
phrafès pour l'endroit d'un acle qui eft refte non-
écrit. C'eft en ce feris qu'on dit qu'on a laiffé deux ,
trois ou quatre lignes de blanc , qu'on a laiffé un nom
en blanc. (H)
Blanc , 1. f. {Commerce.') petite monnoic de cui-
vre qui avoit autrefois cours en France, de la valeur
de cinq deniers. Selon le prix réel du marc d'argent,
le billon dont on fabriquoit les blancs avoit plus ou
moins de titre. Le blanc n'a pas de cours dans le com-
merce, il n'y a plus que le bas peuple qui fe lert de
VexprelWonJîx-blanc s, pour marquer le prix de tren-
te deniers.
B L A
271
Blanc , ( Jardinage. ) maladie qui furvient aux
concombres : on la remarque aufTï dans l'œillet. Ce
n'eft autre chofe qu'une altération dans les fibres de
leurs tannes ou de leurs bras , qui n'étant plus en
état de recevoir le fuc qui les nourrit , les fait périr
fans qu'on puiffe y remédier. C'eft une efpece de
rouille blanche , telle qu'on en voit fur les laitues ,
les chicorées , les melons , & les blés. Cette maladie
vient d'une trop grande féchereffe , d'une mauvaife
expofition, d'un arrofement fait mal-à-propos, de
brouillards , &c des nuits froides : une grande atten-
tion peut en garantir ces plantes. (A" )
* Blanc-bois , ((Économie rufliq.) on comprend
fous ce nom tous les arbres qui ont non-feulement le
bois blanc , mais encore léger & peu folide : tels font
le faille, le bouleau , le tremble, l'aune. Mais le châ-
taigner, le tilleul, le frêne, le fapin, &c. font bois-
blancs & non blancs-bois , parce que, quoique blan-
châtres , ils font fermes & propres aux grands ouvra-
ges. Les blancs-bois viennent vite , même en des ter-
reins mauvais : mais ils n'ont point de confiftance ,
ne font bons qu'à de petits ouvrages, & ne peuvent
entrer que pour un tiers au plus dans les bois à brûler.
* Blanc-en-BOURRE, ((Economie rufliq.) efpece
d'enduit fort en ufage à la campagne ; il eft fait de
terre , & recouvert de chaux mêlée de bourre. On
l'applique aux murs des granges , des bergeries , &c.
* Blanc-étocow Blanc-être, (Œconom. rujl.)
Couper une forêt à blanc- étoc ou blanc-itre , c'eft l'a-
battre fans y laiffer ni baliveaux ni autres arbres re-
tenus , ce qui eft défendu fous peine de trois cents li-
vres d'amende , à moins qu'on n'ait fait déclaration
des baliveaux qu'on veut couper, au greffe de la maî-
trife des eaux & forêts, dont les bois font reffortif-
fans , afin que les officiers puiffent renonnoître avant
la coupe l'âge & la qualité des baliveaux qu'on veut
abattre. Cette loi s'étend aux taillis comme aux fu-
taies.
Blanc-manger, (Pharmacie.') efpece dégelée,"
dont Fuller donne la préparation fuivante : Prenez
quatre pintes de lait , les blancs d'un chapon bouilli ,
amandes douées blanchies , deux onces ; battez le
tout enfemble , & faites - en une forte expreffion :
faites bouillir l'extrait fur le feu, avec trois onces de
farine de riz : lorfque le tout commencera à fe coa-
guler , ajoutez fucre blanc , huit onces , eau de rofes
rouges , dix cuillerées : mêlez bien le tout enfemble.
Cette compofition eft falutaire dans les confomp-
tions , dans les gonorrhées , & dans d'autres maladies
où l'on doit fe propofer de corriger les humeurs ÔC
d'en tempérer l'acrimonie. (A)
Blancs-manteaux , f. m. pi. (Hifl. ecclJf.) c'eft
le nom qu'on donna aux religieux de l'ordre des Ser-
vîtes ou Serviteurs de la fainte Vierge mère de Jefus-
Chrift , à caufe qu'ils avoient des habits Se des man-
teaux blancs. Cet ordre avoit été inftitué à Marfeil-
le, & fut confirmé par le pape Alexandre IV. l'an
1257 ; Se comme ils s'établirent à Paris , dans la rue
de la vieille Parcheminerie , cette rue & le monaf-
tere ont depuis retenu le nom de Blancs-manteaux ,
quoique ce monaftere ait été donné , dès l'an 1298,
aux religieux Guillelmites , qui avoient des manteaux
noirs, & que les religieux Bénédi&ins de Cluni, qui
font habillés de noir , y foient entrés en 1618, par la
cciîionque leur en firent les Guillelmites de France,
non fans oppolition de la part de leur général. Les
Bénédictins de Cluni l'ont encore cédé depuis aux
Bénédictins de la congrégation de faint Maur, qui en
font prefentement en poffefîion. Du Brcuil, Antiquit.
de Paris. (G)
* Cette maifon eft aujourd'hui remplie de reli-
gieux très-favans & d'un grand mérite, auteurs d'ou-
vrages fort eltimables & fort utiles ; comme l'art de
vérifier des dates , qui a été fi bien reçu du public ; la
r-fi
B L A
nouvelle Diplomatique , la collection des Hifloricns de
France, &c. Nous faillirons avec plailir cette occa-
fion de célébrer leurs talens & leurs travaux.
Blanc de baleine, (Médecine.) matière grafle
& oncïueufc , qui le tire de la tête & d'autres parties
d'une efpece de baleine. C'ell un très-bon expecto-
rant. Foyfi Baleine & Cachalot.
Blanc de l'œil, (en slnatomie.) ceû la première
tunique ou enveloppe de l'œil ; on l'appelle aufîi Val-
buginée , ôt on lui donne encore le nom de conjonc-
tive, à caufe qu'elle fert à unir les paupières aux glo-
bes de l'œil. Voye^ Conjonctive & Œil. (L)
Blanc d'œuf, c'ell cette partie vifqueufe & blan-
châtre qui enveloppe le jaune, quand l'œuf ell cru ,
& qui ell: confinante & blanche quand il ell: cuit : on
l'employé , en Médecine , en qualité de glutineux &
d'aflringent. Dans cette vue on le mêle lbuvent avec
le bol d'Arménie , &c. pour empêcher l'enflure des
parties qui ont fouffert quelque violence , & pour
rendre aux fibres leur refl'ort & leur élallicité ; c'eil
ce qu'on appelle un défenfif. Il entre aulîi dans quel-
ques mélanges pour consolider les plaies récentes &
prévenir l'hemorrhagie. (N)
On le fert du blanc-l'œuf, chez les Relieurs-doreurs,
pour englairer deux ou trois lois avec une éponge
très-fine , les dos , & les autres endroits , avant d'y
appliquer l'or, lorlque le blanc-a" œuf ell lec. On dit
pafferau blanc-d'œuf. On le fert encore du blanc-d'œuf
pour donner du luitre aux couvertures. Quand le li-
vre ell entièrement achevé , on palle légèrement une
éponge fine trempée dans le blanc-d'œuf iux toute la
couverture , & quand il ell lec on y palle le ter à po-
lir. Voye7^ Fer à polir & Polir.
Blanc-signé ou Blanc-seing , f. m. en termes
de Commerce , ell un papier fur lequel on n'a mis que
la fignature. Les blancs-Jignés ne le confient ordinai-
rement qu'à des arbitrer ou à des amis , pour les rem-
plir de ce qu'ils jugeront à propos pour terminer quel-
que contestation ou procès , ou à des perfonnes de la
probité defquelles on ell extrêmement iùr. (G)
* Blanc (le) , Gèog. petite ville de France, en
Berry , fur la Creufe. Longitude 18. 43. latitude
46. 38.
* BLANC A (la) , Céog. île inhabitée de l'Améri-
que , au nord de la Marguerite, proche Terre-ferme.
Long. 11. 60. lat. 31J.
* BLANCARDS , f. m. pi. (Commerce.) toiles de
lin , ainli appellées de ce que le fil a été à demi blan-
chi avant que d'être employé à leur fabrication. Elles
viennent toutes de Normandie : elles ne font ni grol-
fes ni fines : leur chaîne ell de deux mille fils ; leur
largeur en écru , de quinze feiziemes , ÔC la pièce de
foixante à loixante-fix aunes.
BLANCHE , adj. f. pris fubll. nom d'une note de
Mufique , qui le fait ainfî f & qui vaut deux noires
ou la moitié d'une ronde. Voye^_ Mesure & Valeur
des notes. (S)
Blanches, (Fermes.) terme de la coutume de
Normandie , font celles dont le fermage le paye en
argent. Voyc^ Ferme. (H)
* Blanche, (la mer) Géog. grand golfe de l'O-
céan leptentrional, qui baigne les côtes de la Lappo-
nie Mofcovite au nord & à l'occident : on donne en-
core ce nom à une partie de l'Archipel, par oppoli-
tion à la mer Noire.
BLANCHET , f. m. ell un morceau de drap blanc,
dont on le fert en Pharmacie, pour palier les firops
& les décodions ; il s'étend fur le carrelet. V. Car-
relet , Filtration.
Blanchet ; les imprimeurs nomment ainfiun gros
drap blanc, qu'ils employent pour garnir le grand
tympan d'une prelfe; ils en font uiage pour faciliter
le toulage de l'imprelîion, & garantir en même tems
l'œil de la lettre. Un blanchet entier ell un morceau
B L A
de ce drap d'une aune environ , plié en deux ; un demi
blanchet ell lîmple : par ce moyen on a la facilité ce
garnir le tympand'un blanJiet, ou d'un demi blanchet^
pour racourcir ou alonger le coup de la prefle.
Blanchet , en terme de Rajineur, ell une pièce de
gros drap contenant vingt aunes ou environ, bordé
tout autour d'une double bande de toile. Elle s'étend
par un bout dans le panier à clairée, où il vaut mieux
qu'elle toit lâche & ailée que tendue, paice que le
poids de la clairée qui y coule à flots de la daie , ia
déchireroit. Voye^ Dale & ClairÉE. Si j'ai dit éten-
due par un bout, c'ell que le même endroit ne lert
jamais qu'une fois. On iailie tomber à mefure le bout
qui afervi, en tirant au-dellus du panier celui qui
n'a point encore fervi. Quand toute la pièce a été
chargée , on la lave avec loin , en la battant avec for-
ce dans la rivière , pour la degraifier ; & quand elle
ell feche on la bat avec des baguettes, pour en laire
fortir toute la pouffiere. La même pièce fert julqu'à
ce qu'elle loit bien idée. On retient le blanchet fui les
bords du panier par des crochets qui prelTent étroi-
tement l'étoffe de chaque côté du bord , & au-deilus.
royei Crochet.
BLANCHEUR , f. f. ( Phyfiq. ) ell la qualité qui
dillingue les corps blancs. V. Blanc & Couleur.
M. Newton a prouvé par l'expérience, que la blan-
cheur confiile dans le mélange de toutes les couleurs ,
6c que la lumière du foleil n'ell blanche que parce
qu'elle ell compoiée de toutes les couleurs. Voye-r
Couleur, Prisme, Rayon.
Le même auteur fait voir que la blancheur la plus
forte & la plus éclatante doit être mile au pre-
mier rang des couleurs , & que les blancheurs qui font
au-delîbus , font des mélanges de couleurs de difîé-
rens ordres. Les métaux blancs donnent cette blan-
cheur du premier ordre ; l'écume , le papier , le linge ,
& les autres fubflances blanches, font de la blancheur
du fécond ordre. M. Newton conjecture que les mé-
taux blancs font plus blancs que les autres corps ,
parce qu'ils font plus dénies, & compofés de par-
ties plus ferrées. Selon le même auteur, les particu-
les des métaux blancs, comme l'argent, l'étain, &c.
doivent avoir plus de furface que celles de l'or ou
du cuivre. Ces deux derniers métaux, amalgamés
avec du mercure , ou mêlés par la fulîon avec de l'é-
tain , de l'argent, ou du régule d'antimoine , devien-
nent blancs. (O)
BLANCHEUR, fe dit, en Médecine, du teint, des
urines , des déjettions, du pus, des crachats. Quand
la blancheur du vilage ell extrême, elle fe nomme
pâleur. C'ell dans les femmes le lymptome de la liip-
prefîion des règles , ou de la maladie dite dans les
auteurs, febris alba amatoria , pâles couleurs. Koye^
Pasles couleurs.
Elle efî aufîi ordinaire dans la fécherefTe , dans la
convalefcence , dans les pertes ; dans ceux qui ont le
friflbn ; dans ceux qui ont peur , ou qui font agités
de pallions femblables.
La pâleur dénote que la circulation ell diminuée,
que le fang ell épais , & qu'il ne peut aborder dans
les petits vaifîeaux lymphatiques , ou mieux, dans les
artères capillaires extrêmement fines , qui rampent
dans le tiffu de la peau. Voye{ Pasleur.
Les urines pâles & blanches, font un ligne de ref-
ferrement dans les conduits urinaires. Voy. Urine.
Les déjections blanches èc grilès, marquent ou la
lienterie, ou les obllruftions du foie. Voye^ Lien-
terie, Obstruction.
Le pus d'un blanc terne &C mat, ell un pus bénin
& louable.
Les crachats blancs & mouffeux font allez équi-
voques, &c. (N)
BLANCHIMENT , f. m. à la monnoie, elt une pré-
paration que l'on donne aux flancs, pour qu'ils ayent
de
B L A
B L A
de l'éclat & du brillant au fortir du balancier. Le
blanchiment {"e faifoit autrefois à l'eau-forte : mais ce
procédé, outre qu'il altéroit un peu les el'peces, étoit
plus coûteux que celui que l'on fuit à prefent. Les
flancs que l'on veut blanchir fe mettent dans une ef-
pece de poelle fur un fourneau de réverbère ; les
flancs ayant été ainfi chauffés , on les laiffe refroidir,
puis on les met bouillir fucceSîiveraent dans d'autres
foelles appellées bouilloires, dans lesquelles il y a de
eau , du fel commun , & du tartre de Montpellier
ou gravelle ; & lorsqu'ils ont été efforés de cette
première eau dans un crible de cuivre , on y jette
du fablon & de l'eau fraîche, enfuite on les effuie.
Blanchiment, les Orfivres appellent ainli un
baquet, où il y a de l'eau-forte affoiblie par de l'eau,
pour blanchir la vaifièlle ; ils donnent auiîî le même
nom à l'opération même.
Blanchiment, (Doreur) Voy. Blanc & Blan-
chir.
BLANCHIR, v. au. c'en-, en Maçonnerie, donner
une ou plufieurs couches de blanc à colle fur un mur
fale, après y avoir paflé un lait de chaux, pour
rendre quelque lieu plus clair & plus propre. (P)
BLANCHIR , terme de Boyaudier , c'eft tremper les
boyaux dans une tinette ou chaudron , immédiate-
ment après qu'ils ont été dégraiffés, pour achever de
les nettoyer : c'eft de cette tinette où on les met blan-
chir , que des femmes les retirent pour les coudre.
BLANCHIR , en terme de Chauderonnier ; c'eft donner
le luftre aux chauderons , chaudières , poêlions , &c,
fur le tour avec une paroire. foyer Paroire.
Blanchir la cire , c'eft lui faire perdre la couleur
jaune fale qu'elle a, après qu'on en a féparé le miel.
foye^ClKE, MIEL, &c.
La cire féparée du miel , &: fondue en gros pain ,
eft ce que l'on appelle de la cire brute. C'eft en cet
état qu'on l'apporte dans les blanchifferies, où elle
paffe par les préparations fuivantes.
Premièrement , un ouvrier la coupe par morceaux
gros comme le poing , afin qu'elle fonde plus facile-
ment lorfqu'elle eft portée dans les chaudières A , A ,
A ( PI. du blanchijjage des cires , vignette ) où on la re-
mue juiqu'à parfaite fufion avec la fpatule de bois,
Jig. 4. Après qu'elle eft fondue , on la laiffe couler au
moyen des robinets adaptés ijux chaudières, dans
les cuves B & C qui font de bois , & placées de fa-
çon que le fond des chaudières eft de quelques pou-
ces plus élevé que la partie fupérieure des cuves.
On la laiffe repofer dans les cuves environ cinq ou
fix heures, tant pour qu'elle n'ait plus qu'un médio-
cre degré de chaleur, fans toutefois ceffer d'être
fluide , que pour donner le tems aux ordures ou
fèces, dont elle eft chargée, de fe précipiter dans
l'eau , dont le bas de la cuve eft rempli à cinq ou
fix pouces de hauteur.
Au-deffousdescuvesi?, C, en font d'autres D , E ,
de forme oblongue , qu'on appelle baignoires, polées
fur le pavé de l'atteilier. Ces baignoires qui iont de
bois & cerclées de fer, font revêtues intérieure-
ment de plomb , pour qu'elles tiennent mieux l'eau
dont on les remplit , en ouvrant le robinet X, par
lequel l'eau vient d'un réfervoir. Chaque baignoire
a de plus fur le devant 6c à la partie intérieure , un
robinet F , F, parle moyen duquel on vuide l'eau
qu'elles contiennent dans le puilait ou égoût foûter-
rein , dont G eft l'ouverture recouverte d'une grille.
Toutes choies ainiî disposées, on place les cylin-
dres de bois H , Hcn travers des baignoires. Ces cy-
lindres qui ont un pié de diamètre, en occupent tou-
te la largeur. Ils font traversés par un arbre de fer,
dont une des extrémités eft courbée en manivelle :
enforte que les cylindres peuvent tourner librement
fur les tourillons de ces arbres, auxquels des échan-
-crurcs pratiquées dans les bords des baignoues^ 1er-
Toim II,
273
vent de collets. Les cylindres doivent être placés
dans les baignoires , enforte que leur centre ou axé
foit directement à plomb au-deiïbus de l'extrémité
des canelies K , K par lefquelles la cire contenue!
dans les cuves doit Sortir. On place enfuite au-def-
fus du cylindre, une efpcce de banquette de fer a b,
ou a b , ac, bc,fig.z. qu'on appelle chevrette, quia
quatre pies qui appuient fur les bords de la baignoi-
re, comme on voit en C,fig. 2. enforte que les tou-
rillons du cylindre ("oient au milieu entre les pies de
la chevrette. Cette chevrette a vers chacune de les
extrémités deux lames de fer élaftiques 1 , 2 ; 1 2
entre lefquelles on place un vaiffeau de cuivre L , L ,
de forme oblongue , qu'on appelle greloire. Cette ere-
loire eft plus large par le haut que par le bas. Sa lon-
gueur L L qui eft égale à celle du cylindre, eft divifée
en trois parties ; celle du milieu qui eft la plus grande,
eft percée d'une cinquantaine de petits trous , pius ou
moins, d'une ligne de diamètre, diftans les uns des
autres d'un demi-pouce ou environ. Les deux autres
parties fervent à placer des réchauds pleins de braife ,
dont l'ufage eft d'entretenir un médiocre degré de cha-
leur dans la greloire, dont la fraîcheur ne manque-
roit pas de faire fîger la cire que l'on y laiffe couler.
On met une plaque de fer blanc ou de cuivre 3 ,
3 ,fig. 2. inclinée vers la canelle K , pour rejetter la
cire dans l'auge ou greloire L L. La plaque 3,4, poféc
de l'autre fens, fert au même ufage. Par-deffus ces
deux plaques , on met une paffoire 5 toute criblée
de trous. C'eft dans cette paffoire que coule la cire
après qu'on a repouffé dans la cuve le tampon qui
bouche la canelle K, au moyen de la cheville 6 qu'on
laiffe dans la cannule plus ou moins enfoncée , pour
modérer, félon le befoin , la vîteffe de l'écoulement.
La cire , après avoir pafie dans la paffoire ou cri-
ble 5, tombe fur les plaques 4, 3; 3 , 3 , & de-là dans
la greloire L L , d'où elle fort par les petits trous que
nous avons dit être au fond de cette greloire , & tom-
be fur la furface du cylindre end. Si en même tems
un ouvrier afiis en /, fait tourner le cylindre à l'aida
de la manivelle qui eft de fon côté , de d par e vers
f, il eft évident que le filet de cire qui tombe fur le
cylindre, doit s'étendre, &c former une bande qui
fera d'autant moins épaiffe , que le cylindre fe fera
mû avec plus de vîtefiè : mais comme il eft mouillé,
étant immergé dans l'eau au quart de fa Surface, la
cire ne s'y attachera point. Mais après avoir deScendu
en/, elle paffera par g, pour aller fe raffembler en
E ,fig. 1. Ce mouvement eft encore facilité par ce-
lui de l'eau qui eft dans la baignoire , laquelle fe por-
te vers E , pour fortir à mefure qu'il en vient d'au-
tre du réServoir par le robinet X ; enforte que l'écou-
lement par le robinet F , foit égal à celui par le robi-
net X. On rechange continuellement d'eau , non-Seu-
lement pour qu'elle S'oit plus propre , mais aufii afin
qu'elle foit toujours fraîche , & qu'elle puiffe faire
congeler les rubans de cire à mefure qu'ils tombent
dans la baignoire.
Par cette opération , la baignoire ne tarde pas
d'être remplie de rubans ; un ouvrier placé en M.
les enlevé avec une fourche à trois dents, &c les
jette de la baignoire dans la manne N qui eii un
grand panier d'ofier revêtu intérieurement de t< >ile ;
lorfque le panier eft plein, un autre ouvrier à l'aide
de celui qui a empli la manne, k place Sur une
brouette O , fur laquelle il la transporte près des
quartés ou chaiîis iùr leiquels Sont des toiles ten-
dues & expolées à l'air, foyei Quarré. Il vuide
fa manne Sur ces toiles, en un feul tas que des
femmes qui Sont autour des quarrés ou toiles , épar-
pillent Sur toute leur Surface : pendant que cet ou-
vrier conduit l'a brouette , le tireur remplit une
autre manne; ainfi alternativement julcju'à ce qua
la cuve foit épuifée.
Mm
274
B L A
En réduifant la cire en rubans , les furfac es en
font prodigieufement multipliées, ce qui donne plus
de prife à l'action de l'air ce du foleil à laquelle
on les expofe ïlir les quarrés pour diffiper l'huile
volatile qui fait la couleur jaune de la cire.
Les quarrés font de grands chaffis de charpente
de dix pies de large fur une longueur telle que le
lieu le permet , élevés d'un pié & demi au-deffus
du terrein. Sur les chaffis font tendues horiionta-
lement des toiles foûtenues dans le milieu de leur
largeur par une pièce de bois horifontale qui fe
trouve dans le pian du chaffis. C'eft fur cet affem-
blage de charpente & de toile qu'on étend ou
éparpille également la cire mile en rubans ou en
pains, ainii qu'il fera dit ci-après. On entoure en-
core le quarré d'une bande de toile verticale ac-
crochée à des piquets, dont l'ufage eft d'empêcher
que le vent n'emporte la cire, &c ne la jette par
terre. Lorfque la cire a été expolée un tems con-
venable fur les quarrés , on la retourne , enforte
que la partie qui étoit délions paroiiTe deffus. Et
lorfque l'on juge que la cire a acquis un premier
degré de blancheur , on la reporte à la fonderie ,
où on lui fait iubir la même fuite d'opérations que
nous venons de détailler ; c'eft-à-dire qu'on la re-
met en rubans, & qu'on l'expofe encore fur les
quarrés à l'action du ioleii fie de l'air : mais comme
il ne peut pas manquer d'arriver à cette féconde
fonte que les parties intérieures des premiers ru-
bans ne fe trouvent à 1.: :e js féconds , il fuit
que toutes les parties de la cire auront été fuc-
ceffivement expoiées à l'acuon de l'air ce du foleil.
On réitère une troiiierne fois cette opération , li on
juge que la cire n'ait pas encore acquis le degré
de blancheur que 1 on deare qu'elle ait.
La cire expoiee pour la dernière fois au foleil
fous la forme de rubans , cii encore remife dans une
chaudière, d'où, après qu'elle a été rendue , on ia
laiffe couler dans ia cuve : au lieu de la faire
par ia greloire , comme dans les opérations préc ;:-
tes, on ia laine couler dans le coffre reprefenté fig.
j , que Ton fubftitue à la place de ia greloire.
Ce cofire eft une caiffe de cuivre étamé, por-
tée fur quatres pies de fer iembïabics a ceux L.e la
chevrette. Aux dieux longs côtés de ce coffre font
deux aui es de même métal , dans lelquelies on place
des réchauds de braife dont l'ufage eft d'enti
dans l'état de fluidité la cire dont le coiffe eft rem-
pli : on tire la cire ce ce coffre par le robinet^,
dans l'écuellon fig. 3 , qui eft un valé de cuivre
ayant deux anfes A A , & deux gouiettes B B , avec
lequel on verfe la cire dans les planches à pains.
Les planches à pains , ainiï appellées parce que
c'eft dans ces planches que l'on fait prendre à la cire
la figure de pains , font de chine d'un pouce d'é-
paifleur , creufées de deux rangées de trous ronds ,
chacun d'un demi pouce de profondeur fur 4 pou-
ces de diamètre ; on remplit deux de ces moules
à la fois au moyen des deux gouiettes de l'écuellon,
ribfervant de mouiller la planche auparavant , afin
que la cire ne s'y attache peint. Après que les pains
font figés, on les jette dans i'eau de la baignoire
pour les affermir : on les porte enfuite fur les quar-
rés ; on les y laiffe jufqu'à ce qu'ils ayent acquis
tout le degré de blancheur que l'on délire qu ils
ayent, ou dont ils font capables, obfervant de les
retourner quand ils font affez blancs d'un côté, ce
qui fe fait avec une main de bois qui eft une plan-
che de bois mince repréfentée7%. 3 '■ cette planche
a 3 pies ou environ de longueur fur un demi-pié
de large ; elle eft percée d'un grand trou vers uns
de fes extrémités qui eft traveriée d'une poignée par
. :nt cette machine , avec laquelle on re-
tourne les pains comme on feroit avec v.r.c pelle
B L A
plate; ce qui eft plus expéditif que de les retour-
ner les uns après les autres.
La cire blanchie & réduite en pains paffe entre
les mains du cirier , qui l'employé aux différens ufa-
ges de fa profeffion. foye{ Cirier.
Blanchir ou faire blanchir, (en terme de
Confifeur) c'eft enlever de deffus les abricots, aman-
des, &c. cette efpcce de bourre ou de duvet dont
ils font chargés , en faifant paffer ces fruits par une
leffive préparée pour cela. Foye- Amande, Aeri-
COTS , &C.
Blanchir, (cne^ les Couteliers) c'eft quand la
pièce eft forgée Se dreffée à la lime , la parler fur la
meule pour la première fois ; c'eft fur la fécondé
meule qu'on la dégroffit , & fur la troiiierne qu'on la
met à tranchant : la poliffoire fuccede à la meule.
Blanchir, \en terme deCuifim) c'eft faire revenir
une pièce, quelle qu'elle ioit, dans de l'eau tiède : il
ne faut l'y laiffer qu'un demi-quart d'heure ou en-
viron.
Blanchir, (en terme de Doreur*) s'entend d'une
opération par laquelle on enduit de plufieurs cou-
ches de blanc une pièce qu'on veut dorer. Poye^
Dorer. C'eft par-là qu'on remplit les inégalités du
bois qui empêcheroient l'or de s'étendre par-tout*
La figure S, PLznckc du Doreur, repréfente un ouvrier
qui blanchit.
Blanchir , (en terme de Cloutier d'épingle*) c'eft
étamer les clous de cuivre. Voye-^ Etamer.
BLANCHIR, (en terme cCEpinglicr ) c'eft faire
changer au laiton , fa couleur jaune en blanche ; pour
cet effet , on étend d'abord les épingles au nombre
de fix ou iept mille fur les plaques. Voyc^ Plaque.
On empile ces plaques les unes fur les autres, tant
qu'il y en a de la même efpece d'épingle , fur des croi-
iees ; on les lie enfemble avec les fils de laiton des
croifées. Voyer Croisée. Soit qu'il y ait une ou plu-
fieurs portées de plaque, wyq Portée, on met le
tout dans une grande chaudière avec de l'eau & de
la graveîie , ou lie de vin ; on le fait bouillir trois
heures ce demie ou environ. On les déteint , on les
lave , on les feche , & on les vanne. Voye^ ces mots
à leurs articles , & lesjî^. PI. II. de V Epinglier ; 13 ,
cilla chaudière ; 11, fon couvercle ; 14 , la croifée,
aux quatre extrémité? de laquelle font attachées des
cordes de laiton; 15, une plaque chargée d'épin-
gles nue l'on pofe fur la croifée ; 1 1 , plufieurs pla-
ques empilées fur la croifée , que l'on met dans la
enaudiere , par le moyen des cordons de laiton atta-
chés à cette croifée.
Blanchir, (en terme de Layetier. ) Voye^ B.A-
EOTTER.
Blanchir la foie d'un cheval (Maréchalerie)
c'eft en ôter limplement la première écorce.
BLANCHIR , (en Monnoyage ) l'argent fe blanchit
en le faifant bouillir dans de l'eau forte , mêlée avec
de l'eau commune , ou feulement de l'eau où on a
fait difibudre de l'alun. Les ouvriers en médailles &C
en monnoie fablonnent tous les flancs , & les frotent
dans un crible de fer pour en ôter les barbes. Voycr
Blanchiment.
Blanchir , ( en terme d'Orfèvre en grojferie ) c'eft
mettre un morceau d'orfèvrerie dans de l'eau fécon-
de , pour le délivrer des ordures qui empêcheroient
de le polir ce de recevoir tout l'éclat dont la matière
eft fufceptibîe. On blanchit encore en Allemagne avec
de Falun bouilli dans de l'eau , ou même avec de la
graveîie ce du fel mefuré par portion égale : mais ce
blanchiment ne peut fervir en France , où l'argent eft
monté à un titre beaucoup plus haut qu'en Allema-
gne. Foyei Blanchiment, & Eau seconde.
BLANCHIR LE PLOMB , ( terme de Plombier) eft
l'ctamer au feu , ou le couvrir de feuilles d'étain. Les
. s font obligés de blanchir toutes les pièces
B L A
de plomb qu'ils placent fur un bâtiment neuf & qui
font en vue. C'eft pourquoi ils ont un fourneau à
ctamer, fur le foyer duquel chargé de braife , deux
compagnons tiennent fmpendues & chauffent les ta-
bles de plomb, tandis qu'un autre y étend des feuil-
les d'étain battu , qu'il frotte avec des étoupes 6c de
la poi\'-réfine, à mefure que l'étain fe fond. Voye^
Plomb & Plombier, 6c lafg. prem. PI. III. de
Plomberie.
Blanchir , ( en terme de Plumajfier^ceû. ôter aux
plumes le gros de la teinture , en les paffant dans de
l'eau claire.
BLANCHIR, (en Serrurerie ) c'eft enlever à la
groffe lime les premiers traits de la forge.
Blanchir la foie , les étoffes de laine. Voye^
Soie , Bonneterie , Drapier , Laine.
BLANCHISSERIE DES TOILES , fe dit de l'art
de blanchir les toiles ou de leur faire perdre la cou-
leur jaune , fale , ou grife , qu'elles ont au fortir des
mains du tifferand ; c'eft aulli le nom que l'on donne
au lieu où fe fait cette opération , qui s'appelle par
cette raifon blanchijferie ou buerie en terme Flamand-
Picard.
La blanchifferie doit être fituée fur le bord d'une
rivière environnée de prés ; elle eft compofée de cinq
bâtimens ou attelicrs iéparés , qui font le moulin , la
buerie, proprement dite le frottoir, la laiterie, & la
ployerie ou le rnagafîn.
Les trois blanchijjeries de Senlis font fituées fur la
rivière de Nonnettc , entre Senlis & Chantilly, vis-
à-vis Courteuil. Les eaux de cette rivière, qui font
bordées de prés , font au dire des gens du pays , les
plus propres que l'on connoiffe pour fervir à blan-
chir les toiles.
La première préparation que l'on donne aux toi-
les , lorfqu'elles font arrivées à la blanchijferie , con-
fiée à en ôter le parou , qui eft l'apprêt que le Tiffe-
rand leur donne. Voye^ Parou & l'article Tisse-
rand ; ce qui fe fait en les laiffant tremper dans l'eau
pure : on les y laiffe en Flandre pendant 8 à 1 o jours,
même dans les chaleurs. Au bout de ce tems , on les
repame, on les étend, 6c on les feche. Ici, on les fait
fouler dans le moulin ; ce moulin elt en tout lembla-
ble à celui des foulons, f^oyei Foulon, Moulin à
Foulon ; il n'en diffère qu'en ce que les maillets
n'ont point de dents , mais font arrondis par la par-
tie qui tombe fur ies toiles : au refte la mécanique de
ces moulins eft exactement la même que celle des
foulons en laine. Ceux qui ne fe fervent point de
moulin , dégorgent les toiles, à force de les arrofer,
après les avoir laiffé tremper pendant 8 ou dix jours,
comme nous avons dit.
Cette opération achevée , on repame les toiles.
Repamer, c'eft battre les toiles dans un eau couran-
te , en les y jettant de defïïis un petit pont qui tra-
verfe la rivière , 6c qui n'eft élevé que d'un pié ou
deux au-deffus de la furiacc île Peau ; ce pont s'ap-
pelle repamoir , conjointement avec la partie du lit
de la rivière , dans laquelle les toiles trempent & font
battues. On étend enluite les toiles pour les taire lé-
cher , & on coule la première leftive.
Le lieu où on coule les leffives s'appelle particu-
lièrement buerie ou bUvichifjeric , par ce que ce n'eft
que par des leffives réitérées que l'on parvient à ren-
dre les toiles blanches. Ce lieu,dis-je , eft une falle
plus ou moins grande félon le nombre des cuviers
ce des bacs que l'on y veut placer ; c'eft dans le mê-
me lieu que l'on prépare èc que l'on coule les leffi-
ves. L'eau y eft conduite par des rigoles placées à une
hauteur convenable au-deffus des chaudières ; cette
eau eft élevée par des pompes ou une roue à pots ,
ou par tout aune moyen que l'hydraulique enleigne.
Préparation delaùffivc. Apres avoir pulvérile par
le moyen d'une meule tournante, mue par un che-
Tome II.
B L A
*75
val ou par l'équipage du moulin , les cendres de caf-
foude , &les avoir tamifées dans un tamis de cuivre,
dont les trous n'excèdent point la groffeur d'un grain
de chenevi ; on les met tremper dans les bacsZ>, E, F,
qui font des coffres de charpente , revêtus intérieu-
rement de planches bien étanchées. On laiffe écou-
ler, quand on le juge à propos, l'eau chargée des fels
deidites cendres, dans les autres bacs G, H, I, qui
font au-deffous , dont on ne voit qu'une petite partie.
Ces derniers bacs font de briques ou tuileaux ma-
çonnés avec du ciment, comme les baffins des jardins
faits avec les mêmes matières.
Les trois bacs D,E,F, contiennent trois différentes-
fortes de cendres : dans le premier, on met tremper
les cendres caffoudes ; dans le fécond , les cendres
vecdaffes , 6c dans le ti oilieme , les cendres commu-
nes de bois neuf : ces trois fortes de cendres em-
ployées féparément ou mêlées enfemble dans dif-
férentes proportions , forment les différentes fortes
de leffives qui font en ufage dans ces manufactures.
Lorfque l'on veut faire une leffive , on prend dans
un des bacs G, H, /, autant d'eau chargée des fels de
la cendre du bac qui eft au-deffus, qu'il en eft befoin y
ou de plufieurs bacs , s'il eft néceffaire , pour faire
une leffive compofée : on met ces eaux qu'on doit
avoir laiffé repoiér jufqu'à ce qu'elles loient claires
6c limpides , dans un autre bac de ciment C, où on
les tient en réferve pour s'en fervir au befoin.
Les cendres par cette première lotion à l'eau froi-
de n'ont pu être épuifées totalement de leurs fels :
pour en tirer le refte , on les met dans le bac B , qui
eft auffi de ciment. Ce bac s'appelle bac à brafjer. Il
reçoit l'eau chaude de la chaudière de fer A , qui eft
affife fur un fourneau de brique femblable à celui des
Teinturiers. Cette eau chaude achevé de détremper
les fels que l'eau froide n'avoit pu diffoudre. Cette
opération eft encore accélérée parie travail des ou-
vriers, qui remuent continuellement les cendres dans
l'eau avec des pelles de bois ; c'eft ce qui a fait don-
ner à ce'bac le nom de bac à brafjer. La leffive qu'on
retire par ce moyen eft jettée après qu'elle a été
éclaircie dans le bac C , d'où on la tire pour la jet-
ter dans des rigoles qui la conduifent dans les chau-
dières P, Q,R,S, établies chacune fur un fourneau,
dont les ouvertures L", Y, Y, Y, répondent fous une
hotte de cheminée ; eniorte que la fumée du bois qui
entretient le feu tous les chaudières , puilfe trouver
par-là une iiïïie. Ces chaudières qui lont de fonte ou
fer fondu , ont trois pies de diamètre.
Les cuviers K, L, M, ÀT, font placés vis-à-vis des
chaudières : ils font de brique maçonnée avec chaux
& ciment ; leur diamètre eft d'environ fix pies, 6c leur
profondeur à peu près la même. Chaque cuvier eft
garni dans Ion fond d'un plancher ou grillage de
planches de chêne, élevé d'environ un pie au-deflua
du tond des cuviers , qui eft de maçonnerie comme
tout le refte. Chaque cuvier a de plus deux tuyaux
que l'on ferme avec des tampons ou des robinets.
Un de ces deux tuyaux A" qui (ont places au-deffous
du plancher de planches , le plus pics qu'il eft poffi-
blc du fond du cuvier , lert à couler la leffive du cu-
vier dans la chaudière ; l'autre place à l'oppofite du
premier derrière le cuvier , 6c qu'on ne voit pas ,
fert à lâcher dans une rigole ou égoût cache auffi
par les cuviers, au derrière delquels il eft placé , la
leffive contenue dans les cuviers : après qu'on en a
tiré tout le lervice qu'on peut en efpérer, elle lort
par cette rigole, pour s'alier perdre dans la rivière
ou clans la campagne.
Pour couler la felfive , on puife avec un feau dans
les chaudières P, Q, R, S, 6c on jette clans les cuviers
A", Z., A/, N, O , remplis des toiles propofées à blan-
chir. Les cuviers de Flandre contiennent chacun qua-
rante aunes de trois quarts, ce on y met cent livres
M m ij
176
B L A
de caffoude. L'eau après avoir traverfé les toiles re-
tourne dans la chaudière , d'où on la reprend pour
la jetter de nouveau fur les toiles ; ainfi alternative-
ment pendant plufieurs heures.
La première lefïïve eft compofée de moitié de cen-
dres de caffeau, & de cendres du pays. Les toiles
fortant de cette leffive doivent être étendues fur le
pré & arrofées.
Pour étendre les toiles fur le pré , on fe fert de
plufieurs chevilles de bois qu'on fait parler dans des
anneaux de ficelle qui font coufus tout autour de la
toile , & qu'on enfonce dans la terre, en forte que
latoil foit bien tendue.
La difpoiition des prés favorife l'opération d'arro-
fer : ils font coupés comme on voit Pi. I.ena,t>, c ,
d,e,f,g,h,i,k,l,m,n, o,p,q,àe dix toiles
en dix toiles par des canaux dans leiquels on a dé-
tourné le lit de la rivière. On prend l'eau dans ces
canaux avec des écopes de forme finguliere , repré-
fentéesfig. l. PL U> de Blanchijferie {V. Ecope) , &
on la jette fur les toiles étendues , en forte qu'elles
fe trouvent par-tout également mouillées : on réitère
cette opération jufqu'à ce que les toiles foient entiè-
rement dégorgées de cette première lefïïve.
Lorfqueles toiles font feches , on peut les retirer
du pré , & les mettre à une féconde lefïïve.
La féconde lefïïve fera augmentée d'un tiers de
caffoude. Les toiles feront ainfi coulées la troifieme ,
quatrième & cinquième lefïïve, avec cette augmen-
tation de caffoude , obfervant à chaque lefïïve ce
qui a été prefcrit ci-deffus.
Il faut obferver que fi après la première lefïïve on
ne pouvoit pas retirer les toiles feches dedeffusle pré
à caufedes pluies, en ce cas , après avoir repamé les
toiles , on pourroit les mettre à la lefïïve à la fortie
du repamoir.
La fixieme & feptieme lefïïve fera coulée avec la
même quantité de caffoude que les précédentes , &
avec les mêmes attentions ; c'eit- à-dire , que les toi-
les doivent être feches.
La huitième & neuvième lefïïve fera faite avec
les toiles qu'on aura repamées fortant du pré ; elles
feront mifes dans les cuviers étant mouillées.
On doit obferver pour les lefïïves fui Vantés, dont
le nombre eft indéterminé , qu'il faut les encuveter
feches une lefïïve , & les repamer , & les encuveter
mouillées à la leffive fuivante , ainfi alternative-
ment.
On doit aufïï obferver pour les lefïïves où les toi-
les ont été encuvetées feches , qu'il faut que la lefïï-
ve foit feulement à demi-chaude ; au lieu que quand
les toiles font écrites ou mouillées, elle peut être
bouillante.
A l'égard de la quantité de cendres caffoudes, pour
cent vingt pièces de toile de Flandre de trente- fix
aunes de longueur & de trois quarts de large , on met
cent livres de cendres ; quant aux deux ou trois pre-
mières lefïïves , feulement quatre-vingts livres.
Lorfque les toiles font à demi blanches, on met un
tiers de cendres vecdaffes ; & lorfqu'elles font tout-
à-fait blanches , & prêtes à entrer au lait , les lefïï-
ves font feulement compofées de cendres blanches
ou de bois commun ; cette dernière donne un fond
beaucoup plus clair , & un blanc plus parfait.
Lorfque les toiles font blanches, il faut les retirer
du pré , les repamer pour les mettre au lait , après
qu'elles font égouttées.
La laiterie eft une falle plus ou moins grande ,
dans laquelle font plufieurs grandes cuves de bois
enterrées de toute leur hauteur dans le fol de la falle.
La grandeur de ces cuves eft à peu près égale à celle
des cuviers. On jette les toiles encore moites dans
ces cuves , & par-deffus une quantité fufhfante de
lait écrémé , pour qu'elles foient entièrement pion-
B L A
gées : on les laiffe en cet état pendant vingt-quatre
heures ; on les retire du lait pour les porter au re-
pamoir , où elles font repamées. Lorfque les toiles
font repamées , elles vont toutes mouillées à la
frotterie ou frottoir. Le frottoir eft une autre falle
où des femmes font occupées à favoaner les lifieres
des toiles, qui n'ont pu être autant blanchies que le
milieu de l'étoffe par les opérations précédentes.
Cette falle contient plufieurs baquets A , B , C ,
PI. I. au bas , de trois pies de large , & d'environ
quatre pouces d'épaifîeur , & de quinze ou dix-huit
de profondeur: le bord fupérieur de ces baquets,
qu'on appelle plateaux, eft incliné en-dedans , enfor-
te que l'eau puiffe retomber : ils font portés fur deux .
pièces de bois DD, E E , foûtenues par des pies
fcellés dans le plancher , qu'on appelle chantiers.
Chacun de ces plateaux contient un autre vafe de
bcis XXX, dont le diamètre eft à peu près le tiers
de celui du plateau , qu'on appelle tinette ; cette ti-
nette contient de l'eau chaudequi fert à détremper le
favon noir contenu dans les écuelles de bois FF,
pofées fur les piliers G G , qui font placés entre cha-
que plateau X.
Les autres uftenciles que cet attelier contient,font
un fourneau garni de fa chaudière , pour faire chauf-
fer l'eau néceffaire aux tinettes ; quelques tables
pour pofer les toiles & les vifiter , c'eft-à-dire , exa-
miner fi les lifieres ont été affez f avonnées ; & une
machine qu'on appelle chaife , repréfentée fig. pre-
mière , PL I.
Ces chaifes ne font autre chofe qu'une caiffe à
jour compofée de quatre montans ou piliers , de quel-
ques bâtons qui les unifient , & d'un fond de plan-
ches; le tout a affez de reffemblance avec un tabou-
ret commun renverfé.Cet infiniment fert à égoutter
les toiles au fortir des mains des frotteufes.
Pour f avonner les lifieres , les toiles étant ployées
en deux fuivant leur longueur,&en plufieurs doubles,
enforte que toutes les lifieres foient raffemblées dans
l'étendue d'un pié & demi ou environ , la frotteuie
prend un peu de favon dans l'écuelle E, l'applique
fur l'endroit qui ne paroît pas affez blanc ; elle frotte;
eniuite deux parties de lifiere l'une contre l'autre juf-
qu'à ce que la tache foit effacée , obfervant de mouil-
ler de tems en tems avec l'eau chaude contenue dans
la tinette du plateau fur le bord duquel elle travaille.
Deux ouvrières peuvent travailler en même tems
fur le même plateau fans s'incommoder ; l'une eft
d'un côté des chantiers, & l'autre du côte oppofe.
Après que les toiles ont été lùfïïfamment frottées,
elles vont à la lefïïve douce, «de-là fur le pré pour
être arrofées : au fortir du pré il faut les repamer &
les remettre au lait , d'où elles fortent pour être por-
tées pour la féconde fois au frottoir, d'où elles paf-
fent à la lefïïve légère.
Cette lefïïve légère eft compofée d'un quart feu-
lement de caffoude ; fi on a de la vecdaffe , on peut
couler les toiles avec la même quantité de cette der-
nière matière fans caffoude.
Lorfque les toiles fortent du frottoir pour la fécon-
de fois, elles font portées humides à la lefïïve : il faut
en mettre feulement deux lits dans le cuvier, avoir
la leffive chaude , & en jetter defliis environ la quan-
tité qu'une chaudière en peut contenir; cela fait, il
faut en mettre deux autres lits , & les arrofer avec
la même leffive , & continuer de la forte jufqu'à ce
que toutes les toiles qui doivent paffer par cette lefïï-
ve foient entrées dans le cuvier ; alors on les arrofera
avec la même lefïïve bouillante, que l'on aura aug-
mentée d'eau pour que la chaudière foit pleine.
Après avoir laiffe couler la lefïïve trois fois , on
fortira les toiles ainfi chaudes, on les étendra fur le
pré , où on les fera arrofer deux ou trois fois.
Après le troifieme arrofage , il faut retirer les
B L A
toiles du pré , les porter mouillées au repamoir , Se
étant égouttées, on les remettra au lait ; continuant
ainfi la même litite d'opérations jufqu'à ce qu'elles
ayent acquis tout le degré de blancheur dont elles
font capables , ou celui que Ton veut leur donner.
Cette fuite d'opérations n'efi pas fi bien démon-
trée la meilleure , qu'on ne puifle s'en écarter dans
bien des occalions : mais c'eft la plus ordinaire. Il y
a des qualités de toiles qui réiiftent à tous les efforts
que l'on fait pour les blanchir parfaitement ; il faut
fe contenter alors d'un demi-blanc , ou davantage fi
on le peut atteindre : il y en a d'autres qui renflent à
toutes ces opérations , & dont on vient facilement à
bout en variant le procédé de quelques-unes, foit pour
la dofe ou pour l'ordre ; c'eft où paroît l'intelligence
du manufacturier : c'eft pourquoi il obferve foigneu-
fement ii la blancheur de fes toiles fait du progrès en
paflant parles opérations que nous venons de décri-
re ; fi elle s'arrête en chemin , il varie un peu le pro-
cédé , & par ce moyen il détruit ou diminue l'obfta-.
cle qui s'oppofoit au progrès de la blancheur de fa
toile. Il ne faut quelquefois pour cela que deux lefli-
ves bouillantes de fuite , au lieu que nous avons prel-
crit ci-devant de les donner alternativement bouil-
lantes fur les toiles mouillées , & tiedes fur celles qui
font miles feches dans les cuviers ; ainli de toutes les
variétés dont ces opérations font fufceptibles.
Lorfque les toiles font blanches, il faut les porter
au repamoir ; mouillées du repamoir , il faut leur
donner un premier bleu , & les faire lécher fur les
pieux.
Le bleu dont on fe fert dans les manufactures eft
le bleu d'Inde appelle indigo , ou le bleu de Prufle
qui a un plus bel œil. On plonge les pièces de toile
dans un baquet rempli d'eau chargée plus ou moins
de cette couleur ; on l'y retourne pour qu'elle s'en
charge également ; enfuite on retire par un bout la
pièce de toile , Se on la roule en l'exprimant fur un
bâton placé au-deflus du baquet à trois ou quatre pies
de hauteur , cnlbrte que la pièce de toile a la figure
d'un écheveau de fil ouvert , & fufpendu par le bou-
ton placé au-defTus du baquet. Après qu'elle eft égout-
tée, on la tord pour exprimer la quantité d'eau fu-
perflue. Cette opération eft très délicate ; car fi on
tord trop, toute la teinture bleue fort , & les toiles
reftent à peu près comme elles étoient avant que
d'avoir été plongées dans le baquet : fi au contraire
on ne tord pas allez, on a à craindre que les toiles
ne foient plus chargées de couleur dans un endroit
que dans un autre.
L'opération de donner le bleu aux toiles , eft fui-
vie de celle de les étendre fur les pieux pour les faire
fécher. Les pieux font placés dans la campagne ou
le pré ; ce font des bâtons enfoncés fermement dans
la terre , &c qui en fortent d'environ quatre pies : ils
font rangés fur clés lignes droites comme les arbres
d'un jardin. Sur les têtes de ces pieux , qui doivent fe
trouver en ligne droite, on étend une toile groflie-
re , ou une toile qui n'a pas encore été blanchie , en
forte que le milieu de la largeur de la toile porte fur
la tête des pieux , & qu'elle pende de chaque coté.
On affermit & on tire cette toile pour qu'elle foit
bien tendue; & fur celle-ci on étend de même celle
qui a été mile au bleu pour la taire fécher : elle doit
être bien tendue, pour empêcher qu'elle ne s'étré-
cifle & fe raccourcifle en léchant.
Lorfqu'elles feront feches on leur donnera l'ap-
prêt qui fuit : prenez de l'amydon, faites-le bouillir
dans de l'eau , retirez-le de défais le feu quand il fe-
ra cuit, & le pafle/. par un linge.
Vous mettrez dans un autre pot ou vafeun tiers
d'amydon crud , que vous détremperez dans de Peu
fans le faire bouillir , & le parferez à travers un linge.
Cela fait , vous mettrez dans un troilieme vale deux
B L A
177
tiers d'amydon bouilli, avec un tiers d'amydon crud ;
vous y ajouterez votre bleu ; ayant bien mêlé le tout,
vous y plongerez vos toiles , & après les avoir bien
trempées dans cette compofition , vous les retirerez
pour les faire fécher.
Après que les toiles font feches , on les porte à la
ploierie ou magafin , d'où elles ne fortent que pour
retourner chez ceux à qui elles appartiennent, ou à
qui elles font deftinées.
Mais comme les toiles après avoir paffé par tou-
tes les opérations dont on vient de parler , ont un
grand nombre de faux plis , on leur donne dans la
ploierie diverfes préparations qui les effacent.
La première de ces préparations confifte à les fai-
re palier dans le rouloir , qui eft une efpece de calen-
dre ou de preife en taille-douce. Le rouloir repréfenté
fig-Z. PI. III. eftcompofé de deux jumelles, des mon-
tans C A , FB, fendus de D en A , d'une longue
mortoife, de quatre montans K H , I G , FE , LMy
toutes ces pièces font afTemblées dans une plate-for-
me ou chafîis I KL; chacun des quatre montans eft
affemblé avec les jumelles par des traverfes GD f
HD , ME ; & les jumelles le font l'une avec l'autre
parle fommier^/2? : entre les deux jumelles au-deflbus
du fommier , on place fept rouleaux de bois de fix à
lept pouces de diamètre , & d'environ quatre pies de
longueur. Ces rouleaux dont les tourillons entrent
dans les mortoifes des jumelles , portent les uns fur
les autres , enforte que le mouvement d'un de ces
rouleaux fe communique à tous les autres , qui tour-
nent alternativement en fens contraire.
Le rouleau marqué 6 dans le profil , porte un carre
qui reçoit une manivelle , au moyen de laquelle on le
fait tourner, & on communique le mouvement à tous
les autres.
Sur les deux montans de devant eft encore un au-
tre rouleau, que l'on fait tourner avec une manivelle
M , voye^ au(Ji 9 le profil. A la partie oppofée , c'eft-
à-dire derrière , eft un autre rouleau 8 ; mais qui eft
fixé &; percé de plufieurs trous pour recevoir des che-
villes a, entre lefquelleslapiecede toile eft conduite.
Enfin , au-deflbus des rouleaux eft une table de bois
qui occupe tout le vuide du chaflis IKL, dontl'ufage
eft d'empêcher la toile de toucher le plancher. La toi-
le eft pofée fur cette table, comme on le voit dans la
figure , & le trait noir repréfenté le profil de la toile,
qui eft ployée en zig-zag. On prend le bout fupé-
rieur de cette toile , on le pafle fous le rouleau 8 , on
le ramené entre les deux chevilles a a fur le rouleau 1 ;
on fait tourner enfuite la manivelle du rouleau 6 du
fens convenable , pour que le chef de la toile pafle
entre les rouleaux 1 & 2 ; continuant de tourner, on
le fait pafier entre les rouleaux 2 tk 3 , & luccefiive-
ment entre tous les autres, -jufqu'à ce qu'il forte en-
tre les rouleaux 6 & 7 du côté de G. Lorfqu'il en eft
forti une longueur convenable 7, 9, on reçoit le chef
fur le rouleau 9 , où on Faffujettit par le moyen d'une
envergeure ou petite baguette, qui fe cache &fe fixe
enfuite clans une cavité de l'enfuple ; ce qui fait qu'en
tournant la manivelle du rouleau 9, on amené toute
la toile fur lui fans craindre qu'elle fe déroule ; cette
opération redrefle les fils de la trame & de la chaîne ,
que les opérations par lefquelles la toile avoit paffé
pour être blanchie, avoient beaucoup déranges; de
plus elle efface les principaux plis.
Cette opération achevée , on ôte le rouleau 9 de
defliis les i'upports I G , LM, & on le porte fur un
autre AB ,Jig. 4. Plane. II. qu'on appelle par cette
rz'iion porte-rouleau. C'efl une efpece cle banc à quatre
pies , aux deux extrémités duquel font deux mon*
tans, fur lefquels on pofe les tourillons du rouleau.
Cette machine fe place au bout d'une table, auprès
de laquelle les ployeufes font affilés. Elles ployent la
toile en botte , ainli qu'il cil d'ufage. Lorfque les toi-
27» B L A
ks font ployées , on les met en preffe avec des ais
entre-deux comme les livres que l'on relie. Les pref-
fes dont on fe fert pour cet effet , l'ont en tout fembla-
bles à celles des manufactures de papier , auxquelles
nous renvoyons à cet égard.
Les toiles dûement preflees , pour leur faire perdre
les plis qu'elles ont, l'ont enveloppées de papier ; c'eft
ce qu'on appelle mettre en papier , & aulîî la dernière
préparation qu'on leur donne dans les manufaâ ures.
Il y a des toiles que l'on fait paner au mailloir ,
Plane. H.fig. 3. c'eft-à-dire , que l'on les bat fur une
pierre de marbre avec des maillets de bois , pour en
applatir les fils & leur donner une plus belle appa-
rence : mais c'eft une charlatanerie ; car au premier
blanchiffage , les fils qui avoient été applatis repren-
nent leur rondeur ordinaire , & on eft tout étonné de
voir de la toile qu'on a achetée pour de la toile
fine , devenir groffiere ; d'ailleurs cette opération ufe
plus les toiles que ne feroient deux ans de fervice.
Il y en a d'autres que l'on fait parler à la calendre ;
cette méthode n'altère point tant les toiles : mais à l'é-
gard de l'apparence de fineffe & de perfection qu'elle
leur donne , elle eft comme l'autre fujette à l'in-
convénient , que le premier blanchiffage la fait éva-
nouir.
BLANCK , f. m. (Commerce.') c'eft une monnoie
fictive, par laquelle on compte en Hollande. Le blanck
vaut 6 duytes ou 1 4- fou argent de France.
BLANCKENBERG , ( Gêog. ) petite ville de la
Flandre Efpagnole , fur la mer, entre Oftende & l'E-
clufe. Il y a une ville de ce nom dans le duché de Ber-
gue , fur la rivière de Sieg.
BLANCKENBURG, (Gêog.") principauté d'Al-
lemagne , dans la baffe Saxe. Il y a encore une ville
de ce nom dans la Thuringe.
BLANC KENHAYN , (Géog.) petite ville d'Al-
lemagne , à 4 lieues d'Erford.
BLANCKENHEIM , (Géograph.) petite ville &
comté d'Allemagne , fur la rivière d'Ahr.
BLANDICES , f. f. {terme de Palais.) fignifie des
flateries ou cajoleries artificieufes , par où l'on fur-
prend le confentement de quelqu'un. (H)
BLANKA, (Gêog.) petite île du golfe de Mexi-
que , près la côte de Tlafcala , à peu de diftance de
la Vera-Crux.
BLANKIL,f. m. (Commerce.) petite monnoie d'ar-
gent de billon , qui eft en ufage dans les royaumes de
Fez & de Maroc : elle vaut environ deux fous iîx de-
niers de notre argent.
BLANOS, (Géog.) petite ville maritime d'Efpa-
gne , en Catalogne , près de la rivière de Tordera ,
au nord de ion embouchure.
BLANZAC,(GVo£.) petite ville deFrance, dans
l'Angoumois , fur la rivière de Nay , aux frontières
de la Saintonge.
BLARE , f . f . ( Commerce. ) petite monnoie de
cuivre , avec mélange d'un peu d'argent : elle fe fa-
brique à Berne en Suiffe , au même titre que les ratzes
de Souleurre & de Fribourg , & elle a à peu près la
même valeur. Voye^ Ratze. Le blare eft évalué en
France à deux fous un denier.
B L A S I A , genre de plante à fleur monopétale ,
campaniforme , tubulée , & reffemblante en quelque
façon à la trompe d'un éléphant. Cette fleur eft fté-
rile & n'a point de calice: les fruits font des capiules
qu'on trouve le long des bords des feuilles , & où il
y a pour l'ordinaire dix femences arrondies & très-
petites. Nova plantarum gênera , par M. Micheli. (/)
BLASON, f. m. Y Art Héraldique ou Y Art de blafon-
ner les armoiries des maiions nobles , ou d'en expli-
quer toutes les parties dans les termes qui leur con-
viennent, foye^ ARMOIRIES.
Des diveries étymologies du mot blafon , la plus
probable eft celle qui le fait venir du mot Allemand
B L A
blafen, qui fignifie former du cors , parce que c'etoit
autrefois la coutume de ceux qui fe préfentoient pour
entrer en lice dans les tournois , de notifier ainfi leur
arrivée. Enfuite les héraults fonnoient de la trom-
pette , blafonnoient les armes de ces chevaliers , les
décrivoientà haute voix, & fe répandaient quelque-
fois en éloges, au fujet des exploits de ces braves.
Il y a cette différence entre les armes & le blafon,
que les premières font des devifes ou des figures dont
eft chargé l'écufibn , & que le blafon eft la cieicrip-
tion que l'on en fait verbalement. Vcyc{ Armoiries
& Devise.
Les règles de cet Art font i° de nommer d'abord
le métal ou la couleur du champ , comme d'or, d'ar-
gent , ou de gueules : z° de fpécifier la manière ou la
divifion de l'écu par lignes , foit de haut en-bas , ou
en bandes , & de même la différence de la ligne , c'eft
à favoir li elle eft endentée, engrelée, &c. 30 dire
enfuite ce que porte le champ : 40 après avoir expri-
mé de la forte le champ , la divifion & fon port , s'il
y a plus d'une pièce dans le champ , il faut commen-
cer par la principale : 50 s'il y a plus d'une forte de
pièces dans le champ , il faut nommer la première
celle qui eft dans la principale partie : 6° éviter la
répétition des termes en blafonnant , & fur-tout celle
de ces mots de, ou , & , avec : 70 les trois formes de
blafons confiftent en métaux , en pierres précieufes ,
& en planètes : la première convient aux fimples gen-
tilshommes ; la féconde aux nobles qualifiés ducs ,
comtes , &c. la troifieme aux empereurs , aux rois ,
aux princes , quoique cette variété foit improuvée
des François , ainii que des autres nations qui n'ufent
que de métaux & de couleurs pour tous les degrés de
nobleffe , & quoique nous tenions d'eux Y Art héraldi-
que: 8° c'eft mal blafonner, que démettre couleur fur
couleur , & métal fur métal ; ce qui fouffre une feule
exception en faveur des armes de Jérufalem , qui font
d'argent à la croix potencée de gueules entre quatre
petites croix d'or. Ajoutez que des lions debout font
dénommés rampans; s'ils marchent ,pafjans, gardans;
on les nomme encore faillans , regardans , &c. Les
loups & les ours fe qualifient comme les liens ; les
griffons, au lieu de rampans & de faillans , font dits
fegreans ; les lions , les griffons , & les aigles font dé-
nommés aufîi langues & armés ; les cygnes, membres ;
les faucons , chaperonnés ; les coqs , armés , crêtes , bar-
belés , c'eft-à-dire , lorfque les langues , les becs , &
les ferres de ces animaux font d'une couleur différen-
te de leur corps.
Lorfqu'un enfant ou un animal fort du fond de l'é-
cu, on l'appelle iffant ; loriqu'il eft deffus, on le dit
giffant ; s'il part du milieu, il le qualifie naiffant , &c.
koye^ ces articles, (f^)
B L A S P H E M E , f. m. fe dit en général de tout
difeours ou écrit injurieux à laMajefté divine : mais
dans Pufage ordinaire , on entend plus fpécialement
par blafphbnes , les juremens ou impiétés contre le
faint nom de Dieu , proférés de vive-voix. (H)
Les Théologiens difent que le blafphème conlifte à
attribuer à Dieu quelque qualité qui ne lui convient
pas , ou à lui ôter quelqu'attribut qui lui convient.
Selon faint Auguftin toute parole mauvaife , c'eft-à-
dire, injurieuie à Dieu , eft un blafphème : Jam vero
blafphemia non accipitur nifi mala verba de Deo dicere.
De morib. Munich, lib. II. cap. xj. Ainfi ce feroit un
blafphème, que de dire que Dieu ejl injufle & cruel parce
qu'il punit le péché originel dans les en/ans qui meurent
fans baptême. Le blafphème eft une fuite ordinaire de
l'hérélie : puifque celui qui croit mal, parle indigne-
ment de Dieu 6c des myfteres qu'il méprife. C'eft ce
qui s'appelle proprement blafphème. (G)
BLASPHÉMATEUR , f. m. celui qui- blafphème ou
qui prononce un blafphème. Les blasphémateurs ont
toujours été féverement punis par la juftice humai-
BLA
ne, tant dans l'ancienne loi que dans le Chriflianif-
ïrie, Ils étoient punis de mort chez les Juifs. Qui blaf-
phemaverit nomcn Domini , morte moriatur. Livide, ca-
pit. xxiv. & ce fut fur cette loi mal appliquée , que
l'on condamna Jefus-Chrift à la mort : Blajphemavit:
quid adiiuc egemus tejlibus ? ecce nunc audijlis blajphe-
miam , quid vobis videtur? at illi refpondentes dixerunt,
reus efl mertis. Matth. cap. xxvj. verf. 66. Nous avons
des lois de S. Louis & de plufieurs autres de nos rois ,
qui condamnent les blafphèmateurs à être mis au pilori
& à avoir la langue percée avec un fer chaud par la
main du bourreau. Pie V. dans des réglemens faits
fur la même matière en ï 566 , condamne les blafphé-
mauurs à la même peine , & aux galères , fi c'efl la
îroifiemc fois qu'ils retombent dans ce crime ; car il
n'inflige qu'une amende pour la première fois , & le
fouet par les carrefours pour la leconde , û le crimi-
nel efl: un laïque ; s'il efl eccléfiaftique , ce pontife
veut qu'à la troifleme fois il foit dégradé ôc envoyé
aux galères. La peine la plus ordinaire aujourd'hui ,
efl l'amende honorable & le banniflement. (£')
BLASPHEMATOIRE, ce qui contient ou expri-
me un Mafplïème. C'eft une qualification que les iou-
verains pontifes & les théologiens donnent quelque-
fois à certaines propoiitions înjurieufes à Dieu , ou
qui lui attribuent des choies contraires ou répugnan-
tes à fa fouveraine perfection. Ainfi la cinquième
propofition de Janlenius : c'efl une erreur Semipelagi:n-
ne , que de dire que Jejus-Chrijt eji mort ou a répandu fon
J'ang pour tous les hommes , entendue en ce fens , que
Jcius-Chrifl n'efl mort que pour le falut des prédef-
tinés , efl déclarée blafphcmatoirt dans la condamna-
tion qu'en porta Innocent X. Le cardinal de Lugo
diftingue deux fortes de propoiitions blafp hématoires:
les unes Amples , qui contiennent quelque chofe de
contraire à la foi , mais qui n'efl pas clairement énon-
« •' les autres héréticales,qui au blafphéme ajoutent
l'hérélic formelle & clairement exprimée. -Dijp. XX.
de f'ide ,fecl. III. n° 100. (G )
* BLATIER , f. m. (Commerce & Police.} marchand
qui acheté le blé fur les greniers des campagnes, pour
le revendre dans les marchés des villes. Ce mot vient
ûu vieux terme Latin bladus , fruit ou femence. Il y
avoit une communauté de blatiers à Paris du tems de
S. Louis , 6c ce prince leur donna des flatuts. 11 y a
f>lus de trois ficelés que ceux de cette ancienne com-
munauté fortt réduits à vendre à petite mefure , &
ont été nommés regratiers ou grainiers ; ceux qui font
ce grand commerce le nomment marchands de grains.
Le nom de blatiers n'efl donc reflé qu'à une cinquan-
taine de petits marchands forains, qui vont avec des
chevaux ou des ânes chercher le bie dans les campa-
gnes , cv qui l'amènent à lomme dan:, les marchés des
grandes villes.
Ce commerce a fon avantage & fon inconvénient
pour le public. Les blatiers facilitent la vente des
grains ^ ceux qui n'en ont qu'une petite quantité :
mais aufli ce grain, qu'ils achètent Cv fur lequel ils
gagnent, revient plus cher entre les mains de celui
qui doit le conlbmmer. Il efl de la bonne police
d'avoir l'œil fur ces petits commerça ns , cv de les
empêcher de mêler les grains , de les falfifier, 6c de
les faire renfler, ce qu'ils appellent blatrer,
BLATREll , v. a&. c'eft apprêter le grain , le ren-
dre frais , & lui donner de la couleur & de la main ,
par des préparations danger eufes. Ce fecret efl em-
ployé par les petits marchands de grains , ê< même
parles gros marchands : mais la police y veille, cv
quand ils font furpris elle les punit.
BLATTE , blatta , {Hifl. nat.} On a donné ce nom
à plufieurs infectes de nature très-difféi ente ; comme
les vers qui naiiient clans les oreilles , & ceux qui
rongent les étofiè.s &: les livres ; ceux des inteftins ,
de la farine , &c. Aujourd'hui , félon M. Linnams ,
L A
i7Q
on ne doit reconnoître fous le nom de blatte , que les
infectes dont les antennes font longues ôc menues j
& dont les enveloppes ou fourreaux des ailes font
membraneufes , & qui ont la poitrine applaîie , ar-
rondie & bordée. Le même auteur rapporte la des-
cription de deux efpeces de ce genre. La première
efl de couleur brune,tirant fur la couleur de la rouiile
de fer. Les enveloppes des ailes portent l'empreinte
d'un fillon tracé en ovale. Les femelles de cette ef-
pece n'ont que quelques rudimens & quelque appa-
rence des ailes & des enveloppes des ailes qui font
bien entières dans les mâles. M. Linnaeus comprend
fous cette efpece la blatta mollis, & la blatte des mou-
lins , blatta moltndinaria , qui font diftinguées dans
Mouflet. Celui-ci dit que l'on trouve la première fui
les lunettes des latrines, &c dans les bains, 6*c« Le
nom de l'autre efpece déflgne allez les lieux où elle
efl fréquente. Mouflet ajoute que les blattes lé trou-
vent aufli dans les boulangeries , les étuves , &c,
qu'elles craignent la lumière; que fi elles font obli-
gées de s'y expofer, elles reviennent au plus vite le
cacher dans les ténèbres, & qu'elles fe couvrent de
pouiiiere. M. Linnaeus rapporte qu'elles fe trouvent
dans les poelles des Finlandois, où elles rongent leur
pain & leurs bottes , &c. pendant la nuit , & qu'el-
les fe retirent dès qu'on allume de la chandelle.
La féconde efpece de blatte de M. Linnaeus efl jau-
nâtre , & les enveloppes des ailes lont tachées de
noir. On troitve cet infede dans les cafés des lap-
pons : il fe loge entre les écailles des poiilons que Ton
fait deflecher fans être laies. Mouflet, Infect, iheatrum,
pag. ZjJ. Linnsi, S'yfl. nat. & faunaj'uœcica, Voyes^
Insecte.
* BLATTA BYZANTIN A . (Hift. nat. Concilie-
/cj.) c'eft le nom qu'on donne au couvercle d'une co-
quille oblongue, dont la lubflancc reflemble allez à de
la corne : on l'appelle blatta , à caufe de la reflêmblam
ce avec la teigne ou la motte dite blatta & Byfanti-
na, parce qu'elle vient de Conftantinople appellée
autrefois By^ance. On dit que prife intérieurement»
elle purge & divile les humeurs ; 'ai. extérieurement ,
que li on la brûle l'odeur en efl bonne pour les i
mens de la matrice. Il y a eu de grandes difputes entre
iesNaturaiifles pour lavoir ce que ce pouvoit être que
cette coquille. Quelques-uns ont cru que c' étoit le
couvercle du purpura murex ; d'autres l'ont confondu
avec la coquille qu'on appelloit autrefois unguis odora-
tus, qui étoit connue à Diofcoride fous le nom de
7rù>/m.a.Koyxiihioç. On en apportoit de Ion tems la meil-
leure eipece de la mer Rouge, & celle qui étoit moin-
dre , d Affyrie. Voici ce qu'il en dit : In lacubus nardi-
jeris Indice reperitur ; quapropter , & conchylus nardum
.. .] ■..', t endbus aromaticus evadit; coiligitur verà, pojiquam
œjiivis caloribus lacus inaattr'utt. 11 conclut emuite
qu'en brûlant ce coquillage, il produit les mêmes ef-
fets que le purpura 6c le buccinum : & en parlant du
nnrd , il dit que cet ai brifleau naît près du ( I
c'efl-à-dire dans des lacs formés parles débordemens
de ce fleuve ; ce qui prouve que c'etoit un coquillage
d'eau douce.
Le l'avant Lyflcr prétend que la blatta by~: .
connue aujourd'hui , n'efl point la même chofe que
Yunguis odoratus des anciens, dont Tufage s'efl perdu
parmi nous. Il le fonde fur ce que cette coquille n'a
point les qualités de ï 'unguis odoratus , & qu'on n'y
trouve point du tout l'odeur aromatique qu'on lui
attribuoit ; il conjecture plutôt que ce pourroit être
la même choie que le pétoncle qui le trouve dans
la Tamife & dans d'autres rivières , qui efl ordinai-
rement delà grandeur & de l'épaùTeur de l'ongle du
pouce. En effet ii pouvoit avoir, à caufe de Ion odeur
aromatique, des vertus que nous ne trouvons ni dans
ce qu'on appelle blatta byyintina , ni dans nos coquin
les di
aSo
BLE
BLATTENBURG , ( Géog. ) ville du duché de
Gueldre , fur la Meule.
BLAU-STROM , (Géog.) rivière clans la Soûabe
qui le jette dans le Danube près d'Ulra.
BLAUBEUREN , ( Géog. ) petite vi|le d'Alle-
magne dans le duché de Wirtemberg, fur la rivière
d'Ach.
BLAYE ou BLAIE , ( Géog. ) ville de France
dans le Bourdelois en Guyenne , fur la Gironde. Lon.
l6. 63. lai. 46. 6.
BLAYER, f. va.(tcrmede Coutumes.} eft un feigneur
haut-jufticier qui a droit de blairie. (H)
BLE, f. m. plante qui produit un grain dont on
fait le pain , qui eft la principale nourriture de l'hom-
me. /^oy^PAiN.
On donne auffi le nom de blé au grain ou femence
de cette plante , après qu'elle eft féparée de fon épi.
Vbyei Grain & Semence.
Dans le commerce des blés on n'en diftingue que
de trois fortes : le blé proprement dit , qu'on nomme
autrement froment ; voyc^ Froment : lefeigle qui eft
une efpece bien différente , & d'une qualité fort in-
férieure ; voy. Seigle : & un troifieme Wequiréfulte
du mélange des deux autres , qu'on appelle blé mé-
ttil ; voyei M É T E I L .
A l'égard des laboureurs , ils mettent encore au
nombre des blés plufieurs de ces grains que l'on feme
au mois de Mars , comme Y orge , Y avoine , les pois ,
la vefce , &c. voyar ces mots : mais pour les diftin-
guer, ils les qualifient de petits blés.
Le maïs & le farajîn lont encore des grains aux-
quels on donne le nom de blé : l'un s'appelle blé de
Turquie & blé d'Inde, ck l'autre blé noir. Voye^ Blé
de Turquie & Blé noir.
Il n'y a que l'Europe , mais non pas par- tout; l'E-
gypte , ck quelques autres cantons de l'Afrique , le
long des côtes de Barbarie , ck peu d'endroits de l'A-
mérique , défrichés & cultivés par les Européens ,
comme la nouvelle France, la nouvelle Angleterre,
& l'Acadie , qui produiient du blé.
Les autres parties du monde ont en place le maïs
ck le ii{ ; ck même en quelques lieux des îles &
du grand continent de l'Amérique , de fimples raci-
nes , telles que font les patates & la manioc. Voye-^
Patate & Manioc.
L'Egypte paffoit autrefois pour le pays le plus fer-
tile en blé. On fait par lhiftoire fainte , en quelle répu-
tation elle étoit fur ce point dès les premiers tems ;
ck l'on apprend par l'hiftoire profane, qu'elle en four-
niffoit à une partie des peuples loûmis à l'empire Ro-
main , & qu'on la nommoit la mcre nourrice de Rome
-&■ de t Italie. La France , l'Angleterre , & la Pologne
fcmblent avoir pris la place de l'Egypte ; & c'eft de
leur abondance ck de leur fupcrflu , que la plupart
des autres nations de l'Europe lubliftent.
L'opinion commune eft que dans les premiers fie-
cles du monde on ne vivoit que des fruits de la terre
& de gland : quelques-uns ajoutent cette efpece de
noifette que produit le hêtre , qu'ils prétendent avoir
été appelle pour cela fagus en Latin , du mot Grec
çàyu,je mange. Ils difent qu'on n'avoit ni l'ufage du
blé, ni l'art de le préparer & de le rendre mangeable.
Voye^ Boulanger.
On dit que c'eft Cerès qui a fait connoître le blé
aux hommes ; ce qui la fit mettre au rang des dieux.
D'autres attribuent cet honneur à Triptoleme , fils
de Celée , roi des Eleufiniens. D'autres veulent que
Cerès ait trouvé le blé, & que Triptoleme ait inven-
té l'art de le femer ck de le cultiver.
Diodore de Sicile dit que ce fut Ifis ; furquoi Po-
îydore Virgile obferve qu'il ne diffère point des au-
tres , parce qu'Iris ck Cerès font la même. Les Athé-
niens prétendoient que c'étoit chez eux que cet
art avoit commencé. Les Cretois & les Siciliens
BLE
afpiroient à la même gloire , auffi-bien que les Egyp-
tiens. Quelques-uns croyent que les Siciliens "lont
mieux fondes , parce que la Sicile étoit la patrie de
Ceres , ck que cette déeffe n'enfeigna ce fecret aux
Athéniens , qu'après l'avoir appris aux Siciliens.
D'autres prétendent que Cerès pafla d'abord dans
l'Attique, de-là en Crète , & enfin en Sicile. Il eft ce-
pendant des favans qui foûtiennent que c'eft en Egyp-
te que l'art de cultiver les blés a commencé ; ck cer-
tainement il y avoit des blés en Egypte & dans l'O-
rient , long-tems avant Cerès. Vayt[ aux articles Fro-
ment , Seigle , Épautre , Méteil , &c le choix
de terre , la culture , ck les autres parties de l'agri-
culture qui leur conviennent.
Pour conferver le blé, il faut le bien fécher & le
tenir net. Le grenier doit avoir lès ouvertures au lèp-
tentrion ou à l'orient , ck des foûpiraux au haut. Il
tant avoir foin de le travailler de quinze en quinze
jours tout au moins , les fix premiers mois : dans la
fuite il fuffit de le cribler tous les mois. Après deux
années il ne s'échauffe plus , ck il n'a plus rien à crain-
dre que de l'air ck de l'humidité étrangère, f^oye^
Grenier.
Peu de tems après le fiége que foûtint Metz fous
Henri II. le duc d'Epernon fit faire de grands amas
de grains dans la citadelle , qui fe font confervés
jufqu'en 1707. Quoique la citadelle eût été bâtie fous
Henri III. il y en avoit un tas dans le magafin , avec
lequel on fit du pain , dont le roi , le dauphin , ck les
leigneurs qui parlèrent par cette ville mangèrent.
Une des choies qui contribue le plus à la confer-
vation du blé, c'eft la croûte qui fe forme fur toute
la fuperficie par la germination des grains extérieurs ,
jufqu'à l'épaiffeur d'un pouce ck demi. On fe prome-
noit fur celui de Metz , fans que cette croûte obéît.
On a vu à Sedan un magafin taillé dans le roc ck affez
humide , dans lequel il y avoit un tas de blé très-con-
fidérable depuis 1 10 ans : il étoit revêtu d'une forte
croûte épailfe d'un pié.
Il y a des greniers à Chaalons où l'on conferve le
blé 30 ou 40 ans.
On choifit le plus beau blé ck du meilleur cru qu'il
eft pollible. Après l'avoir travaillé , on en fait un tas
auffi gros que le plancher le peut permettre : on met
enfuitedeffusunlitde chaux vive en poudre de trois
pouces d'épaiffeur ; puis avec des arrofoirs on hu-
mecte cette chaux qui forme avec le blé une croûte.
Les grains de la fuperficie germent , & pouffent une
tige d'environ un pié ck demi de haut , que l'hyver
fait périr : on n'y touche point que quand la néceffité
y oblige.
Blé de Turquie, maïs; genre de plante dont la
fleur n'a point de pétales : elle eft compolée de plu-
fieurs étamines qui lortent d'un calice. Cette fleur
eft ftérile ; les embryons naiffent léparément des
fleurs ; ils font raffemblés en épis , & terminés par
un long filet. Les épis font enveloppés dans des feuil-
les qui leur fervent de gaines. Chaque embryon de-
vient une femence arrondie , anguleufe , ck enchâffée
dans l'un des chatons du poinçon qui lbûtient l'épi du
fruit. Tournefort , Infl. rei kerb. Voye^ Plante.
Il y a du blé de Turquie en Bourgogne , en Fran-
che-Comté, ck ailleurs. Il vient facilement, & c'efl
toujours un fecours dans les famines. On en fait du
pain allez fain. On en confomme confidérablement
dans l'Amérique , aux Indes, & en Turquie. Il aime
la terre graffe bien remuée , & les filions larges ; le
froid lui eft très-contraire. Quant à ta culture, voy.
Agriculture.
Blé noir ou Sarasin , fagopyrum; genre de
plante dont la fleur n'a point de pétales : elle eft com-
polée de plufieurs étamines qui fortent d'un calice
divifé en cinq parties. Le piftil devient dans la fuite
une femence triangulaire , renfermée dans une en-
veloppe
BLE
veloppe qui a fervi de calice à la fleur. Ajouter aux
caractères de ce genre , que les fleurs naiffent en
grappe ou en épi , & que les racines font chevelues.
Tournefort , Infi. rei htrb. Voyc^ Plante. ( / )
* Lçfarrajzn eft plus commun en France que le
lié de Turquie. Il ne fort qu'à nourrir la volaille. Les
faifans en font friands ; c'eft pourquoi l'on en feme
dans les bois , &c par - tout où l'on veut attirer ces
oifeaux. Le pain & la bouillie qu'on en fait , font
noirs & amers, à moins qu'on n'y mêle d'autres grains.
Le fourrage en eft bon pour les vaches. Il vient dans
toutes fortes de terres , & aime la fechereffe. Les la-
bours lui font avantageux , & on le feme en filions.
Les pierres &C les cailloux ne l'empêchent pas de
pouffer. En femant de bonne - heure dans les pays
chauds , on en fera jufqu'à deux récoltes par an.
Quant à fa culture , c'eft la même que celle des au-
tres grains. Voye{ Agriculture.
BLECKINGEN, {Géog.) contrée de Suéde dans
!a Gothie méridionale , bornée au nord par la Go-
thie, & au couchant par la Scandinavie.
BLEIBURG, ( Géog. ) ville & château fur la ri-
vière de Feiftritz dans la Carinthie.
BLEICHRODA, {Géog.) petite ville du comté
de Hohenftein en Thuringe.
BLEICHFELD , {Géog.) petite ville de l'évêché
de Wurtzburg en Franconie.
BLEIDERSTADT, {Géog.) petite ville du comté
de Naffau , à la fource de la rivière d'Aar.
BLEND A , ( Géog. ) petite île de l'Archipel.
B L E S S , ( Géog.) petite ville de la Wetteravie ,
appartenante à l'électeur de Trêves.
BLEY-STADT, {Géog.) petite ville du royaume
de Bohème.
BLIESS, ( Géog. ) petite rivière qui fe jette dans
laSaar.
BLEMMYES ou BLEMYES , f. m. plur. ( Hifi.
anc. & Géog. ) Les anciens Géographes font mention
d'un peuple de ce nom (fabuleux fans doute), qui
n'avoit point de tête , & qui avoit les yeux & la bou-
che dans la poitrine : on dit qu'ils habitoient une
partie de l'Ethiopie.
BLENDE , ( Minéralogie. ) ce mot eft Allemand :
on s'en fert dans les mines pour défigner un minéral
qui n'eft bon à rien ; on l'appelle en Latin pfeudo-ga-
lena, galena inanis , mica. Henckel , dans fa Pyrito-
logic , dit que c'eft une pierre martiale , ftérile , corn-
pofée de parties arfénicales , & d'une terre qui ré-
lifte à l'action du feu. Il y entre aufli du foufre. On
la trouve fur -tout dans les mines de plomb & d'ar-
gent. Hoffmann regarde les blendes comme la matrice
de ces métaux. Il y en a de plulieurs cfpeces & cou-
leurs ; les plus ordinaires font noires , luifantes , &
reffcmblantes à la mine de plomb , quoi qu'elles ne
foient point fi brillantes ; on les appelle Jlerile nigrum ,
& en Allemand /'«c/i blende. Il y en a , outre cela , de
brunes , de rouges , de jaunes , de cendrées , & de
blanchâtres. Celles qui font jaunes ou de couleur
d'or , fe nomment katfcn gold, or de chat ; celles qui
font blanches s'appellent katfenjilber , argent de chat.
A la (impie inspection S: au poids , on eft tenté de
croire que ce minéral contient du métal : mais il ne
s'y en trouve jamais que peu ou point du tout. Ces
blendes déplaifent fouverainement aux Fondeurs ; car
non-feulement elles ne fourniffent rien de bon , mais
elles l'ont affamées des autres minéraux , & les ren-
dent réfraclaires. Le favant M. Pott a fait une differ-
tation très-étendue fur ce minéral.
Nonobftant toutes ces mauvaiies qualités des blen-
des , M. Marggraf a oblervé qu'il s'en trouve quel-
quefois qui contiennent une terre métallique propre
à produire du zinc, &C M. Pott a remarqué le pre-
mier que le cuivre mêlé avec la pfeudo-galene ou blen-
de pulvéi iféc , 6c des charbons pUcs mis au weujfej ,
Tome II,
BLE
181
prenoitune couleur fort approchante de celle du lai-
ton; d'où il conclut que la blende a de l'affinité avec
la pierre calaminaire.
M. Marggraf a pouffé fes recherches plus loin , &
a tiré du zinc d'une efpece de blende choifie , qui ve-
noit de Freyberg en Saxe. Voici comme il en donne
le procédé : il faut la purifier de la pyrite arfénicale
jaune qui y eft attachée, & après l'avoir pidvérifée
on la brûle petit-à-petit , en obfervant de pouffer le
feu fur la fin de l'opération , ce qu'on continue pen-
dant plufieurs heures, jufqu'à ce qu'on ne fente plus
aucune odeur , & que la matière ait perdu tout bril-
lant ; la blende ainfi brûlée , on en prend quatre onces
mêlées avec deux drachmes de charbon ; on met ce
mélange au feu dans des vaiffeaux fermés ; on aura
de véritable zinc 6 à 8 grains, & autour de 4 à 5
grains de fleurs de zinc.
« Ou bien on prend la même quantité de blende
» brûlée ; on verfe deffus 4 onces d'efprit de vitriol
» bien rectifié : le mélange s'échauffe ; & la digeftion ,
» fuivant la matière du zinc , fe mettra en folution
» avec quelques particules de fer ; il faut précipiter
» cette folution par une lefîîve de cendres gravelées
» jufqu'à ce qu'il n'aille plus rien au fond ; après que
» cette chaux aura été fouvent édulcorée dans l'eau
» chaude & defféchée , vous en prendrez un peu plus
» de 3 drachmes ; vous les mêlerez avec une demi-
» drachme de charbon ; vous y joindrez 2 drachmes
» & 2 fcrupules de petites lames de cuivre , arran-
» géant le tout couche fur couche dans le creufet ,
» que vous couvrirez de pouffiere de charbon , &c
» que vous mettrez au feu de fulion ; après quoi ,
» quand tout fera refroidi , vous trouverez le plus
» beau laiton. Si vous le voulez aufti , ce précipité
» mis dans des vaiffeaux fermés de la manière fuf-
» dite , peut être réduit en zinc ». foye^Zitic.
Ces deux procédés font de M. Marggraf, & fe
trouvent dans le 1 1 . vol. des Mémoires de l'Académie
royale dePruJfe , année IJ48, à la fin d'un mémoire
fur le zinc du même auteur. ( — )
BLESNEAU , ( Géog. ) petite ville de France i
dans le gouvernement d'Orléanois , dans la Puifaye,
fur le Loin.
BLEU , adj. Un corps paroit bleu , parce que fes
parties ont une fituation 6c une contexture qui les
rend propres à réfléchir les rayons bleus en plus
grande quantité que les autres. Voye\ Couleur.
Pour expliquer la couleur bleue du firmament,"
Newton remarque que toutes les vapeurs, quand
elles commencent à fe condenf er &c à s'affembler ,'
deviennent d'abord capables de réfléchir des rayons
bleus avant qu'elles puiflent former des nuages d'au-
cune autre couleur. Le bleu eft donc la première cou-
leur que commence à réfléchir l'air le plus net & le
plus tranfparent lorfque les vapeurs ne font pas par-
venues à la grofleur fuffifante pour réfléchir d'au-
tres couleurs.
M. de la Hire remarque, après Léonard de Vinci,"
qu'un corps noir quelconque vu à travers un autre
corps blanc & tranfparent, paroit de couleur bleue ;
ck c'eft par-là qu'il explique la couleur azurée du fir-
mament , dont l'immcnle étendue étant entièrement
dépourvue de lumière , eft apperçûe à travers l'air
qui eft éclairé & comme blanchi par la lumière du
foleil. Il ajoute que par la même raifon la fuie mê-
lée avec du blanc forme du bleu. Il explique par le
même principe la couleur bleue des veines lur la fur-
face de la peau , quoique le fang dont elles font rem-
plies foit d'un rouge foncé : car , dit-il , à moins que
la couleur rouge ne foit vue au grand jour , elle pa-
roit un rouge obfcur & qui approche du noir ; 6c com-
me elle fe trouve dans une lorte d'obfcurité dans les
veines , elle peut avoir l'effet de la couleur noire ,
qui copjidtfree à travers la membrane de la veine &C
N n
a8i
BLE
BLE
la blancheur delà peau , produit la fenfation èulieù.
f^oyei Noirceur. (O)
Bleu d'azur , (Chimie.) On peut tirer cette cou-
leur de l'argent : mais le lavant Boyle tk Henckel pré-
tendent avec raifon que cela n'arrive qu'en raifon du
cuivre qui le trouve ordinairement mêlé à ce métal.
Voici la façon la plus courte de le faire : faites fon-
dre dans de fort vinaigre diftillé , du fel gemme , du
fëj alkali , & de l'alun de roche ; fufpendez au-deflùs
de ce vinaigre des lames d'argent fort minces , enter-
rez le vafe où vous aurez fait fondre ces matières
dans du marc de raifin ; vous pourrez tous les trois
jours ôter de deflùs les lames d'argent la couleur
bleue qui s'y fera formée.
Autre manière. Mettez dans une livre de fort vinai-
gre des lames d'argent auffi minces que du papier ;
joignez-y deux onces de fel ammoniac bien pulvéri-
fé ; mettez le tout dans un pot de terre verniffé, que
vous boucherez avec foin ; enterrez ce pot dans du
fiimier de cheval pendant 1 5 ou 10 jours , vous trou-
verez au bout de ce tems les lames d'argent chargées
d'un très-beau bleu da^ur.
Autre manière. Prenez une once d'argent diffous
dansl'efprit denitre, 2 \ fcrupulesde fel ammoniac,
autant de vinaigre qu'il en faut pour précipiter l'ar-
gent , décantez le vinaigre , mettez la matière préci-
pitée dans un matras bien bouché; laiffez repofer
le tout pendant un mois , vous aurez un beau bleu
d'azur.
On tire aufli le bleu d'azur du cuivre, du mercure
& du plomb : pour le tirer du cuivre , on prend de
verd de gris & de fel ammoniac de chacun 3 onces ;
on mêle ces deux matières avec de l'eau où l'on a
fait fondre du tartre ; on en fait une pâte molle ; on
met le tout dans un vafe bien bouché qu'on laiflë
en repos pendant quelques jours, & l'opération eft
faite.
Autre. JEs uflum & lie de vin , de chacun 2 onces ,
de foufre une once ; réduifez en poudre Vas ujlum &
le foufre ; venez par-deffus du vinaigre ou de l'uri-
ne ; mettez le mélange dans un pot vernifïé , & laif-
fez-le bien bouché pendant 1 5 jours.
On peut tirer le bleu d'azur du vif-argent &c du
plomb de la manière fuivante : c'eft Agricola qui la
donne telle qu'il fuit. On prend 3 parties de vif-ar-
gent , 2 parties de foufre , & une partie de fel am-
moniac : on met au fond d'un plat de la litharge, &
l'on fait fondre par-deffus le foufre pulvérifé ; on y
jette enfuite le fel ammoniac en poudre & le vif-ar-
gent ; on remue toutes ces matières avec un petit
bâton , afin qu'elles fe mêlent exactement : on laiffe
refroidir le mélange qu'on réduit en poudre ; on met
cette poudre dans un matras bien luté qu'on laiffera
un peu ouvert ; lorfque le lut fera feché, on mettra
le matras fur un trépié & fur un feu modéré , & on
couvrira l'ouverture d'une lame de fer, & on en re-
gardera de tems en tems le deffous pour voir s'il ne
s'y forme plus d'humidité. Il faut alors boucher l'ou-
verture avec du lut; on pouffe le feu pendant une
heure ; on l'augmente encore jufqu'à ce qu'il s'élève
une fumée bleue; cela fait, on trouvera un beau bleu
au fond du matras. (— )
Bleu d'Émail, (Chimie.) appelle quelquefois
fmalte bleue , eft une couleur d'un grand ufage pour
les Émailleurs : voici la façon de la préparer fuivant
Neri , dans fon Art de la Verrerie. On prend quatre
livres de la fritte ou matière dont on fait l'émail. V.
V article ÉMAIL , 4 onces de faffre réduit en poudre ,
qui n'eft autre chofe qu'une préparation du cobalt ,
voyei V article COBALT , & 48 grains d'tfi uflum, ou
de cuivre calciné par trois fois : on mêle exactement
ces trois matières ; on les met au fourneau de verre-
rie, dans un pot verniffé en blanc ; lorfque le mélan-
ge eft bien entré en fonte , il faut le verlër dans de
l'eau claire pour le bien purifier ; on le remet en-
fuite fondre de nouveau ; on réitère l'extinction dans
l'eau , & la fonte deux ou trois fois ; l'on obtient de
cette façon un très-beau bleu d'émail.
Kunckel, dans fes remarques fur Neri, obferve
qu'il n'eft guère poffible de preferire exactement la
dofe de faffre qu'on doit employer pour faire le bleu
d'émail; il eft bon de commencer par en faire des
épreuves en petit, fuivant les différentes nuances
qu'on cherche : fi on trouve le bleu trop clair , il faut
augmenter petit à petit la dofe du faffre ; fi au con-
traire elle eft trop foncée , il faut remettre plus de la
fritte de l'émail. C'eft en fuivant ainfi certaines pro-
portions , qu'on peut produire dans l'émail les diffé-
rentes nuances du bleu. Si , par exemple , on vouloir,
un bleu d' 'émail céladon ou de couleur d'aigue-mari-
ne , il faudrait renverfer les dofes données ci-deffus,
& l'on prendroit alors 4 livres de la fritte d'émail,
2 onces d'œs uflum , & feulement 48 grains de faffre ;
on mêleroit bien ces trois matières : du refte on fui-
vroit exactement la méthode précédente , pour leur
fonte & leur purification. Il faut bien oblerver que
toutes ces opérations font fort délicates, & deman-
dent une attention toute particulière ; car pour peu
qu'on ne faffe point d'attention aux circonftances ,
il fe produit des effets tous différens de ceux qu'on
veut chercher; c'eft ce que Kunckel avoue lui être
arrivé dans l'opération du bleu d'émail céladon que
nous venons de donner. Il avoit éprouvé cette mé-
thode qui eft de Neri : mais comme elle ne put pas
d'abord lui réuffir , il crut que cet auteur s'étoit trom-
pé : ayant enfuite réitéré l'opération , & regardé la
chofe de plus près,il découvrit qu'elle n'avoitmanqué
la première fois, que parce qu'il n'avoit pas bien
pris fon tems pour retirer la matière du fourneau ,
qu'il l'avoit laiffée trop long-tems au feu. (— )
* Plus le grain d'émail eft gros , & plus le bleu eft
vif, & tire un peu fur le violet comme l'azur : mais
l'émail eft d'un plus beau bleu eclefle. Le grain d'azur
à poudrer eft li gros, qu'on ne peut l'employer que
très-difficilement , & feulement en détrempe ou à fref-
que, ou pour mettre dans l'empois ou amydon , avec
lequel il fe lie fort bien. On l'appelle a^ur à poudrer ,
parce que pour faire un beau fond d'un bleuturquin ,
on le poudre fur un blanc à l'huile couché médiocre-
ment épais & le plus gras qu'on peut. On l'y étend
aufîi-tôt avec une plume : mais il faut l'avoir bien fait
fécher auparavant fur un papier au-defî'us du feu. On
y en met affez épais ; &c on l'y laiffe jufqu'à ce que
le fond lbit bien fec , & ainfi le blanc en prend au-
tant qu'il peut. Enluite on le lëcoue, & on en ôte
tout ce qui ne tient pas au blanc , en le frottant lé-
gèrement avec une plume ou une broffe douce. C'eft
une couleur très-vive & qui dure long-tems , quoi-
qu'expofée à l'air & à la pluie.
L'émail qui eft d'autant plus pâle qu'il eft plus fin ^
fert dans la détrempe & à frefque : mais on ne s'en
fert guère à l'huile, parce qu'il noircit, à moins qu'il
ne foit mêlé avec beaucoup de blanc.
*Bleud'inde & Indigo: l 'indt eft plus claire &
plus vive que Yindigo, ce qui vient feulement du
choix de la matière dont on les fait ; car au fond c'eft
la même : c'eft la feuille de l'anil , voye^ Anil. On en
fait tremper les feuilles dans l'eau pendant deux jours
ou environ ; enfuite on fépare l'eau qui a une légère
teinture de bleu verdâtre : on bat cette eau avec des
palettes de bois durant deux heures, & l'on cefîe de
battre quand elle moufle. On y jette alors un peu
d'huile d'olive , en afpergeant. On voit aufli-tôt la
matière de Yinde qui fe fépare de l'eau par petits gru-
meaux , comme quand le lait fe tourne ; & l'eau étant
bien repofée , elle devient claire , & l'eau fe trouve
au fond comme de la lie, qu'on ramaffe après avoir
ôté l'eau, & qu'on fait lécher au foleil. L'inde fêtait
BLE
nvec les jeunes feuilles & les plus belles , Se Vbpdiga
avec le refte de la plante. Cette plante eroit dans les
Indes orientales & occidentales. Vinde eft ordinaire-
ment par petites tablettes de deux à trois lignes d'é-
paiffeur &c d'un bleu affcz beau : mais l'indigo eft
par morceaux irréguliers d'un bleu brun, tirant fin-
ie violet. Cette couleur eft excellente pour la pein-
ture à détrempe , tant pour le brun des bleux , que des
verds, en y mêlant pour le verd, de la teinture de
graine d'Avignon , ou du verd de veffie. On pourroit
fe fervir de Vinde à l'huile , & elle a beaucoup de
corps avec le blanc : mais elle fe décharge en féchant,
8c perd la plus grande partie de fa force ; c'eft pour-
quoi on n'en uie pas, à moins que ce ne foit en dra-
perie , qu'on glace d'outre-mer par-deffus. Voye^
GlACER.
Il y a un bUu de tourmfol qui peut être d'ufage dans
la peinture à détrempe & dans l'enluminure. Letour-
neiol eft une pâte qu'on forme ordinairement en pains
quarrés avec le fruit de la plante appellée heliotro-
pium tricocccn. Cette plante croît en France ; on met
tremper cette pâte clans l'eau ; & il vient une affez
belle teinture bleue. Il arrive aufîi qu'elle eft rouge,
ce qui eft occafionné par le mélange d'acide: mais
on lui rend fa couleur bleue , en y mêlant de l'eau
de chaux.
Bleu d'outre-mer, (Chimie.) la bafe de. cette
couleur eft le lapis la^uli; c'eft aufti ce qui la rend
fort chère , indépendamment des opérations qu'il faut
pour en tirer le bleu , qui ne laiffent pas d'être lon-
gues &c pénibles : on en jugera par ce qui fuit.
Pour connoître fi le lapis larjili dont on veut tirer
la couleur, eft d'une bonne qualité , & propre à don-
ner un beau bleu, il faut en mettre des morceaux fur
des charbons ardens, & les y faire rougir: s'ils ne fe
caftent point par la calcination , & fi après les avoir
laine refroidir , ils ne perdent rien de l'éclat de leur
couleur, c'eft une preuve de leur bonté. On peut
encore les éprouver d'une autre façon : c'eft en fai-
iant rougir des morceaux de lapis fur une plaque de
fer, & les jettant enfuite tout rouges dans du vi-
blanc très-fort ; fi la pierre eft d'une bonne ef-
pece , cette opération ne lui fera rien perdre de fa
couleur. Après s'être affûré de la bonté du lapis , voi-
ci comme il faut le préparer pour en tirer le bleu d'ou-
tre-mer. On le fait rougir plufieurs fois , & on l'éteint
chaque fois dans de l'eau , ou dans de fort vinaigre ,
ce qui vaut encore mieux ; plus on réitère cette opé-
ration , plus il eft facile de le réduire en poudre : ce-
la fait, on commence par piler les morceaux de la-
pis; on les broyé fur un porphyre , en les humectant
avec de l'eau , du vinaigre, ou de l'efprit-dc-vin ; on
continue à broyer jufqu'à ce que tout foit réduit en
une poudre impalpable; car cela eft très-effentiel :
on fait lécher enfuite cette poudre après l'avoir lavée
dans l'eau , Se on la met à l'abri de la poulîiere pour
en faire l'ulage qu'on va dire.
On fait une pâte avec une livre d'huile de lin bien
pure; de cire jaune, de colophone, Se de poix ré-
linc, de chacune une livre; rie maftic blanc, deux on-
ces. On fait chauffer doucement l'huile de lin; on y
mêle les autres matières, en remuant le mélange qu'on
fait bouillir pendant une demi-heure, après quoi on
paffe ce mélange à travers d'un linge, Se on le laiffe
refroidir. Sur 8 onces de cette pâte , on mettra 4 on-
ces de la poudre de lapis indiquée ci-deffus; on pé-
trira long-tems Se avec foin cette" mafte; quand la
poudre y fera bien incorporée, on verfera de l'eau
chaude par-deffus , & on la pétrira de nouveau dans
cette eau , qui fe chargera d'une couleur bleue ; on la
laiffera repofer quelques jours , jufqu'à ce que la cou-
leur foit tombée au fond du vafe ; enfuite de quoi on
décantera l'eau, Se en lahTant lécher la poudre, on
aura du bleu d'outre-mer.
Tome II,
BLE
283
Il y a bien des manières de faire la pâte dont nous
venons de parler: mais nous nous contenterons d'in-
diquer encore celle-ci. C'eft avec de la poix-réfîne ,
térébenthine, cire vierge, 5c maftic, de chacun fix
onces ; d'encens & d'huile de lin, deux onces, qu'on
fera fondre dans un plat verniffé, le refte comme
dans l'opération précédente. Voici la méthode que
Kunckel nous dit avoir fuivie avec fuccès pour faire
le bleu d'outre-mer.
Après avoir cafte le lapis la~uli en petits morceaux
de la groffeur d'un pois, on le fait calciner, & on
l'éteint dans du vinaigre diftillé à plufieurs reprifes ;
eniuitc on le réduit en une poudre extrêmement dé-
liée : on prend de cire vierge Se de colophone de cha-
cune moitié du lapis réduit en poudre ; on les fait fon-
dre dans une poelle, ou plat de terre verniffé : on y
jette petit à petit la poudre , en remuant Se mêlant
avec foin les matières; l'on verfe le mélange ainlî
fondu dans de l'eau claire, Se on l'y laiffe pendant
huit jours ; au bout de ce tems, on remplit de grands
vafes de verre, d'eau auffi chaude que la main peut
la fouffrir: on prend un linge bien propre, on pétrit
la maffe , Se Iorfque cette première eau fera bien co-
lorée , on retirera la maffe pour la mettre dans de
nouvelle eau chaude : on procédera de la même façon
jufqu'à ce que toute la couleur foit exprimée ; c'eft
cependant la couleur qui s'eft déchargée dans la pre-
mière eau , qui eft la plus prétieufe : on laiffe enfuite
repofer l'eau colorée pendant trois ou quatre jours ,
au bout defqucls on voit que la couleur s'eft précipi-
tée au fond du vafe. Une même maffe fournit trois
ou quatre fortes de bleu d'outre-mer: mais on n'en re-
tire que fort peu de la plus belle.
Il y a encore bien des manières de tirer du bleu
d'outre- mer : mais comme leur différence ne confifté
que dans la pâte à laquelle on mêle le lapis pulvérifé,
on a cru inutile d'en dire davantage. On reconnoît
fi le bleu d'outremer a été faliifié, non-feulement au
poids, qui eft moindre que celui du véritable, mais
encore parce qu'il perd fa couleur au feu. (— )
BLEU DE MONTAGNE, (Hi(l. nat. & Minéralogie.)
lapis armenus ou cœruleum montanum , en Allemand,
berg-blau. C'eft un minéral ou pierre foinle bleue, ti-
rant un peu fur le verd d'eau. Elle reffemble affez au
lapis Li'jili, mais avec cette différence qu'elle eft plus
tendre , plus légère Se plus caftante que lui , Se que
fa couleur ne rélifte point au feu comme la lienne.
Lorfqu'on fait ufage du bleu de montagne dans la pein-
ture, il eft à craindre que par La fuite la couleur n'en
devienne verdâtre. Cette pierre le trouve en France ,
en Italie , en Allemagne , Se furtout dans le Tirol. On
dit que celle qui vient de l'Orient ne perd point fa
couleur dans le feu. Le bleu de montagne contient beau-
coup de cuivre; celui qui eft léger en fournit moins
que celui qui eft pefant ; le premier contient un peu
de fer, fuivant M. Cramer. On dit qu'on contrefait
le bleu de montagne en Hollande, en faifànt fondre
du fouffre, 6c en y mêlant du verd de gris pulvérifé.
Pour employer le bleu de montagne dans la peinture ,
il faut le broyer, le laver enfuite, & en féparer les
petites pierres qui y font quelquefois mêlées.
Dans la Médecine On s'en eft lervi quelquefois , il
à une vertu purgative & émétique; il paroît cepen-
dant qu'il eft à propos de s'en dérier, attendu le eni-
vre qui en eft la bafe. (— )
BLEU de Prusse , eft une matière utile pour la
peinture. On l'appelle bleu de Prujj'e, parce que c'eft
en Pruffc que fa préparation a été trouvée, f-'oye^ le
premier volume des MifceUanta BerolincnRa , 1 ~ 1 o ;
Se les Tranfaêlions philosophiques en ont publie la com-
polîtioni clans les mois de Janvier & Février 1724.
Depuis, M. Geoffroy , de la faculté de Médecine &
de l'académie des Sciences de Paris, en a donné la
préparation dans les Mémoires de f Académie de 1725.
N n ij
284
BLE
La préparation du bleu de Prujfe eft une fuite de plu-
fieurs procédés difficiles. On a pluiicurs râlions pour
croire que ce bleu vient du fer. On fait que les diflo-
îutions de fer prennent dans l'eau une couleur bleue
par la noix de galle. L'acier bien poli & échauffé à un
feu modéré , prend une couleur bleue ; & il paroît par
cette expérience que cette couleur bleue vient d'une
fubftance graffe , que le feu élevé à la furface du fer.
On l'ait qu'il y a dans le fer une matière bitumineu-
se , qui n'eft pas parfaitement unie avec les autres
principes , ou qui y en" en trop grande quantité.
C'eft ce bitume qui doit être la bafe du bleu qu'on
veut faire : mais certainement il eft trop compact. ;
il faut le fubtilifer : or les alkalis font les diffolvans
naturels des bitumes.
Il y a apparence qu'on a effayé , pour faire le bleu
de Prujfe , plufieurs huiles végétales , & que c'a été
fans fuccès : on a aulîî éprouvé les huiles animales ;
& le fang de bœuf calciné & réduit en poudre a rem-
pli l'attente ; &: pour l'alkali , on y a employé le plus
piaffant , qui eft celui de tartre.
Le bitume du fer ell: attaché à une terre métalli-
que jaune ; cette terre altéroit la couleur bleue du bi-
tume , quelque raréfié qu'il fût : on le tranfportè de
deflus la terre jaune fur une terre blanche, qui eft
celle de l'alun ; &c alors la couleur bleue non-feule-
ment n'eft plus altérée par le fonds qui la loûtient ,
mais de fombre & trop foncée qu'elle étoit , elle de-
vient plus claire & plus vive.
Il faut obferver que ce bitume qu'on veut avoir,
on ne le cherche pas dans du fer en fubftance ; mais
dans du vitriol où le fer eft déjà très-divifé.
Il y a donc trois liqueurs nécelTaires pour faire le
lieu de Prujfe : une leftîve de fang de bœuf calciné
avec le fel alkali ; une diffolution de vitriol , & une
diffolution d'alun.
De toutes ces opérations , il réfulte une efpcce de
fécule d'une couleur de verd de montagne , & qui par
l'efprit de fel devient dans l'inftant d'une belle cou-
leur bleue foncée ; & c'eft-là le bleu de Prujfe. Cet ar-
ticle eft de M. Formey,fecrétaire perpétuel de l'aca-
démie royale de Pruffe.
M. Maloiiin , dans un mémoire qu'il a donné à l'a-
cadémie en 1745 , dit, qu'il a tiré un bleu de Prujfe
du mélange de la crème de chaux , & du fel alkali du
tartre ; que ce bleu étoit Semblable à celui qui lui a
donné Peau-mere du fel de Seignette par l'efprit de
vitriol.
Il faut remarquer que M. Maloiiin avoit trouvé
auffi du fer dans la chaux ; & il dit que la noix de
galle épineufe peut tirer de i'eau de chaux une tein-
ture bleue.
Le même auteur rapporte auffi dans ce mémoire,
qu'ayant fait mettre dans un creulet entre les char-
bons ardens , de la chaux vive & du fel marin mêlés
enfemble , il fortit de la matière contenue dans le
creufet, une flamme bleue qui répandit une odeur
aromatique. Il apperçut cette flamme lorfqu'il dé-
couvrit le creufet; & il y avoit un quart d'heure que
îe creufet étoit rouge lorfqu'il le découvrit. ( M )
Le bleu entre dans prefque toutes les parties fuyan-
tes d'un tableau ; l'on s'en fert auffi dans les ciels ,
la mer, &c.
On diftingue différentes nuances de bleu ; le bleu
ilanc , bleu mourant , bleu célejle , bleu turquin Joncé ,
bleu de Perfe entre le verd & le bleu , bleu d'enfer ou
noirâtre , bleu de forge , bleu artificiel. Il n'y a guère que
îes Teinturiers qui différencient ainfi leurs bleus ; les
Peintres ne les diftinguent que par ces expreffions :
ce bleu ejl plus tendre que celui-ci ; ces bleus J ont de dif-
férent ton, ne font pas du même ton.
Bleu tenant lieu d'outremer dans le lavis. Pour fup-
pléer à Y outremer qui eft d'un trop grand prix , & qui
a trop de corps pour être employé en lavis , on re-
BLE
cueille en été une grande quantité de fleurs de bluetà
qui viennent dans les blés ; on en épluche bien les
feuilles en ôtant ce qui n'eft point bleu : puis on met
clans de l'eau tiède de la poudre iïalun bien fubtile.
On verfe de cette eau imprégnée d'alun dans un mor-
tier de marbre , on y jette les fleurs ; & avec un pi-
lon de marbre ou de bois , on pile jufqu'à ce que le
tout foit réduit de manière qu'on puifle aifément en
exprimer tout le fuc , que l'on pafle à travers une toi-
le neuve , faifant couler la liqueur dans un vafe de
verre , où on a mis auparavant de l'eau gommée ,
faite avec de la gomme arabique bien blanche. Re-
marquez qu'il ne faut guère mettre d'alun pour con-
ferver l'éclat , parce qu'en en mettant trop on obf-
curcit le coloris. On peut de même faire des couleurs
de toutes les fleurs qui ont un grand éclat , obfervaht
de les piler avec de l'eau d'alun, qui empêche que la
couleur ne change ; pour rendre ces couleurs porta-
tives , on les fait lécher à l'ombre , dans des vaiffeaux
de verre ou de fayence bien couverts. (/?)
Bleu , officier bleu (Marine ) lieutenant ou enfeigni
bleu ; c'eft un officier que le capitaine d'up vaiffeau
crée dans ton bord pour y fervir, faute d'officier
major. (Z)
BLEU , METTRE AU BLEU ( en terme de Cuifine}
c'eft une façon d'accommoder le poiilon en le fai-
fant cuire avec fes écailles dans du vin blanc, avec
de l'oignon , des feuilles de laurier , du clou de gi-
rofle , fel & poivre , Se autres épices : on le lert
ainli préparé , avec de l'huile 6c du vinaigre dans un
vafe à part.
* Bleues, (Cendres) font d'un très-grand ufage
dans la peinture à détrempe ; il y en a qui font très-vi-
ves en couleur: mais à l'huile elles noirciffent & de-
viennent verdâtres; car elles tiennent delà nature du
verd de gris ; & de plus quand on les met à l'huile,
elles ne paroiflent pas plus brunes ou foncées en cou-
leur. On les trouve enpierre tendre dans les lieux où
il y a des mines de cuivre ou de rofette , & l'on ne
fait que les broyer à l'eau pour les réduire en poudre
fine. Cette efpece de bleu doit être employé fur-tout
dans la peinture en détrempe, qu'on ne voit qu'aux
lumières , comme les décorations de théâtre ; car
quoiqu'on y mêle beaucoup de blanc , il ne laiffe
pas de paioître fort beau. Ii tire pourtant un peu fur
le verd , tout au contraire de l'émail qui eft fort vif
au jour, & qui paroît gris aux lumières.
On trouve quelquefois des cendres bleues , qui pa-
roiflent auffi belles que Y outremer : mais on connoît
bien-tôt que ce ne font que des cendres , fl on les mêle
avec un peu d'huile ; car elles ne deviennent guère
plus brunes qu'auparavant , au contraire de l'outre-
mer qui devient fort brun. Au feu elles deviennent
noires.
BLEUIR un métal, c'eft l'échauffer jufqu'à ce qu'il
prenne une couleur bleue ; ce qui eft pratiqué par
les Doreurs , qui bleuiffent leurs ouvrages d'acier
avant que d'y appliquer les feuilles d'or ou d'argent.
Koye{ DOREUR , & la fig. f). PI. du Doreur. Vignette.
BLEUISSOIR , f. m. outil d'Horlogerie. Vcye^ Re-
VENOIR.
BLEY-GLANTZ , ( Minéralogie ) ou en Latin ga-
lena tejjulata j c'eft le nom Allemand d'une mine de
plomb ainli décrite , par M. Cramer , dans fa Doci-
rrçafie : « c'eft une mine de plomb fort riche, compo-
» fée d'un affemblage de petits cubes équilatéraux
» & de parallélépipèdes oblongs , formés par de
» petites lames minces , polies & brillantes : cette mi-
» ne eft fort pelante, &c fe calîe aifément. La fonte
» en eft ailée ; cependant elle demande un feu plus
» fort que le plomb même : la raifon en eft l'abon-
» dance de Soufre, qui eft caché dans cette mine &
>» qui en fait prefque un quart. Si on s'y prend comme
» il faut, un quintal de cette mine doit donner 65
B L I
» à 70 livres de plomb ». Il s'en tire auffi quelquefois
3 ou 4 onces d'argent ; s'il s'y en trouvoit davanta-
ge , on aurait lieu de fbupçonner une veine d'argent
dans le voifinage. (— )
• BLEYME, f. f. ( Maréchalerie ) maladie ou inflam-
mation de la partie antérieure du f àbot vers le talon ,
entre la foie &c le petit pie.
Il y a trois fortes de bleymes ; de fiches , d'encornées ,
qui ne font fort fouvent qu'une fuite des premières ,
& de foulées.
On connoît les bleymes en général par une petite
rougeur pareille à du fang extravafé , qui fe trouve
entre la foie & le petit pié ; on ne les diilingue que
lorfqu'on blanchit le pic en le parant : cette rougeur
n'eft autre choie qu'un lang extravaié.
Les bleymes fechc s font ainfi nommées à raifon de
leur caufe , laquelle eft intérieure ; car elles provien-
nent de la trop grande féchereffe du pié.
• Les bleymes foulées ont une caufe extérieure; car
elles proviennent de ce qu'il fe lera enfermé de pe-
tites pierres ou du gravier entre le fer & la lole , ou
bien de ce que le fer aura porte fur la foie , qu'il au-
ra foulée & meurtrie en quelque endroit : les pies plats
font fujets à ces fortes de bleymes , car le gravier &
le fable s'enferment aifément entre le fer ce la foie.
Le remède eft de parer le pié pour découvrir la
bleyme, 6c d'ôter toute la foie meurtrie, fi la matière
n'y eft pas encore formée ; fi elle y eft formée , il faut
l'évacuer, puis panier le trou ou la plaie comme
une enclouure : le mal dans fon commencement fe-
ra bien-tôt guéri ; s'il eft grand , les remèdes que nous
propofons en viendront à bout avec le terr.s. Il y a
dans les manèges des chevaux long-tems de féjour
pour ces bleymes : mais l'huile de merveilles & lem-
miellure rouge , quand on a donné jour à la bleyme
par-deflbus, guériffent bien-tôt ce mal. (/^)
BLEY-SACK, (Métallurgie & Minéralogie) on ap-
pelle ainfi en Allemand une partie de plomb , qui n'a
pas été féparée de l'argent à la coupelle ; parce que
le régule eft venu à fe durcir trop tôt : ce défaut vient
de ce que le feu n'a pas été affez fort pour réduire
tout !e plomb en litharge. M. Cramer obferve dans
fa Docimajîe, que lorfqu'on purifie l'argent à la cou-
pelle, le plomb agit comme diflblvant lur ce métal;
c'eft pourquoi il eft néceffaire d'augmenter le feu à
mefure que le plomb le détruit 6c le réduit en lithar-
gc (-)
BLEfE,f. f. bhtum, ( Hifl. nat. bot. ) genre de
plante à fleur fans pétale , compofée ordinairement
de trois étamines qui fortent d'un calice découpé en
trois parties ; le piftil devient dans la fuite une fe-
mence oblongue pour l'ordinaire , renfermée dans
Une capfule qui a fervide calice à la fleur, & reflem-
blante a une vciîic. Tournefort , Infl. rei herb. Voyet
Plante. (/)
BLEY-SWEIFF, ( Minéral. ) on donne ce nom
dans les mines d'Allemagne à une cfpece de mine de
plomb fulphureufe 6c arfénicale ; elle eft jaune, mê-
lée de taches cendrées & noirâtres, & graffe au tou-
cher : elle fe trouve à l'entrée des Gangues. Ce mi-
néral rcftcmblc affez au plomb pur : mais il eft très-
difficile d'en tirer du métal par la fonte. (— )
BLIN, RELIN , f. m. ( Marine, ) c'efl une pièce de
bois quarréc où plufieurs barres lônt clouées en tra-
vers & à angle droit, enfolte que plufieurs hommes
en la maniant enfcmblc , peuvent agir de concert
pour faire entrer des coins de bois fous la quille d'un
Vaiffeau lorfqu'on veut le mettre à l'eau. On fe fert
auflî du blin pour afl'embler des mâts de plufieurs
pièces. II y a des blins qui ont des cordes paffées au
lieu de barres , afin de pouffer les coins dans renfon-
cement du deflbus du vaiffeau ; à quoi le blin à bar-
res ne ferait pas propre. ( Z )
' Blin, c/;j~ Us PaJJ'ementiers & autres ouvriers en foie,
b l r
28
>
eft une pièce de l'ourdifîbir échancrée dans toute fa
hauteur , jufte à l'épaiffeur du pilier de la lanterne
dans laquelle elle doit entrer, Yoy. Lanterne de
l'Ourdissoir. Cette échancrure eft garnie de deux
petites arrêtes , pour entrer jufte dans les rainures
du pilier de devant de la lanterne , & pouvoir par ce
moyen defeendre & monter le long de ce pilier fans
fautiller ; ce qui ne pourrait arriver fans caufer de
grands inconvéniens, que l'on évite encore en frot-
tant de favon les rainures qui lui fervent de condui-
te. Les boutons qui font fur l'un des bouts du blin
& qui peuvent tourner, fervent à donner plus de fa-
cilité pour le paffage des foies à mefure qu'elles s'en-
roulent fur l'ourdifibir. Ce blin porte encore fur Pcx»
trémité de devant une petite verge de bonis ou d'é-
mail , furquoi parlent aulfi les ioies que l'on our-
dit ; par ce fecours elles ne font point en danger
de s'écorcher contre la vive arrête du blin. Le blin
eft chantourné & évuidé par l'un de fes bouts, &
quarré par l'autre ; ce qui n'eft point ici pour l'orne-
ment. Comme ce bout chantourné eft plus long ciue
l'autre , puifqu'il faut qu'il reçoive toutes les loies
qui paffent fur lui , il peferoit trop s'il étoit en plein
comme l'autre bout , & conféquemment il inclineroit
de ce côté ; ce qui nuirait notablement à fa defeente :
on a donc été obligé de le chantourner ainfi pour le
rendre de poids égal à l'autre bout , & conferver par-
là le parfait équilibre qui lui eft abfolument nécef-
faire. Après avoir donné fa defeription , il faut expli-
quer la façon de le mettre en état de fervir. Il porte
une petite poulie qui répond vis-à-vis celle du haut
du pilier de devant de la lanterne, une ficelle dont un
bout eft fixé fur la broche de l'arbre du moulin &
qui eft affez longue pour faire plus de deux fois la
hauteur de l'ourdiflôir ; cette ficelle , dis-je , vient
palier fur la poulie du pilier de devant de la lanterne,
enfuite elle paffé ions la poulie dn blin, ck(e terrrîine
par fon autre bout près de la poulie du pilier , où ce
bout eft fixé par le moyen d'une boucle que l'on fait
à la ficelle , & qui s'attache à un petit clou qui elî fur
lcvtremité de ce pilier. En faifant tourner le mou-
lin , il faut que ce blin defeende à mefure que la cor-
de le déroule de deffus la broche ; & en le tournant
en fens contraire, il remonte de même. Le blin ar-
range par ces différentes montées 6c defeentes les
foies que l'on ourdit ; & cela fans confulion , puif-
que pendant que le moulin fait un tour , le blin mon-
te affez pour donner de l'éloignementà ces foies , 6c
leur faire prendre la figure lpirale qu'elles doivent
avoir néceflaircment par ce mouvement du blin ;
& c'eft à quoi il eft uniquement deftiné. Il faut ob-
ferver que la ficelle du blin partant de la broche d'en-
haut , doit entrer fous la poulie du blin du côté du pi-
lier ; ce qui aide encore à la direction de fon mouve-
ment afeendant & delcendant. Si l'on vouloit ourdir
à claire voie , c'eft-à-dire , que les tours en fpirale
fuffent plus écartés les uns des autres , il n'y aurait
qu'à fixer le bout de la ficelle à la brochette de la
poulie du blin , qui ferait alors hors d'état de mou-
voir: alors cette corde n'étant plus double, doit fe
dérouler ou s'enrouler de même qu'elle failbit aupa-
ravant ; mais le blin defeendraou montera avec une
viteffe double de la première , ce qui produira l'effet
déliré. / (JvrOl'IlDIR & OURDISSOIR.
HLINDE , i. f . en terme de Fortification , eft une for-
te de détente faite communément d'ofier ou de bran-
ches d'arbres entrelacées , & pliffeesde travers en-
tre deux rangs de bâtons d'environ la hauteur d'un
homme , plantés en terre à la diftance de quatre ou
cinq pies l'un de l'autre. On s'en fert particulière-
ment à la tète de la tranchée, lorfqu'elle s'étend de
front vers les glacis. Les blindes fervent à mettre les
travailleurs à couvert, & empêchent l'ennemi de
voir leurs ouvrages.
a86
B L O
On en couvre anfll le deffus des fapes dans les en-
droits dangereux , c'eft-à-dire , à portée des gre-
nades & des pierriers de l'afliégé. ( <2 )
BLITUM-ALBUM , off.c. Park. ( Médecine. ) les
feuilles qui font la feule partie dont on faffe ufage ,
encore très-rarement , font de la clafie de l'arroche
& de fa nature : elles fe mangent parmi les autres
légumes ; elles lâchent le ventre , fans être pour cela
purgatives ; elles rafraîchiffent 6c amolliiîènt, & on
les t'ait entrer dans les clyfteres. L'ulâge de cette
plante eft fort rare. ( N )
BLOC , f. m. fignifîe un grand morceau de mar-
bre ou de pierre tel qu'il fort de la carrière , avant
que la main de l'ouvrier lui ait donné aucune for-
me. Voyc^ Marbre.
Bloc d' échantillonna celui qui étant commandé à
la carriere.y eft taillé de certaine forme & grandeur.
Bloc , en termes de Commerce, le prend pour plu-
fiers pièces ou fortes de marchandiles coniidérées &
eftimées toutes enièmble. Ainii l'on dit qu'un mar-
chand a acheté toutes les marchandiles d'une bouti-
que ou d'un magafin en bloc.
On dit auffi faire un marché en bloc & en tâche ,
lorique fans entrer dans le détail de ce que chaque
choie doit coûter en particulier , on convient d'un
certain prix pour un ouvrage ou une entreprife; ain-
fi Ton dit : j'ai fait marché en bloc & en tâche avec ce
voiturier pour m'amener mes marchandiles franches
de tous droits. (G)
BiOC, BLOT , TÈTE DE MORT, CHOUQUET ,
en Marine, voye^ CHOUQUET.
Bloc , Roc-d'issas, Sep-de-drisse, en Mari-
ne, voyc^ Sep-de-drisse. (Z)
Bloc , f. m. en Fauconnerie , c'eft ainfi qu'on nom-
me la perche fur laquelle on met l'oifeau de proie :
elle doit être couverte de drap.
Bloc , terme d'Argenteur, fe dit d'un cercle ou bou-
let de canon , &c. chargé de ciment , fur lequel on
monte une petite pièce pour la brunir plus à Ion a.-
k.FoyeiPl.I.fig.i.
BLOC de branche , en terme de Fourbijfeur , c'eft un
mandrin de bois formant un demi-cercle , à l'extré-
mité duquel font deux paftâges pris lur le bois pour
y introduire l'étrier , qui relferre la branche lur
le Woctant & lipeu qu'on veut. ^oye^Jig. i. Plan, du
Fourbijjèur.
BLOC de plaque , en terme de Fourbijjèur, eft un man-
drin de bois large , rond , creux , ou convexe , &
percé dans le milieu pour recevoir une branche de
fer vilTée qui y affermit l'ouvrage plus ou moins
par le moyen d'un écrou. Voye^Pl. l.fig. <). du Four-
bijjèur.
Blo C , en terme de Rafineur defucre, n'eft autre cho-
fe qu'un billot de bois élevé fur trois ou quatre pies ,
fur lequel on frappe doucement la forme pour en
faire iortir le pain , & conlidérer l'état où eft la tête.
Voy. Plamoter , Pain , Tête , Sucre.
Bloc, en terme de Tabletier-Cornetier , eft une ef-
pece d'auge dont le dedans eft taillé de manière à
pouvoir contenir des plaques entre lelquelles on ap-
platit les ergots à coup de maillet. Le bloc ne diffère
de la preffe , qu'en ce qu'il n'a ni vis ni boulon de
fer. Fqye^Pl. I.Jig. à.
BLOC AGES , 1. m. pi. en Architecture , ce font de
menues pierres ou petits cailloux & moellons qu'on
jette à bain de mortier pour garnir le dedans des
murs , ou fonder dans l'eau à pierres perdues : c'eft
ce que Vitruve appelle cœmenta , ainfi que toute
pierre qu'on employé fans être équarrie. (P)
BLOCHET , f. m. c'eft , en Charpenterie , une pie-
ce de bois qui fe met fur les plates-formes , entaillée
dedans , de l'épaiffeur du mur lur lequel elle eftpo-
fée , fur lequel pane le pié des formes , év où elles
font aflemblées,
BLO
BloCHETS de recrue , ce font ceux qui font droitç
dans les angles.
* BLOCKZIEL , ( Géog. ) petite ville fortifiée de
la province d'Overiffel , fur la rivière d'Aa.
BLOCUS, f. m. (Art milit.) manière d'afiiéger
une place qu'on veut prendre par famine , en bou-
chant tous les pafî'ages , & le laifillant de toutes les
avenues , de façon qu'aucun renfort , ni provifions ,
ni autre choie , ne puiffent palier. Voye?^ Siège.
Ce mot vient de l'Allemand blochus , ou blockhau-
fe, boulevard, oumaifon de bois; ou du Gaulois bio-
cal, barricade ; quoique d'autres le dérivent du Latin
buculare, boucher un paffage.
Le blocus n'eft point un liège régulier ; car on n'y
fait pas d'attaque, & on n'ouvre pas de tranchée:c'ell
la cavalerie qui forme le blocus..
L'objet du blocus eft d'obliger ceux qui font enfer-
més dans une ville de confommer toutes leurs pro-
vifions de bouche , pour les contraindre de fe rendre
faute de fubliftance.
On voit par-là qu'un blocus doit être fort long ,
lorlqu'une place eft bien munie : aulîi ne prend-t-on
guère le parti de réduire une place par ce moyen ,
qu'on ne foit informé que fes magalins font dégar-
nis , ou bien lorique la nature & la fituation de la
place ne permettent pas d'en approcher pour faire
les attaques à l'ordinaire.
Les blocus fe forment de deux manières : Ample-
ment, en fortifiant ou occupant despoftes à quelque
diftance de la place , principalement fur les bords
des rivières, au-deflùs & au-delfous , & fur les grands
chemins & les avenues ; dans tous ces poftes on tient
de l'infanterie & des corps de cavalerie , leiquels fe
communiquent entr'eux pour veiller à ce qu'il n'en-
tre point de vivres dans la place bloquée , où les be-
loins augmentant tous les jours , en font deferter la
garnifon , y caufent des murmures & des fouleve-
mens , qui fouvent forcent le gouverneur à fe rendre
par capitulation.
Le lùccès de cette efpece de blocus fe fait Iong-
tems attendre ; parce qu'il eft prefqu'impofîïble qu'il
n'entre toujours quelques vivres , qui font au moins
prendre un peu de patience aux affiegés. Son avan-
tage eft bien plus fenlible , quand après avoir ainii
bloqué une place de loin pendant un tems conlidé-
rable , on en forme enfuite le fiége , parce qu'on la
trouve plus aifément dépourvue de bien des choies
nécelTaires à fa défenfe.
L'autre efpece de blocus fe fait de plus près , par
des lignes de circonvallation & contrevallation dans
lelquelles l'armée le place, lorique , par exemple ,
après le gain d'une bataille , l'ennemi fe feroit retiré
dans une ville qu'on fauroit n'être pas bien pour-
vue de vivres, & qu'on préfume de pouvoir affamer
en peu de jours.
Ce cas n'arrive pas ordinairement; parce qu'il fe-
roit trop imprudent à un général battu de s'expofer à
perdre le refte de fon armée, en s'enfermant ainii
dans une mauvaife place. Ainfi l'ulâge des blocus fe
trouve beaucoup plus fouvent dans la première efpe-
ce que dans la féconde. Mémoires de M. de Feuquieres.
(<2) .
B L 0 1 S , ( Geog. ) ville de France , capitale du
Blaifois, fur la Loire. Lon. 18. 3o. So. lat. 4J. Ji.
19.
' BLONDE , f. f. ( Commerce. ) ouvrage de foie fait
à l'oreiller par le moyen des fufeaux , de la même
manière que la dentelle, à laquelle ilrefTemble beau-
coup ; la blonde travaillée n'en différant fouvent
que par la matière. Voy. Blonde travaillée. La
loie qui entre dans les blondes eft de deux efpeces ,
par rapport à iâ qualité : la première eft la plus grof-
fe, & s'employe dans les fonds. PôyeçFoNDS. La fé-
conde eft la plus fine , ôi feit à faire les grillages.
BLO
Voye{ Grillage. Celle-ci fe double toujours; cel-
le-là prefque jamais , ou du moins qu'en deux fils.
On employé quelquefois encore de la foie montée ,
qui n'eft autre choie qu'une foie ou deux entortillées
au rouet fur une autre , comme l'or & l'argent fur la
foie. Cette opération fe fait à Lyon: les Blondiers
font obligés d'y envoyer leur foie , ou d'en tirer tou-
te montée. Jai dit quelquefois ; & c'eft en effet très-
rarement qu'on fe fort de foie montée , parce que cor-
donnée comme elle eft , les ouvrages qu'elle produi-
roit feroient lourds, cordonnés eux-mêmes, oc n'au-
roient point d'ceil : d'ailleurs , ces foies coûtant une
piftole déplus que les autres , les ouvriers n'en mèt-
rent point en œuvre qu'on ne le leur commande. Il
faut remarquer encore que les foies qui entrent dans
la blonde font d'une qualité bien inférieure à celles
dont on fait les étoffes : celles-ci auroient le même
inconvénient que les foies montées , -toutefois dans
un degré proportionnel à la nature particulière de la
foie.
Les Blondiers achètent leurs foies en moches ( V.
Moche), compofées de trois parties égales, cha-
cune delquelles l'eft de cinq écales (Voy. Ecales ) ,
qui elles-mêmes ont encore leurs centaines , pour en
faciliter la divifion ou découpure. Les moches fépa-
Técs , chaque tiers en cinq parties, on met celles-ci
fur des tournettes ( Voye?^ Tournette ) pour les
découper. Cette opération eft la plus difficile de tout
l'apprêtage. Elle confifte à trouver les différentes
centaines , qui font à la vérité dans une écale , mais
indiftin&es , & fans ligature comme on en voit dans
un écheveau de fil ou foie retordue. Le meilleur
moyen d'y parvenir , c'eft de prendre d'abord peu
de foie , en la tournant autour des tournettes , d'aller
toujours en augmentant jufqu'à l'entière divifion. On
ne fe fait point une peine de caffer quelques brins de
foie qui y feroient obftacle : cela ne porte point un
grand préjudice, attendu que dans le dévidage on
noue tous les bouts , & que les nœuds n'empêchent
point de travailler la foie. Dès en commençant, on
voit à la réparation plus ou moins nette qui fe fait ,
fi l'on a rencontré la centaine ; ce qui n'empêche pas
qu'on ne foit quelquefois obligé de recommencer ,
quoique les premiers tours n'ayent eu que peu d'em-
barras. Les centaines enfin trouvées par cette décou-
pure,on les lie chacune à part vers leur milieu,de peur
qu'elles ne fe mêlent , & on les couvre afin qu'elles
ne s'éventent point : on les dévide enfuite autour des
tournettes ou d'un dévidoir , au choix du fabri-
quant , fur des bobines montées "fur un roiiet à la
main. Ceci n'a rien de difficile , & ne demande que
de la patience. Un ouvrier , quand la foie eft bonne ,
peut en dévider cinq onces, & gagner quarante fous
par jour ; fouvent aufli quand elle eft bien pleine de
morvolant ( t'oye^ Morvolant ) , il ne gagne que
huit fous. Cela fait , on double feulement celle qui
eft deftinée à faire le toile, en quatre, cinq, fix ou
fept brins , félon que la foie eft plus ou moins fine.
(Voye-{ DOUBLER. ) Enfin le fabriquant la donne aux
ouvriers qui en chargent leurs fufeaux ( V. Char-
ger ) , & exécutent les deffeins qu'on leur a four-
nis , les uns fur un oreiller plat , les autres fur un
oreiller à roue, (/^oy^ Oreiller à roue.) Les fu-
feaux chargés de filets font plus gros, afin qu'on les
reconnoiffe plus ailément. ( Voye^ Filet. ) Le refte
de l'ouvrage s'achève en fixant la foie aux angles ,
aux bords , & aux autres parties du deffein où il eft
néceffaire de la fixer, par des épingles jaunes. Cette
couleur n'ell pas effcnticlle à l'ouvrage , mais à l'ou-
vrière , qui paye ces fortes d'épingles moins cher
que les autres. La texture is: le jeu des fufeaux le
font l'une & l'autre comme dans la dentelle de fil.
{ Foyei Dentelle.) On diftingue dans la blonde
trois parties ; le réfeau , le grillage ou plein , & le
BLO
287
toile. Voyei ces mots <* ^eurs articles. Dans tout cela on
imite les différentes dentelles d'Angleterre , de Ma-
lines , de Valenciennes, &c. Les blondes font parfai-
tes & imparfaites en deux manières ; parfaites , par
une texture régulière, fine , & qui a de l'éclat, & par
la propreté & la blancheur qu'on a fû conferver à la
foie ; imparfaites, par les deux contraires. Le défout
de propreté & de textures égales diminue la moitié
du prix d'un ouvrage , parce qu'il n'en eft pas des
blondes comme des dentelles, qui fe blanchiffent. Il
y a des blondes de fantaijïe , & des blondes travaillées :
les blondes de fantaijie en général , font celles d'un
moindre prix , &c qui font fujettes au caprice de la
mode 6c des goûts : celles-ci fe divifçnt encore en
différentes branches particulières , qui tantôt reçoi-
vent leur dénomination de la reffemblance qu'elles
ont avec certains objets naturels ou imités , plantes,
animaux , ouvrages , &c. tantôt des evenemens &
des faifons oii elles paroiflent ; tantôt enfin de la ré-
putation & de la vogue feules que s'eft acquis le fa-
briquant. Mais pour découvrir cette reffemblance,
quand il y en a , il faut toujours regarder le toile ou
les fleurs, dont elle dépend uniquement.
Nous en allons nommer quelques-unes qui fervi-
ront d'exemples.
Berg-op-^oom , ce font des blondes dont le deffein
commença à paraître dans le tems que cette vdle fut
prile ; & le bruit que fît ce fuccès de nos armes , fuffit
pour donner ce nom à une infinité de chofes.
Chenille , eft une blonde dont le principal toile eft
environné d'un brin de chenille, Pcye{ Chenille.
Perjil , eft une blonde compqfée d'une infinité de
petits toiles , affez approchans de la figure d'une
feuille de perfil.
Points à la reine , eft une blonde qui forme plufieurs
quadrilles pleins &c vuides , dont les premiers font
compofés de trois petites branches diftincf es,& à plu-
fieurs brins , qui montent & defeendent obliquement
en fe traverfant deffus & deffous vers leur milieu ,
& foûtenues en-haut & en-bas fur deux points tranf-
verfaux qui régnent dans toute la pièce.
Pouce du roi , eft une blonde dont le grand toile re-
présente un éventail ouvert & fendu à la bafe par le
milieu.
Privure , eft un toile continué qui ferpente entre
deux rangs de grillages ou de pleins : on l'appelle en-
core la couleuvre.
Enfin la blonde travaillée eft celle dont le deffein
correct & bien choifi , joint à une exécution déli-
cate , forme une pièce dont la beauté permanente eft
avouée indépendamment du caprice , de la mode &C
des circonftances. Les blondes travaillées imitent fort
les dentelles , & font auffi chères qu'eftimées.
Quand toutes ces différentes fortes de blondes n'ont
pas affez de luftre en fortant des mains de l'ouvrière ,
on les repaffe avec une bouteille de verre femblable
à celle dont fe fervent les blanchiffeufes de bas de
foie , en obfervant d'y aller fort légèrement , trop de
pefanteur &c de répétitions les rendant trop liffes &
trop Iuifantes.
Nous finirons cet article par deux remarques : l'une
concernant le deffein , furquoi nous dirons que celui
qui a paru le plus agréable , même après en avoir
fait des effais , fournit fouvent des pièces bien moins
belles que celles qu'on en attendoit ; auffi les mar-
chands ont-ils foin de ne pas monter une grande quan-
tité de pièces fur un deffein nouveau , avant que le
goût du public ait confirme & fixé le leur. La fé-
conde remarque que nous ayons à faire , eft que quoi-
que les blondes foient ordinairement d'une foule cou-
leur , c'eft-à-dire blanches , on ne laiffe pas d'en faire
qui font mêlées de noir , de rouge , 6-c. pour garnir
desrobbes de dames, 6-c. />. .- Dentelle.
Les marchands de modes employent beaucoup de
a88
BLU
blonde pour garnir les robbes , les coëffures , les man-
chettes , &c les palatines des femmes.
Il y en a deux lbrtes relativement à la matière ; la
blonde de fil , qui reffemble beaucoup à la dentelle ;
& la blonde de foie , qui n'eft pas à beaucoup près lî
bonne à l'iilè, mais qui fied beaucoup mieux.
BLONITSA, (Géog.) petite rivière deSiléfie, dans
la principauté d'Oppeln : elle fe jette dans l'Oder.
* BLONYE ou BLONICZ , ( Géog. ) grande ville
de la grande Pologne , dans le palatinat de Rava.
BLOQUER , en termes de rivières, c'eft remplir une
fondation de moellons fans ordre , comme dans l'eau
quand on rétablit le dégravoyement d'une pile qu'on
a entourée auparavant de pilotis & de pals à plan-
ches.
Bloquer, faire un blocus, Voye^ Blocus.
Bloquer , eft , en Architecïure , conitruire &C lever
des murs de moellon d'une grande épaiffeur le long
des tranchées , fans les aligner au cordeau , comme
on fait les murs de pierres lèches : c'eft aufli remplir
les vuides de moellon & de mortier fans ordre , com-
me on le pratique dans les ouvrages qui font fondés
dans l'eau. (Z5)
Bloquer , Blocquer , en Marine; c'eft mettre
de la bourre fur du goudron , entre deux bordages ,
quand on fouffle ou que l'on double un vaiffeau. (Z)
Bloquer , terme a" Imprimerie ; c'elt en compolant
mettre à deffein dans fa compofition une lettre ren-
verlée , & exactement de la même épaiffeur que celle
qui devoit y être , mais qui manque dans la caffe ,
parce qu'elle court beaucoup dans l'ouvrage.
"BLOQUER, w Fauconnerie , fe prend en deux
fens difîérens : il fe dît de l'oifeau qui a remis la per-
drix & la tient à fon avantage : il fe dit auffi de fon
vol , lorfqu'il relte fufpendu en l'air lans battre de
l'aile ; ce qui s'appelle auffi planer.
BLOUSER , v. n. au billard; c'eft mettre la bille
de fon adverfaire dans une bloufe quelconque : on
gagne deux points pour ce coup, comme on en perd
deux également pour avoir bloufe la fienne feule , ou
avec celle de fon adveriaire.
BLOUSES , f. f. au billard ; ce font des trous d'un
billard dans lefquels on pouffe les billes ; & la gran-
de adreffe du billard , eft de pouffer la bille de fon
adverfaire dans la bloufe. Voye^ Billard.
BLUET ou BARBEAU , f. m. cyanus , ( Hift. nat.
bot.~) genre de plante dont la fleur eft compofée de
deux lbrtes de fleurons. Ceux qui occupent le centre
de la fleur font plus petits , découpés en lanières éga-
les. Ceux qui font à la circonférence lont beaucoup
plus grands tk plus apparens ; ils femblent être par-
tagés en deux lèvres. Les uns & les autres portent
fur des embryons de graines , & font foùtenus par
un calice écailleux qui n'a point de piquans. Lorf-
que la fleur eft paffée , les embryons deviennent des
femences garnies d'aigrettes. Tournefort , Infl. rei
herb. Voye^ PLANTE. (/)
BLUET , cyanus fegetum flore cœruleo. (Mat. med. )
Les auteurs, &c fur -tout les Allemands, ont donné
de grandes vertus au bluet. La plupart des Médecins
en font cependant allez peu de cas ; & fi l'on en croit
Geoffroy , les vertus qu'on lui attribue font tout-à-
fait incertaines & précaires.
L'huile de bluet fe fait de la façon fuivante. Pre-
nez des fleurs de bluet cueillies avant le lever du fo-
leil , autant qu'il vous plaira ; pilez-les dans un mor-
tier de marbre ; renfermez -les dans un vaiffeau de
verre dont l'ouverture foit fort large ; fermez exac-
tement ce vaiffeau , & l'expofez au foleil pendant un
mois entier : on peut luter ce vaiffeau avec du levain.
Cette huile eft un excellent ophthalmique , félon
Timaeus , dans les fluxions chaudes , acres &c falines.
Eau de bluet , félon M. Geoffroy. Prenez une cer-
taine quantité de fleurs de bluet avec leur calice ;
BLU
broyez-les , & faites-les macérer pendant vingt-qua-
tre heures dans une fuffifante quantité d'eau de nei-
ge ; diftillez enfuite à un feu de fable modéré : c'eft
l'eau que les François appellent eau de caffe-lunette.
On affùre que cette eau 6c celle d'eufraife font un
excellent remède contre l'inflammation des yeux ;
&c on la recommande avec le mufe , le benjoin , &
la fleur d'orange , pour donner au vifage un teint
fleuri , fur-tout fi l'on y ajoute le lait virginal.
Tournefort confeille l'eau de caffe-lunette dans les
ophthalmies avec rougeur, dans la chaîne, & tou-
tes les fois qu'il eft queftion d'éclaircir la vue & de
la fortifier, avec une quantité fuffifante de camphre
& de fafran , lorfqu'il s'agira de calmer une inflam-
mation. (A7)
BLUTEAU , f. m. infiniment dont les Boulangers
fe fervent pour féparer le fon d'avec la farine. Foye^
lafig. A A, Planche du Boulanger.
Il y a deux principales parties dans un bluteau ; la
caiffe , & le bluteau proprement dit. La caiffe eft un
coffre de bois proportionné à la longueur & à la grol-
feur du bluteau qu'il renferme , & foûtenu fur deux ,
quatre ou fix pies aufli de bois ; à l'un des bouts de
cette caiffe eft un trou par lequel le grain moulu ou la
farine entre dans le bluteau; le fon en fort par un au-
tre trou fait à l'autre extrémité de la caiffe : enfin fur
le devant font deux ou plufieurs guichets , qui fe fer-
ment avec des targettes , qu'on ouvre pour tirer les
différentes fortes de farines qui y ont été blutées.
Chez les Boulangers, la caiffe du bluteau peut n'ê-
tre pas tout entière de bois ; fouvent il n'y a que les
deux bouts & le deffus qui en foient : ils placent le
bluteau de façon que le mur fert de derrière , le plan-
cher de fond , &. une toile attachée le long du deffus ,
& qui pond jufque fur le carreau de devant à la caiffe.
Le bluteau proprement dit , eft un gros & long cy-
lindre fait de plufieurs cerceaux environnés d'étami-
ne de foie , de laine , & fouvent de l'une & de l'au-
tre enfemble , à travers laquelle paffe le plus fin du
grain moulu.
Ce cylindre eft divifé en trois ou quatre parties de
différente fineffe ; ce qu'il y a de plus fin étant tou-
jours à la tête du bluteau : d'oii l'on voit qu'il peut y
avoir autant de degrés de fineffe dans les farines ,
qu'il y a de divifions différentes dans les bluteaux.
Il faut que le bluteau foit un peu incliné par un
bout , afin que lorfqu'il eft agité par la manivelle , le
grain moulu tombant fucceffivement par ces divi-
fions , laiffe fous chacune d'elles la farine qui lui con-
vient ; & que le fon ne trouvant point de paffage par
où il puiffe s'échapper , tombe au bout du bluteau par
le trou qu'on y a ménagé.
Cependant comme ces divifions font très-peu fen-
fibles , & qu'il n'y a prefque point de différence en-
tre les degrés de fineffe des trois ou quatre premiè-
res , non plus qu'entre ceux des trois ou quatre der-
nières , on n'en fait pour l'ordinaire que deux parts,
& l'on mêle enfemble les farines qui ont paffe par
les divifions qui font à-peu-près égales en fineffe.
Outre ces divers degrés de fineffe qui font dans le
même bluteau , il y a encore différentes fortes de blu-
teaux propres à chaque efpece de farine , mais qui
ne diffèrent des autres qu'en ce qu'ils font plus ou
moins gros.
Au- deffus du bluteau eft une trémie dans laquelle
on verfe la farine , ou toute autre choie qu'on veut
bluter : au bas de cette trémie eft une ouverture re-
couverte par une planchette qui le hauffe & le baiffe
félon la quantité de grain qu'on veut donner au blu-
teau. De la trémie le grain tombe dans l'auget , d'où
il paffe dans le bluteau.
BLUTEAU , terme de Courroyeur ; c'eft un paquet
de laine fait de vieux chiffons ou bas d'eftame , avec
lequel les Courroyeurs effuient les cuirs des deux
côtés j
BOA
après îcs avoir chargés de bierre aigre, foye^
CoURROYER ; vojei lajig 5. Pi. du Courroyeur.
PLUTER , en terme de Boulanger ; c'eft iéparer la
farine d'avec le fon par le moyen du Linteau. On
appelle farine blutée , celle qui a paffé par le bluîeau.
BLUTER.IE ; c'eft , parmi les Boulangers , le lieu où
font placés les bluteaux , & où l'on blute la farine.
B O
* BOA , ( Hiji. nat. ) c'eft le nom d'un ferpent
aquatique , d'une grandeur demeûiréc, & qui s'atta-
che particulièrement aux bœufs , dont il aime beau-
coup la chair : c'eft ce qui lui a fait donner le nom
qu'il porte. Il aime auffi beaucoup le lait. S'il eft vrai,
ainfi que le dit Duncan , qu'il ne puifle vivre d'autre
chofe , l'elpece en doit être peu nombreufe ; & fi l'on
en trouve quelquefois dans la Calabre , ainli qu'on
nous l'affûre , il eft' étonnant que nous n'en ayons
pas une defeription plus exacte. On tua un boa fous
le règne de l'empereur Claude , dans lequel on trou-
va un enfant entier. Ceux qui ont avancé qu'il pou-
voit avaler un bœuf, ne méritent qu'on rapporte
leur lentiment que pour montrer jufqu'où peut aller
l'exagération. Les hiiloriens font afl'ez ordinairement
le contraire de la montagne en travail : s'agit-il d'une
fouris ? leur plume enfante un éléphant.
* BOBAQUE,f. m. (Jlïfl. /z^.)iorte d'animal allez
reffemblant au lapin , qui fe trouve fur les bords du
Nieper , ayant deux dents en haut & autant en bas ,
& le poil de la couleur du blaireau ; il le terre com-
me le lapin; il fait lés provifions pou*- l'hyver depuis
le mois d'Avril jufqu* au mois d'Octobre ; alors il fe
retire fous terre , ôc n'en fort qu'au printems : il eft
facile à apprivoifer , & donne beaucoup de plaiiir
lorlqu'il a été inftruit. On dit que cet animal eft her-
maphrodite.
BOACRES , ( Géog. anc.) lieu d'Italie fur la voie
Aurélienne, & lur la route de Rome à Arles par la
Tofcane & les Alpes: on croit que c'eft la même
chofe que Boucle. Poyeç BOACTE.
BOÂCTE, ( Géog. anc. & mod. ) rivière d'Italie
dans la Ligurie. Quelques-uns croient que c'eft la
il'/ ella. Olivier l'explique de h; Brignole.
BOAE , ( Géog. anc. & mod. ) ville de Peloponefe
dans la Laconie , près d'un golfe qui en étoit appelle
Uoetiacusjînus. Les Géogiaphes prétendent que c'eft
le Vajica d'aujourd'hui , ou Batica , ou Vatica.
B 0 AY I S TA , ( Géog. mod. ) petite île , la plus
oiientaledc celles du cap-Verd.
BOBÈCHE de chandelier. Voye^ CHANDELIER.
* Bobèche , f. f. Les ouvriers en fer, mais fur-
tout les Couteliers , donnent ce nom à un petit mor-
ceau d'acier lin ce trempé , d'un pouce de long & un
peu plusjcv portant 3 à 4 lignes d'épaiffeur d'un côté,
îùr une ligne ou environ de l'autre , ce qui lui donne
la forme d'un coin oblong. Quand les Couteliers for-
gent un rafoir , ils prennent un morceau d'étoffe ou
de gros acier ; ils l'étil er.t , le recoin bent par un bout ,
inierent ia bobèche entre les deux parties recourbées,
la foudent, & elle forme le tranchant de l'ouvrage.
On n'ufe de bobèches que pour épargner l'acier fin.
Dans un rafoir , par exemple , le tranchant fe trouve
par ce moyen d'acier (in , & le dos de gros acier ;
■ d'où il arrive que li la pièce cil mal forgée, le gros
acier s'etendant beaucoup fui l'acier tin , le 1
peut fervir qu'en très-peu de tems il ne de^ ienne mau-
vaise que quelque bien que le rafoir foitforg
peu; l'ufer entièrement. On forge un grand nombre
tle bobèches à la fois: pour ce: .
leurmorceaud'acierd'Anglete -
l'on ait ; on l'étiré , & on lui donne fur toute la lon-
gueur la forme que nous a\ ons de
le divile lui la tranche par autant d'entailles obliques
Tome II,
BOB
289
qu'il peut contenir de bobèches; on le trempe , puis on
trappe deffus avec un petit marteau ; il fe caffe à tou-
tes les divilions, &donne toutes les bobèches féparées ;
on fait les entailles obliques , afin qu'il y ait à la par-
tie fupérieure de la bobèche une efpece de bec qui s'é-
tende fur l'épaiffeur de la boucle du gros acier re-
courbé , ëê qui la recouvre : fi la bobèche au lieu d'ê-
tre en lofange , étoit quarrée, il eft évident que ,
n'ayant point de bec , quand on l'infereroit entre les
deux parties de l'acier recourbé , l'endroit du coude
ne feroit pas couvert d'acier fin , &c que par confis-
quent le haut de la pièce forgée que ce coude forme-
roit, leroit de gros acier & mauvais; à moins que
l'ouvrier n'eût l'attention d'enlever fur la tranche
cette portion ; ce qu'il eft quelquefois obligé de faire.
Voyer^ COUTELIER.
BOBENHAUSEN, ( Géog.) petite ville d'Alle-
magne dans le comté de Hanau.
BOBER. , ( Géog.) rivière de la baffe Siléfie , qui
fe jette dans l'Oder.
i.i >BERAU , ( Géog. ) petite ville de Siléfie dans
la principauté de Jagerndorfï".
BOBERSLERG, ( Géog.) petite ville de la baffe
Siléfie , iur les frontières de la Luface , fur la rivière
de Bober.
* BOBINE , f. f. infiniment à Biffage de tous les
ouvriers qui ourdiffent , & de plulieurs autres , Paf-
fementiers, Manufacturiers en loie , Rubaniers , Epin-
gliers, Tireurs-d'or, Trifileurs, &c. C'eft en général
un cylindre de bois léger, qui a plus ou moins de dia-
mètre & de longueur , & qui eft percé fur toute fa
longueur d"un petit trou , dans lequel on fait
une broche qui lui fert d'axe. Tantôt la broche mo-
bile fait tourner la bobine : tantôt la bobine tourne iur
la broche immobile. La burine n'eft pas ordinairement
de même diamètre fur toute fa longueur : il y en a lur-
tout de deux efpeces bien différentes ; les unes lbnt
ablolument faites en cône ; les autres en cylindre
cave fur toute fa longueur ; enforte que dans celles-
ci , tantôt le point le plus bas de la cavité tombe fur
le milieu de la longueur, & tantôt la cavité étant la
même par-tout, les extrémités du cylindre forment
feulement des rebords. Toutes les bobines fervent à
envider ou de la laine , ou de la foie , ou du fil , &c.
Les bobines coniques font à I'ufage des moulineurs &C
des tordeurs de laine , de foie , &c. Comme il faut
que le til fe dévide verticalement de deffus ces bobi-
nes , s'il y avoit un rebord il empécheroit le devida-
ge. Je ne l'ai fi dans les moulins à tordre la foie , on
ne parviendroit pas par la feule ligure des bobines , à
remédier à l'inégalité du toii : c'eft à M. de Vaucan-
fon à examiner ce méchaniuhe. La cavité des I
cylindriques fert à recevoir le lil , & à le contenir de
manière qu'il ne s'éboule point.
La bobine des Epingliers eft un a fiez gros cylindre
de bois , traverle d'un arbre, dont un bout cil loù-
tenu dans un collet , & dont l'autre eft garni d'une
manivelle : la manivelle fnr tourner le cylindre , qui
fe charge en tournant du lil trifilé qui doit fervir à
faire l'épingle.
Les Manufacturiers en foie ont de grandes bobines
ou canons à deux têtes , un peu j ros , qui leur fervent
à dévider le fil de lac au loi tir ne la boutique du cor-
dier ; & de petites bobines ou canons, qui portent la
donne.
Li bobine du Rubnnier , duFaifeurde bas au mé-
tier, &c. eft une efpece de rochet dont les :
rs,&lal< tgi ... concave,
bois pli 1 ; fa groffeur& fa lon-
gueur varient. Elle iei I - le rochet , a . ece
voir les foies dévidée , ■ r-
La bobine du Tireur-d'oi efl - de roue mo-
bile , Iur laquelle on àt '■{ TlRl l R-
d'os. Cet instrument eft long d'un tout au
Oo
290
B O C
B O C
plus , cylindrique , percé & mobile fur deux pivots ,
avec des rebords à chaque bout.
* B O B I N E R , v. au. c'eft , che[ les Tireurs-d'or ,
faire parler le trait de defTus le tambour fur une petite
bobine , à laquelle on donne le nom de roquetin. Foy.
Tireur-d'or.
* BOBINEUSE , f. f. pi. nom que l'on donne ,
dans les Manufactures , particulièrement dans celles de
laine , à des femmes employées à dévider fur des bo-
bines ou rochers , le fil deftiné à former des chaînes.
* BOBINIERE, f. f. partie fupérieure du moulin
ou rouet à filer l'or, ainfi appellée de fa fonction.
Voye^ Fi leur-d'or.
BOBIO, (Géog. ) ville d'Italie dans le Milanès ,
au territoire de Pavie fur la Trébia. Long. zj. lat.
44. 48.
Bobio , ( Géog. ) la plus grande de toutes les ri-
vières du Chili en Amérique : elle prend fa fource
dans les Cordelières, & fe jette dans la mer, au Jje
degré de latitude.
BOBROISKO , ( Géog. ) ville dans le palatinat
de Minski en Lithuanie.
*BOBURES, f. m. plur. (Géog. ) peuples de
Terre-Ferme dans l'Amérique méridionale : ils habi-
tent dans le gouvernement de Venezuela , au midi du
lac de Macaraïbo.
BOCAGE, f. m. ( Jardinage. ) c'eft un bouquet
de bois non cultivé , planté dans la campagne pour
fe mettre à l'ombre. ( K )
BOCAL, f. m. en Italien boccale, f Commerce. )
mefure des liquides en ufage à Rome. Le bocal elt
proprement ce qu'on appelle en France une bouteille.
Il contient un peu plus que la pinte de Paris. Il faut
fept bocals & demi pour la rubbe ou rubbia , & treize
rubbes. & demie pour la brante ,qui contient quatre-
vingt-feize bocals. Voyc^ Brante & Rubbia. (G)
Bocal , inftrument dont les Bijoutiers & plufieurs
autres ouvriers fe fervent pour raffembler fur leur
ouvrage la lumière d'un flambeau placé derrière.
Cet inftrument confifte en une groffe bouteille de
verre blanc fort mince , montée liir l'on pié de bois.
f^qye^ lafig. 2. PI. du Bijoutier. On emplit cette bou-
teille d'eau de rivière ou de pluie , dans laquelle on
fait difîbudre quelques fels , ou bien on y mêle un peu
d'eau-forte pour l'empêcher de geler l'îry ver , ce qui
feroit rompre le vale.
Pour fe fervir de cette machine , on la pofe mon-
tée fur fon pié fur l'établi, la chandelle ou lampe
placée derrière, enforte que les rayons lumineux qui
traverfent la liqueur dont la bouteille eft pleine, vien-
nent fe raffembler fur l'ouvrage que l'ouvrier voit ,
comme il le verroit en plein jour.
* BOCAMBRE, f. m. terme à l'ufage des groffes-
Forges : il eft fynonyme à bocard. Voyei_ Bocard.
BOCANE , f. f. danfe grave, ainii nommée de
Bocan , maître à danfer de la reine Anne d'Autriche,
qui en fut l'inventeur. On commença à la danfer en
1645 : elle n'eft plus d'ufage. (B)
* BOCARD , f. m. moulin à pilon dont on fe fert
pour broyer la mine avant que de la mettre au feu ,
furtout lorfqu'elle eft mêlée de pierre & de parties mé-
talliques : un autre avantage de la mine bocardée, c'eft
qu'étant réduite en poudre, elle préfente plus de fur-
face à l'a&ion du feu. Il n'y a guère de lavoirs fans être
accompagné d'un bocard. Le bocard eft. une machine
fort fimple ; ce font des poutres ferrées par un bout ,
tenues verticalement par des traverfes de bois , entre
lefquelles elles peuvent delcendre ëc monter par le
moyen d'un gros cylindre garni de cammes ou dents
qu'une roue à eau fait mouvoir , & qui rencontrant
en tournant des éminences pratiquées aux poutres
ferrées ou pilons , les élèvent & les laiffent retomber
lorfque les cammes viennent à s'échapper de deflbus
les éminences des poutres ferrées ou des pilons. Le
bout ferré du pilon frappe dans une auge oit Ton jette
la mine à bocarder , & lécrafe. De cette mine écra-
fée , les parties métalliques étant les plus lourdes ,
tombent & reftent au fond de l'auge ; les parties pier-
reufes & plus légères font entraînées par un courant
d'eau qu'on fait parler fous les pilons. Du bocard la
mine eft portée au lavoir , & du lavoir au fourneau
à griller. Voye{ dans nos Planches de Minéralogie , &
dans celles des groffes- Forges , plufieurs figures de
bocard.
* BOC ARDO , ( Logique. ) c'eft une forte d'argu-
mentation , dans laquelle la majeure eft particulière
négative , la mineure univerfelle affirmative , & la
conclufion particulière négative. ^.Syllogisme.
* BOCCA DELLA VERITA , (Hifl. mod.) c'eft
ainfi qu'on appelle à Rome une tête antique de pier-
re , près l'églife de Sainte-Marie en Cofmédine , qui
a la bouche ouverte : l'on en rapporte une chofe bien
extravagante ; c'eft que les femmes de Rome foup-
çonnées de galanterie , pour defabufer leurs maris
jaloux & prouver leur innocence , fourroient leur
main dans cette bouche , & qu'on étoit dans la per-
fuafion qu'elle fe fermoit , lorfque la prétendue inno-
cence n'étoit pas bien avérée.
* BOCCA D'INFERNO , ( Phyfiq. ) c'eft un mé-
téore qui paroît fouvent aux environs de Bologne en
Italie , lorfqu'il fait obfcur : ce font des exhalaifons
enflammées , auxquelles les peuples du pays attri-
buent la mauvaife volonté de chercher à égarer les
voyageurs : aceufation que les gens du peuple for-
ment auffi parmi nous contre ce qu'on appelle feux
follets. Foyei FEUX FOLLETS.
* BOCCALE ; l'on nomme ainfi un grand verre
qui tient pinte , dont on fe fert en Allemagne & dans
les Pays-Bas pour célébrer des fantés intéreffantes à
la fin des grands repas, & dans Iefquels l'on force
quelquefois impitoyablement les convives de noyer
le peu de raifon qui leur refte.
BOCCONE , f. f. bocconia, (Hifl. nat. bot.) genre
de plante dont le nom a été dérivé de celui de Bocco-
ne , noble Sicilien , connu par plufieurs ouvrages de
Botanique & de Phyfique. La fleur des plantes de ce
genre eft compofée de deux pétales : il s'élève du mi-
lieu de la fleur un piftil qui devient dans la fuite un
fruit ovoide pointu , applati & plein de fuc ; ce fruit
renferme une femence ronde. Plumier, Nova plant.
Amer, gêner. V. Plante. ( / )
BOCHET , f. m. (Pharmacie, .) décoction féconde
du gayac & des autres bois fudorifiques , félon Caf-
telli; quoiqu'on puiffe l'appliquer. à la première dé-
coction des bois ou racines ligneufes. Ces décoftions
font néceffaires dans tous les cas où il faut atténuer ,
divifer & pouffer par la fueur , Se où les pores font
allez ouverts pour faciliter la fueur. L'ufage de ces
remèdes convient dans les rhûmatifmes froids , 6c
aux conftitutions froides & humides. (A)
BOCINO , ( Géog. ) petite ville d'Italie au royau-
me de Naples , proche le confluent des rivières de
Selo & de Negro.
BOCKARA, ( Géog. ) ville affez confidérable
dans le Zaçatay en Afie , fur la rivière d'Albiamu.
BOCKÈLEN , ( Géog. ) ville & château du comte
de Y/oldenberg fur la Nette, à peu de diftance d'Hil-
desheim.
* BOCKEM, f. m. (Commerce ) On appelle en
Hollande kareng bockem , ce que nous entendons en
France par harengs fumés. Voye? HARENG.
BOCKENHEIM , ( Géog. ) Il y a deux villes de ce
nom, l'une dans le bas Palatinat, l'autre en Alface
lur la Saar.
BOCKHOLT , (Géog.) ville & territoire dans
l'évêché de Munfter, fur la rivière d'Aa en Wèft-
phalic.
BOCKNIA, (Géog.) ville de la petite Pologne
B O D
dans le palatinat de Cracovie , renommée à caufe
qu'on y trouve beaucoup de f'el gemme.
* BOCQUET , f. m. (Blafon. ) terme qui dans
quelques auteurs fignifie unfr de pique.
* BOD, f. m. (Hift. mod. ) idole des Indes à laquelle
on s'adreffoit pour avoir des enfans. Lorfqu'une fem-
me avoit été exaucée , & qu'elle avoit mis au monde
une fille , on préfentoit cette fille au Bod, &c on la
laiffoit dans fon temple , où elle étoit élevée jufqu'à
ce qu'elle eût atteint l'âge nubile : alors elle fbrtoit
pour prendre place à la porte du temple entre les au-
tres femmes vouées. Elles étoienî toutes afiîfes lur
des tapis , prêtes à fe livrer au premier venu. La feule
choie dont le culte leur fît un cas de confcience , c'é-
tait de mettre à vil prix leurs faveurs , ou d'en rete-
nir une partie. Elles étoient obligées fous peine de
déplaire au Bod , de remettre tout l'argent qu'elles
amaflbient à fon fervice , entre les mains de Ion prê-
tre , pour être employé aux bâtimens ce à l'entre-
tien du temple. Renaud , relat. des Indes.
BODANETZ , ( Géog. ) petite ville de Bohême
dans le cercle de Koniggratz , peu éloignée de Par-
dubitz.
BODEoz/BUDE, (Géog.) rivière quitraverfe les
pays de Quidlimbourg , d'Halberftadt , & de Magde-
bourg , 6c fe jette dans la Saale.
BODENBURG , (Géog.) petite ville du duché de
Brunfwick-Wolfembuttel.
BODENDYCK , (Géog.) petite villedu duché de
Lunebourg, à l'électeur de Hanovre.
BODENHAUSEN , ( Géog. ) petite ville du Land-
graviat de Heffe , fur la frontière du duché de Brunf-
•wick.
BODENZÉE , ( Géog. ) c'eft ainfi que les Alle-
mands nomment le lac de Confiance , entre la Soua-
be & la Suiffe.
BODINERIE , f. f. ( Commerce. ) efpece de con-
trat qui eft en ufage fur les côtes de Normandie : c'eft
une forte de prêt à la groffe aventure , qui eft affigné
fur la quille ou bodine du vaiffeau , & où l'on hypo-
thèque non-feulement le corps du vaiffeau , mais
encore les marchandifes qui y font chargées. Voye\_
Aventure.
La bodineric diffère du contrat d'affùrance , en ce
qu'on ne paye point de prime , & qu'il n'efi rien dû
en cas de naufrage , prife d'armateurs , corfaires , &c.
mais feulement quand le vaiffeau arrive à bon port,
on paye la fomme principale avec l'intérêt ou profit
maritime ftipulé dans le contrat.
Il eft encore différent du contrat d'affùrance en
cas de conteftation , en ce que c'eft au créancier à
prouver devant les juges de l'amirauté que le vaif-
feau eft arrivé à bon port , pour rendre l'obligation
de bodlnerie exécutoire , & établir fon droit de créan-
ce ; au lieu que dans les polices d'affùrance , c'eft à
l'affûré à juftifierla perte , prife ou naufrage du vaif-
feau , pour fon rembourfement de la choie affûrée.
(G)
* BODINURE, f. f. ( Marine.) cordelettes paffées
autour de la partie de l'ancre qu'on appelle arga-
neau , ou organeau. Voye^ ANCRE.
* BODOWNICZY , ( Hift. mod. ) c'eft le nom
qu'on donne en Pologne à un magiftrat dont la char-
ge eft de veiller fur les bâtimens : c eft ce qu'étoit un
édile chez les Romains.
BODROG , ( Géog. ) rivière de la haute Hongrie
qui prend fa fource vers les frontières de Pologne ,
éc fe jette dans la Theifs à Tokay.
Bodrog , (Géog.) comté de la haute Hongrie , Se
ville fituée fur un bras du Danube.
BOEDROMÏES , f. f. ( Myth. ) fêtes qu'on célé-
broit à Athènes , pendant lefqucllcs on couroit en
jettant de grands cris , du Grec Ce» , cri , & «Tpd^cç ,
touffe. Elles fe célebroient vers le mois d'Août ,
Tome 11.
B O E
291
d'où ce mois chez les Athéniens a été nommé Boc-
dromion. Cette fête , félon Plutarque , fut inftituée au
fujet de la guerre contre les Amafones , ou , félon
d'autres , en mémoire du fecours qu'on donna aux
Athéniens contre Eumolpe. (G)
BOEN, (Géog.) petite ville de France dans le Fo-
rez , au pié des montagnes , fur une côte arrofée par
le Lignon , à cinq lieues de Rouanne.
* BOESJES , f. f. pi. ( Comm. & Hift. mod. ) co-
quilles de mer qui fervent de monnoie parmi les ha-
bitans de la baffe Ethiopie.
BOESSER , v. act. à la Monnoie , c'eft nettoyer les
lames au fortir de la fonte avec lagratte-boeffe. Voy.
Gratte-boesseow Gratte-bosse de Monnoyage.
* BCEUF , f. m. bos , (Hift. nat. ) taureau coupé.
Foye{ Taureau.
Le bœuf 'ne diffère du taureau , que comme un ani-
mal diffère d'un autre de la même efpece , lorfque
celui-ci eft plein de feu, vif, hardi, vigoureux, Se
même un peu farouche , & que l'autre eft pelant ,
lâche , & timide ; il eft confiant que la caftration
feule met toutes ces différences entre le bœuf & le
taureau.
Caftration. Elle fe fait à deux ans ; quelques per-
fonnes la rifquent à fix mois. On s'y prend le matin
avant que le jeune bœuf ait forti : les uns choiiiffent
le mois de Mai; d'autres l'automne. Pour la faire, on
prend les mufcle's des tefticules avec de petites te-
nailles, on incife les bourfes, on enlevé les tefticu-
les , ne laiffant que la portion qui tient aux mufcles ;
après quoi on frotte la bleffure avec des cendres de
farment mêlées de litarge d'argent, & on y applique
un emplâtre : ce jour on lui ménage la nourriture ;
on ne lui donne point de boiffon , & on lui en don-
ne peu les jours fuivans. Les trois premiers jours on
le nourrit de foin haché , & d'un picotin de fon
mouillé qu'on lui laiffe prendre en une fois. Le troi-
fieme ou quatrième jour on levé le premier appareil,
& l'on met fur la plaie un emplâtre de poix tondue,
& de cendres de farment mêlées avec de l'huile d'o-
live. A mefure que l'appétit revient au jeune animal,
on lui donne de l'herbe fraîche , & on lui augmente
la boifibn. On le garde jufqu'à trois ans ; c'eft l'âge de
la vente.
Choix du bœuf. Le bœuf eft la plus eftimée d'entre
les bêtes à cornes : il fe nourrit facilement 6i rend
beaucoup de fervice. Il faut le choifir avec la tiu
courte & ramaffée ; YoreilL grande , velue , &c unie ;
la corne forte , luifante , & de moyenne longueur ;
le mufle gros &C camus; les nafeaux ouverts ; la dent
blanche , longue tk. égale ; la lèvre noire ; le cou gros
& charnu ; les épaules larges, groffes, fermes cv char-
nues ; \a. poitrine large ; le fanon long & pendant ; les
reins larges & forts ; les côtés étendus ; le ventre large
& tombant; les flancs proportionnés à la groffeur
du ventre ; la hanche longue ; la croupe large & ron-
de; la j ambe forte & nerveufe ; la cuijfe de même ;
le dos droit & plein ; la queue longue, pendante , &
garnie de poils déliés & touffus ; le pié ferme ; le cuir
fort & doux ; le poil luifant cv épais ; les mufcles éle-
vés ; V ongle court ôc large ; le corps entier , membru ,
large & ramaffé ; jeune , fort , docile, prompt â l'ai-
guillon , obéiffant à la voix , & facile à manier.
Poil du bœuf. Le bœuf ious poil noir trompe rare-
ment ; le meilleur eft tous poil rouge : il eft tardif
fous poil blanc : méfiez-veus du moucheté : 1
time pas le gris; le brun dure peu.
Age du bœuf. Le bœuf ne peut commencer à icrvir
qu'à trois ans ; paffé'dix , il faut l'engraiffer pour la
boucherie : il vit jufqu'à quatorze ans. On connoît
fon âge à la dent & à la corne. A dix mois il jette les
premières dents de devant ; elies font luivics d'autres
plus larges & moins blanches : à feize mois les dents
de lait des côtés tombent à leur tour, & font auffi
O o ij
%<)1
B (E U
remplacées par d'autres moins blanches & plus for-
tes : à trois ans toutes les dents ont mué ; elles font
égales , blanchâtres & longues ; & à mefure que le
bœuf vieillit , elles s'ufent , le noirciflent , & devien-
nent inégales & noires. Si l'on confulte les cornes
fur l'â^e , on comptera pour trois ans les annelets
qui régnent depuis le bout des cornes jufqu'au pre-
mier nœud en defeendant : pane trois ans , le bœuf
perd ce qui lui eft venu de cornes , & il lui en croît
une nouvelle , nette , petite , urilé , à laquelle il fe
forme chaque année un nœud lemblable à un an-
neau relevé en bofles; & pour juger de fon âge au-
delà de trois ans , on compte le nombre de ces
nœuds.
On a remarqué que ceux qui mangent lentement ,
& qui ont été élevés fur les montagnes , font de meil-
leur fervice. Si on les prend au loin , ils feront fujets
à tomber malades ; & l'on rie les accoutumera au cli-
mat qu'en les ménageant beaucoup la première an-
née , furtouî dans Tes chaleurs , & qu'en leur don-
nant de bon foin. On recommande au laboureur de
ne point prêter les bœufs , & de ne les point excéder
de travail.
Manière de dompter les bœufs. Pour les accoutumer
au joug , il faut d'abord les careffer de la main qu'on
leur parle fur tout le corps , leur donner un peu de
fel dans du vin , & les apprivoifer ; puis on leur lie
les cornes ; quelques jours après leur mettre le joug ;
une aiUre fois leur faire traîner des roues ; & finir
par la charrue.
On les accouple dans le commencement avec un
bœuf tout formé ; on ne les aiguillonne point : fi mal-
gré les ménagemens dont on ufe on les trouve fou-
gueux , on les attelé entre deux bœufs faits & vigou-
reux ; ce travail les foùmet en moins de trois ou qua-
tre jours.
On les difpofe encore au joug en les accouplant à
la mangeoire entre des bœufs formés , & les menant
ainli accouplés aux champs ; leur montrant d'autres
bœufs au travail, &£ les faifant au bruit en les condui-
fant dans des endroits où il y a beaucoup de monde.
Il ne faut pas laifîer pafTer trois ans fans les domp-
ter : quand ils font accoutumés au joug , on y joint le
timon, dont on laine traîner la chaîne afin que le
fon ne les épouvante pas : au bout de trois ou quatre
jours on attache une pièce de bois à la chaîne , & on
les attelé devant deux bœufs formés ; on leur allège
la peine par les careffes , le peu de travail , & la bon-
ne nourriture ; on ne leur laifle pas manquer de li-
tière ; on a foin au retour de l'exercice de les frotter
& de les couvrir ; on les fortifie quand ils ont trop
chaud , par de l'avoine ou du ion.
Quand on accouple un bœuf, il faut lui donner
fon égal en force & en taille , fans quoi le plus fort
portera toute la fatigue , & périra en peu de tems.
Défauts des bœufs. Le bœuf eu fujet à des défauts ;
il faut s'appliquer à les connoître & à les corriger :
les jeûnes & les careffes valent mieux que les coups
& l'aiguillon; cependant s'il eft rétif , on lui battra
les feffes avec un bâton thé chaud hors du feu ; s'il
eft ombrageux , on lui fera fouvent du bruit , & l'on
continuera jufqu'à ce qu'il ne s'épouvante plus ; s'il
eft violent , ce qui ne vient guère que de repos Se
d'embonpoint , on le liera par les quatre jambes , on
le terraffera , & on lui épargnera la nourriture ; fi on
l'aime mieux , on le fatiguera de travail & de coups
d'aiguillon. Les anciens mettoient du foin à la corne
des bœufs quil'avoient dangereufe. S'il eft pareiléux,
il faut ufer de l'aiguillon.
Nourriture du bœuf Le bœuf ne mange jamais trop ;
quand il a pris fon repas , il fe couche & rumine. On
le nourrit en hyver de paille & de foin ; quand il
travail il lui faut de bon foin : fon repas dure ordi-
nairement une heure. Avant que de l'atteler, il faut
BIU
lui donner du fon fec ou de l'avoine. En été on lui
jette de l'herbe fraîche , des bourgeons de vigne ,
des feuilles d'orme, de Irène , d'érable, de chêne,
de faule , & de peuplier.
La vefee verte ou feche lui eft bonne, ainfi que
le fainfoin , la luferne , la paille d'orge , &c. celle d'é-
pautre ne lui convient guère qu'en litière.
Il y en a qui nourriffent le bœuf avec le lupin trem-
pé dans l'eau , les pois chiches , la rave , le navet , le
jonc marin , l'écoiTe de pois , l'orge bouilli , &c.
Il ne faut le mettre au pâturage qu'à la mi-Mai ,
& aux fourrages en Octobre : mais obfervez de ne
le faire paffer du verd au i'ec , & du fec au verd , que
peu à peu. Le bœuf ne mange pas autant qu'on le
croiroit fur fa grofieur.
Soin du bœuf. Dans les tems de labour-, fi l'on a
deux paires de bœufs , l'une travaillera depuis le ma-
tin jufqu'à onze heures , l'autre depuis midi jufqu'au
foir. Il faut extrêmement ménager les jeunes bœufs.
On aura foin au retour du travail de frotter les
bœufs avec des bouchons , fur-tout s'ils font en lueur ;
de les étriller le matin avant que de les mettre au
joug ; de rembourer de paille ce qui peut les incom-
moder ; de leur laver fouvent la queue avec de l'eau
tiède ; de les mener rarement aux champs & au la-
bour dans les grandes chaleurs, les froids & les pluies;
de leur rafraîchir la bouche en été avec du vinaigre
ou du vin imprégné d'un peu de fel ; de ne les atta-
cher dans l'étable que quand leur lueur fera paffée ;
de leur laver les pies au retour des champs ; de leur
donner à manger aux heures réglées ; de les faire
boire deux fois le jour en été , & une fois en hyver ;
enfin de prévenir leurs maladies & de panier leurs
maux. Quant à l'étable , voye^ Etable.
S'il y a plufieurs jours de fête de fuite , il faudra
leur graifier la corne & le delfous du paturon avec
du furpoint , ou leur appliquer fur un morceau de lin-
ge un oignon bien cuit dans la braife ; les tenir en
tout tems un peu éloignés les uns des autres ; veil-
ler à ce que l'étable foit propre , pour les garantir de
vermine ; & leur donner toujours de la belle eau
claire.
Au refte tout ce qui précède n'eft que pour le bœuf
de charrue ou de hamois; celui qui ne travaille pas ne
demande pas tant de foin ; il fuffit de l'envoyer aux
champs en été , & de lui donner du fourrage en hy-
ver , à moins qu'il ne faille l'engrailîer.
Engrais du bœuf. L'engrais des bœufs fe fait de la
manière fuivante. On ne fe détermine guère aies en-
graifler que quand ils font hors de fervice : c'eft or-
dinairement à l'âge de dix ans ; alors on ne leur fait
faire ni voitures ni labour. Si c'eft en été qu'on en
veut faire l'engrais , on s'y prend fur la fin de Mai :
auffi-tôt que le jour paroît on les mené paître ; on
les laiffe au pâturage jufqu'au grand jour , alors on
les ramené repolèr dans l'étable ; quand la chaleur
eft paftee , on les reconduit aux champs jufqu'à la
nuit , on leur diftribue des herbages , & on les par-
que par cantons : s'ils manquent d'appétit , on les fe-
ra boire trois ou quatre fois par jour, on leur lavera
de tems en rems ia langue avec du fel & du vinaigre,
& on leur jettera dans la gorge une petite poignée
de fel.
Pendant les huit premiers jours de l'engrais , en
é'té on fait tiédir au foleil , en hyver fur le feu , de
l'eau où l'on met de la farine d'orge ; on laifle repo-
fer ce mélange jufqu'à ce que le gros foit précipité ,
après quoi il refte une eau blanche qu'on fait boire
aux bœufs pendant huit ou dix jours ; quant au gros
ou fédiment , on le réferve pour le retour du pâtu-
rage.
Le foir on leur donne une bonne litière , & on
jette devant eux une botte d'herbe fraîche; on con-
B (S U
B (5 U
tirme ces foins pendant quatre mois: voilà l'engrais
d'été.
En hyver on n'engraifle guère que clans les pays
fans pâturage. On commence l'engrais par l'eau blan-
chie , qu'on donne aux baufs foir & matin pendant
huit jours ; on les tient chaudement dans l'étable ;
on leur fait ample litière; on leur donne lans épargne
du foin & des herbes feches ; le foir leur repas efl
de pelottes de farine de feigle , d'orge , d'avoine ,
-mêlées ou féparées , pétries avec de l'eau tiède &
un peu de fel ; on fupprirne la paiile à laquelle on
iubilxtue foir & matin un picotin & demi de fon fée,
& à midi une écueilée de feigle ; c'eft le moyen d'a-
voir des bœufs gras en trois mois : dans le tems des
raves , on leur en hache de crues dans leur auge ;
quelques-uns ne négligent pas le marc de railin cuit
dans l'eau avec le ion ; les lupins en farine , ou en
pâte , entiers ; l'avoine en grain , la luferne & le
gland. Il y en a qui commencentrengrais par une on-
ce de poudre d'antimoine , dans une mefure d'avoi-
ne ou de ion. Pour les empêcher de fe lécher ( car
on prétend que cela leur nuit ) , on leur frotte avec
leur fiente tous les endroits du corps où ils peuvent
atteindre.
Il y a encore d'autres manières d'engraifTer les
baufs : mais voilà la plus ordinaire.
Maladies des bœufs. Elles viennent prefque toutes
d'excès de travail. Les principales font le dégoût, la lan-
gueur, le mal de cœur , la colique 6c les tranchées , Y en-
flure, le flux de ventre , 1' 'avant-cœur , la parejfe de ven-
tre , Yindigeflion , le pijfement de fang , les barbillons ,
Y enflure du palet , la flevre , Y enflure du cou , les écor-
chures , les duretés au chignon , la maigreur , Yentorjé ,
Yenclo'ùure, les étranguillons , la galle; 6t une infinité
d'autres dont on trouvera les principales à leurs ar-
ticles.
Bœuf, (aliment. ) On employé prefque toutes les
parties du bœuf en nourriture : on mange le bœuf
bouilli , rôti, en ragoût, & fumé.
Le bœuf fumé le prépare de la manière fuivante.
On commence par le dépecer en gros morceau* qu'on
fai'.poudre de fel blanc ; on le laifte dans le fel pen-
dant deux ou trois jours , puis on le met en prefîe
entre deux planches ; on le fufpend enluite dans une
née, aflez éloigné de la flamme pour que la
graille n'en foit pas fondue , ôcTon fait deflbus un
feu qui donne beaucoup de fumée : pour cet effet on
préfère le bois verd de genévrier , qui donne au bœuf
fumé un goût aromatique. Le meilleur fe fait à
bourg ce dans le duché de Gucldres. Quand il cil fu-
mé , on le coupe en tranches fort minces, ce on le
mange crud ou cuit fur des beurrées.
Le bœuf à la mode fe fait avec des rouelles de bœuf,
qu'on bat , qu'on larde , qu'on paffe au roux , &
qu'on met enfuite entre deux terrines fur un feu mo-
déré , avec du fel , du poivre , du laurier , un verre
devin blanc , èV deux verres d'eau.
Il y a une infinité d'autres manières de préparer
le bœuf en aliment.
Bcsur, remède j la chair du bœufeÙ. un très-bon ali-
ment , fur-tout poiir ceux qui tra\ aillent beaucoup ,
parce que le fuc que l'on en tire efl très-propre à ré-
parer la déperdition de lûbftance qu'occafionne le
violent exercice ; ce dont on pourra s'aflurer par la
quantité d'extrait qu'il a fourni à M. Geothoi le jeu-
ne, & dont il a rendu compte à l'Académie des Scien-
ces, dans un mémoire qu'il a lu en 1730.
On attribue , avec raifon , au bœuffalè 6c aux ali-
mens de cette efpe'ce, le feorbut auquel font lujcts
les marins lorfqu'ils font des voyages de long cours.
Voyc^ Scorbut.
L'ulàgc ordinaire de la chair du bœuf efl de le faire
bouillir dans une fuffifante quantité d'eau , avec un
peu de fel marin, 6c de l'écumer afin d'en ôter ccr-
293
taines parties qui pounoient être nuifibles ; on en tire
par ce moyen un fuc que l'on appelle bouillon , & qui
eil le feul aliment qu'on accorde pour l'ordinaire aux
malades.^ On a encore foin de le proportionner à leurs
forces , & à la néceiîité qu'ils ont de prendre plus ou
moins de nourriture , c'eft-à-dire , qu'on le mêle dans
certains cas avec une plus grande quantité d'eau ; on
joint au bœuf le veau 6c la volaille , enfin on y joint
aufli des plantes appropriées à leurs maladies.
L'odeur de la peau du bœuf brùlee efl recomman-
dée dans la paflion hyflérique : le poil a le même effet.
Le Juif en efl bon , lorfqu'il efl queftion d'amollir. La
graifle fondue avec le fabot efl plus pénétrante &
plus émolliente , parce que ces parties font plus dé-
liées. La moelle efl un excellent anodyn & calmant
dans les douleurs de goutte & de rhûmatifme. Les os
calcinés arrêtent les dévoiemens, tuent les ver',, fur-
tout s'il y a trop d'acide & d'humide dans le corps ,
& qu'il foitbefoin d'employer des defliccatifs &des
ablorbans. La rapure de la corne efl bonne , félon
quelques-uns, dans l'épilepiie ; le fabot a la même
propriété. Le membre génital ou le nerf du bœufpul-
vénié ou pris en décoéfion, parle pour exciter dans
les hommes le defir du cou, 6c dans les femmes l'a-
verflon de cet ade. Le bézoard de la véficule du bœuf
efl alexipharmaque & anti-épileptique. Le bulithe ou
boule qu'on trouve dans les inteflins & l'eftomac du
bœuf, efl compofé de poils que cet animal détache
de fon corps en fe léchant , qu'ii avale, & qui fe ra-
mafiam peu à peu- forment une boule qtii efl de la
couleur du poil de l'animal ; cette boule efl quelque-
fois enduite d'une croûte luifante : des médecins l'or-
donnent à la dofe d'un demi-gros en poudre en qua-
lité d'aflringent. Le fiel a les mêmes Vertus que la
bile en général, c'eft-à-dire qu'il efl: déterfif, favo-
neux , réfolutif , & fondant. La fiente efl difeuffive ;
on l'employé récente en cataplafme comme un ano-
dyn propre à calmer les inflammations & la goutte :
on l'applique fur le bas-ventre avec les vers de terre
pour difliperles vents, les douleurs 6c duretés du bas-
ventre. Elle doit fon énergie à l'extrait des plantes
dont l'animal fe nourrit : on la recommande dans la
rétention d'urine, appliquée vu:- le périnée éc fur les
os pubis. Le fuc exprimé efl employé par le petit
peuple dans la colique ; Etmuller prétend que ce re-
mède efl bon dans ce cas &; dans la pleurélie. Le ^i-
betum occidentale fe tire de cette fiente par la fubli-
mation. foyes^ Zibetum. Quelques-uns font grand
cas de la fiente de bœuf dans la gangrené : mais Keif-
ter confeillc de la laifl'er à ceux qui ne peuvent pas
employer de meilleurs remèdes , & perde qu'il efl
aufli foible que fordide. Le fang du bœufd les mêmes
vertus que le lang des autres animaux ; en confé-
quence de fa chaleur naturelle 6c de ia qualité lavo-
neufe , il efl fondant & apéritif, il refont &: deterge.
Toutes ces parties du bœuf ont la vertu des alkalis
volatils tirés du règne animal , 6c n'ont d'efficacité
qu'à raifon de cette volatilité; la différence efl que
ceux du bœuf ont plus d'énergie, parce que les fels ec
les huiles font plus exaltés par l'exercice 6c l'aclion
continuels de ces animaux, de même que par I
des différentes herbes dont ils le rtouixiffent. (A)
Entre beaucoup de fortes de marchandées qu'on
tire du bœuf, la peau efl très-utile pour le commerce.
Les peaux de bœuf te vendent en poil , vertes , ou ta-
lées, ou feches , & lans poil lorfqu'elles ont été pré-
parées par les tanneurs ou par les hongrieurs, qui en
font du cuir fort & du cuir de Hongrie , qui s "employé
enfuite à dirferens ulàgcs. Vùy. CuiR & Tannerie.
Les rognures de fa peau fervent à faire de la col-
le-forte. Vby^ Colle.
Le poil de leur queue, après avoir été côl
bouilli , fournit une partie du crin que las tap
&: autres artifans employent. Le poil du refte de la
2 94
O G
peau fert à faire la bourre , dont on garnit les felies
des chevaux , les bâts de mulet, &c. La pellicule qui
s'enlève de la furface de les boyaux , fert aux bat-
teurs d'or. Voyi{. Baudruche & Batteur d'or.
Bœuf marin, f'qyei Veau marin.
B<euf de Dieu, oifeau. Voye?^ Roitelet. (/)
Bœuf ; éparvin de bœuf. {Maréchal.} V. Eparvin.
Bœuf rôti ; {Hifl. anc.) cérémonie en ufage chez
les Scvthes : voici ce qu'en dit Lucien au dialogue in-
titulé Toxaris ou de l'amitié? lorsqu'un des anciens
Scythes avoit reçu quelqu'injure , 6c qu'il étoit trop
foible par lui-même pour en tirer vengeance , il fai-
foit rôtir un bœuf, le coupoit par pièces , & les mains
liées derrière le dos comme un priibnnier , il s'af-
feyoit fur la peau au milieu de tout cet amas de vian-
de ; ceux qui pafToient auprès de lui & qui vouloient
le fecourir,en prenoient un morceau & s'engagçoient
à lui amener, l'un cinq cavaliers, l'autre dix, cha-
cun félon l'on pouvoir, & ceux qui ne pouvoient dif-
pofer que d'eux-mêmes, promettoient de venir en
perlbnne. Par ce moyen ils aifembloient des troupes
plus confidérables encore par la valeur que par le
nombre ; l'amitié étoit intéreffée dans leur vengean-
ce , & la religion du ferment la rendoit terrible. {G )
* Bœuf (œil de) , Architecture , fenêtre ronde qui
fe pratique dans les grands bâtimens au-defTus du der-
nier entablement , & dans les grands & petits bâti-
mens aux toits , pour éclairer les greniers.
* Bœuf, f. m. c'eft ainfi qu'on appelle dans les Sa-
lines , l'ouvrier qui décharge le bois des charrettes,
le jette fous la poelle , & fait les autres menus fervi-
ces de cette nature.
* BOG , {Géog.) rivière de Pologne , qui va fe jet- .
ter dans le Nieper à Oczakoxr.
■ * BOGARMILE, f. m. & f. {Hifl. eccléf.y& le
nom qu'on donnoit autrefois à une fedfe d'hérétiques,
qui fe firent connoître àConftantinople fous l'empire
d'Alexis Comnene : leur chef étoit un nommé Bajilc;
il renouvella les erreurs des Antropomorphites , des
Audiens , & d'autres , qui avoient attribué à Dieu une
forme corporelle. Bafile fut condamné à être brûlé ,
Hc fa fe&e n'eut que très-peu ou point de fuite. Foy.
BOGOMILES OU BONGOMILES.
* BOGDOI, f. m. pi. (Géog.') peuples de la gran-
de Tartarie. Les Chinois les appellent Tartans orien-
taux , & les Monguls leur donnent le nom de Niouchi
ou Nuchi. Ils ont les Monguls au couchant , la Chine
au midi , èc l'Océan oriental au levant. On fait ha-
biter le pays par les Tartares Dieuchari ou Diourf-
chi , par qui la Chine a été conquife & qui y régnent.
. Ce font apparemment les mêmes que Witfen appel-
le Coejari.
BOGESUND , {Géog.) petite ville de la province
«le Weft-Gothie en Suéde.
BOGLIASCO, {Géog.) petite ville fur le golfe de
Gènes.
BOGNA , {Géog.) rivière du Milanois, dans un
petit pays appelle F al Bognafca.
BOGOMILES ou BONGOMILES , fubft. m. pi.
{Hif.eccléf.) fecfe d'hérétiques fortis des Manichéens,
ou félon d'autres des Maffiliens , mais qui ne s'élevè-
rent que dans le xm. fiecle , & dont le chef nommé
Bafîh fut brûlé vif, par ordre de l'empereur Alexis
Comnene.
Ducange prétend que leur nom eft dérivé de deux
mots de la langue Bulgare , favoir, Bog, Deus , Se
milvi , miferere, enlorte que ce nom lignifie à la lettre
celui qui implore la mifericorde de Dieu.
Sous ce titre impolant, les Bogomïks enfeignoient
une doû rine très-impie. Ils afluroient que Dieu avoit
une forme humaine , & que l'archange faim Miche!
s'étoit incarné. Ils nioient la réfurredion , & n'en
admettoient d'autre que la réfurreefion lpiiituelle
par la pénitence. Ils rejettoieat aufli le myftere de
BOG
Peuchariftie , les livres de Moyfe , & ne recevoient
comme canoniques que fept livres de l'Écriture. Se-
lon eux la mefle étoit un facrifice de démons. L'o-
raifon Dominicale , qui étoit leur feule prière , étoit
aufli la feule euchariftie. Ils croyoient concevoir le
Verbe & l'enfanter comme la Vierge ; ils méprifoient
les croix & les images , &C afluroient que le baptême
des Catholiques étoit le baptême de faint Jean , &
qu'eux feuls adminiftroient celui de Jefus-Chrift. On
leur attribue aufli des erreurs capitales fur la Tri-
nité. Baronius, ad ann. 1118 .Sander. heref lj8.
(G)
BOGUE , BOOPS , BOX , f. f , ( Hifl. nat. Ich-
thyolog. ) poiflbn de mer qui vit près des rivages : il
eft de la longueur d'un pié ; il a le corps renflé , la
tête courte & petite , & les yeux fi grands qu'ils oc-
cupent prefque toute la tête. La bogue a différentes
couleurs , & des traits qui s'étendent depuis la tête
jufqu'à la queue : les uns femblent être dorés & les
autres argentés ; mais ils font tous peu apparens ; on
n'en voit aucun fur le ventre , qV.i eft de couleur d'ar-
gent. Ce poiflbn a comme la dorade , deux nageoi-
res auprès des ouies & deux au-deflus ; une autre qui
s'étend depuis l'anus prefque jufqu'à la queue , &C une
autre fur le dos, qui va prefque d'un bout à l'autre.
La queue femble être compofée de deux nageoires
triangulaires. Rondelet. "SVillughby dit , qu'il n'a
jamais vu de bogues qui euflent un pié de longueur;
que la chair de ce poiflbn eft de bon goût , & qu'elle
ne fait jamais de mal de quelque façon qu'on la pré-
pare. On a de ces poiffbns à Gènes , à Livourne ,
à Naples , à Mefline , &c Foyeir Dorade.
Bogue-ravel, poiflbn qui reffemble beaucoup
au précédent , & qui a cependant le bec plus poin-
tu & le corps plus large & plus court ; on croit qu'il
a été nommé bogue-ravel , parce qu'on le vend or-
dinairement avec tous les petits poiffons que l'on ap-
pelle ravaille, à Montoellier. Rondelet. F. POISSON.
(O
* BOHADE , f. f. ( Hifl. mod. ) c'eft un droit de
corvée qui appartient aux feigneurs dans quelques
provinces ; leurs vaffaux font en vertu de ce droit ,
obligés de leur fournir deux bœufs ou une charrette,
pour aller pour eux au vin , ou en leurs vignobles,
dans le tems de la vendange.
BOHEME , ( Géog. ) royaume de l'Europe; il eft
borné à l'occident par la Franconie ôc le haut Pa-
latinat , à l'orient par la Moravie & la Siléfie , au
nord par la Luface & la Mifnie , & au nid par l'Au-
triche & la Bavière ; ce royaume eft divifé en 1 4 cer-
cles ou diftricls , & Prague en eft la capitale. Le ter-
rein eft fertile & rempli de montagnes & de mines
très-abondantes ; il s'y trouve aufli des pierres pré-
cieufes de plufieurs efpeces : il y a grand nombre de
verreries , dont les ouvrages s'envoyent par toute
l'Europe. Le roi de Bohême eft le premier des élec-
teurs féculiers , & a le titre de grand maître d'hôtel
{Archi-pincerna ) de l'Empire, dont il eft feudataire.
Ce royaume appartient à la maifon d'Autriche. Les
Bohémiens font fort induftrieux , leur langue eft uns
dialecfe de l'Efclavon.
* BOHEMIENS , f. m. pi. ( Hifl. mod. ) c'eft ainfi
qu'on appelle des vagabonds qui font profefïïon de
dire la bonne aventure , à l'infpection des mains. Leur
talent eft de chanter , danfer , & voler. Pafquier en
fait remonter l'origine jufqu'en 1427. Il raconte que
douze pénanciers ou pénitens , qui fe qualifioicnt chré-
tiens de la baffe Egypte , chaffés par les Sarrafns
s'en vinrent à Rome , & fe confefferent au pape , qui
leur enjoignit pour pénitence d'errer fept ans par le
monde , fans coucher fur aucun lit. Il y avoit en-
tr'eux un comte , un duc , & dix hommes de cheval ;
leur fuite étoit de cent vingt perfonnes : arrivés à
B O H
Paris , on les logea à la Chapelle , où on les alloit voir
en foule. Ils avoient aux oreilles des boucles d'ar-
gent , &C les cheveux noirs & crêpés ; leurs femmes
ctoient laides , voleules , & diieules de bonne aven-
ture : l'évêque de Paris les contraignit de s'éloigner ,
& excommunia ceux qui les avoient confultés ; de-
puis ce tems le royaume a été infedé de vagabonds
de la même elpece , auxquels les états d'Orléans te-
nus en 1560, ordonnèrent de fe retirer ious peine
des galères. Les Bifcaycns & autres habitans de la
même contrée ont fuccédé aux premiers bohémiens ,
& on leur en a coniervé le nom. Ils le mêlent aufïi
de voler le peuple ignorant &: fuperftitieux , & de
lui dire la bonne aventure. On en voit moins à pré-
lent qu'on n'en voyoit il y a 30 ans , foit que la po-
lice les ait éclaircis , foit que le peuple devenu ou
moins crédule ou plus pauvre , 8c par conléquent
moins facile à tromper, le métier de bohémien ne foit
plus aufîi bon.
* BOHITIS , f. m. pi. ( Hifi. mod. ) prêtres de l'île
Efpagnole en Amérique. Les Efpagnols les trouvè-
rent en grande vénération dans le pays , quand ils y
arrivèrent. Leurs fondions principales étoient de
prédire l'avenir & de faire la médecine. Ils em-
ployoient à l'une & à l'autre une plante appellée co-
hoba ; la fumée du cohoba refpirée par le nez leur cau-
foimn délire qu'on prenoit pour une fureur divine ;
dans cette fureur ils débitoient avec enthouiiafme un
galimathias, moitié inintelligible, moitié fublime, que
le peuple recevoit comme des infpirations. La maniè-
re dont ils traitoient les maladies étoit plus finguliere.
Quand ils étoient appelles auprès d'un malade , ils
s'enfermoient avec lui , failbient le tour de fon lit
trois ou quatre fois , lui mettoient de leur falive dans
la bouche ; & après plufieurs mouvemens de tête &
autres contorfions , fouffloient fui lui &c lui fuçoient
le cou du côté droit. Ils avoient grand foin aupara-
vant de mettre dans leur bouche un os , une pierre ,
ou un morceau de chair ; car ils en tiroient après l'o-
pération quelque chofe de femblable , qu'ils don-
noient pour la caufe de la maladie , & que les paren-
tes du malade gardoient avec foin afin d'accoucher
heureidement. Pour foulager le malade fatigué de
ces cérémonies , ils lui impofoient légèrement les
mains depuis la tête jufqu'aux pies , ce qui ne l'em-
pêchoit pas de mourir ; alors ils attribuoient fa mort
à quelque péché récent dont elle étoit le châtiment.
Ils n'avoient d'autre part aux facrifîces que celle de
recevoir les pains d'offrande , de les bénir , & de les
diftribucr aux affiftans ; mais ils étoient chargés de
la punition de ceux qui n'obfervoient pas les jeûnes
preferits par la religion. Ils portoient un vêtement
particulier, ck ils pouvoient avoir plufieurs femmes.
Voyc^ Lop. de Gomar. Hifl. des Ind. occid.
BOHMISCH-BROD , ( Gèog. ) c'eft une ville de
Bohème , peu éloignée de Prague.
BOHMISCH-WEYER , ( Géog. ) ville de Bohè-
me , dans le cercle de Pillen fur un lac.
* BOHMISTES , f. m. pi. {Hifl. eccl. ) on appelle
ainfi en Saxe lesiedateurs d'un nommé Jacob Bohm ,
qui eft mort en 1614 ; il a laide plufieurs écrits myf-
tiques , & a donné dans une Théologie obfcure 6c
inintelligible.
BOHOL , ( Géog. ) une des îles Philippines, dans
l'Océan oriental en Àfie.
BOHUSLAW, (Géog.) ville de Pologne, dans
le Palatinat de Kiovie.
BOIANO, (Géog.) petite ville d'Italie, au pie
de l'Apennin , au royaume de Naples, dans le comté
de Molife , près du Biferno. Long. 32. 8. lac. 41. 30.
* BOIARD , f. m. ( Commerce) terme uiité par
ceux qui pèchent la morue pour défigner une civiè-
re à bras , fur laquelle on charge ce poifîon , pour
le tranfporter d'un lieu dans un autre.
B O I
195
* BOIBI , ( Hifi. nat. ) c'eft un ferpent du Brefil,
que les Portugais appellent cobre verde , ferpent verd ;
il eft ordinairement d'environ trois pies de long , &
gros comme le pouce : fa couleur eft verdâtre. Il a
la gueule grande &la langue noire ; il fe tient entre
les pierres & dans les mafures ; fa morfure eft très-
dangereufe : l'on attribue à fa chair les mêmes qua-
lités qu'à celle de la vipère.
* BOICININGA , ( Hifi. nat. ) en Portugais cafi
cavel, c'eft un grand ferpent du Brefil , qui a quatre
ou cinq pies de long ; il eft de la groffeur du bras , fa
couleur eft d'un rouge tirant fur le jaune ; fa tête eft
longue & mince & fa langue fourchue : il a de petits
yeux, mais fes dents font longues & pointues. On
voit attaché à fa queue vers l'extrémité , un corps pa-
rallélépipède , de trois à quatre doigts de long , lar-
ge d'un demi-doigt , & compofé de petits chaînons
entrelacés les uns avec les autres , fecs , unis , lui-
fans , de couleur cendrée , tirant fur le rouge. Ce
corps croît à chaque année d'un anneau ou chaînon ;
il fait le même bruit qu'une fonnette : il annonce de
loin la prélènce du ferpent qui fe tient dans les che-
mins écartés. Il eft fort venimeux & attaque les paf-
fans ; les Indiens, à ce qu'on prétend, portent pour
s'en garantir au bout d'un bâton un morceau de la
racine dite vipérine, dont l'odeur arrête fa furie. On
prépare un remède fingulier contre fa morfure ; c'eft
fon fiel imbibé dans une quantité convenable de
chaux réduite en poudre ou de farine de mais. On
dit que ce fiel eft de couleur d'azur & fi fpiritueux ,
qu'il s'évapore & difparoît à l'air. On ajoute que la
véficule en eft vuide en été ; d'où l'on conjecture
qu'elle eft portée aux gencives de l'animal & qu'elle
eft la fource de fon poifon. On raconte de la viru-
lence de ce poifon des chofes étonnantes ; comme
de fe tranfmettre à travers le bois & le fer , & de
rendre dangereux l'attouchement des corps que le
ferpent a mordus.
* BOIE, f. f. ( Commerce ) efpece de revêche que
les Sayetteurs d'Amiens fabriquent. II y en a de trois
largeurs ; les grands ont trois quartiers de large fur
vingt aulnes de long : les moyennes ont la même lon-
gueur fur un peu moins de largeur ; les étroites n'ont
qu'une demi-aulne de large , fur vingt de long.
* BOIENS, f. m. pi. (Géog. anc.) il y a eu plu-
fieurs peuples de ce nom : les uns en Germanie , les
autres dans les Gaules, en Italie, &: même en Afie.
Ceux de Germanie habitoient la forêt Hercyniene,
& ce font eux qui ont donné nom à la Bohême.
Ceux de la Gaule habitoient entre la Loire &C l'Al-
lier, jadis le pays des ./Eduens, aujourd'hui le Bour-
bonnois.
Ceux des Gaules réfidoient vers les confins de la
Novempopulanie &c dans le pays de Bordeaux. On les
appelle aujourd'hui Bujes,&c leur canton Buch, Burt^t
& Buch ; il eft fi tué fur la Loire.
Les Boiens de la Gaule Cifalpine firent partie des
Gaulois qui entrèrent en Italie en 364 , & s'emparè-
rent de l'Umbrie &£ de l'Etrurie. Près de l'Apennin ,
dit Polybe , on trouve les Ananes , enfuite les Boiens.
Les Boiens de l'Afie, Gaulois d'origine , s'avancè-
rent, fous la conduite de Brennus , jufqu'à Bilance ,
& pénétrèrent jufques dans l'Eolie & l'Ionie , où ils
s'établirent.
BOIER , (Marine.) Voye^ BoYER.
BOINITZ , (Géog.) ville de la haute Hongrie , au
comté de Zoll , remarquable par fes bains & fon fa-
fran. Long. 36. 40. lat. 4$. 41.
BOIOARIENS, f. m. pi. ( Géog. anc. ) peuples de
la Germanie, connus dans les auteurs modernes fous
le nom de Bavarois , & leur pays fous celui de Ba-
vière.
B O I R E , v. ad. & n. (Phvfiobg.) adion par la-
296
B O I
quelle on fait entrer clés liqueurs dans la bouche , puis
dans le gofier pour les conduire à l'eftomac. Voye{
Gosier & Estomac. Il y a deux moyens pour cet
effet, fans compter ceux que nous pourrions mettre
enufage, finous voidions imiter les façons de boire
des animaux : celles qui font les plus ordinaires à
l'homme , font de pomper les liquides , ou de les ver-
fer dans la bouche.
On boiten pompant, en fuçant, quand on boitavec
un chalumeau : les enfans tètent leurs nourrices en
fuçant. On fuce de même en buvant dans un verre ,
dans un biberon, ou loffque l'on boit dans une riviè-
re ou au baffin d'une fontaine. On peut pomper ou
fucer de différentes Manières, avec la bouche feule-
ment, ou avec la bouche & la poitrine enfemble.
Quand on fuce avec la bouche ieulement, on fait
d'elle-même une pompe alpirante, les lèvres fe fer-
ment en rond , 6c laifl'ent une ouverture que je com-
pare à celle du bout de la pompe qui eft dans l'eau ; le
corps de la pompe eft fait par les joues, les mâchoi-
res & le palais ; la langue fait le pifton. Quoique cette
comparailon foit exactement jufte quant au fond, il
y a pourtant quelque différence de la pompe ordinai-
re à celle que nous failons avec notre bouche : ces
différences confiftent en ce gue l'ouverture de la pom-
pe , fon corps & fon pifton , ne changent point leur
groffeur ni leur diamètre , & que les lèvres peuvent
former une ouverture plus ou moins grande , fuivant
le defir que nous avons de pomper plus ou moins de
liqueur à la fois , ou que nous voulons les faire en-
trer avec plus ou moins de vîtefTe : la bouche deve-
nue corps de pompe, s'augmente ou diminue, foit
pour contenir la liqueur pompée , foit pour s'amlter
à la langue : celle-ci qui fait le piften , fe grofht ou
devient petite pour fe proportionner aux différons
diamètres de la bouche : elle prend aufîi différentes
figures pour s'accommoder aux inégalités des dents ,
auxquelles elle doit être appliquée avec autant dejul-
teffe qu'un pifton le doit être au corps de fa pompe.
Ainfi on peut dire que la bouche fait tout ce que peut
faire une pompe , ck que de plus (es parties étant ca-
pables d'un nombre infini de modifications, elles mul-
tiplient les fonctions de la bouche, & en font une
pompe d'une ihu&ure particulière. Pour mettre en
ufage cette pompe , il faut que quelque liquide foit
préîent à l'ouverture des lèvres , 6c qu'il la bouche
entièrement; on approche les joues des mâchoires
pour diminuer la capacité de la bouche : on retire la
langue en arrière , & le liquide vient occuper la pla-
ce que tenoit la langue : mais pour faire 'entrer la
boiffon plus promptement 6c en plus grande quanti-
té , on écarte la mâchoire inférieure de la fupérieu-
re, & la bouche occupant plus d'eipace au dehors,
preffe l'air extérieur qui comprime la liqueur, & la
fait entrer dans la cavité de la bouche, augmentée
par l'éloignement des mâchoires. Si l'on met le bout
d un biberon plein d'eau dans l'ouverture des lèvres,
ôi que l'on faffe les mêmes mouvemens des joues,
des lèvres, de la langue & des mâchoires, le liquide
entrera de. même. Un fiphon, un biberon 6c autres
vaiffeaux de pareille elpece , ne font que l'ouvertu-
re des lèvres prolongées. Lorf que l'on a rempli la bou-
che, il faut la vuider, fi l'on veut pomper ou iucer
de nouveau. Elle ievuide en-dedans quand on avale,
ou en-dehors quand on fedngue, pour ainfi-dire , ce
que l'on avoit pompé ; c'eft ce que '.ont les Cabare-
tiers quand ils goûtent leurs vins. Dans l'un & dans
l'autre cas la langue fait le pinon ; elle s'avance en-
devant, elle preffe le liquide qu'elle jette en-dehors,
fi les lèvres font ouvertes , ou qu'elle chafïe du coté
du gofier, fi la valvule eft levée, & que les lèvres
foient exactement fermées. La féconde manière de
faire entrer des liqueurs dans la bouche en pompant,
dépend de la dilatation de la poitrine ; par cette dila-
B O I
tation l'air extérieur pouffe l'eau & la fait entrer dans
l'ouverture des lèvres; cela fe fait, en infpirant. On
infpire de l'eau ou de l'air enfemble ou féparément :
quand on infpire du liquide feul, cela le nomrae/i-
cer ; 6c lori'que l'on infpire l'un & l'autre , cela s'ap-
pelle humer : dans cette façon de boire, l'air prend la
route de la trachée-artere, pendant que l'eau refte
dans la bouche. Pour humer on forme ordinairement
une ouverture aux lèvres plus grande que pour pom-
per. On éloigne les lèvres des mâchoires ; on levé le
bout de la langue du côté du palais ; on relevé la val-
vule du gofier , & on infpire. L'ouverture des lèvres
doit être plus grande , pour que l'air extérieur qui
preffe feau que l'on veut humer, ait moins de peine
à la faire entrer dans la bouche. On éloigne des lè-
vres les mâchoires pour former une efpace capable
de contenir l'eau ; on relevé le bout de la langue ,
qui, comme un rempart, retient l'eau, l'empêche
de fuivre l'air qui entre dans la trachée-artere ; on
relevé la valvule du gofier pour que l'air puiiie paf-
fer; 6c enfin en dilatant la poitrine, on inlpire pour
que l'air extérieur preffe le iiquide , & l'oblige d'en-
trer dans la bouche avec lui. C'eft ainfi que l'on prend
un bouillon , du thé , du caffé & autres iiqueurs chau-
des.
On peut verfer les liquides dans la bouche de trois
manières : dans la première on verie doucement à
mefure que la langue conduit la boiilon dans le go-
fier ; c'eft une façon affez ordinaire de boire. Dans la
féconde on verie brufquement tout-à-la-fois, 6c la
langue conduit le tout dans le gofier avec la même
vîteile; c'eft ce que l'on appelle fubler: 6c la troiiie-
me eft de verler dans la bouche ayant la tête renver-
fée ; c'eft ce que l'on appelle boire au galet. Quand on
boa de la première façon , la langue peut prendre
deux iituations différentes; elle peut avoir fon bout
appliqué à la partie du palais qui eft la plus proche
tics dents de devant, fans quitter cette place, quoi-
qu'elle le meuve pour avaler, parce qu'il luffit qu'el-
le fe baiffe pour fon milieu, en décrivant une ligne
courbe qui laiffe deux elpaces fur les côtés par où
l'eau monte dans le vuide que la courbure de la
langue laiffe entr'elle & le palais ; après quoi la lan-
gue pouffe l'eau dans le goiier, en approchant ion
milieu au palais , fans que ion bout quitte fa premiè-
re place, 6c pour lors le milieu de la langue ne fait
quefe bailler pour recevoir, & fe hauffer pour pou£
1er les liquides dans le gofier juiqu'à ce qu'on ait tout
avalé. La leconde iituation que peut prendre la lan-
gue eft d'avancer au-delà des dents , & placer fon
bout au-defl'ous du bord du verre qui répand fur
elle fa liqueur, laquelle eft pouffée de même dans le
goiier lori'que la langue ie relevé , 6c qu'elle s'appli-
que au palais. Les adions defabler & de boire au ga-
let demandent d'autres mouvemens , dans Je détail
delquels nous n'entrerons pas ici. V. Mém. de l'aca-
démie royale des Sciences , année ijio.page iSS. &fui-
vantes. (Z.)
Boire, faire bmre les peaux , terme de Chamoifeur
& Je Mégijfier , qui figniiiey etter à la rivière les peaux
de chèvre, de mouton, ou autres animaux iembla-
bles, pour les y faire tremper , après qu'elles ont paf-
fé fur le chevalet, & qu'elles y ont été préparées
avec le couteau de rivière du côté de la chair. On
les y laiffe plus ou moins de tems, félon la chaleur
de la faifon. Cette façon fe donne quand on eft prêt
à les travailler de fleur pour la féconde-fois. Voye^
Chamois.
Boire dans fon blanc , (Manège.} exprefîîon figu-
rée qui lignifie qu'un cheval bay al^an , &c. a le ne^
tout blanc. Boire la bride, fe dit iorlque les montans
ue la bride , n'étant pas affez allonges , le mors force
les coins de la bouche du cheval, & les fait rider.
Faire boire un cheval au feau, c'eft lui apporter un feau
d'eau
B O I
d'eau pour le faire boire dans l'écurie fans le déranger
de la place. (^)
Boire , terme de papier ; on dit que du papier boit,
lorfque l'encre pénètre à travers , & pai oit de l'au-
tre côté delà feuille; le papier qui boit ne. vaut rien
pour écrire , parce que dans ce cas l'encre s'étend &
brouille l'écriture. Ce détaut arrive au papier faute
d'avoir été bien collé, Se quand il cil: trop humide.
Boire , terme de Tailleur; les tailleurs diient qu'une
étoffe boit, lorfque de deux litières qui font jointes en-
femble par une couture, l'une piiiïe un peu, Se eft
coufue plus lâche que l'autre.
* BOIS , f. m. ( (Economie rujliq. ) ce terme a deux
grandes acceptions ; ou il fc prend pour cette fubf-
tance ou matière dure & folide que nous tirons de
l'intérieur des arbres & arbrifleaux ; ou pour un
grand canton de terre planté d'arbres propres à la
conflruction des édifices , au charronage , au feiage ,
au chauffage , &c.
Si l'on jette un coup d'œil fur la confommation
prodigieufe de bois qui fe fait par la charpente , la
meniulerie , d'autres Arts , & par les feux des forges ,
des fonderies , des verreries , & des cheminées , on
concevra facilement de quelle importance doivent
avoir été en tout tems , Se chez toutes les nations ,
pour le public & pour les particuliers , la plantation ,
la culture , Se la confervation des forêts ou des bois ,
en prenant ce terme félon la ieconde acception. Com-
ment fe peut-il donc que les hommes foient reliés fi
long- tems dans les préjugés fur ces objets , & qu'au
lieu de tendre fans ceffe à la perfedion, ils le foient au
contraire de plus en plus entêtés de méthodes qui les
éloignoient de leur but? Car c'eft-là qu'ils en étoient ;
c'ell-là qu'ils en font encore pour la plupart , com-
me nous pourrions le démontrer par la comparai-
fon des règles d'agriculture qu'ils ont preferites , Se
qu'on fuit fur les bois , Se par celles que l'expérience
Se la philôiophie viennent d'indiquer à M. de Buffon.
Mais notre objet eft d'expofer la vérité , & non pas
do l'affocier à l'erreur : l'erreur ne peut être trop
ignorée, & la vérité trop connue, fur- tout quand
elle embraûe un objet aulïï coniidérable que l'ali-
ment du feu , c\: le fécond d'entre les matériaux qui
entrent dans la conflruction des édifices. Nous ob-
ferverons feulement que l'extrait que nous allons
donner des différens mémoires que M. de Buffon a pu-
bliés, non feulement pourra éclairer , fur la culture ,
l'amélioration & la confervation des bois , mais pour-
ra même devenir une grande leçon pour les philolo-
phes de le méfier de l'analogie ; car il paroît que l'i-
gnorance dans laquelle il femble qu'on aime encore
à relier, malgré le grand intérêt qu'on a d'en fortir ,
ne vient dans Ion origine que d'avoir tranfporté les
règles de l'agriculture des jardins à l'agriculture des
forêts. La nature a les loix , qui ne nous paroiffent
peut-être li générales , Se s'étendre uniformément à
un fi grand nombre d'êtres , que parce que nous n'a-
vons pas la patience ou la fagacité de connoître la
conduite qu'elle tient dans la production Se la con-
fervation de chaque individu. Nous nous attachons
au gros de les opérations : mais les finelîes de fa main
d'œuvre , s'il eu permis de parler ainli , nous échap-
pent fans celle ; & nous portillons dans nos erreurs jul-
qu'à ce qu'il vienne quelqu'homme de génie , alliez
ami des hommes , pour chercher la vérité ; Se j'ajoû-
terois volontiers , alTez courageux pour la commu-
niquer quand il l'a trouvée.
Le nom de bois , pris généralement , comprend les
forets , les bois , les haies, Se les bluffons ou bocages.
L'on entend vulgairement fous le nom dejorei , un
bois qui embraffe une fort grande étendue de pays.
Sous le nom de bois , l'on comprend un bois de
moyenne étendue.
Le parc cil un bois enfermé de murs.
Tome II,
B O I
297
Les noms de haie Se de buifjun ou bocage , font tîn-
tes en quelques endroits pour lignifier un bois de peu
d'arpens.
Néanmoins l'ufage fait fouvent employer indiffé-
remment les noms de forêt Se de bois ; il y a même
des bois de très -grande étendue, des forêts qui
occupent peu d'efpace , & des bois qui ne font ap-
pelles que haies ou buifjons, Se chaumes; comme les
chaumes d'Avenay près Beligny-fur-Ouche , dans
le bailliage de Dijon en France , qui contiennent au-
tant d'arpens que des bois de moyenne grandeur.
Toutes ces fortes de bois font plantés d'arbres , qui
font ou en futaie ou en taillis.
Futaie fe dit des arbres qu'on laiffe croître fans les
couper que fort tard. Voyc^ Futaie.
Taillis , des arbres dont la coupe fe fait de tems en
tems , & plutôt que celle de la futaie. V. Taillis.
Il y a des forêts qui font toutes en futaie ; d'autres
toutes en taillis : mais la plupart font mêlées de l'une
& de l'autre forte.
Quand on parle de bois de futaie Se de taillis , on
conlidere le bois debout & fur le canton même qui en
eft couvert , & formant des forêts , &c.
Dans les autres occalions , le terme bois s'entend
du bois abattu Se delliné aux ufages de la vie civile :
c'ell fous ces deux points de vue que nous allons con-
fidérer le bois.
Bois fur pié ; yqyeç Fop.Èt. Le bois qui étoit au-
trefois très -commun en France, maintenant luffit à
peine aux ufages indifpenfabîes , & l'on efl menacé
pour l'avenir d'en manquer absolument. Ceux qui
font prépoiés à la confervation des bois , fe plaignent
eux-mêmes de leur déperiffement : mais ce n'ell pas
allez de le plaindre d'un mal qu'on lent déjà , & qui
ne peut qu'augmenter avec le tems , il en faut cher-
cher le remède ; & tout bon citoyen doit donner au
public les expériences & les réflexions qu'il peut
avoir faites à cet égard.
Tous nos projets fur les bois doivent fe réduire à
tâcher de conferver ceux qui nous relient , Se à re-
nouveller une partie de ceux que nous av<
truits.
Tout le bois de fervice du royaume çonfifte dans
les forêts qui appartiennent à faMajeflé , dans les ré-
ferves des eccléliafliques Se des gens de main mor-
te , & enfin dans les baliveaux , que l'ordonnance
oblige de laiffer dans tous les bois.
On fait par une expérience déjà trop longue , que
le bois des baliveaux n'ell pas d'une bonne qualité ,
& que d'ailleurs ces baliveaux font tort au taillis, t'oy.
Baliveaux. M. de Buffon a obfervé les effets de la
gelée du printems dans deux cantons voilins de bois
taillis: on avoiteonfervé dans l'un tous les baliveaux
de quatre coupes fucceffives ; dans l'autre , on n'avoit
réfervé que les baliveaux delà coupe actuelle: M.
de Buffon a reconnu que la gelée avoit fait un fi grand
tort au taillis furchargé de baliveaux , que l'autre
taillis l'a devance de près de cinq ans fur douze.
L'cxpolition étoit la même : M. de Buffon a fondé le
terrein en différens endroits ; il étoit femblable : ainli
il ne peut attribuer cette différence qu'à l'ombre Se
à l'humidité que les baliveaux jettoient lur le taillis ,
& à l'obllacle qu'ils formoient au deffechement de
cette humidité, en interrompant l'action du vent &
du foleil.
Les arbres qui pouffent vigoureufement en bois,
produifent rarement beaucoupde fruit ; les baliveaux
le chargent d'une grande quantité de glands , 6c an-
noncent par là leur foibleffe. On imaginerait 1
gland devrait repeupler & garnir les bois , ma 1 cela
le réduit à bien peu de choie ; car de plufieurs m
de ces graines qui tombent au pie de «.,
peine en voit-on lever quelques centaines , &
tit nombre eft bientôt étouffé par l'ombre conti
Pp
î93
B O I
le manque d'air , ou fupprimé par le dégouttement
l'arbre ,& par la gelée, qui cil toujours plus vive
&
de l'arbre ,& par la gelée, qui eit toujours plus vive
près de la iiirface de la terre , ou enfin détruit par les
obftacle s eue ces jeunes plantes trouvent dans un ter-
rein traverlé d'une infinité de racines & d'herbes de
toute efpece. On trouve , à la vérité , quelques ar-
bres de brin dans les taillis. Ces arbres viennent de
graine ; car le chêne ne le multiplie pas par rejettons,
& ne pouffe pas de la racine: mais les arbres de brin
font ordinairement dans les endroits clairs des bois ,
Loin des gros baliveaux , ce font dûs aux mulots ou
aux dffêatfX , qui en transportant les glands en fement
une grande quantité. M. de Buffon a fû mettre à pro-
fit ces graines que les oifeaux laiffent tomber. Il avoit
obfervé dans un champ , qui depuis trois ou quatre
ans étoit demeuré fans culture , qu'autour de quel-
ques petits bluffons , qui' s'y trouvoient fort loin les
uns des autres , plufieurs petits chênes avoient paru
tout d'un coup. M. de Buffon reconnut bientôt par
fesyeux que cette plantation appartenoit à des geais ,
qui en fortant des bois venofent d'habitude le placer
fur ces buiffons pour manger leur gland , & en lail-
foient tomber la plus grande partie , qu'ils ne le don-
noient jamais la peine de ramaffer. Dans un terrein
que M. de Buffon a planté dans la fuite , il a eu foin
de mettre de petits buiffens ; les oiieaux s'en font em-
parés , <k ont garni les environs d'une grande quan-
tité de jeunes chênes.
Les réferves établies dans les bois des ëccléfîàfti-
ques. & des gens de main-morte , ne font pas finettes
au défaut des baliveaux. H faudrait établir un tems
fixe pour la coupe de ces futaies en réferve ; ce tems
feroit plus ou moins grand , félon la qualité du ter-
rein. On pourroit en régler les coupes à 50 ans dans
un terrein de 2 pies j de profondeur , à 70 dans un
terrein de 3 pies ^, &c h. 100 ans dans un terrein de
4 pies * & au-delà de profondeur. M. de Buffon don-
ne ces termes d'après les obfervàtions qu'il a faites
au moyen d'une tarriere haute de cinq pies , avec la-
quelle il a fondé quantité de terreins , où il à examiné
en même tems la hauteur , la groffeur & l'âge des
arbres : cela fe trouve affez julle pour les terres for-
tes & pétriffables. Dans les terres légères & fâblon-
neufes , on pourroit fixer les termes des coupes à 40 ,
60 & 80 ans : on perdroit à attendre plus long-tems ;
& il vaudrait infiniment mieux garder du bois de fer-
vice dans des magafins , que de le laiffer fur pié dans
les forêts , où il ne peut manquer de s'altérer après
un certain âge.
Tous ceux qui connoiffent un peu les bois, favent
que la gelée du printems eft le fléau des taillis ; c'eft
elle qui dans les endroits bas & dans les petits val-
lons, fupprimé continuellement les jeunes rejettons,
& empêche le bois de s'élever ; en un mot , elle fait
aux bois un auffi grand tort qu'à toutes les autres pro-
ductions de la terre ; & fi ce tort a jufqu'ici été moins
connu , moins fenfible , c'eft que la joùiffance d'un
taillis étant éloignée , le propriétaire y fait moins
d'attention , & fe confoïe plus aifément de la perte
qu'il t'ait : cependant cette perte n'eft pas moins réel-
le , puifqu'elle recule l'on revenu de plufieurs années.
M. de Buffon a tâché de prévenir , autant qu'il eft
pofîïble , les mauvais effets de la gelée , en étudiant
la façon dont elle agit ; & il a fait fur cela des expé-
riences qui lui ont appris , que la gelée agit bien plus
violemment à Pexpofition du midi , qu'à l'expofition
du nord ; qu'elle fait tout périr à l'abri du vent , tan-
dis qu'elle épargne tout dans les endroits où il peut
paffer librement. Cette obfervation , qui eft confian-
te , fournit un moyen de préferver de la gelée quel-
ques endroits des taillis , au moins pendant les deux
ou trois premières années , qui font le tems critique,
&où elle les attaque avec plus d'avantage. Ce moyen
confifte à obferver , quand on les abat , de commen-
B O I
ccr la coupe du côté du nord : il eft aiSé d'y obliger
les marchands de bois, en mettant cette claule dans
fon marché ; & M. de Buffon s'eft déjà bien trouvé
d'avoir pris cette précaution pour fes taillis.
Un père de famille, un homme arrangé qui fe trou-
ve propriétaire d'une quantité un peu conlidérable
de bois taillis , commence par les faire arpenter , bor-
ner , divifer , & mettre en coupe réglée ; il s'imagine
que c'eft-là le plus haut point d'eeconomie ; tous les
ans il vend le même nombre d'arpens ; de cette façon
fes bois deviennent un revenu annuel, il le lait bon
gré de cette règle; & c'eft cette apparence d'ordre
qui a fait prendre faveur aux coupes réglées : cepen-
dant il s'en faut bien que ce foit là le moyen de tirer
de les taillis tout le profit qu'on en peut tirer. Ces
coupes réglées ne font bonnes que pour ceux qui ont
des terres éloignées qu'ils ne peuvent vifiter ; la cou-
pe réglée de leurs bois eft une efpece de ferme ; ils
comptent fur le produit , & le reçoivent fans s'être
donné aucun foin ; cela doit convenir à grand nom-
bre de gens : mais pour ceux dont l'habitation fe
trouve fixée à la campagne , & même pour ceux qui
vont y paffer un certain tems toutes les années , il
leur eft facile de mieux ordonner les coupes de leurs
bois taillis. En général , on peut affùrer que dans les
bons terreins on gagnera à attendre , & que dans
les terreins où il n'y a pas de fond , il faudra les cou-
per fort jeunes : mais il feroit bien à Souhaiter qu'on
pût donner de la précifion à cette règle , & détermi-
ner au jufte l'âge où l'on doit couper les taillis. Cet
âge eft celui où l'accroiffement du bois commence à
diminuer. Dans les premières années , le bois croît
de plus en plus, c'eft-à-dire , la production de la fé-
conde année eft plus confidérable que celle de la pre-
mière , l'accroiffement de la troisième année eft plus
grand que celui de la féconde ; ainli i'accroiffement
du bois augmente jufqu'à un certain âge , après quoi
il diminue : c'eft ce point , ce maximum qu'il faut fai-
fir , pour tirer de fon taillis tout l'avantage & tout le
profit poffible.
M. de Buffon a donné , dans les Mémoires de t 'Aca-
démie , année IJ38 , le moyen qu'il a trouvé d'aug-
menter la force &c la Solidité du bois : rien n'eftplus
fimple ; car il ne s'agit que d'écorcer les arbres, &
les laiffer ainfi fécher & mourir fur pié avant que de
les abattre ; l'aubier devient par cette opération aufii
dur que le cœur de chêne ; il augmente considérable-
ment de force & de denlité , comme M. de Buffon s'en
eft affùré par un grand nombre d'expériences ; &£. les
louches de ces arbres écorcés & léchés lur pié , ne
laiffent pas de repouffer & de reproduire des rejet-
tons : ainfi il n'y a pas le moindre inconvénient à éta-
blir cette pratique , qui , en augmentant la force &c
la durée du bois mis en œuvre , doit en diminuer la
confommation , & par conféquent doit être comptée
au nombre des moyens de conlerver les bois. Les Al-
lemands , chez qui les Hollanclois vont chercher leurs
bois de menuiferie , n'ont point d'autre fecret pour
leur donner cette qualité qui les rend fi propres à être
travaillés. Au printems, lorfque l'écorce commence
à le lâcher , on écorce l'arbre ; on lui lailie paffer l'an-
née : le printems lùivant , l'arbre écorcé ne pouffe
plus que de petites feuilles ; on lui laiffe achever en-
core cette année fur pié ; on ne le coupe que dans
la faifon où l'on coupe les arbres.
Règles pour femer le bois. Pour femer une terre
forte & glaifeufe , il faut conlerver le gland pendant
l'hy ver dans de la terre , en faifant un lit de deux
pouces de gland fur un lit de terre d'un demi- pié ,
puis un lit de terre & un lit de gland , toujours al-
ternativement, & enfin en couvrant le magafind'un
pié de terre ; pour que la gelée ne puiffe y pénétrer.
On en tirera le gland au commencement de Mars,
& on le plantera à un pié de diftance. Ces glands qui
B O I
B O I
199
ont germé, font déjà autant de jeunes chênes , & le
fucces d'une plantation faite de cette façon n'eit
pas douteux ; la dépenfe même n'eit pas confidéra-
ble , car il ne faut qu'un feul labour. Si l'on pouvoit
fe garantir des mulots 6c des oifeaux, on réuffiroit
tout de même & fans aucune dépenfe , en mettant
en automne le gland fous l'herbe ; car il perce & s'en-
fonce de lui-même , & réuiîit à merveille fans aucune
culture dans les friches dont le galon eft fin , ferré 6c
bien garni , & qui indique prelque toujours un ter-
rein ferme & mêlé de glaifc.
Si l'on veut femer du bois dans les terreins qui font
d'une nature moyenne entre les terres fortes & les
terres légères , on fera bien de femer de l'avoine avec
les glands , pour prévenir la naiffance des mauvaifes
herbes , qui font plus abondantes dans ces efpeces de
terreins , que dans les terres fortes 6c les terres légè-
res ; car ces mauvaifes herbes , dont la plupart lont
vivaces , font beaucoup plus de tort aux jeunes chê-
nes , que l'avoine qui ceffe de pouffer au mois de
Juillet.
M. de Buffon a reconnu par plufieurs expérien-
ces , que c'eft perdre de l'argent & du tems que de
faire arracher de jeunes arbres dans les bois pour
les tranfplanter clans des endroits où on eft obligé de
les abandonner & de les laiffer fans culture ; & que
quand on veut faire des plantations . confidérables
d'autres arbres que de chêne ou de hêtre dont les grai-
nes font fortes 6c furmontent prefque tous les obfta-
cles , il faut faire des pépinières où on puiffe élever
& foigner les jeunes arbres pendant les deux premiè-
res années , après quoi on les pourra planter avec
fuccès pour faire des bois.
Dans les terreins fecs , légers , mêlés de gravier ,
& dont le fol n'a que peu de profondeur , il faut faire
labourer une feule fois, & femer en nrême tems les
glands avant l'hyver. Si l'on ne feme qirau printems ,
la chaleur du foleil fait périr les graines. Si on fe con-
tente de les jetter ou de les placer fur la terre , comme
dans les terreins forts , elles fe deffechent 6c périffent ;
parce que l'herbe qui fait le gafon de ces terres légè-
res, n'eit pas affez garnie & affez épaiffe pour les ga-
rantir de la gelée pendant l'hyver, & de l'ardeur du
foleil au printems. Les jeunes arbres arrachés dans
les bois , réuiîiffent encore moins dans ces terreins
que clans les terres fortes ; & lî on veut les planter,
il faut le faire avant l'hyver, avec de jeunes plants
pris en pépinière.
Le produit d'un terrein peut fe mefurer par la cul-
ture ; plus on travaille la terre , plus elle rapporte
de fruits: mais cette vérité d'ailleurs fi utile, fourbe
quelques exceptions ; & dans les bois une culture pré-
maturée & mal entendue , caufe la difette , au lieu de
produire l'abondance. Par exemple, on imagine que la
meilleure manière de mettre un terrein en nature de
bois , eft de nettoyer ce terrein & de le bien cultiver
avant que de femer le gland ou les autres graines qui
doivent un jour le couvrirde bois; &M. de Buffonn'a
été defabufé de ce préjugé qui paroît fi raifonnable,
que par une longue fuite d'obfervations. M. de Buf-
fon a fait des femis confidérables 6c des plantations
affez vaftes ; il les a faites avec précaution: il a fou-
vent fait arracher les genièvres , les bruyères , & juf-
qu'aux moindres plantes qu'il regardoit comme nuifi-
bles , pour cultiver a fond & par plufieurs labours les
terreins qu'il vouloit enlemenccr. M. de Buffon ne
doutoit pas du fuccès d'un femis tait avec tous ces
foins: mais au bout de quelques années il a reconnu
que ces mêmes foins n'avoient fervi qu'à retarder
Faccroiffement des jeunes plants; & que cotte cul-
turc précédente qui lui avoit donné tant d'eipéran-
ce , lui avoit caufe des pertes confidérables : ordinai-
rement on dépenfe pour acquérir.; ici la dépenfe nuit
à l'acquiiition.
Tome II.
Si l'on veut donc réuiïir à faire croître du bois dans
un terrein, de quelque qualité qu'il (bit, il faut imiter
la nature , if faut y planter & y femer des épines 6c
des buiffons qui puiffent rompre la force du vent ,
diminuer celle de la gelée, & s'oppofer à l'intempé-
rie des faifons. Ces buiffons font des abris qui garan-
tiffent les jeunes plants , & les protègent contre l'ar-
deur du foleil & la rigueur des frimats. Un terrein
couvert , ou plutôt à demi-couvert, de genièvre, de
bruyères , eft un bois à moitié fait , & qui peut-être a
dix ans d'avance fur un terrein net ôc cultivé.
Pour convertir en bois un champ , ou tout autre
terrein cultivé , le plus difficile eft de faire du cou-
vert. Si l'on abandonne un champ , il faut vingt ou
trente ans à la nature pour y faire croître des épines
& des genièvres : ici il faut une culture qui dans un
an ou deux puiffe mettre le terrein au même état où
il fe trouve après une non-culture de trente ans.
Le moyen de fuppléer aux labours , & preiqu'à
toutes les autres efpeces de culture , c'eft de couper
les jeunes plants jufqu'auprès de terre : ce moyen ,
tout fimple qu'il paroît , eft d'une utilité infinie ;
6c lorfqu'il eft mis en œuvre à propos , il accélère de
plufieurs années le fuccès d'une plantation.
Tous les terreins peuvent fe réduire à deux efpe-
ces; lavoir, les terreins forts Si les terreins légers:
cette divifion , quelque vague qu'elle paroiffe , eft
fuffifante. Si l'on veut femer dans un terrein lé-
ger, on peut le faire labourer ; cette opération fait
d'autant plus d'eftèt , & caufe d'autant moins de dé-
penfe , que le terrein eft plus léger ; il ne faut qu'un
feul labour , & on feme le gland en fuivantla char-
rue. Comme ces terreins font ordinairement fecs 6c
brùlans , il ne faut point arracher les mauvaifes her-
bes que produit l'été fuivant ; elles entretiennent une
fraîcheur bienfaifante, 6c garantiffent les petits chê-
nes de l'ardeur du foleil; enfuite venant à périr &
à fe lécher pendant l'automne, elles fervent de chau-
me & d'abri pendant l'hyver , & empêchent les ra-
cines de geler. Il ne faut donc aucune efpece de cul-
ture dans ces terreins fablonneux; il ne faut qu'un
peu de couvert 6c d'abri pour faire réuffir un lèmis
dans les terreins de cette efpece. Mais il eft bien plus
difficile de faire croître du bois dans des terreins forts,
S: il tant une pratique toute différente : dans ces ter-
reins les premiers labours font inutiles , & fouvent
nuifibles; la meilleure manière cil de planter les
glands à la pioche , fans aucune culture précédente :
mais il ne faut pas les abandonner comme les pre-
miers au point de les perdre de vue & de n'y plus pen-
fer ; il faut au contraire les vilîter fouvent ; il faut
obierver la hauteur à laquelle ils fe font élevés la
première année , obferver enfuite s'ils ont pouffé
plus vigoureuiement à la féconde : tant que leur ac-
croiffement va en augmentant , ou même tant qu'il
fe foùtient fur le même pic , il ne faut pas y toucher.
Mais on s'apperçoit ordinairement à la troifieme an-
née que l'accroiffement va en diminuant ; & fi on
attend la quatrième, la cinquième, la fixieme , &c.
on reconnoitra que l'accroiffement de chaque année
eft toujours plus petit : ainfi dès qu'on s'appercevra
(juc fans qu'il y ait eu de gelées ou d'autres accidens,
les jeunes arbres commencent à croître de moins en
moins , il faut les faire couper jtifqu'à terre au mois
de Mars , 6c l'on gagnera un grand nombre d'années.
Le jeune arbre livré à lui-même dans un terrein fort
Cv ferre , ne peut étendre fes racines ; la terre trop
dure les fait refouler fur elles-mêmes ; les petits fi-
lets tendres 6c herbacées qui doivent nourrir l'arbre &
former la nouvelle production de l'année, ne peu-
vent pénétrer la fubftance trop ferme de la terre ;
ainfi l'arbre languit privé de nourriture , & la
production annuelle diminue tort fouvent jufqu'au
point de ne donner que des teuilles & quelques bon-
Ppij
JOO
E O I
tons. Si vous coupez cet arbre, toute la force de la
fève fe porte aux racines , elle en développe tous les
germes , & agiffant avec plus de puilïance contre le
terrein qui leur réfifte , les jeunes racines s'ouvrent
des chemins nouveaux, & divifent par le îiircroît de
leur force- cette terre qu'elles avoient jufqu'alors vai-
nement attaquée; elles y trouvent abondamment des
fucs nourriciers ; & dès qu'elles s'y font , pour ainfi
dire, établies, elles poulîent avec vigueur au-dehors
la furabondance de leur nourriture , & produilent
des la première année un jet plus vigoureux & plus
élevé , que ne l'étoit l'ancienne tige de trois ans.
Dans un terrein qui n'eft que ferme , fans être trop
dur , il fuffira de couper une feule fois le jeune plant
pour le faire réuflir.
Les auteurs d'agriculure font bien éloignés de pen-
fer comme M. de Buffon fur ce fujet ; ils répètent tous
les uns après les autres que pour avoir une futaie ,
pour avoir des arbres d'une belle venue , il faut bien
fè garder de couper le fommet des jeunes plantes , èc
qu'il faut conferveravec grand foin le mo n tant, c'eft-
à-dire , le jet principal. Ce confeil n'eft bon que
dans certains cas particuliers : mais il eft générale-
ment vrai, & M. de Buftbn affùre, après un très-
grand nombre d'expériences , que rien n'eft plus effi-
cace pour redreffer les arbres , & pour leur donner
une tige droite , que la coupe faite au pié. M. de Bur-
fon a même obfervé fouvent que les futaies venues
de graine ou de jeunes plants , n'éîoient pas fi belles
ni li droites que les futaies venues fur de jeunes lou-
ches : ainfi on ne doit pas héfiter à mettre en prati-
que cette efpece de culture , ii facile &c ii peu coù-
teufe.
Il n'eft pas néceffaire d'avertir qu'elle eft encore
plusindifpenfable lorfque les jeunes plants ont été ge-
lés ; il n'y a pas d'autre moyen pour les rétablir que
de les couper. On auroit dû , par exemple , réceper
tous les taillis de deux ou trois ans qui ont été gelés
au mois d'Octcbre 1740: jamais gelée d'automne
n'a fait autant de mal. La feule façon d'y remédier ,
c'eft de couper : on faciïrîe trois ans pour n'en pas
perdre dix ou douze.
Le chêne & le hêtre font les feuls arbres , à l'ex-
ception des pins & de quelques autres de moindre
valeur , qu'on puiffe femer avec fuccès dans les ter-
reins incultes. Le hêtre peut être lemé dans les ter-
reins légers ; la graine ne peut pas fortir dans une
terre forte , parce qu'elle poulie au-dehors Ion enve-
loppe au-deffus de la tige naiffante ; ainfi il lui faut
une terre meuble & facile à divifer , fans quoi elle
refte & pourrit. Le chêne peut être lemé dans pref-
quetous lesterreins. M. de Buftbn a donné en 1739,
dans les Mémoires de l'Académie , les différens procé-
dés fuivant les diftérens terreins. Toutes les autres
efpeces d'arbres peuvent être élevées en pépinière ,
& enfuite tranfplantées à l'âge de deux ou trois ans.
Il faut éviter de mettre enfemble les arbres qui ne
fe conviennent pas : le chêne craint le voifinage des
pins , des lapins , des hêtres , & de tous les arbres qui
pouffent de groffes racines dans la profondeur du fol.
En général, pour tirer le plusd'avantage d'un terrein,
il faut planter enfemble les arbres qui tirent la lub-
ftance du fond en pouffant leurs racines à une grande
profondeur , & d'autres arbres qui puiftent tirer leur
nourriture prefque de la furface de la terre , comme
font tous les arbres dont les racines s'étendent &
courent à quelques pouces feulement de profondeur,
fans pénétrer plus avant.
Lorfqu'on veut femer du bois, il faut attendre une
année abondante en glands , non-leulement parce
qu'ils font meilleurs & moins chers , mais encore
parce qu'ils ne font pas dévorés par les oifeaux , les
mulots & les fanglicrs , qui trouvant abondamment
du gland dans les forêts, ne viendront pas attaquer
B O I
votre femis : ce qui ne manque jamais d'arriver dans
des années de dilette.
BOIS ; accroiffement du bois ; formation du bois ; tex-
ture du bois ; force & réjïjlance du bois. Une femence
d'arbre , un gland qu'on jette en terre au printems ,
produit au bout de quelques lemaines un petit jet ten-
dre & herbacée, qui augmente, s'étend, grofîït, dur-
cit , & contient déjà des la première année un filet
de lubftance ligneufe. A l'extrémité de ce petit arbre
eft un bouton qui s'épanouit l'année fuivante,8t dont
il fort un fécond jet fembiable à celui de la premiè-
re année , mais plus vigoureux, qui groflit & s'étend
davantage , durcit dans le même tems , & produit
aufli à fon extrémité fupérieure un autre bouton qui
contient le jet de la troilieme année , & ainfides au-
tres , jufqu'à ce que l'arbre loit parvenu à toute fa
hauteur: chacun de ces boutons eft une femence qui
contient le petit arbre de chaque année. L'accroilîe-
ment des arbres en hauteur le fait donc par plufieurs
productions femblables & annuelles ; de forte qu'un
arbre de cent pies de haut eft compolé dans fa lon-
gueur de plufieurs petits arbres mis bout à bout ; le
plus grand n'a pas fouvent deux pies de longueur.
Tous ces petits arbres de chaque année ne changent
jamais de hauteur , ils exiftent dans un arbre de cent
ans fans avoir grofli ni grandi ; ils font feulement de-
venus plus folides. Voilà comment le fait l'accroifîe-
ment en hauteur ; l'accroiffement en grofteur en dé-
pend. Ce bouton qui fait le fommet du petit arbre de
la première année , tire fa nourriture à travers la
lubftance & le corps même de ce petit arbre : mais
les principaux canaux qui fervent à conduire la fève
fe trouvent entre l'écorce & le filet ligneux. L'action
de cette fève en mouvement dilate ces canaux & les
fait groftir , tandis que le bouton en s'élevant les tire
& les allonge de plus la fève en y coulant conti-
nuellement jRïépole des parties fixes , qui en aug-
mentent la folidité ; ainft dès la féconde année un pe-
tit arbre contient déjà dans fon milieu un 'filet li-
gneux en forme de cône fort allongé , qui eft la pro-
duction en iw'i de la ire année, 6c une couche ligneufe
aufti conique , qui envelope ce premier filet & le fur-
monte , ck qui eft la production de la féconde année.
La troilieme couche le forme comme la féconde ; il
en eft de même de toutes les autres , qui s'envelop-
pent fucceftivement & continuellement ; de forte
qu'un gros arbre eft un compole d'un grand nombre
-de cônes ligneux , qui s'enveloppent & le recouvrent
tant que l'arbre groilit. Lorfqu'on vient à l'abattre ,
on compte ailémentlur la coupe tranfverfale du tronc
le nombre de ces cônes , dont les ferions forment des
cercles concentriques ; & on reconnoît l'âge de l'ar-
bre par le nombre de ces cercles ; car ils fontdiftinc-
tement féparés les uns des autres. Dans un chêne vi-
goureux FépaifTeur de chaque couche eft de deux*ou
trois lignes ; cette épaiffeur eft d'un bois dur & folide:
mais la lubftance qui unit enfemble ces cônes li-
gneux n'eft pas à beaucoup près aufti ferme ; c'eft la
partie foible du bois dont l'organifation eft différente
de celle des cônes ligneux , & dépend de la façon
dont ces cônes s'attachent & s'unifient les uns aux
autres , que M. de Buffon explique en deux mots. Les
canaux longitudinaux qui^portent la nourriture au
bouton , non-feulement prennent de l'étendue & ac-
quièrent de la folidité par l'action & le dépôt de la
levé , mais ils cherchent encore à s'étendre d'une
autre façon ; ils fe ramifient dans toute leur longueur,
& pouffent de petits fils , qui d'un côté vont produi-
re l'écorce , & de l'autre vont s'attacher au bois de
l'année précédente , Se forment entre les deux cou-
ches du bois un tiffu fpongieux /qui coupé tranfver-
falement, même à une allez grande épaiffeur, laiffe
voir des petits trous , à peu près comme on en voit
dans la dentelle. Les couches du bois font donc unies
B O I
les unes aux autres par une efpece de réfeau ; ce ré-
feau n'occupe pas à beaucoup près autant d'efpace
que la couche ligneufe ; il n'a que demi-ligne ou en-
viron d'épaiffeur.
Par cette fimple exposition de la texture du bois ,
on voit que la cohérence longitudinale doit être bien
plus considérable que l'union tranfvcrfale : on voit
que dans les petites pièces de bois , comme dans un
barreau d'un pouce d'épaiffeur , s'il fe trouve qua-
torze ou quinze couches ligneufes , il y aura treize
ou quatorze cloifons ; &c que par conséquent ce bar-
reau fera moins fort qu'un pareil barreau qui ne con-
tiendra que cinq ou fix couches , & quatre ou cinq
cloifons. On voit auffi que dans ces petites pièces ,
s'il fe trouve une ou deux couches ligneufes qui
Soient tranchées, ce qui arrive Souvent, leur force
Sera considérablement diminuée : mais le plus grand
défaut de ces petites pièces de bois , qui Sont les Seu-
les fur lefquelles on ait fait des expériences , c'eft
qu'elles ne Sont pas comporees comme les groffes
pièces. La pofitiondes couches ligneufes & des cloi-
fons dans un barreau eft fort différente de la position
de ces mêmes couches dans une poutre ; leur figure
eft même différente ; & par conséquent on ne peut
pas eftimer la force d'une groffe pièce par celle d'un
barreau. Un moment de réflexion fera fentir ce que
je viens de dire. Pour faire une poutre il ne fautqu'é-
quarrir l'arbre , c'eft-à-dire , enlever quatre fegmens
cylindriques d'un bois blanc &£ imparfait qu'on ap-
pelle aubier: le cœur de l'arbre, la première couche
ligneufe , refte au milieu de la pièce ; toutes les autres
couches enveloppent la première en forme de cer-
cles ou de couronnes cylindriques ; le plus grand de
ces cercles entiers a pour diamètre l'épaiffeur de la
pièce ; au-delà de ce cercle tous les autres ibnt tran-
chés , & ne forment plus que des portions de cercle
qui vont toujours en diminuant vers les arrêtes de la
pièce : ainfi une poutre quarrée eft compofée d'un
cylindre continu de bon bois bien folide , & de qua-
tre portions angulaires tranchées d'un bois moins So-
lide & plus jeune. Un barreau tiré du corps d'un gros
arbre , ou pris dans une planche , eft tout autrement
composé : ce font de petits fegmens longitudinaux
des couches annuelles , dont la courbure eft inienfi-
ble ; des fegmens qui tantôt fe trouvent pofés paral-
lèlement aune des Surfaces du barreau , & tantôt plus
ou moins inclinés ; des fegmens qui font plus ou
moins longs & plus ou moins tranchés , & par con-
féquent plus ou moins forts : de plus il y a toujours
clans un barreau deux' politions , dont l'une cil plus
avantageufe que l'autre ; car ces iègmens de couches
ligneufes forment autant de plans parallèles: û vous
polez le barreau en forte que ces plans foient verti-
caux., il réfiftera davantage que dansune'politionho-
rifontale ; c'eft comme fi on faifoit rompre plulieurs
planches à la fois , elles réfifteroient bien davantage
étant poSécs fur le côté , que furie plat. Ces remar-
ques Sont déjà fentir combien on doit peu compter
fur les tables calculées ou fur les formules que diffé-
rens auteurs nous ont données de la force du bois ,
qu'ils n'avoient éprouvée qÉe Sur des pièces, dont les
plus groffes étoient d'un ou deux pouces d'épaiffeur,
&: dont ils ne donnent ni le nombre des couches li-
gneufes que ces barreaux contenoient , ni la polition
de ces couches, ni le Sens dans lequel fe font trou-
vées ces couches lorsqu'ils ont t'ait rompre le bar-
reau ; circonstances cependant effentielles , comme
on le verra par les expériences de M. de Buffon, &
par les Soins qu'il s*eft donnés pour découvrir les effets
de toutes ces différences. Les Physiciens qui ont fait
quelques expériences fur la force du bois , n'ont fait
aucune attention à ces inconvéniens : mais il y en a
d'autres , peut-être encore plus grands , qu'ils ont
aulîi négligé de prévoir & de prévenir. Le jeune bois
B O I
301
eft moins fort que le bois plus âgé ; un barreau tiré
dupié d'un arbre,réfifte davantage qu'un barreau qui
vient du fommet du même arbre; un barreau pris à la
circonférence près de l'aubier , eft moins fort qu'un
pareil morceau pris au centre de l'arbre : d'ailleurs
le degré de deffechement du bois fait beaucoup à la
réliftance ; le bois vert caffe bien plus difficilement
que le bois Sec. Enfin le tems qu'on employé à char-
ger les bois pour les faire rompre , doit auffi entrer
en confidération ; parce qu'une pièce qui foûtiendra
pendant quelques minutes un certain poids, ne pour-
ra pas Soutenir ce même poids pendant une heure ;
& M. de Buffon a trouvé que des poutres qui a voient
chacune Supporté fans fe rompre , neuf milliers pen-
dant un jour, avoient rompu au bout de cinq à Six
mois fous la charge de fix milliers ; c'eft-à-dire , qu'el-
les n'avoient pas pu porter pendant fix mois les deux
tiers de la charge qu'elles avoient portée pendant un
jour. Tout cela prouve affez combien les expérien-
ces que l'on a faites Sur cette matière l'ont imparfai-
tes ; & peut-être cela prouve auffi qu'il n'eft pas trop
aiié de les bien faire. M. de Buffon , auteur des Mé-
moires dont nous avons tiré tout ce que nous avons
dit juiqu'ici, a fait une infinité d'expériences pour
connoitre la force du bois:h première remarque qu'il
a faite , c'eft que le bois ne caffe jamais Sans avertir ,
à moins que la pièce ne Soit fort petite. Le bois vert
caffe plus difficilement que le bois Sec ; & en général
le bois qui a du reffort rélifte beaucoup plus que ce-
lui qui n'en a pas : l'aubier, le bois des branches ,
celui du fommet de la tige d'un arbre , tout le bois
jeune , eft moins fort que le bois plus âgé. La force
du bois n'eft pas proportionnelle à fon volume ; une
pièce double ou quadruple d'une autre pièce de mê-
me longueur , eft beaucoup plus du double ou du qua-
druple plus forte que la première: par exemple, il
ne faut pas quatre milliers pour rompre une pièce de
dix pies de longueur, & de quatre pouces d'équar-
e ; & il en faut dix pour rompre une pièce dou-
ble ; & il faut vingt-fix milliers pour rompre une pie-
ce quadruple, c'eft-à-dire , une pièce de dix pies de
longueur, Sur huit pouces d'équarriffage. Il en eft de
même pour la longueur : il Semble qu'une pièce de
huit pies, & de même groffeur qu'une pièce de feize
pies , doit par les règles de la Méchanique porter
julle le double ; & cependant elle porte beaucoup
plus du double. M. de Buffon qui auroit pu donner
des raifons phyfiques de tous ces faits, le borne à
donner des faits : le bois qui dans le même terrein
croît le plus vite, eft le plus fort; celui qui a crû
lentement, & dont les cercles annuels, autrement
les couches ligneules, font minces, eSt moins Sort que
l'autre.
M. de Buffon a trouvé que la force du bois eu. pro-
portionnelle à la pefanteur; de forte qu'une pièce de
même longueur & groffeur, mais plus pelante qu'u-
ne autre pièce , Sera auffi plus forte à peu près en
même railon. Cette remarque donne les moyens de
comparer la force du bois qui vient de différens pays
&: de différens terreins , & étend infiniment L'utilité
• exp ncesdeM.de Buffon: car lorfqu'il
d'une construction importante , ou d'un ou\ .
conféquerice , on pourra aifément au moyen de S'a
table, & en pelant les pièces, ou feulement des
échantillons de ces pièces , s 'affiner de la force du
bois qu'on employé ; & on évitera le double incon-
vénient d'employer trop ou trop peu de cette matiè-
re , que fouvent on prodigue mal-à-propos , èc que
quelquefois on ménage avec encore moins de railon.
Pour effayer de comparer les effets du tems fur la
réfiftance du bois , Se pour reconnoître combien il
diminue de fa force, M. de Buffon a choifi quatre
pièces de dix-huit pies de longueur , fur fept pouces
de groffeur ; il en a fait rompre deux , qui en nom-
302
B O I
B O 1
bre rond ont porté neuf milliers chacune pendant
une heure ; il a fait charger les deux autres de fix
milliers feulement , c'eïî-à-dire des deux tiers , &c il
les a laiffé ainfi chargées , réfolu d'attendre l'événe-
ment : l'une de ces pièces a cafle au bout de trois
mois & vingt-iîx jours ; l'autre au bout de fix mois
& dix-fept jours. Après cette expérience il fit travail-
ler deux autres pièces toutes pareilles, 6k il ne les fit
charger que de la moitié , c'eft-à-dire , de quatre mille
cinq cens ; M. de Buffon lésa tenues plus de deux ans
ainfi chargées ; elles n'ont pas rompu, mais elles ont
plié affez conhdérablement ; ainfi dans des bâtimens
qui doivent durer long-tems , il ne faut donner au bois
tout au plus que la moitié de la charge qui peut le fai-
re rompre ; & il n'y a que dans des cas preffans , &
dans des conftructions qui ne doivent pas durer, com-
me lorfqu'il faut faire un pont pourpafTer une armée,
ou un échaffaud pour fecourir ou affaillir une ville ,
qu'on peut hafarder de donner au bois les deux tiers
de fa charge.
Tous les auteurs qui ont écrit fur la réfiitance des
folides en général , &c du bois en particulier, ont don-
né comme fondamentale la règle luivante : la réfif-
tance ejl en raifon invtrjt de la longueur , en raifon directe
de la largeur , & en raifon doublée de la hauteur. Cette
règle elt celle de Galilée , adoptée par tous les Ma-
thématiciens , & elle feroit vraie pour tous les folides
qui feroient ablolument inflexibles & qui romproient
tout-à-coup : mais dans les folides élaitiques , tels que
le bois , il elt ailé d'appercevoir que cette règle doit
être modifiée à plufieurs égards. M. Bernoulli a fort
bien obfervé que dans la rupture des corps élalt iques'
une partie des libres s'allonge , tandis que l'autre par-
tie fe racourcit, pour ainfi dire, en refoulant fur elle-
même, f^oye^ fon mémoire dans ceux de F Académie ,
année ijo5. On voit par les expériences précéden-
tes, que dans les pièces de la même grciTeur , la règle
de la réiiltance en raifon inverle de la longueur s'ob-
ferve d'autant moins que les pièces font plus courtes.
Il en eft tout autrement de la règle de la réiiltance en
raifon direde de la largeur & du quarré de la hau-
teur. M. de Buffon a calculé la table feptieme, à def-
fein de s'aiTùrer de la variation de cette règle ; on
voit dans cette table les réfultats des expériences , &
au-deiîbus les produits que donne cette règle ; il a
pris pour unités les expériences faites fur les pièces
de cinq pouces d'équarrifTage , parce qu'il en a fait
un plus grand nombre fur cette dimenfion que fur les
autres. On peut obierverfur cette table, que plus les
pièces font courtes , & plus la règle approche de la
vérité ; & que dans les plus longues pièces , comme
celles de 18 & de zo pies, elle s'en éloigne ; cepen-
dant à tout prendre, on peut fe fervir de la règle gé-
nérale avec les modifications néceffaires pour calcu-
ler la réiiltance des pièces de bois plus groffes & plus
longues que celles dont M. de Buffon a éprouvé la re-
ntrance ; car en jettant les yeux fur cette feptieme
table , on voit un grand accord entre la règle & les
expériences pour les différentes groffeurs , & il règne
un ordre alTez confiant dans les différences par rap-
port aux longueurs & aux groffeurs, pour juger de la
modification qu'on doit faire à cette règle. Voye^
Résistance,
TABLE DES EXPERIENCES
SUR LA FORCE DU BOIS.
Première Table , pour les pièces de quatre pouces
d'équarrijfage.
Longueurs
des
pi.ces.
Poids
dts pietés.
Charges.
Tems
employé
à charger
les pièces.
Flèches de la
courbure des
pièces dans
l'initant où
elles com-
menc.nt à
rompre.
Pies.
Livres.
Livres.
Heur. M,n.
Pouc. Lign.
7
8
{
l
X
6o
68
63
535°
5^75
4600
t
4500
O 29
O ZZ
O 15
O I3
3 6
4 6
3 9
4 8
9
i
{
f
l
77
71
4100
395°
O 14
O 12.
4 10
5 6
io
84
82
3625
3600
O I5
O 15
5 10
6 6
12
100
98
3050
2925
....
7
8
Seconde Table , pour les pièces de cinq pouces
d'équarrijfage.
Longue
des
pieee!
urs
Poids
des pièces.
Charges.
Tems dtp; i
le premier
éclat jufqu'.
l'inftant de
1j rupture.
Flèches ce ia
courbure
avant que
d'éclater.
Via.
Livres.
Livres.
Heur. Min
Pouc Lign.
7
8
\
94
88f
112J-)
O 58
0 53
2 6
2 6
104
I 02
9900
9675
0 40
0 39
2 8
2 1 1
9
;
1
Il8
Il6
IJ5
84OO
8325
8200
0 28
0 28
0 26
3
3 3
3 6
10
{
132
130
128I
7225
705O
7IOO
0 2.1
0 20
0 18
3 2
3 6
4
12
14
\
— 1
156
r54
6050
6lOO
0 30
5 6
5 9
178
176"
54OO
5200
0 21
0 18
8
8 3
16
\
.209
205
44-5
4275
0 17
0 15
8 1
8 2
18
\
232
231
375°
3650
0 1 1
0 10
8
8 z
20
\
263
259
3-75
3J75
0 10
0 8
8 10
10
22.
281
-975
0 18
11 3
24
\
310
307
2200
2125
0 16
0 15
1 1
13 6
26
28
\
364
360
1 800
1750
0 17
0 17
18
zz
B O I
Troijïcmc Table , pour les pièces de Jîx pouces
d'équarrijjage.
Longueurs
des
pièces.
Poids
des pièces.
Charges.
Tems depuis
le premier
éclat jufqu'à
l'inirant de
la rupture.
Flèches de la
courbure
avant que
d'éclater.
Pics.
Livres.
Livres.
Heur. Min.
Ptucpgà.
On n'a pas
pu obfcrver la
quantité dont
les pièces de 7
p;cs ont plie
dans leur mi-
lieu, àcaufede
lepaifleur de
la boucle.
-l
128
ia6j
19250
18650
I 49
I 38
I 12
I IO
S{
149
i*6
15700
!535°
2 4
2 5
'{
166
164I
13450
12850
O 56
O 51
2 6
2 10
"f
188
186
"475
11025
O 46
O 44
3
3 6
"{
224
2.2.1
9200
9000
O 31
O 32
4
4' J
'* l
255
254
7450
7500
O 25
O 22
4 6
4 -
,,-{
294
293
6250
6475
O 20
O 19
5 6
5 J°
"{
334-
33i
5625
5500
O l6
0 14
7 5
8 6
M
377
375
5025
4875
O II
O I I
9 ^
8 10
Quatrième Table , pour les pièces de fept pouces
d'équarrijfage.
Longue
des
pièces
JiS
Poids
des pièces.
Charges.
Tt.ms depuis
le premier
rinftant de-
là rupture.
Flèches de la
courbure
avant que
d'éclater.
Pies.
Livres.
Livres.
Heu
-. Afin.
Poue
L n.
7
8
i
204
20ji
26l 50
2595O
Z
6
J3
1
9
6
9
s
i
227
225
Z2800
2I9OO
1
I
40
37
3
1
1 1
10
t
254
252
I965O
I93OO
1 H
I 16
3
7
12
{
302
30I
l6800
1 5550
1 3
1
J
1 1
4
14
1
—
s
1
351
351
I360O
I285O
0
0
55
48
4
3
2
9
16
406
403
IIIOO
10900
0
0
41
36
4
5
10
3
18
{
454
450
9450
9400
0
0
-7
22
5
5
6
10
20
r
1
505
500
8550
• 8000
0
0
15
13
7
8
10
6
'
B O I
303
Cinquième Table , pour les pièces de huit pouces
d'équarrijfage.
Longueurs
des
pièces.
des pièces.
IO { 331
l 33°
2 S 397
X 3951
461
459
10
l 5^
18 J 594
! 593
-{
664
6604
Charges!
2780O
277OO
2390O
23OOO
20050
I950O
1680O
I595O
I35OO
I290O
II775
I I200
Tems depuis
le premier
éclat julqu';
l'ii, liant de
la rupture.
Heur. Min.
5°
58
o 47
o 50
o 24
o 28
Fkches delà
ccurbtre
:
?
2
1 1
3
10
3
\
5
2
J
9
4
6
4
1
Sixième Table , pour les charges moyennes de toutes
les expériences précédentes.
r
Grosseurs.
4
pouces.
5
pouces.
6
pouces.
7
pouces.
8
pouces.
Pus.
7
Livres.
Livres.
Livres.
Liires.
Livres.
5312
11525
1895O
8
45 50
9787 i
W5
26050
9
10
1 2
4025
8308 f
13150
22350
3612
7125
1 1250
!9475
-7750
2987^
6075
9100
16175
23450
14
16
5300
7475
13225
19775
4350
6362 1
1 1000
16375
18
3700
55**1
94-5
r 3200
20
3225
4950
82/5
11487-1
-4
28
!
2975
2l62{
1 _ 1
3°4
B O I
Septième Takte. Comparai/on de la réfiftance du bois ,
trouvées par Us expériences précédentes , & de la ré-
Jîjlance du bois fuivant la règle que cette réfifance efl
comme la largeur de la pièce , multipliée par le quarré
de fa hauteur , en fuppofant la même longueur.
Nota. L.s aftéri mes marquent que les expériences f.'ort pas été faites.
Grosseurs.
+
pouces.
5
pouces.
6
pouces.
Sîp 1 S. 8950
C59°r 3 CI99Mf
i{455°, }
bon? J
J7*.s /
»w 169 12
/a025 il o ni fiBM0
43';1* l^5^ii25°
_JL 3^48 j 1 12312
f2987ï l / f 9100
12; .7 6075 -<
l3"of J \ 10497}
5100
7+75
l 88]
7
pouces.
pouces.
4.8100
476 19 l
31624}/ 471 9b f
26050
268s6-^
22350
22798 1
9+75
19551 '29181
16175
16669!
f 636^
L 75'6|
+ 3
3700
3"5
13225
J3995j
1 1000
ii936f
f 55621
\ 6393)
f' +95o
\ 5 57-1
0152
8275
8849 f
27750
23i5°
24883J
■9775
20889}
16375
»78i7i
1 3200
J5f55Î
11487^
1 3209!
Le bois fur pié prend différentes dénominations fé-
lon fes différentes qualités. Il s'appelle
Bois arsin, lorfqu'il a été maltraité par le feu.
Bois blanc. Voye^ Blanc-bois.
Bois BOMBÉ , s'il a quelque courbure naturelle.
Bois carié ou vicié, s'il a des malandres ou
nœuds pourris.
Bois chamblis ; quand il a été maltraité par les
vents, foit qu'il ait été déraciné & renverlé, loit que
les branches feulement en ayent été rompues.
Bois charmé, lorfqu'il a reçu quelque domma-
ge dont la caufe n'eft pas apparente, & qu'il menace
de périr ou de tomber.
Bois en défends, lorfqu'il eft défendu de le cou-
per , & qu'ayant été reconnu de belle venue , on veut
lui laiffer prendre tout fon accroiffement. Ces défends
ne lont guère d'ufage que dans les grandes forêts ou
les bois dégradés ou trop jeunes, pour qu'on en puiffe
faire ufage. Les taillis lont en défends de droit juiqu'à
cinq & fix ans. Le défends s'étend toujours aux chè-
vres , cochons , moutons , & autres animaux mal-fai-
fans, hormis le tems de la glandée pour les cochons.
Bois dÉfensable, lorfqu'il eft permis, par
celui à qui il appartient de permettre , de faire les
coupes oc paillons convenables , parce qu'il eft en
état de rélifter.
Bois encrouÉ , lorfqu'il a été renverfé fur d'au-
tres en l'abattant , & que fes branches lie lont entre-
lacées avec les branches des arbres fur lelquels il eft
tombé.
L'ordonnance défend d'abattre les bois fur lefquels
d'autres lont encroiiés.
B O I
Bois EN ÉTANT, quand il eft debout.
Bois à faucillon, lorfqu'il s'agit d'un petit
taillis qu'on peut abattre à la lërpette.
Bois gelif, s'il a des gerfures ou fentes caufées
par la gelée..
Bois marmentaux ou de touche, lorfqu'ils
entourent un château , une maifon , un parterre , 6c
qu'ils lui fervent d'ornement. Les ufufruitiers n'en
peuvent difpofer.
Bois mort , s'il ne végète plus , foit qu'il tienne
à l'arbre, foit qu'il en ait été léparé. Voye^ Mort
bois.
Bois mort en pié, s'il eft pourri fur pié, fans
fubftance , & bon feulement à brûler.
Bois en pueil, fi c'eft un bois qui ait été nou-
vellement coupé , 6c qui n'ait pas encore trois ans.
11 eft défendu d'y laiffer entrer aucun bétail.
Bois rabougri , s'il eft maifait, tortu, & de
mauvaife venue.
Bois recÉpé , quand fur quelque défaut qu'on
lui a remarqué , on la coupé par le pié pour l'avoir
plus promptement & de plus belle venue.
Bois sur le retour, lorfqu'il eft trop vieux,
qu'il commence à diminuer de prix, & que les chê-
nes ont plus de deux cents ans.
Bois de haut revenu , s'il eft de demi-futaie
de 40 à 60 ans.
Bois vif, quand il porte fruit & qu'il vit , comme
le chêne , le hêtre , le châtaignier , & autres qui ne
font point compris dans les morts-bois.
Le bois abattu ou pris félon la première acception
du terme bois , ou relativement aux ulages qu'on en
fait dans la fociété, peut le diftribuer en bois de char-
pente , defeiage , de charronage , Si. de chauffage.
Des bois de charpente. La provifion des bois de char-
pente , pour la fourniture de Paris, le tait par trois
fortes de marchands , les forains domiciliés , les fo-
rains qui vendent en arrivant, &c les regratiers, qui
ont leurs magafins dans la ville oc les r..uxbourgs ,
mais ailleurs que fur les ports. Ces maichands for-
ment trois corps féparés, mais fans communauté ni
entr'eux ni en particulier. C'eft un commerce libre.
L'île Louvier a été le lieu d'abordage ces bois à bâtir.
Tous les marchands ont eu le même uro.t d'y defeen-
dre. Chacun prerioit la place qui lui convenoit, lâns
payer de droit, obiervant leulement de ne pas occu-
per trop de terrein. Les forains domiciliés tiennent en
tout tems leur chantier ouvert pour le fervice du
bourgeois ; il n'eft fujet à aucune vilite de police : le
forain non domicilié eft obligé de tenir port pendant
trois jours, afin de donner le tems au bourgeois de fe
pourvoir ; les charpentiers & menuiliers ont la pré-
férence fur les regratiers , & peuvent même rompre
leur marché. Le regraticr peut faire exploiter pour
fon compte : mais il ne peut laiffer fon bois fur les
ports ; il faut qu'il le faffe entrer dans fes chantiers
immédiatement après l'achat.
Le commerce des bois , foit de chauffage , de char-
pente ou de menuiferie , pris en grand & dans la fo-
rêt, demande une grande expérience : on peut y per-
dre ou y gagner beaucoup ; le moindre mécompte fur
l'étendue du terrein, la quantité des bois , leur qua-
lité , l'exploitation & le traniport , tirent à des conié-
quences immenles ; & tel marchand croit fa fortune
faite , tant que fon bois eft fur pié , qui fe trouve à
moitié ruiné quand il eft abattu.
Le bois de chêne eft le meilleur de tous les bois pour
la charpente, à caufe qu'il ne pourrit point facile-
ment quand il eft employé lur terre & dans l'eau,
ôc qu'il eft plus fort que les autres bois.
Le bois de châtaignier eft b«>n pour les mêmes ou-
vrages , pourvu qu'il loit à couvert. La plupart des
anciens édifices ont leur charpente de ce bois.
Le bois d'aune ne pourrit point non plus dans l'eau ,
ce
B O I
ce qui fait qu'on en fait des tuyaux de pompes & de
conduites d'eau.
Les chênes , pour pouvoir en faire du bois bon
pour Pillage de la charpenterie , ne doivent point
être abattus avant foixante ans, & plus tard que deux-
cents ans ; parce que parlé deux cents ans ce bois
dépérit , & qu'avant foixante ans il eft trop jeune.
Dans la charpente on employé de deux fortes de
bois , le bois de brin &c le bois de feiage.
Le bois de brin cil celui qui fe fait en ôtant les qua-
tre dofTes & flachc d'un arbre en Péquarriflant.
Le bois de feiage fe tire ordinairement des bois
courts & trop gros , ou des pièces moins faines. On
en parlera plus au long ci-deffous.
Le bois de chine qu'on nomme bois gras ou doux ,
eft celui qui eft moins poreux &c fans fil , & a moins
de nœuds que le bois ferme ; & il n'eft bon pour l'u-
fage des menuifiers , que pour faire des panneaux &
des affemblages qui ne fatiguent point ; car il ne vaut
rien pour les bâtis de portes , &c tout ce qui peut
fouffrir la moindre fatigue.
Le bois dur ou ruflique , eft celui qui a le fil gros. Il
vient dans les terres fortes & fonds pierreux & f ablon-
neux , & au bord des forets.
Les bois légers font les bois blancs , comme fapins ,
tilleuls , trembles , ôcc. Les charpentiers ne s'en fer-
vent que dans les cloifons au défaut du chêne.
Bois , un cent de bois; c'eft , en terme de Charpentier,
foixante-douze pouces de longueur fur iix pouces d'é-
quarriffage. Tout le bois de charpente fe réduit à cette
mefure , & une feule poutre eft comptée pour autant
d'autres , qu'elle contient de fois cette mefure , foit
pour la vente , foit pour la voiture , foit pour le toifé.
Le bois de charpente prend différentes dénomina-
tions félon fes différentes qualités ; il s'appelle :
Bois affoibli, quand on a diminué considéra-
blement la forme d'équarriffage , en le rendant dif-
forme, courbe, ou rampant , pour laiffer des boffages
aux poinçons , ou des encorbellemens aux poteaux
fous les poutres qui portent dans les cloifons. Au ref-
te ce bois fe toifé dans le plus gros du boffage.
Bois apparent, lorfqu'étant en œuvre, comme
dans les ponts de bois, planchers, cloifons , &c. il n'eft
point recouvert de plâtre ou autre matière.
Bois blanc, quand il tient de la nature de l'au-
bier, &C fe corrompt facilement.
Bois bouge, quand il a du bombement, ou qu'il
eft courbé en quelque endroit.
Bois cantiban , lorfqu'il n'a du flachc que d'un
côté.
Bois corroyé , quand il a été drcfTé à la varlo-
pe ou au rabot.
Bois déchiré , celui qui revient de quelque ou-
vrage mis en pièces, pour raifon de vétufté ou autre.
Bois déversé ou gauchi, lorfqu'après avoir
été travaillé & équarri , il n'a pas confervé la for-
me qu'on lui a donnée, mais s'eft de jette, courbé,
incliné &C déformé de quelque manière & par quel-
que caufe que ce foit.
Bois d'échantillon, quand les pièces de bois
font d'une groffeur & longueur déterminée.
Bois échauffé ; lorfqu'il commence à fe gâter Se
-à pourrir, & qu'on lui remarque de petites taches rou-
ges Se noires ; ce font ces fortes de bois que quelques-
uns appellent bois pouilleux.
Bois d'entrée, s'il eft entre vcrd& fec.
BOIS d'ÉQUARRISSAGE, quand il eft propre à re-
cevoir la forme d'un parallélépipède : il ne s'equarrit
point de bois au-deffous de fix pouces de gros.
Bois FLACHE, quand il ne pourroit être bien
équarri fans beaucoup de déchet, èv que les arrêtes
n'en font point vives.
Bois gissant, lorfqu'il eft coupé, abbatu &
couché fur terre.
Tome II,
B O 1
305
Bois EN GRUME, s'il n'eft point équarri, & fi on
l'employé de toute fa grofîéur, par exemple , en pieux
appelles pilotis.
Bois lavé, quand on lui a ôté tous les traits de
feie & rencontre , avec la befaiguë.
Bois mouline, s'il eft pourri & rongé des vers.
Bois qidfe tourmente, lorfqu'il fe déjette, étant em-
ployé trop verd ou trop humide.
Bois refait, quand de gauche & flache qu'il
étoit, il eft équarri & redrefté au cordeau fur fes
faces.
Bois de refend, lorfqu'on l'a mis par éclats pour
faire le merrein , les lattes , les échalats , du boif-
feau, &c.
Bois rouge , s'il s'échauffe, & s'il eft fujet à pour-
rir.
Bois roulé , quand les cernes ou crues de cha-
que année, font féparées, & ne font point de corps;
ce bois n'eft bon qu'à brûler. On dit que le bois de-
vient roulé, lorfqu'étant en fève il eft battu par le
vent.
Bois sain & net, lorfqu'il eft fans malandres,
nœuds vicieux, gale, fiftule.
Bois tortu , quand il ne peut fervir qu'à faire
des courbes , & n'eft bon que pour la marine.
Bois tranché , s'il a des nœuds vicieux ou fils
obliques qui coupent la pièce, & la rendent peu pro-
pre à rélifter à la charge & à être refendu.
Bois vermoulu , s'il eft piqué de vers.
Bois vif , lorfque les arrêtes en font bien vives &
fans flache, & qu'il ne lui refte ni écorce ni aubier.
Bois de charronage: on comprend fous cette
dénomination tout celui qui eft employé par les Char-
rons à faire des charrettes, des roues, &c. comme Y or-
me, le frêne, le charme, &C Y érable; la meilleure par-
tie s'en débite en grume. Foye^ les articles de ces
bois.
Bois de CHAUFFAGE; le bois de chauffage eft neuf
ou flotté. Les marchands de bois neuf 'font ceux qui
embarquent fur les ports des rivières navigables des
bois qui y ont été amenés par charroi ; & ils les em-
pilent enfuite en théâtre , comme on le voit fur les
ports & autres places dont la ville de Paris leur a ac-
corde l'ufage. Voye^ Chantier. Ces fortes de mar-
chands ne font guère que le tiers de la provision de
cette ville , &c.
Les marchands de bois flotté font ceux qui font
venir leurs bois des provinces plus éloignées. Ils les
jettent d'abord à bois perdu fur les ruiffeaux qui en-
trent dans les rivières fur lefquelles ce commerce
eft établi ; enfuite ces mêmes rivières les amènent
elles-mêmes encore à bois perdu jufqu'aux endroits
où il eft pofîible de les mettre en trains , pour les con-
duire à Paris ; après néanmoins les avoir rétirés de
l'eau avant de les flotter en train, & les avoir fait
lécher fuffifamment , fans quoi le bois iroit à fond.
Ces marchands font les deux autres tiers de la pro-
vision.
Il y a quelques fiecles que l'on étoit dans Pappré-
henfîon que Paris ne manquât un jour de bois de chauf-
fage; les forets des environs fe détruifoient , & l'on
prévoyoit qu'un jour il faudroit y tranlporter le bois
des provinces éloignées; ce qui rendroit cette mar-
chandilè li utile & d'un ufage fi gênerai , d'un prix
exorbitant occafionné par le coût des charrois. St
l'on eut demande alors à la plupart de ceux qui fen-
tent le moins aujourd'hui le mérite de l'invention
du flottage des bois, comment on pourroit remédier
au terrible inconvénient dont on étoit menace , ils y
auroienl été , je crois , bien embarrafTés ; l'accroiffe-
ment ce l'entretien des forêts euffciu été , félon toute
apparence, leur unique reffource. C 'eft en effet à ces
moyens longs, coûteux èx. pénibles, que le réduisit
alors toute Fa prudence du gouvernement ; & la ca-
306
B O I
B O I
pitale étoit fur le point de devenir beaucoup moins
habitée par la chéreté du bois , lorsqu'un nommé Jean
Rouvet, bourgeois de Paris , imagina en 1 549 de ral-
fembler les eaux de pluiieurs ruifleaux & rivières
non navigables ; d'y jetter les bois coupés dans les
forêts les plus éloignées ; de les faire defeendre ainii
juiqu'aux grandes rivières ; là , d'en former des trains
ik. de les amener à flot, & fans bateaux , jufqu'à Pa-
ris. J'ofe aflûrer que cette invention fut plus utile au
royaume , que pluiieurs batailles gagnées , & méritoit
des honneurs autant au moins qu'aucune belle acf ion.
Jean Rouvet fit les premiers elfais dans le Morvant ;
il raflembla tous les ruifleaux de cette contrée ; fît
couper fes bois , & les abandonna hardiment au cou-
rant des eaux : il réuflit. Mais l'on projet traité de fo-
lie avant l'exécution , ÔC traverlé après le fuccès ,
comme c'eft la coutume , ne fut porté à la perfec-
tion &c ne reçut toute l'étendue dont il étoit iulcep-
tible , qu'en 1 566 , par René Arnoul. Voye^ à l'article
Train, la manière de les conftruire. Ceux qui voy ent
arriver à Paris ces longues malles de boisy font effrayés
pour ceux qui les conduifent , à leur approche des
ponts : mais il n'y en a guère qui remontent juiqu'à
l'étendue des vues & à l'intrépidité du premier in-
venteur , qui ofa raflèmbler des eaux à grands frais ,
& y jetter enfuite le relie de ia fortune.
Entre les marchands de bois flotté , les uns font
bourgeois , les autres forains ; il y a beaucoup plus
de bourgeois que de forains , qui faffent le commer-
ce du bois , qui vient du pays d'amont ; au contraire
il y a beaucoup plus de forains que de bourgeois ,
qui faffent commerce du pays d'aval.
Tout ce qui concerne le bois de chauffage fe réduit
à fa façon , au îems de le tirer des ventes , à fa voi-
ture & à Ion déchargeage , à la diligence de voiture ,
à fon arrivée , à fa vente dans les chantiers , & aux
officiers qiu y veillent.
Façon. Il eft enjoint de donner à tous les bois à
brûler , trois pies & demi de longueur ; au bois de
moult , dix- huit pouces de tour ; au bois de corde de
quartier ou de traverfe , autant. Si le bois de quartier , de
traverje , ou fendu , a dix-huit pouces de tour , il fe
melure au moule ; s'il n'en a que dix-fept , il va avec
le bois de corde dans la membrure. Le bois taillis doit
avoir fix*pouces de tour. Le bois <T Andelle a la même
grofleur: mais il eft plus court ; il n'a que deux pies
6c demi ou environ.
Sortie des ventes. Les marchands font tenus de faire
couper & fortir les bois des ventes , dans les tems
qui leur auront été fixés , eu égard aux lieux & à
la qualité des arpens.
toitures. Il eft permis de voiturer depuis les fo-
rêts juiqu'aux rivières, à travers toutes terres, en
avertiflant dix jours auparavant par des publications
aux prônes ; de jetter les bois dans les rivières ; de
les pouffer par les ruifleaux, étangs , foffés de châ-
teaux , &c. fans qu'ils en puiflent être empêchés par
qui que ce foit.
Diligence. Il eft défendu de féjourner en chemin
fans néceflité , & de décharger ailleurs qu'à Paris.
Pente. Il eft enjoint de les mettre en chantier , &
ils ne peuvent être vendus ailleurs.
Officiers. La Ville commet des perfonnes à elle pour
Veille* à cette diftribution. Toute la différence qu'il
y a entre les bois de chauffage foit neuf, ioït flotté , fe
tire de la taille , de la voiture , & de la mefure.
Relativement à la taille , il fe diftribue en gros bois
& en menu bois ; à la voiture , en bois neuf Sx. en bois
flotté ; à la mefure , en bois de moule & de compte , &
en bois de corde.
Tout le gros bols eft compris fous le nom généri-
que de bâches ; chaque bûche , de quelque bois que ce
foit , doit avoir , ainfi que nous l'avons déjà dit, trois
pies & demi de long.
Les plus grofles bûches font nommées bois de mou-
le,ou de moulure, ou de compte ; parce qu'elles fe me-
furent dans le moule ou l'anneau. Voye^ Anneau*
Elles doivent avoir dix-huit pouces de tour.
Le bois de traverfe fuit immédiatement en grofleur
le bois de compte ou de moult ; il doit avoir dix-fept
pouces de tour. Il y en a qui comprennent fous la
même dénomination tout le bois blanc.
On appelle bois taillis , tout celui qui n'a que cinq
à fix pouces de tour.
Le bois de corde doit avoir au moins dix-fept pou-
ces ; il eft appelle bois de corde , parce que les Bûche-
rons plantent à la corde quatre pieux en quarré , dont
le côté a huit pies , & chaque pieu a quatre pies de
haut. C'eft-là leur mefure ou corde qui contient, com-
me on voit, quatre fois 64 ou 256 pies cubes de bois.
Cette méthode de mefurer le bois a duré jufqu'en
1641 , qu'il fut ordonné de fe fervir d'une membru-
re de charpente , qui retint le nom de corde. Voyt^
Corde. Voye^ Membrure.
Le menu bois eft ou coteret , ou fagot , ou bourrée.
Il y a des coterets de bois taillis fendu , ou des cote-
rets de bois rond.
Ceux-ci viennent par l'Yonne : mais ils doivent
avoir les uns & les autres deux pies de long , fur dix-
fept à dix-huit pouces de tour.
Les fagots font faits de branches d'arbres menues.'
Ils doivent avoir trois pies & demi de long , fur dix-
fept à dix-huit pouces de tour.
La bourrée , qui eft une efpece de fagot, eft faite
de broflailles d'épines & de ronces , &c.
Voici encore quelques dénominations qu'on don-
ne au bois de chauffage.
Bois en chantier , eft celui qui eft- en pile ou
en magafin ; on nomme ordinairement ces fortes de
piles théâtre.
Bois flotté , eft celui qu'on lie avec des rouel-
les & des perches , & que l'on amené en train fur des
rivières. Voye^ Train.
Bois perdu , eft celui qu'on jette dans les petites;
rivières qui n'ont pas affez d'eau pour porter ni train
ni bateau , & qu'on va recueillir & mettre en train
aux lieux où ces rivières commencent à porter.
Bois canards, font ceux qui demeurent au
fond de l'eau , ou qui s'arrêtent aux bords des ruif-
leaux, où l'on a jette une certaine quantité de bois,
bûche à bûche , pour le laifler aller au courant de
l'eau. Après que ces bûches font arrivées au lieu oit
le ruifleau eft devenu une rivière navigable , les mar-
chands peuvent faire pêcher leurs bois canards pen-
dant 40 jours fans rien payer. Voye^ ^Ordonnance
de 16 jz.
Bois volans , font ceux que le flot amené droit
au port.
Bois échappés , font ceux que les inondations
portent dans les prés ou dans les terres.
Bois neuf, eft celui qu'on apporte dans des ba-
teaux fans qu'il ait trempé dans l'eau.
Bois pelard , eft un bois menu & rond, dont on
ôte l'écorce pour faire du tan. Les Rotifleurs & Bou-
langers s'en fervent.
Bois de gravier , eft un bois qui croît dans des
endroits pierreux , & qui vient demi flotté du Niver-
nois & de Bourgogne ; le meilleur eft de Montargis.
Bois d'Andelle , ainfl nommé du nom de la ri-
vière qui le voiture , eft un bois de hêtre qui a ordi-
nairement deux pies & demi de longueur ; il faut qua-
tre mefures d'anneau pour la voie , &c quatre bûches
de témoins par anneau.
Bois tortillard ; ce bois n'eft point ordinai-
rement reçu dans les membrures à caufe des vuides
qu'il laifle , & le tort qui en réfulte pour le public.
Bois boucan , bûches qui par vetufté ne font
plus de mefure pour être miles en membrures.
B O î
Je ne finirai point cet article du bois de chauffage ,
qui forme un objet prefqu'auffi important, que celui
<le conftru&ion ÔC de charpente , fans obferver que
nous tommes menacés d'une dilette prochaine de
l'un & l'autre ; & que la cherté feule du premier
peut avoir une influence confidérable fur l'état en-
tier du royaume. Le bois de chauffage ne peut deve-
nir extrêmement rare & d'un grand prix , fans chaf-
ier de la capitale un grand nombre de fes habitans ;
or il eft confiant que la capitale d'un royaume ne
peut être attaquée de cette manière , fans que le- relie
du royaume s'en reffente. Je ne prévois qu'un remè-
de à cet inconvénient , &c ce remède eft même de na-
ture à prévenir le mal , fi on Fcmployoit dès à préfent.
Quand les forêts des environs de la ville furent épui-
(ées,il le trouva un homme qui entreprit d'y amener à
peu de frais les bois des forêts éloignées , & il réuf-
lit. Lorfque la négligence dans laquelle on perfifte
aura achevé de détruire les forêts éloignées , il ell
certain qu'on aura recours au charbon de terre ; & il
eft heureulement démontré qu'on en trouve prefque
par-tout. Mais pourquoi n'en pas chercher &. ouvrir
<les carrières dès aujourd'hui ? pourquoi ne pas in-
terdire l'ufage du bois à tous les états & à toutes
les profeflions dans lefquels on peut aifément s'en
palier ? car il en faudra venir là tôt ou tard ; & fi
l'on s'y prenoit plutôt , on donneroit le tems à nos
forêts de le reftituer ; 6c en prenant pour l'avenir
d'autres précautions que celles qu'on a prilespour le
pallé , nos forêts miles une fois lur un bon pié , pour-
roient fournir à tous nos befoins , fans que nous euf-
fions davantage à craindre qu'elles nous manquaf-
fent. Il me femble que les vues que je propole font
utiles : mais j'avoue qu'elles ont un grand défaut , ce-
lui de regarder plutôt l'intérêt de nos neveux que le
nôtre; & nous vivons dans un iiecle philofcphique
où l'on fait tout pour loi, & rien pour la poftérité.
Bois (MOULEUR de), Police, officier de ville ,
commis lur les ports pour que le bois y foit fidèle-
ment meluré dans les moules ou les membrures. V.
Moule & Membrure.
Bois (Marchand de), voye^ ci-deffus l'article
Bois de chauffage.
Bois de feiage. On entend par bois de feiage , ce-
lui qui eft débile en foliveaux & coupé en planches
à l'ufage de la menuiferie. On comprend fous ce nom
tout celui quia moins de lix pouces d'équairiffage,
beaucoup de bois tendres , fur-tout pour la boilèrie ,
le parquetage, les lambris, 6c plafonds. On fait fa-
çonner le bois de feiage , ou par des lcieurs de long ,
ou dans des moulins à feie. Foyet^ Sciage.
Le bois de feiage s'appelle :
Bois mi-plat , s'il eft beaucoup plus large qu'é-
pais ; ce bois eft pour l'ufage de la menuiferie.
Bois ouvre, ou non ouvré , quand il paife ou
non par les mains de l'ouvrier.
Il y a encore le bois d'ouvrage & celui de merrein.
Le. bois d'ouvrage , eft celui qu'on travaille dans
les forêts , & dont on fait des fabots , des peiles , des
féaux, des lattes , des cercle-., des édifies.
Le bois de chêne s'appelle bois de merrein , quand il
cft débité en petits ais ou douves pour faire des ton-
neaux, des cuves, des féaux, &c. I aryt^ Merrein.
Il ne nous refte plus qu'à ajouter à cet article quel-
ques fortes de bois , parmi lesquelles il y en a qui
ont peu de rapport avec les précédentes.
Bois FOSSILE, (Hijl. nat.~) bois qui fe trouve en
terre à différentes profondeurs, oit il s'efl conierve
depuis long tems làns fe pourrir. On fait aile/ qu'il
arrive fouvent des éboulcmens de terre oc d'autres
dcplaccmens , qui font occaiionnes par différentes
caufes, & fur-tout par les tremblemens de terre , les
torrens, les inondations , &c. c'eft par ces accidens
que les arbres font enfonces dans la terre, S'il le ren-
Tome II,
B O I
i°7
contre des matières biïumincufes qui les pénètrent,
alors ils ne font plus fufceptibles de pourriture , oc
ils le confervent dans leur entier. Les différentes com-
binaifons des matières bitumineufes doivent caufer
des différences dans la confiftanec du boisfiffile , dans
fa couleur, fon poids, &c Voye^ Houille, Char-
bon DE TERRE , JAYET. (/)
Bois pétrifié. /^^Pétrification.
* Bois d'aloès. Il y a tout lieu de croire que le
bois que nous appelions aujourd'hui bois d'aloès , eft
le même que Diofcoride a décrit fous le nom d'agal-
loclutm , 6c que l'on a nommé dans la fuite xyloaloh.
Il ne faut pas confondre le bois d'aloès a vec le (uc épaif-
li qui porte Amplement le nom d'aloès, ni croire que
ce fuc îorte du bois d'aloès. Nous verrons dans la fuite
qu'on le tire de plulieurs efpeces de plantes auffi ap-
pellées aloès. On voit au contraire que le bois d'aloès
ne peut venir que d'un arbre.
On peut diftinguer trois fortes à'agallochum : la
première eft celle que les Indiens appellent calam-
bac j c'eft la plus rare & la plus précieufe , elle vient
de la Cochinchine. Le calambac eft tendre : il y en
a de plulieurs couleurs, par lefquelles on a voulu le
diftinguer , & plufieurs efpeces. Si on le met fur les
charbons ardens, il femble fe fondre plutôt que
brûler i. tant il eft réfineux; la fumée qu'il rend eft
fort épailîe & de bonne odeur.
La féconde paffe communément fous le nom de
bois d'aloès ou bois d'aigle ; on la trouve^omme la
première dans la Cochinchine , mais il y en a auffi.
à Cambaye 6c à Sumatra r le bois d'aloès eft plus com-
mun dans ce pays-ci que le calambac, parce qu'il n'eft
pas fi cher. Le bois d'aigle eft compaft 6c pefant ; fa
i'ubftance eft percée de plulieurs cavités, elle femble
être cariée ; la couleur eft rouffe , fon goût eft un peu
acre 6c aromatique , il bouillonne fur les charbons
ardens , fa fumée eft d'une odeur fort agréable.
La troifieme efpece à'agallochum eft appellée ca-
lambour ou calambouc ; il eft d'une couleur verdâtre
& quelquefois roufîe ; fon odeur eft agréable & pé-
nétrante. On l'apporte des îles de Solor & de Temor
en grofles bûches ; & on en fait des étuis, des boîtes,
des chapelets, & plulieurs autres ouvrages.
On ne fait pas fi ces trois efpeces à'agallochum
viennent chacune d'un arbre particulier, ou s'il n'y
a qu'une ieuie efpece d'arbre pour les trois. Ce der-
nier fentiment a été foùtenu par plufieurs botaniftes :
ils ont afîùré que l'arbie reflembloit à un olivier, Se
qu'il portoit de petits fruits rouges.
On dit que les Indiens laiffent les troncs de ces ar-
bres dans la boue pour faire pourrir l'écorce &C l'au-
bier ; il ne refte que le cœur, qui prend leulcment
une couleur brune , 6c qu'il conierve par la réfihs
qu'il contient. On a prétendu que ce bois étant fur pié
ou coupé récemment, rendoit un fuc laiteux d'une
mauvaife qualité : s'il en entroit dans les yeux, on
en perdoit la vue ; s'il en tomboit fur la peau , il s'é-
levoit des boutons. On a vu que ce lue étant épaiffi
6c defféché formoit la rétine qui préferve de la pour-
riture les parties du bois auxquelles il s'attache. Celles
qui en contiennent une grande quantité lont le vrai
caiambac: on dit qu'elles fe trouvent ordinairement
au pie du tronc. D'autres affùrent qu'il faut que les
arbres fe ilellechent & fe pourriffent d'eux-mêmes
fur les montagnes , pour former du talambac. Quoi
qu'il en foit, il eft certain que ce bois eft fort rare,
même chez les Indiens, puiiqu'Us l'achètent fouvent
au poids de l'argent , &: même de l'or. Ils l'cftiment
beaucoup à cauVe de la bonne odeur qu'il rend lors-
qu'on le brûle ; c'eft un parfum délicieux qu'ils ré-
fervent pour les temples des deux & pour les palais
des îois. Si le bois d'aloès n'a pas une auffi bonne
odeur que le calambac, on ne laine pas que d'en faire
■jrand cas dans ce pays-ci.
308 B O I
Il a une qualité chaude & defficcafive , il eft cor-
dial , il fortifie les nerfs & le cerveau , il ranime les
efprits, il prévient les défaillances &c les maladies de
la matrice ; on le fait entrer dans les cordiaux & dans
la thériaque.
On l'employé dans les boutiques de Paris au lieu
de Yafpalath.
* Bois de Rhodes. On foupçonne que \ohois
Je Rhodes étoit Yafpalath des anciens : mais ce n'eft
qu'une conjecture , les anciens n'étant pas même
d'accord fur Yafpalath. Les modernes ont prétendu
que c'étoit Yagallochum , le bois d'alors , ou le bois
de Rhodes ; aujourd'hui on ne fait pas encore préci-
sément ce que c'eft que le bois de Rhodes.
Celui auquel on donne aujourd'hui ce nom eft jau-
nâtre lorfqu'il eft nouvellement coupé ; fa couleur
' devient brune avec le tems. Il eft dur, compaâ,
noueux , & réfineux ; il a une odeur de rofe , c'eft
pour cela qu'on l'a appelle bois de rofe ; & parce que
l'arbre duquel on le tire croît dans l'île de Rhodes &C
de Chypre, on a donné au bois les noms de bois de
Rhodes tk. de bois de Chypre. On trouve auffi ce bois
aux Canaries & à la Martinique.
* Bois de Brésil; ce bois eft ainfi nommé à caufe
qu'on l'a tiré d'abord du Brelil , province de l'Amé-
rique. M. Huet foûtient cependant qu'on le connoif-
foit fous ce nom , long-tems avant qu'on eût décou-
vert ce pays. Voye^ Huetiana , pag. 268.
On le Irnorame différemment fuivant les divers
lieux d'où il vient ; ainfi il y a le brejd de Fernam-
bouc , le brefil du Japon , le brefil de Lamon , le brefïl
de fainte Marthe , Se enfin le brefîlkt ou bois de la Ja-
maïque qu'on apporte des îles Antilles.
L'arbre de brefil croit ordinairement dans des lieux
fecs & arides , & au milieu des rochers. Il devient
fort gros & fort grand , & pouffe de longues bran-
ches , dont les rameaux font chargés de quantité de
petites feuilles à demi-rondes. Son tronc eft rarement
droit, mais tortu & raboteux , & plein de nœuds à
peu près comme l'épine blanche. Ses fleurs , qui font
îemblables au muguet & d'un très-beau rouge , exha-
lent une odeur agréable & très -amie du cerveau
qu'elle fortifie. Quoique cet arbre foit très-gros, il
eft couvert d'un aubier lî épais , que lorfque les Sau-
vages l'ont enlevé de deffus le vif du bois , fi le tronc
étoit de la groffeur d'un homme , à peine refte-t-il
une bûche de brefil de la groffeur de la jambe.
Le bois de brefil eft très-pefant , fort i'ec, &c pétille
beaucoup dans le feu , où il ne fait prelque point de
fumée à caufe de fa grande féchereffe.
Toutes ces différentes fortes de brefil n'ont point
de moelle, à la réferve de celui du japon. Le plus
eftimé eft le brefil de Fernambouc.
Pour bien choiiîr ce dernier , il faut qu'il foit en
bûches lourdes , compaft , bien fain , c'eft-à-dire fans
aubier &fans pourriture ; qu'après avoir été éclaté,
de pâle qu'il eft il devienne rougeâtre , & qu'étant
mâché il ait un goût fucré.
Le bois de brefl eft propre pour les ouvrages de
tour, & prend bien le poli: cependant fon principal
ufage eft pour la teinture , où il fort à teindre en
rouge , mais c'eft une fauffe couleur qui s'évapore
aifément , & qu'on ne peut employer fans l'alun &c
le tartre. Voye^ Teinture.
Du bois de brefil de Fernambouc on tire une efpece
de carmin par le moyen des acides : on en fait auffi
de la lacque liquide pour la mignature. V. Rouge ,
Lacque, &c.
* Bois de fustet , (Hijl nat.) l'arbre qui le don-
ne eft commun à la Jamaïque ; il y croît en plaine
campagne. Les teinturiers s'en fervent pour teindre
en jaune : mais il n'eft d'aucun ufage en Médecine.
* Bois LETTRÉ , lignum jlnenfe , il vient delà Chi-
ne. On l'appelle bois lettré, parce qu'on nous l'ap-
B O I
porte marqué de lettres ; il n'eft prefque d'aucun ufa-
ge en Médecine.
* Bois de sainte Lucie, arbre qui doit fe rap-
porter au genre appelle cerifie/. Voye?^ CERISIER.
* Bois d'Inde, Bois delà Jamaïque,o«Bois
DE CAMPECHE, (Hifî. nat.~) on l'appelle auffi laurier
aromatique ; c'eft un grand & bel arbre qui croît en
Amérique , & principalement aux îles de Ste Croix
de la grande Terre , la Martinique , la Grenade , &c.
Le bois de cet arbre eft dur , compa£t , &c fi lourd ,
qu'il ne nage point fur l'eau. Sa couleur eft d'un
beau brun marron , tirant quelquefois fur le violet
& le noir : on en fait des meubles précieux , car il
prend un très -beau poli & ne fe corrompt jamais.
Son écorce eft jaunâtre, très-mince & très-unie ; (es
feuilles reffemblent affez à celles du laurier ordinai-
re , excepté que celles du bois d'Inde font ovales, &
ne fe terminent pas en pointe comme les fiennes ;
elles font liffes , roides , d'un verd foncé en-deffus ,
& d'un verd plus clair en-deffous; les bords en font
unis,& ne font point pliffés comme ceux des feuilles
de laurier , elles font outre cela fort aromatiques ; &
miles dans les fauffes elles leur donnent un goût re-
levé femblable à celui de plusieurs épiceries. Cet ar-
bre fleurit une fois l'an; & aux fleurs, qui*viennent
par bouquets , fuccedent de petites baies ou de peti-
tes graines rondes, groffes comme des pois , qui ren-
ferment de la femence; ces graines font très-odoran-
tes , & ont du rapport avec la canelle, le clou de gi-
rofle, & la mufeade : elles ont irv-goût piquant &
aftringent qui n'eft point defagréable : on les connoît
en Angleterre fous le nom de graine des quatre ipices;
les habitans des îles s'en fervent pour affaifonner leurs
faillies. Si on en met digérer dans de bonne eau-de-
vie, on en retire par la diftillation une eau ou liqueur
fpiritueufe d'une odeur gratieule mais indéfiniffable,
à laquelle il ne faut qu'ajouter une dofe convenable
de fucre pour en faire une liqueur délicieufe au goût
& propre à fortifier l'eftomac. On dit que la décoc-
tion des feuilles du bois d'Inde eft bonne pour forti-
fier les nerfs, & foulage les paralytiques & les hydro-
piques. On l'employé dans la teinture , & fa décoc-
tion eft fort rouge.
On a remarqué que fi l'on met de cette teinture
dans deux bouteilles , & que l'on mêle dans l'une un
peu de poudre d'alun , celle-ci deviendra d'un très-
beau rouge clair, qu'elle confervera, & l'autre de-
viendra jaunâtre en moins d'un jour , quoique les
deux bouteilles foient fermées de même ; &c û on
laiffe à l'air quelque peu de cette décoûion , elle de-
viendra noire comme de l'encre dans le même efpa-
ce de tems.
* Bois DE FER , ( Hifl. nat.} arbre qui croît princi-
palement aux îles de l'Amérique : c'eft fa grande du-
reté qui lui a fait donner ce nom. Il eft de la grof-
feur d'un homme par le tronc ; fon écorce eft grifâ-
tre & dure ; il a beaucoup de petites feuilles , 6c eft;
tout couvert de bouquets de fleurs , Iemblables à ceux
du hlas ; l'aubier eft jaune & fort dur jufqu'au cœur
de l'arbre , qui eft fort petit & d'un rouge brun : ce
cœur eft d'une fi grande dureté , que les outils de fer
mieux trempés ne peuvent le percer.
* BOIS NÉPHRÉTIQUE , {Hijl. nat.~) lignum nephre-
ticum ou peregrinum : il eft blanchâtre ou d'un jaune
pâle , fordide ; pelant , acre , & même un peu amer
au goût ; d'une écorce noirâtre , & brun ou d'un
rouge brun au cœur. Macéré dans de l'eau claire pen-
dant une demi -heure, il lui donne une belle couleur
opale , qui change félon la dilpolîtion de l'œil & de
la lumière. Si on y mêle une liqueur acide , la cou-
leur bleue difparoit , & la liqueur paroit dorée de
quelque côté qu'on la regarde. Mais l'huile de tartre ,
ou la folution d'un fel alkali urineux , lui reftituera
la couleur bleue.
B O I
L'arbre qui donne ce bois s'appelle arbor Americana
Coatli. M. Tournefort en donne la defcription fui-
vante. Il a la fubftance &C la grandeur du poirier ; les
feuilles difpofées alternativement fur les rameaux de
la forme de celles du pois chiche , mais plus épaiflès ,
fans découpures , longues d'un demi -pouce , larges
de quatre lignes , d'un verd brun , parfemées d'un
duvet fort doux , reluifantes en deflbus où ce duvet
eft argenté , avec une nervure aflez grotte ; la fleur
attachée au bout des rameaux. Hernandes dit qu'elle
eft d'un jaune pâle , petite , longue , & difpoîée en
épi , &c que fon calice eft d'une pièce , partagé en
cinq quartiers , femblable à une corbeille , & cou-
vert d'un duvet roux. Cet arbre croît dans la nou-
velle Efpagne.
On recommande l'ufage de ce bois pour les mala-
dies des reins & la difficulté d'uriner. On le coupe
par petites lames , qu'on fait macérer dans de l'eau:
cette eau acquiert au bout d'une demi-heure la cou-
leur d'un bleu clair ; on la boit ; on en ajoute de nou-
velle , qu'on prend encore , & l'on continue jufqu'à
ce que le bois ne colore plus.
Les uns prennent un verre de cette teinture tous
les matins ; d'autres la mêlent avec du vin : quelques-
uns en ont été foulages dans la gravelle , tk. autres
maladies relatives aux reins & à la vefiie.
Bois puant , (Mjl- nat. ) anagyris , genre de
plante à fleur papilionacée , dont la feuille lupérieure
eft beaucoup plus courte que les autres. Lorfque
cette fleur eft paffée , le piftil qui fort du calice de-
vient une filique femblable à celle du haricot , qui
renferme des femences qui ont ordinairement la fi-
gure d'un petit rein. Ajoutez au caractère de ce gen-
re , que les efpeces ont les feuilles trois à trois fur un
feul pédicule. Tournefort , Intl. rci htrb. F. Plante.
(O
Bois rouge ou Bois de sang , (Hijl. nat.) c'eft
le bois d'un arbre qui croît en Amérique près du golfe
de Nicaragua ; il eft d'un très-beau rouge : on s'en
fert dans la teinture. Il le vend fort cher.
Différentes acceptions du terme bois dans les Arts
méchaniques.
Bois de grille, partie du métier à travailler les
bas , fur laquelle les reflbrts de grille font difpofés
perpendiculairement. Voye^ Bas.
Bois de moule fervant à fondre les caractères d 'Impri-
merie ; ce font deux morceaux de bois taillés fuivant
la figure du moule , dont l'un eft à la pièce de deflus ,
& l'autre à la pièce de deflbus : ils fervent à tenir le
moyle , l'ouvrir , & le fermer fans fe brûler au fer
qui eft échauffé par Le métal fondu que l'on jette con-
tinuellement dedans, foye^ A & B fig. i. PI. II. du
Fondeur de caractères d'Imprimerie, 6c les figures z. &
,3 de la même planche.
Bois, en terme de Lapidaire , eft un gros cylindre
court & percé de part en part , qui s'emmanche dans
le clou ou cheville de la table , placé à côté de la
roue , près duquel l'ouvrier appuie fa main pour
être plus fur , & dans lequel il fourre un bout de fon
bâton à cimenter , afin que la preffion de la pierre fur
la roue foit égale, foye^ la fig. y. PI. du Lapidaire.
16 eft le trou dans lequel entre le bout du bâton à
ciment , comme la_/%. 6 le repréfente ; i , le bois ;
r s , le clou ou cheville fixée par fa partie inférieure
dans la table ou établi ; i z , la place de l'ouvrier qui
preffe fur le bâton à ciment , à l'extrémité duquel la
pierre eft montée ; 14 , la meule.
Bois de têtes, Bois de fonds: les Imprimeurs nom-
ment ainfi certains morceaux de bois de chêne , qui
entrent dans la compofition d'une forme , lefquels
font de diverfes grandeurs , mais égaux dans leur
épaifleur , qui eft réglée à fept à huit lignes , alin
qu'elle foit inférieure à la hauteur de la lettre , qui
eft de dix à onze lignes. Ce font ces difïercns mor-
B O î
309
ceaux de bois qui déterminent la marge. Ils doivent
être plus ou moins grands , fuivant le format de l'ou-
vrage & la grandeur du papier. Voye^ Forme,
Biseau, Coin. VoyeiPl. II. fig. 3. lettres h, i ; '
fig. 6. lettres k> i ; fig. 7. lettres h , i , k,l;fig.8.
lettres/, g3 h,i.
Bois de raquette ; c'eft un tour de bois qui a un
manche de longueur médiocre , dont on fait avec de
la corde à boyau des raquettes à jouer à la paume.
Les bois de raquettes font faits de branches de bois
de frêne fendues en deux.
Bois , cht[ les Rubaniers , fe dit de la petite bobi-
ne qui porte l'or ou l'argent filé : il en porte ordi-
nairement deux onces ; 6c c'eft lorfqu'il eft chargé
qu'il eft appelle bois , car il devient bobine lorfqu'il
eft vuide.
Bois à limer, cher^ les ouvriers en métaux & autres ;
c'eft un petit morceau de bois quarré qui fe met dans
l'étau, & fur lequel on pofe la pièce que l'on tient
d'une main, foit avec les doigts, foit avec un étau
à main , foit avec une tenaille , 6c qu'on lime. On fe
fert de ce bois pour appui , de peur que le fer de l'é-
tau ne gâte la forme de l'ouvrage à mefure qu'on
travaille. On fait à ce morceau de bois une entaille
qui fert de point d'appui à la pièce.
Bois de broffe , en terme de Vergetùer ; c'eft une pe-
tite planche mince de hêtre ou de noyer , percée à
diftance égale pour recevoir les loquets".
Bois d'un éventail, fignifïe les flèches & les maî-
tres brins de bois , écaille , ivoire , ou autres matiè-
res , dont on fe fert pour monter un éventail. Le bois
d'un éventail eft compofé de deux montans ou maî-
tres brins , & de dix-huit ou vingt flèches , qui font
collées par en-haut entre les deux feuilles , &ï joints
enlemble en-bas par un clou ou cheville de fer qui
les traverfe , & qui eft rivée des deux côtés. Foye^
Éventail, & la figure Z4. PI. de C Eventaillifle. Ce
font les Tabletiers qui les fabriquent , & qui fe fer-
vent pour cet effet de limes , de feies , d'équerres ,
de forets , &c.
Bois de fufil ou FÛT, terme cTArquebuJîcr ; c'eft un
morceau de bois de noyer ou de chêne fculpté , de
la hauteur de quatre pies, large , & un peu plat par
en-bas ou du côté de la croffe ; par en-haut il eft rond,
creuïé en- dedans pour y placer le canon du friûi , à
peu-près de la même groffeur , de façon que le canon
y eft à moitié enchâffé. Il y a par -défions une mou-
lure pour y placer la baguette , qui y eft retenue par
les porte-baguettes-: c'eft fur ce bois que l'on monte
la platine , le canon , la plaque de couche , la ious-
garde , &c.
Il y a aufii des boisdefufds à deux coups , qui ne
différent de celui-ci que parce qu'il eft plus largg^
&£ qu'il y a deux moulures pour y placer les deux
canons , deux entailles pour y placer les deux pla-
tines , l'une à droite & l'une à gauche , & par-delibus
une feule entaille pour placer la baguette.
Bois, au trictrac , fe dit en gênerai des dames
avec lesquelles on joue au jeu. f-'oye^ Dame &
Trictrac.
* Bois de vie , ( Hijl. ceci. ) On nomme ainfi par-
mi les Juifs deux petits bâtons, femblables à peu-
près à ceux des cartes géographiques roulées, par
où on prend le livre de la loi , afin de ne pas tou-
cher au livre même , qui efl enveloppé dans une es-
pèce de bande d'étoffe brodée à ('aiguille. Les Juifs
ont un refpeâ fuperftitieux pour ce bois ; iU le tou-
chent avec deux doigts feulement, qu'ils portent fur
le champ aux yeux , car iis s'imaginent que cet at-
touchement leur a donné la qualité de fortifier la
vue , de guérir du mal d'yeux, de rendre la fanté ,
& de faciliter le- accouchemens des femmes encein-
tes : les femmes n'ont cependant pas le privilège de
3 I0
B O I
toucher les bois de vie ; mais elles doivent fe conten-
ter de les regarder de loin.
* Bois sacrés , {Myth.) Les bois ont été les pre-
miers lieux deftinés au culte des dieux. C'eft dans le
creux des arbres & des antres , le filence des bois &
le fond des forêts , que fe font faits les premiers fa-
crifices. La fuperftition aime les ténèbres ; elle éleva
dans des lieux écartés fes premiers autels. Quand elle
eut des temples dans le voilinage des villes , elle ne
négligea pas d'y jetter une fainte horreur, en les en-
vironnant d'arbres épais. Ces forêts devinrent bien-
tôt aufîi révérées que les temples mêmes. On s'y af-
fembla ; on y célébra des jeux & des danfes. Les
rameaux des arbres furent chargés d'offrandes ; les
troncs facrés auffi révérés que les prêtres ; les feuil-
les interrogées comme les dieux. Ce fut un facrilége
d'arracher une branche. On conçoit combien ces
lieux deferts étoient favorables aux prodiges : auffi
s'y en faifoit-il beaucoup. Apollon avoit un bois à
Claros , où jamais aucun animal venimeux n'étoit
entré. Les cerfs des environs y trouvoient un retuge
affiiré , quand ils étoient pouriuivis. La vertu du dieu
repouffoit les chiens : ils aboyoient autour de fon
bois , où les cerfs tranquilles broutoient. Efculape
avoit le fien près d'Epidaure : il étoit défendu d'y
laifTer naître ou mourir perfonne. Le bois que Vul-
cain avoit au mont Ethna étoit gardé par des chiens
facrés , qui flattoient de la queue ceux que la dévo-
tion y conduifoit , déchiroient ceux qui en appro-
choient avec des mains impures , ÔC éloignoient les
hommes & les femmes qui y cherchoient une retraite
ténébreufe. Les furies avoient à Rome un bois/acre.
BOIS LE-DUC, (Géog.) grande ville, bien for-
tifiée , du Brabant Hollandois , dont elle eft la capi-
tale , au confluent du Dommel Se de l'Aa qui for-
ment la Dies , qui va fe jetter dans la Meufe au fort
de Crevecœur. Le pays qui en dépend s'appelle la
mairie de Bois -le- duc , qui fe divife en quatre quar-
tiers ou diftrifts.
* BOISER, V. a£t. terme de Menuiferie & d'Archi-
tecture; c'eft couvrir les murs d'une chambre ou d'un
appartement d'ouvrages en bois afTemblés , moulés ,
fculptés, &C. Voye{ LAMBRISSER & DÉCORATION.
Les appartenons boifes font moins froids en hyver
& plus fains en tout tems.
BOISSEAU, f. m. (Comm.) mefure ronde de bois
ordinairement cintré par le haut d'un cercle de fer
appliqué en-dehors bord à bord du fût , avec une
tringle ou barre de fer qui le traverfe par l'ouvertu-
re d'en-haut dans fa circonférence, pour le lever plus
aifément. Il fert à mefurer les corps ou chofes feches,
comme les grains, le froment , l'orge, l'avoine , &c
les légumes fecs , comme les pois , fèves , lentilles ,
&c. les graines , comme le chenevi , le millet ; les
fruits fecs , comme les navets , oignons , noix , châ-
taignes , &c.
Du Cange fait venir ce mot de bujfellus , bujlellus ,
ou bijjellus, diminutif de buça, qui iignifioit la même
choie dans la baffe latinité : d'autres le font venir de
bujfulus , qui fignifie une urne dans laquelle on jettoit
les forts. Ce mot femble être une corruption de bu-
xulus.
A Paris le boijfeau fe divife en deux dcmi-boijfeaux ;
le demi-boijjeau en deux quarts ; le quart en deux de-
mi-quarts ; le demi-quart en deux litrons ; & le li-
tron en deux demi-litrons. Par tentence du prévôt
des marchands de Paris , le boiffeau doit avoir huit
pouces Se deux lignes Sz demi de haut , & dix pou-
ces de diamètre ; le demi-boijfeau fix pouces cinq li-
gnes de haut, fur huit pouces de diamètre ; le quart
de boijjcau doit avoir quatre pouces neuf lignes
de haut & fix pouces neuf lignes de large ; le demi-
quart quatre pouces trois lignes de haut , & cinq pou-
ces de diamètre ; le litron doit avoir trois pouces &
B O I
demi de haut , & trois pouces dix lignes de diamètre ;
& te demi-litron deux pouces dix lignes de haut , fuf
trois pouces une ligne de large. Trois boijfeaux font
un minot ; fix font une mine ; douze un ieptier ; Se
cent quarante-quatre un muid. Voye-^ Muid.
La mefure du boijjcau eft différente dans les autres
parties de la France : quatorze boiffeaux & un huitiè-
me d'Amboife & de Tours , font le feptier de Paris;
vingt boijjeaux d'Avignon font trois feptiers de Pa-
ris ; vingt boijjeaux de Blois font un feptier de Paris ;
& il n'en faut que deux de Bordeaux pour faire la
même mefure ; trente-deux boijfeaux de la Pvochelle
font dix-neuf feptiers de Paris.
Les mefures d'avoine font doubles de celles des
autres grains ; de forte que vingt-quatre boijfeaux d'a-
voine font un feptier, Se deux cents quarante-huit un
muid. On divife le boijjcau d'avoine en quatre pico-
tins , & le picotin en deux demi-quarts , ou quatre
litrons. Quatre boijfeaux de fel font un minot , & fix
un feptier. Huit boijfeaux font un minot de charbon ,
feize une mine , & trois cents vingt un muid. Trois
boijjeaux de chaux font un minot , & quarante-huit
minots font un muid.
Par un règlement d'Henri VII. le boijfeau en Angle-
terre contient huit gallons de froment ; le gallon huit
livres de froment à douze onces la livre ; l'once vingt
fterlins ; & le fterlin trente-deux grains de froment
qui croiffent dans le milieu de l'épi. (G)
* Cette mefure eft l'ouvrage principal du Boiffe-
lier : il eft compofé de morceaux de merrein affem-
blés circulairement.
* Boissea.u, f. m. C'eft un inftrumentà l'ufage
des Boutonnicrs , de la même manière que le couffin
eft à l'ufage des faifeufes de dentelle; avec cette
différence que le couffin eft fait en demi -globe , ou
en globe tout entier , que l'ouvrière tient fur fes ge-
noux , & fur lequel fes fufeaux font fixés, de manière
que la poignée des fufeaux eft tournée vers elle ; Se
le boijjcau au contraire eft la portion d'un cylindre
creux , coupé par la moitié , que l'ouvrier place fur
fes genoux , qui font couverts de fa concavité. La
partie fupérieure du boiffeau eft attachée à fa vefte
par une courroie , & fes fufeaux font placés de ma-
nière que c'eft leur tête qui eft tournée vers l'ou-
vrier. Le chef de l'ouvrage, dans la dentelle, en eft
fur le couffin la portion la plus éloignée de l'ou-
vrière ; au contraire, c'en eft la partie la plus voifine
dans le travail du boutonnier. C'eft fur le couffin
que fe fait la dentelle ; c'eft fur le boiffeau que fe font
les galons de fil Se de foie , les jarretières , les cein-
tures , & autres ouvrages de tiffuterie. Le couihn eft
rembourré , Se les fufeaux Se la dentelle s'attachent
deffus par le moyen des épingles. Le boijfeau eft de
bois mince Se fimplement couvert ou d'une toile
groffiere, ou d'un parchemin fort; ou il ne l'eft point
du tout , Se l'ouvrage eft contenu fur le boijfeau par
une efpece de bobine qui eft placée à fa partie fupé-
rieure , & fous laquelle il paffe pour fé rendre entre
l'eftomac de l'ouvrier & le bord lùpérieur du boijfeau,,
tomber fous le boijfeau Se l'y rouler. rojwBouTOK,
Galon , Ceinture , &c Voye^ auffi la Planche I.
figure à. du Boutonnier , un ouvrier qui travaille ail
boijfeau ; cet infiniment eft repréfenté en particulier
dans les figures 3 , J. de la Planche IL
Boisseau, (Fontainier. ) on appelle ainfi la boîte
de cuivre dans laquelle tourne la clé d'un robinet.
(K)
Boisseau de Poterie , eft un corps rond & creux
de terre cuite , Se verniffé en-dedans , en forme de
petit barril fans fond , d'environ neuf à dix pouces
de haut, & d'autant de diamètre, dont plufieurs em-
boîtés les uns dans les autres forment la chauffe ou
tuyau d'une ailance. (P)
BOISSELÉE ,f. f. (Commerce.) ce qui eft contenu
B O I
dans un boifleau. On dit une boiffelie de froment,
d'orge , de pois , de fèves , &c.
Boijfele'eeil aufli une certaine mefure de terre dont
on fe iert en plufieurs provinces de France , & elle
dénote autant de terre qu'il en faut pour recueillir
un boifleau de grain. Huit boijjelées font un arpent de
Paris ou environ. (G)
BOISSELERIE, f. f. Part ou la profejfwn du Boif-
Jèlier, qui coniifle à faire & vendre plufieurs menus
ouvrages de bois.
BOISSELIER , c'eft un ouvrier qui vend & fait
des pelles , des boifleaux , des foufflets , des lanter-
nes , & autres menus ouvrages de bois.
Les Boifjeliers font partie de la communauté des
Tourneurs. Voye%_ Tourneur.
Ces fortes d'ouvriers ont peu d'outils qui leur
foient particuliers , ne fe fervant que de couteaux ,
marteaux, planes, &c. comme bien d'autres arti-
sans , fous l'article defquels on pourra voir la des-
cription & la figure de chacun de ces outils.
* BOISSON , f. f. on peut donner ce nom à tout ali-
ment fluide deftiné à réparer nos forces ; définition
qui n'exclut pas les remèdes mêmes fluides. On a vu
en Angleterre un homme qui ne vivoit que de fomen-
tations qu'on lui appliquoit à l'extérieur. Le but de
la boijfon efl: de remédier à la foif , au deflechement,
à l'épaifieur ou à l'acrimonie des humeurs. L'eau
froide , très-légère , fans odeur ni fans goût , puifée
dans le courant d'une rivière , feroit la boijfon la plus
faine pour un homme robulle. L'eau froide efl: adou-
ciflante ; elle fortifie les vifeeres ; elle nettoyé tout :
fi les jeunes gens pouvoient s'en contenter , ils au-
raient rarement des maladies aiguës. Hérodote pa-
roît attribuer la longue vie des Ethiopiens à l'ufage
d'une eau pure & légère. Il fembleroit qu'il faudroit
réîerver la bierre , le vin , & les autres liqueurs for-
tes , pour les occafions où il s'agit d'échauffer , de
donner du mouvement, d'irriter, d'atténuer, &c.
Boire de l'eau , & vivre d'alimens qui ne foient point
du tout gras , voilà , dit Boerhaave , le moyen de
rendre le corps ferme , & les membres vigoureux.
* BOITE, f. f. fe dit en général de tout aficmbla-
ge de bois , de cuivre, de fer, ou de quelqu 'autre
matière que ce foit , deftiné , foit à contenir , foit à
revêtir, îoit à diriger, foit à affermir d'autres pie-
ces. Il faut bien oblerver que toute boue fait l'une de
ces fondions ; mais qu'il y a un grand nombre d'ou-
tils , d'inftrumens ou d'aflemblages qui ont quelqu'u-
ne ou plufieurs de ces propriétés communes avec la
boite , & auxquels on ne donne pas le même nom.
Le nombre des aflemblages auxquels on donne le
nom de boîte cft infini : nous ne ferons mention que
des principaux ; les autres Te trouveront aux articles
des touts dont ils font des parties.
BoÎTE À FORET, outil d'' Arquebufter , de Coute-
lier, de Serrurier , & autres ouvriers ; c'eft une efpece
de bobine , ou de fer ou de bois , ou de cuivre , plus
grofle que longue , qui cft traversée d'une broche
auffi de fer de la longueur de fix pouces , dont un des
.bouts eft pointu , pour entrer dans le plaftron ( Voy.
Plastron ) , & l'autre bout eft un peu plus gros
par en-bas, & eft percé d'un trou quarré dans le-
quel on met les forêts & les frailes pour percer les
trous , en faifant tourner la boîte avec l'archet , par
le moyen de la corde de l'archet. Cette boîte cft tan-
tôt de ter, tantôt de cuivre , de bois, &c.
BOÎTES de réjoiiijfince , ( Artijicier. ) ce font des
cfpcces de boites de fer ou de tonte qui fe chargent
avec de la poudre èc un tampon , 6c qu'on tire dans
les réjouiffanecs avant le canon , ou au défaut du
canon.
* Boîte , f. f . ( Artillerie. ) c'eft le nom qu'on
donne au bout de la hampe des écouvillons qui fer-
vent à nettoyer ôc à rafraîchir le canon. Foytr Ca-
B O I
311
NON, voyei Hampe. On donne le même nom à la tê-
te d'un refouloir, ainfi qu'à l'embouchure de fer ou
de fonte dans laquelle entre le bout d'un eflieu d'af-
fût ou autre , & à la partie du vilebrequin qui reçoit
la mèche , & la fixe au corps du vilebrequin , &c.
* Boîte à pierrier, en Artillerie , corps cylindrique
& concave fondu de bronze ou forgé de fer, avec une
anfe & une lumière : on remplit la boîte de poudre ;
on la place enfuite dans le pierrier par la culafle ,
derrière le refte de la charge , qu'elle chafle en pre-
nant feu.
Boîte , eft encore un cylindre de cuivre percé félon
fon axe d'un trou quarré , pour pouvoir être monté
fur la tige de l'aléfoir : cette boîte porte les couteaux
d'acier au moyen defquels on égalife l'ame des ca-
nons, f^oyei Alesoir , & D fig. 3. PI. de la Fon-
derie des canons ,jig. de Paléfoir.
BoÎTES à foudure , en terme de Bijoutier, font de
petits coffrets dans lefquels l'on renferme les paillons.
Voyei Paillon. Ils font chiffrés du titre de la fou-
dure qu'ils contiennent.
BoÎTE , en terme de Boijfelier , fe dit de tout coffret
deftiné à contenir ou ferrer quelque chofe : il y en a
de couvertes , & d'autres fans couvercle.
Les boîtes couvertes font garnies d'un couvercle
qui embrafle l'extrémité fupérieure de l'ouvrage en-
dehors du corps ; les autres n'ont point cette pièce.
Boîte à lijfer, ckei les Cartiers , eft un inftrument
de bois qui a deux manches de bois à fes deux côtés ,
& qui par le milieu entre dans l'entaille qui eft au
bout de la perche à lifler. Cette boîte reçoit par fon
extrémité d'en-bas qui eft creufe , une pierre noire
fort dure & très-polie , avec laquelle on lifle les car-
tes en frottant defflis. Foye{ Plan, du Cartier ,jîg. j.
qui repréfente un ouvrier qui lifle une feuille de car-
te , & lajîg- 8. de la même Plan. A7 eft la boîte à lijfer
dans fa fituation naturelle, o la partie inférieure de
la perche , n la liflbire de verre très-polie , qu'on fait
entrer dans la mortoife qui paroît à la figure M , qui
eft la boîte à lijfer renverfée. On frotte la liflbire avec
du favon , pour qu'elle coule plus facilement fur les
cartes.
Boîte, inftrument de Chirurgie, pour contenir la
jambe dans le cas de fracture compliquée. Les pan-
femens qu'exigent les fraftures compliquées ne peu-
vent fe faire fans des mouvemens capables d'empê-
cher la réunion des os , à moins que les parties une fois
réduites , ne foient contenues par des machines aflez
induftrieufemcnt inventées , pour qu'elles ne fouf-
frent aucun dérangement. La Chirurgie moderne,
déterminée par le fuccès , a préféré une boîte aux
fanons & aux écorces d'arbre qu'on employoit pour
maintenir ces fortes de fraftures. Cette boite cft com-
pofée de quatre pièces ; fa voir, d'une femelle, d'un
plancher, & de deux murailles. La femelle eft jointe
à l'extrémité du plancher par deux gonds qui en-
trent dans deux fiches, & les deux murailles font
jointes de même aux parties latérales du plancher;
de manière que les unes & les autres de ces pièces
peuyent le joindre & le féparer du plancher pour les
utilités dont on parlera plus bas. Le plancher eft cou-
vert d'un petit matelas qui foûtient la jambe ; les mu-
railles auffi garnies de matelas, en s'approchant,
contiennent la jambe, & empêchent les mouvemens
qu'elle pourroit faire fur les côtés. La femelle matc-
laflec foùticnt la plante du pié , qui par fon moyen
cft tenu plus ou moins fléchi à la faveur de deux cro-
chets , qui , des deux côtés de la femelle , vont s'en-
gager clans deux crémaillères attachées au bout & à
l'extérieur des murailles: ces crémaillères ont plu-
fieurs trous pour donner plus ou moins d élévation
à la femelle dont elles reçoivent les crochets.
M. Petit a perfectionné la ftruclure de cette boîte,
& en a conlidciablemcnt étendu les avantages. La
3 12
B O I
machine de M. Petit diffère de celle que nous venons
de décrire ( K Planche IV. fig. 3-) i°- Parce qu'au
lieu de plancher , elle a une efpece de lit de fangle
formé par un couti cloué fur un chaffis , lequel eft
compolé de deux jumelles cintrées à l'endroit du
pli du genou , & de deux traverfes, dont l'une droite
& plus courte joint les deux jumelles par le bout du
côté du pié ; l'autre plus longue & cintrée les joint du
côté du genou. La féconde choie en quoi cette boîte
diffère de la première , efl un chaffis compolé auffi
de deux jumelles & de deux traverfes ; le tout parallè-
le au chaffis de deffus , excepté que les jumelles de ce
dernier chaffis font toutes droites , &C que celles du
chaffis fupérieur font cintrées fous le jarret. Les jumel-
les de l'un & l'autre chaffis , par le bout qui regarde
la cuiffe, font jointes enfemble par deux charnières ;
ce qui permet de les écarter, & rapprocher plus ou
moins ; &c pour les tenir au degré de proximité, ou
d'éloignementqui convient, il y a une efpece de pa-
lette jointe par deux gonds de bois reçus dans deux
fiches attachées aux extrémités des jumelles du chaf-
fis fupérieur : cette palette fe plie contre les jumelles,
& peut s'en éloigner par une fuite de degrés , qui lui
font marqués par deux crans creufés fur la partie lu-
périeure des jumelles du chaffis inférieur du côté du
pié ; de manière que l'on peut lever plus ou moins ,
6c baiffer de même le chaffis fupérieur fur lequel fe
trouve la jambe. Telle eft la defcription que M. Petit
fait de cette machine dans ion Traite des maladies des
Os. M. de Garengeot détaille dans fon Traité cflnflru-
mms les dimenlions des différentes pièces qui entrent
dans la ftrudture de cette boîte. Nous avons fait gra-
ver toutes ces pièces en particulier ; cela luffira à
tout homme intelligent pour en faire conftruire une
pareille.
Ses avantages font, i°. qu'au moyen du double
chaffis , on peut changer l'attitude du malade , en
lui baillant & relevant la jambe à fon gré ,fans qu'on
ait à craindre que les os rompus fe déplacent; parce
que ce changement ne dépend que de la flexion ou
de l'extenfion du genou ; mouvemens qui peuvent fe
faire par le moyen du chaffis fupérieur, fans courir
le rilque de déplacer les os.
a0. La palette ayant des degrés de repos fur les
jumelles du chaffis inférieur , peut mettre la jambe en
fureté à tous les degrés de hauteur qui conviendront
au malade , dans les panf emens ou dans les inter-
valles.
3°. On évitera par cette machine les mouvemens
irréguliers auxquels ie membre eft. expofé , lorfqu'on
eft obligé de lever les appareils , ou d'en appliquer
de nouveaux ; parce qu'on mettra la partie au dernier
degré d'élévation , & on la fera foùtenir par deux ai-
des , pendant qu'un troifieme garnira d'un nouveau
bandage le chaffis qu'on aura retiré de deffous la
jambe, & qu'on y remettra lorfque le panlement fe-
ra fait. On efl: fur par ce moyen de trouver affez
d'adreffe & de force dans les aides qui foûtiennent
le membre.
4°. Le couti dont le chaffis fupérieur efl garni fait
une efpece de lit de fangle fur lequel la jambe le
moule , & eft bien plus commodément que fur le
plancher de l'ancienne boîte.
5°. Le cintre des jumelles du chaffis fupérieur
tient la jambe pliée , & relâche par conféquent le
tendon d'achille , dont la tenlîon caufe des douleurs
infupportables au talon , par l'extenfion de la jambe
dans l'ufage de la boîte ordinaire.
6°. Le chaffis inférieur reçoit dans fonquarré l'enflu-
re du matelas preffé par le poids de la jambe, & l'em-
pêche de glifler vers le pié du lit comme fait la boîte
ordinaire, parce qu'elle eft unie.
PL IV. fig. j. la boîte ; les figures fuivantes mon-
trent fes différentes pièces.
B O I
Fig. 6. le lit de fangles à double chaffis fur lequel
on pofe le membre.
Fig. S. les murailles matelaflées qui fe montent
par gonds & pentures , ainfi que la femelle , fig. 4.
011 l'on voit deux crochets qui entrent dans les trous
d'une pièce a, fixée à l'extérieur des murailles,
figure 3.
Fig. y. palette de bois-avec fes gonds. Fig. 8. fi-
che qui reçoit un gond de la palette.
Fig. g. la charnière qui unit les jumelles des deux
chaflis par le bout qui regarde la cuiffe.
Les petites pièces qui ne font point chiffrées font
les gonds & les pentures , dont on conçoit affez l'ufa-
ge par ce que nous avons dit. (F)
Boîte, en terme d' Epinglier , eft une efpece de
petit coffre fans deffus , 6k ayant dans fon milieu une
lame de cuivre fur laquelle on appuie les épingles.
Cette lame partage la boîte en deux parties qui font
le plus fouvent de deux fortes de longueurs. Ces boî-
tes font couvertes de plufieurs brins de fil de ter qui
contiennent les épingles dans la capacité de la boîte ,
& les empêchent d'y remuer à la preffion des cifail-
les. Voye{ la figure zcj. SS. PI. de t Epinglier.
Boîte, chc^ les Fontainiers, font des coffres de
fer ou de toile , percés de trous , que l'on met à la
fuperficie des pièces d'eau , pour arrêter les ordu-
res , &c empêcher l'engorgement d'une conduite. Voy.
Crapaudine.
On appelle encore boîte ce qui fait la jonction des
deux pièces d'une foupape. (K)
Bo î te de montre ; cette boîte eft compofée de la cu-
vette qui contient le mouvement , de la lunette dans
laquelle eft ajufté le cryflal, de la charnière qui joint
enfemble ces deux parties , & de la bâte fur laquelle
répofe le cadran, & qui s'étend jufqu'au bord ou filet
de la cuvette. C'eft à cette bâte qu'on fait la petite
charnière. Voy. Charnière. Lorfque le mouvement
efl dans la boîte , le cadran vient fe répofer fur le
bord fupérieur de la bâte , & la platine des piliers
s'appuie auffi fur un petit rebord ou filet qui eft dans
l'intérieur de cette bâte; il a une certaine épaiffeur ,
& c'eft par-deflbus que s'avance la tête du reflbrt de
cadran ; de cette façon le mouvement eft contenu
dans la boîte , fans hauffer ni baiffer , & n'en peut
fortir qu'en dégageant la tête du reflbrt de cadran de
deffous ce filet. Voyei Ressort de cadran.
La boîte fe ferme ordinairement au moyen d'un ref-
fort fitué vis-à-vis de la charnière , qu'on appelle ref-
fort de boîte. Il eft fait de façon que la lunette pofant
fur le bord ou filet de la cuvette, fa partie qu'on ap-
pelle la tête, s'avance fur une autre filet qui eft à la
partie inférieure de la lunette ; de forte que dans cet
état elle ne peut plus fe lever à moins que l'on ne
pouffe le bouton du reflbrt , qui le faifant avancer ,
dégage la tête de-deffus ce filet. Lorfqu'il n'y a point
de reflbrt , la lunette efl retenue au moyen d'un filet
tourné en drageoir , & fituée à la partie inférieure de
la bâte proche de la cuvette : de façon que par ce
filet la lunette & la cuvette tiennent enfemble à ce
drageoir. A la partie fupérieure de la lunette, il y a
une rainure pour contenir le cryflal. ^.Drageoir,
Charnière, &c (T)
Boîte, partie d'une prefife d' Imprimerie ; c'eft un
morceau de bois H, fig. 1. & 2. PI. IV. de ITmpri-
merie , taillé à quatre faces , d'un pié de long , creufé
dans fa longueur, félon la groffeur &c la forme de
l'arbre de la vis, pris depuis le deffous du barreau,
jufqu'au pivot, lequel , au moyen de cette emboîtu-
re, eft contraint de tomber d'à-plomb dans la gre-
nouille ; la boîte elle-même eft maintenue perpendi-
culairement par une tablette K K découpée enquar-
ré, dans laquelle elle fe trouve encaftrée au milieu
de fa hauteur : la boîte eft arrêtée un peu au-deffus du
pivot , par une double clavette de fer qui traverfe
l'extrémité
B O I
Pfextrérnité de l'arbre au-deffus du pivot; aux quatre
coins de cette boîte font attachés quatre crochets de
i'<ji qui reçoivent les attaches de la platine. VoyefTh-
blette, Platine, Presse, &c.
BOÎTES, pièces d'une prejfe d'Imprimerie en taille-
douce. Voye{ PRESSE d 'Imprimerie en taille douce.
BOÎTES, en terme de Layetiers ; ce font de petits
coffres faits de bois de fapin ou autre , pour fervir
à toutes fortes d'ufages. Ils donnent à ces coffres dif-
férera noms félon leur ufage & leur capacité. Exem-
ples : ils appellent boîtes à Lingerie, une boîte qui â deux
pies de long , quinze pouces de large , & dix à onze
de haut , à l'ufage des Lingeres ; boite des champs ,
celle qui n'a qu'un pié de long , neuf de large, fix à
fept de haut ; boîte d'écritale , celle qui a dix-huit pou-
ces de long, un pié de large , & neuf pouces de haut.
BoÎTE du crochet de l'établi, en Menuiferie , eft un
morceau de bois de deux pouces & demi ou envi-
ron en quarré , fur huit à neuf de long , qui entre dans
une mortoife faite au bout de l'établi , & dans laquel-
le le crochet de fer eft placé. Voye^ la figure 36 . PI.
de Menuiferie ,fig. 4, la boîte , J. le crochet.
B O î T E de table à bracelets , en term e de Metteur en œu-
vre , eft une lame d'or ou d'argent battu, pliée, de
forte que la partie fupérieure avance moins que l'au-
tre. Une petite languette de même matière eft fon-
dée fur cette lame vers l'endroit où elle eft pliée, &c
vient pafler dans une ouverture faite à l'entrée de la
boite. Voyc^ Entres. Cette languette fe termine par
un petit bouton aflbrti pour l'ordinaire avec la ta-
ble. V. Table. C'eft en appuyant fur ce bouton ou
le foûlevant un peu , que l'étoffe prife entre les deux
lames ci-deffus , eft chaftee , ou y eft retenue avec
force. Il fe fait auffi quelquefois de ces boites fimples
♦n or ou en argent , qui fervent à attacher un bracelet
de perles, ou autres pierres propres à être enfilées.
Boîtes cTeffai, à la Monnoic, font des petits cof-
fres où l'on met les monnoies qui ont été effayées
pour les envoyer à la cour des Monnoies , où l'on en
tait un nouvel efiai. Les juges-gardes des monnoies
iont chargés de faire les boîtes. Sur trente pièces d'or ,
ilb doivent en mettre une fans choix; &: fur dix-huit
marcs d'argent, une autre qui fert d'échantillon , fur
quoi la cour des Monnoies prononce.
Boîte , en Mon noie, eft encore une partie du ba-
lancier. Voye^ Balancier.
BoÎTE à moulure, ou à bille, en terme d'Orfèvre ,
eft un infiniment fait d'un chafîis de fer de quatre
pouces de long fur trois de haut en-dedans. Le fer eft
d'un pouce d'épaiffeur fur dix-huit lignes de largeur
en-dedans. Sur les côtés il y a une coulifle pour affri-
jettir les billes , avec une échancrure à l'un des deux
çiôtés pour faire entrer les billes : à la partie de-deflùs,
au chaflîs , il y a deux trous taraudés clans lefquels paf-
fent deux vis qui refîerrent les billes l'une contre l'au-
tre par ie moyen crime clef.
BoÎTES, [dans les Orgues) font des tuyaux d'étof-
fe; on appelle étoffe un mélange de deux parties de
plomb ci d'une d'étain de forme cylindrique A , fig.
44. Pi. d'Orgue , terminé par en bas par un pié de
forme conique , par le fommet duquel le vent du fom-
mier pafie clans la boite, dans le corps de la trom-
pette ou autre jeu d'anche , dent la partie inférieure
C entre dans la boite ainli nommée de Ion ufage. Voyc^
Trompette & Orgue.
Boîte , ( en Serrurerie} c'eft une forte de douille
ronde ou quarree, que l'on fcelle ou clans un billot ,
ou à terre, pour recevoir l'extrémité foit d'une barre
de fer, foit d'un inftrument , foit d'un morceau de
bois , dont l'ufage eft de les tenir fermes, quand ils
y font ; d'où l'on peut les tirer & où l'on peut les
replacer à diferétion. On voit des boîtes pratiquées
dans les facrifties : elies font fcellées dans le pavé
pour recevoir les piliers qui foûtiennent les devans
Tome II,
B O I
313
des tiroirs où l'on enferme les chappes , &c.
Boîte^, oit Poche de Navette, ( terme de
Tijjerand. ) c'eft la partie creufe pratiquée dans le
milieu de la navette , où on renferme l'efpoulin , ou
le petit morceau de rofeau fur lequel eft dévidée une
portion du fil de la trame. Voyei Navette.
Bo ÎTE , ( terme de Tourneur) c'eft ainfi qu'on ap-
pelle une pièce de bois de deux ou trois pouces de
longueur, qui s'ajoute à vis au mandrin, ou à l'arbre
du tour , lorfqu'on veut tourner quelque ouvrage
en l'air , ou lui faire des vis & des écroues , tant en
dedans qu'en dehors. La boîte eft de figure cylindri-
que , plate d'un côté , & arrondie par le bout qui tou-
che l'arbre ou le mandrin. Le côté arrondi a une
écroue pour recevoir la vis de l'une ou l'autre de ces
deux pièces; & on attache fur le côté plat avec du
maftic ou avec certaines petites pointes placées
exprès , l'ouvrage qu'on fe propofe de tourner. La
boue eft toujours au -dehors de la lunette. Voye?
Tour.
Bo î TE du gouvernail , ( Marine. ) c'eft la pièce de
bois percée , au travers de laquelle pafl'e le timon ou
la barre. (Z)
BOITER, [Manège.) fe dit du cheval de même
que de l'homme. Boiter de vieux ou de vieux tems,
hgnifie qu'il y a long-tems que le cheval boite. (V)
BOITEUX , ( en terme de Manège ) fe dit d'un che-
val qui a quelque irrégularité dans les mouvemens
pour avoir été eftropié à l'épaule , à la jambe , eu au
pié ; deforte qu'en marchant , il cherche à ména-
ger la partie offenfée , ou n'ofe s'en fervir qu'avec
crainte.
Comme il importe de connoître ce mal dans fes
différentes circonftances, nous en expoferons ici les
principales : fi un cheval boite des pies de devant,
c'eft un ligne que fon mal eft dans l'épaule , dans les
jambes ou dans les pies ; s'il boite des pies de derriè-
re , il faut que fon mal foit dans la hanche , dans le
jarret , ou dans quelqu'autrc partie voifine.
1 °. On connoît que le mal eft dans l'épaule lorfque
le cheval ne levé point la jambe à l'ordinaire & qu'il
la traine par terre, ou quand il levé une jambe plus
que l'autre, & que fon genou paroît comme diilocjué,
à quoi l'on peut ajouter qu'en tournant court, il fa-
voriie viliblement la jambe du côté oii il eft boiteux.
De même fi le mal eft dans l'épaule, ii faut qu'il foit
ou dans le garot , ce qu'il fait connoître en boitant
davantage lorfqu'il eft monté yque loriqu'on le me-
né par la bride, en bronchant beaucoup, & mena-
çant de mordre quand on le touche ou manie à la
partie fupérieure de l'épaule ; ou bien le mal eft dans
la partie intérieure qui joint l'os moelleux , & que
l'on connoît par le mouvement du cheval , qui prefte
fes pas en bronchant , au point de tomber ii l'on ap-
puyoit fur cette partie ; ou enfin le mal eft dans le
coude qui joint l'os moelleux à la jambe , ce que le
cheval fait connoître en ruant ôê levant le pié , quand
on le pince dans cet endroit.
2°. Si le mal eft dans les jambes , il faut qu'il foit
ou dans le genou ou dans la jointure du paturon ,
ce que le cheval tait connoître en refufant de plier
l'un ou l'autre , & en les roidiflant lorfqu'on le fait
marcher ; ou le mal eft clans le canon, & pour lors il
fe manitefte par quelque ef quille, furos, molette, ou
autre mal vilible.
30. Si le mal eft dans le pié, il faut qu'il foit dans
la couronne , & qu'il vienne de quelque effort ou dé-
torfe ; ce que l'on connoît par quelque tumeur ou
fracture, ou quand la partie eft chaude & brûlante
au taû : ou bien le mal eft clans le talon , ce qui vient
de quelque nerf féru ou autre accident femblable ;
en ce cas le mal eft toujours vifible , cv d'ailleurs le
cheval le fait connoître en marchant tout-à-fait fur
Rr
3J4
BOL
la pince : ou bien enfin , le mal eft dans les quartiers
entre le milieu du fabot & le talon ; ce que le cheval
fait connoîrre en boitant davantage loriqu'il eft fur
une pente que lorsqu'il marche iur un terrein uni.
Cet accident vient quelquefois d'un clou qui a blefle
le cheval en le ferrant, & Ton diftingue le clou qui
bleffe en pinçant la tête de chaque clou en même
tems oue le fabot , avec une paire de tenailles.
Quand un cheval boite des pies de derrière , fi le
mal eft dans la hanche ou dans l'os de la cuilfe , il
marchera de côté, & n'avancera pas fi bien de la jam-
be malade que de l'autre ; en tournant court il favo-
rifera cette jambe malade , & en marchant fur une
pente , il tiendra toujours cette jambe plus haute
que l'autre.
Si un cheval a quelque maladie cachée qui l'obli-
ge à boiter quand il travaille , on pourra le découvrir
en le faifant courir à la main par un terrein uni , en
lui lâchant toute la longueur du licou , & remarquant
de quelle manière il pofe fes jambes. S'il ne favorife
aucune des quatre , il faut continuer à l'éprouver en
le maniant rondement juiqu'à ce qu'il ioit bien échauf-
fé ; alors il faut le la, lier repoier pendant l'elpace
d'une heure , & le faire courir ennuie ce nouveau à
la main , en lui lâchant toute la longueur du licou
comme auparavant. ( V)
Boiteux, adj. ( che^ les Rubaniers Tijfutiers ) fe
di't,lo;fqu'un dernier retour n'a pas autant de mar-
ches que les autres , comme s'il n'avoit que 20 mar-
ches ou plus ou moins , au lieu de 24 que les autres
ont ;*on appelle celui-ci retour boiteux. '/. Retour.
Boiteux, fe dit chez les mêmes ouvriers, d'un
ouvrage , comme d'un tuban , qui fe trouve d'une
couleur à un bod & d'une autre couleur à l'autre
bord ; c'eft ce qu'on appelle ruban boiteux.
* BOITIAPO, ( Hift. nat. ) c'eft un grand ferpent
du Brefil ; il a fept ou huit pies de long : il eft de la
groiîeur du bras , fa queue le termine en pointe ; il
eft couvert de belles écailles d'un jaune olivâtre ;
fa morfure eft fort dangereule ; fa chair , a dit-on ,
la propriété de rélifter au venin.
* BOITTE , f. f. ( en terme de Pêche ) c'eft ainfi
que les Pêcheurs de morue nomment l'appas qu'ils
mettent à leurs hameçons. Les François du cap Bre-
ton fe fervent du hareng & du maquereau , dont la
morue eft friande , & qui eft commun fur ces côtes.
BOITZENBURG , ( Gêog. ) il y a deux villes de
ce nom en Allemagne : l'une tur l'Elbe , dans le comté
de Schwerin , à quelques lieues de Hambourg ; l'au-
tre , dans l'éleûorat de Brandebourg.
* BOK.AS , f. m. ( Commerce ) toile de coton que
l'on tire de Surate. 11 y a des bokas blancs & de bleus.
BOL , f. m. (Hifl. nat.) terre grailleule & argilleu-
fe , pelante & ftyptique ; elle s'attache promptement
à la langue & teint les mains : il y a des bols de dif-
férentes couleurs, ordinairement de jaunes & de rou-
ges ; il y en a auifi de blancs , &c. Autrefois on alloit
chercher du bol dans le Levant , en Arménie , pour
l.ufage de la Médecine : mais on s'eft à la fin convain-
cu que le bol que nous avons très-communément en
France , eft auliî bon que celui d'Arménie. On en
fait venir de Blois , de Saumur , de Baville , &c. ^oyei
Terre. (/)
* Les plus connus d'entre les bols font celui d'Ar-
ménie , qui eft maintenant tort rare. La deicription
générale de bol qui précède ,lui convient. On lui at-
tribue la vertu aiexiphaimaque &del'aftnngence. Il
y en a de jaune & de blanc.
Celui de Blois , qui eft une terre d'un rouge pâle.
Celui d'Allemagne , dont la couleur eft un peu plus
foible que ceiui d'Arménie. Il eft pariémé de veines
jaunes ; on le tire des mines de Eohcme. Il n'a aucu-
ne propriété particulière.
Le bol blanc , qui vient de Gran en Hongrie , & de
BOL
Coltberg fur le territoire de Liège ; on le dit d'un ef-
ficacité finguliere dans la dyfTenterie.
Le bol de France , qui vient de Blois , de Saumur
& de la Bourgogne. Le jaune palTe pour le meilleur.
Celui de Tranfylvanie , il a tous les caractères de
celui d'Arménie. Il fe fond dans la bouche comme
beurre ; il vient des environs de Toccai.
Les Doreurs, pour faire l'aflîette de l'or, fe fer-
vent du bol d'Arménie. Les Reiieurs l'écrafent avec
une molette en l'humectant avec un peu de blanc-
d'eeuf mêlé d'eau fur une pierre polie ; quand il eft
bien bi oyé , ils le renferment dans un petit pot , pour
en mettre dans l'occafion une couche très-mince fur
la tranche du livre , après qu'elle a été bien ratifiée.
Foyei Pinceau au Bol.
Bol, (Pharmacie) forme fous laquelle on fait
prendre certains médicamens , pour épargner aux
malades le dégoût qu'ils ont , qui fouvent leur donne
beaucoup de répugnance ; en effet le bol n'étant qu'u-
ne bouchée très-petite , eft très-ailé à avaler.
Le bol doit être mou & un peu plus épais que le
miel : on le compofe avec tout ce qui peut être pris
intérieurement ; lorfque ce font des lubftances feches
ou des poudres , on leur donne une confilîance molle,
en les mêlant avec des conferves ou des fnops.
Lorsqu'elles font liquides & qu'on a intention de les
faire prendre fous la forme de bol , on y joint des
poudres telles que la poudre de réglifîe & autres,
par le moyen defquelîes on les rend un peu plus
lblides.
Le lucre en poudre eft un des ingrédiens , dont on
fe fert pour donner la confiftance d'un bol aux médi-
camens gras & huileux, tels que les baumes.
L'on le fert de pain azyme pour envelopper le bol,
empêcher qu'il ne s'en échappe quelque paitle , & en
faciliter la déglutition.
Le bol a diverfes qualités , félon la différence des
médicamens dont il eft compoié ; il y en a d'aliérant ,
de purgatif, d'aftringent , félon les indications qui fe
prélentent à rempbr.
On a foin de preferire au malade une boiffon ap-
propriée à fa maladie , qui puiffe aider à diviier le
bol lorfqu'il eft dans le ventricule. ( )
* B O L AT H E N , f. m. ( Mythologie ) en Grec
fcoxàSw ; c'eft un nom que les Phéniciens & les Syriens
donnoient à Saturne.
* BOLBITINA , ( Gêog. anc. ) ville d'Egypte ,
qui donnoit nom à une des bouches du Nil , bolbiti-
num ojlium ; c'eft aujourd'hui le bras de Raichit ou de
Roiette.
BOLCANE , ( Gêog. ) l'une des îles des Larrons
en Afie ; il y a un volcan.
tOLCKENHAYN , ( Gêog. ) petite ville de Si-
léfie , dans la principauté de Schweidnitz.
BOLCKWITZ , ( Gêog. ) petite ville de Siléfie ,
dans la principauté de Giogaw.
BOLDUC , voj^ Bois-le-Duc.
BOLENBERG , petite ville du Duché de Mec-
klembourg , lur la mer Baltique.
BOLLANDISTES , f. m. pi. (Hifl. ecclêflafl.) nom
que l'on a donné à quelques Jéluites d'Anvers , ou à
une fociété d'écrivains de leur corps , qui depuis plus
d'un fiecle s'occupe à recueillir tout ce qui concerne
les actes & les vies des laints. On les a ainfi nommés
de Bollandus, Jéluite Flamand, un de leurs princi-
paux chefs, fcyei Acte, Saint.
Comme dans le cours de cet ouvrage nous fom-
mes fouvent obligés de citer cette lavante compa-
gnie, des aâes de laquelle nous avons thé diveiles
obiervations , il ne fera pas inutile de les taire con-
noitre au lecteur.
Au commencement du xvn. fiecle , le P. Heribert
Rolveid , Jéluite d'Anvers , conçut le deffein de raf-
f embler les vies des faints , telles qu'elles avoient été
BOL
B O M
315
écrites par les auteurs originaux, en y ajoutant des
notes femblablcs à celles que les meilleurs éditeurs
des Pères ont ajoutées à leurs écrits , foit pour éclair-
cir les paiTages obfcurs , foit pour distinguer le vrai
du fabuleux. L'cntreprife étoit grande, mais , comme
on le font allez , beaucoup au-deffus des forces d'un
foui homme: aufîi le P. RolVeid ne put -il pendant
toute fa vie qu'amafler des matériaux , & mourut
fans avoir commencé à leur donner de forme. C'é-
loit en 1629 ; & l'année fuivante , le P. Bollandus
reprit ce delfoin fous un autre point de vue , qui tut
de compofor les vies des faints d'après les auteurs
originaux. En 1635 , ds'afibeia le P. Godefroi Henl-
chenius ; &C fix ans après, ils firent paroître les acles
des faints du mois de Janvier en deux volumes in-fo-
lio : ce livre eut un luccès qui augmenta lorfque Bol-
landus eut donné trois autres volumes dans la même
forme , contenant les aûes des faints du mois de Fé-
vrier. Il s'étoit encore aflbcié en 1650 le P. Pape-
brock, & travailloit à donner le mois de Mars lorf-
qii'il mourut en 1665. Après la mort d'Henfchenius ,
le P. Papebrock eut la principale direction de ce grand
ouvrage , & s'affocia fucceiiivement les PP. Baërt ,
Jemaing, du Sollier, & Raye, qui ont donné vingt-
quatre volumes, contenant les vies des faints jufqu'au
mois de Juin. Depuis la mort du P. Papebrock, arri-
vée en 1714 , les PP. du Sollier , Cuper , Piney , &
Bofch , donnèrent en cinq volumes in-folio , le relie
du mois de Juin , & tout le mois de Juillet. Il a paru
encore depuis de nouveaux volumes , contenant une
grande partie des faints du mois d'Août , & l'ouvrage
cil toujours continué par d'autres favans du même
ordre. On prétend que Bollandus n'a pas été allez en
garde contre les traditions populaires : mais fes fuc-
cefleurs , & fur-tout le P. Papebrock , ont apporté plus
de critique dans le choix des monumens deftinés à
former cette vafte collection , qui ne peut être que
très-utile à la religion. ( G)'
BOLLINGEN , ( Gêog. ) petite ville fur le bord
d'un lac , dans l'évêché de Confiance.
BOLLOS , f. m. ( Minéralog. ) on appelle ainfi ,
dans les mines du Potofi & du refte du Pérou , les
lingots ou barres d'argent , qu'on tire du minéral par
l'opération réitérée du feu , ou par le moyen des
eaux-fortes. Voye^ Argent.
BOLOGNE, ( Gêog.) ville d'Italie , capitale du
Bolonois , fur la rivière de Reno , jointe au Po par
un canal. Long. 29. lat. 44. zj. 20.
Bologne (pierre de) ,HiJl. nat. c'eû une pierre
grifâtre , pefante , talqueufo , ordinairement de la
grolfour d'une noix , mais d'une figure irrégulicre ;
les plus luifantes & les moins remplies de taches font
les meilleures , aulîi bien que celles qui font couver-
tes à la furface d'une croûte mince , blanche & opa-
que. On trouve ces pierres en plulieurs endroits d'I-
talie , mais fur-tout au pié du mont Paterno , qui eft
à peu de diftance de Bologne : c'eft après les gran-
des pluies qu'on les découvre ; parce qu'alors ces
pierres fe trouvent lavées & dégagées des parties
terreftres qui les environnent quelquefois , & qui les
rendent méconnoifTables. On prépare ces pierres de
la manière fuivante : après en avoir ôté la terre &
les matières hétérogènes , on en prend quelques-unes
qu'on réduit en poudre très-déliée , qu on paffe en-
fuite au tamis ; on humefte les autres pierres avec
de l'eau-de-vie , & on les enduit de cette poudre ;
on prend enfuite un petit fourneau de terre dont
la grille foit de cuivre jaune ; on y met d'abord quel-
ques charbons allumés ; quand ils font confumés à
moitié , on remplit à moitié le fourneau de charbon
de braife ; on pofe doucement dclïïis , les pierres en-
duites de poudre ; on achevé enfuite de remplir le
fourneau de charbon de braife éteinte ; on couvre
le fourneau de ion dôme , &C on laille brûler le char-
Tome llv
bon fans y toucher , jufqu'à ce qu'il foit entièrement
confommé. Lorfque tout fera refroidi , on trouvera
fur la grille les pierres calcinées : on en fépare la
croûte , & on garde ces pierres dans des boîtes avec
du coton. Elles ont la propriété du phofphore ; c'eft-
à-dire , qu'en les expofant au jour ou au foleil , &
même à la clarté du feu , & les tranfportant fur le
champ dans un endroit obfcur, elles paroiflent lumi-
neufes comme des charbons allumés , mais fans cha-
leur fenfible. Cette lumière dure quelque tems, puis
elle s'affoiblit & fe perd : mais en les expofant de nou-
veau à la lumière, elles reprennent leur qualité phof-
phorique. S'il arrive qu'au bout de deux ou trois ans
elles viennent à perdre tout-à-fait la propriété dont
on vient de parler , on peut la rendre en les faifant
calciner de nouveau de la manière qui a été indi-
quée.
Nous devons ce procédé à M. Lemery , qui a fait
grand nombre d'expériences fur la pierre de Bologne t
6c qui en donne un détail très-circonftancié dans Ion
cours de Chimie. (— )
* BOLONOIS , ( Gêog. ) province d'Italie , dans
l'état de l'Eglifo , bornée au feptentrion par le Ferra-
rois ; à l'orient , par le même & par la Romagne ; au
midi , par le Florentin ; & à l'occident, par l'état de
Modene.
BOLSENA , ( Gêog. ) ville d'Italie fur le lac de
même nom , dans le patrimoine de S. Pierre. Long.
29. 33. lac. 42.37-
BOLTON , ( Géog. ) ville d'Angleterre , dans la
foûdivilïon Septentrionale de la province d'Yorck ,
fur la rivière de Trivel.
* BOLUC-BASSI , (Hifl. mod.) c'eft le nom d'une
dignité ou d'un grade militaire chez les Turcs. Les
boluc-baffis font chefs de bandes , ou capitaines de
cent JanifTaires : ils font habillés & montés , & ils
ont foixante afpres de paye par jour.
BOLZANO ou BOZZEN , ( Gêog. ) ville d'Alle-
magne au comté de Tirol , fur la rivière d'Eifach ,
proche l'Adige. Long. 28. 46. lat. 46. 42.
*BOLZAS,f. m. ( Commerce. ) coutil fabriqué de
fil de coton , qui vient des Indes. Il y en a de tout
blancs , & d'autres rayés de jaune : les raies s'en
font avec du fil de coton écru.
BOLZWAERT , ( Gêog. ) ville de la province de
Frife , près du Zuyder-Zée.
BOMBAIM ou BOMBAI , (Gêog.) ville d'Afie
dans les Indes , proche la côte de Malabar , au royau-
me de Vilapour. Long. 90. 30. lat. 19.
BOMBARDE, f. f. (Artillerie.) pièce d'artillerie
dont on fe fervoit autrefois , qui étoit groflè & courte
avec une ouverture fort large. Quelques-uns l'ont
appellée bafilic.
Il y en a qui dérivent ce mot par corruption de
Lombarde, croyant qu'elle eft venue de Lombardie»
Du Cange après Voffius, le dérive de bombus fkardeoi
Ménage , de l'Allemand bomberden , le pluriel de bom-
ber , balifle : mais je doute que les Allemands ayent ja-
mais connu ce mot. Il eft allez ordinaire à Ménage,
& à plufieurs autres étymologiftes , de donner des
étymologies de mots qu'ils ont eux-mêmes forgées.
Il y a eu des bombardes qui ont porté jufqu'à 300
livres de balle. Froiflart fait mention d'une de ces
pièces , qui avoit cinquante pies de long. On fe fer-
voit de grues de charpente pour les charger. On croit
que les bombardes étoient en ufage avant l'invention
du canon. Voyc^ Canon.
Le P. Daniel croit qu'on donna d'abord le nom de
bombarde à toutes les armes à feu , & que ce nom vient
du Grec QifAQoç , qui fignirie /■; bruit que ces armes font
en tirant. ( Q )
Bombarde , ( Luth. ) jeu d'orgue de la clafTe de
ceux qu'on appelle./ «« d'anche , voyc{ TROMPETTE ;
& dont la bombarde ne diffère que parce quelle fonne
Rrij
3 16
B O M
B O M
l'oaave àu-deffous , étant d'un plus grand diapafon.
Vayei la table du rapport des jeux de l'orgue. Il y a
des orgues où les baffes de ce jeu l'ont en bois ; alors
les tuyaux ont la forme reprél'entée dans \afig. 3- PL
d'Orgue. Ceux des deffus & des tailles ibnt faits com-
me ceux de la trompette , & font d'étain fin, ainfi
que les baffes , ii on ne les fait point en bois.
Ordinairement on place la bombarde fur un fom-
mier féparé ; car comme ce jeu conlbmme beaucoup
de vent , il altéreroit les autres. Vt*yfi Orgue , où
on explique la faûure & les proportions des parties
de ce jeu.
BOMBARDIER, f. m. c'eft , dans t 'Artillerie , ce-
lui qui exécute les mortiers & les bombes.
Les bombardiers ont formé en France un régiment
attaché à l'Artillerie, comme celui des fullliers , ap-
pelle enfuite régiment de royal artillerie. Mais le régi-
ment des bombardiers a été incorporé dans royal ar-
tillerie , par l'ordonnance du 5 Février 1720. Voye^
Mortier. ( Q )
BOMBARDEMENT, f. m. (Artillerie.) c eft le
fracas que l'on fait en jettant des bombes dans une
place ou ailleurs. ( Q )
BOMBARDER , c'eft jetter des bombes dans un
fort ou dans une place. ( Q )
* BOMBARJOHN-SIGGEAR, {Hijl.mod.) c'eft
le nom qu'on donne , à la cour de Maroc , à un eunu-
que noir qui elt commis à la garde des threfors &C
bijoux de l'empereur.
* BOMBASIN, f. m. ( Commerce.) on donne ce
nom à deux fortes d'étoffes : l'une de foie dont la ma-
nufadure a paffé de Milan en quelques provinces de
France ; l'autre , croifée & de fil de coton.
BOMBE , f. f. {Artill. ) eft un gros boulet creux
que l'on remplit de poudre , & qu'on jette par le
moyen du mortier lur les endroits qu'on veut dé-
truire. Elle produit deux effets : l'avoir , celui de rui-
ner les édifices les plus folides par l'on poids ; & celui
de caufer beaucoup de détordre par les éclats : car
lorfque la poudre dont elle eft chargée prend feu ,
fon effort rompt ou crevé la bombe , & il en fait f au-
ter les éclats à la ronde.
Le mot de bombe vient de bombus , crépitas , owfibi-
lus ani , à caufe du bruit qu'elle fait.
M. Blondel croit que les premières bombes furent
jettées , en 1 588 , au fiége de Wachtendonck , ville
du duché de GueldresrD'autres prétendent qu'un
fiecle auparavant, en 1495 , on en îetta * Naples
fous Charles VIII ; & ils tâchent de le prouver par un
endroit du Verger d'honneur , compofé par Octavien
de Saint -Gelait , & par André de la Vigne. ^Strada
dit que ce fut un habitant de Venlo qui le mêloit de
faire des feux d'artifices , qui inventa les bombes.
Lés habitans de cette ville le propoferent de réga-
ler de cette invention le duc de Cleves qui étoit
venu chez eux , & à qui ils avoient donné un grand
repas. Ils voulurent donc en faire la première ex-
périence devant lui, & elle réuffit beaucoup mieux
qu'ils ne l 'avoient prétendu : car la bombe étant tom-
bée fur une maii'on , elle enfonça le toît & les plan-
chers, & y mit le feu , qui s'étant communiqué aux
maifons voilines , brûla les deux tiers de la ville ,
le feu étant devenu fi violent qu'il ne fut pas pofïi-
ble d'arrêter l'incendie. Le duc fe fervit de cette
invention au fiége de "Wachtendonck , qu'il entreprit
peu de jours après.
« Je l'ai, ajoute Strada , que quelques uns ont écrit
» qu'un mois ou deux auparavant , une pareille expé-
» rience avoit été faite à Berg-op-zoom par un Italien
» deferteur des troupes d'Efpagne , qui s'étoit donné
» aux Hollandois , & leur avoit promis de faire des
» boules creufes de pierre ou de fer , qui étant jettées
» dans une ville affiégée,& fe crevant après leur chû-
h te,mettroient le feu par-tout : mais comme ii prépa-
» roît fon artifice , une étincelle étant tombée fur la
» poudre , il en fut tué , & laiffa en mourant ceux
» pour qui il travailloit , dans l'incertitude fi fon fe-
» cret auroit réuffi ».
C'eft feulement au fiége de la Motte, en 1634 ,
qu'on voit le premier ulage des bombes en France.
Le roi Louis XIII. avoit fait venir de Hollande un
ingénieur Anglois nommé Mathus , qui employa les
bombes avec iuccès en différens lièges , & qui fut tué
à celui de Gravelines en 1658. Nous avons un livre
de cet ingénieur , intitulé Pratique de la guerre, conte'
nant tuf âge de l'artillerie , bombe , &C.
Les figures 3. & 6. de la PI. VII. de l'art milita
peuvent ièrvir à donner une idée exacte de la bombe.
Lzfig- 3. fait voir une bombe telle qu'elle paroît à
la vue , & lafig. 6 . en fait voir la coupe ou le profil.
Les parties A ècB font les anles de la bombe, & F
eft la lumière de la fig. à. Dans la fig. 6. Pépaiffeur
du métal eft marquée par l'ei'pace rempli de petits
points ; C D eft la fulée de la bombe enfoncée par la
lumière Cqui eft entre les anles A ÔC B. Vqye^FvsÉE
& Mortier. Cette f'ulèe fert à porter le feu dans la
poudre dont la bombe eft chargée , laquelle poudre
en s'enflammant , fait crever la bombe.
La bombe qui eft jettée par un mortier de 1 8 pou-
ces 4 lignes de diamètre, qui contient douze livres
de poudre dans l'a chambre concave en forme de
poix , appellée de la nouvelle invention , a dix-fept
pouces dix lignes de diamètre. Voye^ Chambre.
Elle a deux pouces d'épaiffeur par-tout , excepté
au culot qui a deux pouces dix lignes.
Sa lumière a 20 lignes d'ouverture dehors , & de-
dans elle contient 48 livres de poudre , & pei'e fans
fa charge 490 livres & un peu plus ; elle a deux an-
les coulées auprès de la lumière.
Le mortier qui a 12 pouces 6 lignes de diamètre,"
contient dans la chambre 1 8 livres de poudre. Sa bom»
bea 11 pouces 8 lignes de diamètre ; 1 pouce 4 lignes
d'épaiffeur par-tout, hors le culot qui a un pouce 8
lignes; la lumière a 16 lignes d'ouverture par-deffus
& par-dedans; elle contient quinze livres de poudre;
elle a deux anles coulées auprès de fa lumière , &
elle pelé fans la charge environ 130 livres.
Les bombes qui font jettées par des mortiers de iz
pouces, 3 , 4 & jufqu'à 6 lignes de diamètre, & qui
ont dans leurs chambres concaves 1 2 & 8 livres de
poudre , ont les mêmes proportions que la précé-
dente.
C'eft aulfi la même chofe pour la bombe qui fert au
mortier ordinaire de 1 2 pouces , qui contient dans la
chambre cinq à 6 livres de poudre.
La bombe jettée par un mortier de 8 pouces 4 lignes
de diamètre , & qui porte 1 livre & ~ de poudre dans
fa chambre, a 8 pouces de diamètre, 10 lignes d'é-
paiffeur par-tout, hors le culot qui en a 13. Sa lu-
mière a un pouce de diamètre par-deffus & par-de-
dans. Elle contient quatre livres de poudre ; elle a
des anles de fer battu coulées avec la bombe , & elle
pelé fans la charge 3 5 livres.
La bombe jettée par un mortier de 6 pouces \ de
diamètre, qui porte dans l'a chambre une livre & un
peu plus de poudre , a 6 pouces de diamètre , 8 lignes
par-tout, hors par le culot où elle a 1 1 à 12 lignes ;
la lumière a 10 lignes d'ouverture par-deffus & par-
dedans. Elle contient trois livres & demie de poudre,
_& elle pelé fans la charge , 20 livres ou environ ; ces
fortes de bombes n'ont point d'anfes ordinairement.
Il y a des cas où l'on peut diminuer la poudre dont
la bombe eft chargée, c'eft-à-dire, lorfqu'on n'em-
ployé les bombes que pour ruiner les édifices , fans
vouloir y mettre le feu , ou pour tirer fur les trou-
pes; car alors l'objet de la charge n'eft que de faire
crever la bombe; par conféquent il ne faut que la
quantité de poudre néceffaire pour produire cet effet.
B O M
Orfuivant ce qui eft rapporte dans le Traité des armes
& machines en ufage à la guerre depuis l'invention de la
poudre , M. Eelidor a trouvé que trois livres de pou-
dre étoittout ce qu'il falloit pour faire crever les bom-
bes de 1 z pouces , & i livre pour celle de 8 ; ce qui
doit faire préfumer que 8 ou io livres fuffiroient pour
charger les bombes de 18 pouces, au lieu des 48 liv.
dont on les charge ordinairement.
La fig. y. de la PI. VII. de l'art milit. fait con-
noître comment l'on coule une bombe de 1 1 pouces
5 lignes , 6c ainfi des autres.
E , noyau de terre.
F , place qu'occupe le métal , formant l'épaiffeur de la
bombe, & d'où l'on a tiré la terre douce qui ctoit entre
le noyau & la chappe.
Il faut obferver que la terre fe tire ailement, par-
ce que la chappe eft de deux pièces.
G chappe qui ejl de terre fort dure & recuite.
H ejl la lance qui paffe au-tr avers du noyau , & qui le
fufpend en l'air pour laijjer couler le métal entre le noyau
6 la chappe.
1,1, ouvertures où font placées les anfes , & par lef-
quelles on coule la bombe.
Pour qu'une bombe foit bien conditionnée , il faut
qu'elle ioit de bonne fonte, &c d'une matière douce
& liante , pour éviter les fouflures , les chambres &
les évents , en forte qu'elle foit à toute forte d'épreu-
ve. Elle doit être bien nette en-dedans , & il faut que
le morceau de fer qui tient toujours au culot après la
fonte, & que l'on appelle lance, foit rompu.
La bombe doit être encore bien coupée , bien ébar-
bée par le dehors , & bien ronde ; avoir fa lumière
bien laine & les anfes entières, afin de la placer plus
ailement dans le mortier.
Manière de charger les bombes. Pour charger les bom-
bes, il faut les emplir de poudre avec un entonnoir ,
y mettre enfuite la fufée C D , fig. 6. PL VIL de
l'art milit. qu'on frappe ou enfonce dans la lumière
de la bombe avec un maillet de bois , & jamais de
fer , crainte d'accident. A l'égard de la manière de
l'exécuter avec le mortier, voye^ Mortier ék. Bat-
terie de Mortiers. (Q)
La théorie du jet des bombes eft l'objet princi-
pal de la Baliftique. Voy. Balistique. On trouvera
cette théorie expliquée à l'article Projectile.
BoMBÉ, adj. (Coupe des pierres.) ledit d'un arc
peu élevé au-delius de fa corde , ou d'un petit arc
d'un très-grand cercle.
Lorfqu'au lieu de s'élever au-deflus, l'arc s'abaiffe
au-deflbus de fa corde , on l'appelle bombé en contre-
bas , comme il arrive aux plates-bandes mal faites.
(D)
BOMBEMENT, f. m. en Architecture) fe dit pour
cavité , convexité & renflement. V. BOMBÉ. (P)
BOMBER , v. act. & n. en Architecture, c'eft faire
Un trait plus ou moins renflé. (P)
BOMBER , en terme de Bijoutier, c'eft proprement
emboutir ou creufer les fonds d'un bijou , tel qu'une
tabatière, plus ou moins. Pour cet effet l'on a une pla-
que de fer de la forme que l'on veut donner à l'on
fond ; dans cette plaque on met un mandrin de
plomb, le fond delïiis , & le frappe-plaque fur l'or ,
puis on frappe fur ce frappe-plaque avec une mafle,
jufqu'à ce que le fond foit bombé. Voye^ Frappe-pla-
que.
B OM E R I E , f. f. terme de commerce de mer , c'eft
une efpece de contrat, ou de prêt à la grofle aven-
turc , alfigné fur la quille du vaifleau , différent de
l'affûrance , en ce qu'il n'eft rien dû en vertu de ce
contrat, en cas de naufrage, mais feulement quand
le navire arrive à bon port. On a donné ce nom à
l'intérêt des fommes prêtées entre marchands fur la
quille du vaifleau, ou fur les marchandifes quiyfont
chargées , moyennant quoi le prêteur fe foùmet aux
BON
317
rifques de la mer & de la guerre; & comme la quille
d'un vaifleau s'appelle bodem en Hollandois , on a
nommé ce prêt bodemerie ou bodmerie , dont nous
avons fait celui de bomerie.
BOMBON, (Géog.~) province de l'Amérique mé-
ridionale , dans le Pérou, de l'audience de Lima, oit
la rivière des Amazones prend fa fource. (Z)
BOMMEL, (Géog.) ville fortifiée de la Gueldre
Hollandoife , dans une ile formée par le "Waal , qu'on
appelle Pommeler Weert.
BOMMEN, (Géog.) petite ville des Provinces-
Unies, dans l'île de Schouwen.
BOMONIQUES, adj. (Hifl. anc.) nom que les
Lacédemonicns donnoient aux jeunes gens de leur
nation , qui faifoient gloire à l'envi , de louffrir conf-
tamment les coups de fouet qu'on leur donnoit dans
les facrifices de Diane. Ils fe défioient les uns les au-
tres à qui lupporteroit plus long-tems cette efpece
de fupplice : quelques-uns le foûtenoient une jour-
née toute entière, & l'on en voyoit fouvent expirer
avec joie fous les verges ; leurs meres préfentes à cet-
te cérémonie, les encourageoient par des exhorta-
tions & par des chants d'allegrefle. On prétend que
par-là les Lacédemonicns avoient en vue de rendre
la jeunefle de bonne heure infenflble aux douleurs ,
& de l'endurcir aux fatigues de la guerre. Les éty-
mologifles tirent ce nom deCa/ucç, autel, & de riz» ,
victoire; comme fi l'on difoit victorieux à l'autel, par-
ce que cette flagellation fe faifoit devant l'autel de
Diane. (G)
BON, adj. (Métaph.)S'il eft difficile de fixer l'ori-
gine du beau , il ne l'eft pas moins de rechercher cel-
le du bon. Il le fait aimer , ainfi que le beau fe fait ad-
mirer, dans les ouvrages de la nature & dans les pro-
ductions des arts. Mais quelle eft l'on origine , & quel-
le eft fa nature ? en a-t-on une notion précife , une
véritable idée , une exafte définition ? Ce qui embar-
raflê le plus , ce font les diverfes acceptions qu'il re-
çoit, félon les diverfes circonftances où on l'appli-
que. Il fignifie tantôt une bonté d'être, tantôt une bonté
animale , tantôt une bonté raifonnée propre à l'être
penfant. Eflayons de développer ces divers fens.
La bonté d'être confifte dans une certaine conve-
nance d'attributs qui conftitue une chofe ce qu'elle
eft. Tous les êtres en ce fens font néceflairement bons ,
parce qu'ils ont ce qui les conftitue tels qu'ils font ;
& il eft même impoflible qu'ils ne Payent pas. J'ajou-
te que tous les êtres font également bons de ce gen-
re de bonté. Mais outre les rapports intérieurs , qui
conftituent leur bonté abfolue, ils en ont encore d'ex-
térieurs , d'oii réfulte leur bonté relative. La bonté re-
lative confifte dans l'ordre, l'arrangement, les rap-
ports, les proportions, & la fymmétrie que les êtres
ont les uns avec les autres. Ici commence cette va-
riété infinie de bonté qui différencie fi fort tous les
êtres. Ils ne font pas tous également nobles & par-
faits : un corp5 organifé eft fans doute préférable à
une mafle brute & groflîere. Par la même raifon , un
corps organifé & en même rems animé, l'emportera
fur un corps organifé qui ne l'eft pas; & parmi les
êtres animés , qui doute qu'il n'y en ait de plus par-
faits les uns que les autres ? On diroit que la nature
a ménagé , pour la perfection de cet univers , une
efpece de gradation qui nous fait monter à des êtres
toujours plus parfaits, à mefure qu'on s'avance dans
la fphere qui les comprend tous. Ces nuances , il eft
vrai, ces paflages imperceptibles n'ont plus lieu ,
quand il eft queftion de palier du monde matériel au
monde fpirituel. De l'un à l'autre le trajet efl im-
menfe : mais quand nous fommes une fois parvenus
au monde fpirituel , qui pourroit exprimer la diftan-
ce qui fépare l'ame des bêtes , des lublimes intel-
ligences celeftes ? Les nuances qui diftinguent les
différentes efpeces d'efprits l'ont imperceptibles , &
3i8 BON
cependant très-réelles. Rien n'eft plus mince que la
barrière qui fépare l'initincl: d'avec la railbn , & ce-
pendant ils ne le confondent jamais. Voyt^ CarticU
Esprit, où nous avons eu loin d'en caraftériier
les différentes efpcces , ôc d'affigner , autant qu'il elt
poilible, les limites qui léparent les unes des autres.
Tous les êtres qui entrent dans la composition de
ce orand tout qu'on appelle C univers , ne font donc
pas également bons , il eft même néceffaire qu'ils ne
le foient pas. C'eft de l'imperfeclion plus ou moins
grande desdrfferens êtres, que refaite la perfection de
cet univers. On conçoit qu'il feroit beaucoup moins
parfait , s'il ne comprenoit dans fa totalité que des
êtres de la même elpece , ces êtres fuflent-ils les plus
nobles de tous ceux qui le compofent. La trop
grande uniformité déplait à la longue ; du moins
elle ne tient pas lieu de la variété , qui compenfe ce
qui manque aux êtres finis. Croit-on qu'un monde ,
qui ne feroit formé que de purs efprits , fût plus par-
iait qu'il ne l'eit aujourd'hui ? qui ne voit que le mon-
de matériel laifferoit par ion abfence un grand vuide
dans cet univers ? On pourroit étendre cette reflexion
jufqu'au mélange de vertus ôc de vices , dont nous
fommes ici bas le fpettacle ôc les fpeâateurs tout à
la fois. Un monde d'où feraient bannis tous les vices ,
ne feroit certainement pas fi parfait qu'un monde qui
les admet. La vertu prife en elle-même , elt ians dou-
te préférable au vice , de même que l'eiprit eft par fa
nature plus noble que le corps : mais quand on con-
fédéré les choies par rapport au grand tout , dont ils
font partie , on s'apperçoit aifement que pour une
plus grande perfection , il étoit néceffaire qu'il y eût
des imperfections dans le monde phylique & dans le
monde moral.
Si mala fuftulerat , non erat ilk bonus.
Voyt^ Vartidt Manichéisme , où ce raifonnement
eft développé dans toute fa force.
Rien n'eft fans doute plus admirable que tous ces
rapports , que la main du Créateur a ménagés entre les
differens êtres. Ils font plus ou moins immédiats , fui-
vant le plus ou moins de variété de ces êtres. Il en eft
d'eux comme des vérités, qui tiennent toutes les unes
aux autres , moyennant les vérités intermédiaires qui
fervent à les réunir. La bonté de cet univers confifte
dans la gradation des differens êtres qui le compo-
fent. Ils ne font féparés que par des nuances , com-
me nous l'avons déjà remarqué ; il ne le trouve au-
cun vuide dans le pafîage du règne minéral au règne
végétal , ni dans le paffage de celui-ci au règne ani-
mal ; autrement , pour me fervir de la penfée de l'il-
luftre Pope , il y aurait un vuide dans la création ,
où , un degré étant ôté , la grande échelle ferait dé-
truite. Qu'un chaînon foit rompu , la chaîne de la
nature l'eft, & l'eft également , foit au dixième , foit
au dix-millieme chaînon. C'eft alors qu'on verrait ,
pour continuer la penfée du poète Anglois , la terre
perdre fon équilibre ôc s'écarter de fon orbite , les
planètes ôc le foleil courir fans règle au-travers des
cieux , un être s'abyfmer fur un autre être , un mon-
de fur un autre monde , toute la maffe des cieux
s'ébranler juiques dans fon centre , la nature frémir
jufqu'au throne de Dieu , en un mot tout l'ordre de
cet univers fe détruire ôc le confondre.
Il faudrait être ftupide & infenfible , pour ne pas
appercevoir la dépendance & la fubordination de
tous les êtres qui entrent dans la compofition de ce
tout admirable : mais il faudrait être encore pis que
tout cela pour l'attribuer à un hazard aveugle. Voyt{
Hasard 6-Épicuréisme. L'eiprit ne peut être
frappé fans admiration de cette multiplicité de rap-
ports, de ces combinaifons infinies, de cet ordre,
de cet arrangement qui lie toutes les parties de l'u-
nivers ; ôc l'on peut dire que plus il l'ailira de rap-
BON
ports , plus la bonté des êtres fe manifeftera à lui d'une
manière fenlîble & frappante. Dieu feul connoit tou-
te la bonté qu'il a mile dans les ouvrages , parce qu'il
eft lui feul capable de connoître partaitement la juf-
teffe qui brille dans les ouvrages , le rapport mutuel
qui fe trouve entr'eux, l'harmonie qui tait d'eux un
tout régulier ôc fagement ordonné , en un mot l'or-
dre établi pour les conferver. La chaîne qui attire ôc
réunit toutes les parties eft entre les mains de Dieu ,
& non entre celles de l'homme. Petites parties de
ce tout , comment pourrions-nous le comprendre ?
« Tout ce que nous voyons du monde , dit dans fon
ftyle énergique le fublime Pafchal , » n'eft qu'un trait
» imperceptible dans l'ample fein de la nature : nulle
» idée n'approche de l'étendue de fes eipaces : nous
» avons beau enfler nos conceptions , nous n'entan-
>t tons que des atomes au prix de la réalité des choies :
» c'eft un cercle infini , dont le centre eft par-tout ,
» la circonférence nulle part : enfin , c'elt un des plus
» grands caractères fenfibles de la toute-puiffance de
» Dieu , que notre imagination fe perde dans cette
» penfée L'intelligence de l'homme tient, dans
» l'ordre des choies intelligibles , le même rang que
» fon corps dans l'étendue de la nature : & tout ce
» qu'elle peut faire , elt d'appercevoir quelqu'appa-
» rence du milieu des choies , dans un defefpoir éter-
» nel d'en connoître ni le principe ni la fin. Toutes
» choies font forties du néant , ôc portées jufqu'à l'in-
» fini : qui peut fuivre ces étonnantes démarches ?
» l'auteur de ces merveilles les comprend , nul autre
» ne le peut faire ». Penfées de Pafch. ch. xxij.
Nous fommes forcés de joindre le témoignage de
notre railon , au témoignage aveugle des créatures
inanimées & matérielles , dont la beauté , la difpofi-
tion ôc l'économie annoncent fi hautement la gran-
deur de celui qui les a faites. Un fpectacle digne de
Dieu, peut bien être digne de nous. Moyfe rapporte
que lorique Dieu eut achevé l'ouvrage des fix jours ,
il conlidera tous les êtres d'une feule vue , ôc que les
ayant comparés entr'eux ôc avec le modèle éternel
dont ils étoient l'exprefTion, il en trouva la beauté
ôc la perfection excellente. L'univers parut à fes
yeux comme un tableau qu'il venoit de finir , & au-
quel il avoit donné la dernière main. Il trouva que
chaque partie avoit fon ufage, chaque trait fa grâce
ôc fa beauté : que chaque figure étoit bien fituée ÔC
fàifoit un bel effet : que chaque couleur étoit appli-
quée à propos , mais fur-tout que l'enfemble en étoit
merveilleux : que les ombres mêmes donnoient du re-
lief au reite : que le lointain en s'attendrifîant faifoit
paraître ce qui étoit plus proche avec une force nou-
velle ;ôc que les objets les plus remarquables, rece-
voient une nouvelle beauté parle lointain, dont ils n'é-
toient iéparés que par une diminution imperceptible,
de teintes Ôc de couleurs. Qui coniidéreroit ce tableau
de plus près, pourroit appercevoir dans le plan de la
création celui de la rédemption. Si quelques défauts
nous frappent dans cet immenfe tableau , fouvenons-
nous que ce font des ombres que la main de l'éternel
y a jettées exprès pour en faire fortir les figures; que
leur ordre Ôc leur lîtuation contribuent à lui donner
une beauté qu'il n'aurait pas ; ôc que prendre occa-
fion de ces défauts pour critiquer l'univers ôc fon au-
teur , ce feroit reffembler à un ciron , dont les yeux
feroient fixés furies ombres d'un tableau , ÔC qui pro-
noncerait que ce tableau elt défectueux , qu'il n'y re-
connoît aucune ordonnance , ni le vrai ton des cou-
leurs.
La bonté animale eft une économie dans les pal-
lions , que toute créature fenlîble & bien conitîtuée
reçoit de la nature. C'elt en ce fens qu'on dit d'un
chien de chaffe , qu'il eft bon , lorfqu'il n'elt ni lâche
ni opiniâtre : c'eft auffi en ce fens qu'on dit d'un hom-
me, qu'il eft bien conltitué, lorfqu'il règne dans fes
BON
BON
319
membres !a proportion qui s'ajufte le mieux avec les
fonctions auxquelles l'a deftiné ia providence. La bon-
té animale îcra d'autant plus parfaite , que les mem-
bres bien proportionnés conipireront d'une taçon plus
avantageuse à l'acccmpliliement des fonctions anima-
les. Par une fuite des lois que Dieu a établies , il doit
s'exciter dans l'ame telles ou telles feniations à l'oc-
cafion de telles ou telles impreflions qui auront été
faites fur les organes de nos fera. Si donc elles ne s'y
excitoient pas , il y auroit alors un défaut d'œcono-
mie animale. On en peut voir un exemple bien ienfi-
ble dans les perionnes paralytiques. Le défaut d'œ-
conomie animale le trouve auiii dans ceux qui ont
des mouvemens convulfifs, qu'ils ne peuvent arrêter
ni fuipendre. On peut dire la même choie de ceux qui
font fous 6c ftupides. Les uns ont trop d'idées, & les
autres n'en ont pas afîéz, par un défaut de confor-
mation dans le cerveau. Il eft des perionnes qui font
nées fans aucun goût pour la Mulique , & d'autres
pour qui les vers les mieux faits ne font qu'un vain
bruit. Ce défaut d'organes dans ces fortes de perion-
nes eft, comme Ion voit, un défaut d'œconomie ani-
male. On peut dire en général, que c'eft là le grand
défaut de ces efprits ftupides & greffiers , dent la por-
tée ne fauroit atteindre au raifonnement le plus fim-
plc. Les organes du corps , qui les voile & les enve-
loppe , font fi épais & fi malins , qu'il ne leur eft pref-
que pas pofiîble de déployer leurs facultés ni de faire
leurs opérations. Plus les organes font délicats , plus
les fenfations qu'ils occafionnent font vives. Il y a
des animaux qui nous furpaflent par la délicateffe de
leurs organes : le lynx a la vue plus perçante que
nous ; l'aigle fixe le foleil qui nous éblouit ; le chien
a plus de lagacité que nous dans l'odorat ; le toucher
de l'araignée eft plus fubtil que le nôtre , & le lenti-
ment de l'abeille plus exquis & plus lûr que celui que
nous éprouvons : mais n'envions point aux animaux
l'avantage qu'ils ont fur nous en cette partie. Si nous
avions l'oeil microfeopique du lynx , nous verrions le
eu on : mais notre vue ne pourrait s'étendre jufqu'aux
tieilx. Si le toucher étoit plus fenfible & plus délicat,
nous ferions blefiés par tous les corps environnans ;
les douleurs & les maladies s'introduiraient par cha-
que pore. Si nous avions l'odorat plus vif, nous fe-
rions incommodés des parties volatiles d'une rofe ,
& leur action iur le cerveau en ébranlerait trop vio-
lemment les fibres. Avec une oreille plus fine , la
nature fe ferait toujours entendre à nous avec un
bruit de tonnerre , & nous nous trouverions étourdis
par le plus léger fouffle de vent. Croyons que les
organes, dont la nature nous a doiies, font pro-
portionnés au rang que nous tenons dans l'univers.
S'ils etoient plus groffiers ou plus délicats , nous ne
nous trouverions plus fi propres aux fonctions anima-
les , qui font une fuite de notre conftitution. Après
qu'on a pelé toutes les choies clans la balance de la
rai ion , on eft forcé de reconnoître la honte & la fa-
geffe de la providence également & dans ce qu'elle
donne & dans ce qu'elle refuie , & de convenir avec
Pope , en dépit de l'orgueil & de la raifon qui s'éga-
re, de cette vérité évidente, que tout ce qui ejl , ejl
bien. Nous nous regardons comme dégradés , parce
qu'il a plû à l'auteur de notre être de nous aflujettir
aux organes d'un corps : mais ii pourrait fe trouver,
en approfondiffant la matière, que cette influence de
l'union de l'ame avec le corps, s'exerce peut-être
plus an profit qu'aux dépens de nos facultés intellec-
tuelles. Voye^ les articles ESPRIT & RÉSURRECTION,
où cette queftion eft i
La bonté raijbnnée , qualité propre à l'être peniant ,
confiite dans les rapports des mœurs avec l'ordre ef-
ientiel , éternel , immuable, règle & modèle de tou-
tes les actions réfléchies : elle eft la même que la
vertu. Voy:?^ cet arude.
Jufqu'ici nous n'avons confidéré le bon , que par
les rapports qu'il a avec notre efprit. Pris en ce fens ,
il rentre dans l'idée du beau, qui n'eft autre choie que
la perception des rapports ; voyc7 cet article : mais il y a
un autre bon , dont les rapports font plus immédiats
avec nous , parce qu'ils touchent notre cœur de plus
près. La bonté qui réfulte de ces rapports , eft plus in-
timement liée avec notre être, plus proportionnée à
nos intérêts : il n'y a qu'elle qui ait de l'alcendànt fur
notre cœur, & qui l'ouvre au fentiment. L'autre bonté
nous eft , pour ainfi dire , étrangère ; elle ne nous tou-
che prefque pas : fi elle a des charmes , ce n'eft que
pour notre efprit. Nous admirons les êtres en qui pa-
raît cette première bonté : mais nous n'aimons que
ceux qui participent à cette autre bonté; & l'amour
que nous leur portons fe mefure fur les diffé-rens de-
grés de cette bonté relative. Le bon , pris dans ce fé-
cond fens , fe confond avec Vutile ; de forte que tous
les êtres qui nous font utiles , renferment cette bonté
qui intéreiîe le cœur , ainfi que cette autre bonté qui
plaît à l'efprit , eft l'apanage de tous les êtres qui
font beaux.
Le bon a donc deux branches , dont l'une eft le bon
qui eft beau , 6i l'autre le bon qui eft utile. Le premier
ne plaît qu'à l'efprit , & le fécond intéreiîe le cœur :
l'un n'obtient de nous que des fentimens d'eftime Se
d'admiration , tandis que nous réfervons pour l'autre
toute notre tendrefie. Un être qui ne ferait que beau
pour nous, fe ferait feulement eilimer & admirer de
nous. Dieu, tout Dieu qu'il eft, auroit beau déployer
à notre efprit toutes les perfections qui le rendent in-
fini , il ne trouverait jamais le chemin de notre cœur,
s'il ne fe montroit à nous comme bienfaifant. Sa bonté
pour nous eft le ieul attribut qui puiffe nous arracher
l'hommage de notre cœur. Et que nous ferviroit le
fpeft acle de ia divinité , s'il ne nous rendoit heureux ?
On voit par-là combien s'abuiént de pieux vilion-
naires , qui follement amoureux d'une perfection chi-
mérique , s'imaginent qu'ils peuvent aimer dans Dieu
autre chofe que fa bonté bienf ai jante. Quel déiîntéref-
fement ! ils veulent que leur amour pour Dieu i'oit Ci
pur , fi généreux , fi gratuit , fi indépendant de toutes
vues intéreftées , que même à l'égard de Dieu on fe
contente du plaifir de l'aimer, fans rien attendre &C
fans rien efpérer de lui. Ce n'eft pas ici le lieu de com-
battre ces excès impies , qui font contraires à la loi
naturelle , & qui deshonorent la Religion , fous la
vaine apparence d'une perfection chimérique qui en
détruit les fondemens. Foye/^les articles Charité &
QuiÉtisme, où font réfutées ces abiùrdités, aufîi
impies qu'infenfées , mais qui font les fuites néceflai-
res d'un defintéreiremcnt abfolu.
Un être peut nous être utile de deux manières ; ou
par lui-même , ou par quelque choie qui foit diftin-
gué de lui. Ce qui ne nous eft utile que comme
moyen , nous ne l'aimons pas pour lui-même , mais
feulement pour la chofe à laquelle il nous fait par-
venir : ainfi nous n'aimons pas les richeffes pour
elles-mêmes , mais bien pour les plaiiirs que nous
achetons à leurs dépens ; j'excepte pourtant les ava-
res , pour qui la poffeilion des richeflés eft un vérita-
ble bien : ceux-ci font heureux par la vue de l'or,
& les autres ne le font que par [Nuage qu'ils en font.
Mais un être nous eft-il utile par lui-même ? c'eft
alors que nous l'aimons pour lui-même & que notre
cœur s'y attache : ou cet être nous fatisfàit du cote
de la confeience & de la railon , ce qui eft un bien
durable, folide , & qui n'eft point i'ujct à de fàcheux
re vers ; & alors on lui donne le nom de bien honnête :
ou bien cet être ne nous fatisfàit c\uc du côté de la
cupidité , & fe trouve par coi expofé au dé-
goût & à l'inquiétude ; & alors on lui donne Ample-
ment le nom de bien agréable entant qu'oppofe à V hon-
nêteté.
320
BON
Apres avoir confidéré le bon dans les êtres natu-
rels , il eft naturel de l'examiner dans ceux qu'on ap-
pelle artificiels : ils ont été inventés fur le modèle de
la nature ; d'où je conclus que leur perfection dépend
plus ou moins de leur imitation de la nature. Mais
de même que dans les ouvrages de la nature il y a
un bon & un beau , qui ne dépendent ni du hal'ard ni
du caprice , ainfi dans les productions des arts il y a
des lois immuables qui nous guident dans nos con-
noiifances &c dans nos goûts ; & on ne peut en au-
cune façon violer ces lois tracées avec tant d'éclat
dans les ouvrages de la nature, que Feiprit ôc le goût
n'en ioient lévoltés.
Il lé trouve , avons-nous dit, dans les ouvrages de
la nature deux fortes de bontés , l'une , qui rentre dans
la même lignification que la beauté, & qui pour cette
raiibn ne flatte que l'eiprit ; & l'autre , qui retient le
nom de bonté, & quiintéreife notre cœur. Quand un
objet réunit en loi ces deux genres de bonté , c'eft-à-
dire qu'il étend & perfectionne nos idées d'une part,
& que de l'autre il nous prélente des intérêts qui
nous font chers , qui tiennent à la confervation ou
à la perfection de notre être , qui nous font fentir
agréablement notre propre exiltence , nous pronon-
çons que cet objet eft bon ; & il l'eft d'autant plus ,
qu'il poffede ces avantages dans un plus haut degré.
Pareillement une production de l'art, 011 le bon fe
réunifiant avec le beau , renfermera toutes les qua-
lités don: elle a beloin pour exercer oc perfectionner
à la fois notre efprit & notre cœur , lera d'autant
plus parfaite, qu'elle attachera plus agréablement
notre efprit , & qu'elle intérelTera plus vivement no-
tre cœur.
Parmi les ouvrages de la nature , il y en a qui ne
font que beaux , & qui ne plaifent qu'à l'efpnt. La
même chofe fe trouve dans les productions des arts :
ainli un théorème de Géométrie , difficile , mais lans
ufage, n'eft qu'un beau théorème. Voye\ B E A U.(
Mais de même qu'il y a des ouvrages de la nature
qui font bons & beaux en même tems , parce qu'ils
contiennent en foi de quoi réveiller des idées qui
nous attachent & nous intéreflént , il y en a aufîi
parmi les productions des arts qui produilent en nous
le même effet , mais toujours d'une manière fubor-
donnée à la nature , parce que la nature en tout lur-
paffe fart : in onini re procul dubio vincit imitationem
veritas. Le cœur n'eft touché des objets que félon le
rapport qu'ils ont avec ion avantage propre ; c'eft ce
qui règle fon amour ou la haine : or le cœur a plus
d'avantage à attendre des objets naturels que des ob-
jets artificiels. Ce que l'art préfente au cœur n'eft
qu'un phantôme , qu'une apparence ; & ainfi il ne
peut lui apporter rien de réel. Ce qu'il y a de plus
touchant pour nous, c'ell: l'image des pallions & des
actions des hommes , parce qu'elles font comme des
miroirs où nous voyons les autres , avec des rapports
de différence ou de conformité. Il y auroit ici un beau
problème à refondre , lavoir qui de Corneille ou de
Racine a mieux peint les paffions ; le premier, en
nous élevant au-delTus de l'homme ; le fécond , en
nous rendant à nos foibleffes naturelles. Voye{ TRA-
GÉDIE. (X)
Bon , ( en terme de Pratique. ) eft un terme par le-
quel on ratine une promette , une cellule ; faire bon ,
c'eft promettre de payer pour foi ou pour autrui. (//)
* Bon , (Hifi. moi. ) c'eft le nom d'une fête que
les Japonois célèbrent tous les ans en l'honneur des
morts ; on allume ce jour-là à chaque porte grand
nombre de lumières , & chacun s'emprefîe de cou-
rir aux tombeaux de ceux qui leur ont autrefois ap-
partenu, avec des mets bien choilisqui lont deftinés
à la nourriture des morts.
Bon , terme d'honneur dont on fe fert dans le com-
merce pour défigner un marchand riche & folvahle.
BON
Vous pouve{ confier votre marckandife à M. N.je vous
garantis qu'il ejl bon.
Bon d'aunage. fbyeç Aunage , & Bénéfice
d'aunage.
BONS , adj. ( Hifi. anc. ) nom que les anciens Ro-
mains donnoient à plufieurs de leurs dieux , pour li-
gnifier des divinités favorables : ainfi ils diloient bona
dea , bona fiortuna , bonafpes , bono genio , boni fiati.
BONA, (Géog.} ville maritime d'Afrique, dans
le royaume d'Alger , & peu loin de la frontière de
Tunis. Les vertiges de l'ancien Hyppo-regius en font
peu éloignés. Lat. Jj degrés , long, zj & demi.
BONACE, f. f. (Marine) calme dans lequel le vent
celle, & les houles ou les lames de la mer s'appianif-
fent. Quelquefois la bonace précède les plus grands
orages , & les pilotes s'en méfient. V. Calme. (Z)
BONA1RE , ( Géog. mod. ) île vis-à-vis du conti-
nent de l'Amérique méridionale , & de la province
de Caracai , au levant de l'île de Curaçao , & occu-
pée par les Hollandois. Lat. iz. long. 30 g.
BONAROTE , f. f. (Hifi. nat. bot. ) en Latin Bo-
narota , genre de plante à fleur monopétale irrégu-
liere , faite en malque & tubulée ; elle eft diviiée en
deux lèvres, dont la fupérieure eft entière, ou un
peu échancrée , & l'inférieure fendue en trois ou en
quatre parties. Il s'élève du fond du calice un piftil
qui elt attaché comme un clou à la partie pofté-
rieure de la fleur , & qui devient dans la luite un fruit
oblong , fourchu , un peu applati , compofé de deux
loges formées par une cloilon qui s'étend depuis le
fond juf qu'au milieu. Ce fruit s'ouvre juf qu'au centre
en quatre parties tories ; il eft rempli de femences
qui reffemblent à des grains de froment , &c qui font
attachées à un placenta. fijyeçMichelx, Nova plan-
tarum gênera. ^ojé^PlaNTE. (/)
BONASIENS , f. m. pi. ( Hifi. ecclèfi. ) hérétiques
qui parurent dans le iv. fiecle,& qui foùtenoient
que Jefus-Chrift n'étoit fils de Dieu que par adop-
tion. Baronius. Voyt?^ Adoptiens. (G)
* BONASUS , ( Hifi. nat. Zoolog. ) animal de la
figure d'un bœuf, dont il ne diffère que parce qu'il
elt plus grand & plus fort ; d'ailleurs il a des crins
pendans au cou comme le cheval, & 'd'autres qui
lui tombent du fomrnet de la tête jufque fur les yeux :
les cornes vont en fe recourbant , & renferment fes
oreilles dans un arc à peu près circulaire. La convo-
lution de fes cornes les lui rend inutiles pour le com-
bat. On dit que fa chair eft douce , & bonne à man-
ger. Il lemble différent de ce qu'on appelle la vache
des Indes. BonaJ'us n'eit pas le feul nom qu'il ait dans
les auteurs ; Ariftote l'appelle monapos ; iElien , mo-
no pfie j & les Grecs , tantôt bolinthos , tantôt bonajos
ou bonafios. On trouve la raifon qui le faifoit appel-
ler bolinthos , dans ce que les anciens Naturaliftes
rapportent de la manière dont cet animal fe défend
quand il eft chatte : ne pouvant écarter les chiens
avec fes cornes recourbées , qui ne les blefferoient
point , il lâche contr'eux fes excrémens , & les en
couvre à la diftance de quatre orgyes ou vingt-qua-
tre pies. Ces excrémens font une efpece de caufti-
que , allez corrofif pour enlever tout d'un coup le
poil de l'endroit où ils tombent fur le corps des
chiens. Le bonafus habitoit autrefois une montagne
qui couvroit la Paeonie , & qui la féparoit d'un pays
voifin appelle Mœdica , qui Pœoniam mœdicamque re-
gionem terminât.
* BONAVOGLIO , ( Hifi. mod. ) on défigne par
ce nom en Italie , ceux qui pour de l'argent & à
certaines conditions s'engagent à fervir lur les galè-
res, & qu'il faut diftinguer des efclaves & des forçats
qui font condamnés à ramer.
* BONBANC , f. m. ( Architecture. ) c'eft une ef-
pece de pierre fort blanche qui fe tire des carrières
qui font aux environs de la ville de Paris. Le bonbane
fe
B O N
fé mouline , Se ne réfifte pas beaucoup ; il ne laiffe
pas néanmoins de durer affez long - tems , lorf qu'il
n'eft pas expofé aux injures de l'air ni à l'humidité.
Il a depuis quinze pouces juiqu'à vingt-quatre de
hauteur ; on s'en fert aux façades intérieures des bâ-
timens , & pour faire des rampes & des appuis ; on
en tire aufîï des colonnes : celui qui a un lit coquil-
leux & des molieres , eft le meilleur.
* BON-CHRETIEN , f. m. {Jardinage.) efpece de
poire fort groffe & fort vantée pour la bonté de ion
goût. Il yen a de plufieurs eipeces ; les principales
ibnt le bon-chrétien d'été , & le bon- chrétien* tfhyvcr :
celui d'été eft beurré , long , pyramidal & allez
gros; ce fruit porte juiqu'à quatre pouces de dia-
mètre par Ion milieu , fur cinq à fix de hauteur ; fa
couleur naturelle eft jaune : il demeure iur l'arbre
depuis le mois de Mai juiqu'à la fin d'Octobre , 6c le
conferve quatre à cinq mois dans la ferre. Celui d"hy-
ver a la même forme que celui d'été : la chair eft caf-
fante , fa faveur agréable , &C fon eau douce & lû-
crée. Son défaut eft d'être un peu coriaffe & pier-
reux. Les curieux distinguent plufieurs fortes de bon-
chrétiens , tant d'hy ver que d'été : mais toutes ces dif-
tinûions font de f antailie.
La Quintinie fait encore mention du bon-chré-
tien d'été mufqué , & du bon chrétien d'Efpagne : le
premier de ces fruits eft une poire de la groffeur d'u-
ne belle bergamotte, blanche d'un côté, rouge de l'au-
tre , d'une chair entre le tendre & le caftant , & plei-
ne d'eau & de parfum. Le fécond a tout-à-fait la for-
me du bon-chrétien d'hy ver : mais il eft rouge d'un
côté , & piqueté de points noirs, d'un blanc jaunâtre
de l'autre ; fa chair eft très-caffante , fon eau douce ,
fucrée, &c affez agréable , quand il eft mûr ; ce qui
arrive affez communément depuis la mi-Novembre
juiqu'à la mi-Décembre, & quelquefois en Janvier.
Au refte on ne peut guère avoir aucun de ces bon-
chrétiens d'une certaine beauté , qu'on n'en mette les
arbres en efpalier ; on n'en obtient autrement que
dans des jardins d'une expofition très-favorable.
BOND , f. m. fe dit en général de l'aôion d'un
corps en mouvement qui rejaillit à la rencontre de la
terre , ou d'un autre corps fur lequel il tombe.
Bond , terme de Paumier, c'eft l'aûion d'une balle
qui après avoir frappé par terre rejaillit & fe relevé.
Une balle prife au premier bond eft auftî bonne que
celle qu'on renvoyé de volée : mais le fécond bond
ne vaut rien.
Bond faux. Le faux bond eft celui qui ne fe fai-
fant point félon la règle ordinaire de l'incidence des
corps mus en ligne droite , trompe le joueur , & lui
fait manquer la balle, foye^ Reflexion.
Bond , ( Manège. ) eft un faut que le cheval fait
en s'élevant fubitement en l'air , & retombant à fa
même place. Aller par fauts & par bonds. Voye^ Al-
ler. )y)
BONDE, f. f. eft une longue pièce de charpente
équarric par un bout, & faite en forme de cône tron-
qué , que l'on pôle dans un trou de la rigole prati-
quée à l'endroit le plus creux d'un étang , pour le
pouvoir vuider à fond quand on lèvent pêcher. Cet-
te bonde eft foùtenue par un chaflis de charpente avec
un chapeau, (/v)
* Bonde, ( Hifi. nat. ) arbre d'une grandeur &
groffeur prodigieui'e qui le trouve au royaume de
Quoya ; il a jflus de fix ou fept braffes d'epaiffeur;
fon écorce eft toute hériffée d'épines ; fon bois eft
huileux : on en fait plufieurs uftenciles de ménage ,
auflî bien que des canots : les cendres leffivées lont
propres à faire de fort bon fa von , en les mêlant a\ ec
de la vieille huile de dattes.
BONDEN, {HiJI. mod. ) c'eft un écueil fameux
qui fe trouve dans le golfe de Bothnie , qui le prétente
Tome 11.
B O N
321
de loin comme un grand château bien bâti , & qui
de près n'eft qu'un affemblage de rochers.
BONDENO , (Geog.) bourg du Ferrarois dans l'é-
tat du faint Siège , fur le Panaro , près de Ion embou-
chure dans le Pu.
BONDON , terme de Tonnelier, eft une cheville de
bois groffe & courte dont on bouche le trou qu'on
laiffe au-deflus des tonneaux , pour pouvoir les rem-
plir & leur donner de l'air quand on le veut.
Bondon fe prend auffi quelquefois pour le trou
qu'on ferme avec la cheville appellée bondon.
BONDONNER un tonneau , façon de parler'qui li-
gnifie quelquefois y percer avec la bondonniere un
trou pour mettre le bondon , & quelquefois boucher
ce trou avec la cheville appellée bondon.
BONDONNIERE, inftrument de Tonnelier fait en
forme de tarriere de figure conique , & dont le bout
qui fe termine en pointe eft amorcé & tourné en vis :
les Tonneliers s'en lervent pour percer dans une des
douves des futailles le trou où fe met le bondon. V .
Tonnelier.
La bondonniere eft emmanchée dans le milieu , d'un
cylindre de bois long d'un pié , rond , de deux pou-
ces ou environ de diamètre par le milieu , & plus pe-
tit parles extrémités. Voye{ les PI. du Tonnelier, &
celles du Taillandier. Ce font les Taillandiers qui font
les bondonnieres.
BONDORFF , ( Géog, ) bourg de la Souabe dans
la forêt Noire.
* BONDRÉE, (HiJI. nat. ) oifeau de rapine qui
a le bec court , la tète plate & groffe , le cou fort
court , garni de beaucoup de plumes. Il eft en-deffus
d'une couleur brune & obfcure : mais il a le ventre
blanc , marqueté de plufieurs taches brunes, oblon-
gues ; il a la queue large. Aldrovandus lui donne trois
tefticules ; c'eft ce qui l'a fait appeller en Latin bu-
teo triorchis , ce qui eft dérivé du mot Grec Tf.upy.»ç.
f^oye{ Buse.
BONDUC , f. m. ( Hijl. nat. bot. ) genre de plan-
te dont la fleur eft polypétale ou monopétale , pro-
fondément découpée en plufieurs parties, mais ce-
pendant d'une figure approchante de celle des rieurs
irrégulieres. Il s'élève du fond du calice un piftil qui
devient dans la fuite un fruit en iîlique pointu , le
plus ibuvent hériffé de pointes : ce fruit renferme
une ou deux femences rondes , dures , & liftes. Plu-
mier , nova plant. Amer, gêner. Voy. Plante. ( / )
La plante nommée Bonduc eft d'ulage en Médecine.
Ses baies font rondes & de couleur cendrée , blan-
ches en-dedans, ameres & infipides.
On s'en fert dans les hernies ; elles difîipent les
vents , foulagent dans la colique , fortifient l'eftomac,
provoquent les règles & chaffent la pierre. Doit. (.Y)
BONELLES , (Géog.) petite ville de l'île de Fran-
ce à neuf lieues de Paris.
BON-HENRI , Bonus Henri eus, f. m. (Hi/I. nat.
bot. ) plante qui doit fe rapporter au genre appelle
patte-d'oie, foye^ Patte-d'oie.
* Le bonus-Jienricus , ou la tota-bona , a la ra-
cine épaiffe , jaunâtre , garnie de quelques fibres ,
acre, & amere; les tiges nombrcules , cannelées ,
creules , en partie droites , en partie couchées fur la
terre , légèrement velues, longues d'un pié ou d'une
coudée; les feuilles triangulaires , comme c<
l'arroche ou du pié-dc-veau, & quelquefois .nie/.
femblables, liftes en-deftûs , couvertes d'une fine ta-
rir.e en-deffous, portées fur de longues queues, ce
potées alternativement fur des tiges, d'une lu\ eur un
peu nitreufe : les fleurs au fommetdes tiges , ramal-
fées en epi , petites , tans pétales , compolées de plu-
fieurs étamines jaunes qui s'élèvent d'un calice dé-
coupe en plufieurs parties; le piftil dégénérant en
une petite graine arrondie , applatie , approchant
de lu forme île rein , noire dans fa maturité , renier-
Ss
Il
BON
mée dans une capfule qui a la figure dune étoile,
Se qui étoit le calice de la fleur.
La plante entière eft d'ulage : on la trouve dans
les lieux incultes & les malures , le long des chemins,
des vieilles murailles Se des haies des champs , ou
même on la cultive dans les potagers.
La plante entière , graine Se racine , diltillee a la
cornue , donne une liqueur limpide , d'une couleur
& d'une laveur d'herbe ; une autre liqueur limpide ,
de la même odeur Se faveur, mais plus manifefte Se
fcrt acide ; une liqueur roufsâtre , empyreumatique ,
{oit acide , un peu falée Se un peu auftere ; une li-
queur roulie , empyreumatique , imprégnée de beau-
coup de fel volatil urineux , une huile épaiffe com-
me du firop. ,
La malle noire de la cornue calcinée , a donne
des cendres dont on a tiré par lixiviation un lei rixe
purement alkali. .
Ainii cette plante contient un fel eflentiel , mtreux,
ammoniacal , mêlé de beaucoup d'huile, & délayé
dans beaucoup de phlegme ; d'où il refaite que c'eft
un compofé vifqueux , Se un peu mucilagineux.
Cette plante reiâche le ventre , Se eft émolhente ;
fa feuille pelée & hachée réunit les plaies récentes ,
déterre les ulcères fordides & vieux, & tue les
vers qui y furviennent. Elle eft encore digeftive , ré-
folutive , Se calmante. Le cataplafme de la plante en-
tière foulage dans la goutte.
BONHEUR , f. m. ( Morale. ) fe prend ici pour un
état , une fituation telle qu'on en defireroit la durée
(ans changement ; & en cela le bonheur eft différent
du plaiiir , qui n'eft qu'un fendaient agréable , mais
court & paifager , Se qui ne peut jamais être un état.
La douleur auroit bien plutôt le privilège d'en pou-
voir être un.
Tous les hommes fe réunifient dans le defir d être
heureux. La nature nous a fait à tous une loi de no-
tre propre bonheur. Tout ce qui n'eft point bonheur
nous eft étranger : lui feul a un pouvoir marqué fur
notre cœur ; nous y fommes tous entraînés par une
pente rapide , par un charme puiflant , par un attrait
vainqueur ; c'eft une imprefiion ineffaçable de la na-
ture qui l'a gravé dans nos cœurs , il en eft le charme
Se la perfection.
Les hommes fe réunifient encore fur la nature
du bonheur. Ils conviennent tous qu'il eft le même que
le plaiiir , ou du moins qu'il doit au plaifir ce qu'il a
de plus piquant Se de plus délicieux. Un bonheur crue
le plaifir n'anime point par intervalles , & fur le-
quel il ne verfe pas fes faveurs , eft moins un vrai
bonheur qu'un état Se une fituation tranquille : c'eft
un trifte bonheur que celui-là. Si l'on nous laifle dans
une indolence parefleufe , où notre activité n'ait rien
à faifir , nous ne pouvons être heureux. Poilr rem-
plir nos defirs , il faut nous tirer de cet affoupiflernent
où nous languifibns ; il faut faire couler la joie juf-
qu'au plus intime de notre cœur , l'animer par des
fentimens agréables , l'agiter par de douces fecouf-
fes , lui imprimer des mouvemens délicieux , l'enivrer
des tranfports d'une volupté pure , que rien ne puifie
altérer. Mais la condition humaine ne comporte point
un tel état : tous les momens de notre vie ne peuvent
être filés par les plaifirs. L'état le plus délicieux a
beaucoup d'intervalles languiflans. Après que la pre-
mière vivacité du fentiment s'eft éteinte , le mieux
qui puifie lui arriver , c'eft de devenir un état tran-
quille. Notre bonheur le plus parfait dans cette vie ,
n'eft donc , comme nous l'avons dit au com'mence-
ment de cet article , qu'un état tranquille J'eméçà &
là de quelques plaifirs qui en égayent le fond.
Ainfila diverfité des fentimens des philofophes fur
le bonheur , regarde non fa nature , mais fa caufe ef-
ficiente. Leur opinion fe réduit à celle d'Epicure , qui
faifoit coniifter efl entiellement la félicité dans le plai-
BON
fir. Voyt{ cet article. La pofiefuon des biens eft le fon-
dement de notre bonheur , mais ce n'eft pas le bonheur
même ; car que feroit-ce fi les ayant en notre puif-
fance , nous n'en avions pas le lentiment ? Ce fou
d'Athènes qui croyoit que tous les vaifleaux qui ar-
rivoient au Pirée lui appartenoient , goûtoit le bon-
heur des richelies fans les polieaer ; & peut-être que
ceux à qui ces vaifleaux appartenoient véritable-
ment, les poffédoient fans en avoir de plaifir. Ainfi ,
lorfqu'Ariftote fait confifter la félicité dans la con-
noifiance & dans l'amour clu iouverain bien , il a ap-
paremment entendu définir le bonheur par les fonde-
mens : autrement il fe feroit grollierement trompé ;
puifque , fi vous fépariez le plaifir de cette connoif-
fance Se de cet amour, vous verriez qu'il vous faut
encore quelque choie pour être heureux. Les Stoï-
ciens , qui ont enleigne que le bonheur conliftoit dans
la pofleliion de la fagefle , n'ont pas été li înlenlés
que de s'imaginer qu'il fallût féparer de l'idée du
bonheur h fatisfacKon intérieure que cette lageflé leur
inlpiroit. Leur joie venoit de l'ivrelie de leur ame ,
qui s'applaudifibit d'une fermeté qu'elle n'avoit point.
Tous les hommes en général conviennent néceflai-
rement de ce principe ; & je ne lai pourquoi il a
plu à quelques auteurs de les mettre en oppolition les
uns avec les autres , tandis qu'il eft confiant qu'il n'y
a jamais eu parmi eux une plus grande uniformité de
fentimens que fur cet article. L'avare ne le repaît que
de l'elpérance de jouir de fes richelies, c'elt-à-dire ,
de fentir le plaiiir qu'il trouve à les pofféder. Il eft
vrai qu'il n'en ufe point : mais c'eft que Ion plaifir
eft de les conlerver. Il le réduit au fentiment de
leur pofleliion , il fe trouve heureux de cette fa-
çon ; & puifqu'il l'eft , pourquoi lui contefter Ion bon-
heur ? chacun n'a t-U pas droit d'être heureux , félon
que fon caprice en décidera ? L'ambitieux ne cher-
che les dignités que par le plaifir de fe voir élevé au-
defiiis des autres. Le vindicatif ne fe vengeroit point,
s'il n'efpéroit de trouver fa fatistadion dans la ven-
geance.
Il ne faut point oppofer à cette maxime qui eft cer-
taine , la morale Se la religion de J. C. notre Légif-
lateur Se en même tems notre Dieu, lequel n'eft
point venu pour anéantir la nature , mais pour la per-
fectionner. Il ne nous fait point renoncer à l'amour
du plaifir , & ne condamne point la vertu à être
malheureufe ici-bas. Sa loi eft pleine de charmes Se
d'attraits ; elle eft toute comprife dans l'amour de
Dieu Se du prochain. La fource des plaifirs légitimes
ne coule pas moins pour le Chrétien que pour l'hom-
me profane : mais dans l'ordre de la grâce il eft infi-
niment plus heureux par ce qu'il efpere , que par ce
qu'il pofiede. Le bonheur qu'il goûte ici-bas devient
pour lui le germe d'un bonheur éternel. Ses plaifirs
font ceux de la modération , de la bienfailance ,
de la tempérance, de la confeience; plaifirs purs,
nobles , fpirituels , & fort fupérieurs aux plaifirs
des fens. foye^ Plaisir.
Un homme qui prétendroit tellement fubtilifer la
vertu qu'il ne lui laiflat aucun fentiment de joie &
de plaifir , ne feroit alïïirément que rebuter notre
cœur. Telle eft fa nature qu'il ne s'ouvre qu'au plai-
fir ; lui feul en fait manier tous les replis Se en faire
jouer les reflbrts'les plus fecrets. Une vertu que n'ac-
compagneroit pas le plaifir, pourroit bien avoir no-
tre eftime , mais non notre attachement. J'avoue
qu'un même plaifir n'en eft pas un pour tous : les uns
font pour le plaiiir greffier , & les autres pour le plai-
fir délicat; les uns pour le plaifir vif, & les autres
pour le plaiiir durable ; les uns pour le plaifir des
fens, & les autres pour le plaifir de l'elprit; les uns
enfin pour le plaifir du fentiment , Se les autres pour
le plaifir de la réflexion : mais tous fans exception
font pour le plaiiir. Confulte^ cet article.
BON
On peut lire clans M. de Fontenelle les réflexions
fol . . &c judicieufes qu'il a écrites furie bonheur.
Quoique notre bonheur ne dépende pas en tout de
nous , parce que nous ne fommes pas les maîtres d'ê-
tre placés par la fortune dans une condition médio-
cre , la plus propre de toutes pour une fituation tran-
quille , & par conféquent pour le bonheur , nous y
pouvons néanmoins quelque choie par notre façon
de penfer. ( C )
* Bonheur , Prospérité , ( Gramm.} termes
relatifs à l'état d'un être qui penie ce qui fent. Le
bonheur cil l'effet du halard'; il arrive inopinément.
La profpéritê cft un bonheur continu , qui lemble dé-
pendre de la bonne conduite. Les fous ont quelque-
fois du bonheur. Les fages ne profperent pas toujours.
On dit du bonheur qu'il eft grand, & de la profpéritê
qu'elle cft rapide. Le bonheur fe dit & du bien qui
nous eff. arrivé , 6c du mal que nous avons évité.
La profpéritê ne s'entend jamais que d'un bien aug-
menté par degrés. Le capitole fauve de la furpriie
des Gaulois par les cris des oies facrés, dit M. l'ab-
bé Girard , eft un trait qui montre le grand bonheur
des Romains : mais ils doivent à la fageffe de leurs
lois & à la valeur de leurs lbldats , leur longue prof-
péritê.
BON HOMME DE CHEVAL , BON HARAS,
BON PÎÉ, BON TRAIN; voye^ tous ces mots à Leurs
lettres. ( V )
* BONICHON , f. m. ( Verrerie. ) c'eft un trou qui
communique du four aux lunettes des arches à pots :
il fait dans chaque arche à pot la fonftion de ven-
toufe. Comme on met cuire les bouteilles dans les
arches à pots , des qu'on a quitté le travail, pour em-
pêcher le feu du four d'entrer , & laiffer refroidir
les bouteilles , on marge la lunette. : mais la lunette
étant margée , 6c la flamme du four n'ayant plus
d'entrée ni de l'ortie , le four feroit étouffé , fi on
n'ouvroit le bonichon.
* BONJEAU , f. m. ( Œcon. rufl. ) c'eft un affem-
le deux bottes de lin liées l'une contre l'autre
de la tête au pié , afin d'occuper moins de place dans
l'eau , où on doit mettre le lin roiiir. Voyc{ Lin.
* BON1ER , f. -m. ( Commerce & Agriculture. ) mé-
dire tic ter e qui contient en lurface 4074 toiles cinq
pouces & quatre lignes. Ainli l'arpent contenant 900
toiles , il faut quatre - arpens 24 toiles <j pouces &
4 lignes, pour l'équivalent d'un bouieren médire de
Pans. Cette mefure varie d'un canton à l'autre de
la Flandre , 011 elle eit en ufage.
BON1FACIO, ( Géog. ) petite ville & port dans
la partie méridionale de l'île de Coi le. Long. zj. lut.
41. 20. Le détroit qui fépare la Corle de la Sardai-
gne fe nomme Bocca di Bonifacio.
* BONITE , ( Hijl. nat. ) poiffon fort commun
dans ht mer Atlantique : il eft d'une couleur allez ap-
prochante de celle de nos maquereaux, àqui il ref-
fembic auffi par le goût, honnis qu'il eft beaucoup
plus grand. Il fe trouve plutôt en pleine mer. que près
des côte: . : dé la forme d'un ovâl , dont le grand
diamètre auroil deux pies, & le petit un ou un & demi:
il a près de !a tête ids tnlerons pointus, &
depuis^ ; une lî ne d'écaillé tirée jufqu'à fa
( . qui eft fourchue , & deux autres au-deflbus ;
une au bas-ventrè , & l'aune de grandeur inégale, d%-
i 1 du dos jufqu'à la queue. 11 eft couvert
d'u chai en eft excellente ; elle eft
{ e , & nourriffante. La mer en cft quelques
f couverte. Il faute à dix oudouze pies de
haut. Ou le prend foij A la fouine, foit au trident, loit
ou à l hameçon. Cet hameçon eft de la
ur du petit doigt: on l'amorce avec deux plu-
mes de pigeon blanc , enveloppées de petits linges :
iche la ligne à la vergue; on fait familier à une
certaine hauteur l'hameçon ah. fi armé 3 la bonite le
Tome 11 .
BON
323
prend pour un petit poiffon volant, fe jette deflus, &
le trouve accrochée à l'hameçon. Voyt^ Vhiûoirtdis
Anal, du P. du Tertre.
BONITON , f. m. amia,{Hifl. nat. ) poiffon de
mer qui rellemble au thon & au maquereau par la
lorme du corps , pour les nageoires & pour la queue.
Il a le bec pointu , les yeux petits & de couleur d'or ,
le ventre gros & argenté , le dos bleu & luifant , & la
queue mince & faite en forme de croiffant : il y a des
lignes de couleur noirâtre qui s'étendent oblique-
ment depuis le dos jufqu'au ventre , & qui font allez
éloignées les unes des autres ; il n'a des écailles qu'à
l'entour des ouies. Les dents font fort pointues 6c re-
courbées en-dedans; elles font ferrées les unes con-
tre les autres. Ce poiffon aime l'eau douce. Sa chair
eft graffe & bonne. Rondelet. Voye{ Poisson. (/)
BONN, {Géog.) ville forte & ancienne d'Allema-
gne dans l'éleftorat de Cologne , 6c iituée fur la rive
gauche du Rhin. Elle eft la réfidence de l'électeur.
Long. 26. lat. 5o. 40.
BONNE , ( Géog. ) ville maritime d'Afrique dans
la Barbarie, au royaume d'Alger. Long. z5. z8. lat.
37.
Bonne, bourg de Faucigni , dans la Savoie , à
3 lieues de Genève.
BONNE-DAME , f. f. (Hift. nat. bot. ) plante qui
doit fe rapporter au genre appelle arroche. Voye^
Arroche.
Bonne-dame , atriplex , (Jard.) elle eft potagère.
Elle fe nomme encore arroche , mais elle en effun peu
différente. Elle croit de la hauteur de fix pies ; pouffe
des feuilles larges qui reffemblent à celles de la blet-
te , dont le goût eft fade. Ses fleurs font petites , à pïu-
fieurs étamines jaunâtres. La bonne -dame vient de
graine qui fe feme au printems. On fe fert de fa feuille
pour le potage 6c pour la farce. Cette plante vient
en toute forte de terre , 6c fa culture n'a rien de par-
ticulier. ( A' )
* BONNE DÉESSE , ( Myth.) Dryade , femme de
Faune , roi d'Italie , que ton époux fît mourir à coups
de verges, pour s'être enivrée, ^ à laquelle de re-
gret il éleva dans la fuite des autels. Quo'que Fauna
aimât fort le vin, on dit toutefois qu'elle fut fi
charte qu'aucun homme n'avoit fu l'on nom , ni vu l'on
vilage. Les hommes n'étoient point admis à célébrer
fa fête, ni le myrte à parer l'es autels. On lui faifoit
tous les ans un facrifice dans la maiion , & par les
mains de la femme du grand -prêtre. Les veftales y
étoient appellées, & la cérémonie ne commençoit
qu'avec la nuit: alors on voilôit les repréféntafions
même des animaux mâles; le grand-prêtre s'éloi-
gnoit, emmenant avec lui tout ce qui étoit de fon
lexe. On prétend que c'étoit en mémoire de la faute
& du châtiment de Fauna , qu'on banniffoit le myr-
te de fon autel , & qu'on y plaçoit une cruche pleine
de vin: le vin, parce qu'elle l'àvoit aimé ; le myr-
te , parce que ce fut de branches de myrte qu'on
fit la verge dont elle fut G cruellement fouettée pour
en avoir trop bù. Les Grecs facrifioient auffi à la
bonne déejj'e , qu'ils appelloient la dêtfft des femn
qu'ils donnoient pour 11:1e îles nourrices de Bacchus ,
dont il leur étoit défendu de prononcer le nom. Du
temsde Cicéron , qui appelle les myfteres de 1 1
déeffi par excellence myfteres des Romains, Publius
Clodius les profana en le gluTant en habit de femme
chez Jules Célar, dans le deffein de corrompre Mu-
tia , fa femme. La décile Fauna faifoit un double rôle
en Italie ; c'étoit une ancienne reine du pays , & c'é-
toit auffi la terre : cette duplicité de peffonnage eft
commune à la plupart des dieux du paganifmer; 6-:
voici la raifon qu'on en lit dans le grand Dictionnaire
hijlorique. Dans les premiers rems tous les cultes fe
rapportoient à des êtres matériels , comme le ciel ,
les affres, la terre, la mer, les bois, les fleuves ,
Ssq
324
BON
qu'on prenoit grofîierement pour les feules caufes
des biens & des maux. Mais comme le progrès de l'o-
pinion n'a plus de bornes , quand celles de la nature
ont été franchies > la vénération religieufe qu'on
avoit conçue pour ces êties , s'étendit bien-tôt avec
plus de raifon aux perfonnes qui en avoient inventé
le culte. Cette vénération augmenta inienliblement
dans la fuite des âges par l'autorité & le relief que
donne l'antiquité : & comme les hommes ont toujours
eu le penchant d'imaginer les dieuxiemblablesà eux,
rien ne paroiflant à l'homme , dit Cicéron, fi excel-
lent que l'homme même , on en vint peu-à-peu à di-
vinifer les inventeurs des cultes , & à les confondre
avec les divinités mêmes qu'ils avoient accréditées.
C'eft ainfi que la même divinité fut honorée en plu-
fieurs endroits de la terre fous différens noms , fous
les noms qu'elle avoit portés, & les noms des per-
fonnes qui lui avoient élevé les premiers autels ; &
que Fauna fut confondue avec la terre , dont elle
avoit introduit le culte en Italie. On l'appella aufîi
la bonne deejjc , la déejfe par excellence ; parce que la
terre eft la nourrice du genre humain , & que la plu-
part des êtres ne tirent leur dignité que du bien ou
du mal que nous en recevons.
BONNE DE NAGE, (Marine) fe dit d'une chaloir-
pe lorsqu'elle eu facile à manier , & qu'elle pafie ou
avance bien, à l'aide des avirons feulement.
BONNE TENUE , ( Marine. ) Voye?^ TENUE.
BONNEAU , f. m. GAVITEAU , ( Manne ) c'eft
un morceau de bois ou de liège , & quelquelois un
barril relié de fer ,qui flottant lùr l'eau, marque l'en-
droit où les ancres font mouillées dans les ports ou
rades. Voye{ Bouée. (Z)
* BONNE-ESPERANCE , ( Mythologie ) Bona
fpes , ce fut une divinité payenne. On trouve dans le
recueil de Gruter une infeription qui porte :
B O NjE
A U G.
PP.
S P El
ro t.
TR.
foit que ce fut la même déefTe que VEfpérance , à la-
quelle les Romains donnoient l'épithete de bonne,
loit qu'on diflinguât ces deux divinités.
BONNE-ESPERANCE , ( Cap DE ) Gécg. le Cap
de bonne Efpirance , eft à la pointe méridionale de
l'Afrique. Poyez_ Cap.
BONNESTABLE, ( Gêog. ) ville de France, dans
le Maine , à 6 lieues du Mans ; il s'y fait un grand
commerce de blé. Long. 18. S. lac. 48. il.
BONNET , f. m. ( Hifi. mod. ) forte d'habillement
de peau ou d'étoffe , qui f ert à couvrir la tête.
L'époque de l'ufâge des bonnets & des chapeaux
en France fe rapporte à l'an 1449 ; ce fut à l'entrée
de Charles VII. à Rouen , qu'on commença à en voir :
on s'étoit julqu'alcrs fervide chaperons ou de capu-
chons. M. le Gendre en fait remonter l'origine plus
haut ; on commença , dit-il , fous Charles V. à rabat-
tre fur les épaules les angles des chaperons , & à fe
couvrir la tête de bonnets , qu'on appella mortiers , lorf-
qu'ils étoient de velours , & fimplcment bonnets , s'ils
étoient faits de laine. Le mortier étoit galonné ; le
bonnet au contraire n'a voit pour ornement que deux
efpeces de cornes fort peu élevées , dont l'une fer-
voit à le mettre fur la tête , & l'autre à fe découvrir.
Il n'y avoit que le roi , les princes , & les chevaliers
qui portaflent Le mortier. Voye^ Mortier.
Le bonnet étoit non-feulement l'habillement de tête
du peuple , mais encore du clergé & des gradués , au
moins fut-il lùbftitué parmi les docteurs- bacheliers,
&c. au chaperon qu'on portoit auparavant comme un
camail ou capuce , & qu'on laifîa depuis flotter fin-
ies épaules. Pafquier dit qu'il faiioit anciennement
partie du chaperon que portoient les gens de robe,
dont les bords ayant été retranchés ,ou comme lu-
BON
perflus ou comme embarraflans , il n'en refta plus
qu'une efpece de calotte propre à couvrir la tête,
qu'on accompagna de deux cornes pour l'ôter & la
remettre plus commodément , auxquelles on en ajou-
ta enluite deux autres ; ce qui forma le bonnet quarré,
dont il attribue l'invention à un nommé Patouillet ;
ils n'étoient alors lurmontés tout au plus que d'un
bouton au milieu , les houpes de foie dont on les a
couronnés étant une mode beaucoup plus moderne,
& qui n'eit pas même encore généralement répan-
due en Italie. Le même auteur ajoute que la céré-
monie de donner le bonnet de maître-ls-arts ou de doc~
teur dans les univerfités , avoit pour but de montrer
que ceux qu'on en décoroit avoient acquis toute li-
berté , & n'étoient plus fournis à la férule des maî-
tres ; à l'imitation des Romains qui donnoient un bon-
net à leurs efclaves lorfqu'ils les affranchifïbient ;
d'où eif. venu le proverbe vocare fervum ad pdeum ,
parce que fur les médailles , le bonnet efl le fym-
bole de la liberté , dont on y repréfenîe le génie , te-
nant de la main droite un bonnet par la po.nte.
Les Chinois ne fe fervent point comme nous de
chapeaux , mais de bonnets d'une forme particulière ,
qu'ils n'otent jamais en faluant quelqu'un , rien n'é-
tant, félon eux, plus contraire à la politefle que de
fe découvrir la tête. Ce bonnet eft différent lelon les
diverles faifonsde Tannée: celui qu'on porte en été a
la forme d'un cône renverfé ; il eit fait d'une efpece
de natte très-fine & très-eftimée dan:, le pays, & dou-
blé de fatin ; on y ajoute au haut un gros floccon de
lôie rouge qui tombe tout autour , lé répand & flotte
de tous côtés , ou une houpe de crin d'un rouge vif
& éclatant , qui rélifte mieux à la pluie que la foie,
& tait le même effet. Le bonnet d'hy ver eft d'une forte
de peluche , fourré & bordé de zibeline , ou de peau
de renard avec les mêmes agrémens que ceux des
bonnets d'été ; ces bonnets font propres , parans , du
prix de huit ou dix écus , mais du refte fi peu pro-
fonds , qu'ils laiflent toujours les oreilles découvertes.
Le bonnet quarré efl un ornement , & pour certai-
nes perfonnes la marque d'une dignité , comme pour
les membres des Uniyerfités , les étudians en philofo-
phie , en droit , en médecine , les docteurs , & en gé-
néral pour tous les eccléfiaftiques féculiers , & pour
quelques réguliers. Il y a plufieurs univerfités ou l'on
distingue les do&eurs par la forme particulière du
bonnet qu'on leur donne en leur conférant le docto-
rat ; aifez communément cette cérémonie s'appelle
prendre le bonnet. Il falloit que les bonnets quarrés fuf-
fent en ulage parmi le clergé d'Angleterre , long tems
avant que celui de France s'en fervit ; puifqueWiclef
appelle les chanoines bifurcati , à caule de leurs bon-
nets ; & que Pafquier obferve que de fon tems , les
bonnets que portoient les gens d'églile, étoient ronds
& de couleur jaune. Cependant ce que nous avons
ci d îfliis rapporté d'après lui , prouve que ce fut auffi
de ion tems que leur forme commença à changer en
France.
Le bonnet d'une certaine couleur a été & efl enco-
re en quelques pays une marque d'infamie. Le bonnet
jaune elt la marque des Juifs en Italie ; à Luques , ils
le portent orangé ; ailleurs on les a obligés de mettre
à leurs chapeaux des cordons ou des rubans de cette
couleur. En France les banqueroutiers étoient obli-
gés de porter toujours un bonnet verd. Voye-^ plus
bas Bonnet verd.
Dans les pays d'inquintion , les aceufés condam-
nés au fuppliçe font coiffés le jour de l'exécution ,
d'un bonnet de carton en forme de mitre ou de pain
de fucre , chargé de flammes & de figures de dia-
bles : on nomme ces bonnets , carochas. ^oye^ Caro
cha & Inquisition.
La couronne des barons n'eft qu'un bonnet orné
de perles fur les bords ; ôc celles de quelques princes
BON
de l'empire , qu'un bonnet rouge , dont les rebords ,
ou félon l'ancien terme , les rebras font d'hermine.
Voye^ Couronne.
Dans l'univerfité de Paris , la cérémonie de la prife
du bon rut , foit de docteur, foit de maître-ès-arts , après
les examens, thefes ou autres exercices préliminaires,
fe tait ainli : le chancelier de l'univerfité donne la bé-
nédiction apoftolique, & impofe ion bonnet fur la
tête du récipiendaire , qui reçoit l'un & l'autre à ge-
noux. Vttye^ Docteur, Maistre-ès-Arts. (G)
Bonnet verd , ( Jutifprud. ) étoit une marque
d'inramie à laquelle on affujettifloit ceux qui avoient
fait celîion en juftice , de peur que le bénéfice de cef-
fion n'invitât les débiteurs de mauvaife foi à frauder
leurs créanciers : on n'en exceptoit pas même ceux
qui prouvoient qu'ils avoient été réduits à cette mi-
lérable reflburce par des pertes réelles & des mal-
heurs imprévus ; & fi le ceflionnaire étoit trouvé fans
fon bonnet verd, il pouvoit être conftitué prifonnier :
mais à préfent on n'oblige plus les cefîîonnaires à
porter le bonnet verd. Il ne nous en refte que l'expref-
fion, porter le bonnet-verd, qui fignifie qu'un homme
a fait banqueroute , 6c qui a paffé en proverbe. (H)
Bonnet à Prêtre, ( e/z terme de Fortification)
eft une tenaille double conftruite vis-à-vis un baftion
ou une demi-lune , dont le front forme deux tenail-
les fimpies , e'eft-â-dire un angle faillant & deux an-
gles rentrans. Voye^ Tenaille-double , 6- An-
gle mort. ((^)
Bonnet de prêtre ou Bonnet à prêtre,
tvonymus, (Jardinage.') elpece de citrouille, qui de-
mande la même culture, 6c que l'on rame comme le
fufain , qu'on appelie aufïï bonnet de prêtre, parce que
fon fruit en a la figiue. Voye^ Fusain. (/£)
Evonymus vulgaris granis rubentibus C. B. P. 418.
On n'en fauroit faire ufage intérieurement fans dan-
{ *r • Ion fruit eft d'une qualité nuilible. Théophrafte
allure quelle fait du mal aux befriaux; Matthiole &
Ruelle confirment ce fentiment, & rapportent que
les bi ebis & les chèvres, quelqu'a vides qu'elles foient
des bourgeons des plantes, ne touchent jamais à cel-
le-là. Trois ou quatre de les baies purgent par haut
& par bas. Les payfans fe fervent de la poudre du
fruit pour tuer les poux, & lavent leurs cheveux
avec la décoction de les graines.
Ce fruit employé extérieurement eft émollicnt &
réfolutif: il tue les vers, & guérit la teigne & la gra-
telle. Dik. (AT)
Bonnet , f. m. dans les Arts , on donne en géné-
ral ce nom à tout ce qui eft deftiné à couvrir la par-
tie fupérieure bc Iphcriquc d'une machine, d'un inf-
iniment , &c.
Cette métaphore eft prife de la partie de notre ha-
billement appellée bonnet.
Bonnet , en terme d'Orfèvre en grojferie , fe dit de la
partie fupérieure d'un encenfoir, commençant au
bouton, 6c fini fui nt aux confoles où paffent ies chaî-
nes : il forme un dôme uu peu ecrafé.
Bonnet de Turquie, c'eft, parmi les Patiffîers,
iin ouvrage en forme de bonnet ou turban à la Tur-
que, fait d une pâte a biicuit, ou autre.
Bonnets, en termes de Bottier, font les genouil-
lieres échancrées des bottes de Courier , ainfi nom-
mées de leur forme qui approche beaucoup de celle
d'un bonnet.
BONNETER , ou félon d'autres , cocjfcr un artifice ;
c'eft en couvrir l'amorce d'un papier collé , pour que
le feu ne puifTe s'y infinuer que lorsqu'on le veut ,
en caflant ce papier qu'on appelle aulli bonnetage.
* BONNETERIE, f. f. manufaâure de bonnets,
de bas, de camifoles , de jupons, de chauffons, & au-
tres ouvrages en laine pure ou en laine èc foie , qu'on
appelle caftorSt vigogne. V'oye^ LAINE, SOIE, Cas-
tor & Vigogne.
BON
325
Les Bonnetiers achètent la laine, 6c la donnent à
des ouvriers qui la font pafler par toutes les opéra-
tions qui la mettent en état d'être employée à leurs
marchandifes. Ces préparations font à peu près les
mêmes que pour la draperie. Voye^ L'article Drape-
rie.
Le dégrais , le battage & l'engrais , trois de ces pré-
parations , dont il fera fait mention à V article Dra-
perie , fe font chez le Bonnetier même. Il n'y a que
la carde & le filage qui fe faffent dehors.
La première attention du Bonnetier doit être de fe
mettre à couvert de la friponnerie du Cardeur 6c du
Fileur; il peut être trompé fur le filage, en ce qu'il
peut être plus ou moins fin ; il peut être trompé fur
la quantité de la laine qu'on lui rend filée , en ce qu'on
en peut diminuer la quantité , en augmentant le poids
par une addition d'huile. Exemple : dans l'engrais de
douze livres de laine qui fe fait chez le Bonnetier, il
entre trois livres d'huile ; ce qui fait quinze livres de
poids : mais la livre de laine peut aller jufqu'à qua-
tre francs , & la livre d'huile ne va qu'à douze fols ;
le Cardeur & le Fileur peuvent donc être tentés de
fubftituer de l'huile à de la laine.
Le Bonnetier eftimera la fineffe du filage par une
machine femblable à celle du Drapier. F. l'article
Draperie. C'eft une efpece de dévidoir qui indi-
que le nombre de tours, & par conféquent la lon-
gueur du fil , qu'on peut toujours comparer avec le
poids. Il eft évident que la finette du filage eft en rai-
fon compofée de la direcle du nombre des tours, 6c
de l'inverfe du poids, ou que le filage eft d'autant
plus fin, que le nombre des tours eft grand, 6c le
poids de l'écheveau petit.
Quant à la quantité de la laine ; s'il veut s'afTùrer
de la fidélité de l'ouvrier, il n'a qu'à la pefer en la re-
cevant; & après l'avoir parfaitement dégraiflee, le dé*
grais de quinze livres de laine aura d'abord emporté
les trois livres d'huile qu'elles avoient reçues dans
l'engrais , èc le poids de laine reftant devroit être de
douze'livres, s'il n'y avoit point eu de déchet dans la
carde & le filage : mais il y a eu du déchet ; & ce dé-
chet eft eftimé à deux onces par livre de feize onces.
Le Bonnetier reçoit la laine filée, & la diftribue à
des Faifeurs de bas au métier 6c à des Tricoteufes ,
pour être employée : ces gens lui rendent la laine em-
ployée aux ouvrages dont nous avons parlé ci-def-
fus. Mais il ne faut pas croire qu'alors ces ouvrages
puifTentfe vendre ; ils ont à palier par un grand nom-
bre d'opérations dont nous aiions rendre compte , &
qui lont proprement du refTortdu manufacturier Bon-
netier : aulîi fe font-elles ordinairement chez lui.
La première de ces opérations ejl la foule. La foule
demande la conftruction d'une machine telle qu'on
la voit Plan, du Bonnetier en i'acefig. 1. de coté fig.
3- Cette machine s'appelle une fouloire. La fouloire a
été conftruite jufqu'à prélent en bois de chêne : mais
fon peu de durée & de folidité a détermine le lieur Pi-
chard , marchand Bonnetier fabriquant rue Mouf-
tetard, à la faire conftruiredc pierre.
Au refte la forme de la fouloire en pierre eft la
même que de la fouloire en bois que nous allons dé-
crire, parce qu'elle eft beaucoup plus ordinaire, a
fig. 1 . eft une planche de chêne échancrée. Les écri
crures ae,ed, ont été pratiquées pour faciliter l'ac-
tion des bras de l'ouvrier. La partie élevée e corref-
pond au ventre de l'ouvrier. Le fond de la fouloire F,
fig. 3. eft fait d'une forte planche de chêne appuyée
fur le bâtis de bois incline h i k l. Entre les pies m n
o/>&: fous ce bât! s, eft placé un grand panier d'ofier.
Sur le fond Fàe la fouloire eft fixée à clous une plan-
che oblongue, fur un pie de hauteur & fur un peu
plus de longueur ; cette planche eft percée de rangées
de trous, au nombre environ de cent vingt. On prend
de* dents de bceuf qu'on entortille de rilalîe, & qu'on
326
BON
fait entrer dans ces trous. Cette planche ^garnie de
dents de bœuf, s'appelle le râtelier. On voit même
planche du Bonnetier ,fig. J. le râtelier féparé: il fe-
roit mieux que le râtelier , au lieu d'être fixé à clous
fur le fond de la fouloire , y i'ût enchaffé , de maniè-
re qu'il n'y eût que les dents qui defaflcurafTent, &
c'eif ce que le lieur Pichard a fait obferver dans les
Tiennes. Des robinets g, g donnent à diferétion dans
la fouloire , de l'eau chaude qui vient d'une chaudiè-
re B,fig. z. affilé fur un fourneau C, au-deffous du-
quel on remarque un petit bûcher D , 8c au-deffus un
réfervoir^ d'eau froide , qui fournit à la chaudière B.
Pour fouler, on ouvre les robinets g,g,fig- 3- l'eau
chaude tombe dans la fouloire; l'ouvrier a du favon
dans un fac de toile ; il prend ce fac , & le promené
dans l'eau chaude. La précaution du fac eft bonne ;
par ce moyen il ne parle dans l'eau que les particu-
les plus fines du favon, le gros tacheroit l'ouvrage.
Cette eau imprégnée de favon, s'appelle eau neuve.
Quand l'eau neuve eft prête, l'ouvrier prend fur la
planche 1 , 2, 3,4, au lieu 1 , une certaine quan-
tité d'ouvrage qu'on appelle une poignée. Si ce font
des bas d'homme , il n'en faut qu'une paire pour fai-
re une poignée. Cette poignée a déjà fouffert plu-
fieurs préparations dans la fouloire , avant que de
parler dans l'eau neuve , ainii qu'on le verra par la
fuite de l'opération que nous décrivons. L'ouvrier
foule cette poignée : ion travail confifte alors à tour-
ner, retourner, & preffer à plufieurs réprifes fa poi-
gnée fur les dents du râtelier; obfervant de la faire
toucher à chaque mouvement à l'eau qui s'élève dans
la fouloire jufqu'à la hauteur de deux rangées de
de dents les plus voifines du fond. Il continue lbn opé-
ration pendant une bonne heure au moins , ayant foin
de ne pas fouler à fec ; car fa marchandée en devien-
drait cariante. Cela fait, il tord bien fon ouvrage
pour en faire fortir l'eau , le plie & le met dans le
panier qui eft fous la fouloire.
Son ouvrage ferré dans le panier, il ouvre les ro-
binets g, g; il tombe de l'eau chaude dans la fouloi-
re ; cela s'appelle réchauffer. Cette eau réchauffée une
première fois s'appelle eau d'imprimé. L'eau d'impri-
mé étant préparée , l'ouvrier prend une poignée d'ou-
vrage au lieu 2 ; il met cette poignée dans l'eau d'im-
primé , l'y agite, & commence à la fouler un peu.
Cette manœuvre dure un quart d'heure; au bout de
ce tems , au lieu de jetter cette poignée dans le pa-
nier, comme la première, il la met iur la planche au
lieu 1 , après l'avoir tordue.
Cela fait, il réchauffe l'eau : cette eau réchauffée
s'appelle eau de dégrais à fait : il prend une autre poi-
gnée au lieu 3 ; il a du favon noir dans un barril ; il
en frotte fa poignée à la quantité d'une demi-livre ,
enfuite il l'agite clans l'eau , & la preffe fortement fur
le râtelier pour en faire fortir la graiffe. Cette ma-
nœuvre dure un quart-d'heure : au bout de ce tems ,
il tord fa poignée & la met fur la planche au lieu 1.
Il réchauffe l'eau : cette eau réchauffée s'appelle
eau grajje. Il prend une autre poignée au lieu 4 ; il la
met dans l'eau graffe fans la frotter de favon , il fe
contente de l'agiter & de la preffer fortement contre
le râtelier. Cette manœuvre dure encore un quart-
d'heure ; au bout de ce tems il tord fa poignée & la
met fur la planche au lieu 3.
Pour cette fois il ne réchauffe point , il prend feu-
lement une nouvelle poignée au lieu 5 ; cette poignée
eft d'ouvrage tel qu'il fort des mains du fabriquant ,
8c fans aucune préparation. Il jette fa poignée dans
l'eau , l'y agite , 8c preffe contre les dents. Cette ma-
nœuvre dure un quart-d'heure ; au bout de ce tems
il la tord 8c la met fur la planche au lieu 4.
Cela fait, il vuide toute la fouloire par un bouchon
qui eft au fond , & la nettoyé exactement. Quand la
fouloire eft bien nettoyée, il refait de l'eau niew e
BON
pour recommencer la fuite d'opérations que nous ve-
nons de décrire , & dans lefquelles coniifte la foule.
Doù l'on voit que nous avons fiîppofé la fouloire
en train : mais fi elle n'y eût point été , on eût fait
une eau neuve arec du favon noir, &; on eut con-
tinué le travail clans l'ordre que nous avons preferit :
mais le commencement eût été coûteux Se n'eût pas
donné un ouvrage fi parfait. Le but de la foule
eft de dégraiffer, &de rendre l'ouvrage plus fort &
plus ferré.
L'ouvrier eft payé trois fous la poignée : maistous
les ouvrages ne font pas également durs. Les bas
d'homme , de Segovie , font les plus durs ; les bas de
femme font de deux paires à la poignée. L'ouvrage
de foule le moins pénible, ce font les calottes de caf-
tor , quoiqu'il y en ait huit à la poignée.
Si l'on veut avoir de bel 8c bon ouvrage , il ne
faut le fouler ni aux pies ni au moulin ; ces deux ma-
nières rendent les bas durs & inégalement foulés.
La féconde opération ejl celle de la forme. Au fortir
des mains du foulon , dans le même jour , il faut enf or-
mer les marchandises : fi on les laiffoit lécher , on ne
pourroit plus les enformer fans les mouiller, ce qui
les' gâteroit. La forme n'eft autre choie qu'un mor-
ceau plat de bois de hêtre , dont le contour eft , à
proprement parler , la ligne de profil de la pièce à
enformer. On la fait entrer dans les ouvrages foulés,
qu'on tend fortement fur elle , avec de petits clous
qu'on plante , foit dans l'ouvrage , foit dans une li-
fiere ou allonge qu'on y attache : ordinairement 011
met des liiieres aux jupons. On laiffe les marchandi-
ses en forme jufqu'à ce qu'elles loient feches , ce qui
demande au-moins douze heures , fans feu ni foleil.
Quand on eft preffe , on porte les marchandifes en-
formées dans une étuve ou cabinet échauffé par une
poelle de feu : il ne faut aux marchandifes qu'une
heure d'étuve pour les lécher : mais il vaut mieux
les laiffer fécher à l'air.
La troifieme opération coniifte à les racoutrer. Ra-
coutnr, n'eft autre chofe que réparer les défauts que
les marchandifes rapportent, foit du métier à bas,
foit de la foule. Cette réparation fe fait à l'aiguille 8c
avec la même matière : il faut qu'elle foit la plus fo-
lide 8c la plus propre qu'il eft polîible.
La quatrième opération eft le draper. Pour draper,"
on a une broche double : cette broche double eft une
efpece de fourche de fer , telle qu'on la vokfg. 5. On
a monté fur chaque fourchon , un chardon de ceux
cpi'on appelle chardon à bonnetier ou drapier ou foulon ;
ces chardons peuvent fe mouvoir ou tourner fur les
deux fourchons, 8c y font arrêtés par une planchette
qui en eft traverfée , & une clavette qui les traverfe.
L'ouvrier prend la queue de cette broche ou fourche
entre l'index & le doigt du milieu de fa droite; place
fon ouvrage fur fon genou gauche , qu'un petit mar-
che-pié tient élevé , 8c pailè deffus , les deux char-
dons , jufqu'à ce qu'il s'apperçoive qu'il s'eft formé
affez de duvet. Les chardons en roulant fur la mar-
chandile , le chargent de bourre. Quand ils en ont
trop , on a une carde telle qu'on la voit fig. 6. fur la-
quelle on les roule , ce qui s'appelle débourrer.
La cinquième opération eft la tonte. Cette opéra-
tion eft très-délicate , & il faut une certaine habitude
pour aller vite &c ne pas tondre en échelle ou inéga-
lement : pour cet effet le tondeur fe ceint d'une cein-
ture telle qu'on la voit f g. 8 ; elle a une boucle or-
dinaire à ion extrémité , 8c elle traverfe un morceau
de bois fait en cœur, dont on auroit coupé la pointe,
& au milieu duquel on auroit pratiqué une ouverture
quarrée. Il arrête ce morceau de bois , qu'on appelle
couffinet, fur ion flanc droit. Il prend dans fa main
gauche un rouleau ou morceau de bois rond, cou-
vert de ferge , qu'on vohfig. 1 0. Ce rouleau ou mor-
ceau de bois a un pié de long fur quatre pouces de
BON
BON
diamètre, îl place fon ouvrage fur ce ronlcirn , en tra-
vers , ii c'eit un bas ; il appuie la longue bi anche dé
fes cifeaux dans l'ouverture du couffinet; il les faifit
toutes deux, & failaru ouvrir & fermer rapidement
fon cifeau , il enlevé de dciîiis l'ouvrage les gros-
poils , oblervant de tourner peu à peu le rouit. ai ,
afin que la furface de l'ouvrage à tondre fiiccede à
la furface tondue , & fe préiente eontinuement au
cifeau.
On appelle bourre , tant la laine enlevée au char-
don, que celle qui vient du cifeau ; ce produit du dra-
per & de la tonte fert à remplir les dents des cardes
neuves , quand on craint qu'étant trop longues elles
ne déchirent la lAie. On la vend aufa à des ouvriers
qui ont trouvé le fecret d'en faire une forte de ta-
pifferie qu'on appelle tontijje. La bourre vaut quatre
fous la livre.
Il elt étonnant qu'on ait trouvé un emploi à la
bourre de la laine, 6c qu'on n'en ait pas encoie trou-
vé à la recoupe de la gaj'e ; l'un pourtant me iemble
bien plus facile que l'autre. On entend par la recoupe
delagafe , cette portion de fil 6c de ioie blanche qui
s'enlève au cifeau de deffus les pièces , quand elles
font fabriquées , pour en taire paroître les fleurs ,
voye{ Gase : on brûle cette matière ou cet amas de
petits fils plus blancs que la neige. Cependant il n'eit
perfonne à qui il ne vienne en penfée qu'on en pour-
rait très-bien faire ufage dans les papeteries : peut-
être que du papier fabriqué en entier de cette ma-
tière leroit caÛant ; mais ïi on la mêlangcoit avec le
chiffon , je ne doute point quelle ne contribuât à la
blancheur & à la finefle : j 'invite les fabriquans de
papier à en faire l'eflai. Si cet effai réuflifioit , il y
auroit un gain conliciérable à taire pour les premiers
entrepreneurs; car ces bouts de fil 6c de lbie forment
au bout de Tan , dans l'atteher d'un galicr un peu oc-
cupé , une malle tres-confidérable , 6c ils le donnent
pour rien ou pour très-peu de chofe.
La Jlxieme opération eil la teinture. Après la tonte
on teint ou l'on envoyé à la teinture les ouvrages
faits de laine blanche ; car pour ceux qui lont fabri-
qués de laines déjà teintes , ils relient de la couleur
qu'on a cardé la iaine. Voye^ fur le mélange des lai-
nes teintes propres à produire la couleur qu'on de-
fire, C article D RAPE RI t. Foye^ «a^ï TEINTURE.
Septième opération. Il faut rappréter les marchan-
difes paliées à la teinture. On entend par rappréter,
reparler au chardon légèrement , ce qu'on appelle
éclaircir, £c tondre enfuite.
Huitième opération. Quand les marchandifes ont
pafle par toutes les opérations précédentes , on les
prefle ou on les catit. La prefle des Bonnetiers n'a rien
de particulier ; elle rellemble à celle des relieurs 6c
de quelques autres ouvriers. L'action de la prefle eft
de rendre les marchandifes moins épaiffes , 6c de leur
donner un œil plus fin. Catir , c'elt chauffer modéré-
ment fur une poelle pleine de feu , qu'on appelle ca-
tijfoire. La catillbirc renfle la laine, & donne à la mar-
chandée un air plus moelleux & plus chaud , mais
plus épais, ce qui ne plaît pas à tout le monde.
Il ne relie plus au Bonnetier après cela, qu'à ren-
fermer fa marchandée dans des ai moires, & à veil-
ler à ce que les vers ne s'y mettent point.
La Bonneterie de Paris eil fans contredit une des
meilleures de l'Europe, 6c la meilleure du royaume.
La crainte qu'elle ne perdît de Ion crédit par de mau-
vais ouvrages diftribués liir Ion compte , détermina
fa Majellé à ordonner à trois rcpriles différentes , en
171 3 , 16 6c 11 , que les marchandées de bonneterie ,
qui fe prélenteroient à l'entrée de Paris, feraient vi-
fitées à la douane ; ce pour cet effet il fut cnjojnt i°
au commis des portes 6c barrières de Paris , lous peine
d'interdicïion pendant un mois, 6c ae îévocation en
cas de récidive, d'envoyer au bureau de la douane
327
tous les marchands forains , voituriers , conducteurs
de coches , & meffagers qu'ils trouveiont chargés de
bonneterie , tant au métier qu'à l'aiguille, de leur dé-
livrer des envois , d'en prendre des gages propor-
tionnes à la quantité des marchandifes , & même de
les conduire: i° en cas qu'il fe trouvât des gens en
contravention , de faifir 6c de dreffer procès-verbal
& rapport de 1 aine , dans les vingt-quatre heures :
3° au lieutenant de police d'ordonner en ces conjonc-
tures ce qu'il appartiendra : 4° que le tiers des mar-
chandrfes pnfes en fraude, lbit adjugé aux commis.
La Bonneterie forme le cinquième des fix corps des
marchands de Paris. Il a droit de vendre bonnets de
drap , de laine , bas , gants , chauffons , camifoles ,
caleçons, & autres femblables ouvrages faits au mé-
tier , au tricot , à l'aiguille , en laine , fil , lin , pod ,
calïor , coton , 6c autres matières ourdiffables.
Les Bonnetiers entendent par des bas caflors , ou
autres ouvrages défignés fous ce nom, ceux qui font
faits avec de la laine filée & torfe , enfuite avec de la
foie. Ces marchandifes fe traitent au fortir des mains
du fabriquant , précifément comme fi elles étoient
toute laine.
Dans les ftatuts de la Bonnetere, accordés par Hen-
ri IV. en 1608 , les marchands bonnetiers font appel-
lés Aulmulciers - mitoniers ; parce qu'anciennement
c'étaient eux qui faifoient des aulmulces ou bonnets
propres pour la tête quand on alloit en voyage, &C
qu'ils vendoientdes mitaines. Fcye{ Aumusse. Sui-
vant ces ftatuts , on ne peut être reçu dans le corps
avant vingt-cinq ans, & fans avoir travaillé cinq ans
en qualité d'apprenti , & cinq autres années en quali-
té de compagnon , 6c fans avoir fait chef-d'œuvre.
La Bonneterie a fes armoiries ; elles font d'azur , à
la toifon d'argent , furmontée de cinq navires aulfi
d'argent , trois en cher* & deux en pointe ; & une
confrairie établie en l'églife de S. Jacques de la Bou-
cherie , fous la protection de S. Fiacre.
Il y a à la tète du corps fix maîtres ou fix gardes.
Trois font appelles anciens. Le plus ancien des trois
s'appelle le premier ou le grand garde ; les trois autres
font nommés nouveaux gardes.. On ne peut être élu
premier garde, qu'on n'ait été nouveau garde.
L'éledion de deux gardes fe fait tous les ans après
la S. Michel , au bureau de la Bonneterie; lavoir, d'un
ancien pour la féconde fois , 6c d'un nouveau pour
la première fois ; enforte qu'il en fort deux , le grand
garde , & le premier des trois nouveaux. L'éleftion
i'e fait à la pluralité des voix, en prélence du procu-
reur du Roi du châtelet , & d'un greffier.
Les fix gardes portent en cérémonie la robe con-
fulaire , c'elt-à-dire , la robe de drap noir, à collet ,
à manches pendantes , à paremens 6c bord de velours
noir.
Dans les comptes que les gardes ont à rendre, ils
font entendus par lix anciens hors de charge , nom-
més à la pluralité des voix.
Quand un ancien garde décède , les quatre der-
niers gardes en charge font tenus d'affilier en robe
à fon convoi , & de tenir chacun un des coins du
poîle , qui ell fourni par le bureau , avec fix flam-
beaux de cire blanche, auxquels font attachées les
armoiries du corps.
Ce cinquième corps s'cfl accru, en 1716, de la
communauté des maîtres bonnetiers & ouvriers au
tricot des faubourgs.
Cette réunion occafionna dans la fuite des con-
tellations ; ces contellations augmentèrent encore
quand la communauté le fut accrue des taileurs de
bas au métier. Ce fut pour terminer tous ces démê*
lés, occalionnés par les différens réglemens qu'a voit
chacun de ces corps avant la réunion , 6c qu'il pré?
tendoit conferver après , qu'il fut ordonne par un
3i3
BON
arrêt du confeil de 1716, qui n'eut fon effet qu'en
i° Que la communauté des bonnetiers de fau-
bourgs fera éteinte & reliera unie au corps des Bon-
netiers, v
2° Que les maîtres des faubourgs reçus avant la
réunion , feront réputés maîtres de la ville , &c pour-
ront y tenir boutique.
3° Qu'ils jouiront eux, leurs veuves & leurs en-
fans , des droits des Bonnetiers de Pans.
40 On peut voir le relie de ces réglemens dans
le diftionnaire du Commerce , avec les huit articles
qu'on fut obligé d'y ajouter lors de la réunion des
fabriquans de bas au métier , aux Bonnetiers de la
ville & des faubourgs. Voyei au£i l'article Bas au
MÉTIER.
Je finirai cet article par un fait qui pourra être de
quelqu'utilité à d'autres marchands bonnetieis qu'au
iieur Pichard. Il ell confiant qu'il n'y a point de iou-
loire bien entretenue , qui ne conlomme au moins
pour dix fous d'eau par jour , & un marchand bonne-
tier peut avoir chez lui jufqu'à ûx , huit , dix fouloi-
res , ce qui fait pour l'eau feulement un objet allez
considérable. Le Sr Pichard parloit un jour de cette
dépenle, devant un aveugle de.nailïance déjà connu
(dont il s'agit dans la Lettre fur les aveugles 6c dans
l'art. Aveugle ), & cet aveugle lui donna un con-
feil dont on ne s'étoit pas encore avifé depuis qu'on
fait de la bonneterie : ce fut de lé fervir de l'eau de
fon puits ; cela n'étoit pas difficile à trouver , diront
ceux qui ignorent que l'eau de puits ell très-dure &
fe charge ii difficilement de favon , qu'il n'ell pas pol-
fible d'en faire mage en bonneterie. Mais notre aveu-
gle l'avoit très-bien , par l'ufage qu'il avoit de la dif-
tillation, que cette même eau de puits diltillée deve-
noit très-pénétrante , le chargeoit de favon avec une
extrême facilité , & en demandoit même beaucoup
moins que l'eau de rivière , pour produire le même
effet.
Il l'avoit encore que le travail de la bonneterie de-
mandoit que l'on tint perpétuellement du feu fous la
chaudière qui fournit de l'eau aux fouloires. Il con-
feilia donc au fieur Pichard de placer un grand alem-
bic entre deux chaudières, qui recevroient l'eau qui
s'en dillilleroit, &c qui la rendraient dans les fouloi-
res. L'alembic de la fouloire du Sr Pichard ell d'une
forme Singulière ; il ell concave en-deflbus, & op-
pofe une large furface au feu ; il s'en élevé perpétuel-
lement une malle conlidérable de vapeurs ; il ell pla-
cé de façon qu'il ell échauffé par le feu même qui en-
tretient la chaleur des chaudières , & il fournit aux
fouloires de l'eau qui ne coûte rien , qui épargne le
favon , & qui foule mieux que l'eau de rivière.
BONNETIER, f. m. celui qui vend , fabrique ou
fait fabriquer des bonnets , des bas , & autres ou-
vrages de bonneterie.
Le corps des Bonnetiers de Paris ell compofé de
trois autres , dont la réunion s'eil laite fucceffive-
ment ; du corps des Bonnetiers-Aulmulciers-Mitoniers,
qui faifoientle cinquième des fix corps des marchands,
& ne travailloient que dans la ville ; du corps des
Bonnetiers au tricot des faubourgs ; & du corps des
Faifeursde bas-au-métier. Voye^ Part. Bonneterie
<S- Bas-au-metier.
BONNETTE , terme de Fortification , ell une efpe-
ce d'angle laillant que l'on conltruit dans un liège au
pié du glacis. Cet ouvrage s'appelle plus communé-
ment/tv/*. Voye{ Flèche. (Q)
Bonnette , f. f. ( Marine. ) ce font de petites voi-
les dont on le fert lorfqu'il y a peu de vent ; on les
ajoute aux autres voiles duvaiileau pour les aggran-
dir , ou on les met en particulier pour avoir plus
grand nombre de voiles.
Bonnettes maillées. Ces bonnettes lervent à allon-
BON
ger les baffes voiles pour aller plus vite quand il fait
beau tems : on les attache à des mailles , c'eiî-à-dire,
à des œillets qui font près de la ralingue , après quoi
on amarre les écoutes aux points des bonnettes.
■ Secondes bonnettes maillées. On les lace encore aux
bonnettes maillées par-deffous. Ce font les Hollandois
qui le fervent de fécondes bonnettes.
Bonnettes maillées des huniers.
Bonnettes en étui, mifene en étui , coutelas. Ce font
de petites voiles qui ont la figure d'un étui , & qui fe
mettent par le bout le plus étroit à chaque extrémité
des vergues , fur des pièces de bois qu'on nomme bou-
te-hors ; ainlî elles régnent le long des côtés des deux
baffes voiles & des huniers. On n#met les bonnettes
en étui que loi i que la mer ell unie , & le vent pas trop
frais.
Lacer la bonnette, c'efi l'amarrer fous la voile avec
de éguillettes qui la lacent dans les œillets.
Délacer , déranger , démailler la bonnette , c'efl la
détacher de la voile où elle étoit attachée.
BONNETTE lardée, (Marine.) larder la bonnette;
c'elt une pratique des calfateurs : quand un vaiffeau
a une voie d'eau , & qu'ils ne connoiffent point l'en-
droit où eue ell , pour ia trouver ils lardent une bon-
nette av :c ue l'etoupe , qu'on pique lur la voue avec
du fil à voile , & après avoir mouillé la bonnette, ils
jettent de la cendre ou de la poulïiere fur ces bouts
de fil de caret 6c à étoupe , afin de leur donner un peu
de poids pour taire enloncer la bonnette dans l'eau :
en cet état ils la delcendent dans la mer, & la pro-
mènent à llnbord & à bas-bord de la quille , jufqu'à
ce qu'elle fe trouve oppofée à l'ouverture qui efl
dan:> le bordage , &qui lorme la voie d'eau ; car alors
l'eau qui court pour y entrer pouffe la bonnette con-
tre le trou ; ce qui fe connoît par une elpece de ga-
fouillement ou de ffémiffement que font la bonnette
& la voie d'eau. Les matelots pour exprimer ce bruit
ou gafouillementj dilent que la bonnette Jupe. (Z)
BONNEVAL, (Géog.) vdle de France dans la
Beauce , fur le Loir , à trois lieues de Châteaudun. Il
y a une belle abbaye de l'ordre de S. Benoit. Lon.
l<). j. lat. 48. zo.
BONNEVILLE , ( Géog. ) petite ville de Suiffe
dans le canton de Baie , lur un lac.
BONONIA , {Géog. anc. & mod.) ville de la baffe
Pannonie , qu'on croit être notre fionmonller lur le
Danube , ou Sophie. Il y a plulîeurs autres villes an-
ciennes du même nom.
* BONOSIAQUES okBONOSIENS, Hijl.
eccléf. c'ell le nom de certains hérétiques du ive lie-
cle , qui paroiffent avoir été dans les erreurs des Pho-
tiniens. ^byeç BONOSIENS.
* BONOSIENS , f. m. ( Hijl. eccléf. ) nom d'une
fecle que Bonofe évèque de Macédoine renouvella
au ive liecle. Ses erreurs, de même que celles de
Photin , confiftoient à foùtenir que la Vierge avoit
ceffé de l'être à l'enfantement. Le pape Gelale les
condamna. Comme ils baptifoient au nom de la Tri-
nité , on les recevoit dans l'Eglile fans baptême ; au
lieu que le fécond concile d'Arles veut que les Pho-
tiniens ou Paulianilles foient rebaptilés ; ce qui con-
ïlitue quelque différence entre ces derniers héréti-
ques & les Bonofiens. Voy. Photiniens ou Paulia-
N1STES.
* BONS-CORPS , f. m. pi. ( Hijl. mod. ) c'ell le
nom qu'on donna à une milice levée par François II.
duc de Bretagne, dans la guerre qu'il eut en 1468
contre Louis XI. Ce duc, en attendant les fecours
que le Roi d'Angleterre devoit lui fournir , fit lever
dix mille hommes de nouvelle milice , compolée de
gens du commun : on choififfoit les plus robulles
qu'on pouvoit trouver ; c'elt ce qui les rit nommer
bons-corps.
* BON-SENS , f. m. ( Métaphyfique. ) c'ell la me-
Cure
BON
BON
%i<)
fùre de jugement & d'intelligence avec laquelle tout
homme eft en état de le tirer à fon avantage des af-
faires ordinaires de la fociété.
Otez à l'homme le bon-fins , & vous le réduirez à
la qualité d'automate ou d'enfant. Il me femble qu'on
exige plutôt dans les enfans de l'efprit que du bon-
fins; ce qui me fait croire que le bon-fiens fuppofe de
l'expérience , & que c'eft de la faculté de déduire des
expériences, qu'on fait le plus communément les
inclusions les plus immédiates. Il y a bien de la diffé-
rence dans notre langue entre un homme de Cens &c
un homme de bon-fins : l'homme àefiens a de la pro-
fondeur dans les connoiffance , & beaucoup d'exac-
titude dans le jugement ; c'eft un titre dont tout hom-
me peut être flatté : l'homme de bon-fiens au contrai-
re paffe pour un homme fi ordinaire , qu'on croit
pouvoir fe donner pour tel fans vanité. Au refte il
n'y a rien de plus relatif que les termes fiens , fiens-
tommun , bon-fiens , efprit , jugement , pénétration ,fa-
gacité, génie , & tous les autres termes qui marquent
îoit l'étendue , foit la forte d'intelligence de chaque
homme. On donne ou l'on accorde ces qualités , fé-
lon qu'on les mérite plus ou moins foi-même.
BONS - HOMMES , f. m. ( Hiji. eccléj] ) religieux
établis l'an 1 159 en Angleterre par le prince Edmond;
ils profeffoient la règle de S. Augultin , & portoient
un habit bleu. Sponde croit qu'ils fuivoient Pinftitut
du bienheureux Jean le Bon qui vivoit en ce fiecle.
On donna en France ce nom aux Minimes, à caufe du
nom de bon-homme que Louis XI. avoit coutume de
donner à S. François de Paule leur fondateur. Les Al-
bigeois affeûoient auffi de prendre ce même nom de
bons-hommes. Polydore Virgile, Ni fi Angl. liv. XVI.
Sponde , A. C. i%5g. n. cj. Voye{ Minimes. (G )
* BONTANS , f. m. ( Commerce. ) étoffes ou cou-
vertures de coton rayées de rouge fabriquées à Can-
tor. Les Européens en font le commerce avec d'au-
tres peuples des côtes d'Afrique.
BONTÉ , f. f. (Morale. ) La bonté morale confifte
en deux points : le premier, ne pas faire du mal à nos
fimblablts ; le fécond, leur faire du bien.
iv. Ne point faire à autrui ce que nous ne vou-
drions pas qu'on nous fît ; voilà la règle qui détermi-
ne quelle forte de traitemens la nature nous interdit
à l'égard du refte des hommes. Tout ce qui fait à
nous-mêmes, nous paroîtroit dur, barbare, & cruel,
eft compris dans la prohibition : mais cette maxime ,
d'un uiage iî étendu, eft bien reftreinte dans l'appli-
cation qu'on en fait : la plupart des hommes le con-
duifent les uns avec les autres , comme s'ils étoient
perfuadés qu'elle ne dût avoir lieu qu'entre amis.
Lorique la paffion vous porte à quelque violence
contre un autre homme , jettez les yeux fur lui ,
pour y voir l'empreinte de la main divine, & votre
propre reiTemblance ; ce fera dequoi rallentir votre
emportement. Ne dites point à Dieu ce que Cain lui
dit : m\ivc7-vous donné mon frère en garde ? Oui ians
doute, il vous l'a donné en garde ; &c non-ieulement
il vous défend de lui faire aucun mauvais traitement,
mais il vous ordonne même de le fervir de tout vo-
tre pouvoir.
i°. Lorfqu'on eft officieux & bienfaifant pour fes
parais , fes bienfaiteurs ou les amis , on le croit gé-
néreux , quoique d'ailleurs dur &£ indifférent pour
tout le refte des hommes ; 6c l'on n'efl pas même cha-
ritable ; qualité cependant bien en-deçà de la géné-
rofité , qui eft le comble & la perfection de toutes
les autres vertus fociales. En pratiquant celles-ci on
ne fait qu'éviter les défauts contraires placés tout
près d'elle : mais la généralité nous éloigne bien plus
du vice , puiiqu'elle laille pour intervalle entr'elle &
lui toutes les vertus de précepte. La généralité eft un
degré de perfection ajouté aux vertus par-deflus celui
cuie preferit indifpenfablement la loi, Faire pour fes
Tome II,
femblables précifément ce qu'ordonne la loi , ce n'eft
pas être généreux ; c'eft Amplement remplir l'on de-
voir.
Mais la charité , ou ce qui eft la même chofe , cet-
te affeft ion générale que nous devons à tous les hom-
mes , n'eft pas une vertu de furérogation : vous ne
ferez que fatisfaire à ce que l'humanité vous impofe,
fi rencontrant un inconnu que des alTaffins ont blef-
fé, vous vous en approchez pour panier fes plaies :
le befoin qu'il a de votre fecours eft une loi qui vous
oblige à le fecourir. Un indigent eft preffé par la
faim ; vous ne ferez que payer une dette en appai-
fant fon befoin. Les pauvres font à la charge de la fo-
ciété ; tout le fuperflu des riches eft affeclé de droit
à leur fubfiftance. Et ne plaignez pas même le fe-
cours que vous leur donnez , quand il feroit le prix
de vos fueurs &c de pénibles travaux : quoi qu'il
vous coûte , il leur coûte encore plus : c'eft l'acheter
bien cher que de le recevoir à titre d'aumône.
Voulez -vous apprendre en deux mots jufqu'oîi
s'étendent les bons offices que vous devez à vos fem-
blables ? en voici la mefure. Faites à autrui ce que
vous voudriez qu on vous fît. (-ST)
BONTlA,{. f. (Hifi. nat. bot. ) genre de plante
dont le nom a été dérivé de celui de Jacques Bontit
médecin. La fleur de ce genre de plante eft monopé-
tale , en mafque ; la lèvre fupérieure eft relevée , Se
l'inférieure divifée en trois parties. Il s'élève du ca-
lice de la fleur un piftil qui eft attaché comme un clou
à la partie poftérieure de la fleur , & qui devient
dans la fuite un fruit ovoïde, mou , & plein de fuc.
Ce fruit renferme un noyau oblong , dans lequel il y
a une amende de la même figure. Plumier , Nova,
plant. Amer. gen. Voye^ Plante. (/)
BONUS EVENTUS , le bonfiucces , ( Myth. ) di-
vinité principalement honorée chez les anciens par
les laboureurs , & qu'on mettoit , félon Vairon , au
nombre des douze dieux qui préiïdoient à l'agricul-
ture : félon d'autres , il étoit auffi l'un des douze dieux
nommés confientes, qui étoient admis au confeil de
Jupiter. Il avoit un temple à Rome ; & dans plufieurs
médailles du haut empire on voit la figure de ce
dieu, avec ces diverfes légendes : bonus eventus, bono
éventai , eventus Aug. il y eft repréfenté nud proche
d'un autel , tenant d'une main une patere , de l'au-
tre des épis & des pavots. Une ancienne infcriptlon
porte : bono eventui. aponia. C. F. montana. fiacerdos
divar. augufiar. col. Aug.fir. editis. ob honorem fiacerd,
circenfibus. Pline rapporte qu'à Rome dans le capitu-
le il y avoit une ftatue de ce dieu , de la main de Pra-
xitèle ; & il ajoute qu'Euphranor , autre fameux fcul-
pteur Grec , fit une ftatue du bonus eventus, tome rel-
iémblante à la figure qu'on en trouve furies médail-
les. (6)
BONZES, Hip.mod.) philofophes&miniftresde
la religion chez les Japonois. Ils ont des univerlités
où ils enfeignent les feiences & les myfteres de leur
fefte ; & li l'on en croit un Jéfuite , auteur de Phif-
toire de l'Eglife du Japon , ils ont difputé avec autant
de force que de fubtilité contre nos plus favans mif-
fionnaires. Les auteurs font fort partagés fur ce qui
concerne leurs mœurs; les uns nous dépeignent les
bonnes comme des cyniques abandonnés aux plus in-
fâmes defordres; d'autres au contraire affûrent qu'ils
gardent la continence , vivent en commun, & qu'if
y a des couvens de tilles de leur ordre. Ilsreconnoif-
fent pour leur chef un certain Combadaxi , qui leur
enfeigna les premiers principes des arts & des lcien-
ces , & dont ils attendent la venue dans des millions
d'années ; car, à les en croire, il n'eft point mort, &
n'a fait que difparoitrc de deffus la terre. On don-
ne auffi le nom de bonnes aux prêtres de plulieurs
autres peuples des Indes orientales. (G)
* Un empereur de la famille des Tangs fît détruire
Tt
33°
BOR
une infinité de monafteres de bonnes , fur un princi-
pe qu'il tenoit de les ancêtres : c'eft que s'il y avoit
un homme qui ne labourât point , ou une femme qui
ne s'occupât point, il falloit que quelqu'un fouftnt le
froid & la faim dans l'empire. Voyei l'£fp. des lois ,
•tome II.
BOOPE , ( Hift. nat. ) voyei BOGUE.
* BOOPIS , ( Myth. ) furnom de Junon , formé de
Çcuç, bœuf, & de «4, «il. Junon fut furnommée la
déifie aux yeux de bœuf, à caufe de fes grands yeux.
* BOOT , ( Géog. ) île d'Ecoffe dans fa partie mé-
ridionale, dans le golfe de Cluyd, entre le pays d'Ar-
gyle & l'île d'Aran.
* Boot,£ m. ( Hi(l. mod. ) on nomme ainfi en
Efpagne un tonnelet à mettre du vin : il eft fort en
ufage pour tranfporter les vins de Xérès.
BOPFINGEN, ( Géog. ) petite ville libre Se im-
périale d'Allemagne dans la Souabe, fur l'Eger. Lon.
zy. 30. lat.48. Si.
■ BOPPART, ( Géog. ) petite ville d'Allemagne du
cercle du bas Rhin , dans l'archevêché de Trêves ,
autrefois impériale, mais unie à l'élettorat de Trêves
en 1494. Elle eft au pié d'une colline fur les bords
du Rhin , près des monts de Pedernach , à 3 lieues
de Coblentz. Long. z5. 10. lat. 5o. 19.
BOQUELLE , f. f. ( Commerce. ) c'ell le nom que
les peuples d'Egypte donnent au daller ou écu de
Holiande. Voye\ Daller.
* BOQUETEAU , f. m. ( terme d'Eaux & forêts.)
c'eft un petit canton de bois planté en futaie ou en
taillis , qui n'excède pas cinquante arpens. Il eft
moindre que le buifîbn , Se le buiffon moindre que la
forêt. Foye{ BUISSON. Voye^ auffi Forest.
* BOQUILLONS, f. m. ouvriers occupés dans les
coupes des bois deftinéspour les falines. Ils font fou-
rnis à l'infpeclion des veintres. foye^ Veintre.
BORA , ( Géog. ) petite rivière de la Miihie , qui
fe jette dans l'Elbe , près de Pirna.
* BORACHERA , {Hift. nat.) c'eft un arbre des
Indes occidentales , qui porte des fleurs aufîi blan-
ches que des lis , mais un peu plus grandes , & d'une
odeur très-agréable. On dit qu'en exprimant le lue
de fes feuilles , Se le mêlant avec de l'eau , il en ré-
fuite un breuvage qui a allez de force pour enivrer.
BORAMETS, ou BORANETZ. Voyti Agnus
SCYTHICUS.
BORAU , ( Géog. ) petite ville de Siléfie.
BORAX , {Hift. nat. & Chimie. ) c'eft un fel ou*
fubftance foffile , affez reffemblante à l'alun ; il eft
blanc , tranfparent , compofé de cryftaux à 6 cotés
tronqués par les deux bouts , qui ne font ni fi longs
ni iî réguliers que ceux du nitre , ni fi ferrés que ceux
des autres fels. Le goût en eft d'abord allez doux :
mais il devient acre , falin , Se nitreux. L'odeur que
donne le borax eft affez fuave au commencement :
mais elle devient enfuite alkaline Se urineufe ; c'eft
ce qui a donné lieu de le ranger au nombre des fels
alkalis. Il ne fe diffout que dans de l'eau très-chaude.
Les anciens ne paroiffent avoir eu qu'une con-
noiffance très-imparfaite du borax ; ils l'ont confon-
du avec le nitre que les Grecs appelloient àçpor'rrpw ,
comme on peut le voir dans Pline Se dans Diofcori-
de : mais il y a plufieurs lîecles que ce fel eft connu
des Arabes qui l'ont nommé baurach , dont il eft ailé
de voir que le mot borax eft dérivé. Agricola l'ap-
pelle chryfocolla , en quoi il a été fuivi par beaucoup
d'auteurs ; nom qui paroît lui avoir été donné à caufe
de l'ufage qu'on en tait pour fouder l'or. C'eft mal-
à-propos qu'on a confondu le borax , qui eft un fel
naturel avec le nitre qui n'eft que factice ; & M.
Georiroi a très-bien prouvé qu'ii eft différent de la
chrvfocolle des anciens. Voye{ les Mémoires de VA-
cadêmie des Sciences , année IJ3~ » P- ^49- Le peu
de lumière qu'on a eu fur la formation de ce fel a fuit
BOR
croire à quelques auteurs qu'il n'étoit point une pro*
duclion de la nature , mais de l'art : cependant la
meilleure divifion qu'on en puifîe donner , c'eft en
borax crud ou groffler, & en borax pur ou raffiné. On
dit que la première efpece fe trouve dans les mines
d'or Se d'argent des Indes , de la Tartarie , de la Per-
le , Se fur-tout dans l'île de Ccylan , d'où les Anglois
Se les Hollandois en apportent beaucoup. Il y en a
de deux fortes ; l'une eft grafïe Se rougeâtre , l'autre
eft grife Se verdâtre , Se fe durcit à l'air. Ce borax
qui fe trouve brut aux Indes , fe purifie en Europe ;
on donne la préférence à celui qui a été raffiné par
les Vénitiens qui en faifoient autrefois un gi and dé-
bit : tout le lecret conlîftoit , dit-on , à faire calciner
le borax , à le faire cuire Se fondre dans l'eau avec
un peu de chaux vive ; on le filtroit enfuite , Se on
en faifoit des cryftaux attachés à des mèches de co-
ton comme le lucre candi. Les Hollandois ont aufîi
une manière de le raffiner , mais ils en font myftere;
c'eft d'eux que nous tirons celui dont nous nous fer-
vons.
Il eft bien furprenant que depuis qu'il y a un com-
merce auffi intime entre l'Europe & les Indes, on ait-
négligé des recherches auffi faciles que celles qui au-
roient pu nous mettre au fait de ce qu'on doit penfer
fur la formation d'un fel auffi néceflaire qu'eft le
borax.
Ceux qui ont regardé le borax comme un fel fac-
tice , ont prétendu qu'on le faifoit avec du nitre, du
fel ammoniac Se du fel marin : d'autres ont voulu
que ce fût avec de l'urine de jeunes garçons buvans
vin , Se du nitre.
Voici, fuivant Agricola de Re metall. lib.XII. la
façon dont on fait le borax en Egypte : « Ce dont on
» fait le nitre , n'eft autre choie que de l'eau douce,
» filtrée par des terres nitreufes , à laquelle on mêle
» une leffive de cendres de bois de chêne ; on reçoit
» l'une Se l'autre dans des baffins quarrés de cuivre,
» où on les fait cuire jufqu'à ce que le nitre s'epaif-
» lifte. Le nitre , tant naturel que factice, mêlé dans
» des cuves avec de l'urine d'un enfant qui n'a pas
» encore l'âge de puberté, fe cuit dans les mêmes
» baffins de cuivre. Après qu'il a été fuffifamment
» cuit , on le verfe dans des cuves où l'on a mis des
» fils de cuivre, Se en s'y attachant il fe fige Se prend
» une confiftance. C'eftainfi, continue cet auteur,
» que fe fait la chryfocolle , à qui nous donnons le
» nom de borax , qui eft Arabe ».
Avant de faire ufage du borax purifié, il eft à pro-
pos d'examiner s'il n'eft point mêlé à de l'alun : en
effet , on fe fert quelquefois de cette matière pour le
falfifier ; celui qui eft dans ce cas , n'eft pas fi blanc
ni li léger , Se n'enfle point au feu comme celui qui
eft pur ; on peut auffi en reconnoître la bonté à fa
clarté Se à fa traniparence ; en le portant fur la lan-
gue , il ne doit avoir que très-peu de goût après le
raffinage.
Le borax eft d'un grand ufage , & a beaucoup de
propriétés dans la Chimie Se la Métallurgie : lors-
qu'on le met fur le feu , il enfle d'abord très-conlidé-
rablernent, Se donne une écume blanche S: légère ;
il devient enfuite très-fluide ; Se lorf qu'il eft refroidi ,
il forme une efpece de verre allez beau : il rend vi-
trifiables toutes les terres auxquelles il eft mêlé.
Mais fa propriété principale eft de faciliter infini-
ment la fonte de tous les métaux : cependant avant
de s'en fervir pour cet ufage , il eft important de com-
mencer par le faire fondre à part dans un creufet
dont il n'occupe tout au plus que le quart, parce
qu'il s'élève fort haut ; il faut auffi ne faire qu'un feu
modéré tout autour , Se le retirer auffi-tôt qu'on n'en-
tend plus de bouillonnement ; car li on pouffoit trop
le feu , il fe vitrifierait Se feroit moins propre aux dit
férens ufages auxquels on l'employé. Lorfque les me-
B O R
taux font divifés en particules délices , féparées , &
éloignées les unes des autres , le borax eft un véhicu-
le très-propre pour les réunir , les rapprocher , & les
raffembler, pour ne former qu'une même maffe ou
régule ; la moindre quantité de faletés ou de matiè-
res hétérogènes eft capable d'empêcher cet effet.
Pour remédier donc à cet inconvénient , on em-
ployé le borax ; ce fel facilite la réunion des parties
métalliques , les fait tomber au fond du creuiet , ôt
vitrifie les feories & les faletés qui s'y trouvent, en
les pouffant vers la furface. Un autre avantage que
les métaux en fonte retirent du borax , c'eft qu'il les
environne d'une efpece de verre mince & délié qui
les défend contre les impreffions de l'air & du feu :
joignez à cela qu'il difpenfe de faire beaucoup de
feu, & qu'il ne fe mêle point aux métaux. C'eft pour
cette raiibn qu'il eft d'un fi grand ufage pour braier
& fouder tous les métaux , tels que l'or , l'argent , le
cuivre , & le fer.
Il eft à propos d'enduire de borax les creufets &
vaiffeaux deftinés à fondre les métaux précieux ,
comme l'or &c l'argent ; parce qu'au moyen de cette
précaution , on les en retire plus ailément & avec
moins de perte après la fonte.
Le borax a la propriété de pâlir l'or ; c'eft pour-
quoi lorfqu'on s'en fert pour la fonte de ce métal , il
faut y joindre ou du nitre ou du fel ammoniac ; ces
fels maintiennent l'or dans fa couleur naturelle : mais
il faut prendre garde de ne les point mettre tous
deux , parce qu'il arriveroit détonation.
M. Lemery le jeune a donné plufieurs mémoires
curieux fur le borax , qu'on peut voir dans les Mémoi-
res de r Académie royale des Sciences , an, iJzS , item
année IJZÇ) & IJ3Z.
On fait ufage du borax dans la Médecine ; on le
regarde comme très-propre à divifer & atténuer les
humeurs vilqucides & pituiteufes , & fort bon dans
les maladies qui font caufées par l'épaifiiffement des
humeurs : il eft apéritif, diurétique , ôt abftergent ;
il agit fans caufer ni corrofion ni inflammation : on
peut le donner depuis 5 grains jufqu'à un demi-feru-
pule , en poudre , dans du vin , dans un œuf, ou dans
quelqu'autre véhicule.
Le borax entre dans la compofition du fel fédatif
de Homberg. Voye-^ Sel sédatif.
Mais on le regarde fur-tout comme un très-puif-
fant emménagogue, & comme un excellent remède
pour les accidens qui accompagnent les accouche-
mens : mais il devient plus efficace fi on le mêle avec
la myrrhe , le fafran , la canelle , des fels alkalis , ou
ce qui vaut encore mieux , avec le nitre , le cinna-
bre , ou d'autres remèdes antifpaimodiques.
Suivant M. Lemery , la folution du caput mortuum
du borax pouffe fortement les urines , &c fait fortir la
gravelle. Il eft très-ftyptique & aftringent ; on le met
auffi au nombre des cofmétiques ; on lui attribue la
qualité de blanchir le teint , & de faire difparoître
les taches de rouflèur. La poudre emménagogue de
Tuilerie fait en prenant de borax de Venife 1 <j grains,
myrrhe 1 z grains , fafran 3 grains , huile de clous
de girofle une goutte : mêlez & faites une poudre
qui eft bonne pour provoquer les règles. ( — )
BORB A, (Géog.) petite ville fortifiée en Portugal,
entre Eftremos & Elvas , dans un pays très-fertile.
BORBAO , ( Géog. ) rivière du Piémont, qui fe
jette dans le Tanaro , près d'Afti.
BORBONIA, genre de plante dont le nom a été
dérivé de Gafton de France , prince du iang de la
Maifon de Bourbon. La fleur des plantes de ce genre
eft monopétale , faite en forme de cloche ou en go-
det, & découpée. Il s'élève du nombril de cette fleur
un piftil qui devient dans la fuite un truit reffem-
blant à un gland charnu & divifé au dedans en deux
lobes. Le bas de la fleur devient le calice du fruit ,
Tome II,
B O R
331
8c ce calice eft charnu & reffemble à un capuchon.
Plumier, Nova plant. Amer, gêner. V. Plante. (/)
BORBORIGME, 1. m. ( Médecine. ) bruit excité
dans le ventre par des vents. Cet effet eft produit par
l'explolion de l'air contenu dans les alimens, qui ve-
nant à fe raréfier par la chaleur des organes de la di-
geftion, tend à s'échapper, & fait effort contre les
parois des vifeeres. Gahen dit que c'eft un bruit de
vents fourds & longs , accompagné d'une humidité
modérée.- qui fe fait entendre en descendant vers les
parties inférieures.
Tout ce qui peut occafionner des vents & des co-
liques, eft caufe du borborigme. Dans les cpnftipa-
tions le borborigme annonce affez ordinairement une
évacuation prochaine. (AT)
BORBORITES, f. m. pi. (Hifl. eccléf.)kàe de
Gnoftiques, dans le 11. fiecle, laquelle, outre les er-
reurs & le libertinage commun à tous les hérétiques
connus fous ce nom , nioit encore, félon Philaftrius,
la réalité d'un jugement dernier. S. Epiphan. héref.
23. & 26. S. Auguft. des héref. c. 5. BarOnius ad ann,
Chr. izq. (G)
. BOR.CH , (Géog.) ville du duché deMagdebourg,
à deux lieues de Magdebourg, fur l'Elbe, apparte-
nante au roi de Pruffe.
BORCHHOLM , ( Géog. ) petite ville avec châ-
teau , dans la Livonie. C'étoit autrefois la réfidence
de l'évêque de Revel.
Borchholm , (Géog.) fortereffe & port de l'île
d'Oeland, dans la mer Baltique , à la couionne de
Suéde.
BORCHLOEN, (Géog.) ville de l'évêché de Liè-
ge , dans la Hasbaye, fur le Jecker.
BORCKELOO , ( Géog. ) place forte des Provin-
ces-Unies au comté de Zutphen , & à 4 lieues de la
ville de ce nom , fur la rivière de Borckel. Long. z^f.
6. lat. 5z. l5.
BORCKEN , ( Géog. ) petite ville de la baffe-
Heffe , fur la rivière de Selvwalm.
Borcken , (Géog.) petite ville de l'évêché de
Munfter , fur l'Aa , près de Wefel.
BORCKFORT, (Géog.) fortereffe & petite ville
du comté d'Oldenbourg.
BORD , f. m. (Gramm.) fe dit communément des
parties les plus éloignées du milieu d'une étendue li-
mitée. Cette définition eft prefque générale ; & c'eft
en ce fens qu'on dit le bord d'un pré , d'une table ,
d'un lit, d'une rivière, &c.
Bord, on entend ordinairement par le mot bordy
le vaifleau même. On dit retourner à bord , fortir du
bord, pour dire retourner au vaijfeau , fortir du vaijfeau;
venir à bord , c'eft fe rendre au vaifleau.
Renverfer, tourner, changer le bord ; c'eft revirer j
&C porter le cap fur un autre air de vent.
Rendre le bord, c'eft- à -dire, venir mouiller, ou
donner fond dans quelque rade ou quelque port.
Bord fur bord, courir bord fur bord ; c'eft louvoyer,
& gouverner tantôt kfribord, tantôt kbasbord: lorf-
que le vent eft contraire , & qu'il ne permet pas de
porter à route, on chicane le vent, & on court fur
plufieurs routes , pour approcher du lieu 011 l'on
veut aller, ou pour ne s'abbatre pas, & ne s'éloi-
gner que le moins qu'on peut.
Faire un bord, faire une bordée ; c'eft faire une rou»
te, foit à basbord , foit kfribord.
Courir même bord que l'ennemi; tenir même bord y
c'efl virer à Jlribord &C kbasbord, félon que l'ennemi
y a viré, & porter fur le même rumb.
Mettre à l'autre bord; virer, changer de bord.
Tenir bord fur bord, c'eft-à-dire, courir d'un côté
ou d'un autre au plus près de vent , foit pour atten-
dre un vaifleau qui eft de l'arriére, foit pour s'entre-
tenir dans un parafe. (Z)
Tt ij
33* B O R
De bord à tord; cette expreffion veut dire autant
fur un côté du vaiffeau que fur l'autre , & lignifie
encore dt part & d'autre , de la droite route ; ce qui
déligne la même choie. Lorfque l'on dit , par exem-
ple , que Ton peut naviger ou faire des bordées lur on-
ze points de compas de bord abord, cela lignifie qu'on
peut le lervir des onze airs de vent qui ibnt hflribord,
ou à l'un des côtés du vent de la route ; & encore des
onze autres airs de vent qui font à basbord, ou à l'au-
tre côté du même vent de la route. Comme fi le lieu
de la route eft à l'oueft , le vent d'eft lëra le vent de
la droite route : mais l'on peut lé lervir de vingt-deux
rumbs d« vents différens pour porter à l'oueft , ou
s'en approcher ; favoir des onze airs de vent qui lont
depuis i'eil juiqu'au fud-oueft, quart de fud, &des
onze autres airs de vent qui lont depuis Feft juiqu'au
nord-oueft. Ainfi c'eft naviger 6c gouverner iur onze
airs de vent de bord à bord.
Bord à bord, deux vaiffeaux qui font bord à bord;
c'eft-à dire , qu'ils lont prêts l'un de l'autre de l'avant
en arrière.
Un bord qui allonge , c'eft-à-dire, que la bordée
que l'on court fert à la route , quoique le vent foit
contraire.
Bon bord, faire un bon bord; c'eft-à-dire , que l'on
a gagné ou avancé à fa route , étant au plus près du
vent.
Bord à terre , bord au large ; on employé ce terme ,
lorfqu'on parle d'un vaiffeau qui court à la mer , &
qui recourt à terre , ou de la mer à terre , & de la
terre à la mer.
Paffe du monde fur bord ; c'eft un commandement
qui le fait à l'équipage, pour faire paffer des mate-
lots des deux côtés de l'échelle , pour recevoir ceux
qui veulent entrer ou fortir du vailfeau. Ce comman-
dement ne fe fait que pour les officiers , 6c pour ceux
à qui on veut rendre des honneurs.
Bas bord, haut bord; on dit un vaiffeau de haut bord,
on dit aufîi un vaijjeau de bas bord, Voye^ NavIRE &
Vaisseau.
Bord de la mer, c'eft le rivage ou les premières ter-
res qui bordent la mer.
Bord , Bordage ; ce font les planches qu'on em-
ploie à border un vaiffeau.
Franc bord , ce font les bordages qui couvrent les
membres du vaiffeau. Ce mot le prend auffi en par-
ticulier pour le bordage, depuis le bas des fleuves jus-
qu'au haut du vaiffeau. (Z)
Bord de baffin, en Architecture, c'eft la tablette ou
le profil de pierre ou de marbre , ou le cordon de ga-
fon ou de rocaille , qui pôle fur le petit mur, ou cir-
culaire , ou quarré , ou à pans d'un baffin d'eau. (P)
BORDS DENTELÉS, {Rubannerie-Tiffuterie.} elt la
même chofe que dent de rat. Voye^ Dent de rat.
Bord, Ruban, ou Galon, qu'on met aux ex-
trémités des chapeaux , des juppes , & fur les coutu-
res des habits , &c. On fabrique des bords de différen-
te largeur, & de toute forte de matière , comme or,
argent , foie , fil , &c.
On fait à Amiens quantité de bords de laine ; on en
compte de trois fortes : l'un qu'on appelle petite bor-
dure, dont la chaîne doit être compoiée de vingt-
lept fils , & la pièce doit contenir vingt-quatre aunes :
l'autre dont la chaîne elt de trente-trois fils, & la
pièce de vingt-quatre aunes , fe nomme bord & demi;
& le troifieme qui doit avoir trente-fix fils à la chaî-
ne , & trente-fix aunes à la pièce , eft appelle bord à
dentelle. Voye^ ROULEAU DE LAINE.
Bord , en terme de Vannier, c'eft un cordon d'ofier,
plus ou moins gros félon la pièce qu'il termine par
en-haut, & qu'il rend plus folide.
Bord, en terme de Fondeur di cloche , eft la plus
grande épaiffeur qu'elle ait, fur laquelle frappe le bat-
tant. Foyei l'article FONTE dis cloches , 6Ï hfig. I.
B O R
Plan, de la fonderie des cloches. La troifieme partie du
bord s'appelle corps. Voyc^ CORPS.
Bord de manchon, en Pelleterie ; c'eft une fournira
que l'on fait avec la peau d'un animal, aux deux
bouts des manchons. Voye^ Manchon.
Bord de front , terme de Perruquier; c'eft le nom
que ces ouvriers donnent aux treffes qui fe placent
fur le bord de la perruque qui touche au front, & ré-
gnent depuis une des tempes jufqu'à l'autre.
BORDAGE, BORDAGES, FRANCBORD ,
FRANCBORDAGE, en Marine; ces mots font fy-
nonymes. On nomme ainli le revêtement de plan-
ches qui couvrent le corps du vaiffeau par dehors ,
depuis le gabord juiqu'au plat-bord. Quelques-uns
l'appellent le franebordage , pour le diftinguer du bor-
dage intérieur qui s'appelle ferrage , ferres , ou vaigres.
Les Charpentiers appellent auffi bordages les planches
qu'ils employent. On dit bordage de tant de pouces ,
par exemple, de quatre pouces, c'eft-à-dire, qu'il a
quatre pouces d'épaiffeur. Quelques-uns prétendent
que i'épaiffeur du franebordage le doit régler par l'é-
pailfeur de l'étrave , & qu'on lui doit donner le quart
de cette épaiffeur 6c même un peu plus.
La largeur des planches du franebordage eft le plus
louvcnt de 18 , 20, ou 22 pouces.
Le bordage de l'arcafle peut être d'un tiers plus
mince que celui des côtés. Lorfqu'il s'agit des plus
grands vaiffeaux pour lefquels il faut des bordages
plus épais, 6c par conféquent plus difficiles à plier,
on tâche de le parler de feu en tout ou en partie ;
c'eft-à-dire , de n'avoir pas befoin de les chauffer &
de les plier beaucoup: & pour cet effet, on pi end
des poutres qu'on choifit fort unies, & on les feie
en courbe entier lur des modèles , ou en demi-cour-
be; & en ce cas, on les chauffe un peu pour ache-
ver de les faire courber. Voy. Marine, PI. VLfg.31.
le deffein d'un bordage.
Il faut que les bordages Se les cintres qu'on deftine
pour un vaiffeau , foient pris de quatre à fix pouces
plus longs que leur jufte mefure, même en y com-
prenant leur rondeur, ou bien ils fe trouveront trop
courts. (Z)
Bordage de fond. Les conftrufteurs ne con-
viennent pas également de ce qu'on doit entendre
par bordages de fond : les uns comprennent lous ce
mot tous les bordages depuis la quille juiqu'au premier
bordage des fleurs , & par conféquent les gabords &
les ribords ; fouvent on n'entend que les bordages de-
puis les ribords juiqu'au premier bordage des fleurs :
d'autres confondent auffi les gabords & les ribords ,
en prenant l'un 6c l'autre mot pour les deux premiè-
res planches qui joignent la quille par les deux cô-
tés ; au lieu qu'il y a des charpentiers qui les diftin-
guent , nommant ces deux premières planches feu-
lement gabords ; & les deux autres premières planches
qui fuivent , c'eft-à-dire une de chaque côté après les
gabords , ils les nomment ribords. Voy. Marine , PI. V.
fig. 1. n°. 16 z. la place de ces bordages.
Bordage des fleurs ; ce font les planches
qu'on employé à border les fleurs du vaiffeau , & qui
en font la rondeur dans les côtés , depuis le fond de
cale jufque vers la plus baffe préceinte. Cette ron-
deur contribue beaucoup à faire flotter le vaiffeau ;
elle fert à le faire relever plus aifément lorfqu'il vient
à toucher ; & elle fait qu'il ne s'endommage pas fi
facilement qu'il feroit , fi le bas de fes côtes étoit
plus quarré.
On employé dans les fleurs d'un vaiffeau trois ou
quatre pièces de bordage , ou même plus , félon la
grandeur du navire , & félon la rondeur qu'on leur
veut donner.
BORDAGE d\ntre les préceintes ou couples ; ce font
les deux pièces de bordage qu'on met entre chaque
préceinte: elles s'appellent auffi fermetures oufermu-
B O R
rts. Voye^ PL VI. n°. 32. la figure de ce bordage.
On donne aux bordages d'entre les préceintes une lar-
geur convenable à la grandeur du vaiffeau : ceux qui
font entre les deux plus baffes préceintes , doivent être
proportionnés , enlorte que les dalots y puiffent être
commodément percés , & qu'ils le rencontrent jufte
au-deffous de la faconde préceinte.'
Les entre-fabords font proportionnes à la largeur
qu'on donne aux fabords. Les bordages a" entre les pré-
ceintes qui ibnt au-deffus des iabords , doivent aulîi
avoir leur julte proportion pour y percer les dalots du
haut pont. Il faut remarquer qu'à lapréceintequi eft au-
deffus des fabords , on commence à diminuer l'épaif-
feur des bordages , & qu'on continue jufqu'au haut.
On donne le plus fouvent aux fermures ou couples
d'entre les préceintes , la moitié de 1 épaiffeur des pré-
ceintes ; cependant on change cette difpolition , félon
qu'on le juge à propos , par rapport aux proportions
du bâtiment entier : mais à l'égard de leur largeur ou
hauteur , il n'y a point de règle à donner , que de
prendre bien garde que toutes les firmures foient fi
bien proportionnées que les fabords & les dalots puif-
fent s'y placer commodément & d'une manière qui
foit agréable ; & pour cet effet on les doit tenir un
peu plus étroites vers l'avant & vers l'arriére qu'au
milieu. Au refte comme on ne les préfente point, &
qu'il faut les dreffer toutes prêtes par la règle feule-
ment , il y faut être fort exact , & prendre foin qu'il
n'y ait point de défauts.
BORDAGES d'entre les deux préceintes du premier
rang, ou plus baffes préceintes. Voye^ PRECEINTE.
BORDAGES des fabords , fermures des fabords ; ce
font tous les bordages d'entre les deux préceintes , oii
les fabords font percés.
BORDAGES d'entre les fabords de la première & de la
féconde batterie. Voye^ PI. V.Jig. i. n°. IJl. & IJ2.
BORDAGE des acajlillages ou efquain , quein , qlin.
Voye^ ESQUAIN.
Premier bordage de l' efquain; c'eft le bordage qui fe
pofe fur la liffe de vibord , pour commencer les acaf-
tillages : il eft plus épais que le relie de l'efquain.
Voye^ ce bordage PI. VI. n°. JJ.
BORDAGES pour recouvrir les ponts ; voye^ la PI.
VI. n°. 34. & J3. la fig. de ces bordages.
BORDAGES du premier pont ; voye{ PI. V. fig. 1.
n\ y 8.
BORDAGES du fécond pont ; PI. V.fig. 1. n°. iz5.
BORDAGES des gaillards ; PI. V.fig. 1 . n°. 146.
BORDAGES du vaigrage ; voye7_ PI. IV. fig. I. n°.
141.
BORDAGES du vaigrage entre deux ponts ; voy. PI.
IV.fig.i.n\ny.
BORDAIER , ( Mar. ) quelques-uns difent borde-
ger ; c'eft faire ou courir des bordées, c'eft- à -dire,
gouverner tantôt d'un côté , tantôt d'un autre , lorf-
que le vent ne permet pas de porter à route. ( Z )
BORD AILLE , f. f. ternie de rivière , fe dit de la par-
tie d'un bateau foncet, voifine des rebords.
* BORDAT, f. m. ( Commerce. ) petite étoffe ou
tiffu étroit , qui fe fabrique en quelques lieux de l'E-
gypte , fur-tout au Caire , à Damiette , & à Alexan-
drie.
BORDE les avirons, ( Marine.) c'eft-à-dirc , mets
les avirons en état pour fc préparer à ramer au na-
ser-(zX
BORDÉ , adj. corps bordés , corporafimbriata , en
Anatomie, eft le nom d'un petit rebord collatéral,
mince & plat , comme une cfpece de bandelette , que
l'on remarque aux côtés externes des piliers poilé-
rieurs de la voûte à trois piliers. Voye^ Voûte. {V)
BORDÉ , en terme de Blafon , fe dit des croix , des
bandes , des gonfanons , Se autres choies qui ont des
bords de differens émaux.
Thomas d'Embri, d'or à la bande d'or bordée &
B O R
333
dentelée de gueules. ( V)
BORDÉE , f. f. ( Marine. ) c'eft le cours d'un vaif-
feau , ou la route qu'il fait fur une aire de vent lorfqu'il
a changé ou reviré de bord , jufqu'à ce qu'il change
de bord & qu'il revire de nouveau. Lorlque le vent
ellcontraire à la route qu'on veut faire, on fait des
A*lfo pour s'élever & s'approcher le plus près du
vent que l'on peut. Voye^ Bord sur bord & De
BORDA BORD.
Faire diverfes bordées, courir plufuurs bordées, c'eft-
à-dire virer & revirer fouvent.
Courir à la même bordée , c'eft-à-dire courir encore
du même côté que l'on a couru : c'eft aufïï courir à
la même aire de vent qu'un autre vaiffeau.
Venir à fa bordée d'un para ge à un autre , c'eft-â-
dire y venir à la bouline fans changer les voiles &
fans revirer.
^ Courir à petites bordées, c'eft ne pas courir loin d'un
côté & d'autre.
On dit : bonne bordée , mauvaife bordée.
Faire la grande bordée ; c'eft lorfqu'étant dans une
rade on y veut faire le quart , comme fi on étoit à
la mer.
Faire la petite bordée ; c'eft lorfque dans une rade
on partage les quarts en deux parties , pour faire le
fervice ou le quart.
Bordée de canon, (Marine. ) c'eft l'artillerie qui
eft dans les fabords de l'un ou de l'autre côté.
Envoyer la bordée , donner la bordée; c'eft tirer fur
un autre vaiffeau tous les canons qui font dans l'un
ou l'antre côté du navire. ( Z )
BORDELAGE , f. m. terme de Droit coûtumier, eft
une forte de tenure en roture , ufuée en quelques
coutumes , & iingulierement dans celle de Nivernois,
à des charges & conditions particulières.
Coquille dit que le terme de bordelage vient de bor-
de ou borderie , ancien mot françois qui fignifîe un
domaine aux champs , deftiné pour le ménage , labou-
rage , & culture.
Les conditions du bordelage font , i°. que faute du
payement de la redevance , le feigneur peut rentrer
dans l'héritage par droit de commilé , en le faifant or-
donner en juftice : i°. que le tenancier ne peut dé-
membrer les chofes qu'il tient en bordelage , à peine
de commife : 30. qu'il doit entretenir l'héritage en
bon & fuffifânt état: 40. que les collatéraux du te-
nancier ne peuvent lui fuccéder , s'ils n'étoient com-
muns avec le défunt de communauté coûtumiere ,
(voyei Communauté coûtumiere); faute de
laquelle condition , c'eft le feigneur qui lui fuccede :
50. que fi le détenteur vend l'héritage , le feigneur a
le choix de le retenir en rembourfant l'acquéreur , ou
de prendre la moitié du prix porté par le contrat. (//)
BORDELONGO , ( Géog. ) ville & royaume fur
le golfe de Siam , avec un bon port.
BORDELIERE , f. f. ballems, (Hijl. nat. Ichthyol.)
•poifton qui a la tête petite , des os rudes en place de
dents , et le palais charnu ians qu'il y ait de lanejue :
mais il fe trouve au milieu du palais un os , & plus
bas deux autres os découpés en fine d"un côté. C'eft
par la rencontre de ces os, que la bordeliere broyé les
herbes dont elle fe nourrit. Elle a deux nageoires
près des ouies , deux autres au milieu du ventre , une
autre qui s'étend depuis l'anus jufqu'à la queue , 6c
une autre fur le dos. Les dernières nageoires & la
queue font rougeâtres , comme dans les perches de
rivière : celle du dos eft noire ; il y a un trait courbe
qui s'étend depuis les ouies jufqu'à la queue : les ouies
font au nombre de quatre de chaque côté. On adon-
né à ce poiffon le nom de bordeliere à Lyon & en Sa-
voie, parce qu'il fuit toujours le bord des lacs , ou
on le prend. Il eft allez femblable à la brème , quoi-
qu'il foit plus petit , & qu'il n'ait pas des écailles à
proportion li grandes. On peut le comparer à la car-
334
BOR
pe pour fa façon de vivre. Rondelet. Foye*_ POIS-
SON. (/)
BORDEMENT , f. m. terme de Peinture en émail :
pour employer les émaux clairs , on les broyé feule-
ment avec de l'eau ; car ils ne peuvent pas fouffrir
l 'huile comme les émaux épais ; on les couche y^at ,
bordés du métal fur lequel on les met. On fai^tei-
quefois des ouvrages qui font tout en champ d'émail
& fans bordement ; ce qui eft affez difficile, à caufe
-que les émaux clairs en fe parfondant , fe mêlent en-
lemble , & que les couleurs fe confondent , principa-
lement lorfque les pièces font petites. Voye{ Par-
FONDRE. (R)
* BORDER, v. au. en général , c'eft garnir les
-extrémités de quelque chofe que ce foit , d'une autre
choie accidentelle, qui orne , conferve , ou fortifie la
chofe bordée,
Ainfi , en terme de PJche , border un filet , c'eft atta-
cher de trois pouces en trois pouces avec du fil , une
corde autour du filet pour le rendre plus tort.
BORDER , en terme de Jardinage, un parterre, une
plate-bande , une planche de potager ; c'eft l'entourer
de buis, de ftaticée , de thym , de lavande , de roma-
rin , & autres plantes. ( K )
BORDER, en terme de Boijfelier ; c'eft garnir d'un
bord d'ofier les extrémités de chaque pièce de boiffe-
lerie en-deffus du corps , ou vers le milieu de cette
pièce , pour la rendre plus ferme & plus folide.
Border , en terme de Vannerie; c'eft finir & termi-
ner par un cordon de plufieurs brins d'oûer une pièce
de mandrerie.
Border la haie, en Art militaire, eft un mou-
vement par lequel on difpofe plufieurs rangs ou plu-
fieurs files , fur une ou plufieurs lignes droites mar-
quées ; & l'on dit border la haie , parce qu'on fe fert
véritablement de cette évolution pour difpofer une
troupe le long d'une haie , d'un retranchement, d'une
rue, ou de quelqu'autre chemin. Voy. Rang, File.
Il y a plufieurs manières de border la haie. La plus
ordinaire eft qu'au commandement de border la haie ,
chaque rang ou chaque file fait en particulier un quart
de converfion du côté qu'il eft dit ; ce qui réduit tous
les rangs en une file , ou toutes les files en un feul
rang , que l'on appelle haie. Bottée , Exercice de l'in-
fanterie. (Q)
Border un vaiffeau, {Marine.*) c'eft couvrir les
membres de bordages.
On dit border le tillac, Facafillage, le vibord.
Border en caravelle ; c'eft border à l'ordinaire , de
forte que les bordages fe touchent quarrément à côté
l'un de l'autre.
Border à quein ; c'eft border de forte que l'extrémité
d'un bordage paffe fur l'autre. Voye^ Quein.
Border une voile, ( Marine ) c'eft l'étendre par
en bas en halant ou tirant les cordages appelles écou-
tes , pour prendre le vent.
Larguer la voile ou filer les écoutes , c'eft le contrai-
re de border.
Les voiles fupérieures font bordées par le bas aux
vergues inférieures.
Border une écoute , c'eft la tirer , ou haler , jufqu'à
ce. qu'on fafTe toucher le coin de la voile à un cer-
tain point.
Border les écoutes arrière , c'eft-à-dire haler les deux
écoutes de chaque voile , afin d'aller vent en poupe.
Border (artimon , c'eft haler l'écoute d'artimon à
toucher à une poulie qui eft mife fur le haut de l'ar-
riére du vaiffeau. On dit leulement border Y artimon ,
ou l'écoute d'artimon, & non les écoutes ; parce qu'il
n'y en a qu'une à cette voile qui ferve à la fois.
Border P artimon tout plat, border la m if ene tout plat,
c'eft en border les écoutes autant qu'il fe peut.
Borde les écoutes tout à plat , terme de commande-
ment. Border &. brajfer au vent> c'eft poux faire border
BOR
les écoutes & bràffcr les vergues, lorfque le vent recule.'
Borde la grande écoute ; borde la mifene , ou la haie au
plus près du vent ,• borde la civadiere ; borde le grand per-
roquet j borde le petit perroquet de mifene ou d'avant •
borde au vent ; borde fous le vent.
Tous ces commandemens le font pour faire border
les écoutes chacune en particulier ; quelques-uns di-
fent , borde l'écoute d'une telle voile.
La vergue de foule ne fert que pour border le perro*
quet par le bas.
Border un vaiffeau ; on fe fert quelquefois de cette
exprefïïon pour dire , fuivre un vaiffeau de côté pour
l'obferver & le reconnaître. (Z)
Border les avirons , {en terme de Batelier ) c'eft
mettre les avirons dans les tourets du bachot pour
nager , autrement dit ramer.
BORDEREAU , f. m. {terme de Finances ) eft un
état , une lifte ou un mémoire d'articles ou de fom-
mes tous portés fur une même colonne , pour en re-
fumer plus facilement le montant. ( H)
Bordereau , f. m. ( en termes de Commerce ) eft
un mémoire ou une note des efpeces que l'on donne
en payement , ou que l'on reçoit ou que l'on a dans
fa caille ; on dit en ce fens un bordereau d' efpeces ou
un bordereau de caiffe.
On appelle aufli bordereau de compte, l'extrait d'un
compte dans lequel on comprend toutes les lommes
tirées hors des lignes , foit de la recette foit de la
dépenfe, afin de connoître le total de l'une & de
l'autre , pour favoir s'il eft dû par le comptable , ou
fi on lui doit.
Les marchands négocians & banquiers ont un livre
de caiffe & de bordereaux , fur lequel ils portent toutes
les fortunes qu'ils reçoivent, & qu'ils payent jour-
nellement; ce livre eft du nombre de ceux qu'on ap-
pelle livres d'aides ou livres auxiliaires. Voye{ LlVRE
de Caisse & de Bordereaux.
On nomme auffî bordereau un petit livret que les
commis , fadeurs , garçons , & porteurs d'argent des
marchands , négocians tk banquiers , qui vont à la re-
cette par la ville , portent dans leur poche , & fur le-
quel ils écrivent à mefure qu'on leur fait quelque
payement , les dates des jours qu'ils ont reçu , les
noms de ceux qui ont payé , les fommes qui leur
ont été payées , & en quelles efpeces ou monnoie.
On appelle table du bordereau d'aunage , une table
compofée de. diverfes fractions de l'aune , fuivant
qu'elle eft différemment divifée , comparées aux par-
ties de la livre tournois de vingt fols. On trouve cette
table dans le Gendre & dans le Diclion. du commerce,
tom. l.pag. 1638. avec 1'ufage &: la pratique qu'on
en doit faire. {G)
BORDIER , f. m. ( terme de Coutumes ) par où l'on
entend les propriétaires qui ont des héritages fur les
bords des grands chemins. ( H)
BORDIER , f. m. {Marine) vaiffeau bordier , c'eft
celui qui a un côté plus fort que l'autre.
* BORDIGUE , f. f. ( Pèche ) c'eft ainfi qu'on
appelle un efpace retranché de roleaux & de cannes,
vers les bords de la mer , pour arrêter le poiffon.
Les bordigues fe font ordinairement fur les canaux ,
qui vont de la mer aux étangs falés ; & elles arrê-
tent le poiffon dans le paffage de l'une à l'autre.
BORDOYER , ( terme de Peinture en émail ) qui
exprime le mauvais effet que font les émaux clairs,
lorfqu 'étant employés fur de bas or , ils plombent &
deviennent louches ; enforte qu'une efpece de cou-
leur noire, comme de la fumée , obfcurcitla couleur
naturelle de L'émail , lui fait perdre beaucoup de fa
vivacité , & la bordoye , en fe rangeant tout autour,
comme fi c'étoit du plomb noir. Voye^ Peinture
en émail. {R)
* BORDURE, f. f. fe dit en général de tout
corps appliqué fur les extrémités d'un autre , foit
B O R
pour conferver ces extrémités , foit pour les orner,
foit pour les fortifier.
Bordure , f. f. ( en architecture} eff un profil en
relief" rond ou ovale , le plus fouvent taillé de lculp-
ture , qui renferme quelque tableau , bas-relief ou
panneau de compartiment ; on appelle cadres , les
bordures quarrées.
Bordure de pave; les Paveurs appellent ainfi
les deux rangs de pierre dure & ruftique , qui retien-
nent les bords du pavé d'une chauffée. (P)
Bordure en Èoijjellerie ; ce font des feuilles de
hêtre fort minces , portant environ fix pouces de
largeur ; on les appelle bordures , parce qu'elles fer-
vent à border les extrémités des féaux , boiffeaux ,
minots , &c.
Bordure, f. f. ( Corderie) tiffu de chanvre ou
fangle, large d'environ un pouce de roi , qui le fabri-
que par les Cordiers , & dont les Tapiffiers fe fer-
vent pour border les tentes , les tapifferies & autres
gros ouvrages.
BORDURE , ( en Jardinage} fe dit des plantes qui
entourent les planches d'un potager. Voye^ Border.
Bordure , ( en Peinture ) eff un ornement qui rè-
gne tout autour d'un tableau , d'une eftampe , &c
Une riche bordure , une bordure commune , une bor-
dure d'or bruni, d'or mat , &c. » Les bordures , dit M.
» l'abbé du Bos , jettent un nouvel éclat fur les cou-
» leurs , &c femblent en détachant les objets voifins ,
» réunir mieux entre elles les parties dont ils font
» compofés ». Réfl.fur la Peint. (R)
Bordure, ( en terme de Blajbn) eff une efpece
«le brifure en forme de paffement plat au bord de
l'écu , qu'elle environne tout autour en forme de
ceinture, & fert à distinguer différentes branches.
La largeur de la bordure doit être d'environ une
fixieme partie de l'écu.
La bordure fimple efr. celle qui eff toute d'une mê-
me couleur ou d'un même métal ; c'eff la première
brifure des puînés. Il y en a d'autres , componées ,
cantonnées , engrelées , endenties & chargées d'autres
pièces , qui lbnt des brifures différentes des puînés
île différens degrés.
Si la ligne qui conftitue la bordure eff droite , & la
bordure unie , comme on dit en terme de blafon , pour
lors on ne nomme que la couleur ou le métal de la
bordure , comme il porte de gueules à bordure d'or. Si la
bordure eff chargée de plantes ou de fleurs , on dit
qu'elle eff verdoyée de trejT.cs. Si elle eff d'hermine ,
de vaire , ou d'autre pelleterie , le terme d'art eff
bordée d'hermine.
BOREAL , adj. ( Phyfîa. ) fe dit en général de tout
ce qui a rapport au feptentrion ou au nord, d'où le
vent Borée fouffle. Ainfi on appelle l'hémifphere de
la terre qui répond au pôle arctique , hémifphere bo-
réal; on dit de même que la latitude boréale d'un lieu
eff de tant de degrés , pour marquer que ce lieu eff
dans l'hémifphere boréal à tant de degrés de diltan-
ce de Péquateur.
Cependant on fe fert aujourd'hui plus communé-
ment du mot feptcntrional ; & on a refervé le nom
de boréal pour le phénomène appelle aurore boréale.
Voyei Aurore Boréale.
BOREASMES , f. f. pi. fêtes inftituées en l'hon-
neur de Borée.
BORÉE , f. m. (Phyfq.) nom dérivé du Grec , Se
dont on fe fert communément pour lignifier le vent
de nord. Voye7^ Vent & NORD.
Les étymologiltes font venir ce mot du Grec fie»,
clamor , bruit ; ou déposa , efca, aliment ; foit parce
que l'on regardoit ce vent comme donnant de l'ap-
pétit , ou parce qu'on le croyoit bon pour les fruits
de la terre qui nous donnent la nourriture. D'autres
le dérivent de l'Hébreu , biojah , aliment , ou de bai.
tranquillité , ou de bor , pureté , ou de bar , blé. Les
B O R
335
anciens fuppofoient que ce vent fe faifoit fentir prin-
cipalement en Thrace. Pezron remarque qu'ancien-
nement borée fignifioit le vent de nord , & qu'il louffloit
chez ces peuples pendant le folftice d'été. Il ajoute
que ce mot vient du mot Celtique bore , matin , parce
que les premiers rayons du foleil fe font voir en été
au nord-eft, & qu'ordinairement c'eft de ce point
que ce vent commence à fourrier. (O )
BORETSCHO , (Géog.) ville forte, fur les limites
de la Hongrie & de la Tranfilvanie.
BOREZ , (Géog.) petite ville d'Efpagne, dans le
duché d'Arcos , en Andaloufie.
BORG , (Géog.) ville fituée dans l'île de Femern ,
dans la mer Baltique ; elle appartient au duc de Holf-
tein.
Borg , (Géog.) petite ville & port de l'île de Bar-
ra, en Écoffe.
BORGHETTO,(6"^.)il y a trois villes de ce
nom ; la première dans le Trentin , vers les frontiè-
res des états de Venife : la féconde dans le Véronois ,
fur les frontières du Mantoiian ; & la troifieme dans
le duché de Milan , fur le Lambro.
BORGHOLTZHAUSEN, (Géog.) petite ville du
comté de Ravensberg , appartenante au roi de Pruffe.
BORGI , (Géog.) ville d'Afrique , dans la province
de Zeb , en Numidie.
BORGO , (Géog.) ancienne ville de Suéde , fur le
golfe de Finlande , dans la province de Nylande , &
dans le territoire de Borgo. Long. 44. lat. 60. 34.
Borgo di S. Angelo, (Géog.) fortereffe dans
l'île de Malte.
Borgo forte , (Géog.) petite ville du duché de
Mantoue, fur le Pô. Long. z8. ij. lat. 41. 3j.
Borgo d'O s m a , (Géog.) ville de la Caffille
vieille , fur le Duero.
Borgo San Donnino , (Géog.) petite ville du
duché de Parme. Long. zj. 30. lat. 41. 3j.
Borgo di San Sepolcro, (Géog.) ville du
grand duché de Tofcane , dans le Florentin. Longit.
29. 5o. lat. 43. 35.
Borgo di Sessia, (Géog.) petite ville du duché
de Milan, quoiqu'appartenante aux ducs de Savoie.
Borgo di val di Taro , (Géog.) petite ville
fur le Taro, avec citadelle, fur les frontières de l'é-
tat de Gènes.
Borgo-franco , (Géog.) petite ville fur le Pô ,
dans le Milanois.
Borgo-manero , (Géog.) ville du Milanois,
près de Navarre.
BORJA , (Géog.) petite ville d'Efpagne, dans le
royaume d'Arragon. Long. 16. là. lat. 41. So-
BORIGUEN , (Géog.) c'elt le nom que les natu-
rels Amériquains donnoient à File qui a pris le nom
de Porto-rico , limée au levant de I île de S. Domin-
gue, & dont les Efpagnols font en poffeffion.
BORISSOW, (Géog.) ville & château du palati-
nat de Minsky , en Lithuame , fur la rivière Bererina.
BORKUM, (Géog.) petite' île de la mer d'Alle-
magne, près de la province de Groningue , de qui
elle dépend.
BORMIA & BORMIDA , ( Géog. ) ce font deux:
petites rivières d'Italie, qui prennent leur fource dans
le marquifat de Final , fe réunifient à Sezanc , & le
jettent dans le Tanaro.
BORMIO , {Géog.) ville agréable <Sc bien peu-
plée , au pays des Grilons ; c'elf la capitale du comté
de ce nom , elle elf lituée au confluent de l'Adda &
de l'Ifibllaccia. Long. zj. ~fà. lat. z6 . 4.1.
BORNA , (Géog.) petite ville de Saxe , près de
Lcipfick, fur la Wyra & la Pleifs.
BOP.NAGE (action de), terme de Palais , eff
celle par laquelle ceux qui ont des héritages voifins,
33<5
B O R
tenans & aboutiffans les uns aux autres, agîlTent l'un
contre l'autre pour s'obliger refpecTivement à les fé-
parer, en y plaçant de nouvelles bornes, ou en réta-
bliffant les anciennes , qui auroient été tranfpoi tées
ailleurs ou par cas fortuit, ou par le fait de l'une des
parties.
L'aftion de bornage eft mixte. Foyc{ Action.
On parvient à borner deux héritages par trois
movens : par les bornes qui ont été miles fur les con-
fins'pour fervir de limites , par titres & par témoins.
La manière de pratiquer ces deux dernières preuves
cil la même qu'en toute autre aûion. Par rapport au
premier, on reconnoît qu'une pierre a été mile pour
fervir de borne & de limite , quand on trouve deffous
des garants ou témoins , c'eft-à-dire , deux ou trois
morceaux d'une pierre plate , que les mefureurs &
arpenteurs Ont accoutumé de mettre aux côtés de
la borne quand ils la plantent. On appelle ces petites
pierres garants ou témoins, parce qu'elles font des
témoins muets qui certifient la vérité, (i/)
* BORNES, TERMES , LIMITES , (Gramm.)
termes qui font tous relatifs à l'étendue finie ; le terme
marque juf qu'où l'on peut aller : les limites , ce qu'il
n'eft pas permis de parler : les bornes , ce qui empê-
che d'aller en-avant. Le terme efl un point ; les limites
font une ligne ; les bornes un objlaclc. On approche ou
l'on éloigne le terme : on étend ou l'on refferre les li-
mites : on avance ou l'on recule les bornes. On dit les
bornes d'un champ , les. limites dune province , le terme
dune courfe*
* BORNE , f. m. fe dit en général de tout figne de
limites , & cette définition convient tant au iimple
qu'au figuré. Ainfi ,
Borne, en Droit , efl toute féparation naturelle
ou artificielle , qui marque les confins ou la ligne de
divifion de deux héritages contigus. Quand il n'y en
a pas de naturelles , les arpenteurs en placent d'ar-
tihcielles. Voyer^ ci-dejfus Bornage.
Il y a peine d'amende contre ceux qui enlèvent &
déplacent les bornes , dans le deffein d'empiéter fur
l'héritage voilin. (//)
Borne de bâtiment , en Architecture , efl une ef-
pece de cône tronqué de pierre dure, à hauteur d'ap-
pui , à l'encognure eu au-devant d'un mur de face ,
pour le défendre des voitures.
Borne de cirque ; pierre en manière de cône , qui
fervoit de but chez les Grecs , pour terminer la lon-
gueur de la ftade , & qui régloit chez les Romains la
courfe des chevaux dans les cirques & les hippodro-
mes , ce qu'ils nornmoient meta. (P )
BORNEO, (Géog.) île d'Afie , dans les Indes ,
l'une des trois grandes îles de la Sonde ; elle fut dé-
couverte en i 521 , par dom Georges Menezés , Por-
tugais. Cette île , qui a environ 600 lieues de tour,
cil fous la ligne. Tout ce pays efl très-fertile ; il abon-
de en cafte, cire, camphre, poivre, herbes aroma-
tiques , bois odoriférans & rélineux ; le riz y efl le
meilleur de toute l'Afie ; il y a auffi de grandes forêts
remplies d'animaux lîngulicrs ; le plus extraordinaire
fans doute , efl celui que l'on appelle homme J'auvage;
il cil , à ce qu'on dit , de la hauteur des plus grands
hommes ; il a la tête ronde comme la nôtre , des yeux ,
une bouche , un menton un peu différens des nôtres,
prefque point de nez, & le corps tout couvert d 'allez
longs poils. Ces animaux courent plus vîte que des
cerfs ; ils rompent dans les bois des branches d'arbre,
avec lefquelles ils affomment les paffans, dont enfui-
te ïisuicent le fang : c'eft ce qu'en rapporte une let-
tre inférée dans les Mémoires de Trévoux en ijoi. Ces
bêtes , que l'on trouve au premier coup d'œil reffem-
blcr fi fort à l'homme , & qui examinées en détail en
différent prefque dans tous les traits , pourroient bien
n'être que des finges , dont des voyageurs , amis du
merveilleux , ont exagéré un peu la taille , l'agilité
B O R
à ïa courfe , & beaucoup la conformité à l'efpece"
humaine. On y voit aufîi des finges rouges , noirs
ou blancs , appelles oncas , qui foui niffent de très-
beaux bézoards.
Cette île contient plufieurs royaumes; le princi-
pal efl celui de Bornéo , dont la capitale efl la ville du
même nom ; elle efl bâtie dans un marais, fur pilotis
comme Venife ; fon port efl grand & beau. Le roi de
Bornéo n'efl que le premier iujet de fa femme , à qui
le peuple & les grands défèrent toute l'autorité ; là
raifon en ell, qu'ils font extrêmement jaloux d'être
gouvernés par un légitime héritier du throne , &
qu'une femme efl certaine que fes enfans font à elle,
ce qu'un mari n'ofe affluer. Journal des Savans du
mois de Février 1680.
BORNER,V. a£l. (Jardinage.') du bonis, par exem-
ple , c'eft , lorfqu'il vient d'être planté , lui donner
avec le dos du plantoir ou avec les mains , la forme
& le contour qu'il doit avoir fuivant le deffein, en
plombant bien la terre tout au-tour de peur qu'il ne
s'évente. (/£)
BORNHOLM, (Gêog.) île de l'Océan , apparte-
nante au royaume de Danemarck, à 20 lieues des
côtes de la Scandinavie*, elle contient une ville nom-
mée Rottum , & deux châteaux.
Bornholm , île de la mer Baltique.
BORNO ou BOURNOU, (%) ville & royale
me d'Afrique , dans la Nigritie , avec un lac & un
defert de même nom ; on croit que c'eft le pays des
anciens Garamantes. On dit que les habitans n'ont
point de religion , que les femmes y font communes,
& que les particuliers n'y reconnoilîént pour leurs en-
fans que ceux qui leur reffemblent. Le pays abonde
en troupeaux , en millet , & en coton. Il efl entre le
3 2 & le 4 1 de long. & le 1 o & le 20 de lat. Le lac de
Borno efl célèbre parce que le Niger le traverfe.
Borno , (Géog.~) petite rivière de la Savoie, qui
fe jette dans l'Arve.
BORNOYERo«B ORNE YER , c'eft regarder
avec un œil , en fermant l'autre , pour mieux juger
de l'alignement , ou connoitre fi une furface eft
plane, ou de combien elle efl gauche. Voye^ Dé-
gauchir. (Z>)
BORNSTADT , (Géog.) petite ville de la Tranfil-
vanie , à deux lieues d'Hermanftadr.
BOROUBRÏDGE, (Géog.) ville d'Angleterre,1
dans la province d'Yorck , fur la rivière d'Youre , à
cinq lieues d'Yorck. Long. 16. ô. lat. 64.
BORRELISTES, f. m."pl. (Hift. ecclej:) M. Stoupp;
dans fon Traité Je la religion Hollandoife , parle d'une
fefte de ce nom dont le chef étoit Adam Boreil , Zé-
landois, qui avoit quelque connoiflance des langues
Hébraïque , Greque & Latine. Ces Borreliftes , dit
M. Stoupp , fuivent la plus grande partie des opi-
nions des Mennonites , bien qu'ils ne fe trouvent
point dans leurs affemblées. Ils ont choill une vie
fortfévere,employant une partie de leur bien à faire
des aumônes , & s'acquitant d'ailleurs avec grand
foin de tous les devoirs d'un homme chrétien , félon
l'idée qu'ils s'en forment. Ils ont en averfion toutes
les églifes , & l'ufage des facremens , des prières pu-
bliques , & de toutes les autres fondions extérieures
du fervice de Dieu. Ils foûtiennent que toutes les
Eglifes qui font dans le monde , & qui ont été après
la mort des Apôtres & de leur premiers fucceffeurs ,
ont dégénéré de la pure doftrine qu'ils avoient prê-
chée , parce qu'elles ont fouffert que la parole de
Dieu infaillible contenue dans le vieil & le nouveau
Teftament, ait été expliquée & corrompue par des
docteurs qui ne font pas infaillibles , & qui veulent
faire paffer leurs confeffions, leurs catéchifmes, leurs
liturgies & leurs fermons , qui font des ouvrages des
hommes , pour ce qu'ils ne font point. Ces Borrelijles
iôùùennent qu'il ne faut lire que la feule parole de
Dieu
B O R
B O S
Dieu , fans y ajouter aucune explication des hom-
mes. M. Stoupp qui nous a donné cette defeription
des Borrelilhs , affùre qu'il les a connus en Hollande.
(G)
BORRIANO , (Géog.) petite ville d'Efpagne dans
le royaume de Valence , fur le bord de la Méditer-
ranée.
. BORROMÉE , ( Géog. ) petite île du duché de
Milan extrêmement ornée , dans le lac de Corne.
BORROMÉES , ( Les îles ) Géog. ce font deux îles
agréables du duché de Milan, à la partie méridionale
du lac Majeur.
* BORROV, (Hift. nat. ) arbre ou bois des In-
des : fon écorce eft couverte d'épines crochues ; fi
l'on y fait une incifion , il en fort un fuc purgatif: il
eft fi poreux , qu'il n'eft même pas bon à brider ; il
paroît par ce détail que cette plante eft peu connue.
BORROZAIL , ( Médecine. ) ou U {ail des Ethio-
piens , maladie épidémique régnante dans les envi-
rons de la rivière de Senega : elle attaque les parties
honteufes ; cependant elle diffère de la vérole , quoi-
qu'elle doive fon origine à un ufage immodéré des
femmes , pour lefquelles les habitans de ces contrées
ont une pafhon violente. Cette maladie s'appelle
dans les hommes afab , 6c dans les femmes ajjabatus.
Blancard. (N)
BORSHOLDER , f. m. ( Hifl. mod. ) nom qu'on
donnoit anciennement en Angleterre au doyen ou
chef d'une certaine fociété qu'on appelloit décurie,
parce qu'elle étoit compofée de dix hommes qui fe
cautionnoient folidairement, 6c s'obligeoient envers
le roi de répondre de tout ce qui pourroit fe commet-
tre de contraire aux lois par leurs afïbciés : fi l'un
d'eux venoit à prendre la fuite , les autres étoient te-
nus de le repréfenter dans le terme de trente jours ,
ou de fatisfaire pour lui , félon la qualité de la faute
qu'il avoit commife. Le roi Altrede qui régnoit vers
l'an 880, divila toute l'Angleterre en comtés, cha-
que comté en centuries , & celles-ci en décuries ou
dix chiffes de bourgeois confulérables , dont le doyen
fut appelle borsholder , c'eft-à-dire , U principal ré-
pondant , ou le vieillard du bourg. Spelman. GloJJar.
archeolog. Voye{ Dixaine. (G)
BORSTEL , ( Géog. ) ville de Weftphalie , dans
l'évêché d'OInabrug.
BORT , ( Géog. ) petite ville de France dans la
province de Limofin , fur la Dordogne.
BORTWICK , ( Géog.) ville de l'EcofTe méridio-
nale, dans la province de Lothian.
BORTINGLE, terme de Rivière, efpece de plat-
bord qui fert de hauffe au bord du bateau , lorlque
La quantité de charge lui fait prendre trop d'eau.
BORV A , ( Géog. ) petite ville & château de Por-
tugal, dans la province d'Alentejo, à deux lieues de
Villa-Viciofa.
BORU\VANNY,( Géog.) ville du royaume de
Bohême , dans le cercle de Bechin.
BORYSTHENE, ( Géog.) grand fleuve : on l'ap-
pelle aujourd'hui Dnieper , ou Nicper ; il prend fa
fourec dans la Rufîie , 6c la fépare de la Lithuanie ,
traverfe l'Ucraine , 6c tombe dans la mer Noire à
Oczakow. Il eft très-large à ion embouchure , & d'u-
ne navigation dangereufe à caufe des rochers qui s'y
trouvent , & de 70 îles qu'il forme , qui font habitées
par les Cofaques de Zaporov.
BOSA , ( Géog. ) ville maritime dans la partie oc-
cidentale de l'île de Sardaigne , avec une citadelle 6c
un allez, bon port. Elle eft lituée fur la rivière il
à fept lieues d'Alghier. Long. z6. 23. lat. 40. /o.
BOSCH, ( Géog. ) petite île dans la mer du Nord,
pies les côtes de la Frife.
BOSCO ou BOSCHI , ( Géog. ) petite ville d'Ita-
lie au Milanez, dans l'Alexandrin. Elle eft fur la ri-
vière d'Orbe , à deux lieues d'Alexandrie,
Tome II,
337
BOSEL , f. m. c'eft en Architecture la même chofe
que bâton, tore, /pire, ajlragale. Foye^ Astragale.
BOSENHAM , ( Géog. ) ville d'Angleterre dans la
province de SufTex.
BOSJNGEN, ( Géog. ) ville deSuiffe dans le can-
ton de Fnbourg , fur la rivière de Senfen.
BOSNA , ( Géog. ) rivière de Bofnie, qui fe jette
dans la Save à Arki.
BOSNIE , (Géog.) province de la Turquie en Eu-
rope , ainfi nommée de la rivière Bofna qui y coule.
Elle fe divife en haute 6c baffe : elle eft bornée au
nord par l'Efclavonie , & au fud par l'Albanie.
BOSPHORE , f. m. ( Géog. ) nom que les anciens
donnoient à un détroit ou canal de mer d'une très-
petite étendue. Voyc{ Détroit, Mer, &c.
On n'a donné ce nom qu'à deux détroits de la mer
Méditerranée ; le bofphore de Thrace , & le bofphore
Cimmerien.
Le bofphore Cimmerien eft le détroit qui fert de com-
munication au Pont-Euxin ou à la mer Noire avec
le Palus-Méotide. Il tiroit fa dénomination desCim-
meriens , nation célèbre dans l'antiquité : on lui a
donné depuis le nom de détroit de Zabache.
Le bofphore de Thrace , ou canal de Confiantinople ,
eft le détroit par lequel la Propontide ou la mer de
Marmara communique au Pont-Euxin ou à la mer
Noire. Il a environ fix lieues marines de longueur; fa
largeur en quelques endroits n'eft que d'environ qua-
tre censtoifes. L'un de lés bords appartient à l'Euro-
pe , l'autre à l'Afie.
Ce mot eft Grec , Çomepcç ; il eft formé de /2«?, bœuf9
& 'mcf.oi , paffage. Ainfi le mot bofphore paroît figni-
fîer en général un bras de mer affez étroit, pour qu'un
bœuf pût le paffer à la nage. C'eft auflî l'opinion
de piuiieurs favans.
Cependant fi l'on convient de l'étymologie de ce
mot, on ne convient pas de la raifon de cette éty-
mologie, principalement pour le bofphore de Thrace.
Nymphius raconte que les Phrygiens voulant paffer
ce détroit conftruifirent un navire, à la proue duquel
il y avoit une figure de tête de bœuf, 6c qui appa-
remment pour cela fut appelle Gç, bœuf.
Denys le géographe, Val. Flaccus , Apollodore ,"
Mareellin , &c. dilènt qu'Io , fille d'Inachus , ayant
été changée en vache par Junon , paffa ce détroit,
qui delà fut nommé bofphore.
Arrien dit que les Phrygiens ayant reçu une ré-
ponfe de l'oracle qui leur ordonnoit de fuivre la rou-
te que leur marquerait un bœuf, ils en tourmentè-
rent un qui le jetta à la mer pour éviter leurs pour-
fuites , 6c paffa ce détroit à la nage. D'autres difent
qu'un bœuf tourmenté d'un taon, fe jetta dans le
détroit & le paffa : d'autres que tout détroit étoit au-
trefois appelle bofphore : d'autres que quand les ha-
bitans des cotes vouloient paffer le bofphore de Thra-
ce , ils joignoient des bateaux enlemble ,6c y atte-
loient des bœufs. Charniers,
BOSQUET, f. m. ( Jardinage.) petit bois planté
dans les jardins de propreté ; c'eft comme qui diroit
un bouquet de verdure , un bois paré , au milieu duquel
on trouve ordinairement une falle ornée de fontai-
nes 6c de pièces de gafon , avec des lièges pour fe
repofer.
Les bofquets font le relief des jardins; ils forment
une de leurs principales parties , & font valoir tou-
tes les autres : c'eft par leur moyen qu'on couvre
toutes les vues defagréablcs. On leur donne toute
forte de figures , telles que des étoiles, de> quincon-
ces, cloîtres, falles vertes , galeries . labyrinthes ,
croix de S. André, pattes d'oie , chapelets, guillo-
chis, culs-de-fac , carrefours, cabinet;,, &c.
Le bofquet repréfenté dans la PI, FI. eft un quar-
V v
î33
B O S
B O S
ré long échancré dans fes quatre angles, coupé de
diagonales qui mènent dans une figure octogone al-
longée , qui préiente des renrbncemens pour des va-
(és ou des figures en face de chaque allée : on entre
par quatre allées dans la falle du milieu, où l'en
trouve une pièce d'eau cintrée dans fes extrémités ,
avec un bouillon au milieu : les quatre bancs prati-
qués dans la paliffade de l'octogone en face de cha-
que allée , découvrent cette fontaine , & s'enfilent
l'un l'autre : on trouve encore quatre bancs cintrés
dans les petits cabinets ménagés dans les angles de
la falle du milieu.
On trouvera la manière de tracer ce bofquet & de
le planter , aux articles Tracer , Planter. ( K )
BOSRA, nommée Bufferet dans les hiftoriens Fran-
çois des Croifades. Bofra dans l'antiquité , ancienne
métropole d'une province particulière d'Arabie , au
levant de la Paleftine.
BOSSAGE, f. m. fe dit en général de toute émi-
nence laiffée aune furface plane de pierre ou de bois,
ou autre matière propre au bâtiment.
Bossage , en Architecture , fe dit de la faillie bru-
te &c non taillée qu'on laiffe dans les bâtimens à des
pierres que l'on fe propofe de réparer au cifeau,
pour y former des ornemens , des armes , des feuil-
lages , &c.
Joindre des pierres en bojjkge , c'efl les biffer fail-
lir au-delà des endroits où lont les joints , comme on
îe remarque au tambour des colonnes de plufieurs
pièces : c'efl un moyen de conferver les arrêtes de
leurs joints de lit, que les cordages pourraient émoul-
fer , 6c d'en faciliter la pofe.
On donne encore le nom de bojfagîs ou de pierres
de refend, à celles qui femblent excéder le nud du
mur , quand les joints de lit en font marqués par des
enfoncemens ou canaux quarrés.
Le bojjagerufiique eft arrondi, & fes paremens pa-
roiffent ou brutes ou pointillés également : l'arron-
di a fes arrêtes arrondies ; le bojjage à anglct efl chan-
frené , & joint à un autre de pareille manière avec
lequel il forme un angle droit : celui à pointe de dia-
mant a le parement à quatre glacis, terminés en un
point quand il efl quarré , & en arrête quand il efl
barlong : celui qui efl en caret a la faillie terminée
par un caret entre deux filets , &c. (/*)
Bossages, {Charpent.) ce font des maffes de
bois qu'on laiffe aux pièces qu'on allégit aux endroits
des mortoifes , pour qu'elles foient plus fortes. froy.
les arbres des grues , PL du Cliarpentier.
On donne encore en Charpente le nom de bojjage ,
à l'arc ou au cintre que forment les bois courbes. Le
bojjage fe toife.
* BOSSE , f. f fe dit en général de toute éminence
fphérique , foit effentielle , foit accidentelle au corps
où cette forme fe remarque. Le boffuè ell l'oppolé de
bojju : le premier marque enfoncement , 6c l'autre
faillie , & ils peuvent fe trouver en même tems fur
un corps mince ; fi ce corps efl bo[jué d'un côté , il
fera bojfu de l'autre. La bojfe efl accidentelle , toutes
les fois qu'elle gâte la forme totale ; elle efl effen-
tielle , quand elle efl un effet de l'art , & une fuite de
la conformation ou de I'ufage de l'ouvrage.
Bosse , vice de conformation , qui confifle en ce
que l'épine du dos efl convexe & voûtée , & quel-
quefois le jiernum, La moelle de l'épine & les nerfs
qui en fortent , font comprimés par ce dérangement;
de là vient l'amaigriffement du corps , tandis que la
tête groffit ; les nerfs du cerveau font d'autant plus
actifs & plus nourris , que ceux de la moelle de l'é-
pine font plus affoiblis. C'efl peut-être pour cette rai-
fon , dit M. Daubenton ( Hifi. nai. tom. III. ) , que
les boffus ont ordinairement plus d'efprit que les au-
tres. La règle n'ell pourtant pas généi aie , & l'auteur
ne donne cette explication que comme une conjec-
ture. Voye^ Rachitis. (O)
Bosse , en Anatomie; épithete dont on fe fert pour
caraôérifer une éminence. Voye^ Eminence.
Ainfi on dit la protubérance ou boj/e occipitale. Voy.
Occipital, {L')
Bosse ou Ronde bosse , en Architecture , efl toute
figure qui fert à l'ornement d'un édifice ; ou plus gé-
néralement tout ouvrage de fculpture , dont les par-
ties ont leur véritable rondeur , & font ilolées com-
me les figures. On appelle demi-boffe , un bas relief,
qui a des parties faillantes 6c détachées. (P)
Bosse , en terme de Bâtiment ; c'efl dans le pare-
ment d'une pierre un petit bojfage que l'ouvrier laiffe
pour marquer que la taille n'en eft pas toilée , & qu'il
ôte après en ragréant. ( P )
BOSSE ( travailler d'après la ) , fe dit, en Defftin ,
d'un élevé ou d'un maître qui copie d'après une fi-
gure de relief, foit en marbre , foit en plâtre, {Il )
Bosse , en Marine , fe dit de bouteilles de verre
fort minces , qu'on remplit de quatre à cinq livres de
poudre , qu'on garnit de plufieurs mèches qui pendent
du goulot , & d'un bouchon , qu'on allume 6c qu'on
lance d'un vaiffeau dans un autre , avec une corde
longue de quatre à cinq pies : cette machine venant
à fe brifer , met le feu dans le bâtiment, & répand
le defordre entre l'équipage. On dit qu'elle efl d'ufa-
ge fur la Méditerranée.
Bosses , f. f. pi. ( Marine. ) ce font des bouts de
corde d'une médiocre longueur, ayant à leurs extré-
mités des nœuds nommés cul de port doubles. L'ufage
des bojfes efl de rejoindre une manœuvre rompue ,
ou qu'un coup de canon aura coupée ; ce qui eft fort
néceffaire dans un combat.
BOSSES pour les haubans. Voye^ Haub AN.
BOSSES à cguillettes ou à raban , bojfes de cable ; ce
font les bojfes qui font pour le cable, c'efl-à-dire qui
ont au bout une petite corde qui fert à faifir le cable
lorfque le vaiffeau ell à l'ancre.
Bosses à fouet ; ce font celles qui étant treffées
par le bout , vont jufqu'à la pointe en diminuant.
Bosse du boffoir; c'elt la manœuvre qui fert à tirer
l'ancre hors de l'eau , pour l'amener au boffoir lorf-
qu'elle paroît. Aov^Candelette.
Bosses de chaloupe ou de canot ; ce font les cordes
dont on fe fert pour amarrer les chaloupes & les ca-
nots.
Prendre une bojfe ; c'efl-à-dire amarrer une bojfe à
quelque manœuvre. ( Z )
Bosse {ferrure à ) ; elle s'attache en-dehors, foit
avec des clous rivés,foit avec des vis, dont les écrous
font placés en-dedans , & fe ferme à moraillon. Voyeç_
la dejeription de cette Jerrure à V article SERRURE.
Bosse , dans les grojjes Forges ; on donne ce nom
à une partie des applatifïbires. Voye^ Applatis-
SOIRE & GROSSES FORGES.
BOSSE , {(Economie rufliq.') c'efl ainfi qu'on appelle
à la campagne les paquets de chardons que l'on fait
pour être vendus aux drapiers , laineurs, couvertu-
riers , &c.
Bosse , a auffi fon acception en Orfèvrerie. La vaif-
felle fe diltribue en plate 6c en vaiffelle en bojje. La
plate comprend les affiettes , les plats, les cuillères,
& tout ce qui n'a pas une concavité confidérable.
Celle en bojfe comprend tous les grands vaiffeaux
qui ont un ventre & un cou , comme lèaux , flacons ,
aiguières , baffins profonds , &c.
Rosse , che% les Paumiers , fe dit ou d'une éminence
ronde pratiquée en laillie , d'un pie ou environ de
diamètre , fur quatre à cinq de haut, du côté de la
grille ; ou d'un angle obtus que le mur du côté de la
grille fait au même endroit, dans lequel la balle ve-
nant à frapper , elle eft très-difficile à juger pour ceux
qui ont à la prendre.
B O S
* BOSSES , dans les Salines ; c'eft ainfi qu'on appelle
des tonneaux pleins de fel en grain , ou de lel trié ,
deftiné pour latisfaire aux engagemens de la France
avec les cantons Catholiques de Suiffe. Les bojj'es doi-
vent contenir feize fîerlins , mefurc de Berne , qui
font évalués fur le pie de quatre charges deux tiers ,
& la charge à raifon de cent trente livres : cependant
les feize fîerlins ne pèlent environ que cinq cens cin-
quante à foixante livres. Quoique le fel trié foit le
moins humide de celui qui fe tire de la poêle , fur
les bords de laquelle on le laiffe afTez long-tems en
monceaux , pour que la plus grande partie de la
muire s'en écoule ; cependant une des principales
conditions du traité du Roi &c du fermier avec les
Suiffes , c'eft qu'il ait été dépofé pendant fix femai-
nes fur les étuailles , avant que d'être mis dans les
boffes. Les ouvriers qu'on appelle poulains , & qui
empliffent les boffes , entrent dedans à la quatrième
mefure , c'eft-à-dire au quatrième gruau qu'on y ver-
fe , & foulent le fel avec les pies , & ainfi de quatre en
quatre mefures. Elles relient enfuite huit jours fur
leurs tonds ; après quoi on bat encore le fel de dix-
huit coups de pilon ou demoilelle. On ajoute la quan-
tité néceffaire pour quelles loient bien pleines ; on
les ferme, & on les marque d'une lettre. Chaque
lettre a cent bofjes. Les boffes rendues à Grandlon &
à Yverdun , y doivent encore relier trois femaines
en dépôt. On les mefure encore de nouveau , & l'en-
trepreneur des voitures , à qui le fermier parle pour
déchet 9 pour ioo en-dedans , ce qui lait cent bojfes
pour quatre-vingt-onze , ell tenu de les remplir de
manière qu'il n'en revienne pas de plaintes.
BOSSES {contrôleur à rcmplijjagc des") ; c'eft un offi-
cier gagé dans des Salines , qui veille à ce que les
poulains faffent bien leur devoir , &c que les bojjes
loient bien pLeines. Voye^ Poulain.
Bosse, le dit, en Vénerie, de la première pomTée
d'un cerf qui a mis bas ; ce qui commence dès les
mois de Mars ou d'Avril. Il le prend en même fens
pour le chevreuil. C'eft dans l'une & l'autre Pémi-
nence d'oii fort le mairin , la perche , ou le fût du
bois. Cette éminence le nomme meule dans le pre-
mier de ces animaux, & enflure dans le fécond.
* BOSSE , terme de Verrerie ; c'eft la forme que l'ou-
vrier appelle boffier, donne à la matière vitrifiée, en
l'allongeant, poliffant , tournant fur le marbre , &
foufflant à plulîeurs reprifes. La boffe a la figure d'un
globe d'environ deux pies de tour : elle tient à la telle
par une efpece de col. C'eft ce globe qui deviendra
par les opérations fubléquentes , un plat de verre à
vitre. Voyci VERRERIE A VITRE.
BOSSEMAN , f. m. {Marine angV) fécond contre-
maître; c'eft un officier marinier qui eft chargé du foin
des cables & des ancres , des jas & des bouées. Il doit
faire griffer & tonner les cables aux endroits nécef-
faires, caponner &c boffer les ancres, y mettre des
omis de longueur convenable au tond des mouilla-
ges , y tenir les bouées flotantes au - delïïis de l'eau ,
& veiller fur les cables , pour voir s'ils ne rompent
point , & li l'ancre ne chaffe pas.
BOSSER & DEBOSSER un cable; c'eft , en Mar.
amarrer & démarrer la bolfe qui faifit le cable , lorf-
que l'ancre eft à la mer.
Boffer C ancre , c'eft au lîi tirer l'ancre pour la met-
tre fur les boflbirs. ( Z )
BOSSETTE , f. f. en terme d' 'Eperonnier , s'entend
d'un ornement en or , en argent , en cuivre , 6v. em-
bouti , dont on couvre le fonceau d'un mors, ^oye^
FoNCEAU ; voye^ MORS ; voy. D.fig. Zl. Planche de
VEptronnier.
C'eft aulïï une pièce de cuivre qu'on met fur les
yeux des mulets.
* BOSSIER , f. m. c'eft dam les Verreries , le nom
d'un gentilhomme occupé à former la bulle. Voyt^
Tome II.
B O S
339
Bosse ; voye^ Verrerie en plat.
BOSSOIRS ou BOSSEURS , f. m. pi. en Marine;
ce font deux poutres ou pièces de bois miles en fail-
lie à l'avant du vaiffeau au-deffus de l'éperon , pour
foûtenir l'ancre ce la tenir prête à mouiller , ou bien
l'y pofer quand on l'a tirée hors de Peau. La faillie
que font les boffoirs , donne lieu à l'ancre de tomber à
l'eau fans rifque , quand il faut mouiller, & empêche
qu'elle n'oriente le franc bordage ou les ceintes. Voy.
Planche I. le bojfoir , cottè M. foye?^ aujfila Planch. IV.
fig. I. n°.lJ3 , le bojfoir; & n°. Ï34 , le porte-bojfoir.
L'infpection de ces deux figures fera connoître par-
faitement la forme des bofioirs, èc leur poiitiondans
le vaiffeau. Il y a un ou deux rouets à la tête de cha-
que bojfoir , par le moyen defquels on tire l'ancre
lorfqu'elle eft venue à pic.
Le bojfoir doit avoir huit pouces d'épais & dix peu-
ces de large parle boutqui eft furie château d'avant,
& huit pouces de large &C quatre pouces d'épais par
l'autre bout.
On fait des ornemens de fculpture à la tête du bof-
foir: à côté il y a une groffe crampe qui tient au bof-
foir, dans laquelle on met une poulie qui lert à enle-
ver les plus greffes ancres. La corde qui eft dans cette
poulie, va paffer dans un rouet qui eft fur le château
d'avant, dans un traverlîn qui traverle le gaillard pro-
che du fronteau , 6c qui lert à amarrer diverles ma-
nœuvres. (Z)
BOSSON, {Mar.) myer BOUGE & BeSSON. (Z)
BOSSU, adj. pris fubft. en terme de Médecine , eft
celui qui a les vertèbres , ou le fternum d'une conve-
xité difforme. Voyei Vertèbre & Bosse.
La partie du foie d'où ibrt la veine-cave eft aufTi
appellée partie gibbeufe , c'eft-à-dire Bossue. Voye?
Foie. {L)
Bossu , {Aflronomit. ) on fe fert quelquefois du
terme de bojfu pour deiigner la partie éclairée de la
lune , lorfqu'elle parle du plein au premier quartier,
& du dernier quartier au plein ; car pendant tout ce
tems , la partie qui eft dans Pobfcurité eft cornue , &
celle qui eft éclairée eft élevée en boffe convexe, ou
boffue. Voyei Phase <S' Lune. Ce mot fe dit plus en
Latin qu'en François : luna gibboja. { O )
Bossu , ( Monnoie. ) nom que l'on donne en Tou-
raine aux fous marqués.
BOSSUT , ( Géog. ) bourg &c château du comté de
Hainaut, entre Valencicnncb &: Mons.
* BOSSY , f. m. ( ffift. nat. bot. ) arbre qui croît
au royaume de Quoja en Afrique : il a Pécorce lèche
&c le bois gras &. huileux. Ses cendres lont bonnes
pour le favon; & fon fruit eft une prune jaune,
aigre, qui fe mange.
BOSTANGIS , f. m.{Hifl. mod. ) claffe des aza-
mogluns ou valets du ferrail , occupes aux jardins du
grand-feigneur. Quelques-uns cependant font élevés
à un degré plus haut, & occupés aux n
commiliîons du lultan ; c'eft pourquoi on les nomme
hajjakis ou chajfakis, c'eft-à-dire meffag<
Bostangi Bachi , chef des jardiniers ou fui in-
tendant tles jardins du grand-leigneur. De fîrnple bof-
tangi ou jardinier, il par\ ierit à cette dignité , qui eft
une des premières de la porte , év qu'il ne quitte que
pour être tait pacha à trois queues. Quoiqu'il foit
infpeûeur ne des jardins du ferrai! <Sc de:
fultan , l'on autorité ne le borne pas à cette ron
elle s'étend depuis le fond du port Kaffump
Gaiata , Top-Hana , & le détroit de Conltanti
jufqu'àla ville deVarnefurla mer'Nbire. Jour& nuit
il fait la ronde dans tous ces lieux avec une ;;•
montée de trente bofangis pour \ cilla: au feu , fur-
prendre les ivrognes , ^ les femmes île tnauvaife
vie, qu'il coule quelquefois à foni -s ren-
contre avec des hommes dans des bateaux. Il eft
encore erand maître des eaux & forêts, à .
340
BOT
des chafies des plaifirs du grand-feigneur. On ne
peut faire entrer une feule pièce de vin dans Conf-
tantinople fans fâ permiffion ; ce qui lui donne une
jurifdiction de police fur les cabarets. Il contrôle les
vins des ambaifadeurs , & fait arrêter leurs domefti-
?[ues à la chaffe , s'ils n'ont pas fon agrément. Mais
a fonction la plus honorable eft de foûtenir fa hau-
teffe , lorfqu'elle le promené dans fes jardins , de lui
donner la main quand elle entre dans fa gondole ,
d'être alors affis derrière elle , & de lui parler à l'o-
reille en tenant le timon , & de lui fervir de marche-
pié le jour de fon couronnement.
Quelquefois le boftangi bachl prend les devans avec
fon bateau , pour écarter tous ceux qui le rencon-
trent fur la route de l'empereur. Il doit connoître
non-feulement toutes les variations que la mer caufe
fur fon rivage ; mais encore tous les dilférens édifi-
ces qui ornent les bords , & les noms de leurs pro-
priétaires , afin de répondre exactement aux queftions
que le grand-feigneur peut lui faire ; deforte qu'il
faut avoir couru long-tems les bords de cette mer,
en qualité de iimple boftangi , pour parvenir à celle
de boftangi bachi : cet accès facile auprès du grand-
feigneur, donne à cet officier un très-grand crédit,
& le fait quelquefois devenir favori de ion maître ;
place dangereufe ; & qui dans les révolutions fré-
quentes à Conitantinople , a plus d'une fois coûté la
tète à ceux qui y étoient parvenus.
Comme les empereurs Ottomans vont quelquefois
à Andrinople , ancienne capitale de la monarchie
Turque , il y a auffi dans cette ville un boftangi bachi ,
comme à Conitantinople. Leur rang eft égal , mais
leur jurifdiction & leur revenu font fort dirférens.
Celui d'Andrinople n'eft chargé que du palais impé-
rial , quand le lultan y fait fa réfidence , & de la gar-
de de fes fils ; au lieu que le boftangi bachi a une fur-
intendance générale fur toutes les maifons deplaifan-
ce du prince , à peu près comme en France , le direc-
teur général des bâtimens. Guer, mœurs & ufages des
Turcs , tom. II. (G)
BOSTON , ( Géog. ) ville d'Angleterre , dans la
province de Lincoln , fur la rivière de Witham , peu
au-deffus de fon embouchure dans la mer , à i o lieues
de Lincoln. Lat. 3j. degrés , long. IJ& demi.
Boston ; c'eft le nom qu'on a donné à la ville
capitale de la nouvelle Angleterre , dans l'Amérique
i eptentrionale ; elle eft grande Se a un très-bon port.
Lat. 42 degrés, 2 0 minutes ; long. JO(y degrés , 5o &
quelques minutes.
BOSWORTH , ( Géog. ) bourg dans la province
de Leicefter , en Angleterre , à environ 3 <j lieues de
Londres.
BOSZUT, (Géog.) petite rivière d'Efclavonie ,
qui fe jette dans la Save , près du lieu de l'ancienne
ville de Sirmium.
BOTA, (Commerce*) c'eft le nom ufité en Efpa-
gne , pour défigner une mefure de liquides , qui tient
30 robas; le roba tient 30 livres pelant.
BOT , ( Marine ) c'eft un gros bateau flamand ,
ou une efpece de petite flûte ; le bot eft ponté. Au
lieu de dunette ou de chambre un peu élevée , il y
a une chambre retranchée à l'avant , qui ne s'élève
pas plus que le pont. On fait joiier le gouvernail ,
ou avec une barre , ou fans barre ; parce que celui
qui gouverne , le peut faire tourner aifément de def-
lus le bord.
A l'avant du bot, il y a une poulie, qui fert à lever
l'ancre , & au milieu du bâtiment on pofe un cabef-
tan , lorfqu'il en eft befoin , & on l'affermit par deux
courbatons , qui de l'un & de l'autre coté vont fe
terminer contre le bord. Les membres du fond font
vaigrés ou couverts de planches , hormis à l'endroit
par où l'on puife l'eau qui y entre.
Paquebot , pacquet-bot , c'eft ce bateau qui porte les
BOT
lettres d'Angleterre en France , & de France en An-
gleterre ; il va de Douvres à Calais. Il y a aufli des
paquebots , qui portent les lettres d'Angleterre en
Hollande ; ils partent de Harwich & vont à la Brille.
(2)
BOTADON , ( Géog. ) petite ville d'Angleterre ,
dans la province de Cornoùaille.
BOTALL , trou ( Anat. ) on donne le nom de trou
botall au trou ovale , fitué entre les deux oreillettes du
cœur ; de Botall , confeiller & médecin de Charles IX.
à qui on en attribue la découverte. Voye?K Cœur. (L)
BOTANIQUE , f. f. {Ordre encyclop. Entendement.
Raifon. Philofophie ou Science. Science de la nature.
Phyjique générale, particulière. Botanique.') partie de
l'hilloire naturelle , qui a pour objet la connoiffance
du règne végétal en entier; ainii la Botanique eft la
Icience qui traite de tous les végétaux tk. de tout ce
qui a un rapport immédiat avec les végétaux.
L'étude de la végétation fait la première partie de
cette feience , c'eft la baie de toutes les autres ; car
on doit commencer par examiner la nature des vé-
gétaux en général, avant que de traiter de chaque
plante en particulier; & on ne peut pas parvenir à
connoître l'ceconomie végétale , fi on ne fait com-
ment les germes des plantes fe développent, & com-
ment elles prennent leur accroiffement ; quels font
les moyens de les multiplier ; quelle eft leur orga-
nifation en général ; la ftruclrire de chaque partie ;
leur manière de fe reproduire , & quel eft le mouve-
ment & la qualité de la fève ; & enfin fi on ne fait
en quoi le terrein Se le climat peuvent influer fur les
plantes. Tels font les principes généraux qui ctablif-
fent les fondemens de la Botanique : mais ces con-
noiflances dépendent de la Phylique <, &: forment le
lien qui unit ces deux feiences. f^oye^ Végétation.
Le détail de la Botanique eft divilé en plulieurs par-
ties : il y en a trois principales ; favoir la nomenclature
des plantes , leur culture , & leurs propriétés. La der-
nière eft la feule qui foit importante par l'utilité que
nous en tirons ; les deux premières ne doivent nous
occuper qu'autant qu'elles peuvent contribuer à faire
valoir la troifieme , en perfectionnant la connoiffan-
ce des propriétés. On doit entendre par les propriétés
des plantes , tous leurs ufages, même les ufages d'a-
grément; ainii les arbres des forêts & les herbes des
parterres ont dans ce fens leurs propriétés , comme
les plantes ufuelles dans la Médecine.
Dès que la connoiffance des plantes a formé un
corps de feience , l'énoncé de leur nomenclature a
dû précéder dans l'expolé de cette feience l'hilloire
de leur culture & de leurs propriétés. Mais il eft cer-
tain que la première connoiffance que l'on ait eu des
plantes , a été celle des ufages auxquels on les a em-
ployées , & que l'on s'en eft fervi avant que de leur
donner des noms. On s'eft nourri avec des fruits ; on
s'eft vêtu avec des feuilles ou des écorces ; on a for-
mé des cabanes avec les arbres des forêts avant que
d'avoir nommé les pommiers ou les poiriers, le chan-
vre ou le lin , les chênes ou les ormes , &c. L'homme
a dû iatisfaire fe:> befoins les plus preffans parle feul
fentiment, & indépendamment de toute connoiffan-
ce acquife : on a joui du parfum des fleurs dès qu'on
s'en eft approché , & on a recherché leur odeur fans
s'inquiéter du nom de la rofe ou du jainiin. Les ufa-
ges des plantes qui luppofent le plus d'expérience,
n'ont jamais été indiqués par le nom ou par l'appa-
rence extérieure d'aucune plante; c'eft par un coup
heureux du Hafard, que l'on a été inftruit de l'utilité
que l'on pouS cal tirer du riz ou du froment, du caffé
Se de la vigne, Enfin il y a tout heu de cToire que les
plante, tifircflés ''ans la Médecine cv dans les Ans ,
n'ont été nommées qu'après que leur efficacité a été
connue : il y en a plulieurs qui ont encore aujour-
d'hui des noms relatifs à leurs propriétés.
BOT
La nomenclature des plantes n'eft donc pas nécef-
•our la découverte de leurs propriétés ; cela elt
fi vrai qu'il ferait ridicule de l'avoir mis en queftion ,
s'il n'étoit prouvé par l'état préient de la Botanique
& par l'expérience du parlé , que l'on s'eft appliqué
à la nomenclature par préférence aux autres parties
de cette feience. On fait plus d'obfervations & on
tente plus de combinaifons pour parvenir à réduire
la nomenclature des plantes en fyltème, qu'il ne fau-
drait peut-être faire d'expériences & acquérir de faits
pour découvrir quantité de nouvelles propriétés uti-
les dans ces mêmes plantes. Ce défaut de conduite
dans l'étude de la Botanique , cft un obit acle à l'avan-
cement de cette feience , parce qu'il nous éloigne de
ion principal objet. Il elt même à craindre que û on
continuoit à marcher dans cette faufle route , on ne
vînt à le perdre de vue. Pour s'en convaincre il faut
examiner quelle elt l'utilité que l'on a retirée de la
nomenclature des plantes , poufféc au point de per-
fection que les Botanijîes fe font efforcés de lui don-
ner ; à quoi cette nomenclature peut lervir dans la
Botanique ; & à quoi elle peut nuire , en fuppofant
que cette connoiffanec foit réduite en fyltème conf-
iant & même infaillible.
On elt parvenu , par le moyen de la nomenclatu-
re , à diftinguer environ vingt mille efpcces de plan-
tes, félon l'eftime des Botanijîes, en comptant toates
celles qui ont été obfervécs tant dans le nouveau mon-
de , que dans l'ancien. S'il y avoit eu un plus grand
nombre d'obfervateurs, & s'ils avoient parcouru tou-
te la terre, ils auroient doublé ou triplé le nombre
des efpeces de plantes ; ils en auroient peut-être trou-
vé cent mille & plus , conformément aux principes
de leur calcul. Mais quel cas doit-on faire de ce cal-
cul ? le réfultat n'eft pas le même pour tous les obfer-
vateurs ; chacun compte à fa mode ; les uns multi-
plient fans néceffité , en féparant fous différentes ef-
pcces des individus qui font femblables ; les autres
mêlent enfemble des individus différens , & dimi-
nuent par cette confufion le nombre des efpeces. On
n'a donc pu convenir jufqu'ici d'un principe certain
pour conltater ce nombre : cependant on y a em-
ployé beaucoup d'art, on n'a épargné ni foins ni fa-
tigues , mais toujours infructueufement. Il ne faut
pas en être furpris , car il elt aifé de remonter à la
ïource de cette erreur. On a voulu faire une icience
de la nomenclature des plantes , tandis que ce ne
peut être qu'un art , & feulement un art de mé-
moire.
Il s'agiffoit d'imaginer un moyen de fe retracer,
fans confufion , l'idée & le nom de chaque plante
que l'on auroit vu réellement exiftante dans la na-
ture , ou décrite & figurée clans les livres. Il y a cent
façons différentes de parvenir à ce but : dès qu'on a
bien vu un objet 6c qu'on fe l'eft rendu familier , on
le reconnoît toujours, on le nomme, & on le diitin-
gtte de tout autre , avec une facilité qui ne doit fur-
prendre que ceux qui ne font pas dans l'habitude
d'exercer leurs yeux ni leur mémoire. Il elt vrai que
le nombre des plantes étant, pour ainii dire, excef-
fif, le moyen de les nommer 6c de les difflflguer tou-
tes les unes des autres, en étoit d'autant plus diffi-
cile à trouver; c'étoit un art qu'il falloit inventer;
art, qui auroit été d'autant plus ingénieux , qu'il au-
roit été plus facile à être retenu de mémoire. Par cet
art une fois établi, on auroit pu le rappeller le nom
d'une plante que l'on voyoit, ou fe rappeller l'idée
de celle dont on favoit le nom; mais toujours en fup-
pofant dans l'un & l'autre cas, que la plante même
fût bien connue de celui qui auroit employé cet art
de nomenclature ; car la nomenclature ne peut être
confiante que pour les choies dont la connoiffanec
n'eft point équh oque.
La connoiffaRce en qcnéral elt ablblument indé-
BOT
341
pendante du nom. Pour le prouver, examinons ce
que doit faire un homme qui veut connaître une
plante qu'il voit pour la première fois , & dont il
ne fait pas le nom. S'il commence par s'informer du
nom de cette plante il n'en tirera aucune lumière ,
parce que le nom d'une chofe que l'on ne connoît
pas, n'en peut rappeller aucune idée. Il faudra donc
qu'il obferye la plante , qu'il l'examine, & qu'il s'en
forme uneidée diftincte ; il y parviendra enla voyant ,
& s'il expofe , s'il décrit tout ce qu'il aura vu , il com-
muniquera aux autres la connoiffanec qu'il aura ac-
quile. Alors le nom fervira de figne pour lui rappel-
ler l'idée de cette plante à lui-même 6c à ceux qui
auront lu la defeription: mais il elt impoffible qu'un
nom tienne jamais lieu de defeription; ce figne peut
rappeller l'idée d'une chofe connue , mais il ne peut
pas donner l'idée d'une chofe inconnue.
Cependant on a fait des tentatives infinies pour
parvenir à étendre les noms des plantes, à les compli-
quer 6c les combiner , de façon qu'ils partent donner
une idée diftincte des plantes , fans qu'il tût néceffai-
re de les avoir vues , ou d'en avoir lu la defeription
entière. Ce projet ne tendoit à rien moins qu'à for-
mer une feience de la nomenclature des plantes , s'il
eût réùffi : mais on a échoué dans l'exécution autant
de fois qu'on l'a entreprife , parce que les deferip-
tions ne peuvent pas être réduites en nomenclature ,
& que par conféquent les noms ni les phrafes ne peu-
vent pas être équivalens aux deferiptions.
Les nomenclateurs ont entrevu la vérité de cette
objection, & pour furmonter cette difficulté , ils ont
joint au nom une petite partie de la defeription. C'elt
ce compofé qu'ils appellent phrafe. Ils ont tâché d'y
faire entrer les caractères fpécifiques : mais comme
ils n'ont pu comprendre dans ces phrafes , c'elt-à-clire
dans les noms des efpeces , qu'une partie de la deferip-
tion qui ne pouvoit pas donner une idée de la plante,
ils ont prétendu fuppléer à ce défaut, en attribuant
au nom générique une autre partie de la defeription.
Ces deux parties étant délignées par les noms du
genre &: la phrafe de l'efpece, étant encore trop im-
parfaites pour faire reconnoître la plante , ils ont com-
pris dans l'énoncé de l'ordre 6c de la claffe d'autres
parties de la defeription : mais quelqu'art qu'ils ayent
employé pour combiner toutes ces partitions , ils
n'ont pu parvenir à donner une idée diftincte de la
plante, parce' qu'ils n'ont pas rapporté la defeription
en entier.
Cette defeription complcfte cft abfohiment nécef-
faire pour caractérifer une plante , de façon qu'on la
puiffe diftinguer de toute autre plante : c'elt une loi
conftante pour tous les objets de Phiftoirc naturelle ,
& principalement pour ceuxqui lont auffi nombreux
que les plantes. Cependant on a tâche d'éluder cette
difficulté infurmontablc dans la nomenclature, en fe
perfuadant que l'on trouveroit dàl .s, des
parties dont la defeription pourrait luppléer à la
description de la plante entière . & que ces parties
feraient affez confiantes pour ne manquer à aucune
plante, affez variées pour fournir des caractères à
chaque clpece , & affez évidentes pour être
ment reconnues. C'a é*é par le moven de ces attri-
buts imaginaires, que l'on a prétendu réduire la no-
menclature en fylleme, en métltddè , en
méthodique; & fi l'on encrait les plus enth
des nomenclateurs , ce fylteme elt le fvftcnv
nature; cependant la nature dément à chaque
de pareils fyltemes. Il n'y a dans les plantes aucunes
parties qui fe manifeftem* dan- tdutes les efpeces : les
fleurs & les ifetnènces, qui p larties
les plus effentielles, & ;
tantes, ne font p;v
peces. C'elt pourtant lu'r les partie
tion , que les tyllemes les plus vantés font é\
Î4i
BOT
Mais comme leur fondement n'eft pas plus sûr que
les rbndemens des autres fyftèmes de nomenclature ,
ils ne fe foùtiennent pas mieux , & ils ne font pas
moins éloignés les uns que les autres du fyftème de
la nature. foye{ Méthode.
En effet , comment peut-on efpérer de foùmettre
la nature à des lois arbitraires ? lommes-nous capa-
bles de diftinguer dans un individu qu'elle nous pré-
fente, les parties principales & les parties accefîoi-
res? Nous voyons des efpeces de plantes, c'eft-à-dire
des individus qui font parfaitement reffemblans ; nous
les reconnoiffons avec certitude, parce que nous com-
parons les individus tout entiers : mais dès qu'on fait
des conventions pour diftinguer les efpeces les unes
des autres , pour établir des genres & des claffes , en
tombe néceffairement dans l'erreur , parce qu'on
perd de vue les individus réels pour fuivre un objet
chimérique que l'on s'eft formé. De-là viennent l'in-
certitude des nomenclateurs fur le nombre des efpe-
ces, des genres & des clafies, & la multiplicité des
noms pour les plantes ; par conléquent toutes les
tentatives que l'on a faites pour réduire la nomen-
clature des plantes en corps de icience, ont rendu
la connoiffance des plantes plus difficile & plus fau-
tive qu'elle ne le feroit, fi on ne le fervoit que de
fes yeux pour les reconnoître , ou fi on n'employoit
qu'un art de mémoire fans aucun appareil fcientili-
que. Ces fyftèmes n'ont fervi à l'avancement de la
Botanique , que par les deferiptions exactes de plu-
fieurs parties des plantes, & par les observations que
l'on a faites fur ces mêmes parties, pour établir des
carafteres méthodiques.
Voilà donc à quoi ont fervi toutes les méthodes
que l'on a imaginées jusqu'ici dans la nomenclature
des plantes. Voyons à préfent ce que Ton pourroit
attendre de ces mêmes méthodes , en luppofant qu'el-
les fuflent portées au point de perfection , tant déliré
par les nomenclateurs. Quiconque feroit bien inftruit
de ce prétendu fyftème de la nature , auroit à la vé-
rité un moyen infaillible de reconnoitre toutes les
efpeces de plantes , & de les diftinguer les unes des
autres : mais l'application de ce fyftème paroîtroit im-
menfe dans le détail ; & ce feroit vraiment un chef-
d'œuvre de combinaifons ck de mémoire , dont peu
de perfonnes feroient capables , crue de pouvoir rap-
porter fans équivoque vingt mille noms à vinet mille
plantes que l'on ne connoîtroit preique pas. D'ail-
leurs un pareil fyftème de nomenclature , une aufîi
grande connoiffance de noms ck de phrafes , ne pour-
roit en aucune façon nous inftruire de la culture &
des propriétés des plantes ; puifque ces deux parties
de la Botanique demandent chacune des obfervations
toutes différentes de celles que fuppofe la nomencla-
ture. Un méthodifte obferve fcrupuleufement la po-
iition , le nombre , ck la forme de certaines parties de
chaque plante : mais il n'en peut tirer aucune confé-
quence pour la culture ; parce que , fuivant ion fyftè-
me , le nombre , la pofition , ck la forme de ces par-
ties, doivent être les mêmes en quelque climat que
fe trouve la plante , ck de quelque façon qu'elle loit
cultivée. Ces mêmes obfervations ne peuvent don-
ner aucune lumière pour les propriétés des plantes.
La preuve en eft connue. Nous lavons parfaitement
que toutes les plantes que l'on rapporte au même
genre , n'ont pas les mêmes propriétés : ce fait a été
conftaté dans tous les fyftèmes de nomenclature qui
ont été faits jufqu'à prélent ; ck malheureufement on
peut dire d'avance qu'il fera confirmé par tous ceux
que l'on pourrra faire dans la fuite. Cependant les
méthodiftes les plus zélés pour la découverte du
prétendu iyfteme de la nature , ont annoncé qu'on
pourroit parvenir à indiquer les propriétés des p'.an-
. tes par les vrais caractères génériques. Ils prétendent
même qu'on a déjà établi plulieurs de ces vrais ca-
BOT
raâeres qu'ils appellent naturels , & qui fe font foûte-
nus dans la plupart des méthodes. Si cela eft , ce ne
peut être que l'effet d'un heureux hafard : car les mé-
thodiftes ne peuvent changer les propriétés des plan-
tes , comme l'ordre de leur nomenclature.
Il feroit bien à fouhaiter qu'il tût poflible d'établir
un pareil fyftème. Cette découverte feroit plus profi-
table au genre humain , que celle du fyftème du mon-
de : cependant elle ne nous difpenferoit pas de taire
des expériences pour découvrir de nouvelles pro-
priétés dans les plantes : il y auroit beaucoup de gen-
res qui ne comprendroient que des efpeces dont on
ne connoîtioit pas les piopriétés. Quoiqu'on pût ti-
rer quelque indication de la propriété générale attri-
buée à la claffe, il faudrait encore acquérir de nou-
velles lumières pour afhgner le degré d'efficacité des
plantes d'un de les genres: d'ailleurs toutes les efpe-
ces d'un même genre feroient -elles également acti-
ves, demanderoient-elles la même préparation , &c.
Je n'infifterai pas davantage fur une fuppofiîion chi-
mérique ; il me fuffira de faire obferver , qu'autant la
nature eft indépendante de nos conventions , autant
les propriétés des plantes font indépendantes de leur
nomenclature. Peut-être que les deferiptions com-
plètes des plantes pourraient donner quelques indi-
ces de leurs propriétés : mais que peut -on attendre
d'une defeription imparfaite de quelques parties? On
conçoit que la delcription exacte d'un animal , tant à
L'extérieur qu'à l'intérieur , peut donner quelque idée
de fes qualités. Mais fi l'on n'obiervoit que les par-
ties de la génération , comme on prétend le faire dans
les plantes , que pourroit-on conciurre de cet animal*
à peine pouirait-on l'avoir s'il eft plus ou moins fé-
cond qu'un autre. S'il eft vrai que certaines plantes ,
dont les parties de la fleur & du fruit font l'embla-
bles à quelques égards , ayent les mêmes proprié-
tés , c'eft un fait de hafard qui n'eft point confiant
dans les autres plantes. Ces combinaifons fortuites
peuvent arriver dans tous les Iyftèmes des nomen-
clateurs : mais je penfe qu'il n'eft pas plus poiîible de
trouver leur prétendu fyftème naturel, que de juger
de la qualité des fruits lans les avoir goûtés.
Non - feulement la nomenclature des plantes ne
peut contribuer en rien à la connoiffance de leur cul-
ture , ni de leurs propriétés , mais elle y eft tres-pré-
judiciable en ce qu'elle retarde l'avancement de ces
deux parties de la Botanique. La plupart de ceux qui
le font occupés de cette Icience depuis le renouvel-
lement des lettres, fe font appliqués par préférence
à la nomenclature. Que de méthodes fe lont détrui-
tes en fe fuccédant les unes aux autres ! que de vains
efforts pour parvenir à un but imaginaire ! Mais tou-
tes ces tentatives ont marqué beaucoup de foin , de
fineffe , ck de fagacité dans le plus grand nombre des
méthodiftes. Ils auraient pu s'épargner bien des fati-
gues , ou en faire un meilleur emploi , en s'appliquant
à la culture ou aux propriétés des plantes. Une feule
méthode fuffifoit pour la nomenclature ; il ne s'a-
git que de le faire une forte de mémoire artificielle
pour retenir l'idée & le nom de chaque plante, parce
que leur nombre eft trop grand pour fe paffer de ce
lecours : pour cela toute méthode eft bonne. A pré-
lent qu'il y en a plufieurs , ck que les noms des plan-
tes le font muitipliés avec les méthodes , il feroit à
fouhaiter qu'on pût effacer à jamais le fou venir de
tous ces noms luperflus , qui font de la nomenclature
des plantes une feience vaine ck préjudiciable aux
avantages réels que nous pouvons efpérer de la Bo-
tanique par la culture ce par les propriétés des plantes.
Au lieu de nous occuper d'une fuite de noms vains
& lurabondans , appliquons-nous à multiplier un bien
réel ck neceffaire ; tâchons de l'accroître au point
d'en tirer affez de fuperflu pour en faire un objet de
commerce. Tel eft le but que nous préfente la Bou-
BOT
BOT
nique, dans la féconde partie, qui eft la culture des
plantes. Il ne dépend pas toujours de nous de décou-
vrir leurs propriétés ; nous ne pouvons jamais les mo-
difier à notre gré : mais il eft en notre pouvoir de mul-
tiplier le nombre des plantes utiles , & par conféquent
d'accroitre la fource de nos biens , & de la rendre
intariffable par nos foins. Les anciens nous en ont
donné l'exemple : au lieu de paffcr tout leur tems &c
d'employer tous leurs foins à des recherches vaines
fur les caractères diftin&ifs du froment , du feigle ,
de l'orge , du riz , de l'avoine , du millet, du panic ,
du chiendent, &c des nombreufes fuites d'efpeces que
l'on prétend rapporter à chacun de ces genres , ils
fe font uniquement appliqués à cultiver celles de
toutes ces plantes dont ils connoiffoient l'utilité. Ils
font parvenus , à force de travail & de conftance , à
les rendre allez abondantes pour fournir aux befoins
des hommes & des animaux domeftiques. C'eft en
perfectionnant l'art de la culture des plantes , qu'ils
ont trouvé le moyen de les diftribuer fur la furface
de la terre dans l'ordre le plus convenable à leur
multiplication & à leur accroiffement. On a femé les
terres qui pouvoient produire d'abondantes moif-
fons ; on a planté des vignobles dans les lieux pro-
pres à la maturité du raifin ; on a fait des pâturages ;
on a élevé des forêts, &c. enfin on a fu aider la na-
ture , en raffemblant les plantes utiles dans les lieux
les plus convenables, & en écartant de ces mêmes
lieux, autant qu'il étoit poffible , toutes les plantes
inutiles. Voilà l'ordre le plus néceffaire, & l'arran-
gement le plus fage que l'on puifïe mettre dans la di-
vifion des plantes : auffi c'a été le premier que les
hommes ayent fenti & recherché pour leur propre
Utilité, f^oyei AGRICULTURE.
La connoiffance de la nature du terrein & de la
température du climat , eft le premier principe de l'A-
griculture. C'eft de l'intelligence de ce principe , &
du détail de fes conféquenecs , que dépend le fuccès
de toutes les pratiques qui font en ufage pour la cul-
turc des plantes. Cependant on n'eft guidé que par
des expériences groffieres, pour reconnoître les dif-
férens terreins. Les gens de la campagne ont fur ce
fujet une forte de tradition , qu'ils ont reçue de leurs
percs, & qu'ils tranfmcttent à leurs enfans. Ils fup-
pofent chacun dans leur canton, fans aucune con-
noiflance de caule, du moins fans aucune connoif-
fance précife , que tel ou tel terrein convient ou ne
convient pas à telle ou telle plante. Ces préjugés bien
ou mal fondés , parlent fans aucun examen ; on ne
penie feulement pas à les vérifier : l'objet ell cepen-
dant allez important pour occuper les meilleurs Phy-
ficiens. N'aurons -nous jamais des fyftèmcs raifon-
nés , des diftributions méthodiques des terreins , des
climats , relativement à leurs productions ; je veux
dire , de ces fyltèmes fondés fur l'expérience ?
La convenance du climat eft moins équivoque que
celle du terrein , parce qu'on la détermine aifément
parla maturité des fruits, ou par les effets de la gelée :
niais on n'a pas a fiez obiervé combien cette conve-
nance de température a de fréquentes viciffitudes
dans un même lieu. Les deux principales caufes de
ces changemens font les coupes des forets , ou feule-
ment des arbres épais , ce qui diminue la quantité des
brouillards ; 8c l'élévation des vallons , ou lentement
des bords des rivières & des ruiffeaux , ce qui deffe-
che le terrein &c rend les inondations moins fréquen-
tes. On conçoit aifément quels changemens ces deux
Califes peuvent occafionner dans la température du
climat par rapport aux plantes. Il feroit trop long de
fuivre ce fujet clans les détails. Je me contenterai de
faire dbferver que l'on ne doit pas renoncer à culti-
ver telle plante clans tel lieu , parce qu'elle n'y a pas
réuffi pendant quelque tems. On ne doit pas craindre
de multiplier les expériences en Agriculture ; le moin-
343
dre fuccès dédommage abondamment de toutes les
tentatives inutiles.
On peut diftinguer deux principaux objets dans la
culture des plantes. Le premier eft de les multiplier,
& de leur faire prendre le plus d'accroiffement qu'il
eft poftible. Le fécond eft de perfeftionner leur na-
ture , & de changer leur qualité.
Le premier a du être apperçû dès qu'il y a eu des
hommes qui ont vécu en nombreufe fociéte. Les ef-
fais que l'on aura faits dans ces premiers tems, étoient
fans doute fort greffiers : mais ils étoient fi néceffai-
re? >.{F'on a neu d'être furpris qu'ils n'ayent pas été
fuivis jufqu'à préfent de plus de progrès. Nous ne l'a-
vons pas combien de moyens différens ont été em-
ployés pour labourer la terre depuis que les hommes
exiftent : mais nous ne pouvons pas douter que ceux
que nous employons ne puiffent encore devenir meil-
leurs , & même qu'il n'y en ait d'autres à trouver qui
vaudraient bien mieux. Cependant la charme eft
toujours la même depuis plufieurs fiecles , tandis que
les modes de nos ameublemens & de nos équipa-
ges changent en peu d'années , & que nous fommes
parvenus à cet égard à un point de commodité qui
ne nous laifte prefque rien à defirer. Que l'on com-
pare une charrue à*ine chaife de pofte , on verra
que l'une eft une machine groffiere abandonnée à
des mains qui le font encore plus ; l'autre au contraire
eft un chef-d'œuvre auquel tous les Arts ont concou-
ru. Notre charrue n'eft pas meilleure que celle des
Grecs & des Romains : mais il a fallu bien plus d'in-
duftrie & d'invention pour faire nos chaifes de pofte,
qu'il n'y en a jamais eu dans les chars de triomphe
d'Alexandre & d'Augufte. L'art de la culture des ter-
res a été négligé, parce qu'il n'a été exercé que par
les gens de la campagne ; les objets du luxe ont pré-
valu même en Agriculture ; nous fommes parvenus
à faire des boulingrins auffi beaux que des tapis , Se
à élever des paliflades de décoration. Enfin nous con-
noiffons l'architecture des jardins , tandis que la mé-
chanique du laboureur n'a prefque fait aucuns pro-
grès. Cependant les moyens de multiplier les plantes
ik de les faire croître , femblent être à la portée de
tous les hommes ; & je ne doute pas qu'on ne pût
arriver en peu de tems à un haut degré de perfec-
tion , fi ceux qui font capables d'inftruire les autres ,
daignoient s'en occuper plus qu'ils ne le font.
Il paraît qu'il eil plus difficile de produire des chan-
gemens dans la nature des plantes , & de leur don-
ner de meilleurs qualités qu'elles n'en ont naturelle-
ment. On y eft pourtant parvenu par le moyen de la
greffe & de la taille des arbres. Cet art eft connu de-
puis long-tems ; & il a , pour'ainfi dire, furvécu à la
plupart de fes effets. Nous favons des anciens qu'ils
avoient le fecret de tirer des femences du pommier
& du poirier fauvages des fruits délicieux. Ces fruits
ne font pas venus jufqu'à nous : mais nous avons fû
faire des pommes & des poires , que nous ne chan-
gerions pas pour celles des Romains ; parce que nous
avons femé , greffé , & taillé les arbres auffi bien
qu'eux. Cet art précieux eft inépuifable dans fes
productions. Combien ne nous reftc-t-il pas d'expé-
riences à faire , dont il peut réfulter de nouveaux
fruits qui feraient peut-être encore meilleurs que
ceux que nous avons déjà trouvés?Ce que nous avons
fait pour les arbres S: les arbriffeaux ne peut -il pas
auffi fe faire pour les autres plantes , fur-tout depuis
que nous croyons favoir comment s'opère leur géné-
ration , en fubilituant aux pouffieres fécondantes
d'une plante, des pouffieres d'une autre cfpece? n'y
auroit-il pas lieu d'elpérer qu'elles produiraient dans
le piftil de nouveaux germes , dont nous pourrions
tirer des fortes de mulets, comme nous en avons
dans les animaux ; & que ces mulets de plantes au-
raient de nouvelles propriétés, dont nous pourrions
344
BOT
faire ufage. Le nombre des variétés auxquelles la na-
ture peut lé prêter, eft prefque infini : c'eft de ces
variétés que nous avons tiré nos meilleurs fruits. Si
nos prunes, nos pêches, nos abricots ,• &c. ne l'ont pas
des elpeces conltantes , ce font au moins des produc-
tions préférables à la plupart des elpeces conltantes ,
& bien dignes par leur utilité d'occuper les Botanil-
tes , qui lemblent les dédaigner Se en abandonner le
foin aux Jardiniers.
La transmigration des plantes n'eft pas un des moin-
dres objets de leur culture : en tirant de l'étranger
une nouvelle plante utile , on s'approprie un nou-
veau bien qui peut devenir meilleur que ceux dont
on joiiiiîbit auparavant. Le plane , l'orme , le maron-
nier, le pêcher , l'abricotier, le rofier , & tant d'au-
tres , ont été tranfportés de pays fort éloignés , & ont
été , pour ainli dire , naturaliiés chez nous. La nature
a favorifé la première tentative que l'on a faite pour
leur tranfplantation : mais combien y a-t-il de plan-
tes qui nous paroiffent trop délicates pour réfifter à
notre climat , & qui pourraient peut-être y vivre , li
on les en approchoit par degrés ; li au lieu de les tranl-
porter brulquement d'un lieu chaud à un lieu troid ,
on les dépoioit fuccelïivement dans des climats de
température moyenne , & fi on Jeur donnoit le teins
de le fortifier avant que de les expoler à la rigueur
de nos hyvers ? Il faudroit peut-être plufieurs géné-
rations de la même plante dans chaque dépôt , &
beaucoup d'induftrie dans leur culture , pour les ren-
dre plus robuftes : mais quels avantages ne tireioit-
on pas de toutes ces expériences, fi on réuffiffoit dans
une feule ? Je fai qu'il n'eft pas polîîbic de l'uppléer à
la chaleur du foleil pour les plantes qui font en plein
air: mais on rapporte fouvent au détaut de chaleur
ce qui ne dépend que du terrein , & je crois qu'il eft
toujours poliible de le rendre convenable à la plante
que l'on veut cultiver.
Tous ces différens objets d'agriculture font bien
dignes d'occuper les hommes , & principalement
ceux qui le font voués à la Botanique : mais les pro-
priétés des plantes nous touchent encore de plus
près , c'eft le bien dont l'agriculture nous prépare la
joiïiffance. Nous devrions réunir tous nos efforts pour
y parvenir ., & nous appliquer par préférence à dé-
couvrir de nouvelles propriétés.
Nous devons certainement au hafard la plupart
de celles que nous connoiifons ; & la découverte
des autres eft fi ancienne , que nous en ignorons l'hif-
toire. Pour juger des tems palîès par ce qui le fait à
prélent au lujet des propriétés des plantes , il eft très-
probable qu'on n'en a jamais connu aucune que par
des circonftances fortuites. Bien loin d'avoir eu des
principes pour avancer cette connoillance , on a lou-
% ent pris les plantes des plus lalutaires pour des poi-
fons, tandis que l'on mettoit en ufage celles dont les
effets auroient paru tres-dangereux , fi on les avoit
examinées lans prévention. On a peine à concevoir
que les hommes gardent des préjugés contre leurs pro-
pres intérêts, cependant on n'en a que trop d'exem-
ples : on s'eft fouvent laiffé prévenir fans raifon pour
ou contre des remèdes dont on failbit dépendre la vie
ou la mort des malades ; chacun les employoit ou les
rejettoit à l'on gré , fans trop penfer à en déterminer
les vraies propriétés. D'où vient donc cette indiffé-
rence pour des chofes qui nous intéreffent de fi près ?
Notre amour pour la vie n'eft point équivoque , &
cependant nous femblons négliger ce qui peut la
conlerver. Nous favons que les propriétés des plan-
tes lont les moyens les plus doux & fouvent les plus
sûrs pour rétablir notre fanté , ou pour prévenir nos
maladies ; & l'art qui pourrait nous conduire à re-
connoître ces propriétés n'eft pas encore né. Que
d'arts frivoles ont été portés à leur comble ; que de
connoiffançes vaines ont été accumulées au point de
BOT
former des feiences , tandis que l'on s'eft contenté
de faire une lifte des plantes ufuelles dans la Méde-
cine , & de diftinguer leurs propriétés par un ordre
méthodique qui les repartit en clalTes & en genres !
On a compris dans une même clalïe les plantes éva-
cuantes , ôc dans une autre les plantes altérantes :
les purgatives, les émétiques font des genres delà
première clalTe ; & la féconde eft divifée en plantes
céphaliques , béchiques , cardiaques , diurétiques ,
diaphoniques , &c. Voye\ Matière médicale.
Cette méthode eft tres-incomplete ; parce qu'à
l'exception du genre des purgatifs qui eft partagé en
purgatifs forts 6c en purgatifs minorants , il n'y en
a aucun autre qui loit lous-divilé ; & parce que dans
tous les elpeces ne font point déterminées , les plan-
tes y font feulement raffemblées pêle-mêle fans être
caraclérifées , de façon que l'on puiffe diftinguer leurs
propriétés de celles des autres plantes du même gen-
re. Cependant cette méthode eft bonne , en ce qu'elle
eft moins arbitraire qu'aucune méthode d'hiftoire
naturelle ; fes caractères dépendant des effets que
produifent les plantes fur le corps humain , l'ont aufïï
conftans que la nature des plantes & que la nature
humaine : aulîî cet ordre méthodique n'a point été
changé jufqu'ici ; & je crois qu'il vaudrait bien mieux
le développer en entier & le Cuivre dans les détails,
que de penfer à en faire d'autres. L'abus que l'on a
fait des méthodes dans les nomenclatures des plan-
tes , doit nous préferver d'un pareil abus dans l'ex-
pofé de leurs propriétés , qui ne peut être que le ré-
l'ultat de nos obfervations.
Il fe préfente naturellement deux objets princi-
paux dans les obfervations qui peuvent nous con-
duire à la connoiffance des propriétés des plantes.
Le premier eft de déterminer l'effet des propriétés
connues , & de le modifier dans les différentes cir-
conftances. Le fécond eft de trouver les moyens de
découvrir de nouvelles propriétés.
Le premier a été bien fuivi par les bons obferva-
teurs , tant pour les remèdes intérieurs de la Méde-
cine , que pour les topiques de la Chirurgie par rap-
port au règne végétal. Auffi eft-ce par le réfultat de
ces obfervations que l'on conftate la plupart des con-
noiffançes de la matière médicale , qui eft fans doute
une des parties les plus certaines de la Médecine.
Mais ces mêmes obfervations font imparfaites en ce
qui dépend de la Botanique & delà Pharmacie , c'eft-
à-dire de l'état aftuel de la plante que l'on employé
& de fa préparation. On ne fait pas bien en quoi dif-
férent les propriétés d'une racine arrachée au prin-
tems ou en automne , en été ou en hyver ; une fleur
cueillie , des feuilles léchées , une écorce enlevée ou
un bois coupé dans ces différentes faifons ; en quelle
proportion l'efficacité des plantes augmente ou di-
minue à melure qu'on les garde après les avoir re-
cueillies ; quelle différence y occafionne un deffe-
chement plus ou moins prompt , & la façon de les
tenir dans un lieu plus ou moins fermé ; en quoi les
propriétés des plantes dépendent de leur âge , du ter-
rein , & du climat dans lequel elles croiffent, &c. Si
onaquelques connoiffançes des effets que produifent
ces différentes circonftances , ce font des connoif-
fançes bien vagues & bien éloignées du point de pré-
cifion qu'exige 1 importance du lujet. On n'a jamais
fait des expériences affez fuivies pour avoir de bon-
nes obfervations fur ces différens objets : dételles ob-
fervations pourraient nous faire connoître la meil-
leure façon de préparer les plantes pour modifier
leur efficacité à tel ou tel point. Nous finirions au
moins quel changement arrive dans la propriété
d'une plante par une infufion plus ou moins longue,
& par quantité d'autres préparations.
Il fera fans doute plus facile de déterminer l'effet
des propriétés connues dans les plantes , & de les
modifier
BOT
modifier par différons procédés , que de trouver le
moyen de découvrir des vertus nouvelles. Les Chi-
miftes avoient entrepris cette recherche , & avoient
cm pouvoir y parvenir en décompofant les plantes ,
& en en faifant une analyfe exaûe : mais les plus ha-
biles artiftes ont échoué dans cette entreprife ; les
résultats de l'analyfe n'ont pas été d'accord avec les
qualités les plus connues des plantes analyfées. On
a même prétendu que les plantes les plus oppofées
en vertu, fe réduifoient aux mêmes principes. Enfin
on a abandonné la voie de l'analyie , après s'être
cpnvaincu qu'elle ne pouvoit conduire à aucune
connoiffance certaine fur les propriétés des plantes.
Que de travaux infructueux ! La plûpart-des plantes
ufuelles avoient été analyfées ; on les avoit déjà ca-
raftérif ces par les principes auxquels elles avoient été
réduites , & on efpéroit que cette méthode nous fe-
roit connoître les propriétés d'une nouvelle plante
par les réfultats de fon analyfe.
Il faut donc renoncer à cette erreur , quelque fla-
teufe qu'elle foit : mais pour avoir fait des tentatives
inutiles , on ne doit pas le décourager dans un fujet
auffi important. Il s'agit à préfentde fubftituer à l'a-
nalyfe des plantes quelqu 'autre moyen de découvrir
leurs propriétés : dût-on échoiier de nouveau après
une longue fuite d'expériences , on ne peut trop les
multiplier, pour peu que le fuccès foit probable. On
vient de faire une découverte dont on pourroit tirer
des lumières pour cette recherche. M. de Buffon nous
a fait voir des corps mouvans , non-feulement dans
les femences des animaux , mais dans celles des plan-
tes. Lorfqu'on a fait infufer pendant quelque tems
des femences broyées ou d'autres parties d'une plan-
te, on y voit , par le moyen du microfcope , des par-
tics organiques qui fe développent , qui le meuvent
de différentes manières , & qui prennent des figures
différentes. Hiji. nat. tom. II. Foye{ Animalcule.
Cette belle découverte qui a , pour ainfi dire , dé-
voilé aux yeux de fon auteur le myftere de la repro-
duction des animaux & des plantes , pourroit peut-
être nous rendre les propriétés des plantes fenlibles
aux yeux. Ce fut la première réflexion que je fis ,
lorfque M. de Buffon me montra ces corps mouvans
dans toutes les infufions de plantes qu'il mit en ex-
périence pour la première fois, après qu'il eut con-
clu , que puiiqu'il y avoit des parties organiques ien-
fibles dans les femences des animaux , elles dévoient
auffi fe trouver dans celles des plantes. Cette induc-
tion , qui ne pouvoit venir que d'un génie tait pour les
plus grandes découvertes, a été confirmée par toutes
les expériences qui ont été faites depuis. M. Nécdham
en a fait beaucoup en vue de la végétation. Nouvell.
cbf. microfeop . J'en ai fait quelques-unes par rapport
aux propriétés des plantes , & je crois qu'il feroit à
propos d'en faire bien d'autres, pour tâcher de par-
venir par ce moyen à déterminer les différences en-
tre les propriétés connues, & à en trouver de nou-
velles. Le développement, la fituation , la figure, le
mouvement , la durée de ces corps mouvans pour-
roient fervir de règle & de menue pour juger des pro-
priétés de la plante , & pour évaluer leur efficacité.
J'qyq HlSTOIEF. NATURELLE, PLANTE. (7)
BOTANOMANCIE , f. f. divination qui le faifoit
par le moyen des plantes & des ai m ineaux. Ce mot
elt tonné du Grec /Sorar») , herbe , 6c de juavthu. , divi-
nation.
On fe fervoit, dans la botanomancie , de branches
ou de rameaux de verveine, de bruyère , de figuier,
& d'autres iimptes ou arbriffeaux , fur lefquels on
écrivoit le nom Cv la queflion du confultant. Les au-
teurs ne nous dilent pas de quelle manière le faifoit
la réponfe , ni par quels lignes elle 1e manifeftoit. Il
cil à préfumer que les prêtres ou les devins la ren-
doient de vive-voix. On faifoit grand ufage dans la
Tome II.
BOT
H*
botanomancie de blanches de tamarin ou de bruyère ,
parce que cet arbrifTeau étoit particulièrement con-
facré à Apollon., qui préfidoit à la divination, & à
qui l'on avoit donné le fumoir, de myricœus , du Latin
myrica , qui lignifie bruyère , & à celle-ci l'épithete de
prophétique. Au refte il ne faut pas confondre la divi-
nation dont nous parlons ici, avec la coutume qu'a-
voit la fibylle de Cumes d'écrire lès réponfes fur des
feuilles. (G )
BOTHNIE , ( Géog. ) province confidérable de
Suéde , fur le golfe du même nom , qui la divife en
orientale & occidentale.
BOTHRION, f. m. (Chirurgie.') nom d'une efpece
d'ulcère creux , étroit , & dur , qui fe forme iur la
cornée tranfparente & fur l'opaque. On l'appelle aufîi
fojfette, fojfula ou annulus, à caule de fa profondeur.
La cure ne diffère point de celle des autres ulcères qui
attaquent ces parties. Voye^ Argema. (T)
BOTHYNOE ou Antres , ( Phyfique. ) forte de
météore. Voye^ Aurore boréale. (O)
BOTRYTIS , f. f. (Hifi. nat. bot.) genre de plante ,
qui ne diffère du byjjus que parce qu'elle dure très-
peu , & par l'arrangement de fes femences, qui font
difpofées en grappe ou en épi au bout des tiges ou
des rameaux. Micheli, Nova plantarum gênera, f'oye^
Plante. (/)
La bothrytes ou bothrytis eu botrys vulgarïs , offic.
Germ. 2.5 o. eft amere au goût , & fon odeur eft forte,
mais non defagréable ; eiie eft chaude de fa nature ,
defféchante, réfolutive, apéiitive, déterf.ve, & pur-
gative ; elle empêche la putréfaction , & eLe elt d'une
efficacité imguliere dans les opprefïïons , les toux, la
difficulté de refpirer , & toutes les maladies froides de
la poitrine ; elle elt bonne pour diffiper les matières
vilqueufes contenues dans les bronches ; elle levé les
obftruftions du foie , des reins , & de la matrice , gué-
rit la jauniffe , prévient les hydropifies , hâte les rè-
gles & les vuîdanges , & calme les douleur? du bas-
ventre & de l'utérus.
Les dames Vénitiennes regardent le botrys comme
un remède infaillible contre les accès de la paffion
hyfterique.
L'eau , la conferve , & le looeh de botrys font ex-
cellens dans toutes les maladies de la poitrine & du
bas-ventre.
L'herbe bouillie dans une leffive quelconque tue
la vermine; & fi l'on en lave la tête, elle emportera
la gale.
On affûre que cette plante femée avec le grain ,
tue les vers qui font nuilibles au grain. Barthol.Zorn,
Bot anal og. (A7)
BOTTAGE, f. m. (Commerce.) eft un droit que
l'abbaye de S. Dcnys en France \c\ e fur tcn:s les ba-
teaux & marchandées qui parlent fur la rivière de
Seine , à compter du jour S. Dcnys, 9 Oclobie, juf-
qu'à celui de S. André, 30 Novembre.
Ce droit eft allez fort, pour que les marchands
prennent leurs mefures de bonne heure pour Invi-
ter , foit en prévenant l'ouverture de ce droit pour le
paffage de leurs marchandées , foit en différant juf-
qu'à la clôture, fur- tout fi ces marchandées font do-
gros volume. (G)
BOTTE, 1. f. (Manège.) chauffure de cuir-fort,
dont on fe fert pour monter à cheval : elle eft com-
polée de la genouillère , d'une tige auffi large en-haut
]ires du genouil , qu'en-bas pies du cou-de-pie , èv d'un
lbulier armé d'un éperon qui tient à la r:ge. La botte-
fbrtt cil celle dont la tige eft dure & ne tint aucun pli ;
elle lert ordinairement aux chaffeurs, aux poftillons,
& à la cavalerie. Voye\ PI ■ < ORDONNIER-
bottier ,fig. 4J. La botte-molle, eft celle qui fait
plufieurs plis au-deffus du cou-de-j
tes & les dragons s'en fervent . Les bottts à ta ho
& à VAngloïfe font molles &. n'ont point de genôuil-
Xx
34<*
BOT
1ère. On met quelquefois aux chevaux qui fe cou-
pent , un morceau de cuir qu'on attache avec des
boucles, & qui entoure la jambe dans l'endroit où le
cheval fe coupe. On appelle ce cuir une bout. Poycr^
la fuite de cet article. (F)
Botte à baleine, en terme de Bottier , c'eft une ef-
pece de botte molle , foûtenue par plufieurs brins de
baleine enfermés dans des fourreaux. Ce font ces
bottes que l'on garnit, fur-tout de garnitures rondes.
Voye{ Garnitures rondes.
BOTTE ie chajj'e, en terme de Bottier. Voyc{ BOTTE
DE COUR.
Botte à chaudron , en terme de Bottier. V. BOTTE
DE COUR.
BOTTES à contrefort , en terme de Bottier , font des
bottes qu'on garnit de pièces rapportées fur la tige ,
pour les rendre plus fermes. Voye\ Contre-fort.
Botte de cour , en terme de Bottier , eft une efpece
de botte dont la genouillère eft évafée en forme d'en-
tonnoir ou de chaudron , ce qui les fait aulli nommer
bottes à chaudron. On les appelle cependant le plus
ordinairement bottes de cour, parce que c'eft de cette
efpece de botte dont toute la luite du Roi ie lert dans
les parties de chaffe ; c'eit proprement l'uniforme des
cavaliers en fait de bottes, f^oye^ GENOUILLERE.
Voye-^ Planche du Cordonnier-bottier ,fig. 4J.
Bottes de courier, font des bottes ainii nommées
parce qu'elles ne fervent guère qu'aux couriei s; elles
font beaucoup plus fortes que les autres : les garni-
tures font jointes l'une à l'autre par des jarretières à
boucles. Ces bottes fe changent de jambe , ce qu'on
ne peut faire avec toutes les autres.
BOTTES, demi-chajje , ( en terme de Bottier ) font
les bottes dont le dedans de la genouillère eft échan-
cré ; ce qui la diflingue de la botte de chajj'e , ou à
chaudron , qui ne l'eft point. Voye{ Botte de
CHASSE, OU à CHAUDRON.
BOTTES , demi-chajfe à quatre coutures , ( en terme
de Bottier') font des bottes ornées de quatie cordons
en manière de couture fur les quatie faces. Poye{
Couture.
BOTTES de gardes du Roi , ( en terme de Bottier)
font des bottes dont les genouillères lont grandes &
quarrées , & les garnitures rondes ou en foi me de fil.
BOTTES de moufquetaire , ( en terme de Bottier) iont
des bottes auxquelles on a laiiie un pli derriei e le
talon , qui fait que la botte fe plie en marchant ; ce
qui lui donne à peu près le même ulage que la boue
molle , dont on a parlé plus haut.
BuTTES de pojte de courier, (en terme de Bottier)
font des bottes qui ne différent des bottes de courier
ordinaire, que parce qu'elles ont double tige. Voye^
Tige.
Botte , aller à la botte, ( Manège ) c'eft une ac-
tion d'un cheval colère , qui porte la bouche à la
botte ou à la jambe de celui qui le monre pour mordre.
Serrer la botte , (Manège ) eft une expreffion figu-
rée , qui veut dire prelier un cheval d'avancer en
ferrant les jambes. Ce terme eft ulité à la guerre.
BOTTE , (en Vénerie) c'eft ainli qu'on appelle le
collier avec lequel on mené aux bois le limier.
* BOTTE, 1. f. eipece de forces dont on fe fert
dans les manufactures de lainage de la piovince de
Champagne, & avec laquelle il eft ordonné par les
reglemens de donner la dernière tonte aux droguetsi,
BOTTE , tonneau ou vaifleau de bois propre à
mettre du vin ou d'autres liqueurs. On dit une boue
de vin iïEJ'pagne , une botte d'huile.
La botte pour les huiles eft à peu près femblable à
un muid. Ceiles pour les vins lont plus larges par le
milieu que par les extrémités , allant toujours en di-
minuant depuis le bondon julqu'au jabie.
Le terme de botte eft ufité particulièrement dans
les piovinces de France , qui approchent de l'Italie ,
BOT
où l'on appelle bottais un tonnelier. Il eft aufTi en ufa-
ge chez les Efpagnols , où la botte contient trente aro-
bes de vingt-cinq livres chacune. Voye-^ Arobe.
En Angleterre la botte contient cent vingt-fix gal-
lons, c'eft-à-dire 504 pintes de Paris. Foye?^ Gallon.
En Bretagne , on jauge les bottes par veltes ; cha-
que velte eft eftimée 4 pots , c'eft-à-dire 8 pintes me-
lure de Paris.
Les boues de Portugal jaugent 67 à 68 veltes , cel-
les d'Efpagne ne font pas fi grandes.
Les bottes d'huile d'Efpagne & de Portugal pefent
environ un millier. Il y a aufti des demi-bottes.
La botte de Venile eft la moitié de Yamphora. Foye*
Amphoka. Celle de Lisbonne eft moindre que celle
d'Efpagne , la première ne rendant à Amfterdam
que 16 à 17 ftekans , & l'autre 36 à 37.
HOTTE fe dit auffi d'un fagot, ou paquet de plu-
fleurs choies de la même efpece liées eniemble. Une
botte d'échalas , une botte de lattes , une botte d'allu-
metes , &c.
Botte de paille ou de foin , ( Œconom. rufiiq. ) eft
une certaine quantité de paille ou de foin , qu'on
entoure avec des liens de même nature , & qui pefe
plus ou moins ielon les différentes pays : on en nour-
rit les chevaux qui lont à l'écurie.
Botte de mouchoirs , ie dit d'un paquet de mouchoirs
des Indes qu'on vend au Caire ; dix-huit fins, ou dix
gros , font une botte.
Botte , foie en boue, paquet de foie platte ou autre
pliée de la longueur d"un pié lur deux pouces d'épaif-
leur en tout iens , & dont la livre eft de 1 5 onces.
Boue eft auih le nom qu'on donne aux gros pa-
quets de chanvre du poids de 1 50. (G)
BOTTE de corde de boyau, (teime de Boyaudier)
c'eft ainli qu'on nomme un petit paquet de cordes
de boyau plié en lept ou huit plis. Voye^ Corde
À boyau.
Botte de parchemin, c'eft une certaine quan-
tité de peaux ou de feuilles de parchemin liées en*
femble en paquet.
La botte de parchemin en coffe , aufïi bien que celle
de parchemin raturé, foit qu'il ioitéquarrié ou non,
eft compofée de trente-iix peaux.
Le parchemin raturé mis en cahier fe vend auffi à
la botte , qui eft compofée de foixante & douze feuil-
les, ou de dix-huit cahiers de quatre feuilles chacun.
Voye7^ Parchemin.
Botte de bordure, (en terme de Boi fêler! e) c'eft:
une douzaine de feuilles de hêtre de iix pouces de
largeur, liées eniemble & préparées pour faire des
bordures.
BOTTE de féaux , ( en terme de Boiffelerie ) c'eft un
paquet de fix corps de féaux , tels qu'ils iortent de
la premieie main &c de la forêt.
i.OTTE ou ESTOCADE, (en terme de Maître en fait
d'armes.) Voye^ ESTOCADE.
BOTTE, 1. f. (terme de Sellier) c'eft une efpece de
marche-pié, fait de maroquin en deifus, rembouré
par délions le maroquin, 6c iùfpendu par des cour-
roies de cuir aux côtés ou brancards d'une berline,
d'un carrolîe, & de toute autre voiture, vis-à-vis
des portières ; on appuie le pié iùr la botte pour en-
trer dans la voiture. P'oye^ les Planches du Sellier.
BOTTELAGE , f. m. ( Œconom. rufiiq. ) c'eft l'ac-
tion de mettre en botte ; celui-ci fe dit particulière-
ment du foin. Voye-t Foin.
BOTTELER , v. aft. (Jardinage?) c'eft mettre en
botte. On dit botteler du foin , & en général on peut
le dire de toutes les plantes , telles que les buis , les
raves , les aiperges dont on fait des bottes. Une botte
de ces dernières plantes eft à peu-pres la valeur de
deux ou trois poignées eniemble. On dit auffi des bot-
tes d'échalas, de foin, de paille, de charmille, d'oiier,
&c. Poyeiplus haut l'articli BOTTE. (K)
BOU
B O U
347
BOTTELEUR , f. m. ( (Econom. rufiiq. ) homme
de journée employé à mettre le foin en botte. Voyt^
Foin.
BOTTER , ( se) fignifie mettre des bottes pour
monter à cheval. On dit aufîi qu'un cheval fe botte
lorfque marchant dans un terrein gras , la terre lui
remplit le pié & y refte. ( ^)
BOTTIER , f. m. eft celui qui fait & vend toutes
fortes de bottes molles , fortes, bottipes. Les Bottiers
font du corps des Cordonniers , & ne fe fervent point
d'autres outils qu'eux. Voye^ Cordonnier.
BOTTINES , f. f. chez les Boyaudiers , ce font des
morceaux de cuir fouple ou de peau , que ces ou-
vriers s'attachent au-defhis du coup-de-pié, afin d'em-
pêcher que l'ordure & l'eau n'entrent dans leurs fou-
liers , loriqu'ils travaillent les boyaux deftinés à fai-
re des cordes. Ces bottines reffemblent affez aux mor-
ceaux de peau que les Tailleurs de pierre fe mettent
aux jambes , pour empêcher que les éclats des pier-
res n'entrent dans leurs fouliers & ne les blefTent.
Bottines , ( en terme de Bourfier ) c'eft une efpe-
ce de botte de ter revêtue de cuir , pour foùtenir la
jambe d'un enfant lorl qu'elle eft trop foible , ou qu'el-
le prend un pli contre nature.
Bottines , f. f. {[Bottier ) on donne ce nom à une
chauffure de cuir fort 6c dur j qu'on met à fes jam-
bes pour monter à cheval : elle diffère de la botte ,
en ce que la tige &: la genouillère font fendues en
long par le côté , & fe rejoignent par des boucles ou
des boutons ; en ce qu'elle fuit précifément le moule
de la jambe , & en ce que le foulier n'y eft point at-
taché. Voy&{_ PL du Bottier , fig. 30.
Bottines fortes à tringles, (jn terme de Bottier.')
font des efpeces de bottes dont la tige eft aufïi forte
que les groffes bottes. Elles n'ont point de pié , &
le ferment au bas de la jambe par une tringle de fer
qui règne tout le long de la tige , 8c s'emboîte dans
un anneau.
Bottines àpaffans , (en terme de Bottier.} font des
bottines qui fe ferment par des efpeces de bouton-
nières de cuir coufues le long de la tige , & qui fe
paffent les unes dans les autres jufqu'à la dernière
qui s'arrête par un bouton. Voye^ Passans , & la
fig. 50 PI. du Cordonnier-Bottier.
Bottines à la dragonne. Elles ont la tige dure com-
me la botte : elles lont ouvertes tout du long par le
coté , & elles emboîtent la jambe jufte; 6c le long
du côté de l'ouverture eft une verge de 1er qui paffe
par le bas environ d'un pouce , 6c entre dans un
petit anneau de fer qui eft à l'autre côté de la tige,
qui fert à la tenir ferme par le bas , 6c par le haut à
la genouillère; elie eft fermée avec des attaches &
des boucles. Les bottines n'ont point de fouliers.
BOTZENBOURG, (Géog.) ville d'Allemagne
fituée fur l'Elbe , dans le duché de Mcckclbourg. ton.
28.23.lat.53.34.
BOTTWAR, (Géog.) ville du duché de Wurtem-
berg fur la rivière de même nom.
BOVA, (Géog.) petite ville d'Italie au royaume
de Naples , dans la Calabre , près l'Apennin , à 8
lieues de Reggio. Long. 34. 3. lat. 3j. 55.
BOUARD , f. m. gros marteau qui étoit ancien-
nement à 1'ulagc des monnoyeurs. ^"oyeçBoUER.
* BOUBIE ou BOOBY , (. m. (Hift. nat.) c'eft un
oifeau aquatique d'Amérique , qui n'eft pas tout-à-
fait li gros qu'une poule : il eft d un uns clair, a un
bec lemblable à celui d'une corneille, les pattes
larges 6c épattées comme un canard; il -
prendre tres-aifément, car il n'eft point fauvage ;
fa chair eft noire , &: le goût eft comme celui Ue la
chair des poiffons.
BOUC , f. m. hircus. (Hift. nat. Zoolog.) animal
quadrupède, dont la femelle eft appellée
capra, ïoye{ Chèvre. Les Latins donnoiont «ulule
Te me If,
nom de caper au bouc lorfqu'il avoit été coupé ; c'eft
de ces deux derniers noms qu'a été dérivé celui du
genre auquel on a rapporté ces animaux , caprinum
genus.
Le bouc diffère du bélier en ce qu'il eft couvert de
poil & non pas de laine ; que fes cornes ne font pas
autant contournées que celles du bélier ; qu'il a une
forte de barbe au menton , 6c qu'il répand une mau-
vaife odeur. Ray, Anim. quad.Jynop, Voye^ Qua-
drupède. (/)
* Le bouc pour être bon à la chèvre doit avoir le
corps grand, les jambes greffes, le cou charnu &
court , la tête petite , le poil noir , épais & doux ,
les oreilles grandes 6c pendantes, la barbe longue &:
touffue ; s'il a des cornes , il fera pétillent , dange-
reux , & n'en fera pas meilleur.
Il ne lui faut donner des chèvres qu'à un an ou
deux, & ne lui en plus donner au-delà de quatre ou
cinq ; mais il peut lervir pendant deux mois à cent
cinquante chèvres. Quand on l'occupe , il le faut
bien nourrir, & lui donner lept à huit bouchées de
fon & de foin à manger , lorfqu'il a lailliune fois ; on
lui donne la même chèvre julqu'à trois fois , afin de
s'afîûrer qu'elle eft pleine.
Lorfqu'on ne le deftine pas à multiplier, on le
châtre à lîx mois ou un an. foye^ Chevreau.
Foye[ auffi Chèvre.
On mange rarement le bouc , à caufe dé fon odeur
6c de Ion goût defagréable.
La graiffe de bouc paffe pour un très-bon émollient.
Hippocrate la recommande comme telle dans un
peliaire.
Diolcoride a donné la compofition d'un topique
très-l'alutaire félon lui , contre la goutte , 6c qu'il fait
avec parties égales de graiffe de bouc , & de celle de
chèvre , mêlées avec un peu de fafran. (\"j
* Les peaux de bouc font une partie aflez confidé-
rable du commerce des cuirs ; les Maroquiniers , les
Chamoiieurs 6c les Mégiffiers , les préparent en ma-
roquin, en chamois ou en mégie, & les mettent en
état d'être employées à différens ufages. Le fuit de
bouc n'eft pas non plus à négliger.
* Boucs. (Myth.) Les habitans de Mendés en
Egypte, avoient une grande vénération pour les
boucs. Les Egyptiens en général n'en immoloient
point , par relpecf pour Pan à la tête & aux pieds de
bouc. Ils adoroient fous ce lymbole la nature feconde.
Les Grecs lacrihoient le bouc à Bacchus. C'étoit la
monture ordinaire delà Vénus populaire.
* Bouc , f. m. On donne ce nom dans les machi-
nes hydrauliques à une elpece de poulie garnie de
cornes de fer, qui font monter & defeendre une
chaîne fans fin. C'eft par le moyen à' un bouc que les
eaux font élevées du puits laie de Moyenvic. Voye^
les Planches de Saline.
* Bote , 1. m. On donne auffi ce nom dans les
gro fies forges à une grande roue à eau , traverfée par
un arbre qu'elle fait mouvoir, & telle que celle qu'on
voit en M , Planche 11. fig. 1. des çroj/cs Jorges.
•BOUCAC HARDS,l.m. [ffiji. eccléj.) elpece de
chanoines réguliers réformés , ainfi appelles de la
mauon cie B oucai han .', où commença la réforme. I es
Boucachards ne font ni anciens ni approuvés par l'E-
. r.iiant ils ont plulieurs maifons, & font
appelles Boucachards dans celles des chanoine
tiers où il a plu aux évêquesde les introduire.
BOUCAGE, i'.m. tragofdinum , (Hiji.nat. Bot.)
génie de plante à fleur en rôle 6c en ombelle, com-
pofée de pli (leurs pétales inégaux faits en forme de
. difpolés en rond & (outemispar un calice.
C e calice devient dans la fuite un fruit compofé de
1 menées oblongues arrondie- , cannelées d'un
de l'autre. Tournefort , Injl.rei herb.
Voyt^ Plante. (/) ..
X x 1]
343
B O U
Première efpece , Tragofdinum majus umbellâ can-
didâ. Pit. Tourn.
Seconde eipece , Tragofdinum minus. Pit. Tourn.
Ces plantes croiffent aux lieux incultes , & en ter-
re graffe ; elles contiennent beaucoup de fel effentiel
& d'huile : la petite & la plus commune eft la plus
eftimée dans la Médecine ; on employé la racine,
les feuilles & la femence.
Elles font apéritives, déterfives, fudorifiques ,
vulnéraires, propres pour brifer la pierre du rein &
de la veffie , pour réfifter au venin & à la malignité
des humeurs , pour lever les obftruû ions , pour ex-
citer l'urine & les règles , étant prifes en décoction,
ou en poudre.
On l'appelle bouquetine, parce que les boucs en
mangent. (N)
BOUCAN, f. m. les marchands de bois nomment
ainii une bûche rompue par vétufté. Ce mot a encore
un autre fens.^ôyeç l'arc, fuivant.
BOUCANIER , f. m. (Hijl mod.) eft le nom que
l'on donne dans les Indes occidentales à certains fau-
vages qui font fumer leur viande fur une grille de
bors de Brefil placée à une certaine hauteur du feu ,
qu'on appelle boucan.
Delà vient qu'on appelle boucans les petites loges
dans lefquelles ils font fumer leurs viandes , & l'action
de les préparer boucaner.
On prétend que la viande ainfi boucanée plaît éga-
lement aux yeux & au goût ; qu'elle exhale une
odeur très-agréable ; qu'elle eft d'une couleur ver-
meille , & qu'elle fe conferve plufieurs mois dans cet
état.
Oexmelin de qui nous tenons ces faits , ajoute
qu'il y a des habitans qui envoyent dans ces lieux
leurs engagés lorsqu'ils font malades , afin qu'en
mangeant de la viande boucanée ils puiffent recouvrer
la fanté.
Savary dit que les Efpagnols , qui ont de grands
établiffemens dans l'île de Saint-Domingue , y ont
auffi leurs boucaniers , qu'ils appellent matadores, ou
monteras; c'eft-à-dire , chajjeurs : les Anglois appel-
lent les leurs cow-killers.
Il y a deux fortes de boucaniers ; les uns ne chaffent
qu'aux bœufs pour en avoir le cuir , & les autres aux
iangliers pour fe nourrir de leur chair.
Voici, fuivant Oexmelin, la manière dont ils font
boucaner la viande : Lorfque les boucaniers font reve-
nus le foir de la chaffe , chacun écorche le ianglier
qu'il a apporté , & en ôte les os ; il coupe la chair
par aiguillettes longues d'une braffe ou plus , félon
qu'elles fe trouvent. Ils la mettent fur des tables,
la faupondrent de fel fort menu , & la laiffent ainfi
jufqu'au lendemain , quelquefois moins , lelon qu'elle
prend plus ou moins vite Ion fel. Après ils la mettent
au boucan , qui confifte en vingt ou trente bâtons
gros comme le poignet , & longs de iept à huit pies ,
rangés fur des travers environ à demi-pié l'un de
l'autre. On y met la viande , & on fait force fumée
deffous , où les boucaniers brûlent pour cela les peaux
des fangliers qu'ils tuent , avec leurs offemens , afin
de faire une fumée plus épaiffe. Cela vaut mieux
que du bois feul ; car le fel volatil qui eft contenu
dans la peau & dans les os de ces animaux , vient s'y
attacher, & donne à cette viande un goût fi excel-
lent qu'on peut la manger au fortir de ce boucan fans
la faire cuire , quelque délicat qu'on foit.
* L'équipage des boucaniers , félon le même au-
teur, eft une meute de vingt-cinq à trente chiens ,
avec un bon fufil , dont la monture eft différente des
fuiîls ordinaires , & qu'on nomme fujils de boucaniers.
Leur poudre qui eft excellente, & qu'ils tirent de Cher-
bourg , fe nomme auffi poudre de boucaniers. Ils font or-
dinairement deux enfemble , &c s'appellent l'un l'au-
tre matelot. Ils ont des valets qu'ils appellent engagés,
B O U
qu'ils obligent à les fervir pour trois ans, & auxquels,
ce terme expiré , ils donnent pour récompenîe un
fufîl , deux livres de poudre , & fix livres de plomb ,
& qu'ils prennent quelquefois pour camarades. En
certaines occafions ces boucaniers fe joignent aux
troupes réglées dans les colonies , & fervent aux ex-
péditions militaires ; car il y en a parmi toutes les
nations européennes qui ont des établiffemens en
Amérique. (G)
*BOUCASSIN, f. m. (Commerce?) nom que l'on
donnoit autrefois à certaines toiles gommées , ca-
lendrées , & teintes de diverfes couleurs. Il y a des
boucaffîns de Smyrne , ou des toiles apprêtées & em-
pefées avec de la colle de farine. On les peint en in-
diennes; & l'on donne l'épithete de boucaffine à
toutes les toiles préparées en boucaffin.
BOUCAUT, f. m. (Marine.) on donne quelque-
fois ce nom à certaines embouchures de rivières,
foit à la mer ou dans des lacs. Ce nom eft en ufage à
la côte de Maroc & de Bifcaye. (Z )
Boucaut, f. m. (Commerce.) moyen tonneau
ou vaiffeau de bois qui fert à renfermer diverfes for-
tes de marchandifes , particulièrement du girofle , de
lamufcade, de la morue, &c.
On fe fert auffi de boucauts pour le vin , & autres
liqueurs.
Quelquefois le boucaut fe prend pour la chofe qui
y eft contenue : ainfi l'on dit un boucaut de girofle,
un boucaut de vin , &c. (G)
* BOUCHAGE, f. m. c'eft dans les grojfes for-
ges, une certaine quantité de terre détrempée & pé-
trie , dont on fe fert pour fermer la coulée, f^oyes^
COULÉE. Ainfi faire le bouchage , c'eft détremper 6c
pétrir cette terre. Voye-^ grosses Forges.
BOUCHA1N, (Géog.) ville forte des Pays-Bas
dans le Hainaut, à trois lieues de Valenciennes &. de
Cambray. Long. 20. 68. lat.So. ij.
BOUCHARDE , f. f. (terme de Sculpture.) eft un
outil de fer , de bon acier par le bas , & fait en plu-
fieurs pointes de diamant, fortes & pointues de court.
Les fculpteurs en marbre s'en fervent pour faire un
trou d'égale largeur, ce qu'ils ne pourroient faire
avec des outils tranchans. On frappe fur la boucharde
avec la maffe , & les pointes meurtriffent le marbre,
& le mettent en poudre ; & il en fort par le moyen
de l'eau que l'on jette de tems en tems dans le trou ,
de peur que l'outil ne s'échauffe , & ne perde fa
trempe. C'eft par la même raifon que l'on mouille
les grais fur lefquels on affûte les outils , qui fe dé-
tremperaient fi on les ffottoit défais le grais à fec.
Cela fe fait auffi pour empêcher que la pierre ne
s'engraiffe , & que le mer n'entre & ne fe mette dans
les pores du grais.
Lorfqu'on travaille avec la boucharde, on prend un
morceau de cuir percé, au travers duquel on la fait
pafier, Ce morceau de cuir monte 6v defeend aifé-
ment , & empêche qu'en frappant fur la boucharde
l'eau ne réjailliffe au vifage de celui qui travaille.
Voye^ Plan. I. fig. z. à côté de laquelle on voit le
plan marqué A.
BOUCHART, (Géog.) île & ville de France en
Touraine , fur la Vienne, à fept lieues de Tours.
BOUCHE , f. f. en Anatomie , eft une partie du
vifage compofée des lèvres, des gencives, du de-
dans des joues , & du palais. Voye^ Face, Lèvres,
&c.
Toutes ces parties font tapiffées d'une tunique
glanduleufe qui fe continue fur toute la furface in-
terne de la joue , & fur toutes les parties excepté les
dents.
Les glandes de cette tunique féparent une forte de
falive qui coule par une infinité de petits conduits
excrétoires , & fert à entretenir dans la bouche & dans
BOU
B O U
toutes fcs parties l'humidité & la foupleffc. Foyer
Salive.
A la partie poftérieure du palais , & perpendicu-
lairement fur la glotte , pend un corps rond , mou ,
& uni , femblable au bout du doigt d'un enfant, &
qui eft formé par la duplicatnre de la membrane du
palais ; i! le nomme la luette : il eft mû par deux mui-
cles , favoir, [efphêiwjlapkylin , & le ptérygojlaphy-
lin , & fufpendu par autant de ligamens. Voye\
Luette.
Sous la membrane du palais font quantité de pe-
tites glandes affez vifibles dans la partie antérieure
de la bouche , & femblables à des grains de millet ,
Se dont les conduits excrétoires s'ouvrent dans la
bouche, à travers fa membrane : mais vers la partie
poftérieure de la touche elles font beaucoup plus fer-
rées^ autour de la racine de la luette elles font raf-
femblées fi près les unes des autres , qu'elles femblent
ne former qu'une groffe glande conglomérée, que
Verheyen appelle par cette raifon glandula conglome-
rata paladna. Voyer^ Palais. Les gencives couvrent
les alvéoles oii les dents font enchâilées. Voyc^
Dent.
Outre les parties propres de la bouche > il y en a
d'autres dedans &ç alentour qui lui font extrêmement
utiles & nécefTaires;comme les glandes, dont les plus
comidérables font les parotides , les maxillaires , les
fublinguales , & les amygdales. Voye7-\zs chacune
dans leurs articles particuliers , Parotides , &c.
Ces glandes font les organes de la falive , & four-
niffent toute la liqueur des crachats qui découlent
dans la bouche par différens conduits , après qu'elle a
été féparée dufang dans le corps des glandes. Com-
me il fort plus de falive lorfque la mâchoire inférieu-
re agit , par exemple , lorfque l'on mâche , que l'on
avale , ou que l'on parle beaucoup , &c. ladilpofition
des conduits falivaires favorife auffi dans ces occa-
iions cette plus grande évacuation.
M. Dcrham obferve que la bouche des différens ani-
maux eft exactement proportionnée aux ufages de cet-
te partie , étant d'une figure très-convenable pour fai-
fir la proie , ramalTer & recevoir la nourriture , &c La
bouche de prefque tous les animaux s'appelle gueule.
Dans certains animaux elle eft grande & large ,
dans d'autres petite & étroite ; dans les uns elle eft
taillée profondément dans la tête , pour mieux faifir
& tenir la proie , & briier plus aifément une nourri-
ture dure, d'un gros volume, & qui réfifte ; dans
les autres , qui vivent d'herbes , elle eft taillée moins
avant.
Celle des infeftes eft très-remarquable : dans les
uns elle eft en forme de pinces , pour faifir , tenir &
déchirer la proie ; dans les autres elle eft pointue ,
pour percer & bleffer certains animaux , & fucer
leurfang ; dans d'autres elle eft garnie de mâchoires
& de dents , pour ronger & arracher la nourriture ,
traîner des fardeaux , percer la terre & même le bois
le plus dur, & jufqu'aux pierres mêmes, afin d'y
pratiquer des retraites 6c des nids pour les petits.
La bouche des oifeaux n'eft pas moins remarqua-
ble , étant faite en pointe pour fendre l'air , &
étant dure & de la nature de la corne , pourfuppléer
au défaut des dents , étant crochue dans les oifeaux
de proie , pour faifir & tenir la proie , longue & min-
ce dans ceux qui doivent chercher leur nourriture
dans les endroits marécageux , longue 6c large el ans
ceux qui la cherchent dans layafe. Voyt^ Bec. (Z.)
Bouche-en-cour , (Hift. mod. ) c'eft le terme
dont on le fert pour lignifier le privilège d'être nour-
t à la cour aux dépens du Roi. Ce privilège ne s'é-
tend quelquefois qu'à la fourniture du pain &du vin.
Cette coutume étoiten ufage anciennement chez les
feigneurs de même que chez, les rois. (6-)
La BOUCHE & les mains , terme de Jurijprudencefêo-
349
dale, employé dans la coutume de Paris art. j. pour
figmfier la foi & hommage. L'origine de cette expref-
fion vient de ce qu'autrefois le vaflal en prêtant le
ferment de fidélité àfon feigneur, lui préfentoit la
bouche , & lui mettoit le* mains dans les fiennes : mais
cette formalité a été abrogée par le non-ufage. (H)
Ouvrir & fermer la bouche d'un cardinal, c'eft une
cérémonie qui fe fait en un confiftoire fecret , où le
pape ferme la bouche aux cardinaux qu'il a nouvelle-
ment nommés , en forte qu'ils ne parlent point quoi-
que le pape leur parle : ils font privés de toute voix
acfive & paffive jufqu'à un autre confiftoire, où le
pape leur ouvre la bouche , & leur fait une petite ha-
rangue, pour leur marquer de quelle manière ils doi-
vent parler & le comporter dans le confiftoire.
Bouche lignifie aufii dans les cours des princes
ce qui regarde leur boire & leur manger , & le lieu
où on l'apprête ; de-là les officiers de bouche, les chefs
de la bouche.
Bouches inutiles, (Artmilit. ) ce font dans
une ville affiégée les perfonnes qui ne peuvent fer-
vir à fa défenfc ; tels font les vieillards , les femmes
& les enfans ,• &c. Un gouverneur qui fait que fa pla-
ce eft pourvue de peu de vivres , doit prendre le par-
ti de fe défaire de bonne heure des bouches inutiles ;
car lorfque le fiége eft formé , l'alfaillant ne doit pas
permettre la fortie de ces perfonnes , afin qu'elles ai-
dent à confommer les vivres , & que le gouverneur
fe trouve forcé de fe rendre plus promptement (())
Bouche À feu , c'eft dans Y Art militaire , les ca-
nons & les mortiers : ainli battre une place avec îoo
bouches à feu , c'eft avoir 200 pièces , tant de canons
que de mortiers , en batterie fur la ville. (Q)
Bouche , en terme de Manège , marque la lenfibi-
hté du cheval en cette partie où on lui met le mors.
Filets de la bouche d'un cheval , voye^ FlLET.
La bouche eft la partie de la tête du cheval à la-
quelle on donne le nom de gueule dans les autres ani-
maux. Le cheval à r.aufe de fa nobleffe , eft le feul
quadrupède à qui on donne une bouche : fes bonnes
qualités font d'être bonne ou loyale, c'eft-à-dire , que
le mors n'y taffe trop ni trop peu d'impreffion. On ap-
pelle auffi bouche à pleine main, une bouche que l'on
ne fent ni trop ni trop peu dans la main : ajfùrée , c'eft-
à-dire , que le cheval fente le mors fans inquiétude :
fenfible , fignifie qu'elle eft délicate aux impreffions
du mors ; c'eft un défaut à une bouche que d'être trop
fenfible : fraîche , c'eft-à-dire , qu'elle conferve tou-
jours le fentiment du mors , & qu'elle eft continuel-
lement humeftée par une écume blanche.
Les mauvaifes qualités d'une bouche font d'être
fauffi ou égarée, c'eft-à-dire , qu'elle ne répond pas*
jufte aux impreffions du mors ; chatouilleufe , vient
d'une trop grande fenfibilité ; fiche, c'eft-à-dire fans
écume , eft quelquefois iine fuite d'infenfîbilité ; for-
te , veut dire que le mors ne fait prefque point d'im-
preffion fur les barres : on dit dans cette occafion
que le cheval eft gueulard, ou a de la gueule , ou eft
lans bouche, ou eft fort en bouche : perdue ou ruinée ,
fignifie que le cheval n'a plus aucune fenfibilité à la
bouche. Afùrcr , rajjùrcr , gourmander , offenfer , ouvrir
la bouche 'd'un cheval , voyeç ces termes à leurs lettres.
C> . , ■
Bouche, en Architecture , terme métaphorique ,
pour lignifier l'ouverture ou l'entrée d'un tuyau,
d'un four, d'un puits , d'une carrière, &c.
BOUCHE , c'clï , che{ le roi & che^ les princes, un
bâtiment particulier compofé de plufieurs p
comme de cuifines, offices, &c où l'on apprête &C
drefle féparément les viandes des premières râbles.
BOUCHE, ( Marine. ) on donne quelquefois ce
nom aux ouvertures par lelquclles de grandes riviè-
res déchargent leurs eaux à la mer. On dit les bon-
50
B O U
B O U
ches du Rhône , les bouches du Nil , &c Quelquefois
on l'applique à certains paflages de la mer refferrés
entre les terres , comme les touches de Boniface , en-
tre la Corfe & la Sardaigne. (Z)
Bouche, Bosson , Besson; voyt{ Bouge &
Besson.
BOUCHE, dans les tuyaux d'Orgue ; on appelle
ainfi l'ouverture du tuyau par laquelle l'air qu'il con-
tient fort. On a ainfi appelle cette partie par analo-
gie à la bouche de l'homme , parce que c'eft par cette
ouverture que le tuyau parle : la largeur entre les
deux lèvres 3 & 0, fig. 30. PL d'Orgue , doit être le
quart de leur longueur bb, pour qu'elle parle avec
le plus d'avantage qu'il eft pomble ; car fielle eft trop
ouverte , le tuyau ne parle preique pas ; & ii elle
l'eft trop peu , le tuyau ne fait entendre qu'un fine-
ment defagréable.
Bouche ovale, forte de bouche des tuyaux d'Or-
gue laquelle eft arrondie par le haut , comme la figu-
re 31. Plan. d'Orgue le repréfente.
Pour trouver le trait de cette bouche , foit d b ,
fig. 31. n° 2. fa largeur ; il faut diviier cette largeur
en deux au point 3 , élever perpendiculairement la
ligne 3 c , fur laquelle on prendra 3 /égale kdb;à\\
point/, comme centre , & d'un rayon moitié de db,
on décrira la demi-circonférence e, qui avec les deux
perpendiculaires aux points d & b , terminera la fi-
gure de la bouche ovale. Voye^ ORGUE.
Bouche en pointe , c'eft ainfi que l'on nomme la bou-
che des tuyaux d'orgue dont la lèvre fupérieure , fi-
gure 33. Plan. cf Orgue , eft faite en triangle ifolcele
a b c ; b c eft la largeur de la bouche ; c 2 une fois &
demie cette largeur qui eft la hauteur de la bouche ,
que l'on forme en tirant les deux lignes égales a c &
a b. Voye^ C article ORGUE.
BOUCHE de four , en terme de Boulanger , eft une
ouverture en quarré ou cintrée , par laquelle on met
le bois ôc le pain dans le four. Voye^ fig. 1. du Bou-
langer ; A B CD eft la bouche du four , & CDEF,
la plaque de fer avec laquelle on le ferme , en levant
cette plaque qui fait charnière dans la ligne CD.
Voye{ la fig. z. qui eft le profil du four fur fa lon-
gueur.
* BOUCHER , f. m. (Police anc. & mod. & Art. )
celui qui eft autorifé à faire tuer de gros beftiaux ,
& à en vendre la chair en détail.
La viande de boucherie eft la nourriture la plus
ordinaire après le pain , & par conféquent une de cel-
les qui doit davantage & le plus fouvent intéreffer
la fanté. La police ne peut donc veiller trop attenti-
vement fur cet objet : mais elle prendra toutes les pré-
cautions qu'il comporte, fi elle a foin que les beftiaux
deftinés à la boucherie foient fains ; qu'ils foient tues
& non morts de maladie , ou étouffés ; que l'apprêt
des chairs fe faffe proprement , & que la viande foit
débitée en tems convenable".
Il ne paroît pas qu'il y ait eu des Bouchers chez les
Grecs , au moins du tems d'Agamemnon. Les héros
d'Homère font fouvent occupés à dépecer & à faire
cuire eux-mêmes leurs viandes; & cette fonction qui
eft fi defagréable à la vue n'avoit alors rien de
choquant.
A Rome il y avoit deux corps ou collèges de Bou-
chers, ou gens chargés par état de fournir à la ville
les beftiaux néceffaires à fa fubfiftance : il n'étoit pas
permis aux enfans des Bouchers de quitter la profef-
fion de leurs pères , fans abandonner à ceux dont ils
fe féparoient la partie des biens qu'ils a voient en com-
mun avec eux. Ils élifoient un chef qui ju^eoit leurs
différends : ce tribunal étoit fubordonné à celui du
préfet de la ville. L'un de ces corps ne s'occupa d'a-
bord que de l'achat des porcs , & ceux qui le com-
pofoient en furent nommés fuarii : l'autre étoit pour
1 achat ôc la vente des boeufs ; ce qui fit appeiier ceux
dontil étoit formé, boarii ou pecuarii. Ces deux corps
furent réunis dans la fuite.
Ces marchands avoient fous eux des gens dont
l'emploi étoit de tuer les beftiaux , de les habiller,
de couper les chairs , & de les mettre en vente ; ils
s'appelloient Laniones ou lanii , ou même carnifices :
on appelloit/d/zi<;/z<ï, les endroits où l'on tuoit,& ma-
cella , ceux où l'on vendoit. Nous avons la même dif-"
tinefion ; les tueries ou échaudoirs de nos Bouchers
répondent aux lanienœ , & leurs étaux aux macella.
Les Bouchers étoient épars en différens endroits
de la ville ; avec le tems on parvint à les raffem-
bler au quartier de Cœlimontium. On y transféra
auffi les marchés des autres fubftances nécefiaires à
la vie , & l'endroit en fut nommé macellum ma-
gnum. Il y a fur le terme macellum un grand nom-
bre d'étymologies qui ne méritent pas d'être rappor-
tées.
Le macellum magnum , ou la grande boucherie , de-
vint fous les premières années du règne de Néron un
édifice à comparer en magnificence aux bains , aux
cirques , aux aqueducs , & aux amphithéâtres. Cet
efprit qui faifoit remarquer la grandeur de l'empire
dans tout ce qui appartenoit au public , n'étoit pas
entièrement éteintda mémoire de î'entreprife du ma*
cellum magnum fut tranfmife à la poftérité par une mé-
daille où l'on voit par le frontiipice de ce bâtiment,
qu'on n'y avoit épargné ni les colonnes , ni les porti-
ques, ni aucune des autres richefles de l'architefture.
L'accroifiement de Rome obligea dans la fuite d'a-
voir deux autres boucheries .• l'une fut placée in re-
gione Efquilina , & fut nommée macellum Livianum j
l'autre in regionefori Romani.
La police que les Romains obfervoient dans leurs
boucheries s'établit dans les Gaules avec leur domi-
nation ; & l'on trouve dans Paris, de tems immémo-
rial, un corps compolé d'un certain nombre de fa-
milles chargées du foin d'acheter les beftiaux , d'en
fournir la ville, & d'en débiter les chairs. Elles étoient
réunies en un corps où l'étranger n'étoit point ad-
mis, où les enfans fuccédoient à leurs pères , & les
collatéraux à leurs parens ; où les mâles feuls avoient
droit aux biens qu'elles pofledoient en commun ,
& où par une efpece de fubftitution , les familles qui
nelaiffoient aucun hoir en ligne mafculine,n'avoient
plus de part à la fociété ; leurs biens étoient dévolus
aux autres jure accrefeendi. Ces familles élifoient en-
tr'elles un chef à vie , fous le titre de maître des Bou-
chers , un greffier , & un procureur d'office. Ce tri-
bunal fubordonné au prévôt de Paris , ainfique celui
des Bouchers de Rome l'étoit au préfet de la ville ,
décidoit en première inftance des conteftatiens par-
ticulières , & faifoit les affaires de la communauté.
On leur demanda fouvent leur titre , mais il ne pa-
roît pas qu'ils Payent jamais fourni ; cependant leur
privilège fut conriimé par Henri IL en 1550, &
ils ne le perdirent en 1673 , que par l'édit général
de la réunion des juftices à celle duChâtelet.
Telle eft l'origne de ce qu'on appella dans la fuite
la grande boucherie ; l'accroifiement de la ville rendit
néceflaire celui des boucheries , & l'on en établit en
différens quartiers ; mais la grande boucherie fe tint
toujours léparée des autres , & n'eut avec elles au-
cune corref pondance , foit pour la jurande , foit pour
la dilcipline.
A melure que les propriétaires de ces boucheries
diminuèrent en nombre & augmentèrent en opulen-
ce , ils fe dégoûtèrent de leur état , & abandonnè-
rent leurs étaux à des étrangers. Le Parlement qui
s'apperçut que le fervice du public en fouffroit, les
contraignit d'occuper ou par eux-mêmes ou par des
ferviteurs : de-là vinrent les ètaliers Bouchers. Ces éta-
liers demandèrent dans la fuite à être nicities , & on
le leur accorda : les Bouchers de la grande boucherie
B O U
s'y oppoferent inutilement ; il leur fut défendu de
troubler les nouveaux maîtres dans leurs tondions ;
ces nouveaux turent incorporés avec les Bouchers
des autres boucheries : dans la fuite , ceux même de
la grande boucherie leur louèrent leurs étaux , &C
toute diltinâion ceffa dans cette profelfion.
La première boucherie de Paris fut fituée au par-
vis Notre-Dame : fa démolition & celle de la bou-
cherie de la porte de Paris fut occaiionnée par les
meurtres que commit fous le règne de Charles V I.
un Boucher nommé Caboche. Ce châtiment fut fuivi
d'un édit du roi , daté de 141 6 , qui fupprime la der-
nière , qu'on appeiloit la grande boucherie , confiique
fes biens , révoque fes privilèges , & la réunit avec
les autres Bouchers de la ville , pour ne faire qu'un
corps , ce qui fut exécuté : mais deux ans après , le
parti que les Bouchers foûtenoient dans les troubles
civils étant devenu le plus fort , l'édit de leur fup-
preffion fut révoqué, & la démolition des nouvelles
boucheries ordonnée. Une réflexion le préfente ici
naturellement , c'eft que les corps qui tiennent entre
leurs mains les choies nécefî'aires à la iubfiltance
du peuple, font très- redoutables dans les tems de
révolutions , fur-tout fi ces corps font riches , nom-
breux & compotes de familles alliées. Comme il efl
impoffible de s'afTûrer particulièrement de leur fidé-
lité , il me femble que la bonne politique conlîfte à
les divifer : pour cet effet , ils ne devroient point for-
mer de communauté , & il devroit être libre à tout
particulier de vendre en étal de la viande & du pain.
La grande boucherie de la porte de Paris fut réta-
blie ; mais on laifia fubfifier trois de celles qui dé-
voient être démolies ; la boucherie de Beauvais , celle
du petit-pont, & celle du cimetière S. Jean : il n'y
avoit alors qiu ces quatre boucheries; mais la ville
s'accroiffant toujours , il n'étoit pas polfible que les
choies reftafTènt dans cet état ; aufli s'en forma-t-il
depuis 1418, jufqu'en 1 540, une multitude d'autres-
accordées au mois de Février 1587, &£ enregiftrées
au Parlement , malgré quelques oppofitions de la
part de ceux de la grande boucherie qui louffroient à
être confondus avec le refte des Bouchers ; dont les
principales étoient celle de S. Martin des Champs ,
des religieufes de Montmartre, des religieux de S.
Germain-des-Prés , les boucheries du Temple , de
Stc Geneviève , &c fans compter un grand nombre
d'étaux difperlès dans les diftèrens quartiers de la
ville.
Ces établifTemens ifolés les uns des autres , don-
nèrent lieu à un grand nombre de conteftations qu'on
ne parvint à terminer f qu'en les réunifiant à un feul
corps : ce qui fiit exécuté en conféquence de lettres
patentes lolticitées par la plupart des Bouchers même.
Il fut arrêté en même tems i°. que nul ne fera
reçu maître , s'il n'elt fils de maître , ou n'a fervi
comme aprenti & obligé pendant trois ans ; & ache-
té , vendu , habillé & débité chair , pendant trois
autres années.
2°. Que les fils de maître ne feront point chef-
d'œuvre , pourvu qu'ils ayent travaillé trois à quatre
ans chez leurs parens.
30. Que la communauté aura quatre jurés élus
deux à deux, & de deux en deux ans.
40. Que nul ne lera reçu , s'il n'elt de bonnes
mœurs.
50. Qu'un ferviteur ne pourra quitter l'on maître,
ni un autre maître le recevoir, fans congé ce certifi-
cat , fous peine d'un demi-écu d'amende pour le fer-
viteur , & de deux écus pour le maître.
6°. Que celui qui afpirera à la maîtrife, habillera
en prétence i!es jures & maîtres, un bœut ,un mou-
ton , un veau, & un porc.
70. Que nul ne fe; a état de maître Boucher , s'il n'a
été reçu , &. s'il n'a lait ie Ici ment.
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35i
8°. Qu'aucun Boucha ne tuera porc nourri es mai-
fons d'huiliers , barbiers ou maladreries , à peine de
dix écus.
90. Qu'aucun n'expofera en vente chair qui ait le
fy , fous peine de dix écus.
io°. Que les jurés vifiteront les bêtes deftinées es
boucheries , & veilleront à ce que la chair en foit
vénale , fous peine d'amende.
1 1°. Que s'il demeure des chairs, du jeudi au fa-
medi, depuis Pâques jufqu'à la S. Rémi, elles ne
pourront être expofées en vente, fans avoir été vifi-
tées par les Bouchers , à peine d'amende.
12°. Que ceux qui font alors Bouchers, continue-
ront , fans être obligés à expérience & chef-d'œuvre.
130. Que les veuves jouiront de l'état de leur
mari , & qu'elles n'en perdront les privilèges , qu'en
époufant dans un autre état.
140. Que les enfans pourront fuccéder à leur
père , fansexpérience ni chef-d'œuvre , pourvûqu'ils
ayent fervi fous lui pendant trois ans.
1 50. Que les enfans de maître ne pourront afpirer
à maîtrile avant dix-huit ans.
160. Que les autres ne pourront être reçus avant
vingt-quatre.
De la Police des étaux. Lorfque les Bouchers furent
tentés de quitter leur profelfion & de louer leurs
étaux , on lentit bien que plus ce loyer feroit fort,
plus la viande augmenteront de prix ; inconvénient
auquel la police remédia cg 1 540 , en fixant le loyer
des étaux à feize livres panfis par an. Il monta iuc-
ceffivement; & en 1690, il étoit à neuf cents cin-
quante livres. Mais le lituation , l'étendue , la com-
modité du commerce , ayant mis depuis entre les
étaux une inégalité conlîdérable , la févérité de la
fixation n'a plus de lieu , & les propriétaires font
leurs baux comme ils le jugent à propos. Ileltieu-
lement défendu de changer les locai.aii es , de deman-
der des augmentations , de renoaveller un bail , ou
de le tranlporter, fans lapermiffion du magiftrat de
police.
Il elt aulfi défendu d'occuper un fécond étal, fous
un nom emprunté dans la même boucherie , ce plus
de trois étaux dans toute la ville.
De Cachât des bejliaux. La première fonction du
Boucher après fa réception, efl l'achat des beft lux :
les anciens difpenlbient les Bouchers des charges oné-
reufes & publiques ; toute la protection dont ils
avoient beloin leur étoit accordée 5 on lacilitoit &
l'on affùroit leur commerce autant qu'on le pouvoir.
Si nos Bouchers n'ont pas ces avantages , ils en ont
d'autres : un des principaux , c'elt que leur état eft
libre ; ils s'engagent avec le public tous les ans aux
approches de Pâques ; mais leur obligation finit en
Carême.
La police de l'achat des beltiaux le réduit à qua-
tre points : i°. quels beltiaux il elt permis aux Bou-
chers d' achetei : z°. en quels lieux ils en peuvent taire
l'achat : 30. comment ils en feront les payemens :
40. la conduite des beltiaux des marchés à Paris ,
& leur entretien dans les étables.
Autrefois les Bouchers vendoient bœuf , veau ,
mouton , porc , agneau , &: cochon de lait.
Des tueries ou échaudoirs. On a fenti en tout tems
les avantages qu'il y aui oit pour la lalubrité de l'air
& la propreté de la ville, à en éloigner un grand
nombre de profeîfions ; & l'on a toujours prétendu
que le projet d'établir des tueries fur la rivière, le
lieu qui leur convient le plus , n'étoit bon qu'en fpé-
culation. M. le commifTaire de la Mare n'a point pris
parti fur cette queltion ; il s'elt contenté de rappor-
ter les railons pour & contre.
Il obierve i°. que la tranllation des ttieries du mi-
lieu de la ville aux extrémités des faubourgs , a été
ordonnée par pluiîeurs arrêts , & qu'elle a heu à
35i
B O U
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Lyon , Moulins , Tours , Laval , Nantes , & d'autres
villes.
2°. Que les embarras & même les accidens cau-
fës par les gros beftiaux dans les rues de la ville ,
femblent l'exiger.
3°. Que ce projet s'accorde avec l'intérêt & la
commodité du Boucher & du public : du Boucher , à
qui il en coûteroit moins pour fa quotité dans une
tuerie publique, que pour fon loyer d'une tuerie par-
ticulière : du public , qui fe reffentiroit fur le prix de
la viande de cette diminution de frais.
4°. Qu'il eft defagréable de laiffer une capitale
infectée par des immondices & du fang qui en cor-
rompent l'air , & la rendent mal faine , & d'un afpeû
dégoûtant.
Malgré la juftefle de ces obfervations , je croi que
dans une grande ville fur-tout , il faut que les bouche-
ries & les tueries foient difperfées. On peut en appor-
ter une infinité de raifons : mais celle qui me frappe
le plus , eft tirée de la tranquillité publique. Chaque
Boucher a quatre garçons ; plufieurs en ont fix : ce font
tous gens violens , indifciplinables , & dont la main
& les yeux font accoutumés au fang. Je croi qu'il y
auroit du danger à les mettre en état de fe pouvoir
compter ; & que li l'on en ramaifoit onze à douze
cents en trois ou quatre endroits , il feroit très-diffi-
cile de les contenir , & de les empêcher de s'entral-
fommer : mais le tems amené même des occaiions où
leur fureur naturelle pou/roit fe porter plus loin. Il
ne faut que revenir au règne de Charles VI. & à
l'expérience du paffé , pour fentir la force de cette
réflexion , & d'une autre que pous avons faite plus
haut. Loin de raffembier ces fortes de gens , il me
femble qu'il feroit du bon ordre & de la falubrité ,
qu'ils fulî'ent difperfés un à un comme les autres mar-
chands.
De la vente des chairs. La bonne police doit veiller
à ce que la qualité en foit faine , le prix jufte , &C le
commerce difcipliné.
En Grèce , les Bouchers vendoient la viande à la
livre , & fe fervoient de balance & de poids. Les Ro-
mains en uferent de même pendant long-tems : mais
ils afTujettirent dans la fuite l'achat des beftiaux & la
vente de la viande , c'eft-à-dire le commerce d'un
objet des plus importans , à la méthode la plus extra-
vagante. Le prix s'en décidoit à une efpece de fort.
Quand l'acheteur étoit content de la marchandée ,
il fermoit une de fes mains ; le vendeur en faifoit au-
tant: chacun enfuite ouvroit à la fois & fubitement,
ou tous fes doigts ou une partie. Si la fomme des
doigts ouverts étoit paire , le vendeur mettoit à fa
marchandée le prix qu'il vouloit : fi au contraire elle
étoit impaire , ce droit appartenoit à l'acheteur. C'eft
ce qu'ils appelloient m'icare ; & ce que les Italiens ap-
pellent encore aujourd'huiyoà'er à la moure. Il y en a
qui prétendent que la mication des boucheries Ro-
maines fe faifoit un peu autrement : que le ven-
deur levoit quelques-uns de fes doigts ; & que fi l'a-
cheteur devinoit fubitement le nombre des doigts ou-
verts ou levés , c'étoit à lui à fixer le prix de la mar-
chandife , linon à la payer le prix impoié par le ven-
deur.
Il étoit impofïible que cette façon de vendre & d'a-
cheter n'occalionnât bien des querelles. Auffi fut-on
obligé de créer un tribun & d'autres officiers des
boucheries ; c'eft-à-dire d'augmenter l'inconvénient;
car on peut tenir pour maxime générale , que tant
qu'on n'aura aucun moyen qui contraigne les hom-
mes en place à faire leur devoir , c'eft rendre un
deiordre beaucoup plus grand , ou pour le préfent ou
pour l'avenir, que d'augmenter le nombre des hom-
mes en place.
La création du tribun & des officiers des bouche-
ries ne iupprima pas les inconvéniens de la mication :
elle y ajouta feulement celui des exactions , & il en
fallut revenir au grand remède , à celui qu'il faut em-
ployer en bonne police toutes les fois qu'il eft prati-
cable , la fupprefhon. On fupprima la mication tk. tous
les gens de robe qu'elle faifoit vivre. L'ordonnance en
fut publiée l'an 360 , & gravée fur une table de mar-
bre, qui fe voit encore à Rome dans le palais Vati-
can. C'eft un monument très -bien confervé. Le
voici.
Ex auctontate Turci Aproniani , V. C. prefeili urbis.
Ratio docuit , utilitate fuadente , confuetudme mican-
di fummotâ , fub exagio potius pecora vcndere quam di-
gitis concludentibus tradere ; & adpcnfo pecorc , capite ,
pedibus &j'evolactante ( macïanti) &fubjugulari ( fub-
jugulanti) lanio ccdentitus , rcliqua caro cum pelle &
itercneis proficiat vendit ori , fub confpeciu pubiico fide
ponderis comprobatâ , ut quantum caro occijl pecoris ad-
pcndût & cmptor norit 6* venditor , commodis omni-
bus , & prœdd damnatâ quam tribunus ofpcium cancel-
larius & fcriba de pecuariis capere confueverant. Qucz
forma interdicli & difpofitionis , jub gladii pcriculo per-
petuo , 'cufodienda mandatur.
« La raifon & l'expérience ont appris qu'il eft de
» futilité publique de iupprimer l'uiage de la miceu
» don dans la vente des beftiaux , & qu'il cil beau-
» coup plus à propos de la faire au poids que de l'a-
» bandonner au fort des doigts : c'eft pourquoi, après
» que l'animal aura été pelé , la tête , les pies & le
» fuif appartiendront au Boucher qui l'aura tué , ha-
» bille & découpé; ce fera fon falaire. La chair, la
» peau & les entrailles feront au marchand Boucher
#» vendeur , qui en doit faire le débit. L'exactitude du
» poids & de la vente ayant été ainfi conftatées aux
» yeux du public , l'acheteur & le vendeur connoî-
» tront combien pefe la chair mife en vente , & cha-
» cun y trouvera fon avantage. Les Bouchers ne fe-
» ront plus expofés aux extorlions du tribun & de
» fes officiers ; & nous voulons que cette ordonnan-
» ce ait lieu à perpétuité , fous peine de mort ».
Charlemagne parle fi expreffément des poids &
du foin de les avoir juftes , qu'il eft certain qu'on
vendoit à la livre dans les premiers tems de la mo-
narchie. L'ufage varia dans la fuite , & il fut permis
d'acheter à la main. La viande le vend aujourd'hui au
poids 5c à la main , & les Bouchers font tenus d'en
garnir leurs étaux , félon l'obligation qu'ils en ont
contractée envers le public , lous peine de la vie.
Les Bouchers font du nombre de ceux à qui il eft
permis de travailler & de vendre les dimanches &
fêtes : leur police demande même à cet égard beau-
coup plus d'indulgence que celle des Boulangers , &
autres ouvriers occupés à la fubfiftance du peuple.
D'abord il leur fut enjoint d'obferver tous les diman-
ches de l 'année , & d'entre les fêtes celles de Pâques ,
de l'Afcenlion , de la Pentecôte , de Noël , de l'Epi-
phanie, de la Purification , de l'Annonciation , de
l' Affomption , de la Nativité de la Vierge , de la Touf-
faint, de la Circoncifion , du Saint-Sacrement, &de
la Conception. Dans la fuite , il leur fut permis d'ou-
vrir leurs étaux les dimanches depuis Pâques jufqu'à
la Saint-Remi : le terme fut reftraint , étendu , puis
fixé au premier dimanche d'après la Trinité jufqu'au
premier dimanche de Septembre inclufivement. Pen-
dant cet intervalle ils vendent les dimanches oc les
fêtes.
Ces marchands font encore affujettis à quelques
autres règles de police, dont il fera fait mention ail-
leurs. Voye^ les articles TUERIE , VlANDE , ÉCHAU-
doir, Suif, Étal, &c
* BOUCHERIE , f. f. ( Police anc. &mod. ) c'étoit
chez les Romains , fous le règne de Néron , un grand
bâtiment public élevé avec magnificence , où des
marchands diftribuoient la viande aux habitaris. C'eft
de notre tems & dans nos villes de France , une rue
infectée ,
B O U
infe&ce , eu des gens chargés du même commerce ,
ont leurs ét-aux. Coyei Étal & Boucher.
Il y a auffi dans les maiibns nombreules attenant
les grandes cuifmes , une pièce qui elt deflinée à con-
tenir les greffes viandes, & qu'on appelle boucherie.
Il faut avoir loin de n'y pas laiffer un grand jour ,
d'y tenir toujours la viande fufpendue , & d'y avoir
une balance ou romaine pour la peler, avec une ta-
ble & plulieurs tablettes.
BOUCHER , v. au. On dit , en terme de Dorure ,
boucher d'or moulu , pour dire ramender avec de l'or
moulu les petits défauts qu'on trouve encore à l'or
après qu'on l'a bruni. Cet or moulu le met dans une
petite coquille avec un peu de gomme arabique ; &
il n'y a point de meilleur moyen pour faire un ou-
vrage propre, pourvu que l'endroit gâté ne loit pas
considérable.
BOUCHETURE , f. f. en terme de Coutume , elt tout
ce qui lert de clôture à un champ , un pré , une terre
labourable , ou tous autres héritages , à l'effet d'em-
pêcher les bêtes d'y entrer ; comme haies vives , pa-
liffades, échaliers & autres. En pays de pâturage il
elt bien expreffément défendu d'enlever les bouchetu-
res. (H)
BOUCHIN, f. m. {Marine.) On entend par ce
mot la plus grande largeur du vaiffeau de dehors en
dehors. C'en: la partie la plus large du corps du vaif-
feau , ce qui le trouve toujours à ftribord & à bas-
bord du grand mât , à caufe que le maître ban & la
maîtreffe côte font en cet endroit. Quand on parle
de la largeur du vaiffeau de dedans en-dedans, elle
s'exprime par la longueur du ban ou barrot ; & l'on
dit , ce vaiffeau a tant de pus de ban ou de barrot. Lorf-
qu'on dit qu'un bâtiment elt plus court de varangue
& plus petit de bouchin , c'elt- à -dire qu'il elt plus
rond par la quille, & plus étroit par le bordage. (Z)
* BOUCHOiR , f. m. c'elt ainli que les Boulan-
gers appellent le couvercle de la bouche de leur four.
Il elt de fer ; il a une poignée : quant à la figure , c'elt
un grand fegment de cercle , ou la ligure de la bouche
du four.
* BOUCHON, f. m. (Commerce.) nom que l'on
donne à des paquets de laine d'Angleterre , & qui
leur vient de la manière dont ils font contournés.
* Bouchon ,(Jardinage.) on donne ce nom à ces
paquets de toile niée ou formée par les chenilles ,
qu'on apperçoit à l'extrémité des arbres & des ar-
briffeaux , fur-tout en hyver quand il n'y a plus de
feuilles, & dans lefquelles ces infeftes le conîervent
pendant cette laifon. On détruit les bouchons le plus
exactement qu'on peut.
Bouchon, (Manège.) c'elt un tortillon de paille
ou de foin qu'on lait fur le champ, pour frotter le
corps d'un cheval , fur-tout quand il a chaud.
Bouchonner un cheval , c'elt le frotter avec le bou-
chon, (r)
BOUCHON de contre -potence , lignifie , parmi Us
Horlogers , une petite pièce de laiton, dont une par-
tie , qui elt comme un gros pivot, entre à frottement
dans le trou de la contre-potence d'une montre. Voy.
b, fig. 4.4. PI. X. de V Horlogerie.
Cette pièce reçoit un des pivots de la roue de ren-
contre dans un petit trou , que les habiles Horlogers
font ordinairement avec un poinçon ; parce qu'il faut
qu'il ait peu de profondeur , que le fond en loit plat,
& qu'il loit , ainli que les parois , bien écroiii & bien
poli.
Le trou de la contre-potence elt rond , pour qu'on
puiffe'y faire tourner le bouchon; ce qui elt néceffaire
afin de pouvoir donner à la roue de rencontre la fi-
tuation convenable , en variant par ce mouvement la
polition du trou du bouchon. V. Contre-potence,
Roue de rencontre , Potence , &c. ( T)
Bouchons, f. m. pi. Les ouvrières occupées au
Tome 11,
B O U
35?
tirage de la foie donnent ce nom à des inégalités &
groffeurs qui le rencontrent dans le fil au lbrtir de
deffus le cocon & de dedans la balîine ; défauts qui
en rendent le tirage plus difficile , & la foie tirée
moins parfaite.
BOUCHOT , f. m. ( Pêche. ) parc que l'on conf-
truit fur les grèves , ou aux bords de la mer , pour y
arrêter le poiffon.
* BOUCLE, f. f. (Hijl. anc.)Les anciens avoient
des boucles de plufieurs lbrtes : les unes lervoient à
l'Archite&ure ; d'autres à la Chirurgie. Les Muficiens
&les Comédiens avoient les leurs: elles étoient éga-
lement d'ufage aux hommes, aux femmes , aux Grecs,
aux Romains , & aux autres nations , pour attacher
les tuniques , les chlamydes , les lacernes , les pénu-
les , &c. Elles avoient prefque toutes la forme d'un
arc avec fa corde. Il y avoit à chaque côté de l'ha-
bit , à l'endroit où on l'attachoit , une pièce de métal ,
d'or, d'argent, ou de cuivre. La partie de la boucle
qui formoit comme la corde de l'arc , étoit une ai-
guille. Cette aiguille paffoit comme un crochet à-
travers des trous pratiqués à la pièce de métal , Se
fufpendoit la partie de l'habit tantôt fur une épaule ,
tantôt fur l'autre. On en trouvera la figure dans nos
Planches d'antiquités.
BoUCLE , ( Marine) mettre un matelot fous boucle ,
ou à la boucle ; le tenir fous boucle : ce terme lignifie
clé ou prifon. Mettre un matelot fous boucle , c'elt le
mettre fous clé , le tenir en prifon. ( Z )
Boucles , en Architecture , font de petits ornemens
en forme d'anneaux , lacés fur une mouline ronde ,
comme baguette ou aftragale. ( P )
Boucles d'oreilles , en terme de Metteur-en-œu-
vre, elt une forte de bijou de femme, quelles portent
à leurs oreilles. Il y en a de plulieurs efpeces , qui
prennent pour la plupart leur nom de la figure dont
elles lont faites. On dit boucles à quadrille Jimple ou
double ; boucles entourées fîmples ou doubles ; boucles à
dentelle; boucles de nuit } ôcc. Voyt\ ces mots à leur,
article.
BOUCLES À QUADRILLE , en terme de Metteur-en-
œuvre y font des boucles compofées de quatre pierres
ou de neuf, arrangées de manière qu'elles forment
un quarré régulier. Le quadrille double elt celui où le
nombre des pierres elt multiplié au double. Il y a auffi
Ad quadrilles entourés. ^.ENTOURÉ & ENTOURAGE.
BOUCLES DE NUIT, en terme de Mette ur-cn- œuvre ,
font des boucles compoiées de quatre pierres, dont les
deux plus groffes font placées au-deffus l'une de l'au-
tre, celle d'en-bas allant en diminuant en façon de
poire , & les deux autres latéralement à l'endroit où
celles-ci le joignent.
Boucles de bracelet, elt une efpece d'atta-
che qui n'a qu'un arguillon fans chappe , &: qui elt
précédée d'une barrière , autour de laquelle on tour-
ne le ruban des bracelets, qui s'arrête enfin par un
trèfle. Voye[ Barrière & Trèfle.
BOUCLES , en Serrurerie ou en Fonderie , ce font ces
anneaux ronds de 1er ou de bronze , qui font attachés
aux portes cocheres, & qu'on tire avec la main pour
les fermer. Il y en a de riches , de moulure 6c de
fculpture.
Boucle gibecière, c'eft le nom qu'on donne à
ces heurtoirs fi bien travaillés qu'on voit aux portes
cocheres. On leur donne le nom de gibecière , parce
que leur contour imite celui de la gibecière.
BOUCLE , en terme de Rafineur defuerc , elt en effet
une boucle ou anneau de fer emmanché dans un mor-
ceau de bois de deux pies ou environ de longueur.
On s'en fert pour tirer les formes tombées dans le
bac à formes, vayt^ Bac À formes ; ce qui n'arrive
que lorfquelles le féparent du relte qui y elt empilé.
On s'y prend de manière à faire entrer la tête de la
forme dans la boucle, tk on la retire alors fans rilque.
y y
354
B O U
Bouclé , adj. (Marine.) fe dit d'un port. Un port
bouclé, c'eft- à-dire firme, & dont on n'en veut rien
laiffer iortir. (Z )
BOUCLÉ , (terme de Blafon.) il fe dit en parlant du
collier d'un lévrier ou d'un autre chien qui a des bou-
cles.
Le Febvre de Laubiere , d'afur au lévrier rampant
d'argent, accolé de gueules, bordé & boucle' d'or. (V)
Bouclé, en Pajjementerie & Soierie, s'entend du
velours à boucles qui a été fait à l'épingle , pour le
distinguer du velours coupé , que l'on appelle ras ,
& qui eft fait au couteau. Voye{ Velours.
BOUCLER une jument, (Maréchallerie & Manège.)
c'eft lui fermer l'entrée du vagin au moyen de plu-
fieurs aiguilles de cuivre , dont on perce diamétra-
lement les deux lèvres , & qu'on arrête des deux cô-
tés. On fe fert auffi d'anneaux de cuivre , le tout afin
qu'elle ne puiffe point être couverte. (V)
BOUCLETTE , s'employe en terme de Chajje : on
dit vmepentiere à bouclette , parce qu'elle a dans le haut
de petites boucles attachées comme on en voit à un
rideau de lit. Voyc{ Pentiere & Bécasse.
BOUCLETTES , le dit, en Pajfementerie, de l'endroit
où la ficelle, foit des liffes, loit des hautes-liffes, eft
traveriée dans le milieu par une autre ficelle qui en
fait la partie inférieure. L'ufage de ces bouclettes eft
tel , que fi c'eft une haute-liffe , la rame étant paffée
dans la bouclette , & fe trouvant arrêtée par la jonc-
tion des deux parties de ficelle dont on vient de par-
ler , elle eft contrainte de lever lorfque la haute-liffe
levé ; & que fi c'eft une liffe , les foies de la chaîne
étant parlées dans les bouclettes de ces liffes , les foies
lèvent auffi quand les bouclettes lèvent.
BOUC LIER, (Art. milit.) efpece d'armure défen-
fîve , dont les anciens fe fervoient pour fe couvrir
des coups de l'ennemi.
Le bouclier fe paffoit dans le bras gauche. Sa figure
a fort varié dans toutes les nations , auffi-bien qu'en
France. Il y en avoit de ronds ou ovales , qu'on ap-
pelloit des rondelles. Il y en avoit d'autres prefque
quarrés , mais qui vers le bas s'arrondiffoient ou s'al-
longeoient en pointe. Ceux des piétons étoient beau-
coup plus longs que ceux de la cavalerie , & quel-
ques-uns couvraient prefque tout le corps. Ces der-
niers boucliers s'appelloient auffi targes , targes , nom
qui fe donnoit encore à d'autres boucliers , dont on ne
fe fervoit pas pour combattre , mais pour fe couvrir ;
par exemple , fur le bord d'un foffé d'une ville , con-
tre les flèches des affiégés. Daniel, Hijloire de la Mille.
Franc. (Q)
Selon plufîeurs favans , le mot bouclier eft dérivé
de buccularium ou buccula , parce qu'on reprélentoit
fur les boucliers des têtes ou gueules de gorgone, de
•lion, ou d'autres animaux. Le bouclier d'Achille &
celui d'Enée font décrits dans l'Iliade & dans l'Enéi-
de. Ovide dit que celui d'Ajax étoit couvert de fept
peaux.
Cléomenes établit à Sparte l'ufage des boucliers à
anfes, fortement attachées fous le bouclier, & par lef-
quelles on paffoit le bras. Ils étoient & plus commo-
des & plus fûrs que ceux qu'on portoit auparavant,
qui ne tenoient qu'à des courroies attachées avec
des boucles.
Aux boucliers des anciens ont fuccédé chez les mo-
dernes les écus , rondaches ou rondelles , boucliers
ronds & petits , que les Efpagnols portent encore
avec l'épée quand ils marchent de nuit.
Boucliers votifs, efpece de difques de métal,
qu'on confacroit aux dieux , & que l'on fufpendoit
dans leurs temples, foit en mémoire d'une vicloire
ou d'un héros, foit en action de grâces d'une victoire
remportée fur les ennemis , dont on offroit même les
boucliers pris fur eux comme un trophée. C'eft ainfi
que les Athéniens fufpendirent les boucliers pris fur les
B O U
Medes & les Thébains , avec cette infcrîption : Leâ
Athéniens ont pris ces armes fur les Medes &fur les Thé'
bains. Les bouchers votifs différoient des boucliers ordi-
naires , en ce que les premiers étoient ordinairement
d'or ou d'argent , & les autres d'ofier & de bois revê-
tu de cuir. On les fufpendoit aux autels , aux voûtes,
aux colonnes , aux portes des temples. Les Romains
empruntèrent cet ufage des Grecs, & de-là les ancilia
ou boucliers facrés de Numa. Lorfque Lucius Martius
eut défait les Carthaginois , on fufpendit dans le ca-
pitole un bouclier d'argent pefant cent trente-huit li-
vres , qui fe trouva dans le butin. Celui que les Ef-
pagnols avoient offert à Scipion , en reconnoiffance
de fa modération & de fa générofité , & qu'on voit
dans le cabinet du Roi , eft d'argent & pefe quarante-
deux marcs. Sous les empereurs , cette coutume dé-
généra en flatterie , puifqu'on confacra des bouchers
aux empereurs mêmes, honneur qui , avant eux, n'a-
voit été accordé qu'aux dieux. On nommoit en géné-
ral ces boucliers, clypei , difei , cicli , afpides ; nom gé-
nérique , qui convenoit également aux boucliers qu'on
portoit à la guerre : mais on les appelloit en particu-
lier pinaces , tableaux , parce qu'on y reprélentoit les
grands hommes & leurs belles ad ions : jlelopinakia ,
tableaux attachés à des colonnes , parce qu'on les y fuf-
pendoit fouvent : protoniai , bujles , parce que celui
du héros en étoit pour l'ordinaire le principal orne-
ment -.Jlhetaria , dérivé du Grec ç-«9-o? , peclus , parce
que les héros n'y étoient repréfentés que jufqu'à la
poitrine. Quoiqu'il fut permis aux particuliers d'éri-
ger ces monumens dans les chapelles particulières ,
ils ne pouvoient cependant en placer un feul dans les
temples fans l'autorité du fénat. Mémoires de TAcad,
tom. I. (G)
BOUDIN , f. m. (Cuifîne.) efpece de mets qui fe
fait avec le fang du cochon , fa panne , & fon boyau.
Lorfque le boyau eft bien lavé, on le remplit de fang
de cochon , avec fa panne hachée par morceaux , Se
le tout affaifonné de poivre , fel, & mufeade. On lie
le boudin par les deux bouts, & on le fait cuire dans
l'eau chaude , obfervant de le piquer de tems en tems
à mefure qu'il le cuit, de peur qu'il ne s'ouvre & ne
fe répande. Quand il eft cuit , on le coupe par mor-
ceaux & on le fait rôtir fur le gril. Ce boudin s'ap-
pelle boudin noir.
Le boudin blanc fe fait de volaille rôtie & de pan-
ne de cochon hachées bien menu , arrofées de lait ,
faupoudrées de fel & de poivre , & mêlées avec des
jaunes d'eeuf. On remplit de cette efpece de farce le
boyau du cochon , qu'on fait cuire enfuite dans l'eau
chaude. Quand on le veut manger on le rôtit fur le
gril entre deux papiers , Se on le fert chaud.
Boudin (rejjort à ) , c'eft un reffort en fpiral , dont!
nous parlerons à l'article Ressort.
BOUDINE, f. m. fe dit dans les Verreries en plat i
d'une éminence ou bouton que le gentilhomme bof-
fier forme au bout de la boffe deftinée à faire un plat.
C'eft par cette éminence que cet ouvrier reprend la
boffe pour ouvrir le plat. Voye^ Bossier , Bosse ,
& Verrerie en plat.
BOUDINIERE, f. f. inflrumentde Chair cuitier ; c'eft
un petit inftrument de cuivre ou de fer-blanc , dont
ces gens fe fervent pour remplir les boyaux dont ils
font le boudin.
BOUDINURE DE L'ARGANEAU , EMBOU-
DINURE , (Marine.) c'eft un revêtement ou une en-
veloppe dont on garnit Varganeau de l'ancre , & qui
fe fait avec de vieux cordages qu'on met tout au-
tour, pour empêcher le cable de fe gâter ou fe pour-
rir. (Z )
BOUDRI , (Géog.) petite ville fur une hauteur ,
dans le comté de Neufchâtel , en Suiffe.
BOUE , f. m. fe dit en général de cette ordure qui
s'engendre dans les rues èk. les places publiques , Se
B O U
que ceux qui veillent à la propreté d'une ville, font
enlever dans des tombereaux.
Boue, (Marée hallerie.) On dit que la boue fouffle
au poil , lorfque par quelque bleflùre qu'un cheval
aura eue au pié , la matière de la fuppuration paroît
vers la couronne. (V)
BOUÉE, fubft. f. (Marine.') c'eft une marque ou
enfeigne faite quelquefois avec un barril vuide , bien
clos , relié de fer ; quelquefois avec un fagot ou avec
un morceau de bois & de liège , l'un ou l'autre atta-
ché au cordage appelle orin , qui eft frappé à fa tête ;
enforte qu'on laifle flotter la bouée , pour indiquer l'en-
droit où l'ancre eft mouillée , &c la relever lorfque le
cable s'eft rompu , ou qu'on la coupe fur l'écubier.
Elle indique auffi les pieux & les débris de vaifleau
qui font enfoncés dans la mer, & autres chofes fem-
blables qui peuvent nuire à la navigation. Toutes ces
bouées fe diftinguent par les matières dont elles font
faites. Ce mot Té prend auffi fort fouvent pour le mot
de balife ou tonne , & alors la bouée iert pour marquer
les partages difficiles & dangereux : on en met fur les
écores des bancs que la mer couvre, pour lervir à
les faire éviter.
Dans la figure première , la bouée &c fon orin eft
marquée par la lettre V t èc le cable par la lettre T.
Loriqu'il y a des droits à payer pour les bouées ,
ce font les maîtres des navires qui lbnt tenus de les
acquitter, d'autant qu'ils ne font point du nombre
des avaries. Voye^_ Tonne & Balise. Un vaifleau
mouillé dans un havre , doit avoir une bouée à fon an-
cre ; 6c faute de cela , s'il en arrive quelque defordre
ou perte, le maître payera la moitié du dommage.
Bouée de bout de mât , c'eft celle qui eft faite du
bout d'un mât ou d'une feule pièce de bois.
Bouée de barril , c'eft celle qui eft faite avec des
douves , & qui eft foncée & réliée comme un barril.
Bouée de liège ; c'eft une troifieme cfpece de ces
fortes de marques -, faite de pluiieurs pièces de liège ,
que des cordes tiennent liées enfemble. (Z)
BOVENA, ( Géog. ) c'eft le nom d'une des îles
d'Hieres , dans la Méditerranée , près de la côte de
Provence.
BOUER , v. ait. en Monnoyage , c'eft frapper plu-
fieurs flancs enfemble , placés les uns fur les autres ,
avec le marteau nommé boiiard. Cette opération les
applique exactement , félon leurs furfaces, les appla-
nit, & les fait couler fans peine au compte &: à la
marque. Elle fe répète trois fois; deux fois après avoir
fait recuire , la troifieme fans recuire. On blanchit les
flancs après qu'ils ont été boiiés.
BOUEUR , f. m. (Police.) eft celui qui enlevé les
ordures des rues , hors de la ville.
Il y a auffi un officier fur les ports qu'on appelle
boiteur , parce que la fonction eft de veiller à ce qu'on
les tienne propres , & qu'on en enlevé les ordures.
m
BOUEUSE , (ancre) eft la plus petite des ancres
d'un vaifleau. Voye^ Ancre. (O)
BOUFFE, f. f. (enAnalomie.) nom que donne du
Laurens à la petite éminence formée par la rencontre
des deux lèvres.
BOUFFÉES, en termes d'hydraulique , eft fyno-
nyme kfecouffes.
Lorfque les jets font engorgés par les vents , ils ne
fortent que par bouffées ; c'eft-à-dire, parfecoujjès. (K)
BOUFFON, f. m. (Hifi. atic. & litur.) comédien ,
farceur qui divertit le public par fes plailanteries ;
qui fait & qui dit des quolibets pour faire rire les fpec-
tateurs, & attraper de l'argent. Voye^MiME, Pan-
tomime, Burlesque.
Ménage après Saumaife , dérive ce mot de buffb.
On nommoit ainfi en latin ceux qui paroiflbient fur
le théâtre avec les joues enflées pour recevoir des
foufflets ; afin que le coup fit plus de bruit, & exci-
Tome II,
B O U 355
tât davantage à rire les fpectateurs. Quelques-uns
dérivent ce mot d'une fête qui fut inftituée dans
PAttique par le Roi Erechtée , à l'occaflon d'un fa-
enficateur nommé Buphon , lequel après avoir im-
molé le premier bœuf f iir l'autel de Jupiter Polyen ,
ou gardien de la ville , s'enfuit fans aucun fujet fi
foudainement , qu'on ne put ni l'arrêter, ni le trou-
ver. La hache & les autres uftenflles du facrifîce
furent mis enire les mains des juges, pour leur faire
leur procès : les juges déclarèrent la hache crimi-
nelle ôile relie innocent. Toutes les autres années
fuivantes on fit le facrifîce de la même loite. Le fa-
crificateur s'entuyoit comme le premier, &. la hache
étoit condamnée par des juges. Comme cette céré-
monie & ce jugement étoient tout-à-fait burlefques,
on a appelle depuis bouffons &c bouffonneries toutes
les autres momeries & farces qu'on a trouvées ridi-
cules. Cette hiftoire eft rapportée dans CaeliusRho-
diginus , lib. VIII. c. vj. (G )
BOUGE, f. m. (en Architecture) eft une petite
pièce ordinairement placée aux côtés d'une chemi-
née pour ferrer différentes chofes. Ce mot fe dit aufîi
d'une petite gardev-obe où il n'y a place que pour un
lit très -petit. (P)
Bouge, BESSON,f. m. (Marine.) on nomme ainfi
la rondeur des baux & des tillacs d'un vaifleau. (Z)
Bouge, f. m. (Commerce.) étamine fine, blanche
& claire , dont on fait les chemiles des religieux qui
ne portent point de toile.
BOUGE , ( Commerce. ) petit coquillage qui fert de
monnoie dans les Indes. Certains peuples Indiens
donnent le nom de bouge aux coquilles des Maldives ,
connues fous le nom de coris. Voye^ Coris.
Bouge, f. m. c'eft ainfi que les Charrons appellent
la partie la plus élevée du moyeu d'une roue. C'eft
fur fa furface plane ou arrondie que lont pratiqués
les trous dans lefquels on fait entrer à coups de malle
les rayons de la roue. Voye-^ Planche des proportions
du canon & de fon affût. Le moyeu léparé de la roue
de l'affût CD eft le diamètre du bouge.
BOUGE, (en terme d 'Orfèvre en grofferie.) eft un
cifelet ainfi nommé, parce qu'on s'en fert pour tra-
vailler fur les petites parties d'un morceau où le mar-
teau à bouge ne peut entrer. Elle eft comme lui , gar-
nie d'une petite tranche longue & arrondie.
BOUGE , ( en terme d'Orfèvre en grofferie. ) fe dit de
la partie du chandelier qui commence à la poignée,
& qui defeend fur le pié en s'évafant.
Bouge, (en terme de Planeur!) c'eft proprement
la partie concave d'une affiette, d'un plat, &c qui
fépare le fond de l'arrête. Voye^ Fond & Arrête.
Bouge, c'eft en terme de Tonnelier, le renflement
des tonneaux qui leur donne la forme de deux cônes
tronques appliqués par leurs baies. Quand ce ren-
flement eft conlîdérable, on dit qu'une pièce eft bien
bougiée. C'eft le bouge qui fait la difficulté du jau-
geage, fôy^ Tonneau. Voye\ Jauge.
BOUGEOIR, f. m. efpece de petit chandelier,
formé d'une bobèche, ou plutôt d'une douille fixée
au milieu d'une foucoupe , au bord de laquelle il y
a un anneau qui fert à recevoir le doigt, quand on
porte le bougeoir. Les bougeoirs font de cuivi e , d'ar-
gent, de fer-blanc , &c. on en trouve chez les ou-
vriers qui travaillent en ces métaux. Quand un prélat
officie, c'eft un de les aumôniers qui poi te le bougeoir.
Bougeoir le dit auffi d'une lorte d'étui où 1 aumô-
nier ferre la bougie.
* BOUGIE, f. f. cire employée de manière qu'on
s'en fert à éclairer. Il y a deux fortes de bougie ; la
bougie de table , ôi la bougie filet.
La bougie de table ne le fait guère autrement que
les cierges A la cuillère. Pcye{ Cierge. On fait des
mechesnioitié coton, moitié fil blanc & lin ; on les
tord un peu; on les cire avec de la cire blanche;, afiji
Yyij
35<S
BOU
BOU
de les égalifer fur toute leur longueur , & ne laiffer
échapper aucun poil qui traverie la iblidité de la
bougie ; & on les enferre par le bout avec un petit
ferret de fer blanc , placé vers le collet de la bougie^
ce ferret couvre l'extrémité de la mèche, & empê-
che la cire de s'y appliquer.
Quand les mèches l'ont enferrées , on les colle
chacune léparément , par le côté oppofé au collet , à
des bouts de ficelle qui iont attachés autour d'un
cerceau iufpendu au-deffus de la poelle où l'on tient
la cire en fuiion pour coller ; il iuffit d'appuyer la
mèche contre le petit bout de ficelle ciré ; cette ficel-
le enduite de cire pour avoir fervi au même uiage
prend à la mèche. Si les bouts de ficelle n'avoient
point encore fervi , il faudroit tremper dans la cire
les bouts des mèches.
Quand toutes les mèches font appliquées autour
du cerceau , on les jette l'une après l'autre jufqu a
ce que la bougie ait acquis environ la moitié de ion
poids ; c'eft-à-dire , qu'on verie de la cire deffus les
mèches , comme on le pratique aux cierges faits à
la cuillère : puis on retire la bougie du cerceau, &
on la met entre deux draps , avec une petite couver-
ture par deflùs , pour la tenir molle & en état d'être
travaillée. Eniuite on la retire d'entre les draps , on
répand un peu d eau fur une table bien unie 6c bien
propre , on la roule fur cette table avec le rouloir.
Voye{ Rouloir. On la coupe du côté du collet , on
ôte le ferret , on lui forme la tête avec un couteau
de bois , & on l'accroche par le bout de la mèche qui
eft découvert, à un autre cerceau garni fur la cir-
conférence de cinquante crochets de fer ; comme on
le voit Planch. du Cirier, fig. 2. Quand le cerceau eft
garni de bougies , on leur donne trois demi-jets par
en bas, puis des jets entiers, qu'on continue jufqu'à
ce qu'elles ayant le poids qu'on defire.
Apres le dernier jet on décroche la bougie ; on la
remet entre les draps fous la couverture ; on l'en re-
tire pour la reparler au rouloir ; on la rogne par le
bas avec le couteau de boui ; on l'accroche derechef
à des cerceaux de fer ; & on la laiflé lécher. La bou-
gie de table eft de différente grolîéur; il y en a depuis
quatre jufqu'à ieize à ia livre.
* Bougie filée, c'eft un des ouvrages du cirier
le plus difficile , non parce qu'il faut beaucoup de
précaution pour lui donner ia forme ronde tk égale,
c'eft un fimple effet de la fiiiere par laquelle elle
pâlie ; mais parce que le cordon demande un loin
continuel , pour que tous les fus qui le compolent
foient ou de même force , & de même grolieur , ou
un plus gros à côté d'un foible , enlorte que la foi-
blelle de l'un ibit exactement réparée par la force de
l'autre. On oblerve auiîi de ne pas tourner les tours
trop vite. Foye^ToVR. La matière ayant trop peu
de tems pour le congeler fur le cordon , retomberait
dans le pereau , fans que ce cordon en eût prelque
rien confervé autour de lui. Première railon. En
fécond lieu , le cordon ne pouvant réiifter à tant de
vîteffe, & le dévider allez promptement de deffus le
tour, le romprait; ce qui eft un inconvénient dom-
mageable au cirier. Pour première opération dans
la bougie filée , on dévide d'abord les écheveaux de
coton lur des tournettes, en nouant d'un nœud plat
qui n'eft pas beaucoup plus gros que le fil , les bouts
des uns avec ceux des autres. Rien , comme on peut
le penler, ne fixe la quantité de ces écheveaux , que
la quantité de bougie que l'on a defléin de faire : le
cordon ou la mèche ainfi parvenue à la grofTeur
fixée encore par l'efpece d'ouvrage , on trempe le
bout dans la cire fondue , on l'attache en le collant
fur le tour A, fig. l . du Cirier ; on l'y dévide entière-
ment. On met un autre tour B à quelque diftance du
premier ; entre les deux elf le pereau C. Voye{ Tour
& Pereau. Le bout du cordon s'amène fur le bec du
pereau , fe pafTe dans un petit crochet D au milieu
de cet outil , toujours plus bas que la matière , tra-
verie une fdiere , & fe roule fur l'autre tour , que
l'on met en mouvement avec une manivelle. Tout
le cordon ainfi dévidé , on met le côté de la filière
qui regardoit le fécond tour, en dedans du pereau,
6c celui qui étoit en dedans en dehors, mais à l'au-
tre bec du pereau; & on retourne le cordon du pre-
mier tour lur le fécond, en le faifant paner ious la
filière par un trou du numéro au dellùs ; cette opé-
ration fe répète jufqu'à ce que le cordon foit luffi-
famment filé , ou chargé. On tient la cire chaude
dans le pereau , par le moyen d'une poelle de teu E.
Quant à la fonte de la matière , elle eft bonne ou
mauvaife , à proportion que le degré de chaleur a
été bien ou mal faifi. Mais une règle générale c'eft:
qu'il ne faut jamais trop mettre de matière à la fois
dans le pereau , autrement les premiers tours feraient
blancs & parfaits , les autres viendraient jaunes, la
cire ne pouvant être qu'un certain tems lur le feu ,
pafié lequel elle perd la blancheur , & même là qua-
lité. On obvie donc à cet inconvénient en mettant de
nouvelle cire fondre à melure qu'on employé celle
qui eft fondue. Par là on donne du corps à cette der-
nière , & fe mêlant avec l'autre elle fupporte encore
l'action du feu fans en fouffrir. Ainli de diftance en
diftance jufqu'à la fin. Cette matière eft blanche ou
jaune , félon le prix qu'on fe propofe de vendre la
bougie: quand elle eft pliée , on la peint quelquefois
de diverfes couleurs, fur tout celle qui a la forme
d'un livre. Les bougies fe font de la grofTeur qu'on
les veut.
Bougie , (terme de Chirurgie.} c'eft une petite ver-
ge cirée , faite en façon de cierge , qu'on introduit
dans l'urethre pour le dilater & le tenir ouvert , ou
pour confirmer les carnolités qui s'y trouvent. Il y
a de deux fortes de bougies; les unes fimples, & les
autres compofées. Les fimples font faites de cire
garnie d'une mèche, ou de toile cirée & roulée en
forme de petit cierge : on en fait auffi de corde à
boyau ou de plomb , dans l'intention de tenir le
canal de l'urethre dilaté & comme en forme ; leur
grofTeur doit être proportionnée au diamètre de ce
conduit. Les bougies compofées font celles qui font
chargées de quelque remède capable de mettre le
canal de l'urethre en fuppuration , & de détruire les
carnolités ou excroiffances qui s'y trouvent. Voye^
Carnosité.
Pour faire des 'bougies il faut avoir des languettes
de linge fin, d'une largeur convenable à la grolîéur
qu'on veut leur donner; on enduit ces bandelettes
du médicament emplaftique qu'on croit néceiîaire.
On les roule avec les doigts auffi ferrés qu'on le
peut ; & on leur donne la iolidité requife en les rou-
lant enfuite fur un marbre , ou lur une planche dô
bois de noyer huilée , avec une autre planchette qui
a une poignée fur le milieu de la furface oppofée à
celle qui appuie fur la bougie. (J )
BOUGIER une étoffe , terme de Tailleur, qui li-
gnifie, paffer légèrement une bougie allumée fur la
coupe d'une étoffe qui s'éfile facilement , afin d'en
arrêter les fils.
* BOUGRAN, f. m. (Commerce.) greffe toile de
chanvre gommée, calendrée tk. teinte en diverfes
couleurs , dont on fait des doublures aux endroits
des vêtemens qui fatiguent, & dont l'étoffe a belbin
d'être foutenue.
BOUILLARD , f. m. ( Marine. ) Quelques-uns
nomment ainfi fur la mer certain nuage qui donne
de la pluie & du vent. Mais ce terme n'eft guère
en ulaa;e.
* BOUILLE , f . f . ( Commerce. ) C'eft la marque
appliquée par le commis du bureau des fermes , à
B O U
toute pièce de drap ou autre étoffe de laine qu'on y
déclare.
* BOUILLE , ( Pèche de rivière.') efpcce de rable de
bois à long manche , dont les pêcheurs fe fervent
pour remuer la vafe, 6c en taire lortir le poifion.
* Bouille , f. f. vaifleau d'uiage dans lesj'alines.
Il fert de melure au charbon ou à la braife, qu'on
appelle aufli chanci : ainlî on dit une bouille de chanci,
pour une pannetée de charbon.
BOU1LLER , v. ad. touiller une étofFe , c'eft la
marquer : touiller un endroit de rivière, c'elt le bat-
tre avec la touille. Foye^ Bouille.
BOUILLI, adj. pris iubiî. en terme de Cuijïne,
eft un pièce de bœuf, de veau , de mouton , ou de
volaille , cuite fur le feu , dans une marmite , avec du
fel , de l'eau , 6c quelquefois des herbes potagères.
Le bouilli elt un des alimens de l'homme le plus
fucculent & le plus nourriliant , fur-tout celui de
bœuf. On pourroit dire que le bouilli elt, par rapport
aux autres mets , ce que le pain elt par rapport aux
autres lortes de nourriture. La volaille elt beau-
coup plus légère que le bouilli pour les eltomacs
délicats.
BOUILLIE , f f. c'efl ainfi que les Papetiers 6c les
Cartonnurs appellent quelquefois les drilles ou chif-
fons qui ont été réduits lous le pilon en une pâte
fort liquide , & à peu près de la même confiftance
que cette première nourriture qu'on donne aux en-
fans & qu'on appelle bouillie. C'elt avec cette bouil-
lie ou pâte liquide taite de drapeaux , que fe fabri-
quent le papier & le carton.
BOUILLIR , v. neut. ( Y action de ) (Phyfiq.) c'elt
l'agitation d'un fluide, occafionnée par le feu. Foye%_
Feu , Chaleur. Voici comment s'opère cette agi-
tation , félon les Phyficiens. Les plus petites particules
de la matière dont le feu elt compolé étant détachées
les unes des autres , & pouflées en tourbillon avec
une grande vîteiïe , paiTent à travers les pores du
vaifleau , & fe mêlent avec la liqueur qui y elt con-
tenue ; par la réfiftance qu'elles y trouvent, leur
mouvement elt détruit, ou du moins communiqué en
grande partie au fluide qui elt en repos : de-là vient
la première agitation inteltine. Par l'action continuée
de la première caufe , l'effet elt augmenté , & le mou-
vement du fluide devient continuellement plus vio-
lent ; delorte que le fluide eft par degrés plus fenfi-
blement agité. Alors les nouvelles particules du feu
venant à frapper fur celles de la furface inférieu-
re du fluide , non-feulement les pouffent en haut ,
mais mêmes les rendent plus légères qu'auparavant ;
ce qui les détermine à monter : elles les rendent plus
légères , foit en les enflant en petites véliculcs , foit en
brifant & en féparant les petites particules de fluide ;
& c'eft ce qui caufe un flux continuel du fluide du
fond du vaifleau vers le haut , & du haut au fond ;
c'clt-à-dire que par-là le fluide de la furface , & ce-
lui qui eft au fond du vafe , changent de place ; &
c'elt pour cela que le fluide de la furface elt plutôt
chaud que celui du fond. M. Homberg dit dans les
Mém. de l'académie , que fi on ôte du feu une chau-
dière bouillante , & qu'on applique la main dans l'inf-
tant fous la chaudière , on ne fe brûlera pas ; la raifon
qu'il en donne elt que les particules ignées qui pat-
ient par la partie inférieure de la chaudière ne s'y
arrêtent pas , & vont gagner la furface de l'eau.
Un feu exceflif diminue la pefanteur fpécitique de
l'eau , delorte qu'il la peut faire monter fous la for-
me d'air : de-là vient la vapeur & la fumée ; cepen-
dant l'air renfermé dans les intcrltices de l'eau, doit
être regardé comme la principale caufe de cet effet,
parce que l'air étant dilaté èv ayant acquis de nou-
velles forces par l'action du teu , brile la prilon èv
monte à travers l'eau dans fair , emportant avec lui
B O U
35?
quelques-unes des bulles d'eau qui lui font adhéren-
te, f^oyei Vapeur , Exhalaison.
Les particules d'air qui font dans les différentes
interftices du fluide étant ainfi dilatées & le portant
en haut, le rencontrent & s'accrochent dans leur
paffage ; par ce moyen une grande quantité d'eau
eft foulevée & retombe rapidement, & fair s'élève
& fort de l'eau : car quoique l'air après i'unionde lès
parties puifle lbûtenir une grande quantité d'eau par
l'on élafticité , pendant qu'il eft dans l'eau , il ne peut
plus cependant la porter avec lui dans l'atmofphe-
re; parce que quand une fois il eft dégagé de la fur-
face de l'eau qui elt dans le vaifleau , il le détend de
lui-même ; & ainfi fa force devient égale à celle de
l'air refroidi. Ajoutez à cela que la force de l'air pour
enlever l'eau , elt diminuée par la force avec laquelle
les particules d'eau tendent à fe réunir aux particu-
les d'eau lemblables qui les attirent plus fortement,
& qui les forcent de relter fur la furface de l'eau ;
delorte qu'il ne s'échappe prefque point de particu-
les d'eau avec l'air , que celles qui y font immédia-
tement adhérentes , quoique l'air faffe effort pour en
enlever une plus grande quantité; & de-là vient le
principal phénomène de l'ébullition , favoir la fluc-
tuation de la furface de l'eau. L'eau tiède ou froide
femble bouillir dans la machine pneumatique quand
l'air en elt pompé : la raifon de cet effet elt facile à
comprendre , car la preflion de l'atmofphere n'agif-
fant plus fur la litrface de l'eau , fair renfermé dans
fes interftices fe dilate avec afl'ez de force pour foû-
lever l'eau , & fe dégager par lui - même. Quand
l'ébullition de l'eau celle , on peut la faire recom-
mencer en y verfant de l'eau froide ; 6c quand l'é-
bullition elt très-grande , on peut la faire diminuer
en y verfant de l'eau chaude ; car en verfant de l'eau
froide , on ajoute de nouvel air qui n'elt point en-
core dilaté ni dégagé ; & en verfant de l'eau chaude ,
on ajoute de l'air qui elt déjà dilaté , 6c qui doit faire
beaucoup moins d'effort. (O)
BOUILLITOIRE , f . f . ( à la Monnaie ) donner la
bouillitoire , c'el't jetter les flancs à la bouilloire , les y
nettoyer & faire bouillir dans un liquide préparé ,
jufqu'à ce qu'ils foient devenus blancs, f^oye^ Blan-
chiment & Bouilloire.
BOUILLOIRE, f. f.' ( à la Monnaie ) vaifleau de
cuivre , en forme de poelle plate à main , dans lequel
il y a de l'eau bouillante avec du fel commun , & du
tartre de Montpellier gravelé, où l'on jette les flancs
qu'on a laiffé refroidir dans un crible de cuivre rou-
ge , après qu'ils ont été afl'ez recuits. On les fait bouil-
lir dans ce vaifleau pour les décraiîer, enfuite on les
jette dans une autre bouilloire , remplie de même que
la première , où on les fait bouillir une leconde fois,
pour achever de les nettoyer.
Ce vaifleau elt commun à tous les ouvriers en or,
en argent, & même en cuivre. Foyc{ Pl.prem. d'Or-
fèvrerie. Voyer auffi la PI. du Boutonnier en cuivre.
BOUILLON, f. m. ( Médecine ) décoction de la
chair des animaux faite fur un feu modère , pour en
tirer le fuc qu'elle contient; on tait entrer dans la
compofition des bouillons, non-feulement le bœuf, le
veau , & le mouton ; mais aulîi différentes efpeces
d'oifeaux , telles que les poules, chapons & autres.
On en fait auffi avec le poillon.
Le bouillon fert à l'homme , comme aliment ordi-
naire & comme remède.
Quand on employé les bouillons comme remèdes,
on y joint ordinairement des plantes , dont la vertu
elt appropriée à l'état de la perlbime qui en fait ufa-
ge ; & alors on les nomme bouillons médicamenteux : il
y en a d'altérans , de pectoraux , d'apéritifs , &c 6c
on leur donne ces différens noms, félon la vertu des
differens medicamens qui entrent dans leur compo-
fition. Les bouillons les plus propees à nourrir lont
35§
B O U
B O U
ceux qui font compofés de bœuf & de volaille. Voyei
Bœuf. Au défaut de ceux-ci , on donne ceux de
veau & de mouton.
Les malades & les convalefcens fe trouvent très-
bien de bouillons de poifTon ; les fibres de l 'eftomae
étant très-afFoiblis par une longue maladie , il eft fou-
vent peu propre à digérer le fuc des animaux, & s'ac-
commode mieux de celui de carpe , de tanche , de
grenouille >- &<. qui d'ailleurs porte une fraîcheur
dans le fang qu'on ne doit point attendre de celui
des animaux terreitres ni des volatils. (iV)
Bouillon blanc, ou Mollaine, (Hifi. nat.
bot. )-verbafcum, genre de plante à fleur monopétale ,
rayonnée & découpée. Le piftil fort du calice &
eft attaché comme un clou au milieu de la fleur , qui
devient dans la fuite un fruit ou une coque ovoïde
& pointue , partagée en deux loges par une cloilon
mitoyenne , & remplie pour l'ordinaire de pluiieurs
fémences anguleufes attachées à un placenta. Tcur-
nefort, Infi. ni herb. Voye^ PLANTE. ( / )
Vtrbafcum i. Matth. Ray , Hijl. Vtrbafcum vulgart,
flore luteo magno, folio maximo. J. B. Vtrbafcum mas
îatifolium luuum. C. B. Pit. Tournefort. Vtrbafcum
tapfus barbatus offic. Cette plante eft au nombre des
herbes émollientes ; elle relâche 6k. convient avec
celles de fa clafle , comme la mauve , dans les lave-
mens, les cataplafmes, &les fomentations lôrfqu'il
eft. queftion de relâcher & de détendre.
Les fleurs & les feuilles font eftimées pectorales ,
bonnes contre la toux , le crachement de fang , &
autres affections de la poitrine.
Elles font aufli fort falutaires contre les tranchées ,
& les douleurs de colique , qui viennent d'humeur
acre.
On fait avec le bouillon blanc des préparations
pour la toux, & les hémorrhoïdes douloureufes. (A/)
BOUILLON, (Martchaltrit^ on appelle ainfl une
excroiflance charnue , qui vient fur la fourchette du
cheval ou à côté , qui eft grofle comme une cerife
& fait boiter le pié. Les chevaux de manège qui ne
fe mouillent jamais les pies , font plus fujets que les
autres aux bouillons de chair qui les font boiter tout
bas. Pour défigner ces bouillons , on dit : la chair fou-
fltfur la fourchette.
On donne aufli ce nom à une excroiflance ronde
& charnue , qui croît dans une plaie. ( V")
Bouillons d'Eau, ( en ArchitcUure') fe dit de
tous les jets d'eau qui s'élèvent de peu de hauteur
en manière de fource vive. Ils fervent pour garnir
les cafeades , goulotes , rigoles , gargouilles, qui font
partie de la décoration des jardins. (P)
Bouillon, ( ttrmt de Brodeur} c'eft une efpece
de cannetille d'or ou d'argent très- brillante, qui fe
coupe par petits morceaux , qui s'enfile comme des
perles , & fe pofe clans le milieu des fleurs en brode-
rie, où elle s'attache avec du fil d'or , d'argent ou
de foie. Le bouillon entre aufli dans les crépines.
Voye^ PI. prem. fig. à. du Boutonnitr. Le bouillon à
l'uiage de ces derniers ouvriers eft un fil d'or roulé
fur un autre , le plus prefie qu'il fe peut , retiré de
deflus celui qui lui fervoit de patron ; on le coupe de
différentes longueurs pour en faire des épis , des
roues , & autres enjolivemens propres aux Bouton-
niers. Voyt{ ces mots à leurs articles.
BOUILLON , ( boîte à} en termede Boutonnier , c'eft
une boîte de fer-blanc doublée d'une autre boîte de
même matière , mais moins profonde , criblée de
trous comme une pafloire. On coupe le bouillon dans
cette première boîte ; & le remuant à la manière
d'un tamis , le déchet que les cifeaux ont fait en cou-
pant le bouillon , tombe & fe conierve dans la fécon-
de boîte. Voyci BOUILLON.
BOUILLON, (Ge'og.) ville forte avec château à
îrois lieues de Sedan , fur la rivière de Semoy , capi-
tale du duché de même nom , fitué entre le duché dé
Luxembourg & l'évêché de Liège. Long. 22. 35.
Ut. 49. 49.
BOUILLONNEMENT , f. {.{Marine ) on appelle
quelquefois ainfi l'agitation de la mer au borct du ri-
vage. La mer bouillonne , fe dit encore lorlqu'elle ne
briiè que médiocrement. Vcye^ Briser. (Z)
BOUILLONNER , v. au. ( en terme de Bouton-
mer , ) c'eft enjoliver un bouton avec du bouillon ;
ce qui s'exécute de la manière fuivante : on a une
aiguille exprès , c'eft-à-dire longue & mince , enfilée
d'une foie de grenade unie & cirée pour que le bouil-
lon y coide mieux. On pafle l'aiguille dans le bouil-
lon , & on l'attache en long , en écartant ie point de
fa longueur , ou en roue , en rapprochant les points :
j'ai dit foie de grenade unie , c'eft que les cimes loies
étant cotonneufes & pleines d'inégalités , empêche-
roient le bouillon de pafler ; ce qui retarderoit l'opé-
ration, &pourroit même rendre l'ouvrage imparfait >
fur-tout dans les épis & les cordelières , oii les foies
du moins après un tems fe fépareroient en petits poils,
qui pourroient pafler à travers le bouillon , & offuf-
quer fon éclat.
BOUIN , (Géog.~) petite île de la province de Bre-
tagne au-deflous de l'embouchure de la Loire.
BOVINES ou BOVIGNES , ( Géog. ) petite ville
du comté de Namur fur la Meute , renommée par la
victoire qu'y remporta Philippe-Augufte.
BOVINO , ( Géog. ) petite ville d'Italie au royau-
me de Naples dans la Capitanate , proche les monts
Apennins , avec évêché.
BOUIS , f. m. terme de Chapelier ; ce terme fe dit des
vieux chapeaux. Leur donner le bouis , c'eft les net-
toyer & les luftrer. Voye^ Rebouisage.
BoUIS , en terme de Vergettier & de Cordonnier ; c©
font des morceaux de ce bois très-unis que prépa-
rent les Vergettiers , & dont les Cordonniers fe fer-
vent pour luftrer leurs pafle-taions & le bord des fe-
melles de fouliers. Voye{ l'article Cordonnier.
BOUISSE , f. f. en terme de Formitr de Cordonnier ;
c'eft un morceau de bois concave , à-peu-près com-
me une petite auge , que les Formiers préparent , §£
dont les Cordonniers fe fervent pour donner de la
profondeur à leurs femelles , ck leur faire prendre
plus aifément le pli de la forme & du pié. Voye^ Pi.
du Cordonnier-Bottier.
* BOULANGER , f. m. (Police anc. & mod. &Art.)
celui qui eft autorité à faire , à cuire , & à vendre dû
pain au public.
Cette profeflion qui paroît aujourd'hui fi néceflai-
re , étoit inconnue aux anciens. Les premiers fiecles
éîoient trop Amples pour apporter tant de façons à
leurs alimens. Le blé fe mangeoit en fubftance com-
me les autres fruits de la terre ; & après que les hom-
mes eurent trouvé le fecret de le réduire en farine ,
ils fe contentèrent encore long-tems d'en faire de la
bouillie. Lorfqu'ils furent parvenus à en pétrir du
pain , ils ne préparèrent cet aliment que comme tous
les autres , dans la maifon & au moment du 1 epas.
C'étoit un des foins principaux des mères de ramille ;
ôedans les tems où un prince ruoit lui-même l'agneau
qu'il devoit manger, les femmes les plu- qualifiées ne
dédaignoient pas de mettre la main à la pâte. Abra-
ham, dit l'Ecriture, entra promptement dans fa tente,
& dit à Sara : pétrife^ trois mefures de farine , & faites
cuire des pains fous la cendre. Les dames Romaines fai-
foient aufli le pain. Cet ufage pafla dans les Gaules ;
& des Gaules , fi l'on en croit Borrichius , jufqu'aux
extrémités du Nord.
Les pains des premiers tems n'avoient prefque rien
de commun avec les nôtres , foit pour la forme , foit
pour la matière : c'étoit prefque ce que nous appel-
ions des galettes ou gâteaux ; ci ils y faifoient fouvent
entrer avec la farine le beurre, les ceufs, la graifle, le
BOU
fafran , & autres ingrédients. Ils ne les cuifoïent point
dans un four , mais fur l'atre chaud , fur un gril , fous
une efpece de tourtière. Mais pour cette forte de pain
même , il falloit que le blé & les autres grains fuf-
fent convertis en farine. Toutes les nations , comme
de concert , employèrent leurs efclaves à ce travail
pénible ; & ce fut le châtiment des fautes légères
qu'ils commettoient.
Cette préparation ou trituration du blé fe fit d'a-
bord avec des pilons dans des mortiers , enfuite avec
des moulins à bras. Voye{ Pa I n ; voye{ MOULIN.
Quant aux fours,& à l'ufage d'y cuire le pain, il com-
mença en Orient. Les Hébreux, les Grecs , les Afia-
tiques , connurent ces bâtimens , & eurent des gens
prépofés pour la cuite du pain. Les Cappadociens ,
les Lydiens , & les Phéniciens y excellèrent. Voyc^
Pain ; voye{ Four.
Ces ouvriers ne pafTerent en Europe que l'an 583
de la fondation de Rome : alors ils étoient employés
par les Romains. Ces peuples avoient des fours à
coté de leurs moulins à bras ; ils conlerverent à ceux
qui conduifoient ces machines, leur ancien nom de
pinfores ou pijîores , pileurs , dérivé de leur première
occupation , celle de piler le blé dans des mortiers ; &
ils donnèrent celui de piftorix aux lieux où ils travail-
loient : en un mot Pi/lor continua de fignifîer un Bou-
langer ; &c pijloria , une boulangerie.
Sous Augufte, il y avoit dans Rome jufqu'à trois
cents vingt-neuf boulangeries publiques diftribuées en
dirîerens quartiers : elles étoient prefque toutes te-
nues par des Grecs. Ils étoient les leuls qui fufTent
faire de bon pain. Ces étrangers formèrent quelques
affranchis , qui fe livrèrent volontairement à une pro-
felfion li utile , ôc rien n'efl plus iage que la dilcipline
qui leur fut impofée.
On jugea qu'il falloit leur faciliter le fervice du
public autant qu'il feroit poffible : on prit des précau-
tions pour que le nombre des Boulangers ne diminuât
pas , ôc que leur fortune répondît pour ainfi dire de
leur fidélité &c de leur exactitude au travail. On en for-
ma un corps, ou félon Pexpreiîîon du tems,un collège,
auquel ceux qui le compofoient, reftoient nécefïaire-
ment attachés ; dont leurs enfans n'étoient pas libres
de fe féparcr ; & dans lequel entroient néceffairement
ceux qui époufoient leurs filles. On les mit en pof-
fefîion de tous les lieux oii l'on mouloit auparavant ,
des meules , des efclaves, des animaux, & de tout
ce qui appartenoit aux premières boulangeries. On
y joignit des terres & des héritages ; & l'on n'épar-
gna rien de ce qui les aideroit à foûtenir leurs travaux
& leur commerce. On continua de reléguer dans les
boulangeries tous ceux qui furent acculés & convain-
cus de fautes légères. Les juges d'Afrique étoient te-
nus d'y envoyer tous les cinq ans ceux qui avoient
mérité ce châtiment. Le juge l'auroit fubi lui-même ,
s'il eut manqué à faire fon envoi. On fe relâcha dans
la fuite de cette févérité ; & les tranfgreffions des ju-
ges &c de leurs officiers à cet égard , furent punies pé-
cuniairement : les juges furent condamnés à cinquante
livres d'or.
Il y avoit dans chaque boulangerie un premier pa-
tron ou un furintendant des ierviteurs, des meules,
des animaux, des efclaves , des fours , &c de toute la
boulangerie ; & tous ces furintendans s'aflembloient
une fois l'an devant les magiftrats , & s'élifoient un
prote ou prieur , chargé de toutes les affaires du col-
lège. Quiconque étoit du collège des Boulangers ne
pouvoir difpofer , foit par vente , donation ou autre-
ment , des biens qui leur appartenoient en commun :
il en étoit de même des biens qu'ils avoient acquis
dans le commerce , ou qui leur étoient échus par luc-
çeflion de leurs pères ; ils ne les pouvoient léguer
qu'à leurs enfans ou neveux qui étoient néceflaire-
ment de la profeflion ; un autre qui les acquérait ,
BOU
359
étoit aggrégé de fait au corps des Boulangers. S'ils
avoient des pofTeffions étrangères à leur état , ils en
pouvoient difpofer de leur vivant , finon ces pcfTef-
fions retomboient dans la communauté. Il étoit dé-
fendu aux magiftrats, aux officiers & aux fénateurs,
d'acheter des Boulangers mêmes ces biens dont ils
étoient maîtres de diipofer. On avoit cru cette loi
effentielle au maintien des autres ; & c'eft ainfi qu'el-
les devraient toutes être enchaînées dans un état bien
policé. Il n'eft pas poffible qu'une loi lubfifte ifolée.
Par la loi précédente , les riches citoyens & les hom-
mes puifTans furent retranchés du nombre des acqué-
reurs. Auffitôt qu'il naifîbit un enfant à un Boulanger %
il étoit réputé du corps : mais il n'entroit en fonction
qu'à vingt ans ; jufqu'à cet âge , la communauté en-
tretenoit un ouvrier à fa place. Il étoit enjoint aux
magiftrats de s'oppofer à la vente des biens inalié-
nables des fociétés de Boulangers , nonobstant per-
miffion du prince & confentement du corps. II étoit
défendu au Boulanger de folliciter cette grâce , fous
peine de cinquante livres d'or envers le fife , & or-
donné au juge d'exiger cette amende, à peine d'en
payer une de deux livres. Pour que la communauté
fût toujours nombreufe , aucun Boulanger ne pouvoit
entrer , même dans l'état eccléfiaftique : &c fi le cas
arrivoit , il étoit renvoyé à fon premier emploi : il
n'en étoit point déchargé par les dignités , par la mi-
lice, les décuries , & par quelqu'autre fonction ou
privilège que ce fût.
Cependant on ne priva pas ces ouvriers de tous
les honneurs de la république. Ceux qui l'avoient
bien fervie , fur-tout dans les tems de difette , pou-
voient parvenir à la dignité de fénateur : mais dans
ce cas il falloit ou renoncer à la dignité , ou à fes
biens. Celui qui acceptoit la qualité de fénateur ,
ceffant d'être Boulanger, perdoit tous les biens de
la communauté ; ils pafïbient à fon fuccefleur.
Au refte , ils ne pouvoient s'élever au-delà du de-
gré de fénateur. L'entrée de ces magiftratures , aux-
quelles on joignoit le titre de perfeclijjimatus , leur
étoit défendue , ainfi qu'aux efclaves , aux compta-
bles envers le fife, à ceux qui étoient engagés dans
les décuries , aux marchands , à ceux qui avoient bri«
gué leur pofte par argent , aux fermiers , aux procu*
reurs , & autres admmiltrateurs des biens d'autrui.
On ne longea pas feulement à entretenir le nom-'
bre des Boulangers ; on pourvut encore à ce qu'ils
ne fe méfalliaflént pas. Ils ne purent marier leurs filles
ni à des comédiens , ni à des gladiateurs , fans être
fultigés , bannis , & chafîes de leur état ; & les offi-
ciers de police permettre ces alliances , fans être
amendés. Le banniffement de la communauté fut en-
core la peine de la diffipation des biens.
Les boulangeries étoient diftribuées, comme nous
avons dit , dans les quatorze quartiers de Rome ; &
il étoit défendu de palier de celle qu'on occupoit dans
une autre , fans permilfion. Les blés des greniers pu-
blics leur étoient confiés ; ils ne payoient rien de la
partie qui devoit être employée en pains de largef-
fes ; & le prix de l'autre étoit réglé par le magiftrat.
Il ne fortoit de ces greniers aucun grain que pour les
boulangeries , &c pour la perfonne du prince , mais
non la mailon.
Les Boulangers avoient des greniers particuliers j
où ils dépofoient le grain des greniers publics. S'ils
étoient convaincus d'en avoir diverti , ils étoient
condamnés à cinq cents livres d'or. Il y eut des tems
où les huiffiers du préfet de l'Annonc leur livraient
de mauvais grains , &c à faillie mefure ; & ne leur en
fournilîbient de meilleurs , &£ à bonne melure , qu'à
prix d'argent. Quand ces concufîions étoient décou-
vertes , les coupables étoient livrés aux boulangeries
à perpétuité.
Afin que les Boulangers pufîent vaquer fans relâ*
3'o BOU
che à leurs fondions , ils furent déchargés de tutel-
les , curatelles , & autres charges onéreufés : il n'y
eut point de vacance pour eux , ÔC les tribunaux leur
étoienî ouverts en tout tems.
Il y avoit entre les affranchis -, des Boulangers
Chargés de l'aire le pain pour le palais de l'empereur.
Quelques-uns de ceux-ci afpirerent à la charge d'in-
tendans des greniers publics, comités horreorum : mais
leur liaifon avec les autres Boulangers les rendit liif-
peâs, & il leur fut défendu de briguer ces places.
C'étaient les mariniers du Tibre & les jurés-me-
fureurs , qui diftribuoient les grains publics aux Bou-
langers ; & par cette raifon, ils ne pouvoient entrer
dans le corps de la boulangerie. Ceux qui déchar-
geoient les grains des vaiffeaux dans les greniers pu-
blics , s'appelloientydcc<z«/ ; & ceux qui les portoient
des greniers publics dans les boulangeries , catabo-
lenfes. Il y avoit d'autres porteurs occupés à distri-
buer fur les places publiques le pain de largeffe. Ils
étoient tirés du nombre des affranchis ; & l'on pre-
noit auffi des précautions pour les avoir fidèles, ou
en état de répondre de leurs fautes.
Tous ces ufages des Romains ne tardèrent pas à
palier dans les Gaules : mais ils parvinrent plùtard
dans les pays feptentrionaux. Un auteur célèbre ,
c'èft Borrichius, dit qu'en Suéde & en Norvège , les
femmes pétriffoient encore le pain , vers le milieu du
xvi. fiecle. La Fiance eut des la naiffance de la mo-
narchie des Boulangers , des moulins à bras ou à eau ,
& des marchands de farine appelles ainfi que chez
les R-omains , Pejlors , puis Parutiers , Talmeliers , &
Boulangers. Le nom de Talmeliers eft. corrompu de
Tamifîérs. Les Boulangers furent nommés ancienne-
ment Tamifiers , pa; ce que les moulins n'ayant point
de bluteaux , les marchands de farine la tamiloient
chez eux & chez les particuliers. Celui de Boulan-
gers vient de Boulents , qui eft plus ancien ; & Bou-
lents , de polenta ou pollis , fleur de farine. Au relie ,
la profeffion des Boulangers eft libre parmi nous : elle
eft feulement affujettie à des lois , qu'il était tres-jufte
d'établir dans un commerce auffi important que celui
du pain.
Quoique ces lois foient en grand nombre , elles
peuvent le réduire à fept chefs.
i° La diftinftion des Boulangers en quatre claffes;
de Boulangers des villes , de Boulangers des faubourgs
& banlieue , des Privilégiés , ck des Forains.
2° La difeipline qui doit être obfervée dans cha-
cune de ces claffes.
3° La jurifdiâion du grand pannetier de France fur
les Boulangers de Paris.
4° L'achat des blés ou farines , dont ces marchands
ont befoin.
5° La façon , la qualité , le poids , & le prix du
pain.
6° L'établiffement & la difeipline des marchés où
le pain doit être expoié en vente.
7° L'incompatibilité de certaines profeffions avec
celle de Boulanger.
Des Boulangers de Paris. Les fours banaux fubfif-
toient encore avant le règne de Philippe Augufte. Les
Boulangers de la ville fourniffoient feuls la ville : mais
l'accroiffement de la ville apporta quelque change-
ment , & bien-tôt il y eut Boulangers de ville &C Bou-
langers de faubourgs. Ce corps reçut les premiers re-
glemens fous S. Louis : ils font très-fages , mais trop
étendus pour avoir place ici. Le nom de gindre, dont
l'origine eft afiez difficile à trouver , & qui eft encore
d'ufage , eft employé pour défigner le premier gar-
çon ou Boulanger. Philippe le Bel fit auffi travailler
à la police des Boulangers , qui prétendoient n'avoir
d'autre juge que le grand pannetier. Ces prétentions
durèrent prelque juf qu'en 1 3 50, fous Philippe de Va-
lois , que parut un règlement général de police , on
BOU
celle des Boulangers ne fut pas oubliée , & par lequel
i° l'élecHon des jurés fut transférée du grand panne-
tier au prévôt de Paris : 20 le prévôt des marchands
fut appelle aux élections : 30 les Boulangers qui fe-
roient du pain qui ne feroit pas de poids , payeraient
foixante fous d'amende , outre la confifeation du pain.
Le fou était alors de onze fous de notre monnoie cou-
rante. Henri III. fentit auffi l'importance de ce com-
merce , & remit en vigueur les ordonnances que la
fageffe du chancelier de l'Hôpital avoit méditées.
Il n'eft fait aucune mention d'apprentiffage ni de
chef-d'œuvre dans les anciens ftatuts des Boulangers.
Il fuffiioit , pour être de cette profeffion , de demeu-
rer dans l'enceinte de la ville , d'acheter le métier du
Roi; & au bout de quatre ans, de porter au maître
Boulanger ou au lieutenant du grand pannetier un pot
de terre , neuf, & rempli de noix 6c de nieulle , fruit
aujourd'hui inconnu ; caffer ce pot contre le mur en
prélence de cet officier , des autres maîtres , & des
gindres, & boire enfemble. On conçoit de quelle con-
fêquence devoit être la négligence fur un pareil ob-
jet : les Boulangers la fentirent eux-mêmes , & fon-
gerent à fe donner des ftatuts en 1637. Le roi approu-
va ces ftatuts , & ils font la bafe de la difeipline de
cette communauté.
Par ces ftatuts , les Boulangers font fournis à la ju-
rifdiftion du grand pannetier. Il leur eft enjoint d'élire
des jhrés le premier dimanche après la fête des Rois ;
de ne recevoir aucun maître fans trois ans d'appren-
tiffage ; de ne faire qu'un apprenti à la fois ; d'exiger
chef-d'œuvre , &c.
Du grand Pannetier. Les anciens états de lamaifon
de nos rois , font mention de deux grands officiers ,
le dapifer ou fénéchal , & le bouteiller ou échanfon. Le
dapifer ou fénéchal ne prit le nom de pannetier, que
fous Philippe Augufte. Voyt{ l'article Grand-Pan-
netier. Depuis Henri II. cette dignité était toujours
reftée dans la maifon de Coffé de Briffac. Ses préro-
gatives étoient importantes. Le grand pannetier, ou
fa jurifdiâion, croifoit continuellement celle du pré-
vôt de Paris, ce qui occafionnoit beaucoup de con-
teftations , qui durèrent jufqu'en 1 674, que le roi réu-
nit toutes les petites juftices particulières à celle du
châtelet.
Des Boulangers de faubourgs. Les ouvriers des fau-
bourgs étoient partagés, par rapport à la police , en
trois claffes : les uns étoient fournis à la jurande &
faifoient corps avec ceux de la ville : d'autres avoient
leur jurande & communauté particulières ; & il était
libre d'exercer toute forte d'art & maîtrife dans le
faubourg S. Antoine. En faveur de l'importance de
la Boulangerie , on permit à Paris & dans toutes les
villes du royaume , de s'établir Boulanger dans tous
les faubourgs , fans maîtrife. On affujettit les Boulan-
gers de faubourgs , quant au pain qu'ils vendoient
dans leurs boutiques , à la même police que ceux de
ville ; quant au pain qu'ils conduif oient dans les mar-
chés , on ne fçut fi on les confondrait ou non , avec
les forains.
Cette diftinûion des Boulangers de ville , de fau-
bourgs , & forains , a occaiionné bien des contefta-
tions; cependant on n'a pas olè les réunir en com-
munauté , & l'on a laifîè fubfifter les maîtrifes particu-
lières , de peur de gêner des ouvriers auffi effentiels.
Des Boulangers privilégiés ; ils font au nombre de
douze , & tous demeurent à Paris ; il ne faut pas les
confondre avec ceux qui ne tiennent leur privilège
que des lieux qu'ils habitent. Les premiers ont brevet
èc font Boulangers de Paris ; les autres font traités
comme forains.
Des Boulangers forains, ou de ceux qui apportent
du pain à Paris, de Saint-Denys , Gonefîe, Corbeil,
Villejuif , & autres endroits circonvoiiîns. Ces pour-
voyeurs font d'une grande reffource; car deux cents-
cinquantç
B O U
cinquante Boulangers que Paris a dans fon enceinte ,
& fix cents-foixante dans fcs faubourgs , ne lui iiiffi-
roient pas. Elle a befoin de neuf cents forains, qui
arrivent dans les marchés deux fois la femaine. Ils ne
venoient autrefois que le famedi. Il leur fut permis ,
en 1 366 , de fournir dans tous les jours de marché. Ils
obtinrent ou prirent fur eux , au lieu d'arriver dans
les marchés , de porter chez les bourgeois : mais on
fentit & l'on prévint en partie cet inconvénient.
De Fackat des blés & des farines par les Boulangers.
Deux fortes de perfonnes achètent des blés & des fa-
rines ; les Boulangers & les bourgeois & habitans de
la campagne : mais on donne la préférence aux der-
niers, & les Boulangers n'achètent que quand les bour-
geois font cenfés pourvus. Ils ne peuvent non plus
enlever qu'une certaine quantité ; 6c pour leur ôter
tout prétexte de renchérir le pain fans caufe , on a
établi des poids pour y peler le blé que reçoit un meu-
nier, & la farine qu'il rend. Voye^ BLÉ & FariNF.
Il n'arrivoit jadis fur les marchés que des blés ou des
farines non blutées : la facilité du tranfport a fait per-
mettre l'importation des farines blutées.
De la façon & de la vente du pain. Voye^ à /' article
Pain , la manière de le faire & de le vendre , avec les
différentes efpeccs.
Du poids & du prix du pain. Voy. encore l'art. Pain.
Du débit & des places où il ft fait. Tout Boulanger
qui prend place fur un marché , contracte l'obligation
de fournir une certaine quantité de pain chaque jour
de marché , ou de payer une amende. Il faut qu'il s'y
trouve lui ou fa femme , & que tout ce qu'il apporte
foit vendu dans le jour. Il leur eft enjoint de vendre
jufqu'à midi le prix fixé , parle cette heure il ne peut
augmenter , mais il eft obligé de rabaiffer pour faci-
liter fon débit.
Il lui eft défendu de vendre en gros à des Boulant
gers. Les marchés au pain fe font augmentés , à me-
liire que la ville a pris des accroiffemens : il y en a
maintenant quinze ; les grandes halles ; les halles de
la Tonneleric ; la place Maubert; le cimetière faint
Jean ; le marché neuf de la cité ; la rue faint Antoine
vis-à-vis les grands Jéfuites ; le quai des Auguftins ;
le petit marché du faubourg S. Germain ; les Quinze-
vingts ; la place du Palais royal ; le devant de l'hôtel-
lerie des bâtons royaux , nie S. Honoré ; le marché
du Marais du Temple ; le devant du Temple ; la porte
S. Michel. Il fe trouve, le mercredi & le famedi de
chaque lemaine , dans ces endroits , quinze cents tren-
te-quatre Boulangers , dont cinq à fix cents ou forains
ou des faubourgs.
Profeffion incompatible avec la Boulangerie. On ne
peut être Boulanger , meunier, & marchand de grain
parmi nous , ainfi que chez les Romains, on ne pou-
voit être pilote , marinier, ou mefureur. U n'eft pas
néceffaire d'en apporter la raifon.
On trouvera aux articles Meunier, Pain, Fa-
rine , Levain , Blé , Four , Grain , &c. le refte
de ce qui concerne la profeflîon de Boulanger.
S'ils vendent à faux poids, ils font punis corporcl-
lement. Comme le pain eft la nourriture la plus com-
mune & la plus néceffaire , le marché au pain tient à
Paris le mercredi & le famedi , quelques jours qu'ils
arrivent , excepté feulement l'Epiphanie , Noël , la
Touffaint, & les fêtes de Vierge ; dans ces cas le dé-
bit fe fait le mardi & le vendredi. Quant au commer-
ce des boutiques , il n'eft jamais interrompu ; les Bou-
langers font feulement obligés les dimanches & têtes ,
de tenir les ais de leurs boutiques fermés.
BOULANGER, v. neut. qui n'eft guère François
que chez les Boulangers, 011 il lignifie pétrir la farine
6c en faire du pain. Voy -<rj Pétrir.
BOULANGERIE , f. f. (en Architecture.) eft un bâ-
timent dans un palais , mailon de campagne , ou dans
Tome IL
B O U
561
une communauté , deltiné à faire le pain , & compolë
de plufieurs pièces , comme fournil , lieu où font les
fours , panneterie , pétrin , farinier 6c autres. (P )
Boulangerie , {en Marine.) ce terme fe dit dans
un arfenal de marine, du lieu où l'on fait le bifeuit.
Voye{ dans la Planche VII. féconde partie de l'arfe-
nal , l'emplacement & la diftribution des bâtimens
pour la Boulangerie. (Z )
BOULE , f. f. On donne ce nom en général à tout
corps rond, de quelque matière qu'il foit , & à quel-
qu'ufage qu'on le deftine. Il elt fynonyme à globe ;
mais globe 6cfphere ont d'autres acceptions.
* Boule de Mars , remède efficace pour les
plaies.
Prenez de la limaille d'acier préparée, c'eft-à-dire
réduite en poudre très-déliée & bien purgée, une
partie; de tartre blanc pulvérifé , deux parties : mê->
lez dans une cucurbite : arrofez d'eau-de-vie, de
manière que le mélange en foit couvert à la hauteur
d'un doigt : digérez foit au bain-marie , foit à la cha-
leur du foleil : verfez derechef fur la maffe léchée &
pulvérifée, de l'eau-de-vie : mettez encore en digef-
tion : répétez jufqu'à ce que la maffe defféchée vous
paroiffe comme rélineufe. Faites de cette maffe des
boules de la groffeur d'un œuf.
Pour s'en lervir, on prend la boule, on la met dans
l'eau-de-vie chaude ; on l'y laiffe fondre un peu ; elle
lui donne une couleur brune ; alors on y trempe des
linges qu'on applique fur la partie offenfée.
Les boules de Mars qui viennent de Nancy en Lor-
raine , paffent pour les meilleures.
Boule de chamois, œgagropila. C 'eft une
petite boule qu'on trouve dans Peftomac des dains &
des boucs en Allemagne; quelques-uns ont prétendu
qu'elle étoit formée par le doronic que ces animaux
paillent : mais on fait qu'elle eft compofée de poils
qu'ils avalent , à peu près comme les bœufs , les co-
chons , & les fangliers , où l'on trouve de pareilles
balles ou boules. Cela étant, ces boules n'ont pas d'au-
tres vertus que celles des autres animaux ci-deffus
dénommés ; c'eft à tort qu'on les a cru bonnes con-
tre le vertige, ou douées des vertus des plantes que
ces animaux avoient mangées. (A7)
BOULE D'AMORTISSEMENT, en Architecture , eft
un corps fphérique qui termine quelque décoration,
comme il s'en met à la pointe d'un clocher , d'une
pyramide , fur la lanterne d'un dôme , auquel elle eft
proportionnée. LabouledeS. Pierre de Rome, qui eft
de bronze , avec une armature de fer en-dedans faite
avec beaucoup d'artifice , & qui eft à 67 toiles de hau-
teur, a plus de huit pies de diamètre. Il fe met aufîî
des boules au bas des rampes , & fur les pié-d'eftaux
dans les jardins. (P)
Boule, qu'on appelle aufîî enclume ronde , c'eft,
en terme de Chaudronnier , l'inftrument fur lequel on
fait la quarre des chaudrons , poêlions , marmites ,
& autres ouvrages de chaudronnerie qui ont des cn-
fonçures.
Cette enclume eft d'acier ou de fer acéré : fa hau-
teur eft d'environ trois pies, y compris un billot de
bois qui lui fert de baie : la groffeur elt inégale, ayant
trois à quatre pouces de diamètre par en-haut, 6c H-
niffant en pointe par en-bas , pour qu'il puiffe entrer
dans le billot.
L'extrémité fupérieure , qui eft proprement ce
qu'on appelle la boule , eft de figure fphérique. C'eft
fur cet endroit qu'on tourne l'ouvrage lorfqu'on en
fait la quarre, c'eft-à-dire, lorfqu'on en arrondit le
fond avec le maillet de bonis. Voyei Quarre , & la
fig. IJ. PL I. du Chaudronnier.
Boule , en terme de Fourbi (feur , eft un morceau de
bois rond, percé à demi fur la fin face, de plufieurs
trous pour recevoir le pommeau, & pour les enfbrv
Z 1
362
B O U
cer plus aifement dans la foie, Voyt{ S OIE; voye{
PL I.duFourbifieur,fig.iy.
BOULES , {en terme de Graveur en pierres fines ) fe dit
de la tête des bouterolles , de quelque figure qu'elle
foit , excepté plate , en ce dernier cas on l'appelle
fcie. C'eft la tète de la bouterolle qui ufe la pierre au
moyen de la poudre de diamant dont elle eft enduite.
Il y en a de toutes grandeurs & formes différentes ,
félon les parties de Fouvrage que l'on veut travailler.
Voye^ lesfig. 3,4,6,6 , PL III. de la Gravure.
BOULE ou SPHERE, inftrument de Miroitier- Lune-
tier. C'eft un morceau de cuivre , de fer , ou de métal
compoié , coupé en demi-fphere ,fig. 3- PL du Lu-
netier , E F, monté avec du maftic fur un manche de
bois , avec lequel ces ouvriers font les verres con-
caves qui fervent aux lunettes de longue vue , aux
lorgnettes , aux microfeopes , &c.
Il y a des boules de diverfes grolleurs , fuivant le
rayon du foyer qu'on veut donner aux verres. L'on
fe fert de ces boules pour le verre concave , en les
appuyant & tournant fur le verre , qui eft couché à
plat lur rétabli , au lieu qu'on travaille le verre con-
vexe fur le baffin. A cette différence près , les mêmes
matières fervent au dégroffi , à l'adouciffement , &
au poli de l'un & de l'autre ouvrage. On monte aufîi
des boules fur le tour , ainfi qu'on fait des baffins. V.
Bassin.
Boules de licol, {Marèehall.) font des corps
de bois ronds , d'environ quatre pouces de diamè-
tre , & percés d'un trou tout au travers. On paffe les
Jonges du licol dans deux boules , une pour chaque
longe. Ces boules, qui pendent au bout des longes,
les entraînent toujours en-bas, au lieu que quand les
longes font arrêtées aux anneaux de la mangeoire ,
elles plient au lieu de defeendre , ce qui eft caufe que
lorfque le cheval veut fe grater la tête avec le pié de
derrière , il court rifque d'engager fon pié dans le pli
de la longe, & de s'enchevêtrer. Voye[ Enchevê-
trer. {V)
Boule À SERTIR, en terme de Metteur en œuvre, eft
une boule de cuivre tournant dans un cercle de mê-
me matière , concave à fon intérieur, & compoié de
deux pièces qui s'affemblent l'une fur l'autre , avec
des vis qui paffent des trous qui fe répondent de l'une
à l'autre. La partie de deffous fe termine en une queue
tarrodée en forme de vis, qui entre dans l'établi : la
boule eft percée à fon centre d'un trou qui reçoit la
poignée fur laquelle eft montée la pierre qu'on veut
fertir; cette boule , par fa mobilité , préfente l'ouvrage
dans toutes les faces qu'on veut travailler. Voye^ PL
du Jouai Hier & Metteur en œuvre , fig. 16. IJ.
BOULES , en terme d'Orfèvre en grojferie, eft un mor-
ceau de fer , dont une extrémité entre dans un billot
d'enclume , & l'autre fe termine en une boule ou tête
ronde , & quelquefois plate , félon l'ouvrage qu'on y
veut planer. Voyt{ Planer, ^oye^fig. 2. PL II.
Boule , {Serrurerie.} ce font de petits globes de fer
qui fervent à orner & à foùtenir.
Ce font des ornemens dans les balcons , où ils fer-
vent à joindre les rouleaux & anfes des paniers , &e.
Ce font des appuis dans les balcons , lorl qu'ils font
fous les pilaftres , &c.
Boule, {au jeu de quilles ) c'eft un morceau de
bois parfaitement rond , & percé d'un trou pour met-
tre le pouce , & d'une efpece de mortaife pour les au-
tres doigts de la main. Elle fert à abattre les quilles.
Boule, {jeu de} exercice fort connu. On le joue
à un , deux , trois contre trois , ou plus même , avec
chacun deux boules pour l'ordinaire : les joueurs fixent
le nombre des points à prendre dans la partie à leur
choix. C'eft toujours ceux qui approchent le plus
près des buts, qui comptent autant de points qu'Us y
ont de boules. Ces buts font placés aux deux bouts
d'une efpece d'allée très-unie, rebordee d'une petite
B O U
berge de chaque côté , & terminée à chacune de fes
extrémités par un petit foffé appelle noyon. Voye^
Noyon. Quand on joiie, fi quelque joueur ou au-
tre arrête la boule, le coup fe recommence. Il n'eft
pas permis de taper des pies pour faire rouler fa bou-
le davantage, ni de la pouffer en aucune façon, fous
peine de perdre la partie. Une boule qui eft entré»
dans le noyon , & a encore affez de force pour reve-
nir au but , ne compte point : un joueur qui joiie de-
vant fon tour , recommence fi Ton s'en apperçoit ;
celui qui a paffé fon tour , perd fon coup. Il eft libre
de changer de rang dans la partie, à moins qu'on ne
foit convenu autrement. Qui change de boule , n'eft
obligé qu'à reprendre la fienne , & rejouer fon coup
fi perfonne n'a encore joué après lui : mais fi quel-
qu'un à joiie , il remet la boule à la place de celle qu'il
a jouée, fi l'autre veut jouer avec fa boule. L'adref-
fe d'un joueur confifte à donner à la boule le degré de
force néceffaire pour arriver au but, pour cela il faut
qu'il faffe attention à fa pefanteur , & qu'il tourne
toujours le fort vers l'endroit du jeu le plus raboteux,
ce qui varie cependant félon la difpofition du terrein,
Se la qualité de la boule.
Boule, avoir la boule; c'eft au jeu de ce nom,
avoir droit de joiier le premier. Ce droit s'acquiert
endettant une quille vers la boule ; celui dont la quil-
le eft reftée le plus près de la boule, joiie le premier,
& eft dit avoir la boule.
Boule, au jeu de mail, eft une pièce de bouis, ou
d'autre bois très -dur bien tourné, que l'on chaffe
avec la maffe ou mail. Voye^ Mail. Ces boules doi-
vent être d'un poids proportionné à celui du mail ,
c'eft-à-dire, environ de moitié. Si le mail dont on fe
fert pefe dix onces , il faut que la boule en pefe cinq,
& ainfi des autres. Les meilleures de ces boules vien-
nent des pays chauds.
Boules qui ne s'éventent pas au jeu de mail , font
des boules qui ne fautent point , & qui ne fe détour-
nent point de leur chemin naturel.
BOULEAU, f. m. betula, { Hifi. nat. bot.) genre
de plante, dont les efpeces portent des chatons com-
posés de plufieurs petites feuilles attachées à un axe
ou poinçon , & garnis de lommets d'étamines. Cette
fleur eft ftérile : l'embryon eft écailleux , & devient
dans la fuite un fruit cylindrique , dans lequel il y a
des femences ailées fous les écailles qui font atta-
chées au poinçon. Tournefort , Injl. rei herb. Voyeç_
Plante. (T)
* Bouleau, {Jardinage?) l'arbre connu fous
le nom de bouleau , eft peu eftimé ; on ne l'employé
que dans les taillis , & fon bois blanc n'eft propre
qu'à faire des fabots, des balais, des paniers, des
corbeilles, du cerceau. Son écorce eft blanchâtre &
raboteufe ; les anciens en faifoient du papier. Sa feuil-
le eft petite , dentelée , pointue , pleine de fentes , don-;
nant peu d'ombre, cependant de première verdure ;
elle répand au commencement du printems une odeur
affez forte & agréable. Il porte des chatons à plu-
fieurs feuilles ; fes fruits naiffent dans des endroits
différens en forme d'épis ; ils deviennent enfuite cy-
lindriques, & renferment chacun une femence. Le
bouleau vient facilement & partout. Si on fait une in-
ciîion un peu profonde à fon écorce , ou qu'on y per-
ce un trou , en y adaptant un vafe , il reçoit une eau
ou lue affez abondant qui en découle ; on le dit bon
contre la pierre , & très-propre à rafraîchir ; on le dit
auffi fort falutaire pour le vifage & contre les dar-
tres , boutons & taches de rouffeur. Il eft affez agréa-
ble au goût : mais il faut, pour en tirer ce fuc , choi-
fir le printems lorfque la fève commence à monter.
BOULER OT NOIR, gobio niger, {Hifi. nat. Ick-
thyologie. ) poifion de mer de la grandeur du doigt ;
fon corps eft rond & noir principalement fur le de-
vant ; il n'a qu'une nageoire au-deffous des oiiies ,
B O U
B O U
363
qui reffemblc en quelque forte à une barbe noîre ;
c'eft pourquoi Rondelet préfume que ce poifTon cft
celui à qui Athénée a donné le nom de bouc. Le bou-
lerot noir vit fur les rivages. Rondelet. Voye^ Gou-
jon, Poisson. (/)
BOULET , en terme de guerre, eft une grofTe balle
de fer dont on charge le canon.
Il y a des boulets de tous les calibres ; ils fe met-
tent dans le canon fur la poudre , ou du moins fur le
fourage , ou le tampon dont on couvre la poudre.
Ce que l'on cherche dans les boulets, eft qu'ils
foient bien ronds , bien ébarbés , & fans ioufflures.
Bien ronds & bien ébarbés , afin qu'ils raflent leur
chemin droit dans la pièce , fans l'érafler^ ni l'écor-
cher.
Sans foufflures , afin qu'ils ne pirouettent point en
l'air , & que le vent ne s'y engouffre point.
Enfin qu'ils foient du poids dont ils doivent être ,
ces fortes de cavités étant quelquefois caufe que les
boulets pefent moins que leur calibre ne porte ; à quoi
il faut prendre garde ; car le roi feroit léié de payer
un boulet fur le pié de 24 livres , qui n'en peferoit que
*3- (<2).
Il feroit à defirer qu'ils ne fuffent pas de fer aigre,
car en les remuant ils fe caffent facilement.
Voici la différence qu'il y a entre le calibre des pie-
ces & celui que doivent avoir les boulets deftinés
pour y fervir : cette différence vient du vent qu'il
faut donner pour que les boulets puiffent avoir plus
de jeu dans la pièce.
Table du calibre des Pièces, & du diamètre des Boulets.
Calibre des Pièces.
Onces.
Pouces.
Lign
I.
O.
9-
2.
O.
1 1.
3-
1.
4-
2,,
5-
4-
6.
4-
7-
I.
î-
8.
6.
10.
8.
IZ.
I-
9-
14.
10.
Livres.
Pouces.
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2.
Tome II,
Diamètre & poids
des Boulets.
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On dira ici en partant, qu'il eft rare de rencontrer
toujours bien jufte les proportions dont on vient de
parler, parce que quclqueiois la pièce le trouvera
trop évalée , ou le boulet ne fera pas rond , ou l'inf-
trument dont on fe fervira ne fera pas fait dans toute
la régularité qui cft à defirer, ou l'officier n*aura pas
l'intelligence néceffaire pour prendre lés mefures : &
cela fait que fouvent deux officiers calibreront diffé-
remment une même pièce, mais la différence ne doit
pas être coniidérable.
L'on trouvera , en faifant quelques inventaires ,
des boulets creux , des boulet' u l'ange ou u chaîne , des
boulets a deux têtes , des mej/ugers , 6c d'autres boulets
qui portent des noms extraordinaires. Comme toutes
ces lortes de boulets ne font pas préfentement d'ufa-
ge, j'en dirai peu de choie ; il iuffit feulement de la-
voir, que ce qu'on appelle boulets creux lont ce; lai-
nes boucs de ter longues, dont le diamètre efl u c
libre d'une pièce telle que l'on veut, 6c longues de
deux calibres & demi ou environ. Ces boi.L
véritablement creules, & renferment ce [^artifice 6c
des balles de plomb, des clous, & delà mitra
fer: l'on failoit entrer dans ces boites, par le bout qui
touchoit à la poudre dans l'ame de la pièce, une huec
de cuivre entrant à vis dans un écrou , chargée com-
me celle des bombes, qui s'allumoit par le tende
la pièce, & qui le portant enfuite à l'artifice de ces
boîtes ou boulets creux, les obligeoit à crever dans
l'endroit où ils tomboient; ces boulets dévoient faire
un grand fracas, & même l'effet d'une foùgaflè ou
Z z ij
364
B O U
B O U
efpece de mine aux endroits où ils feraient entrés.
On obfervoit de ne mettre ilir ce boulet que la moi-
tié du foui rage ordinaire.
Un boulet creux du calibre de vingt-quatre , pefoit
en fer 60 liv.
Et chargé de plomb 79 liv.
Il contenoit 6 livres de poudre.
Sa fulée avoit de longueur 6 pouces; fon diamè-
tre par la tête 15 lignes, réduit par le bas à 10 lignes;
la lumière 4 lignes de diamètre. On irottoit la tête
du boulet de térébenthine pour y taire tenir le poul-
verin , afin que le feu le communiquât plus prompte-
ment à la fulée.
Mais toutes les fois que l'on en a fait l'épreuve ,
ou ces boulets ont crevé en l'air , ou ils ne lont allés
frapper la butte ou le bianc que par leur largeur &C
de travers, & non par leur pointe; ou les fufées
n'ont point pris, ou elles fe font éteintes , & leur
effet par conséquent eft devenu entièrement inutile.
Ce que l'on appelle boulets mcjjage& , tont des bou-
lets creux dont on fe fei voit autrefois pour porter des
nouvelles dans une place de guerre, & l'on ne met-
toit qu'une foible charge de poudre pour les faire
tomber où l'on vouloit ; & ces fortes de boulets étoient
pour l'ordinaire couverts de plomb, & la plupart
étoient de plomb lans mélange de ter.
Les boulets à fange , a chaîne , & autres , étoient
pour faire plus d'exécution, ou dans une ville ou
dans un camp.
Mais quelques inventions que l'on ait imaginées
jufqu'à prélent, il en faut toujours revenir à l'ancien
ufage , qui eft le plus fur & le moins embarraffant.
Un ancien officier d'artillerie a propoié pour la
jner un boulet: ce boulet a deux têtes 6c eft garni au
milieu , de la même compolition dont l'on charge les
carcaffes; on l'enveloppe d'une toile ou drap loutre
qui prend feu par celui du canon , & qui le porte
dans les voiles des vaiffeaux.
Ce Boulet eft percé à l'une des têtes pour y mettre
la fulée qui a communication à la charge du canon ,
& le boulet avec fon enveloppe tient lieu de fourra-
ge, afin que la charge du canon le communique à la
fufée du boulet. S. Remy , mem. a" Artillerie.
Boulets barrés, ce font deux boulets, ou plu-
tôt deux moitiés de boulets jointes enlemble avec une
barre de fer, qui fervent à couper les mâts, les voi-
les , &c. chargés à mitraille. Voyeç_ Mitraille.
Boulet coupé ou séparé, eft une efpece de £o«-
let de canon dont on felert quelquefois fur mer : pour
en donner une idée , il faut s'imaginer un boulet de fer
ou de plomb coupé en deux & creulé en dedans, &
deux barres de fer qui forment les diamètres de cha-
que demi boulet, & qui ont un trou au milieu où paf-
fe & s'attache une chaîne de fer longue de deux pies.
Cette chaîne pouvant fe racourcir, & entrer dans le
creux des demi boulets , on les coule ailément dans le
canon comme un fimple boulet entier. Ces deux de-
mi boulets , en lortant de la bouche du canon , fe lé-
parent & s'étendent de toute la longueur de la chaî-
ne , volent en tournovant , coupent les agrès des vaif-
feaux ennemis , & font un effet confidérable. Cette
forte de boulet n'eft point connu en France.
Boulet rouge , eft un boulet qu'on fait rancir
pour mettre le feu dans les mailons de la ville qu'on
attaque.
On creufe une place en terre , & on y allume une
groife quantité de charbon de bois ou de terre.
On met deffus une torte grille de fer.
Quand ce feu eft dans toute fa force , on met les
boulets fur la grille , & ils y rougiflént en très-peu de
tems.
On a des tenailles ou des cuillieres de fer pour
les prendre.
On les porte dans la pièce qui n'en doit point être
éloignée , après que l'on a mis de la terre glaife , s'il
fe peut , fur la poudre dont la pièce eft chargée , &
qu'on l'a extrêmement refoulée avec le refouloir.
On ne met point de fourrage fur le boulet. On met
le feu promptement à la lumière de la pièce : le coup
part , & partout où paffe le boulet, s'il rencontre quel-
ques matières combuftibles , il les allume, & il porte
l'incendie.
Lorfque les tranchées font devant les batteries de
boulets rouges , on bourre la poudre avec du fourra-
ge, parce que fi on y mettoit de la terre glaife , les
morceaux pourraient aller bleffer & tuer les travail-
leurs.
Les boulets rouges ne fe tirent qu'avec des pièces
de huit & Oe quatre; parce que lî les pièces étoient
d'un plus fort calibre, les boulets ieTOient trop diffici-
les à lervir. S. Remy , Mem. d'Artillerie. (Ç)
BOULET , ( Mareehallerie. ) jointure qui eft à la
jambe du cheval au-deffous du paturon, qui tient
lieu d'un fécond genou à la jambe du devant, &
d'un fécond jarret à chaque jambe de derrière. Les
entorles le font au boulet; c'eft au boule: que le che-
val fe coupe , c'eft-à-dire , qu'il eft entamé par le
côté d'un de les fers. Boulet qui luppure ; boulet gor-
gé , c'eft-à-dire enflé. Ii vient des crevaffes au-deffous
des boulets. Etre Jur les boulets, elt la même chofe
qu'être bouleté. Voyer^ BOULETÉ. ( V"}
Bouletan , terme de Rivière dont on fe fert dans
le pays d'amont l'eau , pour exprimer la pièce de bois
qu on appelle courbe, t^oye^ COVRBE.
BouletÉ, adj. un cheval bouleté eft celui dont
le boulet paraît avar cer trop en avant , parce que
le paturon & le pié lont plies en arrière : cette con-
foi mation vient de trop de fatigue , 6c eft une mar-
que sûre que la jambe eft uiée. (f)
* BOULEVARD , f. m. (Fortification.') ouvrage de
fortification extérieure ; c'eft ce que nous entendons
aujourd'hui par un gros bajlion. Ce mot n'eft plus
d'ulage. Voye7 Bastion.
BOULEUX , adj. ( Maréchal. ) fe dit d'un cheval
de taille médiocre , qui n'a ni nobleffe , ni grâce , ni
légèreté dans fes allures , 6c qui eft étoffé. V. Al-
lure , Etoffé , &c.
BOULINE , f. f. ( Marine. ) c'eft une corde amar-
rée vers le milieu de chaque côté d'une voile , &
qui fert à la porter de biais pour prendre le vent de
côté , lorfque le vent arrière & le vent largue man-
quent pour faire la route qu'on fe propoie.
Ces boulines font des cordes fimples qui tiennent
chacune à deux autres cordes plus courtes , qu'on
nomme pattes de bouline , & celles-ci tiennent en-
core à de plus courtes qui font nommées anfettes ou
cobes, lefquelles lont épilîées à la ralingue de la voile.
Les boulines fervent piincipalement à retirer la
voile , ôc empêcher que le vent , loriqu'on le prend
de côté , n'en enfle trop le fond ; ce qui retarde le
fillage du vaiffeau au lieu de l'avancer : elles empê-
chent auffi que le vent n echape par le côté qu'elles
retirent.
Prelque toutes les voiles ont des boulines , à l'ex-
ception de la civadiere ou voile de beaupré , qui n'a
ni boulines ni coiiets , les écoutes en failant l'office.
Bouline de la grande voile, voyer^ PL I. n° . 89. la
figure fera connoitre la fituation de cette manœuvre.
Bouline de la mijene , n°. 90.
Bouime du grand hunier , n° . 91.
Bouline du petit hunier , n°. 93.
Bot.. 'i ne du g' and perroquet , n°. 92.
Bouùne du perroquet d'avant , n° . 94.
Bouline du perroquet de fougue , n° . 88.
Bouline de reven , c'eft celle des deux boulines qui
eft lous le vent , & qui eft larguée. Largue la bouline
de revers , tejme de commandement pour lâcher la
bouùne qui eft fous le vent. Voye^ REVERS.
B O U
Haler fur les boulines , c'eft-à-dire , tirer & bander
fur les boulines , afin que le vent donne mieux dans
la voile pour courir près du vent, Foye^ Haler.
Hait bouline , voye^ HALE.
Avoir les boulines halées , c'eft les avoir roides afin
de bien tenir le vent.
Vent de bouline , c'eft un vent qui eft éloigné du
lieu de la route de cinq aires de vent , 6c qui par fon
biaifement fait que le vaifTeau penche fur le côté ;
ainfi la route étant nord , le nord-eft , quart-d cft , &
le nord-oueft quart-d'oueft font les vents de bouline.
Aller à la bouline , c'eit le fervir d'un vent qui fem-
ble contraire à la route , 6c le prendre de biais en
mettant les voiles de côté;ce que l'on fait par le moyen
des boulines. On va aufïï vite & plus vite à la bouline,
qu'en failant vent arrière ; car en boulinant on porte
routes fes voiles , ce qui ne fe fait pas de vent arriè-
re. Quelque fort que foit le vent , on ne laiffe pas d'al-
ler à la bouline , pourvu qu'on porte moins de voiles,
& qu'il n'y ait pas un orage violent.
A la bouline , terme de commandement pour pren-
dre le vent de côté.
Aller à grafe bouline , ou à bouline grajfe , c'eft fe
fervir d'un vent compris entre le vent de bouline 6c le
vent largue, & cet air de vent doit être éloigné de
la route par un intervalle de fix à fept rumbs de vent
ou pointes de compas. Ainfi pour aller à grafft bou-
line , il ne faut pas ferrer le vent : par exemple , fi
la route étoit nord, le nord-eft quart-d 'eft feroit le
vent de bouline , & l'eft nord-eft feroit le vent de
grajfe bouline.
Franche bouline , c'eft pincer le vent , & aller au
plus près. Voye^ Près & Plein.
Faire courre la bouline , c'eft un châtiment qu'on
fait fur les vaiffeaux pour punir les malfaiteurs ; &
pour cet effet l'équipage eft rangé en deux haies de
l'avant à l'arriére du vaifteau , chacun une gar-
cette ou une corde à la main ; & le coupable étant
lié , & n'ayant pour vêtement qu'un caleçon mince,
fuit une corde , & paffe deux ou trois fois entre ces
deux haies d'hommes , qui donnent chacun un coup
à chaque fois qu'il paffe. (2)
BOULINS, f. m. pl.e/z Jardinage , pièces de bois
pofées horizontalement & lcellées par un bout dans
les murs , & par l'autre bout attachées avec des cor-
dages à d'autres pièces de bois pofées à plomb , fur
lefquelles on met des planches pour échafauder une
face de bâtiment. Nous appelions en François trous
de boulins , les trous qui retient des échaffaudages ,
& Vitruve les nomme columbaria. (Z3)
Boulins (QEconom. rufl.) c'eft ainii qu'on appelle
à la campagne les logettes qui occupent les parois
d'un colombier, & qui forment la demeure ou les
nids des pigeons. Voye^ Colombier.
BOULINER , v. n. {Marine.') c'eft prendre le vent
de côté. Foyei Aller À la Bouline. (Z)
BOULINGRIN , en Jardinage, cft une efpece de
parterre de pièces de galon découpées , avec bordu-
res en glacis & arbres verds à l'es encognures & au-
tres endroits : on en tond quatre fois l'année le ga-
fon , pour le rendre plus velouté. L'invention de ce
parterre eft venu d'Angleterre , auffi bien que Ion
nom qui a été tait de boule , qui lignifie rond, 6c de
green , verd pré ou gafon. (/*)
Il y a des boulingrins fimples ; il y en a de com-
pofés.
Les fimples font tout de gafon , fins aucun autre
ornement.
Les compolés font coupés en compartimens de ga-
fon, mêlés de broderie, avec des lentiers, des pla-
tes-bandes , des ifs 6c arbrifleaux de fleurs.
Les fables de différentes couleurs ne contribuent
pas peu a les l'aire valoir.
Il ne faut point trop renfoncer les boulingrins : on
B O U
365
donne un pié & demi de profondeur dans les petits,
& deux pies dans les plus grands. Six à fept pies de
long fuffifent pour la longueur des talus; on peut
aller jufqu'à huit à neuf pies pour les plus grands.
Le boulingrin représenté dans la FI. V. eft fitué
dans un bofquet , dont il forme une falle où l'on
entre par les quatre milieux; il eft accompagné de
chaque côté d'une rangée de caiffes & de pots , 8c
à un des bouts d'un bafîin entouré d'une rangée de
tilleuls taillés en boules : quatre bancs s'enfilent &
terminent les deux allées latérales vers la paliffade :
le fond du boulingrin eft labié de fable jaune ou rou-
ge , Se comparti dans une pièce de gafon avec des
enroulemens dans les angles : on voit à fa tête un
fleuron de broderie pour varier avec le refte ; & qua-
tre vafes font pofés dans les échancrures du haut.
On trouvera la manière de tracer ce boulingrin à
l'article Tracer. (K)
BOULINIER , f. m. ( Marine. ) vaiffeau qui eft
bon boulinier , méchant boidinier ; c'eft-à-dire , qu'il
va bien ou mal lorfqueles boulines font halées. (Z)
BOULOGNE en Picardie, voyeç ci-deffus BOLO-
GNE.
BOULOIR , infiniment de Mégiffier, c'eft un long
bâton emmanché dans une elpece de maffe de bois
dont ces ouvriers fe fervent pour délayer la chaux
qu'ils mettent dans les pelins. Voye^la jig. 4. PI. du
MégiJJîer.
BOULOIR , en terme d'Orfèvre en grojferie , c'eft un
vafe de cuivre rouge oblont; ayçc une queue, dans
lequel on déroche les pièces. Voye^ J l. Il.fig. 3. Le
même vaiffeau eft à l'ufage des Monnoyeurs.
BOULON ou GOUGEON , f. m. dans une pou-
lie , eft le petit axe placé dans Le centre de la pou-
lie , qui unit la chape à la poulie , 6c fur lequel la
poulie tourne. Voye^ Poulie ( O )
* On donne en général ce nom à tout morceau de
fer qui dans une machine , quelle qu'elle foit , tait la
même fonction. Les articles fuivans en leront des
exemples.
Boulons ; les Imprimeurs nomment amfi les deux
chevilles de fer qui traverfent le iommier 6c le cha-
piteau d'une preffe : ces chevilles de dix-huit pouces
de long , fur trois pouces de diamètre , font termi-
nées d'un bout par une tête ronde applatie , 6c de
l'autre elles font percées en long pour rece\ oir une
large clavette. L'office de ces jouions elt en les îer-
rant ou defferrant , de taire monter ou delcendre le
fommier.
Boulon, terme de Plombier , c'eft un morceau de
cuivre ou de fer long & rond , qui lert de noyau au
moule dans lequel les Plombier;, coulent les tuyaux
de plomb fans loudure. Foye{ Moulée Plombiers,
& lafig. P. PI. 11. du Plombier.
Boulon , eft une groffe cheville de fer qui a une
tête ronde ou quarrée , 6c qui eft percée par l'autre
bout 6c arrêtée par une clavette , pour retenir un ti-
rant ou autre pièce d'une machine. On en met auffi
deffous les robinets , pour empêcher qu'ils ne foient
levés par la force de l'eau. (A)
Boulon , {Serrurerie.) foit rond , foit quarré, c'eft
un morceau de fer dont la tête eft ronde ou quarrée,
& dont l'autre extrémité eft tarodée & peut (e rece-
voir dans un écrou , ou bien eft percée , & peut re-
cevoir une clavette. Son ulage eft de lier les pièces
de bois ou de fer les unes avec les autres , &: de les
tenir fortement aflemblées.
Il y a des boulons d'efcalier : ce font ceux qui paf-
fent à travers les limons de l'efcalier, & <jui vont le
rendre dans les murs , pour empêcher l'écartement
des marches, & leur léparation des murs. Ils le font
de différentes façons; il y en a à mondes : ils font
COmpofés de deux parties , dont l'une eft arrêtée ddn*
les murs ou clouons de la cache de PefcaUer, l'autre
366
B O U
B O U
dans les limons de l'efcalier ; & toutes deux vont fe
réunir en moufles fous le milieu des marches , où el-
les font ferrées par une clavette.
Il y en a à doubles clavettes; ce font ceux qui ont
des clavettes aux deux extrémités.
Il y a des boulons de limons d'efcalier : ceux - ci
font à vis, & fervent à retenir les limons avec les
courbes.
BOULONNOIS , ( Géog.) contrée de France dans
la Picardie , dont Bologne'eft la capitale. Ce pays
rut uni à la couronne par Louis XI. Son commerce
principal confifte en charbon de terre , en beurre ,
harengs, & liqueurs fortes. Le Boulonnais a environ
douze lieues de long , fur huit de large.
BOUQUE, f. f. ( Marine. ) les navigateurs fe fer-
vent quelquefois de ce terme pour lignifier entrée ou
paffe. V. DÉBOUQUEMENT & DÉBOUQUER. ( Z)
BOUQUET , f. m. on donne ce nom au propre à
un amas de fleurs cueillies , liées enlemble , & defti-
nées à parfumer un lieu ou une perfonne : mais il s'eft
tranfporté au figuré à une infinité d'autres choies :
en voici quelques-unes.
Bouquet , (en terme de Cuifine. ) eft un paquet
de fines herbes, comme lavande , thym , perfil , &c.
qu'on met liées enlemble dans les fauces , & dans les
bouillons , pour leur donner du haut-goût.
BOUQUET , ( terme de Doreur fur cuir. ) fer dont on
fe fert pour pofer le bouquet dont on fait un ornement
fur le dos des livres qu'on relie en veau. Voye-^ Re-
lieur & les Planches de Relieur.
Il y en a pour in-folio, in-^°. in-S°. i/z-n. &
in-iS. Ils doivent être proportionnés à la grandeur
& à la groffeur du volume ; anciennement ils étoient
quarrés , actuellement ils font de toutes fortes de fi-
gures , tantôt à fleurs , tantôt à d'autres defTeins.
PI. II. de la Reliure , figure N.
On pouffe les bouquets après que les palettes ont
été employées dans les entre-nerfs du dos des volu-
mes. Pour cet effet, on chauffe le fer & on l'applique
fur la dorure. On donne auffi le nom de bouquet à la
partie de la dorure qui a la forme du fer , & qui relîe
appliquée fur le dos du livre.
BOUQUET , (en terme de Maquignon ) fe dit de la
paille que les marchands de chevaux mettent à l'o-
reille ou à la queue du cheval qu'ils veulent ven-
dre. (V)
Bouquet , venir par bouquet ; on fe fert de ce ter-
me dans Y Imprimerie , lorfqu'on remarque qu'une
feuille imprimée , au Heu d'être partout d'une égale
& même couleur d'encre, fe trouve plus atteinte
dans quelques endroits que dans d'autres ; défaut qui
vient de la preffe quand elle foule inégalement, &
auquel on remédie aifément par le fecours des hauf-
fes. Voye{ HAUSSE.
Bouquet , ( en terme de Metteur en œuvre. ) eff un
ornement de femme , qui repréfente une touffe ou un
amas de fleurs , dont les couleurs font exprimées par
les pierres précieufes qui le compofent. On y diftin-
gue ordinairement une queue, un nœud , des bran-
ches & des feuillages , le tout félon le goût , ou la
mode du tems.
Bouquet déplumes; c'eft le nom qu'on donne
en Plumajferie à diverfes plumes montées en divers
rangs fur un chapeau. On ne voit plus de ces fortes
de bouquets en France ; le plumet a pris leur place.
Voye{ Panache & Plumet.
Bouquet de Héron, eft un amas de quelques
plumes d'un oiieau de ce nom , qui n'en porte fur le
haut de la tête que deux ou trois dont on fe ferve
pour les bouquets , qui en deviennent par ce moyen
fort chers , & d'un ufage rare. Foye^ Héron.
Bouquet de Phaéton, {terme de Piumaffier.)
eft un faifeeau de plumes d'autruche , orné d'or ,
d'argent fin ou faux , qu'on voit fur les têtes des che-
vaux , aux entrées d'ambaffadeurs & autres céré-
monies.
Bouquet de dais , font plufieurs plumes d'au-
truche de différentes couleurs , rangées en cercle ,
& renverfées , au milieu defquelles s'élève un bou-
quet de plumes d'aigrettes , de crin , ou de verre filé.
On en fait à plufieurs rangs pour mettre fur les lits ,
ou pour fervir dans les funérailles.
BOUQUE TIER , f. m. ( Commerce. ) ouvrier qui
fait & vend des bouquets de fleurs artificielles. Les
bouquetiers font de la communauté des Merciers.
foyei Fleurs artificielles. Les PlumaJJîers pren-
nent auffi le titre de Bouquetiers.
BOUQUETIERES , f. f. femmes qui vendent des
fleurs naturelles dans les rues &c les marchés. Elles
forment une efpece de petite communauté , quoi-
qu'elles n'ayent ni ftatuts ni jurées : elles font fous
la jurifdiftion du lieutenant de police.
BOUQUINER , ( en terme de chaffe. ) fe dit d'un liè-
vre en amour, lorfqu'il tient une hafe.
* BOURACAN ou BAR AC AN , f. m. ( étoffe non-
croifée. ) c'eft une efpece de camelot d'un grain fort
gros : elle fe travaille fur le métier à deux marches
comme la toile. La trame eft un fil fimple , retors, &
fin filé ; la chaîne eft double ou triple ; il y entre de la
laine & du chanvre ; les bouracans ne fe foulent point ,
on fe contente de les faire bouillir dans de l'eau claire
à deux ou trois reprifes , & de les bien calendrer en-
fuite : on en fait des rouleaux qu'on nomme pièces. Le
bouracan pour être bon , doit être à grain rond , uni ,
& ferré : il s'en fait beaucoup en Flandre & en Pi-
cardie , à Valencienne , à Lille , à Abbeville , &c.
BOURACANIER, ou BARACANIER, f. m.
ouvrier qui fabrique le bouracan. Il eft défendu à tout
bouracanier de lever une pièce de deffus le métier ,
qu'elle n'ait été vifitée par les jurés de la commu-
nauté , & fcellée de leur plomb.
BOURACHE , f. f. borrago , ( Hijl. nat. Bot. ) gen-
re de plante à fleur monopétale rayonnée ; il fort
d'un calice découpé un piftil qui eft attaché comme
un clou au milieu de la fleur , & environné de qua-
tre embryons qui deviennent dans la fuite autant de
femences reffemblantes à des têtes de vipère. Ces
femences mùriffent dans le calice qui s'étend à pro-
portion que le fruit groffit. Tournefort , Injl. rei herb.
Voye{ Plante. (/;
La bourache croît dans les jardins ; on la trouve
auffi autour des maifons & fur les murs ; elle fleurit
au mois de Juin.
On fait ufage de fes fleurs & de fes feuilles.
Ses feuilles font incifives, atténuantes , & entrent
dans toutes les infufions , décoctions , & autres pré-
parations, où l'on fepropofe de diviferles humeurs ;
on leur attribue la qualité d'anti-pleurétique , d'ale-
xipharmaque , & d'être utiles dans les fièvres mali-
gnes ; on ne fait pas un bouillon altérant où l'on ne
mette la bourache ; on donne le fuc tiré des feuilles à
la quantité de deux , trois , & quatre onces dans un
bouillon ou autre liqueur appropriée.
Les fleurs paffent pour cordiales; la conferve eft
la feule préparation officinale que l'on en faffe. (./V)
* BOURACHER , f. m. ( Commerce. ) c'eft le nom
qu'on donne dans certaines manufactures de Picar-
die à ceux qui travaillent aux raz de Gènes , & au-
tres femblables étoffes. Ils font de la communauté
des Hautelifleurs : mais ils ont leurs jurés particu-
liers.
BOURASQUE ,f. f. (Marine.) tourbillon de vent;
tempête foudaine & violente qui s'élève fur la mer.
(Z)
BOURBILLON, f. m. (Chirurgie & Maréchal Une.)
c'eft le pus qui fort d'une plaie , d'une apoftême ,
d'un javart , quand il eft mûr Cv épaùfi : une plaie fc
guérit bientôt après que le bourbillon en eft forti.
BOU
* BOURBONS , f. m. c'eft ainfi qu'on appelle
dans les falines de Lorraine de groffes pièces de bois
de fapin de trente pies de longueur, fur fix pouces
d'équarriffage. Il y en a feize fur la longueur de la
poelle , efpacées de fix en fix pouces , & appuyées
îiir deux autres pièces de bois de chêne beaucoup
plus greffes , polées fur les deux faces de la longueur
de la poelle : les deux dernières fe nomment machi-
nes. Les bourbons fervent àfoûtenirlespoelles par le
moyen des happes & des crocs.
Bourbon, (île de) ou Mascareigne, Géog.
île d'Afrique , clans la mer d'Ethiopie ; elle a un vol-
can ; elle eft très-fertile , & appartient à la France ;
elle a environ 15 lieues de long, fur 10 de large ;
il y croît beaucoup de caffé , de poivre blanc , de
bois d'ébene , &c.
Bourbon-Lancy, (Géog.) ville de France, au
duché de Bourgogne , dans l'Autunois , avec un bon
château. On y remarcpie un grand pavé de marbre
appelle le grand bain , cpii eft un ouvrage des Ro-
mains. Long. zid. 26' . 3z" . lac. 46. 3J.
Bourbon-l'Archambaut , ou les Bains ,
( Géog. ) petite ville de France , dans le Bourbon-
nois, à 6 lieues de Moulins , remarquable par fes
bains ; les eaux en font falées , & laifTent fur les bords
du vale une couleur jaunâtre , avec une odeur de
foufre : elles font fi chaudes au toucher , qu'on ne
fauroit y tenir long-tems la main ; on en boit cepen-
dant fans fe brûler. Long. zod. 43' . 2$". lat. 46.
35'. 22".
Bourbonne-les-Bains ,( Géog. ) bourg de Fran-
ce en Champagne , clans le Bafîîgni , célèbre par fes
eaux minérales. Ces eaux font fi chaudes , qu'on peut
à peine y tenir le doigt pendant quelques fécondes :
on en peut boire cependant fans fe brûler ; elles ne
cuifent point l'herbe , & n'en altèrent point la cou-
leur ; elles bouillent moins vite que l'eau commune
chaude au même degré ; elles font fort chargées de
foufre ; ce qui fait qu'elles dorent les vafes d'argent.
Hifloire de f .Académie 1324.
BOURBONNOIS , ( Géog. ) province & duché-
pairie de France , entre le Berry & la Bourgogne ;
Moulins en eft la capitale. Ses principales rivières
font la Loire, l'Allier, & le Cher. Ce pays abonde
en blés , fruits , pâturages , bois , gibier , ck en vin ;
il ne biffe pas que de faire un certain commerce.
On fabrique à Moulins des ferges, des étamines, &
des crêpons ; à Hériffon & à Montluçon on fait des
toiles.
BOURBOURG, (Géog. ) petite ville de France,'
dans la Flandre , à une demi-lieue de Gravelines.
Long. ig. 5o. lat. 5o. 55.
BOURCER UNE VOILE , ( Marine. ) c'eft ne la
pas taire lervir en entier, & la troufTcr à mi-mât,
ou au tiers de mât , par le moyen des cordes nom-
mées carques ou cordes deftinées à cet effet, afin de
prendre moins de vent , & de retarder le cours du
vaiffeau. On fe fert peu de ce mot fur les vaifTeaux
du roi , & à la place on dit carguer. (Z)
BOURCET , f. m. mât de bourcet ; quelques navi-
gateurs , & furtout ceux de la Manche , appellent la
voile de mifene bourcet ; ainfi mât de bourcet lignifie
mât de mifene. (Z )
* BOURDAINE ,f. f. (Artificier. ) efpcce de bois
dont on fait le charbon qui entre clans la compolition
de la poudre à canon ; elle ne fe trouve guère que
dans les taillis, & ne dure que cinq à fix ans ; elle
n'a guère que deux pouces de grolïeur ; Ion char-
bon eu extrêmement lec & léger ; il eft permis au
commiifairc général des poudres & à fes commis, de
faire exploiter dans les bois de fa majelté & autres ,
tant de bourdaine qu'il leur plaît , depuis l'âge de trois
ans jufqu'à quatre , 6c en quelque tems qu'ils le ju-
gent à propos ; après toutefois en avoir obtenu la
BOU
367
permiffion des officiers des eaux & forêts , & avoir
appelle les gardes à la coupe.
BOURDE ,{.f.( Marine. ) c'eft une voile dont
on fe fert fur les galères , & que l'on ne met que
quand le tems eft tempéré. ( Z )
BOURDEAUXo«BORDEAUX,(C7^.)
grande , belle & riche ville de France fur la Garon-
ne , capitale de la Guienne. Son archevêque prend
le titre de primat des Aquitaines. Il y a un parlement
& beaucoup d'autres tribunaux ; un hôtel des mon-
noies , & trois forts : le principal eft le château Trom-
pette ;il commande au port, qui eftun des plus beaux
du royaume. Lon. i6A. 55' .52" .lat. 44^-. 5o'. 18".
BOURDEILLE, ( Géog. ) petite ville de France
dans le Périgord.
BOURDELAGE , f. m. terme de Coutume, eft la
même choie que bordelage. Voye^ ce dernier.
BOURDELIER , fe dit du feigneur à qui appar-
tient le droit de bourdelage ou bordelage. On le dit
aufîi de l'héritage concédé à ce titre , & du contrat
de concefîion : héritage bordelier , contrat bordelier.
(#)
BOURDILLON , f. m. (Tonnelier.) bois de chêne
débité , refendu , & propre à faire des douves de ton-
neau. Voye^ Mairin.
BOUQUETIN , BOUC-ESTAIN , STEINBOK ,
IBEX , 1. m. ( Hi/l. nat. Zoolog. ) animal quadrupède
fauvage, du genre des boucs. Il elt à-peu-près de la
grandeur de la chèvre domeltique , & il reflemble
en quelque façon au cerf; car ion poil eft court &
de couleur fauve. Il a les jambes menues , la barbe
longue & noire , la tête petite , & des cornes de qua-
tre ou cinq pies de longueur , groffes & noûeules :
chaque nœud eft le produit d'une année. Ray, Anim.
quad. Jynop. Voye^ QUADRUPEDE. (V)
* Le fang du bouquetin, mais celui fur-tout, dit
Van-Helmont, qu'on a tiré de fes tefticules, delTeché
au foleil , elt un remède excellent dans la fluxion de
poitrine. J'en ai entendu réciter des effets fi merveil-
leux , qu'il elt étonnant qu'on n'en faffe pas plus d'u-
fage. On l'ordonne depuis vingt grains jufqu'à deux
dragmes.
BOURDON , f. m. bombylius , (Hift. riat. Infeclol.)
infecte du genre des abeilles. Voyt^ Abeille. Il a un
aiguillon & une trompe ; il tire des fleurs fon miel &5
de la cire brute. Les bourdons que l'on voit le plus
fouvent font plus gros que les abeilles ordinaires , ils
font plus de bruit en volant. Ces mouches font cou-
vertes de poils longs & touffus , qui les font paroître
plus grottes qu'elles ne le font réellement. Elles ont
différentescouleursùlyen a qui n'ont que les anneaux
poltérieurs de couleur canelle ; le relie du corps eft
noir. Dans d'autres , le corcelet elt couvert de poils
blancs, & le corps elt traverfé par une raie jaune ,
qui eft fuivie d'une raie blanche. On en voit qui ont
de plus une bande tranfverfale de couleur de citron,
vers le milieu du corps. Dans quelques-uns la par-
tie antérieure du corcelet elt bordée de poils blancs
ou jaunes , qui forment une efpcce de collier. Dans
d'autres, le corcelet elt couvert de poils blancs ; il
a fur le corps une large raie de poils jaunes , ênfuite
une bande noire , & enfin une bande blanchâtre. Il
fe trouve des bourdons de couleur blonde plus ou
moins foncée ; les poils du deffous du corps font de
couleur de citron fort pâle ; ceux du deflûs du cor-
celet font un peu roux. Ces couleurs varient: mais
celle des jambes eft toujours noire.
Il y a des bourdons qui n'ont des poils longs que fur
le corcelet : on en trouvé de tels en Egypte, dont les
poils font d'une belle couleur d'olive , & les ailes
tirent fur le violet ; & d'autres qui ont le delfus du
corcelet couvert de longs poils, d'une belle couleur
de citron , & les anneaux du corps ras , & même lif-
les & luifans. Ces anneaux font noirs avec quelques
368
B O U
teintes de violet , & les ailes font d'une couleur vio-
lette moins noire.
Dans l'efpece des bourdons qui ont des longs poils
for le corcelet & fur le corps , la même femelle pro-
duit trois fortes de bourdons de différentes grandeurs :
les plus grands furpaflent de beaucoup les abeilles
ordinaires pour la groffeur ; ce font les femelles : les
mâles ne font pas ii grands ; & les plus petits de tous
n'ont point de fexe. Leur grandeur efl égale à celle
des abeilles , quelquefois elle eft moindre.
Les bourdons vivent en fociété comme les abeil-
les : mais ils ne font pas fi nombreux ; on n'en trouve
que cinquante ou foixante réunis enfemble. Ils font
des efpeces de nids pour fc loger, & ils les couvrent
de moufle : ces nids font dans les prairies & dans les
champs de fainfoin & de luferne ; leur diamètre eft
de cinq ou fix pouces & plus , & ils font élevés de
quatre à cinq pouces au-deflus de terre. Le meilleur
moyen de trouver ces nids , eft de fuivre les fau-
cheurs, parce qu'ils les découvrent & même les cou-
pent avec la faux. L'extérieur reflemble à une motte
de terre couverte de moulTe , plus ou moins relevée
en boffe. Il y a dans le bas un trou qui fert d'entrée,
& fouvent on trouve une forte de chemin d'un pié de
long , & une voûte de moufle qui fert d'avenue. Dans
certains nids qui ne font pas encore finis, les bour-
dons entrent par le deflus. Quand on enlevé le del-
fus du nid qui fert de toict , il en fort quelques mou-
ches; les autres y reftent , & il n'arrive pas qu'on en
foit piqué , quoiqu'elles ayent des aiguillons. Après
avoir enlevé cette couverture , on voit une forte de
gâteau épais plus ou moins grand , mal façonné , &
compofé de corps oblongs ajuftés les uns contre les
autres : quelquefois il n'y a qu'un gâteau ; d'autres
fois il y en a deux ou trois ; on voit marcher les bour-
dons par - deflus & par - deflbus : dès qu'on ceffe de
toucher au nid , les mouches travaillent à le recou-
vrir ; & pour cela elles employent la moufle qu'on
a enlevée & jettée à quelque diftance : mais au lieu
de porter les brins de moufle , elles les pouffent , ou
pour mieux dire, elles les font gliffer peu-à-peu. Tou-
tes travaillent enfemble , les mâles , les femelles, &c
celles qui ne font ni mâles ni femelles.
Le bourdon a comme l'abeille deux dents écailleu-
fes très-fortes , dont le bout eft large & dentelé : c'eft
par le moyen de ces dents qu'il coupe la moufle &
qu'il l'attire en-arriere fous fon corps ; enfuite il la
fait gliffer avec les pattes de devant ; les pattes de la
féconde paire la font paffer plus loin, & les dernières
la pouffent aufli loin qu'elles peuvent s'étendre. En
répétant cette manœuvre , ils raffemblent derrière
eux un petit tas de moufle. Le même bourdon , ou un
autre , reprend ce tas par brins comme le premier ,
& l'approche du nid ; pour cet effet , ils fe pofent de
façon que le nid eft en arrière par rapport à eux :
chaque fois que le tas de moufle change de place , il
parcourt un efpace égal à la longueur du bourdon ,
avec les pattes de derrière étendues. Lorfque ces
mouches arrangent la mouffe pour former la couver-
ture du nid , elles fe fervent de leurs dents & de leurs
pattes de devant. Cette forte de toift a un pouce ou
deux d'épaifleur , & met le nid à l'abri des pluies or-
dinaires. Les bourdons qui font entièrement jaunâ-
tres , & ceux fur lefquels le noir domine , & peut-
être d'autres , mettent un enduit de cire brute fur
toute la furface intérieure du couvert de mouffe ;
ils y forment une forte de platfond , qui n'a que le
double de Pépaiffeur d'une feuille de papier ordi-
naire , mais qui eft impénétrable à l'eau : cet enduit
lie tous les brins de mouffe qui font à l'intérieur
& rend la couverture plus folide. La matière de cet
enduit a une odeur de cire : mais ce n'eft qu'une
cire brute & tenace ; on peut la pétrir. La chaleur
ne la liquéfie , ni ne la ramollit: mais elle s'enflam-
B O U
me. Sa couleur eft d'un gris jaunâtre ; elle ne s*at»
tache pas aux doigts lorfqu'on la pétrit.
Le nombre & l'étendue des gâteaux augmentent
à proportion que le nid eft plus ancien. Ces gâteaux
font convexes à l'extérieur , & concaves à l'inté-
rieur : mais leurs furfaces , fur-tout l'inférieure , font
fort inégales. Chaque gâteau eft compofé , comme il
a déjà été dit , de corps oblongs , appliqués les uns
contre les autres fuivant leur longueur. Ils font d'un
jaune pâle ou blanchâtre. Il y en a de trois gran-
deurs différentes : les plus gros ont le grand diamè-
tre de plus de fept lignes de longueur , &c le petit
d'environ quatre lignes &c demie ; dans les plus pe-
tits, le grand diamètre n'a pas trois lignes. Quelque-
fois ces corps font fermés par les deux bouts ; d'au-
tres fois la plupart font ouverts par le bout inférieur ,
& vuides : ce font des coques de foie qui ont été for-
mées par des vers qui s'y font métamorphofés. Les
bourdons qui viennent de ces vers après la métamor-
phofe , laiffent les coques ouvertes en en fortant.
Il y a aufli dans les gâteaux de petites maffes irré-
gulieres affez femblables à des truffes , quoique moins
dures : on trouve dans chacune un vuide au centre ,
dans lequel il y a des œufs d'un beau blanc un peu
bleuâtre , longs d'environ une ligne & demie fur un
diamètre plus court des deux tiers. Le nombre des
œufs n'eft pas le même dans chaque maffe ; il y en a
trois , quatre , quinze , vingt , & même trente enfem-
ble : mais lorfqu'il y en a tant , ils font renfermés dans
différentes cavités. La matière qui environne les œufs
eft une pâtée dont fe nourriffent les vers , après qu'ils
font éclos. Ces vers font affez femblables à ceux des
abeilles ; leur couleur eft blanche , & ils ont quel-
ques taches noires fur les côtés : lorfqu'ils ont con-
fommé une partie de leur pâtée , il arriveroit quel-
quefois qu'ils fe feroient jour au-dehors , & qu'ils
s'expoferoient trop tôt à l'air, fi les bourdons n'a voient
foin d'appliquer de nouvelle pâtée fur les endroits
trop minces. Toute cette matière eft de la cire brute :
on y reconnoît les pouflîeres des étamines ; elles font
humeâées par un miel aigrelet. Quoiqu'il fe confom-
me beaucoup de cette pâtée dans les nids , on ne voit
que très-rarement les bourdons y revenir chargés de
cire ; ce qui fait croire qu'ils avalent les étamines
pour les digérer, & les dégorger enfuite.
Il y a dans chaque nid trois ou quatre petites cavi-
tés , remplies de miel : ce font des fortes de vafes
prelque cylindriques , au moins aufli grands que les
plus grandes coques , faits avec la même matière qui
fert de plafond au nid. On ne fait fi ce miel fert à
ramoliir les étamines pour faire la pâtée. Les fau-
cheurs connoiffent ces petits dépôts , & les cherchent
pour en boire le miel.
Après avoir enlevé les gâteaux d'un nid, on trouve
au bout de huit jours , que les bourdons ont travaillé
à en faire de nouveaux : ils commencent par former
dans le milieu du nid une petite maffe de pâtée de la
groflèur d'une noifette , qui efl pofée fur un lit de
mouffe , & qui tient à un petit vafe plein de miel :
c'eft fans doute pour recevoir les œufs de la mère
que ce premier travail fe fait.
Les vers s'éloignent les uns des autres à mefure
qu'ils confument leur pâtée : ainfi lorfqu'ils appro-
chent du tems où ils doivent prendre leur forme de
nymphe , ils ont chacun affez d'efpace pour filer leur
coque. Comme ces coques fe trouvent à découvert
dans la fuite , il eft à croire que les bourdons enlè-
vent les reftes de pâtée qui font au-dehors. Tous les
vers donnent à leur coque la même pofition : le grand
axe eft perpendiculaire à l'horifon, & chacun atta-
che la fienne aux coques voifines en la commençant ;
c'eft par cette union que les gâteaux font formés.
Ces mouches au fortir de leur coque n'ont que
des couleurs tendres , qui deviennent plus foncées
lorfqueiles
B O U
îorfqu'eilcs font expofées au grand air. En ouvrant
clans des tems convenables les plus gros bourdons ,
qui font les femelles , on trouve dans leur corps un
ovaire de chaque côté, & on n'y voit qu'une vingtaine
d'oeufs au plus ; cependant elles en pondent une plus
grande quantité : tous ces œufs ne font pas lénfibles
dans le même tems. On croit qu'un nid de bourdons
eft commencé par une femelle qui le peuple peu-à-
peu : ce qui rend cette opinion très -probable, c'eft
qu'à la fin de l'hy ver on ne voit voler que des bour-
dons femelles , fans aucuns mâles ni ouvriers. Les
petiti bourdons ont un aiguillon comme les femelles :
les mâles n'en ont point ; ils font de grandeur moyen-
ne. Mais il y a auffi des bourdons de cette même gran-
deur qui n'ont point de fexe , & que l'on doit regar-
der comme des ouvriers , de même que les petits :
ceux-ci parohTent plus adtifs, & les autres plus forts.
On a obfervé entre un bourdon de moyenne taille ,
qui étoit mâle , & une femelle , un accouplement qui
dura près d'une demi-heure. On s'eftaulîi affùré que
ïes bourdons mâles n'ont point d'aiguillon , & qu'ils
ont des parties analogues à celles des mâles de di-
vers infecles.
Les bourdons ont de petits poux ; on les voit quel-
quefois par centaines fur le corcelet , ou fur d'autres
parties : ces mêmes poux le trouvent furies gâteaux
des nids. Il y a apparence qu'ils cherchent la liqueur
miellée des bourdons pour s'en nourrir.
Les fourmis cherchent la pâtée des bourdons ; quel-
quefois il entre dans leur nid une fourmilière entière ;
& lorfqu'il ne s'y trouve qu'un petit nombre de mou-
ches, elles font obligées de l'abandonner, ne pou-
vant pas le défendre. Il s'y forme de gros vers qui
mangent la pâtée, les vers & les nymphes des bour-
dons. Il y a auffi des efpeces de chenilles : mais les
animaux qui y font le plus de ravage , font les rats ,
les mulots & les fouines.
Les parties intérieures des bourdons font à-peu-
près iemblables à celles des abeilles ; de même leurs
aiguillons & leur venin.
On ne trouve aucuns bourdons dans leurs nids au
commencement de Novembre ; il eit à croire que
les mâles &c les ouvriers périffent avant l'hy ver , &
qu'il ne relie que les femelles; celles-ci étant fécon-
dées , fuffifent pour perpétuer l'efpece. Elles fe ca-
chent dans des trous de murs , ou dans des creux en
terre jufqu'au printems. Mémoires pour fervir à l'hill.
des infecles , tom. Vl.prem. mém. Voy. Insecte. (/)
Bourdon, f. m. les Imprimeurs entendent par ce
mot , une omiffion que le compofiteur a faite dans
fon ouvrage , d'un ou de plufieurs mots de fa copie ,
& même quelquefois de plufieurs lignes. Le compo-
fiteur cft obligé , en remaniant , de faire entrer les
omiflions ; ce qui fouvent lui donne beaucoup de
peine, & nuit prefquc toujours à la propreté de l'ou-
vrage. Ce terme fait allulion au grand bâton dont
les pèlerins fe fervent pour franchir les foffés. Voye^
Remanier, Remaniement.
BOURDON de 16 pies , ou huit pics bouché ; on
appelle ainfi dans les Orgues un jeu , dont le plus
grand tuyau qui fonne Vue à la double oclave au-
delTous de la clé de cfol ut , a huit pies de longueur ;
ce qui équivaut à un tuyau de 1 6 pies ouvert , qui
eit à l'uniifon d'un de huit pies bouché. Ce jeu a
trois oÉtaves en bois , & celle de demis en plomb.
Voye^lafig. 30 , PL d'Orgue , qui repretente un tuyau
de bois des balles, &c un tuyau de plomb des deuils.
Les tuyaux de bois font compofés de quatre planches
affemblées à rainure ik. languette , les unes dans les
autres, & fortement collées, comme hij'g- âz le mon-
tre ; b , la bouche ; 3 , la lèvre inférieure ; 4 ou o , la
lèvre fupérieure ; A , le pié ; B , la chambre ; C , le
bifeau; E , le tampon, que l'on retire ou que l'on
enfonce dans le tuyau pour accorder. Lajig. jq, n".
Tome IL
B O U
369
2. repréfente un tuyau de plomb des deffus, & a le
pié dans les deux figures ; c , la bouche ; d , les oreil-
les au moyen defquelles on les accorde ; e , coupe
du tuyau ; £,le bileau , dont le talud regarde en déf-
ais ; y, plaque qui ferme le tuyau par dellus & qui y
eft fondée. Quant à la proportion des parties du
tuyau, elle doit être telle qu'il ait de longueur, dix
fois la largeur ou environ ; ainiï le tuyau de huit pies
doit avoir 9 pouces d'équarriffage intérieurement.
Remarquez que la longueur du tuyau le compte de-
puis la face lupérieure du biieau c , jufqu'à la face
inférieure du tampon E , & que la hauteur de la
chambre B , & l'efpace pour retirer le tampon E,
doivent être pris en fus de cette mefure ; tous les
tuyaux du bourdon doivent fuivre exactement entre
eux la proportion du diapafon. Voyer^ Diapason,
& l'article Orgue , & la table du rapport de rétendue
des /eux de f Orgue.
BOURDON de huit pies ou quatre pies bouché,
eft un jeu d'orgue dont le plus giand tuyau, qui eft
de quatre pies bouché lonne l'oâave au-deflus du
bourdonào. 16 ; les baffes font en bois & les tailles en
plomb &. bouchées à raie , & les deiïits à cl aminées.
Voyt{ lajig. 32. PL d'orgue; A, tuyau des baffes;
B , tuyau des tailles ; e d, les oreilles ; 3 , la plaque
qui bouche le tuyau par en haut'; C, tuyau des def-
uis à oreilles & à cheminées ; 4, la plaque qui le fer-
me , laquelle eit percée d'un trou ; 2 cheminée qui
eft fondée fur la plaque 4, comme taj?£. Cle reoré-
fente. Voy. les articles Orgue , Dia p ason , dont tous
les tuyaux de ce jeu doivent iuivre la proportion.
BOURDONNÉ , ( en termes de Blafon ) fe dit d'u-
ne croix dont les branches font tournées & arron-
dies en bourdons de pèlerins.
Rochas en Provence , d'or à la croix bourdonnée
ou pommelée de gueules , au chef d'afur , chargé
d'une étoile d'or. (/^)
BOURDONNET , f. m. ( terme de Chirurgie) c'eft
un petit rouleau de charpie de figure oblongue, mais
plus épais que large, deftiné à remplir une plaie ou
un ulcère. Les premiers bourdonnets qu'on introduit
dans le fond d'un ulcère profond doivent être liés ,
afin qu'on puiffe les retirer, & qu'ils n'y féjournent
point fans qu'on s'en appercoive. Voye?fig. 8.Q. &
u. PL II.
L'uiage des bourdonnets & de tous les dilatans peut
être fort nuifiblc ou fort avantageux , félon la façon
dont on s'en iert. Si les bourdonnets ferment un ul-
cère profond comme on ferme une bouteille avec
fon bouchon, ils s'oppofent à l'écoulement des ma-
tières purulentes , & produifent la collection du pus
qui corrompt les focs que la circulation conduit vers
l'endroit 011 il croupit. L'obftaclc que les bourdonnets
font à l'iffue des matières purulentes peut en caufer
le reflux dans la maffe du fang , où elles occaiion-
nent, pour peu qu'elles foient atteintes de putréfac-
tion , des colliquations fâcheufes qui détruifent la
partie rouge de la maffe des humeurs, & qui ren-
dent cette maffe toute féreufe ; de-là font produites
les évacuations continuelles , qui jettent le corps
dans le mnraime & dans une extrême foibleflè, qui
eft enfin fuivie de la mort.
Si on remplit un ulcère de bourdonnets durs entaf-
fés les uns fur les autres, l'irritation qu'ils cailleront
aux vaiffeaux empêchera le paiîage des focs : ils s'ar-
rêtent, s'accumulent & fe condenlent dans les parois
de l'ulcère , & y forment des calloiités qui le rendent
incurable à moins qu'on n'en détruife les duretés.
Ces inconvéniens bien obfervés ont fait beaucoup
crier contre le tamponage des plaies : M. Bellolte,
dans Ion Traité du Chirurgien d'Hôpital , s eft élevé
contre l'ufage des bourdonnets qu'il croit fort nuifi-
blcs ; il blâme même l'attention qu'on a de garnir
exactement les plaies caverneulès avec des bourdon-
A a a
37°
B O U
nets mollets : c'eft cependant le feul moyen d'empê-
cher la collection & le féjour du pus , & d'exclurre
l'air de leur cavité. La charpie s'imbibe des matières
purulentes , ces matières fe diftribuent entre les filets
qui les foûtiennent , & les empêchent de fe raffem-
bler en aucun lieu particulier. La charpie eft pour
ces matières , félon l'expreffion de M. Quefnay , une
échelle avec laquelle elles peuvent monter du tond
de la plaie , jufqu'à ce qu'elles trouvent une ifïïie
pour s'évader , à peu près comme il arrive dans ces
difîillations qui fe font par le moyen d'une languette
de drap , ou les liqueurs montent jufque par-deffus
les bords du vafe qui les contient. ( V)
* BOURG , (Hifi. anc. & mod.) ce mot vient du
mot allemand burg ville , forterefie &c château ; il eft
fort ancien chez les Allemands, comme on peut le
voir dans Vegcce au IV. livre de re militari , cajhllum
parvum quem burgum vocant, &c. Du tems des empe-
reurs Carlovingiens , il n'y avoit en Allemagne que
fort peu de villes enfermées de murailles ; ce fut
Henri l'Oifeleur qui commença à bâtir plufieurs for-
tereffes ou bourgs pour arrêter les incurfions fréquen-
tes des Huns ou Hongrois : pour peupler ces nou-
veaux bourgs , en prenoit un neuvième des habitans
de la campagne ; & l'on appelloit burger ou bourgeois ,
ceux qui demeuroient dans les bourgs ou villes pour
les diftinguer des payfans. Aujourd'hui par bourg ,
on entend un endroit plus confidérable qu'un villa-
ge , mais qui l'eft moins qu'une ville.
Bourg-en-Bresse , ( Géog. ) ville de France,
capitale do la Breffc , preiqu'au centre de cette con-
trée , fur la rivière de Refouffe. Long. zz.J>3- àà.
lat. 46. iz. 31.
Bourg-sur-mer , ville de France en Guienne ,
avec un affez bon port , au confluent de la Dordogne
Se de la Garonne , à 6 lieues de Bourdeaux. Long.
iy. lat. 45.
BOURG ANEUF, ( Géog.) ville de France dans
la Marche , fur la rivière deTaurion, à fix lieues de
Limoges.
♦BOURGEOIS, CITOYEN, HABITANT,
( Gramm. ) termes relatifs à la réfidence que l'on fait
dans un lieu. Le bourgeois eft celui dont la réfidence
ordinaire eft dans une ville ; le citoyen eft un bour-
geois confidéré relativement à la fociété dont il eft
membre ; Yhabftant eft un particulier confidéré re-
lativement à la réfidence pure & fimple. On eft ha-
bitant de la ville , de la province , ou de la campa-
gne : on eft bourgeois de Paris. Le bourgeois de Paris
qui prend à cœur les intérêts de fa ville contre les
attentats qui la menacent , en devient citoyen. Les
hommes font habitans de la terre. Les villes font plei-
nes de bourgeois ; il y a peu de citoyens parmi ces
bourgeois, h habitation fuppofe un lieu ; la bourgeoise
fuppofe une ville ; la qualité de citoyen , une fociété
dont chaque particulier connoît les affaires & aime
le bien,& peut fe promettre de parvenir aux premiè-
res dignités.
Bourgeois , on appelle ainfi en terme de Marine
le propriétaire d'un navire , foit qu'il l'ait acheté ,
fou qu'il l'ait fait conftruire. Si plufieurs marchands
s'unifient pour faire l'acquifition d'un navire , on les
appelle co-bourgeois.
Ce font les bourgeois des vaiffeaux qui les équi-
pent , qui les frettent , & qui font avec ceux avec
qui ils les louent cette efpece de traité , qu'en terme
de Marine On appelle charte-partie. Voye? CHARTE-
PARTIE.
Quelques auteurs prétendent que le mot de bour-
geois eft venu du ftyle de la hanfe Teutonique , à
caufe qu'en Allemagne il n'y a que les bourgeois des
villes anféatiques qui puiffent avoir ou faire conftrui-
re des vaiffeaux ; ce qui fait qu'en ce pays-là on ap-
pelle bourgeois tout feigneur ôc propriétaire de navi-
B O U
re : & l'Allemagne a emprunté vraiffemblablemenf
ce nom desRomains,qui pendant le meilleur tems de
la république ne permettoient pas aux patrices ou
fénateurs de pofféder ni tenir en propre aucun na-
vire un pau confidérable, mais feulement de petites
barques ; les fimples citoyens ayant feuls le droit
d'armer de grands vaiffeaux. (Z)
BOURGEON ou BOUTON , f. m. (Jardin.) c'eft
une éminence qu'on remarque aux branches des ar-
bres , ou un œil animé qui produit dans la fuite une
jeune branche ; les feuilles y font arrangées & cou-
chées avec beaucoup d'induftrie. (K )
Il paroît que le terme de bourgeon s 'employé mieux
pour la vigne , le verjus , le chaffelas , le mufeat.
Voye^ Bouton. (K)
BOURGES, (Géog.) ancienne & grande ville
de France , capitale du Berry. Elle eft iiir les riviè-
res d'Auron & d'Yevre , prefqu'au centre de toute
la France. Lon. zo.3. z6. lat. 47. ^. 58.
* BOURGOGNE, f. f. (Géog.) province confidé-
rable de France , avec titre de duché. Elle eft fituée
entre le Bourbonnois, le Nivernois, & la Franche-
Comté. Son commerce principal eft en vin. Les plus
vantés font ceux de Dijon , de Nuis , de Beaune , de
Pomarre , de Chaffagne , de Mâcon , de Tonnerre,
d'Auxerre, & autres endroits. Ils fe tranfportent dans
toutes les provinces du royaume, Se dans toutes les
contrées de l'Europe. Il vient encore des grains , des
foins , des beftiaux , des fers , & du bois de chauffa-
ge , du bailliage de Dijon. Il y a auffi des foins & des
grains dans le bailliage de S. Jean de Laune. Celui
d'Auxonne fait le commerce de fes blés & de ceux
du Baffigny. La Saône eft très-favorable à celui des
bois. Le territoire d'Autuneft ingrat. Celui du bail-
liage de Châlons eft très-fertile en vin , blé , &; autres
grains dont la Saône favorife le tranfport. Avalon a
des grains , des vins , des beftiaux & des bois. Il ne
iort guère d'Auxerre que fes vins. Le Chârolois four-
nit des bois Se des beftiaux. C'eft peu de chofe que le
commerce du comté de Bar-fur-Seine & delà Brcffe ,
fi l'on en excepte les beftiaux de cette dernière con-
trée.Le Bugey fait le même commerce. Le commerce
du pays de Gex n'eft prefque rien. Il fe fait dans la
province entière des draperies à Dijon , à Vitaux ,
à Mercy , à Semur , Saulieu , Seignelay , &c.
Bourgogne, ( le cercle de ) c'eft un des dix cer-
cles de l'Empire , qui comprenoit autrefois la Fran-
che-Comte & les dix-fept provinces des Pays-bas ,
mais qui eft acf uellement entièrement démembré de
l'Empire. C'étoit le roi d'Efpagne qui étoit direefeur
de ce cercle, du tems que ce royaume appartenoit à
des princes de la maifon d'Autriche.
Bourgogne, ( Comté de ) voye^ Franche-
Comté.
Bourgogne , ( la ) f. f. nom d'une danfe Fran-
çoife qui fut faite pour M. le duc de Bourgogne.
BOURGOIN , ( Géog. ) petite ville du Viennois
en Dauphiné. Il s'y fait un grand commerce de chan-
vre.
* BOURGUEMESTRE , f. m. ( Hijl. mod. ) Ce
mot eft formé de deux ternies Flamands , burger, bour-
geois , & meejler , maître ; c'eft-à-dire , le maître & le
protecteur des bourgeois. Quelques-uns l'expriment
en Latin par conful, d'autres parfenator. M. Bruneau
dit que Bourguemejlre en Hollande répond à ce qu'on
appelle alderman & sheriff' en Angleterre ; attourné à
Compiegne ; capitoul à Touloufe ; conful en Langue-
doc : mais cela n'eft pas exacf ; Y alderman des An-
glois répond au fcheepen ou échevin des Hollandois.
Les bourguemejlre s font choifis du nombre des éche-'
vins , & ne font ordinairement en place que pour
un ou deux ans.
C'eft ainfi qu'on appelle les principaux magiftrats
des villes de Flandre , de Hollande & d'Allemagne ;
B O U
ils font comme les maires & les gouverneurs ; ils
donnent des ordres pour le gouvernement, Fadmi-
niftration des finances, la justice & la police des vil-
les. Le pouvoir & les droits des bourguemejlres ne font
pas égaux par-tout : chaque ville a Tes lois de fes fta-
tuts particuliers.
BOURGUIGNONES , (Lois) Jurifprud. ce font
■celles qui étoient en ufage chez les Bourguignons
avant Gondebaud l'un de leurs derniers rois , qui les
réforma & en fit une efpecede code, qu'on appella
de fon nom lois Gombettes. Voye^ GoMBETTES.( H)
BOURGUIGNOTE , f. f. ( Art. milit. ) c'eft une
armure de tête faite de fer poli dont fe fervoient les
piquiers. ( Q )
* BOURIGNONISTE , f. m. (HiJI. eccléf. ) nom
de fecle : on appelle aiftfi dans les Pays-bas protef-
tans ceux qui fuivent la doôrine d'Antoinette Bou-
rignon, célèbre Quiétifte. Voye^ Quiétisme.
* BOURIQUET , f. m. ( Minéral. ) efpece d'ef-
cabellc dont on fe fert dans les fonderies en cuivre ,
pour contenir les branches de la tenaille , lorfqu'on
employé ce dernier infiniment à tenir le creufet dans
ion aplomb tandis qu'on le charge.
BOURICHE, f. m. ( Chajfe. ) c'eft une efpece de
panier fait en forme d'eeuf , dans lequel les oifeleurs
portent en vie les oif eaux aquatiques. On donne aufti
le même nom à ceux dans lefquels on fait des envois
de gibier.
* BOURLET ou BOURRELET , f. m. fe dit au
propre d'un ajuftement de tête à Fufage des jeunes
enfans ; c'eft une efpece de bandeau rembourré &c
épais qui leur ceint le front ; &c des cordons de ru-
ban qui fe croifent fur le haut de la tête , l'empê-
chent de defeendre fur les yeux. Il garantit la tête
des enfans dans les chûtes 6c autres accidens. On a
tranfporté ce nom aux éminences circulaires prati-
quées à l'extrémité de plufieurs corps , parce qu'el-
les ont la forme & le lieu des bourkts pris au propre.
BOURLET , c'eft dans l 'Artillerie l'extrémité d'une
pièce de canon du côté de fon ouverture ou de fa
bouche. La pièce en cet endroit eft renforcée de mé-
tal , & elle reffemble à un bourlet.
On le faifoit autrefois avec différens ornemens ou
membres d'architecture : mais aujourd'hui on le fait
en tulipe , c'eft-à-dire, avec un arrondiflementà peu
près fcmblable à une tulipe. Cette forme eft la plus
avantageufe pour la confervation des embrafures.
Voye^ Canon. ( Q )
Bourlet, en Marine , c'eft un gros entrelacement
de cordes & de trèfles que l'on met autour du grand
mât , du mât de mifene , & du mât d'artimon , pour
arrêter la vergue dans un combat , en cas que les
manœuvres qui la tiennent fuflent coupées. ( Z )
BOURLET , ( Jardinage. ) s'entend d'un gros nœud
qui au bout de quelques années vient au-defîbus d'u-
ne greffe , plus gros que le pié fur lequel elle a été
feite ; ce qui dénote que le lujct ou fauvageon n'eft
pas bien conditionné. Le bouda fe connoît par un
cercle avancé, la greffe fe joignant difficilement à
l'arbre greffé , qui demeure plus petit: la raifon eft
que lesvaiffeauxde la greffe ne répondant pas exacte-
ment auboutdesvaiffeaux du fujet fur lequel on l'ap-
plique , il n'eft pas poifible que le fuc nourricier les
enfile en droite ligne. Quand on s'apperçoit qu'un
fauvageon fait le bourlet, foit dans la pépinière , foit
mis en place , on ne peut mieux taire que de l'arra-
cher & d'en replanter un autre. (A')
Bourlet , ancien terme qui ftgnifioit la partie du
harnois des chevaux qu'on appelle à préfent le col-
lier. C'eft de-là qu'eft venu le nom de Bourrelier ,
qu'on donne aux ouvriers qui font les colliers de che-
vaux. Voye^ Collier. Voye^ B , fig. 6. Planche du
Bourrelier.
Bourlet de lutin y en terme de Boutonnier , eft un
Tome II,
B O U
371
ouvrage en bois tourné en poire ou autrement : il y
en a de deux fortes ; l'un eft percé par en haut , 6c
fert à cacher les tirefonds ; 6c l'autre l'eft par en-
bas , un peu en s'évafant, pour renfermer le nœud
de la corde qui fufpend le luftre. Les uns & les au-
tres peuvent être percés à jour ou ne Fêtre pas.
BOURLET , en terme de Raffineur de fucre , eft un
cercle ^de corde quia fept à huit pouces de diamè-
tre > d'où s'élèvent quatre autres cordes qui fe réu-
nifient & fe lient enfemble environ deux pies au-def-
fus du bourlet. Il faut faire attention de conserver
dans cette ligature une boucle pour attacher le bour-
letii la corde du tracas. Voye^ Tracas.
On fe fert du bourlet pour monter les pots 8c les
grofles pièces, comme bâtardes &vergeoifes, dans
les greniers. Voye^ Bâtardes & Vergeoises. Ce-
lui qui fert aux vergeoifes doit avoir moins de dia-
mètre & des cordes plus longues , que celui qui fert
aux pots. Voye{ Pot & Vergeoise.
BOURMONT , ( Géog. ) petite ville de France
au duché de Bar, à fept lieues de Nancy , près de la
Meufe. Long. 23. 18. lat. 48. IO.
BOURNEZEAU , petite ville de France dans le
Poitou.
BOURON, ( Géog.) ville de la Romanie fur un
lac de même nom , appartenante aux Turcs.
BOURRE , i. f. dans plufieurs Arts méchaniques ,
poil de plufieurs animaux , comme taureaux, bœufs,
vaches , veaux, bufles , chevaux, cerfs , &c qu'on
détache par le moyen de la chaux , ou qu'on rafe
avec un couteau de deffus leurs peaux ou cuirs lorf-
qu'on les prépare dans les tanneries , ou chez les Mé-
giffiers, Chamoifeurs, ou Hongrieurs. La bourre {çrt
à garnir des felles , des bâts , des chaifes , des tabou-
rets , des banquettes ou formes , &c.
A Paris ce font les Marchands de fer, qui font du
corps de la Mercerie , qui font prefque tout le négo-
ce de cette efpece de bourre , quoiqu'il foit permis
aux marchands Epiciers de le faire. Ceux qui en
font commerce , l'achètent en gros des ouvriers qui
préparent les cuirs , 6c la revendent enfuite en détail
aux artifans qui en ont befoin.
* Bourre de laine , chei les Bonnetiers , c'eft la par-
tie qui tombe fous la claie quand on la bat.
* Bourre -lanisse, laine que les Laineurs ou
Eplaigneurs tirent de defius les draps , les ratines , &
autres étoffes, quand ils les préparent fur la perche
avec le chardon avant que de les tondre.
* Bourre - tontisse , laine qui provient de U
tonte des draps.
Les faifeurs de matelas & autres ouvriers qui em-
ployent la laine , trompent fouvent , foit en mélan-
geant les bonnes laines avec ces mauvaifes , foit en
les leur fubftituant.il faut y prendre garde.
* Bourre de soie , Filoselle . ou Fleuret,
c'eft la partie de foie qu'on rebute au dévidage des
cocons : on la file , & on la met en écheveaux comme
la bonne. On en fait des padous , des ceintures , des
lacets , du cordonnet , &c.
* Bourre , ( rouge de ) en Teinture : il fe fait avec
le poil de chèvre le plus court. On fait bouillir le poi!
plufieurs fois dans la garance ; ainfi préparé , il fé
fond dans la cuve à teindre par le moyen de quel^
qu'acide, comme la cendre gravelée , l'urine, &c.
6c donne le rouge ou nacarat de bourre , un des fept
bons rouges.
* Bourre de Marfeille , (Commerce.) étoffe moirée
dont la chaîne eft toute de loie , tk la trame toute de
bourre de foie. Les premiers bourres fe font faits à
Marfeille: il s'en fabrique à préfent à Montpellier,
à Nimes , & ailleurs.
* Bourre , cht{ les Corroyeurs , c'eft le vieux tan
qui eft refté des peaux de mouton au fortir de la
tannerie. Onébourre ces peaux avec l'eftire.
A a a ij
372
B O U
BOURRE , en terme d'Artillerie , c'eft tout ce que
l'on met for la poudre en chargeant les armes à feu,
D i pier , foin, &c. Voye{ CHARGE 6- T A M p o N.
Bourre , fe dit de la première forte de bourgeons
des vignes & des arbres fruitiers,
i Bourre fe dit auffi de la graine d'anémone. (K )
BOUR.R.EAU , f. m. ( Hifl. anc. & mod. ) le der-
nier officier de juftice , dont le devoir eft d'exécu-
ter les criminels. La prononciation de la fentence
met le bourreau en poifefiîon de la perfonne con-
damnée. En Allemagne on n'a point pour le bour-
reau la même averiion qu'en France. L'exécuteur eft
le dernier des hommes aux yeux du peuple ; aux
yeux du philofophe , c'eft le tyran.
BOURRÉE , f. f. terme dOrchcfiique. Il y a des pas
qu'on nomme pas de bourrée. Voye-^plus bas.
Il y a une danfe qu'on nomme la bourrée : elle eft
gaie , &c on croit qu'elle nous vient d'Auvergne : elle
eft en effet toujours en ufage dans cette province.
Elle eft compofée de trois pas joints enfemble , avec
deux mouvemens. On la commence par une noire
en levant.
Mouret a fait de jolies bourrées ; il a porté ce gen-
re d'airs & de danfe dans les ballets.
On l'a peu fuivi , cette danfe ne paroiffant pas allez
noble pour le théâtre de l'opéra. (5)
La bourrée eft à deux tems , & compofée de deux
parties , dont il faut que chacune ait quatre mefures,-
ou un nombre de mefures multiple de quatre. Elle
diffère peu du rigaudon. Voye^ Rigaudon.
. Bourrée, ( Pas de ) ce pas eft compofé
de deux mouvemens ; lavoir d'un demi-coupé avec
un pas marché for la pointe du pié , & d'un demi-
jetté: je dis un demi-jetté , parce qu'il n'eft fauté qu'à
demi ; & comme ce pas eft coulant , l'on dernier pas
ne doit pas être marqué h fort : on en a adouci F (.lia-
ge , parce qu'il demande beaucoup de force dans le
coiip-de-pié ; on y a donc ajouté le fleuret. Voye^ la
définition de ce pas.
Pas DE Eourr.EE avec fleuret diffus & dejfous. Ces
pas fe font en revenant dû côté gauche, le pié droit
étant à la première pofition. On plie fiir le pié gau-
che en ouvrant les genoux , & étant plié on croife le
pié devant foi jufqu'à la cinquième poiition, & l'on
s'élève defî'us. On porte enfoitè le pié gauche à côté
à la féconde pofition, & le droit fe croife derrière à
la cinquième, ce qui fait l'étendue dupas.
Ceux qui fe font deffous & dcîïus ne différent du
premier , qu'en ce que le demi-coupé fe croife der-
rière , & le troifieme fe croife devant.
Quant à ceux qui fe font de côté en effaçant l'é-
paule, le corps étant pofé fur le pié gauche , on plie
ueffus, ayant le pié droit en l'air prés du gauche, &
qn le porte à côté en s'élevant for la pointe , & en
retirant l'épaule droite en arrière : mais la jambe gau-
che fuit la droite , & fe pofe derrière à la troifieme
poiition, les genoux étendus for la pointe , & pour
le troifieme on laiffe gliffer le pié droit devant à la
quatrième pofition , en laiffant pofor le talon à terre,
ce qui finit ce pas. Le corps étant pofé for le droit,
on peut plier deffus , & en faire un autre du gauche.
- Pas de Bourrée ouvert ; fi on prend ce pas
du pié droit , l'ayant en l'air à la première pofition,
on plie fur le gauche , & l'on porte le droit à la fécon-
de pofition , ou l'on s'élève fur ce pié , en faifant ce
pas de la forte : la jambe gauche fuit la droite , en s'ap-
prochant à la première pofition , & dans le même tems
le droit fe pofe entièrement, 8c de fuite le gauche fe
pofe à côté à la féconde pofition, en laiffant tomber
le talon le premier : lorfque le corps fe pofe fur ce
pié , on s'élève for la pointe ; par cette opération on
attire la jambe droite , dont le pié fe gliffe derriè-
re le gauche jufqu'à la troifieme poiition , tk le pas eft
B O U
terminé. Si l'on en veut faire un autre du pié gauche,
il faut porter le talon droit à terre , plier deflus , &
porter le pié gauche à côté, en obfervantles mêmes
règles.
Pas de Bourrée emboîté; ce pas s'appelle ainfî,
parce qu'il s'arrête au (econd pas à l'emboîture. Il faut
faire le demi-coupé en arrière, en portant le pié à la
quatrième pofition. Le fécond pas fe porte vite à la
troifieme , & l'on refte un peu dans cette pofition fur
la pointe des pies , les jambes étendues ; puis on laiffe
gliffer le pié qui eft devant jufqu'à la quatrième po-
iition. Ce mouvement fe fait en laiffant plier le ge-
nou de la jambe de derrière , qui renvoyé par l'on
plié le corps for le pié de devant , ce qui fait l'éten-
due de ce pas.
Bourrée eft un petit fagot qui n'eft fait que dera-
mafïls d'e bois 6c de broffailles; telles que celles dont
on fait famé d'un fagot. Voye^ Bois DE CHAUF-
FAGE, Foye{ Fagot.
BOURRELIER , f. m. ouvriers qui font les har-
nois de chevaux de carroffe , de charrette ; ils font
de la communauté des Selliers. Ils ont été nommés
bourreliers , du collier des chevaux, qu'on appelloit
autrefois bourrelet. Voye^ Sellier.
BOURRU, BOURRUE, adj. (manufacî. enfoie.)
fe dit de tout fil ou foie inégal , ou chargé de diffé-
rentes bourres de la même eipece qui s'y font intro-
duites lors de la fabrique de ce fil ou foie ; cette bour-
re doit être ôtée foit de la chaîne ou de la trame , fi
l'on veut que l'ouvrage foit beau.
BOUR.S AULT , terme de Plombier, eft une pièce de
plomb qu'on place au haut des toits couverts d'ar-
doife. C'eft la principale pièce de l'enfaîtement; au-
deffous du bourfault eft la bavette , ôv au-deffous de
la bavette eft le membron.
Boursault ROND, outil de Plombier, c'eft un ins-
trument de bois plat d'un côté & arrondi de l'autre ,
dont les Plombiers fe fervent pour battre & arrondir
les tables de plomb dont ils veulent faire des tuyaux
fur les tondins. Le manche du bourfault eft attaché le
long du coté qui eft plat; il n'y a que le côté arron-
di qui ferve à battre le plomb. Voye^ la figure PL de
Plomberie & du Fontaïnier.
BOURSE , en terme de Bourfiers , dont ils tirent leur
nom , eft une efpece de petit fac portatif, fermé par
des cordons , & propre à recevoir tout ce qu'on veut
y mettre. Il y a des bourfes à cheveux , à jetions, &c.
Foyer ces mots.
BOURSE À CHEVEUX, terme de Bourjler & autres,
c'eft un petit fac de taffetas noir, environ de huit pou-
ces en quarré au-haut & en-deffus duquel eft attaché
un ruban fort large , noir & plié en rôle. Ce fac eft
fermé de deux côtés, & eft ouvert par en-haut. Il y a
un faux ourlet à chaque bord , dans lefquels paffent
des cordons qui le font ouvrir ou fermer. Les hom-
mes s'en fervent pour mettre leurs cheveux par der-
rière. Les Marchands de modes en font peu , mais ils
les font faire par des ouvriers.
Bourse à jettons , les Bourfiers appellent de ce
nom un fac de cuir, de velours, &c. qui fe ferme
avec des cordons qui traverient les quarrés en fens
contraires. Il y a des bourfes à dix, douze quarrés plus
ou moins , c'eft-à-dire , à dix ou douze plis.
Bourse, en Anatomie , fe dit de deux facs formés
par le darthos & le ferotum , qui enveloppent les tef-
ticules comme dans une bourjé. Foyez_ Darthos 6*
Scrotum. (L)
BOURSE, ( Commerce. ) en terme de Négocians , eft
un endroit public dans la plupart des grandes villes,
où les Banquiers, Négocians, Agens, Courtiers, In-
terprètes, & autres perf onnes intérefîées dans le com-
merce, s'affemblent en certains jours , & à une heu-
re marquée , pour traiter enfemble d'affaires de com-
merce, de change, de rernjies, de payemens, d'af-
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fùrancés , de fret , & d'autres choies de cette nature ,
qui regardent les intérêts de leur commerce , tant fur
terre que lur mer.
Bruges en Flandre a été la première ville où l'on
fe foit lérvi du mot de bourfe , pour déligner le lieu
où les Marchands tenoient leurs aflemblees, à caule
que les Marchands de cette ville s'aflembloient dans
une place vis-à-vis d'une mail'on qui appar tenoit à la
famille de Vander bourfe.
En Flandre , en Hollande, & dans plufieurs villes
de la France , on appelle ces endroits bourfes ; à Pa-
ris &c à Lion , plaças de change ; & dans les villes li-
bres & anléatiques du Nord , collèges des Marchands.
Ces aflemblees fe tiennent avec tant d'exacfrtude ,
& il eft fi néceflaire aux négocians de s'y trouver ,
que la feule ablénce d'un homme le fait quelquefois
foupçonner d'avoir manqué ou tait banqueroute.
Voye^ Banqueroute & Faillite.
Les bourfes les plus célèbres de l'Europe font , cel-
le d'Amfterdam , & celle de Londres , que la reine
Elifabeth fit appeller le change royal, nom qu'elle a
retenu depuis. V. en la defcription à Carticle CHAN-
GE ROYAL.
La bourfe d'Anvers n'étoit guère inférieure à celles
de Londres & d'Amfterdam , avant le déclin du com-
merce de cette ville.
Dans le tems même des anciens Romains , il y
avoit des lieux où les commerçans s'aflembloient
clans les villes les plus conlidérables de l'empire. La
bourfe que quelques-uns prétendent avoir été bâtie à
Rome, l'an 259 après la fondation de cette ville,
c 'eft-à-dire 49 3 ans avant la naifl'ance de Jefus-Chrift,
fous le confulat d'Appius Claudius , & de Publius
Servilius, fut nommée Collegium mercatorum ; on pré-
tend qu'il en refte encore quelque choie , que les Ro-
mains modernes appellent loggia, la loge, & qu'ils
nomment aujourd'hui la place de S. George. Voye-^
Collège.
C'eft iur l'autorité deTite-Live qu'on fonde cette
opinion d'une bourfe dans l'ancienne Rome ; voici
ce que dit cet auteur : Certamtn confulibus inciderat
uter dedicaret Mercuriï œdem. Sénat us à fe rem ad po-
pulum rcjecit : utri eorum dedïcatio jufju populi data
■effet , eum prœejfe annonce , mercatorum collegium injli-
tuerejuffit. lib. II. Mais il eft à remarquer que dans la
pureté de la langue Latine , collegium ne fignifioit ja-
mais un édifice fait pour une fociété de gens ; deforte
que collegium mercatorum ïnflituere , ne peut pas fe
rendre parbdtir une place de change ou un collège pour
les négocians. Le fens de cette expreflion eft que les
négocians furent incorporés & formés en compa-
gnie : & comme Mercure étoit le Dieu du commer-
ce, cette œdes Mercuriï femble avoir été le lieu deftiné
aux dévotions de cette compagnie de commerçans.
La bourfe des marchands de Touloufe fut établie
'par Henri II. en 1549, à l'incitation des juges confer-
vateurs des privilèges des foires de Lyon.
L'édit d'érecnon confirmé par lettres patentes du
roi en 15 51 , permet aux marchands de cette ville
d'élire & de faire chaque année un prieur ik. deux
confuls d'entre eux pour connoitre & décider en pre-
mière inftanec de tous & chacuns les procès & diffè-
rens qui peur raifon de marchandifes , aflùrances ,
&c. feroient mus & intentés entre marchands Se tra-
fîquans à Touloufe , & par appel au parlement de
ladite ville ; leur permettant d'acheter ou conftruire
un bâtiment pour y tenir la jurifdicuon cycles aflem-
blees de ladite bourfe commune.
Les marchands qu'il el'c permis aux prieur & con-
fuls de choilir ce de s'aflocier pour affilier aux jiige-
mens de la bourfe , s'appellent juges -confeillers de la
retenue , &: font au nombre de Coûtante. / qye^ Juges
DE LA RETENUE.
La bourfe de Rouen , ou, comme on l'appelle, la
373
convention de Rouen , eft de quelques années plus mo-
derne que celle de Touloule, n'étant que de l'année
1 566 , fous le règne de Charles IX : pour le refte elle
lui eft à-peu-pres femblable.
La plus nouvelle de toutes les bourfes confulaires eft
celle de Montpellier, érigée en 1691 par Louis XIV.
pour les marchands de cette ville, & dont la juri-
diction s'étend dans les diocefes de Montpellier , Nî-
mes , Usés , Viviers , le Puy, Mende , Lodeve , Agde,
Befiers , Narbonne , & Saint-Pons. Ses officiers font
un prieur , deux juges-confuls , un fyndic , 6c un cer.
tain nombre de bourgeois pour afîifter avec eux aux
jugemens.
A Bourdeaux , les confuls font appelles juges-con-
fuls de la bourfe commune des marchands. Voye? CON-
SULS.
Jufqu'en 1724, le lieu d'aflemblée où les mar-
chands, banquiers, négocians, & agens de change
de Paris s'aflembloient pour traiter de leur commer-
ce , étoit fitué dans la grande cour du Palais , au-def-
fous de la gallerie Dauphine , du côté de la Concier-
gerie ; & on l'appelloitla/^ce du Change. Mais alors
on choifit l'hôtel de Nevers , rue Vivienne ; & aux
bâtimens qui y étoient déjà , on en ajouta de nou-
veaux pour la commodité des négocians , banquiers,
&c. & c'eft ce qu'on nomme aujourd'hui à Paris la
bourfe. On peut en voir les principaux reglemens
dans l'arrêt du confeil du 24 Septembre 1724, &
dans le dictionnaire du Commerce <&Savary, tom. I.
pag. 1080. &fuiv.
La bourfe d'Amfierdam eft un grand bâtiment de
brique & de pierres de taille , qui 8230 pies de long
fur 1 30 de large , & autour duquel règne un periftyle,
au-defliis duquel eft une galerie de vingt pies de lar-
geur. Les piliers du periftyle font au nombre de qua-
rante-fix , tous numérotés depuis un jufqu'à quaran-
te-fix , pour diftinguer les places où fe tiennent les
marchands , & aider à les trouver aux perfonnes qui
ont affaire avec eux ; ce qui fans cela feroit fort dif-
ficile , puifque ce bâtimentpeut contenir jufqu'à 4500
perfonnes. La bourfe eft ouverte tous les jours ouvra-
bles depuis midi jufqu'à une heure & demie ou deux
heures ; on en annonce l'ouverture par le fon d'une
cloche. A midi tk. demi on en ferme les portes ; on
y peut néanmoins entrer jufqu'à une heure en payant
un certain droit à un commis établi pour le recevoir.
Outre cette bourfe, il y en a encore une dans la
même ville , qu'on appelle la bourfe aux grains. C'eft
une halle fpatieuie où les marchands de grains , fac-
teurs , &c. s'aflemblent tous les lundis , mercredis ,
& vendredis , depuis dix heures du matin jufqu'à
midi , & vendent ou achètent des grains fous mon-
tre. Il y a aufli à Rotterdam une bourfe très-belie , &
qui fait un des principaux ornemens de cette ville,
quoique moins grande & moins fpatieufe que celle
d'Amfterdam.
Bourse a encore, dans le Commerce, plufieurs li-
gnifications , dont voici les principales.
Il le dit de ceux qui ont beaucoup d'argent comp-
tant, qu'ils font valoir fur la place en efeomptant
des lettres & billets de change : ainli on dit , ce mar-
chand efl une des meilleures bourfes de Paris.
Bourfe commune eft proprement une fociété qui fe
tait entre deux ou plufieurs perfonnes de même pro-
feflion , pour partager par égale portion les profits ,
ou fupporter les pertes qui peuvent arriver dans leur
trafic. On dit quelquefois tenir la bourfe , pour tenir
U caiffe. foyer Caisse.
Bourfe commune s'entend aufli de ce qui provient
des droits de réception , foit à l'apprentiflage , foit
à la maîtrife , dans les corps des marchands &c les
communautés des Arts & Métiers ; ce qui compofe
un fonds qui ne peut être employé que pour les be-
l'oins & aiiaùes communes. Ce font ordinairement
374
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ies maîtres & gardes 6c jurés qui font chargés de la
perception de ces deniers , dont ils rendent compte
eu lbrtir de leur charge.
Bourfi le dit encore de l'argent ou bien de quel-
qu'un. Avoir la bvurfe , manier la bourfi ; c'eft taire la
xlépenfe. Mettre la main à la bourfi , c'eft dépenfer.
'Faire une affaire fans bourfi délier^ c'eft taire un troc
de marchandises , un accommodement but à but , 6c
fans être obligé de donner de l'argent de part ni
<1 'autre. (<r)
Bourse , ( Hifl. mod. ) manière de compter , ou
efpcce de monnoie de compte fort ulitée dans le Le-
vant , fingulierement à Conitantinople. Voyt{ Mon-
noie de COMPTE.
-La bourfe eft une fomme de cent vingt livres fter-
lins , ou de cinq cents écus. Ce terme vient de ce que
le threlor du grand-léigneur eft gardé dans le lérrail
dans des bourfes de cuir , qui contiennent chacune
cette fomme.
Cette manière de compter des Turcs leur vient
des Grecs , qui l'avoient prile des Romains , dont
les empereurs la rirent parler à Conitantinople ; com-
me il paroît par la lettre de Constantin à Cécilien ,
évêque de Cartilage , citée par Eulebe 6c Nicéphore ,
où on lit ce qui fait: « Ayant réfolu de donner quel-
•» ques Secours en argent aux miniftres de la religion
» Catholique en Afrique , dans les provinces de Nu-
» midie & de Mauritanie ; j'ai écrit à Vefus , notre
* threibrier général en Afrique , & lui ai donné or*
» dre de vous délivrer trois mille folles » , c'eft-à-
dire bourfes : car , comme le remarque M. de Fleury ,
ce que nous appelions bourfe , les Latins l'appellent
follis , par oîi ils entendent une fomme de deux cents
cinquante deniers d'argent , ce qui revient à cinq
cents livres de noire monnoie.
La bourfi d'or chez les Turcs eft de quinze mille
fequins, ou.de trois mille écus ; & ce font celles que
ies Sultans généreux distribuent à leurs favoris & aux
Sultanes.
BOURSETTES , f. f. ( Orgue. ) ce font de petites
parties du fomrnier fort ingénieuiement imaginées ,
pour pouvoir faire entrer un ril de fer dans la laye ,
fans que le vent dont elle eft remplie , puifle Sortir
par le trou par oii le fil de fer paile. Foyei lafig. 5.
Le n°. i. représente les dirférentes parties dont
une bourfette eft compofée. A eft un petit morceau
d'ofier d'une ligne ou deux , plus long que la planche
de la laye n'a d'épaifleur. d e eft un hl de fer enfilé
dans l'ofier. A l'extrémité d , on fait un anneau avec
les pincettes rondes. B eft un morceau de peau d'a-
gneau fort délié. Ceft un autre petit morceau d'o-
ïier d'une ligne & demie ou deux de long , que l'on
enfile par-deffus la peau d'agneau. On met de la colle
aux bouts des morceaux d'olier qui touchent la peau.
On coupe enfuite le fil de fer e, enforte qu'il n'en
relie que pour faire un anneau e. N°. 2. & n°. 3.
lorlque la bourfette eft ainfi préparée , on perce des
trous dans la planche de deflbus de la laye : ces trous
doivent être Seulement un peu plus grands que les
morceaux d'olier n'ont de grolTeur , afin qu'ils puil-
fent y paffer librement. Du côté de l'intérieur de la
laye , on élargit les trous en les bridant avec un fer
chaud : ce fer doit avoir une tête hémifphérique ,
pour former comme un baffin concave. Lorlque les
trous Sont ainlï préparés , on paSTe le grand morceau
d'ofier dedans , & on colle les bords de la peau fur
les bords évafés du trou , comme on voit au n°. 3.
La colle dont on le fort eft la colle-forte ordinaire,
avec laquelle on colle le bois. Pour faire prêter la
peau à la même forme que les trous des iourfittes , on
le fort d'un morceau de bois arrondi par le bout,
comme le fer à brider dont on a parlé ci -devant,
avec lequel en appuyant fur la peau que l'on vient
de coller, on lui fait prendre la forme des trous. La
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peau prête facilement , fur-tout lorfqu'eîle n'a pas
été étirée , c'eft- à-dire autant étendue qu'elle le peut
être avant de l'employer à cet ulage.
Cette opération faite , la bourfette eft entièrement
achevée. On l'aftemble enluite avec la Soupape/-,
fig. 6. par le moyen d'une S e/qui prend d'un côté
dans l'anneau de la Soupape , 6c de l'autre dans l'an-
neau Supérieur de la bourfette , dont l'anneau inSérieur
reçoit la targette, appellée targette du Jommier.
BOURSIER , S. m. ouvrier 6c marchand tout à la
fois , qui fait & vend des bourfes à cheveux , toutes
fortes d'ouvrases à l'ulage des chaffeurs & des guer-
ners, pour mettre leurs munitions ; tels que font gi-
becière , cartouche , giberne , &c. toutes fortes de
lacs ou étuis à livre , à flacon , calote , parapluie ,
parafol, &c.
La communauté des Bourfiers eft gouvernée par
trois jurés , dont le plus ancien lbrt de charge tous
les ans , pour faire place à un autre qui eft élu le 1 1
d'Août , enlorte que chaque juré exerce fa charge
deux ans de faite.
Ce font ces jurés qui expédient les lettres d'ap-
prentilîage & de maitrife , qui donnent le chef-d'œu-
vre , 6c tont leurs vilites tous les trois mois , comme
il elt porté parles ftatuts.
L'apprenti ne peut être oblige pour moins de qua-
tre ans , 6c chaque maître n'en peut avoir qu'un à la
tois : il peut cependant en prendre un fécond après
trois ans 6c demi d'apprentiiTage du premier.
L'apprenti lorti d apprentillage , doit Saire encore
trois ans de compagnonage chez les maîtres. Tout
ai'pirant à la maitriiê eft tenu au chef-d'œuvre, à
moins qu'il ne toit fils de maître.
L'apprenti étranger doit, pour parvenir à la mai-
trife , lervir pendant cinq ans , trois chez le même
maître , & les deux autres où il lui plaît.
Le chef- d'œuvre confifte en cinq pièces ; Savoir,
une bourfe ronde à quarre de cuir ; une autre de ve-
lours , brodée en or & en argent , avec les crépines
6c boutons de même ; une gibecière de maroquin à
fer , garnie de Ion reffort , avec des courans 6c bou-
tons de cuir; une autre aulîi de maroquin à fer cam-
bré , pareillement garnie de fon refibrt ; enfin un ma-
roquin à l'ulage des hommes , c'eft-à-dire un Sac de
maroquin dont les hommes le fervent pour mettre
fous les genoux.
Les veuves peuvent tenir boutique , & jouir des
autres privilèges de maîtrife , excepté du droit de
faire des apprentis qu'elles n'ont point , pouvant
toutefois continuer celui qui auroit commencé Ion
tems du vivant de leur mari.
Les maîtres ne peuvent aller au-devant des mar-
chandises qu'au-delà de vingt lieues de Paris.
Les patrons de la communauté font S. Brice &C
Notre-Dame de la Fontaine.
BOUS ARDS , f. m. ( Vénerie.) ce font des fientes de
cerf qui font molles comme boule de vache , dont elles
ont pris ce nom, & qu'on nomme autrement fumées.
BOUSE , en terme de Blajbn , le dit d'une efpece
de chanteplure avec laquelle on puife l'eau en An-
gleterre. C'eft une pièce dont quelques feigneurs
ont chargé l'écu de leurs armoiries. ( V)
BOUSIN , f. m. terme de rivière ; c'eft le tendre du
lit d'une pierre , qu'on ne doit point employer en
maçonnerie.
BOUSONVILLE, (Ge'og.) petite ville avec une
abbaye confidérable fur la Nied , à huit lieues de
Metz.
BOUSSAC , ( Gcog. ) petite ville de France dans
leBerry.
BOUSSEVILLER ou BOUXVILLER , (Géog.)
petite ville de France en Alface, avec un château,
aux confins de la Lorraine.
BOUSSOLE , i\ f, infiniment de Marin* , qu'on
BOU
appelle auffi compas de mer , nécefTaire aux pilotes
pour diriger la route de leur vaiffean. Sa propriété
lie fe tourner toujours vers les pôles du monde , en
t'ait le mérite , & la rend précieufe aux navigateurs.
On en attribue l'invention à Flavio de Gioia , Na-
politain , qui vivoit dans le xm. ficelé : néanmoins
-on voit par les ouvrages de Guyot de Provins , vieux
poète François du douzième liecle , cpi'on connoif-
loit déjà la boujfole. Ce poète parle expreftement de
l'ufage de l'aimant pour la navigation.
* Les anciens qui ne connoifïbient point la boufole ,
étoïent obligés de naviger le long des côtes ; & leur
navigation étoit par là très -imparfaite. On prétend
pourtant que des Phéniciens, envoyés par Néc'nao
roi d'Egypte , firent autrefois le tour de l'Afrique , en
partant de la mer Rouge ; & qu'ils furent trois ans à
ce voyage : mais ce fait eft-il bien vrai ? Les anciens ,
dit l'illuftre auteur de Ycfpric des Lois , pourraient
avoir fait des voyages de mer aflez longs , fans le
jfecours de la boujjole: par exemple , fi un pilote d ;ns
quelque voyage particulier avoit vu toutes les nuits
l'étoile polaire , ou le lever & le coucher du ioleil ,
cela auroit fuppléé à la boujfole : mais c'eft-là un cas
particulier & fortuit.
* Les François prétendent que fi l'on met par tout
une fleur-de-iis pour marquer le nord, foir dans le
carton mobile dont les mariniers chargent l'aiguille ,
foit dans la rofe des vents qu'on attache fous le pi-
vot de l'aiguille , au fond des houjfoiles fêdent-aires ,
c'eft parce que toutes les nations ont copié les pre-
mières boufoles . qui font forties des mains d'un ou-
vrier François. Les Anglois s'attribuent , fincn la dé-
couverte même , au moins la gloire de l'avoir per-
fectionnée par la façon de fufpendre la boîte où eft
l'aiguille aimantée. Ils difent , en leur faveur, que
tous les peuples ont reçu d'eux les noms que porte
la boujfole, en recevant d'eux la boujjble même ame-
née à une forme commode ; qu'on la nomme compas
de mer , des deux mots Anglois marinas compafs ; &
que de leur mot boxel, petite boîte , les Italiens ont
fait leur bojjbla , comme d'Alexandre ils font Alejjan-
dro. (Les Italiens difent bojjblo au mafculin , fuivant
le dictionnaire de Trévoux. ) Mais la vérité eft que le
mot boujfole vient du Latin buxus , d'où l'on a fait bu-
xo/us , buxola, bujfola , & enfin boujjble. Les Efpagnols
& les Portugais difent bruxula , qui iemble venir de
bruxa , forciere. Il y a apparence que c'eft une cor-
ruption de bujfola. Quant au nom de mariners com-
paj's , les François pourroient également prétendre
que les Anglois l'ont pris d'eux , en traduifant le nom
François , compas de mer.
* Il ne tient pas à d'autres qu'on n'en fa fie honneur
aux Chinois. Mais comme encore aujourd'hui l'on
n'employé l'aiguille aimantée à la Chine qu'en la
faifant nager fur un fupport de liège , comme on fai-
foit autrefois en Europe , on peut croire que Marco
Paolo ,ou d'autres Vénitiens, qui alloient aux Indes
& à la Chine par la mer Rouge , ont fait connoitre
cette expérience importante , dont ditl'ércns pilotes
ont énfuite perfectionné l'ufage parmi nous.
* La véritable caufe de cette difpute , c'eft qu'il en
eft de l'invention de la boujfole, comme de celle des
Moulins, de l'Horloge, & de l'Imprimerie. Plulieurs
perfonnes y ont eu part. Ces choies n'ont été décou-
vertes qiié par parties, & amenées peu-à-peu à une
plus grande perfection. De tout tems on a connu la
propriété qu'a l'aimant d'attirer le fer. Mais aucun
ancien , ni même aucun auteur antérieur au com-
mencement du douzième fiecle , n'a fçû que l'ai-
mant fufpendu , ou nageant fur l'eau par le moyen
d'un liège , tourne toujours un de les côtés , &C tou-
jours le même côté vers le nord. Celui qui fit le pre-
mier cette remarque, en demeura là : il ne comprit
ni l'importance , m l'ufage de ibn admirable décou-
BOU
375
verte. Les curieux , en réitérant l'expérience , en vin-
rent jufqu'à coucher une aiguille aimantée fur deux
bnns de paille pofés fur l'eau , & à remarquer que
cette aiguille tournoit invariablement la pointe vers
le nord. Ils prenoient la route de la grande décou-
verte : mais ce n'étoit pas encore là la boujjble. Le
premier ufage que l'on fit de cette découverte , fut
d]en impofer aux fimples par des apparences de ma-
gie , en exécutant divers petits jeux phyfiques , éton-
nans pour ceux qui n'avoient pas la clé. Des efprits
plus iérieux appliquèrent enfin cette découverte
aux befoins de la navigation ; & Guyot de Provins j
dont nous avons parle , qui fe trouva à la cour de
l'empereur Frédéric à Mayence en 1181, nous ap-
prend , dans le roman de la Rofe , que nos pilotes
François faifoient ufage d'une aiguille aimantée ou
frottée à une pierre d'aimant , qu'ils nommoient la
marinette, & qui régloit les mariniers dans les tems
nébuleux.
I celle étoile ne fe mv.it,
Un art ) ont qui mentir ne puet^
Par vertu de la marinette ,
Une pierre laide , noirette ,
Ou li fer volentiersfe joint , &c.
* Bientôt après , au lieu d'étendre les aiguilles corn.'
me on iaifoit , fur de la paille ou fur du liège , à la fur-
face de l'eau , que le mouvement du vaifleau tour-
mentoit trop , un ouvrier intelligent s'avùa de fuf-
pendre fur un pivot ou fur une pointe immobile , le
milieu d'une aiguille aimantée , afin que fe balançant
en liberté , elle fuivît la tendance qui la ramené vers
le pôle. Un autre enfin , dans le xiv. fiecle , conçut
le deflein de charger cette aiguille d'une petit cercle
de carton fort léger , où il avoit tracé les quatre points
cardinaux , accompagnés des traits des principaux
vents ; le tout divilé par les 360 degrés de l'horifon»
Cette petite machine légèrement fulpendue dans une
boîte, qui étoit fulpendue elle-même , à -peu -près
comme la lampe des mariniers, répondit parfaite-
ment aux efpérances de l'inventeur. M. Former.
La boifjole , PI. de navigation , flg. iz. eft compo-
fée d'une aiguille ou lofange , ordinairement faite
avec une lame d'acier trempée & aimantée fur l'ai-
mant le plus vigoureux : cette aiguille eft fixée à
une rofe de carton ou de talc , fur laquelle on a tra-
cé un cercle divifé en trente-deux parties égales ; la-
voir d'abord en quatre par deux diamètres qui fe
coupent à angles droits , & qui marquent les quatre
points cardinaux de l'horifon , le nord, le fud ,-Teft f
& l'oueft ; chacun de ces quarts de cercle eft divifé
en deux , ce qui conftituc avec les précedensles huit
rumbs de vent de la boujfole : chaque partie eft enco-
re diviléec\: l'ubdivike en deux, pour avoir les huit
demi-rumbs & les feize quarts. On peut voir fur la fi-
gure ces trente-deux airs , avec leurs noms ufités dans
les mers du Levant & du Ponent.
On délîgne ordinairement le rumb du nord par
une fleur de lis , & quelquefois celui de Feft par une
croix ; les autres par les premières lettres de leurs
noms : chacun de ces airs de vent ou rumbs eft in-
dique par une des pointes de l'étoile tracée au centre
de la rofe. f'roye^ la figure.
Il y a un autre cercle concentrique à celui de la
rofe , & qui eft ùxc à la boite : il eft divifé en 360
degrés , & fert à mefurer les angles ec les écarts de
la boujfole : le centre de la rofe qui eft evidé , eft re-
couvert d'un petit cône creux de cuivre ou de quel-
qu'autre matière dure qui fert de chape, au moyen
de laquelle l'aiguille peut être pofee fur un pivot
bien pointu & bien poli, & s'y mouvoir avec liber-
té. On fufpend le tout à la manière de la lampe de
Cardan , par le moyen de deux anneaux ou cercles
concentriques , chacun mobiles fur deux pivots aux
37<5
B O U
extrémités des deux diamètres dont les directions fe
coupent à angles droits , afin que la houjfole puiffe
toujours conierver la fituation horizontale , malgré
les roulis du vaiffeau. Enfin on l'enferme dans une
boîte quarrée couverte d'une glace , & on la place
près du gouvernail dans une plus grande boîte ou ar-
moire qiîarrée fans fer , que les marins nomment ha-
bitacle , laquelle eft placée à l'arriére du vaiffeau fur
le pont, & éclairée pendant la nuit d'une lampe, afin
que le timonier, c'eft-à-dire , un matelot intelligent
qui tient le gouvernail , & qui dans les vaifîeaux de
roi eft relevé de deux heures en deux heures , puifle
avoir toujours la boujjok fous les yeux, & diriger la
route du vaiffeau fuivant le rumb qui lui eft prefent
par le pilote.
Comme la rofe de la houjfole eft mobile fur fa cha-
pe , le timonier a foin de gouverner enforte que la
pointe de la rofe qui indique le rumb ou air du vent
de la route actuelle du vaiffeau, foit dirigée parallè-
lement à la quille ; ce que la polition de la boîte de
la houjfole, parallèlement aux parois de l'habitacle,
indique fuffifamment. Enfin pour ne laiffer aucune
équivoque , on a coutume de marquer d'une croix
l'endroit de la boîte qui regarde la proue.
Les capitaines de vaiffeau, les officiers & les pilo-
tes attentifs , ont ordinairement une houjfole un peu
différemment conftruite fufpendue au plancher de
leur chambre, afin de pouvoir, lors même qu'ils ne
font pas fur le pont , favoir à toute heure où le navi-
re a le cap , c'eft-à-dire , quelle route il fait actuel-
lement ( dédu&ion faite de la dérive ) : cette fufpen-
fion exige moins de précautions que la précédente :
mais en ce cas il faut obferver que l'eft ioit à la gau-
che du nord , & l'oueft à fa droite ; en un mot que
tous les points foient dans une fituation inverfe à l'é-
gard de la houjfole renverfée , quoique toujours dans
la même pofition à l'égard du fpeclateur ou à l'égard
du vaiffeau.
Pour prévenir les accidens que les frottemens ou
quelqu'irrégularité phyfique pourroient cauleràune
boujjok fi elle étoit feule , il y en a toujours deux
dans l'habitacle , & elles font féparées par une cloi-
fon. Toutes deux font expofées à la vue du timonier.
Maintenant voici la manière de fe fervir de cet
infiniment pour diriger la route du navire. On re-
connoît fur une carte marine réduite par quel rumb
le vaiffeau doit tenir fa route pour aller au lieu pro-
pofé , & on tourne le gouvernail jufqu'à ce que le
rumb déterminé foit vis-à-vis de la croix marquée
fur la boîte ; & le vaiffeau faifant voile eft dans fa
véritable route : par exemple , fi on part de l'île
d'Oùeffant à l'occident de Breft , & qu'on veuille al-
ler au cap Finiftere en Galice , on commencera par
chercher dans une carte marine réduite quelle doit
être la direction de la route , & on trouve qu'on la
doit faire au fud-oueft quart au fud : tournant donc
le gouvernail jufqu'à ce que le rumb fud-oueft quart
au fud réponde exactement à la petite croix marquée
fur la boîte de la houjfole , le vaiffeau fe trouvera
dans fa véritable route.
Tel eft le principal ufage de la boujjok : il y en a
plufieurs autres qui tendent à déterminer les latitu-
des , à fixer les points de l'horifon où les aflres fe lè-
vent & fe couchent ; c'eft-à-dire , à déterminer les
amplitudes orientales ou occidentales : mais ces ufa-
ges ont plus de rapport à l'Aftronomie & à la Navi-
gation , qu'à l'ufage principal de la boujjble.
La déclinaifon de l'aimant dont on a parlé à l'ar-
ticle Aiguille , qui confifte en ce que cette aiguille
ne fe dirige prefque jamais exactement vers les pôles
du monde , mais qu'elle s'en écarte ordinairement
tantôt vers l'eft tantôt vers l'oueft ; cette déclinai-
fon , dis-je , qui varie dans les différens endroits de
la terre , & dans les mêmes en différens tems , oblige
B O U
les marins à faire continuellement des corrections
aux opérations qu'ils font avec la boujfok. On verra
à l'article Variation les précautions qu'ils appor-
tent pour reconnoître & déterminer la quantité de
cette variation , & les moyens dont ils fe fervent
pour reclifier leur route.
L'avantage que les gens de mer retirent de la houj-
fole qui les guide au travers des mers les plus vaftes,
& les fait arriver aux extrémités de la terre les plus
reculées , a porté les Phyficiens à imaginer différens
moyens pour la perfectionner. Tous conviennent que
la boujfok doit être la mieux aimantée qu'il eft poffi-
ble , tres-légere dans fa confti udlion , & fur-tout par-
faitement mobile fur ion pivot. Nous avons enfeigné
dans l'article Aiguille la meilleure manière dé
conftruire & d'aimanter les aiguilles : en voici une
autre qui a aufli fes avantages, & même qui nous pa-
roît préférable à bien des égards. Elle eft fondée fur
ce principe démontré par l'expérience , que le fer &
l'acier ne reçoivent qu'une quantité déterminée de
vertu magnétique , & qu'il y a une proportion de lon-
gueur , de largeur & d'épaiffeur , pour que ces mé-
taux puiffent recevoir la plus grande quantité qu'il eft
pofîible qu'ils retiennent; c'eft pourquoi M.Mitchell,
auteur de cette nouvelle méthode , prétend qu'il eft
très-avantageux de faire les boujjoks avec des lames
d'acier parallélépipèdes & bien ti empées, plutôt que
de fil d'acier ou de lames de reffort dont on fe fert
ordinairement. En effet , on éprouve que non-feule-
ment ces lames prennent beaucoup plus de vertu ma-
gnétique , qu'elles la confervent plus long-tems dans
le même degré, & qu'elles la perdent beaucoup plus
difficilement ; mais encore qu'elles ont leurs pôles
plus près des extrémités ; ce qui augmente confidé-
rablement leur vivacité , & l'exaclitude de l'obferva-
tion. La dimenfion qu'il eftime la meilleure, eft celle
à peu près qu'il donne aux lames dont il compofe fes
aimans artificiels ; c'eft-à-dire , fix pouces de lon-
gueur , fix lignes de largeur , & environ un tiers de
ligne d'épaiffeur: elles doivent être percées dans le
milieu, pour laiffer paffer le pivot fur lequel elles fe-1
ront leur révolution.
On a obfervé que la rouille détruit confidérable-
ment la vertu magnétique , c'eft pourquoi on doit
tâcher d'en préferver avec foin les aiguilles des bouf-
foks : les boîtes vitrées dans lefquelles on les renfer-
me ordinairement font infuffifantes , & l'air de la mer
agit toujours fur elles. On les garantira de cet acci-
dent en les enduilant d'une couche fort mince d'hui-
le de lin cuite : cet enduit n'apporte aucun obftacle
aux effets de l'aimant , &c les boujfoks s'aimantent au-
travers avec autant de facilité que fi elles étoient
bien polies. Il y a même lieu de croire par quelques
expériences , que les boujjoks peintes confervent
mieux que les autres leur grande force magnétique ;
car on remarque dans la plupart des ferremens peints
à l'huile , qu'ils font plus lùfceptibles de magnétif-
me que les autres fers , en même tems qu'ils devien-
nent plus caffans & plus durs ; & c'eft peut-être par"
cette raifon qu'ils s'aimantent mieux.
On aimantera ces lames en les pofant fur le milieu
d'une barre de fer affez longue , & en paffant huit à
dix fois d'un bout à l'autre fix aimans artificiels , dont
trois ont leurs pôles nord tournés en haut , & conti-
gus aux pôles du fud des trois autres lames ; enforte
que les pôles du fud des premiers aimans foient un
peu écartés des pôles du nord des trois autres lames,
& tournés vers l'extrémité de l'aiguille qu'on veut
faire diriger vers le nord, Voye%_ l'article Aimant.
Comme il efl difficile de bien déterminer dans des
aiguilles ainfi larges & plates fi leur axe , c'eft-à-dire ,
la ligne qui joint les deux pôles , paffe exactement
par les points de iùfpenfion , & que d'un autre côté
en les faifant pointues par les extrémités , on fait ren-
trer
B O U
BOU
trer leurs pôles en-dedans , & on les rend un peu
moins aimantées qu'elles ne le pourroient être ; voi-
ci un moyen de remédier à ces inconvéniens. On
mettra fur un pivot une des meilleures aiguilles ai-
mantées, conftruite fuivant la méthode ordinaire, &
pointue par fes extrémités, & on obfervera avec foin
de combien fon pôle nord décline de quelque point
fixe qu'on choifira à volonté : enfuite on ajuftera fur
le pivot la nouvelle aiguille, appliquée fur la rofe de
carton de telle forte que la fleur de lis décline du point
obfervé,danslemême fens & de la même quantité que
faifoit le pôle du nord de l'aiguille mince & pointue :
on fixera la rofe dans cette fituation , 6c la bouffait
fera centrée.
Il vaudra mieux faire cette opération fur un vaif-
feau en cette manière : on tirera une ligne droite de
la poupe à la proue, 6c on placera les deux boujfoles
fur cette ligne , à une telle diftance &c en telle forte
qu'elles ne puiffent ni agir l'une fur l'autre , ni être
détournées par aucun fer qui foit dans le voifinage :
on ajuftera la rofe comme on vient de dire , de ma-
nière que la fleur de lis fa fie avec la ligne d'épreuve,
le même angle que fait le pôle du nord de l'autre ai-
guille."
On ne fauroit difïïmuler que le poids de ces nou-
velles aiguilles ne fafîê augmenter leur frottement ,
fur-tout fi le pivot & la chape font de cuivre ; car il
n'eft guère poflîble de fe fervir à la merde pivot d'a-
cier , qui feroit bien-tôt rouillé. Mais on pourra re-
médier à cet inconvénient en employant un pivot
d'or, allié de quelque métal pour l'endurcir, 6c en
attachant aux barres , des chapes garnies d'un petit
morceau de verre concave bien poli ; ce qui vaut en-
core mieux que l'agate dont on fe fert quelquefois.
Ce petit changement , qui n'augmente pas confidé-
rablement le prix des boujjbles, donne à cesinftrumens
plus d'exactitude qu'on ne peut efpérer dans les bouj-
foles ordinaires , fur-tout lorfque le tems eft calme ,
& que les vagues n'agitent pas le vaiffeau : car alors
il faut nécefTairement frapper les boîtes pour vaincre
les frottemens , fi l'on veut que la boujfole marque la
route avec exactitude ; au lieu que les nouvelles
boujfoles fe meuvent très-librement fans ce fecours.
On a conftruit fur ces principes une aiguille de
boujfole qui avoit trente-deux pouces de longueur ,
& qui pefoit un peu plus de huit onces. Elle a été mi-
fe en mouvement avec une force capable de lui faire
faire vingt-cinq tours par minute : cette force a été
fufhTante pour lui faire continuer fes révolutions pen-
dant l'efpace de foixante-dix ou quatre-vingts minu-
tes,©^ elle a encore fait des vibrations pendant quinze
autres minutes,quoiqu'elle ne fût que fur un pivot de
cuivre qui a été bientôt émouffé par fon poids ; au lieu
qu'elle a fait à peine quelques vibrations lorfqu'elle
a été fufpcndue par une chape de cuivre fur un pivot
d'acier bien pointu & bien poli.
Les avantages de la boujfole ne fc bornent pas à
ceux qu'en peuvent retirer les navigateurs ; cet inf-
iniment eft auiîi fort utile fur la terre pour faire une
infinité d'opérations : on y fait feulement différens
changemens, pour le rendre propre aux divers ufa-
ges auxquels on le deftine. Son application la plus
commune eft à l'équerre des arpenteurs, qui ne con-
iiftoit anciennement que dans un cercle de cuivre di-
vifé en quatre parties égales par deux diamètres qui
fe coupent à angles droits. Il y a une pinnule bien
perpendiculaire au plan du cercle , à l'extrémité de
chacun de ces diamètres , afin de pouvoir pointer
fur différens objets. ^oj^Equerre.
Dans les nouvelles équerres d'arpenteur on a ajou-
té au centre du cercle un pivot , fur lequel eft fufpen-
due une aiguille aimantée , & renfermée dans une
boîte couverte d'une glace. L'aiguille parcourt dans
jfes différens mouvemens la circonférence d'un cercle
Tome II,
377
divifé en trois cens foixante degrés ; & le o de la
graduation marqué d'une N(nord) ou d'une fleur de
lis , eft directement au- deftbus d'une des pinnules,
enforte que les autres points cardinaux fe trouvent
auffi fous les autres pinnules : toute la machine eft
montée fur un pivot , ou mieux encore fur un genou,
fur lequel on peut la tourner librement en tout fens.
On fe fert aufti quelquefois de boujfoles enfermées
dans des boîtes de cuivre ou de bois ( ces dernières
font plus fûres ) exactement quarrées , & dont les
côtés font bien parallèles aux diamètres qui parlent
par les points cardinaux.
Celles-ci, par exemple, font très-commodes pour
trouver la déclinaifon d'un mur ou d'un édifice, c'eft-
à-dire, l'angle qu'ils forment avec le méridien du lieu :
pour cet effet on applique à une règle pofée horifon-
talement le long du mur le côté de la boîte marqué
fud ou nord, fuivant que le mur regarde à peu près
le feptentrion ou le midi ; enfuite on oblerve quel
angle fait la pointe de l'aiguille , ou fon pôle boréal,
avec le méridien tracé fur la boujfole , & qui eft per-
pendiculaire à la règle. Cet angle , réduction faite de
la déclinaifon de l'aimant , exprime en degrés la vé-
ritable déclinaifon du mur , laquelle eft orientale ou
occidentale, fuivant que l'aiguille s'écarte à l'eftou
à l'oueft du méridien de la boujfole , dans le cas où
ce mur eft tourné du côté du midi ; & réciproque-
ment , lorlqu'il regarde le feptentrion.
Ceux qui conftruifent des cadrans folaires verti-
caux, ont fouvent recours à cette méthode pour trou-
ver la déclinaifon du plan fur lequel ils veulent tra-
cer , & découvrir jufqu'à quelle heure il peut être
éclairé ; ou bien en connoiflant la déclinaifon de l'ai-
guille aimantée dans le lieu &c au tems de l'opéra-
tion , ils l'employent pour tracer tout d'un coup une
ligne méridienne , & orienter un cadran horifontal :
il fuffit pour cet effet de poler la boujfole fur un plan
bien parallèle à Phorifon , &c de faire enforte en tour-
nant peu à peu la boîte , que le pôle boréal de l'ai-
guille s'arrête du côté de l'oueft ou de l'eft , fur un
point qui faffe avec celui de O un angle égal à celui
de la déclinaifon de l'aimant ( par exemple , de 17e*
io' N.O. pour le 19 O&. 1750a Paris) : & en appli-
quant une règle à l'eft ou à l'oueft de la boîte , ils tra-
cent une ligne droite qui eft la méridienne. Enfin
cette méthode eft encore très-utile pour orienter des
édifices , des orangeries , des ierres chaudes , pour
donner une expofition favorable aux étuves , aux
greniers , ou aux glacières.
La Géométrie pratique tire de grands avantages
de la boujjole , pour lever d'une manière expéditive
des angles fur le terrein, faire le plan d'une rorêt,
d'un étang, d'un marais inacceffibie , ou pour déter-
miner le cours d'une rivière.
Par exemple, pour lever les angles A D B,B D C,
( PI. d'Arpentage ,fig. 11. ) on commencera par ap-
pliquer bien exactement un des côtés de la boîte de
la boujfole fur la ligne A D , en forte que la ligne qui
paffe par les pinnules du nord & du fud fe termine
aux points A & D ; eniuite on oblervera l'angle que
fera le pôle boi cal de l'aiguille avec cette ligne : on
appliquera aulîi la boujfole fur la ligne D B , & on ob-
fervera de même l'angle que fera l'aiguille avec cette
ligne. Maintenant la différence de ces deux angles
fera la valeur de l'angle A D B , fi l'aiguille s'écarte
dans le même fens de la méridienne de la boujjole ;
ou , ce qui eft la même chofe, des lignes AD , DBy
fur lefquelles elle eft pofée. Mais fi l'aiguille s'écarte
de la méridienne en fens contraire, comme il arrive
en la pofant fur les lignes BD, DC, la Comme des
angles obfervés fera la valeur de l'angle cherché.
On opérera plus exactement fi au côté même de
la boîte de la boujfole eft appliqué un parallélépipè-
de creux , qui porte deux pinnules par lefquelles on
Bbb
378
B O U
B O U
vife à un objet éloigné : la ligne de mire des deux pin-
nules doit être parallèle au diamètre de la boujfole
d'où l'on commence à compter les divifions. Ce pa-
rallélépipède équivalent à une règle à pinnule donne
encore un autre avantage : il doit être mobile fur un
clou ou pivot, en loi te qu'il puifle s'incliner à lho-
rifon fans fortir du même plan vertical ; ce qui eft
très-commode , & même néceflaire quand on veut
pointer à un objet élevé ou abaiiïe au-deiîous de l'ho-
rifon , & reconnoître fa direction ou ion gifement
par rapport aux régions du monde ; ce que les ma-
rins nomment relever un objet , parce qu'ils font cette
opération avec une boujjole ordinaire placée lur le
pont du vaifleau , en le mettant dans l'ahgnement
du centre de la boujjole & de l'objet dont ils veulent
reconnoître le gilement , & qu'ils étendent le bras
vers le -centre de la boujfole , & le relèvent enliute
perpendiculairement julqu'à la rencontre du rocher,
du cap , du vaifleau, ou d'un point quelconque: c'eft
cette opération qu'ils dt lignent en dilant : avons re-
levé tel cap à tel air de vent. Dans la boujfole à pinnu-
les dont nous parlons , & qui eft deftinée pour la ter-
re , on dirige la pinnule parallèle au côie de la boîte
de la boujfole fur l'objet qu'on veut relever , ou dont
on veut connoître le gilement ; & cet objet étant or-
dinairement éloigné , c'eft la même choie que fi la
règle à pinnule étoit placée lur le centre même de la
boujfole , quoique cette règle en foit éloignée d'envi-
ron trois pouces , qui eft au plus la demi-largeur or-
dinaire de cet inftiument , tant pour le rendre plus
portatif, que parce que l'expérience a fait voir que
c'eft la proportion la plus convenable ; les aiguilles
plus petites étant trop vives & trop long-tems à fe
fixer, & les plus grandes trop parefteufes & trop peu
libres fur leur pivot.
Pour lever le plan d'une forêt , d'un étang ou d'un
marais , on commencera par réduire leur circuit en
autant de lignes droites qu'il lera convenable, en met-
tant des piquets à toutes les courbures un peu confi-
dérables : on mefurera tous les côtés de ce polygo-
ne, & dirigeant fur chaque côté fuccelîîvement les
pinnulesnord & fud de l'équerre , onobiérvera l'an-
gle que forme le pôle boréal de la boujfole avec ce
côté du polygone , en remarquant fi l'aiguille s'en
écarte à droite ou à gauche : ces obfervations déter-
mineront les angles que ces côtés forment entr'eux ,
en ufant des mêmes précautions qu'on vient d'indi-
quer pour lever les angles fur le terrein. Connoif-
iànt donc les angles Si les côtés du polygone, il fera
facile d'en tracer le plan ; il ne s'agira plus que de
l'orienter; ce qu'on exécutera fort aifément , puis-
qu'on connoît tous les angles que forme la boujjole
avec chacun des côtés du plan : on en choilira donc
un à volonté , auquel on tracera une parallèle ;
en quelqu'endroit à l'écart on fera avec cette paral-
lèle, & dans le même lens , un angle égal à celui que
faifoit fur le terrein l'aiguille de la boujjole avec ce
côté correfpondant ; & connoiilant cet angle par la
déclinaifon de l'aimant , qu'on connoîtra d'ailleurs ,
la ligne qui formera cet angle corrigé avec la paral-
lèle j fera la méridienne du plan.
Soit A B CD E F (fig. 12. ) une rivière dont on
veuille déterminer le cours : on commencera par
planter des piquets à tous lés points principaux de
flexion , afin de réduire fa courbure en autant de
petites lignes droites AB , BC , CD , D E , E F,
qu'il fera néceflaire ; on mefurera toutes ces liones
droites, & on déterminera les angles qu'elles font en-
tr'elîes , en prenant d'abord celui que chacune d'elles
fait avec l'aiguille aimantée : ces opérations donne-
ront le plan de la rivière & de les détours , & on l'o-
rientera par la méthode qu'on vient d'indiquer tout
à l'heure.
On le lert aufli quelquefois pour orienter un plan ,
d'une autre efpece de boujfole que quelques-uns nom-
ment un déclinatoire : celle-ci ne diffère des autres
qu'en ce que fa boîte , longue de 6 ou 7 pouces fui-
vant le plus ou le moins de longueur de l'aiguille ,
n'a qu'environ 2 pouces de large , ce qui fiiffit pour
marquer à droite & à gauche de la pointe de l'ai-
guille un nombre de degrés, au-moins égal à celui
de la déclinaifon de l'aimant dans le lieu de l'obfer-
vation. Alors fi l'on fait répondre la pointe de l'ai-
guille fur la quantité de déclinaifon , qu'on fuppofe
connue d'ailleurs , l'axe de la boîte ou fon côté qui
lui eft parallèle fe trouvera dans la direction du mé-
ridien , & pourra fervir à tracer fur le terrein une li-
gne nord & fud, à laquelle on rapportera toutes les
autres.
Il faut bien remarquer que toutes les pratiques pré-
cédentes , où l'on opère avec la boujjole , ne peuvent
donner qu'une méridienne approchée , & dont on
ne peut au plus répondre qu'à un demi degré près à
caule de la petitefle de l'inftrument & des petites va-
riations à quoi l'aiguille aimantée eft elle-même lu-
jette. Si l'on avoit beloin d'une plus grande préci-
fion, il faudrait fe fervir des moyens que l'Aftrono-
mie foui nit pour tracer une méridienne ou pour trou-
ver l'azimuthdu foleil. Foyeç Méridienne & Azi-
MUTH.
Il eft plus avantageux de fe fervir , pour les opé-
rations que nous venons de décrire , des grandes bouf-
Joles faites avec des lames d'acier trempé & forte-
ment aimantées , que des petites aiguilles ordinaires :
celles-ci font trop facilement dérangées par les corps
magnétiques ou ferrugineux, qui le trouvent répan-
dus dans les différens endroits où l'on opère : cette
précaution eft fur-tout néceflaire dans les travaux
qu'on entreprend dans l'intérieur de la terre , où il
le rencontre fouvent des corps qui détourneraient
trop les petites aiguilles. Qu'on veuille , par exem-
ple , déterminer dans une mine de charbon la direc-
tion d'un lieu à un autre , afin de creuler un puits par-
dehors , juftement à l'extrémité d'une galerie ; on
obfervera premièrement dans la mine quel angle fait
le pôle boréal de la boujole , avec la direction de la
galerie , & on fera cette obfervation à l'extrémité
de la galerie qui fe trouve au bas de quelque puits
déjà fait: &c ayant mefuré la longueur, on fera la
même opération en-dehors au haut du puits , & on
mefurera cette longueur dans la ligne qui fait avec
la boujjole le même angle que faifoit avec elle la di-
rection de la galerie, & dans le même lens, ce qui
déterminera le point où il faut faire le nouveau puits.
Mais s'il y a dans le voifinage des corps magnétiques
ou ferrugineux , les petites boujfoles feront prelque
toujours infuffifantes pour cette opération; les gran-
des aiguilles y feront aufli à la vérité un peu fujettes :
mais voici un moyen de reconnoître la préfence de
ces corps magnétiques , ce de remédier à cet incon-
vénient.
On tendra dans le milieu de la galerie & dans fa
direction un cordeau le plus long qu'il lera poflible,
& on fera eniorte qu'il loit bien en ligne droite : on
placera la boujjole à l'extrémité de ce cordeau , de
telle forte que la ligne fiducielle ou le diamètre de la
boujfole , duquel on commence à compter les divi-
fions , loit bien dans la direction de la galerie : on
obfervera li l'aiguille co-incide avec cette ligne, eu
lous quel angle elle s'en écarte Si de quel côté : on
réitérera cette obfervation d'elpace en efpace , en
avançant vers le fond de la galerie. Si elle conferve
toujours la même direction par rapport au cordeau
dans toute la longueur, il lera allez probable que
rien ne dérange l'aiguille de fa direction naturelle ,
du-moim à droite ni à gauche : mais fi fa direction
varie en différens endroits le long du cordeau, le lieu
où elle s'écartera le plus de la direction qu'elle a
BOU
dans le plus grand nombre des points , fera le plus
proche du corps qui la détourne ; c'eft pourquoi on
tirera par ce point une perpendiculaire oppofée au
côté vers lequel l'aiguille paroît le plus détournée ,
& on donnera le plus de longueur qu'on pourra à
cette perpendiculaire : on tirera par dirférens points
de cette perpendiculaire des parallèles au cordeau ,
& on examinera aux points oii ces parallèles cou-
pent la perpendiculaire, fi l'aiguille fait avec les pa-
rallèles le même angle qu'elle raifort avec le cordeau
dans la plupart des points où on n'a pas eu lieu de
foupçonner qu'elle fût détournée : fi elle fait le mê-
me angle , on conclurra qu'on eft hors de la fphere
d'attraâion du corps magnétique , & on connoîtra
de cette manière & par différentes épreuves , la for-
ce &c l'étendue de ces fortes de corps.
On fe fert en mer d'une autre efpece de bouffole
appellée compas de variation , pour reconnoître la dé-
clinaifon de l'aiguille aimantée dans le parage où on
rtavige. Il y en a de différentes fortes ; un entr'au-
tres qui n'exige qu'un feul obfervateur : il eft décrit
dans les Mémoires de l'Académie des Sciences , de l'an-
née iy33. Voye^ Variation & Compas.
Nous devons tout cet article , à l'exception des a-
linea marqués d'une étoile, à M. le Monnier,qui nous
avoit déjà donné , pour le premier volume , les arti-
cles entiers de Y aimant & de Y aiguille aimantée. Voy.
ces articles. Voye{ aujji DÉCLINAISON , MAGNETIS-
ME, AMPLITUDE, AZIMUTH. Les endroits mar-
qués d'une étoile dans cet article font de M. Formey.
BOUSTROPHEDON , ( Hi(l. anc. ) terme ufité
parmi les antiquaires , pour exprimer une manière
d'écrire particulière aux Grecs , fur-tout dans les inf-
criptions. Elle confiftoit en ce que la première ligne
étant écrite de la droite à la gauche , la féconde étoit
écrite de la gauche à la droite , & ainfi de fuite. On
tire l'étymologie de ce mot des filions que les bœufs
font en labourant , parce qu'à la fin de l'un ils repren-
nent l'autre par un demi-cercle , & ainfi alternative-
ment ; de /2où? , bœuf, & ç-popiî , article, couplet , ligne.
M. l'abbé Fourmont , dans le voyage qu'il fit en
Grèce en 1729 par ordre de la cour, recueillit plu-
fieurs infcriptions en boujlrophedon , dont on efpéroit
tirer de grandes lumières fur divers points de l'anti-
quité Greque. (G)
BOUSURE , f. f. (à la Monnoie.) compofition dont
on fe fert pour le blanchiment des efpeces. V. Blan-
chiment. C'eft ce que l'on appelloit dans l'ancien
monnoyage , bouture.
* BOUT , EXTRÉMITÉ , FIN , (Gramm.) termes
relatifs à l'étendue : bout , à l'étendue feulement en
longueur, dont il marque le dernier point,- extrémité,
à l'étendue , f oit en longueur , foit en longueur & lar-
geur , foit en longueur , largeur , & profondeur ; car
on dit Y extrémité d'une ligne, d'une fur face , d'un corps ;
mais extrémité diffère encore de bout , en ce qu'elle
réveille davantage l'idée de dernière limite , foit de
la ligne , foit de la furface , foit du folide. Fin, n'eft
relatif qu'à un tout 011 l'on confidere des parties
comme antérieures & poftérieures dans l'ordre ouïe
tems. Ainfi bout ne fe dit d'une table que quand elle
cft oblongue , & qu'on en veut défigner la partie la
plus éloignée du centre : extrémité , que de l'efpace
de cette table pris tout autour extrêmement voifin
des bords qui la terminent: fin, que d'un livre,
d'une année , d'un récit , d'un concert , &c
Bout-rime , f. m. (Littérature.) ce font des rimes
difpofées par ordre , qu'on donne à un poète pour les
remplir. P~oycr Rime.
L'invention des bouts-rimés cft duc à un poète nom-
mé Dulot , qui vivoit vers l'an 1649. On choifilfoit
pour rimes des mots dont les idées avoient entr'elles
le moins de rapport. Ces rimes bifarres font bien
fouvent celles qui çmbarraffent le moins, & qui four-
TotQe II,
BOU
379
niffent le plus de chofes nouvelles & furprenantes
pour ce ftyle burlefque. Sarrafin a fait un poème
qu'il a intitulé la Défaite des bouts-rimés. Les bouts-
rimés font aujourd'hui abandonnés aux mauvais
poètes.
Les lanterniftes de Touloufe ont trouvé le fecret
de relever de nos jours les bouts-rimés, en en propo-
fant toutes les années , pour être remplis à la gloire
du Roi ; & le fonnet victorieux eft récompenfé par
une médaille d'argent.
Bouts & Joustes , terme de Palais , fynonyme à
tenans & aboutiffans. Voye{ ABOUTISSANT. (H)
Bout DE CORDE, (Marine.) c'eft ainfi qu'on ap-
pelle à la mer une corde de moyenne longueur.
Bouts de corde ; ce font des bouts de corde dont le
prévôt fe fert pour châtier ; & que les gens du quart
ou de l'équipage tiennent auffi pour frapper fur ceux
qui font condamnés à ce châtiment.
Bouts de cable , font des bouts ou morceaux de ca-
bles ufés , rompus , ou trop courts.
Bout de vergue ; c'eft la partie de la vergue qui ex-
cède la largeur de la voile , & qui fert quand on
prend les ris.
Bout de beaupré ; c'eft un matereau qui fait faillie
fur l'étrave , dans les petits bâtimens qui n'ont point
de beaupré.
Bout pour bout. FUer le cable bout pour bout. Voye^
Filer. (Z)
BOUT , ( terme de Lapidaire. ) Voye^ BoUTEROLLE.
Bout , ( terme de Ceinturier ) petite plaque d'argent
que l'on met au bout des boucles d'un baudrier , pour
leur donner plus de grâce. Voye^ Baudrier.
Bout, (en terme de Fourbifj'eur -, ) c'eft une pièce de
cuivre ajuftée au bout du fourreau , & qui en envi-
ronne l'extrémité pour la rendre plus ferme contre
la pointe. Voye{ la lettre a , PI. de Fourbiffeur ,fig. z.
BOUT DE REVERS, (en terme de Fourbiffeur) cft
une partie de la branche , enrichie d'ornemens , qu'on
remarque à l'extrémité qui entre dans le pommeau.
Voye^ Branche & Pommeau, & la Planche du
Cifeleur-Damafquineur avec jon explication.
BOUTS DE QUEUE , ( che^ les Plumaffiers ) ce font
des plumes qu'on tire de la queue de l'autruche.
BOUT DE CLÉ , ( che^ les Serruriers ) c'eft la par-
tie de la tige qui excède le panneton de la clé , &
auquel on pratique ordinaùementun bouton , quand
la clé n'eft pas forée.
BOUT d'or, les Tireurs d"or appellent bout d'or ,
un bâton d'argent doré , & bout d'argent , un gros bâ-
ton d'argent fin , qu'ils pafient par la filière , pour fai-
re des filets d'or & d'argent. Foyer Filif.rf. 6-Filet.
BOUT, (Maréchalerie ) on dit qu'un cheval n'a
point de bout , quand il recommence fouvent des
exercices violens & de longueur fans en être fatigué ,
& avec la même vigueur ; & qu'il eft à bout, lorlqu'il
eft extrêmement fatigué.
BOUTS, f. m. c'eft ainfi que les Cordonniers
appellent des morceaux de cuir fort , attachés fous
les talons des fouliers avec des chevilles de bois ,
foit que les talons forent de cuir ou qu'ils foient de
bois.
* BOUT-À PORT, f. m. (Police) officier for les
ports , dont la fonction eft de mettre ou faire mettre
à port les bateaux qui y arrivent. Le bout-à art eft
contrôleur à l'inlpccîion pour les rangemens des ba-
teaux. On a réuni à cet office celui de débacleur.
BOUTADE, f. f. on donnoit ce nom autrefois à.
des petits ballets , qu'on exécutoit , ou qu'on paroif-
foit exécuter impromptu. Ils étoient composés pour
l'ordinaire de quatre entrées, d'un récit , & d'une en-
trée générale ; c'étoit le grand ballet en raccourci :
liée des fpeclacles anciens <£ nouveaux de f abbé de Pure,
imprimé à Paris en 166 J. Toys; Ballet. (B)
r B b b ij
380
BOU
BOUTAN, ( Géog. ) royaume d'Afie à l'orient de
la Tartarie, fur les confins du Mogol. On y trouve
de la bonne rhubarbe & du muic.
* BOUT ANES, {.{.(Commerce) toiles de coton,
qui fe fabriquent dans l'île de Chypre.
Boutant, adj. fe joint , en Architecture , avec
d'autres mots ; on dit , par exemple , arc-boutant , &
c'eft un arc ou un lbùtien qui fert à porter une
voûte , & qui eft lui-même ibùtenu par quelque gros
mur, ou par quelque gros pilier. Voye{ Arc-bou-
tant , soutien, appui. Ce mot vient du vieux
mot françois bouter.
Un pilier boutant eft une grande chaîne de piliers de
pierre , faite pour fupporter un mur, une terraffe ou
une voûte. (P)
* BOUT ARGUE ou POUT ARGUE, ( Commer-
ce ) mets fort en ufage en Italie & en Provence ; ce
font les œufs du mulet préparés de la manière fui-
vante : on prend tous les œufs de ce poiffon , on les
met dans un plat & on les faupoudre de fel : on les
couvre pendant quatre ou cinq heures afin que le fel
y pénètre , après quoi on les met en prefTe entre
deux planches. On les lave & on les fait lécher au
foleil pendant quinze jours , ou on les fume. On man-
ge la boutargue avec de l'huile & du citron. Il s'en
fait beaucoup à Tunis , en Barbarie , & à Martegue
en Provence.
* Bout-avant , f. m. officier de faline , dont la
fonction eft de veiller à ce que l'empliflage du vaxel
fe faffe félon l'ufage. Voye^ Vaxel & Aide-bout-
avant.
BOUTÉ, adj. ( cheval bouté) eft celui qui a les
jambes droites depuis le genou jufqu'à la couronne ;
ce qui arrive fouvent aux chevaux court-jointés.
Cheval long jointe eft le contraire de bouté. (V)
BOUTÉE , voyei BUTER.
BOUTES , f. f. pi. ( Marine ) ce font de grandes
futailles où l'on met de l'eau douce , que l'on embar-
que pour faire voyage. Les boutes ou tonnes à met-
tre de l'eau , ne font pas fournies par le munitionnai-
re dans les navires de guerre , mais aux dépens du
roi, auffi-bien que les barrils, feilleaux , & lièges pour
les boutes , lefquelles doivent être cerclées de fer.
Boute , Baille, f. f. ( Marine ) fe dit encore
d'une moitié de tonneau en forme de bacquet , dans
laquelle on met le breuvage , qui eft diftribué chaque
jour à l'équipage. ( Z )
BOUTE-FEU , ( LE ) Artillerie ) eft un bâton ou
hampe de bois , garni d'un ferpentin de fer par en
haut , dans lequel fe pane la mèche , qui fert à met-
tre le feu aux pièces de canon & aux mortiers.
Voye^ la fig. du boute-feu , PI. VI. de Fortifie, fig. 6 .
Les boute-feux font de toutes fortes de bois ; ils
font longs de deux à trois pies , gros d'un pouce , &
fendus par une de leurs extrémités pour y parler le
premier bout d'une braffe de mèche , laquelle eft
tournée autour; l'autre bout reparlant fur celle qui
eft tournée , pafié dans la fente du boute-feu, qui
l'empêche de fe détortiller : on peut par ce moyen
allumer les deux bouts de la mèche, qu'on allonge
facilement à mefure qu'elle brûle. Saint-Remy , Mé-
moires d 'Artillerie. ( Q )
Boute-selle, f. m. (Art milit.) fonner le boute-
felle ; c'eft battre le tambour d'une manière particu-
lière, pour que les cavaliers fellent leurs chevaux ,
& qu'ils fe mettent en état de monter à cheval au
premier commandement. ( Q )
BOUTE-DE-LOF, BoUTE-LOF , f. f. ( Mar. ) c'eft
une pièce de bois ronde ou à huit pans , qu'on met
au-devant des vaiffeaux de charge qui n'ont point
d'éperon : elle fert à tenir les armures de miiene.
BOUTE-DEHORS , BoUTE-HORS , f. m. (Marine.)
ce font des pièces de bois longues & rondes , qu'on
.îjoûte par le moyen d'anneaux de fer à chaque bout
BOU
des vergues du grand mât & du mât de mifene , pour
porter des bonnettes en étui quand le vent eft foible
& qu'on veut chaffer fur l'ennemi , ou prendre chaffe
& faire diligence. ( Z )
Boute-dehors, c'eft un petit mât qui fert à la ma-
chine à mater , pour mettre les chouquets & les hu-
nes en place.
Boute-dehors , boute-hors , défenfes ; ce font auffi de
longues perches ou pièces de bois avec des crocs ,
pour empêcher dans un combat l'abordage du brû-
lot , ou pour empêcher dans un mouillage que deux
vaifTeaux, que le vent fait dériver l'un fur l'autre ,
ne s'endommagent. Voye^ Minot. (Z)
Boute-en-train , en terme de haras , eft un che-
val entier dont on fe fert pour mettre les jumens en
chaleur , ou pour découvrir fi elles font en état de fe
laiffer faillir. Il faut qu'un boute-en-train henniffe fou-
vent, (v)
BOUTEILL AGE , f. m. ( Hifi. mod. ) c'eft le droit
fur la vente des vins étrangers , que le bouteiller du
roi d'Angleterre prend , en vertu de fa charge , fur
chaque vaiffeau : ce droit eft de deux chelins par
tonneau.
* BOUTEILLE , f. f. ( Verrerie. ) vaiffeau de gros
verre noirâtre , qui eft prefque le feul en ufage par-
mi nous pour le vin. Les bouteilles fervent aufti à ren-
fermer d'autres matières , foit liquides , foit folides ,
dont on craint l'évaporation ou lèvent. La quantité
de bouteilles qu'on employé parmi nous eft fi confi-
dérable, que nous avons plufieurs verreries occupées
à ce feul ouvrage. Voye^ l'art de faire des bouteilles à
l'article Verrerie.
Bouteille , ( Comm. ) mefure des liquides dont
on fe fert à Amfterdam : elle n'eft point différente du
mingle. Voyei Mingle. ( G )
Bouteilles d'eau , ( Phyfia. ) on appelle ainfi
les petites gouttes rondes d'un fluide quelconque >
qui font remplies d'air & qui fe forment , foit fur la
lurface du fluide par l'addition d'un fluide fembla-
ble , comme quand il pleut ; ou dans fa lubftance ,
par une vive commotion intérieure de les parties.
Voyei Pluie. Les bouteilles ou bulles d'eau font dila-
tables ou compreflibles ; c'eft- à -dire qu'elles occu-
pent plus ou moins d'efpace , félon que l'air qu'elles
renferment eft plus ou moins échauffé, ou plus ou
moins preffé : elles font rondes , parce que l'air ren-
fermé agit également au-dedans d'elles en tout fens.
La tunique qui les couvre eft formée des plus petites
particules du fluide ; & comme ces particules font
très-minces , & ne font que très-peu de réfiftance ,
la bouteille crevé bientôt pour peu que l'air fe dilate.
Le méchanifme de ces petites bouteilles , eft le même
que le méchanifme de celles que les enfans forment
avec dufavon , en foufflant au bout d'un chalumeau.
Lorfqu'on a mis une liqueur fous le récipient de
la machine pneumatique , 6c qu'on commence à pom-
per l'air , il s'élève à la furface de la liqueur , des bou-
teilles ou bulles femblables à celles qui font produites
par la pluie. Ces bouteilles font formées par l'air qui
eft renfermé dans la liqueur , & qui fe trouvant moins
comprimé lorfqu'on a commencé à pomper l'air du
récipient , fe dégage d'entre les particules du fluide ,
& monte à la furface.
Il en arrive autant à un fluide qui bout avec vio-
lence , parce que l'air qui y eft contenu fe trouvant
raréfié par la chaleur , cherche à s'étendre & à fe met-
tre au large , & s'échappe avec promptitude vers la
furface du fluide , où il forme des bouteilles. Voye^
Bouillir. ( O )
Bouteilles , (Marine.) ce font des faillies de
charpente fur les côtés de l'arriére du vaiffeau de
part & d'autre de la chambre du capitaine.
Les bouteilles font à la place des galeries , dont l'u-
fage fut fupprimé par l'ordonnance de 1673. Leur
B O U
figure reffemb'e affez à une moitié de fanal coupé de
haut en bas. Vqye{ PL I. lettre &. Les bouteilles n'ont
guère qu'environ deux pies ou deux pies & demi de
largeur, & (ont conduites depuis les fabords de Sainte-
Barbe jufqu'au couronnement. Voye^ Galerie.
BOUTER , v. acl. ce mot lignifie , en termes de
Marine , mettre , & pouffer.
Boute le cable au cabejlan.
Bouter à l 'eau , c'eft faire lbrtir un bateau hors du
port , ou mettre la chaloupe ou le canot à la mer.
Boute au large, c'eft-à-dire pouffe au large.
Bouter de lof, (Marine.) c'eft venir au vent ,
bouliner , ferrer le vent , prendre l'avantage du vent ,
mettre les voiles en écharpe pour prendre le vent de
côté. ( Z )
BOUTERE AU , f. m. en terme d'Epinglier , c'eft un
poinçon rond d'acier , qui diminue de groffeur depuis
le haut jufqu'en bas : c'eft avec cet outil que l'on gra-
ve l'empreinte de la tête clans l'enclume & dans le
poinçon. Il faut qu'il fpit bien trempé. Voye^ lafig.
IJ. PI. II. de LE pin g lier.
BOUTEROLLE , f. f. ce terme a différentes ac-
ceptions , félon les ouvriers qui s'en fervent. La bou-
terolle de l'Orfèvre n'eft pas la même que celle du
Serrurier ou du Lapidaire. Voye^ à la fuite de cet ar-
ticle les définitions de ces bouterolles , qui n'ont pref-
que rien de commun , fi ce n'eft de fervir , les unes
d'une façon , les autres d'une autre , à donner des
formes tantôt concaves, tantôt convexes.
BoUTEROLLE de Doreur (la) eft un morceau de
fer arrondi par un bout, que l'ouvrier applique fur
les boutons mis dans le tas , frappant fur l'autre bout
afin qu'ils prennent la forme du tas. Voye^ Planche
du Boutonnier.
BOUTEROLLES des Graveurs en pierre fine (les) , font
des morceaux de cuivre fondés fur une tige de même
matière. On monte la tige fur l'arbre du touret ; &
la tête enduite de poudre d emeril ou de diamant, ufe
par le frottement la pierre qu'on lui préfente. Il y en
a de diverfes formes & figures , les unes fphériques ,
les autres plates, les autres aiguës, les autres évui-
dées. Voye{ lesfig. J. 8. PL III. de la Gravure , f arti-
cle Gravure en pierre fine.
BoUTEROLLE du Metteur -en -œuvre (la) eft un
morceau de fer arrondi par un bout , qu'on applique
fur les pièces qu'on veut reftraindre dans le dez à em-
boutir. Voyer_ Dez à emboutir ; voye^z Planche du Met-
teur-en-œuvre & Bijoutier ,fig. c).
BOUTEROLLE de C Orfèvre en grofferie (la) eft un
înftrument de fer qui fe termine auffi par une tête
convexe de la forme d'une cuillierc ou d'un autre
ouvrage : c'eft en frappant cette bouterolle fur la cuil-
lierc difpofée fur une maffe de plomb , qu'on forme
la capacité ou le cuilleron. Voye^Pl. ll.fig. 8.
BoUTEROLLE du Serrurier (la) eft une forte de
roiiet qui fe pofe fur le palatre de la ferrure , à l'en-
droit où porte l'extrémité de la clé qui le reçoit , &
fur lequel elle tourne. Le bout de la clé reçoit la bou-
terolle par le moyen d'une fente pratiquée au panne-
ton , entre la tige & le panneton.
Il y en a de différentes fortes. Il y a des bouterolles
avec un fauffdlon ; ce lont celles où la bouterolle avec
le fauffillon forment une croix qui n'a qu'un croifon
ou un bras.
Il y a des bouterolles à fauffdlon , renverfées & en
bâton rompu; ce font celles où le bord du fauffdlon
renverfé forme un bâton rompu.
Il y a des boutirâÙts à crochet ; ce font celles où
le bord de la bouterolle eft renverfé , & forme un cro-
chet.
Il y a des bouterolles où toutes les formes ci-deffus
fe trouvent employées , & lur lefquelles on en pour-
roit encore employer d'autres. Voye{ nos Planches de
Serrurerie , & leur explication.
B O U
381
BOUTEROUE, terme de rivière / c'eft ainfi qu'on
appelle les bornes qui empêchent que les effieux des
voitures ne brifent les garde-fous , par-tout où l'on
en met fur leurs paffages.
BOUTICLAR , f. m. terme de rivière; c'eft une
grande boutique à poiffon. Foye^ Boutique.
BOUTILLIER ou BOUTEILLER, ( le grand bou-
tillier ou bouteiller de France ) f. m. Hifl. mod. nom
qu'on donnoit anciennement à l'officier que nous
nommons aujourd'hui le grand échanfon , & qu'on ap-
pelloit alors en Latin buticularius ; comme on le voit
dans une loulcription du teftament de Philippe -Au-
gufte , rapportée par Rigord. Le grand boutillier étoit
un des cinq grands officiers de la couronne, qui fianoit
dans toutes les patentes des rois , ou du moins affif-
toit à leur expédition. Il avoit féance entre les prin-
ces, & difputoit le pas au connétable. Il prétendoit
avoir droit de préfider à la chambre des Comptes ;
& l'on trouve en effet fur les regiftres de cette cham-
bre, qu'en 1397 Jean de Bourbon , grand boutillier
de France , y fut reçu comme premier prélident. De-
puis même , cette prérogative fut annexée par édit
du roi à la charge de grand boutillier ; mais foit né-
gligence du titulaire de cette dernière charge , foit
dilpofition contraire de la part du fouverain , ce pri-
vilège ne fubfifta pas , & la charge de grand boutillier
fit elle-même place à celle de grand échanfon. Au refte
cette dignité étoit fort confidérable du tems de Char-
lemagne ; & Hincmar dans fes lettres en parle com-
me d'un des principaux poftes du palais de nos rois.
(G)
BOUTIQUE, f. f. ( Commerce. ) lieu où les mar-
chands expolënt leurs marchandifes en vente , qui
eft ouvert fur la me & au rez-de-chauffée. On l'ap-
pelloit autrefois fenêtre & ouvroir, comme on lé voit
dans les anciens ftatuts des communautés des Arts
& Métiers.
On dit dans le commerce , lever , ouvrir boutique ;
garder , conduire la boutique ; fe mettre en boutique ;
garçon de boutique; fille de boutique , &c.
Il y a auffi des boutiques dans les foires , dans les
falles du Palais, &c. On appelle encore boutiques cer-
tains étaux portatifs, à l'abri defquels fe mettent les
petits marchands dans les foires. Voye^Èr A.U.
Boutique fe dit auffi du fonds d'un marchand. Ce
négociant a vendu ou cédé la boutique à ion garçon ,
à ion affocié , c'eft-à-dire qu'il lui a abandonne fes
marchandifes , fon fonds.
arrière-boutique eft un magafin fur le derrière d'une
mailon deftiné à mettre les marchandifes qu'on veut
conferver.
Garde-boutique fe dit d'une vieille étoffe défec-
tueufe , ou qui n'eft plus de mode.
BOUTIQUE , dans le commerce du poiffon tTeau-doU'
ce, eft un bateau dont fe fervent les marchands de
poiffon pour le voiturer & le nourrir en attendant
qu'ils le vendent. Ces bateaux lont percés de divers
trous au-deffous du niveau de la rivière , & ne lont
foùfenus fur l'eau que par le vuide qui eft à l'avant
& à l'arriére.
A Paris , la plupart de ces boutiques font placées
au port Saint-Paul & à la delcente du pont Marie.
Le prévôt des marchands & les échevins connoiffent
des conteftations 6c délits fur le fait defdites bouti-
ques. (G)
BOUTIS , f. m. c'eft ainfi qu'on appelle en Véne-
rie, tous les lieux où les bêtes noires ont îcmué la
terre ; on dit, ces forets font toutes remplies de boutis.
BOUTISSE , f. f. ( terme d' 'Architecture. ) c'ell une
pierre dont la plus grande longueur eft dans le corps
du mur. Elle eft différente du carreau , en ce qu'elle
préfente moins de face ou de parement, & qu'elle a
plus de queue. (P)
381
B O U
BOUTOIR ou BOUTOI , f. m. c'eft en Vénerie,
le bout du nez des bêtes noires ; on dit , cefanglier a
le boutoifort.
Boutoir, outil de Corroyeur ; c'eft une efpe ce
de couteau emmanché par les deux bouts , à peu
près comme la plane des Tonneliers , à l'exception
que les manches n'en font pas recourbés. Les Cor-
royeurs fe fervent de cet inftrument pour bouter les
cuirs qu'ils veulent courroyer.
Ces artifans ont deux fortes de boutoirs ; l'un dont
le tranchant eft émouffé , & qu'on appelle pour cette
raifon un couteau fourd ; l'autre au contraire a le tran-
chant fort affilé. Voyei CORROYER , & les figures 3
& 4 Planche du Corroyeur.
Boutoir ; les Maréchaux appellent ainfi un inf-
trument qui fert à parer le pié du cheval , & à en
couper la corne fuperflue. Il eft large de quatre
doigts , & recourbé vers le manche. Voye{ Parer.
Foyei la Planche du Maréchal.
BOUTON , f. m. petit ouvrage compofé d'un
morceau de bois plat deffous , arrondi deflus , & re-
couvert en cuivre , en argent , en or , en foie ou en
poil , fervant dans l'habillement à réunir deux par-
ties féparées , ou à en contenir deux autres l'une fur
l'autre au moyen des boutonnières dans lefquelles
les boutons fe paffent. Les boutons fe divifent en trois
efpeces ; en bouton à pierre , en bouton de métal , ÔC
en bouton tijfu.
Ces derniers font ou poil & foie à la brochette, ou
boutons de foie pure , ou boutons d'or & d'argent ; en-
fin , ou boutons planés.
Toutes ces différentes efpeces de boutons font unies
ou façonnées ; il n'y a point de difficulté pour l'uni :
c'eft un tiffu limple. Le bouton façonné eft celui fur
lequel on exécute des deffeins en foie, en or , ou en
argent ; ces deffeins varient au-delà de ce qu'on peut
s'imaginer ; un ouvrier quelquefois ne fait pas dix
garnitures d'un même deffein. Cet art tout mécha-
nique qu'il eft , demande donc du goût & même de
l'imagination ; il eft vrai que les deffeins ne chan-
gent guère que quant à la forme ; le fond refte tou-
jours le même. On fait des boutons à épi , à amande ,
en limaffe , &c. mais c'eft toujours avec du bouillon,
du luifant , des falbalas , des cordes à puits , des
roues , &c. Voye-^ tous ces articles.
Quant à la matière , c'eft toujours deux files de
poil tords avec un fil de foie pour les boutons poil &
foie , unis , façonnés , ou à la brochette ; de la foie
pure , pour ceux de foie. Les boutons d'or ont une
première couche pour ainii dire d'une foie médio-
cre , qui fert de fondement à l'or ; s'ils font roftés en
foie , ce doit être de foie de Piémont , la plus belle
de toutes celles qu'employent les Boutonniers, pour
approcher le plus qu'il eft poffible de l'éclat de l'or ;
eniorte que le bouton d'or du moindre prix eft fait
avec la meilleure foie ; l'or & l'argent font en trait
en luifant , en frifé , en cordonnet , &c.
Le bouton poil & foie uni fe fait avec quatre poin-
tes. Voye^ Pointe. On y diftingue les coins, les
ondes , & la croix. Ployer ces articles & bouton poil &
foie uni.
Le bouton poil &foie à la brochette fe fait fans poin-
tes fur une petite broche qui fert à tenir le bouton
qui y eft fiché. Il n'a que des coins & une croix fans
ondes. Foye^ Bouton à la brochette, & Bro-
chette.
Tous ces boutons ayant une manœuvre particu-
lière , pour ne rien donner ici de confus , nous avons
pris chaque efpece à part , & nous les avons condui-
tes de la première opération à toutes les autres dans
le rang qu'elles ont entre elles.
Bouton à amande , eft un bouton dor entouré d'un
cerceau fimple ou gravé , découpé en plein. Voye^
B O U
Cerceau , & dont la tête eft fermée d'un deffein
qui repréfente une amande , ovale , quarrée , lon-
gue ou ronde. Il fe fait comme le bouton façonné par
un premier jettage de foie , un fécond de cerceaux
arrêtés à l'aiguille , & enfin on forme fon amande.
Foye{ Amande, & on l'orne de cordelières, de
roues , de falbalas , de corde à puits , &c. Voye^ tous
ces articles. Ces ornemens fe mettent à l'aiguille , &
s'attachent comme nous l'avons dit , au bouton fa-
çonné. Voye{ Bouton façonné , avec une foie de
grenade égale & cirée.
Bouton À la brochette, (en terme de Bou-
tonnier. ) eft un bouton fait fans pointe fur une bro-
chette. Foye{ Brochette. Le plus difficile dans ce
bouton c'eft de jetter les premiers tours fur les bords
d'un moule à furface arrondie. Les autres tours fe
font de l'un à l'autre , mais fans revenir deux fois
fur le même coin ; au bouton couvert de cette forte ,
le poil s'eft amaffé autour de la brochette en-deffous
en quatre tas ou parties que l'on embraffe enfemble
avec un fil double : on les arrête enfuite. Ces boutons
n'ont point d'onde , & doivent être coufus fur les
habits par les quatre branches que nous avons dites,
fans paffer l'aiguille au milieu d'elles , ce qui rom-
proit des brins , Se détruiroit le bouton en peu de
tems.
Bouton à cul-de-dé, eft un bouton façonné
qui n'a point de premier jettage ; on le fait en or ou
en argent filé , ou en milanoife ; on jette d'abord di-
vers partages de plufieurs brins ; chacun de ces parta-
ges étant également diftans l'un de l'autre ; puis on
a une aiguille enfilée d'un pareil nombre de fils que
l'on coule fur le premier partage & fous le fécond ,
fur le troifieme & fous le quatrième , ainfi des
autres : ce qui fait des quarrés les uns vuides , & les
autres pleins, affez femblables aux creux & aux pleins
d'un dé , à la forme près. Ce bouton fe fait fur la bro-
chette.
Bouton d'or UNI , (en terme de Boutonnier. ) fe
fait avec les pointes ou à la brochette , félon qu'on
veut qu'il ait des ondes ou qu'il n'en ait pas. L'or peut
être en luifant , en frifé , en trait , en guipé , en cor-
donnet , &c. Voye^ ces mots à leur article. Alors les
boutons font glacés ou guipés , &c. Les opérations
dans toutes ces fortes de boutons font les mêmes que
dans les boutons unis poil & foie , aux pointes ou à
la brochette. Voye^ ces mots ; excepté que les coins
font toujours de fil dans les boutons de trait glacé.
Foyei Coins ; parce que l'aiguille romproit ce trait,
s'il n'y avoit pas des endroits pour la ficher ; & que
ces boutons font plus difficiles à faire que ceux de
poil & foie ; parce que dans ceux-ci on ne mené
qu'un brin à la fois , & que dans ceux-là on en mené
plufieurs , qu'il faut prendre garde de ne point met-
tre l'un fur l'autre.
Bouton d'or façonné , fe dit d'un bouton fur
lequel on a exécuté un deffein , & que l'on a décoré
de divers ornemens. Soit que les boutons foient à
amandes , à épi , à limaffe , &c. Voyt^ ces articles. On
commence par les jetter en foie à plufieurs brins qui
fervent d'affiette aux cerceaux , s'il y en a , & de
prife à l'aiguille s'ils font rofttés ou enjolivés. Voye^
Cerceaux & Roster. Ce jettage achevé , on fait
celui des cerceaux , ou on applique les ornemens :
dans le premier cas , on arrête les cerceaux avec du
trait ou de la foie en les tournant diverfement autour
du bouton , de manière que ces tours l'embraffent
avec grâce. On le roftte en foie ou or , & on le bouil-
lonne, pour les finir. Voyei Bouillonner. Dans le
fécond cas , on place les pièces de rapport qu'on y
deftine , en formant tel ou tel deffein avec l'aiguille
& une foie de grenade unie , égale , & cirée , qui les
attache par le premier jettage. Ce premier jettage
eft la bafe & le fondement des opérations pour tou-
B O U
B O U
385
tes les efpeces de boutons façonnes. Nous le difons ici
pour ne plus le répéter. foye^ Jettage.
Bouton À Épi, eft un bouton façonna roulé après
le premier jettage , ( Voyt{ Rouler ) d'or en trait ,
en cordonnet, en luifant, & couvert d'un cerceau;
enluite on jette de haut en bas autant de cotes de foie
que l'on veut faire d'épis. Voye^ Épi. Ces cotes fer-
vent à donner prife à l'aiguille qui ne pourroit le fi-
cher dans le cerceau ; on pofe fes épis , on rofte , &c
on enjolive le bouton de falbalas , roues , &c. Voye^
as mots.
Bouton à garde d'Épée , eft un bouton uni en
or ou argent , qui ne diffère des autres que par fes on-
des qui font beaucoup plus hautes que les ordinaires ;
il fe fait aux pointes, & s'il eft de trait, ce trait doit
être du n°. 17. pour pouvoir être retordu avant d'ê-
tre employé. Voyc{ Pointe , & Bouton poil
ET soie uni. On fait les ondes plus hautes en mul-
tipliant les partages fur le même fens. Voyt{ Onde.
Bouton à Limasse, eft un bouton façonné qui
ne diffère des autres que parce qu'il eft entouré de
plulieurs croix de foie luifante , & d'autres en rofta-
ge , qui l'embraffent dans toute fa hauteur , &: des-
cendent de haut en bas , en tournant autour de lui ;
ce qui donne à ces croix ou pans une forme appro-
chante de celle de la coquille d'un limaçon. Ces for-
tes de boutons font rarement enjolivés.
Bouton poil et soie uni , (en terme de Bou-
lonnier. ) c'eft un moule de bois couvert d'un fil corn-
pôle de poil de chèvre & de foie , deux tiers du pre-
mier, & un de l'autre : c'eft au maître à faire ce mé-
lange ;ill 'exécute au roiiet. Voye^ Rouet. Il dévide
enluite fa matière fur une bobine , & la donne en cet
état à l'ouvrier qui pofe la bobine fur un rochet.
Voye^ Rochet. Il plante quatre pointes fur le mou-
le en croix, en gardant des diftances égales autant
qu'il eft poffible ; il fait fur chaque pointe cinq ou
fix tours , en allant de l'une à l'autre pour former les
coins. Voyt^ Coins. Il ôte fes pointes , prend une
aiguille enfilée de gros fil , la fiche en-deffousdans les
tours faits ; fait un tour fur un coin , plie Ion poil fur
le fil de l'on aiguille , retourne fur le même coin , y
arrête fon poil en le pliant comme ci-deffus , èc ga-
gne un autre coin où il fait encore deux tours ; ainli
du refte jufqu'à la croix. Voye^ Croix. Il arrête le
pié du bouton avec le fil de fon aiguille , & donne fon
ouvrage en cet état à un autre ouvrier qui l'arrête :
arrêter , c'eft faire un point en croix furies tours qui
terminent le bouton. On fe fert pour cet effet de l'ai-
guille , & d'un fil pareil à celui du bouton.
Les Boutons à pierre ne font autre chofe que
des cailloux , des pierres ou des cryftaux , auxquels le
Lapidaire a donné la forme de bouton , & qui reçoi-
vent du Metteur-en-ceuvre , une monture propre à
l'ufage du bouton.
Les BOUTONS en argent, or, & cuivre, ne font
autre chofe que des feuilles minces èv rondes de ces
métaux; auxquelles on donne la forme de boutons,
par le moyen de tas, où l'on a pratiqué à L'aide du
poinçon, des concavités dans lefquelles les feuilles
étant frappées , elles prennent non-feulement la fi-
gure convexe, mais encore cette figure fur tous ics
Ornemens qu'on a pratiqués en creux dans le tas.
BOUTON plané , ( en terme Je Bcutonnicr ) eft un
bouton d'un métal quelconque , en plein , monté fur
un moule , & le refte du vuide rempli d une efpece
de ciment. La matière de ces boutons eft tantôt du
plomb , tantôt de l'étain argenté , tantôt du cuivre
& de l'argent , & plus rarement de l'or. Les Bouton-
hiers prennent les trois derniers métaux ; l'un chez
le Fondeur , ôc les autres chez l'Orfèvre. Quant au
plomb ou à Péta n argenté , ils fondent l'un & l'au-
tre & argentent le dernier chez eux. Leur moule eft
Un morceau de fonte de la forme qu'il a plu de lui
donner , gravé d'un trou de la profondeur que doit
avoir la calotte. On jette la matière fondue dans un
moule ; on le penche auiîi-tôt de côté pour verfer la
matière qui remplit la calotte : elle tombe, & ne iaif-
fant que celle qui s'eft d'abord figée aux parois du
moule , il vient une calotte creufe. Le cuivre , l'ar-
gent & l'or en rubans , l'ont coupés à l'emporte-piece
F E ,GH, en ronds CCC, DD , PI. du Moutonnier
en métal, de différentes grandeurs. Alors on embou-
tit tous ces métaux dans un tas uni M N, ou gravé
en creux , en frappant fur des bouterolles. foye? bou-
terolles & lafig. i.On coupe le plus gros autour 'avec
des cifeaux. On palTe la corde à boyau dans les mou-
les en commençant d'abord par un trou, & allant de
l'un à l'autre jufqu'au quatrième; ce qui forme deux
tours fur le bouton. On fait les deux autres en paf-
fant par les mêmes trous & rempliffant les elpaces
vuides. On fait fondre le maftic pilé dans les calot-
tes , expolées fur le feu dans une platine de fer à
bord , d'un demi pouce de haut , & remplie de fa-
blon à une certaine épaiffeur , qui fert à entretenir la
chaleur & à empêcher que les calottes ne fondent.
y°ye{fig- 2.. Le maftic fondu, on y met le moule.
Voye^ Moule. On fertit les calottes autour du mou-
le liir un tour , & avec des bruniffoires ; enfin on ra-
bat la calotte avec une langue de lerpent tranchante ,
en coupant l'extrémité en bifeau , &c l'appliquant le
plus près du moule qu'il fe peut. On polit pour der-
nière façon les boutons , de quelque métal qu'ils
foient , & on les attache par douzaines fur un petit
carton quarré.
* Bouton , (Moule de ) (Ans méchaniques.) Le
travail des moules de bouton eft un très-petit art, dont
voici la defeription. Les moules de bouton lont affez
ordinairement de bois de chêne. Il faut fe procurer
des bûches de ce bois de fix à lept pouces en quarré.
On prend ces bûches , on a une efpece d'étau de bois ,
entre les mâchoires duquel on les place , les unes
après les autres , comme on en voit une en a. Deux
ouvriers ou i'eieurs , tels qu'ils font reprélentés , PL
du faifeur de moules à bouton , figure 1. & 2 , coupent
avec une feie , la bûche a en tranches , de l'épailîeur
de 4 , 5,6,7 lignes. Ces tranches paffent entre les
mains d'un ouvrier allis fur une efpece de chevalet,
jambe de-çà , jambe de-là , & ayant devant lui le
moule perçoir monté fur une poulie , & pôle par fes
deux extrémités fur deux appuis , qui fervent de col-
lets. Une corde paffe fur cette poulie & va fe rendre
fur une grande roue ; deux ouvriers ou tourneurs
font mouvoir la roue ; & par conlequent la poulie &
le moule perçoir qui la traverfe , & qui lui fert d'axe.
Cefl ce qu'on voitjig. J. 4. 5. Le moule perçoir,//'^.
<). eft compofé de deux parties , d'un manche 6ê d'un
fer. Le corps du manche a n'a rien de particulier ;
c'eft une boîte à foret oblongue fur laquelle une cor-
de peut fe rouler. La tête ou partie uiperieure eft faite
de deux petits tenons féparés par une fente , dont les
faces font inclinées l'une vers l'autre ; enîorte que
l'ouverture de la tente eft pius étroite en bas qu'en
haut : le fer a la même melinaifon , par laquelle il s'in-
fère , s'applique , & fe fixe entre les faces des tenons,
comme on l'y voit en 1,1,3. L'extrémité du ter eft
terminée par cinq pointes : cel»e du milieu eft la plus
longue ; elle fert à percer le moule de bouton au cen-
tre : les deux parties voilînes de celte du milieu tra-
cent des moulures à la iùrface. Les deux des extré-
mités tonnent les bords du moule & l'enle\ ent de la
tranche de bois : toutes ces pointes qui (ont encore
tranchantes par leurs bords , & qui loi ment la conca-
vité d'un arc de cercle fur le fer, ne peuvent tour-
ner fur elles-mêmes , fans donner au morceau de bois
qu'on leur appliq ■ gure convexe.
L'ouvrier repréfenté ,fig. 3. applique une tranche
de bois au moule perçoir , ck la met iuccellivement
3 84
B O U
en autant de moules de boutons qu'elle peut être per-
cée de trous. Comme il y a des boutons de différen-
tes groffeurs , il faut auffi des moules de différentes
groiléurs ; & par conféquent différentes fortes de
moules perçoirs. On en voit un plus petit, fig. 10.
fon fer n'a que trois pointes ; celle du milieu qui per-
ce le moule de bouton , & les deux des côtés qui font
concaves , forment la furface convexe du moule , &
le féparent de la tranche de bois. On peut faire
mouvoir le moule perçoir par le moyen d'une roue
& d'une poulie : mais on le peut auffi par le moyen
d'un archet , comme on voit fig. y. 8. On doit aller
plus vite à la roue qu'à l'archet , & former plus de
moules en moins de tems : mais en revanche il faut
un ou deux ouvriers de plus. Le chevalet dans ce fé-
cond cas, eft le même que dans le premier : l'ouvrier
eft afîis deffus de la même manière ; & la feule diffé-
rence qu'il y ait entre l'une & l'autre manœuvre , c'eft
que le moule perçoir eft monté dans une boîte , & le
meut ici par l'archet ; & que dans le premier cas , il
eft monté dans une poulie & le meut par des tour-
neurs. Il femble qu'il faudroit travailler les petits
moules de boutons à l'archet , & les gros moules à la
roue.
Lorfque les boutons font enlevés , il s'agit d'y faire
les trous à paffer les cordes ; c'eft ce qui s'exécute
avec beaucoup de promptitude avec la perçoire de
la fig. il. Cette perçoire peut fe monter fur une pou-
lie , ou s'inférer feulement comme on la voit ici ,
danstme longue boîte à foret. Dans le premier cas ,
les trous à cordes fe feront à la roue : dans le fécond,
ils fe feront à l'archet.
Il eft à propos que le bois de moule à boutons foit
dur & fec , afin qu'il fe tranche net. On faifoit autre-
fois des moules à bouton avec la corne ; mais la mo-
de en eft paffée.
Ce métier nourrit à peine l'ouvrier , & il ne peut
guère fe tirer d'affaire que par la célérité.
Ces moules fe vendent à tous ceux qui font des
boutons. Les Boutonniers-Paffementiers les couvrent
de fil , de foie , de poil de chèvre , d'or & d'ar-
gent. Voye^ Bouton. Les Orfèvres en remphllent
la concavité des boutons qu'ils frappent fur le tas, les
contenant dans cette concavité , à l'aide de la bor-
dure du bouton , & d'un enduit ou de maftic , ou de
ciment mêlé avec la poix-réfine.
Le terme bouton ne fe prend pas feulement pour
une des parties de notre habillement. On a tranfporté
le même nom à une infinité d'autres choies , qui n'ont
de commun avec cette partie que la leule forme ,
comme on le verra dans les articles fuivans.
BoUTON , ( Chimie & Métallurgie ) on délîgne par-
ce mot un globule d'argent , qui relie fur la coupelle
au fourneau d'effai. Lorfque pour effayer de l'argent ,
on le met fur la coupelle où il y a du plomb fondu ,
il commence par noircir un peu ; enluite il fe fond ,
en tournoyant continuellement , & paroît bouillon-
ner : à mefure que les bouillons groffiffent , ils de-
viennent moins fréquens , & la matière qui les en-
vironne diminue : enfin il ne fe fait plus que deux
ou trois bouillons , qui fe raffemblent pour n'en for-
mer plus qu'un ; ce qui fait éclair , ou corufeation ou
l'opale : pendant ce tems le globule paroit tourner
encore ; enfin il ceffe & demeure fans mouvement.
On le laiffe refroidir peu à peu , & ce qu'on trouve
fur la coupelle , eft ce qu'on nomme le bouton ; on le
pefe pour connoître le titre de l'argent. ( M )
Bouton, (Chirurgie.*) tubercule ou petite tumeur
rouge qui s'élève lur la peau, principalement au vi-
fage. Cette tumeur eft de la nature du phlegmon ,
vojer Phlegmon , & fe termine ordinairement par
fuppuration. Voye^ ABCÈS.
Bouton eft auffi un inifrument de Chirurgie dont
en lé fert dans l'opération de la taille. Voyt^ PL XI.
B O U
fig. 6. 11 en compofe trois, parce qu'il a trois ufages
dans cette opération. C'eft une efpece de fonde d'a-
cier ou d'argent , très-polie , longue de huit pouces.
Le corps de cet inftrument eft cylindrique ; il a cinq
pouces de long, près de quatre lignes de diamètre à
fa bafe , & deux lignes à fa pointe. Le long de cette
tige règne une crête ou languette qui s'élève douce-
ment vers la bafe , & qui devient de plus en plus émi-
nente jufqu'aux deux tiers de fon chemin , où elle ne
doit pas excéder une ligne 6c un tiers de hauteur ;
elle continue enfuite en diminuant infenfiblement
pour finir en mourant. La longueur de cette crête eft
de quatre pouces & demi.
L'extrémité antérieure de cet inftrument eft la fui-
te du corps ; elle a encore un peu de la figure cylin-
drique & pyramidale , puifqu'elle va en diminuant de
volume pendant la longueur de trois lignes; cette
extrémité eft recourbée du côté de la crête , & fe
termine par un bouton en forme de poire de cinq lignes
de longueur fur deux & demie de diamètre. Ce bouton
qui donne le nom à tout l'inftrument, eft très-adou-
ci & très-poli pour ne point bleffer la veflie.
L'extrémité poftérieure forme une efpece de cuil-
liere beaucoup plus allongée que large : elle n'a à fon
extrémité la plus évafée que cinq lignes de diamètre;
fa longueur eft de deux pouces deux lignes. Sa ca-
vité eft du côté oppolé à la crête & au bouton ; elle
commence doucement , &c a environ trois lignes de
profondeur dans l'endroit le plus creux , pour fe ter-
miner par une efpece de bec arrondi : le dehors de
cette cuilliere eft très-poli , & fait une légère cour-
bure qui fe jette du côté de la crête.
L'uiage du bouton eft de pénétrer dans la vefîîe
pour retourner les pierres qui font mal chargées dans
les tenettes ; d'entrer dans cet organe , après la for-
tie d'une pierre , pour lavoir s'il n'y en a point d'au-
tres. La crête fait l'office de conducteur , puifque c'eft
par fon moyen qu'on réitère avec fureté l'introduc*»
tion des tenettes dans la veffie , autant qu'il en eft
befoin. Enfin la curette fert à ôter les fragmens de
pierre , les fables , les caillots de fang , & autres
corps étrangers qu'on ne peut tirer avec les tenettes.
Bouton Je feu , eft un nom qu'on donne au cautère
acruel. Voye^ Cautère. (Y)
BOUTON ; on appelloit ainfi , dans F Artillerie , un
petit corps rond, fondu avec le canon à l'extrémité de
la volée , & qui étoit aufti élevé fur l'ame delà pièce ,
que la partie fupérieure de la culaffe. On s'en fer-
voit pour mirer ou pointer le canon : mais l'ordon-
nance du 7 Octobre 1732 fupprime ce bouton à tou-
tes les pièces. On fe fert à la place du fronteau de mire.
Voye^ Pointer.
Il y a auffi dans le canon l'extrémité de la culaffe ,
qui forme une efpece de bouton , & que l'on appelle
par cette raifon le bouton de la culaffe, ( Q )
Bouton , (Jardinage.) eft un petit point rond qui
vient le long des branches des arbres , d'où fort la
fleur qui doit produire le fruit. Les boutons des arbres
à pépin ont plufieurs fleurs ; ceux à noyau n'en ont
qu'une.
Il y a deux fortes de boutons , les boutons ronds , Se
les boutons plats : les ronds font ceux qui font efpérer
des branches à fruits : les plats au contraire ne laif-
fent entrevoir que des branches à bois. ( K )
Boutons d'or; voye^ Bassinet.
Bouton ; les Artificiers appellent ainfi l'extrémité
de la tétine du culot arrondie en forme de zone fphé-
rique , du milieu de laquelle s'élève la broche qui
forme l'ame de la fulee. Voyc{ Culot.
BOUTONS, en termes de Brajferie, font de petites
parties de moufle en forme de boutons , qui s'élèvent
fur le levain.
Bouton, en termes de Fourbiffeur , eft un demi-
rond qui termine la garde par en-haut , ôc fur lequel
on
B O U
©n ride la foie , pour rendre la monture plus folide.
i^oye^ la figure , Planche du Doreur.
BOUTON de la bride , ( Maréckallerie & Manège. )
eft un petit anneau de cuir , au -travers duquel les
deux rênes parlent , & qu'on fait monter ou defeen-
dre félon le beioin qu'on en a. Couler le bouton , c'eft
le faire defeendre fur le crin. Mettre un cheval fous le
bouton , cék racourcir & tendre les rênes par le
moyen du bouton de la bride , que Ton fait defeendre
jufque fur le crin. On s'en fert quelquefois de cette
manieEe lorfqu'on drefle les chevaux d'arquebufe ,
pour les arrêter plus facilement & plus vite.
Boutons de farcin , font les grofieurs rondes qui
viennent au cheval qui eft attaqué de cette maladie.
Bouton de feu , eft un morceau de fer long, terminé
en pointe & emmanché , que l'on fait rougir pour en
percer la peau du cheval dans certains cas. (^)
Boutons de RETOURS , en Rubannerie ; ce iont
communément des moitiés de vieux rochets coupés
en deux, à -travers lefquels on paffe les tirans des
retours , pour que ces retours foient plus aifément
tirés par l'ouvrier, que s'il ralloit qu'il les tirât par le
tirant: on fait un nœud au bout de ce tiran qui em-
pêche le bouton de retour de s'échapper.
Boutons, fe dit aufli , dans les Manufactures de
foie , des petites boules de bois traverfées de ficelles ,
qui fe rendent au rame , & qui tiennent lieu de tem-
ple dans les ouvrages à la petite tire. ^"ov^Rame ,
Semple , <S- Petite-Tire.
Bouton , en Serrurerie ; c'eft ce qui fert de main
pour ouvrir & fermer les verroux , targettes , &c
Il y en a de différentes fortes , félon la figure qu'ils
ont : ainfi on dit, des boutons à olive ; on les fait ainfi
dans les locquets à bafcules , & dans les ferrures à
demi - tour : il y en a de ronds & plats*
Bouton à filet & rofette; ce font ceux qu'on voit aux
portes des appartemens , qui font plats , & auxquels
on voit un filet ôc une rofette : ils fervent à tirer la
porte. Le filet & la rofette font de pur ornement.
Bouto.i à coulifje ; c'eft celui qui dans les ferrures
en-dedans des appartemens , eft placé fur le palatre
ou fur les cloifons de deflus ou de deffous , & fert
à ouvrir le demi-tour & la porte en même tems. Voy.
nos Planches de Serrurerie , & leur explication.
Bouton ou Bâton , ( Géog. ) 1 une des îles Mo-
lucques en Afie : elle a 2 5 lieues de long & 2.0 de lar-
ge. La capitale s'appelle Calajitfung ; elle eft grande
& peuplée.
, . BOUTONNE , ( Géog. ) rivière de France , qui
prend fa fource en Poitou , & qui le jette dans la
Charente.
BOUTONNÉ , en termes de Blafon , fe dit du mi-
lieu des rofes & des autres fleurs, qui eft d'un autre
émail que la fleur. Il fe dit suffi d'un rofierqui a des
■boutons & des fleurs de lis épanouies , comme celle
de Florence, d'oii fortent deux boutons.
Gotafrey en Dauphiné , d'argent à trois rofes de
■gueules , boutonnées d'or. ( V)
BOUTONNER la bonnette. Quelques Marins fe
•fervent de ce terme pour la bonnette maillée. Ils di-
-fent aufli déboutonner. Voye^ Bonnette & DÉLA-
CER. (Z)
BOUTONNERIE , f. f. ( Commerce. ) marchandife
de boutons. Ce mot le dit aufli de la profeflion de
-ceux qui en font commerce. Les Boutonniers-Pafle-
mentiers fabriquent la boutonnerie d'or , d'argent , de
fil , de foie , de poil , de crin , &c. Mais les marchands
Merciers pour qui ces artifans travaillent , l'ont ceux
•qui en font le plus gros commerce.
BOUTONNIERE, f. m. celui qui fait & vend des
boutons, & autres choies qui y ont rapport. Les
Boutonniers font un corps coniiderable à les regar-
der par leur nombre ; le métier étoit même (î éten-
du , que jadis chaque ouvrier en ayoit çhoili une
Tome II,
B O U
3§5
branche , qu'il exerçoit fans fe mêler des autres : les
uns ne faifoient que retordre ; ceux-ci travailloient
en boutons ; ceux-là en trèfles ; d'autres en crépi-*
nés; d'autres en boutons planés : l'un battoit, gra-
voit & découpoit ; voye{ Battre , GRAVER , &
Découper : cet autre avoit embraffé la partie des
moules & des bois pour les gros ouvrages ; enfin cha-
cun avoit ion diftrict , d'où il ne fortoit & ne pou-
voit fortir. Mais les deux tiers des ouvrages qui font
portés fur leurs ftatuts , ont paffé de mode -, tk ne fe
font plus.
Les Boutonniers & les Rubanniers ne faifoient ou'un
corps, gouverné par les mêmes lois, & travaillant
avec les mêmes privilèges. Dans la fuite, le nombre
des uns & des autres s'étant fort accru , on en fit
deux communautés , qui n'eurent pins rien de parti-
culier entre elles. Cette divifion pourroit fort bien
avoir aidé à faire tomber la boutonnerie , que les
Tailleurs auroient achevé de ruiner , s'ils n'avoient
été déboutés de la prétention de mettre fur les habits
des boutons de la même étoffe.
Lt s ftatuts des Boutonniers n'ont rien d'aflez par-
ticulier pour.en faire mention. Ils ont pour leurs ap-
prentis & leurs compagnons , à-peu-près les mêmes
reglemens que les autres communautés. Leur patron
eft S. Louis , & leur chapelle eft dans Féglife des en-
fans de la Trinité.
Boutonnier en émail , verre , ù cryflallin ; c'eft
un artifan qui fabrique des boutons à la lampe avec
ces fortes de matières. Les maîtres Boutonniers en
émail forment une communauté dans la ville de Pa-
ris , & ont été réunis en 1706 avec les maîtres Ver-
riers , couvreurs de bouteilles & flacons en ofier.
Mais on diftingue toujours les uns d'avec les autres :
ceux-ci font plus connus fous le nom de Fayenciers ,
& les premiers fous celui tfEmailUurs. Voye^ Email-
leurs.
* BOUTONNIERE , f. f. {Tailleur & Couturière.')
ce font des ouvertures longues & étroites , pratiquées
par les Tailleurs à tous les endroits de nos vêtemens,
d'homme fur-tout , où l'on veut avoir la commodité
de les ouvrir & de les fermer par le moyen des bou-
tons. Le bouton eft à droite, & la boutonnière eft à
gauche. Le bouton eft défais le bord du vêtement,
& il entre dans la boutonnière par-deflous. La bouton-
nière eft faite ou de foie , ou de fil , ou de fil d'or &
d'argent , félon la richefle ou la fimplicité de l'habil-
lement. Ses côtés font bordés d'une efpece de tiflii
fort , étroit , & un peu rélevé , que le tailleur forme
à l'aiguille ; ôi les extrémités font contenues par deux
brides.
Il y a des boutonnières ouvertes , & ce font celles
dont nous venons de parler. Il y en a de jermées , 8c
ce font celles qu'on place dans des endroits où elles
étoient autrefois d'ufage , & oii la boutonnière & le
bouton ne font plus que d'ornement.
Les boutonnières prennent chez les Tailleurs & les
Couturières , diifcrens noms relatits à la façon da
la boutonnière.
BOUTONNIERE , terme de Chirurgie , incifion qu'on
fait au périnée , pour pénétrer dans la vellie 6c y pla-
cer une cannule qui puiil'e donner ifluc aux matières
qui y font contenues.
Cette opération eft néceflaire pour procurer le
cours des urines , des graviers , ôc du pus ; par fort
moyen on fait commodément des injections dans
une veflie graveleule ou ulcérée : elle a lieu dans
certaines retentions d'urine qui viennent des roàgus
de la veflie ; ce font des excroifl'ances charnues qui
bouchent l'orifice interne de la veiiie, ce qui empê-
chent que la contraction de ce vilcere agitie fur l'u-
rine contenue.
Pour faire cette opération , on place le malade
comme pour lui taire l'opération de la taille ; oq
C c c
3 86
B O U
prend une fonde cannelée ( voyei CATHETER ) ; on
î'inlinue doucement dans la vefîie ( voye{ Catké-
térisme ) ; un aide monte fur une chaife ou un ta-
bouret , placé au côté droit du malade , fouleve les
boudes , 6c applique iés doigts indicateurs parallè-
lement le long du périnée à chaque côté de l'urethre.
L'opérateur , le genou droit en terre , tient avec fer-
meté de la main gauche le manche de la fonde , de
façon qu'elle faiîe un angle droit avec le corps du
malade. Il fait faire , autant qu'il elf poffible , une
faillie au périnée avec la courbure de la fonde,à côté
du raphé , entre les deux doigts index de l'aide-chi-
rurgien. L'opérateur doit appuyer pour un moment
le bec de fa fonde fur le rectum , pour bien remar-
quer au-deffus de l'anus jufqu'à quel endroit il pour-
ra continuer l'incilion. Il prend alors un lythotome
ou biltouri , qu'il tient de la main droite comme une
plume à écrire ; il porte la pointe de l'initrument dans
la cannelure de la fonde , au-defïbus des bourfes ; il
perce les tégumens 6c l'urethre au côté gauche du ra-
phé , & il continue fon incilion intérieurement juf-
qu'au point qu'il a remarqué au-deffus de l'anus , en
le gardant de paffer outre , de crainte d'intéreffer
l'inteltin. Dès que l'incilion eft faite , l'opérateur re-
tire le lythotome , & prend un gorgeret dont il por-
te le bec dans la cannelure de la ionde , fur laquelle il
le tait couler jufque dans la veffie. Il retire la fonde ,
prend le manche du gorgeret avec la main gauche ,
ÔC de la droite il conduit une cannule arrivée dans la
veffie à la faveur du gorgeret , qu'il retire enfuite en
lui faiiant faire un demi-tour fur la cannule ; de façon
qu'en le retirant , fon dos ou furface convexe regar-
de l'angle fupérieur de la plaie , qu'on panfe avec de
la charpie feche , qu'il faut foùtenir avec des com-
prefîes 6c un bandage contentif , qiu ne gêne point
la fortie de l'urine. Il ne diffère point de l'appareil
de la lythotomie. Voye^ Lythotomie.
L'objet de la Chirurgie elt de guérir 6c non d'opérer :
ainfi dès qu'on a fait la boutonnière au périnée, on n'a
rempli qu'un des points du traitement , & le malade
fe trouve Amplement dans une difpolition favorable
pour recevoir les fecours qu'un Chirurgien intelligent
doit lui procurer. Cette opération permet l'iffue aux
matières graveleufes , dont il faut aider la fortie par
des injections , ÔC dont il faut quelquefois faire l'ex-
traction lorfqu'il fe trouve des petites pierres , dont
le volume fera d'un diamètre plus grand que celui
des ouvertures latérales de l'extrémité antérieure de
la cannule. V. Cannule. Les injeftions doivent être
appropriées à la nature & à l'état de la maladie qui
les exige , parce qu'il faut quelquefois mettre des fon-
gus en iiippuration ; tantôt mondirier une veffie mala-
de , déterger enfuite les ulcères ; d'autres fois forti-
fier les fibres qui ont perdu leur reffort , &c. Lorf-
qu'on fera parvenu à rétablir les chofes dans l'état
naturel , par l'ufage fucceffif ou combiné des diffé-
rens moyens qui feront indiqués , on fupprime la can-
nule , & on met dans l'urethre une fonde creufe ou
cannelée , courbée en S (voy. Algalie) par laquelle
les urines couleront d'abord en partie : à inefure que
la plaie fe refferrera , les urines ne prendront point
d'autre route pour s'écouler ; & la plaie n'étant plus
mouillée par les urines, elle fe réunira bientôt.
L'adminiltration des remèdes doit être variée , &
n'eft pas , comme on voit , moins foûmife aux indi-
cations dans le traitement des maladies chirurgica-
les , que dans celui des maladies internes : le manuel
chirurgical même doit être différent , fuivant les cir-
conitances qui fe préfentent. On fait que l'art d'opé-
rer , dépouillé de tout rapport à la guérifon des ma-
ladies , 6c conlîdéré fimplement en lui-même, de-
mande des connoiffances anatomiques très-exa&es :
mais elles ne furnfent point à un Chirurgien. La itruc-
ture de la partie ne lui montre point de routes non-
B O U
veîles pour diriget lès opérations : l'ufage des parties
& le méchanilme par lequel elles exécutent leurs
fondions , font abiolument néceffaires à lavoir , pour
qu'on puiffe juger lainement de la maladie , qui con-
fiite dans la lélion des fondions. C'eil fur ces con-
noiffances phyfiologiques & pathologiques , qui fuf-
filent à unhabile homme dans l'autre branche de l'art
de guérir , & qui dans la Chirurgie doivent être fou-
tenues de la connoiffance exacte de la ltru£ture , du
volume , de l'étendue , des attaches des parties , &
de leurs différens rapports à celles qui les environ-
nent, qu'on fait fe tracer & qu'on fuit avec toute la
certitude poffible des voies d'opérer, qui ne font point
déterminées par les préceptes. Dans l'opération de
la boutonnière , l'incifion elt commune aux tégumens
& à l'urethre ; cependant des circonltances particu-
lières demandent qu'on étende & qu'on dirige diffé-
remment la feftion des parties. Il furvint à un homme
de quarante- cinq ans , par une rétention totale d'u-
rine , une tumeur au périnée qui s'étendoit dans les
bourfes , dans les aines , fous la peau qui couvre le
pubis & la verge. Le progrès en fut il rapide, qu'en
deux fois vingt-quatre heures il furvint une luppura-
tion gangréneuie. On ouvrit en plulieurs endroits du
périnée , des bourfes, & des aines ; les parties fe dé-
gorgèrent , les urines coulèrent en abondance , les
lambeaux gangreneux le détachèrent ; on parvint en-
fin à guérir toutes ces plaies, excepté une du périnée
qui relta filtuleufe , 6c par laquelle les urines cou-
loient involontairement. Le malade avoit déjà fouf-
fert l'opération de la boutonnière fans fuccès , lorfqu'il
fe confia à M. Petit. Je fupprime ici le détail des com-
plications 6c des traitemens préliminaires que ce
grand praticien mit en ufage , pour me reftraindre à
l'opération. M. Petit jugea par la fortie continuelle
& involontaire des urines , que l'orifice interne de
la fîitule étoit au-delà du fphincter de la veffie , parce
que quand le trou d'une fîitule elt en-deçà du fphinc->
ter , l'urine ne peut lortir par la fiitule qu'après être
entrée dans l'urethre , 6c elle n'y entre que par les ef-
forts que le malade tait lorfqu'il veut uriner. Ce ma-
lade , au contraire , fans être averti du befoin d'un*
ner , & fans faire aucun effort , rendoit prefque tou-
tes les urines par le trou de la fiitule fans en rendre
par la verge ; ou s'il en rendoit , c'étoit toujours vo-
lontairement , 6c quand il étoit excité par le réfidu
des urines; car le trou de la fiitule étoit ii petit , que
malgré l'écoulement involontaire 6c continuel des
urines , fa veffie fe rempliffoit une ou deux fois par
jour; de forte qu'à chaque fois il rendoit un verre
d urine & à plein canal , fur-tout lorfqu'avec le doigÇ
il bouchoit le trou de la rïitule près le bord de l'anus.
Sur ces obfervations , M. Petit jugea que le trou in-
terne de la fiitule étant au-delà du fphinfter de la
veffie , il falloit que l'incifion s'étendît jufque-ià ; 6c
que l'opération taite à ce malade par les Chirurgiens
de la province , avoit été infructueuie , parce que
le trou interne de la fiitule n'avoit point été com-
pris dans l'incilion. Pour guérir radicalement le ma-
lade , M. Petit , après avoir fait l'incilion comme
nous l'avons décrite , la continua en coulant Ion bil-
touri le long de la cannelure de la fonde , 6c la porta
jnfqu'au-delà du col de la veffie , pour fendre le linus,
filtuleux dans toute fon étendue : il mit une cannule ,'
& réuilit comme il l'avoit folidement conçu , à gué-
rir le malade. Cette oblervation elt inférée dans le
Ier volume des Mém. de l'acad. royale de Chirurgie.
A l'occalîon des opérations qui conviennent au
périnée & à la veffie , indépendamment de la lytho-
tomie , voy. Fistule au périnée d- Rétention,
d'urine. (I)
Boutonnière ; on donne en général ce nom à
toute pièce de bois de layeterie d'environ lépt pouces
de long , cinq de large , 6c quatre de haut.
B O U
BOUTRIOT , eft parmi les Cloutiers ■£ épingles une
efpece de burin dont ils fe fervent pour taire la pe-
tite cavité du poinçon. Voyt^ Poinçon, 6* PL du
Cloutier d"1 épingle ,jig. ij. & 18.
BOUTTES , f. f . ( Comm. ) efpece de grands ton-
neaux dans lefquels on enferme en Guienne les feuil-
les de tabac après qu'elles ont (ué. Chaque boutte
contient environ fept quintaux de feuilles.
Bcutte eft auffi le nom qu'on donne à des barriques
dans lefquelles on met le caviac ou œufs d'efturgeon
& de mouronne qui viennent de la mer Noire. La
boutte de caviac pefe fept quintaux ôc demi, foye{
Quintal. (G)
BOUTURE , f. f.- ( Jardin. ) c'eft une branche que
l'on coupe à certains arbres moelleux , tels que le
figuier , le faule , le coignafÏÏer, le grofeiller , laquelle
reprend en terre fans racines.
Plufieurs confondent la bouture avec la marcotte
qui eft bien différente , en ce que cette dernière eft
une branche couchée en terre , mais qui n'eft point
féparée de l'arbre qui lui donne vie , & qu'on ne fe-
vre que quand elle a des racines ; au lieu que la bou-
ture & le plançon font des branches fans racines.
Voye\ Marcotte. (/C)
Bouture, terme d'Orfèvre , eau préparée, leffive
faite avec du fel de tartre pour blanchir l'argent. La
coutume qu'on a prife de blanchir l'argent au feu , .
a mis cette eau prefque hors d'ufage.
BOUVEMENT , f. m. outil qui fert aux Menuijîers
pour faire les moulures fur leurs ouvrages : il ne dif-
fère de lefpece générale des bouvets , qu'en ce que
fon profil eft une cimaife ; du refte la manière de le
fervir de cet outil eft la même. ïoye{ Bouvet, &
lafig. 16. PL II. du Menuifîer , qui le repréfente.
BOUVET, forte de rabot , outil qui fert aux Me-
mùfiers & aux Charpentiers à faire les rainures & les
languettes. Le bouvet qui fait les rainures s'appelle
bouvet mâle , & celui qui forme les languettes s'ap-
pelle bouvet femelle. Le premier eft repréfenté_/z£. ij.
PL II. du Menuifîer : on voit à côté le proril d'une
rainure. L'autre repréfente fig. 18. eft le bouvet fe-
melle , qui fert à faire les languettes , dont on voit le
rofil à côté : on ne fe fert de ces outils qu'après que
es bois lônt bien dreffés , & la manière de s'en ler-
vir eft la même que celle du feuilleret. K Feuille-
ret.
BOUVET de deux pièces ou brifé , forte de rabot qui
diffère des autres en ce que la joue eft montée iiir
deux tiges quarrées qui font fixées perpendiculaire-
ment fur le corps du bouvet , dont elle s'approche &
s'éloigne fuivant le befoin. Cette joue s'arrête parle
moyen de deux clés. On le fert de cet outil pour fai-
re des rainures à différentes diftanecs ; ce qui ne fe
peut avec les autres dont la joue eft fixe, f^oye^ la
fg. 1$. PL IL du Menuifîer, qui repréfente un bouvet
femelle brifé.
Bouvets de brifure , fervent à rainer les brifures
des guichets , des croifées , & des portes.
Bouvet à dégorger, fert à dégorger les moulures.
Bouvets à embrevure , fervent à faire les embre-
Temens des cadres.
Bouvets à noix , fervent à faire les noix des bat-
tans des croifées.
Bouvets à panneaux , fervent à rainer le bois des
panneaux.
Bouvets à planchers, fervent à rainer les planches
a planchers.
* BOUVIER , f. m. (fEconom. rufl.) celui qui gar-
de les bœufs. Il doit être robufte, vigdant , avoir la
voix forte, être attentif à donner à les bêtes bonne
nourriture &C bonne litière , à les frotter loir & matin
avec des bouchons de paille ; à leur laver la queue
avec de l'eau tiede ; en un mot à en avoir tous les
Tome II,
B O U
387
i;
foins néceflaires pour les conferver en force, en chair
6c en fanté. Voye^ B(EUF.
Bouvier, bootes, Arclophylax , en Ajhonomie,
eft une conftellation de l'hémilphere feptentrional ,
dont les étoiles font au nombre de vingt-trois dans le
catalogue de Ptolomée ; de vingt-hui: félon Tycho-
Brahé ; de cinquante-deux félon Hevelius ; & de
cinquante -cinq félon le catalogue de Flamfteed.
(O)
BOUVIER, ÏHijl, nat. Ornythol. ) boarina Aldr.
oifeau auquel on a donné le nom de boarina ou de
boarota à Bologne , parce qu'il fuit les troupeaux
de bœufs. Àldrovande ajoute à ces noms celui de
mufeicapa prima. Cet oifeau a le corps allongé de mê-
me que le bec , qui eft de couleur brune rouffâtre :
le dos &c la tête lont de couleur cendrée ou jaunâtre,
avec quelques teintes de couleur plombée : la gorge
& le ventre font blanchâtres ; la poitrine eft parlè-
mée de taches noires : les ailes font brunes , à l'excep-
tion de la pointe des petites plumes qui recouvrent
les grandes, & des barbes extérieures des grandes
plumes qui lont blanchâtres. La queue eft compofée
de douze plumes : les deux du miteu font de couleur
cendrée ; les trois qui luivent de chaque côté font
noirâtres , &l ont les bords extérieurs cendrés ; l'a-
vant-derniere a déplus une tache à la pointe ; cette
tache eft beaucoup plus grande dans la dernière ; el-
le defeend du côté extérieur jufqu'aux deux tiers de
la longueur de la plume , & elle s'étend au-delà du
tuyau fur les barbes intérieures dans le deffus de la
plume. Les pattes font noirâtres : le doigt extérieur
tient au doigt du milieu à fa naiffance , & les on-
gles des doigts de derrière font fort grands , comme
dans les alouettes , & un peu courbés. Aldrovande,
Ornith. Voye^ OlSEAU. (/)
BOUVREUIL ou PIVOINE , f. m. {Hifl. nat. 0r.
nithol. ) rubicilla , oifeau qui a le bec noir , court , &
fort, reffemblant à celui de l'oifeau qu'on appelle
gros-bec , quoique plus petit : la bafe de la pièce in-
férieure du bec eft contournée en forme de croiffant,
au milieu duquel il y a une petite protubérance qui
le partage en deux fegmens de cercle : la pièce du
deffus déborde fur celle du deffous d'environ une de-
mi-ligne , & la pointe devient un peu crochue lorf-
que l'oifeau eft avancé en âge : la langue eft comme
fendue & coupée par le bout : l'iris des yeux eft de
couleur de noifette : les ongles font noirs : les pattes
font de couleur brune mêlée de noir : le doigt exté-
rieur tient au doigt du milieu par la première phalan-
ge:la tête eft groffe à proportion du corps. Il y a dans
le mâle une belle couleur rouge de mine de plomb
qui tient toute la poitrine, le deffous du bec,& le long
des mâchoires jufqu'aux yeux : le deffus de la tête
eft noir : il y a aufïï une bande noire qui entoure le
bec : le ventre & le croupion font blancs : le deffus
du cou &c le dos font de couleur cendrée , très-lége-
rement teinte de roux.
Il y a dix-huit grandes plumes dans chaque aile ;
les dernières de ces plumes font d'un noir luifant à
leur partie fupérieure, & fur-tout du côté extérieur:
la dernière a de ce même côté une tache de la même
couleur qui eft fur la poitrine : les barbes extérieures
des premières plumes font feulement brunes, & le
bord extérieur de la première plume eft blanc dans
la partie inférieure : dans les trois ou quatre plumes
fuivantes ce même bord n'eft blanc qu'à la partie fu-
périeure de la plume : l'extrémité des petites plumes
des ailes , qui font les plus proches du corps & qui
recouvrent les grandes, font de couleur cendrée ; fur
les plumes intérieures cette couleur cendrée eft plus
étendue que fur les extérieures: celles qui font fur
la côte de l'aile font de la même couleur que le dos :
la queue a deux pouces de longueur , ôc elle eftçoni-
C c c ij
-3>i8
BOY
BOY
pofée de douze plumes qui font d'une couleur noire
luifante.
Le mâle eft gros comme la femelle ; il en diffère
'par les couleurs qui font plus brillantes.
Cet oiieau aime beaucoup les premiers boutons
qui précèdent les feuilles & les fleurs des pommiers ,
des poiriers , des pêchers , & de tous les autres
arbres des jardins , où il caufe un grand dommage. .
Le chant de cet oifeau eft agréable ; cependant on
aime mieux celui de la linotc. Aldrovande prétend
que la femelle chante aufîi bien que le mâle , au con-
traire, des autres oifeaux. On leur apprend fans b'eau-
'coup de peine à imiter le fon de la flûte , & on pré-
tend qu'ils approchent de la voix humaine. Villughby,
'Ornlth. Voyc{ OlSEAU. ' ( / )
* BOUZES , f. m. pi. prêtres idolâtres à la Chine
& au Japon , fort méprifés clans le premier de ces em-
pires, & en grande vénération dans le fécond , où ce-
pendant on n'ignore pas leur débauche & leurhypo-
crifie. Ils font divifés en plufieurs fectes , qu'on re-
connoît à la couleur de leurs habits : la première eft
des Xcnxus , qui prétendent que l'ame eft mortelle : ,
la féconde des Xodovius , bonnes gens, & qui croyent
l'immortalité de rame : la troifieme des Foquexus,
docteurs deXaca, &f les plus honnêtes d'entre les
Bouges : la quatrième des Negous , les meilleurs fol-
dats de l'empire : la cinquième des lxoxus , qui paf-
fent pour forciers : on y ajoute les Arbors-bouxes ,
grands contemplateurs , & qui font leurs demeures
clans des arbres creux; les Jenguis & les Géoguis,
directeurs de pèlerins. Ces différentes feues fe détef-
tent : elles ont un fùpérieur général appelle Xaco ,
& des fupérieurs particuliers revêtus du pouvoir de
Faire des prêtres ; ils appellent ceux-ci Tundcs. Char-
fevoix , Hijloire du Japon.
EOYv ENS , ( Géog. ) petite ville dans l'île de Fuh-
nen avec un bon port.
: BOXBERG , ( Géog. ) petite ville & château en
Franconie, près delà ville de Lancia.
" B O X M E E R , ( Géog. ) ville & comté dans le
comté de Zutphen , fur les frontières du duché de
Cleves.
BOXTEHUDE , petite ville d'Allemagne dans le
duché de Bremen , au cercle de baffe Saxe , à cinq
lieues de Hambourg. Elle appartient au Danemark.
Long. zy. 10. ïàt. 53- 40.
BOXTEL , ( Géog. ) petite ville & feigneiirie du
Érabant Hollandois , fur le Dommel , à deux lieues
de Boifleduc.
i BOYARDS , ou BOJAR.ES , ou BOJ ARDS , f. m.
pi. '( H'ifl. mod. ) nom que l'on donne aux grands fei-
gneurs de Mofcovie. Selon Becman les Boyards font
chez les Rufîiens la même chofe que la haute nobleffe
dans les autres pays : le même auteur ajoute que
dans les aftes publics le Czar nomme les Boyards
avant les Vaivodés. Foye^ Waivodes.
Oléarius, dans fon Voyage de Mofcovie , dit que ces
grands font les principaux membres du confeil d'é-
tat , qu'ils ont à Molcou de magnifiques hôtels , &
qu'Us iont obligés de fuivre le prince dans lès voya-
ges ; que dans les jours de cérémonie ils font vêtus
d'une tunique de brocard enrichie de perles , & cou-
verts d'un grand bonnet fourré de renard noir , &
qu'ils préfident aux tribunaux de juftice : mais depuis
que le czar Pierre Ier a tiré la Ruffie de la grofîiereté
oii elle étoit plongée, on a laiffé aux Boyards leurs
titres de nobleffe ; & quoiqu'ils joùiffent d'une gran-
de coniidération , il ne paroit pas qu'ils ayent grande
part au gouvernement. ( G )
BOYARD , f. m. (fonte du lard de baleine} efpece
de civière à bras dont le fond eft fait à jour & en gril-
lage , dans laquelle on place le lard & les crotons ,
a fin qu'ils puiffent s'égoutter dans des bacs , &
qu'on ne perde rien du fùc des uns &C de l'huile des
autres. P6y\ l'article Baleine , & à la fin des Plan-
ches d'Hiltoire naturelle la fonte du lard de baleine,
la ûg. 4. eft un boyard.
BOYAUX , terme ordinaire dont on fe fort pour
défigner les inteftins. Voyt^ Intestin.
BOYAUX , dans la guerre des Sièges, font les che-
mins que l'on fait en zig-zag pour approcher de la
place fans en être vu ; ou bien ce font les parties
de la tranchée qui conduifent à la place. Voy. l'article
Tranchée.
La tranchée qui eft à peu prés parallèle à la place
fe nomme place d'armes. Voye^ Parallèle.
Les boyaux de la tranchée doivent être tracés de
manière que leur prolongement ne donne fur aucune
des parties de la place attaquée , autrement ils fe-
roient enfilés de cette partie. Voye^ Tranchée &
Enfiler. (Q)
Boyau , cheval qui a beaucoup de boyau ,.fe dit,
en Manège & Maréchallerie , de celui qui a beaucoup
de flanc , beaucoup de corps , les côtes longues , ni
plates ni ferrées. Cheval étroit de boyau, eft celui
qui n'a point de corps , qui a les côtes refferrées ou
courtes , & le flanc retrouffé , ce qui lui rend le corps
efflanqué comme celui d'un lévrier; c'elt ce qu'on
appelle un cheval ejlrac , qui eft ordinairement déli-
cat & peu propre au travail , à moins qu'il ne foit
grand mangeur. On rebute fur-tout les chevaux de
carroffe qui n'ont point de corps, qui font étroits de
boyau , & qui femblent avoir la peau des flancs col-
lée fur les côtes. Un chaffeur ne méprife pas un che-
val étroit de boyau ; il le préférera même à un autre
qui aura plus de flanc , pourvu qu'il foit de grande
haleine , de beaucoup de reflburce , léger, & grand
mangeur. On donne le vert pour faire reprendre du
boyau aux chevaux qui l'ont perdu. Le mot de flanc
eft auffi en ufage , & félon quelques auteurs , plus
élégant que celui de boyau. (V}
Boyau ; il y a des animaux dont les boyaux font
utiles dans le commerce , après avoir été préparés
par certains artifans qu'on nomme Boyaudiers , qui
forment à Paris une des communautés des Arts &
Métiers.
Boyau: on appelle cordes à boyau, certaines cor-
des faites avec des boyaux de mouton ou d'agneau.
Il s'en fabrique une allez grande quantité à Rome ,
à Touloufe , à Lyon , à Marfeille , & à Paris. Voye^_
Corde à boyau. Voye^ l'article Boyaudier.
BOYAUDIER , f. m. eft un artifan qui prépare
& file des cordes à boyau , pour iervir aux inftru-
mens de mulique , à faire des raquettes , & à d'autres
ùfages.
Ces maîtres compofent une des communautés des
Arts & Métiers de la ville tk. faubourgs de Paris : ils
ne font que huit maîtres en tout, qui travaillent dans
le même endroit, & ont chacun leur attelier au fau-
bourg S. Martin, auprès de l'endroit appelle Mont^
faucon.
Voici la manière dont ces ouvriers s'y prennent
pour fabriquer les cordes à boyau : ils fe fervent'
pour cela de boyaux de mouton ou d'agneau qu'on
leur apporte de la boucherie fans être lavés , ck en-
core tous pleins d'ordure , dans des efpeces de hot-
tes appellées Bachoux. Voye^ Bachou.
La première opération eft le lavage des boyaux:
pour cet effet ils fe mettent des bottines aux jambes,
pour empêcher l'ordure de tomber dans leurs fou-
liers , & devant eux trois tabliers les uns par-deffus
les autres , aufli-bien qu'une bavette devant leur ef-
tomac, pour ne point gâter leurs habits, y. Botti-
ne , Tablier & Bavette. Dans cet équipage , ils
prennent les boyaux par un bout , les uns après le*
autres , & les font gliffer dans leur main, en les com-
primant pour en faire fortir toute l'ordure. À mefurë
qu'ils les nêttoyent , ils les jettent dans un chaudron1
BOY
BOY
^j'our les laifTer amortir. Voye^ CHAUDRON 6-
•AMORTIR.
Après avoir laiffé amortir les boyaux pendant un
tems raifonnable , dont la durée n'a point d'autre rè-
gle que le plus ou moins de chaleur qu'il fait, & qui
dépend de la prudence de l'ouvrier , on les remet
dans un autre chaudron encore pendant un certain
tems ; & enfuite on les en tire pour les dégraifTer un
à un , fur un inltrument appelle di'graijjoir. f^oy. DÉ-
GRAISSOIR.
Lorfque les boyaux font fuffifamment dégraiffés ,
& qu'on en a ôté les filandres , que l'on jette dans
une tinette qui eft auprès du dégraiffoir , on les re-
met encore dans une tinette pleine d'eau ; c'eft ce
<ju'on appelle les mettre blanchir. Voye^ Filandres
& Blanchir.
Les boyaux ayant fuffifamment blanchi , des fem-
mes les retirent de la tinette pour les coudre les uns
au bout des autres, afin de leur donner précifément
la longueur qu'on veut donner à, la corde. Voye^
Coudre.
Tout cela fait , les boyaux font en état d'être filés.
On. file un boyau feul ou pluiieurs enfcmble , félon
la groffenr que doit avoir la corde. Quand il n'y en
a qu'un , ou fait uncijaetite boucle à l'extrémité , &
on l'attache par-là au crochet ou émerillon qui eft
au-haut du rouet ; s'il y en a pluiieurs , on les atta-
che enfcmble par un nœud, & on les accroche à l'é-
merillon : pour lors un homme tourne la manivelle
du roiiet, tandis que l'ouvrier file en reculant à peu
près de même que les cordiers. Vdyt[ Rouet.
Quand les cordes font filées , on les étend à l'air
fur des efpeces de râteaux garnis de chevilles , dont
le manche eft enfoncé en terre; Se au bout de quel-
ques jours ils les dégrofïïflènt , c'eft-à-dire , les ren-
dent plus douces & plus égales : cette opération fe
fait avec une corde de crin , imbibée de lavon noir ,
avec laquelle ils les frottent rudement depuis un bout
jufqu'à l'autre. Poye{ DÉGROSSIR.
On donne encore une autre préparation aux cor-
des à boyau , avant qu'elles foient en état d'être ex-
pofées en vente : mais les ouvriers en font un myfte-
re , & prétendent que c'eft en cela que confiée tout
ié fecret de leur art. Il y a apparence que ce préten-
du fecret n'efl autre chofe que de les frotter d'huile
pour les adoucir encore plus &C les rendre plus fou-
pies ; cependant ils aiTùrent qu'ils ne fe fervent point
d'huile.
BOYER , BOIER , & BOUIER , f. m. (Marine.)
c'eft une efpcce de bateau ou de chaloupe Flaman-
de. Le boyer eft maté en fourche Se a deux femelles ,
au moyen defquelles il va bien à la bouline & dérive
peu.
Le boyer eft un petit bâtiment de charge , qui a un
beaupré & de l'acaftillage à l'avant S: à l'arriére : il
a du rapport dans beaucoup de parties avec le fema-
que : il eft plat de varangues , Se le mât en eft fort
haut Se porte un perroquet. Cette forte de bâtiment
n'elt pas fi propre à naviger fur mer, que fur les ri-
vières & fur les autres eaux internes. Mais pour don-
ner une idée plus claire de cette forte de bâtiment ,
\1 faut en voir la figure , Planche XII. figure première ;
ïk: pour plus d'intelligence , nous allons donner le
devis d'un boyer de 86 pies de long de l'étrave à l'é-
tambord , de 20 pies de ban de dedans en dedans , &
cle 9 pies un quart de creux de deil'us la quille au ni-
veau des gouttières.
La quille a 14 pouces en quané; Petrave & l'é-
tambord ont un pic d'épailfeur ; l'ctra\ e .1 8 pies de
quête, Si l'étambord un pic 3 pouces. Il a 6 pies à
l'avant de relèvement, & 7 pies à l'arriére : le fond
de cale a 1 5 pies de large, Se s'élève de 2 pouces vers
les fleurs : les varangues ont 9 pouces d'épaiffeur, Se
b' pouces dans les fleurs ou aux empatures. Les ge-
380
noux ont un demi-pié d'épais fur le franc bord, Se
les allonges autant au même endroit, Se 4 pouces r
par le haut. La carlingue a 9 pouces d'épais fous le
mât, & 6 ou 7 pouces à l'arriére. Les vaigres d'em-
pature ont 4 pouces d'épais , Se les vaigres de fond
2 pouces , Se les autres auffi jufqu'aux ferrebauquie-
res qui ont 4 pouces d'épais, Se chaque ban a deux
courbes de haut en-bas , & deux par la longueur du
bâtiment. Les ferregouttieres ont 4 pouces d'épais,
Se les bordages qui couvrent le pont en ont 2 pouces
t : les préceintes ont un demi-pié d'épais Se un pié
de large, c'eft-à-dire les deux plus balles ; la troifie-
me a 4 pouces d'épais & 10 de large.
Les couples ou fermures ont 6 pouces de lar^e •
ceux d'entre la plus haute préceinte & le carreau ,
ont 10 pouces de large Se 5 pouces d'épais. Le car-
reau a vers les bouts un grand pié de largeur , & eft
plus large par fon milieu. La chambre de proue a 10
pies de long , à prendre à l'étrave en-dedans ; c'eft-là
que font les cabanes & la cuiline , dont Je tuyau de
cheminée fort fur le pont proche du virevaut. Le vi-
revaut a 20 pouces d'épais. Le mât d'artimon , qui
eft fort petit , eft tout proche de la planche qui fert
d'appui vers l'arriére. Quelquefois on fait une petite
dunette vers l'arriére , pour y ferrer quelque chofe ,
ou pour coucher des gens.
La grande écoutille a 10 pies de long Se 7 pies de
large ; l'écoutilie qui s'emboîte a 4 pies. La chambre
de poupe a 14 pies de long , & eft élevée au -demis
du pont ; elle citféparée de deux ou trois fronteaux,
Se dans l'un des retranchemens on met les voiles Se
les agrès; les autres fervent à coucher ou font pour
d'autres nfages. La chambre du capitaine a 10 pies
de long, à prendre du dedans de l'étambord ; fon bas
plancher defeend 3 pies { au-defîbus du pont , Se
baiffe un peu vers l'arriére : le tillac ou plancher qui
la couvre, s'élève 3 pies au-defTus du pont, Se il y
a une petite échelle pour defeendre fur le pont.
La hauteur du mât eft affez arbitraire ; on peut le
mettre plus long ou plus court ; il penche un peu vers
l'arriére. Le gouvernail a fix pouces d'épais par le
haut , Se eft par le bas de la même épaifî'eur que l'é-
tambord. La barre pafTe entre le banc Se la voûte de
la chambre du capitaine. Le timonnierfe tient devant
cette chambre. Le relèvement du tillac à l'avant Se
à l'arriére fert à faire écouler les eaux , fur-tout cel-
les que lancent les coups de mer. Les femelles , qui
font attachées avec des chevilles un peu au-defïbus
du carreau , enfoncent dans l'eau deux pies plus bas
que la quille ; leur largeur fe prend à diferétion ; Se.
comme elles iont deftinées à empêcher que le vail-
feau ne dérive , il s'enfuit qu'il faut les faire gran-
des , & qu'elles pourraient être encore plus grandes
qu'on ne les fait , li cette grandeur ne les rendoit
pas trop difficiles à manœuvrer. L'étrave & fa quille
font jointes enfemble par un lien de fer de chaque
côté. (Z )
* Bovez, f. m. pi. {Hift. mod.) prêtres idolâtres
des Sauvages de la Floride. Chaque prêtre a fon idole
particulière , &le Sauvage s'adrefl'e au piètre de l'i-
dole à laquelle il a dévotion. L'idole eu*invp-quéé
par des chants , Se la fumée du tabac eft fon offran-
de ordinaire.
BOYNE, (Géog.) rivière d'Irlande , dans le comté
de Lcinfter , qui fe jette dans la mer, au-deffous de
tieda.
BÔYNES , petite ville de France dans l'Orléanois ,
près de Pithivicrs.
BOZA, ( Géog. ) petite ville du royaume de
Hongrie.
* Boza , ( Commerce ) c'eit une efpece de bierre
ou liqueur forte en ufage chez les Turcs ; elle fe fait
avec de l'orge Se du millet qu'on cuit enfemble , &
qu'on laiffe enfuite fermenter : on dit que cette boif-
9G
B R A
fon n'eft rien moins qu'agréable , & qu'elle ne laine
pas d'enivrer lorfqu'on en boit d'une façon immo-
deree.
BOZANTIA, ( Géog. ) petite ville affez bien for-
tifiée de la petite Pologne , dans le Palatinat de Sen-
domir. . ,
BOZZO , ( Géog. ) rivière dans le duché de Mi-
lan , qui fort du lac majeur , & va fe perdre dans le
lac de Gavira , près de Bozzolo.
BOZZOLO , ( Géog. ) petite ville du Mantouan,
capitale d'une principauté de même nom , entre Man-
toue & Crémone. Long. 28. lot. 4a. S>-
B R
BRABANT, ( Géog. ) duché , & l'une des dix-fept
provinces des Pays-bas , bornée au nord par la Hol-
lande & la Gueldre ; à l'occident par la Zélande &c
la Flandre ; au midi par le Hainault & le comté de
Namur ; & à l'orient par i'évêché de Liège. Une par-
tie en appartient à la maifon d'Autriche , & l'autre
partie à la république des Provinces-Unies ; ce qui
le fait divifer en Brabant Efpagnol, ^ Brabant Hol-
ïandois. Bruxelles eft la capitale du premier , & Bois-
le-Duc du fécond. 11 s'y fait un très-grand commer-
ce de toiles , dentelles , &c
BRABEUTE , f. m. ( Hifi. anc. ) du Grec fyvAùç,
qui lignifie dijlributcur du prix , nom d'un officier pu-
blic chez les Grecs , qui préfidoit aux jeux folennels ,
& fur-tout aux jeux facrés. Cette charge , qui étoit
une efpece de magiftrature , pour juger de ceux qui
remportaient le prix à la courfe , la lutte , &c. étoit
fort confidérable , non-feulement chez les Grecs,
mais encore parmi les Perlés. Les rois eux-mêmes
l'exerçoicnt , c'étoit au moins parmi les familles les
plus conudérables de la Grèce , qu'on choififlbit ces
arbitres. Philippe de Macédoine s'en étoit fait attri-
buer la qualité , & en commettoit les fondions à un
de les officiers , lorfqu'il n'y pouvoit affifter lui-mê-
me ; ce que Démofthenes regarde comme un attentat
à la liberté des Grecs. Quand ces juges étoient fur le
point d'exercer leur charge , on les faifoit entrer pour
quelque tems dans un petit enclos, où on leur faifoit
prêter ferment , qu'ils jugeroient avec impartialité ;
cette formalité achevée, ils en fortoient la couronne
fur la tête , revêtus d'un habit de pourpre, portant à
la main une baguette pour marque de leur autorité ,
& alloient s'affeoir à une place diftinguée , qu'on
nommoit ^As-Spr , qui étoit regardée comme un afyle
inviolable : de-là , par une loi de Lycurgue , ils pro-
nonçoient leurs jugemens avec un pouvoir ablolu,
décernoient des peines contre les athlètes qui s'étoient
mal comportés , & desrécompenlés aux vainqueurs.
Les prix qu'ils diitribuoient s'appelloient @ç.a.Ct7ct , &
les couronnes ât/ûirteKliç , pour marquer que c'étoit
Thémis elle-même ou ladéeffe de la jullice, qui les
avoit pliées & formées de fes propres mains. Le nom-
bre des brabeutes n'étoit point fixé ; quelquefois il n'y
en avoit qu'un , mais plus ordinairement on en comp-
toit fept ou neuf. Ce font les mêmes qu'on appelloit
athlothetes-époptes,cd\-h-àire, juges ôc infpecleurs des
athlètes. Voye^ Athlothete & Époptes. (<?)
BRABORG , ( Géog. ) petite ville de Suéde , dans
la province d'Oftgothie , fur la rivière de Motala.
BRACCAS, {Géog. ) île de l'Amérique, près de
celle de Cuba , l'une de celles qu'on nomme Cayma-
nes ; elle eft inhabitée.
BR ACCI ANO , ( Géog. ) petite ville d'Italie , dans
îe patrimoine de Saint-Pierre , avec titre de duché ,
à 6 lieues & demie de Rome. Il y a des bains célè-
bres. Long. zç). 4Ô. bat. 4.Z. 4.
Bracciano , ( Géog. anc. & mod. ) un des plus
grands lacs d'Italie , proche la ville de même nom.
On le nommoit autrefois fabatinus ou fabatus locus.
B R A
BRACCIO DI M AIN A, (Géog.) la plus grande
des provinces de laMorée ; on l'appelle aulîi Zaconia.
* BRACELET , f. m. (Antiq.) ornement fort an-
cien que les Grecs & les Romains portoient au bras ,
comme le mot le fait affez entendre , & dont l'ula-
ge s'eft confervé parmi-nous. Le bracelet ancien a eu
différentes formes ; on en voit un à trois tours fur
une ftatue de Lucille , femme de l'empereur Lucius-
Verus. Ils étoient ia plupart ou d*or ou de fer , ou do-
rés ou argentés ; on entend ici par dorés & argentés ,
autre choie que ce que nous faifons fignifier à ces
mots , c'eft-à-dire qu'ils étoient couvarts de lames d'or
ou d'argent : on plaçoit quelquefois dans les bracelets y
ou un anneau ou une médaille. Ils étoient pour toutes
fortes de conditions. Les hommes en portoient ainû
que les femmes. Les Sabins , ditTite-Live , en avoient
d'or , & de fort pefans au bras gauche ; c'étoit une
marque arbitraire d'honneur ou d'efclavage : on en
récompenfoit la valeur des gens de guerre. On trou-
ve dans Gruter la figure de deux bracelets , avec cette
infeription : Lucius Antonius Fabius Quadratus , fils de
Lucius , a été deux fois honoré par Tibere-Céfar , de col~
liers & de bracelets. Quand l'empereur faifoit ce pré-
fent , il difoit : ^empereur te donne ces bracelets. Il y
avoit des bracelets d'ivoire : il eft à croire que ceux
de cuivre & de fer ne fervoient qu'aux efclaves &C
aux gens de bas état. Le nom ftarmilla vient à'armus ,
la partie fupérieure du bras; parce qu'anciennement
le bracelet fe mettoit au haut du bras. Capitolin dans
la vie d'Alexandre Severe , fe fert du terme dextro-
cherium , au lieu d'armilla : il raconte que cet empe-
reur avoit huit pies un pouce de hauteur ; que fa for-
ce répondoit à fa taille ; que fes membres y étoient
proportionnés ; qu'il traînoit leul un chariot chargé ;
qu'il faifoit fauter toutes les dents à un cheval d'un
leul coup de poing ; qu'il lui caffoit la jambe d'un coup
de pié ; &C qu'il donna d'autres preuves de fa vigueur
extraordinaire , qu'on peut voir dans l'hiftoire : mais
ce qui fait à notre fujet, c'eft qu'il avoit le pouce fi
gros , que le bracelet ou le aextrocherium de fa femme
lui fervoit de bague : d'où le père Montfaucon con-
clut qu'on portoit des bagues au pouce, comme aux
autres doigts.
Le bracelet n'eft plus parmi nous qu'à l'ufage des
femmes. C'eft quelquefois un ornement fort précieux
par les perles & les diamans dont il eft enrichi. Il fe
place vers l'extrémité du bras ; le portrait du mari
y eft affez ordinairement enchâffé : on en fait de ru-
bans, de cheveux , de crin , &c. Ils font également
portés par les peuples policés & par les nations bar-
bares. Ceux-ci les font ou de grains enfilés, ou de co-
quilles , ou de verrerie , &c. Ils faifoient jadis fi grand
cas de ces ornemens , qu'ils abandonnoient leurs
plus riches marchandif es , èc même facrifioient quel-
quefois la liberté de leurs pères, de leurs femmes &C
de leurs enfans , pour s'en procurer la poffeffion.
* Bracelet, f. m. che{ les Doreurs , Argenteurs ,
& autres ouvriers , eft un inftrument ou de cuir fim-
ple , ou de cuir rembouré , d'étoffe , ou de plulieurs
peaux miles les unes fur les autres , dont ils fe cou-
vrent le bras gauche au-deffus du poignet , afin de
pouvoir l'appuyer fortement contre la partie infé-
rieure du brunilloir, fans le bleffer , quand ils polif»
fent leurs ouvrages.
Bracelet, voyer Carpe.
BRACHBANT, ( Géog. ) on nomme ainfi un pe-
tit diftrief du Hainaut , où fe trouvent les villes de
Condé & de Leufe.
BRACHHUSEN , ( Géog. ) petite ville du comté
de Hoya , appartenant à l'élecleur de Hanovre.
BRACHIAL, adj. eft en Anatomie une épithete
que l'on donne aux différentes parties qui compo-
fent le bras ; c'eft dans ce fens que l'on dit les nerfs
brachiaux ,r art ère brachiale , le mufcU brachial, &c.
B R A
B R A
39*
fnaîs on donne plus particulièrement ce nom à l'ar-
tère qui eft placée le long de Y humérus , & à deux
mufcles dont l'un eft placé à la face interne & l'au-
tre à la face externe de ce même os , & font en con-
féquence appelles l'un brachial interne , & l'autre
brachial externe, ou anconé interne, f^oye^ AnconÉ.
Le brachial interne eft fitué tout le long de la par-
tie moyenne inférieure & intérieure de l'humérus à
laquelle il s'attache , & fe termine à une tubérofité
qui fe remarque à la partie fupérieure & externe du
cubitus.
Les nerfs brachiaux naifTent de l'union des cinq
dernières paires cervicales &c de la première dorfale
qui fe divilé principalement en fix rameaux remar-
quables. En 1697 M. Duverney en caraftérifa cinq
par ces noms , le mujculo-cutané , ou cutané externe ,
le médian , le cubital , le cutané interne , & le radial ,
& le fixieme a été appelle par M. Winflow nerfaxil-
laire ou articulaire , &c. Voye^ CUTANÉ EXTERNE ,
MÉDIAN , &c.
Outre ces gros nerfs brachiaux , il part plufieurs
petites branches des paires cervicales qui fe diftri-
buent aux épaules , à la poitrine , &c.
Brachio-CUIîITAL, (ligament en Anatomie.') c'eft
un ligament qui unit l'os du bras ou l'humérus avec
l'os du coude ou le cubitus. Voye^ Humérus , & Cu-
bitus.
BRACHIO-RADIAL , ( ligament en Anatomie ) c'eft
un ligament qui unit le rayon ou radius avec l'os du
bras ou Yhumerus. V. Humérus , & Radius. (Z.)
BRACKLL , ( Géog. ) petite ville d'Allemagne ,
dans le cercle de Veftphalie , fur la Nette , à cinq
lieues de Paderborn. Long. zG. 4J.lat. 5i. 46. Il y
a une autre ville de ce nom en Weftphalie , dansl'é-
véché d'Hildesheim.
BRACKENHEIM , ( Géog. ) petite ville fur la ri-
vière de Zaber , à 2 lieues de Hailbron , appartenan-
te au duc de Wurtemberg.
BRACKLEY , ( Géog. ) ville d'Angleterre , dans la
province de Northampton. Long. 16. z5.lat.5i.56.
* BRACHM ANES , f. m. pi. {Hift. anc. ) Gymno-
fophiftes ou philofophes Indiens , dont il eft fouvent
parlé dans les anciens. Ils en racontent des choies
fort extraordinaires , comme de vivre couchés fur la
terre ; de fe tenir toujours fur un pié ; de regarder le
foleil d'un œil ferme & immobile depuis ion lever
jufqu'à ion coucher ; d'avoir les bras élevés toute
leur vie ; de fe regarder fans ceffe le bout du nez , &
de fe croire comblés de la faveur célefte la plus infi-
gne , toutes les fois qu'ils y appercevoient une petite
flamme bleue. Voilà des extravagances tout-à-fait
incroyables ; & iî ce fut ainfi que les brachmancs ob-
tinrent le nom de Jages, il n'y avoit que les peuples
qui leur accordèrent ce titre qui fuifent plus fous
qu'eux. On dit qu'ils vivoient dans les bois , &C que
les relâchés d'entre eux , ceux qui ne vifoient pas à
la contemplation béatifîque de la flamme bleue , étu-
dioient l'Aftronomie , l'hiftoiie de la nature , & la
politique , & fortoient quelquefois de leurs deferts
pour faire part de leurs contemplations aux princes
& aux fujets. Ils veilloient de fi bonne heure à l'inf-
truâion de leurs difciples , qu'ils envoyoient des di-
recteurs à la merc , ii-tôt qu'ils apprenoient qu'elle
avoit conçu; & fa docilité pour leurs leçons étoit
d'un favorable augure pour l'enfant. On demeuroit
trente-iept ans à leur école , fans parler , touller , ni
cracher ; au bout de cetems, on avoit la liberté de
mettre une chemife , de manger des animaux , &c
d'époufer plufieurs femmes; mais à condition qu'on
ne leur révéleroit rien des préceptes fublimes de la
gymnofophic. Les brachmanes prétendoient que la
a ie eft un état de conception , éc la mort le moment
de la naiffanec; que l'aine du philofophe détenue
dans fon corps , eft dans l'état d'une chryiàlide , &c
qu elle fe débarrafie à l'inftant du trépas , comme
un papillon qui perce fa coque & prend fon eflbr.
Les évenemens de la vie n'étoient félon eux ni bons
ni mauvais ; puifque ce qui déplaît à l'un plaît à l'au-
tre , & qu'une même chofe eft agréable & defagréa-
ble à la même perfonne en différens tems : voilà l'a-
brégé de leur morale. Quant à leur phyfique , c'é-
toit un autre amas informe de préjugés : cependant
ils donnoient au monde un commencement & une
fin ; admettoient un Dieu créateur , qui le gouver-
noit & le pénétrait ; croyoient l'univers formé
d'élémens différens ; regardoient les deux comme
le réfultat d'une quinteffence particulière ; foûte-
noient l'immortalité de Famé ; & fuppofoient des
tribunaux aux enfers , &c. Clément d'Alexandrie en
iait l'une des deux cfpeces de gymnoiophiftes. Voye^
Philosophie des Indiens 6- Gymnosophistes.
Quand ils étoient las de vivre , ils fe brûloient ; ils
dreflbient eux-mêmes leur bûcher , l'allumoient de
leurs mains , & y entroient d'un pas grave &C ma-
jeftueux.
Tels étoient ces fages que les philofophes Grecs
allèrent confulter tant de ibis : on prétend que c'elt
d'eux que Pythagore reçut le dogme de la métemp-
fycofe. On lit dans Suidas qu'ils furent appelles
Brachmanes , du roi Brdchman leur fondateur. Cette
fefte iubfifte encore dans l'orient , fous le nom de
Bramenes ou Bramines. Voye~^ BRAMINES.
BRACHYGRAPHIE, f. f. {Grain. ) c'eft-à-dire;
l'art d'écrire par abréviations : ce mot eu compo-
fé de /3p«^t;V , brevis , & de i^tpco, Jcribo. Ces abré-
viations étoient appcllées notœ ; & ceux qui en fai-
foient profefîïon , notarii. Gruter nous en a confervé
un recueil qu'il a fait graver à la fin du fécond tome
de fes inicriptions , notœ Tironis ac Senecœ. Ce Tiron
étoit un affranchi de Ciceron , dont il écrivit l'his-
toire ; il étoit très-habile à écrire en abrégé.
Cet art eft très-ancien : ces feribes écrivoient
plus vîte que l'orateur ne parloit ; & c'eft ce qui a
fait dire à David , Lingua mea calamus feribœ veloci-
ter fcribzntis. Pf. 44. «Ma Iangueeft comme la plume
» d'un écrivain qui écrit vîte ». Quelque vîte que les
paroles foient prononcées , dit Martial , la main de
ces feribes fera encore plus prompte : à peine votre
langue finit-elle de parler, que leur main a déjà tout
écrit.
Currant verba licet , manus efl velocior illis :
Vix dum lingua tuum , dextra peregit opus.
M art. épig.
Manilius parlant des enfans qui viennent au mon?
de fous le figne de la vierge , dit :
Hic efl feriptor ericvelox , cuili liera verbum ejl,
Quiijuc notis linguam J'uperet , curjîmque loquentis
Excipiat longas , nova per compendia voces.
Manil. Alton, lib. IV. v. 197.
C'eft par de femblables expédiens , que certains
feribes que nous avons eus à Paris, fuivoient en écri-
vant nos plus habiles prédicateurs ; &: ce fut par ce
moyen , que parut , il y a environ trente ans , une
édition des fermons du P. Mabillon. ( F)
BRACHYSTOCHRONE, f. f. (Mêchamque.) eft
le nom que feu M. Bernoulli , profeileur de Mathé-
matique à Bâlc , a donné à une courbe ACB (Jîg.GS.
Médian?) dont la propriété eft telle qu'un corps qui
tombe du point A , en vertu de la pelanteur , le long
de la concavité de cette courbe, arrive de A en B
en moins de tems qu'il n'y arriveroit, s'il defeendeut
le long de tout autre courbe A DB , partant par les
mêmes points A, B , ou même s'il delcendoit le long
de la ligne droite A B.
Ce mot vient de deux mots Grecs, «avoir, ^aV.i/r-
toç, fuperlatifde fïf«y.vç, qui fignifie vite, prompt, 8c
Xfivoc, tems. La courbe bnuhyjlochrone s'appelle aulïi
courbe ou ligne de la plus vite defeente ,
392
B R A
BEI
Feu M. Bernoulli propofa aux Géomètres en 1697,
de déterminer quelle étoit cette courbe. Le problè-
me fut réfolu par M. Jacques Bernoulli Ton frère,
alors profeffeur de Mathématique à Eâle , par M.
Leibnitz , par M. le Marquis de l'Hôpital , & par M.
Newton. M. Bernoulli avoit averti les Géomètres
dans fon programme , que la ligne droite A B , paf-
fant par les deux points A , B , quoiqu'elle fût la plus
courte de toutes celles qu'on pouvoit faire paffer par
ces points , n'étoit pas néanmoins celle qu'un corps
pelant, tombant de^, devoit parcourir en moins de
tems ; & en effet , on trouva que c'étoit une cycloïde ,
ou plutôt un arc de cycloïde paffant par les points A ,
B, & dont le point A étoit l'origine. V. Cycloïde.
Il n'eft pas impoffible de faire fentir à ceux même
qui font peu verfés dans la Méchanique tranfeendan-
te, comment il peut fe faire que la ligne droite A B ne
ibit pas la ligne de la plus courte defeente. Car , ima-
ginons la ligne horiiontale E C qui partage la cour-
be ACB en deux parties AC, CB, telles que la par-
tie A C foit plus courte que A E, & la partie C B plus
longue que £ B ; il eft certain que le corps A arrive-
ra en C plutôt qu'il n'arriveroit en E , puiiqu'il au-
ra moins de chemin à faire. Il eft vrai qu'il employe-
ra enfui te plus de tems à parcourir CB , qu'il n'en
mettra à parcourir EB ; mais il faut remarquer que
les tems employés à parcourir les lignes AE , AC,
CB , EB , ne font point entr'eux comme ces lignes ,
parce que le corps ne les décrit pas d'un mouvement
Uniforme ; ainiï il ne doit pas paroître impoffible que
l'excès du tems par A E fur le tems par AC, foit plus
grand que l'excès du tems par CB fur le tems par
E B. Ainfi de ce que la ligne droite AB eft plus cour-
te que la ligne courbe A CB, il ne s'enfuit nullement
que la ligne droite A B doive être defeendue en moins
de tems que la ligne courbe A CB. L'efpece de rai-
fonnement métaphylique que nous venons de faire ,
peut bien fervir à faire foupçonner que la ligne de
la plus vite defeente peut être une courbe : mais ce
raifonnement ne fauroit jamais être une démonftra-
tion. C'eft par le calcul feul qu'on peut s'afîïïrer fi
ce qu'on a foupçonné eft vrai , & le calcul démontre
en effet qu'on a foupçonné jufte. Voici à peu près com-
ment on s'y prend pour déterminer la courbe de la
plus vite defeente. Soit ACB cette courbe, & ayant
pris un arc infiniment petit Ce, foit imaginé un arc
quelconque infiniment petit C O c, terminé aux
points C, c ; il eft évident que le corps pefant arrivé
en C, doit parcourir l'arc C c, en moins de tems que
l'arc C O c. Car s'il étoit moins de tems à parcourir
l'arc CO c , alors ce feroit ACO c B, & non A CB
quiferoit la courbe de la plus vite defeente, ce qui
eft contre l'hypothefe. Ainli la propriété de la cour-
be dont il s'agit , eft telle, qu'un de ies arcs quelcon-
ques infiniment petits Ce , eft parcouru en moins de
tems que tout autre arc infiniment petit CO c, paf-
fant par les mêmes points C, c.
Maintenant foient imaginés les points infiniment
proches € , c, & foit cherchée fur la ligne horiionta-
le Q L, la pofition du point K, tel , que C Kc foit
parcouru en moins de tems que tout autre chemin
C k c , paffant par C & c , on trouvera ( Voye^ Ré-
fraction) en menant les lignes K R, cr, per-
pendiculaires à QL, que le finus de l'angle CKR
doit être au finus de K c r, comme la vîteffe le long
de C K à la vîteffe le long de K c : d'où il s'enfuit que
la courbe cherchée doit être telle que le finus de l'an-
gle qu'un de fes côtés quelconque infiniment petit
Ç K fait avec la verticale K R , foit proportionnel à
la vîteffe en K ; laquelle vîteffe eft comme la racine
«marrée de la hauteur d'où le corps eft parti. Or en
achevant le calcul , ou trouve que cette propriété
convient à la cycloïde. Voye{ Cycloïde.
Si l'on inppoibit qu'un corpufcule de lumière tra-
versât l'atmofphere , de manière qu'il arrivât d'urt
point à un autre dans le plus court tems poffible , la
courbe qu'il décriroit feroit une braehyjîoehrone, pour-
vu que l'on fît certaines hypothefes fur la deniîté du
milieu. Voye^ Réfraction, Action, Causes fi-
nales.
Voyez dans les Mémoires de PAcadem. de ljl8.
deux folutions du problème de la braehyjîoehrone, don-
nées par M. Bernoulli , & toutes deux fort fimplcs.
Galilée a cru fauffement que la braehyjîoehrone étoit
un arc de cercle. La Géométrie de fon tems n'étoit
pas encore affez avancée pour réfoudre ce problè-
me.On trouve dans le fécond volume de la Méchanique
de M.Euler, imprimé à Petersbourg ijj6. une folu-
tion très-élegante de ces problèmes &c des théorèmes
fort limples & fort généraux fur les propriétés de la
braehyjîoehrone; la folution du problème devient beau-
coup plus difficile lorfqu'on fuppofe que le corps fe
meut dans un milieu réfiftant, parce qu'alors la vî-
teffe ne dépend pas de la hauteur feule. M. Euler a
donné auffi la braehyjîoehrone pour ce cas-là, ce que
perfonne n'avoit encore fait avant lui. (0)
BRACHITES, f. m.(Hijl. ecclef.) feâe d'héréti-
ques qui parurent dans le troifieme fiecle.lls fuivoient
les erreurs de Manés & des Gnoftiques. (G)
BRACON, f. m. (Machine hydrauliq.') on appelle
bracon d'un vanteau, d'une porte d'écluiè, la confo-
le, la potence, ou l'appui qui foùtient cette porte.
(K)
BRACONNIER , f. m. ( Ckafe. ) celui qui chaffe
fans droit & fans permiffion fur les terres d'autrui.
Les ordonnances décernent des peines très-grieves
contre les braconniers. (//)
« Tous tendeurs de lacs, tiraffes, tonnelles, trai-
» neaux , bricolles de corde & de fil d'archal , pièces
» & pans de retz, colliers, ailiers de fil ou de foie,
» dit ï ordonnance du roi , du mois de Mai 1 66 c) , feront
» condamnés au fouet pour la première fois , & en
» trente livres d'amende ; & pour la féconde , fufti-
» gés , flétris, & bannis pour cinq ans hors de la maî-
» trife, foit qu'ils ayent commis délit dans nos forêts ,
» garennes, & terres de notre domaine , ou en celles
» des eccléfiaftiques , communautés , & particuliers
» de notre royaume , fans exception ».
BRADANO, (Géog.) rivière dans la Bafilicare ,
au royaume deNaples, qui prend fa fource dans l'A-
pennin, & fe décharge dans le golte deTarente.
BRADFORD,( Géog. ) contrée d'Angleterre ,
avec titre de comté , dans la province de Shrop.
* BRADUPEPSIE, f. f. ou COCTION LENTE,
(Médecine.} maladie de l'eftomac, dans laquelle les
alimens ne font digérés qu'avec peine & lenteur. La
digeftion paffe pour lente, quand au lieu de s'exécu-
ter dans l'efpace de vingt-quatre heures , elle ne fe
fait que dans l'efpace de pluiieurs jours. Voye^ Es-
tomac, Digestion. Bradupepjïe eft compofée de»
fyitSvç, lent, tardij', & de sresr?», cuire, digérer.
BR ADIE , Géog. ) ville de Moldavie lituée fur la
rivière de Pruth.
BRAGANCE, ( Géog. anc. & mod. ) ville de Por-
tugal avec château, capitale du duché de même nom,
dans la province deTra-losmontes. La maifon régnan-
te de Portugal' en porte le nom. Lon. 11. 20. lat 41,
47-
Quelques auteurs prétendent que c'eft le Ccelio-
briga des anciens.
BRAGANZA , ( Géog. ) petite ville fur les fron-
tières de la Marche Trevifane dans le territoire de la,
république de Venife.
BRAGUE , f. f. ou BR ACQUE , DRAGUE, {Ma-
rine. ) tous ces termes font fynonymes.
La brague eft une corde qu'on fait paffer au-tra-
vers des affûts du canon, & qu'on amarre par les
bouts à deux boucles de fer qui font de chaque côté
des
B R A
fie; iabords : les bragues à fervent retenir les affûts du
Canon , & empêchent qu'en reculant ils n'aillent
frapper jufqu'à l'autre bord du vaifleau. (Z)
Brague, ( Géog. anc. & mod.) grande ville de
Portugal , avec archevêché dont l'archevêque elt pri-
mat du royaume, fur la rivière de Cavédo. Lon.g.
JO. lit. 41.30. Ptolomée la nomme Braccara auguf-
ta , & l'itinéraire d'Antonin , Bragara.
BRAH1LOW, ( Géog. ) petite ville de Valachie,
à l'endroit où la rivière de Seretfe jette dans le Da-
nube.
* BR AI , f. m. mélange de gomme , de réfine , de
poix , & d'autres matières vifqueufes , ou de poix li-
quide & d'huile de poiflon , dont on fe fcrt pour le
calfat des bâtimens de mer. Voyei Goudron.
* Brai ; on entend encore par ce mot l'efcourgeon
& l'orge broyé pour la bierre. Le brai pris en ce lens
gâte les moulins à blé ; & les feigneurs ne peuvent
contraindre de le porter à leurs moulins , à moins
qu'ils n'en aient de particuliers pour cette mouture.
BRAID - ALBAIN ou ALBANIE , province fep-
tentrionale de l'EcoiTe , entre le Lochaber , le pays
d'Athol &C d'Argile. La Tay y prend fa fource.
BRAIE , f. f. ( Marine. ) c'eft ainfi qu'on nomme
des morceaux de toile poiffée ou de cuir goudronné
qu'on applique autour d'un trou pratiqué dans le til-
lac pour faire parler le mât ; ce qui empêche que l'eau
de la pluie ou des coups de vagues ne tombent à fond
de cale. On applique aufTides braies à l'ouverture par
où paffe la barre du gouvernail ; parce que de gros
tems , & fur-tout de vent arrière , les vagues qui fau-
tent fouvent par-defîtis la dunette , rempliroient la
fainte-barbe , où il n'y a ni dalots ni rnaugeres pour
la faire écouler. Voye^OxhOT & Maugere. (Z)
Braie , ( Cordai:. ) Voyc^ Broyé.
BRAIE, en terme de Cirier, efl un infiniment fur
lequel on écache la cire. Voy. Ecacher. Il eit com-
pote d'un banc garni d'un anneau dans lequel eft re-
tenue la brait proprement dite ; c'elt- à-dire , une plan-
che de bouis jouant dans cet anneau, fous laquelle on
pétrit la cire.
BRAIE , chéries Imprimeurs , c'efl une peau ou par-
chemin préparé pour l'ufage de l'Imprimerie, qui fcrt
à recouvrir le grand tympan.
On appelle encore braie une feuille de papier gris
ou une maculature découpée en frifquette , qui icrt
à faire des épreuves. V. Epreuve , Maculature,
Tympan, Frisquette.
* BRAILLE , f. f. ( Pèche & Comm. ) pelles de bois
dont on fe fcrt dans la falaifon des harengs, foye^
Brailler.
* BRAILLER , v. ad. ( Pèche. ) c'efl remuer le
•poiflon avec la braille lorlqu'il efl falé , afin qu'il
prenne mieux la falure. On ne braille que quand on
l'aie à terre : quand on encaque d'abord le poifîbn ,
on le tient dans des paniers plats, & on le faupou-
dre à chaque rangée ou lit qu'on en fait dans la ca-
que , obfervant quelquefois de le tourner & retour-
ner clans les paniers avant que de l'encaquer.
Brailler , ( Cha/Je. ) on dit qu'un chien braille
quand il crie fans .voix.
BRAILLEUR , f. pris adj. ( Manège. ) efl un che-
val qui hennit très-fouvent. Ce défaut eit extrême-
ment incommode , fur-tout à la guerre. (V)
B HAINE, (Géog.) petite ville de France à quatre
lieues de Soiflbns.
Braine-l'aleu , petite ville des Pays-bas Autri-
chiens , prés de Bruxelles.
Braine- le -comte, petite ville du Hainaut à
cinq lieues de Mons. Lon. 21. 46. lac. 3o. Ji.
* lîRAISE, f. f. ( Boulangers & Patiffiers. ) c'eft
ainfi qu'on appelle le charbon éteint. Ceux qui crai-
gnent la vapeurdu charbon noir le fervent de braife:
elle fe vend au boifleau; on en diltingue de deux ef-
Tonu IL
B R A
395
peces ; 'la menue &Ia grofl'e : celle-ci eit un peu plus
chère que l'autre.
* Braise , (faire la) Verrerie. C'eft une des fonc-
tions de tifeur. Pour faire la braife. le tueur prend !e
grand rable , il en paffe le bout dans le tifonnier , Se
égalife la braife par-tout ; puis avec fa pelle à filer il
jette dans le four trois , quatre , ou cinq pelletées de
charbon, enfuite il va à l'autre tifonnier, il en fait au-
tant , & revient au premier, jufqu'à ce qu'il ait rem-
pli le foyer environ aux deux cinquièmes : il le 1 a i lie
clans cet état à peu-près un quart d'heure, jufqu'à ce
que le charbon ait pris feu ; alors il recommence la
même manœuvre qu'il a faite , jufqu'à ce que la bmife
le foit : quand la braife efl faite, le foyer en efl rem-
pli d'environ les trois quarts de fa hauteur ; alors les
ouvriers font appelles au travail. Voye^ l'article
Verrerie.
BRAKERNES , ( Géog. ) petite ville de Norvè-
ge j dans la province d'Açgcrhus , fur le Dramme.
- BRALIN , ( Géog. ) ville & château de la baiîe Si-
léfie, à peu de chftance de Martemberg.
BRAMA ou BRAHMA, f. m. (H:Jt. mod.) l'un
des principaux dieux du Tonquin, entre la Chine Se
l'Inde. Il ell adoré par les lectateurs de Confucius.
Ces idolâtres font des facrifices aux fept planètes,
comme à des divinités : mais ils ont encore cinq ido-
les pour lefquelles ils ont une vénération particuliè-
re ; l'avoir , quatre dieux nommés Brama , Raumu ,
Betolo , Ramonu ; & une déefle qu'ils appellent Sa-
tibana. Le roi , les mandarins, c'efl-à-dire les fei-
gneurs de la cour, & les doctes du pays , n'adorent
guère que le ciel. Tavernier , Voyage des Indes. Voy*
Chinois c^Bramines. (G)
BRAMA ou BREMA , ( Géog. j) ville & royau-
me d'Afie dans l'Inde, au-delà du Gange, fur la
rivière de Menan , aux frontières du royaume de
Tonquin & de Pégu : elle appartient au roi d'Ava.
Les habitans fe nomment les Bramas.
BRAMANT, ( Géog. ) petite vUle de Savoie dans
la province de Maurienne fur la rivière d'Arc.
BRAMAS , ( les ) Géog. peuples d'Afie qui habi-
tent les extrémités du royaume d'Ava & de Pégu.
BRAMER , v. n. (.Ckaffe. ) Ce mot n'a point
d'autre ufage que de défigner le cri du cerf.
* BRAMîNESo« BRAMENES , ou BRAMINS ou
BRAMENS , f. m. pi. ( Hiji. mod.){e&e de philofo-
phes Indiens . appelles anciennement Brac'
Voyei BrAchmanes. Ce font des prêtres qui révè-
rent principalement trois choies , le dieu Fo , fa loi ,
êv les livres qui contiennent leurs conflirutions. Ils
alîïircntque le monde n'ell qu'une illùfion, unfonge,
un prellige , & que les corps pour ciller véritable-
ment , doivent cefler d'être en eux-mêmes , & fe
confondre avec le néant , qui par fa fimplici
la perfection de tous les êtres. Ils font confifter la
fainteté à ne rien vouloir , à ne rien penier , à ne
rien féntif , & à ii bien éloigner de l'on efprit toute
idée , même de vertu , que la parfaite quiétude de
l'amc n'en foit pas altérée. C'eil le profond afloupif-
fement de l'efprit, le calme de toutes les puiifances,
la fufpenfion abfolue des (eus , qui fait la perfection.
Cet état reflemble fi fort au fommeii , qu'il paroît que
quelques grains à'opium fanctiiîeroient un Bramme
bien plus sûrement que tousfes efforts. Ce quienimc
a ete attaqué clans les Indes, èv défendu avec cha-
leur : du reite ils méconnoiflent leur première ori-
gine : le roi Brachman n'eit point leur fondateur. Ils
fe prétendent iffus de la tête i\u dieu Brama , dont le
cerveau ne fut pasfcul fécond; fes pies . fes mains,
fes bras, fon eftomac , fescuiffes, engendrèrent aufïï,
mais des êtres bien moins nobles que les Bramines.
Ils ont des (ivres anciens qu'ils appellent facrés. Ils
confervent la langue dans laquelle ils ont ete écrits.
Us admettent la méîempfycôiè, Us prétendent que la
Ddd
394 B R A
chaîne des êtres eft émanée du fein de Dieu , & y
remonte continuellement , comme le fil fort du ven-
tre de l'araignée &y rentre : au relie il paroît que ce
fyftème de religion varie avec les lieux. Sur la côte
de Coromandel Wiftnou eft. le dieu des Bramines ;
Brama n'eft que le premier homme. Brama reçut
de Wifïnou le pouvoir de créer : il rit huit mondes
comme le nôtre,dontil abandonna l'adminiltration à
huit lieutenans. Les mondes périffent & renailient :
notre terre a commencé par l'eau , &c finira par le
feu : il s'en reformera de fis cendres une autre , où
il n'y aura ni mer ni vicifhtude de faif'ons. Les Bra-
mines font circuler les âmes dans différens corps ; cel-
le de l'homme doux pafTe dans ie corps d'un pigeon ;
celle du tyran dans le corps d'un vautour ; & ainh
des autres. Ils ont en conféquence un extrême ref-
peft pour les animaux ; ils leur ont établi des hôpi-
taux : la piété leur fait racheter les oifeaux que les
Mahométans prennent. Ils font fort refpeÛés des
Benjans ou Banians dans toutes les Indes ; mais fur-
tout de ceux de la côte de Malabar, qui pouffent
la vénération jufqu'à leur abandonner leurs épouf es
avant la conibmmation du mariage , afin que ces
hommes divins en diipofent félon leur fainte volon-
té , & que les nouveaux maries 1 oient heureux & bé-
nis. Ils font à la tête de la religion ; ils en expliquent
les rêveries aux idiots , & dominent ainli fur ces
idiots , & par contre-coup fur le petit nombre de
ceux qui ne le font pas. Us tiennent les petites écoles.
L'auftérité de leur vie , l'oiïentation de leurs jeûnes,
en impofent. Ils font répandus dans toutes les Indes :
mais leur collège eft proprement à Banaflî. Nous
pourrions pouiier plus loin l'expofition des extrava-
gances de la philolbphie & de la religion des Brami-
nes : mais leur abiurdité , leur nombie & leur durée,
ne doivent rien avoir d'étonnant : un chrétien y voit
l'effet de la colère célefte. Tout fé tient dans l'en-
tendement humain ; l'obtcurité d une idée fé répand
fur celles qui l'environnent : une erreur jette des té-
nèbres fur des vérités contiguës ; & s'il arrive qu'il
y ait dans une fociété des gens intéreffés à former ,
pour ainfi dire , des centres de ténèbres , bien-tôt le
peuple le trouve plongé dans une nuit profonde.
Nous n'avons point ce malheur à craindre : jamais les
centres de ténèbres n'ont été plus rares & plus reffer-
rés qu'aujourd'hui : la Philolbphie s'avance à pas de
géant , & la lumière l'accompagne ôc la fuit. Voye^
dans la nouvelle édition de M. de Voltaire la lettre
d'un Turc fur les Bramines.
BRAMPOUR. , grande ville d'Afie , capitale du
royaume de Candish, qui eft tributaire du grand Mo-
gol. Les habitans font idolâtres. Il s'y fait un grand
commerce de toiles de coton. Long. q5. lai. zi. 10.
BRANCA, (Géog.)ou L'ISLE-BLANCHE, l'une
des îles du cap-Verd.
BRANCARD , f. m. affemblage de plufieurs pie-
ces de bois de charpente , fur lequel on place des
pierres ou autres fardeaux d'une grande pelanteur ,
quand on craint d'en gâter la forme par des chocs.
On donne le même nom à une efpece de grande ci-
vière à bras & à pies , fur laquelle les crocheteurs
transportent les chotes fragiles , comme glaces , bu-
reaux , buffets , &c.
BRANCARD , terme de Charron ; ce font deux pièces
de bois longues, quarrées , un peu courbées, qui font
enchâffées à mortoife dans le bout du liffoir de der-
rière , & pofent fur l'avant-train : elles peuvent avoir
environ quinze ou feize pies de long , fur fix pouces
d'équarriffage. f^oye^ la figure PI. du Sellier.
* BRANC ASTRE, ( Gèog. anc. & mod. ) village
du comté de Norfolck , autrefois grande ville. C'é-
toit le Brannodunum des Latins.
* BRANCE, f, m. ( (Econom. rufiiq. ) efpece de
B R A
blé blanc afTez commun en Dauphiné : on le confond
avec le fandelium des Latins, & le riguet & Yaripquc
de nos ancêtres. Voyt{ Blé.
BRANCHES , f. f. ( Jard. ) Les branches font les
bras du corps de l'arbre ; ce font elles qui lui uonnent
fa figure. Le bourgeon s'étend peu-à-peu en branches
portées collatéralement, & compofëes des mêmes
parties que la tige. Ces branches s'étendent enfuite,
s'élargilîent, & le divifent en ramilles , d'où fortent
quantité de feuilles. Elles croiffent à l'œil de la queue
de la feuille , & produifent des fleurs , enfuite des
fruits, qui fe convertiffent en femence pour la pro-
pagation de l'efpece.
L'agitation des branches caufée par le vent eft aux
arbres, cequ'eftaux animaux l'impulfion du cœur:
inflexibles comme les os , elles pourroient fe rompre :
pliantes Ôc élaftiques comme elles font, elles fe prê-
tent & réliftent à la violence des vents.
On compte des maitreflés ou mères branches ; des
branches petites & foibles ; des branches à bois , à
fruit , chifonnes , gourmandes , veilles , aoutées . ôc les
branches de faux bois.
Les tranches chifonnes , qui font courtes & fort me»
nues , feront retranchées lors de la taille d'un arbre»
Les branches gourmandes font celles qui fortent des
mères branches ou du tronc , bien droites , greffes &
longues^
Les branches à bois font celles qui étant les plus
groffes tk pleines de boutons plats , donnent la forme
à un arbre fruitier , 8c doivent fe conlerver en partie.
Les branches à fruit font celles qui naiffent plus foi-
bles que les branches à bois , avec des boutons ronds ;
ce font elles qui donnent les fruits, ôc qu'on doit con-
lerver.
Les branches de faux bois font celles qui croiffent
hors des branches taillées de l'année précédente i ou
qui étant venues , font groffes où elles devroient être
menues , &C qui ne donnent aucune marque de fécon*
dite : on les coupe ordinairement.
Les maitrelfes branches ou mères branches , font les
plus hautes branches de l'arbre, & d'où parten tou-
tes les autres.
Les branches veules , qui après leur accroiffement
font longues Se fort menues , fans promettre aucu-
ne fécondité , fe coupent comme n'étant propres à
rien.
La branche aoutée fe dit quand , après le mois d'Août,'
elle a bien pris fa croiffance , s'endurcit , &c prend
une couleur noirâtre. Si elle demeure verte ôc velue ,
elle n'eft pas bien aoutée. ( K )
* On a tranfporté par métaphore le nom de bran*
che , de l'arbre où il eft pris an propre , aux pièces
d'une infinité de machines , dans lesquelles ces pie-
ces font regardées comme des parties analogues à la
branche dans l'arbre. Voye^-en des exemples ci-deffous.
Branche , en Généalogie, fe prend quelquefois
pour un rejetton, ou pour une famille iffue d'une
autre ; ce que les généalogiftes appellent aujourd'hui
féconde ou troifieme branche.
Branche , en Anatomie ; c'eft un nom qui fe don-
ne à quelques productions d'autres parties qui en font
conlîdérées comme le tronc.
Les artères principales fe divifent en branches , 8c
ces branches fe fubdivitent en rameaux. V. Artère.
La cinquième paire de nerfs fe divife en trois bran'
ches , & chacune de ces branches fe fubdivile en d'au-
tres rameaux. /^ov^Nerf & Paire.
Les branches ou cuijjes du clitoris , qui font comme
les racines des deux corps caverneux du clitoris ,
font de même attachées au bord de la branche de l'os
ifchium , oii elles fe terminent peu-à-peu , quoi qu'u-
ne portion du tuyau membraneux paroilié dans quel-
ques-unes s'étendre jufqu'à la tubérolité. foy. CLI-
TORIS , ïschium , &c. Elles lbnt trois fois aufiî Ion-
B R A
gués que le tronc ordinaire du clitoris même ou
des cuiffes.
Les branches antérieures de la moelle allongée ou
fes groffes branches , que l'on nomme auffi jambes an-
térieures de cette moelle ; pédoncules du grand cer-
veau , bras de la moelle allongée, cuiffes de la moelle
allongée, font deux faifceaux médullaires très-con-
fidérables , dont les extrémités antérieures s'écartent
l'une de l'autre , & les extrémités pouerieures s'u-
nifient, de forte que les deux faifceaux représentent
un V romain. Leurs extrémités antérieures paroil-
lent fe perdre au bas des corps cannelés. Les petites
branches ou branches pofiérieures de la moelle allon-
gée, font des productions latérales de la protubé-
rance annulaire , qui vont fe perdre dans le cervelet.
On nomme auffi ces petites branches , jambes pojlé-
ricures du cervelet , pédoncules du cervelet. ( Lj
BRANCHE de courbe {terme de Géométrie). Pour en-
tendre ce que c'eft que branche de courbe , imaginez
une courbe géométrique , dont on ait l'équation en x
& en y , x repréfentant les abfciffes, &c y les ordon-
nées, (^oye^ Courbe, Abscisse, Ordonnée, &c)
11 elt évident,
i°. Qu'en prenant x pofitive , y aura un certain
nombre de valeurs correfpondantes à la même va-
leur de x.
20. Qu'en prenant x négative, y aura de même
un certain nombre de valeurs correfpondantes à la
même x.
Or la courbe a autant de branches que y a de va-
leurs répondantes aux x tant pofitives que négatives.
Voye^ à l'article Couree pourquoi les ordonnées
pofitives fe prennent du même côté de l'abiciffe ,
& les négatives du côté oppofé.
Au refte il efl: bon d'obferver que les Géomètres
n'ont pas encore bien fixé la figninYation du mot
branche. Par exemple , foit une courbe qui ait pour
équation yz=.~-\-x-\-\a, on regarde d'ordinaire
cette courbe comme n'ayant qu'une feule branche ,
parce que y n'a qu'une feule valeur. Cependant
cette branche elt quelquefois comptée pour deux ,
parce qu'elle s'étend à l'infini du côté des x pofi-
tives, 6c du côté des x négatives. Introd. à Vanalyfe
des Lignes courbes par M. Cramer.
On appelle branche infinie une branche de courbe
qui s'étend à l'infini.
L'hyperbole & la parabole ont des branches infi-
nies. Mais le cercle &c l'cllipfe n'en ont point ; ce
font deux courbes qui rentrent en elles-mêmes.
Les branches infinies d'une courbe font ou parabo-
liques ou hyperboliques.
Les branches paraboliques font celles qui peuvent
avoir pour afymptote une parabole d'un degré
plus ou moins élevé. Par exemple , la courbe dont
l'équation feroit y = — 1 , auroit une branche
infinie parabolique, qui auroit pour afymptote une pa-
rabole ordinaire dont l'équation leroit j-= ^— . En
effet -v étant infinie , l'équation le réduit à y = —
qui eft celle de la parabole ordinaire. De même fi
1 équation etoit y =. — -f- - ; on trouveroit que
la branche infinie auroit pour afymptote une parabole
du troifieme degré y = -^- .
Les branches hyperboliques font celles qui ont pour
afymptote une ligne droite ; elles peuvent auffi avoir
pour afymptote , une hyperbole d'un degré plus ou
moins élevé. Par exemple, la courbe.y = -^— - -f- —
dont nous venons de parler, fe réduit à j= —
torique x = o , elle a pour afymptote l'ordonnée
infinie qui pâlie par l'origine, év elle peut avoir auili
Tome II.
B R A 395
pour afymptote l'hyperbole ordinaire."
De même la courbe y=z ^- -f- -^ a pour afymp-
tote l'ordonnée infinie , qui paffe par le point ou
x=o ; & elle a auffi pour afymptote une hyperbole
cubique.
Il elt vifible que toutes les branches infinies font OU
hyperboliques on paraboliques. Car foit dans l'équation
d'une courbe y exprimée en x par une ferle dont tous
les termes foient réels , il efl: évident que quand x
fera infinie ou infiniment petite , toute cette équa-
tion fe réduira à y = xm, tous les autres termes étant
alors regardés comme nuls. Or la branche fera para-
bolique fi m eft politif & plus grand que i, &c hy-
perbolique, fi m eft négatif ou o , ou i. V. Série.
Au reffe il ne faut pas croire que cette équation
y = xm qui détermine fi une branche efl hyperbolique,
ou parabolique , foit fiiffifante pour connoître le nom-
bre &la pofition des branches. Par ex. foit y = — -f-
\/a x ; en faifant x infinie , on a y = — & l'on
voit que la branche efi parabolique. De plus, on eft:
tenté de croire que cette courbe aura comme la pa-
rabole deux branches infinies, l'une du côté des x
pofitives , l'autre du côté des x négatives. Mais on
feroit dans l'erreur fi on le penfoit ; car x étant né-
gative, l'ordonnée y = -Ç + \/a x fera imaginaire.
On peut bien négliger \/a x vis-à-vis de — , Iorf-
que \/a x & — font tous deux réels : mais Iorfque
\/a x devient imaginaire , alors ce terme Va x rend
imaginaire —, & on ne fauroit conferver l'un fans
l'autre. Je fuis le premier qui aie fait cette remarque.
Voye^ les Mon. de Cacad. royale des feiences de Prujfe,
an. IJ46. f^oyei ■ aufii Rebroussement.
On trouvera une. théorie tres-compiette des bran-
ches infinies des courbes dans le huitième chapitre de
l' Introduction à Vanalyfe des lignes courbes par M. Cira-
mer. Il y donne la méthode de déterminer les diffé-
rentes branches d'une courbe, & leurs alymptotes
droites ou combes. Comme cette théorie nous con-
duiroit trop loin , nous renvovons là - defius à ion
ouvrage. On trouve auffi d'excellentes choies .111 ce
fujet dans les Ufages de fanaly/e de Dejcarus, par M.
l'abbé de Gua. (O)
BRANCHES dé 'ogives , ( Architecture & Coupe des
pierres. ) ce font les nervures des voûtes goti
qui font faillie lur le nud de ces voûtes. /'*. Nerf.
w
* Branche ou \ frge de balance ; c'eft cette
longue pièce de ter , de bois , ou de cuivre , qui fait
une des parties principaies de la romaine, & lur la-
quelle font marqués les points qui defignent les poids
des corps qu'on pefe. V, Balance cr Romaine.
BRANCHES, terme de Bimblotier , faijeur de balles
& de dragées pour les armes a feu : on appelle ainfi le
jet principal auquel toutes les dragées tiennent par
un jet particulier. Ces branches lont formées dans la
gouttière du moule. Voye^ , fig. 6. PL de la fonte
des dragées au moule, les dragées qui tiennent par
autant de jets à l'arrête inférieure de la branche , &c
l'article FoNTE des dragées moulées.
Franche , terme de rivière & de Marchand de bois ;
il le dit de la partie d'un train qui forme un coupon.
Il a quatre branches ; lavoir, deux de iabourage, &
deux de rive.
La branche a lix miles , &: une petite mile nommée
accoture. Voye:^ Train.
* BRANCHE, le dit, che^ les Charrons, des deux
pièces de bois qui font au-derriere du train d'un car-
relle , vis-à-vis les montans , & qui en foûtiennenî
les arçboutans. C'eft fur ces branches que les laquais
Dddij
396
B R A
fe tiennent debout, lorfque la livrée efl nombreufe.
Branche, ta termes d'Epingïur , fe dit propre-
ment du brin ou du corps de l'épingle , lorsqu'une de
{"es extrémités efl en pointe , & l'autre prête à rece-
voir la tête, Voye^ Epingle.
BRANCHE de la bride, ( Eptronriur. ) ce font deux
pièces de fer courbées , qui portent l'embouchure ,
les chaînettes , la gourmette , & qui font attachées
d'un côté à la têtière , & de l'autre aux rênes , pour
affujettir la tête du cheval. Fiaye^ Embouchure ,
Chaînette , Gourmette , Tétiere ,Rene, &c
On dk branche hardie, en parlant de celle qui ra-
mené. Voyei Ramener. On forgeoit autrefois une
branche pour relever , qu'on appelloit branche flaque :
elle n'efl plus en ufage ; parce que celui des bran-
ches à genou elî beaucoup meilleur. Pour faire une
branche Iiardie , les Eperonniers placent le touret au-
delà de la ligne du banquet , à l'égard de l'encolure ;
& la branche efl flaque ou foible , li le trou du tou-
ret elt placé au- deçà de cette ligne par rapport à
l'encolure. Voye^ Touret , Banquet 3 Enco-
lure, &c
Le coude de la branche eit cette partie de la bran-
che qui prend naiffance au bas de l'arc du banquet ,
vis-à-vis du fonceau ou du chaperon , qui forme un
autre arc au-dellbus du banquet. Voyt\ Fonceau,
Chaperon. Le coude d'une branche prend un tour
plus ou moins grand , félon que l'on veut fortifier ou
affoiblir la branche.
Branche de mors. Les meilleures branches de mors
font de l'invention du connétable de Montmorenci ,
qu'on appelle à caufe de cela , à la connétable. De
quelque côté que les branches du mors aillent , la bou-
che du cheval va toujours au contraire. Vous tirez
la bride , év ce mouvement tire les branches en-haut ,
$ la bouche va en-bas. L'a£tion de la branche de la
bride reffemble à celle du levier. Voici les noms des
différentes efpeces de branches : branche droite à piflo-
let , branche à la connétable , branche à la gigotte , bran-
che à genou , branche françoife : on peut en voir la dei-
cription dans Solleyfel , Newcaitle , &c. & la figure
en A O , PI. de t 'Eperonnier , fig. 22.
* BRANCHES, terme de Manufacture d'étoffe , de
laine , de foie , de gafe,lkc. c'eft une des portions dans
lefquelles une chaîne efl divifée. Voye^ Chaîne. La
chaîne efl difhibuée en portées ; la portée en bran-
ches , & la branche en fils. La branche efl une demi-
portée. La quantité de fils dont elle ell compolée,
varie félon la qualité de l'étoffe.
Branche , en terme de Fourbiffeur , efl une partie
de la poignée faite en demi-cercle , qui parle d'un
bout dans l'œil au-dellbus de la poignée , & de l'au-
tre bout dans le pommeau au -délais. Voye^ Poi-
gnée & Pommeau. La branche efl garnie d'une
amande & d'un bout de revers. Voye^ Amande &
Bout de revers , & la figure PI. du Cifcleur-Da-
mafquineur.
* Branche , terme de Nattier ; c'efl ainfi que ces
ouvriers appellent les portions dont un cordon de
natte efl formé. Un cordon de natte a trois branches,
& chaque branche peut avoir depuis quatre brins juf-
qu'à douze , félon 1 epaiffeur & la force qu'on veut
donner à la natte.
BRANCHES , ne fe dit, che{ les Rubanniers , que
dans l'ouvrage des velours , & s'entend de chaque
portion de chaîne, quoique de différentes couleurs,
ou d'une feule, contenue fur chacun des petits ro-
quetins qui compofent lefdites branches. Il en a été
parlé plus au long à l'article Allonges des poten-
ceaux. Voye^ RoQUETiN.
* Branche , en Verrerie en plat ; c'eft une planche
aiguifée en pointe par un bout, & que le fouet fait
entrer dans l'orifice de la baffe qui lui efl préfentée
par l'ouvrier , pour lui faciliter l'ouverture du plat ,
B R A
en polir les bords , & former l'ourlet. Voytz Verre-
rie en plat, Fouet, 6* Bosse.
* BRANCHE de vigne, (Antiq. ) La branche devigne
étoit chez les Romains la marque des centurions. V.
Centurion.
* Branche de cyprès , ( Commerce. ) c'efl une
efpece de droit de balife qui le paye au bureau des
Fermes établi à Blaye , par chaque vaiifeau qui vient
de Bordeaux , Libourne , & Bourg.
BRANCHER, BRANCHE, voy. Fourches. (O)
* Brancher , en Verrerie ; c'efl mouvoir circulai-
rement la branche dans l'ouverture de la befie. Voy.
Branche, Verrerie en plat, & Bosse.
* BRANCHIDES , f. m. pi. ( Hifl. anc. ) prêtres
du temple d'Apollon, à Didyme dans l'Ionie. Ces
prêtres livrèrent eux-mêmes à Xercès les richeffes
du temple. Après cette impiété , ils fe réfugièrent
dans la Sogdiane , où Xercès leur permit de bâtir
une ville. Mais Apollon ne laiffa point leur crime
impuni : Alexandre prit leur ville , la rafa après en
avoir paffé tous les habitans au fil de Pépée ; 6c la
faute des pères fut pourfuivie fur leurs defeendans.
* BR ANCHIER , adj. fe dit , en Fauconnerie , d'il»
jeune oileau qui n'ayant point encore de force , fe
repofe de branche en branche au fortir du nid.
BRANCION , ( Géog. ) petite ville avec titre de
comté , dans le duché de Bourgogne.
BRANDAM, (Géog.) ville d'Alie dans l'île de
Java , appartenante au roi de Suruhaya.
BRAiNDES , 1. f. le dit ,en Vénerie , des bruyères
où les cerfs vont viander. Voy. Cerf & Viander.
BRANDEBOURG , (la Marche de) Géog.
c'eit un grand pays d'Allemagne dans le cercle de la
haute Saxe. Il ell borné à l'occident par le duché de
Lunebourg ; au nord , par le Meckelbourg & la Po-
méranie ; à l'orient , par la grande Pologne ; & au
midi , par la Siléfie , la Luface , l'éleftorat de Saxe ,
& le duché de Magdebourg. Ce pays efl abondant
en grains , chanvre , beftiàtix ; il s'y trouve beau-
coup de manufactures tres-floriffantes : il appartient
au roi de Pruflè , qui porte le titre de marggrave &
d'électeur de Brandebourg. Il eit archi-chambellan de
l'Empire : c'ell le comte de Hohenzollern qui rem-
plit lous lui cette fonction.
Brandebourg , ( Géog. ) ville capitale de la
Marche de ce nom , fur la rivière d'Havel. Il y a
une autre ville de ce nom dans le duché de Meckel-
bourg , qu'on appelle la nouvelle Brandebourg.
BRANDEIS , ( Géog. ) petite ville & château de
Bohême lur l'Elbe , à trois lieues de Prague. Il y a
encore une autre ville de ce nom en Bohême : elle
cil lituée fur la rivière d'Orlitz. '
* BRANDERIE , f. f. ( Commerce. ) c'efl ainfî-
qu'on nomme à Amflerdam , les lieux où l'on fait
les eaux-de-vie de grain.
BRAhlDEUM, fub. (Hift. eccléf.) nom ufité
dans les auteurs de la baffe latinité , pour fïgnifier un
linceul de foie ou de lin , dont on enveloppoit les
corps des faints & leurs reliques. On donnoit le mê-
me nom aux bnges que l'on failoit toucher aux reli-
ques des faints. Du tems de S. Grégoire le grand , qui
tenoit le iîége de Rome l'an 6oo , èv avant lui , on ne
touchoit point aux corps des faints ; & au lieu de
leurs os, on fe contentoit d'envoyer dans une boîte
un morceau de ce drap ou de ce corporal. Le pape
faint Grégoire parle de cette coutume, &: ajoute
qu'on la croyoit , par tradition , du tems du pape
S. Léon, vers l'an quatre cent cinquante. Quelques
Grecs avant douté fi l'on devoit tenir ces reliques pour
bonnes , ce faint pontife, pour les convaincre , le fit
apporter des cifeaux , & coupa en leur préfence un
de ces brandeum , c'eft-à-dire, une de ces pièces de
drap , dont on dit qu'il fortit du fang , comme !î c'e :.:
été le corps même du faint. Greg. Turon. de G .
B R A
conf, cap. xxxv'ij, Pierre Damien , in lïb. IV. epljl. xiv.
Bcde,ÎIiJt. Angl. lib. I. c. iij. Du Cange, Glofjar. (G")
BRANDIR, V. n. en termes de Charpenterie , c'eft
lorfque l'on place une pièce de bois de travers fur
une autre fans être entaillée , percer un trou en tra-
vers des deux pièces , & y mettre une cheville de bois
pour les arrêter enfemble. Brandir les chevrons fur
les pannes , c'eft faire avec une tarriere un trou qui
perce les deux enfemble , & y mettre une cheville.
BRANDONS , f. m. pi. terme de Palais , auquel on
/oint pour l'ordinaire celui de panonceaux ; ce font
des bouchons de paille qu'on attache en quelques pro-
vinces à la porte des héritages faifis , avec les armes
du roi ou du feigneur. Voye{ PANONCEAUX.
Arrêt-Brandons; voyei Arrêt. (H)
* Brandons , ( (Economie rujlique. ) c'eft le nom
qu'on donne dans les campagnes à quelques épines,
branches , ou bouchons de paille , par lefquels on
avertit que le chaume eft réfervé & retenu par celui
qui joiiit de la terre : fans quoi il feroit cenfé aban-
donné , & le premier venu en pourroit faire fon pro-
fit. Dans les coutumes où les brandons ont lieu, on
les met dès le 1 5 Septembre.
• Brandons , danfe des brandons ; on exécutoit cette
danfe dans plnlieurs villes de France, le premier di-
manche de carême , autour des feux qu'on allumoit
dans les places publiques ; & c'eft de-là qu'on leur
avoit donné le nom de brandons. Voye^ Danse sa-
crée. Les ordonnances de nos rois ont fagement
aboli ces danfes , ainli que les baladoires , les noctur-
nes , &c celles qui fe faifoient dans nos églifes : cet
ufage étoit fi fort enraciné , que malgré les fages pré-
cautions des évêques & des magiftrats , il fubfiftoit
opiniâtrement dans quelques villes du royaume. A la
fête de faint Martial , apôtre du Limouhn , le peuple
danfoit encore vers le milieu du dernier fiecle dans
le chœur de l'églife , dont ce faint eft le patron. A la
fin de chaque pfeaume , au lieu de chanter le Gloria
Patri , tout le peuple chantoit en langage du pays :
fan Marceau pregats per nous , è nous epingaren perbous ;
c'eft-à-dire , faint Martial prie^pour nous , & nous dan-
ferons pour voue. Cette coutume eft abolie. Bonnet,
Hijloire de la danfe. ( B )
Brandons , ( Géog. ) ville de France en Bourgo-
gne , fur les frontières du Charolois , à quatre lieues
d'Autun.
BR ANDSOE , ( Géog. ) petite île du Danemark ,
dans le détroit de Middelfart, entre le duché de Schlef-
/wig , & l'île de Funen.
BRANLANT, en terme de Metteur-en-œuvre , eft une
croix qui fe porte fans coulant, d'un fimplc chaton ,
qui fe termine par une pendeloque qui lui donne ce
nom. Voyei Pendeloque.
BRANLE, f. m. terme d'OrcheJlique ou de danfe ,•
c'eft un pas compofé de pluficurs perfonnes qui dan-
fent en rond en fe tenant par la main , & en fe don-
nant un branle continuel.
On commençoit autrefois tous les bals par un grand
branle : on les commence aujourd'hui ordinairement
par les menuets.
Il y a le branle fimplc , & le branle double : le pre-
mier confifte en trois pas & un pié joint , qui fe font
en quatre melures. On les répète pour faire le branle
double.
Il n'y a guère de nom de province qu'on n'ait don-
né à quelqu'un des branles François ; il y a des branles
de Bourgogne, du Barrois,& de Bretagne.
Il y avoit autrefois le branle des Lavandières , des
fabots ; des chevaux, des pois, des hennîtes , de la
torche, &e. les branles morgues , gefticulés , de la
moutarde , &c tous ces branles fe reduifent à préfent
à un feul genre qu'on nomme branle à mener. Dans
cette efpece de branle , chacun mené la danfe à Ion
tour, & fe met après i\ la queue. C'eft pour l'ordi-
Torue II,
B R A
397
naire aux chanfons que l'on danfe les branles. Orc/ie-
fographie de Thoinot Arbeau. ( B )
Branle de S. Elme , ( Hijl. mod. ) fête qui fe céle-
broit autrefois à Marfeille la veille de S. Lazare. On
choilîffoit les plus beaux garçons & les filles les
mieux faites ; on les habilloit le plus magnifiquement
qu'on pou voit : cette troupe repréfentoit les dieux
de la fable , les différentes nations, &c. Se étoit pro-
menée dans les rues au fon des violons & des tam-
bours. Cette mafearade s'appelloit le branle de faint
Elme.
Branle ou Hamac , ( Hijl. mod. ) eft une efpece
de lit fufpendu entre deux arbres , deux poteaux ou
deux crochets , dont on fe fert dans les Indes orien-
tales.
Les Indiens fufpendent leurs branles à des arbres,
pour fe mettre à couvert des bêtes fauvages Se des
infecTes , qui ne manqueraient pas de leur nuire s'ils
couchoient par terre.
Les habitans des îles Caribbes font extrêmement
fuperftitieux au fujet de leurs branles, Se ne les font
jamais fans beaucoup de cérémonie : ils placent à cha-
que bout un fac de cendre , croyant que fans cette
précaution il-, ne fubfîfteroientpas long-tems. Ils croi-
raient faire tomber leurs branles s'ils mangeoient def-
fus des figues , ou quelque poiffon qui eût des dents.
Le P. Plumier qui s'étoit fouvent fervi de branles
dans fes voyages des Indes , prétend qu'ils confiftent
en une grande mante ou greffe toile de coton d'en-
viron fix pies en quarré , aux extrémités de laquelle
font desgances de la même étoffe , où paffent à travers
des cordons dont on forme d'autres anneaux , & où
paffe une corde qu'on attache aux arbres voifins ,
ou à deux crochets fi c'eft dans les maifons. Cette ef-
pece de couche fert en même tems de lit, de mate-
las, de drap, & de couffin. (G)
Branles , Hamacs , ( Marine. ) c'eft ainfi qu'on
appelle encore les lits dont fe fervent les gens de l'é-
quipage d'un vaiffeau : ils font compofés d'un mor-
ceau de forte toile , long de fix pies Se large de trois,
renforcé par les bords d'un cordage appelle ralingue,
en façon d'ourlet , que l'on fufpend par les quatre
coins entre les ponts d'un vaiffeau , où l'on fait cou-
cher un matelot ou un foldat. Voye^ Hamac.
Branle matelajfé, c'eft une efpece de matelas qui
eft fait en branle.
On dit tendre Se détendre les branles.
Branle-bas ou Jorbranle , c'eft un commandement
qu'on fait lorfqu'on veut faire détendre tous les bran-
les d'entre les ponts , afin de fe préparer au combat,
ou pour quelqu'autre raifon. (Z )
Branle , en Fauconnerie , fe dit du vol de Foifeau ,'
lorfque s'élevant feulement au premier degré fur la
tête du fauconnier , il tourne en battant des ailes &C
remuant la queue.
Branle , en Horlogerie , s'entend de Fefpace par-
couru par le régulateur dans une vibration.
Comme les petits arcs décrits par un pendule ne
différent pas feniîblement de ceux qu'il décriroit , s'il
vibroit entre des portions de cycloïde , voye{ C\-
c loi de ; il eft à propos que le pendule décrive de
petits arcs dans fes vibrations : au refte le branle doit
être toujours conditionnel à l'échappement qu'on em-
ployé ; parce qu'il y en a qui exigent un plus grand
branle que d'autres, tel eft l'échappement à levier.
/ .;.. -Echappement, Pendule, Cycloïde, &c
L'expérience a appris aux Horlogers , que pour
qu'une montre aille judo avec l'échappement ordi-
naire , & que cette juftefle foitdeduree.il falloit
que le balancier branlât moitié , c'eft- à-dire qu'un
point quelconque de fa circo, : 1 .>">urùt dans
chaque vibration un demi-cercle ou 180 degrés, l'oy.
Échapi-iment, Levier, &c. (T)
BRANLER . v, n. tn termt de Commerce , fe dit d'un
39»
B R A
marchand ou d'un banquier, qui fait préfenter fes
billets par tout pour avoir de l'argent , & qui donne
par-là à connoître qu'il eft fur le penchant de fa ruine
& prêt à faire faillite. Voyei Faillite. ( G )
* BRANLOIRE, f. f. c'eft ainfi que les Serru-
riers , Taillandiers , & autres ouvriers de forge , ap-
pellent la chaîne , qui tient d'un bout au levier , qui
fait mouvoir leurs foufflets , & qui porte un manche
de l'autre bout , qu'ils prennent à la main , pour met-
tre en aûion ce levier.
BRANQUE-URSINE ; voye{ Acanthe.
BRANSKO, ( Géog. ) petite ville de Mofcovie ,
fur la rivière Defna , dans le duché de Novogorod
Scwiersky. Il y a deux autres villes de même nom ,
Tune en Podlachie fur la Narva , l'autre en "Wolhinie.
BRANSLE , ( Gcog. ) rivière de France , qui prend
fa fource dans le Vendomois , le jette dans la Cifle ,
un peu au-deflus de fa jonction avec la Loire.
BRAQUER un canon ou un mortier, ( Artillerie. )
c'eft lui donner la pofition néceffaire pour tirer : mais
on fe fert plus communément du terme de pointer ,
pour exprimer la même choie. Voye^ Pointer. (Q)
BRAQUES ou BRACS , f. m. ( Ckajfe. ) c'eft le
nom qu'on donne à des chiens ras de poil , bien cou-
pés , légers , bons quêteurs , vigoureux , & allez fins
de nez. Ils font bons pour la plaine & pour les brol-
failles. Ils réiiftent à la chaleur , & font moins fenfi-
bles aux épines que les autres.
BRAS , f. m. ( Anatomie. ) eft une partie du corps
humain, qui fe termine d'un côté à l'épaule , & de
l'autre à la main. Voyc^ Corps , Épaule , &c.
Chez les Médecins & les Anatomiftes , bras figni-
fie feulement cette partie qui eft entre l'épaule & le
coude ; le refte depuis le coude jufqu'au poignet , fe
nomme V avant-bras. Voye^ M AIN.
Le bras dans ce dernier fens , n'a qu'un feid os
appelle humérus. Voye^ HuMERVS.
Le bras a cinq fortes de mouvemens qui s'exécu-
tent par neuf mufcles ; un mouvement en haut , par
le deltoïde , le fufépineux , & le coracobrachial ; un
mouvement en bas, par le grand rond, le petit rond ,
& le grand dorfal ; un mouvement en devant , par le
grandpecforal & le fous-fcapulaire ; un mouvement
en arrière, par le fous-épineux ; un mouvement cir-
culaire , par l'aûion combinée de tous ces mufcles.
Vvyer cliacun de ces mufcles fous fon article particulier.
L'autre partie du bras ou Y avant-bras , eft compo-
fée de deux os } le radius & le cubitus. Voy. Radius
& Cubitus.
Les mufcles qui fléchifTent Y avant-bras , font \e bi-
ceps & le brachial interne ; ceux qui l'étendent font le
long extenfeur & le court extenfeur, le brachial externe,
Yanconée; le mouvement de pronation s'exécute par
le rond pronateur & le quarré pronateur ; & celui
de fupination, par le longfupinateur & le court fupina-
teur. V. chacun de ces mufcles enfin lieu. La faignée ordi-
naire fe fait au bras. V. SAIGNÉE & PhlÉBOTOMIE.
BRAS de la moelle allongée, voy ftf BRANCHES &
Moelle allongée. (/-)
Bras fe prend au figuré pour un infiniment ou
pour la partie d'une machine , qui a par fa longueur
Se par la fonction des rapports, quelquefois bien éloi-
gnes , avec la forme èc les ufages du bras dans le
co>ps humain. C'eft en ce fens qu'on appelle chez les
marchands Ciriers , bras de flambeaux , les longs cor-
dons de mèche dont ils torment leurs flambeaux , en
les enduifant de cire. Voyc^ Flambeau & Cire.
Chez les Menuifurs & Charpentiers , bras de feie ,
font les deux pièces de bois parallèles auxquelles la
feuille de la feie eft attachée. Voye^ Scie.
Chez les Charpentiers , bras de chèvre , les deux lon-
gues pièces de bois qui portent le treuil fur lequel
îe cable s'enveloppe quand on monte un fardeau.
Yoyei Chèvre, &c.
b r a
Chez les Majfons , bras de bar & de civière , les ex-
trémités des deux principales pièces de ces engins,
celles que les porteurs tiennent à leurs mains , quand
ilss'eniervent. On dit encore bras de grue, voy. Grue ;
bras de baleine , pour nageoires , voye^ B ALEIN E ; bras
d'engin , voye^ ENGIN ; brasde Tourneur, bras d'ancre,
bras de rivière , &c. voye^ ces articles , les uns ci-defjous,
les autres à leurs renvois.
Bras SE cvLiER,terme ufîté en Droit, eft l'autorité,
la main ou puiftance du juge féculier , que l'on em-
ployé pour faire exécuter les ordonnances du juge
d'églife, ou pour faire fubir à un eccléfiaftique cou-
pable d'un délit privilégié , les peines que l'Ëglife ne
peut impofer. Le juge d'églife n'a pas le pouvoir de
mettre à exécution fes fentences fur les biens tempo-
rels de ceux qu'il auroit condamnés , ni d'impofer des
peines grieves & qui aillent jufqu'à l'effufion du f ang.
Diction, de Droit de Deferriere.
Bras , en Manège, fe dit de la partie de la jambe
de devant, qui s'étend depuis le bas de l'épaule juf-
qu'au genou. On dit qu'un cheval plie bien le brasy
pour dire qu'il plie bien la jambe , quoique le bras
même ne plie point. Un cheval qui plie bien les brast
& levé le devant avec liberté , n'a plus befoin d'être
mis entre deux piliers pour lui rendre le devant léger.
Le bras pour être bien fait , doit être large , long , ÔC
charnu. (^)
Bras, (Jardinage!) eft un terme dont on fe fert
en parlant des melons, des concombres , des citrouil-
les, pour exprimer les branches qu'ils pouffent. On
diftingue les bons bras d'avec les mauvais qui font
veules , & qu'il faut fupprimer. Les bons melons ne
viennent jamais que fur les bons bras. (X)
Bras,£/z Marine, ce font des cordages amarrés
au bout de la vergue , pour la mouvoir & gouverner
félon le vent. La vergue d'artimon outre les bras , a
une corde appellée ourfe , à l'extrémité de la vergue.
Halc^fur les bras , terme de commandement pour
ordonner aux matelots de roidir ces cordages.
Tenir un bras, c'eft-à-dire , haler Se amarrer un de
ces cordages nommés bras.
Bon bras , cela fe dit quand on braffe au vent , en
forte que le vent ne foit pas au plus près.
Bras de revers ; larguer le bras du vent ou dejèrvice.
Bras , les grands bras , ou bras de la grande vergue >
fig.l.n0 44.
Bras de la vergue de mifene , n° 45.
Brasde la vergue du grand hunier , n° 73.
Bras de la vergue du petit hunier, n° 75.
Bras de vergue de foule , n° 7 1 . Le cordage appelle
ourfe ok hource , n°. 43.
Bras de vergue de perroquet défoule , n° j%.
Bras de la vergue de grand perroquet , n° 74.
Bras de la vergue du perroquet de qiifene,jîg. 1. n° 76;
Bras de la vergue de civadiere ,n° 46.
Bras de la vergue de perroquet de beaupré , n° 77. (Z)
Bras , terme dont fe fervent les Géographes , pour
dire une partie de mer ou de rivière refferrée entre
des terres. Voye^ Mer , Océan , Ria'iere.
L'Italie eft féparée de la Sicile par un bras de mer.
Le bras de S.George dans la Méditerranée, eft l'an-
cien bofphore de Thrace , aujourd'hui le détroit des
Dardanelles.
Bras d'une ancre , eft une des moitiés de la partie
courbe, dite croifée. Foye^ ANCRE.
Bras d'une balance, font les deux parties du levier
qui la forme , prife de part & d'autre du centre : &.
auxquelles on fufpend les poids. Voye^ Balance.
(0) .
Bras , en terme de Diamantaire , n'eft autre choie
qu'une pièce de bois AB , PI. XI. du Diamantaire ,
d'environ deux pies de long , garnie de deux poignées,
& montée fur une autre pièce perpendiculaire CD,
qui tourne par en-bas fur une crapaudine fçellée eu
B R À
R A
399
ïèrtë , &par en-haut aii moyen d'un tourillon dans
un collet qui l'embrafle. Voye^ la figure premier: , PL
II. du Diamantaire,
Pour faire mouvoir la roue , un ouvrier poufie &
tire alternativement \e bras AB , par le moyen des
deux poignées qu'il tient dans Tes mains ; le mouve-
ment ainfi imprimé au bras , Te communique par le
moyen de l'épée au coude de l'arbre , qui porte la
roue de bois. Poye{ les figures.
BRAS , (parties de la prefife en tailk-doucc . ) ils font
au nombre de quatre afTemblés par une de ieurs ex-
trémités oo, dans les parties latérales des jumelles
CD; leur autre extrémité FF, porte fur les colon-
nes G, qui font de même au nombre de quatre. Voyt^
Presse d'Imprimerie en taille-douce^ & les fig. prem.
6' 6 . oo , FF, PI. de r Imprimerie en taille-douce.
Bras , (terme de Tourneur.) ce font deux pièces
de bois qui traverfent les poupées du tour un peu au-
defTous des pointes , & qui fervent à foutenir la barre
fur laquelle l'ouvrier appuie fes outils en travaillant.
Ces bras s'avancent & reculent à la volonté de l'ou-
vrier , & félon que l'ouvrage le demande. Voye^
Toir.
Bras deprefiè , bras de force , pièces du métier à bas.
7'oyei l'article Bas.
* BRAS1DÉES , f. m. pi. (Hifl. anc. ) fêtes infti-
tuées en l'honneur de Brafidas, parles habitans d' Am-
phipolis, qui élevèrent à ce chef fameux des Lacé-
démoniens , un fuperbe tombeau dans le milieu de
leur ville. Nous ne favons rien de la manière dont
les Brajidks fe célébraient.
* BRASILLER , v. neut. ( terme de Marine. ) il fe
dit des feux & de la lumière que jette la mer pendant
la nuit. La mer brafûle beaucoup le lpng des flancs
d'un vahTeau qui vogue à pleines voiles.
BRASLAW , ou BRACKLAW , ( Géog. ) ville &
jpakatihatj ou province de la petite Rufiie , fur les
frontières de la Tartarie ; la ville eft fituée fur la ri-
vière de Bog. Long. 4J. i5. lat. 48. 49.
BRASLAW , ou BR ATISLAW , ( Géog. ) ville de
Pologne, fur les frontières du duché de Curlandc ,
liir un grand lac , à peu de diftance de la Dwina.
■Long. £4, 40. lat. 33. 4.5.
BRASLAW , ( Géog. ) petite ville de la Valachie ,
près des frontières de la Moldavie.
BRASSAGE, f. m. (à la Monnoie.) droit que le
roi accorde aux directeurs de la monnoie fur chaque
marc d'or , d'argent , 6c de billon , mis en ceuvre &
fabriqué. Ce droit eft de cinq fous pour l'or & pour
l'argent , & de fix fous pour le billon.
Autrefois le directeur (que l'on appelloit maure)
prenoit trois livres par marc d'or, Se dix-huit fous par
marc d'argent, dont la moitié étoit employée au dé-
chet de fonte , charbon , frais , &c. 6c l'autre moitié
au payement des ouvriers.
* BRASSARD , f. m. inftrument de bois dont on
fe fert pour jouer au ballon : c'eft une douille de bois
de chêne allez mince , de la longueur de l'avant-bras
qu'on y fait entrer à force avec des mouchoirs , fer-
viettes , ou autres linges. On peut avec le bras ainfi
armé , recë\ oir le ballon & le frapper fi fort que l'on
veut fans fc bleflef. La furface du brajjart eft taillée
en groffes dents , afin que le coup ne glifle pas (lu- le
balion.
Les anciens à qui le jeu de ballon n'étoit pas in-
connu , ont eu aulfi leurs braffitrds : mais ils n etoient
pas de bois, c'étoient des courroies d'un cuir fort,
dont ils fail'oient plulïeurs tours fur leurs bras.
* BRASSARD de renier : ces brafiards font faits de
deux vieux chapeaux partes l 'un dans l'autre. On en
Ote le deflus , & l'on en couvre le bras droit jufqu'au
COudei II fervent à foutenir le manche des pelles ,
quand il eft trop chaud , lorlqu'on tranfporte as ce
ces pelles de la matière , des arches à recuire , dans
le pot.
BRASSAW,0.vGRONSTAT, (Géog. anc. &mod.)
vdle forte de Tranfilvanie. Long. 44. 10. lat. 46.
30. Les uns la prennent pour la Prœtoria augufiaàc
Ptolomée , & d'autres la nomment Corona & Stepht-
nopolis.
BRASSE , f. f. La Marine a trois fortes de brafiès;
la grande brafiè, dont on fe fert pour les vaifTeaux de
guerre eft de fix pies ; la moyenne , qui eft celle des
vaifTeaux marchands , eft de cinq pies & demi ; & la
petite n'eft que de cinq pies ; elle n'eft en ufag'e que
parmi les patrons de barques & autres 'petits bâti-
mens qui fervent à la pêche.
Tous les cordages fe mefurent par brafes. Les c&
blés des plus grands vaifTeaux ont 1 20 brafes ou 710
pies. Le Roi entretient dans fes ports un officier nom-
mé maître d'équipage , dont la principale fonction eft
de couper les manœuvres fuivant le rang des vaif-
Teaux , c'eft-à-dire , de donner aux cordages la lon-
gueur qu'il leur convient^ chacun. (Z)
Brasse, (Commerce.) melure de la longueur des
deux bras étendus , & qui eft ordinairement de cinq
pies. M. Savari la fait de fix pies de roi, & équiva-
lente à la toife. Voye^ ToiSE.
Brasse , eft aufîi une efpece d'aune ou de mefure
de longueur , qui fert à melurer les draps , toiles , ru-
bans 6c autres pareilles marchandifes.
On s'en fert dans prefque toute l'Italie : mais fa
mefure varie fuivant les lieux. A Venife la brafiè con-
tient un pié trois pouces trois lignes , qui font huit
quinzièmes de Faune de Paris , & ainfi quinze irafièi
de Venife font huit aunes de Paris.
La brafiè de Bologne , Modene , Mantoue , eft (cm-
blable à celle de Venife:
À Luques la brafiè eft d'un pié neuf pouces dix li-
gnes, ce qui fait demi-aune de Paris : à Florence elle
contient un pié neuf pouces quatre lignes, qui font
quarante-neuf centièmes d'aunes de Paris , & par con-
féquent un peu moins d'une demi-aune.
À Milan la brafiè pour mefurer les l'oies , n'eft pas
la même que celle avec laquelle on mefure les draps
de laine : la première ne contenant qu'un pié fept
pouces quatre lignes , &: la féconde deux pies onze
lignes.
À Bergame la brafiè contient un pié fept pouces
fix lignes , qui font cinq neuvièmes d'aune de Paris ;
ainfi neuf aunes de Bergame n'en font que cinq de
Paris.
Brasse, fe dit auffi de la chofe mefurée avec la
brafiè ; une brafiè de drap , une brafiè de corde. (G)
BRASSÉE DE SOIE , (terme de Fabrique des étoffes
de foie. ) La braffée de foie eft compolée d'autant de
brins de foie qu'il y a de rochets à la cantre. Le ter-
me de brafiée n'eft en ufage que pour Fourdiflage des
chaînes : mais on Te Tert partout du terme de portée.
La portée ordinaire eft de 80 fils.
BRASSEIER, BRASSER, BRACHER, v. neut.
en Marine , c'eft taire la manœuvre des bras , & gou-
verner les vergues avec ces cordages. V. Bras. (Z)
BRASSER , v. neut. il Te dit proprement de la ma-
nœuvre des brafieurs ou fabricateurs de bierre , dont
le principal travail eft des bras, foyer Brasserie.
Le verbe brafièr a palTé dc-là dans plufieurs antres
Arts.
Brasser les vergues , ( Marine. ) c'eft mettre les
vergues horiibntalement de l'avant en arrière, en
maniant les manœuvres.
Brasser les voiles fur le mât , c'eft-à-dire manœu-
vrer les voiles de telle manière que le vent le mette
deflus, au lieu d'être dedans : ce qui eft auffi brafièr à
contre , terme ulite pour la milene.
Brafiè au vent , terme de commandement pour faire
manœuvrer les vergues du cote d'où Aient le venti
400
B R A
Brajfe au vent tout court, fe dit pour faire manœu-
vrer, enlbrte que le vent ne foit pas au plus près.
Brajfe au plus près du vent , pour qu'il foit au plus
près. Brajfe fous le vent , c'elt pour taire manœuvrer
les vergues du côté oppolé à celui du vent. Brajfe à
l'autre "bord, pour faire braffer les vergues à l'autre
bord. Brajfe à porter , brafje à fervir ; c'eft pour taire
braffer les vergues , enlbrte que le vent donne dans
les voiles. Braffer à contre, c'eft-à-dire, braffer les
bras du vent , èc faire que le vent donne fur les voi-
les ; cela fe pratique ordinairement lorfqu'on veut
le mettre fur la voile de mifene. C'eft dans ce fens
qu'on dit, brajfe la mifene à contre. (Z )
Brasser , (à la Monnaie. ) verbe qui marque l'ac-
tion de remuer le métal lorfqu'il a acquis l'état de
fluidité. L'or ne fe brafje point de même que l'argent
& le billon. Voye{ Brassoir.
* BRASSER , terme de Pécheur , c'eft agiter & trou-
bler l'eau avec la bouloire , pour faire fortir le poif-
fon & le conduire dans les filets.
* Brasser , en terme de Tannerie , c'eft remuer les
cuirs , les agiter , & retourner pendant un certain
tems dans une cuve remplie de tan & d'eau chaude,
pour les rougir. Voye^ Tanner.
* BRASSERIE , fubft. f. attelier qui contient les
cuves, chaudières, moulins , & tous les autres inf-
îrumens , agrès &c commodités néceffaires pour faire
la bierre. La bierre eft une boiffon fort ancienne. V.
Bïere.e. On peut dire en général , qu'elle fe tire du
grain : mais elle ne fe tire pas du même grain , par-
tout où l'on en fait. À Paris , & plus généralement
en France , on n'y employé que l'orge: Quelques
braffeurs feulement y mêlent , les uns un peu de blé ,
d'autres un peu d'avoine. Dans les provinces du nord
de la France , telles que la Picardie , l'Artois , le Bou-
lonois , la Flandre Françoife , elle ne fe fait qu'avec
le foucrillon , ou l'orge d'hyver , ou même avec l'ef-
piotte , que nous appelions auffi Yejcourgeon. Ce que
nous nommons orge , s'appelle dans ces provinces
pâme le.
En Hollande , on braffe non-feulement avec l'or-
ge foucrillon , mais encore avec le blé & l'avoine.
Les braffeurs Hoîlandois , qui tirent de la bierre de
chacun de ces trois grains , ont trois fortes différen-
tes de bierre.
En Allemagne , où la bierre ne laiffe pas que d'ê-
tre fort commune , elle fe fait auffi avec l'orge. On
y employé quelquefois l'efpioîte. L'efpiotte eft un
grain , dont le noyau reffemble affez à celui du f ei-
gle , excepté qu'il eft plus court & plus plat. La co-
que qui le renferme ne diffère guère de celle du blé ;
on a feulement beaucoup plus de peine à en faire
fortir le grain , même en le battant à la manière des
autres grains ; aufîi on fe contente d'en brifer les épis :
on le fait germer & on le moût dans fa coque.
En Angleterre , oii la bierre eft très-commune , on
la fait ainli qu'ailleurs, avec l'orge, le blé & l'avoine.
Une brafferie eft un bâtiment très-confidérable ; le
nombre des agrès ne l'eft pas moins : les principaux
font le geimoir , la touraille , le moulin , les cuves ,
les chaudières , &c.
Pour braffer , fuivant notre façon de Paris , il faut
avoir de bon orge , que l'on met tremper dans de
l'eau naturelle pendant l'efpace de trente à quarante
heures , plus ou moins , félon que les eaux font plus
ou moins dures & l'orge plus ou moins lèc. Au refte
en quelque tems que ce foit , èc de quelque nature
que foit l'orge, on jugera qu'il aura affectait , quand
en le ferrant entre les doigts , il cédera facilement à
la preffion & s'écrafera fans peine fous l'ongle ; alors
on le retirera de la cuve où on l'aura fait mouiller,
Sz on le'tranfportera dans le germoir.
Du germoir. Le germoir , ainfi que le nom l'indi-
que allez , eft un lieu où l'on met germer le grain
B R A
mouillé qu'on deftine à faire de la bierre. 11 y en a
de deux efpeces : les uns font de grandes caves vou- .
tées , on les regarde comme les meilleurs ; les autres
de grandes lalies au rez-de-chauffée. Le prain' refte
au germoir , en tas ou en mottes , communément
vingt-quatre heures. Au bout de ce tems , qu'on lui
accorde pour reboire fon eau , comme on dit dans les
brafferies , on le met en couches , c'eft-à-dire qu'on
étend les mottes ou tas , & qu'on les réduit à la hau-
teur de 8 à 9 pouces d'épaifieur , plus ou moins , fé-
lon que le germoir eft plus ou moins échauffé. On
laiffe le grain dans cet état jufqu'à ce que par la
chaleur naturelle qu'il trouvera dans lui-même , le
germe commence à en fortir. Quand on verra le
germe pointer hors du corps du grain , pour lors il
faudra rompre.
On appelle rompre une couche de grain , la remuer
avec une pelle , jetter le grain d'une place dans une
autre , le retourner , & le remettre en couche corn-
'me auparavant, obfervant feulement de donner à la
couche moins de hauteur. A moins que le grain n'eut
été rompu trop jeune, c'eft-à-dire , avant que le ger-
me en fût affez avancé , on IaifTera la nouvelle cou-
che de grain clans cet état pendant douze ou quinze
heures , plus même , fur-tout fi l'air qui règne clans
le germoir eft froid ; car alors la germination fe fera
beaucoup plus lentement.
Au bout des douze ou quinze heures, le germe s'é-
tant accru confidérablement , & la chaleur s'étant
beaucoup augmentée, on redonnera encore un coup
de pelle au grain , obfervant de l'éventer plus que la
première fois : cette manœuvre s'appelle donner le j'e-
cond coup de pelle. On finira le fécond coup de pelle ,
par remettre le grain en couche ; il y reftera encore
douze à quinze heures , ce tems lui iuffira pour ache-
ver de pouffer fon germe au point qui convient pour
être en état de paffer fur la touraille.
De la touraille. La touraille eft une des portions prin-
cipales d'une brajferie. Sa partie fupérieure A B CD,
figure première , Brafferie, Planche première , a la forme
d'une pyramide équilatérale , creufe , dont le fommet
ieroit tronqué , & la bafe en-haut. Le corps ou les fa-
ces en font compofées de pièces de bois affemblées
& revêtues en-dedans d'une maçonnerie de brique ,
faite fur un lattis tel que celui des platfonds ; & pour
préferver les bois d'un incendie pref qu'inévitable, la
maçonnerie de brique eft enduite de bonnes couches
de plâtre : x , y , [ , font trois faces intérieures de la
pyramide ou trémie de la touraille. On a pratiqué à
l'une de ces faces une porte pour pouvoir entrer dans
le corps de la touraille , en cas de befoin.
La bafe de cette pyramide ou la fuperfîcie fupé-
rieure de cette trémie A B E F , eft un plancher fait
de tringles de bois de 3 pouces d'équarriffage. Cha-
ques tringles laiffent entr'eiles le même intervalle ,
enlbrte que la furface entière A B E F, eft tant plei-
ne que vuide. Sur ces tringles de bois, qui font com-
munément de lapin , on étend une grande toile de
crin , que l'on nomme la haire. La haire couvre tout
le plancher A B E F de la touraille ; cet efpace eft
environné Se furrriorrtë de madriers, au défaut de mu-
raille. Sur ces madriers font attachées des bandes de
chêne, que l'on nomme cojlieres. Les cofiieres débor-
dent, ou comme oh dit', tètouvrent fur Vain du plan-
cher, & empêchent le grain de s'échapper par les
rebords , & de tomber clans le corps de la touraille.
Sous la trémie ABCD ou fous le corps de la tou-
raille , en eft une autre de maçonnerie Ç D G H , de
la forme d'un parallélépipède. C'eft dans l'intérieur
de ce folide qu'eft conftruit le fourneau de la tou-
raille , dont on voit l'intérieur par la bouche /. Ce
fourneau a communément vingt pouces de large ,
quatre pies & demi de long dans œuvre , non com-
pris fon embouchure, qui le trouvera plus ou moios
Ion eue _,
B R A
B R A
401
longue , félon que les murs du fourneau auront plus
ou moins de profondeur.
Pour conflruire folidement un fourneau de tourail-
le , il faut que le pavé en foit fait de briques pofées
debout & de champ , & que le pié du mur en dedans
du fourneau foit revêtu de fortes enclumes , capa-
bles de réiifter à l'action du feu ; autrement foit les
briques, foit les tuiles dont on le conftruiroit, fe-
roient bientôt calcinées. Comme la première portion
du fourneau s'élève en grand fur plomb, ainli qu'on
l'apperçoit dans la figure, il efl néceffaire que les en-
clumes foient détenues par le haut, d'une forte barre
de fer fcellée d'un bout dans le mur du fond du four-
neau , & de l'autre dans le mur de côté , près de l'em-
bouchure, en iorte qu'elle s'étende de toute la lon-
gueur du fourneau ; &c pour plus de iolidité, on l'ar-
mera de gougeons de fer d'environ un pié de long ,
qui feront pareillement fcellés dans le mur de côté,
ainii qu'on l'apperçoit dans les coupes du fourneau,
fig. 2. &c 3. même planche.
La première partie du fourneau étant ainfi élevée,
on conitruira à plomb fur elle , celle du milieu ; on
lui donnera environ un pié de hauteur. On élèvera
enfuite la dernière partie : fa forme tera la même
qu'on voit à celle du milieu, mais dans une lîtuation
renveriée; enfoite que la partie du milieu du four-
neau & fa partie fupérieure , reflemblent affez à deux
chaudières oppofées fond à fond & communiquant
par une ouverture commune , avec cette feule con-
dition que la chaudière inférieure auroit plus de hau-
teur que la fupérieure. Voye^fig. 1. z.& 3. I G H K
L, partie inférieure du fourneau. K L M bouche. N
O P Q enclumes fcellés. P Q R S partie du milieu du
fourneau. R S TV communication de la partie du
milieu avec la partie fupérieure. TV X Y partie fu-
périeure. La. fig. 1. montre le fourneau en entier. La
fig. 3. en eft une coupe verticale par le milieu de la
bouche. ha fig. 2. en efl une coupe verticale, 6c pa-
rallèle à la bouche.
Sur cette conftruûion on placera de bonnes &c for-
tes briques , de champ , fur le mur de la partie fupé-
rieure , félon leur hauteur , & de diftance en diftance,
comme on voit fig. 1.2. 3. en 0,0, 0,0, &c. Ces
.briques ainfi difpoiées formeront des efpeces de car-
neaux. Sur ces briques on placera un chaffis de fer
plat, d'environ deux pouces d'équarrifTage. Voy.fig.
4. ce chaffis. Ondiltribuera fur ce chaffis de grandes
& fortes tuiles qui fervironl à porter la maçonnerie
qu'il convient d'élever deflus ce chaffis. On appelle
communément cette maçonnerie la truite.
De la truite. La truite P qr 5, fig. 1. a la figure d'un
comble de pavillon à quatre arrêtes ; c'eft un égoût
formé par des tuiles , & tel que feroit exactement ce-
lui d'un bâtiment. L'ufage de la truite elt d'arrêter
l'action du feu qui tend naturellement à monter, de
replier la flamme iur elle-même , de confumer le peu
de fumée qui le fait dans le fourneau , de contraindre
la flamme à s'échapper pure par les carneaux formés
par les briques qui foùtienncnt le chaffis, tk de dif-
tribuer par ce moyen une chaleur égale dans tout
l'intérieur de la touraille , qui , lans cette précaution,
ne feroit bien échauffée que dans le milieu. D'ail-
leurs elle empêche le germe qui tombe dans l'inté-
rieur de la touraille, de palier dans le tourneau. C'eft
auffi par cette dernière raifon qu'on lui a donné la
figure d'un comble à quatre arrête».
La pouffiere du grain & le germe, après avoir tra-
vcrlé la haire ou toile de crin dont le plancher de la
touraille eft couvert, ne relient point fur la truite;
ils defeendent tout-au-tour , & le rendent au pour-
tour de la maçonnerie intérieure de la partie du mi-
lieu du fourneau, 011 l'on a pratiqué des canaux ap-
pelles ventoufes, qui les reçoivent. Les ventoules,
fig. 1. & 3. Z , Z, forment comme un petit foffé d'en-
Tome II,
vîron fix à fept pouces de large tout-au-tOur du four-
neau , entre la maçonnerie intérieure Se la maçon-
nerie extérieure.
Le grain, au fortir du germoir, fe charge fur le
plancher de la touraille. On l'y étend en forme de cou-
che d'environ cinq à fix pouces d'épaiffeur: on fait
du feu dans le fourneau julqu'à ce qu'à ce qu'on s'ap-
perçoive que la grande humidité que le grain a prile
dans le mouillage, commence à fortir. 11 y a pour
cela un ligne certain : alors on voit à la furface du
grain une grande rofée , & cette rofée eft coupée par
bandes ; ou plutôt toute la furface de la couche efl
divilée par bandes chargées & non chargées de ro-
fée alternativement. Cette divifion elt caufée par
les tringles de bois qui font fous la haire, & qui em-
pêchent que tout le grain ne foit atteint également
par le feu. Celui qui correfpond aux efpaces vuides
doit chauffer plus vite que celui qui correlpond aux
efpaces pleins.
Lorfqu'on apperçoit ces bandes , il eft tems de
remuer le grain. Pour cet eitet, on jette celui qui efl
fur une moitié du plancher, fur l'autre moitié; puis
on rejette fur la partie vuide & le grain qui y étoit,
& celui qui n'y étoit pas , mais mêlé & retourné. Ce-
la fait, on étend le tout, & l'on en reforme une cou-
che fur toute la lupei«ficie de la touradle. Dans cet
état celui qui étoit à demi léché fe trouve placé à cô-
té de celui qui ne l'étoit point. Il fe rait une réparti-'
tion affez égale d'humidité , & un progrès affez uni-
forme de deiliccation. Cette première mai oeuvre
s'appelle retourner la touraille pour la première fois.
Après que la touraille a été retournée , on ranimé
de nouveau le feu du fourneau , & on le continue
jufqu'à ce qu'il foit tems de la retourner pour la fécon-
de fois. Ce moment eft indiqué par la luppreffiort
prefqu'entiere de l'humidité dans tout le grain. Le
plus voifin de la haire en efl entièrement privé ; on.
n'apperçoit plus de moiteur qu'à la luperheie. C'eft
alors qu'il elt tems de rebrouiller.
On appelle rebrouiller la touraille, mettre deffous
le grain qui le trouve à la luperficie de la couche, 6c
deffiis celuàqui étoit deffous. Dans cette manœuvre,
on ne jette point le grain l'un fur l'autre, comme
quand on retourne ; on le contente de le prendre .in eo
la pelle, & de le retourner fens deflus deffous, pel-
letée à pelletée.
On biffera la touraille rebrouillée quelques heu-
res dans le même état & fans feu ; pour donner à la
chaleur du fourneau le tems de diffiper le relie de
l'humidité qui pourroit fe trouver dans le grain. Après
quoi on ôtera le grain de deflus la touraille pour fai-
re place à d'autre ; & pour le cribler au crible de fer,
afin d'en léparer la pouffiere & les touraillons. On
appelle touraillons , le germe léché.
Du moulin. On laiffe repofer le grain pendant quel-
ques jours ; la méthode en elt meilleure que de le por-
ter au moulin tout au fortir de la touraille. Le moulin
représenté Planche III. elt un moulin à double tour-
nure. Il a deux roiiets cV: deux lanternes , fans compter
le grand rouet. Les chevaux font attelés par le moyen
de patons aux queues ou leviers, ou aiffeliers À du
moulin ; ces aiffeliers font emmanchés dans l'arbre
de bout B ; cet arbre fait tourner le grand roiiet Cl
ce roiiet ell armé de dents qui engrainent dans les lu-
feaux de la grande lanterne D , dans laquelle paffe
l'arbre de couche E. Cet arbre porte à fon autre ex-
trémité, & parallèlement à la grande lanterne, le pe-
tit roiiet -F qui tourne verticalement, Cx engraine dans
la petite lanterne G fixée fur l'arbre de fer qui traver-
fe la meule fupérieure H. Cette meule s'appelle la
meule courante; elle elt pofée un peu au-delhis d'un
autre qu'on appelle la meule gif ante. Ces deux meu-
les écrafent ena 'elles le grain qui y eft introduit par
le moyen de la trémie K tk de l'auget. Le grain ré-
£ e «
40 î
BRA
B R A
duit en farine , fort par l'anche , & tombe dans le fac /.
L'endroit où font les chevaux s'appelle le manège. On
volt à gauche de la même figure les meules féparées,
& à la diftance qui convient pour la mouture , avec
l'ouverture de l'anche ; car le grand rouet C produit
des deux côtés le même effet , 6c fait marcher propre-
ment deux moulins. Mais ce n'eft pas tout : le même
méchanifme pourrait fervir à deux moulins à l'eau ;
on en voit un à droite. L'eau eft tirée du puits par une
pompe à chapelet : on a pratiqué clans l'étage fupe-
rieur à celui du manège un trou au plancher à tra-
vers lequel paffe le grand arbre debout B. Cet arbre
porte à fa partie fupérieure, comme on voit auffi à fon
inférieure , un grand roiiet C C. Les dents de ce roiiet
engrainent dans la lanterne K K fixée fur l'arbre de
couche L, au bout duquel eft adaptée une étoile M
garnie de les cornichons , à l'aide defquels elle porte
& tire la chaîne à chapelet , qui paffant dans un tuyau
de bois N qu'elle remplit exactement, monte l'eau
dans le petit réfervoir O , qui eft au-deffus du puits.
De ce réfervoir on la conduit par des tuyaux de plomb
partout où l'on en a befoin.
Il ne faut pas que la farine foit trop groffe , ni qu'el-
le foit trop fine ; l'un & l'autre excès a fes inconvé-
niens : trop groffe , le lue ne s'en tire pas facilement ;
trop fine , on court rifque de" perdre entiei ement le
braffm; il s'entait alors une liaifon, un mortier que
l'eau ne peut pénétrer lorfque la farine eft dans la
«uve.
De la cuve matière, Lorfque la farine eft faite , on la
met dans la cuve appellée communément cuve ma-
tière , Planche V. A. Cette cuve A eft de bois ; fes dou-
ves ont environ deux pouces ou deux pouces 6c de-
mi d'épaiffeur fur quatre à cinq pouces de largeur ;
fa profondeur eft d'environ quatre pies 6c demi , elle
eft à deux fonds : celui d'en bas eft plein, comme le
font ordinairement tous les fonds de cuve : mais il eft
furmonté d'un fécond que l'on appelle faux-fond. Ce
faux-fond eft compofé de planches percées dune mul-
titude de petits trous faits en cône , ou plus ouverts
à la partie inférieure de la planche , qu'à fa partie fu-
périeure. La différence de diamètre de ces ouvertu-
res eft grande; car à la partie inférieure le trou peut
avoir trois quarts de pouce ou environ, & il le trou-
ve réduit à la partie fupérieure à une ligne ou envi-
ron. Ces planches font foùtenues au-deffus du pre-
mier fond par des patins qui font attachés fur elles-
mêmes; ces patins ont environ deux pouces de hau-
teur, de façon qu'il fe trouve deux pouces d'inter-
valle entre les deux fonds.
Le faux-fond eft arrêté en-deffus par un cordon de
bois , qui règne tout autour de la cuve. Ce cordon a
environ trois petits pouces de large , & fert à rete-
nir tous les bouts des planches du faux-fond , & à
empêcher qu'elles ne fe lèvent avec l'eau que l'on
envoyé dans la cuve. Dans un endroit de la cuve le
plus commode , on place debout une efpece de pom-
pe ou tuyau de bois , qu'on appelle pompe à jetter
trempe. Ce tuyau paffe à -travers le faux-fond , &
pofe fur l'autre fond , mais ne s'y applique pas. On
lui a pratiqué aux quatre angles quatre efpeces de
pies , fur lefquels il eft appuyé : Pefpace évuidé qui
eft entre ces quatre pies , fuffit pour donner paffage
à l'eau.
Sous la cuve-matiere , il y en a une autre plus pe-
tite que l'on nomme reverdoir , & dans laquelle eft
équipée une pompe à chapelet , qu'on appelle pompe
à cabarer. Cette pompe fert à enlever ce qui fort de
la cuve-matiere , & à le renvoyer, par le moyen
d'une gouttière qu'on lui applique , dans les chau-
dières , fur le bord defquelles cette gouttière eft ap-
puyée de l'autre bout. Voye^ la Planche V. A cuve-
matiere : B autre cuve-matiere ; car on peut en avoir
plusieurs ; C, C, pompes à cabarer , qui fe rendent
dans les cuves placées au-deffous des cuves matiè-
res : E , E , gouttières : D , Z> , chaudières : F, F,
bacs. On verra plus bas l'ufage de tous les agrès 9
après que nous aurons expliqué ce qui concerne les
chaudières.
Des chaudières. Les chaudières dont on fe fert ,
fon, faites de grandes tables de cuivre, clouées en-
iemble avec des clous de même métal. Leur figure
eft celle d'un demi -globe. Elles font montées fur
leurs fourneaux , qui doivent être conftruits de bri-
que ou de tuileau. On y employé quelquefois la
pierre : mais la difficulté de trouver des pierres qui
réliftent au feu , fait préférer les deux autres efpeces
de matériaux.
Pour bien conftruire un fourneau , il faut d'abord
faire un bon maffif de moilon que l'on revêtira de
bons murs. Voye^fig. z. PL IL A , A , A , A , 6cc.
Ces murs étant élevés à la hauteur de deux pies &
demi ou environ , fuivant la grandeur des chaudiè-
res , on pavera le fond du fourneau B ,B , B,B, Sec.
avec du gros pavé de grais , ou avec de la brique de
champ , & debout : puis on pofera l'embouchure
C , C , C, C , 6cc. L'embouchure doit être conftruite
de trois ou quatre barres de fer , fortes Sx. larges de
cinq à fix pouces ; chacunes affemblées avec des en-
tretoifes de pareil fer. L'embouchure étant pofée ,
on conftruira le mur intérieur du fourneau , qu'on
voit même Planche, f g. g. en D , D, D. Cette fi-
gure eft une coupe verticale de la chaudière & du
fourneau , prife fur le milieu de l'embouchure qu'elle
partage en deux félon fa longueur. Ce mur intérieur
doit être de brique ou de tuileau. On l'élevera envi-
ron de quinze pouces à plomb. Sa forme , comme on
voit , eft concave. Après quoi on le continuera à
grand fruit. Quant à la forme qu'on lui donnera , ce
fera celle d'une calote fphérique concave, capable
d'embraffer la chaudière dans toute fa furface , ex-
cepté à l'endroit qui correfpond au fourneau , où la
chaudière n'a aucune partie de conftru&ion qui s'y
applique , & que par-tout ailleurs il y a entre la chau«
diere & le mur en calote fphérique concave, cinq à
fix pouces de diftance. Il n'y a rien qui correfponde
au fond de la chaudière E, comme on voit figure g.
L'efpace du mur ôc de la chaudière F , F , plus grand
par en bas que par-tout ailleurs , va toujours en dimi-
nuant à melùre qu'il s'élève vers les bords de la chau-
dière. Cette conftruftion eft très-raifonnable ; par ce
moyen les parties de la chaudière font d'autant plus
découvertes , qu'elles font plus expofées à l'action
du feu ; & la flamme refferrée à mefure qu'elle mon-
te , fe replie fur elle-même , & enveloppe toute la
chaudière , s'élevant jufqu'aux ventoufes qui font
perpendiculairement au-deffus de l'embouchure , en-
viron à cinq à fix pies plus haut. Il n'eft pas nécef-
faire d'avertir qu'il faut garnir 6c élever les murs de
revêtiffement , à mefure que l'on élevé ceux du four-
neau qui doivent commander aux autres. Lorfqu'on
a pouffé la «onftru&ion jufqu'en G , G, à quatre à
cinq pouces des agraffes de la chaudière , qui doi-
vent être faites de cuivre pour plus grande folidité ,
on fermera tout-à-coup le fourneau ; enforte que tou-
tes les briques toucheront pour lors la chaudière ; &C
l'on continuera de conftruire ainfi lors même qu'on
fera au-deffus des agraffes , avec cette différence feu-
lement, que les briques depuis le pié du mur jufqu'aux
agraffes , feront unies avec de la terre à four : & que
depuis les agraffes jufqu'aux bords & au - deffus des
bords , on les liera avec un mortier de chaux & un
ciment d'eau-forte. On obfervera , lorfqu'on polera
les briques avec le mortier de chaux & le ciment , de
faire mouiller les briques , afin qu'elles foient plus
difpofées à faire corps avec le ciment.
Lorfqu'on a conduit la maçonnerie à la hauteur
de la chaudière , 6c qu'on aura conftruit les ventou-
B R A
B R A
fes ••; les cheminées R , R ,fig. i. les hottes S, S , on
pofera fur le devant de la chaudière , c'eft-à-dire à la
pa2tie oppofée à l'embouchure du fourneau , une
jante de bois d'orme de 4 à 5 pouces d'équarriffage ,
&dont la largeur couvre l'épaiffeur du mur. On gar-
nira &c l'on arrafera cette jante tout autour de la
chaudière & des bords , avec des briques Se du ci-
ment. La maçonnerie ainii arrafée , on pofera les
fommiers : ce ibnt deux pièces de bois de chêne d'en-
viron neuf pouces de largeur , fur un pié de hauteur,
qui doivent traverfer la chaudière dans toute la lar-
geur , briffant entr'elles un efpace de vingt à vingt-
deux- pouces qui reliera toujours vuide , afin de pou-
voir emplir tk. vuider les chaudières. Ces deux pie-
ces de bois étant aufïï arrafées par la maçonnerie de
brique & de ciment , on pofera delîus des planches,
comme on les voit en T, T , T , fig. 1. Planche II.
ou fig. 1. Planche V. Ces planches feront attachées
fur les fommiers , ferviront de couvertures à la chau-
dière , &c porteront les bacs à jets , qui doivent tou-
jours être fur les chaudières , & qu'on y voit fig. 1 .
Planche V. en F , F.
Des bacs. Les bacs font des efpeces de réfervoirs
deftinés à recevoir la bierre lorfqu'elle eft laite. Il
y en a de deux fortes , les bacs à jetter , & les bacs
■de décharge. Les bacs à jetter dont il s'agit ici , &
qu'on voit en F, F, fig. 1. PI. V. font placés fur les
chaudières , & font faits pour recevoir tout ce qui en
fort , foit eau , foit bierre : mais les liqueurs ne font
que pafTer deflus , & n'y relient jamais ; aufïï font-
ils plus petits que les autres. Les bacs de décharge
font deftinés à recevoir la bierre lorlqu'elle eft taite,
& qu'elle a ceffé de cuire dans les chaudières. On
fait couler deffus ces bacs la bierre avec le houblon ,
par le moyen de gouttières faites & difpofées exprès.
La bierre refte dellus julqu'à ce qu'elle foit prête à
mettre en levain dans la cuve guilloire , dont nous
parlerons ci-après.
Nous avons fuffifamment expofé ce qui concerne
Jes agrès de la braderie : nous allons maintenant re-
tourner au grain moulu , que nous avons laiffé dans
la cuve- matière , tk. continuer la fabrication de la
bierre , ou l'art de braffer , qui ne commence pro-
prement qu'en cet endroit.
Manioc de braffer. Après qu'on a tiré de l'eau du
puits , & qu'on en a rempli les chaudières , on fait
du feu dans les fourneaux fur lelquels elles font pla-
cées , julqu'à ce que l'eau ait acquis le degré de cha-
leur convenable pour jetter trempe. Il faut bien pren-
dre garde que l'eau ne foit ni trop chaude , ni trop
froide. Cela eft de la dernière conféquence pour la
fabrication. Le trop de chaleur eft cauie que l'on ne
peut enfuite faire fermenter la bierre , ni par con-
féquent la dépurer de tout ce qu'elle a de grofïïer.
Le trop peu peut nuire encore davantage , une trem-
pe trop douce ne manquant jamais de lier en quelque
Sorte la farine , de l'empêcher de filtrer , &i. d'occa-
fionncr la perte des bralïïns.
Il n'eft pas facile de juger (i l'eau eft bonne ; c'eft
une affaire d'un taft expert à goûter les eaux : c'eft
le terme des Braffeurs. On goûte les eaux, en pré-
fentant le bout du doigt à leur furface. Si l'eau pi-
que au premier abord , c'eft un figne qu'elle eft bon-
ne. Cette détermination me paroit bien vague. Il
me femble qu'il vaudroit beaucoup mieux s'en rap-
porter au thermomètre : il ne s'agiroit que d'un nom-
bre fuffifant d'expériences faites avec cet infiniment
en différentes faifop.$.
On appelle/efrer trempe, vuider l'eau de la chau-
dière dans les bacs à jetter qu'on voit en F, F%iur les
chaudières. Cette manœuvre fe fait à laide d'un inf-
trument qu'on appelle un jet. Il eftrepréfenté PI. II.
Jig. 4. C'eft un grand chaudron de cuivre lait exprès,
& emmanché, d'un long morceau de bois, au bout
Tome II,
4O3
duquel eft un contrepoids de plomb qui allège le far-
deau du jet & de l'eau qu'il contient, & facilite ton
mouvement. Le milieu du manche porte fur la jante
de bois qui occupe l'intervalle des deux fommiers
qui font fur la chaudière ; on laiffe tomber la cuil-
liere du jet dans la chaudière. Quand elle eft pleine
on applique la main vers le contrepoids ; la cuillie-
re s'élève julqu'à la hauteur du bac , dans lequel on
renverfe l'eau qu'elle contient, en lui donnant un
tour de poignet.
Il faut obferver que , tandis qu'on jette l'eau hofs
de la chaudière , il faut tirer le feu de deffous ; fans
quoi la chaudière lé vuidant & reliant à fec , & le
ieu continuant dans le fourneau , la chaudière rilque-
roit d'être brûlée. L'eau eft conduite des chaudières
par les bacs dans la cuve matière , par le moyen d'u-
ne gouttière qui porte d'un bout à l'endroit où le bac
à jetter eft percé , & de l'autre fur les bords de la cu-
ve matière. Mais la manière dont elle eft portée dans
la cuve matière eft très-ingénieufe : la gouttière, ou
plutôt fon ouverture correipond à celle de la pompe
à jetter dont nous avons parlé : l'eau , au fortir de la
gouttière, tombe dans la pompe à jetter ; la pompe à
jetter la tranfmet jufqu'au fond-plein de la cuve ma-
tière. L'intervalle compris entre le fond-plein & le
faux- tond ou fond percé de trous coniques, le rem-
plit d'eau; quand il en eft plein , alors l'eau des chau-
dières qui continue de delcendre par la pompe à jet-
ter , force celle qui eft contenue entre les deux fonds ,
à fortir par les trous du faux-fond : cet effort eft con-
fidérable, comme le penferont bien ceux qui lavent
que les liqueurs agiffent en tout fens, en raifon de leur
hauteur & de leur bafe. La farine qui couvre le faux-
fond eft enlevée du faux-fond par l'effort de l'eau
jailliffante par les trous , jufqu'au niveau des bords
de la cuve. Cinq ou fix garçons braffeurs, armés cha-
cun d'un fourquet , ou d'un infiniment tel qu'on le
voit jig. y. PI. II. ( c'eft une efpece de pelle de fer
ou de cuivre , percée dans fon milieu de deux grands
yeux longitudinaux); ces ouvriers, dis je, font vis-
à-vis d'eux , chacun un trou dans la farine , l'écartant
avec leur fourquet julqu'à ce qu'ils ayent atteint l'eau
qui l'enlevé en mafle. AulTi-tôt qu'ils l'ont atteinte ,
ils agitent la farine ; ils travaillent à la mêler à l'eau ;
ils n'épargnent aucun moyen de la bien délayer, du
moins en gros. A cette manœuvre , ils en font fuccé-
der une autre. Ils quittent le fourquet. Ils prennent
la vague : c'eft un long infiniment de bois , terminé
par trois fourchons , traverjfés tous trois horifontale-
ment par trois ou quatre chevilles , ce qui divile l'ef-
pace total contenu entre les fourchons en plulieurs
efpaces plus petits. t'oy.Pl. des outils de Braff.lh plon-
gent la vague dans la cuve, & agitent fortement l'eau
6éia farine avec cet infiniment. Dès ce moment, le
mélange d'eau & de farine contenu dans la cuve-ma-
tiere , s'appelle le fardeau, & la dernière manœuvre
s'app elle r -agiter. On ne celle de vaguer , que quand
la farine eft délayée le plus parfaitement qu'on peut.
Du fardeau. Le fardeau refte dans cet état une heu-
re ou environ, pendant laquelle toute la farine fe
précipite & le repole fur le taux-fond. La liqueur que
pour lors on nomme tes métiers , demeure au-deffus ;
au bout d'une heure , les métiers étant éclaircis, on
donne avoi , en levant une tape de bois, qui traverfe
le faux tond , ec ferme un trou pratiqué dans le fond
de la cuve. La tape de bois étant levée, la liqueur
paffe dans le rtverdoir, petite cuve dont nous avons
fait mention ci-deffus. Quand je dis la ligueur, j'en-
tens celle qui eft comprife entre les deux fonds. Pour
ceile qui eft fur le fardeau ; lorfque l'efpace compris
enti e le fond èv le faux-fond eft vuide , elle fe filtre
à travers le fardeau , & achevé de lé charger du lue
contenu dans cette tarine.
Pendant que les métiers ï'cclaircifTent, comme on
E e e ij
404
B R A
B R A
vient de le dire , on remplit une des chaudières avec
de l'eau nouvelle , juiqu'à une certaine hauteur ; on
met fur cette eau une partie des premiers métiers ,
6c l'on achevé de remplir la chaudière pour la fécon-
de trempe : on fait de nouveau feu délions la chau-
dière , & on l'entretient jufqu'à ce qu'elle commence
à bouillir. Le refte des métiers eft dépofé dans une
autre chaudière.
Lorfque la matière de la féconde trempe , ou l'eau
mêlée avec les premiers métiers commence à bouil-
lir , on jette cette féconde trempe comme la premiè-
re, avec la gouttière & par la pompe à jetter trempe;
on délaye avec le fourquet ; on agite avec la vague ,
& on laiffe encore .repofer le fardeau environ une
heure. Au bout de cette heure , on donne avoi & on
•reçoit la liqueur dans le reverdoir, comme à la pre-
mière fois ; on la fait pafiér du reverdoir dans les
■chaudières , ainli que nous l'avons dit plus haut , à
l'occafion de ce vaiffeau , à l'aide d'une pompe à cha-
pelet ; c'eft alors qu'on met la quantité convenable
de houblon : on fait du feu fous la chaudière , &c le
tout cuit enfemble.
La quantité de houblon varie , félon fa force &
félon celle de la bierre , ou plutôt la quantité de grain
qu'on y a employée : on peut cependant affùrer qu'il
en faut depuis trois juiqu'à quatre livres par pièce ;
& par conféquent une loixantaine de livres fur un
braflin de treize à quatorze pièces. Il n'y a point de
préparation à lui donner.
Mais le grain & le houblon ne font pas les feuls in-
grédiens qu'on fafle entrer dans la bierre ; il y en a
qui y ajoutent la coriandre , foit en grain foit mou-
lue. Ceux qui l'employent en grain l'enferment dans
tin fac qu'ils fufpendent dans la cuve guilloire : ceux
qui la font moudre , ou l'enferment dans un fac qu'ils
fufpendent dans la cuve guilloire , comme fi elle étoit
en grain, ou en faupoudrent la bierre quand elle eft
fur les bacs à décharger. Au refte on fait très bien
de la bierre fans coriandre : cependant on en peut
mettre une chaudronnée de dix à douze pintes fur un
braffin de treize à quatorze pièces ; & ce que nous
avons dit , indique très-clairement le moment dlen
faire ufage.
De la cuiffon. C'eft alors que le travail de la bierre
rouge & de la bierre blanche commence à devenir
dînèrent : car jufqu'ici , toute la façon a été la même
pour l'une & pour l'autre , fi ce n'eft que l'on a fait
beaucoup plus fécher le grain à la touraille pour la
bierre rouge que pour la blanche.
La cuiffon de la bierre rouge eft beaucoup plus
considérable que celle de la blanche. La cuiffon de
la bierre blanche fe fait en trois ou quatre heures ,
fuivant la capacité des chaudières ; & celle de la rou-
ge en demande jufqu'à trente & quarante. Il faut
avouer aufii que la bierre blanche fe cuit à bien- plus
grand feu que la rouge ; au refte le plus ou le moins
de cuiffon , tant du grain fur la touraille , que de la
bierre même dans les chaudières , eft la feule choie
qui taffe la différence de la couleur des bierres.
Lorfque la bierre eft fuffifamment cuite , on vui-
de les chaudières avec le jet , comme nous l'avons
dit ailleurs , & cela s'appelle décharger: c'eft pour lors
que la bierre en fortant des bacs à jetter , qui font
fur les chaudières , entre dans les grands bacs ou bacs
de décharge , & y refte avec le houblon , jufqu'à
ce qu'elle foit bonne à mettre en levain.
Du levain. On ne peut dire au jufte à quel degré
de tiédeur ou de chaleur il faut prendre la bierre
pour la mettre en levain ; attendu que ce degré va-
rie fuivant les différentes températures de l'air, Se
qu'on eft obligé de mettre en levain à un degré
beaucoup plus chaud dans l'hy ver que dans l'été. Il
faut dans cette dernière faifon que la bierre foit
prêfque froide ; il n'y a qu'un long ufage & une gran-
de expérience qui puiffent inftruire là-deflus ,bu lés
obfervations au thermomètre : c'eft affûrément ici
une des occafiens où cet inftrument peut être très-
utile.
Lorfque la bierre eft prête à être mife en levain ,
on en fait couler dans la cuve , qu'on appelle cuve
guilloire, parle moyen des robinets qui font aux bacs;
on en fait couler , dis-je , une certaine quantité , dans
laquelle on jette de la levure de bierre , plus ou moins
fuivant la quantité de bierre qu'on a à mettre en le-
vain. La levure eft la caufe & l'effet de la fermenta-
tion ; deforte que celle que l'on met dans la bierre y
occafionnant la fermentation , engendre de nouvelle
levure & ainfi fucceffivement ; il tant environ la pro-
duction de levure de quatre à cinq pièces , pour en
mettre en levain la quantité de trente pièces.
La levure étant mile dans la quantité de bierre que
l'on a fait paffer des bacs à décharger dans la cuve
guilloire ; on a ce qu'on appelle le pie de levain : on
terme les robinets , & on laiffe le pié de levain envi-
ron une heure ou deux dans cet état ; pendant ce tems,
le principe de la fermentation s'établit. On connoit
que ce principe eft fuffifamment établi , aux crevaf-
les qui fe font à la moufle, en différens endroits de la
furface de la cuve ; ces crevaffes repréfentent allez
au naturel une pâte d'oie : pour lors il faut de nou-
veau faire couler de la bierre des bacs à décharger
dans la cuve guilloire , afin d'entretenir la fermenta-
tion , obfervant néanmoins de ne pas lâcher les ro-
binets d'abord à plein canal ; car on s'expoferoit à
fatiguer , &c peut-être à noyer le pié de levain : au
lieu que fi l'on modère les avois pendant quelques
tems , la fermentation fe conferve vigoureufe , & il
vient un moment où l'on peut en fureté ouvrir les
robinets entièrement.
Quand toute la bierre a paffé des bacs à déchar-
ger dans la cuve guilloire, la fermentation continue;
elle augmente juiqu'à un certain point de force ou
de maturité , auquel on peut entonner la bierre. On
connoit que le levain eft mûr , lorfque les rochers de
moufle que la fermentation a engendrés commencent
à s'affaiifer & à fondre fous eux-mêmes , & ne fe re-
produifent plus ; & qu'on ne remarque plus à la fu-
perficie du levain qu'une groffe écume extrêmement
dilatée : pour lors il faut frapper fur cette écume avec
une longue perche , & la faire rentrer dans la liqueur;
& c'eft ce qu'on appelle battre la guilloire.
Lorfque la guilloire ejl battue , on entonne la bierre
dans des tonneaux rangés à côté les uns des autres
fur des chantiers , fous lefquels font des bacquets , ou
moitiés de tonneau ; c'eft dans ces vaiffeaux que tom-
be la levure au fortir des tonneaux. L'endroit de la
brajjerie où font rangés les tonneaux s'appelle Yen-
tonnerie. Voye?^ PL V. de Brajferie , une entonnerie.
De la levure. La levure ne fe forme pas auflî-tôt
que la pièce eft entonnée, quoique la fermentation ,
félon toute apparence , n'ait pas ceflé ; il ne fort d'a-
bord que de la moufle qui fe fond promptement en
bierre : ce n'eft guère qu'au bout de trois ou quatre
heures , que la levure commence à fe former. On dif-
tingue facilement le changement; alors la moufle ne
fort, plus fi promptement : elle devient plus grafie &C
plus épaiffe ; mais bien-tôt après la fermentation fe
rallentit , pour lors on pure le bacauet, c'eft- à-dire ,
qu'on en retire la bierre provenue de la fonte des
moufles , & on en remplit les tonneaux. Mais comme
le produit des bacquets ne fuflit pas pour le rempliffa-
ge , on a recours à de la bierre du même braflin mife
en réferve pour cet effet.
Les tonneaux ainli remplis recommencent à fer-
menter avec plus de vivacité que jamais , &z jettent
pour lors de la vraie levure. On a foin de loûtenir 8c
de cultiver la fermentation , en rempliffant de tems.
en tems les tonneaux ; c'eft-à-dire que deux heure*
BRA
èprès qu'on a fait le premier rempliflage , on en fait
un fécond , mais fans purer les bacquets. Les bac-
quets ne fe purent qu'une fois ; après deux autres heu-
r es, dh fait un troiiicme rempliflage : au bout d'une
heure le quatrième , & à peu près à même diftance
de tems , le cinquième & dernier.
Tous ces diiïerens rempliflages faits , on làiffe la
bierre tranquille fur les chantiers ; &c ce n'eft que
vingt-quatre heures après le dernier rempliflage qu'el-
le peut être bondonnée. Si on fe hâtoit de bondon-
ner , la fermentation n'étant pas achevée , on expo-
feroit les pièces à s'entrouvrir en quelqu'endroit.
Voilà donc la bierre faite , & en état d'être mife
en cave : mais û l'on eft prefle d'en faire ufage , &C
que l'on n'ait pas le tems de la laifler éclaircir natu-
rellement , ce qui ne s'exécute pas trop prompte-
ment, on y remédie en la collant.
Di la colle. On colle la bierre , ainfi que le vin ,
avec de la colle de poiflon qui fe prépare de la ma-
nière fuivante : prenez la colle de poiffon , battez-la
avec un marteau , afin de pouvoir la déchiqueter plus
Facilement ; mettez-la en pièces les plus petites qu'il
éû poflible ; faites-la tremper dans de l'eau pendant
vingt-quatre ou trente heures ; renouveliez l'eau,
fur-tout dans les tems chauds , pour prévenir la cor-
ruption : après que la colle aura trempé , retirez-la
de l'eau ; maniez-la fortement jufqu'à ce qu'elle foit
devenue comme de la pâte ; délayez-la enfuite dans
de l'eau claire, & faites-en comme de l'orgeat très-
epais : après cette première préparation elle ne tarde
pas à prendre une autre forme , &c à devenir , de lait
qu'elle fembloit être , une gelée de viande très-forte,
•en verfant cleffus une quantité fuffifante de vin blanc,
ou de bierre très-vieille , &C remuant bien le tout
enfemblc : plus on remue , plus on s'apperçoit que
la gelée prend de coniiftance : quand elle en a iurfi-
fa minent, on la laifle dans cet état jufqu'à ce qu'on
veuille s'en fervir.
Quand on veut éclaircir la bierre par le moyen de
la colle , on prend de cette gelée dont on vient de
parler ; on la délaye dans de l'eau ; on pane ce mé-
lange à travers un linge : il ne faut pas qu'il y ait trop
d'eau ; fi la colle étoit trop délayée , elle ne produi-
roit plus d'effet.. On prend environ une pinte de
colle délayée & paffée pour un demi-muid : quand
on a verfé la colle dans la pièce , on y introduit un
bâton de la longueur du bras ; on agite fortement la
liqueur pendant environ une ou deux minutes , & on
laifle le tonneau environ douze heures fans le rebou-
cher ; cela fait avec foin , au bout de vingt - quatre
heures on aura de la bierre très-claire.
Voilà tout ce qui concerne la manière de brafler ,
& les inftrumens du Brafleur. Un homme intelligent
pourrait, lur cette dclcription & fur l'infpcclion de
nos planches , lever une braj/eric , & faire de la bier-
re : il ne lui relierait à apprendre que ce qu'on ne
tient que de l'expérience , comme la chaleur de l'eau
propre à jetter trempe , celle de la bierre pour être
mile en levain, & autres circonflances pareilles.
L'agrès d'une brajjer'u où l'on remarque particulière-
ment de l'invention , c'eft la cuve à deux fonds , que
lesBraflcurs appellent cuve- matière : fi au lieu de faire
enlever le fardeau de farine par des eaux qui le pren-
nent en-deflbus , on eût fait tomber les eaux deflus ,
ces eaux l'auraient pénétré, appefanti, lié,& il eût été
prefqu'impoflible de le travailler, foit au fourquet,
l'oit a la vague. Le faux-fond &: la pompe à jetter trem-
pe, font une application très-ingénietife & très-utile
du principe d'aftion des fluides : un bon phyficien
n'aurait pas imaginé mieux que l'ouvrier à qui l'on
doit cette invention , en vertu de laquelle la mafle
de farine eft prife en-deflbus, & portée toute entière
Vers le haut de la cuve , d'où l'ouvrier n'a plus qu'à
la précipiter vers le fond ; ce qui lui elt infiniment I
BRA
40 j
plus facile que d'avoir à l'élever du fond vers le
haut de la cuve : d'ailleurs l'eau renfermée entre la
farine & le fond , fe conferve dans une chaleur pref-
qu'égale , & la trempe en eft d'autant meilleure. Les
petits trous du faux fond, après avoir fervi à l'ex-
hauflement de la farine pour la vaguer,fervent, après
qu'elle elt vaguée , à la filtration de l'eau chargée de
fon lue ; & il y a bien de l'apparence que la nécef-
fité de cette filtration a fait d'abord imaginer le faux
fond , & qu'on a parle de-là à la pompe à jetter
trempe.
Les uns font venir le mot brajfer de brace , efpece
de grain dont on faîfoit la bierre : les autres de bras
ou de les compofés , parce que la manœuvre la plus
fatigante s'exécute à force de bras. Les brajferles font
fort anciennes à Paris ; & les Bralfeurs avoient des
ftatuts en 1268 , fous S. Louis. Ceux auxquels ils
font fournis fe réduifent à un petit nombre d'articles.
i°. Il y eft dit que nul ne braflera &c ne charriera
ou fera charrier bierre , les dimanches , les fêtes fo-
lemnelles & celles de Vierge.
20. Que nul ne pourra lever brajfer'u fans avoir fait
cinq ans d'apprentiffage , & trois ans de compa*
gnonage , avec chef-d'œuvre.
3°. Qu'il n'entrera dans la bierre que bons grains
& houblons bien tenus &c bien nettoyés , fans y mê-
ler farraiin , ivraie, &c. pour cet effet les houblons
feront vilités par les jurés , afin qu'ils ne foient em-
ployés échauffes , mollis , gâtés , mouillés , &c.
40. Qu'il ne fera colporté par la ville aucune levure
de bierre , mais qu'elle fera toute vendue dans la
brajfer'u aux Boulangers & Pâtifliers , & non à d'au-
tres.
50. Que les levures de bierre apportées par les fo«
rains feront vifitées par les jurés avant que d'être ex*
pofées en vente.
6°. Qu'aucun Brafleur ne pourra tenir dans la
brajfer'u , bœuf, vache, porc , oifon, canne , volaille,
comme contraire à la netteté.
70. Qu'il ne fera fait dans une brajfer'u qu 'un braflîrt
par jour, de quinze feptiers de farine au plus. Je dou*
te que cet article foit exécuté. .
8°. Que les caques , barrds , & autres vaifleaux à
contenir bierre , feront marqués de la marque du
Brafleur , laquelle marque fera frappée en préfence
des jurés.
90. Qu'aucun maître n'emportera des maifons
qu'il fournit de bierre , que les vaifleaux qui lui ap-
partiendront par convention.
io°. Que ceux qui vendent en détail feront fou-
rnis à la vifite des jurés.
ii°. Que nul ne pourra s'aflbeier dans le com-
merce d'autres qu'un maître du métier.
12°. Qu'aucun maître n'aura qu'un apprenti à la
fois , & que cet apprenti ne pourra être tranfporté
fans le confentement des jurés. Il y a exception à la
première partie de cet article pour la dernière an-
née : on peut avoir deux apprentis, dont l'un com-
mence fa première année , & l'autre fa cinquième.
1 30. Que tout fils de maître pourra tenir ouvroir
en faifant chef-d'œuvre.
1 4". Que nul ne recevra pour compagnon celui
qui aura quitté fon maître , outre le gré de ce maître.
1 50. Qu'une veuve pourraavoir ferviteurs & faire
brafler , mais non prendre apprentis.
1 6°. Que les maîtres ne lé fouftrairont ni ouvriers
ni apprentis les uns aux autres.
1 7". Qu'ils éliront trois maîtres pour être jurés &
gardes , deux defquels le changeront de 2 en 2 ans.
180. Quti ces jure ce gardes auront droit de vi-
fite dans la ville , les faubourgs & la banlieue.
• La bierre eft flljette à des droits ; & pour que le
Roi n'en foit pas fruftre, le Brafleur eft obligé à cha-
que braflîn d'avertir le commis du jour & de l'heure
40<>
B R A
qu'il met le feu fous les chaiidieres , fous peine d'a-
mende & de confiscation.
Comme on ne peut taire de la bierre fans y em-
ployer beaucoup de grain , le roi fait furfeoir les
brajferies dans les tems de difette.
Il y eut jadis une grande conteftation fur la vente
que les Brafleurs faif oient de la levure de bierre aux
Boulangers & aux Pâtiffiers : on prétendoit qu'elle
étoit mal-faine ; la Faculté de Paris décida le con-
traire.
* BRASSEUR , f. f. ( Art méchan. ) ouvrier auto-
rifé à lever une brafferie , & à fabriquer & vendre
de la bierre. Voye^ Brasserie & Bierre. Les Braf
feurs s'apelloient autrefois Cervoifïers. Foye^ dans les
mêmes articles les ftatuts auxquels les Brajjéurs font
afïïijettis.
BRASSICOURT , {Manège. ) fe dit d'un cheval
qui a naturellement les jambes courbées en arc, à la
différence des chevaux arqués. Voyc^ Arqué. ( V)
BRASSIN , f. m. on entend par ce mot toute la
bierre qui fe retire de la quantité de grains qu'on met
& qu'on travaille à chaque fois dans la cuve-matiere :
ainii le braffin peut être plus ou moins coniidérable.
BRASSOiR , f. m. à la Monnoie , infiniment de fer
ou de terre cuite de creufet , dont on le fert pour
brafTer le métal lorsqu'il ell en bain. Pour l'argent &
le billon les braffoirs font des cuiilieres de fer : mais
pour l'or fi l'on fe fervoit de brajjoirs de fer , l'hété-
rogénéité qui règne entre ces deux métaux feroit pé-
tiller l'or & s'écarter; d'où il s'enfuivroit des déchets
& un embarras dans le travail. On a foin de bien
chauffer le brajfoir, même de terre, avant de s'en fer-
vir. Voye^ Bain.
BRATHIAN , ( Géog. ) ville de la Pniffe Polo-
noife.
BRATSKI ou BRATI , ( Hijl. mod. ) c'eft une na-
tion de Tartares en Sibérie , qui s'eft venu établir
fur les bords de la rivière d'Anagara. Ils font fournis
à la Mofcovie , 6c ont bâti la ville de Bratskoy.
BRAVA, {Géog.) l'une des îles du cap-Verd , ap-
partenante aux Portugais. Le meilleur port qui s'y
trouve eft celui de Fuerno. Il y croit d'excellent vin.
Brava, ville & république d 'Afrique avec un
bon port, fur la côte d'Ajan , près de celle de Zan-
s;uebar. Long. 5o. 10. lat. i.
* BRAVADE , f. f. ( Hijl. mod. ) fête qui fe célè-
bre à Aix en Provence la veille de S. Jean. Onexpo-
fe un oifeau dans un champ pendant quelques jours ,
on le tire à coups de fufii , & celui qui lui abat la tête
eft déclaré roi de la fête par les confuls & les autres
magiftrats. Le roi fe choifit un lieutenant & un enfei-
gne qui font reçus à l'hôtel de ville. Ces trois officiers
lèvent chacun une compagnie de moufquetaires , tk.
fe trouvent tous enfemble fur la place de la ville , oii
le parlement fe rend auffi pour allumer le feu de la
S. Jean. On fait remonter l'inftitution de cette fête
jufqu'en 1256, lors du retour de Charles d'Anjou du
voyage de la Tcrre-fainte. On tiroit autrefois l'oi-
feau avec les flèches , qu'on a abandonnées depuis
l'invention du fufil. Il y a apparence que le roi de la
bravade jouit de quelques privilèges, quoiqu'on ne
nous les dife pas. Dans toutes lesivilles de province
011 l'on tire l 'oifeau , on donne le nom de roi à celui
qui l'abat trois années de fuite , & il eft exempt des
droits d'entrée & du logement des foldats.
BRAUBACH , ( Giog. ) petite ville d'Allemagne
avec un château , fur le Rhin , dans la Veteravie.
BRAULIO , ( Géog. ) haute montagne des Alpes
chez les Grifons , près de la ville de Bormio, fur les
frontières du Tirol.
BRAULS , f. f. pi. ( Commerce. ) toiles des Indes
rayées de bleu & de blanc : on les nomme autrement
turbans , parce qu'on les employé particulièrement
fur la côte d'Afrique aux coeffures appellées de ce
nom.
B R A
BRAUNAU, ( Géog.) ville fortifiée delà haute
Bavière , fur la rivière d'Inn. Il y a encore une autre
ville de ce nom dans le royaume de Bohême.
BRAUNFELS , { Géog.') petite ville avec un châ-
teau fort dans le comté de Solms , dans le cercle du
haut Rhin , à une lieu* de Wetzlar.
BRAUNSBERG, {Géog. ) ville de la PmfTe Po-
lonoife , fur la lifiere de la Prufîe royale , fur la ri-*
viere dePaflerg.
* BRAVOURE, VALEUR, COURAGE, CŒUR,
INTPvEPIDITÉ , ( Gramm. ) termes qui défignent
tous l'état de Pâme à la vue d'un danger: le cœur mar-
que la fermeté ; l'homme de cœur ne recule pas : le
courage eft accompagné d'impatience ; il brûle d'atta-
quer : la valeur eft le courage accompagné d'une for-
te d'oftentation qu'on aime dans la jeunelTe : la bra-
voure n'eft guère d'ufage que dans les dangers de la
guerre , & femble ne s'accorder qu'à ceux qui s'y
font expofés pluiîeurs fois ; la bravoure eft le courage
f ouvent éprouvé : P intrépidité eft le mépris de la vie
& des dangers. Les termes bravoure , valeur , intré-
pidité, ont une acception moins étendue que ceux de
cœur & de courage.
* BRAURONE , ( Géog. anc. & Myth. ) lieu de
l'Attique où la ftatue de Diane enlevée de la Tauride
par Iphigénie fut dépoiée dans un temple qu'Orefte
fît élever. On y célébroit tous les ans la délivrance
de ces deux entans d'Agamemnon. On appliquoit une
épée nue fur la tête d'une viciime humaine ; quelques
gouttes de fon fang y tenoient lieu de facrifîce. Iphi-
génie reçut les honneurs divins dans le temple de
Braurone , dont elle avoit été la première prêtrefTe.
BRA Y fur Seine, petite ville de France dans la pro-
vince de Champagne. Il y a auffi une ville de ce nom
dans le Soiffbnnois.
Bray fur Somme , petite ville de France en Picar-
die , entre Péronne oî Amiens.
Bray , ( le pays de ) Géog. petit pays de France en
Normandie. C'eft une des quatrepetites contrées qui
compofent le diocefe de Rouen.
BRAY£ , ( Géog. ) rivière de France qui prend fa
fource dans le bas Perche, ôcfe jette dans le Loir.
Braye, voyei Canal.
BRAYER , f. m. terme de Chirurgie, eft une forte
de bandage d'acier ou autre matière lemblable, pour
tenir en état les parties auxquelles il y a des hernies
ou ruptures. troye?v Hernie.
Ces bandages font faits d'un cercle d'acier forgé ,
battu , & applati , affez grand pour environner les
trois quarts du corps , & dont l'extrémité , qui doit
pofèr fur la defeente , eft allongée en en-bas en for-
me d'écuflbn. A l'autre extrémité du cercle , il y a
une courroie affez longue pour achever le tour du
corps , & pour s'attacher à l'écuflbn , oit il y a une
pointe d'acier en forme de crochet qui entre dans un
des trous dont la courroie eft percée , afin qu'on puif-
fe ferrer le bandage plus ou moins, félon qu'il eft né-
ceffaire : ces bandages font ordinairement garnis de
coton , & recouverts de chamois ou de marroquin.
L'écuflbn doit être bien garni intérieurement , afin
de contenir les parties fans blefîèr le point fur lequel
il appuie. Il y a des bandages à double écuflbn pour
■la hernie. Des deux côtés on peut joindre les écuf-
fons par un reffbrt ou par deux ou trois petites char-
nières qui leur permettent de fe plier ; cette mécha-
nique empêche le froiflement & la contufion des par-
ties fur lefquelles le bandage eft pofé. {f^oye- PL f.
fig. y. & PL Vl.fig.i. 2. 3. &4-) .
M. Delaunay, maître en Chirurgie, a préfenté un
bandage d'acier élaftique , dont la figure & la'defcrip-
tion fe trouvent dans le premier volume des Mémoi-
res de L'Académie royale de Chirurgie.
M. Martin , auffi maître en Chirurgie , a préfenté
depuis peu à la même académie , des bandages qu'il
BRA
G perfectionnés à plufieurs égards. Un défaut aiTez
ordinaire des bandages, eft de ne pas comprimer éga-
lement dans toutes les attitudes & les différens mou-
vcmens auxquels on elt expofé, parce que la ceinture
d'acier ne peut pas avoir allez de refîbrt , 6c former
à l'oppofite de l'écuffon , un point d'appui fuffifant
pour la compreffion. M. Martin, pour éviter cet in-
convénient, a rendu élaftique la pelotte ou écuffon
du brayer. La pelotte renferme deux platines ; l'une
eft continue au demi-cercle d'acier, & l'autre placée
en dedans , tient fupérieurement à la précédente par
une charnière qui en fait le point fixe , pendant que
la partie inférieure refte béante & mobile au moyen
d'un refTort mis entre les deux plaques : ce reffort
tend toujours à rapprocher celle du dedans vers le
ventre , dans le tems que la première pourrait s'en
éloigner avec le demi-cercle d'acier par quelque mou-
vement particulier du corps ou quelque changement
<le fituation. Ainfi cette féconde platine , qui eft con-
tinuellement paflee vers l'anneau , fait une compref-
fion d'autant plus avantageufe , qu'elle eft détermi-
née de bas en haut, & demeure toujours égaLe dans
•quelque attitude que fe trouve le corps. Cet avan-
tage difpenfe de porter le bandage auffi ferré qu'on
le porte ordinairement, ce qui elt une féconde utilité
d'un grand prix pour beaucoup de perfonnes , & fur-
tout pour celles qui font gràlfcs 6c qui s'écorchent
facilement.
M. Martin a donné plufieurs avantages aux ban-
dages qui fervent à contenir les hernies de l'ombilic ,
les chûtes de matrice , du fondement , &c.
11 eft important de faire remarquer que les banda-
ges n'exigent pas un foin fi borné ni fi vulgaire qu'on
pourroit lé l'imaginer : tout y elt digne de l'attention
îles habiles Chirurgiens. L'exécution de ces fortes de
machines ne peut être parfaite qu'à l'aide de leurs
lumières & de leur expérience. Cette branche de l'art
lient à beaucoup de connoiffances anatomiques &
chirurgicales fort délicates , & éloignées feulement
en apparence ; connoiffances , dont font dépourvus
les ouvriers auxquels on permet la fabrique 6c mê-
me l'application de ces fortes d'inltrumcns.
Le public ne peut être trop informé qu'un brayer
bien conditionné eft l'unique moyen qui puifTe met-
tre en fùrctc la vie de ceux qui font affligés de def-
centes; il les garantit de l'étranglement que la chute
des parties pourroit occalionner , & il produit quel-
quefois la guérifon aux perfonnes même d'un âge
avancé.
Pour les enfans qui font encore à la mammellc , on
ne fe ! ért pas de bandage d'acier : on polê quelques
compreffes graduées fur l'anneau , 6c on les contient
avec une bande de toile. On peut auffi fe lervir d'un
bandage , dont la ceinture de liliere ou de drap revê-
tu de chamois ou de futaine , ait une pelotte de toile
bien bourrée de filaffe 6c revêtue de la même étoffe
que la ceinture. On doit cirer les bandages des en-
fans , pour qu'ils ne pourriffent pas dans les urines
& les excrémens.
Au derrière de tous les brayers on attache une ban-
delette de toile double , qui paffant fous la cuiffe vient
s'attacher à l'écuffon , de même que la courroie qui
termine la ceinture. Cette bandelette le nomme la
Jbus-cuijfe ; elle foùtient le bandage , 6c empêche qu'il
ne remonte.
L'application de ces bandages elt ailée à taire :
ceux qui en portent les ôtent & les remettent fans
peine , par l'habitude qu'ils en ont contractée. Mais
une circonitancc cffentielle à obferver , c'efl de ne
point mettre le bandage que la deicente ne foit en-
tièrement rentrée; car s'il reftoit une partie de l'in-
teftin dans l'aine, le bandage le meurtriffant y cau-
serait de la douleur, de l'inflammation, 6c enfin la
gangrené, fi l'on n'y pourvoyoit : cette règle fçuf-
BRA
40?
fre quelque exception , lorfque l'épiploon forme la
hernie, Voyey RÉDUCTION.
Brayer pour contenir les hemorrhoïdes. Voye{ He-
MORRHOÏDES.
Brayer pour la chute du rectum ou de la matrice,
Foyei Chute.
Brayer pour la hernie du nombril. V-oyét Exom-
PHALE. (Y")
Brayer, c'eft une efpece de bandage fait de gros
cuir , garni d'une boucle & de fon ardillon , qui fert
à foûtenir le battant d'une cloche. Voye-^ Cloche
Xj- FONDEUR DE CLOCHES, foy£{figure 6. Planche
de la Fonderie des cloches , & l'article FONTE DES
CLO C HES.
Braver, en Fauconnerie , c'eft le cul d'un oifeau
de proie , & on dit qu'une marque de la bonté d'un
faucon eft quand il a le brayer net , & lorfqu'il lui
tombe bien bas le long de la queue , & qu'autour il
cil bien émaillé de taches noires & rouffes.
B R AY E R un vaijjïau ou brayer les coutures d'un
vaijjeau , (Marine.*) c'eft y appliquer du bray bouilli
pour remédier aux voies d'eau , en rempliffant & en
refferrant les jointures de fon bordage. On dit lbu-
vent tfpahncr 6ifuifer pour brayer. (Z)
* BRAZER , en terme de Serrurier, Coutelier, & au-
tres ouvriers enfer , c'eft unir deux pièces de fer avec
du cuivre. On bra^e dans les occafions fur-tout où
la crainte de gâter les formes d'une pièce rompue ,
empêche de la lbuder. Pour brarer, il faut ajufter les
pièces à bra7^er le plus exactement qu'on pourra , de
manière qu'elles ne vacillent point , parce que fi elles
s'ébranloient , elles fe déplaceroient & ne fe brade-
raient pas où l'on veut ; c'eft pourquoi on les lie avec
de petits fils de fer ; après quoi on prend du laiton
ou de la mitraille la plus jaune 6c la plus mince que
faire fe peut ; on la coupe par petites bandes , que
l'on met autour des pièces qu'on veut brader , on les
couvre avec du papier ou du linge qu'on lie avec un
fil ; alors on prend de la terre franche qui foit un peu
fablpnneufe , car autrement elle pourroit fondre 6c
couler : s'il arrivoit que la terre fût trop grafîe , on
y mêleroit du fable 6c de l'argile , & de 1 écaille de
fer , avec un peu de fiente de cheval & de bourre ;
puis on la bat avec un bâton, & on la détrempe avec
de l'eau claire en confiftance de pâte ; plus elle fera
battue , mieux elle vaudra. On en couvre l'ouvrage
accommodé comme nous avons dit ci-deffus , de l'é-
paiffeur de 2 , 3 , 4, 5,6 lignes ou davantage, lui-
vant la groffeur des pièces à brader. Ainfi couvert ,
on le mouille avec de l'eau , puis on met de l'écaillé
de fer par-deffus ; cela fait on le met dans le feu , &
& on le chauffe doucement. Quand on voit la terre
rouge , on le tourne 6c retourne doucement dans le
feu, 6c on chauffe encore un efpaCe de tems, toujours
tournant & retournant à plulieurs reprifes , de peur
qu'il ne chauffe trop d'un côté : on chauffe jufqu'à ce
qu'on apperçoive une fumée bleue qui s'échappe de
la terre ; on elt fur-tout exaét à tourner 6c retourner
lorfqu'on voit la flamme bleue violette , car c'elt une
marque que le laiton elt fondu. On chauffe encore
un peu , afin que la fulion du laiton foit parfaite , 6c
qu'il coule également par tous les endroits néceffai-
rei. On ote enluite l'ouvrage du feu , 6c on le tourne
cv retourne doucement fur l'enclume pour faire aller
le laiton par-tout , jufqu'à ce que l'ouvrage (oir i\n
peu refroidi , 6c qu'il foit à prélumer que le lairon ne
coule plus; fans cette précaution il le trouverait plus
épais en un endroit qu'en un autre. On Iaiffe refroi-
dir l'ouvrage fous la terre , 6c l'on ne longe à le dé-
couvrir que quand on peut facilement y appliquer la
main. Cette façon elt commune à toutes les giolies
pièces.
Pour les petites , on les pourra brader fans les cou-
vrir de terre , prenant du laiton , le mettant fur 1?
408
B R E
BRE
pièce , ia mouillant avec de l'eau claire , & y répan-
dant du borax en poudre ; après quoi on la fera lé-
cher doucement contre le feu ; car fi on l'approchoit
d'un trop grand feu en commençant , l'eau venant à
.s'échauffer & à bouillir, elle jetteroit le laiton & le
borax hors de la place.
BRAZZA, (Géog.) île, avec une petite ville de
même nom , dans le golfe de Venife , vis-à-vis de
Spalatro : elle eft aux Vénitiens.
BREBBES , f. m. pi. (Hïft. mod. & Géog.) peuples
particuliers , qui habitent les montagnes Atlantiques
de l'Afrique ; ils font Mahométans ; & par une dévo-
tion très-bifarre ils fe balafrent les joues de marques
& de cicatrices , ce qui les diltingue des autres habi-'
tans des mêmes contrées.
BREBEZ, (Géog.) rivière qui prend fa fource
dans la Pruffe Polonoilé , & qui le jette à Mazoire ,
dans la rivière de Natew.
BREBIS , ovis, fub. f. (Hifi. nat. Zoolog.) animal
quadrupède femelle , dent le bélier eft le mâle ; ce-
pendant c'eft du nom de la femelle qu'on a dérivé
les noms génériques oviaria & oviarium pecus , trou-
peaux de brebis, foye^ BÉLIER. Il y a des brebis qui
ont de petites cornes : mais la plupart n'en ont point.
On a diftingué plulieurs fortes de brebis , par la diffé-
rence du poil ou de la laine : on les a auffi défignées
par les noms des pays où elles fe trouvoient. M. Lin-
naeus a réduit toutes cell es dont il eft fait mention dans
plufieurs auteurs , à trois efpeces principales.
La brebis domefiique , & celle qui a une très-grande
queue , font compriles fous la première efpece. Voy.
Mouton.
La féconde eft celle du Strepjlctros de Crète ou de
Candie , qui a les cornes droites & entourées par une
gouttière dirigée en fpirale ; au refte , elle ne diffère
guère des nôtres. Bellon dit qu'il y en a de grands
troupeaux fur le mont Ida.
La troifieme efpece comprend les brebis de Guinée
ou d'Angole ; elles font plus grandes que les nôtres ;
le derrière de la tête eft plus l'aillant, les oreilles.font
pendantes, & les cornes petites & recourbées en-bas
jufqu'aux yeux : ces brebis ont une crinière qui def-
cend plus bas que le cou , des poils courts comme
ceux du bouc au lieu de laine , & un fanon fous la
gorge comme le bœuf, f^oye^ Mouton, Quadru-
pède. Ray, fynop. anim, quadrup. Linnan,j^/?. nat-
* Choix des brebis. Le profit qu on tire d un trou-
peau , dépend principalement de la bonté des brebis.
Une bonne brebis a le corps grand , les yeux de mê-
me , & fort éveillés ; la queue , les jambes , & les té-
tines longues; le ventre grand & large ; la démarche
libre & alerte ; les jambes bas jointées ; la tête , le
dos & le cou , garfiis de laine longue , foyeufe , dé-
liée, luifante ôc blanche. La brebis noire n'eft pas fi
eftimée que la blanche : la grife & la tachetée de
différentes couleurs, l'eft encore moins.
Age de la brebis. Que votre brebis ne foit ni trop
jeune ni trop vieille. Celle de deux ans fera bonne à
garder : laiffez celle qui en aura plus de trois.
L'âge d'une brebis fe connoît à les dents qui fe for-
tifient jufqu'à trois & quatre ans. Paffé cet âge , elles
deviennent inégales entr'elles. Mais c'eft une affaire
d'expérience que d'eftimer l'âge par ces différences.
Efpece de brebis. Les brebis étrangères vous rappor-
teront plus que les communes. Les flandrines , ou cel-
les qui font venues des Indes en Hollande & en Flan-
dre , vous donneront au moins deux agneaux par an ;
feront plus fortes que vos brebis ordinaires ; porte-
ront deux fois plus de laine , & l'auront plus fine , &
vous procureront des moutons & des béliers plus
forts.
Ayez donc un bélier flandrin avec quelques brebis
^e cette efpece»
Il y a dans le pays Breffan , aux environs de Man*
toue , des brebis dont la laine eft groffiere , mais qu'on
tond jufqu'à trois fois par an : elles font d'ailleurs fi
vigoureufes, qu'on peut les mener aux champs en
tout tems.
Le pays Tefïïn' a fes brebis : elles font auffi vi-
goureufes que les Breffanes , mais elles portent moins
de laine. En récompenfc, elles font belles, groffes,
& donnent de beaux agneaux. Les bâtardes du
Breffan font eftimées ; cependant elles font moins
fortes que les naturelles , quoique plus fortes que les
Teffines. On dit que c'eft aux brebis de Barbarie que
l'Angleterre doit la beauté de les draps : ce qu'il y a
de certain , c'eft qu'elles donnent trois fois plus de
lait que les brebis du pays ; que la laine en eft plus
fine , & qu'on en tire deux fois davantage.
Chc4fiffiez entre ces brebis les meilleures , & for-
mez-en votre troupeau. Ayez de bonnes bergeries ;
voyei tarticle Bergerie. Ne négligez pas le choix
. du berger ; voye^ les articles Berger & Chien de
Berger.
Les brebis font timides , douces , fenfibles au chaud
& au froid , & fort fujettes à maladie : elles ne pat-
ient guère neuf ans.
Nourriture des brebis. Il faut les nourrir d'herbes ,
de foin , de paille, & de fon dans la bergerie :«on
peut auffi leur donner des raves , des navets , & des
joncs marins hachés; de la vefee, du fainfoin, & de
la luferne : dans les tems de difette , des feuilles d'or-
meau , de frêne , & de bouleau , du cythife , des cof-
fes & feuilles de légumes , des choux , &c. C'eft
principalement en hy ver qu'on uie de ces lecours ,
au défaut des pâturages.
Lorfque le tems du pacage eft venu , au prin-
tems , en automme , & en hy ver , on les y mené une
fois par jour : elles lortent fur les neur heures , & on
les ramené avant le foleil couché. En été , elles y
vont deux fois le jour. Elles partent dès le grand
matin , & rentrent fur les dix heures : on les fait boi-
re ; on les renferme dans la bergerie ; elles y repo-
fent jufqu'à trois heures qu'elles retournent aux
champs , où elles paiffent jufqu'au coucher du fo-
leil , qu'on les fait boire une féconde fois , avant que
de les renfermer. On ne les fait boire qu'une fois
dans les autres faifons.
II ne faut pas mener paitre au loin les brebis qui
ont des agneaux ; d faut même alors leur donner le
matin de bon foin. Tirez leur lait le matin , avant
qu'elles forrent , & le foir quand elles reviennent.
Recommandez à votre berger d'éviter les pâtura-
ges épais & marécageux ; qu'il choififle les lieux
fecs, aérés, élevés, ceux qui abondent en plantes
odoriférantes , & les collines : les chardons & les
épines gâtent la laine , & donnent la galle aux bre-
bis. Mais il n'y a point de meilleurs pâturages que
les bords de la mer &C les environs des marais fa-
lans. Qu'il les faffe paître à l'ombre dans les gran-
des chaleurs.
Il faut tenir le bélier féparé des brebis , foit aux
champs , foit dans la bergerie , à moins qu'elles ne
foient en chaleur ; Se pour augmenter fon troupeau ,
il en faut féparer toutes les viedles brebis. Ce triage
fe fera fur la fin d'Avril.
La paille qu'on donne aux brebis fe remet en ger-
be , qu'on vend ; car les bêtes à laine n'en rongent
que l'épi. On parque les brebis ; voye^ l'article PAR-
CAGE. On les tond vers le mois de Mai ; voy. Ton-
te. On les engraiffe quand on veut s'en détaire ; voy.
Engrais. Quant à la propagation , voici comment
on y procède.
Multiplication des brebis. Les brebis font en chaleur
depuis la Touffaint jufqu'au mois d'Avril ; elles agne-
lent donc auffi pendant fix mois : elles portent pen-
dant cinq. Comme le froid feroit périr les agneaux
qui
B R E
ERE
qui naîtroient avant Décembre , on ne Iaiffe appro-
cher le bélier des brebis , que vers la fin de Juillet ou
au mois d'Août.
Ne laiffez le bélier avec vos brebis que le tems qu'il
faut pour qu'elles conçoivent. Vos agneaux vous vien-
dront au tems où vous les attendrez , 6c vous ména-
gerez votre bélier. Nourririez bien votre bélier pen-
dant qu'il travaille , 6c faites prendre de l'eau falée
à la brebis.
Il faut veiller fur les brebis , quand le tems de l'a-
gnation approche. L'agneau 6c la mère périront fou-
vent û on ne les aide. Vaye^ r article Agneau. Vous
enfermerez les brebis qui auront agnelé pendant qua-
tre jours , avec du bon foin, du fon mêle d'un peu de
fel , & de l'eau tiède , blanchie avec un peu de farine
de millet ou de froment. Donnez -leur aufïï de la
feuille d'orme ou de frêne, amaffée dans la faifon.
Le cinquième jour, elles pourront aller aux champs ,
mais non loin , de peur que leur lait ne s'échauffe.
Si l'on veut tirer partie du lait de la brebis , il ne faut
pas que l'agneau la tête.
Maladies des brebis. Comme les brebis font fort dé-
licates , elles font, comme nous l'avons dit plus haut,
fujettes à plusieurs maladies. Il faut foigneufement
féparer les malades des autres. On s'en appercevra
à plufieurs fignes ; elles auront alors la tête lourde &
les yeux troubles ; elles négligeront les pâturages ;
elles ne bondiront point; elles marcheront lentement ;
elles fe tiendront à l'écart ; elles chercheront l'ombre
& la folitude ; elles chanceieront en marchant; elles
fe coucheront fouvent ; elles fe traîneront après les
brebis faines : le berger ne fauroit y regarder de trop
près.
Voici un remède qui foulage affez généralement
les beftiaux.
Prenez du foie d'antimoine , enveloppez-le dans un
linge , mettez-le tremper dans une pinte de vin blanc ;
ajoutez huit dragmes de lené , du lucre , de la noix
mufeade , &c autres épices ; laiflez infufer le tout 24
heures , 6c donnez un demi-feptier de cette infufion
à chaque brebis: cependant tenez la brebis ainli médi-
camentée dans un lieu chaud , 6c ne la faites manger
que le foir.
Les brebis font principalement fujettes à la galle,
voye* GALLE : à la fièvre , voye^ Fièvre : aux poux ,
voyer Poux : à la clavelée ou claveau , voyt[ Cla-
velÉE : à la toux , à l'enflure , à la difficulté de ref-
pirer ; ce qui marque abondance de lang , ou obf-
truction dans les viieeres de la rcfpiration. On les fou-
lagera en leur fendant les nafeaux, ou en leur cou-
pant les oreilles: à la morve, voye{ Morve: à l'a-
vertin , vertige , étourdiffement , fang , folie ou tour-
nant , voye{ Avertin. Elles deviennent boiteufes ou
de lalfitudc , ou parce que leurs ongles font amollis ,
ou parce qu'elles ont relié long-tems dans leur fiente.
Si ç'efl laffitude , biffez-les repofer dans la bergerie ;
fi c'eft ongles amollis, coupez-leur l'extrémité de l'on-
gle gâté, mettez-y de la chaux vive, enveloppée d'un
linge pendant un jour ; le lendemain fubltituez le verd
de-gris, 6c ainli alternativement, chaux év verd-dc-
gris , jufqu'à ce que l'ongle loit guéri. Il y en a qui
préfèrent à ce remède , de la vieille huile de noix ou
d'olive , mile en onguent par l'ébullition , avec de l'a-
lun pulverifé. Elles font encore fujettes aux abcès,
qu'il faut ouvrir quelque part qu 'ils paroiffent: quand
l'abcès fera ouvert & vuidé, on diftillera dedans de
la poix fondue avec du fel bridé & mis en poudre ,
& l'on fera boire à la brebis de la thériaque délayée
dans de l'eau. A la pelle , qui les attaque en été 6c en
hyver ; elles en meurent quand elles en font mala-
des : mais on préviendra cet accident, li on leur fait
prendre pendant une quinzaine, au commencement
du printems &; de l'automne , tous les matins avant
qu'elles aillent aux champs , de l'eau où l'on aura t'ait
Tome II,
r°9
infufer la fange Se le marrube. Si une brebU fe rompt
la jambe, on la lui frottera avec de l'huile & du vin
mêlés ; on l'entortillera avec des linges, 6c on la foû-
tiendra avec des écliffes : on la fera repofer trois ou
quatre jours dans la bergerie ; le cinquième elle pour-
ra fuivre les autres aux champs.
Ufage. La brebis fournit dans le commerce les mê-
mes marchandifes que le bélier & le mouton ; entre
autres de la laine , qui fert dans les manufactures d'é-
toffes ; & fa peau , qu'on vend aux Tanneurs 6c aux
Mégiffiers.
BRECHE , f. f. terme de Bâtiment : il fe dit en géné-
ral d'une ouverture caufée à un mur de clôture par
mal-façon , caducité , ou faite exprès pour faire paf-
ferdes voitures ou équipages de maçonnerie. Ce mot
vient de l'Allemand brechen, qui fignifie rompre.
Brèche, forte de marbre. Poye{ Marbre. ( P)
BRECHE, dans Canaque des places , fe dit du trou
ou de l'ouverture qu'on fait à quelque partie des mu-
railles d'un ville , par mine , fappe , ou coups de ca-
non, pour enfuite monter à l'affaut, ou emporter la
place de force. Vqye^ Siégé , Assaut , &c.
On dit réparer la brèche , fortifier la brèche , fe lo^cr
fur la brèche , &c. Nettoyer la brèche , c'eft en ôter les
ruines pour pouvoir mieux la défendre.
Une brèche praticable eft celle où des hommes peu-
vent monter 6c s'y loger. La brèche doit être large de
1 5 à 20 toifes. Les affiégeans y montent en fe cou-
vrant avec des gabions , des facs de terre , &c.
Battre en brèche ; voy^ Battre & Batterie.
Monter la brèche ; voye^ MONTER. ( Q )
Brèche , ( la ) Géog. rivière de France qui a fon
cours dans le Beauvoifis, & fe jette dans l'Oife.
BRECHET, & par corruption BRICHET,f. m.
{Anat. ) la partie de la poitrine où les côtes aboutif-
lent antérieurement, 6c que les Anatomiftes appel-
lent le fiernum. Voye{ S TER NU M. ( L )
BRÉCHYN, ( Géog. ) petite ville de l'Ecoffe fep-
tentrionale , dans la province d'Angus. Longit. iS.
20. lat. 36. AJ.
BRECHKNOCK, {Géog.) ville d'Angleterre au
midi de la province de Galles , dans un petit pays
appelle Brecknockshire. Long. 14. iz. lat.Sz. S.
BREDA , ( Géog. ) ville forte avec titre de baro-
nie, fitûée dans le Brabant Hollandois , dans un lieu
fort marécageux , fur la Merck. Long. Z2. 'O. lat
ôi. Ji.
BREDENARDE, {Géog.) petite contrée de Fran-
ce en Artois.
BREDINDIN , f. m. ( Marine. ) c'eil une manœu-
vre ou petit palan qui paffe dans une poulie (impie ,
amarrée au grand ctai fous la hune , & parle moyen
de laquelle on enlevé de médiocres fardeaux,, pour
les mettre clans le navire. (Z)
* BREDOUILLE , f. f. terme de Triclrac : on ap-
pelle ainfi le jetton qui fert à marquer que les points
qu'on a , on les a pris fans interruption: ainli, je ga-
gne quatre points, je marque ces quatre points avec
un jetton accompagné de celui de la bredouille : j'en
gagne encore deux , qui avec quatre que j'avois font
li\ , je marque ces fix points avec un jetton , toujours
accompagné de celui de la bredouille. Mon adverfaire
joiie ,il gagne deux points ; alors je perds la ht
& c'eftlui qui la gagne, 6c qui la confervera jii
ce que je la lui ôte en gagnant quelques points avant
qu'il en ait pris douze : alors nous ne l'aurons ni l'un
ni l'autre ; car nous nous ferons interrompis t
deux en prenant alternativement des points. Si l'on
gagne douze points fans interruption , ou , comme on
dit au jeu, douze points . on marque deux
trous ; s'ils ne font pas bredouille , on ne marque qu'un
trou.
S'il y a des trous bredouille , il y a aufïi des pa
bredouille, La partie du trictrac eft de douze t.
Fff
4io
B R E
on la gagne bredouille quand on prend ces douze trous
tout de fuite & fans interruption. Il y a des joueurs
qui la font payer double.
Pour que le trou & la partie foient bredouilles , il
n'eft pas néceffaire que votre adverfaire ne prenne
point de trous ni de points ; il fuffit que vous falîiez
vos douze points ou vos douze trous tout de fuite ;
que votre adverfaire eut des points ou des trous
avant que vous en prifîiez , cela eft indifférent.
BRÉE, (la ) ou L'ABRAS , c'eft ainli qu'on ap-
pelle dans les forges, la garniture de fer qui entoure
le manche du marteau pour l'empêcher de s'ufer par
le frotement. Voye{ en D fig. 6. Planche des Forges.
La brée eft placée dans l'endroit où les cammes de
l'arbre prennent le manche & le font lever. On con-
çoit que cet endroit doit fatiguer d'autant plus que
le marteau eft plus lourd , le nombre des cammes plus
fréquent , & le mouvement de l'arbre plus rapide.
BREDIR , v. neut. terme en ufage che^ les Bourreliers;
ils s'en fervent pour exprimer la manière dont ils
joignent enfemble les ditférens cuirs dont ils coulent
les foùpcntes & autres groffes pièces. Pour cet effet
ils prennent une groffe alêne appellée alêne à bredir ,
avec laquelle ils font dans le cuir des trous où ils paf-
fent, au lieu de fil , des lanières de cuir; & ferrent
cette efpece de couture par le moyen du marteau ap-
fcWè ferre- attache.
BREF , COURT , SUCCINT, (Gram.) termes re-
latifs à la quantité ; bref, à la quantité du tems ; court,
de l'efpace & du tems; fuccint, de l'expreffion. La
prononciation d'une fyllable eft longue ou brève;
un difeours eft diffus , ou fuccint ; un article eft court
eu long.
BREF , f. m. dans plufïcurs coutumes de France , fe
dit des lettres qu'on obtient en chancellerie , à l'effet
d'intenter une aftion contre quelqu'un. Ainii on dit
dans ces coutumes un bref de rcjlitution , de rcfcifion.
Dans quelques anciennes coutumes , & même enco-
re à préfent en Angleterre, ce terme eft fynonyme à
aclion.
Par exemple , on appelle en Normandie bref de ma-
riage encombré, une adion que la femme a droit d'e-
xercer à l'effet d'être réintégrée dans les biens do-
taux ou matrimoniaux , qui ont été aliénés par ion
mari. (//)
Brefs apostoliques, font des lettres que le
pape envoyé aux princes &c aux magiftrats pour des
affaires publiques. On les appelle ainfi , parce qu'el-
les font concifes, fans préambule, & fur papier; au
lieu que les bulles font plus amples , écrites fur du
parchemin, & fcellées de cire verte ou de plomb. Les
brefs ne font fcellés qu'avec de la cire rouge, &fous
l'anneau du pêcheur. Ce feel ne s'applique jamais
qu'en préfence du pape. Voye^ BULLE.
Les brefs ont en tête le nom du pape , & ils com-
mencent par ces mots : Dileclo filio falutem, &apoJlo-
licam benediclionem , &c. après quoi s'enfuit la ma-
tière qui doit être traitée fans aucun préambule.
Le pape ne figne pas les brefs , & on n'y applique
pas fon nom au bas , c'eft le fecrétaire qui figne. Le
pape Alexandre VI. établit un collège de fecrétaires
pour les brefs ; depuis ce tems les brefs font plus longs
& plus amples qu'auparavant.
Les brefs n'étoient autrefois envoyés que pour les
affaires de juftice : mais préfentement ils font em-
ployés pour les matières de bénéfices, de grâces ex-
pectatives, & pour les difpenfes. (H)
Bref, en terme de Commerce; on appelle bref état de
compte, un compte en abrégé, ou qui n'eft pas dreffé
& rendu en forme. Voyc\ Compte.
Bref , en ternie de Commerce de mer, fignifie en Bre-
tagne un congé ou permiflion de naviger.
Il y en a de trois fortes; brefdcfauvetéy bref de con-
B R E
duite , & bref de victuailles. Le premier fe donne pour
être exempt de droit de bris. Foye-^ Bris : ie fécond,
pour être conduit hors des dangers de la cote ; & le
troifieme , pour avoir liberté d'acheter des vivres.
On les appelle auffi brieux , Se dans le langage or-
dinaire , on dit , parler aux hébiieux pour obtenir ces
brefs. Foyc{ BRIEUX. (G)
Bref , en Mufïque , eft un mot qu'on ajoute quel-
quefois au-deffus de la note qui unit un air ou un
chant, pour marquer que cette finale doit être cou-
pée par un fon bref tic fec, au lieu de durer toute fa
valeur. Foye^ COUPÉ, (S)
BPvRFAR , ( Gêog. ) c'eft le nom d'une des îles.
Sorlingues, près des cotes de Cornouaille en An-
gleterre.
BPvEFORT , (Géog.) petite ville du comté de Zut-
phen , affez bien fortifiée, & fituée dans un endroit
fort marécageux.
BREGENTZ, (Géog. ) ville capitale d'un comté
de même nom , fur le lac de Confiance en Souabe ,
appartenante à la maifon d'Autriche. Il y paffe une
petite rivière de même nom. Long. zy. 20. lat. ^y.
BREGIN, f. m. terme de rivière, efpece de filet dont
les mailles font fort étroites.
BREGLIO, (Géog.) petite ville du comté de Ni-
ce, en Piémont , fur la petite rivière de Rodia.
BREGMA, f. m. en Anatomie , c'eft ce qu'on ap-
pelle auffi le linciput. Voye^ SlNClPUT.
Le bregma eft compofé de deux os que l'on appel-
le bregma ou bregmatis ojfa , qui font les deux parié-
taux. Foye{ Pariétaux, (L)
BREGNA, {Géog.) petite contrée d'Italie, l'une
des quatre que les Suiffes y poffedent , entre les four-
ces du Rhin & la ville de Bellinzone. Il y a dans ce
pays une rivière de même nom , qui le Uaverfe, ôc
lie jette dans leTefin.
BREGNANO , ( Géog. ) petite ville du duché de
Milan , fur la Sevefe.
BREHAINE fe dit, en Vénerie , d'une biche qui
n'engendre point; on la nomme auffi brehagne. Cette
vieille biche laille un pié large qui peut induire en
erreur.
BREHAINES, (Terres) terme de coutumes, qui fe dit
des terres non labourées ni cultivées , qui font va-
cantes , en friche & abandonnées. (H)
* BREHIS , f. m. (Hift. nat. ) animal de l'île de Ma-
dagafear, de la grandeur de la chèvre, qui n'a qu'une
corne fur le front, & qui eft fort fauvage.
BREHNA , ( Géog. ) petite ville de l'éledorat d*
Saxe , à trois milles de Leipfick.
BREISICH , ( Géog. ) petite ville d'Allemagne ,
au duché de Juliers , fur la rive gauche du Rhin.
BREITH-MARCK, (Géog.) petite ville d'Allema-
gne , en Franconie , fur le Mayn.
• BREIT-BACH, ( Géog.) petite ville fur le Rhin ,
fituée dans l'éledorat de Cologne.
BREITENBACH , (Géog.) petite ville & château
dans la Thuringe.
BREITENBOURG ou BREDENBERG, (Géog.)
fortereffe autrefois coniidérable dans le duché de
Holftein , fur la rivière de Stoer.
* BRELAND , f. m. jeu de cartes : il fe joue à tant
de perlonnes que l'on veut: mais il n'eft beau, c'eft-
à-dire très-ruineux , qu'à trois ou cinq. L'ordre des
cartes eft as, roi, dame, valet, dix, neuf, huit,
fept , fix : l'as vaut onze points ; le roi, la dame , le
valet & le dix , en valent dix ; les autres cartes comp-
tent autant de points qu'elles en portent ; on laifie
rarement les fix dans le jeu.
On donne trois cartes, ou par une , ou par deux
& une , ou par une & deux, mais non par trois. Si
un joueur a dans fes trois cartes, l'as, le roi, & la
B II E
BRE
411
dame d'une même couleur, il compte trente èc un ;
s'il a l'as &. le dix , il compte vingt-un ; s'il a le dix, le
rieur", & le fept , il compte vingt-iix ; &c ainfi des au-
tres cartes ou jeux qui peuvent lui venir.
S'il a dans les trois cartes , ou trois as , ou trois
rois , ou trois valets , &c. il a brdand. Un brdand eft
Supérieur à quelque nombre de points que ce l'oit ;
& entre les brelands, cciui d'as eft fupérieur à celui de
rois ; celui de rois à celui de dames , & ainfi de fuite.
Les as , ou plus généralement les cartes qui fe trou-
vent dans la main des joueurs , emportent toutes les
cartes inférieures de la même- couleur qui fe trou-
vent aufli fur le jeu. Ainli fi un joueur a trois cœurs
par le valet , & qu'un autre joiieur ait ou l'as , ou la
dame , ou le roi de cœur feul ou accompagné , il ne
refte rien au premier , & le fécond a quatre cœurs
au moins. Il n'y a d'exception à cette règle que le
cas du brcland ; les as mêmes n'emportent point les
cartes qui font un brdand dans la main d'un joiieur.
Celui qui donne met feul au jeu : cet enjeu s'ap-
pelle pajje ; & la paffe cil fi forte ou fi foible qu'on
veut. Il y a primauté entre les joueurs ; celui qui eft
le plus à droite du donneur prime fur celui qui le fuit ;
celui-ci furie troilicme , ik ainfi de fuite. Le donneur
eft le dernier en carte : à égalité de points entre plu-
sieurs joueurs , le premier en carte a gagné.
On n'eft jamais forcé de jouer ; fi l'on a mauvais
jeu , on pajje : Ç\ tout le monde paffe , la main va à
celui qui étoit le premier en carte ; il joint fon enjeu
au précédent, & îl y a deux pajfcs ; le nombre des
enjeux ou paffes augmente , jufqu'à ce que quelqu'un
joue. Mais fi un joueur dit, je joue, n'eût-il point de
concurrent , il tire toutes les paffes qui font fur jeu ,
fans même être obligé de montrer fon jeu.
Si un joiieur dit , je joue , il met autant d'argent
fur jeu qu'il y a de paffes ; ii un autre joiieur dit auffi,
je joue , il en fait autant , &£ ainfi de tous ceux qui
joueront : puis ils abattent leurs cartes ; ils s'enlè-
vent les uns aux autres les cartes de même couleur
inférieures à celles qu'ils ont ; Ôe celui qui compte le
| ■ points dans les cartes d'une feule couleur , a
; ou s'il y a des brdands , celui qui a le breland
le plus haut , ou celui qui a un breland , s'il n'y en a
du un , tire tout l'argent qui eft fur le jeu.
Il faut obferver que la carte retournée eft du nom-
bre de celles qui peuvent être enlevées ou par celui
qui a dans fa main la carte la plus haute de la même
Couleur , ou de préférence par celui qui a trois au-
tres cartes, non de la même couleur , mais de la même
efpece. Ainli dans le cas où la carte retournée feroit
un dix , le joueur qui auroit trois dix en main auroit
de droit le quatricme;ce qui lui formeroit le jeu qu'on
appelle tricon. Le tricon eft le jeu le plus fort qu'on
puiffe avoir ; cependant ce jeu n'eft pas sûr.
Si le brdand eft un jeu commode , en ce qu'on ne
joue que quand on veut , c'eft un jeu cruel , en ce
qu'on n'eft guère libre de ne jouer que ce qu'on veut.
Tel fe met au jeu avec la réfolution de perdre ou de
gagner un louis dans la foirée, qui en perd cinquante
en un coup : c'eft votre tour à parler; vous croyez
avoir jeu de rifquer la valeur de hpaffè ; je luppofe
fort d'un écu : vous dites , jt joue , & vous
mette?, au jeu \m écu. Celui qui vous fuit, croira
| ir auffi rifquer un écu , & dira je joue , & met-
tra fon écu : mais le troifieme croira Ion jeu meilleur
qu'un écu ; il dira , je joue auffi ; voilà Vécu delapajfe ,
mais j'en mets vingt , trente, quarante en fus. Le qua-
trième joiieur ou paffe , ou tient, ou enchérit. S'il
paffe , il met fes cartes au talon ; s'il tient , il met &
l'écu de paffe, cv l'enchère du troilicme joiieur ; s'il
enchérit , il met & l'écu de paffe , & l'enchère du 3e
joiieur,&fon enchère particulicrc.Le 5e joueur choi-
fit auffi de paffer , de tenir , ou de pouffer. S'il tient ,
il met la paffe , l'cnchcre du troifieme, 6c celle du
Tome //,
quatrième. S'il pouffe ou enchérit , il ajoute encore
Ion enchère : le jeu fe continue de cette manière juf-
qu'à ce que le tour de parler revienne à celui qui a
joiié le premier. Il peut ou paffer, en ce cas il perd
ce qu'il a déjà mis fur jeu; ou tenir, en ce cas il
ajoute à fa mife la fomme néceffaire pour que cette
mife & fen addition tirflent une fomme égale à la
mife totale du dernier enchériffeur ; ou il pouffe &
enchérit lui-même , & en ce cas il ajoute encore à
cette fomme totale fon enchère. Les enchères ou te-
nues fe continuent, & vont auffi loin que l'acharne-
ment des joueurs les entraîne , à moins qu'elles ne
foient arrêtées tout court par une dernière tenue faite
dans un moment oii celui qui tient , ajoutant à fa
mife ce qui manque pour qu'elle faffe avec fon addi-
tion une fomme totale égale à la dernière enchère;
tous les joueurs fe trouvent avoir fur jeu la même
fomme d'argent, excepté celui qui a fait, à qui il en
coûte toujours la paffe de plus qu'aux autres. En gé-
néral tout joueur qui a moins d'argent lur jeu qu'un
autre joueur, peut enchérir, & les enchères fe pouf-
fent néceffaircment jufqu'à ce qu'il arrive une tenue
au moment où la mile de tous ceux qui ont fuivi les
enchères eft ablblument égale.
Il faut lavoir qu'on n'eft point obligé de fuivre les
enchères , & qu'on les abandonne quand on veut ;
mais auffi qu'on perd en quittant , tout ce qu'on a
mis d'argent fur le jeu. Il n'y a que ceux qui Suivent
les enchères jufqu'au bout , qui puiffent gagner.
Lorfque tous les joueurs qui ont fuivi les enchères
font réduits à l'égalité de mile , S: arrêtés par quel-
que tenue, ils abattent leurs cartes ; ils fe diftribiient
celles qui lgur appartiennent parle droit de lupério-
rité de celles qu'ils ont , s'il n'y a point de IrcLnd ;
& celui qui forme le point le plus haut dans les car-
tes d'une même couleur, gagne tout. S'il y a un bre-
land , celui qui l'a, tire; s'il y en a plulieurs , tout
l'argent appartient au plus fort breland; à moins qu'il
n'y ait un tricon : le tricon a barre fur tout. Il n'y a
de reffource contre le tricon , que d'avoir plus d'ar-
gent que lui , & que de le forcer à quitter par une en-
chère qu'il n'eft pas en état de fuivre. C'eft par cette
raifon que nous avons dit que tricon étoit le plus beau
jeu que l'on pût avoir , fans toutefois être un jeu sûr.
Tel eft le jeu qu'on appelle le brdand ; il n'y a
peut-être aucun jeu de hafard plus terrible & plus at-
trayant : il eft difficile d'y joiier fans en prendre la
fureur ; & quand on en eft poffédé , on ne peut plus
fupporter d'autres jeux : ce qu'il faut, je crois, at-
tribuer à les révolutions , & à l'efpérance qu'on a de
pouffer le gain tant qu'on veut , & de recouvrer en
un coup la perte de dix féances malheurcufes. Efpé-
rances extravagantes ; car il y a démonftration mora-
le que le gain ne peut aller que jufqu'à un certain
point ; & il eft d'expérience que le grand gain rend
les joueurs plus refferrés & plus timides , & que la
grande perte les rend plus avides & plus téméraires.
La police n'a pas tardé àfentirles triftes fuites de ce
jeu ; ce il a été proferit fous les peines les plus féve-
res : cependant il fe joue toujours ; & je fuis con-
vaincu que les hommes n'y renonceront que quand
ils en auront inventé un autre qui loit auffi égal Se
plus orageux; deux conditions difficiles à remplir:
car il faut convenir que le brelandcil un jeu très-égal*
quand l'enchère la plus forte eft bornée.
* BRELLE , f. m. ( Commerce de bois quarré ) c'eft
ainfi que ceux qui font ce commerce nomment une
certaine quantité de pièces de bois liées cnfemble ,
en forme de radeau. Il faut quatre brtllts pour for-
mer un train complet. Foye{ Train.
* BRELUCHE , f. f. ( Commerce) c'eft ainfi qu'on
appelle des droguets fil & laine qui le fabriquent à
Roiien , à Darnctal , ék. à Caè'n , & les tiretaines de
PoitOU. Foye? DROCiUET. f'o)C^ TlUETAINE.
Fffij
.1 i 1
B R E
BREM A , ( Géog. ) royaume & ville d'Afie , dans
l'Inde au-delà du Gange.
Brema , ( Géog. ) petite ville du duché de Milan ,
fur le Pô , entre Caf'al & Valence.
BREMBATO DI SOTTO, ( Géog. ) petite ville
du Bergamafque , fur la rivière de Brembo.
BREMBO , ( Géog. ) rivière qui prend i"a fource
aux frontières de la Valteline , 6c qui fe jette dans
l'Adda , au-deflbus de Bergame.
BREME, BRAME, f. m. {Hijl. nat. Ichthyolog.)
cyprinus lattis , poifibn de lac 6c de rivière ; il eft
grand & large ; il a la tête petite à proportion du
corps , le dos convexe & tranchant , le corps plat 6c
couvert de grandes écailles comme la carpe ; le dos
eft d'un bleu noirâtre : les côtés & le ventre font
blancs fur-tout dans ceux qui font jeunes & maigres.
Ceux qui font plus avancés en âge & gras , ont les
côtes de couleur d'or , & le ventre rougeâtre. La brè-
me a un trait courbe qui s'étend depuis les ouies juf-
qu'à la queue ; elle a deux nageoires auprès des
ouies , une fur le dos , deux au milieu du ventre ,
une autre qui fe continue depuis l'anus jufqu'à la
queue. Ce poifibn devient fort grand ; il y en a dans
quelques lacs d'Auvergne , qui ont deux coudées de
longueur, & deux pies de largeur : il refte dans les
eaux dormantes. On n'en trouve que dans les riviè-
res , dont le cours eft lent & l'eau bourbeufe , par
exemple dans la Sône : mais les brèmes de rivière ne
font jamais fi groiTes que celles des lacs. La chair
de ce poifibn eft molle 6c grafle ; il y a des gens qui
la trouvent bonne. Rondelet. Willughby. Foye{ Pois-
son. (/)
B R e m e , ( Géog. ) duché d'Allemagne , dans le
cercle de bafle Saxe , limé entre l'Elbe &c le Wefer ;
il appartient à l'électeur de Hanovre, qui l'a acheté
de la couronne de Suéde.
Brème , ( Géog. ) ville libre & impériale fortifiée ,
arrolée par le Wefer ; elle eft au nombre des villes
Hanféatiques , & il s'y fait un commerce très-confi-
dérable. Le port de cette ville en eft éloigné de trois
lieues ; il en fort grand nombre de vaifîeaux , qui tra-
fiquent fur la mer Baltique & vont à la pêche de la
baleine. Long. z6 . lO.lat. 53- 10.
BREMERWERDE ou BREMERFURT, {Géog.)
ville ce château fort dans le duché de Brème , à trois
milles de Brème. Long. z6 . 30. lit. 53- 40.
BREMG ARTEN , ( Géog. ) petite ville de la Suifle,
à trois lieues de Zurich , fur la rivière de Rufs ; elle
appartient en partie au canton de Berne , & en par-
tie'à celui de Zurich. Long. z5. 55. lat. 4J. zo.
BREMME, {Géog.) ville d'Italie fur le Pô, dans
le duché de Milan.
BREMPT, {Géog.) petite ville d'Allemagne,
dans l'éleftorat de Trêves , fur la Mofelle.
BRENDOLO , ( Géog. ) petite ville avec un port,
fur une petite île des lagunes de Venife , entre la ville
de Venife & l'embouchure du Pô.
BRENNE , ( Géog. ) c'eft le nom d'un petit diftritt
de France , dans la Touraine.
BRENNKIRCHEN , {Géog.) petite ville de la
bafle Autriche , fur les frontières de la Hongrie , à
peu de diftance du Danube.
BRENSK ou BRENSKI , ( Géog. ) ville dans la
principauté de Severie , fur la rivière deDefna , ap-
partenante aux Mofcovites.
BRENTA , ( Géog. ) rivière qui prend fa fource
dans l'évêché de Trente , & qui fe jette dans le golfe
de Venife , au-deflbus de Padoue.
BRENTE , f. f. en Italien , Brenta , {Commerce) me-
fure des liquides dont on fe fert à Rome. La trente eft
de 96 bocales , ou de treize rubbes & demi. Voyt{
BOCALE & RUBBE.
La brcme de Vérone eft de feue baflees, Foye^
Basse e. {G)
B R E
BRENTFORD , ( Géog. ) ville afTez peuplée d'An*
gleterre , dans le comté de Middlefex , fur la rivière
de Brent , à l'endroit où elle fe jette dans la Tamife.
BRENTOLA , ( Géog. ) petite ville du Vicentin ,
à peu de diftance de Vicenze ; elle dépend de la répu-
blique de Venife.
BRENTZ , ( Géog. ) rivière qui prend fa fource
dans le duché de Wirtemberg , & qui fe jette dans le
Danube , près de Laugingen.
BREOULX , ( Géog.) petite ville de France en
Provence , vers les confins du Dauphiné , à quatre
lieues d'Embrun.
* BREQUÎN , f. m. c'eft dans un vilebrequin, la
partie qu'on appelle plus communément la mèche ;
il y a des brequins de toute grandeur & grofleur : leur
ulage eft de pratiquer les trous néceffaires en travad-
lant en bois feulement.
BRESCAR , ( Géog. ) ville d'Afrique au royaume
deTremecen , dans la province de Tenez.
BR-ESCIA, ( Géog. ) capitale du Brefcian , fous la
domination de Venife , fur la rivière de Garza ; elle
eft fortifiée 6c défendue par une citadelle : on y fa-
brique toutes fortes d'armes. Long. zj. 40. lut, 4.5.
3i-
BRESCIAN , ( Géog. ) pays d'Italie fournis aux
Vénitiens , borné au nord par les Grifons , à l'occi-
dent par le Bergamafque , au fud par le Cremonois,
& à l'orient par le Trentin , le Mantouan & le Ve-
ronois.
BRESCON, ( Géog. ) petite île de France , dans
le golfe de Lyon , près des côtés de Languedoc ; elle
eft pleine de rochers , & il s'y trouve un château tort.
BRESECKE, ( Géog. ) petite ville de la Marche
de Brandebourg , fur la rivière d'Ucker.
BRESELLO ou BERSELLO,( Géog.) pente ville
d'Italie , dans le duché de Modene. Long. z8. lat.
44- à5.
* BRESIL, ( Géog.) grande contrée de l'Améri-
que méridionale , bornée au nord, à l'orient & au mi-
di par la mer , & à l'occident par le pays des Amazo-
nes & le Paraguai : les côtes qui ont environ 1 200
lieues de long fur 60 de large , appartiennent aux
Portugais. L'intérieur du pays eft habité par des peu-
ples fauvages 6c idolâtres , qui fe défigurent le vifa-
ge pour paroître plus redoutables à leurs ennemis :
on prétend qu'ils font anthropophages. Les plus con-
nus font les Topinambous , les Marjagas & les Onéta-
cas. Cette partie du Nouveau-monde eft fort riche.'
Les Efpagnols la reconnurent en 1500. Alvarès Ca-
brai , Portugais , en prit poffeflion en 1 5 o 1 pour fon
roi. foyei quant à fon commerce S aint-Salvador ,,
Olinde , 6c Saint-Sebastien.
BRESIL , ( Bois de brejïl. ) Voye^ l'article BoiS.
* BRESILLER,v. ad. {Teinture) c'eft teindre
avec le bois de Brefil ; il faut que les toiles & les fils
à marquer ayent été teints en bonne cuve , pour être
brefillés. Foyei TEINTURE.
BRESINI , ( Géog. ) petite ville de la grande Polo-
gne , dans le Palatinat de Lenczicz.
BRESLAU , ( Géog. ) grande & riche ville , avec
titre de principauté ; elle eft la capitale de la Siléfie ,
fur l'Oder : elle eft fortifiée , & fort commerçante.
Il y a un évêché & une univeriité ; elle appartient
aujourd'hui au roi de Prufle. Long. 34. 40. lat.
5i. 4- .
BRESLE, (la) Géog.) petite ville de France ;
dans le Lyonnois, fur la Tardine.
BRESLE, (la) Géog. ) rivière de France , qui
prend fa fource en Normandie , dans le pays de
Caux, & fe jette dans la mer au-deflbus d'Eu.
BRESLOIA , {Géog.) ville d'Italie , appartenant
à la république de Venife.
BRESNITZ , {Géog.) ville du royaume de Bohè-
me, dans le territoire de Prague , où il y a des mines;
B R E
ic fer: il y a encore une autre ville dé ce nom en
Bohème, dans ic cercle de Satz, fur la rivière d'E-
gery.
BRESSE , {Géog.) province 6c comté de France ,
dont Bourg eft la capitale ; elle eft. bornée au nord
par la Bourgogne 6c la Franche-Comté , à l'eft par
k Savoie , au midi par le Viennois , & à l'orient par
la principauté de Dombes ik la Sône. Elle com-
prend les pays de Gex , de Bugey , & de Valromcy.
BRESSIN , f. m. {Marine.') c'eft un palan ou cor-
dage qui fert à iffer & à amener une vergue ou une
voile; on l'appelle autrement guindereflè. F, Palan.
Bressins ; ce l'ont des crocs de fer. Voye7_ Crocs
pe palan. (Z )
BRESSUITE , {Géog.) petite ville de France , fur
la rivière d'Argenton , en Poitou.
BREST, {Géog.) ville de France fort confidérable
par les fortifications & fon port fur l'Océan , qui eft
un des meilleurs du royaume ; elle eft défendue par
un fort château bâti fur un rocher efearpé. Lon. ijd
<)' 10". Ut 48d. zz' 55" .
BRETAGNE (grande) , Géog. c'eft une grande
île de l'Océan , qui comprend les royaumes d'Angle-
terre & d'Écoffe ; ce nom lui a été donné fous le rè-
gne de la reine Anne , après la réunion de ces deux
royaumes. Quant au commerce, voy. Angleterre
& Ecosse.
Bretagne {Nouvelle) , pays & prefqu'île de l'A-
mérique feptentrionale au Canada , au nord du fleu-
ve S. Laurent.
* Bretagne, {Géog.) grande province de Fran-
ce , avec titre de duché. Elle forme une péninfule :
du coté des terres , elle eft bornée par le Poitou ,
l'Anjou, le Maine, & une partie de la Normandie.
Son commerce eft confidérable. Il s'y fait des fels
dans les marais de Bourneuf & du Croiffi. Il vient
des beurres de l'évêché de Nantes , des grains de Van-
nes, des chanvres & des lins des évêchés de Rennes,
de Treguicr , & de Léon , où l'on fabrique auffi des
toiles ; il y en a qui fervent à faire des voiles de vaif-
ièaux : on les appelle pertes , locrenans, polUdanis ,
pentes oîonncs , toiles de Quintin , dePonthy , Nantoi-
J'es , de Morlaix , &c. Les toiles de Quintin font toutes
de lin , &c ne lecedent guère en fineffe aux batiftes.
On fait avec les plus fines des manchettes , des ra-
bats , des coeffurcs , &c. avec les groffes , des mou-
choirs 6c des chemifes. Les toiles à tamis bleuâtres
viennent de la même province. Les toiles de Ponti-
vy ne différent pas de celles de Quintin. On donne
le nom de cris à celles de Morlaix 6c autres lieux , 6c
l'on diftingue un grand nombre de crès différentes.
Les haut-brins fe font à Dinan ; les Vitrés, à Vitré
même : on peut voir dans le Dictionnaire du commerce
le détail de ces toiles. Il y a auffi en Bretagne , de la
bonneterie 6c des mines de fer 6c de plomb. On fait
la pèche de la fardine & du maquereau au port Louis,
à Bclille, à Cancarnau, &c. Il fe fabrique dans la
plupart des villes de petites étoffes de laine , comme
éfamines , droguets , ferges , molletons , crêpons ,
&c. voilà à peu près qu'elles font les marchandifes
du crû de cette province. On peut mettre au nombre
de celui du dehors la morue , dont la pêche fe fait par
les Maloiiins 6c les Nantois. Quant aux retours des
Bës l'ïançoifes de 1" Amérique, ils conhltent en lucres
bruts qui fe rafinent à Angers, Saumur, & Orléans ,
en gingembre, indigo, rocou, écaille, cuirs, bois de
teinture. 11 y arrive d'Angleterre, de Hambourg, 6c
Hollande des planches, des mâts, des chanvres , du
goudron , du fromage , &c. Les Mlles du commerce
le plus étendu font Rennes, S. Maîo , Nantes , \ itré ,
Morlaix, Port-Louis, Chateaulin , Coveron , &. Au-
drai.
* BRETAGNE (toiles de), Commerce , c'eft ainfi
cm'on nomme celles qui fe fabriquent dans cette pro-
B R E
4'3
vince , ou Celles qui fe fabriquent ailleurs fous mê-
me longueur, largeur, & force. Voye^ Bretagne ,
Géog. & fon commerce.
Bretagne, {La) f. f. nom d'une danfe Françoife,
fort noble & d'un beau caractère ; elle fe danfe en
pas de deux. Feue Mme la ducheffe de Luxembourg ,
qui étoit la meilleure danfeufe de la cour , en fixoit
fur eile tous les regards , lorfqu'elle exécutoit cette
danfe.
B R ETA U D ER un cheval , en terme de Maréchal >'
c'eft lui couper les oreilles. {V)
* Bretauder , v. neut. terme d'ufage chez les
Tondeurs de draps , c'eft tondre inégalement. Foyer
Draperie.
BRETÇHEN, {Géog.) forterefle 6c petite villa
de la Pruffe Polonoife , dans le pays de Libau , entre
Strasburg & Oftcrode.
BRETELER une pierre , {terme dt Maçonnerie.) c'efl
en dreffer le parement avec le marteau à bretter , la
faye , le riflard ou la ripe.
* BP-ETELLES , f . f. on donne en général ce nom
à des rubans ou à de longues & larges courroies ,
affemblées par d'autres courroies tranfverfaies , de
manière qu'elles forment un quarré oblong , dont on
auroit prolongé deux des côtés parallèles". On peut
pafler la tête dans le quarré oblong ; alors les cour-
roies prolongées s'appliquent fur l'une & l'autre
épaule, ÔC des courroies tranfverfaies, l'une patte
fur les épaules, l'autre fur la poitrine. Les bouts des
longues courroies placées fur les épaules 6c prolon-
gées descendent par-devant & par-derriere à la hau-*
teur des mains , & aident à porter plus facilement
une civière, une chaife à porter, & toute autre ma-
chine dont on peut placer les bras dans les boucles
ou boutonnières pratiquées à ces extrémités. Les bre*
telles fervent encore à d'autres ufages.
Bretelles , {les) ce font , c/z^ les Rubaniers , deux
bouts de fangle attachées d'une part au chaffis du mé-
tier, 6c de l'autre à la poitriniere : l'ouvrier pafîe la
tête au travers de ces deux bretelles , & fe trouve allez
appuyé par l'extrémité des épaules,pour en être beau-
coup foulage ; comme il elî peu alfis & fort courbé
fur l'on ouvrage , on a été obligé à lui chercher ce
point d'appui, fbye^ Poitriniere, & nos Planches
de Paffcrritmerie , où prefque tous les ouvriers qu'on
a repréfentés travaillant au métier , font appuyés fur
leurs bretelles.
BRETEUIL , ( Géog. ) petite ville de France dans
la haute Normandie , avec titre de comté. Il y a en-
core une autre ville de ce nom dans le Beauvoilis.
BRETHEIM ou BRETTEN , ( Géog. ) petite ville:
d'Allemagne dans le bas Palatinat, fur les frontières
du duché de "Wirtcmberg , fur la rivière de Saltz.
BRETTA, {Géog.) petite vilie de Suéde, dans
la province de Wcftgothie.
* BRETTÉ ou BRETELÉ, adj. Serrurerie, Tail-
landerie fur-tout. Il le dit de certains outils , tels que
les marteaux à tailler de ia pierre , les ébauchoirs
de Sculpteur, &c. 0Î1 la partie tranchante eft divifée*
en dents laites à la lime ; les unes prifes de court fur
le tranchant même de l'outil , les autres tirées de long
par l'es traits parallèles fur les deux furfaces.
BRETTEN , ( Géog.) petite ville du royaume de
Suéde , dans la Dalle , fur le tac Waner.
* BRETTER ou BRETELER , v. ad. & neut. En
général , c'eft fe fervir d'un infiniment bretté. C'efl
avec le marteau bretté que les Tailleurs de pierre
ébauchent les paremens.
BRETTER , terme de Sculpture; c'eli , en modelant,
travailler la terre, de manière qu'elle nefoitpaslùTe,
mais comme égratignée , ce que les ouvriers font d'a-
bord avec un ébauchoir bretele. Il y a beaucoup
d'art à laitier paraître en quelques endroits cette né-
gligence de travail, V, Modeler & Ebauchoir,
4M
B R E
* BRETTESSES , f. f. pi. terme de Blafon ; ce font
des rangées de crenaux , & l'on dit des pièces où l'on
apperçoit ces efpeces de dentelures , qu'elles font
b rétif] ces.
BRETTIN , ( Gédg. ) petite ville de l'éledtorat de
Saxe, fur l*Eibe.
* BRETTURE, f. f. fe prend en deux fens diffé-
rens, ou pour les dents mêmes pratiquées à l'inftru-
menr dont on fe feit pour bretter , ou pour les traits
faits à l'ouvrage à l'aide de l'inftrument. Dans le
premier fens , c'eft un terme de Taillanderie ; dans le
fécond , il eft de Maçonnerie & de Sculpture.
BREUBERG , ( Géog. ) petite ville avec château
dans la Franconie , fur le Mayn,
BREVE , f. f. en terme de Grammaire , fe dit d'une
fyllabe relativement à celles qui font longues : par
exemple , Va eft bref dans place , & long dans grâce ;
en matin le commencement du jour , ma eft bref; au
lieu que ma eft long en mâtin , gros chien. L'a eft bref
entache, macula, & long en tâche, ouvrage qu'on
donne à taire.
Toutes nos voyelles font ou brèves , ou longues , ou
communes. C'eft de i'aifortiment des unes avec les
autres que réfulte l'harmonie de la période. Le tems
d'une brève eft de moitié plus court que le tems d'une
longue; ou, comme on dit communément, la brève
n'a qu'un tems , & la longue en a deux : c'eft-à-dire ,
cme pour prononcer la brève , on n'employé précifé-
ment que le tems qu'il faut pour la prononcer ; au
lieu qu'on prononcerait deux brèves dans l'intervalle
de tems que l'on met à prononcer une longue.
Les Latins étoient extrêmement exadls à diftinguer
les longues & les brèves. Cicéron dit , que fi un a£teur
faifoit une faute fur ce point , il étoit fiffie par les
fpe£tateurs : Non folum verbis arte pojïtis moventur om-
nes , vtrum etiam numeris ac vocibus. At inhisfi paulùm
mode offènfum efl , ut aut contractione brevius fieret , aut
produclione longius , tkcatra tota reclamant. Quiâ ? hoc
non idem fit in vocibus , ut à multitudine & populo , non
modo catervœ atque conventus , fed etiam ipji Jibi jinguli
diferepantes , ejïciantur? Cic. de orat. lib. III. cap. j.
La même chofe arriveroit fans doute parmi nous
fi un acteur prononçoit par confquent au lieu de par
conféquent , la mer au lieu de la mer, &c
Dans le latin, la brève fe marque d'un u & la longue
d'un — ; ainfi dans arma la première eft longue & la
féconde brève. Brève eft auffi un terme de Mufique :
alors on foufentend note. Voye^_ l'article fuivant.
Brève , en Mufique , eft une note qui paiTe deux
fois plus vite que celle qui la précède : ainii la noire
eft brève après une blanche pointée, la croche après
la noire pointée. On ne pourrait pas de même appel-
ler brève une note qui vaudroit la moitié de la précé-
dente : ainfi la noire n'eft pas une brève après la blan~
che {impie , ni la croche après la noire , à moins qu'il
ne foit quertion de fyncope.
C'eft autre chofe dans le Plain-chant. Pour répon-
dre exactement à la quantité des fyllabes , la brève y
vaut la moitié jufte de la longue : de plus , la longue
a quelquefois une queue pour la diftinguer de la brè-
ve qui n'en a point ; ce qui eft précisément le con-
traire de la Mufique , où la ronde qui n'a point de
queue eft double de la blanche qui en a une. f^oye^
Mesure , Valeur des notes.
Brève eft auffi le nom que donnent les Italiens à
cette ancienne figure de note que nous appelions
quarrée , qui fe fait amfi Q , & qui vaut trois rondes
owfcmi-breves dans la mefure triple , & feulement
deux dans celle à ceux ou à quatre tems. Ancienne-
ment, dit l'abbé Broffard, fous le figne du C barré ,
elle ne valoit que deux tems. De là vient que les Ita-
liens nomment encore alla brève , la melure à deux
tems fort vîtes , dont ils fe fervent dans les mufiques
da cape lia, (S )
B R E
Brève , (à la Monnaie. ) eft la quantité de marc
ou d'efpeces délivrées, & provenant d'une feule fon-
te. De trente marcs d'or , il doit revenir neuf cents
louis : or la délivrance des neuf cents louis eft une
brève. Voye^ DÉLIVRANCE.
BREVET , f. m. ( Jurifp. ) eft un acte expédié en
parchemin par un Secrétaire d'état , portant concef-
lion d'une grâce ou d'un don que le roi fait à quel-
qu'un , comme d'un bénéfice de nomination royale,
d'une penfion , d'un grade dans (es armées , ou autre
choie iemblable ; d'une fomme payable au profit du
brevetaire , par celui qui fera pourvu de telle charge
ou de tel gouvernement , foit par la mort de celui qui
l'occupe , ou par fa démiffion : c'eft ce qu'on appelle
brevet de retenue. Voyc{ RETENUE.
Brevet , enjlyle de Notaires, eft la minute d'un adle
paffé pardevant Notaires , délivrée en original à l'u-
ne des parties. (//)
Brevet , fe dit encore de plufieurs actes qui s'ex-
pédient par les commis des douanes , ou les maîtres
6c gardes & jurés des corps èv communautés.
Brevet de contrôle , c'eft une eipece de ré-
cépiiîé ou d'atteftation que donnent les commis des
bureaux des douanes, traites foraines, &c. à la for-
tie du royaume , à la place de l'acquit de payement
des droits que les conducteurs & voituriers leur re-
mettent entre les mains. Ce brevet, qui eft fur du pa-
pier timbré & imprimé , fe donne fans frais , pas mê-
me pour le timbre , & fert de certificat , que les mar-
chandées énoncées dans l'acquit ont été vifitées ÔC
recenfées. Voye^ Acquit.
Brevet d'apprentissage , a£te qui fe délivre
à un apprenti après qu'il a fervi le tems porté par
les ftatuts de fa communauté , ou celui dont il eft
convenu pardevant notaires avec un maître , qui
pourtant ne peut être moindre que celui qui eft réglé
par les ftatuts. On appelle auffi brevet l'obligé de l'ap-
prenti qui doit être enregiftré par les jurés , & qu'il
doit rapporter auffi -bien que les certificats de fon
apprentiffage & de fon dernier fervice en qualité de
compagnon , avant que de pouvoir être reçu à la mai-
trife, & admis au chef-d'œuvre. Voye^ Apprenti &
Apprentissage.
Brevet : on nomme auffi quelquefois brevet de
maîtrife , l'afte de réception à la maitrife ; on dit plus
proprement lettres de maitrife. Foye{ LETTRES.
Brevet , en termes de Marine , eft ce qu'on appelle
connoijjement fur l'Océan , & police de chargement fur
la Méditerranée ; c'eft-à-dire un écrit fous feing privé,
par lequel le maître d'un vaifleau reconnoît avoir
chargé telles Se telles marchandifes dans fon bord ,
qu'il s'oblige à porter au lieu & pour le prix conve-
nu, fauf les rifqucs de la mer. Voye^ Connoisse-
ment 6* Police de chargement. (G)
* Brevet , ( Teinture. ) bain d'un guefde ou d'une
cuve qu'on fe difpofe à faire réchauffer.
On dit en Teinture , manier le brevet : c'eft exami»
ner avec la main lî le bain ou brevetée la cuve eft bon,
ou allez chaud : ouvrir le brevet , c'eft prendre de la
liqueur foit avec la main , foit avec le rable , pour
juger de la couleur du bain. V. Bain & Teinture.
BREVETAIRE , c'eft l'impétrant d'un brevet.
Voye^ ci-dejjus BREVET.
Dans le concours d'un indultaire & d'un brevetaire
de joyeux avènement, le grand-confeil donne la pré-
férence à Findukaire , quoique fa réquifition foit pof-
térieure à celle du brevetaire. ^oye^ÏNDULT, Indul-
taire , 6* Expectative. (j7)
BREVIAIRE , f. m. ( Thèol. ) livre d'Eglife , qui
contient pour chaque jour de la iemaine & pour cha-
que fête, l'office du jour & de la nuit. V. Office.
Le bréviaire eft compofé des prières qu'on récite
dans l'églife à diverfes heures du jour: favoir, l'offi-
ce de la Huit, que l'on appelle matines , que l'on ré-
BRE
citait autrefois la nuit ; ufage qui s'eft encore con-
servé dans quelques cathédrales , &£ dans la plupart
des ordres religieux : landes , qu'on difbit au lever
du foieil -.prime, tierce ,fexu , & none , ainfi nommées
des heures du jour oit on les récitait , iuivant l'an-
cienne manière de compter ces heures : vêpres , qui
le difbient après ioleii couché. On a depuis ajouté
complies , mais fans les féparer abfolument des vê-
pres , afin de rendre à Dieu un tribut de prières fept
fois par jour , pour fe conformer à ce paffage du pfal-
mifte -.feptics in die laudem dixi tibi. Poye^ HEURES.
L'ufage de réciter des prières à ces diverfes heures
de la nuit & du jour , eft très-ancien dans PEglife. On
les appelloit en Occident le cours : on leur a donné
depuis le nom de bréviaire , foit que l'ancien office
ait été abrégé , foit que ce recueil foit comme un
abrégé de toutes les prières.
Le dofteur Mege tire l'origine du nom de bréviaire,
da la coutume qu'avoient les anciens moines de por-
ter dans leurs voyagesde petits livres qui contenoient
les pfeaumes , les leçons , tk. ce qu'on lifoit en chaire ;
le tout extrait des grands livres d'éylife: &c le P. Ma-
billon allure , qu'il a vu dans les archives de Cîteaux
deux pareils livrets , qui n'avoient pas plus de trois
doigts de large, écrits en très-petit cara£tere,avec des
abréviations, où très -peu de fyllabes exprimoient
une période entière.
Le bréviaire eft compofé de pfeaumes , de leçons ti-
rées de l'Ecriture , ou des homélies des percs , ou des
hiftoires des faints ; d'hymnes , d'antiennes , de ré-
pons , de verfets , d'oraifons convenables au tems ,
aux fêtes , & aux heures. Les églifes ayant chacune
rédigé les offices qui étaient en ulage chez elles , il
en a réfulté de la différence entre les bréviaires : il s'eft
même gliffé dans plufieurs , quantité de faufles légen-
des des faints ; mais la critique qui s'efl: fi fort perfec-
tionnée depuis un fiecle , en a purgé la plupart. Les
conciles de Trente , de Cologne , les papes Pie V.
Clément VIII. &c Urbain VIII. ont travaillé à cette
réforme ; & aujourd'hui les églifes de France en par-
ticulier , ont des bréviaires compofés avec beaucoup
de loin & d'exactitude. Celui qu'on appelle bréviaire
Romain , n'efl point l'ancien bréviaire de l'églile de
Rome , mais un bréviaire que les Cordclicrs récitaient
dans la chapelle du pape, & que Sixte IV. adopta.
Plufieurs de fes fucceffeurs ont voulu en faire un bré-
viaire univerfel pour toute l'Eglifc : mais ce projet eft
demeuré fans exécution. Le cardinal Quignoncz s'é-
tait aufli propofé de le Amplifier , en fupprimant le
petit office de la Vierge , les veriets , les répons , &
une grande partie de la vie des faints : l'on projet n'a
pas non plus eu lieu.
Les principaux bréviaires , après celui de Rome &
ceux des églifes particulières , font ceux des Béné-
dictins , des Bernardins , des Chartreux , des Prémon-
trés , des Dominicains , des Carmes , de Chiny , tk le
bréviaire Mozambique dont on fe fert en Efpagne. Ce-
lui des Francifcains & des Jéluiteseft le même que le
Romain , a l'exception de quelques fêtes propres &c
particulières à l'un ou l'autre de ces ordres.
Le bréviaire des Grecs , qu'ils appellent horologinm ,
cfl à- peu -près le même dans toutes leurs églifes &c
fcîonafteres : ils divifent le pfeautier en vingt parties ,
qu'ils nomment x*7i<ry.a.Ttt , paufes ou repos , & chaque
paufe eft fubdivifée en trois parties; en général , le
bréviaire Grec confifte en deux parties , dont l'une con-
tient l'office du f'oir appelle umovû/Cluv , &c l'autre celui
c\u matin , qui comprend matines , laudes , les petites
heures, vêpres Cx complies. Celui des Maronites con-
tient quelques différences plus confulerables. Voyc{
Maronite.
Parmi les peuples qui parlent la langue Sclavon-
ne , ou quelques - uns de les dialedes , le bréviaire eft
en langue vulgaire , comme parmi les Maronites en
BRE
415
Syriaque , parmi les Arméniens en Arménien , &c ,
Ceux qui difent le bréviaire en Sclavon, font di viles
quant au rit. Les habitans de la Dalmatie & des côtes
yoilines de cette province , de même que ceux qui
font plus avant dans les terres , comme en Hongrie ,
Bofnie , & Efclavonie , fuivent le rit Romain ; en Po-
logne , Lithuanie , Mofcovie , ils fuivent le rit Grec.
Le bréviaire des Abyffins & des Cophtes eft prefque
le même. Voye^ Cophtes, Grec, &c.
L'ufage de réciter le bréviaire en particulier était
originairement de pure dévotion ; non -feulement
des eccléfiaftiques , mais même des laïques l'ont pra-
tiqué quand ils ne pouvoient pas affilier à l'office dans
l'églile : mais on ne trouve pas de loi ancienne qui y
oblige les eccléfiaftiques. La première eft le décret
du concile de Bâle , fuivi de celui de Latran fous Ju-
les IL & Léon X. encore ne regardent-ils expreflë-
ment que les bénéfîciers. Mais les cafuiftes penfent
en général , que tous les eccléfiaftiques promus aux
ordres f acres , ou pofTédant des bénéfices , font tenus
au bréviaire fous peine de péché mortel ; 6c quant à
ces derniers, qu'ils font obligés à la reftitution des
fruits de leur bénéfice proportionnément au nombre
de fois qu'ils ont manqué de réciter leur bréviaire»
Mege. Joly, de Récit, hor. canon. Mabillon , de Curfu
Gallican. De Vert, des Cérémonies. ( G )
BREVI ATEUR , f. m. ( Hijl. anc. ) c'était le nom
d'un officier des empereurs d'Orient , dont la fonc-
tion étoit d'écrire & de tranferire les ordonnances
du prince. On appelle encore à Rome breviâteurs ou
abreviateurs , ceux qui écrivent &c délivrent les brefs
du pape. Voye{ BREF. (G)
BREUIL , f. m. terme d'Eaux & Forêts , eft un petit
bois tailiis ou buiffon , fermé de haies ou de murs ,
dans lequel les bêtes ont accoutumé de fe retirer. (//)
BREUILS ou C ARGUES , ( Marine. ) voye^ Car*
GUES.
Breuils , Martinets , 6-Garcettes: ces
mots fe prennent aufli , en Marine, pour toutes les pe-
tites cordes qui fervent à breuiller , ferler, & ferrer
les voiles. (Z )
BREUILLER ou BROUILLER les voiles , les car*
guer ou troujfer; voye^ C ARGUER. ( Z )
BREUSCH, ( Géog. ) rivière de la baffe Alfàce ,
qui prend fa fource aux frontières de la L'orraine, &
tombe dans l'Ill près de Strasbourg.
BREUVAGE, f. m. Voye?^ Boisson.
Breuvage , Brevage, Bruvage : on appelle
ainfi , en Marine , un mélange égal de vin & d'eau
qu'on donne quelquefois pour boiffon à l'équipage.
Le breuvage des équipages de Hollande dans les
mers d'Allemagne &C Baltique , eft de la bierre ; ce
dans les voyages de long cours, ce n'eftque de l'eau,
ou de l'eau mêlée avec du vinaigre. ( Z )
Breuvage : on appelle encore ainli, en Médecine
& en Maréchalerie, toutes les liqueurs médicinales que
le médecin & le maréchal font prendre à l'homme
& au cheval malades. Le breuvage fe donne à ce der-
nier avec la corne de vache. ( //)
BREY , ( Géog. ) petite ville du pays de Liège ,
dans le comté de Looz. Long, z j. 10. lat. 61. 6.
BREYN , ( Géog. ) petite ville du comté d\
dans l'Ecofle leptcntrionale , fur un petit golfe de
même nom.
BREYNI A , (f f. ( Hifl. nat bot. ) genre de plante
dont le nom a été dérivé de celui de Jacques '
de Dantzic. La fleur de ce genre de plante eft en rô-
le , compofée de plufieurs pétales difpofés en rond :
il s'élève du fond du calice un piftil qui devient dans
la fuite un fruit ou une lilique molle & charnue , dans
laquelle font renfermées plufieurs femences qui ont
la figure d'un rein. Plumier, Nova plant. Amer, genen
Voyc~x Plante. ( /)
416
B R E
BREZIN, ( Géog.) ville de la grande Pologne,
dans le palatinat de Lenczicz.
BRIANÇON , ( Géog.) ville de France dans le
haut Dauphine , avec un château tort fur la Duran-
ce. Long. 24. zo. lat. 44. 46 .
BRÏANÇONNET , ( Géog. ) fortereffe de Savoie
dans la Tarentaiie , bâtie fur un rocher inaccellible.
BRIANÇONNOIS , ( Géog. ) petit pays de Fran-
ce en Dauphine , dont Briancon eft la capitale.
BRI ARE , ( Giog. ) petite 'ville de France en Ca-
nnois , fur la Loire , remarquable par le canal qui
porte l'on nom, & qui fait communiquer la Loire & la
Seine. Long. 20d. 24'. 13" ■ '<"• 47A- 38'. 16".
BRIATENTE , ( Géog. ) petite ville de France en
Languedoc , fur le Dadou , à quelques lieues d'Alby.
* BRICIEN, f. m. (Hijl. moi.') l'ordre militaire
des Briciens fut infatué en 1366 par fainte Brigitte ,
reine de Suéde , fous le pontificat d'Urbain V. qui
l'approuva , & lui donna la règle de S. Auguftin. Cet
ordre avoit pour arme une croix d'afur, femblable
à celle de Malte, & pofée fur une langue de feu, fym-
bole de foi & de charité. On y faifoit vœu de com-
battre contre les hérétiques & pour la lépulture des
morts, & l'afliftance des veuves, des orphelins, &
des hôpitaux. Toutes ces inftitutions font plus recom-
mandables par la pureté d'intention des perfonnes
qui les ont infatuées , les riches commanderies dont
elles ont été dotées , la naiffance & la piété de plii-
ez lampe qui fume encore. Voye^ Fleuri , D ij 'cours fur
les Religieux.
BRICOLE, f. f. terme Je Bourrelier. V. COUSSINET.
BRICOLE , terme dePaumier ; jouer de bricole , c'eft
faire frapper la balle contre un des murs de la lon-
gueur du jeu de paume.
BRICOLE , terme de jeu de Billard : on dit qu'une
bille en frappe une autre par bricole , lorfqu'au lieu
d'être pouffée directement contr'elle , elle ne vient la
rencontrer qu'après avoir frappé la bande du billard,
& avoir été renvoyée par cette bande.
Soit F une des billes , & A l'autre (fig. 2J. Opt.)
H G la bande du billard; fion poulie la bille -F fuivant
/"£,& que renvoyée fuivant EA par le point F. de la
bande , elle vienne choquer la bille A, cela s'appelle
choquer de bricole. Pour trouver le point E de la ban-
de , auquel il faut pouffer la bille .F pour choquer la
bille A de bricole , menez de la bille A la perpendicu-
laire A G , à la bande G H, & prolongez-la de ma-
nière que G B foit égal à A G ; enfuite vifez de F en
B , & pouffez la bille F fuivant F B ; le point E où
F B coupera G H, fera le point de bricole : car tirant
FE&cAE,'û eft aifé de démontrer que l'angle F
E H eu égal à l'angle A E G. Donc fuivant les lois
de la réflexion des corps ( Voye^ Réflexion ) , la
bille pouifée fuivant F E, rejaillira fuivant EA.
Au relie les bons joueurs, par la feule habitude,
trouvent ce point E fans préparation , & les mala-
droits le manquent avec cet échaffaudage.
On peut donner auffi des règles géométriques pour
toucher une bille par deux bricoles ou davantage :
mais elles feroient plus curieufes dans la théorie,qu'u-
tiles dans la pratique. Voye^V article Miroir , où l'on
traite affez au long de la reflexion ,iimple ou multi-
ple des rayons : réflexion qui reprélente parfaite-
ment les bricoles iïmples ou multiples d'une bille de
billard. ( O )
Bri COLE, ( Chaffe & Pêche. ) ce font des filets faits
de petites cordes pour prendre les grandes bêtes ; ils
font en forme de bourfes. On le lert auffi de cette
forte de filets pour prendre le poiffon. ^.Brochet.
BRICOLLER, f. m. ( Manège.) eft le cheval qu'on
B R E
attelé à une chaife de pofte à côté du cheval de bran-
card , & fur lequel le pofallon eft monté. Ce nom
vient du harnois qu'on lui met , qui s'appelle une bri-
cole. (F)
BRICOTEAUX , f. m. pi. che{ les Rubaniers , les
Gabiers , &c. ce font deux pièces détachées & enfi-
lées ( fig. 1. PI. V. ) dans la broche qui porte les
poulies du côté gauche du chatelet. Il y en a un (fi-
gure 5. ) qui eft repréfenté feul pour en laiffer voir
toutes les parties. A A eft la pièce enfourchée qui
foûtient le bricoteau ; B la broche du chatelet où il
s'attache; C l'endroit de la bafcule où s'attache le bri-
coteau ; D l'endroit où s'attache le tirant des marches;.
E la corde qui porte la pierre ou le poids F, qui fert
à donner plus de charge à la bafcule ; G le nœud
des quatre lacs des quatre lames , qui feules font agir
le bricoteau ; .//les quatre lames dont on vient de par-
ler , & qui font enfilées dans leur chafiis toutes les
quatre du même côté ; / les quatre marches qui font
mouvoir les quatre lames , ôc font les quatre en-de-
hors du côté gauche de l'ouvrier , marchées du mê-
me pié gauche ; K l'endroit où le place la corde de
la traverfe , qui fert à lever également toute cette
machine; L Lies deux cordes qui foûtiennent le lif-
feron MM , qui porte les lifiettes NN j O O les qua-
tre rouleaux du porte-rame de devant, fur lefquels
& entre les différentes grilles font paffées les rames
de fond P P , qui viennent aboutir en Q Q , où elles
font noiiées en R R aux lifiettes.
Voici l'ufage de ces bricoteaux. Dans les ouvrages
extrêmement cornpofés il y a julqu'à cinquante ou
foixante livres pelant de fufeaux attachés aux lifiet-
tes , & cela , comme il a été dit à leur article , pour
faire retomber ces lifiettes : on voit cette mafîe énor-
me dans la fig. 1 . PI. V. comme on en voit une pe-
tite partie dans lafig. à. en S S : ce poids confidéra-
ble doit être levé prelqu'en totalité par le pié gauche,
toutes les fois que l'ouvrier en aura levé du pié droit
une partie, quelquefois très-petite, d'autres fois plus
conlidérable , mais toujours bien moins coniidéra-
ble que la quantité qu'il levé avec le pié gauche ,
puilque c'eft de ce pié que feront levées toutes les
foies de fond ; au lieu que le droit ne levant que la
figure qui s'exécute fur l'ouvrage , n'opère très-fou-
vent que de très-petites levées , par la marche des
vingt marches du pié droit ; ( car elles font dans cet
ordre , vingt du pié droit pour la figure, & quatre du
pié gauche pour le fond ) Pendant cette petite levée
toutes les foies de chaîne retient en-bas : mais après
un coup de navette lancé à travers cette levée , le
fond venant à lever par une des quatre marches du
pié gauche , ce fond chargé , comme nous avons dit
plus haut , rend cette levée d'une lourdeur extraor-
dinaire , qui eft conlidérablement diminuée par le
moyen du bricoteau ou des deux bricoteaux qui font
ici l'office d'un levier , encore aidée du poids de la
pierre F. C'eft donc avec raifon que la bafcule CDy
qui patie par l'enfourchement A , eft d'inégale lon-
gueur: cette néceflité n'a pasbeloin d'être prouvée.
Dans certains ouvrages ce bricoteau levé encore les
quatre hautes liftes de devant qui portent les rames
de litière , & qui font levées alternativement par
chacune des quatre marches du pié gauche ; dans ce
cas ces quatre hautes lilîes font à claire voie , c'eft-
à-dire , qu'elles n'ont qu'une très-petite quantité de
mailles diftribuées fur les deux bouts de leurs lifle-
rons FF , G G , de la fig. 2. les rames 77 qui forment
les litières y étant feules parlées , le font en cet or-
dre : fi la première rame fait un pris fur la première
haute lilïe , elle fera un lailfé fur la féconde , un pris-
fur la troilieme,& un laiffé fur la quatrième ; la 2e au
contraire de la ir% fera un laiffé fur la tre haute liffe,
un pris fur la 2e,un laiffé fur la troilieme,Cvun pris fur
la quatrième; ainli des autres rames de litière: ces
quatre
B R 1
quatre hautes liîïes ne portant que les rames que l'on
vient d'expliquer, n'ayant befoin que de quelques
mailles fur les extrémités, doivent par conféquent
.1-ihTer un grand vuide entr'elles, qui donne paflnge
à la grande quantité de rames de figure qui vient
aboutir fur les difiérens rouleaux , & à travers les
différentes grilles du porte-rames de devant. Si l'on
faifoit de l'ouvrage en plein, c'eft-à-dire , qui ne rc-
prélentât qu'un même fonds fans aucune figure , il
n'y auroit pour lors befoin crue des deux liftes ^^>
fig. 2. dont la féconde C C porterait enBB , comme
la première A A, un poids à chacune des quatre ex-
trémités de leurs deux lifterons. Ce poids compolé
d'un ou de plufieurs fufeaux,ferviroit à faire retomber
la lifTe qui baiffe : mais la chaîne D eft pafiée dans
ces deux lifi'es en cette forte ; le premier brin eft
pafTé dans les deux premières mailles delà première
lifTe ; le fécond brin eft pafTé dans les deux premières
mailles de la 2e lifTe , & toujours de même de l'une à
l'autre ; par conféquent il y auroit toujours une moi-
tié de la chaîne qui leveroit par le moyen de la lifte
dans laquelle cette moitié fe trouve ainfi palTée : or
c'eft à travers ces levées égales que la navette qui
porte la trame eft lancée ; ce coup de navette qui
reçoit fur lui un coup de battant pendant que le pas
eft encore ouvert , eft ce qu'on appelle duitti ( Voye^
Duitte ) ; ce pas eft fermé par l'ouverture de l'au-
tre , où la même chofe fe fait encore , & toujours de
même. Cette égalité de répartition de chaîne dont
on vient de parler , eft bien différente dans les ou-
vrages figurés ; car c'eft de la quantité de chaîne plus
ou moins confidérable qui levé , que dépend la for-
mation des différentes parties de deflein , comme on
le \d\tfig. 4. où a, qui fait la figure , eft en-bas , pen-
dant que b , qui fait le fond , levé. Ce pas ainli ou-
vert va recevoir le coup de trame de la navette n,
qui eft de foie ; & à l'autre pas où a qui fait la figure
fera levé , il recevra le coup de la navette A^qui eft
chargée de deux brins de fil d'or ou d'argent. Mais
pourquoi ces deux différentes navettes , l'une de
l'oie ik. l'autre de filé ? Si lorfque le pas b eft ouvert,
où prefque toute la chaîne eft levée , on lançoit la
navette A^qui porte le filé , ce coup fe trouverait ab-
forbé , & comme enfeveli fous la grande quantité de
foie qui le couvriroit ; & ce feroit prefqu'autant de
filé de perdu ; au lieu que lorfque le pas de figure
fera ouvert , comme a qui fait la figure dans la fi-
f'ure 3. pendant que le fond B eft en-bas , le coup de
a navette N qui eft de filé qui y va être lancé , fe
trouvera prefque tout à découvert. On aura par ces
diverfes opérations le développé du deflein X: il y a
une double néceflité de la féconde navette de foie ;
car la foie qu'elle contient occupant bien moins
d'efpace que le filé , & étant toujours placée entre
deux coups de filé qui en occupent beaucoup plus
qu'elle, la liaifon du tout eft plus aifée à fe faire par
les coups de battans : dans ce cas où deux navettes
font lancées comme ici l'une après l'autre, l'ouvrier
reçoit l'une entre les doigts index & médius , Se l'au-
tre navette eft reçue entre ce même médius &c l'an-
nulaire , tantôt d'une main tantôt de l'autre : de mê-
me , comme il arrive quelquefois, s'il y en avoit trois
qui allaflent alternativement, il recevrait le troilie-
mc entre l'annulaire ik. l'auriculaire : il n'en peut
conduire davantage, n'ayant que ces trois ouvertu-
res. Lorfqu'il y a plus de navettes , puifqu'il y en a
quelquefois jufqu'à 2.5 ou 26, celles qui ne travail-
lent pas font pofées jufqu'à leur tour fur le carton.
Voyei Carton.
On trouvera clans cet article beaucoup de chofes
qui auraient ilù taire la matière d'autant d'artic es
différens : mais comme on a l'eftampc fous les yei x,
on a cru devoir traiter fous un même point de \ ûe
tout ce qu'elle renferme : par-là on évite aufli les re-
Tomc II,
BRI
4t?
dites continuelles, prefqu'inévitables en traitant Une
matière fi étendue , & fi fujette à la prolixité.
BRIDE , f. f. {Maréchal. ) fe dit en général & au
propre de tout le harnois de tête du cheval harna-
ché , & en particulier du mors & des différentes par-
ties qui l'accompagnent , dont voici le nom : l'em-
bouchure , qui cil foûtenue en fa place par la montu-
re de la bride ; cette monture eft de cuir & a plufieurs
parties; fa voir , la têtière , ou le dcfTusde tête , qui
pofe fur le fommet de la tête , derrière les oreilles ;
les porte-mors ou les montans de la bride , qui font
deux cuirs qui paflant dans les yeux du mors , le
loùtiennent à fa place , chacun a une boucle pour
pouvoir hauffer ou baiffer le mors ; lefrontail, ouïe
cuir qui traverfe !e front au-deflus des yeux , & qui
eft attaché à la fêtiere des deux côtés , il n'a point
de boucles ; la fous-gorge , qui part de la têtière , &
dont on entoure la jonction de la ganache au cou,
l'ayant attaché à une boucle du côté du montoir ; la
muferole ou le cuir qui entoure le milieu de la tête
du cheval , & fe boucle du côté du montoir : enfin
les rênes , qui font deux cuirs , qui d'un bout fe bou-
clent aux anneaux des tourets des branches , & de
l'autre font jointes ck liées enlcmble ; le mors ou fer
qui entre dans la bouche du cheval; la branche, la
fous-barbe , qui eft une pièce de fer qui prend du
fonceau au bas du coude de la branche , & ne fert
qu'à attacher l'oreille du bas de la boffette aux bran-
ches coudées ; les boffettes qui ne fervent que d'or-
nement , & feulement pour cacher le bouquet &c le
fonceau du mors ; enfin la gourmette , qui eft com-
pofée de mailles de fer Se de deux maillons deftinés
à entrer dans un crochet, lorfqu'on veut la mettre à
fa place. Voye^ Mors , Branche , Martingale ,
&c. Voye-^ La PI. de f ' Eperonnier.
La main de la bride , c'eft la gauche ; voye^ Main.'
Boiteux de la bride , vçyeçBoiTEUX. Secoujje de la bri-
de , voye^ Saccade. Effet de la bride , c'eft le degré
de fenfibilité que le mors caufe aux barres du che-
val par la main du cavalier. Boire la bride , voye^
BoiRE. Donner quatre doigts de bride, voyez^ DON-
NER. Mettre la bride fur le cou , voyc^ Mettre. Ren-
dre la bride , v&yat Rendre. Raccourcir la bride , eft la
même chofe quaccourcir ; voye^ ACCOURCIR. Bri-
de en main , voyar TENIR. Bocher avec la bride , c'eft
une habitude que quelques chevaux prennent de
joiier avec la bride, en fecoùant les mors par un petit
mouvement de tête , fur-tout lorfqu'ils font arrêtés.
Goûter la bride , fe dit lorfque le cheval commence
à s'accoutumer aux impreffions du mors.
Bride à abreuver ; on peut mettre à un poulain pour
quelques jours la bride à abreuver fans rênes; après
quoi , lui mettre le mors. Il n'y a rien de fi utile à la
fanté des chevaux , que de les tenir avec la bride à
abreuver trois ou quatre heures avant que de les mon-
ter, & autant de tems après , jufqu'à ce qu'ils foient
bien refroidis. Il leur eft aufli très-utile de les tenir
bridés deux ou trois heures avant & après leur avoir
fait prendre quelque remède.
Bride : on dqnne ce nom au figuré à toute pièce
en général qui fert à retenir ou loùtenir. Ainfi dans
une barre de godet , on appelle la bride de la b.irre la
partie qui fert à fôutenir les côtés du godet ou de la
gouttière de plomb. On trouvera dans nos planches
tle Serrurerie , plufieurs figures de brides. Poy*{ ■ &■*
piication de ces Planohes.
Bride , {terme d' Arqucbuficr. ) c'eft un petit mor-
ceau de fer plat , échancré fur les bords , un peu plus
grand que la noix, reployé en deux parties lur cha-
que bout , 8e perce d"un trou où l'on place des vis
qui raliùjcttiffent en-dedans au corps de platine : le
milieu de la bride eft un peu plus large ; il efl percé
d'un trou qui reçoit le piveau menu de la noix , & la
tient comme en équilibre. Cette bride fert poir îoù-
4i8
R I
tenir la noix , & empêcher que le chien n'approche
trop près du corps de platine en-dehors. Elle eft pofée
par-deuus la noix, de façon cependant, qu'elle ne la
gêne point dans les difTéiens mouvemens.
* Bride , ( Bas au métier.) on donne ce nom à une
partie de foie qui s'étant échappée de deffous le bec
d'une aiguille , ou qui n'y étant point entrée , n'a
point été employée à former la maille , & qui , au
lieu de paroitre tilTue & de contribuer à la continuité
du bas , paroît droite &l lâche , &: Iaiffe un vuide ou
un trou. Ce trou le rebouche en remontant la maille ;
pour cet effet on prend la tournille , on fait paffer la
bride dans fon bec ; on tranfporte cette bride de def-
fous le bec de la tournille fous le bec de l'aiguille ,
& l'on achevé à la main ce que la machine auroit dû
faire. Foye{ Maille, Tournille, & Bas
au métier.
Bride , ( outil de Charron. ) c-'eft une bande de fer
plate , pliée en trois , quarrément , dont les deux
branches font percées de plulieurs trous vis-à-vis les
uns des autres , pour y placer une cheville de fer ,
qui va répondre d'un trou dans un autre. Cet outil
fort aux Charrons pour affujettir planeurs pièces de
leurs ouvrages eniemble. Voye^ lafig. i. Planche du
Charron.
Bride à brancard, (outil de Charron.') afTez fem-
blable & d'un ufage fort analogue au précédent.
C'eft une bande de fer pliée en trois , dont la partie
du milieu peut avoir iîx ou huit pouces de long , &
la partie des deux côtés peut avoir cinq pies de long ,
fur quatre pouces de large : cela fort aux Charrons
pour maintenir le brancard quand ils le montent &
Faffemblent. Voye^ lafig. il. PI. du Charron.
Brides, en terme de Fondeur de cloches, font de
grands anneaux de fer de forme parallélogrammati-
que, qui fervent à fufpendre la clcche au mouton , par
le moyen des barreaux de fer qui traverfent les anfes
de la cloche, & les barreaux de bois &: de fer poiés
en travers fur le mouton , fur lefquels les brides paf-
fent. Poye^ lafig. 6 . Planch. de la Fonderie des cloches ,
& Varticle FONTE des cloches.
Brides ; ce font les extrémités des tuyaux de fer
faites en platines , avec quatre écroues dans les an-
gles , pour les joindre & les brider, en y mettant des
rondelles de cuivre ou de plomb entre deux , avec
du maftic à froid. (/£)
Bride , Bp>.ides , terme dont on fe fort dans la
Manche. Voye^ Guerlandes.
BRIDER un cheval, {Manège) c'eft faire entrer le
mors dans la bouche , paffer le haut de la têtière par-
deffus les oreilles , & accrocher la gourmette. Brider
la potence. Voye^ Potence.
Se brider bien , fe dit du cheval , lorfqu'il a la tête
placée comme il faut , c'eft-à-dire , qu'il n'a point le
nez en avant , ni en - deffous , ni trop bas. Se brider
mal, fe dit lorfqu'il tend le nez, ou qu'il avance
trop. ( V)
Brider V ancre, en Marine; c'eft envelopper les
pattes de l'ancre entre deux planches , afin d'empê-
cher que le fer de la patte ne creufe, & n'élargiffe
le fable ou la vafe , lorfqu'on fe trouve obligé de
mouiller dans un fond où la tenue eftmauvaife. (Z)
* BRIDER, terme de Maçonnerie de carrière , brider
une pierre ; c'eft l'attacher avec le bout du cable de
la grande roue , d'où pend le crochet qui doit l'enle-
ver. C'eft la forme de la pierre qui détermine celle de
la brider ; d'ailleurs les pierres ne fe tirent pas autre-
ment des carrières, que les autres fardeaux.
BRIDER les ferres d'un oifiau , en Fauconnerie ; c'eft
en lier une de chaque main , pour l'empêcher de
charrier la proie.
BRIDGENORTH , ( Géog. ) petite ville d'Angle-
terre , dans le Shropshire , fur la Saverne. Long, i5.
i. Ut. 5z. 24.
B R I
BRIDGETOY/N , ( Géog. ) ville d'Amérique ,
dans l'île de la Barbade , aux Anglois ; elle eft forte
& bien peuplée. Long. J18. 40. lat. ij. za.
BRIDGE\VATER , ( Géog. ) grande ville d'An-
gleterre , fur le Paret , dans la province de Sommer-
lèt , avec titre de comté.
BRIDLINGTON , ( Géog. ) petite ville d'Angle-
terre , dans la province d'Yorck.
BR.IDON ,{. m. ( en terme £ Eperonnier ) c'eft une
foule embouchure , qui fe termine par des anneaux,
dans lefquels on paffe les rênes : on les appelle brU
dons à la royale ; parce que ce fut , dit-on , Louis XIV.
qui s'en fervit le premier dans une circonftance où
la bride de fon cheval fe caffa. Voye^ lafig. ig. PL
de CEperonnier.
BRIDON à F Angloife , ( en terme CEperonnier) ne
diffère du bridon à la royale , que par fon anneau de-
mi-rond , monté fur un fer rond , & paffé dans l'an-
neau qui termine l'embouchure.
On ne mené les chevaux anglois qu'avec des bri-
dons , & on ne leur met des brides qu'à l'armée. Il
n'y a point de cheval lûr ou utile , qui puilîe aller
avec un bridon, s'il n'eft premièrement monté avec
le mors.
BRIDPORD , ( Géog. ) petite ville d'Angleterre,
dans la province de Dorfet.
BRIDURE, f. in. (terme de Rivière & de Train)
perche qui tient avec une longue roùette. Voye^
Train fe- Rouette.
BRIE , ( Géog. ) pays de France , borné au nord
par File de France, & le Soiffonnois ; à l'orient par
la Champagne , & au midi par la Seine. On la divife
en haute &c baffe.
Brie-Comte-Robert , ( Géog. ) petite ville de
France dans la Brie , à 6. lieues de Paris. Long. zoi.
iG'.zJ'.lat. 48*. 41'. 26".
Brie-Comte-Braine , ( Géog. ) petite ville de
France dans le Soiffonnois , au bord de la Vefle , qui
fe jette près de-là dans l'Aifne.
B R I E C K , ( Géog. ) pays de la petite Pologne ,
dans le palatinat de Cracovie.
BRIEF , f. m. terme de Commerce de mer, en ufage
dans toute la Bretagne , pour fignifîer l'écrit ou le
congé que les maîtres , patrons ou capitaines des vaif-
feaux font obligés de prendre des commis des fermes
du Roi, dans les ports de cette province. Voye^ Bref
& Brieux. (G)
BRÎEG , ( Géog. ) ville forte d'Allemagne , capi-
tale d'une principauté de même nom, dans la baffe-
Siléfie , à 6 milles de Brellau. Long. J3. 10. lat.
ôo. 49.
Brieg , ( Géog. ) ville d'Angleterre , dans la pro-
vince de Galles , remarquable par des bains chauds.
BRIENNE,( Géog. ) petite ville de France efï
Champagne , près de la rivière d'Aube , avec titre
de comté.
BRIENNON , ( Géog. ) petite ville de France en
Champagne , fur la rivière d'Armançon , dans le Ssn-
nonois.
BRIESCIA , BRESSICI ou BRESCZ , ( Géog. )
province ou palatinat dans la Lithuanie , borné au
nord par les palàtinats de Novogrodek & de Troki ,
à l'occident par ceux de Bielko & de Lublin , au fud
par la haute "Wolhinie & le palatinat de Chelm , &c
à l'orient par le pays de Rziczica. La capitale porte
le même nom que la province.
BRIEUX, terme de Commerce ufité en Bretagne, pour
lignifier les congés que les maîtres, patrons , ou capitai-
nes de vaiffeaux font obligés de prendre de l'amiral,
de l'amirauté ou des commis des fermes du Roi. f^oy.
Bref ou BRIEF , dans le Diclionn. du comm. de Savari,
tom. l.pag. 1114. La taxe des droits de brieux, que
payent les barques ou vaiffeaux , lelon leur différent
port à Nantes & dans fa prévôté , auiîi bien que pour
BRI
ïcs Tels de Brouage , la Rochelle , Guerande , tranf- |
portés tant à Nantes & comté Nantois qu'au Croific.
Brieux , (St. ) Géog. ) ville de Fiance, dans la
haute Bretagne , avec un bon havre à une demi-
lieue de la mer. Long. 14. 4.J. lat. 48. 33»
BIIIEY , ( Géog. ) petite ville de France , dans le
duché de Bar , près de la rivière de Mance , à 8 lieues
de Saint-Michel»
BRIEZEN , ( Géog. ) ville d'Allemagne , dans l'é-
lectorat de Brandebourg. Il y a encore une autre ville
de ce nom dans la Marche mitoyenne de Brande-
bourg , fur la rivière de Niepelitz , à 8 milles de
Berlin.
BRIFIER , ( terme de Plombier') c'eft une bande de
plomb , qui fait partie des enfaîtemens des bâtimens
couverts d'ardoife. Voye\ Enfaîtement.
BRIGADE, f. f. ( dans L'Art militaire ) partie
ou diviiion d'un corps de troupe , foit à pié , l'oit à
cheval , Tous le commandement d"un brigadier. Voye^
Brigadier.
Le mot brigade efi dérivé , fi l'on en croit quelques
auteurs , du mot latin brigua , brigue , ou intrigue
iecrete. Du Cange le fait venir de brigand, lbldat mal
difeipliné, qui court le pays & le ravage fans atten-
dre l'ennemi ; comme font les armées de Tartares ,
d'Arabes , &c. On tire encore l'étymologie de briga-
de , de brigandine , forte d'armure , dont on s'eit lervi
autrefois en France. Voye^ Brigandine.
L'armée fe divife en plufieurs brigades , c'eft-à»
dire en plufieurs corps particuliers. C'eil un certain
nombre de bataillons ou d'efeadrons deftinés à com-
battre & à faire le fervice militaire , fous les ordres
d'un chef appelle brigadier.
Les troupes d'une même brigade font lur la même
ligne dans l'ordre de bataille , & placées immédiate-
ment à côté les unes des autres.; elles ne font point
de différente efpece , mais feulement ou d'infanterie
ou de cavalerie.
Le nombre des bataillons ou des efeadrons de cha-
que brigade n'eft pas fixé : elles font quelquefois de
fix bataillons, elles ne font pas toutes égales. Il y en a
de plus fortes & de plus foibles ; dans les dernières
campagnes de Flanche , celles d'infanterie étoient de
quatre bataillons. Les brigades de cavalerie peuvent
aller jufqu'à huit efeadrons.
Les brigades fuivent entr'elles le rang du premier
régiment qu'elles contiennent. Les autres régimens
font regardés comme joints avec ce premier , & ne
faifant en quelque façon que le même corps. Con-
formément au rang de ce régiment, on donne aux
brigades les pofles d'honneur qui lui conviennent. On
appelle pojle d'honneur à la guerre , celui qui elt jugé
le plus périlleux ; comme les flancs des lignes font les
endroits les plus expofes & les plus dangereux , on
place par cette raifon les premières brigades aux
flancs. Le Blond , Effai fur la Ca/lramétation.
Brigade , dans L'Artillerie , eft une certaine divi-
fion de l'équipage ou du train d'Artillerie , compo-
fée ordinairement dp dix pièces de canon , & de tou-
tes les différentes munitions néceffaires à leur fervi-
ce. Chaque brigade a un commifiaire provincial , plu-
fieurs commiflaires ordinaires &c extraordinaires , des
Officiers pointeurs , &c. ((>)
BRIGADIER, eft un officier qui commande un
corps de troupes appelle brigade. Voye^ Brigade.
Brigadier des armées du Roi , eft un officier créé
du règne de Louis XIV. dont les fondions font lubor-
données au maréchal de camp.
Le titre de brigadier n'étoit d'abord qu'une com-
miffion , & non une charge , ni proprement un gra-
de dans l'armée : mais en 1 667 , quand la guerre com-
mença , le Roi fit expédier divers brevets de cava-
lerie, dont il honora plufieurs officiers ; Si. c'eft alors
Tome H,
B R I
419
que furent inftitués les brigadiers par brevet. Le Roi
ayant été fort fatifait de ces brigadiers de cavalerie ,
en mit auffi dans l'infanterie l'année fuivante , c'elt-
à-dire en 1668.
Le brigadier d'infanterie dans une bataille eft à
cheval , pour pouvoir fe porter plus vite aux divers
bataillons de fa brigade , dont il doit ordonner tous
les mouvemens. Il y a des brigadiers, non-feidement
dans la cavalerie légère & dans l'infanterie , mais
encore dans les dragons & dans la gendarmerie : ceux
de la gendarmerie , au moins ceux qui étoient capi-
taines-lieutenans des quatres premières compagnies,
precédoient dans les promotions ceux de la cavale-
rie légère : mais cet ui'age n'elt plus ; il n'eft pas nc-
ceffaire d'avoir paffé par la charge de colonel ou de
meftre de camp pour parvenir au titre de brigadier ;
le Roi a fouvent promu à ce grade des capitaines
aux gardes, des officiers de gendarmerie, des offi-
ciers des gardes du corps , des officiers des gendar-
mes de la garde , des officiers des chevau - légers &
des moufquetaires , des officiers d'artillerie , des in-
génieurs, & des lieutenans-colonels. Ces officiers
font leur chemin comme les autres , c'eft-à-dire , que
de brigadiers ils deviennent maréchaux de camp , ôc
lieutenans généraux par leur fervice.
Louis XIV. attacha auffi à la qualité de brigadier
des honneurs militaires.
Le brigadier qui eft logé dans le camp , & y a fa
brigade, doit avoir une garde compofée d'un caporal
& de dix hommes de fa brigade : mais s'il eft dans
une place fous un autre commandant , il n'a pas mê-
me de fentinelle.
Quand le brigadier vifite un pofte , l'officier tient
fa garde en haie , fans autres armes que l'épée , &
fe met à la tête ayant fon efponton près de lui.
Un officier, tandis qu'il n'eft que brigadier, eft
pour l'ordinaire obligé de garder fon régiment , s'il
en avoit avant que d'être parvenu à ce grade : mais
il peut le vendre à fon profit dès qu'il eft fait maré-
chal de camp.
Par ordonnance du 30 Mars 1668 , le Roi donne
aux brigadiers d'infanterie la même autorité fur les
troupes d'infanterie , que ceux de cavalerie ont fur
celles de cavalerie.
Par celle du 10 Mars 1673 ' ^ a été réglé que tout
brigadier qui aura lettres de fervice , commandera à
tous colonels ou meures de camp , tant d'infanterie
que de cavalerie : que dans une place fermée celui
d'infanterie commandera à celui de cavalerie ; mais
dans un lieu ouvert , & à la campagne , celui de ca-
valerie commandera à celui d'infanterie.
L'ordonnance du 30 Juillet 1695 y ajoute le bri-
gadier des dragons , auquel elle donne le même rang
qu'à celui de cavalerie , & ordonne qu'ils rouleront
enfemble fuivant leur ancienneté.
Par ordonnance du premier Avril 1696 , il a été
réglé que les brigadiers qui auront leur commiffion
du même jour , garderont toujours, comme colonels,
le rang que leur régiment leur donne , & marcheront
comme brigadiers fuivant l'ancienneté de leur com-
miffion de colonels. Et par celle du 20 Mars 1704,
fa Majefté expliquant mieux fon intention à l'égard
des colonels d'infanterie qui ont paffé foit dans la
gendarmerie, foit dans des régimens de cavalerie ou
dragons , elle a ordonné que les brigadiers d'infante-
rie, de cavalerie ou de dragons, marcheront entr'eux
du jour de leur commiffion de colonels ou de moitiés
de camp , d'infanterie , de cavalerie ou de dragons,
fans avoir égard aux changemens des corps , ni au
tems où ils feront entrés dans celui où ils le trouve-
ront.
Nonobftant le brevet que le Roi donne aux briga-
diers . iis ne fervent en cette qualité que par une let-
Gggij
4ÎO
B R I
BRI
tre de fervice. Ils ont en campagne cinq cens livres
par mois de quarante-cinq jours. (Q)
BRIGAND , f> m. ( Hiji. mod. ) vagabond qui
court les campagnes pour piller & voler les paflans.
On donne quelquefois ce nom aux foldats mal difci-
plinés qui defolent les pays où ils font des courfes ,
& qui n'attendent point l'ennemi pour le combattre.
Ainii les Hordes des Tartares, & ces pelotons d'Ara-
bes qui infultent les voyageurs dans le Levant , ne
font que des troupes de brigands. On prétend que ce
mot vient originairement d'une compagnie de ioldats
que la ville de Paris arma & foudoya en 1356, pen-
dant la prifon du roi Jean; que toute cette troupe
étoit armée de brigandines , forte de cote d'armes
alors ufitée ; & que les defordres qu'ils commirent
leur acquirent le nom de brigands , qu'on appliqua
enfuite aux voleurs de grand chemin. Borel le déri-
ve de brugue , autre efpece d'armure ancienne faite
de lames de fer jointes , 6c dont ces brigands fe fer-
voient comme de cuirafles. Jufte Lipfe le fait venir
de bragantes, qui étoient des fantaffins. Fauchet en
trouve la racine dans brig ou brug , vieux mot Gau-
lois ou Tudefque , qui fignific un pont ; parce que ,
dit-il , les ponts font des lieux où l'on détroufle com-
munément les paflans. D'autres le tirent d'un nommé
Burgand , qui défola la Guienne du tems de Nicolas
premier. Et d'autres enfin de certains peuples appel-
lés Brigantins ou Brigands , qui demeuraient fur les
bords du lac de Conftance , & piiloient tout le mon-
de indifféremment, amis ou ennemis. (G)
BRIGANDAGE, f. m. ( Jurifprud.) efl un vol fait
à force ouverte , comme le vol fur les grands che-
mins , ou autre femblable. Il eft oppoié à filouterie
ou larcin. C'eft un crime capital. Voye?^ Vol , Fi-
louterie, Larcin.
Il le dit auffi , dans un fens figuré , d'extorfions ou
conclurions dont les particuliers ne peuvent pas fe
défendre : ainfi l'on dira en ce fens , qu'un gouver-
neur de province , un traitant , a commis des brigan-
dages crians. (-&*)
BRIGANDINEouBRIGANTINE, f. {.(Jrtmilit.)
efpece de corcelet fait de lames de fer , attachées
les unes aux autres fur leur longueur par des clous
rivés ou par des crochets. Cette armure étoit en ufa-
ge lors de l'établiffement des francs-archers par Char-
les VIL qui la nomme dans le détail des armes dont
les troupes dévoient être armées. (Q)
* BRIGANTES , f. m. pi. ( Géog. hifl. ) nom d'un
peuple compote de différentes nations , &c ibûtenu
par des colonies que les anciens Gaulois envoyoient
enEfpagne, en Portugal, en Italie, en Allemagne ,
& dans la grande Bietagne. Ce peuple habitoit les
lieux les plus élevés de ces pays ; aufîî remarque-
t-on que les villes qui finiffent par brica , briga , bria ,
font pour la plupart fituées fur des hauteurs. Voilà
un peuple bien iingulier. II étoit difperlé dans diffé-
rentes contrées , où il confervoit ion nom , 011 il
affettoit d'habiter les lieux hauts , & où il étoit en-
tenu par des colonies.
BRIG ANTIN , f. m. ( Marine. ) c'eft un petit vaif-
feau léger , bas & ouvert , c'eft-à-dire , qui n'a point
de pont : il eft moins grand pour l'ordinaire que la ga-
liote ; il va à rames 6c à voiles : on s'en fert pour fai-
re la courfe. Il a communément douze à quinze bancs
de chaque coté pour les rameurs , & un homme à
chaque rame. Les corfaires fe fervent principale-
ment de brigantins à.caufe de leur légèreté. Tous les
matelots y font foldats , & chacun a ion fufil en
état au-deflbus de fa rame. (Z)
BRIG-KAUSTEVEN, {Géog.) petite ville d'An-
gleterre dans la province de Lincoln.
BRIGNAIS , ( Géog. ) petite ville de France dans
le Lyonnois , fur le Garon, à deux lieues de Lyon.
BRIGNOLES, ( Géog. ) ville de France en Pro-
vence. Long. 23- 30. bat. 43. 24.
Brignoles, (Géog.) rivière d'Italie dans l'état
de Gènes.
BRIGONDIS , ( les ) Géog . peuple d'Ethiopie dans
la CafFrerie , au nord-oueft du cap de Bonne-Efpé-
rance.
BRIGUES , f. f. ( Hifl. anc. ) étoient chez les Ro-
mains les démarches que faifoient ceux qui afpiroient
aux honneurs pour fe faire élire.
Ils alloient vêtus de blanc par toute la ville , &
quêtoient des fuffrages dans les places Si. les aflem-
blées publiques ; & c'eft en cela que conliftoit l'am-
bitus , mot compofé de l'ancienne prépofition amy
qui fignifioit autour , & de ire , aller. Voye-t Candi-
dat.
La brigue fe faifoit tout ouvertement à Rome , &C
on y facrifioit de grandes fommes d'argent : & Cicé-
ron impute à cette caufe le taux exceifif auquel les
intérêts étoient portés de fon tems , lefquels rou-
loient entre quatre & huit pour cent. Cicer. Epit. II.
ad Quint, frat. C'étoit plutôt corrompre les citoyens
que les folliciter. La brigue a coûté pour une feule
tribu jufqu'à 80719 liv. or il y en a voit trente-cinq :
par où l'on peut juger des fommes immenfes que coû-
toient les charges à Rome , quoiqu'elles n'y fuflent
pas vénales. (C7)
BRIGUEIL, (Géog.) petite ville de France dans'
la baffe Marche , aux confins du Poitou ÔC de l'An-
goumois , fur la Vienne.
BRIHUEGA, ( Géog. ) petite ville d'Efpagne dans
la Caftille nouvelle, fur la rivière de Trajuna. Il s'y
fait un çrand commerce de laine.
BRILINGEN , ( Géog. ) petite ville d'Allemagne
dans la Soùabe , fur le Bujet.
* BRILLANT, LUSTRE, ECLAT, f. m. (Gram.)
termes qui font relatifs aux couleurs , quand ils font
pris au propre & au phyfique, & qu'on tranfporte
par métaphore aux expreffions , au ftyle , aux pen-
iées ; alors ils ne fignifient autre choie que de même
qu'entre les couleurs il y en a qui affectent plus ou
moins vivement nos yeux, de même entre les penfées
& les expreffions, il y en a qui frappent plus ou moins
vivement l'efprit. L'éc/at enchérit furie brillant , &£
celui-ci fur le luflre : il femble que Y éclat appartienne
aux couleurs vives & aux grands objets; le brillant 9
aux couleurs claires & aux petits objets ; &c le luflre ,
aux couleurs récentes & aux objets neufs. La flam-
me jette de l'éclat ; le diamant brille; le drap neuf a
fon luflre.
Brillant , c'eft , parmi les Diamantaires , un dia-
mant taillé deffus & deffous.
Le brillant vu par fa table eft compofé de quatre
biiéaux , qui formeraient un quarré fans les coins
qui l'arrondiflént. Foye7_ Biseau, Coin, fi*
Table.
Brillant, terme de Manège ; un cheval brillanted
celui qui exécute fon exercice &c fes airs de manège
avec un feu & une vivacité qui éblouit , pour ainli
dire , les yeux des fpeftateurs. (^)
BRILLE ,(la) Géog. ville maritime de la provin-
ce d'Hollande , dans File de Voorn. Elle eft fortifiée,
&Z a un bon port près de l'embouchure de la Meule.
Lon. 21.31.lat. Si. 53.
BRILON , ( Géog. ) petite ville d'Allemagne dans
le cercle de'NVeftphalie , appartenante à l'élefteur de
Cologne.
BRIMBALE ou BRINGUEBALE ,{.(.( Fontaine
eft la barre ou la verge qui fait jouer une pompe.
Ce mot eft un peu vieilli ; & il convient mieux de
dire la tringle de fer qui eft attachée d'un bout à la ma-
nivelle , & de l'autre au pifton qui fait fon jeu dans
le corps de la pompe. (K)
* BRIMO , f. f. ( Myth. ) c'étoit un des noms de
B R I
Profcrpine; il fignifie terreur: il vient de Gptfta^jé-
p buvante. Les anciens croy oient que les terreurs noc-
turnes venoient de Proferpine.
BRIN , f. m. le dit en général de tonte petite por-
tion d'un corps foible & long ; ainii on dit un brin de
foie. Il le dit même quelquefois aufîi d'un corps long
& menu , comme un brin de paille.
Brin de fougère, terme d'Architecture, forte de pan
de bois. Foye{?A.K DE BOIS. (P)
Brin ; les Artificiers appellent ainfi une tringle de
bois de trois à quatre pouces de groflèur , fur laquelle
on arrange les pots à feu , en les plantant par le
moyen des chevilles attachées à leurs baies , dans
les trous pratiqués le long de cette tringle.
Brin , (Corderie ou (Econorn. ruftiq. ) on appelle
ainii les filamens du chanvre , fur-tout quand ils ont
été affinés & peignés. Les filamens les plus longs qui
relient dans les mains des peigneurs s'appellent le pre-
mier brin : on retire du chanvre qui eft relié dans le
peigne des filamens plus courts, qu'on appelle le fé-
cond brin ; le refte cil l'étoupe , qui fert à d'autres
ufages.
Brin , en terme d'Eventaillifie , c'eft une de ces pe-
tites flèches qui forment ces efpeces de rayons de
bois , d'ivoire , &c. qu'on voit aux éventails , qui en
foûtiennent le papier , & qui fe réunifient par leur
extrémité comme à un centre où ils font unis par un
ciou. Voye^fig. 4. PI. de VEventaillifle.
Brin , maître-brin , {terme d'Eventaillifle.) ce font
deux longs montans de bois , d'écaillé , d'ivoire , &c.
auxquels font collées les deux extrémités du papier
d'un éventail , & entre lefquels les flèches font ref-
ferrées. Voye^ Éventail. Voye^ lesfig. zz. & 24.
PI. de VEventailliJle.
BRIN , {Jardinage.') on dit un arbre d'un beau brin ,
c'eft-à-dire , d'une belle venue , d'une tige droite &
unie , foit que ce loit un arbre fruitier ou un fauvage.
En fait de charpente , on dit une poutre , une foli-
ye de brin , quand la pièce eft prife dans le montant
de l'arbre, &c non dans fes branches. (K)
HRINDES ou BRINDISI, (Géog. anc. & mod.)
ville du royaume de Naples, dans le pays d'Otrante,
près le golfe de Venife , avec un des meilleurs ports
d'Italie. Long. J5. 40. lat. 40. J>Z. C'étoitle Brun-
àujîum des anciens.
BRINDILLE , f. f. (Jardinage.') eft un petit rameau
de bois que la tige d'un arbre a poufTé. (K)
* BRINÛONES , f. m. pi. (Hifl. nat. bot.) fruit qui
croît aux Indes orientales à Goa- : il eu. rougeâtre en
dehors , d'un rouge de fang en dedans , ÔC d'un goût
très-aigre. Il conierve toujours fa couleur intérieure :
quant à Ion goût, il perd quelquefois de ion acreté,
à melûre qu'il mûrit ; il devient auffi noirâtre à l'ex-
térieur. Il y a des perfonnes qui l'aiment. Il fert aux
teinturiers. On conferve l'on ecorce ; Ray dit qu'on
l'employé en Portugal à faire du vinaigre. Cette def-
cription eft fi imparfaite , qu'il n'eit pas poffible de
deviner fi le fruit décrit eft de l'efpece des poires ,
des pommes , des pêches , des cerifes , &c.
BRINGUE , f. f. le dit , en Manège , d'un petit che-
val d'une vilaine figure, 6c qui n'eit point étoffé.
BRINN , (Géog.) ville forte d'Allemagne, en Mo-
ravie , au confluent des rivières de ScWart & de
Schwitt. Long. Z4. 43. lat. 4g. 8.
BRINNITZ , (Géog.) rivière d'Allemagne, dans
la Silène , qui le jette dans l'Oder.
BRIOLON , (Géog.) petite ville forte de la Vala-
chie , fur le Danube.
BRION ou RINGEAU, f. m. (Mâtine.) c'eft la
pièce du haut de l'étrave, ou Ion allonge , lorfque
l'étrave eft de deux pièces : il vient à la hauteur de
l'éperon. Les Hollandois ne font pas d'étrave de deux
pièces. Foye^ la Pi, lF.fig. 1. n° 2, la ûtuation de la
B R 1
4ix
' pièce de bois appellée brion , pofée entre la quille 1.
& l'étrave 3 . (Z )
Brion , (Geog.) île de l'Amérique feptentrionale ,
au Canada.
BRIONI , (Géog.) c'eft le nom de trois îles de la
mer Adriatique , qui appartiennent aux Vénitiens,
fur la côte orientale de l'iftrft,
BRIONNE, (Géog?) ville de France, avec titre
de comté , dans la province de Normandie , fut la
Rille. Long. ig. z6. lat. 49. Jj.
BRIOUDE , (Géog.) ville de France , dans la baffe
Auvergne: il y en a deux ; l'une s'appelle la vieille ,
&c l'autre , qui eft la nouvelle , s'appelle Brioude l'E-
glifc. La vieille Brioude eft fur l'Allier : il y a un cha-
pitre de chanoines , qui font obligés de faire preuve
de nobleffe pour y être admis. On les appelle' les
comtes de Brioude. Long. zi. lat. 4^. 14.
BRIQUAILLON , f. m. pi. les Fondeurs appellent
ainii les vieux morceaux de brique , dont on remplit
tout l'efpace renfermé par le mur de recuit. On met
les plus petits contre le moule , pour le garantir de
la violence du feu , & les plus gros contre le mur de
recuit. Voyt{ leur ujage au mot Fonderie en bronze,
ou des (latues équeflres.
* BRIQUE , f. f. forte de pierre factice , de cou-
leur rougeâtre, compofée d'une terre graffe, pétrie,
mife en quarré long dans un moule de bois , &£ cuite
dans un four, où elle acquiert la confrfiance nécef-
faire au bâtiment. Voye^ Pierre , Tuile.
II paroît que l'ufage de la brique eft fort ancien.
Les premiers édifices de l'Afie , à en juger par les rui-
nes , étoient de briques léchées au foleil ou cuites au
feu, mêlées de paille ou de rolèaux hachés & cimen-
tés de bitume. C'eft ainii, félon la Ste Écriture, que
la ville de Babylone fut bâtie par Nemrod. Les murs
célèbres dont Semiramis la fit enclorre , & que les
Grecs comptèrent au nombre des merveilles du mon-
de , ne fuient bâtis que de ces matériaux. Voici com-
ment un de nos plus exacts voyageurs parle des ref-
tes de ces murs : « A l'endroit de la réparation du
» Tigre , nous vîmes comme l'enceinte d'une grande
» ville Il y a des reftes de murailles fi larges,
» qu'il y pourroit paffer fix carrones de front : elles
» font de briques cuites au feu. Chaque brique eft de
» dix pouces en quarré , fur trois pouces d'épaiffeur.
» Les chroniques du pays aifùrent que c'eft l'anciert-
» ne Babylone. Tav. voyag. du Lev. liv. IL. ch. vij. »
D'autres parlent d'une maiTe d'environ trois cents pas
de circuit, fituée à une journée & demie de la pointe
de la Méfopotamie, & à une diitance prefqu'égale
du Tigre 6c de FEuphrate , &C qu'on prend pour les
ruines de la fameufe tour de Babel ; ils diient qu'elle
eft bâtie de'briques féchées au foleil, qui eft très-ar-
dent dans ces quartiers ; que chaque brique a dix pou-
ces en quarré , fur trois pouces d'épaiffeur ; que cha-
que lit de briques eft iéparé par un lit de cannes ou de
rolèaux concailcs & nulés avec de la paille de blé,
de l'épaiffeur d'un pouce & demi, & que d'efpace
en eipace , où l'on avoit befoin de forts appuis , on
remarque d'autres triques des mêmes dimeniions que
les précédentes, mais cuites au feu, plus folides &
maçonnées avec le bitume.
Il refte encore dans l'Arménie , dans la Géorgie ,
& dans la Perfe, pluiîeurs anciens édifices bâtis des
mêmes matériaux. A Tauris , autrefois Ecbatane, à
Kom, àTeflis,àErivan, & ailleurs, les vieilles mai-
fons font de briques.
Pendant pluiîeurs lîecles les autres parties du mon-
de ne furent pas plus magnifiques en édifices. L'ufage
de bâtir de briques compofees de terre mêlée de pail-
les menues, qui avoit commence dans l'Afie , paffa
en Egypte. Ce travail pénible tut un des moyens dont
l'un des Pharaons le fervit pour opprimer les Ilr.iéli-
tes. Les Grecs prirent aullî cette manière de bâtir, des
4î i
BRI
Orientaux. Vitrr.ve , qui écrivoit fous le regtt* d'Au-
gufte , dit qu'on voyoit encore de fon tems dans Athè-
nes , l'Aréopage bâti de terre & couvert de chaume.
Rome , dans l'on origine & pendant les quatre pre-
miers fiecles de fa fondation , n'étoit qu'un amas in-
forme de cabanes de briques &: de torchis. Les Ro-
mains prirent dans la fiîite , des Tofcans , la manière
de bâtir avec de groffes pierres maflives & quarrées.
Vers les derniers tems de la république , ils revinrent
à la brique. Le panthéon & d'autres grands édifices
en furent conftruits. Sous Galien , on formoit les murs
alternativement d'un rang de brique & d'un rang de
pierre tendre & grife.
Les Orientaux faifoient cuire leurs briques au fo-
leil ; les Romains fe fervirent d'abord de briques crues,
feulement féchées à l'air pendant quatre à cinq ans.
Les Grecs avoient trois fortes de briques; la première ,
qu'ils appelloient didoran ou de deux palmes ; la fé-
conde , tetradoran ou de quatre palmes ; &c la troifie-
me . quintadoran ou de cinq palmes. Outre ces briques
de jauge , ils en employoient de plus petites de moi-
tié, qui fervoient de liaifon & ornoient leurs édifices
par la diverfité des figures & des pofitions.
Les briques , parmi nous , ont différens noms pris
de leurs formes , de leurs dimenfions , de leur ufage ,
& de la manière de les employer.
La brique entière de Paris , eft ordinairement de huit
pouces de long fur quatre de large & deux d'épais.
La brique de Chantignole ou demi-brique , n'a qu'un
pouce d'épais , les autres dimenfions comme la brique
entière.
On appelle briques en liaifon , celles qui font pofées
fur le plat , liées , moitié par moitié , les unes fur les
autres , & maçonnées avec plâtre & mortier.
Briques de champ , celles qui font pofées fur leur
côté pour fervir de pavé.
Briques en épi , celles qui font placées fur l'angle
diagonalement en manière de point d'Hongrie ; tel
eft le pavé de Venife.
La brique de Chantignole ou demi-brique , fert entre
des bordures de pierre aux atres & aux contre-cœurs
de cheminée.
Manière de faire la brique. Ne prenez ni terre are-
neufe ou graveleule , ni bourbiers fablonneux ; ces
matières pefent trop & ne refirent point à la pluie.
Si vous trouvez de la terre blanche qui tienne de la
craie, de la terre rouge , ou même du fablon mâle
rouge , fervez-vous en : vos briques feront fermes
Se légères ; deux conditions effentielles. Choififfez
pour ce travail la faifon qui convient le mieux pour
faire fécher. En un mot , ayez de bonne argile ,
qui ne foit point fablonneufe , ou de la terre courte ,
moins forte que la terre grafle ; ou fi vous avez de
l'argile & de la terre courte, faites-en un mélange
en parties égales. Trempez votre mélange fans le
noyer; remuez -bien; délayez avec une pelle; &
battez avec la tête d'un piquoir ou d'une houe : plus
vous battrez , meilleure fera votre brique. Ayez des
moules ou cadres de bois de la dimenlion intérieure
que vous voulez donner à votre brique : mouillez-les :
iaupoudrez-les d'un peu de fable bien fec , afin que
la matière de vos briques ne s'y attache pas : remplit-
fez-les de terre : foulez la terre avec les mains : ayez
enfuite un gros bâton rond ; achevez de prefter la ter-
re dans les moules , en faifant parler ce bâton forte-
ment fur cette terre : que ce bâton foit poli Se mouil-
lé , afin que la terre ne s'y prenne pas : cela fait , pre-
nez votre moule & déchargez-le de plat dans un lieu
bien uni : recommencez la même manœuvre , fau-
poudrant le moule & foulant la terre avec les mains
& le bâton : laiffez fécher vos briques au foleil ; quand
elles feront à demi feches, taillez-les, c'eft-à-dire ,
enlevez avec un couteau tout ce qui nuiroit à la ré-
gularité de la figure. Quand il eil important que les
B R I
briques foient bien régulières , on a pour cette opéra»
tion un nouveau moule , de la forme même de la ban-
que, feulement un peu plus petit; mais n'ayant que
deux côtés difpofés en équerre : on applique la briqua
entre ces deux côtés , les deux autres dirigent le cou-
teau. Quand on a taillé deux côtés, on taille les deux
autres de la même manière , & l'on a par ce moyen
des briques bien équarries & bien égales entr'elles.
Quand vos briques léront taillées , pofez-les fur le côté
deux à deux , à la hauteur d'un pié & demi : formez-
en des rangées ; mettez de l'efpace entre chaque ran-
gée, & laifièz-les fécher. Ayez un four , & difpofez-y
vos briques de manière qu'elles puiffent être bien pé-
nétrées par le feu , ou faites-les cuire en plein air ;
car il y a ces deux manières de cuire la brique : mais
la première eft la meilleure. Le four n'a rien de par-
ticulier : il eft à grande volée ou à l'ordinaire , feu-
lement de moitié plus grand que celui du Potier. On
met les briques dans le four : on le ferme : on y met
du bois : on fait un feu médiocre , jufqu'à ce que la
fumée du fourneau , d'un blanc obfcur qu'elle paraî-
tra , devienne noire ; alors on celle de mettre du bois;
on continue feulement d'entretenir la chaleur avec
des fagots , de la paille , des genêts , &c. jufqu'à ce
que le four paroiffe blanc , & que la flamme s'élève
jufqu'au haut de la cheminée. Quand on a fait durer
cette chaleur pendant quelque tems, on la ralentit,
& on laifTe refroidir le four par degrés. On réitère la
même opération , échauffant le four, & le refroidif-
fant alternativement jufqu'à ce que la brique paroifte
avoir été bien pénétrée par le feu , ce qui n'eft guère
poftible qu'au bout de quarante-huit heures.
Les bons fours font en voûte , & les bons ouvriers
difpofent les briques de manière qu'elles laiftent en-
tr'elles des vuides entre lefquels la flamme puiffe s'in-
finuer. Voici comment on s'y prend , on place les
briques les unes fur les autres ; enforte qu'elles empiè-
tent pour fe foûtenir : mais on laifTe entre chacune
le plus d'efpace qu'on peut ; enforte que la mafte to-
tale eft proprement conftruite tant vuide que pleine»
Elle ne doit pas remplir entièrement le four , mais
laifter aux deux côtés & fur le devant un efpace né-
ceffaire pour les matières combuftibles. On couvre
cet efpace d'un lit de bois; on place fur ce lit une
couche de charbon. On ne manque pas non plus d'in-
férer dans tous les vuides des briques, au charbon , &
du petit bois ; il arrive de-là qu'en un moment toute
la mafte eft pénétrée de flamme : on renouvelle ce
feu , autant qu'il eft néceffaire ; & on ne le laiffe en-
tièrement éteindre , que quand on juge la brique cuite.
Voilà la manière d'avoir de la brique allez bonne :
mais il y a apparence qu'on l'auroit beaucoup meil-
leure , fi les ouvriers y apportoient les précautions
fuivantes : i°. n'employer à faire la brique, que la
terre qui auroit été tirée & retournée au moins une
fois , entre le premier de Novembre & le premier de
Février ; 2°. ne la façonner en brique qu'au premier
de Mars , & cefler au 29 de Septembre ; 30. n'y mê-
ler rien qui pût la détériorer ; 40. y ajouter une cer-
taine quantité de cendre de charbon criblée & paf-
fée au tamis fin ; 50. nommer des gens pour viliter
les fourneaux , les briques &c les terres qu'on y em-
ployé; 6°. faire battre par des hommes, & fouler
la terre par des animaux, avant que de l'employer;
70. v faire mettre du fable , quand elle eft d'une na-
ture trop molle ; 8°. faire tremper la brique dans l'eau,
après qu'elle auroit été cuite une première fois, & la
remettre au feu , elle en acquerroit le double de du-
reté ; 90. veiller , à ce qu'avant de les mettre au four,
elles ne foient point expofées à fécher à un trop grand
foleil ; 1 o°. les garantir pareillement du trop grand fo-
leil en été , en les couvrant foit de paille foit de fable.
Il y auroit encore un grand nombre d'autres précau-
tions à prendre pour taire la brique fi bonne , qu'elle
B R ï
feroît peut-être plus durable que la pierre même ;
mais à quoi bon les indiquer? Le commerce & la fa-
brication de la tuile font libres; & il n'y a point de
règles preferites, ni à l'ouvrier, ni au marchand, ni
à l'acheteur. On fe plaint que nos ouvrages en ma*
çonnerie n'ont pas la force de ceux des anciens , 6c
l'on ne voit pas qu'ils prenoient pour ics faire durer,
toutes les précautions qu'ils imaginoient nécefïaires ,
au lieu que nous n'en prenons aucune.
Il nous vient de la brique de Bourgogne , de Melun ,
& de Corbeil ; celle de Bourgogne parte pour la meil-
leure: il faut la choifir bien cuite, ibnnante & colo-
rée. Elle s'achète au millier : on ne peut rien itatuer
fur fon prix. Elle a valu d'abord dix livres le millier,
puisquinze; &il y a apparence qu'elle vaut davanta-
ge , & qu'elle augmentera de prix à mefure que les ma-
tières combuftibles deviendront plus rares. Ceux qui
ont de grands batimens de brique , foit à faire , foit à en-
tretenir, épargneront beaucoup à loiier des ouvriers
qui la travaillent fur leur terré : ils leur donneront qua-
rante-cinq à cinquante fous par jour, ou plutôt ils les
payeront à raifon de trois livres pour chaque mille
de briques bonnes & entières après la cuiffon. On leur
fournit le bois à raifon de vingt cinq cordes pour
trente milliers de briques cuites en plein air. Il faut
un quart de bois de moins dans une briqueterie , ou
four fait exprès ; plus le four a fervi , plui il s'échauffe
facilement.
Un commentateur de Vitruve voudroit qu'on don-
nât aux briques la forme d'un triangle équilatéral ,
dont chaque côté eût un pié de long , fur un pouce
6c demi d'épais. Il prétend que ces briques s'employe-
roient plus commodément , coùteroient moins , Se
feroient plus folides & d'une plus belle apparence :
elles ajoûtei oient , dit-il , de la force & de la grâce,
fur-tout aux angles d'un ouvrage dentelé. M. Wot-
ton s'étonne avec raifon de ce qu'on a négligé l'avis
du commentateur de Vitruve.
La brique eft d'ufage en Médecine ; on la fait chauf-
fer, 6c on l'employé fur différentes parties du corps ;
on en met quelquefois fur les cataplafmes pour les
tenir chauds.
L' 'huile de brique , autrement appellée Y huile des phi-
lofophes , fe fait comme il fuit. On éteint des briques
chaudes dans de l'huile d'olive, & on les y laifîe juf-
Ïu'à ce qu'elles en ayent pris toute l'huile ; on les
iftille enfuite par la retorte , & on retire l'huile que
l'on fépare de l'efprit.
Cette huile eft chargée de particules ignées , & de
l'acide de la brique ; ainfi elle eft réfolutive, carmi-
native , calmante, 6c bonne à l'extérieur dans les cm-
brocatiorts , & les linimens pour les tumeurs froi-
des. (V)
* BRIQUET , f. m. c'eft une forte de couplet , à
queue d'aronde , dont les deux parties font jointes
par un double anneau qui le place au milieu des deux
nœuds des ailes , & qui y eft retenu par deux bro-
ches qui traverlent les nœuds de ces ailes ; de manière
que les deux ailes en tournant, peuvent s'appliquer
exactement l'une fur l'autre : ce qui n'arrive pas aux
autres fortes de couplets , à caufe de l'éminence des
nœuds. Comme le double anneau eft plat par-deffus;
il ne paroît aucun nœud, lorlque les ailes font éten-
dues & déployées. Son ufage eft principalement aux
tables de comptoirs , & à toutes les occafions où l'on
veut que les lurfaces fe plient , & foient fans nœuds
de charnière. Voy. PL de Serrurerie , & leur explicat.
BRIQUETER , v. au. {terme d'Architecture ) c'eft
contrefaire la brique fur le plâtre avec une imprefïion
de couleur d'ocre rouge , 6c y marquer les joints en
plâtre.
B R I Q U ET E R I E , f. f. ( en Architecture , ) voye{
Tuilerie. {P)
BRIQUETIER, f, m. ouvrier manufacturier de
B R I
413
briques. Voye?^ Brique & Tuile,
BRIS , f. m. eft un terme de Palais , qui fignifie la
rupture faite avec violence d'une chofe fermée, ou
de ce qui en fait la clôture ; c'eft en ce fens qu'on dit
bris de prifon , bris de portes , bris de f celle.
Par l'article 25 du titre XVII. de l'Ordonnance
criminelle , le procès doit être fait à l'accufé pottr le
crime du bris des prifons par défaut & contumace.
Le bris de prifon de la part d'un aceufé n'eft pas
regardé comme une confeffion décifive de fon crime ;
mais c'eft un fort indice qui feroit fufHfant pour le
faire appliquer à la queftion , s'il venoit à être repris.
C'eft un crime dans la perfonne même de celui
qui fe trouveroit avoir été emprifonné fans caufe lé-
gitime. Les complices du bris de prifon font punis en-
core plus féverement que le prifonnier qui cherche à
s'évader. La peine de ce crime eft arbitraire ; parce
qu'il eft toujours accompagné de circonftances qui
le rendent pins ou moins grave.
Le bris defcellé eft un crime , & fe pourftiit extraor-
dinairement. Voye%_ S CELLE.
Bris de marché, eft le vol des marchandifes qu'on
porte au marché , ou une monopole pratiquée à l'effet
d'empêcher la vente du marché , ou toute autre en-
treprife violente faite dans la vue d'empêcher le port
ou le débit des marchandifes dans les marchés. {H)
Bris ou Naufrage, {terme de Marine.) Ce mot
de bris fe dit des vaiffeaux qui échouent, ou qui vien-
nent fe brifer fur les côtes ; d'où l'on dit droit de bris.
C'eft un droit qui appartient au feigneur du lieu où
s'eft fait le bris. C'eft le droit le plus injufte & le
plus univerfel qui foit au monde. Les anciens Gau-
lois l'avoient établi , parce qu'ils traitoient d'enne-
mis tous les étrangers. Les Romains en ayant abrogé
l'ufage , il fut rétabli fur le déclin de 1 empire, à
caufe de l'incurfion des nations du nord qui rava-
geoient les côtes de la Gaule. Enfin les ducs de Bre-
tagne follicités par laint Louis, modérèrent cette ri-
gueur ; 6c moyennant quelque taxe , ils accordèrent
des brefs ou congés que prenoient ceux qui avoient
à naviger fur leurs côtes. Ce bris n'a plus de lieu en
France , non plus qu'en Italie, en Efpagne, en Angle-
terre , 6c en Allemagne , fi ce n'eft contre les pirates
& contre les ennemis de l'état. L'empereur Andro-
nic fut le premier qui , par un édit qu'on exécuta ,
fit défenfe de piller les vaiffeaux brifês ou échoués ;
ce qu'on faifoit auparavant avec beaucoup de ri-
gueur fur toutes les côtes de l'empire , nonobstant
les défenfes des princes qui l'avoient précédé. (Z)
Bris, {terme de Blafon) fe dit d'une de ces happes
de fer à queue pattée , dont l'ufage eft de foùtenir
les portes fur leurs pivots , & de les taire rouler fur
leurs gonds ; & comme la plupart des fenêtres & des
portes font brilées en deux par le moyen de deux de
ces happes , dont les bouts entrent en pivot l'un dans
l'autre , on les nomme bris. Les vieux blafonneurs
appellent bris d'huis, les pivots fur lefqucls fe meu-
vent les portes ou fenêtres brilees , quands ils font
reprefentés fur l'écu. {y)
BR1SACH, {le vieux) {Géogr.) ville d'Allemagne,
autrefois capitale duBrifga^', fur le Rhin. Long. z5.
28. lat. 48. 8.
Brisach, {le neuf) ville de France en Alface*
à une demi-lieue du Rhin. Elle eft bien fortifiée. Lon*.
25. 21. lat. 48. 6.
BRISANT, BRIS ANS , f. m. {Marine) font des
pointes de rochers qui s'élèvent jufqu'à la iurtace
de l'eau , 6c quelquefois au-deffus , en forte que les
houles y viennent rompre ou brifer. Sur les cartes
marines ils font reprefentés par des petites croix fi-
gurées ainii + + + fuivant leur étendue & leur fitua-
tion.
On appdUe auffi infant , le rejailliffement de la
4*4
B R I
mer contre des rochers élevés , ou contre une côte
efearpée fur laquelle lés vagues l'ont portées. (Z)
BRISE , f. f. ( Architecl. Hydrauliq. ) c'eft une pou-
-tre en bafcule , pofée fur la tête d'un gros pieu , la-
quelle fort à appuyer par le haut les aiguilles d'un
..permis. ( K )
Brise-cou, f. m. (Man.) on appelle ainfi un jeune
liomme hardi & de bonne volonté, à qui on fait
jnonter les poulains & les jeunes chevaux , pour
.commencer à les accoutumer à fouflrir l'homme. (V)
Brise-glace , f. m. (Architechire.) c'eft devant
une palée de pont de bois du côté d'amont , un rang
-de pieux en manière d'avant-bec , lefquels font d'i-
négales grandeurs ; enforte que le plus petit lert d'é-
peron aux autres , & tous font recouverts d'un cha-
peau incliné fur le devant, pour brifer les glaces &
conferver les palées. ( P )
Brise-vents , f. m. (Jard. ) eft une clôture faite
avec des paillaffons ou des pieux mis le long d'une
couche garnie de paille longue bien liée avec de l'o-
fier , pour garantir des vents froids les plantes 'qu'on
y a lemées. ( K )
BRISÉ , adj. en termes de B la fon , fe dit des armoi-
ries des pûmes & cadets d'une famille , où il y a quel-
que changement par addition , diminution , ou alté-
ration de quelque pièce pour diftinction des bran-
ches. Il fe dit encore des chevrons dont la pointe eft
déjointe, comme celle de Viole. C'eft une erreur
d'appeller les autres brifés.
Viole à Paris , d'or à trois chevrons brifés de fa-
11e. (V)
* BRISÉE, f. m. ( Salines. ) c'eft une opération
qui confifte à détacher la fangle qui foûtient la chè-
vre , ôter les rouleaux , faire fauter le pivot d'un
coup de maflue , & donner du mouvement a la chè-
vre , afin qu'elle coule par fon propre poids , & fe
renverfe fur le feuil du banc. Elle fe fait par un ou-
vrier , en préfence du contrôleur des cuites , de ce-
lui qui eft de femaine pour ouvrir les bancs , &
d'autres employés. Elle le fait des deux côtés en
même tems ; car la poelle ell chargée de deux
chèvres égales. Voye7K Chèvre , Banc , Cuite , &
Saline.
Brisées, en Vénerie, fe dit des marques faites
aux arbres fur les voies d'une bête.
Les brifées font fauffes, quand les marques éloi-
gnent de la voie ; on en pratique quelquefois pour
tromper fon compagnon.
BRISER, ROMPRE , v. n. ( Mar. ) La mer brife ,
c'eft-à-dire , la mer, la lame, la vague vient frapper
avec violence & fe brifer contre la côte , contre des
rochers , ou fur un banc de fable. Lorfqu'on voit la
mer brifer, c'eft marque de danger fous l'eau , qu'il
faut éviter. ( Z )
Briser , parmi les Cardeurs , c'eft démêler la laine
& la rendre comme du chanvre fans aucuns flocons ,
en la pafîant Se reparlant plufieurs fois fur les drouf-
fettes.
Briser, en termes de Blafon, fignifie charger un
écu de brifure , comme lambel , bordure, &c. C'eft
ce que font les cadets pour être diftingués des aînés
qui portent les armes pleines. ( V)
Briser, en Vénerie, c'eft marquer la voie d'une
bête par des branches rompues. Brifer bas , c'eft rom-
pre des branches Se en jetter fur les voies. On dit ,
nous brijâmes bas , quand nous eûmes remarqué que
ie cerf étoit pafTé. La pointe des branches fait voir
d'oii la bête vient , 8c le gros bout indique où la
feête va.
Brifer haut , c'eft rompre les branches à demi-hau-
teur d'homme , Se les lailîer pendre au tronc de
l'arbre.
* BRISEl/S , ( Myth. ) furnom de Bacchus , qui
lui yenoit ou de celui de Brifis fa nourrice , ou du
B R I
mot bris , relatif à l'ufage du miel Se du vin , dont
on lui attribuoit la première invention ; ou de Brifa ,
promontoire de l'île de Lesbos , où il avoit un temple.
BRISGAW ( LE ) , Géog. pays d'Allemagne dans
le cercle de Souabe , qui eft fêparé de l'Allâce par
le Rhin. Il appartient à la maifon d'Autriche.
BRISIGHELLA , (Géog.) petite ville d'Italie dans
la Romagne , dépendante des états de l'Eglife.
BRISIS , f. m. fe dit , en Architcclure , de l'angle
que forme un comble brifé, c'eft-à-dne la partie où
lé vient joindre le faux-comble avec le vrai , com-
me font ceux à la manfarde : auffi ce nom n'eft - il
uiité que dans cette forte de couverture. ( P )
BR1SSAC , ( Géog. ) petite ville de Fiance en An-
jou, fur la rivière d'Aubence , avec titre de duché-
pairie , à quatre lieues d'Angers.
BPJSTADT , (Géog.) petite ville d'Allemagne
en Franconie , dans le marggraviat d'Anfpach.
BRISTOL , ( Géog. ) grande ville d'Angleterre
fort commerçante fur la rivière d'Avon , avec titre
de comté : elle eft en partie dans la province de
Sommerfet , Se en partie dans celle de Glocefter ,
renommée par la bonté des eaux minérales qui s'y
trouvent, long. tj>. lai. 5z. zj.
Bristol (la nouvelle), Géog. ville de l'Améri-
que feptentrionale dans l'île de la Barbade. Elle ap-
partient aux Anglais.
BRISURE DE LA COURTINE , c'eft dans la
Fortification , le prolongement de la ligne de défenfe
qui fert à former le flanc couvert. Voye~v Flanc
CONCAVE. ( Q )
Brisure , f. f. terme de Blafon , pièce ou figure
qu'on ajoute aux armoiries , pour distinguer les ca-
dets Se les bâtards d'avec les aînés 5c les fils légiti-
mes. Telles font le lambel , la cottice , le bâton ,
&c. Voye^ ces mots à leur lettre.
* BRISURE , fe dit , dans plufieurs Arts michaniq,
d'une forme donnée à une ou plufieurs parties d'un
tout , en conféquence de laquelle on peut les fépa-
rer, les réunir , les fixer dans une direction rectiligne ,
les dilpolér en angle , en plier les parties les unes fur
les autres , les racourcir , les étendre , &c. C'eft dans
l'un de ces fens qu'on dit, un compas brifé , unfufîl
brifé, une règle b ri fée , Sec.
BRITANNIQUE , adj. ( Géog. anc. ) nom que les
anciens Géographes donnent à la mer qui s'étend en-
tre l'Angleterre Se la France, Se que les modernes
nomment la Manche. Ce nom lui vient de la grande
Bretagne dont les terres refïerrent d'un côté l'Océan
Britannique.
BRITIOGA , (Géog. ) petite île de l'Amérique
méridionale fur les côtes du Brefil. Elle appartient
aux Portugais , qui y ont bâti un fort qui défend le
port de Saint- Vincent qui eft vis-à-vis.
BRIVE la Gaillarde , ( Géog. ) ville de France
dans le bas Limofm. Long. ig. io. lat. 46. i5.
BRIVIO , ( Géog. ) petite ville d'Italie dans le du-
ché de Milan, fur la rivière d'Adda.
BRIX, (Géog.) ville de Bohème, à deux milles
de Toplitz , & à dix de Prague.
BRIXEN , ( Géog. ) grande ville Se évêché d'Al-
lemagne, entre le Tirol, l'évêché de Trente, & le
territoire des Vénitiens: l'évêque en eft louverain,
Se eft un des états immédiats de l'Empire. Long. zg.
z5. lat. 46.35.
BRIXENSTADT , ( Géog. ) ville d'Allemagne en
Franconie , à neuf milles d'Anfpach.
* BRIZO, f. f. ( Myth.) déelfe des fonges , ado-
rée autrefois dans l'île de Delos. On lui offroit des
nacelles pleines de toutes fortes d'offrandes , dont il
n'y avoit que les poifîôns d'exceptés. Briro vient de
fyiÇur, dormir. Les fonges qu'en voyoit Bri-j) étoient
des oracles ; S: ceux qui avoient fait une heureufe na-
vigation, croyoient lui en devoir une action de grâce.
BRO,
B R O
ERO, (Géog.) rivière de la Pruffe Polonôifdj
qui fe jette clans la Viftule.
BPvOAD , ( Géog. ) c'cft le nom d'un lac d'Irlan-
de dans la province d'Ulfter , dans lequel fe trouvent
pluficurs petites îles.
BROC , f. m. ( Commerce. ) mefure des liquides
qui contient environ deux pintes de Paris. On l'ap-
pelle en quelques endroits une quarte , en d'autres un
pot. Voye^ Quarte & Pot. (G')
BROC , ( Gcog. ) ville du royaume de Pologne ,
dans le palatinat de Mazoire.
BR.OCALO , ( Géog. ) petit royaume d'Afrique
en Nigritie , à l'embouchure du Niger.
BROCANTER, v. n. (Commerce.) terme parti-
culièrement en ufage à Paris chez les curieux , les
Peintres , ou parmi quelques marchands merciers ,
pour dire acheter , revendre , ou troquer des ta-
bleaux , des cabinets , des bureaux , des bronzes , ta-
bles , figures de marbre , peintures , porcelaines ,
pendules, paravents, 5c autres femblables marchan-
difes , meubles , ou curiofités. ( G )
BROCANTEUR , f. m. ( Commerce. ) fe difoit dans
le fens propre de celui qui faifoit proreffion d'ache-
ter des tabieaux pour les revendre : ce commerce
étoit anciennement fort à la mode en Italie. Les mar-
chands Génois, Vénitiens & Florentins, comman-
doient au Guide , aux Caraches , & à d'autres ex-
celicns Peintres , des tableaux qu'ils achetoient de la
première main , & qu'ils revendoient enfuitc en Fran-
ce, en Allemagne , & môme en Turquie. Mais au-
jourd'hui le mot de brocanteur ne convient qu'à ceux
qui font commerce des chofes concernant la curiofi-
té , comme vafes , médailles , bronzes , tableaux ,
mais particulièrement des tableaux des anciens Pein-
tres , dont ils favent fe défaire , non fuivant leur va-
leur , mais fuivant le degré d'entêtement qu'on a
pour eux. ( R )
BROCARD, f. m. (Morale.) efpecC de raillerie
grofliere , maligne & infultante. Le brocard eft , à
proprement parler , une injure plutôt qu'une raille-
rie. La raillerie , tant qu'elle ne iort point des bornes
que lui preferit la politeffe , eft l'effet de la gaieté
& de la légèreté de l'efprit. Elle épargne l'honnête
homme , &C le ridicule qu'elle attaque eft louvent fi
léger, qu'elle n'a pas même le droit d'offcnler. Mais
le brocard annonce un fond de malignité ; il offenfe
& ulcère le cœur. La raillerie exige beaucoup d'ef-
prit dans ceux qui la manient , fans quoi elle dégé-
nère en brocard, pour lequel tout homme a toujours
affez d'efprit. Voyc?^ Raillerie. (A")
* BROCARD, (Manufacture en or , argent , & foie.)
terme générique, fous lequel on comprend commu-
nément toutes les étoffes riches ou fonds d'or. Les
ouvriers & fabriquans fc. fervent préférablement des
termes fond or , fond argent , &c. tifj'u, luflrlne , &C.
& ils entendent par brocards , fonds or , argent, &c.
une étoffe d'or , d'argent , & de foie , relevée de
fleurs , de feuillages , ou d'autres ornemens , fuivant
le goût du marchand & des ouvriers. Ils ne mettent
d'autre différence entre les brocards & les fonds or &
argent , qu'en ce que les brocards fuppofent plus de
richeffe , 6c que tout ce qui s'en préfente à l'endroit
B R O
4*5
Tome IL
eft or oit argent , à l'exception de quelques légères
découpures ; au lieu que dans les fonds or Se argent j
on y voit des parties exécutées en foie.
Les brocards ou fonds or & argent , n'exigent pas
un autre métier que celui dont on fe fert communé-
ment. Nous parlerons à l 'article Velours à jar din,
des variétés qui furviennent dans les parties , la dii-
pofition & le montage du métier , félon les différens
ouvrages qu'on le propofe d'exécuter. Nous ren-
voyons à cet article plutôt qu'à un autre , parce que
l'ouvrage que nous y expliquerons , demande un mé-
tier très-compofé , & qu'il ne s'agit prefque que d'en
anéantir certaines parties , & d'y en fubftituer quel-
ques autres pour le transformer dans un métier pro-
pre à quelqu'ouvrage que ce foit.
Il y a des brocards ou fonds d'or de différentes for-
tes. Nous allons indiquer ces différences , exhortant
ceux qui ne font pas verfés dans cette matière , de
parcourir auparavant les différens articles de notre
Dictionnaire qui y ont rapport, pe fût-ce que pour
fe tamiliarifer avec les termes. Qu'ils voyent les ar-
ticles Armure , Liage, Poil , Accompagna-
ge, Lisse , & fur-tout l'article Velours, où ils
trouveront au long & clairement ce qui concerne le
métier ,fes parties, le montage , la lecture du deffein ,1a.
tire , le travail , 6cc.
Il y a des brocards ou fonds or à huit liffes de fatin
& quatre de poil ; à cinq Mes de fond, & cinq liffes
de poil ; à cinq liffes de fatin 6c quatre de poil , &c.
Il y a des brocards dont la dorure eft relevée , fans
liage, ou liée parla corde ; & d'autres dont la do-
rure eft relevée , & tous les lacs liés , excepté celui
de la dorure relevée qui ne l'eft jamais.
Des fonds or à huit liffes ds fatin & quatre de poil.
Ces fonds or font compofés de quatre -vingts -dix
portées de chaînes & de quinze de poil : l'armure en
eft la même que celle de la luftrine à poil , en iiip-
primant les quatre marches de rebordures & les qua-
tre liffes de rabat , & formant après cette fupprefîîon ,
l'armure du fond or dont il s'agit, comme nous al-
lons dire. Dans l'armure de luftrine à poil , la mar-
che de rebordure fe trouve toujours entre une mar-
che de luftrine & une marche d'accompagnage. Sup-
pofez la marche de rebordure jettéc fur la marche
de luftrine, & celle-ci chargée non-feulement de ce
qu'elle portoit , mais encore de ce que la marche de
rebordure lui aura donné de plus qu'elle n'avoit, &
vous aurez la première marche de fond de l'armure
que vous cherchez. Suppofez la même marche de re-
bordure jettée fur la marche d'accompagnage , &
celle-ci chargée non-leulement de ce qu'elle portoit,
mais encore de ce que lui aura donne de plus qu'elle
n'avoit , la marche de rebordure : 6c vous aurez la
première marche d'accompagnage de l'armure cher-
chée. Parlez à la féconde marche de rebordure de
l'armure de la luftrine ; jettez-la fur les marches de
luftrine & d'accompagnage , entre lefquelles elle eft
placée, & vous aurez la féconde marche de fond & la
féconde marche d'accompagnage de l'armure cher-
chée, 6c ainli du refte ; d'où il s'enfuit, qu'au lieu
de feize marches qui font à la luftrine , l'étoffe dont
il s'agit n'en a que douze.
H h h
4*6
B R O
B R O
EXEMPLE.
Démonflration de f armure d'une lujlrlne à poil.
Démonjlraùon de l'armure d'un fond or à huit liffis
de fatin & quatre liffes de poil.
• 7- 6. j. 4. }. 2. 1.
liffes
de fond.
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3333333 =
g S-2-S.cLcLS- —
ondfifîfîfîfî
û.Q.û-n.o-û-CLQ-
g = 0 3 <=> S
3 o. = a- 3 o-
a a a r n si
>> r
Si vous jettez la première marche a de rebordure
de l'armure de la luftrine fur la première marche b de
luftrine , vous aurez X o o O de poil & O 1 de fond,
c'eft-à-dire la première marche de fond r de l'armure
que vous cherchez.
Si vous jettez la première marche de rebordure a
de l'armure de luftrine fur la première marche d'ac-
compagnage c de luftrine , vous aurez X X o o de
poil & o 4 de fond, c'eft-à-dire la première marche/'
d'accompagnage de l'armure que vous cherchez.
Si vous jettez la féconde marche d de rebordure de
l'armure de la luftrine fur la féconde marche e de luf-
trine , vous aurez o X O o de poil & o 7 de fond ,
c'eft-à-dire la féconde marche t de fond de l'armure
cherchée , & ainft du refte.
Les lignes verticales marquent les marches. Les
lignes horifontales marquent les liftes. La marque o
lignifie qu'une lifte levé ; la marque X lignifie qu'elle
baille , excepté aux liftes de rabat où o marque baif-
fer, la fonction de ces liftes n'étant jamais de lever.
Du fond or à cinq liffes de fatin & à cinq liffes ds poil.
Cette étoffe étoit d'uiage quand les fonds or avoient
beaucoup de glacé , parce qu'il grippe moins avec un
poil de vingt-deux portées & demie , comme il le faut
à cette étoffe , qu'avec des poils de quinze ou dix-huit
portées , comme dans les autres fonds d'or. On arme
le fatin , qui eft de quatre-vingts-dix portées de chaî-
ne , comme le damas. On paffe la rebordure fur le
coup de fond , parce qu'il y en a peu dans ces for-
tes d'étoffes , Se l'accompagnage fur le poil feule-
ment, qui eft armé en ras de faint-maur ; obfervant
que comme il y a cinq liftes de poil , il en faut tou-
jours faire lever trois & bailler deux. On peut le fer-
vir pour cette étoffe d'un peigne de 1 5 ou d'un de 1 8 ,
l'un & l'autre pouvant s'accorder avec le poil.
Il eft bon de lavoir que dans les luftrines à fond
or , le fil de poil ne doit jamais fe trouver à la rive
de la dent , c'eft-à-dire au commencement ou à la
fin ; parce que pour lors il rayeroit & fe montreroit
dans le fond , ce qu'il faut éviter foigneufement.
C'eft pour cela que les peignes doivent toujours être
d'accord avec le poil : par exemple, avec un poil de
quinze portées & qu atre-vingts-dix portées de chaîne,
il fe rencontre tous les fix fils de chaîne un fil de poil ;
mais mettez un 1 5 de peigne qui contienne chaque
dent douze fils de chaîne , & il arrivera que le fil de
poil fe trouvera à la fin des douze fils déchaîne, ou
au commencement des douze autres qui fuivent la
dent , ce qui fera rayer. Pour éviter cet inconvénient,
on corrompt la première dent, c'eft le terme de l'art:
on n'y met que neuf fils ; mais on continue par dou-
ze dans les autres dents. Pour lors, le fil de poil fe
trouve clos par trois fils de chaîne; & ainfi des au-
tres , comme les 18.
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Z)émonflratlon de l'armure d'un fond or à cinq liffes
de fond & cinq liffes de poil.
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Fond Or à cinq liffes de fat in & quatre de poil : les
fonds or de cette efpece font les plus beaux , & ne
peuvent le faire qu'en travaillant des deux pies : le
fatin eft armé comme celui du damas , & les cinq
marches de ce latin ne font mouvoir aucune liffe de
poil. La chaîne eft de quatre-vingts-dix portées à l'or-
dinaire , & le poil de quinze ; avec un peigne de quin-
ze , il faut douze marches pour le poil , y compris
les quatre marches de liage qui font placées du côté
gauche , & cinq pour le fond qui font ordinairement
du côté droit. Toutes ces étoffes pourroient cepen-
dant être faites du ieul pié droit , en lardant les mar-
ches de liage , c'eft-à-dire en plaçant par ordre cha-
que marche de cette efpece , après celles qui font def-
tinées pour les coups de navette : mais dans cette
étoffe , la choie eft impoiîible , excepté qu'on ne vou-
lût mettre trente-deux marches , parce qu'il faut
vingt coups pour que le courfe des marches de poil
fe rencontre avec celui du fond. L'accompagnage eft
à l'ordinaire en ras de faint Maur , &c le coup de fond
à trois liffes de poil levées , la quatrième en l'air ,
comme à la luftrine , s'il n'y a point de rebordure ; 6c
s'il y en a une, on la fait baiffer.
Dèmonflratlon d'un fond d'or à cinq liffes de fatin
& quatre de poil.
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Selon la difpofition du métier 8c- de l'armure , il
faut marcher des deux pies chaque coup de fond ; les
autres coups du pié gauche feulement. Le courfe ne
peut fe rencontrer fini de chaque côté que tous les
vingt coups ; d'où il s'enfuit qu'il faut quatre cour-
fes du latin , & cinq du poil , ou des marches de l'un
& de l'autre.
Tous les fonds d'or dont nous venons de parler,
ont un fond dont la couleur eft diftinguée , foit cra-
moifi , foit ponceau , foit ratine , qui eft un ponceau
commun ; les Américains ne les veulent pas autre-
ment : c'eft auffi le goût de quelques pays du Nord.
Mais, il n'en eft pas de même des brocards ; ils n'ont
point de fond , ou s'ils ont quelques légères décou-
pures dans la dorure , elles ne paroiffent pas.. C'eft
pour cela que les fabriquans i°. ne les font qu'en
gros de Tours , pour éviter la quantité de trames , qui
eft moins conlidérable que dans les fonds fatin , at-
tendu le croifé qui lé trouve à chaque coup ; 20. met-
tent les chaînes de la couleur de la dorure pour .évi-
ter l'accompagnage. L'accompagnage paffe fous les
mêmes lacs de la dorure qui domine dans l'étoffe , &
fon emploi a deux objets ; l'un de cacher le fond de
l'étoffe qui perceroit au-travers de la dorure , & la
rendroit déleclueufe , en prenant la place du fond ;
l'autre de donner la liberté au fabriquant de brocher
ou de palier une dorure plus fine , qui même fe trou-
ve relevée par l'accompagnage qui eft deffous.
Tels font les motifs qui ont fait inventer Fart d'ac-
compagner la dorure , une des idées dans ce genre
les plus belles & les plus heureufes. Le brocard ayant
le fond de même couleur que la dorure , l'accompa-
gnage devient inutile : il eft vrai que dans les fonds
or où il entre de l'argent, on ne peut pas accompa-
gner l'un & l'autre : mais dans ce cas, comme c'eft
très-peu déchoie que l'argent qui entre dans un fond
or , & que d'ailleurs il n'eft point accompagné , on a
foin de brocher une dorure plus groffe , & dont la
croffeur empêche le fond de percer au-travers. Voilà
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4^8
RRO
la méthode qu'il faut iuivre pour fabriquer des fonds
d'or &C d'argent qui foient parfaits. Reprenons main-
tenant les brocards.
La chaîne des brocards eft de quarante-cinq portées
doubles , & quinze portées de poil fur un peigne de
quinze. L'armure pour le fond eft la même que celle
du gros de Tours , ainfi que pour le poil. On paffe
le premier coup de navette en faifant lever le poil &
la chaîne en taffetas ou gros de Tours ; après quoi ,
on broche la dorure & la foie , en faifant baiffer de
fuite une des deux lhTes de poil qui aura baiffé au
coup du fond , & l'on continue de la première à la
quatrième ; d'où il arrive que le courte des marches
du fond n'étant compofé que de deux grandes mar-
ches , il faut le répéter pour être d'accord avec les
quatre de liage.
La dorure des brocards eft prefque toute liée par
les découpures de la corde , afin d'imiter la broderie.
Je dis toute : mais il en faut excepter le frifé , le clin-
quant , & la cannetille qui l'eft même quelquefois.
On a imaginé depuis peu la façon de relever la
principale dorure en boffe, tel que l'or liffe : on paffe
fous le lacs tiré de la dorure qu'on veut relever , une
duite de quinze à vingt brins de foie de la couleur de
la dorure , en faifant baifîér les quatre lilles de poil
pour la tenir arrêtée ; après quoi on laiffe aller la mar-
che , & on broche la dorure fans lier ; voilà pour le
premier lacs. Au fécond lacs , on broche de même une
groffe duite qui eft la iuite de la première , & on
baiffé les quatre liffes de poil. Comme cette duite eft
une efpece d'accompagnage , on fait baiffer toutes les
lifles de liage, afin que la foie brochée ne tranfpire
pas au-travers de la dorure , Se qu'elle puiffe former
un grain affez gros pour faire relever la dorure , com-
me fi elle étoit foîitenue par une cartifanne, Lorfque
tout le broché eft lié par la corde ou par la décou-
pure , il ne faut plus que quatre marches ; favoir deux
pour le coup de fond , & deux pour lier la foie qui
relevé la dorure ; ô/ quand il y a du broché , il taut
quatre marches de liage de plus.
Dcmonflration de l'armure. d'un brocard, dont la dorure
eft relevée , fans liage ou liée par la corde.
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les autres étoffes : mais on le broche en faifant baiffer
deux marches armées en taffetas , comme il eft indi-
qué ici.
x°. Que toutes les étoffes dont la dorure eft rele-
vée , doivent être roulées fur des molletons , à mè-
fure qu'elles viennent fur l'enfuple , afin que la do-
rure ne foit pas écrafée , & qu'elle faffe toujours fail-
lie ou relief: il faut autant de molleton que d'étoffe
fabriquée.
Il ie fait des brocards dont le poil eft de quarante i
portées fimples , pour l'accompagnage defquels on
fait baiffer tout le poil qui eft de la couleur de la do-
rure : pour lors on peut brocher toutes fortes de cou-
leurs pour relever ; parce que la quantité du poil
baiffé garniffant fuffifamment , elle empêche la foie
de couleur qui relevé , de tranfpirer ou percer au-
travers du poil.
Démonftration de l'armure d'un brocard dont la dorure
eft relevée , & tous les lacs liés , excepté celui de la
dorure relevée , qui ne l'eji jamais.
Il faut obferver i°. que l'accompagnage étant
gros , il ne fe paffe point avec la navette comme dans
Les marches d'accompagnage ne lèvent point de
liffes , parce que l'accompagnage eft broché , & non
paffé avec la navette , comme dans les autres étoffes
où il n'a que trois ou quatre bouts très-fins , au lieu
qu'ici il a dix-huit à vingt bouts de groffe foie.
On pourroit dans la dernière armure éviter les
quatre marches qui font baiffer tout le poil, en pref-
fant les quatre de liage à la fois : mais l'embarras de
trouver à chaque coup la marche qui doit lier à fon
tour , feroit commettre des fautes à l'ouvrier qui ne
fuivroit pas exactement fon liage.
* BROC ATELLE, f. f. (manufacture de foie. ) étoffe
compofée d'une chaîne de foixante portées , & d'un
poil de dix portées, avec cinq liffes de chaîne & trois
liffes de poil : on employé la brocatelle en tapifferie.
Le fond eft tramé de fil , & le coup de tire , de foie :
c'eft la trame qui fait le tond , & c'eft la chaîne qui
fait la figure.
Brocatelle , ( en Architecture,} ^ôyeç Marbre
de Brocatelle.
BROCHANT , adj. (terme de Blafon. ) il fe dit des
pièces qui paffent fur d'autres , comme une face ou
un chevron qui broche fur un lion : les chevrons de
la Rochefoucault brochent fur des burelles.
La Rochefoucault en Angoumois, burelé d'argent
& d'azur , à trois chevrons de gueules brochant fur
le tout, (y)
BRO
*BROCHE, f. f. terme fort ufité dans les Arts &
Métiers ; on le donne en général à tout outil , inftru-
ment, machine , ou partie de machine, d'une figure
longue & menue , & dont la fond ion ordinaire eft
de traverfer & de foûtenir d'autres parties. Le mot
broche a paflé dans les boutiques & les atteliers , de
la cuifine où la broche, eft un inftrument de fer long
de cinq à fix pies , de cinq à fix lignes de diamètre ,
pointu par un bout , & coudé en équerre , ou garni
d'une poulie par l'autre , & percé dans le milieu de
plufieurs trous qui fervent à fixer fur la broche, la pie-
ce qu'on veut rôtir, par le moyen de brochettes de
fer qu'on fiche à travers la pièce , & qui parlant auffi.
dans les trous oblongs pratiqués au milieu de la bro-
che , font angle droit avec la broche. C'eft pour prati-
quer ces trous oblongs , & empêcher les pièces em-
brochées de tourner fi facilement fur la broche , que
le milieu de cet inftrument eft applati & plus large
que le refte. La broche des cuifines fe tourne à la
main , ou par le tournebroche. Voye^ Tournebro-
CHE.
* Broche , eft fynonyme à cheville dans un grand
nombre d'occaiions : la feule différence qu'il y ait ,
c'eft que la cheville eft alors une petite broche , ou la
broche une grolfe cheville. Les marchands de vin don-
nent le nom de broche au morceau de bois pointu
qu'ils infèrent dans l'ouverture qu'ils ont faite à
un tonneau mis en perce. C'eft de-là qu'eft venue
l'exprefîion , vendre du vin à la broche , pour le ven-
dre en détail.
* Broche, fe dit dans quelques manufactures
d'étoffes en laine, des dents du peigne ou roft ; c'eft
en ce fens que ce mot eft pris dans les articles du
ftatut des Manufacturiers d'Abbeville , où il eft or-
donné que les rofts pour les baracans feront de quatre
cents lbixante-huit broches. Voye{ Peigne.
Broches à tricotter ;ce font des bouts de laiton ou
de fer , polis & longs , qu'on appelle auffi aiguilles.
On s'en fert pour tricotter ou brocher des bas , cami-
lolles, gants, & autres ouvrages de bonneterie. Ce
font les maîtres Aiguilliers Epingliers qui font & ven-
dent les broches ou aiguilles à tricotter. Voye-^ la PL
du Tricot.
Broches , che^ les Arquebufiers , ce font des mor-
ceaux d'acier bien trempés , longs d'environ un de-
nù-pié , emmanchés de bois comme une lime , & à
fix ou huit pans vifs , félon le befoin. Les Arquebu-
fiers s'en fervent pour arrondir un trou , en infinuant
la broche dans le trou qu'ils veulent arrondir , & la
faifant tourner de côté & d'autre.
BROCHE quarrée , outil d 'Arquebufier , c'eft une ef-
pece de petit cifeau quarré d'acier bien trempé, avec
lequel les Arquebufiers font un trou de la même fi-
gure ; par exemple , celui du chien , ou de cette
partie qui eft Qjpntce fur le pivot quarré de la noix :
ils placent ce cifeau fur la pièce qui eft rouge de for-
ge , & frappent deffus jufqu'à ce que le trou foit for-
mé.
BROCHE ronde , outil et Arquebufier , c'eft un mor-
ceau de fer rond , de la grofl'eur d'une baguette de
fufil , long d'un pié , & emmanché d'un manche de
lime ; on pofe fur cet outil les porte - baguettes ,
pour les façonner 6c limer plus commodément.
BROCHE pointue, outil d' Arquebufier , c'eft une cf-
pece de poinçon rond d'acier fin & bien trempé, long
d'un demi-pié, fort pointu, 6c emmanché comme
une lime. Les Arquebufiers s'en fervent pour marquer
la place d'un trou pour poler une vis , & en com-
mencer le trou.
Broche; les Artificiers appellent ainfi une petite
verge ronde conique de fer ou de bois fort , tenant
au culot du moule d'une fuiée volante , pour ména-
ger un trou de même figure dans la matière combuf-
tible dont on la charge ; ce qui le fait par le moyen
BRO
•419
des baguettes de refouloir percées fuivant leur axe
d'un trou capable de recevoir cette broche, enforte
qu'elle n'empêche point que la matière ne foit fou-
lée tout autour à coups de maillet ; d'où réfulte ce
qu'on appelle Yame. Voye^ Ame.
BROCHE , che{ les Balanciers, fe dit des clous OU
pivots de fer qui traverfent'la verge de la balance
romaine , & qui fervent à foûtenuki garde du cro-
chet , la garde forte , & la garde foible. Voye{ Ro-
maine.
* Broche , fe dit che^ les Bonnetiers d'un inftru-
ment qui foùtient le chardon qui leur fert à carder
leurs ouvrages. Ils ont deux fortes de broches , la^ra-
ple & la double : la broche fimple ne porte qu'un char-
don ; &C la double broche en porte deux. froye^ à C ar-
ticle Bonneterie , l'uiage & la defeription de la
broche & de la double broche.
Broche , terme & outil de Brodeur j cette broche eft
un petit morceau de bois tourné , de la longueur de
fix pouces , pofé fur une petite patte plate ou trian-
gulaire ; la tête en eft plus groffe , ronde , longue
de deux pouces , & fendue jufqu'au milieu de la lar-
geur d'une ligne ou deux. Les Brodeurs tournent
l'or frifé autour du pivot 6c de la tête de cette broche,
& pafient le bout qu'ils veulent employer par ladite
fente , & enfuite l'appliquent fur leurs ouvrages.
Broche , chjti ^cs Bouchers , c'eft un inftrument
de 1er dont ils fe fervent pour apprêter & parer leurs
viandes. Il y en a de deux fortes ; l'une de fer , &
l'autre d'os de mouton : celle de fer eft longue de
deux pies , ronde , groffe d'un demi-pouce , & gar-
nie d'un anneau par le bout ; elle fert à percer la
peau des bœufs pour y inférer la douille du foufflet
avec lequel on les enfle quand ils ont été tués :
celle d'os de mouton fe fait avec le tibia qu'on vui-
de de fa moelle , & dont on affûte un des bouts qu'on
inlere dans les rognons de veau pour les foufîler avec
la bouche.
Broche , che^ les Cardeurs , c'eft une petite verge
de fer , garnie à fa partie enfermée entre les deux
marionnetes , d'une noix ou efpece de petite poulie
qui retient la corde que la reue met en mouvement;
& par le bout fur lequel on dévide le fil, d'un rebord
de bois affez haut , 6c voiiiu du fraieau , afin que le
fil s'élève fur la broche.
* BROCHE , che^ les Chandeliers & les Ciriers , c'eft
une baguette longue & menue fur laquelle ils dref-
fent & lùfpendent les mèches qui doivent être plon-
gées dans la bafiine ou dans l'abyfme , afin qu'elles
fe couvrent de cire & de fuif. Ces broches ont deux
pies 6c demi de long , & peuvent contenir feize chan-
delles des huit à la livre.
BROCHE , che^ les Blanchijfeurs de cire , & chez un
grand nombre d'autres ouvriers qui le fervent de cu-
ves ou de tonneaux pleins d'un fluide qu'il faut avoir
la commodité d'arrêter ou de laiiïér couler à diferé-
tion , fe dit d'un morceau de bois ou de fer qui s'in-
fère dans une douille, ou cannelé ou cannule, fi-
xée au bas du tonneau ou de la cuve , par laquelle le
fluide peut s'échaper, quand on tire de la douille le
corps ou la broche qui la rempliffoit.
* Broche , che^ les Ciriers , eft le nom de petits
morceaux de bois de bonis polis , faits en cône , avec
tefquels ces ouvriers pratiquent au gros bout des cier-
ges les ouvertures par lesquelles ils reçoivent les ri-
ches des chandeliers.
BROCHE , che^ les Cordonniers , eft l'outil qui fert à
faire les trous dans les talons des iouliers , pour les
chevilles de bois qui attachent les bouts deffous les
talons : c'eft une forte d'alêne , mais qui eft droite ,
emmanchée dans un fort manche de bois de trois ou
quatre pouces de long , fur la tête duquel on frappe
avec le marteau. V<tyt\ fofig- 2J. PL du Cordonnier-
43°
B R O
Bottier, qui représente le fer de cet infiniment , &
une petite portion du manche.
Broche , en terme a" Epinglier , font deux baguet-
tes de fer emboîtées perpendiculairement dans la
baie & dans la traverfe de bois du métier ; c'eft à
leur aide que le contrepoids retombe toujours fur le
même point. Les broches n'entrent point dans le mé-
tier par en-bas ; elles pofent feulement avec force
fur une plaque de plomb fur laquelle on l'arrête à
volonté , & félon que la fituation du poinçon l'exi-
ge. Voyei la figure 10. Planche IL de ÇEpinglier.
BROCHE c'a rouleau, s'entend dans C Imprimerie en
team, d'une pièce de fer de Fépaiffeur d'un doigt,
ronde par les deux bouts , quarrée dans le milieu , &
longue de deux pies , non compris le coude & la poi-
gnée : le premier bout eft coudé de façon à recevoir
un revêtiffement de bois creufé que l'on appelle ma-
nivelle , & qui eft pour la commodité de la main de
fouvrier. Cette broche traverfe en-deffous tout 1*
train de la preffe , en paffant par le milieu du corps
du rouleau , & eft arrêtée par fa dernière extrémité
par une clavette. Ces deux agens réunis fervent à fai-
re paffer le train de la preffe fous la platine , &£ à fai-
re revenir ce même train fur fon point d'appui. Voy.
Rouleau , Manivelle , & PI. IV.fig. z.Mla ma-
nivelle , N le rouleau.
Broche,m Pàtijfcrie , eft un gâtftm de forme py-
ramidale , fait d'une pâte détrempée avec du fucre ,
des jaunes d'eeufs , & de la levure.
* BROCHE , che\ les Regraders , eft une longue ver-
ge de bois menu fur laquelle ils enfilent & fufpen-
dent les harengs quils ont fait deffaler , afin qu'ils s'é-
gouttent plus facilement.
BRO CHE ou BOULON de fer , chei les Rubaniers ; il
y en a de diverfes fortes , comme ceux qui enfilent
les marches par la tête , & dont les deux bouts paf-
fent à travers les planches du pont.
Les deux broches qui fervent auffi à enfiler les la-
mes dans le porte-lames ; les deux broches qui enfilent
les poulies dans le chatelet ; celle qui enfile les re-
tours dans leur chaffis ; celies qui fervent à dévider
la foie ; & d'autres dont on parlera ailleurs.
Broche , en Serrurerie , eft une forte de petit fer
rond qui paffe dans les nœuds des fiches.
Broches à bouton, ce font les broches des fiches aux-
quellesFon remarque une petite tête ronde au-deffus
de la fiche.
Broches à lambris , ce font des efpeces de clous
ronds fans tête , qui fervent à pofer les lambris.
* BROCHE ; on en diflingue plufieurs chez les Ma-
nufacturiers en foie , qui , de même que chez les Ruba-
niers, fe distinguent par leur ufage. Il y a les broches
des marches ; ce font des efpeces de boulons qui en-
filent les marches & les arrêtent.
Les broches du cafjïn , qui ne font que de petites
verges de fer rondes , qui traverfent les poulies du
caffin.
Les broches du carete , ou baguettes rondes de fer
ou de bois , qui fervent d'axe aux aleirons.
Les broches des roiiets ; elles font de fer, & garnies
d'une noix plus ou moins greffe , fur laquelle paffe
la corde ou la liiiere qui les fait tourner.
Les broches de la cantre , petites verges de fer très-
longues & très-menues , fur lefquelles tournent les
roquetins>
Il y a encore d'autres broches : mais c'eft affez qu'il
en foit parlé dans les deferiptions des machines où
elles feront employées.
Broche, petit infiniment dont fe fervent les
Haute-liffiers ; elle leur tient lieu de la navette qu'on
employé dans la fabrique des étoffes & des toiles.
Cette broche eft ordinairement de bonis , ou de quel-
qu'autre bois dur, longue en tout de fept à huit pou-
BRO
ces , y compris le manche , & de fept ou huit lignes
de groffeur dans fon plus grand diamètre : elle fe
termine en pointe , pour paffer plus facilement en-
tre les fils de la chaîne. C'efl fur la broche que font
dévidés l'or , l'argent , les foies & les laines qui en-
trent dans la labrique des haute-liffes. ^oy^ Haute-
lisse.
Broche , terme de Tonnelier , qui fignifie une che-
ville avec laquelle ils bouchent le trou qu'ils ont fait
avec le forêt ou vrille à un tonneau pour en goûter
le vin. Ce mot fe dit auffi quelquefois de la fontaine
de cuivre qu'on met à une pièce de vin qu'on vient
de percer.
* BROCHÉE , f. f. en général , c'efl la quantité
de quoi que ce foit que foûtient une broche.
Brochée, che^ les Chandeliers , c'ell la quantité
de chandelle mife fur une broche , & qu'on peut faire
à la fois, f^oyei par rapport à cette quantité l'article
Broche.
Brochée , che^ les Rotijfeurs , c'efl la quantité de
viande qu'on peut mettre fur une broche ; & ainfi
des autres' occafions où l'on employé le terme bro-
chée.
* BROCHER ( le ) Manufactures en foie, or & ar-
gent ; c'elt l'ait de nuancer des objets de plufieurs
couleurs fur une étoffe en foie , quelle qu'elle foit ,
ou d'en enrichir le fond de dorure , de clinquant , de
chenille , de fil d'argent , de cannetille , &c. par le
moyen de très-petites 'navettes qu'on appelle ejpo-
lins, qui font toutes femblables aux grandes navet-
tes que l'ouvrier a devant lui , & dont il fe fert lelon
qu'il lui ell marqué par le deffein qu'il exécute.
Le métier du broché efl exa&ement le même que
pour les autres étoffes. Les étoffes brochées font à
fleurs : quand il n'y a que deux couleurs fur fond fa-
tin , on n'a pas befoin de brocher; deux grandes navet-
tes les exécutent : s'il n'y a que trois couleurs , on
peut encore fe paffer de brocher ; trois grandes na-
vettes les rendront ; il y aura une navette pour cha-
que couleur : mais alors- il faudra beaucoup de fils à
la chaîne , & il faudra de plus que ces fils foient
très-forts. Ces trois navettes qui exécutent les fleurs,
& qui fervent en même teins de trame, ne manquent
jamais de falir le fond ; & c'eil pour qu'elles le fa-
liffent moins qu'il faut , comme nous l'avons dit,
beaucoup de fils à la chaîne , & que ces fils foient
forts : mais ces deux conditions rendent nécefîaire-
ment le fatin très-ferré. Ainfi quand on prend un fa-
tin à fleurs non broché , en général le meilleur fera
celui qui aura le plus de couleurs. Quand le deffein.
porte plus de trois couleurs , on broche le furplus ,
c'efl-à-dire , qu'on a cette quatrième , cinquième cou-
leur montées fur de petites navettes , & qu'on paffe
ces petites navettes dans les endroits où elles doivent
être pafîées félon la tire. Pour fe faire une idée clai-
re de la manière dont cela s'exécute,
Soit le deffein GH I K à exécuter en fatin broché :
il eil évident qu'il doit y avoir au femple cent cor-
des , puifque le deffein ell fur un papier de 8 lur 1 2 ,
& qu'il y a douze divifions & demie horifontales.
Si l'on veut que ce deffein foit répété plufieurs fois
à l'ouvrage , il faut que chacune des cordes du fem-
ple tire autant de cordes ou mailles de corps , qu'on
veut de répétitions ; c'efl-à-dire , qu'il faut que les
fourches ou arcades foient à deux , trois , quatre ,
brins. La lecture de ce deffein fur le femple n'efl pas
différente de la lecture de tout autre deffein. Il faut
bien remarquer que dans le brocher l'endroit de l'étoffe
ell en-deffous.
Comme il n'y a ici que cinq couleurs & le fond ,'
le coup le plus compofé n'a pas plus de fix lacs.
C'ell la chaîne qui fait le fond A, ou le corps de l'é-
toffe , à moins qu'on ne le veuille or ou argent ; alors
il faut avoir fou or Si ion argent filé, monté fur des
BRO
efpolins comme les couleurs. Le coup commence ici
par le fond , un autre coup commencera par le verd,
par le jaune, &c.
Dans le deffèïn propofé , le fond A eft blanc ; la
tige B cil verte; les parties C , C , C , C, de la fleur
font jaunes; les parties D ,D , D , &c. font lilas fon-
cé ; les parties E , E ,E ,E, &c. font lilas plus clair ;
les parties F, F, F, &c. violet.
Ces couleurs le fuccedent aifez ordinairement à la.
tire les unes aux autres dans un même ordre , cela
facilite beaucoup l'exécution de l'ouvrage : c'eft l'ha-
bitude de travailler & la connoiffance de fon deffein ;
c'eft un petit morceau d'étoffe de la couleur qui ren-
tre , attaché au lacs , qui avertit qu'elle va commen-
cer, & qu'une autre couleur a ceffé.
Plus il y a de couleurs, moins il règne d'ordre en-
tre la manière dont elles fe fuccedent , plus l'ouvrage
demande d'attention de la part de l'ouvrier.
Il eft , je crois, démontré pour quiconque connoît
un peu le métier , que fur un métier bien monté , &
avec un grand nombre de femples, on parviendroit
à exécuter des figures humaines , & des animaux
nuancés comme dans la peinture.
Il y a ici douze liftes , huit pour le fatin , & quatre
pour lier le fond & la dorure. La chaîne elt de trois
milles fix cents fils ; partant chaque liffe de fatin fait
travailler la huitième partie de trois mille fix cents.
Quant aux liffes de liage , la première ne prend que le
dixième fil de chaîne ; la féconde , que le vingtième ,
la troifieme que le trentième , & ainfi de fuite.
Il faut bien remarquer que l'étoffe fur laquelle on
exécute ici le deffein G H I K. n'a que dix pouces;
& qu'on ne l'a luppofée telle que pour faciliter l'in-
telligence de l'opération du brocher.
Quand il n'y a point de dorure , & qu'on veut con-
ferver les liffes de liage , la première prend le cinquiè-
me fil ; la féconde , le dixième , &c.
C'eft la couleur du fond & le nombre des cou-
leurs , qui montrent qu'une étoffe eft ou brochée ou
non brochée.
On peut confidérer l'art de brocher , comme une
forte de peinture où les foies répondent aux cou-
leurs , les petites navettes ou efpolins aux pinceaux ;
& la chaîne a une toile fur laquelle on place & l'on
attache les couleurs par le moyen de fes fils , dont on
fait lever telle ou telle partie à diferétion au-deffus
du refte , par le moyen de ficelles qui correfpondent
à ces fils , avec cette différence que le peintre eft de-
vant fa toile , & que le brocheur eft derrière.
* Brocher , (en Bonneterie ) c'eft tricoter ou tra-
vailler avec des broches ou aiguilles.
* Brocher , ( che^ les Bouchers ) c'eft après que
le bœuf a été égorgé ci mis bas , y pratiquer avec la
broche des ouvertures pour fouffler. Voye^ Broche
& Souffler.
* BROCHER, (che? les Couvreurs") c'eft mettre de
la tuile en pile fur des lattes , entre les chevrons.
* Brocher, ( che^ les Cordiers') c'eft paffer le
boulon dans le touret : on dit brocher le touret.
Voye?^ TOURET, voye^ aujjï Corderie.
Brocher , ( en Jardinage ) fe dit des plantes qui
montrent de petites pointes blanches , foit à la tête
pour pouffer de nouvelles branches, foit au pic pour
jetter de nouvelles racines. (&)
Brocher, (terme de Maréchal') c'eft enfoncer à
coup de brochoir, qui eft le marteau des Maréchaux,
des clous qui partent au-travers du fer & de la cor-
ne du fabot , afin de faire tenir le fer au pié du che-
val. Brocher haut , c'eft enfoncer le clou plus près
du milieu du pié. Brocher bas, c'eft l'enfoncer plus près
du tour du pié. Brocher en mujiaue , c'eft brocher tous les
clous d'un fer inégalement, tantôt haut, tantôt bas ;
ce qui vient du peu d'adreffe de celui qui ferre.
On fe iervoit autrefois de ce mot pour dire : piquer
BRO
431
un cheval avec les éperons , afin de le faire courir
plus vite, (f)
Brocher , ( terme de Blafon ) on dit que des che-
vrons brochent fur des burelles , pour dire qu'ils paf-
fent dans l'écu fur des burelles. Voye{ Burelle.
Brocher , ( terme de Relieur ) c'eft plier les feuil-
les d'un livre les unes fur les autres , les coudre en-
femble , & les couvrir de papier marbré ou autre.
Foyei Relier.
BROCHET , f. m. lucius,( Hifi. nat. ) poiffon de
rivière qui fe trouve auffi dans les lacs & les étangs,
il eft fort commun dans toutes les eaux douces. Le
brochet eft long , fon dos eft prefque quarré , lorfqu'il
eft gras. Il a le ventre gros, la queue courte, la tête
quarrée& percée de petits trous; le bec allongé à peu
près comme celui d'une oie : il y a fur le devant de
la mâchoire inférieure de petites dents recourbées
en dedans. La mâchoire fupérieure n'en a point de
correfpondantes à celles de l'autre mâchoire : mais
il y en a deux rangs fur le palais. Les yeux font de
couleur d'or , les écailles font petites & minces ; de-
forte que lorfque ce poiffon eft jeune , il femble n'a-
voir point d'écaillés : mais elles deviennent dans la
fuite dures & apparentes. Le corps eft parfemé de ta-
ches jaunâtres , le dos eft noirâtre , le ventre blanc ,
les côtes de couleur d'argent : mais lorfque le bro-
chet eft vieux , ils font de couleur d'or ; plus ce poif-
fon eft jeune , plus il approche de la couleur verte.
Il a deux nageoires au bas des ouies , deux autres au
bas du ventre qui font fortes. 11 y a auprès de la
queue une nageoire de couleur dorée & tachetée de
noir, pofée en deffus, & une autre en deflbus ; la
queue eft fourchue & parfemée de taches brunes.
La ligne qui s'étend le long du corps- dans le milieu
n'eft marquée que par de petits points. Les brochets
des grandes rivières & des lacs ont la chair ferme ;
ceux au contraire qui font dans les eaux dormantes
& fangeufes ,ne font pas bons à manger. Ces poiffons
font très-voraces ; ils s'efforcent quelquefois pour
avaler d'autres poifTons qui font prcfqu'auilî gros
qu'eux : ils commencent par la tête , & ils attirent
peu à peu le refte du corps à mefure qu'ils digèrent
ce qui eft dans leur eftomne ; on les a vu avaler de
petits chiens & de petits chats que l'on avoit noyés
dans des rivières. Souvent ils fe nourriffent de gre-
nouilles : mais on dit que s'ils avalent un crapaud de
terre ils le vomiffent. On prétend qu'ils n'attaquent
point les perches à caufe des aiguillons qu'elles ont
fur le dos ; cependant on a rapporté qu'ils prenoient
les perches en travers dans leur bouche , & qu'ils les
y tenoient jufqu'à ce qu'elles fuffent mortes avant
que de les avaler. Ce qu'il y a de certain , c'eft qu'ils
n'épargnent pas même les poiflbns de leur efpece.
Rondelet. Willughbi. Voyt{ POISSON. (/)
Brochet de mer. Voye^ Spet. (/)
* On lit dans du Bravius de Pifcinis & pifeium , lib.
I. chap. ij. que la grenouille faute quelquefois fur la
tête du brochet , l'enibraffe de fes pattes , qu'elle les
lui met dans les yeux , & les lui crevé. Aldrovande
& Cardan prétendent que ii l'on jette unbrochet à qui
on aura ouvert le ventre, dans un étang ou un réfer-
voir où il y ait des tanches , il ne mourra pas de fa
bleflùre ; 1 humeur gluante de la tanche , contre la-
quelle il va fe frotter, l'ayant bien-tôt fait cica-
trifer. Voilà des faits qu'il feroit ailé de vérifier : il
ne s'agiroit pour le premier, que de tenir pendant
long-tems un brochet dans un réfervoir oii il y au oit
bien des grenouilles , & 011 ri n'y auroit que cela ; &;
pour le fécond, que de bleffer un brochet 6c le jetter
entre des tanches.
On croit que le brochet vit long-tems. On dit qu'il
en fut trouvé un dans un étang d'Allemagne en 1 407 ,
qui avoit un anneau d'airain parte dans la couver-
ture de fes ouies , fur lequel il y avoit une infeription
43* BRO
Greque, faifant mention que c'étoit l'empereur Fré-
déric II. qui l'avoit mis dans cet étang ; ce poifîon
avoit au moins 2.67 ans, fi le fait eft vrai.
Il y a des brochets auxquels on trouve des œufs &
une laite en même tems ; d'où l'on conclut qu'ils font
hermaphrodites.
* La pêche du brochet n'a rien de particulier , fi ce
n'efi celle qui fe fait à la bricole. On a un réfervoir
de petits poifibns , mais il faut donner la préférence
au' carpeau. Ayez un hameçon à deux cro.chets , x y ,
faites entrer une ligne par la queue du carpeau , &
la faites fortir par fa bouche. Attachez au bout de la
ligne qui fortira par la bouche du poiffon un hame-
çon à deux crochets recourbés vers la queue du poif-
lon. Paflez un morceau de liège JFdans votre ligne,
afin que le poiffon refte fufpendu entre deux eaux
en l'endroit qu'il vous plaira ; entortillez le refte de
votre ligne à un piquet placé fur le bord de la riviè-
re. Difpoléz plulieurs appas de cette nature dans les
endroits où vous croyez qu'il y a du brochet, bien-tôt
cet animal vorace avalera & les poiffons & les ha-
meçons. Il faut que la corde foit entortillée au pi-
quet de manière qu'elle puiffe fe dévider ; pour cet
effet on prend une branche fourchue, ABCD^
PI, de Pêche : on fend les bouts des fourchons CD.
On entortille la ligne E autour de ces fourches ; &
quand on eft parvenu à leurs extrémités , CD, on
fiche la ligne E dans la fente d'un des fourchons C.
Le brochet , en fe débattant , a bien-tôt fait fortir la
ligne de la fente ; lorfqu'elle n'y eft plus détenue ,
elle fe dévide & permet au brochet de s'écarter.
Cuijîne. On prépare le brochet de plufieurs maniè-
res ; au court-bouillon , à la fauce d'anchois , & à la
Polonoife. On le frit ; on le met en ragoût , ou on le
farcit.
On emplove , en Médecine , fes mâchoires & fa
graiffe : cette dernière eft fort en ufage , & on en oint
la plante des pies pour détourner un catarrhe & pour
appaifer la toux. Dale dit qu'on en frotte avec fuc-
cès la poitrine des enfans dans le rhume & dans la
toux.
La mâchoire inférieure eft defiïccative & déterfi-
ve : on la regarde comme fpécifique dans la pleuré-
fie ; elle fert , de même que les autres os de la tête ,
contre le calcul , les fleurs blanches, & pour facili-
ter l'accouchement. Ses cendres employées à l'exté-
rieur , arrêtent l'évacuation de la fanie , détergent
les vieilles plaies , ik deffechent les hémorrhoïdes.
L'eau diftillée du fiel du brochet eft eftimée bonne
contre les maladies des yeux.
On recommande fon fiel dans les maladies froides
accompagnées de l'inactivité de la bile ; il paffe auffi
pouf guérir les fièvres intermittentes , étant pris au
commencement de l'accès. La dofe eft de fept ou
huit gouttes dans une liqueur appropriée.
Son cœur produit le même effet.
Les petites pierres ou offelets de la tête font recom-
mandés pour hâter l'accouchement, purifier le fang ,
faire venir les règles , exciter l'urine, chaffer la pierre
des reins & de là velue , & contre l'épilepfie. On en
peut donner depuis vingt-cinq grains jufqu'à un gros.
On doit éviter de manger les œufs du brochet, par-
ce qu'ils excitent des naiùees , & qu'ils purgent affez
violemment.
Il contient beaucoup d'huile & de feî volatil , &
médiocrement dephlegme , ce qui le rend allez nour-
riffant ; cependant il ne convient pas à tout le mon-
de, il eft indigefte chez.bien des gens. (N)
BROCHETÉ , adj. fe dit des artifices percés d'un
trou plus petit ou plus court que Pâme des fufées vo-
lantes , foit en Jes chargeant avec des baguettes per-
cées , foit après-coup , en les chargeant mafïifs , &
les perçant enfuite fuivant leur axe , pour leur don-
ner un mouvement plus vif, comme à quelques fer-
BRO
penteaux qu'on appelle fougues, lardons , oaJèrpeiH
teaux brochais. Voye^ FOUGUE , LARDON, &c.
* BROCHETER , v. a£t. en général percer de-
broches ou de brochettes. C'eft en ce lèns qu'on dit
que les boucaniers de l'île de Saint-Domingue bro-
chettent leurs cuirs , en les étendant fur la terre , au
moyen d'un grand nombre de chevilles , & les laif-
fent féchef dans cet état. Cette préparation empêche
les cuirs de fe rétrécir , & les met en état d'être em-
barqués fans fe gâter. L'un eft l'effet des brochettes ,
l'autre du defléchement.
Brocketer , en Marine , c'eft mefurer les mem-
bres & les bordages d'un vaiffeau.
* BROCHETTE , f. f. fe dit en général & au pro-'
pre, d'un petit morceau de bois ou de fer, long &
pointu , dont l'ufage ordinaire eft d'être paffé dans
quelques corps mous , pour en unir , foûtenir , ou rap-
procher les parties. On a tranfpoité ce terme au figu-
ré , à d'autres outils qni avoient à-peu-près la même
forme & la même fonûion.
BROCHETTE, en termes de Boutonnier : c'eft une
petite broche fur laquelle on fait le bouton de ce nom.
Elle fert à tenir le moule , & à faciliter le jet des pre-
miers tours qui fe font, comme nous avons dit , fans
pointes. Voye^ Pointe & Bouton à la brochette.
BROCHETTE à lier, en termes de Boutonnier , eft
un morceau de bois tourné , plus gros par le bout
qu'on tient à la main , que par celui qui entre dans
la bobine. Il tire fon nom de fon ufage , puifqu'il fert
à lier la cannetille autour du vélin découpé.
BROCHETTE , eft , en terme de Fondeur de Cloches t
une règle fur laquelle font tracées différentes mefu-
res. Il y en a deux efpeces : la brochette des épaiffeurs ,
fur laquelle font marquées les différentes épaiiîèurs
& diamètres des parties d'une cloche. Voye^lafig.z.
Planche de la Fonte des Cloches.
L'autre efpece de brochette n'eft autre chofe qu'une
règle , fur laquelle font marqués les différens diamè-
tres des cloches , qui iont les différens degrés de l'oc-
tave , la longueur de la règle étant prife pour le dia-
mètre de la cloche. Mais la manière dont les Fondeurs
font cette divifion eft fautive, ainfi que le P. Merfennc
l'a démontré : c'eft pourquoi nous en avons donné
ime autre plus exafte à l'article Fonte des Cloches,
fondée fur la connoiffance du diapafon. Voye^ Dia-
pason des Orgues.
Brochettes , dans F Imprimerie, font deux pe-
tites tringles de fer , chacune de quatre à cinq pouces
de long , fur huit à dix lignes de circonférence. Elles
attachent la frifquette au chaflis du tympan au moyen
de petits couplets , & vont un peu en diminuant d'u-
ne extrémité à l'autre, afin qu'on puiffe les ôter faci-
lement , quand on veut détacher la frifquette du tym-
pan, pour en fubftituer une autre, en changeant
d'ouvrage. Voy. TYMPAN, & PI. IF. de C Imprimerie.
BROCHETTE , terme de Rubannier , eft une petite
portion de baleine ou de bois , taillée en rond , me-
nue , longue , & capable d'entrer dans le canon , &
enfuite dans ies trous des deux bouts de la navette.
La brochette doit être allez menue pour ne pas empê-
cher le canon qu'elle porte de fe dérouler fuivant le
befoin. Voye^ Navette.
BROCHEUR , BROCHEUSE , ouvrier ou ou-
vrière dont le métier eft de brocher des livres.
* BROCHOIR , f. m. (Maréchal-Fcrrant.) c'eft
le marteau dont ces ouvriers fe fervent pour ferrer
les chevaux. Ils le portent attaché à leur ceinture.
Foyei Brocher.
BROCHURE,!". {Librairie.) On donne ordinai-
rement le nom de brochure à un livre non relié ,
mais dont les feuilles ont été Amplement coufues &
couvertes de papier , & dont le volume eft peu
confidérable. Les meilleurs livres fe brochent ainfi
que les plus mauvais ; cependant c'eft aux der-
niers
BRO
niers que le nom de brochure paroît le plus finguliére-
ment confacré. On dit affez ordinairement : nous
■avons été cette année inondes de brochures ; c,ejî une mau-
vaifi brochure , &c. quand on veut le plaindre de la
quantité de ces petits ouvrages nouveaux dont la
lecture produit deux maux réels ; l'un de gâter le
goût ; l'autre d'employer le tems & l'argent que l'on
pourroit donner à des livres plus folides & plus inf-
rruftifs. Au refte cette frivolité du fiede n'eli pas un
mal pour tout le monde ; elle fait vivre quelques pe-
tits auteurs , & produit , proportions gardées , plus
de cenfommation de papier que les bons livres. Une
brochure paffe de la toilette d'une femme dans fon an-
ti-chambre , &c. cette circulation fe renouvelle , &
fait valoir le commerce de nos fabriques.
BROCKAU, ( Géog. ) petite rivière d'Allemagne
dans le duché de Holftein, dans la province de \Va-
BROCOLI , f. m. (Jardinage,') c'eft une efpece
de choux qui fe cultive en Angleterre , cv furtouten
Italie : on l'y mange avec la viande , & fouvent en
falade chaude. Quelques Jardiniers en France cou-
pent les têtes des choux pommés fans en arracher les
troncs ,&c ils font parler pour brocolis les petits re-
jetions qu'ils pouffent. ( K )
BRODEQUIN , f. m. ( Hijl. anc. ) forte de chauf-
fure en ufage parmi les anciens , qui couvroit le pie
& la moitié de la jambe , & qu'on pourroit comparer
pour la forme aux bottines des houfards ou des hei-
duques , quoiqu'elle en différât pour la matière : car
fi le calceus , ou la partie inférieure du brodequin étoit
de cuir ou de bois , la partie fupérieure ou le caliga
ctoit d'une étoffe fouvent précieufe ; tels étoient fur-
tout ceux dont fe fervoient les princes , & les acteurs
dans les tragédies.
On attribue l'invention du brodequin à Efchyle qui,
dit-on , l'introduifit fur le théâtre pour donner plus de
majelté à les afteurs. Le brodequin étoit quadrangu-
laire par en-bas ; & l'efpecc de bottine qui le fur-
montoit , s'attachoit plus ou moins haut fur la jam-
be. Le calceus étoit fi épais , qu'un homme de médio-
cre taille , chauffé du brodequin , paroiffoit de la taille
des héros. Cette ehauffure étoit abfolument diffé-
rente du foc , efpece de foulier beaucoup plus bas,
& affecté à la comédie. De là vient que dans les au-
teurs clafTiques , & fur-tout les poètes , le mot de
brodequin ou de cothurne défigne fpécialcment la tra-
gédie ; Se qu'encore aujourd'hui l'on dit d'un poète
•qui compoie des tragédies , qu' il chauffe le cothurne.
Au relie , les brodequins n'étoient pas tellement re-
légués au théâtre , que les perfonnes d'une autre con-
dition ne s'en ferviffent. Les jeunes filles en mettoient
pourfe donner une taille plus avantageufe ; les voya-
geurs & les chaffeurs , pour fe garantir des boues. On
trouvera le brodequin dans nos Planches d'Antiquités,
yoye^ leur explication. ( 6-' )
Brodequins , (Jurifpr.) forte de torture dont
on fe fert pour faire tirer des criminels l'aveu de leurs
forfaits: elleconliftc en quelques endroits en une forte
de boîte ou de bas de parchemin, que l'on mouille &
que l'on applique ainii à la jambe du patient ; enfuite
on approche cette jambe proche du feu , qui occafion-
nant un violent rétréciffement au parchemin, ferre la
jambe vivement, & caufe une douleur infupportable.
Il y a aufli une autre forte de queftion appellée
les brodequins , qui confifte en quatre fortes planches
liées avec des cordes tout autour. Deux de ces plan-
ches font placées entre les jambes du criminel , év les
deux autres inr les côtés extérieurs des jambes , que
l'on ferre aulîi avec des cordes l'une contre l'autre:
on paffe enfuite un coin entre les deux planches qui
font entre les deux jambes ; ce qui tendant à faire
écarter les planches ce les cordes qui les refferrent,
l'effort du coup tombe fur les os des jambes & les
Tome II,
BRO
43
brife , ou occafionne une luxation qui fair fouffrir au
criminel des douleurs horribles. Cette queftion n'eft
plus ufîtée en Angleterre : mais elle fubfiffe encore
en France , en Ecoîfe , & en quelques autres pays.(#)
BRODERA , ( Géog. ) ville des Indes orientales
dans l'empire du Mogol , au royaume de Guzurate :
il s'y fait un grand négoce de toiles de coton. Long,
go. 30. lat. 22. 23.
ERODERIE , f. f. ouvrage en or , argent ou foie ,
formé à l'aiguille d'un deffein quelconque , fur des
étoffes ou de la mouffeline. Dans les étoffes on fait
ufage d'un métier qui fert à étendre la pièce , qui fe
travaille d'autant mieux qu'elle eft plus étendue.
Quant à la mouffeline , les ornemens qu'on y ap-
plique dépendent de fa qualité : on la bâtit fur
un patron deniné qui fe tient à la main; quelque-
fois on l'cmpefe avant que de la monter fur ce pa-
tron , quand l'ouvrière juge par la qualité qu'elle lui
reconnoît , qu'elle fera dirhciie* à manier. Les traits
du deffein fe rempliffent , ainfi que quelques -unes
des feuilles , de piqué & de coulé. Voye^ ces mots.
Les fleurs fe forment de différens points-à-jour , au
choix de l'ouvrière ; choix toujours fondé fur le plus
ou le moins d'effet que l'on penfe qui réfultera d'un
point ou d'un autre.
La broderie au métier eft d'une grande ancienneté.
Dieu ordonna qu'on en enrichît l'arche & d'autres
ornemens du temple des Juifs. Mais la broderie en
mouffeline pourroit bien ne pas remonter fi haut. Les
broderies de cette efpece fuivant en tout les deffeins
des belles dentelles, & la plupart des points des unes
ayant pris le nom du pays où les autres fe font , car
on dit point d'Hongrie , point de Saxe , &C. il y a lieu
de croire que la broderie qui n'eft vraiment qu'une
imitation de la dentelle , n'eft venue qu'après elle ;
fur-tout , fi l'on fait attention que la broderie s'eft plus
pei fect ionnée dans les pays où les dentelles font les
plus belles, comme en Saxe, que par-tout ailleurs.
La broderie au métier paroît bien moins longue que
l'autre, dans laquelle, du moins pour le rempliffk-
ge des fleurs , il faut compter fans ceffe les fils de la
mouffeline tant en long qu'en travers : mais en revan-
che cette dernière eft beaucoup plus riche en points ,
& dès-là îufceptible de beaucoup plus de variété. La
broderie en mouffeline la plus eft imée eft celle de Saxe :
on en fait cependant d'auffi belle dans d'autres con-
trées de l'Europe , fur-tout en France : mais la répu-
tation des ouvrières Saxonnes eft faite ; les Françoi-
fes feroient mieux, qu'on les vanteroit moins. Il le-
roit bien à fouhaiter que la prévention n'eût lieu que
dans cette occafion.
Les toiles trop frappées , ne font guère fufcepîv-
bles de ces ornemens : & en effet , on n'y en voit
point. Les mouffelines même doivent être lîmples.
Les plus fines font les meilleures pour être brodées.
Les doubles , à caufe de leur tiffure preffée & pleine,
rentrent pour la broderie dans la claife des toiles , fur
lefqueiles elle eft au moins inutile.
Broderie appliquée , eft celle dont les figures
font relevées & arrondies par le coton ou vélin qu'on
met deffous pour la foûtenir.
Broderie en couchure, eft celle dont l'or &
l'argent eft couché fur le deffein , ce ell coula .u eC
de la foie de même couleur.
Broderie en guipure , fe fait en or ou en ar-
gent. On deffine fur l'étoffe , enfuite on met du vé-
lin découpé, puis l'on coud l'or ou l'argent dellus
avec de la foie. On met dans cette broderie de l'or
ou de l'argent frifé , du clinquant , du bouillon de
plufieurs façons. On y met auffi des paillettes.
Broderie passée , "eft celle qui paroît des deux
côtés de l'étoffe.
Broderie plate , eft celle dont les figures foni
I 11
434
BRO
plates & unies fans frifures , paillettes , ni autres or-
nemens.
Broderie, (Jardinage.) c'eft dans un parterre, un
compofé de rinceaux de feuillages , avec fleurons ,
fleurs , tigettes , culots , rouleaux de graines , &c. le
tout forme par des traits de bouis nain, qui renferment
du mâche-fer au lieu de fable , & de la brique battue,
pour colorer ces broderies & les détacher du fond , qui
cil ordinairement fable de fable de rivière. V. Par-
terre. (P)
Broderie , Doubles , Fleurtis : tout cela fe
dit , en Mufique , de plufieurs notes que le mulicien
ajoute à fa partie dans l'exécution , pour varier un
chant fouvent répété , pour orner des paffages trop
fimples , ou pour faire briller la légèreté de fon go-
fier ou de fes doigts. Rien ne montre mieux le bon ou
mauvais goût d'un mulicien , que le choix & l'ufage
qu'il fait de ces ornemens. La mufique Françoife efl
fort retenue fur les broderies : les Italiens s'y donnent
plus de carrière ; c'eft chez eux à qui en fera davan-
tage : les afteurs & aftrices de leurs opéra , rafîem-
blent ordinairement , d'après les meilleurs maîtres ,
des recueils de doubles , qu'ils appellent pajp , (ur
toutes fortes de traits de chant , &: ils font fort jaloux
de ces fortes de recueils. (S )
BRODEUR, f. m. eft l'ouvrier qui orne les étoffes
d'ouvrages de broderie. Voye{ Broderie. Les2?ro-
deurs, à Paris , font communauté. L'on ne comprend
fous le nom de Brodeurs , que les ouvriers qui travail-
lent fur des étoffes. Les broderies en linge fe font par
des femmes , qui ne font ni du corps des Brodeurs, ni
d'aucun autre.
BRODI , ( Géog. ) ville fortifiée , du royaume de
Pologne , dans la Wolhinie.
BRODNICZ , (Géog.) ville de la Pruffe Polonoi-
fe , dans le palatinat de Culm.
BRODRA , (Géog.) petite ville , dans l'empire du
grand-mogol ,au royaume de Guzurate, vis-à-vis le
golfe de Cambaie.
BRODT ou BROD, (Géog.) petite ville forte de
Sclavonie , fur la Save , dans le comté de Poffega.
Long. 36. lat. 46. i5.
BRODZIEC , (Géog.) petite ville du grand duché
de Lithuanie , dans le palatinat de Minsky , fur la ri-
vière de Berezina.
BROGLIO , (Hift. mod.) l'on nomme ainfi à Ve-
nife un endroit de la place iaint Marc , où les nobles
Vénitiens tiennent leurs aflemblées ; lorfqu'ils y vien-
nent avant midi, ils fe mettent à couvert fous le por-
tique : mais fi l'aûemblée fe tient l'après-dinée , ils
prennent un autre côté pour fe mettre à l'abri du fo-
leil; il n'eft permis à perfonne d'y paffer pendant ce
tems-là.
BROJE, (Géog.) rivière de Suifîe, dans le canton
de Fribourg, qui va fe jetterdans le lac deNeubourg.
BROlfZCHIA, (Géog.) ville d'Afie, dans le
royaume de Guzurate , dans l'empire du Mogol ; c'efl
une des plus confidérables forterefles de l'Inde.
BROMELIA , fubft. f. (Hift. nat. bot.) genre de
plante, dont le nom a été dérivé de celui deBromel,
médecin Suédois. La fleur des plantes de ce genre eft
en rofe, compofée de trois pétales difpofés en rond,
& foûtenus par un calice , qui devient dans la fuite
un fruit ovoïde , diviié en trois loges remplies de fe-
mences un peu allongées 8c prefque cylindriques.
Plumier, Nova plant. Amer, gêner. V. Plante. (/)
* BROMIUS, fub. m. (Myth.) ce mot vient de
/2pa//oç, bruit; & Bacchus a été furnommé Bromius ,
ou parce qu'il naquit , dit-on , au bruit d'un coup de
tonnerre , qui fit accoucher Semélé fa mère , ou parce
que les Bacchantes , femmes particulièrement atta-
chées à fon culte , étoient fort bruyantes.
BRONCHADE , f. f. (Manège.) taux pas que fait
lui cheval. (F)
BRO
BRONCHER , v. neuf. (Manège.) mettre le piék
faux ; il fe dit proprement des chevaux auxquels les
jambes mollifTent. Ce défaut leur vient d'avoir les
reins & l'échiné foibles, & les jambes ufées. (F)
BRONCHES , f. f. pi. on appelle ainfi, en Anato»
mie , les petits tuyaux dans lelquels fe divife la tra»
chée artère à fon entrée dans les poumons , & qui
font diftribués dans chaque partie du poumon, pour,
fervir de pafTage à l'air dans la refpiration.
Le mot eft Grec, fyljx1*-) & fignifïe la même chofe."
Les rameaux des bronches , en fe fubdivifant , de-
viennent capillaires: ils paflent dans les petits lobu-
les des poumons; ils paroiffent même former par leur
expanfion , les cellules avec lefquelles ils commu-
niquent. Chaque tuyau forme donc à l'extrémité une
cellule , comme l'a imaginé Malpighi ; ainfi s'il eft
tombé en erreur , c'efl: en repréfentant ces cellules
comme des véficules folitaires. Voye^ Poumon.
Les bronches font compofées de cartilages comme
la trachée-artere, finon que leurs cartilages font par-
faitement circulaires , fans avoir aucune partie mem-
braneufe ni dure. Ils font joints enfemble par une
membrane qui les enveloppe : ils font tirés en-dehors
en longueur dans l'infpiration &c en-dedans dans l'ex-
piration. Voyei Inspiration & Expiration. (I)
BRONCHIALE (Artère), c'eft une artère des
paumons , qui vient du tronc de l'aorte defeendante
ou des intercoft aies , & après avoir embrafle la tra-
chée , pourfuit fon cours avec les bronches , dont elle
accompagne toutes les branches dans tout leur cours.
Voye^ Planches A nat. fig. 1, n° 29.
Bronchiale (freine) , cette-veine vient des in-
tercoftales , accompagne l'artère, & fe divife en au-
tant de branches qu'elle. L'artère porte le fang aux
bronches pour leur nourriture & pour celle des vé-
ficules des poumons ; & la veine le rapporte à la vei-
ne cave dans laquelle elle fe jette. L'artère bronchiale
eft quelquefois fimple : mais elle eft fouvent double,
& quelquefois triple. Voye7^ Veine, Artère.
BRONCHIQUE , en Anatomit ; épithete des muf-
cles fitués fur les bronches ; tels font les fterno-hyoï-
diens , les tyro-hyoïdiens , &c. Fj>y. Bronche. (L)
BRONCHOCELE, f. f. (Chirurgie.) ce mot vient
du Grec fipô j %oç , bronchas , la trachée , 6c de %«x«, ««•
jlure, tumeur. C'eft une tumeur qui furvient à la gor-
ge , par le déplacement d'une partie de la membrane
interne de la trachée artère. Cette membrane , en fe
dilatant , paffe entre les anneaux cartilagineux de ce
conduit , & forme à la partie antérieure du cou une
tumeur mollaffe , fans douleur, de même couleur que
la peau , & qui s'étend quand on retient fon haleine;
c'efl proprement une hernie de la trachée-artere.
Cette maladie , qui eft rare , nuit beaucoup à la voix
& à la refpiration. Je crois que cette tumeur pour-
rait être comprimée par un bandage en bouton , com-
me quelques perfonnes le confeillent pour l'anevryf-
me : il ne faut pas confondre , comme on fait allez
communément, la bronchocele avec une autre tumeur
du cou qu'on nomme goitre. Voy. Goitre. (Y)
On prétend qu'il y a des gens qui ont des fecrets
pour fondre cette tumeur , fans être obligés d'em-
ployer les ferremens : fi la choie eft vraie , il feroit à
propos de les engager par des récompenfes à rendre
cette compofition publique ; ce feroit rendre un fer-
vice fignalé à nombre de perfonnes qui font attaquées
de cette maladie également incommode & defagréa-
ble. (N)
BRONCHORST, (Géog.) petite ville furl'Iffel,
dans le comté de Zutphen, avec titre de comté de
l'empire.
BRONCHOTOMIE , f. f. opération de Chirurgie,
qui confifte à faire une ouverture à la trachée-artere,
pour donner à l'air la liberté d'entrer dans les pou-
B R O
srnons & d'en fortir , ou pour tirer les corps étrangers
qui fe feroient infinités dans le larynx ou dans la tra-
chée-artère. Ce terme vient du Grec /SpoVfcas, -trachée,
& de Ti/M'a>,feco, je coupe. On a aufli appelle cette
opération laryngotomie , mais mal-à-propos, puis-
qu'elle n'ouvre point le larynx. Quelques modernes
prétendent qu'on doit lui donner, par préférence , le
-nom de trachéotomie.
La poffibilité de l'opération dont nous parlons , eft.
établie fur la facilité avec laquelle certaines plaies
de la trachée-nrtere , même les plus compliquées , ont
été guéries. H y a peu d'obfervateurs qui ne nous
en ayent laiffé des exemples remarquables & allez
connus.
Cette opération convient dans plufieurs circons-
tances, 6c demande d'être pratiquée différemment,
félon le cas qui l'indique. J'en juge ainfi , pour avoir
rapproché plufieurs faits les uns des autres, les avoir
comparés exactement , ôt les avoir envifagés fous plu-
sieurs afpcfts difFérens.
Les efquinancies , ou inflammations de la gorge ,
qui ont reiifté à tous les remèdes ou qui menacent de
fuffocation , exigent cette opération, f^oye^ Esqui-
NANCIE.
Pour la pratiquer dans ce cas il n'eft pas néceffaire
de faire à la peau & à la graille une incifion longitu-
dinale, qui devroit commencer un demi-travers de
doigt plus haut que la partie inférieure du cartilage
cricoide , 6c qui s'étendroit jufqu'au cinquième ou
fixieme anneau de la trachée -artère, pour féparer
enfuite avec le biftouri les mufcles fterno-hyoidiens,
& porter la pointe de cet infiniment ou celle d'une
lancette entre le troiiieme 6c le quatrième anneau :
on peut faire cette opération par une ponction feule,
qui en rendra l'exécution plus prompte , plus facile,
ck moins douloureufe. Pour opérer , il faut laiffer le
malade dans l'attitude oii il refpire le mieux , foit
dans fon lit loit dans un fauteuil , de crainte qu'en
lui étendant ou renverfant la tête, comme quelques
auteurs le confeillent, on ne le fuffoque. On poie le
bout du doigt index de la main gauche fur la trachée-
artère, entre le fiernum & la partie, inférieure du la-
rynx ; on prend de la main droite une lancette, dont
la lame eft affujettic fi.ir la châflé par le moyen d'une
bandelette : on la tient avec le pouce, le doigt index,
& celui du milieu , comme une plume à écrire : on la
ployé tranfverfalement dans la trachée-artere, en la
iailant gliiîér fur l'ongle du doigt index de la main
gauche, qui, appuyé fur la trachée-artere, fert en
quelque façon de conducteur à la lancette. Je ne fixe
pas l'entre-deux des cartilages qu'il faut ouvrir, parce
que la tenfion de la gorge ne permet pas qu'on les
compte. On pénètre fort aifément dans la trachée-
artere , qui cil tort gonflée par l'air auquel on ouvre
un paflage libre par la plaie qu'on y pratique. Il faut
avoir foin de palier un ftylet le long de la lancette
avant de la retirer , 6c fur ce ftylet on place dans
la trachée-artere une cannule , de façon cependant
qu'on fe donne de garde qu'elle ne touche la paroi
oppofée à l'ouverture par où elle paffe. Cette can-
nule doit être de plomb ou d'argent : elle doit être
plate, pour s'accommoder à l'entre-deux des carti-
lages. L'entrée doit être en forme de pav illon , &C
être garnie de deux petits anneaux qui fervent à paf-
ler une bandelette , dont on noiie les extrémités à la
nuque, afin d'affujettir la cannule dans la trachée-
artere. Les dimenfions de cette cannule font déter-
minées à avoir fix lignes de longueur , une ligne de
diamètre à fon bec, qui doit être légèrement courbé
& arrondi exactement, & deux lignes &; demie de
largeur à l'endroit du pavillon. Cette longueur de fix
lignes fuffit pour l'opération avec l'incifion des tégu-
mens ; mais elle n'eft pas fuffifante loriqu'on ne tait
qu'une feule ponction commune à la peau , à la graif-
Tomt II,
B R O
43 5
fè , & à la trachée-artere. Il faut que la cannule foit
plutôt plus longue que trop courte , afin qu'on puiffê
s'en fervir pour des perfonnes graflés , à moins qu'on
ne veuille en avoir de plufieurs dimenfions pour les
différentes perfonnes qui pourroient en avoir befoin.
foy^fiz.iz.PLXXVl.
Le panfement confifte à mettre fur l'embouchure
de la cannule une petite toile fort claire, afin que l'air
puiffe paffer facilement à travers ; on met une com-
preffe feneftrée qu'on contient par quelques tours dé
bande dont les circonvolutions ne portent pas fur le
pavillon de la cannule , que la comprefié feneftrée
laiffe libre. On fent que cette opération ne remédie
qu'au danger de la fuftocation , qui eft l'accident le
plus urgent ; il faut donc continuer les fecours capa-
bles d'en détruire les caufes. Voye7^ Esquinancie.
Quand les accidens font pafles , on retire la can-
nule , & on panfe la plaie à plat ; elle fe réunit com-
me une plaie fimple.
L'opération de la bronchotomie convient auffi lorf-
qu'il y a des corps étrangers qui font tellement en-
gagés dans le pharynx ou dans l'cefophage, qu'on n'a
pu par aucun fecours les retirer ni les enfoncer, ÔC
que ces corps étrangers font d'un volume confidéra-
ble qui comprime la trachée artère , 6c met le malade
dans le danger d'être fuffoque. Habicot maître Chi-
rurgien en l'Univerfité de Paris , dans un traité inti-
tulé , Quejiion chirurgicale fur la pojjibilité & la nécejfué
de la bronchotomie , rapporte avoir fait avec fuccès
cette opération à un garçon de 14 ans , qui ayant
oiii dire que l'or avale ne faifoit point de mal , vou-
lut avaler neuf piftoles enveloppées dans un iinge,
pour les dérober à la connoiffance des voleurs. Ce
paquet qui étoitfortgios , ne pût paffer le détroit du
pharynx ; il s'engagea dans cette partie de manière
qu'on ne put le retirer ni l'enfoncer dans l'eftomac.Ce
jeune garçon étoit fur le point d'être fuffoque par la
compreflion que ce paquet caufoitàlatrachée-artere:
fon cou & fon vifage étoient enflés & fi noirs , qu'il
en étoit méconnoifiable. Habicot chez qui on por-
ta le malade , effaya envain par divers moyens de
déplacer ce corps étranger : ce Chirurgien voyant
le malade dans un danger évident d'être fuffoque ,
lui fit la bronchotomie. Cette opération ne fut pas
plutôt faite, que le gonflement & la lividité du cou
& de la face le difliperent. Habicot fit defeendre le
paquet d'or dans Feftomac par le moyen d'une fon-
de de plomb ; le jeune garçon rendit huit ou dix
jours après par l'anus fes neuf piftoles à diverfes re-
paies ; il guérit parfaitement & très-promptement
de la plaie de la trachée-artere. Voye^ Œsopha-
GOTOMIE.
La bronchotomie eft non-feulement néceffaire pour
faire refpirer un malade , comme dans le cas dont on
vient de parler , mais encore pour tirer les corps
étrangers qui fe feroient glifles dans la trachée-arte-
re. Dans cette dernière circonftance, il faut faire
une incifion longitudinale à la peau & à la graiffe,
comme nous l'avons dit au commencement de cet
article , 6c incifer enfuite la trachée-artere en long ,
de façon qu'on coupe tranfverfalement trois ou qua-
tre cartilages pour pouvoir failir & tirer le corps
étranger avec des petites pincettes ou autres inftru-
mens. Cette opération a été pratiquée avec fuccès
par M. Heifter pour tirer un morceau de champi-
gnon qui s'étoit glifl'é dans la trachée-artere, & M.
Raw , au rapport de cet auteur, a ouvert la trachée-
artere pour tirer une fève qui s'y étoit introduite.
On voit que dans ce cas on ne pounoit pas fe
contenter d'une feule ponction , & qu'il faut neceffai-
rcment faire une incifion ; la plaie à l'extérieur peut
même être étendue de trois ou quatre travers de
doigt , fi le cas le requiert.
La ponction , comme je l'ai décrite, eft moins avan-
I i i ii
436
BRO
ta^eufe & plus embarraiTante même dans le cas de
l'eTquinancie , que celle qui fe feroit avec un trocart
armé de fa cannule. On en a imaginé de petits qui
font très-commodes pour cette opération. ( Voyc^lci
fis. i. Pl.XXVlIIé) A leur défaut, on pourroit taire
faire une petite cannule fur l'extrémité du poinçon
d'un trocart ordinaire , en obfervant de le garnir de-
puis le manche jufqu'au pavillon de la cannule, afin
de ne fe fervir que de la longueur qui eft néccfiaire.
Je fonde la préférence de l'opération avec le trocart
fur une obfervation de M. Virgili Chirurgien-major
de l'Hôpital de Cadix , qu'on peut lire dans un Mé-
moire de M. Hevin, fur les corps étrangers arrêtés
dans l'œiophage , initré dans le premier volume deceux
de r Académie royale de Chirurgie. Un lolclat Eipa-
gnol prêt à être luffoqué par une violente inflamma-
tion du larynx & du pharynx fut porté à l'hôpital de
Cadix ; M. Virgili jugeant que l'unique moyen de
lui fauver la vie étoit de lui faire fur le champ la bron-
choromie, ne crut pas , par rapport au grand gonfle-
ment , devoir préférer la fimple ponction à la tra-
chée-artere ; il fit une incifion aux tégumens avec le
biltouri , fépara les mufcles fterno-hyoidiens , & ou-
vrit tranfverfalement la trachée-artere entre deux
anneaux. Cette ouverture ne fut pas plutôt taite, que
le fang qui fortoit des petits vaifieaux ouverts, &c
qui tomba dans la trachée-artere , excita une toux
convuliive fi violente, que .a cannule qu'on intro-
duira dans la plaie, ne put être retenue en iituation,
quoiqu'on la remît pluiieurs fois en place.
M. Virgili qui voyoit le danger auquel le malade
étoit expoié par le fang qui continuoit de couler dans
la trachée-artere , dont l'ouverture dans certains
mouvemens qu'excitoient les convulfions ne le trou-
voit plus vis-à-vis celle de la peau , fe détermina à
fendre la trachée-aitere en long julqu'au lixieme an-
neau cartilagineux. Apres cette leconde opération ,
le malade refpira facilement , & le poulx qu'on ne
fentoit prefque point , commença à reparoitre. On
fit lîtuer le malade la tête panchée hors du lit, la face
vers la terre , afin d'empêcher lelang deglilTer dans
la trachée-artere ; M. Virgili ajufta à la plaie une
plaque de plomb percée de plufieurs trous , & par les
foins le malade guérit parfaitement.
L'entrée du lang dans la trachée-artere a été la
caufe des accidens terribles qui ont prefque fait pé-
rir le malade dont on vient de parier. Une limple
ponction avec la lancette ne i'auroit peut-être point
mis dans la trifte extrémité où il a été réduit par le
moyen qu'on employoit pour lui lauver la vie ; la
ponction avec le trocart évite encore plus sûrement
î'hémorrhagie , parce que la cannule ayant plus de
volume que le poinçon qu'elle renferme, comprime
tous les vaifieaux que la pointe divile pour fon
P^ffage.
Cette opération a été pratiquée avec fuccès à
Edimbourg en EcofTe ; le malade en reçut d'abord
tout le foulagement qu'on avoit lieu d'elpérer : mais
la cannule s'étant bouchée par l'humeur que filtrent
les glandes bronchiques , le malade fait menacé d'une
fuffocation prochaine ; un miniftre homme de génie,
qui étoit près du malade , conleilla l'ufage d'une fé-
conde cannule , dont le diamètre feroit égal à celui
du poinçon d'un trocart. Cette cannule fut placée
dans la première ; & lorfque la matière des crachats
s'oppofoit au paffage libre de l'air , on retiroit cette
cannule , on la nettoyoit , Se on la remettoit en
place. Cette manœuvre étoit très-importante pour
le malade , & avoit l'avantage de ne lui caufer au-
cune fatigue. Je tiens cette obfervation de M. Elliot,
qui l'a oui raconter à M. Monro , célèbre profeffeur
en Anatomie 8c en Chinirgie à Edimbourg.
Enfin on a cru que la bronchotomie étoit un fecours
pour rappelier les noyés d'une mort apparente à la
BRO
vie : la perfuafion où Ton eft que les noyés meurent
faute d'air &c de refpiration , comme fi on leur eût
bouché la trachée-artere , eft Le motif de cette ap-
plication : mais il eft confiant que les noyés meurent
par l'eau qu'ils infpirent, Ôcdont leurs bronches font
remplies. J'ai prélenté un mémoire à l'Académie
royale des Sciences fur la caule de la mort des noyés,
oii je donne le détail de plufieurs expériences & ob-
fe:vations convaincantes fur ce point. J'ai noyé des
animaux dans des liqueurs colorées en préfence de
MM. Morand & Bourdelin que l'Académie avoit
nommés commiffares pour vérifier mes expériences,
& ils ont vu que la trachée-artere & les bronches
étoientabfolument pleines delaliqueur dans laquelle
j'avois noyé les animaux fujets de mes démonftra-
tions. (Y)
BRONNO , ( Géog. ) petite ville d'Italie, dans le
duché de Milan, dans le Pavélan, à 4 lieues de Pavie.
* BRONTEUS ,f.m. (AfyrA.) de b^cir» , tonnerre;
ainii Jupiter bronceus, n'eft autre choie que Jupiter
qui lance le tonnerre.
BRONTIAS , ( Hifl, nat. ) c'eft une pierre que
l'on nomme auffi batrachite ôc chelonite ; on prétend,
mais fans fondement, qu'elle tombe des nuages avec
la grêle : elle rellemble alTez aux boutons qu'on porte
fur les habits ; car un côté eft convexe, & l'autre eft
concave ; en defliis il part du centre à la circonfé-
rence dix rayons deux à deux : cette pierre eft fort
dure ; la couleur en eft d'un brun tantôt clair , tantôt
foncé ; il s'en trouve beaucoup en Danemark ; on
dit qu'elle eft plus greffe qu'un œuf de poule. Gef-
ner en compte fix elpeces , qui ne différent que dans
la couleur plus ou moins foncée. ( — )
* LRONZE, f. f. terme de Fonderie, eft compofé de f
de cuivre rouge , & d'y de jaune , pour qu'elle foit
plus douce & plus facile à travailler : cependant pour
la rendre moins loufflante & plus lolide , on met un
peu plus d'un tiers de cuivre jaune, auquel on joint un
peu d'étain fin , qui empêche la bronze de refroidir
trop vite, ôc lui donne le tems de parvenir dans les
parties extrêmes de l'ouvrage qui font oppofées au
fourneau. Le poids de la bronze qui doit être em-
ployée eft de dix fois celui des cires ; ainfi fur 500
livres de cire , il faut 5000 livres de bronze : cepen-
dant on ne rifque pas d'y en mettre un (même da-
vantage , à caule du déchet du métal dans la fon-
te, Se de la diminution du noyau au recuit.
Fonderie en bronze, ou art d'exécuter avec la
kron^e de grands ouvrages , comme les ftatues équef-
tres , que nous prendrons ici pour exemple, parce
qu'il lera facile d'y rapporter les autres morceaux de
ce travail.
Tous les arts ont une forte d'attelier qui leur con-
vient , foit par fa conftru&ion , foit par la difpofition
de fes parties; ôc c'eft aux ouvrages qu'on y travaille
à déterminer l'une ôc l'autre. Celui du fondeur en
grand eft un efpace profond revêtu de murs au pour-
tour, au centre duquel l'ouvrage à fondre eft placé.
L'étendue de cet efpace doit être proportionné à la
grandeur de l'ouvrage, & laiffer entre le moule de
potée & le mur de recuit un pié dediftance au moins.
Cet efpace s'appelle la. foffe. La foffe peut être ronde
ou quarrée : la foffe ronde fe fait à moins de frais,
parce qu'elle a moins de murs de pourtour , ôc elle
eft plus lolide , fur-tout quand elle eft enfoncée en
terre , parce que toutes les coupes de les pierres font
dirigées vers un centre. On la creufe au-deffous du
rez-de-chauffée , obfervant que la hauteur des eaux
dans les lieux circonvoifins foit au-deffous de fon
aire , pour éviter l'humidité , qui eft contraire dans
toutes les occafions où le feu eft employé à réfoudre.
C'eft dans la folle qu'on travaille le modèle , le mou-
le de plâtre , &c. lorfque les ouvrages font grands ,
8e qu'on rifqueroit d'en tourmenter les pièces çn les
BRO
transportant. Pour mettre les ouvriers & les ouvra-
ges à l'abri , on couvre la fofle d'un attelier provi-
sionnel de charpente.
Au-dedans de la ibfle eft un mur fait d'une matiè-
re capable de réfifter au feu : il laide de l'efpace en-
tre fon pourtour extérieur & le parement intérieur
de la foflc. Cet efpace fert pour retirer les cires ,
mettre le feu aux galeries, obferver fans inconvénient
fi le moule de potée & le noyau font bien recuits ;
& ce mur eft fait de grès ou de briques maçonnées
avec de l'argile au pourtour , vers le dedans de la
fofle. On peut le conftruire après coup ; il s'appelle
mur de recuit.
Les galeries font des efpaces vuides , féparés par
des murs de grès , élevés de deux affiles de leize pou-
ces d'épaifîéur chacune , d'un pié de hauteur, & ma-
çonnées avec de l'argile : elles font ménagées au fond
de la fofTe fur un maffif de deux rangs de briques ,
dont celles du premier rang font fur le plat , & celles
du fécond fur le champ. On diftribue les affifes de
grès de manière qu'il fe trouve un mur plein fous les
principaux fers de l'armature , comme les pointais ,
les jambes du cheval , &c. fi l'on fond une ftatue
équeftre. C'eft ainfi qu'on prévient leur inflexion ,
que la chaleur pourrait occaiionner. Il y afur les murs
des galeries de fortes plates-bandes de fer, entaillées
moitié par moitié aux endroits où elles fe croifent :
elles fervent de bafe à l'armature , & c'eft fur ces
barres que la grille eft pofée.
La grille eft un aflemblage de plufieurs barres de
fer plus ou moins efpacées , 6c couchées de niveau
en croifant les galeries. Son ufage eft i°. de foûtenir
le maffif fur lequel on élevé le modèle de plâtre ;
2°. de porter les briquaillons ; 30. de lier par en-haut
les murs des galeries, qu'on contient encore en ajus-
tant fur leur pourtour extérieur une embrafîure de
fer , bandée avec des moufles & des clavetttes.
Voye^fig. 1. PI. de la Fonderie en bronze, le plan de
la fonderie. A eft la fofîe ; B le fourneau; Cla chauf-
fe ; D les galeries ; E les plate-bandes de fer ; F l'é-
cheno ; G la grille ; i/les portes. Fig. z. le profil de
la fonderie par fa largeur. A le comble de l'attelier ;
B la folle ; C le fourneau ; D les galeries ; E , E , paf-
fages pour tourner autour du mur de recuit. Fig. J.
le profil de la fonderie par fa longueur.-^, A , le
comble de l'attelier ; B la fofle ; C le fourneau ; D
la chauffe ; E les galeries ; F partage pour tourner
autour des galeries. Fig. 4. les galeries & la grille.
A les galeries ; B les murs de grès des galeries ; C
la grille de fer ; D les plate-bandes ; E lieu des ga-
leries.
Le modèle eft en fonderie l'ouvrage môme dont
le métal doit prendre la forme. On fait les modèles
de différentes matières , félon la grandeur des ouvra-
ges : ils font de cire jufqu'à la hauteur de deux pies ;
d'argile ou de terre à potier , depuis deux pies juf-
qu'à hauteur d'homme ; 6c de plâtre , depuis ce ter-
me jufqu'à tout autre. On commence à faire un pe-
tit modèle, même quand il s'agit d'un grand ouvra-
fe : quand les formes, les grandes parties, l'enfem-
le, four arrêtés fur ce petit modèle, on fait des
études particulières de chacune de les parties; on
travaille enfuite au grand modèle. Comme il eft im-
portant que ce grand modèle refte tel qu'on le tra-
vaille , ci comme fes parties font très-peiantes , &
qu'on eft long-tems à les terminer , on les construit
avec beaucoup de folidité , & on les foûtient en-de-
dans fur un bâti de fer. Pour faire ce bâti , 6c don-
ner aux fers dont il eft afîèmblé les contours des par-
ties àfoûtcnir, on définie contre un mur l'ouvrage
dans toute la grandeur , fous trois points de vue , de
front 6c des deux côtés ; ce deflein dirige le forgeron.
Quand les fers font préparés , on les aflemble fur
une pièce de bois qui traverfe l'ouvrage dans fa Ion-
BRO
437
gueur , & l'on aflemble cette pièce de bois avec fon
armature de fer fur une autre qui porte folidement
dans les galeries , dans le maffif, & fur l'argile : c'eft
là-deflus qu'on forme le modèle avec du plâtre gâ-
ché le plus également qu'd eft poffible. Il ne faut
rien épargner pour la perfection du modèle ; car le
métal fluide prendra toutes les formes , & rendra fes
défauts ainfi que fes beautés.
Le modèle achevé , on travaille aux moules : on
en fait deux ; l'un en plâtre , qui donne le creux du
modèle ; & l'autre de potée 6c d'une terre compo-
fée , dont on verra dans la fuite l'ufage.
Pour faire le moule de plâtre , on commence par
déterminer les dimenfions de fes parties par des li-
gnes tracées fur l'aire de la foffe ; & ces lignes font
données de pofition & de grandeur, par des aplombs
qu'on laifle tomber des parties taillantes de l'ouvra-
ge. On prend autant de ces points qu'on en a befoin ;
6c quand ils ont déterminé le pourtour des affifes du
moule , on ajoute au-delà de ce pourtour exact quel-
ques pouces pour l'épaifléur même du moule : cette
addition donne une nouvelle figure femblable & cir-
conferite à la précédente. On a foin que les jointures
des affifes tombent aux endroits les moins remarqua-
bles, afin que les balevres occafionnés par les cires
foient plus aifés à réparer. La première affife fe pofe
fur l'aire de la grille , & à la hauteur du pié de l'ou-
vrage. On pafle à la féconde : il faut que les lits des
affifes foient bien de niveau, & que les pièces du
moule portent bien aplomb les unes fur les autres ;
elles en auront plus de folidité , & fe replaceront plus
facilement.
Entre les pièces de la première affife , il eft à pro-
pos qu'il y en ait une qui traverfe fans joint d'un des
paremens du moule à l'autre ; elle fervira de baie à
toutes les autres ; elle fera , pour ainli dire , le cen-
tre auquel on les rapportera. On ne manquera pas
de pratiquer aux différentes pièces du moule des en-
tailles ou hoches , 6c des faillies latérales , par le
moyen defquelles elles s'aflemblent les unes avec les
autres , & forment un tout folide.
Mais pour avoir ces parties , voici comment on
s'y prend. On huile bien le modèle, puis on lui ap-
plique du plâtre ; on prend les parties grandes , lar-
ges , & plates , tout d'un morceau ; pour les parties
creufes & fouillées , comme les draperies , on en fait
de petites pièces dans leiquelles on met des morceaux
de fi! d'archal , tortillés par le bout en lpirale ou an-
neau ; on pafle une ficelle dans cet anneau , & on
les lie avec une grande pièce qui les renferme , Si.
qu'on appelle leur chape ; quand on a pris toutes les
parties, on les laifle repoler & faire corps ; on les
marque pour en reconnoître l'ordre 6c la fuite , & on
les fépare du modèle , qu'on repare par-tout où cette
opération peut l'avoir gâté.
Voye^ Planche III. fig. z. le moule de plâtre qui
eft le creux du modèle de plâtre de la figure équef-
tre. 1 Entailles ou hoches creules ; 2 entailles ou ho-
ches de relief; 3 première affife du moule. Fig. J. le
plan de la première affife du moule de plâtre , où l'on
voit toutes les pièces du moule numérotées dans
l'ordre qu'elles ont été faites, depuis 1 jufqu'à 25;
26 pointais de l'armature de ter. Les autres affifes du
moule font faites dans la même intention , en oblcr-
vant d'affife en affife que les pièces du deflus foient
en liailon avec celles du deflbus.
Quand on a le moule en plâtre , on s'en fert pour
former un modèle en cire , tout femblable au mo-
dèle en plâtre : on donneàlacirerépailleurque l'on
veut donner à la bronze. Les anciens, dit M. de Bot-
frand , ne prenoient pas la peine de faire le premier
modèle de plâtre , qui fert à déterminer l'épaifléur
des cires ; après avoir fait leur modèle^ avec de la
terre à potier préparée , ou avec du plâtre , ils Bé-
438
BRO
corchoient,en enlevant par-tout l'épaiffeur qu'ils voû-
taient donner à la bronze ; de forte que leur modèle
devenoit leur noyau : ils failbient recuire ce noyau ,
le couvraient de cire, terminoient ces cires, railoient
fur ces cires terminées le moule de potée , & ache-
voient l'ouvrage comme nous : mais on ne fuit plus
cette méthode que pour les bas-reliefs , & les ouvra-
ges d'exécution facile.
Quant aux grands ouvrages , quand on a affemblé
toutes les pièces dans leurs chapes , on y met de la
cire autant épaiffe qu'on veut que la bronze le foit;
Cette épaifleur totale des cires varie félon la gran-
deur des ouvrages ; ôc*chaque épaifleur particulière
d'une pièce , fuivant la nature des parties de cette
pièce: on donne deux lignes d'épaiiléur aux figures
de deux pies ; un demi-pouce aux figures de gran-
deur humaine ; au-delà de ce terme il n'y a prefque
plus de règle. M. de Boffr'and dit qu'au cheval de la
fiatue équeflre de la place de Louis le grand , on rit
les cires maflives jufqu'au jarret, pour être maffives
en bronze , & qu'on donna un pouce d'épaifleur aux
cuiffes, dix lignes aux autres parties jufqu'à la tête,
& flx lignes à la queue.
Il faut que la cire dont on fe fert ait deux quali-
tés prefqu'oppofées ; celle de prendre facilement les
formes, & de les conferver après les avoir prifes.
Prenez cent livres de cire jaune , dix livres de téré-
benthine commune , dix livres de poix graflfe, dix li-
vres de fain-doux; mêlez, &c faites fondre fur un feu
modéré , de peur que la cire ne bouille , ne devienne
écumeufe , & ne foit difficile à travailler : vous au-
rez ainfi un mélange qui fatisfera aux deux conditions
que vous requérez.
Quand cette compofition fera prête, imbibez bien
les pièces du moule en plâtre d'huile d'olive, defain-
doux , & de fuif fondus eniemble ; prenez de la com-
pofition que j'appellerai cire , avec des broffes de poil
de blereau ; répandez-la liquide dans les pièces du
moule en plâtre ; donnez aux couches environ une
ligne d'épaifleur ; abandonnez enfuiîe la broffe ; fer-
vez-vous de tables faites au moule : ces moules font
à peu près femblables à ceux des Fondeurs de tables
en cuivre , où des tringles de fer plus ou moins hau-
tes fixées entre deux furfaces unies déterminent l'é-
paiffeur des tables ; ayez deux ais ; ajuftez fur ces
ais deux tringles ; amolliffez vos cires dans de l'eau
chaude ; maniez-les bien comme de la pâte ; éten-
dez-les avec un rouleau qui paffe fur les tringles ;
& mettez ainfl ces tables d'une épaifleur qui vous
convienne.
Prenez vos pièces en plâtre couvertes d'une cou-
che en cire; ratifiez cette couche ; faites-en autant à
une des furfaces de vos tables de cire ; faites chauf-
fer modérément ces deux furfaces écorchées, & ap-
pliquez-les l'une contre l'autre.
La quantité de cire employée détermine la quan-
tité de métal néceffaire pour l'ouvrage. On compte
dix livres de métal pour une livre de cire , non com-
pris les jets , les évents , & les égoûts. M. de Bof-
rrand dit qu'on employa pour la ftatue équeflre de
la place de Louis le grand ,5326 livres de cire ; ce
qui demandoit par conféquent 53 260 livres de métal
non compris les jets' , les évents , & les égoûts.
Quand on a donné à toutes les cires les épaiffeurs
convenables , on démolit le modèle en plâtre , en le
coupant par morceaux , qui fervent eniuite à répa-
rer les cires. On remonte toutes les aflifes du moule
jufqu'à la moitié de la hauteur du cheval, s'il s'a-
git d'une ftatue équeflre; & on établit au-dedans &
au-dehors des aflifes l'armature du noyau.
L'armature eft un affemblage des différens mor-
ceaux de fer deftinés à foûtenir le noyau & le mou-
le de potée d'un grand ouvrage de fonderie : entre
ces fers , les uns relient dans le corps de l'ouvrage
BRO
fondu , d'autres en font retirés après la fonte : dans
une ftatue équeflre, ceux qui paffent d'un flanc à
l'autre du cheval , qui defeendent dans la queue , &C
qui paffent dans les jambes , font affemblcs à de-
meure ; les fers des jambes s'étendent même à trois
pies au-delà des pies du cheval , &C font fcellés dans
le corps dupié-d'eftal.
Voye^Jigun 1. Plan. III. l'armature de fer qui a
été faite dans le corps du cheval , avec les pointais
& piliers butans pour foûtenir la figure équeflre.
Le noyau eft un corps folide qui remplit l'efpace
contenu fous les pièces du- modèle en cire, quand
elles font afiêmblées : la matière qui le compofe doit
avoir quatre qualités ; la première , de ne s'étendre
ni refferrer fous les cires ; la féconde , de réfifler à
la violence du feu , fans fe fendre ni ne fe tourmen-
ter ; la troifieme, d'avoir du pouf, c'eft-à-dire , de
réiifter au métal en fuflon , & de céder au métal fe
réfroidiffant ; la quatrième , de ne lui pas être ana-
logue , c'efl-à-dire, de ne le point boire, & de ne
point lui être contraire, ou de ne le point repouffer ;
ce qui occafionneroit dans le premier cas des vuides,
& dans le fécond des foufflures.
Mêlez deux tiers de plâtre , avec un tiers de bri-
ques bien battues & bien faffées, & vous aurez la
matière requife. On mélange , on gâche cette ma-
tière , & on en coule dans les aflifes du moule quand
l'armature efl difpofée , allant d'affilés en aflifes juf-
qu'au haut de la figure. Il efl cependant à propos de
favoir qu'on obferve différens mélanges , & que le
noyau des grandes figures n'eft pas tout entier de la
même matière. Dans la formation du noyau de la
ftatue équeflre dont jai déjà parlé , les jambes qui por-
tent, devant être folides , n'eurent point de noyau:
on fit la queue, la jambe qui eft levée, la tête, le cou,
&c. de plâtre èc de briques battues & faffées ; le corps
du cheval d'un mélange de deux tiers de terre rouge
& fabloneufe , qu'on trouve derrière les Chartreux,
& qui paffe pour la meilleure de l'Europe pour ces
fortes d'ouvrages , 8c d'un tiers de crotin de cheval
& de bourre paffés par les baguettes.
Avant que de commencer le noyau, on paffe des
verges de fer en botte entre les vuides des grands
fers de l'armature , auxquels on les attache avec de
gros fil d'archal ; ces verges tiennent les terres du
noyau en état : on laiffe cependant des trous pour
palier la main & ranger les gâteaux de terre. Sous les
parties inférieures, comme le ventre d'un cheval,
où les ter/es tendent à le détacher de tout leur poids ,
on place des crochets en S qui les arrêtent. Quand
le noyau eft fait , on prend de la compofition du
noyau détrempée à une certaine confiftance ; on en
applique fur les cires avec les doigts , par couches
d'environ un pouce d'épaifleur , qu'on fait bien fé-
cher ; on continue ainfl de couche en couche , fe fer-
vant de gâteaux de la même compofition de quatre
pouces en quarré fur neuf lignes d'épaifleur, qu'on
applique fur leur plat avec la même compofition li-
quide , tk qu'on unit avec les couches qu'on a déjà
données aux cires , faifant toujours fécher nuit &
jour fans interruption , jufqu'à ce que les couches de
terre à noyau ayent au pourtour des cires environ fix
pouces d'épaifleur ; ce qui fuffira pour achever de
recouvrir tous les fers de l'armature. Mais avant que
ces fers foient recouverts , on pôle dans le noyau
un rang de briques en cintre , maçonnées avec de la
terre de la même compofition que le noyau ; ce qui
forme dans ion intérieur une forte de voûte. On a
foin de bien faire fécher les parties intérieures du
noyau , par des poêles qu'on difpofe en-dedans , en
y defeendant par une ouverture pratiquée à la crou-
pe , fi c'efl une ftatue équeflre ; & pour que le feu ne
foit pas étouffé , on pratique au noyau des cheminées
de trois pouces en quarré : ces cheminées font au
BRO
nombre de trois. Quand il eft bien fec , on acbeve
de le remplir très-exactement avec de la brique bien
feche, qu'on maçonne avec de la terre à noyau. S'il
lui arrive de le reflerrer Se de diminuer en léchant,
on le hache &C on le rende avec la même terre
dont on l'a conftruit. Pour s'alTûrer s'il eft iblide , '
on le trappe ; s'il lbnne creux , il «a quelqilc défaut ,
il n'eft pas plein.
Quand le noyau du cheval d'une ftatue équeftre
eft dans cet état , on élevé les affilés de la figure ;
on y ajufte les armatures , 6c l'on coule le reftant du
noyau avec la même compolition , oblervant de pra-
tiquer au-dedans de la figure des jets qui conduilént
le métal aux- parties coudées en montant : fans cette
précaution , ces parties relîeroient vuides.
Quand le noyau eiï achevé , on démonte toutes
les affilés , en commençant par le haut ; on foûtient
par des piliers butans les traverfes principales de l'ar-
mature , qui percent les cires à mefure qu'on les dé-
couvre : on dépouille enfuite toutes les pièces de ci-
re ; on pratique fur le noyau des repaires , pour les
mettre à leur place ; on les place , 6c on a une figure
en .cire toute femblable au modèle.
Pour fixer les cires fur le noyau , on y enfonce
d'efpace en efpace des clous à tête large , fur leiquels
on conftruit une efpece de treillis avec du fil d'archal.
Ce treillis fert à foûtenir les cires. On les lie encore
entr 'elles avec de la cire chaude , qu'on coule dans
leurs jointures , enforte qu'il ne refte aucun vuide.
On achevé alors de réparer les cires aftemblées ; car
on avoit déjà fort avancé le reparage, quand elles
étoient par pièces détachées. On fe fert dans cette
manœuvre de l'ébauchoire & d'une toile dure & neu-
ve , imbibée d'huile , avec laquelle on fuit les con-
tours du nud & des draperies : on pofe enfuite les
. égoûts des cires , les jets & les évents.
Les jets , les évents , 6c les égoîits des cires font
des tuyaux de cire que l'on pofe fur une figure après
que la cire a été reparée. Ces tuyaux de cire étant
enfuite enduits de la même terre que le moule , for-
ment fur toute la figure & dans le moule de potée
des canaux à trois ufages : les uns fervent d'égoûts
aux cires , & f e Comment égoûts ; les autres condui-
fent le métal du fourneau à toutes les parties de l'ou-
vrage, & s '-appellent /'«.s; les autres font des évents
qui font une iiiue à l'air renfermé dans l'efpace qu'oc-
cupoient les cires , & retiennent le nom $ évents. Sans
cette précaution , l'air comprimé par le métal à me-
fure qu'il defeendroit , pourroit faire fendre le moule.
On fait les tuyaux de cire , creux comme des cha-
lumeaux; ce qui les rend légers, & emporte moins
de cire que s'ils étoient folides. Voici comment on
les coule. On a" des morceaux de bois tournés du dia-
mètre qu'on veut donner à ces canaux , & de deux
pies de long ou environ : on conftruit fur ces petits
cylindres un moule de plâtre de deux pièces égales ,
& fermé par un des bouts : on l'imbibe bien d'huile ;
on le remplit de cire : quand il eft plein , on le fecoue
bien : à l'approche du plâtre , la cire fc fige : on ren-
verfè ce qui n'eft pas figé : il refte une douille creufe ,
à laquelle on donne l'épaifteur qu'on veut, en recom-
mençant de remplir de cire &C de renverfer.
Quand ces douilles ou tuyaux font préparés en
quantité fuffifante , on les difpofe fur la figure à deux
pouces de fa furface. On commence par les égoûts
de cire , qui fervent par la fuite de jets : ils font foîi-
tenus autour de l'ouvrage par des attaches ou bouts
de tuyaux menus , fondés par un bout contre les ci-
res de l'ouvrage, 6c de l'autre contre les égoûts. Il
faut des égoûts à tous les endroits qui ont une pente
marquée. Il y en a aux ftatues équeftres à chaque
pié du cheval, à chaque pie de la figure , à la queue
du cheval, deux fous le ventre : on pofe enfuite &
de la même manière , les jets &. les évents.
BRO
439
Chaque ouvrier a fa manière d'attacher. La bon-
ne , c'eft d'incliner les attaches des jets en dépen-
dant vers la figure , & par conféquent de couler la
figure par le haut. Le diamètre des jets , des égoûts ,
&des évents, eft déterminé parla grandeur de 1 ou-
vrage. Ils avoient les dimenfions luivantes dans la
fonte de la ftatue équeftre de Louis XIV. dont nous
avons déjà parlé. Les trois principaux jets , trois pou-
ces quatre lignes de diamètre ; les jets moins forts ,
21, 18, 15, 12, 9 lignes; les évents par le haut, 30
6c 24 lignes de diamètre , & en delcendant , 13,12,
9 lignes : ies égoûts avoient les mêmes dimenlions
que les évents.
Quand on a poufTé l'ouvrage jufqu'au point oit
nous venons de le conduire , on travaille au moule
de potée & de terre. On prend trois fixiemes de terre
de Châtillon , village à deux lieues de Paris , qu'on
mule avec une fixieme partie de fiente de cheval ; on
a laifle pourrir ce mélange dans une foffe pendant
un hyver. A ce mélange , on ajoute enfuite deux fi-
xiemes de creuiets blancs & palïés au tamis. On dé-
trempe le tout avec de l'urine ; on le broyé fur une
pierre ; on en fait ainft une potée très-fine. On com-
mence par en mettre fur la cire, avec une broffe , qua-
tre couches mêlées de blanc d'œuf ; puis on mêle un
peu de poil fouetté & parle par les baguettes , avec la
compolition précédente. On donne avec ce nouveau
mélange vingt-quatre autres couches ; oblervant de
ne point appliquer une couche que la précédente ne
foit bien feche : le moule prend ainft environ un de-
mi-pouce d'épaifTeur. On ajoute alors à la compoli-
tion nouvelle moitié de terre rouge , de même qua-
lité que celle du noyau , ayant foin de remplir les
creux & autres lieux étroits oit la brode n'a pu pé-
nétrer, avec cette compolition un peu épailïe. Le
moule a , à la quarantième couche , environ deux
pouces d'épaifTeur. On met alors fous la figure , s'il
en eft befoin , fous le ventre du cheval , fi c'eft une
ftatue équeftre , des barres menues de fer plat , croi-
fées les unes fur les autres , entrelacées de fil de fer,
& attachées aux gros fers de l'armature du noyau ,
qui percent les cires. Ces barres lervent à foûlever
les parties inférieures du moule , 6c à les empê< her
de fe détacher des cires. On pratique le même ban-
dage fur le refte de la figure, par-tout 011 l'on craint
que le moule ne fléchifTe. On couvre ce premier ban-
dage de terre rouge feule , délayée avec la bonne
qu'on couche avec les doigts , jufqu'à ce que le mou-
le ait environ huit pouces d'épaifTeur par bas , 6c ûx
pouces par haut.
Il faut avoir foin , avant que de commencer le
moule de potée , de couper la cire en quelques en-
droits , afin d'avoir une ouverture à la bronze pour ti-
rer du dedans de la figure les fers fuperflus de l'ar-
mature avec le noyau. En ces endroits on joint les
terres du noyau avec le moule : mais on pratique
des rebords de cire , dont le métal remplira l'efpace ;
ce métal débordant fera rabattu dans la fuite , 6c fer-
vira à boucher l'ouverture pratiquée.
Cent cinquante couches achèvent l'épaifTeur du
moule, fur lequel on pôle enfuite des bandages de
fer pour le rendre folide , & empêcher que la terre
qui perd de la force par le recuit , ne s'éboule. Ces
bandages font de fers plats , clifpofes en réfeau : toute
la figure en eft couverte. On en remplit les ;
de terre & de tuileau. On place les tuileaux aux cv
droits où les fers du bandage ne touchent pas le mou-
le. Sur ce bandage , on en pofe un fécond , de maniè-
re que les fers qui tonnent les mailles ou quarres de
ce lecond , croilent^c coupent les mailles ou quar-
res du premier. On remplit pareillement les endroits
où ces barres ne touchent pas le moule , de terre &
de tuileaux ; & le refte des mailles , de la mêrn; terre.
Dans toutes ces opérations , le moule a pris dix pou?
44°
B R O
ces d'épaiffeur par bas , & fept par en haut.
On voit,/"-, i. PI- III- à la partie antérieure, la
figure équeftre de cire , avec les jets, les évents , Se
tes égoùts de cire, i , jets ; 2 , évents ; 3 , égoûts de
cire ; 4 , attaches ; à la partie postérieure , le ban-
dage de fer plat.
On longe alors à recuire le moule Se à faire fortir
les cires, car elles tiennent la place du métal ; pour
cet effet on conftruit le mur de recuit ; on le fait
d'affilés de grès Se briques pofées avec du mortier
de terre à four , afin qu'il rélifte à la violence du feu.
Sa première affilé eft fur le maffif du fond de la foffe ,
d'où il s'élève jufqu'au haut de l'ouvrage. Son pare-
ment intérieur eft environ à dix-huit pouces de dif-
tance des parties les plus faillantes du moule de po-
tée. On laide à ce mur , des ouvertures correspon-
dantes aux efpaces pratiqués entre les murs des ga-
leries , pour allumer le feu Se l'entretenir. Ces ou-
vertures le bouchent avec des plaques de tôle , afin
de conferver la chaleur.
Quand une foffe eft affez grande , le mur de re-
cuit eft ifolé , & on en fait le tour aifément. Sur la
grille qui couvre les galeries , on conftruit avec de
la brique blanche de Paffy, de petits murs de qua-
tre pouces d'épaifieur par arcade , en tiers point ,
efpacés de quatre pouces. On remplit le refte de l'ei-
pace du mur de recuit Se du moule , de briquailions ,
rangeant les plus petits vers le moule , & les plus gros
vers le mur. On loùtient les ters de l'armature par
des piliers de brique. A mefure que les briquailions
s'élèvent, on place à l'iffue des égoùts des conduits
de tôle qui traverfent le mur de recuit Se conduilent
tes cires. Pour s'aiîurer li ie moule Se le noyau font
lùffifamment recuits , on les perce avec une tarriere
en différens endroits ; Se on place dans les trous des
tuyaux de tôle , qui parlent auffi à-travers le mur de
recuit, Se par leiquels on peut voir le moule Se le
noyau , Se juger du recuit à la couleur. On conduit
encore- à-travers les briquailions, de petites chemi-
nées de trois à quatre pouces en quarré , qui mon-
tent du haut en bas de la foffe : elles donnent iffue à
la fumée. On élevé les principaux jets Se évents ,
avec des tuyaux de tôle ; & l'on couvre toute la
face fupérieure de la foffe Se des briquailions , d'une
couche d'argile d'environ trois pouces d'épaiffeur.
Cela fait , on allume un petit feu dans trois gale-
ries de chaque côté. Ce feu dure un jour & une nuit.
On l'augmente de celui qu'on fait enluite dans deux
autres galeries : on continue ainfi de galeries en gale-
ries ; finiffant par celles qui font les plus voinnes de
la figure , ou de fes parties faillantes. On continue
pendant neuf jours de fuite ce feu de charbon mo-
déré. Les cires coulent deux jours après que le feu
a été allumé. On en avoit employé pour la ftatue
équeftre de la place de Louis le Grand ,5568 livres ,
tant en ouvrage qu'en jets , égoùts , Se évents ; Se
il n'en eft forti en tout que 2805 livres: le déchet
s'eft perdu dans le moule , dans le noyau , Se en
iiirnée.
Quand on s'eft apperçu que le moule a rougi , on
difeontinue le teu peu à peu , puis on le ceffe entiè-
rement : mais le moule & le noyau reftent encore
îong-tems chauds. On attend qu'ils foient refroidis
pour travailler àl'enterrage & à la fonte.
On commence par debarralîér entièrement la foffe
de tout ce qui remplilloit les galeries Se Fefpace qui
eft entre le mur de recuit Se le moule. Enluite on pro-
cède a Penterrage , ou au maffif de terre dont on rem-
plit la foffe autour du moule : on comble d'abord les
galeries jufqu'à la hauteur de la grille , de moelons
maçonnés avec deux tiers de plâtre, Se un tiers de
terre cuite & pilée. On fait enluite un lolide fous les
parties inférieures de la figure, du ventre du cheval,
û c'eft une ftatue équeftre ; ce lolide eft de briques
B R O
maçonnées auffi avec le mélange de plâtre & de ter-
re cuite Se pilée. On terme toutes les ouvertures des
murs de la foffe ; on achevé de la remplir jufqu'à deux
pies au-deffus du moule avec de la terre ferme ; on
met cette terre par couches de fix pouces d'épaiffeur,
qu'on réduit à quatre avec des pilons de cuivre : mais
de peur que l'humidité de cette terre ne nuife au mou-
le, on y répand un peu de plâtre paffé au las. On
avoit même goudronné le moule depuis le bas jufqu'à
la moitié de la figure , dans la fonte de la ftatue
équeftre de la place de Louis-le-grand.
A mefure que l'enterrage s'avance, on bouche les
iffues des égoùts Se les trous de tarriere, avec des
tampons de terre : quant aux jets Se aux évents , on
les élevé avec des tuyaux de même compolition que
le moule de potée ; on fait bien lécher ces tuyaux
avant que de les employer ; on les conduit jufqu'à-
l'écheno.
L'écheno eft un baffin dont nous parlerons plus
au long , où aboutiffentles principaux jets , & dans
lequel paffe le métal liquide au lortir du fourneau,
pour le précipiter dans les jets dont l'entrée eft en en-
tonnoir. Ces entonnoirs font bouchés avec des bar-
res de fer arrondies & de même forme , qu'on appelle
qumouilktus .
Tout eft alors difpofé pour la fonte dans la foffe ;
il ne s'agit plus que d'avoir un fourneau pour met-
tre la matière en fufion : on commence par conftruire
un maffif profondément en terre, lur lequel on alîied
le fourneau de manière que l'atre en loit à peu près
trois pies plus haut que le fommet de la figure à jet-
ter; Se fur Farrafe des murs, on a élevé en pans de
bois trois côtés de l'attelicr; pour le quatrième côté
qui regarde la chauffe du fourneau , il eft conftruit de
moelon , Se c'eft un mur. Le fourneau doit être le
plus près qu'il eft poffible de la foffe; c'eft pourquoi,
en conftruifant le maffif du fourneau qui forme un
des côtés de la foffe , on y a fait deux renfoncemens
en arcades , avec un pilier au milieu , derrière lequel
on a pratiqué un paffage voûté, pour communiquer
d'une arcade à l'autre. Le parement du pilier du côté
de la foffe a été fait avec des affilés de grès pour ré-
futer au feu , qu'il devoit fupporter comme partie du
mur de recuit.
C'eft la quantité de métal néceffaire à l'ouvrage,
qui détermine la grandeur du fourneau ; & c'eft, com-
me nous l'avons déjàinfinué, la quantité des cires
employées, qui détermine la quantité du métal. Il
fallut pour la ftatue équeftre de la place de Louis-le-
grand , tant pour les égoùts, évents, jets , que pour
le noyau, 6071 liv.de cire, ce qui demandoit 60710
livres de métal, à quoi l'on ajouta 22941 livres de
métal , à caufe du déchet dans la fonte , de la dimi-
nution du noyau au recuit, Se pour en avoir plutôt
de refte que moins.
Quand on a la quantité de métal que le fourneau
doit contenir, on cherche quel diamètre & quelle
hauteur de bain de métal il doit avoir. Dans la fonte
de la ftatue équeftre qui nous lert d'exempte, fa-
chant qu'un pié cube de métal allié pelé 648 livres,
on divila 83652 par 64S, Se l'on trouva qu'il fal-
loit que le fourneau contînt 129 pies cubes ^°g. On
prit te diamètre du fourneau pour cette fonte de dix
pies neuf pouces en quarré, fur feize pouces Si de-
mi de hauteur, ce qui donne 129 pies cubes.
Le fourneau doit être percé par quatre ouvertu-
res , une du côté de la chauffe par laquelle la flam-
me entre dans le fourneau , & qu'on appelle Ventrée
de la chauffe; une à l'autre extrémité vers la foffe par
laquelle le métal fondu fort : deux autres qu'on nom-
me portes, font parles deux côtés. Elles fervent pour
pouflér le métal dans le fourneau, Se pour le remuer
quand il fond. On pratique encore deux ou quatre
ouvertures dans la voûte, qui font comme les che-
minées,
BRO
mîîïées-, Se qu'on tient couvertes ou libres feîon le
beibin. ,
A côté du fourneau, à l'oppofite de la foffe, on
fait la chauffe. Cerf, un efpace quarré dans lequel
on fait le feu, & d'où la flamme elt portée dans le
fourneau. Le bois y eft polé fur une double grille qui
fépare fa hauteur en deux parties : l'inférieure s'ap-
pelle le cendrier. On retire les cendres par une porte
ouverte du côté du nord ; parce que le feu qui met
le métal en fufion , étant de réverbère , il eft avan-
tageux que l'air qui paffe par cette porte , & qui le
fouffle , toit un vent froid qui donne ai* feu de l'ac-
tivité.
Le fondement du fourneau ayant été fait folide ,
on pofe l'atre à la hauteur néceffaire pour qu'il ait
pente vers l'écheno. On donna dans l'exemple de
grande fonderie dont nous nous fommes fervis , à l'a-
tre douze pies neuf pouces de diamètre, pour que le
mur du fourneau portât en recouvrement un pié def-
fus au pourtour avec trois rangs de briques, les deux
premières fur le plat , & la troifieme de carreaux de
Sinfanfon, proche Beauvais en Picardie, de huit pou-
ces en quarré, pofés de champ, & maçonnés avec
de la terre de même qualité que celle de noyau. Cet
atre avoit une pente de fix pouces depuis la chauffe
jufqu'au tampon , 6c un revers de trois pouces de pen-
te depuis' les portes jufqu'au milieu, ce qui formoit
un ruifTeau dans le milieu , pour en faire écouler le
métal.
Au-deffus de l'atre, on confinait les murs & la voû-
te du fourneau avec des briques gironnées, c'eft-à-
dire , plus larges & plus épaules par un bout que par
l'autre , de la tuilerie de Sinfanfon, pofées en coupe
fuivant le pourtour & le diamètre de la voûte , ma-
çonnées avec de la terre , 6c garnies par derrière de
briques du pays , pofées avec de la terre en liaifon
& en coupe.
Le trou du tampon eft en façon de deux cônes unis
par leurs bouts tronqués ; on bouche celui qui eft du
côté du fourneau, avec un tampon de fer de la figure
de l'ouverture qu'il doit former, & de la terre qui
remplit les joints : le tampon étant en cône, 6c bou-
chant par fa pointe , le métal ne peut le chaffer. Ce
trou de tampon eft pratiqué dans Ion parement avec
lin rang de briques de Sinfanfon , garni par derrière
de briques du pays , pofées en terre , de même que
tes portes du fourneau.
La chauffe & fon ouverture doivent être d'un con-
tour aile & allongé , afin que la flamme aille fans em-
pêchement frapper au trou du tampon, d'oii elle fe
répand 6c circule dans le fourneau. Au haut de la
voûte de la chauffe il y a un trou par où l'on jette le
bois ; on bouche ce trou avec une pelle de fer qui
gliffe entre deux couliffes de fer au-deffus de cette
ouverture. Dans l'épaiffcur du mur du fourneau du
côté de la chauffe , on met une plaque de fer fon-
du de quatre pies de long, qui defeend huit pouces
plus bas que l'atre du fourneau, à un pié de diftance
du parement du mur de la chauffe , de crainte que li
le feu fàifoit quelque fradure aux murs du fourneau,
le métal ne s'écoulât dans la chauffe. Par la même
raifon on fortifie le fourneau en tout fens avec des
brans de fer qui paflent fous l'atre, & fur la voûte
du fourneau, 6c qui font pris par leurs bouts dans
des ancres de fer qui f ailifîent d'autres barres pofées
de niveau fur les paremens des murs du fourneau.
Les ouvertures du comble qui donnent du jour
dans ces atteliers doivent être en lucarnes damoifél-
les , c'eft-à-dire plus élevées fur le devant que fur
le derrière, afin de donner plus de jour, & laiffer
plus facilement échapper la fumée, ''.ni.; PL H.fig.
.5. plan du fourneau où Ton fait fondre la bron?e;jly
le fourneau ; B , portes ; C, la chauffe: D , la grille ;
JE , le conduit à L'écheno; F, l'écheno,//:,'. 6. profil
Torm II.
BRO
441
du fourneau ; i , le fourneau ; i , les portes ; 3 , la
chauffe; 4 , la grille ; 9 , ouverture pour jetter le bois
dans le fourneau ,Jïg. y. profil du fourneau en lar-
geur ; 1 , 1 , le fourneau ; 2 , les portes ; 3 , la chauffe,
12, 1 2 , les cheminées.
Voilà les règles générales pour la conftrudion d'un
fourneau ; l'expérience 6c le bon fens apprendront au
Fondeur , quand & comment il doit ou les modifier ou
s'en écarter.
Lorfque le fourneau pour la ftatue équeftre de la
place de Louis-le-grand fut conlt ruit , comme nous
avons dit , on fît trois épreuves à la fois ; Tune de la
bonté du fourneau ; l'autre fur la durée du métal en
état de fufion , & la troifieme fur la diminution pen-
dant la fonte. On y fondit 19090 livres de vieilles
pièces de canon, lingots de cuivre moitié rouge,
moitié jaune ; le mélange fut mis en fufion en vingt-
quatre heures, coula près de 50 pies de longueur à
l'air fans fe figer, & l'on n'en retira que 1 5714 livres
nettes. Le déchet venoit de l'évaporation du métal
jaune , & de la perte de la quantité dont l'atre neuf
s'étoit abreuvé.
L'alliage ordinaire de la bronze pour les figures eft
de deux tiers de cuivre rouge , & d'un tiers de cuivre
jaune ; mais on rendra la bronze plus folide 6c moins
foufflante , fi l'on met un peu plus de cuivre jaune.
On prit pour la grande fonte de la ftatue équeftre de
la place de Louis-le-grand , en lingots de la première
fonte, 1 5714; en culaffes de vieilles pièces de canon,
6 1 88 ; en lingots faits de deux tiers de cuivre rouge
& d'un tiers de cuivre jaune, 4860; en autres lingots
de cuivre , moitié rouge & moitié jaune , 45 1 29 ; en
métal rouge , 3 5 3 9 ; en métal jaune, 3 500 ; en lingots
provenant de la fonte de la ftatue de Sextus Marins,
2820; enétain fin d'Angleterre, 2002. Total, 83752.
Pour commencer la fonte , on couvre l'atre du
fourneau de lingots élevés par bouts les uns fur les
autres , afin que la flamme puiffe circuler entr'eux.
On allume le feu dans la chauffe avec du bois fec.
La flamme eft portée dans le fourneau par l'ouver-
ture de la chauffe , 6c s'y répand. Quand les premiers
lingots font en fufion , on continue d'en mettre d'au-
tres qu'on a tenu expofés au l'eu fur les glacis des por-
tes du fourneau , d'oii ils coulent quelquefois d'eux-
mêmes en fufion dans le fourneau. Si on les y jet-
toit froids , ils feroient figer le métal en fufion , qui
s'y attacherait, & formeroit un gâteau. Ce n'eft pas-
là la feule manière dont le gâteau fe puiffe faire.
L'humidité d'une fumée épaiffe qui fe répandroitdans
le fourneau ; le rallentiffement de la chaleur d'un feu
mal conduit ; la moiteur d'un mauvais terrein , &c.
fuffifent pour caufer cet accident, à la fuite duquel
il faut quelquefois rompre le fourneau , retirer le mé-
tal, le divifer &c le remettre en fonte.
Quand tout le métal elt fondu , on continue le feu;
& on ne le préfume affez chaud , que quand la flamme
du fourneau devient rouge , que quand les craffes fe
fendent à fa furface, & montrent en s'écartant d'elles-
mêmes un métal brillant comme un miroir, & qu'en
le remuant avec des pelles de bois , il s'en élevé une
fumée blanche : alors on débouche le fourneau en
enfonçant le tampon avec une barre de fer fufpen-
àuc , qu'on appelle perrier ; le tampon enfoncé , le
métal coule dans l'écheno qu'on a eu foin de tairo
bien chauffer. On levé les qucnouillettes parle moyen
d'une balcule , & le métal fe précipite dans les jets ;
on peut éfpérer du fuccès , quand il coule fans bouil-
lonner ni cracher, qu'il en relie dans l'écheno, ce qu'il
remonte par les évents. Pour la ftatue équeftre de
Louis XIV. le fourneau fut en feu pendant 40 heures ;
& il relia dans l'écheno 2 1 924 1. de métal. / '<;> . PL I.
l'attelier de la fonderie dans le tems que l'on fond le
métal dans le fourneau , cv que l'on coule la ligure
en bronze ; 1 , le fourneau ; 1, portes par lesquelles
K. k k
44*
B R O
on remue le métal dans le fourneau; 3 , cheminées
par lefquelles la fumée fort du fourneau ; 4, baf-
eules par lefquelles on levé & ferme les portes du.
fourneau ; *j , trou du tampon par lequel fort le mé-
tal pour couler dans l'écheno ; 6 , perrier avec lequel
on pouffe le tampon dans le fourneau pour en faire
fortir le métal, afin qu'il coule dans l'écheno. Ce
perrier eft fufpendu par une chaîne de fer; 7 , 7 , 7 ,
trois quenouilles dans l'écheno où elles bouchent les
entrées du métal , au haut des trois jets , par lefquels
le métal fe répand dans tous les jets de la figure ;
8, 8, bafcule pour lever en môme tems les trois qne-
nouillettes , afin que le métal entre dans les trois
principaux- jets; 9, 9, écheno en manière de bafïîn,
dans lequel coule le métal au fortir du fourneau ,
pour entrer dans les trois principaux jets en même
tems, quand on a levé les quenouillettes.
On laiffe repofer le métal dans le moule pendant
îrois ou quatre jours afin qu'il y prenne corps , &
quand la chaleur efl entièrement ceffée , on le dé-
couvre , &c l'on a une figure toute iemblable à celle
qu'on avoit exécutée en cire. On a pouffé la fonderie
û loin , que la cire n'étoit quelquefois guère plus nette
que ne l'eft l'ouvrage fendu ; & qu'on pourrait pref-
que fe contenter de le laver , & de l'écurer avec la
lie devin : mais les gens habiles qui font toujours dif-
ficilement contens d'eux-mêmes, retouchent les con-
tours de leurs figures. D'ailleurs il y a des trous à
boucher , des jets à couper , des évents & d'autres
fuperfluités à enlever; c'eft ce qu'on exécute avec
des cifeaux. On fe fert de la marteline pour déta-
cher une craffe qui fe forme fur l'ouvrage du mélan-
ge de la bronze même & de la potée , & qui eft plus
dur que la bronze même. La marteline eft une eipe-
ce de marteau d'acier pointu par un bout , & à dents
de l'autre , avec lequel on frappe fur l'ouvrage , pour
ébranler la craffe qu'on enlevé enfuite au ciieau. On
employé auffi le gratoir, le rifloir, & le gratte-boffe;
on achevé de nettoyer avec l'eau-forte,dont on frotte
l'ouvrage avec une broffe , ufant aufîi du gratoir &c
du gratte-boffe. On réitère cette manœuvre trois ou
quatre fois ; puis on écure avec la lie de vin.
Quant aux petits ouvrages , quand on en a ôté les
jets > on les laiffe tremper dans l'eau-forte pendant
quelque tems ; la craffe fe diffout & fe met en une
pâte qu'on ôte aifément.
On bouche enfuite les trous en y coulant des gout-
tes de métal. On appelle goutte, ce que l'on fond
après coup fur un ouvrage ; ces gouttes rempliffent
quelquefois les plus grands creufets.
Pour les couier, on taille la pièce en queue d'a-
ronde , en la fouillant jufqu'à moitié de l'épaiffeur de
la bronze. On y met de la terre que l'on modèle fui-
vant le contour qu'elle doit avoir , & fur laquelle on
fait un moule de terre , ou de plâtre & brique , au-
deffus duquel on pratique un évent & un petit godet
qui fert de jet pour y faire couler le métal ; on dé-
place enfuite cette pièce du moule , pour la faire re-
cuire comme le moule de potée ; &c après avoir ôté
la terre du trou où l'on doit couler la goutte, on re-
met cette portion recuite dans fa place , en l'atta-
chant avec des cordes à l'ouvrage , pour qu'elle y
foit jointe ; de manière que le métal ne puiffe s'écou-
ler. Après avoir fait bien chauffer le tout, on y cou-
le le métal , fondu très-chaud dans un creufet , en-
forte qu'il faffe corps avec la bronze : on pratique la
même chôfe aux fentes : mais fi elles fe trouvent dans
un endroit où il feroit difficile de jetter du métal • on
lime une pièce de la même étoffe que l'ouvrage , &
de la mefure de la fente , & on l'enfonce à force ,
après avoir entaillé cette fente en queue d'aronde ,
de la moitié de l'épaiffeur de la bronze.
On achevé enfin tout ce grand travail en vuidant
la pièce fondue de ion noyau; fi c'eft une ftatuè
B R O
équeflre , on defeend dedans par l'ouverture prat;*
quée au-deffus de la croupe : on retire une partie des
fers de l'armure & du noyau par le haut ; le refte
s'écoule par les ouvertures du ventre. On bouche bien
tous ces trous. Si on négligeoit ce foin , les ouvra*
ges venant à fe charger d'eau en hy ver ; & cette eau
defeendant dans les parties inférieures , dans les cuif-
fes & dans les jambes , elle pourrait s'y glacer, &
détruire les formes de ces parties , peut-être même
les ouvrir. On coupe les jets ; on enlevé au cifeau
les barbures ; on repare l'ouvrage jufqu'à ce qu'il
n'y ait plus fien à déiirer , & on le tire de la foffe ,
pour le placer fur fon pié-d'eftal.
Quels travaux, quelles dépenles, quelle induftrie!
Mais doit-on rien épargner quand il s'agit d'éternifer
la mémoire des fouverains qui ont rendu leurs peu-
ples heureux ? Pour les princes oififs ou médians
font-ils dignes des honneurs du bronze? Perdez-vous,
art divin , fous les règnes desClaudes , des Nérons ,
& des Caligulas , & ne vous retrouvez que fous les
règnes des Tites , des Trajans , &c des Antonins.
La ftatue équeftre élevée par la ville de Paris dans
la place de Louis le grand en 1699, efl le plus grand
ouvrage qui ait peut-être jamais été fondu d'un feu!
jet ; il a vingt-un pies de haut. Les ffatues équelfres
de Marc-Aurele à Rome , de Cofme de Medicis à Flo-
rence, d'Henri IV. & de Louis XIII. à Paris, ont
été fondues par pièces féparées. Il en eft de même de
la chaire de l'églife de S. Pierre de Rome ; cet ou-
vrage , qui a quatre-vingts pies de haut , eft fait de
pièces remontées fur une armature.
Les Egyptiens , les Grecs , ont connu l'art de fon-
dre : mais ce qui refte de leurs ouvrages , & ce que
l'hiftoire nous apprend des autres , n'eft que médio-
cre pour la grandeur. Le coloffe de Rhodes , ainfi que
quelques autres ouvrages qui nous paroiffent prodi-
gieux aujourd'hui , n'étoient , félon toute apparence,
que des platines de cuivre rapportées : c'eft ainft qu'on
a fait la ftatue du connétable de Montmorency , éle-
vée à Chantilly.
On peut exécuter de très-grands ouvrages d'un
feul jet : l'expérience qu'on fit du fourneau de la fta-
tue équeftre de la place de Louis le grand , prouve
que le métal en fufion peut couler à cinquante pies à
l'air fans fe figer ; c'eft ce que Landouillet n'ignoroit
pas. Quand on propofa de faire dans le chœur de
Notre-Dame de Paris un autel en baldaquin de bronf
^e de cinquante pies de haut, pour acquitter le vœu
de Louis XIII. cet habile fondeur, commiffaire de la
fonderie de Pracheiort , s'offrit de le fondre d'un feul
jet dans le chœur même de Notre - Dame , dans la
place où le modelé étoit fait , établiffant fes four-
neaux dans l'églife , enforte qu'il n'y eût eu aucun
embarras de tranfport. Ce projet étoit beau & pofîi-
ble , mais au-deffus des lumières de fon tems ; & l'on
pourrait dire que Landouillet naquit un peu trop-
tôt.
Lorfque M. le Moine , habile fculpteur , exécuta
la ftatue équeftre de Louis XV. pour la ville de Bor-
deaux , il y avoit 50 ans que celle de Louis XIV.
pour la ville de Paris avoit été fondue ; les mouleurs ,
les forgerons, & les fondeurs qu'on y avoit employés
n'étoient plus vivans ; & la pratique en étoit prefque
perdue , fans les mémoires & les deffeins recueillis
par M. Boffrand , & communiqués à M. le Moine :
ce fut à l'aide de ces mémoires que l'art de fondre
d'un jet des ftaîues équeftres fe retrouva. A l'égard
de la ftatue équeftre de Louis XIV. dont M. de
Boffrand a expliqué la fonte & les travaux dans un
ouvrage intitulé Dcfcription de ce qui a été pratiqué
pour fondre la ftatue équejlre , &c. la fculpture eft de
François Girardon , dont les ouvrages font l'éloge
mieux que je. ne pourrais faire ; 6c la fonte & fes
opérations ont été conduites par Jean Baltafar Kel-
B R O
B R O
1er ,SuifTe de nation , homme très-expérimenté dans
les grandes fonderie:.
* BRONZES , f. m. pi. ( Antiquit. ) les antiquai-
res donnent ce nom aux figures humaines , aux ani-
maux, aux urnes, aux tables, & en général à tout
morceau de fculpture , ou même d'architecture un
peu considérable , fondus de ce métal par les an-
ciens, & échapésaux ravages des tems.
On tire de ces morceaux des inftrudtions très-cer-
taines fur un grand nombre de faits. Nous en pofïé-
dons beaucoup ; & il n'y a aucun doute que le nom-
bre n'en fut beaucoup plus considérable , fi les plus
grands bronzes n'avoient été fondus dans les tems de
barbarie : alors on faiiifïbit avidement ces métaux ,
comme des matériaux dont le poids fallait tout le
prix.
Nous donnons auflî le nom de bronzes à toutes les
pièces un peu importantes que nous failons fondre
ce ce métal ; foit que ces pièces fôient des copies de
l'antique, foit que ce foient des fujets nouvellement
inventés.
BRONZER, c'eft appliquer le bronze fur les figu-
res & autres ornemensdebois , plâtre, ivoire, &c.
en forte que la bronze réfifte à l'eau. On prend du
brun rouge d'Angleterre broyé bien fin , avec de
l'huile de noix &: de l'huile graffe , on en peint toute
la figure qu'on veut bronzer, puis on laitfe bien fé-
cher cette peinture : quand elle eft bien feche , on y
donne une autre couche de la même couleur , qu'on
laiffe encore lécher ; après quoi l'on met dans une
coquille ou godet du vernis à la bronze {Voyc^ Ver-
nis à la bronze} , & avec un pinceau imbibé de ce
vernis , & que l'on trempe dans de l'or d'Allemagne
en poudre , on l'étend le plus également qu'il eft pof-
fible fur la figure qu'on veut bronzer. Au lieu d'or
d'Allemagne on peut prendre de beau bronze qui
n'oft pas li cher , 6c qui fait un bel effet : il y en a de
piufieurs couleurs. (/î)
BRONZER , terme d'ArquebuJîer & autres ouvriers en
fer, c'eft faire prendre au canon d'un fufil une cou-
leur d'eau. Les Arquebuficrs font chauffer ce canon
juiqu'à un certain point , le pofent dans les tenailles
en bois qu'ils aiTujettiffent dans Fétau , & le frottent
enfuite un peu fort avec la pierre fanguine , jufqu'à
ce que le canon ait pris la couleur.
BRONZER, terme de Chamoifeur ,PeauJJier, & Cor-
royeur , façon qui fe donne aux peaux de maroquin
& de mouton , par laquelle au lieu d'en former le
grain , on y élevé à la f uperficie une efpecc de bour-
re ou velouté , fcmblable à celle qu'on remarque fur
les bafannes velues. Le bronzé le fait toujours en
noir; c'eft avec les peaux qui ont été bronzées qu'on
fuit des fouliers & des gants de deuil, qu'on appelle
Jbuïurs bronzés y & gants bronzés. Voye^ CHAMOI-
SEUR.
* BROQUELEUR , f. m. ( Œconom. rujliq. ) e'eft
ainfi qu'on appelle un trou du diamètre de quatre à
cinq lignes, pratiqué fur le devant des tonneaux :
on le laifTe ouvert pendant dix à douze jours après
qu'un a bondonné les vins nouveaux; paifé ce tems,
on y place une cheville haute de deux pouces , qu'on
puifle ôter& mettre facilement, pour donner de
l'air au vin nouveau dans le cas qu'il vînt encore à
s'émouvoir. On fe fert de la même ouverture pour
remplir les tonneaux pendant deux ou trois femai-
nes , tous les huit jours une fois ; pendant un mois
ou deux , tous les quinze jours une fois ; & enfin tous
les deux mois une fois. On prétend qu'il faut être
très-exact à faire cv:> rempliflages dans les commen-
cemens , lorlque le \ in bouillonne encore , cv cher-
che à fedéban aller de fes impuretés ; cv qu'il ;
pas les négliger dans la fuite , le vin rellàt-il des an-
né* • entières dans la cave.
*BROQUETTE,f,f. ( C7cw«V.) c'eft la plus pe-
Tome II,
443
tire forte de cîous ; il y ër. a depuis quatre onces juf-
qua deux livres le millier : on donne le nom de bro-
qustte emboutie ou. cfiampée à ces dernières. Il y a une
greffe hoquette de trois livres au millier qui <e vend
au cent. Les hoquettes au-defïbus de celle-ci fe ven-
dent à la lbmme , qui eft de douze milliers. Voye^
Clou.
BROR A , ( Géog. ) ville de I'Ecdfle feptentrionaîe
dans le comté de Southerland , à l'embouchure de la
rivière de même nom.
BROSSA? A , f. f. ( Hifi. fiât. bot. ) genre de plan-
te dont le nom a été dérivé de celui de Guy de la
BrofTe, premier intendant du Jardin du Roi. La fleur
des plantes de ce genre eft monopétale,campanifor-
mc,Cvcependantrel!~emblant à un cône tronqué. Cette
fleur eft foûtenue fur un calice profondément décou-
pé , du milieu duquel il s'élève un piftil qui devient
dans la fuite un fruit compoie de cinq capfules , rem-
pli de femences menues > & renfermé dans le calice
de la fleur, qui devient charnu , mou, fphérique , 8c
qui eft ouvert par cinq fentes. Plumier, Nova plant.
Amer, gêner. Voye-^ Plante. ( / )
BROSSAILLES, f. m. pi, {Jardin. ) s'entend du
mauvais bois qui profite peu , tel que les haies , les
huilions , les ronces , les épines , bruyères , ferpo-
let, genêt, jonc marin, &c. (/i)
* BROSSE, f. f. fe dit en général île tout infini-
ment à poil, ou à fil d'archal , ou de laiton , qui fert
foit à nettoyer, foit à d'autres ufages femblables :
ce font les Vergettiers qui font les brojfes , & l'on en
diftingue un grand nombre de fortes , tant par la
forme que par l'emploi. Quant à la manière de le»
fabriquer , elle eft fort iimplc : on perce une planche
de piufieurs trous , on y infère les poils plies ; on ar-
rête ces poils dans les ouvertures par des ficelles ou
du fil d'archal qui les embraifent par le milieu ; on
couvre ces attaches de peau , de maroquin , &c. on
coupe les poils pour les égaiifer , & la brojfe eft faite.'
^OJ'^VERGETTE.
Brosse à l'apprêt , ce font des brojfes courtes qui
n'ont rien de particulier que cette forme. Elles fer-
vent dans toutes les occafions où le frottement de-
vant être violent , il faut que le poil ait une certaine
coniiftance.
Brosses de carrojfe , font celles qui font à queue ,
larges vers la poignée ou la queue , 2c allant toujours
en retréciflant jufqu'à l'autre bout, & dont on le fert
pour nettoyer le dehors & l'intérieur du carroffe.
Brosses à cheval, celles dont on le fert pour étril-
ler les chevaux & leur polir le poil : elles font à poil
de fanglier coupé court , & monté fur un bois rond,
avec une courroie par-deflus qui prend la main en-
tr'elle 6c le bois.
. Brosses à Chirurgien , celles dont quelque* Mé-
decins ordonnent l'ufage à ceux qui font incommo-
dés de rhùmatifmes , prétendant que cette efpece de
friction ouvre les pores , !k fait tranfpirer l'humeur
qui caufe la douleur.
Brosse à dent , eft celle dont le poil court eft atta-
ché dans les trous d'un lût d'os ou d'ivoire avec du
fil d'archal : elle efî aimï nommée parce qu'elle fert
à nettoyer les dents.
Brosse à trois faces , celle qui a trois faces , dont
chacune a ion ufage particulier. On s'en fert pour
brofler les tapilferies , le plancher , & les houiî'es
des lits. Elle eft faite de foie de fanglier.
Brosse d'Imprimerie, celle qui fert à laveries ter-
mes dans la lelîive , d'abord avant de les mettre fous
prefle, enfuite le loir quand la journée eft faite, Se
enfin quand le tirage eft fini. Cette brojfe eft grande ,
&c doit être de poil de fanglier.
BROSSES à ligner, font celles dont les Peintres fe fer-
vent peur tracer des moulures dans leurs tableaux,
& autres ornemens femblables. Voyez Pinceau.
Kkkij
444
B R O
BRO
Brosse à luftrer, celle dont les Galnlers fe fervent ,
à peu près comme des vergettes un peu douces , qu'ils
trempent dans de l'encre s'ils veulent luftrer leurs ou-
vrages en noir : ils en ont auffi pour les autres cou-
leurs.
Brosses à luftrer; celles dont les Chapeliers fe fer-
vent pour luftrer les chapeaux ; elles font de poil de
fanglier, &c de douze loquets fur fix.
Brosses à morue; elles font ainli nommées parce
qu'elles fervent à laver & deflaler la morue ; elles
lont faites de chien-dent , & ont huit loquets fur cinq.
BROSSE à borax, en terme d'Orfèvre en groj/erie,
celle qui fert à ôter le borax qui eft relié fur une
pièce qu'on a foudée. Voyc^ Dérocher.
Brosses à peigne ; celles dont on fe fert pour net-
toyer le peigne : elles font à queue , & rondes.
Brosse à Peintre, eft un gros pinceau de poil de
porc médiocrement fin , & garni d'un manche aflez
long. Les Peintres s'en fervent pour leurs grands ou-
vrages en détrempe & en huile.
BROSSES à plancher, font des broffes de quatorze fur
fept, c'efl-à-dire , qui ont de long quatorze loquets
ou paquets de foie , fur fept de large. On les appelle
broffes à plancher, parce que ce lont celles dont les
trotteurs fe fervent pour frotter les planchers : elles
font garnies d'une courroie pour mettre le pié , afin
que le frotteur puiffe les promener par -tout fans
qu'elles lui échappent du pié.
Brosse de Relieurs-Doreurs , elle eft d'une forme
ordinaire ; ces ouvriers s'en fervent pour nettoyer
leurs fers à dorer , &c en ôter la cendre qui peut y
être entrée en les faifant chauffer au fourneau.
BROSSE à Tapiffler. Voye^ Râteaux.
Brosses à tète, font des brojjès faites en forme de
cylindre ou de rouleau. Elles font de poil de fanglier
ou de chien-dent, fimples ou doubles : les unes 6c les
autres fe ficellent par un bout , fi elles font fimples ,
& par le milieu fi elles font doubles ; & l'endroit par
où elles ont été ficelées fe couvre d'étoffe , de drap ,
de cuir , &c. 6c leur fert de poignée.
BROSSES de Tifjerand , font des broffes faites de
bruyère à l'ufage des Tifferands ; ils s'en fervent pour
mouiiler leur brin iur le métier.
Brosses de toilette , celles qui fervent à vergetter
les habits ; elles tiennent leur nom de la toilette des
hommes ou des femmes, dont elles font un des prin-
cipaux uftenfiles.
Brosse de Tondeur, eft celle qui eft en forme de
vergette, fort rude, dont les tondeurs fe fervent pour
donner la première façon , 6c commencer à coucher
la laine furie drap. Voye^ Draperie.
Brosse à tuyau , celle dont les Doreurs fur bois fe
fuirent pour coucher d'affiette dans les filets : elle eft
montée fur un manche fort petit & garni d'un bouton.
Ce manche pafie dans un tuyau comme un crayon ,
8: par le moyen du bouton qui glilfe le long du tuyau
par la fente qu'on y a faite , le poil de la brofj'e fe ref-
ferre ou s'écarte à proportion qu'on le fait entrer plus
ou moins dans le tuyau. Voye?^ la figure 14. Planche
du Doreur.
* BROSSER , v. a£l. fe dit , en général , de l'action
de nettoyer avec une brofle.
Brosser un cheval, (Manège.) c'eft le frotter avec
la brofie , pour ôter la pouffiere de deffus fon corps.
(n
BROSSER , che^ les Tondeurs , c'eft arranger & cou-
cher avec une brofle la laine fur le drap , & en faire
fortir la pouffiere 6c la crafle qui pourrait s'y trouver.
* BROSSURE , f. f. c'eft ainli qu'on appelle , en
Teinture en peaux & en cuir, la couleur que l'on donne
avec la fimple brofle. Cette teinture eil la moindre
qu'il foit permis de donner par les flatuts.
* BROU , f. m. (Teinture.) c'eft ainfi qu'on appelle
la coque verte de la noix, 11 elt permis aux teintu-
riers de l'employer dans quelques couleurs , mais non
dans toutes. Les tourneurs , menuifiers , &c. s'en fer-
vent pour donner aux bois blancs ia couleur du bouis,
& les diftillateurs en tirent un ratafia , dont on fait
cas.
Brou , (Géog.) ville de France , dans le Perche ,
fur la rivière de Douxaine , près de Châteaudun.
BROU AGE , (Géog.) ville forte de France , en
Saintonge, avec un havre, fameufe par fes faiines.
Long. i6à. 35'. 26". lat. 45K 5o' . il".
BROUAY, (Géog.) petite ville de France, avec
titre de comté , près de Bethune, dans la province
d'Artois.
BROUCK, (Géog.) petite ville d'Allemagne,
dans le cercle de \Veftphalie , au duché de Berg , fur
la Roer.
BROUEK , (Géog.) ville de Suifîe , dans l'Argon ,
fur l'Aar.
BROUETTE, f. f. petite machine faite en forme
de charrette , qui n'a qu'une roue , & que celui qui
s'en fert pouffe devant foi par le moyen de deux ef-^
peces de timons foùtenus d'un côté par l'eflieu de la
roue , & de l'autre par les mains de celui qui conduit
la machine , qui pour cet effet fe met au milieu.
La brouette eft un infiniment à l'ufage de beaucoup
d'ouvriers differens , comme les vinaigriers , les jar-
diniers , les tanneurs , megifiiers , &c.
On appelle encore brouette une voiture fermée ,
à deux roues , &c trainée par un feul homme.
BROUETTE , en terme de B lanchifferie , c'efl un inf-
trument de bois à deux pies , à deux bras ou manches ,
6c terminé à l'autre extrémité par une petite roue
montée fur un boulon de fer en travers , 6c arrêté à
chaque bout dans la principale pièce, qui elt à la
brouette ce que les limons font à une charrette. Les
brouettes de B 'lanchifferie font à plat fans aucun bord,
& fervent à tranfporter la cire en rubans , dans des
mannes , de la baignoire aux toiles , & des toiles dans
la chaudière au magafin, &c. V. Rubans, Toiles,
BAIGNOIRE, &c. Voye^Pl. du Blanchifjage de cire &
l'article BLANCHIR.
BROUILLAMINI, fub. m. (Pharmacie.) nom que
l'on donne à des mafles de bol qui font de la groffeur
du doigt : on les appelle aufli bol en bille.
Ce mot convient à tous les mélanges de remèdes
faits fans beaucoup de méthode & d'égard aux facul-
tés & aux indications : on peut confondre ce mot
avec le pot -pourri, qui fignifie à peu près la même
chofe. (N)
BROUILLARD, f. m. (Phyfiq.) efpece de mé-
téore , compote de vapeurs & d'exhalaifbns qui s-'é-
levent infenfiblement de la terre , ou qui tombent
lentement de la région de l'air , de forte qu'elles y
paroiflent comme fufpendues. Lorfque le brouillard
n'efl compofé que de vapeurs aqueufes, il n'efl point
du tout nuifible à la fanté des animaux , & il ne lent
pas mauvais: mais lorfqu'il elt compolé d'exhalai-
fons , il rend alors une mauvaife odeur , & eft très-
mal fain. Lorfque le brouillard eft compofé d'exha-
laifbns , on trouve quelquefois fur la furface de l'eau
après la chute du brouillard , une pellicule grotte &
rouge, aifez femblable à celle que les Chimiiles ob-
fervent lorfqu'ils préparent leur foutre doré d'anti-
moine.
Il tombe fouvent en France , quand les années font
trop pluvieufes , une efpece de brouillard gras , que
les Laboureurs & les Jardiniers nomment nielle, &
qui gâte les grains : le feigle fur-tout fe corrompt à
un tel point, que le pain dans lequel il entre, devient
pernicieux & caufe la gangrené. Voye^ Nielle
Lorfqu'il y a du brouillard, l'air eft calme & tran-
quille , 6c iffe diflipe dès que le vent vient à foufîler.
Le brouillard paraît plus fenfiblement le foir & le
matin. Voici pourquoi. Le foir, après que la terre a
BRO
été échauffée par les rayons du foleil , l'air venant à
le refroidir tout-à-coup après le coucher de ceraftre,
les particules terref très & aqueufes qui ont été échauf-
fées, s'élèvent dans l'air ainîi refroidi ; parce que dans
leur état de raréfaction , clies font plus légères que
l'air condenfé. Le matin , lorfque le foleil le levé ,
l'air fc trouve échauffé par fes rayons beaucoup plu-
tôt que les exhalaifons qui y font fùfpcndues ; & com-
me ces exhalaifons font alors d'une plus grande pt-
fanteur fpécifique que l'air, elles retombent vers
la terre.
Le brouillard efl. plus fréquent en hyver qu'en au-
cun autre teins , parce que le fioid de l'atmofphere
condenfe fort promptement les vapeurs & exhalai-
fons. C'eft par la même raiion qu'en hyver l'haleine
qui fort de la bouche , forme une efpece de nuage
qui ne paroît pas en été. De là vient encore que le
brouillard règne plufieurs jours de fuite dans les pays
froids du Nord.
Le brouillard fc manifefte , foit que le baromètre
fe trouve haut ou bas. Le brouillard étant une ef-
pece de pluie, n'a rien d'étonnant, quand le mer-
cure eft bas : mais lorfqu'il fe tient haut , on aura
du brouillard : i°. fi le teins a été long-tems calme ,
& qu'il fe foit élevé beaucoup de vapeurs & d'ex-
halaifons qui ayent rempli l'air & Payent rendu fom-
bre &C épais: z°. fi l'air fe trouvant tranquille, laiffe
tomber les exhalaifons qui paffent alors librement à-
travers.
Le brouillard tombe indifféremment fur toute forte
de corps , & pénètre fouvent dans l'intérieur des mai-
Ions lorfqu'il eft fort humide. Il s'attache alors aux
murs 6c s'écoule en bas , en laiilant fur les parois de
longues traces qu'il a formées.
L'opacité du brouillard eft caufée , félon quelques
auteurs , par l'irrégularité des pores que forment les
vapeurs avec l'air. Cette irrégularité dépend de la
grandeur de ces pores , de leur figure , & de leur dif-
pofition. Cela peut venir auffi de la différence de la
denfité qu'il y a entre les exhalaifons de l'air ; car,
lorfque la lumière du foleil fait effort pour pénétrer
à-travers l'air, elle efl continuellement forcée de fe
détourner de fon droit chemin , 6c de changer de rou-
te. C'eft pour cela qu'il arrive fouvent que l'air, quoi-
que fort peu chargé de vapeurs , paroît être fort né-
buleux & fort fombre ; au lieu qu'il devient tranfpa-
rent ÔC plus clair , lorfqu'il fe remplit d'une plus gran-
de quantité de vapeurs , qui fe diftribuent d'une ma-
nière plus uniforme par toute l'atmofphere.
Le brouillard eft quelquefois fort délié, ot difperfé
dar-s une grande étendue de l'atmofphere ; de forte
qu'il peut recevoir un peu de lumière : on peut alors
envifagcrle foleil à nud fans en être incommodé. Cet
aftre paroît pâle , 6c le refte de l'atmofphere cft bleu
& ferein. Le premier Juin 171 1 , on obierva à Paris ,
en Auvergne , & à Milan , un brouillard qui paroît
avoir été le même dans tous ces endroits , 6c qui doit
avoir occupé un efpace confidérablc dans l'atmof-
phere.
On demande , i°. pourquoi il fait beau en été lorf-
que l'air fe trouve chargé de brouillards le matin. Ce-
la vient apparemment de ce que le brouillard fe trou-
vant mince &c délié , eft repouffé vers la terre par
les rayons du foleil ; de forte que ces parties deve-
nues fort menues , & étant féparées les unes des au-
tres , vont flotter çà & là dans la partie inférieure de
>:'phere , &c ne fe relèvent plus.
20. Pourquoi il fc forme tout-à-coup de gros brouil-
lards à côte 6c fur le fommet des montagnes. On ne
fauroit en imaginer de caufe plus vraiffemblable
que les vents, qui venant à rencontrer des vapeurs
6c des exhalaifons déliées 6c difperlées dans l'air, les
emportent avec eux, &: les poulient contre les monta-
gnes, où ils les condenlent, Lorfque l'on fe tient dans
BRO
445
une vallée, d'où l'on confidere ce côté une monta-
gne , à l'endroit où le foleil darde fes rayons , en en
voit fortir une épaifte vapeur , qui parcit s'élever
comme la fumée d'une cheminée : mais lorfqu'cn re-
garde de front l'endroit éclairé de cette montagne ,
on ne voit plus cette vapeur. Cela vient de la
direction des rayons de lumière. Lorfque dan
chambre obfcurc on laiffe entrer les rayons du foleil
par une petite ouverture, on veit en regardant de
côté , de petits filets &c une poufîiere fort fine dans uri
mouvement continuel : mais lorfque les rayons vien-
nent frapper directement la vue , ou qu'ils tombent
moins obliquement dans l'œil , en n'apperçoit plus
ces filets flottans. C'eft le cas des vapeurs qui s'élè-
vent de la montagne , que l'on envifage de côté ; car
on voit alors les vapeurs qu'elle exhale : au lieu qu'el-
les difparoiffent , quoiqu'elles montent toujours éga-
lement, lorfqu'on regarde la montagne de front.
Les brouillards ne font que de petits nuages placés
dans la plus baffe région de l'air ; & les nuages que
des brouillards qui fe font élevés plus haut. Voye{
Nuage.
Les objets que Ton voit à-travers le brouillard pa-
roiffent plus grands & plus éloignés qu'à-travers l'air
ordinaire. Voye^ Vision.
L'on choifit pour pêcher les harengs un tems rem-
pli de brouillards. Voyc{ HARENG.
Nous devons prefque tout cet article à M. Formey,
qui l'a tiré en grande partie de M. Muffchenbroeck.
(O)
Brouillard, (Papeterie.') épithete que 1 on don-
ne à une forte de papier gris , qu'on appelle autrement
papier à demoifelle. Voye^ Papier.
Brouillard ou Brouillon , f. m. c'eft ainf: que
dans le Commerce, on nomme quelquefois un livre dont
fe fervent les négocians , marchands , & banquiers ,
pour les affaires de leur commerce. C'eft proprement
un livre-journal qui n'eft pas tout-à-fait au net, &c
qu'on appelle plus ordinairement mémorial. l'oye{
Mémorial & Livre. (G)
BROUILLÉ , adj. fe dit par les Jardiniers- fleuri fles
quand ils veulent exprimer qu'une fleur n'eft pas
venue belle comme ils l'elpéroient , c'eft-à-dire pa-
nachée & nette : on dit, un œillet brouillé, une tulipe
brouillée. ( K )
BROUILLER un cheval , en termes de Manège ; c'efl
le conduire ù mal-adroitement & avec tant d'incer-
titude , qu'on l'oblige à agir avec confulîon & fans
règle.
Se brouiller , fe dit d'un cheval communément trop
ardent , qui à force de vouloir précipiter fon exerci-
ce , le confond de façon qu'il ne fait plus ce qu'il fait.
Un cheval qui a les aides fines fe brouille aifément ;
on l'empêche de manier pour peu qu'on ferre trop
les cuifiés , ou qu'on laiffe échapper les jambes. (A'")
BROUINE, (P/iyJ:^ue.)e:tû même chofe que
bruine. Foye^ BRUINE.
BROUIR, BROUI5SURE, {Jardin.) fe dit des
feuilles qui ont efluyé un vent qui les a bn
toutes recoquillées. ( K )
BROUME du blé; voy. NlELLE & BROUILLARD.
EROUSALME ou BRESALME , ( Géo5. ) rivière
d'Afrique dans la Nigritie , qui fe jette dans la mer
à deux lieues de la rivière de Gambie.
BROUSSEAU , ( Géog. ) rivière de France en Gaf-
cos;ne.
* BROUSSIN d" érable, (Hift.na:.) mollufcum ;
c'efi ainfi qu'on appelle une excroiffanec ondée &C
madrée fort agréablement , qui vient communément
fur l'érable. Elle étoit d'un très -grand prix chez les
Romains. On s'en fett encore aujourd'hui pour faire
des cafiettes , des tablettes, & autres ouvrages.
BROUTER , fe dit des animaux qui rompent avec
la dent les herbes , l'exu unité des plantes, celles des
44<5
B R O
BRO
branches menues , dans les prés , ou dans les jeunes
taillis qui repouffent. On dit le brout des bêtes fauves :
ce broul ri'eft autre choie que la pâture qu'elles trou-
vent dans les jeunes bois.
BROUWERS ( le détroit de ) , Gêog. c'eftle
nom d'un détroit de l'Amérique méridionale dans la
mer de Magellan , au midi du détroit de le Maire ,
découvert par les Hollandois en 1643.
BROUWERSHAVEN , {Gèog. ) petite ville des
Provinces-Unies dans l'île de Schouwen enZélande.
Il y a un port.
BROWNISTES , f. m. pi. (Hift. ecdîf. ) nom d'u-
ne feue qui le forma de celle des Puritains vers la fin
du xvi. fiecle : elle fut ainlî nommée de Robert
Bro\rn , fon chef.
Ce Robert Brown qui a écrit pluficurs livres pour
appuyer fes fentimens , n'étoit point , comme le pré-
tend Moréri , un maître d'école de Southvark , mais
Un homme de bonnes mœurs , & même favant. Il
étoit d'une allez bonne famille de Rutlandshire , &
allié au lord-threforicr Burleigh. Il fît fes études à
Cambridge , & commença à publier fes opinions &
à déclamer contre le gouvernement ecclélîaftique à
Norvich en 1580; ce qui lui attira le reflentiment
des évêques. Il le glorifioit lui-même d'avoir été pour
cette caufe mis en trente-deux différentes priions , fi
obfcures qu'il ne pouvoit pas y distinguer fa main ,
même en plein midi. Par la fuite il fortit du royaume
avec fes fectateurs , &c le retira à Middelbourg en
Zélande , où lui & les liens obtinrent des états la per-
miffion de bâtir une églife , & d'y fervir Dieu à leur
manière. Peu de tems après , la diviiîon fe mit parmi
le petit troupeau : plufieurs s'en féparerent ; ce qui
dégoûta tellement Brown , qu'il fe démit de l'on offi-
ce, retourna en Angleterre en 1589 , y abjura fes
erreurs , & fut élevé à la place de recteur dans une
églife de Northamptonshire. Il mourut en 1630.
Le changement de Brovn entraîna la ruine de l'é-
glife de Middelbourg : mais les femences de fon fyf«
tème ne furent pas fi ailées à détruire en Angleterre.
Sir "Vfalter Baleigh , dans un difeours compofé en
1692, compte déjà jufqu'à vingt milles perfonnes
imbues des opinions de Brovn.
Ce n'étoit pas pour les articles de foi qu'ils fe fé-
paroient des autres communions , mais à caule de la
difcipline eccléfialtique , & fur -tout de la forme du
gouvernement de l'églife Anglicane , qu'ils improu-
voient hautement , fans adopter davantage celui des
Presbytériens , &C blâmant également les confiftoires
& lcs'fynodes, les évêques & les miniftres. Ils ne
vouloient fe joindre à aucune églife réformée , n'é-
tant pas allures , difoient-ils , de la fainteté & de la
régénération des membres de ces églifes , puifqu'el-
les fouffroient les pécheurs 6k communiquoient avec
eux ; ce qui , félon les Browniftes , étoit le comble de
l'impiété. liscondamnoientla célébration folennelle
des mariages , qui n'étant , difoient-ils , que des en-
gàgemens c;vi!s , n'avoient befoin que de l'interven-
tion du magillrat léculler , & nullement de celle des
eccléfiaftiques. lis ne vouloient pas non plus que les
enfans fuffent baptiles par les prêtres Anglicans ou
les miniltres Presbytériens , qu'ils neregardoientpas
comme membres de l'Eglife , & qui , ajoùtoient-ils ,
ne prenoient nul foin de ceux qu'ils avoient baptiles.
Ils rejettoient toute forme de prière, difant que l'o-
railon dominicale ne devoit pas être regardée com-
me une prière , mais leulement comme un modèle de
prière que J. C. nous a donné. /^.Séparatistes
& Non-conformistes.
Ils établiiîbient un gouvernement eccléfialtique
de forme Démocratique. Quand une de leurs églifes
étoit alïemblée , celui qui vouloit être incorporé à
leur fociété, faifoit une profeffion de foi & lignoit
«ne formule , par laquelle il s'obligeoit de l'uivre 1 e-
vangile dans le même fens qu'eux. Le pouvoir d'ad-
mettre ou d'exclurre les membres, & la décifion de
toutes les conteftations , appartenoit à toute la fo-
ciété. Ils choililloient entre eux leurs officiers 8c leurs
miniltres pour prêcher & prendre foin des pauvres.
On initituoit ces miniltres , & on leur départoit leurs
différentes fondions par le jeûne , la prière , 8c l'im-
polîtion des mains de quelques-uns de la lociéte ,
fans croire néanmoins qu'ils eulfent d'ordre ou de ca-
ractère; car ils les réduifoient quelquefois à l'état des
laïques , perfuadés qu'à cet égard ils pouvoient dé-
truire leur propre ouvrage ; & comme ils enfeigr.oicnt
qu'une églife n'étoit que l'alTemblée d'un certain
nombre de perfonnes dans un même endroit, ils pen-
foient conléquemment que le pouvoir du miniltre pré-
polé à cet endroit, y étoit tellement limité , qu'il ne
pouvoit ni adminiitrer la communion, ni baptifer,
ni exercer aucune autre fonction, dans une autre égli-
fe que la fienne. Il étoit permis à tous ceux de cette
fecte, même aux laïques, de faire des exhortations
à l'alTemblée , de propofer des quelt ions après le prê-
che , & de raifonner fur ce qui avoit été prêché. En
un mot chaque églife des BrowniJIes étoit une alTem-
blée où chaque membre avoit la liberté de tendre au
bien général de la fociété, fans être comptable de les
actions devant aucun fupérieur , fynode , ou tribu-
nal. Les indépendans qui fe formèrent par la fuite
d'entre les Brownijles , adoptèrent une partie de ces
opinions. Voye^ INDÉPENDANTS.
La reine Elifabeth pourfuivit vivement cette fefte.
Sous Ion règne les prifons furent remplies de Brow-
nijhs ; il y en eut même quelques-uns de pendus. La
commilîion eccléfialtique cela chambre étoilée févi-
rent contr'eux avec tant de vigueur , qu'ils furent
obligés de quitter l'Angleterre. Plufieurs familles fe
retirèrent à Amfterdam , 011 elles formèrent une égli-
fe , & choifirent pour pafteur Johnfon , & après lui ,
AynfVorfh connu par un commentaire fur le Penta-
teuque. On compte encore parmi leurs chefs , Barrow
& \Vilkinlbn. Leur églife s'eft lbûtenue pendant en-
viron cent ans. (G)
BROYE ou BRAYE , ( (Econ. ruji. ) machine qui
fert à brifer le chanvre pour en pouvoir mieux fépa-
rer les chenevottes ; c'elt une forte de banc e (fig. 4.
PI. de Cordirle ) fait d'un foliveau de 5 à 6 pouces d'é-
quarrifiage , fur fept à huit pies de longueur, foûtenu
par 4 jambes ou pies , à hauteur d'appui. Ce foliveau
elt percé dans toute fa longueur de deux grandes
mortoifes d'un pouce de large , qui traverle toute
fon épaifleur. On taille en couteau les trois parties ,
que les deux mortoifes ont féparées.
Sur cette pièce on en ajufte une autre qui elt af-
femblée à charnière fur le banc par une de les ex-
trémités ; l'autre elt terminée par une poignée capa-
ble d'être lailïe par la main du broyeur.
Cette pièce qu'on appelle la. mâchoire fupérieuret
porte dans toute la longueur , deux longuettes taillées
en couteau , qui doivent entrer dans les mortoiles
de la mâchoire inférieure. Voyc^ Broyeur.
Broyé, (terme de B lafon') fe dit de certains fe(-
tons , qu'on trouve dans quelques armoiries , pofés
en différentes fituations. Le père Ménétrier dit que
les Anglois les nomment bamacles ; que la mailon de
Broyé les a portés par allulîon à fon nom ; & que cel-
le de Joinville y ajouta un chef avec un lion nail-
fant. (F)
BROYE, ( Géog. ) rivière de SuifTe , au canton
de Fribourç.
BROYEMENT , f. m. ( Phyfiq. ) marque l'adion
d: réduire , de divifer , ou de rompre un corps quel-
conque en petites parties. L'effet de la maftication
des alimens n'eft autre chofe que leur diviiîon ou
leur broyement. Voye^ MASTICATION, &c. (O)
Broïement, ( opération de Pharmacie ) elle le
BRO
BRU
447
fait OU au moyen d'un pilon & d'un mortier , OU au
moyen d'une molette & du porphyre ; l'une & l'au-
tre façon de broyer demandent des précautions , &
doivent fe varier félon les fubftances &£ les mixtes
dont on veut faire la divifion.
Par exemple , û les corps font volatils , & que les
particules qui s'en détachent foient utiles pour les
malades , ou nuifibles à ceux qui font l'opération ,
on doit empêcher ces parties de s'élever ; ainfi on
humectera les matières avec des liqueurs appropriées.
De plus, on enveloppera le pilon dans une efpece
de fac , dont on couvrira le mortier ; ce fac fera de
peau ; c'eft ainfi que l'on fera pour l'euphorbe. Si on
voit que les mixtes huileux jaunhTent dans l'opéra-
tion , on y ajoutera quelques gouttes d'eau pour di-
vifer les huiles.
Mais les inftrumens doivent être variés, félon les
drogues. Si les fels font acides ou alkalins , on évitera
de le (ervir de vaiffeaux de cuivre; parce que ces
jels tireroient une teinture des parties cuivreufes :
alors on employera des mortiers de marbre , de ver-
re , de fer ou de bois. Les pilons feront de même ma-
tière.
La préparation des amalgames , les formations de
nouveaux fels , font d'une conféquence infinie dans
la pratique ; des remèdes deviennent émétiques , pur-
gatifs , venimeux , pour avoir été chargés de particu-
les qui fe font détachées des inftrumens. Voye^ Pou-
dre, voyei auffîEMVLSlON. (A7)
BROYER , v. acL marque en général l'aftion de
réduire un corps en particules plus menues , de quel-
que manière & avec quelque infiniment qu'elle s'exé-
cute. Voyty Broyement.
Broyer des couleurs fiches ou liquides , c'eft les
écraiér julqu'à ce qu'elles foient très-fines , avec une
pierre très-dure qu'on appelle molette , fur une autre
pierre aufti dure qu'eft ordinairement une écaille de
mer.
L'on dit , broyer les couleurs , le broyement des cou-
leurs. On broyé les couleurs à l'eau ou à l'huile , fui-
vant l'ufage qu'on veut en faire.
Broyer & mêler les couleurs , l'ont des termes qu'on
ne doit pas confondre.
On broyé les couleurs fur la pierre, comme on vient
<le dire ; on les mêle fur la palette avec le pinceau,
& en les employant fur la toile. (/? )
Broyer , (terme de Corderie ) c'eft l'action de bri-
fer le chanvre entre les deux mâchoires de la broyé
après qu'il a été roiii ( voye^ Broyé , & la fig. 4. PI.
de Corderie ) pour en féparer les chenevottes ou la
moelle qui n'eft d'aucune utilité pour le travail des
Corderies. Pour cet effet le broyeur prend de fa
main gauche une groffe poignée de chanvre ; & de
l'autre, la poignée de la mâchoire fupérieurc de la
broyé ; il engage le chanvre entre les deux mâchoi-
res, & en élevant ce abaiffant à plufieurs reprifes , 6c
fortement, la mâchoire fupérieurc, il brife les chene-
vottes qu'il fépare du chanvre en le tirant entre les
deux mâchoires ; enforte qu'il ne relie que la nlafîe :
quand la poignée eft ainfi broyée à moitié, il la prend
par le bout broyé , pour donner la même préparation
à celui qu'il tenoit dans la main.
Quand il y a environ ilcux livres de filaffe bien
broyée , on la ployé en deux ; on tord groffiercment
les deux bouts l'un fur l'autre ; & c'eft ce qu'on ap-
pelle des queues de clianvre , ou de lafilafie brute.
Il y a une autre manière de féparer le chanvre ,
qu'on appelle aller. Voye^ Tiller , & l'article Cor-
derie.
BROYEUR , f. m. celui qui broyé le chanvre pour
en féparet les chenevottes. Son travail cil repré-
fenté PL I. de Corderie , fig. 4.
* BROYON, f. m. ( Œconom. ru/L ) piège pour
les bêtes puantes ; on tend ce piège fur le partage des
blairaux, des renards , des fouines & autres animaux
malfaifans. Pour cet effet , on plante en terre deux
fourchons de bois A A ; voye^ PI. d'Agriculture. On
place entre ces fourchons un bâton de traverfe B B ;
ce bâton porte une corde CC; à l'extrémité de cette
corde eft attachée une petite clavette E E ; fur un
bout de la clavette E E , paffe un autre-bâton de tra-
verfe FF ; l'autre bout de la clavette eft légèrement
arrêté par un petit obftacle G H: cet obftacle tient
en terre , & il eft planté à quelque diftance des four-
chons. On a attaché l'appât au bout de la clavette
qui paffe fous l'obftaclc ; on paffe fur le bâton de tra-
verlè FF, deux longs bouts de perche H H, H H,
que le bâton de traverfe FF tient élevés ; ces bouts
de perche font chargés fur le milieu d'un gros poids
/. On ferme bien le devant de ce piège ; enforte que
l'animal ne pouvant entrer que par les côtés, il fe
trouve néceffairement fous les bouts de perche. Il
ne peut mordre à l'appât fans arracher l'obftacle G-y
l'obftacle G ne peut être déplacé , que le bout de la
clavette qui y touchoit ne s'échappe : ce bout ne
peut s'échapper que le bâton de traverfe FF ne tom-
be ; le bâton de traverfe ne peut tomber que le poids
/ ne fafle tomber les perches H H, H H, fous lef-
quelles l'animal f© trouvera pris. Si on veut fe fervir
du même piège pour empêcher les animaux de paffer
par des ouvertures , il faut faire le bout de la clavette
qui pafle fous l'obftacle , tel que l'animal ne puiffe
paffer fans le déplacer.
Broyon , (uflencile (Tlmprim. ) c'eft une pièce de
bois tourné, longue de trois à quatre pouces, fur neuf
à dix de circonférence , uni par le bout , ftirmonté
d'un manche rond de quatre à cinq pouces de long
pris dans le même morceau de bois. Il fert à remuer
l'encre pour l'empêcher de fécher ou de fe confoli-
der, & à en étendre quelque partie fur le bord de l'en-
crier, afin que quand l'Imprimeur prend de l'encre,
elle foit préparée à fe diftribucr facilement fur les
balles. Voyei PL IV. de V Imprimerie, fig. 1. B.
BROZOW, (%) ville de Pologne, dans le pa-
latinat de Ruffie.
BRU , f. f. terme d'affinité , qui exprime l'alliance
qui le forme par le mariage entre la femme &c le pè-
re & la mère du mari ; lefqucls font par rapport à
elle beau-pere &: belle-mere. Belle-fille eft plus du
belufage.(jy)
BRUCA, (Géog.) rivière de Sicile, qui paffe dans
le val di Noto , & fe jette dans la Méditerranée dans
le golfe de Catane. Il y a une petite ville de même
nom bâtie fur cette rivière, avec un havre.
BRUCELLES , f. f. efpece de petite pinectte re-
présentée». 66. & 6j. PL XVI. de T Horlogerie t
dont les branches BB, font reffort : les Horlogers
s'en fervent pour tenir des pièces délicates , comme
des roues finies & des refforts fpiraux , & pour don-
ner la forme requife à ces derniers , au moyen de la
courbure concave de l'une des branches , & de la
courbure convexe de l'autre qui s'applique dans la
première, f oye~ la fig. 6 J.
Les brucelles font compofées de deux lames d'acier
élaftique rivées fur un morceau de cuivre A A ,jig.
66 & 6 y , par plufieurs chevilles qui traverfent les
trois pièces.
Elles le font aufti quelquefois de deux lames de
laiton ; ces fortes de brucelles font plus propres que
celles d'acier à failir de petites pièces du même mé-
tal qui s'attacheroient à la brucelle d'acier , pour peu
que celle-ci fut aimantée.
Les brucelles font à l'ufage d'un grand nombred'ou-
vriers ; les Argenteurs ont les leurs , voye^ Plan, de
tArg. fig. £3. les Boutonniers en cuivre; les Do-
reurs , fig. 11. & 3 1. les Lapidaires, voyei fig. à. PL
du Lapidaifk.
BRUCHHAUSEN, ( Géog. ) comté d'Allemagne,
448
BRU
dans la Weftphalie , fur les bords du Wéfer , appar-
tenant à la maifon de BrunlVick.
BRUCHSAL, ( Géog.) ville d'Allemagne, fur la
Saltz , dans l'évéché de Spire , à deux lieues de Phi-
lipsbourg.
BRUCK , ( Géog.) petite ville d'Allemagne , dans
PEleétarat de Saxe.
Bruck, (Géog.) petite ville d'Allemagne, dans
la baffe-Autriche, for les frontières de Hongrie, fur
la rivière de Leutha.
Bruck , ( Géog. ) petite ville de Stirie , fur la
Muer.
BRUCKEN , ( Géog. ) petite ville d'Allemagne ,
dans la Thuringe.
BRUCKENAU, (Géog.) petite ville d' Allema-
gne , fur la Sinna , dépendante de l'abbaye de Fulde.
BRUCKENSTADT ,(Géog.) petite ville d'Alle-
magne , en Franconie , dépendante du marggraviat
d'Anspach.
BRUDINICK, ( Géog. ) petite rivière d'Allema-
gne , en Siléfie , qui prend fa fource dans la princi-
pauté de Neifs, &fe jette dans l'Oder , près de Krap-
pitz.
BRUEL , ou BRUL , {Géog. ) petite ville d'Alle-
magne , dans l'éîeûorat de Cologne , lieu ordinaire
de la réfidence de l'électeur.
BRUGES , ( Géog. ) grande ville des Pays-Bas ,
dans la Flandre Autrichienne ; il s'y fait un affez
grand commerce ; elle eft à 8 lieues de Gand , & il
y a un canal de communication entre ces deux villes.
Lot. 5ià. n' .30" . long. zo. 4J. Le territoire qui en
'dépend, s'appelle le franc de Bruges.
Bruges , ( Géog. ) petite ville de France , dans la
principauté de Bearn , fur la Nés.
BRUGNETO , ( Géog. ) petite ville d'Italie , dans
l'état de Gènes , fur la Verra , dans l'Apennin. Long.
Z -. 20. lat. 44. 16.
BRUGGEN, (Géog.) petite ville d'Allemagne, au
cercle de "Weftphalie , dans le duché de Juliers.
BRUGNOLES, f. f. (en Epicerie.) ce font des
prunes de Provence féchées au foleil : elles nous
viennent dans des boîtes à confitures.
BRUGNON, BRIGNON, efpece de pêche. Voye[
PÊCHER.
BRUGUERE , ( Géog. ) petite ville de France ,
dans le Roiiergue , fur la rivière de Tarn.
BRUINE , 1. f. (Phyfiq-) forte de petite pluie fine
qui tombe fort lentement. Lorfqu'une nuée le diflout
& change partout également , mais lentement , en-
forte que les particules aqueufes dont la nuée eft
compofée, ne fe réunifient pas en trop grand nom-
bre , ces particules forment de petites gouttes, dont
la pefanteur fpécifique n'eft prefque pas différente
de celle de l'air ; & alors ces petites gouttes tom-
bent fort lentement , & forment une bruine qui dure
quelquefois tout un jour , lorfqu'il ne fait point de
vent. Elle a aufîï lieu , lorfque la difTolution de la
nuée commence en -bas, 6c continue de fe faire
lentement vers le haut ; car alors les particules de
vapeur fe réunifient & fe convertiflent en petites
gouttes , à commencer par les inférieures , qui tom-
bent aufîl les premières ; enfuite celles qui le trou-
vent un peu plus élevées , fuivent les précédentes ;
& celles-ci ne groffûîent pas dans leur chute , parce
qu'elles ne rencontrent plus de vapeurs en leur
chemin ; elles tombent fur la terre avec le même
volume qu'elles avoient en quittant la nuée. Mais fi
la parrie fupérieure de la nuée fe diffout la première
& lentement de haut en bas , il ne fe forme d'abord
dans la partie fupérieure que de petites gouttes , qui
venant à tomber fur les particules qui font plus bas,
fe joignent à elles , & augmentant continuellement
en grofîeur par les parties qu'elles rencontrent fur
leur pafîage , produisent enfin de grofics gouttes qui
BRU
fe précipitent fur la terre. Cet article eft prefque
tout entier de M. Formey. Voyt^ Muffch. ( O )
* BRUIR , v. act. (terme de Draperie. ) bruir des
pièces d'étoffes , c'eft les étendre proprement , cha-
cune à part , f:ir un petit rouleau , & coucher tous
les rouleaux enfemble dans une grande chaudière de
cuivre rouge & de forme quarrée , fur un plancher
criblé de trous , & élevé à quelque diftancedu fond
de la chaudière. On fait chauffer de l'eau dans l'in-
tervalle qui fépare le fond du plancher. La vapeur
portée contre l'étoffe la pénètre & afîbuplit tout ce
qui y peut avoir de la raideur. Voye-^ à article Dra-
perie , le moment & le but de cette opération , qui
s'appelle bruiffage.
BRUISINER , ( terme de Braf/èrie, ) c'eft moudre
le grain germé, en gros.
BRULANT , (miroir ou verre brûlant) fe dit d'un
miroir ou d'un verre par le moyen duquel on brûle ,
en ramaffant les rayons du foleil. Voye^ Ardent.
BRULANT, (montagnes bridantes). /^oyq VoLC AN,
Montagne, Tremblement déterre, &c. (O)
BRULER , {Fanion de) Phyjîque : c'eft l'action du
feu fur les matières qu'il conlume , par laquelle les
plus petites parties de ces matières font détachées les
unes des autres, & miles dans un mouvement excef-
fivement violent; enforte que quelques-unes d'elles
deviennent elles-mêmes de la nature du feu , on au
moins font pénétrées par la matière du feu , pendant
que les plus fubtiles s'évaporent ou font réduites en
cendres. Voya Feu , Vapeur , Fumée , Cendre ,
&c.(0)
BRULER F acier , le fer, & les autres métaux; chez
tous les ouvriers qui les employent, c'eft. leur ôter
leur qualité , en les laiffant trop chauffer ; le fer &
l'acier brûlés f e réduifent en une matière fpongieufe,
fragile , & qui n'eft plus bonne à rien.
* Brûler , (Hifl. anc. ) la coutume de brûler les
corps étoit prefque générale chez les Grecs & chez
les Romains. Elle a précédé chez les premiers letems
de la guerre de Troie. Il ne faut pourtant pas s'ima-
giner que c'ait été la plus ancienne même chez ces
peuples. « La première manière d'inhumer, dit Ci-
» ceron, eft celle dontfe fertCyrus dansXcnophon,
» le corps eft ainn rendu à la terre ; & il eft couvert
» du voile de fa mère. Sylla, victorieux de Caius
» Marius, le fit déterrer & jetter à la voirie. Ce fut
» peut-être par la crainte d'un pareil traitement,
» qu'il ordonna que fon corps fût brûlé. C'eft le pre-
» mierdes patrices Cornéliens à qui on ait élevé un
» bûcher ». L'ufage de brûler les corps & celui de
les inhumer ont fubfifté à Rome dans le même tems.
» L'ufage , de les brûler , n'eft pas , dit Pline , fort an-
» cien dans cette ville. Il doit fon origine aux guer-
» res que nous avons faites dans des contrées éloi-
» gnées ; comme on y déterroit nos morts , nous prî-
» mes le parti de les brûler».
La coutume de brûler les corps dura jufqu'au tems
du grand Théodofe. Voye^ Bûcher , Sépulture ,
l/STRINUM.
BRULINGEN, (Géog.) petite ville d'Allemagne,
dans la forêt Noire, appartenante à la maifon d'Au-
triche.
BRULLOIS , (Géog.) petit pays de France en Gaf-
cogne , entre le Condomois & la Garonne, avec ti-
tre de Vicomte.
BRULOT , f. m. (Marine.) c'eft un vieux bâtiment
chargé de feux d'artifice & de matières combufti-
bles, que l'on accroche aux vaiffeaux ennemis, au
vent defquels on les met pour les brûler. Il y en a
qui l'appellent aulîi navire foreur.
Les bâtimens qu'on eftime les plus propres pour
faire des brûlots , font des flûtes ou des pinaffes de
150 à 200 tonneaux environ; qui ont un premier
pont tout uni, fans tonture, 6c au-deffus un autre
pont
BRU
pont courant devant arrière. On entaille en divers
endroits du premier pont, des ouvertures à peu près
d'un pié & demi en quarré , entre les baux , & elles
répondent dans le fond de cale; enfuite on fait des
dales ou petits conduits de planches qu'on joint, &
on leur donne un pouce 6c demi de large; on les fait
àuflî de fer blanc : on pôle trois de ces dales à trois
côtés de chaque mât, & elles s'étendent tout du long
du bâtiment , à firibord & à bas-bord, & vont fe ren-
dre toutes enfemble dans une autre grande dale qui
eu. en travers , à fix ou fept pies de la place où le met
le timonier. On fait encore une dale afïez longue ,
qui defeend du gaillard d'arrière en biais, jufqu'à la
grande dale qui elt en travers fur le premier pont ,
laquelle longue dale vient encore fe rendre dans une
autre petite, qui elt fur le gailiatd d'arrière où fe tient
le timonier, 6c à l'un des deux côtés, félon qu'il cil
le plus commode. Dans le bordage du gaillard d'ar-
rière, on fait une trape large , au-deffous de laquelle
fe peut porter une chaloupe de bonne nage , afin que
le timonier , après avoir mis le feu dans les conduits ,
y puifTe promptement defeendre. Enfuite on remplit
les dales d'artifice, favoir, d'une certaine portion
de poudre, comme la moitié, d'un quart de falpe-
tre , d'un demi-quart de foutre commun ; le tout bien
mêlé enfemble , & imbibé d'huile de graine de lin ,
mais non pas trop , parce que cela retarderait l'embra-
fement , 6c que l'effet doit être prompt. Après cela
on couvre ces dales de toile foufrée, ou de gros
papier à gargoulTes , & l'on apporte des fagots , de
menus copeaux, ou d'autres menus bois, trempés
dans l'huile de baleine , qu'on arrange en forme de
toît fur les dales, en les mettant bout à bout. Ces fa-
gots lont préparés & trempés dans des matières cora-
bultibles , comme du foufre commun pilé & fondu ,
du falpctre, & les trois quarts de grofle poudre, de
1 etoupe, & de l'huile de baleine, le tout bien mêlé
enfemble. On pend auffi au fécond pont par-defibus ,
toutes fortes de matières combuftibles, & l'on en met
par-tout avec des paquets de vieux fils de carret bien
goudronnés ; l'on y pend encore des paquets de
foufre ou de lilieres foufrées. Tout le dertbus du pre-
mier pont ell auffi fort bien goudronné, de même
que le defïbus du fécond pont ; & avec le goudron
dont le defius du premier pont ert encore enduit, il
y a par-tout des étoupes que le goudron retient, &
qui font mêlées avec du foufre. On remplit encore
les vuides du bâtiment de tonnes poiflees pleines de
ces copeaux minces 6c ferpentans , qui tombent fous
le rabot des Menuiiicrs.
Les cordages , les vergues , les voiles font poiffées
& foufrées ; les extrémités de la grande vergue font
garnies de grapins de fer, de même que celles de mi-
iéne 6c de beaupré. Loriqu'on conftruit des brûlots
de bois neuf, on n'y employé que du plus chéfif 6c
du plus léger , & où le feu prend plus ailément.
Quand on veut fe fervir de brûlots, on ouvre tous
les fabords, les écoutilles, 6c les autres endroits def-
tinés à donner de l'air; ce qui fe fait fouvent par le
moyen des boîtes de pièrrier qu'on met tout proche ,
6c qui faifant enfemble leur décharge par le moyen
des traînées de poudre , s'ouvrent tout à la fois. A
l'avant fous le beaupré , il y a un bon grapin qui pend
à une chaîne, & un à chaque bout de chaque ver-
gue , 6c chacun de ces grapins eiT amarré à une cor-
de qui pafle du lieu où ils font tout le long du bâti-
ment, & va fe rendre au gaillard d'arrière , à l'en-
droit où fe tient le timonier; laquelle corde , auffitôt
que le brûlot a abordé le vanteau , le timonier doit
couper avant que de mettre le feu au brûlot ; il tait
fes efforts pour accrocher le na\ ire ennemi par l'a-
vant , & non par les côtés.
On arme les brûlots de io ou n hommes qui ont
la double paye à caufe des dangers qu'ils courent,
Tome II.
BRU.
449
& de quelques parte-volans pour faire montre feu-
lement, hormis à l'arriére où il y a deux canons de
fer, pour fe défendre contre les chaloupes & canots.
On dit adrejfer ou conduire un brûlot , & détourner
un brûlot, lorfqu'on l'empêche d'aborder. (Z)
BRULURE , f. f. les Chirurgiens nomment ainfi la
folution de continuité qu'occafionne la force du feu
dans une partie du corps. Ils diftinguent ordinaire-
ment la brûlure en différens degrés , defquels le pre-
mier elt quand la brûlure fait feulement élever fur la
peau quelques pullules accompagnées de rougeur ,
6c qu'elle occaiionne une léparation entre l'épider-
me 6c la peau naturelle.
Le fécond degré ell quand la peau elt brûlée , fâ-
chée & retirée , mais qu'il ne s'y eft pas formé de
croûte ou de galle.
Le troifieme ell quand la chair , les veines , les
nerfs , &c. font retirés par la force de la brûlure , 6z
qu'il s'eft formé une croûte. Lulîtanus recommande
pour la brûlure , un onguent fait de cendres de feuil-
les de laurier, avec de la grairtè de cochon , ou du
lain-doux ; ou bien l 'unguentum populeum , avec des
feuilles de vigne dont on enveloppe la partie mala-
de. Panarole obferve que fi on met de la boue fur
une brûlure, on diminue la douleur. Les brafTeurs
d'Hollande fe fervent d'une decoftion de lierre pour
guérir la brûlure. Quelques auteurs preferivent
dans les brûlures l'ufage des médicamens terreux en
forme feche , tels que le bol d'Arménie , la terre figil-
lée, l'argile, &c. pour éteindre , dilent-ils , les parti-
cules ignées comme on éteint le feu loriqu'on lui in-
terdit la communication de l'air qui l'environne, ce
que l'on appelle communément étouffer: mais ces mé-
dicamens bouchant les pores par leur adhérence,
empêchent auffi par la groffiereté de leur matière , la
détente des folides , & ia fuppuration qu'on ne peut
trop promptement procurer. S'ils avoient lieu , ce fe-
roit tout au plus à l'inltant d'une brûlure légère , & ils
agiroient comme répereuffifs & aftringens , de mê-
me que la boue dont on a coutume d'envelopper la
partie au moment qu'elle vient d'être bridée , & qui
étant moins feche doit être préférée , outre qu'elle fe
trouve plus promptement fous la main. En général
les anodvns font fort indiqués dans la brûlure, parce
qu'ils relâchent les vaifleaux dont la crilpation elt
la caufe des douleurs aiguës qu'on lent à la partie brû-
lée. Voy. Anodyn. On employé avec allez de luccès
les fomentations avec Felprit de vin dans les premiers
panfemens ; les faignées font fort utiles pour calmer
ou prévenir les accidens.
La brûlure qui ell une maladie, fert quelquefois de
remède. M.Homberg remarque que les habitans de
l'île de Java fe guérhfent d'une colique qui leur don-
neront la mort, en fe brûiantla plante . 6c
qu'ils fe guériftent les* panaris, en trempant leurs
doigts dans l'eau bouillante à diverfes repaies.
Les voyageurs rappo tent beaucoup d'autres exem-
ples de maladies , que l'on guerit pai i'application du
feu; 6c nous en voyons les effets nou i . qui
pratiquons cette manière de uiiciir les chevaux, les
chiens de charte, les oileaux de proie , t-c.
On s'eft fervi contre la goutte , d'une forte de mouf-
le apportée des Indes , que l'on brùloit fur la partie
affligée. Voyt{ MoXA. M. Homberg a rapporte les
exemples de deux femmes guéries, l'une d'une vio-
lente douleur de tête 6c d'yeux, & l'autre d'une
douleur de jambes & de cuiifes , par la brûlure acci-
dentelle de ces parties. Il ajoute que la bn'dure peut
eue i ii- par l'une de ces trois manières , ou en mettant
tes humeurs peccantes dans un plus grand mouve-
ment, & en leur facilitant un nouveau partage , ou
enbrifantéc en diflblvant leur vifeidite; ou en dé-
taillant les canaux qui charrioient ces mêmes hu-
Lll
450
BRU
BRU
meurs en trop grande quantité. V. Caustique 6-
Cautère. (Y)
BRUMAL, adj. fe dit quelquefois de ce qui arap-
Çort à l'hyver : ce mot eft plus ufite en Latin qu'en
rançois. Ainfion àé\X foljlitium brumak pour le Jbljli-
ce eTkyver. (0)
BRUMALES, brumalia, adj. f. (Hift.anc. &Myth.)
nom d'une fête que les anciens Romains célébroient
en l'honneur de Bacchus, & qui duroit trente jours.
Elle commençoit le 24e jour de Novembre, & finif-
foit le 25e jour de Décembre. Voye^ Fête.
Ce mot vient de bruma , qui veut dire hyver , parce
que cette fête tomboit au commencement de l'hyver :
d'autres dérivent le nom de brumaUs de brumus ou bro-
mios, qui font des noms qu'on donnoit à Bacchus , à
caufe du bruit que faifoient les bacchantes , voyeur
Bromius. Les brumales furent inftituées par Romu-
lus , qui avoit coutume durant ce tems-là de donner
des repas au fénat. (G)
BRUMAZAR , f. m. {Minéralogie & Chimie.) Bê-
cher dit qu'on défigne par ce nom une graifie onc-
tueufe, formée par les vapeurs & exhalaifons ful-
phureufes & mercurielles qui viennent des entrail-
les de la terre , & qui mifes en mouvement par une
chaleur continuelle, s'unifient étroitement. Selon
cet auteur, perfonne ne veut admettre pareille choie
dans les métaux, quoiqu'on l'y apperçoive claire-
ment: c'eft, félon lui, la matière première des mé-
taux , & le ferment qui les conduit à perfection. (— )
BRUME, f. f. on nomme ainfi fur mer, le brouil-
lard : on dit le tems ejl embrumé , quand l'air eft cou-
vert de brouillards. Les Marins ont pour proverbe ,
que dans la brume tout le monde eft matelot /parce
que dans le tems d'un brouillard épais , où l'on ne
voit ni le foleil, ni les étoiles, chacun dit fon fenti-
ment fur la route , qui eft fort fujette à erreur en pa-
reil tems. (Z)
BRUMPT ou BRUMAT , ( Géog. ) petite ville de
la baffe Alface , fur la Sorra , entre Strasbourg ck Ha-
guenau.
BRUN, adj. pris fubftantivement , c'eft en
Peinture, le fombre obfcur; les ombres du tableau
fe font de brun plus ou moins foncé , félon que les
corps font plus ou moins oppofés à la lumière : on
dit les bruns d'un tableau , les ombres d'un tableau. Il y
a des bruns rougeâîres , grifâtres , &c.
Brun rouge , qu'on appelle aufîî ocre , eft une
pierre naturelle d'un rouge foncé ; elle eft d'un grand
ufage dans la Peinture , Ic^it à l'huile foit à détrempe.
Foyei Peinture. Voye{ Ocre. (R)
Brun de Plastre , eft une petite pierre luifante ,
qu'on trouve dans les carrières de plâtre , & dont les
Batteurs d'or fe fervent pour couper l'or fur le couf-
fin , en le faupoudrant de cette pierre , calcinée &
pulvérifée. Vôye^ Talc , qui eft le nom de cette pier-
re. Voye^ Batteur d'or.
B R u n , ( Manège ) bay brun , fe dit des chevaux
qui font de couleur de châtaigne obfcure. Voye^
Bay. (V)
BRUNDUS , ( Géog. ) ville du royaume de Bo-
hême , dans le cercle de Chrudim.
BRUNEGG , ( Géog. ) petite ville d'Allemagne ,
dans le Tirol , à 4 milles de Brixen , fur la rivière de
Rientz.
BRUNELLE, f. f. Brunella , (HiJÏ. nat. bot. ) gen-
re de plante à fleur monopétale labiée ; la lèvre fu-
périeure eft faite en forme de calque ; l'inférieure eft
divifée en trois parties. La partie moyenne eft creu-
lie en cuilleron. Il fort du calice un piftil qui eft at-
taché comme un clou à la partie postérieure de la
fleur , & qui eft environné de quatre embryons. Ces
embryons deviennent dans la fuite des femences ar-
rondies & revêtues d'une capfule qui a fervi de calice
à la fleur. Ajoutez au caraûere de ce genre , que les
fleurs forment un épi fort garni, & que les étamines
n'ont pas la figure d'un os hyoïde, comme celle de
l'ormin , de la toute-bonne , & de la fange. Tourne-
fort, Injl. reiherb. Voye^ PLANTE. (/)
La brunella major, folio non dijjeclo, C. B. Pit. Tour-
nef, eft d'ufage , & contient beaucoup d'huile & un
peu de fel eflentiel.
Elle- eft vulnéraire , déterfive , confondante ; on
s'en fert en décoftion dans les ulcères du poumon ,
contre les hémorrhagies , les maux dégorge ; elle en-
tre dans les gargarifmes ; on l'employé aufli extérieu-
rement.
On croit que fon nom lui vient de ce que les Al-
lemans Femployent dans l'efquinancie qu'ils appel-
lent diebrune. (N) '
* BRUNES , (Commerce.) fortes de toiles qui fe fa-
briquent à Rouen & dans les environs.
BRUNETTE , (la) Géog. place forte & très-im-
portante du Piémont, près de Suie.
* BRUNIR, v. aÛ. (Arts méchan.) c'eft polir un
corps, non pas en Tufant , mais en abattant les pe-
tites éminences qui font fur fa furface ; ce qui fe fait
par le moyen d'un brunifibir. V. Brunissoir.
Dans l'Horlogerie, on brunit les pièces ou les par-
ties , qui par leur grandeur ou par leur figure ne pour-
roient pas être polies commodément. Notez que cette
méthode de polir eft la plus expéditive , & celle qui
donne le plus d'éclat aux corps polis. Elle eft à l'iua-
ge des Couteliers, Serruriers, & de la plupart des ou-
vriers en or , en argent , en fer , & en acier. Elle en-
levé les traits de l'émcril , de la potée , & de la polif-
foire , & donne aux pièces brunies un luftre noir qui
imite celui des glaces.
Les Doreurs Fruniffent l'or & l'argent, ce qu'ils exé-
cutent avec la dent de loup , la dent de chien , ou la
pierre fanguine , qu'ils appuient fortement fur les en-
droits des pièces à brunir. Lorfqu'on brunit l'or fur les
autres métaux , on mouille la fanguine dans du vinai-
gre : mais lorfqu'on brunit l'or en feuille , fur les cou-
ches à détrempe , il faut bien fe garder de mouiller la
pierre ou la dent de loup.
Les Relieurs bruniffem les tranches des livres ; pour
cet effet ils mettent les livres dans une prefie à en-
doffer, avec des ais devant & derrière la prefie, &
deux ou trois autres ais distribués entre les volumes :
on prend une dent de loup ou d'acier que l'on frotte
fortement plufieurs fois fur la tranche pour la luf-
trer. Après que la jafpure a été mife & qu'elle eft fe-
che, on commence à brunir les gouttières , puis tour-
nant la preflee on brunit les tranches du haut èc du
bas du volume. Voye^ Tranche, Jaspure, Dent
À brunir.
On brunit de même les livres dorés fur tranche ,
après y avoir appliqué l'or : mais on obferve pour
la dorure, de mettre l'or d'abord fur la gouttière, de
le faire fécher fur le baquet , & on n'y parle la dent
que lorfqu'il eft bien (qq. Puis déflorant la preflee,
on prend chaque volume pour en abbaifîer les bords
du carton au niveau des tranches , &z remettant la
preflee dans la prefie à endoffer, on fait la même •
opération , foit pour y mettre l'or , le faire fécher ,
èc le brunir. On retourne de nouveau la preflee avec
la même précaution , on dore & on brunit la dernière
tranche. Voye^ Dorer sur tranche 6* Dent à
BRUNIR.
* BRUNISSOIR, f. m. {Art méchan. en métaux.)
outil à l'ufage de preique tous les ouvriers qui em-
ployent le fer, l'or , l'acier , l'argent , Pétain; ils s'en
fervent pour donner de l'éclat à leurs ouvrages après
qu'ils font achevés. Le bruniQoir pane fortement fur
les endroits de la furface de l'ouvrage qu'on veut
rendre plus brillans que les autres , produit cet effet
en achevant d'enlever les petites inégalités qui ref-
tent du travail précédent. D'où l'on voit que, dé
BRU
quelque matière que l'on faffe le brunijfoir, cet outil
n'emporte rien de la pièce, & doit être plus dur
qu'elle.
Le brunijfoir de Y Argent eur eft un morceau d'acier
fin , trempé & fort poli , monté fur un manche de
bois. Voyez figure de t 'Argentcur , Planche VII.
Le brumflbir des Couteliers eft d'acier fin , trempé
& bien poli; il varie félon les ouvrages. Il y en a à
main , & il y en a à étaux. Les brunijfoirs à main
n'ont rien de particulier ; ceux à étaux font montés
par un bout fur un long morceau de bois qu'on ferre
dans l'étau : on pofe la pièce à brunir fur ce morceau
de bois , &c l'on appuyé fur elle fortement le bmnif-
fbir , qu'on tient par le manche qui eft à l'autre bout.
Le bruniffbir fait levier. Quant à fa forme , on lui
donne celle de deux petits concs oppolés au fommet
pour l'intérieur des pièces concaves. Il faut donc
imaginer ces deux petits cônes bien polis, montés fur
un pié , & ce pié élevé perpendiculairement lur le
milieu d'un arbre un peu concave dont il fait partie,
de façon que les deux petits cônes , tenus à quelque
diftance de l'arbre par le pié, foient dans une direc-
tion parallèle à l'arbre. Cet arbre a une de lés extré-
mités faite en crochet ; ce crochet recourbé en-def-
fus, fe place dans un piton fixé fur un morceau de
bois étroit, mais de la longueur de l'arbre ; fon autre
extrémité eft emmanchée. Or. place le bois dans l'é-
tau, & on parle l'un ou l'autre des cônes dans l'anneau
ou for la lurface de la pièce à brunir , & on applique
ce cône fortement fur elle , à l'aiae du piton qui re-
tient un des bouts du bruni, oir, 6c du manche qui fert
à appuyer à l'autre bout. L'arbre du brunijfoir, quand
l'ouvrier s'en lert, eft parallèle au bois pris dans l'é-
tau, &c perpendiculaire à la pièce à brunir.
Le brunijjoir dent les Doreurs fe fervent , eft fait
ordinairement d'une dent de loup , de chien , ou de
la pierre fanguine. On met ces dents ou cette pierre
au bout d'un manche de fer ou de bois. Il y a auftî
des brunijj'oirs d'acier communs à plufieurs ouvriers.
Voyez la figure J8. Planche II. du Doreur.
Le brunifjoir du Doreur fur cuir , eft un caillou dur
& poli emmanché, dont ces ouvriers fe fervent pour
liffer les cuirs dont ils font les tapifteries. Voye^ les
figures 6. & y. Planche du Doreur Jïir cuir ; & la figure
J. de la Vignette , qui reprèfente un ouvrier qui lijje une
peau fur une pierre poj'ée J'ur un établi.
Le brunijjoir ordinaire des Graveurs, eft une lame
d'acier de 6 ou 7 pouces de long & 3 ou 4 lignes d'é-
paiffèur, courbée en S par les deux bouts, qui font
amenuilés pour entrer dans les manches ou poignées
A B (fig. 20. Planche de la Gravure ) qui fervent à le
tenir. La partie du milieu cd, qui eft plate, eft arron-
die du côté convexe , 6c eft auffi un peu courbe ;
l'arrondiffement doit être bien poli, tk tout l'outil
trempe dur.
On fe fert du brarùfibir, pour donner le dernier poli
aux planches de cuivre en Les frottant avec , & ayant
foin de mettre de l'huile d'olive pour les lubrifier. Les
autres brunijj'oirs confiftent en un bâton , pour fervir
de manche, & en une pièce d'acier arrondie fur la
convexité , ainfi que h figure 21. de la même Planche
le reprèfente. 11 y en a de différentes tonnes & gran-
deurs.
Les Horlogers en ont de différentes figures , de for-
més en lime à feuille de fauge , comme dans la figure
zy. n° 2. Planche XIV. de VHorlog. d'autres comme
des limes ordinaires. Ils font tous d'acier trempe &
bien polis : les premiers fervent ordinairement à bru-
nir des vis , des pièces de cuivre ; les autres fervent
pour des pièces plates : ils en ont de petits de cette
dernière efpece pour brunir les pivots, & ils les ap-
pellent brunijj'oirs à pivots. Voyjr BRUNIR. (T)
Le brunijjoir des Orfèvres en grojferie , eft un in 11 ra-
ment d'acier très-poli, ou une pierre fanguine, ou
Tome II,
BRU
451
mente une pierre plus fine, montée fur un manche.
C'eft en l'appuyant également fur tous les endroits
du champ d'une pièce qu'on lui donne ce beau poli ,
cet éclat que les yeux ont quelquefois peine à foû-
tenir.
Les bruniffoirs dont les Facteurs d'orgues fe fervent
pour brunir les tables d'étain qu'ils employent à
faire les tuyaux de montre ou d'anches , font dés mor-
ceaux d'acier arrondis & très-polis , avec lefquels en
frottant fur les tables "d'étain, ils les rendent unies &
luifantes; lu fig. 64. Planche d'Orgue, en reprèfente
deux* A , le manche ; B , le brunijjoir, que l'on appli-
que par le côté convexe fur la table que l'on veut
brunir; CD, un autre brunijjoir qui fert au même ufa-
ge ; C, la poignée de bois dans laquelle le fer D entre
au moyen d'une entaille qui y eft pratiquée. V. Part.
Orgue , où le travad de l'étain & du plomb eft ex-
pliqué.
Le brunijfoir du Potier d'étain lui fert après que fon
ouvrage a été tourné ou reparé au gratoir : il en a de
différentes formes ; les uns pour brunir la vaiflèlle,
les autres la poterie & menuiferie , & les autres ce
qui eft reparé à la main. Ces outils font d'acier pur,
trempé bien dur, enfuite bien polis & frottés de
tems en tems fur la potée d'étain : lorfqu'on s'en lert,
il faut mettre de l'eau de favon fur les pièces d'ou-
vrage avant de les brunir. Voye^ la Planche du Potier
d'étain.
* BRUNITURE , fub. f. fe dit , en Teinture , de la
manière d'éteindre l'éclat d'une couleur, afin de la
réduire-à la nuance qu'on veut , fans toutefois la faire
changer d'efpece. C'eft en conféquence de la nécef-
fité où font les Teinturiers du grand teint de recourir
de tems en tems à cette opération , qu'il leur eft per-
mis de tenir, en petite quantité, des ingrédiens par-
ticuliers aux teintures en petit teint. V. Teinture.
BRUNNER (Glandes de), Anatom. elles font
fituées à l'entrée du duodénum ; elles portent le nom
du médecin Brunner, qui les découvrit & les décrivit
dans une obfervation communiquée à la Société des
curieux de la nature. (L)
BRUNO, (Géog.) rivière d'Italie, dans le grand
duché de Tolcane , qui prend la fource au mont Mafîi,
& fe jette dans la mer près de Caftiglione.
BRUNSBUTTEL, (Geog.) petite ville, à l'em-
bouchure de l'Elbe , appartenante au roi de Dane-
mark.
BRUNSFELSIA, f. i.(Hift. natta, bot.) genre de
plante , dont le nom a été dérivé de celui à'Othon
Brunsfels , médecin. La fleur des plantes de ce genre
eft monopétale , en torme d'entonnoir, tabulée &
découpée. Il s'élève du fond 'du calice un piftil qui
eft attaché au fond de la fleur comme un clou , & qui
devient dans la fuite un fruit arrondi, mou, charnu ,
& rempli de femences ovoïdes , qui le trouvent en-
tre la peau & la chair du fruit. Plumier, Nova plant.
Amer. gen. Voye^ Plante. (/)
BRUNSWICK, (Géog.) grande & forte ville
d'Allemagne , dans le cercle de la baffe Saxe; elle
étoit autrefois impériale & libre, fur la rivière d'Oc-
kcr. Long. 28. là. lat. 52. l5.
Brunswick (le duché de) , Géog. c'eft une grande
province d'Allemagne , dans le cercle de la baffe
Saxe, bornée au nord par le duché de Luncbourg,
à l'occident par le cercle de"Weftphalie , au midi par
le kmdgraviat de Heffe, & à l'orient par la Thuringe
ce le duché de Magdebourg. La capitale eft Brunl-
wick.
BRUNTZENY-MEYDAN,(Cv-.)viile forte de
Croatie, qui fert de barrière contre les Turcs, près
de la rivière d'Unna.
BRUSILOW, (Géog.) ville de Pologne, dans le
palatinat de Kiovie.
* 13RUSQL EMB1LLE Çfeu de la). On peut jouer
L 1 1 ij
45i
BRU
à la brufquembille > deux , trois , quatre , ou cinq : mais
il eit bon d'obferver qu'à deux 6c à quatre on ne joue
qu'avec trente-deux cartes , qui ibnt les mêmes que
celles avec lesquelles on joue au piquet ; & lorique
l'on joue trois ou cinq , il faut que le jeu foit compofé
de trente cartes feulement , c'eft-à-dire", qu'on enlè-
vera deux lept , n'importe lesquels. Lorfqu'on joue à
quatre, l'on eit deux contre deux , & l'on fe met en-
semble afin de pouvoir fe communiquer le jeu.
Les brufqiumbilks font les as & les dix ; elles enlè-
vent les autres cartes de la même couleur ; mais elles
font enlevées par les triomphes : le reite des cartes
conferve le rang & la Supériorité ordinaires.
Lorfque l'on joue en partie , c'eit à-dire , un contre
un , deux contre deux , on convient d'abord de ce
qu'on jouera ; & fi l'on joue trois ou cinq , on prend
un certain nombre de jettons, que l'on fait valoir ce
qu'on veut ; & celui qui mêle , donne à couper à
la "auche , & distribue enfuite à chaque joueur trois
cartes , une à une ou toutes enfemble , en prend au-
tant pour lui , & en retourne une de deiTus le talon ,
qui eit celle qui fait la triomphe , & qu'il met retour-
née à moitié fous le talon , de manière qu'on puiflè
la voir. Celui qui eit premier jette la carte qu'il veut
de fon jeu ; le fécond joue enfuite fur cette carte ,
celle de fon jeu qu'il juge à propos, &C ainfi des au-
tres , chacun à ion tour. Celui qui gagne la main ,
prend une carte au talon , chacun des autres joueurs
en fait autant , en allant de droite à gauche ; l'on
recommence à jouer comme au premier coup , &
l'on continue jufqu'à ce que toutes les cartes du talon
foient prifes , chaque joueur y en prenant une pour
remplacer celle de ion jeu qu'il jette à chaque coup ;
& celui qui prend la dernière carte , prend la triom-
phe qui retourné.
J'ai dit que le fécond à jouer jettoit la carte que
bon lui fembloit , parce qu'on n'en1 point obligé de
fournir à ce jeu de la couleur de la carte jouée , en-
core qu'on en ait : il n'y a point de renonce : on peut
couper une carte à laquelle on auroit pu fournir : voi-
là la manière de joiier le jeu. On recommence chaque
tour de la même façon , jufqu'à ce que l'on ait joiié
les coups dont eit convenu. Il y a quelques perfonnes
qui prétendent qu'on ne peut renoncer , lorfqu'une
fois toutes les cartes du talon l'ont levées , & qu'il
faut couper abfolument û l'on n'a pas de la couleur
jouée : mais je crois que cela dépend de la volonté
des joueurs. Panons aux droits qui fe payent à ce jeu.
Celui qui joue la brufquembille de l'as de triomphe
reçoit deux jettons de chacun : il retire également
deux jettons de chaque joueur, pour tous les as qu'il
jouera après , pourvu qu'il faiTe la levée ; car s'il ne
la faifoit , au lieu de gagner deux jettons de chaque
joueur, il eit obligé de leur en payer deux à chacun.
Il en eit de même des dix , qui valent de chaque joueur
un jetton chacun: mais s'il ne levé pas la main , il eit
obligé d'en donner un à chaque joueur. Celui qui a
plus de points dans les levées qu'il a faites , gagne en-
fuite la partie. Voici la manière de compter ces points:'
après que toutes les cartes du talon ont été prifes, &
que l'on a joiié toutes les cartesque l'on avoit en main,
chacun voit les levées qu'il a , & compte onze points
pour chaque as, dix pour chaque dix, quatre pour
chaque roi , trois pour chaque dame , deux pour cha-
que valet ; &c les autres ne font comptées pour rien.
Celui qui en comptant ainfi, fe trouve avoir plus de
points, gagné la partie. L'on doit par confequent tâ-
cher de faire des levées où il y ait beaucoup de points,
des as , des rois , des dames , des dix , & des valets ,
alin de pouvoir gagner le jeu. L'uiage ôc le bon lens
apprendront mieux à joiier ce jeu , que tout ce que
nous pourrions en dire ; la iituation du jeu demandant
de joiier un même coup tantôt d'une façon tantôt
d'une autre. II eit quelquefois bon d'avoir la main ,
BRU
d'autres fois de l'abandonner à fon adverfaire. En
général , pour bien joiier la brujquembille il faut une
grande attention, pour voir non-ieulement les triom-
phes qui l'ont déjà Sorties*, mais encore les brufqium-
bilks qui font paiTées & celles qui font encore dans
le jeu, afin d'en faire fon avantage en jouant.
Voici quelques règles qui pourront rendre plus
complette la connoiiiance qu'on a déjà de ce jeu,
fur ce que nous en avons dit. Celui qui mêle & trou-
ve une ou plulieurs cartes retournées , ou en retour-
ne lui-même, refait, fans autre peine. Si le jeu de
cartes eit faux par une carte de moins , tout ce qui a
été payé dans le coup eit bien payé ; mais on ne peut
gagner la partie , & l'on ceile de joiier.pourdeux car-
tes qui manqueroient, auffi-tôt qu'.on s'en apperçoit ;
ii le coup eit fini , il eit bon : celui qui joue avant fon
rang, ne peut reprendre ia carte : celui qui a jette fa
carte, ne fauroit y revenir fous quelque prétexte que
ce foit : celui qui prendroit avant fon tour une carte
du talon , s'il a joint à fon jeu la carte prife au talon ,
paye à celui à qui elle auroit été de droit , la moitié
de ce qui eit au jeu , & il la lui rend ; tk s'il ne l'avoit
pas jointe à fon jeu , mais vue feulement , il donne-
1 oit deux jettons à chaque joueur, tk la laifleroit aller
à qui doit la prendre de droit. Celui qui en tirant fa
carte du talon en voit une féconde , paye deux jet-
tons à chaque joueur. Lorique l'on joue en partie ,
deux contre deux , fi l'un des joueurs en prenant fa
carte du talon , voit celle qui doit aller à ion adver-
faire , il leur eit libre de recommencer la partie ; &
fi la carte vue revient à lui ou à fon compagnon , le
jeu fe continue. Il n'y a point de renonce , & l'on n'eil
point forcé à mettre plus haut fur une carte jouée.
Celui qui ayant accuié avoir un certain nombre de
points en auroit d'avantage, & ne les acculerait qu'a-
près que les cartes 1er oient brouillées, ne pourrait y
revenir , & perdrait la partie fi un autre joueur avoit
plus de points dans fes levées qu'il n'en auroit aceufé.
Celui qui quitterait le jeu avant la partie finie , la
perdrait.
BRUSQUEMBILLE, au Jeu de ce nom, eit le nom
qu'on donne aux as 6c aux dix , qui font les premiè-
res cartes du jeu ; les as enlèvent cependant les dix.
Vcye[ l'article précèdent.
* BRUT , adj. ( Gramm. ) eit Foppofé de travaillé:
ainfi on dit de la mine brute , un diamant brut, du lu-
cre brut ; en un mot on donne cette épithete à tous
les objets dans l'état où la nature nous les preiente
lorfqif ils font deitinés à être perfectionnés par l'art :
le naturalise ne dit point une plume brute , parce
qu'il ne la confidere jamais comme une production
qui puifle être perfectionnée par l'art: mais le Plu-
maffier le dit. On ne dit jamais une plante brute. On
donne quelquefois auffi le nom de brut à des produc-
tions artificielles, lori qu'elles en font au premier ap--
prét , & que la main-d'œuvre doit en enlever dans la
fuite des traits greffiers , & autres imperfections lèm-
blables. Ainii on dit d'une pièce de fonderie au for-
tir du moule , qu'elle eit toute brute.
Brut ouOrt , terme de Commerce, qui s'entend du
poids de la marchandise quand elle eit pelée avec fon
emballage : on dit en ce lens, cette balle de poivre pefe
brut ou on 6 00 livres, pour marquer que l'emballa-
ge & le poivre qu'il contient pèlent enfemble 6oo li-
vres. Il y a des marchandiies qui payent les droits
d'entrée & de fortie du royaume net, oc d'autres brut
ou ort. On fe fert auffi du mot bruto, qui Signifie la mê-
me choie ; mais il eit étranger , & peu imté en Fran-
ce. (G)
BRUTE , f. f. ie dit de l'animal confidere comme
privé de raifon , èv par oppoiition à l'homme, yqye^
Animal «S- Bete.
BRU TIENS , f. m. pi. ( Hijl. a ne. & Géog. ) peu-
ples originaires de Lacédémone , félon Juitin ; ils ha-
BRU
bitoient cette extrémité de l'Italie que l'on appello-t
la grandi Grèce : on les diftinguoit en tranlmontains
& cilinontnins.
* BRUXANELLI, f.m.(////?. ndt. bot.) grand arbre
de la grofieur d'un pommier qui croît dans les bois
& fur les montagnes du Malabar ; il fleurit en Juillet
& en Août , & ion fruit eft mûr en Novembre &c en
Décembre. Il vit long-tems , & on lui attribue quel-
ques propriétés médicinales , pour la cure du char-
bon, 6c contre les douleurs de la pierre.
BRUXELLES , ( Gèog. ) belle 6c grande ville des
Pays-bas , capitale du Brabant Autrichien , fur la ri-
vière de Senne qui s'y partage en piuiieurs canaux.
C'eft la réfidence des gouverneurs généraux des Pays-
bas. Long, zi. 56. lut. 5o. Si.
BRUYAN , VERDUN ou VERDRIER, fub. maf.
( Hijl. nat.^ cirlus , luttez primum gemts, Aid. oifeau
de la grofieur du moineau ; le bec eft court 6c épais,
le ventre Si la poitrine font jaunâtres, 6c marqués de
taches brunes ; la tête , le dos , les ailes , 6c la queue,
font de couleur de terre cuite , mêlée de brun ; les
deux plumes extérieures v< que côté c!e ta queue
font en partie blanches, & en partie de la même
couleur que les autres plumes : le maie eft différent
de la femelle en ce qu'il a plus de jaune. Cet oifeau
fe tient prefque toujours fur la terre, c'eft pourquoi
on lui trouve le bec plein de limon lorsqu'on le prend.
Willllghby, Omit. Voye?^ OlSEAU. (7)
BRUYERE , i. f. ( Ni fi. nat. bot. ) trica , genre de
plante à fleur monopétaîc en forme de cloche ; il fort
du fond du calice de la fleur un piftil, qui devient
dans la fuite un fruit ordinairement arrondi : ce fruit
s'ouvre en quatre parties ; il eft le plus fouvent par-
tagé en quatre loges , & il renferme des femences
fort petites pour l'ordinaire. Tournefort, In fi. reiherb.
Voyt^ Plante. ( I)
L'erica vulgaris glabra , C. B. Pin. a la décoction
diurétique. Matthiole prétend qu'elle brife le calcul ,
lorfqu'on la prend loir 6c matin trois heures avant
les repas, à la doie de cinq onces; il ajoute que fon
effet réuftit mieux fi l'on fe baigne plufieurs jours
de fuite clans cette décoction , après en avoir u(é in-
térieurement pendant trente jours.
Rondelet , au rapport de Clufius, cmployoit l'hui-
le de fes fleurs pour les dartres du vifage.
Le fuc de bruyère , ou l'eau diftillée de fes fleurs ,
difîipe la rougeur des yeux , & en fait cefferles dou-
leurs.
Tabernœmontanus afïïire que la fomentation de
fes fleurs calme la goutte. Le bain de vapeur avec
les feuilles & les fleurs de la même plante , produit
le même effet. Tournefort, Biji. des Plantes. (A7)
BRUYERE , en terme de Vergettier , eft un petit ar-
bi ilicau dont les rameaux font petits & trcs-iouples ;
c'eft pour cela qu'on l'appelle feopa , c'elt-à-dire bal-
let , en Italie où il elt très-commun , & d'où les mar-
chands Vergettiers de Paris le tirent , comme le meil-
leur qui foit à leur ufage.
BRUYERES, (Géog.) petite ville de Lorraine,
dans le pays de Yolge.
BRUYUIERE , {la ) Géog. petite ville de France
dans le Languedoc , au diocefe de Lavaur.
* BRYONE , f. f. ( ffift. nat. bot. ) byonia : il y
a deux efpeces de bryone; la blanche , 6e le fecau
notrc-clame. La blanche eft encore de <\e\\\ fortes ;
l'une à baies rouges , & l'autre à baies noires.
La bryone à baies rouges a la racine plus groffe
que le bras quand elle eft jeune , îk autîi groffe que
la cuille quand elle eft vieille , divifée eu grofles fi-
bres , charnue, & fongueufe quand elle eft lèche. Sa
fubftance eft diltinguée par des cercles S: des rayons ;
fa faveur elt acre , défagréable, & un peu amere,
& fon odeur fétide quand elle eft fraîche. Ses tiges
font longues , grêles , grimpantes , cannelées , un peu
B R Y 453
velues, 6c garnies de mains ou longs filets tortillés :
les feuilles placées alternativement, anguleuies ,
afh. / iemblables à celle de la vigne, mais plus petites
& plus rudes : fes fleurs fortant piuiieurs enfemble
des aiffelles des feuilles, d'une feule pièce , en clo-
che, évafées , partagées en cinq parties , arrondies,
d'un blanc verdâtre , parlémées de veines , £< tel-
lement adhérentes à leur calice , qu'on ne les en peut
feparer. Parmi ces fleurs il y en de fténles , qui lont
les plus grandes , 6c qui ne font pas portées fur un
embryon ; les autres font plus petites , fécondes , ap-
puy ées fur un embryon,fe changeant en une baie fphé-
rique de la grofieur d'un pois, verte d'abord, enfuite
rouge , molle , pleine d'un fuc qui caufe desnaufées ,
& des graines arrondies couvertes d'un mucilage-
Cette plante fe trouve dans leshaies & dans les forets.
La bryone blanche à baies noires ne diffère de la
précédente que par la couleur de fes racines &: de fes
bues. Les racines de celle-ci ont intérieurement la
couleur de bouis ; les racines de la précédente font
d'un blanc jaunâtre : les baies de celle-ci font noi-
râtres ; celles de la première font rouges. On fait
moins d'ulage de la bryone à baies rouges.
Le fceau notre-dame a la racine épaille , grofTe ,
longue , tubercule , noire en-dehors , blanche en-de-
dans , remplie d'un fuc gluant & vifqueux , d'une fa-
veur acre qui n'elt pas défagréable ; les tiges farmen-
teufes, grofTes, longues, grimpantes, ligneufes, rou-
geâtres, noirâtres, & fans mains ; les feuilles alter-
nes, molles , d'un verd gai, huilantes , affez fembla-
bles à celles du frntlax , garnies de piuiieurs nervu-
res finuées , & d'une faveur vifqueufe ; les fleurs en
grappe à l'aiffelle des feuilles, petites, d'une feule pic-
ce , en cloche , évafées , partagées en fix parties ,
d'un jaune verd , à fix étamines , ce fténles.
Il y a une autre racine vierge, femelle, & appel-
lée bryonia Lvis ,jive nigra baccifera : elle a la fleur
plus grande que fa pje eedente , blanche, garnie d'un
piltil qui fe change en une baie fphérique, rougeâ-
tre , ou d'un rouge foncé , de la groffeur d'une ce-
rife , 6c contenant une coëffe mem'brancufe remplie
de graines arrondies.
Les racines des deux premières efpeces purgent
les férofités parle ventre è: par les urines , lèvent les
obltructions, excitent les mois aux femmes, pouf eut
l'arrierefaix , font propres contre l'althme 6c fhy-
dropilie : râpées , chauffées, 6c appliquées fur l'ef-
tomac , elles purgent comme fi on ies a. oit prifes in-
térieurement. Elles opèrent plus violemment récen-
tes que feches.
Onguent de bryone. Prenez racine de bryone blan-
che une demi-livre, coupez-la par petites tranches ,
ôc faites-la frire dans une poêle juiqu'à ce qu'elle foit
feche ; paffez la liqueur, & donnez-lui la confiltance
d'onguent, avec la cire à la doie de cinq onces , &
demi-livre de réfine de lapin. Il réfout les écroiielles
y étant appliqué loir & matin.
Eau de bryone compofée parLemcry .Prenez du fuc de
racine de brj une 4 [ivres ; des feuilles de rue, d'armoi-
fe , de chaque 1 livres ; des feuilles de labine feche 3
poignées ; des feuilles de matricaire. d'herbe-à-chat ,
de pouliot, de bafilic, de dictante de Crète, de chacu-
ne 1 poignées ; d'écorce d'orange nouvelle quatre
onces ; de myrrhe deux onces; dé caftoreum une
once ; de vin de Canarie fix pintes ; laifiêz le tout
en digeftion pendant quatre jours dans un vaiffeau
convenable , puis faites-en la diftiilation au bain-
marie; quand elle fera à moitiérfaite , on exprimera
ce qui fera refté dans l'alembic , on continuera à dif-
tiller la liqifeur exprimée , puis on en tirera l'extrait
en faifant épailîir ce qui reftera de liqueur au fond de
la cucurbite.
Remarques. On prend la bryone récente , on la râ-
pe, & on en tire le fuc par expreffion. On aura des
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feuilles de rue & d'armoife récentes , on les pilera
bien , & on en tirera le fuc de la manière ordinaire.
La labine , le diefame , feront iecs ; on les concalîera
& mêlera avec de l'écorce extérieure d'orange ame-
re, la myrrhe & le cajloreum ; on les mettra clans une
cucurbite ; on verfera delïus les lues & le vin de Ca-
narie;'on bouchera le vaiffeau exactement ; on le laif-
fera en digeftion pendant quatre jours, puis on la dif-
tillera au bain-marie. Après en avoir tiré la moitié ,
on exprimera le rendu, & on rediftillera de nouveau ;
enfuite on réduira le relie en coniiftance d'extrait.
Ces eaux mêlées feront l'eau de bryone compofée.
Cette eau eft hyftérique, apéritive ; elle excite les
règles ; elle eft fortifiante , diaphorétique : la dofe
eft depuis demi-once juiqu'à trois onces.
Elecluaire de bryone. Prenez du lue de racine de
bryone mondée nouvellement tirée , quatre livres ;
du meilleur miel deux livres ; cuifez-les en coniiftan-
ce de miel ; puis ajoutez y de la poudre de turbith ,
d'hermodaefes , de jalap , d'agaric , du fel de bryone ,
de chacun fix gros ; des fécules de bryone demi-once ;
faites-en un éleûuaire félon l'art , dont la dofe fera
depuis une dragme juiqu'à une once. Lemery, Phar-
mac. univ.
BRZEST , BRZESTIE , ou BRISCH , ( Géog. )
province ou palatinat de la grande Pologne dans la
Cujavie , dont la capitale porte le même nom. Lon.
3J. 10. lat. 32. 10.
Il y a un palatinat & une ville de même nom en Li-
fhuanie.
BRZEZ AN , ( Géog.) ville de Pologne , dans le pa-
latinat de Rulîie.
B U
BU A , ( Géog. ) île du golfe de Venife fur la côte
de Dalmatie , appartenante aux Vénitiens.
BUABIN,!'. m. (Hijl. mod. ) idole des peuples
de Tonquin , qui habitent entre latf hine ck l'Inde ;
ils l'invoquent lorfqu'ils veulent bâtir une maifon :
ils font dreffer un autel, où ils appellent des bonzes
pour y facririer à cette idole ; après le facrifice on
prépare un feftin des viandes qui ont été facrilîées ,
puis on prélente au Buabin plulieurs papiers dorés
où Ton a écrit quelques paroles magiques , enluite
on les- brûle avec des parfums devait l'idole, pour
l'obliger par cette cérémonie à ne point fouffrir qu'il
arrive jamais de malheur dans la maifon qu'on va
bâtir. Tavernier , Voyage des Indes. (G)
BUADA ,' ( Géog. ) petite île de l'Amérique fep-
tentrionale, dans le lac d'Ontario.
BUADE ,{. {. ( Manège. ) c'eft la même chofe
que bride à longue branche. Les branches de cette ef-
pece de bride font droites & non coudées. ( V)
BUANDERIE , f. f. en Architecture , eft un bâti-
ment particulier dans une communauté ou dans une
maifon de campagne , compolé de pluiîeurs falles
au rez-de-chauffée , avec un fourneau & des cuviers
pour faire la lelïïve. (P)
* BUANDIER , f. m. eft celui qui fait le premier
blanchiment des toiles neuves ; le blanchilfeur au
contraire eft celui qui fait les blanchiffages dont la
toile a befoin à mefurc qu'on s'en fert.
* BUANES , ( Géog. ) ville de France fur la ri-
vière de Bahu , dans la Gafcogne , près d'Aire.
BUARCOS , ( Géog. ) ville de Portugal dans la
province de Beira, proche de la mer.
* BUB ASTE , ( Myth. ) nom que l'on donne à la
Diane d'Egypte ; Diane bubafle , eft la même chofe
que Diane la chate : elle fut ainiî appellée parce qu'el-
le fe transforma , dit-on , en chate , lorlque les dieux
fe réfugièrent en Egypte. La fête de Diane bubafle
étoit une des plus grandes de cette contrée : elle le
célébroit particulièrement à Bubafte ville de la baffe
BUB
Egypte ; on s'y rendoit dans des bateaux remplis de
fymphonic.
BUBON , bubo , f. m. ( terme de Chirurgie. ) c'eft une
tumeur qui vient aux glandes des aînés & des aiffel-
les ; cette tumeur eft skirrheule ou phlegmoneuie
^oj^Skirrhe 6- Phlegmon.
Ce mot vient du Grec /Sufap , inguen , aine , le fié-
gc ordinaire de ces fortes de tumeurs.
Il y a deux fortes de bubons ; on appelle les uns
bénins &z les autres malins ; les malins le divifent en
peftilentiels 6c en vénériens ; les peftilenîiels iùr-
viennent aux fièvres peftilcntielles ; les leconds font
une fuite d'un commerce impur, & font des fymp-
tômes de la vérole. Quand un bubon eft entouré d'un
cercle de différentes couleurs , c'eft une marque qu'il
eft peftilentiel &c le plus fouvent mortel.
Les bubons vénériens font fouvent durs & skir-
rheux , & fe fondent difficilement, même par l'ufage
des plus puiffans réfolutifs. Ils fe terminent quelque-
fois par fuppuration , & alors on eft fouvent obligé
après l'ouverture de la tumeur, d'extirper les glan-
des tuméfiées, ou de les confommer avec des caufti-
ques. Ambroife Paré donne une étymologie du mot
de bubon , qui eft différente de celle de Chambers
& de tous les auteurs. Il dit qu'on appelle ces tu-
meurs bubons du mot Latin bubo , hibou , parce que
ces tumeurs fe cachent fous les aiffelles & dans les
aines , comme le hibou dans le creux des arbres. Ce
qui pourroit autorifer cette étymologie , c'eft que les
anciens ont donné par des rapports beaucoup plus
éloignés des noms d'animaux à plulieurs tumeurs , &C
qu'ils n'ont pas moins nommés bubons , les tumeurs
des aiffelles & de derrière les oreilles , que celles
des aines , auxquelles ce terme devoit appartenir ex-
clulivement à toute autre par la première étymolo-
gie.(n
* BUBONA , (Myth.) déeffe honorée chez les
Romains ; les bœufs étoient fous fa proteûion , & ori
l'invoquoit pour leur conlervation.
BUBONOCELE,f. f. (termede Chirurgie. ) tumeur
dans l'aine, occafionnée par la defeente de l'épi—
ploon ou des inteftins par les anneaux des mulcles
épigaftriques. Voye^ Epiploon , Intestins, &c.
Ce mot vient du Greci2y£wY, inguen, & x«x« ,
tumor.
La bubonocele eft encore appellée ramex & hernie
inguinale, f^oye^ Hernie. C'eft une efpece de def-
eente que les Chirurgiens appellent incomplette , &
elle eft commune aux hommes & aux femmes.
Les femmes y font beaucoup moins fujettes que les
hommes , parce qu'elles le font plus aux hernies cru-
rales ; les parties flottantes du bas-ventre trouvent
dans les femmes une iffue plus libre fous le ligament
de Falloppe ou de Poupart ; parce qu'ayant les os du
baffin plus fpacieux que les hommes , il y a un plus
"grand intervalle depuis l'épine antérieure & fupé-
rieure de l'os des îles, juiqu'à la tubéroiîté de l'os
pubis ; quoiqu'il n'y paffe pas plus de parties que
dans les hommes. Le moindre effort doit donc déter-
miner les parties flottantes du bas-ventre à former
dans les femmes la hernie crurale plutôt que l'ingui-
nale. Celle-ci a fon liège dans l'aine , & l'autre fe
manifefte plus extérieurement à la partie fupérieure
de la cuiffe. Voye^ Hernie. (Y)
BUC AROS , ou BARROS , f. m. ÇHiJl. nat. ) c'eft
le nom qu'on donne en Eipagne & en Portugal à une
efpece de terre lîgillée , qui le trouve dans ces pays.
On lui attribue beaucoup de propriétés & de ver-
tus : en effet, cette terre eft fort lryptique & aftrin-
gente ; on la dit bonne dans plufieurs maladies, c\c
on prétend que c'eft un excellent antidote contre
toutes fortes de poifons ; les dames Efpagnolcs le
font une habitude fi enracinée de mâcher &c de.
prendre continuellement du bucaros , qu'on prétend
B U C
que la pénitence la plus févere que les confefTeurs
de ce pays-là puiflent impofer à leurs pénitentes , eft
de s'en priver feulement pendant un jour -, foit que
les vertus qu'on lui attribue les déterminent à en pren-
dre fi opiniâtrement, foit que la force de l'habitude
la leur rende néceffaire. Le vin confervé dans des
vafes faits de cette terre , en prend le goût & l'o-
deur qui font allez agréables. Il en eft de même de
l'eau : mais quand on l'y verfe , il fefait.une efpece
de bouillonnement tk d'effervefeence ; & fi elle y
féjourne quelque tems , elle en fort à la fin , parce
que la matière de ces vafes eft tres-poreufe oc fpon-
gieufe. (-)
BUCCAFERREA , f. f . ( Hift. nat. bot. ) genre
de plante dont le nom a été dérivé de celui du comte
Camille Antoine Buccafcrro de Boulogne. Les plan-
tes de ce genre croiffent dans l'eau ; leur fleur eft
fans pétales ; elle n'a qu'une feule étamine fans filet,
faite en forme de rein , & compofée de deux valvu-
les ; cette fleur eft ftérile , & plufieurs eniemble for-
ment un épi à double rang. Les embryons fe trou-
vent auprès de quelques-unes de ces fleurs , & de-
viennent dans la fuite des fruits compofés de plu-
fieuis capfules qui tiennent à de longs pédicules , &
qui reflèmblcnt à des têtes de petits oifeaux ; cha-
que capfule renferme une femence arrondie. Miche-
îi, nova plant, gêner. &c. Voyt^ Plante. (/)
.BUCCALES (Glandes. ) Anatomie ; ce font de
petites glandes difperfées fur le côté intérieur des
joues & des lèvres, quiféparent du fang la ialive qui
fert à la maftication ôt à la digeftion. Voye^ Glan-
de , voye{ Bouche. ( L )
BUCCARÏ , {Géog.) Ville d'Iftrie, fur un petit
golfe de la mer Adriatique , qui forme une des meil-
leures rades qu'il y ait dans l'Europe ; elle appar-
tient à la maiion d'Autriche.
BUCCARIE ou BOUCHARIE, (Géog.) grand
pays d'Afie en Tartarie ; on la divife en grande Se
petite. La grande comprend la Sogdiane &la Baftria-
ne des anciens ; elle eft bornée au Nord par le pays
des Calmeucks , par la petite buccarie à l'Eft , & par
les états de ia Perle £; du Mogol au Sud ; c'eft la par-
tie la plus peuplée 6c la mieux cultivée de la Tarta-
rie ; auffi eft-clle très-fertile & très-abondante; les
habitans font nommés ordinairement Tartargs UJbecks
par les Perfans & les Mogols. La petite Buccarie eft
à l'orient des montagnes du royaume de Cachemir.
BUCC ARIZA , ( Géog. ) petite ville de Hongrie,
en Croatie , fur un golfe de même nom , qui fait par-
tie de celui de Venilè.
BUCCELLARIENS , f. m. (Hi/t. anc. ) on nom-
moit ainfi une compagnie de foldats inftituée parles
empereurs de Conflantinople pour diftribuer une
ibrte de pain de munition de forme ronde , & qu'on
appelloit buccellus , nom qu'on peut rendre en notre
langue par munitionnaires ou diflributeurs des vivres ;
on les trouve encore nommés mariandini , & gallo-
grœci ou hdtenogalatœ. , de la Galatie ou Gallogrece
d'où on les tiroit communément. On neconnoît pas
en détail les fondions de l'emploi de. ces buccetlaircs.
D'autres auteurs donnent ce nom aux paralites
qui étoient entretenus aux dépens des princes ou
feigneurs ; les Vifigots au moins appelloicnt ainfi tous
les cliens ou vaflaux entretenus & nourris par les fei-
gneurs. Quelques-uns croyent que les buccellains
étoient des foldats Actionnaires qui accompagnoient
l'empereur en qualité de gardes; & félon d'autre ,
c'étoient des hommes dont ces princes fe fervoient
pour faire mourir fecretement ceux qui étoient tom-
bes dans leur dilgrace. ( G)
BUCCELLATION , f. f. terme dont fe fervent
quelques Chimijhs pour exprimer l'opération par la-
quelle on divife en morceaux , comme par bouchées,
différentes fubftanecs pour les travailler. ( M)
B U C
455
BUCCIN, buccinum, f. m. (Hijl. nat. Conchiolog.')
coquillage ainfi nommé , parce qu'il reffemble en
quelque façon à un cornet, mufical ; il eft allongé ;
l'ouverture de la coquille eft à l'extrémité la plus
grofie, & la coquille diminue peu à peu jufqu'à l'au-
tre extrémité qui fe termine en pointe. On trouve
des buccins fur la terre , dans l'eau douce & dans la
mer , d'où eft venu la divifion de ces coquillages en
buccins de terre , buccins d'eau douce , & buccins de
mer ; ceux-ci font les plus nombreux ; Lifter en fait
vingt-quatre genres , qu'il rapporte à la même clafie.
Lifter, Hiji.feujynop. meth. conch. Voye^ COQUILLA-
GE , Coquille. ( /)
* Il y a une efpece de buccin commune fur les cô-
tes d\Angleterre , qui fournit la pourpre. Cette pro-
priété a été découverte il y a environ 70 ans , par la
ibeiété royale. M. de Reaumur en a trouvé une au-
tre fur les côtes de Poitou , qui donne auffi cette cou-
leur. Cette efpece eft apparemment une de celles que
Piine a décrites. Les buccins de Poitou qui donnent la
pourpre , fe trouvent ordinairement aflemblés autour
de certaines pierres ou fables couverts de 01 ainb ova-
les , longs de trois lignes, & gros d'un peu plus u u-
ne ligne , pleins d'une liqueur blanche un peu jaunâ-
tre , afiez femblable à celle qui fe tire des buccins mê-
mes , & qui après quelques changemens , prend la
couleur de pourpre. Par les expériences de M. de
Reaumur , ces grains ne font point apparemment les
œufs des buccins y ce ne font point non plus des grains
de quelque plante marine, ni des plantes naifiantes ;
il refte que ce foient des œufs de quelque poifion. Ils
ne commencent à paraître qu'en automne.
Ces grains écralés fur un linge blanc , ne font d'a-
bord que le jaunir prefque imperceptiblement ; mais
en trois ou quatre minutes , ils lui donnent un tres-
beau rouge de pourpre , pourvu cependant que ce
linge foit expofé au grand air : car ce qui eft bien di-
gne de remarque , & fait bien voir de quelle extrême
délicateffe eft la génération de cette couleur, l'air
d'une chambre , dont même les fenêtres feroient ou-
vertes , ne fufflroit pas. La teinture de ces grains s'af-
foiblit un peu par un grand nombre de blanchiffages.
M. de Reaumur a reconnu par quelques expérien-
ces , que l'effet de l'air fur la liqueur des grains , con-
lifte , non en ce qu'il lui enlevé quelques-unes de fes
particules , ni en ce qu'il lui en donne de nouvelles ,
mais finalement en ce qu'il l'agite, & change l'arran-
gement des parties qui la compofent. Nous avons
dans la cochenille une très - belle couleur de rouge ,
mais qui n'eft bonne que pour la laine. Le carthame
donne le beau ponceau & le cramoifi , mais ce n'eft
qu'à la foie. Peut-être, dit M. de Fontenelle, les
grains de M. de Reaumur nous foiirhiront-ils le beau
rouge pour la toile.
M. de Reaumur n'a pas manqué de comparer fa
nouvelle pourpre avec celle qui le tire de i'a, buccins
de Poitou. Les buccins ont à leur collier un petit ré-
fervoir , appelle improprement veine par les anciens ,
qui ne contient qu'une bonne goutte de liqueur un
peu jaunâtre. Les linges qui en font teints , e
à une médiocre chaleur du foleil, prennent d'abord
une couleur verdâtre, enfuite une couleur de citron,
un verd plus clair, & puis plus foncé , de là
lct , & enfin un beau pourpre. Cela le fait en peu
d'heures : mais fi la chaleur du foleil cil fort vive,
les changemens préliminaires ne s'apperçoiventpoint^
êv le beau pourpre paroit tout d'un coup. Un grand
feu fait le même effet , à cela près qu'il le tait un peu
plus lentement , & ne produit pas une couleur fi par-
laite. Sans doute la chaleur du foleil beaucoup plus
fubtile que celle du feu de bois , eft plus propre à
agiter les plus fines particules de la liqueur. Le grand
air agit auffi , quoique moins vite , fur la liqueur des
buccins, fur-tout fi elle eft détrempée dans beaucoup
456
B U C
tPeau ; d'où M. de Reaumur conjecture avec affez
d'apparence , que la liqueur des buccins , & celle des
grains, font à -peu -près de même nature , excepté
que celle des grains eft plus aqueuie. Elles différent
encore par le goût : celle des grains eft falée , & celle
des buccins extrêmement poivrée èv piquante , peut-
être parce qu'elle a moins d'eau.
Si on vouloit les employer dans la teinture , celle
des grains ferait d'un ufage plus commode , & coû-
terait moins , parce qu'il eft aifé de la tirer d'une
grande quantité de grains qu'on écraferoit à la fois ;
au lieu que pour avoir celle des buccins , il faut ou-
vrir le rélérvoir de chaque buccin en particulier , ce
qui demande beaucoup de tems : ou , fi pour expé-
dier on écrafe les plus petits de ces coquillages, on
gâte la couleur par le mélange des différentes matiè-
res que fournit l'animal.
La Chimie indiqueroit peut-être des moyens qui
feroient paraître la couleur plus vite & plus belle ,
& qui là rendroient plus tenace. M. de Reaumur a
prouvé que le fublimé corrofif produit cet effet fur la
liqueur des buccins : mais la pratique , & fur-tout un
principe qui viendroit à faire partie d'un métier , de-
manderait beaucoup d'autres obfervations , & des
vues nouvelles. Il y a bien de la différence entre un
phyficien qui veut connoître , & un artifan qui veut
gagner. Ceft par cette réflexion que M. de Fonte-
nelie finit fon extrait du mémoire de M. de Reaumur.
Voyt{ Hijl. deVacad. ijil. p. il. Le favant accadé-
micien le commence par une autre, qui ne me parait
pas aufîî vraie ; c'eft qu'il y a plus de chofes trou-
vées dans ces derniers fiecles , qu'il n'y en a de per-
dues des anciens : mais qu'il ne peut y avoir rien de
perdu , que ce qu'on veut bien qui le foit; qu'il ne faut
que le chercher dans le léin de la nature, où rien
ne s'anéantit, & que c'eft même une grande avance
pour le retrouver , que d'être fur qu'il le peut trouver.
Mais on peut répondre à M. de Fontenelle , que le fein
de la nature eft vafte ; que propofer à un phyficien ce
champ à battre pour y retrouver quelque ancienne
découverte, c'eft lui donner à chercher un diamant
tombé dans le fond de la mer. Une découverte fe
fait fouvent par hafard ; & il peut fe paflèr bien des
(iecles avant que le même hafard fe repréfente : en
un mot , je croi que quand une invention eft perdue,
non-feulement on ne la retrouve pas quand on veut,
mais qu'il fe peut faire qu'avec beaucoup de foins &
de travail , on ne la retrouve jamais. Quant au nom-
bre des choies nouvellement trouvées , & à celui des
anciennes découvertes perdues , c'eft un examen im-
poffible : nous lavons très-bien ce qu'il y a de récem-
ment découvert , mais nous ne lavons point tout ce
que nous avons perdu des anciens ; & fans l'une &
l'autre de ces connoifîances , il n'y a point de compa-
raifon à faire.
BUCCINATEUR , f. m. pris adject. enAnatomie ,
nom d'un mufcle iitué tranfverfalement fous les joues
dont il tait partie. Il s'attache à la partie antérieure
& inférieure de l'apophyfc coronoïde delà mâchoire
inférieure , & vis-à-vis les racines des dernières dents
molaires de l'une & l'autre mâchoire, & fe termine
à la commiffure des deux lèvres. Il eft percé vers fon
milieu par le conduit falivaire de Senom Voy. Con-
duit & Salivaire, (I)
BUCCINE, f. f. (Anmilit.) étoit un ancien inf-
iniment mditaire , ou plutôt un ancien infiniment
de muiîque , dont on fe fervoit à l'armée pour aver-
tir les gardes de nuit , & pour faire f "avoir aux foldats
quand ils dévoient defeendre ou monter la garde.
Le mot Latin buccina dont celui-ci eft fait , vient
de bucca , bouche , & de cano , je chante ; parce qu'on
s'en fert avec la bouche. D'autres croyent qu'il vient
du Grec ^ny.avii, qui fignifie la même choie , formé de
C.s, bœuf, & de cano , je chante ; parce qu'ancienne-
B U C
ment cet infiniment étoit fait de corne de bœuf. D'au^
très de l'Hébreu buk , une trompette. Varron dit qu'il
a été ainfi nommé par onomatopée de bou, bou , en
faifant allufion au fon qu'il rend. Et d'autres le font
plus probablement venir de buccinum , qui eft le nom
d'une conque ou coquille de poijjon.
Le cornet eft regardé comme une forte de trom-
pette , de laquelle cependant il diffère non-feulement
par la figure qui eft droite dans la trompette, & re-
courbée dans le cornet , mais encore par le fon , le
fon du cornet étant plus dur , plus fort , & plus fa-
cile à être entendu de loin , que celui de la trom-
pette. Voyc^ Trompette. Le cornet & la conque
femble avoir été le même inftrument , que l'on a dif-
tingué enfuitc en ce que le nom de conque eft de-
meuré aux plus petits cornets , ce celui de cornet eft
refté à ceux de la plus grande efpece. Quelques-uns
croyent que la conque étoit moins recourbée que le
cornet , qui décrivoit un demi-cercle entier. Varron
aflure que la conque étoit aufïi appellée cornet , par-
ce qu'on faifoit cet inftrument avec lés cornes des
bœufs ; comme cela fe pratique encore dans quel-
ques endroits. Servius affûre qu'on les faifoit ancien-
nement de cornes de bélier ; & conféquemment ces
inftrumens dont on fe fervoit anciennement chez les
Juifs à l'armée & dans le temple , fe trouvent nom-
més dans l'Ecriture fopheroth haijobelïun , cornes de
béliers. Voye^ Corne. ( Q )
BUCENTAURE , f. m. ( Hijl. mod. ) c'eft le nom
d'un gros bâtiment qui reflemble affez à un galion ,
dont fe fert la feigneurie de Venife lorfque le doge
fait la cérémonie d'époufer la mer; ce qu'il fait tous
les ans le jour de* l'Af cenfion. La feigneurie fort du
palais pour aller monter le bucentaure , qu'on amené
pour ce fujet proche des colonnes de Saint -Marc.
Cette machine eft un fuperbe bâtiment, plus long
qu'une galère , & haut comme un vaiffeau , fans mâts
& fans voiles. La chiourme eft fous un pont, fur le-
quel eft élevée une voûte de menuiferie & fculptu-
re dorée par dedans , qui règne d'un bout à l'autre
du bucentaure , & qui eft foûtenue tout autour par
un grand nombre de figures , dont un trclfieme rang
qui foûtient la même couverture dans le milieu , for-
me une double galerie toute dorée & parquetée ,
avec des bancs de tous les côtés , fur lefquels font
affis les fénateurs qui afïiftent à cette cérémonie.
L'extrémité du côté de la poupe eft en demi-rond,
avec un parquet élevé de demi-pié. Le doge eft affis
dans le milieu ; le nonce & l'ambaffadeur de France
font à fa droite & à fa gauche , avec les nobles qui
forment le confeil. ( Z)
BUCEPHALON , f. f. ( Hijl. nat. bot. ) genre de
plante dont la fleur eft fans pétales , compofée feule-
ment de deux étamines qui tiennent à l'embryon , &
qui refïcmblent en quelque façon aux cornes d'un
taureau. L'embryon devient dans la fuite un fruit
charnu , ovoïde , & cannelé. Ce fruit renferme un
noyau qui fe cafte aifément , & dans lequel il y a une
amande. Plumier , Nova pi. Amer. gen. Vôy. Plantf..
<7>
BUCH , ( Géog. ) petite ville de France en Guien-
ne. On nomme le territoire qui en dépend , le capi-
tulât de Buch.
BUCHAN , ( Géog. ) province de l'Ecofle fepten-
trionale , bornée au nord & à l'orient par la mer; au
fud par le comté de Marr , & au couchant par celui
de Murray . Il s'y trouve beaucoup d'agates. On pré-
tend qu'il n'y a point de fouris ; & que fi on y en
tranfbortoit d'ailleurs , elles ne pourraient y vivre.
BUCH AW , (Géog.) ville libre & impériale d'Al-
lemagne dans la Souabe , fur le Federzée, à neuf
lieues d'Ulm. Long. xy. 20 lat. 48. 2.
Buchaw (le), Géog. petit pays d'Allemagne
dans le cercle du haut Rhin. Fulde en eft la capitale.
Bue
BUC
B U C
457
Buchaw , ( Géog. ) ville de Pologne dans îe pa-
iatinat de Mciielau, dans la Ruffie Lithuanienne. Il
y a encore une petite ville de ce nom en Bohème ,
dans le cercle de Satz.
BUCHE , f. £ que l'on écrit aufîi bufche , Se que
quelques-uns appellent bu^e ou flibot. ( Mar. ) La bû-
che ell un petit bâtiment dont on fe fert à la mer pour
la pêche. Les Anglois Se les Hollandois fe fervent de
cette forte de bâtiment pour la pêche du hareng. La
forme de ce bâtiment fe connoîtra bien mieux par
l'infpection de la figure. Voye^ Planche XII. figure z.
qui repréiente une bûche ou flibot , dont voici les pro-
portions les plus ordinaires.
Une bûche a ordinairement 52 pies de long de l'é-
trave à l'étambord ; 1 3 pies 6 pouces de ban , & 8
pies de creux. L'étrave a 2.0 pies de haut , 1 2 pies de
quelle , 9 pouces d'épaifTeur en-dedans , & un pié 9
pouces de largeur par le haut &c par le bas.
L'étambord a 22 pies de haut , 2 pies - de quelle ,
tin pié de large par le haut , & 3 pies 6 pouces par le
bas.
La plus baffe préceinte a 8 pouces de large , & la
fermure qui ell au-deffus , a 5 pouces & demi : la fé-
conde préceinte a 7 pouces de large , & la fermure
en a 5 : la troifieme préceinte a 5 pouces Se demi de
large , la fermure qui ell au-deffus en a 1 5 par Ion mi-
lieu , & 1 6 au bout ; la liffe ell large de 4 pouces ; les
lattes ont 2 pouces de largeur Se 2 d'épaiffeur.
Les bûches ont deux fortes de petites couvertes ou
chambres, à l'avant Se à l'arriére : celle de l'avant
fert de cuifine.
Le maître ou patron de ces bâtimens y comman-
de. Il a un aide ; le contre-maître vient après. Sous
lui font ceux qui virent à bord les aufîieres ou funes ;
ceux qui font employés à faifir les filets ; & les ca-
queurs qui égorgent les harengs , & qui les vuident
de leurs breuilles ou entrailles à mefure qu'on les pê-
che. On ne fert que de bifeuit , de poiffon fec ou fa-
lé , & de gruau , l'équipage fe contentant du poiiîbn
frais qu'il pêche. C'ell le patron qui donne l'ordre
pour jetter les rets Se pour les retirer. Les matelots
fe louent pour l'ordinaire pour tout le voyage en
gros. (Z)
Bucke ou Bt'SCHE , ( Commerce de bols. ) mor-
ceau de bois de chauffage , de groffeur & longueur
déterminée. Plufieurs de ces morceaux forment la
corde. Voye^ Bois.
* BÛCHE , ( controlleurs de la ) Police, petits offi-
ciers établis fur les chantiers. Leur emploi ell de veil-
ler à ce que les bois de chauffage ayent les dimen-
sions & les qualités requifes par les ordonnances.
Voye^ Bois.
BÛCHE , ( réparation à la) terme d'Eaux & Forêts,
ell l'amende ordonnée par jugement des maîtres des
eaux & forêts , pour avoir abattu ou enlevé des ar-
bres dans les forêts du roi. ( i/)
Bûche , en Jardinage; on appelle ainfi la tige des
orangers étêtés, que l'on amené en France de Pro-
vence & de Gènes. (/£)
BUCHEIRA ou BUCHI AR A, (Géog.) c'ell
ainfi qu'on nomme un lac d'Egypte , à fept milles
d'Alexandrie.
B U C H EN , ( Géog. ) petite ville d'Allemagne
dans rOdenwaidt , appartenante à l'électoral de
Maycnce.
BUCHER, f. m. en architecture , cft un petit bâti-
ment ou engard , pratiqué dans une baffe-cour ou
dans une maifon de campagne , où l'on ferre le bois :
dans les maifons particulières , c'ell un lieu obfcur
dans l'étage foùterrain ou au rez-de-chauffée. Les
bûchers f chez les princes, s'appellent fourrières , en
latin cella lignaria. (f )
* B û c h ers , f. m. (Hifi. anc.) amas de bois fur
lefquels les anciens brùloient leurs morts : ces amas
Tome II,
étoient plus ou moins grands , félon la qualité des
perfonnes. La loi des douze Tables défendoit d'y em-
ployer du bois poli & menuifé. On les conflruifoit
principalement de larix , d'if, de pin , de frêne , Se
d'autres arbres qui s'enflamment facilement. On f
ajoûtoit aufîi la plante appcllée papyrus. On les envi-
ronnoit de cyprès , dit Varron , pour corriger par fon
odeur celle du cadavre , qui aurait incommodé ceux
qui affif toient à la cérémonie , Se qui répondoient aux
lamentations de la Prœfica , jufqu'à ce que le corps
étant confirmé & les cendres recueillies , elle difoit
ilicet , retirez-vous.
Le bûcher étoit de forme quarrée , à trois ou quatre
étages , qui alloient toujours en diminuant comme
une pyramide : on l'ornoit quelquefois de llatues.
On verfoit fur le cadavre du vin, du lait, Se du miel.
On répandoit fur le bûcher des parfums , des liqueurs
odoriférantes , de l'encens , du cinnamome , des aro-
mates , Se de l'huile. On donnoit au mort la potion
myrrhine. f^oye{ Myrrhe. Cette profufion coûteufe
d'aromates , de liqueurs , de potions , fut défendue
par la loi des douze Tables : outre la dépenfe fiiper-
flue , qu'il étoit de la bonne police d'arrêter , l'exha-
laifon de tant d'odeurs étouffoit quelquefois ceux qui
approchoient trop près du bûcher.
Après qu'on avoit oint le corps, on lui ouvrait les
yeux qu'on -avoit fermés après le dernier foûpir. On
mettoit au mort une pièce de monnoie dans la bou-
che ; cette coutume a été fort générale en Grèce : i!
n'y avoit que les Hermoniens qui prétendoient pafTer
la barque gratis. C'étoicnt les plus proches parens
du défunt qui mettoient le feu au bûcher : ils lui tour-
noient le dos, pour s oter la vue d'un fi trille fpec-
tacle.
Quand le bûcher étoit allumé , on prioit les vents
de hâter l'incendie. Achille appelle, dans Homère,
le vent du feptentrion & le zéphir fur le bûcher de
Patrocle , Se cette coutume pafîa des Grecs chez les
Romains. Quand le bûcher étoit bien allumé , on y
jettoit des habits, des étoffes précieufes, Se les par*
rums les plus rares. On y jettoit aufîi les dépouilles
des ennemis. Aux funérailles de Jules Céfar les vé-
térans y précipitèrent leurs armes. On immoloit de
plus des bœufs, des taureaux, des moutons, qu'on
mettoit auffi fur le bûcher. Quelques-uns le coupoient
ou s'arrachoient des cheveux qu'ils y femoient.
Il y a des exemples de perfonnes qui fe font tuées
fur le bûcher de celles qu'elles aimoient. Aux funé-
railles d'Agrippine, Mneltor, un de fes affranchis ,
fe tua de douleur. Plufieurs foldats en firent autant
devant le bûcher àc l'empereur Othon. Pline dit qu'un
nommé Philotimus , à qui fon maître avoit légué les
biens , fe jetta fur fon bûcher. Plufieurs femmes ont
eu ce courage. Cette coutume fiibfille encore , com-
me on fait, chez les Banianes. Achille tua douze jeu-
nes Troyens fur îe bûcher de Patrocle.
Lorfque le cadavre étoit réduit en cendres , Se qu'il
n'en refloit que les offemens parmi les cendres , on
achevoit d'éteindre le bûcher avec du vin : on recueil-
loit les refies, & on les eniermoit dans une urne d'or.
La loi des douze Tables détendit les libations de vin.
Mais tout ce qui précède , ne concerne que les
grands Se les riches. On brùloit les pauvres dans de
grands lieux enfermés, appelles uflrina. Poya^ L's-
TRINUM.
C'étoit la mère , les fecurs ou les parentes du dé tant
qui ramafToient les cendres & les os : elles étoient
vêtues de noir : elles les mettoient fous leurs habits.
Les fils recueilloient les refies de leurs pères; au dé-
faut d'enfans , ce devoir étoit rendu par les autres
parens ou par les héritiers. Les confuls ou les pre-
miers officiers des empereurs ramaffo-ent leurs offe-
mens. Au décès d'Augufte , les premiers de Tordre
équcfhe les ramafferent nucb pies. On enveloppoit
M mm
4î8
B U C
ces reftes dans un linge. Avant que de fe retirer, ils
crioient tous au défunt : vale , vale, vale; nos te ordine
quo natura permiferit cuncli fequemur : <« adieu , adieu ,
» adieu ; nous te iuivrons tous, quand la nature l'or-
» donnera.
On emportoit les os & les cendres du défunt. Voy.
les articles FUNÉRAILLES, BRÛLER, TOMBEAU ,
Jeux funèbres, Urne, Sépulcre, Épitaphe,
Mausolée.
BUCHEREST ou BUCHOREST, (Géog.) grande
ville de la Valachie , réiidence du Hoipodar , qui eft
fous la protection des Turcs , fur la rivière de Dem-
browitz. Long. 44. 10. lut. 44. 30.
BUCHERI , (Géog.) ville de Sicile , dans la vallée
de Noto , avec titre de principauté , à trois nulles de
Vizini.
BUCHERON , f. m. ouvrier occupé dans les fo-
rêts à abattre les arbres , & à fabriquer le bois de
chauffage.
BUCHORN, (Géog.) petite ville libre & impé-
riale d'Allemagne , au cercle de Souabe , fur le lac ,
& à cinq lieues de Conftance. Long. zj. 16. latu.
4J- 4l-
BUCHHOLTZ , (Géog.) petite ville d'Allema-
gne , dépendante de l'électorat de Saxe.
BUCHSGAW, (Géog.) pays dans la Suiffe , au
canton de Soleure , avec titre de landgraviat.
BUCK , (Géog.) petite ville de Pologne , dans la
Ruflie rouge, au palatinat de Belezo, au confluent
des rivières de Buck & de Potaw.
BUCKAW , (Géog.) ville d'Allemagne , dans la
marche de Brandebourg.
BUCKENBOURG, (Géog.) ville d'Allemagne,
du comté de Schaumbourg , iur la rivière d'Aa , en
W'eftphalie.
BUCKENFIORT ou AARDALFIOPvT (Golfe
de ) , c'eft un golfe de la mer du Nord , fur les côtes
de Norvège , près de la ville de Stavanger.
BUCKÏNGHAM, (Géog.) ville & duché d'Angle-
terre , dans la province du. même nom, fur la rivière
d*Oufle : elle eft à 1 5 lieues de Londres. Long. 16.
33.lat.6i.5y.
Buckinghamshire , province d'Angleterre,
au diocefe de Lincoln , dont les laines , le pain , & le
bœuf font fort eftimés.
BUCKOR, ville d'Afie, dans l'Indoftan , capitale
de la province du même nom, dans une de que forme
l'Inde.
BUCKOW , (Géog.) il y a deux petites villes de
ce nom en Allemagne, dans le duché de Meckle-
bourg , au cercle de bafle Saxe , l'une s'appelle le
vieux Buckow , l'autre le neuf.
BUCOLIASME , fub. m. (Belles-lettres.) chanfon
en ufage parmi les bergers ou pafteurs de l'ancienne
Grèce. Ils la chantoient en conduifant le bétail aux
pâturages. Selon Athénée, liv. XIV. Diomus, ber-
ger de Sicile , en fut le premier auteur ; & Epichar-
me en faifoit mention dans l'Alcyon & dans l'Ulyfle
faifant naufrage. On appelloit encore bucoliafme un
air à danfer qu'on joiioit fur la flûte , & qu'Athénée
lui-même dift ingue de la chanfon dont nous venons
de parler. Mém. de VAcad. tom. IX. (G)
BUCOLIQUE , f. f. (Belles lett.) ce mot veut dire
pafloral, & fignifîe des poéfies qui regardent les ber-
gers & les troupeaux. Voyei Pastoral.
Ce mot vient de fievç , bos , & koAov , cibus ; de-là
jSs^tAêû), boves pafco ; &C jivKcXeç , qui paît les bœufs ,
bouvier, bubulus.
La poëfie bucolique eft la plus ancienne de toutes
les poëfies , & l'on croit qu'elle a pris naiflance en
Sicile , parmi les divertiflemens des bergers. Elle fut
infpirée par l'amour Se par l'oifiveté. On ajouta en-
fuite des règles à ces divertiflemens champêtres , &
l'on en fit un art. Le foin des troupeaux, les beautés
B U D
de la nature , & les plaiflrs de la vie ruftique en fai-
foient les plus nobles fujets. Mofchus, Bion, Théo-
crite & Virgile font les plus agréables poètes bucoli-
ques de l'antiquité. Voye^ ECLOGUE & Idylle.
Selon M. de Fontenelle , Théocrite a quelquefois le
ftyle un peu trop bucolique. Il eft des auteurs qui at-
tribuent l'invention de la poëfie bucolique à un ber-
ger nommé Daphnis ; d'autres à Bucolius, fils aîné de
Laomédon.
Le grammairien Donat , dans la vie de Virgile ,
rapporte encore diverfes autres opinions fur l'origine
des bucoliques , que les uns attribuent aux Lacédemo-
niens, les autres à Orefte fugitif en Sicile , ceux-ci à
Apollon , lorfqu'il gardoit les troupeaux d'Admete ;
ceux-là à Mercure : & comme dans cette diverlité de
fentimens,il eft difficile de décider quel eft le véri-
table auteur des bucoliques ; ce grammairien conclut
qu'elles ont pris naiflance dans ces tems heureux , où
la vie paftorale étoit encore en honneur.
Les bucoliques, dit Voflius , ont quelque conformité
avec la comédie ; elles font, comme celle-ci, une ima-
ge , une imitation de la vie commune & ordinaire ;
avec cette différence toutefois , que la comédie re-
préfeiite les mœurs des habitans de la ville , & les
bucoliques les occupations des gens de la campagne :
tantôt, ajoûte-t-il , ce dernier poëme n'eft qu'un mo-
nologue , & tantôt il a la forme de dialogue ; & quel-
quefois il eft en action , quelquefois en récit , & enfin
mêlé de récits & d'aclions, ce qui en conftitue diver-
fes efpeces. Le vers hexamètre , pour la poèfle Gre-
que & Latine , eft le plus propre pour les bucoliques,
ôc toutes celles de Virgile ont cette forme. On trouve
cependant quelques vers pentamètres dans Théocri-
te , mais feulement tailant partie des chanfons qu'il
met dans la bouche de fes bergers. Dans la poëfie
Françoife , toute mefure de vers eft admife pour les
paftorales ; les vers libres & irréguliers paroiflent
même convenir principalement à l'aifance néceflaire
à ce genre, beaucoup plus négligé aujourd'hui qu'il
ne l'étoit des anciens , par les raifons que nous dé-
taillerons au mot Eclogue.
On repréfentoit quelquefois des bucoliques , c'eft-
à-dire , des paftorales fiir les théâtres ; les décora-
tions étoient alors Amples , compofées de branches
d'arbres & de feuillages ; & l'inftrument dont s'ac-
compagnoient les afteurs , étoit la flûte de rofeau ,
nommée par les anciens mpi? £ , dont l'extérieur ré-
pondoit à la fimplicité du poëme.
Au refte , toutes les eclogues ou les idylles ne doi-
vent pas être mifes au rang des bucoliques : les trois
eclogues de Virgile, par exemple, intitulées Polliont
Silène, & Gallus, font d'un ftyle beaucoup plus noble
que les fept autres , & roulent fur des matières fort
différentes de la vie champêtre. C'eft le fentiment de
Servius, dans la vie de Virgile. Voflius , Injîit. poét.
lib. III. cap. viij. (G)
* BUCORNE, (Myth.) furnom qu'on a donné à
Bacchus , que l'on repréfentoit quelquefois avec une
corne de taureau à la main, fymbole ancien du vaif-
feau à boire.
BUCORTA, (Géog.) petite rivière du royaume
de Naples , qui fe jette dans la mer au golphe de Gi-
race , dans le duché de Calabre.
BUCQUOY, (Géog.) comté de France, dans la
province d'Artois , fur les frontières de la Picardie.
BUCZAVA ou BUTSKO, (Géog.) ville de Po-
logne , dans le Palatinat de Ruflie.
"BUDACK , (Géog.) ville capitale de la Croatie,"
dans la province de Corbavia , en Hongrie.
BUDE ou OFFEN , (Géog.) grande Se forte ville,
capitale de la bafle Hongrie & de tout ce royaume ,
avec une bonne citadelle : la lituation en eft agréa-
ble , & le terrein de fes environs eft fertile en vins
excellens. Il y a dçs fources d'eau chaude, où l'on.
BUÊ
B UF
cuit des oeufs en très-peu de tems $ quoiqu'on y voye
nager des poiflbns vivans. Diction, géog. de M. Vol-
giem Elle eft fur le Danube. Long. 36. 45. lat. 4J.
20.
BUDJADINGER - LAND , ( Gcog. ) petit diftrift
d'Allemagne, dans le comté d'Oldenburg, au cercle
de balTê Saxe , entre l'embouchure du Wefcr 6c du
Jhade.
BUDINGEN, (Géog.) ville d'Allemagne, avec
un château , au comté d'Ifenbourg , dans la Wetera-
vie , fur la rivière de Nidder.
EUDNOCK ou PUTNOCK, (Gcog.) petite ville
de la haute Hongrie , dans le comté de Barfod, fur la
rivière de Gaya.
BUDOA , petite, mais forte ville maritime de la
Palmatie: elle eft aux Vénitiens, &; a un évêque
fuffragant d'Antivari, dont elle eft à fix lieues. Long.
36. 30. lat. 42. 12.
BUDOSVIES, {Géog. ) petite rivière de Lithua-
nie, dans le palatinat de Poloczk, qui fe jette dans
l'Obola.
BUDWEISS, ville d'Allemagne en Bohême, fur
la-Moldaw, à 29 lieues de Prague. Lon. 32. 3J. lat.
42. i5. Il y a encore une ville de ce nom en Mora-
vie , entre Trebitz & Znaim.
BUDYN1E, (Gcog.) ville du royaume de Bohè-
me, lur i'Eger, à cinq milles de Prague.
BUDZIAC ou BESSARABIE, (Gcog.) pays fitué
entre la Moldavie , le Danube , la mer Noire , &c la
petite Tartarie , arrofé par le Niefter. L'on appelle
les peuples qui l'habitent Tartans Bud^iacs.
BUEIL, (Gcog.) petit pays avec titre de comté ,
dans le comté de Nice, arrofé par leVar, dépendant
du duc de Savoie. La capitale porte le même nom.
BUELTA , f. m. terme de Chimie , dont on fe fert au
Potofi, pour fignifîer le changement qui fe fait à l'ar-
gent dans la coupelle fur la fan de l'opération, lorf-
qu'il fe couvre d'une efpece de toile rouge. Voye^
Bouton.
BUEN AVENTURA , baie que forme la mer du
fud fur la côte occidentale de l'Amérique méridio-
nale , & dans le gouvernement de Popayan. Lat. 4.
degrés nord. long. 301.
BUENOS AYRES, ou CIUDAD DE LA TRI-
NID AD , ( Gcog. ) belle ville aux Efpagnols, dans
l'Amérique méridionale, capitale du gouvernement
de Rio de Plata , dans le Paraguai ; elle elt peuplée
d'Efpagnols & d'Indiens : on y fait un grand commer-
ce de Nègres. Long. J2J. latitude mérid. 34. 55.
BUFFALARA , ( Gcog. ) petite ville du royaume
de Naples , dans la Calabrc citérieure , à l'embouchu-
re du Sibari.
. BUFFET ,{.{.( terme d'Architecture ) c'étoit chez
les anciens de petits appartemens féparés du refte
de la fallè , pour y ranger la porcelaine , les vafes ;
& en France dans les derniers ficelés , les buffets fe
mectoient dans les fallcs à manger , & fervoient au-
tant pour y dreffer les choies utiles pour le fervice
de la table , que pour y étaler la richeiTe & la magni-
ficence des princes ou des particuliers qui donnoient
des feftins. Aujourd'hui dans les maifons de quel-
qu'importance, on place les buffets dans des pièces
féparées ; alors on les décore de tableaux relatifs au
fujet , de fontaines, de cuvettes , de ratraichiflbir &
de vafes , & ils font revêtus de marbre & de bronze ;
au lieu que dans les batimens ordinaires, ces buffets
fe drelfent clans les veftibulcs ou antichambres, pour
éviter l'humidité qu'ils cauferoient dans les (ailes à
manger. Voye^ Salle à manger. (P)
Buffet, ( Fontainier ) elt une demi-pyramide
d'eau adolTée contre un mur ou placée dans le
fond d'une niche, avec plufieurs coupes & bafîîns
formant des nappes, & accompagné au moins d'un
bouillon fur le haut qui les fournit. Il y a de ces
Tome II.
459
buffets plus compofés , & qui ont plufieurs bouillons
& jets d'eau. ( K )
Buffet d'orgue, voye{ Fust d'orgue; c'eft
le Menuifier qui fait la caillé de l'Orgue : elle eft
ordinairement enrichie de fculpture, & autres orne-
mens.
BUFFETER , (en Fauconnerie ) c'eft donner en paf:
fant contre la tête d'un plus fort , ou contre la tête
d'un leurre, quand on le fait battre aux oifeaux. On
dit cet oifeau a buffet é la proie.
BUFFETEUR, f. m. voiturierde vins ou autres
liqueurs , qui boit au tonneau fur la route ; l'Ordon-
nance décerne contre ces voituriers infidèles la pei-
ne des galères.
BUFLE, f. m. ( Hijl. nat. Zoolog. ) bubalus* ani-
mal quadrupède du genre des bœufs ; il eft plus grand
que les nôtres ; fon corps eft plus gros , & fa peau
plus dure. Ses cornes font grandes , contournées j for-
tes & de couleur noire. Les buff.es font fort fréquens
en Italie , fur-tout dans les terres du Pape & dans le
royaume de Naples ; & auffi en Grèce ck en Afie , au
rapport de Belon. On les nourrit pour faire des fro-
mages de leur lait , cafei di cavallo ; on leur fait aufïï
trainer des voitures , oc on les conduit par le moyen
d'une corde attachée à un anneau de fer ou de cui-
vre , qui eft paflé dans leurs narines ; car quoique ces
animaux foient domptés , il leur refte toujours de leur
férocité naturelle. Il elt à cioire que le bufle d'Italie
n'eft pas différent du bubalus des anciens , qui étoit
dans les Indes & dans l'Afie. Voye^ Quadrupède.
On employé en Médecine fes cornes, fes ongles ,
fa graillé , & fa fiente : les deux premières font bon-
nes contre les convullions ; & les autres parties ont,
dit-on, les mêmes vertus que celles du bœuf. (N)
Bufle , f. m. nom que l'on donne à la peau de l'a-
nimal appelle bujtc , quand elle a été paffée à l'huile ,
comme le chamois. Les militaires s'en fervoient an-
ciennement pour armure ; & les grenadiers Anglois ,
de même que la cavalerie Françoile , l'employent en-
core à préfent, à caufe de fa dureté & de fa réfiftan-
ce : on s'en fert à faire des ceinturons , des bourfes ,
&c. Le bufle fait un des articles importans du commer-
ce des Anglois, des François, & des Hollandois, qui
en trafiquent à Conlïantinople, à Smyrne, 6c le long
des côtes d'Afrique.
Les peaux d'élans , de bœufs , & des animaux de
la même efpece , étant paffées à l'huile , & préparées
comme celles du bufle, en prennent le nom,& lervent
de la même manière. Il y a en Fiance un grand nom-
bre de manufactures pour la préparation de ces
peaux, particulièrement à Paris, à Roiien, à Cor-
beil. Ce fut le lieur Jabac , natif de Cologne , qui éta-
blit les premières de ces manufactures, ^oye^la ma~
niere de préparer ces peaux à l'article CHAMOIS.
Bufle, (Moulin à) c'eft un moulin dans lequel oit
foule & prépare avec de l'huile les peaux de bufles ,
d'élans , d'orignaux , de bœufs , &c. pour en faire ce
qu'on appelle des bufles à l'ufage des gens de guerre;
ce qui fe fait au moyen de plufieurs gros pilons , qui
fe hauffent & tombent deffus ces cuirs dans de gran-
des auges de bois , par le moyen d'une roue qui eft
en dehors, & que la force de l'eau fait tourner. Le
lieur J abac , de Cologne , eft celui qui a établi le pre-
mier de ces moulins en France ; ôc celui qu'on voit
à Effone,eftdc fon invention. Voyc^ Bufle, & Mou-
lin À Foulon.
BUFLETIN , c'eft le nom du bufle quand i! eft
encore petit ; on prépare la peau du bufletin , & on
l'employé aux mêmes ufages que celle du bufle.
BUG , ( Géog. ) grande rivière de Pologne , quî
prend fa fource près d'Olefco , &C qui fe jette dans la
Viftule , près de Wifiègrod,
Mrnni îj
460
BUG
BUGEN, ( Géog. ) ville & royaume d'Afie, dans
i'ile de Ximo , dépendant de l'empire du Japon.
BUGEY , ( le ) Géog. ) petit pays de France , en-
tre le Rhône , qui le fépare de la Savoie &c du Dau-
phiné , &la rivière d'Ains, qui le lepare de la Breffe
& du comté de Bourgogne. Bellay en eft la capi-
tale. Ce pays fait commerce de beftianx ; il a aufîi
des vins Se du blé , mais en médiocre quantité.
BUGIE , ( Géog. ) ville forte & peuplée d'Afrique
au royaume d'Alger, capitale de la province de ion
nom, avec une baie commode. Long. 22. i5. lat.
36. 34.
BUGIHA, ( Géog. ) ville d'Afrique , dans leroyau-
rae de Nubie , fur les frontières de l'Egypte.
BUGLAS ou L'ISLE DES NEGRES , ( Géog. )
île de l'Océan orientai , l'une des Philippines. Long.
140 d. làr. io.
B U G L E , bugula , f. f. (Hifl. nat. bot!) genre de
plante à fleur monopétale labiée , qui n'a qu'une feu-
le" lèvre diviiée en trois parties : celle du milieu eft
échancrée ; il y a de petites dents à la place de la lè-
vre fupérieure ; il fort du calice un piftil qui eft at-
taché comme un clou à la partie poftérieure de la
fleur, & environné de quatre embryons; ces em-
bryons deviennent dans la fuite autant de femences
arrondies, renfermées dans une capiule qui a fervi de
calice à la fleur , & qui eft faite en forme de cloche.
Tournefort, Injl. rei herb. Voye^ Plante. (/)
BUGLOSE , f. f. buglojjutn, (Hfl. nat. bot.) genre
de plante à fleur monopétale , faite en forme d'enton-
noir & découpée ; le calice eft fendu jufqu'à fa baie,
il en fort un piftil attaché comme un clou à la par-
tie inférieure de la fleur, & environné de quatre
embryons qui deviennent dans la fuite autant de fe-
mences reffemblantes à des têtes de vipère. Ces fe-
mences mûrifTent dans le calice même de la fleur ,
qui s'étend à mefure qu'elles groffiffent Tournefort,
Injl. rei herb. Voye^ PLANTE. (/)
La buglofe des jardins a les racines fort gluantes ,
& qui rougifîent fort le papier bleu ; les fleurs ont à
peu près la même propriété ; les feuilles ne le rougif-
ïent prefque pas , d'où on conclud que le fel ammo-
niac qui eft dans cette plante , eft enveloppé par un
ii;c gluant où la terre & le foufre dominent.
U&ùglbfe humecte, rafraîchit, & foulage beau-
coup les mélancholiques; elle eft propre ponr diffi-
per les fluxions de poitrine & la toux opiniâtre; on
en fait boire le foc depuis trois onces jufqu'à fix.
On employé les racines & les feuilles dans les bouil-
lons rafraîchiffans, & cette plante ne rafraîchit qu'en
rétabliffant le mouvement du i'ang qui croupit , & qui
échauffe les parties où il circule avec peine.
On fe fert des fleurs de buglofe à la manière du thé ;
on en fait de la conferve , on les compte parmi les
fleurs cordiales.
Le firop fait avec le foc des feuilles foulage beau-
coup les mélancholiques ; ce foc eft employé dans le
firop bifantin fimple, & compofé de même; il entre
aufîi dans le firop, de fcolopendre de Fernel. Tourne-
fort, Hift. plant. (N)
BUGRANDE, voye^ Arrête-bœuf.
B U G S I N , (Géog.) petite ville d'Allemagne , en
Franconie , dans le comté de Reineck.
" BUHOT , f. m. fe dit dans les manufactures d'A-
miens, de ce qu'on entend plus communément par
le mot efpoulin ou efpolin. Voye^ ce mot.
BUIS ou BOUIS , f. m. buxus , ( Hifl. nat. bot. )
genre de plante dont les fleurs n'ont point de pétales ;
ces fleurs font compoiées de plufieurs étamines qui
fortent du fond d'un calice compofé de feuilles. Ce
fond du calice eft ordinairement quarré : les embryons
nahTent féparément des fleurs, & deviennent dans la
fuite des fruits reffemblans en quelque façon à une
marmite renverfée. Ces fruits s'ouvrent en trois par-
B U I
tics par la pointe ; ils font divifés en trois loges , tk
renferment des femences revêtues d'une capiule élaf-
tique. Tournefort, Injl. rei herb. Voye^ Plante. (/)
Le buxus offic. pouffe des feuilles qui font ameres,
& rougifTent le papier bleu ; on tire de ion bois un
efprit acide, & une huile fétide.
Quercetan eftime fort cette huile contre l'épilep-
fie, les vapeurs & le mal de dents; rectifiée & cir-
cùlée enfuite avec un tiers de bon efprit de vin , elle
eft adouciffante & apéritive ; on en fait prendre
quinze ou vingt goûtes avec du fucre , ou de la pou-
dre de régliffe ; on met cette huile rectifiée avec du
beurre , pour en frotter le cancer ; on en fait un li-
niment avec l'huile de mille-pertuis , contre les rhû-
matifmes &la goutte.
Etrmuler & plufieurs autres auteurs foûtiennent
que l'on peut fubftituer le buis au gaiac ; le bois de
genièvre au faffafras , & les racines de bardane &
de benoite à la fquine & à la falfe-pareille. Tourne-
fort , hifl. plant.
Buis ÉPINEUX, lycium buxi foliis , C. B. P. 47?. +
Cette plante vient dans les pays chauds ; on em-
ployoit autrefois en Médecine le rob ou le fùc épaif-
ii des feuilles & des branches dont Diofcoride donne
la préparation : mais on ne s'en fert plus , le vrai ly-
cium eft inconnu aujourd'hui. Le lycium qu'on trou-
ve dans les boutiques, eft fait, à ce que dit Sc'hro-
der , avec les baies du periclimenum ou chevre-feuil-
le : d'autres le préparent avec le fruit du liguflrum ou
troène : d'autres enfin avec des prunes fauvages.
C. Bauhin obferve qu'il vaut mieux leur fubftituer
ïoxyacantha , ou le rhamnus.
On donne aufîi le nom de lycium à différentes ef-
peces de rhamnus ou nerprun.
Lycium Indien, voye^ ACACIA.
Diofcoride étend bien loin les vertus du vrai ly-
cium : mais il eft à penfer qu'il faut beaucoup en ra-
battre ; ce qui eft fort indifférent , puifqu'il n'eft plus
d'ufage. (A?)
Buis, (Jardinage.) il eftdes plus employés' dans les
jardins. Il y en a de deux efpeces: celui qui eft nain >
& qui a les feuilles comme le myrte , fert à former
la broderie des parterres & les bordures des plate-
bandes : la féconde eft le buis de bois , qui s'élevant
bien plus haut, fert à former des palliffades : fon bois
eft jaunâtre, d'une odeur forte, 6k eft fi dur qu'on
l'employé à faire des peign'es, des boules, & autres
ouvrages. On les multiplie de graines &de boutures.
Il y a encore le buis panaché , dont la feuille eft
beaucoup plus belle que celle des autres. (K)
Le buis eft un bois jaune & fort dur, dont on fait
un grand ufage dans différens arts , foit qu'on l'em-
ployé comme la matière fur laquelle l'artifte doit opé-
rer , ou ieulement comme une matière propre à fai-
re différens outils.
Buis , fubft. mafeulin, outil de Cordonnier , eft un
morceau de ce bois de quatre à cinq pouces de lon-
gueur, & d'environ un pouce d'équarriflage, &dont
les angles font un peu abattus dans la partie du mi-
lieu , pour ne point bleffer la main de l'ouvrier. Les
deux extrémités de ce morceau de bois font des ef-
peces de languettes ou entailles de différentes lar-
geur & hauteur. Il fert à lifter les bords' des femelles
après que le tranchet leur a donné la forme qu'elles
doivent avoir. Pour cela on applique une des faces
latérales de la languette , contre le deflbus de la fe-
melle dont on veut lifîèr Pépaiffeur, par conféquent
l'une des baies de l'outil eft appliquée fur cette épaif-
feur, for laquelle on frotte en appuyant fortement,
jufqu'à ce qu'elle ait pris un beau poli. Cette façon
eft une des dernières que l'on donne à l'ouvrage.
Voye{ CORDONNIER, & laflg. â. PI. du Cordonnier-
bottier.
Buis ou le Buy, (Géog.) petite ville de France,
B U L
461
r)kh$ le bas Dauphiné , dans un diftrici qu'on nomme
je bailliage du Buis , fur la rivière d'Ouvefe.
B U I S S E , f. f. billot de bois dans lequel ëft un
creux qui fért à donner la forme aux femelles des lou-
liers , qu'on bat fur ce billot avec un marteau. Foye^
lafig. 33. PI. du Cordonnier-bottier.
BUISSON , f. m. (Jardinage.) on appelle ainfi un
arbre nain. /^oyq Arbre, Bois.
Un bois de 1500 à 1600 arpens, fe nomme auffi
buijfon , parce qu'il n'a pas affez d'étendue pour être
appelle forêt.
Boqueteau eft le nom que l'on donne à un bois moin-
dre qu'un buijfon, lequel a, par exemple, trente à
quarante arpens. '
Buisson ardent, on Pyracantha, doit ce
nom à fes fruits rouges qui fubfîftent en hyver, &Ie
font paraître comme plein de feu. Ce font fes fruits
qui portent la graine. Le bois de cet arbriffeau eft net
& garni de piquans avec une écorce noirâtre, & fa
feuille reffemble à celle du poirier. Plufieurs Bota-
niftes l'appellent aubèpin, & Diofcoride le nomme
ùxyacantha. Foye^ AUBEPIN. (/£)
BUISSON CREUX, fe dit , en Vénerie , de celui dans
l'enceinte duquel le valet de limier qui a détourné ,
ne trouve rien.
Prendre buijfon, fe dit des cerfs, lorfqu'ils vont
choifir un lieu fecret pour faire leur tête, après avoir
mis bas.
BUISSONNIER, en terme de Police, eft un officier
de viile ou garde de la navigation , dont la fonction
eft de donner avis aux échevins des contraventions
qui fe font aux reglemens ; qui doit dreffer des pro-
cès-verbaux de l'état des ponts , moulins , pertuis ,
& rivières, (i/)
BUISSURES , f. f. pi. en terme de Doreur , ce font
des ordures que le feu a raffemblées fur une pièce
que l'on a fait cuire ; on les ôte avec la gratteboefTe.
Voyei Gratteboesser & Gratteboesse.
B U I T R A G O , ( Géog. ) petite ville d'Efpagne ,
dans la nouvelle Caftille.
BUKOVANY , {Géog.) ville du royaume de Bo-
hême, à peu de diltance de Prague.
BULACH, (Geog. ) petite ville d'Allemagne en
Soiiabe , au duché de Wurtemberg. Il y a encore une
petite ville de ce nom en Suiffe , dans le canton de
Zurich.
BULAFO , nom d'un infiniment de mufique dont
îesNegres de la côte de Guinée fe fervent beaucoup.
Cet infiniment eft compoié de plufieurs tuyaux d'un
bois fort dur,arrangésartillement, & diminuant peu-
à peu de longueur; ces tuyaux font attachés les uns
aux autres avec de petites bandes de cuir entortil-
lées fur de petites baguettes , de manière à laiffer un
certain efpace entre les différens tuyaux : on enjoué
en les frappant avec des bâtons dont les bouts font
garnis de cuir, pour en rendre le fon moins aigu.
Voyage de Froger , page 36 , &c Voyelles Planches
de Luth. & leur explication.
BULAGU ANSKI , ( Géog. ) ville & fortereffe des
Ruffiens en Sibérie , fur la rivière d'Angara , dans le
pays de Buratte.
BULAGUEN ou BULAHUANA , ( Géog. ) ville
d'Afrique au royaume de Maroc , fur le fleuve d'Om-
rnirabi, dans la province de Duquela.
BULAM ou BOULAM , ( Géog.) île d'Afrique in-
habitée , quoique fertile , près de la côte de Guinée.
BULBE , f. t. on donne ce nom en Botanique à un
oignon ou à une racine ronde , compofée de plufieurs
peaux ou tuniques emboîtées les unes dans les autres.
Bulbeux s'applique à une plante qui participe de la
nature d'une bulbe , d'un oignon. (A')
Bulbe , en Anatomie , fe dit de l'œil & d'une ef-
pecc de tumeur naturelle du canal del'urethie. Foye^
Œil 6- Urethre.
BULBO - CAVERNEUX , en Anatomie , épithete
de deux mufcles de la verge, qui font auffi appelles
accélérateurs. Voye7 ACCÉLÉRATEUR.
BULBOCODWM, ( Hijl. nat. bot. ) genre dé
plante à fleur liliacée , monopétale , divifée en fix
parties. Le piflil de celte fleur devient dans la fuite
un fruit oblong , divifé en trois cellules , & rempli
de femences arrondies. Ajoutez aux caractères de
ce genre , que la racine eft compofée de deux tuber-
cules qui forment une forte debec.Tournefort,Cbro/„
Injl. rei herb. Foye^ PLANTE. ( / )
*BULBONAC , f. f. (Hijt. nat. bot. ) la tige de
cette plante croît à la hauteur d'une coudée & de-
mie , ou même davantage ; cette tige eft quelquefois
de la groffeur du petit doigt , bleue , d'un rouge fon-
cé , & velue ; elle a la feuille de l'ortie , mais deux
ou trois fois plus large , velue , dentelée , tantôt feu-
le, tantôt oppofée ou placée à la divifion des bran-
ches. Les rameaux font chargés de fleurs difpofées
à peu près comme celles du chou, purpurines , de la
grandeur de celles du chou ordinaire , plus petites
que celles du leucoium , quoiqu'elles lui reffemblent
affez à d'autres égards ; d'une odeur foible , avec un
onglet blanc. Son calice eft oblong ; il en fort quatre
étamines verdâtres , avec des fommités jaunes ; il eft
oblong , rouge , &c compofé de quatre feuilles , dont
deux font plus petites que les deux autres ; fes coffes
font larges , rondes , plates, & les lames extérieures
traverfées des deux côtés par un bord de couleur
d'argent: elles ont un filament à leur extrémité; elles
contiennnent un bout de femence orbiculaire & pla-
te. Sa racine eft bulbeufe ; fa graine , d'un rouge fon-
cé , & très-greffe pour une plante de cette efpece.
La féconde année fa tige fe fane , lorfque la graine
eft mûre. Elle eft commune en Allemagne & en Hon-
grie. On la cultive dans nos jardins.
On fait ufage de fa racine & de fa femence. Sa fe-
mence eft chaude au goût, amere,& aromatique.
On mange fes racines en falade.
BULGARES , f. m. ( Hift. eccléf. ) hérétiques qui
fembloient avoir ramaffé diverfes erreurs des autres
héréfies pour en compofer leur croyance , & dont
la fedte &c le nom comprenoit les Patarins , les Catha-
res , les Joviniens , les Faudois , les Albigeois , & en-
core d'autres hérétiques. Les Bulgares tiroient leur
origine des Manichéens , & ils avoient emprunté
leurs erreurs des Orientaux & des Grecs leurs voi-
fins, fous l'empire de Bafile le Macédonien, dans le
IXe liecle. Ce mot de Bulgares qui n'étoit qu'un nom
de nation, devint en ce tems-là un nom de iecle, & ne
fïgnina pourtant d'abord que ces hérétiques de Bul-
garie : mais enfuite cette même hérélie s'étant répan-
due en plufieurs endroits , quoiqu'avec des circonl-
tances qui y apportoient de la diverfité , le nom de
Bulgares devint commun à tous ceux qui en furent
infectés. Les Pétrobrufiens , difciples de Pierre de
Bruis , qui fût brûlé à S. Gilles en Provence ; les Fau-
dois , fectatcurs de Yaldo de Lyon ; un refte même
des Manichéens qui s'étoient long-tems cachés en Fran-
ce ; les Hcnrici.ns, & tels autres novateurs , qui dans
la différence de leurs dogmes s'accordoient tous à
combattre l'autorité de l'Eglife Romaine, furent con-
damnés en 1 176 dans un concile tenu à Lombez,
dont les actes fe lifent au long dans Roger de Hove-
den,hillorien d'Angleterre : il rapporte les dogmes de
ces hérétiques, quitenoient entr'autres erreurs qu'il
ne fallait croire que le nouveau-Teftament ; que le
baptême n'étoit point néceffaire aux petits enfans ;
que les maris qui joûiffoient de leurs femmes ne pou-
voient être fauves ; que les prêtres qui menoient une
mauvaifc vie ne confacroient point ; qu"on ne de-
voit point obéir ni aux evèques, ni aux autres ec-
cleiialliques qui ne vivoient pas félon les canons;
qu'il n'étoit point permis de jurer en aucun cas ; &C
BUL
fllielques autres articles quin'étoient pas moins per-
nicieux. Ces malheureux ne pouvant lubrifier lans
union & fans chef.i'e firent un louverain pontife qu ils
appelèrent pape , & qu'ils reconnurent pour leur
premier fiipérieur, auquel tous les autres miniftres
étoient fournis ; & ce faux pontife établit Ion fiege
dans la Bulgarie , fur lès frontières de Hongrie , de
Croatie , de Dalmatie , oii les Albigeois qui étoient
en France alloient le confulter & recevoir lés déci-
dons. Reyner ajoute que ce pontife prenoit le titre
d'évêque , & de fils aîné de l'églife des Bulgares.^ Ce
fut alors que ces hérétiques commencèrent d'être
nommés tous généralement du nom commun de Bul-
gares; nom qui fut bientôt corrompu dans la langue
Françoife qu'on parloit alors ; car au lieu de Bulga-
res , on dit d'abord Bougares & Bougueres , dont on ht
le Latin Bugari & Èugeri ; & de-là un mot très-falé
en notre langue , qu'on trouve dans les hiftoires an-
ciennes , appliqué à ces hérétiques , entr'autres dans
une hiftoire de France rrtantifcrite qui fe garde dans
la bibliothèque du préfident de Mefmës , à l'année
1125 , & dans les ordonnances de S. Louis , où l'on
voit que ces hérétiques étoient brûlés vifs lorfqu'ils
étoient convaincus de leurs erreurs. Comme ces mi-
férables étoient fort adonnés à l'ufure , on donna
dans la fuite le nom dont on lés appelloit à tous les
ufuriers , comme le remarque du Cange. Marca, Hijl.
de Bearn. La Faille , Annales de la ville de Touloufe.
Abrégé de l'ancienne Hijl. Du Cange, Glof. Latin.(G)
BULGARIE , ( la grande ) Géog. province d'Alie
dans la Tartarie Ruffienne , bornée au nord par le
royaume de Cafan, à l'eft par la Baskirie , au fud
par le royaume d'Aftracan , & à l'oueft par le "Wol-
ga. La capitale eftBulgarouBelojer. Ce pays efi fou-
rnis à l'empire Rufiien.
Bulgarie , ( la petite ) ou le royaume de Bulga-
rie , Géog. pavs de la Turquie en Europe , borné au
nord par le Danube &C la Valachie , à l'orient par la
rner Noire , au midi par la Romanie & la Macédoi-
ne , &c au couchant par la Servie. Elle efi fous la do-
mination des Turcs. La capitale efi Sophie.
BULGOLDA , ( Hijl. nat. ) c'efi une pierre qtii
( au rapport de Ferdinand Lopez dans/on Hifloire des
Indes ) fe trouve dans la tête d'un animal de même
nom. Les Indiens y ont beaucoup de foi , & lui attri-
buent les mêmes vertus qu'au bézoar : ils la regar-
dent comme un remède fouverain contre toute forte
de poifon. On la dit fort rare. Elle efi: de la grandeur
d'une noifette. (— )
BULIMIE ou BOULIMIE, f. f. {Médecine.) faim
canine , appétit extraordinaire , accompagné d'éva-
noùifiement & de froid aux extrémités du corps.
Voye7^ Faim.
Ce mot efi tiré du Grec Ç^ipU ou &\i/jloç , formé
de Gvç , bœuf, &c de Xi/xcç , faim ; ou , comme d'autres
l'expliquent ,faim afj'e-^ grande pour manger un boeuf ;
ce qui cependant conviendroit mieux au mot Cxça.-) U
qu'à CvKifûtt. Suidas & Varron donnent à ce mot une
étymologie qui fcmble plus naturelle , en le faitant
venir de £5 , particule dont les Grecs fe fervent pour
augmenter , &c de XijjlI; , faim ; car ces mots Cl-^at; ,
un grand garçon , fèx<rvy.oç , une groffe figue , montrent
que les Grecs fe fervoient de la particule G. , jointe
avec les mots auxquels ils donnoient une fignification
augmentative.
Il efi parlé dans les Tranfaclions philofophiques d'u-
ne perfonne malade de bulimie , qui fut guérie en ren-
dant plufieurs vers de la longueur & de l'épaifieur
d'un tuyau de pipe. (A7)
Il paroît par plufieurs expériences que la préfence
des vers efi fouvent la caufe de la bulimie.
BULLA ou BULIA (Géog.) petite rivière de Grè-
ce dans la province de Livadie, qui fe jette dans le
golfe de Lepante,
BUL
BULLE ) f. f . ( Hijl. anc. ) petite boule concave
d'or, d'argent, ou d'autres métaux , que les enfans
des Romains portoient au cou : on la donnoit aux en-
fans de qualité en même tems que la robe prétexte
ou bordée de pourpre , & ils ne la quittoient qu'en
quittant cette robe , c'eft-à-dire , à l'âge de dix-fept
ans. Quoiqu'il paroifle confiant par le témoignage de
tous les auteurs qui 'il n'y avoit que les enfans des
magiftrats curules qui euifent droit de porter la bulle
d'or; il n'eft pas moins certain qu'ils n'étoient pas les
feuls qui la portaflent ; ceux à qui les honneurs du
triomphe étoient décernés prenoient aufii cet orne-
ment : Bulla , dit Macrobe , geflamen erat triumphan-
tium , quam in triumpho prœ fe gerebant : mais cette
bulle étoit d'un plus grand volume que celle des en-
fans. La grande veftale & les dames Romaines en
portoient aufii : la première par diftinftion ; les au-
tres comme une parure. On regardoit encore ces
bulles comme de ti ès-puiflans préfervatifs contre l'en-
vie , & contre les génies malfaifans. La fuperftition
n'avoit guère moins de part que la vanité dans la
coutume d'attacher ces bulles au cou des enfans des
patriciens. (G)
Bulle , ( Hijl. anc. & mod. ) ce mot défignoit au-
trefois le fceau attaché à un infiniment ou charte
quelconque : il y en avoit d'or , d'argent , de cire ,
& de plomb. Les empereurs & les rois , dans les af-
faires de grande importance , fe fervoient de fceaux
d'or ; aujourd'hui on fe fert prefque par-tout de ci-
re : mais le fceau attaché aux conftitutions des papes
efi toujours de plomb. (— )
Bulle , ( Hijl. eccléf. & Droit canon. ) expédition
de lettres en chancellerie Romaine,fcellées en plomb,
qui répondent aux édits, lettres-patentes , y& pro-
vifions des princes féculiers.
On dérive le mot de bulle de bulla , un fceau , &
celui-ci de bulla , une boule ou bouteille ronde qui
fe forme dans l'eau. D'autres le dérivent du Grec
CiX», Confeil. Le père Pezron prétend qu'il efi tiré du
Celte buil ou bul, une boule ou bouteille qui fe for.-
me fur l'eau.
La bulle efi la troifieme forte de referit apoftoli-
que qui efi le plus en ufage , tant pour les affaires de
jufiiee que pour les affaires de grâce : elle efi écrite
fur parchemin, à la différence de la fignature qui efi:
écrite en papier. La bulle efi proprement une figna-
ture étendue , & ce qu'elle contient en peu de pa-
roles , la bulle l'étend : néanmoins elle ne doit pas
être , quoiqu'étendue , plus ample que la fignature,
fi ce n'eft pour les claufes qu'on a coutume d'éten-
dre félon le ftyle. Voye{ Bref.
Si les bulles font lettres gracieufes , le plomb eft
pendant en lacs de foie ; & fi ce font des lettres de
jufiiee & exécutoires , le plomb eft pendant à une»
cordelîe de chanvre: elles font écrites en caractère
rond ou gothique.
La bulle en la forme qu'elle doit être expédiée l
fe divife en quatre parties , qui font la narration du
fait, la conception, les claufes , & la date. Dans la
falutation le pape prend la qualité <ïévéque,ferviteur
des ferviteurs de Dieu ; fervus fervorum Dei. Voye^
Serviteur.
La bulle n'eft proprement que le fceau ou le plomb
pendant qui donne fon nom au titre, parce qu'il lui don-
ne feul autorité ; & généralement tout referit où il y
a du plomb pendant s'appelle bulle. Ce plomb repré-
fente d'un côté les têtes de S. Pierre à droite , & de
S. Paul à gauche ; de l'autre côté eft écrit le nom
du pape régnant , & l'an de fon pontificat. Voyt^ Pon-
tificat.
Les jubilés s'oftroyent par bulles : on ne facre
point les évêques qu'ils n'ayent leurs bulles. En Ef-
pagne on expédie des bulles pour toutes fortes de bé-
néfices ; mais en France on n'a que de fimples figna-.
B U L
(tires en papier , à la referve des archevêchés , des
abbayes , & de quelque prieurés conventuels. Les
bénéfices dont le revenu excède vingt-quatre ducats,
ne font poflédés que i'ur des provilions qui s'expé-
dient par bulles , & non pas par limples fignatures ,
fuivant une règle de la chancellerie. La France n'a
point voulu fe foûmettre à cette règle ; & à l'excep-
tion des bénéfices qui font taxés dans les livres de
la chambre apoftolique , elle s'eft confervée dans le
droit de n'exprimer le revenu du bénéfice qu'on im-
petre qu'en général & de cette manière : Cujus &
illi for fan annexorum fruclus 24. ducatorum auri , de
caméra fecundum communtm etlimationem , valorem an~
nuum non excedunt.
Les bulles qui viennent de Rome en France , font
limitées & modérées félon les ufages du royaume ,
avant que d'être enregiftrées. On n'y en reçoit aucu-
nes , qu'après avoir bien examiné fi elles ne contien-
nent rien de contraire aux libertés de I'églife Galli-
cane. Il fuffit en France que ces mots proprio motu ,
de notre propre mouvement , fe trouvent dans une
bulle , pour la rejetter toute entière.
' Les Efpagnols ne reçoivent pas non plus aveuglé-
ment les bulles des papes : elles font examinées dans
le confeil du roi ; & fi l'on trouve qu'il y ait des rai-
fons pour ne pas les mettre en exécution , l'on en
donne avis au pape par une fupplique ; &c par ce
moyen ces bulles demeurent fans effet. Cette manière
d'agir avec la cour de Rome eft établie dans la plu-
part des états & des royaumes.
Fulminer des bulles , c'eft en faire la publication ou
vérification par l'un des trois commillaires auxquels
elles font adreflees , foit qu'il foit évêque ou officiai.
* On s'oppofe quelquefois à la publication des bulles ou
des referits du pape. Mais quand il s'y trouve de l'a-
bus , l'on a pour lui le refpect de n'appcller pas direc-
tement de la concefiion de la bulle , on interjette fim-
plement appel comme d'abus de l'exécution ou ful-
mination de la bulle. C'eft un expédient pour ne point
choquer le pape , en ne fe plaignant que de la procé-
dure & de la partie qui a obtenu la bulle.
Cependant il y a des cas importans , dans lefquels
on appellerait fans détour comme d'abus de la bulle
du pape : par exemple , s'il prononçoit l'excommu-
nication contre la perfonne du roi ; s'il entreprenoit
fur le temporel du royaume ; s'il difpofoit des béné-
fices dont la nomination appartient au roi par le con-
cordat, f^oyei FULMINATION.
Quand le pape eft mort , on n'expédie plus de bul-
les durant la vacance du fiége , ëc jufqu'à l'élection
du fuccefleur : ainfi pour prévenir les abus qui pour-
roient fe gliffer , auffi-tôt que le pape cil mort , le
Vice -chancelier de I'églife Romaine va prendre le
fceau des bulles , puis il fait effacer en préfence de
plufieurs perfonnes , le nom du pape qui vient de
mourir ; il couvre d'un linge le côté où font les têtes
de S. Pierre & de S. Paul; il y met fon fceau , &
donne ce fceau des bulles ainfi enveloppé , au camé-
rier pour le garder, afin qu'on n'en puiife fceller au-
cune lettre.
Bulle in cœnd Domlnï : on appelle ainfi une bulle
fameuie , qui fe lit publiquement tous les ans à Rome
le jour de la cène , c'eft-à-dire le jeudi-faint , par un
cardinal diacre , en préfence du pape , accompagné
des autres cardinaux & des évêques. Elle contient
une excommunication contre tous les hérétiques, les
contumaces & les defobéiflans au faint fiége. Après
la lecture de cette bulle , le pape jette un flambeau al-
lumé dans la place publique, pour marque d'anathè-
mc. Dans la bulle du pape Paul III. de l'an 1 536, il
en énoncé dès le commencement, que c'eft une an-
cienne coutume des lbuverains pontifes , de publier
cette excommunication le jour du jeudi-faint, pour
conferver la pureté de la religion Chrétienne, pour
B U L
463
entretenir l'union des fidèles : mais on n'y marque
pas l'origine de cette cérémonie. Les principaux chefs
de la bulle in ccena Domini regardent les hérétiques
& leurs fauteurs , les pirates & les corfaires ; ceux
qui impofent de nouveaux péages ; ceux qui faliifient
les bulles & les autres lettres apoftoliques ; ceux qui
maltraitent les prélats de l'Eglife ; ceux qui troublent
ou veulent reftraindre la juridiction eccléfiaftique ,
même fous prétexte d'empêcher quelques violences ,
quoiqu'ils foient confeillers ou procureurs généraux
des princes féculiers , foit empereurs , rois ou ducs ;
ceux qui ufurpent les biens de l'Eglife , &c. ce qui a
donné lieu d'aceufer cette bulle d'établir indirecte-
ment le pouvoir des papes fur le temporel des rois.
Tous ces cas y font déclarés réfervés , enforte que
nul prêtre n'en puifîe abfoudre , fi ce n'efl à l'article
de la mort.
Le concile de Tours , en 1 5 10 , déclara la bulle in
ccena Domini infoûtenable à l'égard de la France , qui
a fouvent protefté contre cette bulle en ce qui regar-
de les droits du roi & les libertés de I'églife Gallica-
ne. En 1 580 , quelques évêques pendant le tems des
vacations , tâchèrent de faire recevoir dans leurs dio-
cefes la bulle in ccena Domini. Le procureur général
s'en étant plaint, le parlement ordpfcna que tous les
archevêques & évêques qui auraient reçu cette bulle
& ne l'auraient pas publiée , enflent à l'envoyer à la
cour : que ceux qui l'auraient fait publier fuflent
ajournés , & cependant leur temporel faifi ; & que
quiconque s'oppoferoit à cet arrêt , fût réputé rebelle
& criminel de lefe-majelté. Mézer. hifi. de France ,
fous le règne d'Henri III. (G)
Bulle d'or , ( Hifl. & Jurifp. ) on donne en Alle-
magne ce nom par excellence aune pragmatique-fanc-
tion ou conftitution de l'empereur Charles IV. ap-
prouvée par la diète ou l'aflémblée générale des prin-
ces & états de l'Empire , qui contient les fonctions ,
privilèges , & prérogatives des électeurs , tant ecclé-
fiaftiqûes que féculiers , & toutes les formalités qui
doivent s'obferver à l'élection d'un empereur. Elle
fut faite en 1 3 56 en partie à Metz , & en partie à Nu-
remberg. La bulle d'or a toujours été regardée depuis
ce tems comme loi fondamentale de l'Empire : elle eft
au nombre de celles que les empereurs font tenus
d'obferver par la capitulation qu'on leur fait jurer à
leur couronnement. Cette conltitution fut faite pour
terminer les difputes , quelquefois fanglantcs , qui
accompagnoient autrefois les élections des empe-
reurs , & prévenir pour la fuite celles qui pourraient
arriver à ce fujet , & empêcher les longs interrègnes
dont l'empire avoit beaucoup fouffert auparavant»
L'original le plus authentique de la bulle d'or , fe con-
ferve à Francfort fur le Mein ; & c'eft le magiftrat de
cette ville qui en eft le dépofitaire. On a un refpect
fi fcrupuleux pour cet exemplaire, qu'en 1642 l'é-
lecteur de Mayence eut de la peine à obtenir qu'on
renouvellât les cordons de foie prefque ufés , aux-
quels le fceau de la bulle d'or eft attaché ; & il n'eu
vint à-bout , qu'à condition que la choie fe pafleroit
en préfence d'un grand nombre de témoins.
Bulle d'or de Bohème, (Hifl.) c'eft un privilè-
ge accordé en 1 348 au roi & au royaume de Bohè-
me , par l'empereur Charles IV. Ce prince y conlir-
me toutes les prérogatives accordées par Frédéric II.
en 1 21 2. à Ottocare , roi de Bohème.
Bulle d'or du Brabanc , {Hifl. mod. & Jurifp.') on
nomme ainfi une conltitution de l'empereur Charles
IV. donnée à Aix-la-Chapelle en 1 349 , par laquelle
ce prince accorde aux Brabançons le privilège de ne
pouvoir être traduits à aucuns tribunaux étrangers
ou hors de leur pays , ainfi que de ne pouvoir point
être arrêtés ailleurs que chez eux , ni pour crimes , ni
poui dettes. La trop grande extenlion de ce pi ivilé-
464
B U N
ge remarquable a quelquefois fait murmurer les états
de l'Empire leurs voiiins. (— )
Bulles d'eau, font de petites boules d'eau dont
l'intérieur eft rempli d'air, & dont la formation vient
de différentes caufes. Voy. Bouteilles d'eau. (O)
BULLERBORN , (Géog. & Hft. nat.) c'eft le nom
d'une fontaine très-linguliere , qui eft clans la forêt
de Teuteberg en Weilphalie, clans l'évêché de Pa-
derborn : on dit qu'elle ne coule pas toujours ; mais
qu'après avoir coulé pendant une heure , elle ceffe
de fournir de l'eau , & qu'au bout de trois heures elle
recommence, & ainfi de fuite. Avant qu'elle com-
mence à couler , on prétend qu'on entend un bruit
comme d'un vent qui voudrait s'élever ; après quoi
l'eau fort avec impétuolîté & bouillonnement. On
ne manque pas de raconter bien d'autres merveilles
de cette fontaine dans le pays , qui ne peuvent trou-
ver créance que chez de crédules "SVeftphaliens.
BULLETIN , f. m. terme de Police , eft un ordre
que donnent des échevins ou magiftrats d'une ville
pour le logement des foldats.
Ce terme fe dit aufli des certificats de fanté , que
donnent les magiftrats en tems de pefte , à ceux qui
veulent palier d'un lieu à un autre. ( H )
Bulletin, CAfor. ) c'eft tin écrit en parchemin
que les comminaires & commis des claiTes délivrent
gratis à chaque officier-marinier & matelot. Il con-
tient leurs fignaux , leurs privilèges , & les années
qu'ils doivent fervir.
C'eft auffi un billet que l'on donne pour fervir de
certificat qu'on a payé les droits d'entrée & de ior-
tie: il eft différent de l'acquit. (Z)
Bulletin , ( Commerce. ) eft auffi un nom qu'on a
donné aux billets que ceux qui avoient des comptes
ouverts dans les livres de la banque royale de Fran-
ce , dévoient envoyer ou porter aux teneurs de livres
pour s'y faire ou créditer ou débiter. ( G )
BULLINGBROOK , (Géog.) ville & comté d'An-
gleterre dans la province de Lincoln. Long. ij. zo
lat. 53.
BULLINGHAUSEN, (Géog. ) petite ville d'Alle-
magne dans le duché de Franconie , dans le comté de
Caïtell.
BULLOQUES, (les ) ou BULLOITES , Géog.
peuples d'Alie , partie dans la Perle ôc partie dans
l'Indoftan , qui eft fort peu connu.
BULLOS ou BOL , ( Géog. ) petite ville avec un
château en SuifTe, au canton de Fribourg.
BUMICILI , f. m. ( Hft. mod. ) nom d'une feue
Mahoméîane en Afrique. Les Bumicilis font grands
forciers. Ils combattent contre le diable , à ce qu'ils
difent , & courent meurtris , couverts de coups , &
tout effrayés. Souvent en plein midi ils contrefont
un combat en préience de tout le monde l'efpace
de deux ou trois heures , avec des javelots ou za-
gaies , jufqu'à ce qu'ils tombent de laffitude. Mais
après s'être repofés un moment , ils reprennent
leurs efprits , & fe promènent.
On ne fait point encore quelle eft leur règle, mais
on les tient pour fort religieux. ( G )
BUNEA , (Myth.) épithete de Junon : elle fut
ainfi appellée de Bunus , fils de Mercure.
BUNGO , ( Géog. ) ville d'Afie au Japon dans un
royaume de même nom , dont elle eft capitale , près
du royaume de Bugen.
BUNTZ , ( Géog. ) petite rivière de la Suifte qui
fe jette dans l'Aar.
BUNTZEL ou BUNTZLAU, {Géog.) Il y a deux
villes en Bohême de ce nom ; l'ancienne qui eft fur
l'Elbe; la nouvelle (c'eft la plus confidérable) eft
fur la Gizare , à huit lieues de Lignitz. Long. 33. zS.
lat. Si. 1 2. Il y en a outre cela encore une de ce nom
en Silène , dans la principauté de Jauer.
B U P
ËUONCONVENTO , ( Géog. ) bourg d'Italie
dans le Siennois , fur l'Ombrone.
* BUPHAGE , ( Myth.) furnom qu'on a donné
à Hercule. On dit que fa faim étoit fi grande, que
les Argonautes craignant qu'il n'épuisât leurs pro-
vifions , l'obligèrent à fortir de leur vaiffeau ; Se
qu'ayant enlevé des bœufs à un payfan , il en dé-
vora un tout entier dans un feul repas : auffi lui a-
t-on donné trois rangs de dents.
* BUPHONIES , (Myth. ) fêtes que l'on célébrait
à Athènes en l'honneur de Jupiter Polien. Onluiim-
moloit un bœuf; & c'eft de là que les fêtes ont pris
le nom de Buphonies.
BUPTHALMUM ou ŒIL DE BŒUF , ( Jard. )
plante qui fe nomme ainli à caufe de fa reflemblance
avec l'œil d'un bœuf. Ses tiges aflez hautes , ont des
feuilles grandes , découpées en leurs bords. Ses fleurs
à rainures font compofées de plulieurs fleurons jau-
nes en manière de gouttière ; & à leur place , il nait
un fruit qui en contient la graine.
La femence & les racines éclatées , font les deux
moyens de multiplier cette fleur qui eft vivace. Elle
vient en toute forte de terre , & le plante dans les par-
terres , parmi les fleurs de la grande elpece. On la
voit fleurie en été. ( K )
BUPRESTE, bupreflis,{. f. (Hift nat. Infeclol.)
infeète que plufieurs auteurs ont mis dans le genre
des cantharides ; cependant Ion corps eft plus allon-
gé ; les enveloppes des ailes font d'un verd jaunâtre
ou doré ; les pattes font plus longues ôc plus gref-
fes ; les yeux font ronds & faillans ; il a deux anten-
nes longues & compolées de plufieurs pièces arti-
culées ; la tête eft petite , la bouche eft grande , &
les levi es font dures & fortes ; il a des lerres & des
dents , au moyen dequoi fa morfure eft très-fenlible ;
le ventre eft allongé. Cet infefte attaque les feara-
bées & les léfards ; il les mord fous le ventre , qui eft
l'endroit le plus foible. On dit qu'il a un mauvais goût
qui approche de celui du nitre. On prétend que la
bupreftt fait enfler le bétail qui l'a avallée avec l'her-
be qu'il paît ; c'eft pourquoi on l'a nommée vulgai-
rement enfle-bœuf. Voye{ Mouffet , Infect, théat. Voy.
Cantharide, Insecte. (/)
BURAGRAG, ( Géog. ) rivière d'Afrique au
royaume de Fez , qui prend fa fource dans les monts
Atlas , & fe jette dans l'Océan Atlantique.
* BURAIL , f. m. ( Commerce. ) étoffe de foie tra-
mée , quelquefois de foie , plus ordinairement de lai-
ne , de poil , de fil , ou de coton. Le burail dit à contre
poil, fe monte en vingt-huit buhots , trente portées,
& doit avoir un pié & demi de roi entre deux gardes,
& vingt-une aune & demie au fortir de l'eftille. Le
burail de Zurich eft une efpece de crépon. Il y a un
grand nombre d'autres burails , diftingués ou par les
noms de lieux , ou par leur façon.
BURAIQUE, voyrç Baraicus.
BURAMOS ( les ) ou les PAPAIS , Géog. peuple
d'Afrique dans la Nigritie : ils demeurent autour de
la rivière de Saint-Domingo. Leur pays s'étend juf-
qu'à l'embouchure du Riogrande. Cette nation eft
idolâtre. On dit que dans ce pays les femmes, pour
s'empêcher de parler , prennent dans leur bouche
une gorgée d'eau qu'elles gardent la moitié d'une
journée , fans que cela les empêche de travailler.
Voye{ Dicl. de la Martiniere.
BURATTES, (les) Géog. nation barbare &
idolâtre qui occupe une partie de la Sibérie. Il y a
une forterefle nommée Buratte , qui appartient aux
Ruffiens, qui y tiennent garnifon.
* BURBAS, f. m. (Commerce.) petite monnoie
Algérienne , qui porte des deux côtés les armes du
dey : elle ne vaut °uere que la moitié d'un afpre.
BURBURATA"", ( Géog. ) île de l'Amérique méri-
dionale , fur la côte de la province de Venezuela.
EURCKEN*
B U R
BURCKEN,(C^.) petite ville d'Allemagne dans
kBrifgau , fur le Rhin ,au-deffous du vieux Brifach.
BURCKERSDORFF, ( Géog. ) petite ville d'Al-
lemagne, à peu de diftance de Vienne en Autriche.
BURCZ A ou BURCZLAND , ( Géog. ) petit pays
de la Tranfdvanie , fur la rivière de même nom , aux
frontières de la Moldavie &c de la Valachie , fertile
en blé & en vin.
BURCHAUSEN, (Géog.) ville d'Allemagne dans
la baffe Bavière , fur la rivière de Saltz , à 1 1 lieues
de Saltzbourg. Long. 30. z5. Lu. 48. 5.
BURD , ( Géog. ) petite rivière de France en baffe
Normandie , qui traverfe le Cotentin , & fe jette dans
îa mer.
BURD ALO , ( Géog. ) rivière d'Efpagne dans l'Ef-
tramadure de Léon : elle prend fa fource dans le voi-
finage de Truxillo, & fe jette dans la Guadiana.
BURDUGNO , ( Géog. ) petite ville de laMorée
fur le Vaiïlipotamo.
BURE , f. f . ( Commerce) groffe étoffe de laine , à
poil long , croifée , qui fe fabrique fur un métier à
deux marches , avec la navette ; elle a une aune de
large. On fait fouvent entrer dans le filage des laines,
dont on la fabrique , une portion de bonne tontiffe.
Bures , f. f. ou m. (Métallurgie) c'eft ainfi qu'on
appelle les puits profonds que l'on pratique dans une
■mine. On en fait deux ordinairement à la fois , l'un
pour l'établiffement des pompes à épuifement; l'au-
tre pour remonter les matières & donner de l'air. On
appelle ces derniers bures d'airage. Les bures à épui-
fement fe pratiquent plus profondes , afin de donner
lieu à l'écoulement facile des eaux. Voye^ l'article
Calamine. Quand on ne fait qu'une bure, elle doit
£tre affez grande , pour que les eaux puiffent être
pompées d'un côté , & les matières remontées de
l'autre.
BUREAU , (en termes d'Aides ou de Finances) eft
le lieu où fe font les recettes ou les payemens.
Bureau , ( en termes de Palais ) eft la table fur la-
quelle font pofées les pièces d'un procès par écrit ,
par le confeiller qui le rapporte. V. Rapporteur.
Ce terme fe dit auffi de l'affemblée ou féance
des commiffaires nommés pour Finftruction & le ju-
gement d'une affaire. Voye^ Commission.
C'eft auffi un terme propre pour défigner plufieurs
îurifdiâions ordinaires ; ainfi l'on dit , bureau des fi-
nances. Voye{ l' article fuivant.
On appelle auffi bureau de la ville , la jurifdiduon
du prévôt des marchands & des échevins. ( H)
Bureau des Finances, (Jurij prudence) c'eft la
jurifdi&ion des thréioriers de France , généraux des
finances , & grands voyers. Ces officiers , qui font de
très-ancienne création , ont fouvent varié pour le
nombre ; en 1 3 10 , il n'y avoit qu'un feul thréforier
de France ; en 1577, on en établit trois dans chaque
généralité , & on réunit à leurs charges celles de gé-
néraux des finances ; ce qui fit le nombre de cinq en
chaque généralité : ils furent confidérablement aug-
mentés par la fuite. Louis XIII. en l'année 1626,
réunit à leurs charges , chacuns dans leurs généra-
lités , l'office de grand voyer , qui avoit été créé en
faveur de Maximilien de Bé thune , marquis de Rôni.
En 1693 , Louis XIV. fupprima la chambre du thré-
for , & incorpora cette juridiction à la leur. On voit
par-là que ce tribunal a changé de face bien des fois ,
Jk qu'il feroit trop long & trop difficile de fuivre dans
ces différentes époques , l'étendue de fes fondions &c
de Ion pouvoir, les matières de la compétence & la
forme de fes jugemens. Voye^pour cela , GÉNÉRAL
des Finances , ThrÉSORIER de France , Ch AMBRE du
Domaine & ThRESOR , VOVER , VoYERIE , COM-
MISSAIRE de la Voyerie.
Les membres de cette compagnie joùiffent des plus
», ^eaux privilèges ; ils font du corps des cours fupé-
Tomc II,
B U R
465
rieures dans lefquellcs ils ont ordinairement féance
avec les confeillers , & voix délibérative , dans le cas
d'affaires importantes & où l'intérêt public exige
leur préfence. Ils font commenfaux de la mailon du
Roi , & en cette qualité joùiffent de toutes les préro-
gatives des officiers de laMajefté. Ils ont la nobleffe
héréditaire, l'exemption des droits feigneuriaux dans
la mouvance du Roi , &c. ainft que les officiers des
parlemens, chambres des comptes, & autres com-
pagnies fupérieures.
Aujourd'hui le bureau des finances de Paris eft com-
pote d'un premier & d'un fécond préfident en titre
d'office, de quatre préiîdens d'ancienneté, & de 30
autres thréioriers de France, d'un avocat du roi,&:
d'un procureur du roi qualifié même dans quelques
édits & lettres-patentes, de procureur général , pour le
fervice du bureau & de la chambre des finances ; pareil-
lement d'un avocat & d'un procureur du roi, pour le
fervice de la chambre du domaine : outre cela il y a
quatre commiffaires généraux de la voyerie, des
greffiers & des huiffiers.
L'édit déjà cité, de 1693 , établit ainfi l'ordre qui
doit être obièrvé dans ce tribunal : « Voulons qu'il
» y foit établi deux chambres , dans l'une defquelle»
» le jugeront les affaires concernant nos finances ,
» voyerie , & autres qui ont été jufqu'à prélent de
» la compétence de nofdits thréioriers de France ; &
» dans l'autre toutes les affaires concernant nos do-
» maines de l'étendue de notre généralité de Paris ,
» l'enregiftrement & exécution des brevets & lettres
» de dons par nous accordés , enfemble des lettres
» de naturalité & de légitimation , & autres affaires
» qui ont été jufqu'à préfent de la compétence de
» notredite chambre du thrélor. Et feront lefdites
» deux chambres remplies de nombre égal defdits
» tréloriers de France , lefquels y ferviront alterna-
» tivement & par femeftre ; & feront préfidées , l'u-
» ne par le premier , ôt l'autre par le fécond préfi-
» dent , &c Entendons que tous les brevets
» de dons qui feront par nous accordés de nos droits
» d'aubaine , bâtardife , déshérence , confîfcation ,
» droits feigneuriaux , & autres cafuels dépendans de
» notre domaine , & lettres-patentes expédiées iur
» iceux, enfemble toutes lettres-patentes de natura-
» lité & légitimation, foient à l'avenir enregiftrées en
» ladite chambre deftinée aux affaires de notre do-
» maine Et à l'égard des lettres de nobleffe ,
» érections , & autres femblables , l'enregiftrement
» en fera fait en la chambre deftinée pour les affai-
» res de la compétence ordinaire de notredit bureau ,
» à laquelle appartiendra pareillement la réception
» de tous les officiers d'éledions , greniers à fel , re-
» ceveurs généraux des finances , & receveurs des
» tailles & autres officiers de l'étendue de notredite
» généralité , qui ont coutume de fe faire recevoir
» en notredit bureau Voulons que tous nof-
» dits thréforiers de France foient à l'avenir reçus en
» notre chambre des comptes ainli qu'ils ont accoû-
» fumé ; & à l'égard des deux préfidens & de nos
» avocats & procureurs, ils feront tenus en outre de
» fe faire recevoir en la grand-chambre de notre
» parlement de Paris ».
Outre ces fondions des thréforiers de France, dont
parle l'édit que nous venons de rapporter , ils con-
noiffent de ce qui concerne les bâtimens & répara-
tions du Palais à Paris , & des jurifdiftions royales.
La levée des tailles doit être faite en vertu de lettres-
patentes à eux adreffantes , après qu'ils ont donné
au Roi en fon confeil , le département qu'ils en ont
fait fur les élections , en confequence du brevet que
fa Majefté leur envoyé tous les ans à cet effet. Com-
me grands voyers , les ponts & chauffées , pavé , &
autres ouvrages publics font du reffort de leur jurif-
diftion. Il y a pour ces derniers objets qui deman-.
Nna
l66
BUR
dent un foin vigilant & une prompte exécution ,
des commiffions du confeil toujours remplies par des
officiers de la compagnie , qui iont chargés de le don-
ner les mouvemens néceil'aires , pour y entretenir le
bon ordre, & faire ce que le bien public exige.
Foyei Ponts & Chaussées, Pavé, &c.
Bureau de Commerce ou du Commerce,
eft un bureau compofé de huit perionnes choilies par
fa Majefïé , parmi ceux de fon confeil, qui ont le plus
d'expérience en fait du commerce. Il a été établi par
arrêt du il Juin 1722 , à la place du confeil de com-
merce.
C'eil à ce bureau que font difeutées & examinées
toutes les propofitions & mémoires qui y font pré-
fentes ; enlemble les affaires & difficultés qui furvien-
nent concernant le commerce , tant de terre que de
mer , au dedans & au dehors du royaume , & ce qui
regarde les fabriques & manufactures. Les intendans
du commerce, ainli que le lieutenant général de po-
lice, & les députés du commerce, & quelques fermiers
généraux , affilient au bureau du commerce qui fe tient
tous les jeudis. Voye^ Conseil du Commerce.
Bureau ,fe dit du lieu où les marchands s'aifem-
blent pour traiter &c délibérer fur les affaires qui re-
gardent leur corps. A Paris , chacun des iix corps de
marchands a fon bureau particulier: mais c'eft dans
celui de la Draperie , comme le premier corps , que
lé tiennent les aiîèmblées générales des fix corps.
Bureau , fe dit encore d'un endroit établi pour la
vente 6c le débit de certaines marchandifes de ma-
nufacture particulière , comme le bureau des cuirs de
Hongrie , le bureau des maroquins , &C. Les cor-
royeurs , tanneurs , mégiffiers , cordonniers , appel-
lent petit bureau , le bureau des vendeurs de cuir.
Bureau , fe dit auffi des lieux dellinés pour la per-
ception des droits établis fur les marchandifes , pour
l'entrée & la fortie du royaume , & les provinces ré-
putées étrangères. On dit le bureau de la douanne de
Paris , le bureau des traites d' Ingrande , le bureau de la.
romaine de Rouen, le bureau de la connétablie ou comp-
tablie de Bordeaux , &C. Il y a des bureaux généraux, des
bureaux particuliers , des bureaux de recette , des bureaux
de conferve, &C.
Bureau de la banque royale, c'étoit le nom que
l'on donnoit en France à tous les lieux dans lefquels
fe faifoient en 1719 ôv 1720 , les diverfes opérations
de cette banque. Outre le bureau de Paris , qui étoit le
principal de tous , & qui occupoit le palais Mazarin,
l'hôtel de Nevers , &c. cette banque avoit encore
fes bureaux dans toutes les villes du royaume où il
y adeshôtelsdemonnoie. Voye^ Banque royale.
Bureau des congés. Voye^ Congé.
Bureau des ckartrons. Voye-^ Chartrons. ( G)
B U R E B A , ( Géog ) contrée d'Efpagne , dans la
vieille Caltille ; fa principale ville eiï Birviefca.
BURELE , f. f. en terme de Blafon , elt une fafee de
huit pièces ou plus.
BURELÉ , adj. en terme de Blafon, fe dit de l'écu
rempli de longue lifîé de flanc à flanc jufqu'au nom-
bre de dix, douze au plus, à nombre égal , & de deux
émaux difFérens. Torafy , burelé d'argent & d'azur à
la bande de gueules , brochant fur le tout. (V )
BURELLA, ( Géog. ) petite ville du royaume de
Naples , dans l'Abruzze , près de la rivière de Sangro.
BUREN, {Géog. ) ville & comté des Provinces-
Unies, dans la Gueldres, au quartier deBehrwe,
appartenant à la maifon d'Orange.
Buren , {Géog.) petite ville d'Allemagne , au cer-
cle de Weftphahe , dans l'évêché de Paderborn , fur
la rivière d'Alme.
Buren, (Géog.) petite ville de SuifTe, au canton
de Berne, fur l'Aar.
BUR G , {Géog.) ville des ProYincesr-Unies , au
«omté de Zutphen, fur l'iûcl.
BUR
* BURGAUT ou BURGAUX , ( Hifi. nat.) lima»
çon de mer , dont la chair , quoique dure , ne laifls
pas d'avoir un affez bon goût ; la coquille qui le ren»
ferme, eft à peu-près de la groffeur du poing; elle
elt argentée par dedans , & couverte en dehors d'un
tartre brut ou fédiment marin de couleur grife , le-
quel une fois enlevé , lailfe voir au-dellous une cou-
leur de nacre de perle très-éclatante : on trouve cet-
te coquille dans toutes les îles de l'Amérique. Elle en-
tre dans beaucoup d'ouvrages de bijouterie, comme
tabatières, boîtes, &c.
BURGAU, (le) Géog. Margraviat d'Allemagne,
en Souabe , fur le Danube , entre le Lech & Plier ,
appartenant à la maifon d'Autriche. La capitale por-
te le même nom ; elle elt fîtuée fur le Minden , à qua-
tre milles d'Illon. Long. z8. 6. lat.48. z8.
BURGDORFF , {Géog.) petite & jolie ville d'Al-
lemagne , dans le duché de Lunebourg , fur la petite
rivière d'Owe, entre Zelle & Hanovie.
Burgdorff, {Géog.) petite ville avec château ,
en Suilîe, dans le canton de Berne. Long. z5. 10- la/.
4j. 6.
B U R G E L , ( Géog. ) petite ville d'Allemagne i
dans la Mifhie.
BURGGRAVE, {.m. {Hifi. mod. ) ce mot eft
compofé de deux mots Allemands, burg , ville , for-
terefie , château , & de graffou grave qui lignifie comte.
On appelloit ainfi autrefois en Allemagne des offi-
ciers , à qui les Empereurs avoient confié la défenfe
d'une ville ou d'un château ; ces Burgraves n'étoient
pas toujours fur le même pié , il y en avoit qui rem-
plilfoient certaines fondions de magiftrature ; d'au-
tres rendoient la juftice en matière criminelle : d'au-
tres enfin fe mêloient auffi du civil au nom de l'em-
pereur ou de ceux qui les avoient établis. Par la fuite
l'office de burggrave eft devenu héréditaire , &c mê-
me ceux qui en étoient revêtus fe font rendus pour
la plupart fouverains des villes dont ils n'étoient au-
paravant que les gardiens. Aujourd'hui ceux qui por-
tent ce titre dans l'Empire , reçoivent de l'empereur
l'inveltiture féodale des villes ou châteaux dont ils
font burggraves. Il y en a aujourd'hui quatre en Alle-
magne qui ont le titre de princes de l'Empire , fa-
voir les burggraves de Magdebourg, de Nuremberg ,
deStromberg, &. de Reineck. La maifon de Brande-
bourg delcend des anciens burggraves de Nuremberg ,
& en porte encore le titre. Elle prétend en cette qua-
lité avoir des droits fur cette ville , que le magiltrat
lui contelte. La ville de Nimegue dans la Gueldre
Hollandoife a auffi un burggrave. {—)
BURGGRAVIAT, {Hifi. modj on donne ce nom
à l'étendue de la jurifdiftion d'un burggrave. V. ce mot.
BURGHELLI , ( Hifi. mod. ) on donne ce nom à
des petites barques dont on fe fert à Venife pour aller
prendre l'air en mer ; elles ont une falle oii il peut
tenir une compagnie de dix à douze perfonnes: on
les nomme auffi petits bucentaures. {—)
BURGHUHN, {Géog.) petite ville d'Allemagne,'
dans le territoire de Buchau en HefTe , fur la rivière
de Huhn.
BURGIAN, {Géog.) ville confidérable d'Afie, en"
Perfe , dans le Koraffan, près du lac de même nom.
BURGLANGENFELD , {Géog.) petite ville forte
d'Allemagne , dans le duché de Neubourg , entre An>
berg & Ratisbonne , fur la Nabe.
BURGLEHN, {Hifi. mod.) l'on nommoit ainfî au-
trefois en Allemagne une forte de ligne défenfivô
entre deux familles, qui devoit avoir lieu non-feu-
lement entre les parties existantes , mais auffi entre
leurs héritiers & defeendans à perpétuité ; & en ver-
tu de laquelle l'une des deux familles venant à s'é-
teindre , l'autre devoit lui fuccéder dans tous fes
biens, droits & prérogatives.
BURGMANN, {Hifi. mod.) c'eft le nom qu'on
BUR
donne en Allemagne dans les deux villes de Fridberg
&c de Grfnhauièn , aux conseillers de ville : pour être
admis parmi eux, il faut faire preuve de nobleffe ;
les princes & les comtes en font néanmoins exclus ;
ce font ces confeillers qui élifent le burggrave , qui
relevé immédiatement de l'empereur. (— )
BURGO ou BURGOW, (Géog.) petite ville d'Al-
lemagne , dans le comté de Tirol , fur la route de
Trente à Venife.
BURGOS, (Géog.) ville d'Efpagne, capitale delà
Caftille vieille , fur une montagne. Lon. 14. zo. lat.
42. 20.
BURGSTADTEL, (Géog.) petite ville d'Allema-
gne, en Mifnie.
BURG-UMSTADT , (Géog.) petite ville d'Alle-
magne, en Franconie , dans l'évêché de Bamberg.
BURIA, (Hifl. nat.) c'eft le nom que les habitans
de la Carinthie donnent à un vent d'eft très- violent,
aux ravages duquel ils font quelquefois expofés. Ce
vent, lorlqu'il fe levé, eft capable de renverfer tout
ce qu'il rencontre , & de mettre en danger de la vie
les voyageurs qu'il furprend , en les emportant eux
& leurs montures: lorlqu'il règne, perforfne ne peut
aller de Senofeth à Triefte. (— )
BURICK, (Géog.) petite ville d'Allemagne, au
cercle de Weftphalie , dans le duché de Cleves, ap-
partenant au roi de Prude. Lon.24. 20. lat. Si. J8-
BURIN, eft un infiniment d'acier, dont on fe fert
pour graver fur les métaux ; les burins doivent être
faits avec l'acier le plus pur , & le meilleur d'Alle-
magne ou d'Angleterre : fa bonté conlifte en ce que
le grain en foit fin & de couleur de cendre ; elle dé-
pend aufli beaucoup de la trempe. Quant à la forme
du burin , il eft comme inutile d'en parler , chacun
les prenant à fa volonté. Les uns les veulent fort lo-
fanges , les autres tout-à-fait quarrés : il y en a qui
les aiguifent extrêmement déliés, & d'autres gros &
courts. Pour moi , je crois qu'il eft bon qu'un burin foit
d'une bonne longueur , comme à peu près de cinq à
fix pouces ; que fa forme foit entre le lolange & le
quarré ; qu'il foit aflèz délié par le bout , mais que
cela ne vienne pas de loin , afin qu'il conlerve du
corps pour pouvoir réfifter fuivant les néceftités de
l'ouvrage ; car s'il eft trop délié Si atîûté de loin, il
ployé, ce qui le fait cafter, à moins que ce ne foit
pour de très-petits ouvrages. Le Graveur doit avoir
foin que le ventre de fon burin ibit aiguilé fort à plat ,
ce qu'il coupe parfaitement , le taifant lever un peu
vers l'extrémité de fa pointe, pour le dégager plus
facilement du cuivre ; il doit être aufti averti de ne
graver jamais avec un burin dont la pointe foit émouf-
fée, s'il veut que la gravure foit vive , autrement elle
ne fera qu'égratignee. On l'emmanche dans un petit
morceau de bois, de buis, d'os, &c. f^oye^ PL II. de
Gravure , fig. J 0 .
Le burin eft aufïï d'un grand ufage parmi les Orfè-
vres, les Horlogers, les Armuriers, les Serruriers,
&c. f^oye^ les Planches de ces arts.
On fe fert du burin en le tenant avec la main , en-
forte que la partie convexe A du manche foit dans
le creux de la main ,• & la partie applatie vers la plan-
che , le doigt indice fur le dos, qui eft l'arrête oppo-
fée à la pointe, le burin prefque couché fur la plan-
che , ainli qu'on peut le voir dans \njig. 14. PL I. de
Gravure, où une main paroît travailler. Le chiffre 2.
marque la planche; le chiffre 3. le coufLnet ( voyeç
Coussinet) fur lequel elle eft pofée.
BURIN, c' 'eft en Serrurerie , une efpece de cifeau à
deux bifeaux, qui fert à coupei le 1er à froid. Il y
en a en bec d'àne, en grain d'orge, à gouge, &c.
BURITACA , (Géog ) contrée de l'Amérique mé-
ridionale, au gouvernement de Sainte-Marthe.
BURLESQUE, adj. qui fe prend quelquefois fubf-
tantivement, (Beltes-lett.) lorte de poulie triviale &C
Tome II,
BUR
467
plaifante , qu'on employé pour jetter du ridicule fui?
les choies & fur les personnes. Foye^ Traa'ESTi.
La poëfie burlefque paroît être moderne , auffi-bien
que le nom qu'on a donné à ce genre fingulier. Le P.
Vavafleur, Jéfuite, dans un traité qu'il a donné fur
cette matière , intitulé de ludierd diclione , afïïire que le
burlefque étoît entièrement inconnu aux anciens. Ce-
pendant quelques auteurs parlent d'un certain Rain-
tovius, qui du tems de Ptolémée La«us traveftit en
burlefque quelques tragédies Greques : mais ce fait , *
s'il eft confiant , prouve plutôt l'antiquité de la farce
que celle du burlefque. D'autres , qui veulent qu'on
trouve dans l'antiquité des traces de tous les genres ,
même les moins parfaits, font remonter l'origine du
burlejque]u{quà Homère , dont la batrachomyomachie%
difcnt-ils, n'efl compofée que de lambeaux de l'Iliade
& de rOdyffêe traveftis & tournés en ridicule , par
l'application qu'ony fait de ce qu'il a dit des combats
des héros à la guerre des rats 6c des grenouilles, Foy*
Batrachomyomachie.
On regarde pourtant les Italiens comme les vrais
inventeurs du burlefque. Le premier d'entr'eux qui fe
fignala en ce genre fut Bernia, imité par Lalli Capo-
rali, &c. D'Italie , le burlefque paffa en France, où
il devint tellement à la mode, qu'il parut en 1649 un
livre fous le titre de la Paffion de Notre-Seigneur en vers
burlefques. En vain a-t-on voulu l'introduire en An-
gleterre; le flegme de la nation n'a jamais pu goûter
cette extravagance , &c à peine compte-t-on deux au-
teurs qui y ayent réitffi.
Boileau , dans fon Art poétique , a frondé le bur-
lefque , dont il avoit pu voir le règne , qu'il attribue
à la nouveauté.
« Il femble , dit à cette occafion un auteur qui a
» écrit depuis peu fur la poëfve, que la première au-
» rore'du bon goût ne dût luire qu'à travers les nua-
» ges ténébreux que le mauvais goût s'e^brçoit de
» luioppofer. En effet, rien étoit-ilplus contraire au
» bon l'ens & à la nature , qu'un ftyle qui choquoit
» directement l'un & l'autre, & dont les termes bas,
» les expreffioris triviales, les imaginations ridicules,
» formoient les prétendues grâces , fans parler du mé-
» pris que f es partitans faifoient des biemeances ? On
» a peine à comprendre comment une nation qui les
» connoît & qui les oblerve fi exactement aujour-
» d'hui , les négligeoit c*c le faiîoit en quelque forte
» honneur de les'vioier , il n'y a pas cent a is. Quoi-
» que l'Académie Françoife eût été établie parle car-
» dinal de Richelieu , pour ramener 6c fixer le bon
» goût, quelques membres de cette compagnie, tels
» que Voiture, Benferade, &c. étoient encore par-
» tifans du burlefque.
» Il eft cependant croyable, àjoûte-t-il, èv il faut
» le dire pour l'honneur de notre nation, que ce gen-
» re fi juftement méprifé doit fon origine à une erreur
» par laquelle ceux qui ont donné dans le burlefque ,
» ont été entraînés infenfiblement & comme parde-
» grès, ne diflinguant pas aflez le neuf du plat & dx
.. houfon, comme l'infiniie M. Delpreaux. En confé-
» quence on a d'abord employé le burlefque à décri-
» re des aventures ordinaires, comme ayant plus
» d'aifance & plus de (implicite que le ftyle noble
» affecté aux grands fujets. On l'a donc confondu
>> a\ ec le il\ le naïf qui embellit les plus (impies ba-
» gatelles. La facilité apparente de celui-ci a feduit
» ceux qui s'y font attachés les premiers: mais elle
>• a bientôt dégénéré en négligence; celle-ci a en-
» traîné la baiTelTe, & la bafleffe a produit lalicen-
» ce. Cette conjecture ell fondée : 1" fur ce que la
» plus grande partie des vers burlefques de ce rems-là
» conlifte en récits: i° fur ce que des auteurs con-
» temporains , tels que Balzac, ont confondu ces
» deux genres, néanmoins li différens. Abufés par
» la facilité d'un ftyle bas, ils fe font persuadés faut
N nn ij
468
BUS
» fement qu'ils avoient trouve l'art d'écrire avec
» cette molle aifance , avec ce badinage délicat dans
» lequel Marot a excellé». Voyt{ Marotique.
Princip. pour la lect. des Poet. tom. I.
Tout le monde fait que Scarron a mis l'Enéide en
vers buriefques , fous le titre de Virgile travejli, &
d'AfTouci les Métamorphofes en même ftyle , fous
celui à* Ovide en belle humeur; & que ces ouvrages
font aujourd'hui aufïï décriés qu'ils étoient autrefois
goûtés. (G)
BURONZO , ( Géog. ) petite ville du Piémont ,
dans le comté de Verceil , for les frontières de la
principauté de Mafferano.
BURRA , ( Géog. ) île de l'Océan , une des Orca-
des ; elle eft très-fertile.
BURRIANA, {Géog.) petite ville d'Efpagne, au
royaume de Valence , fur le bord de la mer.
BURRO , ( Géog. ) grande île d'Afie , dans la mer
des Indes , entre l'île d'Amboine & celle des Ce-
lebes.
BURSAL , adj. ( terme de Palais. ) qui n'eft en ufa-
ge que conjointement avec le mot édit. Les édits bur-
J'aux font ceux qui fous apparence de règlement , ont
pour principal objet de faire rentrer de l'argent au
prince , &C dont en effet il confent pour l'ordinaire
l'inexécution moyennant finance. ( H)
BUR-SALUM , royaume en Afrique, au Nord de
la rivière de Gambie , & qui touche à la côte occi-
dentale de cette partie du monde.
BURSE , PRUSE , BOURSE , ou BROUSSE ,
( Géog. ) ville de la Turquie, en Aiie , dans la Na-
tolie , étoit autrefois le lieu de la réfîdence des Sul-
tans Ottomans avant la prife de Conftantinople.
BURSI , ( Géog. ) petite île de la Grèce , à peu de
diftance de celle de Corfou.
BURTENBACH , ( Géog. ) petite ville d'Allema-
gne , en Souabe , fur la Mindel , entre Augsbourg
6 Ulm.
BURY , ( S. Edmunds ) Géog. petite ville d'An-
gleterre, dans la province de Lancaftre , fur la ri-
vière d'Itwell. Il y a encore une autre ville de ce
nom en Angleterre , dans la province de Suffolk , à
7 ou 8 milles de Newmarcket.
BUS , {Géog.) île de l'Océan feptentrional, en-
tre l'Iflande & Terre-neuve.
BUSC , f. m. {Architecl. Hydraulique. ) Le bufe eft
une afTemblage de charpente compof é d'un feuil , des
heurtoirs contre lefquels s'appuient les bas des por-
tes d'une éclufe, avec un poinçon qui joint enfem-
ble le feuil avec les heurtoirs & quelques liens de
bors pour entretenir le tout. On dit une porte bufquée ,
quand elle eft revêtue de cet aflemblage de charpen-
te , & que fes venteaux s'areboutent réciproque-
ment, s'ouvrent, & fe ferment à volonté pour l'écou-
lement des eaux & le paiTage des bateaux. ( R )
BUSC A , ( Géog. ) petite ville du Piémont , fur la
rivière de Macra, autrefois capitale d'un marquifat
de même nom.
BUSCH , ( Géog. ) petite île de la mer du Nord ,
appartenante à la province de Groningue.
BUSE , BUSARD , BUYSARD , BOUSAN , LA-
NIER , ou BOUDRÉE , buteo vulgaris , (Hijl. nat.
Ornith. ) oifeau de la groffeur du phaifan , ou d'une
jeune poule ; il pefe trente-deux onces ; il a environ
vingt pouces de longueur depuis la pointe du bec
jufqu'à l'extrémité de la queue ; l'envergure eft de
quatre pies & plus ; la tête eft grande , & le fommet
eft fort large & applati; le bec cil court , crochu , &
d'un bleu noirâtre; la partie fupérieurc eft recouver-
te par une peau jaune ; l'angle de la bouche eft aufïï
de couleur jaune ; la bouche eft grande, & la langue
épaiîîe & charnue, & obtufe comme dans les autres
oifeaux de ce genre. Quand cet oifeau eft en colère,
il ouvre le bec , ôc il tient pendant quelque teins
BUS
la langue avancée jufqu'à l'extrémité du bec ; l'em-
preinte de la langue eft marquée fur le p^iis ; les
yeux font grands ; l'iris eft d'un jaune blanchâtre, ou
de couleur blanche mêlée d'un peu de rouge, ou en-
tièrement blanchâtre ; la paupière inférieure eft cou-
verte de duvet.
Toute la face fupérieure de cet oifeau eftrouflc ,
ou de couleur fauve obfcure, tirant furie noir, ou
plutôt, comme dit Willughby , de couleur de rouille
mêlée de noir ; les plumes de l'épaule cv celles qui
recouvrent les grandes plumes des ailes, ont les bords
jaunâtres & les tuyaux noirs. Il y a quelques oi-
feaux de cette efpece qui ont fur les grandes plumes
des ailes plufieurs taches blanches difpofées de forte
que quand on étend l'aile , elles forment une efpece
de ligne blanche , & on voit aufïï de pareilles taches
fur les grandes plumes de l'épaule qui s'étendent fur
le dos ; toute la face inférieure eft d'un blanc jaunâ-
tre ; la gorge & le cou ont des bandes oblongues de
couleur brune , légèrement teintes de jaune ; ces ta-
ches ne font pas tranfverfales , mais elles fuivent
longitudinalement le tuyau de chaque plume , &l s'é-
tendent de chaque côté ; le tuyau eft noir fur la poi-
trine & fur le ventre ; il y a plufieurs taches affez
glandes de la même couleur , qui font iituées dans
la même direction longitudinale à quelque diftance
les unes des autres fur plufieurs plumes ; mais fur le
plus grand nombre, il y a une ligne de la même cou-
leur qui va d'une tache à l'autre ; ces mêmes taches
forment des bandes irrégulieres & longitudinales fur
les plumes des côtés du corps & fur celles des cuif-
fes & du deflbus de l'aile dont le fond eft de la même
couleur blanche jaunâtre. On voit entre les yeux-&
les narines de longs poils noirs ; il n'y a point de plu-
mes fur le milieu du dos , mais feulement- du duvet ;
car les plumes de l'épaule couvrent le dos en entier;
il y a vingt-quatre grandes plumes dans chaque aile ;
l'extérieure eft courte ; la troilieme &c la quatrième
font les plus longues ; les quatre premières ont l'ex-
trémité plus noire & plus étroite que les autres qui
ont la pointe de couleur blanchâtre ; elles ont toutes
les barbes intérieures marquées par des bandes tranf-
verfales brunes , & des bandes blanchâtres qui font
parfemées de petites taches brunes ; la face inférieure
des ailes eft de couleur blanche avec des bandes noi-
res tranfverfales 6c parallèles , à l'exception de l'ex-
trémité de toutes les plumes qui eft brune ; & cette
couleur s'étend jufqu'au tiers de la longueur des cinq
premières plumes. Quand les ailes font pliées, elles
s'étendent prefque jufqu'au bout de la queue qui a 9
ou 10 pouces de longueur; elle eft composée de
douze plumes , & elle n'eft point du tout fourchue ;
mais les dernières plumes font moins longues que les
autres , & donnent une courbure à l'extrémité de la
queue ; la pointe eft de couleur cendrée , blanchâ-
tre ; il y a fur le refte de ces plumes plufieurs ban-
des tranfverfales , dont les unes font de couleur cen-
drée & les autres brunes ; le bas de la plume eft blanc ;
les cuifiés font longues , fortes , & bien mufelées ;
les jambes font courtes , fermes , charnues , 6c cou-
vertes de plumes jufqu'au-defibus de l'articulation ;
les jambes & les pâtes font jaunes & couvertes d'é-
cailles ; le doigt extérieur tient au doigt du milieu
par une membrane ; les ongles font longs, forts, &
noirs ; l'ongle du doigt extérieur eft le plus court, &c
celui du doigt de derrière eft le plus long. La bufe le
nourrit de rats , de taupes, & d'oifeaux : Willughby
dit qu'il a trouvé un oifeau entier dans l'eftomac
d'une bufe qu'il avoit diftequée , 6c une grive dans
celui d'un autre. Les bufes tuent & mangent les la-
pins ; & faute de meilleure nourriture , elles pren-
nent des fearabées, des vers déterre & d'autres infec-
tes , & même l'excrément des vaches. On dit que ces
oifeaux ont la tête de couleur cendrée lorfqu'îls font
BUS
âgés , & que les plumes du dos deviennent blanchâ-
tres. Aurefte, foit par l'âge , foit par le fexe, il eft
sûr qu'on trouve des variations dans ces oifeaux ;
car il y en a qui n'ont point du tout de taches blan-
ches ni fur la tête , ni fur le dos , ni même fous les
ailes , tandis qu'il y en a qui en ont en grand nombre.
Les œufs de la bufe font blancs Si parièmés de quel-
ques taches affez grandes , rouffâtres , placées fans
ordre ; quelquefois ils font blancs , fans aucune ta-
che : on a cru que cet oifeau avoit trois tefticules ;
mais cette obfervation n'a pas été confirmée par l'ex-
périence. Voye^ Willughby. Voye^ Oiseau. (/)
Buse , f. f. on donne ce nom dans Us grof es forges
à un canal qui conduit l'eau fur la roue qui fait tour-
ner l'arbre par le moyen duquel le martinet marche.
BUSEN , ( Géog. ) petite île de la mer du Nord ,
vis-à-vis le pays de Ditmarlc, près de l'embouchure
de l'Elbe.
BUSENTO , ( Géog. ) petite rivière d'Italie au
royaume deNaples, qui fe jette dans la mer deTof-
cane.
BUSKO , ( Géog. ) ville de Pologne dans le paia-
tinat de Belsko.
BUSSARD ou BUSSE , ( Commerce. ) eft une des
neuf efpeces de vaiffeauxou futailles régulières dont
on fe fert en France , particulièrement en Anjou 6c
en Poitou , pour mettre les vins & autres liqueurs.
Le bufjard eft la moitié d'une pipe , & eft égal à
une demi-queue d'Orléans, de Blois, de Nuys , de
Dijon , de Mâcon ; ce qui revient aux trois quarts du
muid de Paris , qui font vingt-lept feptiers , chaque
leptier de huit pintes ; enforte que le bujfard eft com-
pofé de deux cens feize pintes de Paris. (G)
BUSSERETH , ( Géog. ) 'ville d'Afie dans l'Ara-
bie Petrée.
BUSSETTO, (Géog.) petite ville d'Italie au du-
ché de Parme , dans un petit canton qui s'appelle
Y Etat de Bujfetto , près du Pô.
BUSSSIERE , ( la ) Géog. petite ville de France
en Bourgogne , près d'Autun. '
BUST ou BOST , ( Géog. ) ville forte d'Afie , en
Perfe, capitale du Sableftan. Long. 8j. 5o. lut. ji.
60.
EUSTE , f. m. en Sculpture , eft un portrait en ron-
de-boue ( Voy.e\ Ronde-bosse) qui n'a que la tête,
les épaules , tk. la poitrine. On dit le bujte de Céfar ,
du Roi.
Buste , en Peinture, eft auffi un portrait à demi-
corps , c'eft-à-dire , où l'on ne voit la perlonne que
julqu'à la ceinture : mais on ne dit pas en Peinture ,
le bulle de Céfar , le bujle du Roi ; fai vu le bu/le de
M, un tel , ou fai fait faire mon bujle : cependant on
dira bien , tel Peintre ne fait pas un bu/le à moins de zo
louis. (7c)
* Une queftion qu'on pourroit faire ici , c'eft de
demander pourquoi dans le bujle on a ajoute à la tête
une partie des épaules & de la poitrine , & par quelle
règle on a limité l'étendue de ces parties acciden-
telles qu'on joint à la tête , & qui n'ajoutent rien à
la reffcmblance. Quant à la première partie de la
queftion, il me lemble qu'on ajoute à la tête , le
cou entier , & une partie des épaules & de la
poitrine, afin d'annoncer le refte du corps, & iau-
ver au fpechiteur l'idée d'une amputation chirur-
gicale ou même d'une exécution : &c pour ce qui
eft de la féconde partie, je crois qu'on a meiuré
naturellement l'étendue des parties qu'on ajoû-
toit au bujle fur l'efpace que l'œil embraile , à la
diftance oit il le place d'un objet pour le bien confi-
dérer; efpace qui ne'differe guère de celui qu'on
donne à un bujle de grandeur naturelle.
Buste, terme de Blafon, image d'une tête avec la
poitrine , mais fans bras.
Bustes , ( Commerce. ) boites de lapin légères &
BUS
469
à demi-rondes dans lefquelles on apporte les raifins
de Damas.
* BUSTERICHUS , ( Myth. ) dieu des anciens
Germains , dont l'idole fe voit encore aujourd'hui
dans la ibrtereffe de Sondershufa : elle étoit autrefois
dans celle de Rottembourg. Elle eft d'une forte de
métal inconnu. Elle a la main droite fur la tête ; la
gauche qu'elle avoit fur la cuifTe eft calTée ; elle a ùri
genou en terre.
BUSTO-GRANDE , ( Géog. ) petite ville d'Italie
dans le duché de Milan , entre les rivières d'Olana
6c d'Arno.
BUSTUAIRES , f. m. pi, ( Hifl. anc. ) gladiateurs
qui fe battoient autrefois chez les Romains auprès
eut bûcher d'un mort, à la cérémonie defes obfeques.
Foye{ Gladiateur, Bûcher , &c.
La coutume fut d'abord de facrifier des captifs fur
le tombeau ou près du bûcher des guerriers. On en
voit des exemples dans Homère , aux obfeques de
Patrocle , & dans les tragiques Grecs : on croyoit
que leur fang appaifoit les dieux infernaux , & les
rendoient propices aux mânes du mort.
Dans la fuite cette coutume parut trop barbare ,
& au lieu de ces victimes on fit combattre des gla-
diateurs, dont on crut que le fang auroit le même
effet. Au rapport de Valere Maxime & de Florus ,
Marcus & Décius , fils de Brutus , furent les pre-
miers qui honorèrent à Rome les funérailles de leur
père par ces fortes de fpeftacles , fous le confulat
d'Appius Claudius 6c de Marcus Fulvius , l'an 489
de Rome. On croit que les Romains prirent cet ufa-
ge cruel des Etruricns , qui peut-être l'avoient pris
des Grecs. Voye^ Funérailles. (G)
BUSWALT HAM , ( Géog.) ville d'Angleterre en
Barkshire.
BUT, VUE, DESSEIN, (Grmmm.) termes re-
latifs à la conduite d'un être, ou pema.it ou confi-
déré comme penfant. Le but fe dit d'un objet fixe 6c
déterminé , auquel les aérions de l'être penfant font
dirigées : les vues font plus' vagues , 6c embraffent
un plus grand nombre d'objets : le 1 1 opre-
ment ce mouvement de l'ame par lequel on
termine à tenter ou à ne pas tenter une choie. Le
dejfein 6c les viles font en nous ; le but eft hors de nous.
Le dejfein offre une idée de réfolution qui n'eft pas fi
marquée dans les vues. On fe propofe un but ; on a
des vues ; on forme un dejfein.
BUT-EN-BLANC , en terme cT Artillerie , fignifie la
portée d'un- moufquet ou fi 1 il 1 tiré horifontalement,
c'eft-à-dire, dont la bouche ne hauffe ni baille.
Quand on tire de but-en-blanc, on fuppofc que le
boulet ne s'écarte point de la ligne droite avant que
d'arriver au but , & qu'il n'eft pas porté dans une
ligne courbe, comme le lont les bombes , & les bou-
lets que l'on tire à toute volée , en leur donnant une
élévation fenfible. Voye^ Mortier , Projectile ,
Portée , &c. (Q)
BUTE , f. f. le dit en terme de Blafon , du fer dont
les Maréchaux le fervent pour couper la corne des
chevaux. Le père Méneftrier dit que la mailon de Bu-
tet en Savoie en porte trois en poigiw.
Bute ou Buthe , ( Géog. ) île d'Ecofle , l'une
des Weiternes.
BUTÉ, adj. on dit en Vénerie d'un chien qui a la
jointure de la jambe grofie , qu'il eft buté.
BUTER , v. n. terme d' Architecture , c'eft par le
moyen d'un arc ou pilier butant ou boutant , contre-
tenir ou empêcher la pouflee d'un inùr ou fecartc-
ment d'une voûte. On dit buté ou bouté, poui
fier l'effet de cet arc ou pilier curant, l'oye^ Culée.
BUTER fen Jardinage ; on dit butter un arbre, quand
on le contient avec de la terre amaflee autour c;e fon
pié ; pratique ufitee dans les terres extrêmement frai-
470
BUT
ches , pour garantir les végétaux d'une trop grande
humidité.
On dit encore buter un jalon haut ; c'eft y faire
apporter de la terre au pié pour le mettre à la hau-
teur du nivellement , de même qu'on décharge un
jalon du pié quand il fe trouve trop bas.
B U T E RA , ( Gêog. ) petite ville avec titre de
principauté en Sicile , dans la vallée de Noto.
BUTHOWoa BUTON, ( Géog.) ville de la Caf-
fubie , aux frontières de la Pruffe royale , capitale
d'un petit pays de même nom qui appartient au roi
de Pruffe. Eile eft fur la rivière deStolpe, à dix milles
deDantzic.
BUTIN , f. m. ( Art mil'u. ) on donne en général
ce nom à tout ce que l'on enlevé à l'ennemi. Quel-
ques-uns diftinguent le butin du pillage ; ils difent que
le butin eft le gros de la prile , & le pillage , la dé-
pouille des habits , hardes &C coffres de l'ennemi, &
l'argent qu'il a fur fa perfonne jufqu'à trente livres.
BUTOR , f. m. ( Hijl. nat. Ornith. ) butorius , bo-
taurus , ardea Jlellaris ; oifeau aquatique que l'on a
auffi appelle héron pareffeux . Il eft de la groffeur du
héron gris ; il a environ trois pies de longueur de-
puis la pointe du bec jufqu'au bout des ongles , &
près de deux pies & demi jufqu'à l'extrémité de la
queue : la tête eft petite , étroite , c'eft-à-dire , ap-
platie par les côtés ; le fommet eft noir ; il y a de
chaque côté auprès des coins de la bouche une ta-
che noire ; la gorge & les côtés du cou font rouffâ-
tres , & marqués de petites bandes tranfverfales de
couleur noire ; le cou eft couvert de grandes plu-
mes , de forte qu'il paroît plus court & plus gros qu'il
ne l'eft en effet : les plus longues plumes de la poi-
trine font noires dans le milieu ; la face intérieure
des cuiffes & le bas- ventre , font d'un blanc mêlé de
roux , & la face extérieure eft parfemée de taches
noires ; le dos eft marqueté de roux pâle & de noir,
avec un peu de cendré , & des taches noires qui
font plus larges ôc plus grandes que fur toute autre
partie du corps ; le bas des plumes de la gorge eft
blanc; les grandes plumes des ailes font plus cour-
tes dans le héron gris ; la pointe des grandes plumes
eft noirâtre ; le refte eft marqueté de taches tranf-
verfales , ronfles & noires ; les petites plumes qui
recouvrent les grandes font d'un roux foncé ; la
queue eft courte , petite , compofée de dix plumes
qui font de même couleur que les grandes plumes
des ades ; les raies & les taches noires qui fe trou-
vent entre les épaules , font larges & inclinées en-
bas : le bec eft droit & fort ; il eft gros à fa racine ;
d diminue infenfiblement de groffeur jufqu'à fon ex-
trémité qui eft pointue ; il eft tranchant par les cô-
tés, & entièrement de couleur verdâtre ; les côtés
de la pièce inférieure du bec entrent dans la pièce
fupérieure : la langue eft pointue ; elle ne s'étend
pas jufqu'au milieu du bec : l'irisdes yeux e/t de cou-
leur jaune , mêlée de couleur de noilette ; on l'a vue
rougeâtre dans un autre oifeau de cette efpece : l'ou-
verture de la bouche eft fort grande ; elle s'étend
julqu'au-delà des yeux , de forte qu'ds paroiffent être
dans le bec : d y a fous les yeux un petit efpace qui
eft dégarni de plumes, & de couleur verte : les ored-
les font grandes ; les jambes font dégarnies de plu-
mes au-deffus de l'articulation ; les pies font verts ;
les doigts allongés , & les ongles longs & forts : le
doigt extérieur tient au doigt du milieu à fa naiffan-
ce : l'ongle du doigt du milieu a le côté intérieur
dentelé , comme tous les autres oileaux de ce genre ;
ils fe fervent de ces pointes pour retenir les anguil-
les , &c les autres poiffons gliffans : l'ongle du doigt
de derrière eft le plus gros 8c le plus long. On dit qu'à
chaque ponte les petits du butor font en nombre im-
pair , comme trois ou cinq. Les oeufs font arrondis &C
B U V
blanchâtres, avec quelques teintes de cendré ou de
verd. Le nid eft fait en terre. On a comparé le cri
de cet oifeau au mugiffement d'un bœuf ou d'un tau-
reau ; d'où vient le nom de botaurus , butor. Il fe ca-
che dans les joncs des marais : fouvent il fe tient
dans des buiffons la tête levée. Willughby. Foye{
Oiseau.
L'oifeau que l'on nomme grand butor rougeâtre , eft
une efpece moyenne entre le butor & le héron gris ,
de forte que l'on pourroit dire que c'eft un héron gris,
dont la poitrine & les côtés font roux.
Le butor hupé , ardea hœmatopus , feuCirris Virgil'ù
Scaligero Aid. eft prefqrte le plus petit de tous les oi-
feaux de ce genre ; il a le cou fort & court ; fa cou-
leur dominante eft rouffâtre , plus foncée fur le déf-
ions de l'oifeau , plus pâle fur le deffus & fur les ai-
les ; la queue eft li petite qu'elle ne paroît pas ; l'iris
des yeux eft jaune & environné d'un cercle rouge ,
qui eft dans un autre cercle de couleur noire. Il y a
lur la tête une aigrette , qui eft renverfée en arrière
& formée par des plumes en partie jaunes &C en par-
tie noirâtres. Le bec eft long, pointu, tort,'& mi-
parti de deux couleurs. La baie eft verte ou bleuâtre,
& la pointe eft noire ; les jambes & les pies font d'un
rouge foncé , ôc les ongles noirs ; les doigts font fort
longs &r joints par une petite membrane. Willughby.
Fqye{ OlSEAU. (/)
B U T R I N T O , {Géog.) ville & port de Grèce ,
dans i'Épire ou Albanie , lur le golfe de même nom ,
appartenant aux Vénitiens.
BUTTELSTAD ; {Géog.) petite ville d'Allema-
gne, dans la Thuringe , à deux milles de Veimar.
BUTTIMAN , {Commerce.) c'eft un poids d'ufage
en Perle , qui revient aux environs de 15 livres.
BUTTONS-BAY ou la BAYE de BUTTON,
{Géog.) golJe de l'Amérique f eptentrionale , dans les
terres ArÊtiques ; c'eft la partie occidentale de la baie
de Hudfon.
BUTUA , {Géog.) ville & royaume d'Afrique , au
Monomotapa , fur la rivière de Zambre.
BUTZBACH , {Géog.) petite ville d'Allemagne,
dans la "Weteravie , à 4 milles de Francfort , lur le
Mein.
BUTZOV,( Géog. ) petite ville d'Allemagne ,
dans la principauté de Schwerin , fur le Warnon.
BUVETTE , f. f. {Hifi. mod.) endroit établi dans
la plupart des cours & jurifdi&ions de France ; c'eft
là que les magiftrats & autres gens de robe vont fe
rafraîchir, après le long & pénible exercice de leurs
fonctions.
BUVETTIER , f. m. c'eft le nom de celui qui tient
la buvette.
BUVETTIER, f. m. {Art médian. ) celui chez qui
l'on va boire. Les maîtres Vinaigriers-Moutardiers
de Paris prennent la qualité de bâvettiers, parce qu'il
leur eft permis de donner à boire dans leurs bouti-
ques , l'eau-de-vie qu'ds ont la permiffion de diftdler.
fbyci Vinaigrier.
BUVEUR, {en Anatomie.) on donne ce nom à un
mufcle droit de l'œil, autrement appelle adducteur de
l'œil. Voyei Œil & Droit. (Z.)
BUXHEIM, {Geog.) petite ville d'Allemagne,
dans le comté de Richebourg , cercle de Souabe.
BUZANÇOIS , {Géog.) petite ville de France , en
Berry , fur la rivière d'Indre, aux frontières de la
Touraine.
BUZ ARD de marais , milvus œruginofus , {Hi(l. nat.
Ornith. ) oifeau de proie , plus petit que la but e , &
à peu près de la groffeur de la corneille ; il n'a pas la
tête fi grande que la bufe , & le fommet n'en eft pas
fi large ; il a plus d'un pié & demi de longueur depuis
la pointe du bec jufqu'à l'extrémité de la queue , Pen-
\ ergure eft de plus de quatre pies ; le bec a prefque
un pouce 6c demi de longueur, il eft crochu ; la bafe
B U Z
cit recouverte cTune peau ou d'une membrane de cou-
leur jaune mêlée de vert, & le relie eft noir : l'ouver-
ture des narines eft oblongue ; le dedans de la bou-
che eft en partie noirâtre & en partie bleuâtre : la
langue eft large , charnue , & toupie comme dans les
autres oifeaux de proie : les yeux font de médiocre
grofleur : l'iris eft de couleur de fafran ; on en a vu
de couleur de noifette cendrée : le fommet de la tête
eft d iin roux blanchâtre ou d'un jaune rouffâtre avec
de petites lignes noires, qui s'étendent longitudina-
lement fur le tuyau de chaque plume : le demis de la
gorge eft de même couleur : tout le refte du corps ,
tant en-deflus qu'en-deflbus, eft de couleur de rouille
foncé , à l'exception d'une tache de couleur roufle-
pâle qui eft fur chaque aile , & que Ips plumes qui fe
trouvent à l'origine de la queue font roulfâtres. Quand
les ailes font pliées , elles s'étendent prefque julqu'au
bout de la queue : il y a dans chacune vingt-quatre
grandes plumes , dont la première eft beaucoup plus
courte que la féconde ; elles font toutes plus noires
que les autres plumes : celles qui recouvrent l'aile
en-deflous font bigarrées de brun & de couleur fau-
ve'. La queue a environ 9 pouces de longueur ; elle
eft compofée de douze plumes toutes également lon-
gues : les jambes ont environ un palme de longueur ,
elles font couvertes de plumes julqu'au -deffous de
l'articulation ; elles font plus minces Se plus longues
que dans les autres oileauxde ce genre, à proportion
de la grofleur du corps : les pies & les jambes font
jaunes , les ongles font noirs; le doigt extérieur tient
au doigt du milieu par une membrane : le côté inté-
rieur de l'ongle du doigt du milieu eft tranchant. Wil-
lllghhy. Voye{ OlSEAU. (/)
BUZE, (Marine.) Voye{ BÛCHE.
Buze , on appelle ainti, dans l'Artillerie , un tuyau
de bois ou de plomb , dont on fe lert pour conduire
l'air dans les galeries des mines , par des ouvertures
ou des puits. (Q)
B Y
BYBENSCHITZ, (Géog.) ville d'Allemagne , en
Moravie.
BYCHOW , (Géog.) petite ville de Lithuanie , au
palatinat de Miliczlaw , iiir le Nieper. Long, 4g. 10.
kt. 63.37.
BYDZOW, (Géog.) ville du royaume de Bohême.
BYELSK , (Géog.) ville de la Podlachie , dans un
petit pays de même nom.
B Y S A N C E , nommée depuis Conflantinople ,
{Géog. anc.) ville deThrace , fur la pointe du Boi-
phore. Voyt^ Constantinople.
BYSANTAGAR , ( Géog. ) grande ville d'Afle ,
dans l'Inde , au royaume de Guzuratè , habitée par
des Bramines.
BYSANTINE(^'/?ozVe) , Littéral, nom que l'on a
donné à un corps d'hiftoire de Conftantinople , im-
primé au Louvre, dans le courant du xvne ficelé.
Il eft compofé de differens auteurs Grecs , éclaircis ,
commentés , & publiés fucceflîvemcnt par differens
favans. Les premiers parurent en 1645.
BYSDAIL , (Géog.) ville & port d'Écoffe, dans
l'île d'Ulft.
BYSSE ou BYSSUS. Voyt{ Byssvs.
Bysse, (Hijl. des Arts.) Il eft fingulier que ce
mot foit le même en Hébreux , en Grec , en Latin ,
& en François, fans qu'on connoiffe précilcment ce
qu'il défigne. On fait feulement que c'eft le nom de
la matière qui fervoit au tiflu des plus riches habille-
mens. Il en eft beaucoup parlé dans les auteurs pro-
phanes & dans rÉcriture: (E^eckiel, xxvij. 16. 1. I v.
Parallp. xv. zj. Ejlher , viij. z3. &Cc.) on y lit que
Djfvid avoit un manteau de byjfe , aufli bien que tous
les chantres & tous les lévites ; furquoi la plupart
des Naturaliftcs prétendent que ce lyjje étoit la foie
B Y S
471
des pinnes-marines, ou de l'huître perlîere mile en
œuvre. Voye{ Pinxe-MARINE.
Quelqu'amufante que foit cette idée , il eft diffici-
le de fe perfuader que du tems de David & de Salo-
mon , la foie du poifîbn pinne ait été aflez commu-
ne dans ces pays-là , pour qu'un fi grand nombre de
gens puflent en avoir des manteaux; ce qui eft cer-
tain , c'eft que le byjfe dont il s'agit ici , étoit diffé-
rent du lin ordinaire.
Le pafiage de S. Luc, chap. xvj. ig, où il eft dit
dans notre édition Latine , conformément au Grec ,
que le mauvais riche étoit vêtu de pourpre & de byfi
Je, n'embarrafle pas moins les interprètes du Nou-
veau Teftament.
Il eft d'abord inconteftable que toutes les verfions
Efpagnole , Italienne , Françoile , ou autres , qui pour
s'accommodera nos ufages modernes, ont traduit
qui étoit vêtu Je pourpre & de foie , s'éloignent égale-
ment de Fexaditude 6c du vrai. En effet le byjfus étoit
une toute autre matière que notre foie , comme on
peut le prouver évidemment par un grand nombre
d'anciens écrivains, & pour abréger, par le feul
dictionnaire de Pollux , liv. VU, chap. xvij.
On ne fauroit approuver davantage la traduction
des Jéfuites , qui s'/iabilloit d'écarlate & de toile fine ,
parce que byjfus ne fignifîe point une toile fine dans
le fens que nous attachons au mot de toile.
MM. de Port-Royal ont rendu plus exactement le
terme Grec , qui étoit vêtu de pourpre & de lin ; mais
ils n'en ont pas dit aflez , car il s'agit ici néceffaire-
ment de quelque choie qui eft au-deifus du fimple lin.
M. Simon l'a bien vu ; aufli a-t-il traduit, quife
vetoit de pourpre & de fin Un. Il appuie la traduction
d'une très-bonne note. « II y avoit, dit-il, une efpe-
» ce de fin lin qui étoit fort cher , & dont les plus
» grands feigneurs fe vêtoient en ce pays-là, &C dans
» l'Egypte. Ce riche en avoit un habit de couleur de
» pourpre ».
MM. de Beaufobre & Lenfant ont traduit de mê-
me, qui allait vêtu de pourpre & de lin très-fin j c'eft-
à-dire , ajoutent-ils dans leurs notes , d'une étoffe de
lin fin teinte en pourpre.
Ceci s'accorde parfaitement avec Pline, qui afiiî-
re que le byjfe étoit une efpece de lin très-fin. Paufa-
nias dit la même chofe, & remarque que dans toute
la Grèce , il ne croiflbit de byjfe qu'en Elide. Plufieurs
modernes font du même avis, & en particulier Bo-
chart , qui remarque que le byjjus étoit un lin tort
fin, qu'on teignoit fouvent en pourpre. On peut aufli
coniulter le vocabulaire Grec de Hélychius , &£ Ley-
dekker dans (à république des Hébreux.
Ceux qui foùtiennent que le byjfus n'étoit autre
chofe qu'une toile de coton fort fine , connue teule-
ment aux Indes , & par conféquent très-chere dans
les autres pays, s'appuient du récit de Philoftrate ,
qui raconte qu'Apollonius deTyane étant aux Indes,
obferva que tout le byj/'us dont on fe fervoit en Egyp-
te , venoit uniquement des Indes. Mais l'autorité
de Philoftrate, auteur d'un vrai roman fait fous le
titre de la ^ic dApollonius de Tyane , ne fauroit dé-
truire des témoignages formels, qui prouvent qu'il y
avoit d'autre byjfe que celui des Indes.
Enfin Philon aflure (Philo, de Somniis , pag. 3,0.7.
édit. in-fol. ) que le byjfus eft de tous les lins le plus
beau, le plus blanc , & le plus fort; qu'il n'eft point
tiré d'une chofe mortelle , mais de la terre , & qu'il
devient toujours plus blanc & plus brillant lorfqu'on
le lave comme il faut. Voilà donc l'amiante ou le lin
incombuftible , fous le nom de byjfus dans Philon.
S'il eft permis de dire notre fentiment après tant
d'habiles critiques qui ont taché d'eclaircir ce que
l'on doit entendre par le byjfus des anciens, nous
croyons pouvoir conjecturer avec vraiflemblance,
que ce mot eft un terme générique, qui lignifie dan*
47*
B Y S
leurs écrits une matière rare, tirée du règne végé-
tal & même minéral , en divers lieux & en divers
pays , de laquelle matière ils faifoient diverfes étof-
fes riches & précieufes. Il y avoit le byjje des Indes ,
d'Egypte , de Grèce , comme nous avons de la por-
celaine de divers pays.
Nous ne doutons point encore que fous ce nom ,
les anciens n'ayent confondu les cotons , les oiiattes ,
en un mot tout ce qui fe filoit, &C qui étoit d'un plus
grand prix que la laine.
Mais s'il eft certain qu'il y avoit chez les anciens
du byjfe tiré du règne végétal , il y a tout lieu de pen-
fer qu'ils tiroient aufîî du byjfus des pinnes-marines.
Que dis-je , de penfer ? Ariftote l'affûre pofitivement ;
car il nomme byjfus, la foie de ces coquilles.
On a connu de tout tems l'art de la filer; ainfi l'on
ne peut douter qu'elle n'ait été fouvent employée
pour les habits des grands feigneurs , dans des fiecles
où la foie n'étoit que très-peu comme , & ne fe voyoit
que rarement.
En effet ce byjjiis de coquillage, quoique filé grof-
fierement, paroît beaucoup plus beau que la laine,
& approche affez de la foie : on en fait encore à pré-
fent des bas , & d'autres ouvrages qui feraient plus
recherchés fi la foie étoit moins commune.
Pour filer cette forte de byffus , on le laiffe quel-
ques jours dans la cave pour l'humefter & le ramol-
lir ; enfuite on le peigne pour en féparcr la bourre
& les autres ordures qui y font attachées ; enfin on
le file comme on fait la foie.
Si je connoiffois quelque ouvrage, quelque traité
particulier fur le byjfus des anciens , j'y renvoyerois
les curieux. Voye^ cependant l'article Byssus. ( Le
chevalier de Javcourt.}
BYT
BYSSUS , f. m. (Hijl. nat. bot.') genre de plante-,
qui diffère du coralloïde , en ce que les plantes du
genre dont il s'agit , font compofées de filamens cy-
lindriques, qui ont des rameaux dans des efpeces, &
n'en ont pas dans d'autres ; enfin d'autres efpeces de
ce même genre ont fur le même pié des filamens fans*
rameaux & des filamens avec des rameaux ; la lon-
gueur de ces filamens varie dans les différentes ef-.
peces ; il y en a de fort courts & de fort longs. La
byjfus diffère du conferva , en ce que fes filamens n'ont
aucuns nœuds apparens , même lorfqu'ils font deffé-
chés. Le byjfus eft. plus durable & plus confiftant que
le botrytis ; fes femences ne font pas difpofées en épi
ou en grappe , mais placées le long des tiges. Il y a
quelques efpeces de byjfus dont la fubftance eft affez
dure, & d'autres qui ne font qu'herbacées. On en
trouve qui reffemblent , comme le conferva , à un
amas de fils de foie , à un tapis , à une peau de rat ou
de chat, à une toifon de brebis , à un morceau de drap,
ou enfin à une toile d'araignée. Les femences qui ont
été apperçûes font longues ou oblongues. Micheli ,
Nov. plant, gen. Voye{ PLANTE. (/)
BYSTRICE ou BYSTRYTZ , (Géog.) il y a trois"
villes de ce nom dans le royaume de Bohême.
B YTHAU, (Géog.) petite ville de la Pruffe PcV
lonoife.
BYTTE , (Géog.) île de la mer d'Allemagne , près
de celle de Falfter.
B Z
B Z.O , ( Géog. ) ville d'Afrique , au royaume de
Maroc.
c
'473
Le C , c , (Gram.') eft la troifieme
lettre de notre alphabet. La figu-
re de cette lettre nous vient des
Latins. Elle a aujourd'hui un fon
doux devant Ve & devant l'y on
prononce alors le c comme unf,
ce, ci, comme fe,f; enforte qu'a-
lors on pourroit regarder le c,
comme le Jîgma des Grecs , tel qu'il fe voit fouvent ,
furtout dans les inferiptions , avec la figure de notre
C capital, TAIC HMEPAIC (Gruter, tome I.pag.jo)
c'eft-à-dire, tais emerais ; &C au tome II. pag. 10Z0>
on lit une ancienne infeription qui fe voit à Alexan-
drie fur une colonne , ahmokpathc riEriKAiTOC
APXITEKTOC , Démocrates périclitas architeclos , Dé-
mocrates illuftre architecte. Il y a un très-grand nom-
bre d'exemples du Jîgma ainfi écrit, fur-tout en let-
tres majeures ou capitales; car en lettres communes
lefgmasëcnX ainfi a au commencement & au milieu
des mots , & ainfi ç à la fin des mots. A l'égard de la
troifieme figure du Jîgma, elle eft précifement comme
notre c dans les lettres capitales , & elle eft en ufage
au commencement , au milieu, Se à la fin des mots :
mais dans l'écriture commune on recourbe la pointe
inférieure du c , comme fi on ajoûtoit une virgule au
c : en voici la figure (f .
Ainiî il paroit que le c doux n'eft que le Jîgma des
Grecs ; &c il feroit à fouhaiter que le c eût alors un
caractère particulier qui le diftinguât du c dur; car
lorfque le c eft fuivi d'un a , d'un o , ou d'un a , il a
un fon dur ou fec , comme dans canon , cabinet , ca-
denat , cojfre , Cologne , colombe , copijle , curiofîté , cu-
vette, &c. Alors le c n'eft plus la même lettre que le
c doux , quoiqu'il paroifle fous la même figure ; c'en:
le cappa des Grecs , K, k, dont on a retranché la pre-
mière partie; c'en" le q des Latins écrit fans u, ainfi
qu'on le trouve en quelques anciens : pronuncUndum
a latinum fine u , quod hœ voces ojlendunt , punicï qa-
lam , xxXafAoç , calamus , qane , ndira. , canna , ( Angcli
Canifil e'/Am'ksjugç. Parijîis , l5j8 , pag. Ji.
En bas-Breton on écrit auffi le q fans u, é qever ,
envers ; qen , qer , tant, tellement. Le q fans u cil le
cappa des Grecs , qui a les mêmes règles &l le même
fon. (Grammaire Françoij'e Celtique, à Cannes IJ38.}
S'il arrive que par la raifon de l'étymologie on con-
ferve le c dans l'écriture devant a ,o , u; que dans la
prononciation on donne le fon doux au c, comme
quand on écrit il prononça , François , conçu , reçu,
Çrç. à c;\u(e de prononcer , France, concevoir, recevoir,
&c, alors on met fous le c une petite marque qu'on
appelle cédille , ce qui pourroit bien être le même
Jîgma dont nous avons déjà parlé, qui en lettre com-
mune s'écrit ainfi ? , eu> , sô , enforte que la petite
queue de ce Jîgma pourroit bien être notre cédille.
Depuis que l'auteur du bureau typographique a
mis en ufage la méthode dont on parle au chapitre vj.
de la Grammaire générale de P. R. les maîtres qui
montrent aujourd'hui à lire , à Paris , donnent une
double dénomination au c; ils l'appellent ce devant e
& devant i, ainfi. en faifant épeler ils font dire ce, e,
ce : ce , i , ci.
A l'égard du c dur ou fec , ils l'appellent ke ou que ;
ainfi pour faire épeler cabane, ils font dire ke , a,
ca ; be,a, ba , cabaj ne , e , ne , ca-ba-ne ; car aujour-
d'hui on ne fait que joindre un e muet à toutes les
çonfpnnes ; ainfi on dit be , ce, de, Je , me , re, te , fe ,
ve ; &C jamais ejfe , emme , enne , erre , elfe. Cette nou-
velle dénomination des lettres facilite extrêmement
Tome II,
la lecture, parce qu'elle fait aflembler les lettres
avec bien plus de facilité. On lit en vertu de la dé-
nomination qu'on donne d'abord à la lettre.
Il n'y a donc proprement que le c dur qui foit le
kappa des Grecs k , dont on a retranché la premiè-
re partie. Le c garde ce fon dur après une voyelle &
devant une confonne ; dicter , effectif.
Le c dur & le q fans u ne font prefque qu'une mê-
me lettre : il y a cependant une différence remarqua-
ble dans l'ufage que les Latins ont fait de l'une & de
l'autre de ces lettres , lorfqu'ils ont voulu que la
voyelle qui fuit le q accompagné de Vu, ne fît qu'une
même fyllabe; ils fe font fervis de qu ; ainfi ils ont
écrit , aqua , qui , quiret , reliquum , &c. mais lorf-
qu'ils ont eu befoin de diviler cette fyllabe , ils ont
employé le c au lieu de notre tréma; ainfi on trouve
dans Lucrèce a-cu-a en trois fyllabes , au lieu de
aqua en deux fyllabes ; de même ils ont écrit qui mo-
nofyllabe au nominatif, au lieu qu'ils écrivoient cu-i
diffyllabe au datif. On trouve aulfi dans Lucrèce cu-
i-ret , pour quiret ; relicu-um , pour reliquum.
Il faut encore obferver le rapport du c au g. Avant
que le caradere g eût été inventé chez les Latins ,
le c avoit en plufieurs mots la pronociation du g, ce
fut ce qui donna lieu à Sp. Carvilius , au rapport de
Terentius Scaurus^ d'inventer le g pour diltinguer
ces deux prononciations: c'en: pourquoi Diomede,
lib. II. cap. de litterà , appelle le g lettre nouvelle.
Quoique nous ayons un caraûere pour le c, & un
autre pour le g, cependant lorfque la prononciation
du c a été changée en celle du g, nous avons con-
fervé le c dans notre orthographe , parce que les yeux
s'étoient accoutumés à voir le c en ces mots-là : ain-
fi nous écrivons toujours Claude, Cicogne ,Jècond,fe-
condement , féconder ,Jecret,quok[ue nous prononcions
Glande , Cigogne , J'egond , fegondement , fegonder z
mais on prononce J'ecret , fecretement ,fecrétaire.
Les Latins écrivoient indifféremment vicefimus ou
vigefmus ; Gaius ou Caius ; Gneius pour Cneius.
Pour achever ce qu'il y a à dire fur ce rapport du
c au g, je ne puis mieux faire que de transcrire ici
ce que l'auteur de la méthode Latine de P. R. a re-
cueilli à ce fujet , p. 647.
« Le g n'eft qu'une diminution du.c , au rapport
» de Quintilien ; aufti ces deux lettres ont-elles gran-
» de affinité enfemble , pùifquè de K\Ât^iaK nous fai-
» fons gubernater ; de xhicç , gloria ; de a gère , aclum ;
» de nec-otium , negotium : & Quintilien témoigne
» que dans Gaius , Gneius, on ne diftinguoit pas lî
» c'etoit un c ou un g : c'eft de-là qu'eft venu que
» de centum on a formé quadringenti , quingenti ,fep-
» iengenti , &c. de porricere qui eft demeuré en ufage
>» dans les facrifices , on a fait porrigere ; & fembla-
» blés.
» On croit que le g n'a été inventé qu'après la
» première guerre de Carthage , parce qu'on trouvé
» toujours le c pour le g dans la colonne appellée
>» rojtrata , qui fut élevée alors en l'honneur de Dui-
» lins , conlul , & qui fe voit encore à Rome au ca-
» pitole ; on y lit : macijiratos leciones puenando copias
» Carcacinienjîs : ce que l'on ne peut bien entendre lr
» l'on ne prend le rdans la prononciation du k. AufH
>• ell-il à remarquer que Suidas parlant du croulant
» que les lcnateurs portoient fur leurs fouliers, l'ap-
» pelle to p'afjuLiKov y.a^a-à ; faii'ant allez voir par-là
» que le c & le k pafloient pour une même choie ,
» comme en effet ils n'étoient point différens dans
» la prononciation ; car au lieu qu'aujourd'hui nous
Ooo
474 C
» adouciflbns beaucoup le c devant Ye & devant IV,
» enforte que nous prononçons Cicero comme s'il y
» avoit Sifero ; eux au contraire prononçoient le c
» en ce mot & en tous les autres , de même que
» dans caput & dans corpus, kikero ».
Cette remarque fe confirme par la manière dont
on voit que les Grecs écrivoient les mots Latins où
il y avoit un c , fur-tout les noms propres , Cœfar ,
Ka?<rap; Cicero , K/xepwr, qu'ils auroient écrit 2/répac,
s'ils avoient prononcé ce mot comme nous le pro-
nonçons aujourdhui.
Voici encore quelques remarques fur le c.
Le c eft quelquefois une lettre euphonique , c'eft-
à-dire mife entre deux voyelles pour empêcher le
bâillement ou hiatus ;fi-c-ubi , au lieu def-ubi , fi en
quelque part , fi en quelque endroit ; nunc-ubi , pour
num-ubi ? eft-ce que jamais ? eft-ce qu'en quelque
endroit ?
Quelques auteurs ont cru que le c venoit du chaph
des Hébreux , à caufe que la figure de cette lettre eft
une efpece de quarré ouvert par un côté ; ce qui fait
une forte de c tourné à gauche à la manière des Hé-
breux : mais le chaph elt une lettre afpirée , qui a
plus de rapport au % , chi , des Grecs qu'à notre c.
D'ailleurs, les Latins n'ont point imité les carac-
tères Hébreux. La lettre des Hébreux dont la pronon-
ciation répond davantage au aaW* & à notre c, c'eft
le kouph dont la figure n'a aucun rapport au c.
Le P. Mabillon a obfervé que Charlemagne a tou-
jours écrit fon nom avec la lettre c ; au lieu que les
autres rois de la féconde race qui portoient le nom
de Charles , Pécrivoient avec un k ; ce qui fe voit en-
core fur les monnoies de ces tems-là.
Le C qui elt la première lettre du mot centum , étoit
chez les Romains une lettre numérale qui fignifioit
cent. Nous en faifons le même ufage quand nous nous
fervons du chiffre Romain , comme dans les comp-
tes qu'on rend en juftice, en finance, &c. Deux CC
marquent deux cents , &c. Le C avec une barre au-
defïùs , comme on le voit ici , fignifioit cent mille.
Comme le C eft la première lettre de condemno , on
Pappelloit lettre funefle ou tripe , parce que quand les
juges condamnoient un criminel , ils jettoient dans
Purne une tablette fur quoi la lettre c étoit écrite ; au
lieu qu'ils y écrivoient un A quand ils vouloient ab-
foudre. V niverfi judices in cijlam tabulas Jimul conjicie-
bant fuas : eafque inculptas Hueras habebant , A , abfolu-
tionisj C , condemnationis. (Afconius Pedianus inDi-
vinat. Cic. )
Dans les noms propres, le C écrit par abrévia-
tion lignifie Caius : s'il eft écrit de droite à gauche ,
il veut dire Caia. Voy. Valerius Probus , de nous Ro-
manorum , qui fe trouve dans le recueil des grammai-
riens Latins , Auclores linguec Latines.
Le C mis après un nom propre d'homme , ou dou-
blé après deux noms propres , marquoit la dignité de
conful. Ainfi Q. Fabio & T. Quintio CC , ûoniRefous
le confulat de Quintus Fabius , & de Titus Quintius.
En Italien , le c devant Ye ou devant Yi , a une forte
de fon qui répond à notre tche , tchi , faifant entendre
le t foiblement: au contraire fi le c eft fuivi d'une h,
on le prononce comme ké ou que , ki ou qui : mais la
prononciation particulière de chaque confonne re-
garde la Grammaire particulière de chaque langue.
Parmi nous , le C fur les monnoies eft la marque
de la ville de Saint-Lô en Normandie. (.F)
C , dans le Commerce : cette lettre feule , ou fuivie ,
Ou précédée de quelques autres, fert aux marchands ,
négocians , banquiers & teneurs de livres , pour abré-
ger certains termes qu'ils font obligés de répéter fou-
vent dans les écritures qu'ils portent fur leurs jour-
naux ou regiftres. C. fignifie compte. C. O. compte
ouvert, C. C. compte courant. M. C, mon compte. S. C.
C A A
fon compte. L. C. leur compte. N. C. notre compte. Voy'.
Abréviation. (G)
C eft , en Mufique , le figne de la mefure à quatre
tems. Voye{ Mlsure.
C barre , qui fe fait ainfi (p , eft en Mufique ,
le fignede la mefure à quatre tems vîtes, ou plutôt à
deux tems pofés , confervant pourtant toujours le ca-
ractère de la mefure à quatre tems , qui eft l'égalité
des croches. Voyez Mesure.
C SOL UT, C SOL FA UT , oufmplement C : ca-
ractère ou terme de Mufique qui indique la note que
nous appelions ut. Voye\ Gamme. C'eft auflî le nom
de l'une des trois clés de la Mulique. Voy. Clé. (S)
* Quant à la formation de la lettre C confidérée
comme caraclere d'écriture. V. l'article Ecriture.
* CAA-APIA , (Hijl. nat. bot. ) petite plante du
Brefil dont la racine eft longue d'un ou deux tra-
vers de doigt , groffe comme le tuyau d'une plume
de cygne , noiieufe , garnie de petits filamens d'un
gris jaunâtre en -dehors, blanche en -dedans ; d'a-
bord infipide au goût , puis un peit acre ce piquante.
Il part de cette racine trois ou quatre pédicules longs
de trois ou quatre travers de doigt , & portant cha-
cun une feuille large d'un travers de doigt, longue
de trois ou quatre, d'un verd luifant en-deflus, un
peu blanchâtre en-deffous , traveriee d'une nervure
principale, d'où il en part d'autres latérales qui font
relevées en-defibus. La fleur a fon pédicule particu-
lier : elle eft ronde , radiée , approchante de la fleur
du bcllis , à plufieurs étamines , & à femences ron-
des plus petites que la graine de moutarde. On attri-
bue à la racine les vertus de l'ipecacuhana : mais
c'eft à tort. Cependant elle arrête le flux , 6c fait vo-
mir. Les habitans du Brefil pilent la plante entière,
& fe fervent de fon fuc contre la morfure des ferpens
& la blefïïire des flèches empoifonnées. Mémoires de
l'académie des Sciences , ijoo.
* Caa-ATAYA , ( Hijl. nat. bot. ) plante du Bre-
fil dont la racine eft petite , blanche, quarrée , de la
hauteur d'un pié , d'un verd pâle , foible , genouillée,
partie droite , partie rampante, & prenant racine où
fes nœuds touchent la terre. Elle a à chaque nœud
deux petites feuilles oppofées,fcmblables à celles de
la véronique mâle pour la pofition & pour la figure,
d'un verd pâle , & dentelée par les bords. A chaque
paire de feuilles eft une petite fleur blanche en cal-
que , à laquelle fuccede une gonfle ièmblable au
grain d'avoine. Cette gonfle s'ouvre & répand une
petite femence ronde , d'un jaune foncé , & plus me-
nue que celle du pavot. La plante n'a point d'odeur ;
elle eft un peu amere au goût. Broyée & bouillie
dans l'eau , on en tire par décoction un purgatif vio-
lent par haut & par bas. On la pourrait rapporter au
genre de l'eufraile.
* CAABLE, adj. (Commerce de bois.) on donne
ce nom aux arbres que les vents ont abattus dans les
forêts. Ainfi caablé eft lynonyme à verfé & à chablis.
Voyei Bois.
* CAACICA, (Hijl. nat. bot.) plante du Brefil
à racine petite & filamenteufe, d'où part un grand
nombre de tiges voifines les unes des autres , hautes
d'un demi-pié , & quelquefois davantage ; d'un verd
rougeâtre , un peu velues , genouillées , de la grof-
feur du doigt, & portant à chaque nœud deux feuil-
les bien découpées, de la grandeur & de la forme de
celles de la véronique mâle ; vertes en-deffus & blan-
châtres en-defibus. Entre ces feuilles croît une multi-
tude de petites fleurs en ombelle, d'un verd mêlé
d'un peu de rouge: toute la plante rend un lue lai-
teux. Broyée , on 1'apphque pour la morfure des ler-
pens &c d'autres bleflures.
* CAA-ETIMAY,( Hift. nat. bot. ) plante du
Brefil qui s'élève à la hauteur de trois piéj , a la tige
verte , pleine d'une fubftance médullaire, & couron-
C A A
née à fon origine d'un grand nombre de feuilles lon-
gues de quatre à cinq doigts , étroites , dentelées par
les bords, un peu velues , ainlî que la tige, dont la
partie fupérieure le divile en quatre , cinq , fix , ou
iépt branches , couvertes de petites feuilles lembla-
bles à celles de l'hyfope. Les plus petites branches
portent un grand nombre de petites fleurs fembla-
bles à celles du feneçon. Ces fleurs dégénèrent en un
duvet qu'emporte le vent.
Cette plante a la feuille chaude & acre : on l'em-
ployé bouillie & broyée , contre la gratelle. Ray,
Hift. plant.
* CAAGHIYNITO, (Hift. nat. bot. ) arbriffeau
de la groffeur du framboifier : fa tige eft ligneufe &
velue; les feuilles croulent par paires oppoiées, 6c
font couvertes d'un duvet doux au toucher, légère-
ment découpées , divilées par trois nervures émi-
nentes qui les traverlent dans toute leur longueur ,
& d'où partent en grand nombre de petites veines
<mi fe croifent en tout fens , plus vertes en - deffus
qu'en-defîbus , relevées en bolîés en-deflùs , & par-
femées de cavités en-deffous. Il croît fur tout l'ar-
brifTeau trois, quatre, cinq fleurs blanches , à cinq
pétales qui fe réunifient : elles font fuivies de baies
noires de la groffeur de celles du genièvre , douces
au goût, 6c pleines d'un fuc femblable à celui des
baies de myrte. Les Nègres les mangent. Le caag-
hiynito croit en plufieurs contrées du Brefil. On dit
que les feuilles mifes en poudre , font un bon remè-
de contre les ulcères qui proviennent d'un principe
chaud.
* CAAGUACUBA , ( Hift. nat. bot. ) petit arbre
droit peu vigoureux , non branchu , couvert au fom-
met d'un grand nombre de feuilles larges d'un pié 6c
davantage, longues d'un pié 6c demi, divilées par
des nervures douces au toucher , velues , 6c plus ver-
tes en-deflùs qu'en-defîbus. Il porte de petites fleurs
difpolées en ombelle , femblables à celles du tilleul ,
blanches, à cinq pétales, avec un ovaire jaune au
milieu : elles ont aufll l'odeur des fleurs du tilleul.
L'écorce de l'arbre eft cendrée , 6c le bois en eft caf-
fant. Son fruit eft noir quand il eft mùr , 6c les oifeaux
s'en nourriflent. Ray ne dit rien de fes vertus médi-
cinales.
* CAAIO , ( Hift. nat. bot. ) plante du Brefil. M.
Ray en diftingue deux cfpeces : il les appclle/^/i/ï-
ves. Il n'en donne point la description , & ne leur at-
tribue aucune propriété médicinale.
C AANA, (Géog. ) ville d'Egypte fur le bord
oriental du Nil , agréable par fa fituation , &curieufe
par beaucoup de monumens. Long. 4g. 58. lat. x5.
30.
* CAA-OPIA , (Hift. nat. bot.) arbre du Brefil
qui n'eft pas fort confidérable. Son écorce eft. d'une
couleur cendrée tirant fur le rouge , avec des raies
brunes ; Ion bois eft fort , il poulie beaucoup de bran-
ches; les feuilles font fermes, vertes, tirant furie
rouge en-deflbus , 6c d'un verd pâle ec luifant en-
deflùs ; fes fleurs font en ombelle , 6c tirent leur ori-
gine de petites éminences rondes , brunes , de la for-
me d'une lentille , d'où elles fortent à la longue , com-
pofées de cinq pétales d'un verd tirant fur le jaune ,
couvertes au-dedans d'une efpece de laine blanche ,
& bien pourvues de belles étamines jaunes : les (leurs
font fuivies de baies vertes d'abord, de la groffeur
d'une cerife , rondes , couvertes d'une coque molle ,
d'oii étant tirées & écralces , elles rendent par exiu-
dation une fubftance liquide d'un fort beau jaune :
au-dedans de l'écorce de cet arbre efl renfermée une
pulpe blanche compofée de corps cylindriques, pla-
ints à coté des autres , & adhérons entre eux à
l'extrémité des branches qui portent le fruit. Il y a
toujours deux feuilles brunes, pointues, unies ou à
moitié collées , qui relicmblent allez à une pique.
Tome II,
C A B
475
Cet arbre fleurit en Novembre & en Décembre , &
fon fruit eft mùr en Janvier ou Février. Si l'on fait
une incifion à fon écorce , fur-tout lorfqu'il commen-
ce à bourgeonner , il en lortira au bout d'un ou de
deux jours une larme d'une couleur de iafran , rou-
geâtre , qui eft molle d'abord , mais qui fe durcit par
la fuite : cette larme eft de la couleur & confiltance
de la gutta- gamba. Elle le dilî'out dans l'elprit-de-
vin , à qui elle donne une belle couleur de iafran.
On fe fervoit autrefois de cette gomme comme
d'un remède pour la gratelle , en la failant difloudre
dans l'eau : mais elle n'a point tant d'efficacité que
la gutta -gamba. En la faifant macérer dans du vi-
naigre de fquille ou dans l'elprit-de-vin, on a un,
purgatif violent. Ray, Hift. plant.
CAAPEBA , ( Hift. nat. bot. ) genre de plante à
fleur en rôle , compofée de quatre pétales dilpofés
en rond, & ftérile. II s'élève du milieu un pillil ap-
plati , rond , & marqué d'un ombilic. Il y a fur la
même plante des embryons féparés des fleurs , qui
deviennent dans la fuite une baie molle & fphéri-
que , qui renferme une femence ridée. Plumier,
Nova plant. Amer, gêner. Voye^ Plante. (/)
CAB, (Hift.anc.) mefure Hébraïque, qui étoit
la fixieme partie àuféah ou fatum , & la dix-huitie-
me partie de Yepha. Le cab contenoit une pinte , cho-
pine , un poifîbn, un pouce cube & un peu plus. Le
quart du cab étoit cette mefure de fiente de pigeon ,
ou plutôt d'une forte de pois chiche appellée de ce
nom , qui fut vendue h Samarie jufqu'à cinq ficles
pendant le fiége de cette ville , comme il eft rap-
porté au IV. livre des Rois , c. vj. verf. zà. Ce quart
de cab contenoit un demi-feptier, un poùTon, un
quart de poilTon , trois lignes cubes & un peu plus.
On l'appelle auffi rog ou robah. Le cab étoit fort dif-
férent du cad , cadus. Voye^ Cad. Dictionnaire de là
bible. (G)
* CABACK , (Hift. mod. ) c'eft ainfi qu'on ap-
pelle en Ruffie les cabarets 6c les maifons oii l'on
va boire du vin, de leau-de-vie ,6c d'autres liqueurs
fortes. Tous les cabacks ou cabarets qui font dans
l'étendue de l'empire appartiennent au louverain ; il
eft le leul cabaretier de les états : il atferme en argent
ces fortes de maifons ; cela fait une partie confidéra-
ble de fes revenus, attendu la vafte étendue des pays
qui lui font fournis , & l'invincible penchant que les
fujets ont à s'ériivrer de vin , 6c fur tout d'eau-de-
vie.
CABAIGNAC , ( Giog. ) petite ville de France
dans le haut Languedoc , entre Touloufe 6c Car-
calfonne.
CABALE , f. f. (Jurifp. ) concert ou confpira-
tion de plufieurs perlonnes , qui par des menées fe-
cretes & illicites , travaillent lourdement à quelque
choie d'injufte , comme à perdre un innocent , à fau*
ver un coupable, à décréditer une bonne marchan-
dée , un bon ouvrage , à ruiner quelque etabliffement
utile , ou à faire écïorre quelqueprojet préjudiciable
à l'état ou à la fociété.
Il fe dit auffi du projet même des perfonnes qui
cabalent. Ainli l'on dit , fi les manœuvres des per-
fonnes mal intentionnées ont rculii , ou ont manqué :
aie l'a emporté cette fois ; la cabale a échoué ,
6cc.
De ce mot on a fait cabaleur , pour défigner celui
qui trempe dans une cabale , ou plutôt même celui
qui en eu le promoteur. (H)
Cabale , (Philof. ) On n'entend pas feulement
ici par le mot de Cabale , cette tradition orale dont
les juifs croyoient trouver la fource furie montSinai
ou elle fut donnée a Moyfe, en même tems que la loi
écrite , & qui , après l'a mort, palîa aux prophètes,
aux rois chéris de Dieu , 6c furtout aux fages , qui
O o o ï)
47<S
C A B
la reçurent les uns des autres par une efpece de fub-
ftitution. On prend furtout ce mot pour la doctrine
mythique , & pour la Philofoph.it occul c des Juifs , en
un mot pour leurs opinions myftérieufes fur la Mé-
taphyfique, fur la Phyfique & fur la Pneumatique.
Parmi les auteurs Chrétiens qui ont fait leurs ef-
forts pour relever la Cabale , & pour la mettre au ni-
veau des antres feiences , on doit diffinguer le fa-
meux Jean Pic de la Mirandole , qui à Page de vingt-
quatre ans foùtint à Rome un monftrueux aflembla-
ge de toute forte de proportions tirées de plufieurs
livres cabaliffiques qu'il avoit achetés à grands frais.
Son zèle pour l'Eglife Romaine fut ce qui l'attacha
à la Cabale. Séduit par les éloges qu'on donnoit à la
tradition orale des Juifs, qu'on égaloit prefque à l'E-
criture-fainte , il alla jufqu a fe perfuaderque les li-
vres cabaliltiques qu'on lui avoit vendus comme au-
thentiques , étoient une production d'Efdras , & qu'ils
contenoient la doctrine de l'ancienne églife Judaïque.
Il crut y découvrir le myftere de la Trinité , l'Incar-
nation , la Rédemption du genre humain , la paiîïon ,
la mort & la réfurreclion de J. C. le purgatoire , le
baptême, la fupprefîion de l'ancienne loi, enfin tous
les doomes enfeignés & crûs dans l'Eglife catholi-
que. Ses efforts n'eurent pas un bon fuccès. Ses the-
iés furent fupprimées, & treize de fes propositions
furent déclarées hérétiques. On peut lire dans Volf
le catalogue des auteurs qui ont écrit fur la Cabale.
Origine de la Cabale. Les commencemensde la Ca-
bale font fi obfcurs , fon origine efl couverte de li
épais nuages, qu'il paroît prefque impoffible d'enfi-
ler l'époque : cette obfcurité d'origine ell commune
à toutes les opinions qui s'infinuent peu à peu dans
les efprits , qui croiiïent dans l'ombre & dans le fi-
lence , & qui parviennent infeniiblement à former
mn corps de i yfteme.
Il feroit affez inutile de rapporter ici les rêveries
des Juifs fur l'origine de la Plulojbphie cabalifiique, on
peut conlulter l'article Philosophie judaïque,
èv nous aurons occafion d'en dire quelque chofe dans
le cours même de celui-ci : nous nous contenterons
de dire ici qu'il y a des Juifs qui ont prétendu que
Fange Raziel , précepteur d'Adam , lui avoit donné
un livre contenant la feience célefle ou la Cabale , &
qu'après le lui avoir arraché au fortir du jardin d'E-
den, il le lui avoit rendu, fe biffant fléchir par fes
humbles fupplications. D'autres difent qu'Adam ne
reçut ce livre qu'après fon péché , ayant demandé à
Dieu qu'il lui accordât quelque petite coniolaiion
dans le malheureux état où il fe voyoit réduit. Ils
racontent que trois jours après qu'il eut ainfi prié
Dieu , l'ange Raziel lui apporta un livre qui lui com-
muniqua la connoiffance de tous les fecrets de la
nature , la puiffance de parler avec le foleil &avec
la lune , de faire naître les maladies & de les guérir ,
de renverfer les villes , d'exciter des tremblemens
de terre , de commander aux anges bons & mau-
vais , d'interpréter les longes & les prodiges , &c de
prédire l'avenir en tout tems. Ils ajoutent que ce li-
vre en paffant de père en fils , tomba entre les mains
de Salomon , & qu'il donna à ce favant prince la
vertu de bâtir le temple par le moyen du ver Zamir ,
fans fe fervir d'aucun infiniment de fer. Le rabbin
îfaac Ben Abraham a fait imprimer ce livre au com-
mencement de ce fiecle , & il fut condamné au feu
par les Juifs de la même tribu que ce rabbin.
Les favans qui ont écrit fur la Cabale font fi par-
tagés fur fon origine , qu'il ell prefque impoffible de
tirer aucune lumière de leurs écrits : la variété de
leurs fentimens vient des différentes idées qu'ils fe
formoient de cette feience ; la plupart d'entr'eux n'a-
voient point examiné la nature de la Cabale , com-
ment ne fe feraient - ils pas trompés fur fon origine ?
Ainiï fans prétendre à la gloire de les concilier , nous
C A B
nous bornerons à dire ici ce que nous croyons de
plus vraiffemblable.
ic. Ceux qui ont étudié l'hiftoire de la Philofo-
phie , & luivi les progrès de cette feience depuis le
commencement du monde juiqu'à la naiffance de J .C.
favent que toutes les nations , & furtout les peuples
de l'orient , avoient une feience myflérieufe qu'on
cachoit avec foin à la multitude , & qu'on ne corn-
muniquoit qu'à quelques privilégiés : or, comme les
Juifs tenoient un rang diflingué parmi les nations
orientales , on fe perfuadera aiiément qu'ils durent
adopter de bonne heure cette méthode iecrete & ca-
chée. Le mot même de Cabale femble l'infinuer ; car
il lignifie une tradition orale & Iecrete de certains
mylleres dont la connoiffance étoit interdite au peu-
ple. (Liiez Vacliierns inElucidario Cabba. Schrammius.
Differt. de Mylleriis Judœorum plulojbphicis.*) Mais par-
mi le grand nombre de témoignages que nous pour-
rions citer en faveur de ce fentiment, nous n'en choi-
firons qu'un tiré de Jochaides écrivain cabaliffique.
( Jdra Rabba §. 16. Cabb. dtnud. tom. 11. )
K. Schimeon exorfus dixit ; qui ambulat ut circum-
foraneus , révélât feerctum ; fed fideiis Jpiritu operit ver-
bum , ambulans ut circumforaneus : hoc dicîum quœflio-
nem meretur, quia dicitur circumforaneus quare ambu-
lans, vir circumforaneus dicendus erat , quid ell ambu-
lans ? Verumenimvero in Mo , qui non efl fedatus infpi-
ritufuo , nec verax , verbum quod audivit , hùc Mue mo-
vetur , ficut Jpina in aquâ , donec Mue foras expellat ;
quamobrem ? quia fpiritus ejus non efl flabilis . . . nec
enim mundus in (labilitate manet niji per fecretum , &
fi circa negotia mundana opus ejlfecreto , quanto magis
in negotiis fecretorum fecretiffîmorum & confideratione
finis dierum , quœ nequidem tradita fiunt angelis ....
Cœlis nondicam ut aufcultent ; terra non dicam ut au-
diat ; certè enim nos columnœ mundorum fumus.
Ainfi parle Schimeon Jochaides ; & il regardoit le
fecret comme une chofe fi importante qu'il fit jurer
fes difciples de le garder. Le filence étoit fi facré chez;
les Efleniens , que Jofephe ( Procem. hifl. Judaïc. y
afîùre que Dieu puniffoit ceux qui ofoient le violer.
2°. Il n'efl donc pas douteux que les Juifs n'ayent
eu de bonne heure une feience iecrete & myfté-
neuie : mais il efl impoffible de dire quelque chofe
de pofitif foit fur la vraie manière de l'enfeigner ,
foit fur la nature des dogmes qui y étoient cachés,
foit fur les auditeurs choiiis auxquels on la commu-
niquoit. Tout ce qu'on peut affùrer , c'eft. que ces
dogmes n'étoient point contraires à ceux qui font
contenus dans l'Ecriture lainte. On peut cependant
conjecturer avec vraiffemblance , que cette feience
fecrete contenoit une expoiition affez étendue des
mylîeres de la nouvelle alliance , dont les femen-
ces font répandues dans l'ancien Tellament. On y
expliquoit Fefprit des cérémonies qui s'oblèrvoient
chez les Juifs , & on y donnoit le fens des Prophé-
ties dont la plupart avoient été propolées fous des
emblèmes & des énigmes : toutes ces choies étoient
cachées au peuple , parce que ion efprit groffier &
charnel ne lui faifoit envifàger que les biens ter-
rellres.
3°. Cette Cabale , ou bien cette tradition orale
fe conferva pure & conforme à la Loi écrite tout le
tems que les prophètes furent les dépofitaires & les
gardiens de la doftrine : mais lorfque l'efprit de pro-
phétie eut ceffé , elle fe corrompit par les quelîions
oifives, 8c par les affertions frivoles qu'on y mêla.
Toute corrompue qu'elle étoit , elle conferva pour-
tant l'éclat dont elle avoit joui d'abord , & on eut
pour ces dogmes étrangers & frivoles qu'on y inléra ,
le même refpe£t que pour les véritables. Voilà quelle
étoit l'ancienne Cabale , qu'il faut bien dillinguer de
la Philofophie cabalifliqut , dont nous cherchons ici
l'origine.
C A B
4°. On peut d'abord établir qu'on ne doit point
chercher l'origine de la Philofophie cabalijlique chez
les Juifs qui habitoient la Paleltine ; car tout ce que
les anciens rapportent des traditions qui étoient en
vogue chez ces Juifs , fe réduit à des explications de
la loi , à des cérémonies, 6c à des conftitutions des
fages. La Philofophie cabalijlique ne commença à pa-
roitre dans la Paleltine que lorfque les Elléniens ,
imitant les mœurs des Syriens & des Egyptiens , &
empruntant même quelques-uns de leurs dogmes &
de leurs inftituts , eurent formé une fecte de Philo-
sophie. On fait par les témoignages de Jofephe & de
Philon , que cette fefte gardoit un fecret religieux fur
certains myfteres '6c fur certains dogmes de Philofo-
phie.
Cependant ce ne furent point les EfTeniens qui
communiquèrent aux Juifs cette nouvelle Cabale; il
eft certain qu'aucun étranger n'étoit admis à la con-
noiffance de leurs myfteres : ce fut Simeon Scheta-
chides qui apporta d'Egypte ce nouveau genre de
tradition , & qui l'introduifit dans la Judée ( Voye^
l'Hifloirc des Juifs. ) Il eft certain d'ailleurs que les
Juifs , dans le féjour qu'ils firent en Egypte fous le
règne de Cambife , d'Alexandre le grand , & de
Ptolémée Philadelphe, s'accommodèrent aux mœurs
des Grecs 6c des Egyptiens , 6c qu'ils prirent de ces
peuples l'ufage d'expliquer la loi d'une manière al-
légorique, 6c d'y mêler des dogmes étrangers : on ne
peut donc pas douter que l'Egypte nefoitla patrie de
la Philofophic cabalifique , 6c que les Juifs n'ayent
inféré dans cette feience quelques dogmes tirés de la
Philofophie Egyptienne & orientale. On en fera plei-
nement convaincu , fi l'on fe donne la peine de com-
parer les dogmes philolophiques des Egyptiens avec
ceux de la Cabale. On y mêla même dans la fuite
quelques opinions des Peripatéticiens ; ( Morus.
Cabb. denud. tom. I. ) & J. Jufte Lofuis ( Giejpz
ljo6 . ) a fait une diliertation divifée en cinq cha-
pitres , pour montrer la conformité des fentimens de
ces derniers philofophes avec ceux des Cabalijles.
L'origine que nous donnons à la Philofophie. caba-
lifique , fera encore plus vrailTemblable pour ceux
qui feront bien au fait de la Philoibphie des anciens,
& furtout de l'hiftoire de la Philofophie judaïque.
Divifon de la Cabale. La Cabale le divile en con-
templative , & en pratique : la première eft la feience
d'expliquer l'Ecnture-fainte conformément à la tra-
dition lecrete , & de découvrir par ce moyen des
vérités fublimes fur Dieu , fur les efprits 6c fur les
mondes : elle enfeigne une Métaphyfique myftique ,
& une Phyfique épurée. La féconde enfeigne à opé-
rer des prodiges par une application artificielle des
paroles & des fentences de l'Ecriture fainte , 6c par
leur différente combinailon.
i°. Les partifans de la Cabale pratique ne manquent
pas de raifons pour en foùtenir la réalité. Ils fou-
tiennent que les noms propres font les rayons des
objets dans lcfquels il y a une eipece de vie cachée.
C'eft Dieu qui a donné les noms aux choies , & qui
en liant l'un à l'autre, n'a pas manqué de leur com-
muniquer une union efficace. Les noms des hommes
font écrits au ciel ; & pourquoi Dieu auroit-il placé
ces noms dans les livres , s'ils ne méritoient d'être
confervés ? Il y avoit certains Ions dans l'ancienne
JMuliquc , qui frappoient li vivement les fens , qu'ils
animoient un homme ianguiffant, diltipoient la mé-
lancholie,chaffbient le mal dont il étoit attaqué, & le
faifoient quelquefois tomber en fureur. Il tant nécef-
fairement qu'il y ait quelque vertu attachée dans ces
Ions pour produire de li grands effets. Pourquoi donc
refiuera-t-on la même efficace aux noms de Dieu 6c
aux mots de l'Ecriture ? Les Cabalijhs ne fe conten-
tent pas d'imaginer des raifons pour juftirier leur Cj-
fralc pratique ; ils lui donnent encore une origine fa-
C A B
477
crée, & en attribuent l'ufage à tous les faints. En
effet ils foûtiennent que ce fut par cet art que Moyfe
s'éleva au-deffus des magiciens de Pharaon ,& qu'il
fe rendit redoutable par lés miracles. C'étoit par le
même art qu'Elie fitdefcendre le feu du ciel , & que
Daniel ferma la gueule des lions. Enfin , tous les
prophètes s'en font fervis heureufement pour décou-
vrir les évenemens cachés dans un long avenir.
Les Cabaliftes praticiens difent qu'en arrangeant
certains mots dans un certain ordre , ils prpduilent
des effets miraculeux. Ces mots font propres à pro-
duire ces effets , à proportion qu'on les tire d'une lan-
gue plus fainte ; c'eft pourquoi l'Hébreu eft préféré à
toutes les autres langues. Les miracles font plus ou
moins grands, lelon que les mots expriment ou le nom
de Dieu , ou les perfections & lés émanations ; c'eft
pourquoi on préfère ordinairement lesféphirots , ou
les noms de Dieu. Il faut ranger les termes , & prin-
cipalement les foixante & douze noms de Dieu ,
qu'on tire des trois verfets du xiv. chap. de i 'Exode ,
d'une certaine manière à la faveur de laquelle ils de-
viennent capables d'agir. On ne fe donne pas tou-
jours la peine d'inférer le nom de Dieu : celui des
démons eft quelquefois auffi propre que celui de la
divinité. Ils croyent, par exemple, que celui qui boit
de l'eau pendant la nuit , ne manque pas d'avoir des
vertiges & mal aux yeux : mais afin de fe garantir de
ces deux maux , ou de les guérir lorfqu'on en eft atta-
qué , ils croyent qu'il n'y a qu'à ranger d'une certai-
ne manière le mot Hébreu Schiauriri. Ce Schiauriri
eft le démon qui préfide fur le mal des yeux & fur
les vertiges ; & en écrivant fon nom en forme d'é-
querre , on fent le mal diminuer tous les jours & s'a-
néantir. Cela eft appuyé fur ces paroles de la Ge-
nefe , où il eft dit , que les anges frappèrent d'ébloiiif-
fement ceux qui étoient à la porte de Loth , tellement
qu'ils ne purent la trouver. Le Paraphrafte chaldaï-
que ayant traduit aveuglement , befehiauriri , on a con-
clu que c'étoit un ange , ou plutôt un démon qui en-
voyoit cette efpecc de mal , & qu'en écrivant fon
nom de la manière que nous avons dit , on en guérit
parfaitement. On voit par là que les Cabaliftes ont
fait du démon un principe tout-puilTant , à la Mani-
chéenne ; 6c ils fe font imaginés qu'en traitant avec
lui , ils étoient maîtres de faire tout ce qu'ils vou-
loient. Quelle illulïon ! Les démons font-ils les maî-
tres de la nature , indépendans de la divinité ; & Dieu
permettroit-il que fon ennemi eût un pouvoir prefque
égal au lien ? Quelle vertu peuvent avoir certaines
paroles préférablemcnt aux autres? Quelque différen-
ce qu on mette dans cet arrangement , l'ordre change-
t-il la nature ? Si elles n'ont aucune vertu naturelle ,
qui peut leur communiquer ce qu'elles n'ont pas ?
Eft-ce Dieu ? eft-ce le démon ? eft-ce l'art humain ?
On ne peut le décider. Cependant on eft entêté de
cette chimère depuis un grand nombre de fiecles.
Carminé lœfà Ceres Jlerilem vanefeit in herbam ;
Deficiunt lie fa carminé fonds aquœ
llicibus glandes, cantataque vitibus uva
Decidit , 6*' nullo porna movente ûuunt.
(Ovid. Amor. lib. III. Eleg. 6. )
II faudrait guérir l'imagination des hommes, puifque
c'ell-Ià où réfide le mal : mais il n'eft pas aile de por-
ter le remède julques-li. Il vaut donc mieux laiffer
tomber cet art dans le mépris , que de lui donner une
force qu'il n'a pas naturellement , en le combattant
oc en le réfutant.
z°. La Cabale contemplative eft de deux cfpeces ;
l'une qu'on appelle littérale, artificielle, ou bien fym-
boliqut ; l'autre qu'on appelle philoj'ophique ou non ar-
tificielle.
La Cabale littérale eft une explication fecrete , ar-
tificielle , 6c fymbolique de l'Ecriture-fainte , que les
473
C A B
Juifs difenî avoir reçue de leurs pères , & qui , en
tranfpofant les lettres, les fyllabes, & les paroles ,
leur eniei»ne à tirer d'un verfet un fens caché , &
différent de celui cju' il prélente d'abord. ( On peut
voir dans Banage les foùdivifions de cette efpecede Ca-
bale & les exemples de tranfpofuions. Hijl. des Juifs ,
chap. iij. )
La Cabale philo fophique contient une Métaphyfique
fublime ck fymbohque fur Dieu, fur les efprits, &
fur le monde , félon la tradition que les Juifs difent
avoir reçue de leurs pères. Elle le divife encore en
deux efpeces , dont l'une s'attache à la connoiflànce
des perfections divines & des intelligences céleftes ,
& s'appelle le Chariot ou Mercava ; parce que les Ca-
baliftes font perfuadés qu'Ezéchiel en a expliqué les
principaux myfteres dans le chariot miraculeux, dont
il parle au commencement de fes révélations ^l'au-
tre qui s'appelle Berefchit ou le Commencement , roule
fur l'étude du monde fublunaire. On lui donne ce
nom à caufe que c'eft le premier mot de la Genefe.
Cette diftinction étoit connue dès le tems de Maïmo-
nides , lequel déclare qu'il veut expliquer tout ce
qu'on peut entendre dans le Berejchit &c le Mercava.
(Maimonides More Nevochim , pag. z. ch. xxxjx. pag.
2.J3-) Il foûtient qu'il ne faut parler du berefchit , que
devant deux peribnnes ; & que fi Platon & les autres
Philofophes ont voilé les fecrets de la nature fous
des exprefïïons métaphoriques , il faut à plus forte
raifon cacher ceux de la religion , qui renferment
des myfteres beaucoup plus profonds.
Il n'efr. pas permis aux maîtres d'expliquer le Mer-
cava devant leurs difciples. (Excerpta Gcmarœ de opè-
re currus , apud Hottinger , pag. 5o , 3j , 89. ) Les
docteurs de Piundebita confulterent un jour un grand
homme qui paffoit par-là , & le conjurèrent de leur
apprendre la fignification de ce chariot. Il demanda
pour condition , qu'ils lui découvrirent ce qu'ils fa-
voient de la création : on y confentit ; mais , après
les avoir entendus , il refufa de parler fur le cha-
riot , & emprunta ces paroles du Cantique des Can-
tiques , le lait & le miel font fous ta langue , c'eft-à-dire
qu'une vérité douce & grande doit demeurer fous
la langue, & n'être jamais publiée. Un jeune étudiant
fe hafarda un jour à lire E~Jchiel, & à vouloir expli-
quer fa vifion : mais un feu dévorant fortit du chaf-
mal qui le confuma : c'eft pourquoi les docteurs dé-
libérèrent, s'il étoit à propos de cacher le livre du
prophète , qui caufoit de fl grands defordres clans la
nation. Un rabbin chaffant l'âne de l'on maître , R. Jo-
chanan , fils de Sauai , lui demanda la permilhon de
parler , & d'expliquer devant lui la vifion du chariot.
Jochanan defcendit aufli-tôt, & s'alfit fous un arbre;
parce qu'il n'eft pas permis d'entendre cette explica-
tion en marchant , monté fur un âne. Le dilciple par-
la, & auffi-tôt le feu defcendit du ciel; tous les ar-
bres voifins entonnèrent ces paroles du pfeaume :
Vous , la terre , loue^ l'Eternel , &c. On voit par-là
que les Cabaliftes attachent de grands myfteres à ce
chariot du prophète. Maïmonides ( More Nevochim ,
part. III. préf. ) dit , qu'on n'a jamais fait de livre
pour expliquer le chariot d'Ezéchiel ; c'eft pourquoi
un grand nombre de myfteres qu'on avoit trouvés
font perdus. Il ajoute qu'on doit le trouver bien hardi
d'en entreprendre l'explication ;puilqu'on punit ceux
qui révèlent les fecrets de la loi , & qu'on récompenfe
ceux qui les cachent: mais il aflure qu'il ne débite
point ce qu'il a appris par la révélation divine ; que les
maîtres ne lui ont pas enfeigné ce qu'il va dire, mais
qu'il l'a puifé dans l'écriture même; tellement qu'il
iemble que ce n'étoit qu'une traduction. Voilà de gran-
des promefles : mais ce grand docteur les remplit mal,
en donnant feulement à ion difciple quelques remar-
ques générales , qui ne développent pas le myftere.
En -effet , on fe divife fur ion explication. Les uns
C A B
difent que le vent qui devoit fouffler du feptentrîon
avec impétuofité -, repréfentoit Nabuchodonofor, le-
quel ruina Jérufalem , & brûla fon temple ; que les
quatre animaux étoient les quatre anges qui prélî-
doient fur les monarchies. Les roues marquoient les
empires qui recevoient leur mouvement , leur pro-
grès & leur décadence du miniftere des anges. Il y
avoit une roue dans l'autre; parce qu'une monar-
chie a détruit l'autre. Les Babyloniens ont été ren-
verfés par les Perfes : ceux-ci par les Grecs , qui ont
été à leur tour vaincus par les Romains. C'eft-là le
fens littéral : mais on y découvre bien d'autres myf-
teres , foit de la nature , foit de la religion. Les quatre
animaux font quatre corps céleftes , animés , intelli-
gens. La roue eft la matière première , & les quatre
roues font les quatre élémens. Ce n'eft-là que 1 ecor-
ce du chariot ; fi vous pénétrez plus avant , vous y
découvrez l'eflence de Dieu , fes attributs & les per-
fections , la nature des anges , & l'état des âmes après
la mort. Enfin Morus , grand cabalifte , y a trouvé le
règne du Meflîe. (Vïjîoms E^echieliticœ ,Jlve mercava
expojitio , ex principiis philojophiœ Pytag. theojophiœ-
que judaicœ ; Cabbala Denud. Tom.l.p. 223.)
Pour donner aux lecteurs une idée de la lubtilité
des Cabaliftes, nous mettrons encore ici l'explication
philofophique , qu'ils donnent du nom de Jehovah.
( Lexicon cabaliflicum . )
» Tous les noms & tous les fur-noms de la divinité
» fortent de celui de Jehovah , comme les branches
» ck les feuilles d'un grand arbre fortent d'un même
» tronc , ck ce nom ineffable eft une fource infinie de
» merveilles ck de myfteres. Ce nom fert de lien à
» toutes les jplendeurs , ou féphirots : il en eft la co-
» lonne ck l'appui. Toutes les lettres qui le compo-
» fent font pleines de myfteres. Le Jod , ou IV, eft
» une de ces chofcs que l'œil n'a jamais vues : elle
» eft cachée à tous les mortels ; on ne peut en com-
» prendre ni l'eflence ni la nature ; il n'eft pas même
» permis d'y méditer. Quand on demande ce que
» c'eft, on répond non , comme fi c'étoit le néant;
» parce qu'elle n'eft pas plus compréhenfible que le
» néant. Il eft permis à l'homme de rouler fes pen-
» fées d'un bout des cieux à l'autre : mais il ne peut
» pas aborder cette lumière inacceflîble , cette exif-
» tence primitive que la lettre Jod renferme. Il faut
» croire fans l'examiner ck fans l'approfondir ; c'eft
» cette lettre qui découlant de la lumière primitive ,
» a donné l'être aux émanations : elle fe laffôit quel-
» quefois en chemin ; mais elle reprenoit de nouvel-
» les forces par le fecours de la lettre h , he , qui fait
» la féconde lettre du nom ineffable. Les autres let-
» très ont aufli des myfteres ; elles ont leurs relations
» particulières aux fphirots. La dernière h découvre
» l'unité d'un Dieu & d'un Créateur ; mais de cette
» unité fortent quatre grands fleuves : les quatre ma-
» jeftés de Dieu , que les Juifs appellent Schetinah.
» Moyfe l'a dit ; car il rapporte qu'un fleuve arrofoit
» le jardin d'Eden, le Paradis terreftre , & qu'enfuite
» il fe divifoit en quatre branches. Le nom entier de
» Jehovah renferme toutes choies. C'eft pourquoi
» celui qui le prononce , met dans fa bouche le monde
» entier , & toutes les créatures qui le compofent.
» De-là vient auflî qu'on ne doit jamais le pronon-
» cer qu'avec beaucoup de précaution. Dieu lui—
» même l'a dit : Tu ne prendras point le nom de r Eternel
» en vain. Il ne s'agit pas-là des fermens qu'on viole,
» & dans lefquels on appelle mai-à-propos Dieu à
» témoin des promefles qu'on fait : mais la loi défends
» de prononcer ce grand nom , excepté dans fon
» temple , lorfque le fouverain facrificateur entre
» dans le lieu très-faint au jour des propitiations. Il
» faut apprendre aux hommes une choie qu'ils igno-
» rent , c'eft qu'un homme qui prononce le nom de
» l'Eternel , ou de Jehovah) fait mouvoir les cieux 2ç
CAB
<> la terre , à proportion qu'il remue fa langue & Tes le-
i> vres. Les anges fentent le mouvement de l'univers ;
» ils en font étonnés , 6c s'entredemandent : pourquoi
» le monde eft ébranlé ? on répond que cela le fait, par-
» ce que N. impie a remué fes lèvres pour prononcer
» le nom ineffable ; que ce nom a remué tous les noms
i> &C les furnomsde Dieu, lefquels ont imprimé leur
» mouvement au ciel , à la terre, & aux créatures. Ce
» nom a une autorité fouveraine fur toutes les créa-
v titres. C'eft lui qui gouverne le monde par fa puif-
» fance ; & voici comment tous les autres noms &c
» furnoms de la divinité fe rangent autour de celui-
» ci , comme les officiers & les ioldats autour de leur
» général. Quelques-uns qui tiennent le premier rang,
y> lont les princes & les porte-étendards : les autres
» font comme les troupes & les bataillons qui com-
» pofént l'armée. Au-dcffbus des LXX. noms , font
» les LXX. princes des nations qui compofent l'uni-
» vers ; lors donc que le nom de Jehovah influe fur
» les noms & furnoms , il fe fait une impreffion de
» ces noms fur les princes qui en dépendent , & des
» princes fur les nations qui vivent fous leur protec-
* tion. Ainfi le nom de Jehovah gouverne tout. On
» repréfente ce nom fous la figure d'un arbre , qui a
» LXX. branches , lesquelles tirent leur fiic & leur
» lève du tronc , & cet arbre eft celui dont parle
» Moyfe, quiétoit planté au milieu du jardin, & dont
» il n'étoit pas permis à Adam de manger ; ou bien ce
» nom eft un roi qui a différens habits , félon les dif-
» férens états où il fe trouve. Lorfque le prince eft en
» paix,il fe revêt d'habits fuperbes , magnifiques, pour
» éblouir les peuples ; lorfqu'il eft en guerre , il s'ar-
« me d'une cuirafte , &c a le cafque en tête : il fe des-
« habille lorfqu'il fe retire dans lbn appartement, fans
« courtifans & fans miniftres. Enfin il découvre fa
» nudité lorfqu'il eft leul avec fa femme.
» Les LXX. nations qui peuplent la terre , ont
» leurs princes dans le ciel , lesquels environnent le
» tribunal de Dieu , comme des officiers prêts à exé-
» cuter les ordres du roi. Ils environnent le nom de
» Jehovah, & lui demandent tous les premiers jours
» de l'an leurs étrennes ; c'eft-à-dire , une portion de
» bénédictions qu'ils doivent répandre fur les peu-
» pies qui leur lont fournis. En effet, ces princes font
» pauvres , & auroient peu de connoiffance , s'ils ne
» la tiroient du nom ineffable , qui les illumine &c
» qui les enrichit. Il leur donne au commencement
» de l'année , ce qu'il a deftiné pour chaque nation ,
» & on ne peut plus rien ajouter ni diminuer à cette
» meliue. Les princes ont beau prier & demander
»> pendant tous les jours de l'année , & les peuples
» prier leurs princes , cela n'eft d'aucun ufage rc'eft-
» là la différence qui eft entre le peuple d'Iliaél &
» les autres nations. Comme le nom de Jehovah eft le
» nom propre des Juifs , ils peuvent obtenir tous les
» jours de nouvelles grâces ; car Salomon dit , que
» les paroles, par le/quelles il j'ait Jupplication à Dieu ,
» feront prefentes devant l'Eternel , J chovah , le jour &
» la nuit ; mais David ajfùre , en parlant des autres na-
» dons , qu elles prieront Dieu , & qu'il ne les fauvera
»> pas ». Que de folies !
L'intention des Cabaliftes eft de nous apprendre
que Dieu conduit immédiatement le peuple des Juifs,
pendant qu'il lailfe les nations infidèles fous la direc-
tion des anges : mais ils pouffent le myftere plus loin.
Il y a une grande différence entre les divcrles na-
tions, dont les unes paroiffent moins agréables à Dieu
& font plus durement traitées que les autres : mais
cela vient de ce que les princes font différemment
placés autour du nom de Jehovah ,• car quoique tous
ces princes reçoivent leur nourriture de la lettre Jod
ou J , qui commence le nom de Jehovah , cependant
la portion eft différente, félon la place qu'on occupe.
Ceux qui tiennent la droite , font des princes doux ,
CAB
479
libéraux : mais les princes de la gauche font durs &
impitoyables. De -là vient auffi ce que dit le pro-
phète , qu'il vaut mieux efpérer en Dieu qu'aux princes,
comme fait la nation Juive , fur qui le nom de Jehovah
agit immédiatement.
D'ailleurs , on voit ici la raifon de la conduite de
Dieu fur le peuple Juif. Jérufalem eft le nombril de
la terre , & cette ville fe trouve au milieu du monde,
Les royaumes , les provinces , les peuples , & les na-
tions l'environnent de toutes parts , parce qu'elle eft
immédiatement fous le nom de Jehovah. C'eft là fort
nom propre , & comme les princes , qui font les chefs
des nations , font rangés autour de ce nom dans lé
ciel , les nations infidèles environnent le peuple Juif
fur la terre.
On explique encore par-là les malheurs du peuple
Juif, & l'état déplorable où il fe trouve ; car Dieu a
donné quatre capitaines aux LXX. princes, lefquels
veillent continuellement fur les péchés des Juifs, afin
de profiter de leur corruption , & de s'enrichir à leurs
dépens. En effet lorfqu'ils voyent que le peuple com-
met de grands péchés, ils fe mettent entre Dieu &
la nation , & détournent les canaux qui fortoient dit
nom de Jehovah , par lefquels la bénédiction couloit
fur Ifrael , & les font pencher du côté des nations ,
qui s'en enrichiffent & s'en engraiffent , & c'eft ce
que Salomon a fi bien expliqué lorfqu'il dit : La terre
tremble pour l'efclave qui règne , & lejbt qui fe remplit
de viande : l'efclave qui règne , ce font les princes ; &
le fot qui fe remplit de viande, ce font les nations
que ces princes gouvernent , &c.
Au fond , les Cabaliftes nous mènent par un long
détour, pour nous apprendre, i° que c'eft Dieu de
qui découlent tous les biens, & qui dirige toutes cho-
ies : i° que Dieu juge tous les hommes avec une juf-
tice tempérée par la miféricorde : 30 que quand il eft
irrité contre les pécheurs , il s'arme de colère & de
vengeance : 40 que lorfqu'on le fléchit par le repen-
tir, il laifTe agir fa compaffion & fa miféricorde : 50
qu'il préfère le peuple Juif à toutes les autres nations ,
& qu'il leur a donné fa connoiffance : enfin , ils en-
tremêlent ces vérités de quelques erreurs, comme
de prétendre que Dieu laiffe toutes les nations du
monde fous la conduite des anges.
On rapporte aùffi à la Cabale réelle ou non artificielle
l'alphabet altrologiquc & célefte , qu'on attribue aux
Juifs. On ne peut rien avancer de plus pofitif que ce
que dit là-dcffus Poltel : Je pafjerai peut-être pour un
menteur , Jî je dis que j'ai lu au ciel , en caractères Hé-
breux , tout ce qui ejl dans la nature ; cependant Dieu &
fon Fils me font témoins que je ne rnents pas :j 'ajouterai
J'eulement que je ne l'ai là qu'implicitement.
Pic delà Mirandole attribue ce fentiment aux doc-
teurs Juifs ; & comme il avoit fort étudié les Caba-
liftes, dont la feience l'avoit ébloiii, on peut s'ima-
giner qu'il ne le trompoit pas (Picus Mir. in Aflroloo,
lib. VIII. cap. v.). Agrippa foùtient la même chofe ;
( Voyez de occulta Philo'oph. libr. III. capit. xxx. )
& Gatfarcl (Curiofnés inoiiies , cap.xiij.') ajoute à leur
témoignage l'autorité d'un grand nombre de rabbins
célèbres, Maimonidê, Nachman, Aben-Efra, &c
Il fcmble qu'on ne puiffe pas contefter un fait appuyé
fur un li grand nombre de citations.
Pic de la Mirandole avoitmis en problème,^ toutes
chofes étoient écrites & marquées dans le ciel à celui qui
favoity lire. ( Pici Mir. heptaplus , cap. iv. ) Il foûte-
noit même que Moyfe avoit exprimé tous ces effets
des affres par le terme de lumière , parce que c'efl elle
qui traîne &: qui porte toutes les influences des cieuv
fur la terre. Mais il changea de fentiment, & remar-
qua que non-feulement ces caractères , vantés par les
doefeurs Hébreux, étoient chimériques ; mais que les
fignes mêmes n'avoient pas la figure des noms qu'on
leur donne ; que la fphere d'Aratus éttnt tres-diffe-
480
CAB
rente de celle des Chaldéens , qui confondant la ba-
lance avec le (coçpion, ne comptent qu'onze lignes
du zodiaque. Aratus même , qui avoit imaginé ces
noms , étoit, au jugement des anciens , très-ignorant
en Aftrologie.
Enfin , il faut être vifionnaire pour trouver des let-
tres dans le ciel , Se y lire, comme Poftel prétendait
l'avoir fait. Gaffarel , quoique engagé dans l'Eglile
par les places , n'étoit pas plus raisonnable ; s'il n'a-
voit pas prédit la chute de l'empire Ottoman, du
moins il la croyait , Si prouvoit la folidité de cette
fcience par un grand fatras de littérature. Cependant
il eut la honte de furvivre à fa prédiclion : c'eft le
fort ordinaire de ceux qui ne prennent pas un affez
long terme pour l'accompliffement de leurs prophé-
ties. Ils devroient être affez fages, pour ne haiarder
pas un coup qui anéantit leur gloire, & qui les con-
vainc d'avoir été vilionnaires : mais ces altrologues
font trop entêtés de leur fcience & de leurs principes,
pour écouter la raifon &c les confeils que la prudence
leur dicte.
Examinons maintenant quels font les fondemens
de la Cabale philojbphique.
Principes & fondemens de la Cabale philofophique .
Henri Morus & Van-Helmont (Knorrius , Cabala de-
nud. tom. /.) font les deux favans qui ont les premiers
débrouillé le cahos de la Philofophie cabaliflique. Les
efforts qu'ils ont faits tous les deux pour porter la lu-
mière dans un fyftéme où on avoit comme affe&é de
répandre tant d'obfcurité , feraient plus louables Se
plus utiles, s'ils a'euffent point attribué aux Cabalil-
tes des fentimens qu'ils n'ont jamais eus : l'expolition
qu'ils ont donnée des principes de la Cabale , a été
examinée par des favans diltingués ; qui ne l'ont pas
trouvée conforme à la vérité (Cil. Jï'achterus , Spino-
Jîfm. in Judaifm. detecl. p. 2.). Pour éviter de tomber
dans le même défaut , nous puiferons ce que nous
avons à dire fur ce fujet , dans les auteurs anciens &
modernes qui paffent pour avoir traité cette matière
avec le plus d'ordre & de clarté. Parmi les modernes
on doit diitinguer R. Iizchak Loriia , & R. Abraham-
Cohen Irira. Le premier eft auteur du livre Drufchim,
qui contient une introduction métaphyfique à la Ca-
bale ; & le fécond , du livre Schaar hajeamaim , c'eft-
à-dire , Porte des deux , qui renferme un traite des dog-
mes cabalijîiques , écrit avec beaucoup de clarté ck de
méthode. Voici donc les principes qui lervent de baie
à la Philofophie chbalijiique.
Pr E M I ER Pr I N.C I P E . De rien il ne Je fait rien , c'eft-
à-dire qu'aucune choie ne peut être tirée du néant.
Voilà le pivot fur lequel roule toute la Cabale philo-
fophique, Se tout le fyftéme des émanations, félon le-
quel il eft néceffaire que toutes choies émanent de
Feffence divine, parce qu'il eft impoffible qu'aucune
ne choie de non exiftente devienne exift ente. Ce prin-
cipe eft fuppolé dans tout le livre d' 'Irira. Dieu , dit-
il , {DiJJert. IV^. cap.j.} n a pas feulement produit tous
les êtres exifans, & tout ce que ces êtres renferment , mais
il les a produits de la manière la plus parfaite , en lesfai-
Jant finir de fin propre fonds par voie d 'émanation , &
non pas en les créant.
• Ce n'eft pas que le terme de création fût inconnu
chez les Cabaliftes : mais ils lui donnaient un fens
bien différent de celui qu'il a chez les Chrétiens, par-
mi lefquels il lignifie l'action par laquelle Dieu tire lis
êtres du néant; au lieu que chez les premiers il figni-
fioit une êmiffion , une expanfion de la divine lumière ,
faite dans le tems , pour donner Ccxijïcnce aux mondes.
C'eft ce qu'on verra clairement dans le paffacre fui-
vant de Lonia (Tr. 1. Drufchim , cap./.f L'cxijLnce
delà création , dit -il, dépend du tems ou a commencé
V expanfion 6* r êmiffion de ces lumières , & de ces mon-
des dont nous venons de parler ; car puij qu'il falloit que
i expanfion de ds lumières Je fit dans un certain ordre ,
CAB
il n'étoit pas poffible que ce monde exifldl ou plutôt ou
plus tard. Chaque monde a été créé après le monde qui lui
était Jùpérieur, & tous les mondes ont été créés en différens
tems , & les uns après les autres , jufquà ce qu enfin le
rang de celui-ci arrivât , Sec. On peut lire beaucoup
de chofes femblables dans le Lexicon cabalijlique.
On peut bien juger que les Cabaliftes n'ont point
emprunté ce principe de l'églile Judaïque ; il eft cer-
tain qu'ils l'ont tiré de la philofophie des Gentils,
Ceux-ci regardoient comme une contradiction évi-
dente , de dire qu'une choie exifte & quelle a itê faite
de rien, comme c'en eft une de loûtenir quune chojï
ejl & nef pas. Cette difficulté qui le prélente allez
louvent à la raifon , avoit déjà choqué les Philofo-
phes. Epicure l'avoit pouffée contre Heraclite Se les
Stoïciens. Comme cet axiome eft véritable dans un
certain fens , on n'a pas voulu fe donner la peine de
développer ce qu'il a de faux. Accoutumés que
nous fommes à nous laiffer frapper par des objets
icnlibles & matériels , qui s'engendrent Se qui fe pro-
duilent l'un l'autre , on ne peut fe perluader qu'avec
peine, que la choie fe loit faite autrement , Se on fait
préexifter la matière fur laquelle Dieu a travaille ;
c'eft ainli que Plutarque comparoit Dieu à un char-
pentier , qui bâtiffoit un palais des matériaux qu'il
avoit aftemblés, Se à un tailleur qui fajfoit un habit
d'une étoffe qui exiftoit déjà. Voye^ Chaos.
On avoue aux Cabaliftes, qu'il eft vrai que rien ne
peut être fait de rien , Se qu'il y a , comme ils dilent ,
une oppolition formelle & une diftance infinie entre
le néant & l'être , s'ils entendent par-là ces trois cho-
fes. i°. Que le néant & l'être fub/ijlent en même tems ;
en effet , cela implique contradiction auffi évidem-
ment que de dire qu'un homme eft aveugle & qu'il
voit : mais comme il n'eft pas impoffible qu'un aveu-
gle ceffe de l'être , & voye les objets qui lui étoient
auparavant cachés , il n'eft pas impoffible auffi que
ce qui n'exiftoit pas acquière l'exiftence & devienne
un être. 20. Il eft vrai que le néant ne peut concourir
à la production de l'être ; il femblc que les Cabaliftes
regardent le néant comme un fujet fur lequel Dieu
travaille, à-peu-près comme la boue dont Dieu fe
fervit pour créer l'homme; & comme ce fujet n'e-
xifte point, puiique c'eft le néant , les Cabaliftes ont
raifon de dire que Dieu n'a pu tirer rien du néant.
Il feroit ridicule de dire que Dieu tire la lumière des
ténèbres , fi on entend par-là que les ténèbres pro-
duifent la lumière : mais rien n'empêche que le jour
ne fuccede à la nuit , & qu'une puilfance infinie don-
ne l'être à ce qui ne l'avoit pas auparavant. Le néant
n'a été ni le fujet, ni la matière, nil'inftrument, ni
la caufe des êtres que Dieu a produits. Il lemble que
cette remarque eft inutile, parce que perfonne ne re-
garde le néant comme un fond fur lequel Dieu ait tra-
vaillé, ou qui ait coopéré avec lui. Cependant c'eft.
en ce iens que Spinola , qui avoit pris ce principe des
Cabaliftes , combat la création tirée du néant : il de-
mande avec infulte ,fi on conçoit que la vie puiffe finir
de la mort : dire cela , ce feroit regarder les privations com-
me les caujes d'une infinité d'ejfetsj c'ejl la même chofe que
fi on difoit , le néant & la privation de r être font la caufi
de l'être. Spinofa & les maîtres ont raifon; la priva-
tion d'une chofe n'en eft point la caufe. Ce ne font
ni les ténèbres qui produifent la lumière , ni la mort
qui enfante la vie. Dieu ne commande point au néant
comme à un elclave qui eft obligé d'agir & de plier
fous les ordres , comme il ne commande point aux
ténèbres ni à la mort , d'enfanter la lumière ou la
vie. Le néant eft toujours néant, la mort & les ténè-
bres ne font que des privations incapables d'agir :
mais comme Dieu a pu produire la lumière qui diffi-
pe les ténèbres , & relfufciter un corps , le même Dieu
a pu auffi créer des êtres qui n'exiftoient point aupa-
ravant , tk, anéantir le néant , fi on peut parler ainli ,
en
C A B
en produifant un grand nombre de créatures. Com-
me la mort ne concourt point à la réiurrecfion , tk.
que les ténèbres ne font point le Sujet fur lecjuel Dieu
travaille pour en tirer la lumière , le néant aufîi ne
coopère point avec Dieu , & n'eft point la caufe de
l'être , ni la matière lur laquelle Dieu a travaillé
pour faire le monde. On combat donc ici un phan-
tôme , 6c on change le fentiment des Chrétiens or-
thodoxes, afin de le tourner plus aifémcnt en ridi-
cule. 30. Enfin il eft vrai que rien ne fi fiait de rien ou
par rien y c'eft-à-dire fans une caufe qui préexifte : il
feroit , par exemple , impoffible que le monde fe fût
fait de lui-même ; il falloit une caule fouverainement
piaffante pour le produire.
L'axiome rien ne fe fait de rien , eft donc vrai dans
ces trois fens.
II. PRINCIPE. Il n'y a donc point dej'ubfiance qui
■ait été tirée du néant.
III. PRINCIPE. Donc la matière même n'apû fiortir
■du néant.
IV. PRINCIPE. La matière , à caufe de fa nature
yile , ne doit point fin origine à elle-même ; la raifon
qu'en donne Irira, eft que la matière n'a point de for-
me , & qu'elle n'eft éloignée du néant que d'un degré.
V. PRINCIPE. De-là il s'enfuit que dans la nature ,
il ny a point de matière proprement dite.
La railon philofophique que les Cabaliftes don-
nent de ce principe , eft que l'intention de la caufe effi-
ciente efi de faire un ouvrage qui lui J'oit femblable ; or la
caufe première & efficiente étant unejubjlancejpirituelle,
il convenoit que fies productions fujjent auffi des fit /fiances
Jpirituelles , parce qu'elles rcffemblent plus, à leur caufe ,
que les fubfiances corporelles. Les Cabaliftes infiftent
beaucoup fur cette raifon ; fuivant eux il vaudrait
autant dire que Dieu a produit les ténèbres , le péché ,
& la mort , que de foûtenir que Dieu a créé des fubf-
tances fenfibles & matérielles , différentes de fa na-
ture & de Ion effence : car la matière n'eft qu'une
privation delà spiritualité , comme les ténèbres font
une privation de la lumière, comme le péché eft une
privation de la fainteté, & la mort une privation
de la vie.
VI. Principe. De-là il s'enfuit que tout ce qui efi ,
efi efiprit.
VII. PRINCIPE. Cet efiprit efi incréé , éternel , intel-
lectuel , fenfibie , ayant enfioi le principe du mouvement,
immenfe , indépendant , 6* nêceffairement exi/lant.
VIII. PRINCIPE. Par conjéqucnt cet efiprit efi CEn-
Joph ou le Dieu infini.
IX. PRINCIPE. // efl donc néceffaire que tout ce qui
exijle J'oit émané de cet efiprit infini. Les Cabaliftes n'ad-
mettant point la création telle que les Chrétiens l'ad-
mettent, il ne leur reftoit que deux partis à prendre :
l'un de foûtenir que le monde avoit été formé d'une
matière préexiitante ; l'autre de dire qu'il étoit forti
de Dieu même par voie d'émanation. Ils n'ont ofé
embrafferle premier fentiment, parce qu'ils auraient
crû admettre hors de Dieu une caufe matérielle , ce
qui étoit contraire à leurs dogmes ; ils ont donc été
forcés d'admettre les émanations , dogme qu'ils ont
reçu des Orientaux qui l'a voient eux-mêmes reçu de
Zoroaftrc, comme on peut le voir dans les livres ca-
balistiques.
X. PRINCIPE. Plus les chofis qui émanent font pro-
ches de leur fource , plus elles font grandes & divines ; &
plus elles en font éloignées , plus leur nature fe dégrade
& s'avilit.
XI. PRINCIPE. Le monde efi difingué de Dieu com-
me un effet de fa caufe , non pas à la vérité comme un effet
paffager , mais comme un effet permanent. Le monde étant
émané de Dieu , doit donc être regardé comme Dieu
>. ne , qui étant caché & incomprêhenfiblt dans f on effen-
ce , a voulu Je manififler ? & fe rendre yijlblc par fis éma-
nations.
Tome II,
C A B
481
Voilà les fondemens fur Iefquels eft appuyé tout
l'édifice de la Cabale ; il nous refte encore à faire
voir comment les Cabaliftes tirent de ces principes
quelques autres dogmes de leur fyftème , tels que
ceux d'Adam Kadmon, des dix féphirots, des qua-
tre mondes , des anges , &c.
Explication des Séphirots ou des Splendeurs. Les fé-
phirots font la partie la plusfecrete de la Cabale. On
ne parvient à la connoiffance de ces émanations &
fplendeurs divines , qu'avec beaucoup d'étude &c de
travail : nous ne nous piquons pas de pénétrer jus-
qu'au fond de ces myfteres ; la diverfité des inter-
prétations qu'on leur donne, eftprefque infinie.
Lolius ( Pomum Ariflot. difjcrt. II. de Cabb. cap*
ij. ) remarque que les interprètes y trouvent toutes
les feiences dont ils font profeffion : les Logiciens y
découvrent leurs dix prédicamens : les Aftronomes
dix fpheres : les Aftrologues des influences différentes .-
les Phyficiens s'imaginent qu'on y a caché les prin-
cipes de toutes choies : les Arithméticiens y voyent
les nombres , & particulièrement celui de dix , le-
quel renferme des myfteres infinis.
Il y a dix Jéphirot s; on les repréfente quelquefois
fous la figure d'un arbre, parce que les uns font
comme la racine & le tronc , & les autres comme au-
tant de branches qui en fortent. On les range fou-
vent en dix cercles dirîérens , parce qu'ils font en-
fermés des unes dans les autres : ces dix féphirots
font la couronne , la Jagefie , l'intelligence , la J'orce ou
lajêvêrité , la mifiricorde ou la magnificence , la beauté \
la victoire ou V éternité , la gloire , le fondement , & le
royaume.
Quelques-uns foûtiennent que les fplendeurs ( c'eft
le nom que nous leur donnerons dans la fuite) ne font
que des nombres: mais, félon la plufpart, ce font
les perfections & les attributs de la divinité. 11 ne
faut pas.s'imaginer que l'effence divine foit compo-
fée de ces perfections , comme d'autant de parties dif-
férentes; ce feroit une erreur: l'efiénce de Dieu eft
fimple ; mais afin de fe former une idée plus nette de
la manière dont cette effence agit , il faut diftinguer
fes attributs , confidérer fa juftice , fa miféricorde ,
fa fageffe. Il femble que les Cabaliftes n'ayent pas
d'autre vue , que de conduire leurs difciples à la con-
noiffance des perfections divines, & de leur faire
voir que c'eft de l'affemblage de ces perfections que
dépend la création & la conduite de l'univers ; qu'el-
les ont une liàifon inféparable, que l'une tempère
l'autre. C'eft pourquoi ils imaginent des canaux , par
Iefquels les influences d'une lplendeur fe communi-
quent aux autres. « Le monde , difoit Siméon Jochaï-
» des (injeçirak, cum not. Bittangel, pag. 18 â. 6*
» iSG. ) ne pouvoit pas être conduit parla miferi-
» corde feule , &c par la colonne de la grâce : c'eft-
» pourquoi Dieu a été obligé d'y ajouter la colonne
» de la force ou de la iévérité , qui fait le jugement.
» Il étoit encore néceffaire de concilier les deux co-
» lonnes , & de mettre toutes choies dans une pro-
» portion & dans un ordre naturel ; c'eft pourquoi
» on met au milieu la colonne de la beauté , qui ac-
» corde la juif ice avec la miféricorde, & met! ordre
» » fans lequel il eft impoffible que l'univers fublïfte.
» De la miféricorde qui pardonne les péchés , fort
» un canal qui va à la victoire ou à l'éternité » ; par-
ce que c'eft par le moyen de cette vertu qu'on par-
vient au triomphe ou à l'éternité. Enfin les canaux
qui fortent de la miféricorde ce de la force , 6l qui
vont aboutir à la beauté , font chargés d'un grand
nombre d'anges. Il y en a trente-cinq fur le canal
de la miféricorde qui récompenient & qui couron-
nent la vertu des faints, Ci: on en compte un pareil
nombre fur le canal de la J'orce, qui châtient les pé-
cheurs ; & ce nombre de ioixante tk. dix anges , aux-
quels on donne des noms différent , elt tiré du xiy,
Ppp
jjSa
C A
C
chapitre de l'Exode. Il y a là une vérité aflez fen'ùbîe ;
c'eft que la miféricorde cil celle qui récompenie les
fidèles, & que la juiiice punit les impénitens.
Il me iemble que la clé du myrtere confifte en
ceci : les Cabaliftes regardant Dieu "comme une ei*-
fence infinie qui ne peut être pénétrée , & qui ne peut
ie communiquer immédiatement à la créature , ont
imaginé qu'elle ie faifoit connoïtre , & qu'elle agH-
i bit par les perfe&ions qui émanoient de lui , comme
les perfections de Famé & lbn eflence fe manifef-
.tent , &c fe font connoitre par les aefes de raiion Ôc
.<le vertu qu'elle produit , & fans lefquels ces perfec-
tions feroient cachées
Ils appellent ces attributs les habits de Dieu , parce
.qu'il fe rend plus fenfible par leur moyen. Il femble ,
à la vérité , que Dieu fe cache par-là, au lieu de fe
révéler , comme un homme qui s'enveloppe d'un
manteau ne veut pas être vu : mais la différence eft
grande , parce que l'homme eft fini & borné ; au lieu
que l'elïence de la divinité eft imperceptible fans le
-iecoius de quelque opération ; ainfi on ne peut
voir lefoleil , parce que fon éclat nous éblouit ; mais
wn le regarde derrière un nuage -, ou au-travers de
quelque corps diaphane.
Ils difent aufli que c'étoient les inftrumens dont le
•fouverain architecte fe fervoit : mais de peur qu'on
-ne s'y trompe , ils ont ajouté ( Abrahami patriarches
liber Je^irah , c.ip.j.fect. Z.pdgi lj5. ) que ces nom-
bres font fortis de l'efîence de Dieu même , & que fi
on les confidere comme des inftrumens , ce feroit
pourtant une erreur grofiiere , que de croire que
Dieu peut les quitter & les reprendre félon les befoins
tfu'il en a ; comme l'artifan quitte les outils , lorfque
l'ouvrage eft fini , ou qu'il veut fe repofer ; & les re-
prend , lorfqu'il recommence fon travail. Cela nefe
peut ; car les injlramens ne font pas attaches à la main
du Charpentier : mais les nombres , les lumières refplen-
difîantes fartent de l'effence de l'infini , & lui font tou-
jours unies, comme la flamme au charbon. En effet, com-
me le charbon découvre par la flamme fa force & fa
vertu, qui étoit cachée auparavant ; Dieu révèle fa
grandeur & fapuifTance par les lumières refplendif-
iantes dont nous parlons.
Enfin les Cabaliftes difent que ce ne font pas-là
feulement des nombres , comme Morus l'a crû ; mais
des émanations qui fortent de l'effence divine , com-
me les rayons fôrtent du foleil , & comme la chaleur
naît par le feu fans en être féparée. La divinité n'a
fouffert ni trouble , ni douleur , ni diminution , en
leur donnant l'exiftence , comme un flambeau ne
perd pas fa lumière , & ne fouffre aucune violence ,
lorlqu'on s'en fértpour en allumer un autre qui étoit
éteint, ou qui n'a jamais éclairé. Cette comparaifon
n'eft pas tout-à-fait jufte ; car le flambeau qu'on
allume , fublïfte indépendamment de celui qui lui a
communiqué fa lumière ; mais l'intention de ceux
qui l'ont imaginée étoit feulement de prouver que
Dieu ne fouffre aucune altération par l'émanation
de fes perfections, & qu'elles fubiiftcnt toujours dans
fon efténee.
L'enfoph qu'on met au-deflûs de l'arbre féphiroti-
que, ou des fplendeurs divines , eft l'infini. On l'ap- ■*
pelle tantôt ïétre, & tantôt le non-être : c'eft un être,
puiique toutes chofes tirent de lui leur exiilence ;
c'eft le non-être , parce qu'il eft impoffible à l'hom-
me de pénétrer fon effence & fa nature. 11 s'enve-
loppe d'une lumière inaccefîïble ; il eft caché dans
une majefté impénétrable : d'ailleurs il n'y a dans la
nature aucun objet qu'on puifle lui comparer, & qui
le repréfente tel qu'il eft. C'eft en ce fens que Denys
l'Aréopagite a oié dire , que Dieu n'étoit rien , ou
que c'étoit le néant. On fait entendre par-là que
Dieu eft une eflence infinie, qu'on ne peut ni la fon-
der ni la connoïtre ; qu'il poiiedv toutes chofes d'une
manière plus noble & plus parfaite que les créatu-
res , & que c'eft de lui qu'elles tirent toutes leur
exiilence & leurs qualités, par le moyen de fes per-
fections , qui font comme autant de canaux par lef-
quels l'être fouverain communique fes faveurs.
Les trois premières fplendeurs font beaucoup plus
excellentes que les autres. Les Cabaliftes les cifiin-
guent : ils les approchent beaucoup plus prés de l'in-
fini , auquel elles font étroitement unies ; & la plu-
part en font le chariot d'Ezéchiel ou le mercava ,
qu'on ne doit expliquer qu'aux initiés. Les Chrétiens
(Kirch. (Edip. Aigypt. Gymnaf. Hyerog. ciaff.4. §.a.)
profitent de cet avantage , & foùtiennent qu'on a in-
diqué par là les trois perfonnes de la Trinité dans une
feule & même eflence qui eft infinie. Ils fe plaignent
même de l'ignorance & de l'aveuglement des Caba*
liftes modernes , qui regardent ces trois fplendeurs
comme autant d'attributs de la Divinité : mais ces
Cabaliftes font les plus fages. En effet , on a beau ci-
ter les Cabaliftes qui difent , que celui qui efl un a fait
émaner les lumières , qu'il a fait trois ordres d'émana-
tions , & que ces nombres prouvent la tnnité du roi pen-
dant toute t 'éternité j ces expreftions vagues d'ifachof
Béer (Ifachor Béer, fil. Mojïs , Pefahc. lib. irnve Be-
riah. ) lont expliquées un moment après : tout le myf
tere confife dans V émanation de quatre mondes ; l'Arcke-
tipe , l'Angélique , celui des Etoiles , & l'Elémentaire.
Cependant ces quatre mondes n'ont rien de com-
mun avec la Trinité: c'eft ainfi que Siméon Jochaï-
des trouvoit dans le nom de Jehovah le Père , le Fils ,
la Fille , & la Mère ; avec un peu de fubtilité on trou*
veroit le faint-Efprit dans la Fille de la Voix , & la
Mère pourroit être regardée comme l'EfTence divi-
ne, ou l'Eglife Chrétienne. Cependant on voit bien
que ce n'étoit point l'intention de ce Cabalifte : le
Jod , dilbit-il , eft le Père ; Vh , ou la féconde lettre
du nom ineffable , eft la Mère ; Vit eft le Fils ; & la
dernière h eft la Fille : & qu'entend-il par là ? l'Ef-
prit , le Verbe , la voix , & l'ouvrage. On cite Maimo-
nides , qui dit : « que la couronne eft l'efprit origi-
» nal des dieux vivans; que la fagefle eft l'efprit de
» PEfprit ; & que l'intelligence eft l'eau qui coule de
» l'efprit : que s'il y a quelque diftindlion entre les
» effets de la fagefle , de l'intelligence , & de la feien-
» ce , cependant il n'y a aucune différence entr'elles ;
» car la fin eft liée avec le commencement, & le
» commencement avec la fin ». Mais il s'explique
lui-même , en comparant cela au feu ou à la flamme
qui jette au -dehors plufleurs couleurs différentes,
comme autant d'émanations qui ont toutes leur prin-
cipe & leur racine dans le feu. On ne conçoit pas les
perfonnes de la Trinité , comme le bleu , le violet ,
èv le blanc qu'on voit dans la flamme : cependant les
Cabaliftes foùtiennent que les fplendeurs émanent
de la Divinité , comme les couleurs fortent de la
flamme , ou plutôt du feu. Il ne finit donc pas s'ar-
rêter aux éloges que les docleurs font des trois pre-
miers léphirots comme fi c'étoient les perfonnes dé
la Trinité , d'autant plus qu'ils unifient tous les fé-
phirots à l'effence de Dieu ; 6c dès le moment qu'on
regarde les trois piemiers comme autant de perfon-
nes de l'Eifence divine , il faudra les multiplier juf-
qu'à dix , puifqu'ils fubfiftent tous de la même ma-
nière, quoiqu'il y ait quelque différence d'ordre.
La couronne eft la première des gra.ndesjplcn deurs ;
parce que comme la couronne eft le dernier habit qui
couvre l'homme, & qu'on porte fur la tête, cette
fplendiur eft la plus proche de l'infini , & le chef du
monde Azileiitique : elle eft pleine de mille petits ca-
naux , d'où coulent les effets de la bonté & de l'amour
de Dieu.Toutes les troupes des Anges attendent avec
impatience qu'une portion de ccxtefplendeur delccn-
de fur eux, parce que c'eft elle qui leur fournit les
alimens £c la nourriture. On l'appelle le non - are ,
C A B
parce qu'elle fe retire dans lefcin caché de Dieu, dans
un abyfint inacceffible de lumière.
On donne quelquefois le titre de couronne au royau-
me , qui n'eft que la dernière des (plendeurs : mais c'eft
dai.s un iens impropre , parce qu'il eft la couronne du
temple , de la foi , & du peuple d'If ael.
La ieconde émanation eft hfagejfe , & la troifieme
eft Y intelligence : mais nous ferions trop longs li nous
voulions expliquer ces trois grandes fplendeurs , pour
deicendre enfuitc aux fept autres. Il vaut mieux re-
marquer la liaifon qui eft entre ces.fplendeurs , & celle
qu'elles ont avec les créatures qui compolent l'uni-
vers. A chaque fephirot on attache un nom de Dieu ,
im des principaux anges , une des planètes , un mem-
bre du corps humain , un des commandemens de la
loi ; & de là dépend l'harmonie de l'univers. D'ail-
leurs une de ces chofes fait penler à l'autre , & lert
de degré pour parvenir au plus haut degré de la con-
noilîance &c de la Théologie contemplative. Enfin
on apprend par là l'influence que lesjplendcurs ont
fur les anges , fur les planètes , fur les aftres , fur les
parties du corps humain , &c.
Il y a donc une fubordination entre toutes les cho-
fes dont cet univers eft compoié , & les unes ont une
grande influence fur les autres ; car les /plendeurs in-
fluent fur les anges , les anges fur les planètes , & les
planètes lur l'homme : c'eft pourquoi on dit que Moy-
fe, qui avoit étudié l' Aftronomie en Egypte, eut beau-
coup d'égard aux aities dans la loi. Il ordonna qu'on
fanûilîât le jour du repos , à caule de Saturne qui pré-
fide lur ce jour là , & dont les malignes influences fe-
roient dangereuies , fi on n'en détournoit pas les ef-
fets par la dévotion & par la prière. Il mit l'ordre
d'honorer fon pere 6c fa mère fouslaiphere de Jupi-
ter, qui étant plus doux , eft capable d'inlpirer des
fentimens de relpecl & de fofimifîion. Je ne fai pour-
quoi Moyfe qui étoit li habile , mit la defenfe du
meurtre fous la conltellation de Mars ; car il eft plus
propre à les produire qu'à en arrêter le cours. Ce font
là les excvs & les vifions de la Cabale. Paffons à d'au-
tres.
En fuppofant la liaifon des /plendeurs ou perfec-
tions divines , & leur fubordination , il a fallu ima-
giner des canaux Se des conduits , par lefquels les in-
fluences de chaque perfc£t:on le communiquafîent à
l'autre: autrement l'harmonie aliroit été renverlée;
& chaque Jplendeur a giflant dans la fpherc particu-
lière, les mondes des anges , des altres , èv des hom-
mes terreftres, n'en auroient tiré aucun avantage.
C'eft pourquoi les Cabaliftes ne manquent pas de
dire qu'il y a vingt-deux canaux , conformément au
nombre des lettres de l'alphabet Hébreu , & ces vingt-
deux canaux fervent à la communication de tous
les léphirots: car ils portent les influences de l'une à
l'autre.
Il fort trois canaux de la couronne , dont l'un va fe
rendre à la fagcjje , le fécond à Y intelligence , & le
troifieme à la beauté. De l.i J-ig\j'e fort un quatrième
canal qui va fe jetter dans l'intelligence : le cinquiè-
me pâlie de la même fource à la beauté , & le lixicme
à la magnificence.
Il faut remarquer que ces lignes de communicat'on
ne remontent jamais , mais elles defeendent toujours.
Tel clt le cours des eaux qui Ont leur fource lur les
montagnes, 6V qui viennent fe répandre dans les lieux
plus bas. En effet , quoique toutes \s.sfpltndturs foient
unies à FEfTence divine , cependant la première a de
la fupériorité fur la féconde ; du moins c'eft de la pre-
mière que fort l.i vertu &i la force , qui fait agir la fé-
conde; & le royaume, qui eft le dernier, tire toute
fa vigueur des /plendeurs qui font au-defliis de lui.
Cette fubordination des attributs de Dieu pourroit
paroître erronée : mais les Cabaliftes dilent que cela
ne le tait que félon notre manière de concevoir ; 6c
Tome II,
C A B
&
qu'on range ainfi ces /plendeurs , afin de lésdiftinsiier
& de faciliter la connoifîance exacte & pure de leurs
opérations.
C'eft dans la même vue qu'ils ont imaginé trente-
deux chemins &c cinquante portes qui conduilént les
hommes à la connoiffance de ce qu'il y a de plus f e-
cret & de plus caché. Tous les chemins fbrtent de la
fageJJc > parce que l'Ecriture dit, tu as créé le monde
avec Jagejje. Toutes ces routes font tracées dans un li-
vre qu'on attribue au patriarche Abraham ;& un rab-
bin célèbre du même nom y a ajouté un commentai-
re, afin d'y conduire plus iùrement les hommes.
Les Chrétiens fe divifênt fur l'explication desfé-
phirots auffi-bien que les Juifs ; & il n'y rien qui puilîe
mieux nous convaincre de l'incertitude de la Cabale ,
que les différentes conje&ures qu'ils ont faites : car
ils y trouvent la Trinité 6c les autres principes de la
religion Chrétienne. (Morus, epijl. in Cab. denud.
tom. II. Kircher, (Sdip. uHgypt. Gymnaf. &C. cap. ix;
tom. H. ) Mais Y\ l'on fe donne la peine d'examiner
les chofes , on trouvera que fi les Cabaliftes Ont voulu
dire quelque choie , ils ont eu deffein de parler des
attributs de Dieu. Faut -il, parce qu'ils cUltmguent
trois de ces attributs comme plus excellens , con-
clurre que ce font trois perfonnes ? Qu'on life leurs
dofteurs fans préjugé , on y verra qu'ils comparent
les Jéphirots à dix verres peints de di.c couleurs diffé-
rentes. La lumière du ioleil qui frappe tous ces ver-
res eft la même , quoiqu'elle rafle voir des couleurs
différentes : c'eit ainfi que la lumière ou l'Eifence di-
vine elt la même , quoiqu'elle fe diverfifie dans les
fplendeurs , tk. qu'elle y verfe des influences tres-dif-
iérentes. On voit par cette comparaiion que ïcsjc-
phirots ne font point regardés par les Cabaliftes com-
me les perfonnes de la Trinité que les Cfiretiens ado-
rent. Ajoutons un autre exemple qui met la même
choie dans un plus grand jour, quoiqu'on s'en ferve
quelquelois pour prouver le contraire.
Rabbi Schabté compare lesjplendeurs à un arbre ,
dans lequel on diftingue la racine, le germe, & les
branches. « Ces trois choies forment l'arbre; &c la
» feule différence qu'on y remarque , elt que la ra-
» cine elt cachée pendant que le tronc & les bran-
» ches le produilent au -dehors. Le germe porte la
» vertu dans les branches qui fructifient : mais au
» fond , le germe 6z les branches tiennent à la raci-
» ne , & forment enfemble un Ieul &z même arbre.
» Dilons la même choie àeb fplendeurs. La couronne
» eft la racine cachée, impénétrable ; les trois ci-
» prits , ou léphirots ^ ou fplendeurs , font le germe de
» l'arbre; èv les lept autres, lont les branches unie;
» au germe fans pouvoir en être feparées: car celui
» qui les féparc, fait comme un homme qui arrache*
» roit les branches de l'arbre , qui couperait le tronc
» & lui ôteroit la nourriture en le féparant de fa ra-
» cine. La couronne elt la racine qui unit toutes les
» fplendeurs ». ( Schabté in Je;':ra'i. )
Comment trouver là la Trinité? Si on l'y dé-
couvre , il faut que ce l'oit dans ces trois chofes qui
compolent l'arbre ; la racine, le germe , & les bran-
ches. Le Pere lera la racine, le germe fera le Fils,
& les branches le laiht - Efprit qui fructifie. Mais"
alors les trois premiers. Jplendeurs cefient d'être les
perfonnes de la Trinité; car ce font elles qui for-
ment le tronc & le germe del'aibre: &z que fera
t-on des branches & de la racine , li l'on veut que ce
tronc Ieul, c'elt-à-dire les trois premières fph
foient la Trinité? D'ailleurs ne voit-on pas que com-
me les d'w JpLr.-Jeurs ne font qu'un arbre , il faudrait
conclurre qu'il y a dix peifonnes dans la Trinité, li
on vouloit adopter les principes des Cabaliftes ?
Création du monde par voie d'émanation. Les Caba-
liftes ont un autre fyltème, qui n'eft pas plus intel-
ligible que le précédent. Ils loùtiennent qu'il \
Ppp ij
484
CAB
fieurs mondes, &que ces mondes font f'ortis de Dieu
par voie d'émanation. Ils font compofés de lumière.
Cette lumière divine étoit fort fubtile dans fa four-
ce : mais elle s'eft épaifîie peu -à -peu à proportion
qu'elle s'eft éloignée de l'Être fouverain , auquel elle
étoit originairement attachée.
Dieu voulant donc créer l'univers , il y trouva
deux grandes difficultés. Premièrement tout étoit
plein , car la lumière éclatante & fubtile ( Introduit,
adlib. Zohar.ftci. I. Cab. denud. tom. III. ) qui éma-
noit de l'Effence divine , rempliiîbit toutes chofes : il
falloit donc former un vuide pour placer les émana-
tions et l'univers. Pour cet effet , Dieu preffa un peu
la lumière qui l'environnoit , & cette lumière com-
primée fe retira aux côtés , & laiffa au milieu un
grand cercle vuide , dans lequel on pouvoit lituer
le monde. On explique cela par la comparaifon d'un
homme qui fe trouvant chargé d'une robe longue la
retrouffe. On allègue l'exemple de Dieu qui changea
de figure , ou la manière de fa prélence fur le mont
Sinaï , & dans le buiffon ardent. Mais toutes ces com-
paraifons n'empêchent pas qu'il ne refte une idée de
fubftance fenfible en Dieu. Il n'y a que les corps qui
puiffent remplir un lieu , & qui puiffent être com-
primés.
On ajoute que ce frit pour l'amour des juftes &
du peuple laint , que Dieu fit ce reflerrement de lu-
mière. Ils n'étoient pas encore nés , mais Dieu ne
lailïbit pas de les avoir dans fon idée. Cette idée le
réjoùiffoit ; & ils comparent la joie de Dieu qui pro-
duifit les points, & enfuite les lettres de l'alphabet,
& enlîn les récompenfes & les peines , au mouve-
ment d'un homme qui rit de joie.
La lumière qui émanoit de FEffence divine , fai-
foit une autre difficulté , car elle étoit trop abondante
& trop fubtile pour former les créatures. Afin de pré-
venir ce mal , Dieu tira une longue ligne , qui def-
cendant dans les parties baffes , tantôt d'une manière
droite, & tantôt en fe recourbant , pour faire dix cer-
cles ou dix féphirots , fervit de canal à la lumière. Elle
fe communiqua d'une manière moins abondante ; &C
s'épaiffiffant à proportion qu'elle s eloignoit de fon
centre , & defeendant par le canal , elle devenoit
plus propre à former les elprits & les corps.
La première émanation , plus parfaite que les au-
tres , s'appelle Adam Kadmon , le premier de tout ce qui
a été créé au commencement. Son nom eff tiré de la Ge-
nefe , où Dieu dit ifaifons l'homme ou Adam à notre
image ; & on lui a donné ce nom , parce que comme
l'Adam terreftre eft un petit monde , celui du ciel eft
un grand monde ; comme l'homme tient le premier
rang fur la terre , l'Adam célefte l'occupe dans le
ciel ; comme c'eft pour l'homme que Dieu a créé
toutes chofes , V Eternel a pojfedé f autre des le commen-
cement , avant qu'il fit aucune de fes œuvres , & dés les
rems anciens. ( Prov. ch. viij. verf. ZZ. ) Enfin , au lieu
qu'en commençant par l'homme (Abraham Cohen Iri-
rœ philofoph. Cab. dijfert. FI. cap. vij .~) on remonte par
degrés aux intelligences fupérieures jufqu'à Dieu ;
au contraire , en commençant par l'Adam célefte qui
eft fouverainement élevé , on defeend jufqu'aux créa-
tures les plus viles & les plus baffes. On le repréfente
comme nn homme qui a un crâne , un cerveau , des
yeux , & des mains ; &: chacune de fes parties ren-
ferme des myfteres profonds. La fagefie (Apparatus
in lib. Zohar. figura prima , pag. igj>. ) cil: le crâne du
premier Adam , & s'étend jufqu'aux oreilles ; Vintelli-
gence eft fon oreille droite ; la prudence fait fon oreille
gauche ; fes pies ne s'allongent pas au-delà d'un cer-
tain monde inférieur , de peur que s'ils s'étendoient
jufqu'au dernier ils ne touchaffent à l'infini, & qu'il ne
devint lui-même infini. Sur fon diaphragme eftunamas
de lumière qu'il y a condenfée : mais une autre par-
tie s'eft échappée par les yeux St par les oreilles. La
CAB
ligne qui a fervi de canal à la lumière , lui a commu-
niqué avec l'intelligence & la bonté , le pouvoir de
produire d'autres mondes. Le monde de cet Adam
premier eft plus grand que tous les autres ; ils reçoi-
vent de lui leurs influences , & en dépendent. Les
cercles qui forment fa couronne , marquent fa vie &
fa durée , que Plotin tk. les Egyptiens ont repréfentée
par un cercle , ou par une couronne.
Comme tout ce qu'on dit de cet Adam premier
femble convenir à une perfonne , quelques Chrétiens
interprétant la Cabale, ont cru qu'on défignoit parla
Jefus-Chrift , la féconde perfonne de la Trinité. Ils fe
font trompés ; car les Cabaliftes ( Abraham Cohen.
Irirœ philofoph. Cab. dijfert. IV. cap. vij. ) donnenf à
cet Adam un commencement : ils ont même placé un
efpace entre lui & l'infini , pour marquer qu'il étoit
d'une effence différente , & fort éloigné de la perfec-
tion de la caufe qui l'avoit produit ; & malgré l'em-
pire qu'on lui attribue pour la production des autres
mondes , il ne laiffe pas d'approcher du néant , &
d'être compofé de qualités contraires : d'ailleurs les
Juifs qui donnent fouvent le titre de fils à leur Seir-
Anpin , ne l'attribuent jamais à Adam Kadmon qu'ils
élèvent beaucoup au-defîus de lui.
On diftingue quatre fortes de mondes , & quatre
manières de création.
i°. Il y a une production par voie d'émanation ;
& ce font les féphirots & les grandes lumières qui
ont émané de Dieu , Se qui compofent le monde
A^ileutique : c'eft le nom qu'on lui donne. Ces lu-
mières font forties de l'Etre infini , comme la chaleur
fort du feu , la lumière du foleil , & l'effet de la caufe
qui le produit. Ces émanations font toujours proche
de Dieu , où elles confervent une lumière plus vive
& plus fubtile ; car la lumière fe condenfe & s'épaiffit
à proportion qu'on s'éloigne de l'Être infini.
Le fécond monde s'appelle Briathique , d'un terme
qui fignifie dehors , ou détacher. On entend par là le
monde ou la création des âmes qui ont été détachées
de la première caufe , qui en font plus éloignées que
les féphirots , & qui par conféquent font plus épaif-
fes & plus ténébreufes.On appelle ce monde le throne
de la gloire , & les féphirots du monde fupérieur y
verfent leurs influences.
Le troifieme degré de la création regarde les an-
ges. On affûre ( Philof. Cabb. dijf. I. cap. xvij . ) qu'ils
ont été tirés du néant dans le deffein d'être placés
dans des corps céleftes , d'air ou de feu ; c'eft pour-
quoi on appelle leur formation Jcjlrah , parce que
ces efprits purs ont été formés pour une fubftance qui
leur étoit deftinée. Il y avoit dix troupes de ces an-
ges. A leur tête étoit un chef nommé Métraton , éle-
vé au-deffus d'eux , contemplant inceffamment la
face de Dieu , leur diflribuant tous les jours le pain de
leur ordinaire. Ils tirent de lui leur vie & leurs autres
avantages ; c'eft pourquoi tout l'ordre angélique a
pris fon nom.
Enfin Dieu créa les corps qui ne fubfiftent point
par eux-mêmes comme les âmes , ni dans un autre
fujet , comme les anges. Ils font compofés d'une ma-
tière divifible , changeante ; ils peuvent fe détruire ,
& c'eft cette création du monde qu'ils appellent
Afiah. Voilà l'idée des Cabaliftes , dont le féns eft
que Dieu a formé différemment les âmes , les anges ,
& les corps ; car pour les émanations , ou le monde
A^ilcutique , ce font les attributs de la divinité qu'ils
habillent en perfonnes créées , ou des lumières qui
découlent de l'Etre infini.
Quelques bifarres que foient toutes ces imagina-
tions , on a tâché de juftifier les viiionnaires qui les
ont enfantées , & ce font les Chrétiens qui fe char-
gent fouvent de ce travail pour les Juifs. Mais il faut
avouer qu'ils ne font pas toujours les meilleurs in-
terprètes de la Cabale, Ils penfertf: toujours à la Tri-
C A 13
• ... des perfonnes divines ; & quand il n'y auroit
que ce feul article dont ils s'entêtent , ils n'entre-
roient jamais dans le fentiment des Cabaliftes. Ils
nous apprennent feulement par leur idée de la Tri-
nité , qu'on peut trouver tout ce qu'on veut dans la
Cabale. Cohen Irira , dans fon livre intitulé , Phi-
lof. Cab. differt. V. chap. v'iij. nous fait mieux com-
prendre la penfée des Cabaliftes , en foûtenant, i°.
que la lumière qui rempliffoit toutes choies étoit trop
uibtiie pour former des corps ni même des efprits.
Il falloit condenfer cette lumière qui émanoit de
Dieu. Voilà une première erreur , que le monde eft
forti de la divinité par voie d'émanation , & que
les efprits font fortis de la lumière. i°. Il remarque
que Dieu ne voulant pas créer immédiatement lui-
même , produifit un être qu'il revêtit d'un pouvoir
fuffifant pour cela , & c'eft ce qu'ils appellent Adam
premier , ou Adam kadmon. Ce n'eft pas que Dieu ne
pût créer immédiatement : mais il eut la bonté de
ne le pas faire , afin que fon pouvoir parût avec plus
d'éclat , & que les créatures devinffent plus parfai-
tes. 3°. Ce premier principe que Dieu produifit,
afin de s'en fervir pour la création de l'Univers ,
ctoit fini & borné: Dieu lui donna les perfections qu'il
a , & lui laijfa les défauts qu'il n'a pas. Dieu eft in-
dépendant , 6c ce premier principe dépendoit de lui ;
Dieu eft infini , ôë le premier principe eft borné ; il
eft immuable , & la première caufe étoit fujette au
changement.
Il faut donc avouer que ces théologiens s'éloi-
gnent des idées ordinaires , & de celles que Moyfe
nous a données fur la création. Ils ne parlent pas
ieulement un langage barbare ; ils enfantent des er-
reurs , & les cachent fous je ne fai quelles figures.
On voit évidemment par Iiaac Loriia , commenta-
teur Juif, qui fuit pas à pas fon maître , qu'ils ne
donnent pas immédiatement la création à Dieu ; ils
font même confifter fa bonté à avoir fait un principe
inférieur à lui qui pût agir. Trouver J. C. dans ce
principe , c'eft non feulement s'éloigner de leur idée ,
mais en donner une très-fauffe du Fils de Dieu , qui
eft infini , immuable , & indépendant.
Si on defeend dans un plus grand détail , on aura
bien de la peine à ne fe feandalifer pas du Seir Anpin,
qui eft homme & femme ; de cette mère , ce père ,
cette femme , ou Nucha , qu'on fait intervenir ; de cet-
te lumière qu'on fait fortir par le crâne , par les
yeux & par les oreilles du grand Anpin. Ces méta-
phores font-elles bien propres à donner une jufte
idée des perfections de Dieu , tk. de la manière dont
il a créé le monde ? Il y a quelque chofe de bas Se
de rampant dans ces figures , qui bien loin de nous
faire diftinguer ce qu'on doit craindre & ce qu'on doit
aimer , ou de nous unir à la divinité , l'aviliiïcnt , &C la
tendent méprifablc aux hommes.
Voilà les principes généraux de la Cabale , que
nous avons tâché d'expliquer avec clarté , quoique
nous ne nous flattions pas d'y avoir réufîî. II faut
avouer qu'il y a beaucoup d'extravagance , & même
de péril dans cette méthode ; car fi on ne dit que ce
que les autres ont enfeigné fur les opérations & fur
les attributs de Dieu , il eft inutile d'employer des
allégories perpétuelles, &C des métaphores outrées ,
qui , bien loin de rendre les vérités fcnlibles , ne
fervent qu'à les obfcurcir. C'eft répandre un voile
fur un objet qui étoit déjà caché , & dont on ne dé-
couvrait qu'avec peine quelques traits. D'ailleurs ,
on renvcrle toute l'Ecriture , on en change le fens ,
& jufqu'aux mots , alîn de pouvoir trouver quel-
que fondement & quelque appui à fes conjectures.
On jette même fouvent les hommes dans l'erreur ,
parce qu'il eft impoffible de fuivre ces théologiens ,
qui entaffent figures fur figures, & qui ne les enoifif-
ient pas toujours avec jugement, Ce mélange d'hom-
CAB
48?
mes & de femmes qu'on trouve aflbciés dans les
Jplendeurs, leur union conjugale , & la manière 'dont
elle fe fait , font des emblèmes trop puérils &c trop
ridicules pour repréfenter les opérations de Dieu,
& fa fécondité. D'ailleurs, il y a fouvent une pro-
fondeur fi obfcure dans les écrits des Cabaliftes ,
qu'elle devient impénétrable : la raifon ne difte rien
qui puifie s'accorder avec les termes , dont leurs
écrits font pleins. Après avoir cherché long-tems inu-
tilement , on fe lafle , on ferme le livre ; on y revient
une heure après ; on croit appereevoir une petite
lueur ; mais elle difparoît auffitôt. Leurs principes
paroiffent d'abord avoir quelque liaifon : mais la di-
verfité des interprètes qui les expliquent eft fi gran-
de , qu'on ne fait où fe fixer. Les termes qu'on em-
ployé font fi étrangers , ou fi éloignés de l'objet ,
qu'on ne peut les y ramener ; & il y a lieu d'être
étonné qu'il y ait encore des perfonnes entêtées , qui
croyent que l'on peut découvrir , ou éclaircir , des
vérités importantes , en fe fervant du fecours de la
Cabale. Il ferait difficile de les guérir : d'ailleurs , fï
en expofant aux yeux cette feience dans fon état
naturel , on ne s'apperçoit pas qu'elle eft creufe &
vuide ; & que fous des paroles obfcures , fouvent in-
intelligibles à ceux mêmes qui s'en fervent , on ca-
che peu de chofe , tous les raifonnemens du monde
ne convaincraient pas. En effet , un homme de bon
fens qui aura étudié à fond les féphirots , la couronne
qui marque la perfection , lafagejj'e , ou la magnificence ,
en comprendra-t-il mieux que Dieu eft un être infi-
niment parfait , & qu'il a créé le monde ? An-con-
traire , il faut qu'il faffe de longues fpéculations
avant que de parvenir là. Il faut lire les Cabaliftes ;
écouter les différentes explications qu'ils donnent à
leurs fplendeurs , les fuivre dans les conféquences
qu'ils en tirent ; pefer fi elles font juftes. Après tout, il
faudra en revenir à Moyfe ; & pourquoi n'aller pas
droit à lui, puifque c'eft le maître qu'il faut fuivre,
& que le Cabalifte s'égare dès le moment qu'il l'a-
bandonne ? Les féphirots font, comme les diftinttions
des fcholaftiques , autant de remparts , derrière lef-
quels un homme qui raifonne jufte ne peut jamais
percer un ignorant qui fait fon jargon. Les écrivains
facrés ont parlé comme des hommes fages & judi-
dicieux , qui voulant faire comprendre des vérités
fublimes , fe fervent de termes clairs. Us ont dû
néceffairement fixer leur penfée & celle des Lec-
teurs , n'ayant pas eu deffein de les jetter dans un.
embarras perpétuel & clans des erreurs dangereufes.
S'il eft permis de faire dire à Dieu tout ce qu'il a pu
dire , fans que ni le terme qu'il a employé , ni la
liaifon du difeours détermine à un fens précis , on
ne peut jamais convenir de rien. Les fyftèmes de re-
ligion varieront à proportion de la fécondité de l'i-
magination de ceux qui liront l'Ecriture ; & pendant
que l'un s'occupera à chercher les évenemens fu-
turs , & le fort de l'Eglife dans les cxprefîîons les
plus fimples , un autre y trouvera fans peine les er-
reurs les plus groffieres.
Mais, nous dira-t-on , puifque les Juifs font entêtés
de cette feience , ne icroit-il pas avantageux de s'en
fervir pour les combattre plus facilement ? Quel
avantage ! quelle gloire pour nous , lorfqu'on trou-
ve , par la Cabale. , la Trinité des perfonnes , qui eft
le grand épouvantail des Juifs, & le phantôme qui
les trouble ! quelle confolation , lorfqu'on découvre
tous les myfteres dans une feience quifemble n'être
faite que pour les obfcurcir !
Je réponds i°. que c'eft agir de mauvaife foi que
de vouloir que le Chriftianifmc foit enferme dans les
féphirots; car ce n'étoit point l'intention de ceux qui
les ont inventés. Si on y découvre nos myfteres ,
afin de faire fentir le ridicule exi le foible de cette mé-
thode , à la bonne heure : mais Morus & les autres
86
C A
4
Cabaliftes Chrétiens entrent dans le combat avec une
bonne toi qui déconcerte, parce qu'elle fait connoî-
jtre qu'ils ont deûein de prouver ce qu'ils avancent,
&C qu'ils font convaincus que toute la religion chré-
tienne fe trouve dans la Cabale ; ils inliùtent ceux
qui s'en moquent , &c prétendent que c'elt l'igno-
rance qui entante ces foùris méprilans. On peut em-
ployer cette feience contre les rabbins qui en font
entêtés , afin d'ébranler leur incrédulité par les ar-
gumens que l'on tire de leur propre fein ; & l'ul'age
qu'on fait des armes qu'ils nous prêtent , peut crie
bon quand on les tourne contre eux-mêmes : mais il
faut toujours garder ton bon fens au milieu du com-
bat , Se ne le laiffer pas éblouir par l'éclat d'une vic-
toire qu'on remporte facilement , ni la pouffer trop
loin. Il faut fentirla vanité de ces principes , &n'eH
pas faire dépendre les vérités folides du Chriftianif-
me ; autrement on tombe dans deux fautes fenlibles.
En effet, le Juif converti par des argumens caba-
liftiques , ne peut pas avoir une véritable foi. Elle
chancellera des le moment que la raifon lui décou-
vrira la vanité de cet art ; Se fon chriftianifme , s'il
n'eit tiré que du fond de la Cabale , tombera avec la
bonne opinion qu'il avoit de fa feience. Quand mê-
me l'illuiion durerait jufqu'à la mort , en feroit-on
plus avancé ? On ferait entrer dans l'églife chré-
tienne un homme dont la foi n'eit appuyée que fur
des rofeaux. Une connoiffance fipeu lolide peut-elle
produire de véritables vertus ? Mais , de plus , le
prolelyte , dégagé des préjugés de fa nation , & de
l'autorité de fes maitres , 6c de leur feience , perdra
peu à peu l'eltime qu'il avoit pour elle. Il commen-
cera à douter : on ne le ramènera pas aifément , par-
ce qu'il le déliera de fes maîtres qui ont commencé
par la fraude ; & s'il ne rentre pas dans le Judaïfme
par intérêt, il demeurera Chrétien fans religion &
fans piété, (c?)
Voilà bien des chimères : mais l'hiftoire de la
Philofophie, c'eft-à-dire des extravagances d'un
grand nombre de favans , entre dans le plan de notre
ouvrage ; & nous croyons que ce peut être pour
les Philofophes même un fpectacle affez curieux &
affez intëreffant, que celui des rêveries de leurs fem-
blables. On peut bien dire qu'il n'y a point de folies
qui n'ayent paffé par la tête des hommes , &c même
des fages ; & Dieu merci , nous ne iommes pas fans
doute encore au bout. Ces Cabaliftes qui découvrent
tant de myfteres en tranfpofant des lettres ; cette
lumière qui lbrt du crâne du grand Anpin ; la flam-
me bleue que les brachmanes le cherchent au bout
du nez ; la lumière du Tabor que les ombilicaux
croyoient voir à leur nombril ; toutes ces vifions
font à peu-près fur la même ligne : éc après avoir
lu cet article & plufieurs autres , on poura dire ce
vers des Plaideurs :
Que de fous ! je ne fus jamais à telle fête. (0)
CABALIG , ( Géog. ) ville d'Alie dans le Turquef-
tan. Long. 103. Lit. 44.
CABALISTh , terme de Commerce ufîtê à Touloufe
& dans tout le Languedoc. C'elt un marchand qui ne
fait pas le commerce fous fon nom , mais qui elt in-
térefle dans le négoce d'un marchand en chef. (G)
CABAL1STES , f. m.plur. (Hijl.) ff-tte des Juifs
qui fuit & pratique la Cabale , qui interprète l'Ecri-
ture félon les règles de la Cabale prife au fécond fens
que nous avons expliqué. Voyt{ Cabale.
Les Juifs font partagés en deux fecles générales ;
les Karaites , qui ne veulent par recevoir les tradi-
tions, ni le thaîmud , mais le feul texte de l'Ecri-
ture (.Voye^ Karaïtes. ) ; & les Rabbiniites , ou
Thalmudiites , qui outre cela reçoivent encore les
traditions , & huvent le Thalmud. Voye{ Rabbi-
NISTES.
C A B
Ceux-ci font encore div-ifés en deux partis ; fei-
voir, Rabbimjies Jimples, qui expliquent 1 Ecriture fé-
lon le iens naturel , par la grammaire , l'hiftoire , ou
la tradition ; .6c en Cabalifles , qui pour y découvrir
les fens cachés & myfterieux que Dieu y a mis , le
fervent de la Cabale , & des principes fublimes que
nous avons rapportés dans l'article précédent.
Il y a des vifionnaires parmi les Juifs , qui difent
que ce n'eit que parles myfteres de la Cabale ,-que
J. C. a opéré les miracles. Quelques fçavans ont cru
que Pythagore & Platon avoient appris des Juifs
en Egypte l'art cabaliltique, & iis ont cru en trou-
ver des vertiges bien marqués dans leurs philolo-
phies. D'autres croyent au contraire que c'elt la
Philofophie de Pythagore & de Platon qui a produit
la Cabale. Quoi qu'il en foit , il elt certain que dans
les premiers fiecles de l'Eglife , la plupart des héré-
tiques donnèrent cans les vaines idées de la Caba-
le. Les Gnolîiques, les Valentiniens, les Balilidiens ,
y turent lurtout très attachés. C'elt ce qui produiiit
Vabvaz A2 , ôc tant de talifmans , dont il nous ref-
te encore une grande quantité dans les cabinets des
antiquaires. Voye^ Talisman, &c. (fJ)
CABAMITEN ou CABAMITAN , {Geog.) petite
contrée d'Alie dans la Tartane.
CABANE , f. f. ( Architecture. ) du Latin capana ;
c'elt aujourd'hui un petit lieu bâti avec de la bauge
( elpece de terre graffe ) & couvert de chaume ,
pour mettre à la campagne les pauvres gens à l'abri
des injures du tems. Anciennement les premiers
hommes n'avoient pas d'autres demeures pour habi-
tation : l'Architecture a commencé par les cabanes ,
& a fini par les palais. Foye- Architecture. (/>)
CABANE , f. m. ( en terme de Marine. ) c'elt un pe-
tit logement de planches pratiqué à l'arriére , ou le
long des côtés du vaiffeau , pour coucher les pilotes
ou autres officiers ; ce petit réduit elt long de fix pies,
& large de deux & demi ; & comme il n'en a que
trois de hauteur , on n'y peut être debout.
On donne le même nom à l'appartement prati-
qué à l'arriére des bûches qui vont à la pêche du
hareng , & qui elt deftiné pour les officiers qui les
conduifent. Voye?K PI. XII. fig. 2.
C'elt aufîi un bateau couvert de planches de fa-
pin , fous lequel un homme peut fe tenir debout &
à couvert ; il a un fond plat , & on s'en fert fur la
Loire.
Les bateliers appellent aulîi cabane un bateau cou-
vert du côté de la poupe , d'une toile que l'on nom-
me banne , ibûtenue fur des cerceaux plies en forme
d'arc , pour mettre les paffagers à couvert du foleil
& de la pluie. Voye\ Bateau. ( Z )
CAEANIA ou KABANIA , ( Geog.) ville & forte-
refle de la Rufîie feptentrionale , dans la province
de Burati.
CABARER , verb. neut. eft un terme de brafferie,
qui lignifie jetter les métiers ou l'eau d'un vaiffeau
dans un autre , foit avec le jet ou avec le chapelet.
Voye^ C article B R A S S E R I E .
CABARET, f. m. (Hifl.nat.bot.) afdrum. Genre
de plante à fleurs fans pétales , compolee de cinq ou
fixétamines qui fortent d'un calice découpé en trais
parties. La partie poltérieure de ce calice devient
dans la fuite un fruit qui eft pour l'ordinaire angu-
leux , divifé en lix loges , & rempli de quelques le-
mences oblongues. Tournefort Infl. rei lierb. Voye%_
Plante.
Uiifarum offic. germ. a la racine purgative & émé-
tique ; elle defobltrue le foie , provoque les règles ,
expulfe l'arrierefaix , & même le fœtus. On la re-
commande dans la jauniffe , l'hydropilie , les dou-
leurs des reins , & la goutte : on l'appelle la panacée
des fièvres quartes. Les payfans en font leur fébrifuge.
Une emplâtre de fes feuilles appliquée fur la région
C A B
lombaire, pouffe les urines ; extérieurement elle eft
réfolutive , déterfive , & vulnéraire. Les femmes en-
ceintes doivent en éviter Fuiage , quoi qu'en dife
Fernel.
Potion émétique avec le cabaret. Prenez fuc (Tafarum
une once ; oxymel de fouille demi-once; eau de char-
don deux onces : c'eft un très-puiffant émétique , ex-
cellent dans la manie , où il reuffit mieux que tous
les remèdes ordinaires.
Le cabaret pris en décoction purge doucement, &
ne fait point 'vomir. Fernel en t'aifoit une compoli-
tion émétique qui convient, félon lui , à tout le mon-
de. Elle fe prépare dans les boutiques.
Le cabaret eft ainli nommé, parce que les ivrognes
s'en fervent pour s'exciter au vomnTenïent. (Ar)
Cabaret , Taverne , ( Commerce. ) ces deux
lieux ont eu cela de commun , que Tony vendoit du
vin : mais dans les tavernes on n'y vendoit que du
vin , fans y donner à manger; au lieu qu'on donnoit
à manger dans les cabarets. Cette diftinction eft an-
tienne. Les Grecs nommoient TaC-pvaj les lieux où
l'on vendoit du vin , & y.a-Tiù , ceux où l'on donnoit
à manger. Les Romains avoient auffi leurs tabemœ Se
popince , dont la diftinction étoit la même. Les profef-
iions d'Hôteliers , de Cabaretiers , &c de ïaverniers,
font maintenant confondues : la police leur a pref-
crit quelques règles relatives à la religion, aux mœurs,
à ia fante , & à la fureté publique , qui font fort bel-
les , mais de peu d'ufage.
CAB ARETIER. , f. m. celui qui eft autorifé à don-
ner à boire & à manger dans la maifon à tous ceux
qui s'y préfentent. foye* Cabaret.
CABAR-HUD, ( Géog. ) ville de l'Arabie heu-
reufe dans la province de Hadhramuth.
* CABARNES , f. m. pi. ( Hijl. anc. ) c'eft ainfi
qu'on appeiloit les prêtres de Cerès dans l'île de Pa-
ros. Ce mot vient du Phénicien ou de l'Hébreu car-
karninoù careb , offrir: il étoit en ufage dans le mê-
me fens parmi les Syriens , ainli que Jofephe le fait
■\oir par Théophrafte : d'autres prétendent que ce
fut le nom du premier de ces prêtres , qui apprit , à
ce qu'on dit , à Cerès l'enlèvement de fa fille.
* CABARRES , f. m. pi. ( Marine & Commerce. )
on donne ce nom à toutes fortes de petits bâtimens
à fonds plats, qui fervent à fecourir &C alléger les
gros vaiffeaux en mer. Les Suédois & les Danois les
appellent clincar,
CABAS , f. m. ( Meffagerie. ) grand coche dont
le corps eft d'ofier cliffé. Cette voiture appartient
ordinairement aux meiTagerics.
Cabas ou Cabat , ( Commerce. ) panier fait de
jonc ou de feuilles de palmier, ('eit dans ces fortes
de paniers que l'on met les figues de Provence , après
les avoir fait lécher. Il y en a de grands & de petits;
les uns pour la marchandife d'élite, & les autres
pour la commune : on les couvre également avec une
toile ordinairement bleue ou violette. Voye^ Figue.
Cabat le dit aufti dans quelques provinces de Fran-
ce, d'une mefure à mefurerles grains , particulière-
ment le blé. (G)
CABASET , f. m. fignifioit autrefois, dans CArt
milit. une arme défenlive qui couvroit la tète. Ce mot
vient , félon Nicod, de l'Hébreu coba , qui lignifie un
Cdfque ou heaume, ou de l'Efpagnol cabeça , tête. (Q>)
* CABAY, f. m. ( Hijl. moi. ) c'eft le nom que
les Indiens, & les habitans de l'île de Ceylan èv d A-
racan , donnent à des habits faits de foie ou de co-
ton ornés d'or, que les feigneurs & principaux du
pays ont coutume de porter.
CABE, ( Géog.') petite rivière d'Efpagne au royau-
me de Galice , qui te jette dans le Velezar, & tom-
be avec lui dans le Minho.
CABEÇA-DE-YIDE, ( Géog. ) petite ville avec
château, en Portugal , dans l'Alentéjo , à cinq lieues
C A B 487
de Port-Aîcgre. Longitude 10. 48. latitude Jo.
* CABELA , {Hijl nat. ) c'eft le nom d'un fruit
des Indes occidentales, qui reffemble beaucoup à
des prunes : l'arbre qui le produit ne diffère pref-
qu'en rien du cerilier.
CABENDE , ( Géog. ) ville & port d'Afrique au
royaume de Congo, dans la province d'AngOy, où
il le fait un grand commerce de Nègres.
CABES ou GABES , ( Géog. ) ville d'Afrique au
royaume de Tunis, affez près du golfe du même nom.
Long. 28. 3o. lat. 33. 40.
CABESTAN, f. m. (Mar. ) c'eft une machine de
bois reliée de fer , faite en forme de cylindre , pofée
perpendiculairement fur le pont du vaiffeau, que des
barres paflees en travers par le haut de l'éffieu font
tourner en rond. Ces barres étant conduites à force
de bras , font tourner autour du cylindre un cable ,
au bout duquel font attachés les gros fardeaux qu'on
veut enlever. Voye^ Cable.
C'eft encore en virant le cabejlan qu'on remonte
les bateau v , & qu'on tire fur terre les vaiffeaux
pour les calfater, qu'on les décharge des plusgroffes
marc!'' ifidifès , qu'on levé les vergues & les voiles ,
auffi bien que les ancres. Voyc^ Ancre.
Il y a deux cabejlans fur les vaiffeaux , qu'on dis-
tingue par grand & petit cabejlan ': le grand cabejlan
eft placé derrière le grand mat fur le premier pont,
& s'élève jufqu'à quatre ou cinq pies de hauteur au-
deffus du deuxième. Voye-r PI. LV.fig. 1. n° 102. On
l'appelle aufîi cabejlan double, à caufe qu'il iért à.
deux étages pour lever les ancres , & qu'on peut dou-
bler fa force en mettant des gens fur les deux ponts
pour le faire tourner.
Le petit cabeflan eft pofé fur le fécond pont , entre
le grand mât 6c le mât de mifene. Voye-^ Plan. LV.
fig. 1. n°. 103. il iért principalement à iffer les mâts
de hune & les grandes voiles , & dans les occalions
où 1! tant moins de force que pour lever les ancres.
Les François appellent cabeflan Anglais , celui où
l'on n'employé que des demi-barres , & qui à caufe
de cela n'eft percé qu'à demi ; il eft plus renflé que
les cabejlans ordinaires.
II v a encore un cabejlan volant que l'on peut tranf-
porter d'un lieu à un autre, f'oye^ VlNDAS.
/ . • . /■ , >/.' cabsfl : -.' , poi er ai: cabeflan, faire jouer au
•• . c'eft-à-dire , faire tourner le cabeflan-,
au cabejlan, envoyer au cabeflan : quand les
garçons de IV ou les moufles ont commis
quelque faute, le maître les fr.it aller au cabeflan pour
les y châtier : on y envoyé auffi les matelots. Tous
le. châtimens qu'on fait au cabejlan chez les Fran-
çois , fe font au pié du grand mât chez les Hollan-
d . (Z)
Le cabeflan n'a pas la forme exactement cylindri-.
que , mais efl à peu près comme un cône tronqué qui
va en diminuant de bas en haut , afin que le corda-
ge qu'on y roule l'oit plus ferme , & moins fujet à.
couler ou gliffer de liant en bas.
II eft viiible par la description de cette machine,
que le cabejlan n'eft autre choie qu'un treuil , dont
l'axe au lieu d'être horiibntal, eft vertical. ' ;.,;
à l'article A x E les lois par lefquelles on
mine la force du treuil, appelle en Latin axis in pé-
ri'trochio , axe dans le tambour, OU ejieit dans le tour.
Dans le cabejlan le tambour, peritrochium , eft le cy-
lindre, ec Laxe ou I'eflieu font les leviers qu'on
adapte aux cylindres , 6v par le moyen defquels on
fait tourner le cabeflan.
Le cabejlan n'eft donc proprement qu'un levier ,
ou un anemblage de leviers auxquels plufieurs puif-
fonl appliquées. Donc fmvant les 1
\ . ■ i . ■ :i faite du frottement , la ;
ce tau 1 mme le rayon du cyl 1
jvier auquel la puiiiance eft atti 1
'4&8
C A B
& le chemin de La puiflance efl à celui du poids»,
comme le levier eft au rayon du cylindre. Moins il
faut de force pour élever le poids , plus il faut faire
de chemin : il ne faut donc point faire les leviers nop
longs , afin que la puiflance ne fane pas trop de che-
min ; ni trop courts , afin qu'elle ne foit pas obligée
de faire trop d'effort; car dans l'un & l'autre cas elle
feroit trop fatiguée.
On appelle encore en général du nom de cabcjlan,
tout treuil dont l'axe efï pofe verticalement : tels lont
ceux dont on fe fert fur les ports à Paris , pour attti-
rer à terre les fardeaux qui fe trouvent fur les gros
bateaux , comme pierres , &c.
Un des grands inconvéniens du cabcjlan , c'eft que
•la corde qui fe roule deffus defeendant de la grofleur
à chaque tour , il arrive que quand elle eft parvenue
tout-à-fait au bas du cylindre , le cabcjlan ne peut plus
virer , & l'on eft obligé de choquer , c'eft-à-dire ,
de prendre des boiTes , de devirer le cabcjlan , de
hauffer le cordage , &c. manœuvre qui fait perdre
Un tems coniidérable. C'eft pour y remédier que l'A-
cadémie des Sciences de Paris propofa pour le fujet
du prix de 1739, de trouver un cabcjlan qui tùt
exempt de ces inconvéniens. Elle remit ce prix à
1741 ; & l'on a imprimé en 1745 les quatre pièces
qu'elle crut devoir couronner , avec trois acccjju.
L'Académie dit dans fon avertiffement , qu'elle n'a
trouvé aucun des cabcjlans propolés exempt d'incon-
véniens. Cela n'empêche pas néanmoins , comme
l'Académie l'obferve , que ces pièces , fur-tout les
quatre pièces couronnées, & parmi les accejjit, celle
de M. l'abbé Fenel , aujourd'hui de l'Académie des
belles lettres , ne contiennent d'excellentes chofes ,
principalement par rapport à la théorie. Nous y
renvoyons nos leâeurs. (O)
* CABESTERRE, (Géog. ) on appelle ainfidans
les îles Antilles , la partie de l'île qui regarde le le-
vant , & qui eft toujours rafraîchie par les vents ali-
fés , qui courent depuis le nord jufqu'à l'eft-fud-eft.
La baffe terre eft la partie oppoiee ; les vents s'y font
moins fentir ; & par conféquent cette partie eft plus
chaude , & la mer y étant plus tranquille , elle eft
plus propre pour le mouillage & le chargement des
vaiffeaux ; joint à ce que les côtes y font plus baffes
que dans les cabcjlcrrcs , où elles font ordinairement
hautes &£ efearpées , & où la mer eft prefque tou-
jours agitée. Voyages du P. Labat.
CABIDOS ou CAVIDOS, f. m. (Commerce.) forte
de mefure de longueur , dont on fe fert en Portugal
'pour mefurer les étoffés , les toiles , &c.
Le cabidos , ainii que l'aune de Hollande ou de Nu-
remberg , contient z pies 1 1 lignes , qui font quatre
feptiemes d'aune de Paris. L'aune de Paris fait un ca-
bidos & trois quarts de cabidos ; de forte que fept ca-
bidos font quatre aunes de Paris. Voye^_ Aune. (G )
* CABIGIAK ou CAPCHAK, f. m. (Hijl. mod.)
tribu des Turcs Orientaux. Une femme de l'armée
d'Oghuz-Kan preffée d'accoucher , fe retira dans le
creux d'un arbre. Oghuz prit foin de l'enfant , l'a-
dopta, & i'appella Cabigiak, ccorcedc bois ; nom qui
marquôit la ungularité de fa naiiTance. Cabigiak eut
une poftérité nombreufe qui s'étendit juiqu'au nord
de la mer Cafpienne. Il s'en fit un peuple qu'on con-
noît encore aujourd'hui fous le nom de Defcht Kit-
chak ; ceft de ce peuple que font forties les armées
qui ont ravagé les états que le Mogol poffédoit dans
la Perfe , & ce furent les premières troupes que Ba-
jazet oppofa àTamerlan.
* CABILLE ou C ABILAH , f. m. (Hijl. mod.) nom
d'une tribu d'Arabes , indépendans & vagabonds ,
qu'un chef conduit. Ils appellent ce chet cauque. On
compte quatre-vingts de ces tribus : aucune ne re-
connoît de fouverains.
C A B
CABîLLOTS , f. m. pi. (Marine.) ce font de petits
bouts de bois , qui font faits comme les boutons des
Récolets , c'eft- à-dire taillés longs & étroits, plus
épais vers le milieu , & un peu courbes, les deux ex-
trémités étant plus pointues , & fe relevant un peu.
On met ces morceaux de bois aux bouts de plufieurs
heries qui tiennent aux grands haubans , qui fervent
à tenir les poulies de pantoquiere.
Cabillots ; ce font auffi de petites chevilles de
bois qui tiennent aux chouquets avec une ligne , 6c
qui fervent à tenir la balancine de la vergue de hune
quand les perroquets font ferrés. (Z )
CABIN , (Géog.) rivière de France , en Gafcognes,
CABINET, f. m. (Architecl.) fous ce nom on peut
entendre les pièces deftinées à l'étude , ou dans les-
quelles l'on traite d'affaires particulières, ou qui con-
tiennent ce que l'on a de plus précieux en tableaux,
en bronzes, livres, curiofités, &c. On appelle auffi
cabinet, les pièces 011 les dames font leur toilette, leur
oratoire , leur méridienne , ou autres qu'elles deiti-
nent à des occupations qui demandent du recueille-
ment & de la folitude. On appelle cabinet d'aifance ,
le lieu oii font placées les commodités , connues au-
jourd'hui fous le nom de lieux àjbupape.
Les premières efpeces de cabinets doivent être pour
plus de décence, placés devant les chambres à cou-
cher & non après , n'étant pas convenable que les
étrangers paffent par la chambre à coucher du maî-
tre pour arriver au cabinet , cette dernière pièce chez
un homme d'un certain rang , lui fervant à conférer
d'affaires particulières avec ceux que fon état ou fa
dignité amènent chez lui ; par ce moyen le maître ,
au fortir du lit, peut aller recevoir les vifites, parler
d'affaires fans être interrompu par les domeihques ,
qui pendant (on ablence entrent dans la chambre à
coucher par des dégagemens particuliers, & y lont
leur devoir, fans entrer dans le lieu qu'habitent les
maîtres , à moins qu'on ne les y appelle. Je parle ici
d'un cabinet faifant partie d'un appartement deitiné
à un très-grand feigneur , à qui pour lors il faut plu-
fieurs de ces pièces , qui empruntent leur nom de
leurs différens ufages, ainfi que nous venons de le dire
ci-deffus. On a une pièce qu'on appelle le grand ca-
binet de l'appartement du maître ; elle eft confacrée
à Fufage dont nous venons de parler ; c'eft dans Ion
cabinet paré qu'il raflemble ce qu'il a de tableaux ou
de curiofités ; fon arrière-cabinet contient les livres ,
fon bureau , Se c'eft là qu'il peut recevoir en particu-
lier , à la laveur des dégagemens qui l'environnent ,
les perfonnes de diftinâion qui demandent de la pré-
férence : un autre lui fert de ferre-papiers , c'eft là
que font confervés fous fa main & en fureté fes ti-
tres , fes contrats, fon argent: enfin il y en a un del-
tiné à lui lervir de garde-robe &: à contenir des lieux
à foupape , où il entre par fa chambre à coucher , &
les domeftiques par un dégagement. Ce détail nous
a paru nécefTaire.
Il y a encore d'autres cabinets; on en a un du côté
de l'appartement de fociété,qui a fes ufages particu-
liers ; il peut fervir pour un concert vocal ; les lieux
pour les concerts compolés de beaucoup d'inftrumens
devant être plus fpacieux , alors on les appelles/A; de
concert ; dans ce même cabinet on peut tenir jeu , pen-
dant que la falle d'affemblée, qui eft à côté, lerviroit
ainlî que celle de compagnie , à recevoir une plus
nombreufe fociété. Un petit fallon peut auffi lervir
de cabinet au même ulage : mais fa forme elliptique,
la manière dont il eft plafonné , & principalement les
pièces qui l'environnent, lui ont fait donner le nom
dej'allon , pendant que la pièce qui lui eft oppoiee
peut recevoir le nom de cabinet , par rapport à
l'appartement dont elle fait partie ; cependant il
Ifaut avouer qu'il eft, pour ainli dire, des formes
confacrées à Fufage de chaque pièce en particulier :
par
C A B
par exemple , il femble que les cabinets deftinés aux
affaires ou à l'étude, doivent être de forme réguliè-
re , à caufe de la quantité des meubles qu'ils font
obligés de contenir , au lieu que ceux de concerts ,
de bijoux, de toilette , &C autres de cette efpece , peu-
vent être irréguliers : il faut fur-tout que ta décora-
tion des uns & des autres foit relative à leur ufage,
c'eit-à-dire qu'on obferve de la gravité dans l'ordon-
nance des cabinets d'affaires ou d'étude ; de la fimpli-
cité dans ceux que l'on décore de tableaux ; & de la
légèreté , de l'élégance , & de la richefle , dans ceux
deflinés à la fociété , fans que pour cela on ufe de
trop de licence.
Il n'y a perfonne qui ne fente la nécefïïté qu'il y
a de faire précéder les chambres à coucher par les
cabinets , lur-tout dans les appartemens qui ne font
compofés que d'un petit nombre de pièces.
On appelle auffi cabinets, certains meubles en for-
me d'armoire, faits de marqueterie ,de pièces de rap-
port 6c de bronze, fervant à ierrer des médailles,
des bijoux, &c. Ces cabinets étoient fort en ufage dans
le dernier fiecle : mais comme ils ne laiflbient pas
d'occuper un efpace affez confidérable dans l'inté-
rieur des appartemens, on les y a fupprimés. Il s'en
voit encore cependant quelques-uns dans nos anciens
hôtels , exécutés par Boule , ében fie du roi , ainfi
que des bureaux , des fecrétaires , ferre-papiers, bi-
bliothèques , &c. dont l'exécution eft admirable , &
d'une beauté fort au-deflus- de ceux qu'on fait au-
jourd'hui.
On appelle aufli cabinets , de petits bâtimêns ifolés
en forme de pavillons , que l'on place à l'extrémité
de quelque grande allée , dans un parc , fur une ter-
rafle ou fur un lieu éminent ; mais leur forme étant
prefque toujours lphérique , elliptique ou à pans cou-
verts , en calotte , & fouvent percés à jour , le nom
de /allons leur convient davantage ; & lorfque ces
pièces font accompagnées de quelques autres , com-
me de veflibules , d'anti-chambres , garde-robes , &c.
on les nomme belvédères. Voye{ Belvédère.
On appelle cabinets de treillage , de petits fallons
quarrés , ronds , ou à pans , compofés de barreaux
de fer maillé d'échalats peints en verd, tels qu'il s'en
voit un à Ciagny , d'un deflein & d'une élégance très-
eflimable , & plulieurs à Chantilly , d'une distribution
îrès-ingénieuie. {P )
Cabinet d'Histoire naturelle. Le mot ca-
binet doit être pris ici dans une acception bien diffé-
rente de l'ordinaire , puifqu'un cabinet d'Hijioire na-
turelle efl ordinairement compolé de plulieurs P£K~|
& ne peut être trop étendu ; la plus grande f^Be
plutôt le plus grand appartement , ne feroit i^S^tr
elpace trop grand pour contenir des collections en
tout genre des différentes productions de la nature :
en effet , quel immenfe & merveilleux aflembla^e !
comment même fe faire une idée julte du fpectacle
que nous prélenteroient toutes les fortes d'animaux,
de végétaux , & de minéraux , ii elles étoient raffem-
blées dans un même lieu , ce vues , pour ainfi dire ,
d'un coup d'œil ? ce tableau varié par des nuances à
l'infini , ne peut être rendu par aucune autre expref-
fion, que par les objets mêmes dont il efl compofé :
un cabinet d'Hiffoire naturelle efl donc un abrégé de
la nature entière.
Nous ne lavons pas fi les anciens ont fait des ca-
binets d'Hijioire nature/le. S'il y en a jamais eu un leul ,
il aura été établi chez les Grecs, ordonné par Ale-
xandre, & formé par A idiote. Ce fameux naturalifte
voulant traiter Ion objet avec toutes les vues d'un
grand philofophe , obtint delà magnificence d'Ale-
xandre des fommes très-confidérables , es: il les em-
ploya àraflembler des animaux de toute elpece, & à
les taire venir de toutes les parties du monde connu.
Ses livres fur le règne animal , prouvent qu'il avoit
Tome II,
C A B
489.
obfervé prefque tous les animaux dans un grand dé"
tad , & ne permettent pas de douter qu'il n'eût une
ménagerie tres-complettë à la difpofltion, ce qui fait
le meilleur cabinet que l'on puifle avoir pour l'hilloire
des animaux. D'ailleurs les dépouilles de tant d'ani-
maux , & leurs différentes parties difféquées , étoient
plus que fuffifantes pour faire un très -riche cabinet
d'Hijioire naturelle dans cette partie ; car on ne peut
pas douter qu'Ariflote n'ait difféqué les animaux avec
foin,puilqu 'il nous a laifle des rélultats d'obfervations
anatomiques , oc qu'il a attribué à certaines elpeces
des qualités particulières , dont elles font douées à
l'exclufion de toute autre efpece. Pour tirer de pa-
reilles conféquences, il faut avoir, pour ainfi dire
tout vu. Si nous fommes quelquefois tentés de les
croire halardées, ce n'eft peut-être que parce que les
connoiflances que l'on a acquiles fur les animaux de-
puis la renaiffance des lettres , ne font pas encore
allez étendues , & que les plus grandes colledions
d'animaux que l'on a faites font trop imparfaites en
comparailon de celles d'Ariflote.
La Icience de l'Hifloire naturelle fait des progrès
à proportion que les cabinets le complètent ; l'édifice
ne s'élève que par les matériaux que l'on y employé,
& l'on ne peut avoir un tout que lorlqu'on a mis en-
femble toutes les parties dont il doit être compofé.
Ce n'a guère été que dans ce fiecle que l'on s'efl ap-
pliqué à l'étude de 1 Hiftoire naturelle avec affez d'ar-
deur & de lucces pour marcher à grands pas dans
cette carrière. C'efl aufli à notre fiecle que l'on rap-
portera le commencement des établiflemens les plus
dignes du nom de cabinet d'Hijioire naturelle.
Celui du jardin du Roi efl un des plus riches de l'Eu-
rope. Pour en donner une idée il Influa de faire ici
mention des collections dont il efl compolé , en fui-
vant l'ordre des règnes.
Règne animal. Il y a au cabinet du Roi différens fque-
letes humains de tout âge, & une très- nombreuse
collection d'os remarquables par des coupes , des frac-
tures , des difformités, & des maladies : des pièces d'a-
natomie injectées & defiechées ; des fœtus de diffé-
rens âges , & d'autres morceaux linguliers conier-
vés dans des liqueurs: de très-belles pièces d'anato-
mie ;epréfentées en cire, en bois, &c. quelques par-
ties de momies Se des concrétions pierreufes tirées
du corps humain. Voye^ la defeription du cabinet du
Roi, Hijl. nat. tome III. Quantité de vètemens , d'ar-
mes, d'uflenciles de lauvages, &c. apportés de l'A-
mérique & d'autres parties du monde.
Par rapport aux quadrupèdes , une très-grande fui-
te de fquejetes ci d'autres pièces d'ofléologie , &
quantité d'animaux & de parties d'animaux conser-
vées dans des liqueurs, des peaux empaillées, une
collection de toutes les cornes des quadrupèdes , des
bézoards, des égagropiles, &c.
De très-beaux Iqueletes des oileaux les plus gros
& les plus rares ; des oileaux entiers conierves dans
des liqueurs, év d'autres empailles, &c.
Une nombreule ^ de poiffons de mer &
d'eau douce deffeches ou conlerves dans des li-
queurs.
Un très-grand nombre d'el'peces différentes de fer-
pens, de lefàrds, &c. recueillis de toutes les pâmes
du monde.
Une très-grande fuite de coquilles , de cruflacées ,
&c.
Enfin quantité d'infectes de terre & d'eau, entr'au-
tres une mite de papillons prefque complette , ce une
très-grande collection de faillies plantes mannes de
toutes efpeces.
Règne végétal. Des herbiers très-complets faits par"
M. d >rt & par M. Vaillant; de nombreu-
fes fuites de racines, d'éço ces de bois, de femen-
ces ce de fruits de plantes ; une collection prelqu'en-
Qqq
49°
C A B
tiere dégommes, de rétines, de baumes, & d'au-
tres fucs de végétaux.
Règne minéral. Des collections de terres , de pier-
res communes & de pierres figurées , de pétrifica-
tions , d'incruftations , de rélidus pierreux , & de fta-
laftites: une très-belle fuite de cailloux, de pierres
fines , brutes, polies , façonnées en plaques , taillées
en vafes , &c. & de pierres précieulés , de cryftaux ;
toutes fortes de fels & de bitumes , de matières miné-
rales & foffiles , de demi-métaux & de métaux. En-
fin une très-nombreufe colledion de minéraux du
royaume, & de toutes les parties de l'Europe, fur-
tout des pays du nord , des autres parties du monde ,
& principalement de l'Amérique.
Toutes ces collections font rangées par ordre mé-
thodique, & diftribuées de la façon la plus favora-
ble à l'étude de l'Hiftoire naturelle. Chaque individu
porte fa dénomination , & le tout eft placé fous des
glaces avec des étiquettes , ou difpofé de la manière
la plus convenable. (/)
* Pour former un cabinet d,HiJloire naturelle , il
ne fufïït pas de raffembler fans choix, & d'entaffer
fans ordre & fans goût, tous les objets d'Hiftoire na-
turelle que l'on rencontre ; il faut favoir diftinguer
ce qui mérite d'être gardé de ce qu'il faut rejetter ,
& donner à chaque choie un arrangement convena-
ble. L'ordre d'un cabinet ne peut être celui de la
nature ; la nature affefte par-tout un defordre lu-
blime. De quelque côté que nous l'envifagions , ce
font des malles qui nous tranfportent d'admiration ,
des groupes qui fe font valoir de la manière la plus
furprenante. Mais un cabinet d'ffijloire naturelle eft
fait pour inftruire ; c'eft-là que nous devons trouver
en détail & par ordre , ce que l'univers nous préfen-
te en bloc. Il s'agit d'y expofer les thréfors de la na-
ture félon quelque diftribution relative, foit au plus
ou moins d'importance des êtres , foit à l'intérêt que
nous y devons prendre , foit à d'autres coniidérations
moins lavantes & plus raifonnables peut-être, entre
lefquelles il faut prétérer celles qui donnent un ar-
rangement qui plait aux gens de goût , qui intérefî'e
les curieux, qui inftruit les amateurs, & qui infpi-
re des vues aux favans. Mais fatisfaire à ces diffé-
rens objets, fans les facrifier trop les uns aux autres ;
accorder aux diltributions feientifiques autant qu'il
faut , fans s'éloigner des voies de la nature, n'eftpas
une entreprife facile ; & entre tant de cabinets d'Hif-
toire naturelle formés en Europe, s'il doit y en avoir de
bien rangés, il doit aufli y en avoir beaucoup d'autres
qui peut-être auront le mérite de la richefle , mais qui
n'auront pas celui de l'ordre. Cependant qu'eft-ce
qu'une collection d'êtres naturels fans le mérite de
l'ordre ? A quoi bon avoir raffemblé dans des édifi-
ces , à grande peine & à grands frais , une multitude
de product ions , pour me les offrir confondues pêle-
mêle & fans aucun égard , foit à la nature des chofes,
foit aux principes de l'hiftoire naturelle ? « Je dirois
» volontiers à ces Naturalises qui n'ont ni goût
» ni génie : Renvoyé^ toutes vos coquilles à la mer ;
» rende £ à la terre fes plantes & Jon engrais , &
» nettoyé^ vos appartemens de cette foule de cadavres ,
» d'oifeaux , de poijjons , 6- d'infectes , (i vous n'en
>» pouve^ faire quun chaos où je napperqois rien de
» difincl , quun amas où les objets épars ou entafjés
» ne me donnent aucune idée nette & précife. Vous
» ne fave{ pas faire valoir l'opulence de la nature ,
» &farichejj'e dépérit entre vos mains. Reflc^ au fond.
» de la carrière , taille^ des pierres ,• mais laijj'e^ à d'au-
« très le foin d'ordonner f édifice ». Qu'on pardonne
cette fortie au regret que j'ai de favoir dans des ca-
binets , même célèbres, les productions de la nature
les plus prétieufes , jettées comme dans un puits : on
accourt fur les bords de ce puits , vous y fuivez la fou-
le, vous cherchez à percer les ténèbres qui couvrent
C A B
tant de raretés ; mais elles font trop épaiflès , vous
vous fatiguez envain , & vous ne remporterez que le
chagrin d'être privé de tant de richeffes , foit car l'in-
dolence de celui qui les poffede , foit par la négligen-
ce de ceux à qui le foin en elt confié.
Nous n'aurions jamais fait , fi nous entreprenions
la critique ou l'éloge de toutes les collections d'Hif-
toire naturelle qui font en Europe ; nous nous arrête-
rons feulement à la plus fiorifiante de toutes , je veux
dire le cabinet du Roi. 11 me femble qu'on n'a rien né-
gligé , foit pour faire valoir , loit pour rendre utile
ce qu'il renferme. Il a commencé des fa naiffance à
intéreffer le public par fa propreté & par fon élégan-
ce : on a pris dans la fuite tant de foins pour le com-
pléter, que les acquilitions qu'il a faites en tout gen-
re , font lurprenantes , fur-tout fi en les compare avec
le peu d'années que l'on compte depuis fon inftitu-
tion. Les chofes les plus belles & les plus rares y ont
afflué de tous les coins du monde ; & elles y ont heu-
reufement rencontré des mains capables de les réu-
nir avec tant de convenance , 6c de les mettre en-
femble avec tant d'ordre , qu'on n'auroit aucune pei-
ne à y rendre à la nature un compte clair & fidèle de
fes richeffes. \.h\ établiffement li conlidcrable ce ii
bien conduit , ne pouvoit manquer d'avoir de la célé-
brité , & d'attirer des fpedateurs ; aufli il en vient de
tous états, de toutes nations, & en fi grand nombie,
que dans la belle faifon, lorfque le mauvais tems n'em-
pêche pas de refier dans les f ailes du cabinet, leur ef-
pace y fuffit à peine. On y reçoit douze à quinze cents
perfonnes toutes les femaines : l'accès en eft facile ;
chacun peut à fon gré s'y introduire , s'amufer , ou
s'inltruire. Les productions de la nature y font expo-
fées fans fard , & fans autre apprêt que celui que le
bon goût, l'élégance, & la connoifïance des objets
dévoient luggérer : on y répond avec complaifance
aux queftions qui ont du rapport à l'Hiftoire naturel-
le. La pédanterie qui choque les honnêtes gens , &
la charlatanerie qui retarde les progrès de la feience,
font loin de ce lanefuaire : on y a lènti par une im-
puliion particulière aux âmes d'un certain ordre ,
quelle b a fieffé ce feroit à des particuliers qui auroient
quelques collections d'Hiftoire naturelle , de préten-
dre s'en faire un mérite réel , & de travailler à enfler
ce mérite , foit en les étalant avec faite , foit en les
vantant au-delà de leur jufte prix , foit en mettant
du myftere dans de petites pratiques qu'il eft toujours
aflez facile de trouver, lorsqu'on veut fe donner la
peine de les chercher. On a fenti qu'une telle con-
tJMJfcg'accorderoit moins encore avec un grand éta-
bliffement , où l'on ne doit avoir d'autres vues que le
bien de l'établifièment, où en rendant le public té-
moin des procédés qu'on fuit , on en tire de nouvel-
les lumières , & l'on répand le goût des mêmes occu-
pations. C'eft le but que M. d'Aubenton , garde & dé-
monihdtem du cabinet du Roi , s'eftpropofé , & dans
fon travail au cabinet même qu'il a mis en un fi bel
ordre, &c dans la defeription qu'on en trouve dans
l'Hiftoire naturelle. Nous ne pouvons mieux faire
que d'inférer ici fes obfervations fur la manière de
ranger & d'entretenir en général un cabinet d' Hi foire
naturelle; elles ne font point au-deflbus d'un aufli
grand objet.
« L'arrangement, dit M. d'Aubenton, le plus fa-
rt vorable à l'étude de l'Hiftoire naturelle , feroit l'or-
» dre méthodique qui diftribue les choies qu'elle
>t comprend, en dalles, en genres, & en efpeces ; ainfi
» les animaux , les végétaux , & les minéraux , fe-
» roient exactement feparés les uns des autres ; cha-
» que règne auroit un quartier à part. Le même or-
» dre fubfifteroit entre les genres & les efpeces ; on
» placcroit les individus d'une même efpece les uns
» auprès des autres , fans qu'il fut jamais permis de
» les éloigner. On verroit les efpeces dans leurs gen-
C A B
si res , & les genres dans leurs clarTes. Tel eft l'arran-
y- gcment qu'indiquent les principes qu'on a imagi-
» nés pour faciliter l'étude de l'Hiftoire naturelle ;
» tel eft l'ordre qui f'eul peut les réalifer. Tout en
)> effet y devient inftructif ; à chaque coup d'ceil ,
» non-feulement on prend une connoiflance réelle
» de l'objet que l'on confidere , mais on y découvre
» encore les rapports qu'il peut avoir avec ceux qui
» l'environnent. Les reffemblances indiquent le gcn-
» re, les différences marquent l'efpece; ces carac-
» teres plus ou moins reffemblans , plus ou moins dif-
» férens, & tous comparés enfemble, préfentent à
» l'eiprit & gravent dans la mémoire l'image de la
» nature. En. la fuivant ainfi dans les variétés de fes
» productions , on paffe infeniiblement d'un règne à
m un autre ; les dégradations nous préparent peu à
» peu à ce grand changement, qui n'eft ienfible dans
» ion entier que par la comparailon des deux extrè-
» mes. Les objets de l'Hifloire naturelle étant préien-
» tés dans cet ordre , nous occupent allez pour nous
» intéreffer par leurs rapports, fans nous fatiguer,
» 6c même fans nous donner le dégoût qui vient or-
» dinairement de la confufion & du defordre.
» Cet arrangement paroît fi avantageux, que l'on
» devroit naturellement s'attendre à le voir dans tous
» les cabinets ; cependant il n'y en a aucun où l'on
» ait pu le fuivre exactement. Il y a des efpeces &
»> même des individus qui , quoique dépendans du
» même genre 6e de la même efpece , font fi dif-
» proportionnés pour le volume, que l'on ne peut
» pas les mettre les uns à côté des autres ; il en eft
» de même pour les genres , & quelquefois aufîî pour
» les clafîés. D'ailleurs on efl: fouvent obligé d'inter-
»> rompre l'ordre des luîtes ; parce qu'on ne peut pas
» concilier l'arrangement de la méthode avec la con-
» venance des places. Cet inconvénient arrive fou-
» vent , lorfque l'efpace total n'eft pas proportionné
» au nombre des chofes qui compotent les collcc-
» tions : mais cette irrégularité ne peut faire aucun
» obftacle à l'étude de l'Hifloire naturelle : car il n'eft
» pas pofliblc de confondre les chofes de différens re-
»> gnes & de différentes clafles ; ce n'eft que dans le
»> détail des genres & des efpeces , que la moindre
» équivoque peut caufer une erreur.
» L'ordre méthodique qui , dans ce genre d'étude,
» plaît li fort à l'eiprit, n'eft prefque jamais celui qui
»> eft le plus avantageux aux yeux. D'ailleurs, quoi-
» qu'il ait bien des avantages, il ne laifle pas d'avoir
» plufieurs inconvéniens. On croit fouvent connoî-
» tre les choies , tandis que l'on n'en connoît que les
» numéros & les places : il eft bon de s'éprouver
» quelquefois fur des collections , qui ne iuivent que
» l'ordre de la iymmétrie & du contraire. Le cabinet du
» Roi étoit allez abondant pour fournir à l'un & à
» l'autre de ces arrangemens ; ainfl dans chacun des
»> genres qui en étoit f ufccptible , on a commencé par
» choilir une fuite d'efpeces , & même de plufieurs
» individus , pour faire voir les variétés aufïi bien
» que les efpeces conftantes ; 6c on les a rangés mé-
» thodiquement par genres S: parclaffes.Le furplus de
» chaque collection a été diftribné dans les endroits
» qui ont paru le plus favorables , pour en taire un
» enfemble agréable à l'œil , & varié par la diffet en-
>» ce des formes & des couleurs. C'eft-là que les ob-
» jets les plus importons de l'Hifloire naturelle l'ont
» préfentes à leur avantage ; on peut les juger fans
» être contraint par l'ordre méthodique, parce qu'au
» moyen de cet arrangement , on ne s'occupe que des
» qualités réelles de l'individu, fans avoir égard aux
» caractères arbitraires du genre & de l'efpece. Si on
» avoit toujours fous les yeux des fuites rangées mé-
» thodiquement , il feroit à craindre qu'on ne le Iaiffât
» prévenir par la méthode , & qu'on ne vînt à négli-
» ger l'étude de la nature , pour fe livrer à des con-
Tomc II,
C A B
491
» Ventions auxquelles elle n'a fouvent que très-peu
» de part. Tout ce qu'on peut raffembler de l'es pro-
» duclions , dans un cabinet d'HiJloirc naturelle , dé-
» vroit y être diftribné dans l'ordre qui approcheroit
» le plus de celui qu'elle fuit , lorfqu'elle eft en libér-
» té. Quoique contrainte , on pourroit encore l'y ré-
» connoître , après avoir raflemblé dans un petit ëf-
» pace des productions qui font cliiperfées an loin fur
» la terre ; mais pour peu que ces objets loient norn-
» breux , on fe croit obligé ci'cn faire des clafles" ,
» des genres & des efpeces, pour faciliter l'étude de
» leur hiftoire : ces principes arbitraires iont fautifs
» pour la plupart ; ainfl il ne faut le;> Suivre rangées
» méthodiquement , que comme des indices qui ebri-
» duifent à obferver la nature dans les colleûiop.s où
» elle paroît, fans preiqu'aucun autre apprêt qUe
» ceux qui peuvent la rendre agréable aux yeux. Les
» plus grands cabinets ne fuffiroient pas , fi on vouioit
» imiter fcrupuleufement les difpôfitions & les pro-
» greffions naturelles. On eft donc obligé , afin d'é . i-
» ter la confuhon , d'employer un peu d'art , pour
» faire de la fymmétne ou du contrarie.
» Tant qu'on augmente un cabinet d'HiJloire natu»
» rel , on n'y peut maintenir l'ordre qu'en déplaçant
» continuellement tout ce qui y eft. Par exemple ,
» lorfqu'on veut faire entrer dans une fuite une ef-
» pece qui y manque , fi cette efpece appartient au
» premier genre , il faut que tout le refte de la fuite
>■> f'oit déplacé , pour que la nouvelle efpece foit mile
» en ion lieu Quoique ce genre d'occupa-
» tion demande de l'attention , & qu'il emporte toù-
» jours beaucoup de tems , ceux qui font des collec-
» tions d'hiftoire naturelle ne doivent point le négli-
» ger : on ne le trouvera point ennuyeux ni même
» infruÉruèux , fi on joint au travail de la main l'ef-
»> prit d'obi'ervation. On apprend toujours quelque
» chofe de nouveau en rangeant méthodiquement
» une collection ; car dans ce genre d'étude plus on
» voit , plus on fait. Les arrangemens qui ne lont faits
» que pour l'agrément , fuppofent aulfi des tentati-
» ves inutiles ; ce n'eft qu'après plufieurs combinai-
» ions qu'on trouve un réfultat fatisfaifant dans les
» choies de goût : mais on eft bien dédommagé de la
>» peine qu'on a eue par le plailir qu'on relient, lorf*
» qu'on croit avoir réuni. Ce qu'il y a de plus défa*
» gréable iont les ioins nue l'on eft obligé de pren-*>
» dre pour Gohferver certaines pièces fujettes à un
» prompt dépériffement ; 1 on ne peut être trop at-
» tentif à tout ce qui peut contribuer à leur confer-
>» vation, parce que la moindre négligence peut être
» préjudiciable. Heureufement toutes les pieees d'un
» cabinet ne demandent pas autant de foins les unes
» que les autres, & toutes les faùons de l'année ne
» lont pas également critiques.*
» Les minéi u - en gén< I ne demandent que d'ê-
» tre tenus proprement ,&d« façon qu'ils ne puiflent
» pas fe choquer les uns contre les autres; il y en a
» feulement quelques-uns qui craignent l'humidité,
» comme les lels qui le fondent ailement, & les py-
» rites qui le ileiuillent , c'efl-à-dire qui tombent en
» pouffiere. Mais les animaux & les végétaux font
» plus ou moins fu jets à la corruption. On ne peut
» la prévenir qu'en les defféchant le plus qu'il eft
» poiiible , ou en les mettant dans des liqueurs pré-
» parées ; dans ce dernier cas , il faut empêcher que
» la liqueur ne s'évapore ou ne fe corrompe. Les
» pièces qui font deiTéchées demandent encore uri
» plus grand foin ; les infe&es qui y naiiîènt & qui
» y trouvent leurs alimens , les détruifent dans l'in-
» téricur avant qu'on les .:it apperçûs. Il y a des vers,
» des fearabées , des tcigr.es , des papillons , des mi-
» tes, &c. qui s'établiffcnt chacun dans les choies qui
» leur font le plus convenables ; ils rongent les chairs,
» les cartilages , les peaux , les poilo , ce les plumes ;
49*
CAB
» ils attaquent les plantes, quoique defféchées avec
>» le plus grand loin ; on l'ait que le bois même peut
» être réduit en poudre par les vers : les papillons ne
» font pas autant de mal que les icarabées ; & il n'y
» a que ceux quiproduilentles teignes qui lbient nui-
» libles. Tous ces infectes pullulent en peu de tems ,
» & leur génération eit Il abondante , que le nombre
» en deviendroit prodigieux , il on n'employoit pas
» différens moyens pour les détruire. La plupart de
» ces petits animaux commencent ordinairement à
» éclorre ou à le mettre en mouvement au mois d'A-
» vril , lorfque le printems eft chaud , ou au mois de
» Mai , lorfque la faifon eit plus tardive ; c'eft alors
» qu'il faut tout viliter , ck examiner fi on n'apper-
» cevra pas la trace de ces iniectes , qui eit ordinai-
» rement marquée par une petite poulîiere qu'ils font
» tomber des endroits où ils l'ont logés ; dans ce cas
» il y a déjà du mal de fait ; ils ont rongé quelque
» choie : ainfi on ne doit point perdre de tems , il faut
» travailler à les détruire. On doit obferver ces petits
» animaux juiqu'à la fin de l'été ; dans ce tems il n'en
» relie plus que des œufs , ou bien ils font arrêtés &
» engourdis par le froid. Voilà donc environ cinq
>» mois pendant lefquels il faut veiller fans celle ;
» mais auffi pendant le relte de l'année , on peut s'é-
» pargner ce foin.
» Il fufnt en général de garantir l'intérieur d'un ca-
» binet du trop grand froid , de la trop grande chaleur,
» & fur-tout de l'humidité. Si les animaux defféchés ,
» particulièrement ceux de la mer , qui relient toû-
» jours imprégnés de fel marin, étoient expolés à l'air
» extérieur dans les grandes gelées , après avoir été
» imbibés de l'humidité des brouillards , des pluies ,
» ou des dégels, ils- feraient certainement altérés &
» décompolés en partie , par l'action de la gelée oc
» par de li grands changemens de température. Auffi
» pendant la fin de l'automne ôf pendant tout l'hy ver,
»> on ne peut mieux faire que de tenir tous les caln-
» nets bien fermés ; il ne faut pas craindre que l'air
» devienne mauvais pour n'avoir pas été renouvel-
» lé : il ne peut avoir de qualité plus nuilible que celle
» de l'humidité. D'ailleurs les falles des cabinets font
» ordinairement affez grandes pour que l'air y circu-
» le ailêment : au relte en choùiffant un tems fec , on
» poarroit les ouvrir au milieu du jour. Pendant l'été
» on a moins à craindre de l'humidité : mais la cha-
» leur produit de mauvais effets , qui font la fermen-
» tation & la corruption. Plus l'air elt chaud , plus les
» infectes font vigoureux ; plus leur multiplication
» elt facile & abondante , plus les ravages qu'ils font
» font conlidérables : il faut donc parer les rayons du
» foleil par tous les moyens poffibles , & ne jamais
» donner l'entrée à l'air du dehors , que lorlqu'il elt
» plus frais que celui du dedans. Il leroit à louhai-
» ter que les cabinets d'HiJloire naturelle ne tuffent ou-
» verts que du côté du nord ; cette expofition elt cel-
» le qui leur convient le mieux , pour les prélerver
» de l'humidité de l'hy ver , & des chaleurs de l'été.
» Enfin par rapport à la dillribution & aux propor-
» tions de l'intérieur , comme les planchers ne doi-
»> vent pas être fort élevés , on ne peut pas faire de
» très-grandes falles ; car fi l'on veut décorer un ca-
» binet avec le plus d'avantage , il faut meubler les
» murs dans toute leur hauteur , & garnir le plat-
» fond comme les murs , c'elt le feul moyen de faire
» un enlemble qui ne loit point interrompu ; &c même
» il y a des choies qui font mieux en place étant iuf-
» pendues que partout ailleurs. Mais fi elles fe trou-
» vent trop élevées , on fe fatiguerait inutilement à
» les regarder fans pouvoir les bien diftinguer. En
» pareil cas , l'objet qu'on n'apperçoit qu'à demi , elt
» toujours celui qui pique le plus la curiofité : on ne
» peut guère voir un cabinet a" Hifloire naturelle, fans
» une certaine application qui eit déjà allez fatiguait-
CAB
» te ; quoique la plupart de ceux qui y entrent , ne
» prétendent pas en faire une occupation férieufe ,
» cependant la multiplicité ôc la lingularité des ob=
» jets fixent leur attention.
» Par rapport à la manière de placer & de préfen-
» teravantageufementles différentes pièces d;Hiftoi-
» re namrelle , je crois que l'on a toujours à choifir.
» Il y en a pluiieurs qui peuvent être aufli convena-
» blés les unes que les autres pour le même objet ;
» c'elt au bon goût à lervir de règle ». M. d'Auben-
ton ne prétend entrer dans aucune dii'cufiion à cet
égard ; il s 'elt contenté dans la delcnption du cabi-
net du Roi , de rapporter la façon dont les choies de
différens genres y font difpofees , 6c en même tems
les moyens de les conlerver.
Me lèra-t-il permis de finir cet article par I'expo-
fition d'un projet qui ne leroit guère moins avanta-
geux qu'honorable à la nation ? Ce leroit d'élever à
la nature un temple qui fût digne d'elle. Je l'imagine
compofé de pluiieurs corps de bâtimens proportion-
nés à la grandeur des êtres qu'ils devraient renfer-
mer : celui du milieu leroit ipatieux , immeme , &
deltiné pour les monftres de la terre & de la mer r
de quel étonnement ne feroit-on pas frappé à l'entrée
de ce lieu habité par les crocodiles , les éiéphans &
les baleines ? On paiTeroit de-là dans d'autres falles
contigués les unes aux autres , où l'on verrait la na-
ture dans toutes les variétés & les dégradations. On
entreprend tous les jours des voyages dans les dif-
férens pays pour en admirer les raretés ; croit-on
qu'un pareil édifice n'attireroit pas les hommes cu-
rieux de toutes les parties du monde , & qu'un étran-
ger un peu lettré pût fe réloudre à mourir , fans
avoir vu une fois la nature dans Ion palais ? Quel
fpectacle que celui de tout ce que la main du tout-
puiffant a répandu fur la furface de la terre , expol'é
dans un feul endroit ! Si je pouvois juger du goût
des autres hommes par le mien, il me femble que
pour jouir de ce fpectacle , penonne ne regretterait
un voyage de cinq ou fix cents lieues ; & tous les
jours ne fait-on pas la moitié de ce chemin pour voir
des morceaux de Raphaël &l de Michel-Ange? Les
millions qu'il en coûterait à l'état pour un pareil éta-
blilfement ieroient payés plus d'une fois par la mul-
titude des étrangers qu'il attirerait en tout tems. Si
j'en crois Philtoire , le grand Colbert leur fit autre-
fois acquitter la magnificence d'une fête pompeufe ,
mais paifagere. Quelle comparailon entre un car-
roufel & le projet dont il s'agit ? & quel tribut ne
pourrions-nous pas en elpérer de la curiofité de tou-
tes les nations ?
Cabinets secrets , (Phyjîque) forte de cabi-
nets dont la conitruction elt telle que la voix de celui
qui parle à un bout de la voûte , elt entendue à l'au-
tre bout : on voit un cabinet ou chambre de cette
elpece à l'Obfervatoire royal de Paris. Tout l'artifi-
ce de ces fortes de chambres conhite en ce que la
muraille auprès de laquelle elt placée la perlonne
qui parle bas , foit unie & cintrée en ellipi'e ; l'arc
circulaire pourrait aufli convenir , mais il feroit
moins bon. Voici pourquoi les voûtes elliptiques ont
la propriété dont nous parlons. Si on imagine (;%.
16. n°.j. Pneumatique. ) une voûte elliptique ACB ,
dont les deux foyers foient F6cf, voye?^ Ellipse,
& qu'une perlonne placée au point /"parle tout aufli
bas qu'on peut parler à l'oreille de quelqu'un , l'air
pouffé fuivant les directions FD, FC, FO, &c. le
réfléchira à l'autre foyer / par la propriété de l'el-
liple qui elt connue & démontrée en Géométrie ;
d'où il s'enfuit qu'une perlonne qui aurait l'oreille à
l'endroit/, doit entendre celui qui parle en F aufit
diltindtement que li elle en étoit tout proche.
Les endroits fameux par cette propriété étoient la
prilbn de Denys à Syraçufe , qui çhangeoit en un
CAB
bruit considérable un fimple chuchotement , & uri
claquement de mains en un coup très-violent ; l'a-
quéduc de Claude, qui portoit la voix , dit-on, juf-
qu'à feize milles; & divers autres rapportés par Kir-
cher dans fa Phonurgie.
Le cabinet de Denys à Syracufe étoit , dit-on , de
forme parabolique ; Denys ayant l'oreille au foyer
de la parabole , entendoit tout ce qu'on diibit en bas ;
parce que c'elt une propriété de la parabole , que
toute action qui s'exerce fuivant des lignes parallè-
les à l'axe , tè réfléchit au foyer. Voye^ Parabole
6* Foyer.
Ce qu'il y a de plus remarquable fur ce point,
en Angleterre , c'eft le dôme de l'égide de S. Paul de
Londres , où le battement d'une montre fe fait en-
tendre d'un côté à l'autre , & oii le moindre chucho-
tement femble faire le tour du dôme. M. Derham
dit que cela ne fe remarque pas feulement dans la
galerie d'en-bas , mais au-deflus dans la charpente
où la voix d'une perfonne qui parle bas eft portée en
rond au-deflus de la tête julqu'au fommet de la vou-
te , quoique cette voûte ait une grande ouverture
dans la partie iupérieure du dôme.
Il y a encore à Glocefler un lieu fameux dans ce
genre , c'eft la galerie qui eft au-deflus de l'extré-
mité orientale du chœur , & qui va d'un bout à l'au-
tre de l'églife. Deux perionnes qui parlent bas , peu-
vent s'entendre à la diftance de 15 toiles. Tous les
phénomènes de ces ditférens lieux dépendent à peu-
pres des mêmes principes. Voye^ Echo & Porte-
yoix. (0)
CABIRES , f. m. pi. ( Myth. ) divinités du paga-
nifme révérées particulièrement dans i'ile de Samo-
thrace. Ces dieux étoient félon quelques-uns , Plu-
ton , Prolerpine , &: Cerès ; & félon d'autres c'étoient
toutes les grandes divinités des payens. Ce nom eft
Hébreu ou Phénicien d'origine, cabir, ikfignifîe grand
& puijjant. Mnafcas met ces dieux au nombre de
trois ; Axieres , Cerès ; Axiocerfa , Proferpine ; &
Axioccrfus, Pluton, auxquels Dionyliodore ajoute un
quatrième nommé Cajlmil, c'eft-à-dire Mercure. On
croyoit que ceux qui étoient initiés dans les myfteres
de ces dieux en obtenoient tout ce qu'ils pouvoient
fouhaiter : mais leurs prêtres avoient affecté de ré-
pandre une fi grande obfcurité fur ces myfteres ,
qu'on regardoit comme un facrilége de prononcer
feulement en public le nom de ces dieux. De-là vient
que les anciens fe font contentés de parler des myf-
teres de Samothrace tk. du culte des dieux Cabires ,
comme d'une choie très-refpe&able , mais fans entrer
dans le moindre détail. M. Pluche dans Ion hifloire
du Ciel , dit que les figures de ces dieux venues d'E-
gypte en Phénicic , ci de-là en Grèce, portoient fur
la tête des feuillages , des cornes , des ailes & des glo-
bes, qui, ajoute cet auteur,ne pouvoient pas manquer
de paroître ridicules à ceux qui ne comprenoientpas
la lignification de ces lymboles , comme il arriva à
Cambyle roi des Perles en entrant dans leur temple.
Mais ces mêmes figures, fifingulieres en apparence ,
délîgnoient Olîris , Ilis & Horus , qui enfeignoient au
peuple à fe précautionner contre les ravages de l'eau.
Voilà, félon lui, à quoi le réduifoit tout l'appareil
de ces myfteres , à apprendre à ceux qui y étoient
initiés une vérité fort Ample & fort commune.
Cabires , dans Origene" contre Celfc , fe prend
pour les anciens Pcrians qui adoroient le foleil & le
feu. Hyde dans fon Hijloire de la religion des anciens
Perfans confirme cette étymologie. Cabiri , dit-il,
chap.xxix./«/z£ Gabri, voce Perfîcd aliquantulum detor-
td ; c'eft-à-dire, que du mot Gabres ou Guebres , qui
eft Perlàn , on a fait celui de Cabires. Voye{ G-UE-
Sres. (G)
C ABIMES , f. f. pi. ( Myth. ) fêtes que les anciens
C A
493
habitans de Lemnos & de Thebes , célebrbient en
l'honneur des dieux Cabires.
^ Cette fête paflbit pour être très-ancienne , & an-
térieure au tems même de Jupiter, qui la renouvella
à ce qu'on dit. Les cabines fe célebroient pendant la
nuit ; & l'on y confaeroit les enfans depuis un certain
âge. Cette confécration étoit, félon l'opinion payen-
ne, un préfervatif contre tous les danger de la mer,
La cérémonie de la confécration , appellée &ps«-
c-i; , ou $port<r/*oç , confiftoit à mettre l'initié fur uri
throne , autour duquel les prêtres faiioient des dan-
fes. La marque des initiés étoit une ceinture ou échar-
pe d'un ruban couleur de pourpre.
Quand on avoit commis quelque meurtre , c'é-
tait un afyle que d'aller aux lacnfices des cabiries.,
Meurfius produit les preuves de tout ce que nous
venons d'avancer. (G)
CABITA , ( Géog. ) une des îles Philippines avec
un port , à deux lieues de Manilla.
C ABLAN , ( Géog. ) ville & royaume d'Afie dans
l'Inde, au-delà du Gange, dépendant du roi d'Ava.
CABLE , f. m. ( Corderie. ) fe dit en général de tous
cordages néceflaires pour traîner & enlever les far-
deaux ; ceux qu'on nomme brayers , en Architecture «
fervent pour lier les pierres, baquets à mortier, bon-
riquets à moilon , &c. les haubans , pour retenir &
haubaner les engins , grues , & gruaux , &c. les vin-
taincs qui font les moindres cordages , pour conduire
les fardeaux en les montant , & pour les détourner
des faillies Se des échaffauds. Ils fervent aufli à atta-
cher les boulins pour former les échaffauds. On dit
bander, pour tirer un cMe ; ce mot vient du Latin capu-
lum , ou caplum , tait du verbe capere , prendre. Voyez
Bander. (/>)
Cable, f. m. en Marine, que quelques-uns écri-
vent & prononcent chable : ce dernier n'eft point ufité
par les gens de mer. C'eft une groiie & longue corde
ordinairement de chanvre, faite de trois hanlieres ,
dont chacune a trois torons. ^.Hansiere 6* Toron,
Le cable fert à tenir un vaifîeau en rade , ou en
quelque autre lieu. On appelle aufli cables les cordes
qiii fervent à remonter les grands bateaux dans les
rivières , & à élever de gros fardeaux dans les bâti-
mens par le moyen des poulies.
Il y a ordinairement quatre cables dans les vaif-
feaux , & le plus gros s'appelle maître-cable. Ce maî-
tre-cable eft long de 1 20 brades , 6c ceh: eft caufe que
le mot de cable le prend aufli pour cette mefure : de
forte que quand on dit qu'on mouille à deux ou trois
cables de terre ou d'un vaifîeau , on veut dire qu'on
en eft à la diftance de 240 ou 360 brades. A l'égard de
la fabrique des cables ,vo;e^ Cordage, Corde, &
Corderie.
Les plus petits vaifleaux ont au moins trois ca-
bles ; il y a le cable ordinaire , le maître cable , & le
cable d'affourchi qu'on nomme aufli groflin , qui eft lé
plus petit : la longueur la plus ordinaire de ces ca-
bles eft de 1 10 & de 1 20 brafles.
On proportionne fouvent la groffeur du cable de
la moyenne ancre à la longueur du vaifleau , & on
lui donne un pouce d'épais pour chaque dix pies de
cette longueur. On fe fert bien aufli de ces mêmes
cables pour la maîtrefle ancre. Lorfqu'on mouille dans
un très - mauvais tems , on met jufqu'à deux cables à
une même ancre , afin qu'ils ayent plus de force , &
qu'en même tems l'ancre puiffe jouer plus facilement.
Un vaifleau de 134 pies de long de l'étrave à l'é-
tambord ,doit être pourvu de quatre cables de treize
pouces de circonférence , ce de 100 brades de long,
ce d'un autre de douze pouces.
Mais les vaifleaux de guerre font pourvus de ca-
bles de 1 20 brafles , afin qu'ils jouent plus ailément
fur l'ancre : ces cables ont vingt à vingt-deux pouces
de circonférence, & font çompofés de trois hanfig*
494
C A
€ A B
res : chaque hanfiere eft de trois torons , & chaque
toron eft de trois cordons & d'environ 600 fils ; de
forte que le cable entier eft de 1 800 fils , pris à vingt
pouces de circonférence, &il doit peler 9 5 00 livres
fans être goudronné. Ces proportions peuvent ce-
pendant varier un peu , & ne font pas toujours éga-
lement fuivies.
Quelques-uns règlent fur la largeur du vaiffeau
les proportions des cables , & donnent autant de de-
mi-pouces de circonférence au maître cable que le vaif-
feau a de pies de largeur. D'autres font tous les ca-
bles prefque d'égale groffeur pour les navires de guer-
re : mais pour les navires marchands dont les équipa-
ges font foibles , c'eft-à-dire qui ont peu de monde ,
on ne leur donne qu'un gros cable pour maître cable ,
& on fait le cable ordinaire d'un huitième plus léger ,
& le cable a" affourchi encore plus léger d'un autre hui-
tième.
Le cable Je touê n'eft qu'une fimple hanfiere , &
Ton ne s'en fert ordinairement crue dans les rivières
& dans les endroits où les bancs rendent le chenal
étroit & le refferrent.
Le cable a"affourche fert avec le cable ordinaire ou
avec le maître cable ; parce que fi les vaiffeaux n'é-
toient que fur une ancre ou fur un cable , ils ne man-
queroient pas de tourner au premier changement de
vent & de marée , ce qui pourrait nuire à la fureté
du vaiffeau.
Les cables & cordages dont on fe fert dans les vaif-
feaux , ont depuis trois pouces jufqu'à vingt & vingt-
deux pouces de circonférence , & font compofés d'un
plus grand nombre de fils , félon leur groffeur. On en
auroit pu joindre ici une table , de même que de leur
poids: mais on la trouvera à l'article de laCoRDERiE.
Quoiqu'on ait dit ci-devant que les vaiffeaux ont
ordinairement quatre cables, les vaiffeaux du Roi en
font mieux pourvus. Le vaiffeau le Dauphin royal du.
premier rang , avoit quatre cables de vingt-trois pou-
ces de circonférence & de 1 10 braffes de long , pe-
fant chacun 9650 livres en blanc , & 12.873 livres
goudronné : quatre cables de vingt -deux poucss de
circonférence , pefant chacun 8900 livres en blanc ,
& 1 1869 livres goudronné : deux de douze pouces,
pefant chacun 2610 livres en blanc, & 3495 livres
goudronnés : deux de onze pouces , pefant 2154 liv.
en blanc , & 2872 livres goudronnés : un tournevire
de douze pouces de circonférence & de foixante braf-
fes de longueur , pefant 1400 liv. blanc , & 1866 liv.
goudronné. Voye^ Goudronnerie.
Biner le cable , voyei BlTTER.
Couper le cable, le tailler, c'eft le couper à coups
de hache fur l'écubier , & abandonner l'ancre , afin
de mettre plus vite à la voile , foit pour éviter d'être
furpris par le gros tems ou par l'ennemi , foit dans le
deffein de chaffer fur quelque vaiffeau , n'ayant pas
alors le loifir de lever l'ancre & de retirer le cable.
On laiffe alors une bouée fur l'ancre attachée avec
une corde , par le moyen de laquelle on fauve l'an-
cre &C le cable qui y tient , lorfqu'on peut renvoyer
le chercher.
Lever un cable , c'eft le mettre en rond en manière
de cerceau , pour le tenir prêt à le filer , & en donner
ce qu'il faut pour la commodité du mouillage.
Donner le cable à un vaiffeau , c'eft fecourir un vaif-
{eau qui eft incommodé ou qui marche mal , ce qu'on
fait en le toiiant ou en le remorquant par l'arriére
d'un autre vaiffeau. En terme de Marine cela s'ap-
pelle tirer en ouaiche.
Laiffer traîner un cable fur le filiale du vaiffeau , cette
manœuvre fe fait pour rallentir la courte du vaiffeau.
Les vaiffeaux corfaires fe fervent affez volontiers de
cette rufe pour contrefaire les méchans voiliers.
Les cables font dits avoir un demi-tour ou un tour,
lorfquun vaiffeau qui eft mouillé Cv affourché , a fait
un tour ou deux en obéiffant au vent ou au courant
de la mer ; enforte qu'il ait croifé ou cordonné près
des écubiers les cables qui les tiennent.
Filer du cable, c'eft lâcher & laiffer defcendre le
cable. Filer le cable bout pour bout , c'eft lâcher &c
abandonner tout le cable qui tient l'ancre , & le laif-
fer aller à la mer avec l'ancre, quand on n'a pas le
tems de la lever.
Le cable à pic, c'eft lorfque le vaiffeau approchant
de l'ancre qui eft mouillée , ce cable commence à fe
roidir pour être à pic , c'eft-à-dire perpendiculaire.
CABLE , adj. en termes d' 'Architecture , fe dit des
cannelures quilont rejc vées & contournées en forme
de cables. ^oyqCANNLLLKr. (P)
CÂBLÉ , en termes de Blafon , le dit d'une croix faite
de deux bouts de cable de vaiffeau, ou bien d'une
croix couverte ou entortillée de corde ; ce qu'on ap-
pelle plus proprement croix cordée. Voye^ Croix
& Cordée. ( F)
CABLER , terme de Boutonnier ; c'eft affembler
plufieurs fils ou cordons au moyen d'un infiniment
nommé fabot , & les tordre avec un rouet pour en
former un cordon plus gros. Voyt{ Sabot.
CABLEAU , f. m. ( Marine. ) on fe fert de ce mot
pour le diminutif d'un cable : on l';.pr'ique commu-
nément à la corde qui fert d'amarre à la chaloupe
d'un vaiffeau lorfqu'elle eft mouillée.
On appelle auffi cableav. ou cmcenelle cette longue
corde dont les bateliers fe fervent pour tirer les ba-
teaux en remontant les rivières. ( Z )
CABLIAU , ( Hifi. nat. Ichthyolog.) lesHollandois
nomment ainii un poiffon de mer tort grand, fort
long , dont la tête eft fort groffe. On pêche ce poif-
fon dans tous les ports de mer, où il fe trouve en abon-
dance. C'eft un excellent manger. Sa chair eft très-
blanche , & fe divife en grandes écailler. Ce n'eft au-
tre chofe que la morue fraîche. Voye^ Morue.
* CABLIAUX , f. m. plur. {Hifi. mod. ) nom de
factieux qui troublèrent la Hollande en 1 3 50. lis le
prirent du poiffon appelle cabliau, & ils fepromet-
,-- toient de dévorer leurs adverfaires , comme le ca-
bliau dévore les autres poiffons. La faction oppofée
fe fit appeller des Hocckens ou Hameçcnniers.
CABO , ( Géog. ) royaume d'Afrique dans la Ni-
gritie, fur le Riogrande vers le fud.
CABOCEIRA ou CABACEIRA , ( Géog. ) pref-
qu'île attachée au continent de l'Afrique près de Mo-
fàmbique par une langue de terre que la mer cou-
\ re iorlqu'elle eft haute. Elle eft fort près & vis-à-vis
de l'île Saint-George.
CABO -CORSO, {Géog.) cap d'Afrique fur la
côte d'Or de Guinée , auprès duquel les Anglois ont
une importante fortereffe. Long. 18. 20. lat. 4. 40.
CABO-MISERADO , ( Géog. ) cap d'Afrique fur
la côte de Malaguette , près d'une rivière nommée
Duro.
CABOCHE , f. f. terme de Cloutier, efpece de clous
qu'on nomme plus fouvent clous àfouliers , parce que
le menu peuple & les ouvriers de la campagne en
font garnir le deffous du talon & de la femelle de
leurs fouliers , afin qu'ils durent plus long-tems. Il y
a deux fortes de caboches ; les unes qu'on nomme à
deux têtes , & les autres à tête de diamant. En général
ces fortes de clous font courts , & ont la tête large.
CABOCHE , adj. terme de Blajon , fe dit d'une tête
d'animal coupée derrière les oreilles par une feciion
parallèle à la face , ou par une feefron perpendicu-
laire ; au lieu qu'on diroit coupé , li la lecfron étoit
faite horilontalement. ( F)
CABOCHON , f. m. terme de Jouaillier , pierre pré-
cieufe qui n'eft que polie, & qu'on a laiffée telle qu'on
l'a trouvée , c"eft-ù--ire à laquelle on a feidement ôté
ce qu'elle avoit de brut, fans lui donner aucune ri-
C A B
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495
gure particulière. On dit fur-tor.t rubis-cabochon. Voy.
Rubis.
* CABOLETTO , ( Commerce. ) monnoie d'Italie
ufitée clans les états de la république de Gènes , qui
vaut environ quatre fous de notre argent.
CABOT , poiffon de mer. Voye^ Mulet.
CABOTER , v. neut. terme de Marine , pour dire
aller de cap en cap , déport en port , naviguant le long
des côtes.
CABOTAGE , f. m. ( Marine. ) on appelle ainfi la
navigation le long des côtes. On entend auffi par ce
mot la connoirTance des mouillages , bancs , courans
& marée que l'on trouve le long d'une côte.
CABOTTIERE, 1". f. ( Commerce. ) barque plate ,
longue & étroite , d'environ trois pies de profondeur,
avec un gouvernail très-long , fait en forme de rame.
Cette eipece de bateau n'eft utile qu'au commerce
qui fe fait par la rivière d'Evre. Cette rivière prend
la iource du côté de Chartres , paiTe à Dreux , & fe
jette dans la Seine à un quart de lieue au - defl'us du
Pont-de-1' Arche. (Z)
CABOUCH AN , ( Gêog. ) ville d'Afie dans le Co-
rafian , dépendante de Nicha bour.
C ABRA , ( Géog. ) ville d'Afrique au royaume de
Tombut dans la Nigritie , fur le bord du Sénégal.
Long. 18. 23. lat. l5. 10.
CABRÉ , adj. en termes de Blafon , fe dit d'un che-
val acculé.
La Chevalerie dans le Maine , de gueules au che-
val cabré d'argent.
CABRER , v. pafT. fe cabrer, ( Manège. ) fe dit des
chevaux qui fe lèvent &c dreffent fur les pies de der-
rière prêts à fe renverfer lorlqu'on leur tire trop la
bride , ou qu'ils font vicieux ou fougueux. Lorfqu'un
cheval fe cabre plufieurs fois de fuite, & fe jette fi
haut fur les jambes de derrière qu'il eft en péril de le
renverfer , on appelle ce defordre faire des ponts-le-
vis : il faut que le cheval ait beaucoup de force , &
lui tendre la main à propos , autrement ces ponts-
levis font très-dangereux. Le moyen de rendre obéif-
fant un poulain fujet à fe cabrer fouvent ôc à defo-
béir, eft de prendre le tems que fes pies de devant
retombent à terre , & lui appuyer alors fortement
des deux. ( V)
CABB.ERA, ( Géog.') contrée d'Efpagne dans la
partie feptentrionale du royaume de Léon.
CABRERA o« CAPRARIA, {Géog.) petite île
d'Efpagne dans la mer Méditerranée, à peu de dii-
tance de celle de Mayorque.
CABRES, f f. c'eft ainfi qu'on appelle, dans les
Manufactures d'ouvrages en foie, deux pièces de bois
de fept à huit pies de longueur , foùtenues d'un côté
par des pies qui les traverfent dans une mortoile de
neuf" à dix pouces de hauteur en-dehors. On s'en fert
pour placer l'enfuple quand on plie les chaînes, ou
qu'on les met fur l'enfuple.
CABRES , ( Géog. ) petite île d'Afrique près des
côtes de Guinée, à pende diftancede celle de Saint-
Thomas.
CABRESTAN, ( Géog. ) petite ville d'Afie dans
une plaine , formée par les montagnes qui régnent le
long du golfe Perfique.
CABRIOLE ou CAPRIOLE f. f. terme de Danfe ,
élévation du corps , faut léger & agile que les dan-
feurs font ordinairement à la fin des cadences.
Frifer la cabriole , c'eft agiter les pics avec vîteffe
tandis qu'ils font en l'air. En matière de danfe la ca-
briole eft la même choie que le faut. La demi-<.
eft lorlqu'on ne retombe que fur l'un des pies. rvyt{
Saut.
CABRIOLE, en termes de Manège , eft un faut
vif que le cheval l'ait fans aller en avant , de fa-
çon qu'étant en Pair il montre les fers, détache des
ruades aulîi loin qu'il peut les porter , tk fait du bruit
avec les pies. Ce mot vient de capreolare, & celui-ci
de capreolus.
La cabriole eft la plus difficile de toutes les ruades.
Il y a plufieurs fortes de caprioles : capriole droite ;
capriole en arrière ; capriole de coté ; capriole battue ou
frifée ; capriole ouverte. Lever à capriole. Aoy^ LEVER ;
voyei auffi SAUTER. ( F )
CABROLLE , poiffon de mer. Foye? BlCHE.
* CABRUS ou CAPRUS, (Myth. ) dieu particu-
lier qu'on honoroit à Phafelis, ville de Pamphilie :
on ne lui offroit en facrlfice que du poiffon falé ; ce
qui donna lieu de nommer proverbialement un re-
pas de poiffon falé , unjacrijice de Phafelites.
* CABUJ A , ( Hifl. nat. bot. ) plante d'Amérique
dont les feuilles rcficmblent beaucoup à celles du
chardon. On dit que les Américains travaillent cette
plante comme nous faifons le chanvre & le lin , &:
qu'ils s'en fervent pour faire du fil & des cordes.
C ABUL ou CABOUL , ( Géog. ) grande ville d'A-
fie dans les Indes , capitale du Cabufiftan , avec deux
bons châteaux.
CABULISTAN ou CABOULISTAN, province
d'Afie dans l'empire du Mogol , bornée au nord par
la Tartarie , à l'eft par la Cachemire, à l'oueft par
le Zabuliftan & le Candahar , au fud par le Multan.
On y trouve des mines de fer , des bois aromatiques,
& plufieurs fortes de drogues. Ce pays , peu fertile
d'ailleurs , eft cependant riche par le commerce.
* CABURA , (Géog.) endroit de la Mélopotamie
où il y a , dit-on , une fontaine dont les eaux ont une
odeur douce & agréable. Pline qui en parle , dit que
cette odeur leur fut laiffée par Junon , qui s'y bai-
gna une fois.
CABURLAUT , poiffon de mer ; Voye^ CHABOT.
CACAC A , ( Géog. ) ville d'Afrique au royaume
de Fez, proche Melille.
CACALIA , f. f. ( Hifl. nat. bot.) genre de plante
dont la fleur eft un bouquet à fleurons découpés en
quatre parties , portés par un embryon , & foûtenus
par un calice cylindrique. Lorfque la fleur eft paflée,
chaque embryon devient une graine garnie d'une
aigrette. Tournefort , Injl. rei kerb. Foye^ Plante.
<*> r ■ ;.-**.
* On dit que fa racine macérée dans du vin, ou
mâchée feule , foulage dans la toux ; & que fes baies
pulvérifées tk réduites en cerat , adoucifient la peau,
& effacent les rides.
* CACAO ou CACAOYER , f. m. ( Hifl. nat. )
arbre étranger.
Sa defeription. Le cacaoyer eft un arbre d'une gran-
deur & d'une groffeur médiocres , qui augmentent
ou diminuent félon la qualité du fonds où il vient.
Sur la côte de Caraquc , par exemple , il prend
beaucoup plus de croifTance que dans nos îlesFran-
çoifes.
Son bois eft poreux & fort léger ; fon écorce eft
afTez unie, tk. de couleur de canelle plus ou moins
foncée , fuivant l'âge de l'arbre.
Ses feuilles font longues d'environ neuf pouces
fur quatre , dans le fort de leur largeur, qui diminue
vers les deux extrémitésoù elles fe terminent en poin-
te; leur couleur eft d'un verd un peu foncé, mais
plus clair en-deflus qu'en-deflbus ; elles font ati
à des pédicules longs de trois pouces, & d'une ligne
de diamètre. L'alongement de ces pédicules forme
le long du milieu de chaque feuille une cote droite
un peu relevée, qui depuis fa naiffance jufqu'au
bout va en diminuant ; & de part ce d 'autre de cette-
côte fortent alternativement treize à quatorze nervu-
res obliques.
Comme ces feuilles ne tombent guère que fuccef-
fivement, & à mefure que d'autres les remplacent,
l'arbre ne paroît jamais dépouillé :U fleurit en tout
49<>
C A C
teins ; mais plus abondamment vers les deux folfti-
ces que dans les autres laitons.
Ses fleurs qui font régulières & en rofe , mais fort
petites & fans odeur , fortent par bouquets des aifîel-
les des anciennes feuilles , dont on apperçoit encore ,
pour ainû dire , les cicatrices aux endroits oîi l'ar-
bre s'en étoit autrefois dépouillé. Une grande quan-
tité de ces fleurs coulent , & à peine de mille y en
a-t-il dix qui nouent ; en forte que la terre qui cil au-
deffous paroît toute couverte de ces faillies fleurs.
Chaque fleur eft attachée à l'arbre par un pédi-
cule délié , & long de cinq à fix lignes ; & quand
elle eft encore en bouton , elle n'a qu'em iron d
lignes de diamètre , fur deux & demie ou trois tout
au plus de longueur. Plus elle eft petite par rapport
à l'arbre & au fruit , plus elle m'a paru finguliere &
digne d'attention.
Lorfque le bouton vient à s'épanouir , on peut
confidérer le calice , le feuillage , & le cœur de la
fleur.
Le calice fe forme de l'enveloppe du bouton , di-
vifée en cinq parties ou feuilles de couleur de chair
fort pâle.
Les cinq véritables feuilles de même couleur leur
fuccedent , & rempliflent les vuides ou féparations
du calice. Ses feuilles ont deux parties ; l'une qui
eft au-defïbus en forme de tafle oblongue , panachée
intérieurement de pourpre , fe recourbe vers le cen-
tre par le moyen d'une étamine qui lui fert comme
de lien , d'oiiibrt enfuite au-dehors l'autre partie de
la feuille qui femble en être féparée , & eft formée
en manière de fer de pique.
Le cœur de la fleur eft compofé de cinq filets &
de cinq étamines , avec le piftil au milieu ; les filets
font droits , de couleur de pourpre , & difpofés vis-
à-vis des intervalles des feuilles ; les étamines font
blanches & courbes en-dehors , avec une efpece de
bouton au fommet qui s'engage dans le milieu de
chaque feuille pour la foûtenir.
Quand on obferve ces menues parties avec le mi-
crofeope, on diroit que la pointe des filets eft argen-
tine , & que les étamines font de cryftal , auffi bien
que le piftil que la nature femble avoir placé au cen-
tre , en forme de filet blanc , ou pour être les prémi-
ces du jeune fruit , ou pour lui fervir de détente , s'il
eft vrai que cet embryon ne fe produife & ne fe dé-
veloppe qu'à fa bafe.
Le cacaoyer porte prefque toute l'année des fruits
de' tout âge , qui mûriffent fuccefîïvement , mais qui
ne viennent point au bout des petites branches, com-
me nos fruits enEurope , mais le long de la tige & des
mères branches ; ce qui n'eft pas rare en ces pays-là,
où plufieurs arbres ont la même propriété : tels font
les cocotiers , les abricotiers de S. Domingue , les
calebafïiers , les papayers , &c.
Le fruit du cacao eft contenu dans une code, qui
d'une extrême petitefle parvient en quatre mois à la
groffeur & à la figure d'un concombre qui feroit
pointu par le bas , & dont la furface feroit taillée en
côte de melon.
Cette gouffe dans les premiers mois eft ou rouge
ou blanche , ou mêlée de rouge & de jaune ; & cette
variété de couleurs fait trois lortes d'arbres de cacao,
qui n'ont entr'eux que cette feule différence , que je
ne crois pas fuffilante pour établir trois efpeces de
cacao.
La première eft d'un rouge vineux & foncé , prin-
cipalement fur les côtés, lequel devient plus clair Ôc
plus pâle en mùrilTant.
La féconde , qui eft la blanche , eft au commen-
cement d'un verd fi clair , qu'il en paroît blanc ; peu-
à-peu elle prend la couleur de citron ; & le colorant
toujours de plus en plus , elle devient enfin tout-à-fait
jaune dans la maturité,
C A C
Là troifieme , qui eft rouge & jaune tout enfem-
ble, tient un milieu entre ces deux premières ; car
en mûrilîànt la rouge pâlit , & la jaune le renforce.
On a remarqué que les colles blanches font plus
trapues que les autres , lur-tout du côté qu'elles tien-
nent à l'arbre , & que les cacaoyers de cette forte en
rapportent communément davantage.
Si Ton fend une cie ces colles iuivant la longueur,
on trouve qu'elle a environ quatre lignes d'épailicur ,
& que fa capacité eft pleine d'amandes ce cacao ,
dont les intervalles font/remplis avant leur maturité
d'une i'ubltance blanche & ferme, mais qui le chan-
ge enfin en une elpece de mucilage d'une acidité
charmante ; c'eft pourquoi on fe donne fouvent le
piailir de mettie de ces amandes de cacao avec leurs
enveloppes dans la bouche, pour la rafraîchir agréa-
blement , & pour étanchei la foif : mais on le garde
bien d'y appuyer la dent, parce qu'en perçant la
peau du cacao on lentiroit une amertume extrême.
Lorlqu'on examine avec attention la ftructure in-
térieure de ces colles , & qu'on en anatomife , pour
ainli dire, toutes les paities, on trouve que les fi-
bres de la queue du fruit pafiàm à travers la cofTe
fe partagent en cinq branches ; que chacune de ces
branches fe divile en plufieurs filamens , qui le ter-
minent chacun au gros bout d'une des amandes ; &
que le tout enfemble forme comme une elpece de
grappe de vingt, vingt-cinq, trente à trente -cinq
grains au plus , rangés & appliqués l'un contre l'au-
tre dans la colTe avec un ordre merveilleux.
Après un grand nombre d'expériences , on n'y
trouve ni moins ni plus de vingt-cinq : peut-être qu'à
force de chercher les plus grolTes colles , dans les
fonds les plus féconds , & lur les fujets les plus vi-
goureux , on en pourroit trouver de quarante aman-
des ; mais comme cela n'ira jamais au-delà , il eft de
même certain qu'on ne trouvera point de colTes qui
en ayent au-delïous de quinze , à moins que ce ne
loient des cofîes avouées , ou le fruit de quelqu'ar-
bre fatigué , c'eft- à-dire , ulé de vieillefie , de mé-
chant fonds, ou par défaut de culture.
Lorlqu'on ôte la peau à quelqu'une des graines de
cacao , on découvre la lubftance de l'amande , qui
paroît tendre , liffe, un peu violette, & comme di-
vifée en plufieurs lobes , quoique dans la vérité elle
n'en ait que deux , mais fort irréguliers , & iortem-
barrafTés l'un dans l'autre.
Enfin coupant l'amande en deux fuivant la lon-
gueur , on trouve à l'extrémité du gros bout une ef-
pece de grain cylindrique de deux lignes de long ,
fur une demi-ligne de diamètre , qui eft le vrai ger-
me de la plante ; au lieu que dans nos amandes Eu-
ropéennes cette partie eft placée à l'autre bout.
On peut voir même en France cette irrégularité
des lobes , & le germe du cacao , dans les amandes
rôties & mondées pour faire le chocolat.
Du choix & de la dijpojuion du lieu pour planter uns
cacaoyere. Le cacaoyer croît naturellement dans plu-
fieurs contrées de la zone torride de l'Amérique ,
mais particulièrement au Mexique , dans les provin-
ces de Nicarague & de Guatimale , comme aulTi le
long des bords de la rivière des Amazones , & fur la
côte de Caraque , c'eft-à-dire , depuis Comana jui-
qu'à Carthagene , & à l'île d'Or ; on en a même trou-
vé quelques-uns dans les bois de la Martinique.
Les Elpagnols & les Portugais ont été les premiers
à qui les Indiens ont donné connoilïance du cacao ;
ils en ont long-tems ulé fans le communiquer aux
autres nations.
En 1 649 on ne connoilToit encore aux îles du Vent
qu'un feul arbre de cacao , planté par curioliré dans
le jardin d'un Anglois habitant de l'île de Sainte-
Ci oix. En 1655 les Caraïbes montrèrent à M. du Par-
quet le cacaoyer, dans les bois de l'île de la Martinique
dont
C A C
dont il étoit feigneur : cette découverte donna lieu
à plusieurs autres de même efpece , dans les mêmes
bois de la Capeftere de cette île ; &c c'eft apparem-
ment aux graines qu'on en tira que les cacaoyeres qu'on
y a depuis plantées doivent leur origine. Un Juif
nommé Benjamin y planta la première vers l'année
1660 : mais ce ne fut que vingt ou vingt-cinq ans
après, que les habitans de la Martinique commencè-
rent à s'appliquer à la culture du cacao , 6c à plan-
ter des cacaoyeres.
On appelle une cacaoyere , une efpece de verger
d'arbres de cacao plantés au cordeau , à peu près
comme nous difons en France une cerifaie , une pom-
meraie, une prunelaie , une fguerie , ècc.
Lorsqu'on veut planter une cacaoyere , il faut fur-
tout choifir la fituation du lieu, 6c la nature du ter-
roir qui lui conviennent.
Le cacaoyer demande un lieu plat , humide , & à
l'abri des vents ; une terre neuve , & pour ainfi dire
vierge , médiocrement grade , meuble & protonde ;
c'eft pourquoi les fonds nouvellement détrichés, dont
la terre eft noire & fabloneufe , qu'une rivière tient
frais , & que les coteaux ou mornes d'alentour ( pour
parler le langage du pays) mettent à couvert des
Vents , fur-tout du côté de la mer , font préférables
à toute autre fituation ; & l'on ne manque guère de
les mettre à cet ufage , quand on eft allez heureux
pour en avoir de femblables.
J'entends par fonds nouvellement défrichés , ceux
dont le bois vient d'être abattu exprès pour cela ; car
il faut remarquer qu'on place encore aujourd'hui tou-
tes les cacaoyeres au milieu des bois , de même qu'on
a fait depuis la création du monde ; & cela pour deux
raifons très-effentielles ; la première , afin que le bois
debout qui relie autour leur ferve d'abri ; & la fé-
conde , afin qu'elles donnent moins de peine à far-
der, la terre qui n'a jamais produit d'herbe n'en
pouffant que peu faute de graines.
Aux cacaoyeres plantées fur des éminences, la terre
n'a ni affez d'humidité ni affez de profondeur , &
ordinairement le pivot ou la maitreffe racine, qui
feule s'enfonce à plomb dans la terre , ne peut percer
le tuf qu'elle rencontre bien-tôt : les vents d'ailleurs
y ont plus de prife , font couler les fleurs nouées , &
pour peu qu'ils foient forts , abattent les arbres dont
prefque toutes les racines font fuperficiellcs.
C'eft encore pis aux coteaux dont la pente eft un
peu rude ; car outre les mêmes inconvéniens , les
avalaifons en entraînent la bonne terre , & décou-
vrent infenfiblement toutes les racines.
On peut donc conclurre que toutes ces fortes de ca-
caoyeres lbnt long-tems à porter , qu'elles ne font ja-
mais abondantes , &c qu'elles le ruinent en peu de
tems.
Il eft bon aufTî ( autant qu'il eft pofîîble ) qu'une
cacaoyere foit entourée de bois debout ; ou s'il y a
quelque côté d'ouvert , on doit y remédier de bon-
ne heure par une liiierc à plulieurs rangs de bana-
niers.
Il faut encore qu'une cacaoyere foit d'une gran-
deur médiocre ; car les petites , furtout dans les
fonds , n'ont pas affez d'air, & font comme étouf-
fées ; & les grandes jufqu'à l'excès font trop expo-
fées à la fechereffe 6c aux grands vents qu'on nom-
me ouragans en Amérique.
La place de la cacaoyere étant choiiie, & les di-
menlions déterminées , on le met à abattre le bois :
on commence par arracher les petites plantes , & à
couper les arbriffeaux & le menu bois ; puis on tron-
çonne les tiges & les groffes branches dos petits ar-
bres , & des médiocres ; on tait des bûchers &: on
allume des feux de toutes parts ; on brûle même fur
pié les plus gros arbres , pour s'épargner la peine
île les couper.
Tome II,
C A C
497
Lorfque tout eft brûlé , qu'il ne refte plus fur la
terre que les troncs des plus grands arbres qu'on né-
glige de faire confumer , & que l'abattis fe trouve
parfaitement nettoyé , on dreffe au cordeau des ai-
lées équidiitantes & parallèles , où l'on plante en
quinconce des piquets de deux à trois pies de long,
à l'intervalle de 5. 6. 7. 8. 9. ou 10 pies , en un
mot , à telle diftance qu'on a réfolu de donner aux
cacaoyers qu'ils repréfentent. Enfin on fait une pièce
de manioc de tout l'efpace défriché , prenant garde
de n'en planter aucun pié trop près des piquets.
On obfervera que les cacaoyeres plantées à «ren-
des diftances de 8. 9. & 10 pies donnent bien plus
de peine à tenir nettes dans les premières années
( comme nous dirons dans la fuite ) : mais auffi quand
elles font dans de bons fonds , elles réulïîffent mieux
de cette forte , rapportent 6c durent beaucoup plus.
Les habitans qui font preffés de leurs befoins ,
plantent plus près les arbres , parce que cela aug-
mente confidérablement le nombre des pies , & di-
minue en même tems le travail de les tenir nets.
Quand dans la fuite les arbres viennent à fe nuire
réciproquement par leur proximité , ils ont déjà re-
cueilli quelques levées de cacao , qui ont pourvu à
leurs néceffités les plus urgentes ; & au pis aller ils
coupent alors une partie des arbres pour donner de
l'air au refte.
A la côte de Caraque , on plante les cacaoyers à 1 z
& 1 5 pies d'intervalle , & l'on pratique des rigoles
de tems en tems pour les arrofer dans les grandes fé-
chereffes : on a fait auffi une heureufe expérience de
cette pratique à la Martinique depuis quelques an-
nées.
Au refte le manioc eft un arbufte dont les racines
gragées & cuites fur le feu , fourniffent la caffave
Cv la farine qui fervent de pain à tous les habitans
naturels de l'Amérique. On en plante dans les nou-
veaux abattis , non-feulement parce qu'il en faut né-
ceffairement à un habitant pour la nourriture de fes
nègres , mais auffi pour diminuer la production des
mauvaises herbes , & pour mettre à l'ombre les pies
de cacao qui lèvent , dont la plume tendre ni même
les fécondes feuilles ne pourroient rélîfter à l'ardeur
exceffive du foleil : c'eft pourquoi on attend que le
manioc puiffe ombrager le pié des piquets , avant
que de planter le cacao.
De la manière de planter une cacaoyere , & de la cul-
tiver juj'quà la maturité des fruits. Tout le cacao fe
plante de graine , le bois de cet arbre ne prenant
point de bouture. On ouvre une coffe de cacao , 6c à,
mefure qu'on en a befoin , on en tire les amandes ,
& on les plante une à une , commençant , par exem-
ple , par le premier piquet, on l'arrache & avec une
forte de houlette de fer bien affilée, ayant fait une ef-
pece de petit labour , & coupé , en béquillant tout
autour , les petites racines qui pourroient nuire , on
plante la graine à trois au quatre pouces de profon-
deur , Se l'on remet le piquet un peu à côté pour fer-
vir de marque ; Se ainfi de piquet en piquet , Se de
rang en rang , on parcourt toute la cacaoyere.
Il faut oblerver , i°. de ne point planter dans les
tems fecs ; on le peut à la vérité tous les mois , &
toutes les lunes vieilles ou nouvelles ; lorfque la fai-
fon eft fraîche , ce que la place eft prête : mais on
croit communément que plantant depuis le mois de
Septembre jufqu'aux tètes de Noèl > les arbres rap-
portent plutôt de quelques mois.
z°. De ne planter que de groffes amandes , & bien
nourries ; car, puifque dans les plus belles colles il
fe trouve des graines avortées , il y auroit de l'im-
prudence de les employer.
3°. De planter le gros bout des graines en bas,
c'eft celui-là qui rient par un petit filet au centre de
la colle quand en tire l'amande en dehors. Si on plan-
Rri;
493
C A C
toit le petit bout en bas , le pié viendrait tortu , &
ne réuffiroit point ; fi on plantoit la graine de plat ,
le pié ne laifleroit pas de venir affez bien.
4°. De mettre deux ou trois graines à chaque pi-
quet , afin que fi par malheur les criquets ou autres
petits infecles coupoient la plume encore tendre cl un
ou deux pics , il en reftât un troilieme , pour fup-
pléer au défaut des autres. S'il n'arrive point d'ac-
cident , on a au moins l'avantage de pouvoir choi-
fir enluite le brin qui eft le plus droit & de meilleu-
re venue : mais on ne fe réfout à couper les pies
furnuméraires , que lorfque celui qu'on a choifi, eft
couronné , & hors de nique félon toutes les appa-
rences.
Les graines de cacao lèvent dans huit , dix ou dou-
ze jours plus ou moins , félon que le tems plus ou
moins propre avance ou recule la végétation : le
grain cylindrique du germe venant à fe gonfler, pouf-
fe en bas la radicule , qui devient enfuite le pivot de
l'arbre ; & en haut la plume , qui eft un racourci de
la tige & des branches : ces parties croiflant , &C fe dé-
veloppant de plus en plus , les deux lobes de l'aman-
de un peu féparés & recourbés , fortent les premiers
de la terre , & à mefure que le pié s'élève , fe re-
drefTent & fe féparent tout-à-fait en deux feuilles
diflemblables , d'un verd obfcur , épaiff^s , inégales,
& comme recoquillées, qui font ce qu'on appelle les
oreilles de la plante : la plume paroît en même-tems,
& fe partage en deux feuilles tendres , &c d'un verd
clair & naifTant ; à ces deux premières feuilles op-
poiéefcdeux à deux en fuccedent deux autres de-mê-
me , a celles-ci deux troifiemes , le pié s'élève à pro-
portion , & ainfi de fuite durant une année ou en-
viron.
Toute la culture du cacao fe réduit alors à la pra-
tique de deux choies.
Premièrement à le recouvrir tous les quinze jours ,
c'eft à-dire , planter de nouvelles graines aux lieux
où les premières n'ont pas levé , ou bien plutôt , où
les pies ont été rongés par les criquets , & autres in-
fecles , qui font fou /ent un dégât terrible de ces nou-
velles plantes , lors même qu'on les croit hors de tout
danger. Quelques habitans font des pépinières à part,
& tranfplantent enfuite des pies de cacao où il en
manque ; mais comme ils ne prennent pas tous , lors
principalement qu'ils font un peu grands , ou que la
faifon n'eft pas favorable , & que la plupart même
de ceux qui prennent , font long-tems à languir , il a
toujours paru plus convenable de recouvrir avec la
graine.
Secondement , à ne laiffer croître aucune herbe
dans la cacaoyere , recommençant à farcler par un
bout dès qu'on a fini par l'autre ; & prenant garde
fur toutes choies de laiffer jamais grener aucune her-
be ; car s'il arrive une fois qu'on en laiffe monter en
graine , on a dans la fuite bien de la peine & du tra-
vail à détruire les mauvaifes herbes , & à tenir nets
les cacaoyers , parce que la végétation n'eft jamais
interrompue en ce pays-là par le froid.
Ces farclaifons continuelles durent jufqu'à ce que
les cacaoyers devenus grands , & leurs branches fe
croifant , l'ombrage empêche les herbes de pouffer;
èc que d'ailleurs, les feuilles tombant des arbres &
couvrant la terre , achèvent d'étouffer les herbes.
Ainfi finit le pénible exercice de farcler ; il fufHt
alors de faire tous les mois une revue eu le prome-
nant dans la cacaoyere , d'arracher par-ci par-là le
peu d'herbes qu'on y trouve , & de les traniporter
loin dans le bois , crainte des graines.
Dès que les cacaos ont neut mois , on doit com-
mencer à arracher le manioc , & taire fi bien qu'en
trois mois au plus tard il n'y en ait plus. À mefure
qu'on l'arrache , on peut encore en replanter une
rangée ou deux au milieu de chaque allée , ôc fe-
C A C
mer dans les autres vuides des concombres, des ci-
trouilles , des giraumonts & des choux caraïbes ; par-
ce que ces plantes ayant de grandes feuilles rempati-
tes , font fort propres à conferver la fraîcheur de la
terre , & à étouffer les méchantes herbes. Quand les
cacaoyers font parvenus à couvrir leur terre , on eft
contraint d'arracher tout , car rien ne peut plus pro-
fiter au-deffous.
Les cacaoyers d'un an ont ordinairement quatre pies
de tige ou environ , & commencent à faire leur tête
en pouffant tout à la fois cinq branches au fommet, qui
forment ce qu'on appelle Az couronne du cacao. Il arrive
rarement que cette couronne n'ait pas ces cinq bran-
ches ; & lorfque par quelque accident , ou contre
Tordre de la nature , elle n'en a que trois ou quatre ,
l'arbre ne vient jamais bien ; & il feroit peut-être
mieux de le recéper d'abord , & d'attendre une nou-
velle couronne qui ne feroit pas long-tems à fe for-
mer.
Si à la fin de l'année le manioc n'étoit pas enco-
re arraché , cela retarderoit la portée des arbres; &
leurs tiges montant trop haut , feroient foibles , veu-
les , & plus expoiées aux coups de vent: que fi elles
couronnoient , les couronnes feroient trop ferrées ,
& les mères branches ne s'évafant pas affez , les ar-
bres ne feroient jamais bien dégagés , & n'auroient
point l'étendue qui leur eft naturelle.
Quand tous les pies font couronnés , on fait
choix des plus beaux jets , & l'on coupe fans mifé-
ricorde tous les furnuméraires ; fi l'on ne prend bruf-
quement ce parti , on a bien de la peine à s'y réfou-
dre dans la fuite ; cependant il n'eft pas poffible que
des arbres ainfi accolés ne s'entrenuifent à la fin.
Les cacaoyers ne font pas plutôt couronnés qu'ils
pouffent de tems en tems un pouce ou deux au-def-
fous de leur couronne , de nouveaux jets qu'on ap-
pelle rejetions ; fi on laiffe agir la nature , ces rejet-
tons produifent bientôt une féconde couronne , fous
laquelle un nouveau rejetton venant à pouffer, en for*
me encore une troifieme , &c. C'eft ainfi que font
faits les cacaoyers naturels & fans culture , qu'on
trouve dans les bois de la Capefterre de la Martini-
que. Mais parce que toutes ces couronnes à plu-
fieurs étages ne font qu'anéantir en quelque manière
la première , qui eft la principale , & que l'arbre
abandonné à lui-même devient trop haut & trop ef-
filé ; on a foin tous les mois en fardant , ou en cueil-
lant le fruit , d'ébourgeonner , c'eft-à-dire , de châ-
trer tous ces rejettons ; & c'eft ce qu'on appelle fur
les lieux rejettonner.
On ne s'eft point encore avifé de tailler, non plus
que de greffer les cacaoyers ; il y a cependant une ef-
pece de taille qui pourroit leur être avantageufe. Il
eft confiant , par exemple , que ces fortes d'arbres
ont toujours quelque partie de bois mort, les uns
plus, les autres moins; fur-tout aux extrémités des
branches : & il n'y a pas lieu de douter qu'il ne leur
fût très-utile de retrancher ce bois moit jufqu'au vif
avec la ferpette : mais comme l'avantage qu'on en
retireroit ne feroit ni fi préfent , ni ii leniible que le
tems & le travail qu'on y employeroit ; il y a bien de
l'apparence qu'on négligera toujours cette opération,
& qu'on la traitera même de peine inutile. Les Efpa-
gnols n'en jugent pas de même, Se ils ont au contraire
un grand loin de retrancher tous ces bois morts ; aufîî
leurs arbres font plus vigoureux que les nôtres, &
donnent de plus beaux fruits. On doute qu'ils ayent
la même attention de les greffer, & que perfonne ait
encore tenté de le faire ; on croit néanmoins que les
cacaos en feroient bien meilleurs.
A mefure que les cacaoyers croiffent , ils fe dépouil-
lent peu à peu des feuilles de la tige ,• qu'il faut laif-
fer tomber d'elles-mêmes ; car dès qu'ils en font en-
tièrement dépouillés, Us ne font pas long-tems à fleu-
C A C
rir :.mais ces premières fleurs coulent ordinairement,
& on ne doit guère efpérer de fruit mûr avant trois
ans , encore faut-il que ce foit en bonne terre ; à qua-
tre ans la levée eft médiocre , & à cinq elle eft dans
toute fa force. Pour lors les cacaoyers portent ordinai-
rement pendant toute l'année des fleurs & des fruits
de tout âge ; il eft à la vérité des mois , où ils n'en
ont prefquc point , & d'autres où ils en font tout char-
gés ; vers les folftices les levées font toujours plus
abondantes que dans les autres faifons.
Comme dans les ouragans le vent peut faire Ië
tour du compas en très-peu d'heures , il eft mai-ailé
que perçant par l'endroit le plus foible , & le moins
couvert des cacaoyers , il n'y faffe bien du defordre ,
& il eft néceffaire d'y remédier le plus promptement
qu'il eft poffible. Si le vent n'a fait que renverfer les
arbres fans rompre leur pivot , en ce cas le meilleur
parti qu'il y ait à prendre , fur-tout dans les bonnes
terres , eft de relever fur le champ ces arbres , & de
les remettre en place ; les appuyant avec une four-
che , & les réchauffant bien avec de la terre d'alen-
tour : de cette manière ils font raffermis en moins de
•fix mois, & rapportent comme s'ils n'avoient jamais
eu de mal. Dans les mauvaifes terres , il vaut mieux
les laiffer couchés , rechauffer les racines., &: culti-
ver à chaque pié le rejetton de plus belle venue , &
le plus proche des racines qu'il pouflera , en retran-
chant avec foin tous les autres : l'arbre en cet état ne
laiffe pas de fleurir & de porter du fruit; & quand
dans deux ans le rejetton confervé eft devenu un ar-
bre nouveau , on étronçonne le vieux arbre à un de-
mi pié du rejetton.
De la cueillette du cacao , & de la manière de le faire
refluer &fécher, pour pouvoir être confervé & tranfporté en
Éurope.Le cacao eft bon à cueillir lorfque toute la coffe
a changé de couleur , & qu'il n'y a que le petit bou-
ton d'en-bas qui foit demeuré verd. On va d'arbre en
arbre, & de rang en rang , èc avec des gaulettes four-
chues, on fait tomber les coffes mûres, prenant gar-
de de ne point toucher à celles qui ne le font pas ,
non plus qu'aux fleurs : on employé à cela les Nègres
les plus adroits ; & d'autres qui les fuivent avec des
paniers , ramaffent les coffes à terre , & en font à
droit & à gauche dans la cacaoyere des piles qu'on
laiffe là quatre jours fans y toucher.
Dans les mois d'un grand rapport, on cueille tous
les quinze jours : dans les faifons moins abondantes ,
on cueille de mois en mois.
Si les graines reftoient dans les coffes plus de qua-
tre jours, elles ne manqueroient pas de germer & de
fe gâter; c'eft pourquoi, lorfque de la Martinique,
on a voulu envoyer aux îles voifines des coffes de
cacao pour avoir de la graine à planter, on a eu un
foin extrême de ne cueillir que lorfque le bâtiment
de tranfport alloit mettre à la voile , & de les em-
ployer d'abord en arrivant : il n'eft donc pas poffible
que les Efpagnols voulant avoir de la femence pour
produire ces arbres , laiffent parfaitement mûrir & lé-
cher les gouffes qui la contiennent , qu'après ils ôtent
la femence de ces gouffes, & qu'ils les fafferit loigneu-
fement lécher à l'ombre , pour les planter enfin en
pépinière, comme le rapporte Oexmelin, Hifloire des
aventuriers , tom. I.pag. 424. Il eft néceffaire de les
écaler dès le matin du cinquième jour au plus tard ;
pour cela on frappe fur le milieu des coffes, avec un
morceau de bois pour les fendre , & avec les mains
on achevé de les ouvrir en travers, & d'en tirer les
amandes qu'on met dans des paniers , jettant dans la
cacaoyere les coffes vuides pour lui fervir d'amande-
ment & d'engrais, quand elles font pourries, à peu
omme les feuilles de la dépouille îles arbres
i lit de fumier continuel.
lans une café tout le cacao écalé,
& on I le , fur une elpece de plancher vo-
Tome IL
C A C 499
Iant couvert de feuilles de balifier, qui ont environ
quatre pies de long fur vingt pouces de large; puis
entourant le cacao de planches recou vertes des mê-
mes feuilles , ce faifant une efpece de grenier qui
puiffe contenir toute la pile de cacao étendue, on cou-
vre le tout de femblables feuilles , qu'on affermit avec
quelques planches: le cacao ainfi entaffé, couvert,
& enveloppé de toutes parts , ne manque pas de s'é-
chauffer par la fermentation de les parties ihfenfi-
bles, & c'eft ce qu'on appelle fur les lieux rejfuer.
On découvre ce cacao fbir & matin , & l'on fait en-
trer dans le lieu où il eft des Nègres qui travaillant à
force des pies & des mains, le remuent bien & le
renverfent fens-deffus-deffous , après quoi on le re-
couvre comme auparavant avec les mêmes feuilles
ôc les mêmes planches. On continue cette opération
chaque jour jufqu'au cinquième, auquel il eft ordinai-
rement affez rejfùé; ce qu'on connoit à la couleur qui
eft beaucoup plus foncée, & tout-à-fait rouffe.
Plus le cacao reffue , & plus il perd de fa pefanteur
& de fon amertume: mais s'il ne reffue pas affez , il
eft plus amer, lent le verd, & germe quelquefois ;
il y a donc pour bien faire , un certain milieu à gar-
der, ce qui s'apprend par l'ufage.
Dès que le cacao a affez reffue , on le met à l'air,
& on Pexpofe au foleil pour le faire lécher en la ma-
nière fuivante.
On a déjà dreffé d'avance plufieurs établis à deux
pies ou environ , au-deffus du plan d'une cour defti-
née à cela ; ( ce font deux efpeces de fablieres paral-
lèles, à deux pies l'un de l'autre, affermies fur de
petits poteaux enfoncés dans la terre). On étend fur
ces établis plufieurs nattes faites de brins de rofeaux
refendus, afïèmblés avec des liens d'écorce de ma-
hot ; ( le mahot eft un arbrilfeau dont les feuilles font
rondes & douces au maniement , comme celle de la
guimauve; fon écorce qui fe levé facilement, 8c
qu'on divife en longs rubans, fert de ficelle & de cor ■
de aux habitans & aux fauvages) & fur ces nattes on
met du cacao reffue environ à la hauteur de deux pou-
ces , on le remue & on le retourne fort fouvent avec
un rabot de bois , fur-tout les deux premiers jours :
le foir on plie le cacao dans les nattes , qu'on recou-
vre de quelques feuilles de bahlier, crainte de la
pluie; on entait autant le jour quand il va pleuvoir.
Ceux qui craignent qu'on ne le vole la nuit, l'enferi
ment dans une cale.
Il y a des habitans qui fe fervent de caiffes d'envi-
ron cinq pies de long fur deux de large , & trois à
quatre pouces de rebord, pour faire fecher leur ta*
cao : elles ont cette commodité , que dans les gran-
des pluies ou qui lurviennent tout-à-coup, lorfque le
cacao commence à lécher, on peut vite mettre tou-
tes ces caiffes en pile l'une fur l'autre , enforte qu'il
ne refte que la dernière à couvrir , ce qui cil bientôt
fait avec des feuilles de balilier, recouvertes d'une
caiffe vuide renverfée. Mais ce qui rend l'ufage des
nattes préférable, eft que l'air qui palfe par-deffous à
travers les vuides des rofeaux, fait mieux lécher le
cacao. Des caiffes dont le fond leroit en |éfeau fort
ferré de fil de laiton , feroient excellentes ; mais il fau-
drait les faire faire en Europe, ce qui leroit une dé^
penle conlidérable.
Quand le cacao eft affez reffue, il faut lexpofer fur
les nattes quelque tems qu'il rafle : fi l'on pré^ '-voit
même une pluie abondante & de durée, il leroit bon
de le laitier moins refluer d'un demi-jour ou en\ iron ;
on remarque que quelques heures de pluie dans le
commencement, bien loin de lui mure, ne fen
qu'à le rendre plus beau & mieux conditioi
la belle faifon au lieu de cette pluie , il n'eft pas mal
de l'expoferles premières nuits au ferein 6c à la 10-
fee, La pluie même d'un jour ou deux ne lui fera pas
R r r ij
500
CAC
fort nuifible , fi l'on obferve de ne. le point couvrir
absolument jufqu'à ce qu'il ait eu un jour, ou tout au
moins un demi-jour de foleil; car après un jour de beau
tems, on le plie le foir dans fa natte, comme nous
avons dit , & après un demi-jour , on fe contente fans
le plier , de le couvrir pendant la nuit de feuilles de
baliiier , arrêtées avec des pierres mifes défais aux
deux bouts. Mais une trop longue pluie fait fendre
le cacao; & parce qu'alors il ne le conferve pas long-
tems, on l'employé fur les lieux à taire du chocolat.
Si le cacao n'eft pas affez reflué , ou qu'on le plie
trop tôt dans fa natte, il eft fujet à germer ; ce qui le
rend tort amer, & tout-à-fait mauvais.
Lorlque le cacao a été une fois plié dans fa natte ,
& qu'il a commencé à fe lécher, il ne faut plus fouf-
frir qu'il le mouille ; il ne s'agit alors que de le remuer
de tems en tems , jufqu'à ce qu'il foit fuffifamment
fec ; ce qu'on connoît, fi en prenant une poignée de
cacao dans la main , & la ferrant , il craque ; alors il
eft tems de le mettre en magalin , & de l'expolèr en
vente.
Ceux qui veulent acquérir la réputation de livrer
de belle marchandife, fe donnent le foin, avant
que d'enfutailler leur cacao, de trier & de mettre à
part les grains trop petits , mal nourris , & plats, qui
font feulement moins beaux à la vue, & rendent un
peu moins en chocolat.
C'eft de cette manière que les graines ou amandes
de cacao léchées au foleil, nous font appoitées en
Europe, & vendues chez les Epiciers, qui les distin-
guent (je ne fai pourquoi ) en gros Cv petit caraque ,
& en s,ros & petit cacao des îles ; car fur les lieux il
n'eft point fait mention Je cette diverfité , & il faut
apparemment que les marchands qui en font commer-
ce , aycnt trouvé leur compte à faire ce triage , puil-
que naturellement tout cacao provenu du même ar-
bre & de la même coffe, n'eft jamais de la même
groffeur. Il eft bien vrai que comparant une partie
entière de cacao avec une autre, on peut trouver que
l'une eft pour la plupart compofée de plus gros grains
que l'autre, ce qui peut provenir ou de l'âge du plant,
ou de la vigueur des arbres, ou bien de la fécondité
particulière de la terre : mais très-aflïïrement il n'y a
point d"efpece de cacao qu'on puifle appeller grande
par rapport à une autre qu'on puifle appeller petite.
Le cacao qui nous vient de la côte de Caraque, eft
plus onctueux &c moins amer que celui de nos îles ,
& on le préfère en Efpagne & en France à ce der-
nier : mais en Allemagne & dans le Nord , on eft , à
ce qu'on dit, d'un goût tout oppolé. Bien des gens
mêlent le cacao de Caraque avec celui des îles moi-
tié par moitié , & prétendent par ce mélange rendre
leur chocolat meilleur. On croit que dans le fond la
différence des cacaos n'eft pas fort confidérable , puif-
qu'eile n'oblige qu'à augmenter ou diminuer la dofe
du fucre pour tempérer le plus ou le moins d'amertu-
me de ce fruit. Car il faut confidérer, comme nous
l'avons déjà dit, qu'il n'y a qu'une elpece de cacao ,
qui croît aulfl naturellement dans les bois de la Mar-
tinique, que dans ceux de la côte de Caraque ; que
le climat de, ces lieux eft prefquele même, & par con-
féquent la température des laitons égales , & qu'ainlî
il ne fauroit y avoir entre ces fruits de différence in-
trinfeque qui foit tort effentielle.
A l'égard des différences extérieures qu'on y remar-
que, elles ne fauroient provenir que du plus ou du
moins de fécondité des terroirs , du plus ou du moins
de foin donné à la culture des arbres, du plus ou du
moins d'induftrie & d'application de ceux qui le pré-
parent & qui le travaillent, depuis fa cueillette juf-
qu'à fa livraifon ; & peut-être même de tous les trois
enfemble ; ce qu'on peut obferver à la Martinique
même, où il y a des quartiers oîi le cacao réuflit mieux
que dans d'autres, par la feule différence des terres
CAC
plus ou moins grafles, plus ou moins humide .
On a l'expérience de ce que l'attention à la culture
& à la préparation du cacao , peuvent ajouter à fon
prix : avec des foins & de l'intelligence , on trouve
le moyen de faire la plus belle marchandife de toute
l'île , & de fe procurer la préférence de tous les mar-
chands pour la vente & le prix du cacao , iur tous les
voifins.
Le cacao de Caraque eft un peu plat , & reffemble
affez par fon volume & fa figure à une de nos groffes
fèves; celui de S. Domingue , de la Jamaïque , & de
l'île de Cube , eft généralement plus gros que celui
des Antilles. Plus le cacao eft gros &c bien nourri , &
moins il y a de déchet après l'avoir rôti & monc é.
Le bon cacao doit avoir la peau fort brune & allez
unie ; & quand on l'a ôtée, l'amande doit fe montrer
pleine , bien nourrie, & lifle ; de couleur de noifette
fort obfcure au-dehors , un peu plus rougeâtre en-de-
dans ; d'un goût un peu amer & aftringent , lans fen-
tir le verd ni le moili; en un mot fans odeur & fans
être piqué des vers.
Le cacao eft le fruit le plus oléagineux que la na-
ture produife ; il a cette prérogative admirable de ne
jamais rancir, quelque vieux qu'il foit, comme font
tous les autres fruits qui lui font analogues en quali-
té , tels que les noix , les amandes, les pignons , les
piftaches , les olives , &c
On nous apporte aufli de l'Amérique du cacao ré-
duit en pains cylindriques d'environ une livre cha-
cun ; & comme cette préparation eft la première Se
la principale qu'on lui donne pour faire le chocolat ,
il me femble à propos d'aioûter ici la manière de la
faire.
Les Indiens , dont on l'a tirée , n'y faifolent pas
grande façon ; ils faifoient rôtir leur cacao dans des
pots de terre , puis l'ayant mondé de fa peau & bien
écrafé & broyé entre deux pierres, ils en formoient
des maffes avec leurs mains.
Les Eipagnols , plus induftrieux que les Sauva-
ges , & aujourd'hui les autres nations , à leur exem-
ple , font choix du meilleur cacao & du plus récent.
( Comme le cacao n'eft jamais fi net , que parmi les
bons grains il n'y en ait d'avortés , de la terre , des
pierres, &c. il faiit, avant que de l'employer, faire
pafler ces ordures à travers un crible , qui leur don-
ne iflue fans donner paffage aux amandes de cacao.)
Ils en mettent environ deux livres dans une grande
poêle de fer fur un feu clair, & ils les remuent 6z
les retournent continuellement avec une grande lpa-
tule , jufqu'à ce que les amandes foient affez rôt'.es
pour être facilement dépouillées de leur peau ; ce
qu'il faut frire une à une, & les mettre à part, pre-
nant un foin extrême de rejetter les grains cariés r
les moilis , & toute la dépouille des bons ; car ces
pellicules reliées parmi le cacao ne fe duTolvent ja-
mais dans aucune liqueur , pas même dans l'eftomac ,
& fe précipitent au fond des taffes de chocolat , dont
le cacao n'a pas été bien mondé. Les ouvriers , pour
expédier plus promptement cette opération é-: gagnes
du tems , mettent une groffe nappe fur une table , ÔC
y étendent leur cacao for tant tout chaud de la poêle,
puis ils font couler le rouleau de fer deflus , pour faire
craquer & détacher les pellicules du cacao ; enfin ils
vannent le tout dans un van d'olîer, jufqu'à ce que
le cacao foit parfaitement mondé.
Si on a eu foin de peler le cacao chez l'épicier , &
qu'enluite on le repefe après qu'il eft rôti & mondé ,
on y trouvera environ un fixieme de déchet, un peu
plus, un peu moins , félon la nature & les qualités du
cacao; c'eft-à-dire, par exemple, que de trente livres
d'achat , il en reliera à peu-près vingt-cinq toutes
mondées.
Tout le cacao étant ainfi rôti 6c mondé à diverfes
rcpriles , on le met encore une fois rôtir dans la me-
C A C
me poêle de fer, mais avec un feu moins violent ; on
remue (ans ceffe les amandes avec la fpatule , jufqu'à
ce qu'elles foient rôties également &c au point qu'il
tant; ce qu'on connoît au goût favoureux & à la cou-
leur brune fans être noire ; l'habileté conlifte à éviter
les deux extrémités, de ne les pas rôtir fuffiiàmmcnt
& de les trop rôtir, c'eft-à-dire de les brûler. Si on ne
les rôtit pas afTez , elles confervent une certaine ru-
deffe de goût defagréable; & fi on les rôtit jufqu'à les
brûler , outre l'amertume & le dégoût qu'elles con-
tractent , on les prive entièrement de leur on&uofité ,
& de la meilleure partie de leurs bonnes qualités.
En France , où on outre ordinairement toutes chc-
fes, on s'eft fort entêté du goût de brûlé & de la cou-
leur noire , comme de qualités requifes au bon cho-
colat ; ne confidérant pas que charbon pour charbon
il vaudroit autant y mettre celui du feu que celui du
cacao. Cette obfervation n'eft pas feulement confor-
me à la raifon & au bon fens : mais elle eft d'ailleurs
confirmée par le contentement unanime de tous ceux
qui ont écrit fur cette matière , & elle eft de même
autoriiée par la pratique univcrfelle de toute l'Amé-
rique.
Lorfque le cacao eft rôti à propos & bien mondé ,
on le pile dans un grand mortier pour le réduire en
maffe grofficre , qu'on pafle enfin fur la pierre juf-
qu'à ce qu'elle foit d'une extrême fîneffe , ce qui de-
mande une explication plus étendue.
On choifit une pierre qui rélifte naturellement au
feu, & dont le grain foit ferme , fans être ni trop doux
pour s'égrainer, ni trop dur pour recevoir le poli.
On la taille de feize à dix-huit pouces de large fur
vingt-fept à trente de long & trois d'épaiffeur , en-
forte que fa furface foit courbe & creufe au milieu
d'environ un pouce & demi ; cette pierre eft affer-
mie fur un chafîis de bois ou de fer , un peu plus re-
levé d'un côté que de l'autre : on place deflbus un
brafier pour échauffer la pierre , afin que la chaleur
mettant en mouvement les parties huileufes du ca-
cao , & le reduifant en confiftance liquide de miel,
facilite beaucoup l'action d'un rouleau de fer , dont
on fe fert pour le travailler avec force , le broyer,
& l'affiner jufqu'à ce qu'il n'y ait ni grumeau , ni la
moindre dureté. Ce rouleau eft un cylindre de fer
poli , de deux pouces de diamètre fur dix-huit ou
environ de long , ayant à chaque bout un manche
de bois de même grofieur , & de fix pouces de long
pour placer les mains de l'ouvrier.
Quand la pâte eft autant broyée qu'on le juge né-
ceffairc, on la met toute chaude dans des moules de
fer blanc , oîi elle fe fige & fe rend folide en très-peu
de tems. La forme de ces moules eft arbitraire & cha-
cun les peut faire à fa fantaific : cependant les cylin-
driques qui peuvent contenir deux à trois livres de
matière , me paroiffent les plus convenables , parce
que les pains les plus gros fe confervent plus long-
tems dans leur bonté, & font plus commodes pour
le maniement quand il s'agit de les râper. On doit
conferver ces billes enveloppées de papier dans un
lieu îêc , & obfcrver qu'elles font fort fufceptibles
des bonnes & des mauvaifes odeurs , & qu'il eft bon
de les garder cinq ou lix mois avant que d'en ufer.
Au refte le cacao étant fuffifamment broyé & pafle
fur la pierre , comme nous venons de l'expliquer, fi
l'on veut achever la compolition du chocolat en
malle, il ne s'agit plus que d'ajouter à cette pâte une
poudre paflec au tamis de foie , & compofée de lu-
cre, de canelle , &c li l'on veut de vanille , fuh ant
les dofes & les proportions que nous enfeignerons
dans la fuite de cet article ; de repafler le tout fur la
pierre pour le bien mêler & incorporer cnfemble ,
& de cliftribiier enfin cette confection Américaine
dans des moules de fer blanc en Tonne de tablettes
d'environ quatre onces chacune , ou demi-livre li
l'on veut.
C A C
5oî
Propriétés du cacao. Le cacao eft fort tempéré , nour-
riflant , & de facile digeftion. Il répare promptement
les efprits diffipés & les forées épuilées ; il eft falu»
taire aux vieillards.
Ufages du cacao; on en fait des confitures , du cho-
colat , & l'on en tire l'huile qu'on appelle beurre de
cacao.
Du cacao en confiture. On fait choix des colles de
cacao à demi mûres ; on en tire proprement les aman-
des fans les endommager, Se on les met tremper pen-
dant quelques jours dans de l'eau de fontaine , que
l'on a foin de changer foir & matin : enfuite les ayant
retirées & efïïiyées , on les larde avec des petits lar-
dons d'écorce de citron & de canelle , à peu-pres
comme on fait les noix à Rouen.
On a cependant préparé un lirop du plus beau fu-
cre , mais fort clair , c'eft-à-dire où il y ait fort peu
de fucre; & après l'avoir bien purifie & bien clarifié,
on l'ôte tout bouillant de deffus le feu , on y jette les
grains de cacao , ck. on les y laiffe tremper pendant
vingt-quatre heures , après quoi on les retire de ce
firop; & pendant qu'on les laiffe égoutter, on en fait
un nouveau femblable au précédent, mais plus fort
de lucre, où on les fait pareillement tremper durant
vingt-quatre heures. On réitère cinq ou fix fois cette
opération , augmentant à chaque fois la quantité de
fucre , fans les mettre jamais fur le feu ni donner
d'autre cuiffon. Enfin ayant tait cuire un dernier fi-
rop en confiftance de lucre, on le verfe fur les cacaoi
qu'on a mis bien efiùyer dans un pot de fayence pour
les conferver , &: quand le lirop eft prefque refroidi ,
on y mêle quelques gouttes d'effence d'ambre.
Quand on veut tirer cette confiture au fée , on ôte
les amandes hors de leur lirop ; ck après les avoir bien
égouttées, on les plonge dans une baliine pleine d'un
firop bien clarifié & fort de fùcre , & fur le champ on
les met dans une étuve, où elles prennent le candi.
Cette confiture , qui reffemble afTez aux noix de
Rouen , eft excellente pour fortifier l'eftomac fans
trop l'échauffer, ce qui fait qu'on peut même en don-
ner aux malades qui ont la fièvre.
Du chocolat. Foye^ l'article CHOCOLAT.
Beurre de cacao. On prend du cacao rôti , mondé , &
pafle fur la pierre ; on jette cette pâte bien fine dans
une grande baffine pleine d'eau bouillante fur un feu
clair, où on la laiffe bouillir jufqu'à la confomption
prefque entière de l'eau ; alors on verfe deffus une
nouvelle eau dont on remplit la baffine : l'huile mon-
te à la furface, & fe fige en manière de beurre, à me-
fure que l'eau fe refroidit. Si cette huile n'eft pas
bien blanche , il n'y a qu'à la faire fondre dans une
baffine pleine d'eau chaude , où elle fe dégagera ce
fe purifiera des parties rouffes &c terreftres qui lui ref-
toient.
A la Martinique cette huile eft en confiftance de
beurre : mais portée en France , elle devient comme
du fromage afTez dur, qui fe fond néanmoins & fe
rend liquide à une légère chaleur; elle n'a point d'o-
deur fort fenfible , ci a la bonne qualité de ne ran-
cir jamais. L'huile d'olive ayant manqué une année,
on ufa de celle de cacao pendant tout un carême :
elle eft de fort bon goût; & bien loin d'être malfai»
faute, elle contient les parties les plus eflentielles &
les plus falutaires du cacao.
Comme cette huile eft très-anodvne, elle
cellente a l'intérieur pour guérir l'enrouenw
pour émouffer l'acrete des fels qui dans le rhume pi-
cotent la poitrine. Pour s'en fer\ ir on la tait tondre ,
on y mêle une fuffifante quantité de li..
on en forme de petites tablettes, qu'on retient le plus
long-tcms qu'on peut dans la bouche, les laiffant fon-
dre tout doucement fans les avaler.
L'huile de cacao prife à propos , pouri
core merveilleufe contre les poifons c<
502
C A C
n'a pas de moindres vertus pour l'extérieur • i°. elle
cit. la meilleure & la plus naturelle de toutes les pom-
mades , dont les dames qui ont le teint l'ec puiffent ie
fervir , pour fe le rendre doux & poli , fans qu'il y
parohTe rien de gras ni de luifant. Les Efpagnols du
Mexique en connoiffent bien le mérite : mais com-
me en France elle durcit trop , il faut nécefTairement
la mêler avec l'huile de ben, ou celle d'amandes dou-
ces tirée fans feu.
2°. 6i l'on vouloit rétablir l'ancienne coutume
que les Grecs & les Romains avoient d'oindre le
corps humain d'huile , il n'y en a point dont l'ufa-
ge répondît mieux aux vues qu'ils avoient de con-
ferver par ce moyen aux parties , & même de leur
augmenter la force & la fouplefie des mufcles , &c
de les garantir des rhûmatilmes & de plulieurs au-
tres douleurs qui les affligent. On ne peut attribuer
l'anéantiflement de la pratique de ces ondions qu'à
la mauvaife odeur & à la mal-propreté qui l'accom-
pagnoient ; mais comme en fubftituant l'huile de ca-
cao à celle d'olive, on ne tomberait point dans ces
inconvéniens , parce que celle-là ne lent rien , &
qu'elle fe feche plutôt fur le cuir ; rien fans doute ne
feroit plus avantageux , fur-tout pour les perfonnes
âgées , que de renouveller aujourd'hui un ufage û
autorifé par l'expérience de toute l'antiquité.
3°. Les Apothicaires doivent employer cette huile
préférablement à toute autre choie pour fervir de
bafe à leurs baumes apoplectiques ; parce que toutes
les graiffes ranciflent , & que l'huile de mufeade blan-
chie avec l'efprit de vin , conferve toujours un peu
de fon odeur naturelle , au lieu que l'huile de cacao
n'eft point fujette à ces accidens.
4°. Il n'y en a aucune plus propre pour empêcher
les armes de rouiller , parce qu'elle contient moins
d'eau que toutes les autres huiles dont on fe fert
ordinairement pour cela.
5°. Aux îles de l'Amérique , on fe fert beaucoup
de cette huile pour la guérifon des hémorrhoïdes :
quelques-uns en ufent fans mélange ; d'autres ayant
fait fondre deux ou trois livres de plomb , en ramaf-
fent la craffe , la réduifent en poudre , la parlent au
tamis de foie , l'incorporent avec cette huile , & en
font un Uniment très-efficace pour cette maladie.
5°. D'autres pour la même intention mêlent avec
3ette huile la poudre des cloportes , le lucre de fa-
turne , le pompholyx , & un peu de laudanum.
D'autres fe fervent utilement de cette huile pour
appaifer les douleurs de la goutte , l'appliquant chau-
dement fur la partie avec une comprefle imbibée
qu'ils couvrent d'une lerviette chaude. On pourrait
en ufer de même pour les rhûmatilmes.
6°. Enfin l'huile de cacao entre dans la compofi-
tion de l'emplâtre merveilleux , & de la pommade
pour les dartres.
Emplâtre, excellent pour la guérifon de toutes fortes
d'ulcères. Prenez huile d'olive une livre ; cerufe de
Venife ( elle eft plus chère que celles d'Hollande &
d'Angleterre , qui font mélangées de craie , & qu'il
faut lailTer aux peintres ) en poudre demi -livre:
mettez-les dans une baffine de cuivre ou dans une
caiîerole de terre verniffiée fur un feu clair & mo-
déré , remuant toujours avec une fpatule de bois
îufqu'à ce que le tout loit devenu noir, & de con-
fiftance prelque d'emplâtre ( ce qu'on connoît en
laiiïant tomber quelques gouttes fur une affiette
d'étain ; car fi la matière fe fige fur le champ , &
ne prend prelque point aux doigts en la maniant ,
elle eft fuffifamment cuite. ) Alors on y ajoute de la
cire coupée en petites tranches , une once & demie ;
huile ou beurre de cacao , une once ; baume de copa-
hu , une once & demie. Quand tout eft fondu & bien
mêlé, on tire la baffine de deffus le feu , & remuant
toujours avec la fpatule , on y ajoute peu à peu les
C A C
drogues fuivantes réduites en poudre très-fubrile j
fép? rément, & puis bien mêlées enfemble ; favoir, de
la pierre calaminaire rougie au milieu des charbons,
puis éteinte dans l'eau de chaux , & broyée fur le
porphyre , une once ; de la myrrhe en larmes , de
l'aloès iûccotrin , de l'ariftoloche ronde , de l'iris de
Florence , de chacun deux dragmes ; du camphre ,
une dragme. Lorfque tout fera bien incorporé , cri
le laiflera un peu refroidir, après quoi on le veriera
fur le marbre , pour en former des magdaléons en la
manière ordinaire.
Ce remède produit des effets ftirprenans ; il gué-
rit les ulcères les plus rebelles &c les plus invétérés,
pourvu que l'os ne loit pas carié; car en ce cas,
pour ne pas travailler en vain , il faut commencer par
la cure de l'os, & traiter enfuite l'ulcère avec l'em-
plâtre. On panie la plaie foir & matin après l'avoir
nettoyée avec l'eau de chaux , & bien efluyée avec
un linge fin.
Le même emplâtre peut fervir plufieurs fois , pour-
vu qu'avant que de l'appliquer on l'ait lavé avec
l'eau de chaux , qu'on l'ait efluyé avec un linge , pré-
lente au feu un moment , & qu'on l'ait un peu ma-
nié avec les doigts pour le renouveller en quelque
manière. On exhorte les perfonnes charitables de fai-
re cet emplâtre & de le distribuer aux pauvres, fur-
tout à ceux de la campagne.
Pommade excellente pour guérir les dartres , les rubisy
& les autres difformités de la peau. Prenez fleurs de
foufre de Hollande , ( la fleur de fourre de Hollande
eft un pain comme le ftil de grain, fort légère , dou-
ce, friable, & plutôt blanche que jaune; elle ne
doit pas moins coûter de trente lous la livre. A ion-
défaut on prendra de ceile de Marleille, qui eft en
poudre impalpable, légère, & d'un jaune doré) ; fal-
petre rafiné, de chacun demi- once; bon précipité
blanc , deux dragmes ; ( l'examen du précipité blanc
fe fait ainfi. On en met un peu fur un charbon allu-
mé ; s'il s'exhale , c'eft figne qu'il eft bon & fidèle ;
s'il refte fur le feu ou qu'il fe fonde , ce n'eft que de
la cerufe broyée , ou quelqu'autre blanc femblable ;)■
benjoin , une dragme. Pilez pendant long-tems le
benjoin avec le falpètre rafiné dans un mortier de
bronze , jnfqu'à ce que la poudre foit très-fine; mê-
lez-y enfuite la fleur de foufre & le précipité blanc ;
& quand le tout fera bien mélangé , gardez cette pou-
dre pour le befoin.
A la Martinique , lorfqu'il étoit queftien- de m'en-
fervir, je l'incorporais avec le beurre de eacao ;mzi$
en France où il durcit trop , je lui ai fubftitué la pom-
made blanche de jafmin la plus odorante; cette odeur
j.ointe à celle du benjoin corrige en quelque manière
celle du foufre , que beaucoup de perfonnes abhor-
rent. Hifl. nat. du cacao, vol. in-iz , cke{ M.di Dhoury.
* C AC AOTETL , ( Hijl. nat. ) nom qu'on donne
dans les Indes à une pierre que Borelli nomme en La-
tin lapis corvinus Indice ; on prétend que fi on vient à
faire chauffer cette pierre dans le feu , elle fait un
bruit très-confidérable , & femblable à un coup de.
tonnerre.
CACATOWA , ( Géog. ) petite île de la mer des
Indes , près de l'île de Sumatra.
CACCIONDE , f. f. ( Pharm. ) nom d'une pilule
dont le cachou fait la bafe , & que Baglivi recomman-
de dans la dyflenterie.
CAÇERES , ( Géog. ) petite ville d'Efpagne dans-
l'Eftramadure , proche les confins de Portugal : elle
eft fur la rivière de Sabrot , à neuf lieues d'Alcantara.
Long. iz. 8. lat. 3$. 15.
Caçeres de Camerinha, (Géog.) petite ville
d'Alie dans f île de Luçon. Lon. 142. 26. lat. 14. zà.
CACHALOT, f. m. cete Cluf(Hift. nat. Icktkyol.)
très-grand poiiïbn*de mer, du genre des cétacées.
Willughby fait la defeription, d'aprèsClulius , d un.
C A C
cachalot qui fut jette fur les côtes occidentales de la
Hollande par une violente tempête : cet animal rel-
piroit encore lorfqu'on l'apperçut , environ dix heu-
res après la tempête. Il avoit cinquante-deux ou cin-
quante-trois pies de longueur, & trente-un pies de
circonférence, & même beaucoup plus félon d'au-
tres relations : on ne put pas avoir des mefures exac-
tes , parce qu'une partie du corps s'étoit enfoncé dans
le fable par les mouvemens que fit l'animal avant que
de mourir. Il y avoit quinze pies de diftance depuis
le bout de la mâchoire fupérieure jufqu'aux yeux. Le
palais étoit percé de quarante-deux alvéoles , vingt-
un de chaque côté, dans lefquels entraient autant
de dents de la mâchoire inférieure , qui étoient de
la grandeur du pouce d'un homme de haute taille.
Ce poiffon avoit fur la tête auprès du dos un .• . it
d'environ trois pies de diamètre, par lequel il jettoit
de l'eau en l'air. La mâchoire inférieure étoit longue
de fept pies. Les yeux de cet animal étoient très-pe-
tits à proportion de fa groffeur énorme : on auroit
pu les entourer en faifant toucher l'extrémité du
pouce avec celle du premier doigt. Il y avoit quatre
pies de diftance entre les veux & les nageoires; feize
pies depuis les mâchoires jufqu'au nombril ; trois pies
depuis le nombril jufqu'à la verge ; trois pies 6c demi
depuis la verge jufqu à l'anus , &£ treize pies 6c demi
depuis l'anus jufqu'à la queue. Les nageoires avoient
quatre pies quatre pouces de longueur , 6c un pié d'é-
naiffeur. La longueur du membre éto t de li.x pouces
après la mort de l'animal. La queue étoit fort ép liffe
& elle avoit treize pies d'étendue. On tira de la tète
de ce poiffon du blanc de baie. ne en afiez grande quan-
tité, pour remplir plus du quart d'un tonneau ; & le
corps entier rendit environ quarante tonneaux de
graifle , fins compter celle qui le i ép ndit fur la terre
& dans la mer. La peau du dos étoit ;>oire comme
celle des dauphins ou des thons ; le ventre étoit blanc.
Cluiius fait mention d'un autre cachalot qui avoit
foixante pies de longueur , quatorze pies de hauteur,
& trente-fix pies de circonférence.
M. Ahderîon fait mention de pluficurs cachalots
dans Ion hijloire de Groenland , &c. Il y en a , dit cet
auteur, qui ont de grofles dents plus ou moins lon-
gues , un peu arrondies & plates par le défais ; les
autres les ont minces 6c recourbées comme des fau-
cilles. On ne trouve dans le détroit de Davis & aux
environs de Spitzberg , qu'une efpece de cachalot. Il
a les dents cou tes , grofles 6c applaties ; la tète fort
groffe ; deux nageoires longues aux côtés ; une lorte
de petite nageoire qui s eieve fur le dos , & une queue
large de douze ou quinze pies. Les cachalots de cette
efpece voyagent par troupes. On en a vu qui avoient
plus de cent pies de longueur, & quifaiioientenfouf-
flant l'eau un très-grand bruit que l'on pourroit com-
parer aufon des cloches. Ces poiffons le trouvent en
quantité au cap du Nord , <m fur les côtes de Finmar-
chie : mais on en prend rarement , parce qu'ils font
plus agiles que les ! tnd, & qu'ils
n'ont que deux ou trois endroits a t-deflus de la na-
geoire où le harpon puiffi pénétrer ; d'ailleurs leur
graille cil fort tendineufe, ce ne rend pas beaucoup
d'huile.
Les marins, dit M. Anderfon , diftinguent deux ef-
peces de cachalots qui le reffemblent parfaitement par
la figure du corps eic par les dents , mais qui différent
en ce que les uns font verdâtres . & ont un crâne ou
couvercle dur & offeux par-deffus le cerveau ; les
autres font gris fur le dos , & blancs fous le ventre ,
6c leur cerveau n'eft recouvert que par une forte
membrane qui eft de l'épaiffeur du doigt. On prétend
que cette différence ne < - ; e l'âge du poiffon;
Lorfqu'on a ôté la peau du haut de la tête des ca-
chalots qui n'ont point de crâne, on trouve de la graille
de i'epaùieur de quatre doigts , 6c au - délions une
C A C
503
membrane cpaifTe & fort nerveufe qui fert de crâne ,
6c plus bas une autre cloifon qui eft aflez femblable
à la première , & qiri s'étend clans toute la têt,
le muieau jufqu'à la nuque. La première 1
eft entre ces deux membranes, renferme le c
le plus précieux, & dont on prépare le meilleur blanc
de baleine. Cette chambre eft divifée en plufieurs
cellules , qui font formées par une forte de réfeau
reffemblant en quelque façon à un gros crêpe. Dans
le cachalot fur lequel cette defeription a été faite , on
tira de cette chambre fept petits tonneaux d'huile
qui étoit claire 6c blanche: mais lorfqu'on la jettoit
fur l'eau , elle fe coaguloit comme du fromage ; &
■ >n l'en 1 etiroit , elle redevenoit fluide comme
auparavant. Au-deffous de la première chambre il y
en a une autre qui le trouve au-deffus du paiais , Se
qui a depuis qu tre jufqu'à le hau-
teur, félon ij groffeur du poiffon, & eft remplie
de blaUe de baleine: il eft renfermé comme le miel
dans de petites cellules , dont les parois rcffemblent
à la pellicule intérieure d'un œuf. A mefure que l'on
enlevé le blanc de baleine qui eft dans cette cham-
bre , il en revient de nouveau en allez grande quan-
tité , pour que le tout rempliilè jufqu'à onze pet.ts
tonneaux. La matière qui remplace celle que l'on
tire , fort d'un vailfeau qui eft auprès de la tête du
poiffon , & qui eft gros comme la cuiffe d'un homme ;
il s'étend le long de l'épine jufqu'à la queue , où il n'eft
pas plus gros que le dogt. Lorfqu'on coupe la graifle
du cachalot, il faut éviter ce vailfeau; car fi on le
coupe, le blanc de baleine s'écoule par l'ouverture.
Le cachalot que l'on prend fur les cotes de la nou-
velle Angleterre & aux Bermudes , eft une efpece
différente. Ses dents font plus groifes & plus larges ,
elles redemblent aux dents de la roue- d'un moulin,
& font de la groffeur du poignet. On trouve dans les
cachalots de cette efpece des boules d'ambre-gris qui
ont jufqu'à un pié de diamètre , & qui pèlent jufqu'à
vingt livres. Voye[ C article Baleine. (/)
CACHAN , ( Géog.) ville de Perle dans l'Irac,
fituée dans une grande plaine à vingt- deux lieues
d'ifpahan. Il s'y fait grand commerce d'étorîés de
foie en or & argent , & de belle fayence.
CACH AO , ( Géog. ) grande ville d'Alie , capitale
de la province du même nom , au royaume de Ton-
quin. Les Anglois 6c les Hollandois y ont un comp-
toir. Long. Ij2. J2.lat. 22.
* CACHE-ENTRÉE, f. m. c'eft ainfi que les Ser-
ruriers appellent une petite pièce de fer qui dérobe
l'entrée d'une ferrure. Il y a des cacht-emrézs faits
avec beaucoup d'art, f^oye^ l'article Serrure , 6"
l'explication des planches de Serrurerie.
CACHECTIQUES, adj. plur. (Médecine.) c'eft
ainfi qu'on appelle des remèdes bons pour prévenir
la cachexie, ou la guérir lorfque le malade en eft at-
taque. Il s'agit pour parvenir à la guérifon de cette
maladie, d'en lever les obftAtcfions commençantes,
même les plus enracinées. Les préparations de Mars,
les fèls apéritifs , les amers, 6c furtout le quinquina ,
ont cette vertu.
Ces remèdes fontfouvent employés trop tard. Les
malades négligent de demander du fecours , & laif-
fent parce moyen enraciner kir eux la came d'une
maladie qui devient par la fuite facheufe, èv qu'on
auroit pu détruire au commencement, f^oy'i Ca-
CHEXIE. ( A )
CAL HEMIRE , ( Géog.) province d'Alie dans les
états du Mogol au nord : elle a environ trente
de long fur douze de large. Ce pays eft peuple , &c
fertile en pâturages , riz , f ornent , légumes : 1 y
trouve beaucoup de bois & de bétail. Les h.ibitans
font adroits 6c laborieux , & les femmes y font bel-
les On les croit Juifs d'origine ,pa >nt tou-
jours à la bouche le nom de Moyl'e, qu'ils croyent
504
C A C
avoir été dans leur pays , ainfi que Salomon. Ils font
aujourd'hui Mahométans ou idolâtres. Diction, de M.
<&Vofgien.
Cachemire, c'eft la capitale de la province de
ce nom. Long, pj. lat. 34. 30.
CACHEO , ( Géog. ) ville d'Afrique dans la Ni-
gritie, fur la rivière de Saint-Dominguo : elle appar-
tient aux' Portugais. Long. 2. 40. lat. iz.
♦CACHER, DISSIMULER, DÉGUISER,
(Gram.) termes relatifs à la conduite que nous avons
à tenir avec les autres hommes , dans les occafions où
il nous importe qu'ils fe trompent fur nos penfées &c
fur nos actions , ou qu'ils les ignorent. On cache ce
qu'on ne veut point laiflër appercevoir ; on diffimule
ce qui s'apperçoit fort bien ; on dégiàfe ce qu'on a in-
térêt de montrer autre qu'il n'eft. Les participes dijji-
mulé & caché fe prennent dans un fens plus fort que
les verbes diffimuler & cacher. L'homme caché eft ce-
lui dont la conduite eft impénétrable par les ténèbres
dont elle eft couverte ; l'homme dijfimuléeû celui dont
la conduite eft toujours mafquée par de fauffes appa-
rences. Le premier cherche à n'être pas connu ; le fé-
cond à l'être mal. Il y a fouvent de la prudence à ca-
cher ; il y a toujours de l'art & de la faulîété , foit à
diffimuler , foit à déguifer. On cache par le filence ;
on diffimule par les démarches ; on déguife par les pro-
pos. L'un appartient à la conduite ; l'autre au difcours.
On pourroit dire que la diffimulation eft un menfon-
ge en a£Hon.
* CACHERE , f. f. terme de Verrerie en bouteilles ;
c'eft ainfi qu'on appelle une petite muraille contiguë
aux fils des ouvraux , ou au remettement du four ,
fur laquelle le maître fépare la bouteille de la canne.
Le cou de la bouteille étant glacé , il pofe le corps
dans la cachere ; & tenant fes deux mains étendues en
avant , il preflé de la main gauche le milieu de la can-
ne ; & plaçant la main droite à l'extrémité de la can-
ne, il levé cette extrémité , & donne en même tems
en fens contraire une fecoufle de la main gauche.
Cette fecoufle fépare la bouteille de la canne. Cela
fait , il tourne le cul de la bouteille de fon côté ; il y
applique la partie du cou qui refte attachée à la can-
ne , & met le cou au crochet pour y appliquer la cor-
deline. V. Cordeline ;voy. Verrerie en bouteille.
* CACHET , f. m. petit infiniment qu'on peut
faire de toutes fortes de métaux , & de toutes les pier-
res qui fe gravent , tk. dont on fe fert pour fermer des
lettres , fceller des papiers , &c. par le moyen d'une
fubftance fufible fur laquelle on l'applique. Voy. V ar-
ticle SCEAU. Il y a des cachets en bague , c'eft toujours
une pierre gravée & montée en or ou en argent : il y
en a à manche; ils font ordinairement d'argent , le
manche en eft en poire , & la matière du manche
d'ébene , d'ivoire , de bonis , &c. Il y en a qui font
tout d'or ou d'argent ; ils font petits ; ils ont une poi-
gnée proportionnée , qu'on prend entre le pouce &
l'index quand on les applique fur la cire. Mais de
quelqu'elpece que foient les cachets, ils fe fondent
tous , & ils ont le même ufage & la même forme prin-
cipale , je veux dire une furface plane , ronde , ou
ovale , fur laquelle on a gravé en creux ou des armes ,
ou une tête , ou quelques figures d'hommes , d'ani-
maux , de plantes , &c. Cette gravure en creux ap-
pliquée fur une matière molle , rend ces figures en
relief. Voy 't^t 'article Gravure. Les cachets ont été à
l'uiage des anciens : il nous en refte même quelques-
uns d'eux qui font précieux par le travail. Celui qui
eft connu fous le nom de cachet de Michel- Ange , peut
être mis au nombre des chefs - d'œuvres de gravure
antique. Il eft au cabinet du Roi : c'eft une petite cor-
naline tranfparente , gravée en creux, que l'on croit
avoir fervi de cachet à Michel-Ange , & qui dans un
efpace de cinq à fix lignes , contient quatorze figures
humaines, fans compter des animaux, des arbres, des
C A C
fleurs , des vafes , &c. & un exergue , où l'on voit
encore des monticules , des eaux avec un petit pê-
cheur, &c.
On prétend que le tout eft une efpece de fête qu'on
célébroit anciennement en mémoire de la naiflance
de Bacchus. On remarque d'abord deux femmes dont
l'une tient fur les genoux un enfant nud; c'eft Bac-
chus, dit-on , avec fa nourrice, & la belle Hippa dont
il eft parlé dans les hymnes d'Orphée. Le vieillard affis
par terre eft Athamas , mari d'Ino , ou û l'on veut , un
faune qui tient une patere , & qui fait une libation ,
&c. C'eft ainfi que M. de Mautour qui a tâché d'ex-
pliquer le cachet dont il s'agit, amené à fon fyftème tou-
tes les autres figures de la pierre, hors celle du cheval.
M. Bourdelot prétend au contraire que les puanep-
fies font le fujet de la cornaline de Michel-Ange. Voy.
Puanepsies. Il prend la figure humaine couronnée
d'olivier, élevant de la main droite un vafe , & te-
nant de la gauche les renés d'un cheval , pour Thefée ;
le cheval pour le fymbole de Neptune , père de The-
fée ; les autres figures d'hommes & de femmes , pour
des Athéniens & des Athéniennes qui prennent part
à la fête ; l'enfant entre les bras de fa mère , pour le
figne de la délivrance de ce tribut ; & le petit pêcheur
de l'exergue , pour l'image de la paix que Thefée
avoit aflùrée à fon pays.
Quoi qu'on puifle dire du talent des modernes &
des progrès des beaux Arts parmi nous , nous aurions
de la peine à trouver quelqif ouvrage dans le même
genre, qu'on put comparer à la pièce dont il s'agit,
foit pour fa difficulté , foit pour fa perfection.
CACHETI ou KACHETI , ( Géog. ) pays defert
de l'Afle dans la Géorgie.
CACHEUR, f. m. en termes de Rafineur de fucre ;
eft un morceau de bois de neuf à dix pouces de long ,
plat par un bout & rond par le manche. Le bout qui
eft plat, fert à frapper les cercles de bois qui envi-
ronnent les formes. Celui qui eft rond fert alors de
poignée. On s'en fert pour fonder les formes. Voye^
Sonder, Forme.
CACHEXIE , f. f. ( Médecine. ) ce mot eft tiré du
Grec y.cty.oç , mauvais , & tfjig , conjlitution. Ainfi l'on
entend par cachexie la mauvaife conftitution , le mau-
vais état du corps humain dans toute fon habitude.
Pour donner une idée jufte de la cachexie , il faut
pofer pour principes, i°. que le corps ne peut ref-
ter dans fon état naturel , ni augmenter , s'il n'eft ré-
paré à proportion de la déperdition qu'il fait jour-
nellement. On appelle la première opération nutri-
tion , &la féconde accroiffement , qui arrivelorfquela
déperdition eft plus que compenfée par l'addition du
fuc nourricier. Voye^ Nutrition , & Accrois-
sement. 2.9. Que ce fuc nourricier doit être tiré
des alimens changés en chyle par l'opération nom-
mée digejlion, voyez Digestion , Se convertis en
fang dans la veine foûclaviere gauche. Voyt{ San-
guification. 3°. Que de ce fang fe fépare le fuc
nourricier ; que ce fuc fera propre à la nutrition lorf-
que le chyle & le fang feront de bonne qualité ; qu'au
contraire il fera dépravé , & ne produira pas une
bonne nutrition , loi -{qu'il fera fourni par un mauvais
chyle & un mauvais fang. 40. Que le chyle ni le fang
ne feront pas louables , lorfque les alimens dont ils
font tirés feront de mauvaife qualité , ou que les vif-
ceres deftinés à les compofer feront viciés. Cela po-
fé , examinons à préfent quels effets produira fur le
corps la dépravation du chyle & du fang. Lorfque
le fang n'aura pas une conliftance requife , qu'il ne
fera pas fourni ou renouvelle par un bon chyle , il
s'enfuivra par fon défaut de couleur la pâleur de
toutes les parties charnues, & fur-tout du vifage , la
déperdition des forces du corps en général , tk l'inap-
titude aux fondions tant naturelles que volontaires ;
d'où naîtront les lafîitudes dans les bras & les jam-
bes,
C A C
tes , la difficulté de refpirer -, l'inégalité du pouls , là
fieVre même , la perte de l'appétit , la douleur d'el-
îomac appellée cardialgie , les palpitations, &c. enfin
la dépravation du lue nourricier, d'oii l'amaigrûTe-
ment & l'affaiffement total de la machine, à quoi ié
joignent les obftructions dans les glandes , & fur-tout
dans le foie. Tous les accidens ci-dellus détaillés ca-
ractérifent la cachexie, qui lorfqu'on la néglige dégé-
nère très -facilement en hydropiiie ; le chyle mal pré-
paré faifant , pour ainfi dire , fur le iang le même ef-
fet que le vinaigre fur le lait , en fépare la férofité qui
s'épanche» On voit ailément après cette expoiition ,
pc;urquoi les jeunes perionnes qui n'ont point encore
et.: réglées , ou les femmes qui auront eiiuyé des per-
tes confidérables , deviennent cachectiques ; la trop
gj ande abondance ou la fuppreffion de quelque éva-
cuation ordinaire ou néceilaire , étant une cauie de
cachexie ; leur appétit dérègle pour le fruit verd, pour
la craie , le charbon , & autres drogues de cette efpe-
•. ■ < v luit iouvent chez eiies le même accident. Par
la mauvaife qualité du chyle qui en réiulte , on voit
i lie coniéquence il eit de corriger la caule de la
le, Pour y parvenir , il faut examiner fi le vice
cil dans les liqueurs ou dans les parties iolides , ou
enfin dans l'un & l'autre eniemble ; lorlque Ion le
fera apperçu que ce font les liqueurs qui pèchent ,
&i que Ion reconnoîtra par les lignes détaillés aux
articles Acide Cr Alkali confidérés comme cail-
lés de maladies , il fera queftion de vuider l'elîomac
& les inteftins , loit par un vomitif doux , foit par un
purgatif léger , & empêcher par toutes fortes de
moyens le renouvellement de la matière morbinque.
Lorlque les parties Iolides feront caufe de la cachexie,
les remèdes corroborans, & fur -tout les martiaux,
feront convenables; enfin lorfqu'elle procédera du
vice Je l'un & de l'autre , on la détruira par les re-
mèdes deftinés à réparer ce vice. On aura loin de
joindre aux remèdes dans l'un & l'autre cas , l'ulage
d'un exercice modéré , & d'un régime capable de
rendre au lue nourricier la douceur qui lui eit né-
ce!! a ire pour être employé utilement ; de détendre
• les alimens grolfiers , farineux , & de difficile
i on. De tout ce que j'ai dit ci-dehus , il faut
<: ne que la cachexie eft un état très -fâcheux ;
que lorfqu'elle eit la mue de la foibleiie de quelque
partie folide , elle eft plus difficile à guérir ; & que
lorfqu'elle eit accompagnée d'une fièvre opiniâtre ,
elle eit très-dangereule. (A')
* ( AL Hl , f. m. ( Hifi. nai.foff. ) C'eft une cfpe-
ce de pierre blanche fort relîemblante à de l'albâtre,
qu'on trouve en quantité dans les mines d'argent de
L'Amérique; elles contiennent ordinairement quel-
ques parties de plomb.
* CACHIMAS , ( Hifi. nat. bot. ) arbre des Indes
occidentales dans les lies Antilles : on en compte de
deux efpeces ; le cachimasfauvage , & le cachimas pri-
ve. Le premier eft garni de pointes; fon fruit eft de
la gi -ollêur d'une pomme de moyenne grandeur ,
dont la pelure, qui demeure toujours verte & dure ,
eit remplie de bolles & d'inégalités. Le cachimas pri-
vé a une écorce lifte , & des traits unis qui iont beau-
coup plus grands que ceux du premier; loriqu'ils
font mûrs ils font d'un beau rouge , & blancs au-def-
fous C'C l'enveloppe ; le goût en eit très-agréable. Les
feu lies des i\y.ux efpeces de cachimas reiîemblent
beaucoup à celles du châtaignier: on dit que le fruit
donne de l'appétit, Cv a la propriété de diviler les
humeurs.
* CACHIMENTIER , ( Hifi. nat. bot.) arbre très-
commun aux îles Antilles, è\- dans plufieurS endroits
de l'Amérique ; il y en a plu rieurs efpeces. Cet arbre
porte un fruit que l'on appelle cachiment ; il clt de
foi nie ronde , d'environ cinq ou lix pouces de dia-
mètre , il eft couvert d'une peau brune rougeâtre,
Tome II.
C A C
$05
ck quelquefois d'un vert tirant fur le jaune 1
dans de laquelle le trouve une fubftahce bianchei
d'un goût fort fade & d'une confiltance de crème ;
tout le fruit eft rempli de graines grofies c
de petites fèves, oblongues , brunes , filles & tort af-
tringentes. Les deux principales eipeces de cachiment
font le cœur de hœufqui a la forme & la couleur de
ce dont il porte le nom , & le cachiment morveux très-
bien nomme parcomparailon. Cette dernière efpece
eit fort rafraîchiiïante ; la peau qui le couvre eft ver-
te , & devient un peu jaunâtre lorlqu'il eit mûr. foy.
Gonzaler Oviedo & le R. P. Plumier, qui apellent cet
arbre guanabanus fruciu purpureo.
* CACHLEX , ( Hifi. nat. ) efpece de pierre dont
il n'y a point de deicription, mais qu'on dit fe trou-
ver fur le bord delà mer. Galien prétend que ii on la
fait rougir dans le feu , & qu'on vienne à l'éteindre
enfuite dans du petit-lait , elle lui donne la vertu d'ê-
tre un excellent remède contre la dyfienterie.
* CACHOS, ( Hijt. nat. bot. ) arbriffeau qui ne
croît que lur les montagnes du Pérou : il eft fort verd ;
fa feuille eft roitde 6c mince , & Ion fruit comme la
pomme d'amour ; il s'ouvre d'un côté , & a la forme
de coquillage ; la couleur eft cendrée , & for
agréable: il contient une petite Umence. Les In-
diens lui attribuent de grandes propriétés ; telles que
celle de débarraffer les reins de la gravelle , & même
de diminuer la pierre dans la veille , quand elle
commence à s'y former;
CACHOT , f. m. ( Architecl. ) c'eft dans les pri-
fons un lieu fouterrain , voûté , lans aucun jour , oiî
l'on enferme les malfaiteurs!
CACHOU , ( Hifi. nat. des drogues.) fuc épaiffitiré
du règne des végétaux : en Anglois cashoo ; en Latin
terra Japonica , terre du Japon ; dénomination rerùe
depuis près d'un iiecle, quoique tres-fauiîé en elle-
même, &C d'autant plus impropre , que tout le cachou
qu'on trouve au Japon y eft apporté d'ailleurs.
Il en eft du cachou , iuivant la remarque de M. dé
Juflieu , comme de la plupart des autres di
fur l'hiftoire deiquelles il y a autant de variations
que de relations de voyageurs,
Le cachou nefi point une terre. Le public & les mar-
chands épiciers leduits par la iécherefle &Ia friabi-
lité du cachou , ont commencé par goûter avidement
les dédiions de ceux qui s'éloignent du récit de Gar-
cie du Jardin , & ont mis cette drogue au ranç des
terres. M. de Caen , docteur en Médecine de la fa-
culté de Paris, eil un des particuliers qui a le plus
accrédité cette opinion en France, en détaillant l'ori-
gine & la nature de cette terre , fur l'atteliaiion d'un
de fes amis voyageur.
On trouve , a-t-il dit , cette terre dans le Levant,
& elle y eft appellée mafquiqui : on la ramafle prin-
cipalement lur les plus hautes montagnes où croif-
fent les cedi es , Cv fous la racine defquels on la ren-
contre dure , & en bloc. Pour ne rien perdre de cet-
te terre , les naturels du pays, qu'on nomme Algon-
quins , la ramaffent en entier avec ce fable qui
s'y trouve joint. Ils vcrlenr defiûs le tout de l'eau de
rivière., le rendent liquide , *k. en pétrifient une pâtd
qu'ils mettent lécher au ioleil , jufqu'à ce qu'elle l'oit
dure comme nous la voyons. Les Algonquins en
portent toujours fur eux , cv en ufent pour les maux
d'eftomac. Ils l'appliquent auiîi extérieurement en
forme d'onguent lur la région du bas-ventre.
Ce roman a pallè débouche en bouche, de livres
en livres, avec d'au tics circonttanccsiingulieres: tout
cela n'a lervi qu'à lui donner plus de créance ; & le
petit gravier qu'on trouve quelquefois dans le cachou
n'y ;i pas nui. Enfin le nom même de terre du Japon ,
fous lequel le cachou eft connu depuis ii iong-tems
parmi les auteurs de matière médicale , n'a pas peu
contribué à confirmer l'opinion que c'eft effeclive-
Sss
506
C A C
ment une terre , ou du moins qu'il y a une terre qui
lui i'ert de baie.
Mais on eft à préfent détrompé de cette erreur par
l'examen analytique qui a été tait des principes du
cachou ; premièrement en Allemagne par Hagen-
dorn , "SVedelius, & autres , tk. enluite en France par
M. Boulduc.
Les expériences, les diiTolutions, & les différentes
analyfes de ce mixte , ont prouvé démonftrativement
que c'eft un fuc de végétal épaiili : car i°. au lieu de
jetter comme toutes les autres terres un limon dans
l'humidité , il s'y diflbut entièrement , à quelques
parties groflîeres près ; & non-ieulement dans les li-
queurs aqueules , mais encore dans les fpiritueufes :
2°. il le diflbut facilement dans l'eau commune, s'in-
corpore avec elle , & lui communique une teinture
rouge , de même qu'un grand nombre d'extraits & de
(lies de végétaux épailfis : 30. la fîltration ne l'en fé-
pare point ainli qu'elle fait les terres ; mais il paffe
par le filtre avec l'eau : 40. en le filtrant on n'y trou-
ve jamais de terre , fi ce n'eft lorfqu'il eft mal-pro-
pre : )°. il s'enflamme , brûle dans lé feu , &l ne don-
ne que peu de cendres : 6°. mis dans la bouche il ne
laiffe fur la langue aucun goût de terre , & s'y fond
totalement : 70. on en tire par la chimie beaucoup
d'huile & de fels eiî'entiels , pareils à ceux qu'on tire
des plantes.
Le cachou ri efl point une fubfanct v'uriolique. Ces
raiforts étant decilives , d'autres Phyticiens ont ima-
giné de placer le cachou dans la clafie des vitriols ,
c'eft-à-dire , de le regarder comme une lubftance
compoiée , qui tient de leur nature : mais cette ima-
gination n'a pas fait fortune ; les expériences la
détruilent , & prouvent que le cachou n'a rien de
vitriolique : en effet, i°. on n'en fépare aucun lel
de cette nature ; 20. fi on le mêle avec un alkali , il
ne produit ni effervefeence ni précipitation ; 30. fa
folution fait l'encre, avec une addition de quelques
fubftances vitrioliques.
C'efl une fubflance végétale. Il feroit inutile de m'é-
tendre davantage fur de pures ridions : d'ailleurs
tout le monde convient aujourd'hui qu'il faut mettre
le cachou dans le rang desfubfiances végétales ; per-
fonne n'oferoit le contefter ; c'eft un fait dont on eft
pleinement convaincu.
Sa définition. Par confisquent on peut hardiment le
définir un fuc gommeux , réfineux , fans odeur, fait &
durci par art, d'un roux noirâtre extérieurement , & d?un
roux brun intérieurement ; fon goût efl afringent , amer
quand on le met dans la bouche , , enfuite plus doux &
plus agréable. Voilà ce qu'on connoît du cachou : mais
on n'ell point encore afluré fi c'eft un fuc qu'on tire
de la décoction de diverles plantes, ou le fruit d'u-
ne feule ; & fi notre cachou eft la même choie que
le lycium Indien de Diofcoride.
// ne faut pas le confondre avec le cajou. Quelques-
uns fe fondant fur l'affinité des noms , ont avancé
que le cachou eft l'extrait ou le lue épaiili du fruit
que nous appelions noix £ acajou; car ce fruit le nom-
me cat^u ou caiou : mais ceux qui ont eu cette idée
ne connoiffoient pas l'acajou , qui contient dans fa
fuftance un fuc acre , mordicant , brûlant les lèvres
& la langue , & qui eft d'une laveur bien différente
de celle du cachou.
Arbre dont on tire le cachou fuivant Garde. Si nous
nous en rapportons à Garcie, l'arbre dont on tire
le cachou eft de la hauteur du frêne : il a des feuilles
très-petites , & fort femblables à celle de la bruyère
ou du tamaris : il eft toujours verd , & hérifle de
beaucoup d'épines. Voici comment il rapporte la
manière de le tirer. On coupe par petits morceaux
les branches de cet arbre , on les fait bouillir , enfuite
on les pile ; après cela on en forme des paftilles
& des tablettes avec la farine de nachani , & avec
C A C
la fciure d'un certain bois noir qui naît dans le pays*'
On fait fécher ces paftilles à l'ombre : quelquefois
on n'y mêle pas cette lciure.
DeJ'cripiion de cet arbre fuivant Bontius. Bontius ,
un des premiers voyageurs qui en ait parlé , dit que
cet arbre eft tout couvert d'épines fur le tronc &
fur les branches , ayant des feuilles qui font preique
comme celles de la fabine , ou de l'arbre que l'on ap-
pelle Marbre de vie , hormis qu'elles ne font pas fi gref-
fes ni fi épaiffes. Il porte , dit-il , des fèves rondes
de couleur de pourpre , dans lefquelles font renfer-
mées trois ou quatre noix tout au plus , & qui font
fi dures que l'on ne peut les cafter avec les dents. On
en fait bouillir les racines , l'écorce & les feuilles ,
pour en faire un extrait que l'on appelle cale ; ex-
trait , pour le dire en paflant , que ces deux auteurs ,
Garcie & Bontius , croyent être le lycium Indien de
Diofcoride.
Suivant Hébert de Jager. Mais Hébert de Jager ,
dans les Ephéméridesdes curieux de la nature , décad. II.
an. 3. écrit que le lycium des Indes, ou le cate de Gar-
das, ouïe kaath , comme les Indiens l'appellent , &
le reng des Perles , eft un fuc tiré non d'un arbre ,
mais de prefque toutes les elpeces d'acacia qui ont
l'écorce aftringente & rougeâtre , & de beaucoup
d'autres plantes dont on peut tirer par l'ébullition un
fuc femblable. Tous ces lues font défignés , ajoûte-
t-il , dans ces pays-là fous le nom de kaath, quoi-
qu'ils foient bien differens en bonté & en vertu.
Il parle cependant d'un arbre qui porte le plus ex-
cellent & le meilleur kaath : cet arbre eft nommé
khier par les Indiens , khadira par les Brachmanes ,
tfaanra par les Golcondois , karanggalli fatti par les
Malabares.
C'eft une efpece d'acacia épineux , branchu ,
dont les plus grandes branches font couvertes d'une
écorce blanchâtre cendrée. Les rameaux qui produi-
fent des feuilles font couverts d'une peau roulsâtre,
& ils fortent des plus grandes branches entre les pe-
tites épines , placées deux à deux , crochues & op-
pofées. Les feuilles ailées , portées fur une côte ,
font femblables à celles de l'acacia , mais plus peti-
tes. Cet auteur n'a pas vu les fleurs ni le fruit. On re-
tire de cet arbre par la décoftion , dans le royaume
de Pégu, un lue dont on fait le kaath, fi recherché
dans toutes les Indes orientales.
L arbre qui fournit le cachou efl fur-tout C Areca. En
effet, quoi qu'en dife Hébert de Jager, l'arbre qu'on
nomme areca eft le plus célèbre parmi ceux qui don-
nent l'extrait de kaath ou le cachou ; tk. c'eft même
le feul qui fourniffe le vrai cachou , fi l'on en croit
les voyageurs qui méritent le plus de créance , &
en particulier Jean Othon Helbigius , homme très-
verfé dans la connoiffance des plantes orientales ,
& qui a fait un très-long féjour dans le pays.
Synonymes de cet arbre. Voilà donc la plante que
nous cherchions : c'eft un grand arbre des Indes
orientales , qui croît feulement fur les bords de la
mer & dans les terres fabloneules , une efpece de
palmier qui porte les noms fuivans dans nos ouvra-
ges de Botanique ; palma cujus fruclusfeffilis Faufel
dicitur , C. B. P. 510. Filfîl & Fufel Avicen. Faufel,
five areca palmœ foliis , J. B. 1. 389. areca ,five Fau-
vel , Cluf. Exot. 188. Pinung. Bont. caunga hort.
Malab. où l'on en trouvera la figure très-exa&e.
Sa defeription. Sa racine eft noirâtre , oblongue ,'
épaiffe d'un empan , garnie de plufieurs petites ra-
cines blanchâtres & ronfles ; l'on tronc eft gros d'un
empan près de la racine, & un peu moins vers fon
fommet ; fon écorce eft d'un verd gai, &c fi unie ,
qu'on ne peut y monter à moins qu'on n'attache à
fes pies des crochets & des cordes , ou qu'on ne l'en-
toure par intervalles de liens faits de nattes, ou de
quelqu'autre matière femblable.
C A C
Les branches feuillées fortent du tronc en fautoif
deux a deux ; celles qui font au-deflus fortent de
l'cntre-deux des inférieures ; elles enveloppent par
leur baie le fommet du tronc , comme par une gaine
ou une capfule ronde &c fermée ; elles forment par
ce moyen une tête oblongue au fommet, plus groffe
que le tronc de l'arbre même.
Le pié des branches feuillées extérieurement fe
fend & fe rompt , &c elles tombent fucceflivement
l'une après l'autre : les branches feuillées font com-
poiées d'une côte un peu creufe en-deflus , arrondie
en-deflôus , & de feuilles placées deux à deux &op-
pofées , longues de trois ou quatre pies , larges de
trois ou quatre pouces plus ou moins ,pliées comme
un éventail , veites , & luifantes : au haut du tronc
il fort de chaque aiffelle de feuille une capfule en
forme de gaine , longue de quatre empans , plus ou
moins , qui renferme les tiges chargées de fleurs &c
de fruits , concaves par où elles le rompent & s'ou-
vrent , d'un verd blanchâtre d'abord extérieurement,
jaunâtre enfuite, & blanches en-dedans.
Les tiges qui font renfermées dans ces gaines font
les unes plus groffes , & chargées vers le bas de fruits
tendres ; les autres font plus grêles , & garnies des
deux côtés de boutons de fleurs : ces boutons font pe-
tits , anguleux , blanchâtres , s'ouvrant en trois pé-
tales, roides , pointus, & un peu épais ; ils contien-
nent dans leur milieu neuf étamines grêles, dont trois
font plus longues, d'un jaune blanchâtre, qui font
entourées des fix autres plus petites & plus jaunes.
• Defcription du fruit arec. Les fruits encore tendres
& mous font blancs & luifans , attachés à des pédi-
cules blancs , de figure anguleufe & non arrondis ,
renfermés pour la plus grande partie dans les feuilles
du calice , qui font ovalaires & entrelacées les unes
avec les autres : ils contiennent beaucoup de liqueur
limpide , d'un goût attringent , placée au milieu de
la pulpe , qui s'augmente avec le tems ; & la liqueur
diminue juiqu'a ce qu'il n'en refte plus : enfuite il naît
une moelle blanchâtre, tandis que la pulpe s'endurcit ,
& l'écorce acquiert enfin la couleur de jaune doré.
Les fruits devenus afTez gros , & n'étant pas enco-
re focs , font ovalaires , & reflemblent fort à des
dattes : ils font plus lerrés aux deux bouts , & com-
pofés d'une écorce épailfe, lhje, membraneulé , &
d'une pulpe d'un brun rougeâtre , qui devient en lé-
chant fibreufeou cotonneufe , & jaunâtre : la moelle,
ou plutôt le noyau ou la femence qui eft au milieu,
eft blanchâtre.
Lorfque le fruit eft foc , le noyau fe fépare aifé-
jnent de la pulpe librcule ; il eft de la grofleur d'une
aveline ou d'une mui'cade , le plus fouvent en forme
de poire , ou applati d'un côté & fans pédicule , con-
vexe de l'autre , ridé , cannelé extérieurement ; d'u-
ne couleur roufie ou de canelle , d'une matière dure ,
difficile à couper , panaché de veines blanchâtres,
ronfles & rougeâtres ; d'un goût un peu aromatique,
& légèrement aftringent. C'eft ce fruit que nous
nommons proprement arec , & les Arabes fauvel.
Ufages que les Indiens font de ce fruit. L'ulage que les
Indiens en font tous les jours , lui a donné une très-
grande réputation. Ils le mâchent continuellement,
ioit qu'il foit mou , foit qu'il foit dur , avec le lycium
indien , ou le kaath, les feuilles de bétel , & très-
peu de chaux. Ils avalent le fuc ou la falive teinte
de ces choies , & ils crachent le refte ; leur bouche
alors paroît toute en feng , ce fait peur à voir.
Ils ne manquent pas de l'employer comme une cf.
pece de régal dans les vifites qu'ils fe font. Leur ma-
nière de le iérvir , eft de le préfenter en entier, ou
coupé en plufieurs tranches. Lorfqu'on le préfente
entier , on lert en même tems un infiniment propre
à le couper , qui eft une efpece de cifeau , compolé
de deux branches mobiles arrêtées par une de leurs
Tome II,
C A C
507
exrcmités , & qui s'ouvre de l'autre. C'eft par l'ex-
trémité par laquelle le cifeau s'ouvre , que l'on prefle
l'arec , que l'on met entre ces deux branches pour le
couper en autant de parties que l'on veut : & de ces
deux branches il n'y en a qu'une , qui eft la fupérieu-
re , deftinée à couper ; l'inférieure ne fort que d'ap-
pui pour foûtenir cette femence dans le tems de l'ef-
fort que l'on fait par l'abaiflement de la partie fit*
périeure du cifeau.
Lorfqu'on le fort coupé en tranches , c'eft ordinai-
rement fur des feuilles de bétel dans lefquelles on
enveloppe ces morceaux, après les avoir auparavant
couverts d'une couche légère de chaux , propre à fe
charger du fuc de l'arec & du bétel , quand on les mâ-
che , pour en faire conferver plus longtems dans la
bouche une faveur agréable.
Préparations du cachou. Je viens à la manière de
préparer l'extrait d'areca ; la voici , félon que le rap-
porte Hébert de Jager dans les Ephémerides des cu-
rieux de la nature , decur. II. an. J.
On coupe en deux ou en trois morceaux la noix
d'areca ou faufel avant qu'elle foit tout-à-fait mûre ,
& lorfqu'elle eft encore verte , & on la fait bouillir
dans de l'eau , en y ajoutant un peu de chaux de co-
quillages calcinés pendant l'efpace de quatre heures,
jufqu'à ce que les morceaux de cette noix ayent con-
tracté une couleur d'un rouge obfcur. La chaux y
fort beaucoup. Alors on pafle cette décoction encore
chaude ; &; lorfqu'elle eft refroidie , on la fépare un
peu de la matière épaifle & de la lie qui va au fond
du vaifleau. Cette lie étant épaifle , s'appelle auflï
kaatk , & on l'employé de la même manière que ^'ex-
trait appelle cate. Mais pour rendre cet extrait plus
excellent , ils y ajoutent l'eau de l'écorce encore ver-
te du tflanra , ou de l'acacia , dont nous avons parlé ,
qu'ils pilent & font macérer pendant trois jours. En-
fin, lorfque ce fuc eft épaifli , ils l'expofent au ioleil
fur des nattes , &c ils le réduilent en petites mafles
ou en paftilles.
Les grands du pays & les riches ne fe contentent
pas de ce cachou : ils y mêlent du cardamome , du
bois d'aloès , du mufe , de l'ambre , & d'autres cho-
fes , pour le rendre plus agréable & plus flatteur au
goût. Telle eft la compofltion de quelques paftilles
que l'on prépare dans les Indes , qui font rondes ,
plates , de la grofleur d'une noix vomique , que les
Hollandois apportent en Europe fous le nom defri
gâta gamher.
Telles font auflï des paftilles noires qui ont diffé-
rentes figures, tantôt rondes comme des pilules , tan-
tôt comme des graines , des fleurs , des fruits , des
mouches , des infectes , tantôt comme des.crotes de
fouris , &c. que les Portugais font dans la ville de
Goa , & que les François m£prifont à caufe de leur
violente odeur aromatique. Mais comme les nations
qui fabriquent ces paftilles , font fort trompeufes ,
il leur arrive fouvent d'y mêler d'autres corps étran-
gers , pour en augmenter le poids & le volume ; de-
forte qu'il eft rare d'en voir fortir de pures de leurs
mains.
Pour ce qui eft du cachou Ample , naturel , & fans
aromates , qui pafle en Europe , & que nous recher-
chons le plus ; c'eft un pur extrait de l'arec fait fur
les lieux , & rendu lolide par l'évaporation de toute
l'humidité que cet extrait contenoit.
On coupe les graines d'arec vertes , en tranches ;
on les met bouillir dans l'eau , jufqu'à ce que cette
eau foit chargée d'une forte teinture rouge-brune ;
on pafle cette décoction , qu'on fait évaporer jufqu'à
coafiftance d'extrait, auquel on donne telle torme
que l'on veut , & qui fe durcit bientôt après.
Effets de Carte quand il ejl verd. Gardas & Bon-
tius aflùrent que fl Ton mâche l'arec verd , il caufe
une efpece de vertige U d'ivrefle femblable à celle
S s s ij
5o8
C A C
C A C
que caufe le vin , mais qu'on diïîipe bientôt en pre-
nant un peu de Ici 6c d'eau fraîche : quand ce fruit
eft mûr ou cuit , il ne fait point le même effet , il
n'en produit que de falutaires ; & je ne crois pas
vraisemblable qu'il tire fon feul mérite de la mode ,
de l'habitude , & de la volupté.
Vertus médicinales du cachou. Les Orientaux l'em-
ployent continuellement contre la puanteur de l'ha-
leine , pour raffermir les gencives , pour aider la di-
geition , pour arrêter le vomiiTement , la diarrhée ,
Ta dyfienterie ; 6c les relations de nos voyageurs , de
Garcie , de Linfchot, de Bontius, de Cleyer, d'Her-
man , d'Helbigius , conviennent de fon efficace dans
tous ces cas.
Par l'ulage que npus en avons fait en Europe ,
nous y avons remarqué à peu près les mêmes pro-
priétés ; nous avons trouvé que le cachou naturel eft
bon pour raffermir les gencives , pour l'angine aqueu-
fe , pour diifiper les catarrhes , pour appaiier la
toux qui vient d'une pituite acre , pour arrêter les
flux de ventre qui viennent du relâchement de l'efto-
mac & des intérims , &c autres maladies femblables.
Si nous pénétrons jufques dans les principes qui
peuvent opérer ces effets , il femble que ce foit à
î'altriction dont cette drogue eft principalement
douée , que l'on doive lès vertus.
Effectivement , c'eft par cette aftri£tion que l'ef-
tomac plus capable de retenir les alimens , eft en état
de les mieux digérer ; ce qui eft le vrai remède de la
plupart des diarrhées qui ont pour caufe la foibleffe
de ce vifeere.
C'eft par cette même aftriction , que réunifiant
les principes du fang qui étoient divifés , elle peut
arrêter la dyfienterie , 6c les fluxions dans lefquelles
le iang ou la iérolité s'épanchent avec trop de fa-
cilité.
Le caractère fpécifique du cachou eft dohe d'être
comme un compoié des lues d'hypociftis 6c d'aca-
cia, defquels il a l'aftriûion ; 6c par fa douceur, il
approche de celle de la réglifle 6c du fang-dragon ,
eniorte qu'il réunit en foi les vertus de ces différens
lues, en modifiant ce qu'ils ont de trop aftringent
ou de trop difficile à diffoudre , dans l'eau iimple.
Nous pouvons le difputer aux Indiens par rapport
aux différentes préparations que nous donnons au
cachou pour le rendre plus agréable. On le dilTout dans
l'eau fimple , qui dans peu de tems fe charge de fes
parties les plus pures ; on la coule , on laiflè évapo-
rer la colature , & l'on ne trouve au fond du vafe
qu'un extrait rouge-brun , qui eft ce cachou purifié ,
auquel on ajoute les aromates les plus convenables
au goût de chacun , quelquefois même le fucre ,
pour en corriger cette amertume qui ne prévient pas
«d'abord en fa faveur. *
Les formes fous lefquelles on le réduit , font celles
ou de pilules , ou de paftilles , ou de tablettes , pour
s'accommoder aux goûts des diverfes perfonnes qui
en tout ufage ; l'ambre-gris , dont l'odeur eft utile à
ceux qui ont l'haleine mauvaife , s'y retranche ordi-
nairement pour les dames à qui elle pourroit caufer
des vapeurs. On le donne en iûbftance fous la for-
me de pilules , de paftilles, ou de tablettes, depuis
un demi-fcrupule jufqu'à une drachme.
. Son ufage , fous quelqu'une de ces formes que ce
foit , convient le matin à jeun , avant & après le re-
pas , & dans tous les cas où l'on veut faciliter la di-
geftion , qui manque par 1'affoiblifTement de l'efto-
mac , ou par l'acide qui domine dans les premières
voies.
Enfin , une qualité particulière par laquelle le ca-
chou fe fait diftinguer des autres drogues avec lefquel-
les il a quelque analogie , eft, qu'au lieu que celles-
ci fe déguilent aifément par le mélange des autres
ingrédiens que l'on y joint , le cachou fe fait toujours
rëconhoître , dans quelque compofition où on le falTe
entrer. i
Je ne dois pas oublier un avantage que l'on peut
tirer du cachou , en faveur de ceux qui ont de la répu-
gnance pour les tifanes , & pour la commodité de
ceux qui veulent faire fur le champ une boiflbn con-»
venable clans les dévoiemens , dans les fièvres bi-
lieules , dans les maladies provenantes d'une abon-
dance de férofités acres , &c. c'eft que la quantité
d'un ou deux gros de cette fubftance , jettée dans de-
mi-pinte d'eau , lui donnera une teinture rougeârre,
une faveur douce & un peu aftringente , telle qu'il
convient dans ces occafions.
Il me paroit que l'on n'a rien à craindre d'une trop
grande dote du cachou ; car l'on peut en retenir con-
tinuellement de petits morceaux dans la bouche ,
& en fubftituer de nouveaux à ceux qui font diflous ,
fans accident fâcheux. Il faut obferver que plus les
morceaux font petits , plus ils paroiflènt agréables au
goût. On en prend de la grolTeur d'une graine d'anis
ou de coriandre.
Teinture de cachou. "Wedelius en tire une teinture
de la manière fuivante. 1Ù cachou en poudre quantité
fuffiiante ; verfez defTus fix ou huit fois autant d'ef-
prit de vin re&ifié : digérez. On retire une très-belle
teinture , que l'on ftpare de la lie , en la verfant peu
à peu , & on la garde pour l'ulage ; la dofe eft depuis
20 gouttes jufqu'à 6o.
On employé heureufement cette teinture dans la
cachexie 6c autres maladies de fibres lâches , où les
aftringens conviennent. On peut s'en fervir en gar-
garifme dans un véhicule propre , pour le feorbut ,
pour raffermir les dents 6c les gencives , 6c pour adou-
cir l'haleine.
Pajlilles de cachou. 2£ cachou , une drachme ; fucre
royal , une once : réduifez-les en poudre fine. M.
avec du mucilage de gomme adraganth , & une
goutte ou deux d'huile de canelle. Faites des paftil-
les , que l'on tiendra dans la bouche , dans les toux
catarrhales.
Opiate de cachou. Ï/L. cachou, trois onces ; corail
rouge préparé , deux drachmes ; firop de coing ,
quantité fuffiiante. M. F. un opiat. La dofe eft une
drachme trois ou quatre fois le jour , dans la fuper-
purgation , la diarrhée , & la dyfienterie.
Julep de cachou. If. cachou , une drachme ; diaco-
de , trois onces ; firop de rofes lèches , une once ;
eau de pourpier, de laitue, ana quatre onces: fai-
tes-en un julep dans le crachement de fang , ou la>
dyffenterie.
Looch de cachou. 2C. cachou en poudre , deux drach-
mes ; mucilage de gomme adraganth, trois onces;
firop de grande confonde , une once : M. & faites-
en un looch , contre la toux provenante de pituite
acre , qui tombe fur le poumon.
Tout médecin peut changer , combiner , amplifier
ces fortes de formules à fon gré , & les employer
dans les occafions. Je ne les ai indiquées que parce
que je mets le cachou au rang des bonnes drogues qui
ont le moins d'inconvéniens.
Choix du cachou. Il faut le choifir pefant , d'un rou-
ge tanné au-defl'us , point brûlé , & très-luilant. On
l'apporte de Malabar , de Surate , de Pégu , & des
autres côtes des Indes.
Notre cachou paroit un extrait du feul areca. Parmi
celui que nous recevons , il le trouve des morceaux
de différentes couleurs & figures ; les uns font formés
en boules , & d'autres en maffes applaties plus ou
moins groffes ; de plus , il y en a de pur qui fe fond
promptement dans la bouche , 6c d'autre plus grof-
lier , plus amer , terreux , fablonneux , brûlé. Ces'
différences ont porté plulieurs auteurs de matière mé-
dicale , à diftinguer deux fortes de cachou , qu'ils ont
imaginé être des. ftiçs extraits de différentes plan-»
C A C
C A C
509
■tes ; cependant toutes les différences dont on vient
de parler, ne femblent qu'accidentelles, & peuvent
venir dé diverfes préparations d'un feul & même
fruit.
En effet, fuivant Pobfervation de M. de Juffieu ,
la différence des couleurs de l'intérieur & de l'exté-
rieur des maffes , peut ne dépendre que du plus ou
du moins de cuiffon du lue extrait , qui ayant été ex-
pofé au feu & au foleil pour être déffeché , a re-
çu à l'extérieur plus d'imprefiion de feu qu'à l'inté-
rieur.
Il ne faut d'ailleurs qu'un peu d'expérience fur les
différens effets qu'eft capable de produire le plus ou
le moins de maturité dans les fruits & les femences
dont on extrait ces fucs , pour juger de la caufe de
cette diverfité de couleur dans les différentes maffes
de cachou qui nous font apportées des Indes.
Le plus ou le moins de fécherefle de l'arec peut
auflî contribuer à rendre ces morceaux de cachou
plus ou moins terreux , & à les faire paroître plus ou
moins réfineux ; puifqu'il ell impoffible qu'à propor-
tion de l'un de ces deux états dans lequel cette fe-
mence aura été employée , il n'y ait plus ou moins
de fécules , dont la quantité le rendra plus terreftre
& plus friable ; il fera au contraire plus compael ,
plus pefant , moins caffant , & paroîtra plus réfineux,
plus il y aura d'extrait gommeux.
Le fable , les petites pierres , & corps étrangers
qu'on trouve dans quelques morceaux & non clans
d'autres , font l'effet de la malpropreté &c du manque
de foin dans la préparation.
Enfin la couleur & la faveur de l'arec , qui fe ren-
contrent dans Pun & l'autre cachou , paroiffent indi-
quer qu'ils ne tirent leur origine que de ce feul & mê-
me fruit , & que tous les autres accidens qu'on a dé-
taillés ne dépendent que de la préparation.
Cependant je n'oferois nier qu'il n'y ait d'autre ca-
chou dans le monde que celui qu'on retire de l'arec ;
il n'eft pas même vraiffemblable que- ce feul fruit
puiffe fuffire à la quantité prodigieufe qu'on débite
de cette drogue aux Indes ; & il eft à préfumer que
leur extrait kaath ell un fuc tiré non -feulement du
fruit de l'arec, mais de beaucoup d'autres fruits ou
plantes , dont on tire par l'ébullition un fuc qui lui
ell analogue.
Le cachou n'eft point le lycium Indien des Grecs. Il ne
me relie plus qu'à examiner fi le cachou ell la même
chofe que le lycium Indien de Diojcoride ; on a grand
fujet d'en douter.
L'illuftre médecin d'Anazarbe , Galien , & Pline ,
ont fait mention de deux fortes de lycium ; favoir , de
celui de Cappadoce , 8c de celui des Indes. Le pre-
mier étoit un fuc tiré d'un certain arbre épineux ,
dont les branches ont trois coudées de long , & mê-
me plus ; fon écorce eft pcâle ; fes feuilles iont fem-
blables à celles du bonis; elles font touffues : fon fruit
eft noir comme le poivre, lu ifant, amer, compact;
fes racines font nombreufes , obliques , & ligneules.
Cet arbre croît dans la Cappadoce , la Lycie , & plu-
fieurs autres endroits. Les Grecs l'appclloient Kukiov
On préparait le lycium , ou cet extrait , avec les
rameaux tk les racines que Pon piloit : on les macé-
roft enfuite pendant plulieurs jours dans Peau , Oc en-
fin on les faifoit bouillir. Alors on rejettoit le bois ;
on faifoit bouillir de nouveau la liqueur jufqu'à la
confillance de miel.
On en faifoit de petites maffes noires en-dehors ,
ronfles en -dedans lorfqu'on venoit de les rompre ,
mais qui fe nohcifToient bientôt ; d'une odeur qui
n'étoit point du -tout puante ; d'un goût aftringent
avec un peu d'amertume. On avoit auffi coutume
défaire un lycium , que Pon exprimoit ôc que Pon fai-
foit lécher.
L'autre lycium , ou celui des Indes , étoit de cou-
leur de fafran ; il étoit plus excellent & plus efficace
que le précédent. On dit , ajoute Diofcoride , que
l'on fait ce lycium d'un arbriffeau qui s'appelle, lon-
ckitis.
Il eft auffi du genre des arbres à épines ; fes bran-
ches font droites ; elles ont trois coudées , ou même
plus ; elles fortent en grand nombre de la racine , &
font plus greffes que celles de l'églantier : l'écorce
devient rouflé après qu'on l'a briiée; les feuilles pa-
roiffent femblables à celles de l'olivier.
Ces deferiptions ne conviennent point du -tout
avec celles que Garcias & Bontius font du cati , ou
avec celle que Herbert de Jager fait de l'acacia In-
dien , ni avec celle que nous avons donnée du palmier
areca; d'où nous pouvons conclurre avec Clufius &c
Veflingius , que nous n'avons pas le lycium Indien des
Grecs. On ne trouve plus dans les boutiques le lycium
de Cappadoce.
Auteurs fur le cachou. J'ai lu fur le cachou quantité
de relations de voyageurs , qui m'ont pani la plupart
infidèles ; le Traité J'Hagendorn , imprimé en Latin
à Gènes en 1679 , in 8^ , qui eft une fort médiocre
compilation ; plufieurs DiJJ'ertations d'Allemagne , qui
n'ont rien de remarquable ; les Ephémerides des cu-
rieux de la nature , qui ont du bon & du mauvais ; un
Mémoire de M. Boulduc , dans le recueil de l'Académie
des Sciences, qui ne renferme rien de particulier ; un
autre de M. de Juffieu , qui eft intéreffant ; l'article
qu'en a donné M. Geoffroi dans fa Matière médicale ,
qui eft excellent, &c dont j'ai fait le plus d'ufage. En-
fin j'ai beaucoup travaillé ce fujet pour m'en inltruire
& pour en parler avec quelque connoiffance. Article
communiqué par M. LE CHEVALIER DE JAUCOURT.
* C ACHRY , (Hijl. nat. bot.) c'ell la graine d'une
plante que M. Ray appelle libanoùs cachryophora ;
elle eft échauffante & defficcative.
CACHUNDE, fub. m. (Pharmacie.) remède fort
vanté dans la Chine & dans l'Inde, décrit dans Za-
cutus Lujitanus, dont cet auteur fait un fi grand élo-
ge , qu'il lui attribue les avantages de prolonger la
vie & d'éloigner la mort ; enfin c'eft félon lui un rc-.
mede vraiment royal.
Ce remède eft un opiat compofé de médicamens
aromatiques, de pierres prétieufes, & d'autres cho-
ies fort couteufes. Zacutus Lujitan. de MedU. princip,
lib.I.obf.3y.(N)
CACHIMIA , f. f. (Chimie.) ce mot ne fe trouve
guère que dans Paracclfe, qui s'en fert pour délîgner
des fubltances minérales qui ne (ont point parvenues
à perfection , ou ce qui n'eft ni fel ni métal , mais qui
participe cependant plus de la nature métallique que
de toute autre. Les fubltances de ce genre iont les
différentes efpeces de cobalt , le bifmuth , le zinc ,
l'arienic, &c. (—)
CACIQUE, fubft. m. (Hijl. mod.) nom que les
peuples d'Amérique donnoient aux gouverneurs des
provinces & aux généraux des troupes fous les an-
ciens Yncas ou empereurs du Pérou. Les princes de
Pile de Cuba , dans l'Amérique feptentrionale , por-
toient le nom de caciques quand les Espagnols s'en
rendirent maîtres. Depuis leurs conquêtes dans le
nouveau monde, ce titre eft éteint quant à l'autorité
parmi les peuples qui leur obéiffent : mais les Sau-
vages le donnent toujours par honneur aux plus no-
bles d'entr eux ; ck les chefs des Indiens qui ne font
pas encore fournis aux Européens ont retenu ce nom
de caciques, (G)
CACOCHYMIE , fub. f. (Médecine.) état dépravé
des humeurs; mot tiré du Grec **k<k, mauvais , &c
de Kvja.it , f&c.
Un corps devient fujet à la cacojtymie par plulieurs
caufes : i°. par Pufage habituel d'alimens qui ont
peine à être digérés /loit par leur trop grande vif-
5îo
C A C
coûté , foit par leur texture trop forte pour céder à
l'a£rion des organes de la digeition : la pléthore, les
hémorrhagies coniîdérables , les diarrhées , les per-
tes dans les femmes , les fleurs blanches , ainiï que
leur ceffation fubite , l'oiûveté , les veilles immo-
dérées , font autant de caufes de la cacochymie , qui
elt elle-même la caufe d'une infinité de maladies.
Un régime doux , un exercice modéré , quelques
légers purgatifs appropriés au tempérament, au fexe
& à l'âge de la perfonne menacée de cacochymie , en
font les préfervatifs. (A7)
CACONGO, (Géog.) petit royaume d'Afrique ,
dans le Congo, fur la rivière de Zair; Malemba en
eit la capitale.
' ' CACOPHONIE , f. f. terme, de Grammaire ou plu-
tôt de Rhétorique : c'eft un vice d'élocution, c'eit un
ion defagréable ; ce qui arrive ou par la rencontre
de deux voyelles ou de deux fyllabes , ou enfin de
deux mots rapprochés , dont il réfulte un fon qui dé-
plaît à l'oreille.
Ce mot cacophonie vient de deux mots Grecs; /.a.-
kcç , mauvais , & $mn , voix , fon.
Il y a cacophonie , fur-tout en vers , par la ren-
contre de deux voyelles : cette forte de cacophonie fe
nomme hiatus ou bâillement , comme dans les trois
derniers vers de ce quatrain de Pibrac , dont le der-
nier eit beau :
Ne vas au bal qui n aimera la danfe,
Ni à la mer qui craindra le danger ,
Ni au felîin qui ne voudra manger ,
Ni à la cour qui dira ce qu'il penje.
La rime , qui eit une reifemblance de fon , produit un
effet agréable dans nos vers , mais elle nous choque en
profe. Un auteur a dit que Xerxès tranfporta en Per-
ié la bibliothèque que Piiiitrate avoit faite à Athènes,
où Seleucus Nicanor la fit reporter : mais que dans la
fuite Sylla la pilla ; ces trois la font une cacophonie
qu'on pouvoit éviter en difant , mais dans la Juite elle
fut pillée par Sylla. Horace a dit , œquam mémento ré-
bus in arduis fervare mentem ; il y auroit eu une caco-
phonie fi ce poète avoit dit mentem mémento , quoique
(a penfée eût été également entendue. Il elt vrai que
l'on a rempli le principal objet de la parole , quand
on s'eft exprimé de manière à fe faire entendre : mais
il n'elt pas mal de faire attention qu'on doit des
égards à ceux à qui l'on adreiïe la parole : il faut
donc tâcher de leur plaire ou du-moins éviter ce qui
leur feroit defagréable & ce qui pourrait offenfer la
délicatefie de l'oreille, juge févere qui décide en fou-
verain , & ne rend aucune raifon de fes décifions : Ne
extremorum verborum cum infequentibus primis concur-
fus , aut hiulcas voces efficiat aut afperas ; quamvis cm m
fuaves grave/que fententice , tamenfi inconditis verbis ef-
feruntur, offendent aures, quarurn ejl judiciumfuperbijjî-
mum : quod quidem Latina linguajic obfcrvat , nemo ut
tam rujlicusfit quin vocales nolit conjungen. Cic. Orat.
c-44- GO
Cacophonie, f. f. bruit defagréable , qui réfulte
du mélange de plulieurs ions difeordans ou diiTonans.
Voyei Dissonance, Harmonie, &c. (O)
CAÇORLA , (Géog.) ville d'Elpagne , dans l'An-
daloufie , iur le ruiffeau de Véga , à deux lieues de la
fource du Guadalquivir, fur les frontières du royau-
me de Grenade.
C ACOUCHACS, (Géog.) nation fauvage de l'A-
mérique feptentrionale , dans la nouvelle France.
: * CACTONITE , f. f. ( Hijl. nat. Litholog.) caclo-
nites ; pierre que quelques-uns prennent pour la far-
de ou pour la cornaline. On a prétendu que fon feul
attouchement rendoit victorieux , & que prife dans
la dote d'un fcrupule elle mettoit à couvert des ma-
léfices ; propriété% fi fabuleufes , qu'à peine ofons-
nous en faire mention.
CAD on CADILS , (Hift, anc.) fignifie en Hébreu
CAD
une mefure de continence pour les liquides , une cru-
che, une barrique, un feau ; mais dans S. Luc, c. xvj*
verf. 6. il fe prend pour une certaine mefure déter-
minée. Combien deve^-vous à mon maître? cent cades
d'huile. Le Grec lit cent baths ; or le bath ou éphi con-
tenoit vingt-neuf pintes, chopine , demi-ieptier , un
poiifon & un peu plus mefure de Paris.
CADAHALSO , ( Géog. ) petite ville d'Efpagne ,
dans la nouvelle Caltille.
C ADALENS , ou CADELENS , ( Géog. ) ville de
France dans l'Albigeois , au Languedoc.
CADAN ou KADAN, {Géog. ) petite ville de
Bohême , au cercle de Zatz, fur l'Eure.
CAD ARIEN , (Hifi. mod. ) nom d'une fefte Ma-
hométane. Les Cadariens font une fecte de Mulul-
mans qui attribue les actions de l'homme à l'homme
même , & non à un décret divin qui détermine fa
volonté.
L'auteur de cette fecte fut Mabedben-Kaled-al-
Gihoni , qui fouffrit le martyre pour défendre fa
croyance : ce mot vient de l'Arabe "Hp, kadara ,
pouvoir. Ben- A un appelle les Cadariens , leS Mages ou
les Manichéens du MuJ'ulmanifme ; on les appelle au-
trement Mota^ales. ( G)
CADASTRE ,f.m. {terme a" Aides ou de Finances.")
éft un regiftre public pour l'afîiette des tailles dans
les lieux oii elles font réelles , comme en Provence
& en Dauphiné. Le cadaflre contient la qualité , l'ef-
timation des fonds de chaque communauté ou pa-
roiffe , & les noms des propriétaires. ( H)
Cadastre , ( Commerce.') eitauiTi le nom que les
marchands de Provence & de Dauphiné donnent
quelquefois au journal ou regiltre fur lequel ils écri-
vent chaque jour les affaires concernant leur com-
merce & le détail de la dépenfe de leur maifon. Voye^
Journal & Livre , DiUwnn. du commerce, tom. II.
page ig. (G)
C AD AVRE , f. m. c'eft ainfi qu'on appelle le corps
d'un homme mort : il elt des cas où ne pouvant pror
céder contre la perfonne d'un criminel , parce qu'il
elt mort avant que fon procès pût lui être fait, on le
fait au cadavre , s'd elt encore exiltant , finon à la mé-
moire. Voyelles cas dans lejquels cette jorme de procéder
ejl ujitée, au mot MÉMOIRE.
Pour cet effet , le juge doit nommer un curateur au
cadavre ou à la mémoire , lequel prête lennent de bien
& fidèlement défendre le cadavre ou fa mémoire. Toute
la procédure le dirige contre ce curateur , à l'excep-
tion du jugement définitif qui le rend contre le cada~
vre ou la mémoire du défunt.
Le curateur cependant peut interjetter appel du
jugement rendu contre le défunt : il peut même y
être obligé par quelqu'un des parens du défunt, le-
quel en ce cas elt tenu d'avancer les frais pour ce
néceiTaires.
Et s'il plaît à la cour fouveraine oii l'appel eit por-
té , de nommer un autre curateur que celui qu'a-
voient nommé les juges dont eit appel , elle le peut.
Foye{ Curateur. {H)
La loi falique , dit l'illuitre auteur de l'efprit des
lois, interdifoit à celui qui avoit dépouillé un cadavre
le commerce des hommes , jufqu'à ce que les parens
acceptant lafatisfaction du coupable, euiîènt deman-
dé qu'il pût vivre parmi les hommes. Les parens
étoient libres de recevoir cette fatisfaction ou non :
encore aujourd'hui , dit M. de Fontenelle , éloge de
M. Littre , la France n'eit pas fur ce fujet autant au-
deffus de la fuperltition Chinoife , que les Anato-
miftes le delireroient. Chaque famille veut qu'un
mort joùiiïè pour ainfi dire, de fes obfeques , & ne
foudre point , ou fouffre très-rarement qu'il foit fa-
crifié à l'initruction publique ; tout au plus permet-
elle en certains cas qu'il le foit à fon initruction , ou
plutôt à fa curiolité particulière. M. de Marfollier
CAD
raconte clans la vie de S. François de Sales, que ce
faim encore fort jeune étant tombé dangereuiement
malade , vouloit léguer l'on corps par tcitament aux
écoles de iMedecine , parce qu'il étoit fcandalilé de
l'impiété des étudians qui déterraient les morts pour
en taire la diffecfron. Il eft pourtant néceffaire que
les magiftrats ferment jufqu'à un certain point les
yeux fur cet abus , qui produit un bien conlidérable.
Les cadavres font les fculs livres où on piuiïe bien
étudier l'Anatomie. Voye{ Anatomie.(O)
* L'ouverture des cadavres ne feroit pas moins
avantageulé aux progrès de la Médecine ; tel , dit M.
de la Métrie , a pris une hydropifie enkiftée dans la
duplication du péritoine , pour une hydropifie ordi-
naire , qui eut toujours commis cette erreur , li la dif-
fection ne l'eût éclairé : mais rJbur trouver les caufes
des maladies par l'ouverture des cadavres , il ne fau-
drait pas le contenter d'un examen fuperficiel,il fau-
drait fouiller les vifeeres , ck remarquer attentive-
ment les accidens produits dans chacun & dans toute
l'ceconomie animale ; car un corps mort diffère plus
encore au-dedans d'un corps vivant , qu'il n'en dif-
'fere à l'extérieur. La conlervationdes hommes ck les
progrès de l'art de les guérir , font des objets fi im-
portans , que dans une fociété bien policée , les prê-
tres ne devraient recevoir les cadavres que des mains
de l'Anatomifte ; & qu'il devrait y avoir une loi qui
défendît l'inhumation d'un corps , avant l'on ouvertu-
re. Quelle foule de connoiifancesn'acquerroit-on pas
par ce moyen ] Combien de phénomènes qu'on ne
î'oupçonne pas , & qu'on ignorera toujours , parce
qu'il n'y a que la diifeclion fréquente des cadavres
qui piaffe les faire appercevoir ! La confervation de
la vie eft un objet dont les particuliers s'occupent
alfez , mais qui me femble trop négligé par la fo-
ciété. Voye^ les articles^ FUNERAILLES , BUCHER ,
Sépulcre , Tombeau , &c
C ADDOR , ( Géog. ) ville d'Afie , dans l'Inde , au
royaume de Brampour , dépendante du grand Mo-
gol.
Caddor , ( IHJl. mod. ) c'eft le nom qu'on donne
en Turquie à une épée dont la lame eft droite , que
les fpahis font dans Fufage d'attacher à la felle de
leurs chevaux , ck dont ils fe fervent dans une ba-
taille au défaut de leurs fabres.
* CADEAU , f m. ( An d'écrire.} grand trait de
plume , dont les maîtres d'Ecriture embelliiient les
marges , ck le haut & le bas des pages , & qu'ils font
exécuter à leurs élevés pour leur donner de la fer-
meté & de la hardieffe dans la main.
CADÉE , f. f. (ffi/t. mod. ) c'eft ainfi qu'on nom-
me celle des trois ligues qui compofent la républi-
que des Grifons , qu'on appelle autrement la ligue de
la mai/on de Dieu. C'eft la plus étendue ck la plus
puiffante des trois ; elle renferme l'évêché de Coire ,
la vallée Engadine , & celle de Bregaillc ou Prigél;
elle eft alliée aux fept premiers cantons SuifTesdepuis
1498; on y profeffe le Proteftantifme ; l'Allemand
eft la langue de deux des onze grandes & vingt ck
une petites communautés dont la Cadée eft compo-
sée ; les autres parlent le dialecfe Italien appelle le
Rhitique.
CADEGI , (Hijî. nat. bot. ) arbre qui croît aux
Indes & en Arabie , & qui a beaucoup de reffem-
blance avec celui qui porte la cafle, mais dont la
feuille eft cependant plus longue ck plus mince. On
donne aurli le même nom à un autre arbre des In-
des , qui a beaucoup de conformité avec un prunier ;
fon écorce eft d'un brun foncé ; fes feuilles font un
peu plus longues que celles du poirier ; la fleur qu'il
produit eft blanche ck pourpre , d'une odeur fort
agréable , ck le fruit reftemble aux poires de berga-
motte.
CADEL-AVANACU , ( Hijl. nat. bot. ) efpecc de
CAD
511
ricin qui croît au Brefil , fleurit , & porte fruit en
Janvier ck en Juillet : c'eft tout ce que Ray nous en
apprend, Voye^ dans le dictionnaire de Médecine fes
propriétés qui font en grand nombre , & qui feraient
délirer une meilleure defeription du cadel-avanacu ,
fi elles étoient bien réelles.
C ADENAC , ( Géog. ) petite ville de France dans
le Querci, fur la rivière de Lot.
C A DE NAT, f. m. eft une efpece de petite
ferrure qui fèrt à fermer les malles, les coffres forts,
les caffette5, &c. Il y en a de différentes figures & de
méchanifme différent : mais on peut les renfermer
tous fous trois claffes , ck dire que les uns font à
ferrure , les autres à rejfort , & les troifiemes à fecret.
Quant aux figures , il y en a de ronds , de longs ,
d'ovales , en éculfon , en cylindre , en triangle , en
baluftre , en cœur, &c.
Les cadenats d'Allemagne ont toutes leurs pièces
bralées.
Pour expliquer les cadenats , nous allons commen-
cer par ceux en cœur, en triangle, & en boule. Ils
ont une anfe ON,fig. 3. & 4. PI. II. de Serrurerie ,
arrêtée par une goupille entre les deux oreilles qui
forment la tête du palatre. Cette anfe , par un mou-
vement de charnière , va fe rendre dans une Ouver-
ture pratiquée entre les deux oreilles oppofées aux
précédentes , où fon extrémité , à laquelle on voit
une encoche, rencontre un pèle IL, foutenu fur une
couliffe K , qu'elle pouffe , ck qui eft repouffé dans
l'encoche par un reffort à chien M qui eft fixé fur le
palatre du cadenat : c'eft ainfi que le cadenat fe
ferme de lui-même. Pour l'ouvrir, on a une clé dont
le panneton vient s'appliquer en tournant de gauche
à droite contre la queue L du pèle qui eft coudé en
équerre , repoulfe le reffort , & fait fortir le pèle /
de l'encoche de l'anfe du cadenat, ck alors le cadenat
eft ouvert.
Ces cadenats font, comme on voit, compofés d'un
palatre , d'une cloifon , & d'une couverture , qui eft
le côté où entre la clé, pour le dehors; & quant à
la garniture du dedans, c'eft un pèle à queue coudé
en équerre , & foutenu fur une couliffe K , avec un
reffort à chien par derrière , & une broche qui entre
dans le canon de la clé.
Autre cadenat en demi-cœur & à anfe quarrée. Celui-
ci a les mêmes pièces au dehors , mais aucune gar-
niture en dedans. Les deux extrémités de fon anfe
FGH ', FGH , font garnies fur deux faces , lavoir
celles qui regardent le ventre du cadenat, ck celles
qui fe regardent fous l'anfe , chacune d'un reffort
en aîie , F G, F G , foudés furies extrémités F, F, de
l'anfe. On fait entrer ces extrémités de l'anfe avec
ces refforts dans les ouvertures E, E, qui font entre
les oreilles de delfus la tête du paiatre ; dans ce
mouvement, les refforts FG, FG, fe preffent contre
les faces des extrémités de l'anfe, ck fe détendant
enfuite dans l'intérieur du cadenat, au-delà du dia-
mètre des ouvertures, l'anfe ne peut fortir d'elle-
même & le cadenat te trouve fermé. Pour l'ouvrir,
on a une clé forée Kl, dont le panneton eft entaillé
à fes deux extrémités , fuivant la forme des bouts
de l'anfe. En tournant cette clé de gauche à droite,
les deux parties entaillées du panneton preffent les
deux refforts de devant, & la partie du panneton
qui eft reliée entière , &qui paffe entre les deux au-
tres refforts qui fe regardent entre les branches de
l'anfe, les preffe en même tems ; d'où il arrive qu'ils
font tous quatre appliqués fur les faces de l'extré-
mité de l'anfe qui perd fon arrêt , ck lui permet de
fortir.
Cadenat cylindrique à reffort à boudin (fg. J. même
Planche'). Ce cadenatz pour corps un cylindre creux
ABI fermé par une de ces extrémités 5, ck garni à
l'autre extrémité d'un guide immobile ck bralé avec
5îî
C A
CAD
le corps , ou fixe par une goupille. Le corps porte à
la même extrémité du guide, où entre la clet , deux
oreilles entre lesquelles le meut l'ànfe B z , qui y
eft arrêtée par une goupille d'un bout, & dont l'au-
tre terminée par une iurface plate , quanée & per-
cée dans ion milieu d'un trou quarré , entre par une
ouverture faite au corps, dans ia cavité à la partie
oppolée des oreilles ; voilà toutes les parties extérieu-
res. L'intérieur eft garni d'un guide ou plaque cir-
culaire E 3, percée pareillement d'un trou carré , &
fondée parallèlement au guide , à très-peu de distan-
ce de l'ouverture qui reçoit l'extrémité de l'anle qui
doit recevoir le pèle. Entre ces deux guides le pofe
un relîbrt à boudin H G3, fur l'extrémité duquel
eft fituée une nouvelle plaque ou pièce ronde G J ,
& percée dans l'on milieu d'un trou quarré , dans le-
quel le pèle a F 6 eft fixé. Ce pèle traverle le relîbrt
à boudin , la pièce ronde mobile dans laquelle il eft
fixé , l'autre pièce ronde fixée dans le corps , & s'a-
vance par un de les bouts , juiqu'au de-là de l'ouver-
ture du cadenat , comme on voit en R M L y. Son
autre extrémité eft en vis , & entre dans le guide du
côté de l'anle ; il eft évident que dans cet état le ca-
denat eft fermé. Pour l'ouvrir , on a une clé 1 4,
dont la tige eft forée en écrou ; cet écrou reçoit la vis
du pèle, tire cette vis, fait mouvoir le pèle, approcher
la pièce ronde à laquelle il eft fixé , 6c lortir Ion ex-
trémité de la pièce ronde fixée dans le corps , &t du
trou quarré de Fauberon ; alors le cadenat eft ouvei t.
La pièce ronde s'appelle picolet. Il eft évident que
quand on retire la clé , on donne lieu à l'action du
relîbrt, qui repouiîè le picolet mobile, & fait aller
le bout du pèle de delîus le picolet fixe dans l'au-
beron. Cette clé a un épaulement vers le milieu de
fa tige; cet épaulement l'empêche d'entrer, & con-
traint le relîbrt à laitier revenir le pèle.
Autre cadenat à cylindre , ji g. 6. il eft fermé par
un de fes bouts M , l'autre N eft ouvert. Le côté
ouvert peut recevoir une broche D £ F, qui a qua-
tre ailes , foudées par la pointe de la broche & for-
mant relîbrt. L'anle accrochée par un bout M ou B
dans un anneau , qui eft à l'extrémité par laquelle en-
tre la clé, a en fon autre extrémité un auberon
C , percé d'un trou quarré , & qui entre dans le
cylindre qui forme le corps du cudenat ; lorfqu'on
veut fermer le cadm.it , on poulie la broche D E F
par le côté ouvert du cylindre , & on la fait palier
avec les relions E F à travers l'auberon ; ces reiïbrts
parlent au-delà de l'auberon , s'ouvrent, forment un
arrêt, & le cadznat eft fermé. Pour l'ouvrir, on a une
clé G H ii garnie d'un aubeion, qui reçoit la poin-
te de la broche , relïerre les refforts , & les relions
font ferrés avant que l'auberon de la clé foit parve-
nu jufqu'à l'auberon de l'anle ; cette clef ouvie le ca-
denat , & chalîe la broche.
Cudenat à ferrure , figure 2. même Planche : il eft
compote quant à la cage, d'un palatre , d'une cloi-
fon, d'une couverture & d'une anle ; quant au de-
dans, d'un pèle, monté dans deux picolets fixés fur
le palatre ; un grand relîbrt à gorge , aulîi monté
furie palatre ; au-delïbus du pelé cil un roue: fimple ,
avec une broche, desétochios qui arrêtent la cloilon
entre le palatre & la couverture , & fixent le tout en-
femble. La cloifon eft ouverte en deflus en deux en-
dioits , dont l'un reçoit une des branches de l'anle al-
longée & terminée par un bouton qui fixe la courie,
l'empêche de fortir du cadenat , & dont l'autre reçoit
l'autre branche de l'anle qui eft plate, & qui a une
entaille ou ouverture. Cette entaille reçoit le pèle ,
lorfque la clé tournant de droite à gauche rencontre
la gorge du relîort , le fait lever & échapper de fon
encoche , & poulie les barbes du pèle qui entre dans
l'entaille de l'anle , &c reçoit le relîbrt qui retombe
dans une autre encoche , qui empêche le pelé de
reculer. Alors le cadznat eft fermé ; fi l'on meut îa ci<J
en lens contraire, tout s'exécutera en feus conti ai-
re, & le cadenat lera ouvert.
On voit encore à ce cadenat un cache-entrée, qui
eft fixé iur la couverture par deux vis, dont l'une
eft rivée , & l'autre peut fortir jufqu'à fleur du cache-
ent'-ée ; l'utilité du cache-entrée , eft d'empêcher que
l'eau n'entre dans le cadenat : la tête de la broche qui
eft lur le palatre, eft tout-à-tait iemulable au cache-
ent.ee.
Cadenat à fecret, même PL il eft formé d'une plaque
A B , au milieu de laquelle eft rivé un canon CD ,
ouvert par la partie lupérieure. Sur ce canon peu-
vent s'enfiler des plaques rondes , pereces dans le
milieu E , échancrées circulairement en F G H, &C.
fendues en F; une aift-e plaque 1 K , porte fixée lur
ion milieu une broche LM , faite en icie. Cette bio-
che entre dans le canon CD , & traverle toutes les
piaques F G //,demanieie pour.anc que les dents
débordent par l'ouverture du canon, 6c font reçues
dans les échancrures des plaque . Qu; nd la bioche
L M avance dans le canon C D , l'extrémité Q d'u-
ne des moitiés de l'anle entre dans l'extrémité R de
l'autre moitié. Si vous faites tourner les plaques
F G H lur elles-mêmes , il eft évident que les dents
de la broche L M leront retenues par toutes les
échancrures de ces plaques , 6i. qu on ne pourra en
faire lortir cette broche , qu'en failant mouvoir tou-
tes les plaques , jufqu'à ce que toures ils fentes F de
ces plaques le trouvent &£ dans la même direction,
& dans la direction des dents de la bicche ; or, s'il
y avoit feulement fix à lept plaques échancrées , il
taudroit les tourner long-ten.s avant que le haiard
fit rencontrer cette pofinon un. que. Mais , dira-t-on ,
comment ouvre-t-on donc ce cadenat ? c'elî par le
moyen de fignes & ue caracteies répandus er grand
nombre fur toutes les circontérences des plaques e n-
filées. Il n'y a qu'une leule pofition de tous ces ca-
ractères , qui donne aux plaques celle dans laquelle
0.1 peut faire fortir la broche du car on ; & il n \ a
que le maître du cadenat qui connoille cette pofi-
tion, & qu'un Géomètre qui épu:leioit les combinai-
fons de tous les caractères, & qui éprouveioit ces
combinailons de caractères les unes après les autres,
qui puilTe rencontrer la bonne; mais par malheur,
cette eipece de cadenat eft à l'ufage de gens , dont
l'humeur inquiète ne lailî'e guère aux autres le tems
de faire un fi grand nombre d'épreuves.
CADENCE , f. f. ( Belles-Lettres ) ce mot dans le
difeours oratoire & la Pocfie , lignifie la marche har-
monieufe de la proie & des vers , qu'on appelle au-
trement nombre , & que les anciens nommoient ^hpU.
Foyei Nombre , Rythme , cv Harmonie.
Quant à la profe, Ariftote veut que fans être me-
furée comme les vers , elle foit cependant nombreu-
fe ; & Ciceron exige que l'orateur prenne loin de
contenter l'oreille , dont le jugement, dit-il , eft il fa-
cile à révolter , JuperbiJJlmum aurium judicium. En
effet la plus belle penlée a bien de la peine à plaire,
lorfqu'elle eft énoncée en termes durs & mal arran-
gés ; iî l'oreille eft agréablement flattée d'un diicours
doux & coulant , elle eft choquée quand le nombre
eft trop court, mal ibûtenu , la chute trop rapide ;
ce qui fait que le ftyle haché il fort à la mode aujour-
d'hui ne paroît pas être le ftyle convenable aux ora-
teurs : au contraire, s'il elt traînant & languiiîant,
il lalîè l'oreille & la dégoûte. C'eft donc en gardant
un jufte .milieu entre ces deux défauts, qu'on don-
nera au difeours cette harmonie toujours nécelîaire
pour plaire , & quelquefois pour perluader ; & tel
eft l'avantage du ftyle périodique & ioùtenu , comme
on peut s'en convaincre par la lecture de Ciceron.
Quant à la cadence des vers , elle dépend dans la
Poelie Greque & Latine , du nombre & de l'entre-
lacement
CAD
lacement des pies ou mefurcs profodiques , qui en-
trent dans la compofition des vers , des céfures, &c
ce qui varie félon les différentes efpeces de vers : &
dans les langues vivantes , la cadence réfulte du nom-
bre des fyllabes qu'admet chaque vers, de la richeffe,
de la variété & de la difpofition des rimes. Voyei
Harmonie.
» Dans l'ancienne Poëfie, il y a , dit M. Rollin,
» deux fortes de cadences : l'une iimple , commune ,
» ordinaire , qui rend les vers doux & coulans , qui
»> écarte avec foin tout ce qui pourroit bleffer l'o-
» reille par un fon rude & choquant ; & qui par le
» mélange de différens nombres & différentes mefu-
» res , forme cette harmonie fi agréable, qui règne
»> univerfellement dans tout le corps d'un poëme.
» Outre cela , continue-t-il , il y a de certaines ca-
» dences particulières plus marquées , plus frappan-
» tes , & qui fe font plus fentir ; ces fortes de caden-
y> ces forment une grande beauté dans la verfîfica-
» tion , & y répandent beaucoup d'agrément , pour-
» vu qu'elles l'oient employées avec ménagement &
» avec prudence , & qu'elles ne fe rencontrent pas
>> trop louvent. Elles fauvent l'ennui que des caden-
» ces uniformes , & des chûtes réglées fur une même
h mefure ne manqueraient pas de caufer. . . . Ainfi
» la Poëfie Latine a une liberté entière de couper
» fes vers où elle veut , de varier fes cefures , & fes
» cadences à fon choix , & de dérober aux oreilles dé-
» licates les chiites uniformes produites par le dacly-
» le & le fpondée , qui terminent les vers héroïques ».
Il cite enfuite un grand nombre d'exemples tous
tirés de Virgile ; nous en rapporterons quelques-uns.
i°. Les grands mots placés à propos forment une
cadence pleine cVnombreufe , fur-tout quand il entre
beaucoup de fpondées dans le vers.
Luclantes ventos tempefiatefque fonoras ,
Imperio premit. iEneid. i .
Ainfi le vers fpondaïque a beaucoup de gravité.
Confiât, atque oculis Phrygia agmina circumfpexit t
Un monofyllabe à la fin du vers lui donne de la force,
Hœret pes pede denjufque viro vir. jEneid. X.
Il y a des cadences fufpenducs propres à peindre les
objets , telle que celle-ci ,
Et frufira retinacula tendens ,
Fertur equis auriga. Georg. i.
d'autres coupées , d'autres où les élifions font un
très-bel effet. Les fpondées multipliés font propres à
peindre la trifteffe.
Extincliun nimphee crudeli funcre Daphnim
Fichant. Eclog. V.
des dactyles au 'contraire , à marquer la joie , le
plailîr ,
Saltantes fatyros imitabitur Alphefibœus , Eclog. V.
Pour exprimer la douceur , on choifit des mots où il
n'entre prefquc que des voyelles avec des confonnes
douces & coulantes ,
Devenere locos lœtos & amœna vireta \
Fortunatorum nemorian fedefquc beatas . jErteid. VI.
La dureté fe peint par des rr , ou d'autres confonnes
dures redoublées.
Ergo œgre raflris terram rimant ur. Georg. III.
la légèreté par des dactyles ;
Ergo id'i clara dédit fonitum tuba , fini bus on: nés,
Haud rnora , projiluere fuis j fait alliera clamor.
vEneid. v.
& la pefanteur par des fpondées ;
Illi inter Jefe magna vi brachia tollunt,
In numerum y yerfantque tenaci fircipë ferrum.
Georg. iv.
Tome II.
CAD 513
Dans d'autres cadences, un mot placé & comme re-
jette à la fin , a beaucoup de grâce.
Vox quoque per lucos vu/go exaudita filent es
Ingens. Georg. 1.
Traité des Etudes , tam. prem. pag. Jj3. &fuiv. ( C)
Cadence, en Mufique, eft la terminaifon d'une
phrafe harmonique fur unrepos ou fur un accord par-
fait, ou pour parler plus généralement, c'eft tout paf-
fage d'un [accord difîbnant à un autre accoid quel-
conque ; car on ne peut jamais fortir d'un accord dif-
fonant que par une cadence. Or comme toute phrafe
harmonique eft néceffairement liée par des diffonan-
ces exprimées ou fous-entendues , il s'enfuit que tou-
te l'harmonie n'eft proprement qu'une fuite de ca-
dences.
Ce qu'on appelle acte décadence réfulte toujours de
deux fons fondamentaux , dont l'un annonce la ca-
dence , & l'autre la termine.
Comme il n'y a point de dilîbnance fans cadence ,
il n'y a point non plus de cadence fans difïbnance ex-
primée ou fous-entendue ; car pour faire fentir agréa-
blement le repos , il faut qu'il loit précédé de quelque
chofe qui le faffe délirer , & ce quelque choie ne peut
être que la difïbnance : autrement les deux accords
étant également parfaits, on pourroit fe repofer fur
le premier ; le fécond ne s'annonceroit point , & ne
feroit pas néceflaire : l'accord formé fur le premier
fon d'une cadence , doit donc toujours être difTonant.
A l'égard du fécond, il peut être confonant ou difîb-
nant , félon qu'on veut établir ou éluder le repos*
S'il eft confonant, la cadence eft pleine : s'U eft difîb-
nant , c'eft une cadence évitée.
On compte ordinairement quatre efpeces de ca-
dences : fa voir , cadence parfaite , cadence interrompue ,
cadence rompue , & cadence irréguiiere. Ce font les noms
que leur a donné M. Paimeau.
1. Toutes les fois qu'après un accord de feptieme,
la baffe fondamentale defeend de quinte fur un ac-
cord parfait, c'eft une cadence parfaite pleine, qui pro-
cède toujours d'une dominante à une tonique : mais
fi la cadence eft évitée par une diffonance ajoutée à
la féconde note , elle peut fe faire derechef fur cette
féconde note , & fe continuer autant qu'on veut en
montant de quarte , ou defeendant de quinte fur tou-
tes les cordes du ton , & cela forme une fucceffion de
cadences parfaites évitées. Dans cette fucceffion qui
eft la plus parfaite de toutes, deux ions, lavoir la
feptieme & la quinte , defeendent fur la tierce & fur
l'octave de l'accord luivant, tandis que deux autres
fons, favoir la tierce & l'octave , refient pour faire
la feptieme & la quinte , & defeendent enfuite alter-
nativement avec les deux autres : ainfi une telle fuc-
ceffion donne une harmonie defeendante : elle ne
doit jamais s'arrêter qu'à une dominante pour tom-
ber enfuite par cadence pleine fur la tonique. Voye^
PI. I. de mufique , fig. l.
2. Si la baffe fondamentale defeend feulement de
tierce, au lieu de def cendre de quinte après un ac-
cord de feptieme, la cadence s'appelle interrompue :
celle-ci ne peut jamais être pleine: mais il faut né-
ceffairement que la féconde note de cette cadence por-
te un autre accord de feptieme : on peut de même
continuer à delccndre par tierces ou monter par fix-
tes, d'accords de feptieme en accords de feptieme*
ce qui fait une féconde fucceffion de cadences e\ teesi
mais bien moins parfaite que la précédente; car la
feptieme quiïe fauve fur la tierce dans la cadence par-
faite , fe fauve ici fur l'octave , ce qui fait moins d'har-
monie, & fait même fous-entendre deux ot
de forte que pour les éviter, on retranche ordinaire-
ment la dilîbnance, ou l'on renverfe l'harmonie.
Puilqiie la cadem interrompue ne peut jamais êtr«j
pleine , il s'enfuit qu'une phrafe. ne peut finir par elle*
T 1 1
5M
C A
mais il faut recourir à la cadence parfaite pour faire
entendre l'accord dominant. Voycifig. z.
La cadence interrompue forme encore par fa fuccef-
fion une harmonie dépendante : mais il n'y a qu'un
feul l'on qui defeende ; les trois autres relient en pla-
ce pour defeendre fuccefîivement chacun à fon tour.
(Voye^ même fig.j Quelques-uns prennent pour ca-
dence interrompue un renverfement de la cadence par-
faite, où la balle après un accord de feptieme ,def-
cend de tierce portant un accord de fixte : mais il eft
évident qu'une telle marche n'étant point fondamen-
tale , ne fauroit conft ituer une cadence particulière.
3. Cadence rompue eft celle où la baffe fondamen-
tale , au lieu de monter de quarte après un accord
de feptieme, comme dans la cadence parfaite , monte
feulement d'un degré. Cette cadence s'évite le plus
fouvent par une feptieme fur la féconde note : il elt
certain qu'on ne peut la faire pleine que par licence ;
car alors il y a néceffairement défaut de liaifon. Voye^
fis- .3-
Une fuccelîion de cadences rompues eft encore des-
cendante ; trois fons y deicendent , & l'o&ave refte
feule pour préparer la diffonance : mais une telle fuc-
celîion eft dure, & lé pratique très-rarement.
4. Quand la baffe defeend de quinte de la domi-
nante fur la tonique , c'eft , comme je l'ai dit , un afte
de cadence parfaite : fi au contraire , la baffe monte de
quinte de la tonique fur la dominante , c'eft un afte
de cadence irréguiiere, félon M. Rameau, ou de caden-
ce imparfaite , félon la dénomination commune. Pour
l'annoncer on ajoute une fixte à l'accord de la toni-
que, d'où cet accord prend le nom de fixte ajoutée.
Voye^ Accord. Cette fixte qui fait diffonance fur
la quinte , eft auffi traitée comme diffonance fur la
balle fondamentale , & comme telle eft obligée de
fe fauver en montant diatoniquement fur la tierce de
l'accord fuivant.
. Il faut remarquer que la cadence irréguiiere forme
une oppofition prefqu'entiere à la cadence parfaite.
Dans le premier accord de l'une & de l'autre on di-
vife la quarte qui fe trouve entre la quinte & l'oûa-
ve par une diffonance qui y produit une nouvelle
tierce ; & cette diffonance doit aller fe relbudre fur
la tierce de l'accord fuivant par une marche fonda-
mentale de quinte. Voilà tout ce que ces deux caden-
dences ont de commun : voici ce qu'elles ont de con-
traire.
Dans la cadence parfaite , le fon ajouté fe prend au
haut de l'intervalle de quarte auprès de î'oûave ,
formant tierce avec la quinte , & produit une diffo-
nance mineure qui le fauve en delcendant ; tandis
que la baffe fondamentale monte de quarte , ou def-
eend de quinte de la dominante à la tonique , pour
établir un repos parfait. Dans la cadence irréguiiere ,
le fon ajouté fe prend au-bas de l'intervalle de quar-
te auprès de la quinte , & formant tierce avec l'octa-
ve , il produit une diffonance majeure qui fe fauve
en montant, tandis que la baffe fondamentale def-
eend de quarte , ou monte de quinte de la tonique à
la dominante , pour établir un repos imparfait.
M. Rameau qui a parlé le premier de cette caden-
ce , & qui en a admis plufieurs renverfemens , nous
défend dans fon traité de F Harmonie , pag. il y. d'ad-
mettre celui oii le fon ajouté eft au grave , portant un
accord de feptieme. Il a pris cet accord de feptieme
pour fondamental , de forte qu'il fait fauver une fep-
tieme par une autre feptieme , une diffonance par
une autre diffonance , par mouvement femblable fur
la baffe fondamentale. Foye^ fig. 4 Mais l'harmonie
fous laquelle cet auteur a mis une telle baffe fonda-
mentale , eft viliblement renverfée d'une cadence ir-
réguiiere évitée par une feptieme ajoutée fur la fécon-
de note, même figure ; & cela eft fi vrai, que la baffe
CAD
continue qui frappe la diffonance, eft néceffaire-
ment obligée de monter diatoniquement pour la fau-
ver, autrement le paffage ne vaudroit rien. D'ail-
leurs M. Rameau donne dans le même ouvrage ,pag.
ZJZ. un exemple d'un paffqge femblable avec la
vraie baffe fondamentale : on peut remarquer en-
core que dans un ouvrage poftérieur , ( Gêner.
Harm. pag. 186 .j le même auteur femble reconnoî-
tre le véritable fondement de ce paffage à ra faveur
de ce qu'il appelle le double emploi. F'oye^ DOUBLE
Emploi. (S)
M. Rameau donne les raifons fuivantes des déno-
minations qu'on a données aux différentes efpeces
de cadence.
La cadence parfaite confifte dans une marche de
quinte en delcendant , & au contraire Yimparfaite
confifte dans une marche de quinte en montant. En
voici la raifon : quand je dis ut , fol,fiol eft déjà
renfermé dans ut , puilque tout fon comme ut, por-
te avec lui fa douzième, dont fol eft l'oûave. Ainll
quand on va d'ut à fol, c'eft le fon générateur qui
paffe à fon produit , de manière pourtant que l'o-
reille defire toujours de revenir à ce premier gé-
nérateur; au contraire, quand on dît Jbl , ut, c'eft
le produit qui retourne au générateur, l'oreille eft
fatisfaite, & ne defire plus rien. De plus dans cet-
te marche fol, ut, le fol fe fait encore entendre
dans ut , ainfi l'oreille entend à la fois le générateur
&c fon produit ; au lieu que dans la marche ut , Jbl,
l'oreille qui dans le premier fon avoit entendu ut
& Jbl , n'entend plus dans le fécond que fol fans
ut. Ainfi le repos ou cadence de fol à ut eft plus par-
fait que le repos ou cadence de ut à fol .
Il femble que dans les principes de M. Rameau,
on peut encore expliquer l'effet de la cadence rompu*
& de la cadence interrompue : imaginons pour cet ef-
fet qu'après un accord de feptieme fol fi re fia , on
monte diatoniquement par une cadence rompue à l'ac-
cord la ut mi fol, il eft vilible que cet accord eft ren-
verfé de l'accord de fous-dominante ut mi fol la ; ainli
la marche de cadence rompue équivaut à celle-ci fol fi
re fia, ut mi Jbl la , qui n'eft autre chofe qu'une caden-
ce parfaite , dans laquelle ut au lieu d'être traité com-
me tonique , eft rendue fous-dominante. Or toute to-
nique peut toujours être rendue fous-dominante en
changeant de mode. Voye^ Dominante, Sous-
dominante, Basse fondamentale, &c.
À l'égard de la cadence interrompue , qui confifte à
defeendre d'une dominante fur une autre par l'inter-
valle de tierce en defeendant, en cette ibnefolfi re-
fa, mi Jbl fi re, il femble qu'on peut encore l'expli-
quer : en effet le fécond accord mi Jbl fi re, eft renver-
fé de l'accord de fous-dominante , fol fin mi ; ainfi la
cadence interrompue équivaut à cette fuccelîion, fbly
fi re fia, fol fi re mi, où la note jbl, après avoir été
traitée comme dominante , eft rendue lous-dominan-
te en changeant de mode , ce qui eft permis , & dé«
pend du compofiteur. /^by^MoDE, &c. (0)
La cadence irréguiiere fe prend auffi de la fous-do-
minante à la tonique : on peut de cette manière lui
donner une fuccelîion de plufieurs notes, dont les
accords formeront une harmonie , dans laquelle la
fixte & l'oftave montent fur la tierce & la quinte de
l'accord fuivant , tandis que la quinte & la tierce res-
tent pour faire l'octave , & préparer la fixte , &c.
Nul auteur jufques-ici n'a parlé de cette afeenfior»
harmonique, & il eft vrai qu'on ne pourroit prati-
quer une longue fuite de pareilles cadences, à caufe
des lîxtes majeures qui éloigneroient la modulation,
ni même en remplir fans précaution toute l'harmo-
nie. Mais enfin li les meilleurs ouvrages de Mulique,
ceux, par exemple, de M. Rameau, font pleins de
pareils paffages ; ù ces paffages font établis fur de
CAD
bons principes, & s'ils plaifent à l'oreille, pourquoi
n'en avoir pas parle ? (S)
On pourroit au relie , ce me femble , obferver que
M. Rameau a parlé du moins indirectement de cette
forte de cadence, lorfqu'il dit dans fa Génération har-
monique , que toute fous-dominante doit monter de
quinte fur la tonique , & que toute tonique peut être
rendue à volonté fous-dominante. Car il s'enfuit de-
là qu'on peut avoir dans une baffe fondamentale une
fuite de fous-dominantes qui vont en montant de
quinte , ou en defeendant dé quarte , ce qui eft la mê-
me chofe. ( O )
Il y a encore une autre efpece de cadence que les
Muficiens ne regardent point comme telle , & qui ,
félon la définition , en cil: pourtant une véritable;
c'eft le partage de l'accord feptieme diminuée de la
note fenlible , à l'accord de la tonique ; dans ce pal-
fage il ne le trouve aucune liaifon harmonique , &
c'eft le fécond exemple de ce défaut dans ce qu'on
appelle cadence. On pourroit regarder les tranlîtions
enharmoniques comme des manières d'éviter cette
même cadence : mais nous nous bornons à expliquer
ce qui eft établi.
• Cadence fe dit, en terme de chant, de ce batte-
ment de voix que les Italiens appellent trillo , que
nous appelions autrement tremblement , &c qui fêtait
ordinairement fur la pénultième note d'une phrafe
muficale, d'oii fans doute il a pris le nom de caden-
ce. Quoique ce mot foit ici très-mal adapté , & qu'il
ait été condamné par la plupart de ceux qui ont écrit
fur cette matière , il a cependant tout-à-fait prévalu ;
c'eft le feul dont on le ferve aujourd'hui à Paris en
ce fens, & il eft inutile de difputer contre l'ufage.
CADENCE, dans nos dan/es modernes , lignifie la
conformité des pas du danfeur avec la mefure mar-
quée par l'infti ument : mais il faut obferver que la
cadence ne fc marque pas toujours comme fe bat la
mefure. Ainfi le maître de Mufique marque le mou-
vement du menuet en frappant au commencement
de chaque mefure ; au lieu que le maître à danfer ne
bat que de deux en deux mefures , parce qu'il en faut
autant pour former les quatre pas de menuet. (S)
Cadence , dans la Danfe , fc prend dans le même
fens que mefure ck mouvement en Mufique : ainûjèn-
tir la cadence , c'eft lentir la mefure, & luivre le mou-
vement d'un air ;fortir de cadence , c'eft ceffer d'ac-
corder fes pas avec la mefure & le mouvement d'une
pièce de mufique. Les danfeurs diftinguent deux Tor-
ies de mefures; une vraie & une faufle , ck confé-
quemment deux fortes de cadence, l'une vraie ck l'au-
tre fitujfe. Exemple : clans le menuet la mefure vraie
eft la première mefure , & la féconde eft la faune ;
ôk comme les couplets du menuet font de huit ou de
douze mefures, la vraie cadence eft en commençant,
& la fuuffe en finiiîant. La première fe marque en
frappant de la main droite dans la gauche ; Se la fé-
conde ou faujfe cadence en levant , ce que l'on conti-
nue par deux tems égaux.
Le pié tait tout le contraire de la main. Eft effet,
dans le tems que l'on relevé fur la pointe du pié droit ,
c'eft dans ce même-tems que vous f, appez ; ainfi on
doit plier fur la fin de la dernière mefure , pour fe
trouver à portée de relever dans le tems que l'on
frappe.
La cadence s'exprime de deux manières en dan-
fant: i°. les pas qui ne font que plies év élevés font
relevés en cadence. i°. Ceux qui font fautes doivent
tomber en cadence. Il tant donc toujours que les mou-
vemens la préviennent , ck plier fur la fin de la der-
nière mefure , afin de fe relever lorsqu'elle le doit
marquer.
CADENCE , en termes de Manche , fe dit de la me-
fure ck proportion égale que le cheval doit garder
dans tous fes mouvemens, foit qu'il manie au galop,
Tome II,
CAD
5?5
ou terre à terre , ou dans les airs , enforte qu'aucun
de fes tems n'embraife pas plus de terrein que l'au-
tre , qu'il y ait de la juftefiè dans tous fes mouve-
mens , &c qu'ils fe foûtiennent tous avec la même
égalité. Ainli on dit qu'un cheval manie toujours de
la même cadence , qu'il fuit fa cadence, ne change point
fa cadence , pour dire qu'il obférve régulièrement fon
terrein , ck qu'il demeure également entre les deux-
talons. Lorfqu'un cheval a la bouche fine, les épau-
les èk les hanches libres, il n'a aucune peine d'entre-
tenir fa cadence. Cheval qui prend une belle cadence
fur les airs, fans fe démentir, fans fe brouiller; qui
manie également aux deux mains. (V)
CADENE, f. t. en terme de Marine, cftfynonyme
à chaîne.
Cadene de hauban ; ce font des chaînes de fer, au
bout defquelles on met un cap de mouton pour fer-
-^ ir à rider les haubans.
On voit à chaque porte-hauban une cadene ou chaî-
ne de fer, faite d'une feule barre recourbée , ck qui
furmonte. Il y a une corde qui eft amarrée , èk qui
partant dans les trous du cap de mouton que la ca-
dene environne , & qui fervent comme de rouets ,
tient ferme les haubans ck les fait rider, & contribue
par ce moyen à l'affermiflement du mât ; les cadenes
font tenues par de bonnes chevilles de fer. Celles des
hunes font fort longues , & fur -tout celles qui font
aux hunes des mâts d'avant & d'artimon, parce que
les haubans des mâts , qui font entés défais, v,c âei
cendent pas jufqu'aux cercles de la hune. Il n'y a
point de cadene à la hune de beaupré. Les cadenes qui
font aux porte-haubans font rider les haubans par le
moyen des palanquins : mais les haubans des hauts-
mâts ne fe rident qu'avec des caps de mouton.
11 y a dans les grands porte-haubans deux loigucs
barres de fer plates qui font mobiles, ék que l'on ap-
pelle pareillement cadenes ; l'une iert à mettre le pa-
lang qui ride les grands haubans , èk l'autre à defeen-
dre la chaloupe à la mer, ou à la haler à bord. (Z )
CADENET , (Géog.) petite ville de France , en
Provence , à cinq lieues d'Aix, près de la Durance.
CADEQUIE ou CADAQUEZ, (Géog.) port
d'Efpagne, en Catalogne , fur la mer Méditerranée.
CADES , (Géog.Jainte.) ville de la tribu de Neph-
tali , lîtuée au haut d'une montagne, à l'occident du
lac de Lamechon. Ce fut là que Jonathas , frère de
Judas Machabée , tua trois mille hommes à Deme-
trius Nicanor , avec une poignée de foldats.
CAD ES , {Géog. fainte.) ville dans le defert de
Pharan& de Sin , qui eft entre la terre promife , l'E-
gypte , ck l'Arabie. Ce fut là que Marie, fœur de
Moyfe , mourut ck fut enterrée. Il y avoit dans la
Paleftine d'autres villes du même nom.
CADESSIA , {Géog.) ville d'Aiîe, dans la provin-
ce de l'Irac Babylonienne.
CADET, f. m. (terme de relation.) eft fynonyme
à pu:nc , 6k fe dit de tous les garçons nés depuis lame.
Dans la coutume de Paris , les cadets des familles
bourgeoifes partagent également avec leurs aines.
Dans d'autres coutumes les aînés ont tout ou pref-
que tout. En Efpagne, l'ufage dans les grandes fa-
milles eft qu'un des cadets prenne le nom de là mère.
w ,'
Cadet , (A 'ri militaire.) un officier eft dit le eadet
d'un autre de même fonction que lui, lorfque là com-
milfion eft plus nouvelle; il n'importe qu'il foit plus
âgé ou qu'il eût beaucoup plus de fervice dans un
autre gn
( > DETS, fc dit aurti , dans F Art militain , de
plufieurs compagnies de jeunes gentilshommes que
LoiiisXlY. avoit créés en i6bz, pour leur tin.
ner toutes les infrrucrions néceffaires à un homme de
guerre. Le roi pavoit pour chaque compagnie un
maître de mathématique, un maître à deifinei , un
T t t ij
5i6
CAD
maître de langue Allemande , un maître à danfer ,
ôi. deux maîtres d'armes.
Cet établiffement dura dix ans dans fa vigueur :
mais les grandes guerres que le roi eut fur les bras
après la ligue d'Ausbourg , l'obligèrent à retran-
cher les dépenfes qui n'étoient pas abfolument né-
ceffaires , &C l'on penfa à fe décharger de celles qui
fe faifoient pour les cadets. On avoit déjà commencé
à ne pas admettre gratuitement ceux qui fe prélen-
toient. Il falloit cautionner pour eux cinquante écus
de penfion , & ils étoient obligés d'aller prendre leurs
lettres à la cour. Ces frais en rebutèrent beaucoup,
& altérèrent même l'établiffement , en ce que plu-
fieurs qui n'étoient pas gentilshommes étoient reçus
à ces conditions , pourvu qu'ils f uffent de bonne ia-
mille & vivant noblement. Enfin , après 1691 on
ceffa de faire des recrues , & peu à peu dans l'efpa-
ce de deux ans ces compagnies furent anéanties.
Le Roi a rétabli pluiîeurs compagnies de cadets en
1726, mais elles ont été réformées lors de la guerre
de 1733.
Cadets d'Artillerie , font de jeunes gens de
famille , que le grand-maître reçoit pour les taire inl-
truire dans les écoles d'Artillerie , & les mettre par-
là en état de fe rendre capables de devenir officiers.
Foyei Écoles d'Artillerie.
On appelle encore cadets , dans les troupes , de
jeunes gentilshommes qui font un fervice comme les
cavaliers & foldats , en attendant qu'ils ayent pu ob-
tenir le grade d'officier. (Q )
C A D I , ( Hift. mod. ) c'eft le nom qu'on donne
aux juges des caufes civiles chez les Sarrafins & les
Turcs. On peut cependant appeller de leurs fenten-
ces aux juges lupérieurs.
Ce mot vient de l'Arabe , kadi , juge. D'Herbelot
écrit cadhi.
Le mot cadi , pris dans un fens abfolu, dénote le
juge d'une ville ou d'un village ; ceux des provinces
s'appellent molla ou moulas , quelquefois moula-cadïs
OU grand-cadis. (G)
CADI AR, ( Géog.) rivière d'Efpagne , au royau-
me de Grenade , qui fe jette dans la Méditerranée
près de Salobrena.
CADIERE (la) , Géog. petite ville de France ,
en Provence , à trois lieues de Toulon.
CADILESQUER ou CADILESQUIER , fub. m.
(Hift. mod.) chef de la juftice chez les Turcs. Voye^
Cadi.
Ce mot eft Arabe , compofé de kadi ,juge, &c af-
char , & avec l'article al , alafchar , c'eft-à-dire ar-
mée, d'où s'eft formé kadilafeher, juge d'armée, parce
que d'abord il étoit juge des foldats. D'Herbelot écrit
cadhi-lesker ou cadhiasker.
Chaque cadilefquier s. fon diftrict particulier ; d'Her-
belot n'en compte que deux dans l'empire , dont l'un
cil le cadilefquier de Romanie , c'elf-à-dire d'Europe ,
& le fécond d'Anatolie ou d'Afie. M. Ricaut en ajou-
te un troilieme , qu'il appelle cadilefquier du Caire.
Le cadilefquier d'Europe & celui d'Afie font fubor-
donnes au reis eftèndi , qui eft comme le grand chan-
celier de l'empire. Voye{ Reis effendi. (G)
CADILLAC , petite ville de France , en Guyenne
dans le Bafadois, proche la Garonne, à 4 lieues de
Bafas.
* CADIS , f. m. {Commerce.) petite étoffe de laine
croifée , ou ferge étroite & légère , qui n'a qu'une
demi-aune moins ~ de large , fur 30 à 3 1 aunes de
long. Il s'en fabrique beaucoup dans le Gevaudan &
les Cevenes. Elle eft exceptée par les reglemens du
nombre de celles qu'il eft défendu de teindre en rou-
ge avec le brefil, à moins qu'elles n'ayent une demi-
aune de large.
On donne encore le nom de cadis à une autre ef-
pece d'étoffe de laine fine croifée & drapée , d'une
CAD
demi-aune de large , & dont les pièces portent de-
puis 38 jufqu'à 42 aunes. Ces derniers cadis fe fabri-
quent particulièrement en Languedoc. On appelle
cadis ras , ceux qui ont la croit ure déliée & peu de
poil; on nous les envoyé à Paris en blanc & en noir.
Les religieux en confomment beaucoup.
* CADISÉ , adj. (Commerce.) On défigne par cette
épithete une efpece de droguets croifés & drapés ,
dont les chaînes font de 48 portées , & chaque por-
tée de 16 fils. & qui ont, tout apprêtés , une demi-
aune de large & 40 aunes de long. Ils fe fabriquent
en pluiîeurs endroits du Poitou.
CADISADELITES , f. m. pi. (Hift. mod.) nom
d'une feue Mufulmane. Les Cadifadelites font une ef-
pece de Stoïciens Mahométans , qui fuient les telfins
&c les divertifïemens , & qui affe&ent une gravité ex-
traordinaire dans toutes leurs actions.
Ceux des Cadifadelites qui habitent vers les fron-
tières de Hongrie & de Bolnie, ont pris beaucoup de
choies du Chriftianifme qu'ils mêlent avec le Maho-
métifme. Ils lifent la traduction Efclavone de l'évanr
gile , aulîi-bien que Palcoran, & boivent du vin , mê-
me pendant le jeune du Ramalan.
Mahomet, félon eux, eft le S. Efprit qui defeendit
fur les apôtres le jour de la Pentecôte. Ils pratiquent
la circoncifion comme tous les autres Mufulmans,
& fe fervent pour l'autorifer de l'exemple de Jefus-
Chrift , quoique la plupart des Turcs & des Arabes
le fondent bien davantage fur celui d'Abraham. (G)
CADIX , (Géog. anc, & mod.) ville d'Efpagne , en
Andaloufie , avec bon port. Cette ville bâtie par les
Phéniciens , eft grande , forte , riche , & très- com-
merçante : elle eft dans une petite île , à 8 lieues de
Médina Sidonia, & à 18 de Gibraltar. Long. iz. lat.
36. z3. Les anciens l'ont nommée Gades 6c Gadira.
C ADMIE , f. f. ( Chimie & Métallurgie. ) c'eft une
fubftance femi-métallique , arfénicale, fulphureufe ,
& alkaline , qui s'attache comme une croûte aux pa-
rois des fourneaux où l'on fait la première fonte de
certains minéraux. On la nomme cadmia fornacum ,
cadmie des fourneaux , pour la diftinguer de la pierre
calaminaire , qu'on appelle quelquefois cadmia foffi-
lis , cadmie foffile. Voye?^ l'article CALAMINE. En
effet elle en a toutes les propriétés. La vraie diffé-
rence qui fe trouve entre ces deux lubftances , c'eft
que la pierre calaminaire eft une production de la
nature , au lieu que la cadmie des fourneaux en eft une
de l'art.
Il femble que les auteurs qui ont écrit fur la cad-
mie , loin de chercher à nous la faire connoître d'une
façon diftin£te,fe font étudiés à obfcurcir l'idée qu'on
pouvoit s'en former. En effet , à quoi peut-on attri-
buer les différens noms inutiles, empruntés du Grec
& de l'Arabe , dont ils fe font fervis pour la défigu-
rer ? On trouve dans différens ouvrages cette ma-
tière délignée fous les noms de capnites , diphryges ,
fpodium , oftracites , botryites , cadmia , climia , &zc qui
tous doivent lignifier la cadmie des fourneaux , & qui
ne marquent cependant dans leur étymologie que la
figure différente qu'elle prend , & la place qu'elle oc-
cupe dans le fourneau. C'eft encore plus mal-à-pro-
pos qu'on la trouve dans quelques auteurs confon-
due avec d'autres lubftances , avec qui elle n'a que
certains points de conformité , telles que la tutie , le
pompholix , Se le nihilum. Voye^ces articles. On a cru
devoir fe récrier contre cette erreur & cet abus de
mots , fur -tout attendu les fuites fâcheufes qui peu-
vent en réfulter. En voici un exemple frappant. On
fait que la tutie paffe pour un bon remède contre
les maux d'yeux , & que le pompholix eft employé
pour deffécher les plaies : où en feroit-on , li au lieu
de ces remèdes on employoit à ces ufages la cadmie ,
qui eft prefque toujours mêlée de parties arfénicales ?
Il y a différentes fortes de cadm'us ; c'eft la divtr-
CAD
fité des minéraux- , dont les vapeurs les produifenr,
qui en font la différence. On en voit qui s'élèvent
fous la forme d'une farine légère , d'autres fous celle
d'une pierre compacte , & cependant friable ; tandis
qu'une autre eft légère, feuilletée & fpongieufe. La
couleur ne laifie point d'en varier comme la figure ;
elle eft tantôt d'un bleu d'ardoife, tantôt brune , &
tantôt elle tire furie jaune. Enfin il y a de la cadmic
qui a la propriété de jaunir le cuivre de rofette ; celle
qui a cette qualité , en eft redevable au zinc qui lui
communique fa volatilité : la preuve eft qu'on peut
aiiement tirer ce demi-métal de la cadmic. Celle qui
ne jaunit point le cuivre , ne peut point être appellée
une vraie cadmie: ce n'eft autre chofe qu'une tiimée
condenfée , dont jufqu'à préfent on n'a pu découvrir
l'ufage.
De toutes les cadmies , la meilleure &C la plus ufi-
tée elt celle de Gofiar dans le duché de Brunlv/ick:
il y a dans le voifinage de cette ville plufieurs fonde-
ries oii l'on travaille des mines de plomb qui font en-
tremêlées de quelque choie de terreftre , qu'on peut ,
félon M. Marggraf , à la fimple vue diftinguer de fes
autres parties , & qui n'eft autre chofe que de la cala-
mine, où par conféquent il le trouve du zinc ; dans la
fonte une partie s'en diffipe en fumée , & l'autre de-
meure attachée comme un enduit aux parois des
fourneaux. M. Stahl dit qu'anciennement on jet-
toit cet enduit comme inutile avec lesfcories : mais
depuis qu'on a trouvé à le vendre à ceux qui font le
cuivre de laiton , on le recueille avec foin , & même
on a la précaution d'humecter de tems en tems avec
un peu d'eau , la partie antérieure du fourneau vis-
à-vis des tuyères, qu'on appelle ordinairement la
chemife , afin qu'il s'y forme davantage de cadmic.
Cette partie antérieure ou chemife , eft faite avec
des tables ou plaques de pierre fort minces , néan-
moins capables de réfifter au feu. Quand après la
fonte on les ôte des fourneaux , on en détache à
coups de cifeau la cadmic qui s'y eft attachée. Elle
eft d'une couleur d'ardoife , ou d'un gris tirant fur
le jaune. C'eft-là la matière dont on fe fert en bien
des endroits d'Allemagne pour faire le cuivre de lai-
ton ; on la préfère même à la calamine. Nous allons
en donner le procédé.
Lorfqu'on a détaché la cadmie, on la laiffe expo-
fée pendant long -tems , quelquefois même pendant
deux ou trois ans , aux injures de l'air : on prétend
que cela la rend beaucoup meilleure , parce que
par-là elle devient moins compacte & plus friable.
On la torréfie dans des fourneaux faits exprès ; on
la réduit en une poudre très-fine , qu'on pâlie au ta-
mis ; on en mêle une partie avec deux parties de
charbon pilé ; on unit bien exactement ces deux ma-
tières toutes lèches ; on y verfe de l'eau ; d'autres
veulent que ce loit de l'urine , & qu'on y joigne un
peu d'alun ; ils prétendent que cela contribue à don-
ner une plus belle couleur au laiton : on remue bien
tout le mélange, & on y ajoute du lel marin. Voilà
la préparation qu'on donne à la cadmie de Gojlar.
Lorfqu'on veut en faire du laiton , on a pour cela des
fourneaux ronds enfoncés en terre , qui font percés
de plufieurs trous par le bas , pour que le vent puiffe
y entrer & faire aller le feu ; on met dans chaque
fourneau huit creufets à la fois , & lorlqu'ils font
échauffés , on y met le mélange qu'on vient de dire ,
de charbon & de cadmie ; de façon que quarante-lix
livres de ce mélange fe trouvent également reparties
dans les huit creufets : on met enluite dans chaque
creufet huit livres de cuivre en morceaux ; on les
remet au fourneau , &c on les laiffe expofés à un feu
violent pendant neuf heures : au bout de ce tems ,
on prend un des creufets pour examiner fi la fonte
s'eft bien faite ; on le remet , & on laiffe le tout en-
core une heure au feu , & enfin on vuide les creu-
CAD
51
I
fets dans des lingotieres , où on coule le cuivre de
laiton en tables. Il y a des gens qui font dans l'ufage
de remettre le laiton encore une fois au fourneau , Se
qui prétendent par-là lui donner une plus belle cou-
leur : mais il n'y a point de profit à le faire. Le cui-
vre dans l'opération que nous venons de décrire ,
acquiert près d'un tiers de fon poids : en effet , fi
avant la fonte on répartit foixante - quatre livres de
cuivre dans les huit creufets , on aura à la fin de l'o-
pération quatre-vingts-dix livres de laiton. Voilà fui-
vant Lazare Ercker , la manière dont fe fait le cui-
vre de laiton dans plufieurs endroits d'Allemagne ,
comme dans le Hartz , dans le pays de Heffe , & près
de la ville de Goilar.
On peut tirer du zinc de la cadmie des fourneaux ,
comme de la cadmie foffîle ou calamine ; voyet l' 'article
Zinc : cette fubftance fait comme elle effervefeence
dans les acides. M. Swedenborg dit , que fi on fait
diffoudre la cadmie dans l'efprit de vinaigre , elle lui
donne une couleur jaune ; fi on fait évaporer à fie-
cité ce diffolvant, on trouve au fond du vafe un pré-
cipité ou une chaux qui a la forme de petites étoi-
les inferites dans un cercle , & dont tous les rayons
font à une diftance égale les uns des autres. (— )
CADODACHES ™CADODAQUIOS , (Géog.)
peuple fauvage de la Louifiane dans l'Amérique fep-
tentrionale.
CADORE ou PIEVE DI CADORE , ( Géog. )
petite ville d'Italie dans l'état de Venife , au petit
pays de Cadorino , ainfi appelle de fon nom.
CADOROUSE ou CADEROUSSE , (Géog.) pe-
tite ville de France dans la principauté d'Orange ,
à l'endroit où l'Argenté tombe dans le Rhône.
CADRAN ou CADRAN SOLAIRE, ( Ordre en-
cyclopédique. Entend. Rai/on. P/ulofophie ou Science.
Science de la nature. Mathématiques. Mathématique*
mixtes. Agronomie géométrique. Gnomonique , ou Art
de faire des Cadrans. ) c'eft une furface fur laquelle on
trace certaines lignes qui fervent à mefurer le tems
par le moyen de l'ombre du foleil fur ces lignes.
Foye^ TEi\is & Ombre.
Les anciens donnoient auffi aux cadrans le nom
àefeiatériques , parce que l'ombre , sy.ia. , fert à y mar-
quer les heures.
On définit plus exactement le cadran. , la deferip-
tion de certaines lignes fur un plan ou fur la furface
d'un corps donné , faite de telle manière que l'ombre
d'un ftyle , ou les rayons du foleil paffant à-travers un
trou pratiqué au ftyle, tombent fur de certains points
à certaines heures. Voye^ Style.
La diverfité des cadrans folaires vient de la diffé-
rente fituation des plans Si. de la différente figure des
furraces fur lefquelles on les décrit: c'eft pourquoi
il y a des cadrans équinocliaux , horifontaux , verticaux,
polaires , directs , élevés , déclinans , inclinans , récli-
nans, cylindriques , &c. Voy. PLAN , GNOMONIQUE,
Pour montrer l'heure fur la furface des cadrans ,
on y met deux fortes de ftyles : l'un appelle droit , qui
confifte en une verge pointue, laquelle par Ion ex-
trémité & par la pointe de fon ombre , marque l'heu-
re ou partie d'heure qu'il eft. Au lieu de ces verges ,
on peut fe contenter d'une plaque de métal , élevée
parallèlement au cadran , Si percée d'un trou par où
paffe l'image du foleil: ce trou repréfente l'extré-
mité lupérieure de la verge , comme on le voit à
prefque toutes les méridiennes. V. MÉRIDIENNE.
L'autre efpece de ftyle eft nommé ftyle oblique ou in-
cliné, ou bien axe , & montre l'heure par une ombre
étendue.
Le bout du ftyle droit de tous les cadrans repré-
fente le centre du monde , & par conféquent uilfi le
centre de l'horifon , de Fequateur , des méridiens ,
des verticaux, &c. en un mot de tous les grands cer-
cles de la fphere. Le plan du cadran eft fuppcle élao.
5i?
CAD
gaé du centre de la terre d'une quantité égale à 1»
longueur du ityle droit.
En effet , la diltance du foleil au centre de la terre
eit ii grande , que l'on peut regarder tous les points
-de la iùperficie de la terre que nous habitons , com-
me s'ils étoient réunis au centre , fans que l'on puiiïe
s'appercevoir que la différence de leur diftance ré-
ciproque , qui elt tout au plus le diamètre de la ter-
re , apporte aucun changement feniible au mouve-
ment journalier du foleil autour du centre de la terre,
ou aiitour d'une ligne qui représente ce centre , &
que l'on nomme l'axe du monde. C'eit pourquoi l'ex-
trémité du ityle de tous les cadrans peut être prife
pour le centre de la terre , & la ligne parallèle à l'axe
du monde qui paffe par l'extrémité de ce ityle, peut
«tre confiderée comme l'axe du monde.
Les lignes horaires que l'on trace fur les plans des
cadrans iont la rencontre des cercles horaires , c'elt-
à-dire des méridiens où le foleil fe trouve aux diffé-
rentes heures , avec le plan du cadran.
Le centre du cadran elt la rencontre de fa furface
avec l'axe du cadran qui paffe par l'extrémité du ityle
& qui eit parallèle à l'axe du monde. Toutes les li-
gnes horaires fe rencontrent au centre du cadran ; d'où
il s'enfuit qu'une ligne tirée par l'extrémité du ltyle
■& par le point de rencontre des lignes horaires, elt.
parallèle à l'axe du monde.
Tous les plans des cadrans peuvent avoir un cen-
tre , excepté ceux dont le plan ell placé de manière
qu'il loir parallèle à l'axe du monde ; car alors la ligne
tirée par l'extrémité du ityle parallèlement à cet axe,
cft parallèle au plan du cadran, & par conféquent
elle ne rencontre point ce plan : ainli le cadran n'a
point alors de centre , & les lignes horaires ne fe ren-
contrent point ; par conféquent elles font parallèles.
La verticale du plan du cadran elt une ligne qui
paffant par l'extrémité du ityle , rencontre perpendi-
culairement ce plan ,oCy détermine le pié ou le lieu
du ityle. On appelle hauteur du fiylt , la diltance du
pié du ityle à ia pointe.
La ligne horifontale elt une ligne parallèle à l'ho-
lifon, qui eit la rencontre du plan du cadran avec
-un plan horifontal , qu'on imagine paffer par la
pointe ou par le pié du ityle.
La verticale du lieu elt a ligne droite , qui paffant
par le pié du ityle , eit perpendiculaire à l'horifon.
On appelle encore verticale celle des lignes d'un
cadran , qui paffant par le pié du ityle , eit perpendi-
culaire à la ligne horifontale : cette ligne eit la fection
que fait avec la luriace du cadran , le cercle vertical
qui lui elt perpendiculaire.
Il y a auiiï deux méridiennes , dont Tune eit la mé-
ridienne propre du plan ou la foùitylaire , parce que
fon cercle qui eit un des méridiens , paffe par la ver-
ticale du plan , 6c par conféquent par le pié du ityle ;
l'autre qui elt la méridienne du lieu , a fon cercle mé-
ridien qui paffe par la verticale du lieu.
Lorique le cadran ne décline point vers l'orient ou
vers l'occident, c'eit-à-dire qu'il regarde directement
le nord ou le midi , ces deux méridiennes le confon-
dent.
La ligne équinodtialc eit la fection ou rencontre du
plan du cadran avec le plan de l'équinodial ou de l'é-
quateur: cette ligne elt toujours d'équerre avec la
ioùityîaire.
Le point où le rencontrent la foùitylaire & la mé-
ridienne , eit le centre du cadran ; -car le centre du
cadran eit déterminé par la rencontre de deux lio-nes
qui ibient les fections du plan du cadran avec deux
méridiens. Or la foùitylaire &la méridienne font les
fèttions du pian du cadran avec deux méridiens : ainfi
le point où ces deux lignes le rencontrent , doit être
le centre. Ces principes pôles , nous allons enfei°;ner
la delcription des principaux cadrans. Voye\ 13 ion.
CAD
Les cadrans fe diitinguent quelquefois eh deux ef-<
peces.
Les cadrans de la première efpece font ceux qui
font tracés fur le plan de l'horifon , &c que l'on ap-
pelle cadrans horijontaux ; ou bien perpendiculaires à
l'horifon fur les plans du méridien ou du premier ver-
tical , & qui font appelles cadrans verticaux ; au nom-
bre delquels on met auiîî ordinairement ceux que l'on
trace iur des plans polaires & équinoenaux , quoi-
qu'ils ne foient ni horifontaux , ni verticaux.
Les cadrans de la féconde efpece font ceux qui font
tracés fur des plans déclinans , ou inclinés , ou recli-
nés, ou déinclinés. On trouvera dans la fuite de cet
article les explications de tous ces mots.
Le cadran équinociial lé décrit fur un plan équinoc-
tial , c'eit-à-dirc fur un plan qui repréfente l'équa-
teur. ^qy^EQUINOCTIAL & EQUATEUR.
Un plan oblique à l'horifon s'incline d'un côté, &
tait un angle aigu avec l'horifon , ou fe renverfe en
arnere en iaifant un angle obtus : on appelle ce der-
nier un plan rèclinant y ii l'a réclinaifon eit égale au
complément de la latitude du lieu , il fe trouve dans
le plan de l'équinoctial : ainfi un cadran tracé deffus,
prend le nom de cadran équinociial.
Les cadrans cquinocliaux fe diitinguent ordinaire-
ment en fupéricurs , qui regardent le zénith, &c en
intérieurs qui regardent le nadir.
Or comme le foleil n'éclaire que la furface fupé-
rieure d'un plan équinoûial , quand il elt fur notre
hémifphere ou du côté feptentrional de l'équateur ,
un cadran équinociial fupérieur ne marquera les heu-
res que dans les faifons du printems & de l'été.
De même , comme le foleil n'éclaire que la furfa-
ce intérieure d'un plan équincctial , quand il eit dans
l'hémifphere méridional ou de l'autre coté de l'équa-
teur , un cadran équinociial inférieur ne marquera les
heures qu'en automne & en hyver.
C'elt pourquoi afin d'avoir un cadran équinociial
qui ferve pendant toute l'année, il faut joindre en-
iemble le Supérieur & l'inférieur ; c'elt- à-dire , qu'il
faut tracer un cadran fur chaque côté du plan.
Et puifque le foleil luit pendant tout le jour fur
l'un ou l'autre côté d'un plan équinociial , un cadran
de cette efpece marquera toutes les heures d'un jour
quelconque.
Tracer géométriquement un cadran équinoaial. he ca-
dran équinociial eit le premier, le plus aifé & le plus
naturel de tous : mais la néceffité de le faire double ,
eit caufe que l'on n'en fait pas un grand uiage. Néant-
moins comme fa conitruction fait entendre celle des
cadrans des autres eipeces , & qu'elle fournit même
une bonne méthode de les tracer, nous allons enen-
feigner ici la pratique.
i°. Pour décrire un cadran équinociial fupérieur
d'un centre C , (PI. I. de Gnomon, fig. 4.) décrivez un
cercle A B D E , &: par deux diamètres AD & B E ,
qui s'entre-coupent à angles droits ,divifez ce cercle
en quatre quarts AB,BD,DE,&cEA; fubdivi-
fez chaque quart en fix parties égales par les lignes
droites C 1 , C i , C 3 , &c. ces lignes feront les lignes
horaires. Au centre C attachez un ityle perpendicu-
laire au plan A B D E.
Après que le cadran a été ainfi tracé , diipofez-le de
manière qu'il foit parallèle au plan de l'équateur , que
la liçne C 1 1 foit dans le plan du méridien , èc que le
point A regarde le iùd ou le midi ; l'ombre du ityle
marquera les heures avant & après midi.
Car les cercles horaires divifent l'équateur en arcs
de quinze degrés (vaye{ Équation du tems) ; par
conféquent Te pian A B D E étant fuppofé dans le
plan de l'équateur , les cercles horaires di\ lieront
pareillement le cercle A B D E en arcs de quinze de-
grés chacun. C'elt pourquoi puifque les angles 12 C
il j nt'io, 10 C 9, &c. font fuppefés chacun de
CAD
1 5 degrés ; les lignes C 1 2 , C 1 1 , C 10 , C9 font les
interibâions des cercles horaires avec le plan de l'é-
quinoctial.
De plus , puifcjue le ftyle qui pane par le centre C
représente l'axe du monde , 6c qu'il eft outre cela le
diamètre commun des cercles horaires ou méridiens ,
fon ombre couvrira la ligne horaire C 1 2 quand le
foleil fera dans le méridien ou dans le cercle de dou-
ze heures ; la ligne C 1 1 , quand il fera dans le cer-
cle de onze heures ; la ligne C 10 , quand il fera dans
le cercle de dix heures.
Pour difpofer le plan du cadran parallèlement au
plan de l'équateur, il ne faut qu'avoir un triangle
rectangle de bois dont l'angle oblique à la bafe loit
égale à l'élévation de l'équateur , ( par exemple ,
41 d io' pour Paris) & d'appliquer le plan du cadran
à l'hypoténufe ou grand côté de ce triangle, dont
on placera la bafe horifontalement ; 6c pour mettre
la ligne AD dans la direction de la méridienne, il
faut favoir trouver la méridienne. Voy, Ligne mé-
DIENNNE.
2°. Pour décrire un cadran équinoclial inférieur , la
méthode n'eft pas différente de celle que nous venons
de'fuivre pour tracer le fupérieur , excepté que l'on
ne doit pas tracer les lignes horaires au-delà de la li-
gne de fix heures ; parce que ces cadrans ne peuvent
fervir qu'en automne & en hyver , oii les jours ne
paffent pas fix heures.
30. Pour décrire un cadran équinoclial univerfel ,
joignez deux plans de métal ou d'ivoire A B CD 6c
C D E F(jîg. 5. ) , qui foient mobiles à l'endroit où
ils fe joignent : fur la furface fupérieure du plan
A B C D , décrivez un cadran cquinoclial fupérieur,
& un inférieur fur la furface inférieure , ainfi qu'on
l'a déjà enfeigné , 6c placez un ftyle au centre / : pla-
cez une boîte G dans le plan D £ FC, & mettez-y
une aiguille aimantée : ajuftez fur le même plan un
quart de cercle de cuivre A E bien exactement divilé,
8>C qui paffe par un trou fait au plan A B CD : cela
pofé , moyennant l'aiguille aimantée , on peut placer
le plan A B C Dde manière que la ligne / 1 2 foit dans
le plan du méridien ; & par le moyen du quart de
cercle , on peut le difpofer de manière que l'angle
B C F foit égal à l'élévation de l'équateur. On pourra
donc fe fervir de ce cadran en quelqu'endroit du mon-
de que ce ioit. Il elt à remarquer que le jour de l'équi-
noxe , les cadrans équinocliaux ne marquent point
l'heure , parce qu'ils ne font point éclairés par le fo-
leil , qui ces jours-là , eft dans le plan de l'équateur.
Le cadran horifontal elt celui qui eft tracé lur un
plan horifontal ou parallèle à l'horifon. Voye^ Ho-
Risgn.
Puifque le foleil peut éclairer un plan horifontal
Fendant toute l'année , lorfqu'il eft au-deffus de
horifon ; un cadran horifontal peut montrer toutes
les heures du jour pendant toute l'année : ainii l'on
ne fauroit avoir un cadran plus parfait.
Tracer géométriquement un cadran horifontal. Ti-
rez une ligne méridienne A B ( fig. G. ) fur le plan
immobile donné. Ou tracez-la à volonté fur un plan
mobile. Voye^ LlGNE MÉRIDIENNE.
D'un point pris à volonté , comme C , élevez une
perpendiculaire CD, & faites l'angle CAD égal à
l'élévation du pôle. En D faites un autre angle CD
£ égal aufîi à l'élévation du pôle , 6c tirez la ligne
droite D E qui rencontre A B en E. Enfuite faites
E B = E D , & du centre B avec le rayon E B , dé-
crivez un quart de cercle E B F, 6c divifez-le en fix
parties égales. Par E tirez la ligne droite G H , qui
coupe A B d angles droits. Du centre/? par les di-
vifions du quart de cercle E F tirez les lignes droites
Ba, B b , Bc, Bd, B H, qui rencontrent la ligne
G Hdux points a,b,c,d, H. Du point E fur la ligne
droite EG portez lei intervalles EatEbt &c, ç'eft-
CAD
519
à-dire , portez E a de E en e , £ b de E en/, E c , en
£ cng,6cc. Du centre ^/décrivez un petit cercle, 6c
mettant une petite règle fur le point A 6c fur les dif-
férens points de divifion a,b ,c,d , H, 6ce,f,g,hy
G, tirez les lignes^ 1, Ai, A}, A4, A } 6c A 11,
A 10, A 9, A 8 , A 7. Par le point A tirez une
ligne droite 6 6 , perpendiculaire à la ligne AB. Pro-
longez la ligne droite A 7 , au-deià du petit cercle
julqu'en7, A 8 jufqu'en 8,^5 jufqu'en 5,^4 juf-
qu'en 4. Autour de tout le plan , tracez un quarré ,
un cercle , ou un ovale. Enfin au point A fixez un
ftyle , qui faffe avec le méridien A B un angle égal
à l'élévation du pôle : ou bien élevez en C un ftyle
perpendiculaire égal à C D ; ou bien fur la ligne AE
placez un triangle AD E perpendiculaire au plan du
cadran.
Les lignes A 11 , A 10, Aç),&c. font les lignes ho-
raires d'avant midi ; & les lignes A 1 ,A x ,A 3 , &c.
font celles d'après midi. Et l'ombre des ftyles dont on
a parlé ci-deffus , tombera à chaque heure fur les li-
gnes horaires refpeclives»
Si on s'eft contenté de tracer à volonté la ligne mé-
ridienne , 6c de décrire enfuite toutes les lignes du
cadran , ce qui n'eft permis que quand le plan du ca-
dran eft mobile , il faut alors orienter le cadran de
manière que la ligne méridienne qu'on y a tracée fe
trouve dans le plan du méridien : on peut en venir à
bout par différens moyens , entr'autres par le moyen
de la boufTole : mais cette méthode n'eft pas extrê-
mement exafte , parce que la déclinaifon de l'aiguille
aimantée varie ;ainli il vaut mieux tracer géométri-
quement la méridienne fur un plan horifontal immo-
bile.
Décrire un cadran horifontal trigonométriquement.
Dans les grands cadrans , où l'on a befoin de la plus
grande exactitude , il vaut mieux fe paffer des lignes
géométriques , & déterminer les lignes du cadran par
un calcul trigonométrique. M. Clapiès,dans les Mé-
moires de l'académie royale des Sciences , pour Pannes
iyoj , nous a donné un moyen très-aifé & très-ex-
péditif de calculer les lignes horaires : nous rappor-
terons fes règles ou fes analogies pour chaque clpece
de cadran dont nous aurons à parler.
Pour le cadran horifontal : l'élévation du pôle
du lieu étant donnée , trouver les angles que les li-
gnes horaires font avec le méridien , au centre du ca-
dran,
Voici la règle ou l'analogie : comme le finus total
eft au.^inus de l'élévation du pôle du lieu propofé ,
ainii la tangente de la diftance du foleil au méridien
pour l'heure requife , eft à la tangente de l'angle
cherché.
Le cadran vertical eft un cadran tracé fur le plan
d'un cercle vertical. Voye^ Vertical.
Ces fortes de cadrans varient félon le vertical que
l'on choifit. Les verticaux qui font principalement
en ufage , font le méridien , 6c le premier vertical ,
c'eft-dire , le cercle vertical perpendiculaire au mé-
ridien : d'où viennent les cadrans méridionaux ,ftp-
tentrionaux , orientaux , & occidentaux.
Les cadrans qui regardent les points cardinaux de
l'horifon , s'appellent particulièrement cadrans directs,
Voye{ Direct.
Si l'on prend un autre vertical , on dit que le cadran
décline. Voyer^ DÉCLINANT.
De plus en général , fi le plan fur lequel on opè-
re , eft perpendiculaire à l'horifon , comme on le doit
fuppofex dans tous les cas dont il eft queition à pre-
fent , les cadrans font appelles particulièrement des
cadrans droits. Par exemple , on dit : un cadran droit
méridional , ou feptentrional ,&C.
Si le plan du cadran eft oblique à l'horifon , on dit
qu'il incline, ou qu'il réçline. foye^ Inclinaison,
RÉCLINANT, £f,
5 20
CAD
Le cadran méridional , ou pour le défigner plus par-
ticulièrement , le cadran droit directement méridional ,
efl celui que l'on décrit fur la furface du premier
vertical , qui regarde le midi.
Le foleil éclaire le plan du premier vertical qui
regarde le midi , lorfque dans l'a courfe , il paffe de
ce vertical au méridien , ou qu'il va du méridien au
premier vertical ; en quoi il employé fix heures avant
midi & fix heures après le jour de l'équinoxe ; &
environ quatre heures & demie avant midi , &c qua-
tre heures &c demie après le jour du folflice d'été , &
ainfi des autres jours ; & en hyver , le foleil ne paroît
fur l'horifon qu'après fix heures ; d'où il s'enfuit qu'un
cadran méridional ne peut marquer les heures que
depuis fix heures du matin jufqu'à fix heures du foir.
Tracer un cadran vertical méridional. Sur le plan
du vertical qui regarde le midi , tracez une ligne mé-
ridienne A B (fig. g. ) & prenant l'intervalle A C k
volonté pour la grandeur du cadran propofé , élevez
en C une perpendiculaire d'une longueur indéfinie
C D ; & faifant un angle CAD égal à l'élévation de
l'équateur, tirez une ligne droite AD qui rencontre
la perpendiculaire CD en D ; enfuite faites au point
D l'angle CD E égal auffi à l'élévation de l'équateur,
en tirant la ligne droite D E qui coupe le méridien en
E. Par le point E tirez la ligne droite G H qui coupe
le méridien A B à. angles droits. Prenez E B égal à
E D , & avec ce rayon décrivez un quart de cercle
E F. Le refte fe fait comme dans le cadran horifon-
tal, excepté que les heures d'après midi doivent être
écrites à main droite , & celles d'avant midi à main
gauche , ainfi que la figure le fait comprendre. Enfin
au point A fixez un flyle oblique , qui fafle un angle
égal à l'élévation de l'équateur ; ou bien , élevez en
c?un flyle perpendiculaire égal à CD ; ou enfin , éle-
vez fur AE un triangle A D E , qui foit perpendicu-
laire au plan du cadran.
L'ombre du flyle couvrira les différentes lignes
horaires aux heures qui répondent à ces lignes.
Le cadran feptentrional , ou le cadran droit directe-
ment feptentrional ,fe trace fur la furface du premier
vertical qui regarde le nord. Foye^ Nord.
Le foleil n'éclaire cette furface que quand il avan-
ce de l'orient au premier vertical , ou qu'il vient de
ce même vertical au couchant : de plus , le foleil efl
dans le premier vertical à fix heures du matin & à
fix heures du foir le jour de l'équinoxe ; le jour du
folffice d'été il fe levé fur l'horifon de Paris à quatre
heures , & arrive au premier vertical vers les fept
heures Se demie ; & en hyver le foleil n'éclaire point
du tout ce plan feptentrional; d'où il efl évident que
le cadran feptentrional ne peut marquer que les heu-
res d'avant fept heures & demie du matin , & celles
d'après fept heures & demie du foir. C'efl pourquoi ,
comme dans l'automne & dans l'hyver le foleil ne fe
levé pas avant fix heures , & qu'il fe couche avant
lix heures du foir , on voit que pendant toutes ces
deux faifons , le cadran feptentrional n'efl d'aucun
ufage : mais en le joignant au cadran méridional , il
iupplée ce qui manque à celui-ci.
Décrire un cadran vertical feptentrional. Tirez une
•ligne méridienne E B (fig. 10) & du pointa décri-
vez un petit cercle à volonté : au point A faites l'an-
gle DAC égal à l'élévation de l'équateur, & du
point C pris à volonté , élevez une perpendiculaire
CD qui rencontre AD au point D. Faites un autre
•angle CD E égal auffi à l'élévation de l'équateur, &
tirez pareillement une ligne D E qui rencontre A E
au point E. Enfuite prenez IB égal k£D , & par /
tirez G H qui coupe SB à angles droits. Du centre
B avec le rayon / B décrivez un quart de cercle ; &
divifez-le en fix parties égales. Par les deux derniè-
res divifions tirez des lignes du centre B , c'efl-à-dire
BhècBG, qui rencontrent G H en h Si G , ce faites I
CAD
TVégal à Ik, &/i/égal kl G. Enfuite appliquant
une règle aux points A , d & H , & encore aux
points A , h & G , tirez les lignes droites A 5, A 4 ,
A 7 , A 8. Enfin , au pointa fixez un flyle obli-
que AD , faifant un angle D AE , avec la ligne mé-
ridienne dans le plan du méridien , égal à l'élévation
de l'équateur : ou bien un flyle perpendiculaire en
C , égal à CD ; ou , au lieu d'un flyle , mettez fur
la ligne méridienne E A un triangle EDA perpen-
diculaire au plan du cadran.
Les lignes ^4,^5,^6 , marqueront les heures
du matin ; & les lignes A 6 , A y , AS , marqueront
celles de l'après-midi , & par conféquent l'ombre de
V index montrera ces heures.
Ou bien encore , opérez de la manière fuivante.
Dans le cadran méridional (fg. £.) fi les lignes horai-
res 4 & 5 , de même que 7 & 8 , font continuées au-
delà de la ligne 6 A 6 , &c que le triangle A DE tour-
ne autour de fon pôle A , jufqu'à ce que A E tombe
fur le prolongement de A 1 2 ; il efl évident que par
ce moyen on a un cadran feptentrional , oblervant
feulement ce que l'on a dit fur la manière de marquer
les heures.
Si fur l'extrémité IK d'un cadran horifontal , ( fg.
y. Gno7non.s) on élevé à angles droits un plan veiti-
cal 1 KN M, & qu'on prolonge Y index horaire AL
du cadran horifontal jufqu'à ce qu'il rencontre le plan
vertical en L , on n'aura qu'à tirer enfuite du point
L à la ligne de contingence ou de rencontre IK des
deux plans des lignes droites qui pafTent par les diffé-
rens points des heures marquées fur cette ligne IK ;
on aura un cadran vertical méridional , dont L fera le
centre ; ce qui efl évident , puifque l'ombre du flyle
marquera les mêmes heures fur les deux cadrans.
Tracer par la Trigonométrie un cadran vertical fep-
tentrional ou méridional. La defeription de ces cadrans
ne diffère de celle du cadran horifontal , qu'en ce qu»
l'angle CA D , efl égal au complément de l'élévation
du pôle du lieu ; de forte que l'on doit fe fervir de la
même analogie que pour le cadran horifontal : en ob-
fervant feulement que le fécond terme foit le com-
plément de l'élévation du pôle pour le lieu où l'on
trace le cadran.
Le cadran oriental , ou h cadran droit directement
oriental, efl celui que l'on trace fur le côté du méri-
dien qui regarde l'orient. Voye^ Orient.
Comme le foleil n'éclaire le plan du méridien qui
regarde l'orient , qu'avant midi ; un cadran oriental
ne peut marquer les heures que jufqu'à midi.
Tracer un cadran oriental. Sur le côté oriental du
plan du méridien , tirez une ligne droite AB (Jîg. zi.y
parallèle à l'horifon , & joignez-y la ligne À K , qui
fafle avec elle un angle KAB , égal à l'élévation de
l'équateur. Enfuite avec le rayon D E décrivez un
cercle , & par le centre D , tirez E C perpendiculaire
à A K ; moyennant quoi le cercle fera divifé en qua-
tre quarts. Subdivifez chacun de ces quarts en fix par-
ties égales. Et du centre D , par les différentes divi-
fions , tirez les lignes droites Z>4,Z)^,Z>6, Djy
D$ , Dy, D 10, Du. Enfin , en D élevez un flyle
égal au rayon D £ perpendiculairement au plan , ou
fur deux petites pièces fixées perpendiculairement
en E,C, & égales au même rayon D E , attachez un
flyle parallèle k E C.
Par ce moyen , chaque index aux différentes heu-
res , jettera une ombre fur les lignes refpeûives 44 ,
5 5 , 66 , à-c
Le cadran occidental , ou le cadran droit directement
occidental , fe trace fur le côté occidental du méri-
dien. Voyt^ Occident.
Comme le foleil n'éclaire qu'après midi le côté du
plan du méridien , qui regarde l'occident , on voit
qu'un cadran occidental ne peut marquer les heures
que depuis midi jufqu'au foleil couchant.
Ainfi j
CAD
CAD
521
Ainfi , en joignant le cadran occidental avec Po-
rîental , ces deux cadrans marqueront toutes les heu-
res du jour.
Tracer un cadran occidental. La conflru£lion efl
précifément la même que celle du cadran oriental;
excepté que la fituation efl renvcrfée , & les heures
écrites conformément à cette difpofition.
Le cadran polaire cft tracé for un plan qu'on ima-
gine parler pal' les pôles du monde , & par les points
de l'orient & de l'occident de l'horifon. II y en a de
"deux efpeces : ceux de la première efoece regardent
le zénith , &font appelles polaires fupérieurs ; ceux de
la féconde regardent le nadir, & font appelles polai-
res inférieurs.
Ainfi le cadran polaire efl incliné à l'horifon, avec
lequel il fait un angle égal à l'élévation du pôle.
Comme le plan polaire PO , Q S , {figure iz. )
pâlie par les points O & S de l'orient & de l'occident,
il y a un quart de l'équateur , & de chacun des pa-
rallèles à l'équateur , intercepté entre ce plan & le
méridien P H Q : donc la furface fupérieure efl
éclairée par le foleil depuis fix heures du matin juf-
.qu'à fix heures du foir; & la furface inférieure de-
puis le lever du foleil jufqu'à fix heures du matin ;
& depuis fix heures du foir jufqu'au coucher du fo-
leil.
C'eft pourquoi un cadran polaire inférieur marque
les heures du matin depuis le lever du foleil jufqu'à
fix heures , & celles du foir depuis fix heures jufqu'à
fon coucher; & un cadran polaire fupérieur marque
les heures depuis fix heures du matin jufqu'à fix heu-
res du foir.
Tracer un cadran polaire fupérieur. Tirez une ligne
droite A B (fig. 13. ) parallèle à l'horifon ; & fi le
plan efl immobile , trouvez la ligne méridienne CE :
divifezCi? en deux parties égales, & par C tirez une
ligne droite F G parallèle à A B ; enfuite du centre
D , avec l'intervalle D E , décrivez un quart de cer-
cle , & divifez-le en fix parties égales : du centre D ,
par les differens points de divilion , tirez les lignes
droites D \ ,D x , Z? 3 , Z> 4, Z> 5 , & placez en
fens contraire les intervalles E 1 , E 1, E ■$, E 4,
E 5 , c'efl- à-dire ,£n, 10 , 9 , 8 , & 7 , des points
5,4,3,1,1, &c. élevez des perpendiculaires qui
rencontrent la ligne F G aux points correfpondans ;
enfin élevez en D un flyle perpendiculaire égal à
DE; ou fur deux flyles égaux à E D, placez une
verge horifontale parallèle à E C: les lignes 12 11,
1 1 1 1 , 22, 33 , &c. feront les lignes horaires.
Un cadran polaire fupérieurne diffère des cadrans
orientaux & occidentaux , que par fa fituation , & que
par la manière d'écrire les heures.
On a un cadran polaire inférieur , en négligeant les
heures d'avant midi , 9 , 10 , & 1 1 , & celles d'après
midi , 1 , 2 , Se 3 , avec l'heure 1 2 de midi ; tk en ne
laiffant que les heures 7 & 8 du matin , & 4 tk 5 du
foir, qui deviendront alors les heures 7 &c 8 du foir ,
& 4 & 5 du matin , en renverfant le cadran f ens-def-
fus-deffous.
Tracer tous les cadrans de la première efpecefur le mê-
me corps irrégulier. i°. Suppofons que le plan ABCD ,
(figure 14. ) dans la fituation naturelle du corps,
ibit horilontal ; décrivez defl'us un cadran liorifontal y
comme il a été enfeigné plus haut.
20. Tirez les lignes E M & F L , parallèles à D C ,
qui feront par conféquent parallèles à l'horifon dans
la fituation naturelle du corps; fi on fuppofe enfuite
que le plan B N M C, fane un angle C ME avec
E M , égal à l'élévation du pôle; décrivez défais un
cadran polaire fupérieur.
3°. Suppofant que le plan oppofé AD E , faffe
avec E M un angle D E M , égal à l'élévation de
Tome II,
l'équateur; tracez fur ce plan un cadran équinoclial
J'upét leur.
40. Suppofant que le plan K L H , fafle avec L F
un angle H L F ', égal à l'élévation de l'équateur ; tra-
cez fur ce plan un cadran équinociial inférieur.
50. Si le plan pppofé F G , fait avec F L un angle
G F L , égal à l'élévation du pôle ; tracez-y un cadran
polaire inférieur.
6°. Si le plan M A" A" L , & l'oppoié E F, font per-
pendiculaires à F L ; fur l'un d'eux tracez un cadran
méridional , &c fur l'autre un cadran feptentrional.
70. Sur le plan E M LF, décrivez un cadran occi-
dental, ÔC un oriental fur le plan oppole.
Nous avons expliqué plus haut & fort en détail
les méthodes dont on doit le fervir pour tracer ces
différentes efpeces de cadrans.
Cela fait , fi le corps ell difpofé de manière que
le plan M N K L regarde le midi, & que le plan du
méridien le coupe en deux dans la ligne de 12 heu-
res du cadran liorifontal A B C D , & du cadran mé~
ridional M N KL ; tous ces differens plans marque-
ront en même tems les heures du jour.
Les cadrans fecondaires , ou de la féconde efpece , font
tous ceux que l'on place fur les plans de cercles dif-
ferens de l'horifon , du premier vertical , de l'équi-
noclial , & des cercles polaires ; c'efl-à-dire fur des
plans qui déclinent , inclinent, réclment.
Les cadrans verticaux déclinans , font des cadrans
droits ou verticaux qui déclinent , ou qui ne regar-
dent pas direftement quelqu'un des points cardi-
naux.
Les cadrans déclinans font d'un ufage fort ordinai-
re , car les murailles des maifons fur lefquelles on
trace communément les cadrans , ne font pas direc-
tement expoiées aux points cardinaux. Voye^ Dé-
clinant.
Il y a différentes efpeces de cadrans déclinans ,
qui prennent leurs noms des points cardinaux vers
lefquels ils paroiffent le plus tournés , mais dont ils
déclinent réellement : il y en a qui déclinent du mi-
di ou du nord , & même du zénith.
Tracer trigonométriquement un cadran vertical
nant. 1 °. La déclinaifon du plan tk. l'élévation du pô-
le du lieu étant donnés , voici la règle pour trouver
l'angle formé au centre du cadran par la méridienne
& la foùllyldire : comme le iinus total ell à la tan-
gente du complément de la hauteur du pôle du lieu ;
ainfi le iinus de l'angle de déclinaifon du plan ell à
la tangente de l'angle cherché.
20. La déclinaifon du plan étant donnée , avec l'é-
lévation du pôle du lieu, voici comment on trouve
l'angle formé au centre d'un cadran vertical dicli*
nant , par la loûllylaire & l'axe.
Règle. Comme le finus total ell au finus du com-
plément de l'élévation du pôle ; ainfi le iinus du com-
plément de déclinaifon du plan ell au iinus de l'angle
cherché.
30. La déclinaifon du plan & l'élévation du pôle
étant données , fi on veut trouver l'arc de i'équateur
compris entre le méridien du lieu 6c le méridien du
plan ; voici la règle.
Comme le iinus total ell au finus de la hauteur
du pôle du lieu ; ainfi la tangente du complément île
déclinaifon du plan eli à la tangente du complément
de l'angle cherché, que nous appellerons pour abré-
ger , ..•/;;,•.'.• de la différence des longitudes.
4". L'angle de la différence des longitudes, & ce-
lui de l'axe avec la foùilylaire , étant donnes , on de-
mande les angles formés au centre d'un cadian \ ertieal
décimant , entre la foùilylaire oc les lignes horaires.
Ce problème a trois cas; car le >raires
dont on cherche les angles , peuvent eue i°. entre
le méridien & la fou il \ lairejou 1". au-delà de la foûf-
tylaire ; ou 3". du cote du méridien où la loûllylaire
Vvv
522
CAD
n'eft pas. Dans les deux premiers cas on doit pren-
dre la différence entre la diftance du foleil au méri-
dien à chaque heure , & l'angle de la différence des
longitudes trouvées par le dernier problème ; & dans
le troilieme cas on doit prendre la fomme de ces
deux angles , & faire ufage de la règle fuivante.
Règle. Comme le linus total eft au finus de l'angle,
entre l'axe & la foûftylaire ; ainfi la tangente de la dif-
férence de la diftance du foleil au méridien , & de la
différence des longitudes , ou la tangente de la fom-
me de ces deux angles eft à la tangente de l'angle
cherché.
50. L'angle formé par la foûftylaire avec les lignes
horaires, & celui de la foûftylaire avec le méridien
étant donnés, on peut trouver les angles formés en-
tre le méridien & les lignes horaires au centre des
cadrans verticaux déclinans.
Les angles des lignes horaires entre le méridien
&C la foûftylaire, le trouvent en ôtant l'angle formé
par la foûftylaire avec la ligne horaire, de l'angle
formé par la foûftylaire avec la méridienne.
Les angles au-delà de la foûftylaire & du côté
oppoiè à celui du méridien , le trouvent en ajoutant
ces deux angles.
On trouve ceux qui font de l'autre côté du mé-
ridien , en prenant leur différence.
Décrire géométriquement un cadran vertical qui
décline du midi à Vouent ou au. couchant. Trouvez la
déclinaifon du plan , ainfi qu'il eft enfeigné à Yarti-
cli DÉCLINAISON & DÉCLINATEUR.
Enfuite tracez fur le papier un cadran horifontal ,
en luppolant que G H foit la ligne de contingence,
ou de rencontre du plan avec le plan équinoclial ,
( ;..;; .' 6. ) : par ÎC point E où la ligne méridienne
A E coupe la ligne G H , tirez une ligne droite /•&,
qui faffe avec G H un angle H E K, égal à la décli-
naifon du pian donné ; ainlï comme GH repréfente
l'interleclion du premier vertical avec Fhorifon , /
il fera l'interleclion du plan déclinant Se de l'hori-
lon ; c'eft pourquoi la partie I E doit être élevée
au-deffus de G E , en cas que le pian donné décline
vers l'occident; ou bien au-deffous de GE , fi le
plan décline vers l'orient. Tirez une ligne droite pa-
rallèle à l'horifon , fur le plan ou fur le mur donné
pour repréfenter I K; &c prenant fur cette ligne un
point correfpondant au point E , traniportez-y les
différentes diftances horaires E i , E 2 , E 3 , &c.
marquées dans la ligne I K tracée fur le papier : en-
fuite du point E élevez une perpendiculaire E C ,
égale à la diftance qu'il y auroit de la ligne de con-
tingence G H, au centre d'un cadran méridional éle-
vé fur G H , & dont le ftyle pafferoit par le centre
de ce cadran , & par le points/ : de-là tirez aux dif-
férens points 1,2, 3 , &c. les lignes C 1 , C 2 , C 3 ,
&c. qui leront les lignes horaires : enfuite faites tom-
ber une perpendiculaire A Z>, du centre A du cadran
horifontal , fur la ligne de contingence I K , &c
tranfportez la diftance E D du point E fur la mu-
raille ; CD fera la ligne foûftylaire. J^oyei Sousty-
laire.
C'eft pourquoi joignant AD ScDCk angles droits,
ï'hypoténufe A C fera un ftyle oblique , qui doit
être attaché fur la muraille au point C, de manière
que le côté C D tombe fur le côté CD,&c que A D
foit perpendiculaire au plan de la muraille. Il faut
bien remarquer que la ligne I K qui eft tracée obli-
quement fur le papier , doit être horifontale fur le
plan ; & comme on lùppofe que le foleil éclaire la
face du plan qui eft tournée vers A , il faut que fur
le cadran le point C loit en haut , & le point E en
bas.
Tracer un cadran vertical déclinant du nord vers
l'orient ou Voccident. Trouvez d'abord la déclinai-
Ion au plan , enfuite tracez un cadran vertical decli-
CAD
nant du midi , dans lequel le point Cfoit en haut, Se
le point E en-bas ; renverfez-le de manière que le
centre C foit en-bas , & le point E en-haut , & por-
tez fur la gauche les heures de la main droite , & au
contraire , en lupprimant toutes les lignes horaires
que l'on ne peut pas voir dans un plan de cette ef-
pece.
La meilleure méthode dans h pratique , c'eft après
que l'on a tracé fur le papier un cadi'cn méridional
déclinant , d'en piquer les différens points en \z per-
çant avec une épingle , appliquant enfuite à la mu-
raille la face du papier lûr laquelle le cadran eft tra-
cé , & ayant foin de mettre le point C en-bas; le
revers donnera tous les points néceffaires pour tra-
cer un cadran feptentrional déclinant.
Si le cadran décline trop , enforte que le point C
doive être trop éloigné , on fe contentera de ne tra-
cer qu'une partie des lignes horaires ; &C au lieu du
ftyle triangulaire A C D , on ne mettra qu'une par-
tie du ftyle A C, foûtenue par deux appuis , de ma-
nière pourtant que cette partie de ftyle étant prolon-
gée ainfi que les lignes horaires , puiffe rencontrer
le plan du cadran au point C.
Les cadrans inclinés font ceux que l'on trace fur
des plans qui ne font pas verticaux , mais qui s'in-
clinent ou qui penchent vers le côté méridional de
l'horifon , en faifant un angle plus grand ou plus
petit que le plan équinoftial. Voye^ INCLINAISON.
On peut concevoir un plan incliné, en fuppofant
que le plan de l'équateur fe rapproche du zénith d'un
côté , & de l'autre s'abaiffe vers le nadir , en tour-
nant fur une ligne tirée du point eft au point oueft de
l'horifon.
Tracer un cadran incliné. i°. L'inclinaifon du plan ,
comme D C , (fig. zj.) étant trouvée par le moyen
d'un déclinateur , ainfi qu'il fera enfeigné à V article,
DÉCLINATEUR ; fi ce plan tombe entre le plan équi-
noclial C E , & le vertical C B , de manière que l'an-
gle d'inclinaifon D C A foit plus grand que l'éléva-
tion de l'équateur E C A ; fur le côté fupérieur tra-
cez un cadran feptentrional , & fur le côté intérieur
un méridional pour une élévation de l'équateur , qui
foit égale à la fomme de l'élévation de l'équateur du
lieu donné , & du complément de l'inclinaifon du
plan à un quart de cercle.
20. Si le plan incliné F C tombe entre l'horifontal
CJ,!k l'équinoclial CE , tellement que l'angle d'in-
clinaifon F C A foit plus petit que l'élévation de l'é-
quateur E C A ; décrivez un cadran horifontal pour
une élévation du pôle , égale à la fomme de l'élé-
vation du pôle du lieu donné , & de l'inclinaifon du
plan.
Les cadrans ainfi inclinés fe tracent de la même
manière que les cadrans de la première efpece , ex-
cepté que le ftyle dans le premier cas doit être fixé
fous l'angle A D C, & dans le dernier cas , fous l'an-
gle D F ' C; & que la diftance du centre du cadran à
la ligne de contingence dans le premier cas eft D C,
Si dans le dernier ei\FC.
Les cadrans réclinans font ceux que l'on trace fur
des plans qui ne font pas verticaux, mais penchés ,
en s'écartant du zénith vers le nord , &: faifant un an-
gle plus grand ou plus petit que le plan polaire.
On peut concevoir un plan réclinant , en luppo-
fant que le plan polaire s'eleve d'un côté vers le zé-
nith , & de l'autre s'abaiffe vers le nadir , en tour-
nant autour d'une ligne tirée de l'orient à l'occi-
dent. Pour trouver la réclinaifon d'un plan , voye^
RÉCLINAISON.
Tracer un cadran réclinant , i°. Si le plan réclinant
HC tombe entre le plan vertical B C, & le plan po-
laire IC, de manière que l'angle de réclinaifon BC H
foit plus petit que la diftance du pôle au zénith
B CI, décrivez deux cadrans verticaux 3 unfeptentrio-
CAD
71 al Scunméridional, pour une élévation de l'équateur
égale à la différence entre l'élévation de l'équateur
du lieu donné , '& l'angle de réclinaifon.
2°. Si le plan récliné comme K C, tombe entre le
plan polaire / C , & l'horifontal CL , de manière que
l'angle de réclinaifon B CK foit plus grand que la
diltancedu pôle au zénith ICB : décrivez deffus un
cadran horifontal pour une élévation du pôle , égale à
la différence entre l'angle de réclinaifon & 1
tion de l'équateur du lieu donné.
On trace auffi par la Trigonométrie les cadrans incli-
nans & réclinans , l'inclinaiibn ou la réclinaifon du
plan , &C l'élévation du pôle étant connues ; & l'on
trouve les angles faits , au centre d'un cadran inclinant
vu redinant, par le méridien &C les lignes horaires.
Un cadran de cette efpece cil proprement un ca-
dran horifontal pour une latitude égale à l'élévation
particulière du pôle fur le plan du cadran : c'ell pour-
quoi l'on détermine les angles par la règle que l'on a
donnée pour les cadrans horifontaux .
Quant à l'élévation du pôle fur le plan du cadran ,
on la trouve de cette manière : le plan étant incliné,
fon élévation efl plus grande que l'élévation du pôle
du lieu , ou ell plus petite, ou lui efl égale ; dans
les deux premiers cas , pour les cadrans fupérieurs mé-
ridionaux, ou inférieurs feptentrionaux , on a l'éléva-
tion particulière du pôle fur le plan , en prenant ia
différence entre l'élévation du pôle du lieu , & l'in-
clinaifon du plan : & dans le dernier cas , le cadran
eil un cadran polaire , où les lignes horaires feront
parallèles , à caufe que le plan étant placé fur l'axe
du monde , aucun des deux pôles n'y peut être re-
préfenté.
Pour les cadrans fupérieurs feptentrionaux , & infé-
rieurs méridionaux , i°. fi l'inclinaiibn efl plus grande
que le complément de l'élévation , il faut ajouter le
complément de l'inclinaiibn au complément de l'élé-
vation. z°. Si elle efl plus petite , il faut ajouter l'in-
clinaifon à l'élévation. 30. Si elle efl égale , le cadran
fera un cadran équinoclial , où les angles au centre
feront égaux à la dillance du foleil au méridien.
Les cadrans déinclinés font ceux qui font en même
tems déclinans & réclinans ou inclinés.
On ic fort rarement des cadrans inclinés, réclinans ,
& furtout des cadrans déinclinés ; c'ell pourquoi la
conllruction géométrique & trigonométrique en
étant un peu compliquée , nous prenons le parti de la
fupprimer , &: de renvoyer ceux qui auroient du goût
ou de la curiofité pour les cadrans de cette efpece ,
à la méthode méchanique générale de tracer toutes
fortes de cadrans : méthode que nous allons expoler
en peu de mots.
Méthode facile de tracer un cadran fur toutes for-
tes de plans, par le moyen d'un cadran équinoclial mo-
itié. Suppofons , par exemple , que l'on demande
un cadran fur un plan horifontal ; fi le plan eil im-
mobile , comme A B D C (fig. 18.) déterminez fa
ligne méridienne G F; ou , fi le plan eil mobile , pre-
nez une méridienne à volonté. Enfuiteparle moyen
du triangle EKF, dont vous appliquerez la baie fur
la ligne méridienne , élevez le cadran équinoclial H,
jufqu'à ce que le flyle G I devienne parallèle à l'axe
du monde ; ce qui fe trou\ e en faifant l'angle KE F
cgal à l'élévation du pôle , 6e que la ligne de 1 1
heures du cadran foit bien directement au-deflus de
la ligne méridienne du plan ou de la baie du triangle.
Alors, ii pendant la nuit une bougie allm
appliquée à l'axe G 1 , deforte que i oui!
ou le ilyle GI tombe fuccciîivcment fur les lignes
horaires ; cette même ombre marquera les difl s
lignes horaires fur le plan ABCD.
Ainfi marquant des points hir l'ombre, tirez, par
ces points des lignes au point G ; alors un index étant
placé en G , îuiyaut l'angle 1 GF} fon ombre raar-
Tçrnc II,
CAD
523
quera les différentes heures , à la lumière du foleil.
Si vous voulez un cadran fur un plan vertical ,
ayant élevé le cercle équinoclial , comme on l'a eut
ci-deffus, pouffez en avant V index G I, jufqu'à ce
que la pointe I touche le plan vertical fur lequel
vous voulez tracer le cadran.
Si le plan eil incliné à l'horifon, il faudra trouver
l'élévation du pôle fur ce même plan, & l'on fera
l'angle du triangle KEF égal à cette élévation.
Remarquez qu'outre les différentes efpeces de ca-
drans ci-deflus mentionnés , qui l'ont des cadrans à
centre , il y en a d'autres appelles des cadrans fans
centre.
Les cadrans fans centre font ceux dont les lignes
horaires font à la vérité convergentes , c'efl-à-dire ,
tendent à ié réunir en un point , mais fi len;
que l'on ne fauroit marquer fur le plan donné le cen-
tre vers lequel elles font convergentes.
Les cadrans horifontaux fans centre , doivent être
faits pour les endroits où l'élévation du pôle ellhes-
petite , ou , ce qui revient au même , l'élévation de
l'équateur très-grande : en effet dans \afig. 6'. fil'on
fuppoi'e l'angle A E D prçi'que droit, c'eft-à-dire,
l'équateur prefque perpendiculaire à Thorilbn, le
point A qui eil le centre du cadran deviendra très-
éloigné , & la ligne DA qui repréfente l'axe du
monde, fera prefque parallèle à l'horifon.
De-Ià il s'eniuit que les cadrans verticaux fans cen-
tre conviennent aux endroits qui font fort près du
pôle , & que les cadrans horifontaux fans centre con-
viennent aux endroits qui font fort près de l'équa-
teur.
Pour tracer un cadran horifontal fans centre {fig.
i5. ) on commencera par tracer la méridienne AO ,
& par un point quelconque E de cette méridienne ,
on tirera la perpendiculaire G //qui dciignera la li-
gne de contingence de l'horifon 6c du plan de l'é-
quateur. On fera l'angle CED, égal à l'élévation
de l'équateur; & enfuite ayant porté ED en E B ,
on divilera la ligne de contingence comme j
cadran horifontal ordinaire ; on élèvera eniuite au
point D une perpendiculaire D F de longueur arbi-
traire ; &c ayant tiré la perpendiculaire F L à D F ,
on tranfportera FL en LO, & on divifera j
point O , la ligne M N, en intervalles horaires, com-
me on a divifé la ligne G //parle point B ; enfuite
par les points horaires correipondans de ces deux li-
gnes G H, M N, on tirera les lignes horaires XI il;
enfin aux points E , L, on placera perpendiculaire-
ment au plan du cadran V index E DFL, compofé
du flyle DF, èv de deux appuis ED , F L, ec le
cadran fera achevé.
Pour tracer un cadran vertical méridional fins cen-
tre, on remarquera qu'un tel cadran n'ell autre chofe,
qu'un cadran horifontal conilruit pour une hauteur
de pôle égale au complément de l'élévation du pôle
donnée ; ainii la conllruction de ce cadran lera la
même que celle du cadran horifontal fans centre.
Dans la fphere droite , c'eft-à-dire , dans L
frtués fous l'équateur, le cadran horifontal ell le
que le cadran polaire, 6v le cadra;: \ traçai ■
cpie le cat -uinoclial.
\ Dans la fphere parallèle , c'eft-à-dire, pour les ha-
bitais des pôles, le cadran horifontal eu le mêi
le cadran équinoclial ; &. le cadiar: vertical cil ie même
que le cadran polaire.
Outre la description des heures , on trace furies
cadrans polaires beaucoup d'autres i leur
fervent comme d'accompagnement & d'orne
On décrit aufli des cadrans folâtres li:
de différent corps irréguliers : nous avons déjà fait
voir comment fur un corps irrégulier, on ;
tracer tous les cadrans de la première efpece. On peut
en tracer de plus fur differens autres corps ; par.
Y y v ij
V-4
CAD
exemple , fur un bâton , fur un cylindre ; on n'at-
tend pas de nous que nous entrions fur ce fujet dans
un plus grand détail , qui n'appartiendroit qu'à un
ouvrage complet fur la Gnomonique. Ceux qui vou-
dront en lavoir davantage, pourront avoir recours
aux différens traités qui en ont été publiés.
On trouvera auifi dans ces mêmes traités des mé-
thodes pour tracer géométriquement des cadrans uni-
verfels : mais nous ne nous y arrêterons point , parce
qu'elles nous paroiffent plus curieufes qu'utiles , &
que dans un ouvrage de la nature de celui-ci, nous
devons principalement faire mention de ce qui peut
être le plus d'ulage.
Nous ne dirons rien non plus des Cadrans qu'on
appelle à réflexion & à réfraction. Voye^ ces mots.
Le cadran nocturne ou de nuit , montre les heures
de la nuit.
Il y en a de deux efpeces ; le lunaire ou le cadran
à la lune , & Icfldéréal ou le cadran aux étoiles.
Le cadran à la lune ou le cadran lunaire eft celui
qui montre l'heure de la nuit , par le moyen de la
lumière ou de l'ombre de la lune , qu'un index jette
defhis.
Tracer un cadran lunaire. Suppofons , par exem-
ple, que l'on demande un cadran lunaire horifontal:
décrivez d'abord un cadran folaire horifontal : élevez
enfuite les deux perpendiculaires A B & CD, (fig.
iç). ) à la ligne de douze heures ; & divifant l'inter-
valle G F en douze parties égales , par les différens
points de divifion, tirez des lignes parallèles. Main-
tenant fi on deftine la première ligne CD au jour de la
nouvelle lune , & la féconde au jour où la lune arrive
au méridien, une heure plus tard que le foleil ; & enfin
la dernière ligne A B au jour de la pleine lune : les in-
terférions de ces lignes avec les lignes horaires don-
neront des points , par leiquels on tracera une ligne
courbe 12 12, qui fera la ligne méridienne de la lu-
ne ; on déterminera eniuite de la même manière les
autres lignes horaires, 11, 2 2, 3 3 , &c. lelquel-
les feront coupées aux heures folairescorrefpondan-
tes & refpeftives , ou par l'ombre de la lune , que jet-
tera le ftyle du cadran. On effacera les lignes horaires
du cadran folaire , auffi bien que les perpendiculaires,
par où l'on a tiré les heures lunaires ; & on divifera
l'intervalle G F par d'autres lignes parallèles en
quinze parties égales , qui répondent aux quinze
jours entre la nouvelle & la pleine lune. Enfin on
écrira auprès de ces lignes les différens jours de l'âge
de la lune.
Maintenant , connoiffant par un calendrier l'âge
de la lune , l'interfe&ion de la ligne de l'âge de la
lune , avec les lignes horaires de la lune , donnera
l'heure de la nuit.
On peut de la même manière transformer tout
autre cadran folaire en cadran lunaire.
Tracer un cadran lunaire portatif fur un plan , qui
peut être difpoféfelon i 'élévation de féquateur. Décrivez
un cercle A B {fig. ZO. ) & diviiez fa circonférence
en 29 parties égales. Du même centre D décrivez un
autre cercle mobile D E , divifez-le en 24 parties ou
en 24 heures égales. Au centre C placez un index ,
de même que pour un cadran équinoctial.
Si l'on place ce cadran, comme il faut, dans un
plan parallèle à l'équateur , comme le cadran équi-
noctial, & que l'on porte la ligne de 12 heures au
jour de l'âge de la lune , l'ombre du fiyle donnera
l'heure.
Pour fe fervir d'un cadran folaire , comme fi c'étoit
un cadran lunaire , c'eft-à-dire , trouver l'heure de la
nuit , par le moyen d'un cadran folaire , on obferve-
ra l'heure que l'ombre du ftyle montre à la lumiè-
re de la lune. On trouvera l'âge de la lune dans le
calendrier , & on multipliera le nombre des jours par
\ : le produit eft le nombre d'heures qu'il faut ajoù-
CAD
ter à l'heure marquée par l'ombre, afin d'avoir l'heu-
re que l'on demande. La railon de cette pratique eft,
que la lune paffe tous les jours au méridien , ou à
quelque cercle horaire que ce (oit , trois quarts d'heu-
re plus tard que le jour précédent. Or le jour de la
nouvelle & de la pleine lune , elle pafle au méridien
en même tems que le foleil ; d'où il s'eniuit que le
troiiieme jour, par exemple , après la nouvelle lune,
elle doit palier deux fois trois quarts d'heure plus
tard au méridien, tk. ainfi des autres.
Si le nombre des jours multipliés par |, & ajoutés
au nombre des heures , excède 1 2 , il faudra en ôter
1 2 , pour avoir l'heure cherchée.
Si on veut connoître plus facilement & plus exac-
tement l'heure de la nuit par le moyen de l'ombre
de la lune fur un cadran folaire , on pourra fe fervir
de la table fuivante ; & ajouter pour chacun des
jours de l'âge de la lune , les heures marquées dans
cette table , aux heures marquées fur le cadran par
l'ombre de la lune.
Jo
trs
Différence des Heures
de "âge d
e la Lune.
lunaires
& des Heures fola'res.
H. M.
I
16
0 0
2
17
0 48
3
18
1 36
4
X9
2 24
5
20
3 11
6
21
4 0
7
22
4 48
8
^3
5 36
9
M
6 24
10
M
7 m
1 1
26
8 0
12
27
8 48
13
28
9 36
14
29
10 24
*5
11 12
Le cadran aux étoiles eft un infiniment par lequel
on peut connoître l'heure de la nuit en obfervant
quelque étoile ; ce cadran fe fait par la connoiffance
du mouvement journalier que font autour du pôle ou
de l'étoile polaire , qui n'en eft pi éfentement éloignée
que de deux degrés, les deux étoiles de la grande our-
fe , qu'on appelle fes gardes , ou la claire du quarré de la
petite ourfe : pour la conftruftion de ce cadran , il faut
lavoir l'afcenfion droite de ces étoiles , ou à quel jour
de l'année elles le trouvent dans le même cercle ho-
raire que le foleil ; ce qui fe peut connoître par le
calcul aftronomique , ou par un globe , ou avec un
plànifphere célefte conftruit fur les nouvelles obfer-
vations , en mettant fous le méridien l'étoile dont il
s'agit , & en examinant quel degré de Pécliptique fe
trouve en même tems fous ce méridien. V. Globe.
Les jours de l'année où les deux étoiles ont la
même afeenfion droite que le foleil , elles marque-
ront les mêmes heures que le foleil : mais comme les
étoiles fixes retournent au méridien chaque jour plu-
tôt que le foleil d'environ 1. degré ou 4. minutes
d'heures ; ce qui fait 2. heures par mois, il faudra
avoir égard à cette différence , pour avoir l'heure du
foleil par le moyen des étoiles.
Le cadran , dont il s'agit, eft compofé de deux pla-
ques circulaires appliquées L'une fur l'autre (^fig.zi.
Gnomon. ) la plus grande a un manche poux tenir à
CAD
la main l'inftrument dans les ufages qu'on en fait.
La plus grande roue a environ deux pouces & de-
mi de diamètre : elle eft divifée en i 2 pour les i x
mois de l'année , & chaque mois de 5 en 5 jours ;
de telle forte que le milieu du manche répondejufte-
ment au jour de l'année auquel l'étoile , dont on veut
fe fervir , a la même afcenfion droite que le foleil.
Et h on veut que le même cadran ferve pour différen-
tes étoiles, il faut rendre le manche mobile autour
de la roue , afin de l'arrêter où l'on voudra.
La roue de deffus, qui elt la plus petite , doit être
diviiée en 24 parties égales , ou deux fois 1 2 heures
pour les 24 heures du jour , & chaque heure en
quarts ; ces 24 heures fe distinguent par autant de
dents , dont celles où font marquées 1 2 heures , font
plus longues que les autres , afin de pouvoir compter
la nuit les heures fans lumière.
A ces deux roues , on ajoute une règle ou alidade
qui tourne autour du centre , & qui déborde au-delà
de la plus grande circonférence.
Ces trois pièces doivent être jointes enfemble par
le moyen d'un clou à tête , percé de telle forte dans
toute fa longueur , qu'il y ait au centre de ce clou
un petit trou d'environ deux lignes de diamètre , pour
voir facilement à travers ce trou l'étoile polaire.
L'inftrument étant ainfi confiant , fi on veut fa-
voir l'heure qu'il eft de la nuit , on tournera la roue
des heures jufqu'à ce que la plus grande dent où eft
marquée 1 2 heures , foit fur le jour du mois courant ;
on approchera l'inftrument de les yeux , en le tenant
par le manche , enforte qu'il ne penche ni à droite
ni à gauche , & qu'il regarde directement l'étoile po-
laire , ou ce qui eft la même choie , qu'il foit à peu
près parallèle au plan de l'équinoctial ; enfuite ayant
vû par le trou du centre l'étoile polaire , on tour-
nera l'alidade jufqu'à ce que fon extrémité , qui palle
au-delà des circonférences des cercles , raie la claire
du quarré de la petite ourfe , fi l'inftrument eft difpo-
fé pour cette étoile. Alors la dent de la roue des heu-
res , qui fera fous l'alidade , marquera l'heure qu'il
eft de la nuit. Voye{ BlON , Inflrumens de Mathémati-
que , & Wolf , Elémcns de Gnomonique. On trace
fouvent fur la ftrrfaee d'un cadran d'autres lignes que
celles des heures , comme des lignes qui marquent
les lignes du zodiaque ,1a longueur des jours, les pa-
rallèles des déclinaifons , les azimuths, les méridiens
des principales villes , les heures babyloniennes 6c
italiques, &c. Voye^ Gnomonique. ■
L'analemme ou le trigone des fignes , eft l'inftru-
ment dont on le fert principalement pour tracer
ces fortes de lignes Sr de points fur les cadrans. Voye{
Analemmf. & Trigone des Signes.
Au relie la defeription de ces fortes de lignes &
de points eft plus curieuie qu'utile ; la condition la
plus cffcntielle pour un bon cadran Jblaire , c'eft que
les lignes horaires, & fur-tout la méridienne, y foient
bien tracées , & le ftyle bien pofé ; & toutes les au-
; :es qu'on y. peut décrire , pour marquer au-
tre ebofe que les heures du lieu où l'on eft , peuvent
être quelquefois nuifibles par trop de confuiion. (O)
Cadran de Mer. Voye^ Boussole.
Cadran , dans les horloges , eft une plaque fur la-
quelle font peintes ou gravées les heures, les minu-
tes , les fécondes , &c tout ce que la dîfpofitiori du
mouvement lui permet d'indiquer.
Ce que Ton exige principalement d'un cadran ,
c'eft qu'il foit bien divifé , bien monté , & que tou-
tes les parties s'en diftinguent facilement.
Le cadran des montres eft fait d'une plaque de cui-
vre rouge , recouverte d'une couche d'émail de l'é-
paiffeur d'un fiard environ.
Les cadrans tiennent pour l'ordinaire à la platine
des piliers , par le moyen de pluiieurs pies foudés
Vers leur circonférence, au coté qu'on ne voit pas. I
CAD
5îj
Ces pies entrent jufte dans des trous percés à la pla-
tine; ils la débordent & l'on fiche des goupilles dans-
de petits trous percés dans leur partie excédante :
ainfi le cadran tient à la platine des piliers de là
même manière que cette platine tient à celle du
deffus. Voyei Cage. PL l. Horl.fig. /. (T)
CADRAN , fe dit , en Architecture , de la décoration
extérieure d'une horloge enrichie d'ornemens d'ar-
ehiteâure & de fculpture , comme le cadran du palais
à Paris , où il y a pour attributs la loi & la juftice ,
avec les armes de Henri III. roi de France ÔC de Po-
logne. Cet ouvrage eft du célèbre Germain Pilon.
On ne fait guère ufage de ces lortes de déla-
tions dans les bâtimens particuliers, ma
prelqu'indifpenfables aux édifices lacrés , tels que
font les paroifiès , les couvens, communautés, &c.
ou bien aux monumens publics , comme hôtels-de-
ville , bourfes , marchés ; alors il eft convenable de
rendre leurs attributs relatifs aux différens ciraûeres
de l'édifice , & fur-tout que les ornemens foient unis
avec des membres d'architedure qui paioiiient liés
avec le refte de l'ouvrage. Quelquefois ces cadrans
font funnontés par des lanternes, dans lefquelles l'ont
pratiqués des carillons, tels qu'il s'en voyou au mar-
ché-neuf il y a quelques années , & qu'on en voit
encore aujourd'hui à celle de la Samaritaine , bâti-
ment hydraulique fitué fur le pont-neuf à Paris.
Les cadrans fiolaires qui font placés fur la lurface
perpendiculaire des murailles dans les grandes cours
ou jardins des hôtels , comme au Palais royal à Paris,
ou poiés fur des piédeftaux , s'ornent auiïi de figures,
attributs & allégories relatifs au fujet; tel eft celui
qu'on voit à Fontainebleau dans le jardin de l'oran-
gerie. (P)
CADRAN, f. m. {inflrument de Lapidaire.} eft une
machine fort ingénieutement inventée pour tenir le
bâton à ciment, à l'extrémité duquel le diamant eft
attaché , foit avec du muftic 0.1 de l'étain fondu , &
lui faire prendre telle inchnaifon que l'on lbuhaite à
1 égard de la meule.
Cet 'infiniment, qui eft de bois, eft compofé de
quatre pièces principales ; favoir , le corps, la bafe ,
& les deux noix. Le corps repréfenté leparément ,
fig. ij. Planche du Lapidaire , eft une pièce de bois
d'en\ iron 5 ou 6 pouces de long & de 4 à 5 de large,
dans laquelle eft un trou K qui eft le centre de l'arc
hi percé à jour. Sur Pépaiffeur de la face g g s'élève
la vis //.' qui eft dans le même plan, & par laquelle
elle s'afièmble avec la bafe u x en paffant par le
tiouy ; elle y eft retenue par l'écrou en S marqué { ,
ainli qu'on peut le voir dans la figure 10. qui repré-
fenté le cadran tout monté.
La bafe , outre le Xrowy , en a encore un autre x
qui delcend verticalement: ce trou reçoit le clou qui
eft fixé fur l'établi , comme on voit en R ,Jig. 3.
Le trou K du corps reçoit la noix //. La partie o
eft celle qui entre dans le trou A , 6c la partie/* faite
en vis reçoit l'écrou Z,fig. 19. au moyen duquel elle
fe trouve fixée fur le coi ps du c:
L'ouverture circulaire h i reçoit la noix de hfig. 8.
la partie r eft celle qui entre dans l'ouverture h i ;
cette partie eft cavée du cote qui doit s'appliquer fur
l'arc convexe de l'ouverture circulaire, & elle eft de
même que la première rétenue j ar l'écrou 6, fig-iQ'
Les deux noix font chacune percées d'un trou,
dans lequel palle le bâton à ciment 312, fig. 10.
qui peut tourner fur ion axe ec fe fixer dans les ouver-
tures des noix par le feul frottement , à quoi contri-
bue beaucoup fa forme conique.
Voye^ pour l'ufage de cet infiniment l'article La-
pidaire & la figure 3. R eft le cadran monté fur fon
clou, enforte que le diamant fondé au bout du bâton
à ciment porte fur la meule K.
CADRATURE , f. i. lignifie en général , parmi
5x6
CAD
les Horlogers, l'ouvrage contenu dans l'efpace qui eft
entre le cadran & la platine d'une montre ou d'un
pendule , &c. Planches VI. VIL. & XI. de l'Horlog.
mais il lignifie plus particulièrement cette partie de
la répétition , laquelle , dans une montre ou un pen-
dule qui répète , eft contenue dans cet efpace.
Dans les montres fimples , la cadrature eft compo-
fée de la chauffée , de la roue de minutes , & de la
roue de cadran. Ces deux roues fervent à faire tour-
ner l'aiguille des heures , portée fur la roue de cadran
pour cet effet ; la chauffée tournant en une heure a
1 2 dents , & elle engrené la roue de minutes de 36 ;
cgUc-qJHg)rte un pignon de 10, qui engrené dans la
rote dè*cadran de 40 ; par ce moyen un tour de la
chauffée fait faire à la roue de cadran ~ de tour ,
ou plutôt 1 2 tours de la chauffée , où 1 2 heures équi-
valent à un tour de la roue de cadran ; & ainfi
l'aiguille portée par cette roue marquera les heures.
Dans toutes les montres fimples, à répétition, ou
autres , il y a toujours ces trois roues qui fervent à
faire tourner l'aiguille des heures. Dans les pendu-
les , il y a de même toujours une cadrature pour faire
tourner les aiguilles , & elle eft difpofée félon les mê-
mes principes.
Dans les montres ou pendules à répétition, la ca-
drature , comme nous l'avons dit plus haut , outre les
roues dont nous venons de parler, contient encore
une partie des pièces de la répétition, l'autre étant
contenue dans la cage. Ces pièces font la crémail-
lère , le tout ou rien , la pièce des quarts , le doigt ,
l'étoile , tk le limaçon des heures ; le valet , le lima-
çon des quarts , & la furprife ; la fourdine, les deux
poulies , jes refforts des marteaux , les levées , ôt
tous les refforts qui fervent au jeu de ces différentes
pièces.
Comme la conftruction & la difpofition de ces pie-
ces , les unes par rapport aux autres , peuvent être
très-variées , il eft facile d'imaginer qu'on a fait un
grand nombre de cadratures très-différentes les unes
des autres : mais de toutes ces cadratures il n'y en a
guère que trois ou quatre qu'on employé ordinaire-
ment : telles font les cadratures à l'Angloife , à la Sta-
gden , à la Françoife , & celle.de M. Julien leRoy.
Voyei là-deiTus l'article RÉPÉTITION. Voyc{ auffi
les jïS. 31. 34. 35.
La perfection d'une cadrature confifte principale-
ment dans la jufteffe & la fureté de fes effets ; cette
dernière condition eft fur-tout effentielle , parce que
fans cela il arrive fouvent que les machines de la ré-
pétition venant à fe déranger , elles font arrêter la
montre.
Plu fleurs horlogers ont fait des tentatives pour pla-
cer toutes les parties de la répétition dans la cadra-
ture , mais jufqu'ici elles ont été infruchieulès : il eft
vrai que ce feroit un grand avantage, car la cage ne
contenant alors que le mouvement , on pourroit le
faire auffi grand & auffi parfait que celui des mon-
tres fimples.
Nous avons dit dans la définition de cadrature ,
que c'étoit cette partie de la répétition contenue en-
tre le cadran & la platine: mais quoique cette défi-
nition foit vraie en général , il femble que les hor-
logers entendent plus particulièrement par cadrature,
l'affemblage des pièces dont nous avons parlé plus
haut , foit que ces pièces foient fiîuées entre le ca-
dran & la platine , foit qu'elles le foient ailleurs. C'eft
ainfi que dans une pendule à répétition que M. Julien
le Roy a imaginée , & dans laquelle ces mêmes pièces
font fituées'fur la platine de derrière, elles ont tou-
jours confervé le nom de cadrature. Voye^ Pendule
À répétition. (T)
CADRATURIER , fub. m. nom que les Horlogers
donnent à celui qui fait des cadratures ; il ne fe dit
qu'en parlant des cadratures des montres $ répéti-
CAD
tion , parce que clans les pendules il n'y a point d'ou-
vrier particulier pour les cadratures, c'eft à-dire qui
ne faffe que de cela. (7")
C ADRE , 1. m. en Architecture , eft une bordure de
pierre ou de plâtre traîné au calibre, laquelle dans
les compartimens des murs de face & les plafonds
renferme des ornemens de iculpture. V. Bordure.
Cadre de plafond ; ce font des renroncemens caufés
par les intervalles des poutres dans les plafonds lam-
briffés avec de la Iculpture , peinture , & dorure.
Cadre, (Marine.) c'eft un carre fait de quatre
pièces de bois d'une moyenne force & groffeur , mi-
les en carré long & entrelacées de petites cordes ,
ce qui forme un chaifis, fur lequel on met un mate-
las pour le coucher à ia nier. (Z )
CADRES , terme de manufacture de papier ; ce font
des chaifis, G G, HH, voy. PL IV, de Papeterie, com-
polés de quatre tringles ue bois jointes enlemble par
les extrémités , à angles droits , & ayant un drageoir
comme les cadres des miroirs & tableaux. L'ouvrier
fabriquant les applique lur la forme pour lui fervir
de rebord & empêcher que la pâte ne tombe quand*
il égoutte la forme.
Cadre eft encore fynonyme à bordure, Se s'appli-
que aux tableaux & aux eftampes.
CADR1TE, f. m. (Hijï. mod.) forte de religieux
Mahométans.
Les Cadrites ont eu pour fondateur un habile phi-
lofophe & jurifconfulte, nommé Abdul Cadri, de qui
ils ont pris le nom de Cadrites.
Les Cadrites vivent en communauté & dans des ef-
peces de monafteres , qu'on leur permet néanmoins
de quitter s'ils veulent , pour le marier , à condition
de porter des boutons noirs à leur vefte pour fe dis-
tinguer du peuple.
Dans leurs monafteres , ils paffent tous les ven-
dredis une bonne partie de la nuit à tourner , en fe
tenant tous par la main , & repétant fans ceffe ghai ,
c'eft-à-dire, vivant, qui eft un des noms de Dieu.
Pendant ce tems-là un d'entr'eux joue de la flûte ,
pour les animer à cette danfe extravagante. Ils ne
rafent jamais leurs cheveux, ne fe couvrent point la
tête , & marchent toujours les pies nuds. Ricaut, de
C empire Ottom. (<?)
CADSANDT, (Géog.) île de la Flandre Hollan-
doife, entre la ville de l'Éclufe & File de Zélande.
CADUC , adj. VIEUX , CASSÉ , qui a perdu fes
forces & qui en perd tous les jours davantage. On
dit devenir caduc , tige caduc , Janté caduque. Voye^
Vieillesse.
Caduc (mal), Médecine, fe dit de l'épilepfie ; elle
a été airtfi nommée , parce que les malades tombent
à la renverie dans l'accès de cette maladie; cet acci-
dent joint aux convulfions qui l'accompagnent, don-
ne beaucoup de frayeur aux fpectateurs. Cette chiite
fait fouvent périr les malades, fur-tout lorfqu 'elle ar-
rive la nuit , qu'ils font feuls , ou qu'ils tombent d'un
lieu élevé. Voye[ Épilepsie. (A7)
Caduc, dans les matières de J urif prudence , fe dit
de ce qui étant valide dans l'origine, eft cependant
devenu nul dans la fuite à cauie de quelqu'évenement
poftérieur : ainfi l'on dit en ce fens qu'un legs ou une
inftitution d'héritier eft devenue caduque par la mort
du légataire ou de l'héritier inftitué , avant celle du
teftateur. Caducité fe dit aufii dans le même lens. (H)
CADUCÉE, f. m. (-^V-) verge ou baguette que
les Poètes & les Peintres donnent à Mercure. Quel-
ques Mythologiftes diient que ce dieu ayant rencon-
tré deux ferpens qui fe battoient, il jetta fa baguette
au milieu d'eux , 6^ les réunit , & que depuis il la por-
ta toujours pour iymbole de paix. Auffi peint-on le
caducée aVec deux ferpens entrelacés, & lur le haut
on ajoute deux ailerons ; ce qui, félon d'autres } raar-
C A E
que la force de l'éloquence , dont Mercure étoit ré-
puté le dieu aufîï bien qu'Apollon. Et en ce cas les
ferpens, iymbolesdeia prudence, marquent combien
cette qualité eft néceflaire à l'orateur; & les ailes
lignifient la promptitude & la véhémence des paro-
les. Comme Mercure étoit auffi cenfé préfider aux
négociations, pour avoir plus d'une fois rétabli la
bonne intelligence entre Jupiter & la femme Junon ;
les ambaûadcms feciaux ou hérauts, chargés à Ro-
me de traiter de la paix , portoient en main un ca-
ducée d'or , d'où leur vint le nom de caduceatores. Les
Poètes attribuoient encore au caducée de Mercure di-
verles autres propriétés , comme de conduire les
âmes aux enfers, tk de les en tirer, d'exciter ou de
troubler le fommeil , &c
Le caducée qu'on trouve fur les médailles , eft un
fymbole commun; il lignifie la bonne conduite, la
paix & la félicité : le bâton marque le pouvoir ou
l'autorité ; les deux lerpens , la prudence , & les deux
ailes la diligence , toutes chofes néceffaires pour réuf-
fir dans les entreprifes où l'on s'engage. Jobert, Scien-
ce des médailles , tome I. pag. 3JJ. (G)
CADUCÉE, en Phyfique. Voye{ BAGUETTE DIVI-
NATOIRE. (O)
CADUCITÉ , f. f. l'état d'une perfonne caduque :
on dit cette perfonne approche de la caducité ; d'oii l'on
voit que la caducité le prend pour l'extrême vieillef-
fe ; mais il n'en eft pas de même de caduc : on dit d'un
jeune homme qu'il eft caduc, & d'un vieillard qu'il
ne l'eft pas.
CADURCIENS,f. m. pi. (Géog.anc.) peuples qui
occupoient les pays que nous nommons aujourd'hui
Je Quercy : c'étoit un des quatorze qui habitoient en-
Ire la Loire & la Garonne.
CADUS ou CERANLUM, ( Hifi. anc. ) grande
melure des anciens, contenant cent vingt livres de
vin, ÔC environ cent cinquante livres d'huile.
CADUSIENS, f. m. pi. (Géog.) peuples d'Afie,
qui habitoient quelques contrées voiiines du Pont-
Euxin; lelon Strabon, ils occupoient la partie lep-
tcntrionale de la Médie Atropatene , pavs monta-
gneux, & affez femblable à la delcription que Plu-
larque fait de celui des Cadujiens.
CAEN , (Gcog.) ville de France , capitale de la
baffe Normandie; elle eft fur l'Orne. Lon. ly. 18.
23. lat. 4c. 2 1. io.
CAERJJEN , ( Géog. ) petite ville d'Allemagne ,
dans l'éledorat de Trêves , fur la Mofelle.
CAERMARTHEN, (Géog.) ville d'Angleterre,
dans la principauté de Galles , fur la rivière de Towy,
dans une province qui le nomme Caermarthenshire.
CAERNARVAN, (Géog.) ville d'Angleterre ,
dans le pays de Galles, fur le Menay, capitale du
Caernarvan^hire.
CjESALPINA, f. f. (Hifi, nat. bot.) genre de plan-
te, dont le nom a été dérivé de celui d'André Caefal-
pin , Médecin du pape Clément VIII. la fleur des
plantes de ce genre eft monopétale, laite en forme
de mafque, irréguliere , & divifée en quatre parties
inégales: celle du deffus eft la plus grande, elle eft
creufée en forme de cuilliere : il s'élève du fond
de la fleur un piftil entouré d'étamines recourbées.
Ce piftil devient une filique remplie de femences
oblongues. Plumier, Nova plant. Amer, gêner. Voye^
Plante. (1)
* On ne lui attribue aucune propriété médccinale.
< \tFFA, (Géog.) autrefois Tkéodofie , ville riche,
ancienne & conliclérable , capitale de la Tartarie
Grimée , avec deux citadelles; elle eft fur la mer
Noire, à 60 lieues de Conftantinople. Lon. Si. 30-
lat. 44. 5$.
* GAFFÉ, f. m. (Hifi- n^- bot.) Depuis environ
foixante ans, cliioit M. de Juffieu en 1715, que le
cafj'é eft connu en Europe , tant de gens en ont écrit
C A F
5*7
fans connoître fon origine, que û l'on entreprenoit
d'en donner une hiftoire fur les relations qu'on nous
en a laiffées , le nombre des erreurs feroit fi grand ,
qu'un feul mémoire ne fuffiroit pas pour les rappor-
ter toutes.
Ce que nous en allons dire eft tiré d'un mémoire
contenu dans le recueil de C Académie des Sciences , an-
née 1J13. Ce mémoire eft de M. de Juffieu , le nom
de l'auteur fuffit pour garantir les faits. L'Europe,
dit M. de Juffieu , a l'obligation de la culture de cet ar-
bre aux foins des Hollandois , qui de Moka l'ont por-
té à Batavia, & de Batavia au jardin d'Amftcrdam.
La France en eft redevable au zèle de M. de Ref-
fons , lieutenant général de l'Artillerie , & amateur de
la Botanique, qui le priva en faveur du jardin du
Roi, d'un jeune pié de cet arbre qu'il avoit fait venir
de Hollande. Il cil maintenant affez commun, & on
lui voit donner fucceflivement des fleurs & des fruits.
Cet arbre dans l'état où il étoit au jardin du Roi ,
Iorique M. de Juffieu rit fon mémoire , avoit cinq pies
de hauteur & la groffeur d'un pouce ; il donne des
branches qui fortent d'efpace en efpace de toute la
longueur de fon tronc, toujours oppofées deux à deux,
& rangées de manière qu'une paire croife l'autre.
Elles font fouples, arrondies , noiieufes par interval-
les , couvertes aufli bien que le tronc , d'une écorce
blanchâtre fort fine, qui lé gerfe en fe defféchant :
leur bois eft un peu dur & douçâtre au goût ; les bran-
ches inférieures font ordinairement limples, & s'éten-
dent plus horifontalement que les fupérieures qui ter-
minent le tronc, lefquelles font divifées en d'autres
plus menues qui partent des aifl'elles des feuilles, &
gardent le même ordre que celles du tronc. Les unes
6c les autres font chargées en tout tems de feuilles en-
tières , fans dentelures ni crenelures dans leur con-
tour, aiguës par leurs deux bouts, oppofées deux à
deux , qui fortent des nœuds des branches , & ref-
iemblent aux feuilles du laurier ordinaire ; avec
cette différence qu'elles font moins feches & moins
épaiffes, ordinairement plus larges , plus pointues par
leur extrémité , qui iouvent s'incline de côté ; qu'el-
les font d'un beau verd gai & luifant en-deffus, verd
pâle en-deffous , & verd jaunâtre dans celles qui font
naiffantes ; qu'elles font ondées par les bords , ce qui
vient peut-être de la culture, & qu'enfin leur goût
n'eft point aromatique, Se ne tient que de l'herbe.
Les plus grandes de les feuilles ont deux pouces en-
viron dans le fort de leur largeur, fur quatre à cinq
pouces de longueur; leurs queues font fort courtes.
De l'aiffelle de la plupart des feuilles naiflént des
fleurs jufqu'au nombre de cinq , foûtenues par un pé-
dicule court ; elles font toutes blanches, d'une feule
pièce , à peu près du volume & de la figure de celles
du jafmin d'Efpagne , excepté que le tuyau en eft plus
court, & que les découpures en font plus étroites,
& font accompagnées de cinq étamincs blanches à
fommets jaunâtres , au lieu qu'il n'y en a que deux
dans nos jafmins : ces étamines débordent le tuyau
de leurs fleurs , & entourent un ftyle fourchu qui fur-
monte l'embryon ou piftil placé dans le fond d'un
calice verd à quatre pointes, deux grandes & deux
petites , difpofecs alternativement. Ces fleurs paflènt
fort vite , & ont une odeur douce & agréable. L'em-
bryon ou jeune fruit, qui devient à peu-près de la
groffeur & de la figure d'un bigarreau, ic termine
en ombilic, &- eit verd clair d'abord, puis rougea-
tre, enfuite d'un beau ronge, S: enfin rouge obfcur
dans fa parfaite maturité. Sa chair eft glairèufe , d'un
goût defagréable, qui fe change en celui de nos pru-
neaux noîrs fecs, lorfqu'elle eft féchée , & la g offeur
de ce fruit iè réduit alors en celle d'une baie de lau-
rier. Cette chair fertd'ènvdoppe à deux coques min-
ces, ovales, étroitement unies, arrondies fur leur
dos, applaties par l'endroit 00 elles fe joignent, de
5*8
C A F
couleur d'un blanc jaunâtre , & qui contiennent cha-
cune une femence calleufe , P°ur^ ainlî-dire ovale ,
voûtée fur fon dos , &c plate du côté oppofé, creu-
fée dans le milieu &c dans toute la longueur de ce mê-
me côté , d'un fillon affez profond. Son goût eft tout-
à-fait pareil à celui du caffi qu'on nous apporte d'A-
rabie : une de les deux femences venant à avorter ,
celle qui refte acquiert ordinairement plus de volu-
me , a les deux côtés plus convexes , év occupe leule
le milieu du fruit. Voyc^ Plan. XXVIII. d'Hifl. nat.
On appelle caffé en coque , ce fruit entier Se deffé-
ché ; & caffé monde , les femences dépouillées de
leurs enveloppes propres & communes.
Par cette defcnption faite d'après nature , il eft
ailé de juger que l'arbre du caffe , que l'on peut ap-
peller le caffîer, ne peut être rangé fous un genre qui
lui convienne mieux que fous celui des jafmins, fi
l'on a égard à la figure de fa fleur, à la ftrutture de fon
fruit, & à la difpolition de lés feuilles.
Cet arbre croît dans fon pays natal , & même à
Batavia , juiqu'à la hauteur de quarante pies ; le dia-
mètre de fon tronc n'excède pas quatre à cinq pou-
ces : on le cultive avec foin ; on y voit en toutes les
faifons des fruits , & preique toujours des fleurs. Il
fournit deux ou trois fois l'année une récolte très-
abondante. Les vieux pies portent moins de fruit que
les jeunes , qui commencent à en produire dès la troi-
sième & quatrième année après la germination.
Les mots caffe en François , &c coffee en Anglois &
en Hollandois , tirent l'un & l'autre leur origine de
caouhe , nom que les Turcs donnent à la boiffon qu'on
prépare de cette plante.
Quant à fa culture , on peut affûrer que fi la fe-
mence du caffe n'eft pas mile enterre toute récente,
comme plufieurs autres femences des plantes, on ne
doit pas efpérer de la voir germer. Celles de l'arbre
qu'on cultivoit depuis une année au Jardin-royal ,
mifes en terre auffi-tôt après avoir été cueillies , ont
prefque toutes levé fix femaines après. Ce fait, dit
M. de Jufîieu , juftifîe les habitans du pays où fe cul-
tive le caffe , de la malice qu'on leur a imputée de
tremper dans l'eau bouillante , ou de faire fécher au
feu tout celui qu'ils débitent aux étrangers , dans la
crainte que venant à élever comme eux cette plan-
te , ils ne perdiffent un revenu des plus confidé-
rables.
La germination de ces femences n*a rien que de
commun.
A l'égard du lieu où cette plante peut fe confer-
ver, comme il doit avoir du rapport avec le pays
dans lequel elle naît naturellement , & où Ton ne
reffent point d'hyver , on a été obligé jufqu'ici de
fuppléer au défaut de la température de l'air & du
climat , par une ferre à la manière de celles de Hol-
lande , fous laquelle on fait un feu modéré , pour y
entretenir une chaleur douce ; & l'on a obfervé
que pour prévenir la lechereffe de cette plante , il
lui talloit de tems en tems un arrofement propor-
tionné.
Soit que ces précautions en rendent la culture dif-
ficile , foit que les Turcs , naturellement pareffeux ,
ayent négligé le foin de la multiplier dans les autres
pays fujets à leur domination ; nous n'avons pas en-
core appris qu'aucune contrée que celle du royau-
me d'Yemen en Arabie , ait l'avantage de la voir
croître chez elle abondamment ; ce qui paroît être
la caufe pour laquelle avant le xvi. liecle fon ufage
nous étoit prefqu'inconnu.
On laiflè à d'autres le foin de rapporter au vrai ce
qui y a donné occafion , & d'examiner fi l'on en doit
la première expérience à la vigilance du fupérieur
d'un monaftere d'Arabie , qui voulant tirer lès moi-
nes du fommeil qui les tenoit affoupis dans la nuit
C A F
aux' offices du chœur , leur en fît boire l'infufion ,
fur la relation des effets que ce fruit caufoit aux
boucs qui en avoient mangé ; ou s'il faut en attri-
buer la découverte à la piété d'un mufti , qui pour
faire de plus longues prières , & pouffer les veilles
plus loin que les dervis les plus dévots , a paffe pour
s'en être fervi des premiers.
L'ulage depuis ce tems en eft devenu fi familier
chez les Turcs, chez les Perlans, chez les Arméniens,
&c même chez les différentes nations de l'Europe ,
qu'il eft inutile de s'étendre fur la préparation , &
fur la qualité des vaifîèaux tk. inftrumens qu'on y em-
ployé.
Il eft bon d'oblèrver que des trois manières d'en
prendre l'infufion , lavoir , ou du caffe mondé 8c dans
l'on état naturel , ou du caffe rôti , ou feulement des
enveloppes propres & communes de cette fubftance,
auxquelles nos François au retour de Moka ont im-
proprement donné le nom de fleur de caffe ; la féconde
de ces manières eft préférable à la première , & à la
troifieme appellée aufti caffe à lafultane.
Qu'entre le gros & le blanchâtre qui nous vient
par Moka , &c le petit verdâtre qui nous eft apporté
du Caire par les caravanes de la Mcque , celui-ci
doit être cholfi comme le plus mûr , le meilleur au
goût , & le moins fujet à le gâter.
Que de tous les vaifîèaux pour le rôtir , les plus
propres font ceux de terre verniffée, afin d'éviter
l'imprefïion que ceux de fer ou d'airain peuvent lui
communiquer.
Que la marque qu'il eft fuffifament brûlé ou rôti
eft la couleur tirant fur le violet , qu'on ne peut ap-
percevoir qu'en fe fervant pour le rôtir d'un vaiffeau
découvert.
Que l'on ne doit en pulvérifer qu'autant & qu'au
moment que l'on veut l'infufer : on fe fert pour cet
effet d'un petit moulin portatif, compofé de deux
ou trois pièces ; d'une gorge qui fait la fonction de
trémie , dans laquelle on met le caffé grillé , & qu'on
bouche d'un couvercle percé d'un trou ; d'une noix
dont l'arbre eft foûtenu & fixé dans le coffre ou le
corps du moulin qui la cache , & dans lequel elle le
meut fur elle-même : la partie du coffre qui corref-
pond à la noix eft de fer , & taillée en dent ; il y a
au-deffous de la noix un coffret qui reçoit le caffe à
melure qu'il fe moud. Voye^ Plan, du Tailland. 3 un
moulin à caffé , rf tout monté ; & dans lesflg. 4. m
ml, k , o p p , n , un autre moulin & Ion détail. La
fig. 4. eft l'arbre féparé du moulin rf: m m /, autre
moulin ; m , fon arbre ; k , Ion embale ; n , la coupe
par le milieu ; o, fa noix ;fig. rf, r eft la trémie.
Et qu'étant jette dans l'eau bouillante , l'infufion
en eft plus agréable , & fouffre moins de diiîipation
de fes parties volatiles , que lorfqu'il eft mis d'abord
dans l'eau froide.
Quant à la manière d'agir & à fes vertus, la ma-
tière huileufe qui fe fépare du caffé , & qui paroît
fur fa iùperfîcie lorfqu'on le grille , & Ion odeur par-
ticulière qui le fait diftinguer du feigle , de l'orge ,
des pois, des fèves, Se autres femences que l'épar-
gne fait fubftituer au caffé , doivent être les vraies
indications de fes effets , fi l'on en juge par leur rap-
port avec les huiles tirées par la cornue , puifqu'elle
contient auffi-bien que celles-là , des principes vola-
tils , tant falins que lulphureux.
C'eft à la diffolution de fes fels , & au mélange
de fes foufres dans le fang , que l'on doit attribuer
la vertu principale de tenir éveillé , que l'on a tou-
jours remarquée comme l'effet le plus conlîdérablede
fon infufion. C'eft de-là que viennent fes propriétés
de faciliter la digeftion , de précipiter les alimens»
d'empêcher les rapports des viandes , & d'éteindre
les aigreurs , lorfqu'il eft pris après le repas.
C'eft par-là que la fermentation qu'il caufe dans
le
C A F
lé fartg , utiles aux perfonnes grattes , replettes, pi-
tuiteufes, & à celles qui font lujettes aux migraines,
devient nuifible aux gens maigres , bilieux , & à
ceux qui en ufent trop fréquemment.
Et c'eft auffi ce qui dans certains fujets rend cette
boiffon diurétique.
L'expérience a introduit quelques précautions
qu'on ne fauroit blâmer , touchant la manière de
prendre cette inrufion : telles font celles de boire un
verre d'eau auparavant , afin de la rendre laxative ;
de corriger par le lucre l'amertume qui pourrait la
rendre defagréable , & de la mêler , ou de la faire
quelquefois au lait ou à la crème , pour en éteindre
les fourres , en embarraflér les principes falins , &
la rendre nourriflante.
Enfin l'on peut dire en faveur du caffe, que quand
il n'auroit pas des vertus auffi certaines que celles
que nous lui connoilî'ons , il a toujours l'avantage
par-deflus le vin de ne laiffer dans la bouche aucune
odeur defagréable , ni d'exciter aucun trouble dans
l'efprit ; & que cette boifibn au contraire femble
l 'égayer , le rendre plus propre au travail , le récréer,
en difiiper les ennuis avec autant de facilité, que
ce fameux Népenthe fi vanté dans Homère. Mémoires
de V Académie royale des Sciences , année IJlJ , page
299-
M. Leaulté père, docteur en Médecine de la Fa-
culté de Paris , a fait une obfervation fur l'infufion
de caffe, qu'il n'eft pas inutile de rapporter ici. Un
homme à qui un charlatan avoit conieillé l'ufage d'u-
ne compofition propre , à ce qu'il difoit , à a
une toux opiniâtre qui le tourmentoit depuis long-
tems , prit le remède , fans être inftruit des
diens qui y entroient : cet homme fut tout-à-coup
iaili ci un ailoupifiement ce d'un étouffement cenfi-
dérable , accompagnés de la fupprefiion de toutes
les évacuations ordinaires, plus de crachats, plus
d'urine, &c. On appella M. Leàulté , qui informé
de la nature des diogues que cet homme avoit pri-
fes , lui ordonna fur le champ une faignéc : mais le
poifon avoit figé le fang , de manière qu'il n'en vint
ni des bras ni des pies : le médecin ordonna plufieurs
taffes d'une forte infufioh de café fans lucre , ce qui
en moins de cinq à lix heures reftitua au ( u
mouvement allez confidérablc pour fortir par les
quatre ouvertures, & le malade guérit.
Simon Pauli , médecin Danois, a prétendu qu'il
enivroit les hommes , 6c les rendoit inhabiles à la
génération. Les Turcs lui attribuent le même effet,
& penfent que le grand ufage qu'ils en font eft la
caule pour laquelle les provinces qu'ils occupent,
autrefois fi peuplées , le font aujourd'hui fi peu. Mais
Diiiour relate cette opinion , dans Ion Truite du c.zffé,
du thé , & du chocolat.
Le père Malebranchc affûra à MM. de l'Académie
des Sciences , qu'un homme de fa connoilTance avoit
été guéri d'une apoplexie par le moyen de plufieurs
lavemens de caffe: d'autres diient qu'employé de la
même manière , ils en ont été délivrés de maux de
tête violens ce habituels. ( A)
Le comme ce du caffe en confidérablc : on afïïirc
que les fculs habitans du royaume d'Ycmen en dé-
bitent tous les ans pour plufieurs millions ; ce qu'on
n'aura pas de peine à croire , li l'on tait attention à la
confbiumation prodigicule.
Caffe mariné ; c'en ainfi qu'on appelle celui qui
dans le rranfport a été mouiilé d'eau de mer : on en
fait peu de cas , à càufe de l'acrete de l'eau de mer ,
que la torréfaction ne lui ôte pas.
CaffÉS : ce font des lieux à l'établifiemcnt def-
quels l'ufage du caffe a donné lieu : on y prend tou-
tes fortes de liqueurs. Ce font auffi des manufactures
d'elprit, tant bonnes que mauvaifes.
CAFFETIER, f. m. (Commerce.') celui qui a le
Tome II,
C A G
29
droit de vendre au public du caffe , du thé , du cho-
colat , & toutes foites de liqueurs froides Se chau-
des. Les C^lti;rs font de la communauté des Limo-
nadiers. Voye^ Limonadier.
C AFFILA, f. t. ( Commerce. ) troupe de marchands
ou de voyageurs , ou compolée des uns & des au-
tres , qui s'aflémblent pour traverfer avec plus de fu-
reté les valles états du Mogol > ôc autres endroits de
la terre ferme des Indes.
Il y a auffi de femblables cafflas qui traverf ent une
partie des deferts d'Afrique , 6c particulièrement ce
qu'on appelle la nier de fable , qui eft entre Maroc &
Tamboucîou , capitale du royaume de Gago. Ce
voyage, qui cil de quatre cents lieues , dure deux
mois pour aller, 6c autant pour le retour, lacaffîlœ
ne marchant que la nuit à caule des chaleurs excef-
fives du pays.
La caffîla eft proprement ce qu'on appelle cara-
vane dans l'empire du grand-Seigneur, en Perle,
& autres lieux de l'Orient. Voye^ Caravane.
L'affila lé dit auffi dans les differens ports que les
Portugais occupent encore fur les côtes du royaume
de Guzarate, des petites flottes marchandes qui vont
de ces ports à Surate , ou qui reviennent de Surate
fous l'elcorte d'un vaifleau de guerre que le roi de
Portugal y entretient à cet effet.
CAFF1S , 1. m. ( Commerce. ) mefurede continence
dont on fe fert pour les grains à Alicante. Le caffs
revient à une charge 6c demie de Marfeille, & con-
tient fix quillots de Conffantinople , c'eil-à-dire qua-
tre cents»cinquante livres poids de Marfeille : ce qui
revient à trois cents foixante-quatre livres poids de
marc. (G)
*C .A FI CI, ( Commerce. ) mefure ufitée en Afri-
que , fur les côtes de Barbarie. Vingt guibis font un
cafici , & fept cafici font un lait d'Amlterdam , ou
162 { iivres de Hollande.
CAFRERIE , ( Géog. ) grand pays fitué dans la
partie méridionale de l'Afrique , borné au nord par
l'Abylïinie & la Nigritie ; à l'occident par la Guinée
6c le Congo ; au fuel par le cap de Bonnc-Elpérance ;
à l'orient par l'Océan. Les habitans de cette contrée
font nègres & idolâtres. Ce pays eff peu connu des
Européens , qui n'ont point encore pu y entrer bien
avant : cependant on accule les peuples qui l'habi-
tent d'être anthropophages.
* CAFRI, ( Hiji. nat. bot. ) fruit des Indes qui
croît fur de petits arbriffeaux : il eft à peu près de la
grolîeur des noix ; lorfqu'il eft mùr il eft d'un beau
rouge , comme la eerife ; fes fleurs reflernblent à cel-
les du dictamne de Crète.
CAFSA , ( Géog. ) ville d'Afrique dans le Biledul-
geridj tributaire du royaume de Tunis. Long. 40.
lat. zy. 1 0 .
CAFTAN , ( Hijl. mod. ) c'eft le nom qu'on don-
ne à une efpece de manteau chez les Turcs & les
Perfans.
CAGASIAN, ( Géog.) fort d'Afrique fur la côte
i!e Malaguette.
* l.IGASTRUM, (Médecine.) Paracelfe fefert
de ce mot pour défigner le germe & le principe de
toutes les maladies.
CAGAVEL , poiffbn de mer ; voyc{ Merdolë.
CAGAYAN , ( Géog. ) province & ii\ iere d'Afie
dans l'île deLuçon, l'une ces Philippi 1
*CAGE, 1. f. c'eft au propre un affemblage de
plufieurs petits bois équarris , emmortoifés les uns
avec les autres, 6c traverfés de bas en haut par des
fils d'archal,de manière que le tout renferme un ef-
pace dans lequel des oifeairx pui fent fe mouvoir fa-
cilement, fans s'échapper. On place e 1 t:.t vers, dans
l'intérieur de la cage , quelques petits bâtons londs,
fur lefquels les oileaux puiflent ie repofer. t1 n
couvre le fond d'une planche mince qui en: v
X x x
53°
C A G
devant à cOuliffe dans les traverfes affemblées eft
reâangle , qui forment la bat'c & les contours infé-
rieurs de h. cage. Cestraverfes ibnt aufli grillées de
fils d'archal , afin que quand on tire la planche du
fond , les oiiéaux ne puifient pas fortir par ce fond
qui refteroit tout ouvert. On a laifie cette planche
mobile afin de pouvoir nettoyer la cage ; on la tire
par un petit anneau de fer qui y eft attaché. On pra-
tique une petite porte par-devant , & aux deux cô-
tés deux ouvertures au-deflbus defquelles on place
des petits augets dans leiquels Poifeau peut boire Se
manger. Le tond de toutes les cages efi n^ceiîaire-
ment reétangle ou quarré. On lui donne au relie telle
forme qu'on veut ; on coupe fur cette forme les pe-
tits bois qui fervent à la conftruétion ; on les perce
au foret & à l'archet. On peut fe férvir pour plus
d'expédition , de la perçoire , & de la machine à per-
cer les moules de boutons. Voyei Carticle Bouton.
Si on ajoùtoit à cette commodité des patrons d'acier
fur lefquels on équarrît les petits bois à la lime , il
faudrait très-peu de tems Se d'adreflè pour faire une
cage, où il paroîtroit qu'il y auroit beaucoup d'art &
d'ouvrage. On pourroit aifément équarrir Se per-
cer plulieurs bâtons à la fois par le moyen des pa-
trons.
On a tranfpôrté le mot de cage dans plufieurs arts
méchaniques , aux parties extérieures qui fervent de
bafe à d'autres , dans une grande machine. Ainii on
dit la cage du métier des ouvriers en foie ; la cage du
métier à faire des bas ; la cage d'une grande horloge ,
&c. Voyt^ à la fuite de cet article , plufieufs de ces
acceptions.
C âge , ( en Anhiuclnre ) eft un efpace terminé par
quatre murs , qui renferment un efeaiief , ou quel-
que divilion d'appartement.
Cage de cloches ; c'eft un affemblage de char-
pente , ordinairement revêtu de plomb , & compris
depuis la chaiiè fin laquelle il pôle , jufqu'à la bafe
de la rleche.
Cage de moulin à vent ;c eft un affemblage quar-
ré de charpente en manière de pavillon , revêtu d'ais
Se couvert de bardeau , qu'on fait tourner fur un pi-
vot poié fur un maflif rond de maçonnerie , pour
expoier au vent les volans du moulin.
Cage , terme de Bijoutier , c'eft une tabatière qui
. de la garniture en ce que celle-ci a fa bâte
d'or, Se que la cage n'a qu'une bâte de fermeture,
( foyei Bâte) une petite moulure , & un pilier fur
chaque angle. Le relie eft rempli , comme le deftbus
Se le defTus.
Cage lignifie dans V Horlogerie ,une efpece de bâ-
ti qui contient les roues de l'horloge. Dans les mon-
tres &les pendides elle eft compoiée de deux pla-
ques , qu'on appelle platines. Ces plaques font tenues
éloignées l'une de l'autre d'une certaine difrance ,
au moyen des piliers P P P P. Voye^ lesfig. ^.z. jf.y.
& 56. PI. X. de l'Horlogerie. Ces piliers d'un côté ,
font rivés à la platine des piliers E , Se de l'autre ,
ils ont chacun un pivot qui entre dans les trous faits
exprès dans l'antre platine D. De plus, ils ont un
rebord ou afïiette R , pour faire , comme on l'a dit ,
que ces platines ibienî tenues à une certaine diitan-
ce l'une de l'autre. Pour qu'elles ne faflént qu'un
corps enfemble , Se que celle qui entre fur les pivots
des piliers n'en forte pas , chacun de ces pivots
eft percé d'outre en outre d'un petit trou il tué aune
diltance du rebord R un peu mon ::aiffeur
de la platine : une petite goupille étant enfoncée à
force dans ce trou , elle la preffe ce:-.,:- ce rebord ,
& chaque pilier en ayant une de même , la platine
D elt retenue fermement avec l'autre E.
Tout ce que nous venons de dire des cages de mon-
tres , s'applique également à celles des pendules.
Pour qu'une cage foit bien montée , il faut que les
C A G
platines foient bien parallèles entr'elles , Se que là
platine O qui entre air les piliers , le faffe librement
& fans brider. On trouvera à l'article Horloge de
clocher , la defeription des cages de ces horloges. Voy.
Platine , Pilier , &c. ( ï)
Cage, chc7^ les Tourneurs , eft la partie ambiante
du tour à figurer: elle fert à porter les roulettes qui
pouffent contre les rofettes de l'arbre. Voytit Tour
FIGURÉ , Se Planche du tour III. & 1K.
Cage , ( Marine. ) c'eft une efpece d'échéuguette
qui eft faite en cage au haut du mât d'un vaiffeau.
On lui donne le nom de hune fur l'Océan, Se celui
de gabie fur la Méditerranée. ( Z )
CAGLl , ( Géog. ) ville d'Italie au duché dl
au pié de l'Appennin. Long. Jo. l8. lot. 4.3. ,30.
C AGLIARI , ( Géog. ) ville capitale du royaume
de Sardaigne , dans la partie méridionale de l'île fur
la mer Méditerranée. Long. zy. y. lat.jc). zo.
CAGNARD , f. m. forte de fourneau à l'ufaj
Ciriers. Il confifie en une efpece de baquet fans fond
& renverié , fur lequel on pofe la cuve qui contient
la cire fondue , dont les Ciriers forment les bougies
de table & les cierges. Dans l'un des côtés du ca-
gnard on a ménagé une ouverture , par laquelle on
fait entrer fous la cuve une poêle de fer remplie de
feu , pour faire fondre la cire que la cuve contient.
Voyelles jîg. 8. & 2. Plan. duCiritr. On fe fert pour
modérer le feu lorfqu'il devient trop violent, d'une
plaque de tôle percée de plufieurs trous , repréfentée
fig. 10. avec laquelle on couvre la poêle.
* CAGOTS ou CAPOTS, f. m. pi. ( Hifi. mod. )
c'eft ainfi , dit Marca dans fon hifioire de Béarn, qu'on
appelle en cette province , & dans quelques endroits
de la Gafcogne , des familles qu'on prétend dépen-
dues des Vifigots qui relièrent dans ces cantons après
leur déroute générale. Ce que nous en allons racon-
ter , eft un exemple frappant de la force & de la du-
rée des haines populaires. Ils font cenfés ladres Se
infects; & il leur eft défendu , par la coutume de
Béarn , fous les peines les plus féveres , de fe mêler
avec le refte des habitans. Ils ont une porte particu-
lière pour entrer dans les églifes , Se des fiéges fépa-
res. Leurs maifons iom écartées des villes & des vil-
lages. Il y a des endroits où ils ne font point admis
à la confeflion. Ils lent charpentiers , & ne peuvent
s'armer que des inltrumens de leur métier. Ils ne font
point reçus en témoignage. On leur faifoit ancienne-
ment la grâce de compter fept d'entr'eux pour un té-
moin ordinaire. On fait venir leur nom de caas Goths f
chiens de Goths. Cette dénomination injurieufe leur
eft reitée , avec le foupçon de ladrerie , en haine de
l'arianifme dont les Goths faifoient profeffion. Ils
ont été appelles chiens & réputés ladres , parce qu'ils
avoient eu des ancêtres Ariens. On dit que c'eft par
un châtiment femblabie à celui que les Iiraéiitcs in-
fligèrent aux Gabaonites, qu'ils font tous occupés
ai; travail des bois. En 1460, les états de Béarn de-
mandèrent à Galion d'Orléans , prince de Navarre ,
qu'il ieur fût défendu de marcher pies nuds dans les
rues , fous peine de les avoir percés , & enjoint de
porter le pié d'oie ou de canard fur leur habit. On
craignoit qu'ils n'infectaffent , & l'on préîendoit an-
noncer par le pié d'un animal qui le lave fans ceffe ,
qu'ils étoient immondes. On les a aufli appelles Ge-
liatins, de Giezi , ferviteur d'Elifée, qui fut frappé
de lèpre. Le mot cagot eft devenu fynonyme à hy-
pocrite.
CAGOUILLE ou GAGOUÏLLE , f . f . ( Marine. )
volute du revers de l'éperon. C'eft ce qui fait un or-
nement au haut du bout de l'éperon d'un -
Foyei Revers d'éperon.
CAGUE , f. f. ( Marine. ) c'eft une forte de petit?
bâtiment Kollandois , dont il faut voirie defieifl PI-
XI F. fig. 1. pour pouvoir s'en former une id^ .
C A H
Voici le devis dé la cague qui eft feprëfehtee ici.
Ce bâtiment a 47 pies de long de l'étrave à Fé-
tambord , 1 2 pies 6 pouces de large de dedans en-de-
dans , & 4 pies 2 pouces de creux. L'étrave à 9 pies
de haut , un pié de large par le haut , & 5 pies & de-
mi de quefte. L'étambord a 7 pies 8 pouces de haut ,
& 3 pics de quefte. Il a 7 pouces d'épais en-dedans ,
& 5 pouces en-dehors , & un pié de large par le haut.
La f aile a 8 pies 5 pouces & demi de large , & 4 pou-
ces d'épais. Les varengues ont 3 pouces & demi d'é-
pais , 6c font à un pié de diftance l'une de l'autre ;
les genoux font à même diftance , ayant 4 pouces d'é-
pailfeur vers le haut , 6c 5 pouces de largeur. Le bor-
dage a un pouce & demi d'épais , 6c la ceinte en a 4
& demi , 6c autant de largeur. Le bordage au-deflus
de la ceinte a un pié de large ; le lerre-gouttiere qui
cft au-deflus a un pié 7 pouces de large, év 2 pouces
d'épais. La couverte de l'avant a 1 5 pies de long. La
carlingue a un pié 2 pouces de large , & 3 pouces d'é-
pais. Le cornet du mât s'élève d'un pié 7 pouces au-
deflus du tillac , & a 4 pouces d'épais ; l'on étendue
en-dedans eft de 13 pouces d'épais , & 1 5 pouces de
•large. L'écoutille qui eft au-devant a 7 pies 7 pouces
de long. La hifle a un pouce & demi d'épais. La cou-
verte de l'arriére a 4 pies 8 pouces de long , &c deux
écoutilles. Le traverfin d'écoutille a 2 pouces d'é-
pais 6c 4 pouces de large. Les courbatons ont 4 pou-
ces d'épais & 5 de large. La ferre- gouttière a un pié
9 pouces de large. Derrière le mât , il y a un ban 011
les iemelles font attachées , & un autre au bout de la
couverte de l'arriére. Les femelles ont 1 1 pies 6c de-
mi de long , 2 pies de large par-devant , 4 pies 6c de-
mi par-derrière, & 2 pouces & demi d'épaifleur. Le
gouvernail a 2 pies & demi de large par ie haut , 4
pies 5 pouces 6c demi par le bas , 6c d'épaifleur par-
devant autant que l'étambord : mais il eft un peu plus
mince par-derriere. La barre du gouvernail a 8 pies
de long , 4 pouces d'épais , 6c 5 de large. Le mât a
4Ï pies de long. Le balefton a 50 pies de Ion;1,. Il y
a dans les courcives un taquet au-deffus de chaque
c !:uuon. Les branches fupérieures des genoux
aboutitlént iur la préceinte. (Z)
CAHI ou CAHYS. Voyer^ Cakys.
CAHIER , f. m. c'eft au propre l'affcmblage de
plufieurs feuillets de papier blancs ou écrits , plies
enlemble , fans être ni attachés ni reliés. On a tranf-
porté ce nom à des ouvrages qui le dictent fous cette
forme : ainfi on dit , des cahiers de Philofophie , des ca-
hiers de Droit , 6cc.
Cahier , en termes de Droit public , cft la fuppli-
que ou le mémoire des demandes, des propofitions ,
ou remontrances que le clergé ou les états d'une pro-
vince font au Roi. ( H}
Cahier; les Relieurs appellent cahier les feuilles
d'un livre pliées fuivant leur format. Les feuilles
in- 4'. 6c i«-8°. ne font jamais qu'un cahier. Il faut
deux ou trois feuilles in-fol. pliées l'une dans l'autre
pour faire le cahier in-fol. fuivant que \c livre eftim-
pi imé. Les in- 1 2 font quelquefois deux cahiers : niais
i mvent un fcul. Les formats au-defious font
toujours plufieurs cahiers. I oye\ Plier.
CAHORLE ou CAORLE, (Géog. ) petite île du
golfe de Venife fur les côtes c!u Frioul , avec une
ville de même nom.
C AHCRS , ( Géog. ) ville de France , capitale du
Quercy dans la Guicnne fur la Lot. Long, ig d. j' .
9". Lit. 44*. 26'. 4".
CAHYS , f. m. ( Commerce. ) mefurc de grains dont
on le fert en quelques endroits d'Efpagne , particu-
nent à Seville & à Cadix. Quatre cakys font le
fanega , & cinquante fanegas font le lait d'Amfter-
dam. Il faut douze anegias pour un cahys. l oytr
Fanega, Last, Anegka. Diclionn. du Commerce ,
tome II. page J 1 ,
Tome 11,
C A I
531
Le Cahys cft généralement en ufage en Ëfpacmé
pour les marchandifes feches ; l'anegra tient douze
almudas , 6c Palmuda répond à environ fept livres
de Hollande ou d'Amfterdam , 6c neuf à dix onces.
C AI , ( Géog. ) petit royaume dépendant de l'em-
pire du Japon , dans l'île de Niphon.
CAIABO, ( Géog. ) province de l'Amérique fep-
tentrionale dans l'île Efpagnole.
* CAJ AN ou KAYAN , ( Hifl. nat. bot. ) arbre
des Indes d'une grandeur médiocre , dont les feuilles
font rondes 6c attachées trois à trois comme des trè-
fles à l'arbre. Il porte des fleurs d'une odeur agréa-
ble , & conferve fa verdure i'hyvcr & l'été. Il pro-
duit une graine ou femence qui reffemble à des pois
chiches.
CAJ ANEBURG , ( Géog. ) ville forte de la Suéde
en Finlande , fur le lac d'Uia.
CAJANIE , ( Géog. ) grande province de la Fin-
lande appartenante aux Suédois , iur le golfe de Both-^
nie , dont la capitale eft Cajaneburg.
CAJ ARE , ( Géog. ) petite ville de France dans
le Quercy.
CAJ AZZO , (Géog.) petite ville d'Italie au royau»
me de Naples , dans la terre de Labour. Long. 32.
lat. 41. 10.
CAICHE , forte de bâtiment. Voyc\ Quai c HE.
^ ÇAICS ou SAIQUES , f. f. pi. (Hifl. & Navigat.)
L'on nomme ainfi de petites barques qui font ordi-
nairement attachées aux galères, de même qu'une
chaloupe l'eft aux vaifleaux. On donne aufFi ce nom
à des bâtimens dont on fe fert affez communément
en Hongrie pour naviger fur le Danube , aufli-bien
qu'à des barques couvertes par en-haut de peaux d'a-
nimaux , dont les Cofaques fe fervent pour pirater
6c croifer fur la mer Noire. Une çaïc tient quarante
à cinquante hommes. ( Z )
CA1COS , ( Géog. ) îles de l'Amérique , au nord
de celle de Saint-Domingue : elles font au nombre
de fix.
CAIENNE ou CAYENNE, {Géog. ) île de l'A-
mérique , avec une ville de même nom , appartenant
à la France, f'oye- Pfndtjle.
CAIES , f. f. ( Marine. ) c'eft un banc de fable ou
dé toche, couvert d'une vafe épailfe ou de quantité
d'herbages , quelquefois à fleur-d'eau , 6c le plus fou-
vent couvert de tres-peu d'eau , fur lequel les petits
bâtimens peuvent échouer. On écrit auffi cayes. (Z)
CAJUMANE , (Hifl. nat. bot. ) c'eft une efpece
de canellier lainage qui croît dans certains pays
des Indes orientales , dont on n'a point de bonne def-
cription.
CAIFUNG , ( Géog. ) ville d'Afie dans la Chine ,
province de Honnang. Long. 131.30. Lit. j3.
CAILLE , f. f. coturnix, ( Hifl. nat. Ornith. ) oi-
feau plus petit , plus large , 6c moins reflerré par les
côtés que le râle. Il a fept pouces de longueur de-
puis la pointe du bec julqu'à l'extrémité de la queue,
6c treize à quatorze pontes d'envergure. Le bec a un
peu plus d'un demi-pouce de longueur depuis la poin-
te juiqu'aux coins delà bouche : îleft plus applatique
le bec des autres oileaux de ce genre ; la pièce inté-
rieure eft noire ,& la fupérieure eft légèrement teinte
de brun, cv ion extrémité eit pointue. L'iris des yeux
cft couleur de noifette. Le ventre & la poitrine font
d'un jaune pâle mêlé de blanc , ck la gorge a de plus
une teinte de roux. Il y a fous la pièce inférieure du
bec une large bande noirâtre qui s'étend en bas , &
au-deflus des yeux une ligne blanchâtre qui pafle fur
le milieu de la tête , dont les plumes font noires , à
l'exception des bords qui font roux ou cendres. Les
plumes du deiîbus du cou, 6c celles qui recouvrent
le dos , ont chacune à leur milieu une marque de cou-
leur jaune-blanchâtre, &le refte de la plume eft bi-
garré de noir 6i de roux cendre. On voit fous les ailes
Xxx ij
532
C A I
C A I
une longue bande dont le milieu eft noir & les côtés
de couleur ronfle mêlée de noir. Les grandes plumes
des ailes font bnines & pariemées de lignes tranfver-
fales de couleur roufle pâle. Les petites plumes des
ailes qui recouvrent les grandes , font preiqu'entie-
rement roufsâtres. La queue eft courte, & n'a qu'un
pouce & demi de longueur ; elle eft compofée de
douze plumes de couleur noirâtre entremêlée de li-
gnes tranfverfales d'un roux peu foncé. Les pattes
font de couleur pâle, & recouvertes d'une peau divi-
fée plutôt en écailles qu'en anneaux entiers. Le dei-
fous du pié eft jaune ; le doigt extérieur tient par une
membrane au doigt du milieu jufqu'à la première ar-
ticulation. Les cailles font des oifeaux de paflage : el-
les quittent ces pays- ci aux approches de l'hyver ,
pour aller dans des climats plus chauds , & elles pal-
ientles merspour y arriver .Willughby, Ornit. Voye^
Oiseau.
Caille , ( roi de ) ortigometra , oifeau qui pefe en-
viron cinq onces. Il a treize ou quatorze pouces de
longueur depuis la pointe du bec jufqu'à l'extrémité
des ongles, &C onze pouces, fi on ne prend la lon-
gueur que jufqu'au bout de la queue. L'envergure
eft d'environ un pié & demi. Le bec a un pouce de
longueur depuis fa pointe juiqu'aux coins de la bou-
che. Le corps eft applati fur les côtés. Le bas de la
poitrine & le ventre font blancs. Le menton eft blanc;
le jabot de couleur fale. Il y a fur la tête deux traits
noirs ; le milieu des plumes du dos eft de même cou-
leur, & les bords font de couleur cendrée roufle. Les
cuifles font marquées de bandes tranfverfales blan-
ches. Il y a vingt-trois grandes plumes dans chaque
aile. Les petites plumes qui recouvrent les grandes ,
font de couleur de fafran en-deflus, & en-deflbus de
même couleur que les bords des grandes plumes. La
queue a près de deux pouces de longueur , & elle eft
compofée de douze plumes. La partie fupérieure du
bec eft blanchâtre , & l'inférieure de couleur brune.
Les jambes font dégarnies de plumes jufqu'au-deflus
de l'articulation du genou. Les pies font blanchâtres.
On dit que cet oifeau fert de guide aux cailles lorf-
qu'elles paflent d'un pays à un autre. On le nomme
rallus ou grallus ; parce que fes jambes font fi lon-
gues qu'il femble marcher fur des échafles. Cet oi-
feau eft excellent à manger : c'eft pourquoi on dit
vulgairement que c'eft un morceau de roi, Willugh-
by, Ornith. Voye{ OlSEAU.
Caille de Bengale, {Hifl.nat. Ornith.} oi-
feau un peu plus gros que notre caille ; fon bec eft
d'une couleur de frêne lombre , tirant fur le brun ;
les coins de fa bouche font rouges , les narines font
grandes & oblongues ; l'iris des yeux eft de couleur
blanchâtre ; le fommet de la tête eft noir ; au-deflbus
de ce noir il y a une couche de jaune , & enfuite une
ligne noire qui commence auprès des coins de la
bouche , &C qui entoure le derrière de la tête : au-
deflbus de cette bande , il y a une couche de blanc ;
la poitrine , le ventre , & les cuifles font de couleur
de buffle pâle &c tirant fur le jaune ; la partie de def-
fous contiguë à la queue eft tachetée de rouge ; le
derrière du cou & les plumes qui recouvrent les ai-
les, font d'un verd jaunâtre , à l'exception d'une mar-
que d'un verd pâle bleuâtre qui eft à la naiflance des
ailes & d'une autre de la même couleur fur le crou-
pion ; les grandes plumes des ailes font noires , & il
y a une ligne blanche fur les petites ; les jambes &
les pattes font de couleur de citron , & les ongles font
rougeâtres. Hijl. nat. des Oifeaux. Derham. Voye?
Oiseau. (/)
* Chajje de la caille ; La caille fe chafle au chien
couchant & au fufil , au halier & à la tirafle. Voye-^
Halier , voye^ Tirasse. La chafle de la caille au
chien couchant n'a rien de particulier ; on tend le
fcalier en zig- zag ; c'eft un petit filet d'un pié de
hauteur au plus, qui fe tient perpendiculaire à l'aide
de piquets ; on a un appeau ; le halier fe place entre
la caille & le chafleur : le chafleur contrefait la voix
de la femelle ; & les mâles accourant , fe jettent dans
les mailles du halier dont ils ne peuvent plus fe dé-
barrafler. L'appeau de la caille eft fait d'une petite
bourfe de cuir pleine de crin , à laquelle on ajufte un
flfflet fait d'un os de jambe de chat , de cuiffe d'oie ,
d'aile de héron , &c. qu'on rend fonore avec un peu
de cire molle ; ou d'un morceau de peau mollette
attachée fur un fil de fer en fpirale, & collée à l'une
de fes extrémités fur un petit morceau de bois en
forme de cachet , & à l'autre extrémité fur un petit
fifflet femblable à celui du premier appeau. On tient
celui-ci de la main gauche appuyé contre le côté
droit , & l'on frappe defliis avec le doigt index, de
manière à imiter le chant de la caille. L'autre appeau
a un fil pafle à l'extrémité du petit morceau de bois
en cachet ; on prend ce fil entre le pouce & Vindex
de la main gauche , & tenant le fifflet de la droite ,
on pouffe l'appeau contre les doigts de la gauche ,
afin de le faire réfonner convenablement. On peut
au lieu d'appeau fe fervir d'une caille femelle qu'on*
a dans une cage qi>'on entoure de halier ; cette mé-
thode eft la plus fùre. Voye^ Planches de chaffe en A
& B , les deux appeaux dont il s'agit , & en C le ha-
lier.
On rôtit les cailles comme tout autre gibier; on
les met en ragoût , ou on les fert à la braile.
* Cailles , (Mytk.) Latone perfécutée par Ju-
non , fut changée en caille par Jupiter , & fe réfugia
fous cette forme dans l'île de Delos. Les Phéniciens
facrifioient la caille à Hercule , en mémoire de ce
que ce héros que Typhon avoit tué , fut rappelle à
la vie par l'odeur d'une caille qu'Iolaus lui fit fentir.
C AILLEBOTIS , f. m. ( Marine. ) c'eft une efpece
de treillis fait de petites pièces de bois entrelacées
& miles à angle droit. Ils font bordés par des hiloi-
res , & on les place au milieu des ponts des vaif-
feaux. Les caillebotis fervent non-feulement à donner
de l'air à l'entre-deux des ponts quand les fabords
font fermés durant l'agitation de la mer , mais en-
core à faire exhaler par ces fortes de treillis , la fil-
mée du canon qui tire fous les tillacs. On met des
prélarts fur les caillebotis, pour les couvrir , afin que
l'eau de la mer ne tombe pas fous les ponts dans le
gros tems. Voye{ Planche Kl. n°. jô. la figure d'un
caillebotis. Koye^ auffi Planche IK.fig. l. nu . iz6. le
caillebotis du fécond pont , n°. l^y. le caillebotis des
gaillards , n° . IÇ)l. le caillebotis d' 'éperon.
Le caillebotis eft compofé des hiloires , des vafla-
les , & des lattes ; le grand caillebotis dans les vaif-
feaux de guerre doit avoir fept pies de large dans fort
milieu ; les hiloires 10 à 1 1 pouces de large , fur 5
à 6 d'épais ; les vaflales environ 2 pouces & demi
de large , & au moins 2 pouces d'épais ; les lattes
doivent avoir trois pouces & demi de large , & plus
de demi-pouce d'épais ; elles font pofées fur les vaf-
fales par la longueur du vaiflëau.
Le petit caillebotis qui eft derrière le mât doit avoir
trois pies en quarré , les hiloires fept à huit pouces,
les lattes trois pouces & demi de large , &c un peu
plus de demi-pouce d'épais.
Le caillebotis qui eft devant la grande écoutille,
& celui qui eft fur le château d'avant , doivent être
de même largeur. ( Z )
CAILLELAIT , f. m. gallium , ( Hifl. nat. bot. )
genre de plante dont la fleur eft faite en forme de
cloche , ouverte & découpée. Le calice devient dans
la fuite un fruit compofé de deux femences feches,
dont la figure reflèmble pour l'ordinaire à celle d'un
croiflant. Ajoutez aux caractères de ce genre, que les
feuilles ne font ni rudes ni cotoneufes, & qu'il y en
a cinq ou fix enfemble , ôc même davantage autour
C A I
des nœuds des tiges. Tournefort, Inft. rei htrb, Voy.
Plante. (/)
On a donné ce nom François à la plante appellée
gallium luttum , à caufe de la propriété que l'on lui
a découverte de faire cailler le lait. On fe fert du cail-
Itlait contre l'épileplie , en le donnant en poudre le
matin à jeun , à la dote d'un gros ; ou bien on fait
prendre quatre onces de fon iuc dans une chopine
d'eau commune ; ou enfin on fait bouillir une poi-
gnée de cette plante dans une pareille quantité d'eau.
On lui donne auffi la propriété d'arrêter les hé-
morrhagies , fur-tout celle du nez , en la mettant en
poudre, & la prenant comme du tabac.
Nota , que lorfqu'on fait une infufion de gallium
luttum ou cailklait , on doit la faire à froid, parce
qu'en la mettant dans l'eau bouillante comme le thé,
elle perd beaucoup de fa vertu. Il faut donc la met-
tre infufer le foir pour la prendre le lendemain. (iV)
CAILLER, v. n. p. {Chimie') Cailler & coaguler
font mots fynonymes ; cependant cailler ne fe dit or-
dinairement que du fang & du lait, & plus particu-
lièrement du lait. On ne peut dire , en parlant d'au-
tres liqueurs , qu'elles fe caillent , ou qu'on les fait
cailler ; on fe fert alors du terme de coaguler. On peut,
en parlant du fang , fe fervir également du terme de
coaguler , & de celui de cailler: mais en parlant du
lait, cailler elt un terme plus propre que coaguler,
foit que cela fe fafle par la chaleur, par la prefure,
&c. yoye{ Lait-pris & Petit-Lait.
On dit aufîî quelquefois en Chimie , en parlant du
changement qui arrive à certaines diflblutions , qu'el-
les fe caillent , comme il arrive à la diflblution d'ar-
gent faite par l'acide du nitre , qui fe caille lorfqu'on
y ajoute de l'acide du fel marin , tk. il s'y fait un pré-
cipité en caillé blanc. (A/)
CAILLÉ , f. m. qui ne doit être employé , propre-
ment parlant , que pour fignifier du lait caillé. On dit
auffi au participe paffif: Caillé; lait caillé, fang caillé.
De-là vient le mot caillebotte, lait caillé en petites
maries. Vo-ji Lait.
CAILLETTE , f. f. la partie du veau oii fe trouve
la prefure à cailler le lait. La caillette elt le dernier
eftomac de ces animaux : les animaux ruminans ont
quatre eltomacs différens ; favoir la panfc , le refeau,
le feuillet , & la caillette. Voyt{ Rumination. (M)
C A I L LI Q U E, poiflbn de mer. Voye^ Haren-
GAde.
CAILLOT , f. m. qui ne fe dit que du fang caillé
en petites mafîes.
CAILLOU , fdex , ( Hijl. nat. ) matière vitrifiable
produite par Fargille tk analogue au fable vitrifia-
ble , grès , granit , &c. Il y a des carrières de cailloux
où cette matière elt difpofée en grandes mafTes &
par couches ; il y a auffi dans diftérens pays des cail-
loux en petite mafle & répandus en très-grande quan-
tité , foit à la furface , foit à l'intérieur de la terre.
Ainli la matière du caillou elt une de celles qui tom-
bent le plus fouvent fous les yeux , & qu'il importe
par conféquent de connoître le mieux. Or pour la
confidérer tous deux- afpects ; l'un relatif à l'Hiltoire
naturelle, l'autre à la Chimie: nous allons commen-
cer par le premier. Voici comment M. de Buffon
explique la formation du caillou , Hijl. nat. tome I.
p. 25,g.
«Je conçois, dit-il, que la terre dans le premier
» état étoit un «lobe , ou plutôt une fphéroïde de
» matière vitrifiée de verre , fi l'on veut très-com-
>» pacte, couverte d"une croûte légère Cv friable,
» formée par les feorics de la matière en fufion
» d'une véritable pierre- ponce : le mouvement tk
» l'agitation des eaux & de l'air briferent bientôt &
» réduifirent en poufficre cette croûte de verre lpon-
» gieufe , cette pierre-ponce qui étoit à la fui-face ;
» de-là les fables qui en s'uniflant, produinrent en-
C A I
533
» fuite les grès & le roc vif, ou ce qui elt la même
» choie, les cailloux m grande malle, qui doivent
» aufli-bicn que les cailloux en petite mafle , leur du-
» rete , leur couleur , ou leur tranfparence , & la va-
» nete de leurs accidens , aux différens degrés de
» pureté & à la finefle des grains de fable qui font
» entres dans leur compofition.
» Ces mêmes fables dont les parties confirmantes ,
» s unifient par le moyen du feu , s'affimilent & de-
» viennent un corps dur très-denfe , & d'autant plus
» tranfparent , que le fable elt plus homogène ; ex-
» pôles au contraire long-tems à l'air , ils le déc'om-
» pofent par la defunion & l'exfoliation des petites
» lames dont ils font formés , ils commencent à de»
» venir terre ; & c'elt ainfi qu'ils ont pu former les
» glaifes & les argilles. Cette poufficre, tantôt d'un
» jaune brillant , tantôt femblable à des paillettes
» d^argent , dont on fe fert pour lécher l'écriture ,
» n'elt autre chofe qu'un fable très-pur , en quelque
» façon pourri , prefque réduit en fes principes , tk.
» qui tend à une décompofition parfaite ; avec le
>► tems ces paillettes fe feroient atténuées & divifées
» au point , qu'elles n'auroient plus eu allez d'épaif-
» feur & de furface pour refléchir la lumière , & elles
» auraient acquis toutes les propriétés des glaifes»
» Qu'on regarde au grandjour,un morceau d'argille,
» on y appercevra une grande quantité de ces paib
» Jettes talqueufes , qui n'ont pas encore entièrement
» perdu leur forme. Le fable peut donc avec le tems
» produire l'argille , & celle-ci en fe divilant acquiert
» de même les propriétés d'un véritable limon, ma-
» tiere vitrifiable comme l'argille , & qui eft du mê-
» me genre.
» Cette théorie elt conforme à ce qui fe pafle tous
» les jours fous nos yeux ; qu'on lave du fable for*
»tant de fa minière, l'eau le chargera d'une aflez
» grande quantité de terre noire , dudtile , grafle , de
» véritable argdle. Dans les villes où les rues font
» pavées de grès , les boues font toujours noires &
» très-grafles ; & deflechées , elles forment une terre
» de la même nature que l'argille. Qu'on détrempe
» & qu'on lave de même l'argille prife dans un ter-
» rein oii il n'y a ni grès ni cailloux , il fe précipitera
» toujours au tond de l'eau une aflez grande quantité
» de fable vitrifiable.
» Mais ce qui prouve parfaitement que le fable , &
» même le caillou & le verre exiltent dans l'argille,
» & n'y font que déguifés, c'elt que le feu en réu-
» niflant les parties de celle-ci , que l'a£Hon de l'air
» & des autres élémensavoit peut-être divifées, lui
» rend fa première forme. Qu'on mette de l'argille
» dans un fourneau de réverbère échauffe au degré de
» la calcination , elle fe couvrira au-dehors d'un
» émail très-dur ; li à l'extérieur elle n'elt point en-
» core vitrifiée , elle aura cependant acquis une très-
» grande dureté ; elle réliltera à la lime & au burin ;
» elle étincellera fous le marteau ; elle aura enfin
» toutes les propriétés du caillou : un degré de cha-
» leur de plus la fera couler , &; la convertira en un
» véritable verre.
» L'argille e^ le fable font donc des matières par-
•> faitement analogues & du même genre. Si Pareil-
» le en le condenlant peut devenir dq caillou, du
» verre , pourquoi le fable en fe divilant ne pour-
» roit-il pas devenir de l'argille ? le verre paraît être
» la véritable terre élémentaire , & tous les mixtes un
» verre déguifé ; les métaux , les minéraux , les fels,
» &c. ne font qu'une terre vitrcfcible ; la pierre or-
» dinaire , les autres matières qui lui font analogues ,
» & les coquilles des teltacées, des enntacées, &t
» font les feules fubltances qu'aucun agent connu n'a
» pu jufqu'à préfent vitrifier , Cv les leides qui fem-
» blent faire une clafle à part. Le teu en réunifiant
» les parties divifées des premières , en fait une ma-
534
C A I
» tiere homogène , dure , tranfparente à un certain
» degré , fans aucurfe diminution de pefanteur , & à
» laquelle il n'eft plus capable de caufer aucune al-
v tération ; celles-ci au contraire , dans lesquelles il
» entre une plus grande quantité de principes actifs
» & volatils , & qui fe calcinent , perdent au feu plus
h du tiers de leur poids , & reprennent Simplement
» la forme de terre , fans autre altération de leurs
» principes ; ces matières exceptées, qui ne font pas
» en grand nombre , & dont les combinaifons ne pro-
» duifent pas de grandes variétés dans la nature ,
» toutes les autres fubftances , & particulièrement
» Pargille , peuvent être converties en verre , & ne
» font efïentiellement par conféquent qu'un verre dé-
» compofé. Si le feu fait changer promptement de
» forme à ces fubftances, en les vitrifiant, le verre
» lui-même , foit qu'il ait fa nature de verre , ou bien
» celle de fable & de caillou , fe change naturelle-
» ment en argille , mais par un progrès lent & infen-
» fible.
» Dans les terreins où le caillou eft la pierre domi-
» nante , les campagnes en font ordinairement jon-
» chées ; & li le lieu eft inculte , & que ces cailloux
» ayent été long-tems expofés à l'air fans avoir été
» remués , leur fuperfîcie eft toujours très-blanche ,
» tandis que le côté oppofé qui touche immédiate-
» ment la terre , eft très-brun & conferve fa couleur
» naturelle. Si on cafTe plufieurs de ces cailloux , on
» reconnoitra que la blancheur n'eft pas feulement
» au dehors , mais qu'elle pénètre dans l'intérieur
»► plus ou moins profondément , & y forme une ef-
» pcce de bande , qui n'a dans de certains cailloux
» que très-peu d'épailTeur ;mais qui dans d'autres oc-
» cupe prelque toute celle du caillou. Cette partie
» blanche eft un peu grenue , entièrement opaque ,
»> aulîi tendre que la pierre; & elle s'attache à la lan-
» gue comme les bols , tandis que le reite du caillou
» eft liffe &c poli , qu'il n'a ni fil ni grain , 6c qu'il a
» conferve fa couleur naturelle , fa tranfparence &
» fa même dureté. Si on met dans un fourneau ce mê-
» me caillou à moitié décompolé , fa partie blanche
» deviendra d'un rouge couleur de tuile , & fa par-
» tie brune d'un très-beau blanc. Qu'on ne dife point
» avec un de nos plus célèbres naturaliftes , que ces
» pierres font des cailloux imparfaits de différens
» âges , qui n'ont point encore acquis leur perfec-
» tion ; car pourquoi feroient-ils tous imparfaits ?
» pourquoi le feroient-ils tous d'un même côté , &
» du côté qui eft expofé à l'air ? il me femble qu'il eft
» ailé au contraire de fe convaincre que ce font des
» cailloux altérés , décompofés , qui tendent à repren-
» dre la forme & les propriétés de Pargille & du bol,
» dont ils ont été formés.
» Si c'eft conjecturer que de raifonner ainfi, qu'on
» expofe en plein air le caillou le plus caillou ( comme
» parle ce fameux naturalifte ) le plus dur & le plus
» noir , en moins d'une année il changera de couleur
» à la furface ; & fi on a la patience de f uivre cette ex-
» périence , on lui verra perdre infenflblement & par
» degrés fa dureté , fa tranfparence & fes autres ca-
» raderes Spécifiques , & approcher de plus en plus
» chaque jour de la nature de l'argille.
» Ce qui arrive au caillou arrive au fable ; chaque
» grain de fable peut être confidéré comme un petit
» caillou , & chaque caillou comme un amas de grains
» de Sab!e extrêmement fins & exactement engrenés.
» L'exemple du premier degré de décompolition du
» fable fe trouve dans cette poudre brillante , mais
» opaque , mica , dont nous venons de parler , & dont
» l'argille & l'ardoife font toujours parfemées ; les
» cailloux entièrement tranfparens , les quartz pro-
» duifent , en fe décompofant , des talcs gras & doux
» au toucher , auiij paitriffables & duûiles que la
h glaiiè, & vitrifiables comme elle, tels que ceux de
C A I
» Venife & de Mofcovie. Il me paroît que le talc elî
» un terme moyen entre le verre ou le caillou tranf-
» parent & l'argille ; au lieu que le caillou grofficr Si.
» impur , en fe décompofant , paffe à l'argille fans in-
» termede.
» Nous avons dit qu'on pouvoit divifer toutes les
» matières en deux grandes claffes , & par deux ca-
» racteres généraux ; les unes font vitrifiables , les
» autres font calcinables ; l'argille & le caillou , la
» marne & la pierre , peuvent être regardées corn-
» me les deux extrêmes de chacune de ces claffes ,
» dont les intervalles font remplis par la variété
» prefque infinie des mixtes , qui ont toujours pour
» bafe l'une ou l'autre de ces matières.
» Les matières de la première clafîe ne peuvent
» jamais acquérir la nature & les propriétés de cel-
» le de l'autre; la pierre quelqu'ancienne qu'on la
» fuppofe , fera toujours aufîi éloignée de la nature
» du caillou, que l'argille l'eft de la mai ne : aucun
» agent connu ne Sera jamais capable de les San e ior«-
» tir du cercle de combinaifons propres à leur natu-
» re ; les pays où il n'y a que des marbres & de la
» pierre , aufli certainement que ceux où il n'y a que
» du grès , du caillou , & du roc vif, n'auront jamais
» de la pierre ou du marbre.
» Si l'on veut obfèrver l'ordre Se la distribution
» des matières dans une colline compofée de matie-
» res vitrifiables , comme nous l'avons Sait tout à
» l'heure dans une colline compofée de matières cal-
» cinables , on trouvera ordinairement fous la pre-
» miere couche de terre végétale un lit de glaife ou
» d'argille , matière vitritiable & analogue au caillou,
» & qui n'eft , comme je l'ai dit , que du Sable vitri-
» fiable décompolé ; ou bien on trouve fous la terre
» végétale , une couche de fable vitrifîable ; ce lit
» d'argille ou de iable répond au lit de gravier qu'on
» trouve dans les collines compofées de matières cal-
» cinables ; après cette couche d'argille ou de fable ,
» on trouve quelques lits de grès , qui , le plus fou-
» vent n'ont pas plus d'un demi pié d'épaifTeur, &
» qui font divifésen petits morceaux par une infinité
» de fentes perpendiculaires , comme le moellon du
» troiiiemc lit de la colline, compofée de matières cal-
» cinables ; fous ce lit de grès on en trouve plufieurs
» autres de la même matière , &c aufli des couches
» de fable vitrifîable, & le grès devient plus dur, &
» fe trouve en plus gros blocs à mefure que l'on def-
» cend. Au-dcfîbus de ces lits de grès , en trouve une
>> matière très-dure , que j'ai appellée du roc vif, ou
» du caillou en grande majfe : c'eft une matière très-
>> dure , très-denie, & qui réfifte à la lime , au burin ,
» à tous les efprits acides , beaucoup plus que n'y ré-
» Sfre le fable vitrifîable , & même le verre en pou-
» dre , fur lefquels Feau-forte paroit avoir quelque
» prife ; cette matière frappée avec un autre corps
» dur jette des étincelles , & elle exhale une odeur
» de foufre très-pénétrante. J'ai crû devoir appeller
» cette matière du caillou en grande majje ,• il eft or-
» dinairement ftratifîé fur d'autres lits d'argille, d'ar-
» doife , de charbon de terre , de fable vitrifîable
» d'une très-grande épaifTeur, & ces lits de cailloux
» en grande majje, répondent encore aux couches de
» matière dures , & aux marbres qui fervent de bafe
» aux collines compofées de matières calcinables.
» L'eau, en coulant par les fentes perpendiculai-
» res &c en pénétrant les couches de ces fables vitri-
» fiables , de ces grès , de ces argilles , de ces ardoi-
» fes , fe charge des parties les plus fines & les plus
» homogènes de ces matières , & elle en forme plu-
» fieurs concrétions différentes , telles que les talcs,
» les amiantes , & plufieurs autres matières , qui ne
» font que des productions de ces ftillations de ma-
» tieres vitrifiables.
» Le caillou, malgré fon extrême dureté & fa gran«
C A I
5> de denfité , a auffi , comme le marbre ordinaire ck
» comme la pierre dure , Tes exudations ; d'où réful-
» tent des ftalaôites de différentes efpeces , dont les
» variétés dans la tranfparence des couleurs ck la con-
» figuration l'ont relatives à la différente nature du
»' caillou qui les produit, 6k participent auffi des dif-
» férentes matières métalliques ou hétérogènes qu'il
«^contient : le cryftal de roche , toutes les pierres
» précieufes, blanches ou colorées, & même le dia-
» mant, peuvent être regardées comme des ftala&i-
» tes de cette efpecc.
» Les cailloux en petite maffe, dont les couches font
» ordinairement concentriques , font auffi des ftalac-
» tites & des pierres parantes du caillou en grande
» maffé , & la plupart des pierres fines opaques ne
» font que des efpeces de caillou. Les matières du
» genre vitrifiable produifent, comme l'on voit, une
» auffi grande variété de concrétions , que celle du
» genre calcinable; ck ces concrétions produites par
» les cailloux , font prefque toutes des pierres dures
» 6k précieufes; au lieu que celles de la pierre calci-
» nable ne font guère que des matières tendres 6k qui
» n'ont aucune valeur ». (/)
Nous allons ajouter ici pluficurs obfervations 6k
conjectures fur le caillou , qui fe trouvent répandues
dans les opufcules minéralogiques de M. Henckel ,
êk dans le commentaire de M. Zimmermann fur ces
opufcules , ouvrages Allemands , qui n'ont jamais
paru en François; laiflant au lecteur à décider de ce
qu'elles peuvent avoir de favorable au fyftème de
M. de Buffon.
M. Henckel penfe que le caillou, dans fa première
origine, a été formé par de la marne, tonde lur ce que
la marne fans addition a la propriété de fe durcir dans
le feu , au point de donner des étincelles lorfqu'on la
frappe avec l'acier , ce qui fait une des principales
propriétés du caillou : mais il ne peut pas croire que
dans fa formation le feu doive être regardé com-
me agent extérieur. // ejl vrai , dit-il , que le caillou ejl
vitreux , ainfi qu'il ejl vifible quand il a la pureté & la
tranfparence du cryjial: mais il ne fe trouve point dans
les entrailles de la terre un feu affe~ violent pour vitrifier,
à r exception des volcans qui jettent des flammes , & dont
le feu dejlruclif n ell qri accidentel & incapable de produire
aucun être , & que d'ailleurs la nature ejl lente dans tou-
tes fes opérations: d'où l'on voit que M. de Buffon 6k
M. Henckel ont été portés l'un 6i l'autre à croire, par
l'infpc&ion du caillou , que c'étoit une matière don-
née par le feu ; mais que M. Henckel ne s'eft écarté
de cette idée , que parce qu'il ne rencontrait point
dans les entrailles de la terre un principe de vitrifi-
cation, ce que M. de Ruftbn lui accordera fort vo-
lontiers , puifqu'il remonte beaucoup plus loin pour
trouver ce principe, cv le déduit du fyftème général.
M. Zimmermann dit que fi l'on vient à cafter un
caillou , on le trouvera feuilleté & tranchant à l'en-
droit où il aura été cafté ; qU< oux font tou-
jours plus durs , plus purs , & plus tranfparens vers le
milieu ou le centre , ce qu'il appelle lé grain intérieur ,
qu'à l'enveloppe; d ce grain central fe
diftingue toujours des autres parties environnantes ,
qui font plus molles 6k moins compactes; qu'il a ren-
contré dans plufieurs caillou?, deux , trois, & même
davantage de ces grains ou centres , à cote les uns
des autres, & féparés feulement par la partie molle
& rare du caillou, de forte qu'un grand caillou à plu-
fieurs grains lui parut être un aftemblage de cailloux
petits , fondus enieinble , 6k réunis de quelque façon
que ce fût; que quand on polit les cailloux , ils de-
viennent tranfparens, mais qu'ils le deviennent en-
core plus , quand on n'en polit que les grains ; que
s'étant informé des lapidaires, s'il étoit vrai, ainfi
cju'on le difoit & qu'Henckel conleilloit de le recher-
C A I
535
cher , que le caillou contient du cryftal , ils avoierit
varié dans leur rapport , les uns Pafi'ûrant , les autres
le mant, mais tous convenant de ce qu'il vient de
dire fur le grain intérieur, 6k s'accordant à le regar-
der comme plus cryftallin que le refte du caillou; qu'il
s'enfuit cle-là , que puifqne le caillou eft tranfparent
& pur, il faut qu'il ait été dans fon principe fous une
forme liquide ; car la tranfparence fuppofe un ordre,
un arrangement, & une forte de iymmétrie dans les
parties qu'on ne peut trouver que dans un fluide ;
que le caillou étant gerfé 6k plein de crevaffes , il eft
clair que la matière en eft aigre , qualité qui vient
apparemment d'une condenfation fubke, comme on
le remarque aux larmes de verre qu'on éteint dans
l'eau, & à tous les verres qui fe refroidiffent fubite-
ment , ce qui rend en même-tems le grain intérieur
plus clair ck plus compact que l'enveloppe , parce
qu'il n'a pas été faifi ou condenfé fi promptement ;
que fi les cailloux font fi petits , c'eft une preuve nou-
velle de la promptitude du refroidifTement & de la
condenfation qui a occafionné l'effraclion ; en un
mot , que nous pouvons tenir pour certain , i°. que
le caillou a été originairement liquide : 2°. qu'il a
été faifi 6k condenfé fubitement ; d'où il fuit , félon
lui, que s'il n'eût pas été interrompu dans fa forma-
tion , il ferait devenu un corps plus pur Ô: plus par-
fait ; que la caufe de ce faififîcment ck de cette con-
denfation fubite a été tout-à-fait accidentelle , hors
de l'ordre commun , ck extraordinaire ; 6c que c'eft-
là ce qui nous rend obfcure la formation des cailloux.
Ainfi parlent deux grands obfervateurs de la natu-
re ; 6k quelle preuve M. de Buffon n'en auroit-il pas
tirée en faveur de fon fyfteme du monde , fi ces
autorités lui avoient été connues ?
Voilà ce que les Naturaliftes penfent du caillou ;
voici maintenant le fentiment des Chimiftes fur la
même fubftance. Le caillou eft une pierre qui eft
dans la claffe des terres ou pierres vitrifiables , non
pas qu'il fe vitrifie tout feul êk fans addition , mais
il faut pour cela qu'il foit mêlé avec fuffifante quan-
tité de Ici alkali. A 'oyerj 'article CRYSTAL FACTICE.
Un de^ caractères diftinôifs du caillou , eft de faire
feu lorfqu'il eft frappé avec l'acier; M. Cramer dit
que fi on regarde avec le microfeope les étincelles
que l'acier en fait partir, on les trouvera tout-à-fait
femblables à des feories de fer mêlées d'un peu de
ce métal & de caillou vitrifié. On trouve par l'exa-
men du feu de la différence entre les cailloux ; il y
en a qui n'entrent que très -difficilement en fufion
au feu de réverbère , tandis que d'autres fe fondent
affez facilement : mais ce n'eft jamais que par l'ad-
dition de plus ou de moins de fel alkali. Cependant
M. Henckel parle , dans fes opufcules minéralogi-
ques , d'une efpece de caillou qui lui fut envoyé, qui
entroit en fufion fans aucune addition , ck formoit
en fondant une mafte noire. Il allure la même chofe
d'une forte de pierre à fufil qui le trouve, quoique
rarement, dans des couches de terre argilletrfe près
de Waldenburg. Le fable ne doit être regardé que
comme un amas de petits cailloux, auffi en a-t-il
toutes les propriétés. Voye^ l'article ACIER.
Les cailloux ont bien des formes ck couleurs
rente : les M incs font regardés comme les meilleurs
dans l'ufage de la verrerie. Les taches ou veines rou-
ges qu'on y remarque , ne font autre choie que du
ter qui s'y eft attaché extérieurement ; mais lorl-
qu'on veut les employer dans l'art de la verrerie, il
tant avoir foin d'en féparer la partie métallique, de
peur qu'elle ne donne une couleur au verre.
M. Henckel dit avoir trouve dos cailloux de ri-
vière qui devenoient plus pefans au fou ; fur quoi
fon commentateur remarque que li le tait étoit bien
prou\ é , ce ferait un triomphe pour ceux qui , com-
me Boyle , penfent que les particules ignées ont eu
J3<5
C A I
poids, & doivent par conféquent augmenter celai
des corps où elles entrent.
Bêcher le vante d'avoir réduit les cailloux en une
fubftance gradffe , huileufe , & mucilagineufe , fem-
blable à de la gelée , 6c qui pouvoit le pétrir com-
me de la cire , en les railant rougir au feu, & en en
raiiant l'extinction dans l'eau. Le même auteur pré-
tend tirer de cette liqueur un fel verd & une huile
rougeâtre , qui a , félon lui , la propriété de précipi-
ter le mercure , & de le fixer en partie beaucoup
mieux que ne peut faire l'huile de vitriol. Mais ces
grandes promenés ont bien l'air d'être du genre mer-
veilleux de celles que tous les Alchimift.es affectent
de- faire fans jamais les tenir.
Si on mêle deux ou trois parties de fel de tartre avec
une partie de caillou bien pulverifé , qu'on mette
ce mélange dans une cornue tubulée toute rouge , il
fe fait une eiïèrvefcence très-confidérable, & il parle
à la diftillation un efprit acide, d'une odeur fulphu-
reufe; c'eft ce qu'on appelle liquorfrficum, ou liqueur
de caillou ; les Alchimiltes lui ont attribué des ver-
tus tout extraordinaires, & l'ont même regardée com-
me le vrai alkaheft ou difiblvant univeriel. Glauber
va plus loin , 6c dit qu'en y mettant en digeftion des
métaux difibus , il fe formera des végétations métal-
liques.
M. Lemery donne une autre manière de faire le
liquor filicum , c'eft de mêler 4 onces de cailloux cal-
cuves éc réduits en une poudre impalpable, avec 24
onces de cendre gvavelée , de vitrifier ce mélange
dans un creufet , 6c lorfque la vitrification eft faite,
de mettre ce verre à la fraîcheur de la cave où il fe
réfout en eau. Si on môle à cette eau une dofe égale
de quelque acide corrolif, il fe formera une efpece
de pierre. (— )
CAIMACAN ou CAIMACAM , f. m. (Hifi. mod.)
dignité dans l'empire Ottoman qui répond à celle de
lieutenant ou de vicaire parmi nous.
Ce mot eft compolc de deux mots Arabes , qui font
caim maçhum , celui qui tient ia place d'un autre , qui
s'acquite de la fonction d'un autre.
Il y a pour l'ordinaire deux caimacans : l'un réfide
à Conftantinople , dont il eft gouverneur ; l'autre ac-
compagne toujours ie grand- vilir en qualité de lieu-
tenant. Quelquefois il y en a trois, dont l'un ne quitte
jamais le grand-ièigneur, l'autre le grand-vifir, & le
troifieme réfide à Confrantinople, où il examine tou-
tes les affaires de police & les règle en partie.
Le caimacan qui accompagne le grand-vifir n'exer-
ce fa fonction que quand il eft éloigné du grand-fei-
gneur , & fa fonction demeure fuipendue quand le
vifir eft auprès du fultan. Le caimacan du vifir eft
comme fon fecrétaire d'état , & le premier miniftre
de ion confeil.
Un auteur moderne , qui après beaucoup d'autres
a écrit fur le gouvernement des Turcs , parle ainii du
caimacan : « Le caim.ican eft proprement le gouver-
» neur de la ville de Conftantinople ; il a rang après
» les vifirs , &c fon pouvoir égale celui des bâchas
» dans leurs gouvernemens ; cependant il ne peut
» rien ftatuer par rapport à l'adminiftration de la juf-
» tice ou le règlement civil , fans un mandement du
» vifir.
» Si ce miniftre eft engagé dans quelqu'expédition
» militaire , & que le grand-feigneur loit refté au fé-
» rail , ce prince nomme toujours un des vifirs du
» kubbe ou un bâcha à trois queues, rekiafkaimacqn,
» c'eft-à-dire , député pour tenir l'émcr. Le vifir azem
» ne fait donner cette charge qu'à une de fes créafu-
» res, de peur qu'un autre abufant du privilège de fa
» place , qui veut qu'en l'abience du premier minif-
» tre le caimacan ne cpiitte jamais la hauteffe, ne pro-
» fite de la conjoncture pour le fupplanter.
» Cet officier eft chargé, dans l'abience du vifir,
C A ï
» de toutes les affaires qui regardent le gouverne-
» ment, & que le vifir décideroit s'il étoit prêtent :
» mais il ne peut pas créer de nouveaux bâchas, ni
» dégrader ceux qui le iont , ou en mettre aucun à
» mort. Dès que le premier miniftre eft de retour ,
» le pouvoir du caimacan ceile. Il n'a nulle autorité
» dans les viiies de Conftantinople & d'Andrinople ,
» tant que le fultan y eft préfent : mais il ce prince
» s'en abiente feulement huit heures , l'autorité du
» caimacan commence , & va prefque de pair avec
» celle du fouverain ». Guer, Moeurs des Turcs , to-
me II. (G)
* CAÏMAN , fub. m. (Hifi. nat. Lith.) pierre que
l'on apportoit, fuivant quelques auteurs , des Indes
orientales , & fur-tout de Carthagene 6c de Nombre
de Dios. On prétend qu'elle reflemble au caillou des
rivières ; qu'elle fe trouve dans i'eftomac des grands
crocodiles appelles caimans, 61 que les Indiens ôc les
Efpagnols la recherchent avec loin comme un remè-
de aiïïiré contre la fièvre quarte ; il faut en appliquer
une à chaque tempe. Fojez Crocodile.
Caïman ou Caymanes , {Géog.) île de l'Amé-
rique , dans ie golfe de Mexique ; il y a encore une
île de ce nom au même endroit, qu'on appelle le petit
Caïman.
CAINITES ou CAIANIENS , f. m. pi. {Hifi. ecclef)
nom d'anciens hérétiques qui rendoient un honneur
extraordinaire aux perfonnes que l'Écriture nous re-
prélente comme les plus méchans de tous les hom-
mes. Ils ont été ainfi appelles de Caïn, qu'ils regar-
doient comme leur pere : c'étoit une branche de Gnof-
tiques, qui foûtenoient des erreurs monftrueufes: ils
prétendoient que Caïn 6c même Eiaii , Lot & ceux
de Sodome, étoient nés d'une vertu celefte très-puif>
faute; & qu'A bel au contraire étoit né d'une vertu
fort inférieure à la première. Us afibeioient à Caïn
&aux autres du même ordre Judas, qui avoit eu fé-
lon eux, une grande connoifiance de toutes chofes;
6c ils en faiibient une fi grande eftime , qu'ils avoient
un ouvrage fous fon nom, intitulé Y évangile de Judas.
S. Epiphane a rapporté & réfuté en même tems leurs
erreurs, dont les principales étoient : que l'ancienne
ici n'étoit pas bonne , & qu'il n'y auroit point de ré-
iurreûion. Ils exhortoient les hommes à détruire les
ouvrages du Créateur , & à commettre toutes fortes
de crimes , perfuadés que les mauvaifes aérions con-
duifoient au falut. Ils invoquoient même les anges
à chaque crime qu'ils commettoient , parce qu'ils
croyoient qu'il y avoit un ange qui ainitoit à chaque
péché & à chaque action honteufe, & qui aidoit à
la faire. Enfin ils faifoient confifter la fouveraine per-
fection à dépouiller tellement toute honte & tous
remords , qu'on commît publiquement les aérions les
plus brutales. Ils erroient aufii furie baptême, com-
me il paroît par Tertullien ; 6c la plupart de leurs opi-
nions étoient contenues dans un livre qu'ils avoient
compoié fous le titre d'afeenfon de S. Paul, où fous
prétexte des révélations faites à cet apôtre dans fon
ravifiement au ciel , ils débitoient leurs impietés &
leurs blafphcrnes. Dupin, biblioth. des auteurs ecclef.
tom. II. Fieury , lùfi. ecclef. tom. I. liv. iij. {G)
CAINITO , f. m. {Hifi. nat. bot.) genre de plante
à fleur monopétale, en cloche ouverte &c découpée :
il s'élève du calice un piftil qui devient dans la fuite
un fruit mou, charnu, rond, ou de la forme d'une
olive , contenant un ou plufieurs noyaux qui renfer-
ment chacun une amande. Plumier, Nova plantar.
Amer, gênera, l'oye^ Plante. (/)
CAJOLER., v. n. {Marine.) c'eft mener un vaif-
feau contre le vent à la faveur du courant: on ie iert
auffi de ce terme pour dire , faire de petites :
ou attendre fans voile , en iaiiant peu de route.
CAIRE, (le) Géog. grande ville d'Africjue, capi-
tale de l'Egypte ; elle pafle pour l'une des plus eoniî-
d. râbles
C A I
dcrab'es de h domination desTurcs : elle eft furla rive
orientale du Nil. Lon. 49*. 6'. là", lat. 3 od. 2'. 30".
CAIROAN , ( Géog. ) vilie d'Afrique , au royau-
me de Tunis. Lon. zg. lat. Ji. 40.
CAISSE, f. f. du latin capja, coffre ou boîte , fe
dit au propre d'un coffre de planches de bois de la-
pin, affemblées avec des clous, ou des traverses
clouées ou autrement, & dcffinées à renfermer des
marchandées, foit pour les conferver, foit pour les
tranlporter : le nom de caijfe a pris, par analogie , un
grand nombre d'autres acceptions , comme on va
voir à la iuite de cet article.
Caisse , terme d 'Architecture , c'eft dans chaque in-
tervalle des modillons du plafond de la corniche co-
rinthienne , un renforcement quarré qui rcnterme
une rôle. Ces renforcemens qu'on nomme auffi pan-
neaux ou cajjettes , font de divcrfes figures dans les
compartimens des voûtes 6c plafonds. (/*)
Caisse , ( Lutherie. ) c'eft une machine ou inftru-
ment de guerre, de la groffeur d'un minot, couvert
à chaque bout d'une peau de veau, qui rend union
vraiment martial en battant fur l'une de ces peaux
.avec deux baguettes de bois faites exprès. Ce fon
eft plus ou moins fort , félon que les peaux font plus
ou moins étendues par le moyen de plulieurs corda-
ges qui fe refferrent avec de petits tirets, ou des oreil-
les de cuir qui les environnent , & (elon que le tim-
bre , qui n'eft autre choie qu'une corde qui traverfe
la peau de deffous, eft plus ou moins tendu. Voye^
TAMBOUR & le* Planches de Lutherie.
CAISSE defufées ; les Artificiers appellent ainfi un
coffre cie planches , long 6c étroit , en quarré fur fa
longueur , & polé verticalement , dans lequel on en-
ferme une grande quantité de fuites volantes , lors-
qu'on veut faire partir en même tems & former en
l'air une figure de feu femblable à une gerbe de blé,
qu'on appelle pour la même railon gerbe de feu.
Caijfe aérienne, c'eft une efpece de balon qui ren-
ferme beaucoup d'artifice de petites fufées.
Caisse à fable , eft un coffre de bois de quatre pies
de long , de deux de large, & de dix pouces environ
de profondeur, foûtenuà hauteur d'appui par quatre
pies. C'eft dans cette caijfe qu'eft contenu le fable
dont on forme les moules , 6c qu'on le corroyé. Voye^
l'article FONDEUR EN SABLE, & lajig. 14. Plan, du
Fondeur en fable.
Caisse, à la Monnoie, fe prend à peu-près dans
le même lens que chez le Fondeur en fable.
Caisse , {Jardinage.) vaiffeau quarré fait de plan-
ches de chêne clouées fur quatre piliers du même bois,
qui lert à renfermer les orangers , les jalmins , & au-
tres aibres de fleur.
Pour faire durer les caijfes , on les peint par dehors
de deux couches à l'huile , foit de blanc , foit de verd ,
& on les goudronne en-dedans. Les grandes font fer-
rées. Les petites caiffes fe tont de douves fortant des
tonneaux : les moyennes , de mairain ou panneau : les
grandes, de chevrons de chêne , avec de gros ais de
chêne attachés deffus, garnies d'équerres & de liens
de fer. (A)
Caisse, en terme de Rafineur defucre, c'eft un pe-
tit coffret de bois plus long que large , lur le derrière
duquel il y a un rebord plus élevé que le refte , & à
gauche une traverfe d'environ deux pouces de hau-
teur 6c d'un pouce & demi d'épaiffeur. Le rebord em-
pêche le lucre que l'on gratte de tomber par terre ,
6c la tra\ erfe lert à foùtenir la l'orme que l'on gratte
furla caijfe. Voye^ Gratter.
Caisse des marches , ( Manufacture de foie. )
efpece de coffret percé de part en part, & qui re-
çoit le boulon qui enfile les marches. On le charge
d'un poids considérable pour leftcr les marches ar-
rêtées. Cette façon d'arrêter les marches dans la caijfe
eft la meilleure; parce qu'on peut avancer ou recu-
Tome IL.
C A I
537
1er le poids félon le befoin : mais il n'en eft pas de
même quand le boulon eft arrêté à de gros pitons
fichés dans le plancher.
Caisse, (Commerce.*) efpece de vaiffeau ou coffre
fait de menues planches de lapin, ou autre bois lé-
ger, jointes enfemble par des clous ou des chevilles
de bois , & propre à tranlporter des marchandifes plus
facilement fans les gâter ou corrompre. On dit une
caijje d'étojjes , de toiles , d'oranges , de vins étrangers ,
&c.
Caijfe emballée , eft une caijfe pleine de marchandi-
fes, entourée de paille , 6c couverte d'une grofi'e toi*
le qu'on nomme balle ou emballage, foye^ Balle &
Emballage.
Caijje cordé-- , eft une caijfe qui n'a point d'embal-
lage, 6c qui eft feulement liée par delius avec de la
corde de diftance en diftance, pour empêcher les
planches de s'écarter
Caijje ficelée & plombée, eft celle que les commis
de la doitane ont fait emballer & corder en leur pré-
fence, après avoir fait payer les droits néceffaircs, 6c
qu'ils ont fait noiier autour du nœud de la corde
d'une ficelle dans laquelle eft un plomb marqué deffus
6c deffous des coins du bureau. Ces iortes de caiffes
ne doivent être ouvertes qu'au dernier bureau de la
route, fuivant l'ordonnance de 1687.
CAISSE, (Commerce.) lignifie aulïl une efpece de
coffre fort tout de fer , ou de bois de chêne garni de
bonnes barres de fer, & d'une ou de plufieurs fer-
rures, qui ordinairement ont des reflorts qui ne lont
connus que de ceux à qui la caijje appartient.
C'eft dans ces iortes de caijfes que les marchands
Négocians & Banquiers enferment leur argent comp-
tant 6c leurs principaux effets de petit volume , com-
me lettres & billets de change, promeffes, lingots
d'or, &c.
On entend auffi par le mot de caijfe le cabinet du
Caiffier, où eft la caijfe ou coffre-fort , & où il fait fa
recette 6c fes payemens. Voye^x Caissier.
On appelle livre de caijje , une forte de livre qui
contient en débit & crédit tout ce qui entre d'argent
dans la caijje, & tout ce qui en fort. Ce livre eft le
plus important de tous ceux que les Négocians nom-
ment livres auxiliaires.
Caisse fe dit de tout l'argent qu'un marchand Né-
gociant ou Banquier peut avoir à fa dilpolition pour
négocier: on dit en ce fens que la caijfe d'un tel Ban-
quier eft de cent mille écus , de huit cent mille livres,
&c. M. Savary , dans fon parfait Négociant, II. part*
liv. L. chap. iv. donne d'excellentes maximes pour le
bon gouvernement d'une coiffe, i oy .--les dans cet ou-
vrage ou dans le Diclionn. du commerce, tom. IL.pag.
33-34-&3à-
Caisse de crédit, c'eft une caijfe établie en faveur
des Marchands forains , qui amènent à Paris des vins
& autres boifîbns.
Le premier établiffement de cette caijfe eft du mois
de Septembre 1719. L'Edit porte: « que les Mar-
» chands forains 6c autres pourront y recevoir fur le
» champ le prix de leurs vins K boiffons, & y pren-
<• die crédit moyennant lix deniers pour livres ». On
peut voir ce qui concerne la police & l'adminiftration
de cette coiffe dans le Diclionn. du commerce, tom. II.
pag. 36.
Caissi des cwpmnts, nom qu'on a donné en France
a une caijfe publique établie à Paris dans l'hôtel des
Ici mes unies du Roi, où toutes fortes de perfonnes de
quelque qualité ou condition qu'ils lullent , tant Fran-
çois qu'étrangers, étoient reçus à porter leur argent
pour le faire valoir, 6c d'où ils pouvoient le retirer
à l'échéance des promeffes folidaires que les Fermiers
généraux de la Miellé leur en fourniffoient, lignées
de quatre de la compagnie prépolés à cet effet.
Ces Iortes de promeffes dont le nom de celui qui
Vyy
533
C A I
en avoit payé la valeur refloit en blanc , étoient faî-
tes payables au porteur dans un an , & les intérêts
qui y étoient compris pour Tannée, ne le payoient
qu'à leur échéance , lbit en les renouvellant , foit en
retirant fon capital.
Cette caifjé avoit d'abord été établie en 1673 , &
fut fupprimée vers la fin du même liecle : elle tut ré-
tablie en 1702 > & les intérêts réglés à huit pour cent
par an. Mais les promefTes qu'on nommoit billets de la
caiffe des emprunts, s'étant prodigieusement multi-
pliés pendant la guerre finie en 171 3 , on prit alors
divers moyens de les rembourfer : ils furent enluite
convertis en billets de l'état en 171 5 , & enfin retirés
du commerce par différentes voyes qu'explique l'au-
teur du Dïàïonn. du commerce, tom. II. pag. 38. &
39- (G)
* Selon M. le Pr. Henault ( Abrégé de CHifi. deFr.)
ces billets furent introduits en 1707, M. de Cha-
millard étant controlleur général des finances.
CAISSETIN , f. m. c 'efl ainii qu'on appelle dans
les Manufactures d'' ouvrages en J'oie , une petite armoire
en forme de caiffe , de trois pies de longueur , d'un
demi-pié de large , à plulieurs étages , dans lelquels
l'ouvrier range les dorures ôc les foies qu'il em-
ployé.
CAISSETINS , (Commerce.*) petites caiffes de fa-
pin plus longues que larges , dans lefquelles on en-
voyé de Provence les raifins en grappes féchés au
foleil , qu'on appelle raijins aux jubis. foye^ Rai-
sins aux jubis. (G)
CAISSIER., f. m. (Commerce & Finance.) efl celui
qui tient un état des revenus & des deniers d'une
compagnie , & en rend compte. Voye^ Receveur ,
Tkrésorier.
Savary le définit celui qui garde l'argent d'une
compagnie ou d'un banquier, négociant , &c. & qui
efl chargé de recevoir & de payer. (G)
CAISSON , f. m. diminutif de caife, petite caiffe
dans laquelle on envoyé des marchandilés. (G)
Caisson, efl aufîi un charriot couvert dont on
fe lert pour voiturer le pain de munition à l'armée.
Caisson de bombes, (Artillerie.) efl une tonne
ou une cuve qu'on emplit de bombes chargées ; on
l'enterre jufqu'au niveau du rez-de-chauffée , en l'in-
clinant un peu de côté , & répandant beaucoup de
poudre de guerre deffus : on y met le feu par le moyen
d'un fauciffon qui répond au fond de ce caij/bn ; il
fait élever les bombes en l'air du côté que le caiffon
efl incliné. Cette invention n'eîl plus guère d'ufage ;
on y a fubilitué les fougaces, qui produifent de plus
grands effets. Voye{ FouGACE. ( Q )
Caissons , f. m. pi. ( Marine. ) on nomme ainfi
les coffres qui font attachés fur le revers de l'arriére
d'un vaiffeau. (Z)
C AITHNESS , ( Géog. ) province au nord de l'E-
cofîé.
* CAJUMANIS , ( Hift. nat. bot. ) on appelle de
ce nom une efpece'de canellier fauvage qui croît
dans les Indes orientales , fur le côtes duSunde.
CAIL'S, (Hijt. anc. ) nom propre , mais en gé-
néral & fans addition employé par les Romains pour
fignifîer un homme , de même que Cala fignifioit une
femme. Ils exprimoient le premier de ces mots par
la lettre C toute feule , dans fa polition naturelle , &
le fécond par la même lettre, mais renverfée j.
Quintilien rapporte que dans les époufailles & fêtes
nuptiales, on faifoit mention de Caïus & de Caïa;
ce que Plutarque confirme lorfqu'il dit ; « Pourquoi
» ceux qui conduifoient la nouvelle époufe en la
» maifon du mari, lui font-ils prononcer ces mots :
» uki tu Caïus , & ego Cala }qÙ tu feras Caïus , je fe-
» rai aujfi Cala ? linon pour marquer qu'elle y entre
» à cette condition , d'avoir part aux biens & au gou-
>» vernement de la famille , 6c que Caïus étant mai-
CAL
» tre , Caïa doit être aufll maîtrene ». D'où il s'en-
fuit que les noms Caïus & Caïa dans cette cérémonie ,
équivaloient à ceux de pater familias , ck de mater
familias ; père & mère de famille. (G)
CAJUTES, f. f. pi. (Marine.) on appelle ainfi
les lits des vaiffeaux qui font emboîtés autour du na-
vire ; on les appelle aufîi cabanes. Voye^ Cabane.
(Z) , s
CAKET, (Géog.) ville & petit royaume d'Afie ,
dépendant du roi de Perle , prés du Caucafe. Long.
63.60. lut. 43.32.
CAKETA , ( Géog. ) grande rivière de l'Améri-
que méridionale , qui prend fa fource dans la nou-
velle Grenade.
CAKILE , f. f. ( Hif}.. nat. bot. ) genre de plante à
fleur en croix ; le piflil fort d'un calice , & devient
dans la fuite un fruit femblable en quelque façon à
la pointe d'une pique , & compolé de deux parties
qui font jointes enfemble par une forte d'articula-
tion , & qui renferment une femence finguliere , &
ordinairement oblongue. Tournefort , Irijt, ni heii.
cor. foyei Plante. ( / )
C ALAA , ( Géog. ) ville d'Afrique au royaume de
Tremecen. Long. iz. 30. lat. 31. 10.
CALABA , f. m. (Hift- nat. bot. ) genre de plante
à fleur en rôle, compoiée deplufieurs pétales difpo-
lés en rond; ii s'élève du fond du calice un piftil ,
qui devient dans la fuite un fruit fphérique , charnu,
qui renferme un noyau ou une femence de la même
forme , dans laquelle il y a une amande aufîi de la
fiiême figure. Plumier , nova plant. Amer. gen. Voye^
Plante. (/)
* Il fort de fon tronc & de fes branches une gom-
me claire , à peu près femblable au maftic , dont
elle porte le nom, & auquel on la fubftitue quel-
quefois.
CALABRE , ( la ) Géog. province d'Italie dans
la partie méridionale du royaume de Naples , avec
titre de duché. On la divifê en citérieure &C ulté-
rieure.
Calabre, ( la merde ) s'appelloit anciennement
mare Aufonium. C'efl celle qui baigne les côtes de
la Calabre.
* CALABRISME , f. m. (Hifl. anc. ) nom d'une
danfe des anciens, dont nous ne connoilfons rien de
plus .
CALACIA , ( Géog. ) ville d'Afie dans la Tarta-
rie , au royaume de Tanguth.
CALACOROLY , ( Géog. ) royaume d'Afrique
dans la Nigritie , au nord de la rivière de Saint-Do-
mins;'o.
* C ALADARIS , f. f. toile de coton rayée de rou-
ge ou de noir, qu'on apporte des Indes orientales,
fur-tout de Bengale. La pièce a huit aunes de long,
fur j d'une aune de large.
C A L A D E , ( Marech. ) efl la même chofe que
baffe. Voyei BASSE. ( V)
CALA-DUCIRA , ( Géog. ) ville & port de l'île
de Gozo , dans la mer Méditerranée.
CALAF , ( Géog. ) petite ville d'Efpagne dans la
province de Catalogne.
CALAFIGUER , ( Géog.) ville & port de la côte
méridionale de l'île de Majorque.
CALAFUSUNG, (Gc^.) grande ville d'Afiedans
l'île de Buton , l'une des Moluques.
CALAH , ( Géog. ) île de la mer des Indes , près
de la ligne équinoctiale.
CALAHORRA, ( Géog. ) ville d'Efpagne dans la
vieille Caflille. Long. i5. 48. lat. 42. 12.
CALAJATE, ( Géog. ) ville ruinée d'Afie , dans
l'Arabie heureufe , vers le golfe Perfique.
CALAIS , (Géog. ) ville fortifiée de France dans
la Picardie , fur le bord de la mer. Long. i<)A, 30'.
â6".lat.5oA.âf.3i">
CAL
Calais , ( lt pas de ) on nomme ainfi la partie la
plus étroite de la Manche ou du canal qui fépare la
France de l'Angleterre.
Calais, (Saint-) Géog. petite ville de France
dans le Maine.
C ALALOU , ( Hijl. mod. ) ragoût que préparent
les dames Créoles en Amérique ; c'eft un compote
d'herbes potagères du pays, comme choux caraïbes,
goment , gombaux & force piment : le tout foigneu-
ièment cuit avec une bonne volaille, un peu de bœuf
falé ou du jambon. Si c'eft en maigre, on y met des
crabes , du poiflon , & quelquefois de la morue lè-
chc. Le calalou paffe pour un mets fort fain & très-
nourriffant ; on le mange avec une pâte nommée ouan-
gou , qui tient lieu de pain.
CALAMA , (Géog.) ville d'Afrique au royaume
d'Alger fur la Malvia.
CALAMALA, (Géog.) ville d'Europe dans la
Morée, fur la rivière de Spinarza.Zo/20'. J^. ^3. lut.
37-8.
* CALAMBOURG , ( Comm. ) bois odoriférant
dont la couleur tire fur le verd : il diffère du calam-
bouc qui vient de la Chine, & qu'on fubftitue au bois
d'aloès. On l'apporte des Indes en bûches. On l'em-
ployé en ouvrages de tabletterie , & dans les bains
de propreté.
CALAMENT , f. m. ( Hifl. nat. bot. ) calamintha ,
genre de plante à fleur monopétale labiée , dont la
levre fupérieure eft échancrée , arrondie , & relevée ;
& l'inférieure eft divifée en trois parties : il fortdu ca-
lice un pifKl, qui eft attaché comme un clou à la partie
poftérieure de la fleur , &c qui eft environné de qua-
tre embryons , qui deviennent dans la fuite autant
de femences arrondies &£ renfermées dans la capfule
qui a fervi de calice à la fleur. Ajoutez aux caractè-
res de ce genre , que les fleurs naiffent dans les ail-
felles des feuilles, & tiennent à des pédicules bran-
chus. Tournefort, Injî. rei herb. Voy. Plante. ( /)
Le calamintha vulgaris ojfîcinarum , eft plein d'un
Ici aromatique , volatil , huileux ; il eft ftomachique,
diurétique, apéritif, & provoque les règles: on peut
s'en iervir comme du thé : fa décoction en clyftere
calme les douleurs de la colique , réfout les tumeurs
cedémateufes, & fortifie les parties. Tournefort. ( N)
CALAMIANES, (Géog.) île d'Alîe dans la mer
des Indes , entre celle de Bornéo & les Philippines.
CALAMINE, ou PIERRE CALAMINAIRE,f. f.
( Minéral. & Metall. ) en Latin calamités , mais plus
communément lapis calaminaris , cadmia nativa, ou
cadmia fojjïlis , cadmie foffile , pour la diftinguer de
la cadmie des fourneaux. C'eft une pierre ou terre,
qui mêlée au cuivre par le moyen de la partie inflam-
mable du charbon , produit un mixte métallique ,
qu'on appelle cuivre jaune , ou laiton.
Cette pierre le trouve en plufieurs endroits de
l'Europe, comme en Allemagne, en Bohème, en
Hongrie , en Pologne, en Efpagne, en Angleterre ;
il s'en trouve en Berry : le pays de Liège & les envi-
rons d'Aix-la-Chapelle en fourniffent une grande
quantité.
M. Hcnckel dit , dans fa Pyritologie , que la cala-
mine le trouve ordinairement dans des terres grafles
& argilleufes : il n'eft pas befoin pour cela de creu-
fer bien avant , attendu qu'elle fe préfente très-fou-
vent aufîi-tôt qu'on a levé la première couche ; il ar-
rive même quelquefois qu'elle forme elle-même
cette première couche. On la trouve aulïï mêlée à
des mines métalliques , & fur-tout à des mines de
plomb , comme on peut le voir dans celles de Gofiar
cv d'Angleterre.
La calamine eft ordinairement d'une figure irrégu-
liere : elle ne laiffe pas aufti de varier dans fa cou-
leur ; tantôt elle eft d'un beau jaune de couleur d'or;
tantôt elle cil brime ; quelquefois elle tire furie rou-
Tornc II,
CAL
539
ge : celle de Berry eft de cette dernière couleur.
Celle qui eft pefante & compacte , eft préférable
à celle qui eft légère & fpongieufe ; & celle qui eft
entremêlée de veines blanches , paffe pour la meil-
leure. L'inconvénient de celle d'Angleterre eft d'être
mêlée avec beaucoup de plomb; c'eft pour cela
qu'on eft obligé de lui donner bien des préparations
avant de l'employer à faire du laiton , parce que le
plomb ne vaudrait rien dans cette opération.
La calamine contient la terre qui fert de bafe au
zinc volatil & inflammable, & à ce qu'on appelle la
cadmie des fourneaux : on juge de fa bonté par l'abon-
dance de zinc qui y eft contenu , & par le plus ou le
moins de mélange qui s'y trouve d'autres terres limo-
neufes ou ferrugineufes qui lui font tout-à-fait étran-
gères. On confond quelquefois mal à propos avec la
pierre calaminaire beaucoup d'autres minéraux qui
lui refTemblent à l'extérieur. Agricolal'a confondue
avec une mauvaife efpece de mine de cobalt tres-
arlénical , qu'on nomme en Allemand fiiegenflein ,
pierre aux mouches: mais la marque diftinctive de la
pierre calaminaire , c'eft de jaunir le cuivre de rofette,
& de contenir du zinc. La règle de M. Marggraf , la-
vant chimifte de l'Académie de Berlin , eft que « tou-
» te pierre qui mêlée avec des charbons, &qui ex-
» pofée à l'action la plus véhémente d'un feu renfer-
» mé, ne produit point de zinc , ou qui à un feu dé-
» couvert ne compofe point le laiton lorfqu'elle eft
» mêlée avec le cuivre & le charbon , n'eft point
» une pierre calaminaire ».
Il y a néanmoins du choix à faire entre les diffé-
rentes efpeces de pierres calaminaires : en effet , il
s'en trouve quelques-unes qui augmentent plus,
d'autres moins, le cuivre , lorfqu'on en fait du laiton.
Voye^ l'article Cuivre. Il y en a qui lui donnent
une couleur plus ou moins belle , le rendent plus ou
moins malléable , lorfque la calamine fe trouve mê-
lée à du plomb ; comme cela eft ordinaire à celle
de la province de Sommerfet en Angleterre ; ou à
du fer , comme il arrive à celle de Bohème & à celle
du Berry. Il n'eft point douteux que ces efpeces ne
rendent le cuivre fragile & caftant , à moins qu'on
ne prévienne ces mauvais effets par des torréfac-
tions réitérées avant de mêler la calamine au cuivre ,
tandis qu'il s'en trouve d'autre qui peut être em-
ployée tout de fuite fans aucune préparation anté-
rieure. Ce ferait donc fe tromper que d'attendre les
mêmes effets de toutes fortes de pierres calaminaires.
M. Henckel oblèrve qu'un des phénomènes les
plus remarquables de la Chimie , c'eft la façon dont
la calamine, qui eft une terre, s'unit & s'incorpore
avec le cuivre qui eft un métal , fans lui ôter fa mal-
léabilité. Il conclut de là qu'il y a des terres qui ont
la faculté de fe métallifer. En effet, du laiton où l'on
aura fait entrer un tiers de pierre calaminaire, le laiffe
travailler avec autant de facilité que le cuivre de
rofette le plus pur & le plus fin ; il faut pour cela que
l'union qui fe fait par ce mélange foit bien intime
Se toute particulière , furtout attendu qu'il eft poffi-
ble de féparer enfuite la calamine du cuivre , fans
qu'il arrive aucun changement à ce métal.
Le rapport qui le trouve entre la calamine & le
zinc , lui a fait donner par Giauber le nom de cad-
mie fufible : en effet , comme on a dit , toute bonne
pierre calaminaire contient du zinc , & doit être re-
gardée comme la minière de ce demi-métal, M. Henc-
kel a oblervé que la calamine de Bohème contient
une petite quantité de mauvais fer : elle fe trouve
mêlée à des pyrites ferrugineufes appellées en Alle-
mand eifenflein ; on peut en tirer du vitriol de Mars ,
& on la trouve jointe à de l'alun. Ce lavant Minera-
logifte ne doute point qu'il n'en loit de même de tou-
tes les pierres calaminaires.
La calamine reffemble en quatre points à la cadmit
Y y y ij
540
CAL
des fourneaux: i°. elle contient du zinc comme elle ;
°. elle jaunit comme elle le cuivre de rofette ; 30.
elles ont toutes deux pour bafe une terre alkaline ;
40. elles font toutes deux effervefcence avec les
acides.
La grande volatilité des fleurs de la calamine , &
l'odeur qui s'en élevé , donnent lieu de croire que
cette pierre eft ordinairement mêlée d'arfenic ; fa
promptitude à s'enflammer fur les charbons ou avec
le nitre , eft une marque qu'elle contient beaucoup
de parties inflammables ou de phlogiftique. C'eft à
la même raifon qu'il faut attribuer fa prompte & vé-
hémente folution dans les acides , fa concrétion avec
le cuivre , & les autres phénomènes qu'on y remar-
que. y<yye[ à l'article Cuivre la manière de l'exploi-
ter , & de l'employer à la fonte du cuivre de rofette.
La calamine eft quelquefois ufitée extérieurement
dans la Médecine : on lui attribue la propriété d'ê-
tre aftringente , & de fécher & cicatrifer les plaies
& les ulcères : mais il faut pour cela la bien dégager
de toute partie arfénicale. Ce que les apothicaires
nomment calamine préparée , n'eft autre chofe que
cette pierre bien broyée & formée en trochifques
avec de l'eau-rofe. (— )
C ALAMITA , ( Géog. ) rivière d'Afie dans la Tar-
tarie-Crimée , qui fe jette dans la mer Noire.
• CALAMITE , adj. ( Mat. med. ) épithete que l'on
d Jnne quelquefois au ftyrax , à caufe qu'on le met-
toit autrefois dans des rofeaux appelles calami pour
le conferver. Vo$ rqr Styrax. (A7)
C ALAMO , (Géog.) rivière de la Grèce qui prend
fa fource dans l'Albanie, & fe jette dans la mer, vis-
à-vis de l'île de Corfou.
Calamo , ( Géog. ) île de l'Archipel autrefois ap-
pellée Claros , près de la côte d'Afie.
CALAMUS AROMATICi/S, (Hift. nat. bot.)
genre de plante à fleur fans pétales : elle eft compo-
iée de fix étamines foûtenues par un calice de fix
pièces. Il fort du milieu de ce calice un piftil , qui de-
vient dans la fuite un fruit divifé en trois loges , &
rempli de femences oblongues. Ajoutez aux caractè-
res de ce genre, que les fleurs forment un épi coni-
que reflemblant à celui du poivre -long. Micheli ,
Nova plant, gen. Voye{ PLANTE. (/)
On donne, en Pharmacie, le nom de calamus aro-
maticus, rofeau aromatique, à une racine amere &
épicée , produite par une efpece particulière de jonc ,
ou plutôt de flambe ou de glayeul qui vient dans le
Levant , & même en plufieurs endroits d'Angleterre ,
de l'épahTeur environ d'une plume d'oie , & haute de
deux ou trois pies , dont on fait un grand ufage com-
me d un céphalique ÔC d'un ftomachique , lur-tout
dans les douleurs occafxonnées par la foibleffe de
l'eitomac.
Le calamus aromatïcus eft ce que l'on appelle au-
trement acorus. Voye^ AcORUS.
On l'appelle aufîi calamus odoratus , & calamus
amarus ; Se quelquefois calamus verus , ou officinalis ,
pour le diftinguer d'une autre efpece , que l'on ap-
pelle adulurinus , en François le rofeau doux ou flam-
be aromatique.
Le meilleur eft celui qui eft grisâtre en-dehors &
rougeâtre en-dedans , dont la pulpe eft blanche & le
goût extrêmement amer, mais qui a fes feuilles & fes
racines d'une bonne odeur. ( A7 )
Calamus scriptorius , en Anatomie , eft le
nom de l'extrémité poftérieure du quatrième ventri-
cule du cerveau , qui fe termine comme le bec d'une
plume à écrire. Voyei Cerveau. (Z. )
CALANDRE , f. f. calandra , ( Omithol. ) oifeau
du genre des alouettes. Voye?^ Alouette. Il eft un
peu plus gros que l'aloiiette ordinaire , & il lui ref-
femble affez par la forme du corps. On peut le com-
parer à la grive pour fa grandeur ; cependant la tête
CAL
eft plus groffe , le bec plus court & plus épais : les
pattes font comme celles des autres alouettes. Toute
la face antérieure ou inférieure eft de couleur cen-
drée , avec quelques taches noires qui font fur la poi-
trine comme dans les grives. Toute la face fupérieu-
re ou poftérieure eft de couleur de terre d'ombre. A
deux pouces au-deffous du bec il y a un cercle , ou
plutôt un collier de plumes noires qui entoure le cou.
W'illughby, Ornith. Voye7^ Oiseau. (7)
Calandre, infecte. Voye^ Charençon.
CALANGUE , CALE , f. f. ( Marine. ) c'eft un
abri le long d'une côte , derrière une hauteur ou dans
quelque petit enfoncement , où des bâtimens médio-
cres peuvent fe mettre à couvert du mauvais tems.
CALANTIGAS , ( Gcog. ) nom qu'on donne à
trois petites îles, fur la côte orientale de l'île de Su-
matra.
^ * C ALANTIQUE , f. f. ( Hifl. anc.) ornement de
tête des femmes Romaines , dont Ciceron fait men-
tion : Fous ajufiit7^, dit-il à Clodius,Az calantique à
fa tete. On ne lait rien de plus.
* CALAOIDIES , f. f. pi. ( Hifl. anc. ) fêtes insti-
tuées en l'honneur de Junon. On n'en fait autre cho-
ie , finon qu'elles fe célébroient dans la Laconie.
CALAPATE , ( Géog. ) ville d'Afie dans l'Inde en
deçà du Gange, fur la côte de Coromandel , dans le
royaume de Bifnagar.
CAL ARE , ( Géog. ) contrée des Indes fur la côte
de Malabar , aux confins des royaumes de Travan-
cor & de Changanate.
* CALASINI, f. f. (Hijl. anc.) tunique de lin ,
frangée par le bas , que les Egyptiens portoient fous
un habit de laine blanche. Quand ils entroient dans
les temples , ils quittoient l'habit de laine , & ne con-
fervoient que celui de lin. La calajini paroît leur avoir
fervi d'habit & de chemife. Elle a été aufîi en ufage
chez les Grecs : il en eft parlé dans les nuées d'Arifto-
phane , & Hefychius l'appelle la, tunique au clou largi^
foyei Clou large.
CALAT, ( Géog.) ville d'A.fie dans le royaume
de Cotan , près de Candahar.
CALATA-BELLOTA , ( Géog. ) ville de Sicile
fur une rivière de même nom.
Calât a-fimi, ( Géog.) ville de Sicile dans la
vallée de Mazare.
Calata-girone , ( Géog. ) ville de Sicile dans
la vallée de Noto, près de la rivière de Diillo.
Calata-nisseta , ( Géog. ) ville de Sicile dans
la vallée de Noto , près de la rivière de Salfo.
Calata-xibeta , ( Géog. ) petite ville de Sicile
dans la vallée de Noto , près des lources de la rivière
de Dataino.
CALAT AYUD , ( Géog.) ville d'Efpagne dans le
royaume d'Arragon , au confluent du Xalon & du
Xiloca. Long. 16. 10. lat. 41. 22.
CALAT HUS , ( Hifl. anc. ) corbeille ou panier à
ouvrage , fait ordinairement de jonc ou de bois tort
léger , qui fervoit aux ouvriers à mettre leurs laines,
& étoit fpécialement confacré à Minerve, qu'on re-
gardoit comme l'inventrice des arts & des ouvrages
faits à l'aiguille. Virgile pour exprimer que Camille ,
reine des Volfques , avoit les inclinations martiales,
& ne s'amufoit point aux petits travaux propres à
fon fexe , dit :
Non Ma colo , calathifve Minervce ,
Fœmineas ajfueta manus. jEneid. 7.
Pline compare ce panier à la fleur du lis , dont les
feuilles vont en s'évafant à mefure qu'elles s'élargif-
fent: ab angufiis in latitudinem paulatim fcfe laxantis
effigie calathi ; & telles étoient les corbeilles que les
Canephores portoient fur leur tête dans les fêtes de
Minerve , & qui renfermoient les choies facrées, def-,
tinées à fes myfteres.
CAL
Sur les monumens antiques , les dieux d'Egypte
font repréfentés avec une efpcce de boifleau fur la
tête , qu'on croit être le calathus. Mais il n'y a pas de
doute que ce ne foit ce même calathus dont cil fur-
montée la coeffure de Minerve dans une médaille
que M. l'abbé de Fontenu a expliquée fous le titre de
Minerve Iliade. Mem. acad. des B. L. ton. V. (G)
* CALATISME, f. m. (Hijl. anc.) danfe ancienne
dont il ne nous eft parvenu que le nom. V. Danse.
CALATRAVA , ( Géog. ) ville d'Efpagne dans la
nouvelle Caftille , fur la rivière de Guadiane , près
de la Sierra-Morena , dans un pays nommé Campo di
Calai rava. Long. 14. 20. lai. Je). S.
Calatrava , ( Hijl. mod. ) ordre militaire en Ef-
pagne , inftitué en 1 1 5 8 par Sanche III. roi de Caftille.
Les hiftoriens en rapportent l'origine , à ce que ce
prince ayant conquis fur les Mores le château de Ca-
latrava , qui étoit alors une forterefle importante , il
en confia d'abord la garde aux Templiers , qui ne pou-
vant détendre cette place, la lui rendirent. Ils ajou-
tent, qu'à la lollicitation de Diego Velafquez, moine
de Cîteaux , & homme de condition , Raimond ,
abbé de Fitero , l'un des monafteres du même ordre ,
obtint du roi la permiflîon de défendre Calatrava, &
s'en acquita très -bien contre les Mores; que plu-
fieurs de ceux qui l'avoient accompagné dans cette
entreprife , prirent l'habit de l'ordre de Cîteaux , fans
toutefois renoncer aux exercices militaires. De là ,
dit-on , fe forma l'ordre de Calatrava , qui s'étant
beaucoup augmenté fous le règne d'Alphonle le
Noble , fut d'abord approuvé par le pape Alexandre
III. en 1 164, & confirmé par Innocent III. en 1198 ,
& enfuite gouverné par des grands maîtres , dont le
premier fut Don Gardas Redon : mais fous Ferdi-
nand oc Ifabelle , la grande maîtrife fut réunie à la
couronne de Caftille en 1489. Le premier habit de
ces chevaliers étoit la robbe & le fcapulairc blanc
comme les religieux de Cîteaux , ôc ils ne pouvoient
pas fe marier : mais les papes les ont dilpenfés de
ces deux règles ; & les quatre-vingts commanderies
que cet ordre poffede en Efpagne , font ordinaire»
ment tenues par des gens mariés. Leurs armes font
d'or à la croix fleurdelilée de gueules , accoftée en
pointe de deux entraves ou menotes d'azur ; &: les
chevaliers portent de même fur l'eftomac une croix
rouge , qui eft la marque de leur ordre. ( G )
CALAVON , ( Géog. ) petite rivière de France
dans le comté de Provence , qui fe jette dans la Du-
rance près de Cavaillon.
CALAW , {Géog. ) petite ville de Bohème fur la
rivière de Bober.
CALAZEITA , ( Géog. ) petite ville d'Efpagne au
royaume d'Arragon , près de la rivière de Mata-
ranna.
CALAZZOPHYLACES , f. m. pi. (Hijl. anc. )
prêtres ou miniftres de la religion chez les anciens
Grecs , dont la fonction étoit d'obferver les grêles ,
les orages , & les tempêtes , pour les détourner par
le facrifice d'un agneau ou d'un poidet. Au défaut
de ces animaux , ou s'ils n'en tiroient pas un augure
favorable, ils fe découpoient le doigt avec un canif
ou un poinçon , 6c croyoient ainii appailer les dieux
par l'effufion de leur propre fang. Ils avoient été
inftitués par Cléon. Leur nom eft formé de y.aXalÇa.,
grêle , & de çuxàtaw , j'obferve , /épie. Les Ethiopiens
ont de fcmblables charlatans qui fe déchiquetait le
corps à coups de couteau & de rafoir , pour obte-
nir ta pluie ou le beau tems ; & l'on trouve dans
l'Ecriture un exemple des mêmes pratiques , miles
en œuvre par les prêtres de Baal que confondit
Elic. Foye{ Baal , Bellonaires, &c. (G)
CALBARY ,( Géog. ) rivière d'Afrique au royau-
me de Bénin , qui fe jette dans le golfe de Guinée.
CAL
54*
CALBE, (Géog. ) ville d'Allemagne fur la Saales
au duché de Magdebourg.
CALBOTIN , f. m. eft un panier de paille dans
lequel les Cordonniers mettent le fil. Faye^ la figure
33. & 36. qui en ejl le profil.
^ CALCAIRE , ( Terre ou Pierre) Hijl. nat. & Chimie.
L'on nomme ainfi les terres ou pierres qui, expofées
à l'aûion d'un feu convenable , fe réduifent en pou-
dre ou en chaux , ou qui font difpofées par le feu à
prendre cette forme. M. Pott , favant Chimifte , qui
dans fon excellent Traité de la Lithogeognofie , a fait
un examen tout particulier des différentes efpeces dé
terres & pierres, diftingue abfolument la terre calcaire
de la terre gypfmfe , avec laquelle cependant pref-
quetous les auteurs la confondent. Suivant ce favant
naturalifte, les caractères diftinftifs de la vraie terre
ou pierre calcaire font, de ne point prendre corps lorf-
qu'elle a été mife en diiîb'ution dans l'eau , fans le
iecours d'une fubftance intermédiaire , comme le fa-
ble , le ciment , &c. & de fe diflbudre dans les acides;
On peut même dire en général , que toute terre qui
ne fe diftbut point dans l'eau-forte , ne doit point être
appellée une terre calcaire ; le même auteur nommé
aufti cette efpece de terre alkaline : en effet elle a
toutes les propriétés des alkalis. Elle fait effervef-
cence dans tous les acides ; elle s'y diftbut , & peut
être précipitée par les fels alkalis.
Lorfque la terre ou pierre calcaire a éprouvé l'ac-
tion du feu, elle eft encore plus difpofée à fe diflbu-
dre dans les acides ; elle attire pour lors l'humidité
de l'air , & fait effervefeence même dans l'eau com-
mune : c'eft ce que nous voyons tous les jours dans
la chaux vive.
Les principales efpeces du genre des calcaires font,
la craie , le marbre , une efpece de fpath , que
M. Pott nomme alkalin , la marne , le lapis judaicus ,
la pierre de lynx , la pierre à ciment, la terre d'An-
gleterre , la terre d'alun , le corail , les cendres lcfli-
vées , le lapis fpongiœ , les os des animaux , & toutes
les coquilles calcinées : on la trouve aufti dans quel-
ques ardoifes , dans l'argille , le limon , l'oftéocollc ,
&c. & dans un grand nombre de corps qui ne diffé-
rent entre eux , que par des choies qui leur font ac-
cidentelles.
C'eft la terre calcaire , qui fait la bafe des os des
animaux , oit elle fe trouve liée par une efpece de
gluten , qui leur donne la confiftance néceflaire ; c'eft
ce même gluten ou lien qui met aufli toute la diffé-
rence que nous remarquons entre les fubftances du
genre des calcaires , comme entre la craie & le mar-
bre , la pierre à chaux , & la marne , &c. différence
qui ne s'y trouve plus , lorfque le gluten a été chafle
par l'aclion du feu. C'eft aufli ce lien qui empêche
quelquefois les acides d'agir fur les terres calcaires ,
comme on peut le voir dans la pierre à chaux , qui
ne fe diftbut point dans l'eau avant d'avoir été brû-
lée , & dans l'eau forte qui n'agit point fur l'ivoire ,
quoiqu'il ait été calciné ; parce que l'aftion du feu
n'a pu entieremeut détruire le gluten qui y lie la ter-
re calcaire.
Les terres calcaires ne peuvent point fe vitrifier, ni
fe mettre en fulîon toutes feules & fans addition ,
quelque violent que foit le feu qu'on y employé ; pour
produire cet effet , il faut y joindre une bonne quan-
tité de fcl alkali. Cette terre s'unit afle/. bien aux
matieres déjà vitrifiées fans leur oter leur tranfpa-
renec , pourvu qu'elle n'y foit mêlée qu'en très-peti-
te quantité.
Le favant M. Hcnckcl explique comment nous
voyons que plulîcurs eaux minérales e*; lourccs
d'eau chaude participent aux propriétés de la chaux :
c'eft félon lui , parce que les terres ou pierres calcaireit
par-deflus lcfquelles ces eaux viennent à pafler . font
brûlées & tournées en chaux par l'aftion du feu cù-
542
CAL
ché dans les entrailles de la terre , &C par-là difpofées
à le diiî'oudre dans ces eaux , à les échauffer , & à
leur communiquer leurs vertus &C leurs propriétés.
De toutes les qualités de la terre calcaire , ne pour-
roit-on point conclurre, i°.que c'eft par ia tache dil-
folution dans les acides qu'elle devient propre à pal-
fer avec eux dans tous les corps organiles de la na-
ture ; i°. que par la propriété que la terre calcaire a de
favoriler la diiïolution des loutres & des tels par les
acides , elle développe les organes des corps , &
les rend vifibles en le mêlant à eux ; 30. que par la
faculté qu'elle a d'attirer l'humidité de l'air , &: d'en
être réciproquement attirée, elle produit l'élévation
& l'accroiftément des coips. Ce iont-là des conlé-
quences naturelles des propriétés de la terre calcaire ,
dont il faut laillér l'examen aux Chirmftes , à qui des
expériences exactes feront connoître fi ces conjec-
tures l'ont bien ou mal fondées. (— )
CA L CA N EU M, en Anatomic , c'eft la même
choie que l'os du talon. Il eft fitûé tous l'aitragale à
la partie poftérieure du tarie ; c'eft le plus gros des
os du pié.
On peut y diftinguer fix faces : une poftérieure ,
convexe ôc inégale , qui forme la partie du pié qu'on
appelle le talon: une fupérieure, qui eft divilée en
deux portions , dont la poftérieure eft la plus élevée ,
inégale & un peu concave ; l'antérieure plus balle a
deux faces articulaires iéparées l'une de l'autre par
une gouttière : une intérieure, à la partie poftérieure
de laquelle on remarque deux tubérolités ; une gi offe
fituée intérieurement ; l'autre petite fituée poftéiieu-
rement : deux latérales, dont l'externe eft légèrement
convexe ; l'interne eft concave : une anténeuie ,
qu'on appelle la grande apophyfe. (Z.)
CALCAR, (Géog.) ville d'Allemagne, dans le
duché de Cleves , fur le ruifiéau de Men. Long. 24.
x5. lat. 5i. 46.
CALCE, ( Géog.) petite ville d'Italie au duché
de Milan , fur la rivière d"Oglio.
CALCE , ( Géog. ) petite île de l'Archipel , fur les
côtes de l'A lie mineure.
CALCEDOINE ou CHALCEDOINE, lapis chal-
eedonius , pierre fine qui a été mile dans la clafle des
pierres fines demi-tranfparentes. Voye-^ Pierre fi-
ne. Les deferiptions de la Calcédoine , que nous trou-
vons dans les anciens auteurs l'ont fi différentes les
unes des autres , qu'on ne peut pas les rapporter à
la même pierre ; parce qu'on a donné autrefois le
nom de calcédoine à plufieurs eipeces de pierres. La
defeription que Pline nous a laillée, donne l'idée d'un
grenat oriental , ou d'une amethifte. D'autres del-
criptions défignent l'Onyce ou la Sardoine onyce. Le
nom de calcédoine appartient aujourd'hui à une pier-
re de même nature , que le caillou que l'on appelle
communèmçnt pierre àfujil, de couleur blanche , lai-
teule, & légèrement teinte de gris, de bleu, ôc de jau-
ne. Cette pierre a aufti été nommée agate blanche; û
la teinte de bleu eft allez foncée pour approcher du
brun ou du noir , la pierre prend le nom a agate noi-
re ; fi la teinte de jaune eft affez vive pour approcher
de la couleur orangée ou du rouge , la pierre doit
être zppellce fardoine ou cornaline.
On diftingue la calcédoine comme l'agate , en orien-
tale & en occidentale ; V orientale a des couleurs plus
vives & plus nettes que celles de l 'occidentale , qui
eft ordinairement d'un blanc fale , ou d'une couleur
ronflé. On trouve des calcédoines de cette efpece en
Allemagne , en Flandre , aux environs de Louvain
£c de Bruxelles , &c II y a des calcédoines allez grofi-
fes pour faire des vafes ; mais ces grandes pièces lont
rares, & on tiouve communément de petits mor-
ceaux, que l'on grave pour faire des bagues ou des
cachets. La dureté de la calcédoine eft égale à celle
de l'agate.
CAL
Les Joiiailliers appellent pierres calcedoineufes , cel-
les qui ont des nuages ou des teintes laiteules com-
me la calcédoine; ce défaut eft allez commun dans les
grenats & dans les rubis ; on tâche par la manière de
les tailler , de faire dilparoître ces taches. Le moyen
le plus lûr eft de les chever , c'eft-à-dire, de rendre
concave l'une des faces de la pierre , & l'autre con-
vexe. ( l )
Calcédoine Factice , (Chimie) comme il y a
beaucoup de rapport entie l'agate , le jaipe , & la cal-
cédoine , le même procédé pourra fervir pour imiter
ces trois eipeces de pierres précieules. Faites diffou-
dre une once d'argent dans de Peau-forte , prenez de
chaux, d'étain, de cinnabre, de bol d'aiménie, de cha-
cun -i-once ; de lalran de Mars , d'antimoine crud , de
minium, d'orpiment , & d'arfenic blanc , d'as uflum;
de chacun \ once ; réduifez toutes ces matières en
une poudre très-fine , & verfez par-deffus petit à pe-
tit &bien doucement, luffilante quantité d'eau-forte,
parce qu'il le fera une effervefeence confidérable :
torique toute l'effervelcence fera paflée, verfez-y
encore de l'eau-forte , & mettez le vaie en digeftion
dans un lieu modérément chaud ; on pourra au bout
de quelques jours retirer l'eau-forte par diftillation ;
il reliera un lédiment ou une poudre d'un rouge ver-
dâtre , on n'aura qu'à la broyer & la réduire en une
poudre très-fine, & en mêler à clifîti entes reprifes
une | once ou deux onces fur 1 2 liv. ce fritte de cryf-
tal , faite avec des morceaux de cryltai caffé ; on re-
muera bien exactement ce mélange pendant qu'il fe-
ra en r'ulion , en donnant un teu convenable : au bout
de vingt-quatre heures l'opération leia faite , ec le
verre ou cryftal coloré lera en état d'être travaillée
Calcédoine , ( Géog. ) ville autrefois confidéra-
ble d'Alie mineure , fur la mer de Maimara, n'eft
plus qu'un mauvais bourg , que les Turcs nom-
ment aujourd'hui Calcitiu.
C ALCET , 1. m. ( Marine ) affemblage de planches
élevé & cloué fur le haut des arbres d'une galère , &C
qui fert à renfermer les poulies de bronze , qui font
deftinées au mouvement des antennes. (Z)
* CALCIO , ( Jeu) il giuoco del calcio, c'eft une
efpece de jeu de ballon fort ufité en Italie, fur-tout
dans les environs de Floience ; on y joue avec bien
des formalités & lolennités pendant l'hiver : les jeu-
nes gens qui y jouent le partagent en deux bandes,
qui pour le diftinguer portent ies unes des rubans
rouges, d'autres des rubans verds ; chaque bande élit
un chef qu'on nomme principe del calcio, qui eft pour
l'ordinaire un gentilhomme nche ; ce prince ou chef
le choifit des officiers , & le forme une ccur parmi
ceux de la bande ou de fon paiti : il envoyé des am-
baiîadeurs au chef qui lui eft oppofé , tk en nie com-
me feraient de vrais iouverains. Comme il r.e man-
que jamais d'arriver une rupture, il lui déclare la
guerre , & va lui livrer bataille , qui n'eft point fan-
glante ; c'eft une partie au ballon qui décide de la
victoire , & le vainqueur marche la tête haute aufS
content de lui , que s'il avoir remporté des lauriers
plus langlans. Cette bataille fe livre ordinairement
dans la ville de Florence , ce ci-devant le donnoit fous
les fenêtres du grand duc.
CALCINATÏON , f. f. ( Chimie.) L'opération chi-
mique , connue tous le nom de calcination , eft l'ap-
plication d'un feu ouvert à des matières folides & fi-
xes , difpofées de manière qu'elles prélentent au leu
& à l'air le plus de furface qu'il eft poffible.
On fe propolé en général dans la calcination êcv.x
objets différeras : ou l'on cherche à léparer une li bf-
tance volatile , qu'on ne le met pas en peine de re-
tenir, d'une fubftance fixe qu'on a feule en
comme dans la calcination des mines, dont on diffipe
par cette opération les matières volatiles étrangères
CAL
au métal qui eft l'objet du travail , principalement le
foutre 6c l'arlenic. Cette opération eft plus connue
dans le traitement des mines , Toit pour l'efTai , ftfit
pour le travail en grand fousde nom de rotij/age ou
de grillage, Voye{ Grillage. C'eft cette eipece de
calcinaùcn que M. Cramer appelle ujlulatio, 6c qu'il
diftingue , mais feulement par ion objet , de celle
dont nous allons parler dans un moment. L'opération
par laquelle on iouffle ou fait fumeries culots d'or,
dans la purification de ce métal par l'antimoine , fe
peut rapporter aux calcinations de la première efpece;
comme aufïi la calana'ion des fels fixes , foit neutres ,
fbit alkalis, gras, ou empâtes de matières huileufes
qu'on blanchit : on purifie par ce moyen celle des
vrais favons , celle des lèls très-aqueux , comme l'a-
lun, le vitriol, le fel de Glauber , &c. La calcination
de ces fels au foleil, & leur calcination à l'air,ne dif-
férent de la précédente 6c entr'elies , que par le de-
gré de feu. Voyc^ Feu.
Le fécond objet général de la calcination , c'eft
d'ouvrir certains corps , ou de rompre la liaifon ,
de détruire le maftic naturel , le gluten de certaines
• matières , telles que les parties dures des animaux &
des pierres , ëc les terres alkalines & gypfeuies , qui
fournilTent par la calcination ces produits connus de
tout le monde fous les noms de chaux & de plâtre ;
telles encore que les gangues dures , réfradaires ou
fauvages , des mines d'ailleurs peu fulphureufes &
peu ariénicales , qu'on ne grille que pour difpofer
cette gangue à la fuiion. C'eft à peu près dans la mê-
me vue que cette opération eft en ufage dans les tra-
vaux de la verrerie , des émaux , des porcelaines ,
& dans les laboratoires des Chimiftes , pour la pré-
pai ation des chaux métalliques , &c.
On appelle encore calcination en Chimie , calci-
nation par la voie humide , la divifion de toute lubf-
tance métallique opérée par un menfïnie , lorfque
cette divifion eft fuivie d'un précipité , foit fponta-
née , foit produit par l'action d'un précipitant ; 6c
tous les précipités lont appelles indiftinclemcntcta#.v.
Ainli on appelle chaux d'or , l'or départi de l'argent ,
ou l'or de départ précipité par l'huile de tartre;
chaux d'argent , l'argent départi de l'or , ou l'argent
de départ précipité par le cuivre , le précipité par
le fel marin ou par ion acide de la difiblution d'ar-
gent dans l'acide nitreux , &c. Mais la plupart de ces
iubftances ne conviennent avec les chaux propre-
ment dites , que par le nom. La calcination par la voie
humide porte encore le nom bien plus exact de pul-
vérifation philojbphiqtu. Voye^_ Pulvérisation &
Lu/- C IPITÉ.
On prend aufîi le mot de calcination dans un fens
trop vague , quand on l'applique à la préparation
des parties folides tics animaux , qu'on épuile de leur .
partie lymphatique par l'eau bouillante : on appelle
ces fublhinccs ainli épuifées, calcinées philofophique-
ment ; corne de cerf calcinée philosophiquement , cnIC
mais ce n'eit ici abiblument qu'une décoction. Foye^
DÉCOCTION.
Quel eft donc le caractère propre de la vrwle cal-
cination ? JVntre pour le déterminer dans un examen
plus détaillé de les principaux phénomènes , des dif-
férens changemens qu'elle opère dans les divers fu-
jets auxquels on l'applique. Cette diicufîion nous
ira de la manière la plus abrégée à la vraie
théorie de notre opération.
Jediftingue d'abord les effets qui lui font communs
avec d'autres opérations chimiques, de ceux qui
lui font propres : 1". la i confidérée comme
féparant des parties volatiles d'avec des parties plus
fixes , peut ne différer de la diftillation qu'en ce qu'on
retient ces parties volatiles dans la dernière i
tion, & qu'elles s'échapent dans la première. (. 'efl
ainli que les tels aqueux le deliecheroient dans les
C A L 545
vaifTéaux termes, comme ils fe delTechent dans les
vaWie-aux ouverts ; la première opération exigerait
feulement un feu plus violent : mais les deux pro-
duits de chaque opération , c'e-i't-à-dire , le phlegme
paffé dans la diftillation, oa difiipé par la calcina-
tion , ( on peut en ramafler en e.\ pelant un miroir à
m ) oc le réfidu de l'une & de l'autre , feroient
exactement les mêmes. Je pourrais faire de cette opé-
ration une efpece diftin&e de calcination: mais elle
eft fi diftinûe des deux autres que je vais propofer,
qu'il fera plus exact encore de l'en féparer abfolu^
ment. /'oy^ Dessiccatk .
2.''. Les lavons , les tels gras ou empâtés de ma-
tières grafks ou huileufes, pourraient auffi être pri-
ves ce ces matières par la diftillation , auffi bien que
par la calcination. La plupart des fubitances métal-
liques minéralifées , traitées dans les vaifi'eaux fer-
mes , lailTeroient fublimer du fourre Se de l'arfenic :
mais j'obferve dans ce cas une différence remarqua-
ble; c'ell que la fubftance volatile féparée cjui eft in-
flammable , du moins pour la plus grande partie ,
s élevé dans la diftillation ou dans la fublimation,fans
éprouver aucune altération , ou n'étant que très-peu
altérée ; au lieu qu'elle eft décompofée dans la calci-
nation, elle eft enflammée , détruite. Cette efpece de
calcination opère donc la féparation réelle de deux
cîpeces de corps qui formoient un compofé ou un
fnrcompofé pSr leur union ; circonftance commune
à cette opération & à la dilliilation , mais de plus
la deftrudion d'un des principes de la compofltior»
du corps calciné, celle du mixte ou du compofé in-
flammable. Cette efpece de calcination fera propre
à tous les corps folides compoles ou fiircompolés ,
dans la formation defquels entreront des mixtes ou
des compoles inflammables. Ces corps font les mines
ou iubilances métalliques minéralifées , les métaux
fulphurés , tous les lavons, les extiaits folides des vé-
gétaux , le tartre , la lie, les os des animaux , les bi-
tumes folides , &c.
Il eft enfin une autre efpece de calcination eflen-
tiellement diftincle des opérations faites dans les
vaiffeaux fermés : c'eft l'opération qui prive par
l'action du feu un mixte fixe & folide de fon phlo-
giitiqitc , ou la décompofition par le feu d'un mixte
folide, dont le phlogiflique pur eft principe
constituant. Les fujers de cette c donation lont les
métaux imparfaits, les demi-métaux, excepté le
mercure , & tous les vrais charbons tirés des trois
règnes. V/n-par julphuris ou foie de foutre peut fe
ranger aufîi avec ces corps, quoiqu'avec quelqu'in-
exactitude.
Quoique la fixité abfoluc de l'or &de l'argent te-
nus en fulion pendant un tems très-confidérable , foit
unanimement adoptée d'après les expériences de
Kunckcl , il el't très-probable cependant que leur
calcination n'eft que beaucoup plus difficile que
celle des autres fiîbftances métalliques , mais non
pas abiblument impraticable. C'eft la doctrine de
plufienrs Chimiftes illuftres.
[faac le Hollandois , dans fon traité de falibus &
oleis metaliorum , cap. ij. de ;'.. ..s, al-
lure que la chaux d'argent , c'eft-à-dire , l'argent dé-
jà ouvert par un menftrue, e dant vin^r-
un jours à un feu non interrompu , cv te! qu'il eft
néceflaire pour tenir le plomb en tuf on <
, te réduit en une vraie chaux ; &
ouïe précipité d'or expofé au même d<
éprouve la même altération en ii\ femaines.
Kunckel ne daigne pas même réfuter un auteur
à qui ilavoit l'ait cet honneur fur plufieurs autres
points; un auteur, dis-je , qui avoit mis la vraie
chaux d'or parmi les non-êtres chimie] ,
Stahl qui compte beaucoup furie
ces deux auteurs , eft perl'uade qu'Us entendent par-
544
CAL
CAL
1er l'un & l'autre de la même opération ; favoir , de
la réverbération , ou de la calcination ta grand ré-
verbère, tant vanté par le premier ( Iiaac le Hollan-
dois. ) ^oyeile Vitulus aurais igné combujlusde Stahl.
Il paroît que l'or & l'argent ïont vitriftables, qu'ils
font dans l'état de verre dans les émaux. ( Voyt^ Vi-
trification. ) Il paroit encore par les expérien-
ces faites avec le miroir de Tfchirnhaufen,ougra7<&
lentille duPabis-royal, ( KoyeiMim. del'Acad. royale
dis Scierie, ijoz. ) que ces métaux ont été vitrifiés ,
même fans addition , du moins évidente. Or la vitri-
fication fuppofe une calcination : calciner l'or & l'ar-
gent , eft pourtant encore un problème chimique.
Les produits de cette calcination font des chaux ou
des cendres.
Les chaux métalliques font plus ou moins parfai-
tes , félon que les fubftances qui les ont fournies ont
été plus ou moins exactement calcinées : elles font
des chaux ablblues,fi le phlogiftique en a été entière-
ment féparé.
Lorlque ces chaux font volatiles , elles s'appellent
flairs. Foye{ FLEURS & SUBLIMATION.
Ma. dernière efpece de calcination ne diffère pas
réellement de la précédente , coniidérée comme de-
mi;: a nt un mixte inflammable. Le caractère généri-
que & eiî'entiel de l'une & de l'autre , ou de la calci-
nation proprement dite , c'eit de ne pouvoir être
exécutée dans les vaiffeaux fermés ; car les mixtes
inflammables volatils ne peuvent être qu'élevés dans
les vaiffeaux fermés , quelque feu qu'on employé ;
& les mixtes fixes , tels que font les l'ujets de la der-
nière elpece de calcination , peuvent y être actuelle-
ment ignés ou embraies , fans y éprouver aucune el-
pece d'altération , pas même un changement de lieu,
dimotionem a loco.
Ces faits n'ont été qu'énoncés jufqu'à prélent , fur-
tout l'inaltérabilité du charbon parfait , 6c celle des
métaux dans les vaiffeaux fermés. Cette propriété
finguliere peut fe déduire pourtant par une analogie
toute l'impie de plulieurs phénomènes connus, &
très-bien expliqués par les Chimiltes , entr'autres par
Stahl. C'eft parla théorie de la flamme en un mot
qu'il faut expliquer les phénomènes de la calcination:
car nous ne connoiffons que deux efpeces d'ignition
réelle , la flamme & l'embrafement fimple : or les
corps propres à la calcination reltent embraies dans
les vaiffeaux fermés fans s'y calciner ; donc ce n eft
pas dansd'embralement fimple qu'il taut chercher le
méchanifme de cette opération.
Ce méchanifme eft fenfible dans la deftruftion des
mixtes inflammables humides ou aqueux : l'huile, le
foutre , l'elprit-de-vin , le phofphore de Kunckel , ne
fe décompofent que par l'inflammation : mais les
mixtes inflammables fecs ou terreux , tels que font
les fujets propres de ma 2e elpece de calcination ,
ne paroiffent pas capables de donner une vraie flam-
me ; on a même fait entrer dans la détermination de
leur caractère la propriété de n'en point donner ,
même à l'air libre , du moins par eux-mêmes : le zinc
feul efl: excepté.
. Voici par quelle chaîne de confidérations je me crois
autorité à généralifer cette théorie, à l'étendre à
tous les lu jets de la calcination.
Les charbons qui flambent ( je demande grâce pour
cette expreflion ) , lorfqu'ils font expofés à un cou-
rant rapide d'air, font infiniment plutôt confirmés
ou détruits , que lorfqu'ils brûlent fans flamber dans
un lieu où l'air n'eft point renouvelle , comme dans
un fourneau dont le cendrier eft fermé , ou dans la
caffe d'une forge dont le foufflet ne joue point. On
ne fauroit attribuer cette différence à la fimple aug-
mentation de la vivacité du feu; c'eft la flamme,
comme telle , qui la conftitue ; car des charbons ex-
poles dans les vaiffeaux fermés à un feu dix fois plus
fort nue celui qui les confume lentement, lorfqu'on
les couvre de cendres par exemple, ne les altère
pas.
Le zinc ne fe calcine qu'en flambant : les fubftan-
ces métalliques qui ne flambent pas par elles-mêmes ,
le fer, l'étain , le régule d'arfenic , le régule d'anti-
moine , détonnent ou flambent avec le nitre : or le
nitre feul ne flambe jamais ; donc ces fubftances mé-
talliques contribuent matériellement à la flamme ;
car d'ailleurs par cette détonnation ou cette inflam-
mation , leur calcination , très-lente fans ce lecours ,
eft effectuée fur le champ.
Voilà , fi je ne me trompe , l'énergie de l'inflam-
mation ou de la flamme bien conftatee pour la calci-
nation : n'eft-il donc pas permis de la regarder com-
me une ufiion avec flamme fenfible dans la plupart
des fujets; cachée, ou même infenfible clans la moin-
dre partie, dans les quatre métaux imparfaits, dont
deux même flambent avec le nitre , & dans trois de-
mi-métaux dont un feul , le bifmuth, ne flambe point
avec le nitre ? Voye^ Feu.
La calcination des pierres Se des terres calcaires ,
& celle des pierres & des terres gypfeufes , fera plus
ou moins analogue à l'opération dont je viens de ref-
traindre l'idée , à raifon du plus ou du moins de com-
buftibilité des parties qu'on diftipe dans la prépara-
tion des chaux & des plâtres : des inductions très-
bien fondées rangent cette opération , du moins pour
les matières calcaires , dans la claffe des calcinations
les plus proprement dites. Les parties dures des ani-
maux donnent des chaux par la deftru&ion d'une ma-
tière lymphatique , c'eft-à-dire , d'une fubftance in-
flammable , qui conftituoit leur gluten. Or entre le
corps d'un animal le moins dégénéré, une corne , un
os récent , & la pierre calcaire la plus déguifée , le
marbre , il exiite tant d'efpeces intermédiaires dans
lefquelles on diftingue évidemment l'efpece même
des matières animales dont elles font formées , &
où l'on voit ces matières plus ou moins détruites ,
depuis la plus groffe corne d'ammon, jufqu'auxfrag-
mens ou aux iemences de coquilles imperceptibles
fans le fecours de la loupe ou du microfeope, qu'il
eft naturel de conclurre de cette reffemblance exté-
rieure , que le gluten des pierres calcaires eft en gé-
néral une matière animale , qui peut être un peu dé-
générée à la vérité , & que leur calcination eft par
cenféquent une vraie deftruction d'une fubftance in-
flammable : la conformité des qualités intérieures de
toutes ces fubftances , avec celles des parties dures
des animaux, confirme cette analogie. Il en eft de mê-
me de ces qualités intérieures qui démontrent immé-
diatement du phlogiftique dans les pierres & les ter-
res calcaires , comme dans la craie, le marbre, &c.
Voye{ Terre. i
La théorie de la calcination des pierres & des ter-
res gypfeufes tient moins immédiatement à celle-ci.
Foyei Terre.
Le feu s'applique de différentes façons aux matiè-
res qu'on veut calciner; ou on expoie ces matières
immédiatement à un feu de bois ou de charbon.
Cette manière eft la plus ufitée dans la préparation
des chaux & des plâtres. Voyt\ Chaux & Plâtre.
Ou on les expofe à la flamme d'un réverbère. L'une
& l'autre de ces méthodes eft en uiage dans les tra-
vaux des mines. Voye^ Grillage.
Ou enfin on les place dans des vaiffeaux plats &
évafés , appelles têt , écuelles à rôtir ou feorificatoires ,
qu'on met fur un feu de charbon , ou fous la mouffle
du fourneau d'effai. Les calcinations pratiquées dans
les laboratoires desChimiftes pour des vues d'analy-
fe , s'exécutent ordinairement dans ces vaifléaux.
Les règles générales du manuel de ces dernières
opérations font :
i<\De
CAL
CAL
i°. De réduire en poudre groffiere le corps à cal-
ciner.
i°. De gouverner le feu de forte que la matière
n'entre point en fufion ; du-moins d'éviter la fufion
autant qu'il eft poffible. Cette règle n'eft pas abfolu-
ment générale ; car la fufion favorife la calcination
du plomb & de l'étain , & elle ne nuit pas à celle du
bifmuth , pourvu néanmoins que ce ne foit qu'une
fufion commençante.
3°. Si on a laiffé fondre fa matière, ou feulement
s'empâter , de la laiffer refroidir & de la réduire de
nouveau en poudre grofiiere.
4°. De remuer fouvent la matière.
5°. Enfin de ménager l'accès libre de l'air , autant
qu'il eft poffible.
Quelques fubftances métalliques éprouvent par la
calcination, dans de certaines circonftances, un chan-
gement fingulier. Leurs chaux le chargent d'une ma-
tière qui augmente le poids abiolu du corps calciné.
Cette circonitance eft fur-tout très-remarquable dans
le minium. Voye{ MlNIUM.
La calcination vraie peut-être confidérablement
hâtée par le fecours du fourre , par celui du nitre ,
& par celui de l'un & de l'autre employés en même-
tems.
Vœs ujfum , le fafran de Mars , communément ap-
pelle ajlringent , &c. font des chaux préparées par le
loutre. Les chaux de cette efpece portent le nom gé-
nérique de fafran , crocus. La théorie de cette opéra-
tion , eft précifément la même que celle du grillage
des métaux imparfaits & des demi-métaux minéraii-
fés. Poyei Grillage.
Le nitre projette dans un creufet rougi au feu avec
les charbons en poudre , avec la limaille des métaux
imparfaits , & avec les demi-métaux folides pulvé-
rifés, ou jette fur ces fubftances embrafées , concourt
très-efficacement à leur calcination , qui s'opère dans
ce cas très-promptement. Lorfque cette calcination
fe fait avec bruit & flamme manifefte , comme celle
du fer , de l'étain , du régule d'antimoine , du zinc ,
du régule d'arfenic , elle s'appelle détonation. Voyt{
DÉTONATION.
Les chaux d'antimoine tirées de l'antimoine crud
ordinaire par le fecours du nitre , comme l'antimoine
diaphorétique préparé avec l'antimoine crud , le fa-
fran des métaux , &c. font dues au concours du nitre
& du foufre.
L'efprit de nitre opère auffi des calcinations vraies.
Le fer difîbus par l'acide nitreux & abandonné par
cet acide à mefure qu'il eft attaqué , eft une vraie
chaux de fer ; voye^ Fer. Cet acide agit de la mê-
me façon fur le zinc , & même un peu fur le bif-
muth. Foye{ les aniclesZltiC , BlSMUTH, c>Mens-
TRUE.
Mais la chaux de cette efpece la plus parfaite , une
chaux abfolue, c'eft le produit de l'action de l'acide
nitreux fur la partie réguline de l'antimoine , foit
qu'on l'applique immédiatement à ce régule , foit
qu'on l'applique à l'antimoine crud , ou au beurre
d'antimoine pour faire le bézoard minéral.
Glauber a fort ingénieufement obfcrvé dans la
première partie de fis Journeaux philofopkiques , que le
bézoard minéral & l'antimoine diaphorétique étoient
exactement la même choie, & qu'il n'importait pas
que ce diaphorétique J ùt fait avec l'elprit de nitre ou avec
le nitre même corporel. Voyc^ M t NSTRUE , ANTIMOI-
NE & Feu.
Il ne faut pas confondre ces chaux avec les pré-
cipités métalliques qui portent le même nom, dont
on a parlé plus haut. Cet article efl de M. t'enel.
CALCUL, f. m. (Mathém. pures.') fupputation de
plufieurs lommes ajoutées, foultraites, multipliées,
ou diviiées. ^'oye{ Arithmétique.
L'erreur de calcul 'ne le couvre jamais ni par arrêt
Joint U,
545
m par tranfadtion, &c. Quand on arrête un compte
on fous-entend toûjoursfauf erreur de calcul.
L art de calculer en général , eft proprement l'art
de trouver l'expreffion d'un rapport unique , qui ré-
fuite de la combinaifon de plufieurs rapports. Les dé-
férentes efpeces de combinaifons , donnent les diffé-
rentes règles de calcul. Cela eft expliqué plus au long
à l'article Arithmétique.
Voyçi les différentes efpeces de calcul aux articles
Algèbre, Différentiel , Exponentiel , In-
tégral, Addition, &c
Plufieurs peuples de l'Amérique , de l'Afrique, Se
de l'Afie calculent avec des cordes , auxquelles ils
font des nœuds.
Le calcul aux Jetions fe fait aifément , en repréfen-
tant les unités par des jettons , les dixaines par d'au-
tres jettons , les centaines par d'autres. Par exemple,
fi je veux exprimer 3 1 5; avec des jettons , je mets 3
jettons pour marquer les centaines , 1 pour les dixai-
nes, 5 pour les unités. Foye?^ Dixaine, &c. (£ )
Le mot calcul vient du Latin calculus , qui fignifie
une pierre, parce que les anciens fe fervoient de pe-
tits cailloux plats pour faire leurs fupputations, foit
des fommes multipliées ou divifées dans les comptes,
foit en Afti onomie 6c en Géométrie. De-là vient que
nous avons donné le nom de calcul aux Sciences des
nombres , à l'Arithmétique , à l'Algèbre. Les Romains
s'en fervoient encore pour donner les fiiffrages dans
les afiemblées & dans les jugemens ; ils marquoient
auffi les jours heureux avec une pierre blanche, d'us
albo notanda lapillo , dit Horace, & les jours malheu-
reux par une pierre noire. Ils avoient emprunté la
première de ces coutumes des Grecs , qui nommoient
ces efpeces de jettons naturels 4»P&? ; c'étoient d'a-
bord des coquilles de mer , remplacées depuis par des
pièces d'airain de la même figure , appcÛccsJpondy-
les. Deux choies diftinguoient les calculs; la forme &
la couleur. Ceux qui portoient condamnation étoient
noirs & percés par le milieu , les autres étoient entiers
& blancs. M. l'abbé de Canaye ,^dont nous avons
déjà parlé à l'article Aréopage, avec l'éloge que
méritent la fine fie de fon efprit & la variété de les
connoifl'ances , dit qu'on pourroit regarder la pré-
caution de percer les noirs comme une preuve que
les Aréopagites , qui s'en fervoient, jugeoient pen-
dant la nuit; car à quoi bon percer les calculs noirs,
fi l'on eût pu voir les uns & les autres , &c apperce-
voir , par le fecours de la lumière , la différence de
leur couleur ; au lieu qu'en jugeant dans les ténèbres
il eft clair qu'on avoit beloin d'une différence au-
tre que celle de la couleur &c relative au tact , pour
démêler les calculs de condamnation d'avec ceux qui
marquoient l'ablolution. On comptoit ces calculs ,
&c le nombre des uns ou des autres décidoit pour ou
contre l'aceufé.
On fe fervoit auffi de calculs ou bulletins pour ti-
rer les athlètes au fort dans les jeux publics , &: les ap-
parier. Voici comme la choie le pratiquoit aux jeux
olympiques, au rapport de Lucien dans ion dialogue
intitulé Hcrmotime ou des Secles. « On place , dit-il,
» devant les juges , une urne d'argent confacrée au
» dieu en l'honneur de qui fe célèbrent les jeux. On
» met dans cette urne des ballotes de la groflcur
» d'une téve, & dont le nombre répond à celui des
» combattans. Si ce nombre eft pair, onu
» deux de ces ballotes la lettre A , fur deua
» la lettre B , fur deux aunes la lettre r , Cv a
>» refte. Si le nombre eft impair, il y a de néceffité
» une des lettres employées qui ne le trouve :ii crite
>» que fur une feule ballote ; enfuite les athlètes s'ap-
» prochent l'un après l'autre , ce ayant invoque Ju-
» piter, chacun met la main dans l'urne èv: en tire
» une ballote. Mais ui\ des maitigophores ou porte-
» verges lui retenant la main , l'empêche de re^ar^
546
CAL
» der la lettre marquée fur cette ballote jufqu a ce
» que tous les autres ayent tiré la leur. Alors un des
» juges faifant la ronde examine les ballotes de cha-
» cun, & apparie ceux qui ont les lettres femblabies.
» Si le nombre des athlètes eft impair , celui qui a
» tiré la lettre unique eft mis en réferve pour le bat-
» tre contre le vainqueur ». Mém. de l Acadcm. dis
Bell. Lett. tom. I. & VIL {G )
CALCUL des nombres , lignifie , en Méchanique &
parmi les Horlogers , l'art de calculer les nombres des
roues Se des pignons d'une machine , pour leur faire
faire un nombre de révolutions donné dans un terns
donné. On ne peut parvenir à cela, qu'en modérant
la vîtefTe des roues par un pendule ou balancier, dont
les vibrations foient ifochrones. Voy. Pendule & la
fig. 2. & 3. PI. I. de l'Horlogerie , qui reprélente un
rouage de pendule ; D , la roue de rencontre ; C, la
roue de champ ; B, la grande roue , laquelle doit faire
un tour en une heure. Le mouvement lui eft commu-
niqué par la roue A adoffée à une poulie que le poids
G fait tourner en tirant en en-bas : cette roue engre-
né dans un pignon fixe au centre ou fur la même tige
que la roue B, qui doit faire un tour en une heure.
Cette roue engrené de même dans le pignon fixe fur
la tige de la roue de champ C ; cette dernière engre-
né dans le pignon de la roue de rencontre D , dont
la vîtefTe eft modérée par les vibrations du pendule ,
qui ne laiffe palier qu'une dent de la roue de rencon-
tre à chaque vibration du pendule. Mais comme cha-
que dent de la roue de rencontre , dans une révolu-
tion entière , frappe deux fois contre les palettes du
pendule , il fuit que le nombre de vibrations pendant
un tour de la roue de rencontre eft double de celui
des dents de cette roue. Ainfi , fi les vibrations du
pendule durent chacune une féconde, & que la roue
de rencontre ait 1 5 dents , le tems de fa révolution
fera de 30" ou une demi-minute. Si on fuppofe que
le pignon x de la roue de rencontre D ait fix ailes
ou dents , & que la roue de champ qui le mené en
ait 24 , il eft manifefte , vu que les dents du pignon
ne parlent qu'une à une dans celles de la roue , qu'il
faudra , avant que la roue de champ C ait fait un
tour, que le pignon x en ait fait quatre, puifque le
nombre de fes dents 6 eft contenu 4 fois dans le nom-
bre 24 de la roue. Mais on a obfervé que la roue de
rencontre , Se par conféquent le pignon x qui eft fixé
fur la même tige , employé 30" à faire une révolu-
tion ; par conféquent la roue de champ C doit em-
ployer quatre fois plus de tems à faire une révolu-
tion entière: 30" X 4= 1 20" = 2', ainii le tems de fa
révolution eft de deux minutes.
Préfentement fi on fuppofe que le pignon y fixé
fur la roue de champ ait fix ailes , & que la roue à
longue tige B ait 60 dents, il faudra que le pignon
y faffe dix tours avant que la roue B en ait fait un ;
mais le pignon y fixé fur la tige de la roue de champ
C employé le même tems qu'elle à faire une révo-
lution , Se le tems eft de 2' ; la roue B en employera
donc 10 fois davantage , c'eft-à-dire 20' ou 1200"
ou vibrations du pendule. Ainli Ton voit que le tems
qu'elle met à faire une révolution , n'eft que le tiers
de 3600" ou d'une heure , qu'elle devoit employer à
la faire. Les nombres fuppofés font donc moindres
que les vrais , puilqu'ils ne fatisfont pas au problème
propofé ; ainli on lent qu'il eft néceffaire d'avoir une
méthode fûre de trouver les nombres convenables.
Il faut d'abord connoître le nombre des vibrations
du pendule que l'on veut employer pendant le tems
qu'une roue quelconque doit faire une révolution.
Voye{ à F article Pendule la manière de déterminer
le nombre des vibrations, par cette règle, que le
quarré de ce nombre, dans un tems donné, eft en
raifon inverfe de la longueur du pendule. Divifez le
nombre par deux , Se vous aurez le produit de tous les
CAL
expofans : on appelle les expo/ans les nombres qui mar-
quent combien de tois une roue contient en nombre
de dentures le pignon qui engrené dans cette roue.
Ainli li on a une roue, de îoixante dents Se un pignon
de fix qui y engrené, l'expofant fera 10 qui mar-
que que le pignon doit faire dix tours pour un de la
roue: on écrit les pignons au-deffus des roues, &C
l'expofant entre deux en cette forte :
6 = pignon ,
10 = expofant,
60 = roue.
Lorfqu'il y a pluiieurs pignons & roues , on les écrit
à la file les uns des autres, en féparant les expofans
par le figne X (multiplié pur~) dont un des côtés repré-
lente la tige fur laquelle eft un pignon Se une roue ,
qui ne compofant qu'une feule pièce , font leur révo-
lution en tems égaux. Exemple :
0778
^2X15x6x5x7-^- &c.
15 42 35 60 B
1,2,15,6,5,7;, font les expofans ou les quo-
tiens des roues diviiés par leurs pignons. 7,7,8,
les pignons. 15, 42, 3 5 , 60 , les roues qui engrè-
nent dans les pignons placés au-deffus. Les X mar-
quent, comme il a été dit, que le pignon 7 & la roue
1 5 lont fur une même tige, ainfi que le fécond pi-
gnon 7 & la roue 42, de même le pignon 8 eft fur
la tige de la roue 35.
Théorème. Le produit des expofans doublé eft égal
au nombre des vibrations du pendide pendant une
révolution de la dernière roue B.
Démonjlration. La roue de rencontre 1 5 , ainfi
qu'il a été expliqué ci-deffus , ne laiffe paffer qu'u-
ne dent à chaque vibration du pendule : mais com-
me chaque dent paffe deux fois fous les palettes du
pendule, le nombre des vibrations, pendant une
révolution de la roue de rencontre , eft le double
du nombre de dents de cette roue ; ainfi on doit
compter 30 vibrations ou 2 X 15 : mais le pignon
7 fixé fur la tige de la roue de rencontre , fait fa
révolution en même tems que la roue fait la fien-
ne ; Se il faut qu'il faffe fix révolutions pour que la
roue 42 en faffe une ; le nombre de vibrations pen ■
dant une révolution de cette féconde roue 42 , fera
donc fextuple de celui du pignon 7 qui employé
2x15a faire fa révolution; ainfi la roue 42 em-
ployera 2x15x6 vibrations à faire une révolution
entière. Le fécond pignon 7 fixé fur la tige de cette
roue , employera autant de tems qu'elle a à faire
une révolution : mais il faut cinq révolutions de ce
pignon pour un tour de la roue 3 5 : ainfi le nombre
de vibrations pendant un tour de cette dernière roue,
fera (2X 15X 6)x 5 vibrations ; le pignon 8 em-
ployera le même tems, Se la roue 60 , 7 { fois davan-
tage, puifqu'il faut que le pignon 8 faffe y- tours,
pour que la roue 60 en faffe un : ainfi le nombre des
vibrations pendant une révolution de cette dernière
roue , fera (2X15X6X 5 ) X 7 7 , ce qui eft le
produit de tous les expofans multiplié par 2. Ce qu'il
falloit démontrer.
Dans un rouage on place ordinairement les plus
petits pignons vers l'échappement, Se les plus gros
vers le moteur : on place de même les roues plus
chargées de dentures ; ce qui fait que les plus grands
expofans fe trouvent vers l'échappement : ainii dans
l'exemple précédent, les roues 35 & 42 devroient
changer de place , pour que les expofans allaffenten
décroiffant de A vers B en cette forte :
o 579
^2X15x10X8x7 B
5° 56 63 ,
ce qui fait un roiiage qui peut être employé avec
avantage pour toutes les parties. On met le nombre
de vibrations ou produit des expofans à la fin , le-
CAL
CAL
547
paré feulement par le figne = en cette forte :
5 7 9
2X 15 X 10x8x7= 16800
M
50 56 6;
ce qui exprime le nombre de vibrations pendant une
révolution entière de la dernière roue 63.
Lors donc que l'on propote de conftruirc un roua-
ge, il faut connoître le nombre de vibrations du pen-
dule qu'on veut appliquer au rouage pendant le tems
que l'on veut qu'une roue employé à taire la révo-
lution : fuppofons que ce tems foit une heure , 6c que
le pendule batte les fécondes , c'eft-à-dire , que cha-
que vibration foit de la durée d'une féconde , une
heure en contient 3600 : ainii pendant la révolution
de la roue qui fera un tour en une heure, le pendule
fera 3600 vibrations, & ce nombre 3600 eft le dou-
ble du produit de tous les expofans 2 X r X s X t
des roues 6c des pignons qu'il faut connoître. Divi-
fez le nombre 3600 par 2, il vient 1800 qui eft le
produit de trois grandeurs inconnues r, s, t, mais que
l'on fait devoir aller en décroiflant de r à t , 6c que
l'expofant r qui représente le rochet de la roue de
rencontre , peut être double du triple de l'expofant s ,
qui ne doit furpaffer le troifieme t que d'une unité
au plus.
Pour trouver ces trois inconnues, on fuppofe une
valeur à la première r , 6c cette valeur eft un nom-
bre commode pour être un rochet , & eft toujours
un nombre impair pour une roue de rencontre. Sup-
posant que r = 30, on le dégage facilement de l'é-
quation 1800 = r s t, & on a pour la valeur de s t ,
s t = ^~ = 60. Préfentement , puifque s 6c t font
égaux ou prefqu'égaux , en fuppofant t = s, on aura
l'équation 5 s = 60; donc s = y/6o : ainfiil faut ex-
traire la racine quarrée de 60 : mais comme elle n'eft
pas exacte , on prend pour expofant la racine du quar-
ré le plus prochain, foit en-defius, ou en-deflbus, &
on divife le produit s t = 60 par cette racine, & le
quotient eft l'autre expofant, & le plus grand eft ce-
lui que l'on met le premier : ainii dans l'exemple , 64
eft le quarré le plus prochain de 60, fa racine eft 8 ;
on divife 60 par 8 , il vient 7 1 pour l'autre expofant.
On les difpofera tous an cette forte :
2x30x8x7!= 3600
Préfentement il faut trouver les pignons & les roues ,
ce qui n'eft point difficile : pour 7- on prendra 8 pour
pignon , 6c pour roue 8 fois l'expofant 7 f , ce qui
fait 60 ; pour l'expofant 8 , on prendra un pignon 7,
&c la roue fera 56 ; la troifieme roue qui eft le rochet
eft toujours égale au premier expofant :
178'
2X30x8x7^ = 3600
30 56 60
On doit obferver i°. lorfque l'expofant eft un mixte,
que le pignon doit toujours être le dénominateur de
la fraction du mixte , ou un multiple de ce dénomi-
nateur, s'il eft trop petit pour être un pignon. i°.Que
s'il y a voit trois expofans s c u, non compris le ro-
chet ou la roue de rencontre, ondevroit extraire la
racine cubique de leur produit ; cette racine cubique
ou celle du cube le plus prochain , fera un des ex-
pofans. (Z>)
CALCUL, (Médecine.) Voyei PiFRRE.
CALCULATEURS, fub. m. pi. (Hift. anc.) nom
que les Romains donnoient auv maitres d'Arithméti-
que , parce qu'ils montraient d'abord aux enfans à
calculer ou compter avec des jettons appelles en La-
lin calculï. Ce terme le trouve dans les anciens jurif-
confultes ; oc félon d'habiles critiques , il fervoit à dé-
figner les maîtres d'Arithmétique de condition libre ,
au lieu que par le mot calculants qui s'y rencontre
auffi , l'on entendoit les cfclaves ou les affranchis de
nouvelle date , qui exerçoient la même profcffîon.
Tertuhen appelle ces maîtres primi numerorum arma-
Tome II,
ni, peut-être parce qu'après avoir enfeigné aux en-
fans la manière de compter aux jettons , ils leur mon-
traient l'Arithmétique, en traçant fur le fable les figu-
res des chiffres à là manière des anciens Géomètres.
Ordinairement il y avoit un de ces maîtres pour cha-
que maifon confidérablc , 6c le titre de fa charge étoit
à calculis,à rationibus , c'eft-à-dire, officier chargé
des comptes , des calculs, (G)
CALCULER, v. a et. c'eft en général appliquer
les règles ou de l'Arithmétique ou de TAlgebre, ou
les unes & les autres à la détermination de quelque
quantité. Voye^ CALCUL. Ainfi,
Calculer en Hydraulique, eft cherchera con-
noître la force 6c la vîteffe d'un jet, d'un ruiffeau ,
d'un courant de rivière, ce qui eft la même chofe
que fa dépenfe. Voye^ Dépense.
Quand il s'agit du poids de l'eau & de fon éléva-
tion, voye^ ces deux mots & celui de Colonne. Si
l'on veut connoître le contenu d'eau d'un baflin ,
voyei Toisé des Bassins.
On ne fe fert point dans l'Hydraulique vulgaire du
calcul algébrique ; l'Arithmétique vulgaire lui a été
préférée comme plus familière à tout le monde. (/£)
CALE , f . f . ( en Architeclure. ) eft un petit morceau
de bois mince qui détermine la largeur du joint de lit
d'une pierre. Mettre une pierre fur cales, c'eft la po-
fer fur quatre cales, de niveau & à demeure, pour
enfuite la ficher avec un mortier fin. On fe fert quel-
quefois de cales de cuivre ou de plomb pour pofer le
marbre. (/*)
Cale , fond de cale , ( Marine. ) c'eft la partie la
plus baffe d'un navire qui entre dans l'eau , fous le
franc tillac ; elle s'étend de poupe en proue. Le fond
de cale comprend tout l'efpace compris depuis la car-
lingue jufqu'au franc tillac ou premier pont. C'eft le
lieu où l'on met les munitions & les marchandifes.
Voye^ Planche IV. fig. 1. n° . Ji. le fond de cale & fa
diftribution, les cloilons & féparations. Il n'y a point
d'ufage particulier pour la diftribution , qui le fait
fuivant la deftination du bâtiment.
On tient le fond de cale plus large dans les vaif-
feaux qu'on deftine pour charger à cueillette ou au
quintal , que dans les autres; parce que la diverfe
manière des paquets , des tonneaux , des caiffes , 6c
de toutes les choies qu'on y charge , fait qu'il eft plus
difficile de les bien arrimer. Voye^ Arrimer , Ar-
rimage , Cueillette.
Dans le combat,lî l'on a des prifonniers ou des ef-
claves contre lefquels on doive être en garde , on
les enferme fous le tillac dans le fond de cale.
CALE , donner la cale , ( Marine. ) c'eft une forte
d'eftrapade en ufage parmi les gens de mer, à laquelle
on condamne ceux de l'équipage qui lont convain-
cus d'avoir volé , blafphémé , ou excité quelque ré-
volte. Il y a la cale ordinaire 6c la cale fe^he : lori-
qu'on donne la cale ordinaire, on conduit le criminel
vers le plat bord , au-deflous de la grande vergue ,
& là on le fait affeoir fur un bâton qu'on lui pâlie
entre les jambes , afin de le foulager ; il embraffe un
cordage auquel ce bâton eft attaché, ôc qui répond
à une poulie fufpendue à un des bouts de la vergue.
Enfuite trois ou quatre matelots hiffent cette corde
le pluspromptement qu'ils peuvent, juiqu'à ce qu'ils
ayent guindé le patient à la hauteur de la v(
après quoi ils lâchent le cordage tout-à-coup ; ce qui
le précipite dans la mer. Quelquefois quand le crime
eft tel qu'il fait condamner celui que l'on veut punir,
à une chute plus rapide , on lui attache un boi
canon aux pies. Ce fupplice fe réitère jufqu'à cinq
fois, félon que la fentence le porte. On l'appelle cale
feche, quand le criminel eft fufpendu à une corde
raccourcie, qui ne descendant qu'à quelques pies de
la furfacede l'eau , empêche qu'il ne plonge dans la
mer; c'eft une cfpecc d'eftrapade. Ce châtiment eft
Z zz ij
548
CAL
rendu public par un coup de canon qu'on tire , pour
avertir tous ceux de l'ef cadre ou de la flotte d'en être
les ipeclateurs.
Donner la grandi cale , ou donner la cale par-deffous
la quille , ( Marine. ) c'eft une forte de punition
qu'on pratique à la mer parmi les Hollandois : on
mené le coupable au bord du vaifleau , & on y atta-
che une corde , au milieu de laquelle il eft lié par le
milieu du corps, ou bien on amené la vergue fur le
vibord , & ayant mis le coupable fur le bout , on y
attache la corde. Autour de fon corps on met quel-
que choie de pefant, ou bien on l'attache à fes pies ;
la corde eft aufîi longue qu'il Faut pour pafler fous la
quille du vaifleau ; un des bouts en eft tenu de l'au-
tre côté par quelques-uns des plus forts matelots de
l'équipage , & l'autre bout eft celui qui eft attaché au
vibord ou à la vergue. Le coupable, à l'ordre qu'en
donne le quartier-maître, étant jette à la mer, ceux
qui tiennent la corde à l'autre bord du vaiffeau, la
tirent le plus vite qu'ils peuvent, deiorte qu'il parle
avec une grande rapidité dans l'eau fous la quille.
On recommence même quelquefois , & on le jette
autant de fois que la fentence le porte. Ce châtiment
eft rude &c dangereux ; car le moindre détaut de di-
ligence ou d'adreffe de la part de ceux qui tirent la
corde , ou quelqu'autre petit accident, peut être cau-
fe que celui qu'on tire , le rompe ou bras ou jambes,
& même le cou ; auffi l'on met ce châtiment au rang
des peines capitales. ( Z )
Cale , ( Marine. ) c'eft un abri fur la côte. Voye^
Calangue.
Cale , fe dit encore d'un terrein creufé d'une cer-
taine longueur & largeur dans un chantier de conf-
truclion , préparé en pente douce , & s'étendant juf-
que dans la mer pour tirer les vaiffeaux à terre
lorfqu'il eft queftion de les radouber.
On a long-tems agité en France fi les cales étoient
plus avantageufes pour la conftruftion que les for-
mes : mais les formes paroiffent l'avoir emporté. Le
principal inconvénient que l'on trouve dans les cales,
c'eft que le vaifleau eft en danger de tomber fur le
côté quand on le tire fur la cale , ou qu'on le remet à
l'eau ; & quand le navire refte fur la cale, il ne peut
être foùtenu que par des coittes, qui ne pouvant aller
d'un bout à l'autre du vaifleau , à caufe du relève-
ment des façons de l'arriére &c de l'avant , n'en foû-
tiennent qu'une partie , pendant que le devant & le
derrière qui ne font foùtenus de rien fouffrent beau-
coup. D'ailleurs la cale étant plus étroite que le vaif-
feau , on ne peut l'épontiller d'un bout à l'autre.
Ces inconvéniens ne fe rencontrent point dans la
forme.
Pour qu'une cale foit dans fa perfection , il faut que
le fond en foit fort folide &C extrêmement uni , con-
fervant une pente douce & égale d'environ 6 à 8
lignes par pie ; deforte qu'elle devient extrêmement
longue, & peut avoir environ 6oo pies de long fur
25 à 30 pies de large. Il faut qu'elle s'étende fous
l'eau de façon qu'il y ait au moins x 1 pies d'eau au
bout , afin qu'un navire fe puiffe porter tout entier
fur la cale , Se que la quille touche d'un bout à l'au-
tre dans le même moment ; car un vaiffeau dont une
partie touche & l'autre eft flot , fouffre beaucoup.
Pour rendre le fond de la cale folide , on le fait de
grandes caiffes maçonnées qu'il faut avoir attention
de pofer de façon que le niveau de la pente foit bien
confervé ; la caiffe du bout qui eft la plus avant fous
l'eau , eft fort difficile à enfoncer. On met fur ce fond
un grillage de bois qu'on appelle échelle, qui fert à
faire gaffer le vaiffeau & y établir des couliffes pour
le tirer droit & l'empêcher de varier. On fe fert
de plufieurs cabeftans pour tirer le vaiffeau fur la
cale , & d'un bâtis de charpente qu'on appelle ber-
c-eau. Il faut pour le fervice d'une caley une échelle ,
CAL
trois berceaux, un pour les grands vaiffeaux, un pour
les moyens , &c un pour les petits , &c plulieurs ca-
beftans.
Cale , ( Marine. ) ce met fe dit enfin d'un plomb
dont on fe fert pour faire enfoncer l'hameçon au fond
de l'eau dans la pêche de la morue.
Cale, ( Marine. ) terme de commandement qui
fe fait pour laiffer tomber tout d'un coup ce que l'on
tient fufpendu. Cale-tout. (Z)
CALE-BAS , CARGUEBAS , CAL-BAS , CAR-
QUE-BAS , f. m. {Marine. ) c'eft un cordage qui
fert à amener les vergues des paefis ; il eft amarré par
un bout au racage de l'un de ces paefis , & par l'au-
tre bout à un arganeau qui eft au pié du mât ; & ce
cordage eft un palan fimple.
Calebas , ( Marine. ) c'eft aufîi un petit palan ,
dont on fe fert pour rider le grand étai. ( Z )
CALEBASSE , cucurbita , f. f. ( Hijt. nat. bot. ) gen-
re de plante dont les fleurs font faites en forme de
cloche ouverte , & pour l'ordinaire découpées de
façon qu'elles paroiffent être compofées de cinq pé-
tales : les unes de ces fleurs font ftériles , &c ne tien-
nent à aucun embryon ; les autres font fécondes &
font portées fur un embryon qui devient dans la
fuite un fruit cylindrique dans quelques efpeces , Se
fait en forme de flacon ; dans d'autres , ce fruit eft
ordinairement partagé en fix loges remplies de fe-
mences applaties , oblongues , émouffées par les deux
bouts, échancrées par le plus large. Tournefort,
Injl. rei herb. Voyc7^ Plante. (/)
CALEBASSIER d'Amérique , f. m. plante étran-
gère. Les Efpagnols l'appellent higuero ; les Anglois ,
tlte calabash-tree , &C les Botaniftes , cucurbitifera arbor
Americana. H. L.
Un arbre d'Amérique dont on ne peut prefque fe
paffer dans aucune habitation , eft le cakbaffier. Le
lecteur en va juger tout-à-1'heure.
Ses caractères. Sa fleur eft d'une feule pièce , faite
en forme de cloche , & découpée en divers fegmens.
Du calice de là fleur s'élève un piftil , qui devient
un gros fruit plein de chair, femblable à nos calebaf-
fes , revêtu d'une écorce dure & forte , & contenant
plufieurs femences faites en cœur.
Defeription du calebaffîer. Cet arbre s'élève à une
grande hauteur dans les pays chauds de l'Amérique.
Son tronc eft tortueux , couvert d'une écorce grife ,
blanchâtre , & raboteufe. Il eft divifé en plufieurs
branches , compofées d'autres plus petites . chargées
de feuilles. Son bois eft plus coriace que dur. Ses
feuilles ont quatre , cinq, fix pouces de longueur fur
un pouce de largeur , plus larges dans le milieu que
par l'une ou l'autre de leurs extrémités ; épaiffes ,
liftes , glabres , d'un verd clair en-deffous , plus obf-
cures en-deffus : elles font attachées le long des bran-
ches les unes après les autres. Ses fleurs qui croiffent
fur le tronc comme fur les branches , font d'une feule
pièce en forme de cloche , approchant affez pour la
figure à des rofes fauvages éclofes à moitié : elles font
longues d'un pouce & demi fur un pouce de largeur,
poinîillées fur leur furface , & d'une odeur defagréa-
ble. Les étamines font blanches , & le calice de la
fleur eft verdâtre, à deux feuilles arrondies, du milieu
defquelles s'élève un piftii qui devient un fruit fem-
blable aux calebaffes 6\i au potiron , de différente fi-
gure & groffeur , revêtu d'une écorce blanchâtre ,
dure , liffe , épaifîe , forte , & renfermant plulieurs
graines brunes.
Noms de fon fruit. On nomme communément ce
fruit macha-mona en Guinée , cuicle dans la Nouvelle-
Efpagne , &c coui dans nos colonies Françoifes.
On connoît que les calebaffes font mûres quand la
queue qui les attache à l'arbre fe flétrit & fe noircit;
pour lors on les détache de l'arbre. Si on veut s'en
-fervir pour mettre de l'eau ou d'autres liqueurs , on
CAL
fait près de la queue un trou d'une grandeur conve-
nable , par lequel on verfe de l'eau bouillante dans la
calebaffe pour macérer plus promptement la moelle
ou pulpe dont elle elt remplie.
Ufages de la coque de ce fruit. Après que cette pulpe
eft bien macérée , on introduit dans la calebaffe un pe-
tit bâton , pour rompre entièrement cette pulpe &c l'a
faire lortir : enfuite on y met encore de l'eau chaude
avec du gros fable , que l'on remue fortement pour
achever de détacher ce qui peut reft er de la calebajje ,
6c en polir le dedans. Quand les calebajjes font ainfi
nettoyées &c féchées , le vin & les autres liqueurs
qu'on y met s'y confervent parfaitement , &c ne con-
tractent point de mauvais goût. Lo: lqu'on veut lé-
parer une calebajfe en deux parties pour en faire deux
couis, qui font propres à une infinité d'ufages , on
l'environne avec une petite corde que l'on (erre for-
tement à l'endroit où on veut couper la calebaffe ; &c
de cette manière on la lépare en deux : mais il tant
pour cela qu'elle ne f oit ni trop (eche , ni trop traî-
chement cueillie. Etant ouverte , on la vuide faci-
lement, on en gratte le dedans avec une coquille de
. moule ou autre , pour le polir.
Les Indiens poliffent l'écorce du coui en -dedans
& en -dehors, l'émaillent fi agréablement avec du
roucou , de l'indigo , &c autres belles couleurs > que
les délicats même peuvent boire &c manger fans dé-
goût dans les divers vaiffeaux qu'Us en forment. Ils
ilefîincnt &C gravent fur la convexité , des comparti-
mens &c des grotefques à leur manière. Ils remplil-
fent les hachures de couleurs afforties , & leurs def-
feins font auffi juftes qu'on peut l'attendre de gens
qui ne fe fervent ni de règle, ni de compas. Il y a
des curieux qui recherchent ces lortes d'ouvrages ,
& qui ne les eftiment pas indignes d'une place entre
les raretés de leurs cabinets.
Ces couis font d'un ufage très-diverfifié ; & quoi-
qu'ils ne foient que de bois, on ne laiffe pas que de
les employer à y faire chauffer de l'eau. Lorfqu'ils
font rompus , leurs pièces fervent à faire des cuil-
liercs : on en fait des écumoires & des paffoircs , en
les perçant avec un petit fer rouge. C'elt la vaiffelle
ordinaire & la batterie de cuifine , tant des Caraïbes
que de nos Nègres. En un mot le calebaffîer fournit
tout feul la plus grande partie des petits meubles du
ménage des Indiens & des habitans étrangers qui de-
meurent aux îles.
Uj'ages de la pulpe. Mais la pulpe de la calebaffe leur
cft encore plus précieule que la coque : c'cft-là leur
grande panacée pour une infinité de maladies ou d'ac-
cidens. Dans toute efpcce de brûlure , ils en font une
efpecc de cataplafmc, qu'ils appliquent fur la partie
brûlée ou échaudée ; ils renouvellent de tems entems
ce cataplafmc , & le maintiennent par un bandage:
ils fuivent la même méthode pour guérir les maux de
tête caufés par des coups de foleil. Ils cuifent cette
pulpe , ou la macèrent dans des cendres chaudes ; &
du lue qu'elle fournit , ils en compofent des lavemens
pour la colique. Ils l'employcnt encore comme un
préfervatif contre tout accident dans les chûtes con-
sidérables : pour cet effet , ils vont cueillir une cale-
baffe prefque mûre, la cuifent fous des cendres chau-
des, l'ouvrent enflute , expriment ie lue de la moelle
Bans un vaie, & le donnent à boire au malade. Ne
nous moquons point ici de cette pratique ; cette boif-
fon rafraîchiffante vaut mieux en pareil cas que celle
de rintuiion des herbes vulnéraires , que plusieurs de
nos Médecins ordonnent, & que je trouve recom-
mandées djns les Mémoires deV Académie des Sciences.
Enfin les habitans de l'Amérique regardent la pul-
pe du coui comme louveraine pour arrêter les he-
morrhagies cauiees par des bleffures , pour prévenir
des abcès , pour refoudre des tumeurs par contufion ,
pour empêcher les défaillances, &c, Les pauvres
CAL
549
gens font excufables de croire à ce prétendu remè-
de : mais nos voyageurs Oviedo , Rochefort , du
Tertre , Labat , & tant d'autres , ne fe moquent-ils
pas de nous quand ils nous vantent les merveilleux
effets opérés par la moelle de calebaffe dans les der-
niers cas dont nous venons de parler ?
Culture du calebaffîer en Europe. Quoique la pulpe
de calebaffe ni fa coque ne nous touchent guère en
Europe par le peu d'utilité que nous en pouvons ti-
rer, nous avons cependant pouffé la curiofité juiqu'à
chercher à élever dans nos climats le calebaffîer d A-
mérique, & nous y avons réuffi. En voici la méthode
enfeignée par Miller , & que tout le monde né con-
noît pas.
Il faut tenir cet arbre dans un endroit de la ferre
dont le degré de chaleur foit modéré , par le moyen
du thermomètre. Il fembleroit qu'étant originaire des
pays chauds , il auroit befoin d'une très -forte cha-
leur: mais on a trouvé par expérience , que la cha-
leur tempérée lui ell beaucoup plus avantageufe. Il
demande une terre légère , fablonneufe , de fréquens
arrolemens, & beaucoup d'air en été ; autrement il
arrive que fes feuilles font mangées d'infectes , ce qui
le défigure étrangement & retarde fa pouffe. Il n'y a
d'autres moyens de prévenir ce mal ou d'y remé-
dier , que de nettoyer ibigneufement les feuilles avec
une guenille de laine , de mettre l'arbre en été à un
plus grand air , & en hyver dans un endroit plus
frais.
On multipliera le calebaffîer en plantant pendant
l'été de fes rejettons dans des pots garnis de bonne
terre , & en plongeant ces potb dans un lit de tan d'u-
ne chaleur modérée , obfervant de les arrofer & de
les abrier pendant le chaud du jour, jufqu'à ce que
les remettons ayent pris racine. Les gra'mes de cet ar-
bre , £ on les apporte fraîches dans le fruit même ,
viendront à merveille en les femant fur des couches
chaudes , & en les cultivant comme des ananas. Le
calebaffîer vient mieux de bouture que de graine , &
porte bien plutôt. On en tranfplante même en Amé-
rique de très-grands & gros , d'un lieu à un autre ,
avec fuccès , fans qu'ils en reçoivent le moindre
dommage.
De la calebaffe d'herbe d'Amérique. Je n'entrerai
dans aucun detcrtl fur une autre efpcce de calebaffe
commune en Amérique, très'-groffe, longue, qu'on
feme chaque année , & que les François de nos iles
nomment calebajje <T herbe. Ces fortes de calebajjes ne
font autre choie que la gourde européenne , plante
cucurbitacée dont la racine branchue périt toutes les
années, Se dont la graine a été portée de l'Europe
dans le nouveau monde. Leur écorce ou coque ell
beaucoup plus épaiffe que celle des calcbaljcs d'ar*-
bres, mais beaucoup moins durable , parce qu'elle
cft molle & fpongieufe : ce qui fait encore qu'elles
contfa&ent ailément un mauvais goût , & qu'elles
gâtent ce qu'on y met.
Les curieux trouveront toutes fortes de détails fur
le calebaffîer d'Amérique dans le recueil général des
voyages, Oviedo, Marcgrave, du Tertre, Rochefort,
Labat , Plumier, & Miller. Cet article ejl de M. le
CHEVALIER" DE JaUCOURT.
CALEBEG ou KILBEG , (Géog.) petite villed'lr-
lande dans la province d'Ulfter, au comte de Dun-
negal.
CALEÇONNIER , f. m. Les maîtres Peaujjîcrs-
Teinturiers en cuir prennent la qualité tic Laleçonniers ,
parce que leurs ftatuts leur donnent pouvoir de pal-
ier les cuirs propres à faire des caleçons , qu'ils peu-
vent auffi fabriquer & vendre dans leurs boutiques.
Voye^ Peaussier.
CALECOULON, ( Géog. ) petit royaume d'Afic
dans l'Inde , fur la côte de Malabar.
CALEDONIEN, (Océan) Géog. anc. & moi.
5?o
CAL
CAL
c'eft ainfi qu'on nomme quelquefois la mer qui en-
vironne l'Ecoffe , qui eft une partie de la mer du
Nord : elle s'étend depuis le nord de l'Ecoffe julqu'à
la partie méridionale de l'Iflande.
CALÉFACTION , f. f. terme de Pharmacie , qui fe
dit de l'aclion du feu qui caulé de la chaleur , ou
l'impuliion que les particides d'un corps chaud im-
priment fur d'autres corps à la ronde. Voye^ Cha-
leur.
Ce mot eft particulièrement ufité en Pharmacie,
oii l'on diftingue la caléfaclion de la coclion ; la calé-
faction n'étant en ufage que pour exprimer l'action
du feu fur quelque liqueur , ians qu'on l'ait fait
bouillir. J-oy^CocTioN & Feu. (A')
CALFAT , f. m. ( Marine. ) on nomme ainfi un
infiniment de fer , reffemblant affez à un cifeau qui
auroit la tête arrondie au lieu d'être emmanché dans
un morceau de bois , qui fert au cal/as, pour calfater
un vaiffeau. Il y a différens calfats deffinés à diffé-
rens ufages.
Calfat à fret, c'eft un infiniment qui a le bout à
demi-rond , & avec lequel on cherche autour des
têtes des clous & des chevilles s'il n'y a point quel-
ques ouvertures , afin d'y pouffer des étoupes pour
les boucher.
Calfat fimple ; celui-ci eft plus large que le précé-
dent , fie un peu coupant : on s'en fert pour faire en-
trer l'ctoupe jufqu'au fond de la couture.
Calfat double ; il eft rayé , 8e paroît comme dou-
ble par le bout : on s'en fert à rabattre les coutures.
(Z)
CALEMAR, f. m. fe dit , dans V Ecriture , d'un
vafe de plomb ou de verre plein d'encre qu'on a
placé au milieu d'une éponge mouillée , dans un pla-
teau de fayence ou de bois. On donne aufîi le nom
de calemar à un vaiffeau de cryftal, à peu -pires de
la forme d'un alambic , excepté que le bec de celui-
ci tend en -bas, & celui-là en-haut. On l'appelle
plus communément cornet à lampe.
CALEMBERG, (Gèog.) principauté d'Allema-
gne dans la baffe-Saxe , qui fait partie du duché de
BmnlVick : on l'appelle ordinairement le pays de
Hanovre.
* CALENCARDS , f. m. pi. ,( Commerce. ) toiles
peintes qui viennent des Indes &c de. Perfe : ce font
les plus eftimées des indiennes.
* CALENDARIS , ( Myth. )Yurnom donné à Ju-
non, à qui les calendes de chaque mois étoient con-
facrées , & qu'on honoroit dans ces jours par des fa-
crifîces.
* CALENDER - HERREN pu FRERES DES
CALENDES, {Hifl. mod. ) c'ell ainfi qu'on appel-
loit il y a quelques fiecles , une fociété ou confré-
rie de laïques Se d'eccléfiaftiques , établie dans pref-
que toutes les principales villes de l'Allemagne. Le
nom de frères des Calendes leur fut donné , parce qu'ils
s'affembloient le premier jour de chaque mois , que
les Latins nomment calendce: chacun apportoit à ces
affemblées de l'argent , qui étoit deftiné à prier pour
les morts , fie à être employé en aumônes. Cette el-
pece de iociété n'a plus lieu aujourd'hui.
CALENDERS, f. m. pi. (Hifl. mod.) efpecede
derviches ou religieux Mahométans, répandus fur-
tout dans la Perfe 6c dans les Indes ;àinfi nommés du
Santon Calenderi , leur fondateur. C'eft une fefte d'E-
picuriens , qui s'adonne aux plaihrs au moins autant
qu'aux exercices de fa religion , Se qui ufant de tou-
tes les commodités de la vie , pente auffi-bien hono-
rer Dieu par là que les autres feues par leurs aufté-
rités: en général , ils font habillés fimplement d'une
tunique de plufieurs pièces , piquée comme des ma-
telats. Quelques-uns ne fe couvrent que d'une peau
d'animal velue , & portent au lieu de ceinture un ler-
pent de cuivre , que leurs maîtres ou docteurs leur
donnent quand ils font profefîïon , & qu'on regarde
comme une marque de leur feience. On les appelle
abdals ou abdallas , c'eft-à-dire en Perfan ou en Ara-
be , gens confacrés à Dieu. Leur occupation eft de prê-
cher dans les marchés & les places publiques ; de
mêler dans leurs difeours des imprécations contre
Aboubekrc , Omar , & Ofman , que les Turcs hono-
rent , fie de tourner en ridicule les perionnages que
les Tartares Usbegs révèrent comme des faints. Ils
vivent d'aumônes ; font le métier de charlatans , mê-
me celui de voleurs, tk font très -adonnés à toutes
fortes de vices : on craint autant leur entrée dans les
maifons , que leur rencontre fur les grands chemins ;
& les magiftrats les obligent de fe retirer dans des ef-
peces de chapelles bâties exprès proche des mofquées.
Les Calenders reffemblent beaucoup aux Santons des
Turcs. Voyei Santon. ( G )
CALENDES, f. f. pi. calendes, c'étoit dans la Chro-
nologie Romaine, le premier jour de chaque mois.
Voye^ Mois.
Ce mot eft formé du Latin calo , ou plutôt du Grec
v.a.\îm, f appelle ou je proclzme, parce qu'avant la pu-
blication des faites Romains, une des charges des
pontifes étoit d'obferver la nouvelle lune, fie d'en
donner connoiffance au rex facrificulus ; alors, après
avoir offert un facrifice , le pontite ajournoit le peu-
ple au capitole , & là il publioit à haute voix le nom-
bre des calendes , ou quel jour f croient les nones ; ce
qu'il faifoit en répétant cette formule , calojuro no-
vellce , autant de fois qu'il y avoit de jours de calen-
des. C'eft de-là qu'eft venu le mot calendce, de calo ,
calare, appeller ou publier. C'eft la raifon qu'en don-
ne Varron. Plutarque , fie après lui Gaza , dérivent ce
mot de clam, quia luna calendis clam fit ; mais cela pa-
roit cherché trop loin :■. d'autres font venir ce nom
de ce que le peuple , étant affemblé ce jour-là , le pon-
tife nommoit ou publioit les jours de fêtes qui dé-
voient arriver dans le mois. Cette coutume continua
julqu'à l'an de Rome 450 , où Caius Flavius édile
curule, ordonna que l'on affichât les faftes ouïe ca-
lendrier dans les places publiques, afin que tout le
monde pût connoître la différence des tems, &c le re-
tour des fêtes. Voye^ Fastes.
Les calendes fe comptoient à reculons, ou dans un
ordre rétrograde : ainfi , par exemple , le premier de
Mai étant les calendes de Mai , le dernier ou le tren-
tième d'Avril étoit le pridie calendas ou le lecond des
calendes de Mai; le vingt-neuf d'Avril, le troiiïeme
des calendes, ou avant les calendes, fie ainfi de iuite en
rétrogradant jufqu'au treizième, où commençoient les
ides que l'on comptoit pareillement en rétrogradant
jufqu'au cinquième qui étoit le commencement des
nones; elles le comptoient toujours de même julqu'au
premier jour du mois , qui étoit les cale/idts d'Avril.
Voye^ Nones 6-Ides.
On a renfermé dans les vers fuivans les règles du
comput par calendes.
Prima dies menfis cujufque efl dicta calendce;
Sex Malus nonas , Oclober, Julius 6- Mars
Quatuor at reliqui : dabit idus quilibet ocio.
Inde dies reliquos omnes die efje calendas,
Quos rétro numerans dices à menfefequente.
Pour trouver le jour des calendes qui répondent à
chaque jour du mois où l'on eft, voyez combien il y
a encore de jours du mois qui relient , 6c ajoutez deux
à ce nombre. Par exemple, luppolons que ion foit
au vingt-deux d'Avril , c'eft donc le 1 oe des calendes
de Mai : car Avril a 30 jours; Se 22 ôtés de 30, don-
nent 8 pour refle , auquel ajoutant 2, là lomme eft 10.
La raiion pour laquelle on ajoftte z, c'ell que le der-
nier du mois s'appelle Jècundo calcndas, d'où il s'en-
fuit que le pénultième ou le 29e doit s'appeller tertio
calendas, l'antépénultième ouïe 28e quarto caandas,
CAL
CAL
& ainfi de fuite. Or fi de 30 on ôte 29 , il refte 1 , nu-
quel par conséquent il faut ajouter 2 pour avoir le
urtïo calendas : de même fi de 30 on ôte 28 , il refte 2
auquel il faut ajouter 2 pour avoir le quarto calen-
das , &c.
Les auteurs Romains ne favent pas trop eux-mê-
mes la raifon de cette manière ablurde & bifarre de
compter les jours du mois, néanmoins on s'en iert
encore aujourd'hui dans la chancellerie Romaine ;
& quelques auteurs , par une afte&ation frivole d'é-
rudition, la préfèrent à la méthode commune qui eft
bien plus naturelle 6c plus ailée. Voye^ An, Nones,
Jour, Ides.
Cette manière de compter par calendes étoit fi par-
ticulière aux Romains, qu'elle a donné lieu àuneef-
pece de proverbe encore en ufage aujourd'hui : on
dit qu'on fera une chofe aux calendes greques , pour
dire qu'on ne la fera jamais, parce que les Grecs ne
comptoient point par calendes. Charniers*
* CALENDRE , f. m. machine qui fert à tabifer 6c
à moirer certaines étoffés , & à cacher les défauts des
toiles 6c de quelques autres étoffes. Cette machine
qu'on voit fig. z. PI. XI. des manufactures en foie ,
eft composée de deux montans ^4i>, ab, fixés en A a,
dans un bâtis de gros bois de charpente , ou dans un
maffïf de pierre C D c d; ce maffif eft couvert d'un
grand bloc de marbre E A F e a /qui embrafié par
chacun de fes bouts un des montans, 6c defeend en-
fiiite en plans inclinés : les deux plans inclinés font
féparés par une grande furface plane : ce marbre s'ap-
pelle la table inférieure de la calendre : fa partie plarfe
H h eft garnie d'une plaque de cuivre d'un pouce d e-
paificur; les montans A B, a b, font ouverts félon
la longueur de la calendre , chacun de deux ouvertu-
res iï,kk; II, K K. Les trois ouvertures k k, K K,
II, (ont chacune garnies d'une poulie; les montans
font encore conlolidés par une traverfe B b : on re-
marque à celui qui cil marqué AB , un boulon percé
dans ion milieu, & tenu par deux pitons cloués fur
les côtés du montant. On voit fur la table deux rou-
leaux L, l, 6c fur ces rouleaux une forte pièce de
bois O M N n o p , dont la furface inférieure M N
n m, imite celle de la table ; fes extrémités MN, m n,
font coupées en plans inclinés, 6c fa partie N n eft
plate & garnie pareillement d'une table de cuivre
d'un pouce au moins d'épàiffeur; à chaque extrémité
de cette pièce de bois , lur le milieu , eff aflcmblé per-
pendiculairement lin montant O P, o p ; chacun de
ces montans OP , o p, eff percé de deux ouvertures,
félon la longueur de la calendre , qq ,r r, QQ, R R;
& il y a dans chacune de ces quatre ouvertures une
poulie; les extrémités fupéricures des montans O P ,
o p , font confolidées 6c ioûtenues par une forte barre
de fer P p qui les traverfe. Sur le bois O MN nm o
eft aflis un maffif de pierre détaille use V S T du plus
grand poids. A l'une des extrémités de la calendre eft
un plancher A B C D. Sur le milieu de ce plancher
eft arrêté une efpece de treuil ou tourniquet .F G HE,
à la partie fupérieure duquel, au-deflbus du tambour,
eff adapte un levier ou bras ouaiflélier I K, qui por-
te à fon extrémité K un bout de traverfe armé de
deux pitons ou anneaux L L. Une corde attachée au
boulon x paffe fous la poulie Q Q , revient deflus la
même poulie, paffe fous la poulie / /, revient deffus la
même poulie, paffe fous la poulie/? R, revient deffus
la même poulie, paffe fous la poulie K K , revient def-
fusla même poulie, & fe rend fur le tambour fupé-
rieur G du tourniquet F E. Une corde fixée à la bro-
che y paffe deffous la poulie rr, revient deffous la
même poulie, paffe deffus la poulie k k, revient def-
fous la même poulie, paffe deffus la poulie .;./, re-
vient délions la même poulie, traverfe le montant
a b par l'ouverture ii, & fe rend fur le tambour in-
férieur H du tourniquet FE , fous le plancher A B
5 5 ï
C D. La corde x & la cordej s'enveloppent fur leurs
tambours , chacune en fens contraire. Si donc on at-
telle un cheval au bras IK,6i qu'il fa fie envelopper
la corde x G fur le tambour G ; la maffe MN nm 6c
tout fon équipage avancera dans la direction m M,
6c à mefure que la corde x G s'enveloppera fur le
tambour G, la corde y H fe développera de deffus le
tambour H. Si la corde x G fe développe de deffus
fon tambour G, la corde y H s'enveloppera fur le
fien , 6c la maffe MN nm 6c tout fon équipage re-
viendra dans la place M n. On a donc par ce mécha-
nifme le moyen de faire aller & venir la maffé M N
n m 6c toute fa charge ; & cette machine eft ce qu'on
appelle une calendre.
L'ufage de cette machine eft, comme nous avons
dit, de tabifer & de. moirer: on entend par moirer ,
tracer fur une étoffe ces filions de lultre qui fembient
fe fuccéder comme des ondes qu'on remarque nir
certaines étoffés de lbie & autres, & qui s'y corner*
vent plus ou moins de tems; & il n'y a de différence
entre tabifer 6c moirer, que celle qui eft occ..;.
par la groffeur du grain de l'étoffe ; c'eft-à-dire , que
dans le tarais, le grain de l'étoffé n'étant pas confidéra-
ble, les ondes ie remarquent moins que dans le moiré
où le grain de l'étoffe eft plus confulérable. L'opéra-
tion de la calendre n'eft pas entièrement la même pour
toutes les étoffes , 6c l'on ne moire pas préciicment
comme l'on tabife : pour moirer on prend un coutil ,
& un rouleau L ou /, comme on le voit fous la ca-
lendre ; on fait faire au coutil un tour fur le rouleau ;
on plie l'étoffé à moirer en deux félon la longueur,
eriforte que la lifiere fe trouve fur la lifiere. Puis on
la met en zig-zag, enforte que l'étendue de chaque
zig-zag foit à peu près celle du rouleau , & que cha-
que pli couvre en partie celui qui le précède, 6c foit
couvert en partie par celui qui le fuit , comme on
voit même PL fig. z. A B eft le rouleau ; 1,2,3,
4, 5 , 6 , 7, &c. îbnt les zig-zags de l'étoffe. On en-
veloppe l'étoffe ainfi pliée en zig-zag fur le rouleau ,
obfervant de ferrer chaque tour à force de bras , les
uns contre les autres , par le moyen du coutil ; Se
l'on continue de plier en zig-zag , & d'envelopper
jufqu'à la fin de la pièce. On ne met guère fur un
rouleau plus de trente à trente-cinq aunes de gros
grain , comme moire , cannelé , & autres femblables,
& guère plus de cinquante aunes , fi c'elt un petit
grain ; le coutil qui enveloppe n'en a pas plus de fix ,
fur trois quarts de large. On appelle fourreau, cette
enveloppe de coutil qui fuit tous les tours de i e-
toffe en zig-zag fur le rouleau. Il faut obferver quand
on roule la pièce à moirer de mettre la lifiere en
ù.cc de foi , ce de mouiller la tête du fourreau , afin
d'arrêter l'étoffe & le fourreau fur le rouleau.
Lorfque le rouleau eff ainli charge , on le fait paf-
fer fous la calendre , 6c on lui en donne vingt-cinq
tours. On entend par un tour une allée èv pne Ve-
nue, c'eff-à-dire qu'on fait aller ce venir la maffe
M N n m avec fa charge vingt-cinq ibis. On retire
enfuite le rouleau , on déroule l'étoffe , puis on la re-
met en zig-za<; , mais de manière que les parties de
l'étoffe, qui faifoient l'extrémité des premiers zig-
zags, ta lient le milieu de ceux-ci. Cela fait, on la re-
met lous la calendre, 6c on lui donne encore quinze
tours , après lefquels on retire le rouleau , on iL\ e-
loppe l'étoffé , ce on la dreffe ; la dreffer , c'eft la met-
tre en plis égaux d'une demi aune, niais non pas en
zig-zag, finis toutefois l'ouvrir; quand elle eft dref-
fée, on la preffe à chaud. La preffe des CaL
n'a rien de particulier : on a des plaques de ter chaud
de la grandeur de l'étoffé pliée; on met une ;
de fer chaud tiède ,on la couvre d'une feuille de car-
ton; on met l'étoffe pliée fur ce carton ; on met une
autre plaque de ter chaud fur l'étoffe avec unt
feuille de carton , ce on ferre le tout à fores de bras.
551
CAL
Cette précaution de preffer à chaud l'étoffe moirée ,
fait tenir l'onde plus long-tems ; l'ans la preffe , l'hu-
midité agirojt tellement lur les ondes, qu'elle les ef-
faceroit dans les envois qu'on fait au loin des étoffes
moirées. On preffe tous les draps à plaque chaude ,
excepté l'écarlate.
Il s'entait de ce qui précède , que la moire n'eft ni
un effet du travail de l'étoffe , ni un effet de la tein-
ture ; que ce n'eft autre choie que les différentes im-
preffions des plis de l'étoffe fur elle-même ; ces plis ap-
pliqués fur l'étoffe par un poids immenfe , en écralent
le grain en zig-zag , & forment en entraînant le rou-
leau , ces ondes ou reflects de lumière qui frappent
û agréablement les yeux. Le maffif de pierre ust,
VST, eft ordinairement de vingt-lîx à vingt-lépt mille
livres pelant : on le pouffe à la calcndre royale jufqu'à
quarante mille.
Pour tabifer, on plie en deux, mais on ne fait
point de zig-zag ; on fe contente de bien rouler
l'étoffe fur elle-même, & de bien ferrer les tours les
uns fur les autres. L'étoffe étant foible , fi on la met-
toit en zig-zag comme pour moirer , elle ne pour-
roit foùtenir limpreffion des plis appliqués par le
poids , fans s'érailier & même fe déchirer. Quand on
preffe les étoffes tabifées, c'eft à froid; on oblerve feu-
lement d'en féparer chaque lit par des planches.
Mais ibit moire , l'oit tabis , les étoffes ne paffent
qu'une nuit lous la preffe.
Les belfamines qui font fil & foie fe tabifent feule-
ment. On ne met les damas fur fil à la calendre que
pour les unir , leur donner plus d'ceil , les faire paroî-
tre ferrés, & les allonger. L'allongement eft de trois
aunes fur quarante , félon toutefois que la chaîne a été
plus ou moins tendue , & la trame plus ou moins
frappée ; les étoffes de Paris , les latins fur coton ,
la papeline , s'étendent à la calendre : mais quand
cette dernière eft déroulée , elle fe remet dans le
même état ; ce qui eft commun à toutes les étof-
fes en laine. Il y a des camelots qui fe moirent , mais
c'eft à force de cakndre & de preffe à feu. On calendre
les toiles à carreaux & les toiles de coton ; les toiles
de coton , pour les faire paroître ferrées. Les toiles à
carreaux s'étendent beaucoup & ne fe remettent pas.
La calendre écrafe les fleurs des fiamoifes à fleurs &
d'autres étoffes figurées , & les empêche d'avoir du
relief. Les fiamoifes à raies font expoiées à un incon-
vénient fous la calendre, c'eft de faire ferpenter leurs
raies. On donne à ces étoffes, & aux toiles à carreaux ,
dix à douze tours , en deux reprifes ; après les fix
premiers tours , elles le lâchent tellement fur le rou-
leau qu'il faut les refferrer. On donne plus ou moins
de tours , félon que l'étoffe eft plus ou moins dure.
Les papelines ne ie preffent point ; il faut les tenir
roulées , afin qu'elles ne fe retirent pas. On preffe les
toiles à carreaux , à coton ; mais on oblerve d'a-
voir des ais & de les rouler deffus ; autant de pièces ,
autant d'ais. Les fiamoifes & les toiles communes fe
preffent feulement , cueillies ou faudées , c'eft-à-di-
re plis fur plis.
Il n'eft permis qu'aux maîtres Teinturiers d'avoir
des calcndres. On paye la moire deux fous par aunes;
les belfamines , un fou ; les tabis , fix blancs ou deux
fous ; les autres étoffes , à peine un liard ; les toiles
communes , un liard.
Les rouleaux dont on fe fert font de charme ; ils
ont trois pies huit pouces de longs , y compris les
pommes ou poignées , fur fix à lept pouces de dia-
mètre. Ils fervent tout au fortir des mains du Tour-
neur ; ils ne font pas tous également bons : les fila-
menteux & blancs font préférables aux durs & roux.
Ces premiers ne fe paîtrifient ni ne le caffent. S'il ar-
rive à un rouleau de s'écrafer , il faut arrêter fur le
champ la calendre ; fans cela , les tragmens du rouleau
jCOuperoient l'étoffe.
CAL
Quand les pièces ont peu d'aunage , on les calen-
dre les unes fur les autres; le moins qu'on en puiffe
calendrer à la fois, c'eft douze ou quinze aunes, quand
elles ne fe doublent pas ; & lept à huit aunes , quand
elles fe doublent ou plient en deux. Toutes les étoffes
ne fe ferrent pas lur le rouleau également bien.
Quand on les apperçoit lâches, il faut les dérouler.
Pour empêcher les pièces de fe décharger les unes fur
les autres , ou on les fait leules, ou on les fépare par
des papiers blancs fur le même rouleau. Quand on
a des rouleaux neufs , il eft à propos de les faire tra-
vailler d'abord avec des pièces qui loient en largeur
de toute'la longueur de ces rouleaux. Il arrive d'en
perdre jufqu'à vingt, trente, quarante en une fe-
maine.
Lorlqu'on s'apperçoit qu'il fe forme un bourlet à
l'étoffe moite , ou qu'étant lèche &c la calendre gliffant
deflus, le rouleau le dérange, on le remet en place
avec une mailloche ; ce qui s'appelle en terme de
l'art , châtier le rouleau.
Mais la manière dont on fait mouvoir la maffe
M N ,n m , avec la charge , n'eft pas la leule qui foit
en ula&e. Il y a des calendres où la p:ece de bois MNy
nm , eft toute plate , comme on voit même Pl.fig. J.
La table inférieure eft terminée à les deux extrémités
G g en plans inclinés; il y a à la maiïe ust, U S T f
deux anneaux P p ; il palfe dans ces deux anneaux
deux crochets R r ; ces crochets font attachés aux
extrémités de deux cables , dont l'un fe roule fur
l'arbre XX; quand l'autre le développe , on fait tour-
ner l'arbre XX , par la grande roue Y Y, dans la-
quelle des hommes montent , tantôt d'un côté , tan-
tôt de l'autre; ce qui fait aller & venir la maffe MN ,
nm , avec fa charge & les rouleaux L l qu'elle preffe ;
quand on veut retirer les rouleaux, on fait avancer
la maffe MN, nm, vers l'une des extrémités de la ta-
ble G g, jufqu'à ce que la partie de cette maffe, qui
correfpond à un des plans inclinés étant plus lourde
que l'autre, & l'emportant en haut, comme on voit
dans la figure , elle n'appuie plus deffus le rouleau.
Il y a à Paris deux calendres royales , la grande &
la petite ; la grande a fa table inférieure d'un mar-
bre bien uni, &c la fupérieure d'une plaque de cui-
vre bien polie : la petite a les deux tables de fer ou
d'acier bien poli ; au lieu que les calendres ordinaires
des Teinturiers n'ont que des tables de bois.
Avant M. Colbert il n'y avoit point de calendre
en France; c'eft à l'amour que ce grand miniftre avoit
pour les arts & pour les machines utiles , que nous
devons les premières calendres.
On prétend que la calendre à roue eft meilleure que
la calendre à cheval , parce qu'elle a le mouvement
plus égal & plus uni ; relie à favoir fi un peu d'irré-
gularité dans le mouvement eft un défavantage ,
quand il s'agit de former des ondes fur une étoffe.
CALANDREUR , f. m. ( Commerce ) c'eft ainfi
qu'on appelle dans quelques manufactures , l'ouvrier
qui met les étoffes fous la calendre.
CALENDRIER , f. m. ( Hift. & Afiron. ) c'eft une
diftribution de tems accommodée aux ufages de la
vie ; ou bien c'eft une table ou almanach qui con-
tient l'ordre des jours, des femaines , des mois , des
fêtes, &c. qui arrivent pendant le cours de l'année.
Voye? Tems , Année , Mois , Fête.
Il a été appelle caLndrier, du mot calendœ, que l'on
écrivoit anciennement en gros caraeferes au com-
mencement de chaque mois. Vaye\ Calendes.
Le calendrier Romain , qui eft encore en ufage,
doit Ion origine à Romulus : mais depuis il a fubi dif-
férentes réformes. Ce légillateur diftribuale tems en
différentes périodes , pour l'ufage du peuple qui vi-
vent fous ton gouvernement : mais comme il étoit
beaucoup plus \ eilé dans la guerre que dans les ma-
tières auronomiques , il ne divila l'année qu'en dix
mois,
C A L
CAL
înoîs , qui étoient alternativement de trente-un & de
trente jours : elle commencent le premier de Mars ;
& Romulits croyoit qu'au moyen de cette distribu-
tion l'année recommençoit toujours au printems ;
s'imaginant que le foleil parcouroit toutes les lailbns
.dans l'eipace de trois cents quatre jours ; au lieu
qu'en effet il s'en falloit foixante-un jours que cette
année ne s'accordât avec la vraie année folairc.
Le calendrier de Romulus tut réformé par Numa ,
qui y ajouta deux mois de plus , Janvier tk. Février,
qu'il plaça avant le mois de Mars : de plus Numa or-
donna que le mois de Janvier auroit vingt-neuf jours,
Février vingt-huit , tk les autres mois alternative-
ment trente-un &c vingt-neuf, excepté Août & Sep-
tembre , qui en avoient vingt-neuf chacun; de ma-
nière que l'année de Numa confiitoit en trois cents
cinquante-cinq jours , & commençoit au premier de
Janvier : il s'en falloit dix jours par an, tk. quarante-
un jours au bout de quatre ans , que cette année ne
s'accordât avec le cours du foleil ; & l'année Gre-
que lunaire qui étoit de trois cents cinquante-quatre
jours , donnoit en quatre ans quarante-cinq jours d'er-
• reur. Cependant Numa, à l'imitation des Grecs,
aima mieux faire une intercalation de quarante-cinq
jours , qu'il divifa en deux parties , intercalant un
mois de vingt-deux jours à la fin de chaque deuxiè-
me année , tk à la fin de deux autres années fuivantes
un autre mois de vingt-trois jours. Ilappella ce mois
ainfi interpofé , le Macédonien ou le Février interca-
laire.
On ne fut pas long-tems fans s'appercevoir du dé-
faut de cette intercalation , & on y ordonna une ré-
forme, foyer An.
Mais cette réforme étant mal obfervée par les pon-
tifes auxquels Numa en confia le foin , occafionna de
grands defordres dans la conititution de l'année.
Céfar , en qualité de fouverain pontife , tâcha
d'y remédier : dans cette vue il s'adreiTaàSofigenes,
célèbre aftronomc de l'on tems : cet altronome trou-
va que la dillribution du tems dans le calendrier ne
pourroit jamais être établie fur un pié bien fur , fans
avoir auparavant obiérvé avec beaucoup de foin le
cours annuel du loleil : Se comme le cours annuel
du foleil ne s'achève qu'en trois cents foixante-cinq
jours lîx heures , il réduiiit Tannée à ce même nom-
bre de jours. L'année de cette correftion du calen-
drier fut une année de confufion ; car on fut obligé ,
afin d'abloibcr l'erreur de foixante-fept jours dans
laquelle on étoit tombé , & qui étoit caufe de la con-
fulion, d'ajouter deux mois outre le Macédonien, qui
fe trouvoit avoir lieu clans cette même année ; de
manière qu'elle fut compolée de quinze mois, ou de
cents quarante-cinq jours. Cette réformation
le fit l'an de Rome 708 , quarante-deux ou quarante-
irois ans avant J. C.
Le calendrier Romain , que l'on appelle aulîi ca-
Julitn, du nom de Jule Ccfar l'on réforma-
teur, eft difpofé eu périodes de quatre années ; les
premières années, qu'on appelle communes,
ont trois cents foixante-cinq jours; cv la quatrième,
t) ée biffextile , en a trois cents foixante-fix , à
caufe des iix heures qui dans l'eipace lie quatre ans
compofent un jour. Il s'en faut à la vérité quelque
chofe ; en effet , après un efpace décent trente-
quatre ans, il faut retrancher un jour intercalaire. Ce
lut pour cette raifon que le pape Grégoire XIII. f'ui-
vant les confeils de Cïavius & deCiaconius, ordon-
na que la centième année de chaque fiecle ne feroit
point biffextile , excepté celle de chaque quatrième
fiecle; c'eft-à-dire, que l'on feroit une fouftraûion
de trois jours biilextiles dans l'eipace de quatre fie-
cles , à caufe des onze minutes qui manquent dans
les Ux heures dont la biffextile ell compolée. Voya
BiSbEXTILE.
Tome II.
ï5S
La reformation du calendrier , ou le nouveau lty-i
le , ainfi qu'on l'appelle en Angleterre , commença
le quatrième Octobre 1 582 , où l'on retrancha tout»
d'un-coup dix jours qui , faute d'avoir tenu compté
des onze minutes, s'étoient introduits dans le com-
put depuis le concile de Nicée en 325 ; ce concile
avoit fixé l'équinoxe pafchal au 21 de Mars,
Le calendrier Julien des Chrétiens ell celui dans le-
quel les jours de la femaine font déterminés par les
lettres sï,B,C,D,E, F, G , au moyen du cycle
folaire; & les nouvelles & pleines lunes, particu-
lièrement la pleine lune de Pâque , avec la fête dé
Pâque 6v les autres fêtes mobiles qui en dépendent j
par celui des nombres d'or, difpofés comme il faut
dans tout l'eipace de l'année Julienne. Foyei Nom-
bre d'or 6' Cycle solaire;
On luppofe dans ce calendrier que l'équinoxe d'au-
tomne eft fixé au vingt-unième de Mars ( V. Equi-
noxe ) , & que le cycle de dix-neuf ans, ou les nom-
bres d'or , indiquent conftamment les lieux des nou-
velles & pleines lunes : cependant l'une & l'autre de
ces fuppofitions eft erronée. ( Voye^ Cycle. ) Auffî
cette erreur fit naître une fort grande irrégularité
dans le tems de la Pâque.
Pour démontrer cette erreur d'une manière plus
évidente , appliquons cette méthode de comprit à
l'anné 171 5 , où l'équinoxe du printems tomboit au
10 de Mars, fuivant le vieux ftyle , &c au 21 fuivant
le nouveau : la vraie pleine lune d'après l'équinoxe
tomboit au 7 d'Avril; ainli c'étoit trois jours trop
tard par rapport au cycle lunaire ou nombre d'or ,
qui donnoit cette année la pleine lune pafchale le 10
d'Avril ; or le 10 d'Avril fe trouvant un dimanche,
la Pâque doit être remife au 1 7 fuivant la règle ; ain-
fi la Pâque qui devroit être le dixième d'Avril , ne
feroit que le dix-feptieme. L'erreur confilfe ici dans
la poft-poiition de la pleine lune ; ce qui vient du
défaut du cycle lunaire : fi la pleine lune eût tombe
le onzième de Mars , Pâque auroit tombé le treiziè-
me du même mois ; ainfi l'erreur qui vient de l'an-
ticipation de l'équinoxe , auroit excelTivemcnt aug-
menté celle qui procède de la poft-poiition. Foye£
MÉTEiMPTOSE.
Ces erreurs étoient û multipliées par la fucceffion
du tems, que Pâque n'avoit plus aucune régularité
dans le calendrier. Ainli le pape Grégoire XIII. eri
1582 retrancha dix jours du mois d'Ôétobrc , pour
rétablir l'équinoxe dans fa vraie place , c'eft-à-dire ,
au vingt-unième de Mars. Il introduilit de cette ma-
nière la forme de l'année Grégorienne , ordonnant
que l'on prendroit toujours l'équinoxe au vingt-
unième Mars. Ce pape déclara qu'on n 'indiquèrent
plus les nouvelles tk pleines lunes par les nombres
d'or, mais par les épaftes. Voyt{ Epacte. Cepen-
dant on fuit encore aujourd'hui (en 1749) l'ancien
calendrier en Angleterre fans cette correction ; &c c'eft
ce qui caufe une dilîerence de onze jours entre le
comput des Anglois & celui de la plupart des autres
nations de l'Europe.
Le calendrier Grégorien eft donc celui qui détermi-
ne les nouvelles & pleines lunes , le tems de la Pâ-
que , avec les têtes mobiles qui en dépendent dans
l'année Grégorienne , par le moyen des épactesdif-
es dans les différens mois de l'année.
( 'ell pourquoi le calendrier Grégorien cil différent
du calendrier Julien; i°. par la forme de l'année ( foy»
An); 20. par les épactes qui ont été iùbftituees au
lieu des nombres d'or : quant à leur ufage Cv à leur
difpofition, voye^ Epacte.
Quoique le calendrier Gngo-i:n (bit préférable au
calendrier Julien, il n'eft pas cependant lans défaut :
peut-être n'eft-il paspoflible,ainfiqueleconjeôurent
Caffini & Tycho-Brahé . de porter ce comput à une
jufteffe qui ne laiilé rien à defirer ; car premièrement
ÂAaj
554
CAL
CAL
l'intercalation Grégorienne n'empêche pas que 1 e-
quinoxe n'arrive après le vingt-unième de Mars ; ce
n'eft quelquefois que le vingt-troiiieme ; & quelque-
fois l'equinoxe anticipe , en tombant le dix-neuvie-
me ; Se la pleine lune qui tombe le vingtième de
Mars 5 eft alors la vraie lune pafchale : néanmoins
dans le talendrien Grégorien on ne la compte pas pour
telle. D'un autre côté , dans ce calendrier on prend
pour la lune pafchale la pleine lune duvingt-deuxie-
me de Mars, qui cependant n'eft point pafchale lorf-
qu'elle tombe avant l'equinoxe : ainfi dans chacun
de ces deux cas le calendrier Grégorien induit en er-
reur. Déplus le comput par épatles étant fondé fur
les lunes moyennes , qui peuvent néanmoins précé-
der ou luivre les vraies lunes de quelques heures ,
la pleine lune de Pâque peut tomber un famedi ,
lorique l'épacle la met au dimanche ; & au contraire
l'épactc peut mettre au famedi la pleine lune qui eft
le dimanche : d'où il fuit que dans le premier cas la
Pâque eft célébrée huit jours plus tard qu'elle ne le
doit être ; dans le fécond cas elle eft célébrée le vrai
jour de la pleine lune , avec les Juifs & les hérétiques
quarto-décimans , condamnés pour de bonnes rai-
fons par le concile deNicée; ce qui eft, dit M/SVolf,
un inconvénient fort à craindre. Scaliger fait voir
d'autres défauts dans le calendrier Grégorien : c'eft ce
calendrier que fuivent les Catholiques Romains , &
même la plupart des Proteftans. Foyei les articles
Epacte & Pasque.
Le calendrier réformé ou corrigé, eft celui où fans
s'embarraiTer de tout l'appareil des nombres d'or ,
des épa£tes,des lettres dominicales, on détermine
l'equinoxe , avec la pleine lune de Pâque Se les tè-
tes mobiles qui en dépendent , par les calculs aftro-
nomiques , fuivant les tables Rudolphines.
Ce calendrier fut introduit dans les états Proteftans
d'Allemagne l'an 1700 , où l'on retrancha tout-d'un-
coup onze jours du mois de Février ; de manière
qu'en 1700 Février n'eut que dix-huit jours : par ce
moyen le ftyle corrigé revint à celui du calendrier
Grégorien. Les Proteftans d'Allemagne ont ainii re-
çu pour un certain tems la forme de l'année Grégo-
rienne , jufqu'à ce que la quantité réelle de l'année
tropique étant enfin déterminée par observation,
d'une manière plus exaâe , les Catholiques Romains
puiffent convenir avec eux d'une forme plus exacte
Se plus commode.
Conflruclion d'un calendrier ou d'un almanach. i°.
Calculez le lieu de la lune Se du foleil pour chaque
jour de l'année ; ou bien prenez-les dans les éphé-
mérides. Foye[ Soleil & Lune. z°. Trouvez la let-
tre dominicale, Se par fon moyen divifez le calen-
drier en femaines. Foye^ Lettre dominicale. 30.
Calculez le tems de la Pâque , Se déterminez par-là
les autres fêtes mobiles. Foye^ Pasque. 40. Ecrivez
aux jours marqués les fêtes immobiles , avec les noms
des faints qu'on y célèbre. 50. Marquez à chaque
jour le lieu du foleil & de la lune , avec leur lever &
leur coucher ; la longueur du jour & de la nuit ; le
crépufcùle Se les afpects des planètes. 6°. Mettez aux
endroits qui conviennent les principales phaies de
la lune. Foye^ Phase. Mettez-y auffi l'entrée du fo-
leil dans les points cardinaux , c'eft-à-dire , dans les
folftices Se dans les équinoxes , avec le lever Se le
coucher des planètes, particulièrement leur lever Se
leur coucher héliaque , Se ceux des principales étoi-
les fixes. On trouvera les méthodes pftur ces différens
calculs aux articles qui leur font particuliers.
La durée des crépufcules, c'eft-à-dire , la fin de
l'après-midi Scie commencement du matin , avec le
lever ôc le coucher du foleil, & la longueur des jours ;
tout cela peut être tranfporté des calendriers d'une
année dans ceux d'une autre , la différence étant
trop petite dans chaque année pour être de quelque
confidération dans l'ufage civil.
Ainfi la conftruction d'un calendrier n'a rien en foi
de fort difficile , pourvu que l'on ait fous la main des
tables des mouvemens céleftes. F. Ephémérides.
Le calendrier Gélalîen eft une correction du calen-
drier Perfan : elle fut faite par Tordre du fultan Géla-
leddan , la 467e année de l'hégire , & de J. C. 1089.
La correction du calendrier ordonnée par ce fultan eft
telle , qu'elle donne fort exactement la grandeur de
l'année. Voye\ An.
Dans le calendrier des Juifs il y a tin cycle de 19
années commençant à une nouvelle lune que les
Juifs feignent être arrivée un an avant la création ;
cette nouvelle lune eft appellée par eux molad toh.u ;
Se clans le cycle de 19 années , qui font des années
lunaires, la 3e, la 6e, la 8e, la 11e, la 14- , la 17e,
Se la 19e, font des années embolifmiqucs de 383
jours 21 heures ; les autres font des années communes
de 3 54 jours , 8 heures.
Dans le calendrier des Mahométans , il y a un cycle
de 30 années , dans lequel les années 2 , 5,7, 10 ,
13, 15, 1 8 , 2 1 , 24 , 26 , 29 , font embolifmiques ou
de 3 5 5 jours ; les autres communes ou de 3 54 jours.
Selon les Juifs, l'année de la création du monde eft
la 959e de la période Julienne, commençant au 7e
d'Octobre ; Se comme l'année delà naiffance de J.C.
eft la 4714e de la période Julienne , il s'enfuit que
J. C. eft né l'an 3761 de l'ère des Juifs ; c'eft pour-
quoi fi on ajoute 3761 à une année quelconque de
l'ère chrétienne , on aura l'année Juive correfpon-
dante , qui doit commencer en automne ; bien en-
tendu qu'on regarde alors l'année Juive comme une
année folaire, Se elle peut être regardée comme
telle en effet , à caufe des années embolifmiques qui
remettent à peu près de trois en trois ans le com-
mencement de l'année Juive avec celui de l'année
folaire.
L'ère des Mahométans commence à l'an 622 de
J. C. qui eft l'année de l'hégire ; d'où il s'enfuit que
fi d'une année quelconque de l'ère chrétienne on ôte
621 ,1e refte fera le nombre des années deJ. C. écou-
lées depuis le commencement de l'ère Mahométane,
Or l'année Julienne eft de 365 jours 6 heures , & les
années de l'hégire , qui font des années lunaires, font
de 3 54 jours 8 heures 48 ' ; d'où il s'enfuit que cha-
que année de l'hégire anticipe fur l'année Julienne de
10 jours 21 heures 12'; Se par conféquent 33 ans, de
359 jours 3 heures 36', c'eft-à-dire d'une année, plus
4 jours 18 heures 48' ; donc fi on divife par 33 le
nombre trouvé des années Juliennes écoulées depuis
l'ère Mahométane , Se qu'on ajoute le quotient à ce
nombre d'années, on aura le nombre des années Ma-
hométanes.
Il faut remarquer que le furplus des 4 jours 1 8 heu-
res 48 ' , doit former aufli une année au bout de piu-
fieurs fiecles , c'eft-à-dire au bout d'environ 72 fois
3 3 ans ; mais cette correction ne regardera que nos
defeendans. Wolf , Elem. de chronologie.
On fe fert aufti du mot calendrier pour défigner le
catalogue ou les faftes que l'on gardoit ancienne-
ment dans chaque églife , Se où étoient les faints que
l'on y honoroit en général ou en particulier , avec
les évêques de cette églife , les martyrs , &c Foye^
Saint , Nécrologe , &c.
Il ne faut pas confondre les calendriers avec les
martyrologes ; car chaque églife avoit fon calendrier
particulier; au lieu que les martyrologes regardent
toute l'Eglife en général : ils contiennent les martyrs
Se les confeffeurs de toutes les églifes. De tous les
différens calendriers on en a formé un feul martyro-
loge ; en forte que les martyrologes font pofterieurs
aux calendriers. ^oy^MARTïROLOG;.
Il y a encore quelques-uns de ces calendriers qui
CAL
exigent, particulièrement un de l'églife de Rome
fort ancien , qui fut fait vers le milieu du quatriè-
me fiecle , il contenoit les fêtes des payens com-
me celles des chrétiens ; ces dernières étoient alors
en affez petit nombre. Le père Mabillon a t'ait im-
primer auffi le calendrier de l'églife de Carthage,
qui fut fait vers l'an 483. Le calendrier de l'églife
d'Ethiopie , & celui des Cophtes , publies par Lu-
dolphe, paroiffent avoir été faits après l'année 760.
Le calendrier des Syriens imprimé par Genebrard ,
eft fort imparfait ; celui des Moicovites , publié par
le père Papebrock , convient pour la plus grande
partie avec celui des Grecs, publié par Genebrard.
Le calendrier mis au jour par dom Dachery , fous le
titre & année folaire , ne diffère en rien du calendrier
de l'églife d'Arras. Le calendrier que Beckius publia
à Augsbourg en 1687 , eft félon toute apparence ,
celui de l'ancienne églife d' Augsbourg , ou plutôt de
Strasbourg , qui fut écrit vers la fin du dixième fie-
cle. Le calendrier Mojarabique , dont on fait encore
uiage dans les cinq égliles de Tolède ; le calendrier
Ambrojlen de Milan, & ceux d'Angleterre, avant la
. réformation , ne contiennent rien que l'on ne trouve
dans ceux des autres églifes occidentales , c'eft-à-
dire , les laints que l'on honore dans toutes ces égli-
fes en général , 6c les faints particuliers aux églifes
qui faifoient uiage de ces calendriers. Chambers.
Calendrier perpétuel. On appelle ainfi une
fuite de calendriers relatifs aux différens jours 011 la
fête de Pàque peut tomber ; & comme cette fête
n'arrive jamais plûtard que le 25 Avril, ni plutôt
que le 22 Mars, le calendrier perpétuel eft compofé
d'autant de calendriers particuliers, qu'il y a de jours
depuis le 22 Mars inclufivement , julqu'au 25 Avril
inelulivement ; ce qui fait 35 calendriers.
On trouve un calendrier perpétuel fort utile & fort
bien entendu , dans l'excellent ouvrage de Y Art de
vérifier les dates , par des religieux Bénédictins de la
congrégation de S Maur.
Calendrier Rustique, eft le nom qu'on donne
à un calendrier propre pour les gens de la campagne,
dans lequel ils apprennent les tems oit il faut femer,
planter , railler la vigne , &c. Ces fortes de calen-
driers font ordinairement remplis de beaucoup de rè-
gles faillies , eV fondées la plupart fur les influences
& les afpeâs de la lune &c des planètes. C'eft pour-
quoi il eft bon de diftinguer avec foin les règles qui
font fondées fur des expériences exactes & réitérées,
d'avec celles qui n'ont que le préjugé pour princi-
pc.(O)
CALENGE, f. f. {Jurif prudence.} terme qui fe
trouve fréquemment dans les anciennes coutumes,
011 il fe prend tantôt pour débat ou contejlation , tantôt
pour accufaàon ou dénonciation judiciaire , &c. tantôt
pour défi ou appel.
CALENGER , verbe formé de calengc , a les mê-
mes lignifications : en Normandie oii il eft encore
en ufage , il lignifie barguigner. (//)
CALENTER , f. m. (Hifi. mod.) les Perfes nom-
mentainli le thrélorier & receveur desfinanecs d'une
province ; il a la direction du domaine, tait la re-
cette des deniers, & en rend compte au confeil, ou
au chan de la province, loy^i Chan.
CALENTURE, f. f. (Medeàne.) efpece de fiè-
vre accompagnée d'un délire lubit, commune à ceux
qui font des voyages de long cours dans des cli-
mats chauds , Cv furtout à ceux qui panent fous la
ligne.
L'hiftoire luivante donnera une idée de cette ma-
ladie , ce de la manière de la traiter.
Un matelot âgé de trente à quarante ans , affez
grand , mais fluet , fut attaqué d'une calenturt li vio-
lente, que quatre de les camarades iufhfoient à pei-
ne pour le retenir: il s'écrioit de tems en tems qu'il
Tome II,
CAL
555
vouloit aller dans les champs ; il avoit la vue égarée,
furieule ; ion corps étoitdans une chaleur biûljnre,
&C fon pouls fort déréglé , fans aucune vibration dif-
tincte. Le Chirurgien du vailîeau tacha delefaigner:
mais quoique la veine du bras fut affez ouverte , il
n'en pût jamais tirer une once de fang ; on lui ouvrit
la veine du front avec aulfi peu de fuccès ; on paffa
à la jugulaire, il enfortit deux onces de fang fleuri,
après quoi il ceffa de couler , quoique l'ouverture fût
affez large ; on répéta les la ignées , on en tiroit de
trois ouvertures à la fois ; le lang couloir plus libre-
ment à melurc que les vailieaux le vuidoient. Après
une évacuation conlidérable , la fièvre diminua de
même que l'agitation ; le malade avoit la vue moins
égarée , il ne'crioit plus ; le pouls devint plus régu-
lier , la chaleur fe modéra , & la fureur fe rallentit ,
de façon qu'un feu] homme fuffilbit pour le contenir.
On lui tira environ cinquante onces de fang par
les trois ouvertures dont on a parlé : l'ayant fait coin
cher , on lui donna une once de firop de diacode
dans un verre d'eau d'orge ; après quoi il dormit fort
tranquillement pendant quelques heures , Se ne fen-
tit en s'éveillant qu'une foibleffe qui venoit du fane
qu'on lui avoit tiré , & un malaife par tout le corps
produit apparemment par la violence des convul-
fions qu'il avoit eues , & des efforts qu'il avoit faits
pour s'échapper.
Il eft vraiffemblable que quand les matelots font
attaqués de cette chaleur vioiente & de cette mala-
die , ce qui leur arrive ordinairement pendant la
nuit , ils le lèvent , s'en vont fur le bord , & le jettent
dans la mer , croyant aller dans les prés ; ce qui rend
cette conjecture d'autant plus vraiffemblable , c'eft
que dans la mer Méditerranée , il arrive fouvent en
été & dans des tems chauds, que des gens de mer
dilparoiffent fans qu'on lâche ce qu'ils font devenus ;
ceux qui relient dans le bâtiment , penfent que tous
ceux qui dilparoiffent ainlilelont lauvés fans qu'on
s'en ioit apperçu. Quant à celui dont il eft parlé ci-
deffus , le Médecin apprit d'un de les camarades ,
qu'ayant loupçonné fon deffein, ill'avoit faifi , com-
me il étoit fur le point de s'élancer dans l'eau , &
qu'on l'avoit coniervé par ce moyen. Si les calentu-
res font plus fréquentes pendant la nuit que pendant
le jour , c'eft qu'alors les bâtimens font plus fermés
oc reçoivent moins d'air. Pkilofoph. tranfact. air. vol.
I V. par le docteur Olivier.
Le docteur Shaw veut qu'on traite cette maladie
de la manière luivante.
Il faut tâcher de procurer du repos : on donnera
de l'eau d'orge avec du vin blanc ; on proferira la
bière, & toute liqueur fpiritueufe, & on prelcrira
un régime foible & liquide. Le premier pas qu'on ait
à faire dans la cure , c'eft de faigner ; il arrive affez
fouvent que les vaiffeaux font pleins d'un ' G
épais, qu'on eft obligé d'en ouvrir plulieiu s pour
évacuer affez de fang ; la veine jugulaire eft préfé-
rable à celle du bras. Huit ou dix heures après la
faignée , on donnera l'émétiquc, on appliquera au
cou un large epifpaftique , on reviendra à la faignée
auflï-tôt qu'on le pourra ; le loir lorfque le malade
fera prêt à repofer, on lui donnera un parégorique.
Si la maladie eft furhfamment calmée, on ordon-
nera le purgatif doux qui fuit.
Prenez feuilles de féné deux gros & demi , rhu-
barbe un demi-gros, fel de tartre un demi-fcrupule,
graine de coriandre broyée un fcrupule ; taites intu*
fer le tout dans fufhfante quantité d'eau de fontaine ;
Cv fur deux onces ce demie de la liqueur paffee, ajou-
te/ firop folutif de roîes fix gros , firop de corne de
cerf deux gros; efprit de mtre dulcine, fel volatil
huileux , de chacun trente gouttes. Faites-en une po-
tion que le malade prendra deux ou trois fois , félon
A A a a ij
556
CAL
que la maladie l'exigera , & en gardant un régime
exact.:
Voilà la manière ordinaire de traiter la caknture,
(N)
CALER, (terme d'Architecture.') c'eft arrêter la
pofe d'une pierre , mettre une cale de bois mince qui
détermine la largeur du joint , pour la ficher enfuite
avec facilité. (P)
CALER , v. n. ( Marine. ) c'eft enfoncer dans l'eau ;
lorfqu'un vaifieau eft trop chargé , cela le peut faire
caler fi bas dans l'eau , que fa batterie d'entre deux
ponts eft noyée.
CALER les voiles , ( Marine. ) c'eft amener ou
abaiffer les voiles avec les vergues , en les faifant
gliffer & defcendre le long du mât. Un dit à pré-
térit amener les voiles, & très-rarement , caler les voi-
les. (Z)
CALER , V. a£h (Plomberie.) on dit caler des tuyaux,
quand on en arrête la pofe avec des pierres pour qu'ils
ne s'afFaifTent pas , ce qui les feroit crever. (K )
* CALESIAM , (Hift. nat, bot.) arbre qui croît
dans les contrées du Malabar. Il eft grand; l'on bois
eft de couleur de pourpre obfcur , uni & flexible ;
fes fleurs croiflent en grappes à l'extrémité de fes
branches ; elles reflembîent aflez à celles de la vigne:
fes baies font oblongues , rondes, plates, vertes,
couvertes d'une écorce mince , pleines d'une pulpe
inlipide , contenant un noyau verd , oblong , plat ,
& portant une amande blanche & infipide. Outre ce
fruit , qui eft le vrai , il en porte un fécond à la chute
des feuilles , qui croît au tronc & aux branches ; il eft
plus gros que le fruit vrai , ridé , en forme de rein ,
couvert d'une écorce de couleur de verd d'eau, fous
laquelle on trouve une pulpe dénié. Ray croit que ce
fruit bâtard n'eft qu'une grofleur produite par la pi-
quùre des infeftes , qui cherchent dans cet arbre une
retraite & de la nourriture. Il donne du fruit une fois
l'an , depuis dix ans jufqu'à cinquante.
Son écorce pulvérifée & réduite en onguent avec
le beurre , guérit le fpafme cynique & les convul-
fions caufées par les grandes douleurs ; le même re-
mède s'employe avec fuccès dans les ulcères malins
ik. calme les douleurs de la goutte ; le fuc de l'écorce
diflîpe les aphthes & arrête la dyflenterie ; fa poudre
avec celle de compulli purge & chaffe les humeurs
pituiteufes &c atrabilaires.
On fait prendre une rafle de la déco&ion de l'é-
corce & des feuilles dans de l'eau , pour hâter l'ac-
couchement.
CALETURE , (Géog.) forterefle de l'île de Cey-
lan , appartenante aux Hollandois. Longit. qj. z6.
lat. 6. 38.
CALFAT, f. m. (Marine.) c'eft le radoub d'un
navire , qui fe fait lorfqu'on en bouche les trous ik.
qu'on les enduit de fuif, de poix, de goudron, afin
d'empêcher qu'il ne faffe eau; ou bien c'eft une étou-
pe enduite de brai , que l'on poufle de force dans les
joints ou entre les planches du navire , pour le tenir
fain, étanché & franc d'eau. Ce terme s'employe
pourjignifier l'ouvrier & l'ouvrage.
Calfat , Calfateur , Calfas, f. m. (Marine.)
c'eft un officier de l'équipage , qui a foin de donner
le radoub aux vaiffeaux qui en ont befoin , & qui foir
&c matin examine le corps du bâtiment , pour voir
s'il ne manque point de clous ni de chevilles ; s'il n'y
en a point qui foient mal aflurées ; fi les pompes font
en bon état , & s'il ne ic fait point quelque voie d'eau
afin de l'arrêter. Il doit avoir l'œil particulièrement
à l'étrave , qui eft l'endroit du vaifieau le plus ex-
pofé aux acciclens de la mer ; & aux carènes & œu-
vres de marée. Il examine fi l'étoupe eft bien poufl'ée
dans les jointures & dans les fentes du bordage. Lorf-
qu'ily a combat, il fe tient à la fofle aux cables, avec
des plaques de plomb & autres chofes néceflaires , &
CAL
fe met à la mer pour boucher par-dehors les voies
d'eau qu'on découvre.
CALFATAGE, f. m. (Marine.) c'eft l'étoupe qui
a été mife à force dans la couture du vaifieau.
CALFATER , CALFADER , CALFEUTRER ,
v. adt. (Marine.) c'eft boucher les fentes des jointu-
res du bordage ou des membres d'un vaifieau , avec
ce qui peut être propre à le tenir fain & étanché , en-
forte qu'il ne puifl'e y entrer d'eau. On fe fert pour
cela de planches , de plaques de plomb , d'étoupes,
&C d'autres matières.
Calfater, c'eft poufler l'étoupe dans les coutures.
Calfater lesfabords; c'eft emplir d'étoupe le vuide
du tour des labords, ainfi que les coutures du vaif-
feau. On ne fait ce calfatage que très-rarement , ÔC
lorfqu'on eft obligé de tenir long tems la mer.
CALFATEUR, (Marine.) Foy^ CALFAT.
CALFATIN, f. m. (Marine.) c'eft le moufle qui
fert de valet au calfateur.
CALFEUTRER, (Marine.) V. CALFATER. (Z)
CALGINU , (Géog.) ville d'Afrique , dans l'Abyfi-
finie , dans une contrée deferte.
CALI , (Géog.) ville de l'Amérique méridionale ,
au Popayan, fur le bord de la rivière Cauca. Long,
304. 30. lat. 3. i$.
CALIACA , (Géog.) ville & port d'Europe , dans
la Bulgarie , fur la mer noire , appartenante aux
i urcs.
* CALIBRE , f. m. (Arts méch.) ce mot a deux ac-
ceptions différentes : il fe prend ou pour le diamètre
d'un corps, & en ce fens on dit, ces colonnes, ces
juflls , &c. font de même calibre; ou pour l'inftru-
ment qui fert à en mefurer les dimenfions , & en ce
fens les Serruriers , & prefque tous les ouvriers en
métaux , ont des calibres. Voye^ les articles fuiv ans.
* Calibre, pris dans le fécond fens, eft un infini-
ment ou de fer ou de bois , dont l'ufage eft différent,
lelon les diftérens ouvriers.
Les Maçons ont leur calibre ; c'eft une planche fur
le champ de laquelle on a découpé les différens mem-
bres d'urchiteefrire qu'ils veulent exécuter en plâtre
aux entablemens des maifons , corniches des plafons
des appartemens, plintes , & ouvrages de maçonne-
rie qui fe traînent. Ce calibre fe monte fur un mor-
ceau de bois qu'ils appellenty^or. On a pratiqué fur
le fibot, à fa partie du devant qui fe doit traîner fur
les règles , une rainure pour fervir de guide au ca-
libre.
Calibre des Serruriers ; les uns font faits de fer
plat battu en lame , & découpés comme ceux des
maçons , fuivant la forme & figure que l'on fe pro-
pofè de donner à la pièce que l'on veut ou forger ou
limer. Ce calibre a une queue, que le forgeron tient
à fa main , pour le préfenter fur le fer rouge quand
il forge. Pour ceux dont on fe fert en limant , ils font
figurés &c terminés fort exactement ; on les applique
fur la pièce à limer , & avec une pointe d'acier on
trace la figure & les contours du calibre , pour enle-
ver avec la lime ce qui eft au-delà du trait.
D'autres fervent à mettre les fers droits ou con-
tournés de largeur & d'épaifieur égales dans toute la
longueur. Ces fortes de calibres font des lames de fer
battu mince , dans lefquelles on a fait des entailles
fuivant la largeur & l'épaifleur que l'on veut donner
au fer. On fait gliflèr ce calibre fur le fer , & l'on
forge jufqu'à ce qu'il puifle s'appliquer fucceflive-
ment fur toute la barre. Il eft évident que ces fortes
de calibres ne peuvent fervir que pour un feul & mê-
me ouvrage.
II y a d'autres calibres qu'on appelle calibres brifes
ou à coulijfe. Il y en a de plufieurs figures : les uns
font compofés de quatre parties ; favoir , de la tige
retournée en équerre par une de fes extrémités , qui
CAL
forme une des ailes du calibre , & ouverte dans fon
milieu 6c dans toute fa longueur d'une entaille qui
reçoit un bouton à vis, à tête & à colct quarré, qui
glifie exactement dans l'entaille ; il eff garni d'un
écrou à oreille, & il traverfc une couliffe qui em-
braffe entièrement & exactement la largeur de la tige;
la partie de cette couliffe qui regarde l'aile de la tige
pareillement conduite en équerre , forme une autre
aile parallèle en tout fens à l'aile de la tige ; de forte
que ces deux ailes peuvent s'écarter plus ou moins
l'une de l'autre, à la volonté de l'ouvrier, fans per-
dre leur parallélifme par le moyen de l'entaille & de
la couliffe , & font fixées à la diffance que l'ouvrier
veut par le moyen de l'écrou. On fe fert de ce cali-
bre pour dreffer des pièces , 6c s'afiiïrcr fi elles font
partout de groffeur & de largeur égales.
Il y en a d'autres qui ont le même ufage , & dont
la conftrucrion ne diffère de la précédente , qu'en ce
qu'une des deux ailes peut s'éloigner de l'autre par
le moyen d'une vis de la longueur de la tige, qui tra-
verfe le talon de la tige , & parle dans un talon en
écrou pratiqué au derrière de la couliffe mobile dans
laquelle paffe la tige que cette couliffe embraffe en-
tièrement ; quant à l'extrémité de la vis , elle eff" fixée
au talon de l'autre aile, qui eff pareillement à cou-
liffe, mais immobile, pardeux goupilles qui l'arrêtent
fur le bout de la tige : le bout de la vis eff: reçu dans
un petit chapeau fixé immobilement fur le talon de
l'aile fupérieure , de forte que cette vis, fans baiffer
ni defeendre , tourne toujours fur elle-même , & fait
feulement monter & defeendre la couliffe avec l'aile
inférieure.
Un calibre portatif d'une troifieme conffruâion ,
eff compofé d"une tige fur laquelle eff fixée une aile,
& fous laquelle fe meuvent deux coulifles en ailes
qui l'embraffent entièrement, mais qu'on fixe à la
diffance qu'on veut de l'aile fixe , par le moyen de
deux petites vis qui traverfent la couliffe : par ce
moyen on peut prendre deux mefures à la fois.
Le fécond , qui eff à vis en-deffbus, eff divifé par-
deflus en pouces , lignes , & demi-lignes ; ainff on
donne à la diffance des ailes tel accroiffèment ou
diminution qu'on veut, ce qui montre encore l'ex-
cès de dimenlions d'une pièce fur une autre.
Mais au premier calibre on met entre l'écrou 6c la
couliffe une rondelle de cuivre , pour empêcher les
deux fers de le ronger, & pour rendre le mouvement
plus doux.
C ali BB E , terme a" Arquebuficr : les Arquebufiers fe
fervent de diverfes fortes d'outils, auxquels ils don-
nent le nom de calibre , dont les uns font de bois, 6c
les autres d'acier.
Les calibres de bois font proprement les modèles ,
d'après lefquels ils font débiter ou débitent eux-mê-
mes les pièces de bois de noyer , de frêne , ou d'éra-
ble , dont ils font les fûts , fur lefquels ils montent les
canons & les platines des armes qu'ils fabriquent. Ce
ne font que de fimples planches très-minces, taillées
de la figure du fût qu'on veut taire ; de forte qu'il y
en a autant que de différentes efpeccs d'armes , com-
me calibres de fit fil , de itioufquel , de piflolet , 6Cc
Les calibres d'acier pour l'Arquebulerie font de deux
fortes ; les uns doubles , 6c les autres fimples. Les fim-
ples font des efpeccs de limes fans manche ni queue ,
percées de diffance en diffance par des trous de diffé-
rent diamètres. Ils fervent à dreffer 6V: limer le dc\-
fous des vis. Les calibres doubles ne différent des fim-
ples que parce qu'ils font compofés de deux limes pô-
les l'une fur l'autre , & jointes par deux vis qui font
aux deux bouts , &: avec lefquclles on les éloigne 6c
on les rapproche à diferétion. La lime de de flou s a de
plus un manche auffi d'acier un peu recourbé en-de-
dans. Ces derniers calibra fervent à roder , c'eff-à-
dire a tourner comme on tait au tour les noix des
platines que l'on met entre deux,
CAL 557
Calibre , dans V Artillerie , eff l'ouverture de la
pièce de canon & de toutes les autres armes à feu ,
par où entrent & fortent le boulet &c la balle. On dit
Cette pièce efl d'un tel calibre : on le dit auffi d'un bou-
let ; l'inffrument même dont on fe fert pour prendre
la grandeur de l'ouverture ou diamètre d'une pièce
ou d'un mortier , s'appelle auffi calibre.
Cet infiniment eff fait en manière de compas,
mais ayant des branches courbes, afin de pouvoir
auffi s'en fervir pour calibrer & embrafler le boulet.
Quand il eff entièrement ouvert , il a la longueur
d'un pié de roi , qui eft de douze pouces , chaque
police compofé de douze lignes , entre les deux bran-
ches.
Sur l'une des branches font gravés & divifés tous
les calibres , tant des boulets que des pièces ; & au-
dedans de la branche font des crans qui répondent
aux fections des calibres.
Et à l'autre branche eff attachée une petite tra-
verse ou languette, faite quelquefois en forme d'i",
ôc quelquefois toute droite , que l'on arrête fur le
cran oppofé qui marque le calibre de la pièce.
Le dehors des pointes fert à calibrer la pièce ; &c
le dedans qui s'appelle talon , à calibrer les boulets.
Voyt^ PI. Vil. de L'Art milit.Jig. J.
Il y a un autre moyen de calibrer les pièces. L'on a une
règle bien divifée , &c où font gravés les calibres tant
des pièces que des boulets , comme il fe voit dans la
Planche. Appliquez cette règle bien droit fur la bou-
che de la pièce , rien de plus fimplc ; le calibre fe trou-
ve tout d'un coup : ou bien l'on prend un compas
que l'on préfente à la bouche de la pièce ; on le rap-
porte enf uite fur la règle , &c vous trouvez votre ca-
libre.
Mais en cas qu'il ne fe trouvât pas de règle divi-
fée par calibre dans le lieu où vous ferez", il faut
prendre un pié de roi divifé par pouces & par lignes
à l'une de fes extrémités.
Rapportez fur ce pié le compas , après que vous
l'aurez retiré de la bouche de la pièce où il faudra
l'enfoncer un peu avant ; car il arrive fbuvent que
des pièces fe font évafées &c aggrandies par la bou-
che , où elles font d'un plus fort calibre que n'-eff leur
ame.
Vous compterez les pouces &: les lignes que vous
aurez trouvés pour l'ouverture de la bouche & de la
volée de la pièce , 6c vous aurez recours à la table
que voici , pour en connoître le calibre ; elle eff tres-
exacle.
Calibre des pièces. La pièce qui reçoit un boulet pe-
fant une once poids de marc , a d'ouverture à fa bou-
che neuf lignes & cinq feiziemes de ligne.
Celle qui reçoit un boulet pefant deux onces , a
d'ouverture à fa bouche onze lignes ck trois quarts
de ligne.
On va continuer fuivant cet ordre.
Pefanteur du Boulet. Ouverture du Calibre.
Onces. Teuus, Lignes. FtaRïons*
1 o ..... 9 .... ^
1 O....II.... 1
3 i .... i .... ^
4 i .... . i . . . . \
5 i ..... 4
6 i 4 {
7 t . . . . 5 - - fr
8 i . ..... 6 .... £
IO I . . . • S . . . . -ù;
ii i . . . . 9 . . . . -j-
M i .... 10 .... ^
La pièce qui reçoit un boulet pelant i livre , qui
553
CAL
fait 16 onces, a d'ouverture à fa bouche i pouce
1 1 lignes & demie.
Pefanteur du Boulet. Ouverture du Calibre.
livres. Pouces. Lignes. Fractions.
3
4 ■
5
6
7
8
9
ÎO
1 1
12
13
14
«S
iÔ
i7
18
*9
2.0
21
22
23
24
25
26
17
18
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41 .
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45-
46-.
47 ••
48--
49 •
50 .
55 ■
60 -.
64..
6 .
6 .
6 .
6 ,
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9
9
10
10
1 1
o
o
5
7
10
Il eft bon de remarquer qu'en l'année 1668 l'on
rétablit le pié de roi conformément à la toile du châ-
telet de Paris ; c'eft de ce pié rétabli que l'on s'eft
CAL
fervi ici , & dont l'original aufii-bien que celui de la
toife , le conferve à l'Obfervatoire royal de Paris.
Il faut aufii remarquer que pour avoir le pié de roi
bien exact , il faut avoir la toife du châtelet bien
julte , Se la diviler en fix parties bien égales.
On a omis exprès quelques nombres, parce qu'il
ne fe trouve que peu ou point du tout de ces cali'
bres rompus. Saint-Remy, Mémoires £ Artillerie.. (Q)
CALIBRE, lignifie , dans les Manufactures d'armes à.
feu , l'ouverture d'un fufil ou d'un piftolet par oii en-
tre & fort la balle : ainfi on dit cette arme a trop de ca-
libre. Voye^ Canon de fufil.
Calibre , che^ les Fontainiers , fe dit de l'ouverture
d'un tuyau , d'un corps de pompe, exprimée par leur
diamètre : ainfi on dit , tel tuyau a un demi-pie de cali-
bre , c'eft-à-dire de diamètre. ( K )
Calibre , dans f Horlogerie : les Horlogers en ont
de plufieurs efpeces : mais celui dont ils font le plus
d'ufage, eft le calibre à pignon , fig. âj. PI. XV. de
r Horlogerie. Il eft compoié de la vis V & des deux
branches AB , A B , qui par leur reffort tendent tou-
jours à s'éloigner l'une de l'autre : au moyen de cette
vis on les approche à volonté. Les Horlogers s'en fer-
vent pour prendre la groffeur des pignons , ôc pour
égaler leurs ailes. Voyc^ Egaler. ( 7")
Calibre, che^ les Horlogers , fignifie encore une
plaque de laiton ou decarton, fur laquelle les grandeurs
des roues & leurs fituations refpectives font mar-
quées. C'elt en fait de machine, la même chofe qu'un
plan en fait d'Architecture. Voy. lafig. 60. Planche X.
d'Horlogerie. C'elt pourquoi l'Horloger dans la conl-
truction d'un calibre , doit avoir la même attention
qu'un Architecte dans celle d'un plan : celui-ci doit
bien profiter du terrein , félon les lois de convenance
& de la belle architecture ; de même l'autre doit pro-
fiter du peu d'efpace qu'il a , pour dilpoier tout le-
lon les lois de la méchanique.
Il feroit fort difficile de donner des règles généra-
les pour la conltru&ion d'un calibre ; parce que l'im-
polîibilité où l'on cil fouvent de le faire de manière
qu'il réunifie tous les avantages poflîbles , fait que
l'on ell contraint d'en facrifier certains à d'autres plus
importans. Nous donnerons cependant ici le détail
des règles que l'on doit obferver ; & comme c'elt par-
ticulièrement dans les montres que fe rencontrent les
plus grandes difficultés , nous nous bornerons à ne
parler que de leurs calibres , parce que l'application
de nos principes aux calibres des pendules , fera fa-
cile à faire.
Une des premières règles Se des plus cflentielles
à obferver , c'ell que la diipolition des roues , les unes
par rapport aux autres , (bit telle que les engrenages
changent le moins qu'il ell poffible par l'ulure des
trous , c'elt-à-dire , que la diftance du centre d'une
roue au centre du pignon dans lequel elle engrené ,
foit autant que faire fe peut toujours la même.
On en concevra facilement la néceflité , fi l'on
fait attention que Faction d'une roue fur un pignon
pour le faire tourner , ne fe fait point fans qu'il y ait
du frottement fur les pivots de ce pignon : mais ce
frottement ne peut le faire fans qu'il en réfulte une
ulure dans les trous , qui le fait toujours dans le lens
de la prefiîon de la roue ; & qui augmentant par con-
fisquent la diftance au centre d'un pignon , diminue
l'engrenage, & produit les inconveniens dont il eft
parlé à l'article Engrenage.
Pour remédier à ces inconveniens , il faut que les
roues depuis le barnliet jufqu'au balancier ( voye^la
figure 46. ) agiflent autant qu'on le peut , les unes fur
les autres , en forte que fi la grande roue moyenne ,
par exemple, pouffe le pignon de la petite roue
moyenne 56 dans la direction d i ,fig. 5o. elle foit à
fon tour poufiee par la grande roue dans la direction
S c d'une certaine quantité , telle que par ce moyen
CAL
(tance entre le centre de cette roue , & celui du
pignon où elle engrené , ne change pas fenfiblement.
La féconde règle , c'eft que les roues & les pignons
foient encore , autant qu'il eft pcffible , dans le milieu
de leurs tiges , ou à une égale diftance de leurs pi-
vots : par ce moyen on eft plus à portée de mettre
fen ufage la règle que nous venons de donner , & on
évite un grand défaut ; c'eft que Iorfqu'un pignon
eit à l'extrémité de fa tige, il fe fait un très -grand
frottement fur le pivot qui eft fitué du même côté ,
ce qui en occafionne l'ulurc , de même que celle de
fon trou , & diminue beaucoup de la liberté du pi-
gnon. Il eft même bon de remarquer , que Iorfqu'un
pignon eft à une des extrémités de fâ tige , & que
la roue qui eft adaptée fur la môme tige , eft à l'au-
tre , la première règle ne peut avoir lieu ; car
quoique le pignon foit pouffé par la roue qui le
mené dans la diretlion néceffaire pour que l'engre-
nage de la roue qui eft fur la même tige , le conferve
toujours le même avec le pignon dans lequel elle en-
grené , cette roue ne fait qu'éprouver une efpece de
bercement , à caufe que la diftance où elle fe trouve
du pignon , fait que quelque mouvement de tranfport
que celui -ci ait, la roue n'en éprouve qu'un très-
petit.
La troisième règle , mais qu'on ne peut guère met-
tre parfaitement en ufage que dans les pendules &
les horloges , eft celle dont nous parlerons à l'article
Horloge de clocher : elle confifte à fituer les
roues les unes par rapport aux autres , de façon que les
pignons dans lefquels elles engrennent , foient pla-
cés dans les points de leur circonférence , tels qu'il en
réfulte le moins de frottement poftible , fur les pi-
vots de ces roues. Tout ceci étant plus détaillé à
l'article Horloge de clocher, nous y ren-
voyons.
Enfin la force motrice dans les montres étant pref-
que toujours trop petite : on doit s'eiforcer d'avoir
de grands barrillets , pour avoir par-là de plus grands
reflorts. De plus , comme il y a toujours beaucoup
de frottement fur les pivots , on doit avoir pour prin-
e rendre toutes les roues , autant qu'il eft pof-
rrt grandes, afin par-là de le diminuer. Une
chofe qui n'eft pas moins importante, c'eft de difpo-
ler le calibre de façon que le balancier puiffe avoir
une certaine grandeur. On en trouve la raifon à l'ar-
ticle Balancier.
Pour terminer , il faut que le calibre d'une montre ,
d'une pendule, &c. foit tel qu'il en réfulte tous les
avantages qui peuvent naître de la difpofition ref-
pc&ive des roues ; telle que la montre en général
éprouve le moins de frottement, & qu'elle fublifte
le plus conftamment qu'il eft poftible dans le même
état. / oye{ Roue, Pignon, Engrenage, Tige,
Tigeron, Balancier, &c (7)
Calibre , fe dit, en Marine, d'un modèle qu'on
fait pour la conftruétion d'un vaifteau , & fur lequel
d fa longueur, fa largeur, & toutes fes pro-
portions : c'eft la même choie que gabarit. f'oye^G \-
jbarit. (Z)
CALIBRE , en ter/ne l'Orfèvre en tabatière, c'eft un
morceau de fer plat , large par un bout, & percé
«l'un feul trou. Il fert à drefler les charrions, après
les y avoir tait entrer à force. Il faut que le calibre
foit bien trempé , afin que la lime ne morde que fur
le chaînon. Voyc^V article TABATIERE.
CALIBRER , ( Horlogerie. ) c'eft prendre avec un
calibre la grandeur eu Tepaiffeur de quelque chofe.
Calibre. (7~)
CALICE , f. m. ( Théol. ) coupe ou vaifleau qui
fert à la méfié pour la confecration du vin. Ce mot
vient du Grec y.vXi* ou xaAtsif, qui lignifie un vafe ou
un verre.
Le vénérable Bede a fu que le calice dont (c fer-
CAL
■
Vit Jéiûs-Chrift à la dernière cène . étoit un vafe à
& contenoit une chopine; & que ceux
dont on s eft fervi dans les commencemens, étoient
de la même forme. Dans les premiers lieclcs , les ca-
lices étoient de bois. Le pape-Zéphyrin ,ou félon d'au-
tres , Urbain Ier. ordonna qu'on les fît d'or ou d'ar-
gent. Léon IV. défendit qu'on en fît d'étain ou de
verre ; & le concile de Calchut ou de Celcyth en
Angleterre, fkauflï la même défenfe. Les calices des
anciennes églifes pefoient au moins trois marcs ; Se
l'on en voit dans les threfors & facrifties de plulieurs
églifes anciennes , d'un poids bien plus confidérable.
Il y en a même dont il eft comme impofTiblc qu'on
fe foit jamais fervi , attendu leur volume , & qui pa-»
roiffent n'être que des libéralités des princes. Horn.
Lmclan , & Beatus Rhenanus , attellent qu'ils ont vu
en Allemagne quelques anciens calices , auxquels on
avoit ajufté avec beaucoup d'art un tuyau qui fervoit
aux laïques pour recevoir TEuchariftie fousl'cfpcce
du vin. (G)
Calice , ( Bot. ) fe dit de la partie qui enveloppe
les teuilles ou pétales d'une fleur , laquelle eft formée
en coupe ou calice. ( K )
* CALIENDKUM, (Hifl. anc.) tour de cheveux
que les femmes Romaines ajoûtoient à leur cheve-
lure naturelle , afin de donner plus de longueur à leurs
trèfles.
CALICUTo« C ALECUT , ( Gêog. ) ville &
royaume des Indes fur la côte de Malabar. La ville
de ce nom eft une des plus grandes de l'Inde. Le fa-
morin ou roi du pays y fait fa réiidencc. On dit que
lorfquc ce prince fe marie , les prêtres commencent
par coucher avec fa femme , & qu'enfuite il leur fait
un préfent pour leur marquer fa reconnoifTance de la
faveur fignalée qu'ils ont bien voulu lui faire : ce ne
font point fes enfans qui lui fuccedent , mais ceux
de fa fœur. A l'exemple de leur fouverain , les habi-
tans de ce royaume ne font point difficulté de com-
muniquer leurs femmes à leurs amis. Une femme
peut avoir jufqù'à fept maris : fi elle devient grofîé ,
elle adjuge l'enfant à qui bon lui femble , & on ne
peut appeller de fon jugement. Les habitai.
eut croient un Dieu : mais ils prétendent qu'il ne fe
mêle point du gouvernement de l'univers , & qu'il
a laiffe ce foin au diable , à qui conféquemment ils
offrent des facririces. Il fe fait un grand commerce
à Calicut : il confifte en poivre , gingembre , bois d'a-
loès , canelle , & autres épiceries. La ville de Calicut
eft au degré de long. r»J. io- la t. n. zi.
CALIDUCS , f. m. ( Phyfiq.) c'étoit une forte de
canaux , dilpofés autrefois le long des murailles des
maifons & des appartemens , & dont les anciens fe
fervoient pour porter de la chaleur aux parties de
leurs maifons les plus éloignées ; chaleur qui étoit
fournie par un foyer, ou par un fourneau commun.
Voye^ Poêle , Feu , &c
Ce mot eft formé des mots latins calidus, chaud ,
& duco , je conduis. Chambers.
CALIFE , f. m. ( Hijl. mod. ) titre que prirent les
fuccefteurs de Mahomet , dans le nouvel empire tem-
porel 6V fpirituel établi par ce législateur. / o) t\ Caf*
tu.'-: MAHOMÉTAN.
Ce mot eft originairement Arabe, khalifah, qui fî-
gnifîe proprement unfucceffeur , ou un héritier. (Quel-
ques-uns prétendent qu'il vient d'un verbe, qui ii-
gnifie non-feulement fuceider , mais en là
place d'un autre , en qualité d'héritier ce de vicaire.
C'eft en ce fens, félon Erpcnius , que les empereurs
& les grands-prêtres Sarrafins étoient app« -
comme étant les vicaires ou les lieutenant de Dieu*
Mais l'opinion lapins reçue eft qu'ils prirent ce ti-
tre en qualité de fucceffeurs de Mahomet.
Apres la mort de Mahomet , Aboubekre ayant été
élu par les Mufulmans, pour remplir fa place, il ne
560
CAL
voulut point prendre d'autre titre que celui de khal'ifa
refoul Allah , c'eft-à-dire , vicaire du prophète ou mef-
j'ager de Dieu. Omar , qui fuccéda à Aboubekre , re-
préfenta au chef des Mahométans , que s'il prenoit à
l'imitation du calife dernier mort , le titre de vicaire
ou de fucceffeur du prophète , par la fuite des ternsle
mot vicaire ieroit répété & multiplié fans fin : fur cette
repréfentation, & par l'avis de Mogairah , Omar prit
le titre à' émir moumenin , c'eft- à-dire , le feigneur, ou le
prince des croyans. Depuis ce tems , tous les califes ,
ou les fuccefleurs légitimes de Mahomet , ont con-
senti à porter ce nom. Ils ont encore retenu le titre
de calife fans aucune addition.
Les premiers califes réunilfoient donc en leurs per-
fonnes l'autorité temporelle & fpirituelle , & étoient
en même tems chefs de l'empire &t du facerdoce ,
comme avoient été les empereurs romains dans le
Paganifme. Aufli les princes mahométans recevoient-
ils d'eux Finveftiture de leurs états avec beaucoup
de cérémonies religieuiés , & ils décidoientdes points
de dodrine. Les califes fuccefleurs de Mahomet ont
régné dans la Syrie , & on les divife en deux races ,
celle des Ommiades , & celle des Abaflides. Mais à
mefure que les Sarrafins augmentèrent leurs conquê-
tes , les califes fe multiplièrent , plulieurs de leurs
fouverains ayant pris ce titre ; car outre celui de Sy-
rie & de Babylone , qu'on nommoit encore le calife
du Caire , on trouve dans les hiftoriens , des califis de
Çàrvan , de Fe^ , d'Ejpagne , de Perje , de Cilicie , de Me-
Jbpotamie. Mais depuis que les Turcs fe font rendus
maîtres de la plus grande partie des conquêtes des
Sarrafins , le nom de calife a été aboli , &c la première
dignité de la religion mahométane chez eux, eft de-
venue celle de muphti. foyeç Muphti. (G)
CALIFORNIE , (Géog.) grande prefqu'ile de l'A-
mérique feptentrionale , au nord de la mer du fud , ha-
bitée par des fauvages qui adorent la lune; chaque
famille y vit à fon gré , fans être foumiie à aucune
forme de gouvernement. Les Eipagnols y ont bâti
un fort nommé Notre-Dame de Lorette.
CALIMNO , ( Géog. ) ile de l'Archipel , habitée
par des Grecs.
CALLIN , f. m. à la Monnoie, compofition de
plomb & d'étain , dont l'alliage & Fufage vient de
la Chine.
C'eft de cette efpece de métal que plufieurs faux-
monnoyeurs ont fabriqué des écus , en y ajoutant ce
qu'ils ont cru le plus propre à remplir leur deiTein.
A la Chine , à la Cochinchine , au Japon , à Siam ,
on couvre les maifons de callin bas ou commun ; on
fait avec le callin moyen des boites de thé , & autres
vaiffeaux femblables ; &c du callin qu'ils appellent
fin , on en fabrique des efpeces.
CALIND A , ( Hift. mod. ) danfe des Nègres créols
en Amérique , dans laquelle les danfeurs 6c les dan-
feufes font rangés fur deux lignes en face les uns des
autres ; ils ne font qu'avancer & reculer en cadence ,
fans s'élever de terre , en faifant des contoriions du
corps tort lingulieres , & des geites fort lafeifs , au
fon d'une efpece de guitare & de quelques tambours
fans timbre , que des Nègres frappent du plat de la
main. Le R. P. Labat prétend que les religieuiés Ef-
pagnoles de l'Amérique danlent le calinda par dévo-
tion ; &C pourquoi non !
CALINGUE, CARLINGUE, CONTRE-
QUILLE. Foyei Carlingue.
CALIO , (Géog.) petite ville d'Afie dans la Nato-
lie , avec un port lur la mer Noire.
C ALIORNE , f. f. ( Marine ) la caliorne eft un gros
cordage parlé dans deux mouffles à trois poulies ,
dont on fe fert pour guinder & lever de gros far-
deaux. On l'attache quelquefois à une poulie fous la
hune de mifene , & quelquefois au grand étai au-def-
fiis de la grande écoutille. (Z)
CAL
CALIPPIQUE. Période calippique , (en Chronologie)
c'eft une période de ioixante-feizeans , après laquelle
les nouvelles & pleines lunes moyennes revenoient
au même jour de l'année folaire , félon Calippus
Athénien , inventeur de cette période. Voye?^ Pé-
riode.
Cent ans auparavant , Méton avoit inventé un<>
période ou un cycle de 1 9 ans. foye^r Cycle.
Il avoit formé ce cycle en prenant pour la quan-
tité de l'année folaire 365 j. 6 h. 18 ' 56" 50"'
31 "", 34""'; & le mois lunaire de 29 j. 12. h. 45'
47 " 26 "' 48"" 30 "'". Mais Calippus confidérant
que la quantité Métonique de l'année folaire n'é-
toit pas exacte , multiplia par 4 la période de Méton,
ce qui produilit une période de 76 ans , appellée ca-
lippique : c'eft pourquoi la période calippique contient
277 5 9 jours; & comme le cycle lunaire contient 23 c
lunaifons , ce que la période calippique eft quadru-
ple de ce cycle , il s'enfuit qu'elle contient 940 lu-
naifons.
Il eft démontré cependant que la période calippique.
elle-même n'eft point exacte ; qu'elle ne met point les
nouvelles &c pleines lunes précilément à leurs pla-
ces , mais qu'elle les fait retarder de tout un jour dans
l'efpace de 225 ans. En effet l'année folaire étant de
36 5 j. 6 h. 49', & la période calippique de 76 ans ; cette
même période fera par conféquent de 27758 j. 10 h.
4'. Or la grandeur du mois lunaire étant de 29 j.
12 h. 44' 3" 1 1'" ; 940 mois lunaires font 27758 j.
18 h. 9' 52" 20'", & par conféquent furpaftent
76 années folaires , de 8 h. 5 ' 52 20'". Ainfi à
chaque révolution de la période , les pleines lunes
& les nouvelles lunes anticipent de cet intervalle.
Donc comme cet elpace de tems fait environ un jour
entier en 225 ans, il s'enfuit que les pleines & nou-
velles lunes moyennes anticipent d'un jour dans cet-
te période au bout de 225 ans , & qu'ainii la période
calippique n'étant bonne que pour cet efpace , eft en-
core plus bornée que le cycle métonique de 19 ans,
qui peut fervir pendant un peu plus de 300 ans.
Au relie , Ptolemée fe fert quelquefois de cette pé-
riode ; Calippus avoit fuppofé l'année folaire de 365
jours 6 h. & le mois lunaire de 29 j. 12 h. 44' , 12",
48 '" ; & par conféquent il avoit fait l'un & l'autre
trop grand. Voit*, elem. de Chronol. (0)
CÂLIS ou CALIX , (Géog.") petite ville de Suéde
dans la Bothnie occidentale , fur une rivière de mê-
me nom , qui a fa fource dans la Laponie Suédoife ,
& fe jette dans le golfe de Bothnie,
CALIXTINS , f. m. pi. ( Hift. eccl.) Seftaires qui
s'élevèrent en Bohême au commencement du XV.
fiecle , & qui prirent ce nom , parce qu'ils foùtenoient
que Fufage du calice , ou de la coupe , étoit ablolu-
ment nécefiaire au peuple , dans la réception de l'Eu-
chariftie.
La doctrine des Calixtins confiftoit d'abord en qua*
tre articles. Le premier concernoit la coupe. Les
trois autres regardoient la correction des péchés pu-
blics & particuliers , qu'ils portoient à certains ex-
cès ; la libre prédication de la parole de Dieu , qu'ils
ne vouloient pas qu'on pût défendre à perfonne ; &
les biens d'Eglife contre lefquels ils déclamoient. Ces
quatre articles furent réglés dans le Concile de Balle
d'une manière dont les Calixtins furent contens , &la
coupe leur fut accordée à certaines conditions dont
ils convinrent. Cet accord s'appella CompaBatum ,
nom célèbre dans l'hiftoire de Bohême. L'ambition
de Roquefane leur chef en empêcha l'effet , & ils ont
duré jufqu'au tems de Luther auquel ils le réunirent.
Quoique depuis ce tems-Ià la fecle des Calixtins ne
foit pas nombreufe , il s'en trouve cependant quel-
ques-uns répandus en Pologne. Boff. hift. des variât.
Liv. XI. n°. 16 S & 171. (G)
Calixtins eft encore le nom qu'on donne à quel-
ques
CAL
Sues Luthériens mitigés, qui fuivent les opinions de
George Calixte, théologien célèbre parmi eux , qui
mourut vers le milieu du. XVIIe fiecle. Il n'étoit pas
du fentiment de S. Augmtin fur la prédeftination , la
grâce , le libre arbitre ; auffi les diiciples font-ils re-
gardés comme des Sémipélagiens. Calixte ibûtenoit
qu'il y avoit dans les hommes un certain pouvoir
d'intelligence & de volonté, avec un degré luffilant
de connoiffance naturelle , & qu'en ufant bien de ces
facultés , Dieu ne manque pas de donner tous les
moyens néceffaires pour arriver à la perfection dont
la révélation nous montre le chemin. Outre cela il
étoit fort tolérant , Si ne témoignoit pas un refpecr
aveugle pour les décifions de Luther ; ce qui n'a pas
contribué à accréditer fon fyftème , ni à groiîir le
nombre de les partifans. (C)
CALKA , ( Géog. ) royaume d'Ane danslaTarta-
rie, borné par la Sibérie, le royaume d'Eluth, &c.
* CALLÂF, ( Hijl. r.itur. botan. ) arbriffeau fort
bas , dont le bois eft uni , la feuille lemblablc à
celle du cerifier , dentelée par les bords , Si placée à
l'extrémité des branches qui font droites , jaunes , Si
tans nœuds ; Si les fleurs qui viennent avant les feuil-
les , en grand nombre , font dilpolées à égale diftan-
ce ies unes des autres ; ce font de petites lpheres ob-
longues , cotoneules , jaunes , ou d'un jaune blan-
châtre , & d'une odeur agréable. On en prépare
à Damas une eau excellente pour fortifier , d'une
agréable odeur , li pénétrante , qu'elle fuffit pour dil-
fiper la défaillance. Les Maures s'en fervent tant in-
térieurement qu'extérieurement dans les fièvres ar-
dentes & peftilentielles. Elle humeûe & rafraîchit.
On en tire une huile qu'on employé à plufieurs ufa-
ges. Profpcr Alpin.
C ALLAHUYA , ( Géog. ) province de l'Amérique
méridionale au Pérou , très-fertile en mines d'or.
* C ALLAIS } f. f. (Hifl. nat. Lith.) pierre qui imite
le faphyr , excepté que la couleur eft plus claire , Se
reiTemble à celle de l'eau de mer : on la trouve , à ce
qu'il dit , dans les rochers efearpés & couverts de gla-
ce ; qu'elle a la forme de l'ail , Si qu'elle y adhère
légèrement. Il paroît , ajoute de Boot , que c'eft l'ai-
guë marine des modernes. Voye\_ Aiguë marine.
Maiscen'eft pas l'avis dedeLaet, qui dit que c'eft la
turquoife.
CALLAO, {Géog.) ville forte & confidérablede
l'Amérique méridionale, au Pérou, à i\c\.\x lieues de
Lima, avec un bon port qui a. été ruiné en 1746 par
lin tremblement de terre. Long. jo. 1. lat. mérid. iz.
%9- y°yci Tremblement de terre.
CALLEADA , ( Géog. ) ville des Indes , fur la ri-
vière de Septa , dans les états du Mogol.
* C ALLÉE, f. f. ( Commerce.) Cuirs dccalléc; c'eft
ainfi qu'on appelle des excellens cuirs de Barbarie ,
que les Tagrains & les Andalous achettent , & dont
ils rendent le commerce difficile , par le cas & les
ufages qu'ils en font.
CALLEN , ( Géog. ) ville d'Irlande , dans la pro-
vince de Leinfter , au comté de Kilkenny , fur une
rivière de même nom.
CALLEUX , adjectif ( terme de Chirurgie ) qui fe
dit en général de toute forte de dureté de la peau ,
de la chair & des os ; mais en particulier on donne
cette épithete aux bords durs d'une plaie & d'un ul-
cère , tels que font ceux des fiftules , & des ulcères
malins Si carcinomateux. (Y)
Calleux , corps calleux ( en Anatomie ) eft le nom
qu'on a donné à la partie fupérieurc , ou à celle qui
couvre les deux ventricules du cerveau, qui paroît
immédiatement au-delfous de la faux, lorfqu'on l'a
enlevée , & légèrement écarté les deux hémifpheres
du cerveau. Elle eft enfoncée au-delfous de toutes les
circonvolutions du cerveau ; elle eft formée par l'u-
nion des fibres médullaires de chaque côté. Ses fi-
Tome II,
CAL
561
bres paroiffer.t fe rencontrer un peu obliquement fous
une eipece de raphé,que l'on remarque tout le Ionc
de la partie moyenne de la face fupérieure ; de ma-
nière que celles qui viennent du côté droit fe croi-
fent légèrement avec celles qui viennent du cô'té gau-
che. Voyeit Siège de l'Ame à l'article Ame.
C A L L I A R , ( Géog. ) petite ville de l'Inde , au
royaume de Vifapour.
■f CALLIGRAPHE , adj. pris fubft. ( BeUes-Let. )
écrivain copifte , qui mettoit autrefois au net ce qui
avoit été écrit en notes par les Notaires ; ce qui re-
vient à peu près à ce que nous exprimerions main-
tenant ainlî , celui qui fait lagrojje d'une minute.
Ce mot eft Grec , y.a.),xtyç,â$c,ç , compoié de ■■■■'> ;■ " ,
beauté, Si ypàça, j'écris; & lignifie par conféquent
Jcriptor ekgans , écrivain qui a une belle main.
Autrefois on écrivoit la minute d'un acte, le brouil-
lon ou le premier exemplaire d'un ouvrage, en notes,
c'eft-à-dire , en abréviations , qui étoient une cfpece
de chifres. Telles font les notes de Tiron dans Gruj
ter ; c'étoit afin d'écrire plus vite , Si de pouvoir fui-
vre celui qui di&oit. Ceux qui écrivoient ainlî en
notes s'appelloient en Latin Notaires, & en Grec,
fit/LMioypttçoi &C ■ntyu'if'i^t; c'eft-à-dire, écrivains en
notes , 6c gens qui écrivoient vite. Mais parce que
peu de gens connoilfoient ces notes ou ces abrévia-
tions , d'autres écrivains , qui avoient la main bon-
ne, & qui écrivoient bien Si proprement, les co-
pioient pour ceux qui en avoient befoin , ou pour
les vendre ; c'-: cei:\>ci s':ippe;i"ier.t c.
comme on le voit dans plufieurs auteurs anciens^
Voyc{ Scribe, Libraire, Notaire , &c (CV)
* CALLIMUS , f. m. ( Hijl. nat. Litholog. ) pier-
re ou caillou qui fe trouve dans la pierre d'aigle. Sa
couleur & fa dureté varient ; elle eft quelquefois auffi
tranlparente que le cryftal : on trouve pies de l'Elbe ,
une forte de pierre d'aigle , qui contient un caillou
blanc très-dur , dont la liipcrfîcie eft pleine de cap-
fules , comme un rayon de miel. On lui attribue les
mêmes qualités qu'à la pierre d'aigle. Voye^ Pierre
d'Aigle.
* CALLIOPE,( Myth. ) une des neuf Mufes ,
ainfi appellée à caufe de la douceur de fa voix ; elle
préiîde à l'éloquence & à la Poèlie héroïque. On la
reprélente le bras gauche chargé de guirlandes , Si la
main appuyée fur les œuvres des premiers Poètes
héroïques. On la donne pour mère à Orphée , Si l'on
dit qu'elle eut de Jupiter les deux Corybantes , & le9
Syrenes d'Acheloiis.
* CALLISTES ou C ALLISTHES , ( Myth. ) fê-
tes inftituées en l'honneur ds Venus ; elles fe célé-
braient dans l'île de Lesbcs , & les femmes s'y dif-
putoient le prix de la beauté.
* CALLITRICHEN , (Hijl. nat. Zoologie ) nom
qu'on donne à une eipece de linges à longue queue,
qui font couverts de longs poils fort hériffés , Se qui
forment autour de leur tête une cfpece de capuchon.
CALLOSITÉ ,f. f. ( Chirurgie) chair blanchâtre ,
dure , Se indolente , qui couvre les bords Se les pa-
rois des anciennes plaies Si des vieux ulcères , qui
ont été négligés Si maltraités. On détruit ordinaire-
ment les chairs callcufes parles efcharotiques. Voye{
Escharotique , Caustique. L'épailillèment de
la lymphe dans lès vaiffeaux eft la caufe première
de la callofué. Le mauvais ufage des bourdonnetS
donne fouvent lieu aux callofuis des ulcères. Poye{
Bourdonnet. ( Y)
CALLOSITÉ ,Çen Jardinage) fe dit d'une matière
calleulc qui le forme à la jointure ou à la reprife des
pouffes d'une jeune branche chaque année, ou aux
inlertions des racines. V<ryt{ Calls. ( A )
* CALLYNTERIES , V. f. pi. ( Hijl. anc. ) fêtes
célébrées par les Athéniens, dont il ne nous eft par-
venu que le nom.
BBbb
56l
C A L
CALMANT , adj. ( Médecine ) forte de remèdes
qui adouciffent les douleurs caufées par des humeurs
acres , ou par une diftention trop violente des par-
ties ; ils agiffent par leur humidité 6c leurs parties
mucilagineules , qui le gliffant entre les fibres , les hu-
mectent, les relâchent, èc empâtent les molécules
acides qui picottent & irritent les tuniques des vail-
feaux. Ces remèdes font de plulieurs claffes ; ils font
en général nommés fédatifs , parégoriques, adoucijjans
& émolliens.
C'eft ainfi que les béchiques doux font de vrais
calmants dans la toux ; que la graine de lin , le nitre ,
la guimauve , & les autres diurétiques froids cal-
ment les ardeurs d'entrailles , des reins , de la veffie
& des uretères. L'opium eft à ce titre le plus grand
& le plus énergique de tous les caïmans ; toutes les
préparations font employées pour les mêmes indi-
cations. Toutes les plantes foporeufes de la claffe des
mandragores , des morelles , & des pavots , font auffi
calmantes. Foye^ SEDATIF & DOULEUR. (A7)
CALMAR ou CALEMAR, CORNET, loligo, f. m.
( Hijl. nat. Zoologie') animal du genre des animaux
mous , mollia. M. Needham , de la fociété royale
de Londres , nous en a donné la defeription fans J es
nouvelles obfervations microfcop.Vo'icice que nous en
avons tiré. Le calmar eft allez reffemblant à la lèche
& au polype de mer, & il a comme eux, un réfer-
voir plein d'une liqueur noire comme de l'encre : le
corps eft allongé ; la partie qui porte le nom d'os
dans la lèche n'eft point dans le calmar; il y a en pla-
ce une lubftance élaftique , fine , tranlparente , rel-
femblante à du talc , pliée iuivant la longueur de fon
prand axe dans l'état naturel , & de la figure d'un ova-
fe allongé , lorsqu'elle eft étendue. Cette fubftance
eft placée immédiatement entre la partie intérieure
du dos ou de l'étui de l'animal , & les inteftins qu'elle
renferme dans fa cavité. Le calmar a dix cornes ou
bras rangés à égale diftance les uns des autres , au-
tour d'une lèvre difpofée en cercle & ridée, qui
renferme un bec compofé de deux pièces de fubftan-
ce analogue à la corne , & de deux parties cro-
chues emboîtées l'une dans l'autre , & mobiles de
droit à gauche. L'ouverture qu'elles laiffent entre
elles , eft perpendiculaire au plan qui paffe par les
deux yeux, qui font placés de chaque côté de la tête
allez près l'un de l'autre , & au-delfous de la racine
des bras de l'animal. Ces bras ne font pas tous de la
même longueur ; il y en a deux qui lont auffi longs
que l'animal , tandis que les autres font beaucoup
plus petits : la groffeur de ceux-ci diminue peu à peu
depuis la racine jufqu'à l'extrémité qui eft terminée
en pointe ; leur côté intérieur eft convexe, & garni
de plulieurs rangées de petits fuçoirs mobiles. Il y
a fur le côté extérieur deux plans qui forment un an-
gle en fe réunifiant. Les deux bras les plus longs font
cylindriques , excepté à leur extrémité , qui a la mê-
me forme que les petits bras , & qui eft garnie de fu-
çoirs ; la fubftance de tous ces bras eft affez fembla-
ble à celles des tendons des animaux , & fort élafti-
que.
Chaque fuçoir tient au bras de l'animal par un
pédicule ; lorfqu'ils font étendus ils reffemblent en
quelque forte au calice d'un gland : dans la contrac-
tion , le pédicule s'élève conjointement avec une
membrane fine , qui environne un anneau cartilagi-
neux, garni de petits crochets; ces crochets s'atta-
chent à ce qu'ils touchent , & enfuite l'animal retire
le pédicule & les crochets pour retenir fa proie. C'eft
par ce moyen que s'opère la luccion qui eft faite en
même tems par plus de mille fuçoirs difFérens ; on
en a compté plus de cent à l'un des petits bras , &
plus de cent vingt à l'extrémité des longs bras : mais
leur nombre ne peut être déterminé au jufte , parce
qu'ils font à peine fenfibles à l'extrémité des petits
CAL
bras. Le diamètre des plus grands fuçoirs dans un
de leize pouces eft de trois dixièmes de pouce , &
leur profondeur eft à peu près égale au diamètre.
11 y a au-dedans de la cavité du bec une membrane
garnie de neuf rangées de dents,qui en s'élargiffant par
le haut & en fe contournant par le bas , forme en même
tems une langue &c un gofier. Le corps du calmar eft
un étui cartilagineux, garni de deux nageoires; il y a
immédiatement au-delfous du bec un conduit ou ca-
nal en forme d'entonnoir ouvert par les deux bouts ,
qui donne iffue à une liqueur noire , qui trouble l'eau
lorfque l'animal la répand : cette liqueur étant expo-
fée à l'air, fe condenle & devient une fubftance dure
ck fragile comme du charbon ; & enfuite elle peut fe
diffoudre dans l'eau. Vers le milieu de Décembre,
M. Needham remarqua près de la racine du rélervoir,
qui renferme la liqueur noire , deux facs membra-
neux d'une figure ovale , d'un quart de pouce de dia-
mètre ; ils étoient remplis d'une matière gluante où
étoit contenu le frai de l'animal. A la vue fimple on
n'y diftinguoit que de petites taches d'une belle cou-
leur de cramoili : mais à l'aide du microfeope on
voyoit des œufs très-différens les uns des autres,
pour la grandeur & pour la figure : les deux côtés du
canal par où palfe la liqueur noire font foûtenus &
écartés l'un de t'autre par deux cartilages parallèles
& cylindriques. On voit au-deffus du cartilage gau-
che deux tuyaux fortement adhérens l'un à l'autre ,
quoique leurs cavités foient féparées : peut-être ler-
vent-ils de conduit au frai lorlqu'il fort ; au moins il
eft certain qu'il y a dans le corps du calmar mâle,
deux vaifleaux de la même nature , & fitués de la mê-
me manière par lefquels l'animal fait fortir fa laite.
Ce fut au milieu de Décembre que M. Needham
découvrit, pour la première fois, quelqu'apparence
de la laite & des vélkules qui la renferment ; avant
ce tems il n'avoit trouvé aucun veftige de femence
dans les mâles , ni de frai dans les femelles. Les deux
conduits de la femence étoient bien vifibles : mais ils
ne fe terminoient point en un long réfervoir ovale ,
étendu parallèlement à l'eftomac , & occupant plus
de la moitié de la longueur de l'animal ; ces parties
fe forment & accroilTent à mefure que la femence ap«
proche de fon degré de maturité. Les vaifleaux qui
la contiennent font rangés par paquets , plus ou moins
éloignés des conduits déférens.
» L'étui extérieur eft tranfparent , cartilagineux ,
» & élaftique ; Ion extrémité fupérieure eft terminée
» par une tête arrondie , qui n'eft aune chofe que le
» fommet même de l'étui , contourné de façon qu'il
» ferme l'ouverture , par où l'appareil intérieur s'é-
» chappe dans le tems de fon action.
» Au-dedans eft renfermé un tube tranfparent , qui
» eft élaftique en tous fens , comme il eft ailé de s'en
» convaincre par les phénomènes qu'il offre ; ce tube
» fait effort pour palier par les ouvertures qu'il trou-
» ve : quoiqu'il ne foit pas par-tout également vifi-
» ble , diverfes expériences prouvent cependant qu'il
» renferme la vis , le fuçoir, le barillet &c la fubftan-
» ce fpongieufe qui s'imbibe de la femence. La vis
» en occupe le haut &c fait fortir au-deçà de fa par-
» tie fupérieure , deux petits ligamens par lefquels
» elle eft adhérente , auffi bien que tout le refte de
» l'appareil , auquel elle eft jointe , au fommet de
» l'étui extérieur. Le fuçoir & le barillet font pla-
» ces au milieu de ce tube ; la fubftance fpongieufe
» dilate fa partie inférieure , & eft jointe au barillet
» par une efpece de ligament.
» Plulieurs de ces vaifleaux parvenus à leur maturi-
» té , & débarraffés de cette matière gluante qui les
» environne pendant qu'ils font dans le réfervoir de
» la laite , agiffent dans le moment qu'ils font en plein
» air ; & peut-être que la légère preffion qu'ils foul-
» firent en fortant, fuffit pour les déterminer à cela :
CAL
» cependant la plupart peuvent être placés commo-
» dément pour être vus au microscope , avant que
» leur adion commence ; &c même pour qu'elle s'e-
» xécute , il faut humecter avec une goutte d'eau
» l'extrémité Supérieure de l'étui extérieur, qui com-
» mence alors à le développer, pendant que les deux
» petits ligamens qui Sortent hors de L'étui le contour-
» nent & s'entortillent en différentes façons ; en mê-
» me tems la vis monte lentement , les volutes qui
» Sont à Son bout Supérieur Se rapprochent &c agil-
» Sent contre le Sommet de l'étui. Cependant celles
» qui Sont plus bas arrivent aufli , & iemblent être
» continuellement Suivies par d'autres qui Sortent du
» piSton. M. Needham dit qu'elles Semblent être fui-
» vies , parce qu'il ne croit pas qu'elles le Soient en
»> effet ; ce n'elt qu'une Simple apparence produite
» par la nature du mouvement de la vis. Le Suçoir
m & le barillet Se meuvent auffi Suivant la même di-
» reclion ; & la partie intérieure qui contient la le-
» mence s'étend en longueur , & Se meut en même
» tems vers le haut de l'étui : ce qu'on remarque par
»> le vuide qu'elle laiffe au fond. Dès que la vis avec
»> le tube dans lequel elle eft renfermée , commence
» à paroître hors de l'étui, elle fe plie, parce qu'elle
y> eft retenue par Ses deux ligamens ; &C cependant
» tout l'appareil intérieur continue à Se mouvoir ,
*> lentement & par degrés , julqu'à ce que la vis , le
» Suçoir , &c le barillet Soient entièrement Sortis.
♦> Quand cela eStSait, tout le refte Saute dehors en un
» moment ; le Suçoir Se Sépare du barillet ; le liga-
» ment apparent qui eSt au-deffous de ce dernier , le
#> gonfle 6c acquiert un diamètre égal à celui de la
» partie Spongieulc qui le fuît. Celle-ci , quoique
» beaucoup plus large que dans l'étui, devient enco-
» re cinq fois plus longue qu'auparavant ; le tube qui
» renferme le tout s'etrécit dans fon milieu , & for-
» me ainfi deux efpeces de nœuds diftans environ
•» d'un tiers de la longueur , de chacune de les extré-
» mités; enfuite la Semence s'écoule par le barillet,
» &c elle eft compofée de petits globules opaques ,
» qui nagent dans une matière iereufe , fans donner
» aucun ligne de vie, & qui font précilément tels
»> qu'on les a vus , quand ils étoient répandus dans
» le réfervoir de la lemence. La partie comprite en-
» tre les deux nœuds paroit être frangée ; quand on
» l'examine avec attention, on trouve que ce qui la
» fait paroître telle , c'eft que la SubStance fpongicu-
» fe , qui eft en dedans du tube, eft rompue & féparée
*> en parallèles à peu près égales.
» Quelquefois il arrive que la vis & le tube fe
» rompent précilément au-deffus du Suçoir , lequel
» refte dans le barillet ; alors le tube fe ferme en un
» moment , & prend une figure conique , en le con-
♦» traûant autant cpi'il eft poffible par-deffus l'extré-
» mité de la vis; ce qui démontre qu'il eft très-élaf-
» tique en cet endroit , &c la manière dont il s'accom-
» mode à la figure de la fubftance qu'il renferme ,
» lorfque celle-ci fouffre le moindre changement ,
» prouve qu'il l'eft également par-tout ailleurs.
On fait par les fragmens d'alimens que l'on a trou- 1
vés dans Pcftomac du calmar , qu'il le nourrit d'ani-
maux , & entre autres de pélamides ec de melettes ,
qui font de petits poiffons, dont il y a grand nombre
dans les bas-fonds , prés de l'embouchure du Tage.
Voyc{ les nouvelles obfervations microjcopiques.
On a diftingué deux fortes de calmars, le grand &
le petit, celui-ci eft aufti appelle cajjeron; il diffère
de l'autre en ce qu'il eft plus petit, & que l'extré-
mité de fon corps eft plus pointue.
Le nom du calmar vient de la rcffemblance qu'on
lui a trouvée avec un encrier, fur-tout pour la liqueur
noire qui elt dans le corps de ranimai , &; que l'on
prendroit pour de l'encre. Rondclei. ( / )
CALMAR, (Géog.) grande ville fortifiée de Sue-
Jonit II.
CAL
56?
de, dans la province de Smaland, avec un port fur
la mer Baltique, fur le détroit auquel on donne le
nom de Calmar-Sund. Long. 34. JJ. lac. 56 .48.
CALME, 1". m. {Marine.') c'eft une celfation en-
tière de vent: on dit fur mer calme tout plat, pour
dire qu'il ne fait point du tout de vent. Quelques-
uns prétendent que le grand calme eft un préfage d'u-
ne prochaine tempête. On dit mer calme.
Etre pris du calme , c'eft demeurer fans aucun vent,
enforte qu'on ne peut plus gouverner.
CALMENDA , (Géog.') ville du royaume de Por-
tugal , peu éloignée de Bra»ue.
* CALMANDE, f. f. (Commerce.) étoffe de laine
d'un excellent mer: elle fe fabrique partiel
ment en Flandre. Il y en a de deux efpeces , de
ou rayéem & des calmandes à fleurs. On fait entrer
dans ces dernières de la foie, & dans quelques au-
tres du poil de chèvre. Il n'y a rien de conftant ni
fur leur longueur ni fur leur largeur.
CALMER, appaiter la tempête; il coma.
calmer le dit à la mer, calmer, devenir calme, pour
fignifier que le vent diminue.
Dans un combat entre deux armées navales , le
grand nombre de coups de canon qui fe tirent , fait
prefque toujours calmer. (Z)
CALMOUCKS ou CALMUQUES, (Géog.) peu-
ples d'Alîe , dans la grande Tartane , entre le Mon-
gul & le Wolga : ils lbnt divifés en hordes ou tribus
qui ont chacune leur chef ou kam, dont le prii
rélide à Samarcand. Les Calmouks n'ont point de de-
meure fixe ; ils campent toujours fous des teni
ont des efpeces de chariots qui les Suivent par-tout,
& qui portent leurs femmes, leurs enfans, Cv le peu
de bagage qu'ils peuvent avoir. La Ruffie cil en al-
liance avec cette nation, &c a toujours 6000 Cal-
mouks à fa foluc.
CALOMEL, f. m. terme de Pharmacie , nom qu'on
donne au mercure doux, Sublimé julqu'à quatre f is
ou même davantage. Voye^ Mercure.
Il paroît que cette dénomination a été d'abord don-
née à l'éthiops minéral , ck eft compofée des deux
mots Crées xuXoç, beau, 6i u-> ■--, noir, parce que
les corps pâles ou blancs qu'on en Srotte, devien-
nent noirs. Voye[ Ethiops.
D'autres veulent qu'elle ait été donnée dès le com-
mencement au mercure doux, par la fantaifie d'un
certain Chimifte qui le faifoit lervir dans fes 1
lions par un noir; &. nue cette dénomination fait al-
lulîon tout-à-la-fois à la couleur de l'ai
noir, & à la beauté du médicament qui étoit d'une
fort belle apparence. (A)
CALOMNIE, f. f. ( Morale. ) on calomnie
qu'un , lorfqu'on lui impute des défauts *
qu'il n'a pas. La calomnie eft un mer ieux que
chacun réprouve ce detefte, ne fut-ce que par la
crainte d'en être quelque jour l'objet. Mais ;
tel qui la condamne, n'en eft pas innocent lui-mê-
me: il a rapporté de:- taits avec infidélité, les a gr-of-
fis, altérés ou changés, étourdiement peut-être, &
par la feule habitude d'orner ou d'exagérer fes
Un moyen fur, & le Seul qui le loit , pour ne point
calomnier, c'eft de ne jamais médire.
Tranfportez-vous en el'prit dans quelque m
[aire, ou vous fuppoîerez que les paroles font
toujours l'expreffiori fidèle du fentiment& de la pen-
(ee , on l'ami qui vous Sera des offres de lervu
en clièt rempli de bienveillance; où l'on ne cher-
che point à fe prévaloir de votre crédulité,
vous repaître l'efprit de fables; où lavéritédk
les difeours, lesrécits 8clespromefles;où l'on \ ■ e
parconlequent Sans Soupçon & 1 ins défiance, à l'a-
bri des impoftures , des perfîi délations <•*-
lomnieufes: quel délicieux commerce, que celui des
hommes qui peupleroient cet heureux globe !
1 B B b b ij
5<$4
CAL
Vous voudriez que celui que vous habitez jouît
d'une pareille félicité : eh bien , contribuez y de vo-
tre part, & commencez par être vous-même droit,
fincere & véridique. (C)
» L'égliie , dit le célèbre M. Pafcal , a différé aux
» calomniateurs , aufli - bien qu'aux meurtriers , la
» communion jufqu'à la mort. Le concile de Latran
» a jugé indignes de l'état eccléfialtique ceux qui en
s> ont été convaincus , quoiqu'ils s'en fuflent corri-
» gés ; &C les auteurs d'un libelle diffamatoire , qui
» ne peuvent prouver ce qu'ils ont avancé , font
» condamnés par le pape Adrien à être fouettés ,
» jlagellentur ».
L'illuftre auteur de Yefprh des loix , obferve que
•chez les Romains, la loi qui permettoit aux citoyens
de s'aceufer mutuellement, & qui étoit bonne félon
l'efprit de la république , où chaque citoyen doit veil-
ler au bien commun , produifit fous les empereurs une
foule de calomniateurs. Ce fut Sylla , ajoute ce philo-
fophe citoyen , qui dans le cours de fa diâature ,
leur apprit, par Ion exemple, qu'il ne falloit point
punir cette exécrable efpece d'hommes : bientôt on
alla jufqu'à les récompenfer. Heureux le gouverne-
ment où ils font punis. (O)
* Les Athéniens révérèrent la calomnie ; Apelle, le
peintre le plus fameux de l'antiquité , en fit un ta-
bleau dont la compofition fuffiroit feule pour juiiifîer
l'admiration de fon fiecle : on y voyoit la crédulité
avec de longues oreilles, tendant les mains à la ca-
lomnie qui aDoit à fa rencontre ; la crédulité étoit ac-
compagnée de l'ignorance & du foupçon ; l'ignoran-
ce étoit repréfentée fous la figure d'une femme aveu-
gle ; le foupçon , fous la figure d'un homme agité d'u-
ne inquiétude fecrette , & s'applaudiiTant tacitement
de quelque découverte. La calomnie, au regard fa-
rouche, occupoit le milieu du tableau ; elle fecoùoit
une torche de la main gauche , & de la droite elle
traînoit par les cheveux l'innocence fous la figure
d'un enfant qui fembloit prendre le ciel à témoin :
l'envie la précédoit, l'envie aux yeux perçans & au
vifage pâle & maigre; elle étoit fuiviede l'embûche
& de la flatterie : à une diftance qui permettoit enco-
re de difeerner les objets , on appercevoit la vérité
qui s'avançoit lentement fur les pas de la calomnie,
conduifant le repentir en habit lugubre. Quelle pein-
ture ! Les Athéniens eufTent bienfait d'abatre la fta-
tue qu'ils avoient élevée à la calomnie , Se de mettre
à fa place le tableau d'Apelle.
Calomnie, en Droit , outre fa fignification ordi-
naire , s'eft dit aufli de la peine ou amende impofée
pour une action mal intentionnée & fans fondement.
Onappelloit auiTi anciennement calomnie l'action
ou demande par laquelle on mettoit quelqu'un en
juftice , foit au civil, foit au criminel; & en ce fens
elle le difoit même d'une légitime aceufation, &
d'une demande jufte. (H)
CALONE, (Géog.) comté des Pays-bas, dans le
duché de Brabant, fur les frontières du pays de
Liège.
Calone, (Géog.) rivière de France, en Norman-
die.
CALOPINACO,( Géog. ) petite rivière du
royaume de Naples , dans la Calabre ultérieure.
CALORE, (Géog.) rivière du royaume de Na-
ples, dans la principauté ultérieure, qui prend fa
fource près de Bagnolo, & qui fe jeite'dans le Sa-
bato , près de Benevent.
CALOT, f. m. terme de Bimblotier , ou f ai feur de dra-
gées au moule; c'eft une calotte de chapeau dans la-
quelle ils mettent les dragées après qu'elles font fépa-
rées des branches. Voye^ D.fig. %. PI. de la Fonderie
des dragées au moule.
CALOTTE, f. f. eft une efpece de petit bonnet
de cuir, de laine, de latin ou d'autre étoffe, qu'on
CAL
porta d'abord par nécefîîté, mais qui par fucceflîort
eft devenu un ornement de tête , furtout pour les ec*
cléfiaftiques de France.
Le cardinal de Richelieu eft le premier qui en ait
porté en France. La calotte rouge eft celle que por-
tent les cardinaux. Foye^ Bonnet.
On a tranfporté par analogie avec la calotte par-
tie de notre vêtement , le nom de calotte à un grand
nombre d'autres ouvrages. Voye^ la fuite de cet article.
Calotte , en terme d'Architecture, eft une cavité
ronde ou un enfoncement en forme de coupe ou de
bonnet , latte & plâtré , imaginé pour diminuer la
hauteur ou l'élévation d'une chapelle, d'un cabinet,
d'une alcôve, par rapport à leur largeur. (P)
Calotte , en terme de Boutonnier , c'eft la couver-
ture d'un bouton orné de tel ou tel deflein. Les ca-
lottes font de cuivre, de plomb, d'étain argenté,
d'or, d'argent, de pinchbec, &c. &c font ferties fur
des moules. Voye^ Bouton.
Calotte, en terme de Fourbiffeur , c'eft cette partie
de la garde d'une épée qu'on remarque au-deffus du
pommeau , fur laquelle on applique le bouton.
CALOTTE , en terme de Fondeur de petit plomb , fe
dit des formes de chapeaux dans lelquelles on met le
plomb auiii-tôt qu'il eft féparé de fa branche. Voye^
Calot.
Calotte, nom que les Horlogers donnent à une ef-
pece de couvercle qui s'ajufte furie mouvement d'u-
ne montre. Les Anglois font les premiers qui s'en font
fervis. Cette calotte fert à garantir le mouvement de la
poufliere ; on n'en met guère aux montres limples ;
ce n'eft qu'aux répétitions à timbre qu'elles devien-
nent ablolument nécefïaires , parce que la boîte
étant percée, pour que le timbre rende plus de fon,
on eft obligé d'avoir recours à ce moyen pour garan-
tir le mouvement de toute la poufliere qui y entre-
roit fans cela.
On a prefque abandonné l'ufage des calottes , par-
ce qu'eues rendoient les montres trop petites ; fans
cela elles feraient fort utiles : car il faut convenir
qu'une montre en iroit beaucoup mieux , fi l'on pou-
voit enfermer fon mouvement de façon que la poul-
fiere n'y pût pas pénétrer. Voye^ la fig. S3- PI- X*
£ Horlogerie , où C marque la cavité néceflaire pour
loger le coq. Voye^ Répétition. La fig. de défais
eit le profil. (7)
Calotte Céphalique ou Cucupha, {Phar-
macie?) fachet qu'on appliquoit fur la tête dans la cé-
phalalgie; il étoit fait avec des morceaux de linge,
de fatin, de coton, doublés, entre lefquels on met-
toit des médicamens céphaliques ; on imprégnoit
aufli ce fachet de quelque huile diftillée.
Nota. Ces calottes ne font plus en ufage, parce que
fouvent leurs effets devenoient funeftes ; le plus pe-
tit mal qui en arrivoit , étoit de rendre les malades
très-feniîbles aux changemens les plus légers de l'air.
On peut voir fur ces calottes les différentes Phar-
macopées , furtout celle de Lemery. (iV)
CALOTTIER, f. m. ( Commerce. ) celui qui a le
• droit de faire ôc de vendre des calottes : les maîtres
Calottiers font de l'état des marchands Merciers.
CALOYER ou CALOGER , f. m. (Hijl. ecclef. )
calogeri, moine, religieux ou religieufe Greque , qui
fuivent la règle de S. Baille. Les Caloycrs habitent par-
ticulièrement le mont Athos: mais ils deflervent pref-
que toutes les égliies d'Orient. Ils font des vœux com-
me les moines en Occident. Il n'a jamais été fait de
réforme chez eux ; car ils gardent exactement leur
premier inftitut, 6i confervent leur ancien vêtement.
Tavernier obferve qu'ils mènent un genre de vie
fort auftere & fort retirée; ils ne mangent jamais de
viande, & outre cela ils ont quatre carêmes, & ob-
fervent pluiieurs autres jeûnes de l'égliie Greque avec
une extrême régularité. Us ne mangent du pain qu'a-
CAL
près l'avoir gagné par le travail de leurs mains : il y
en a qui ne mangent qu'une fois en trois jours, & d'au-
tres deux fois en fept : pendant leur fept femaines de
carême , ils parlent la plus grande partie de la nuit à
pleurer & à gémir pour leurs péchés 6c pour ceux
des autres.
Quelques auteurs obfervcnt qu'on donne particu-
lièrement ce nom aux religieux qui font vénérables
par leur âge , leur retraite 6c l'auftérité de leur vie ,
& le dérivent du Grec ko.Xo{ ? beau , & > ripaç , vieillejfe.
Il eft bon de remarquer que quoiqu'en France on com-
prenne tous les moines Grecs fous le nom de Caloyers ,
il n'en eft pas de même en Grèce : il n'y a que les frè-
res qui s'appellent ainfi ; car on nomme ceux qui font
prêtres , Jéromonaques , Hieromonachi , l'tpofjtœvwtù.
Les Turcs donnent auffi quelquefois le nom de ca-
loyers à leurs dervis ou religieux. Voyt7^ Dervis.
* Les religieufes caloyeres font renfermées dans
des monafteres, ou vivent féparément chacune dans
leur maifon. Elles portent toutes un habit de laine
noire, &c un manteau de même couleur; elles ont la
tête rafée , & les bras & les mains couvertes jufqu'au
bout des doigts: chacune a une cellule iéparée,&
toutes font foumifes à une fupérieure ou à une abbef-
fe. Elles n'obfervent cependant pas une clôture fort
régulière , puilque l'entrée de leurs couvens , inter-
dite aux prêtres Grecs , ne l'eft pas aux Turcs qui y
vont acheter de petits ouvrages à l'aiguille faits par
ces religieufes. Celles qui vivent fans être en com-
munauté , font pour la plupart des veuves , qui n'ont
fait d'autre vœu que de mettre un voile noir fur leurs
têtes , & de dire qu'elles ne veulent plus fe marier.
Les unes & les autres vont partout où il leur plaît ,
& joiiifTent d'une affez grande liberté à la faveur de
l'habit religieux. {G)
CALPÉ , f. f. (Jiifi, anc.~) courfe de jumens intro-
duite Se peu de tems après proferite par les Eléens
dans leurs jeux : elle coniiftoit , félon Paufanias , à
courre avec deux jumens , dont on montoit lune ,
& l'on menoit l'autre en main ; fur la fin de la cour-
fe on fe jettoit à terre , on prenoit les jumens par
leurs mords , & l'onachcvoit ainfi fa carrière. Ama-
iie , dans fa verfion Latine de Paufanias , s'eft trom-
pé en rendant koàt™ , par carpentum , chariot , puifque
dans l'auteur Grec il ne s'agit nullement d'une courfe
de chars, mais d'une courfe de jumens libres & fans
aucun attelage. Budé tire du Grec Kottorn , l'éty-
mologie de nos mots François galop 6c galoper. En
effet de *à.\tn ou *.&Kit*. , les Grecs ont fait ttaXw? 6c
xaAwaÇw. Les Latins ont dit calpare & calupere , d'où
nous avons formé gdlop & galoper. Mêrn. de l'Acadé-
mie des B. L. tom. FUI. (G)
CALPÉ, {Géog.) haute montagne d'Efpagne, au
royaume d'Andalouiie , au détroit de Gibraltar, qui
fait l'une des colonnes d'Hercule. La montagne d'A-
byla qui eft en Afrique , vis-à-vis de celle-ci , fait
l'autre.
CALPENTINE , {Géog.) petite île d'Afie, à l'oucft
de celle de Ccyian, avec une ville de même nom,
appartient aux Holland i .
* CALQUE, f. m. {Hifl. anc.) poids de la dixiè-
me partie d'une obole. Voye^ Obole.
CALQUER , {Peinture. Deffein.) manière de
deffmer, ou tranfporter un deffein d'un corps iur lin
autre.
Lorfqu'on veut calquer quelque deffein que ce
foit , on en frotte le revers avec un crayon ou une
pierre tendre de couleur quelconque, mais différente
de celle du papier , ou autre matière fur laquelle on
veuttranfporter le deffein ; on applique le curé trotté
de crayon fur le papier ou autre matière où l'on veut
porter le deffein , en l'y affujettiffant d'une main, tan-
dis que de l'autre on paffe avec une pointe de fer
emouffée fur chaque trait du deffein ; alors il s'impri-
CAL
565
me fur le papier placé deffous au moyen de la cou-
leur , dont le deffein eft frotté fur fon revers. Si l'on
vouloit ne pas colorier le revers du deffein , on pré-
pare avec cette même couleur un papier , qu'on place
entre le deffein & le corps fur lequel on veut le por-
ter , & l'on opère ainfi qu'il vient d'être dit. Lorfqu'im
deffein eft fur du papier affez mince pour qu'on en
puiffe voir les contours au-travers du jour , on affu-
jettit deffus celui fur lequel on veut reporter ce def-
fein ; enfuite on les pôle contre une vitre de cham-
bre , ou contre une glace expofée au jour , ou bien
on les applique fur une table où l'on a fait une ou-
verture ; on pofe une lumière deffous la table , &
par l'une ou l'autre de ces manières , on diftingue
tous les traits du deffein que l'on veut avoir promp-
tement & exactement , & qu'on trace avec du crayon
fur le papier qui fe trouve deffus. Lorfqu'on veut
avoir le deffein en fens contraire , au lieu de placer
le papier fur le deffein même , on le place fur fon
revers, 6c l'on fuit les traits comme on les voit. La
pointe à calquer A fait ordinairement partie du nor-
te-crayon brifé , représenté fig. 24. Plan. II. de la
Gravure. { R )
CALQUERON , f. m. partie du métier des étoffes
de foie. Le calqueron eft Un litteau de quatre pies de
long fur un pouce de large & un pouce d'épaiffeur : il
fert à attacher les cordes qui répondent aux aleyrons
pour faire jouer les liffes fuivant le befoin , pour la
fabrication de l'étoffe. On attache encore au calque-
ron les cordes ou cftrivieres qui le font aulfi aux mar-
ches , pour donner le mouvement aux liffes.
CALSERY , ( Géog. ) ville d'Alie au roj'aume de
Jamba , de la dépendance du grand Mogol.
* CALVAIRE, ( Hifi. & Géog. ) montagne fituée
hors de Jérufalem , du côté du feptentrion , où l'on
exécutoit les criminels , ôc où l'innocence même ex-
pira fur une croix.
Calvaire, f. m. {Hifi. eccléf.) chez les Chrétiens
eft une chapelle de dévotion où fe trouve un crucifix,
& qui eft élevée fur un tertre proche d'une ville , à
l'imitation du calvaire où Jeius-Chrift fut mis en croix
proche de Jérufalem. Tel eft le calvaire du Mont- Ya-
lérien près de Paris : dans chacune des iept chapelles
dont il eft compofé , eft repréfenté quelqu'un des myf-
teres de la Paffion.
On dérive ce nom de calvus , chauve , parce que ,
dit-on, cette éminence à Jérufalem étoit nue &: fans
verdure ; & c'eft en effet ce que lignifie le mot hé-
breu Golgotha , que les interprètes Latins ont rendu
par calvaritz locus.
CALVAIRE , {Congrégation de Notre-Dame du)
Hijl. eccléf. ordre de religieufes qui fuivent la règle
de S. Benoît. Elles turent fondées premièrement à
Poitiers par Antoinette d'Orléans de la maifon de
Longucville. Le pape Paul V*. & le roi Louis XIII.
conhrmei eut cet ordre en 1617; 6c le 25 Octobre,
Antoinette d'Orléans prit poffeffion d'un couvent
nouvellement bâti à Poitiers , avec vingt-quatre reli-
gieufes de l'ordre de Fontevrauld , qu'elle avoit ti-
rées de la maifon d'Encloitre, à deux lieues ou en-
viron de Poitiers. Antoinette mourut le 25 ci"A\ .il
16 18 ; & en 1620 , Marie de Medicis fit venir de ces
religieufes à Paris, & les établit proche le palais
d'Orléans du Luxembourg qu'elle avoit fait bâtir.
Leur couvent du Calvaire lu Maiais ne fut bâti qu'en
1638 par les foins du fameux P. Jofeph , capucin ,
confeffeur& agent du cardinal de Richelieu. C'eft
dans cette dernière maifon que réfide la générale de
tout l'ordre. Supplém. au diction, de Moreri , tome I.
lettre C. page 216 . {G)
CALUCALA, (Géog.) rivière d'Afrique au
royaume d'Angola , dans la province d'Ilamba.
CALVENSANO , {Géog.) petite ville d'Italie
dans le duché de Milan , fur l'Adda.
566
CAL
CAL VI , ( Géog. ) ville du royaume de Naples ,
dans la terre de Labour.
Calvi, ( Géog.) ville & port de l'île de Corfe
fur la mer Méditerranée, avec une citadelle. Long.
zG. J3. lat. 42. 30.
CALVINISME , f. m. ( Hifi. eccléf. ) doftrine de
Calvin &c de l'es feftateurs en matière de religion.
On peut réduire à lix chefs principaux les dog-
mes caradériftiques du Calvimfme: lavoir, i°. que
Jefus-Chriit n'elt pas réellement préfent dans le fa-
crement de l'Euchariftie , mais qu il n'y eft qu'en fi-
gne ou en figure : 20. que la prédeifination & la ré-
probation lont antérieures à la prefeience divine des
œuvres bonnes ou mauvaifes : 3°. que la prédeftina-
tion & la réprobation dépendent de la pure volonté
de Dieu , fans égard aux mérites ou démérites des
hommes : 40. que Dieu donne à ceux qu'il a prédéf-
inies une foi & une jullice inamiffible, & qu'il ne
leur impute point leurs péchés : 50. que les juftes
ne fauroient faire aucune bonne œuvre en conié-
quence du péché originel qui les en rend incapables :
6°. que les hommes lont juitifîés par la foi feule, ce
qui rend les bonnes œuvres & les facremens inutiles.
A l'exception du premier article qu'ils ont conitam-
ment retenu, les Calviniftes modernes ou rejettent
ou adouciiîent tous les autres. Voye{ Arminiens
& GOMARISTES.
Il eft vrai que de ces erreurs capitales fuivent beau-
coup de coniéquences , qui font elles-mêmes des er-
reurs , & qu'ils en ont aufli plufieurs communes avec
d'autres hérétiques : mais c'eft une exagération vifi-
ble que de leur en attribuer cent , comme fait le père
Gauthier , Jéfuite, dans fa Chronologie; à plus forte
raifon quatorze cents , comme les leur impute le cor-
delier Feuardent dans fon ouvrage intitulé Theoma-
chia calvinifiica.
Le Calvimfme depuis fon établifTement s'eft tou-
jours maintenu à Genève qui fut fon berceau , où il
fubfifte encore , & d'où il lé répandit en France , en
Hollande , & en Angleterre. Il a été la religion do-
minante des Provinces-Unies jufqu'en 1 572 ; & quoi-
que depuis cette république ait toléré toutes les lec-
tes , on peut toujours dire que le Calvinifmt rigide y
eft la religion de l'état. En Angleterre , il a toujours
été en décadence depuis le règne d'Elifabeth , mal-
gré les efforts qu'ont fait les Puritains & les Presbyté-
riens pour le faire prédominer: maintenant il n'y eft
plus guère profeffé que par des Non - conformités
quoiqu'il fubfifte encore , mais bien mitigé dans la
doctrine de Péglife Anglicane. Mais il eft encore dans
toute fa vigueur en EcofTe , auffi bien qu'en PrufTe.
Des treize cantons SuifTes , fix profefTent le Calvimf-
me. La religion eft aufïï mélangée dans quelques par-
ties de l'Allemagne , comme dans le Palatinat : mais
la catholique Romaine commence à y être la domi-
nante, lia été toléré en France jufqu'à la révocation
de l'édit de Nantes en 1685. Les Proteftans qui forti-
rent à cette occafion du royaume , & fe retirèrent en
Hollande & en Angleterre , remplirent l'univers de
plaintes & d'écrits. Ce n'eft pas ici le lieu d'examiner
s'il eft utile à un état de ne fouffrir qu'une religion :
mais nous ne pouvons nous empêcher de remarquer
que lorfqu'ils ont fait éclatera cette occafion les mur-
mures & les reproches les plus fanglans , un efpace
de plus de quatre-vingts ans leur avoit fait perdre de
vue les moyens dont leurs pères s'étoient fervis pour
arracher d'Henri IV. alors mal-affermi fur fon throne,
un édit qui n'étoit après tout que provifionnel , &c
qu'un des fucceffeurs de ce prince a pu par confé-
quent révoquer fans injultice.
CALVINISTES , f. m. pi. ( Hifi. eccléf. ) feft ateiys
de Calvin , auxquels on donne encore les noms de
Proteflans, de Prérendus-Réformés, de Sacramentaires,
d: Huguenots. Voye^tous as mots chacun fous leur titre.
CAL
Calvin , leur chef , commença à dogmatifer ea
1 5 3 3 ; fe retira à Genève en 1536, d'où il fut chafTé
deux ans après : mais il y revint & s'y fixa en 1 541.
Ses erreurs s'étant infeniiblement répandues en Fran-
ce malgré la févérité des rois François I. &. Henri II.
les Calviniftes y formèrent fous le règne des trois der-
niers Valois un parti formidable à l'Eglile & à l'état.
Après bien des révoltes & des amnilties , des com-
bats & des défaites , ou comme dans toutes les guer-
res de religion les deux partis exercèrent des cruau-
tés inoiiies , les Calvinifies obtinrent d'Henri IV. qui
leur avoit été attaché avant fa converfion , le libre
exercice de leur religion. Ils excitèrent encore des
troubles fous le règne de Loiiis XIII. & furent chaiTés
du royaume fous celui de Loùis-le-Grand.
Les Calvinifies ont emprunté une partie de leurs
erreurs des hérétiques qui les avoient précédés, &
y en ont ajouté de nouvelles. Les plus célèbres Pro-
teftans conviennent que Calvin a pris pour le fonds
de fa doctrine celle des Vaudois , particulièrement
en ce qui regarde le faint Sacrement , la M elle , le
purgatoire , l'invocation des laints , la hiérarchie de
l'Eglile , & les cérémonies. A l'égard des autres points
qui font plus théologiques , il a prefque tout pris de
Luther ; comme les articles de la doefrine qui con-
cernent le libre arbitre , qu'il détruit ; la grâce , qui
félon lui a toujours Ion effet , & entraîne le conten-
tement de la volonté par une nécefhté abfolue ; la
juftifkation par la foi feule ; la jullice de Jefus-Chrift
qui nous cil imputée ; les bonnes œuvres fans aucun
mérite devant Dieu ; les facremens qu'il réduit à
deux , & auxquels il ôte la vertu de conférer la grâ-
ce ; l'impolfibilité d'accomplir les commandemens
de Dieu ; l'inutilité & la nullité des vœux , à la re-.
ferve de ceux du Baptême ; & autres femblables er-
reurs , qu'il a tirées des écrits de Luther , & femées
dans fon livre de YInfiitution. Les opinions que Cal-
vin y a ajoutées du lien font : que la foi eft toujours
mêlée de doute & d'incrédulité ; que la foi Se la grâ-
ce font inamiffibles ; que le Père éternel n'engendre
pas continuellement fon fils ; que Jefus-Chrift n'a rien
mérité à l'égard du jugement de Dieu ; que Dieu a
créé la plupart des hommes pour les damner, parce
qu'il lui plaît ainfi , & antécédemment à toute pré-
vilîon de leurs crimes. Quant à l'Euchariftie , Calvin
allure que Jefus-Chrift nous donne réellement fon fa-
cré corps dans la fainte cène : mais il ajoute , que c'eft
par la foi , & en nous communiquant fon efprit & fa
vie , quoique fa chair n'entre pas dans nous. Telle eft
l'idée qu'on peut le former des lentimens des Calvi-
nifies d'après leurs livres, leurs catéchiimes , leur dif-
cipline eccléfialtique , & les quarante articles de la
confeifion de foi qu'ils préfenterent au roi de France.
Leurs dilputes dans ces derniers tems avec les Ca-
tholiques fur l'autorité, la vilibilité de l'Eglile, &
fes autres caractères, les ont jettes dans des opi-
nions ou fauffes ou ablurdes , ou dans des contradic-
tions , dont les Controverfiftes catholiques ont bien
fû tirer avantage pour les convaincre de ichifme.
Voye^ Vhifioire des Variations de M. Boffuet , liv. XV.
& fes Infiruclions fur CEglifc contre le minifire Jurieu.
Voye{ auffi les ouvrages de M. Nicole , intitulés de Va-
nité de VEglife , & les Prétendus - Réformés convaincus
defchifme. ( G )
CALVITIE, f. f. terme de Médecine, efl la chute
des cheveux , fur-tout du devant de la tête , fans qu'il
y ait lieu d'efpérer qu'ils reviennent ; elle arrive en
conféquence du deffechement de l'humidité qui les
nourriflbit , caule par une maladie , par le grand âge ,
ou par l'ufage exceffif de la poudre. Voy. Cheveu ;
& Alopécie. ( A')
CALUMET , f. m. (Hifi. mod.) grande pipe à
fumer , dont la tête & le tuyau font ornés de figures
d'animaux , de feuillages , &c, à l'ufage des fauva-
CAL
CAL
56
ges du Nord. Le calumet eft aufii parmi eux un fym-
bole de paix.
* CALVNDRONIUS,{. m. (Hijl. nat. bot.)
pierre merveilleufe dont on ne donne ancune del-
cription : mais à laquelle en récompenfe on attribue
la vertu de rendre viftoricux , de chaffer la mélan-
cholie , de renfler aux enchantemens , & d'écarter
les efprits malins.
CALUS , f. m. en général fignifîe une dureté à la
peau , à la chair , ou aux os , naturelle ou contre
nature.
En ce fens ,Ies cors font des efpeces de calus. Voye^
Cor.
Calus fe dit plus particulièrement d'un nœud ou
d'une dureté qui le forme aux deux extrémités con-
tiguës d'un os qui a été fractiiré. Voye^ Os 6- Frac-
ture.
La formation du calus fe fait de la manière qui
fuit : les focs qui nourriflent l'os & coulent le long
de fes fibres , s'extravafent à l'endroit oii ces fibres
font rompues ; enforte que s'y amafTant , elles s'y at-
tachent , s'y fechent , &£ s'y durcifîent , au point d'ac-
quérir autant de confiflance que l'os même , laiffant
feulement à l'endroit fractiiré une inégalité plus ou
moins grande , félon que la réduction a été plus ou
moins parfaites
Le calus devient aufîî dur qu'un os : on lit dans les
Tranfactions philofophiques , l'exemple d'un calus qui
remplaça un humérus que M. Fowler avoit féparé
parce qu'il étoit carié , & celui d'un autre qui rem-
plaça un fémur qu'avoit féparé M. Sherman ; & cela
îi parfaitement , que la perlonne n'en eut pas la cuifîe
plus foible , ôc marchoit ferme & fans boiter aucu-
nement.
La formation du calus eft proprement l'ouvrage
de la nature ; lorfque par une parfaite réduction &
l'application des bandages convenables , on l'a mile
en état d'agir. Il faut néanmoins que le lue offeux
ne foit point vicié , c'eft à-dire que les principes qui
le compofent, ne le rendent ni trop ni trop peu dif-
pofé à fe congeler. Cette difpofition plus ou moins
favorable du lue nourricier des os , fait fouvent que
dans des fractures de même efpece , le calus eft plus
ou moins promptement affermi , & que le terme de
trente-cinq à quarante jours luffit pour certaines ,
tandis que d'autres ont befoin d'un tems beaucoup
plus confidérable. On doit avoir en vue de corriger
les mauvaifes difpofitions de la lymphe , pour tra-
vailler à la formation & à la perfection du calus; les
alimens de bons focs & de bonne digeftion feront
les moyens de procurer la formation du calus , fi le
fang dépourvu de parties balfamiques y eft un obf-
tacle. Si les focs étoient trop épaiffis, il faudroit met-
tre en ufage les délayans, les apéritifs & les fon-
da ns appropriés à la nature de l'épaiffiffement ; l'u-
fage des anti-vénériens feroit abfolument néceffaire ,
fi l'exiftenec du virus vérolique ôtoit à la lymphe la
coniiitance requife pour prolonger le conduit des fi-
bres ofleufes à chaque bout de l'os rompu, & fonder
l'endroit de la fracture. Extr. du traité des maladies
des os, par M. Petit.
Le calus eft encore une dureté qui fe forme à quel-
que partie du corps humain , iingulierement aux
mains , aux pies , &c. en conféquence de frottement
ou de prefîion contre des corps durs. ( Y )
Calus , ( en Jardinage. ) eft une reprife de la ma-
tière de la ieve qui fe fait en forme de nœud à la
jointure d'une branche ou d'une racine. (A)
CALUTRE , ( Géog. ) ville maritime de file de
Ceylan , à trois lieues de Colombo.
C ALW ou CALB A , ( Géog. ) ville & comté d'Al-
lemagne au duché de W'irtemberg , fur la rivière de
Nagold.
*CALYPTRJ, f. m. (Hifi anc.) ornement de tête
/
des femmes Romaines dont il n'eft refté de connu
que le nom.
* CALYPTRE, f. f. (NiJI.anc.) vêtement des
femmes Greques dont il eft fait mention dans Mien
qui parle en même tems d'un grand nombre d'autres.
« La femme de Phocion , dit-il , portoit le manteau
» de fon mari , & n 'avoit befoin ni de crocote , ni de
» robe tarentine , ni d'anabolé , ni d'encyclion , ni de
» cecryphale , ni de calyptre , ni de tuniques tein-
» tes en couleur. Son vêtement étoit premièrement
» la modeltie , 6c enfuite tout ce qu'elle pouvoit trou-
» ver pour fe couvrir. » On n'a fur la plupart de ce9
habits que des conjectures vagues.
* CALZ A , ( l'ordre de la) ou de la boue , Hi(l. mod,
c'eft le nom d'un ancien ordre militaire qui commen-
ça en Italie en l'année 1400 ; il étoit compolé de
gentilshommes qui choififîbient un chef entre eux -
leur but étoit d'élever & d'inftruire la jeuneffe dans
les exercices convenables à l'art militaire ; la marque
diftinctive de cet ordre , qui ne fubfifte plus aujour-
d'hui , étoit de porter à une des jambes une botte , qui
étoit fouvent brodée en or, ou même plus riche.
CALZADA , ( Géog. ) petite ville d'Efpagne , fur
la rivière de Laglera , dans la Caftille vieille.
CALZENOW , ( Géog. ) petite ville de Livonie ,'
dans la province de Letten , à 7 lieues de Riga.
CAM AGNES , {Marine. ) Quelques gens de mer
appellent ainfi les lits des vailieaux qui (ont emboî-
tés autour du navire. V. Cabane & Capite. (Z )
CAMAGUEIA , ( Géog. ) province de l'Améri-
que feptentrionale , dans l'île de Cuba.
CAM AIL, f. m. forte de couvre-chef à l'ufage des
eccléfiaftiques, pendant l'hyver; c'eft une efpece de
cape qui enveloppe la tête , à l'exception du vifage,
embraffe le col , s'étend for les épaules , fe ferme
pardevant,& defeend jufqu'à la ceinture. L'églife
prend le camail à la place du bonnet quarrée, le 17
Octobre, jour de S. Cerboney.
Camail, {terme de Blafon.) efpece de lambre-
quin qui couvrait les calques & les écus des anciens
chevaliers. Quelques-uns dérivent ce mot de camé-
lanciers , qui étoit une petite couverture de tête , faite
de camelot ; & d'autres le font venir de cap de maille,
à caufe qu'il y avoit autrefois des couvertures de
tête faites de maille. L'hiftoire ancienne fait men-
tion de chevaliers armés de camails ; il y a grande
apparence que ces camails étoient à peu pi es comme
les haufiecols, & que les camails des évëques ont été
ainfi nommés , a caufe qu'ils leur reffemblent. ( V)
CAMALDULES , f. m. pi. {Hifi. eccléf. ) ordre de
religieux fondés par S. Romuald en 1009 •> ou ^c'on
d'autres en 960 dans l'horrible defert de Campo-mal-
doli , dans l'état de Florence , fur le mont Apennin.
Leur règle eft celle de S. Benoît ; par leurs ftatuts,
leurs maifons doivent être éloignées au moins de cinq
lieues des grandes villes.
Les Camaldules ne portèrent pas ce nom dès les
commencemens : jufqu'à la fin du onzième fiecle , on
les appella Romualdins , du nom de leur fondateur.
On n'appelloit alors Camaldules , que ceux qui habi-
toient dans le defert même de Camaldoli; & le P. Gran-
di obferve que le nom de Camaldules ne leur vient
pas de ce que leur première maifon a été établie à
Campo-maldoli , mais de ce que la règle s'eft mainte-
nue dans cette maifon fans dégénérer , mieux que
partout ailleurs. Il n'y a qu'une maifon de Camaldu-
les en France , près de Gros-bois.
La congrégation des hermites de S. Romuald
ou du mont de la Couronne , cil une branche de
celle de Camaldoli, avec laquelle elle s'unit en 1532.
Paul Juftinien de Veniie commença fon établiffement
en 1520, & fonda le principal monafterc dans l'A-
pennin , en un lieu nommé le mont de la Couronne , à
dix milles de Péroufe. Baronius, Raynaldi, Sponde.
563
C A M
* CAMANHÀYA , ( Hifi. nat. bot. ) plante du Bré-
fil ; elle eft capillaire ; elle croit fur les arbres les plus
hauts , & les couvre quelquefois entièrement ; elle
eft oriie , & femblable au duvet ; elle a une , deux ,
trois ,cinq , fix feuilles comme celles du romarin ; on
la prendroit pour un épithyme.
CAMARA , ( Hifi. nat. bot. ) genre de plante à
fleur monopétale , faite en forme de malque , irré-
guliere , dont la lèvre fupérieure eft relevée, & l'in-
férieure découpée en trois parties ; l'embryon qui
porte la fleur devient dans la fuite un fruit mou ou
une baye qui renferme un noyau rond. Ajoutez au
caractère de ce genre, que pluiieurs fruits lontramaf-
fés en une efpece de grappe. Plumier, Nova plantar.
Amer, gêner. Voye{ PLANTE. (/)
* CAMARA- JAPO, CAMARA-MIRA, CAMA-
RA-TINGA , CAMARA-CUBA, CAMARA-BAJA,
{Hifi. nat. bot.) plantes qui croiffent au Brefil; la
première eft une efpece de mente à tige ronde , ve-
lue & rougeâtre , haute de deux pies , à teuilles lé-
gèrement découpées , grisâtres en-deffous , oppo-
iées deux à deux ; les grandes environnées de peti-
tes, & à fleurs placées fur les branches les plus éle-
vées en forme d'ombelles , femblables à celles de la
taneiie , naifîant pendant toute l'année , à étamines
de couleur d'azur , & de l'odeur du mentafirum : toute
la plante eft aromatique & amere ; la femence en
eft petite , longue , & noire ; & quand elle eft mûre ,
elle eft difperfée par les vents avec l'on enveloppe
cotoneufe.
La féconde eft une plante qui s'élève à la hauteur
d'une coudée ; fa tige eft foible & ligneufe ; fa fleur
petite & jaune , s'ouvrant en tout tems fur le milieu
du jour , & fe refermant fur les deux heures ; en-
forte qu'elle fuppléroit en partie au défaut de mon-
tre. Ray, Hifi. plant.
La troiiieme eft une efpece de chevre-feuille nain,
à fleur rouge , & quelquefois jaune , fort odorante ;
l'herbe même en eft fuave ; aux fleurs fuccedent des
grappes de baies vertes, groffes comme celles du
fureau.
La quatrième a la feuille âpre , hérifïee comme
des chardons , la fleur femblable à celle de l'œil de
bœuf, jaune, à neuf pétales , avec un ombilic lar-
ge, jaune dans le milieu , & des étamines noires ;
elle a l'odeur de l'aminte & de l'ortie ; les femences
qui fuccedent aux fleurs font longues, noirâtres, fem-
blables à celles delà chicorée ; la plante entière eft
très-glutineufe.
La dernière eft une efpece de lyfimachia.
C AMARANA , ( Géog. ) île d'Afie dans l'Arabie ,
fur la mer Rouge. Lat. zi.
CAMARASSE , ( Géog. ) ville d'Efpagne en Ca-
talogne , dans le territoire de Lérida.
CAMARATA , {Giog.) petite ville de Sicile,
dans la vallée de Mazaro.
CAMARCES , ( Géog. ) rivière d'Afrique, fur la
côte de Guinée , dans le royaume de Bénin.
CAMARE , caveçon camare , {Manège.) efpece
de caveçon qu'on a banni des académies : il étoit
garni de petites dents ou pointes de fer très - aiguës ,
qui déchiroient le cheval & le tourmentoient. Voy.
Caveçon. (V)
CAMARGUE , ( la) Géog. île de France en Pro-
vence , à l'embouchure du Rhône.
■ * CAMARIN-BAS ou UMARI , ( Hifi. nat. bot. )
arbre qui s'élève à une hauteur moyenne , & porte
de petites fleurs jaunes , fuivies d'un fruit ovale fem-
blable à la prune , de la faveur de la pêche , & d'un
verd tirant fur le jaune pâle : la pulpe en eft petite,
douce, jaune, & contient un noyau large, ovale,
blanc , dont l'amande eft bonne à manger. Le fruit
eft mûr, & tombe en Mars.
On lui attribue pluiieurs propriétés médicinales.
C A M
On le trouve dans les environs de Riogrande.
CAMARINES , ( Géog. ) contrée d'Afie dans l'île
de Luçon , l'une des Philippines.
CAMARONES , ( Los ) Géog. rivière d'Afrique
dans le golfe de Guinée , qui prend fa fource dans
le royaume de Biafara.
CAMAÏEU, f. m. pierre fur laquelle fe trouvent
pluiieurs figures ou repréfentations de payfages 6c
autres choies , par un jeu de la nature , en telle for-
te que ce font des elpeces de tableaux fans peintu-
re. On le dit aufîi de ces pierres précieufes , comme
onices , fardoines, & agates , fur lelquelles les Gra-
veurs en pierre employent leur art pour rendre les
productions de la nature plus recommandables : alors
les têtes ou les bas-reliefs dont ces pierres font or-
nées prennent le nom de camaïeu. On en fait aufîi fur
des coquilles : ce font les moins recommandables ,
par la raifon de leur peu de dureté.
Camaïeu fe dit encore de tous les tableaux faits de
deux couleurs feulement : on dit peindre en camaïeu y
de beaux camaïeux. On les appelle quelquefois ta-
bleaux de grifaille , & de clair-obfcur. (R)
CAMB ou KAMP, ( Géog. ) rivière d'Allemagne
en Autriche , qui prend fa fource aux frontières de
Bohême , & fe jette dans le Danube.
CAMBALU, voyei Pékin.
CAMB AMB A , (Géog. ) pays d'Afrique au royau-
me d'Angola , appartenant aux Portugais.
CAMBANA, ou CAMBOVA, ou CAMBAVA,
( Géog. ) île des Indes orientales , entre les îles Mo-
lucques , celle de la Sonde & de Java.
C A M B A Y E , ( Géog. ) grande ville d'Afie au
royaume de Guzurate , dans les états du grand Mo-
gol, proche d'un golfe de même nom. Long. 8g.
lat. 22-30.
CAMBERG , {Géog.) ville & château d'Allema-
gne , de l'éleclorat de Trêves.
CAMBIO , (Commerce.) terme Italien qui fignifîe
change , & paroît dérivé du Latin cambium , qui veut
dire la même chofe. On s'en fert allez communé-
ment en Provence , &c encore davantage en Hollan-
de. Voye^ Change.
CAMBISTE , f. m. nom qu'on donne dans le Com-
merce à ceux qui fe mêlent du négoce des lettres &
billets de change , qui vont régulièrement fur la pla-
ce ou à la bourfe pour s'inftruire du cours de l'ar-
gent , & fur quel pié il eft relativement au change des
différentes places étrangères , afin de pouvoir taire à
propos des traites & remifes , ou des négociations
d'argent , de billets , lettres de change , &c. Voyt^
Place, Bourse, Billet, Lettre de change,
&c
Ce mot , quoique vieux , ne laiffe pas que d'être
d'ufage parmi les marchands négocians ou banquiers:
on croit qu'il vient du Latin cambium , ou de l'Ita-
lien cambio , qui fignifient change. Voye^ Change.
(G)
CAMBOPJ , ( Géog. ) ville d'Afie au royaume de
Siam , fur les frontières de Pégu.
CAMBOUIS , f. m. ( Médecine. ) graille de porc
ou d'autres animaux , dont on enduit les extrémités
de l'efîieu des roues des voiuires : le vieux-oing
prend le nom de cambouis quand il s'eft chargé
-par le frottement , des parties de fer de l'effieu
& de la garniture des roues. Il palTe pour propre
à réfoudre les hémorrhoides étant appliqué deffus :
cette vertu lui vient du mars qui s'eft détaché par le
mouvement & la chaleur continuelle de l'effieu &
delà roue.
Des charlatans en ont fait pendant long-tems un
fecret, & on l'a regardé comme un remède mer-
veilleux. Il eft ailé de voir que ce n'eft qu'un mélan-
ge de mars & de graille , ou un Uniment épaiffi par
le fer qui s'y eft joint. (A)
CAMBOYE
C À M
LÀMBOYE oh CAMBOGEj (Géog.) ville &
royaume d'Afie dans les Indes , borné au nord par
le royaume de Laos , à l'orient par la Cochinchine j
au ïud & à l'oueft par le royaume & le golfe de Siam.
Long. izz. 30. Ut. 12.40.
CAMBRAY , ( Géog. ) belle & grande ville de
France dans le Pays-bas. Elle eft tres-fortifiée , mu-
nie d'une citadelle très-forte fur l'Efcaut. Long. zod.
53'. 41". Ut. 3od. 10'. 3z".
CAMBRE , f. m. en Architecture , on CAMBRURE,
du Latin cameratus , courbé , fe dit de la courbure du
cintre d'une voûte ou d'une pièce de bois.
Cambré , voye^ Concave. (P)
CAMBRER , v. a£l. il eft fynonyme à courber.- la
différence qu'il peut y avoir entre l'un & l'autre ,
c'eft que cambrer ne fe dit que d'une courbure peu
confidcrable ; au lieu que courber fe dit de toute in-
flexion curviligne, grande ou petite.
CAMBRER un livre , en terme de Relieur , c'eft le
prendre à moitié avec les deux mains , & courber
lin peu les pointes des cartons en-dedans pour lui don-
ner une meilleure forme. Cambrer eft la dernière fa-
çon qu'on donne à un livre relié.
CAMBRESIS, (GVoo-.) province de France dans le
Pays-bas , bornée au nord ôc à l'eft par le Hainaut ,
au midi par la Picardie, & à l'ouefl par l'Artois.
Son commerce coniifte en grains , & fur-tout en toi-
les de lin très-belles & très-eftimées. Cambray en eft
la capitale.
CAMBRIDGE, (Géog.) ville confidérable d'An-
gleterre, capitale du Cambridgshire, avec titre de
duché , fameufe par Ion univerfité. Elle eft fur la
rivière de Cam. Long. ij. z8. lat. Sz. 10.
CAMBURG, (Géog.) petite ville d'Allemagne
dans la baffe Saxe , à un mille de Naumbourg.
* CAM-CHAIN, f. m. (Hijl. nat. bot. ) efpece
d'orange qui croît au royaume de Tonquin , dont la
pelure eftfort épaiffe, & remplie d'inégalités ; elle a
l'odeur très - agréable , & le goût délicieux. On re-
garde ce fruit comme fort fain; on en permet même
l'ufage aux malades.
CAMELEE, f. f. (Hifl. nat. bot.) chamcvlea, genre
de plante à fleur monopétale, découpée en trois par-
ties , de façon qu'elle paroit quelquefois compofée
de trois pétales. Le piftil devient dans la fuite un
fruit à trois noyaux , enveloppés d'une peau mince,
& arrondis : ces noyaux renferment chacun une
amande oblongue. Tournerort , Injl. rei herb. app.
Foyei Plante. (/)
CAMÉLÉON , cameleo , f. m. (Hifl. nat. Zoolog.)
petit animal du genre des animaux à quatre pies qui
l'ont des œufs , comme le crocodile & le lézard, avec
îefqueis il a beaucoup de reffemblance. Voyt{ Plan-
che Xy. d'Hijl. nat.jig. 2. Nous ne pouvons mieux
faire , pour ï'hiftoire du caméléon, que de rapporter
ici ce qu'en a écrit M. Formey , fecrétaire de l'Aca-
démie royale des Sciences & Belles- lettres de Prufle ,
dans un manuferit qui nous a été remis.
» Le caméléon eft fait comme le lézard, fi ce n'eft
» qu'il a la tête plus grofle &r plus large : il a quatre
» pies, à chacun trois doigts; la queue longue , avec
» laquelle il s'attache aux arbres aufli bien qu'avec
» Ijs pics ; elle lui fort à grimper; & lorfqu'il ne peut
» atteindre de fes pies quelque lieu où il veut aller,
» pourvu qu'il y puilî'e toucher de l'extrémité de la
» queue , il y monte facilement. Il a le mouvement
» tardif comme la tortue , mais fort grave. Sa queue
» eft plate , le mufeau long : il a le dos aigu , la peau
» pliffée & hériflée comme une feie , depuis le cou
» jufqu'au dernier nœud de la queue , 6c une tonne
» de crête fur la tête. Il a la tête fans cou , comme
» les poiffons ; il fait des œufs comme les lézards ;
» fon mufeau cil en pointe obtufe ; il a deux petites
» ouvertures dans la tète qui lui fervent de narines ;
Tome II,
C A M
569
» fes yeux font gros , & ont plus de cinq lignes de
» diamètre, dont l'iris eft ifibelle , bordée d'un cer-
»> cle d'or ; & comme il a la tête prefqu'immobile „
» & qu'il ne peut la tourner qu'avec tout le corps j
» la nature l'a dédommagé de cette incommodité en
» donnant à fes yeux toutes fortes de mouvemens ;
» car il peut non-feulement regarder de l'un devant
» lui j &c de l'autre derrière ; de l'un en-haut & de
» l'autre en-bas: mais il les remue indépendamment
» l'un de l'autre avec tous les changemens imagina-
» blés. Sa langue eft longue de dix lignes & lar^e de
» trois , faite de chair blanche , ronde , & applatié
» par le bout, où elle eft creufe & ouverte , iembla-
» ble en quelque façon à la trompe d'un éléphant. Il
» la darde & retire promptement fur les mouches ,
» qui s'y trouvent attrapées comme fur de la glu ; il
» s'en nourrit , & il lui en faut tres-peu pour fe re-
» paître , quoiqu'il rende beaucoup d'excrémens. Ori
» dit même qu il vit long-tems fans autre nourriture
» que l'air, dont il fe remplit au foleil jufqu'à ce qu'il
» en foit enflé. Il n'a point d'oreilles, & ne reçoit nï
» ne produit aucun Ion. Il a dix -huit côtes , & fort
>• épine a foixante & quatorze vertèbres, y compris
» les cinquante de fa queue. 11 devient quelquefois
» fi maigre qu'on lui compte les côtes, de forte que
» TertuU'icnVappeWe une peau vivante. Lorfqu'il fe voit
» en danger d'être pris , il ouvre la gueule & fifllé
» comme une couleuvre. Gefner & Aldrovande di-
» lent qu'il fe défend du ferpent , par un fétu qu'il
» tient dans fa gueule.
» Le caméléon habite dans les rochers : ce qu'il à
» de plus merveilleux , c'eft le changement de cou-
» leur qu'il éprouve à l'approche de certains objets^
» Il eft ordinairement verd, tirant fur le briin vers
» les deux épaules, & d'un verd-jaune fous le ven-»
» tre , avec des taches quelquefois rouges quelquefo:s
>i blanches. Sa couleur verte fe change fouvent ert
» un brun foncé , fans qu'il refte rien dé la première
» couleur: les taches blanches difparoiflent auffi quel-
» quefois, ou changent feulement en une couleur
» plus obfcure , qui tire fur le violet, ce qtii arrive or-
» dinairement lorfqu'il eft épouvanté. Lorfqu'il dort
» fous une couverture blanche , il devient blanc j
» mais jamais ni rouge ni bleu ; il devient auflî verd*
« brun ou noir, fl on le couvre de ces couleurs. Tel-
» les font au moins les relations ordinaires qu'on a
» données de ce phénomène : mais il me paroit exa-
» géré ; & avant que d'en entreprendre l'explication»
» il faudroit bien conftater le fait. Le P. Feuillée >
» Minime , par exemple , prétend dans lbn Journal
» a" obfervations phyjiques , mathématiques & botaniques*
>■> que le changement cle couleurs de cet animal vient
» des divers points de vue où l'on le regarde, ce qui
» n'eft point aufli merveilleux que ce qu'en avoienf
» publié les anciens (Mém. de Trévoux , Août ijzj.
» pag. 141g.). M. Souchu de Renncfort affûre dans
» fon Hijloire des Indes Orientales , que les caméléons
» prennent par les yeux les couleurs des objets fur
» Iefqueis ils s'arrêtent (Hifl. des ouvr. des Sav. Mars
» lô'SS. tom. II. p. 308.). Un autre auteur avance
» qu'il n'eft pas vrai que le caméléon change de cou-»
» leur, fuivant les choies fur lefquclles ilfe trouve:
» mais ce changement arrive, félon lui, fuivant les
» différentes qualités de l'air froid ou chaud qui l'en*
» vironne (Rce. d'Hifl. & de Litter. tom, III. p. J3-)
» MUede Scudery, dans une relation qu'elle a pu-
>* bliéc de deux caméléons qui lui furent apportés d'A-
» frique, affûre qu'elle les conferva dix mois, & que
» pendant ce tems-là ils ne prirent rien du-tout. On
» les mettoit au foleil & à l'air, qui paroilîoit être
» leur unique aliment : ils changeoient fouvent de
» couleur, fans prendre celle des choies fur quoi on
» les mettoit. On remarquoit feulement , quand ils
» étoient varies , que la couleur fur laquelle ils étoien)
C Ccç
570
C A M
» fc mêloit avec les autres , qui par leurs fréquéns
» changemens faifoient un effet agréable {Fumure ,
» article Caméléon). Toutes ces divei fîtes demande-
» roient un examen plus circoniped , qui épargnât
» la peine de chercher des explications, pour ce qui
» n'exiile peut-être point : cependant Ton en a pro-
» pofé pluiieurs : les uns dilént que ce changement
» de couleurs fe fait par fuffufion , les autres par ré-
» flexion , d'autres par la dilpolition des particules
» qui compolent la peau. Elle elt traniparente , dit
» le P. Regnault, (Entr. de Phyf. corn. IV. p. i8l.)
» & renferme une humeur traniparente qui renvoie
» les rayons colorés, à peu près comme une lame
» mince de corne ou de verre Matthiole rapporte
» plufieurs iuperflitions des anciens touchant le ca-
» méléon: ils ont dit que (a langue , qu'on lui avoit
» arrachée étant en vie , lervoit à faire gagner le pro-
» ces de celui qui la portoit ; qu'on failoit tonner &
» pleuvoir fi l'on brùloit fa tête &c Ion gofier avec
m du bois de chêne , ou li on rôtiffoit ion foie fur une
» tuile rouge; que li on lui arrachoit l'œil droit étant
» en vie , cet œil mis dans du lait de chèvre ôtoit les
» taies ; que fa langue liée fur une temme enceinte
» la faifoit accoucher fans danger ; que la mâchoire
» droite ôtoit toute frayeur à ceux qui la portoient
» fur eux , & que fa queue arrêtoit des rivières. Ce
» qui montre que les naturalises ont débité des cho-
» les aufïî fabuleufes que les poètes.
» Il y a en Egypte des caméléons qui ont onze à
» douze pouces , y compris la queue ; ceux d'Arabie
» & du Mexique ont lix pouces leulement ».
On ne fait pourquoi les Grecs ont donné à une
bête aulîi vile &c auifi laide, d'auffi beaux noms que
ceux de petit-lion ou de chameau-lion. Cependant on
a loupçonné que c'étolt parce qu'elle a une crête fur
la tête comme le lion : mais cette crête ne paroît à
la tête du lion, qu'après que les mufcles des tempes
ont été enlevés. On a auiïi prétendu que c'eft parce
que le caméléon prend les mouches , comme le lion
challe & dévore les autres animaux , qu'il a été com-
paré au lion ; de même que le formica- leo.
Les caméléons ont les jambes plus longues que le
crocodile Se le lézard : cependant ils ne marchent
aifément que fur les arbres. On en a obfervé de vi-
vans , qui avoient été apportés d'Egypte. Le plus
grand avoit la tète de la longueur d'un pouce & dix
lignes. Il y avoit quatre pouces & demi depuis la
tête jufqu'au commencement de la queue. Les pies
avoient chacun deux pouces & demi de long , & la
queue étoit de cinq pouces. La groffeur du corps le
trouvoit différente en différens tems ; il avoit quel-
quefois deux pouces depuis le dos jufqu'au-deffous du
ventre ; d'autres fois il n'avoit guère plus d'un pou-
ce , parce que le corps de l'animal le contraâoit &
fe dilatoit. Ces mouvemens étoient non-leulement
dans le thorax ôc le ventre , mais encore dans les
bras , les jambes & la queue ; ils ne fuivoient pas
ceux de la refpiration , car ils étoient irréguliers
comme dans les tortues , les grenouilles , & les lé-
zards. On a vu ici des caméléons refter enflés pen-
dant plus de deux heures , & demeurer défendes
pendant un plus long tems ; dans cet état ils paroif-
fent fi maigres , qu'on croiroit qu'ils n'auroient que
la peau appliquée fur leurs fqueletes. On ne peut
attribuer ces fortes de contractions & de dilatations
qu'à l'air que refpire l'animal : mais on ne fait pas
comment il peut fe répandre dans tout le corps en-
tre la peau & les mulcles ; car il y a toute apparence
que l'air forme l'enflure comme dans la grenouille.
Quoique le caméléon qui a été oblervé , parût fort
maigre lorfqu'il étoit defenflé , on ne pouvoit cepen-
dant pas fentir le battement du cœur. La peau étoit
froide au toucher , inégale , relevée par de petites
toiles comme le chagrin, ôc cependant afTez douce,
C A M
parce que les grains étoient polis : ceux qui cou*
vroientles bras , les jambes , le ventre & la queue ,
avoient la groileur de la tête d'une tpingle , ceux
qui fe trouvoient fur les épaules & fur la tête étoient
un peu plus gros & de figure ovale. Il y en avoit lous
la gorge de plus élevés & de pointus ; ils étoien' ran-
gés en forme de chapelet, depuis la lèvre inférieure
jufqu'à la poitrine. Les grains du dos & de la t"ete
étoient raiiemblés au nombre de deux , trois , qua-
tre , cinq , fix , & lept ; les intervalles qui le trou-
voient entre ces petits amas , étoient paifemés de
grains preiqu împerctptioles.
Lorlque le caméléon avoit été à l'ombre & en re*
pos depuis long tems, la couleur de tous les gu.ns
ue la peau étoit d'un gris-bleuâtre , excepté ie def-
fous des pattes qui étoit d'un blanc un peu jaunâti e ,
& les intervalles entre les amas de grains au uos ÔC
de la tête étoient d'un rouge pâle & jaunâtre , de
même que le fond de la peau.
La couleur grile du caméléon changeoit loffqu'il
étoit expolé au ioleil. Tous les endroits qui en éto.ent
éclairés prenoient , au lieu de leur gris bleuâtre , un
gris plus b;un & tirant mr le minime ; le relie de la
peau changeoit Ion gris en plufieurs couleurs écla-
tantes , qui iormoient des taches de la grandeur de
la moitié du doigt ; quelques-unes cielcencio.ent de-
puis la crête de l'épine julqu'à la moitié du dos ; il y
en avoit d'autres lur les côtés , fur les bras , & lui la
queue; leur couleur étoit ilabelle, par le mehnge
d'un jaune pâle dont les grains le coloroient , & d'un
rouge clair qui étoit la couleur du fond de la peau
entre les grains. Le relie de cette peau , qui n'étoit
pas expolee au ioleil 6c qui étoit demeurée d'un cris
plus pâle qu'à l'ordinaire , refïembloit aux draps mê-
lés de laines de pluiieurs couleurs ; car on voyoit
quelques-uns des grains d'un gris un peu vërdâtre ,
d'autres d'un gris minime, d'autres d'un gris bleuâr
tre qu'ils ont d'ordinaire ; le fond demeuroit rouge
comme auparavant. Lorfque le caméléon ne fut plus
expolé au ioleil , la première couieur grile revint
peu-à-peu lur tout le corps , excepté le délions des
pies qui conferva la première couleur, avjc quelque
teinte de brun de phib. Lorlqu'on le toucha , il païut
incontinent fur les épaules & fur les jambes de de-
vant pluiieurs taches fort noires de la grandeur de
l'ongle ; quelquefois il devenoit tout marqueté de
taches brunes qui tiroient fur le verd. Apres avoir
été enveloppé dans un linge pendant deux ou trois
minutes , il devint blanchâtre , ou plutôt d'une cou-
leur grife fort pâle , qu'il perdit inlenhbiement quel-
que tems après. Cette expérience ne réufîït qu'une
feule fois , quoiqu'elle fût répétée plufieurs fois en
différens jours : on la tenta aufîî lur d'autres cou-
leurs , mais l'animal ne les prit pas. On pourroit
croire qu'il ne pâlit dans le linge blanc , que parce
qu'il s'y trouva dans robicurité,& parce que le linge
étoit froid de même que l'air, qui fe trouva plus
froid le jour de cette expérience , qu'il ne le tut les
autres jours où on la répéta.
La tête de ce caméléon étoit allez femblable à celle
d'un poifîôn , parce qu'il avoit le col fort court , &
recouvert par les côtés , de deux avances cartilagi-
neuies aflez reflemblantes aux ouies des poillons.
Il y avoit fur le fommet de la tête une crête élevée
& droite ; deux autres au-defîûs des yeux, contour-
nées comme une S couchée ; & entre ces trois crêtes
deux cavités le long du deflus de la tête. Le muièau
formoit une pointe obtufe , & la mâchoire de délions
étoit plus avancée que celle de deifus. On voyoit
fur le bout du muleau , un trou de chaque côté pour
les narines , & il y a apparence que ces trous fervent
aufîi pour rouie. Les mâchoires étoient garnies de
dents , ou plutôt , c'étoit un os dentelé , qui n'a pas
paru fervir à aucune maitication , parce que l'animal
C A M
avaloit les mouches & les autres infectes qu'il pre-
noit , fans les mâcher. La bouche étoit fendue de
deux lignes au-delà de l'ouverture des mâchoires ,
& cette continuation de fente defcendoit oblique-
ment en bas.
Le thorax étoit fort étendu en comparaifon du ven-
tre. Les quatre pies étoient pareils , ou s'il y avoit
quelque différence , c'eft que ceux de devant étoient
plies en arrière , 6c ceux de derrière en devant , de
forte que l'on pourroit dire que ce font quatre bras
qui ont leur coude en dedans , y ayant dans chacun
l'os du bras & les deux os del'avant-bras. Les quatre
pattes étoient compofées chacune de cinq doigts, &c
refiembloient plutôt à des mains qu'à des pies. Elles
étoient néanmoins auffi larges l'une que l'autre , les
doigts qui étoient deux à deux étant plus gros que
ceux qui étoient trois à trois. Ces doigts étoient en-
Fermés enfemble fous une même peau , comme dans
une mitaine , & n'étoicnt point féparés l'un de l'au-
tre , mais paroiffbient feulement à travers la peau.
La difpofition de ces pattes étoit différente , en ce que
celles de devant avoient deux doigts en dehors & trois
en dedans , au contraire de celles de derrière , qui en
avoient trois en dehors & deux en dedans.
Avec ces pattes il empoignoit les petites branches
des arbres , de même que le perroquet , qui pour fe
percher partage fes doigts autrement que la plupart
des autres oifeaux , qui en mettent toujours trois de-
vant & un derrière ; au lieu que le perroquet en met
deux derrière de même que devant.
Les ongles étoient un peu crochus , fort pointus ,
& d'un jaune pâle ; & ils ne fortoient que de la moi-
tié hors la peau ; l'autre moitié étoit cachée & enfer-
mée défions. Ils avoient en tout deux lignes &c de-
mie de long.
Le caméléon marchoit plus lentement qu'une tor-
tue , quoique lés jambes fuiTent plus longues & moins
èmbarraffées. On a cru que les animaux de cette ef-
pece pourraient aller plus vite , & on a foupçonné
que c'en; la timidité qui les arrête. La queue de ce-
lui qui a été obfervé reffembloit affez à une vipère ,
ou à la queue d'un grand rat , lorfqu'elle étoit gon-
flée ; autrement elle prenoit la forme des vertèbres
fur lesquelles la peau eft appliquée. Lorfque l'animal
étoit fur des arbres , il entortilloit fa queue autour des
branches; 6c lorfqu'il marchoit , il la tenoit parallèle
au plan fur lequel il étoit pofé , 6i il ne la lailfoit traî-
ner par terre que rarement.
On Ta vu prendre des mouches & autres infe£res
avec fa longue langue ; on a trouvé ces mêmes mou-
ches & des vers dans l'eftomac & les inteftins ; il eft
vrai qu'il les rendoit prefque auffi entiers qu'il les
avoit pris : mais on fait que cela arrive à d'autres
animaux qui n'ont jamais été foupçonnés de vivre
d'air comme le caméléon. Ce préjugé n'eft pas mieux
fondé que celui qui a rapport au changement de
couleurs qu'on a dit lui arriver par l'attouchement
des différentes chofes dont il approche. Mém. deVA-
cad. roy. des Sciences , tom. III. part. j. pag. J3. &
fuiv. Voyei Quadrupède. (/)
CAMÉLEOPARD. Voyt{ GiRAFFE.
CAMELFORD , ( Géog.) ville d'Angleterre , dans la
province de Cornoiiaillcs.
* CAMELOT , f. m. (Draperie.') étoffe non croifée
qui fe fabrique comme la toile ou comme l'étamine ,
fur un métier à deux marches. Il y en a de dirleren-
tes longueurs & largeurs , &: de toutes couleurs. On
en diftingue de plufieurs fortes , entre lefquels les uns
font tout poil de chèvre ; d'autres ont la trame poil ,
& la chaîne mo:tié poil & moitié l'oie ; de troilîemes
qui font tout laine ; & de quatrièmes , où la chaîne
eu tîl & la trame eft laine. Tous ces camelots pren-
nent différens noms félon la façon ; il y en a de teints
en fil & de teints en pièce. On appelle teints en fil ,
Tome II.
C A M
571
ceux dont le fil , tant de chaîne que de trame , a été
teint avant que d'être employé ; &c teints en pièce ,
ceux qui vont à la teinture au fortir du métier. Il y
en a de jafpés , de gauffrés , d'ondes , de rayés , &c.
On en fait des habits , des meubles , des ôrnemens
d'églife , &c. Il s'en fabrique particulièrement en
Flandre , en Artois, en Picardie; on en tire auffi de
Bruxelles, de Hollande & d'Angleterre, qui font
effimés. Il en vient du Levant. On en fait de foie,
cramoifis , incarnats , violets , &c. Mais ce font des
tafetas , & des étoffes tabilées , qu'on fait palier
pour des camelots.
Comme cette étoffe eft d'un grand ufage , le Con-
feil a pris des précautions pour que la fabrication en
fût bonne. Il a ordonné que les camelots de grain tout
laine , auraient la chaîne de quarante-deux portées,
&C chaque portée ou buhot, de vingt fils, avec de-
mi-aune demi-quart de largeur entre les lifieres , &
trente-fix aunes de longueur. Que ceux à deux fils de
foie , auroient quarante-deux portées , & vingt-fix ou
huit fils à chaque portée , avec même longueur & lar-
geur que les précédens. Que les camelots fuperfins
auroient la chaine de poil de chèvre filé , avec deux
fils de foie ; quarante-deux portées à trente-fix fils
chacune, la trame double, de fil de turcoin , ou de
poil de chèvre filé , avec même longueur & largeur
que ci-deffus. Enfin , que les rayés & unis , tout lai-
ne , auroient trente-trois portées , & douze fils à cha-
cune , fur demi-aune de largeur entre les lifieres , &
vingt-une aunes de longueur pour revenir à vinot-
une. Voye-t les regUmens de 16 Q g.
Les camelots ondes ont pris cette façon à la calen-
dre , de même que les gaufrés à la gaufrerie. Foye^
Calendre, & Gaufrer. Les camelots à eau ont
reçu une eau d'apprêt , qui les a difpofés à fe Initier
fous la preffe à chaud.
Il faut être fort attentif à ne point biffer prendre
de mauvais plis au camelot , parce qu'on auroit beau-
coup de peine à les lui ôter. Voye^ Portée , Buhot,
Chaîne , Trame , & à l'article Draperie , la fa-
brication & la différence de toutes ces étoffes.
CAMELOTER , v. neut. c'eft travailler un ou-
vrage de tiffu , comme on travaille le camelot. Il y
a des étamines camelotées , à gros grain & à petit
grain.
CAMELOTINE ,{.{. ( Draperie. ) petite étoffe
faite de poil & de fleuret, à la manière des camelots.
Elle eft paffée de mode ; il y en avoit de différentes
largeurs.
CAMELOTTE, f. f. reliure à la camelottt; ces re-
liures font d'ufage pour les livres d'un très-modique
prix , comme les livres des plus baffes claffes , ou de
prières , à très-bon marché. La camelotte confifte à
coudre un livre à deux nerfs feulement : après qu'on
a marqué les endroits de la couture avec la greque,
on les paffe en carton groffier, mais mince, on les
endoffe fans mettre des ais entre les volumes, & on
ne met que du papier fur le dos , & le refle fe finit
groffierement.
CAMEN, (Géog.) petite ville d'Allemagne dans
le comté de la Marclc, en Weftphalie.
CAMENEC, ( Géog. ) ville de Pologne, au grand
duché de Lithuanie , dans le palatinat de Briefcia.
CAMENTS, ou CAMENITZ, (Géog.) ville
d'Allemagne , clans la Luface, fur l'Ef fier.
CAMERA ( la TORRE de) (Geog.) petite ville
d'Afrique en Barbarie au Royaume de Bai xa.
CAMER AN , ( Geog. ) îlle d'Afrique , dépendante
de l'A by (finie , dans la mer Rouge.
CAMERARIA , f. f. ( Hifl. tau. bot. ) genre de
plante dont le nom a été dérivé de celui de Joachim
Camerarius , Médecin de Nuremberg. La fleur des
plantes de ce genre eit monopétale , faite en forme
de tuyau & de foùcoupe découpée. Il s'élève du
C C c c ij
57*
C A M
calice un piftil qui eft attaché au bas de la fleur
comme un clou , & qui devient dans la fuite un
fruit ordinairement double , filiqueux , bordé , qui
s'ouvre longitudinalement , & qui renferme des fe-
mences oblongues , ailées , & difpofées par écailles.
Plumier , Nova plant. Amer, gêner. V. Plante. (/)
CAMERINO , (Géog.) petite ville d'Italie , dans
l'état de FEglife, proche de l'Apennin , fur la rivière
de Chiento. Long. Jo. 42. Lu. 43.5.
CAMERLINGUE , f. m. ( Hijl. civ. & ecclêf.) ce
nom, félon M. Ducange, a été autrefois employé
pour lignifier un thréforicr du pape, & de l'empereur.
Il vient de l'Allemand kammer-ling, qui fignifie c/m/«-
brier , ou maître de la chambre , ou thréjorier ; & dans
une charte de l'empereur Lothaire , on trouve un
Berthold , qui exerçoit la charge de thréforier , ap-
pelle camerling.
Aujourd'hui ce nom n'eft plus en ufage qu'à Ro-
eft à la tête des finances. Pendant la vacance du faint
liège il fait battre monnoie , marche en cavalcade
accompagné des Suiffes de la garde & autres offi-
ciers , & fait publier des édits. Le cardinal camerlin-
gue a fous lui un thréforier général , un auditeur gé-
néral , & eft préfident d'une chambre ou bureau des
finances , compofée de douze prélats , qu'on nom-
me clercs de la chambre. Le cardinal Alexandre Alba-
ni , neveu de Clément XI. eft aujourd'hui camerlin-
gue du faint fiege. (G)
CAMERON, (Géog.) petite ville d'Allemagne ,
dans la Poméranie , au duché de Stettin.
* CAMERONIENS , f. m. pi. ( Hijl. ecclef. ) On
appelloit de ce nom en Ecoffe dans le dix-feptieme
iiecle , une fefte qui avoit pour chef un nommé Ar-~
chibald Cameron , miniftre presbytérien , qui ne vou-
loit pas recevoir la liberté de confeience que Char-
les II. roi d'Angleterre , vouloit accorder aux pref-
bytériëns , parce que , félon lui , c'étoit reconnoître
la fuprémacie du roi , & le regarder comme chef de
l'Edile. Ces Caméroniens non contens d'avoir fait
fchifme avec les autres presbytériens , pouffèrent les
chofes fi loin , qu'ils regardèrent le roi Charles II.
comme déchu de la couronne , &: fe révoltèrent :
mais on les réduiiit en peu de tems , Se enfin en 1690,
fous le règne de Guillaume III. ils fe réunirent aux
autres presbytériens. Mais en 1709 , ils jugèrent à
propos d'exciter de nouveaux troubles dans l'égide
d'Ecoffe ; il s'en amaffa un grand nombre en armes
près d'Edimbourg : mais ils furent difperfés par des
troupes réglées qu'on envoya contre eux. On pré-
tend qu'ils ont une haine plus forte contre les pref-
bytériens que contre les épifeopaux.
CAMHOFF , (Géog.) ville d'Allemagne , dans la
baffe Bavière.
* CAMILLE, f. m. ( Hijl. anc.) jeune garçon qui
fervoit à l'autel dans les lacrifices des Romains ; fa
fonction étoit de tenir le coffret d'encens & de par-
fums appelle acerra , ou le prœfericulum. y. AcERRA,
& Prœfericulum. Il falloit que ce deffervantfùt
de bonne famille , & qu'il eût père & mère vivans.
À l'autel il étoit vêtu de long ; fa robe étoit large , re-
levée par la ceinture , ôi descendant fort bas ; il avoit
fur la tète un ornement en pointe; du moins c'eft ainfi
qu'on le voit dans plufieurs antiques. On lui marque
dans quelques autres la tête découverte quand le fa-
criricateur l'a voilée , & la tête couverte quand le
facrificateur l'a nue. Il feroit difficile d'en dire la rai-
fon. Le Camille étoit de la célébration des mariages
& des pompes publiques.
CAMIN ou CMAUm,(Géog.) ville d'Allemagne
dans la Poméranie ultérieure , proche de la mer Bal-
C A M
tique , à l'embouchure de l'Oder. Long. 32. 46. lai.
54. 4.
CAMINHA , (Géog.) ville forte du Portugal , avec
titre de Duché. Long. g. 3. lat. 41. 44.
CAMINIETZ , ( Géog. ) petite ville de Pologne ,
fur la rivière de Bug, dans la Province de Mazovie.
C AMINIZI , (Géog.) ville & fortereffe d'Afie , fur
la mer Noire.
CAMION , f. m. (ouvrage de Charron. ) c'eft une ef-
pece de petite voiture ou petit haquet , monté fur
quatre petites roues , faites d'un feul morceau de bois
chacune , fur laquelle on trainedes fardeaux pefans
& difficiles à manier. Le camion eft à l'ufage de plu-
fieurs ouvriers.
Camion eft parmi les Epingliers , la plus petite de
toutes les efpeces d'épingles ; elle ne fert gueres que
pour attacher les coeffures & les autres ornemens des
femmes.
CAMIS, f. m. pi. (Hijl. mod.) idoles qu'adorent
les Japonois , & principalement les bonzes ou mi-
niftres de la fecte de Xenxus. Ces idoles repréfen-
tent les plus illuftres feigneurs du Japon , à qui les
bonzes font bâtir de magnifiques temples , comme à
des dieux , qu'ils invoquent pour obtenir la fanté dii
corps, & la victoire fur leurs ennemis. (G)
CAMIS ADE , f. f. terme de Guerre , qui fignifîe une
attaque par furprife, de nuit ou de grand matin, lorf-
qu'on fuppofe que l'ennemi eft couché.
Ce terme vient du mot chemije , qu'en quelques
provinces on prononce camije. Cette forte d'attaqué
s'appelloit camijade , parce que les foldats qui atta-
quoient , mettoient leur chemife par-deffus leurs ar-
mes pour fe reconnoître plus aifément dans la mêlée.
(Q)
CAMISARDS ou CAMISARS , f. m. plur. (Hi/f.
mod. ) eft un nom qu'on a donné en France aux Cal-
viniftes des Cevenes , qui fe liguèrent & prirent
les armes pour la défenfe du Calvinifme en 1688.
On ne convient pas fur l'étymologie de ce mot :
quelques - uns le font venir de camijade ; parce que
leurs attaques & leurs incurfions furent fubites &C
inattendues : d'autres le font venir de camije , qui en
quelques provinces de France fe dit pour chemije ;
parce qu'ils alloient dans les maifons prendre de la
toile pour fe faire des chemifes , ou parce qu'ils por-
toient des habillemens faits comme des chemifes:
d'autres le font venir de camis , un grand chemin ;
parce que les routes publiques étoient infeftées de
Camijards.
On donna encore le même nom aux fanatiques ,
qui au commencement de ce fiecle fe révoltèrent &
commirent beaucoup de defordres dans les Cevenes.
Ils furent enfin réduits & diffipés par la bravoure &
la prudence du maréchal de Villars. ( G )
CAMISSANO , ( Géog. ) ville d'Italie dans le Vi-
centin , fur les frontières du Padouan , aux Vénitiens.
C AMMALAMM A , ( Géog. ) ville d'Afie dans l'île
de Ternate , dont elle eft la capitale.
CAMMANAH , ( Géog. ) petite province d'Afri-
que dans la Guinée , fur la côte d'Or.
CAMME, f. f. c'eft ainfi qu'on nomme , dans les
grojjes-jorges & dans plujieurs autres ujines , dés émi-
nences pratiquées à la furface d'un arbre , qui tour-
nant fur lui-même par le moyen d'une grande roue
& d'une chute d'eau , fait lever ou des pilons , ou
des loufflets , auxquels on a pratiqué d'autres émi-
nences que les cammes rencontrent.
* CAMMONIA, ( Hijl. nat. bot. ) c'eft une plante
des Indes orientales , dont il y a plufieurs efpeces
différentes. Elle croît à la hauteur de dix à douze
pies ; fes feuilles reffemblent allez à celles du bonis ,
hormis qu'elles font un peu plus grandes. Elle fleurit
quatre fois par année ; f es fleurs font blanches com-
me de la neige , reffemblent à celles du jafmin , èv
C A M
ont une odeur pour le moins auffi gracieufe que la
fienne, & qui fe répand au loin ; fes branches ou ra-
meaux fe remplirent de fleurs qui font monopétales
& qui fe forment en grappes comme des raifins.
* CAMAZNA , f. f. ( Myth. ) déeffe des Romains
dont il eft fait mention dans S. Auguftin : elle préfi-
tloit aux chants.
CAMOMILLE , f. f. (Hifl. nât. bot.) chamœmelum ,
genre de plante à fleur ordinairement radiée , dont
le difque eft un amas de fleurons , Se dont la couron-
ne cil formée par des demi- fleurons portés fur des
embryons , & ibûtenus par un calice écailleux. Les
embryons deviennent dans la fuite des femences at-
tachées à la couche : ajoutez au caractère de ce gen-
re le port de la plante , Se principalement fes feuilles
qui font découpées en petites parties. Tournefort ,
Injî. rei herb. 'Voye^ Plante. ( / )
On l'employé fur les plates -bandes : il ne s'agit
que de l'expoîer a\i grand chaud , Se que de lui choi-
fir des lieux fablonneux. Elle vient de graine ou de
plant en racine , & fleurit en été. ( K )
La camomille appellée chamœmelum vulgare , leu-
camhemum Diofcoridis , C. B. P. I 3 5. chanwmilla ro-
mana offzc. Buxb. eft d'ufage en. Médecine : elle efl
amere , aromatique , Se rougit beaucoup le papier
bleu. Elle contient du fel ammoniac chargé de beau-
coup d'acide , & enveloppé d'une grande quantité
de foufre Se de terre. Elle eft apéritive , diurétique ,
adoucifTante , fébrifuge.
Les fleurs , dès le tems de Diofcoride , fervoient
dans les fièvres intermittentes. Rivière Se Morthon
l'cmployent de même ; Se c'eft encore à préfent le
fébrifuge ordinaire des Irlandois Se des Ecofibis.
L'infufion de fes fommités & de mélilot foulage
dans la colique néphrétique Se dans la rétention d'u-
rine : elle appaife les grandes tranchées qui furvien-
nent après l'accouchement.
Simon Pauli loue le vin de camomille dans la pleu-
réfie , Se les fomentations de la décoction faites en
même tems fur le côté.
Elle eft bonne en lavemens Se en bains : on en
fait des cataplafmes , lorfqu'il eft queftion d'adoucir
& réfoudre , comme dans la feiatique , dans les hé-
niorrhoïdcs.
L'huile de camomille faite par l'infufion de la plan-
te , eft bonne contre les douleurs de rhûmatif me : on
la mêle avec parties égales d'huile de millepertuis Se
d'efprit-dc-vin camphré ; on en fait un Uniment fur
la partie malade , que l'on couvre d'un linge bien
chaud plié en quatre.
La camomille fétide eft d'un ufage moins étendu.
Fqyc{ Maroute.
On trouve dans les boutiques l'eau diftillée , fim-
ple, & compofée de camomille ; l'huile diftillée , Se
l'huile par mfufion. (A')
CAMONICA , ( Geo*. ) petit pays d'Italie dans
le Brcfcian, appartenant aux Vénitiens.
CAMOUFLET , f. m. Donner un camouflet, dans
VArt militaire, c'eft chercher à étouffer ou écrafer
le mineur ennemi dans la galerie.
Le camouflet fe donne de différentes façons , fui-
vant la diftance de l'éloignement & de la ligne de
moindre réfiftance. Voici la plus commune.
Si le mineur eft bien voifin , on fe fert pour lui
donner le camouflet d'une bombe de douze pouces
chargée aVec la fufée. On la loge dans un trou du
côté du parvis oppofé au mineur qu'on veut étouf-
fer ; on regarnit le trou ; on le couvre d'un ou de plu-
sieurs bouts de madriers que l'on areboute bien loli-
dement contre le côté oppofé ; on remplit le bout
du rameau ou de la galerie , que l'on areboute en-
core à proportion de la réfiftance qu'elle doit taire.
Avant de faire cette opération , on met le lauciffon
avec lbn auget , qui commence à la fufée jufqu'à la
C A M
573
fortîe de Fétançonhemént , de la même manière qu'on
en ufe pour mettre le feu au fourneau , ou à la cham-
bre des mines. On met le feu au lauciffon , & le mi-
neur ennemi fe trouve étouffé par le renverfement
des terres , le manque d'air , & la fumée dont il eft
accablé. Voye^ Mine. (Q)
CAMP, f. m. dans l'Art militaire, eft l'efpace ou
le terrein occupé par une armée pour lbn logement
en campagne.
« Ce qui carattérife le camp , & qui en détermine
» le nom fuivant nos ufages, ce font les tentes que
» les officiers & les foldats ont avec eux pour s'en
» fervir au lieu de maifons»
» Les tentes font des pièces de toile ou de coutil
» préparées & accommodées , pour être foûtenues
» en l'air avec des cordes , des piquets , & de petites
» pièces de bois , ou gros bâtons.
» Il eft aifé de comprendre que ces tentes doi-
» vent être placées d'une manière déterminée , qui
» convienne à la commodité He ceux qui habitent le
» camp , & aux précautions néceffaires pour le dé-
» tendre : ces précautions, & tout ce qui concerne
» la fureté du camp , font le principal objet ou la baie
» de fa difpofition.
» Les conféquences tirées de ce principe , ont été
» différentes fuivant les tems. Les anciens refferroient
» le campement de leurs troupes , & ils formoient un
» retranchement tout autour, qui étoit prefque toû-
» jours quarré chez les Romains. Les Turcs , & quel-
» ques autres nations de l'Alie, qui font la guerre le
» plus fouvent dans des pays de plaines entièrement
» découvertes , entourent leur camp d'une enceinte
» formée par leurs chariots & autres bagages.
» La pratique préfente des nations de l'Europe eft
» toute différente. On fait confifter la fureté du camp
» à la facilité qu'on procure aux cavaliers & aux fol-
» dats de fe raffembler devant leurs tentes , pour s'y
» mettre en état de fe défendre contre l'ennemi , Se
» le combattre.
» C'eft pourquoi l'ordre de bataille fixé par le gé-
» néral , devant être regardé comme la meilleure dif-
» pofition dans laquelle l'armée puiffe combattre , il
» s'enfuit que les troupes doivent camper de manière
» à fe raffembler dans cet ordre lorfqu'il en eft be-
» foin , & que le terrein le permet.
» Ainfi c'eft l'ordre de bataille qui doit décider
» abfolument celui du campement ; ce qui eft con-
» forme à ce que M. le marquis de Santa -Crux ob-
» ferve à ce fujet, en difant : que la bonne règle exige
» de camper félon V ordre quon marche , & de marcher
y» félon i ordre dans lequel on doit combattre.
» Les troupes étant deftinées à combattre par di-
» vifion de bataillons 5c d'efeadrons , elles doivent
» donc camper dans le même ordre , Se être arran-
» gées dans le camp de la même manière qu'elles le
» lont dans l'ordre de bataille.
» D'où il fuit : que V étendue de droit à gauche des
» camps particuliers des bataillons & des efeadrons , doit
» être égale au front que ces troupes occupent en bataille ,
» & qu'il doit y avoir entre ces camps des intervalles
» auffi égaux à ceux qu'on met alors entre les mêmes
» troupes.
>» Par cette difpofition , l'étendue du front de tout
» le camp de droit à gauche , eft égal au front de l'or-
» dre de bataille ; Se l'armée étant en bataille à la tête
» de ce front, chaque bataillon & chaque efeadron
» peut faire tendre Ion camp derrière lui : ce qui étant
» fait , toutes les troupes peuvent entrer eniemble
» dans leur camp , s'y placer prefque en un moment ,
» Se en loi tir de même , s'ii en eft befoin, pour com-
» battre.
» Si le camp a un front plus grand que celui de l'ar-
» inée en bataille, les troupes, en le formant à la
» tête du camp , bifferont de grands intervalles en-
574
C A M
» tr'elles fi elles veulent le couvrir ; fi au contraire
» le front du camp eit plus petit, les troupes n'au-
>► ront pas Pefpace nécelfaire pour le former en avant
» avec lès diftancés preferites par le général. D'où
h l'on voit que pour éviter ces deux inconvéniens ,
» il faut que le front du camp fe trouve fenfiblement
» écal à celui de l'armée rangée en bataille , & pour
» cela que le camp particulier de chaque troupe, joint
» à l'intervalle qui le fépare du camp voiiin , ait un
» front égal à celui de la même troupe Sx. de l'on in-
» tervalle en bataille. C'eft aulîi ce que preferit M. le
» maréchal de Puifcgur , qui dit dans fon livre de l'art
» de la guerre : que la première règle à obferver pour
» affeoir un camp , ejl de lui donner au moins la même
» étendue que les troupes occupent en bataille , parce
» qu il faut quelles puifjent être mij'es promptement & en
» tout tems en ordre pour combatre.
» Remarque fur les intervalles qu'on doit lai (fer entre
» les camps de différentes troupes de f armée. Il n'y a rien
» de déterminé ni dans l'ulage , ni dans les auteurs
» militaires , fur la largeur des eipaces qui doivent
» iéparer les corps particuliers de l'armée.
» M. de Bombelles dit dans fon livre fur le fervice
» journalier de l'infanterie , que cette détermination
» ne fe peut faire avec précilion , parce que l'éten-
» due du front du camp de chaque bataillon dépend
» de l'efpace dans lequel le général veut faire cam-
» per fon armée. Il fuppoie cependant qu'en terrain
» ordinaire on peut donner cent vingt pas au front
» d'un bataillon, y compris celui de ion intervalle ;
» comme il fuppoie aufîi que le camp de ce bataillon
» doit occuper quatre-vingts-dix pas : d'où il s'enfuit
>> que félon cet oificier général , trente pas font un ef-
» pace fuffifant pour l'intervalle des bataillons dans
»1e camp.
» D'autres auteurs ne donnent point d'intervalles
» entre tous les camps des bataillons de l'armée ; ils
» prelcrivent feulement de iéparer les camps des ré-
» gimens par un eipace de trente pas: mais ils n'ap-
» puient ce principe d'aucune railbn , enibrte qu'il
» paroît que leur intention à cet égard eft unique-
» ment de divifer le camp par régimens. Quoique
» cette divifion ibit celle qui paroifle la plus confor-
» me à l'ulage préfent, on ne peut néantmoins lare-
» garder ni comme générale , ni comme ayant toû-
» jours été obfervée. M. Roland lieutenant colonel ,
» & Ingénieur dans les troupes de Bavière, qui a
» donné en 1733 un très-bon traité de Fortification,
» prétend dans cet ouvrage , qu'il a toujours vu don-
» ner dans les camps , quarante ou cinquante pas de
» cheval par efeadron , & pareille diftance pour l'ef-
» pace ou l'intervalle des camps particuliers de cha-
» cune de fes troupes; qu'il a vu donner de même
» cent pas de cheval pour le front du camp de cha-
» que bataillon, & autant pour fon intervalle. Cette
» pratique qui eft conforme aux principes ci-devant
» établis , peut être regardée comme une règle inva-
» riable, file général veut combattre avec des inter-
» valles égaux aux fronts des différentes troupes de
» fon armée : mais quel que foit le parti qu'il prenne
» à cet égard, le camp particulier de chaque troupe,
» joint à ion intervalle , doit toujours répondre fen-
» fiblement au front & à l'intervalle des troupes en
» bataille, au moins fi on veut obferver quelque re-
» gle dans la détermination du front du camp.
» Il fuit des principes qui ont été expolés fur l'é-
» tendue ou le front du camp, qu'il doit toujours y
» avoir devant tous les corps des bataillons & des ef-
» cadrons , un terrein libre oii l'armée puiffe fe met-
» tre en bataille.
» C'eft pourquoi fi l'on eft obligé de camper dans
» des lieux embarraffés , la première choie à laquelle
» on doit veiller, c'eft de faire accommoder le ter-
» rein de manière que les troupes qui l'occupent ,
C A M
» puiffent communiquer aifément entr'elles, & fe
» mouvoir fans aucun obltacle.
» L'ordre de bataille étant ordinairement dirigé du
» côté de l'ennemi par une ligne droite, le camp eit dé-
» terminé du même côté & par une même ligne , lorf-
» que le terrein le permet. On place fur cette ligne,
» ou plutôt quelque pas en avant, les drapeaux àc
» les étendards des troupes : on lui donne par cette
» railbn le nom de front de bandiere , vieux mot Fran»
» çois qui fignifîe baniere, & en général tout figne ou
» enfeigne militaire. C'eft la principale ligne, ou
» pour s'exprimer en terme de Fortification, la ligne
» magiflrale du camp , à laquelle toutes les autres fe
» rapportent.
» Après avoir expliqué les principes qui peuvent
» fervir à déterminer le front de bandiere du camp ,
» il s'agit de dire un mot de fa profondeur.
» Elle eft déterminée par celle des camps des ba-
» taillons & des efeadions , qu'on peut évaluer à qua-
» tre-vingts toiles. Il faut obferver que la féconde li-
» gne doit avoir un terrein devant elle allez grand
» pour fe mettre en bataille , fans que les dernières
» tentes de la première ligne anticipent fur ce ter-
» rein.
» L'éloignement de la tête du camp ou du front de
» bandiere de la première ligne à celui de la féconde,
» eft affez ordinairement de trois ou quatre cents pas,
» c'eft- à-dire, de cent cinquante ou deux cents toi-
» fes: on donne même à cet intervalle jufqu'à cinq
» cents pas ou deux cents cinquante toiles , fi le ter-
» rein eft affez fpacieux pour cela : mais cette diitan-
» ce ne peut être moindre que deux cents pas , autre-
» ment la queue des camps de la première ligne s'é-
» tendroit jufqu'à la tête du camp de la féconde.
» Il eft très-utile en cas d'attaque, que non-feule-
>» ment le camp de la première ligne ait affez de ter-
» rein libre en avant, pour que cette ligne puiffe s'y
» porter aifément s'il en eft beibin , ainfi qu'on l'a
» déjà dit , mais encore pour que la féconde ligne ,
» paffant par les intervalles du camp de la première,
» puiffe venir fe former derrière cette première à une
» diftance convenable pour la loûtenir. C'eft pour-
» quoi toutes les fois qu'on peut procurer cet avan-
» tage au camp, on ne doit jamais le négliger, fur-
» tout lorfqu'on eft dans un camp à portée de l'en-
» nemi.
» Il arrive quelquefois qu'on fait un retranche--
» ment devant tout le front du camp : alors il ne doit
» y avoir aucun obftacle qui empêche les troupes de
» communiquer librement du camp au retranche-
» ment.
>» Dans les pays tels que la Hongrie & les provin-
» ces voifmes du Danube , où les Allemands font la
» guerre aux Turcs , tous les officiers généralement
» fe fervent de tentes: mais dans la Flandre, l'AHe-
» magne , l'Italie , &c où l'on a coutume de faire la
» guerre, & où il le trouve beaucoup de villages Se
» demaifons, on s'en fert pour le logement des offi-
» ciers généraux , c'eft-à-dire , pour celui des lieute-
» nans généraux & des maréchaux de camp. Les iour-
» riers de l'armée leur font marquer à chacun une
» mailon dans les villages qui fe trouvent renfermés
» dans le camp. Les brigadiers mêmes peuvent , lui-
v> vant les ordonnances militaires, le loger dans une
» mailon, s'il s'en trouve à la queue de leur briga-
>t de : mais les colonels & les autres officiers infe-
» rieurs doivent néceifairement camper à la queue
» de leurs troupes, félon les mêmes ordonnances.
» On a foin que les officiers généraux foient cam-
» pés ou logés à côté des troupes ou des parties de
» l'armée qu'ils commandent : ainfi ceux qui com-
» mandent à la droite ou à la gauche de l'armée , oc-
» cupent les villages qui le trouvent dans ces parties,
» tk les autres ceux qui font vers le centre; lorfque
c
A M
C A M
«> ces villages ne feront pas fuffifamment couverts
m ou gardés par les troupes du camp , on fait cam-
» perpourla fureté des officiers qui y font logés, des
» corps de troupes qui mettent ces lieux à l'abri de
» toute infulte. Ejjaijitr la cajlramétation , par M. le
» Blond.
Camp rétranché, c'eftiin efpace fortifié pour
y renfermer un corps de troupes, & le mettre à cou-
vert des entrepriies d'un ennemi fupérieur : les camps
retranchés le conffruifent ordinairement dans les envi-
rons d'une place dont le canon peut lervir à leur dé-
fenfe ; 6c ils ont particulièrement pour objet de cou-
vrir & de protéger une place dont la fortification ne
permettroit pas une longue réiiffance.
Le retranchement dont les camps retranches font
entourés, ne co.nfiite guère que dans un fofié, & un
parapet flanqué de quelques redans , ou de baf-
tions. Les troupes font campées environ à cent vingt
toiies du retranchement. Voye^ Plan. XII. de l'Art
milit. une partie d'un camp retranche' dans un terreïn.
inégal.
C'eft des Turcs, dit M. le Marquis de Feuquie-
res , que nous avons Pillage des camps retranchés,
fous le nom de palan.jues. Cet ufage elt fort bon
quand il elt judicieulement pris, 6c j'approuve la
- que M. de Vauban a eue d'en conlfruire lous
quelques-unes des places du Roi: mais il ne faut pas
pour cela en faire ions toutes les places qui leroient
lufccptibics d'une pareille protection, parce qu'on
ne pourroit pas les garnir luffilamment de troupes ,
Se qu'ainlî ces camps retranchés feroient plus préjudi-
ciables que profitables. Voici le cas où je les ap-
prouve.
Lorlque le prince a la guerre à foùtenir de plu-
fieurs côtés de Ion état, que de quelques-uns de
ces côtés il veut demeurer lur la défenlive, & qu'à
la tète de ce pays il y a une place dont la conftruc-
tion permet d'y placer un camp retranché ; le prince
en peut ordonner la conlhuction d'avance, afin qu'il
loit bon , 6c que par-là l'ennemi foit forcé d'attaquer
ce camp dans les lormes, avant que de pouvoir allié-
ger la place.
Lorlqu'une ville cft grande, que fon circuit n'a
pu «.lie fortifié régulièrement à caufe de la grande
dépenfe, & que cependant la conlervation eft nécef-
faire , on peut pour la protection y placer un camp
retranché lorlque fa lituation la rend lufceptible de le
recevoir. Lorlqu'on ne veut garder qu'un petit corps
à la tête d'un pays, lbit pour empêcher les courfes
de l'ennemi, loit pour pénétrer dans le pays enne-
mi , on peut chercher la ville la plus commode pour
les effets dont je viens de parler, &C y conlfruire un
Camp retranché, parce qu'il elf plus ailé de le fervir
des troupes qui lont dans un camp retranché, que de
celles qui font logées dans une ville, dont le lervice
ne lauroit être aufîi prompt que celui des troupes
campées.
Lorlqu'on veut protéger une place dominée par
dés hauteurs, 6c qu'il s'en trouve quelques unes où
lin camp retranché peut être placé de manière que la
communication de ce camp à la place ne puifle point
être ôtee, qu'il éloigne la circonvallation, qu'il ne foit
point dominé, 6c lous le feu du canon de l'ennemi ,
ou qu'il donne quelque liberté au fecours qu'on pour-
roit introduire dans la place, ou une facilité à l'ar-
mée qui veut (ecourir, de s'appiocher de ce camp;
on y peut taire un camp retranché.
Loi luu'une place le trouve fituée fur une rivière,
6c qu'elle elt du même côté par lequel l'ennemi la
peut le plus favorablement aborder pour en for-
mer le liège, on peut encore en ce cas avoir un
camp retranché de l'autre côte de la rivière, princi-
palement file terrein fe trouve difpoféde manière
que de cet autre côté de la rivière il le trouve
575
une hauteur voifine dont l'occupation force l'en-
nemi à. une circonvallation étendue de ce côté-là ;
parce que cette grande circonvallation ainfi féparée
& coupée par une rivière , rendra la place bien plus
ailée à lecourir.
On peut encore faire un camp retranché au-devant
des fortifications d'une place , lorfqu'il peut être fait
de manière qu'il éloigne l'attaque , 6c que l'ennemi
foit obligé à ouvrir une tranchée , & à prendre les
mêmes établilTemcns contre ce camp retranché , que
pour l'attaque même de la place ; 6c qu'après qu'il
aura forcé les troupes qui lont dans ce camp à la
lui abandonner , la terre qui y aura été remuée ne
donnera pas des établilTemens contre la place.
Enfin les camps retranchés font d'un fort bon ufagè
dans les efpeces dont je viens de parler, pourvu qu'ils
foient bons , qu'ils ayent les épailTeurs convenables
pour foùtenir les efforts de l'artillerie ennemie ; qu'ils
loient protégés de la place qu'ils protègent ; qu'ils y
tiennent, 6V que les flancs en foient en fureté par la
protection du canon de la place & des ouvrages, &
fous le feu de la moufqueterie du chemin couvert ;
lans quoi ils pourroient être* dangereux à foùtenir
avec trop d'opiniâtreté : lorlqu'on les veut foùtenir
avec opiniâtreté , à caufe de leur conféquence pour
la durée d'un fiége, l'on y peut faire un fécond re-
tranchement intérieur , qui fera garni d'infante. ie le
jour qu'on craindra d'être attaqué de vive force,
afin que le feu de cette infanterie facilite la retraite
des troupes forcées , & contienne l'ennemi qui pour-
f uivroit avec chaleur les troupes forcées jufque dans
le chemin couvert de la place.
Tous les camps retranchés doivent être conftruits
de manière que les troupes qui y lont campées foient
à couvert du feu du canon de l'ennemi : car il ne
Faut pas que par Ion artillerie il en puifle enfiler au-
cune partie : fi cela étoit, le camp deviendroit fort
difficile à foùtenir , trop peu tranquille , & trop coû-
teux.
Ce que j'ai dit jufqu'à préfent des camps retran-
chés , ne regarde que ceux qui font conlt i uits pour
un corps d'infanterie, pour rendre une circonval-
lation plus difficile , pour éloigner l'attaque du corps
de la place , 6c par conséquent augmenter la curée
du fiége. Il ne relie plus lur cette matière qu'à dire
quel elt l'ufage des camps retranchés pour y mettre
auffi de la cavalerie.
L'ufage de ces camps n'eft que dans certains cas ,"
qui regardent plutôt la guerre de campagne que celle
des fiéges ; 6c voici quels ils font.
Ou l'on veut dans les guerres offenfivcs 6c défen-
lîves faire des courfes dans le pays ennemi ; ou l'on
veut empêcher que l'ennemi n'en fade commodé-
ment , 6c ne pénètre le pays ; ou l'on veut pou-
voir mettre les convois en fureté fous une place où
il ne feroit pas commode de les faire entrer.
Dans tous ces cas l'on peut conltruire un camp re-
tranché fous une place ; 6c pour lors il faut avoir
plus d'attention à la commodité de la lituation pour
y entrer 6: en lortir facilement, 6c à Ion voifina-
gedes eaux , qu'à fa force par rapport à la défen-
lc de la place. Ces camps font toujours de lervice,
pourvu qu'ils foient hors d'infulte , gardés par un
nombre d'infanterie fuffiiànt , 6c allez étendus pour
y camper commodément la cavalerie , 6c taire en-
trer Cv rellortir les charrois des convois fans em-
barras.
Voilà , ce me fcmble , tous les ufages différens
qu'on peut faire des camps retranchés : ils font tous
fort utiles : mais il ne faut pas pour cela avoù trop de
ces camps retranchés : il doit fuÎHre d'en avoir un bon
fous une place principale fur une frontière; parce
que leur garde confommeroit trop d'hommes , qui
576
C A
feraient de moins au corps de l'armée. Tout ceu eft
tiré des Mémoires de M. le marquis de Feuquiere.
Camp volant , eft un petit corps d'armée com-
pofé de quatre, cinq ou fix mille hommes , & quel-
quefois d*un plus grand nombre , d'infanterie & de
cavalerie , qui tiennent continuellement la campa-
gne , & qui Vont différais mouvemens pour empê-
cher les incui lions de l'ennemi , ou pour taire échouer
leurs entrepriiés , intercepter les convois , fatiguer
le pays voifin , & pour le jetter dans une place aiiié-
gée en cas de beibin. (Q)
Camp prétorien , (Hift. anc-. ) c'étoit chez les
Romains une grande enceinte de bâtiment, qui ren-
fermoit plulieurs habitations pour loger les loldats de
la garde , comme pourroit être aujourd'hui l'hôtel
des moulquetaires du Roi à Paris.
Camp , ( Commerce.') Les Siamois , & quelques au-
tres peuples des Indes orientales , appellent des camps
les quartiers qu'Us aflignent aux nations étrangères
qui viennent taire commerce chez eux : c'eft dans
ces camps , où chaque nation forme comme une ville
particulière , que le fait tout leur négoce ; & c'eûMà
où non-feulement ils ont leurs magalins & leurs bou^
tiques , mais aulîi où ils demeurent , avec leur fa-
mille , & leurs fadeurs S: commilhonnaires. Les Eu-
ropéens font pourtant exempts à Siam , 6c prefque
par-tout ailleurs , de cette lujétion; & il leur eft li-
bre de demeurer dans la ville ou dans les faubourgs,
comme ils le jugent à propos pour leur commerce.
(G)
CAMPAGNA , (Géog.) ville d'Italie au royaume
de Naples, dans la principauté ultérieure. Lon, 32.
4J. lat.41.42.
CAMPAGNANO, (Géog.) petite rivière d'Italie
au royaume de Naples, dans la Calabre citérieure.
CAMPAGNE , f. f. en terme de Guerre , fignifie l'ef-
pace de tems de chaque année que l'on peut tenir
les troupes en corps d'armée.
Les Allemands commencent leur campagne fort
tard , &c attendent fouvent jufqu'après la moiflbn :
les François ouvrent la campagne de bonne heure ;
ils la commencent quelquefois dès la fin de l'hyver ;
& cette méthode leur eft fort avantageule. Ce qui
doit décider de l'ouverture de la campagne , ce font les
moilîbns : il faut ou de grands magalins pour la nour-
riture des chevaux, ou que la terre foit en état de
pourvoir à leur fubliftance ; ce qui ne fe peut guère
que vers le milieu du mois de Mai. Voye{ FoURAGE.
(Q)
CAMPAGNE , ( Marine.') faire une campagne ; on
entend fur mer par le mot de campagne , le tems que
dure un armement , foit pour faire un voyage de
long cours , foit le tems que dure une croifiere , ou
celui qu'une armée navale peut tenir la mer. ( Z )
Campagne , (Géog.) petite ville de France dans
l'Armagnac , fur la Douze.
Campagne de Rome , ( la ) Géog. province
d'Italie bornée à l'oueit par la mer & le Tibre ; au
fud ck àl'eft par la mer , l'Abruzze , & le pays de
Labour; Si au nord par la Sabine.
CAMPANE , f. f. terme d' Architecture , du Latin
campana, cloche. On donne ce nom au corps du cha-
piteau corinthien & de celui du compolite , parce
qu'ils reffemblent à une cloche renverlée : on l'ap-
pelle auffi vajï ou tambour, & le rebord qui touche
au tailloir le nomme lèvre.
Campane , ornement de fculpture en manière de
crépines , d'où pendent des houpes en forme de
clochettes pour un dais d'autel , de throne , de chai-
re à prêcher , comme la campane de bronze qui pend
à la corniche compofite du baldaquin de S. Pierre
de Rome.
Campane de comble , ce font certains ornemens
de plomb chantournés &c évuidés qu'on met au bas
C A M
du faîte d'un comble, comme il s'en voit de dorés
au château de Verlailles.
Campanes , voye^_ Gouttes. (P)
Campane , ouvrage de Boutonnier ; c'eft une efpe»
ce de crépine ou de frange faite de fil d'or , d'argent,
ou de foie , qui fe termine par en-bas d'elpace à au-
tre par de petites houpes lemblables à des clochettes;
ce qui leur a fait donner le nom de campane , qui
vient du mot Latin campana.
Quoique les marchands Merciers vendent dans
leurs boutiques des houpes & campanes coulantes
ou arrêtées, montées fur moules & bourrelets,
noiiées & à l'aiguille , il n'y a cependant que les
maîtres Paffèmentiers-Boutonniers qui ayent la fa-<
culte de les fabriquer , luivant l'article vingt-troi-
lîeme de leurs ftatuts du mois d'Avril 1653.
Campane , tirage des Joies ; c'eft le nom que les
Piémontois ont donné à une des roues principales de
la machine à tirer les foies. Voye^ à l'artick Soie,
le tirage des Joies.
CAMPANELLA ( Philo fophie de). Campanella
étoit de Stilo , petite ville de la Calabre : il prit l'ha-
bit de S. Dominique à l'âge de treize ans. On l'accula
d'héréfie ; c'eft pourquoi les juges de l'inquifition le
tinrent en prifon pendant vingt-cinq ans. Le pape
Urbain VIII. obtint fa liberté. Il vint à Paris en 1634;
& le cardinal de Richelieu, qui avoit une eftime
particulière pour les favans, lui fit de grands biens.
Il mourut à Paris en 1639, âgé de 7 1 ans , après une
grande mélancholie, & un dégoût extraordinaire.
Campanella le croyoit fait pour donner à la Philo-
fophie une face nouvelle : fon efprit hardi & indépen-"
dant ne pouvoit plier fous l'autorité d'Ariftote , ni
de les commentateurs. Il voulut donner le ton à fon
fiecle ; & peut-être qu'il en feroit venu à bout , s'il
n'eût fallu que de l'elprit & de l'imagination. On ne
peut nier qu'il n'ait très-bien apperçû les défauts de
laphiloiophie fcholaltique, & qu'il n'ait entrevu les
moyens d'y remédier : mais fon peu de jugement &C
de folidite le rendirent incapable de réufiir dans ce
grand projet. Ses ouvrages remplis de galimathias,
fourmillent d'erreurs & d'abfurdités : cependant il
faut avouer qu'il avoit quelquefois de bons inter-
valles ; & on peut dire de lui ce qu'Horace difoit
d'Ennius :
Cumftueret lutulentus , erat quodtollere v elles.
On allure qu'il prétendoit connoître la penfée d'u~.
ne perlbnne , en lé mettant dans la même fituation
qu'elle, & en difpofant les organes à-peu-près de la
même manière que cette perlbnne les avoit dilpolés.
Ce fentiment devroit paroître bien fmgulier, fi on ne
favoit qu'il n'eft pas néceffaire , pour prendre plaifir
à mettre au jour des choies extraordinaires, de les
croire véritables ; mais qu'il fuffit d'efpérer que le
peuple les regardera comme des prodiges, & que
par leur moyen on palTera foi-même pour un pro-
dige.
Dialectique de Campanella. Pour mettre les lec-
teurs en état de fe former une idée de l'elprit phi-
lolbphique de Campanella , nous allons mettre ici les
lentimens.
1. La dialectique eft l'art ou l'inftrument du fage ,
qui lui enfeigne à conduire fa raiibn dans les feien-
ces.
2. La Logique fe divife en trois parties , qui ré-
pondent aux trois a£tes de l'entendement , la con-
ception , le jugement , & le railonnement.
3. La définition n'eft pas différente du terme: or
les termes font ou parfaits ou imparfaits.
4. Les termes font les femences , & les définitions
font les principes des feiences.
5. La Logique naturelle eft une efpece de parti-
cipation de l'intelligence de Dieu même, par laquelle
nous
C A
C A M
ïicus fortunes raifonnables : la Logique artificielle eft
l'art de diriger notre cîprit parle moyen de certains
préceptes.
6. Les termes font les figues de nos idées.
7. Le genre eft un terme qui exprime une fimili-
tude efféntielle qui fe trouve entre plufieurs êtres
communs.
8. L'eipece eft un terme qui exprime une fimili-
tude efféntielle entre plufieurs individus.
9. La différence eft un terme qui divile le genre ,
&C qui conftitue Fefpece.
10. La définition eft un terme complexe , qui ren-
ferme le genre & la différence.
1 1 . Le propre eft un terme qui fignifie l'état par-
ticulier des choies.
1 2. L'accident eft un terme qui fignifie ce qui n'eft
point efléntiel à un être.
1 3 . La première fubftance , qui eft la bafe de tout,
& qui ne le trouve dans aucun fujet , c'eft Fefpace
qui reçoit tous les corps : en ce fens Dieu eft une fubf-
tance improprement dite.
14. La fubftance eft un être fini, réel , fubfiftant
par lui-même, parfait, & le premier fujet de tous les
accidens.
15. La quantité, qui eft le fécond prédicament,
eft la mefure intime de la iubftance matérielle; &
elle eft de trois fortes; le nombre, le poids , 6c la
are.
16. La divifion eft la réduction d'un tout dans fes
parties , lbit qu'on regarde le tout comme intégral ,
ou comme quantitatif , ou comme ejj'entiel, ou com-
me potentiel, ou comme univerjil.
17. Il y a plufieurs manières de définir, parce
qu'il y a plufieurs manières d'être.
18. Dieu ne peut point être défini, parce qu'il n'a
qu'une différence négative.
19. La deicription eft un difeours qui indique l'ef-
fence d'une chofe par des propriétés, par des effets,
ck par des fimilitudes.
10. Le nom eft un terme qui fignifie proprement
Vejjence des chofes ; & le verbe eft un terme qui figni-
fie V action des ckojès.
21. L'argumentation eft l'action par laquelle l'ef-
prit va de ce qui lui eft connu à ce qui lui eft in-
connu , pour le connoître , le déclarer, 6c le prouver.
22. Les fens font le fondement de toutes lesfcien-
ces humaines.
23. Le fyllogifme eft compofé de deux proposi-
tions, dans l'une defquelles fe trouve le fujet de la
conclufion , 6c dans l'autre l'attribut de la même
conclufion.
24. L'induttion eft un argument qui conclut du
dénombrement des parties au tout.
25. L'expofition eft la preuve d'une propofition ,
par d'autres propositions plus claires & équipol-
ïentes.
26. L'enthimème eft un fyllogifme tronqué, dans
lequel on foufentend ou la majeure ou la mineure.
17. La Science conlifte à connoître les choies par
leurs caules.
Voilà ce qu'il y a de moins déraifonnable dans la
Logique de Campanella : le lefteur eft en état de ju-
ger s'il eft ou plus clair ou plus méthodique qu'Arif-
tote , & s'il a ouvert une route plus ailée 6c plus cour-
te que cet ancien philolbphe.
Phyjtque de Campanella. 1. Les fens font la bafe de
la Phyfique: les connoiffances qu'ils nous donnent
font certaines , parce qu'elles naiilent de la préfence
même des objets.
2. L'eflence d'une chofe n'eft point différente de
fon exiftenc'e ; ce qui n'a point d'exiftence ne peut
avoir d'eflence.
3. Ce qui exifte phyfiquement, exifte dans un
Jieu.
J'orne II,
■
4. Le lieu eft la fubftance première : elle eft fpi-
rituelle , immobile , & capable de recevoir tous les
corps.
5. Il n'y a point de vuide , parce que tous les
corps fentent, & qu'ils font doiiés du fens du taft :
mais il eft poffible qu'il y ait du vuide par violence.
6. Le tems eft la durée fucceftive des êtres : c'efl
la mefure du mouvement, non pas réellement , mais
feulement dans notre penfée.
7. Le tems peut mefurer le repos , & on peut le
concevoir fans le mouvement ; il eft compofé de par-
ties indivifibles d'une manière fenfible : mais l'imagi-
nation peut le divifer fans fin.
8. Il n'eft point prouvé que le tems ait commen-
cé : mais on peut croire qu'il a été fait avec l'efr
pace.
9. Dieu mit la matière au milieu de l'efpace , &
il lui donna deux principes adifs , favoir la chaleur
& le froid.
10. Ces deux principes ont donné naiffance à deux
fortes de corps : la chaleur divifa la matière & en fit
les cieux : le froid la condenfa , & en fit la terre.
11. Une chaleur violente divifa fort vite une por-
tion de matière , & fe répandit dans les lieux que
nous appelions élevés : le froid fuyant fon ennemie
étendit les cieux , & fentant fon impuiffance , il reu-
nit quelques-unes de fes parties, & il brilla dans ce
que nous appelions étoiles.
12. La lune cil compofée de parties qui ne bril-
lent point par elles-mêmes , parce qu'elles font en-
gourdies parle froid de la terre ; au lieu que les cieux
étant fort éloignés du globe terreftre , & n'en crai-
gnant point le froid , lont remplis d'une infinité d'é-
toiles.
1 3 . Le folcil renferme une chaleur fi confidérable,
qu'il eft en état de fe défendre contre la terre.
14. Le foleil tournant autour de la terre & la corri-
battant, ou il en divife les parties, & voilà de l'air
& des vapeurs ; ou il la diflbut , & voilà de l'eau ; où
il la durcit , & il donne naiffance aux pierres : s'il là
diflbut 6c la durcit en même tems , il fait naître des
plantes ; s'il la diflbut , la durcit , & la divile en même
tems , il tait naître des animaux.
15. La matière eft invilible , & par conféquent
noire.
16. Toutes les couleurs font compofées des ténè-
bres, de la matière, 6c de la lumière du foleil.
17. La lumière eft une blancheur vive : la blan-
cheur approche fort de la lumière ; enfuire viennent
le rouge . l'orangé , le verd , le pourpre , &c.
18. Les cieux ne font point fujets à la corruption,
parce qu'ils font compofés de feu , qui n'admet point
les corps étrangers , qui feuls donnent naiffance à la
pourriture.
19. Il y a deux élémens , favoir le foleil Se la terre,
qui engendrent toutes choies.
20. Les comètes font compofées de vapeurs fub-
tiles , éciairées par la lumière dit foleil.
21. L'air n'eft point un élément , parce qu'il n'en-
gendre rien , & qu'il eft au contraire engendré par
le foleil ; il en eft de même de Pc
22. La différence du mâle 6c de la femelle ne
vient cpie de la différente irttenfité de la chaleur.
23. Nous fommes compofés de trois fubftances,'
du corps , de Pefprit , & de Pâme. Le corps cil l'or-
gane ; Pefprit eft le véhicule de l'aine ; 6c Pâme donne
la vie au corps & à Pefprit.
Voilà une très-petite partie des principes & des
opinions qu'on trouve clans les ouvrages de Campa-
'a fur la Phyfique. Il eft fingulier qu'un homme
qui fe donnoit pour le reftaurateur de la Phifofophie,
n'ait pas pris plus de foin de déguifer les larcins. Il
fuffit d'avoir une connoiffance médiocre des fenti-
mens philoibphiques des anciens & des modernes «
DDdd
5?3
C A M
pour reconnoître tout d'un coup les fources où Cam-
panella a puifé la plupart des idées que nous venons
d'expofer. Je ne parle point ici des abiurdités qui
rempliiTent les ouvrages de notre Dominiquain :
fottife pour fottife , il me femble que les anciennes
font auffi bonnes que les modernes ; & il étoit affez
inutile d'étourdir le monde lavant par des projets
de réforme , lorsqu'on n'avoit que des chimères à
propofer. Foyei AristotelisME.
Comme le livre où Campanella donne du fenti-
ment aux êtres les plus infenfibles , fit beaucoup de
bruit dans le tems, on fera peut-être bien aile d'en
voir ici l'extrait , d'autant plus que cet ouvrage eft
extrêmement rare. Il eft intitulé defenfu rerum.
i . On ne donne point ce qu'on n'a point ; par con-
féquent tout ce qui eft dans un effet , eft auffi dans
fa caufe : or comme les animaux ont du fentiment ,
èc que le fentiment ne fort point du néant , il faut
conciurre que les élémens qui font les principes des
animaux , ont auffi du fentiment ; donc le ciel & la
terre fentent.
2. Le fentiment n'eft pas feulement une pafiion :
mais il eft fouvent accompagné d'un raifonnement fi
prompt , qu'il n'eft pas poffible de s'en appercevoir.
3. Si le fentiment elt une pajfwn , & fi les élémens
& les êtres qui en font compotes ont des paffions ,
tous les êtres ont donc du fentiment.
4. Sans le fentiment , le monde ne feroit qu'un
chaos.
5. L'inftincT: eft une impulfion de la nature, la-
quelle éprouve quelque fentiment : donc ceux qui
prétendent que tous les êtres agiffent par inftincl: ,
doivent par conféquent fuppoler qu'ils agiffent par
fentiment ; car ils accordent que tous les êtres na-
turels agiffent pour une fin : il faut donc qu'ils la con-
noiffent cette fin ; donc l'inftinct eft une impulfion
qui fuppofe de la connoiffance dans la nature.
6. Tous les êtres ont horreur du vuide ; donc ils
ont du fentiment , & on peut regarder le monde com-
me un animal.
7. Il feroit ridicule de dire que le monde n'a point
de fentiment , parce qu'il n'a ni pies ni mains , ni
nez , ni oreilles , &c. Les mains du monde font les
rayons de lumière ; fes yeux font les étoiles , & fes
pies ne font autre chofe que la figure ronde qui le
rend propre au mouvement.
8. Il paroît par l'origine des animaux , que l'ame
eft un elprit lubtil , chaud , mobile , propre à rece-
voir des paffions , & par conféquent à fentir.
9. Tous les êtres ont une ame , comme on peut s'en
convaincre par les chofes qui naiffent d'elles-mê-
mes , & qui ont toujours quelque degré de chaleur.
10. Les chofes les plus dures ont un peu de fenti-
ment : les plantes en ont davantage , & les liqueurs
encore plus.Le vent & l'air fentent facilement: mais
la lumière & la chaleur font les êtres qui ont le plus
de fentiment , &c.
En voilà affez , ce me femble , pour mettre le lec-
teur au fait des fentimens de Campanella ; nous fini-
rons cet article en rapportant le jugement que Def-
cartes portoit de cet auteur. « Il y a 15 ans ( écri-
» voit-il au P. Merfenne ) que j'ai lu le livre defenfu
» rerum de Campanella , avec quelques autres trai-
» tés : mais j'avois trouvé dès-lors fi peu de folidité
» dans fes écrits , que je n'en avois rien gardé dans
» ma mémoire. Je ne faurois maintenant en dire au-
» tre chofe , finon que ceux qui s'égarent en affec-
» tant de fuivredes chemins extraordinaires, me pa-
» roiffent beaucoup moins excufables que ceux qui
» ne s'égarent qu'en compagnie & en fuivant les
» traces de beaucoup d'autres ». ( C)
CAMPANULE , f. f. campanula , ( Hif. nat. bot. )
genre de plante à fleur monopétale , faite en forme
de cloche , & découpée i le calice devient un fruit
CAM
membraneux partagé en trois loges ou plus , au mi-
lieu desquelles il y a un pivot chargé de trois pla-
centa qui lbûtiennent plufieurs femences menues ;
dans quelques efpeces, ovales , applaties ; & pour ain-
fi dire entourées d'un anneau dans quelques autres.
Ces femences s'échappent par un trou qui fe trouve
dans chaque loge. Tournefort , Inji. rei herb. Voyeç
Plante. (/)
La campanule eft vivace , & demande une terre à
potager avec peu d'eau , beaucoup de fbleil , & une
culture ordinaire ; elle fleurit en été , & fe feme en
Septembre &. O&obre ; on la foûtient ordinairement
par de petites baguettes.
Quelques Botaniftes , comme Lemery , l'appellent
gantdée ou gants notre-dame ; Bradley dans lbn ca-
lendrier des jardiniers l'appelle miroir de Venus. ( K )
La campanula ej'culenta rapuncultts officin. campa-
nula radice efulentà flore cœruleo , Tournefort, In/?,
111. eft d'ufage en médecine. La femence en eft bon-
ne pour les yeux ; fon lue eft bon pour les maux
d'oreille ; la racine fe mange dans les lalades du
printems ; on prétend que prife avec du poivre long,
elle fait venir le lait.
La gantelée eft une autre campanule d'ufage. Voye^
GANTJiI.ÉE.
La campanule jaune , bulbocodium vulgatius , J. B*
eft une elpece de narciffe, dont la racine contient
beaucoup d'huile & de tel eflentiel ; elle eft purga-
tive &c apéritive , à la dote de deux gros en infu-
fion.
On prétend qu'elle ne vaut rien pour les nerfs ;
mais qu'appliquée extérieurement , elle eft bonne
pour les brûlures , les bleflures , & les hernies.
Clufius & Lobel prétendent que toutes les raci-
nes de toutes les efpeces de narciffe excitent le vo-
miffement. (A^)
C A M P E C H E , ou S. FRANCISCO , (Ge'og.)
ville de l'Amérique léptentrionale , dans la nouvelle
Efpagne , fur la côte orientale de la baie de Campe-
che. Long. 28 J. lat. ig. 20.
CAMPEN , ( Géog ) ville forte des Provinces-
unies des Pays-bas , dans la province d'Overiffel.
Long. 23. 28. lat. 52. 38-
CAMPER pour uriner , ( SE ) Maréckalerie , ell
unfignedeconvalefcence dans de certaines maladies
où le cheval n'avoit pas la force de fe mettre dans la
fituation ordinaire de chevaux qui urinent. ( V}
CAMPER , (Géog) petit royaume d'Afie , dans
l'île de Sumatra.
CAMPERCHE, f. f. ( Tapifur. ) barre de bois ,'
ainfi appellée par les baffe-liffiers ou ouvriers en ta-
pifferies de baflé-liffe , qui traverfe leur métier d'une
roine à l'autre , & qui foûtient les fautriaux où font
attachées les cordes des lames. Voye^ Basse-lisse.
CAMPESTRE ou CAMPESTE f. f. (Hfl.anc.)
c'étoit chez les Romains une efpece de culotte , ou
d'habillement femblable à ce qu'on appelloit autre-
fois parmi nous tonnelet, bas de foie tourné en rond,
ou haut-de-chaufjes , tels qu'on en voit iùr des tableaux
du règne d'Henri II. Charles IX. Henri III. ou tels
qu'en portent encore aujourd'hui les danleursde cor-
de. Cette partie de l'habillement que nos ancêtres
avoient convertie en parure par fa forme , d'étoffe
précieufe garnie de galons & de rubans , n'étoitchez
les anciens qu'un tablier deftiné à le couvrir dans
les exercices du champ de Mars , & qui prenant de-
puis le nombril jufqu'au milieu des cuiffes , laiffoit
tout le refte du corps à nud ; ou l'on en avoit de faits
exprès comme des caleçons , ou on les tormoit au
beioin avec la tunique. ( G )
CAMPHRE , f. m. ( Hifi. nat. bot. & Chimie. ) en
Latin camphora ou caphura. C'eft une lubftance blan-
che , tranfparente , folide , lèche , friable , très-vola-
tile , très-inflammable , d'une odeur tres-pénétrante ,
C A M
&C d'un goût très-amer & piquant ; elle paraît être
compofée de beaucoup de phlogilrique , d'une terre
très-fubtile , & de fort peu d'eau.
Les arbres dont on tire le camphre fe trouvent à la
Chine & au Japon : mais les meilleurs font ceux des
îles de Bornéo , de Sumatra & de Ceylan. Les rela-
tions ne s'accordent pas fur la manière dont on s'y
prend pour tirer le camphre ; l'opinion la plus commu-
ne , &c peut-être la moins fondée , eft qu'il découle
naturellement de l'arbre comme une gomme, & qu'on
le ramaffe figé au pié de ces arbres. Il y a des gens
qui prétendent que les Indiens pour l'obtenir , font
des incifions aux arbres d'où il tombe en abondance.
Suivant les Lettres curieufes & édifiantes , voici la mé-
thode ufitée à la Chine pour tirer le camphre :. on fe
fert pour cela des nouvelles branches d'un arbre que
les Chinois nomment Tchang, on les coupe en petits
morceaux , on les met en macération pendant trois
jours & trois nuits dans de l'eau de puits ; au bout de
ce tems on les fait bouillir dans une marmite , en ob-
iervant de remuer continuellement avec un petit bâ-
ton de bois de faule ; quand on voit qu'il s'attache à
ce petit bâton une efpece de gelée blanche , on paiTe
la décoêlion , on en fépare toutes les faletés , on la
verfe dans un pot de terre verniffé , où on la laiffe
repofer pendant une nuit ; on trouve le lendemain
que ce fiic s'efr. coagulé , & a formé une maffe. Pour
purifier cette première production , on prend de la
terre graffe fort feche , on la réduit en poudre bien
fine , on en met une couche dans un baffin de cui-
vre , & fur cette couche de terre , on en met une de
camphre; on continue à faire des couches de cette
manière jufqu'à ce qu'il y en ait quatre, & on cou-
vre la dernière avec des feuilles de la plante poko ,
ou de pouliot. On couvre le baffin de cuivre ainli
garni d'un dôme ou autre baffin qui s'y adapte exacte-
ment ; on garnit les joints de terre graffe , on les met
fur un feu qu'on a foin de rendre égal & réglé ; on
prend garde qu'il ne fe faffe ni fentes ni crevaffes à
l'enduit de terre qui fert à luter les jointures des baf-
fins , de peur que la partie fpiritueufe du camphre ne
vienne à s'échapper : lorfqu'on a donné un feu fuffi-
fant , on laiffe refroidir les baffins , on les détache ,
&c l'on trouve le camphre fublimé dans celui d'en
haut ; en réitérant deux ou trois fois la même opéra-
tion , on aura un camphre très-pur.
L'arbre dont les branches fourniffent ce camphre, a ,
fuivant les mêmes relations , jufqu'à cent trois cou-
dées de haut ; & fa groffeur cil fi prodigieufe , que
vingt hommes peuvent à peine l'embraffer. Tout ce
détail cft une traduftion fidèle d'un livre chinois fort
cftimé dans le pays. Mais les Chinois donnent eux-
mêmes la préférence au camphre de File de Bornéo ,
qu'ils regardent comme fort fupérieur au leur.
Selon d'autres relations du Japon , on fuit la mê-
me méthode à peu de chofe près qu'à la Chine. On
prend les racines , les branches & même les feuilles
de l'arbre qui donne le camphre , on les coupe en mor-
ceaux groffiers, on les met dans un baffin de fer , on
verte de l'eau par-defftis, & on y adapte un chapi-
teau à bec , garni de paille en dedans ; on lute les
jointures ; après y avoir appliqué un récipient , on
commence à diltiller : par ce moyen , la plus grande
partie du camphre s'attache aux brins de paille ibus la
forme de cryltaux , le refte paffe dans la diflillation ,
& on l'en fépare eniuite. Ces deux dernières manières
femblent les plus vraiffcmblables , & celles qui s'ac-
cordent le plus avec la nature volatile du camphre ,
que la moindre chaleur fait non-feulement diminuer
confidérablement , mais encore difparoître entière-
ment. II ctl donc plutôt à préfumer qu'on le recueille
de cette façon clans les Indes , qu'aux pies des arbres ,
où il paraît que la chaleur du pays doit aifément le
faire difparoître»
Tome //,
C A M
579
Outre ces manières dont nous venons de dire que
le camphre fe tire à la Chine. & au Japon, on pré-
tend auffi qu'il peut fe tirer de la racine du canellier ,
du zidoar de Ceylan , du romarin , de l'aurone , &
d'autres arbriffeaux aromatiques du genre des lau-
riers. M. Neumann croit que l'on a pu tirer de ces
végétaux une fubftance graffe & huiieuie ; mais
que jamais cette fubftance n'a eu la dureté ni la lie-
cité , ni une reffemblance parfaite avec le vrai cam-
phre des Indes. Ce lavant Chimiïte a tiré du thym
un camphre qui , à l'odeur près , rellembicit en tout
point à celui des Indes , & qui avoit toutes les quali-
tés qu"on y remarque. C'eft ce dont il rend compte
dans les Mifcellama Bero'.imnjia , Continuatio 1 1.
pag.JO. &J'uiv.
Apres avoir diftillé de l'huile de thym , il voulut fé-
parer cette huile d'avec l'eau par le moyen d'une
mèche de coton ; il s'apperçut que l'huile ne venoit
qu'avec peine , & qu'elle éioit retardée par de petits
cryftaux qui s'étoient formés autour du co;on ; ne
lâchant à quoi attribuer ce phénomène , il ciiicon-
tinua l'opération. Il la reprit au bout dé quelques
jours , & fut fort furpris de voir qu'il s'étoit formé au
tond du vale où il avoit biffé le produit de ia ctiftil-
lation du thym , uns affez grande quai
taux de forme cubique , & dont quelques-uns e
de la groffeur d'une noifette ; ces cryltaux ne pou-
voient le diifoudre dans l'eau ; ce M. Neumann y
découvrit toutes les autres propriétés du camphre des
Indes , avec la ieule différence , que le camphrt fut
de cette dernière matière avoit l'odeur du thym dont
il avoit été tiré.
Les propriétés du camphre font de diminuer con-
fidérablement, lorfqu'il cit. expofé à l'air, & des'ex-
■ haler entièrement à la fin : il ne fe môle point à l\ tu ,
mais il y furiiage ; & lorfqu'eile elt chaude , il s'y re-
font en une huile tres-voiatiie. Quand on le met à
diftiller, on n'en tire aucune liqueur : mai^ ^ fe fubli-
mé en entier , fans qu'il s'en perde la moindre choie ;
il ne donne point d'empyreume , & ne laiffe point de
tête-morte en arrière ; il s'enflamme très-a 'orient
à un feu ouvert , & brûle même dans l'eau ; il donne
beaucoup de luie , mais aucunes cendres. Le camphre
fe diffout très-aifément dans toutes les huiles , tant
exprimées que diltillées , dans l'efpritde vin bien rec-
tifie , dans l'eau-forte , mais plus difficilement dans
l'huile de vitriol. On ne parvient à le mêler avec
l'eau que par le moyen du blanc d'eeuf.
De toutes ces propriétés M. Neumann le croit au-
torité à conclurre que le camphre doit être regardé
comme une fubftance toute particulière , qui ne doit
être rangée dans aucune autre claffe , & que le nom
qu'on lui donne eft générique , ec doit le joindre à
celui de la plante dont il a ete tire ; c'elt-à-dire qu'on
devroit dire camphre de thym , camphre de romarin , Se
ainli des autres plantes dont on pourrait le tirer. En
effet, félon lui, les propriétés qui viennent d'être énon-
cées, prouvent qucle camphre ne peut être appelle ni
ré/vu, ni gomme, m/cl volatil, ni huile , & que c'efturte
fubitance toute particulière, & qui a des caractères
qui la diftinguent de tous les autres corps. M. Neu-
mann en conclut auffi que tout camphre a l'odeur t;;e-
cifique du végétal dont il a été tiré , & que ia façon
dont il l'a tiré du thym conduit à croire qu'on peut le
tirer de même de beaucoup d'autres plantes.
Le camphre s'employe dans les ùux d'artifice ,
dans beaucoup de vernis , &c. On prétend que dans
les cours des princes orientaux on le brûle avec de
la cire pour éclairer pendant la nuit. On affure que le
camphre réduit en poudre , &; faupoudré fur les habits
& meubles, les préfervedes mittes & teignes: mais
l'on principal ufage elt dans la Médecine &: dans la
Chirurgie. Il cil regardé comme un des pluspuiffans
diaphoniques , c^ fa volatilité fait que lorfqu'il elt
D D d d ij
580
C A M
échauffé par la chaleur de l'eftomac , il pénètre dans
toutes les parties du corps. On prétend que c'eft un
préfervatif contre la pefte & les maladies contagieu-
fes. Bien des gens croyent qu'il eft foporatif , rarraî-
chifTant & calmant: mais ces dernières propriétés ne
font point avérées. On s'en fert dans des poudres &
dans des élixirs ; il entre auffi clans l'huile bézoardi-
que de Wedclius. Mais les effets extérieurs du cam-
phre font beaucoup plus certains & d'un ufage très-
fréquent dans la Chirurgie : mêlé avec l'efTence de
myrrhe & d'aloès, c'eft un excellent remède pour ar-
rêter le progrès de la gangrené, la carie des os , ou
déterger les" plaies. L'ufage de l'efprit-de-vin ou de
l'eau-de-vie camphrée eft journalier ck. connu de tout
le monde. (— )
Le camphre s'employe intérieurement avec fuccès ,
diflbus parle moyen du jaune d'œuf, & étendu dans
quelques liqueurs appropriées,pour arrêter le progrès
de la gangrené dans les efquinancies gangréneufes.
La dole eft de quatre ou cinq grains dans une potion
de huit onces. Mêlé avec les fels de cantharides , il
empêche qu'elles n'offenfent la veflie ; fa fubtilité le
mettant en état de les accompagner dans tous les re-
coins des vahTeaux, Ôcd'émouffer leur acreté.
Le docteur Quincy obferve que l'on commence à
unir avec fuccès le camphre aux remèdes mercuriaux ;
qu'il modère leur qualité irritante , & les aide à pé-
nétrer dans les conduits les plus déliés , où ils opèrent
par fufion & par la force de l'impulfion : car non-feu-
lement le mercure doux ou calomel n'agit plus par
ce moyen furies glandes falivales; mais le turbith
minéral qui opère de lui-même avec violence par
haut & par bas , étant mêlé avec le camphre , fe fait
beaucoup moins fentir, circule avec plus de facili-
té, & excite la tranfpiration d'une manière beaucoup
plus efficace qu'aucun autre remède d'une moindre
pefanteur ipécirique.
M. Lcmcry a tenté de faire l'analyfe du camphre :
mais foit que fes parties ayent été trop déliées &
trop volatiles , pour être pouffées à un plus grand de-
gré de pureté par un procédé chimique , ou que fes
principes, qui félon toute apparence doivent être
une huile & un fel volatil , foient unis trop étroi-
tement , il n'a jamais pu venir à bout de les décom-
-pofer.
Cet auteur remarque que le camphre ne peut fe
difîbudre dans des liqueurs aqueufes, mais bien dans
celles qui font fulphureufes ; qu'il ne fe difTout point
non plus dans les alkalis, ni dans certains acides,
mais bien dans l'efprit de nitre ; ce qu'aucune autre
réfine ne peut faire. On donne ordinairement à cette
dinolution le nom & huile de camphre; & c'eft à elle
que l'on attribue la vertu médecinale du camphre ,
dans les plaies , les gangrenés , & la carie des os. On
n'en ufe point intérieurement à caule de fon acreté
& de fa caufticité ; quoique M. Lemery lui ait vu pro-
duire de bons effets dans les obftructions & les abcès
de matrice, pris à la dofe de deux ou trois gouttes.
Il le mêle cependant pour l'ordinaire avec une égale
quantité d'huile d'ambre. On a fait ce proverbe fur
le camphre :
-Camphora per nares caflrat odore marcs,
mais il eft faux fuivant Scaliger & Tulpius.
Si on jette du camphre dans un baffin fur de l'eau-
de-vie, qu'on les falTe bouillir jufqu'à leur entière
évaporation, dans quelque lieu étroit & bien fermé ,
& qu'on y entre enfuite avec un flambeau allumé ,
tout cet air enfermé prend feu fur le champ, & pa-
roît comme un éclair, fans incommoder le bâtiment
ni les fpeftateurs.
On fait du camphre artificiel avec de la fandaraque
& du vinaigre blanc diftillé , qu'on met pendant 10
jours dans le fumier de cheval , & qu'on laiffe après
C A M
au foleil pendant un mois pour fécher , & on trouve
le camphre lous la forme d'une croûte de pain-blanc,
qu'on appelle autrement gomme de genièvre , vernis-
blanc , &C majlic. {N )
* CAMPHRÉE , f. f. camphorata , {Hifi. nat. bot.)
la racine eft ligneufe , longue , de la groiîeur du
pouce. Ses tiges lont nbmbreufes , ligneufes , un peu
grolTes , hautes d'une coudée , branchues , un peu
velues , blanchâtres, garnies de nœuds placés alter-
nativement , de chacun defquels il fort un grand
nombre de petites feuilles , qui n'ont pas plus d'un
tiers de pouce de long , menues , velues , médiocre-
ment roides; d'une odeur aromatique, & qui appro-
che un peu du camphre quand on les frotte entre les
doigts, d'une faveur un peu acre. Ses fleurs font fans
pétales , & compofées de quatre étamines garnies de
fommets de couleur de rofe , qui s'élèvent d'un ca-
lice d'une feule pièce, de couleur d'herbe, partagé
tantôt en trois parties , tantôt en cinq. Le piftil le
change en une petite graine noire , oblongue , ar-
rondie , cachée dans une capfule qui étoit le calice
de la fleur. Cette plante vient communément dans
la Provence & dans le Languedoc : elle eft d'ufage
en Médecine.
Lobel la dit aftiïngente & vulnéraire : M. Burlet,
Mim. de l' Acad. IJ03. lui attribue la vertu d'exciter
les urines , les lueurs , la tranfpiration , & les règles ;
de lever les obftru étions récentes des vilceres ; d'être
falutaire dans les maladies chroniques; de loulager
fur-tout dans l'afthme humide, & dans l'hydropifie
où il n'y a ni chaleur ni altération : il en faut faire
un long ufage , & fe purger de tems en tems. On la
prend en décoction dans de l'eau, ou macérée dans
le vin. On peut la prendre infufée comme le thé ;
elle échauffe beaucoup , & il en faut ufer avec pré-
caution.
* CAMPHRIER (le) , Hijl. nat. bot.) arbre qui
croît de lui-même & lans culture au Japon, à la
Chine , clans l'île de Bornéo , & dans plufieurs au-
tres contrées des Indes orientales. On dit qu'il eft
de la grandeur d'un beau tilleul. Ses racines font
fortes , tres-odorantes , & fournilfent plus de cam-
phre que le refte de l'arbre. L'écorce eft d'un gris
oblcur autour du tronc , mais autour des rameaux
les plus jeunes elle eft verte : ces rameaux contien-
nent un lue vil queux & gluant; le bois en eft blanc.
Les feuilles en font longues , fe terminant en pointes
ondulées par les bords, en-defliis d'un verd foncé
& brillant. Cet arbre porte en Mai & en Juin des
fleurs blanches à lix pétales ; lorfqu 'elles rombent,
il vient en leur place des baies , qui étant mûres
font de la grofleur d'un pois , d'un rouge oblcur ,
d'un goût qui approche de celui du clou de gérofle.
Foye{ r article CAMPHRE.
* CAMPHUR, (Hijl. nat. Zoolog.) efpece d'âne
fauvage qui le trouve dans les deferts de l'Arabie ,
qui , ïuivant le rapport de quelques voyageurs , a
une corne au milieu du front , dont il le lert pour
fe détendre des taureaux fauvages. Les Indiens at-
tribuent des vertus merveilleules à cette corne , &
la regardent comme un remède fouverain dans plu-
fieurs maladies.
CAMPI ANO , (Géog.) petite ville forte de Sicile,"
dans le val di Taro , fur la rivière de Taro.
CAMPINE ou CAMPIGNE , (Géog.) contrée des
Pays-bas , dont une partie dépend du Brabant Hol-
landois, & l'autre de l'évêché de Liège.
CAMPIGNOLE, (Géog.) ville de France, dans
la province de Breffe, fur la rivière de Dain.
CAMPION, {Géog.) ville d'Aile dans la Tarta-
rie, capitale du royaume de Tangut. Lon. izz. 30.
lat. 40. z5.
CAMPLI , {Géog.) petite ville d'Italie , au royau-
C A M
me de Naples , dans l'Abruzze. Long. Ji. JO- l-at.
•42- 38.
CAMPNER-D AHLER , icu de Campen , (Comm.)
c'cft une pièce d'argent qui a cours dans les provin-
ces-unies des Pays-bas , qui vaut zb' ftuyvers d'Hol-
lande, & environ 57 fous monnoie de France.
CAMPO, (Géog.) petite ville d'Italie, de la dé-
pendance de la république de Gènes.
Campo d'Andevalo, (Géog.) petit pays d'Ef-
pagne , dans l'Andalouûe , fur les frontières du Por-
tugal.
Campo di Montiel , (Géog.) petit diftricl d'Ef-
pagne, dans la partie méridionale de la nouvelle Caf-
rille.
Campo di S. Pietro , (Géog.) petite ville d'I-
talie , dans le Padoiian , fur la rivière de Mufon.
Campo Major , ( Géog. ) petite ville de Portu-
gal , dans la province d'Alentejo. Long. 11. iy. lat.
38. 60.
C A M P O L I , ( Géog. ) petite ville d'Italie , au
royaume de Naples , dans l'Abruzze ultérieure , fur
les frontières de la Marche d'Ancone.
CAMPREDON , {Géog.} ville d'Efpagne , dans la
Catalogne , au pié des Pyrénées.
* CAMQUIT, (Hijl. nat. bot.) fruit du royaume
de Tonquin , femblable à une orange, mais qui n'eft
pas li grand que le cam-chaïn ; fa couleur eft d'un
rouge foncé ; la pelure eft fort mince ; elle eft aufli
rouge en-dedans , 6c ne le cède à aucun fruit en dé-
licatefte : mais ce fruit eft fort mal-fain & donne la
dyflenterie.
CAMSUARE , ( Géog. ) province de l'Amérique
méridionale , habitée par differens peuples.
CAMUL, (Géog.) ville d'Afie , à l'extrémité du
royaume de Cialis , fur les frontières de celui de
Tanguth. Long. n5. 40. lat. Jy. ;3.
CAMULE, lub. m. (Myth.) nom que les Saliens
donnoient à Mars. Il eft reprefenté dans les monu-
xnens avec la pique & le bouclier.
CAMUS ou CAMARD , qui a le nez court ou
creux, & enfoncé vers le milieu, ^oy^ Nez.
Les Tartares font grand cas des beautés camufes ;
Rubruquis obferve que la femme du grand cham Ieng-
his, beauté qui fit beaucoup de bruit en fon teins,
n'avoit pour tout nez que deux petits trous. (H)
Ce Rubruquis étoit un religieux envoyé par laint
Louis , pour convertir le cham des Tartares ; nous
avons la relation de fon voyage , qui eft très-curieu-
fe , fur-tout pour des philofophes. (O)
Camus , cheval camus, eft celui qui a le chamfrain
enfoncé. Voyei Chamfrain.
CANA , (Gcog.fainte.) ville de Galilée , dans la
tribu de Zabulon , où Jefus-Chrift a fait pluheurs mi-
racles. Ce n'eft plus qu'un village peuplé de Maho-
métans. Sainte Hélène avoit confacré ce lieu par une
églife & par un feminaire ; l'églife a été transformée
en mofquée , & le leminaire en un logement de fan-
tons.
CANADA ou CANADE; (H'jl. mode) on nomme
ainfi la mefure de vin ou d'eau qu'on donne par jour
fur les vaiftcanx Portugais à chaque matelot ou hom-
me de l'équipage.
Canada ou Nouvelle France, (Géog.) pays
fort vafte de lAmérique feptentrionale , borné à
J'eft par l'Océan , à l'oueft par le Milîiftipi , au fud
par les colonies Angloifes , & au nord par des pays
deferts & inconnus. Ce pays eft habité par plulieurs
nations fauvas.es, qui ne vivent que de la chaffe 6c
de la pèche. Outre ces nations , les François y ont
des établuTemens coniidérables, &on y t'ait un grand
commerce de pelleteries , que les fauvages apportent
en quantité du produit de leur chaffe. Le Canada ^i\
rempli de forets , & il y fait très-froid. Les fam âges
qui habitent ce pays adorent le foleil 6c un premier
C A N
581
efprit, qu'ils regardent comme au-defTus de lui. La
capitale du Canada eft Québec. Voye^ Canadiens.
CANADELLE , f. f. (Hlfi. nat. hhthyolog.) petit
poilion de mer , qui eft nommé facchetto à Venife , &
qui eft peut-être le channadilla de Belon & de Ron-
delet. Il eft femblable à la perche d'eau douce pour
la figure , les couleurs , & les bandes tranfveriales.
Les nageoires font comme celles de la mendole ; cel-
le du dos a une tache noire à fa partie fuperieure au-
delà des aiguillons : cette marque eft particulière à la
canadel/e, & pourroit la faire diftinguer de tout autre
poiftbn. Le bec eft pointu , & la bouche grande en
comparaifon du corps. La mâchoire du defibus eft un
peu plus grande que ceile du delfus ; elles font l'une
& l'autre garnies de petites dents : il y a auffi fur le
palais un efpace triangulaire rude au toucher. L'iris
des yeux eft de couleur d'argent : les nageoires du
ventre font noirâtres : la queue eft fourchue & tra-
verfée par des lignes de couleur d'or. Les écailles de
ce poiftbn font très-petites. "Willughby, HiJi.piJ'cium.
Foye^_ Poisson. (/)
CANADIENS ( Philosophie des). Nous de-
vons la connoiflance des fauvages du Canada au ba-
ron de la Hontan , qui a vécu parmi eux environ l'ef-
pace de dix ans. Il rapporte dans la relation quelques
entretiens qu'il a eus fur la religion avec un de ces
fauvages ; Se il paroît que le baron n'avoit pas tou-
jours l'avantage dans la difpute. Ce qu'il y a de fur-
prenant , c'eft de voir un huron abufer aflez fubtile-
ment des armes de notre dialectique pour combattre
la religion Chrétienne ; les abftractions & les ter-
mes de l'école lui font prefque auiïï familiers qu'à
un Européen qui auroit médité fur les livres de Scot.
Cela a donné lieu de foupçonner le baron de la Hon-
tan d'avoir voulu jetter un ridicule fur la religion
dans laquelle il avoit été élevé, 6c d'avoir mis dans
la bouche d'un fauvage les raifons dont il n'auroit
olë le fervir lui-même.
La plupart de ceux qui n'ont point vu ni entendu
parler des fauvages , le font imaginés que c'étoient
des hommes couverts de poil , vivant dans les bois
fans fociété comme des bêtes , & n'ayant de l'hom-
me qu'une figure imparfaite : il ne paron pas même
que bien des gens loient revenus de cette idée. Les
fauvages , à l'exception des cheveux de des tourcils
que plulieurs même ont loin d'arracher , n'ont aucun
poil fur le corps : car s'il arrivoi; par hafarjd qu'il leur
en vînt quelqu'un , ils le l'ôteroient d'abord jufqu 'à
la racine. Ils naiffent blancs comme nous , leur nu-
dité , les huiles dont ils lé graillent , & ...
couleurs dont ils le fardent , que le foleil à ia longue
imprime dans leur peau , leur hâlent le teint. Us
font grands, d'une taille fuperieure à îa notre, ont
les traits du vilage fort réguliers, le nez aquilin ; ils
font bien faits en général , étant raie de voir parmi
eux aucun boiteux, borgne, boflu , aveugle, &c,
A voir les Sauvages du premier coup d'œil , il eft
impofïïble d'en juger à leur avantage , parce qu'ils
ont le regard farouche, le port ruftique, 6c l'abord
li iimple & li taciturne , qu'il feroit tres-difticile à un
Européen qui ne les connoitroit pas, de croire que
cette manière d'agir eft une elpccc de civilité à leur
mode , dont ils gardent entre-eux toutes les bienféan-
ces, comme nous gardons chez nous les nôtres, dont
ils fe moquent beaucoup. Ils font donc peu caret-
fans, 6c tont peu de démonftrations: mais nonobs-
tant cela ils font bons, affables , & exercent >. n\ ers
les étrangers & les malheureux une charitable hol-
pitalite , qui a dequoi confondre toutes les nations
de l'Europe. Ils ont l'imagination aile/ vive: il
lent jufte fur leurs affaires : ils vont ù leur fin par
des voies fines : ils agiffent de fang froid & avec un
phlcgmeqiu lafleroit notre patience. Parrailbn d'hon-
neur cv par grandeur d'ame , ils ne le fâchent pref-
581
C A N
que jamais. Ils ont le cœur haut & fier , un courage
à l'épreuve , une valeur intrépide , une confiance
dans les tourmens qui femble iurpafier l'héroïl'irie ,
& une égalité d'ame que ni l'adverlité ni la profpé-
rité n'altèrent jamais.
Toutes ces belles qualités feroient trop dignes
d'admiration , fi elles ne fe trouvoient malheureu-
fement accompagnées de quantité de défauts : car
ils font légers & volages , fainéans au-delà de toute
exprefïïon , ingrats avec excès , foupçonneux , traî-
tres , vindicatifs , & d'autant plus dangereux , qu'ils
lavent mieux couvrir & qu'ils couvrent plus long-
tems leurs reffentimens. Ils exercent envers leurs en-
nemis des cruautés û inouïes , qu'ils furpalTent dans
l'invention de leurs tourmens tout ce que l'hifloire
des anciens tyrans peut nous représenter de plus cruel.
Ils font brutaux dans leurs plailirs , vicieux par igno-
rance & par malice : mais leur rufticité & la dilctte
où ils font de toutes choies, leur donne fur nous un
avantage , qui eft d'ignorer tous les raffinemens du
vice qu'ont introduit le luxe & l'abondance. Voici
maintenant à quoi fe réduit leur philoibphie ce ieur
religion.
i°. Tous les Sauvages foûtiennent qu'il y a un
Dieu : ils prouvent fon exiilence par la compoiition
de l'univers qui fait éclater la toute-puiffance de fon
auteur; d'où il s'enfuit , diiént-ils , que l'homme n'a
pas été fait par hafard , & qu'il eft l'ouvrage d'un
principe fupérieur en fageffe & en connoiffance ,
qu'ils appellent le grand Efprit. Ce grand Efprit con-
tient tout , il paroït en tout , il agit en tout , & il
donne le mouvement à toutes choies ; enfin tout ce
qu'on voit & tout ce qu'on conçoit, eft ce Dieu qui
fubfiftant fans bornes , fans limites , & fans corps ,
ne doit point être repréfenté fous la figure d'un vieil-
lard , ni de quelque autre choie que ce puiffe être ,
quelque belle , vafte , ce étendue qu'elle foit : ce qui
fait qu'ils l'adorent en tout ce qui paroit au monde.
Cela eft fi vrai , que lorsqu'ils voient quelque choie
de beau , de curieux , ce de Surprenant , fur-tout le
foleil & les autres aftres , ils s'écrient : O grand Ef-
prit , nous te voyons par-tout !
i°. Ils difent que l'ame eft immortelle ; parce
que fi elle ne l'étoit pas , tous les hommes feroient
également heureux en cette vie , puifque Dieu étant
infiniment parfait & infiniment fage , n'auroit pu
créer les uns pour les rendre heureux, & les autres
pour les rendre malheureux. Ils prétendent donc que
Dieu veut par une conduite qui ne s'accorde pas avec
nos lumières , qu'un certain nombre de créatures
foufirent en ce monde pour les en dédommager en
l'autre : ce qui fait qu'ils ne peuvent fouflrir que les
Chrétiens difent que tel a été bien malheureux d'être
tué , brûlé , &c. prétendant que ce que nous croyons
malheur , n'eil malheur que dans nos idées ; puifque
rien ne fe fait que par la volonté de cet Être infini-
ment parfait , dont la conduite n'eil ni bifarre , ni
capricieufe. Tout cela n'eil point ii fauvage.
3". Le grand Efprit a donné aux hommes la rai-
fon , pour les mettre en état de difeerner le bien ce
le mal , & de fuivre les règles de la juftice ce de la
fagefle.
40. La tranquillité de l'ame plaît infiniment à ce
grand Efprit. Il déteile au contraire le tumulte des
paffions , lequel rend les hommes méchans.
50. La vie eft un fommeil , & la mort un réveil
qui nous donne l'intelligence des choies vifibles &
invifibles.
6°. La raifon de l'homme ne pouvant s'élever à
la connoiffance des choies qui font au-deffus de la
terre , il eft inutile & même nuiiible de chercher à
pénétrer les chofes invifibles.
70. Après notre mort , nos âmes vont dans un cer-
tain lieu , dans lequel on ne peut dire ii les bons font
C A N
bien , ce fi les méchans font mal ; parce que nous
ignorons ii ce que nous appelions bien ou mal , eft
regardé comme tel par le grand Efprit. ( C)
CANADOR, f. m. ( Commerce. ) mefure des li-
quides de Portugal, dont les douze font une almonde
qui eft une autre mefure du même royaume. Le ca-
nador eft équivalent au mingle ou bouteille d'Amfter-
dam. Foyei MiNGLE & Almonde. Dictionnaire du
Commerce , tome II. page 5ç). {G)
* CANAL ARTIFICIEL , ( Hhjh. & Architecture. )
lieu creufé pour recevoir les eaux de la mer , d'une
ou plufieurs rivières , d'un fleuve , &c. Les rivières
ne contribuent pas feulement à la richeffe naturelle
des campagnes en les arrofant , elles font encore la
richeffe artificielle des provinces , en facilitant le
tranfport des marchandifes. Plus leur cours eft éten-
du dans un état , & plus elles communiquent les unes
avec les autres , plus les parties du corps de cet état
font liées & difpolées à s'enrichir mutuellement. Si
la nature, comme il arrive toujours, n'a pas fait pour
les hommes tout ce qu'il y avoir de plus avantageux
à faire , c'eft à eux à achever ; & les Hollandois , ou
pour prendre fur la foi des voyageurs un exemple
conlidérable , les Chinois qui ont un pays d'une éten-
due fans comparaiion plus grande , ont bien fait voir
juiqu'oii peut aller , en fait de canaux Se de naviga-
tion , l'indullrie humaine , Se quelle en eft la récom-
penfe. Mais l'avantage des canaux eft une choie très-
anciennement connue. Les premiers habitans de la
terre ont travaillé à rompre les ifthmes Se à couper
les terres , pour établir entre les contrées une com-
munication par eau. Hérodote rapporte que les Cni-
diens , peuples de Carie dans l'Alie mineure , entre-
prirent de couper l'ilthme qui joint la prefqu'île de
Cnide à la terre ferme , mais qu'ils en furent détour-
nés par un oracle. Plufieurs rois d'Egypte ont tâché
de joindre la mer Rouge à la Méditerranée. Cléopa-
tre eut le même deffein. Soliman IL empereur des
Turcs, y employa 50000 hommes , qui y travaillè-
rent fans effet. Les Grecs Se les Romains projetterent
un canal à-travers l'ifthme de Corinthe qui joint la
Morée Se l'Achaie , afin de paffer ainfi de la mer Io-
nienne dans l'Archipel. Le roi Démétrius , Jules-Cé-
far , Caligula , & Néron , y firent des efforts inutiles.
Sous le règne de ce dernier , Lucius Verus , un des
généraux de l'armée Romaine dans les Gaules , en-
treprit de joindre la Saône & laMofellepar un canal ,
& de faire communiquer la Méditerranée Se la mer
d'Allemagne par le Rhône , la Saône , la Mofelle &
le Rhin ; ce qu'il ne put exécuter. Charlemagne for-
ma le deffein de joindre le Rhin & le Danube , afin
d'établir une communication entre l'Océan & la mer
Noire , par un canal de la rivière d'Almutz qui fe dé-
charge dans le Danube , à celle de Reditz qui fe rend
dans le Mein , qui va tomber dans le Rhin près de
Mayence : il fît travailler une multitude innombra-
ble d'ouvriers ; mais dirferens obftacles qui fe fuccé-
derent les uns aux autres , lui firent abandonner fon
projet. Bernard propofe, dans fon traité de la jonction
des mers, une communication entre la mer de Pro-
vence Se l'Océan, vers la côte de Normandie, en
joignant l'Ouchc à l'Armanfon. On traverleroit ainli
la France par le Rhône , la Saône , l'Ouche , l'Ar-
manfon , l'Yonne , & la Seine.
La France a plufieurs grands canaux : celui de
Briare fut commencé fous Henri IV. & achevé fous
Louis XIII. par les foins du cardinal de Richelieu. Il
établit la communication de la rivière de Loire à la
rivière de Seine par le Loing. Il a onze grandes lieues
de longueur , à le prendre depuis Briare jufqu'à Mon-
targis. C'eft au-deffous de Briare qu'il entre dans la
Loire , Se c'eft à Cepoi qu'il finit dans le Loing. Les
eaux du canal font foùrenues par quarante-deux éclu-
fes , qui fervent à monter Se à deicendre les trains
CAN
de bois & les bateaux, qu'on conftruit pour cet effet
d'une longueur & d'une largeur proportionnée. On
paye un droit de péage à chaque éclufe pour l'entre-
tien du canal & le rembourfement des propriétaires.
Le canal d'Orléans fut entrepris en 1675 Pour 'a
communication de la Seine &c de la Loire. Il a vingt
éclufes. C'eft Philippe d'Orléans , régent de France
qui l'a fait achever (dus la minorité de Louis XV. Il
porte le nom d'une ville dans laquelle il ne paffe pas.
Il commence au bourg de Combleux , qui eft à une
petite lieue d'Orléans.
Le projet du canal de Picardie pour la jon&ion des
rivières de Somme 6c d'Oife , a été formé fous les mi-
nifteres des cardinaux de Richelieu 6c de Mazarin ,
& (dus celui de M. de Colbert.
Mais un des plus grands & des plus merveilleux
ouvrages de cette efpece , & en même tems un des
plus utiles, c'eft la jonction des deux mers par le canal
de Languedoc , propolé (dus François I. fous Henri
IV. ions Louis XIII. entrepris & achevé fous Louis
XiV. Il commence par un réfervoir de quatre mille
pas de circonférence , & de quatre-vingts pies de pro-
fondeur, qui reçoit les eaux de la montagne Noire.
Elles delcendent à Nauroule dans un baffin de deux
Cents toiles de longueur , 6c de cent cinquante de
largeur, revêtu de pierre de taille. C'eft-là le point
de partage d'où les eaux fe diftribuent à droite & à
gauche dans un canal de foixante & quatre lieues de
long , où fe jettent plufieurs petites rivières, foûtenues
d'efpace en efpace de cent quatre éclufes. Les huit
échues qui font voifines de Bcfiers, forment un très-
beau (peclacle : c'eft une cafcade de cent cinquante-
iix toifes de long fur onze toiles de pente.
Ce canal eft conduit en plufieurs endroits fur des
âquéducs 6c fur des ponts d'une hauteur incroyable,
qui donnent pafTage entre leurs arches à d'autres ri-
vières. Ailleurs , il eft coupé dans le roc tantôt à dé-
couvert , tantôt en voûte , fur la longueur de plus de
mille pas. Il fe joint d'un bout à la Garonne près de
Touloufe : de l'autre traverfant deux (dis l'Aude , il
paiTe entre Agde tk Bcfiers , & va finir au grand lac
de Tau , qui s'étend julqu'au port de Cette.
Ce monument eft comparable à tout ce que les
Romains ont tenté de plus grand. Il fut projette en
1666, & démontré potlible par une multitude infinie
d'opérations longues 6c pénibles , faites fur les lieux
par François Riquct , qui le finit avant fa mort , ar-
rivée en 1680. Quand les grandes choies font exé-
cutées , il eft facile à ceux qui les contemplent de les
imaginer plus parfaites 6c plus grandes. C'eft ce qui
eft arrivé ici. On a propoië un réfervoir plus grand
que le premier, un canal plus large , 6c des éclufes
plus grandes : mais on a été arrêté par les frais.
Nous n'entrerons pas dans tous les détails de la
conftrudtion de ce canal, mais nous ne pouvons guère
nous difpenfer d'expliquer le méchanifme & le jeu
des échues ou rélervoirs d'eau, qu'on peut regarder
comme de grands coffres qu'on remplit à diferétion ,
&C à l'aide defquels on fait monter ou defeendre un
bâtiment d'une portion de canal dans une autre.
Il faut obfervcr d'abord ,quc dans les canaux l'eau
eft de niveau clans chaque partie, c'eft-à-dire entre
une éclufe 6c une autre éclufe , & que les eaux des
différentes parties font dans des niveaux différens.
Une éclufe eft compofée de deux murs parallèles
IX, 34, voy. PI. du canal de Lang. à la fin de nos PI.
d'Hyd.fig. 1. & 4. la hauteur N M de ces murs eft
de deux pics ou environ plus haute que depuis le fond
du canal inférieur jufqu'au niveau de la furface de
l'eau du canal fupérieur : ces deux murs font éloi-
gnés l'un de l'autre d'autant qu'il convient , pour
que les bâtimens puiffent paffer commodément ; &
ils doivent être bâtis ldlidemcnt fur pilotis ou terre
CAN
583
franche & un. peu en talud , pour qu'ils puiffent mieux
foûtenir l'effort des terres.
On a placé entre ces deux murs les portes 24 , 15,
fig. 1. la première pour empêcher l'eau du canal fu-
périeur d'entrer dans le coffre ou dans l'éclufe ; & la
féconde, pour arrêter & foûtenir l'eau quand elle en
eft remplie. Ces portes doivent être très -fortes j &
tourner librement fur leurs pivots : c'eft pour les pou-
voir ouvrir & fermer avec facilité , qu'on y ajufte
les longues barres Ab,Ca,au moyen defquelles on
les meut comme le gouvernail d'un vaiffeau par fa
barre ou (on timon. Il faut aufli les conftruire de ma-
nière qu'elles foientbien étanchées, & qu'elles bif-
fent paffer le moins d'eau qu'il eft poiïible. Les deux
battans de chaque porte s'appuient l'un contre l'au-
tre , & forment un angle faillant du côté où l'eau fait
effort contre eux.
Outre ces parties , une éclufe a encore deuxcanaux
foûterrains G, H; K,F. Le canal G 7/ qui defeend
obliquement, (ert à lâcher l'eau dircanal fupérieur Dy
fig. z. dans le corps de l'éclufe , où elle eft retenue
par la porte Cqui eft fuppofée fermée. On lâche cette
eau en levant la pelle D G , qui en ferme l'ouvertu-
re. Voycifig. 3. le canal G # ouvert en G, 6c l'autre
canal K F fermé en K. Quand au contraire on veut
vuider le coffre de l'éclule , on ferme le canal G H
en baiffant la pelle G ; & l'on ouvre le canal K F en
levant la pelle K : l'eau n'étant plus retenue, s'écoule
par le canal K F dans le canal inférieur B ; enforte
qu'elles fe mettent de niveau dans le canal & dans
l'éclufe. Voy&7_ la fig. 2.
Jm des éclufes. Si l'on propofe , par exemple , de
faire monter le bateau B du canal inférieur dans le
canal fupérieur G ,fig. 2. la porte A & la pelle G du
canal fupérieur étant fermées , on laiffera écouler par
le canal K F toute l'eau que contient l'éclufe , fi elle
n'eft pas vuide: on ouvrira enfuite les grandes por-
tes C, en tournant leurs barres C a , ou en tirant leurs
battans fig. 1. & 4. ce qui fera facile, puifquc l'eau
qu'elles ont de part & d'autre eft en équilibre. Les
portes étant ouvertes , on fera entrer le bateau dans
le corps de l'éclufe ; on refermera enfuite les portes
C& la pelle K; enfuite on ouvrira la pelle G pour
remplir l'éclufe de l'eau du canal , jufqu'à ce qu'elle
(oit de niveau avec celle du canal D , comme on voit
fig. 3. Le bateau s'élèvera à mefure que l'éclufe fe
remplira d'eau , & il arrivera à la hauteur B. Les cho-
ies étant en cet état , on ouvrira la porte A ,6c le ba-
teau paffera dans le canal D ; ce que l'on s'étoit pro-
po(é de faire.
S'il eût été queftion de faire defeendre le bateau
du canal D fig. J. dans le canal inférieur , il faudrait
commencer par remplir l'éclule d'eau, ouvrir la porte
A, y faire enfuite paffer le bateau, refermer cette
porte & la pelle G , ouvrir enfuite la pelle K , pour
laiffer écouler l'eau de l'éclufe dans le canal \n\êr\e\\r.
Le bateau baiffera à mefure que l'éclufe fe vuidera ;
& lorfque l'eau de l'éclufe fera au niveau de ceile du
canal inférieur , on ouvrira la porte Cpour faire for-
tir le bateau 6c le faire paffer dans le canal B. Voye^
l' article E CLUSE.
Canal, (Jardin.) c'eft ordinairement une lon-
gue pièce d'eau , pratiquée dans un jardin pour l'or-
nement & la clôture.
Canal , ehe{ les Fontainiers , fe prend encore pour
un tuyau de fontaine.
Canal en cafcade, (Jardinage. ) eft un canal inter-'
rompu par plufieurs chûtes qui ftiiveht l'inégalité du
terrein. On en voit à Fontainebleau , à Marly, au
théâtre d'eau à Verfailles , 6c dans les jardins de Cou-
vanecs.
Canaux foûterreins , font des aqueducs enfoncés
en terre, qui fervent à conduire les eaux. Voye-^
Aqueduc.
534
C A N
Ce font àufli les tuyaux & conduits dont on fe fert
pour amener les eaux, lefquels le trouvent tout re-
couverts de terre loriqu'ils font poiés. (K )
Canal de Cêtrave , e'êft , en Marine, le bout creu-
fe ou cannelé de l'étrave , iur quoi repoie le beaupré
quand on n'y met point de couffin.
Canal , faire canal, (Marine.) ce terme n'eft guè-
re ufité que pour la navigation des galères. Une ga-
lère fait canal iorfqu'eiie fait un trajet de mer allez
coniîdérable pour perdre la côte de vue , avant que
d'arriver au lieu vers lequel elle fait route. (Z)
Canal, enAnatomie, eft un mot pris générale-
ment pour exprimer tous les vaiffeaux du corps,
tels que les veines , les artères , &c par lefquels dif-
férents fluides circulent. Voye^ Vaisseau, Artè-
re, &c.
Le canal artériel , -\ /"ARTERIEL.
Le canal vtint ux , j \ Ve I N EUX.
Le canal hépatique, j \ HÉPATIQUE.
Le canal cy pique , / ïCySTIQUE.
Les canaux kepati-cyfiq\ /HÉPATï-CÏ STIQ.
Le canal cholidoque, . ^oy. ^Ckolidoçue.
Le canal thorachique , \ / T* 0 R A CHîQ O £ ,
Le canal pancréatique , t -jf PANCRÉATIQUE.
Les canaux déferons , I | DÉFÉRENT.
Les canaux adipeux. J y Adipeux.
Les canaux demi-circulaires font trois canaux dans
le labyrinthe de l'oieille, qui s'ouvrent par autant
d'orifices dans le veltibule. Voyer Oseille.
Ils font au nombre de trois , un vertical fupérieur,
un vertical poftérieur, & un horilontal. Ce dernier
eft ordinairement le pius petit des trois ; le vertical
poftérieur eft fouvent le pius grand , quelquefois c'eft
le vertical fupérieur qui furpafte les autres. Ils va-
rient fouvent fuivant la différence des fujets: mais
ils font toujours femblables dans la même perfonne.
Valfalva conjecture que l'intention de la nature , en
donnant des grandeurs différentes à ces canaux , dans
lefquels une paitie du nerf auditif eâ logée, a été de
les accommoder à la différence des fons , dont les im-
preffions euffent toujours été les mêmes fi ces canaux
avoient été de même grandeur : & quoiqu'on remar-
que quelque différence dans leur forme & leur gran-
deur dans différentes perfonnes , ils ne biffent pas
d'être entièrement femblables dans le même homme;
car fans cette précaution, il n'eût pas manqué d'y
avoir de la discordance dans les organes de l'ouie.
Les canaux aqueux, duclus aquojî Nuckii, font cer-
tains canaux dans la fclérotique , que M. Nuck a dé-
couverts, par lefquels on croit que l'humeur aqueufe
de l'œil eft apportée dans l'intérieur des membranes
qui renferment cette liqueur : mais cette découverte
n'eft pas généralement reçue. Foye^ Aqueux &
<Eil.
Canal, (Maréchalerie.) on appelle ainfi le creux
qui eft au milieu de la mâchoire inférieure de la bou-
che du cheval, qui eftdeftiné à placer la langue , &
qui étant borné de part & d'autre par les barres , fe
termine aux dents mâchelieres. C'eft dans ce canal
que croiffent les barbillons.
Quand le canal eft large , le gofier s'y loge facile-
ment, & le cheval peut bien brider: mais lorfqu'il
eft trop étroit, le cheval eft contraint de porter le
nez au vent. (V)
C an A L ; c'eft dans un aqueduc de pierre ou de
terre , la partie par où paffe l'eau qui fe trouve dans
les aqueducs antiques, revêtue d'un corroi de maf-
tic de certaine compofition , comme au pont du
Gard en Languedoc.
Canal ou Gouttière. Voye^ Gouttière.
Canal d'un larmier t en Architecture , c'eft le pla-
C A N'
fond creufe d'une corniche , qui fait le pendant à moii*
chettes. ^oye^ Larmier & Sophii.
Canal de volute; c'eft dans la volute ionique , la fa-
ce des circonvolutions renfermée par un ftftel, 6c
dont le chapiteau eft entre le liftel & l'ove.
CANAL, terme d' Architecture , ie dit des cavités
droites ou tories , dont on orne les tigelles des cauli-
coles d'un chapiteau.
Canal de triglyphe. Voye^ Triglyphe.
* Canal des ejpolins, ( manufacture de foie. ) machi-
ne de fer blanc, lur laquelle on range les efpoiins,
quand l'étoffe n'eft pas aifez large pour les contenir,
gu qu'ils font en trop grande quantité. Le canal eft
plus large que l'étoffe.
v NAL de Venfuple, fe dit dans les mêmes manu-
factures, d'une cannelure dans laquelle on place la
verge qui eft attachée à la tête ou au cheî d . I é toffe ,
oit plutôt à la queue de la chaîne.
* C a nal e encore chez les mêmes ouvriers ,
un morceau de bois cave, en forme de tuile creufe ,
dont la concavité imite la convexité de l'enfuple. Il
eft long de deux pies ou environ, il s'applique fur
l'enfuple même , & fert à garantir l'ouvrier des poin-
tes d'aiguille qui arrêtent l'étoffe dans le velours ci-
felé , tk. à garantir l'étoife même du frotement dans le
veiours uni. Voy. Us articles VELOURS «S'AIGUILLE
d'ensuple.
Canal (Je) ou la Manche , (Gèograp.) c'eft le
nom qu'on donne ordinairement à la mer qui lépare
la France de l'Angleterre.
CANAN, f. m. (Commerce.) mefure des liquides
dont on fe fert dans le royaume de Siam , & que les
Portugais appellent choup : le canan tient environ un
pot ou deux pintes de Paris : le quart du canan s'ap-
pelle lenigj c'eft notre chopine. Au-defibus du lenig
font les cocos ; il y en a cependant qui peuvent con-
tenir une pinte entière de liqueur. Poyi{ Cocos , me-
fure. (G) v
CAWANOR , (Gèog.) petit royaume d'Afie, avec
upe ville qui porte le même nom , fur la côte de Ma-
labar, appartenante aux Portugais. Long, g 3. ^J.
Lu. iz. là.
CANAPÉ, f. f. longue chaife à dos, fur laquelle
pliriieurs perfonnes peuvent s'affeoir, & même le
coucher.
C ANAPÉ , f. m. en terme de Raffineur defucre , eft une
efpece de chaife de bois fur laquelle on met le baffin,
lorfqu'il eft queftion de tranfporter la cuite du rafrai-
chiftoir dans les formes : deux des monta ns font un
peu plus élevés que les autres, pour empêcher le baf-
fin de répandre.
CANAPEYES , ( Gèog. ) nom qu'on donne à une
nation fauvage de l'Amérique méridionale, qui habi-
te une partie de la nouvelle Grenade.
CANAPLES, ( Gèog. ) petite ville de France en
Picardie , entre Amiens & Dourlens.
CANARA, {Gèog.) royaume d'Afie, fur la côte
de Malabar, habité par des peuples idolâtres.
CANARANE, {Gèog.) royaume d'Afie dans l'In-
de, au-de-lâ du Gange. Quelques Géographes dou-
tent de fon exiftence.
CANARD , f. m. anas, (Hifl. nat. Zoolog.) oifeau
aquatique , dont la femelle porte le nom de cane. Les
canards & autres oifeaux de rivière font pefans, &
fcmblent fe mouvoir difficilement ; c'eft pourquoi ils
font du bruit avec leurs ailes en volant. Il y a des
canards fauvages qui font aufti gros & plus que les ca-
nards domeftiques, & qui leur reffemblent à tous
égards ; d'autres qui font plus petits : ainfi il y en a
de deux fortes. On doit les diftinguer en grands & en
petits, & non pas en fauvages & en domeftiques,
puifque ceux-ci font venus des œufs de canards fau-
vages. Les couleurs de ceux-ci font confiantes : mais
celles des autres varient j ils font quelquefois mi-par-
tis
C A N
ris de blanc ou entièrement blancs. Cependant il s'en
trouve qui ont les mêmes couleurs que les fauva-
ges. Belon, Hifl. de la nat. des oij'eaux.
Il y a quantité d'elpeces de canards: il fuffira de
rapporter ici les principales , je veux dire celles qui
ont été nommées en François.
Canard à bec crochu, anas rojlro adunco: le mâle
pefe deux livres deux onces ; il a depuis la pointe
du bec jufqu'à l'extrémité de la queue environ deux
pies de longueur: l'envergure eft de trente-deux pou-
ces ; le bec eft long de deux pouces & demi ; il elt un
peu courbé, & d'un verd pâle; la pointe qui cil à l'ex-
trémité eft de couleur noire. Le plumage de la tête
& du deffous du cou eft d'un verd l'ombre , & il y a
deux raies formées par de petits points ou taches
blanches ; l'une des raies paile au - defius du bec ,
prefque fur l'œil, & s'étend jufqu'au derrière de la
tète, & l'autre va depuis le bec jufqu'au-deflbus de
l'œil, qui eft entouré d'un cercle déplumes de la
même couleur : le plumage du menton eft aufii bi-
garré de la même manière; celui de la gorge, de la
poitrine & du ventre, eft blanc, & cette couleur eft
mélangée de quelques petites taches tranfveriàles
d'un brun rougeâtre ; les plumes du dos de même que
celles de la naiffance des ailes & des flancs , font de
cette même couleur, 6c bordées oc bigarrées par-tout
de blanc. Les grandes plumes des ailes font au nom-
bre de vingt-quatre, les fix premières font toutes blan-
ches, & les autres font d'un brun rougeâtre ; les pe-
tites plumes du premier rang font bleues, à l'excep-
tion des pointes qui font blanches; les plumes du fé-
cond rang font brunes , & leur pointe eft blanche :
la queue eft compolée de vingt plumes noires , leurs
pointes font blanches ; les quatre du milieu font re-
courbées par en haut en forme de cercle vers le dos :
les jambes & les pattes font de couleur orangée. La
femelle de cet oilèau refl'emble beaucoup à celle du
canard ordinaire , à l'exception du bec qui eft cro-
chu ; elles pondent plus qu'aucunes autres de ce gen-
re. Derham, Hifl. nat. des oij'eaux. Voye^ OlSEAU.
CANARDA crête noire, anas Juligula prima Geln. il
pcfe deux livres ; fa longueur depuis la pointe du
bec jufqu'à l'extrémité de la queue eft de quinze à
feize pouces ; & l'envergure eft de deux pies 6c trois
ou quatre pouces : le bec a depuis la pointe jus-
qu'aux coins de la bouche , environ deux pouces
de longueur ; il eft large , d'un bleu pâle par-tout ,
excepté à la pointe qui eft noire : les narines font
grandes , & environnées par un efpace dégarni de
plumes : l'iris des yeux eft jaune, ou de couleur d'or :
les oreilles font petites ; la tête , fur-tout le fommet ,
eft d'un pourpre noirâtre , ou plutôt d'une couleur
mélangée de noir 6c de pourpre ; c'eft pourquoi on
appelle cet oifeau à Venife, 6c dans d'autres endroits
d'Italie , capo-negro. Il a une crête qui pend derrière
la tête,de la longueur d'un pouce & demi : la couleur
du cou , des épaules, du dos, enfin toute la partie
fupérieure de ['oifeau eft d'un brun foncé , prelque
noir. Les ailes font courtes , 6c toutes les petites plu-
mes font noires; les quatre premières grandes plu-
mes font de la même couleur que le corps; les fix
qui fuivent deviennent fucceffivement blanches par
degrés ; les dix Iuivantes font blanches comme nei-
ge, à l'exception de leurs pointes qui font noires ;
les fix dernières font entièrement noires : la queue
eft très-courte , & compolée de quatorze plumes
noires ; le deffous du cou & le devant de la poitrine
font noirs, & le refte de la poitrine eft blanc ; le ven-
tre eft de la même couleur jufqu'à l'anus, ot
plusobfcurc , 6c au-delà elle eft noirâtre : les plumes
des côtés , que recouvrent les ailes lorfqu'elles font
pliées , celles qui couvrent les cuifles , & les petites
plumes du délions de l'aile, lont blanches ; les jam-
bes font courtes, 6ç placées en arrière; les pattes
Tome 11.
C A N
585
font d'une couleur livide , ou de bleu obfcur ; les
doigts lont longs , & la membrane qui les joint eft
noire. Le corps de cet oifeau eft court , épais , large,
6c un peu applati. On n'a trouvé que des cailloux" 6c
de l'algue dans l'eftomac de cet oileau. Willughby ,
Crnith. Derham , Hijl. nat. des oifeaux. Vcye7^ OI-
SEAU.
Canard à tête élevée. , anas arrecla ; le bec de cet
oileau eft verd, & mêlé d'une couleur brune ; l'iris
des yeux eft blanc ; le fommet de la tête eft noir ; il
y a une bande blanche qui commence fous la bafe
du bec , & qui entoure le fommet de la tête au-def-
fous du noir ; le refte de la tète eft d'une couleur
oblcure , mêlée de verd 6c de rouge ; ce qui la fait
paraître très-belle , félon les différeras reflets de lu-
mière : le cou eft bigarré de plumes noires 6c blan-
ches ; celles de la poitrine & du ventre font de cette
dernière couleur ; les côtés du ventre fous les ailes
& les cuifles , font d'une couleur oblcure tirant fur
le noir ; les grandes plumes des ailes font brunes ,
& leurs bords extérieurs font blancs ; le dos eft d'u-
ne couleur Ibmbre , mêlée de verd & de rouge ; les
jambes & les pies lont d'un jaune oblcur. Cet oifeau
le tient droit en marchant ; c'eft pour cette raifort
qu'on l'appelle le canard droitou à tête élevée. Derham,
Hifl. nat. des oifeaux. Voye^ OlSEAU.
CANARD de Barbarie: cet oifeau parait avoir eu
plusieurs dénominations ; car on croit qu'il a été dé-
ligné parles noms luivans , anas Mofchata , anas Cai-
rina , anas Libyca , anas Indica ; toutes les deferip-
tions que l'on en a faites fous ces dirférens noms , s'ac-
cordent pour la grandeur, pour la voix rauque 6c en-
trecoupée comme par des lifîlemens , pour les tubé-
rolités dégarnies de plumes entre les narines Cv" su-
tour des yeux , & pour la grandeur du mâle , qui lur-
palfe celle de la femelle. Les couleurs du plumage
varient comme dans tous les oileaux domeftiques.
J'ai vu un mâle de trois ans qui peloit quatre livres
treize onces ; il avoit deux pies deux pouces 6c de-
mi de longueur , depuis la pointe du bec julqu'au
bout des pattes , & deux pies 6c demi jufqu'au bout
de là queue ; la partie fupérieure du bec a deux pou-
ces cinq lignes de longueur , depuis l'ouverture de
la bouche jufqu'à l'extrémité de cette partie fupé-
rieure , qui eft terminée par une forte d'ongle large
& plat , noir & crochu , allez reflemblant à un ongle
humain ; les bords de cet ongle font blanchâtres ; il
y a un pareil ongle à l'extrémité de la partie infé-
rieure du bec ; la fupérieure a onze lignes de lar-
geur, & deux pouce-> huit lignes de longueur jus-
qu'aux premières plumes de la tète ; elle eft en forme
de gouttière- renverlée; les narines font à égale dif-
tance de la pointe du bec & du mi _ . ux : le
bec eft élevé , & tuberculeux derrière les narines ;
mais cette partie eft recouverte par une membrane
marbrée de noir & de rouge, qui environne la baie
du bec entier , qui s'étend jufqu'aux yeux , <Sc qui les
entoure ; cette membrane recouvre des tubercules
ofl'eux plus ou moins gros , qui font placés autour
des veux , Cv qui ont une couleur blanche rouliàtre ;
le bec eft marbre de rouge , de couleur de chair Cv
de noir ; les dents lont en forme de feie , comme dans
les canards ordinaires ; la langue elt aufli pareille ; la
tête , ce le defius du cou fur la moitié de fa longueur,
font panaches de noir ce de blanc ; tout le refte du
defius du cou , le dos entier , le croupion, & la queue,
font d'une couleur oblcure & changeante . mêlée
d'or , de pourpre, de bleu 6c de verd ; les lis: pre-
mières grandes plumes des ailes font blanc!
dix-fept Iuivantes font de la même couleur que les
longues plumes de l'épaule 6c de la queue ; la partie
moyenne de ces dix-fept grandes plumes de l'aile eft
panachée de noir & de blanc , principalement fur les
barbes intérieures ; car les barbes extérieures des der-
EE e e
586
C A N
nieres de ces dix-fept grandes plumes , font de même
couleur que l'extrémité , &: les trois ou quatre der-
nières grandes plumes l'ont entièrement de la même
couleur que la pointe des autres; toutes les plumes qui
recouvrent les grandes l'ont blanches , à l'exception
des fix ou fept premières , qui font en grande partie
de la couleur changeante qui eft fur la plupart des
grandes plumes : tout le deffous de l'aile eft blanc ,
à l'exception des endroits des plumes qui font de cou-
leur changeante à l'extérieur ; l'intérieur en eft brun ;
la gorge eft tachetée de blanc , de brun, & de noir ;
le cou & la poitrine font blancs, avec des taches ir-
régulieres fur le jabot , qui font formées par plufieurs
plumes brunes mêlées parmi les blanches ; le ventre
6c les cuiiTes font bruns ; les côtés & le deffous de la
queue font auffi d'une couleur brune , mais elle eft
un peu mêlée de couleur changeante ; les pattes font
brunes ; la membrane qui réunit les doigts eft auffi
brune , & marquetée de blanc fale ; le deffous du
pie & les oncles font d'un blanc fale tacheté de noir.
Ces oifeaux font privés , & fe multiplient comme
les canards communs, f'oye^ OlSEAU.
CANARD de Madagajèar , anas Madagafcirienfîs ,
eft un peu plus grand que le canard privé ; le bec eft
d'un brun jaunâtre , & l'iris des yeux eft d'un beau
rouge ; le cou & la tête font d'un verd iombre , & le
dos eft d'un pourpre foncé mélangé de bleu, à l'ex-
ception des bords des plumes qui lont rouges ; la poi-
trine eft d'un brun fombre , excepté les bords exté-
rieurs des plumes qui font rouges ; le bas du ventre
eft brun; les plumes des épaules lônt d'une couleur
fombre mêlée de bleu , de même que le premier rang
des petites plumes des ailes ; les grandes ont les bords
rouges ; le fécond rang des petites plumes eft verd ;
les jambes & les pies font de couleur orangée. Cet
oifeau eft très-beau ; il vient originairement de Ma-
dagafear. Derham , Hijl. nat. des oifeaux. Voye{ Oi-
seau.
CANARD d'été, anas criflatus elegans ; cet oifeau
a une double hupe qui pend en arrière, & un fort
beau plumage; il a été décrit par Catesby , Hiji. de
la Caroline , vol. I. page qj . il fe trouve en Virginie
& en Caroline : il fait fon nid dans les trous que les
piverts font fur les grands arbres qui croiffent dans
l'eau , & principalement fur les cyprès. Tant que les
petits font encore trop jeunes pour voler, les vieux
canards les portent iur leur dos jufque dans l'eau; &
lorfqu'il y a quelque choie à craindre pour eux , ils
s'attachent par le bec au dos & à la queue du gros
oifeau , qui s'envole avec fa famille. Hiji. nat. de
divers oif. par Edvards , art. xcjx. Voye^ OlSEAU.
CANARD domeflique , anas domejîica vulgaris ;il eft
plus petit que l'oie , & prefque de la groffeur d'une
poule , mais moins élevé ; le dos & le bec font lar-
ges ; les jambes courtes , greffes , & dirigées en ar-
rière , ce qui lui donne de la facilité pour nager, &
de la difficulté pour marcher; auffi marche-t-il len-
tement & avec peine. Les couleurs varient à l'infi-
ni dans ces canards , de même que dans les poules ,
& dans tous les autres oifeaux domeftiques. Le mâle
diffère de la femelle , en ce qu'il a fur le croupion
des plumes qui s'élèvent & fe recourbent en avant.
La femelle fait d'une feule ponte douze ou quatorze
ceufs , & quelquefois plus ; ils reffemblent à ceux des
poules , & font de couleur blanchâtre teinte de verd
ou de bleu; le jaune en eft gros , & d'un jaune rou-
geâtre. Willughby , Omith. foye^ Oiseau.
CANARD fauvage , ou cane au collier blanc , cane
de mer ; bofchas major , anas torquata minor , Aid. il
pefe trente-lix à quarante onces ; il a environ un pié
neuf pouces de longueur, depuis la pointe du bec juf-
qu'à l'extrémité de la queue ; l'envergure a près de
deux pies neuf pouces ; le bec eft d'un verd jaunâ-
tre ; il a deux pouces 6c demi de longueur depuis les
C A N
coins de la bouche jufqu'à fon extrémité, &£ près
d'un pouce de largeur ; il n'eft pas trop applati ; il a
à l'extrémité de la pièce fupérieure du bec une ap-
pendice ou un ongle rond, comme dans la plupart
des oifeaux de ce genre ; les paupières inférieures
font blanchâtres ; les pattes font de couleur de lafran ;
les ongles font bruns ; celui du doigt de derrière eft
prefque blanc ; celui du doigt intérieur eft le plus pe-
tit de tous ceux de devant : la membrane qui joint
les doigts enfemble eft d'une couleur plus fale; les
cuiffes font couvertes de plumes jufqu'au genou : le
mâle a la tête & le deffus du cou d'un beau verd >
au bas duquel il y a un collier blanc bien entier en-
devant, mais qui ne l'eft pas par derrière ; la gorge
eft de couleur de châtaigne , depuis le collier jufqu'à
la poitrine , qui eft mêlée de blanc & de cendré , de
même que le ventre , & parfemée d'un nombre infi-
ni de points bruns ; les plumes de deffous la queue
font noires ; la face fupérieure du cou eft parfemée
de taches rouffes , mêlée de cendré ; la partie du dos
entre les deux ailes eft rouffe ; le deffous de l'oifeau
eft noirâtre ; le croupion eft d'une couleur plus fon-
cée , & mêlée d'un pourpre luifant ; les côtés fous
les ailes , & les plus longues plumes qui vont jufque
fur les ctiiffes , font marquées de lignes tranfverlales
d'un très-beau brun , avec du blanc mêlé de bleu ;
les petites plumes des ailes font rouffâtres ; les lon-
gues plumes qui fortent des épaules font de couleur
d'argent, & élégamment panachées de petites lignes
tranlverlales brunes. Il y a vingt-quatre grandes plu-
mes à chaque aile ; les dix premières font brunes ;
les dix fuivantes ont la pointe blanchâtre , & les
barbes extérieures d'un beau pourpre bleuâtre ; en-
tre le bleu & le blanc il y a de petites bandes noi-
res ; la vingt-unième plume a la pointe blanche , &
le bord extérieur de couleur de pourpre obfcur ; la
vingt-deuxième a un peu de couleur d'argent dans
fon milieu; la vingt-troilieme eft entièrement blan-
che , à l'exception des bords qui font noirâtres ; la
vingt-quatrième eft blanche auffi en entier , excepté
le bord extérieur qui eft noirâtre : les petites plumes
font de la même couleur que les grandes ; cepen-
dant celles qui recouvrent les pourprées ont la pointe
noire , & enfuite une large ligne ou tache blanche ;
la queue eft compolée de vingt plumes , dont l'ex-
trémité eft pointue ; les quatre du milieu font con-
tournées en cercle , & ont une belle couleur luifan-
te mêlée de pourpre & de noir ; les huit fuivantes
de chaque côté font blanchâtres; les plumes du def-
fous de l'aile & de la fauffe aile font blanches.
Ces oifeaux vont par troupes pendant l'hyver ;
au printems le mâle fuit la femelle ; ils marchent par
paires , & ils font leur nid le plus fouvent près de
l'eau , dans les joncs & les bruyères , & raremeut
fur les arbres. La femelle fait d'une feule ponte dou-
ze ou quatorze ceufs, & plus, & elle les couve:
elle n'a pas la tête verte , ni de collier fur le cou ;
fa tête & fon cou ont du blanc , du brun, & du roux
noirâtre ; le milieu des plumes du dos eft d'un brun
prefque noir , & les bords font d'un blanc rouffâtre.
Villughby , Ornith. Voye{ OlSEAU. ( /)
Le canard fauvage paffe pour meilleur que le do-
meflique, étant nourri à l'air libre, & d'alimens qu'il
va chercher lui-même , & plus exercé que l'autre ;
ce qui contribue à atténuer &: à chaffer au-dehors
les humeurs groffieres qu'il peurroit contenir , 6t
enfin à exalter de plus en plus les principes de fes li-
queurs ; ainfi il abonde davantage en fel volatil :
cette chair eft cependant de difficile digeftion.
Le foie du canard fauvage paffe pour propre à ar-
rêter le flux hépatique.
La graille du canard eft adouciffante , réfolutive ,
6c émolliente. (-V)
Canard de pré de France , roy. Cane petiere,-
C A N
C A N
587
Canard de Mofcov'u , voye{ Canard de Barbarie.
Canard d'Inde , voye^ Canard de Barbarie.
Dans les lieux de grand partage on fait au milieu
des prairies & des rofeaux , loin de tous arbres &c
haies , des canardieres ou grandes marres , où l'on
met quelques canards privés qui appellent les paf-
fans , & un homme caché dans une hute les tire au
ïufil. On les prend auffi aux pièges, foit collets ou
autres : l'heure la plus favorable pour les tirer eft de
grand matin , à mefure qu'ils partent. On les prend
encore avec des nappes ou à l'appât , ou bien au
tri&rac avec des panneaux , & à la glu le long des
marres d'eau où ils fe repoient.
Pour le vol du canard il faut fe fervir des autours
qui font leur coup à la toife , c'eft-à-dire tout d'une
haleine , d'un feul trait d'aile , & font toujours plus
vîtes à partir du poing que les autres. Quand on eft
arrivé fur le lieu , & qu'on a obfervé où font les ca-
nards, on prend les devants le long du forte avec l'au-
tour fur le poing; on le préfente vis-à-vis les ca-
nards, qui prennent l'épouvante & fe lèvent : mais
l'autour part auffi-tôt du poing , vole à eux , & en
empiète toujours quelqu'un.
Dans la faiibn où les canards fouvagts font leurs
canetons, on fuit les bords des étangs 6c des rivières
avec un filet attaché à la queue d'une barque ; on bat
tous les endroits couverts & marécageux , les cane-
tons effrayés fortent & fe jettent dans les filets ; on
les prend, on leur brûle les bouts des ailes , & on les
mêle avec les canetons domejllques.
Canards, ou bois perdus ; voyei Bois.
CANARI , f. m. oifeau ainfi appelle des îles Ca-
naries d'où on nous l'a apporté. Voye-^ Serin. (/)
CANARIE (la grande) , Géog. île de l'Océan,
proche de l'Afrique , l'une des Fortunées : elle a en-
viron quarante lieues de circuit; fa capitale eft,
Canarie ou Ciutad de Palmas , ville forte.
Long. 2. l5. lat. z8. 4.
CANARIES (les îles), Géog. îles de l'Océan,
ainfi nommées de la plus grande : elles étoient con-
nues des anciens fous le nom d'îles Fortunées. On en
compte fept , qui font celle de Palme , de Fer , Go-
mero , Ténériffe , la grande Canarie , Fuerteventura ,
& Lancerote : on pourroit encore y en ajouter quel-
ques autres moins confidérables. Elles font très-fer-
tiles, & produifent des vins délicieux. Les Efpagnols
en fqnt les maîtres. L. o-â. 30. lat. xy. J 0-29. 45.
Canarie , fubft. f. efpece d'ancienne danfe , que
quelques-uns croyent venir des îles Canaries , & qui
Jelon d'autres vient d'un balet ou d'une mnfearade,
dont les danfeurs étoient habillés en Sauvages. Dans
cette danfe on s approche & on s'éloigne les uns des
autres, en faifant plufieurs partages bifarres , à la
manière des Sam
La canarie , en Mujique , eft une efpece de gigue.
Voye^ L'article Gl GUE , & le prologue de l'Europe
galante.
CANASSE , fub. f. (Commerce.} on nomme ainfi à
Amrterdam des efpcccs de grandes cairtes , qui font
quelquefois d'étain , dans lelquelles les vaiffeanx de
la compagnie apportent les différens thés de la Chine
& des Indes orientales. Dans la vente de cette mar-
1 handile , on donne ordinairement feize livres de tare
par canafft. Vbye{ Tare. (G)
* CANATHOS , (Myth.) fontaine de Nauplia , où
Junon alloit, dit-on , fe baigner une fois tous les ans,
pour recoin rer fa divinité; fable fondée fur quelque
particularité des myftcres fecrets qu'on y célébrait
en l'honneur de la dceffe.
C A N C A L E , (Géog.') ville de France , dans la
haute Bretagne , fur le bord de la mer. Long. iSA.
48'. là", lat. 48*. 40'. 40".
* CANCAMUM , (Hijl. nat. ) gomme rare, qui
paroit plutôt un artcmblagc de plufieurs gommes :
Tome II,
on y dillingue quatre fubftances différentes, qui ont
chacune leur couleur féparee. La première reflem-
ble au fuccin ; elle fe fond au feu , & a l'odeur de
la gomme laque. La féconde eft noire , fe fond au
feu comme la première , mais rend une odeur plus
douce. La troilicme eft femblable à de la corne, &
n'a point d'odeur. La quatrième eft blanche, & c'eft
la gomme animé. On dit que ces gommes découlent
d'un arbre qui croît en Afrique, au Brefil, & dans
l'île de S. Chriftophe, & qui a quelque reffemblance
avec celui qui donne la myrrhe.
CANCE, (Géog.) rivière de France, dans le Vi-
varais, qui fe jette dans le Rhône.
CANCELLAR1US, fub. m. (Hift. anc.) mot que
quelques auteurs ont rendu en François par chance-
lier. C'étoit chez les Romains un officier fubalterne,
qui fe tenoit dans un lieu fermé de grilles & de bar-
reaux , cancelll , pour copier les fentences des juges
& les autres actes judiciaires, à peu près comme nos
greffiers ou commis du greffe. Ils étoient payés par
rôles d'écritures , ainfi qu'il paroit par le fragment
d'une loi des Lombards, cité par Saumaife. Il falloit
que cet officier fût très-peu de chofe , puifque Vo-
piieus rapporte que Numerien fit une élection hon-
teufe , en confiant à un de ces greffiers le gouverne-
ment de Rome. M. du Cange prétend que ce mot
vient de la Paleftine , où les toits étoient plats &
faits en terraffe , avec des barricades ou baluftrades
grillées nommées cancelll ; que ceux qui montoient
fur ces toits pour réciter quelque harangue s'appel-
loient cancellaril ; qu'on a depuis étendu ce titre à
ceux qui plaidoient dans le barreau , nommés cancel-
larll forenfes. Ménage a tiré du même mot l'étymolo-
gie de chancelier, canccllarlus, à cancellls ; parce que,
félon lui , quand l'empereur rendoit la juftice , le
chancelier étoit à la porte de la clôture ou des grilles
qui féparoient le prince d'avec le peuple. (G)
CANCELLATION , f. f. (Commerce.) terme en
ufage à Bordeaux , dans le bureau du courtage & de
la foraine.
Il fignifie la décharge que le commis donne aux
marchands, de la foùmiliion qu'ils ont faite de payer
le quadruple des droits, faute de rapporter dans un
rems limité un certificat de l'arrivée de leurs mar-
chandifes dans les lieux de leur deftination. (G)
Sur l'étymologie du mot cancellatlon , voye^ l'ar-
ticle foirant.
CANCELLER, v. aft. en Droit, fignifie barrer on
biffer une obligation ou autre acte.
Ce mot vient du Latin cancellare , crolfer, traverfen*
fait de cancelll , qui lignine des b.irreaux ou un treillis;
parce qu'en effet en biffant un acte par des raies tirées
en différens fens , on forme une efpece de treillis. (//)
CANCELLI , lùbft. m. plur. (Hifl. anc.) petites
chapelles érigées par les anciens Gaulois aux déciles
mères , qui préfidoient à la campagne C-c aux fruits
de la terre. Ces peuples y portoient leurs offrandes
avec de petites bougies , & après avoir prononcé
quelques paroles myftérieufes fur du pain ou fur quel-
ques herbes , ils les cachoient dans un chemin creux
ou dans le tronc d'un arbre , & croyoient par-là ga-
rantir leurs troupeaux de la contagion , & de la mort
même. Cette pratique , ainfi que plufieurs fuperlti-
tions dont elle étoit accompagnée , tut défendue par
les capitulaires de nos rois ëc par les éveques. Mon.
de l'Acad. tom. ni. (G )
CANCER , f. m. terme de Chirurgie , eft une tumeur
dure , inégale , raboteuie , 6c de couleur cendrée ou
livide , environnée tout au-tour de pluheurs veines
diftendues è\: gonflées d'un fang noir & limoneux,
iituee à quelque partie glanduleufe ; ainfi appellée ,
à ce que quelques-uns prétendent , parce qu'elle eft
à peu près de la figure d'une écrevifle, ou , à ce que
difent d'autres, parce que fembluble à l'ecrcviffe elle
E E e c ij
583
C A N
ne quitte pas prife quand une fois elle s'eft jettée fur
une partie. . ,
Dans les commencemcns elle ne caule point de
douleur , & n'eft d'abord que de la groffeur d'un
pois-chiche : mais elle groffit en peu de tems &C de-
vient très-douloureuie.
Le cancer vient principalement à des parties glan-
duleufes & lâches, comme les mamelles &les émonc-
toires. Il eft plus ordinaire aux femmes qu'aux hom-
mes , & fingulierement à celles qui l'ont ftériles , ou
qui vivent dans le célibat. La raifbn pourquoi U vient
plutôt aux mamelles qu'à d'autres parties , c'eft que
comme elles font pleines de glandes & de vaiffeaux
lymphatiques & languins , la moindre contufion ,
compreflîon ou piquùre peut faire extravaler ces li-
queurs, qui, par degrés contractant de l'acrimonie ,
forment un cancer. C'eft pourquoi les maîtres de l'art
difent que le cancer eft aux glandes, ce qu'eft la cane
aux os , & la gangrené aux parties charnues.
Le cancer cependant vient quelquefois à d'autres
parties molles & fpongieufes du corps , & on en a
quelquefois vu aux gencives , au ventre , au cou de la
matrice , à Furethre-, aux lèvres , au nez , aux joues ,
à l'abdomen , aux cuilTes , & même aux épaules.
On appelle loup, un cancer aux jambes; 6t celui
qui vient au vilage ou au nez , noli me tangere. Voye^
NOLI ME TAN G ERE.
On divile les cancers, félon qu'ils font plus ou moins
invétérés, en cancer occulte , & cancer ouvert ou ulcère.
■ Le cancer occulte eft celui qui n'a point encore tait
tout le progrès qu'il eit capable de faire , & qui ne
s'eft point encore fait jour.
• Le cancer ulcéré fe reconnoît par les inégalités &
par quantité de petits trous , defquels fort une ma-
tière iordide , puante , & glutineule , pour l'ordinaire
jaunâtre ; par des douleurs poignantes , qui reffem-
blent aux piquCires que feroient des milliers d'épin-
gles ; par fa noirceur ; par l'enflure des veines de l'ul-
cère ; par la couleur noirâtre , le gonflement , ôt les
varices.
Quelquefois les extrémités des vaiffeaux fanguins
font rongées, & le fang en fort. Dans un cancer au
fein , la chair eft quelquefois confuméc au point qu'on
peut voir dans la cavité du thorax. Il occafionne une
fièvre lente , un fentiment de pefanteur , fort fouvent
des défaillances , auelquefois l'hydropiiic , & la mort
à la fin.
- La caufe immédiate du cancer paroît être un fel
volatil exceflivement corrofif , qui approche de la
nature de l'arfenic , formé par la ftagnation des hu-
meurs , &c On eft quelquefois venu à bout de le
guénr par le moyen du mercure & de la falivation.
Quelques-uns croyent que le cancer ulcéré n'eft autre
chofe qu'une infinité de petits vers qui dévorent la
chair petit-à-petit. Le cancer paffe avec raifon, pour
une des plus terribles maladies qui puiffe arriver.
Ordinairement on le guérit par l'extirpation , quand
la tumeur eft encore petite , qu'elle n'eft, par exem-
ple, que de la groffeur d'une noix, ou tout au plus
d'un petit œuf : mais quand il a gagné toute la ma-
melle , qu'il crevé & devient ulcéré , on n'y peut re-
médier que par l'amputation de la partie.
Le cancer ulcéré eft une maladie qui n'eft pas mé-
connoiffable : fes bords tuméfiés & «enverfés ; la fa-
nie , femblable à celle d'une partie gangrenée , qui
découle de fes chairs baveufes ; fa puanteur , &
l'horreur qu'il fait au premier alpcft , en annoncent
le mauvais cara&ere. Mais il eft important pour la
pratique , qu'on établiffe le diagnoftic du cancer oc-
culte commençant. Il y a une infinité de gens qui van-
tent des fecrets pour la guérifon des cancers naiffans ,
& qui font munis de témoignages & d'atteftations
des cures qu'ils ont faites , parce qu'ils donnent le
nom de cancer à une glande tuméfiée qu'un emplâtre
C A N
réfolutif auroit fait difparoître en peu de tems. Les
nourrices & les femmes grofîes font fujettes à des
tumeurs dures & douleureules aux mamelles , qui fe
terminent ordinairement Se fort heureufement par
fuppuration. Il furvient fouvent preique towt-à-coup
des tumeurs dures aux mamelles des filles qui en-
trent dans l'âge de puberté , & elles fe diffipent pour
la plupart fans aucun remède. Le cancer naiflant au
contraire fait toujours des progrès , qui font d'autant
plus rapides , qu'on y applique des médicamens ca-
pables de délayer & de réloudre la congeftion des
humeurs qui le forment. On n'en peut taire trop tôt
l'extirpation , par les raifbns que nous expoferons ci-
après. Il faut donc le connoître par des fignes carac-
tériftiques , afin de ne le pas confondre avec d'autres
tumeurs qui demandent un traitement moins doulou-
reux, & afin de ne pas jetter mal-à-propos les mala-
des dans de fauffes allarmes.
Le cancer des mamelles & de toute autre partie ,'
eft toujours la fuite d'un skirrhe : ainfi toute tumeur
cancéreujé doit avoir été précédée d'une petite tumeur
qui ne change pas la couleur de la peau , & qui refte
indolente , fouvent plufieursmois, & même plufieurs
années fans faire de grands progrès. Lorfque le skir-
rhe dégénère en cancer , la douleur commence à fe
faire ientir , principalement lorsqu'on comprime la
tumeur. On s'apperçoit enfuite qu'elle groffit , & peu
de tems après elle excite des élancemens doulou-
reux , qui fe font reflentir fur-tout dans les change-
mens de tems , après les exercices violens , & lorf-
qu'on a été agité trop vivement par les paffions de
Pâme. La tumeur croit , & fait enfuite des progrès
qui empêchent qu'on ne fe trompe fur fa nature. Les
élancemens douloureux qui furviennent à une tu-
meur skirrheufe , font les fignes qui caraclérifent le
cancer. Ces douleurs ne font point continues ; elles
font lancinantes ou pungitives ; elles ne répondent
point au battement des artères comme les douleurs
pulfatives , qui font le figne d'une inflammation fan-
guine : il femble que la tumeur foit de tems à autre
piquée & traverfée , comme fi on y enfonçoit des
épingles ou des aiguilles. Ces douleurs font fort cruel-
les, & ne laiffent fouvent aucun repos, ce qui réduit
les malades dans un état vraiment digne de pitié :
elles font l'effet de la préfence d'une matière corro-
five, qui ronge le tiffu des parties folides. Les remè-
des fondans & émolliens ne conviennent point à ces
maladies , parce qu'en procurant la diffolution des
humeurs qui forment le cancer, ils en accélèrent la
fonte putride , & augmentent par-là conlidérable-
ment les accidens.
On voit par ces raifons , qu'on ne peut pas trop
promptement extirper une tumeur cancéreujé, même
occulte. Après avoir préparé la malade par des re-
mèdes généraux, (je fuppofe cette maladie à la ma-
melle), on la fait mettre en fituation convenable;
elle doit être affiffe fur un fauteuil , dont le doflier
foit fort panché. Je fais fort volontiers cette opéra-
tion , en laiffant les malades dans leurs lits. On fait
tenir & écarter le bras du côté malade, afin d'éten-
dre le mufcle grand pe£foral. Si la tumeur eft petite ,
on fait une incilion longitudinale à la peau & à la
graiffe qui recouvre la tumeur ; on la faifit enfuite
avec une errine , voyei Errine , & en la difféquant
avec la pointe du biftouri droit qui a fervi à taire
l'incifion de la peau , on la détache des parties qui
l'environnent, éc on l'emporte. J'ai fait plufieurs fois
cette opération , j'ai réuni la plaie avec une future
lèche , &c cela m'a réuffi parfaitement.
Si la tumeur eft un peu confid-érable , qu'elle foit
mobile fous la peau , & que le tiffu graiffeux ne foit
point embarraffé par des congeftions lymphatiques ,
on peut conferver les tégumens : mais une incilion
longitudinale ne fuffiroit point ; il faut les incifer
C A N
crucialement ou en T, félon qu'on le juge le plus
convenable. On difleque les angles , & on emporte
la tumeur ; on réunit enfuite les lambeaux des tégu-
inens ; ils le recollent , &C on guérit les malades en
très-peu de tems.
Lorfque la peau eft adhérente à la tumeur , ou que
les grailles font engorgées , fi l'on n'emporte tout ce
qui n'eft pas dans l'état naturel, on nique de voir
revenir un cancer avant la guérifon parfaite de la
plaie , ou peu de tems après l'avoir obtenue : on
l'impute alors à la malle du fang , que l'on dit être
infectée du virus cancéreux; virus, de l'exiftence du-
quel tout le monde n'eft point perfuadé. Le préjugé
que l'on auroit fur ce point, pourroit devenir préju-
diciable aux malades qui neledétermineroientpas à
fe faire faire une féconde opération, de crainte qu'il
ne vînt encore un nouveau cancer. On a vu des per-
sonnes qu'on a guéries parfaitement après s'être fou-
rnîtes à deux ou trois opérations confécutives. Le
cancer eft un vice local qui a commencé par un
skirrhe, effet de Pextravafation & de l'épaifliflement
de la lymphe : le skirrhe devient carcinomateux
par la diiîblution putride des fucs épanchés ; dès que
les fignes qui cara&érifcnt cette dépravation fe (ont
manifeftés , on ne peut faire trop tôt l'extirpation de
la tumeur, pour empocher qu'il ne parle de cette ma-
tière putride dans le fang , où elle cauferoit une col-
liquation qu'aucun remède ne pourroit empêcher.
Le docteur Turner afîûre*que deux perfonnes de fa
connoiffance perdirent la vie pour avoir goûté de la
liqueur qui couloit d'un cancer à la mamelle. Mal-
gré toutes les précautions que puiffe prendre un ha-
bile Chirurgien , il peut y avoir encore quelques
points skirrheux , qui échappant à les recherches
dans le tems de l'extirpation d'un cancer, feront le
germe d'un nouveau , qu'il faudra enfuite extirper :
alors ce n'eft point une régénération du cancer ; c'eft
une maladie nouvelle , de même nature que la pre-
mière, produite par un germe local qui ne fuccede
point à celui du cancer précédent. On peut en faire
l'extirpation avec fuccès; #es cas exigent des atten-
tions, & doivent déterminer à faire faire ufage des
délayans , des fondans , &C des apéritifs tant internes
qu'externes. J'ai vu faire deux. & même trois fois
l'opération avec fuccès : fi la mafle du fang eft at-
teinte de colliquation , on ne doit pas craindre la
production d'un nouveau cancer ; on fe difpen-
fe abfolument de taire une opération , qui en ôtant
la maladie, n'affranchiroit pas la malade d'une mort
certaine ; on fe contente alors d'une cure palliati-
ve. L'expérience a prouvé l'utilité des préparations
de plomb dans ces cas : on peut appliquer fur le
cancer ulcéré des remèdes capables d'agir par invif-
cation fur les fucs dépravés ; les remèdes coagulans
qui donneraient de la conliftance aux fucs expofés
à l'action de l'humeur putride, pourraient les mettre,
du moins quelque tems, à l'abri de la difi'olution.
M. Quefnay perfuadé que la malignité de l'humeur
cancércufc dependoit d'une dépravation alkaline , a
penfé que les plantes qui font remplies d'un fuc acer-
be , dévoient modérer la férocité de cette humeur ;
il a fait l'eflai àufedum vcrmiculare dans quelques cas
avec beaucoup de fuccès.
Lorfque le cancer occupe toute la mamelle , &
que la matle du fang n'eft point en colliquation , on
peut amputer cette partie : pour taire cette opéra-
tion, après les préparations générales, on met la ma-
lade en fituation. Le Chirurgien placé à droite, (où-
leve la mamelle avec là main gauche , & la tire
un peu à lui , il tient de l'autre main un biftouri avec
lequel il incite la peau à ia partie inférieure de la
circonférence de la tumeur. Il introduit tes doigts
dans cette incifion pour lbulcver la tumeur èv la dé-
coller de deffus le mufcl* pectoral ; cv avec ton bit-
C A N
589
touri il coupe la peau à mefure qu'il difleque la tu-
meur. Il doit prendre garde de couper la peau en
talud pour ne pas découvrir les houpes nerveufes ,
ce qui rendroit les panfemens très-douloureux ; s'il
reftoit quelques pelotons graiffeux affeftés à la cir-
conférence de la plaie ou \ ers l'aiffelle, il faudrait
les extirper. On parue la plaie avec de la charpie
brute ; je fuis dans l'ufage de faire une embroca-
tion tout autour de la plaie avec l'huile d'hypericum ;
je pofe des comprennes allez, épaiiies fur la charpie ,
& je contiens le tout avec le bandage de corps , que
j'ai foin de fendre par une de les extrémités pour en
former deux chefs, dont l'un paffe au-deflus , Se l'au-
tre au-deflous de la mamelle laine , afin qu'elle ne
foit point comprimée. Voye^ Bandage de corps.
Je ne levé l'appareil que le troilïeme ou quatrième
jour , lorfque la fuppuration le détache , & je termi-
ne la cure comme celle des ulcères. Foye^ Ulcère.
L'on a fait graver quelques figures pour l'intelli-
gence des choies qui viennent d'être dites , & pour
qu'on puifle juger des anciennes méthodes de prati-
quer l'opération du cancer.
Planche XXVIII. fig. J. cancer occulte à la ma-
melle droite, & qui n'en occupoit qu'une partie.
Fig. 4. La cicatrice qui relie après l'extirpation
méthodique d'une pareille tumeur.
Fig. 5. Autre cancer qui occupe toute la ma-
melle , 6c dont on a fait l'extirpation avec fuccès.
Fig. 6. Méthode que les anciens preferivoient
pour l'opération du cancer. Lorfqu'ils avoient pane
deux fils en croix fous la tumeur, ils foûlevoient la
mamelle , & l'amputoient comme on voit Planche
XX. fig. 1 . cette méthode eft abfolument proferite
pour fa cruauté &c les imperleftions.
Planche XX. fig. 2- Fourchette que l'on a crû pou-
voir lûbftituer aux points d'aiguille , pour foulever
les tumeurs dont le volume eft conlidérable.
Fig. 4. Autre inftrument pour les petites tu-
meurs.
Fig. J. Inftrument tranchant comme un rafoir
pour l'amputation de la mamelle.
Fig. 3. Nouvel inftrument avec lequel on em-
brafle la mamelle , comme on voit fig. o. la bran-
che moyenne eft d'acier & tranchante fur fa con-
vexité.
Ces inftrumens ne peuvent fervir qu'à une opé-
ration ciéfectucufc. Les figures font d'après M. Heif-
ter, dans fes lnfiltuts de Chirurgie. ( J )
Cancer, (en Aflronomie. ) eft un des douze fi-
gnes du zodiaque : on le reprefente fur le globe fous
la forme d'une écrevifle , &c dans les ouvrages d' As-
tronomie, par deux figures-placées l'une auprès de
l'autre , tk. allez femblables à celles dont on fe fert
pour exprimer foixante-neuf en Arithmétique, ?5.
Vcrye^ Signe , Constellation.
Ptolomée compte 1 3 étoiles dans le figne du can-
cer ; Ticho ,15; Bayer oc Hevelius , 29 ; Flamfteed ,
71 au moins.
Tropique du CANCER , ( en terme (T Aflronomie. ) eft
un des petits cercles de la fphere , parallèle à l'équa-
tcur , & qui patTe par le commencement du ligne du
tr. Ce tropique eft dans l'hémifphere feptentrio-
nal, &c eft éloigne de lequateur de 23"- {. Voyt^
Tropique. Voyc^ aulîi Sphère. (0)
C ANCHE , ( Géog. ) rivière de France, en Picar-
die , qui prend la fource en Artois.
C ANCHES , (Géog.) Sauvages de l'Amérique mé-
ridionale , au Pérou.
CANCHEUoaCANTCHEOU , ( Géog. ) grande
ville de la Chine, dans la province de KiangS , ca-
pitale d'un pays qui porte le même nom. Long. iJJ.
32. lut. 2.5. J>3-
CANCRE, v<y^ Crabe.
590
C A N
CAND ADÏ , ( Gèog. ) petit pays d'Efpagne , clans
fEftramadoure.
CANDAHAR , ( Géog. ) grande & forte ville d'A-
sie , capitale de la province de même nom , fous la
domination du roi de Perfe , aux frontières des états
du Mogol. Long. 8â. lat. 33.
* C AND ARE N A , ou CANDRENA , { Myth. )
Junon fut ainfi furnommée de Candara , ville de Pa-
phlagonie , oii elle étoit particulièrement honorée.
CANDAU , ( Géog. ) petite ville d'Allemagne ,
dans le duché de Courlande à 9 milles de Mittau.
CANDÉ , ( Géog. ) petite ville de France enTou-
raine , au continent de la Loire & de la Vienne.
CANDELABRE, 1". m. {Architecture.) du Latin
canddabrum , chandelier : c'eft une efpece de vafe
fort élevé en manière de baluftre , que l'on place or-
dinairement pour fervir d'amortiffement à Fentour
extérieur d'un dôme , ou pour couronner un portail
d'églife ; tels qu'il s'en voit à la Sorbone, au Val-de-
Grace , aux Invalides , &c {P)
CANDELARO, ( Géog. ) rivière d'Italie au
royaume de Naples dans la Capitanate , qui fe jette
dans le golfe de Manfredonia.
CANDELETTE , f. f. < Marine. ) bofe de bofoir ,
jarre-bojfe ; c'eft une corde garnie d'un crampon de
fer , dont on fe fert pour accrocher l'anneau de l'an-
cre lorfqu'ellc fort de l'eau , & qu'on veut la baiffer
ou remettre en place. Chaque candelette a de fon côté
fon pendour ck fon étrope. ( Z )
CANDELOR , ( Géog. ) ville de la Turquie en
Afie , près de la côte de Natolie.
CANDIDAT , f. m. ( Hift. anc. & mod. )■ fe dit
en général de toute perfonne qui afpire à un emploi
honorable ou lucratif. Les Romains nommoient ainfi
particulièrement les prétendans aux charges publi-
ques , qui fe mettaient fur les rangs au tems de l'é-
lection des magiftrats. Le mot elt Latin, candidatus,
formé de candidus, blanc , à caufe de la robe blan-
che que ces afpirans portoient. Vêtus de la forte ,
ils alloient folliciter les fumages , accompagnés de
leurs proches , de leurs amis , & de leurs cliens. Les
plus illuftres magiftrats qui prenoient intérêt à un can-
didat, le recommandoient au peuple. De fon côté ,
le candidat averti p^r l'es nomenclateurs , gens char-
gés de lui faire connoître par noms & furnoms ceux
dont il briguoit les fuffrages, faluoit tous ceux-ci,
embrafToit'tous ceux qu'il rencontroit en chemin ou
dans la place publique. La loi Tullienne défendoit
aux candidats de donner des jeux ou des têtes au pu-
blic , de peur que par ce moyen on ne gagnât les liif-
frages du peuple : mais du relie on n'oublioit rien
pour y parvenir ; careffes , intrigues , libéralités ,
baffelles même , tout étoit prodigué. Dans les der-
niers tems de la république , on en vint jufqu'à cor-
rompre les diftributeurs des bulletins , qui en les don-
nant au peuple pour le fcrutin , gliffoient adroitement
par-delîous une pièce d'or à chacun de ceux dont on
vouloit déterminer le fufFrage en faveur du candidat,
dont le nom étoit inicrit fur ce bulletin. C'étoit pour
prévenir cet inconvénient , dilent quelques auteurs ,
qu'on avoit impofé aux candidats la néceffité de ne
paraître dans les aiïemblées qu'avec la robe blanche
fans tunique , afin d otcr tout loupçon qu'ils portai-
fent de l'argent pour corrompre les fuffrages : d'au-
tres difent que cet habillement iervoit limplement à
les faire mieux remarquer dans la foule par leurs
cliens & leurs amis. (G)
CAND1DI CERVl ARGENTUM, {Hift. mod?)
tribut ou amende payée à l'échiquier par certains
cantons du dedans ou des environs de la forêt de
Whitehart dans leDorfetslnre. Cette amende elt la
continuation de celle que Henri III. avoit impolée
à Thomas de la Lende &. à d'autres , pour avoir tué
C A N
un cerf blanc d'une beauté finguliere que ce roi avoit
excepté de la chafTe. ( G)
CANDIDIANO, {Géog.) petite rivière d'Italie
dans la Romagne , dépendante de l'état de l'Eglife.
CANDIE ou CRETE , ( Géog.) île confidérable
d'Europe dans la mer Méditerranée , dont la capitale
perte le même nom. L'île a environ 200 lieues de
circonférence : elle eft aux Turcs. Long. 42- 58. lat.
35. zo.
C A N D 1 1 L , f. m. ( Commerce. ) eft un poids
dont on fe fert à la Chine & à Galanga. Il eft de deux
fortes : l'un qu'on nomme le petit , qui eft de feize
mans, èc l'autre qui eft plus fort, eft de vingt mans.
Le candiil de feize mans, fait trois chintals bien forts ,
& celui de vingt mans trois chintals & trois rubis.
Le rubis fait trente-deux rotolis. rqy<{ Chintal ,
R.OTOLI , & Rubis. {G)
CANDIL ou CANDILE, f. m. ( Commerce. ) me-
fure dont on fe fert aux Indes , à Cambaye , & à Ben-
gale , pour vendre le riz &. les autres grains : elle
contient quatorze boifleaux, & pefe environ cinq
cents livres. Voyt^ Boisseau.
C'eft fur le pié du candil qu'on eftime & qu'on jau-
ge dans ce pays -là les navires , comme nous faiiôns
en Europe au tonneau. Ainfi , lorfqu'on dit qu'un
bâtiment eft du port de 400 candils , c'eft-à-dire qu'il
peut porter deux cents milliers pefant , qui font cent
tonneaux ,1e tonneau pris fur le pié de deux milliers.
Voyei Jauger & Tonneau. {G )
CANDIR , v. au. en parlant de fucre , préparation
de cette fubftance faite en la fondant , la claréfîant ,
& la cryftallifant fix ou fept fois différentes , pour la
rendre dure ÔC tranfparente. Voye^ Sucre.
Les Apothicaires font auffi candir certains médica-
mens en les faifant bouillir dans le lucre , & les con-
fervent par ce moyen en nature : c'eft à proprement
parler ce qu'on appelle confire ; car ces deux opéra-
tions ne différent entr'elles que du plus au moins de
cuiffon de lucre. {N)
CANDIS, en termes de Confifeur , fe dit des confi-
tures de fruits ordinairement tout entiers ,fur lefquels
l'on a fait candir du fucre , après qu'ils ont été cuits
dans le firop , ce qui les rend comme de petits rochers
cryftallifés de diverlès formes & figures , dont les
couleurs variées approchent de celle des fruits qui y
entrent.
Une pyramide de candis fur une table , fait un coup
d'ceil agréable.
Candis , fe dit encore , che{ les mimes ouvriers, des
confitures liquides , lorlqu'à force d'avoir été gardées
le fucre vient à s'en féparer & à s'élever au-deffus du
fruit , où il forme une efpece de croûte dure.
CANDISH , ( Géog. ) province d'Alie dans les
états du grand Mogol , dont la capitale eft Brampour.
CANDO , CANDI , ou CONDI , ( Commerce. )
mefure ou aune dont on fe fert en plulîeurs endroits
des Indes , & fur-tout à Goa.
Lé cando de Goa eft de dix-fept aunes de Hollande ,
& de \ par cent plus grand que les aunes de Babel
& de Balfora , & de 6 & \ plus que le varre ou aune
d'Ormus.
Les étoffes de foie & celles de laine fe mefurent
au varre , & les toiles au cando. Le cando ou condi
dont on le fert dans le royaume de Pegu , eft pareil
à Faune de Venife. Voye^ Aune & Varre. Diclionn.
du Commerce, tom. JJ.pag. 69. {G)
* CANDOU , {Hift. nat. bot.) arbre des Indes
orientales , qui croît fur-tout dans les îles Maldives :
il reffemble par l'es feuilles & par fa grandeur à notre
peuplier ; il ne porte point de fruit. Son bois eft mou
& fpongieux : on dit qu'il a la propriété de faire feu ,
lorfqu'on en prend deux morceaux , & qu'on frap-
pe l'un avec l'autre.
CANDY , ( Géog. ) royaume d'Afie dans l'île de
C A N
Ceylan , habité par des idolâtres. La capitale de ce
royaume s'appelle aufii Candy. Long. g8. 30. bat.
CANE a tête rouffe , anas fera fufca : cet oifeau pefe
deux livres ; il a un pié fept ou huit pouces de lon-
gueur depuis la pointe du bec jufqu'à l'extrémité des
doigts , & environ un pié & demi , fi on n'étend la
melure que jufqu'au bout de la queue. Cet oiieau
eit pins gros, plus court, & plus épais que la cane
rouge. Les petites plumes qui recouvrent les grandes
plumes des ailes &c celles du milieu du dos , iont de
couleur cendrée & parfemée de petites lignes on-
doyantes , dont les unes font de couleur cendrée , &
les autres de couleur roufie : elles font placées alter-
nativement. Les'plumes du defious du cou , du crou-
pion , & celles qui le trouvent autour de l'anus iont
noires; les petites plumes qui recouvrent l'aile en-
dettons font blanches ; la tête & le cou prelque en
entier, font de couleur jaune foncée ou ronfle ; les
plumes du milieu de la poitrine font blanches , à l'ex-
ception des bords qui iont jaunâtres : il y a lur le bas
de la poitrine des lignes brunes , <k la couleur du ven-
tre devient peu-à-peu de plus en plus brune & oblcu-
re à mefure qu'on approche de l'anus. La. queue eii
compofée de quatorze plumes, qui ont deux pouces
de longueur, & qui font de couleur cendrée noirâ-
tre. Il y a environ vingt -cinq grandes plumes à
chaque aile ; elles font toutes d'une môme couleur
cendrée & mêlée de brun : cependant fi on y regarde
de près, on trouvera que queiques-uncs aes plumes
qui iont au-delà de la dixième o.u la pointe blanchâ-
tre. Le bec eit plus grand & plus large que celui de
la cane mouche ; la pièce fupérieure du bec eii de cou-
leur plombée , à l'exception de l'extrémité qui eit
noirâire ; la pièce intérieure eit preique entièrement
noire. L'iris des yeux eft d'une belle couleur jaune
éclatante ; les pattes font de couleur plombée , & la
membrane qui tient les doigts unis enfemble eit noi-
re ; le doigt intérieur eit le plus petit, é: 1 extérieur
eii prelque égal au doigt du milieu , dont l'ongle eii
tranchant. Ce qu'il y a de particulier dans cet oiieau ,
c'eil que les plumes des ailes font toutes prefque d'u-
ne même couleur , qui eit le cendré. \Villughby ,
Omit h. foy^ Oiseau.
Cane du Levant , anas circia Gefn. Cet oifeau eft le
plus petit de ion genre. Le bec eit noirâtre ; toute la
face fupérieure de l'oileau eit de couleur brune cen-
drée. L'extrémité des plumes du dos eit blanchâtre ;
il y a fur les ailes une bande large d'un pouce, en partie
noire & en partie de couleur d'émeraude , èv blanche
de chaque côté ;les plumes delà queue font pointues.
Toute la face inférieure de l'oiieau eit de couleur
jaune pâle mêlée de blanc : il y a cependant iur la
poitrine & fur le bas- ventre , grand nombre de taches
noirâtres afiez larges. Les jambes font d'un bleu pâle ;
la membrane qui eit entre les doigts eit noire. On
trouve dans Peitomac des femences & des petites
pierres. D. Johnfon. Willughby , Ornith. Voye^ OI-
SEAU.
CANE haute furfes jambes, anas alticrura ; oiieau
qu'Aldrovande rapporte au genre des plongeons. Il
a le bec pointu , en partie noire & en partie rouge ;
le cou eit entouré d'un collier blanc ; le dos eit de cou-
leur cendrée pâle; le ventre eit blanc ; les ailes font
très-larges ; les quatre premières grandes plumes font
noires, celles du milieu font blanches, & les autres
noires , à l'exception de la pointe qui eit blanche ; la
oiieue eit en entier de la même couleur , excepté
l'extrémité fupérieure qui eit légèrement teinte de
noir ; les jambes font plus minces & plus longues que
dans les autres oifeaux de ce genre ; le pié & la mem-
brane qui joint les doigts les uns aux autres , font
blancs. Aldrovande, Ornith. Ub, XIX. cap, Lx, Voy,
Oiseau.
C A N
591
Cane MOUCHE, anas mu/caria ; cet oifeau a été
ainli nommé , parce qu'il prend les mouches qui vo-
lent fur l'eau. Il eft prefque de la grofleur du canard
domeihque , & il lui reilemble beaucoup. Le bec eit
large & court , il n'a pas plus de deux pouces de lon-
gueur ; la pièce de deil'us eit de couleur de fafran ; les
dents iont difpoiées de chaque coté comme celles d'u-
ne icie ; elles iont un peu larges , prefque membra-
neuies, flexibles & iaillantes , fur-tout dans la pièce
du defïïis , car celles du delîbus iont moins élevées ,
& forment des lortes de cannelures fur le bec. Tout
le corps de cet oifeau eit de plufieurs couleurs mêlées
eniemble , telles que le noirâtre , le blanc & le vert-
clair, avec une couleur de feu brillant, ou pour mieux
dire , approchantes de celles de la perdrix. Les pattes
font jaunes , odes doigts font noirâtres , & fe tiennent
par une membrane. Le cou a en-deflus & en-defibus
des couleurs iemblables à celles dont il a déjà été
fait mention. Le i'ommet de la tête eit plus noir que
toute autre partie de l'oifeau, à l'exception des ailes
où cette même couleur domine auffi : elles ne s'éten-
dent pas jufqu'au bout de la queue. Gefn. Willugh-
by , Ornith. Voye{ OlSEAU.
Cane petiere, anas campeflris , tetrax , oifeau
qui paroît être particulier à la France ; de forte qu'il
n'y a point de payfan qui ne le connoitït fous ce nom,
qui ne doit pas déiigner ici que cet oifeau foit aqua-
tique , ni im vrai canard , mais feulement qu'il s'ac-
croupit fur la terre comme les canards , car il n'a
d'ailleurs aucune refiémblance avec les oifeaux de
ce genre : c'eit un oifeau de campagne ; il eit de la
grofleur du phaifan ; il a la tête lemblable à celle de
la caille , quoique plus grofle , & le bec comme le
coq ; il a trois doigts à chaque patte , comme dans le
pluvier & l'outarde ; les racines des plumes font rou-
ges &c preique de couleur de fang , & elles tiennent
à la peau comme celles des plumes de l'outarde , ce
qui fait croire que cet oifeau eit une cfpece d'outar-
de. Il eit blanc ious le ventre comme un evgne; le
dos eit de trois ou quatre couleurs , le fauve, le cen-
dré &£ le roux mêlé de noir ; les quatre premières
plumes des ailes l'ont noires à l'extrémité , celles qui
ie trouvent au-deflbus du bec font blanches. Il y a
des canes petiens qui ont comme les merles de Savoie
à l'endroit du jabot , un collier blanc qui entoure la
poitrine : cette couleur s'étend jufqu'à la poitrine. La
tête £c le deffus du cou font de même couleur que les
ailes & le dos ; le bec eit moins noir que celui du fran-
colin ; la couleur des pattes tire fur le cendré ; celle
de la tête & du cou n'elt pas confiante , c'eit ce qui
fait une différence entre le mâle & la femelle: mais
la couleur du dos &c des ailes eit toujours la même.
On met la cane petiere au nombre des oifeaux les plus
excellens à manger , & on la croit auffi bonne que
le phaifan : elle ie nourrit indifféremment de toutes
fortes de graines ; elle mange aufii des fourmis, des
fearabés , des mouches , &i du blé lorfqu'il eit en
herbe. On prend les canes potières comme les perdrix
au lacet, au filet, à la forme, & avec l'oileau de
proie : mais cette chaflé n'elt pas ailée , parce qu'el-
les font un vol de deux ou trois cents pas tort prompt
& peu élevé; & lorfqu'elles font tombées à terre ,
elles courent fi vite qu'un homme pourroit à peine
les liiivre. Belon , Hijl. de la nature des oifeaux. ) oy.
Oiseau.
Cane , ou Canard femelle , voyer Canard.
Cane de mer , voye^ Canard sauvage.
Cane^' Guinée , voy ci Canakd de Barbarie.
CANE</« Caire , voye^ Canard de Barbarie. ( / )
* CANES, ((Economie ru/Uaue.) il faut drellér à cette
volaille un petit toit qui les mette à couvert des ani-
maux qui les mangent; ce toit leur fuffit.
Les canes aiment l'eau: il n'en faut pas cleveroù
elles n'ont pas dequoi barboter ; on le lert de leur plu-
59i
CAÎ
me en oreillers, traverfin, matelats, &c. les œufs &
la chair en font bons. Il faut choifir les plus grottes ,
& donner huit ou dix femelles à chaque mâle : on leur
jette à mander le foir & le matin avec le relie de la
volaille , &la même nourriture. Elles font carnacie-
res , cependant elles ne font point de dégât : elles
commencent ordinairement leur ponte en Mars , &
la continuent jufqu'à la fin de Mai ; il faut alors les
retenir fous le toit jufqu'à ce qu'elles ayent pondu : on
employé ibuvent les poules à couver les œufs'd'oie
& de cane, parce qu'elles font plus affidues; qu'une
poule peut couver une douzaine d'oeufs, & que la
cane n'en fauroit guère couver que iix : il faut trente-
un jour de couvée pour faire éclorre les canetons ; on
les élevé comme les pouffins ; on ne les laine fortir
qu'au bout de huit à dix jours.
On ne donne que lix femelles à chaque mâle de
canes d'Inde : leurs canetons s'élèvent plus difficile-
ment que les autres ; on ne leur donne dans le com-
mencement que des miettes de pain blanc détrempées
dans le lait caillé.
Les mâles d'entre les canes d'Inde fe mêlent fou-
vent avec les canes communes , &il en vient des canes
bâtardes qui font allez greffes, & qui s'elevent bien.
Canee, (la) Gêog. ville forte de l'île de Can-
die, avec un port. Long. 41. 43. Lat. ji. 28.
CANELLE, f. f. (Botanique exotique.) c'eft la fé-
conde écorce & l'intérieure d'un arbre qui ne croît
plus que dans l'île de Ceylan.
Les Hollandois font parvenus à faire feuls le com-
merce de la canelle. Les hiitoires anciennes ne nous
fourniffent pas d'exemples de nation , qui ait fait dans
le commerce en auffi peu de tems un progrès pareil à
celui des Hollandois , furtout au milieu des guerres
étrangères &C des divifions domeliiques. Piufieurs
cauies ont concouru à procurer aux Hollandois ce
grand avantage ; la néceffité de fe domicilier dans un
terroir ingrat, d'y fubliiter par artifice, de défendre
des prifes fur mer , les formèrent d'abord à de petites
courfes , enfuite à des armemens , enfin à la naviga-
tion, à la création de puiffantes compagnies, & au
commerce le plus étendu dans les quatre parties du
monde. Auffi cette nation poffede en ce genre des
qualités très-eflentielles : de ce nombre font un génie
né pour la pêche , une frugalité naturelle, un goût do-
minant pour l'épargne, pour le travail, & pour la
propreté , qui fort à conferver leurs vaifieaux & leurs
équipages. Ajoùtez-y leur induitrie ôt leur perféve-
rance à fupporter les plus grandes pertes fans fe
rebuter.
Par tous ces moyens ils établirent dans l'île de Ja-
va un fécond fiége de leur empire , conquirent fur
les Portugais d'un côté les îles Molucques, produifant
feules le girofle , voye{ Girofle ; &c de l'autre file
de Ceylan, autrefois Taprobane , feule féconde en
canelle, écorce précieufe , d'un goût admirable , thré-
for de luxe & de commerce , qui de fupeiflu elt de-
venu néceflaire.
Entrons dans les détails; M. Geoffroi me fournira
ceux de Botanique ; les Hollandois , éclairés iur
cette matière , m'en ont confirmé l'exactitude.
Defcription de la canelle. La canelle commune , cinna-
momum des boutiques , elt une écorce mince , tan-
tôt de l'épaillèur d'une carte à joiier , tantôt de la grof-
feur de deux lignes: elle elt roulée en petits tuyaux
ou cannules, de la longueur d'une coudée , d'une de-
mi-coudée , plus ou moins , d'un pouce de large le
plus fouvent; d'une lubltance ligneufe & fibreufe,
caftante cependant , dont la fuperficie elt quelque-
fois ridée, quelquefois unie, de couleur d'un jaune
rougeâtre, ou tirant furie fer; d'un goût acre, pi-
quant, mais agréable, douceâtre, aromatique, un
peu aftringent , d'une odeur douce 6c très-pénétrante.
L'arbre qui la produit eit le cinnamomum , foliis lu-
C A N
tis , ovatis ,frugiferum , Burm. Ther. Zeyl. pag. Gz. tab.
2J7. laurus fol us oblongo-ovatis , trinerviis ,niiidis , pla-
nts , Linn. Hort. Cliffort , 154.
Defcription du canellier. La racine de cet arbre elt
gn n,., partagée en piufieurs branches, fibreufe,
dure, couverte d'une écorce d'un roux grifâtre en
dehors, rougeâtre en-dedans, qui approche de l'o-
deur du camphre ; le bois de cette racine elt lolide ,
dur, blanchâtre, & fans odeur.
Le tronc s'élève à trois ou quatre toiles , & il elt
couvert auffi bien que les branches qui font en grand
nombre , d'une écorce qui elt verte d'abord , & qui
rougit enfuite avec le tems : elle enveloppe le bois
avec une petite peau & une croûte grile ; Ion goût
elt foible lorfqu'elle elt verte, mais douceâtre , acre,
aromatique, & très-agréable lorfqu'elle eft lèche;
cette écorce récente, léparée de la croûte qui efl
grile & inégale , enlevée en Ion tems, &c léchée au
loleil, s'appelle canelle; le bois elt dur intérieure-
ment, blanc, & fans odeur.
Les fouilles nailîent tantôt deux à deux , tantôt feu-
le à feule : elles font femblables aux feuilles du lau-
rier ou du citronier; elles font longues de plus d'un
palme , lilfos , tarifantes , ovalaires , terminées en
pointe : lorfqu'ellcs font tendres , elles ont la couleur
de foie ; félon qu'elles font plus vieilles , plus lèches ,
elles font d'un verd foncé en-deffus, &c d'un verd
plus clair en-delïbus , foûtenues d'une queue d'un de-
mi-pouce, épailTe, cannelée, terminée par trois filets
nerveux qui s'étendent tout le long de la feuille , l'ail-
lans des deux côtés, d'où partent de petites nervures
tranfverfales : enfin elles ont le goût & l'odeur de la
canelle , caractère qui les diltingue principalement
de la feuille du malabathrum.
Les fleurs font petites, étoilées , à fix pétales , blan-
châtres , & comme difpofées en gros bouquet à l'ex-
trémité des rameaux, portées fur des pédicules d'un
beau verd , d'une odeur agréable , & qui approche
de celle du muguet. Au milieu de la fleur elt renfer-
mé un petit cœur compolé de deux rangs d'étami-
nes , avec un piltil verd, noirâtre au fommet, qui fe
change en une baie ovalaire , longue de quatre ou
cinq lignes, lifle, verte, d'abord, enfuite d'un brun
bleuâtre, tachetée de pointes blanchâtres , fort atta-
chées à un calice un peu profond , un peu épais , verd>
partagé en iix pointes.
Elle contient fous une pulpe verte , onctueufe , af-
tringente , un peu acre & aromatique , un petit noyau
caffant, qui renferme une amande ovalaire , acre ,
prefque de couleur de chair, ou de pourpre légère.
Cet arbre naît, & ne fe trouve prélentement que
dans l'île de Ceylan , où il feroit auffi commun dans
les forêts &c dans les haies , que le coudrier l'elt par-
mi nous , lî on n'avoit grand foin de l'arracher.
Auffi ne le cultive-t-on que dans un efpace d'environ
quatorze lieues le long de la mer : mais cette petite
étendue de pays en produit fi abondamment, que fur
le pié de la confommation de canelle qui fe fait au-
jourd'hui , Ceylan en pourroit fournir ailément à
quatre mondes comme le nôtre.
Les canclliers doivent avoir un certain nombre
d'années avant qu'on enlevé leur écorce : luivant mê-
me le terroir , la culture , & l'efpece , ils donnent la
canelle plus ou moins promptement. Ceux qui croif-
fent dans des vallées couvertes d'un fable menu, pur
& blanchâtre , font propres à être écorcés au bout
de trois ans; au lieu que ceux qui font plantés dans
des lieux humides & marécageux, profitent beaucoup
moins vite. Ceux qui font lîtués à l'ombre des grands
arbres qui leur dérobe les rayons du foleil , parvien-
nent auffi plus tard à la maturité ; il y a même quel-
que différence entre les écorces des uns & des au-
tres. L'écorce des canelliers plantés dans des lieux hu-
mides & ombragés , a un peu plus le goût du cam-
ptre
C A N
phre, que celle de ceux qui viennent à découvert
dans un terrein fabloneux ; car l'influence du iblei!
rend le camphre fi volatil, qu'il fe mêle facilement
avec les lues de l'arbre , & que s'élevant entre le bois
& la membrane intérieure & tendre de l'écorce, il
fc répand lî parfaitement entre les branches 8c dans
les feuilles où il fe transforme , qu'il ne fe laille plus
diftinguer , & que ce qui en relie n'eft pas fenfible.
L'odeur du cane/lier eft admirable quand il eft
en fleur ; & lorfque les vents favorables foufrlent de
terre , le parfum en eft porté fort avant dans la mer,
enforte qu'au rapport de quelques voyageurs, ceux
qui navigent alors dans ces contrées, fentent cette
odeur fuave à quelques milles de diftance du rivage.
Méthode en ufage pour tirer la candie de l'arbre. La
canelle des boutiques eft l'écorce tirée des canelliers
de trois ans: on a coutume de l'enlever au printems
& en automne , dans le tems que l'on obferve une
fève abondante entre l'écorce & le bois ; lorfqu'on
l'a enlevée > on fépare la petite écorce extérieure
grife & raboteufe ; enfuite on la coupe par lames ,
on Fexpofe au foleil ; & là en fe léchant, elle fe rou-
le d'elle-même comme nous la voyons: on choifit
fur-tout le printems, & lorfque les arbres commen-
cent à fleurir, pour enlever cette écorce. Après qu'on
l'a enlevée, l'arbre refte nud pendant deux ou trois
sfns ; enfin au bout de ce tems il fe trouve revêtu d'u-
ne nouvelle écorce , & eft propre à la même opéra-
tion.
La canclle Portugaife ne fubfiftc plus. On a eu pen-
dant quelque tems dans le commerce cette canclle,
qu'on appelloit canelle fauvage, canelle grife , qui croit
foit dans le royaume de Cochin , fur la côte de Ma-
labar;-les Portugais chafles par les Hollandois de
Ceylan, débitoient cette canelle fauvage à la pla-
ce de la véritable; mais ce débit n'a pas duré long-
fèrhS : ces derniers ne virent pas fans envie le négoce
de la canelle Portugaife, ôc l'on croit que cette jalou-
fie fut e*n partie la caufe qui les engagea de s'empa-
rer en 1661 de Cochin, dont ils firent arracher toute
la canellcfauvage , afin de le trouver feuls maîtres dans
le monde de cette précieufe épicerie.
On demande fi les anciens ont connu notre canel-
le , & fi le cinnamome dont il eft tant parlé dans les
ccrits des anciens , étoit la canelle de nos jours :
problème qui partage tous les auteurs.
Il eft d'abord certain que le kin-namom des Hé-
breux, mentionné dans l'Ecriture-fainte , Exode xx.
33. cantiq. iv. 14. n'eft point celui des Grecs & des
Romains , encore moins quelque canelle d'Amérique,
ou celle des Indes orientales. Le nouveau monde n'é-
^toit pas connu , & le commerce avec l'île de Ceylan
oudeTaprobane, n'étoit pas ouvert. Dieu ordonne
à Moyfe de prendre du kin-namom avec divers au-
tres aromates , Se d'en compofer une huile de par-
fum pour oindre le tabernacle. Il s'agit donc ici d'u-
ne gomme, ou d'une huile, plutôt que d'une écorce
ou (l'un bois odorant.
La difficulté eft bien plus grande à l'égard du cinna-
mome des autres peuples. Quelques-uns penfent que
leur cinnamome étoit les tendres rameaux de l'ar-
bre qui porte le clou de girofle: mais ils ne fongent
pris que lî les anciens euflent connu cet arbre, ils
n'auroient pas omis, comme ils l'ont fait, de par-
ler de les fruits , qui font fi remarquables par leur aro-
mate , leur goût piquant, & leur odeur pénétrante.
Ceux qui prétendent que le cinnamomum des an-
ciens, de Théophrafte, Diofcoride, Galien, & Pli-
ne , eft notre canelle moderne , s'appuient fur la ref-
femblance des caractères de cet arbriffeau avec no-
tre canellier, dans la description que ces anciens écri-
vains nous ont donnée de la petiteffede l'écorce, de
f >n odeur, de l'on goût , de fes vertus , & de fon prix :
mais on combat les (éclateurs de cette opinion pré-
Tome II,
C A N
59?
cifément par les mêmes armes qu'ils employent pour
la défendre. On leur oppofe que les anciens difflm-
guant pluficurs efpeces de cinnamomum , une mofyli-
tique noirâtre, d'un gris vineux, qui eft la plus excel-
lente, acre, échauffante, & faléeen quelque maniè-
re, une autre de montagne, une noire , une blanche;
aucune de ces efpeces ne convient à notre canelle :
d'où l'on conclut que les anciens Grecs & Romains
ne l'ont point connue. Les curieux trouveront tou-
tes les railbns poflîbles en faveur de ce dernier fen-
timent , rafl'emblées dans un ouvrage exprès de Bal-
thafar Michael Campi, intitulé: Spicilegio botanico ,
nd qualefi manifefta lo fconofciuto cinnamomo ielli an~
tichi. Lucca , 1652, in-40.
Sans décider une queftion fufceptible de raifons
pour & contre , nous nous contenterons de remar-
quer , que les anciens n'ayant point déterminé clai-
rement ni unanimement ce qu'ils entcr.do'.ent par
leur cinnamomum , nous n'en pouvons juger qu'en
aveugles ; ils n'en connoiflbient pas même i'hiftoire,
comme il eft aile de le prouver.
Pline raconte que les marchands qui l'apportaient
en Europe , fàîfoient un voyage fi long & fi péril-
leux , qu'ils étoient quelquefois cinq ans fans reve-
nir ; que la plupart mouroient en chemin ; & que la
plus conliderable partie de ce trafic fe faifoit par des
femmes. L'éloignement du lieu dont on tiroit la mar-
chandée , la longueur du trajet , l'avidité du gain ,
le prix naturel de la chofe , les diverfes mains par
lesquelles elle pafibit ; cn faut-il davantage pour
donner lieu à toutes les fables qu'on débitait fur l'o-
rigine de la production végétale qu'ils nommèrent
cinnamomum ?
Du tems de Galien elle étoit déjà fi rare , qu'on
n'en trouvoit plus que dans les cabinets des Empe-
reurs. Pline ajoute que le prix en étoit autrefois
très-confidérable , & que ce prix étoit augmenté de
moitié par le dégât des Barbares , qui en avoient brû-
lé tous les plants. Seroit-il donc hors de vrailTemblan-
ce de penfer que le cinnamome des anciens nous eft
entièrement inconnu , & qu'il eft préfentement per-
du ?
Il n'en arrivera pas de même de notre canelle , ni
du canellier : deicription exaûe , planches , culture,
débit , ufage en Médecine , tant de préparations qu'on
en tire , ou dans lefquelles elle entre ; tout nous allu-
re ion immortalité.
Du débit qui s'en fait , de fes diverfes fortes , & de
fon choix. J'ai déjà remarque que la compagnie des
Indes orientales en Hollande étoit feule maîtrefle de
la canelle : mais au lieu d'en augmenter la quantité
par la multiplication des arbres qui la produifent ,
ce qui feroit facile , la compagnie prend grand foin
de faire arracher de tems en tems une partie de ceux
qui croiflent fans culture , ou qui ne feraient pas dans
de certains diftricts de l'ile- elle fait par une expé-
rience de près de cent ans la quantité de canelle qu'il
lui faut pour le commerce, & eft perlùadée qu'elle
n'en débiteroit pas davantage , quand même elle la
donneroit à meilleur marché.
On juge que ce que cette compagnie en apporte
en Europe , peut aller à environ fix cents mille li-
vres pefantparan, & qu'elle en débite à peu-près
autant dans les Indes.
Il s'en confomme une grande quantité cn Amér:-
rique, particulièrement au Pérou pour le chocolat,
dont les Efpagnols ne peuvent fe palier.
Ce qu'on appelle à Ceylan le champ it
& qui appartient en entier à la compagnieHo"
fe , eft depuis Négambo jufqu'à Galueres: la meil-
leure canellt eft celle des environs dj Negambo Scde
Colombo.
On en diflingue de trois fortes , de fine , de moyen-
ne , & de groffiere : cette Jiveriîté procède de la va-
FFff
594
C A N
riétc , non-feulement des arbres dont on la tire , par
apport à leur âge , leur pofition , leur culture , mais
encore des différentes parties de l'arbre : car la ca-
ndie d'un jeune arbre diffère de celle d'un vieux
arbre ; Fécorce du tronc , de celle des branches ; &
l'écorcé de la racine , de celle de l'un tk de l'autre :
les jeunes arbres produifent la plus fine , tk tou-
jours de moindre qualité à menue qu'ils acquièrent
plus de trois ans.
Ainfi cette candie groffiere , connue communé-
ment dans le commerce fous le nom de canelle matte,
n'eft autre chofe que des écorces de vieux troncs de
candiurs : une telle écorce eft de beaucoup inférieu-
re par fon odeur , fon goût , & fes vertus , à la fine
candie ; auffi la doit-on rejeîter en Médecine.
On demande pour le choix de la bonne candie ,
qu'elle foit fine , unie , facile à rompre , mince , d'un
jaune tirant fur le rouge , odorante , aromatique ,
d'un goût vif piquant , tk cependant douçâtre tk
agréable: celle dont les morceaux en même tems
font petits , & les bâtons longs , ont la préférence
par les connoiffeurs.
il fembîe que toute fa vertu confifte dans une pelli-
cule très-fine, qui revêt intérieurement cette écorce;
du moins a-t-on lieu d'en juger ainfi , fi ce que dit
Kerman eft vrai , qu'on retire plus d'huile d'une livre
de cette pellicule , que de lix livres de fécorce
entière.
De fes falff cations. Il y a des gens qui pour ga-
gner iiir le débit de cette épicerie , la mélangent
avec des écorces de même groileur tk couleur ; d'au-
tres la vendent après en avoir tiré les vertus par la
dillillation. Ces fraudes le connoîtront aifément ,
tant au goût qu'à l'odorat. On dit qu'en biffant lé-
journer pendant long-tems des bâtons de canelle pri-
vés par la dillillation de leur huile odorante , parmi
de bonne canelle , ils reprennent leurs vertus. Mais ,
fuivant la remarque de Boerhaave , fi le fait eft vrai ,
c'eftaux dépens de la bonne canelle fur laquelle on les
a mis ; & alors il eft évident qu'elle doit avoir per-
du tout ce qu'ils ont recouvré. Cependant comme
il n'eft pas poffible dans l'achat de la canelle de goû-
ter tous les bâtons les uns après les autres , le vrai
fecret eft de la prendre chez d'honnêtes négocians ,
qui méprifentles gains illicites.
Toutes les parties du candlier fourniffent des fe-
cours à la Médecine : fon écorce , fa racine , fon
tronc , fes tiges , fes feuilles , fes fleurs , & fon fruit :
on en tire des eaux diltillées , des fels volatils , du
camphre , du fuif ou de la cire , des huiles précieu-
jes ; l'on en compofe des firops , des paftilles , des
effences odoriférantes , d'autres qui convenaient
en hypocras toutes fortes de vins ; en un mot c'eft
le roi des arbres à tous ces égards. Prouvons-le en
détail.
De la diflillation de l'huile de canelle , & de fa na-
ture. Nev/rnan dit que la canelle eft un fingulier com-
pofe de parties huileufes , falines , réfineufes , gom-
meufes , tk fur-tout terreftres , enforte que dans une
livre de canelle il y a prefque les trois quarts d'une
terre indiiîbluble , deux onces d'une fubftance réfi-
neufe , une once tk demie d'une fubftance gommeu-
fe , tk près d'une dragme d'une huile effentielle.
Cette huile vient dans la diftillation avec une eau
blanche au fond de laquelle elle fe précipite, parce
qu'elle eft plus pelante en pareil volume. La qualité
effentielle de cette eau & de cette huile , lo^ée dans
leur efpriî recteur invifible , qui n'en augmente ni
n'en diminue le poids , eft un phénomene'bien fur-
prenant.
Si l'on diftille la canelle quand elle eft récente, elle
donne plus d'huile que quand elle eft vieille : de-
là vient peut-être que quelques chimiftes difent n'a-
voir tiré qu'une dragme d'huile , & d'autres deux ,
C A N
d'une livre de canelle ; mais il fe peut auffi que l'art
de la diftiliation y concoure pour beaucoup, s'il eft
vrai qu'il y a des artiftes qui lavent tirer près d'une
once d'huile pure d'une livre de canelle, par le moyen
de l'efprit-de-vin préparé d'une certaine manière ,
dont ils font un fecret. C'cft aux Indes même , à
Ceylan , à Batavia , qu'on lait la diftillation de la
plus grande partie d'huile de canelle qui fe débite en
Europe ; les Droguiftes & Apothicaires Hollandois
trouvant encore mieux leur compte à l'acheter de
la compagnie , qu'à la tirer de la canelle par la diftil-
lation.
Mais comme cette huile eft extrêmement chère ,
tk vaut environ cinquante francs l'once , l'amour du
gain a fait imaginer des rufes pour l'adultérer fine-
ment ; tk on y a réuffi par le mélange de l'huile de
girofle, qui perdant avec le tems fon odeur, ne laifie
prefcju'aiicun moyen de découvrir la falfification.
Suivant le procédé de Boerhaave, on retire par
la diftillation d'une livre de canelle avec de l'eau
bouillante , une liqueur laiteufe , au fond de laquelle
on trouve une petite quantité d'huile limpide , rou-
geâtre , inflammable , brûlante , extrêmement odo-
riférante , & douée au fuprème degré des qualités-
effentielles de la canelle : il faut la garder dans une
phiole étroite bien bouchée ; il en eft de même de
la liqueur laiteufe , fi recherchée par fon agréable
odeur, fon goût vif & piquant. Cette liqueur étant
gardée , dépofe un peu d'huile , & devient inienfi-
blement plus claire , & moins aromatique.
Si on conferve l'huile de canelle pendant plufieurs
années dans des phioles hermétiquement bouchées ,
on prétend que la plus grande partie fe transforme-
ra en un fel qui a les vertus de la canelle , tk qui fe
diffout dans l'eau. Le doûewr Slare affùre , dans les
Tranfailions philofophiques , que dans l'efpace de vingt
ans la moitié d'une certaine quantité d'huile de ca-
nelle fe changea en fel.
La canelle eft donc remplie d'un fel effenti^l , foit
acide, foit urineux, qui approche du fel ammoniac,
uni avec une huile effentielle aromatique , d'où fon
aclion paroît dépendre principalement. Toutes les
expériences nous manquent fur ce fel.
Du camphre que donne la racine du canellier. Voici
d'autres phénomènes. Par la diftillation on retire de
l'ecorce de la racine du canellier une huile & un fel
volatil , ou plutôt du camphre : l'huile eft plus légère
que l'eau, limpide , jaunâtre , fubtile, &: fe diiîipe
aifément dans l'air ; d'une odeur forte , vigoureufe,
agréable , qui tient le milieu entre le camphre & la
canelle ; d'un goût fort vif: fans employer même la
diftillation , l'écorcé de la racine du canellier rend
de tems en tems du camphre en gouttes oléagineufes,
qui fe coagulent en forme de grains blancs.
Le camphre de la canelle eft très-blanc ; il furpafTe
de beaucoup parla douceur de fon odeur le cam-
phre ordinaire ; il eft très-volatil , tk fe diffipe fort
aifément; il s'enflamme promptement, &il ne laine
point de marc après la déflagration.
L'huile que l'on tire de fécorce de la racine du
canellier, eft employée extérieurement aux Indes
dans les douleurs aux jointures , produites par le
froid , dans les rhûmatifmes tk dans les paralyiies ;
on l'y donne intérieurement broyée avec du lucre,
pour exciter les fueurs , les urines , fortifier l'efto-
mac , chaffer les vents , diffiper les catarrhes. On
y regarde le camphre du canellier comme le meilleur
dont on puiffe faire ufage en Médecine : on le ra-
maffe avec foin , & il eft deftiné pour les rois du
pays , qui le prennent comme un cordial d'une effi-
cacité peu commune. La blancheur de ce fel , fon
odeur douce , fa volatilité , fa rareté , affùreroient
là fortune quelque part que ce fût. L'eau camphrée
qui vient ayee l'huile dans la diftillation , eft extrè-
C A N
mement recommandée à Ceyian dans les fluxions,
les fièvres malignes , & extérieurement pour diliiper
les tumeurs aqueufes & œdémateufcs.
De l'ufage de l 'huile des feuilles du canellier. L'huile
des feuilles diltillées va au fond de Teau : elle elt
d'abord trouble ; elle devient jaunâtre & transpa-
rente avec le tems , d'un goût douçâtre, acre , aro-
matique, fentant un peu la canette, & approchant un
peu de l'odeur du clou de girofle.
Cette huile paffe pour un correctif des violens pur-
gatifs : on la donne mêlée avec quelque poudre ap-
propriée , dans les maux d'eftomac , les coliques ven-
îeules , & caufées par le froid ; bouillie avec de l'hui-
le commune , elle elt recommandée dans les compo-
rtions des linimens , des cataplafmes nervins ou ré-
solutifs : on preferit même à Ceyian les feules feuil-
les du canellier dans les bains aromatiques , & les on-
guens defiiecatifs.
De l'ufage des fleurs du canellier. On obtient des
fleurs par la diftillation, une eau odoriférante, agréa-
Ile , bonne contre les vapeurs , propre à rétablir le
cours des efprits , à les ranimer , à adoucir la mau-
"vaife haleine , à donner du parfum & de l'agrément
à différentes fortes de mets. On prépare encore avec
ces fleurs une conferve très-bonne pour les perlon-
nesd'un tempérament leucophlegmatique.
De l'ufage des fruits & de la cire. Les fruits donnent
deux fortes de lubitanecs ; on en tire par la diitilla-
iionune huile effentielle ièmblable à l'huile de geniè-
vre, qui feroit mêlée avec un peu de canette & de clou
de girofle; & parla décoction on en tire une certai-
ne graifïe épaifle , d'une odeur pénétrante , refTem-
blante au fuif par la couleur , fa conliitance , ck qu'on
jnet en pain comme le favon.
La compagnie des Indes orientales Hollandoife
ïious l'apporte lous le nom de cire de canette , parce
crue le roi de Candy , province du Mogoliftan , en
fait faire fes bougies , (es flambeaux , qui rendent
«ne odeur agréable , & font réfervés pour fon uiage
ck celui de la cour. Elle fert d'un remède intérieur
ck extérieur chez les Indiens ; ils la donnent intérieu-
rement , affez mal-à-propos , dans les contufions ,
les luxations , les fractures ; ils la font entrer dans les
onguens ck les emplâtres réfolutifs , nerveux , cé-
phaliques: elle pourrait peut-être fervir à faire un
excellente pommade odorante , pour nettoyer ck
adoucir la peau , pour les petits boutons , les gerçu-
res , les engelures , &c.
Dans les vieux troncs du canellier, il y a des nœuds
réiïncux qui ont l'odeur du bois de Rhodes : nos che-
nilles pourraient en tirer quelque ufage' pour des
ouvrages de leur profelfion.
De r ufage de la canette , de feau fpiritueufe , & de
l'huile qu'on en tire pur la dijtilLition. Mais de toutes
les parties du cancliur , nous n'employons guère en
Europe dans la Médecine que fon écorec , l'eau fpi-
ritueufe , &C l'huile elîénticllc qu'on en tire par la
diltillation.
Les modernes attribuent à Pécorce du canellier,
les mêmes vertus que les anciens attribuoient à leur
cinnamomum , ou à lcurcafTe en tuyau. Ils l'eltiment
aromatique , ltimulante, corroborative , cordiale,
itomachique , emménagogue , ftyptique. Le docteur
Hales démontre , dans les Efjais deflatique , cette
dernière qualité de la canette par l'expérience im van-
te. Il injecta une certaine quantité de cette décoction
chaude clans les intcltinsd'un gros chien ; aufli-tut les
vaificaux Ce refferrerent , ck retinrent pendant quel-
que tems la liqueur qu'ils avaient reçue ; d'où l'on
peut inférer que l'etfet de cet aromate àans les intel-
tins , feroit d'en arrêter les évacuations trop abon-
dantes, & par conféquent conviendrait aux cours
de ventre qui naiffent du relâchemenl (.les vahTeaux.
Elle elt cordiale dans l'abattement des efprits, ck la
Tome II.
C A N
défaillance qui en eftla fuite ; parce que pico.
membranes de l'eftomac , elle met les nerfs de ci vii-
cere en jeu : fuivant les mêmes raifons elle efi em-
ménagogue , quand les règles font fupprimées par
l'atome des vailfeaux : c'elt encore d'après les mê-
mes principes qu'elle eft carminative , en diffipant
les vents par fon aftion fur l'eftomac & les inteftins.
En un mot comme c'elt le meilleur des aromates ,
elle en a toutes les propriétés au fouverain degré :
mais elle en a auffi les inconvéniens. Son ufageim-
modéré ou mal placé , difpole l'eftomac à l'inflam-
mation , en crifpant les fibres , & refferrant les ori-
fices des glandes ltomacales ; ce qui diminue la quan-
tité du fuc digeftif , 6k jette un delordre général dans
la machine : de plus fon ufage trop fréquent rend les
lues trop épais , trop acres ; d'oii nailient plulieurs
maladies chroniques. Il ne faut donc l'employer qu'à
propos , & prendre garde d'en continuer l'uiage trop
îong-tems.
L'écorce de canette entre dans les plus fameufes
compolïtions pharmaceutiques ; & on fait quantité
de différentes préparations de cette écorce , dont la
principale eft l'eau fpiritueule de candie , qui a les
mêmes qualités que l'aromate.
On la prépare en faifant macérer pendant vingt-
quatre heures une livre de canette concaffée , dans
trois livres d'eau de mélifie diltillée ck trois livres de
vin blanc. On diltille la liqueur à un feu violent dans
l'alembic avec un réfrigérant. On conferve pour l'u-
fage les trois livres d'eau qui viennent les premières.
Cette eau elt trouble , blanchâtre, laiteule , à caufe
des parties huileules de la canette qui y font incorpo-
rées , ck qui lui donnent beaucoup de force.
Mais cette force n'elt pas comparable à celle de
l'huile pure , qui eft vraiment caultique , & qui adou-
cie par le mélange du lucre , fous la forme d'un oleo-
faccharum , elt delicieule au goût. On la preicrit en-
core depuis une goutte julqu'à fix dans un œuf po-
ché , ou quelques liqueurs convenables. C'elt dans
cette huile que réfide toute l'efficacité de la canelle ;
auffi elt-elle étonnante par les effets. Rien de plus
agréable , ni de plus admirable , pour animer , échauf-
fer , fortifier tout d'un coup la machine : mais il faut
bien le garder d'en faire un ufage déplacé. Elle eft utile
dans les accouchemens laborieux pour Pexpulfion du
fœtus , de l'arrierefaix Se des vuidanges , dans les
femmes froides , phlegmatiques , & dont les forces
languiflent: mais il faut s'abltenir de ce remède dans
les tempéramens échauffés , pléthoriques , & dans
les cas où l'on craint quelque inflammation. On en
éprouve au-contraire le luccès dans les maladies qui
proviennent d'un phlegme muqueux , dans celles oit
il règne un défaut de chaleur & de mouvement, oc-
cafionné par L'habitude flafque des vahTeaux , ou par
la conftitution languiflante des humeurs.
On peut ajouter l'huile de canelle aux- purgatifs ,
non-feulement pour les rendre moins defagi
au goût , mais encore , pour prévenir les flatulences
& les tranchées. On la fait entrer dans les linimens ,
les onguents & les baumes , tant à caufe de fa bonne
odeur, que parce qu'elle elt échaulfante , rélolutive
& difeuffive.
Comme elle elt extrêmement acre , brûlante Se
corrolive, elle cauterife avec promptitude, quand
on l'applique extérieurement ; quelques Chirurgiens
l'ont employée dans la carie profonde des os : m. us
outre qu'on a d'autres remèdes plus faciles & plus
fûrs , fon prix exceffif empécheale s'en fervir. Tout
le monde en connoît l'ufage dans le mal de dents :
mais elle ne le guérit qu'en déffechant Cv brûlant le
nerf par ("on acreté caultique ; il ne faut donc l'em-
ployer qu'avec prudence dans ce cas-ci , Se dans tous
ceux dont nous avons parle.
Auuurs. Je n'en connois point de particuliers fur
F F if ij
)c>6
C A N
la candie; il n'y a de bonnes figures du candl'ur,
que celles des Botaniftes Hollandois ; d'un autre côté ,
je ne fâche aucun voyageur , dont les relations mé-
ritent notre confiance fur ce fujet. L'académie des
Sciences ne l'a point traité , & l'on trouve peu de dé-
tails intérefTans dans les Transactions philojbphiques.
Article communique par M. le Chevalier de Jaucourt.
Canelle, {le pays de la) {Géog.) grande con-
trée de l'île de Ceylan. L'arbre qui fournit la candie
lui a donné fon nom , à caufe de la grande abondan-
ce qu'on en retire. Il y a des mines de pierres pré-
cieufes très-riches ; les Hollandois font maîtres des
côtes.
CANELUDE , ou C ANELADE , f. f . ( Fauconne-
rie. ) efpece de curée compofée de canelle, de lucre
& de moelle de héron ; les fauconniers préparent cet-
te curée & la donnent à leurs oifeaux , pour les ren-
dre plus héroniers , plus chauds & plus ardens au vol
du héron.
CANEPHORES , f. f. pi. ( Hijl. anc. ) porte-cor-
beilles, du grec stàmç, corbeille, & <p'pa , je porte. C'é-
toit à Athènes deux jeunes vierges de qualité , confa-
crées au fervice des dieux, & particulièrement de
Minerve , dans le temple de laquelle elles demeu-
roient. Dans les panathénées , les caniphores parées
fuperbement , portoient fur leurs tètes des corbeilles
couronnées de fleurs & de myrte , Si remplies de
choies deftinées au culte des dieux. Elles commen-
çoïent la marche dans les procédions folemnelles , &
étoient fuivies des prêtreffes & du chceur. On les
nommoit encore Xijlophores. {G)
C ANEPHORIES , f. f. pi. {Myth.) fêtes de Diane
chez les Grecs, dans lelquelles toutes les filles nubi-
les offf oient à cette déeffe des paniers pleins de petits
ouvrages faits à l'aiguille , & faifoient connoître par
cette offrande qu'elles s'ennuyoientdu célibat. D'au-
tres auteurs difent, avec plus de vrailTemblance, qu'à
Athènes les canéphories étoient une cérémonie quifai-
foit partie de la fête que les jeunes filles célébroient
la veille de leurs noces , & qui fe pratiquoit ainli :
La fille conduite par fes parens au temple de Miner-
ve , préfentoit à cette divinité une corbeille remplie
de préfens , afin que Minerve rendit heureux le ma-
riage qu'elle alloit contracter. Ou plutôt, comme re-
marque le Scholiafte de Théocrite, c'étoit une efpe-
ce d'amende honorable que ces filles alloient faire à
la chafte Minerve , pour l'appailer & détourner fa
colère , de ce qu'elles ne confervoient pas à fon exem-
ple leur virginité. {G)
C ANEPIN , f. f. {Megifiîer.) c'eft une pellicule très-
mince que les Mégiffiers tirent de deffus les peaux
de chevreau ou de mouton qui ont été paffées en mé-
gie. C'eft précifément ce que les Anatomiftes appel-
lent Vc'piderme dans l'homme.
Paris eft l'endroit de France où l'on fait mieux le-
ver le canepin • ce iont les Peaufiiers qui font cette
opération.
Les Gantiers appellent ordinairement le canepin
cuir de poule , & c'eft avec cette forte de cuirs qu'ils
fabriquent la plus grande partie des gants que por-
tent les femmes , furtout dans l'été. On en fait aufîi
des éventails.
Le canepin qu'on tire de delTus la peau des che-
vreaux , eft le plus eftimé pour la fabrique des
gants.
* Les Couteliers en font un grand ufage pour elTayer
leurs lancettes , 6e. lavoir fi elles font allez pointues
& allez tranchantes. Ils tendent un morceau de cand-
pin entre le pouce & l'index d'un bout , & entre le
doigt du milieu Sr l'annulaire de l'autre bout , écar-
tant l'index & l'annulaire. Ils placent enfuite la poin-
te de la lancette fur ce canepin tendu ; ils élèvent la
châlTe ; fi la lancette par fon propre poids perce le ca-
mpin fans faire aucun bruit, elle eft allez pointue ôc
C A N
alTez tranchante ; fi elle ne le perce point , ou qu'elle
faffe un petit bruit en le perçant , elle eft cenfée ne
piquer ni ne couper affez.
Il y a du choix dans le canepin ; celui qui eft épais
& jaunâtre ordinairement ne vaut rien pour Perlai de
la lancette. Iltaut prendre celui qui eft le plus mince,
le plus blanc , & le plus doux au toucher.
CANES , ( Géog.) petite ville de France , en Pro-
vence , fur le bord de la mer Méditerranée.
C ANET , ( Gèog. ) petite ville de France dans le
Comté de Rouffillon.
Canet , {Géog.) petite ville d'Efpagne, dans la
Catalogne , au territoire de Girone.
C A N E T A , ( Géog. ) petite rivière d'Italie , au
royaume de Naples , dans la Calabre extérieure , qui
le jette dans le golfe de Tarente.
CANETO , {Géog.) petite viile d'Italie , au duché
de Mantoue , iur l'Oglio. Long. zj. 55. lat. 4.5.
10.
CANETTE , f. f. ( terme de Blafon.) On s'en fert en
parlant des petites canes qu'on repréiente comme des
merlettes avec les ailes ferrées. La différence eft
qu'elles ont bec & jambes , au lieu que les merlettes
n'en ont point. ^oye^MERLETTE. ( V)
* CANEVAS , f. m. {Commerce) toile écrue , claire,"
de chanvre ou de lin, dont on fe fert pour les ouvra-
ges de tapilferie à l'aiguille : cette toile eft diviléeen
carreaux qui dirigent l'ouvrage ; & même le defîi-
nateur , lorlqu'il trace fur cette toile des fleurs , des
fruits , des animaux à remplir en laine , en foie , en or
& argent , en marque les contours avec des fils de
différentes couleurs, qui indiquent àlaBrodeufe les
couleurs qu'elle doit employer.
Nous allons propofèr ici une forte de canevas qui
rendroit la broderie , foit en laine , foit en foie , in-
finiment plus belle , moins longue , & moins coû-
teule. Ce font ceux qui le feroient fur le métier des
ouvriers en foie. On monteroit le métier comme s'il
étoit queftion d'exécuter le deflèin en brocher : mais
on ne brocheroit point. Ainli le deffein relteroit vui-
de en défions , il feroit couvert en deffus par des bri-
des , comme à la gafe , & tout le fond feroit fait. La
Brodeuie n'auroit plus qu'à remplir les endroits vui-
des. Il eft étonnant qu'on ne fe foit point encore avifé
de faire de ces canevas ; le point en eft infiniment plus
beau & plus régulier qu'il ne fe peut faire à l'aiguil-
le ; le métier fait en mêmetems la toile & le point ;
& chaque coup de battant fait une rangée de points
de toute la largeur du métier. Les contours du def-
fein font tracés d'une façon infiniment plus réguliè-
re & plus diftinfte que par des fils. Il me lemble que
cette invention a autant d'avantage fur l'ouvrage à
l'aiguille , foit pour la perfection , foit pour la vî-
teffe , que l'ouvrage au métier à bas en a fur le tri-
cot à l'aiguille. Il n'y a point d'ouvrier qui ne pût
faire en un jour prelque autant d'aunes de tonds de
fauteuils , foit en foie , foit en laine , qu'un tifferan
fait d'aunes de toile. Et qu'en ne croye pas qu'il y
ait grand myftere à la façon de ces canevas : il faut
que la chaîne foit de gros fil retors de Piémont ;
qu'elle levé & baiffe moitié par moitié , comme pour
la toile; avec cette différence qu'à la toile , où le grain
doit être tout fin &C partout égal , un fil baiffe , un fil
levé , un fil baiffe, un fil levé , ôc ainfi de fuite ; au
lieu qu'ici , oîi il faut donner de l'étendue & du re-
lief au point , on feroit baiiîer deux fils , lever deux
fils , baiffer deux fils , lever deux fils , & ainli de
fuite. On prendrait une trame de laine ou de foie , for-
te, large, épaiffe , & bien capable de garnir. Au refte,
j'ai vûl'effaide l'invention que je propofe : il m'a pa-
ru infiniment fupérieur au travail de l'aiguille. Quant
à la célérité , on peut faire une rangée de points de
la longueur de vingt pouces & davantage d'un feu!
coup de battant. Les brides qui couvriroient les en-
C A N
droits du deflein , les fbrtifïeroient encore , & leur
donneroient du relief.
Nous proposons nos vues toutes les fois qu'elles
nous paroiilent utiles ; au refte , c'elt aux ouvriers
à les juger : mais pour qu'ils en jugeaflent faincment,
il feroit à propos qu'ils fe défilîent de la prévention
qu'il n'y a rien de bien imaginé que ce qu'ils inven-
tent eux-mêmes , ni rien de mieux à taire que ce qu'ils
(ont. Je les avertis que par rapport au canevas en
queftion , j'en croirai plutôt l'expérience que j'ai ,
que tous les raifonnemens qu'ils feront. J'ai vu des
fonds de canevas tels que je les propoie, remplis avec
la dernière célérité , ck où le point étoit de la derniè-
re beauté.
Canevas , autre groffe toile de chanvre écrue ,
dont on le fert en piquùre de corps , ou en loùtien
de boutonnières pour les habits d'homme".
Canevas : on donne ce nom à des mots fans au-
cune fuite, que les Muficiens mettent fous un air,
qu'ils veulent faire chanter après qu'il aura été exé-
cuté par l'orcheih e 6c la danie. Ces mors fervent de
modèle au Poète pour en arranger d'autres de la
même mefure , & qui forment un (eus : la chanion
faite de cette manière , s'appelle aufli canevas ou pa-
rodie. Voye7^ Parodie.
Il y a de fort jolis canevas dans l'opéra de Tan-
crede ; aimable vainqueur , &c. d'Héfîone , eft un ca-
nevas ancien. Ma bergère fuy oit l'amour, &c. des Fêtes
de l'hymen , en eft un moderne ; prelque toutes les
chaconnes de Lully, ainfi que les paiiacailles ont été
parodiées par Quinault ; c'elt dans ces canevas que
l'on trouve des vers de neuf lyllabes , dont le repos
eft à la troiiieme ;ce Poète admirable ne s'en elt fervi
que dans ces occalions.
Les bons Poètes lyriques ne s'écartent jamais de
la règle qui veut que les rimes foient toutes cioi-
fées , hors dans les canevas ieulement. Il y en a tel
qui forcément doit être en rimes masculines, tel au-
tre en demande quatre feminir.es de luite. Il y en
a enfin , mais en petit nombre , dont toutes les ri-
mes font de cette dernière clpecc.
La correction d?ns l'arrangement des vers, eft une
grande partie du Poète lyrique ; les vers de douze
lyllabes , ceux de dix , de fept , oc de fix , adroite-
ment mêlés , font les feuls dont il ie fert ; encore
obierve-t-il de n'uier que trcs-lobrcmcnt de ceux de
fept. Il faut même alors que dans le même morceau
où ils font employés , il y en ait au moins deux de
cette mefure. Les vers de cinq , de quatre , de trois
fyllabes font réfervés au canevas ; la phralc de Mu-
iique qu'il faut rendre donne la loi ; une note quel-
quefois exige un fens fini , & un vers par conléquent
d'une feule fyllabe.
Les canevas les mieux faits font ceux dont les repos
& les fens des vers répondent aux différens repos,
& aux tems des phrai'es de la Muiiquc. Aiois le re-
doublement des rimes ett un nouvel agrément : il
n'eft point d'ouvrage plus d:fhc;le , qui exige une
oreille plus délicate, & où la prolbdieFrançoilëdo \ e
être plus obfervée. Le Poète qui eft en même tems
Muficien , a dans ces fortes de découpures un grand
avantage fur celui qui n'eft que Poète. ( B )
Auffi , comme l'obiei ve M. Rouffeau , il y a bien
des canevas dans nos opérai qui , pour l'ordinaire ,
n'ont ni fens ni ef prit , & où la prolodie Françoife
fe trouve ridiculement eftropiée.
CANGERECORA , ( Géog. ) ville des Indes , en-
deçà du Gange , au pays de Canara , fui les frontiè-
res du Malabar.
* CANGETTE , f f. ( Comment. ) petite ferge
qui fc fabrique en quelques endroits de balle-Nor-
mandic ; elle eft de bon u l'âge & à bon prix.
CANGIANO, {Géog.) 'petite ville d'Italie, au
royaume deNaples, dans la prin cipauté citerieurc.
C A
597
CANGOXUMA , ( Géog. ) ville d'Afie de l'em-
pire du Japon , dans l'île de Ximo , au royaume de
Bungo.
CANGRI , ( Géog.) petite contrée d'Afie, dans la
Natolie , dont la capitale qui eft fur le fleuve Zaca-
rat porte le même nom.
CANGRI A, ( Géog. ) ville de la Turquie en Afie
dans la Natolie.
CANIART , oifeau. Voye^ Colin.
CANICIA , ( Géog. ) province d'Afiique en Bar-
barie , entre Alger & Tunis.
CANICIDE , f. m. fe dit d'une direction Anato-
mique des chiens vivans. Drelincourt s'elt lervi de
ce terme dans fes XVII. expériences Anatomiques ,
dans lelquelles il décrit fes cameides avec tous les
phénomènes qui les ont accompagnes. Cajlelli. (Z.)
CANICLU , {Géog ) piovince d'Afie, dans la
grande Tartarie , à l'oueft du Tibeth ; les habitans
font idolâtres.
CANICULAIRES, {jours caniculaires.) marquent
proprement un certain- nombre de jours qui précè-
dent ce qui fuivent celui où la canicule fe levé le
matin avec le foleil. Voye^ Canicule. Les Egyp-
tiens & les Ethiopiens commençoient leur année
aux jours caniculaires.
CANICULE, f. f. 'Agronomie.) c'elt le nom d'une
des étoiles de la conlfolîafion du grand chien , qu'on
appelle aufli fimplement ['étoile du chien ; lesGiecs
la nommo.ent « pc? , Jïrius. f^oyei SlRlUS.
Pline & Galien donnent aufli à la canicule le nom
de Procyon , quoiqu'en effet Procy on foit le nom d'une
autre étoile dans le petit chien. / >,v- Procyon.
La canicule elt la dixième étoile dans le catalogue
Anglois de Flamltced, 6c la féconde dans ceux de
Ptolomée & de Tycho. Eile eft limée dans la gueule
du grand ch. en, ci elt de la première grandeur ; c'eflfc
la plus grande ôc la plus brillante de toutes les étoi-
les du ciel.
Quelques auteurs anciens nous dii'ent après H'p-
pocrate Se Pline , que le jour où la canicule fe levé,
la mer bouillonne , le vin tourne , les chien:, entrent
enrage, la bile s'augmente & s'irrite, ce tous les
animaux tombent en langueur & dans l'abattement ;
que les maladies qu'elle caufe le plus ordinairement,
font les fièvres ardentes & continues , les dyflente-
ries & les phrénéfies , &c. Voilà bien des chimères.
Si la canicule pouvoit avoir la propriété d'appor-
ter Le chaud , ce devrait être plutôt aux habitans de
Phémifphere méridional qu'à nous , puilque cette
étoile eft dans l'hémifphere méridional, de l'autre
côté de l'équatcur. Cependant il eft ceitain que les
peuples de cet hémifphere font alors en hyver. La
canicule & les autres étoiles lont trop éloignés de
nous , pour produire fur nos coips ni fur notre iyt-
teme planétaire aucun effet fenfible. ( O )
* Les Romains étoient fi periùadés ue la maligni-
té de la canicuk , que pour en écai ter les influences ,
ils. lui facrilioient tous les ans un chien roux ; le chien
ayôit eu la préférence dans le choix des victimes , à
cauie de la conformité des noms. Ce n'eft pas la feu-
le occafion oii cette conformité ait donné nai
à des branches de fuperftition : la canicule pafîbit ou
pour la chienne d'Erigone, ou pour le chien que Ju-
piter donna à Minos , que Minos donna à Procris,
6c eue Procris donna à Cephâle.
( ANLDE,oa CANIVET , très-grand & très-beau
perroquet d'Amérique, /'ovf- PERROQUET.
CANIF , f. f. outil Je C Ecrivain ; c'elt une efpece
de petit couteau d'acier, fort tranchant , 6c dont le
manche reflemble affez A une pyr; mide à pans; il
fert à tailler les plumes ; il y en a un d'une autre ef-
pece , à reffort, & dont le manche reflemble beau-
coup par la partie fupérieure à celui d'un couteau:
mais ta partie inférieure finit en pointe. Cette points
598
C A N
fert à fendre la plume , quand on en taille. Il y a
des canifs à fecrct qui taillent eux-mêmes la plume ;
mais ils font de mauvais fervice.
Canif ou KNiF,eft un outil des Graveurs en bois,
qui leur fert à creufer différentes parties de leurs plan-
ches , comme par exemple , à étrecir des filets que les
burins ont laifféstrop gros. Voye^lafig. 36 '. PI. IL de
la Gravure.
CANIFICIER, {Hift. nat. bot.) c'eft ainfi que
l'on nomme aux Antilles le caffier ou l'arbre qui pro-
duit la caffe ; ce mot vient de l'Efpagnol canafiftola ,
qui iiqnifie la même choie.
CANIN , adjea. m. {Anatomie.) c'eft le nom d'un
mufcle qui vient de la partie majeure de la foffe ma-
xillaire , & fe termine à la lèvre fupérieure , au-dei-
fus des dents canines. {L)
CANINA , {Géog.) ville & territoire de la Grèce,
dans l'Albanie , dépendant de la Turquie, en Europe.
CANINES, {dents.) terme d' Anatomie, font deux
dents pointues à chaque mâchoire , l'une d'un côté ,
l'autre de l'autre , placées entre les incifives & les
molaires.
Elles font épaiffes & rondes, & font terminées en
pointe par le bout ; elles nïont ordinairement qu'une
racine qui eft plus longue que celle des incifives : leur
ufage propre eft de déchirer les alimens. Comme les
dents de devant non-feulement peuvent être déraci-
nées ou rompues par les choies qu'on tient ou qu'on
caffe avec , mais font aufîî plus expofées aux coups ,
elles font enfoncées aux deux tiers dans les alvéo-
les ; moyennant quoi elles font plus en état même
que les molaires , de foûtenir les preffions latérales.
Voyei Dent. {L)
* C ANIRAM , {Hift. nat. bot.) grand arbre du Ma-
labar, dont le tronc & les groffes branches font cou-
vertes d'une écorce cendrée , blanche ou rougeâtre ;
les petites font d'un verd fale, noiieufes & couvertes
d'une écorce amere : les feuilles font placées par pai-
res à chaque nœud. La figure en eft oblongue, ovale,
& le goût amer. Des nœuds des petites branches for-
tent auffi des fleurs en parafol , à quatre , cinq ou fix
pétales, de couleur verd-d eau, pointues , peu odo-
riférantes , mais affez fuaves : fon fruit eft une pom-
me ronde , liffe , jaune , dont la pulpe eft blanche ,
mucilagineufe , &C couverte d'une écorce épaiffe &C
friable. Cette pulpe , ainfi que les graines qu'elle con-
tient , font très-ameres au goût : l'arbre fleurit en été,
& porte fruit en automne ; la racine en decoûion paffe
pour cathartique & faîutaire dans les fièvres pituiteu-
fes , les tranchées , & le cours de ventre ; on s'en fert
en fomentation pour la goutte : mêlée avec le lait de
vache , on en lave la tête aux mélancholiques & aux
vertigineux : fon écorce pilée & pétrie avec de l'eau
de riz , eft bonne dans la dyffenterie bilieufe , &c.
CANÏSCHAoa CANISE, {Géog.) ville forte de
la baffe Hongrie , fur la rivière de Sala , aux fron-
tières de la Stirie.
CANISTRO, {Géog.) petite ville de la Turquie,
en Europe , dans la Macédoine , près du cap de mê-
me nom.
CANIVEAUX, f. m. en Architecture , c'eft ainfi
qu'on appelle les plus gros pavés , qui étant affis al-
ternativement 6c un peu inclinés , traverfent le mi-
lieu d'un ruiffeau d'une cour ou d'une rue.
Une pierre taillée en caniveau, eft celle qui eft creu-
fée dans le milieu en manière de ruiffeau pour faire
écouler l'eau : on s'en fert pour paver une cuifine ,
un lavoir , une laiterie , un privé, ou lieu commun,
&c. {P)
CAKSABINA, fub. f. {Hift. nat. bot.) genre de
plante à fleurs, fans pétales, compofées deplufîeurs
étamines , mais fteriles ; les efpeces de ce genre qui
ne portent point de fleurs , produifent des fruits qui
C A N
font des capfules membraneufes , oblongues , & pref-
que triangulaires , dans lcfquelles il y a des femen-
ces ordinairement oblongues. Tournefort, Inft. rei
herb. corol. Foye{ PLANTE. {I)
CANNAGE , f. m. {Commerce.) méfurage des étof-
fes, rubans, &c. à la canne. Foye^ Canne, mt~
fure.
CANNARES, {Géog.) nation fauvage de l'Amé-
rique méridionale , au Pérou.
* CANNE, f. f. morceau de jonc ou de bois pré-
cieux , d'environ trois pies de long , droit , ferme ,
couvert d'un vernis ; armé par un bout d'une douille
de fer, & d'une pomme de l'autre , & percé à quel-
ques pouces au-deffousde la pomme, d'un trou dans
lequel on met un cordon de foie , où l'on paffe la
main. L'ufage de la canne eft d'appuyer en mar-
chant. Le nom de cannez paffé à beaucoup d'autres
objets.
Canne , voyei Roseau.
Canne d'Inde, voye^ Balisier.
CANNE , {Architecture.) elpece de rofeaux dont
on fe fert en Italie & au Levant , au lieu de doffes ,
pour garnir les travées entre les cintres , dans la conf-
tru&ion des voûtes.
On fe fert auffi de ces rofeaux à la place de chau-
me , c'eft-à-dire , de paille de feigle ou de froment ,
pour couvrir à la campagne les étables, granges,
écuries , de peu d'importance , ou bien les marions
des payfans. {P)
CANNE ou JONC à écrire, {Hift. anc.) calamusfcriptO'
rius, ou arundo feriptoria. Les anciens fe fervoient de
ftilets pour écrire fur les tablettes enduites de cire , ou
de jonc , ou de canne, pour écrire fur le parchemin,
ou le papier d'Egypte ; car notre papier ordinaire
eft d'une invention nouvelle. Le Pfalmifte dit que fa
langue eft comme la canne ou \zjonc à écrire d'un écri-
vain habile : lingua mea calamus feribee ; du moins
c'eft ainfi que traduit la vulgate : mais le texte
Hébreu lignifie plutôt un ftylet qu'une canne à écrire.
L'auteur du troifieme livre des Machabées, dit que
les écrivains employés à faire le rôle des Juifs qui
étoient en Egypte, vinrent montrer leurs rofeaux qui
étoient tout ulés , difant qu'ils ne pouvoient fuffire
à faire le dénombrement que l'on demandoit. Baruch
écrivoit fes prophéties avec de Y encre , & par con-
fisquent avec les rofeaux dont nous venons de parler;
car il ne paroît pas que l'ufage des plumes fût connu
en ce tems-là. Saint Jean, dans fa troifieme épître ,
dit qu'il n'a pas voulu écrire avec l'encre & le ro-
feau : noluiper atramentum & calamum feribere tibi. Cet
ufage eft commun chez les auteurs prophanes. Inquc
manus chartœ nodofaque venit arundo. Les Arabes , les
Perfes,les Turcs, les Grecs, & les Arméniens, fe
fervent encore aujourd'hui de ces cannes ou rofeaux,
comme le témoignent les voyageurs. Jerem. xxxvj.
18 ; 3. Joann. verf. 13. Perf. J'atyr. J. Calmet, die-,
tion. de la bibl.
Canne à vent, {Phyftque.) eft une efpece de canne.
creufe intérieurement , & par le moyen de laquelle
on peut , fans le fecours de la poudre , chaffer une
balle avec grande violence. La conftruftion en eft à
peu-près la même que celle de l'arquebufe à vent,
avec cette différence, que l'arquebufe à vent a une-
croffe & une détente pour chaffer la balle , au lieu
que la canne à vent n'en a point , & a extérieurement
la forme d'une canne ordinaire. Voye^ Arquebuses
vent. (O )
Canne, en Hébreu kanna , {Hift. anc.) forte de
mefure dont parlent Ezechiel, chap. xl. verf. 3. Se S.
Jean dans l'Apocalypfe, chap. x. verf. 1. Ezechiel dit
qu'elle avoit lix coudées & un palme , ou plutôt fix
coudées & fix palmes, c'eft-à-dire fix coudées Hé-
braïques , dont chacune étoit plus grande d'un pal-
me que la coudée Babylonienne, Le prophète eft
C A N
©bligé de déterminer ainfi la coudée dont il parle,
parce qu'au-delà de l'Euphrate où il étoit alors , les
mefures étoient moins grandes qu'en Paleiline. La
coudée Hébraïque avoit vingt-quatre doigts ou fix
palmes , ou environ vingt pouces & demi , en pre-
nant le pouce à douze lignes ; ce qui donne à la canne
ou calamus cent vingt-trois pouces ou dix pies trois
pouces de notre mefure. Voy. liofeau d'E?echiel. Dicl.
delaBibl. (G)
Canne, mefure Romaine, compofée de dix pal-
mes , qui font fix pies onze pouces de roi.
Canne , mefure de longueur, dont on le fert beau,
coup en Italie, en Efpagne, &dans les provinces mé-
ridionales de la France , & qui eft plus ou moins lon-
gue en différens endroits.
A Naples la canne vaut fept pics trois pouces &
demi Anglois , ce qui fait une aune & quinze dix-fep-
tiemes d'aune de Paris ; ainfi 1 7 cannes de Naples font
3 2 aunes de Paris. La canne de Touloufe & de tout le
haut Languedoc eft femblable à la varre d'Arragon,
& contient 7 pies 8 pouces f Anglois. À Montpellier,
en Provence, en Dauphiné , &: en bas Languedoc
elle contient 6 pies 5 pouces & demi Anglois. foyer
Mesure, Pie.
La canne de Touloufe contient cinq pies cinq pou-
ces fix lignes de notre mefure, qui font une aune &
demie de Paris ; ainfi deux cannes de Touloufe font
trois aunes de Paris.
Celle de Montpellier & du bas-Languedoc a fix
pies neuf lignes de longueur, & fait une aune deux
tiers de Paris; ainfi trois de ces cannes font cinq au-
nes de Paris.
L'ufage de la canne a été défendu en Languedoc &:
en Dauphiné par arrêt du confeil du 24 Juin & 27
Octobre 1687, fuivant lefquels on ne peut fe fervir
dans ces provinces , pour l'achat & vente des étoffes,
que de l'aune de Paris au lieu de canne.
Canne fe dit aufli de la chofe qui a été mefurée
avec la canne : une canne de drap , une canne de toile ,
comme nous difons une aune de drap. (G )
Canne , f. f. {Manufactures en J'oie?) grandes ba-
guettes de rofeau ou de noyer , qu'on palTc dans les
envergures des chaînes , foit pour remettre foit pour
tordre les pièces. Voye^ Remettre , & Tordre.
* Canne , ( Verrerie en bouteilles. ) infiniment de
fer , d'environ quatre pies huit pouces de long , en
forme de Canne , percé dans toute fa longueur d'un
trou d'environ deux lignes de diamètre , dont on
fe fert pour fouffler les bouteilles & autres ouvrages.
Voye{ Verrerie.
Canne, (Géog.) petite rivière d'Italie , au royau-
me de Naples, dans la province de Bari.
CANNEBERGE, fub. f. oxycoccus, (Hifl. nat. bot.)
genre de plante à fleur en ro(é , compolée de pluficurs
pétales difpofés en rond. Le calice devient dans la
mite un fruit ou une baie prefque ronde , qui eft di-
vifée en quatre loges , & qui renferme des femences
arrondies. Tourncforî, Intl. reiherb. Foyer Plante.
(0
CANNELLE, f. f. en terme d'Êpmglier Aiguillctier,
fe dit d'une efpece de couteau , dont la lame cfl den-
telée comme une feie. Elle lert à faire une petite rai-
nure fur un morceau dci>ois , dans laquelle on tient
l'aiguille avec des tenailles pour l'y ébaucher. Voye^
! u cher. Cette petite tente s'appelle aufli can-
nelle. Voye^ AIGUILLE , & la Planche de l'Aiguilletier,
CANNELLE , terme d'Aiguilletier; c'efl ainfi qu'on
appelle une petite cannelure, qui fe voit de chaque
coté de la tête des aiguilles à coudre ou à tapifl'erie.
On l'appelle aufli la railettede f aiguille. V. AIGUILLE.
Cannelle, (z?oW0/z;V.) c'eft un morceau de bois
percé en rond par le milieu , qui fe met dans le trou
de la jatte , pour empêcher que l'ouvrage ne s'en-
C A N
599
dommage en frottant contre fes bords afTez mal po-
lis. Il y a des cannelles qui ont leur trou quarré , pour
recevoir des trèfles quarrées. Voye?_ Tresse. Les
unes & les autres font rffciirtées par un bourlet , qui
lùrpaflant le trou de la jroe , les empêche de tomber
au-travers. Voye^ Jatte.
CANNELLE , terme de Tonnejier & de Marchands de
vin, qui lignifie un petit tuyau ou fontaine de cuivre,
qu'on enfonce dans le trou d'un muid qu'on a mis en
perce , afin d'en tirer le vin.
* CANNELÉ , adj. {Arts médian.) On donne ce
nom à tout corps , pierre , bois ou métal , auquel on
remarque des cavités longitudinales & femi- circulai-
res ou à peu-près , l'oit que ces cavités ayent été pra-
tiquées par la nature , foit qu'elles ayent été faites par
art; ainlî on dit d'un canon de fufil, qu'il eft cannelé,
& de la tige d'une plante qu'elle eft cannelée. De tou-
tes les occafions dans lefquelles la nature forme des
cannelures aux corps , il n'y en a peut-être pas une
où la Phyiique foit en état de rendre raifon de ce phé-
nomène. L'art a plufieurs moyens différens de can-
neler : on cannelé au rabot ; on cannelé au cifeau ; on
cannelé à la fonte; on cannelé à l'argue, f^oye^ Argue ,
Rabot, Ciseau, Fonderie, &c
CANNELÉ, en Anatomie , les corps cannelés >
quelquefois corps f ries , font deux éminences qui fe
trouvent à la partie antérieure des ventricules du
cerveau , qui font formées par l'entrelacement de la
lùbftance médullaire , & de la fubftance cendrée, ce
qui fait paraître , lorfqu'on les racle avec un fcalpe! ,
des lignes blanches & des lignes cendrées alternati-
vement difpofées , ôc que l'on a regardé comme des
cannelures. (Z. )
Cannelé, étoffe de foie ; le cannelé eft un tiflii
de foie comme le gros de tour & le taffetas , à l'excep-
tion qu'on laifle oifive une des deux chaînes nécef-
faires pour former le corps de l'étoffe , du côté de
l'endroit, pendant deux, trois, ou quatre coups. Il
eft compoié de deux chaînes & de la trame , dont on
proportionne le nombre des bouts à la qualité qu'on,
veut qu'il ait. Voyt\ Étoffe de soie.
Il fe fait des cannelés unis & des cannelés brodés
foie & dorure; ils font tous ordinairement de -\.
Lorfque la chaîne qui forme le cannelé a ceflé ds
travailler trois, quatre, ou cinq coups plus ou moins,
on la fait toute lever pour arrêter cette même foie ,
& former le grain du cannelé.
Cannelé , en termes de Blafon , fe dit de l'engre-
lure , dont les pointes font en-dedans & le dos en-de-
hors, de même que les cannelures des colonnes en
Architecture. (F)
CANNELER,verb. acl. terme d' Architecture ; c'eft
tracer ou former des cannelures. Voytr_ Cannelé &
Cannelures.
CANNELER, (Architecture.) c'eft, dans le fût
d'une colonne , d'un pilallre , ou bien dans les gai-
nes , thermes , & confoles , creufer des canaux formés
ou d'untlemi-ccrcle ou de l'arc , dont le côté du trian-
gle équilatéral ferait la corde, foye^ Cannelures.
CANNELURES , termes d'Architecture ; ce font des
canaux ou des cavités longitudinales formés ou tail-
lés tout le long du fût d'une colonne, ou d'un pi-
Iaftre , ou de tout autre objet. Vitrine croit qu'elles
ont été introduites aux colonnes , à l'imitation des
plis des vêtemens des anciennes dames Greques ;
aufli les nomme-t-il flriures du latin fiiiges , les plis
d'une robe. Cette étymologie peut avoir quelque for-
te de vraifiemblance , prefque toutes les figures an-
tiques étant revêtues de draperies perpendiculaires,
lelquelles forment des ondulations conca\ es, quiref-
femblent allez aux cannelures dont on parle ici. Les
Anglois les appellent/»'" , parce qu'elles ont quel-
que reflemblance à l'infrxument de mufique qui porte
ce nom.
6oo
C A N
On prétend que les 'cannelures ont été employées
pour la première fois à l'ordre ionique , enfuite on
les a introduites au coriruhien, puis au dorique,
avec cette différence qu'^Pn'en diitribue que vingt
fur la circonférence du fût de cet ordre , à caufe ue
ion caraftere iblide , au lieu que Ton en peut distri-
buer vingt-quatre , lur celle des ordres ionique &c
corinthien , ainfi qu'au compolite , n'y ayant pas d'e-
xemple qu'on en ait jamais employé au toican, que
l'on charge plutôt, quand on veut orner le fût de
cet ordre , de bofTages , ainfi qu'on l'a pratiqué au
palais du Luxembourg. Voye^ Bossages.
Ordinairement on pratique un lifteau ou liftel pour
féparer les cannelures , lefquelles fe forment d'un
demi-cercle ou bien d'une portion de cercle foûte-
nue parle côté d'un triangle équilatéral infcrit: mais
prefque tous les auteurs ont retranché ce liflel aux
cannelures de l'ordre dorique ; je crois que cette mé-
thode d'introduire des cannelures à un ordre foiide eft
contraire à fon caractère. Vôyc{ les différentes cfpe-
ces de cannelures tant anciennes que modernes dans nos
Planches d'Architecture, Je regarde auffi comme abus-
de pratiquer de cannelures torjès, formant une fpirale,
autour d'un fût perpendiculaire ; cela ne peut être
autorifé qu'aux décorations théâtrales ou fêtes pu-
bliques , qui ne demandent pas autant de féverité
que les édifices conftruits de pierre , ainfi que nous
l'avons dit ailleurs.
Ces cannelures concaves fe rempliffent affez fou-
vent de rudentures , voyeç Rudentures , dans toute
la hauteur du tiers inférieur des colonnes ou pilaf-
tres , tant pour enrichir leur fût, que pour affecter de
la folidité dans les parties d'en-bas; alors on les ap-
pelle cannelures rudentées. Quelquefois à l'ordre dori-
que on ne fait régner les cannelures que dans les deux-
tiers du fût fupérieur , afin de laifier au tiers inférieur
toute fa folidité.
Ces rudentures font fouvent enrichies d'ornemens,
tels qu'il s'en voit à l'ordre ionique du château des
Tuileries du côté des jardins, dont l'exécution fur-
paffe tout ce que nous avons de meilleur en France
dans ce genre : mais il faut obferver , lorfqu'on y
affe&e des ornemens , ou qu'on enrichit feulement
les cannelures de baguettes ou de doubles lifleaux ,
de ne les pas orner indifféremment ; leur richefîe aufïi
bien que leur élégance doit être en rapport avec
la folidité ou la légèreté de l'ordre ; il faut éviter, fur-
tout lorfque l'on furmonte un ordre corinthien fur
un ordre ionique , de faire les cannelures de l'ordre
d'en-haut plus fimples que celles de l'ordre d'en-bas;
c'eft un défaut de convenance que l'on peut remar-
quer aux colonnes corinthiennes & ioniques du por-
tail des Feuillans à Paris.
On fait ufage auffi des cannelures dans les gaines
& dans les confoles , lefquelles font fufceptibles d'or-
nemens félon la richeffe de la matière dont elles font
conftruites , ou des figures, thermes , vaie* , bulles
qu'elles foîitiennent. (i5)
* CANNEQUINS , f. m. ( Commerce. ) toiles de
coton qui viennent des Indes, & dont on fait le com-
merce à la côte de Guinée.
CANNER , fignific mefurer les étoffes avec la can-
ne dans les lieux où cette mefure eft en ufage , com-
me on dit auner à Paris , Se par-tout oii Ton fe fert de
l'aune. Diction, du Comm.tom. II. pag. j6. (G)
CANNETÏLLE , f. f. ( Bâtonnier. ) c'eft un mor-
ceau de fil d'or ou d'argent trait , fin , ou faux , plus
ou moins gros , qu'on a roulé fur une longue aiguille
de fer par le moyen d'un roiiet. On employé la can-
netille dans les broderies , les crépines, 6c autres ou-
vrages femblables.
La fabrique Se l'emploi de la cannetille forme une
portion.du métier des Paffementiers-Boutonniers.
Quand la cannetille eft plate &C luifante ,pour avoir
C A N
été ferrée entre deux roues d'acier, on l'app-''.
Ion : cette marchandife entre auffi dans la compôii-
tion des crépines & des broderies.
* CANNETTE, f. f. ( Manufactures en foie.) petit
tuyau de rofeau ou de bouii fait autour , fur lequel
on met la foie pour la trame ou la dorure. Faire des
can,iettes,ce& mettre la foie ou dorure fur ces tuyaux.
Voye^ Brocher; voyei Espolin & Navette.
Cannette , ( Géog. ) petite ville de l'Amena- ic
méridionale au Pérou, dans la vallée de Guarco.
CANNEY, ( Géog. ) île d'Ecoffe, lune des Vef-
ternes.
CANNIBALES , voye^ Caraïbes.
C ANNOBIO , ( Géog. ) petite ville d'Italie au du-
ché du Milan fur le lac majeur , aux frontières de
la Suiffe.
CANNS , ( Géog, ) rivière d'Angleterre dans la
province de "SVcftmorland, qui va le jetter dans la
mer d'Irlande.
C ANNULE, f. f. terme de Chirurgie, petit tuyau
fait d'or , d'argent, d"étain ou de plomb , qu'on intro-
duit dans les plaies pour les tenir ouvertes , & don-
ner ifïïie aux matières qui y croupiffent. Il y a auffi
une cannule pour faciliter l'entrée & la fortie de Pair
dans les poumons , dont on fe fert dans l'opération
de la bronchotomie. Vbye^ Bronchotomie.
Les différens ufages des cannules, & la différence
des parties auxquelles on les deffine , obligent d'en
conltruire de différentes formes : il y en a de ro .-
des , d'ovales , de plates , de courtes , de longues ,
d'ailécs«ou à platine, à anfes ou à anneaux pour les
attacher. Kl. Foubert , de l'académie royale de Chi-
rurgie, fe fert toujours d'une cannule flexible, lors-
qu'il taille à fa méthode ( PL XIII. Chir.fig. z. ) ;
cette cannule procure la liberté du cours des uri-
nes , & empêche Pépanchement de ce fluide dans le
tiffu cellulaire , qui entoure la partie antérieure de
la veffie & le reclum , ce qui occafionneroit des dé-
pôts qui font capables de faire périr les malades.
Voye^ le premier volume des Mémoires de Pacad. royale
de Chirurgie , & l'article LlTHOTOMlE dans c: Dic-
tionnaire.
M. Foubert fe fert auffi d'une cannule particuli ' i
pour les perfonnes auxquelles on a fait une ineffion
au périnée, pour procurer le cours des urines St du
pus dans le cas de veffie ulcérée ou paralytique. Voy.
Boutonnière. Cette cannule a à ion extrémité pof-
térieure un petit robinet, au moyen duquel les ma-
lades peuvent uriner à leur volonté , & ne font pas
continuellement baignés de leur urine, qui s'échappe;
par les cannules ordinaires, à rneluré que ce liquide
excrémenteux diftille par les uretères dans la veffie.
M. Petit a inventé une cannule faite d'un fil d'ar-
gent tourné en fpirale, qui la rend flexible dans toute
fa longueur. Cette cannule a un pié & demi de long ;
elle eft garnie à fon extrémité d'un morceau d'épon-
ge : elle fert à enfoncer dans l'efîbmac , ou à retirer
de l'cefophage les corps étrangers arrêtés à la partie
inférieure de ce conduit. Lorfqu'on veut fe fervir de
cet inftrument , on met dans la cannule un brin de ba-
leine proportionné à fa longueur & à ion diamètre ,
afin de lui donner toute la force qui lui eft néceffaire
pour l'ufage auquel elle eft deftinée. Cette ba'elne
eft plus longue que la cannule , & l'extrémité qui n'en-
tre pas dedans eft plus groffe , afin qu'elle puiffe fer-
vir de manche. La baleine ainii adaptée , eft retenue
en place dans la cannule par deux petits crochets, qui
font au dernier fil de cette cannule , & qui s'engrè-
nent dans deux rainures qui font au manche de la ba-
leine. Foyei lafig. l. PI. V. de Chir.
Les anciens qui faifoient un grand ufage du cautè-
re aftuel , avoient des cannules de fer ou de cuivre ,
femblables à des cercles peu élevés , à-travers ('ci-
quelles
C -A N
quelles ils paffoient le fer rougi, de peur qu'il n'of-
fensât les parties circonvoifines. Voye^ Cautère.
On ne doit pas fe fervir fans néceffité des cannu-
les pour le paniement des plaies , parce que ce font
autant de corps étrangers , qui par leur préfcnce ren-
dent les parois des plaies dures & calleufes, & occa-
fionnent des fîfrules. Il faut fa voir s'en fervir â pro-
pos , & en fupprimer l'ulage à tems. ( 1 )
CANO ou ALCANEM, ( Géog. ) royaume d'A-
frique dans la Nigritie , avec une ville qui porte le
même nom.
* CANON , f. m. ce terme a dans notre langue
une infinité d'acceptions différentes , qui n'ont pref-
qu'aucun rapport les unes avec les autres. Il déligne
un catalogue , une décifton , une arme , & pluiieurs inl-
trumens méchaniques de différentes fortes.
* Canon , en Théologie , c'eft un catalogue authen-
tique des livres qu'on doit reconnoitre pour divins ,
fait par une autorité légitime , & donné au peuple
pour lui apprendre quels font les textes originaux
qui doivent être la règle de fa conduite &c de la foi.
Le canon de la Bible n'a pas été le même en tout tems ;
îl n*a pas été uniforme dans toutes les fociétés qui re-
connoiffent ce recueil pour un livre divin. Les Ca-
tholiques Romains font en contefîation fur ce point
avec les Protcitans. L'Êglife chrétienne, outre les li-
vres du nouveau-Teitament qu'elle a admis dans fon
canon , en a encore ajouté, dans le canon de l'ancien-
Teitament qu'elle a reçu de l'églile juive, quelques-
uns qui n'étoient point auparavant dans le canon de
celle-ci , &: qu'elle ne reconnoiffoit point pour des li-
vres divins. Ce font ces différences qui ont donné
lieu à la difrribution des livres faints en protocanoni-
ques, deutérocanoniques , & apocryphes. Il faut cepen-
dant obferver qu'elles ne tombent que fur un très-pe-
tit nombre de livres. On convient fur le plus grand
nombre qui compofe le corps de la Bible. On peut
former fur le lujet que nous traitons , plulicurs quef-
tions importantes. Nous en allons examiner quelques-
unes, moins pour les décider, que pour propoier à
ceux qui doivent un jour fe livrer à la critique , quel-
ques exemples de la manière de dilcuter Se d'éclair-
cir les queïtions de cette nature.
Y a-t-il eu che^ les Juifs un canon des livres facrés ?
Première quellion. Le peuple Juif ne reconnoiffoit
pas toutes (ortes de livres pour divins ; cependant il
î'ecordoit ce carafterc à quelques-uns : donc il y a eu
che~ lin un canon Je ces livres ,Jixé & déterminé par C au-
torité de lajynagogue. Peut-on douter de cette vérité
quand on confidere que les Juifs donnoient tous le ti-
tre de divins aux mêmes livres , & que le contente-
ment ètoit entr'eux unanime fur ce point ? D'où pou-
voit naître cette unanimité ? linon d'une règle faite
& connue qui marquoit à quoi l'on devoit s'en tenir ;
c'efi-à-dirc d'un canon ou d'un catalogue authentique
qui fixoit le nombre des livres , & en indiquoit les
noms. On ne conçoit pas qu'entre plulieurs livres
écrits en différais tems êv par différens auteurs , il y
en ait eu un certain nombre généralement admis pour
divins à Pexclufion des autres , fans un catalogue au-
torité qui difqnguât ceux-ci de ceux pour qui l'on
n'a pas eu la même vénération; & ce feroit nous don-
ner une opinion auffi fauffe que dangereufe de la na-
tion Juive, que de nous la îefJreienter acceptant in-
diilinctcment & fans examen tout ce qu'il plaifoit à
chaque particulier de lui propofer comme infpiré :
ce qui précède me paroît fans réplique. II ne s'agit
plus que de prouver que les Juifs n'ont reconnu pour
divins qu'un certain nombre de livres, & qu'ils le
font tous accordés à divinifer les mêmes. Les j". cu-
ves en font fous les yeux. La première fe tire de l'u-
niformité des catalogues que les anciens pères ont
rapportés toutes les fois qu'ils ont eu lieu de taire Ré-
munération des livres reconnus pour lucres par les
Tome //,
C A N Coi
Hébreux. Si les Juifs n'avoient pas eux-mêmes fixé le
nombre de leurs livres divins , les pères ne fe feroient
pas aviles de le faire : ils le feroient contentés de mar-
quer ceux que les Chrétiens dévoient regarder com-
me tels , fans fe mettre en peine de la croyance des
Juifs là-deilus ; ou s'ils av oient ofé fuppofer un canon
Juif qui n'eût pas exifté , ils ne l'auroient pas tous fa-
briqué de la même manière ; la vérité ne les dirigeant
pas , le caprice les eût fait varier , foit dans le choix,
foit dans le nombre ; & plufieurs n'auroient pas man-
qué furtout d'y inférer ceux que nous nommons deuté-
rocanoniques, puifqu'ils les croyoient divins, & les ci-
toient comme tels. Nous devons donc être perfuadés
de leur bonne foi par l'uniformité de leur langage ,
& par la fincérité de l'aveu qu'ils ont fait que quel-
ques livres mis par l'Eglife au rang des anciennes
écritures canoniques , en étoient exclus par les fyna-
gogues. La même raifon doit auffi nous convaincre
qu'ils ont été furïïfamment inftruits de ce fait : car s'il
y avoit eu de la diverfité ou des variations fur ce point
entre les Juifs , ils auraient eu au moins autant de
facilité pour s'en informer, que pour favoir qu'on y
comptoit ces livres par les lettres de l'alphabet, èc ils
nous auroient tranlmis l'un comme l'autre. L'accord
des pères fin la queffion dont il s'agit , démontre donc
celui des Juifs fur leur canon.
Mais à l'autorité des pères fe joint celle de Jofephe»
qui fur ces matières , dit M. Huet , en vaut une foulé
d'autres, unus pro mille. Jofephe,ds race facerdotale ,
& profondément inftruit de tout ce qui concernoit
la nation , eft du fentiment des pères. On lit clans fon
premier livre contre Appion, que les Juifs n'ont pas
comme les Grecs , une multitude de livres ; qu'ils
n'en reconnoiffent qu'un certain nombre comme di-
vins ; que ces livres contiennent tout ce qui s'efî
paffé depuis le commencement du monde jufqu'à
Artaxercès ; que quoiqu'ils ayent d'autres écrits, ces
écrits n'ont pas entr'eux la même autorite que les
livres divins , & que chaque Juif ett prêt à répandre
Ion fang pour la défenfe de ceux-ci : donc il y avoic
che{ les Juifs, félon Jofephe , un nombre jixé & détermi-
né de livres reconnus pour divins ;&c cil -là. précilé-
mént ce que nous appelions canon.
La tradition confiante du peuple Juif eft une troi-
sième preuve qu'on ne peut rejetter. Ils ne comptent
encore aujourd'hui entre les livres divins que ceux ,
difent-ils , dont leurs anciens percs ont dreffé le canon
dans le tems delà grandefynagOgue , qui fleurit après
le retour de la captivité. C'eft même en partie par
cette raifon qu'elle fut nommée grande. L'auteur du
traité Megillah dans la Gémare, nous apprend au ch.
//'/.que ce litre lui fut donné non-feulement pour avoir
ajouté au nom de Dieu l'épithete gadol , grand, ma-
gnifique, mais encore pour avoir dreffé le canon des
livres facrés: donc , pouvons-nous conclurrepourla
troifieme fois , /'/ ejl certain qu'il y a eu che{ les Juifs un
canon déterminé & authentique des livres de V ancien TeJ-
rnent regardés comme divins.
N'y a-t-il jamais eu chc^ les Juifs quun même & feut
canon des filmes Ecritures ? Seconde quellion, pour
fervir de confirmation aux preuves de la quellion pré-
cédente. Quelques auteurs ont avancé que les Juifs
avoient fait en différais tems différais crt/jo/z.s- de leurs
livres facrés; & qu'outre le premier compofé de vingt-
deux livres, ils en avoient dreffé d'autres où ils avoient
inféré comme divins , Tobie , Judith , i ' Eccléjuijliquc ,
/./ Sagtjfc, C-- les Mae1:.!-. ..
Genebrard fuppofe dans ù chronologie trois diffé-
rais canons faits par les aflemblées de là fj
le premier au temsd'Efdras, dreffe par la
nagogue , qu'il compte pour le cinquième
contenait \ in:;t -deux livres : le fécond au tems du
pontife Eléazaf , dans un fynode affemblé pour déli-
bérer fur la verfion que demandât le roi Ptolémée,
G Gge
602
C A
C A N
& que nous appelions des Septante , où l'on mit au
nombre des livres divins Tobie , Judith , la Sageffe ,
& V Eccléfiajlique : le trcifieme au tems d'Hircan , dans
le feptieme fynode affemblé pour confirmer la feue
des Phariiiens , dont Hillel & Sammai étoient les
chefs , & condamner Sadoc &c Barjetos , promoteurs
de celle des Saducéens , &c où le dernier canon fut
augmenté du livre des Machabécs , & les deux canons
precédens confirmés malgré les Saducéens , qui com-
me les Samaritains ne vouloient admettre pour di-
vins que les cinq livres de Moyié. À entendre Gene-
brard établir fi délibérément toutes ces diftinâions ,
on diroit qu'il a tous les témoignages de l'hiltoire an-
cienne des Juifs en fa faveur ; cependant on n'y trou-
ve rien de pareil , & l'on peut regarder fa narration
comme un des efforts d'imagination les plus extraor-
dinaires , & une des meilleures preuves que l'on ait
de la nécefllté de vérifier les faits avant que de les
admettre en démonftration.
Serrarius , qui eft venu après Génébrard , n'a pas
jugé à propos d'attribuer aux Juifs trois canons diffé-
rens. Il a cru que c'étoit affez de deux , l'un de vingt-
deux livres fait par Efdras ; & le même , augmenté
des livres deutérocanoniques , &c dreffé du tems des-
Machabées. Pour preuve de ce double canon, il
lui a femblé , ainfi qu'à Genebrard , que fa parole
fuffifoit. Il fe propofe cependant l'objection du filen-
ce des pères fur ces differens canons^, & de leur ac-
cord unanime à n'en reconnoître qu'un compofé de
vin«t-deux livres divins. Mais fa réponfc eft moins
celle d'un favant qui cherche la vérité , que celle
d'un difputant qui défend fa thefe. Il prétend avec
confiance que les pères en parlant du canon des écritures
Juives , compofées de vingt-deux livres , n'ont fait mention
que du premier, fans exclurre les autres. Quoi donc , lorf-
qu'on examine par une recherche expreffe quels font
les livres admis pour divins par une nation , qu'on en
marque pofitivement le nombre , & qu'on en donne
les noms en particulier, on n'exclut pas ceux qu'on ne
nomme pas ? Moyfe en difant qu'Abraham prit avec
lui trois .cents dix-huit de fes ferviteurs , pour déli-
vrer Loth fon neveu des mains de fes ennemis , n'a-
t-il pas exclu le nombre de quatre cents ? & lorfque
Févangélifte dit que Jefus-Chrift choifit douze apô-
tres parmi fes difciples, n'exciud-il pas un plus grand
nombre ? Les pères pouvoient-ils nous dire plus ex-
preffément que le canon des livres de l'ancien Tef-
tament n'alloit pas jufqu'à trente , qu'en nous afsû-
rant qu'il étoit de vingt-deux ? Quand Meliton dit à
Onéfime qu'il a voyagé jufques dans l'orient pour
découvrir quels étoient les livres canoniques , & qu'il
nomme enluite ceux qu'il a découverts & connus ,
n'en dit-il pas affez pour nous faire entendre qu'il n'en
a pas connu d'autres que ceux qu'il nomme? C'eft
donc exclurre un livre du rang des livres facrés, que
de ne point le mettre dans le catalogue qu'on en fait
exprès pour en défigner le nombre & les titres. Donc,
en failant rémunération des livres reconnus pour di-
vins par les Juifs , les pères ont néceffairement ex-
clu tous ceux qu'ils n'ont pas nommés ; de même
que quand nos papiers publics donnent la lifte des of-
ficiers que le Roi a promus, on eft en droit d'aflùrer
qu'ils excluent de ce nombre tous ceux qui ne le trou-
vent pas dans leur lifte. Mais fi ces raiibns ne fuffi-
fent pas , fi l'on veut des preuves pofitives que les
pères ont exclu d'une manière expreffe & formelle
du canon des Ecritures admifes pour divines par les
Juifs , tous les livres qu'ils n'ont pas comptés au
nombre des vingt-deux , il ne fera pas difficile d'en
trouver.
Saint Jérôme , dans fon prologue défenfif, dit qu'il
l'ac ompofé afin qu'on fâche que tous les livres qui
ne font pas des vingt-deux qu'il a nommés , doivent
être regardés comme apocryphes ; ut foire valeamus
quidquid extra hos efl ( on verra dans'la queftion fùî-
vante' quels étoient ces vingt-deux livres ) inter apo-
crypha ejje ponendum. Il ajoute enfuite que la Sageffe ,
V EccUfiajlique , Tobie , Judith, ne lent p;;s dans le ca-
non, igitur Sapientia , qnœ vulgo Salomonis inferibitur ,
& Jefu filii Sirach liber, & Judith , & Tobias , & Pafor,
non j'unt in canone. Dans la préface fur Tobie , il dit
que les Hébreux excluent ce livre du nombre des Ecri-
tures divines , & le rejettent entre les apocryphes.
Il en dit autant à la tête de fon commentaire fur le
prophète Jonas.
On lit dans la lettre qu'Origene écrit à Africanus,
que les Hébreux ne reconnoiffent ni Tobie ni Judith ,
mais qu'ils les mettent au nombre des livres apocry-
phes: nos oportet feire quod Hebrœi Tobiù non utuntut
ncque Judith ; non enim ea liaient niji in apocryphis.
Saint Epiphane dit, nomb. 3 & 4 de fon livre des
Poids & des mefures , que les livres de la Sageffe & de
V Ecclifiaflique ne font pas chez les Juifs au rang des
Ecritures-faintes.
L'auteur de la Synopfe affure que Tobie , Judith ,
la Sagejji Se ï Eccléfiajlique , ne font point des livres
canoniques , quoiqu'on les life aux catéchumènes.
Y a-t-il rien de plus clair & de plus décififque ces
paffages ? Sur quoi fe retranchera donc Serrarius ?
Il répétera que les pères ne parlent dans tous ces en-
droits que du premier canon des Juifs : mais on ne
l'en croira pas ; en verra qu'ils y difent nettement
que Judith , Tobie, & les autres de la même claffe, ne
font pas reconnus pour divins par les Juifs , par les
Hébreux , par la nation. D'ailleurs , ce fécond canon
imaginaire ne devoit-il pas avoir été fait par les Juifs
ainfi que le premier? Comment donc S. Jérôme Se
Origene auraient- ils pu avancer que les Juifs regar-
doient comme apocryphes des livres qu'ils auroient
déclarés authentiquement divins Se facrés , quoique
par un lecond canon ? Le premier ajoûteroit-il , com;
me il fait dans fa préface fur Tobie , que les Juifs peu-
vent lui reprocher d'avoir traduit cet ouvrage com-
me un livre divin , contre l'autorité de leur canon ,
s'il y avoit eu parmi eux un fécond canon où Tobie
eût été mis au rang des livres divins ? Méliton n'a-
t-il recherché que les livres du premier canon , ou
a-t-il voyagé jufques dans l'orient pour connoître
tous les ouvrages reconnus de fon tems pour cano-
niques ? en un mot, le defîein des pères en publiant le
catalogue des livres admis pour divins chez les Juifs ,
étoit-il d'expofer la croyance de ce peuple au tems
d'Efdras , ou plutôt celle de leur tems ? & s'il y avoit
eu lieu à quelque diftinftion pareille , ne l'auroient-
ils pas faite ? Laiflbns donc l'école penferlà-deffus ce
qu'elle voudra : mais concluons , nous , que les Juifs
n'ont eu ni trois , ni deux canons, mais feulement un
canon de vingt-deux livres ; & perfiftons dans ce fen-
timent jufqu'à' ce qu'on nous en tire , en nous faifant
voir que les pères fe font trompés , ce qui n'eft pas
poffible. Car d'où tireroit-on cette preuve ? aucun
ancien auteur n'a parlé du double canon\La tradi-
tion des Juifs y eu formellement contraire. Ils n'ont
encore aujourd'hui de livres divins que les vingt-deux
qu'ils ont admis de tout tems comme tels. Jofephe
dit, ainfi qu'on l'a déjà vu , & qu'on le verra plus bas
encore , que fa nation ne reconnoît que vingt-deux
livres divins ; & que *, fi elle en a d'autres , elle ne
leur accorde pas la même autorité. Mais, dira-t-on ,
Jofephe a cité P Eccléfiajlique dans fon fécond livre con-
tre Appion. Quand on en conviendroit , s'enfuivroit-il
de là qu'il en a fait un livre divin ? Nullement. Mais
il n'eft point du tout décidé que Jofephe ait cité YEc-
cléftafiiquc. Il fe propofe de démontrer l'excellence &
la fupériorité de la législation de Moyfé fur celles de
Solon , de Lycurgue & des autres. Il rapporte à cette
occafion des préceptes & des maximes , & il attri-
bue à Moyfe l'opinion que l'homme eft fupérieur en
C A N
tout à la femme. Il lui fait dire que l'homme méchant
elt meilleur que la femme bientaifante ; ■ywi ft %û^m
Çrch a.\Spoç ûç ts vraiTa, v.a.t « crovîtoia. avTov wûtf, aja-Jo-
îTwew ywa.ix.ot ; paroles citées comme de Moyfe , &
non comme de ï EccUfiajlique. On objectera fans dou-
te que ce paffage ne le trouve point dans Moyle. Soit.
Donc Jofephe ne le lui attribue pas. Je le nie , parce que
le fait elt évident. Mais quand je conviendrois de tout
ce qu'on prétend , on n'en pourrait jamais intérer que
Jolephe ait déclaré Y Ecclcfîajlique livre canonique.
M. Pithou remarque que les dernières paroles du
paffage cité de Jolephe ne font pas de lui , & qu'el-
les ont été inférées ielon toute apparence par quel-
que copifte. Cette critique elt d'autant plus vraisem-
blable , qu'elles ne fe trouvent pas dans l'ancienne
verfion Latine de Rufin. Donc le double & le triple
canon Jont des chimères , les Juifs nen fa.ifa.nt aucune
mention, & les pères ne les ayant point connus : ce qu'il
falloit démontrer.
De combien dt livres étoit compofi le canon des Ecri-
tures divines che^ les Juifs , & quels étoient ces livres.
Troifieme queltion , dont la folution fervira d'éclair-
ciffement & d'appui aux deux queftions précéden-
tes. Les Juifs ont toujours compofé leur canon de
vingt-deux livres , ayant égard au nombre des let-
tres de leur alphabet dont ils faifoient ulage pour
les défigner , félon l'obfervation de S. Jérôme ,dans
fon prologue général ou défenfif. Quelques rabbins
en ont compté vingt-quatre ; d'autres vingt-fept ;
mais ces différens calculs n'augmentoient ninedimi-
nuoient le nombre réel des livres ; certains livres di-
vifés en plufieurs parties y occupoient feulement
pluiieurs places.
Ceux qui comptoient vingt-quatre livres de l'É-
criture , féparoient les Lamentations , de la Prophé-
tie de Jérémie , & le liVre de liuth de celui des Juges,
que ceux qui n'en comptoient que vingt-deux laii-
ioicnt unis : les premiers , afin de pouvoir marquer
ces vingt-quatre livres avec les lettres de leur alpha-
bet , répétoient trois fois la lettre jod, en l'honneur
du nom de Dieu Jehova , que les Chaldéens écri-
voient partroisyW. Ce nombre de vingt-quatre elt
celui dont les Juifs d'à prélent fe fervent pour défi-
gner les livres de l'Ecriturc-fainte ; & c'elt peut-être
à quoi les vingt-quatre vieillards de l'Apocalypfe
font allufion.
Ceux qui comptoient vingt-fept livres , féparoient
encore en fix nombres les livres des Rois 6c des Pa-
ralipomenes , qui n'en faifoient que trois pour les au-
tres. Et pour les indiquer , ils ajoûtoient aux vingt-
deux lettres ordinaires de l'alphabet les cinq finales,
comme nous l'apprend S. Epiphane dans fon livret
Foids&des me/ures.Ccux qui lavent l'alphabet Hébreu
( car il n'en faut pas favoir davantage ) connoiffent
ces lettres finales. Ce font cap/i , mem , nun , pé , tfad,
qui s'écrivent à la fin des mots d'une manière diffé-
rente que dans le milieu ou au commencement.
Le canon étoit donc toujours le même , loit qu'on
comptât les livres par 22 , 14011 17. Mais la premiè-
re manière a été la plus générale & !a plus commu-
ne ; c'elt celle de Jolephe. M. Simon donne l'ancien-
neté à celle de 24 : mais je ne lai fur quelle preuve ,
car il n'en rapporte aucune. J'avoue que ces matiè-
res ne me font pas affez familières pour prendre parti
dans cette queltion , & pour hafarder une conjecture.
Voyons maintenant quels étoient ces 22, 24 Cv 27
livres. S. Jérôme témoin digne de foi clans cette ma-
tière, en fait l'énumération fuivante. La Genefe. VE-
xode. Le Lcvitique. Les Nombres. LvDeutéro/wme .J rofki '.
Les/«g)U,auquel elt joint Rttth. Samuel ',cc font les deux-
premiers des Rois. Les Rois , ce font les deux derniers li-
vres. IJaie. Jeremie , avec fes Lamentations. E~echiel.
Les dou^e petits Prophètes. Job. Les PJeaumes. LesPro-
j tries, L Eccléjîajlc. Le Cantique des Cantiques, Daniel.
Tome II.
C A N
603
Les Paralipomenes , double. Efdras , doubla. Eflher.
S. Epiphane , Heref. viij. nomb. 6. c'ait, de Petau>
rapporte les mêmes livres que S. Jérôme. On retrou-
ve le même canon en deux ou trois autres endroits de
fon livre des Poids & mefures. Vâye^ les nomb. J. 4.
22. 2.3 ■ C>n lit au nombre 22 , que les Hébreux n'ont
que 22 lettres à leur alphabet ; que c'elt par cette
raifon qu'ils ne comptent que 22 livres facrés , quoi-
qu'ils en ayent 27 , entre Ielquels ils en doublent cinq,
ainli qu'ils ont cinq caractères doubles ; d'où il arrive
que comme il y a dans leur écriture 27 caraclcres ,
qui ne font pourtant que vingt-deux lettres , de mê-
me ils ont proprement vingt-fept livres divins , qui
le réduifent à vingt-deux.
S. Cyrille de Jérufalem dit aux Chrétiens , dans fa
quatrième catechefe, de méditer les vingt-deux livres de
l'ancien Teltament , & de fe les mettre dans la mé-
moire tels qu'il va les nommer ; puis il les nomme
ainli que nous venons de les rapporter d'après S.Jé-
rôme & S. Epiphane.
S. Hilaire, dans fon Prologue fur les Pfeaumes , ne
diffère de l'énumération précédente , ni fur les nom-
bres , ni fur les livres. Le canon 60 , de Laodicée ,
dit la même choie. Origene , cité par Eufebe , avoit
dreffé le même canon. Ce feroit recommencer la mê-
me choie jufqu'à l'ennui , que de rapporter ces ca-
nons.
Méliton Evêque de Sardes , qui vivoit au fécond
fiecle de l'Eglife , avoit fait un catalogue qu'Eulebe
nous a confervé, c. xxvj. I. IV. de Ion hiltoire. Il avoit
pris un loin particulier de s'inffruire. Il avoit voyagé
exprès dans l'orient, & fon catalogue elt le même que
celui des auteurs précédens ; car il elt à prélumer que
l'oubli d'Elther elt une faute de copifte.
Bellarmin donne ici occalion à une réflexion , par
ce qu'il dit dans fon livre des Ecrivains eccléjiafliquesx
favoir , que Méliton a mis au rang des livres de L'an-
cien Tejlameut celui de la Sageffe , quoiqu'il ne fût point
reconnu par Jes Juifs pour un livre divin. Mais Bellar-
min le trompe lui-même. La Sageffe n'elt point dans
le canon de Méliton. On y lit : Salomonis Proverbia quee.
& Sapientia, la.Xcfj.arlcç Ïïuf.oi/Ma.1 » v.a.i 1c$ix. D OÙ il
s'enfuit que Méliton ne nomme pas la SLigeffe comme
un livre dillingué des Proverbes; c'elt l'a foit oublie ,
foit mal entendu , qui a donné lieu à la méprife.
Mais , pour revenir au canon des Juifs , Jofephe dit
dans Ion livre contre Appion , qu'il n'y a dans fa nation
que 22 livres reconnus pour divins , cinq de Moyfe ,
treize des prophètes , contenant l 'hiltoire de tous les
tems jufqu'à Artaxercès , & quatre autres qui ren-
ferment des hymnes à louange de Dieu , ou des pré-
ceptes pour les mœurs. Il n'entre pas dans le dé-
tail , mais il déligne évidemment les mêmes livres
que ceux qui font contenus dans les catalogues des
percs.
Sur ce que l'hiftorien Juif a placé dans fes Anti-
quités l'hiitoire d'Elther fous le règne d'Artaxerces ,
& fur ce qu'il dit dans le même endroit que les pro-
phètes n'ont écrit l'hiftoire que /'ufqu'su tems de ce
prince , ôt qu'on n'a pas la même foi à ce qui s'eft
paffé depuis , M. Dupin s'elt perluadé qu'il exclut le
livre (ÏE/iher du nombre des vingt-deux livres de Ion
canon. Mais quiclt-ccqui a dit à M. Dupin que Jole-
phe ne s'elt point lervi du mot juf que dans un lens in-
clufif, ainli que du terme depuis dans un le;. s excluiit r
Ce feroit faire injure à d'habiles cv judicieux auteurs
qui ont précédé M. Dupin , que de balancer leur té-
moignage par une obferv ation grammaticale qui , au
pis aller , ne prouve ni pour ni contre.
Il ne faut point non plus s'imaginer que Jofephe
n'ait point nus le livre de toi au nombre des vingt-
deux livres divins , parce qu'il ne dit rien dans fon
ouvrage des malheurs de ce faint homme. Cet auteur
a pu regarder le livre de Job connue un livre infpire ,
G G g g ij
&
004
C A N
mais non comme une hiftoire véritable ; comme un
poème qui montroit partout l'efprit de Dieu , mais
non comme le récit d'un événement réel ; & en ce
fcns^ quel rapport pourroit avoir l'aventure de Job
avec l'hiftoire de fa nation.
Quel efi le tems & quel efi P auteur du canon des li-
vres facrès chc{ hs Juifs. Quatrième queltion. Il iém-
ble que ce iéroit aujourd'hui un paradoxe d'avancer
qu'Eldras ne fut jamais l'auteur du canon des livres
facrés des Juifs ; les docteurs mêmes les plus judi-
cieux ayant mis fur le compte d'Eldras tout ce dont
ils ont ignoré l'auteur & l'origine , dans les chofes
qui concernent la Bible. Ils l'ont fait réparateurdes
livres perdus ou altérés , réformateur de la manière
d'écrire ; quelques-uns même inventeur des points
voyelles , & tous auteur du canon des Ecritures. Il
n'y a fur ce dernier article qu'une opinion. Il eft
étonnant que nos Scaliger , nos Huet , ceux d'en-
tre nous qui fe piquent d'examiner de près les cho-
fes, n'ayent pas duTerté là-deffus ; la matière en va-
loit pourtant bien la peine. M. Dupin , au lieu de
tranferire en copifte l'opinion de les prédéceifeurs,
auroit beaucoup mieux fait d'expoiér la queltion, &
de montrer combien il étoit difficile de la réfoudre.
Quoi qu'il en foit de l'opinion commune , il me
femble qu'il n'y auroit aucune témérité à affûrer qu'on
peut foutenir qu'Efdras n'eft point l'auteur du canon
des livres reconnus pour livres divins par les Juifs ,
foit qu'on veuille difeuter ce fait par l'hiftoire des
empereurs de Perle , & celle du retour de la captivi-
té ; lbit qu'on en cherche l'éclairciiîement dans les
livres d'Eldras & de Néhemie , qui peuvent particu-
lièrement nous inftruire. L'opinion contraire , quoi-
que plus fuivie, n'eft point article de foi.
En un mot voici les difficultés qu'on aura à réfou-
dre de part & d'autre , & ces difficultés me paroif-
fent très-grandes : i°. il faut s'afïïirer du tems où Ef-
dras a vécu; 2°. fous quel prince il eft revenu de
Babylone à Jérufalem ; 30. fi tous les livres qui font
dans le canon étoient écrits avant lui ; 40. fi lui-mê-
me eft auteur du livre qui porte l'on nom.
Voilà la route par laquelle il faudra paner avant que
d'arriver à la -folution de la 4e queltion : nous n'y en-
trerons point , de crainte qu'elle ne nous menât bien
au-delà des bornes que nous nous fommes preferi-
tes: ce que nous avons dit juiqu'à prélent fuffit pour
donner à ceux qui fe fentent le goût de la critique ,
un exemple de la manière dont ils doivent procé-
der pour parvenir à quelque réfultat , fatisfaifant
pour eux & pour les autres ; c'étoit là principale-
ment notre but.
Il ne nous relie plus qu'une obfervation à faire ,
c'eft que le canon qui fixe au nombre de vingt-deux
les livres divins de l'ancien-Teftament , a été fiiivi
dans la première Eglife jufqu'au concile de Carthage ;
que ce concile augmenta beaucoup ce canon, com-
me il en avoit le droit ; & que le concile de Trente
a encore été au- delà du concile de Carthage , pro-
nonçant anathème contre ceux qui réfuteront de fe
foûmettre à fes décifions.
D'où il s'enfuit que dans toutes difcufîions criti-
ques fur ces matières délicates , le jugement de l'E-
glife doit toujours aller avant le nôtre ; & que dans
les occafions où il arriveroit que le réfultat de nos
recherches ne feroit pas conforme à fes décrets ,
nous devons croire que l'erreur efi de notre cô-
té : l'autorité que nous avons alors contre nous eft
d'un fi grand poids , qu'elle ne nous laifTe pas feu-
lement le mérite de la modeitie , quand nous nous
y foûmettons , & que nous montrons une vanité
impardonnable , quand nous balançons à nous foû-
mettre. Tels font les fentimens dans lefquels j'ai com-
mencé, continué , & fini cet article , pour lequel je
demande au lecteur un peu d'indulgence : il la doit
C A N
à la difficulté de la matière , & aux foins que j'ai pris
pour la difeuter comme elle le mérite. Voye^ à l'arti-
cle Canoniques (Livres) ce qui concerne le canon
du nouveau-Teftament ; c'eft la fuite naturelle de ce
que nous venons de dire.
Canon , terme d'Hijloire ecclifiafiique , fignifie pro-
prement règle ou décijion , foit fur le dogme , foit fur
la difeipline.
Ce mot eft originairement Grec , kavÙv , règle , dif-
eipline.
Nous avons les canons des apôtres, de l'authenti-
cité defquels tout le monde ne convient pas , quoi-
qu'on avoue en général qu'ils font fort anciens , &
diverfes collections de canons des conciles que nous
allons indiquer d'après M. Fleury , dans fon Inflitu-
don au droit eccléfîajhque.
Sous le règne de Conftantin, l'an 314, fe tin-
rent les conciles d'Ancyre en Galatie , & de Néoce-
farée dans le Pont , qui font les plus anciens dont il
nous refte des canons : enfuite , c'eft-à-dire en 3 2 5 ,
fe tint le concile général de Nicée , dont les canons
ont aufîi été recueillis. Il y eut enfuite trois conci-
les particuliers dont les canons furent de grande auto-
rité ; l'un à Antioche , capitale de l'Orient, en 341 ;
l'autre à Laodicée en Phrygie , vers l'an 370 ; & le
troifieme à Gangres en Paphlagonie , vers l'an 375 ;
enfin l'an 381 fe tint le fécond concile univerlel à
Conftantinople.
Les canons de ces fept conciles furent recueillis
en un corps qu'on appella le code des canons de VE-
glife univerfelle , auxquels on ajouta ceux du concile
d'Ephefe , qui fut le troifieme œcuménique tenu en
430, & ceux du concile de Chalcédoine , tenu en
450 : on y ajouta aufïï les canons des apôtres , au
nombre de cinquante , & ceux du concile de Sardi-
que , tenu en 3 47 , & que l'on regardoit en plulieurs
églifes comme une fuite du concile de Nicée.
Tous ces canons avoient été écrits en Grec , & il
y en avoit pour les églifes d'Occident une ancienne
verfion Latine dont on ne fait point l'auteur. L'Egli-
fe Romaine s'en fervit jufqu'au commencement du
vie fiecle ; & les autres églifes , particulièrement
celles de Gaule & de Germanie , n'en connurent
point d'autres jufqu'au IXe fiecle. Mais vers l'an 530
l'abbé Denys le Petit fit une autre verfion des canons
plus fidcle que l'ancienne , & y ajouta tout ce qui
étoit alors dans le code Grec ; favoir les cinquante
canons des Apôtres , ceux du concile de Chalcédoine,
du concile de Sardique, d'un concile de Carthage, &
de quelques autres conciles d'Afrique. Il fit aufîiune
collection de pluficurs lettres décretales des papes ,
depuis Sirice qui mourut en 398 , julqu'à Analtafe II.
qui mourut en 498. foye^ Décretales.
La collection de Denys le Petit fut de fi grande
autorité , que l'Eglife Romaine s'en fervit toujours
depuis , & on l'appella lîmplement le corps des ca-
nons de r Eglife d'Afrique , formé principalement des
conciles tenus du tems de S. Auguftin. Les Grecs la
traduifirent pour leur ufage ; & Charlemagne l'ayant
reçue en 787 du pape Adrien I. l'apporta dans les
Gaules.
Les Orientaux ajoutèrent aufîi des canons à l'an-
cien code ; favoir , trente-cinq canons des apôtres ,
enforte qu'ils en comptoient quatre-vingts-cinq ; le
code de l'églife d'Afrique traduit en Grec ; les canons
du concile in trullo, faits en 692 , pour fuppléer au
cinquième & au fixieme concile qui n'avoient point
fait de canons ; ceux du fécond concile de Nicée, qui
fut le feptieme œcuménique tenu en 787 : tout cela
compolà le code des canons de l'Eglife d'Orient ; &
ce peu de lois fuffit pendant 8oo ans à toute l'Eglife
catholique.
Sur la fin du règne de Charlemagne on répandit
en Occident une collection des canons qui avoit été
C A N
apportée d'Efpagne, & qui porte le nom d'un Ifidore,
que quelques-uns iurnomment le marchand , ljldorus
mercator : elle contient les canons orientaux d'une
verfion plus ancienne que celle de Denys le Petit,
plufieurs canons des conciles de Gaule & d'Efpagne,
6c un grand nombre de 'décrétâtes des papes des qua-
tre premiers fiecles jufqu'à Sirice , dont plufieurs ibnt
fauffes& fuppoiées. ^oy^DECRETALES.
On fit cnfuite plufieurs compilations nouvelles des
anciens canons , comme celle de Réginon, abbé de
Prum , qui vivoit l'an 900 ; celle de Burchard , évo-
que de Vormes, faite l'an ioao; celle d'Yves de
Chartres, qui vivoit en 1 100 ; & enfin Gratien , Bé-
nédictin de Boulogne en Italie , fit la fienne vers l'an
1151; c'eft celle qui eft la plus citée dans le Droit
canon. Fleury , Injlit. au Dr. eccléf. tome I. part. I.
ch.j.page 2. 3. 4. 3. 6. y. 8. & 10.
Gratien mit à fa collection des textes de la Bible,
les fentimcns des pères fur les plus importantes ma-
tières eccléfiaftiques , & intitula ion ouvrage la Con-
cordance des canons difcordans ; il le partagea par or-
dre de matières , & non par ordre de tems , comme
on avoit fait avant lui. Cette compilation fait partie
du Droit .canonique, & eft appellée Décret. Koye^
Décret & Canonique (droit).
On nous a depuis donné diveries collerions des
conciles , où l'on en a coniervé les canons , comme
celle des PP. Labbe & Coffart , Hardoiiin , &c.
Les canons des conciles font pour l'ordinaire con-
çus en forme de lois , en termes impératifs , quelque-
fois conditionnels , tk. oii l'injonction eft prefque tou-
jours accompagnée de la peine infligée à ceux qui la
violeront : quand il s'agit du dogme, les canons font
quelquefois conçus en forme d'anathème; c'eft-à-di-
re , que les PP. du concile y difent anathème , ou
excommunient quiconque foûtiendra telle ou telle
erreur qu'ils ont condamnée.
Canons des Apôtres ; on appelle ainfi une efpe-
cc de collection des canons ou lois eccléfiaftiques que
l'on attribue à S. Clément pape , difciple de S. Pierre,
comme s'il l'eût reçue de ce prince des apôtres. Mais
les Grecs même n'aflûrent pas que ces canons ayent
été faits par les apôtres , & recueillis de leur bou-
che par S. Clément ; ils fe contentent de dire que ce
ibnt des canons , Ae; 0f4.i1 ci tw à.^o^'huiv , que F on ap-
pelle des apôtres : tk. apparemment ils ibnt l'ouvra-
ge de quelques évêques d'Orient, qui vers le milieu
du 111e. fiecle rafîémblerent en un corps les lois qui
étoient en ufage dans les églifes de leurs pays , &
dont une partie pouvoit avoir été introduite par tra-
dition des le tems des apôtres , & l'autre par des
conciles particuliers. Il y a quelque difficulté tant
fur le nombre que fur l'autorité de ces canons. Les
Grecs en comptent communément 85 : mais les La-
tins n'en ont reçu que 50 , dont même plufieurs ne
font pas obfervés. Les Grecs comptent les 50 pre-
miers à peu-près comme nous : mais ils en ajoutent
d'autres dans la plupart dcfquels il y a des articles
qui ne font pas conformes à la difeiplinc ni même
à la créance de PEglife Latine ; & c'eit pour cette
raifon qu'elle rejette les 3 s derniers canons, comme
ayant été la plupart infères ou faliïfiés par les héré-
tiques tk fchifmatiqucs. A l'égard de l'autorité de
ces canons , le pape Gelafe , dans un concile tenu à
Rome l'an 494 , met le livre de ces canons des Apô-
tres entre les apocryphes ; & cela après le pape Da-
male , qui lemble avoir été le premier qui détermi-
na quels livres il talloit recevoir ou rejetter. Par
cette raifon Ifidore les condamne auffi , dans le paflâ-
ge que Gratien rapporte de lui dans la fermant dif-
timlion. Le pape Léon IX. au contraire excepte cin-
quante canons du nombre des apocryphes. Avant lui
Denys le Petit avoit commencé ion code des canons
eccleiittfhques par ces cinquante canons, Gratien,
C A N
60
dans la même diflinclion fe'i^ieme, rapporte qu'Ificîore
ayant changé de ientiment, & fe contredifant lui-
même , met au-deffus des conciles ces canons des
apôtres , comme approuvés par la plupart des peies ,
& reçus entre les conftitutions canoniques ; & ajou-
te que ie pape Adrien I. a approuvé les canons en re-
cevant le quatrième concile ou ils lont inférés : mais
on peut due que Gratien le trompe , & qu'il prend
le iecond concile in trullo , que les Grecs appellent
fouvent le quatrième concile , pour le premier con-
cile tenu in trullo , qui eft véritablement le iixieme
œcuménique ou général. Quant à Ifidore , le pre-
mier paiîage eft d'Ifidore de Séville , & le iecond eft
d'ilidore mercator ou peccator, félon la remarque d'An-
toine Auguftin, archevêque de Tarragor.e , qui dit
que pour concilier ces diveries opinions il faut fui-
vre le fentiment de Léon IX. qui elt qu'il y a cin-
quante de ces canons des apôtres qui ont été reçus ,
&que les autres n'ont aucune autorité dans l'églife
Occidentale. Il eft certain que ces canons ne font
point des apôtres : mais ils paroiffent fort anciens ,
& ont été cités par les anciens fous le nom de canons
anciens, canons des Pères , canons eccléfiaftiques. S'ils
font quelquefois appelles ou intitulés canons apojlo-
liques , ce n'elt pas à dire pour cela qu'ils foient des
apôtres: mais il fuffit qu'il y en ait quelques-uns
qui ayent été faits par des évêques qui vivoient
peu de tems après les apôtres , & que l'on appelloit
hommes apofloliques. L'auteur des Conjlitutions apoflo-
liques eit le premier qui attribue ces canons aux Apô-
tres. Ils contiennent des réglemcns qui conviennent
à la diieipline du fécond & du troifieme ficelé de l'E-
glife : ils font cités dans les conciles de Nicée ,
d'Antioche , de Conitantinople , & par plufieurs an-
ciens. On ne fait pas en quel tems cette collection de
canons a été faite ; il le peut faire que ce l'oit en dif-
férens tems ; non-feulement les cinquante premiers,
mais les trente-cinq derniers , font fort anciens ; les
Grecs les ont toujours reçus : Jean d'Antioche , qui
vivoit du tems de Juftinien , les cite dans fa fixieme
novelle ; ils font approuvés dans le fynode in trul-
lo , tk loiiés par Jean Damaicene & par Photius.
Parmi les Latins ils n'ont pas toujours eu le même
fort : le cardinal Humbert les a rejettes ; Gelafe lésa
mis aunombre des livres apocryphes: Denys le Petit
a traduit les cinquante premiers, & les a mis à la tête
de fa collection ; remarquant toutefois que quelques
perionnes ne les avoient pas voulu reconnoître;c'eft
peut-être pour cette raifon que Martin de Braguene
les fit point entrer dans fa collection : mais Ifidore ne
fit point difficulté de les mettre dans la fienne ; tk.
depuis ils ont toujours fait partie du Droit canon.
Auifi-tôt qu'ils parurent en France ils furent eitimés,
tk allégués pour la première fois dans la caufe de
Prétextât du tems du roi Chilperic , & on y déféra.
Hincmar témoigne qu'ils étoient à la tête d'une col-
lection de canons faite par l'Eglife de France , tk les
croit anciens , quoiqu'ils ne foient pas des Apôtres.
Voye^ Beveregius , dans la Defenfe du code des canons
de PEglife primitive. Daillé , de Pjeud. epigraphis. Du-
pin , Difjcrtations préliminaires fur la Bible , chap. iij.
Doujat , Hijl. du Droit. (G)
Canon, (Chronol. ) ce mot, autant qu'on en
peut juger en parcourant les Chronologiltes, elt em-
ployé en difterens lens : quelquefois il lignifie ample-
ment des tables chronologiques , telles que les tables du
nombre d'or, desépactes, &de la pàque ; quelque-
fois il lignifie la méthode ou règle pour réibudre cer-
tains problèmes de chronologie ; comme trouver les
épaôes , les pleines lunes , lesfêtes mobiles , &c (O)
* Canon Paschal , ( Hijl eccléf. ) c'eit une ta-
ble des fêtes mobiles où l'on' marque pour un cycle
de dix-neuf ans le jour auquel tombe la fête de Pâ-
que , ecles autres fetes qui en dépendent.
6o6
C A N
On croit que le canon pafchalu été calculé par Eu-
febe de Céfarée , & de l'ordre du concile deNicée.
Voyt{ Pasque , Fête , Cycle.
* Canon , parmi les religieux , c'eft le livre qui
contient la règle & les inftituts de l'ordre : on l'ap-
pelle ^auffi régie , inftitut. Voye^ Règle.
* Canon , lé dit encore dans l'Eglilé du catalogue
des faints reconnus &c canonifés par l'Eglilé. Voye?^
Saint & Canonisation.
* Canon; on appelle ainfi par excellence les pa-
roles facramentales de la meffe ; les paroles fecre-
tes dans lesquelles on comprend depuis la préface
jufqu'au Pater ; intervalle au milieu duquel le prêtre
fait la confécration de l'hoftie. Voye{ Messe.
Le léntiment commun eft que le canon commen-
ce à Te igitur , &c. Le peuple doit lé tenir à genoux
pendant le canon de la meffe , & le réciter en loi-
même tout bas , & de manière à n'être point enten-
du. Quelques-uns difentque S. Jérôme par ordre du
pape Sirice , a mis le canon dans la forme où nous
l'avons ; d'autres l'attribuent au pape Sirice même
qui vivoit lùr la fin du ive. liecle. Le concile de
Trente dit que le canon de la meffe a été dreffé par
l'Eglilé , & qu'il elt compoié des paroles de Jel'us-
Chrift , de celles des apôtres , & des premiers pon-
tifes qui ont gouverné l'Eglilé.
Canon, dans la Mufique ancienne ; c'étoit une
règle ou méthode de déterminer les intervalles des
notes, fioyei Gamme , Note , Musique , &c.
Canon , en Mufique moderne , eft une forte de
fugue qu'on appelle perpétuelle , parce que les parties
partant l'une après l'autre , répètent fans ceffe le
même chant.
Autrefois , dit Zarlin , on mettoit à la tête des fu-
gues perpétuelles qu'il appelle fughe in confeguenra,
certains avertiffemens qui marquoient comment il
falloit chanter ces fortes de fugues ; & ces avertiffe-
mens étant proprement les règles de cette efpece de
fugue, s'intituloient canoni , canons. C'eft de-là que
prenant le titre pour la chofe même , on a nommé
canons ces fortes de fugues.
Les canons les plus faciles & les plus communs ,
fe prennent à l'uniffon ou à l'octave , c'eft-à-dire ,
que chaque partie répète fur le même ton le chant
de celle qui l'a précédée. Pour compofer cette ef-
pece de- canon , il ne faut qu'imaginer un chant à
Ion gré , y ajouter en partition autant de parties
qu'on veut , puis de toutes ces parties chantées fuc-
ceffivement n'en compofer qu'un feul air ; faifant
enforte que le chant de l'une puiffe tormer une fuite
agréable avec celui de l'autre.
Pour exécuter un tel canon , la perfonne qui chan-
te la première partie part feule , chantant de fuite
tout l'air , & le recommence aufîi-tôt fans manquer
à la mefure. Dès que celui-ci a fini le premier chant
qui a fervi de fujet , le fécond entre , commence , &
pourfuit ce même chant comme a fait le premier ;
les autres partent de même fucceffivement auffi-tôt
que celui qui les précède a achevé le premier chant;
& recommençant ainfi fans ceffe , on peut continuer
ce canon auffi long-tems qu'on veut.
L'on peut encore prendre une fugue perpétuelle
à la quinte ou la quarte ; c'eft-à-dire , que chaque
partie fera entendre le même chant que la précé-
dente , une quinte ou une quarte au-deffus d'elle. Il
faut alors que l'air foit entièrement imaginé , & que
l'on ajoute des diéfes ou des bémols félon le cas ,
aux notes dont les degrés naturels ne rendroient pas
exactement à la quinte ou à la quarte , le chant de
la partie précédente. On ne doit avoir ici égard à
aucune modulation , mais feulement au chant ; ce
qui augmente beaucoup la difficulté : car à chaque
fois qu'une partie reprend la fugue , elle entre dans
un nouveau ton.
C A N
Pour faire un canon dont l'harmonie foit un peu
variée , il faut que les parties ne fe fuivent pas trop
promptement , que l'une n'entre que long-tems après
l'autre ; quand elles fe luivent rapidement, comme
à la demi-paufe ou aux foirpirs , on n'a pas le tems
d'y faire entendre plufieurs accords , & le canon ne
peut manquer d'être monotone : mais c'eft un moyen
de faire fans beaucoup de peine des canons à tant de
parties qu'on veut ;. car un canon de quatre mefures
feulement fera déjà à huit parties fi elles fe fuivent
à la demi-paufe ; tk. à chaque mefure qu'on ajoutera,
on gagnera encore deux parties.
L'empereur Charles VI. qui étoit grand Muficien,
& compofoit très-bien , fe plailoit beaucoup à faire
& chanter des canons. L'Italie eft encore pleine de
tort beaux canons qui ont été faits pour ce prince
par les meilleurs maîtres de ce pays-là. ( ^)
* CANON , (en Géométrie & en Algèbre, ) lignifie une
règle générale pour la folution de plufieurs queftions
d'un même genre ; ce mot eft aujourd'hui peu ufité.
On fe fertplus communément des termes méthode &
formule. Voye^ MÉTHODE 6* FORMULE.
Canon naturel des triangles : c'eft une
table qui contient tout enfemble , les finus, les tan-
gentes , & les fécantes des angles ; on la nomme de
la forte , parce qu'elle fert principalement à la réfo-
lution des triangles. Voye^ Triangle.
Canon artificiel des triangles : c'eft une
table où fe trouvent les logarithmes des linus & des
tangentes , &c. Voyc^ Sinus , Tangente , Loga-
rithme.
Canon , ( dans PArt militaire. ) eft une arme à feu
de fonte ou de fer, propre à jetter des boulets de
plomb ou de fer.
Le mot de canon femble venir de l'Italien cannant,
qui vient de canna , canne , parce que le canon eft
long , droit , & creux comme une canne.
Les premiers canons ont été appelles bombardes.
Voye^ Bombarde. On leur a aulîi donné des noms
terribles , pareils à ceux que les anciens donnoient
à leurs machines de guerre ; tels font ceux de cou-
levrine, qui vient du nom de couleuvre; de ferpentine ,
de baflic, & d'autres femblables. Ces noms leur fu-
rent donnés à caufe de la figure de ces animaux que
l'on repréfentoit fur ces fortes de pièces : les Efpa-
gnols par dévotion leur donnoient quelquefois des
noms de faints , témoins les douze apôtres que l'em-
pereur Charles-Quint fit faire à Malaga pour fon
expédition de Tunis.
Les principales parties du canon font Planche V.
de CArtmilit. fig. 4, 3, & 6. i°. La culajfe A avec
fon bouton ; elle n'eft autre chofe que l'épailîeur du
métal du canon depuis le fond de fa partie concave
jufqu'au bouton , lequel termine le canon du côté
oppolé à la bouche.
20. Les tourillons I , qui font deuxefpeces de bras
qui fervent à foûtenir le canon , & fur lefquels il peut
fe balancer & fe tenir à peu près en équilibre : je
dis à peu près y parce que le côté de la culafle doit
l'emporter fur l'autre d'environ la trentième partie
de la pelanteur de la pièce. Comme le métal eft plus
épais à la culaffe que vers l'embouchure du canon ,
les tourillons font plus près de fa culaffe que de fa
bouche.
30. Uame qui eft toute la partie intérieure ou con-
cave du canon. Elle eft marquée dans la fig. 5. PL y.
de PArt milit. par deux lignes ponctuées.
Au fond de l'ame eft la chambre , c'eft-à-dire la
partie qu'occupe la poudre dont on charge la pièce.
Foye{ Chambre.
Dans les pièces de 24 & de 16, on pratique au
fond de l'ame une efpece de petite chambre cylin-
drique a h, PI. F. de l'Art mil. fig. 5. &6, qui peut
contenir environ deux onces de poudre.
C 'A
J-L
4°. La lumière S , qui eft une ouverture qu'on tait
clans l'épaiffeur du métal proche la culaffe, & par
laquelle on met le feu à la poudre qui eft dans le
canon. Elle fe fait dans une efpece de coquille qu'on
conftruit fur la partie fupérieure du canon.
Dans les pièces de 24 & de 1 6 livres de balle , la
lumière aboutit vers le fond des petites chambres cy-
lindriques dont on vient de parler , comme c d, fg.
6. Elles ont pour objet d'empêcher que l'effort de la
poudre dont le canon eft chargé , n'agiffe immédia-
ment fur le canal-de la lumière, ce qui peut le con-
ferver plus long-tems. Suivant X ordonnance du y Oc-
tobre lyjz, la lumière des pièces de canon, mor-
tiers, & pierriers , doit être percée dans le milieu
d'une maffe de cuivre rouge , pure rofette, bien cor-
royée ; & cette maffe doit avoir la figure d'un cône
tronqué rcnverlé. Voye^ Lumière.
50. Les an/es H, qui font deux cfpeces d'anneaux
de même métal que la pièce, placés vers les tou-
rillons du côté de la culaffe , auxquels on donne la
figure de dauphins , de ferpens , & autres animaux ;
ces anfes fervent à paffer des cordages parle moyen
defquels on élevé ck on fait mouvoir le canon. Lorf-
qu'il eft fufpendu à ces cordages , il doit être en équi-
libre , c'eft-à-dire , que la culaffe ne doit point l'em-
porter fur la bouche.
Noms des autres parties du Canon.
B , plate-bande & moulures de la culajje. C , champ de
la lumière. D , ajlragale de la lumière. E , premier ren-
fort. F , plate-bande & moulures du premier renfort. L ,
ceinture ou ornement de volée. M , ajlragale de la ceinture.
N , volée. O , rafragale du collet. P , collet avec le bour-
relet en tulipe. Q , couronne avec fes moulures. R, bouche.
Compofuion du métal du canon. Le métal ou la fonte
dont on fe fert pour les canons, eft compofee de rofette
ou cuivre rouge, de laiton ou cuivre jaune, & d'étain.
* On n'eft pas encore d'accord fur la quantité pro-
portionnelle des métaux qui doivent entrer dans la
compofition deftinée à la fonte des canons. Les étran-
gers mettent 100 livres de rofette ; 10 ck même 20 li-
\ 1 es d'étain , & 20 livres de laiton.
On prétend que les Keller mêloient à 10 milliers
de rofette 900 livres d'étain & 600 livres de laiton.
L'étain eft très-propre à empêcher les chambres:
mais comme il eft mou , les lumières durent d'autant
moins qu'on en a plus employé.
Le fieur Bereau, tondeur, prétend que quand on
eft obligé d'employer de vieilles pièces de métal bas,
le fondeur doit demander fur 100 livres de ce métal,
25 livres de bon cuivre & 5 livres d'étain.
D'autres prennent un tiers de rofette , un quart de
laiton ou vieux métal , & un dix-feptieme d'étain.
Il faut à chaque fonte mettre dix livres de vieux*
oing , fur cinq mille livres de métal.
On a foin de purifier le cuivre , l'étain Si le plomb.
'607
Pour cet effet on prend une once de cinnabre , quatre
onces de poix noire , une once & demie de racine de
raiiort feche , feizé onces d'antimoine; quatre onces
de mercure fublimé , fix onces de bol d'Arménie , &
vingt onces de falpetre. On met tout en poudre fé=
parement; puis on mêle. On arrofe enfuite de deux
livres de l'eau-forte fuivante : Prenez deux livres dé
vitriol , deux onces de fel ammoniac , douze onces
de falpetre , trois onces de verd-de-gris , huit onces
d'alun : mettez en poudre féparément , mêlez & dif-
tillez.
Mettez deux parties de cette eau-forte fur trois
parties de la poudre précédente dans une terrine fur
le feu , remuant bien , 6c laiffant évaporer l'eau juf-
qu'à deffication.
Cela préparé , fondez 97 livres de rofette , avec 6
de laiton , 6c avec autant d'étain : laiffez le tout
quelque tems en fufion , le remuant de tems en tems
avec un bâton ferré ck entortillé de haillons trempés
dans le vieux-oing.
Au bout d'un quart d'heure , fur les 109 livres de
métal mettez deux onces de la poudre fufdite. Pour
cet effet renfermez ces deux onces dans une boîte :
attachez cette boîte à une verge de fer, ck plongez-
la au fond du métal , remuant jufqu'à ce qu'il ne s'é-
lève plus de fumée blanche. Laiffez encore le tout en
fufion pendant une demi-heure , au bout de laquelle
vous pouvez jetter en moule.
A l'égard des canons de fer, on les conftruit de la
même manière que les autres. Ils ne font pas capa-
bles de la même réiîltance que ceux de fonte : mais
comme ils coûtent beaucoup moins , on s'en fert fur
les vaiffeaux , & même dans différentes places de
guerre.
Les canons font de différentes grandeurs , & ils
chaffent des boulets plus ou moins gros , fuivant leur
ouverture.
On faifoit autrefois des canons qui chaffoient des
boulets de 3 3 , de 40 , & même de 96 livres de balie :
mais fuivant l'ordonnance du y Gclobre iyjz , il ne
doit être fondu en France que des pièces de 24 ^ qui
font les plus groffes ; enfuite de 1 6 , de 1 2 , de 8 , ck
de 4, c'eft-à-dirc des pièces qui chaffent des boulets
de 24 livres j de 16 livres, &c. car le canon porte or-
dinairement le nom de la peianteur du boulet qu'il,
peut chaffer. Ainfi une pièce de 24, eft un canon qui
tire un boulet de 24 livres , ck de même des autres
pièces.
On deligne encore les pièces de canon par le dia-
mètre de leur bouche , qu'on nomme ordinairement
leur eaL \ Calibre. On doit le divifer en
36 parties, fuivant l'ordonnance du y Octobre i yjl *
pour déterminer par ces parties ies dimennons des
différentes moulures du canon.
On joint ici la table de toutes les dimenfions des
pièces des cinq calibres liuvant cette ordonnance,
6o3
C A N C A N
Table des dimenfions dis puces de canon des cinq calibres.
Pièces de canon
Longueur de l'ame
Profondeur de la petite chambre
Epaiffeur du métal à la culaffe
Longueur du bouton <
Diamètre des tourillons
Saillie des tourillons
Calibre de la pièce
m
Diamètre du boulet t.
Longueur totale
Poids de la pièce
de 24
pie pouce 1
9 6
2 6
5 5
5 5
5 5
5 8
5 6
5400 hv.
de 16
pic pouce lig.
9 *
I
1G
4
9
9
6
4
9
4
9
4
1 1
4
9
10 6
4200 liv.
de 1:
fie pouce
8 8
**■
4
4
8
8
4
4
4
4
4
6
4
4
10
3200 liv.
de 8
pié pouce
7 10
%■
3
9
7
7
3
10
3
10
3
11
3
9
8 10
2100 liv.
de 4
/»/V pouce
6 6
«*■
3
6
3
3
3
X
3
7
3
11 50 liv.
L'ordonnance de ijjz affujettit tous les Fondeurs
à fuivre le même profil ou les mêmes moulures dans
les différentes pièces des cinq calibres : on joint ici
1 a table des dimenfions de ce profil , qui accompagne
cette ordonnance. On y fuppofe le calibre de chaque
pièce divifé en 36 parties égales : ce font ces parties
qui fervent à exprimer ou donner les différentes di-
menfions de ce profil général.
Table des dimenfions des moulures d'une pièce de canon ,
exprimées en parties de/on calibre divifé en Jô' par-
ties égales.
Noms des Moulures.
larg.
1
Saillie.
1.
2.
Plinthe ou plate-bande de
9
36
4
36
4
36
3-
4-
Liitel inférieur de la gorge
Gorge de la culaffe ....
V6
3
3 6
3
36
Les extrémités
tînilTent aux an-
gles des liltels.
5-
6.
Liitel fupérieur de la gorge
Rondeau de la culaffe . . .
36
3
1
36
2
36
7-
3 6
7*
y
Champ de lumière
1 8
36
Vif de la pièce.
9-
Liitel inférieure de l'aftra-
10.
gale du premier renfort..
Altragale du premier ren-
fort
I
36
3~6
7
36
108
3
11.
1 1
Liitel fupér. de l'altragale
du premier renfort ....
Plate - bande du premier
T
lu!
fol
~ an plus faill.
13
Doucine du renfort . < . .
7 J
36 >
'-ïg au mo\ en.
-^ au plus bas.
14. Liitel de la doucine du fé-
cond renfort
15. Plate-bande du 2d renfort
16. Doucine de la volée
17. Liitel de la doucine de la
volée
1 8. Ornemens de la volée . . .
19. Liitel inférieur de l'altra-
gale de la volée
20. Altragale de l'ornement
de la volée
5.1. Liitel fupérieur de l'aitra-
gale de la volée
22. Scotie de l'aitrag. du collet
it,. Ceinture de la Icotie ....
24. Ailragale du collet
25. le collet & le bourrelet en
tulipe , formés en dou-
cine renvçrfée
26 . Ceinture de la couronne. .
27. Couronne
28. Réglet ou ceinture de la
bouche
Longueur totale de la pièce ,
y compris le bouton de
la culaffe
i au plus faill.
^ au moyen.
Yi au plus bas.
Fcs
Vif de la volée.
j-6 au plus haut.
\-rx au f> lus bas.
,9fi au plus liant.
36 1 _' au plus bas.
au p'us haut.
) - au plus bas.
22
liam.
(Q)
Manière de faire les moules du canon & de le.-,
k Avant tout, il eft à propos d'avoir les terres
toute, préparées. La première qu'on employera fur
la natte, ainfi qu'il fera dit ci-après, fera de ! 1
graffe détrempée avec de la poudre de briqu
quantité
C A N
quantité de la poudre de brique dépend de la bonté
de la terre grade.
La féconde terre qui fervira pour le moule , fera
pareillement de la terre graffe bien battue, avec de
la fiente de cbeval & de la bourre ; la quantité de
.fiente de cheval dépend aufïi de la qualité de la terre.
La troifieme , nommée potée , dont on fe fervira
pour commencer la chape du moule, fera de la terre
graffe très-fine & paffée au tamis , mêlée de fiente de
cheval , d'argille , & de bourre. La terre graffe, l'ar-
gille & la fiente de cheval fe mettront en parties
égales avec un tiers de bourre.
La quatrième , qui s'appliquera fur la potée , fera
de la terre graffe avec fiente de cheval & bourre,
dans la proportion ci-deffus.
Il y a une façon de faire une potée , qui fera meil-
leure que la précédente. Prenez une demi-queue de
terre à four , deux leaux de fiente de cheval : mêlez
le tout dans un tonneau avec de l'eau commune, &
l'y laiffez plufieurs jours , au bout defquels faites des
gâteaux de ce mélange : faites lécher ces gâteaux :
pilez-les bien menus : mettez cette poudre à détrem-
per avec de l'eau de fiente de cheval : broyez-la ,
ainfi détrempée , avec une molette , fur une pierre à
broyer les couleurs. Quand elle fera bien broyée ,
ajoûtez-y environ un litron de cérufe pilée 6c pal-
fée au tamis de foie : rebroyez le mélange à la mo-
lette avec de l'urine , puis ajoutez une douzaine de
blancs d'œufs.
Pour faire l'eau de fiente de cheval dont on vient
de parler , rempliffez un tonneau de cette fiente ; jet-
tez deffus de l'eau juiqu'à ce que l'eau fumage ; laif-
fez tremper quelque-tems , 6c vous aurez l'eau de
fiente.
Quant à la terre qu'on employera fur cette potée ,
on la compoléra d'un muid de terre graffe , de qua-
tre féaux de fiente de cheval , &c d'autant de forte
urine qu'il en faudra pour détremper la terre 6c la
bourre, & battre le tout enlemble.
On prend une pièce de bois de lapin , bien droite
êc à plufieurs pans, ou même toute unie 6c plus lon-
gue que la pièce ne peut être , c'eft-à-dire de 1 2 pies
& plus : cette pièce de bois s'appelle trouffeau. On
couche ce trouffeau tout de fon long , &: l'on en ap-
puie les bouts fur des tréteaux ou chantiers. V. PL I.
Fonderie des canons , figure 1. Le trouffeau de bois A
fur les chantiers B B. La partie C du trouffeau s'ap-
pelle le moulinet: ce moulinet fert à tourner le trouf-
feau , lorfqu'on y met la natte, & que l'on applique
la terre qui doit former par fon enduit le moule ou
la chape.
On graille le trouffeau avec du vieux oing ; on roule
par-deffus, 6c l'on attache avec deuxclous une natte
de paille qui couvre le trouffeau, 6c qui lui donne
une groffeur relative à celle que doit avoir la pièce
de canon, foyc-, même figure, cette natte fur le troufj'eau.
Sur cette natte on applique plufieurs charges ou
couches d'une terre graffe détrempée avec de la pou-
dre de brique, & l'on commence à former un modèle
de canon.
On met enfuite une autre couche , dont la terre
eft bien battue ce mêlée avec de la bourre & de la
fiente de cheval : on en garnit le modèle , juiqu'à ce
qu'il (oit de la groffeur dont on veut la pièce.
En appliquant toutes ces couches de terre , on en-
tretient toujours fous le trouffeau un feu de bois ou
de tourbes, fuivant les lieux, afin de faire lécher la
terre plus promptement.
Après cela on fait toutes les parties de la pièce,
comme le bourrelet , le collet, les aftragales , les ren-
ions, les plates-bandes , &c. ce qui fe Fait d'une ma-
nière fort umple , èc néanmoins fort ingénieufe.
Lorfque la dernière terre appliquée eft encore toute
molle , on approche du moule , qui eft brut , ce que
Tome II,
C A N
609
l'on appelle V échantillon: c'eft une planche de douze
pies ou environ, dans laquelle font entaillées toutes
les difrérentes moulures du canon : on allure cette
planche bien folidement fur les deux chantiers, en-
forte qu'elle ne puiffe recevoir aucun mouvement.
On tourne après cela à force le moule contre l'é-
chantillon , parle moyen de petits moulinets qui font
à l'une de ces extrémités : le moule frottant ainfi con-
tre les moulures de l'échantillon , en prend fimpref-
fion, enforte qu'il reffcmble entièrement à une pièce
de canon finie dans toutes fes parties.
A la fonderie de Paris , au lieu des terres fufdites
on employé du plâtre bien fin : mais ce plâtre a un
inconvénient , c'eft de fe renfler inégalement, ce qui
rend la lurface des pièces moins parfaite ; ce qu'on
pourroit corriger en riniffant le moule un peu plus
menu , laiffant faire au plâtre fon effet ; le rechar-
geant enfuite avec du fuif , & le repaffant à l'échan-
tillon jufqu'à ce qu'il eût la groffeur requife.
Voye^ Plane. XI. de l'Art milit.fig. 1. le trouffeau
de bois A poféfur les chantiers B B . C , eft le moulinet
du trouffeau. D , eji l'échantillon de bois arrêté fur des
chantiers garnis de fer du côté du moule de la pièce , qui
fert à form r les moulures fur la terre molle qui couvre le
trouffeau , à mefure qu'on tourne par le moulinet que fon
voit au bout du troufj'eau. E , efi le moule de terre fur le
trouffeau , que Lon tourne par le moulinet pour lui im-
primer les moulures marquées fur f échantillon,
Lorfque le moule du canon eft formé avec fes mou-
lures , on lui pôle les anlés , les devifes , les armes ,
le baffinet , le nom , l'ornement de volée ; ce qui fe
fait avec de la cire & de la térébenthine mêlées , qui
ont été fondues dans des creux faits de plâtre très-
fin , où ces ornemens ont été moulés.
Les tourillons fe font enfuite ; ce font deux mor-
ceaux de bois de la figure que doivent avoir les tou-
rillons : on les fait tenir au moule avec deux grands
clous. Il faut avoir foin de renfler les renforts avec
de la filaffe ; car faute de cette précaution , ils font
creux à caufe des moulures qui l'aillent.
Après avoir ôté le feu de deffous le moule, on le
frotte partout avec force fuif, afin que la chape qui
doit être travaillée par-deffus , pour le couvrir , ne
s'y attache point. On paffe enfuite le moule par l'é-
chantillon, pour faire coucher le fuif également par-
tout.
Cette chape fe commence d'abord par une cou-
che ou chemife de terre graffe , mais très -fine , qui
s'appelle potée. On a déjà dit que cette potée eft une.
terre paffée & préparée avec de la fiente de cheval ,
de l'argille, 6c de la bourre.
On laifîe fécher la première couche fans feu , ce
qui s'appelle à l'ombre.
Quand elle eft feche, on met par-deffus d'une terre
plus graffe , mêlée aufïi de bourre <5c de liente de che-
val : la proportion eft demi-livre de terre , demi-li\ re
de fiente de cheval , & un tiers de bourre ou environ.
Quand c'eft d'une certaine terre rouge comme celle
qui fe prend à Paris auprès des Chartreux , elle luffit
feule en y mêlant un peu de bourre.
Après que la chape a pris une épaiffeur de quatre
pouces , & qu'elle a été bien féchee au feu , on tire
les clous qui arrétoient les anfes & les tourillons, on
en bouche les entrées avec de la terre , puis l'on ban-
de ce moule, ainfi bien couvert déterre, arec de
bons bandages de fer paffés en long & en large 6c
bien arrêtes : par-defî'us ce fer on met encore de la
groffe terre.
La chape des gros moules a ordinairement cinq
ou iix pouces d'épaiffeur.
Quand le trou eft bien (ce , on ôte les clous de la
natte ; on donne quelques coups de marteau lur les
extrémités du trouffeau , lequel étant plus menu par
un bout que par l'autre , ce que l'on appelle être en
1 i HHhh
6io C A N
dépouille , fe détache infenfiblement du milieu du
moule qu'il traverse de bout en bout ; & en retirant
ce troufleau , la natte vient à mefure, & fe défile avec
beaucoup de facilité.
Ce moule ainfivuidé par dedans, on le porte tout
d'un coup dans la foffe qui eft devant le fourneau , &
où le canon doit être fondu.
L'on jette force bûches allumées dans ce moule juf-
qu'à ce qu'il foit parfaitement fec ; & c'eft ce qu'on
appelle le mettre au recuit.
L'ardeur du feu opère deux effets : elle fond le fuif
quifépare la chappe d'avec le moule; & elle feche
en même tems les terres de ce moule , de manière
qu'on les caffe facilement avec des ferremens , afin
qu'il ne relie en entier que la chape feule , laquelle
dans ion intérieur a coniervé l'impreiïïon de tous les
Ornemens faits fur le moule.
A la place du moule que l'on vient de détruirej'on
met une longue pièce de fer qu'on appelle le noyau.
Voye^ Noyau. Elle fe pofe très-jufte dans le milieu
de la chape , afin que le métal le répande également
de côté & d'autre.
Le noyau eft couvert d'une pâte de cendre bien re-
cuite au feu comme le moule , & arrêtée avec du fil
d'archal , aulli bien recuit , le long & à l'entour par
trois fois en fpirale , couche fur couche , juiqu'à la
groffeur du calibre dont doit être l'ame de la pièce ,
enforte qu'il reft e un efpace vuide enn e le noyau &
le creux de la chape qui doit être rempli par le mé-
tal ; ce qui fait l'épaiffeur de la pièce. Cette précau-
tion de couvrir ce noyau , s'obierve pour empêcher
que le métal ne s'attache , & pour pouvoir eniuite le
retirer aifément du milieu de la pièce ; comme en ef-
fet on l'en tire quand la pièce eft fondue.
Pour faire tenir ce noyau bien droit , on le foûtient
du côté de la culaffe par des barreaux d'acier paffés
en croix ; c'eft ce qu'on appelle le chapelet. Voye^
Chapelet. Du côté de la bouche de la pièce , le
noyau eft foùtenu par une meule faite de plâtre &
de tuiles , dans laquelle pafTe le bout oppolé au cha-
pelet.
Lorfque le noyau eft placé , on attache la culaffe
au moule. Cette culaffe eft faite à part , de la même
composition & ce la même manière que le moule du
corps de la pièce. Elle eft auffi bien bandée de lames
de fer , & elle s'enchâffe proprement au bout du
moule, où elle s'accroche avec du fil d'archal aux
crochets des bandages de la chape.
On coule ordinairement les pièces de la culaffe en
bas, & on laiffe au bout du moule qui eft en haut,
un efpace vuide d'environ deux pies & demi de haut,
lequel iert à contenir la mafjelotte , c'eft-à-dire l'ex-
cédent du métal de la pièce, qui pefe quatre milliers
au moins : ce poids fait ferrer le métal qui compoiè
la pièce , & il le rend moins poreux & moins iujet
à avoir des chambres.
F , dans la fig. i. de la PI. II. de F Art milit. repré-
sente le noyau. G , dans la même figure , ejl une coupe du
noyau recouvert de pâte de cendre pour former le calibre de
la pièce. H , ejl le chapelet de fer qui fe met a V extrémité
de Vame de la pièce pour affembler la pièce avec la culaffe.
I , ejl le profil du moule recouvert defes terres, & retenu par
des bandages de fer. KK^dans la fig.i. toujours même PI.
ILefil épaifjenr de la terre , qui forme la chape du moule.
L L , ejl la chape de la culaffe qui s'affemble au corps de
la pièce par le chapelet , comme les lignes ponctuées le font
voir. M M , eft V efpace vuide pour recevoir le métal entre
la chappe & le noyau. NN, ejl le noyau tel qu'il efipojé
dans le moule : on l'en fait J'ortir lorfque la pièce ell fon-
due. O O, ejl la maffelotte ou [excédent de la matière ,
que fonfeie au bout de la volée à l'endroit qui eft ponc-
tué. P , eft le paffageparoù le métal s'écoule dans le mou-
le. Q , ejl le moule recouvert defes terres & bandages , tel
qu'il eft doits la fcjje où an le met pour fondre la pièce.
CAH
Suppofant qu'on veuille fondre plufieurs pièces à la
fois , au haut du moule font difpoiés plufieurs tuyaux
creux & godets de terre répondant à l'intérieur du
corps du moule , par où le métal doit couler ; & l'on
laiffe auffi plufieurs tuyaux pour fervir d'évent.
Quand tout eft bien préparé , la foffe fe remplit de
terre bien feche que l'on bat avec grand foin couche
fur couche autour du moule jufqu'en haut , les go-
dets , tuyaux , & évents furpaffant de quelques pou-
Ces l'air ou la fuperficie du deffus de la foffe. On for-
me des rigoles tout autour avec une terre graffe que
l'on feche parfaitement : elles fe nomment échenos ,
& elles fervent à conduire le métal du fourneau dans
le moule des pièces. S. Remy. (Q)
* Le fourneau de cette fonderie ne diffère pref-
qu'en rien du fourneau de la grande fonderie en bron-
ze. Voye^ P article de cette fonderie. Il y a à l'es fonda-
tions voûte fous la chauffe, & voûte lous le fourneau ,
avec évent , pour donner lortie à la fumée. Il y a au
raiz-de-chauffée des atres de fer pour remuer le métal
en tufion , avec une ouverture pour jetter le bois dans
la chauffe : cette ouverture fe bouche avec une pelle
de fer. Voye-^ Plane. II. de la fonderie dont il s'agit ici ,
une coupe du fourneau parle milieu furies atres de
fer , fig. J. B B , évents de deffus le fourneau. G G , atres
de fer par où l'on remue le métal. L L , ouvertures par où
l'on tireles craffes. M , chauffe. P, voûte fous le fourneau.
La figure 4. de la même Planche , eft une autre coupe
du même tourneau perpendiculaire à la précédente,
& par la chauffe. Q, évent pour la fumée. OO, voûte
fous la chauffe. N , grille. G , atres de fer. K , la chauffe.
L , ouverture pour remuer le métal. M , le fourneau. ZZ ,
bâtis de charpente pour dej'cendre les moules & remonter
les pièces fondues. V , X , Y , bafcule pour lever & baif-
Jer la porte du fourneau par où l'on remue le métal. Fig.
3. cette porte vûeféparément. X , la porte. V , la bafcule.
Y , le boulet qui la fait hau(Jer & baiffer.
Quand le métal eft chaud à un certain degré con-
nu par le fondeur, c'eft-à-dire fort fluide & non em-
pâté, à quoi l'on employé ordinairement 24 ou 30
heures ou environ , obiervant de tenir les morceaux
de rofette dans le fourneau élevés fur des grès , &
ne pofant pas fur l'atre ; on difpofe des hommes qui
tiennent des pinces ou éclufes de fer fur tous les trous
qui communiquent dans les moides , afin que quand
le métal vient à fortir du fourneau , il remphffe éga-
lement toutes les rigoles, & qu'il foit également chaud
en defeendant dans toutes les parties du moule.
On débouche le trou du fourneau avec une lon-
gue & groffe pièce de fer pointue appellée laferriere.
Ce trou eft fermé en-dedans avec de la terre graffe.
Auffi-tôt qu'il eft ouvert , le métal tout bouillonnant
fort avec impétuofité , & il remplit toutes les rigo-
les : alors les hommes qui tiennent les petites éclu-
fes de fer fur les trous , les débouchent deux à deux ,
& à mefure que les trous fe remplirent ils fe reti-
rent ; & le métal tombant avec rapidité dans le mou-
le , forme la pièce.
Pour éviter les foufflures que le métal forme dans
fon bouillonnement & dans la chute précipitée qui
preffe l'air dans les canaux, les Keller avoient ima-
giné un tuyau qu'ils difpofoient à côté de leur mou-
le : le métal entroit par ce tuyau ; & comme il fai-
foit le chemin de defeendre avec violence au fond
de ce tuyau , qui avoit un trou pour communiquer
dans le moule , il remontoit dans le moule par ce
trou , de la même manière que l'eau qu'on verfe
dans une branche d'un fiphon , remonte dans l'au-
tre : par-là il chaffoit l'air devant lui , & il étoit moins
à portée d'en conierver des parties. Mais l'ulage de
ces habiles Fondeurs fur ce point, n'a pas été géné-
ralement iuivi.
Les moules & les fontes des mortiers & des picr-
riers fe font de la même manière que pour le canon,.
C A N
Lorfque les moules font retirés de la forte , on les
caffe à coups de marteau pour découvrir la pièce
qu'ils renferment. La figure fe montre enfuite ; Se
comme elle eft brute en plufieurs endroits , on fe fert
de cifeaux bien acérés Se de marteaux , pour couper
toutes les fuperfluités & les jets du métal ; & avec
le tems , on donne à la pièce toute la perfection que
l'on veut. Lorfqu'elle commence à avoir une forme
un peu régulière , ce qui s'appelle être décrottée , on
la met à l'aléfoir pour lui donner le calibre qu'elle
doit avoir. Voye^ Alésoir. On perce enfuite fa lu-
mière avec une efpece de foret particulier : après
quoi on fait l'épreuve de la pièce, f^oye^ Epreuve.
Mémoires d'Artillerie par Saint-Remy .
On n'a pas toujours fondu le canon avec un noyau
ou un vuide dans le milieu : il y a eu des Fondeurs
qui l'ont coulé mafïïf ; on voit même dans les Mé-
moires de M. de Saint-Remy, la figure de la machine
C A N Sit
dont ils fe fervoient pour former l'ame de la pièce.
Cette méthode fut abandonnée , fuivant cet auteur,
pour revenir à l'ancienne : mais le fieur Maritz a ob-
tenu depuis quelques années la permiflion de fondre
les pièces maîïîves. On prétend qu'il a inventé une
machine plus parfaite que celle dont il eft fait men-
tion dans les Mémoires de M. de Saint-Remy , pour
les forer. Voyei Noyau.
Lorfque la pièce fe coule maffive , le moule fe
forme de la même manière que s'il devoit avoir un
noyau. On ne fait que fupprimer ce noyau.
On joint ici une table de ce que le Roi paye actuel-
lement en France pour la façon des pièces de canon
dans les différens arfenaux du royaume : le prix des
pièces de la fonderie de Strasbourg eft plus confidé-
rable que celui des autres , parce qu'elles y font cou-
lées mafîives Se forées avec la machine du Sr Maritz,
Table du prix des façons des pièces de canon en France.
FONDERIES
DU ROY.
Pièce
de 24.
Pièce
de 16.
Pièce
de 12.
Pièce
de 8.
Pièce
de 4.
Pièce
de 4,
de brancard
& a dos
de mulet.
Pi pcf.
de 2 longue,
pefant
6 à "00 liv.
Pièce
de 2 courte.
Prix
des
lumières.
8ooliv-
700liv'
6ooIIv«
450^
350'^
750
711 iof-
500
400
300
200Uv-
iooliv-
Strasbourg . . .
1000
950
650
55°
400
100
100
900
850
600
500 .
350
Perpignan ....
800
750
5ï°
450
300
220
300
2CO
IOO
Les métaux font fournis par le Roi aux commiffai-
res des fontes ; il leur eft accordé dix pour cent de
déchet fur tous les métaux qu'ils livrent en ouvrages
neufs , faits , parfaits , & reçus.
Le Roi fournit auffi les outils Se uftenfilcs de fon-
derie : mais les commifTaires des fontes font chargés
de pourvoir à leurs frais au radoub & à l'entretien des
outils Se uftenfilcs qui leur font remis en bon état ,
&e dont on les charge par un inventaire en bonne
forme.
Le Roi paye à Douay & à Perpignan 3 fous , à
Lyon Se à Strasbourg 3 fous 6 deniers de façon pour
chaque-livre de métal pefant , pour les petits ouvra-
ges , comme poulies , boîtes à rouage , mortiers Se
pilons pour comportions, boîtes à fignaux , & autres
petits ouvrages à l'ufage de l'Artillerie.
Les pièces de canon , mortiers , S: pierriers , font
portés aux lieux deftinés pour leur épreuve , Se rap-
portés dans les fonderies aux dépens du Roi , à l'ex-
ception des pièces qui font rebutées, que les com-
mifTaires des fontes font obligés de faire rapporter à
leurs frais Se dépens.
Dans les cas preffans , Se lorfqu'il eft ordonné aux
commifTaires des fontes de ne point réparer les pie-
ces , ils font tenus de les livrer brutes; Se alors il leur
eft rabattu 50 livres par pièce de 24, de 16 Si de 12,
& 25 livres par chacune pièce de calibre inférieur ,
ainfi que pour les mortiers Se pierriers. Mémoires d' Ar-
tillerie de Saint-Remy , troifume édition. (Q)
* Lorfque la pièce eft finie , on perce la lumière :
pour cet effet, on renverfe la pièce de cùté, de ma-
nière qu'un des tourillons foit tourné vers la terre.
Elle elt poléc fur des chantiers , l'endroit où fe doit
Tome II,
percer la lumière correfpondant à la pointe du foret
quand il eft monté fur la bafcule , comme on voit
PI. Lfig. 2.
Suivant {'ordonnance du y Octobre ly^z. le canal
de la lumière doit être pratiqué dans le milieu d'un©
maffe de cuivre rouge , pure rofette, bien écroiii , Se
qu'on a placée clans le moule à la place où devoit être
faite la lumière. On a préféré le cuivre rouge à la ma-
tière même du canon , parce qu'il réfifte davantage
à l'effort de la poudre.
La lumière doit être percée de manière qu'elle for-
me un angle obtus de 100 degrés avec l'extérieur de
la pièce vers la volée. C'eft à quoi l'ouvrier doit faire
attention en perçant , afin de diriger Ion foret conve-
nablement.
Dans les pièces de 1 2 , le canal de la lumière doit
aboutir à 8 lignes du fond de la lumière. Dans celles
de 8 à 7 lignes , Se dans celles de 4 à 6 lignes.
Dans celles de 24&de 16 où il y a de petites cham»
bres, à 9 lignes du fond de la petite chambre dans
celle de 14 , Cn: à 8 lignes dans celle de 16.
Le foret dont on fe fert eft le même que celui des
Serruriers; fa partie tranchante eft feulement en lan-
gue de ferpent.
Comme la force d'un homme ne ferait pas fuftî-*
faute pour pouffer le foret & le faire mordre , on fe
fert de la machine qu'on voit fig. 1. elle s'appelle baf-
cule ; Se s'en fervir , c'eft/<>'V'' à bajcule.
La palette G eft tenue fortement appliquée au fo-
ret par le levier A B C Se le poids D.
* Quand la lumière eft faite , on procède" à l'é-
preuve : pour cet effet , on choilit un lieu terminé par
une butte de terre allez forte pour arrêter le boulet.
H H h h ij
6n
C A N
On place la pièce à terre fur un chantier , Se on
la tire trois fois. La première charge de poudre eft
de la pefanteur du boulet. Après la première épreu-
ve , on y brûle encore un peu de poudre en-dedans
pour la flamber ; on y jette de l'eau fur le champ ; on
bouche la lumière ; on preffe cette eau avec un eepu-
villon , & l'on examine fi elle ne s'échappe par aucun
endroit.
On prend enfuite le chat : c'eft un morceau de fer
foit à trois, (oit à deux griffes , comme on le voltfîg.
3. 4. à. du calibre de la pièce , que l'on conduit par-
tout pour trouver les chambres. On ne peut uler de
la bougie que pour les petites pièces, la fumée l'étei-
gnant d ins les grandes.
On n'éprouve les pièces de la nouvelle invention
qu'avec une charge de poudre des trois quarts du
poids du boulet.
On fubftitue quelquefois au boulet des cylindres
de terre grafle du calibre de la pièce , & d'environ
deux pies de long.
Le chat de l&fig. 5. eft à l'ufage de toute forte de
pièces , par la commodité qu'on a d'étendre ou de rei-
ferrer les griffes par le moyen de l'anneau dans lequel
elles font paffées , 6c du reffort qui eft placé entre
elles.
Quand on s'eft affûré par le chat qui fe trouve ar-
rêté dans l'intérieur de la pièce, qu'il y a chambre, on
connoît la profondeur de la chambre de la manière
fuivante : on prend le chat fimple de la/g-. 3- on éle-
vé fur fa plaque de la terre-glaife jufqu'à la hauteur
du bout de la griffe ; vous conduilez votre griffe dans
cet état dans la chambre ; vous l'y faites entrer le plus
que vous pouvez : quand elle y eft bien enfoncée ,
vous retirez votre chat ; les bords de la chambre ap-
puient contre la glaife , &c la détachent de la griffe ;
& la partie découverte de la griffe marque la profon-
deur de la chambre.
* L'on met des grains aux lumières des pièces , en
les alefant d'un trou d'environ deux pouces ; cela
fait, on fait couler par la bouche du canon de la cire
au fond de l'ame, lorfque l'épaiffeur de derrière de
la culaffe n'eft pas affez confidérable. On met fur
cette cire du fable un peu moite : on le frappe avec
un refouloir jufqu'à la hauteur des anies ; on fait
chauffer la pièce ; on place au-deffus un écheno de
terre ; la pièce eft à deux pies au deffous de l'éche-
no qui y conduit le métal. Il y a dans le fourneau à
peu près 800 livres de métal. On pratique un gros
jet pour la lumière ; elle s'abbreuve de métal par ce
jet; on la laiffe refroidir: on enlevé ce qu'il y a de
trop, & on fore une nouvelle lumière.
Banii, fondeur Polonois, s'y prend autrement: il
creufe la lumière en écrou avant que d'y couler le
métal ; le métal s'engage fi bien dans ces tours ou
pas d'écrou , qu'il n'en peut être chaflé.
On a propofé d'autres moyens que les précédens
pour mettre des grains , mais qui ont tous leurs in-
véniens. M. Gor, commiffaire des fontes de Perpi-
gnan, en propofa un en 1736, par le moyen duquel
le grain fe met à une pièce en moins de quatre heu-
res fans la démonter : l'effai s'en fit le deux Mai , &
il fut heureux.
Lorfqu'on refond des pièces , il s'agit de les met-
tre en tronçons pour les jetter dans le fourneau ; pour
cela , on fait une rainure à la pièce dans l'endroit où
l'on veut la couper avec une tranche &c le marteau;
puis on fait une maçonnerie lèche de quatre briques
d'épaiffeur : on y place la pièce en équilibre ; on rem-
plit de charbon allumé la maçonnerie ; on fait chauf-
fer la pièce jufqu'à lui donner la couleur de cerife ;
puis on élevé un gros poids avec la chèvre , qu'on
laiffe retomber à plomb fur la pièce qui en eft briiée.
* Des lavures. Dans les lieux où l'on fond & où on
alefe les canons, il refte des grains, des fçiures, &
C A N
autres pièces de métal mêlées avec les ordures. Il en
relie auffi dans les fourneaux, attaché au fond de
l'atre, qu'on appelle gâteau. La manière deféparerces
portions métalliques s'appelle laver; & ces portions
métalliques léparées s'appellent lavures. Pouriaver ,
on fait paffer le ramas de matières hétérogènes ti-
rées de l'attelierde l'aleloir des terres de la Fonde-
rie, &c. par plufieurs eaux; & on met au moulin ce
qui fort des eaux. Il y a deux fortes de moulins ; la
première n'a rien de particulier, elle reflemble aux
moulins à cidre. C'eft une meule de fer coulé , d'en-
viron trois pies de diamètre , fur quinze pouces d'é-
paiffeur, pofée verticalement lur une cuvette.coulée
auffi de fer, & affile fur une maçonnerie. Les rebords
de la cuvette ont fix pouces de haut : un levier pane
au centre de la meule , la traverfe , & fe rend dans
un arbre vertical mobile fur lui même , & foûtenu
par en haut dans une l'olive où entre Ion tourillon,
& par en b^ fur une crapaudine placée au centre de
la cuvette. Deux hommes s'appliquent au levier, &
font tourner avec l'arbre la meule qui écrafe les la-
vures : quand elles font bien écralées on les relave ;
puis on les fond pour les mettre en laumon. Il y a une
autre forte de moulin qu'on voit Plan. il. de la Fon-
derie de canons.
B B , baquet à laver les lavures.
C C , pilons qui écrafent dans l'auger D D les la-
vures.
A , arbre qui meut les pilons.
E , grande roue mue par des hommes.
F, lanterne qui fait mouvoir la roue E.
G, autre lanterne fixée lnr ie même arbre que la
lanterne F, & qui fait mouvoir l'arbre A , qui tait
hauffer les pilons C, C, C , d'où l'on voit que cette
machine à laver, n'eft autre choie que ceileàbocar-
der des grandes fonderies & ufines placées aux envi-
rons des mines.
Les lavures font portées , comme nous avons dit,
au fourneau d'affinage , qu'on voitj%. 3. même Plan.
F, fourneau.
G H, efpece de rigoles où l'on jette la matière &
le charbon pêle-mêle.
/, un foufflet.
K , levier à mouvoir le foufflet.
Voilà tout ce qui peut concerner la fonte des ca-
nons. Pour l'entendre bien parfaitement, il ne feroit
pas hors de propos d'en faire précéder la lect ure par
celle de la fonte des grandes ftatues en bronze. Voy.
BRONZE. Quant à lamaniere de charger le canon,
voye{ Charge ; 6c pour celle de le mettre en litua-
tion néceffaire pour que le boulet atteigne dans un
lieu défigné, voyei Pointer.
On croit que l'on n'a commencé à fe fervir de ca-
nons qu'en 1 3 50 fur la mer Baltique; quoi qu'il en
foit, il eft certain qu'ils furent employés en 1380
pendant la guerre des Vénitiens avec les Génois. Six
ans après , il en paffa quelques-uns en Angleterre fur
deux vaiffeaux François pris par ces infulaires. Les
Anglois en firent de fer au commencement du feizie-
me liecle. ( Q )
Canon de la nouvelle invention ou à t Efp.ignole .*
on appelloit ainfi des pièces imaginées vers la rin du
fiecle dernier, qui avoient une chambre au fond de
l'ame, en forme de lphere un peu applatie. Ces ca-
nons étoient donc plus courts que les autres.
L'objet qu'on s'étoit propofé dans cette invention,
étoit de chaffer le boulet dans un canon plus court ,
moins pefant $ &C par conléquent plus ailé à tranf-
porter que les anciens , avec la même force que dans
les canons ordinaires.
Pour cela on faifoit aboutir la lumière à peu-près
vers le milieu de la chambre fphérique, afin qu'il
s'enfl.immât une plus grande quantité de poudre à la
fois , que lorfque l'ame du canon étoit par-tout uni-
forme.
C A N
L'expérience a prouvé la réuffite de ce qu'on s4é-
toit propolé clans la conttru&ion de ces fortes de pic-
ces ; car quoique beaucoup plus courtes que les an-
ciennes, & avec une moindre quantité de poudre,
elles produifoient les mêmes effets: mais comme il
étoitdifficilede nettoyer leur capacité intérieure après
que la pièce avoit tiré, il y reftoit affez louvent du feu,
qui produifoit de fâcheux accidens aux canoniers char-
gés du fervice de ces pièces, furtout lorfqu'ils étoient
obligés de tirer promptement. D'ailleurs la poudre ,
avant de fortir de la chambre, agiffoit de tous côtés
avec une fi grande impétuofité , qu'elle brifoit les af-
fùts,ou du moins qu'elle les mettoit en très-peu de tems
hors de fervice ; elles avoient auffi par une fiiitë néeef-
faire de ce grand mouvement, beaucoup de recul &
tres-peu de jufteffe dans leurs coups. Toutes ces con-
fidérations ont fait abandonner l'ufage de ces pièces,
malgré leurs avantages particuliers ; & l'on a même
fait réfondre la plupart de celles qui le trouvoient
dans les arfenaux & dans les places. Vcfyï\ une de ces
pièces de vingt-quatre livres de balle , Plan. VI. de
l'Art milit. fig. i. L'échelle qui eft. devions en fera
connoître les principales dimenlions. Et PL IL fig. i.
èefig. A, B, C, D, l'affût du capitaine Efpagnol avec
fes dimenfions. Il fervira du moins à faire connoître le
canon &t l'affût dans toutle détail de fes parties. (Q)
Proportions de la pièce de huit livres de balle , & defon
affût , roues, & avant- train, de la nouvelle
invention du capitaine Efpagnol.
Proportion de la pièce de huit livres de balle.
Pies, pouc. lig'
La longueur de cette pièce, non com-
pris le bouton ni les ornemens de la
culaffe, 429
Longueur du bouton & des ornemens
de la culaffe , 078
Longueur depuis la platte -bande, ou
les ornemens de la culaffe , jufqu'au
^ou de la lumière , 016
lueur depuis la platte-bande, ou les
îemens de la culafle , julqu'au der-
iere des tourillons, 173
Diamètre des tourillons , 030
Longueur depuis le devant des touril-
lons, jufques & compris le bourlet, 248
Diamètre de la bouche qui eft le calibre
de la pièce,
Diamètre au bourlet,
Diamètre derrière les tourillons,
Diamètre de la culaffe, 106
Longueur de la culaffe , 060
Diamètre auprès de la culaffe oh font
les armes du roi, o 9 10
Longueur du bourlet, 015
Longueur des anfes , 073
Longueur des tourillons,' o 3 10
Longueur de toute la pièce, 4 10 5
Proportion de P affût de la pièce dfhuit livres , de la
nouvelle invention du capitaine Efpagnol.
0
3
0
8
0
10
I
0
0
6
Première Figure.
1
2 Longueur de l'affût , <
3 longueur depuis la tête de
l'affût , jufqu'au devant
du tourillon , i
5 longueur depuis le derriè-
re du tourillon , julqu'au
cintre de L'affût,
6 longueur depuis le cintre
de l'affût, jufqu'au cin-
tre de la croffe,
pouc.
o
//:'. points*
6 3
3 10
613
, pouc. li°. points.
t O o
3 8
4 3
o o
11 10
10 4
9 o
9 9
5 °
C A N
PU
6 7 longueur depuis le cintre de
la croffe, julqu'au bout
de l'affût , 1
3 4 ouverture pour le touril-
lon , 011 il eft. encaftré de
moitié , o
8 cintre de l'affût, o
1 9 hauteur des flafques à la tê-
te de l'affût, 1
10 11 hauteur des flafques derriè-
re les tourillons, o
1 2 8 hauteur des flalques au cin-
tre de l'affût , o
6 1 3 hauteur des flafques au cin-
tre de la croffe , 0
14 15 hauteur au renfort de la
croflé , o
6 cintre de la croffe, o
Seconde Figure,
A Epaiffeur du flafque depuis
la tête de l'affût, julques
au délardement, o
B epaiffeur depuis le délar-
dement julqu'à la mou-
lure, o
C C epaiffeur depuis la moulu-
re julqu'à la moulure de
l'entre-toiie de lunette, o
D D epaiffeur des flafques à l'en-
droit de l'entre -toile de
lunette , o
E E longueur depuis la tête de
l'affût, julqu'à l'entre-
toife de lunette, 6
F F longueur depuis la tête de
l'affût, julqu'à l'entre-
toile de volée, o
G G largeur de l'entre-toife de
volée , o
G H longueur de l'entre-toife de
volée , • o
epaiffeur de l'entre-toife de
volée, o
I I longueur depuis l'entre-toi-
le de volée, julqu'à l'en-
tre-toife de couche , 1
L L longueur del'entre-toile de
couche , o
/ M largeur de l'entre- toile de
couche , o
epaiffeur de l'entre-toife de
couche , o
M N longueur depuis l"entre-toi-
lè de couche , julqu'à
l'entre-toife de mire , o
N O largeur de rentre-toile de
mire , o
P P longueur de l'entre-toife de
mire, o
epaiffeur de l'entre-toife de
mire , o
P Q longueur depuis l'entre-toi-
fe de mire , julqu'à la
moulure qui clt près de
l'entre-toife de lunette, 3
C R longueur des moulures, o
O S longueur depuis l'entre-toi-
le de mire, juiqu'à l'en-
tre-toife de lunette, 3976
P T longueur depuis l'entre-toi-
fe de mire, julqu'à la
moulure qui ell auprès ,0 2 2.0
R V longueur depuis la oioulu-
400
463
310
463
6 4 3
480
5 10 o
7 1 o
311 o
3 8 o
10 4 3
700
311 o
8 1 o
4 5 °
11 o o
711 o
10 9 6
220
614
C A N
C A N
Ug. po
7
6
5
4
o
4
3
0
2
3
O
2
0
6
^
3
re , près de l'entre-toife
de lunette , jufqu'au
bout de l'affût , i i 1 1
•S" X largeur de l'entre-toife de
lunette, i 2 5
D Y longueur de l'entre-toife de
lunette, 158
épaiffeur de l'entre-toife de
lunette, 047
Z Z longueur depuis la tête de
l'affût , jufqu'au devant
du tourillon , 092
D K longueur de tout l'affût ,906
Proportion des ferrures de l'affût de huit,
Preîviiere Figure.
pu
A Deux crochets de retraite ,
longeur,
largeur près le crochet ,
épaiffeur ,
B deux grands liens de flafque ,
long.
larg.
épaiff.
C deux autres liens de flafque ,
long.
larg.
épaiff.
D quatre contre - rivures quar-
rées , ou en façon de trèfle ,
long.
larg.
épaiff.
E le bandeau , long,
larg.
épaiff.
îly a auflîà chaque ouverture
de tourillon deux clavettes ,
long.
largv
epani.
F deux chevilles à têts platte ,
long.
circonférence ,
largeur de la tête platte ,
épaiffeur ,
G deux heurtoirs , long.
circonférence,
largeur de la tête du heur-
toirs,
épaiiîeur ,
Seconde Figure.
i deux fusbandes, long.
larg.
épaiff. .
a deux contre-heurtoirs , long.
larg.
épaiff.
3 deux boulons de charnière ,
long.
circonférence ,
circonférence de la tête du
boulon de charnière ,
4 deux petits boulons , long.
circonférence ,
ç deux boulons à tête de dia-
mant, long.
circonférence de la tête ,
circonférence du boidon ,
$ deux petits boulons à tête de
0
6
6
0
5
0
0
0
2
6
9
6
0
3
4
0
0
3
0
3
6
0
1
0
0
0
2
1
4
10
0
3
0
0
2
2
0
0
6
1
5
3
0
3
2
0
2
3
0
0
10
2
1
4
0
2
9
0
0
6
2
3
7
0
2
6
0
0
4
1
3
0
0
2
10
0
5
6
0
3
0
0
1
6
i
2
0
0
6
0
0
3
0
diamant, & à pointe perdue,'
l0ng' P 4 1.
circonférence de la tête ,
circonférence du boulon ,
7 boulon de l'entre-toife de volée,
long, entre les deux têtes ,
circonférence du boulon ,
circonférence de la tête ,
8 boulon de l'entre-toife de cou-
che , long, entre les deux tê-
tes,
circonférence du boulon ,
circonférence de la tête,
9 boulon de l'entre-toife de mire,
long, entre les deux têtes ,
circonférence du boulon ,
circonférence de la tête ,
10 boulon de l'entre-toife de lu-
nette , long, entre les deux-
têtes ,
circonférence du boulon ,
circonférence de la tête ,
1 1 Deux bouts d'affûts, long.
larg. entre les deux mou-
lures,
épaiff.
12 largeur des bouts d'affût près
l'entre-toife de lunette ,
1 3 deux liens d'entre-toifes de lu-
nette , long.
14 lunette de deffus,
lunçtte de deffous ,
1 5 l'anneau de lunette , diamètre
groffeur de l'anneau ,
16 le boulon d'anneau de lunette ,
long.
circonférence de la tête,
épaiffeur de la tête ,
17 diamètre du trou de l'entre-
toife de lunette ,
Proportion des roues de l'affût de
huit livres.
A B Longueur du moyeu ,
CD diamètre au bouge ,
B E face au gros bout ,
A T face au menu bout ,
F G hauteur des jantes,
Il y a fix jantes dans une roue ,
& à chaque jante il y a deux
raies.
H I longueur des raies, 1
L face des raies , o
MN hauteur des roues , 4
Proportions des ferrures des
roues de raffut.
O Douze bandes , long. z
larg. o
épaiff. o
P Douze liens rends à une chevil-
lette chacun , long. 1
largeur par-deflus la bande, o
larg. à côté de la jante au
plus gros, o
épaiff. fur la bande , o
épaiff. à côté de la jante , o
Quatre frettes,
Proportion de l effîeu de l'affût de
huit livres.
Longueur du corps de l'effieu , non
compris les fuiées , 2
Longueur des fuiées , 1
Longueur avec les fuiées , 6
0
5
0
0
3
7
0
2
0
I
3
4
0
3
5
0
6
0
I
6
0
0
3
0
0
6
0
I
8
0
0
3
4
0
6
3
2
1
0
O
3
6
O
6
2
6
4
11
0
2
4
0
0
3
3 4
3
1
9
1
1 1
10
1
11
10
0
4
4
0
3
0
0
7
7
0
3
G
0
1
0
4 6
6 o
3 o
11 6
8 8
4 1(7
O
IO
O
S
1
6 10
9 10
C A N
Groffcur du corps de l'eflieu , o
Largeur du corps.de l'elîieu , où po-
Tent les flafques , o
Longueur du petit bout des fufécs ,
qui pafle le moyeu , o
Face , o
Proportion de la ferrure de Ceffieu
de V affût de huit livres.
Deux étriers , longueur, i
largeur, o
epaifleur , o
Deux équignons , long. 2
larg
epaili. o
Deux brabans longs , 1
larg. par le plus large , o
& par le plus étroit qui erl def-
fous l'eflieu , o
épaiff. o
Longueur des petits anneaux qui font
au bout des fiiiées de l'eflieu , o
largeur , o
epaifleur , o
Proportion de Pavant- train avec
les roues & eflîcu.
Longueur du corps de l'eflieu , non
compris les fufées ,
Longueur des fufées,
Grofleur du corps de l'eflieu ,
Largeur du corps de l'eflieu où pofe
la fellette ,
Longueur de la fellette ,
Largeur ,
Hauteur de la fellette depuis l'eflieu
jufqu'à la cheville ouvrière ,
Longueur du petit bout de la limo-
niere qui pafle derrière la fel-
lette,
Longueur des limonieres ,
Leurs faces,
Longueur de l'entrc-toife de limonic-
re de dedans en dedans ,
Largeur de l'entretoile de limonicre, o
Son épaifleur,
Longueur de répars de dedans en de-
dans ,
Largeur de l'épars ,
Epaifleur de l'épars ,
Face des limonieres vers l'épars ,
Face des limonieres au bout ,
Longueur depuis la fellette jufqu'à
l'épai s,
Longueur depuis l'épars jufqu'à l'cn-
trc-toile de limonicre,
Longueur depuis l'entretoife jufque
aux ragots ,
Longueur du moyeu ,
Diamètre au bouge ,
Face au gros bout ,
Face au petit bout ,
Longueur des raies ,
FJauteur des jantes,
Face des raies ,
Epaifleur des jantes ,
Hauteur des roues ,
Largeur des limonieres vers le mi-
lieu , 2
Proportion des ferrures de V avant-train
& des rouages.
Quatre cordons , long. j
larg. o
épaiff, o
C A N
Gtj
6 10
6 3
1 1
o
1 o
O I
3
0
10
1
4
4
0
5
0
0
4
0
3
2
10
0
4
0
0
4
0
7
9
0
0
3
0
1
10
10
0
3
8
0
1
6
1
ÏO
10
0
2
8
0
3
10
0
3
9
0
3
0
0
7
6
0
6
1 1
3
8
3
1
1
3
0
10
0
0
9
0
0
6
6
0
8
0
0
4
4
1 >
1
6
0
2
5
3
3
8
Deux grandes frettes , long.
2
8
0
larg.
0
1
3
épaiff.
0
0
4
Deux petites frettes , long.
2
0
9
larg.
0
1
0
épaiff.
0
0
4
Deux liens de fellette , long.
2
j
7
larg.
0
2
2
épaiff.
0
0
5
Deux petits anneaux de limoniere
,
long.
0
1 1
3
H*
0
0
1 1
épaiff.
0
0
3
Deux petits anneaux d'eflicu , long.
0
8
10
larg.
0
0
10
épaiff.
0
0
2
Une plaque de fellette , long.
2
0
11
larg. par le haut , diminuant à
rien par le bas x
0
7
0
épaiff.
0
0
2
Dix bandes à dix clous chacune,
long.
1
9
5
larg.
0
2
2
épaiff.
0
0
6
Deux ragots, long.
0
6
0
longueur du crochet,
0
3
0
largeur du ragot près le crochet3
diminuant à rien par le bas ,
0
3
0
Face du crochet .
0
0
6
o
10
3
A l'égard de la manière de voiturerle canon & de
le foûtenir , vqye<r Affust.
Pour ce qui concerne la méthode de le charger ,
voyei Charge.
Canon à la Suédoife ; c'eft une pièce de quatre
livres de balle de nouvelle invention. Dans l'épreu-
ve de deux de ces pièces fondues à l'arfenal de Pa-
ris en 1740, on a aifément tiré dix coups par mi-
nute. Ces pièces ne pèlent qu'environ 600 ou 62Ç
livres , ce qui les rend d'un tranfport tres-aifé dans
toutes fortes de terreins. On affure que M. Dubro-
card , tué a Fontenoy, s'en efl. fervi très-avantageufe-
ment en Bohême. ( Q )
* Canon defufl, {Arts méchaniaues.} Le canon
d'unfufd en efl la partie principale. C'efl ce ti'be de
fer dans lequel on met la poudre &: le plomb, & qui
dirige le coup où l'on veut qu'il atteigne. Il ne pa-
roît pas au premier coup d'œil , que ce foit un ou-
vrage difficile , que celui d'un bon canon ; cepen-
dant il demande pour l'exécution , des précautions 6c
de l'expérience. Sans les précautions , le canon pé-
chant parla matière , celui qui s'en fervira fera ex-
pofé à en être eltropié , ou peut-être même tut : fans
l'expérience, la matière lera bonne ; mais étant mal
travaillée , celui qui le fervira du fûfil , fera peu (tir
de fon coup , à moins que par une longue habitude
de fon arme , il ne parvienne à en connoître & cor-
riger le défaut. Il y a des canons qui ne portent qu'à
peu de alliance ; d'autres portent ou trop bas , ou
trop haut , ou à gauche , ou à droite. Il y en a qui
ont le recul très-incommode. On peut inviter les Phy-
ficiens à tourner leurs vues de ce côté ; à s'inftruire
de la manière dont on forge les canons de fufiJ , >x. à
rechercher tout ce qui peut contribuer à la perfec-
tion & à la bonté de cette arme.
Une des principales attentions que doit avoir ce-
lui qui fait un canon de fulil , c'ell de choilir de bon
fer. Le meilleur pour cet ufage doit être doux , liant,
& Unis paille.
Il prendra environ fix pies de barre de ce ter, de
leux lignes de large, fur quatre lignes environ
d'épaiffeur. Cette barre pliee en tro;s , appeUée par
les ouvriers maquelle , fera chauffée , foudee , <5cbien
corroyée fous le gros marteau, pour en former la la-
me du canon,
6i6
C A N
On entend par la lame , un morceau de fer plat,
deftmé à être roulé ou tourné fur une longue bro-
che , & à former le tube ou canal du canon.
La broche fait ici la fonction d'une bigorne. C'eft
fur elle que fe fait l'opération, la plus délicate , celle
de fouder le canon , ou la lame roulée , félon toute
fa longueur. On conçoit que fi cette foudure pèche
en quelque endroit , l'effort de la poudre ne man-
quera pas d'ouvrir le canon dans cet endroit ; ôcque
û le défaut fe trouve malheureufement à la partie
inférieure du canon qu'on appelle le tonnerre , le
moindre accident qui puiffe en arriver à celui qui
s'en'fert , c'eft d'avoir un bras , une main empor-
tée. Il eft des Arts dont la bonne police devroit in-
terdire l'exercice à tout mauvais ouvrier , & où les
bons ouvriers font plus particulièrement obligés à
ne point faire de mauvais ouvrages. Un Ouvrier en
canon de firfil qui s'eft négligé dans fon travail , s'eft
expofé à un homicide, il n'en eft pas d'un canon de
fufil ainii que d'un couteau , d'un cifeau , d'une mon-
tre , &c
Pour que la foudure foit bien faite , il eft enjoint
à l'ouvrier de donner les chaudes de deux pouces
en deux pouces au plus. S'il les donnoit moins fré-
quentes &c fur plus de longueur , quelques portions
de matière fe refroidiffant avant que d'être travail-
lées ^au marteau , ou ne louderoient point , ou lou-
deroient mal.
Lorfque le canon aura été fondé fur la broche de
l'un à l'autre bout , l'ouvrier obfervera avec atten-
tion , s'il n'y eft pas refté d'éventures ou crevaffes ,
ou de travers. Les travers font des efpeces de cre-
vaffes tranfverfaîes,qui viennent du défaut de la ma-
tière. S'il y remarque quelqu'une de ces défecluofi-
tés , il rapportera en cet endroit des lames de fer
erichaffées en queue d'aronde , & au lieu de la troi-
iieme chaude douce , il reffoudra le canon depuis un
bout jufqu'à l'autre ; cette reffoudure eft même très-
bonne à pratiquer , foit qu'il y ait eu des éventures
ou non. Elle achèvera de refferrer les pores de l'é-
toffe , & de rendre le canon cie bon fervice.
Cela fait , le canon fera forgé. Il s'agit maintenant
de le forer; car on fe doute bien que fa f urface tant in-
térieure qu'extérieure au fortir de la torge , doit être
très-inégale. Le canon fera foré par vingt forets au
moins , qui augmenteront le calibre peu à peu ; mais
au lieu de l'inftrument appelle la mouche, qui a une
efpece de ramaffe & qui ne peut pas rendre un ca-
non égal de calibre , il eft ordonné de fe fervir d'une
mèche ou outil quarré de la longueur de douze à
quatorze pouces, tur laquelle on appliquera une ételle
de bois , qui couvrira les deux carnes de la mèche ;
à chaque fois que l'on paffera la mèche dans le ca-
non , on rehauffera l'ételle de bois par une bande
de papier mife entre elle & la mèche ; ce qui fervira
à enlever les traits du foret , & à rendre le canon égal
dans l'ame , & du calibre preferit.
Voyez Planche première de la fabrication des ca-
nons , la perfpeclive d'une ufine dont on voit le plan,
Planche II. A eft un bac qui fe remplit d'eau par le
moyen du tuyau ou de la canelle B , qui aboutit
par fon autre extrémité dans un réfervoir ou courant
qui conduit de l'eau , dont la chute fur les aubes d'u-
ne grande roue fixée fur l'arbre de la roue D , fait
tourner cette roue. On a pratiqué deux rainures dans
l'épaiffeur de la roue D , propres à recevoir deux
cordes ; l'une de ces cordes , après s'être croifée , fe
rend fur la poulie E , & la fait tourner. La poulie E ,
fixée fur l'arbre F, fait tourner cet arbre , & avec
cet arbre , la roue <?, la meule H & le quarré /, dans
lequel eft adapté le foret L. La roue G , porte une
corde qui fe ci oii'e & fe rend fur la roue M ; la roue
M-, fait tourner l'arbre N, la meule O , le quarré P
& le forêt Q, qui y eft adapté. Cet équipage forme
C A N
la moitié d'une ufine , telle que font celles de St. Etien*
ne en Forés. Si l'on imagine une corde qui paffe fur
la féconde rainure de la roue Z>, & qui fe rende fur
une roue placée de l'autre côté , & telle que la roue
G , on aura l'uline entière.
Chacune des roues M occupe deux ouvriers ; l'urt
s'appelle lejoreur , l'autre le femeur. Le foreur eft pla-
cé dans la foffe R ; il adapte dans le quatre P,le foret
qui convient. 11 applique fon canon à ce foret. Le ca-
non eft porté dans une pièce échancrée T, qui Fem-
braffe. Une fermeture S , le contient dans Féchan-
crure de la pièce T. Le foreur dirige le canon , & fait
i uccéder les forets les uns aux autres , jufqu'à ce que-
le canon foit du calibre qui convient. Le femeur eft
couché fur la planche V , & c'eft lui qui réduit le ca-
non fur la meule O , à fes proportions extérieures.
Lorfque le canon eft foré , on en vérifie le calibre
avec un dé ou mandrin long de trois pouces , tour-
né , trempé , poli , & du diamètre de fept lignes trois
quarts. On parle ce mandrin dans le canon de l'un à
l'autre bout. Le femeur a deux calibres , l'un de feize>
lignes juftes , &c l'autre de huit lignes & demie pour
vérifier les bouts du canon ; c'eft en femant le ca-
non , c'eft-à-dire en le mefurant exactement avec
fes deux calibres , que le femeur lui donne à l'exté-
rieur la forme de cierge qu'il doit avoir.
On conçoit aifément que le foret ne peut travail-
ler au-dedans d'un canon , fans qu'il s'y faffe un
grand frotement & une chaleur capable de le détrem-
per ; c'eft pour obvier à cet inconvénient qu'on a
pratiqué les rigoles C, x ,y , qui portent de l'eau vers
toutes les folles , & arroient l'endroit où la fermetu-
re foùtient le canon , & où la pointe & les carnes du
foret agiffent. Les meules H , O , tournent dans des
auges qui font aufîl pleines d'eau qui les rafraîchit.
L'ouvrage du femeur n'eft guère moins délicat que
celui du forgeron ; c'eft lui qui dreffe le canon , &
qui lui donne cette diminution d'épaiffeur, qu'il faut
conduire avec tant de précifion, de la culaffe à la
bouche , pour rendre le canon jufte. Il faut un grand
nombre d'années pour former un excellent ouvrier,
en ce genre.
Le canon du fulîl grenadier ou de foldat , eft rond ,'
& n'a qu'un fèul pan qui prend de la culaffe , & va
finir à trois pouces du guidon. La longueur du canon
eft de trois pies huit pouces juftes.
Le diamètre entier à l'arriére ou à la culaffe eft de
feize lignes. Le diamètre entier fur le devant ou à la
bouche eft de huit lignes & demie , & le calibre de
fept lignes trois quarts , afin que la balle des dix-huit
à la livre ait fufhfammcnt de vent.
Suivant ces dimenùons , l'épaiffeur du fer à la cu-
laffe doit être de quatre lignes & un huitième de li-
gne , & l'épaiffeur du fer à la bouche , de trois hui-
tièmes de ligne.
Il eft enjoint de faire la culaffe double & bien
jointe deffus & deffous ; la queue épaiffe de trois li-
gnes proche du talon , venant au bout à deux lignes ;
& le talon de deux lignes & demie d'épaiffeur par-
deffous , allant au-deifus à la largeur du pan du ca-
non , fur fix à fept lignes de haut. La vis de la plati-
ne de derrière, paffant au-travers du talon, il fera
ouvert en forme de fourche , afin que le canon fe
démonte, fans ôter la vis. Il n'y aura que la vis de
la queue à lever.
La tête de la culaffe fera de huit lignes de haut,
& la lumière fera percée à fept lignes de derrière ;
par conféquent la tête de la culaffe fera entaillée d'u-
ne ligne du côté de la lumière , & reliera plate par
le bout.
On n'a pu régler la hauteur de la culaffe par le
nombre de fes filets , ces filets étant plus gros ou plus
fins les uns que les autres : mais il faut avoir foin qu'ils
foient vifs 6c b^en enfoncés. La queue de la culaffe
aura
C A N
C A N
617
aura devrx pouces de longueur & fe terminera en
ovale.
Il y aura un tenon aux canons ; il fera placé à qua-
tre pouces du bout , Ôé fe trouvera logé dans le fût
fous le premier anneau. Le guidon fera auffi bralé à
vingt lignes jufr.es du bout. On y aura une attention
finguliere , pour que les bayonetres des différentes
manufactures puiffent fe rapporter facilement.
Les canons demi-citadelle ou de rempart leront fa-
briqués , comme nous l'avons preferit ci-defTus ; ils
•auront trois pies huit pouces de longueur : le diamè-
tre entier de la culaffe fera de dix-huit lignes. Le dia-
mètre furie devant, ou à la bouche, fera d'onze lignes
un quart , & le calibre de huit lignes un quart. Ils
auront comme ceux de grenadier , un tenon , & le
guidon en fera pofé à feize lignes du bout.
Le bouton de la culaffe aura la même hauteur , &
le talon la même épaiffeur que la culaffe du fufil gre-
nadier ; la lumière en fera aulîi percée à la même
diftance.
Les canons tant de rempart que de foldat feront
éprouvés horifontalement , avec leur vraie culaffe,
couchés fur des chevalets , la culaffe appuyée contre
une poutre armée de barres de ter , ce qui arrêtant
le recul , rendra l'épreuve pius forte. Chaque canon
foûtiendra deux épreuves : la première fera une char-
ge de poudre du poids île la balle , bourrée avec du
papier, et la balle par-deffus aulîi bourrée; la fécon-
de fera d'un cinquième de poudre de moins , aulîi
bourrée & de même la balle par-deffus.
La balle du fufil de foldat elt de dix-huit à la livre ,
& la balle du fufil de rempart elt d'une once ou de
feize à la livre.
Il elt rare qu'il crevé des canons à la féconde
épreuve : mais elle elt ordonnée , parce qu'elle ouvre
& fait découvrir les éventures imperceptibles que la
première épreuve n'a point affez dilatées. Les ca-
nons éventés font mis au rebut , ainfi que les canons
crevés.
Le canon tient au bois fur lequel on le monte , par
la vis de la culaffe , & par deux anneaux qui le joi-
gnent au fut ; l'un , au commencement , où il fert de
porte-baguette à queue ; & l'autre , vers le bout du
fût qu'il faiiit avec le canon , Se où il elt arrête au
moyen d'une petite lame à reffort , qui porte fa gou-
pille encadrée dans le côté du fût. Voyc^ aux articles
Fusil , Platine , &c. ce qui concerne le relie de l'ar-
me-à-leu, avec les dimenhons lelon lelqueiles M. de
Valliere, lieutenant général des armées du Roy, ôc
infpecteur des manufactures des armes , a règle que
les différentes parties fuffént toutes fabriquées.
Notre fabrique de canon de Saint-Etienne en Forés
elt très-confiderable , tant par la quantité d'armes qui
en fartent , que par la qualité qu'elles ont. Elle eft com-
poléc d'une multitude d'ouvriers qui ne peut guère
s'eltimcr , que par celle des ufines conltruites lur les
bords cle la Furenle ; cette rivière fait tourner des
milliers de meules. Cependant comme elle manque
d'eau quelquefois, cela a déterminé quelques tabri-
■cateurs à transporter les leurs fur la Loire. M. de
Saint-Perieux , gendre de M. Girard un de ceux qui
ont le mieux répondu aux vues que M. cle Valliere a
toujours eues pour perfectionner la fabrication des ar-
mes, a placé la lienne a Saint-Paul en Cornillon, à
deux lieues de Saint-Etienne.
Quelques aràftes ont imaginé de fouder plufieurs
•canons cnlemble , & d'en fane des fulils à plufieurs
coups. Les liilils à deux coups font communs. Il en
«Il lorti un à trois coups de la fabrique des nouveaux
entrepreneurs pour le Roi , remarquable par la légè-
reté , fon méchanifme, fa lùreté , Ion travail de forge
& de l.me- èv lesornemens. Nous en ferons mention
à l'article Fusil. Voyt\ t'amde FusïL.
Les canons n'ont pas tous la même forme exte-
Tomc II.
rieure ; il y en a de ronds ; il y en a à pans , ou can-
nelés : les uns font unis ; d'autres font cifelés. Mais
ces ornemens s'exécutent fur le canon du fufil , com-
me fur tout autre ouvrage. foye^ Ciseler, &
Canneler. On a inventé quelques machines pour
les pans & pour les cannelures : mais elles n'ont p; s
répondu à l'effet qu'on en attendoit ,&ona été obli-
gé de les abandonner & de s'en tenir à la lime : il y
a des canons brilés ; des canons carabinés , &c. Koyer
la fuiu de cet article.
CANON BRISÉ , (terme cTJrquebufur.) c'ell un
canon qui eft coupé en deux parties au haut du ton-
nerre ; la partie Supérieure elt en écrou viffé , & fe
monte fur le tonnerre qui eft en vis , de façon qu'ils
fe joignent enlemble, 6z forment en-deffus une face
unie. Ces canons font ordinairement carabinés ; il y
en a de toutes fortes de grandeur 6e de grofîeur.
Foye{ Fusil.
CaNON CARABINÉ , ( terme d'Arquebuficr. ) Ce
canon tait à l'extérieur comme les canons ordinaires,
elt tarodé en-dedans dans toute fa longueur de mou-
lures longitudinales ou circulaires. L'on eft obligé
dans ces canons d'enfoncer la balle avec une baguette
de 1er, & de l'y forcer; ces canons portent la balle
plus loin Ôc plus jultc. Koye^ les articles Mousquet
& Fus*il.
Petit CANON , ( Fonderie en caractères J Imprimerie.)
quinzième corps des caractères d'Imprimerie ; la pro-
portion elt de quatre lignes quatre points , mefure de
l'échelle. foye^ Proportions des Caractères
DTMPRIMERli. , Ôé C exemple à Carticle CARAC-
TERES.
Gros CANON , [chat les mîmes ouvriers.) dix-fep-1
tieme corps des caractères d'Imprimerie ; la propor-
tion elt de fept lignes deux points mefure de l'é-
chelle. Veye^ PROPORTIONS DES CARACT. d'I.MP.
& l'exemple a l'article CARACTERES.
Double Canon , (che^ les mêmes. ) dix-huitieme
corps des caractères d'Imprimerie; fa proportion elt
de neuf lignes deux points, mefure de l'échelle. Voye^
Proportions des Caract. d'Imprim. & V exem-
ple, à Carticle CARACTERES.
Triple CANON , (encore che^ les mêmes. ) dix-neu-
vieme corps des caractères d'Imprimerie ; la propor-
tion elt de douze lignes , mefure de L'échelle. Voye^
Proportions des Caract. d'Imprim. ce "«-
xemple à l'article Caractères.
Canon , ( en terme de Chaudronnier. ) eft un mor-
ceau de fer à tête large & foré , que l'on appuie
fur la pièce , à l'endroit 011 on la perce. Voyc^_ PI.
II. du Chaudronnier , fig. 8. qui rcpielcnte un ou-
vrier qui appuie le canon contre une cuve pc
que l'ouvrier fig. y. perce un trou avec un poinçon
qu'il chaffe avec un marteau. La figure 18. de la
même Flanche représente le canon en particulier, &
la //_;. tj. une cfpece de tas qui iert au même ufage.
Canon , terme dont les Emaillew \ le fervent pour
fignifier les plus gros morceaux ou filets d'email
qu'ils tirent pour le mettre en état d'être employé
aux divers ouvrages de leur métier..
Suivant l'article x.x. des jlatuts des Email'eurs , il
elt défendu à toute pei formes, marchands ou autres,
démêler aucune forte d'émail, & retenir canon pour
vendre , li ce n'elt aux maîtres du métier.
Email , & Emailleur.
Canon , (parmi les Horlogers. } lignifie une 1
de petit tuyau , ou un cylindre creux un peu long,
percé de part en part. On adapte des ca
lentes pièces ou roues, pour qu'elles tournent fur
des arbres ou tiges fans aucun bercement , :
pour qu'elles puiffent y tenir à fr<
canon de la chauffée , celui de la roue de
'.;u;Chaussée, R o l h. de cadran , c
Planche des Mon très. (T)
Iîii
6i8
C A N
Canon; ce mot a deux fens dans le Manège : dans
le premier , il fignifie la partie qui eft depuis le ge-
nouil & le jarret jufqu'au boulet. Les fufées ; les lur-
os viennent au canon des chevaux ; les arrêtes , tout
le long du canon jufqu'au roulet , ne viennent que
très-rarement aux barbes. Dans le fécond , c'eft une
partie du mors ou de l'embouchure du cheval , qui
confiée dans une pièce de fer arrondi qui entre dans
la bouche & la tient fu jette. Il y a plufieurs fortes
de canons , Savoir le canon fimple , le canon a trompe ,
le canon gorge de pigeon , le canon montant, le canon
à compas , le canon à col d'oie la liberté gagnée , le ca-
non à bafcule , le canon à pas d'âne , le canon coupé à
pas d'âne , &c. dont on peut voir la description dans
les auteurs. Voye^ Embouchure. & fig. zz. Plane,
de l' Eperonnier en P.
Canon, {terme de Plombier.} c'eft un tuyau de
plomb de trois ou quatre pies de longueur , où vont
le rendre les eaux des chêneaux qui entourent un
bâtiment , & qui jette l'eau bien loin des fondemens
qu'elle pourroit gâter , fi elle tomboit au pié du
mur.
Canons d'une jauge, font les ouvertures qui font
percées dans fon pourtour , & où font foudés des
bouts de tuyaux. Voye{ Jauge. ( /£)
Canon , ( terme de Potier defiyence. ) c'eft une ef-
pece de pot de fayence un peu long & rond , dans
lequel les marchands Apothicaires, particulièrement
ceux de Paris , mettent les confections & les élec-
tuaires à meiure qu'ils les préparent.
Canon, (terme de Rubannier. ) fe dit d'un petit
tuyau de. buis, ayant ainfi que le rochet de petits
bords à ies bouts pour empêcher les foies d'ébou-
ler ; il eil percé d'outre en outre d'un trou rond pour
recevoir la brochette de la navette dans laquelle il
doit entrer ; fon ulage eft d'être rempli dans chaque
ouvrage de ce qui compofe la trame Voye^ Trame.
Il eft à propos à chaque ouvrier d'avoir quantité de
ces canons, pour éviter de faire de la trame à tous
momens.
Canon à dévider , qui fe pafTe dans la ceinture
de la devideufe ; c'eft iouvent un vieux rochet dans
l'épaiffeur du corps duquel on fait ira trou qui va
jufqu'au trou de la longueur ; il y en a d'unique-
ment deftinés à cet ufage, qui font faits par les Tour-
neurs ; ils fervent à recevoir le bout de la broche
à dévider, pour foulager la devideufe. Voye^ Dé-
vider.
Canon , en Serrurerie , c'eft cette pièce de la fer-
rure qui reçoit la tige de la clé , quand il s'agit d'ou-
vrir ou fermer la ferrure. Cette pièce n'eft autre
chofe qu'un canal fendu par fa partie inférieure ,
qui fert de conducteur à la clé : quand la ferrure a
une broche , la broche traverfe le canon , & lui fert
d'axe. Le canon aboutit par fon entrée à la partie ex-
térieure de la porte , & par fon extrémité intérieure
il va fe rendre à la couverture ou au foncet de la
ferrure. Voyt^ Foncet.
On diftingue deux fortes de canons ; il y en a à
patte , &; de tournans.
Les canons à patte font attachés avec des rivures
ou des vis, fur la couverture ou fur le foncet de la
ferrure.
Les canons tournans , qui font d'ufage aux ferrures
de coffres forts , ronds à l'extérieur comme les au-
tres canons, font ordinairement figurés intérieure-
ment , foit en trèfle , foit en tiers point , ou de quel-
qu'autre figure pareille, & reçoivent par conséquent
des clés dont les tiges ont la même figure de trèfle ou
de tiers point ; d'où il arrive qu'ils tournent fur eux-
mêmes avec la clé , fans quoi la clé ne pourroit fe
mouvoir. Pour leur faciliter ce mouvement, au lieu
d'être fixés foit à rivnre foit à vis fur la couverture
ou" fur le foncet, ils traverfent toute la ferrure, &
C A N
leur tête qui pofe fur le palatre, eft fous une pièce
creule qu'on nomme couverture , qui les empêche de
réfifter , mais non de fe mouvoir : la couverture eft
fixée fur le palatre par des vis. Voye-^ Serrure.
Canon pour la trame, injlrument des ouvriers en
étoffes de foie ; le canon pour la trame eft un bois arron-
di , pointu d'un côté , & avec une tête de l'autre
percée d'un bout à l'autre ; il eft de fix à fept pou-
ces de long environ ; la trame eft dévidée fur ce ca-
non. Voye^ Navette.
Canon pour Corgancin, injlrument des ouvriers en
étoffes de foie ; le canon ou rochet pour l'organcin eft
différent de celui de la trame , en ce qu'il eft un peu
plus petit , & qu'il a une tête à chaque bout. Voye^
Rochet.
Canon , terme de Tourneur ; on nomme canons d'un
arbre à tourner en ovale ou en d'autres iigures irré-
gulieres , deux cylindres creux qui font traverfés par
une verge de fer quarrée qui joint la boîte au man-
drin. Voye^ Tour.
CANONIAL , adj. terme de Droit eccléfiaflique , fe
dit de ce qui concerne un chanoine ; ainli l'on dit une
maifon canoniale , un titre canonial.
CANONICAT , f. m. terme de Jurifpr. eccléf. {ynony-
me à chanoinie : fouvent^les canoniftes le confondent
avec prébende ; il en diffère cependant en ce que le
canonicat n'eft que le titre ou la qualité fpirituelle ,
laquelle eft indépendante du revenu temporel ; au
lieu que la prébende eft le revenu temporel même.
Autrefois le pape créoit des canonicats fans prében-
de , avec l'expeclative de la première qui viendroit
à vaquer : mais ces expectatives ne fe donnent plus
depuis le concile de Trente , qui les a abolies. Seu-
lement le pape crée quelquefois un chanoine fans
prébende , quand il veut conférer une dignité dans
une églife , pour l'obtention de laquelle il faut être
chanoine. Ces canonicats s'appellent canonicats ad
effeclum ; ce n'eft qu'un titre fterile & infructueux ^
qu'on appelle aufti par cette raifon jus ventofum. y.
Chanoinie & Prébende. (#)
C ANONIER , f. m. ( Artillerie. ) en France eft ce-
lui qui fert à charger le canon , avec l'aide des fol-
dats commandés pour le fervice des batteries.
Il n'y a perfonne actuellement qui ait le fimple
titre de canonizr dans l'artillerie , parce qu'on fe fert
de foldats de Royal-artillerie pour faire les fonctions
de canonier.
Il y en a eu autrefois des compagnies particuliè-
res , mais elles ont été incorporées dans Royal-artil-
lerie, en conféquence de l'ordonnance du 5 Février
1720. Voye?^ Artillerie.
L'art du Canonier eft la manière de tirer le
canon & les mortiers , c'eft-à-dire , de les charger,
de les pointer , & d'y mettre le feu avec toute la
jufteflé & promptitude poftlbles.
Uart du canonier fe confidere quelquefois comme
une partie de l'art militaire , & quelquefois comme
une partie de la Pyrotechnie. Voye^ Art militaire
& Pyrotechnie.
Cet art enfeigne à connoître la force & l'effet de
la poudre , les dimenfions des pièces d'artillerie , &
les proportions de la poudre ce du boulet dont on les
charge, auffi-bien que la manière de les manier,
charger, pointer, nettoyer , & rafraîchir. V. Pou-
dre-à-canon, Charge, Pointer, Eponge, &c
Il y a quelques parties de cet art qui font du ref-
fort des Mathématiques ; lavoir, la manière de poin-
ter un canon fur un angle donné , & de calculer fa
portée ; ou de pointer & de diriger le canon de ma»
niere qu'il atteigne le but. Voye^ Projectile.
Les inftrumens principaux dont on Se lert dans
cette partie de l'art du canonier , font la l^gle du ca-
libre ou verge fphéréométrique , le quart de cercle,
§c le niveau. Pour ce qui eft de la manière de fe
C A N
fervïr de ces inftrumens , confultez les articles Ca-
libre, Niveau , & Quart de cercle.
La ligne que décrit le boulet, ou la route qu'il
tient en fortant du canon , à quelque hauteur qu'il
ait été pointé , fe trouve être la même que celle de
tous les autres projectiles, favoir une parabole (foye*
Parabole ) ; c'eft pourquoi les lois particulières
que l'on oblerve dans le mouvement ou dans la vo-
lée du boulet , fa vîteffe , fon étendue, &c. avec les
règles pour atteindre le but, fe trouvent fous l'article
Projectile.
Maltais , ingénieur Anglois , parle pour celui qui a
enfeigné le premier, en 1634, la manière de fe
fervir des mortiers fuivant des règles : mais toutes
les connoiffances n'étoient fondées que fur des expé-
riences & tentatives ; il n'avoit aucune idée de la
ligne courbe que décrit le boulet fur fon paflage , ni
de la différence de fa portée , fuivant les différentes
hauteurs auxquelles on pointe le canon.
Avant que M. Blondel eût donné fon livre de Y Art
dejetter les bombes , la plupart des canoniers ne fe con-
duifoient par aucunes règles en fervant les batte-
ries ; s'ils ne frappoient point au but , ils hauffoient
ou baiffoient la pièce, jufqu'à ce qu'elle fe trouvât
pointée julle: cependant il y a pour toutes ces opéra-
tions des règles certaines , fondées fur celles de la
Géométrie , 8c defquelles nous fommes redevables
à Galilée , ingénieur du grand duc de Toicane , & à
fon difciple Toricelli. Voyt^ Bombe , &c. (Q)
CANONIERES , f. f. pi. font les tentes des fol-
dats te cavaliers. Une canoniere doit contenir lept
foldats. (Q)
CANONIQUE, fe dit, en JfyU de Jurifprudence
eccléjlajlique , de tout ce qui eft conforme à la diipo-
fiîion des canons.
Canonique (Droit ) eft un corps de droit , ou
recueil de lois eccléfialliques concernant la difei-
pline de l'Eglife. Ce recueil eft compoié , 1 °. du Dé-
cret de Gratien ; 20. des Decrétales ; 30. d'une fuite
desDecrétales appelléc leSexte;^0. des Clémentines;
50. des Extravagantes. Voye{ Canon , Décret,
Decretale , Sexte , Clémentines , & Extra-
vagantes.
Dans les églifes proteftantes , le droit canonique a
été fort abrégé depuis la réformation;car elles n'en ont
retenu que ce qui étoit conforme au droit commun
du royaume , ce à la doctrine de chaque églife. ( fl)
Canoniques ( Livres ) , ( Théol. ) on donne ce
nom aux livres compris dans le canon ou le catalo-
gue de livres de l'Ecriture ; voye^ à l'article Canon
ce qui concerne les livres canoniques de l'ancien-Tef-
tament: à l'égard des livres canoniques Au nouveau ,
on a conftamment admis dans l'Eglife les quatre
évangéliftes , les quatorze épîtresde S.Paul, excep-
té l'epître aux Hébreux, la première épine de S.
Pierre, ik la premierre de S.Jean. Quoiqu'il y eût
quelque cloute fur l'epître aux Hébreux, les épîtres
de S. Jacques & de S. Jude , la féconde de S. Pierre-
la féconde & la troilieme de S. Jean, & l'apocalyp-
ie ; cependant ces écrits ont toujours été d'une gran-
de autorité : reconnus par plufieurs églifes , l'Eglife
univerfelle n'a pas tardé à les déclarer canoniques ;
cela le démontre par les anciens catalogues des li-
\ res facrés du nouveau-Teftament, par le canon du
concile de Laodicée , par le concile de Carthage,
par le concile Romain , &c. auxquels la décision du
concile de Trente eft conforme. Le mot canoniqm
\ ient de canon , loi , règle, table , catalogue.
Le canon des livres du nouveau-Teftament n'a
point été drefle par aucune affemblée de Chi
ni par aucun particulier ; il s'eft formé (ùr le con-
fentement unanime de toutes les églifes, qui avoient
reçu par tradition, «S» reconnu de tout tems certains
livres comme écrits par certains auteurs infj
Tome II.
C A N
619
S. Êfprit , prophètes, apôtres, &c Eufebe diftingue
trois fortes de livres du nouveau-Teftament : la iie
dafTe comprend ceux qui ont été reçus d'un con-
fentement unanime par toutes les églifes ; favoir , les
quatre évangiles, les quatorze épîtres de S. Pau! , à
l'exception de celle aux Hébreux, & les premières
épîtres de S. Pierre êk de S. Jean : la féconde claffe
comprend ceux qui n'ayant point été reçois par tou-
tes les églifes du monde , ont été toutefois confidé-
rés par quelques-unes comme des livres canoniques ,
& cités comme des livres de l'Ecriture par des au-
teurs ecclénalliques : mais cette claffe le divife en-
core en deux ; car quelques-uns de ces livres ont été
depuis reçus de toutes les églifes , & reconnus com-
me légitimes ; tels que font l'epître de S. Jacques ,
l'epître de S. Jude , la féconde épître de S. Pierre , la
féconde & la troifieme de S. Jean ; les autres au con-
traire ont été rejettes, ou comme fuppofés , ou com-
me indignes d'être mis au rang des canoniques, quoi-
qu'ils puffent être d'ailleurs utiles; tels que font les
livres du paffeur , la lettre de S. Barnabe , Vé\
félonies Egyptiens, un autre félon les Hébreux,
les actes de S. Paul , la révélation de S. Pierre : en-
fin la dernière claffe contient les livres fuppofés par
les hérétiques , qui ont été toujours rejettes par l'E-
glife ; tels que font l'évangile de S. Thomas & de
S. Pierre, &c. L'apocalypfe étoit mife par quelques-
uns dans la première claffe, & par d'autres dans la
féconde : mais quoique quelques livres du nouveau-
Teftament n'ayent pas été reçus au commencement
dans toutes les églifes , ils fe trouvent tous dans les
catalogues anciens des livres facrés , fi l'on en ex-
cepte l'apocalypfe, qui n'eft point dans le canon du
concile de Laodicée , mais que le contentement una-«
nime des églifes a depuis autorité. M. Simon , Hijl.
critique du vieux-Teflament. M. Dupin, Dijfert. prclim.
fur la Bible, tome III. Vo er APOCRYPHES. ( G )
CANONISATION, f. f. (Tkèolog.) déclaration
du pape par laquelle, après un long examen & plu-
fieurs folennités , il met au catalogue des feints un
homme qui a mené une vie fainte &c exemplaire , cv
qui a fait quelques miracles. V. Saint & Miracle.
Le mot de canonijation femble être d'une origine
moins ancienne que la chofe même ; on ne trouve
point qu'il ait été en ufage avant le XIIe liecle , quoi-
que des le xi'- on trouve un décret ou bulle de
nifation donnée à la prière deLintolfe,évêque d'Augs-
bourg, par le pape Jean XV. pour mettre S. I
ou Ulric au catalogue des faints
Ce mot cil formé du mot canon , catalogue , & il
vient de ce que la canonijation n'étoit d'abord qu'un
ordre des papes ou des évêques, par lequel il étoit
ftatué que les noms de ceux qui s'étoient diftingués
par une pieté & une vertu extraordinaires , feraient
inferésdans les facrés diptyques ou le canon d.
fe, afin qu'on en tit mémoire dans la liturgie. On y
ajouta enfuite les ufages de marquer un office parti-
culier pour les invoquer, d'ériger des . jlifes tous
leur invocation, èv îles autels pour y offrir le faint
facrifice, de tirer leurs corps de leurs premiers fe-
pulcres; peu à peu on y joignit d'autres cérémonies:
on porta en triomphe les im
procédions ; on déclara jour de fête l'anniverfaire de
celui de leur mort , & pour rendre la chofe plus fo-
Iennelle, le pape Honorais III, en i::î, accorda
plufieurs jours d'indulgence pour 1.
Toutes ces règles font modernes , & étoient incon-
nues à la primitive Églife. Sa difeipline à
pendant les premiers fiecles , c : à Ro-
me , qui fut long tems le premier théâtre des
curions , des greffiers ou notaires ] >ur re-
cueillir foîgneufement & avec la dernière fi< -
actes des martyrs, c'eft-à-dire le
Chrétiens touchant la mort des martyrs, leur conf-
1 1 i 1 ij
6io
C A N
tance , leurs derniers difeours , le genre de leurs liip-
plices , les circonstances de leurs aceufations , & fur-
tout la caule & le motif de leur condamnation. Et
afin que ces notaires ne pùiïent pas fallifier ces aûes,
FÉglife nommoit encore des foûdiacres & d'autres
officiers , qui veilloient fur la conduite de ces hom-
mes publics , & qui vifitoient les procès-verbaux de
la mort de chaque martyr , auquel FÉglife , quand
elle le jugeoit à propos , accordoit un culte public
& un rang dans le catalogue des faints. Chaque éyê-
que avoit le droit d'en ufer de même dans Ion dio-
cefe , avec cette différence, que le culte qu'il ordon-
noit pour honorer le martyr qu'il permettoit d'invo-
quer , ne s'étendoit que dans les lieux de fa jurifdic-
tion, quoiqu'il pût engager les autres évêques , par
lettres, à imiter fa conduite ; s'ils ne le faifoient pas,
le martyr n'étoit regardé comme bienheureux que
dans le premier diocefe : mais quand l'égliie de Ro-
me approuvoit ce culte, il devenoit commun à tou-
tes les églifes particulières. Ce ne fut que long tems
après qu'on canonifa les confeffeurs.
Il eft difficile de décider en quel tems cette difei-
pline commença à changer, enforte que le droit de
canonifatlon , que l'on convient avoir été commun
aux évêques , &C fur-tout aux métropolitains , avec
le pape , a été réfervé au pape feul. Quelques-uns
prétendent qu'Alexandre III. élu pape en 1 1 59 , eft
le premier auteur de cette réferve , qui ne lui fut
conteftée par aucun évêque. Les Jéfuites d'Anvers
afTùrent qu'elle ne s'eft établie que depuis deux ou
trois iîecles par un confentement tacite & une cou-
tume qui a paffé en loi , mais qui n'étoit pas géné-
ralement reçue dans le x. & le xi. fiecle : on a mê-
me un exemple de canonifatlon particulière , faite en
1 373 Par "Witikind , évêque de Mindon en Weftpha-
lie , qui fit honorer comme faint l'évêque Félicien ,
par une fête qu'il établit dans tout fon diocefe. Ce-
pendant on a des monumens plus anciens , qui prou-
vent que les évêques qui connoilfent le mieux leurs
droits &c qui y font les plus attachés , les évêques de
France, reconnoiflbient ce droit dans le pape. C'eft
ce que firent authentiquement l'archevêque devien-
ne &c fes fuffragans , dans la lettre qu'ils écrivirent à
Grégoire IX. pour lui demander la canonifatlon d'E-
tienne, évêque de Die, mort en 1208. Quia nemo ,
difoient-ils , quantdllbet maitorum prœrogatlvd polleat,
ab eccleflâ Del pro fanclo habendus aut vencrandus efl ,
nifi prius per fedem apoflollcam ej us fanclltas fuerlt ap-
probata.
Quoi qu'il en foit , le faint fiege apoftolique eft en
pofîeffion de ce droit depuis plufieurs fiecles , & l'e-
xerce avec des précautions & des formalités qui doi-
vent écarter tout foupçon de furprife & d'erreur.
Le cardinal Profper Lambertini , aujourd'hui pape
fous le nom de Benoît XIV. a publié fur cette matière
de favans ouvrages , qui prouvent qu'il ne peut rien
s'introduire de faux dans les procès-verbaux que l'on
dreffe au fujet de la canonifatlon des faints.
Le P. Mabillon diftingue auffi deux efpeces de ca-
nonifatlon : l'une générale , qui fe fait par toute FÉ-
glife afiemblée en concile œcuménique , ou par le
pape ; & l'autre particulière , qui fe faifoit par un
évêque, par une églife particulière, ou par un con-
cile provincial. On prétend auffi qu'il y a eu des ca-
nonlfations faites par de fimples abbés. Voy. Pompe
Tyrrheniçue. (g7)
CANOxNISTE, f. m. (Jurlfprud.) dodeur, ou du
moins homme verfé dans le droit canonique. (H)
* CANOPE , f. m. (Myth.) dieu des Égyptiens ,
dont Suidas raconte ainfi Forigine : il s'éleva, dit-il,
un grand différend entre les Égyptiens, les Chaldéens,
& les autres peuples voifins, fur la primauté de leurs
dieux; après bien des conteftations il fut arrêté qu'on
les oppoferoit les uns aux autres, & que celui qui ref-
C A N
teroit vainqueur feroit reconnu pour fouverain. Or
lesChaldéens adoroientle feu, qui eut bientôt dévoré
les dieux d'or , d'argent , de pierre , & de bois qu'on
lui expofa; & il alloit être déclaré le maître des dieux,
quand un prêtre dé.Canope, ville d'Egypte, s'avifa de
prendre une cruche de terre, qui fervoità la purifica-
tion des eaux du Nil , d'en boucher les trous avec de
la cire, de la remplir d'eau, & de la placer fur la tête
du dieu de Canope, qui devoit lutter contre le feu.
A peine le dieu de Canope fut-il fur le feu , que la cire
qui bouchoit les petits trous du vafe s'étant fondue ,
l'eau s'écoula , éteignit le feu , & que la foiweraineté
fur les autres dieux fait acquife au dieu de Canope, grâ-
ce à l'invention de fon miniftre. On raconte la chofe
d'une autre manière , qui eft un peu plus honorable
pour le dieu , & 011 la prééminence fut une fuite toute
fimple de fes qualités perfonnelles. On dit que le dieu
même étoit repréfenté fous la forme d'un vafe percé
d'une infinité de petits trous imperceptibles , du mi-
lieu duquel s'élevoit une tête d'homme ou de femme,
ou de chien , ou de bouc , ou d'épervier , ce qui ne
laifle au miniftre que le mérite d'avoir bouché avec
de la cire les petits trous de la divinité.
* CANOPIEN , adj. (Myth.) furnom donné à Her-
cule , de la ville de Canope , dans la baffe Egypte,
où il étoit particulièrement honoré.
CANOPINA, (Géog.) petite ville d'Italie, dans
l'état de FEglife.
CANOPUS , (^Afron.~) étoile de la première gran-
deur , fituée dans l'hémifphere auftral , à l'extrémité
la plus auftrale de la conftellation appellée argo ou le
navire argo. Voye^ Argo. Voye^ l'aicenfion droite de
cette étoile pour 1750, à l'article Ascension. (O)
CANOSA , (Gécg.} ville d'Italie , au royaume de
Naples, près de la mer, dans la province de Bazi.
CANOT, fub. m. {Marine.} c'eft une petite cha-
loupe ou petit bateau deftiné au fervice d'un grand
bâtiment.
Canot de bols ; on appelle ainfi un canot, qui eft
fait d'un feul tronc d'arbre creufé.
CANOT de Sauvages & Canot d'écorces ; ce font
de petits bateaux faits d'écorce d'arbre , dont fe fer-
vent les Sauvages de l'Amérique pour pêcher à la
mer, &c pour voyager & aller en courfe & en traite
fur les rivières. Ils les nomment piroques. Ceux du
Canada les font d'écorce de bouleau, & affez grands
quelquefois pour contenir quatre ou cinq perionnes.
Les François du Canada, qu'on appelle coureurs de
bois &c traiteurs , s'en fervent auffî-bien que les Sau-
vages pour aller jufques dans leurs habitations leur
porter des marchandées &C en rapporter des pellete-
ries. Deux hommes conduifent ces canots ; & quand
à caufe des fauts des rivières il faut faire portage , ils
chargent canots & marchandifes fur leurs épaules, &
les tranfportent au-deffus & au-deffbus des fauts, fé-
lon qu'ils montent ou qu'ils defeendent les rivières.
Les canots des Indiens & des Caraïbes font faits de
troncs d'arbres qu'on creule , & ces fortes de bateaux
font plus grands ou plus petits, félon la grandeur &
grofléur des arbres qu'on employé pour les faire. On
dreffe ces troncs d'arbres félon la forme qu'on veut
donner au canot , & l'on les creufe. On les conduit
avec des pagaies & des rames, & on y ajoute quel-
quefois une petite voile ; on met la charge au fond :
mais comme ils ne font point leftés, ils tournent fou-
vent fens-deffus deflbus. Ils n'ont point de gouver-
nail , & ce font les rames de l'arriére qui leur en fer-
vent.
La plupart des canots ont à l'avant & à l'arriére
des avances comme les navettes , & quelques-unes
de ces avances fe terminent auffi de même en pointe.
D'autres ont l'avant & l'arriére tout plat ; il n'y en a
prefque point qui ayent un avant arrondi. Lorlqu'on
veut y ajouter une voile , on élevé un petit mât
C A N
vers l'avant. Les voiles font ou de nattes , ou de toi-
le , ou de joncs entrelacés.
On voit pourtant en Mofcovie , fur le lac de Wol-
da , des canots arrondis à l'avant 6c à l'arriére , &
beaucoup plus larges au milieu que par les bouts :
on les fait avancer avec une leule rame, dont on fe
fert à l'arriére : mais tous les autres canots de ce pays-
là font aigus à l'arriére 6c à l'avant , 6c ont du relè-
vement par les bouts : on les peint , on leur donne le
feu , & on les bi aye pour les conferver.
Les canots dont fe fervent les Nègres de la côte de
Guinée , ne font que des arbres creufés : ils font d'une
figure longue , & il ne leur relie guère de bois au-
deffus de l'eau , de forte que celui qui eft à l'arriére
& qui gouverne le canot fe trouve fouvent dans l'eau.
Ils vont fort vite , & ne laiffent pas que d'aller allez
avant en mer ; ils font donc fort longs , bas , & étroits,
& il n'y a d'efpace dans la largeur que pour tenir un
feul homme, & dans la longueur lept à huit : les hom-
mes y font aftîs fur de petits fieges de bois ronds , 6c
la moitié de leur corps s'élève au-defïïis du bord. Ils
ont à la main une rame de bois bien dur, 6c ils rament
tous à la fois, à la manière des galères, & s'accor-
dent ; ou fi quelqu'un tire trop fort & que le bâtiment
penche , il ell redreffé par celui qui gouverne , ii bien
qu'ils femblent voler lur la furface de l'eau , & il n'y
a pas de chaloupe qui puiffe les fuivre d'un beau
tems ; mais aufîi quand la mer ell haute , ils ne peu-
vent fdler , l'élévation des flots empêchant leur aire.
Lorfque la hame les renverfe , ils ont l'adreffe de les
retourner dans l'eau , de les vuider , 6c de s'y rem-
barquer fans courir le moindre danger, nageant tous
comme des poiffons. Ces canots ont ordinairement i 6
pies de long & un à deux pies de large. Il y en a de
plus grands , qui ont jufqu'à 3 5 pies de long , <j de lar-
ge , & 3 de profondeur : ils lont plats par lanière ,
où il y a un gouvernail & un banc ; ils y ajoutent des
voiles faites de jonc &c de natte. Les Nègres ne laif-
fent point leurs canots à l'eau ; ils les tirent à terre &
les élèvent fur quatre fourches pour les faire lécher;
6c quand ils font fecs , deux hommes peuvent les
charger fur leurs épaules & les porter.
Pour les conflruire 6c les creufer , les Nègres fe
fervent à préfent de haches , que les Européens leur
portent. Ils leur donnent aux deux côtés un peu de
rétréciffement par le fond. Les bouts en font pointus
à l'avant & à l'arriére ; à chaque bout il y a une ef-
pece de petit éperon ou gorgere d'un pié de long, &
large comme la paume de la main , qui fert à donner
prife pour enlever le canot.
Les canots des Sauvages de la terre de Feu & des
environs du détroit de Magellan , font d'une fabri-
que particulière. Ils prennent des écorces des plus
gros arbres , qu'ils courbent pour leur donner des
façons, fi-bien qu'ils les rendent affez femblables aux
gondoles de Venife ; pour cet effet ils les pofent fur
de petites pièces de bois, comme on ferait un vaif-
feau fur le chantier ; 6c lorfque l'écorce a pris la for-
me de gondole & le pli néceffaire, ils affermirent le
fond & les côtés avec des bois affez minces , qu'ils
mettent en travers depuis l'avant jufqu'à l'arriére,
de même qu'on met les membres dans les vaùTeaux ;
& au haut fur le bord ils pofent encore une autre
écorce qui règne tout autour, prenant foin de bien
lier le tout enlemble. Ces canots ont 10, 12, 14, &
jufques à 16 pies de long 6c 2 de large ; ils font à 7
ou 8 places, c'eft-à-dùe qu'il peut y tenir affez com-
ment lept ou huit hommes qui rament débout
6c extrêmement vite.
Les canots des fauvages du détroit de Davis font
encore plus linguliers ; ces bateaux font en forme
de navette , longs de fept à huit pies &: larges de
dcu\ pics , compofés de petites baguettes de bois
pliant en forme de claie,couvcrtes de peaux de chiens
C A N
611
marins ou loups marins. Chaque canot ne peut por-
ter qu'un homme , qui s'aflied dans un trou pratiqué
au milieu. Ils s'en fervent pour aller à la pêche , &
d'une côte à l'autre.
Canot, jaloux ; c'eft un canot qui a le côté foi-
ble , & fe renverfe aiiément. ( Z )
CANOURGUE , ( la ) Géog. petite ville de Fran-
ce dans le Gevaudan.
* CANSCHY , ( Hift. nat. bot. ) c'efl le nom d'un
arbre fort gros qui le trouve au Japon , dont les habi-
tansdu pays fe fervent pour faire une efpecc de pa pier.
Voici comment ils s'y prennent. On coupe l'arbre à
fleur de terre ; il continue à pouffer de petits rej ït-
tons : quand ils font de la greffeur ou doigt, on les
coupe , on les fait cuire dans un chaudron jufqu'à
ce que l'écorce s'en fépare , on feche cette écorce ,
& on la remet cuire encore deux fois , en remuant
continuellement , afin qu'il fe forme une efpece de
bouillie ; on la divife & on l'écrafe encore plus dans
des mortiers de bois , avec des pilons de la même
matière ; on met cette bouillie dans des boîtes quar-
rées, fur lefquelles on met des groffes pierres pour
en exprimer l'eau :on porte la matière fur des formes
de cuivre, & on procède de la même manière que
font les Papetiers.
CANSTADT, ( Géog. ) petite ville d'Allemagne
en Soiiabe fur le Necker, au duché de Wirtemberc.
CANTABP.ES , f. m. pi. (Géog.) anciens peuples
de l'Eipagne Tarragonoife : ils habitoient le pays de
Guipuicoa , la Bifcaye, les Affiiries, & la Navarre:
ils etoient très-belliqueux , & une liberté durable fut
la récompenfe de leur courage.
CANTALABRE , f. m. ( ArchUecl. ) ce mot n'eft
ufité que parmi les ouvriers , 6c iignirîe le bandeau
ou la bordure d'une porte ou d'une croifée. Il peut
avoir été fait du Grec y.urà , autour, & du Latin la-
brum , lèvre ou bord. ( P )
CANTANETTES , f. f. (Marine. ) petites ouver-
tures rondes , entre lefquelles efl le gouvernail , &
qui donnent la lumière au gavon. Foye^ Gavon ,
Gouvernail. (Z)
CANTARA , ( Géog. ) rivière de Sicile dans la
vallée de Demona. Il y en a une autre de même
nom en Sicile, dans la vallée de Noto.
CANTARO , ( Commerce. ) poids dont on fe fert
en Italie ôc ailleurs, pour pefer certaines efpeces de
marchandifes.
Il y a plufieurs fortes de cantaros ; l'un pefe cent
cinquante livres; l'autre cent cinquante -une livre,
6c le troifieme cent foixante livres. La livre de Li-
vourne ell de douze onces , poids de marc ; & celle
de Paris , d'Amfterdam , de Strasbourg , 6c de Be-
fançon , où les poid^ iont égaux , cil de feize onces ,
aulîi poids de marc ; cnlorte que fur ce pié ces trois
fortes de cantaros doivent rendre à Paris , Amfter-
dam , &c. celui de cent cinquante livres , cent trois
livres huit onces ; celui de cent cinquante-une livres ,
cent quatre livres trois onces ; & celui de cent foi-
xante livres , cent dix livres lix onces trois gros , xm
peu plu . Vi . . \ le dictionn, du Commerce.
* CANTARO ; on nomme ainli le quintal clans
l'île de Cli) pie , il contient 100 rotolis ou livres de
Chypre , ce qui revient à pies de 400 livres de notre
poids. A Conirantinople , à Florence , & à Livourne ,
le canton n'cll pas ii conlidérable.
( wt.yro, ell auffi une mefure de continence
dont on fe lért à Cochin. II y en a jufqu'à trois qui
différent de quelques livres. On s'en fert fuivant les
diverfes marchandifes qu'on veutmefurer, Ordinai-
rement le canton eft de quatre rubis , &: le rubis de
trente-deux rotolis. f',n ej RUBIS & Rotolis. (G)
C \ sTATE, f. f. (Belles- Lettres.) petit poème
fait pour erre mis en mufique , contenant le récit
622
C A N
d'une action galante ou héroïque : il eft compofé d'un
récit qui expoie le fujet ; d'un air en rondeau ; d'un
fécond récit , & d'un dernier air contenant le point
moral de l'ouvrage.
L'illuftre Rouffeau eft le créateur de ce genre par-
mi nous. Il a fait les premières cantates Françoiles ;
&: dans prefque toutes , on voit le feu poétique dont
ce crénie rare étoit animé : elles ont été miles en mu-
fique par les Muficiens les plus célèbres de fon tems.
Il s'en faut bien que lés autres poèmes lyriques
ayent l'agrément de ceux-ci. La Poëfie de ftyle n'eft
pas ce qui leur manque : c'eft la partie théatrale,celle
du fentiment , & cette coupe rare que peu d'hommes
ont connue , qui eft le grand talent du théâtre lyri-
que , qu'on ne croit peut-être qu'une fimple mécha-
nique , & qui fait feule réuffir plus d'opéra que tou-
tes les autres parties. Voyt{ Coupe. (^)
La cantate demande une poéfie plutôt noble que
véhémente, douce , harmonieufe ; parce qu'elle doit
être jointe avec la mufique , qui ne s'accommode pas
de toutes fortes de paroles. L'enthoufiafme de l'ode ne
convient pas à la cantate : elle admet encore moins
le defordre ; parce que l'allégorie qui fait le fonds
de la cantate, doit être foûtenue avec lageffe & exac-
titude , afin de quadrer avec l'application qu'en veut
faire le poëte. Princ. pour la lect. des Poët. tom. I. (G)
On appelle auffi cantate , la pièce de Mufique vo-
cale accompagnée d'inftrumens , compofée fur le pe-
tit poëme de même nom dont nous venons de par-
ler , & variée de deux ou trois récitatifs , & d'autant
d'ariettes.
Le goût de la cantate auffi-bien que le mot , nous
eft venu d'Italie. Plufieurs bons auteurs , les Ber-
niers, les Campras, les Monteclairs , les Batiitins ,
en ont compofé à l'envi : mais peribnne en cette par-
tie n'a égalé le fameux Clerambault, dont les canta-
tes doivent par leur excellent goût être confacrées à
l'immortalité.
Les cantates font tout-à-fait paffées de modes en
Italie , & elles fuivent en France le même chemin.
On leur a fubftitué les cantatilles. {S)
CANTATILLE , diminutif de cantate , n'eft en
effet qu'une cantate fort courte , dont le fujet eft lié
avec quatre ou cinq vers de récitatif en deux ou trois
airs communément en rondeau , avec des accompa-
gnemens de fymphonie. ( S )
CANTAZ ARO , ( Géog. ) ville d'Italie au royau-
me de Naples dans la Calabre ultérieure. Long. 34.
35. lot. 38. 59.
CANTECROIX , (Géog.) petite centrée des Pays
Bas au duché de Brabant , avec titre de principauté.
CANTHARIDE , cantharis , f. f. (Hifi. nat. Infect.)
genre d'inlècle dont on diftingue plulieurs efpeces.
M. Linnauis le met dans la claflë desiniéftes , qui ont
des enveloppes à leurs ailes & des mâchoires dans
leurs bouches. Les cantharid.es , félon le même auteur ,
ont les antennes faites en forme de foies ; les faufles
ailes flexibles; la poitrine un peu applatie, bordée &
arrondie, & les côtés du ventre pliflés , &c Syjl. na-
turel. MoufFet divilé les efpeces de cantharides en gran-
des & en petites. Celles qu'on eftime le plus comme
remède , font grandes ; leur corps eft épais & allon-
gé : il y a lur leurs ailes des lignes tranfverlales de
couleur d'or. On les trouve dans les blés. Infect, thea-
trum. Il y a des cantharides de différentes couleurs :
celles que l'on employé dans la Pharmacie font d'une
très-belle couleur verte luifante, azurée, mêlée de
couleur d'or ; elles ont environ neuf lignes de lon-
gueur. On les trouve en été aux environs de Paris &
en plufieurs autres lieux , fur les feuilles du frêne , du
rofier , du peuplier , du noyer , du troène , &c. dans
les prés , & auffi furies blés , où elles caufent du dom-
mage. Il y a beaucoup de ces infeû es dans les pays
chauds , comme l'Efpagne , l'Italie , & les provinces
C A N
méridionales de la France. Ils font fort rares en Al-
lemagne. Les cantharides font quelquefois réunies en
fi grand nombre, qu'elles paroiflent en l'air comme
un eiTain qui feroit pouffé par le vent : alors elles font
précédées par une odeur defagréable qu'elles répan-
dent au loin. Ordinairement cette mauvaiie odeur
fert de guide lorfqu'on cherche à ramaffer de ces in-
fectes. Les cantharides viennent d'un vermifTeau fem-
blable en quelque façon à une chenille, foye^ladeL-
cription détaillée des trois efpeces de cantharides ,
dans les Eph. de Cacad. des cur. de la nat. dec. 2. an.
2. obf. 20.21. 6" 22. ^bjfç INSECTE. (/)
* Les cantharides en poudre appliquées fur l'épi-
derme , y caufent des ulcérations , excitent même des
ardeurs d'urine , la ftrangurie , la foif, la fièvre, le
pifiement de fang , &c. ôc rendent l'odeur puante &
cadavéreufe. Elles caufent les mêmes fymptomes
prifes intérieurement. On a obfervé qu'elles nui-
foient beaucoup à la veffie. Voyt\_ des exemples de
ces effets dans les Ephémérid. des curieux de la nat. dec.
2, an. y. obf. 86. dans les Récits anat. de Barthol ,
cent. I. hijt. 21. On lit dans Paré , qu'une courtifane
ayant préfenté des ragoûts laupoudrés de canthari-
des pulvérifées à un jeune homme qu'elle avoit rete-
nu à fouper, ce malheureux fut attaqué le jour fui-
vant d'un priapifme & d'une perte de fang par l'anus
dont il mourut. Un autre fut tourmenté du mai de
tête & eut un pifiement de fang dangereux , pour
avoir pris du tabac mêlé de poudre de cantharides.
Eoylc va plus loin: il affûre que des perfonnes ont
fenti des douleurs au cou de la veffie , 6c ont eu quel-
ques-unes dés parties qui lervent à la fecrétion des
urines , offenfées , pour avoir feulement manié des
cantharides lèches ; d'où il s'enfuit qu'on peut comp-
ter les cantharides au nombre des poifons. Boerhaave
ordonne contre ce poifon les vomitifs , les liqueurs
aqueufes , délayantes, les fubftances huileufes , émol-
lientes , & les acides qui réfiftent à la putréfaction.
Quand on les employé dans les véficatoires , il faut
avoir égard & à la maladie & à la quantité qu'on
en employé. Boerhaave les croit falutaires dans le .
rachitis , & toutes les fois qu'il s'agit d'aiguillonner
les vaiffeaux , & de réfoudre des concrétions mu-
queufes. Mais en général, l'application extérieure de
ce remède , & fur-tout fon ufage intérieur, demsr.de
beaucoup de prudence & d'expérience de la part du
Médecin.
CANTHENO, cantharus, i. m. (Hifl. nat. Ichth.)
poilfon de mer qui reffemble au fargo & au fparail-
lon pour la forme du corps , mais qui diffère de ces
poill'ons & des autres du même genre , en ce que fa
couleur eft plus obfcure &c plus noire ; que fes écail-
les font beaucoup plus petites ; qu'il n'y a pas de cer-
cle noir auprès de la queue ; que fes dents , quoique
difpofées de la même manière que dans les autres
poiifons de ce genre , ne font pas larges , mais au con-
traire menues & pointues ; & qu'il n'a point dans les
mâchoires de tubercules offeux , mais feulement quel-
ques inégalités : enfin la principale différence connfte
dans des lignes jaunâtres preique parallèles, qui s'é-
tendent depuis la tête jufqu'à la queue , comme dans
la faupe , mais cependant d'une couleur plus obfcu-
re. L'iris des yeux eft d'une belle couleur d'argent
fans aucun mélange de couleur d'or , ni d'autres cou-
leurs ; les lignes qui paftent fur le milieu des côtés
font bien marquées , & plus larges que dans la plu-
part des autres poiffons. Rondelet prétend que l'on
a donné à ce poifibn le nom de cantharus , parce qu'il
refte dans l'ordure comme l'infecte qui eft appelle en
François fouille-merde , & en Latin cantharus. En effet
le cantheno demeure dans la fange fur les bords des
ports de mer,à l'embouchure des fleuves, & dans les
endroits oit les flots de la mer entraînent des immon-
dices. Ce poilfon eft allez fréquent dans la mer Mé-
C A N
C A N
diterranée. On en trouve à Rome & à Gènes. Sa
chair a la même qualité que celle de la dorade , du
fparaillon , du largo , &c. "Willughby , Hijl.pijc. f^oy.
Poisson. (/)
CANTHUS , f. m. ( terme eTAnatomie. ) eft le
coin ou angle dç l'œil , formé par ia commirlure ou
jonâion de la paupière fupérieure & de l'inférieure.
Voye^ CEiL.
L'angle qui eft du côté de l'œil , s'appelle le grand
canthus , ou le canthus interne ; celui qui eft du cô-
té des tempes s'appelle petit canthus , ou canthus ex-
terne. {L )
CANTILLANA , ( Giog. ) petite ville & comté
d'Efpagne , dans I'Andaloufie , fur le Guadalquivir.
C A NT I M AR O N S , ou C ATIM ARONS , I . m .
( Marine. ) ce font deux ou trois canots de pies d'ar-
bres , croifés 6c liés enfemble avec des cordes de
coco , qui foûtiennent des voiles de nattes en forme
de triangle , dont les Nègres de la côte de Coroman-
del fe fervent pour aller pêcher , & même trafiquer
de proche en proche. Ceux qui les conduifent font
ordinairement à demi dans l'eau , aflis les jambes croi-
fées , n'y ayant qu'un endroit un peu élevé vers le
milieu , pour mettre leurs marchandifes. Ils ne font
aucune difficulté d'aller à dix ou douze lieues au lar-
ge ; ils vont très-vite pour peu qu'il vente. (Z)
CANTINE f. f. dans VArt militaire , eft le lieu où
l'on fournit aux foldats de la garnifon l'eau-de-vie ,
le vin & la bière à un certain prix beaucoup au-def-
fous de celui des cabarets. C'eft un privilège particu-
lier que le Roi veut bien accorder à l'es troupes.
Il y a auffi des cantines pour les fournir de tabac.
(Q)
CANTIQUE , f. m. ( Hift. & Bell. lett. ) difeours
ou paroles que l'on chante en l'honneur de la divi-
nité.
Les premiers & les plus anciens cantiques furent
compofés en mémoire de quelques évenemens mé-
morable* , & doivent être comptés entre les pre-
miers monumens hiftoriques.
« Le genre humain s'étant multiplié , dit un au-
» teur moderne , 6c Dieu ayant fait éclater fa puiflan-
» ce en faveur du jufte , contre l'injufte, les peuples
» reconnoiflans immortaliiercnt le bienfait par des
» chants qu'une religieufe tradition lit palier à la pol-
» térité. C'eft de-là que vinrent les cantiques de Moy-
» fe , de Debora , de Judith ; ceux de David 6c des
» prophètes. Voye-^ Pseaùme.
M. Fourmont prétend qu'il y a dans les pfeaumes
& dans les cantiques des Hébreux , des dictions étran-
gères , des expreffions peu ufitées ailleurs , des phra-
fes dont les mots font tranfpofés ; que leur ftyle ,
comme celui de nos odes , en devient plus hardi , en
paroît plus pompeux 6c plus énergique ; qu'on y
trouve des ftrophes , des mefurcs 6c différentes for-
tes de vers, & même des rimes. A^j^Rime.
Ces cantiques étoient chantés par des chœurs de
mufique , au Ion des mlhumens , & fouvent accom-
pagnés de danfes , comme il paroît par l'écriture.
La plus longue pièce qu'elle nous offre en ce genre
eft le Cantique des cantiques , ouvrage attribue à Sa-
lomon , & que quelques auteurs prétendent n'être
que l'épithakime de Ion mariage avec la tille du roi
d'Egypte. Mais les Théologiens prouvent que fous
cet emblème, il s'agit de l'union de Jefus-Chriftavec
l'Eglife.
« Quoique les Paycns , dit encore l'auteur que
» nous avons déjà cité , le trompalfent dans l'objet
« de leur culte , cependant ils avoient dans le fonds
» de leurs fêtes le même principe que les adorateurs
» du vrai Dieu. Ce hit la joie & la reconnoiliance
» qui leur fit inftituer des jours folemnels pour célé-
» bierles dieux auxquels ils le croyoient redevables
» de leur récolte. De la vinrent ces chants de joie
6iy
» qu'il nommoient Dithyrambes , parce qu'ils étoient
» confacrés au dieu qui, félon la Fable, eut unedou-
» ble nailTance , c"eft-à-dire, à Bacchus Après
» les dieux , les héros enfaus des dieux devinrent les
» objets de ces chants C'eft ce qui a produit
» les poèmes d'Orphée , de Linus , d'Alcée, de Pin-
» dare, &c. » Voye{ DITHYRAMBE & Ode. Coursde
Bell. lett. tom. II.p.28 &zg.
Au refte ni parmi les Hébreux ni parmi les Payens,
les cantiques n'étoient pas tellement des expreffions
de la joie publique , qu'on ne les employât auffi dans
les occafions trilles & lugubres ; témoin ce beau can-
tique de David fur la mort de Saiïl & de Jonathas ,
qu'on trouve au //. livre des Rois , chap. j. Ces for-
tes de cantiques ou d'élégies eurent tant de charmes
pour les Hébreux , qu'ils en firent des recueils , 6c
quelong-tems après la mort de Jofias , ils répétoient
les plaintes de Jérémie fur la fin tragique de ce roi.
//. Paralip. ch. xxxv.
Les anciens donnoient encore le nom de cantiques
à certains monologues paffionnés & touchans de leurs
tragédies, qu'on chantoit fur le modehypodorien&
hypophrygien , comme nous l'apprend Ariftote au
xix. de les Problèmes , à peu-pres comme certains
monologues qui , dans quelques tragédies de Cor-
neille , font en ftances cie vers irréguliers , & qu'on
auroit pu mettre en mufique. Telles font les ftances
du Cid, celles de Polieuéte qui font très-belles, 6c
celles d'Héraclius : au refte l'ulage de ces ftances pa-
roit entierrement banni de nos Tragédies modernes.
f^oyei Stances. (G)
CANTON f. m.(Hijl.mod.) quartier d'une ville
que l'on conlidere comme lepare de tous les autres.
/^«{Quartier.
Ce mot paroît dérivé de l'Italien canton; , pierre
de coi.i.
Le mot canton eft plus communément emplové
pour déligner une petite contrée ou diftnct , fous un
gouvernement léparé.
Tels font les treize Cantons SuiiTes , dont chacun
forme une république à part. Ils font cependant liés
enfemble, 6c compofent ce qu'on appelle le Corps
Helvétique , ou république des Suijfss. ( G)
CANTON, ( en terme de Blajbn.} eft une des neuf
pièces honorables des armoiries. C'eft une partie
quarrée de l'écu léparee des autres. Elle n'a aucune
proportion fixe , quoiqu'elle doive être , luivant les
règles ,plus petite que le quartier. Elle eft fouvent ia
neuvième partie de l'écu , & on l'employé comme
une addition ou différence , 6c fouvent pour marque
de bâtardife.
Le canton eit quelquefois placé au coin dextre 6c
quelquefois au feneltie ; & dans ce cas on l'appelle
canton fenejlré. Sa forme eft repielentee dans/'/jz/j';.
Herald. On dit , il porte d'hermine au canton d'argent
chargé d'un chevron de gueules.
Les efpaces que laiiTent les croix & les fautoirs
font auffi nommés cantons. ( / )
Canton, foyei Quan-ton.
CANTONNE, ad j. (terme dArchiu3;ire.) On dit
qu'un bâtiment eft cantonne , quand Ion encoLnure
eft ornée d'une colonne ou d'un pilaftre angulaire,
ou de chaînes en lîaifon de pierres de refend ou de
boffages , ou de quelques autres corps qu
le niul du mur. Les anciens nommoient les pilaûres
<|ui étoient aux encoignures antes , & les temples ou
il \ avoit de ces pilaftres temples a antes.
CANTONNÉ , (enterme dt Blafon ) fe dit lorfque les
efpaces que les croix ec les fautoirs laifient vuides ,
font remplis de quelques figures.
Remond de Modene en Provence , de gueules à
la croix d'argent , cantonne de quatre coquilles de
même. ( y")
CANTONNER des troupes , ( ) c'eft
614
CAO
CAP
les difperfer en différens corps qu'on place clans tin
pays , pour leur donner plus de facilité pour les fub-
iiftances. (Q)
C ANTOR , f. m. ( Commerce.") poids dont on fe fert
en Sardaigne. Un cantor pefe cent quarante-cinq li-
vres de Venife. foye^ Livre.
CANTO RBER Y, (Géog.) ville d'Angleterre,
capitale du comté de Kent fur la Stoure. L'archevê-
que eft primat d Angleterre. Long. 18. j8. lat. 5i.
17-
C ANTRE , f. f. fe dit dans les manufactures en foie ,
d'une partie de l'ourdhToir dans laquelle on paifeles
rochets pour ourdir. Foyei Ourdissoir.
* Cantre , pour les velours & autres ouvrages ,
eft auffi dans les manufactures en loie , une efpece
de chaffis foutcnu fur des pies plus courts par-devant
que par-derriere , ce qui incline le chaffis du côté de
l'ouvrier ; ce chaffis eft diviié félon fa longueur en
deux parties égales par une traverie ; cette traver-
fe & les côtés du chaffis qui lui font parallèles ,
font percés de petits trous. Ces petits trous reçoivent
autant de broches de fil-de-fer. Ces broches font cha-
cunes portées par les deux bouts fur les deux côtés
en longueur de la cantre , & par le milieu lur la tra-
verfe parallèle à ces côtés. C'eft fur elles qu'on en-
file les roquetins à qui elles fervent d'axe. Les fils de
foie dont les roquetins font chargés ne fe mêlent
point au moyen de l'inclinaifon de la cantrz & de
ion plan incliné , qui tient toutes les broches , 6c par
conléquent chaque rangée de roquetins plus haute
Tune que l'autre. La cantre eft piacée au derrière
du métier. Quant à fon ufage , voye^ L'article Ve-
JLOURS.
C ANC/S , A LP H EST ES , f. m. ( Hi(l. nat. Iclh. )
poiiîbn de mer. Son dos eft de couleur de pourpre , &
le refte du corps jaunâtre. Le canus eft plus étroit que
la dorade 8c le pagre. Il eft affez lemblable à la men-
dole , quoique plus grand & plus épais. Il a un pié
de longueur , fa bouche eft de médiocre grandeur ,
il a des lèvres; fes dents font ferrées les unes contre
les autres. Il a depuis la tête juiqu'à la queue des pi-
quants joints enfemble par une membrane fort min-
ce. Rondelet. foyt{ Poisson, (/ )
CANZON , ( Géog. ) petite ville d'Italie , dans le
duché de Milan , au comté de Corne.
CANZUGA , ( Géog. ) ville de Pologne , dans le
palatinat de Ruffie.
CANZULA , (Géog.") ville maritime d'Afie , au
Japon , dans l'île de Niphon.
CAO, (Geog.) ville de la Chine , fur un lac de mê-
me nom , dans la province de Kianp-nan.
CAOCHEU, ou TCHAOTCHEOU, ( Géog. )
ville de la Chine, dans la province de Quan-ton.
* CAOPOÏBA , (Hift. nat. bot.) arbre des Indes ,
de la hauteur & de la forme du hêtre. Son écorce eft
cendrée , 6c a des ondes brunes ; les feuilles font fer-
mes, de figure oblongue , & il fort de leur queue
quand on la rompt , une liqueur laiteufe ; les fleurs
ont un pédicule , elles ont l'étendue de la rofe ; les
pétales en font blancs , avec de petits onglets rou-
ges ; au lieu de nombril , on leur remarque un petit
globule rouge , rélineux , de la groffeur d'un pois ,
qui donne une liqueur gluante , jaunâtre , transpa-
rente , 6c affez femblable à la térébenthine. Le tiu.t
eft dans une capfule , de-même que le gland, & laiffe
voir quand on le coupe en long , avant la maturité ,
plufieurs rangs de lemences , de la groffeur tk de la
figure de pépins de pommes. Chaque femence eft
couverte d'une pellicule rouge, fous une autre, cou-
leur de vermillon. La pulpe du fruit ei\ jaune , ce
donne un fuc jaune. L'écorce de l'arbre , qui eft
épaiffe , fe fépare aifément du bols qui eft fragile ,
& qui contient une moelle que l'on en tire facile-
ment, 6c qui laifte le bois creux.
Il y a une autre efpece de caopoiba à écorce grife ,
& à feuilles oblongues ôc carinées.
C AOMING , ( Géog. ) petite ville de guerre de la
Chine , dans la province de Younnang.
CAOR , ou C AHOR , ( Géog. ) royaume d'Afie ,
dans l'Inde , au delà du Gange ; la capitale porte le
même nom.
C AOPv. A ( Géog. ) rivière de l'Amérique méridio-
nale.
CAORLE , ( Géog. ) petite ile du golfe de Venife,
fur les côtes du Frioul.
COATANG , ( Géog. ) petite ville de guerre de la
Chine , dans la province de Chantung , lur la riviè-
re de Mingto.
* C*AOUANNE, (Hifl. nat. Zoolog. ) grande tor-
tue de mer , dont la chair quoique mangeable , n'a
pas la délicatefie de celle qu'on appelle tortiu fran-
che ; d'ailleurs elle lui reifemble en tout. foye{
Tortue.
* CAOUP , arbre qui croît dans l'île de Mara-
gnan dans l'Amérique ; fa feuille reffemble à celle
du pommier : mais elle eft plus large ; il a la fleur
rouge ou jaune , & le fruit comme l'orange pour la
figure 6c le goût : il eft plein d'amandes.
CAP , f. m. ou PROUE , ( Marine.) c"eft la pointe
qui eft à l'avant du. vaiffeau , qu'on nomme auffi
poulaine, éperon, avantage, tous mots uiités parmi
les gens de mer , pour fignifier la même choie. Voye^
Blanchi 1. la cotte N.
On dit mettre le cap , porter le cap , avoir le cap à
terre ou au large , pour dire , mettre la proue du vaif-
Jeau du coté de la terre ou de la mer.
Porter le cap fur l'ennemi , c'eft faire route pour
l'aller chercher 6c avancer fur lui.
Porter le cap , mettre le cap à fouef , aufud , au nord,
&c. c'eft faite route à l'oueft ou au fud.
Avoir le cap à la marée ; cela fe dit lorique le vaif-
feau préfente l'avant au courant de flot.
Cap de Mouton, ( Marine.) Les caps de mou-
ton font de petits billots de bois , taillés en façon de
poulie , qui lont environnés 6c fortifiés d'une bande
de fer, pour empêcher que le bois n'éclate.
Le cap de mouton eft percé par trois endroits fur
le plat , ayant à chaque trou une ride ; c'eft ainli
qu'on appelle une petite corde qui fert à plufieurs
autres ufages : ordinairement il entre 160 caps de
mouton pour agréer un vaiffeau.
Les caps de moutons fervent principalement à ri-
der qu roidir les haubans 6c les otais ; c'eft par leur
moyen qu'on roidit ou lâche ces manœuvres dor-
mantes , félon qu'on y eft obligé par le tems qu'il fait ;
ils fervent auffi à donner la forme aux trélingages
qui font au haut des étais , ayant divers petits trous
par où paffent les marticles ; ils font en même tems
une efpece d'ornement au vaiffeau ; ils font de figure
ovale ôc plats ; ceux des haubans font amarrés aux
porte-haubans , ou aux cadenes.
Les caps de moutons des grands haubans font amar-
rés aux porte-haubans , moitié dans les haubans,
moitié dans les cadenes ; oc comme les cordage*s
neufs fe lâchent , il faut les roidir autant qu'il le
peut en fanant.
Cap de Mouton de Martinet, (Marine.) c'eft
le cap de mouton du trélingage , ou des marticles qui
font au bout du martinet de l'artimon & à la vergue ;
mais le cap de mouton fur l'étai , qui a la figure ovale,
d'où partent plufieurs lignes, qui von; en s'elarg.i-
fant en patte d'oie , fur le bord de la hune , pour em-
pêcher les huniers d-e fe couper contre la hune ; e'eit
la moque de rre'inj;ay;e. Foye7_ Martinet , Marti-
CLE, & TrÉUNuAGE.
Cap de Mouton a croc, ( Marine.) ce fonides
caps de mouton où il y a un croc de fer , pour a.cc o-
cher
CAP
cher au côté d'une chaloupe; c'eft-là qu'on a cou-
tume de les faire iervir pour retenir les haubans.
Cap deMore ,Tète deMore, Bloc ,Chou-
QUET, voyc{ CHOUQUET. (Z)
Cap, ou Cavesse de More, (Manège.) eft un
che\ al de poil rouhan , qui outre ion mélange de
poil gris & bai , a la tête & les extrémités des pies
noires. Voye^ Rouhan. (V)
* Cap , ou Promontoire,!". m. (Géog. )ce mot
eft dérivé de l'Italien capo, qui veut dire tête en cette
langue. Les Grecs le lervoient des mots axpov , ou
«poTHMov , pour défigner un cap , & les Latins àepro-
montorium ; c'eft une pointe de terre qui s'avance
dans la mer , plus que les terres contigues. Quand
en rangeant une côte , on paffe près d'un cap, on le
fert à la mer de l'exprefïïon doubler le cap , parer le
cap. La Sicile fut appellée par les anciens trinacria ,
à caule de les trois caps ou promontoirs.
Cap de Bonne-Espérance: ce cap eft à l'ex-
trémité méridionale de l'Afrique ; les Portugais le
découvrirent ; depuis les Hollandois y bâtirent un
fort & s'y établirent; enforte qu'ils exigent des péa-
ges des autres nations qui y abordent. Il y croit du
froment & de l'orge en abondance , ainli que diffé-
rentes fortes de légumes & de fruits; il y croît aufli
du vin de liqueur tres-eftimé. Long. Jj. 45. lat. mé-
rid. 34. 40.
Cap-Breton , voye{ Isle royale.
Cap-François; il eft fur la côte feptentrionale
de l'île de S. Domingue ; & c'eft le port le plus fré-
quenté de la partie de cette île qui appartient aux
François. On y a bâti une ville confidérable.
Cap-Verd , ( Géog.) cap très-confidérable fur la
côte d'Afrique ; il a été découvert par les Portugais
en 1474; il eft bordé des deux côtés par la Gambre
& le Sénégal. Il eft habité par des Nègres, qui lont
laborieux & appliqués , & dont la plupart adorent
la lune & les diables.
Cap-Verd , ( des du ) Voye^ IsLES.
CAPABLE, adj. (en Droit.') eft celui qui a les
qualités requifes par les lois pour faire quelque fonc-
tion appartenante à la vie civile : par exemple , il
faut avoir xj ans accomplis pour être capable d'alié-
ner. Il faut être régnicole pour être capable de pof-
féder des bénéfices en France ; il n'y a que les gra-
dués qui foient capables de poiTédcr des cures dans
les villes murées. (H).
Capable , ( Gcom. ) on dit qu'un fegment de cer-
cle eft capable d'un angle , lorlque ce legment eft tel
qu'on y peut inferire cet angle ; enforte que les deux
côtés de l'angle fe terminent aux extrémités du feg-
ment , &: que le fommet de l'angle foit fur la circon-
férence du legment. On fait que tous les angles inf-
crits dans un même legment font égaux ; ainli le leg-
ment E F D , (fig. _o3. Geom. ) eft capable de l'angle
EFD , ou de ion. égal EH D. On a plufieurs mé-
thodes pour décrire un fegment capable d'un angle
donné : en voici une allez limple. Faites un triangle
ifofccle , dont l'angle au iommet EFD foit égal à
l'angle donné ; ou , ce qui eft la même choie , taites
les angles FE D , FDE , égaux chacun à la moitié
de 180 degrés moins la moitié de l'angle donne ; &c
par les points F , D , décrivez l'arc de cercle £ F D.
Foyei Cercle. (O)
CAPACCIO,™ CAPACE, ( GJog.) petite ville
d'Italie, au royaume de Naples , dans la principauté
citérieurc. Long. Jz. 38. Iat.*f0. 2J-
CAPACITE , 1. t. dans un fens général marque
une aptitude ou difpofition à quelque choie.
Les lois d'Angleterre donnent au roi deux capacîm
tés ; l'une naturelle , & L'autre politique : par la pre-
mière , il peut acheter des terres pour lui ci. les héri-
tiers ; par la féconde, il en peut acheter pour lui &C
fes fucceiTeuis ; il en eft de même du clergé.
Tome II.
CAP
625
Capacité (en Droit.) fe prend dans le même
fens que capable. Voye^ ci-deiTus.
En Droit canonique , on entend par capacité, les
qualités extérieures feulement , comme V extrait bap-
tijlaire , la tonfure , les dimijjoires , s'il en eft befoin ,
la provifion du bénéfice , la prife de po/Mion , & quel-
quefois les grades , les induits , ou adves privilèges.
Capacité d'un corps , fe dit proprement de l'ef-
pace ou volume qu'il occupe, Poye{ Espace , Vo-
lume. (O)
C APÀDE ,{.{.( terme de Chapelier. ) eft une cer-
taine quantité de laine ou de poil qu'on a formée
par le moyen de l'arçon. Un chapeau eft compoié
de quatre cipades que l'on feutre lur le bafîîn , &. que
les ouvriers foulent eniuite avec de la lie de vin.
* Capades , f. m. pi. (Hijî. mod. ) l'on nomme
ainfi aux Indes chez les Maures & parmi d'autres
nations , les eunuques noirs à qui on confie la garde
des femmes , & qui les accompagnent dans leurs
voyages.
C APALANIER , f. m. ( Marine. ) on nomme ainlt
fur les vaiflèaux Bretons qui vont à la pêche de la
morue feche , les matelots qui aident à cette pêche ;
ils ont rang entre les décoleurs & les lâleurs , & ont
le même pot-de-vin. ^oye^DÉCOLEUR 6-Saleur.
CAPARAÇON, f. m. (Manège.) couverture qu'on
met fur les chevaux. Les caparaçons ordinaires font
d'une fimple toile ou treiilis pour l'été, ou de drap
en hyver; ceux des chevaux de main font de drap,
ornés &c chargés des armoiries ou des chiffres du maî-
tre , en or , en argent, en laine ou en lbie. Les capara-
çons des anciens gendarmes étoient de riches notif-
ies brodées , dont ils faifoient parade dans les mon-
tres, les tournois, les pompes, & les cérémonies.
Les caparaçons étoient autrefois une armure de fer
dont on couvroit les chevaux de bataille.
Les caparaçons de l'armée font quelquefois d'une
grande peau d'ours ou de tigre , de même que ceux
des chevaux de carrolle en hyver. (F~)
CAPARAÇONNER un cheval, ( Manège. ) c'eft
lui mettre un caparaçon. Voye^ Caparaçon, (y)
CAPALITA , (Gcog.) grande ville de l'Amérique
feptentrionale , dans la province de Guaxaca.
CAPDENAC, (Géog.) ancienne & petite ville de
France dans leQuercy, lur un rocher efearpé, &C
prefqu'environné de la rivière de Lot.
CAPE , f. f. ou GRAND-PACFI , (Marine.) c'eft
la grande voile : être à la cape, c'eft ne porter que La
grande voile bordée , & amurée toute arrière. On
met aulTi à la cape avec la miiene & l'artimon. On fe
tient a la cape, quand le vent eft trop tort , & qu'il eft
contraire à la route qu'on veut faire. V. Capéer.(Z)
Cape, (la) c'eft dans la Fortification , la partie
fupérieure du batardeau. Voye^ Batardeau. (Q)
LAPECHIUM, (Géog.) ville de l'Amérique icp-
^htrionalc, dans la nouvelle Elpagnc, lur la pref-
qulle lie Jucatan.
CAPEER, L \PIER, CAPÉIER, aller à la cape ,
mettre le vaiffeau a la cape , (Marine.) c'eft taire iervir
La grande voile feule , après avoir ferlé toutes les au-
nes, &C portant le gouvernail fous le vent, mettre
le vaifTeau c< té à navets, pour le laiîTer aller à U
dérive , ÔCfe maintenir dans le parage où l'on eft au-
tant qu'il eft polTible, foit pendant un vent force Se
de gros tems, l'oit quand la nuit ou la brunie vous
lui prend auprès d'une côte qu'on ne connoît pas bien,
ou qui eft dangereufe , & qu'on ne veut aborder que
de jour. Que fi le vent n'eit pas forcé , on porte auiit
la miiene , & quelquefois on y ajoute l'artimon : mais
de uros tems on les amené auili-bien que les perro-
quets & les huniers, pour donner moins de pnie au
vent; cv li l'oratt eft fi grand qu'on ne puifleplus
KKkk
6i6
CAP
capcUr , on fait le jet , & on met le vaiffeau à fec , le
laiffant aller à mâts & à cordes. (Z)
CAPELAN, f. m. (Hijl. nat. Ichth.) afellus mollis ml-
nor, feu afellus omnium minimus , anthitz fecundajpecies.
Rond. Ce poiffon eft le plus petit de Ion genre : ce-
lui fur lequel oaja fait cette defeription n'avoit qu'en-
viron îîx pouowde longueur. Le capelan a un barbil-
lon à l'angle delà mâchoire inférieure; les yeux font
recouverts d'une membrane lâcher le dos eft d'un
brun clair, & le ventre d'un blanc fale. La première
nageoire du dos eft compofée de douze piquans ; cel-
le du miiieu en a dix-neuf, & la dernière n'en a que
dix-fept. La nageoire qui eft immédiatement au-de-
là de l'anus, en a vingt-fept , & celle qui eft plus loin
en a dix-fept : les nageoires des ouies en ont chacune
treize, & celles du ventre n'en ont que lix feulement.
La chair de ce poiffon eft douce & tendre, & a un
très-bon goût. On en trouve en grande quantité dans
la mer Méditerranée , & on en voit beaucoup à Ve-
nife & à Marfeille. Willughby , Hijlpifc. Voy. Pois-
son. (T)
CAPELER les haubans, {Marine.') c'eft paffer les
haubans par-deffus la tête du mât, pour les mettre en
place. (Z)
CAPELET, f. m. (Maréchalerle.) enflure qui
vient au train de derrière du cheval , à l'extrémi-
té du jarret, qui eft groffe à peu -près comme une
petite balle de jeu de paume. Cette maladie eft eau-
fée par une matière phlegmatique & froide , qui s'en-
durcit par fa vifeofité, & ne fait pas grand mal. (V)
CAPELINE , f. f. terme de Chirurgie, bandage pour
contenir l'appareil qu'on applique fur le moignon
d'un membre amputé. Foye^ Amputation. (Y)
CAPELINES, f. m. pi. en terme de Plumajferie , ce
font des panaches ou bouquets de plumes, dont fe
fervent quelquefois les aefrices fur le théâtre.
CAPELLE, (la) Géog. petite ville de France , en
Picardie, dans laTierache, à cinq lieues de Guife.
Long. zi. 34. lat. 4g. 58.
Capelle, ( Géog. ) petite ville d'Allemagne, de
l'éle&orat de Trêves , fur le Rhin , au-deffus de Co-
blentz.
* CAPELLETTI , f. m. pi. (Hift. mod.) c'eft le nom
qu'on donne à Venife à une milice que la république
compofe des fujets qu'elle a en Efclavonie , Dalma-
tie, Albanie & Morlachie; qui eft regardée comme
l'élite de l'es troupes , & à la garde de qui elle con-
fie fes places les plus importantes : il y en a toujours
deux compagnies à Venife pour la garde du palais
£>C de la place de S. Marc.
CAPENDU, ( Géog.) petite ville de France, en
Languedoc, au diocefe de Carcaffbnne.
CAPER, nom Latin de la conftellation du capri-
corne. Voye^ Capricorne. (O)
CAPES ou CABEZ, {Géog. ) ville d'Afrique, au
royaume de Tripoli, fur une grande rivière de mê-
me nom, qui prend fa fource dans le BiledulgericL»
&c qui fépare les deux royaumes de Tunis & de T*
poli, & tombe dans la mer Méditerranée, dans un
golfe qui porte fon nom : on dit que l'eau en eft fi
chaude, qu'on ne peut en boire qu'après l'avoir laif-
fé refroidir.
* Capes , (Géog.) peuple d'Afrique , en Guinée ,
fur les côtes de l'Océan, près de la Sierra -Lionna.
On dit que dans chaque village il y a une grande mai-
fon feparée des autres, où l'on met toutes les jeunes
filles du lieu , pour écouter les leçons d'un vieillard
choifi pour les inftruire; au bout de l'année cette
troupe de filles fort au fon des inftrumens , & fe rend
dans de certaines places pour y darder : les jeunes
gens vont dans ces endroits, & y prennent pour fem-
mes celles qui leur conviennent.
CAPESTAN, (Géog.) petite ville de France,
dans le Languedoc , près de la rivière d'Aude & du
CAP
canal royal. Long. zo. 40. lat. 43. z5.
* CAPETIEN, f. m. (Hijl. mod.) nom par lequel
on défigne la troifieme race de nos rois ; il vient de
Hugues Capet, le premier roi de cette race. Il y a
aujourd'hui, en 1752,765 ans qu'elle occupe le thro-
nc de la France. Nulle généalogie ne remonte jl haut qxtt
celle de Jefus-Chrijl , dit un auteur Allemand, cité par
les auteurs du Trévoux , pas même celle des Capétiens.
CAPHAR , f. m. ( Hijl. mod. ) péage Ou droit que
les Turcs font payer aux marchands Chrétiens, qui
conduifent ou envoyent des marchandifes d'Alep à
Jérufalem.
Le droit du caphar avoit été établi par les Chré-
tiens mêmes , lorlqu'ils étoient maîtres de la Terre-
fainte ; & ce fut pour l'entretien des troupes , qu'on
mettoit dans les paffages difficiles pour obferver les
Arabes, & empêcher leurs courfes: mais les Turcs
qui l'ont continué &c augmenté , en abufent , faifant
payer arbitrairement aux marchands & aux voya-
geurs Chrétiens des fommes confidérables , fous pré-
texte de les défendre des Arabes, avec qui néant-
moins ils s'entendent le plus fouvent pour favorifer
leurs brigandages. (G)
CAPHARNAUM ou CAPERNAUM , (Géograph.
fainte.) ville maritime de la tribu de Nephthali, à l'ex-
trémité de celle de Zabulon , fur le rivage de la mer de
Tibériade. Ses habitans incrédules ne tirèrent aucur»
fruit d'un grand nombre de miracles que Jefus-Chrift
fit parmi eux, & dont la lumière auroit fuffi pour
éclairer d'autres peuples à qui il ne fit pas la même
grâce ; parce qu'il eft le maître de fes dons , & qu'il
peut fans injuftice , les accorder à ceux qui n'en pro-
fiteront pas , & les refiifer à ceux à qui ils auroient
été des moyens de falut. O altitudo ! V. Grâce.
CAPHESA ou CAPHSA, (Géog.) ancienne ville
d'Afrique , dans le Biledulgerid , vers la fource de
la rivière de Magrada.
C API-AGA ou CAPI-AGASSI , f. m. (Hijl. mod. )
officier Turc qui eft le gouverneur des portes du fé-
rail , & le grand maître du férail. Voyc^ Sérail.
La dignité de capi-aga eft la première des eunu-
ques blancs : le capi-aga eft toujours auprès du grand-
leigneur , il introduit les ambaifadeurs à l'audience ;
perfonne n'entre & ne fort de l'appartement du grand-
leigneur que par fon miniftere. Sa charge lui donne
le privilège de porter le turban dans le férail , &
d'aller par-tout à cheval: il accompagne le grand-
feigneur julqu'au quartier des fultanes , mais il de-
meure à la porte , & n'y entre point. Le grand-fei-
gneur fait les frais de fa table, & lui donne environ
lbixante livres par jour : mais fa charge lui attire de
plus un très-grand nombre depréfens, parce qu'au-
cune affaire de conféquence ne vient à la connoif-
fance de l'empereur, qu'elle n'ait paffé par fes mains.
Le capi-agaffi ne peut être bâcha quand il quitte fa
charge. Voyt{ Aga. (G)
* CAPI-CAG-TINGA, (Hijl. nat. bot.) efpece d'à-
corus qui croît aux Indes occidentales , & reffemble
beaucoup à celui de l'Europe par fa racine & fes
feuilles ; il eft feulement plus petit : mais on lui attri-
bue des vertus bien fupérieures à celles de l'autre ;
il eft plus chaud & plus aromatique ; il incife les hu-
meurs froides & peccantes ; il rélifte au poifon , &c.
* C A P Ie, f. f. fe dit dans les manufactures où fort
travaille la foie, le fil, la laine, &c. de plulieurs brins
mis en double , à l'aide defquels on ferre l'écheveau
quand il eft fini, 6c4'on arrête le dernier bout ; ce
qui empêche l'écheveau de fe déranger, &; ce qui
en facilite le devidage, en permettant d'en prendre
toujours le dernier bout.
* CAPIER , v. aft. manufacture en foie , fil, laine,
&c. c'eft dans un écheveau de fil, de foie, laine, &c.
arrêter le bout par lequel il a commencé, & celui
par lequel il a fini, de façon qu'au devidage onpuiffe
CAP
toujours trouver & prendre le dernier ; la façon d'ar-
rêter eft arbitraire. Dans le fil on noue les deux bouts
cnfemble;dans la foie onles arrête féparément.Quand
il efl queftion de teindre en bleu, en verd , ou autres
couleurs dont la teinture ne doit être que tiède ; on
cafTe les caples fous lefquelles la teinture ne prendroit
pas , parce qu'ordinairement elles refferrent la par-
tie de l'écheveau qu'elles enveloppent. Le règlement
de Piémont ordonne de caplerles organcins toutes les
huit heures, & les tramer toutes les quatre: cela
vient de ce que les organcins font plus tors que les
trames , & que par conféquent les afpes ou guindres
fe chargent d'une beaucoup moindre quantité d'or-
gancins que de trames, en des tems égaux.
CAPiERfe dit aufîi, dans les manufactures en foie ,
des mailles qu'on efl obligé de faire aux lifles , lorf-
qu'elles commencent à s'ufer : c'eft arrêter la maille
par fon nœud fur la criftellc, précifément dans l'en-
droit qu'elle doit occuper. Foye^ Cristelle.
CAPIGI, f. m. (Hift- mod.) portier du ferai] du
grand-feigneur. Il y a dans le férail environ cinq
cents capigis ou portiers partagés en deux troupes :
l'une de trois cents, fous un chef appelle caplgl-baffa,
qui a de provifion trois ducats par jour; & l'autre
de deux cents appelles cuccicapigi , de leur chef cuc-
clcaplgl-baffi , qui a deux ducats d'appointement. Les
capigis ont depuis fept jufqu'à quinze afpres par jour,
l'un plus , l'autre moins. Leurs fondions font d'affifter
avec les JaniiTaires à la garde de la première & de
la féconde porte du férail, quelquefois tous ensem-
ble , comme quand le Grand-feigneur tient cenfeil gé-
néral , qu'il reçoit un ambaffadeur , ou qu'il va à la
mofquée ; & quelquefois ils ne gardent qu'une par-
tie, &fe rangent des deux côtés, pour empêcher que
perfonne n'entre avec des armes, ou ne f'afle du tu-
multe, &c.
Ce mot dans fon origine fignifie porte. Voye^ SÉ-
RAIL. (G)
Capigi-Bachi ,f. m. ( Hifl. mod. ) capitaine des
portes , officier du ferrail du Grand-feigneur. Les ca-
plgis-bachis font iubordonnés au capi-aga ou capou-a-
gajji, & font au nombre de douze ; leur fonction eit
de monter la garde deux à deux à la troiiieme porte
du férail , avec une brigade de fimples capigis ou
portiers. Lorfque le Grand-feigneur eit à la 1
ion armée ou en voyage , fix capigis - hachis mar-
chent toujours à cheval devant lui pour reconnoître
les ponts ;' ils y mettent pied à terre , attendent le ful-
tan rangés à droite &C à gauche fur fa route , & lui
font une profonde révérence pour marquer la fureté
du partage. A l'entrée des tentes ou du férail ils fe
mettent en haie à la tête de leur brigade. (G)
CAPILLAIRE , tiré du Latin capUli , cheveux , fe
dit de plufieurs chofes, pour marquer leur petiteffe,
&c. qui rcflemblc à celle des cheveux.
Vaiffeaux Capillaires , en Anatomie , ce font les
dernières & les plus petites ramifications des veines
& des artères , qui font infcnliblcs , & qui lorfqu'on
les coupe ou rompt , ne rendent que fort peu de fang.
Foye{ Veine & Artère.
Les vaijfeaux capillaires doivent être beaucoup
plus fins que les cheveux ; on ne fauroit mieux les
comparer qu'aux fils des toiles d'araignée , ck. on les
appelle quelquefois vaiffeaux évanouijjans. Voyc^ Cir-
culation. (Z.)
Les tuyaux ou tubes capillaires, en Phyfique , font
de petits tuyaux les plus étroits que les ouvriers puif-
fent faire, &c non pas dont le diamètre ne pâlie pas
la grofïeur d'un cheveu ; car on n'en a peut-être
jamais fait de cette efpcce.
Le diamètre ordinaire des vaiffeaux capiUai wefl
de la moitié , du tiers , ou du quart d'une ligne
dant le dofteur Hook nous allure qu'il a tire à la flam-
uie d'une lampe des tuyaux plus petits encore , oc
Tome II,
CAP
627
au moins auffi fins qu'un fil de toile d'araignée. Ce
tait eit affez difficile à croire.
L'a'ccnfion de l'eau dans les tuyaux capillaires eft
un phénomène , dont l'explication embarafte fort
les philofophes. Mettez dans l'eau l'un des bouts d'un
petit tuyau ou d'un petit tube ouvert des deux cô-
tés , Se l'eau s'élèvera à une hauteur fenfible dans le
tube où elle demeurera fufpendue : de plus plongez
dans le fluide plufieurs tubes capillaires , dont l'un toit
d'un diamètre beaucoup plus petit que l'autre ; l'eau
montera beaucoup plus haut dans le petit tube caplU
laire : fon élévation fera en raifon réciproque du dia-
mètre des tubes.
Cette élévation fpontanée , contraire en apparen-
ce aux loix de la pefanteur mérite une attention
particulière. Le corps humain efl une machine hv-
draulique; & dans le nombre prefqu'infini de tuyaux
qui le compofent, celui des capillaires efl ians com-
paraifon le plus grand; &c c'eft par conféquent la
connoilTance de cette efpece de tuyaux qui nous in-
térefle le plus.
M. Carré , aidé de M. Geoffroy , dit avoir fait fur
les tuyaux capillaires les expériences iuivantes. i°.
l'eau s'étant élevée au-deflus de fon niveau dans
un tuyau capillaire, fi enfuite on pornpe l'air aufîi
exactement qu'il foit poffible , elle ne redefeend
point ; au contraire elle monte encore un peu : 20. fi
l'on enduit de fuif le dedans d'un tuyau capillaire,
l'eau ne s'y met que de niveau au ref le de fa furfa-
ce : mais fi ce tuyau n'efl enduit de fuif que jufqu'à
une hauteur moindre que celle où il efl plongé dans
l'eau , elle monte à fon ordinaire au-deiTus de fon
niveau ; & s'il n'efl enduit de fuif que d'un côté ,
l'eau de ce côté-là le met de niveau, ck de l'autre
monte au-deffus. Hijl. accad. ijo5.
Plufieurs auteurs attribuent l'afcenfion de l'eau
dans ces tuyaux , à la prefilon inégale de l'air dans
des tubes inégaux : l'air , dif ent-ils , efl compofé de
parties rameufes , fpongieufes , entremêlées &c em-
barraffées les unes avec les autres : ainfi une colonne
d'air étant placée perpendiculairement fur l'ouver-
ture d'un petit tuyau capillaire, une partie fenfible de
la prelfion agira fur les parois de la furface du tube ,
de façon que la colonne ne prefl'era pas avec tout
fon poids fur le fluide placé au-defïbus , mais qu'elle
en aura perdu une quantité plus ou moins grande ,
fuivant que le diamètre fera plus petit ou plus grand.
Mais une explication fi vague le détruit îk par elle-
même , & par cette obfervation , que l'expérience
réufîit auffi bien dans le vuide que dans l'air.
D'autres , comme M. Hauksbée, &c. ont recours
à l'attraction des anneaux de la furface concave du
tube ; & le docteur Morgan fouferit à cette opinion
en ces termes. « Une partie de la gravité de l'eau
» dans ce tube étant arrêtée par la force attractive
» de la furface interne concave du verre ; le fluide
>> qui efl dans le tube devra, au moyen de la lupe-
» riorité du poids extérieur , monter auffi haut qu'il
» faudra pour compenler cette diminution de gravi-
» té produite par l'attraction du verre ». Il ajoute
que comme la force de l'attradion des tubes efl en
raifon réciproque des diamètres, on pourra en di-
minuant ces diamètres , ou en prenant des tubes
de plus en plus petits, faire monter l'eau à telle hau-
teur qu'on voudra.
Mais cet auteur s'eft un peu mépris en cela , félon
MJurin;earpuifquedans les tuyaux capUlaites la hau-
teur à laquelle l'eau s'élèvera naturellement , efl ré-
ciproquement comme le diamètre du tube , il s en-
fuit de-là que la furface qui tient l'eau fufpendue eit
toujours une quantité donnée : mais la colonne d'eau
fufpendue dans chaque tube efl comme le diamètre
du tube ; & par conféquent li l'attradion de la furfa-
ce contenante étoit la cuule de la fufpenfion de l'eau,
KKkk ij
6iS
CAP
il s'enfuivroit de-îà , félon M. Jurin , que des caufes
égales proàuiroient des effets inégaux; ce qui eft ab-
furde. De plus, M. Jurin ajoute que ce n'eft pas feu-
lement l'explication de M. Hauksbée qui s'étend trop
loin , mais aufîi le phénomène qu'il fuppofe ; car il
n'a pas lieu dans tous les fluides : il arrive même
tout le contraire dans le mercure ; cette liqueur ne
s'élevant pas dans le tube julqu'au niveau de celle
qui eft dans le vaifleau , & la hauteur qui s'en man-
que fe trouvant d'autant plus grande , que le vaifleau
efl plus petit.
M. Jurin propofe une autre explication de ce
phénomène , laquelle efl confirmée , félon lui , par
les expériences. « La fufpeniion de l'eau , dans le
» fyfleme de cet auteur , doit s'attribuer à l'attrac-
» tion de cette circonférence de la furface concave
» du tube , à laquelle la furface fupérieure de l'eau
» eft contiguë , & adhère ; cette circonférence
» étant la feule partie du tube de laquelle l'eau doi-
» ve s'éloigner en fortant du repos, & par confé-
» quent la leule qui par la force de la cohéiion &c de
» fon attraction , s'oppofe à la defcente de l'eau ».
Il fait voir que c'eft une caufe proportionnelle à l'ef-
fet, parce que cette circonférence & la colonne fuf-
pendue font toutes deux en la même proportion du
diamètre du tube. Après cette explication de lafufpen-
fion de la liqueur, l'afcenlion qui paroît fpontanée de
cette même liqueur dans ce tube s'expliquera aufli fort
aifément ; car puifque l'eau qui entre dans les tuyaux
capillaires , aulli-tôt que leur orifice y eft plongé ,
perd une partie de fa gravité par l'attraclion de la
circonférence à laquelle fa furface touche ; il faut
donc néceflairement qu'elle s'élève plus haut , foit
par la preflion de l'eau itagnante , foit par l'attraction
de la circonférence qui eft immédiatement au-deflùs
de celle qui lui eft contiguë.
M. Clairaut, dans la Théorie de la figure de la ter-
re , imprimée à Paiis en 1743 , a donné une théorie
de l'élévation ou de l'abaiflëment des liqueurs dans
les tuyaux capillaires , où il combat l'explication de
M. Jurin. Voici ce qu'il lui objecte.
i°. On ne fauroit employer le principe que les
effets font proportionnels aux caulës , que quand on
remonte à une caufe première &c unique , & non
lorfqu'on examine un effet qui réfulte de la combi-
naifon de plufieurs caufes particulières , qu'on n'é-
value pas chacune féparément : or quand on com-
pare l'élévation de l'eau dans deux tubes différens ,
l'attraction de chaque furface eft le réfultat de toutes
les attractions de chaque particule de verre fur tou-
tes celles de l'eau ; & comme toutes les petites for-
ces qui compofent la force totale d'une de ces furfa-
ces ne font pas égales entr 'elles , on n'a aucune rai-
fon pour conclurre l'égalité d'attraction de deux fur-
faces , de l'égalité d'étendue de ces lùrfacos ; il fau-
drait de plus que ces furfaces fufiënt pareilles. Par
la même raifon , quand même on admettrait que le
feul anneau du verre qui eft au-deflùs de l'eau ferait
la caufe de l'élévation de l'eau , on n'en lauroit con-
clurre que le poids élevé devroit être proportionnel
à ce diamètre ; parce qu'on ne peut connoître la for-
ce de cet anneau , qu'en fommant celle de toutes les
particules.
20. Suppofé qu'on eût trouvé que la force d'un an-
neau de verre tût en raifon confiante avec fon dia-
mètre, on n'en pourrait pas conclurre qu'une colon-
ne du fluide d'un poids proportionnel à cette force ,
ferait fufpendue par fon moyen. On voit bien qu'un
corps lolide tiré en en-haut par une force égale à fon
poids , ne fauroit tomber : mais fi ce corps eft fluide ,
les parties étant détachées les unes des autres , il
faut faire voir qu'elles fe foûtiennent mutuellement.
M. Clairaut examine enfuite la queftion des tuyaux
capillaires, par les principes généraux de l'équilibre des
CAP
fluides: fon expofé eft trop géométrique pour être ren-
du ici,ôc nous renvoyons à l'ouvrage même ceux qui
voudront s'en inftruire.Nous nous contenterons de di-
re que M. Clairaut attribue l'élévation de l'eau à l'at-
traclion du bout inférieur du verre , & à celle du
bout fupérieur ; & qu'il fait voir que quand le tube
a un fort petit diamètre , l'eau doit s'y élever à une
hauteur qui eft en raifon inverfe de ce diamètre ;
pourvu qu'on fuppofe que l'attraction du verre atiffe
fuivant une certaine loi. Il ajoute que quand mCme
l'attraction du tuyau capillaire ferait d'une intenfité
plus petite que celle de l'eau , pourvu que cette in-
tenfité ne fût pas deux fois moindre , l'eau monterait
encore ; ce qu'il prouve par lés formules. Il explique
en paflant une expérience de M. Jurin , qui au pre-
mier coup d'ceil paroît contraire à les principes : cette
expérience confiiie en ce que ii on fonde deux tuyaux
capillaires d'inégale grofleur, & qu'on trempe le bout
le plus étroit dans l'eau , cette liqueur n'y monte
pas plus haut que fi tout le tuyau étoit de la même
groflëur que par le bout d'en-haut. Quant à la def-
cente du vif-argent dans les tuyaux capillaires , il
l'explique en montrant que les forces qui tirent en
en-bas dans la colonne qui traverië le tube , font
plus grandes que les forces qui agiflent dans les au-
tres colonnes; &c qu'ainli cette colonne doit être la
plus courte ; afin cie faire équilibre aux autres.
Au relie dans cette explication M. Clairaut fup-
pofe que l'attraction n'eft pas en raifon inverfe des
quarrés des diftances , mais qu'elle fuit une autre
loi, 8z dépend d'une fonction quelconque de la dif-
tance ; fur quoi voy. la fin de tan. Attraction.
Il faut pourtant ajouter à ce que nous avons dit
dans cet article , que li on fuppofe les phénomènes
des tuyaux capillaires produits par l'attraclion , il pa-
roît difficile d'exprimer la loi de cette attraction, au-
trement que par une fonction de la diftance ; car cet-
te attraction ne fauroit être en raifon inverfe du quar-
ré de la diftance , parce qu'elle eft trop forte au
point de contael ; nous l'avons prouvé à l'article At-
traction. Elle ne fauroit être non plus comme
une limple puiflance plus grande que le quarré ; car
elle ferait infinie à ce point de contact ; elle ne peut
donc être que comme une fonction : il eft vrai qu'une
telle loi ferait bien bifarre , & que cela firffit peut-ê-
tre pour fufpendre ion jugement fur la caufe de ce
phénomène.
On trouve dans les tomes VIII. & IX. des Mémoi-
res de l'Académie de Petersbourg , des difiertations fur
cette même matière , par M. "Weitbrecht. L'auteur
paroît la bien entendre , & l'avoir approfondie. La
diflertation de M. Jurin fur les tuyaux capillaires ,
contient un choix ingénieux d'expériences faites pour
remonter à la caufe de ces phénomènes ; elle eft in-
férée dans les Tranfaclions philofophiques , & on la
trouve en François à la fin des Leçons de Pkyjïque ex-
périmentales de M. Cotes , traduites par M. le Mon-
nier , & imprimées à Paris en 1742.
De toutes les liqueurs qui s'élèvent dans les tuyaux
capillaires , l'eau eft celle qui monte le plus haut :
c'efl ce que M. Carré a trouvé en faifant les expé-
riences des tuyaux capillaires avec un grand nombre
de liqueurs différentes. Selon cet auteur , la raifon
de cette afcenlîon plus grande de l'eau, c'eft que les
furfaces de les petites parties font d'une telle confi-
guration , qu'elles touchent plus immédiatement ,
c'eft-à-dire , en un plus grand nombre de points , la
furface du verre. Il eft aifé d'appliquer ce raifonne-
ment aux liqueurs qui mouillent certains corps , &
n'en peuvent mouiller d'autres : car lorfque les par*-
ties des liqueurs ont leurs furfaces telles qu'elles peu-
vent s'appliquer plus immédiatement à la furface des
corps qu'elles touchent , elles y adhèrent , & y font
comme collées , foûtenues d'ailleurs par la preflioa
c
A
CAP
du fluide environnant; Scc'eftpar cette raiion que
les gouttes d'eau fufpendues aux feuilles des arbre. ,
ou à d'autres corps, ne tombent pas. L'on peut auffi
par ce même principe rendre raiion pourquoi cer-
taines liqueurs , comme l'huile & l'eau, ne s'unifient
pas ; & au contraire , pourquoi les parties d'une mê-
me liqueur s'unifient fi facilement.
Nous devons à M. Formey une partie de cet ar-
ticle. (O)
Capillaire , (fracture ) eft une fracture au crâ-
ne fi peu marquée , qu'à peine la peut-on voir : elle
ne laifle pas d'être mortelle. Vbye^ Fracture &
Fissure.
La fracture capillaire efi l'effet d'un coup, d'une chu-
te , qui peut procurer un dépôt fous le crâne; ainii
lorfqu'on l'a reconnue , il faut faire l'opération du
trépan. Voy. TRÉPANER. ( N)
Capillaire , ( HiJI. nat. bot. ) adiantum , genre
de plante que l'on peut feconnoître par fes feuilles.
Tournefort , Infl. rei herb. Voyei PLANTE. ( 1 )
Capillaire, (Médecine.) le dit de cinq plantes
dont voici les noms ; favoir l'adiante commun ou
noir ; l'adiante blanc , appelle capillaire de Montpel-
lier ; le polytric ( Voye^ Polytric) ; le céterach
ou la fcolopendre ( Voyei Céterach ) ; & la fal-
via vittz ou ruta muraria. V. Rue DE MURAILLE.
La vertu de tous les capillaires efi: d'être incififs ,
atténuans , diurétiques , fiomachiques , S: propres
pour aider l'expectoration. Le meilleur capillaire eft
ïe iuivant.
C'eft de Y adiantum fruticofum brafllianum , C.B.
P. qu'on fait le firop de capillaire , qui eft très-adou-
cifiànt ; on peut lui fubfiituer le capillaire commun ;
filicula quet adiantum nigrum offuinarum pinnulis ob-
tufioribus. J. R. H. Il entre dans le firop de chicorée
compoie, ck. dans le firop de guimauve de Fernel.
Le meilleur après ceux-là efi le capillaire de Mont-
pellier ; adiantum foliis coriandri. C. P. B. & J. R. H.
Capillaire , (firop de) fe prépare de plùfieurs
façons ; le meilleur efi celui qui nous vient de Mont-
pellier.
Sirop de capillaire , félon la Pharmacopée nouvelle de
Paris. Prenez capillaire de Canada deux onces ; fai-
tes-les minier pendant deux heures , en y verfant
eau bouillante iix livres : cette infufion le fera dans
un vaiffeau fermé ; on y fondra fucre blanc fix livres ;
on clarifiera enfuite , ckl'on fera cuire à coniifiance
de firop , ou mieux encore à coniifiance d'élcttuaire :
on y ajoutera une nouvelle infufion de capillaire ; on
aromatifera enfuite le firop avec l'eau de fleur d'o-
range.
Le firop de capillaire efi très-vanté ; il poflede tou-
tes les vertus de cette plante : on l'employé dans
les maladies de poitrine : on le mêle dans la tifane
ordinaire, dans les émulfions, dans le thé, pour les
rendre plus adouciflans. (A)
C APILLAMENT , f. m. ( Anatom. Bot. ) lignifie à
la lettre un cheveu , étant formé du Latin capillus, &
celui-ci de caput , tête , Se de pilus , poil ( Voy. Che-
veu ) ; c'eit pourquoi on donne figurément ce nom
à plulieurs choies , qui par rapport à leur longueur
Cv à leur finefle refiemblent à des cheveux; comme
les capillamens des nerts, qui lignifient les fibres dé-
liées , ou lesfilamens dont les nerfs font compolées.
ï'oye^ Nerf 6* Fibre.
« La viiion, dit M. Newton, ne fe fait-elle pas
>> principalement par les vibrations excitées au fond
» de l'oeil par les rayons de lumière , & continuées
» à travers les capillamens folides , tranlparens , &
» uniformes des nerfs optiques jusqu'au fcnjbrium » ?
Newton, Opt. Voy. Vision. (O)
CAPILOTADE , f. f. ( Ciùjbu) ragoût qu'on fait
de refies de volailles & de pièces de rôti dépecées.
* CAPIOGLAN , f. m. ( Hifl. mod. ) clpcce de
629
ferviteur qui a foin dans le férail des atremoçlans,
que le grand feigneur y appelle pour être em]
dans la fuite auprès de fa peribnne.
CAPION,f. m. (Marine") capion de proue , capion
de poupe ; c'eft un terme dont les Levantins le fervent ,
appellant l'étrave capion de proue , & l'étambord ca-
pion de poupe. On dit encore capion à capion , pour li-
gnifier la diilance de l'extrémité de la poupe à celle
de la proue. Voye{ Etrave, & Etambord. (Z)
* CAPISCOL, f. m. (Hifl. eccléfîajlique) digni-
taire de plùfieurs églifes, chapitres, cathédrales ou
collégiales , qu'on dit être le même fous un autre nom
dans la Provence & le Languedoc , où cette dignité
eft plus ordinaire , que le chantre dans les autres Pro-
vinces : fi l'on s'en rapporte à l'étymologie , la capif-
col a la prééminence au chœur ; car capifcol vient ,
à ce qu'on prétend , de caput chori , le premier au chœur,
CAPISTRANO , ( Géog. ) petite principal il
talie, dans le royaume de Naples.
* CAP1TA-GAUHAH, (Hifl. nat. Bot.) arbrif-
feau des Indes orientales , dont le bois tk l'écorce ont
une odeur très-pénétrante, auflî bien que l'es feuilles
qui font d'un beau verd clair, rondes, velues 5c
grandes. Il produit des baies d'une forme ronde , de
couleur brune , èv à peu près femblables aux grains
de genièvre.
CAPITAINE , f. m. (Artmilit.) le titre de Capitaine
en matière de guerre , a toujours lignifié un comman-
dant ou un chef de troupe ; ce mot vient du Latin
caput, qui lignifie chef.
Capitaine d'une compagnie , eft un officier fubal-
terne , qui commande une compagnie de ca\ s .
ou d'infanterie , fous les ordres du colonel. Voye^
Compagnie & Colonel.
Nous difons dans le même fens un capitaine de dra-
gons , de grenadiers, de marine , d'invalides. Voy. DRA-
GON , Grenadier , &c. Les capitaines des gardes à
pié tk à cheval du Roy d'Angleterre ont le titre de
colonel ; parce que ce font pour l'ordinaire gens du
premier rang tk des officiers généraux.
Dans la compagnie colonelle d'un régiment ou pre-
mière compagnie , dont le colonel eft lui-même capi-
taine, l'officier commandant eft appelle c.-.. Itaine-lieu
tenant. Voye\ Capitaine-Lieutj nant.
Lieutenant capitaine , cil le capitaine en fécond ou
l'officier qui commande la compagnie fous les ordres
du capitaine ; tk pendant ion ablence. Va) et LlEUTE-
nant. On l'appelle dans quelques compagnies, capi-
taine-lieutenant.
Capitaine lieutenant , eft celui qui commande
une troupe ou compagnie, au nom & à la place de
quelqu'autre , qui en a la commiflion avec le titre ,
les honneurs & la paye ; mais qui efi difpenfé à caufe
de ion rang d'exercer les fonctions de ce pofte.
Le colonel étant ordinairement c.:/ Haine de la pre-
mière compagnie de ion régiment , il la fait comman-
der par un fubalterne avec le titre de capitaine lieu-
tenant.
En France & en Angleterre , &c le roi , la reine ,
le dauphin, les princes, &c. ont pour l'ordinaire les
titres Cx les dignités de capitaines des gardes , dt
d'armes , &c. quoique les capitaines lieutenans en exer-
cent véritablement les fonctions.
Capitaine-Lieutenant, eft donc da
darmes& les chevau-légersdela garde du Roi, dans
les deux compagnies de moufquetairês , celle des
grenadiers à cheval & les compagnies des ■
mes d'ordonnance, le commandant de chacune de
ces compagnies; parce que c'elt le Roi qui eft le ca-
pitaine.
Il y a deux raifons de -lieute-
: la première eft l'autorité que le roi donne aux
commandans des compagnies qui le portent , tk qui
eft le même que celle du capitaine dans les autres
630
CAP
compagnies ; & la féconde , que le capitaine-lieutenant
a les gages de capitaine & ceux de lieutenant.
Les compagnies de la gendarmerie, qui portent le
nom de quelques princes , comme les gendarmes de
Bretagne , de Berry, &c. ont également des capitaines-
lieutenans , quoiqu'il n'y ait point actuellement de
prince de ce nom ; parce que le Roi en eft cenfé le
capitaine.
Capitaine réformé , eft un officier dont la place
& la charge ont été réformés , mais qui conferve ce-
pendant le grade de capitaine en fécond, &i fans au-
cun commandement. Voye^ RÉFORMÉ.
Capitaine général d'une armée, eft celui qui la
commande en chef. Voye^ Général.
Ce dernier mot eft fenl en ufage par une efpece
d'ellipfe. Le Stathouder a pourtant titre de capitaine
général des provinces unies.
Capitaine de milice , eft celui qui commande
une compagnie de milice. Voyc{ Milice.
Capitaine des guides, eft celui qui eft chargé du
détail des chemins de l'armée. Il doit être très-ha-
bile dans la carte & dans la topographie des lieux
oii le fait la guerre. Les capitaines des guides font fous
les ordres des maréchaux des logis de l'armée. Il y a
auffi des capitaines de mineurs , qui ont foin d'inftruire
& de fournir les mineurs ; un capitaine des charrois ,
pour les attelages & les chariots des vivres & de l'ar-
tillerie , &c. (Q)
Capitaine de vaiffeau , ou Capitaine des vaif-K
féaux, (Marine. ) c'eft un officier employé en cette
qualité fur l'état du Roi , dont il tient fa commiffion ,
pour commander les vaiffeaux de guerre.
Les devoirs & les fonctions du capitaine de vaiffeau ,
font renfermés dans 47 articles du titre 7 du livre Ier
de f Ordonnance de Louis XI V. pour les armées nava-
les & arfenaux de marine, du 15 Avril 1689. Nous
croyons qu'il eft inutile de copier cette Ordonnance ,
qui eft commune & connue de tout le monde.
Lorfque les capitaines des vaiffeaux du roi fe trou-
vent fervir fur terre , ils roulent avec les colonels ,
fuivant l'ancienneté de leur commifTion.
Quoique le nombre des capitaines ne foit pas abfo-
lument fixé, le roi en a toujours au moins 1 10 ou
1 20 , employés fur l'état de la marine.
Lorfqu'un capitaine monte un vaiffeau pavillon ,
c'eft-à-dire un vaiffeau monté par un officier géné-
ral ; c'eft au capitaine à faire faire le détail du fervice.
Les connoiffances d'un capitaine des vaiffeaux du
roi doivent être fort étendues. Il doit favoir la conf-
tru&ion & la bâtiffe des vaiffeaux ; il doit pofféder
foutes les manœuvres qu'il convient faire dans les
différentes fituations où il peut fe trouver à la mer ,
foit dans le mauvais tems , foit pour attaquer ou évi-
ter l'ennemi : il doit favoir les évaluations navales
convenables pour marcher en corps d'armée , ou en
efeadre ; l'hydrographie & toutes les opérations lui
doivent être familières. Enfin c'eft un métier perpé-
tuel d'étude , de réflexion , & d'attention ; & on ne
parvient au grade de capitaine, qu'après avoir parle
iiicceffivement par tous les autres grades de la ma-
rine , tels que ceux de garde de la marine , enfei-
gne , & lieutenant.
Capitaine en fécond ; il fait les mêmes fondions
que le capitaine qui commande le vaiffeau en fon ab-
fence ; le capitaine en fécond eft moins ancien que le
commandant.
CAPITAINE de Faifflau marchand, ou Capitaine de
navire. Voye^ Maitp.e & Patron.
Capitaine déport, c'eft l'officier établi dans quel-
que port confidérable , où il y a un arlenal de mari-
ne , & qui y commande une garde pour la fureté de
toutes chofes. Dans les défarmemens qui fe font au
retour des voyages , les capitaines & les officiers qui
ont monté des vaiffeaux , les remettent à la charge
CAP
& à la garde du capitaine du port; c'eft lui qui a foin
de l'amarrage des navires de guerre, & qui oblige les
vaiffeaux qui arrivent, à rendre les faluts ordinaires.
Il fait les rondes néceffaires autour des baffins, pour
veiller à la confervation des vaiffeaux du roi , & doit
coucher toutes les nuits à bord. Il doit vifiter les vaif-
feaux à armer & en dreffer l'état de radoub & de ca-
rène. Il eft obligé de mener en rade les vaiffeaux du
premier & du deuxième rang, fon lievitenant , ceux
des troifieme & quatrième rang , &c l'enfeigne aux
au-deffous. Il y a préfentement en France fix capitai-
nes de port, à Toulon , Rochefort , Breft , le Havre ,
Dunkerque, & Port-Louis.
Le détail de ce qui concerne toutes les fondions
de capitaines de port fe trouve renfermé en 1 5 arti-
cles du livre XII. titre iij. de YOrdonnance de Louis
XI f^. pour les armées navales & arfenaux de marine , du.
l5 Avril 168 g.
Capitaine de Marine , c'eft celui qui commande
les foldats gardiens d'un port. Il y en a dans chaque
port où il y a des foldats gardiens.
Capitaine d'armes , c'eft un bas officier qui a foin
des foldats fur les vaifleaux : il eft immédiatement
au-deffus des lergens , & a l'infpeâion fur les menues
armes du vaiffeau ; comme auffi fur les baies , ban-
dolieres , pertuifanes , efpontons , haches d'armes , &
autres chofes femblables qu'il diftribue lelon les be-
foins.
C'eft au capitaine d'armes d'avoir foin des menues
armes , & de fe mettre à la tête des foldats Iorfqu'il
faut combattre ; il doit fur-tout vifiter leurs mouf-
quets , & voir s'ils font chargés comme il faut, & fi
les foldats ont leurs petites gargouffes toutes prêtes.
C'eft lui qui pofe la fentinelle devant la chambre du
capitaine , &: au haut de la tire-vieille.
Capitaine desMatelots , c'eft un officier marinier
qui commande aux matelotsfouslemaître d'équipage.
Capitaine garde - côtes , ce font ceux qui com-
mandent la milice que l'on établit pour garder les
côtes , & pour empêcher les ennemis de faire quel-
ques defeentes. ( Z )
* CAPITAINERIE , f. m. nom de dignité qui n'a
plus guère lieu, que par rapport au commandement
des gardes-côtes & de chaffes, & à l'entretien des fo-
rêts & de tout ce qui concerne les chaffes. La capitai-
nerie fe dit d'un certain canton fur l'étendue duquel
le capitaine des chaffes accorde ou refufe la permil-
fion de chaffer , & veille à ce qu'il foit bien fourni de
gibier. Les capitaineries font affez ordinairement des
annexes de maifons royales.
Capitainerie Garde-côte, (Marine') on don-
ne ce nom à une étendue de pays le long des côtes
de la mer , qui renferme un certain nombre de paroif-
fes , qui font fujettes à la garde des côtes.
Chaque capitainerie eft commandée par un capi-
taine général , un major général , Se un lieutenant
général , qui en forment l'état major.
Ces capitaineries font compoiées chacune plus ou
moins du nombre des paroiffes qui fourniflènt les
foldats de milice , garde-côtes , depuis Page de 1 8 ans
jufqu'à 60 ans.
Il y a des capitaineries garde-côtes , qui font formées
en bataillons , dont chaque compagnie eft de qua-
rante hommes ; & en compagnies de cavalerie de
foixante & dix maîtres chacune , bien montés & bien
équipés , à la tête defquelles font des capitaines com-
mandans , des majors , des aides-majors , des lieute-»
nans , & des enfeignes par commiffion du roi.
Il y a deux fortes de fervice dans la garde-côte. Le
fervice militaire , pour s'oppofer aux defeentes ; &
le fervice d'obfervation dans les paroiffes , pour y
veiller journellement.
Les capitaines généraux , majors & lieutenans de
chaque capitainerie garde-côte des provinces duroyau-
CAP
CAP
(55 1
fnè , jotiiiTent de l'exemption du droit de tutelle &
curatelle ; les foldats &c cavaliers des milices gardes-
côtes , font difpenfés de tirer pour la milice ordinaire
chacun dans leur paroiffe, qui en font exemptes par
ordre du F.oi. Les paroifles loûmifes à la garde-côte,
font celles qui fe trouvent fur les côtes & jufqu'à
deux- lieues du bord de la mer.
Les côtes de France tant fur l'Océan que fur la Mé-
diterranée , font divifées en 1 1 2 capitaineries garde-
côtes, qui compôfent environ deux cents miile hom-
mes à pié & à cheval. ( Z )
CAPITAL; il vient du Latin caput , & fe dit en
différentes occafions , pour marquer la relation de
chef ou principal ; ainfi ville capitale fignifie la pre-
mière ville d'un royaume, d'une province, d'un état,
comme Paris eft la capitale de France ; Londres eft la
capitale d Angleterre; Mofcou, la capitale deMofco-
vie; Conjlantinople, la capitale de l'empire Ottoman ;
Rouen , la capitale de Normandie, &c.
Capital , le dit auffi de la fomme qu'on doit rem-
bourfer , indépendamment des intérêts ; ainfi 1 00 liv.
au denier vingt , produifent à la fin de l'année 105 ,
liv. dont 100 efl: le capital, & 5 , l'intérêt, foyer AR-
RÉRAGES, Intérêt, Principal.
Capital, owFqnds dans le Commerce, fe
dit du fonds d'une compagnie de commerce ou de la
fomme d'argent que ceux qui la compôfent fournif-
fent en commun , pour être employée dans leur com-
merce. Voyei^ Fonds.
Le capital de la compagnie des Indes d'Angleterre
étoit dans le commencement de fon inftitution de
36986 1 livres fterlins ; on le doubla enfuite , & il va
maintenant à plus de 1703422 livres fterlins : quand
on a 500 livres dans les fonds de la compagnie , on a
alors voix dans les aflemblées générales.
Le pouvoir que le roi d'Angleterre donna à la com-
pagnie du Sud d'augmenter fon capital , fut la fource
de tous les malheurs qui arrivèrent à cette compa-
gnie en l'année 1720. Voye[ Compagnie.
Capital , fe dit auffi de la fomme d'argent qu'un
marchand met d'abord dans fon commerce , lorlqu'il
s'établit pour fon compte particulier.
Le mot de capital eft oppoié à celui de gain oupro-
fit , quoique fouvent le gain augmente le capital , &
devienne capital lui-même , lorlqu'il cft joint au pre-
mier capital. Diilionn. du comm. tom. Il.pag. 81. {G)
Capital, ( crime ) eft celui pour la réparation du-
quel on inflige au criminel une peine capitale , com-
me la perte delà vie naturelle ou civile. K. Crime
& Châtiment. (H)
Capitale , (lie) cft une lie forte que laifTe la po-
tafTe au fond des chaudières où l'on fait le lavon.
Voyei Savon.
On l'employé, en Chirurgie , en qualité de caufti-
que , & elle entre dans la compofition de la pierre
infernale.
CAPITALES , (médecines) font les préparations des
boutiques les plus fameufes tk. les plus eflenticllcs ,
remarquables pour le nombre des ingrédiens qui y
entrent, pour leurs vertus extraordinaires, &c. com-
me la thériaque de Venife , le mithridate , &c. Voye^
MlTHRIDATE, &C. (X)
Capital , ( Peinture. ) on appelle auffi de ce nom
un tableau qu'on fuppofe d'une grande beauté , fi le
deflein en eft d'une grande ordonnance : un deflein
qui ne feroit que de quelques parties , ou même d'u-
ne figure entière , ne feroit point appelle defjein capi-
tal. Cependant la perfection d'une figure , la confer-
vation d'un beau morceau, la rareté des Ouvrages
exceilens en ce genre, font des motifs pour leur ap-
pliquer ce mot. ( R )
Capitale du hajlion , (la) eft, en Fortification,
une ligne tirée de l'angle flanqué à l'angle du centre
du baftion. Elle eft la différence du rayon du poly-
gone extérieur & de l'intérieur. Telle eû.KH, Pi. J.
de VArt milit. fis, 1 .
Les capitales des baftions ont depuis trente jufqu'à
quarante toiles de longueur. C'eft fur leur prolonge-
ment que l'on fe dirige ou conduit dans les tranchées
pour approcher du baftion. Foye^ Tranchées. (Ô)
Capitales, adj. F. pi. on nomme ainfi , dans là
pratique de, l'Imprimerie , certaines lettres , qui quoi-
qu'elles faflent partie d'une fonte , & foient du mê-
me corps de caractère , différent feulement en ce que
l'œil en eft plus gros , en ce que la figure n'eft pa»
la même , & qu'elles font moins d'ufage , & moins
courantes dans l'impreffion; ces fortes de lettres n'é-
tant laites que pour la plus grande perfeûion de l'Art.
Elles iônt indifpenfables au commencement d'une
phrafe, d'un a-linea, au commencement d'un vers,
aux noms propres d'hommes , de femmes , de royau-
mes , de provinces , de villes , &c.
Les petites capitales s'employent fuivant le fyftème
que l'on fe propôfe de fuivre dans un ouvrage. Elles
font d'un œil plus petit que celui des capitales , &
leur configuration eft la même, auffi en plus petit.
foyei Majuscules & Minuscules.
CAPITAN BACHA ou CAPOUDAN BACHA,
f. m. ( Hifl. mod. ) c'eft en Turquie le grand amiral.
Il pofiede la troifieme charge de l'empire , & a fur
mer autant de pouvoir que le grand-vifir en a fui'
terre. Ce commandant n'avoit point autrefois le titre
de capitan bâcha ou d'amiral; il n'étoit que beg de
Gallipoli. Soliman II. inftitua cette charge en faveur
du fameux Barberoufle, & ^attacha une autorité ab-
folue fur tous les officiers de la marine & de l'arfe-
nal , que le capitan hacha peut punir , cafier , & faire
mourir dès qu'il eft hors du détroit des Dardannel-
les. Il commande dans toutes les terres , les villes ,
châteaux , & forterelTes maritimes ; vifite les places ,
les fortifications , les magafins ; ordonne des répara-
tions, des munitions de guerre & de bouche; chan-
ge les milices , & tient confeil pour recevoir les plain-
tes des officiers.
Lorfque cet officier eft à Conftantinople, il a droit
de police dans les villages de la côte du port &C du
canal de la mer Noire , qu'il fait exercer ou par fon
keajà eu lieutenant , ou par le boftangi bachi.
La marque de fon autorité eft une grande canne
d'inde , qu'il porte à la main dans l'arlenal & à l'ar-
mée. Son canot, par un privilège réfervé feulement
au grand- feigneur , eft couvert d'un tendelet , & ar-
mé d'un éperon à la proue. Il difpofe des places de
capitaines de vaifîeau & de galère , vacantes par
mort.
Cet officier a urne copie de l'état des troupes de
mer & des fonds deftinés pour l'entretien des armées
navales. Trois compagnies de Janifiaires compôfent
fa garde : elles débarquent par-tout où la flotte fé-
journe, Se campent devant la galère du général. Sa
maifon, fans être auffi nombreufe que celle du grand-
vilir , cft compofée des mêmes officiers ; & quand la
flotte mouille dans un port, il tient un divan ou con-
feil compofé des officiers de marine.
Le capitan hacha jouit de deux fortes de revenus ;
les uns fixes, & les autres cafuels. Les premiers pro-
viennent de la capitation des îles de l'Archipel , &
certains gouvernemens &: bailliages de la Naï
de Romelie , entre autres de celui de Gallipoli, que
le grand-feigneur lui donne en apanage avec la même
que celle du grand-vifir. Ses revenus cafuels
conliftent en ce qu'il tire de la paye des bénévoles, Se
de la demi-paye de ceux cpii meurent pendant la cam-
pagne, qu'il partage avec leTerfana Emini. Il a en-
core le cinquième des prifés que font les begs , &
loue fes cfclaves pour mariniers & rameurs fur les
galères du grand-feigneur, à raifon de 50 écus par
tete7 uns qu'ils lui coûtent rien à nourrir ni à entre-
&>-
CAP
tenir ; parce qu'au retour de la flotte, il les fait en-
fermer avec ceux de fa hauteffe. Les contributions
qu'il exige dans les lieux où il pane , augmentent
considérablement fes revenus cai'uels. Guer , Mœurs
& ufag. des Turcs , tom. II. ( G )
C APITANATE, ( la ) Géog. province d'Italie au
royaume de Naples , bornée au nord & à l'orient
par le golfe de Venile ; à l'occident par le comté de
Molile ; au midi par la principauté ultérieure , la
Bafîlicate , & la terre deBari. Lucera delli Pagani
en eft la capitale.
CAPITANE , gahrt capitane, (Marine). Les puif-
fances maritimes , & les états fouverains qui n'ont
pas le titre de royaume , donnent le nom de galère
capitane à la principale de leurs galères.
Depuis la fuppreffion de la charge de capitaine
général des galères de France, il n'y a plus eu de ga-
lère capitane. La principale a été nommée réale , & la
féconde patrone. La galère capitane porte trois fanaux
polés en ligne courbe , & non pas en droite ligne
comme ceux de la réale. ( Z )
C API T ATI ON, f. f. (Finance.) eft un droit
annuel qui fe levé fur tous les bourgeois ou habitans
des villes , à raifon de leur état & de leurs facultés.
On levé fur les payfans ou habitans de la campagne
un droit à peu-près femblable , qu'on appelle taille.
Voye{ Taille.
En France , la capitation eft un droit très-diftingué
de la taille , & que payent toutes les perfonnes tailla-
bles ou non-taillables.
C'eft proprement une taxe ou une impofition qui
fe levé fur chaque perfonne à raifon de fon travail ,
de fon induftrie , de fa charge, ou de fon rang. Per-
fonne n'en eft exempt en France , pas même les prin-
ces du fang.
Cette eipece de tribut en général eft fort ancien ,
& répond à ce que les Grecs appelloient v.vça.'Kniàv ,
les Latins capita ou capitatio , ou tributum capitis ou
capitulare ; ce qui diftinguoit les taxes fur les perfon-
nes , des taxes fur les marchandées qu'on nommait
vecligalia. Voye^ Droit 6- Taxe.
On appelle encore capitation une taxe qu'on im-
pofe par tête dans certains befoins de l'état.
La capitation eft encore aujourd'hui la taille des
Turcs. Elle n'a commencé fous Loiiis XIV. qu'en
1695, & l'édit qui en ordonne l'impolition eft du 1 8
Janvier de la même année. Le R.oi avoit promis de
la fupprimer après la paix : mais les befoins conti-
nuels de l'état ne l'ont pas encore permis. Larrey ,
HiQ. de Louis XIV. tom. VI. Les eccléfiaftiques ne
payent point de capitation , mais ils en donnent l'é-
quivalent fous d'autres titres. (G)
Capitation, en Angleterre , eft une taxe impo-
fée par l'autorité du parlement fur chaque perfonne
ou tête, fur tout le monde indifféremment , ou fui-
vant quelque marque de diftinftion reconnue , telle
que la qualité , le métier , &c Voye^ Taxe.
Ainfi par le règlement ou le ftatut xvm. de Char-
les II. chaque fujet du royaume d'Angleterre fut co-
tifé par tête fuivant fon degré. Un duc payoit cent
livres , un marquis quatre-vingts livres , un baronet
trente livres , un chevalier vingt livres , un écuyer
dix livres , & toute^perfonne roturière douze deniers.
Il paroît par d'anciens aftes du parlement , que ce
règlement n'établit pas une nouvelle taxe , comme
on le peut voir particulièrement par celui qui parut
l'an 1380, qui porte : Qiùlibet t.un conj ugatus quant
joint us , utriufjuefexûs ,pro capite Juofolvcre cogebatur,
"SVallîngham.
Camden , dans les ouvrages qui nous reftent de
lui fur la monnoie , dit qu'il y avoit anciennement un
tribut perfonnel appelle capitatio , unpoié fur chaque
tête ; fur les femmes depuis l'âge de douze ans , Se fur
les hommes depuis l'âge de quatorze ans.
CAP
CAPITE, lit de vaifeau. Voye?^ CAJUTES. (Z)
CAPITELLO , ( Géog. ) petite rivière de l'île de
Corfe , qui fe jette dans le golfe d'Ajazzo.
CAPITULE , f. m. (Hijt. anc. & mod. ) forterefle
de l'ancienne Rome , bâtie fur le mont Tarpeien , où
il y avoit un temple de Jupiter furnommé de là Capi-
tolin : le fénat s'y affembloit ; & aujourd'hui c'eft une
maifon-de-ville où les confervateurs du peuple Ro-
main ont leur tribunal. Les Italiens l'appellent campU
doglio.
On prétend que ce nom de capitule vint d'une tête
d'homme encore fraîche & faignante , trouvée dans
la terre lorfqu'on creufa les fondemens de cette for-
terefle fous Tarquin l'ancien , l'an de Rome 139. Ar-
nobe ajoute que cet homme dont on trouva la tête,
fe nommoit Tolus , d'où l'on a fait capitole , quajià
capite Toli. Servius , fuccefleur de Tarquin, fit éle-
ver l'édifice, & Tarquin le fuperbe l'acheva en 221.
mais il ne fut conlacré que trois ans après i'expulflon
des rois & l'établiflement du confulat. Horace alors
revêtu de la dignité confulaire , en fit la dédicace l'an
de Rome 246.
Le capitole étoiteompofé de trois parties , un vafle
bâtiment ou temple au milieu , conlacré à Jupiter , &
deux ailes dédiées l'une à Junon , l'autre à Minerve.
On y montoit par cent degrés , félon Jufte Lipfe , y
compris ceux qui facilitoient l'abord de la roche Tar-
péienne. Le frontiipice & les côtés étoient environ-
nés de galeries ou portiques , dans lefquelles les vain-
queurs qui avoient obtenu l'honneur du triomphe ,
donnoient au fénat un repas fplendide , après avoir
facrifié aux dieux. C'étoit au capitole que les triom-
phateurs terminoient leur marche. Les dedans &les
dehors de cet édifice étoient extrêmement ornés ,
fur-tout le temple, où brilloit la ftatue deJupiter avec
la foudre , le feeptre , & la couronne d'or. On voyoit
encore dans le capitole un temple de Jupiter Gordien ,
un de Junon , l'hôtel de la monnoie. Sur la pente de
la montagne étoient le temple de la Concorde, & plus
de cinquante autres moindres confacrés à différentes
divinités.
Ce bel édifice renfermoit les dépôts les plus facrés
de la religion , comme les livres des Sibylles , les
anciles ou boucliers tombés du ciel. Il fut brûlé du
tems de Sylla. Un nouvel incendie le confuma fous
Vitellius , & Yefpafien le rétablit. Il éprouva le mê-
me fort fous Tite , & Domitien en répara les ruines.
A l'imitation de Rome diverfes villes, & fur-tout
les colonies Romaines , voulurent avoir leur capitoHy
foit temples , fort fortereflés. Conftantinopîe , Jéru-
falem , Carthage , Milan , Ravenne , Vérone, Aus-
bourg , Trêves , Cologne , Nifmes , Reims , Toulou-
fe, fe conformèrent à cet égard à la capitale de l'em-
pire. On croit communément que les capitouls ou
juges-coniuls de Touloufe ont tiré leur nom du capi-
tole érigé dans leur ville. (G )
CAPITOLINS , adj. pi. ( Hift. anc. ) jeux capito-
lins , ludi capitolini. Camille les inftitua en mémoire
de la levée du fiége du capitole par les Gaulois , ou
plutôt de ce que le cri des oies avoit empêché ces
barbares de furprendre cette citadelle. On les célé-
broit tous les ans en l'honneur de Jupiter Capitoliru
Plutarque dit qu'une partie de ces jeux confiftoit en
ce que les cricurs publics mettoient les Etruriens à
l'enchère , & qu'on prenoit un vieillard qu'on habil-
loit avec la robe prétexte & une bulle d'or au cou
pour repréfenter les rois d'Etrurie ; origine qui ne
paroît pas avoir beaucoup de rapport à l'événement
que Camille avoit prétendu retracer dans l'inititu-
tion de ces jeux.
Domitien en.inftitua de nouveaux, hommes ago-
nes capitolini , dans lefquels non - feulement les lut-
teurs,, les gladiateurs , les conduclcurs de chars , Se
les autres athlètes s'exerçoient , mais encore les poè-
tes»
CAP
CAP
633
tes , les orateurs , les hiftoriens , les muficiens , Se
les a&eurs de théâtre , fe difputoient des prix. Ces
nouveaux jeux capitolins fe célébraient de cinq en
cinq ans : l'empereur lui-même y diftribuoit les cou-
ronnes ; Se ils devinrent fi fameux , qu'au calcul des
années par luftres on fubftitua l'ufage de compter
par jeux capitolins , comme les Grecs avoient fait
par olympiades. Il paroît pourtant que cet ufage ne
fut pas de longue durée. ( G )
CAPITON , f. m. (Commerce de foie.') bourre qu'on
tire de deffus le cocon après qu'on en a enlevé la bon-
ne foie. On l'appelle auffi laj/is, cardaffe ; 6c l'on don-
ne les mêmes noms à des étoffes communes qu'on
en fait.
CAPITOULS, f. m. (Hijt. mod.) magiftrats de
ville à Touloufe , ou officiers municipaux , qui y
exercent la même jurifdicfion que les échevins à Pa-
ris, les jurats à Bordeaux, les confuls en Provence
& en Languedoc. On ne choifit , pour remplir ces
places , que des bourgeois des plus honnêtes famil-
les , ôc c'eft un honneur que d'avoir palTé par ces
charges. (G)
CAPITULAIRES , fub. m. pi. (Hi/l. mod. & Droit
canoniq.) Ce nom qui fignifie en général un livre divi-
fé en pluficurs chapitres ou capitules, s'eft appliqué
en particulier aux lois tant civiles que canoniques,
& fpécialement aux lois ou reglemens que les rois
de France faifoient dans les affemblées des évêques
& des feigneurs du royaume. Les évêques rédigeoient
en articles les reglemens qu'ils croyoient néceffaires
pour la difeipline eccléfiaftique , qu'ils tiroient pour
la plupart des anciens canons. Les feigneurs dref-
foient des ordonnances fuivant les lois 6c les coutu-
mes ; le roi les confirmoit par fon autorité , 6c en-
fuite ils étoient publiés Se reçus.
L'exécution de ceux qui regardoient les affaires
eccléfiaftiques , étoit commile aux archevêques 6c
aux évêques ; & celle des capitulaiaires qui concer-
noient les lois civiles , aux comtes & aux autres
feigneurs temporels : Se à leur défaut , des commif-
faircs envoyés par le roi , qu'on appelloit mifji domi-
nai , étoient chargés d'y veiller. Ces capitulaires
avoient force de loi dans tout le royaume ; non-
feulement les évêques , mais les papes même s'y
foûmettoient. Childebcrt, CIotaire,Dagobert Car-
loman , Pépin , & fur-tout Charlemagne , Loiiis le
débonnaire , Charles le chauve , Lothaire, & Loiiis
II. ont publié pluiieurs capitulaires : mais cet ufage
s'eft aboli fous la troifieme race de nos rois.
Anfegife , abbé de Lobe , félon quelques-uns , ou
félon M. Baluze , abbé de Fontenelles , a fait le pre-
mier un recueil des reglemens contenus dans les ca-
pitulaires de Charlemagne Se de Loiiis le débonnaire ;
ce recueil cil partagé en quatre livres , & a été ap-
prouvé par Loiiis le débonnaire & par Charles le
chauve. Après lui , Benoît , diacre de Mayenne, re-
cueillit vers l'an 845, des capitulaires de ces deux em-
pereurs omis par Anlegilc , & y joignit les capitulai-
res de Carloman & de Pépin. Cette collection eft di-
vifée en trois livres , qui compolent avec les quatre
précédens les fept livres des capitulaires de nos rois :
les li\ premiers livres ont été donnés par du Tillet en
1 548 , & le recueil entier des fept livres par Mrs Pi-
thou. Mais on a encore des capitulaires de ces princes
en la manière qu'ils ont été publies, & des l'an ^4^ ;
il y en a eu quelques-uns imprimés en Allemagne ; en
1 557 on en a imprimé une autre collection plus am-
ple à Balle. Le P. Sinnond a fait paraître quelques
capitulaires de Charles le chaîne ; 6e enfin M. Baluze
nous a procuré une belle édition des capitulaires de
nos rois , fort ample , & revue fur pluiieurs manuf-
crits , imprimée en deux volumes in- fol. à Paris en
1677. Elle contient les capitulaires originaux de nos
Tome II.
rois , Se les collections d'Anfegife ôc de Benoît , avec
quelques autres pièces*
Les évêques donnoient auffi dans le vme fieclc Se
dans les fuivans , le nom de capitules Se de capitulai-
res aux reglemens qu'ils faifoient dans leurs affem-
blées fynodales fur la difeipline eccléfiaftique, qu'ils
tiroient ordinairement des canons des conciles , &c
des ouvrages des SS. Pères. Ces reglemens n'avoient
force de loi que dans l'étendue du diocefe de celui
qui les publioit , à moins qu'ils ne fuffent approuvés
par un concile ou par le métropolitain ; car en ce cas
ils étoient obfervés dans toute la province : cepen-
dant quelques prélats adoptoient fouvent les capitu-
les publiés par un feul évêque. C'eft ainfi qu'ont été
reçus ceux de Martin , archevêque de Brague , de
l'an 515; ceux du pape Adrien I. donnés à Angilram
ou Enguerran , évêque de Metz , l'an 785 ; ceux de
Théodulphe , évêque d'Orléans , de l'an 797 ; ceux
d'Hincmar, archevêque de Reims, en 852; ceux
d'Herard, archevêque de Tours, en 858, & ceux
d'ifaac , évêque de Langres. Doujat , Hijioire du.
Droit canon. Baluze, Prœfatio ad capitularia. M. du
Pin , Biblioth. des Aut. ecclef. Vlll.fucle. ( G )
L'illuitre auteur de YEfprit des lois , obferve que
fous les deux premières races on affembloit fouvent
la nation , c'eft-à-dire , les feigneurs Se les évêques ;
car il n'étoit pas encore queftion des communes. On
chercha dans ces affemblées à régler le clergé par des
capitulaires. Les lois des fiefs s'étant établies , une
grande partie des biens de l'Eglife fut gouvernée par
ces lois. Les eccléfiaftiques feïéparerent, & négligè-
rent des lois dont ils n'avoient pas été les feuls au-
teurs : on recueillit les canons des conciles 6c les
Décrétâtes, qu'ils préférèrent comme venant d'une
fource plus pure. D'ailleurs la France étant divifée
en plufieurs petites feigneuries , en quelque manière
indépendantes , les capitulaires furent plus difficiles
à faire obferver, & peu-à-peu on n'en entendit plus
parler. Ejprit des lois, liv. XXVlll. ch. ix. (O )
CAPITULANT, qui a voix délibérative dans un
chapitre. On peut dire auffi capitulaire dans le même
fens ; mais cette dernière façon de parler eft moins
en ufage. (i/)
CAPITULATION IMPÉRIALE , {Jurifprudencc
& Hijl. mod.') l'on appelle ainlî , en Allemagne , une
loi fondamentale , faite par les élett eurs au nom de
tout l'empire , & impofée à l'empereur pour gouver-
ner fuivant les règles qui y font contenues , dont il
jure l'obfervation à fon couronnement. Les points
principaux auxquels l'empereur s'oblige par la capi-
tulation , font de prendre la défenfe de l'Eglife & de
l'empire ; d'oblerver les lois fondamentales de l'em-
pire, de maintenir 6c conlerver les droits, privilè-
ges , 6c prérogatives des électeurs, princes, îk autres
états de l'empire qui y font fpéciriés , &c.
Bien des jurifeoniultes font remonter l'origine des
capitulations aux tems les plus reculés , & prétendent
qu'elles étoient en ufage des le tems de Charles le
chauve Se de Loiiis le Germanique : mais ceux qui
font dans ce fentiment , fèmblent avoir confondu
a\ ce les capitulations en ufage aujourd'hui, des for-
mules de fermens que les rois de plufieurs pays
& les empereurs ont de tems immémorial prêtés à
leur lucre , qui ne contiennent que des promeffes gé-
nérales de gouverner leurs états fuivant les règles
de la jiiftice & de l'équité , & de remplir envers
leurs lujets les devoirs de bons fouverains : les ca-
pitulations dont il eft ici queftion font plus particu-
lières , & doivent être regardées comme des condi-
tions auxquelles l'empereur eft obligé de fouferire,
avant de pouvoir entrer en poffelfion de la couron-
ne impériale.
La première qui ait été faite dans l'empire , fut
prclçnte à l'empereur Charles-Quint. Ce fut Frédé-
LL11
634
CAP
rie le fage , électeur de Saxe , qui propofa cet expé-
dient , pour favorifer l'élection de ce prince , dont
les vaftes états & la trop grande puiffance faifoient
de l'ombrage aux autres électeurs ; il leur ouvrit l'a-
vis de prelcrire cette capitulation , pour limiter le
pouvoir de l'empereur , l'obliger à obferver les lois
& coutumes établies dans l'empire , mettre à cou-
vert les prérogatives des électeurs , princes , & au-
tres états , & affùrer par-là la liberté du corps Ger-
manique.
Depuis Charles-Quint, les électeurs ont toujours
continué de prelcrire des capitulations aux empereurs
qu'ils ont élus après lui , en y faiiànt cependant quel-
ques changemens ou additions , luivant l'exigence
des cas. Enfin du tems de Rodolphe II. on commença
à douter fi le droit de faire la capitulation n'apparte-
noit qu'aux feuls électeurs ; en conléquence les prin-
ces & états de l'empire voulurent auili y concourir,
& donner leurs fuffrages pour celle qu'on devoit prel-
crire à l'empereur Matthias. Ils vouloient que par la
fuite la capitulation rïït faite dans la diète ou affera-
blée générale des états de l'empire. Les électeurs qui
auraient bien voulu demeurer feuls en poffefïïon d'un
droit qu'ils avoient jufqu'alors feuls exercé , alléguè-
rent, pour s'y maintenir, que ce droit leur étoit ac-
quis par une poffefïïon centenaire , & l'affaire de-
meura en fufpens ; cependant les états obtinrent en
1648 , à la paix de Weftphalie , qu'on inférerait dans
l'article VIII. §. 3. du traité conclu à Ofnabruck, que
dans la prochaine diète on travaillerait à dreffer une
capitulation perpétuelle & fiable, à laquelle les prin-
ces & états auraient part. Nonobftant cette précau-
tion & les proteftations réitérées des états , les élec-
teurs ont toujours trouvé le lecret d'éluder l'exécu-
tion de cet article. La queition eft donc refiée indécife
jufqu'à prélent : cependant pour donner une efpece
de fatisfaction à leurs adverfaires , ils ont depuis in-
féré dans les capitulations des empereurs , & nommé-
ment dans celle de François I. aujourd'hui régnant,
une promeffe de travailler avec force à faire décider
l'affaire de la capitulation perpétuelle.
Le collège des princes , qui ne perd point de vue
cet objet , a fait préfenter en dernier lieu , au mois
de Juin 175 1, un mémoire à la diète de Ratisbonne,
fur la nécefTité de dreffer un projet de capitulation
perpétuelle, qui règle d'une manière ferme & fiable
les engagemens auxquels les empereurs font tenus
par leur dignité de chefs du corps Germanique. La
fuite fera voir fi cette dernière tentative aura plus de
fuccès que les précédentes , &C fi le collège électoral
fera plus difpolé que par le paffé à y faire attention.
Capitulation, dans VArt militaire , efl un
traité des différentes conditions que ceux qui rendent
une ville , obtiennent de ceux auxquels ils font obli-
gés de la céder.
Lorfque le gouverneur qui défend une ville fe voit
réduit aux dernières extrémités , ou que fa cour lui
donne ordre de fe rendre pour avoir de meilleures
compofitions de l'ennemi , &c faire un traité plus avan-
tageux , tant pour la ville que pour la garnifon , il
fait battre ce qu'on appelle la chamade. Pour cela en
fait monter un ou pluiieurs tambours fur le rempart ,
du côté des attaques , qui battent pour avertir les af-
fiégeans que le gouverneur a quelque chofe à leur
propofer : on élevé aufîi un ou plufieurs drapeaux
blancs fur le rempart pour le même fujet , & on en
laiffe un planté fur le rempart ou fur la brèche pen-
dant rfout le tems de la négociation. On en ufe de
même pour demander une fufpennon d'armes , après
des attaques meurtrières, pour enlever les morts, les
bleffés , &c.
Auffi-tôt que la chamade a été battue , on ceffe de
tirer de part & d'autre, & le gouverneur fait fortir
CAP
quelques officiers de marque de la ville , qui vont
trouver le commandant du liège , & qui lui expofent
les conditions fous lefquelles le gouverneur offre de
rendre la ville. Pour la sûreté de ces officiers, les af-
liégeans en envoyent dans la ville un pareil nom-
bre pour otages. Si les proportions du gouverneur ne
conviennent pas au commandant de l'armée afïïé-
geante, il lesrefufe , & il dit quelles font celles qu'il
veut accorder. Il menace ordinairement le gouver-
neur de ne lui en accorder aucune , s'il ne prend le
parti de fe rendre promptement; s'il laiffe achever ,
par exemple , le paffage du foffé de la place», ou éta-
blir quelque batterie vis-à-vis les flancs, &c. Si l'on
trouve les propoiitions qu'il fait trop dures , on rend
les otages , & on fait rebattre le tambour fur le rem-
part , pour faire retirer tout le monde , avant que
l'on recommence à tirer , ce que l'on fait très-peu de
tems après. Il faut obferver que pendant le tems que
dure la négociation , on doit fe tenir tranquille de
part & d'autre , & ne travailler abfolument en au-
cune manière aux travaux du fiége. Le gouverneur
doit aufîi pendant ce tems fe tenir exactement fur fes
gardes , pour n'être point furpris pendant le traité de
la capitulation; autrement il pourrait le trouver ex-
polè à la diferétion de l'afïïégeant.
Suppofant que l'on convienne des termes de la ca-
pitulation, le gouverneur envoyé aux afiiégeans pour
otages deux ou trois des principaux officiers de fa
garnifon , ôc le général des afiiégeans en envoyé le
même nombre &£ de pareil grade , pour sûreté de l'e-
xécution de la capitulation. Lorfque les afïïégés ont
exécuté ce qu'ils ont promis , on leur remet leurs ota-
ges ; & lorfque les afïïégeans ont pareillement exé-
cuté leurs engagemens , on leur renvoyé aufîi les
leurs.
Les conditions que demandent les afïïégés , varient
fuivant les différentes circonftances & fituations où
l'on fe trouve. Voici les plus ordinaires : i°. Que la
garnifon fortira par la brèche avec armes & baga-
ges, chevaux, tambour battant, mèche allumée par
les deux bouts , drapeaux déployés , un certain nom-
bre de pièces de canon & de mortiers, avec leurs ar-
mes, & des affûts de rechange, des munitions de
guerre pour tirer un certain nombre de coups ; pour
être conduite en fureté dans la ville qu'on indique , &
qui eft ordinairement la plus prochaine de celles qui
appartiennent aux afïïégés : on obferve de mettre
par le plus court chemin , ou on indique clairement ce-
lui par lequel on veut être mené. Lorfque la garni-
fon doit être plufieurs jours en marche pour fe ren-
dre au lieu indiqué , on demande que les loldats foient
munis de proviiions de bouche pour quatre ou cinq
jours, fuivant le tems que doit durer la marche par
le chemin dont on eft convenu.
20. Que l'on remettra le foir, ou le lendemain à
telle heure , une porte de la ville aux afïïégeans , &
que la garnifon en fortira un jour ou deux après , fui-
vant ce dont on fera convenu à ce fujet de part &
d'autre.
30. Que les afïïégeans fourniront un certain nom-
bre de chariots couverts , c'elt-à-dire , qui ne fe-
ront point vifités , & en outre des chariots pour con-
duire les malades & les bleffés en état d'être trans-
portés , & en général toutes les voitures néceffaires
pour emporter les bagages de la garnifon , Se l'artil-
lerie accordée par la capitulation.
40. Que les malades & les bleffés, obligés de ref-
ter dans la ville , pourront en lbrtir avec tout ce
qu'il leur appartient , lorfqu'ils feront en état de le
faire , & qu'en attendant il leur fera fourni des loge-
mens gratis , ou autrement.
e°. Qu'il ne fera prétendu aucune indemnité con-
tre les afÏÏégés, pour chevaux pris chez le bourgeois
C À P
& pouf les maifons qui ont été bridées & démolies
pendant le fîége.
6°. Que le gouverneur, tous les officiers de l'état
major, les officiers des troupes, & les troupes elles-
mêmes , & tout ce qui ell au fervice du roi , Sortiront
de la place , rans être fujets à aucun acre de représail-
les, de quelque nature que ce puifîé être, 6c fous quel-
que prétexte que ce foit.
7°. Si ceux auxquels on rend la ville ne font point
de la religion catholique , apollolique &c Romaine ,
on ne manque pas d'inlérer dans la capitulation, qu'el-
le fera conlèrvée dans la ville.
8°. Que les bourgeois & habitans feront mainte-
nus dans tous leurs droits, privilèges & prérogatives.
9°. Qu'il fera libre à ceux qui voudront lortir de
la ville, d'en fortir avec tous leurs effets, & d'aller
s'établir dans les lieux qu'ils jugeront à propos. On y
marque auffi quelquefois ( & on le doit, lorfqu'on
craint que l'ennemi ne traite avec trop de rigueur les
bourgeois, fur les marques d'attachement qu'ils au-
ront donné pendant le liège pour le prince dont ils
quittent la domination) qu'ils ne feront ni inquiétés
ni recherchés pour aucune des choies qu'ils auront
pli faire avant ou pendant le fiége.
io°. On met auffi dans la capitulation , qu'on livre-
ra les poudres & les munitions qui fe trouveront dans
la place, & qu'on indiquera les endroits où il y aura
des mines préparées.
ii°. Que les prifonniers faits de part & d'autre
pendant le fiége , lieront rendus.
Il tant oblerver que pour qu'une place foit reçue
à compolition , il faut qu'elle ait encore des vivres
& des munitions de guerre au moins pour trois jours ,
fans quoi elle le trouverait obligée de fe rendre pri-
fonniere de guerre : mais fi l'affiégeant n'en ell point
informé, &Z que la capitulation ait été fignée , il ne fe-
rait pas julle de retenir la garnifon prifonniere de
guene, lorfque l'on reconnoîtroit la dilette de mu-
nitions.
Quand l'ennemi ne veut point accorder de capitu-
lation , à moins que la garnifon ne fe rende prifon-
niere de guerre , & qu'on fe trouve dans la fâcheufe
néceffité de fubir cette loi , on tâche de l'adoucir au-
tant qu'il efl poflible : on convient allez communé-
ment :
i°. Que le gouverneur & les principaux officiers
garderont leurs épées, pillolets, bagages, &c.
i°. Que les officiers Subalternes , au-deffbus des ca-
pitaines, auront leurs épées feulement, avec leurs
ultenciles ou bagages.
3°. Que les foldats ne feront ni dépouillés, ni dif-
pcrlés de leur régiment.
4°. Que la garnifon fera conduite en tel endroit ,
pour y demeurer prifonniere de guerre.
5°. Que les principaux officiers auront la permit-
fion d'aller vaquer à leurs affaires pendant deux ou
trois jours.
6°. Que lorfque la garnifon évacuera la place , il
ne fera pas permis de débaucher les foldats , pour les
faire déferter de leurs regimens.
Lorfque toute la capitulation ell arrêtée , il entre
dans la place un officier d'artillerie des affiégeans,
pour faire conjointement avec un officier d'artillerie
de la garnifon, un inventaire de toutes les munitions
de guerre qui le trouvent dans la place ; il y entre
auffi un commiffaire des guerres pour faire un état
des munitions de bouche qui s'y trouvent encore.
Lorfqu'on prévoit être clans la néceffité de fe ren-
dre , & que l'on a des magafins confidérables de mu-
nitions de guerre & de bouche, on en gâte autant
que l'on peut avant de parler de fe rendre , afin qu'il
n'en relie dans la place que ce qu'il doit y en avoir
pour pouvoir capituler, ce que l'ennemi n'en profite
pas : li l'on attendoit pour les brûler ou gâter, que
CAP
H\
l'on entrât en capitulation , l'ennemi pourrait infiller
a ce qu'ils f'uffent eonfervés, mais il ne peut plus y
penfer lorfqu'on a pris les précautions auparavant. !
Auffi-tôt que les affiégés ont livré une porte de leur
ville aux afïiégeans , le premier régiment de l'armée
s'en empare , & y fait la garde.
Le jour venu que la garnifon doit fortir de la pla-
ce , on fait mettre l'armée affiégeante fous les armes :
elle fe range ordinairement en deux haies de batail-
lons & d'efeadrons, & la garnifon pafle au milieu.
L'heure venue de fa fortie , le général & les princi-
paux officiers fe mettent à la tête des troupes, pouf
la voir défiler devant eux.
Le gouverneur fort à la tête de la garnifon, ac-
compagné de Pétat-major de la place , & des princi-
paux officiers; il la fait défiler dans le meilleur or-
dre qu'il lui ell poffible. On met ordinairement les
anciens regimens à la tête & à la queue, & les autres
au milieu avec les bagages. Lorfqu'on a de la cava-
lerie , on la partage de même en trois corps, pour la
tête , le centre Se la queue. On détsche des cav aliers
6c de petits corps d'infanterie pour marcher le long
des bagages , & veiller à leur fiuété , afin qu'il n'en
foit pillé aucune partie.
L'artillerie accordée par la capitulation, marche
après le premier bataillon ; lorfque la garnifon efl
arrivée à la place où elle doit être conduite , elle re-
met à l'efeorte les otages des afliégeans ; & lorfque
cette efeorte a rejoint l'armée , on renvoyé les otages
que les affiégés avoient biffés pour la fureté de l'ef-
eorte, des chariots , & autres choies accordées par
l'armée affiégeante pour la conduite de la garnifon»,
Lorfque la garnilon efl prifonniere de guerre , on
la conduit aulïi avec efeorte, jufqu'â la ville où on
doit la mener par la capitulation.
Tout ce qui eft porté dans les capitulations doit
être lacré & inviolable, & l'on doit en entendre tous
les termes dans le fens le plus propre & le plus na-
turel; cependant on ne le fait pas toujours. Il faut
que le gouverneur apporte la plus grande attention,
pour qu'il ne s'y gliffe aucun terme équivoque & fuf-
ceptible de différentes interprétations ; il y a nombre
d'exemples qui prouvent la néceffité de cette atten-*
tion.
Lorfque la garnifon d'une ville où il y a une cita-
delle, capitule pour fe retirer dans la citadelle, il y a
quelques conditions particulières à demander, telles
que lont celles-ci :
Que la citadelle ne fera point attaquée du coté de
la ville ; que les malades & blefles qui ne pourront
être tranlportés , relieront dans la ville 6c dans les lo-
gemens qu'ils occupent ; êv qu'après leur guérifon ,
il leur fera fourni des voitures 6c des pafTe-ports, pour
fe retirer en toute fureté dans une ville qui fera mar-
quée dans la capitulation. On doit ne laiffer entrer
dans la citadelle que ceux qui peuvent y être utiles
pour fa défenfe ; les autres personnes qu'on nomme
communément touches inutiles , ne doivent point ab-
folument y être fouft'ertes. Il faut faire inférer dans
la capitulation , qu'ils feront conduits dans une ville
voilinc de la domination du prince , que l'on indique-
ra. On doit auffi convenir d'un certain tems pour
faire entrer toute la garnifon dans la citadelle, &
marquer evprcffement que pendant ce tems il ne fe-
ra fait de la part de l'affiégeant aucuns des travaux
néceflaires pour l'attaque de la citadelle.
Une ville maritime demande encore quelques atten-
tions particulières pour les vaùTeaux qu'il peut y
avoir dans l'on port : on doit convenir qu'ils (ortiront
du port le jour que la garnifon lortira de la ville,
ou lorfque le tems le permettra, pour le rendre en
fureté dans le port dont on leva convenu. Ils doivent
conferver leur artillerie, agrès, provilions de guerre
& de bouche, &e, Si le mauvais tems les obligeoit
L L 1 1 ij
636
CAP
de rélâcher pendant leur route dans un des ports des
affiégeans, il doit être porté dans la capitulation, qu'ils
y feraient reçus, & qu'on leur fourniroit tous les fe-
cours dont ils auraient beibin pour les mettre en état
de continuer leur route; ils doivent auffi être munis
de paffe-ports , & en un mot avoir toutes les ïïïretés
qu'on peut exiger pour n'être point infulr.es par les
vaifleaux ennemis, & fe rendre fans aucun obftacle
dans le port qui leur fera indiqué. Défenfe des places,
par M. Le Blond. (Q)
* C APIVAR. , ( Hijl. nat. Zoologie. ) animal qua-
drupède & amphibie. Il reffcmble par le corps à un
cochon : mais fa tête eft comme celle d'un lièvre ; il
n'a point de queue ; il fe tient ordinairement affis fur
fes pattes de derrière , à peu près comme les finges.
On en trouve beaucoup fur les cotes du Brefil. Cet
animal fe tient communément dans la mer pendant
la journée ; il ne vient à terre que durant la nuit. Il
fait un grand tort aux arbres & aux plantations , at-
tendu qu'il arrache les arbres & en ronge les racines.
On afsùre qu'il eft fort bon à manger.
CAPNOBATES , f. m. pi. ( Hifi. tf«c.)furnomque
l'on donna anciennement aux Myfiens , peuples d'A-
fie , parce qu'ils faifoient une profeffion particulière
d'honorer les dieux , &: qu'ils s'employoient unique-
ment à leur culte. Selon Strabon , ils s'abftenoient
de toute autre occupation , ne mangeoient point de
chair , ni rien de ce qui avoit été animé , & vivoient
f mplement de miel & de laitage. Kawvos, en Grec ,
f gnide fumée ; & comme la fumée de l'encens entrait
pour beaucoup dans les cérémonies de la religion
payenne , on penfe que c'eft de là que ces peuples
ont eu le nom de Capnobates. ( G )
C APNOIDES , ( Hifi. nat. bot. ) genre de plante à
fleur polypétale , irréguliere , femblable à celle de
la fumeterre. Le piitil fort du calice , & devient
une filique cylindrique , compolée de deux panneaux
affemblés fur un chaffis auquel font attachées quel-
ques femences arrondies. Tournefort , Infi. rti herb.
Voye{ Plante. (/)
CAPNOMANC1E, f. f. divination dans laquelle
les anciens obfervoient la fumée pour en tirer des
préfages.
Ce mot eft Grec , & formé de moto; , fumée , &
de (MOTutt , divination.
On diftinguoit deux fortes de capnomancie ; l'une
qui fe pratiquoit en jettant fur des charbons ardens
des graines de jafmin ou de pavot , & en obfervant la
fumée qui en fortoit. L'autre qui étoit la principale
& la plus ufitée , confiftoit à examiner la fumée des
facrifices. C'étoit un bon augure quand la fumée
qui s'élevoit de l'autel étoit légère , peu épaiffe , &c
quand elle s'élevoit droit en haut , fans fe répandre
autour de l'autel. Théophrafte , fur le prophète Ofée,
remarque que les Juifs étoient auffi adonnés à cette
fuperlhtion. On pratiquoit encore la capnomancie en
humant ou refpirant la fumée qu'exhaloient les vic-
times , ou celle qui fortoit du feu qui les confumoit ;
comme il paraît par ces vers de la Thébaïde de Stace,
où le poète dit du devin Tirefias :
Ille coronatos jamdudum amplccîitur ignés ,
Fatidicum forbens vultu flagrante vaporem.
On penfoit fans doute que cette fumée donnoit des
infpirations prophétiques. Delrio , Difquijït. magie,
lib. IV. chap. ij . quafl. J.fecl. l.pag. S5z. (G)
CAPO-BLANCO , ( Géog. ) cap de l'Amérique ,
dans la mer du Sud , à la partie occidentale de l'ifth-
me de Panama.
CAPO-D'ISTRIA , ( Géog. ) ville confidérable
d'Italie , dans lïftrie , fur le golfe de Trieite , & à
trois lieues de la ville de ce nom. Long. Ji, jâ. Lu.
4à. 48.
CAP
CAPOLETTO,( Géog.)v'û\c & port d'Ane, dans
la Géorgie , fur la mer Noire.
CAPOLINIERI , (Géog.) petite ville d'Italie fur
l'île d'Elba , dans la mer de Tofcane.
C APOLLIN , ( Hifi. nat. bot. ) arbrevqui croît au
Mexique. Sa groflèur eft médiocre ; il Pla feuille de
notre amandier ; les fleurs font en boffettes , pendan-
tes ; Ion fruit eft tout lemblable à la cerife. L'arbre
fleurit au printems , & porte fruit en été. On fait de
fa baie une boiffon , & une forte de pain dont on ufe
dans les tems de difette. On diftingue trois efpeces
de capollin.
CÂPON , f. m. (Marine.") c'eft une machine com-
polée d'une corde &£ d'une groffe poulie , à quoi l'on
joint un gros croc de fer , dont l'ufage eft de lever
l'ancre loriqu'elle paroît hors de l'eau , & de laifir
l'orin , ou cordage , qui répond à l'arganeau de la
bouée & à la croilée de l'ancre.
Croc de canon , -,
Poulie de capon, l fervent a M/wwKrl ancre.
CAPONNER l'ancre , ( Marine. ) c'eft accro-
cher l'arganeau de l'ancre avec le croc du capon ,
pour la hilîèr ou tirer au boffoir.
CAPONNE , terme de commandement qu'on fait
à ceux de l'équipage deftinés à lever l'ancre , pour
les faire haler fur le capon , afin de mettre l'ancre en
place. (Z) -'
CAPONNIERE , f. f. en terme de Fortification , eft
une efpece de double chemin couvert , large de dou-
ze à quinze pies , conftruit au fond du foffé fec , vis-
à-vis le milieu de la courtine. Elle occupe toute la
largeur du folle en cet endroit ; c'eft-à-dire , qu'elle
aboutit à l'angle rentrant de la contrefearpe. Elle eft
paliffadée de part & d'autre ; & l'on parapet, qui eft
feulement élevé de trois pies au deffus du niveau du
foffé , va fe perdre en pente douce ou en glacis ,
dans le foffé , à dix ou douze toiles de fon côté in-
térieur. Son terre-plein eft creule de trois pies dans le
foffé : ainfi toute la hauteur de fon parapet eft de fix ,
pies. Elle a des banquettes comme le chemin couvert.
Pour conftruire la caponnure , il faut tirer les lignes
de défenfe E H , G F, (PI. I. de l'Art milit.fig. n.)
pour avoir l'angle flanquant C B D ; de fon lommet
B , tirer au fommet A de l'angle rentrant de la con-
trefearpe , la ligne BA ; mener de part & d'autre des
parallèles à cette ligne , à la diftance de fis ou fept
pies , terminées d'un côté par la contrefearpe , &c de
l'autre par les lignes de défenfe,& l'on aura la capon-
niere tracée.
On conftruit fouvent des caponràeresàansle foffé fec^
quoiqu'il n'y ait point de tenailles : mais alors on
lubftitue à la tenaille ordinaire une efpece de tenaille
fimple O B P , qui confifte en une élévation de terre
de 8 ou 9 pies le long des parties O B , B P des lignes
de défenfe. Elle va le perdre en glacis dans le foffé
à la diftance de 10 ou utoifes. On donne une ou
deux banquettes à cette efpece de tenaille , qui a
le même ufage que la tenaille ordinaire. Voye^ Te-
naille.
Le principal ufage de la caponnkre qu'on vient de
décrire , eft de défendre directement le paftage du
foffé des faces des baftions , & de donner un parta-
ge fur au foldat pour aller de la place dans les ou-
vrages extérieurs. Afin qu'il ne loit point découvert
en iortant de la caponniere , on coupe ordinairement
la contrefearpe dans Ion angle rentrant , par une li-
gne IK,(Pl.I. de l'An milit. fig. n.) parallèle à la
courtine. On pratique auffi quelquelois pour le mê-
me fujet ,un petit enfoncement LMNK dans cet
endroit auquel on donne différentes figures.
On couvrait autrefois le deffus de la capopnurt
par de forts madriers , qui font des planches très-
épaiffes , & on mettoit beaucoup de terre fur ces
madriers. On pratiquoit de petites ouvertures dans
CAP
le parapet de cet ouvrage , par lefquelles le foldat
tiroit fur l'ennemi ; mais la fumée de la poudre qui
en rendoit le féjour très-incommode , a fait fuppri-
mer ces efpcces de routes ou couvertures. On fe
contente feulement aujourd'hui , dans untems de fié-
§e , de couvrir le defliis de la caponniere de claies ou
de blindes , pour garentir ceux qui défendent la ca-
ponnierc des pierres que l'ennemi jette dans le foflé
pour la faire abandonner.
Outre la caponniere du fofle , il faut obferver qu'on
donne quelquefois le même nom aux communica-
tions du chemin couvert avec les ouvrages qui font
au pié du glacis , parce que ces communications font
de même des eipeecs de doubles chemins couverts.
Voyc^ Communication. Elêmens de Fortifie, pur
M. Le Blond. (Q)
CAPORAL ,f. m. (An milit.) c'eft un bas offi-
cier d'infanterie , qui pofe Se levé les fentinelles , fait
garder le bon ordre dans le corps-de-garde , com-
mande une eicoiiade , Se reçoit le mot des rondes
qui paflent auprès de fon corps-de-garde. Il y a pour
l'ordinaire trois caporaux dans chaque compagnie.
Foye{ Compagnie.
Ce mot vient de l'Italien caporah , qui fignifie la
même chofe , & qui eft dérivé de caput , tête , chef;
le caporal étant le premier de fa compagnie.
CAPORAL d'un vaijjiau', cil un officier qui a foin
de pofer le guet & les fentinelles , & de les lever ;
il vifite auffi les armes des foldats & des mariniers ,
& leur apprend à s'en fervir. Il a un aide fous lui.
ce)
CAPORIE , ou CAPORIO , ( Géog. ) ville de Sué-
de , en Ingrie , fur le golfe de Finlande.
. C APORNACK , (Géog. ) ville & château d'Hon-
f grie , dans l'Efclavonie.
CAPOSER , verb. neut. ( Mari m. ) ce mot peu
ufité , fignifie mettre le navire à la cape.
On capofe en amarrant le gouvernail bien ferme ,
pour laifler aller le vaifleau au gré du vent. Voye^
Cape, &c Capeier.
CAPOT , f. m. ( Marine. ) c'eft un habillement
fait en forme de robe capuchonnée , que mettent
les gens de mer par deflus leur habit ordinaire , pour
les garantir de l'injure du tems (Z)
CAPOT, f. m. voyc{ Cagot.
Capot, (terme de jeu de Pique'..*) On dit de celui qui
ne fait aucune levée ou main , qu'il eil capot. Le ca-
pot vaut quarante points. FoyeiPiQyET. Celui qui
gagne feulement les cartes , n'en compte que dix.
CAPOTAGE, f. m. ( Marine.) on donne ce nom
à cette partie de la feience du pilote , qui ceniifte
dans la connoiflance du chemin que le vaifleau fait
fur la furface de la mer ; connoiflance nécefiaire
pour conduire fûrement le vaifleau.
On fait que la ligne décrite par un vaifleau fur
la furface de la mer, eft une courbe , appeilée loxo-
dromie , ou loxodromique , qui coupe tous les méri-
diens à angles égaux. Plufieurs auteurs nous ont don-
né des traités de cette loxodromie , dans l'hypothe-
fe de la terre iphérique. Mais comme on a reconnu
que la terre cil un fphéoride applati, il a tallu taire en-
trer cette nouvelle confidération dans la théorie de la
loxodromie , qui en cil devenue beaucoup plus diffi-
cile. C'eft ce qu'ont fait MM. Murdoch & Walz , fa-
Vans Géomètres , l'un Anglois , l'autre Allemand ,
dans des traités qu'ils ont publiés exprès fur cela.
M. de Maupertuis a traité le même fujet d'une ma-
nière plus élégante oc plus commode pour la prati-
que , dans un mémoire qui , quoiqu'afle? court , ren-
ferme toute la théorie du capotage dans l'hypothcfe
de la terre applatie. Ce mémoire imprime parmi
ceux de Y académie des Sciences de IJ44 , ell intitulé :
Traité de la loxodromie. On y réduit tout le capotage à
CAP
H
/
ces quatre problèmes, dont il donne la folution en
très peu de pages,
I. Étant connue la longueur de la route faite fur
un même cercle parallèle à l'équateur , trouver la
différence en longitude ; ou réciproquement , étant
connue la différence en longitude fur le même pa-
rallèle , trouver la longueur de l'arc du parallèle.
I I. Étant connue la latitude d'un lieu de la furfa*
ce de la terre , trouver l'arc du méridien intercepté
entre l'équateur & ce lieu.
III. Étant connus l'angle de la route & la latitu-
de d'un lieu , trouver l'arc de la loxodromie termi-
né par l'équateur , & ce lieu.
IV. Étant connus l'angle delà route & la latitu-
de d'un lieu , trouver la différence en longitude en-
tre ce lieu & le point où la loxodromie coupe l'é-
quateur.
M. de Maupertuis donne des formules algébriques
pour réfoudre ces queflions , & fait voir comment
on y peut rapporter tous les problèmes qu'on peut
propofer fur la navigation.
Il feroit à fouhaiter qu'on réduisit ces formules al-
gébriques en tables toutes calculées, pour l'utilité &
la commodité des pilotes. Voye^ Navigation ,
Route , Terre, Loxodromie , &c. (O)
CAPOUE , (Géog.) ville d'Italie , au royaume de
Naples , dans la terre de Labour. Long. 31. 55. lat<,
41- y-
CAPOZWAR , (Géog.) petite ville forte de la
bafle Hongrie , fur la rivière de Capoz.
* CAPPADOCE , f. m. ( Géog. anc. & mod. ) con*
trée ancienne Se confidérable de l'Afie mineure ,
bornée par l'Arménie mineure à l'orient, la Cilicie
au midi , la Galatie ôc la Pamphilie au couchant, &
le Pont-Euxin au feptentrion. Ce fut un royaume t
mais les Romains la réduifirent en province : elle ap-
partient maintenant aux Turcs.
CAPPE , f. f. (Sucrerie. ) c'efl ainfi qu'on appelle
des morceaux de bois légers , minces , arrêtés enfem-
ble par le bout d'enhaut ; on en couvre les formes
cafiees pour les mettre en état de fervir encore ; l'é-
lévation que forme l'aflem!#a°e des morceaux de
bois s'appelle la tête ou le crochet de la caope.
CAPPEL, ou WALD-CAPPEL , ( Géog. ) petite
ville d'Allemagne dans le pays de Hefle, fur la
Vohra.
CAPRAIA , ou LA CAPRÉE , ( Géog. ) île d'Ita-
lie , dans la mer de Tofcane , au nord-cil de celle dé
Corfe dont elle dépend ; elle a environ fix lieues de
tour.
CAPRANICA , ( Géog.) petite ville d'Italie dans
l'état de I'Eglife , à deux milles de Sutri.
CAPRARA , ( Géog. ) petite île du golfe de Ve-
nife , une de celles de Trémiti , dépendante du royau-
me de Naples.
CAPRÉES ou CAPRI , (Géog. ) île de la Médi-
terranée , au royaume de Naples , dans la principau-
té citérieure , fameufe par la retraite & les débau-
ches de Tibère, &par la grande quantité de cailles
qui y paflent tous les ans.
CAPRES , f. m. pi. ( Marine. ) c'efl: le nom qu'on
donne aux armateurs èc aux vaifleaux qui font ar-
més en guerre pour faire la courte. ( Z)
Câpres , f. f. pi. baie du câprier. Foye^ Câ-
prier.
CAPRI , ( Géog. ) capitale de l'île du même nom;
elle a un bon château ; elle ell à 8 lieues de Naples,
Lonç. 31. 41. lut. 40. J5.
CAPRIANA, (Geog. ) petite ville forte d'Italie,
dans le Mantouan.
CAPRI ATO , ( Géog.) petite ville d'Italie , dans
le marqoifat de Montferrat.
CAPRICE , f. f. ( en Architecture. ) cm fe fert de ce
nom par métaphore , pour exprimer une compofr-
63 8
C A P
tion bifarre , quoiqu'ingénieufe , maïs qui eft éloi-
gnée des préceptes de l'Art , tels que font les ouvra-
ges du Boromini, Architecte d'Italie, de Berin, &de
îaJoue, Peintres &Deffinateurs François, &deplu-
fieurs autres de nos jours ; par une imagination
aufii fertile que déréglée , ils mettent en ufage des li-
cences qui autorifent la plupart des jeunes Architec-
tes fans expérience & fans règle à les imiter , & par
là à rendre l'Architefture fufceptible de variations ,
comme les habits , les modes , &c. (P )
Caprice, ou Fantaisie , forte de pièce de Mufi-
que libre , dans laquelle l'auteur fans s'affujettir à
rien , donne carrière à fon génie , & fe livre à tout
le feu de la compofition : le caprice de Rebel étoit
eftimé dans fon tems ; aujourd'hui les caprices de Lo-
catelli donnent de l'exercice à nos violons. ( S )
CAPRICORNE , ( en JJlronomie. ) eft le dixième
figne du zodiaque ; il donne fon nom à la dixième
partie de l'écliptique. Voyei Signe, Ecliptique.
Le caraftere dont fe fervent les auteurs d'Aftrono-
mie , pour défigner le capricorne , eft > .
Les anciens ont regardé le capricorne comme le di-
xième figne du zodiaque , & fixé le folftice d'hy ver
pour notre hémilphcre à l'arrivée du foîeil dans ce
figne. Mais les étoiles ayant avancé d'un figne tout
entier vers l'orient , le capricorne eft maintenant plu-
tôt le onzième figne que le dixième ; & c'eft à l'en-
trée du foleil dans le fagittaire , que fe fait le lolfti-
ce , quoiqu'on ait confervé la façon de s'exprimer
des anciens. foye^ Solstice, & Précession.
Ce figne a dans les anciens monumens, dans les
médailles, &c. la tête d'un bouc & la queue d'un poit-
fon , ou la forme d'un égipan ; il eft quelquefois dé-
figné fimplement par un bouc.
Le capricorne a dans les catalogues dePtolomée &
de Tycho 28 étoiles; dans celui d'Hevelius, 29;
quoiqu'au tems d'Hevelius il en eût difparu une de
la fixieme grandeur , que Ticho comptoit la vingt-
feptieme , &£ qu'il avoit placée dans la queue du ca-
pricorne. Flamfteed fait le capricorne de 5 1 étoiles ,
dans fon catalogue Britannique. ( O )
Capricorne , f. n^ ( Hifl. nat. Infeclolog. ) capri-
cornus , cerambix , infe£te de la clafTe de ceux qui ont
des fauffes ailes , & dont la bouche a des mâchoi-
res. Selon M. Linnsus, Syfl. nat. le capricorne reffem-
ble au cerf-volant pour la grandeur & pour la cou-
leur ; fa tête eft large , les yeux font grands ; fa bou-
che eft ouverte & garnie de deux dents crochues &
dures. La partie du corps qui correfpond aux épau-
les des quadrupèdes, fejnble être lculptée comme un
ouvrage d'ébene polie ; il a trois pattes qui ont cha-
cune trois articulations , & qui paroiffent fort foi-
bles.il a deux antennes placées au-deffus des yeux,
plus longues que le corps, & flexibles , par le moyen
de neuf ou dix articulations ; ces antennes ne ibnt
pas d'égale grofTeur dans toute leur étendue : elles
ont au contraire des inégalités ou des nœuds à peu
près comme ceux des cornes du bouc ; c'eft d'oii
vient le nom de capricorne. Mouflet, Thèat. infect. Cet
auteur ajoute que le capricorne fe fufpend aux arbres
par le moyen de fes antennes, qu'il s'en aide pour
marcher , & qu'en rongeant le bois avec fes dents ,
il fait un bruit que l'on peut comparer au cri ou au
grognement des pourceaux. Mouflet donne auflî la
defeription de plulieurs autres efpeces de capricornes ;
M. Linnœus en rapporte dix-huit efpeces dans le Fau-
na Suecica. Voye-^ Insecte. ( /)
CAPRIER , f. m. ( Hifl. nat. bot. ) capparis , genre
de plante à fleur compofée pour l'ordinaire de qua-
tre pétales difpofés en rofe. Il fort du calice un piftil
qui a un embryon : cet embryon devient dans la fuite
un fruit fait en forme de poire ou une Clique char-
nue , dans laquelle il y a plulieurs lemences qui font
allez fouvent arrondies , ck d'une figure approchante
CAP
de celle d'un rein. Tournefort , Injl. rei herb. Voye?^
Plante. (7)
On cueille les boutons du capparis fpinofa , J. B. 2.'
63. on les confit dans le vinaigre , & on les envoyé
par toute l'Europe.
Les câpres lont aftringentes , ameres , corroborant
tes , bonnes pour les eftomacs foibles & grofîïers
chargés d'humeurs pituiteules , & qui ont perdu l'ap-
pétit : elles font bonnes pour lever les obllruftions
des vifeeres , fur-tout de la rate ; pour la paralyue
& les convulfions caulées par la fuperfluité des hu-
meurs. On les recommande dans les fièvres chroni-
ques & continues.
On applique des linges , ou une éponge trempée
dans la iaumure de câpres , fur le côté au-deflbus de
l'hypocondre, pour réfoudre l'enflure de la rate ; fi
l'on y ajoute de la femence de moutarde , pour que'
le vinaigre puifle s'imprégner de fon fel volatil, le
remède n'en lera que meilleur.
Les câpres font aufïï bonnes pour tuer les vers.
La racine du câprier eft une des cinq petites raci-
nes apéritives.
L'écorce de cette racine eft apéritive , diurétique ;
elle entre dans les tifannés apéritives.
L'huile du câprier fe fait par l'ébullition de cette
racine dans l'huile d'olive : on en oint la région de
la rate dans les douleurs de cette partie.
Cette huile eft fort compofée dans Lémery , &
n'en n'eft pas meilleure. Zweifer ajoute à la compo-
fition pour la rendre plus efficace , du fel ammoniac,
du tabac , du camfi e , de l'huile diftillée de gomme
ammoniaque. (A)
* CAPRIFICATION, f. f. (Hifl. nat. bot. ) ma-
nière d'élever des figuiers. Les anciens en ont parlé
avec beaucoup d'admiration} & elle n'eft pas ima- ~
ginaire. Elle fe pratique tous les ans dans la plupart J
des îles de l'Archipel , par le moyen des moucherons.
Les figuiers y portent beaucoup de fruits : mais ces
fruits , qui font une partie des richefies du pays , ne
proriteroient pas fi l'on ne s'y prenoit de la manière
que nous allons décrire.
On cultive dans les îles de l'Archipel deux fortes
de figuiers. La première efpece s'appelle ornos , du
Grec littéral erinos , qui fignifie le figuier fauvage ou
le caprificus des Latins. La féconde efpece eft le figuier
domeltique. Le fauvage porte trois fortes de fruits ,"
qui ne font pas bons à manger , mais qui font abfo-
lument néceflaires pour faire mûrir ceux desfigujgrs
domeftiques. Les fruits du fauvage font nommés/or-
nites , cratitires*, & orni. Ceux qu'on appelle fornites
paroifiént dans le mois d'Août , & durent jufqu'en
Novembre fans mûrir : il s'y engendre de petits vers
de la piquûre de certains moucherons , que l'on ne
voit voltiger qu'autour de ces arbres. Dans les mois
d'Octobre & de Novembre ces moucherons piquent
d'eux-mêmes les féconds fruits des mêmes pies du fi-
guier. Ces fruits que l'on nomme cratitires ne fe mon-
trent qu'à la fin de Septembre, & les fomites tombent
peu à peu après la fortie de leurs moucherons : ces
cratitires au contraire relient fur l'arbre jufqu'au mois
de Mai , & renferment les œufs que les moucherons
des fornites y ont laiffés en les piquant. Dans le mois
de Mai , la troifieme efpece de fruit commence à
pouffer fur les mêmes pies des figuiers fauvages, qui
ont produit les deux autres. Ce fruit eft beaucoup
plus gros , & fe nomme orni. Lorfqu'il eft parvenu
à une certaine grofleur , ce que fon œil commence à
s'entr'ouvrir , il eft piqué dans cette partie par les
moucherons des cratitires , qui fe trouvent en était de
paffer d'un fruit à l 'autre pour y décharger leurs ceure.
Il arrive quelquefois que les moucherez des cratiti-
res tardent à fortir dans certainç quartiers , tandis que
les orni de ces mêmes quartiers font dilpoics à les re-
cevoir. On eft obligé dans ce cas-là d'aller chercher
CAP
des craàùres dans un autre quartier, & de les ficher
à l'extrémité des branches des figuiers, dont les orni
font en bonne difpofition , afin que les moucheronsles
piquent. Si l'on manque ce tems-là,les orni tombent,
&c les moucherons des cratitires s'envolent , s'ils ne
trouvent pas des orni à piquer. Il n'y a que les payfans
qui s'appliquent à la culture des figuiers , qui con-
nohTent le vrai tems auquel il faut y pourvoir , &
pour cela ils oblervent avec loin l'œil de la figue ;
car cette partie ne marque pas feulement le tems que
les piqueurs doivent fortir, mais aufli celui où la fi-
gue peut être piquée avec fuccès. Si l'œil eft trop dur
6c trop ferré , le moucheron n'y fauroit dépoler les
œufs , & la figue tombe lorfque cet œil eft trop ou-
vert. Ce n'eft pas-là tout le myftere : ces trois fortes
de fruits ne font pas bons à manger; ils font deftinés
par l'auteur de la nature, comme nous l'avons dit ,
à faire mûrir les figues des figuiers domeftiques.
Voici l'ufage qu'on en fait. Dans les mois de Juin &
de Juillet, les paylans prennent les orni dans le tems
que leurs moucherons font prêts à fortir , & les vont
porter fur les figuiers domeftiques. Ils enfilent plu-
sieurs de ces fruits dans des fétus , tk les placent fur
ces arbres à meiure qu'ils le jugent à propos. Si l'on
manque ce tems-là , les orni tombent , & les fruits du
figuier domeflique ne mûriffant pas , tombent en
aufli peu de tems. Les payfans connoiffent fi bien
ces précieux momens , que tous les matins en taifant
leur revue , ils ne tranfportent fur les figuiers domef-
tiques que des orni bien conditionnés ; autrement ils
perdroient leur récolte. Il eft vrai qu'ils ont encore
une reffource , quoique légère ; c'eft de répandre fur
les figuiers domeltiques les fleurs d'une plante qu'ils
nomment afcolimbros. Il fe trouve quelquefois dans
les têtes de ces fleurs des moucherons propres à pi-
quer ces figues ; ou peut - être que les moucherons
des orni vont chercher leur vie fur les fleurs de cette
plante. Enfin les payfans ménagent fi bien les orni ,
que leurs moucherons tont mûrir les figues du figuier
domeflique dans l'clpace d'environ quarante jours.
Ces figues fraiches font fort bonnes. Pour les lécher,
on les expofe au foleil pendant quelque tems ; après
quoi on les pafle au four, afin de les conlerver pen-
dant le reftede l'année. C'efl une des principales nour-
ritures des ifles de l'Archipel ; car on n'y trouve
gueres que du pain d'orge & des figues feches. Il s'en
faut bien pourtant que ces figues ïbient auifi bonnes
que celles que l'on lèche en Provence , en Italie & en
Efpagne ; la chaleur du four leur fait perdre leur bon
goût : mais d'un autre côté elle fait périr les œufs
que les piqueurs de Yorni y ont déchargés , &C ces œufs
ne manqueraient pas de produire de petits vers qui
endommageroient ces fruits. Voilà bien de la peine
& du tems perdu , dira - 1 - on , pour n'avoir que de
méchantes figues. Quelle doit être la patience des
Grecs qui patient plus de deux mois à porter les pi-
queurs d'un figuier à l'autre ; & ne lemble-t-il pas
qu'ils devroient plutôt cultiver les efpeces de figuiers
que l'on élevé en France & en Italie ? Mais ce qui
les détermine à préférer cette efpece inférieure , c'eft
la quantité de beaucoup fupéricurc de fruits qu'ils en
retirent. Un de leurs arbres produit ordinairement
jufqu'à 280 livres de figues , au lieu que les autres
n'en produifent pas 2.5 livres. Peut-être que les pi-
queurs contribuent à la maturité des fruits du figuier
domeftique , en faifant extravalcr le lue nourricier ,
dont ils déchirent les tuyaux lorlqu'ils y déchargent
leurs œufs : peut-être aulli qu'avec ces œufs ils lail-
fent échapper quelque liqueur qui fermente douce-
ment avec le lait de la ligue , & en attendrit la chair.
Les figues en Provence & à Paris même , mûriflent
bien plutôt, fi on pique leurs yeux avec une paille ,
ou avec une plume graiffée d'huile d'olive. Les pru-
nes 6c les poires qui ont été piquées par quelque in-
CAP
639
fecle , mùriffent bien plutôt aufli , & même la chair
qui eft autour de la piquûre eft de meilleur goût que
le refte. Il eft hors de doute qu'il arrive un change-
ment conlïdérable à la tiflure des fruits piqués. Il lem-
ble que la principale caufe en doit être 1 apportée à
l'épanchement de lues , qui ne s'altèrent pas leule-
ment lorfqu'ils font hors de leurs vaifieaux , mais qui
altèrent les parties voifines : de même qu'il arrive
aux tumeurs des animaux furvenues a l"occafion des
piquûres de quelque infiniment aigu. Miin. de Tacad.
des Sciences , ann. IJQÔ. pag. 44 J. & Juiv. Article
communiqué par M. Formey.
CAPRIOLE , vojei Cabriole.
CAPRISANT, adj. (Médecine.) épithete du pouls
irrégulier & fautillant, dans lequel i'artei e inten ompt
fon mouvement ; enlorte que le fécond battement
qui vient après cette interruption , eft plus prompt
Se plus fort que le premier : de même qu'il arrive
aux chèvres qui bondiflent ôc femblent faire un dou-
ble mouvement en marchant. Galien, de Dijf. pulf.
lib. I. c.ip. xxix.
CAPRONS , (Jardinage.) ce font de grofles fraifes
plus belles que bonnes , dont on fait peu de cas , &
qui mùriiTent en même tems que les autres. Leurs
feuilles lont plus larges & en plus grand nombre.
(*)
CAPRONEZA, (Géog.) petite ville de Hongrie ,
dans l'Elclavonie, à deux milles de la Save.
* CAPROTINE, adj. f. (Hijl. anc. ) furnom que
les anciens Romains avoient donné à Junon & aux
nones de Juillet , tems auquel ils célébi oient une fête
dont Plutarque & Macrobe racontent ainfi l'origine.
Les peuples voifins de Rome crurent qu'il leur le-
roit facile de prendre ou de détruire cette ville
épuilée , après l'invafion des Gaulois. Ils s'afiemble-
rent, & mirent à leur tête Lucius , dictateur des Fi-
denates. Lucius fit annoncer aux Romains par un hé-
raut , que le feul moyen qu'ils euffent de conlerver
les reftes de leur ville , c'etoit de lui livrer leurs tem-
mes & leurs filles. Les fénateursneiavoient quel parti
prendre, lorfqu'une efclave appellée Philotis , per-
liiada à fes compagnes de fe couvrir des habits de
leurs maîtrefles , & de pafler dans le camp ennemi.
Ce qui fut exécuté. Le général les diftribua aux ca-
pitaines &c aux foldats. Ces filles les invitèrent à pren-
dre part à une fête folennelle qu'elles feignirent de
célébrer entr'elles. Les hôtes féduits par cette inno-
cente fupercheric, s'abandonnèrent à la débauche :
mais lorlqu'ils furent afioupis par le vin & par le lom-
meil , elles appellerent les Romains par un lignai
qu'elles leur donnèrent du haut d'un figuier fauvage.
Ceux-ci accoururent, & rirent main-baffe par-tout.
La liberté fut accordée à ces généreufes elclaves,
avec une fomme d'argent pour le marier ; le jour de
cette délivrance extraordinaire , appelle Nones c'-r-
protines ou du figuier; & une tète mftitr.ee tous le mê-
me nom en l'honneur de Jr.non. Depuis ce tems , à
pareil jour , les elclaves 1 égaloient leurs maîtrefles
hors de la ville , fous des figuiers fauvages , luttoient
entr'elles, & rappelloient par des exercices la mé-
moire d'une défaite qu'elles avoient occafionnée par
leur dévouement & leur induftrie.
CAPSA , ( Gcog. ) ville de la Turquie en Europe
dans la Romanie.
* CAPSAIRE, f. m. ( HiJI. anc. & mod.) Les Ro-
mains &: les Grecs donnoient ce nom àceu\ quigar-
doient les habits dans les bains publics, &: à certains
domeltiques qui conduilbient les enfans à l'école,
portant leurs livres dans une boîte , cap/a.
CAPSCHAC , (Gcog.) pays très-conlidérable
de la Tartarie , qui s'étend depuis le Turqueftan juf-
qu'au NVolga , & depuis le Volga jufqu'au pays de
Crimée. Sa plus grande étendue eft depuis la mer
Cafpienne jufqu'à la mer Glaciale.
640
CAP
C A P S E , f. f. efpece de chauffe de velours mi-
partie , dans laquelle on met les billets le jour de l'é-
lection des prévôt des marchands & échevins.
C APSULAIRE , adj. ( en Anatomie. ) épithete des
ligamens & des membranes qui forment avec les os
auxquels elles font attachées des efpeces de capfules.
Voye^ Ligament, Membrane , & Capsule. {L)
CAPSULE lignifie à la lettre bourfe , étui, poche.
Ce mot vient du latin capfula , diminutif de cap/a ,
qui fignifie une boîte à ferrer quelque chofe.
La capfule de Glifîbn eft une membrane qui naît du
péritoine , enveloppe le tronc de la veine-porte à
ion entrée dans le foie , & lui fert comme d'étui , fe
partageant en autant de branches qu'elle , & l'ac-
compagnant jufques dans fes moindres ramifications.
Voye^ Veine-Porte.
Cette même capfule ou membrane enferme auffi
ïe conduit biliaire , & autres vaiffeaux du foie , ce
qui lui a fait donner le nom de capfule commune. V.
Conduit biliaire.
Capfule du cœur eft une membrane qui environne
ïe cœur, la même que celle qu'on appelle plus com-
munément péricarde. Voye^ PÉRICARDE.
CAPSULES atrabilaires , (autre terme dAnatomie) fe
dit de deux glandes fituées fur les veines , qu'on ap-
pelle auffi reins fuccenturiaux ou glandes rénales. L'é-
pithete à' atrabilaires leur a été donnée à caufe de la
liqueur noire qui fe trouve dans leur cavité ; & celle
de rénales ou reins fuccenturiaux , à caufe de leur po-
iition. Voy. Reins Succenturiaux & Rénales.
Elles font à peu-près de la grofTeur d'une noix vo-
mique ; leur figure n'eft pas tout-à-fait la même dans
tous les fujets : dans quelques-uns elles font rondes ;
dans d'autres triangulaires, quarrées, &c. La mem-
brane dont elles font couvertes eft très-fine , & leur
cavité confidérable à proportion de leur volu-
me. On ne fait pas bien quel eft leur ufage ; il y a
pourtant apparence qu'elles fervent à féparer l'hu-
meur noire qu'on trouve dans leur cavité , Se qui eft
enfuite verfée par leur veine dans l'émulgente , où
elle fe mêle avec le fang , auquel elle fert de ferment,
ïelon quelques-uns ; & félon d'autres , de délayant
pour l'atténuer & le rendre moins épais. Ces glan-
des dans le fœtus font prefque de la grofTeur des reins.
Voyei Bile.
Capsules féminales. C'eft la même chofe que vê-
Jlculesféminales. Voye^ VÉSICULES SÉMINALES. {L)
Capsule , capfula , {Hifl. nat. bot.) c'eft une loge
ou une forte de boîte , theca , qui renferme les femen-
ces des plantes. Cette enveloppe eft plus ou moins
mince ou épaifle , plus ou moins molle ou dure , &c.
Tournefort, Inft. rei herb. (I)
C APTATEUR , f. m. terme de Palais , par où l'on
entend celui qui par flatteries & par artifices tâche à
furprendre des teftamens ou des donations. {H )
CAPTIF, f. m. {Hifl. mod.) efclave ou perfonne
proie fur l'ennemi , en particulier par un pirate ou
corfaire. Voye^ Esclave, Pirate, &c
On appelle plus particulièrement de ce nom les
«fclaves chrétiens que les corfaires de Barbarie font
dans leurs courfes, & que les PP. de la Merci & les
Mathurins vont racheter de tems en tems à Alger &
dans d'autres endroits de la partie feptentrionale d'A-
frique.
CAPTIVERIE, f. f. {Commerce.) on nomme ainfi
dans le commerce des Nègres , qui fe fait par les Fran-
çois au Sénégal , des grands lieux deftinés à renfer-
mer les captifs que l'on traite, & dans lefquels on les
tient jufqu'à ce qu'ils foient en allez grand nombre
pour être tranfportés aux vaifleaux & envoyés aux
îles.
Les captiveries les plus grandes & les plus fûres que
la compagnie Françoife du Sénégal ait dans toute ré-
CAP
tendue de fa conceffion, font celles de l'île de Gorée.
{G)
CAPTURE , f. f. terme de Pratique , eft l'appréhen-
fion au corps d'un débiteur ou criminel par des ar-
chers ou fergens , à l'effet d'être conduit & détenu
dans les priions. {H)
* CAPUCHON , f. m. {Hifl. eccléf.) efpece de vê-
tement à l'ufage des Bernardins , des Bénédictins. &c.
Il y a deux fortes de capuchons ; l'un blanc , fort am-
ple , que l'on porte dans les occafions de cérémo-
nie : l'autre noir , qui eft une partie de l'habit ordi-
naire.
Le P. Mabillon prétend que le capuchon étoit dans
fon origine , la même chofe que le fcapulairc. Mais
l'auteur de l'apologie pour l'empereur Henri IV. dif-
tingue deux efpeces de capuchon; l'une étoit une robe
qui delcendoit de la tête jufqu'aux pies , qui avoit
des manches, & dont on le couvroit dans les jours 6c
les occafions remarquables ; l'autre , une forte de
camail pour les autres jours : c'eft ce dernier qu'on
appelloit proprement feapulaire , parce qu'il n'enve-
loppoit que la tête & les épaules. V. Scapulaire.
Capuchon, fe dit plus communément d'une pièce
d'étoffe groffiere , taillée & coufue en cône , ou ar-
rondie par le bout , dont les Capucins , les Récolets ,
les Cordeliers , & d'autres religieux mendians , fe
couvrent la tête.
Le capuchon fut autrefois l'occafion d'une grande
guerre entre les Cordeliers. L'ordre fut divifé en
deux fatlions , les frères fpirituels , & les frères de
communauté. Les uns vouîoient le capuchon étroit ,
les autres le vouîoient large. La difpute dura plus
d'un fiecle avec beaucoup de chaleur & d'animolîté ,
& fut à peine terminée par les bulles de quatre pa-
pes, Nicolas IV, Clément V, Jean XXII, & Benoît
XII. Les religieux de cet ordre ne fe rappellent à
prélent cette conteftation qu'avec le dernier mépris.
Cependant fi quelqu'un s'aviloit aujourd'hui de
traiter le Scotifme comme il le mérite , quoique les
futilités du dofteur fubtil foient un objet moins impor-
tant encore que la forme du coqueluchon de fesdif-
ciples , je ne doute point que l'agrefteur n'eût une
querelle fort vive à foûtenir , & qu'il ne s'attirât
bien des injures.
Mais un Cordelier qui auroit du bon fens ne pour-
roit-il pas dire aux autres avec raifon : « Il me fem-
» ble , mes pères , que nous faifons trop de bruit
» pour rien : les injures qui nous échapperont ne ren-
» dront pas meilleur l'ergotifme de Scot. Si nous at-
» tendions que la faine philofophie, dont les lumie-
» res fe répandent partout , eût pénétré un peu plus
» avant dans nos cloîtres , peut-être trouverions-
» nous alors les rêveries de notre docteur auffi ridi-
» cules que l'entêtement de nos prédécelîéurs fur la
» rnelure de notre capuchon ». Voye? les articles Cor-
deliers &Scotisme.
CAPUCIATI ou ENCAPUCHONNÉS , certains
hérétiques qui s'élevèrent en Angleterre en 1 387, &
qui furent ainfi nommés , parce qu'ils ne fe décou-
vraient point devant le S. Sacrement. Ils fuivoient
les erreurs de "Wiclef , & foùtenoient l'apoftafie de
Pierre Pareshul , moine Auguftin , lequel ayant quitté
le froc,accufa fon ordre de pluûeurs crimes. Sponde,
A- c. 137 y.
CAPUCINS, religieux de l'ordre de S. François,
de la plus étroite oblervance. Voye%_ Religieux.
On leur donna ce nom par rapport à la réforme
extraordinaire de leur capuchon. Ils font vêtus d'une
groffe robe , d'un manteau , & d'un capuce d'un gros
drap gris ; portent la barbe , des fandales , & une
couronne de cheveux. Cette réforme des Mineurs ou
Cordeliers a pour auteur Matthieu de Balchi , frère
Mineur obfervantin , du duché de Spolete , & reli-
gieux au couvent de Montefiafcone , qui, en 1 5 2. 7 ,
aflura
C A P
C A P
641
afîTira que Dieu Favoit averti plulîeurs fois , d'une
manière miraculeule , qu'il devoit pratiquer à !a let-
tre la règle de S. François. Dans ce deiîéin il le re-
tira , avec la permiffion du pape Clément VII , dans
une folitude , oii il fut fuivi de douze autres perfon-
nes. Le duc de Florence leur donna un hermitage
dans l'es terres , Se Clément VII. approuva leur con-
grégation par une bulle de 1 5 2.9. Son fucceffeur, Paul
ÏII , la confirma en 1535, avec pcrmiffîon de s'établir
par-tout, & lui donna un vicaire général avec des fii-
péricurs. Ils furent reçus en France fous Charles IX ,
& s'y font tellement multipliés , qu'ils y ont dix pro-
vinces en comprenant celle de Lorraine. Ils rendent
des fervices à l'Eglife par les catéchifmes , conféren-
ces , prédications , millions auxquelles ils font em-
ployés , & doivent pratiquer la plus étroite pauvre-
té, leurs maiibns ne fubiiftant que d'aumônes. Il y
a aulfi des Religieules capucines. (G)
* Quoique leurs conftitutions auxquelles ils font
toujours reftés lort attachés, & l'indigence extrême
dont ils font profeffion particulière , ne leur ayent
guère permis de fe livrer à des études affidues , ce-
pendant ils ont eu d'habiles gens en différens gen-
res , & l'on doit préfumer , à Fefprit d'émulation qui
commence à les animer , que le favoir y deviendra
encore plus commun. Il cil à fouhaiter que les fupé-
rieurs donnent toute leur attention à fortifier cet ef-
prit , & que l'Eglife repare de ce côté les pertes de
lumière qu'elle lemble faire de plufieurs autres.
CAPUCINE, f. f. {Hifl. nat. bot.) cardamindum ,
genre de plante à fleur polypétale irréguliere, com-
pofée de cinq pétales qui lortent des échancrures du
calice : le calice efl terminé par un prolongement en
forme de queue : le piftil fort du fond du calice , Se
devient dans i.i fuite un fruit compofé pour l'ordi-
naire de trois capfules arrondies Se raffemblces en
forme de tête. Chaque caphile renferme une femen-
ce de même figure. Tournefort , Injî. rei herb. Voye^
Plante. (/)
On fe fert de la capucine pour couvrir les murs
des petits jardins des cours , Se pour ombrager quel-
que cabinet de treillage , dont elle gagne le haut en
la palifTant avec du jonc. Sa culture confifle à en la-
bourer le pié en forme de plate-bande , & répandre
deflus un pouce d'épaiffeurde bon terreau, Se l'ar-
rofer de tems en tems. Il y a la grande 6c la petite
capucine. (/C )
* CAPUK ou CAPAS-PUSSAR, {Hifl. nat. bot.)
c'eft le nom d'un arbre qui croît communément aux
Indes orientales , fans culture & de lui-même , & fe
multiplie par la femence qui en tombe : fes feuilles
reflemblent à Vagnus-caflus , mais elles font un peu
plus longues Se plus larges ; fes branches croiffent à
côté les unes des autres par couronnes. Le fruit qui
en vient cft une gonfle fort épailfe , de la longueur
de ! : main , qui léchée par le foleilfc crevé & tom-
be ; les Indiens la ramaffent Se en tirent le capuk , qui
efl une efpece de coton , qu'ils renferment dans des
facs faits d'écorec d'arbres, Se vont le vendre aux
Hollandois à Batavia : on s'en fert au lieu de plumes
pour garnir les oreillers & les matelas des lits.
CÀPULE , f. m. {Hifl. anc.) c'étoit chez les an-
ciens Romains une bière ou cercueil , pour porter les
morts en terre. De-là vient qu'on appelloit les vieil-
lards capulares fenes , Se les criminels condamnés à
mort capulares rei , pour exprimer que les uns Se les
autres étoient fur le bord de leur folle , Se près de la
bière ou du tombeau. {G)
CAPULO ou CAPOUL , {Géog.) île d'Afie, l'une
des Philippines , appartenante aux Ffpaçnols.
* CAPURIONS , fub. m. {Hifi. mod. & anc.) La
ville de Rome efl encore aujourd'hui divifée, com-
me elle l'étoit du tems des Céfars, en quatorze ré-
gions ou quartiers, que les Italiens nomment rio;'d$
Tome II,
en ont feulement changé les noms. Il en efl arrivé dé
même des officiers. Ils étoient fous les empereurs au
nombre de dix-huit ; ils font aujourd'hui dix-huit. Ils
s'appelloient fous Augufte , curatores regionum urbis ;
on les nomme à préfent capurioni. Leurs fondions font
les mêmes , & c'eft à eux d'entretenir la tranquillité
publique , d'empêcher qu'il ne fe commette des vio-
lences dans les mes , d'en informer les magiitrars de
police , veiller à ce que chaque citoyen s'applique à
une profeffion honnête , pourfuivre les gens de mau*
yaife vie , chafTer les fainéans , avoir l'œil fur les édi*
fices publics, aflembler les citoyens quand il en efl
befoin , furveiller les boulangers , les bouchers , Se
autres gens d'arts ; d'où l'on voit que les curatores
urbis des anciens , les capurions des Italiens d'aujour-
d'hui, & nos commiffaires, ont beaucoup de rapport
entr'eux,
CAPUT DR ACONIS, tête de dragon, en Aftro*
norme ; c'eft le nœud afeendant de la lune. Voyc^
Dragon & Nœud. (O)
CdPVT mortuum, {Chimie.) Les Chimifles ont
déligné par cette expreffion le produit le plus fixe
des analyfes ordinaires, faites par le moyen de la
diilillation , ou la partie du corps analylé qui a été
épuifée par le feu (pouffé au plus haut degré auquel
ils avoient coutume de l'élever dans les diflillations)
Se qui refle encore , après l'opération , au fond du
vaiffeau dans lequel les matières à diftiller ont été
expofées au feu.
Le caput mortuum étoit un des cinq principes pré-
tendus des anciens Chimifles , ou plutôt un des cinq
produits des anciennes analyfes chimiques. Ces cinq
produits étoient Fefprit ou mercure , le phlegme ,
l'huile ou foufre , le fel , & la terre damnée ou caput
mortuum, Foye^ Principe.
C'efl avec raifon qu'on commence à bannir Fex-
preffion caput mortuum du langage chimique , Se de
lui fubftituer le mot générique Se indéterminé de ri-
fidu. La première dénomination efl abfolument faill-
ie ; car on pourroit regarder , fur la foi du nom , les
matières qu'elle défigne , comme dépouillées de tout
principe actif, comme indeftructibles , ou ne donnant
prife à aucun agent naturel ; en un mot comme une
pure terre exactement fîmple , Se par confisquent con-
nue autant qu'il efl poffible par l'art , ou du moins peu
digne d'un examen ultérieur ; Se c'efl là l'idée que plu-
fieurs Chimifles s'en étoient faite.
Mais ces matières ne font rien moins que fimples
& inaltérables ; elles contiennent le plus fouvent des
fubftances faîines , foit neutres, foit alkalines , qu'on
en k pare très-facilement. A'byj^LixiviATiON. Les
rélîdus charboneux contiennent au moins du phlo-
giftique , qui en efl très-féparable auffi. f'oye^ Inci-
nération & Chareon.
D'ailleurs l'examen ultérieur du rendu des distilla-
tions que j'appellerai analytiques ( de celles qu'on
pouffe à grand feu , car ce n'efl que de celles-là dont
il s'agit dans cet article ) entre néceffairement dans
la fuite des opérations d'un procédé régulier. Il efl
même telle de ces diflillations qu'on n'exécute que
pour ce produit , pour le réfîdu ; comme fi on diflil-
loit, par exemple, une huile minérale avec de l'al-
kali fixe, ou un lavon de Starckey préparé avec une
huile effentielle dans laquelle on fbupçonne l'acide
vitriolique ou le marin , pour vérifier ce foupçon.
La nouvelle anaiyfe , ou Fanalyfe par combinaî-
fons, exige fans contredit cet examen; & c'efl même
fans doute , la méthode de cette anaiyfe étendue aux
diflillations des fubffances regardées comme uniques
ou homogènes , comme celle d'une plante , d'une gom-
me , d'une graille , &c qui a réveillé l'attention fur
l'abus de negUgeries rendus de ces dernières opéra-
tions. Mais on fera bien plus tonde à n'en négligez
aucun, Si à généralifer la loi de les étudier avec loin%
M M m m
641
CAR
fi on fait réflexion que la plupart des tu jets des diftilla-
tions analytiques ordinaires font des composés ou des
mélanges naturels, qui portent en eux-mêmes des
principes de réaction , qui n'ont beibin que d'être mis
en jeu par le feu pour produire de nouvelles combi-
na iions ; & que ce n'eft qu'à la faveur de ces nouvel-
les combinaifons, dont on retrouve les produits dans
les réiîdus , qu'on obtient les produits plus mobiles ,
les fubftances qui parlent ou qui s'élèvent dans la dif-
tiilation. V. Distillation, & Analyse Végé-
tale à fart. VÉGÉTAL. Cet article ejl de M. Venel.
* C APUUPEBA , (Hift. nat. bot. ) forte de gafon
qui vient au Brelil , à la hauteur de deux ou trois
pies ; i'a tige eft ronde & liffe , genouillée, & garnie
d'une feuille à chaque nœud ; elle fe diitribue à l'on
fommet en une trentaine de branches plus petites ,
dont l'extrémité fe termine en une ombelle argentée
d'où naît la femence.
CAQUE , f. f. ( Commerce. ) que nous appelions
communément baril ; c'eft un petit tonneau dans le-
quel on encaque les harengs , c'eft-à-dire, où on les
enferme après qu'ils ont été apprêtés & falés.
Caque fe dit auffi des petits barils dans lefquels on
renferme la poudre à canon.
Caque eft encore le nom qu'on donne en Cham-
pagne à ce qu'on nomme plus communément un quar-
teau. l'oyei QUARTEAU. (G)
* C AQUEUX , f. m. pi. ( Hift. mod.) efpece de
fe£re que les Bretons, entre lefquels elle s'étoit for-
mée, regardoient avec une extrême averfion, comme
un refte de Juifs infeclé de lèpre. Les caqueux exer-
çoient tous le métier de cordier , & il leur étoit pref-
que défendu de faire autre chofe : la haine & le pré-
jugé public les traitoient du refte à peu près comme
les cagots. Voye^ l'article Cagot. La police civile
6c eccléfiaftique fit des efforts pour détruire la pré-
vention des peuples , 6c rétablir dans les droits de la
fociété des gens qui contribuoient à fon avantage :
mais ces efforts furent long-tems inutiles.
* CARA , (Hijl. nat. bot. ) efpece de convolvulus
à tige quarrée , fort anguleuiè , velue & barbue aux
angles , verte, rougeâtre, & tortueufe : il rampe, &
s'étend fi prodigieufement , qu'une feule plante fuf-
fit pour garnir une furface de cent vingt pies en quar-
ré : les branches & la tige prennent racine partout
où elles touchent terre ; il a la tige de notre fagitta-
le ; quand on en coupe la tige il en fort des larmes :
fa racine entre en terre de plus d'un pié , & a jufqu'à
douze doigts de diamètre : elle eft couverte d'une
peau mince , obfcure , jaunâtre , & cendrée ; eUe a
une pulpe blanche , & pleine d'un fuc laiteux : on la
mange comme un légume : les habitans de Guinée
en font même du pain. Margg.
* CARABACCIUM , ( Hijl. nat. bot. ) c'eft le
nom que l'on donne à un bois aromatique des In-
des , dont l'odeur relTemble beaucoup à celle du clou
de girofle , excepté qu'elle eft plus douce & moins
pénétrante ; extérieurement il eft brun , ou de la cou-
leur de la canelle : on lui attribue la qualité d'adou-
cir l'acrimonie delà lymphe , & d'être un excellent
remède contre le feorbut; il fortifie l'eftomac , & fa-
cilite la digeftion. On le prend en décoûion, ou in-
fufé comme du thé & du cafTé.
CARABANA , ( GJog. ) province de l'Amérique
méridionale , appartenante aux Efpagnols.
CARA3I , ( Géog. ) petite rivière de Sicile dans
la vallée de Mazara , qui fe jette dans la mer d'A-
frique.
CARABINE , f. f. eft une efpece de moufque-
ton dont le canon eft rayé circulairement ou en foi-
raie , depuis la culalïe jufqu'à l'autre bout, en forte
que lorfque la balle , qu'on y enfonce à force , fort
poruTée parrimpétuofité de la poudre, elle s'allonge
CAR
environ d'un travers de doigt , & elle fort empreinte
des rayures du canon.
Le canon de la carabine a trois pies de long , & elle
a quatre pies étant toute montée : elle a une baguette
de fer , 6c l'on commence à y faire entrer la balle
avec une efpece de verge de même métal appelles
poujjeballe , iur la tête de laquelle on frappe avec un
petit marteau deftiné à cet effet.
La carabine a beaucoup plus de portée que le fu-
fil, parce que les rayures du canon arrêtant la balle,
la font réliftcr aux premières impreflions de la pou-
dre , qui ayant le tems de s'enflammer entièrement
avant que de pouvoir la faire fortir , la chafle enfuite
avec bien plus de force que le fufd ordinaire. Traiti
d\4rtill. par M. le Blond. ( Q )
CARABINER, v. acL c'eft tracer en-dedans d'un
canon des traces longitudinaires ou circulaires. Voy.
Fusil.
CARABINIERS , f. m. pi. (Artmilit. ) efpece de
chevaux-légers qui portent des carabines plus lon-
gues que les autres , & qui fervent quelquefois à
pié.
Les François ont formé des corps entiers de ces ca-
rabiniers , qui ne peuvent être que très-utiles , parce
que ce font des troupes choihes dans toute la cava-
lerie, & qui font mieux payées que les autres. On
dit qu'il n'y en a point du tout parmi les Anglois , ex-
cepté dans un feul.
Il y a en France le régiment royal des Carabiniers.
Plufieurs années avant l'inftitution de ce régiment ,
on avoit mis deux carabiniers dans chaque compa-
gnie de cavalerie , que l'on choiiiifoit parmi les plus
habiles tireurs , & qu'on mettoit dans les combats à
la tête des efeadrons , pour faire une décharge de
loin fur ceux des ennemis.
Sur la fin de la campagne de 1690 , le Roi ordon-
na que l'on formât par régiment de cavalerie une
compagnie de carabiniers; cette compagnie étoit de
trente maîtres ; elle avoit Un capitaine, deux lieute-
nans , un cornette , & un maréchal des logis : cha-
que mettre de camp dans fa compagnie choiiiifoit l'es
officiers. Le capitaine pour faire la compagnie , avoit
le choix de donner 260 livres pour un cavalier tout
monté , ou 60 livres pour un homme tout feul. Il
choiiiifoit auffi par compagnie un nombre égal dans
chacune , 6c il n'y avoit d'exclus pour lui que les
deux brigadiers & les deux carabiniers , pour laiiîer
toujours des têtes aux régimens de cavalerie.
Le Roi accorda à tous les officiers des penfions qu'il
attribua à leurs emplois. La compagnie devoit tou-
jours fuivre le régiment , 6c cependant être toujours
prête à camper féparément. Elle étoit auffi recrutée
à tour de rôle des compagnies, moyennant cinquan-
te francs par homme. Tous les meftres de camp fe
firent une idée, différente de cette création, 6c ne
s'accordèrent que fur la valeur qu'ils cherchèrent
tous également dans les officiers qu'ils choifirent.
Quoiqu'une des conditions impofée par fa Majefté
fut qu'ils n'eulïent pas plus de trente-cinq ans , on ne
s'y arrêta pas beaucoup , 6c les meftres de camp y
placèrent , ou ceux qui s'accordoient le moins avec
eux , ou les plus anciens , ou leurs parens , ou leurs
amis , ou au moins ceux qui témoignoient le plus
d'envie d'y aller ; ce qui compofa un affemblage de
très-braves gens, mais très-différents.
Toutes ces compagnies étoient lùrnuméraires clans
leurs régimens , & turent en très-bon état pour la
campagne fuivante 169 1. Le Roi ordonna que toutes
les compagnies de c.zr.:ri:iicrs campaffent enfemble ,
& compofaiTent une brigade à laquelle on nommoit
un brigadier, & deux meftres de camp fous lui quand
la brigade étoit forte. La deftination de ce corps étoit
d'aller en parti.
L'année 1691 les carabiniers firent le mêmefervice
CAR
que l'année précédente ; on et oit très-fatisfait d'eux :
mais on commença à trouver qu'étant la plupart ha-
billés de diverfes couleurs, cette bigarrure étoit cho-
quante , Si que de plus les officiers ne fe connoif-
i oient point les uns les autres ; ce qui fit prendre à la
Majefté la réfolution de former un foui régiment, fous
le nom de Royal-Carabiniers , de toutes ces compa-
gnies , excepté celles des régimens Allemands. Le
Roi qui affeâionnoit fort ce corps , dont il étoit très-
content , choifit pour le commander M. le duc du
Maine , qu'il jugea très-propre pour le mettre en bon
état , & lui donner î'efprit qu'il vouloit qu'il prît, le
deftinant à un genre de forvice tout particulier. Sa
Majefté prit la peine elle-même de donner par écrit
des inftruclions fur ce fujet.
Les compagnies Allemandes étoient retranchées ;
il en refta cent Françoifes , qui furent divifées en
cinq brigades de quatre efcadrons chacune , & les ef-
cadrons de cinq compagnies.
Le Roi affedïa à chaque compagnie un meftre de
camp , un lieutenant-colonel , un major , un aide-
major, avec des penfions attachées à leur emploi.
Les cinq meftres de camp eurent le titre de chefs
de brigade : le premier étoit le chevalier du Mefnil ;
le fécond étoit le chevalier du Profel ; le troifieme ,
le fieur d'Achi ; le quatrième , le fieur de Signi ; & le
cinquième , le commandeur de Courcelles.
Tout le régiment fut habillé de bleu : au lieu de
deux lieutenans qu'il y avoit par compagnie, il n'y
en eut plus qu'un. Le Roi donna deux étendarts par
efeadron , & un timbalier par brigade.
Tout le régiment ayant été mis en état dès le
commencement de l'année 1694, la Majefté voulut
le voir à Compiegne au mois de Mars de la même
année , & elle en fut très-contente. Le roi ayant def-
fein que ce régiment ne fît pas un corps à part dans
la cavalerie, M. le duc du Maine voulut bien pren-
dre l'attache de M. le comte d'Auvergne, colonel
général de la cavalerie légère , quoique l'intention
du Roi fût de l'en exempter ; il fe contenta du titre
de meftre de camp - lieutenant. Il prit pour fa com-
pagnie de meftre de camp celle qui avoit été tirée
de ion régiment du Maine , Si elle fut attachée à la
première brigade ; de forte que toutes les fois que
les brigades changent de rang , ce qui arrive par l'an-
cienneté ou la dignité de ceux qui les commandent,
elle change aufli de brigade , & eft toujours à la
première.
Le corps des carabiniers fut trouvé fi bon & fi nom-
breux, que fa Majefté le partagea dans différentes ar-
mées; ce qui s'eft prefque toujours pratiqué depuis.
Nul corps ne l'a furpaiié pour la diieipline , pour la
fermeté , & pour la valeur, dans toutes les occa-
iîons : Fontenoy les a imortalifés
En 1698 la paix étant faite, Si le Roi ayant ré-
formé une grande partie de fes troupes , il réforma
foixante compagnies des carabiniers , fans pourtant
diminuer le nombre des brigades ni leur état major ;
elles furent feulement réduites chacune à huit com-
pagnies , qui formèrent deux efcadrons ; & à la fin
de l'année 1698 les compagnies furent encore rédui-
tes à vingt carabiniers. Elles ne furent plus recrutées
comme elles l'avoient été par les régimens dont elles
fortoient ; mais tous les régimens qui reftoient fur
pié y fourniffoient à tour de rôle le remplacement
néceffaire , auquel les infpcctcurs tenoient la main.
Tous les officiers des foixante compagnies réformées
demeurèrent chacun à la fuite de leur brigade , lé-
parés par compagnies , excepté les cornettes qui ne
le trouvèrent pas dix ans de forvice dans le tems de
la réforme, & qui turent congédiés abfolument. M. le
duc du Maine reçut ordre de remplacer tous les au-
tres par rang d'ancienneté , à mefure qu'il vaqueroit
des emplois qui leur feroient propres.
Tome //.
CAR
643
En 1694 le chevalier du Mefnil étant mort, le Roi
donna fa brigade au comte d'Aubeterre , &: par-là
elle devint la dernière : ainfi la compagnie de M. le
duc du Maine paffa à celle de du Rofel, qui devint la
première ; Se cela s'eft toujours ainfi pratiqué à tous
les changemens des chefs de brigade. Sous quelque
prétexte que ce puiffe être , le Roi ne veut jamais
permettre de vendre les compagnies de carabiniers.
Pour conferyer toujours les compagnies de cara-
biniers fur un pié de diftinftion , le Roi permettoit de
prendre quelquefois des capitaines dans la cavalerie,
mais il ne confentoit pas qu'ils vendiffent leurs com-
pagnies : fa Majefté trouvoit bon auffi qu'on y prît
des chefs de brigade ; Si l'on obfervoit affez de les
prendre alternativement avec les lieutenans-colonels
du corps.
On accordeit affez aifément aux lieutenans-colo-
nels du corps, des commiffions de meftres de camp ,
Se on ne refufoit guère aux aides-majors & aux lieu-
tenans des compagnies meftres de camp, des commif-
fions de capitaines.
Les compagnies des carabiniers furent remifes à
trente maîtres dans l'hy ver 1701 & 1702. Voicy le
règlement qu'on leur donna pour lors.
Le régiment des carabiniers du roi fera compofé de
cent compagnies de carabiniers de 30 maîtres chacu-
ne , faiiant en tout 3000 carabiniers, & 41 1 officiers ,
y compris le meftre de camp en chef, les cinq mef-
tres de camp fous lui , les cinq lieutenans-colonels ,
les cinq majors , Se les cinq aides-majors. Ils feront
vingt efcadrons de cinq compagnies chacun , dont il
y en aura deux de vieux régimens , Se trois de nou-
veaux. Le meftre de camp en chef aura l'infpeûion
lur tous les régimens , tk les autres l'auront feule-
ment fur vingt compagnies, faiiant quatre efcadrons,
Si cela par police ,& pour la commodité du forvice ;
car ils auront auffi autorité fur tous également félon
leur emploi Si leur grade , auffi-bien que les lieu-
tenans colonels , les majors , les aides-majors.
Quand on féparera le régiment en différentes ar-
mées , on mettra toujours un meftre-de-camp com-
mander les différens corps , & les autres officiers de
l'état-major à proportion.
Le fervice fe fera comme les carabiniers l'ont fait
jufqu'à préfent, tant pour les gardes que pour les dé-
tachemens.
Les compagnies feront entretenues par tous les ré-
gimens de cavalerie François , qui fourniront les re-
crues néceffaires à tour de rôle , tant pour les offi-
ciers que pour les cavaliers , à moins que le roi n'en
ordonnât autrement.
Le régiment fera habillé de bleu doublé de rou-
ge ; les cavaliers d'un bon drap tout uni , Se les offi-
ciers de même ; à la réferve des boutons d'argent
fur les manches & aux colets des manteaux qui fe-
ront bleus comme ceux des cavaliers ; le chapeau
fera bordé d'argent d'un galon plus large que celui
des cavaliers ; les houffes des cavaliers feront bleues,
tout unies , bordées d'un galon de foie blanche ,
les bourfes des piftolets de même , leur ceinturon de
bulle , avec un bord de cuir blanc Si la bandoulière
de même, des gants Si des cravates noires ; les offi-
ciers en auront auffi , excepté que ce qui eft blanc au
cavalier , ils L'auront d'argent.
Les têtières des chevaux feront propres & tout
unies, des boffettes dorées tout unies auffi, des epees
île même longueur Si largeur, des carabines rayées
pareilles, Si tout ce qu'il faut pour les charger; obfer-
vant d'avoir des balles de deux calibres , les unes
pour entrer à force avec le marteau & la baguette
de fer, Si les plus petites pour recharger plus promp-
tement fi l'on en a befoin.
Les piftolets feront les meilleurs que l'on pourra, &C
de quinze nonces de longueur ; les chevaux tous de
M M m m ij
C A
644 ^ A ix.
même taille, à longue queue , & l'ayant retrouffée de
même fans ruban ni troufie-queue.
A chaque elcadron il y aura un timbalier à la com-
pagnie de meftre-de-camp , qui i'era habillé des livrées
du roi , fans or ni argent , auffi-bien que les trom-
pettes de toutes les compagnies ; les tentes feront
pareilles avec du bleu fur leur faîte. Il y aura à cha-
que quatre efcadrons un aumônier à qui on donnera
une chapelle , &c un Chirurgien. On aura foin de n'a-
voir que de bons chevaux, pour que la troupe foit
toujours bien en état d'entreprendre ce qu'on lui or-
donnera.
Le meftre-de-camp en chef, &les autres meftres-
de-camp fous lui , tiendront la main qu'il n'y ait au-
cun officier mal monté , & qui ne foit fur un cheval
de bonne taille : les officiers auront le moins de ba-
gage qu'il leur fera poffible ; rien que des chevaux de
bât , ou des mulets , & point de charriots , de char-
rettes , ni furtouts.
On fera les détachemens par chambrée , de ma-
nière que le cavalier commandé ne porte que celui
qui lui fera néceffaire , & laine les autres hardes à
ceux de fa chambrée qui demeureront au corps du
régiment.
Les compagnies , fans avoir égard aux régimens
dont elles fortent, prendront leur rang de l'ancien-
neté de leur capitaine ; à la réferve de celle de mef-
tre-de-camp , 6c des lieutenans-colonels.
S'il y a des commiffions du même jour , ou des
rangs incertains , on entendra les raiforts de chacun ,
qui Ve débiteront fans aigreur ni difpute , pour en ren-
dre compte au roi, afin qu'il décide promptement.
L'intention du roi eft que ce régiment ne faffe jamais
de difficulté en tout ce qui regardera le fervice, &
que la difcipline y foit obfervée fort régulièrement.
Il ne doit point monter de gardes.
Il faut deux étendarts par efcadrons , avec unede-
vife bien choifie , qui ait un foleil pour corps d'un
côté , & de l'autre, des fleurs de lis parfemées , com-
me la plupart des autres régimens du roi.
Pour fe fervir des carabiniers à pié quand l'occa-
fion s'en préfente , il faut qu'ils ayent des bottes de
baffe tige , mais de cuir fort, avec une petite ge-
nouilliere échancrée à la moufquetaire , & de petits
deffus d'éperons.
Quand les meftres-de-camp de cavalerie à qui ce
fera à fournir les recrues , n'auront pas envoyé de
bons fujets, on les leurrenvoyera à leurs frais & dé-
pens , & ils feront obligés d'en donner d'autres ,
quand même il méfarriveroit defdits cavaliers ; les
meftres-de-camp auront mille livres de penfion ; les
lieutenans-colonels auront huit cents livres , les ma-
jors fix cents , & les aides-majors trois cents ; les au-
tres officiers demeureront comme ils font déjà. Les
carabines rayées auront trente pouces de canon ; les
épées auront trente-trois pouces de lame ; il fera per-
mis aux officiers d'avoir de petites carabines , pour-
vu qu'elles foient bonnes. Les cravates noires, feront
tant des officiers que des carabiniers , de floure , de
longueur de deux aunes de Paris.
Les veftes des habits uniformes feront de drap
rouge brodées d'argent avec des boutons & des bou-
tonnières d'argent , & un galon d'argent pareil à ce-
lui du jufte-au-corps, fur l'amadis; les officiers auront
tous des plumets blancs. Le roi permet que le Maré-
chal qu'il faut, foit pris hors de la compagnie. Hif-
toire de la Milice Françoife.
Outre le corps de carabiniers dont on vient de par-
ler, on appelle encore de ce même nom un certain
nombre de gendarmes , chevau -légers , &c. aux-
quels dans le tems de guerre le roi fait donner des
carabines. Foyer^ Carabines. Ces carabiniers ne for-
ment point de corps féparé ; ils combattent avec
leurs troupes , ôc ils fe fervent feulement de leurs ça-
CAR
rabines pour tirer fur l'ennemi lorfqu'il n'eft pas à
portée d'être joint. ( <2 )
* CARABINS, f. m. pi. (Hijl. mod.) efpece de che-
vau-légers , dont le fervice en guerre étoit affez fem-
blable à celui de nos houfards. Ils formoient des com-
pagnies féparées , quelquefois des régimens ; les offi-
ciers généraux les employoient dans leur garde ; ils
portoient une cuiraffe échancrée à l'épaule pour tirer
plus commodément,un gantelet à coude pour la main
de la bride , un cabaffet en tête , une longue épée ,
avec la carabine à l'arçon.
CARACAS , CARACOS , LES CARAQUES ,
ou S. JEAN DE LÉON , ville riche & confidérable
de l'Amérique en terre-ferme , dans la province de
même nom ; les environs produifent beaucoup de
cacao. Long. Jiz. J3. lat. 9. 40.
CARACATAY, {Géog.) grand pays au fepten-
trion de l'Aiie, habité par plulieurs nations différen-
tes : on l'appelle auffi Khita. Il ne faut point le con-
fondie avec le Catay , qui n'eft autre chofe que la
Chine. Voye{ Chine 6* Chinois.
CARACHISAR on CHURGO, {Géog.) ville d'A-
fle dans la Natolie , avec port & château , fur la côte
de la Caramanie.
CARACOLE , f. f. Manège & Art milit. eft un
mouvement qui fe fait dans la cavalerie par le flanc
ou la hauteur de l'efcadron; chaque file fait une efpe-
ce de quart de converfion en ferpentant & en faifant
des paffades par la campagne à droit & à gauche
pour ôter la mire à ceux que l'on infulte.
Ce mouvement diffère de la converfion en ce que
celle-ci fe fait par rang , & crue la caracole fe fait par
file.(Q)
CARACOLER , ( Maneg. & Art milit. ) c'eft fai-
re des caracoles dans un manège. On fe fert du
même terme quand plufieurs efcadrons fe détachent
l'un après l'autre du corps de la cavalerie pour aller
agacer l'ennemi à coup de piftolet. ( V)
* CARACOLY, (Hijl. mod.) métal compofé de
parties égales d'or , d'argent , & de cuivre : il eft très-
eftimé , ck fort recherché des Caraïbes ou Sauvages
des îles de l'Amérique. Ils nomment auffi caracolys
les petites plaques faites du même métal , dont ils font
leur principal ornement , en fe les attachant au nez ,
aux lèvres , & aux oreilles. Ils tiroient autrefois cette
compofition , des Sauvages de la rivière d'Orenoque':
mais aujourd'hui les Orfèvres du pays les contrefont
en altérant un peu l'alliage , & leur vendent bien cher
ces bagatelles.
CAR ACOMBO , ( Géog. ) île d'Afrique dans l'O-
céan Ethiopien , fur la côte de la baffe Guinée.
CARACORÉ , f. m. ( Marine. ) c'eft un bâtiment
des Indes , dont les habitans de l'île de Bornéo ie fer-
vent beaucoup. Il va à la rame pendant le calme , ou
lorfqu'il fait peu de vent. Les rameurs font affis fur
une galerie de rofeaux qui règne autour. Le dernier
eft jufque dans l'eau , & ils ont chacun leur flèche 6c
leur arc à leur côté. Ces fortes de bâtimens , bien
loin d'avoir du relèvement , baiffent à l'avant & à
l'arriére. Lorfqu'il y a du vent affez fort pour aller à
la voile , ils en mettent de cuir. Ils portent 1 50 &
jufqu 'à 1 70 hommes. Ils n'ont de bordages ou de plan-
ches que quatre ou cinq de chaque côté de la quille.
Ils font aigus ; i'étrave ck l'étambord demeurent tout
découverts au-deffus du bordage de planches. Sur ces
bordages , il y a de petits barots qui font faillie fur
l'eau , félon la largeur qu'on veut donner au bâti-
ment , & l'on couvre ces barots de rofeaux ; ce qui
fert d'un pont qui s'étend jufqu 'au bout de l'élance-
ment que les barots font. Ces rofeaux font environ
de la groffeur du bras.
C'eft fur l'élancement de ce pont , qui fait de cha-
que côté comme une galerie , que font les rameurs ;
&c û y a entre chaque rang de rameurs , vm ouver-
CAR
ture aflez grande pour donner lieu au mouvement de
la pagaie ou rame. On proportionne les rangs des ra-
meurs à la grandeur du bâtiment. Chaque rang eft
ordinairement de i o ou 1 2 hommes. Les pagaies font
compofées de palettes plates , avec des manches
courts ; elles font toutes égales & fort légères. Il y a
quelquefois un rang de rameurs en-dedans du borda-
ge. C'eft en chantant & en battant la caiffe , ou en
jouant de quelque infiniment de mufique , qu'on com-
mande aux rameurs ce qu'ils ont à faire. Le bâtiment
flotte fur l'eau , &c vogue par le moyen du pont de
rofeaux , dont la faillie fe trouve fur la furface de
l'eau , & fans laquelle le caracore , étroit comme il eft ,
ne manquerait pas de fc renverfer ; l'avant ne s'éle-
ve point au-deffus du bordage de planches.
Quelquefois les faillies ou galeries de pont des-
cendent depuis le haut du bâtiment en talus fur l'eau ,
&C alors on ne peut ramer du dedans du vaiffeau. (Z)
CARACOSA,( Géog. ) petite ville d'Efpagne
dans la nouvelle Caftille.
CARACTERE , ( Ordre encyclopédique. Entende-
ment. Raijon. Philojbphie ou Science. Science de L'hom-
me. Logique. Art de communiquer Lapenfée. Grammaire.
Science de Cinjlrument du difeours. Signes. Caractère. )
Ce mot pris dans un fens général , lignifie une mar-
que ou une figure tracée fur du papier , fur du métal ,
fur de la pierre , ou fur toute autre matière , avec la
plume , le burin , le cifeau , ou autre infiniment , afin
de faire connoître ou de déligner quelque chofe. Voy.
Marque, Note, &c
Ce mot vient du Grec x^f^^'P > H1" cft formé du
Verbe Kat.pa.eGuv , injculpere , graver , imprimer , &c.
A peine les hommes furent -ils en fociété , qu'ils
fentirent le befoin qu'ils avoient d'inventer une lan-
gue pour fe communiquer leurs penlées. Cette lan-
gue ne confifta fans doute d'abord qu'à défigner par
certains fons & par certains lignes les êtres fenfibles
& palpables qu'ils pouvoient le montrer , & par con-
féquent elle étoit encore fort imparfaite : mais les
hommes ne fuient pas long-tems fans s'appercevoir
que non -feulement il leur étoit néceffaire de repré-
fênter , pour ainfi dire , ces êtres à l'oreille par des
fons , mais de les repréfenter aufïï en quelque ma-
nière aux yeux , en convenant de certaines marques
qui les défignafïent. Par là le commerce de la fociété
tlevoit s'étendre , puifqu'il devenoit également facile
de défigner ces êtres préiens ou ablens , & que la com-
munication des idées étoit rendue également pofïîble
entre les hommes abfens , & entre les hommes pré-
fens. Il y a bien de l'apparence que les figures même
de ces êtres, tracées grolîierement fur quelques corps,
furent les premiers caractères par le! quels on les défi-
gna , & la première efpece d'écriture , qui a du naî-
tre à-peu-près dans le même tems que les langues.
Voye^ ECRITURE. Mais on dût bientôt fentir l'infuf-
fiiance de ces caractères; Sz peut-être cette infuffifan-
ce contribua-t-elle à faire mieux fentir l'inperfection
des premières langues. Voye^ Langue. Les hommes
qui avoient la facilité de fc parler en défignant les
Êtres palpables par des fons , pouvoient fuppléer
par d'autres fignes , comme par des geftes , à ce qui
pouvoit manquer d'ailleurs à cette langue ; c'eft
ainfi qu'un muet fait entendre fa penfée en mon-
trant les objets dont il parle , & fuppléant par des
geftes aux choies qu'il ne peut montrer : mais une
telle converfation devenoit impoiîible entre des
hommes éloignés , & qui ne pouvoient fe voir. Les
hommes comprirent donc bientôt qu'il falloit nécef-
faircment i °. inventer des fons pour défigner, foit les
Êtres non-palpables , foit les termes abftraits & géné-
raux , foit les notions intellectuelles, foit enfin Les ter-
mes qui fervent à lier des idées ; & ces Ions furent in-
ventes peu à peu : i°. trouver la manière de peindre
ces fons une fois inventés ; Si. c'eft à quoi les hom-
CAR
645
mes purent parvenir , en convenant de certaines mar-
ques arbitraires pour défigner ces ions. Feu à peu on
s'apperçut que dans la multitude infinie en appa-
rence des ions que forme la voix , il y en a un certain
nombre de fimples auxquels tous les autres peuvent
ierédiure,&:dont ils ne font que des combinaiibns.
On chercha donc à repréfenter ces fons fimples par
des caractères, & les fons combinés parla combinaifon
des caractères , Si l'on forma l'alphabet. Voye^ L'arti-
cle Alphabet.
On n'en refta pas là. Les différens befoins des hom-
mes les ayant portés à inventer différentes feiences
ces feiences furent obligées de fe former des mots par-
ticuliers , de fe réduire à certaines règles , & d'inven-
ter quelquefois des caractères , ou du moins de faire
un ulage particulier des caractères déjà inventés pour
défigner d'une manière plus courte certains objets
particuliers. L'Arithmétique ou feience des nombres
a dû être une de ces premières feiences ; parce que
le calcul a dû être un des premiers befoins des hom-
mes réunis en fociété : les autres feiences à fon exem-
ple fc firent bientôt des caractères plus ou moins
nombreux, des formules d'abréviation, formant com-
me une eipece de langue à l'uiage de ceux qui étoient
initiés dans la feience.
On peut donc réduire les différentes efpeces de
caractères à trois principales ; lavoir les caractères litté-
raux , les caractères numéraux, & les caractères d'abré-
viation.
On entend par caractère littéral, une lettre de l'al-
phabet , propre à indiquer quelque fon articulé : c'eft
en ce fens qu'on dit que les Chinois ont tfoooo ca-
ractères. Foye^ Alphabet.
Les caractères littéraux peuvent fe divifer , eu égard
à leur nature & à leur ufage , en nominaux , & en em-
blématiques.
Les caractères nominaux font ce que l'on appelle
proprement des lettres qui fervent à écrire les noms
des chofes. Voye^ Lettre.
Les caractères emblématiques owjymboliques expri-
ment les chofes mêmes, & les perfonirient en quel-
que forte , & repréfentent leur forme : tels iont les
hiéroglyphes des anciens Egyptiens. (O)
Suivant Hérodote , les Egyptiens avoient deux
fortes de caractères, les uns facrés, les autres popu-
laires : les facrés étoient des hiéroglyphes ou fym-
boles; ils s'en fervoient dans leur morale, leur po-
litique, &>fur tout dans les chofes qui avoient rap-
port à leur fanatifme & à leur fuperftition. Les mo-
numens où l'on voit le plus d'hiéroglyphes , font les
obélifques. Diodorc de Sicile, liv. III. pag. 144.
dit que de ces deux fortes de caractères , les populai-
res Se les facrés , ou hiéroglyphiques , ceux - ci n'é-
toient entendus que des prêtres, ^oy^j Hiérogly-
phe , Symbole , &c (F)
Les hommes qui ne formoient d'abord qu'une fo-
ciété unique , & qui n'avoient par conféquent qu'u-
ne langue Se qu'un alphabet , s'étant extrêmement
multipliés, fuient forcés de le diftribuer, pour ainfi
dire , en plufieurs grandes fociétés ou familles , qui
féparées par des mers vaftes ou par des continens ari-
des , ou par des intérêts différens , n'avoient prefque
plus rien de commun entr'elles. Ces circonfiances
occafionnerent les différentes langues & les différens
alphabets qui fe font fi fort multipliés.
Cette diverfité de caractères dont fe fervent les dif-
férentes nations pour exprimer la même idée , eft re-
gardée comme un des plus grands obltaçles qu'il y
ait au progrès des Sciences : aufîi quelques auteurs
penlant à affranchir le genre humain de cette fervi-
tude , ont propofé des plans de caractères qui puf-
fent être univerfels , & que chaque nation pût lire
dans fa langue. On voit bien qu'en ce cas , ces lor-
tes de caractères devraient être réels Se non nominaux _,
646
CAR
c'cft-à-dire exprimer des choies, & non pas, com-
me les caractères communs , exprimer des lettres ou
des ions.
Ainfi chaque nation auroit retenu fon propre lan-
gage , & cependant auroit été en état d'entendre ce-
lui d'une autre (ans l'avoir appris, en voyant Ample-
ment un caractère réel ou univeriél , qui auroit la mê-
me lignification pour tous les peuples , quels que puif-
fent être les ions, dont chaque nation fe ierviroit pour
l'exprimer dans ion langage particulier : par exem-
ple , en voyant le caractère deftiné à lignifier boire ,un
Anglois auroit lu to drink , un François boire , un Latin
bibere , un Grec irirtiv, un Allemand trincken, & ainli
des autres ; de même qu'en voyant un cheval, cha-
que nation en exprime l'idée à la manière , mais tou-
tes entendent le même anima!.
Il ne faut pas s'imaginer que ce caractère réel (bit
une chimère. Les Chinois & les Japonois ont déjà ,
dit-on , quelque choie de femblable : ils ont un ca-
ractère commun que chacun de ces peuples entend de
la même manière dans leurs différentes langues , quoi-
qu'ils le prononcent avec des ions ou des mots telle-
ment différens , qu'ils n'entendent pas la moindre
fyllabe les uns des autres quand ils parlent.
Les premiers effais , & même les plus coniîdéra-
bles que l'on ait fait en Europe pour l'inftitution d'u-
ne langue univerielle ou philoibphique , font ceux
de l'évêque Wilkins & de Dalgarme : cependant ils
font demeurés fans aucun effet.
M. Leibnitz a eu quelques idées fur le même fujet.
Il penié que Wilkins & Dalgarme n'avoient pas ren-
contré la vraie méthode. M. Leibnitz convenoit que
plufieurs nations pourroient s'entendre avec les ca-
ractères de ces deux auteurs : mais , félon lui , ils n'a-
voient pas attrapé les véritables caractères réels que
ce grand philofophe regardait comme l'inftrument le
plus fin dont l'efprit humain pût fe fervir , & qui dé-
voient , dit -il , extrêmement faciliter & le raisonne-
ment , & la mémoire , & l'invention des choies.
Suivant l'opinion de M. Leibnitz , cescaracteres dé-
voient reffembler à ceux dont on fe iert en Algèbre ,
qui font effectivement fort fimples , quoique tres-ex-
preiîifs , fans avoir rien de fuperflu ni d'équivoque ,
& dont au refte toutes les variétés font raifonnées.
Le caractère réel de l'évêque Wilkins fut bien reçu
de quelques favans. M. Hook le recommande après
en avoir pris une exaûe connoiilance , & en avoir
fait lui- même l'expérience : il en parle comme du
plus excellent plan que l'on puiffe fe former fur cet-
te matière; Si pour engager plus efficacement à cette
étude , il a eu la complaiiance de publier en cette
langue quelques-unes de les découvertes.
M. Leibnitz dit qu'il avoit en vue un alphabet des
penfées humaines , & même qu'il y travailloit , afin de
parvenir à une langue philoibphique : mais la mort
de ce grand philofophe empêcha ion projet de venir
en maturité.
M. Lodwic nous a communiqué , dans les tranfac-
tions philofophiques , un plan d'un alphabet ou caractère
univerfel d'une autre elpece. Il devoit contenir une
énumération de tous les fons ou lettres fimples , ufi-
tés dans une langue quelconque ; moyennant quoi ,
on auroit été en état de prononcer promptement &
exactement toutes fortes de langues ; & de décrire ,
en les entendant fimplement prononcer , la pronon-
ciation d'une langue quelconque , que l'on auroit ar-
ticulée ; de manière que les perfonnes accoutumées
à cette langue , quoiqu'elles ne l'euffent jamais en-
tendu prononcer par d'autres , auraient pourtant été
en état fur le champ de la prononcer exactement : en-
fin ce caractère auroit iervi comme d'étalon ou de mo-
dèle pour perpétuer les fons d'une langue quelcon-
que
Dans le journal littéraire de Cannée i jzo , il y a
CAR
auffi un projet d'un caractère univerfel. L'auteur , après
avoir répondu aux objections que l'on peut faire con-
tre la poiîîbilité de ces plans ou de ces projets en gé-
néral , propofe le fien. Il prend pour caractères les chif-
fres Arabes ou les figures numériques communes : les
combinailbns de ces neuf caractères peuvent fuffire à
l'exprefiion diftin&e d'une incroyable quantité de
nombres , &c par conféquent à celle d'un nombre de
termes beaucoup plus grand que nous n'en avons
beibin pour fignifier nos actions , nos biens , nos maux,
nos devoirs , nos paillons , &c. par là on fauve à la
fois la double incommodité de former & d'appren-
dre de nouveaux caractères ; les figures Arabes ou les
chiffres de l'Arithmétique ordinaire ayant déjà toute
l'univerfalité que l'on demande.
Mais ici la difficulté eft bien moins d'inventer les
caractères les plus fimples , les plus ailés , & les plus
commodes , que d'engager les différentes nations à
en faire ufage; elles ne s'accordent, dit M. de Fonte-
nelle, qu'à ne pas entendre leurs intérêts communs.
(°)
Les caractères littéraux peuvent encore fe divifer ,
eu égard aux différentes nations chez lefquelles ils
ont pris naiffance , & où ils font en ufage , en carac-
tères Grecs , caractères Hébraïques , caractères Romains ,
&c.
Le caractère dont on fe fert aujourd'hui communé-
ment par toute l'Europe , eft le caractère Latin des an-
ciens.
Le caractère Latin fe forma du Grec , & celui-ci du
Phénicien , que Cadmus apporta en Grèce.
Le caractère Phénicien étoitlemême quecelui de l'an-
cien Hébreu , qui fubfifta jufqu'au tems de la captivité
de Babylone ; après quoi l'on fit ufage de celui des
AiTyriens , qui eft l'Hébreu dont on fe fert à préfent ;
l'ancien ne le trouvant que fur quelques médailles
Hébraïques , appellées communément Médailles fa-
maritaines. Voye{ SAMARITAIN.
Poft el èc d'autres prouvent qu'outre le Phénicien ,
le caractère Chaldéen , le Syriaque , & Y Arabe , étoient
pareillement dérivés de l'ancien Hébreu. Voye^ Hé-
breu, &c.
Les François furent les premiers qui admirent les
caractères Latins , avec l'Office Latin de S. Grégoire.
L'ufage des caractères Gothiques , inventés par Ulfîlas,
fut aboli dans un fynede provincial, qui fe tint en
1 09 1 , à Léon , ville d'Efpagne , & l'on établit enleur
place les caractères Latins. Voye^ GOTHIQUE.
Les Médailliftes obfervent que le caractère Grec , qui
ne confifte qu'en lettres majulcules , a confervé (on
uniformité fur toutes les médailles jufqu'au tems de
Gallien ; on n'y trouve aucune altération dans le tour
ou la figure du caractère , quoiqu'il y ait plufieurs
changemens confidérables , tant dans l'ufage que dans
la prononciation. Depuis le tems de Gallien, il paroît
un peu plus foibie & plus rond. Dans Fefpace de tems,
qui s'écoula^entre le règne de Conftantin & celui de
Michel , qui fut environ de 500 ans , on ne trouve
que des caractères Latins. Après Michel , les caractères
Grecs recommencèrent à être en ufage ; mais depuis
ce tems , ils reçurent des altérations , ainfi que le lan-
gage , qui ne fut alors qu'un mélange de Grec & de
Latin. Foyeç Grec.
Les médailles latines conferverent leurs caractères
& leur langue jufqu'à la tranilation du iïége de l'em-
pire à Conftantinople. Vers le tems de Decius , le ca-
ractère commença à s'altérer & à perdre de fa ron-
deur & de fa beauté : on la lui rendit quelque tems
après , & il fubfifta d'une manière paffable jufqu'au
tems de Juftin ; il tomba enfuite dans la dernière bar-
barie , dont nous venons de parler , fous le règne de
Michel ; enfuite il alla toujours de pis en pis , jufqu'à
ce qu'enfin il dégénérât en Gothique. Ainii plus le
caractère «ift rond & mieux il eft formé , plus l'on peut
CAR
aiïùrer qu'il efl ancien. Voyc?^ Médaille.
Nous nous fervons de deux fortes de caractères pour
l'imprefîion des livres; i°. le romain ; z°. l'italique.
Nous avons aufîi deux fortes d'écritures à la main;
i°. la bâtarde, qui efl le plus en ufage, & que les
maîtres appellent aufîi italienne; 20. la ronde ou fi-
nancière nommée ivaffifrançoi/e. Voye^ plus bas Ca-
ractères d'écriture, & fonderie en CARACTERES.
Les caraciercs numéraux iont ceux dont on fe fert
pour exprimer les nombres ; ce font des lettres ou des
figures , que l'on appelle autrement chiffres. Les cfpe-
ces de caractères, qui font principalement en ufage au-
jourd'hui , font le commun ôc le Romain : on peut y
joindre le Grec &C un autre nommé le caractère Fran-
çois , ainfi que les lettres des autres alphabets , dont
on s 'efl fervi , pour exprimer les nombres.
Le caractère commun efl celui que l'on appelle or-
dinairement le caractère Arabe , parce que l'on fuppofe
qu'il a été inventé par les Afîronomes Arabes ; quoi-
que les Arabes eux-mêmes l'appellent le caractère In-
dien , comme s'ils i'avoient emprunté des peuples de
l'Inde.
Il y a dix caracleres Arabes , fa voir , 1,1,3,4, 5 »
6,7,8,9,0, dont le dernier s'appelle en latin cy-
phra ; en France, on donne en général le nom de
chiffre à tout caractère , qui fert à exprimer les nom-
bres. Foyei Chiffre.
On fe fert du caractère Arabe prefque dans toute
l'Europe , & prefque dans toutes les circonllances où
il peut avoir lieu , en fait de commerce , de mefure,
de calculs Aflronomiques, &c.
Le caractère Romain efl compofé de lettres majus-
cules de l'alphabet Romain, d'où probablement lui
efl venu ion nom : ou, peut-être , de ce que les an-
ciens Romains en faifoient ufage fur leurs monnoies,
& dans les inferiptions de leurs monumens publics ,
érigés en l'honneur de leurs divinités , & de leurs
hommes illuftres ; de même que fur leurs tombeaux ,
&c.
Les lettres numérales , qui compofent le caractère
Romain , font au nombre de fépt , lavoir, /, V ', X,
L,C,D,M.
Le caractère /, lignifie un ; V ', cinq ; X ' , dix ; L ,
cinquante; C , un cent; D , cinq cents; & M , un
mille.
Le /, répété deux fois , fait deux , // y trois fois ,
trois , 111 ; quatre s'exprime ainfi //'". /, mis devant
V ov\ X, retranche une unité du nombre exprimé par
chacune de ces lettres.
Pour exprimer fix , on ajoute / à V, VI ; pour
fept , on y en ajoute deux , VII ; Se pour huit , trois ,
VIII : on exprime neuf, en mettant I devant A',
IX, conformément à la remarque précédente.
On peut faire la même remarque par rapport à X
devant L ou C ; ceATindique alors qu'il faut retran-
cher dix unités élu nombre fuivant; ainfi XL lignifie
quarante , (k XC , quatre-vingt-dix ; une L fuivie d'un
X, lignifie Jbixante, LX, &c. On a déligné quelque-
fois quatre cents par CD , mais cela cil rare.
Outre la lettre D , qui exprime cinq cents , on peut
encore exprimer ce nombre par un I devant un C
renverfé , de cette manière 10; as même au lieu de
M , qui fignirie un mille, on le fert quelquefois de /en-
tre deux C, l'un droit & l'autre renverlé, en cette
forte CIJ ; fuivant cette convention , on peut ex-
primeryTx cents par IDC, ikj'ept cents par 1JCC, &c.
L'addition de C& J devant & après, augmente
CIJ en raifort décuple ;:\ïnl\CCiJJ , lignifie 10000;
CCC1J JJ , 1 00000 , &c.
C ecieftla manière commune de marquer les nom-
bres , anciennement ulîtée par les Romains, qui ex-
primoient aufîi tout nombre de mille par une ligne ,
tirée fur un nombre quelconque momdre que nulle.
CAR
647
Par exemple V fignifîe 5000 ; L X , 60000 ; pareille-
ment M efl 1 000000 ; MAI , efl 2000000 , &c.
Outre cela, i°. certaines libertés ou variations
ont été admifes , au moins dans quelques écrivains
modernes ; par exemple 11X , fignifîe 8 ; IICIX ,
89 ; 20. certains caractères ont été en ufage , qui fem-
blent avoir du rapport aux lettres ; par exemple A/,
par lequel on exprime mille, 1000, a été formé de
CXJ, ou CIJ , dont la moitié , c'efl-a-dire , ID étoit
prife pour 500 ; de même , afin d'avoir peut être plus
de commodité pour écrire , ID femble avoir été
changé en D. Nous ignorons au refte comment les
Romains faifoient leurs calculs par le moyen de
ces nombres. Ils avoient fans doute une Arithméti-
que comme nous , &c peut être ne fcroit-il pas im-
pofîible de la retrouver : mais ce feroit une recherche
de pure curiofité. Le caractère Arabe qui a prévalu par
tout nous en exempte.
Chiffres Grecs. Les Grecs avoient trois manières
d'exprimer les nombres. i°. La plus iimple étoit pour
chaque lettre en particulier , fuivant fa place dans
l'alphabet, afin d'exprimer un nombre depuis a. 1 ,
jufqu'à « 24 : c'efl de cette manier* que font diflin-
gues les Livres de l'Iliade d'Homère. 20. Il y avoit
une autre manière, gui fe faifoit par une divilion de
l'alphabet en 8 unités : * 1. C 2, &c. 8 dixaines e:
/ 10, y. 20, &c. 3. 8 centaines p 100, c- 200, &c.
N. B. ils exprimoient mille par un point ou un
accent fous uns lettre; par exemple, » 1000,
Ç 2000, &c. 30. Les Grecs avoient une troifieme
manière qui fe faifoit par fix lettres capitales, en
cette manière, 1 [,'a pour juia] 1, n [^ï.tè] 5, ^[J-.:-]
IO, H [iaaToY] IOO, X [%/Xiftj IOOO, M [/Lapa] IOOOO.
Et quand la lettre 11 en renfermoit quelques-unes,
excepté 1 , cela montrait que la lettre renfermée
étoit le quintuple de fa propre valeur, comme
jÂ| 50, HÎj 500, |X| 5000, |Mj soooo.
Chiffres Hébraïques. L'alphabet Hébreu étoit divifé
en 9 unités , N 1, 2 2, &c. en 9 dixaines , > 10, 2 20,
&c. en 9 centaines, p 100, "I 200, &c. "j 500, 23 600,
] 700, F|8oo, S 900. Les mille s'exprimoient quel-
quefois par les unités , que l'on mettoit avant les
cents, 1?"S, 1534, 6c de même devant les dixai-
nes, >X , 1070. Mais en général on exprimoit mille
par le mot THH, Se 2000 par Q'S^N ; OSnH pré-
cédé des autres lettres numérales, fervoit à déter-
miner le nombre de mille ; par exemple , Cî^NJ,
3000, &c
Le caractère François , ainfi appelle, à caufe que
les François l'ont inventé , & en font principalement
ufage, cil plus ordinairement nommé chiffre de compte
ou de finance.
Ce n'eil proprement qu'un chiffre Romain en let-
tres non majufcules; ainfi au lieu d'exprimer 56 par
LVI. en chiffre Romain, on l'exprime en plus petits
res par Ivj. & ainfi des autres, 6c.
On en fait principalement ufage dans les chambres
des comptes; dans les comptes que rendent les thré-
foriers, les receveurs, &c. &c autres perfonnes em-
ployées dans l'adminiflration des revenus.
l ... 3eres d'abréviation. On fe fert aufîi du mot ca-
en plusieurs arts pour exprimer un fymbole
delliné à communiquer d'une manière plus concile
6v plus immédiate , la connoifîance des choies. Voy.
Abréviation.
Paul Diacre attribue l'invention de ces caractères
à Ennius, qui en a inventé, dit-il, les premiers onze
cents. Tyron, affranchi de Ciceron; Philargyrus;
Faunius & Aquila , affranchis de Mécène , y en ajou-
tèrent un bien plus grand nombre.
Enfin Seneque en fit une collection qu'il mit en
ordre, & il augmenta leur nombre jufqu'à cinq mille.
643
CAR
On peut lire les notes de Tyron à la fin des infcrip-
tions de Gruter.
Valerius Probus , Grammairien , du tems de Né-
ron, travailla avec fuccès à expliquer les notes des
anciens. Paul Diacre écrivit un ample traité touchant
l'explication des caractères de droit, fous le règne de
l'Empereur Conrad I. &Goltziusenfitun autre pour
l'explication des médailles.
On fait un ufage particulier de plufieurs caractères
différens dans les Mathématiques, & particulière-
ment en Algèbre, en Géométrie, en Trigonométrie ,
&en Aftronomie, de même qu'en Médecine, en Chi-
mie, en Mufique , &c
Caractères ujïtés en Arithmétique , & en Algèbre. Les
premières lettres de l'alphabet a, b, c,d, &c. font
les lignes ou les caractères qui expriment des quantités
données; & les dernières lettres ç , y, x, &c. font les
caractères des quantités cherchées. Foye{ QUANTITÉ ;
voye{ aufîî l'article Arithmétique universelle,
où nous avons expliqué pourquoi l'Algèbre le fert de
lettres pour défigner les quantités foit connues , foit
inconnues.
Obfervez que les quantités égales fe marquent par
le même caractère. Les lettres m, n , r ,f, t, &c. font
les caractères des expolans indéterminés des rapports
& des puifTances; ainfi xm,yn, <( , &c. défignentles
puiffances indéterminées de différente efpece ; mx ,
ny, r{, les différens multiples ou fous-multiples des
quantités x,y, i, félon que m, n, r, reprélentent
des nombres entiers ou rompus.
-(- Eli: le figne de ce qui exifte réellement, & on
l'appelle figne affirmatif ou pofitif, il fait comprendre
que les quantités qui en font précédées , ont une
exiftence réelle & pofitive. Voyei Positif.
C'eft aufîi le ligne de l'addition ; & en lifant , on
prononce plus; ainli 9 + 3 le prononce neuf plus
trois ; c'eft-à-dire , 9 ajouté à 3 , ou la fomme de 9 &c
3 égale ix. Voyei Addition.
Quand le figne — précède une quantité fimple , il
exprime une négation, ou bien une exiftence néga-
tive ; il fait voir , pour ainfi-dire , que la quantité
qui en eft précédée , eft moindre que rien. Car on
peut dire , par exemple , d'un homme qui a 20000
livres de dettes , & qui n'a rien d'ailleurs, que fa for-
tune eft au-deiTous de rien de la valeur de 20000
livres , puifque fi on lui donnoit 20000 livres , il fe-
roit obligé de payer fes dettes , & il ne lui refteroit
rien ; ce qu'on peut exprimer ainfi , la fortune de cet
homme eii — 20000 livres. Au refte nous donnerons
plus au long & plus exactement l'idée des quantités
négatives à l'article Négatif.
Si on met ce figne entre des quantités , c'eft le fi-
gne de la fouftradtion , & en le lifant, on prononce
moins ; ainfi 14 — 2 fe lit 14 moins 2 , ou diminué de
2; c'eft- à-dire , le refte de 14, après que l'on en a
fouftrait 2, ce qui fait 12. Foyei Soustraction.
= eft le figne de l'égalité ; ainfi 9 -\- 3 = 14 — 2 ,
fignifie que 9 plus 3 font égaux à 14 moins 2.
Harriot eft le premier qui a introduit ce caractère.
En fa place Deicartes fe fert de oc : avant Harriot il
n'y avoit aucun ligne d'égalité. Volf & quelques
autres auteurs fe lervent du même caractère z= pour
exprimer l'identité des rapports, ou pour marquer
les termss qui font en proportion géométrique , ce
que plufieurs auteurs indiquent autrement. Le figne
X eft la marque de la multiplication; il fait voir que
les quantités qui font de l'un tic de l'autre côté de ce
figue, doivent être multipliées les unes par les autres :
ainfi 4 X 6 fe lit 4 multiplié par 6 , ou bien le produit
de 4 & 6 = 24, ouïe rectangle de 4 & de 6. Cepen-
dant dans l'Algèbre on omet allez fouvent ce fi-
gne, & l'on met Amplement les deux quantités en-
f'emble : ainfi b d exprime le produit des deux nom-
bres marqués par b Ikd, lefquels étant fuppofés va-
CAR
loir 2 Si 4 , leur produit eft 8 lignifié par b d.
Wolf & d'autres auteurs prennent pour figne de
multiplication un point (.) placé entre deux mul-
tiplicateurs ; ainfi 6 . 2 fignifie le produit de 6 &
2 , c'eft-à-dire 12. Voye^ Multiplication.
Quand un des facteurs ou tous les deux font com-
pofés de plufieurs lettres , on les ciiftingue par une
ligne que l'on tire delTus ; ainfi le produit de a -f b — c
par d s'écrit dxa-\-b — c.
Guido Grandi, & après lui Leibnitz, Wolf, &
d'autres , pour éviter l'embaras des lignes , au
lieu de ce moyen , diftinguent les multiplicateurs
compofés en les renfermant dans une parenthelè de
la manière fuivante (a-\-b — c) d.
Le ligne -=- exprimoit autrefois la divifion ; ainfi
a~ b défignoit que la quantité a eft divifée par la
quantité b. Mais aujourd'hui en Algèbre on ex-
prime le quotient fous la forme d'une fraction ; ainfi
j fignifie le quotient de a divifé par b.
Wolf & d'autres prennent , pour indiquer la
divifion , le figne ( : ) ; ainfi 8:4, fignifie le quotient
de 8 divifé par 4 , = 2.
Si le divifeur ou le dividende , ou bien tous les
deux font compofés de plufieurs lettres ; par exem-
ple , a -f b divile par c , au lieu d'écrire le quotient
fous la forme d'une fraction de cette manière -±- ,
Wolf, renferme dans une parenthefe les quan-
tités compofées , comme ( a -J- b ) : c. Voye^ D I-
vision.
> eft le figne de majorité ou de l'excès d'une quan-
tité fur une autre. Quelques-uns fe fervent du carac-
tère [_ ou de celui-ci m .
< eft le figne de minorité ; Harriot introduifit le
premier ces deux caractères , dont tous les auteurs
modernes ont fait ufage depuis.
D'autres auteurs employent d'autres fignes; quel-
ques-uns fe fervent de celui-ci __j ; mais aujourd'hui
on n'en fait aucun ufage.
</5 eft le figne de fimilitude , recommandé dans les
Mifcellanea BerolinenJIa , & dont Leibnitz , Wolf,
& d'autres ont fait ufage , quoiqu'en général les au-
teurs ne s'en fervent point. Voye^ Similitude.
D'autres auteurs employent ce même caractère ,
pour marquer la différence entre deux quantités ,
lorfque l'on ignore laquelle eft la plus grande. froye^
Différence.
Le figne y/ eft le caractère de radicalité ; il fait voir
que la racine de la quantité qui en eft précédée , eft:
1
extraite ou doit être extraite : ainfi yA,- ou y/iç fi-
gnifie la racine quarrét de 25 , c'eft-à-dire , 5 : Se
\/~ indique \a.racine cubique de 25. Voye^ Racine,
Radical.
Ce caractère renferme quelquefois plufieurs quan-
tités, ce que l'on diftingue en tirant une ligne deflus ;
ainli y V+7y lignifie la racine quarrée de la fomme des
quantités b &Z d.
Wolf, au lieu de ce figne renferme dans une
parenthelè les racines compofées de plufieurs quan-
tités , en y mettant l'expofant : ainfi (a + b— c ) 2 fiï
gnifie le quarréde a-\-b — c, qui s'écrit ordinairement
Le ligne : eft le caractère de la proportion arithmé-
tique ; ainli 7.3:13.9 fait voir que trois eft fur-
pafie par 7 autant que 9 l'eft par 1 3 , c'eft-à-dire ,
de 4. f-'oyei Progression.
Le ligne : : eft le caractère de la proportion géo-
métrique ; ainli 8 . 4: : 30. 15. ou 8: 4:: 30: 15.
montre que le rapport de 30 à 15 eft le même que
celui de 8 à 4 , ou que les quatre termes font en pro-
portion géométrique , c'eft-à-dire que 8 eft à 4 com-
me 30 eft ù 15. Voyei Proportion.
Au
CAR
Au lieu de ce caractère, "Wolf fe fert du figne d'é-
galité = , qu'il préfère au premier, comme plus fcien-
tifique & plus cxpreffif. D'autres défignent ainfi la
proportion géométrique ,a\h\\c\d. Tout cela eft in-
différent.
Le ligne -H- eft le caractère de la proportion géomé-
trique continue ; il montre que le rapport eft toujours
le même fans interruption : ainfi -K- 2.. 4. 8. 16. 32..
font dans la même proportion continue ; car 1 eft à 4
comme 4 eft à 8 , comme 8 eft à 16 , &c. Voye^ Pro-
portion 6* Procession.
Caractères en Géométrie & en Trigonométrie.
Il eft le caractère du parallélifme , qui montre que
deux lignes ou deux plans doivent être à égale dif-
tance l'un de l'autre. Aoyq Parallèle.
A eft le caractère d'un triangle. Voye^ Triangle.
Q eft le figne d'un quarré ; 4. marque l'égalité des
côtés d'une figure.
i 1 fignifie un rectangle; < eftlefignc d'un angie.
O caradérife un cercle; \_ marque un angle droit.
Z. exprime V égalité des angles. J_ eft le figne d'une
perpendiculaire.
0 exprime un degré ; ainfi 750 fignifie foixante &
quinze degrés.
1 eft le figne d'une minute ou d'une prime , ainfi 50'
dénote cinquante minutes. " , '" , "" , &c. font les ca-
ractères des fécondes , des tierces , des quartes, &cc. de
degré; ainfi 5", 6'", 18"", io'/w, fignifie 5 fécon-
des , 6 tierces , 18 quartes , 20 quintes. Les quartes &
les quintes s'expriment auffi par iv. & par v.
Au refte , plulîcurs des caractères de Géométrie ,
dont nous avons parlé dans cet article , font peu ufi-
tés aujourd'hui : mais nous avons cru pouvoir en
faire mention. (£)
Caractères dont on fait ufage dans V Arithmétique
des injinis.
Le caractère d'un infinitéfimal ou d'une fluxion , fe
marque ainfi x } y y &c. c 'eft- à-dire que ces quanti-
tés ainfi affedées expriment les fluxions ou les diffé-
rentielles des grandeurs variables x & y : deux, trois,
ou un plus grand nombre de points défignent les fé-
condes , les troifiemes fluxions , ou des fluxions d'un
plus haut degré. Voyc^ Fluxion.
On doit à l'illuftrc Newton , l'inventeur des flu-
xions , la méthode de les caradérifer : les Anglois
l'ont fuivie : mais les autres Mathématiciens fuivent
M. Leibnitz , & au lieu d'un point, ils mettent la
lettre d au-devant de la quantité variable , afin d'é-
viter la confufion qui vient de la multiplicité des
points , dans le calcul des différentielles. Voye-^ Dif-
férentiel.
Ainfi d eft le caractère de la différentielle d'une
quantité variable ; dx eft la différentielle de x ; dy
la différentielle de j.
Cette différente manière de caradérifer les flu-
xions & les quantités différentielles , tient peut-être
jufqu'à un certain point à la différente manière dont
Mrs. Newton ot Leibnitz les envifageoient ; en effet
l'idée qu'ils s'en formoient n'étoit pas.la même, com-
me on le verra aux articles cités.
00 exprime V infini.
Caractères ufités en Afironomie.
ff Caractère de Saturne. H les Gémeaux.
■£ Jupiter. «5 le Cancer.
o* Mars. £1 le Lion.
<j> Venus. nj la Vierge,
îj Mercure. & la Balance.
# le Soleil. i". le Scorpion.
tjT la Lune. 4-» le Sagittaire.
3 la Terre. ■£> le Capricorne.
y le Bélier. «s le Verfeau.
.f le Taureau. )( les Poillons.
Tome II.
CAR
649
Caractères des Jfpects , &c.
o Conjonction. A Trine.
S S Semi-fextile. Bq. Biquintile.
* Sextile. Kc Quinconce.
Q. Quintile. </> Oppolition.
□ Quadrat ou quartile. P_ Nœud afcerfflant.
Td Tridecile. \j; Nœud defeendant.
Caractères de Tems.
A. M. (avant midi, ou ante meridiem. )
P. M. (pojl meridiem} ; ou après midi.
M. matin.
S. foir. (O)
Caractères de Chimie.
Les caractères chimiques font une efpece d'écriture
hiéroglyphique & myftérieufc » c'eft proprement la
langue facrée de la Chimie : mais depuis qu'on en a
drefle des tables , avec des explications qui font en-
tre les mains de tous les gens de l'art , ils ne peuvent
plus rien ajouter à l'obfcurité des ouvrages des phi-
lofophes. Voye^ Planche de Chimie.
On s'eft fervi des mêmes caractères lorfciue la Chi-
mie a commencé à fournir des remèdes à la Médeci-
ne , pour cacher ces remèdes au malade , aux aftii-
tans , & aux barbiers. Les malades fe font enfin ac-
coutumés aux remèdes chimiques , & les Médecins à
partager l'exercice de leur art avec tous leurs minif-
tres ; & les caractères chimiques font devenus encore
inutiles pour ce dernier ufage : on ne s'en fert plus
aujourd'hui que comme d'une écriture abrégée.
Les caractères chimiques les plus anciens lont ceux
qui défignent les fubftances métalliques connues des
anciens , leurs fept métaux ; ces caractères defignoient
encore leurs fept planètes qui portent auiîi les mê-
mes noms que ces métaux. Que de doctes conjectu-
res ne peut-on pas former iur cette conformité de
nom , de figne , de nombre fur-tout ? Auffi l'on n'y
a pas manqué : mais la plus profonde difeuftion n*
nous a rien appris , finon que ces lignes & ces noms
leur font communs depuis une antiquité fi reculée,
qu'il eft à peu près impoflible de décider il les As-
trologues les ont empruntés des Chimiftes , ou fi ce
font ceux-ci au contraire qui les ont empruntes dçs
premiers.
Il eft au moins certain que ces caractères font vrai-
ment fymboliques ou emblématiques chez les Chi-
miftes ; qu'ils expriment par des lipuiicatior.s déjà
convenues, des propriétés efléntielies des corps dé-
fignés , ôc même leurs rapports génériques ck lpeci-
fiques.
Ces fept fignes n'ont que deux élémens ou racines
primitives ; le cercle , & la croix ou la pointe : le
cercle défigne la perfection ; la croix ou la pointe ,
tout acre , acide , corrofif , arfénical , volatil , &c.
L'or ou le foleil eft donc déiigné par le cercle , par
le caractère de la perfection; l'argent pu la lune , par
le demi-cercle ou la demi-pei fedion ; les métaux im-
parfaits , par l'un ou l'autre de ces fignes , & par le
caractère d'imperfection ; imperfection qui dépend
d'un (outre immùr, immaturum , volatil, corrolif,
&c. félon le langage de l'ancienne Chimie.
Ces métaux font folaires ou lunaires; cette divi-
lion eft ancienne & très-réelle. / oj . - Mlnstrue.
Le ter ou Mars, & le cuivre Ou Venus, font lol.ii-
rcs ou colores ; le plomb ou Saturne , ce l'étain ou
Jupiter , font lunaires ou blancs ; auffi les deux pre-
miers font-ils défignés par le cercle , & la croix ou Lt-
pointe ; & les deux derniers , par le demi-cercle Cv la
croix. Le mercure prétendu tivs-toluue intérieure-
ment, quoique lunaire ou blanc extérieurement , en
défigné par le cercle furmopté du denu»cercle , e>:
parle caractère d'impertèdion. / '<n ftj la l
moine , demi-métal prétendu (blaire. , efl
N N n n
650
CAR
le cercle , & par le caractère d 'imperfection ou la
croix.
Les caractères chimiques plus modernes n'ont pas été
imaginés fur les modèles de ceux-là ; on n'y a pas
employé tant d'art ou tant de fineffe : quelques-uns
ne font autre choie que les lettres initiales des noms
des fubftances , des opérations , des inftrumens , &c
qu'ils défignent , comme celui du bifmuth , de l'effer-
vefcence, du bain-marie , &c. d'autres peignent la
choie exprimée comme ceux qu'on employé ordi-
nairement pour cornue , bain de fable , &c. d'autres
enfin font purement arbitraires & de convention ;
tels font ceux dont on fe fert pour le cinnabre , les
cendres, le lait, &c. Cet article e/t de M. Venel.
Caractères ufités en Pharmacie & en Médecine.
2f. . . . recipe , prenez.
a âà. ana , de chacun également.
§. une once.
3. une dragme.
9. un fcrupide.
Gr. un grain.
fi. la moitié de quelque chofe.
Cong. congius , ou quatre pintes.
Coch. cockleare , une cuillerée.
M. manipulas , une poignée.
P. la moitié d'une poignée.
P. E. parties égales.
S. A. conformément à l'art.
Q. S. une quantité fufîïfante.
Q. PL quantum p 'lacet , autant qu'il vous plaît.
P. P. pulvis patrum , le quinquina.
Caractères ufités parmi les anciens Avocats, & dans les
anciennes infcriptions.
§. paragraphe.
ff. Digefte.
E. extra.
S. P. Q. R. fenatus , populufque Romanus.
S. cto. Jenatus confulto,
P. P. pater patries.
C. code.
CC. confules.
T. titulus , &c.
Caractères que Von met fur les tombes.
S. V. Jifle viator, arrête-toi voyageur.
M. S. memoriœ facrum , confacré à la mémoire.
D. M. diis manibus.
IHS. Je/us.
X P. caractère trouvé fur d'anciens monumens , fur
la fignification duquel les auteurs ne s'accordent
pas.
Caractères en Grammaire , Rhétorique , Poéjïe , &C.
j caractère d'un comma ou d'une virgule.
; fémicolon , un point & une virgule.
: colon , deux points.
. point.
! exclamation.
? interrogation.
() parenthefe.
' apoftrophe.
accent aigu.
x accent grave.
a accent circonflexe.
" brève.
« guillemet.
+ renvoi.
§ feâion ou paragraphe.
M. D. docteur en médecine.
A. M. artium magifier , maître es arts.
F. R. S. fellow ofthe royal fociety , membre de la fo-
ciété royale.
CAR
Caractères , en Commerce. \
D°. diclo , le même. ,
N°. numéro , ou nombre.
F°. folio ou page.
R°. recto. j r ,.
V°. verfo. U°h9
L. ou tb. livres d'argent,
tfc. livres pelant.
f. fols,
d. deniers.
Rx. rixdalles.
Dd. ducat.
P. S. poftfcript. Sec.
Caractères, en Muflque , font les fignes dont on fe fert
pour la noter. Voye^ Note.
Caractère , en Écriture & en Imprefjîon : outre les
acceptions qui précèdent, où il fe prend pour lettre,
il défigne auffî la grandeur relative d'un caractère ou
d'une lettre à une autre; ainfi on dit un gros caractè-
re i un petit caractère; caractère en écriture elf. alors
fynonyme à oeil en Impreffion , ou en Fonderie en ca-
ractère, foyei CElL, voyei FONDERIE EN CARACTE-
RES à l'article fuivant. On diftingue en écriture qua-
tre fortes de caractères pris dans ce dernier fens : le
gros titulaire ; le moyen , ou le caractère de finance ; la
coulée commune , & la minute.
Les caractères en Écriture & en Imprefjîon fe diftin—
guent encore relativement à une certaine forme par-
ticulière; & l'on a en écriture le bâtard ou Italien ,
& le rond ou financier ; & en Impreflion le Romain &
Y Italique. Voye7 V article fuivant , & les articles IMPRI-
MERIE & ÉCRITURE.
» CARACTERES D'IMPRIMERIE, ce font au-
tant de petits parallélépipèdes d'une compofition mé-
tallique particulière , à l'extrémité defquels eft en re-
lief une lettre ou quelqu'autre figure employée dans
l'imprefîion des livres, & dont la lurface enduite d'en-
cre noire, rouge, ou d'autre couleur, voye^ Encre,
& appliquée fortement par la preffe d'Imprimerie ,
voye{ Imprimerie & Presse, contre du papier pré-
paré à cet effet, y laine fon empreinte.
On conçoit qu'il faut que le caractère qui doit laif-
fer fon empreinte fur le papier , foit tourné dans le
fens oppolé à l'empreinte. Exemple, pour que le ca-
ractère B donne l'empreinte B , il faut que ce carac-
tère foit difpofé comme le voici & ; car fi l'on fpu-
pofe un papier appliqué fur ce , S. de manière qu'il
en reçoive l'empreinte, il eft évident que quand on
retournera le papier pour appercevoir l'empreinte
laiffée , les parties de ce ££ qui étoient à gauche , fe
trouvant à droite, & celles qui étoient à droite, fe
trouvant à gauche, on ne verra plus la figure & , mais
la figure B. C'eft précifément comme fi le papier
étant tranfparent, on regardeit le caractère Q^ par der-
rière. C 'eft là ce qui rend la leéfure d'une forme dif-
ficile à ceux qui n'en ont pas l'habitude. Voye^ Im-
primerie, Forme.
On conçoit encore que fi l'on avoit autant de ces
petits caractères en relief, qu'il en peut entrer dans
l'écriture , & qu'on pofTedât l'art de les arranger
comme ils le doivent être pour rendre récriture ; de
les enduire de quelque matière colorante , & d'ap-
pliquer deffus fortement du papier , de manière que
ce papier ne fe chargeât que des figures des caractè-
res difpofés , on auroit l'art le plus utile qu'on pût
defirer , celui de multiplier à peu de frais & à l'in-
fini les exemplaires des boqs livres pour lefquels cet
art devroit être rélérvé; car il femble que l'Imprime-
rie mettant les productions del'efprit humain entre
les mains de tout le monde , il ne faudroit impri-
mer de livres que ceux dont la lecture ne peut nuire
à perfonne.
Cet art fuppofe celui de faire les caractères, ck,
CAR
celui de les employer : l'art de faire les caractères fe
diftribue en deux autres , celui de préparer les poin-
çons néceffaires pour la fonte des caractères , & l'art
de fondre ces caractères à l'aide des poinçons.
On peut donc distribuer l'art d'imprimer en trois
parties : l'art de graver Us poinçons , première partie ;
l'art de fondre Les caractères , féconde partie ; l'art d'en
faire ufage, auquel nous avons reitraint le nom d' 'Im-
primerie , troifieme partie.
Nous allons expofer ici l'art de graver les poin-
çons , & celui de fondre les caractères. Quant à celui
d'employer les caractères, on le trouvera à V article Im-
primerie, avec l'hiftorique détaillé de l'art entier.
De la Gravure des poinçons. On peut regarder les
Graveurs des poinçons comme les premiers auteurs
de tous les caractères mobiles , avec lefquels on a im-
primé depuis l'origine de l'Imprimerie : ce font eux
qui les ont inventés , corrigés & perfectionnés par
une fuite de progrès longs & pénibles , & qui les ont
portés dans l'état où nous les voyons.
Avant cette découverte, on gravoit le difcours fur
une planche de bois , dont une feule pièce faifoit une
page , ou une feuille entière : mais la difficulté de
corriger les fautes qui fe gliifoient dans les planches
gravées, jointe à l'embarras de ces planches qui fe
multiplioient à l'infini , infpira le deffein de rendre
les caractères mobiles, & d'avoir autant de pièces lé-
parées, qu'il y avoit de figures diftinfles dans l'é-
criture.
Cette découverte fut faite en Allemagne vers l'an
1440; l'utilité générale qu'on lui trouva, en rendit
les fuccès très-rapides. Pluiieurs perfonnes s'occupè-
rent en même tems de fa pcifedf ion ; les uns s'unifîant
d'intérêt avec l'inventeur ; d'autres volant, à ce qu'on
prétend , une partie du fecret pour faire fociété à
part, & enrichir l'art naiffant de leur propres expé-
riences ; de manière qu'on ne fait pas au jufte qui eft
le véritable auteur de l'art admirable de la Gravure
des poinçons & de la Fonderie des caractères, plu-
fieurs perfonnes y ayant coopéré prcfqu'en même
tems ; cependant on en attribue plus communément
l'honneur à Jean Guttemberg , gentilhomme Alle-
mand. Voye^ l'article IMPRIMERIE.
Les Graveurs de caractères font peu connus dans la
république des Lettres. Par une injuftice dont on a
des exemples plus importans , on a attribué aux Im-
primeurs qui ont fait les plus belles éditions, une
réputation cv des éloges que dévoient au moins par-
tager avec eux les ouvriers habiles qui avoient
gravé les poinçons fur lefquels les caractères avoient
été fondus ; fans les difficultés de l'art typographique
qui font grandes , ce feroit comme fi l'on eût donné
à un Imprimeur en taille-douce la gloire d'une belle
eftampe, dont il auroit acheté la planche, & vendu
au public des épreuves imprimées avec loin.
On a beaucoup parlé des Plantins , des Elzevirs ,
des Etiennes, &C autres Imprimeurs, que la beauté
& la netteté de leurs caractères ont rendus célèbres,
fans obferver qu'ils n'en étoient pas les auteurs , &
qu'ils n'auroient proprement que montré l'ouvrage
d'autrui, s'ils n'avoient tra\ aillé à le faire \ a loir par
les foins d'une impreffion propre Se foignée.
Nous ne prétendons point ici déprimer l'art ap-
pelle proprement Typographique: il a fes règles , qui
ne font pas toutes faciles à bien obferver, ci fa diffi-
culté qu'on ne parvient à vaincre que par une lon-
gue habitude du travail. Ce travail le diftribue en
pluiieurs branches qui demandent chacune un talent
particulier. Mais n'eft-cc pas aile/ pour l'Impri-
meur de la louange qui lui revient du méchanifme de
la compolition, de la propreté de l'impreffion , de la
pureté de la correction, &c. fans lui tranfporter en-
core celle qui appartient à des hommes qu'on a lail-
fés dans l'oubli , quoiqu'on leur eut l'obligation de
lome II.
CAR
651
ce que l'Imprimerie a de plus beau? Car une chofé
qui doit étonner, c'eft que les Écrivains qui ont fait
en ditférens tems l'hiftoire de l'Imprimerie, qui en
ont fuivi les progrès , & qui fe font montrés les plus
inftruits fur cet objet , fe font fort étendus fur le mé-
rite des Imprimeurs , fans prefque dire un mot des
Graveurs en caractères ; quoique l'Imprimeur ou plu-
tôt le Typographe ne foit au Graveur, que comme
un habile chanteur eft à un bon compofiteur de Mu-
fique.
C'eft pour rendre à ces Artiftes la gloire qui leur
eft due , que M. Fournier le jeune, lui-même habile
Fondeur & Graveur en caractères à Paris , en a fait
mention dans un livre de modèles de caractères d'Im-
primerie , qu'il a publié en 1741. Il a mis au nom-
bre de ceux qui fe font diftingués dans l'art de gra-
ver les caractères, Simon de Colines , né dans le vil-
lage de Gcntilly près Paris; il gravoit en 1480 des
caractères romains , tels que ceux que nous avons au-
jourd'hui. Aide Manuce faifoit la même choie èc
dans le même tems à Venife. Claude Garamond, na-
tif de Paris, pamt en 1510,8c porta ce travail au
plus haut point de perfection qu'il ait jamais acquis ,
ioit parla figure des caractères, foit par la juftefle Se
la précifion avec lefquelles il les exécuta.
Vers le commencement de ce fiecle on a perfec-
tionné quelques lettres , mais on n'a rien ajoute à
l'exactitude & à l'uniformité que Garamond avoit
introduites dans fon art. Ce fut lui qui exécuta par
ordre de François I. les caractères qui ont tant fait
d'honneur à Robert Etienne. Robert Granjean auffi
de Paris , fils de Jean Granjean , Imprimeur & Librai-
re , grava de très-beaux caractères grecs ëc latins ; il
excella dans les caractères italiques. Il pafTa à Lyon en
1 570 ; il y travailla huit ans , au bout defquels il alla
à Rome où le pape Grégoire XIII. l'avoit appelle.
Les caractères de ce Graveur ont été plus eltimés
que ceux d'aucun de fes contemporains : ils étoient
dans le même goût , mais plus finis. Les trappes ou
matrices s'en font fort répandues en Europe , & elles
fervent encore en beaucoup d'endroits.
Le goût de ces italiques a commencé à pafltr vers
le commencement du dix-huitieme liecle : cette efpe-
ce de révolution typographique fut amenée par les
fieurs Granjean & Alexandre , Graveurs du roi , dont
les caractères fervent à l'Imprimerie royale. En 1742,
M. Fournier le jeune que nous avons déjà cité avec
éloge, les approcha davantage de notre manière d'é-
crire , par la figure , les pleins Se les délies qu'il leur
donna. Foye^ l'article Italique.
Guillaume le Bé, né à Troies en Champagne \ et s
l'an 1 5 2,5 , grava pluiieurs caractères, & s'appliqua
principalement aux hébreux & rabbiniques : il travail-
la d'abord à Paris ; de-là il alla à Venife , à Rome ,
&c. Il revint à Paris où il mourut. Robert Etienne a
beaucoup employé de fes caractères dans fes éditions
hébraïques.
Jacques de Sanlecque , né à Cauleu , dans le Bon -
lonois en Picardie, commença des l'on extrême jeu-
nefle , à cultiver la Gravure en caractères. Il D
loit vers l'an 1 5 58 ; il y a bien reulîi.
Jacques de Sanlecque Ion fils , né à Pans , com-
mença par étudier les Lettres ; il y fit ces pr< ij
fe rendit auffi digne fuccefleur de fon père dans la
Gravure. Sanlecque père & fils étoient, en 1614, les
feuls Graveurs qu'on eût à Paris. Le fil
ielles notes de Plein-Chant & ae, plu-
iieurs beaux caractères , entre lefqi - it nom-
mer le plus petit qu'on connût alors à Pari' , &z que
appelions la Parifiuuu. Vbye{ P.\
M. Fournier le jeune, juge très compétent, par
la connoiffance qu'il a e< de fon Art & de l'Hiftoird
de cet Art , prononce féveremenl
que fils , jufqu'au commencement du ciix-huitieme lie--
NNnn ij
651
CAR
cle , il ne s'eft trouvé en France aucun Graveur en
caractères tant foit peu recommandable. Lorfqu'il
fut queftion de diftinguer les i & les u confonnes &
voyelles , il ne le trouva pas un feul ouvrier en état
d'en graver paffablement les poinçons ; ceux de ces
anciens poinçons qu'on retrouve de tems en tems ,
montrent combien l'art avoit dégénéré. Il en fera
ainfi de plufieurs Arts , toutes les fois que ceux qui
ïes profeffent feront rarement employés ; on fond ra-
rement des ftatues équeftres; les poinçons des carac-
tères Typographiques font prefqu'éternels : il eft donc
néceûaire que la manière de s'y prendre ôc d'ex-
celler dans ces ouvrages , s'oublie en grande partie.
La Gravure des caractères eft proprement le lecret
de l'Imprimerie ; c'eft cet Art qu'il a fallu inventer
pour pouvoir multiplier les lettres à l'infini . & rendre
par-là l'Imprimerie en état de varier les compofitions
autant qu'une langue a de mots, ou que l'imagina-
tion peut concevoir d'idées, & les hommes inventer
de fignes d'écriture pour les défigner.
Cette gravure fe fait en relief (ur un des bouts
d'un morceau d'acier, d'environ deux pouces géo-
métriques de long , & de grolTeur proportionnée à la
grandeur de l'objet qu'on y veut former , & qui doit
y être taillé le plus parfaitement qu'il elt poihble , fui-
vant les règles de l'Art & les proportions relatives à
chaque lettre ; car c'eft de la perfection du poinçon ,
que dépendra la perfection des caractères qui en éma-
neront.
On fait les poinçons du meilleur acier qu'on peut
choiftr. On commence par arrêter le delïein de la
lettre : c'eft une affaire de goût ; & l'on a vu en dif-
férens tems les lettres varier , non dans leur forme
eiTentielle , mais dans les rapports des différentes par-
ties de cette forme entr'elles. Soit le defiein arrêté
d'une lettre majufcule B , que nous prendrons ici
pour exemple , cette lettre eft compoiée de parties
blanches & de parties noires. Les premières font
creufes , & les fécondes font faillantes.
Pour former les parties creuies , on travaille un
contre-poinçon d'acier de la forme des parties blan-
ches. Voye{ Planchr III. de la Gravure , fig, 3z. le
contre-poinçon de la lettre B ; ce contre-poinçon
étant bien formé , trempé dur , & un peu revenu ou
recuit, afin qu'il ne s'égraine pas, lera tout prêt à
fervir.
Le contre-poinçon fait , il s'agit de faire le poin-
çon : pour cela on prend de bon acier ; on en dreffe
un morceau de grolTeur convenable , que l'on fait
rougir au feu pour le ramollir ; on le coupe par tron-
çons de la longueur dont nous avons dit plus haut.
On arrondit un des bouts qui doit fervir de tête , &
l'on dreffe bien à la lime l'autre bout ; enforte que la
face foit bien perpendiculaire à l'axe du poinçon ;
ce dont on s'alTûrera en le palTant dans l'équerre à
drelTer fur la pierre à l'huile , ainti qu'il lera expli-
qué ci-après. On obferve encore de bien drelTer deux
des longues faces latérales du poinçon, celles qui
doivent s'appliquer contre les parois internes de l'é-
querre à dreffer. On fait une marque de repaire fur
une de ces faces ; cette marque lert à deux fins : i°.
à faire connoître le haut ou le bas de la lettre , félon
le côté du poinçon fur lequel elle eft tracée ; i°. à
faire que les mêmes faces du poinçon regardent à
chaque fois qu'on le remet dans l'équerre , les faces
de l'équerre contre lelquelles elles étoient appliquées
la première fois. Cette précaution eft très eiTentielle ;
fans elle on ne parviendrait jamais à bien dreffer la
petite face du poinçon, fur laquelle la lettre doit être
pour ainfi dire découpée.
Lorfqu'on a préparé le poinçon , comme nous ve-
nons de le preferire , on le fait rougir au feu , quand
il eft très-gros ; quand il ne l'eft point , il fnffit que
l'acier foit recuit, pour recevoir l'empreinte du con-
CAR
tre-poinçon ; on le ferre dans un tas dans lequel il y
aune ouverture propre à le recevoir. On l'y affermit
par deux vis , la race perpendiculaire à l'axe tour-
née en haut; on prélente à cet é face le contre-poin-
çon qu'on enfonce à coup de malle , d'une ligne ou
environ, dans le coips du poinçon, qui reço.t ainfi
l'empreinte des parties creuies de la lettre.
Cette opération faite , on retire le contre poinçon ;
on ôte le poinçon du tas ;on le dégroffit à la f me, tant
à fa furface perpendiculaiie à i'axe , qu'à la lui face
latérale ; on le dreffe fur la pierre à l'huile avec l'équer-
re. Il y en a qui tracent quelquefois avec une pointe
d'acier bien aiguë , le contour extérieur des épaiffeurs
des parties faillantes de la lettre : mais quand le con-
tre-poinçon eft bien tait, le Graveur n'a qu'à le laif-
fer diriger par la foi me. On enlevé à la lime les
parties qui font fituées hois du trait de la pointe ai-
guë , quand on s'en lert , ce qui arrive toujours dans
la gravure des vignettes ; on obferve bien de ne pas
gâter les contours de la lettre , en emportant tiop.
On dreffe la lettre fur la pierre à huile pour enlever
les rebarbes que la lime a occafionnées ; on finit la
lettre à la lime, & quelquefois au burin, ne laiffant
à cette extrémité que la lettre feule , telle qu'en voit
la lettre B ,fig. do. même Planch. M. Cette figure
montre le poinçon de la lettre B achevé ; on voit
que la lime a enlevé en talud les parties qui excé-
doient les contours de cette lettre.
L'équerre à dreffer, qu'on voit fig. 53- eft un mor-
ceau de bois ou de cuivre formé par deux parallélé-
pipèdes ABCD, ABEF ', qui forment un angle droit
fur la ligne A B; enforte que , quand l'équerre eft po-
fé fur un plan , comme dans la fig. Si. cette ligne
A B foit perpendiculaire au plan. La partie inférieu-
re de l'équerre, celle qui polë fur le plan, eft garnie
d'une femelle d'acier ou d'autre métal, bien dreffée
lur la pierre à huile , qui doit être elle-même parfai-
tement plane. On place le poinçon dans l'angle de
l'équerre ; on l'y affujettit avec le pouce, & avec le
relie de la main dont on tient l'équerre extérieure-
ment , on promené le tout fur la pierre à huile fur la-
quelle on a foin de répandre un peu d'huile d'olive.
La pierre ufe à la fois & la femelle de l'équerre & la
partie du poinçon. Mais comme l'axe du poinçon
conlerve toujours Ion parallélifme avec l'arrête an-
gulaire de l'équerre A B , & que l'équerre à caufe de
la grande étendue de fa bafe , ne perd point fa direc-
tion perpendiculaire au plan de la pierre ; il s'enfuit
qu'il en eft de même du poinçon , qu'il eft drelîé &
que le plan de la lettre eft bien perpendiculaire à l'axe
du poinçon.
Quand le poinçon a reçu cette façon , on le trem-
pe pour le durcir. On le fait enfuite un peu revenir
ou recuire , afin qu'il ne s'égraine pas quand on s'en
fervira pour marquer les matrices ; c'eft de fa ferme
coniiftance que dépend fa dureté & fa bonté. Trop
dur, il le brife facilement ; trop mou, les angles de fa
lettre s'émouffent , & il faut revenir à la taille & à la
lime.
Tous les poinçons des lettres d'un même corps doi-
vent avoir une hauteur égale , relativement à leur fi-
gure. Les capitales doivent être toutes de même gran-
deur entr'elles , & de la hauteur des minufcules b ,
d , l , &c. & autres lettres à queue ; il en eft de même
de/>, q, par en bas. Les minufcules font auffi égales
entr'elles, mais d'un calibre plus petit , comme m,
a, &c. On les égalife avec un calibre ; ce calibre eft
un morceau de laiton plat dans lequel font trois en-
tailles , la plus grande pour les lettres pleines , telles
que 7 long, Q capital , &c. la féconde pour les let-
tres longues qui font les capitales , les minufcules lon-
gues , telles que d,b ,p, q , &c. la troifieme pour les
minufcules , comme m , a, c, e. La lettre du poinçon
qu'on prélënte à l'une de ces entailles , doit la rem-
CAR
plir exactement : deforte qu'après que les caractères
font fondus , leurs fommets & leurs bafes fe rrouvent
précifément dans la même ligne , ainfi qu'on voit
dans l'exemple fuivant Anhr&rf: &c-
Les poinçons faits , ils palient entre les mains du
Fondeur, qui doit veiller à ce que les poinçons qu il
acheté ou qu'il fait, ayent l'œil bien terminé & d'u-
ne profondeur fuffifante , & que les bafes & fommets
des lettres fe renferment bien entre des parallèles.
On commence ordinairement par le poinçon de la
lettre M, & c'eft lui qui fert de règle pour les autres.
De la Fonderie en caractères. La Fonderie en carac-
tères eft une fuite de la gravure des poinçons. Le ter-
me Fonderie en caractères a plufieurs acceptions : il fe
prend ou pour un affortiment complet de poinçons
& de matrices de tous les caractères, fignes, figure ,
&c. fervant à l'Imprimerie , avec les moules , four-
neaux- , & autres uftcnliles néceifaires à la fonte des
caractères; ou pour le lieu où l'on fabrique les carac-
tères ; ou pour l'endroit où l'on prépare le métal dont
ils font formés ; ou enfin pour l'art même de les fon-
dre : c'eft dans ce dernier fens que nous en allons
traiter particulièrement.
La Fonderie en caractères eft un art libre. Ceux qui
l'exercent ne font point fujets à maîtrife , à réception,
ou vifites. Ils joùiflent néanmoins des privilèges ,
exemptions & immunités attribuées à l'Imprimerie ,
& font réputés du corps des Imprimeurs.
Cet art eft peu connu , parce que le vulgaire ne
fait point de diftin&ion entre Fonderie & Imprime-
rie , & s'imagine que l'imprefiion eft l'ouvrage de
l'Imprimeur, comme un tableau eft l'ouvrage d'un
Peintre. Il y a peu d'endroits où l'on exerce cet Art :
à peine compte-t-on douze fonderies en caractères en
France ; de ces douze fonderies , il y en a plus de la
moitié à Paris.
Les premiers Fondeurs étoient Graveurs , Fon-
deurs , & Imprimeurs ; c'eft-à-dire qu'ils travailloient
les poinçons , frappoient les matrices , tiroient les
empreintes des matrices , les difpofoient en formes ,
& imprimoient : mais l'art s'eft divifé en trois bran-
ches , par la difficulté qu'il y avoit de réuffir égale-
ment bien dans toutes.
On peut obfcrver fur les ouvriers qui ne font que
Fondeurs , ce que nous avons obfervé fur ceux qui
ne font qu'Imprimeurs: c'eft qu'ils ne font les uns
& les autres que prendre des empreintes ; les uns fur
le métal , les autres fur le papier. Que les caractères
foient beaux ou laids , ils n'en font ni à louer ni à
blâmer ; chacun d'eux coopère feulement à la beauté
de l'édition , les Imprimeurs par hi composition & le
tirage , les Fondeurs par les foins qu'ils doivent avoir
que les caractères foient fondus exactement fuivant les
règles de l'Art; c'eft-à-dire que toutes les lettres de
chaque corps foient entr'elles d'une épaiffeur & d'u-
ne hauteur égale ; que tous les traits de chacune des
lettres foient bien de niveau, & également diftans
les uns des autres ; que toutes les lettres des caractè-
res romains foient droites, & parfaitement perpendi-
culaires ; que celles des italiques foient d'une incli-
naifon bien uniforme ; & ainiî des autres caractères
fuivant leur nature : toutes chofes que nous allons
expliquer plus en détail.
Lorfque le Fondeur s'eft pourvu des meilleurs
poinçons , il travaille à former des matrices : pour
cet effet il prend le meilleur cuivre de rofette qu'il
peut trouver; il en forme à la linie des petits paral-
lélépipèdes longs de quinze à dix-huit lignes , 6c d'u-
ne baie & largeur proportionnées à la lettre qui doit
être formée fur cette largeur. Ces morceaux de cui-
vre dreftés & recuits, lont pôles l'un après l'autre
fur un tas d'enclume : on applique deftus à l'endroit
qui convient, l'extrémité gravée du poinçon ; ci: d'un
ou de plufieurs coups de marteau , on l'y tait entrera
CAR
6n
une profondeur déterminée depuis une demi -ligne
jufqu'à une ligne & demie.
Par cette opération , le cuivre prend exactement
la forme du poinçon , & devient un véritable moule
de corps de lettres fen.blablcs à celles du poinçon;
& c'eft par cette raifon qu'on lui a donné le nom de
matrice. Le nom de moule a, été réfervé pour un affem-
blage , dont la matrice n'eft que la partie principale.
La matrice ainfi frappée n'eft pas parfaite , eu
égard à la figure dont elle porte l'empreinte : il faut
fdig'nëiiferheht obferverque fa face Supérieure ,fig.
13. PI. II.de la Fonderie en caractères, fur laquelle s'eft
faite l'empreinte du poinçon , foit exactement paral-
lèle à la lettre imprimée fur eile , & que les deux fa-
ces latérales foient bien perpendiculaires à celle-ci.
On remplit la première de ces conditions en enle-
vant à la lime la matière qui excède le plan paral-
lèle à la face de la lettre ; & la féconde , en ufant de
la lime & de l'équerre.
Cela fait , on pratique les entailles a , b ,c , qu'on
voit Jig. iz. & 13. Les deux entailles a , t> , placées
l'une en-defTus, & l'autre en -délions, /g. zj. à la
même hauteur , fervent à attacher la matrice au
moule : l'autre entaille c reçoit l'extrémité de l'arc
ou archet qui appuie la matrice contre le moule ,
ainli que nous Talions expliquer.
Le moule eft l'afTcmblage d'un grand nombre de
parties , dont on peut conlidérer la fomme comme
divifée en deux.
Toutes les pièces de chacune de ces deux moitiés
de moule , font afïïijetties les unes aux autres par des
vis ôc par des écrous , & font toutes de fer bien dreffé
& bien poli , à l'exception des deux extérieures qui
font de bois , & qu'on appelle par cette raifon le bois
du moule. Ce revêtement garantit les mains de l'ou-
vrier de la chaleur que le métal fondu qu'on jette
continuellement dans le moule , ne manque pas de
lui communiquer.
Les deux premières parties qu'on peut confidérer
dans le moule , font celles qu'on voit Planche II. dt
la Fonderie en caractères , Jig. 20 Se 21. La_/f^. 20. re-
préfente la platine vue en-dedans, & garnie de tou-
tes les pièces : h Jig. 21. la même platine , ou fa fem-
blable , mais vue du côté oppofé ; c'eft fur les plati-
nes que l'on afïiijettit toutes les autres pièces ; elles
leur fervent , pour ainli dire , de point d'appui , com-
me on va voir. La première pièce qu'on ajufte fur la
platine cil la pièce ByJtg. 1.2. 3. ij. 20. on l'appelle
longue pu:c : elle êv la temblable font en effet les plus
longues du moule. ( On obfervera que les mêmes pièces
dans Us différentes Jigurcs font marquées des mêmes let-
tres ). Cette longue pièce qui a dix Ii^r.es de large ,
ck. qui eft epaifle à dilcretion, cil Fourchue par l'une
de ces extrémités X,Jig. ij. ce 20. cV reçoit parce
moyen la tête de la potence de l'autre moitié, à la-
quelle elle fert de coulùTe: il ne faut pas oublier que
les deux moitiés du moule font prelque entièrement
femblables , & que toutes les pièces dont nous avons
déjà parlé , & dont nous allons faire mention dans la
fuite , font doubles ; chacpie moitié du moule a la
lien ne.
La longue pièce cil fixée fur la platine par une
vis A tête ronde b,Jig. iS. qui après avoir paffé par
le trou i\Jig. 21. va s'envillcr dans le trou taraudé
fait à la longue pièce à la hauteur de la fourchette A".
C e trou taraudé ne traverle pas entièrement l'epail-
feur de la longue pièce , qui a à Ion extrémité oppo-
fee \ni trou quatre d ,jig. iy. ik. iS. qui reçoit le te-
non quarré de la potence, .Ai,'. 9. Si 10.
Avant que de placer la potence Z>, on applique
un des blancs C, qu'on voit AV. 14. & /.">. affem-
blés avec la potence. C es blancs ont la même lar-
geur que les longues pièces. Leur longueur eft un
peu moindre que la munie de celle de la longu»
654
CAR
pièce : elles ont la même épaiffeur que celle du corps
que l'on veut fondre dans le moule.
Le blanc appliqué fur la longue pièce, comme
on voit fig. 20. eft percé d'un trou quarré , fembla-
ble à celui qu'on lui voit fig. y. Ce trou quarré reçoit
le tenon quarré* de la potence , fig. Q. & 10. Le te-
non traverié le blanc , la longue pièce , & la platine ,
& fixe toutes ces pièces enfemble.
Le nez D de la potence fe jette du côté de l'ex-
trémité la plus prochaine de la longue pièce. Son
extrémité m faite en vis , reçoit un écrou- qui le con-
tient. On voit cet écrou end, fig. zi.
Ces écrous qui font à pans fe tournent avec la clé
ou le toume-écrou de laj%. z6.
Le blanc peut encore être fixé fur la platine par
une vis à tête perdue , qui traverferoit la platine ; la
lon<me pièce entrerait dans l'épaifleur du blanc , &
s'y arrêteroit : mais cela n'eft plus d'ufage.
Au-deffus des longues pièces & des blancs , on
place les jets A, fig. 5. & 6. comme on les voit fig.
eo. Ces jets font des moitiés d'entonnoirs pyrami-
daux , dont les faces extérieures font perpendiculai-
res les unes aux autres. Celles de ces faces qui s'ap-
pliquent fur la platine , fur le blanc , & fur la longue
pièce , doivent s'y appliquer exa&ement. Quand les
deux moitiés du moule lont réunies , il eft évident
que les jets forment une trémie , dont la plus petite
ouverture eft en enbas. Leurs faces inclinées A, fig.
20. doivent un peu excéder les faces de la longue
pièce & du blanc , afin de former un étranglement au
métal fondu qu'on verfera dans le moule , & afin de
déterminer en même tems le lieu de la rupture du fu-
perflu de matière qu'on y verfera , & faciliter cette
rupture. Voye\ les figures 2. 3- & 20. où cette faillie
des faces inclinées des jets eft fenfiblement marquée.
Chaque jet porte une vis , qu'on voit fig. 6. par le
moyen de laquelle & d'un écrou , on fixe cette pièce
fur la platine , comme on le voit en a ,fig. zi . La par-
tie de cette vis ou tenon viffé qui répond à l'épaifleur
de la platine , eft quarrée , & entre dans un trou de
même figure ; ce qui empêche le jet de vaciller : in-
convénient qui eft encore prévenu par l'application
exacte de l'une de ces faces contre la platine , & de
l'autre contre la longue pièce & le blanc.
Au-deflbus du trou quarré d de la longue pièce eft
une vis /fixée en queue d'aronde dans cette longue
pièce. Cette vis au moyen d'un écrou F ,fig. zo. af-
fujettit la pièce E ,fig. ig. qu'on appelle regijlre. La
partie de la vis ou du tenon viffé / qui fe loge dans
l'épaifleur du regiftre , eft quarrée ., & entre dans une
mortoife plus longue que large ; ce qui donne la com-
modité d'avancer ou de reculer le regiftre à difcré-
tion ,& de laiffer entre fon extrémité E,fig.zo. &
l'extrémité ou l'angle faillant du blanc , tant & ii peu
de diftance que l'on voudra. L'écrou F (en à l'affer-
mir dans la fituation convenable.
Chaque platine porte à fa partie poftérieure une
vis G , qu'on voit figure z i . elle traverié une petite
planche appellée bois , qui a la forme & la grandeur
de la platine , au derrière de laquelle on la fixe par le
moyen d'un écrou ; & pour que la platine & le bois
s'appliquent plus exactement l'un contre l'autre , on
a pratiqué au bois des cavités propres à recevoir les
vis , écrous , & autres parties faillantes qu'on voit à
la partie poftérieure de la platine ,fig. 21.
Les deux moitiés femblables du moule conftruites
somme nous venons de l'expliquer , & comme on les
voit fig. 2. & 3- s'ajuftent exactement , & forment
un tout , qu'on voit fig. /. La potence de l'une entre
dans l'entaille fourchue de la longue pièce de l'au-
tre ; & comme les entailles ont la même direûion que
les potences , elles fe fervent réciproquement de cou-
liffes ; & il eft évident qu'ainfi les blancs pourront
s'approcher ou s'éloigner l'un de l'autre, en faifant
CAR
mouvoir les deux moitiés du moule l'une fur l'autre.
On voit avec la même évidence que le viii'de for-
mé par les jets , aura la forme d'une pyramide tron-
quée ; & que celui qui eft entre les longues pièces
tk. les blancs , aura la forme d'un prifme quadrangu-
laire d'environ dix lignes de hauteur , d'une épaiffeur
confiante ; celle des blancs eft d'une largeur à discré-
tion , cette largeur augmentant ou diminuant félon
qu'on tient les blancs plus ou moins près l'un de l'au-
tre : ce qui s'exécute par le moyen des regiftres qu'on
avance ou qu'on recule à difcrétion , comme nous
avons dit. Le vuide du jet & celui du prifme commu-
niquent enfemble , & ne font proprement qu'une mê*
me capacité.
Voilà bien des pièces affemblées : cependant le
moule n'eft pas encore formé ; il y manque la pièce
principale , celle pour laquelle toutes les autres ont
été inventées & difpofées, la matrice. La matrice fe
place entre les deux regiftres en M , comme on la
voit fig. z. elle appuie d'un bout contre la platine
de l'autre moitié , & elle eft liée par l'on autre ex-
trémité à l'attache. L'attache eft une petite pièce de
peau de mouton qu'on colle au bois d'une des parties
du moule. L'attache pafl'e entre le jimblet & le bois.
On appelle jimblet une petite fiche de fer plantée
dans le bois de la pièce de deffus , & qui retenant
l'attache , empêche la matrice de fortir de place.
La matrice ainli placée entre les regiftres , eft te-
nue appliquée aux longues pièces & aux blancs par
le reflort D CE ,fig. i . qu'on appelle l'arc ou archet :
l'extrémité E de ce reflort entre dans l'entaille C de
la matrice , fig, iz. & 13. & fait effort pour preffer
la matrice contre la platine oppofée , & fur le heur-
toir ou la pièce qu'on voit fig. zz. cette pièce cil
adoflée à celle qu'on voit en m, fig. zi. rivée à la
partie poftérieure de la platine ; elle fert à monter
ou delcendre à difcrétion la matrice vers l'ouvertu-
re intérieure du moule , & à mettre la lettre dans
la place qu'elle doit avoir fur le corps : pour cet ef-
fet on la prend plus ou moins épaiffe.
Pour empêcher la matrice de tomber , & de for-
tir d'entre les regiftres , on met entre la platine &
le bois qui porte l'attache , un petit crochet qu'on
voit fig. 2j, ce crochet s'appelle jobet. L'anneau du
jobet s'enfile fur la tige G de la platine , fig. zi. &
Ion crochet defcend au-deflbus de la matrice , & la
foùtient comme on l'apperçoit en x , fig. 2. en laif-
lant toutefois la place de la matrice qu'il embraffe.
Outre les parties dont nous venons de parler , on
peut remarquer à chaque moitié du moule , fig. 1. z.
3. un crochet a b , dont nous expliquerons Fufage
plus bas.
Il eft à propos, avant que de fermer le moule,
d'obferver à la partie lupérieure de la longue pièce
repréfentée fig. ij. un demi-cylindre a b, placé à
deux lignes au-deflbus ou environ de fon arrête fu-
périeure : ce demi-cylindre, qu'on appelle cran , efl:
une pièce de rapport qui traverié la longue pièce ,
& dont la partie iaillante efl arrondie : mais comme
cette partie iaillante empêcherait le blanc de l'autre
moitié de s'appliquer exactement à la longue pièce
qui la porte , on a pratiqué à cette moitié un canal
concave dans le blanc. Ce canal hémi-cylindrique
reçoit le demi-cylindre. On voit ce canal en b a ,
fig- i5.
Voilà tout ce qui concerne la ftrucTure du moule,"
qui efl une des machines les plus ingénieufes qu'on
pouvoit imaginer , ainfi qu'on achèvera de s'en con-
vaincre parce que nous allons dire de la fonte.
Le moule eft compofé de douze pièces principa-
les , dont nous avons fait mention. Toutes ces pie-
ces de fer ont été bien limées , & font bien jointes ;
elles forment avec les autres un tout , qui a depuis
deux pouces de long jufqu'à quatre , fuivant la grof-
CAR
leur du caractère , fur deux pouces environ de large,
contenant fur ion plan horifontal au moins quarante
pièces de morceaux diftinfts. Les deux portions pref-
que lemblaMes dans lefquelles il fe divife s'appel-
lent, l'une pièce de defius , l'autre pièce de dejfous :
c'eft celle qui porte l'archet qu'on appelle pièce de
dejfous.
La première opération qu'on ait à faire quand on
a conlrruit &c diipofé le moide , eft de préparer la
matière dont les caractères doivent être fondus. Pour
cet effet , prenez du plomb &c du régule d'antimoi-
ne , fondez-les féparément ; mêlez-les enfuite , met-
tant quatre cinquièmes de plomb & un cinquième de
régule ; & ce mélange vous donnera un compofé pro-
pre pour la fonte des caractères.
Ou , prenez de l'antimoine crud , prenez égale
quantité de potin ; mettez le tout cnfemble avec du
plomb fondu , & vous aurez une autre compofition.
La précédente eft préférable à celle-ci , qu'il lem-
blc qu'on a abandonnée en France depuis une ving-
taine d'années , parce qu'on a trouvé que le potin &c
l'antimoine faifoient beaucoup de feories , rendoient
la matière pâteufe , & exigeoient beaucoup plus de
feu.
Au refte nous pouvons affûrer en général que la
matière dont on fond les caractères d'Imprimerie eu un
mélange de plomb & de régule d'antimoine , où le
dernier de ces ingrédiens corrige la molleffe de
l'autre.
Cette fonte fe fait dans un fourneau , tel que ce-
lui qui occupe le milieu de la vignette , Planche I. de
Fonder, il eft divifé en deux parties , l'une & l'autre
de brique. Celle qui répond à la fig. 4. eft un four-
neau fur lequel on a établi une chaudière de fonte,
dans laquelle le plomb eft en fufion : cette chau-
dière eft chauffée avec du bois , comme on voit ; la
fumée s'échappe par une ouverture qu'on peutdiftin-
guer fur le fond , & fuit la cheminée qui eft commu-
ne aux deux fourneaux.
Le fécond fourneau qui correfpond à la figure 3 •
même vignette , eft un fourneau proprement dit :
à fa partie fupérieure eft l'ouverture du fourneau ;
l'inférieure eft un cendrier ; elles font féparées par
une grille horifontale : cette grille foûtient un creu-
fet qui contient le régule d'antimoine , & les char-
bons allumés qui fervent à le mettre en fufion. Le feu
eft excité par le courant d'air qui fe porte à la grille.
On recommande aux ouvriers occupés à ce fourneau
de l'opération qu'ils y ont à faire , de fe garantir
avec loin de la vapeur du régule , qu'on regarde
comme un poifon dangereux : mais c'eft un préjugé ;
l'ulage du régule n'expole les Fondeurs à aucune ma-
ladie qui leur foit particulière ; fa vapeur n'eft fu-
nefte tout au plus que pour les chats : les premières
fois qu'ils y (ont expofes , ils font attaqués de verti-
ges d'une nature ii fingutiere , qu'après s'être tour-
mentés pendant quelque teins dans la chambre où ils
font forcés de la refpirêr , ils s'élancent par les fenê-
tres : j'en ai vu deux lois l'expérience dans un même
jour. Mais quand ils en rechapent , 6f qu'ils ne pé-
nitent pas dans les premiers accès, ils n'ont plus rien
à redouter des féconds ; ils le font à la vapeur qui
les iivoit d'abord fi violemment agités, 6c vivent
fort bien dans les fonderies.
Le régule fondu dans le creufet eft verfé en quan-
tité furrhantedansla chaudière qui contient le plomb :
l'ouvrier 4. prend le mélange avec une cuilliere, &
le vcrle dans les moules oulingotieres qui font à fes
piés : on voit auffi fur le plancher des tenailles pour
le creufet , ion couvercle , une cuilliere , &c d'autres
outils au ki vice de la fonderie.
Le rapport entre le plomb & l'antimoine n'eft pas
le même pour toute forte àecaraSercs: la propriété
de l'antimoine étant de donner du corps au plomb ,
CAR
655
on en mêle plus ou moins , félon que les caractères
qu'on a à fondre font plus ou moins gros ; les petits
caractères n'étant pas auiïï propres à rélifter à l'action
de la preffe que les gros , on les fond de la matière
que les ouvriers appellent matière forte , &c ceux-ci de
celle qu'ils appellent matière foible. La matière forte
deftinée pour les petits caractères , eft un mélange de
régule & de plomb, où le premier de ces ingrédiens
eft en quantité beaucoup plus coniidérable , relati-
vement à celle du plomb , que dans la matière foible.
Quand la matière ou compofition eft ainfi prépa-
rée & mife en lingots , elle paffe dans les fourneaux
des Fondeurs. Voye^ ces fourneaux dans la vignette ,
fig. z. & Z. à droit & à gauche. Ce fourneau eft fait
de la terre dont fe fervent les fournaliftes pour la fa-
brique des creufets , mais moins fine ; elle eft compo-
fée de ciment de pots à beurre caffés , & de terre
glaife pétris enfemble : la grandeur eft de dix-huit à
vingt pouces de hauteur, lur dix à douze de diamètre,
& deux piés ÔC demi de long;ileft féparé en deux dans
fa hauteur par une grille qui peut être indifférem-
ment de terre ou de fer. On pofe le bois fur cette
grille ; la partie inférieure D fert de cendrier : la fa-
ce fupérieure eft percée d'un trou rond B d'environ
dix pouces de diamètre ; ce trou rond eft environné
d'une eipece de bourlet qui iupporte la chaudière de
fer A , fig. g. on appelle cette chaudière cueillere.
Cette cueillere eft divilée en deux ou trois portions
comme on voit ; ces divifions iervent à contenir des
matières de différentes forces ou qualités , liiivant
les ouvriers qui y travaillent, 6c chaque ouvrier
puife dans la divition qui contient la compofition
dont il a befoin.
Le fourneau a encore une autre ouverture H , à
laquelle on adapte un autre tuyau de tôle qui porte
les fumées hors de l'attelier , comme on voit dans
la vignette. Tout ce fourneau eft porté lur un banc
F G G G , au milieu de la hauteur duquel on a pra-
tiqué une tablette F, qui fert à placer différens uf-
tenfiles.
A côté du fourneau on range plufieurs autres
bancs , tels qu'on les voit dans la vignette , 6c au bas
de la Plan. fig. 11. ce font des efpeces de tables dont
le deffus eft à hauteur d'appui ; ces bancs font envi-
ronnés d'un rebord ; ils doivent être de deux ou trois
pouces moins hauts que ia partie fupérieure du four-
neau, à un des côtés duquel ils doivent s'arranger
comme on voit dans la vignette. On a une plaque de
tôle ou de fer , qu'on place de manière qu'elle porte
d'un bout fur le fourneau, & de faut; e iur le banc.
L'ulage de cette tôle eft de ramaffer les gouttes d : ma-
tière fondue qui s'échappent de la cuilliere , ■
l'ouvrier rejette du moule quand il eft trop plein.
Quand l'ouvrier veut fondre un caractère , il prend
le moule préparé comme nous avons dit, & comme
on le voit fig. 1. de la main gauche, il place l'exné-
mitédel'arc ou archet dan-* l'entaille quenous avons
dit être à la partie inférieure de la matrice , afin
qu'elle s'applique exactement contre les longues pie-
ces & les parties l'aillantes des blancs : il pre
fuite les deux moitiés du moule , de manière que les
regiitres foient bien placés contre les faces Lai
de la matrice ; & il enduit fiiperficiellerrjeriî le tond
du jet d'un peu d'ocré délaye dans
quand la lettre eft extrêmement fine. Cel I
couler le métal promptement , 6c le précipite ai I
du parallélépipède vuide, avant que rafraîchi parle
contael de la furface des pièces qui tonnent cet ef-
pace vuide , il ait eu le teins de le figer 6; de s arrê-
ter. On fe fert de la même précaution dans l'ufage
du moule à régler, dont nous parlerons pli
Comme dans ce moule le métal a iouvent plus d'e-
paiilêur, & qu'il a beaucoup de chemina parcourir,
il n'en eft que plus difpoie à fe figer , 6c à ne pas dei-
656
CAR
cendre jufqu'au fond du moule : c'eft pourquoi 1 on
ne le contente pas feulement d'enduire le jet d'ocre
délayé , on en enduit même toute fa furrace inté-
rieure , d'une couche à la vérité la plus légère qu on
peut : mais revenons à la fonte des caractères.
Tout étant dans cet état , le Fondeur puile avec la
cuilliere à verfer qu'on voit fig. ij- «ne quantité de
métal fondu qu'il jette par l'efpece d'entonnoir que
nous avons dit avoir été formé par les jets. Le métal
fluide defeend dans le prifme vuide que laiflent en-
tre elles les faces des longues pièces 6c des blancs ,
& fe répand fur la furface de la matrice dont il prend
toutes les formes ; de manière que quand on l'en tire,
il en- parfaitement femblable au poinçon qui a lervi
à la former. Il rapporte aufli en creux l'impreffion
du demi-cylindre ab, fixé à une des longues pièces,
& dont nous avons parlé plus haut. Ce creux qu on
appelle cran , doit toujours être à la race qui répond
à la partie fupérieure de la lettre : il lert aux Impri-
meurs à connoître fi la lettre eft du lens dont elle
doit être , ou fi elle eft renverfée. Voye^C article Im-
primerie. Les deux opérations de puiler dans le
moule avec la cuilliere & de verfer dans le moule ,
font repréfentées/^. 3. 6- 6. de la vignette.
Il y a ici une chofe importante à oblerver ; c en
que dans le même infiant que l'on yerfe la matière
dans le moule , on doit donner à celui-ci une lecoufie
en-haut , afin que la matière qui defeend en lens con-
traire , frappe avec plus de force le fond de la matri-
ce , & en prenne mieux l'empreinte.
Après que l'ouvrier a verfé fon inétal , il remet fa
cuilliere fur le fourneau , & il fe difpofe à ouvrir le
moule : pour cet effet , il commence par déplacer
l'arc ou archet , ou le reflbrt de l'entaille de la ma-
trice , & le placer dans un cran fait au bois fous le
heurtoir. Il ouvre le moule en léparant les deux moi-
tiés ; & s'il arrive que la lettre refte adhérente à l'une
des moitiés , il la détache avec le crochet qui eft fixé
fur l'autre , ce qui s'appelle décrocher. C'eft ce qu'e-
xécute la/£. 8. delà vignette : après quoi il referme
le moule , replace l'arc fous la matrice , yerfe de la
matière , 6c recommence la même opération julqu'à
trois ou quatre mille fois dans un feul jour.
Il ne faut pas s'imaginer que la lettre au fortir du
moule foit achevée , du moins quant à ce qui regar-
de fon corps ; car pour le caraûere il eft parfait ; il
eft beau ou laid , félon que le poinçon qui a lervi à
former la matrice a été bien ou mal gravé.
Quelle que foit la figure d'un caractère , les contre-
poinçons , les poinçons , les matrices, &c la fonte en
eft la même ; ÔC il n'y a dans toutes ces opérations
aucune différence de l'Arabe, au Grec, au François ,
à l'Hébreu , &c.
La lettre apporte avec elle au fortir du moule une
éminence de matière de forme pyramidale , adhéren-
te par fon fommet au pié de la lettre. Cette partie de
matière qu'on appelle jet, eft formée de ^'excédent
de la matière néceffaire à former les caractères, qu'on
a verfée dans le moule. On la fépare facilement du
corps de la lettre , au moyen de l'étranglement que
les plans inclinés des parties du moule appellées jets,
y ont formé , ainfi que nous avons dit plus haut , &
qu'on voit fig. z. Planche II. D'ailleurs la compofi-
tion que l'addition de l'antimoine rend caftante , pref-
que comme de l'acier trempé , facilite cette fépara-
tion ; le jet féparé de la lettre s'appelle rompure.
Après que toutes les lettres font rompues , c'eft-
à-dire, qu'on en a féparé lesy'titt, qui le remettent à la
fonte ; on les frotte fur une meule de grès qu'on voit
fig- y- PL- LU- & qu'on appelle pierre à frotter. Cette
meule a depuis quinze julqu'à vingt-cinq pouces de
diamètre ; elle eft de la même forte que celles dont
fe fervent les Couteliers pour émoudre. Pour la ren-
dre propre à l'opération du Fondeur en caractère 3 on
CAR
en prend deux qu'on met à plat l'une fur l'autre ; on
répand entre elles du fable de rivière , puis on les
meut circulairement , répandant de tems en tems de
nouveau fable, julqu'à ce que les petites éminences
qui font à ces pierres foient grugées , & qu'on ait
rendu leurs liufaces planes & unies. Le fable en dref-
fant les grès ou meules , ne les polit pas ; il y lailfe
toujours de petits grains qui fervent à enlever aux
caractères les bavures qui leur viennent de la fonte.
On ne peut pas frotter toutes les lettres ; il y eu
a , mais en plus grand nombre dans l'italique que
dans le romain , dont une partie de la figure excède
le corps du côté qu'on frotte. Il eft évident que fi on
les frottoit , la pierre emporteroit cette partie , & ef-
tropieroit la lettre : c'eft pourquoi on commence
parla dégager légèrement , & par en enlever un peu
de matière avec un canif, afin qu'elle puilîe le loger
facilement dans l'efpace vuide que lui présentera
une lettre voiline. Cette opération par laquelle on
dégage la partie faillante au canif, s'appelle crener.
Après que la lettre eft crenée , on la ratifie 6c on-
emporte avec le canif tout ce qu'il y a d'étranger
au corps depuis l'œil julqu'au pié. Ces deux opéra-
tions luppléent au frottement ; les lettres crenées &
ratifiées s'accolent 6c le joignent aulfi-bien que li
elles avoient été frottées. Les deux faces du carac-
tère que l'on frotte fur la meule , font celles qui s'ap-
pliquent aux blancs du moule , quand on y verfe le
métal ; on donne cette façon à ces faces pour en en-
lever le morfil ou la vive arrête occafionnée tant par
la face du blanc d'une des moitiés , que par celle de
la longue pièce de l'autre moitié.
Lorlque les lettres ont été frottées ou crenées &
ratifiées , on les arrange lur un compofteur ; le com-
pofteur qu'on voit fig. 5. PL III. de la Fonderie des
caractères , eft une règle de bois entaillée , comme on
voit , lur laquelle on arrange les caractères la lettre
en-haut , ôc tous les crans tournés du même côté ;
enlorte qu'on a tous les a , rangés en cette maniè-
re, a , a , a , a , a, a, 6c non en celle-ci ava , vav ,
& ainfi des autres lettres : c'eft ce que l'infpe&ior»
des crans indiquera tacilement. Les caractères ainli
rangés dans le compofteur font tranfportés fur la rè-
gle de fer A B dujujlijîeur,fig. 3. même Planche ; on
les y place de manière que leur pié foit en-haut , &
que le caractère porte fur la face horifontale du jufti-
fieur , qui n'eft lui-même , comme on voit , qu'un
compofteur de fer. A cette règle , on en applique une
autre CD , qui a un épaulement en C , comme celui
que l'on voit en B de la première pièce fig. 3. cette
re -de a de plus en C & D , de petites languettes qui
entrent dans les mortoifes a & b de \z figure 3 , enlor-
te que, quand les deux règles fig. 3. 6c 4. font ap-
pliquées l'une fur l'autre, elles enferment exacte-
ment la rangée de caractères placée fur la première
règle ; ainli il n'y a que les pies des lettres qui ex-
cédent d'environ une ligne au-defius des règles de
fer, qui forment le juftifieur.
Le juftifieur ainli garni d'une rangée de caractères ,'
eft placé entre les deux jumelles AB , CD du cou-
poir qu'on voit fig. 1 . Planche III. Le coupoir eft une
forte d'établi tres-folide : fur fa table font fortement
fixées la jumelle AB , qui eft une planche d'un bon
pouce d'épailleur , & la barre de fer FE , qui a un
crochet £ 6c un crochet F à chacune de fes extré-
mités. Le crochet F eft taraudé 6c reçoit une vis ,
au moyen de laquelle on peut faire avancer la fé-
conde règle du juftifieur, que nous avons décrite ci-
defius.
Les deux règles du juftifieur font ferrées l'une
contre l'autre par l'autre jumelle CD , repréientée
par fa partie inférieure dans la fig. z. A B , C D {ont
deux fortes barres de fer, dont les crochets A, C,
entrent dans la table du coupoir. B D eft une autre
barre
CAR
barre de fer qui porte un écrou qui reçoit la vis FE ,
que l'on tourne comme celle d'un étau , par le moyen
du manche F G. Tout cet aflemblage eft fixé à la ta-
ble du coupoir , enforte que la jumelle C D tirée ou
pouffée par la vis FE , peut feule fe mouvoir.
Il fuit de cette defeription du coupoir , que fi l'on
tourne la vis E F,fig. 2. on fera marcher la jumelle
mobile AB , vers la jumelle immobile CD, fig. 1.
& que par conféquent on fera appliquer les deux rè-
gles du juftifieur contre la rangée de caractères qu'elles
contiennent. Mais pour ferrer les caractères les uns
contre les autres , on fera tourner la vis Ff. Cette
vis fera couler la féconde règle du juftifieur le long
de la rangée de caractères , jufqu'à ce que fon épaule-
ment Cfig. 4. rencontrant la rangée de caractères , les
preffera & les pouffera vers l'épaulement B de la
première pièce fig. J. jufqu'à ce qu'ils foient tous
exactement appliqués les uns contre les autres. Cela
fait, il eft évident que les caractères formeront com-
me un corps folide contenu par les deux extrémités
entre les épaulemens des deux pièces du juftifieur ,
& félon fa longueur entre les mêmes pièces , par Fac-
tion des deux jumelles.
Mais avant que de confolider ainfi la rangée de
caractères, on parle un morceau de bois dur fttr leurs
extrémités raillantes ou fur leurs pies , afin de les en-
foncer toutes également , &c d'appliquer leur tête ,
ou la lettre , contre la furface de la règle horifontale
du juftifieur.
Lorfque tout eft ainfi difpofé, on coupe les caractè-
res avec le rabot , de la manière que nous allons dire.
L'inftrument qu'on voit Planche III. de la Fondent
tn caractères , fig. 6. eft appelle rabot. Il eft compefé
d'un fût de fer , qu'on voit fig. 10. Sous la partie NO
de ce fut, font arrêtés avec des vis les deux
Ce , Df. Cet aflemblage eft furmonté d'un bois P Q
qu'on voit fig. 8. ce bois fert de poignée au rabot. Il
le fixe fur la partie NO , fig. 10. comme on l'y voit
fixé, fig. 6. Le fer AB du rabot fe place fur la face
inclinée du fût, par les deux vis G Î7 taraudées, bc
entrant dans les collets que le fer traverfe,& qui font
eux-mêmes fixés fur le fût par la vis que l'on voit en
R. Toutes ces pièces affemblécs forment le rabot de
la fig. G. Les vis fe ferrent- avec le tourne-vis de la
fig. 16'. même Planche III.
Quand on veut couper les lettres , on place le ra-
bot fur le juftifieur, enforte que les parties l'aillantes
des lettres foient entre les guides du rabot ; on hauffe
ou l'on baiffe le fer , qui eft un peu arrondi par fon
tranchant , enforte qu'il puiffe emporter autant de
matière que l'on fouhaite.
Les reglemcns ont ftatué fur la hauteur des lettres ;
il eft ordonné que la lettre portera , depuis fa furface
jufqu'à l'extrémité de fon pié , dix lignes & demie de
pié de roi. Cette hauteur n'eft pas la même par-tout ;
la hauteur de Hollande a près d'une ligne de plus que
celle de Paris ; celles de Flandre , & même de Lyon ,
ont plus de dix lignes. Au refte , lorfque des Impri-
meurs , fans aucun égard pour les ordonnances , veu-
lent des caracLus au-deffus ou au-deffous de dix li-
gnes 6c demie , on a de petites pièces qu'on ajufte au
moule à fondre les caractères , entre le jet Se les lon-
gues pièces.
Ces pièces s'appellent h.-uffes ; félon que les hauf-
fes font plus ou moins épaifîes , un même moule fert
à fondre des caractères plus ou moins hauts de papier ;
c'eft l'expreffion dont on fe fert pour deligner la di-
menfion dont il s'agit ici.
Le fer du rabot étant convexe , les caractères cou-
iront tous une petite échancrure concave, de
manière qu'étant pôles fur leurs pies , ils ne porte-
ront, pour ainii dire, que fur deux lignes, au lieu de
porter fur une furface. On a pratiqué cette con
cavité aux pics des caractères, afin qu'ils s'arrangent
Tome II.
CAR
657
mieux fur le marbre de la preffe, fur lequel expofant
moins de furface , ils font moins fujets à rencontrer
des inégalités.
Mais ce retranchement de matière n'eft pas le feul
qui fe faffe avec le rabot ; on eft contraint d'enlever
encore de l'étoffe au haut du caractère, comme on peut
le voir en B, figure 14. Ce retranchement fe fait des
deux côtés aux lettres qui n'ont ni tête ni queue, 6c
feulement du côté oppofé à la queue , lorfque les ca-
ractères en ont une. Le but de cette opération eft de
dégager encore mieux l'œil du caractère. On voit en
effet, fig. 14. que le caractère B eft plus taillant que
le caractère A , quoiqu'ils ayent été fondus l'un &£ l'au-
tre dans le même moule.
La machine repréfentéey?"'//^ 14. & qui contient
les deux caractères AtkB dont nous venons de parler,
s'appelle Jufiificationj elle fert à connoître , par le
moyen du petit reglet qu'on -voit figure ij. & qu'on
appelle Jetton ) fi les traits des lettres fe trouvent tous
fur une même ligne. Pour cet effet, après avoir jufti-
fîé les lettres mm, que nous avons dit être la première
lettre que l'on fabrique , on place un a , par exemple ,
entre les deux m, en cette lortc mam, & Ion examine
fi l'arrête du jetton s'applique également fur les trois
caractères.
Le morceau de glace, fig. iz. & fon jetton , fig. 1.
fervent à jauger de la même manière les épaiffeurs ,
ôc l'une & l'autre de ces deux machines indique pa-
reillement , par l'application du jetton , fi les traits
des lettres fe trouvent tous exactement dans la même
ligne droite , comme nous venons de dire.
On entend par une fonte de caractères d'Imprimerie, un
affortiment complet de toutes les lettres majufcules ,
minufcules, accents, points, chiffres, &c. néceffaires
à imprimer un difeours , & fondues fur un feul corps.
Le corps eft une épaifleur jufte & déterminée , re-
lative à chaque caractère en particulier ; c'eft cette
épaifleur qui fait la diftance des lignes dans un livre,
& qui donne le nom au caractère , & non l'œil de la
lettre ; cependant pour ne rien confondre on dit fon-
dre un Cicero fur un corps de S. Auguflin , quand on a
pris ce moyen pour jetter plus de blanc entre les
lignes.
Mais pour fe faire une idée jufte de ce qu'on appel-
le en Fonderie de caractères ou en Imprimerie , corps ,
ail , & blanc , prenez une diftance ou ligne quelcon-
que , (uppofez-la divifée en fept parties égales par
des lignes parallèles ; fuppofez écrite entre ces lignes
parallèles une des lettres que les Imprimeurs appel-
lent courtes , telles que Va , le c , Vm , &c. car ils ap-
pellent les lettres à queue, telles que le/>, le q , le d ,
lettres longues. Suppofez-la tracée entre ces parallè-
les de manière qu'elle ait fa bafe appuyée fur la troi-
fieme parallèle en montant , & qu'elle touche de fon
fommet la troilieme parallèle en defeendant, ou ce
qui revient au même , que des fept intervalles égaux
dans lefquelles vous a\ ;ne, elle occu-
pe les trois du milieu ; il eft évident qu'il reliera au-
deflus de ces trois intervalles occupés, deux cfpaces
-, & qu'il en reliera a. m ides au-def-
fous. Cela bien compris , il ne fera pas difficile d'en-
tendre ce que c'elt que le Vccil , le corps, tk le blanc.
Le corps eft repréfenté par la ligne entière ; Vailoc-
les trois cfpaces du milieu, c'eft la hauteur
même de la lettre ; & l'on entend par les blancs , les
deux cfpaces qui relient vuides au-defl'ous ce au-del-
fus de lœil.
A
C
Exemple.
la ligne AB, re-
prélentela hau-
teur du corps;
C D , le blanc
d'en-haut ;DE,
l'œil; E F, le blanc d'en-bas. CD, forme dans une
OO00
658
CAR
page imprimée la moitié de l'efpace blanc qui eft
entre une ligne & la fupérieure ; & E F, la moitié
de l'elpace blanc qui eft entre la même ligne & l'on
intérieure.
Il y a des lettres qui occupent toute la hauteur
du corps , telle eft l'y conibnne avec ion point , com-
me on voit dans l'exemple , les Q capitales en ro-
main , & les f&cf en italique, ainfi que les lignes
(,§,*[, ^-
Dans les lettres longues, telles que le d & le q,
il faut diftinguer deux parties, le corps & la queue;
le corps occupe les trois intervalles du milieu , de
même que les lettres courtes , & la queue occupe
les deux intervalles blancs , l'oit d'en-haut , loir d'en-
bas , le'on que cette queue eft tournée. Voyt{ dans
l'exemple le d & le q. S'il fe trouve dans une ligne
un q, & dans la ligne au-deffous un d, qui corref-
ponde exactement au q , il n'y aura point d'inter-
valle entre les queues : les extrémités de ces queues
lé toucheront , d'où il s'enluit que voilà la hau-
teur relative des corps & celle des caractères déter-
minée ; que refteroit-il donc à faire pour que la
Fonderie & l'Imprimerie fuffent aliùjeties à des rè-
gles convenables? finon de déterminer la largeur
des lettres ou caractères , relativement à leur hau-
teur : c'eft ce que perfonne n'a encore tenté. On eft
convenu que la hauteur du corps étant divifée en lépt
parties égales , la hauteur du caractère , de Y m , par
exemple , feroit de trois de ces parties ; quant à la
largeur , chacun fuit ion goût & fa fantaifie ; les uns
donnent au caracleree ou à l'œil , une forme plus ou
moins voifine du quarré que les autres.
Nous invitons M. Fournier , à qui nous devons la
table des rapports des corps entr'eux , à nous donner
la table des proportions des caractères entr'eux dans
chaque corps. Elle eft bien auflî importante pour la
perfection de l'art de la gravure en caractères , que
la première pour la perfection & commodité de l'art
d'imprimer.
Il pourra pour cet effet, confulter les règles que
les grands écrivains à la main fe font preferites, &
celles que les plus habiles graveurs ont fuivies par
goût.
Une obfervation qui fe préfente naturellement
& qu'on ne fera pas fâché de trouver ici, c'eft qu'il
y^a quelque rapport entre l'impreffion & le génie
d'une langue ; par exemple , l'Allemand eft extraor-
dinairement diffus ; auiîi n'y a-t-il prefque point de
blanc entre les lignes , & les caractères font-ils ex-
trêmement ferrés fur chaque ligne : les Allemands
tâchent de regagner par là , l'elpace que la proli-
xité de leur didion exigeroit.
Les expreffions œil , corps , blanc, caractère fondu
fur un corps d'' un autre caractère , Sec. ne doivent plus
rien avoir d'obfcur.
On difoit corps foible & corps fort , dans le tems
qu'on ignoroit la proportion que les yeux des carac-
tères dévoient avoir avec leurs corps , & celle que
les corps & les caractères dévoient avoir avec d'autres
corps & caractères. Cène ignorance a duré parmi nous
mfqu'en 1742, que M. Fournier le jeune, graveur &
fondeur de caractères , propofa fa table des rapports
des différens corps des caractères d'Imprimerie. Nous
ne tarderons pas à en faire mention. Nous obferve-
rons en attendant , qu'avant cette table on n'avoit
aucune règle fûre pour l'exécution des caractères; cha-
que Imprimeur commandoit des caractères fuivant les
modèles qu'il en trouvoit chez lui, ou qu'il imagi-
noit. Aucun n'ayant l'idée foit du corps ibit de l'œil ,
par exemple, d'un véritable Cicéro, ce caractère avoit
autant de hauteurs de corps & d'œil différentes qu'il
y avoit d'Imprimeries , & s'appelloit ici foible, là
fort ; ici petit œil , là gros œil.
On dit une fonte de Cicéro 3 de Petit-Romain } &c.
CAR
lorfque ces caractères ont été fondus fur les corps de
leurs noms. Les fontes iont plus ou moins grandes ,
fuivant le beibin ou le moyen de l'Imprimeur qui les
commande, par cent pelant ou par feuilles. Quand
un Imprimeur demande une fonte de cinq cents , il
veut que cette fonte , bien affortie de toutes fes let-
tres , pefe cinq cents. Quand il la demande de dix
feuilles , il entend qu'avec cette fonte on puifle com-
pofer dix feuilles ou vingt formes , lans être obligé
de difiribuer. Le Fondeur prend alors fes mefures ; il
compte cent- vingt livres pelant pour la feuille, y
compris lesquadrats &£ eipaces, oufoixantepour la
forme, qui n'eftque la demi-feuille. Ce n'elt pas que
la feuille pefe toujours cent vingt livres , ni la forme
foixante ; tout cela dépend de la grandeur de la for-
me , Se on iuppoie toujours qu'il en refte dans les
cafés.
S'il n'entre pas dans toutes les feuilles le même nom-
bre de lettres , ni les mêmes fortes de lettres , il eft
bon de remarquer que , comme il y a dans une lan-
gue des fons plus fréquens que d'autres , & par con-
iéquent des fignes qui doivent revenir plus liéquem-
ment que d'autres dans l'ufage qu'on en fait en im-
primant , une fonte ne contient pas autant d'à que
de b , cftitant de b que de c , & ainli de fuite. La .-
termination des rapports en nombre , qu'il faut met-
tre entre les différentes fortes de caractères qui for-
ment une fonte, s'appelle la police. Il eft évident que
la police peut varier d'une langue à une autre , mais
qu'elle eft la même pour toutes fortes de caractères em-
ployés dans la même langue. Pour donner une idée
de la police dans notre François , foit , par exemple ,
demandée une fonte de cent mille lettres. Pour rem-
plir ce nombre de cent mille caractères , on prendra
les nombres fuivans de chacun. L'expérience a rélolu
chez les Fondeurs un problème, dont on auroit trou-
vé difficilement ailleurs une foluîion exacte. J'efpere
que les Philofophes & les Grammairiens jetteront les
yeux, avec quelque fatisfaction, fur cette table , &
en délireront de lemblables du Latin , du Grec , de
l'Anglois , de l'Italien , & de la plupart des langues
connues. Pour fe les procurer , ils n'ont qu'à s'adref-
fer aux Fondeurs en caractères des différens pays où
ces langues font en ufage.
Police pour cent mille lettres définies à une impreffion
Françoife ordinaire.
Le lecteur s'appercevra facilement qu'elle ne con-
tient que les lignes grammaticaux , & qu'il ne s'agit
ici que de ceux-là; & que par conféquent cette po-
lice n'elt pas particulière à un livre ou d'algèbre, ou
d'arithmétique, ou de chimie ; mais qu'elle convient
feulement à un difeours oratoire , à la poèfre , &c.
Bas d: Café.
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luttions.
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O. .
150.
CAR
6)9
S'il eft évident que la même police ne convient
pas à toute langue , il ne l'elr pas moins qu'elle con-
vient à tout caractère , de quelque corps que ce foit ,
clans une même langue.
Il y a dans l'Imprimerie , ou plutôt dans la Fon-
derie en caractères, vingt corps différens.
Chacun de ces corps a ion nom particulier & dif-
îinftif , propre aux caractères fondus fur ces corps. Le
plus petit le nomme Parif enne, & en delcendant de
la Parilienne jufqu'aux caractères les plus gros , on a
la Nompareille , la Mignone, le Petit-Texte , la Gail-
larde , le Petit-Romain , la Philofophie , le Cicéro ,
le Saint-Auguftin , le Gros-Texte, le Gros-Romain ,
le Petit-Parangon , le Gros-Parangon, la Pale-lime,
le Petit-Canon , le Trifmegilte, le Gros-Canon , le
Double-Canon, le Triple-Canon , la Groffe-Nom-
pareille ; voye\ les articles de ces caractères à leurs
noms particuliers, & ci-après les modèles de ces ca-
ractères dans les Planches placées à la fin de cet ar-
ticle. Ces Planches ont été compofées fur les carac-
tères de M. Fournier le jeune , de qui nous tenons auffi
tous les matériaux qui forment cet article & les au-
tres articles de la Fonderie en caractères. Nous pour-
rions bien affùrer que notre Ouvrage ne laiffcroit rien
;i délirer d'important fur les Arts, fi nous avions tou-
jours rencontré des gens auiîi attachés au progrès de
leur art, aufïï éclairés , & auiîi communicatifs que M.
Fournier le jeune. Une oblervation que nous avons
cté cent lois dans le cas de faire , c'eft qu'entre les
ouvriers qui s'occupent d'un même art, les ignorans,
& entre les ouvriers qui s'occupent de différents
arts, ceux dont les métiers étoient les moins étendus
&; les plus vils, fc font toujours montrés les plus myf-
iéricux , comme de raifon.
Ces corps fe fuivent par degrés ; les uns fe trou-
Vent julte , le double, le tiers , le quart, &c. des au-
tres, de manière que deux ou plufieurs combinés cn-
fcmble, rempliflent toujours exactement le corps ma-
jeur qui eit en tête de la combinaifon ; régularité bien
cffcntielle à l'Imprimerie.
Mais pour établir entre les corps la corrcfpondan-
Torne II.
ce dont nous venons de parler, & qui fe remarquera
bien dans ia table des rapports ci-jointe , M. Four-
nier a été obligé de créer un corps exprès appelle le
Gros-Texte , qui équivaut à deux corps de Petit-Tex-
te , & d'en faire revivre deux autres qui n'éfoient
point connus ou qui l'étoient peu, la PaUJiine & le
TnfmêgifU. Le premier fait les deux corps de Cicéro ;
le caractère le plus en ufage dans l'Imprimerie ; & le
fécond fait les deux points du Gros-Romain.
Sans ces trois corps la correspondance efî inter-
rompue. On a placé dans la table qui fuit , dans la
première colonne , les noms de ces corps , & dans
celle du milieu , les corps auxquels ils équivalent.
Quand on rencontre le figne || dans un des arti-
cles de la colonne du milieu, il faut entendre que le
nombre des corps qui rempliroient celui qui eit en
marge va changer, & que ce font d'autres corps qui
vont fuivre,& dont lafomme feroit équivalente au
feul corps qui elt dans la première colonne.
Mais ce n'étoit pas afTez d'avoir fixé le nombre
des corps des caractères à vingt , & d'avoir établi les
rapports que ces vingt corps dévoient avoir entr'eux ;
il falloit encore donner la grandeur abiolue d'un de
ces corps , n'importe lequel. Pour cet effet , M. Four-
nier le jeune s'en: fait une échelle, d'après le conleil
des perfonnes les plus expérimentées dans l'Art.
Cette échelle efl compofée de deux parties qu'il
appelle pouces ; ces deux pouces ne font pas de la
même longueur que les deux pouces de pie de Roi.
Nous dirons plus bas quel elt le rapport du pouce de
fbn échelle , avec le pouce de pie de Roi. Il a divifé
fon pouce en trois lignes , & fa ligne en trois points.
On voit cette échelle au haut de la table qui fuit.
Cette table elt divifée en quatre colonnes :
La première marque en chiffres l'ordre des carac-
tères.
La féconde , les noms de ces caractères & leur équi-
valence en autres caractères.
La troifieme & quatrième , leurs hauteurs en par»
ties de l'échelle.
Proportions des différens corps de caractères de l'Im-
primerie , fuivant S. P. Fournier.
Echelle de deux pouces.
I 1 I I lnl,!i,l,U
1 1 1 1 1 1 1 1 iTT
llgn. points.
1. Parijtcnne o
2. Nompareille 1
3. Mignone 1
4. Petit-Texte 1
y Gaillarde I
6. Petit-Romain , 2 Pariliennes 1
7. Philofophie, 1 Parilienne, 1 Nompareille. 1
8. Cicéro, 2 Nompareillcs. || 1 Parifienne,
1 Mignone. 2
9. Saint-Augujlin , 2 Mignones. || 1 Nom-
pareille , 1 Petit-Texte. 2
10. Gros-Texte , 2 Petit -Textes. Il 1 Parif.
1 Philofophie. I 1 Nompareille, 1 Petit-
Romain. | 1 Mignone, 1 Gaillarde. Il 2
Pariliennes, 1 Nompareille. 2
11. Gros-Romain, 2 Gaillardes. || 3 Nomp.||
1 Nomp. 1 Cicéro. | 1 Mign. 1 Philof. |
1 Petit-Texte, i Petit-Rom. Il 2 Parif.
1 Petit-Texte. || 1 Parif. 1 Nompar.
1 Mignone. J
12. Petit-Parangon, 2 Petit-Rom. I 4 Parif. j|
1 Nomp. 1 Saint- Augult. I 1 Pet. Texte,
1 Cicéro. | 1 Gaillarde , 1 Philofop. 1 1
2 Parif. 1 Petit -Romain. I 2 Nompar.
1 Pet. Texte. I iMignones, 1 Nomp.||
1 Parif. 1 Nompar." 1 G.iill. | 1 Parif-
j Mijinone, 1 Petit-Texte. j
O O o 0 ii
CGo
CAR
13. Gros-Parangon, 2 Philofoph. I| 1 Nomp,;
1 Gros-Texte. | 1 Petit Texte , 1 Saint-
Auguftin. I 1 Pet. Rom. 1 Cic. || 2 Parif,
1 Cic. | 2 Nomp. 1 Pet. Rom. | 2iMign.
1 Petit-Texte. I 2 Pet. Texîes, 1 Nomp.||
1 Parif. 1 Nomp. 1 Philofoph. 1 1 Nomp.
1 Mign. 1 Gaill. || 2 Parif. 2 Nomp. |
3 Parifienne , 1 Mignone. 3 4
\14.PaleJline, 2Cicéros.| 3 Pet.Textes. | 4
Nompareill. || 1 Nomp. 1 Gros-Rom. |
1 Petit-Texte, 1 Gros-Texte. | 1 Petit
Rom. 1 Saint-Aug. || 2 Parif. 1 S.Aug.|
2 Nomp. 1 Cic. I 2 Mign. 1 Pet. Rom. |
2 Gaill. iNomp. || 1 Parif. 1 Mignone,
1 Cic. | 1 Parif. 1 Gaill. 1 Petit-Rom. I
1 Nompar. 1 Mignone , 1 Philofoph. |
1 Nomp. 1 Petit-Texte , 1 Petit-Rom. I
1 Mign. 1 Pet.Text. 1 Gaill. || 2 Parif.
2 Mignones. | 3 Parif. 1 Gaillarde. 4 o
15. Petit-Canon, 2 Saint-Aug. | 4 Mign. ||
1 Nomp. 1 Gros-Parangon. | 1 Petit-
Texte , 1 Petit-Parang. | 1 Petit-Rom.
1 Gros-Rom. j 1 Cic. 1 Gros-Texte. ||
2 Parif. 1 Gros-Romain. | 2 Nompar.
1 Gros-Texte. | 2 Mign. 1 Saint-Aug. |
2 Petit-Textes, 1 Cic. | 2 Gaill. 1 Petit-
Rom. | 2 Petit-Rom. 1 Petit-Texte. |
2 Philofoph. 1 Nomp. || 2 Parif. 2Gail.|
2 Nomp. 2 Pet.Text. | 2 Parif. 3 Nomp.|
3 Nomp. 1 Pet. Rom.| 4 Parif. 1 Petit-
Text. il 1 Parif. 1 Mign. 1 GrosText.|
1 Nomp. 1 Pet. Text. 1 S. Auguft. j
1 Parif. 1 Gaill. 1 S. Aug. | 1 Parif.
1 Philofop. 1 Ciel 1 Nomp. 1 Petit-
Rom. 1 Cic.| 1 Mign. 1 Gaill. 1 Cic.||
2 Nomp. 1 Mign. 1 Gaill. I 2 Mign.
1 Nomp. 1 Pet. Text. 4 4
16 Trifmegijle , 2 Gros-Rom. | 3 Ciceros|
4 Gaillardes I 6 Nompareilles 1 1 1 Petit-
Text. 1 Petit-Canon | 1 Cic. 1 Paleft.|
1 S. Aug. 1 Gr. Parang.| 1 Gr. Text.
1 Pet. Parang. 6 o
(On peut encore augmenter de beaucoup
Pajfemblage de ce corps & desfuivans.)
17 Gros-Canon, 2 Gr-Parang.| 4 Philofoph. ||
1 Pet. Text. 1 Trifmégifle| 1 Gr. Text.
1 Pet. Canon. 1 1 Pet. Parang. 1 Paleft. 7 2
18 Double-Canon, 2 Pet. Canons. 1 4 S. Aug.|
8 Mign. Il 1 Cic. 1 Gr. Canon. | 1 Petit-
Parang. 1 Trifmég. 9 2,
19 Triple-Canon, 2 Trifmégiftes. | 4 Gros-
Romains. H 6 Ciceros. 8 Gaillardes. |
12 Nomp. | 1 Gr. Text 1 Double-
Canon. | 1 'Pet. Can. 1 Gr. Can. 12 o
20 Grojfe-NompareUle, 4 Paleft. | 8 Cicéros.|
12 Petits-Textes. | 16 Nompareilles. ||
1 Paleft. 1 Triple-Canon. 16 0
C'eft un fait affez fimple qui a conduit M. Fournier
à la formation de fa table des rapports des caractères :
un Imprimeur demande , par exemple , un Cicéro au
Fondeur, & envoyé en lettres un échantillon fur le-
quel il veut que ce Cicéro foit fondu. Un autre Im-
primeur demande auffi un Cicéro ; & comme c'eft
un caractère de même nom qu'il faut à tous les deux ,
on croiroit que ce caractère eft auffi le même ; point
du tout : l'échantillon de l'un de ces Imprimeurs elt
ou plus grand ou plus petit que l'échantillon de l'au-
tre , & le Fondeur le trouve dans la néceffité ou de
réformer fes moules , ou même d'en faire d'autres ;
ce qui peut être pouiTé fort loin , ainfi que toutes les
chofes de fantaifie. Il femble que les écrivains ayent
été plus d'accord entr'eux, qu'on ne l'eft dans l'Im-
primerie fur la hauteur & fur la largeur des caractè-
res. Ils on; commencé par convenir des dimenfions
CAR
du bec de plume ; enfuite ils ont fixé tant de becs dé-
plume pour chaque forte de caractère.
En formant fa table des rapports , il paroît que
M. Fournier le jeune eft entré dans les vues de l'edit
du Roi , du 28 Février 1723 , portant un règlement
pour l'Imprimerie, qui femble fuppofer cette table.
Exemple. Quand le règlement ordonne , que UGros-
Romainfoit équivalent à un Petit-Romain & à un Petit-
Texte , qu'eft ce que cela doit lignifier ? quel Petit-R.o-
main^ & quel Petit-Texte choilira-t-on ? ils lont par-
tout inégaux. En preferivant cette règle , on imagi-
noit donc ou qu'il y avoit une table des rapports des
caractères inftituée , ou qu'on en inftitueroit une. Mais
quand on auroit eu pour les caractères une grandeur
fixe & déterminée , on n'auroit pas encore atteint à
la perfection qu'on fe pouvoit promettre; puifque
pour avoir l'équivalent convenable du Gros-Romain ,
ce n'étoit point un Petit-Romain & un Petit-Texte
qu'il falloit prendre : car les corps des caractères de-
vant , félon M. Fournier , aller toujours foit en dimi-
nuant fbit en augmentant dans la proportion double,
pour les avantages que nous ailons expliquer , il s'en-
fuit que le Gros-Romain a deux Gaillardes pour équi-
valent, & non pas un Petit-Romain & un Petit-Texte.
En déterminant les forces des corps , M. Fournier
a mis les Imprimeurs en état de lavoir au julte ce
qu'un caractère augmente ou diminue de pages fur un
autre caractère ; combien il faudra de lignes de Petit-
Romain , par exemple , pour faire la page in-iz. de
Cicéro ou de St. Auguftin ; combien par ce moyen ,
on gagnera ou perdra de pages fur une feuille , &£
par conléquent ce qu'un volume aura de plus ou de
moins de feuilles en l'imprimant de tel ou tel caractère.
Ces proportions établies & connues rendent le
méchaniime de l'Imprimerie plus lùr & plus propre ;
l'ouvrier fâchant la portée de fes caractères , remplit
exactement tous les efpaces vuides de fes ouvrages
fans addition ni fraction , foit dans la compofition des
vignettes , foit dans tout autre ouvrage difficile & de
goût. Il a par exemple pour relte de page un vuide
de fix lignes de Nompareille à remplir, il faura tout
d'un coup qu'il peut y fubltituer ou quatre lignes de
quadrats de Gaillarde , ou trois de Cicéro, ou deux de
gros Romain, ou un feul de Trifmégifte. Il a à choi-
fir , & tout cela remplit & fait exactement ion blanc
fans peines ni foins.
On évite par le même moyen la confufion dans
l'Imprimerie , particulièrement pour ce qu'on appelle
lettres de deux points : les lettres doivent fe trouver
exactement par la fonte , le double des corps pour
lefquels elles font les deux points ; voje^ Lettres
de deux Points : mais ces corps , foit Petit-Texte,
foit Petit-Romain, foit Cicéro, étant indéterminés,
plus forts dans une Imprimerie , plus foibles dans une
autre , il s'enfuit que ces lettres de deux points
n'ayant point de rapport fixe avec les gros corps ,
formeront une multiplicité d'épaifleurs différentes ou
de corps dans l'Imprimerie , oii l'on n'aura cepen-
dant point d'autres noms , que celui de lettres de deux
points.
Il faut pour l'ufage de ces lettres de deux points ,'
des quadrats ou efpaces faits exprès & affujettis à la
même épaifTeur:mais les rapports inftitués par la ta-
ble ramèneront tout à la fimplicité ; les lettres de
deux points de Petit-Texte feront fondues fur le
corps de Gros-Texte ; celles de Petit-Romain fur le
corps de Petit-Parangon ; celles de Cicéro , fur le
corps de Paleltine , & ainli de fuite. Il ne fera plus
nécefïaire de fondre exprès des quadrats & efpaces
pour ces lettres ; parce que ceux qui fervent pour
les caractères , qui font le double de ces corps , feront
inconteltablement les mêmes.
Nous avons obfervé au commencement de cet ar-
ticle , que l'art de la Gravure en poinçon , & de la
CAR
Fonderie en caractère , étoit redevable de fa naiffance
parmi-nous, & de les progrès , à Simon de Colines ,
Claude Garamond , Robert Grandjean, Guillaume le
Bé ; Jacques de Sanlecque , pour les 15, 16 , & 17e
iîecles , & pour le 18e à MM. Grandjean & Alexan-
dre , qui ont confacré leurs travaux à l'Imprimerie
du Roi.
L'équité &c la reconnoiffance ne nous permettent
pas de paffer fous iilence ce que M. Fournier le jeune
a fait pour le même art , depuis ces habiles Artiftes.
Il a commencé par l'article important de la table des
rapports , dont nous avons fait mention plus haut.
Cherchant enfuite ce qui pourrait être innové d'ail-
leurs avec avantage , il a remarqué que l'Imprime-
rie manquoit de grandes lettres majulcules pour les
placards , affiches , & frontiipices. Celles dont on fe
iervoit avant lui étoient trop petites & d'un goût fu-
ranné ; les lettres de bois étoient communément mal
formées, fujettes à fe déjetter , à fe pourrir, &c. Il
en a gravé de quinze lignes géométriques de haut ;
& par conséquent une fois plus grandes que celles de
fonte , dont on ufoit auparavant : il en a continué la
col eclion complette depuis cette hauteur, jufqu'aux
plus peti:es.
Il a redoublé ce travail, en exécutant des caracte-
de la même grandeur ; cette forte de let-
tre a exiitolt point dans l'Imprimerie. Les plus grol-
fes qu'on y avoit eues étoient de deux points de
Saint-Auguftin , ou Gros -Pramain , encore maigres
& mai taillées. Il ne faut pourtant pas celer qu'on
en employé de fort belles à l'Imprimerie royale ,
mais jufqu'à une certaine hauteur feulement ; 6c c'eft
d'ailleurs comme fi elles n'exiftoient pas pour les au-
tres Imprimeries du royaume.
Ces grandes majulcules ont prcfqu'étcint i'ufage
d'imprimer les affiches & frontiipices en rouge 6c
noir. Les mots que Ton veut rendre plus lenfibles le
remarquant allez par le mélange des lignes de ro-
main & d'italique dont les figures tranchent allez
l'une lur l'autre ; on a évité par ce moyen le double
tirage du rouge & du noir, & l'on a formé de plus
beaux titres.
L'Imprimerie étoit aufïï comme dénuée de ces pe-
tits ornemens de fonte qu'on appelle vignettes. Le peu
qu'on en avoit étoit fi vieux 6c d'un goût fi luranné,
qu'on n'en pouvoit prefique faire aucun ufage. M.
Fournier, à l'imitation des fieurs Grandjean oc Ale-
xandre , qui en ont exécuté de fort belles pour l'Im-
primerie du Roi , en a inventé de plus de cent cin-
quante fortes, qu'il a gravées relativement à la pro-
portion qu'il a donnée aux corps. Une figure , par
exemple, gravée pour être fondue fur un corps de
Cicéro de la moitié de fon épaifTeur, n'a qu'à être
renverlée pour s'ajiifter à la nompareille; une autre
fera quarrée , & reprefentera le Cicéro en tout fens ;
une autre iera de la largeur d'un Cicéro & demi , &
viendra au corps de Gros Romain ; une autre de deux
Cicéros fera le corps de Palellinc : ainfi du relie , qui
fondu fur un corps fixe, forme par les largeurs, tels
ou tels autres corps, de manière que de quelque fens
qu'on les retourne , elles préfentent des grandeurs dé-
terminées, dont les interftices feront exactement
remplis par des corps plus ou moins torts.
C'eft ainli qu'en combinant ces petits objets, on
compofe facilement des ornemens de fonte plus ou
moins grands, félon le befoin, & plus ou moins bien
entendus, félon le goût du compoiiteur de l'Impri-
merie. Pqye{ quelques-uns de ces ornemens dans les
planches des caractères qui font à la fin de cet article.
Dans la gravure des poinçons des notes de Plein-
chant, M. Fournier a fait des changemens dont lui
ont lu gré les Imprimeurs des différens dioceles qu'il
a tournis. Les notes l-é.juarres , bémols, &c. étoient
gravées cv fondues de différentes épaiù'eurs, fuivant
CAR
661
leurs figures ; de manière que pour compofer ces no-
tes, & juftifier les lignes, il falloit fondre des ei'pa-
ces d'épaiffeurs indéterminées , parmi lefquels il y en
avoit de très-fins. Ces efpaces portoient quatre filets ;
multipliés ils formoient autant de hachures dans les
filets de la note , parce que la jonction ne fe falloir
jamais fi bien qu'on n'en vît l'endroit, fur-tout lorf-
que la note avoit un peu fervi; ces hachures deve-
nant plus fcnfibles, n'en étoient que plus defagréa-
bles. D'ailleurs , l'ouvrier étoit toujours obligé de
juftifier fa ligne en tâtonnant, comme on ta". -nue
une ligne de caractères avec les efpaces ordinaires*
Pour éviter ces inconvéniens, M. Foui nier a »ravé
des poinçons de notes , bèquarres , bémols , guidons ,
pofes, &c. préciléinent d'une même largeur, 6c des
efpaces portant quatre filets de la même épaifTeur ,
ou deux , trois , quatre , cinq fois plus large ; les plus
minces font moitié d'épaiffeur de la note : or toutes
ces épaiffeurs étant égales & déterminées, quand
l'Imprimeur a décidé la longueur de la ligne , toutes
les autres fe trouvent juftiriées comme d'elles-mê-
mes; il ne s'agit que d'employer le même nombre de
notes, ou leur équivalent en efpace, ce qui fe fait
fans foin. Arrivé au bout de la ligne , on y placera
une demi-note, ou fon équivalent, ou l'équivalent
d'une note , ou un efpace équivalent à pluiieurs no-
tes, fuivant le vuide à remplir, & la ligne fe trouve-
ra juftifiée. Les fautes qui feront furvenues dans la
compoiîtion , ne feront pas difficiles à corriger, puif-
qu'on aura toujours préciléinent l'équivalent de ce
qu'on déplacera. Comme on ne fera plus obligé de
juftirier avec des efpaces fins, il y aura moins de ha-
chures, & l'ouvrage fera plus parfait.
Pour cet effet , il a luffi de graver les filets qui
portent la note tous de la même largeur, & de laiffer
fur ces filets la note, ou telle autre figure , fuivant la
grandeur qu'elles doivent avoir, fuivant l'exemple
qu'on voit. ~ E T
M. Fournier a rétranché delà note dont on fe fer-
voit avant lui, une multiplication inutile de huit for-
tes, dont l'effet étoit defagiéable, comme on voit,
par I'ufage où l'on
r~r ™ ■ T^r^» ^to'it cie mettic lc5
~ ™ i~™ queues de ces notes
en-bas, elles fe rrouvoient mêlées avec les cÊraclt*
res qui étoient deffous. Pour éviter cet inconvénient,
de quoi s'agiffoit-il ? De retourner en-haut la queue do
ces notes, ainfi qu'on le pratique en Mufîque. Cet
expédient a été d'autant plus avantageux, qu'on trou-
ve dans le refte de la note de quoi former celle-ci ,
fans qu'il toit befoin d'en faire exprès. Exemple :
retour-
nez ces
m
&
caractères à la compoiîtion , & vous aurez ,
â^==^
Z= c'eft -à-
ZZ direl'ctl
fet delîré, à moins de frais, fans embarras, & avec
plus de propreté. Voyer l'exemple dans les tables des
caractères qui fuivent.
On fe lert clans l'Imprimerie beaucoup plus frér
quemment de reglets fîmples, doubles ou triples,
qu'on ne failoit il y a dix ans, grâce à M. fournier
qui a inventé un moule pour les tondre. On les exe-
cutoit ci-devant en cuivre rouge ou laiton ; ils étoient
chers, & jamais juftes. Il eût été trop long, & peut-
être impoffible de bien planir les lames de laiton, de
l'epailieur déterminée de quelques corps de 1
res. On n'avoit d'autre reflource que dans dit
tes lames d'épaiffeurs inégales, qu'on ajuftoit avec
le moins d'inconvénient que Ton pouvoit. Le mou-
le de M. Fournier remédie a tout cela: c*eft une ma-.
66 1
CAR
chine fimple & commode de quatorze à quinze pou-
ces de longueur, fur un pouce ou environ de large ,
dans laquelle on tond des lames de la longueur de qua-
torze pouces , & de la hauteur d'un caraclere donné.
Le même moule fert pour telle hauteur qu'on veut :
pour avoir des lames d'une épaiffeur déterminée , il
ne s'agit que d'y diipoier le moule , ce qui s'exécute
en un moment : on met ces lames dans le coupoir ,
& avec les rabots fervant aux lettres , èc des fers
faits exprès , on taille fur une des faces un reglet de
telle figure qu'on le fouhaite.
L'utilité de ce moule à reglets a été fi généralement
reconnue , que deux ou trois mois après qu'il en fut
fait ufage , les autres Fondeurs s'emprefferent de l'i-
miter : mais ce qu'ils ont trouvé eft grofîier , moins
fimple , d'un ufage moins commode , le fieur Four-
nier n'ayant point communiqué le lien, & l'ayant
toujours réfervé pour fa Fonderie. Voye^ à l'article
Reglet, l'explication de cette machine, & dans
nos planches de Fonderie en caracleres , fa figure & les
détails.
Pour jetter un peu de variété dans l'impreffion,
6c fervir à l'exécution de quelques ouvrages particu-
liers, M. Fournier vient de graver un caraclere nou-
veau dans fon genre ; il eft en deux parties & fur deux
corps différents. La première fondue fur le corps de
grand Parangon , s'appelle bâtarde coulée ; & l'autre
partie qui a l'œil plus gros , eft fondue fur le Trilmé-
gifte , qu'on appelle bâtarde. Ces caracleres avec l'al-
phabet de lettres ornées & feftonées , pour tenir lieu
de petites capitales, font faits pour aller enfemble,
& forment un tout qu'il appelle caractère de finance ,
parce qu'il imite l'écriture. Voye^-en le modèle dans
les planches qui fuivent.
La partie la plus utile pour l'Imprimerie , Se qui
fera le plus d'honneur à M. Fournier, après fa table
des rapports , c'eft le changement des caracleres itali-
ques auxquels il a donné une figure plus terminée ,
dont il a rendu les pleins & les déliés plus fenfibles ,
& qu'il a plus approchés de notre écriture.
Au commencement de ce fiecle , les fieurs Grand-
jean & Alexandre firent quelques changemens dans
les italiques qu'ils gravèrent pour l'Imprimerie du
roi ; cet exemple a enhardi le lïeur Fournier. Pour
mettre le lecteur en état de juger de fon travail , voici
quelques lignes des italiques , telles qu'il les a trou-
vées, & de celles qu'il leur a fubftituées.
Italique ancienne de Gros Romain.
Vous égale^ ^es Dieux , âfoit Cicéron a
Céfar ; roous voulez faire du bien , & vous
le bouvez comme eux.
Italique nouvelle de Gros Romain.
Vous égale^ les Dieux, difoit Cicéron
a Céfar ; vous voule-^ faire du bien, &
vous Le pouve^ comme eux.
Pour l'exécution des proportions données aux ca-
ractères , & pour s'affûrer de leur exattitude , il faut
faire une jultitîcation ou mefure jufte de quarante li-
gnes, mefure de l'échelle de M. Fournier, & de tren-
te-fept lignes géométriques : elle contiendra ou qua-
rante-huit Parilîennes , ou quarante Nompareilles, ou
CAR
trente-deux Mignones & un gros Texte, ou trente pe-
tits textes, ou vingt-fix Gaillardes & une Nompareil-
le, ou vingt-quatre petits Romains, ou vingt-un Phi-
lofophies & une Gaillarde, ou vingt Cicéros, ou feize
Saint-augultins & un gros-Texte, ou quinze gros Tex-
tes , ou treize gros-Romains &une Nompareille , ou
douze petits-Parangons, ou dix gros-Parangons & un
petit Parangon , ou dix Paleftines , ou huit petits-Ca-
nons & un gros-Texte , ou fix Trifmégiftes ôc une Pa-
leftine , ou cinq gros-Canons & un petit-Parangon ,
ou quatre doubles canons & un gros-texte , ou trois
triples canons & une paleftine , ou deux groffes nom-
pareilles & deux paleftines.
S'il y a ou quelques gros ou quelques petits carac
ares dont il ne foit point fait mention dans la table
des rapports , ni dans la juftification précédente ,
c'eft que ces gros caracleres ne le fondent pas , & que
les petits tels que la perle , la fédanoife , &c. font hors
de proportions , quoiqu'ils le fondent. Au refte il fe-
roit à fouhaiter qu'on les réduifit aux mefures de la
table ; l'art de l'Imprimerie n'en feroit que plus par-
fait, & fa pratique que plus facile.
Il ne nous refte plus qu'un mot à dire desregle-
mens auxquels les Fondeurs en caracleres font affu-
jettis.
Les Fondeurs font tenus , avant que d'exercer leur
profefiion , de fe préfenter aux fyndic & adjoints de
l'Imprimerie , & de fe faire inferire fur le regiftre de
la communauté en qualité de Fondeurs de caracleres •
ce qui doit fe faire fans frais.
Il leur eft néanmoins défendu d'exercer la Librai-
rie ou l'Imprimerie.
Ils doivent rélider & travailler dans le quartier
de l'Univerfité.
On a vu par ce qui précède , ce qu'il faut penfer
de l'article des reglemens fur la proportion des ca-
ractères. Il leur eft enjoint de fondre les caracleres de
bonne matière forte & caftante ( vqye^ plus haut ce
que c'efl que cette matière ) : de travailler pour les Im-
primeurs de Paris par préférence à ceux de provin-
ce : de n'envoyer au - dehors aucune fonte fans en
avoir déclaré au bureau de la communauté la qua-
lité , le poids , & la quantité : de fondre les fontes
étrangères fur la hauteur de celles de Paris : de ne
livrer des fontes & caracleres qu'aux Imprimeurs.
Voilà les principaux reglemens , d'où l'on voit
combien ils font imparfaits , & combien il eft incer-
tain qu'en féparant les arts de Graveur , de Fondeur,
& d'Imprimeur , on ait travaillé à leur perfection
réelle.
Je n'ai rien épargné pour expofer clairement ce
qui concerne les deux premiers , qui fervent de pré-
liminaires effentiels au troilieme ; & j'efpere que les
gens de lettres , qui ont par leurs ouvrages quelque
prétention à l'immortalité , ne m'acculeront pas d'a-
voir été prolixe : quant au jugement des autres , il
m'importe peu. J'aurois été beaucoup plus étendu ,
fi je n'avois pris fur moi de gliffer légèrement fur les
opérations les moins importantes. En revanche j'ai
tâché de décrire les autres de manière à m'acquiter
envers l'art & à le conferver , s'il étoit jamais me-
nacé de fe perdre. Voye^ la fuite à l'article Imprime-
rie. Devions-nous moins à la Fonderie en caracleres ,
par laquelle les productions des grands génies fe mul-
tiplient & s'éternifent , qu'à la fonderie en bronze,
qui met en relief les héros & leurs actions ? Voye^ Fon-
derie en bronre à l'article BRONZE.
Voici des exemples de tous les Caracleres en ufage : ils font de l'Imprimerie de M. le Breton , netre Imprimeur,
& de la fonderie du fieur Fournier, excepté la Perle & la Sédanoife , qui nefe trouvent qu'à l'Imprimerie Royale,
& que M. Aniffbn , directeur de cette Imprimerie , a bien voulu communiquer.
Nous renvoyons à nos Planches gravées les alphabets de la plupart des peuples , tant anciens que modernes.
CAR
CAR
661
EXEMPLES
DE TOUS LES CARACTERES ROMAINS ET ITALIQUES
EN USAGE DANS L'IMPRIMERIE.
Perle.
I.
S EDAN OISE OU PaRISIEKNE.
1 i r 1
■
O cpK !a U-ihifon et un aiwc liomeui '.
XV guerre,
■
! !.
NOMPAREILLE
gouverna l'Empire
grandes
rent le furnom de
/■■
NOMPAREILLE.
ité par fon
emJre &. refoectueux attachement pour
Ldricn. Son zïle £: fon attention à pro-
urer la tranquilitc' de l'Empire, le ht
egarder comme un fécond Numi. Il
beautdup plus l'eiUmc des
lois alliez , qu'à s*cn faire craindre.
Ln'admtttoitaux Char ses publiques que
dei perfonnes recommindabUi par leur équi-
té. Il combU d'honneur les çcr.\ de bien, &
la réputation de fa justice pénétra jusqu'aux
txtremitet du monde ; en forte que les Na-
tions les plus reculées mirent fouvent les ar*
mes bas ,' & le choisirent pour médiateur &
arbitre de leur, diférens. Il mourut la foi-
irru année de fon ag t
troisième de fon règne.
III.
LiACmté
MIG NONE.
:n'cfl pas plus afTùréc
que celle du corps; & quoiqu'on paroiffe
éloigné des paflion, »onncft pas moins
en danger de s'y laùier emporter, que de
tomber malade quand on fc porte bien.
Les défauts de l'ame fon: comme les
bleffures du corps; quelque foin que l'on
prenne , la cicatrice paroit toujours , &
elles font à tout moment en danger de
Dt
M I G N O N E.
' E tromper un homme préoccupé de fon
te c'est lui rendre un aussi mauvais fer ■
que celui que l'on rendit à ce fou à'A-
:s qui eroyoit que tous Us vaisfeaux qui
s le port , croient à lui.
L'homme aime lamaligntti 0 Ufatîre } te
n*at p.'.s contre les malheureux, mets con-
tre les heureux fuperbe s ; & c'est fe tromper
que d'en juger autrement.
IV.
PETIT-TEXTE.
LES honneurs , Pautoril
richeffes ne méritent pas d'être
comptées parmi les bijns , parce
qu'elles n'ont d'autre utilité que cel-
le que leshommesyattachent. Que
me iert en etVet la poffeflion de plu-
sieurs terrci, li ut;e l'eule de gran-
deur médiocre fuflît à itm ni
re, & me donne im air auiii libre à
■ l'autorité fur les autres
ipporteroit - elle
non cfprit ? toutes les per-
les de l'Orient jointes à tout l'or
des Indes , ne rendraient pas mon
fommeil plus doux ni ma i'anté plus
robufte.
PETIT-TEXTE.
ZÂ pluspart des manier:
a introduites en Europe, ont quel-
que chose de fatiguant pour des esprits
naturels: ces révérences de théâtres ,
ces gestes outrés qui expriment des
transports lorsqu'il ne s'agit que des
fentimens: ces louantes prodiguées ,
ces fausses protestations de fervices ,
ces affectations de visage riant où ta
U contrainte y ces airs con~
. bonté & de cordialité , où
l'on entrevoit quelque chose de gêné
& de farouche; vains artifices des hom-
mes, qui font les charmes du vulgaire
< pris des gens de bien.
v.
G A ILLARDE.
.L'Amour eft une paflïon de l'ap-
pétit concupifeiblequi fe porte au
b;cn fcnfiblc , conçu tel par l'ima-
gination , & l'amitié eft une vertu
qui porte notre volonté au bien
honnête, conçu tel par l'entende-
ment. Le premier eft fouvent con-
traire a l'autre.car les paffions vio -
lentes troublent la rail'on , &
GAILLARDE.
'reur Trajjn avait pourma-
xime qu'il fallait qui fis Citoyens U
trouvassent tel , qu'il eiuvoulu trou-
•rcur, s'il euViti lui-même
Jîmple Citoyen. Heureux que l'ivro-
gnerie tyj'es infâmes amours, vices fi
déplorables dans un fi grand homme,
ne lui ayent point fait abandonner les
intérêts &■ le bonheur de fes Peuples.
VI.
PETIT-ROMAIX.
ON n'avok pas honte de fes
ichesfousHenrilII.
Louis X I. a nui a la droiture
& .1 la franchilê naturelle à la
•uvernoit: fans
'. ferions deve-
nus diilimulcs. Il n'y a
de cinquante ou foix.i
que l'ivrognerie avoit un air de
qualité comme l'ignorance. Ne
reprochons-nous pas à certaines
Nations defc permettre des ex-
les autres ne pem ent
riT-ROMAIN.
// faut s'armer contre les vi-
ces ; ils méritent fuis notre indi-
Si nous ne pouvons les
détruire , en les rendant
du moins nous les affaiblirons.
I nous fitr-tot.:
guifer la difformité , , .
pour le nombre de ceux qui s'y
livrent : A fora
.
. comme on s'habitue
avec les vifages les pi
VII.
PHILOSOPHIE.
JLi orsque les grands hom-
mes fe [aillent abattre par
ta longueur de leurs infor-
tunes ils font voir qu'ils ne
les foûtenoient que par la
force de leur ambition, ck
non par celle de leur ame,
& qu'à une grande vanité
près , les Héros font faits
comme les autres hommes.
PHILOSOPHIE.
iV 011s fommes fi préoccupés
en notre, faveur , que Jou-
. s que nous prenons
pour dis venus ne font que
des vices qui Leur ressem-
blent, & que r amour propre
nous déduise.
VI
CI CE R O. *
, U'on choifuTe telle
__ condition que l'on
voudra , & qu'on y af-
femble les biens & les
fatisfa&ions qui femblent
pouvoir contenter un
homme. Si celui qu'on
aura mis dans cet état
cil fans occupation, &
qu'on le laiiîe faire réfle-
xion fur ce qu'il eft, cette
félicité languhTante ne le
foutiendra pas.
* C'eft le caractère
II.
C I C E R O.
/Lfaut gouverner la for-
tune comme li fanté,
en joidr quand elle efl bon-
ne, prendre patience quand
elle efl mauvaife, & ne faire
jamais de grands remèdes
fans un extrême befoin.
Cefl une ennuyé:
ladie que de conftrver fa
fantè par un trop grand
régime.
de l'Encyclopédie.
I X.
SAINT-AUGUSTIN.
E m'imagine avec
plaifir qu'il y a dans
l'Univers une certaine
quantité de bien 6k de
mal , qui rend en un
fens toutes les condi-
tions égales. Si les Rois
ont plus d'agrémens
que leurs fujets, ils l'ont
aufiî plus vivement
frappés des difgraces
auxquelles un particu-
lier n'eft pas fcnfible.
SAINT- AUGUSTIN.
XA condition d' au-
trui paroit plus
agréable que la notre ,
parce quelle nous efl
moins connue. Elle réf.
à ces figures
d'Optique, qui de loin
ruent une belle
ville ou une belle mai fon,
& qui de près ne font
qu'un amas de traits
grojflers & confus.
GROS-TEXTE.
.L'homme croit fouvent fe conduire lors
qu'il eft conduit ; & pendant que par fon
efprit il tend à un but, fon cœur l'entraîne
Lnfeniiblement à un autre.
Allez de Gens méprifent le bien ; mais
peu favent le donner comme il faut.
GROS-TEXTE.
± L y a des crimes qui deviennent innocens
& même glorieux par leur éclat , leur nombre
& leur excès. Il arrh e Je- là que les
664
CAR
XI.
GROS-ROMAIN.
Ous les fentimens ont chacun un
ton de voix, des gefles & des
mines qui leur font propres : Ce rap-
port bon ou mauvais, agréable ou def-
agréable , efl ce qui fait que les per-
sonnes plaifent ou déplaifent.
GROS-ROMAIN.
PRcsque tout le monde prend plaisir
à s aquitter des petites obligations 3
beaucoup de gens ont de la reconnoissance
pour les médiocres , mais il n'y a quasi
personne qui n'ait de l ingratitude pour
les grandes.
XI I.
PETIT-PARANGON.
L'homme aiant befoin de la
fociété pour vivre commo-
dément & agréablement , il doit
contribuer au bien de cette fo-
ciété en fe rendant utile à ceux qui
la compofent-
PETIT-PARANGON.
L y a dans le cœur & dans l'es-
prit humain une génération per-
pétuelle de passions en forte que la
ruine de F une efl presque toujours
rétablissement d'une autre.
XIII.
GROS-PARANGON.
N ne fauroit conferver
les lentimens que l'on
doit avoir pour fes amis fi on
fe donne la liberté de parler
fouvent de leurs défauts.
GROS-PARANGON.
T" E defir de mériter les louan-
t j ges qu'on nous donne fortifie
notre vertu : <3C celles que l'on
donne à la valeur , SC à l'esprit,
contribuent à les augmenter.
CAR
XIV.
PALESTINE.
JLi A vanité , la honte 9 &
fur- tout le tempérament,
font en plusieurs la valeur
des hommes & la vertu ....
PALESTINE.
'orgueil contrepese tou-
tes nos miser es. Car ou il les
cache , ou s' il les montre , il
fe glorifie de les connoitix.
XV.
PETIT-CANON {Romain & Italique.}
Uelque bien que
Ton nous dife de
nous , on ne nous ap-
prend rien de nouveau.
La Sagesse & la impu-
tation ne J ont pas moins
a la mercy de la Fortune
que le bien.
XVI.
TRISMEGISTE {Romain & Italique.)
JE N peu de tems
nous pafîbns de la
vie à la mort.
L'honneur acquis
est caution de celui
qilon acquérera.
XVII.
C A R xv,, CAR
GROS-CANON ( Romain & ludique. )
66]
Rien de durable dans ce monde.
Heureux celui qui ne s'y attache pas
XVIII.
DOUBLE-CANON {Romain & Italique. )
Dieu foit aimé & Adoré.
iïil le fait éternellement.
XIX.
TRIPLE-CANON.
N donne libérale-
ment des conieils.
6 «* 5
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NOTE.
cor - nu fa-lu-tis no
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F*au u 1 ■BJ"4-«.-»-"J
Trii
do - mo Da-vid pu - e - ri lu - i ,
* Ad faci-en - dam miferi- cor- diam
oiwcaiL L^atactere*
a>
01LU~ imiter' eu l thuptetiionJ
ceX^ deuxJ} diffeteitteùL- OctituteX^.
£ a cl0te.mie.tc eïi— avv effets OùatatèeS
C%r la Jecoiide^ UbaLaùt^ coulci^J.
Tome II,
pppp
666
CAR
Voilà les principaux carafons qui fe rapportent ou
aux Sciences , ou aux Arts , ou au Commerce ; &
c'eft ce que nous avions à dire de plus important fur
le mot carafon pris dans fon feps propre & primitif,
c'eft-à-dire pour une marque qui iert à défigner quel-
que chofe. Mais ce mot carafon fe prend en beau-
coup d'autres fens ; la lignification qu'on lui donne
eft alors figurée. Le mot dont il s'agit n'efr pas le feul
qu'on ait tranfporté du propre au figuré : on peut
dire avec allez de vérité , que prefque tous les mots
lie la langue font dans ce cas. Il en eft même quel-
ques-uns qui ont perdu leur fens propre , & qui n'ont
puis que le métaphorique , comme aveuglement &c baj-
Jijfe; d'autres qui s'employent plus fouvent au fens
métaphorique qu'au fens propre ; & d'autres enfin
qui s'employent également & aufïi fouvent dans l'un
que dans l'autre : caractère eli de ce nombre. Voici (es
principales acceptions au figuré: elles ont toutes, ainfi
que les acceptions de cette efpece , un rapport plus
ou moins éloigné au fens propre , c'eft-à-dire qu'el-
les délignent une forte de marque ou d'empreinte
fùbfiftaate avec plus ou moins de ténacité : on peut
même ajouter que le mot carafon eft un de ceux
où le fens propre diffère le moins du figuré.
Caractère , en Morale , eft la difpofition habi-
tuelle de l'ame , par laquelle on eft plus porté à faire ,
& l'on fait en effet plus fouvent des actions d'un cer-
tain genre , que des adt ions du genre oppofé. Ainfi
un homme qui pardonne rarement , ou qui ne par-
donne jamais , eft d'un carafon vindicatif ; je dis rare-
ment ou jamais ; en effet le carafon eft formé , non
par la difpofition rigoureufement confiante , mais
par îa difpofition habituelle , c'eft-à-dire la plus fré-
quente dans laquelle l'ame fe trouve.
M. Duclos , dans fes Conf dérations fur les mœurs ,
remarque avec grande railbn que la plupart des fau-
tes & des fotifes des homrhes dans leur conduite vien-
nent, de ce qu'ils n'ont pas l'eiprit en équilibre , pour
. ainli dire , avecieur carafon: Cicéron , par exemple,
éioiî un grand efprit, & une amefoible; c'eft pour
cela qu'il fait grand orateur , & homme d'état médio-
cre ; & ainli des autres.
Rien n'eft plus dangereux dans la fociété qu'un
homme fans carafon , c'eft-à-dire dont l'ame n'a au-
cune difpofition plus habituelle qu'une autre. On fe
fie à l'homme vertueux ; on fe défie du fripon. L'hom-
me fans carafon eft alternativement l'un & l'autre ,
fans qu'on puifie le deviner , & ne peut être regardé
ni comme ami , ni comme ennemi ; c'eft une efpece
d'anti-amphibie, s'il eft permis de s'exprimer de la for-
te , qui n'eft bon à vivre dans aucun élément. Cela
me rappelle cette belle loi de Solon , qui déclaroit in-
fâmes tous ceux qui ne prenoient point de parti clans
les léditions : il fentoit que rien n'étoit plus à crain-
dre que les caraBeres & les hommes non décidés.
Caractère des nations. Le carafon d'une
nation confifte dans une certaine difpofition habi-
tuelle de l'ame , qui eft plus commune chez une na-
tion que chez une autre , quoique cette difpofition ne
fe rencontre pas dans tous les membres qui compo-
sent la nation : ainfi le carafon des François eft la lé-
gèreté , la gaieté , la fociabilité , l'amour de leurs
rois & de la monarchie même , &c.
■ Dans les nations qui fubliftent depuis long-tems ,
on remarque un fond de carafon qui n'a point chan-
gé :_ ainfi les Athéniens , du tems de Démofthene ,
étoient grands amateurs de nouvelles ; ils l'étoient
du tems de S. Paul , & ils le font encore aujourd'hui.
On voit aufti dans le livre admirable de Tacite , fur
les mœurs des Germains , des chofes qui font encore
vraies aujourd'hui de leurs defeendans.
Il y a grande apparence que le climat influe beau-
coup fur Je caractère général ; car on ne.fauroit l'at-
tribuer à la forme du gouvernement qui change toù-
CAR
jours au bout d'un certain tems : cependant il ne faut
pas croire que la forme du gouvernement lorfqu'elie
lùbfifte long-tems , n'influe aufîi à la longue fur le
carafon d'une nation. Dans un état defpotïque, par
exemple , le peuple doit devenir bientôt parefîeux ,
vain , & amateur de la frivolité ; le goût du vrai &
du beau doivent s'y perdre ; on ne doit ni faire ni
penfer de grandes chofes.
Caractère des fociétés ou corps particuliers. Les
fociétés ou corps particuliers au milieu d'un peuple ,
font en quelques manières de petites nations entou-
rées d'une plus grande : c'eft une efpece de greffe
bonne ou mauvaife , entée fur un grand tronc ; aufti
les fociétés ont elles pour l'ordinaire un caractère par-
ticulier , qu'on appelle efprit du corps. Dans certai-
nes compagnies , par exemple , le carafon général
eft l'eiprit de lubordination ; dans d'autres l'eiprit
d'égalité , ck ce ne font pas-là les plus mal-partagées :
celles-ci lont fort attachées à leurs ufages ; celles-là
fe croyent faites pour en changer. Ce qui eft un dé-
faut dans un particulier , eft quelquefois une vertu
dans une compagnie. Il feroit néceftaire , par exem-
ple , fuivant la remarque d'un homme d'efprit, que
les compagnies littéraires fuffent pédantes.
Souvent le carafon d'une fociété eft très-différent
de celui de la nation, où elle fe trouve pour ainfi
dire tranfplantée. Des corps , par exemple , qui dans
une monarchie feroient vœu de fidélité à un autre
prince qu'à leur fouverain légitime , devroient natu-
rellement avoir moins d'attachement pour ce fou-
verain que le refte de la nation ; c'eft la raifon pour
laquelle les moines ont fait tant de mal à la France
du tems de la ligue : il ne faut pas croire cependant
que cet efprit ne change pas : d'autres tems , d'autres
mœurs. « Les religieux , dont les chefs réfident à Ro-
» me , dit le célèbre M. de Voltaire , dans fon admi-
» rable Ejfai fur lefiecle de Louis XIV. font' autant
» de lu jets immédiats du pape répandus dans tous les
» états. La coutume qui lait tout , & qui eft caufe que
» le monde eft gouverné par des abus comme par des
» lois , n'a pas toujours permis aux princes de remé-
» dier entièrement à un danger , qui tient d'ailleurs à
» des chofes utiles & facrées. Prêter ferment à un au-
» tre qu'à fon prince , eft un crime de lefe-majefté
» dans im laïque : c'eft dans le cloître un aile de reli-
» gion. La difficulté de lavoir à quel point on doit
» obéir à ce fouverain étranger , la facilité de fe laif-
» fer féduire , le plaifir de fécoùer un joug naturel
» pour en prendre un qu'on fe donne à foi - même ,
» l'efprit de trouble , le malheur des tems , n'ont que
» trop fouvent porté des ordres entiers de religieux
» a fervir Rome contre leur patrie.
» L'efprit éclairé cpii règne en France depuis un
» fiecle , & qui s'ell étendu dans prefque toutes les
» conditions , a été le meilleur remède à cet abus. Les
» bons livres écrits lùr cette matière , font de vrais
» fervices rendus aux rois & aux peuples ; & un des
» grands changemens qui fe foient faits par ce moyen
» dans nos mœurs fous Louis XIV , c'eft la periuanon
>• dans laquelle les religieux commencent tous à être,
» qu'ils l'ont fujets du Roi avant que d'être ferviteurs
du Pape ». Ainli pour le falut des Etats, la Philolb-
phie brife enfin les portes fermées. (O)
Caractère fe dit aufîi de certaines qualités vi-
fibles qui attirent du refpecl & de la vénération à ceux
qui en font revêtus. La majefté des rois leur donne
un carafon qui leur attire le refpecr. des peuples. Un
évêque foûtiendroit fon caractère par fon favoir & fa
vertu , beaucoup plus que par l'éclat de la vanité
mondaine , &c Le droit des gens met le carafon d'un
ambafladeur à couvert de toute infulte.
Caractère , en Théologie, c'eft une marque fpi-
rituelle &C ineffaçable , imprimée à l'ame par quel-
C A R
CAR
667
«mes facremens, ce qui fait qu'on ne peut pas réité-
rer ces facremens.
Il n'y a que trois facremens qui impriment carac-
tère, l'avoir le Baptême , la Confirmation , Se l'Ordre :
aufîi ne les réitère -t -on jamais , même aux héréti-
ques , pourvu qu'en les leur conférant il n'ait rien
manqué d'efTentiel dans la forme, ni dans la matière.
Les Catholiques fondent l'exiftence Se la réalité
du caractère fur quelques pafTages de S. Paul, qui ne
paroiflent pas également concluans , non-feulement
aux Protêt! ans, mais même à plulieurs théologiens Ca-
tholiques. On en trouve des preuves plus folidcs dans
la tradition. S. Auguftin entr'autres écrivant .contre
lesDonatiftes, & parlant des facremens de Baptême
& d'Ordre , dit: U manque jacramentum ejl , & quadam
confecratlone utrumque homini ditur , illud cum bapti-
j'atur, ijlud cum ordtnatur ;ideoque in catholicd utrumque
non licet ïterari. Epift. contr. Parmen. n°. 28. La mê-
me chofe eft prouvée pa: la doctrine de toute l'églife
d'Afrique contre les Donatiftes , qui rebaptifoient &
réordonnoient les Catholiques. Le caractère qu'impri-
ment certains facremens , ne fe perd ni par le crime ,
ni par l'héréfie , ni par le ichifme.
Voilà ce qu'enfeigne l'Eglife. Quant à la nature
ou l'efience du caractère , les Théologiens font parta-
gés entre-eux.- Durand, in^.dijt. ji.quceji. /.dit que
le caractère n'eft point une qualité abfolue diftinéte de
l'ame , mais une limple relation de raifon , ou une
dénomination extérieure, par laquelle l'homme bap-
tifé , confirmé , ou ordonné , eft diipolé par la feule
volonté de Dieu , ou rendu propre à exercer, foit
paffivement, ioit a£tivemenr,quelques fonctions fim-
ples. Scot convient que le caractère n'eft pas une qua-
lité abiolue : mais il prétend que c'eft une relation
réelle que l'ame reçoit de dehors. D'autres enfin loù-
tiennentque c'eft quelque chofe de réel Se d'abfolu ,
une efpece de puùlancc pour exercer ou recevoir
des chofes faintes, & qui réfide dans l'entendement
comme dans l'on fujet immédiat. Tourncl. de Sacr.
in gêner, quœjt. IF. art. il.
Les Proteftans nient l'exiftence du caractère facra-
mentel , Se dilent qu'il a été imaginé par le pape Inno-
cent III. cependant ils ne réitèrent , ni ne veulent
qu'on réitère le Baptême. Foye^ Baptême.
Caractère dans les personnages , qu'un poëte
dramatique introduit iur la lcene , cil l'inclination ou
la pafïïon dominante qui éclate dans toutes les de-
marches & les difeours de ces perfonnages , qui eft
le principe Se le premier mobile de toutes leurs ac-
tions ; par exemple , l'ambition dansCéfar , la jalon-
ne dans Hermione , la probité dans Burrhus , l'ava-
rice dans Harpagon, l'hypocrifie dans Tartufe, &c.
Les caractères en général font les inclinations des
hommes conlidérés par rapport à leurs pallions. Mais
comme parmi ces parlions il en eft qui iont en quel-
que forte attachées a l'humanité , Se d'autres qui va-
rient félon les rems Se les lieux , ou les ulages propres
à chaque nation : il faut aufîi diftinguer des caractères
généraux , Se des caractères particuliers.
Dans tous les ficelés Se clans toutes les nations , on
trouvera des princes ambitieux qui préfèrent la gloire
à l'amour; des monarques à qui l'amour a fait négli-
ger le foin de leur gloire ; des héroïnes diftinguées
par la grandeur d'aine , telles que Cornélie , Androma-
que; Se des femmes dominées par la cruauté & la ven-
geance , comme Athalie & Cléopatre dans Rodogune ;
des miniftres fidèles Se vertueux , Se de lâches flat-
teurs : de même dans la vie commune qui eft l'objet
de la tragédie , on rencontre par-tout & en tout tems
de jeunes gens étourdis Se libertins ; des valets four-
bes oc menteurs ; des vieillards avares Se fâcheux;
des riches infolens & fuperbes. Voilà ce qu'on ap-
pelle caractères généraux.
Mais parce qu'en confequence 4es ufages établis
Tome II,
dftns la fociété ces cara&eresne fe produifent pas fous
les mêmes formes dans tous les pays , Se qu'une paf-
fion qui eit la même en foi , varie d'un fiecie à l'au-
tre , n'agit pas aujourd'hui comme elle faifoit il y a
deux Ou trois mille ans chez les Grecs Se chez les Ro-
mains où les erremens étoient compafiés fur leurs
ufages , Se que dans le même fiecie eÛe n'agit pas à
Londres comme à Rome , ni à Paris comme à Ma-
drid ; il en réfulte des caractères particuliers , communs
toutefois à chaque nation.
Enfin parce que dans une même nation les ufages
varient encore non-feulement de la ville à la cour
d'une ville à une autre ville, mais même d'une fo-
ciété à une autre , d'un homme à un autre homme ; il
en naît une troilîeme efpece de caractère auquel on
donne proprement ce nom , Se qui dominant dans
une pièce de théâtre, en fait ce que nous appelions
une pièce de caractère, genre dont M. Riccoboni attri-
bue l'invention aux François : tels font le Mifantrope^
le Joueur , le Glorieux , Sec.
Il faut de plus obferver qu'il y a certains ridicules
attaches à un climat, à un tems, qui dans d'autres
climats 8e dans d'autres tems ne formeraient plus un
caractère. Tels font les Précieufes Ridicules , & les Fem-
mes Savantes de Molière , qui n'ont plus en France le
même fel que dans leur nouveauté , Se qui n'auraient
aucun fuccès en Angleterre , où les finguïarités que
frondent ces pièces n'ont jamais domine.
Le caractère dans ce dernier fens n'eit donc autre
chofe qu'une paflîon dominante qui occupe tout à la
fois le cœur Se l'efprit ; comme l'ambition , l'amour,
la vengeance , dans le tragique ; l'avarice , la vanité ,
la jalonne , la palîion du jeu , dans le comique. L'on
peut encore distinguer les Caractères f.m pies &c domi-
nans , tels que ceux que nous venons de nommer,
d'avec les caractères accejjbircs , qui leur font comme
fubordonnés. Ainiî l'ambition elt foupçpnneufe , in-
quiète, inconflante dans les attachemens qu'elle noue
ou rompt félon les vues ; l'amour eft vif, impétueux»
jaloux , quelquefois cruel; la vengeance a pour com-
pagnes la perfidie , la duplicité, la colère , Scia cruau-
té : de même la défiance Se la léfine accompagnent
ordinairement l'avarice ; la pafïïon du jeu entraine
après elle la prodigalité dans la bonne fortune ; l'hu-
meur & la brufquerie dans les revers : la jaloulie ne
marche guère fans la colère , l'impatience , les ou-
trages ; Se la vanité eft fondée fur le mémo.
dédain , & la fatuité. Si le caractère fimple Se princi-
pal eft fuffifant pour conduire l'intrigue Se remplir
l'a£tion , il n'eft pas befoin de recourir aux caractères
acce[foires : mais li ces derniers font naturellement
lies au caractère principal , on ne fauroit les en déta-
cher fans l'eftropier.
M. Riccoboni , dans fes Obfervationsfur la comédie ,
prétend que la manière de bien traiter le caractère ,
eft de ne lui en oppoler aucun autre qui foit ca-
pable de partager l'intérêt Se l'attention du fpecra-
teur. Mais rien n'empêche qu'on ne rafle contrafter
les caractères ; & c'eft ce qu'oblervcnt les bons au-
teurs : par exemple, dans Britannicus, la probité de
Burrhus eft en oppofition avec la fcelératelle 1
& la crédule confiance de Britannicus avec la
diliimulation de Néron.
Le même auteur obferve qu'on peut diùinguer les
pièces de caractère des comédies de caractère mixte; Se par
celles-ci il entend celles où le poète peut le fervir
d'un caractère principal , Se lui afTocier d'autres ca-
ractères fubalternes : c'eft ainfi qu'au caractère du Mi-
fantrope , qui fait le caractère don: table ,
Molière a ajouté ceux SAranùtae Se de Ceûmene , l'u-
ne coquette, Se l'autre méditante , ce ceux des pe-
tits maîtres , qui ne fervent tous qu'à mettre plus en
évidence le caractère du Mifantropc. Le poète peut en-
core joindre enfemble plulieurs caractères, (oit prim
P P p p ij
668
CAR
cipaux folt accefoires , fans donner à aucun d'eux af-
fez de force pour le faire dominer fur les autres ; tels
font V Ecole des maris , V Ecole des femmes , & quelques
autres comédies de Molière.
C'eft une queftion de lavoir fi l'on peut & fi l'on
doit , dans le comique , charger les caractères pour
les rendre plus ridicules.D'uncôté il eft certain qu'un
auteur ne doit jamais s'écarter de la nature , ni la
faire grimacer : d'un autre côté il n'eft pas moins
évident que dans une comédie on doit peindre le ri-
dicule, & même fortement: or il femble qu'on n'y
fauroit mieux réulîir qu'en raflemblant le plus grand
nombre de traits propres à le faire connoitre , & par
conlequent qu'il eft permis de charger les caractères.
Il y a en ce genre deux extrémités vicieules ; & Mo-
lière a connu mieux que perfonne le point de per-
fection qui tient le milieu entr'elles : fes caractères ne
font ni fi fimples que ceux des anciens , ni fi chargés
que ceux de nos contemporains. La iimplicité des
premiers, qui n'eft point un défaut en foi, n'auroit ce-
a ît pus été du goût du fiecle do Molière : mais
i'affe&ation des modernes qui va jufqtia choquer
la vraiffèmblancè , eft encore plus vicîeufe. Qu'on
caractériïe les pallions fortement , à la bonne heure ;
mais il n'eft jamais permis de les outrer.
Enfin une qualité eflenticile au caractère, c'eftqu'il
fe foùtienhe ; & le pôëté cil d'autant plus obligé
d'oblerver cette régie , que dans le tragique fes ca-
ractères font , pour ainfi dire , tous donnés par la fa-
ble ou l'hiftoire.
Aut famam fequere , autjibi convenientia finge ,
dit Horace.
Dans le comique il eft maître de fa fable , & doit
y difpofer tout de manière que rien ne s'y démente ,
& que le fpeftateur y trouve à la fin comme au pre-
mier acfe les perfonnages introduits , guidés par les
mêmes vues, agiffans par les mêmes principes, fenfi-
bles aux mêmes intérêts, en un mot, les mêmes qu'ils
ont paru d'abord.
Servetur ad imum
Qualis ab incepto procejferh , &Jibi confia.
Horace , Artpoét.
Voyc^ Mœurs. Princip. pour la lecl. des poét. tom. II.
page iSç). &fuiv.
Caractère d'un ouvrage , différence fpecifique
qui le diftingue d'un autre ouvrage de même genre.
Ainlî l'ode , l'éclogue, l'élégie, le poëme épique , la
tragédie , la comédie , &c. font des ouvrages de poë-
iie ou des poèmes : mais chacun a fes principes , fes
règles , fon ton propre & particulier ; & c'eft ce qu'on
appelle fon caractère. De même clans l'éloquence un
plaidoyer , un fermon, un panégyrique , lont des dif-
cours oratoires ; la différence de la méthode qu'on
y fuit , celle du ftyle qu'on y employé , forment leur
caractère propre & particulier. Voye^ Ode, Eclo-
gue, &c. Panégyrique, Plaidoyer.
Caractère, en parlant d'un auteur, eft la ma-
nière qui lui eft propre & particulière de traiter un
fujet , dans un genre que d'autres ont traité comme
lui ou avant lui , ck ce qui le diftingue de ces au-
teurs. Ainfi l'on dit en pariant des poètes lyriques ,
que Pindare eft fublime, & quelquefois obfcur , en-
tortillé ; Anacréon , doux, tendre, élégant; qu'Ho-
race a l'élévation de l'un & la molleffe de l'autre ;
que Malherbe eft noble , harmonieux ; Rouffeau im-
pétueux , hardi ; La Motte ingénieux & délicat. M. de
Fenelon trace ainfi en peu de mots les caractères des
principaux hiftoriens de l'antiquité. « Hérodote ,
» dit-il , raconte parfaitement ; il a même de la grâce
» par la variété des matières : mais fon ouvrage eft
» plutôt un recueil des relations des divers pays ,
» qu'une hiftoire qui ait de l'unité.
CAR
» Polybe eft habile dans l'art de la guerre & dans
» la politique : mais il raifonne trop , quoiqu'il rai-
» fonne très-bien. Il va au-delà des bornes d'un fim-
» pie hiftorien ; il développe chaque événement dans
» fa caufe ; c'eft une anatomie exacte , &c.
» Sallufte a écrit avec une noblefle & une grâce
» finguliere : mais il s'eft trop étendu en peintures
» de mœurs , & en portraits de perfonnes , dans
» deux hiftoires très-courtes.
» Tacite montre beaucoup de génie, avec une pro-
» fonde connoifiance des cœurs les plus corrompus :
» mais il affecte trop une brièveté myftérieufe. Il efl
» trop plein de tours poétiques dans les deferiptions ;
» il a trop d'efprit , il raffine trop. Il attribue aux plus
» fubtils refforts de la politique , ce qui ne vient iou-
» vent que d'un mécompte , que d'une humeur bi-
» farre , que d'un caprice , &c. ». Lett. fur l'éloquence ,
&c.
On voit par cet échantillon , que le caractère des
auteurs ne confifte pas moins dans leurs défauts que
dans leurs perfections ; & comme il n'eft point de
genre d'écrire qui n'ait fon caractère particulier , il
n'eft point non plus d'auteur qui n'ait le fien : l'un
& l'autre font fondés lur la différente nature des ma-
tières , & fur la différence des génies. (G)
CARACTERE , terme moderne de Botanique: le ca-
ractère d'une chofe eft ce qui la diftingue eflentielle-
ment de toute autre choie. Suivant cette définition ,
le caractère d'une plante eft ce qui la diftingue fi bien
de toutes celles qui ont quelque rapport avec elle,
qu'on ne fauroit la confondre avec ces autres plan-
tes , quand on fait attention aux marques effentielles
qui les diftinguent : or ce caractère diftinefif , fuivant
plutieurs Botanif tes , doit être formé d'après l'examen
des parties qui compoient la fleur. V. Botanique,
Méthode. '
L'on nomme caractère incomplet, ou félon M. Lin-
naeus , caractère artificiel, celui dans lequel on décrit
feulement quelques parties de la fleur, en gardant
le iilence fur les autres parties, que par la méthode
qu'on s'eft propolée , l'on iuppoie inutiles ; au lieu
que l'on entend par le caractère naturel , celui dans
lequel on déligne toutes les parties de la fleur, & on
en conlidere le nombre, la iituation, la figure , & la
proportion. Article communiqué par M. le CHEVALIER
DE JAUCOURT.
Caractère , en Peinture , fignifie les qualités qui
conftituent l'eilence d'une choie , qui la diftinguent
d'une autre ; caractère des objets , caractère des pajfions.
La pierre , les eaux , les arbres , la plume , les
animaux , demandent une touche différente, qui ex-
prime leur différent caractère.
On dit beau caractère de tête , non-feulement pour
dire qu'elle exprime bien la palïion dont la figure eft
affeefée , mais on le dit auffi pour le rapport du def-
fein convenable à cette même tête.
Caractère de deff'ein , le dit encore pour exprimer
la bonne ou la mauvaile manière dont le peintre def-
fine , ou dont la chofe en queftion eft rendue. (/? )
CARACTERISER, v. au. en Peinture , c'eft faifir fi
bien le caractère qui convient à chaque objet, qu'on
le reconnoiffe au premier coup d'œil. On dit ce Peintre
caractérijé bien ce qu'il fait , c'eft-à-dire , qu'il eft jufte.
(*)
CARACTERISTIQUE ,«dj. pris fub. en général,
fe dit de ce qui caraclérife une chofe ou une perfonne,
c'eft-à-dire , de ce qui conftitue Ion caraefere , par
lequel on en fait la diftindion d'avec toutes les au-
tres chofes. Voye-^ Caractère.
Caraclériflique eft un mot dont on fe fert particulie-
ment en Grammaire pour exprimer la principale let-
tre d'un mot , qui fe conferve dans la plupart de fes
tems , de fes modes , de fes dérivés & compofés.
La caraclérijlique marque fouvent l'étymologie d'un
CAR
mot, &elle doit être confervée dans fon orthogra-
phe, comme IV eft dans le mot de courfe , mort , . c.
Les caraclérijliqius iont de grand ulage dans la
Grammaire Greque , particulièrement dans la for-
mation des terns , parce qu'ils font les mêmes dans
les mêmes tems de tous les verbes de la même con-
jugaifon , excepté le tems préfent qui a différentes
caractérij/iques, & le futur, Faoriftc premier, le prété-
rit parfait , 6c le plufqne - parfait de la quatrième
conjugaifon , qui ont deuxcaraclérijliques. Voy. Tems,
Verbe , Mode , &c {G)
Caractéristique, f. f. La caraclèrijtique d'un lo-
garithme eft lbn expofant , c'eft-à-dire , le nombre
entier qu'il renferme: ainli dans ce logarithme 1,000
ooo , i eft l'expofant ; de même 2 eft l'expolant dans
celui-ci , 2 , 4513 &c. En général on appelle en
Mathématique caraclérijUque , une marque ou carac-
tère par laquelle on défigne quelque choie. Voye-^ Ca-
ractère. Ainfi d eft la caraclèrijtique des quantités
différentielles, fuivant M. Leibnitz ; & fuivant M.
Newton , la cara'àêrijlique des fluxions eft un point.
Voye{ Fluxion , Différentiel.
Dans la haute Géométrie on appelle triangle ca-
raclérijiiquc d'une courbe , un triangle recbiigne rec-
tangle , dont Fhypothénuie fait une partie de la cour-
be , qui ne diffère pas fenliblement d'une ligne droi-
te , parce que cette portion de courbe eft luppolée
infiniment petite. Ce triangle a été appelle caraclèrij-
tique, à caule qu'il fert ordinairement à diftinguer les
lignes courbes. Voye?^ CoURBE.
Suppofons , par exempic , la demi-ordonnée p m ,
( PI. d'Anal, fig. 18. ) infiniment proche d'une au-
tre demi-ordonnée P Al ; alors Pp fera la différence
de l'abfciffe ; & abaiffant une perpendiculaire M R
= P p , Km fera la différence de la demi-ordonnée.
Tirant donc une tangente T M , en ce cas l'arc infi-
niment petit Mm ne différera pas d'une ligne droite ;
par conféquent Al m R eft un triangle rectiiigne rec-
tangle , & conftitue le triangle caraclèrijtique de cette
courbe , autrement appelle triangle différentiel : en
effet l'équanon différentielle qui eft entre les petits
côtés de ce triangle , eft l'équation qui deiigne Se
caraftérife la courbe. J'cyq Triangle différent
TIEL. (O),
Caractéristique , adj. en Littérature , fe dit de
ce qui fert à caractérifer, à diftinguer les ouvrages &
les auteurs : ainfi l'élévation 6c la véhémence font
les traits caraclérijliques de Corneille ; la nobiefîc &
l'élégance, ceux de Racine.
CARADIVA , ( Géog. ) île de l'Afie , auprès de
l'île de Ceylan.
C ARAGl , f. m. (Commerce.') on nomme ainfi dans
les états du grand-feigneur les droits d'entrée & de
fortie qu'on paye pour les marchandées : ces droits
ne fe payent qu'une fois, 6c feulement à la douane
où les marchandiies font d'abord déchargées. On eft
libre de les tranfporter dans une autre ville , en re- .1
présentant le premier acquit.
Caragi eft aufîi le nom qu'on donne aux commis
des bureaux 011 fe perçoivent les droits : leur chef
ou directeur de la douane fe nomme caragi-baclii. (G7)
CARAGONA , ( Hiji. nat bot. ) arbre qui fe trou-
ve fréquemment dans les Indes orientales , & dont
on ne nous apprend rien , finon qu'il conlerve la ver-
dure hyver Ôc été , & qu'il a beaucoup de reiîem-
blance avec celui qui produit la gomme de Caranne.
CARAGROUCH , f. m. ( Commerce. ) monnoie
d'argent d'ufage dans l'Empire , au titre de dix de-
niers vingt-trois trente-deuxième ; elle vaut argent
de France deux livres dix-huit fous cinq denier- . C et
te monnoie a cours à Conftantinople ; elle y eft re-
çue pour cent feize afpres.
CARAGUATA , f. f. ( Hift. nat. bot. ) genre de
plante à fleur monopétale , en cloche tabulée , de-
CAR
669
coupée ordinairement fur les bords en trois parties.
II s'élève du fond du calice un piftil qui eft attaché
comme un clou à la partie pofterieure de la. fl
& qui devient dans la fuite un fruit oblong , pointu ,
membraneux, qui s'ouvre d'un bout à l'autre en trois
parties , & qui renferme des lémences garni, i
greUes.P\umier,Noi>aplant.sim:r. gen.l''.Pi.A\-ïE.( 1)
CARA-HISSAR , ( Géog.) ville d'Aile , dan^hi
province qui étoit anciennement appeliée Galatu.
^ CARAIAM, ( Géog. ) grande province ou pays
d'Afie dans la Tartane , dont la capitale |
même nom.
CARAIBES , ou CANNIBALES , Sauvages infu-
laires de l'Amérique , qui pofîèdent une partie des
îles Antilles. Ils font en général trilles , rêveurs , &
parelleux , mais d'une bonne conftitution , vivans
communément un fieclc. Ils vont nuds ; leur teint
eft oliyâtre. Ils n'emmaillotent point leurs enfans ,
qui des l'âge de 4 mois marchent à quatre pattes ,
ck en prennent l'habitude au point de courir de cette
façon quand ils lont plus âgés , auiîi vite qu'un Eu-
ropéen avec les deux jambes. Ils ont pluûeurs fem-
mes qui ne iont point jalouies les unes des autres ;
ce que Montagne regarde comme un miracle dans
Ion chapitre fur ce peuple. Elles accouchent fans pei-
ne , ci des le lendemain vaquent à leurs occupa-
tions ; le mari garde le lit, 6c fait diète pour elles
pendant piuiicnrs jours. Us mangent leurs prifonaiers
rôtis , 6c en envoyent des morceaux à leurs amis.
Ils croyent un premier homme nommé Longuo , qui
deicenuit du ciel tout fait; &c les premiers habitons
de la terre, fuivant eux, fortirent de Ion énorme
nombril au moyen d'une inciiîon. Ils adorent cL-s
dieux &c des diables , 6c croyent l'immorta]
l'âme. Quand un d'entre eux meurt , on tue ion nè-
gre pour qu'il aille le iervir dan-> l'autre monde : ils
iont fort adroits à tirer de l'arc ; leurs flèches font
faites d'un bois empoifbnné , taillées de façon qu'on
ne les peut retirer du corps fans déchirer la piaie ;
ik eiiesiontarrofées d'un venin tres-dangereux , fait
avec le nie du mancenilier. ï'oye? Sauvages.
CARAITES, f. m. pi. (HijLccdéf.) lecle très-
ancienne parmi les Juifs , ii l'on en croit quelques au-
teurs , & qui lubliite encore parmi les Juifs moder-
nes en Pologne , en Rullie, à Conftantinople, au
Caire, &dans philieurs autres endroits du Levant.
Ce qui les diftingue des autres Juifs quant à la reli-
gion , c'eft leur attachement lerupuleux à la lettre
de l'Ecriture , exclufivement aux allégories, :
tions , interprétations humaines , 6-c.
Léon de Modene rabbin de Venifc , obier-,
de toutes les héréfies qui étoient chez les Juifs r
la dcftrucLon du temple , il n'eft relte que c
Caraitn , nom dérive de Mitra , qui lignine le pur texte
dt t criture i parce que les Caràues veulent qu'on
s'en tienne au Pentateuque , qu'on le garde à la let-
tre , fans égard pour les gioles Cv les interpolations
des rabbins.
Aben Ezra & quelques autres , pour rendre les
Carottes odieux, les qualifient de Sadducécns : mais
Léon de Modene le contente de les appeller .V
. parce qu'ils admettent l'immortalité de
Famé , la réiurrechon , les recompenies , cv les pei-
ne-, de la vie future, que rejettoient les anciens Sad-
ducéens , dont il doute même que les Caruites foient
defeendus. Poy'i Sadducéens.
M. Simon luppoie avec plus de vraiflemblance ,
que cette lecte ne s'elt formée que de l'oppoution
qu'ont apportée aux rêveries des Thalroudiftes les
Juifs les plus lenfés , qui s'en tenant au texte de l'E-
criture, pour réfuter les traditions ma!
ces nouveaux docteurs, en reçurent le nom d<
ratm, qui Ggnifie en Latin barbare, fcriptunnl , c'eft-
à-dire, gens attaches au texte de l'Ecriture , 6c qu'on
670
CAR
y ajouta le nom odieux de Sadducéèns , parce qu'à
l'imitation de ceux-ci, ils rejettoient les traditions
des dofteurs.
Scaliger, Voflîus,& M. Spanheim, par une erreur
qui n'eft pas pardonnable à des favans du premier or-
dre , ont mis les Caraïtes au même rang que les Sa-
béens , les Mages , les Manichéens , & même les Mu-
sulmans. Wolfgang , Fabricius, &c. difent que les
Sadducéèns 6c les Efféniens turent appelles Caraïtes,
par oppofition aux Pharifiens , qui, comme l'on lait,
étoient grands traditionnaires. D'autres croyent que
ce font les docteurs de la loi , Ugifperiti , dont il eft fi
fouvent parlé dans l'Ecriture : mais toutes ces con-
jectures lbnt peu folides.Jofephe ni Philon ne font au-
cune mention des Caraïtes ; cette fefte eft donc plus
récente que ces deux auteurs ; on la croit même pof-
térieure à la colle&ionde la féconde partie du Thal-
mud , connue fous le nom de Gemara : peut-être
même ne commença-t-elle qu'après la compilation
de la Mifchna vers le Ve. ou v'i*. fiecle ; d'autres en
reculent l'origine jufqu'au vu Ie. fiecle.
Les Caraïtes de leur côté intéreffés à fe donner le
mérite de l'antiquité, font remonter la leur jufqu'au
tems où les dix tribus furent emmenées captives par
Salmanafar. "Wblf , fur les mémoires du Caraïte
Mardochée , la fixe au tems du maffacre des dofteurs
Juifs , fous le règne d'Alexandre Jannée , environ
cent ans avant Jefus-Chrift. On raconte qu'alors ,
Simon fils de Schétach , frère de la reine , s'étant en-
fui en Egypte , y forgea fes prétendues traditions ,
qu'il débita à fon retour à Jerufalem , interprétant la
loi à fa fantaifie , 6c fe vantant d'être le dépositaire
des connoiffances que Dieu avoit communiquées de
bouche à Moyfe ; enforte qu'il s'attira un grand nom-
bre de difciples: mais il trouva des contradicteurs qui
foûtinrent que tout ce que Dieu avoit révélé à Moy-
fe étoit écrit, & qu'il falloit s'en tenir-là. Cette di-
"vifion , ajoûte-t-on , donna naifTance à la fefte des
Rabbiniftes ou Traditionnaires , parmi lefquels brilla
Hillel, & des Caraïtes, dont Juda fils de Tabbaï , fut
un des chefs. Le même auteur met au nombre de
ceux-ci non-feulement les Sadducéèns , mais aufîiles
Scribes dont il eft parlé dans l'évangile. L'adreffe 6c
le crédit des Pharifiens affoiblirent le parti des Caraï-
tes ; Volf dit qu'Anam le releva en partie dans le
vme. fiecle , & rabbi Schalomon dans le ixe. Il étoit
très-nombreux dans le XIVe. mais ils ont toujours été
depuis en déclinant.
Les ouvrages des Caraïtes font peu connus en Eu-
rope , quoiqu'ils méritent mieux de l'être que ceux
des Rabbins. On en a un manuferit apporté de Conf-
tantinople , qui fe conferve dans la bibliothèque des
pères de l'Oratoire de Paris. Les favans les plus ver-
fés dans l'intelligence de l'Hébreu, n'ont d'ailleurs
vu que très-peu de leurs écrits. Buxtorf n'en avoit
vît aucun ; Selden n'en avoit lu que deux ; Trigland
affûre qu'il en a recouvré affez pour en parler avec
quelque certitude ; & il avance apparemment d'a-
près eux , que peu de tems après que les prophètes
eurent ceffé , les Juifs fe partagèrent touchant les
œuvres de furérogation ; les uns foûtenant qu'elles
étoient néceflaires , fuivant la tradition des doûeurs ;
les autres les rejettant , parce qu'il n'en eft pas fait
mention dans la loi ; 6c ce dernier parti forma la fecle
des Caraïtes. Il ajoute qu'après la captivité de Baby-
lone , on rétablit Fobfervation de la loi 6c des prati-
ques qu'on en regardoit comme des dépendances ef-
fentielles , félon les Pharifiens , qui en rapportoient
l'inftitution à Moyfe.
Léon de Modene obferve que les Caraïtes moder-
nes ont leurs fynagogues & leurs cérémonies parti-
culières , 6c qu'ils fe regardent comme les feuls vrais
obfervateurs de la loi ; donnant par mépris lenom
de Rabbanim , ù ceux qui fuivent les traditions des
CAR
rabbins. Ceux-ci de leur côté haïfTent mortellement
les Caraïtes , avec lefquels ils ne veulent ni s'allier ,
ni même converfer , & qu'ils appellent mam^erim ,
c'eit-à-dire bâtards, parce que les Caraïtes n'obfer-
vent point les ufages des rabbins dans les mariages >
les divorces , la purification légale des femmes , &c,
averfion pouffée fi loin , que fi un Caraïte vouloit
paifer dans la feue des Rabbiniftes, ceux-ci le refu-
feroient.
11 eft cependant faux que les Caraïtes rejettent ab-
foîument toutes fortes de traditions ; ils n'en ufent
ainfi qu'à l'égard de celles qui ne leur paroifïent pas
bien fondées. Selden qui traite au long de leurs ien-
timens dans fon livre intitulé Uxor hebraica,à'it, qu'ou-
tre le texte de l'Ecriture , les Caraïtes reçoivent cer-
taines interprétations qu'ils appellent liéréditaires, 6c
qui font de véritables traditions. Leur théologie ne
diffère de celle des autres Juifs, qu'en ce qu'elle eft
plus dégagée de vétilles & de fuperftitions , car ils
n'ajoutent aucune foi aux explications des cabaliftes,
ni aux fens allégoriques , fouvent plus fubtils que
raifonnables. Ils remettent aufîi toutes les décifions du
Thalmud qui ne font pas conformes au texte de l'Ecri-
ture, ou qui n'en fuivent pas par des conféquences né-
ceffaires 6c naturelles: en voici trois exemples. Le pre-
mier regarde les mj^ouiot ou parchemins que les Juifs
Rabbiniftes attachent à toutes les portes par Iefquel-1
les ils ont coutume de paffer. Le fécond concerne
les Theph'dim ou Philacleres dont il eft parlé dans le
Nouveau-teftament. Le troifieme eft fur la détente
faite aux Juifs de manger du lait avec de la viande.
Les Rabbiniftes prétendent que les deux premiers de
ces articles font formellement ordonnés par ces pa-
roles du Deutéronome , ch. vj. v. 8 : & ligabis ea quajl
Jïgnum in manu tua. , eruntque & movebuntur inter ocu-
ios tuos , feribesque ea in lïmine & in ojliis domùs tuœ.
Aaron le Caraïte , dans fon commentaire fur ces pa-
roles , répond qu'on ne doit point les prendre à la
lettre ; que Dieu a feulement voulu faire connoîtie
par-là , que dans toutes les circonftances de la vie ,
fon peuple devoit avoir devant les yeux la loi don-
née à Moyfe. Quant aux Thephilim , après y avoir
donné une pareille interprétation, les Caraïtes appel-
lent par raillerie les rabbins des ânes bridés de leurs
fronteaux. Voye^ Fronteau. Saint Jérôme explique
auffi ce paffage dans un fens figuré. Sur le troifieme
article que les rabbins croyent expreffément défendu
par le Deutéronome, chap. xiv. v. 2 1 , Non coques lue-
dum in lacté matris fuœ ; les Caraïtes répondent avec
beaucoup de vraiflemblance , qu'on doit l'expliquer
par cet autre paffage, 7« ne tueras point la mère quand
elle aura des petits ou quelle fera pleine, À cela les rab-
bins n'oppofent que la tradition 6c l'autorité de leurs
docleurs ; motif infuffifant, félon les Caraïtes, pour
admettre une infinité de pratiques dont on ne trouve
rien dans le texte facré.
Ces derniers retiennent cependant plufieurs fuperf-
titions des rabbins. Schupart, dans ion livre defectd
Karrxorum , montre qu'ils ont les mêmes fcrupules ,
6c s'attachent aux mêmes minuties, fur l'obfervation
du fabbat , de la pâque , des fêtes , de l'expiation ,
& des tabernacles , &c ; qu'ils obfcrvent auffi régu-
lièrement les heures de la prière & les jours de jeu-
ne, qu'ils portent les ^it^it ou morceaux de frange aux
coins de leurs manteaux , & croyent que tout péché
peut être effacé par la pénitence , au contraire des
rabbins qui foûtiennent que certains péchés ne peu-
vent être effacés que par la mort. Les Caraïtes ne
croyent pas comme les traditionnaires, qu'il doive y
avoir du fang répandu dans la circonciiion, ni que ce
figne de leur loi doive être donné à l'enfant toujours le
huitième jour après fa naifTance , 6c même aux enfans
morts, mais qu'à ceux qui font en danger on doit an-
ticiper ce jour. Quant aux divorces j ils conviennent
CAR
avec les autres Juifs, auffi-bien que dans la manière
de tuer & de préparer les viandes permifes : ils en
différent Seulement fur les eipeces d'impuretés Se de
pollutions légales.
Peringer dit que les Caraïtes de Lithuanie font fort
différens , & pour le langage & pour les mœurs, des
Rabbiniftes dont ce pays eft plein ; qu'ils parlent la
langue Turque dans leurs écoles & leurs fynago-
gues, à l'exemple des Tartares Mahométans ; que
leurs fynagogues font tournées du feptentrion au
midi, parce que, difent-ils, Salmanafar ayant tranf-
porté leurs pères dans des provinces fituées au nord
deJerufalem, ceux ci pour prier, regardoient le côté
où étoit fituée la Ville iainte, c'eft-à-dire le midi.
Le même auteur ajoute qu'ils admettent tous les li-
vres de l'Ancien-teftament; opinion oppofée à celle
du plus grand nombre des favans, qui prétendent
que les Caraïtes ne reconnoiffent pour canonique que
le Pentateuque , & ne reconnoiifent que trois pro-
phètes , favoir , Mqyfe , Aaron & Jofué.
Caleb réduit à trois points toutes les différences
qui le rencontrent entre les Caraïtes 6c les Rabbinif-
tes ; lavoir, que les premiers nient, i° que la loi
orale ou la tradition viennent de Moyfj , & rejet-
tent la cabale. z°. Ils abhorrent leThalmud. 30. Ils
obfcrvent les fêtes comme le fabbat &c. beaucoup
plus rigoureufement que leurs adverfaires , à quoi
l'on peut ajouter qu'ils étendent prefque à l'infini les
dégrés prohibés pour le mariage. Foye^ Cabale ,
Thalmud, Sabbat, &c. Les Caraïtes ont encore ce-
ci de particulier, crue, félon l'ancienne coutume des
Juifs , ils règlent leurs fêtes fur l'apparition de la
lune , & blâment les Rabbiniftes qui , dans leur ca-
lendrier, le fervent des calculs aftronomiques. Foye^_
Racbinistes. (G)
CARA-KALPACKS , (Géog. ) peuple qui habite
en Afie, dans le Turqueftan.
CARAMAN , (Géog.) ville & royaume d'Afri-
que en Ethiopie , dont l'exiftence eft douteufe.
* CARAMBOLAS , (Bip. nat. bot. ) pommier des
Indes à fruit oblong, avec un petit ombilic ; garni à
fon extrémité de cinq côtes fort épaiffes , & couvert
d'une peau mince, adhérente à la pulpe , lifte, écla-
tante , verte d'abord, puis jaunâtre. Ce fruit contient
dix graines oblongues , pentagonales , mouftes par
un bout, pointues par l'autre , féparées par quelques
pellicules dures 6c membraneufes , qui forment des
cellules où les graines font deux à deux. On cultive
cette plante dans les jardins: trois ans après avoir été
greffée elle porte fleurs & fruits trois fois l'an : on
lui attribue beaucoup de propriétés médicinales ,
qu'on peut voir dans l'hiftoire des plantes de Ray.
CARAMINNAL , ( Géog. ) petite ville d'Elpagne
fttr la côte de Galice.
CARAMOUSSAL, fub. m. ( Marine. ) C'eft un
yaiffeau marchand de Turquie conftruit en huche ;
c'eft-à-dire qui a la poupe fort haute. Cette forte de
bâtiment n a ni mifene ni perroquets que le feul
îourmentin , &c porte feulement un beaupré , un
petit artimon 6c un grand mât: ce mât avec fon hu-
nier s'éleve à une hauteur extraordinaire , 6c il n'y
a que des galaubcns 6c un étai , répondant de l'ex-
trémité fupérieure du mât de hune à la moitié du
Iourmentin ; fa grande voile porte ordinairement
une bonnette maillée. (Z)
C ARAMANICO , {Géog.) ville d'Italie au royau-
me de Naples dans l'Abbruzze.
CARAM ANIE , ( Géog. ) province de la Turquie
en Afie dans la Natolie ; Satalie en eft la capitale.
CARAMANTA, (Géog.) provincede l'Amérique
méridionale , bornée au nord par le pays de Car-
thagene & la nouvelle Grenade , au midi par le Po-
payan, à l'occident par l'audience de Panama : la
capitale porte le même nom. Long. joJ.lat, 5. i$.
CAR
671
CARANCEBES ou Karan-sebes , ) Géog.) ville
de la baffe Hongrie , au confluent de la Sebes ùl du
Ternes.
* CAR AND AS ou ANZUBA , {Bip. nat. bot.) ef-
pece de plante ou d*arbufte des Indes orientales ,
dont la feuille reffemble beaucoup à celle du frai-
fier, & fuivant d'autres à celles du Tamarin ; il pro-
duitplufieurs fleurs odoriferentes ; fon fruit reffemble
à une petite pomme , qui eft verte au commence-
ment , 6c pleine d'un fuc blanc comme du lait ;
mais lorfqu'elle mûrit, elle devient noirâtre, &
prend un goût affez femblable à celui du railin. Il y
a des gens qui en tirent le fuc pour en faire une ef-
pecc de verjus : on mange auffi ce fruit confit dans
du vinaigre & du fel ; on dit qu'il eft propre à exci-
ter l'appétit. Il s'en trouve beaucoup au royaume de
Bengale.
•CARANGUE, (Bip. nat. Zoolog.) poiffon de
mer très-commun aux Indes occidentales , & fur-tout
aux Antilles ; on en trouve fouvent de deux ou trois
pies de long , un peu plats ; ils ont les yeux grands
6c la queue fourchue ; la chair en eft excellente 6c
le mange à toute fauce.
CARANGUER, (terme deRlv. ) c'eft un terme dont
les matelots du pays d'Aunis le fervent pour dire
agir : ce maître eft un grand carangueur , c'eft-à-dire
qu'il eft agiffant. Cette exprefîion n'eft point en ufage
hors du batteau . (Z)
CARANGUES, (Géog.) peuple de l'Amérique
méridionale au Pérou.
•CARANNA, (Bip. nat. bot.) on varie fur la
defeription de cet arbre : les uns difent qu'il eft haut
& fort; d'autres que c'eft une forte de palmier dont
on fend l'ecorce , & qui rend la refîne ou gomme cen-
drée ou blanchâtre , qui porte fon nom. Cette gom-
me eft en dedans de la couleur de la poix, a le goût
amer , gras 6c oléagineux , l'odeur forte , aromati-
que & tirant fur celle de la lavande : on l'apporte
de Carthagene en maffes molles , envelopées dans
des morceaux de jonc. La plus blanche eft la meil-
leure. Ses propriétés font à peu-près les mêmes que
celles du Tacamahaca. ^oj^Tacamahaca.
Cette gomme ne fe diflbut que dans l'efprit-de-
vin; c'eft ce qui a donné lieu à M. Geoffroy de dire
que l'on l'appelle improprement gomme. Elle eft fon-
dante, difcufîive, réfolutive.
On la mêle dans un mortier chaud avec le baume
de Copahu, & on l'applique avec fucces fur l'épi-
gaftre, dans les douleurs d'eftomac, dans les affec-
tions des hypochondres.
Délayée avec de l'huile d'ambre, elle eft excel-
lente dans la goutte. Schroder recommande pour la
goutte une emplâtre faite avec une once de gomme
caranna, une demi-once de cire jaune, 6c une quan-
tité raifonnable d'huile.
On trouve dans Pomet la defeription d'un baume
fait avec le caranna qu'il dit être très en ufage en
Amérique pour \c plaies. ( N)
CARAQUE, f. f. (Marine. ) c'eft le nom que les
Portugais donnent aux vaiiïeaux qu'ils envoyent au
Brelîl 6c aux Indes orientales. Il les appellent aufïï
naos, comme voulant dire navires par excellence. Ce
font de très-grands vaiiïeaux ronds , également pro-
pres pour le combat & pour le commerce , plus étroits
par le haut que par le bas ; qui ont quelquefois fept
ou huit planchers, & fur lefquels on peut loger jul-
qu'à deux mille hommes. Ces fortes de bàtimens ne
font plus en ufage ; il y en avoit du port de deux mille
tonneaux. La capacité des caraques conlifte plus dans
le creux qu'elles ont, que dans leur longueur £: lar-
geur. Cette profondeur des tarafues, Se la manière
dont elles font conftruites, aflez foible d'échantillon,
les rend finettes à fe renverfer lori'que leur charge
n'eft pas entièrement complette ; mais loi l'qu'elles
6-1. CAR
*ont toutes chargées, elles ne courent pas beaucoup
plus de rifques que les autres vaifieaux, parce que
le grand poids qui eft dedans , les fait beaucoup en-
foncer , ce qui les foùtient. (Z)
CARAQUES , {Us) Géog. peuple fauvage de l'A-
mérique méridionale, au Pérou, fur la côte delà
mer du Sud ; leurs coutumes différent des autres na-
tions de ce pays.
CAR ARA , f. m. {Commerce.) poids dont on fe fert
en quelques endroits d'Italie , & particulièrement à
Livourne , pour la vente des laines &c des morues.
Le carara eft de cent foixante livres du pays , où
la livre n'eft que de douze onces poids de marc, ce
qui revient à cent dix livres fix onces trois gros, un
peu plus , de Paris , Amiterdam , & autres villes où la
livre eft de feize onces. Le carara fait cent trente-fix
livres poids de Marfeille. {G)
CARARA , {Géog.) petite ville d'Italie, avec titre
de principauté , fameufe par fes carrières de marbre.
* CARA-SCHULLI, ( Hijl. nat. bot. ) arbriffeau
des Indes , afiez femblable au câprier. Voye^ dans
VHijioire des plantes de Ray , la lifte des propriétés
merveilleufes qu'on lui attribue.
CARASOU, {Géog.) il y a deux rivières de ce
nom dans la Turquie ; Tune en Natolie , dans la Ca-
ramanie ; l'autre en Romanie , dans la Turquie , en
Europe.
Carasou, ( Géog. ) ville de la Tartarie Précopi-
te, dans la Crimée.
CARAT , f. m. on donne ce nom au poids qui ex-
prime le degré de bonté , de finefle , & de perfection
ou d'imperfection de l'or. Les auteurs ne font pas d'ac-
cord fur l'origine de ce mot : Ménage , après Alciat ,
le dérive du Grec K*p aif/s? , qui étoit une efpece de
petit poids. Savot le dérive, ce qui revient au même ,
de carafon, qui fignifioit un denier de tribut, ou
une efpece de monnoie qu'on battoit à cette fin : cet
auteur dit que , comme la diviiion du fin de l'argent
a été faite par une efpece de monnoie qu'on appel-
loit denier, auffi le titre de l'or a été marqué par
une monnoie d'or qu'on appelloit en ce tems-là ca-
rat. D'autres le dérivent iimpiement du Latin carac-
ter : mais beaucoup de perlonnes aiment mieux fui-
vre l'opinion de Kennet, qui le dérive decare&a, ter-
me qui fignifioit anciennement , félon cet auteur , un
certain poids, & qui a été employé depuis pour ex-
primer la finette de l'or , ou la pefanteur des diamans.
Le carat d'or eft la vingt-quatrième partie d'une
quantité d'or, quelle qu'elle loit: ainfi un fcrupule
qui doit pefer vingt-quatre grains , eft un carat à l'é-
gard d'une once d'or ; car une once contient vingt-
quatre fcrupules.
Si une once d'or n'a aucun alliage , c'eft de l'or à
vingt quatre carats ; fi l'alliage eft d'un carat , c'eft
de l'or à vingt-trois carats ; s'il eft de deux carats ,
c'eft de l'or à vingt-deux carats, & ainfi du refte : mais
on affùre qu'il ne peut fe trouver d'or à vingt-quatre
carats ; parce qu'il n'y en a point qui ne contienne
quelque portion d'argent ou de cuivre , fi bien pu-
rifié qu'il foit. Voye7K CARATURE.
L'or rouge eft le moins eftimable, parce qu'il con-
tient quelque portion de cuivre qui lui donne cette
couleur; le jaune eft le meilleur.
Le carat de perles , de diamant , & des autres pier-
res précieufes, n'eft que de quatre grains. Chimie de
Lemery , onzième édit. de Paris, pag. C)i.
Suivant ce que l'on a vu ci-delîus , les Monnoyeurs
ont fixé à vingt-quatre carats le plus haut titre ou la
plus grande perfection de l'or. Il y a des demi , des
quarts, des huitièmes, des feiziemes, & des trente-
deuxièmes de carat. Ces degrés fervent à marquer
l'alliage : par les lois de France, il eft détendu aux
orfèvres de travailler l'or au-deflbus de vingt-trois
carats.
CAR
Le carat de fin eft donc un vingt-quatrïeme degré
de bonté ou de perfection d'une pièce de pur or.
Le carat de prix eft la vingt-quatrième partie de la
valeur d'une once ou d'un marc d'or. On dit aufïï
quelquefois un carat de poids , qui eft la vingt-quatriè-
me partie du poids de l'once ou du marc. V. Grain ,
Poids , &c
On a déjà vu que le carat eft auffi un poids dont
on fe fert pour pefer les diamans , les perles & les
pierres précieufes, & qu'en ce cas il ne fe divife
qu'en quatre grains. Voye^ Diamant «S* Grain.
C'eft ce qui fait conjecturer à quelques-uns que ce
mot doit dériver du Grec ntatùmv , qui lignifie un fruit,
que les Latins appellent fdiqua, & les François ca-
rouge ou caroube. Chaque grain de ce légume peut
pefer quatre grains de froment ou d'orge ; c'eft pour-
quoi le mot Latin Jiliqua a toujours été ufité pour
fignifier un poids de quatre grains. {£)
CARATCHOLIS, {Us) Géog. peuple d'Afie, dans
la Colchide , au nord du mont Caucafe ; on les nom-
me auffi Karakirks ou Circajjîens noirs , à caufe du
tems noir & toujours couvert qu'il fait dans leur pays.
CARATURE , f. f. ( Chimie ù métall. ) c'eft ainli
qu'on appelle le mélange de parties d'or avec des
parties ou d'argent feul , ou d'argent & de cuivre ,
félon une certaine proportion. Ce mélange eft defti-
né à faire les aiguilles d'efiai pour l'or. Selon que
l'on veut avoir un plus grand nombre d'aiguilles , &
mettre une plus grande précifion dans l'eflai de l'or
par la pierre de touche, on divife le marc d'or en un
plus grand nombre de parties égales : fuppofons-le ,
par exemple , divife en vingt-quatre parties , l'or pur
fera repréfenté par vingt-quatre ; l'or le plus pur après
le premier, par vingt-trois parties d'or, & par une
partie d'argent ; l'or le plus pur après le précédent ,
fera repréfenté par vingt-deux parties d'or, & par
deux parties d'argent ; ainfi de fuite. Cette diviiion
du marc en vingt-quatre parties eft purement arbi-
traire , Se l'on auroit pu la faire ou plus petite ou
plus grande. S'il n'entre, dans le mélange deftiné à
faire les aiguilles d'efiai , que de l'or & de l'argent s
il s'appellera carature blanche. S'il y entre de l'or , de
l'argent & du cuivre , il s'appellera carature mixte.
On voit par rapport à la carature mixte , que la corn-
binaiion eft double. Exemple, l'or le plus pur étant
comme vingt-quatre , celui qui fera le plus pur im-
médiatement après l'or de vingt-quatre , fera allié , ou
de deux parties égales d'argent & de cuivre, ou de
deux parties inégales ; & dans ce fécond cas où il y
a inégalité, ou il y aura deux parties d'argent contre
une de cuivre , ou deux parties de cuivre contre une
d'argent ; ou trois parties d'argent contre une de cui-
vre ; ou une partie d'argent contre trois de cuivre ;
ainli de toutes les autres combinaifons d'alliage d'ar-
gent & cuivre , dont le nombre des parties prifes
enfemble doit fervir de complément à celui de vingt-
quatre qui repréfenté l'or pur.
Obl'ervez toutefois que quoique la divifion du marc
d'or pur deftiné à taire des aiguilles d'efiai, l'oit arbi-
traire; elle ne peut pourtant être poufTée que jufqu'à
un certain point, au-delà duquel les altérations de
couleurs occalionnées par l'alliage, dans les traces
des aiguilles fur la pierre de touche, pafl'eroient par
des nuances fi imperceptibles, qu'on ne pourrait
porter aucun jugement du degré de pureté de l'or
éprouvé. Voye^ Alliage.
Le mélange deftiné à faire les aiguilles d'efiai pour
l'argent s'appelle ligature. Voye^ Ligature. Vayt\ à
V article Essai la manière de faire les aiguilles d'ef-
iai pour l'or & l'argent , Se à ï 'article Pierre celui de
Pierre-de-touche. (— )
CARAVAIA , {Géog.) rivière de l'Amérique mé-
ridionale , qui prend la fource dans le Pérou.
CARAVALLE, voyc; Caravelle. .
CARAVANE ,
CAR
CAR
67*
CARAVANE , f. f. ( Hift. mod. ) dans l'Orient,
troupe ou compagnie de voyageurs , marchands , &
pèlerins qui , pour plus de fureté, marchent ensemble
pour traverser les deferts , & autres lieux dangereux
infeflés d'Arabes ou de voleurs.
Ce mot vient de l'Arabe cairawan ou caïman , &
celui-ci du Perfan kerwan ou karwan , négotiant ou
commerçant. Foye^ Périt!". Ion. mund. éd. Hyde,p.
61.
Les marchands élifent entr'eux un chef nommé ca-
ravan-bachi , qui commande la caravane; celle de la
Mecque efl commandée par un officier nommé Emir
Adge , qui a un nombre de janiffaires ou autres mili-
ces iuffilant pour la défendre. Ordinairement ces
troupes de voyageurs marchent plus la nuit que le
jour , pour éviter les grandes chaleurs, à moins que
ce ne (bit en hy ver ; alors la caravane campe tous les
foirs auprès des puits ou ruiffeaux qui font connus
des guides , & il s'y obferve une difcipline auffi exadle
qu'à la guerre. Les chameaux font ordinairement les
voitures dont on fe fert; ces animaux fupportant ai-
fément la fatigue , mangeant peu , & fur-tout fe paf-
fant des trois de quatre jours de boire. On les atta-
che à la file les uns des autres , &£ un feul chamelier
en mené fept. Les marchands &c les foldats fe tien-
nent fur les ailes.
Le grand feigneur donne la quatrième partie des
revenus de l'Egypte pour les frais de la caravane , qui
va tous les ans du Caire à la Mecque viiîter le tom-
beau de Mahomet ; cette troupe de pieux Mufulmans
efl quelquefois de 40 à 70 mille hommes , accompa-
gnée de les foldats pour les mettre à couvert du pil-
lage des Arabes , & fuivie de huit ou neuf mille cha-
meaux chargés de toutes les provifions néceffaires
pour un fi long trajet à travers les deferts. Il y en
vient auffi de Maroc &c de Perfe.
Les pèlerins pendant le chemin s'occupent à chan-
ter des verfets de l'Alcoran ; quand ils font à deux
journées de la Mecque , dans un lieu nommé Rabak ,
ils fe dépouillent tout nuds & ne prennent qu'une
ferviette fur leur cou, & une autre autour des reins.
Arrivés à la Mecque , ils y demeurent trois jours à
faire leurs prières & à vifiter les lieux faints; de-là
ils vont au Mont-Arafat offrir leur corban ou facrifî-
ce ; & après y avoir reçu la bénédi&ion du fcherif
ou prince de la Mecque , ils fe rendent à Médine ,
pour honorer le tombeau du prophète.
On diilingue en Orient les journées, en journées
de caravanes de chevaux , & de caravanes de cha-
meaux ; celles de chevaux en valent deux de cha-
meaux : il part pluiieurs caravanes d'Alep , du Caire,
& d'autres lieux, tous les ans , pour aller en Perfe,
à la Mecque , au Thibet. Il y a auffi des caravanes de
mer établies pour le même fujet ; telle efl la carava-
nt de vaùTeaux qui va de Conllantinople jufqu'à
Alexandrie.
On appelle auffi caravanes , les campagnes de mer ,
que les chevaliers de Malte font obligés de faire
contre les Turcs & les corlaires , afin de parvenir aux
cominanderies & aux dignités de l'ordre : on les nom-
me de la forte , parce que les chevaliers ont fouvent
enlevé la caravane , qui va tous les ans d'Alexandrie
à Conllantinople. (G')
CARAVANSERAI , f. m. (Hift. mod. ) grand bâ-
timent public dclîiné à loger les caravanes. Voye^_
Caravane.
Ce mot vient de l'Arabe cairawan ou du Perfan kar-
wan, qui fignifie caravane & de ferrai, hôtel ou gran-
de mailon , c'efl-à-dire , hâtelerie des voyageurs.
Ces caravanferais , ou , comme Chardin les appelle ,
caravanferails , font en grand nombre dans l'Orient ,
où ils ont été bâtis par la magnificence des princes
des différais pays.
Ceux dcSchiras ce de Casbin en Perfe pafient pour
Tome II,
avoir coûté plus de foixante mille écus à bâtir ; ils
font ouverts à tous venans , de quelque nation & re-
ligion qu'ils foient , fans que f on s'informe ni de leur
pays , ni de leurs affaires , & chacun y ell reçu gratis.
Les caravanferais font ordinairement un valle &
grand bâtiment quarré , dans le milieu duquel fe trou-
ve une cour très-fpacieufe : fous les arcades qui l'en-
vironnent, règne une efpece de banquette élevée
de quelques pies au-deffus du rez de chauffée , où
les marchands & voyageurs fe logent comme ils peu-
vent eux & leurs équipages ; les bêtes de fomme étant
attachées au pic de la banquette. Au-deffus des por-
tes qui donnent entrée dans la cour, il y a quelque-
fois de petites chambres que les concierges des cara-
vanferais favent louer fort cher à ceux qui veulent
être en particulier.
Quoique les caravanferais tiennent en quelque forte
lieu en Orient des auberges , il y a cependant une
différence très-grande entr'eux &c les auberges ; c'efl
que dans les caravanferais , on ne trouve ablblument
rien ni pour les hommes ni pour les animaux , &
qu'il y faut tout porter ; ils font ordinairement bâtis
dans des lieux arides , flériles & deferts , où l'on ne
peut faire venir de l'eau que de loin & à grands frais ,
n'y ayant point de caravanferai fans fa fontaine. Il y
en a auffi plufieurs dans les villes où ils fervent non-
feulement d'auberge , mais encore de boutique , de
magafin, & même de place de change.
Il n'y a guère de grandes villes dans l'Orient , fur-
tout de celles qui font dans les états du grand fei-
gneur , du roi de Perfe , & du Mogol , qui n'ayent de
ces fortes de bâtimens. Les caravanferais de Conllan-
tinople , d'Ifpahan , & d'Agra , capitales des trois em-
pires , font fur-tout remarquables par leur magnifi-
cence & leur commodité.
En Turquie , il n'efl permis qu'à la mère & aux:
feeurs du grand feigneur , ou aux vifirs &c bâchas qui
fefont trouvés trois fois en bataille contre les Chré-
tiens , de fonder des caravanferais. (G)
CARAVANSERASKIER , f. m. ( Hift. mod. ) di-
recteur ou intendant, chef d'un caravanferai. l'oye^
Caravanserai.
Dans chaque caravanferai qui fe rencontre furies
routes &C dans les deferts , il y a un caravanferaskier ;
dans ceux qui font fitués dans les villes , & deftinés
à ferrer ou à étaler les marchandifes , comme dans
celui d'Ifpahan , il y a auffi un officier ou garde ma-
gafin qu'on appelle caravanferaskier. Il répond des
marchandifes dépofées dans le caravanferai , moyen-
nant un certain droit ou rétribution qu'on lui paye.
{G)
CARAVELLE , f. f. (Marine.) c'efl un petit bâti-
ment Portugais à poupe carrée , rond de bordage ,
& court de varangue ; il porte jufqu'à quatre voiles
latines , ou à oreilles de lièvre, outre les bourfets &
les bonnettes en étui. Ces voiles latines font faites
en triangle ; cette forte de bâtiment n'a point de hu-
ne , &£ la pièce de bois qui traverfe le mât efl feule-
ment attachée près de fon fommet. Le bout d'embas
de la voile n'efl guère plus élevé que les autres four-
nitures du vaiffeau ; au plus bas il y a de groffes pic-
ces de bois comme un mât , qui font vis-à-vis l'une
de l'autre , aux côtés de la caravelle, & s'amenuifent
peu à peu en haut. Les caravelles font regardées corn*
me les meilleurs voiliers ; elles font ordinairement du
port de 1 20 à 140 tonneaux. Les Portugais le fervent
de ces fortes de vaiffeaux en tems de guerre pour
aller & venir en plus grande diligence ; la manœu-
vre en étant facile &C tàifant bien toutes les évolu-
tions.
On nomme auffi caravelle , fur quelques côtes de
France, les bâtimens qui vont à la pèche du hareng
fur les bancs ; ils font ordinairement de 25 à 30 ton-
neaux. Ceux qui font dellinés pour la même pêche,
QQqq
674
CAR
qui fe fait dans la Manche , s'appellent trinquarts ; ils
font depuis i z jufqu'à 1 5 tonneaux. (Z)
CARAY , ( Géog. ) petite île d'Ecofîe , l'une des
Wefternes , affez fertile.
CARBATINE , f. f. ( Chafe ) on donne ce nom en
«énéral à toute peau de bête nouvellement écorchée.
° CARBEQUI , f. m. ( Commerce ) monnoie de cui-
vre fabriquée à Teflis , capitale de Géorgie , qui vaut
un demi - chaoury , ou trois fous quatre deniers ar-
gent de France. f (
C ARBONADE , f. f. ( Cuîfine ) on donne en gêne-
rai ce nom à toute viande que l'on fert fans autre
apprêt, que de l'avoir expofée au feu fur le gril. Un
pigeon à la carbonaie , eft un pigeon ouvert par l'ef-
toniac & cuit fur le gril. Une tranche de bœuf à la
carbonade , c'eft un morceau mince de cette viande
cuit de la même manière ; on fait quelquefois une
fauce à la carbonade , quelquefois on n'en fait point.
CARBONILLA, f. f. (Chimie) on nomme ainfi
au Potofi , un mélange de deux parties de charbon ,
& d'une partie de terre graffe,qu'on humeûe & qu'on
pétrit enfemble , jufqu'à ce que ces matières loient
bien mêlées & bien retournées avec lesmains, qu'el-
les s unifient parfaitement entr'elles , ôcqu'elles pa-
roiffent ne faire qu'un même corps ; cette terre ainfi
préparée , cette carbonilla fert à faire des vaiffeaux
pour les effais des mines , pour faire les catins. Voy.
Catin. (M)
CARBONIEN (fedit) , Hijl. anc. ediclum Carbo-
nianum ; étoit dans l'origine un décret du Préteur
Cn. Carbo , lequel fut dans la fuite adopté par les
empereurs ; qui portoit que dans le cas oii on difpu-
toit à un impubère fa qualité de fils & celle ^d'héri-
tier tout enfemble , la queftion d'état devoit être re-
mife après fa puberté , &t celle concernant l'hérédité
devoit être jugée fans délai ; & au cas qu'il y eût
lieu , la fuccelïïon adjugée provifoirement à l'impu-
bère , fauf l'examen de la queftion d'état après la
puberté.
Or il falloit , pour qu'il y eût lieu au bénéfice de
Védit Carbonien , i°. qu'il s'agît des biens paternels &
non pas des maternels : 20. que la queftion d'état &
celle fur l'hérédité fuffent mues toutes deux: 30. &
enfin que l'impubère n'eût été ni inftitué ni deshérité.
CARBOUILLON, f. m. (terme de Finances.) eft
un droit des falines de Normandie , dont il eft fait
mention dans l'ordonnance des Gabelles. Ce droit
eft la quatrième partie du prix du fel blanc qui s'y
fabrique. (H)
CARBURY ou CARBER, (Géog.) petite ville
d'Irlande , dans la province de Leinfter , au comté
de Kildare , fur la Boyne.
CARCAGNOLES , fub. f. ( Soierie ) ; c'eft ainfi
que les Piémontois appellent des efpeces de petites
crapaudines de verre , fur lefquelles tournent les fu-
feaux des moulins , foit à ovaler , foit à organciner
la foie. Voye{ à C article Soie , le moulin à tordre les
foies; & à t 'article Fil, le moulin ou ovale à tordre le fil.
CARCAJOU, CARCAJOUX ou CARCAIOU,
f. m. (Hijl. nat. Zoolog.) animal quadrupède de l'A-
mérique feptentrionale ; il eftearnacier , & il habite
les cantons les plus froids ; il pefe ordinairement de-
puis vingt-cinq jufqu'à trente-cinq livres ; il a envi-
ron deux pies depuis le bout du mufeau jufqu'à la
queue , qui peut avoir huit pouces de longueur : la
tête eft fort courte & fort grofle à proportion du
refte du corps : les yeux font petits, les mâchoires
très-fortes & garnies de trente-deux dents , dont il
y en a treize molaires , quatre canines , qui font très-
longues , & douze incilives , qui font courtes , étroi-
tes , épaiffes , &c fort tranchantes : les jambes font
fort courtes ; il y a cinq doigts dans chaque pié , & des
ongles crochus , très-forts , & très-pointus : le poil a
CAR
quatorze ou quinze lignes de longueur ; il eft de plu-
sieurs couleurs , noir , roux , blanc , &c. Cet animal
eft très-fort ôt très-furieux , quoiqu'il foit petit ; il
eft fi lent & fi pelant , qu'il fe traîne fur la neige plu-
tôt qu'il ne marche, auffi ne peut-il attraper en mar-
chant que le caftor. En hyver il brile & démolit la
cabane du caftor : mais celui-ci y eft rarement fur-
pris , parce qu'il a la retraite afiûrée fous la glace.
La chafle qui rend le plus au carcajou , eft celle de
l'orignac 6c du caribou. Dans l'hyver , lorfqu'il y a
de la neige de cinq ou fix pies de hauteur , l'orignac
fe fait des chemins dans les endroits où il trouve la
nourriture qui lui eft convenable ; c'eft dans ces che-
mins qu'il eft attaqué par le carcajou , qui monte fur
un arbre , attend l'orignac au partage , s'élance fur
lui , tk. lui coupe la gorge en un moment ; c'eft en
vain que l'orignac fe couche par terre , fe frotte con-
tre les arbres, ôc.fait des efforts affez violens pour
y laifler des morceaux de fa peau larges comme la
main ; rien n'elt capable de faire lâcher prife au car*
cajou. Il tue le caribou de la même façon , & il a beau-
coup d'autres rufes ; il détend les pièges , & enfuite
il mange l'appât fans péril. M. Sarralin, Hijl. de VA-
cad. roy. des Scienc. année iyij. (I)
CARCAISE, fub. f. (Verrerie.) c'eft un fourneau
particulier aux manufactures en glaces & en cryftal,
où l'on prépare les frites deftinées à ces ouvrages ,
& qui font propres à quelques autres opérations rela-
tives aux frites, y. les articles GLACE & CRYSTAL.
CARCAN , f. m. eft un poteau planté en terre,
avec un collier de fer attaché à hauteur d'homme ,
à quoi on attache par le cou des malfaiteurs qu'on
ne juge pas dignes de mort , pour les punir d'un délit
qui marque de la bafleffe d'ame,par la confufion. La
plupart de ceux qu'on attache au carcan , ont été au-
paravant fuftigés par le bourreau , & marqués d'un
fer chaud , &c font fouvent enfuite ou bannis ou en-
voyés aux galères. (H)
CARCANOSSI , ( Géog. ) province d'Afie , dans
l'île de Madagafcar , au midi de la rivière de Mata-
nengha.
CARCARANNE ou CARCARAVAL , (Géog. )
rivière de l'Amérique méridionale , au Paraguai ,
qui fe jette dans la Plata.
* CARCAPULI, (Hijl. nat. bot.) c'eft une efpece
d'oranger de Malabar , grand & gros à proportion,
que deux hommes peuvent à peine embraffer: les feuil-
les font par paires le long des branches , au bout def-
quelles il y a des fleurs tetrapétales , jaunâtres , fans
odeur , & d'un goût aigrelet : le calice eft à quatre
pièces pâles & concaves ; le fruit pend à un pédi-
cule d'un pouce de long ; il eft gros , rond, divifé en
huit ou neuf côtes , gonflées à leurs extrémités : il
eft d'abord verd , il jaunit , & finit par être blanc : il
eft d'une acidité agréable ; fa graine eft oblongue ,
un peu plate , d'une couleur d'azur foncé , & logée
au centre de la pulpe. Il fe mange ; il fe tranfporte
feché , & on lui attribue plufieurs propriétés médi-
cinales. Voye^ Ray.
CARCASSE , f. f. (Anatomie.) c'eft proprement
le fquelete d'un animal , ou le corps mort de cet ani-
mal , tel qu'il eft lorfque la chair en eft enlevée , brû-
lée ou deflechée. Voye$_ Squelete.
C'eft ainfi qu'on dit : on voyoit long-tems après la-
bataille les carcajfes des Jbldats , des chevaux , &c.
Carcajfe d'un oifeau , d'une poularde , d'une per-
drix , d'un levraud , d'un lapin, &c. c'eft ce qui refte
après qu'on en a enlevé les quatre membres , favoir,
les cuiffes & les ailes.
On dit auflî , en Architeclure & en Charpenterie , la
carcajfe d'un bâtiment; elle comprend les folives , les
poutres , les cloifons , les planchers , &c & c'en eft
proprement l'aflemblage coniîdéré indépendamment
des murs qui l'environnent , des tuiles ou ardoiles qui
CAR
îc couvrent , & des autres matières qu'on y applique}
foit pour le confolider , foit pour l'orner.
Carcasse. Voye^ Parquet.
CARCASSE de navire, (Marine.') c'eftle corps du
vaiffeau qui n'eft point bordé , &: dont toutes les pic-
ces du dedans paroiffent au côté , comme tous les os
d'une carcaJJ'e. (Z )
Carcasse : les artificiers appellent ainii une ma-
chine ou efpecé"de bombe , ovale , rarement fphéri-
que , compofée de deux cercles de fer paffés l'un fur
l'autre en croix , en forme d'ovale, avec un culot de
fer , le tout prefque de la même figure que font cer-
taines lanternes d'écurie. On difpofe en-dedans , fé-
lon la capacité de la carcaffe, de petits bouts de canon
à moufquet, chargés de balles de plomb ; de petites
grenades chargées , du calibre de deux livres , & de la
poudre grenée; on couvre le tout d'étoupe bien gou-
dronée , 6c d'une toile forte 6c neuve par-deffus , à
laquelle on fait un trou pour placer la fufée qui ré-
pond au fond de l'ame de la carcajfe. On la jette avec
un mortier, pour mettre feu aux maifons 6c pour pro-
duire d'autres pareils effets.
On a donné à cette machine le nom de carcaffe ,
parce que les cercles qui la compofent repréfentent
en quelque forte les cotes d'un cadavre humain.
On prétend que les carcajjes turent inventées vers
l'an 1672, 6c que les François en firent ufage dans la
guerre qu'il y eut alors entre la France 6c la Hollande.
La carcajje pefoit environ 20 livres ; elle avoit 1 2
pouces de hauteur & 10 pouces de diamètre par le
milieu. L'ufage en efl pour ainfi dire aboli , parce
qu'on a remarqué qu'elle ne faifoit guère plus d'effet
que la bombe , & qu'elfe étoit d'une plus grande dé-
penfe . Voye^ B O M B e . ( Q )
CARCASSE, en terme de Marchand de modes, font
des branches de fil de fer , couvertes d'un cordonnet,
& foùtenues toutes par une traverfe commune à la-
quelle elles aboutiffent. Ces carcajfes fervent à mon-
ter les bonnets , à en tenir les papillons étendus , &c
à empêcher qu'ils ne fe chiffonent.
CARCASSEN, (Géog.) ville d'Efpagne, dans le
royaume de Valence , dans la vallée de Xucar.
CARCASSEZ (le) Géog. petit pays de France ,
au bas Languedoc , dont Carcaffone eu la capitale.
CARCASSONE,(<SVo£.) villede France, en Lan-
guedoc : il y a beaucoup de manufactures de draps ;
elle elt fur l'Aude. Lon^it. zod. 0'. 49". lot. ^jd.
10'. 5i\
CARCHI, (Géog.) petite île très-fertile, dans la
mer Méditerranée, près de celle de Rhodes.
CARCINOME , f. m. y.a.pnitû>/xa , termede Médecine,
fynonyme à cancer. Ce mot vient de «ape/roc, cancer,
ecreviffe. Voye{ Cancer.
CARCUNAH , ( Géog. ) ville d'Afrique , dans la
province de Berbcra en Barbarie Éthiopique.
CARDAILLAC ou CARDILLAC , (Géog.) petite
ville de France, dans le Quercy.
CARDAIRE, f. f. (Hijl. nat. Ichlh.) raiafpinofa,
poiffon tic mer du genre des raies : il efl heriflé d'ai-
guillons à peu près comme des cardes avec lelqucl-
les on carde la laine , c'eft pourquoi on lui a donné
le nom de cardaire. Il a des aiguillons non-feulement
fur les nageoires, comme la raie appellée ronce, mais
encore fur les côtés de la tête , devant les yeux , fur
le dos, &c. Rondelet. V&ye^ Raie. (I)
CARDA MINE, fub. f. (/////. nat. bot.) genre
de plante , dont la fleur cftcompolée de quatre feuil-
les difpofées en croix. Le piftil fort du calice ec de-
vient dans la fuite un fruit ou une filique compofée
de deux lames on panneaux appliqués lur les bords
d'une cloifon, qui divife la filique en deux loges rem-
plies de quelques femences arrondies pour l'ordinai-
re. Ajoutez aux caractères de ce genre , que les lames
Tome II,
C A Ri
ۥ7 y
df?s filiques fe recoquillent par une efpece de 1 1
fe roulent en volute, 6c répandent les femences d*
part 6c d'autre avec allez de force, Tournefort, InJL
rciherb. FÔy^PLANTE, (I)
La cardamine ofpc. Gain, etnai. Z.jf). reffemble
fort au creflbn de fontaine, 6c en a a, peu près les
propriétés ; elle efl échauffante , & bonne contre lé
feorbut ; elle fe donne à la place du creflon de fon-
taine. On l'employé rarement d'ans les boutiques.
Miller Bot. of. (N)
* CARDAMOME , f. m. (TTifi. nat. bot.) carda-
momum ; le meilleur vient de Comagene , d'Armé-
nie , 6c du Bofphore ; il en croit auffi dans l'Inde 6c
dans l'Arabie : il faut préférer c-dui qui efl plein , bien"
ferme , 6c difficile à rompre ; celui qui manque de
ces qualités efl vieux. Le bon çtydtùnpme doit avoir
l'odeur forte , 6c le goût acre 6c un.peu amer.
On en distingue de quatre elpeces ; le cardamome
proprement dit , dont nous Venons de parler i le ma-
ximum, le majus , 6c le mir:us.
Le maximum , qu'on appelle aulïï graine de para-
dis , a les grains quarrés , angulaires, d'un rouge
brun, blancs en-dedans , d'une faveur chaude & mor-
dicante , mais moins aromatique que le cardamome
proprement dit : la coffe qui renferme les grains efl
à peu près fphérique; elle vient de Guinée: l'arbre
qui la porte efl inconnu. Les grains de cardamomum
maximum , ou grains de paradis , font chauds , del-
ficcatifs , & ont à peu près Jes mêmes qualités que le
poivre.
Le majus ou grand cardamome a la coffe longue , à
peu près triangulaire, le grain cornu, rouge , l?i un,
chaud > 6c aromatique; il vient de l'île de Java. On
n en tire guère , parce qu'il n'eft plus d'ufaçe en Mé-
decine.
Le minus , ou cardamome commun , a la coffe trian-
gulaire , fur une tige courte , coriace , flriée , & con-
tenant des grains petits, angulaires, chauds, épi-
ces. On l'apporte des Indes orientales : la plante qui
le produit elt inconnue.
On attribue à tous , mais fur-tout à ce dernier dont
op tait beaucoup d'ufage en Médecine, les propriétés
d'échauffer, de fortifier , d'aider la digeltion , d'être
bienfaifant à l'eltomac &: aux vifeeres , de chaffer
les vents , de foulager dans les maux de nerfs 6c de
tête , de provoquer les urines 6c les règles, & de difi-
iiper la jauniffe.
CARDAN (Philofophie de). Jérôme Cardan , Mi-
lanois, naquit le premier Octobre 1508; il fut pro-
teffeur en Médecine dans prefque toutes les Acadé-
mies d'Italie. En 1 5 70 il fut mis en prifon; & en étant
forti il alla à Rome, où le pape lui donna une pen-
fion. On remarqua une étrange inégalité dans les
mœurs , & fa vie a été remplie de différentes aven-
tures qu'il a écrites lui-même avec une l'implicite ou
une liberté qui n'eft guère en uiage parmi les siens de
lettres. En effet il paroît n'avoir compofé l'niltoire
de fil vie, que pour inltruire le public qu'on peut
être fou 6c avoir beaucoup de génie. Il avoue égale-
ment tes bonnes ce les mauvaifes qualités. Il femble
avoir tout facrifie au dt tir d'être linccre ; & cette
lincérité déplacée va toujours à ternir fa réputation.
Quoiqu'un auteur ne fe trompe guère quand ii parle
de fes mœurs & de les fentimens, on elt cependant:
affez difpofé à contredire Cj-dûn , 6c à lui rèfyfei t<
te créance , tant u femble difficile que la nature
pu former un caractère auflî capricieux Csi auf£ iné-
gal que le lien. 11 fe felicitoit de n'avoir aucun ami
lui la terre, mais en revanche d'avoir un efprit aé-
rien mi-parti de Saturne \ de Mercure, qui le .
duifoit (ans relâche , Cx: l'avefl
voirs. Il nous apprend encore qu'il étdit li inégal dans
lbn marcher, qu'on le prenoit fans doute pour un
fou. Quelquefois il nurchoit fort lentement. .
Q Q q q >j
6f6
CAR
homme qui étoit dans une profonde méditation ; &
puis tout d'un coup il doubloit le pas avec des poftu-
res bifarres. Il fe plaifoit dans Bologne à fe promener
fur un chariot à trois roues. Enfin on ne fauroit
mieux repréfenter la fingularité de ce Philolbphe
que par ces vers d'Horace,que Cardan avoue lui con-
venir très-bien.
Nil cequale homlni fuit Mi : fœpe vdut qui
Currebat fugiens hojlem , perfcepe vdut qui
Junonis facra ferret : habebat fxpt ducentos ,
Scepe decemfervos , &C
Quand la nature ne lui faifoit pas fentir quelque
douleur , il fe procurait lui-même ce fentiment defa-
gréable , en fe mordant les lèvres , & en fe tirail-
lant les doigts jufqu a ce qu'il en pleurât. Il n'enufoit
ainfi, difoit-il , que pour tempérer des faillies ou des
impétuofités d'efprit fi violentes , qu'elles lui étoient
plus infupportables que la douleur même , & pour
mieux goûter enfuite le plaifir de la fanté. Enfin
Cardan afïïire qu'il étoit vindicatif, envieux, traî-
tre , forcier , médifant, calomniateur, abandonné
aux plus fales & plus exécrables excès que l'on puiiTe
imaginer. D'un autre côté , il n'y a jamais eu perfon-
ne qui ait eu fi bonne opinion de foi-même , & qui fe
foit tant loiié que Cardan. Voici quelques-uns des
éloges qu'il fe donne. « Nous avons été admirés de
» plufieurs peuples. On a écrit une infinité de choies
» à ma louange , tant en vers qu'en profe. Je fuis ne
» pour délivrer le monde d'une infinité d'erreurs. Ce
» que j'ai inventé n'a pu être trouvé par aucun de
» mes contemporains , ni par ceux qui ont vécu
» avant moi ; c'eft pourquoi ceux qui écrivent quel-
» que choie digne d'être dans la mémoire des hom-
»mes, n'ont pas honte d'avouer qu'ils le tiennent
» de moi. J'ai fait un livre de diale&ique oii il n'y a
>» pas une lettre de fuperflue , &c où il n'en manque
» aucune. Je l'ai achevé dans fept jours , ce qui fem-
»• ble un prodige. A peine fe trouvera-t-il quelqu'un
» qui puiiTe fe vanter de l'avoir bien entendu dans
»> un an ; & celui qui l'aura compris iemblera avoir
» été inlîruit par un démon familier. Natura mea in ex-
» tremitate humanœfubjlantix conditionifque , & in con-
»fnio immortalium pofita ».
Si l'on coniidere dans Cardan les qualités d'efprit,
on ne fauroit nier qu'il ne fût orné de toutes fortes
de connoiiTances , & qu'il n'eût fait plus de pro-
grès dans la Philofophie , dans la Médecine , dans
F'Aflronomie , dans les Mathématiques , &c. que la
plupart de ceux mêmes qui de l'on tems ne s'é-
toient appliqués qu'à une feule de ces feiences. Sca-
liger , qui a écrit contre Cardan avec beaucoup de
chaleur , avoue qu'il avoit un ei'prit très-profond ,
très-heureux , & même incomparable ; de forte qu'on
ne peut s'empêcher de convenir que ion ame ne tût
d'une trempe finguliere. Voyt{ Algèbre.
Quelques-uns l'ont aceufé d'impiété , & même
d'athéifme : en effet , dans fon livre de Subtilitate , il
rapporte quelques dogmes de diverfes religions, avec
les argumens dont on les appuie ; il propofe les rai-
fons des Payens , des Juifs , des Mahométans , & des
Chrétiens ; mais celles des Chrétiens font toujours
les moins fortes : cependant en lifant le livre que
Cardan a compoié de Vitdpropriâ, on y trouve plus le
caractère d'un homme fiiperftitieux, que celui d'un
efprit fort. Il eft vrai qu'il avoue qu'il n'étoit guère dé-
vot , parum plus ; mais il allure auffi qu'encore que
naturellement il fait très-vindicatif, il négligeoit de
fe vanger quand l'occafion s'en préfentoit ; il le négli-
geoit , dis-je, par refpedt pour Dieu , Dei ob venera-
tionem. Il n'y a point de prière , dit-il , qui vaille le
culte que l'on rend à Dieu , en obéiifant à ia loi con-
tre le plus fort penchant de la nature. Il fe vante d'a-
voir refufé d'Edouard , roi d'Angleterre , une fom-
CAR
me confidérable que ce prince lui offrait , à condi-
tion qu'il lui donnerait les titres que le pape lui avoit
ôtés. Enfin on ne peut rien voir de plus lolide ni de
plus fage que les réflexions qu'il fait dans fon cha-
pitre xxij. où il expofe fa religion. La railon de
ion goût pour la loiitude fent-elle l'impie ? Quand
je fuis Jeu/ , difoit-il , je fuis plus qu'en tout autre tems
avec ceux que f aime , Dieu & mon bon ange.
Cardan avoit un eiprit vaife & de*i cglé , plus har-
di que judicieux , plus amoureux de l'abondance que
du choix. La même bifarrerie qu'il avoit dans fa con-
duite paroit dans la compoiîtion de fes ouvrages.
Nous avons de cet auteur une multitude d'écrits , où
l'obfcurité & les digreffions arrêtent le le£tcur à cha-
que pas. On trouve dans ion arithmétique plufieurs
difeours fur le mouvement des planètes , fur la créa-
tion , fur la tour de Babel. Il y a dans fa dialectique
un jugement fur les hiltoriens i & fur ceux qui ont
compoié des lettres. Il avoue qu'il faifoit des digrcl-
fions afin de remplir plutôt la teuille ; car ion mar-
ché avec le libraire étoit à tant par feuille ; & il ne
travailloit pas moins pour avoir du pain que pour
acquérir de la gloire. C'eft lui qui a réveillé dans ces
derniers fiecles toute cette philofophie fecrete de la
cabale & des cabaliftes , qui rempliiToit le monde
d'efprits ; auxquels Cardan prétendoit qu'on pouvoir,
devenir femblable , en fe purifiant par la Philofo-
phie. Voyc^ Cabale.
Cardan avoit pris cette belle devife , tempus mea
pojfefjio , tempus ager meus ; le tems eft ma richeiTe,
c'elt" le champ que je cultive. Voye^ Bayle, d'où l'on"
a tiré quelques traits de la vie de ce philolbphe. (C)
CARDANO , ( Gèog. ) petite ville d'Italie au du-
ché de Milan , fur l'Ame.
CARDASSE, voyei Raquette.
CARDE , i» f. en terme de Cardeur de laine , eft un
infiniment ou une efpece de peigne compoié de mor-
ceaux de fils de fer aigus , courbés , & attachés par
le pié l'un contre l'autre , 6c par rangées fort preifées,
Voye^ à l'article Cardier la manière dont on les
fait , avec leurs différentes efpeces; & à Y article Lai-
ne & Draperie , leur ufage.
♦ CARDE A , f. f. ( Myth. ) déefle qui préfidoit
chez les Romains aux gonds des portes. On dit que
Janus lui donna cette intendance en réparation d'u-
ne injure qu'il lui avoit faite.
CARDÉE, f. f. les Cardeurs appellent ainfi la
quantité de laine ou de coton qu'on a levé à chaque
fois de deiïïis les deux cardes, après qu'en les a tirées
& pafiées à plufieurs repriies l'une fur l'autre.
CARDER, terme de Cardeur , lignifie l'a&ion de
préparer la laine , en la faifant palier entre les pointes
de fer de deux inllrumens qu'on nomme cardes ,
pour la peigner , en démêler le poil , & la mettre
en état d'être filée , ou employée à divers ouvrages
qu'on fe propoie d'en faire. Voye^ Laine & Dra-
perie.
CARDER , ( Géog. ) petite ville de PEcofTe mé-
ridionale , dans la province de Lothian.
CARDES , f. f. pi. (Hift. nat. & Jard. ) beta ; if
y a deux fortes de cardes , celles d'artichaut , & les
cardes poirées.
Les cardes d'artichauts ne font autres que les côtes
ou feuilles de l'artichaut que l'on enveloppe de paille
ou de vieux fumier dans toute leur longueur , excep-
té le bout d'en-haut : lorfqu'elles font blanchies elles
perdent leur amertume. On choifit les vieux pies
qu'on veut ruiner, & on les tient enveloppés bien
droit de peur qu'ils ne crèvent fur un des côtés. Il y
a des Jardiniers qui pour les mieux aiTûrer contre le
vent , les buttent entièrement comme le céleri.
Les cardes poirées le replantent au mois d'Avril &
de Mai : ce ne font que les pies de poirée replantés
en planche , qui pouffent de grandes fanes , ayant
CAR
CAR
C-n
dans le milieu un coton blanc & épais ; & ce coton
eft la véritable tard» qui iért aux potages & aux en-
tremets;
On les cultive l'une & l'autre comme les arti-
chauts , & elles le multiplient de graine qui relTemble
à celle de la beterave. (A')
C ARDEUR, fa m. ouvrier qui carde la laine , le
coton, la bourre, &c f^oye^ a l'article Draperie
leur fonction.
La communauté des Cardans de Paris eft afTez an-
cienne ; les ftatuts ou réglcmens ont été confirmés
par lettres patentes de Louis XI. du 24 Juin 1467,
& depuis par autres de Louis XIV. du mois de Sep-
tembre 1688 , & enregiftrées au parlement le iz Juin
1691.
Par ces ltatuts & réglemens , les maîtres de cette
communauté lont qualifiés Cardeurs , Peigneurs , Ar-
çonneurs de laine & cocon , Drapiers drapans , Coupeurs
de poil , Fileurs de lumignons , &c.
Aucun ne peut être reçu maître qu'après trois ans
d'apprentiflage * & un de compagnonage , & fans
avoir fait le chef-d'œuvre preferit par les jurés.
Il y a toujours à la tête de la communauté des Car-
deurs trois jurés en charge , établis pour veiller & ré-
former les abus & malverfations qui peuvent s'in-
troduire dans le métier, & défendre les intérêts de
la communauté. L'élection des jurés le fait d'année
en année ; lavoir , la première de deux , ôc la drivan-
te du trûiiîeme.
Outre le pouvoir attribué aux maîtres Cardeurs de
Paris , de carder & peigner la laine ou le coton , de
couper toute forte de poil, de faire des draps, &c.
ils ont encore , fuivant ces mêmes ft atuts , celui de
faire teindre ou de teindre dans leurs rnailons tou-
te forte de laine , en noir , mule , & brun : mais il
leur eft défendu par arrêt du confeil du Roi du 10
Août 1700 , d'arracher ou couper aucun poil de liè-
vre , même d'en avoir des peaux dans leurs maifons,
n'étant pas permis aux Chapeliers d'employer de
cette forte de poil dans la fabrique des chapeaux.
Voye^ Us regl. gêner, pour le Commer. le dicl. du Comm,
& l'article CARDIER.
CARDIALGIE , f. f. ( Médecine. ) des mots Grecs
ivtpPia.) cœur, & de «aÇta ,/efoujfrc : douleur violen-
te qui le fait fentir à l'orifice fupérietir de l'eftomac ,
que les anciens appel loient auffi le cœur. Cette faillie
dénomination a donné occalion à une façon de par-
ler très-commune Se très-impropre , qui eft de dire
j'ai des maux de cœur, lorfque l'on a envie de vomir;
ce mouvement contre nature eft ablblument dépen-
dant de l'eltomac , & en aucune façon du cœur.
La cardialgie eft efTenticlle ou lymptomatique.
L'eflentielle eft occalionnée par l'irritation des fi-
bres de l'eltomac , leur trop grande contraftion , ou
leur foiblefle.
La lymptomatique a des califes étrangères à ce vif-
cere ; telle qu'une inflammation ou obftrucfion du
foie, ou quelque affection du cerveau ou de la ma-
trice.
La cardialgie cfTentielle eft ou inflammatoire ou
venteufe. Un lang épais engorgé dans les vailïeaux
du ventricule eft caufe de la première cfpcce ; voye^
l'article Inflammation: des vents occalion-
nés par l'air raréfié & échappé des alimens que l'on
a pris , produilent la féconde ; celle-ci le diftingue de
l'autre par la difficulté qu'a le malade à relpirer, par
le gonflement de l'eltomac , la douleur en cette par-
tic, qui augmente lorfque l'on a mangé, enfin par les
rots Se les naulées fréquentes qui tourmentent le ma-
lade. Les remèdes carminatifs lont très-indiqués dans
ce cas, & cet accident cède ailément à leur ufage.
Il y a encore une efpece de cardialgie que l'on nom-
mc fpafmodiqut : celle-ci eft plus cruelle que les au-
tres , $C eft accompagnée de douleurs tres-violentes ,
les nerfs de l'eftomac fe trouvant dans un érethifme
& une tenfion des plus confidérables , qui occupe les
hypochondres & toute la région épigaftrique. Elle
eft caillée par un amas d'humeurs mordicantes , par
un émétique donné à trop forte dofe , ou par un poi-
fon : dans ces deux derniers cas , les fymptomes font
très-effrayans. Le vertige , les maux de tête , la perte
du fommeil , le délire , les coavulfions , i'oppreflîon
de poitrine, les palpitations, lafoiblefle, & l'intet1-
mittence du pouls , lesfyncopes, les tranchées , la
conftipation , la liipprelnon des urines , le froid des
extrémités , les lueurs froides , la lividité du vifage >
& la pâleur , font autant de fymptomes de ce funefte
accident, qui lorlque le Médecin n'eft point promp-
tement averti , caule en peu de tems la mort du ma-
lade.
Après cette deicription de la cardialgie , on con-
çoit ailément comment le lait caillé , ou les vers dans
l'eftomac des enfans occafionnent cette maladie ;
pourquoi les hypochondriaques & les femmes hyfté-
riques y font lujets ; la délicateffe des fibres de l'ef-
tomac dans les uns , les mauvaifes digeftiens dans les
autres , font les caules de la maladie : enfin comment
un accès de colère, de peur, ou de quelque palîion
violente , peut occafionner la cardialgie : un engorge-
ment du lang dans les vaiffeaux de l'eftomac , & Ion
peu de facilité à le dégorger dans la veine-porte,
la produilent.
La cardialgie eft un état fâcheux , & auquel on ne
peut trop tôt remédier ; car les fuites en (ont très-fu-
neftes.
Le traitement varie félon les càiifes de la maladie ;
rien en même tems n'eft plus difficile que de placer
les remèdes dont on doit nier : car les cordiaux que
l'on employé affez fréquemment parmi le peuple ,
tels que la thériaque, la confection d'hyacinthe, &
autres remèdes de cette elpece , ne font pas toujours
indiqués. C'eft aux lumières d'un Médecin qu'il faut
s'en rapporter pour en diriger l'ulagc. Rien de plus
dangereux pour un malade attaqué de cardialgie in-
flammatoire , que l'adminiftratiort de ces remèdes.
Quel effet doit- on en attendre dans une cardialgii
Jpafmodique ? enfin quel lîiccès auront-ils lof (qu'elle
lèra caulée par des vers , ou des matières bilieufes
& glaireules , amaflees dans l'eftomac r Un Méde-
cin expérimenté examinera les caulés de la maladie ;
il appliquera les remèdes convenables , & vou! i \ '.li-
gnera les dangers que vous feroient courir par leur
confeil, des gens qui n'ont nulle connoifîance de
l'économie animale , ni des maladies , ni de la fa-
çon de les traiter. (Ar)
CARDIAQUE , adj, en Anatomie , le dit de l'ori-
fice gauche de l'eftomac , à caule de la proximité du
cœur. Voye^ Estomac.
On donne aulfi cette épithete aux vaifleaux, ar-
tère, veine, &c qui fe diftribtient. Voyt^ Artère ,
Veine, &c
Le plexus cardiaque eft un lacis de différens ra-
meaux, tant de la huitième paire que du nerf înter-
coftal, qui le diftribtient au cœur, f^'oy. Cœur, (i)
Cardiaque , adj. (Mcd.) paffiati cardiaque , eft
imc maladie dont il eft lbuvent parlé dans les au-
teurs fous ce nom ; mais dont les modernes traitent
plus fouvent fous le nom de fyncopt : c'ell une toi-
bleffe extrême , que le vulgaire nomme défaiù ar.ee.
Voyc^ Syncope.
Cardiaque, remède qui peut reveiller & rani-
mer les forces abattues & hinguilTantes. Ces fortes
de remèdes agillent en detruilant les obftacles qui
s'oppofent à la circulation , en augmentant le mou-
vement du lanç ; & enfin leur effet le rend fenlible
par le pouls plus élevé" , la ti anfpiration augmentée ,
& par tous les lignes qu'accompagnent nuage mo-
déré des liqueurs reftaurantes.
673
CAR
Ce tefme eft fynonyme à cordiaux rejlauràns , for-
■eifians, analeptiques. Voyer^ CORDIAUX. ( A7)
* CARDIER ou FAISEUR DE CARDES , ( Art
méchaniq. ) Les Cardiers fe fervent pour leur ouvrage
de la peau de veau , de bouc , ou de chèvre bien tan-
née. Ils prennent cette peau ; ils la coupent par mor-
ceaux quarres oblongs de la grandeur dont la carde
doit être ; ils tendent ces morceaux , qu'ils appellent
feuillets , fur une efpece de métier appelle le panteur.
Le panteur qu'on xoit fig. l. PI. du Cardier , efteom-
poie de deux tringles , ou rames , ou branches de
bois ébifelées en -dedans , A A , a a. Les bords des
ébifelures font garnis de deux rangées de clous à cro-
chet ; à l'aide defquels on tend les morceaux de peau,
comme on le voit. Dans les extrémités des deux trin-
gles ou rames font reçus deux bâtons ou cylindres
B B , bb , terminés par les bouts d'un coté en tenon
rond ou tourillon, & parles bouts de l'autre en vis.
Les tourillons font reçus dans la tringle A A , & les
vis dans la tringle a a. Il y a des cordes fines parlées
aux bords CC de la peau , & afïujetties fur les rames
A A , a a. Il eft évident que fi l'on fait tourner les bâ-
tons B B ,bb fur eux-mêmes dans le fens convena-
ble , la rame a a fera forcée de monter , &c qu'il vien-
dra un moment où la peau tirée félon fa hauteur par la
rame aa, &c félon fa largeur parles ficelles CC, lera
tendue en tout fens &c à diferétion. On appelle cette
opération, monter une peau fur le panteur , oupanter.
Lorfque la peau eft montée , on prend une pierre
ponce qu'on pafiè deffus pour i'égaiifer , pour enle-
ver les parties trop dures , lui donner par tout la mê-
me épaiffeur , & la rendre plus déliée & plus fouple ,
fuivant le genre de cardes auquel elle eft deftinée.
S'il s'y trouve des endroits trop minces , on y colle
du papier ou du parchemin. Cette féconde opéra-
tien s'appelle parer.
Lorfque la peau eft parée , on la pique. Piquer une
peau , c'eft la percer de petits trous places iur une
même ligne droite , tous à la même diftance , de ma-
nière que le premier*de la leconde ligne le trouve au
centre du petit quarré, dont lôs deux premiers de la
première ligne, & les deux premiers de la troiiieme
occupent les angles ; que le premier de la quatrième
ligne occupe le centre du petit quarré , dont les deux
premiers de la troifieme & de la cinquième marquent
les angles , & ainfi de fuite , comme on voit fig. 2.
Cette opération fe fait avec l'infiniment reprélenté
fig. 3. Cet infiniment s'appelle une fourchette. Il eft
garni à fa partie fupérieure de deux aiguilles plus ou
moins fines , félon les trous qu'on veut faire , &c ion
manche eft entaillé. Cette entaille fert à recevoir
l'index , tandis que le relie du manche eft embrafié
par la paume de la main. Il eft effentiel que les trous
foient bien rangés en Hgne droite , à même diftance ,
& dans l'ordre où on les voit : cependant pour le leur
donner , les ouvriers ne tracent aucune ligne fur la
peau ; l'habitude feule les dirige , & ils travaillent
avec une vîteffe incroyable. Au refte il ne ferait pas
impofiible d'imaginer une machine qui leur épargne-
rait toute cette peine. Il me femble que quand la peau
ferait fuffifamment tendue fur le panteur , on pour-
rait l'appuyer en- défions de matelats , ou de gros
draps , ou de chapeaux , & la prefTer en-deflùs d'une
furface armée de pointes courtes & roides , & ran-
gées comme on le délire. Rien n'empêcheroit que
cette prefie ne reffemblât tout-à-fait à celle des Im^
primeurs. On dit qu'il y a des ouvriers qui ont des
fourchettes à quatre , fix , huit pointes ; mais nue l'u-
fage de ces fourchettes eft plus difficile que de celles
à deux pointes ; Se qu'il le trouve de l'inégalité foit
dans le diamètre , foit dans l'arrangement des trous ,
ce qui eft de conféquence.
Quand on a piqué la peau , il s'agit de la garnir de
fils d'archal, Pour cet effet on choilit celui qui a la qua-
CAR
îité convenable à la groffeur de la carde qu'on veut
faire. Les fils dont on fait les cardes pour les laines fi-
nes , font connus dans le Languedoc fous les noms de
fils à 2, à 3 , à4, à 5, à~6 , ôt Ù7 plombs , &défignés
à Paris par les numéros 1,2,3,4, 5,6, 7: le nu-
méro 1 eft moins gros que le numéro 2 , & ainfi de
fuite. Les gros fils employés aux cardes des mar-
chandifes , ou laines , ou fils , ou poils extrêmement
groffiers , vont depuis le numéro 30 jirfqu'au nu-,
méro 40 , toujours augmentant en groffeur.
On commence par couper le fil de fer d'une lon-
gueur.proportionnée à la carde qu'on veut taire ; ce
qui s'exécute par le moyen de la jauge. La jauge eft
un infiniment qu'on voir. fig. 4. Son corps A eft de
bois: il eft entaillé en B. Cette entaille eft revêtue
de fer bien dreffé. Sa partie fupérieure C'el': couverte
d'une plaque bien unie. Il eft traverfé d'une vis D
qui fert de queue à la plaque C. Sur fon corps à ion
extrémité E eft fixé un écrou à oreilles , qui ne def-
cend ni ne monte , mais qui fe mouvant feulement
iur lui-même , fait bailler ou defeendre à diferétion
la plaque C. On remplit l'entaille B de fils d'archal
attaches en paciuet , ainli qu'on le voit dans la figure.
On frappe un coup fur la plaque C j afin que les fils
s'arrangent entr'eux Se s'appliquent bien tous exac-
tement fur la garniture inférieure 6. On a une ci-
faille dont la lame s'applique à la plaque C , qui lui
lèrt de guide ; & l'on enlevé d'un coup de cette
force ou cifaille les tronçons égaux & longs à dif-
erétion , qu'on vdilfig. 5. On les coupe ordinaire-
ment d'un pouce & demi plus ou moins. 11 faut que
ces fils foient bien droits , afin qu'ils prennent tous
une inflexion égale , & dans le même endroit. On en
prépare depuis 50 jufqu'à 100 à la fois, fuivant la ca-
pacité de la jauge.
Quand les fils font coupés , on les double. Pour
cette opération , on fe fert de l'inftrument qu'on voit
fig. â. il eft appelle doubleur, de fa fonction. Son man-
che A eft de bois. Sa partie fupérieure C C eft gar-
nie de deux joues de ter. Une pièce de fer bien dref-
fée & fixée à vis dans le corps , revêtit l'efpace DDD
creufé à la partie fupérieure. L'eipece de gouttière
E E fig. 5. eft compnfe entre les deux joues C C, de
manière qu'il y ait entre fa face inférieure & la pla-
que D D D , un efpace fuffifant pour pouvoir y in-
férer les tronçons de fil d'archal. La gouttière EE a
fa rainure tournée en-devant. On verra tout à l'heure
pourquoi on lui a pratiqué cette rainure , & pour-
quoi on lui a donné du refte la forme d'un prifme
triangulaire-. On pafle autant de tronçons de ni d'ar-
chal entre la gouttière E E & la plaque DDD qu'on*
v en peut inférer , comme on y voit le tronçon EL ,
&t l'on ramené la partie F par-detTus la gouttière juf-
qu'au fond de la concavité D D ; ce qui fait fournir"
au fil deux inflexions à la fois , & le réduit à la figure
de celui qu'on voit fur le doubleur en G H 1 K. On
a grand foin que le fond de la concavité D D foit
bien en ligne droite , & que tous les bouts d^^rtron-
çons foient bien exaftement appliqués fur ce fond.
Avec ces précautions , non-feulement les fils fouffri-
ront tous deux inflexions , l'une en H & l'autre en.
1 : mais ces inflexions ou angles leront placés préci-
fément aux mêmes endroits & leront tres-viîs ; ce qui
eft un efiêt du taillant de la gouttière qu'on a fait prif-
matique, afin que l'extrémité du^ronçon put être ra-
menée jufqu'en K. On la ramené jufqu'en A", afin que
le fil venant à fe reftituer un peu par fort reflbrt , l'an-
gle /refte droit. Les tronçons auiortir du doubleur,
ont la figure qu'on leur volt fig. 6. Les partie* a c , bd
font toujours de même longueur entr'elles : mais &
ces parties & la diftance a b , font plus ou moins lon-
gues , félon l'eipece de cardes auxquelles les fils d'ar-
chal font deftinés. Quant aux angles a & b, ils l'un*
toujours droits. Les tronçons dans cet état s'aj :
pointes.
CAR
CAR
679
Les pointes font portées fur la partie qu'elles oc-
cupent fig. 6. du plateau ABC D ; le plateau AB
CD, eft une planche quarrée garnie d'un rebord.
Au milieu du côté A D , eft fixé un liteau E F , par
Je moyen d'une corde I K , qui pafTe par-deffus, qui
traverfe la planche ou le fond du plateau , & qu'on
arrête en-deffous avec une clavette. On élevé le
bout F de ce liteau par le moyen d'une efpece de
coin G H ; le bord de fa furface fupérieure eft garni
d'une plaque de fer L M. Cette plaque eft percée de
trous ; & ces trous pénètrent dans le fond ou corps
du liteau à une profondeur déterminée. Ce liteau
fait exactement la fonction d'un fécond doubleur ; on
prend les pointes a b c d ; on les plante dans les trous-
du crocheux ou croqueux ; car c'eftainfi qu'on appelle
cet infiniment. On en voit une en O , puis on abaiffe
la partie O de la pointe en-devant fur la plaque L M
du croqueux; Si les côtés ac, b d , des pointes, flé-
chiffant , prennent encore deux nouveaux angles, &
fe réduifènt fous la forme no p q r.
Lorfque les pointes font crochées , on les parle
dans les trous de la peau piquée & tendue fur le pan-
teur. On voit fig. y. une peau couverte de pointes
en-deffous , &cjig. 8. la même peau en-deffus ; cette
opération de garnir la peau de pointes s'appelle bou-
ter ou ficher. Lorfqu'on a bouté , & que la peau eft
couverte de pointes ou crocs , on paffe deffus de la
colle forte ; après s'être bien affûré toutefois qu'il
n'y a point de crocs à contre fens ; car il eft évident
que tous les angles doivent avoir leurs côtés parallè-
les , & les fommets tournés du même côté. Pour s'af-
sûrer de cela , on a une planche qu'on appelle pa-
tron. On applique cette planche fur le feuillet ou fur
la peau percée Si garnie de crocs , Si on retourne le
panteur fans crainte que les crocs fortent de leurs
trous , ou fe dérangent.
Lorfqu'on a bien fixé les crocs fur le feuillet avec
la colle forte dont on l'a enduit , on prend une pierre
de grès très-fine , &c on enlevé le morfil , & l'on ai-
guife les pointes des crocs en paffant deffus cette
pierre. Cette opération s'appelle habiller ou rhabiller
la carde.
Après que la carde eft habillée , on prend le fendoir,
Si l'on démêle les crocs qui font embarraffés les uns
dans les autres. Voye^fig. g. cet infiniment. C'eft une
efpece de cifeau dont une des branches eft inclinée
en un fens , &c l'autre en fens contraire ; il a un dos
& un tranchant ; on paffe fa pointe entre les crocs
entrelacés , & on les démêle.
Après cette opération , on prend l'inftrument re-
préfenté fig. 10. Si appelle dreffeur, de fa fonction.
C'eft un petit canon emmanché ; ion ouverture eft
à peu près du diamètre du fil ; on s'en fert pour re-
dreffer les crocs verfés ou renverfés ; on infère la
pointe du croc dans l'ouverture, Si on lui donne
l'angle que l'on veut, & à l'endroit où il faut.
Lufage du fendoir eft de mettre les crocs en ligne
& de les démêler : celui du dreffeur, c'eft de placer
tous les fommets des angles dans un même plan pa-
rallèle au feuillet , & de rendre tous les crocs bien
perpendiculaires , ou dans une même inclinaifon.
11 s'agit maintenant de recorder la carde : recorder
une carde, c'eft examiner tous les crocs , ôter ceux
qui le font caffés , foit dans l'opération du fendoir,
foit dans celle du dreffeur , & ceux qui fe font trou-
vés trop courts. Pour cet effet, on ôte la colle dans
l'endroit du feuillet auquel ils correfpondent , & on
leur en fubftitue d'autres.
Quand la carde a reçu toutes ces façons, on la
détend pour la monter fur un morceau de bois de
hêtre de même grandeur ; ce qui s'exécute au poin-
çon Si au marteau. Le poinçon fert à faire des trous
dans l'épaiffeur du bois, Cv Le marteau a enfoncer
les clous. On a foin que le feuillet foit bien tendu fur
le bois ;&pourl'y arrêter plus folidement, on borde
la carde avec une lilîere de peau dont on couvre les
extrémités cloiièes du feuillet , & qu'on fixe avec de
nouveaux clous.
Lorfque la carde eft montée, on la mouve : les ou-
vriers entendent par mouver , repaffer les pointes au
grès, les égalifer derechef, & donner la dernière
façon tant à celles qu'on a fubftituées , qu'aux au-
tres.
Les Cardiers ne peuvent guère fe négliger dans la
façon des cardes que l'apprêt des laines ne s'en ref-
fente : fi les Cardiers n'obfervent aucune reole fixe
dans la manière de fabriquer les cardes deftinées à
mélanger Si à carder les laines , ou que les Cardeurs
fe fervent indiftinftement de toutes fortes de cardes,
les laines n'obtenant pas toute la perfection de tra-
vail dont elles font fufceptibles , les draps Si les
étoffes qu'on en fabriquera feront moins parfaits.
C'eft pourquoi le Roi a ftatué par un arrêt du 30
Décembre iJZJ , que les cardes appellées grofifes pla-
quettes, qui fervent à embourer , ou carder pour la
première fois les laines fines d'Efpagne ou de Lan-
guedoc , qui entrent dans la fabrication des draps
Londrins premiers & féconds, auront neuf pouces de
long , cinq & demi de large , au moins cinquante &
un rangs de dents, de foixante dents chacun, d'un
fil de fer d'Allemagne de trois plombs.
Que les cardes appellées groffes plaquettes, qui fer-
vent à embourer pour la première fois les draps
communs, auront neuf pouces de long , cinq pouces
Si demi de large, au moins quarante-cinq rangs de
dents, de cinquante-quatre dents chacun , de fil de
fer d'Allemagne de deux plombs.
Que les droffettes deftinées à dreffer ou carder
les laines pour la féconde fois , auront neuf pouces
de long , cinq de large , au moins foixante & un
rangs de dents de foixante Si une dents chacun , de
fil de fer d'Allemagne de quatre plombs.
Que les fines plaquettes qui fervent à emprimer
ou recarder fur le genou pour la troifieme fois , au-
ront neuf pouces de long , quatre pouces trois lignes
de large , au moins quatre-vingts-quatre rangs de
dents , de foixante Si une dents chacun , fil de fer
d'Allemagne de fix plombs.
Que les petites ou fines cardes qui fervent à re-
carder pour la dernière S: quatrième fois les laines
deftinées pour les chaînes des draps Londres , El-
bœuf, &c. auront neuf pouces de long, deux pou-
ces deux lignes de large , au moins quatre-vingts-
quatre rangs de dents , de quarante & une dents cha-
cun , fil de fer d'Allemagne de fix plombs.
Que les petites ou fines cardes à carder les laines
fines d'Efpagne pour chaînes de draps Londrins pre-
miers Si féconds, draps fins noirs, écarlatcs, ik
autres de même qualité , façon d'Efpagne , d'Angle-
terre, de Hollande, &c. auront neuf pouces de long,
deux pouces de large, au moins quatre-vingts-quatre
rangs de dents , de quarante-trois dents chacun , de
til de fer d'Allemagne de fept plombs.
Que les petites ou fines cardes à recarder pour la
quatrième S: dernière fois les laines pour trame de
draps Londres larges , Elbœuf , droguets d'Angle-
terre, &c auront neuf pouces de long , deux pouces
& demi de large, au moins quatre-vingts-quatre rangs
de dents , de quarante ck. une dents chacun , èx' de
fi de ter d'Allemagne de cinq plombs.
Que les petites* ou fines cardes à carder la trame
des draps tins qui paflent au Lc\ ant , façon d'Angle-
terre , de Hollande , d'Efpagne, &e. auront neuf pou-
ces de long , deux pouces cv' demi de large , au moins
quatre-vingts-quatre dents, de quarante-trois dents
chacun , fil de ter d'Allemagne de fix plombs.
Que le Cardier mettra fa marque à (eu fur les car-
des qu'il fabriquera , avec le* numéros de la grofleur
68o
CAR
du fil & des rangs & des dents , fous peine de con-
fifcation.
Que le Cardeur n'employera point de cardes non-
marquées , & ne cardera des laines qu'avec celles
qui font deftinées à cette qualité de laine , fous pei-
ne de confifcation des laines & d'amende , foit con-
tre lui , foit contre le fabriquant.
Que le Cardeur ne cardera point des laines blan-
ches avec des cardes qui auront fervi à des laines
teintes.
Que les laines dont on fait les Londrins premiers
& ieconds , les Londres larges , & autres draps en
blanc , n'ayant pas befoin d'être cardées autant que
les laines teintes ; fi on ne les carde que trois fois ,
feront cardées la première avec les groffes plaquet-
tes ; la féconde avec les droffettes ou avec les fines
plaquettes , & la troilieme avec les petites ou fines
cardes , & que les jurés veillent à ce que les Cardiers
& Cardeurs le conforment à ces ordonnances. Voye^
les Règlement génér. pour les manuf. tom.lll. pag, 25 J.
Les cardes pour le coton ne font pas différentes de
celles qu'on employé pour la laine : ce font celles
qui fervent à carder fur le genou , & qu'on appelle
vulgairement petites cardes, Voye^ F article Drape-
rie. Voye{ auflî les dimenfwns de cette forte de carde
plus haut dans cet article même , & l'article LAINE.
CARDIFF ou GLAMORGAN , (Géog.) ville d'An-
gleterre , dans la principauté de Galles , avec un bon
havre. Long. 14. 20. lat. 5l. 32.
CARDIGAN, (Géog.) ville d'Angleterre, capita-
le d'une province qu'on nomme Cardigan-shire , avec
titre de comté, dans la province de Galles. Long. zz.
ôo. lat. 5z. 13.
CARDINAL , terme qui fert à exprimer la rela-
tion ou qualité de premier, principal , ou plus confi-
dérable.
Ce mot vient de cardo , terme Latin qui lignifie un
gond; parce qu'en effet il femble que iur les points
principaux , portent & roulent pour ainfi dire toutes
les autres chofes de même nature.
Ainli la juftice, la prudence , la tempérance, & la
force, font nommées les quatre vertus cardinales, com-
me étant la bafe de toutes les autres. Voy. Vertu.
Points cardinaux , en Cofmographie , font les quatre
interférions de l'horifon , avec le méridien & le pre-
mier vertical. Voye{ Point.
Il y en a deux, lavoir, les interférions de l'hori-
fon & du méridien , qu'on nomme nord dcfud , ou
nord & midy par rapport aux pôles vers lelquels ils
fe dirigent. foyqNoRD , Sud , Midy.
Quant à la manière de déterminer ces points. Voy.
LlGNL MERIDIENNE.
Les deux autres, favoir, les interférions de l'ho-
rifon & du premier vertical , s'appellent ejl & ouefl,
ou levant & couchant, ou orient & occident. V. ces mots.
Les points cardinaux coincident donc avec les qua-
tre régions cardinales des cieux , & font éloignées de
quatre-vingts dix degrés les uns des autres.
Les points intermédiaires s'appellent points colla-
téraux. Foye{ Points collatéraux.
Points cardinaux du ciel , fe dit auffi quelquefois ,
mais plus rarement, du lever & du coucher du foleil,
du zénith &c du nadir. Voye^ Lever , Coucher,
Zénith & Nadir.
Cardinaux (vents) ,font ceux qui foufflent des
points cardinaux. Voye^ VENT.
Cardinaux (fignes ) , adj. pi. en Afronomie. On
défigne ainli les lignes du zodiaque , qui font les pre-
miers où le foleil eu: cenfé entrer au commencement
de chaque faifon ; favoir , le bélier, le cancer, la ba-
lance & le capricorne. Voy. SIGNE & PRÉCESSION.
(O)
Cardinaux (nombres), en Grammaire, ce font
les nombres 1,2,3, ^ S"* ^ont indéclinables par
CAR
oppcfition aux nombres ordinaux , premier , fécond^
troilieme , &c. Voye^ Nombre.
Cardinal, f. m. (Hift. eccléf.) fe dit plus parti-
culièrement d'un prince ecclélialtique, qui a voix ac-
tive & palfive dans le conclave , lors de l'éleûion du
pape. Voyei Conclave.
Quelques auteurs dilent que le mot cardinal vient
du Latin incardinatio , qui lignifie l'adoption que fai-
foitun églife d'un prêtre d'une églife étrangère , d'où
il avoit été éloigné par quelques malheurs ; que l'u-
lage de ce mot a commencé à Rome & à Ravenne,
parce que les églifes de ces deux villes étant les plus
riches , les prêtres malheureux s'y retiroient ordinai-
rement.
Les cardinaux compofent le confeil & le fénat du
pape. Il y a dans le Vatican une constitution du pape
Jean , qui règle le droit & les titres des cardinaux , &
qui porte que comme le pape repréfente Moyie , ainli
les cardinaux repréfentent les fôixante-dix anciens ,
qui fous l'autorité pontificale jugent oé terminent
les différends particuliers.
Les cardinaux dans leur première inltitution , n'é-
toienr autre choie que les prêtres principaux ou les
curés des parodies de Rome. Dans la primitive égli-
fe le prêtre principal d'une paroifle, qui fuivoit im-
médiatement l'évêque , fut appelle presbyter cardina-
lis. On les diftinguoit par-là des autres prêtres moins
relevés en dignité, qui n'avoient ni églife, ni em-
ploi. Ce mot a commencé environ l'an 1 50 ; d'autres
tiennent que ce fut fous le pape Sylveûre l'an 300:
ces prêtres cardinaux étoient les leuls qui pouvoient
baptiler & adminiftrer les facremens. Autrefois les
prêtres cardinaux étant faits évêqucs , leur cardinalat
vaquoit , parce qu'ils croyoient être élevés à une plus
grande dignité. S. Grégoire fe fert fouvent de ce mot
pour exprimer une grande dignité. Sous le pape Gré-
goire les cardinaux prêtres 6c les cardinaux diacres
n'étoient autre choie que les prêtres ou les diacres
qui avoient une églile ou une chapelle à deffervir.
C'eit-là ce que le mot fignifioit félon l'ancienne &
véritable interprétation. Léon IV. les nomme dans le
concile de Rome, tenu en 853 , presbyttros fui cardi-
nis, ÔC leurs églifes parochias cardinales.
Les cardinaux demeurèrent fur le même pié juf-
qu'au XI'. fiscle: mais la grandeur du pape s'étant
depuis extrêmement accrue , il voulut avoir un con-
feil de cardinaux , plus élevés en dignité que les an-
ciens prêtres. li ell vrai que l'ancien nom eft demeu-
ré : mais ce qu'il exprimons n'elt plus. Il le palîa un
allez long tems fans qu'ils prifient le pas fur les évê-
ques , ou qu'ils fe fuûent rendus les maîtres de l'élec-
tion du pape : mai'- tes qu'une fois ils ont été en pof-
fefïion de ces privilèges, ils ont eu bientôt après le
chapeau rouge &la pourpre; en forte que cioifTant
toujours en grandeur , ils le font enfin élevés au-def-
fus des évêques par la feule dignité de cardinal.
Du Cange oblerve qu'originairement il y avoit trois
fortes d'égides ; que les vraies églifes s'appelloient
proprement paroiffes : les lecondes, diaconies, qui
étoient jointes à des hôpitaux defîervis par des dia-
cres : les troisièmes de fimples oratoires, où on difoit
des méfies particulieies,Si qui étoientdelfervis par des
chapelains locaux & rélidens ; & que pour dillinguer
les églifes principales ou les paroifies, des chapelles
ou des oratoires , on leur donna le nom de cardinales.
Les églifes paroiliiaies donnèrent en conléquence les
titres aux cardinaux piètres, & quelques chapelles
donnèrent enluite le litre aux cardinaux diacres. Voy.
Église.
Tous les cardinaux furent distribués fous cinq égli-
fes patriai châles: lavoir, de S. Jean de Latran, de-
Sainte Marie-majeure, de S. Pierre du Vatican, de
S. Paul, de S. Laurent. L'églile de S. Jean de Latran
avoit fept cardinaux évêques que l'on appelloit col-
latéraux
C A R
CAR
latéraux OU hebdomadaires , parce qu'ils étoient afïif-
îans du pape , tk faifoient en fa place le fervice di-
vin chacun leur femaine. Ce font les évoques d'Of-
tie , de Porto , de Sylva Candida ou Sainte Rufîne ,
dAlbano , de Sabine , de Frefcati , tk de Paleltrine.
L'évêché de Sainte Rufîne eft. maintenant uni à ce-
lui de Porto. L'églife de Sainte Marie-majeure avoit
aiifli fept cardinaux prêtres , favoir , ceux de S. Phi-
lippe & S. Jacques , de S. Cyriace , de S. Eufebe , de
Sainte Prudcnticnne, de S. Vital, des SS. Pierre tk
Marcellin, tk de S. Clément. L'églife patriarchale
de S. Pierre avoit les cardinaux prêtres de Sainte Ma-
rie de-Ià le Tibre , de S. Chryfogone , de Sainte Cé-
cile , de Sainte Anaflafie , de S. Laurent in Damafo ,
de S. Marc , &c des SS. Martin & Sylveftre. L'églife
de S. Paul avoit les cardinaux de Sainte Sabine, de
S. Prifce , de Sainte Balbinc , des SS. Ncrée & Achil-
lée , de S. Xifte , de S. Marcel , tk de Sainte Sulan-
ne. L'églife patriarchale de S. Laurent hors les murs,
avoit fept cardinaux , ceux de Sainte Praxede, de S.
Pierre-aux-liens , de S. Laurent in Lucind, des SS.
Jean & Paul , des SS. quatre couronnés , de S. Etien-
ne au mont Celio, tk de S. Quiricc. Baronius fur
l'année 1057, cite un rituel ou cérémonial extrait
de la bibliothèque du Vatican , qui contient ce dé-
nombrement des cardinaux*
D'autres obfervent qu'on appclloit cardinaux, non-
feulement les prêtres , mais les évêques , les prêtres
tk les diacres titulaires , & attachés à une certaine
églife ; à la différence de ceux qui ne les fervoient
qu'en paffant & par commiffion. Les églifes titulaires
où les titres étoient des efpeces de paroiffes , c'elt-à-
dire, des églifes attribuées chacune à un prêtre car-
dinal, avec un quartier fixé tk déterminé qui en dé-
pendoit , & des fonts pour adminiftrer le baptême
dans le cas où il ne pouvoit pas être adminiflré par
l'évêque. Ces cardinaux étoient fubordonnés aux
évêques. C'cft pour cela que dans les conciles, par
exemple, dans celui de Rome tenu l'an 868 , ils ne
fouferivent qu'après les évêques. Ce n'étoit pas feu-
lement à Rome qu'ils portoient ce nom : on trouve
des prêtres cardinaux en France. Ainii le curé de la
paroiffe de S. Jean des Vignes eft nommé cardinal de
cette paroiffe dans une charte de Thibault , évêque
de SoifTons , 011 ce prélat confirmant la fondation de
l'abbaye de S. Jean des Vignes , faite par Hugue,
iéigneurde Château-Thierry, exige que le prêtre car-
dinal du lieu , presbyter cardinalis illius loci , foit tenu
de rendre raifon du foin qu'il aura eu de (es paroif-
iiens à l'évêque de SoifTons, ou à fon archidiacre,
comme il faifoit auparavant. Les mêmes termes le
trouvent employés , & dans le même fens , dans la
charte du roi Philippe I. en 10 j6. portant confirma-
tion de la fondation de S.Jean des Vignes.
On a donné auffi ce titre à quelques évêques, en
tantqu'évêques. Par exemple, à ceux deMaycncc tk
de Milan. D'anciens écrits appellent l'archevêque de
Bourges cardinal , tk l'églife de Bourges églife cardi-
nale. L'abbé de Vendôme prend le titre de cardi-
nal né.
Les cardinaux font divifés en trois ordres : fix évê-
ques, cinquante prêtres, tk quatorze diacres , faifant
en tout foixante-dix , qu'on appelle le facré-college. y.
Collège.
Les cardinaux évêques , qui font comme les vicai-
res du pape , portent le titre des évèchés qui leur font
attribués. Pour les cardinaux, piètres & diacres, ils
ont tous des titres tels qu'ils leur font aflignés. Le nom-
bre des cardinaux & des évêques clt fixé : mais celui
des cardinaux prêtres, &: diacres, & par contequent
le nombre des membres du facré-college, a toujours
varie jufqu'à l'année 1125. Le collège des cardinaux
étoit de cinquante-deux ou cinquante-trois. Le con-
çue de Confiance fixa le nombre deb cardinaux à
Tome H,
vingt -quatre. Sixte IV. fans avoir égard aii concile $
en grofîit le nombre , & le porta jufqu'à cinquante-
trois ; ainfi comme le nombre des cardinaux étoit anj
ciennement réglé à vingt-huit , il fallut établir de nou-
veaux titres à mefure que l'on créa de nouveaux car-
dinaux. A l'égard des diacres , ils n'étoient originai-
rement que fept pour les quatorze quartiers de la ville
de Rome. On les augmenta enfuite jufqu'à dix-neuf,
après quoi le nombre en fut diminué de nouveau.
Selon Onuphre , ce fut le pape Pie IV. qui régla
le premier en 1562, que le pape feroit feulement
élu par le fénat des cardinaux , au lieu qu'il l'étoit au-
paravant par le clergé de Rome. D'autres difentque
dès le tems d'Alexandre III. en 1 160, les cardinaux
étoient déjà en pofTcffion d'élire le pape, à l'exclu-*
fion du clergé. On remonte encore même plus haut,
& l'on croit que Nicolas II. ayant été élu à Sienne
en 1058, par les feuls cardinaux , c'eft à cette Occa-
iion qu'on ôta le droit d'élire le pape au clergé tk
au peuple Romain, qui n'eurent plus que celui de
le confirmer, en donnant leur confentement ; ce qui
leur fut encore ôté dans la fuite. Le P. Papebroch
conjecture que c'ell Honorius IV. qui a mis le pre-
mier des évêques dans le facré-college, en y faifant
entrer les évêques furliagansdupape,àquidc droit il
appartient de le nommer, & en en faifant la premiè-
re clafie des cardinaux.
La conftitution du conclave , pour l'élection du
pape , fut faite au fécond concile de Lyon en 1 274.
Le décret du pape Urbain VIII. par lequel il eft or-
donné que les cardinaux feroient traités d'éminencet
eft de l'année 1630. Avant cela on les traitoit iïilluf-
trijjîme.
Depuis ces nouvelles prérogatives , les cardinaux
ont précédé les évêques; cependant ces derniers,
confervant leur prééminence , ont quelquefois pris
le pas dans les airemblées tk les cérémonies publi-
ques en prélence même du pape; cela le voit dans
l'acte de dédicace de l'églife de Marmoutier par le
pape Urbain II. l'an 1090, lorfqu'il vint en France
tenir le fameux concile de Clermont ; car dans cette
cérémonie , Hugues archevêque de Lyon , tenoit ,
après le pape , le premier rang ; les autres archevê-
ques & évêques le fuivoient ; & après eux venoient
les cardinaux , prêtres & diacres qui avoient accom-
pagné le pape dans ce voyage.
Quand le pape crée des cardinaux , il écrit le nom
de ceux qu'il veut élever à cette dignité, tk il les fait
lire dans le conliitoire , après avoir dit aux cardinaux,
habetis fratres , c'eft-à-dire, vous ave^pour frères S Ni
Le cardinal patron envoyé enfuite quérir ceux qui fe
trouvent à Rome, tk les mené à l'audience du pape
pour recevoir de lui le bonnet rouge, tk au premier
coniifioire fa fainteté leui donne le chapeau. Jufques-
là ils demeurent incognito, & ne peuvent fe trouver
aux aflémblées. A l'égard des abfens, le pape leur dé-
pêche un de fes cameriers d'honneur pour leur por-
ter le bonnet: mais ils font obligés d'aller recevoir
le chapeau de la main de fa fainteté ; tk quand ils en-
trent à Rome on les reçoit en cavalcade. Les habits
des cardinaux font la (butane, lerochet, le mante-
let, la mozette, & la chape papale fur le roc!,,
les relions publiques c\r lolennelles. La couleur de
leur habit eft différente félon le tems . ou de rouge,
ou de rôle lèche, ou de violet : les cardinal, »
liers ne portent point de foie ou d'autre couleur qua
celle de leur religion , avec une doublure rouge ;
mais le chapeau ci le bonnet rouge font communs à
tous. Les cardinaux que le pape envoyé aux princes
fouverains , font décoi es du titre de légats .1 ...
lorfqu'ils font envo\ es daris une \ tUe de
tion du pape, leur gom ernement s'appelle .'■
ànt tions,qur font; celles d'Avign* .
Ferrare , de J • • de Peroule , ex de U.'.vcnne,
1 RRrr
682
CAR
Voyt{ LÉGAT & LÉGATION, traité de forig. des car-
dinaux. Du Cange, G lof. Aubery, Hift. des cardinaux.
Cardinal fe dit auffi d'offices féculiers : ainfi les
premiers minières de la cour de Theodoie font auffi
appelles cardinaux. Et Caffiodore, liv. Vll.form. Si.
fait mention du prince cardinal de la ville de Rome.
On trouve parmi les officiers du duc de Bretagne
en 1447? un Raoul de Thorel, cardinal de Quillart,
chancelier &c ferviteur du vicomte de Rohan ; ce qui
montre que c'étoitun office fubalterne. (G)
CARDINALE RAPUNTIUM, (Hift. nat. bot.)
genre de plante à fleur monopétale , anomale , tubu-
îée ou iïllonnée , découpée en plufieurs parties qui
font difpofées comme les doigts de la main , & qui
ont chacune la forme d*une langue. Cette fleur a
une gaine qui contient le piltil. Le calice devient un
fruit divifé en trois loges , qui renferment des lemen-
ces petites pour l'ordinaire , & attachées à un pla-
centa divifé en trois parties. Tournefort, Injl. rei
herb. Voyei PLANTE. (/)
CARDINAUX, f. m. pi. en terme de Drapier & de
Tondeur, c'elt une efpece de petites cardes de fer,
remplies par le pié , & dont il n'y a que l'extrémité
des pointes qui paroifTe ; on s'en fort pour ranger le
poil & le coucher dans la tonte. Voye^ C article & les
jigures de la Draperie.
C ARDONE , ( Géog. ) ville forte d'Efpagne dans
la Catalogne, avec titre de duché. Il y a auprès de
cette ville une montagne toute de fol , & qui ne s'é-
puife point ; ce fol elt de différentes couleurs fort
éclatantes, qu'il perd lorfqu'on le lave. Long, ig.io.
lat. 41. 42.
CARDONERO , ( Géog. ) rivière d'Efpagne dans
la Catalogne , quife jette dans celle de Lobregat.
C ARDONS d'Efpagne , ( Jardinage ) elt un légume
qui vient de graine que l'on feme à la mi-Avril ou
en Mai , fur couche ou en pleine terre. On tranfplante
en motte les premières qui étoient fur couche , dans
une planche bien amandée , de quatre pies de large ,
& à trois pies l'une de l'autre dans des trous terrotés.
Si on les feme dru dans la rigole , on les éclaircit en-
fuite , en arrachant les plus ferrés. On les lie quand
ils font hauts avec de la paille, & on les butte d'un
pié de terre pour les foùtenir ; enfuite on y met de la
terre ou de la paille juiqu'en haut pour les faire blan-
chir. On peut les traniporter en motte dans la ferre
en les replantant fur une planche de terre rapportée ;
lî-tor que les cardons feront plantés , on les arrofera ,
on les fardera fouvent , 8c on leur donnera deux ou
trois labours par an. ( K )
CARDUEL, (le) ou CARTHUEL, (Géog. )
pays d Aile à l'Orient de la Géorgie, dont la capi-
tale elt Téflis.
C ARED1 VE , ( Géog. ) île d'Ane , dans la mer des
Indes , fur la côte occidentale de l'île de Ceylan.
CAREK. , ( Géog. ) petite île d'Alie , dans le golfe
Perflque.
C.i RELIA, {. f. (Hift. nat. bot. ) genre de plante
à fleur en fleurons rafîemblés en forme de tête , écail-
leufe & garnie de feuilles ; ces fleurons font d'une
foule pièce, dont les bords font découpés. La fomen-
ce elt oblongue , anguleufe, terminée par une aigret-
te garnie d'écaillés ; elle mûrit fur la couche qui elt
nue. Pontedera Dif.ocl. Voye^ PLANTE. (/)
CARELIE, ( Géog. ) province de la partie orien-
tale de la Finlande ; on la divifé en Suédoile & en
Mofcovite : la partie la plus conlîdérable appartient
à la Ruffie.
CARELL, CRAOL ou CRAIL , ( GV0£. ) petite
ville d'EcolTe , dans la province de File.
CARELSBROOK , ( Géog. ) forterelfo d'Angle-
terre , dans l'île de Wight , dans la Manche.
CARÊME, f. m. (Hift. eccléfiaft. ) quadragefima,
tems de pénitence, pendant lequel on jeûne quarante
CAR
jours , pour fo préparer à célébrer la fête de Pâque.
Foyei Jeûne.
Anciennement dans l'Eglifo Latine, le carême n'é-
toit que de trente-fix jours. Dans le cinquième ficelé ,
pour imiter plus précilément le jeûne de quarante
jours , que Jelus-Chrilt fouffrit au delert ; quelques-
uns ajoutèrent quatre jours , & cet ulage a été niivi
dans l'Occident , lî l'on en excepte l'églifo de Milan ,
qui a confervé l'ancien ulage , de ne taire le carême
que de trente-fix jours.
Suivant S. Jérôme , S. Léon , St. Augultin , & plu-
fleurs autres , le carême a été inltitué par les Apôtres.
Voici comment ils raifonnent : tout ce que l'on trou-
ve établi généralement dans toute l'Eglifo, fans en
voir l'inltiiution dans aucun concile , doit pafler pour
un établiflement fait par les Apôtres ; or tel elt le
jeûne du carême. On n'en trouve l'inltitution dans au-
cun concile ; au contraire , le premier concile de Ni-
cée , celui de Laodicée , auffi bien que les pères Grecs
& Latins , fur-tout Tertullien , parlent du carême com-
me d'une choie générale & très-ancienne.
Calvin , Chemnitius , & les Proteltans prétendent
que le jeûne du carême a été d'abord inltitué par une
efpece de fuperltition,& par des gens Amples qui vou-
lurent imiter le jeûne de Jefus-Chrilt ; ils prétendent
prouver ce fait par un mot de S. Irénée, cité par
Eufebe. Preuve très-foible , ou pour mieux dire de
nulle valeur, quand on a contre elle le témoignage
confiant de tous les autres pères , èc la pratique de
FEglife univerfelle.
D'autres dilent que ce fut le pape Telesphore , qui
l'inltitua vers le milieu du fécond iieclc ; d'autres con-
viennent que l'on obforvoit à la vérité le carême dans
. l'églifo , c'elt-à-dire , un jeûne de quarante jours avant
Pâques, du tems des Apôtres; mais que c'étoit volon-
tairement ; & qu'il n'y eut de loi que vers le milieu
du troifieme ficelé. Le précepte eccléfialtique quand
il foroit foui , formerait une autorité que les réfor-
mateurs auroient dû relpefter , s'ils avoient moins
penfé à introduire le relâchement dans les mœurs que
la réforme.
Les Grecs différent des Latins par rapport à l 'abs-
tinence du carême ; ils le commencent une femain2
plutôt, mais ils ne jeûnent point les famedis com-
me les Latins , excepté le famedi de la fomaine-
fainte.
Les anciens moines Latins faifoient trois carêmes ;
le grand , avant Pâque ; l'autre , avant Noël , qu'on
appelloit de la S. Martin ; & l'autre , de S. Jean-Bap^
tifte , après la Pentecôte ; tous trois de quarante jours.
Outre celui de Pâques, les Grecs en obforvoient
quatre autres qu'ils nommoient les carêmes des Apô-
tres, de l'Alîbmption , de Noël , & de la Transfigura-
tion : mais ils les réduiioient à fopt jours chacun ; les
Jacobites en font un cinquième, qu'ils appellent de la
pénitence de Ninive ; & les Maronites flx , y ajoutant
celui de l'exaltation de la Sainte-croix.
Le huitième canon du concile de Tolède ordonne
que ceux qui, fans une néceffité évidente, auront
mangé de la chair pendant le carême , n'en mangeront
point pendant toute l'année , & ne communieront
point à Pâque.
Quelques-uns prétendent que l'on jeûne les qua-
rante jours que dure le carême, en mémoire du délu-
ge , qui dura autant de tems ; d'autre , des quarante
années pendant lefquelles les Juifs errèrent dans le
delert; d'autres veulent que ce foit en mémoire des
quarante jours qui furent accordés aux Ninivites pour
faire pénitence ; les uns , des quarante coups de fouets
que l'on donnoit aux malfaiteurs pour les corriger;
les autres , des quarante jours de jeûne que Moyfe
obferva en recevant la loi , ou des quarante jours que
jeûna Elie , ou enfin des quarante jours de jeûne
qu'obforva Jenis-Chiift.
CAR
. La difcipline de I'églife s'eft infenfiblement relâ-
chée fur la rigueur <k la pratique du jeune pendant le
carême. Dans les premiers tems, le jeune dans I'églife
d'Occident coniîïtoit à s'abftenir de viandes , d'œufs,
de laitage , de vin , 6c à ne faire qu'un repas vers le
loir : quelques-uns feulement prétendant que la vo-
laille ne devoit pas être un mets défendu ; parce qu'il
eft dit dans la Genefe , que les oifeaux avoient été
créés de l'eau aulîi bien que les poiflbns , le permirent
d'en manger ; mais on réprima cet abus. Dans I'églife
d'Orient , le jeûne a toujours été fort rigoureux ; la
plupart ne vivoient alors que de pain 6c d'eau avec
des légumes. Avant l'an 800 , on s'étoit déjà beau-
coup relâché , par l'ufage du vin , des œufs, & des
laitages. D'abord le jeûne confiftoit à ne faire qu'un
repas le jour , vers le loir après les vêpres ; ce qui
s'eft pratiqué jufqu'àl'ân 1200 dans I'églife Latine.
Les Grecs dînoient à midi , & faifoient collation d'her-
bes & de fruits vers le loir dès le fixieme fiecle. Les
Latins commencèrent dans le treizième à prendre
quelques conferves pour foûtenir l'eftomac , puis à
faire collation le foir : ce nom a été empnmté des re-
ligieux , qui après louper alloient à la collation , c'eft-
à-dire à la lecture des conférences des faints pères ,
appeliées en Latins collationes ; après quoi on leur
permettoit de boire aux jours de jeune de l'eau ou un
peu de vin, & ce léger rafraîchiifement le nommoit
auiu coLUuon. Le dîner des jours de carême ne le fit
cependant pas tout d'un coup à midi. Le premier de-
gré de changement fut d'avancer le foûper à l'heure
de nom , c'eft-à-dne , à trois heures après midi ; alors
on duoit aune , enmûe la méfie , puis les vêpres ,
après quoi l'on alloit manger. Vers l'an 1 500 , on
avança les vêpres à l'heure de midi ; & l'on crut ob-
ferver l'abftinence preferite en s'abftenant de vian-
des pendant la quarantaine , & fe réduilant à deux
repas , l'un plus fort , & l'autre très-léger fur le foir.
On joignoit aulîi au jeûne du carême la continence ,
l'abumence des jeux, des divertiflemens , 6c des pro-
cès. Il n'eft pas permis de marier fans difpenie pen-
dant le carême. Thomalîîn , Traité hijïorique & dogma-
tique des Jeûnes. { G )
CAREMBOUL , ( Géog. ) contrée de l'île de Ma-
dagafear , dans la partie méridionale.
CARENAGE , CRAN AGE , CRAN , f. m. ( Ma-
rine ) c'eft un lieu convenable fur le rivage de la mer,
pour donner la carène à des vaifTeaux ; les mots de
cranage 6c de cran font venus par corruption , & ne
font d'ufage que parmi quelques matelots.
Pour qu'un lieu fôit propre pour en faire un caré-
nage , il tant qu'au pié de la côté il y ait affez d'eau
pour que le vailTeau y foit à flot, êv qu'on puilfe l'a-
battre aifément fur la terre , & le coucher fur le côte
allez pour qu'on lui voye la quille.
CARENE , Quii/e , f. m. ( Marine ) c'elt une lon-
gue & grolTe pièce de bois , ou plusieurs pièces mi-
les à bout l'une de l'autre 6c qui régnent par-dehors,
dans la plus baffe partie du vailTeau , de poupe à
proue , afin de fervir de fondement au navire. Voye^
"Quille. On prend fouveht le mot de carène plus gé-
néralement, 6c on entend par-là toute la partie du
vai(Teau,qui efteomprife depuis la quille jufqu'à la
ligne de l'eau ; de-là vient qu'on dit caréner un vail-
le, m , donner la carène , mettre un vailTeau en carène,
pour lignifier qu'on donne le radoub au fond du bâti-
ment.
Carf.ne , Cran , c'eft le travail qu'on fait pour
calfater & radouber un vailTeau dans les œuvres \ 1
ves , 6c qui vont fous l'eau.
Demi-carene , fe dit lorfqu'en voulant caréner 11:1
vailTeau, on ne peut travailler que dans la moitié de
fon fond, par dehors , £c qu'on ne peut joindre juf-
que vers la quille.
Tome II,
CAR 6î]
^ Carène entière , c'eft quand on peut caréner tout un
côté jufqu'à la quille.
CARENER , verb, aft. ( Marine. )donrter'la carè-
ne à un vaiffeau , mettre un vailTeau en carène. Quel-
ques-uns difent par corruption carner , & mettre un
vaifeau en cran ; car le mot cran n'eft autre chofe , que
celui de carène qu'ils ont eftropié. Caréner un vailTeau ,
c'eft le coucher fur le côté , jufqu'à ce qu'on lui voye
la quille , pour le radouber , le calfater , ou le raccom-
moder aux endroits qui font dans l'eau, qu'on nomme
œuvres vives; 6c les œuvres mortes comprennent tou-
tes les parties du vailTeau qui font hors de l'eau , ou
bien tous les hauts du vailTeau.
Pour bien caréner un vailTeau , il ne faut pas épar-
gner le chauffage , qui le fait avec des bourrées de
menus bois; ce chauffage eft néceffaire pour bien
nettoyer le vaiffeau , & mieux faire paroitre le ,
fecruofités ou les fentes qu'il pourroit y avoir , afin
d'y remédier; enfuite on le fraie & on le fuife.
Pour coucher le vailTeau fur le côté lorfqu'on veut
le caréner, on le fert dans les ports de pontons, fui
lefquels on l'abat & on l'amarre. (Z )
CARENTAN, ( Géog. ) petite viLle de France en
baffe Normandie, dans le Cotcntin.
CARETTE, f. f. partie du métier des étoffes de
foie. La carette eft un cadre d'un pié & demi environ
de large fur deux pies 6c demi de long , compofé d'un
brancard & d'un montant , fur les traverfes duquel de
chaque côté , eft un râteau dans lequel les aleirons
font pofés & enfilés. Voye^ Étoffe de Soie. Koye^
aujjl Aleirons.
Il n'y a pas ordinairement de poulies dans les ca-
rettes ; les aleirons font féparés par des dentures fai-
tes aux deux planches dans lefquelles font enfilés les
aleirons ; d'ailleurs il y a des carette* qui portent juf-
qu'à vingt aleirons de chaque côté : à quoi ferviroient
donc les poulies?
C A-RE VA U , cri de Chafe , c'eft-à-dire que le cerf
s'en retourne dans fon pays.
CAREX , f. m. {Hijl. nat. bot.) genre de plante
qui ne diffère du cyperoide , qu'en ce que Tes fleurs
& les fruits forment plutôt une tète qu'un épi , 6c
qu'en chaque grouppe il fe trouve des fleurs & des
fruit?, de façon que dans quelques efpeces les fleurs
occupent la partie fupérieure du groupe & les fruits la
partie inférieure ; 6c dans d'autres elpeces, les fleurs
font au contraire dans le bas, & les fruits dans le haut*
La divilion des efpeces de ce genre dépend de cette
différence de lituation, & de la figure des capfules.
Micheli , Novaplant. gen. Voye^ Plante. (/ )
CARFAGNANA, {Géog.) petit pays d'Italie,
dans le Modénois , près de l'Apennin.
CARGA , {Géog.') île d'Aiic , dépendante de la
Perfe , de la province de Kerman.
CARGADORS, f. m. pi. {Commerce.') nom qu'on
donne à Amfterdam à des efpeces de courtiers, qui
ne fe mêlent que de chercher du fret pour les navires
qui font en chargement, ou d'avertir les marchands
qui ont des marchandées à voiturer par mer , des
vaifTeaux qui font prêts à partir , 8c pour quels lieux
ils font deltinés.
Si le cargador, à qui le maître d'un vaifleau s'a-
dreffe , trouve à le fretter tout entier , il convient du
prix avec le marchand qui en a beloin ; li au con-
traire il trouve à ne le charger qu'a cueillete , il dif-
tribue des billets à la bourfe, cv y fait afficher des
placards , qui contiennent le nom du vaifleau, du
capitaine , du lieu de fa deftination , 6c celui des car-
gadors. On peut voir un modèle de ce billet, 8c la
manière de traiter avec les cargadbrst dans le
du Commerce , tom. II. pag. 9 "• {G)
CARGAISON, CARÔl AlsoN . f. f. {Mai
c'eft le chargement du vaiffeau : ainfi toutes les mar-
R R r r ij
684
CAR
chandifes dont le vaiffcau eft chargé compofent la
cargaifon. On entend auffi quelquefois par ce mot la
facture des marchandées qui font chargées dans un
vaiffeau marchand.
Quelcues-uns fo iérvent du mot de cargaifon , pour
fi<*nifîer l'action de charger , ou le tems propre à char-
ger certaines marchandiiés , en ce dernier iéns on dit
ce mois efl le tems de la cargaifon des vins, des huiles, &c.
CARGUE , CARGUES , f. f. {Marine.) On ap-
pelle ainlî toute forte de manœuvre qui fort à faire
approcher les voiles près des vergues , pour les trouf-
for & les relever , foit qu'on ait deffein de les laiffer
en cet état ou de les ferrer.
Les cargues font distinguées en cargues -point, en
car gués- f o nd , &C en cargues-bouline.
Il faut remarquer que quoiqu'on difo une cargue au
féminin , ce mot devient mafculin lorfqu'il eft joint
avec un autre : on dit le cargue-point , le cargue-bou-
line , &c.
Cargues d'artimon ; quand on parle de ces fortes de
cargues , on dit les cargues du vent , & les cargues def-
fous le vent ; les unes font du côté d'où le vent vient,
& les autres du côté oppofé.
Mettre les baffes voiles fur les cargues, mettre les
huniers fur les cargues , cela fe dit lorfqu'on fe fort
des cargues pour trouffer les voiles par en-bas*
Cargue à vue, c'eft une petite manœuvre paffée
dans une poulie fous la grande hune , Se qui eft frap-
pée à la ralingue de la voile , pour la lever lorfqu'on
veut voir par-deffous : cette manœuvre n'eft pas or-
dinairement d'ufage.
Prefque toutes les voiles ont des cargues : en voici
le détail & le renvoi à la figure , pour en donner une
plus parfaite intelligence.
Cargues de la grande voile , Flanche I. n° 3 3.
Cargues du grand hunier , n°. 79.
Cargues du grand perroquet , n°. 81.
Cargues d'aï timon, n°. 32.
Cargues du perroquet de foule , n°. 78.
Cargues de milene , nJ. 34.
Cargues du petit hunier , n°. 80.
Cargues du perroquet de milene , n°. 82.
Cargues de la civaciere , n°. 35.
Cargues du perroquet de beaupré , n°. 83.
Cargues-pomt ou tailles de point ; ce font des cordes,
qui étant amarrées aux angles ou points du bas de la
voile, fervent pour la trouffer vers la vergue, enforte
qu'il n'y a que le fond de la voile qui reçoive le vent.
Cargues-bouline , contrefanons ; ce font des cordes
qui font attachées ou amarrées au milieu des côtés
de la voile vers les pattes de la bouline , & fervent
à trouffer les côtés de la voile.
Voye^ Planche I. les cargues-boulines de la grande
voile, cottes 51.
Cargues-fond ou tailles de fond; ce font des cordes
amarrées au milieu du bas de la voile, & c'eft par le
moyen de ces cordes qu'on en relevé ou trouffe le
fond, f^ojei Planche I. Cargues-fond ou tailles de fond
de la grande voile , n°. 53. Cargues-fond de la voile
de milene, n°. 54. Cargues fond de la civadiere, n°.
55- (z)
Cargue-bas. Voye^ Cale-BAS.
Cargues de hune. Voyei RETRAITES DE HUNE.
CARGUER. Carguer la voile , bourcer la voile ,
c'eft la trouffer & raccourcir par le moyen des car-
gues qui la lèvent en-haut, $c qui l'approchent de la
vergue jufqu'à mi-mât ou juiqu'au tiers du mât, plus
ou moins , félon qu'on veut porter plus ou moins de
voile , ayant égard à la force du vent & à la diligence
qu'on veut faire. Trouffer la voile entièrement, c'eft
la ferler ou la mettre en fagot , & quand elle n'eft ni
ferlée ni carguee, cela s'appelle mettre la voile au vent
ou la mettre dehors.
Carguer fignifîe auffi pancher fur le côté m naviguant.
CAR
Carguer C artimon , carguer àflribord , carguer de f ar-
rière , carguer de V avant ; termes de commandement.
Foye{ Cargue.
CARGUEUR, fub. m. (Marine.) c'eft une poulie
qui fort particulièrement pour amener & guinder le
perroquet : on la met tantôt au tenon du perroquet ,
& tantôt à fon chouquet ou à fes barres. (Z )
CARHAIX , (Géog. ) petite ville de France , en
baffe Bretagne , fameufe par la bonté des perdrix qui
s'y trouvent.
C ARIATI , (Géog.) petite ville d'Italie , au royau-
me de Naples, dans la Calabre citerieure, avec titre
de principauté. Long. 34. 5o. lat. J<). 38.
CARIBANE, (Géog.) province maritime de l'A-
mérique méridionale, qui s'étend depuis l'embou-
chure de la rivière d'Orenoque jufqu'à celle de l'A-*
mazone.
CARIBES (les), Géog. peuples fauvages de l'A-
mérique méridionale , aux confins des terres des Ca-
ripous , ils vont tout nuds , tk. fe peignent le corps
en noir.
CARIBOU, f. m. (Hift. nat. Zoolog.) efpece de
cerf de l'Amérique : il eft très-léger, & il court fur la
neige prelqu'auffi vite que fur la terre. Cette facilité
lui vient de la conformation de fes pies , qui n'enfon-
cent pas a lément der.s la neige, parce que la corne
de fes pies eft fort large & garnie d'un poil rude dans
les intervalles , de forte qu'elle lui tient lieu des ra-
quettes des Sauvages. Lorlqu'il habite le fort des bois,
il fe fait des routes dans la neige , &C il y eft attaqué
par le carcajou. Voyer^ Carcajou. (/)
CARICATURE, f. f. (Peinture.) Ce mot eftfran-
cifé , de l'Italien caricatura ; & c'eit ce qu'on appelle
autrement charge. Il s'applique principalement aux fi-
gures grotefques & extrêmement ciilproportionnées
ioit dans le tout , foit dans les parties qu'un Peintre ,
un Sciilpteur ou un Graveur fait exprès pour s'amu-
fer, & pour faire rire. Calot a excellé dans ce genre.
Mais il en eft du burîefque en Peinture comme en
Poëne; c'eft une efpece de libertinage d'imagination
qu'il ne faut fe permettre tout au plus que par délaf»
fement. (O)
CARIE , f. f. terme de Chirurgie, folution de conti-
nuité dans un os , accompagnée de perte de fubftan-
ce, laquelle eft occanonnée par une humeur acre Se
&C rougeâtre. Voye^ Os.
La carie eft une forte de corruption ou putréfact ion
particulière aux parties dures ou offeules du corps ,
qui y produit le même effet que la gangrené ou la
mortification fur les parties molles ou charnues ; ou
qui , comme s'expriment d'autres auteurs , y fait ce
que font aux parties molles l'abcès ou l'ulcère. Voye^
Gangrené, Mortification, Abcès, Ulcère.
La carie provient de l'afSuence continuelle d'hu-
meurs vicieules frif l'os , ou de l'acrimonie de ces hu-
meurs , de fract ure , de contufion , de luxation , d'ul-
cère , de mal vénérien , de médicamens corrofifs , de
ce que l'os eft refté long-tems à nud & dépoiiilié de
chair , expofé à l'air extérieur , &c.
Les remèdes ufités dans la carie font les teintures
d'Euphorbe , de myrrhe , tk d'aloès , ou les mêmes
fubftances en poudre, avec une addition d'iris, d'a-
riftoloche d'une ou d'autre forte , de gentiane , &c.
& fingulierement la poudre de diapenié. Après qu'on
a fait ufage de la teinture, on met fur l'os un phimaf-
feau faupoudré des mêmes fubftances pulvérifées.
On applique auffi fort fouvent, avec fuccès, fur l'os
carié, le cautère actuel, qu'on paffe à travers une
cannule , pour ne point endommager les parties voi-
fines. Foye{ CAUTERE.
Les Anatomiftes en difféquant des corps , trouvent
fouvent des os cariés , fingulierement ceux des mâ-
choires , des jambes, &c. quoique pendant que les
perfonores étoient vivantes on ne foupeonnat rien de
CAR
femblable , & qu'elles n'en refîentilTent aucun mal.
Lorfque les caries font caulées par un virus véné-
rien , fcorbutique , écrouelleux , &c. il faut tacher de
détruire la caufe avant que d'employer les remèdes
locaux capables de produire l'exfoliation de la carie.
Voye^ Exfoliation.
Les caries avec vermoulure ne fe peuvent guérir ,
il faut en venir à l'amputation du membre. Voye^
Amputation.
La carie des os du crâne oblige fouvent à mul-
tiplier l'application des couronnes de trépans. On
trouve dans le premier volume des Mémoires de l'Aca-
démie royale de Chirurgie , pluiîeurs obfervations im-
portantes fur la guérifbn des caries du crâne , à l'ar-
ticle de la multiplicité des trépans. Il y en a une en-
tr'autres de M. de la Peyronie, qui enleva une carie
confidérable , & qui employa à cette opération les
trépans , les élévatoires , les tenailles, les fcies , les
limes , les vilebrequins , les maillets de plomb , les
gouges , les cifeaux de prefque toutes les efpeces, &c.
Cette obfervation , qui fournit un des plus grands faits
de Chirurgie , tant par la grandeur de la maladie , &c
la confiance du malade , que par l'intrépidité du
Chirurgien , eft un de ces exemples extraordinaires
dûs à l'humanité , qui dans les cas defefpérés a porté
de granas Chirurgiens à des entreprîtes audacieuf es,
qui ont fervi à faire connoître de plus en plus les
forces de la nature , & les refTources de l'art.
La carie des dents caufe des douleurs confidérables
qui ne ceffent ordinairement que par l'extirpation.
Voy. Odontalgie , Dent, Mal de dent. ( Y)
Carie , (Géog. anc. & mod.) province d'Alîe en
Natolie , au midi de l'Archipel , appellée aujourd'hui
Alidinelli.
CARIFE , ( Géog. ) petite ville d'Italie au royau-
me de Naples , dans la principauté ultérieure.
CARIGN AN , ( Géog. ) petite ville du Piémont ,
avec titre de principauté. Lon. 23. 20. lat. 44. 46.
CARIQUEUSE , adl f. terme de Chirurgie, eft l'é-
pithete qu'on donne à une tumeur , qui par fa figure
refTemble à une figue. Il en vient quelquefois de cette
efpece parmi les hémorrhoïdes. Voye\ Figue 6-Hé-
MORRHOÏDE.
Ce mot vient du Latin carica, qui eft le nom d'u-
ne elpccc de figue fauvage , ainii nommée parce
qu'elle croillbit en Carie.
CARIGOURIQUAS , ( Géog. ) peuple dAfrique
dans la CafFrerie , aux environs de cap de Bonne-
Elpérance;
CARILLON, f. m. ( Horlogerie.") horloge ou pen-
dule à carillon ; c'eft une horloge qui fonne ou répète
un air à l'heure , à la demie, & quelquefois aux quarts.
Ces horloges font fort communes en Flandre ; on
en voit prefqu'à toutes les églifes : mais dans ce pays-
ci elles finit affez rares. L'horloge de la Samaritaine
eft je crois la feule de cette efpece qui foit dans Paris.
Quant aux pendules à carillon , elles font beaucoup
plus en ufage en Angleterre qu'ici , où on en fait
peu.
Les carillons font faits fur les mêmes principes que
les fermettes , ou le >rgues d'Allemagne. Dans cel-
les-ci le ' formes p r îles petits tuyaux d'or-
gue ; dans les carillons , ils le font par des timbres ou
des cloches, dont les diamètres doivent fuivre exac-
tement le diapafon. Voyt{ Diapason & VareicU
Cloche. Ils ont de même un tambour qui a des
chevilles fur fa circonférence, lefquelles au lieu de
lever des touches comme dans ces orgues , baillent
les leviers pour les foire frapperfur les timbres. (T)
Comme les cloches des carillons font fouvent fort
éloignées du cylindre étant placées fymmétfiquement
dans une lanterne élevée au-defïïis du bâtiment qui
contient l'horloge , on tranfmet à leurs marteaux l'ac-
tion des chevilles du cylindre par des fils de fer atta-
CAR
G8?
chés d'un bout à la queue dii marteau , & de l'antre
au milieu d'une bafcule , fixée par une de fes extié-
mités. Voye^ CLAVIER du grand orgue ; & pour la
manière de noter le cylindre , Parade Serinette.
Il faut remarquer que le clavier du cylindre ne peut
pas être touché avec les doigts , parce que le cylindre
occupe la place de l'Orgamlte ; & d'ailleurs que les
touches font trop larges & toutes de même longueur,
les feintes n'étant point diftinguées par ces fortes de
claviers. Si donc on veut y en ajuft er un que l'on puif-
fe toucher avec les doigts , on placera le clavier où.
on jugera à propos , & par le moyen d'un ou de plu-
fieurs abrégés (voye^ Abrégé ), on établira la fort»
nerie entre les touches du clavier 6c les leviers, ou
queues des marteaux.
On conçoit facilement que lorfque le carillon ré-
pète par le moyen du cylindre, il faut une puifTance
qui le faffe tourner comme , par exemple , un refiort ,
un poids , dont le mouvement eft modéré par le
moyen d'un rouage, comme, dans les fonneries. Voy.
Sonnerie. Il eft encore facile d'imaginer qu'il y a
une détente qui correfpond à l'horloge , au moyen
de laquelle le carillon fonne aux heures & aux de-
mies , &c. & que cette détente eft difpofée de façon ,
qu'il fonne toujours avant l'horloge , & que celle-ci
ne peut fonner qu'après le carillon.
Quant à la manière de noter le tambour, elle eft
la même que pour les orgues d'Allemagne, raye^ Se-
RINETTE , ORGUE d'Allemagne.
Les tableaux mouvans , & les figures qui jouent
des airs , foit avec un violon , un tambourin , &c,
font faites fur le même principe ; c'elt toujours un
tambour , qui faifant un tour dans un teins donné ,
levé des bafcules , qui par de petites chaînes font
mouvoir les doigts , les bras , &c. Tel étoit , par
exemple, l'admirable Auteur de M. deVaucanfon.
Voye^ l'article Androide.
* CARIM-CURINI , (Hijl. nat. bot.) arbriffeau
des Indes, quipo.te des fleurs en calque d'un bleu
verdâtre , & formant des épis , dont le fruit eft par-
tagé en deux cellules . où font deux femences plates ,
arrondies , & faites en cœur , & qui a la racine fibreu-
fe, blanchâtre , & couverte d'une écorce amere. Foy.
dans Ray , fes propriétés médicinales , dont les prin-
cipales font attribuées à la décodlion de la racine ,
qu'on dit appaifer les douleurs de la goutte , &c.
« CARINES , f. f. {Éifi. anc.) femmes dont la pro-
fefîion étoit de pleurer les morts dans les cérémonies
des funérailles payennes. On les faifoit venir de Ca-
rie, d'où elles ont été appellées Carines.
CARINOLA , ( Géog. ) petite ville d'Italie , au
royaume de Naples , dans la terre de Labour. Long.
3i. 35. lat. 41. i5.
CAR1NTHIE , ( Géog. ) province d'Allemagne ,
avec titre de duché , bornée par l'Autriche , la Sty-
rie, la Carniole Se le Frioul, le Tirol , &c. Clagcn-
rurt en eft la capitale.
C ARIOLE , f. f. ( Mejfhgerie. ) efpece de voiture
groffiere à deux roues , dont on fe fert dans les mef-
fageries.
CARIPI , f. m. ( HiJI. mod. ) efpece de cavalerie
dans les armées Turques. Les caripis qui font au nom-
bre de mille, ne font point efclaves , ec n'ont point
été nourris ni élevés comme eux au lerrail : m
font pour la plupart des Maures ou Chrétiens rené-
gats, qui ont fait le métier d'aventuriers i qui cher-
client fortune , & qui par leur adrefïe & leur coura-
ge, font parvenus au rang de cavaliers de la g
du prince. Ils marchent avec Tufagi , à main gau-
che derrière le fultan , & om dix à douze afpres par
jour. Caripiûgiù&e pauvre & étranger; & C alcondyle
dit qu'on leur a donne ce nom , parce qu'on les tire
principalement d'Egypte, d'Afrique, &c. (G)
CARIPOUS, ( Géog. ) peuple « l'Amérique rué-
686
CAR
ridionale , au nord du Bréfil & de la rivière des Ama-
zones. Ce peuple paffe pour le plus doux & le plus
humain de tous ceux des Indes occidentales. Il t'ait
une guerre continuelle aux Caribes qui ne font point
tout- a-fait fi honnêtes gens que les Caripous.
CARISEO , ( Géog. ) île d'Afrique , près du cap
Saint-Jean , près la côte de Guinée, au royaume de
Bénin.
CARISTO , ( Géog. ) petite ville de Grèce dans
l'île de Negrepont. Long. 42. 5o. lat. 38. G.
CARLADEZ , ( LE ) Géog. petit pays de France
dans la haute Auvergne , fur les confins du Rouer-
gue , dont la capitale eft Cariât.
C ARLAT , ( Géog. ) petite ville de France dans
la province d'Auvergne au Carladez.
Carlat , ( Géog. ) petite ville de France dans le
haut Languedoc , fur la rivière de Bezegue. Il y a
encore une ville de ce nom en France au comté de
Foix : c'eft la patrie de Bayle.
CARLEBY , ( Géog. ) petite ville de Suéde dans
la Cajanie en Finlande , à l'orient du golfe de Both-
nie.
CARLENTINI , (Géog.) petite ville de Sicile dans
la vallée de Noto.
CARLETON , ( Géog. ) petite ville d'Angleterre
dans la province d'Yorck.
CARLETTE ou C ARRELETTE , f. f. ( Commerce
& fabrication d'ardoife. ) c'eft ainfi qu'on appelle une
forte d'ardoife qui le fabrique dans l'Anjou, Voye^
Ardoise.
CARLILE, (Géog.) ville d'Angleterre affez forte,
capitale du duché deCumberland , fur l'Eden. Long.
14. IJ. lat. 55.
CARLIN ou CARLINO , ( Commerça. ) monnoie
du royaume de Naples , & qui a auffi cours en Sicile.
Le carlin fait dix grains , ou environ huit fous de
notre argent.
C ARLINE , carlina , f. f . ( Hifi. nat. bot. ) genre
de plante à fleurs ordinairement radiées. Le difque
de ces fleurs eft un amas de fleurons portés chacun
fur un embryon. La couronne des mêmes fleurs eft
formée par piufieurs feuilles plates , qui ne portent
fur aucun embryon. Toutes ces pièces font foûte-
nues par un grand calice épineux. Les embryons de-
viennent dans la fuite des femences garnies d'aigret-
tes, & féparées les unes des autres par de petites
feuilles pliées en gouttière. Tournefort , Injl. rei herb.
Voye{ Plante. (/)
La carlina , chameleon albus , carlina offic. eft d'u-
fage. On fe fort de la racine de cette plante en Méde-
cine : elle eft eftimée fudorifique , alexipharmaque ,
bonne contre toutes les maladies peftilentielles, &
même contre la pefte ; elle eft aufïi diurétique , &
falutaire dans l'hydropifie ; elle excite les règles , &
on peut l'employer dans les maladies hypochondria-
ques.
Son odeur caufe des maux de tête , des vertiges ,
des naufées. (jV)
CARLINGFORD, (Géog.) petite ville mariti-
me d'Irlande, au comté de Louth. Long. 11. 20.
lat. 54. 6.
CARLINGUE , CALINGUE , ESC ARLINGUE,
ECARLINGUE , CONTRE-QUILLE , f. f. (Man-
ne. ) on appelle ainfi la plus longue & la plus groiTe
pièce de bois qui foit employée dans le fond de cale
d'un vaifléau. Comme une feule pièce ne fuffit pas ,
n'y en ayant point d'affez longue, on en met piufieurs
bout à bout. La carlingue le poie fur toutes les va-
rangues ; elle fert à les lier avec la quille , ce qui fait
que quelques-uns l'appellent contre-quille ; le pie du
grand mât pôle deffus. Poye{, Planche VI. n°. 37. la
forme d'une des pièces de bois qui compolent la car-
lingue.
CAR
Voye{, Planche I F. figure 1. n°. 22.1a pofition de
la carlingue , & n°. 5. la partie qu'on nomme contre-
quille. Voye^ encore, Planche V. fig. 1. n°. 22. la car-
lingue dans la coupe tranfverfale.
La carlingue doit avoir FépaifTeur des deux tiers
de celle de l'étrave ; elle doit être plus large que la
quille, à caufe que la carlingue du pié du mât pofe
deffus , & que le ferrage y entre. Elle eft jointe à la
quille par des chevilles de fer, & fert à l'affermiffe-
ment de tout le vaiffeau ; on la peut nommer une
quille interne ; elle a fort fouvent un écart à l'avant.
Les mefures que l'on donne à la carlingue pour fa
largeur &épaiffeur, fe règlent fuivant la grandeur
du bâtiment ; par exemple , la carlingue d'un vaiffeau
de 1 3 4 pies de long , aura 9310 pouces d'épaiffeur,
deux pies 4 à 5 pouces de largeur, & environ 3 pou-
ces d'épais aux bouts de l'écart.
La carlingue va en diminuant vers les bouts tant à
l'égard de la largeur que de l'épaiffeur. On met à
chaque varangue , ou du moins de deux en deux va-
rangues , une cheville de fer à tête perdue , qui paffe
au-travers de la carlingue & de la varangue , & entre
dans la quilie fi avant , qu'il ne s'en faut qu"un pouce
& demi qu'elle ne paffe tout au-travers ; & lorlqu'on
met le vaiffeau furie côté , on garnit le refte du trou
par-dehors de bouts de chevilles de bois , qu'on y
fait entrer avec beaucoup de force , afin qu'il n'y
paffe point d'eau.
On renforce la carlingue d'une autre pièce de bois,
qu'on met deffus à l'endroit qui porte le pié du grand
mât.
Carlingue , ou Ecarlingue de pié de mât ; c'eft
la pièce de bois que l'on met au pié de chaque mât
qui porte auffi ce nom.
Le grand mât , le mât de mifene , & le mât d'ar-
timon, ont chacun leur carlingue. Voye^,Planche VI.
n°. 40. la figure de la grande carlingue ou carlingue
du grand mât ; & fa fituation, PI. IV. fig. 2. n°. 34.
Carlingue du mdt de mifene j fa figure Planche VI.
n°. 41. fa fituation dans le vaiffeau, Planche IV.
fig.i.n°.V).
Carlingue du mdt d'artimon. Voye^ Planche I V.fig.
il. n°. 84. & 106.
La grande carlingue , ou Y ecarlingue du pié du grand
mât fe pofe droit fur la contre-quille ; les proportions
dépendent de la grandeur du vaiffeau ; dans un bâ-
timent de 134 pies de long , elle eft à 6 pies de dis-
tance du milieu de la longueur du vaiffeau , en allant
vers l'arriére ; elle eft affûrée par deux porques mar-
quées aa, dans la figure 40. de la Planche VI. ces
porques dans un vaiffeau de 1 34 pies de long , doi-
vent avoir 1 4 pouces de large , & 1 2 pouces d'épais,
& être à 3 pies & demi de diftance l'une de l'autre.
La porque qui eft vers l'avant , fe place derrière le
banc de la grande écoutille. Ces porques font en-
core fortifiées par 4 genoux, deux du côté de l'a-
vant, & deux du côté de l'arriére. Ils doivent avoir
10 pouces d'épais , & ils font par le bas de la même
largeur que les porques ; leurs branches inférieures
ont 8 pies de long , & leurs branches fupérieures 7
pies ; celles-ci font moins épaiffes de deux pouces
que celles d'en-bas. De chaque coté de la contre-
quille , on met un billot ou taquet , pour fupporter
l'avance que la carlingue fait au-delà de la contre-
quille , au-deffus de laquelle il doit monter de la hau-
teur de 4 pouces , & il a 4 pouces d'épais par le haut.
La largeur de la carlingue doit être de 2 pies 6 pou-
ces , & celle de la carlingue du mât de mifene , doit
être égale ; l'épaiffeur de l'une & de l'autre doit être
de 10 pouces ; le billot qu'on pofe fur la contre-étra-
ve , fous la carlingue du mât de mifene , doit avoir
10 pouces d'épais ; & à le prendre par le côté qui
regarde l'avant ; il eft placé à la neuvième partie de
la longueur du vaiffeau , où eft auffi la carlingue du
CAR
pie du mât. Il fefte au côte du billot une partie delà
pièce où le billot a été coupé , qui fait comme une
planche épaiffe qui monte avec le mât jufqu'au pont.
Les porques de la carlingue du mât de mifene doivent
avoir i z pouces de large , & 10 pouces d'épais ; il y
a 4 genoux au-deffous & deux au-deffus, qui ont
10 pouces de large , & 9 pouces d'épais ; leurs bran-
ches ont 7 pies de long. La carlingue du mât d'arti-
mon doit avoir 14 pouces de large , & 10 pouces d'é-
pais : ces mefures dépendent des différentes métho-
des qu'adoptent les conftructeurs , & changent com-
me on l'a dit ci-devant , fuivant la grandeur des vaif-
feaux.
Carlingue de cabejlan ; il y a la carlingue du grand
cabelîan. Voye\ Planche iV.fig. 1. n°. 67.
La carlingue du petit cabejlan, n°. 104.
Carlingue de cabejlan arquez & couj'ue au pont j c'efl:
lorlque le pié du cabeltan ne defeend pas jufques fur
le pont, on lui fait une carlingue courbée , dont les
deux bouts font attachés aux baux , & le pié du ca-
beftan entre dans fon arc qui eff fufpendu.
Carlingue du bâton de pavillon. Voye7^ Planche I V.
figure 1. n°. 1 55. ( Z )
* CARLOVINGIENS , f. m. pi. ( HiJÎ. moi. ) nom
que l'on donne aux rois de France de la féconde race,
qui commença en 75 z en la perfonne de Pépin le
Bref, fils de Charles Martel , & finit en celle de
Louis V. en 987. On compte quatorze rois de cette
famille.
C ARLOWITZ , ( Géog. ) petite ville de Hongrie,
fur le Danube. Long. 3 y. 43. lat. 4.5. z5.
CARLSBAD , (Géog.) petite ville de Bohème,
fur la Toppel , remarquable par fes bains d'eau chau-
de, auxquels toute l'Allemagne a beaucoup de foi.
CARLSEROON , ( Géog. ) ville forte de Suéde ,
dan:; la Blekingie , avec un port fur la mer Baltique.
Long. 33. 35. lat. 56. i5.
C ARLSHAFEN , ( Géog. ) ville & port de Suéde ,
dans la Blekingie.
CARLSRUHE , ( Géog. ) petite ville d'Allema-
gne , au cercle de Souabe , dans le Marggraviat de
Bade-Dourlach.
CARLSTADT , ou CARLOWITZ , ( Géog. )
ville & fortereffe d'Hongrie dans la Croatie , au con-
fluent des rivières de Kulp & de Merefvvitz.
Carlstadt , ( Géog. ) ville forte de Suéde ,
dans la Weit-Gothie , fur une île. Long. 31. 40. lat.
69. 16.
Carlstadt, ou Carstadt, (Géog.) petite
ville d'Allemagne en Franconie, fur le Mein, près de
.Wirtzbourg.
CARLSBOURG , ( Géog. ) ville & fortereffe d'Al-
lemagne , clans le duché de Bremen, fur la rivière de
Geelte qui fe jette dans le Wefer.
C ARLS-TOWN , ( Géog. ) ville & port de l'Amé-
rique feptentrionale dans la Caroline , fur l'Alty.
CARMAGNOLE , ( Géog. ) ville forte d'Italie ,
dans le Piémont près du Po. Long. z5. zo. lat.
44- 43-
CARMAING , ( Géog. ) petite ville de France en
Gaieogne,dans la Lomagne.
CARMEN , (Belles-Lettres. ) mot Latin dont on
fe fervoit en général pour lignifier des vers , & dans
un fens plus particulier , pour marquer un charme >
ou formule d'expiation, d'exécration, de conjura-
tion, &c. renfermée dans un petit nombre de mots,
d'où l'on croyoit que dépendoit leur efficacité.
Carmina vel cœlo pojfunt deducerc lunam.
J'oyei Vers , Charme , &e.
Le P. Pezron tait venir ce mot de carm ou garm ,
qui chez Les Celtes ie prenoit pour les cris de joie ,
&. les vers que les Bardes chantoient avant le com-
CAR
6 R7
bat pour encourager les foldats; & il ajoute qu'en
Grec, yÀ^a. lignifie tout -à-la-îois combat & joie; mais
ce dernier mot n'eft pas dérivé du celtique que les
Grecs ignoroient très-certainement : il a pour raci-
ne le Grec même x*'f&> ■> }* jne réjouis.
Quelques auteurs tirent de ce mot" l'étymologie
des vers ou pièces de poélies nommées parles Latins
carmina , parce que , difem-ils , c'étoient des difeours
mefures & d'une forme déterminée telle que les char-
mes ou formules des enchanteurs. D'autres au con-*
traire prétendent que ces formules ont été nommées
carmina , parce qu'elles étoient conçues en vers. On
croyoit alors , ajoùtent-ils , que le langage mefuré &C
cadencé , avoit beaucoup plus de pouvoir que la
proie , pour produire la guérifon de certains maux ,
& autres effets merveilleux que promettoient les ma-
giciens.
Vigenere dérive carmen de Cz/vwc:«to, prophéteffe,
mère d'Evandre , parce qu'elle faifoit fes prédictions
en vers ;& d'autres prétendent que c'efl précilément
par cette dernière raifon qu'on lui donna le nom de
cannante , parce qu'avant elle on nommoit tout dif-
eours en vers carmen. Voye^ Car mentales. (G)
CARMENTALES ou CARM£NTALIA,ad). pria
fubit. (Hijl.anc.) fête des anciens Romains qu'ils
célebroient tous les ans le 1 1 de Janvier , en l'hon*
neur de Carmenta ou Carmentis , prophéteffe d'Ar-
cadie , mère d'Evandre , avec lequel elle vint en Ita-
lie, foixante ans avant la guerre de Troie.
Cette folennité fe répétoit auffi le 1 5 Janvier ; ce
qui eft marqué dans le vieux calendrier par carmenta-
lia relata.
Cette fête fut établie au fujet d'une grande fécon-
dité des dames Romaines , après leur réconciliation
avec leurs maris avec qui elles s'étoient brouillées ,
parce qu'ils leur avoient défendu l'ufage des chars
par un édit du fénat.
C'étoient les dames qui célébraient cette fête ; ce-
lui qui offrait les facririces s'appeiloit facerdos car~
mentalis.
Les auteurs font partagés fur l'origine du mot car*
menta : Vigenere dit que cène prophéteffe fut ainfi
zppdlce de carens mente, c'elt-à-dire, hors de fens, hors
de foi-même , à caufe de l'enthouiiafme 011 elle entrait
fouyént. D'autres prétendent que fon nom vient de
carmen , parce qu'elle faifoit fes prophéties en vers :
mais Vigenere loutient au contraire que carmen vient
de carmenta. Voye^ CARMEN. (G)
C ARMER. Y , (Géog.) viile & abbaye de France
au pays du Yelay, fur la rivière de Colance, à quatre
lieues du Puy.
C A R M E S , f. m. pi. ( Hifl. eccléf. ) ou NOTRE-
DAME DU MONT-CARMEL ; ordre religieux qui
tire fon nom du Carmel , montagne de Syrie , autre-
fois habitée par les prophètes Eiie 6c Elifée , è\: par
les enfans des prophètes , defquels quelques auteurs
peu intelligens ont prétendu que les Carmes dei'cen-
doient par une fucceflion non interrompue ; l"un
d'entr'eux l'a même foùtenu dans des theics fingulie-
res imprimées à Befiers , &c qu'on trouve dans les
nouvelles de la république des Lettres de Bayle.
D'autres , avec auifi peu de vraiffemblancc, leur
donnent Jcius-Chvift pour fondateur immédiat : quel-
ques-uns on* imagine que Pythagore avoit été C*r-
me , & cela naturellement, cm fans le lecours de la
métempfycofe ; è< d'autres que no» anciens Druides
des Gaules etoient une branche ou un rejetton de
cet ordre. Phocas, moine Grec , qui vivoit en 1 185,
e de Ion tems on \ oyait encore fur le Carmel
la caverne d'Elie, auprès de laquelle etoient des ref-
iles d'un bâtiment qui pal oifloit avoir ete un monaf-
tere ; que depuis quel.; 1 i » un vieux moine ,
prêtre de Caîabre , s'étoit établi en ce lieu, encon-
féquençe d'une révélation du propbeteElic ; Se qu'il
633
CAR
y avok afTemblé dix frères. Albert , patriarche de Jé-
mfalem , donna en 1209 à ces folitaires une règle
qui fat approuvée deux ans après par le pape Ho-
noré III. & que le père Papebrock a fait imprimer.
En 1238 , le roi S. Louis revenant delaTerre-fainte,
emmena avec lui quelques-uns de ces religieux, &
les établit en France où ils ont fept provinces. Cet or-
dre qui eft un des quatre mendians aggregés à l'uni-
verfité de Paris , s'eft rendu célèbre par les évêques ,
les prédicateurs , & les écrivains qu'il a donnés à l'E-
glife. L'habit des Carmes eft une robe noire , avec
un fcapulaire &un capuce de même couleur , & par-
deflùs une ample chape & un camail de couleur blan-
che.Il n'étoit pas autrefois de même.^.BARRÉS. L'or-
dre des Carmes le divilé en deux branches ; ceux de
l'anciene obfervance , qu'on appelle mitigés , parce
que l'auftérité de leur règle fat adoucie par Inno-
cent IV. & par Eugène IV. & qui n'ont qu'un géné-
ral auquel obéiflent quarante provinces , & la con-
grégation de Mantoue qui a un vicaire général ; &
l'étroite obfervance qui a deux généraux , l'un en
Efpagne , qui a huit provinces de l'on obéiflance , &
l'autre en Italie , qui a douze provinces en différen-
tes parties de l'Europe.
Carmes Déchaussés ou deschaux , ainfi ap-
pelles parce qu'ils vont nud-piés ; c'eft une congré-
gation religieufe établie dans le XVI. fiecle par fain-
te Thérefe : cette fainte la remit dans fa première
auftérité vers l'an 1 562. Elle commença par établir
fa réforme dans les couvens de filles , & la porta en-
fuite dans ceux des hommes , aidée dans ce defîein
par le père Antoine de Jefus, & le père Jean de la
Croix religieux Carmes. Pie V. l'approuva , & cette
réforme fut" confirmée par Grégoire XIII. en 1580.
Il y a deux congrégations de Carmes déchauffes , dont
chacune a fon général & fes conftitutions particu-
lières : l'une eft la congrégation d'Efpagne , divifée
en fix provinces ; l'autre eft la congrégation d'Italie,
qui comprend tout ce qui ne dépend pas de l'Efpa-
<me. Ils ont quarante-quatre ou quarante-cinq cou-
vents en France, où ils font établis depuis 1605. (G)
CARMELITES , nom d'un ordre de religieufes
réformé par fainte Thérefe. C'eft un ordre extrême-
ment auftere. (G)
CARMIN , f. m. ( Peinture & Chimie. ) c'eft une
efoece de laque très-fine & fort belle , de couleur
rouge fort éclatante & précieufe , dont on ne fait
guère d'ufage que dans la mignature & peinture en
détrempe. Comme elle n'a pas beaucoup de corps ,
non plus que toutes les laques, on ne peut la glacer
fur le blanc.
Pour faire le carmin. , prenez cinq gros de coche-
nille , trente-fix grains de graine de chouan , dix-huit
grains d'écorce deraucour , & dix-huit grains d'alun
de roche ; pulvérifez chacune de ces matières à part
dans un mortier bien net ; faites bouillir deux pintes
& demie d'eau de rivière ou de pluie bien claire dans
un vaifleau bien net, & pendant qu'elle bout verfez-
y le chouan , & le laiiTez bouillir trois bouillons , en
remuant toujours avec une fpatule de bois , & parlez
promptement par un linge blanc : remettez cette
eau parlée dans un vaifleau bien lavé , & la faites
bouillir ; quand elle commencera à bouillir , mettez-
y la cochenille , & la laiffez bouillir trois bouillons ;
puis vous y ajouterez le raucour , & lui laifTerez faire
un bouillon : enfin vous y verferez l'alun , & vous
©terez en même tems le vaifleau de deflus le feu ;
vous parferez promptement la liqueur dans un plat
de fayence ou de porcelaine bien net , & fans pref-
fer le linge : vous laifTerez enfuite repofer la liqueur
rouge pendant fept à huit jours , puis vous verferez
doucement le clair qui fumage , & laifTerez lécher
le fond ou les fèces au foleil ou dans une étuve ; vous
les ôterez enfuite avec une brofle ou plume , Ôc ce
CAR
fera du carmin en poudre très-fine & très-belle en
couleur.
Remarquez que dans un tems froid on ne peut pas
faire le carmin , attendu qu'il ne fe précipite pas au
fond de la liqueur , mais fait une eipece de gelée &
fe corrompt.
La cochenille qui refte dans le linge après avoir
paffé la liqueur , peut être remife au feu dans de
nouvelle eau bouillante , pour en avoir un fécond
carmin ; mais il ne fera ni fi beau , ni en fi grande
quantité que le premier.
Enfin la cochenille qui refte dans le linge , & la
liqueur rouge qui fumage au carmin , peut fe mêler
avec la teinture de bourre d'écarlate , pour en faire
la laque fine. Voye^ Varticle Laque, 8c la fuite de
celui-ci.
Autre manière. Prenez trois chopines d'eau bien
pure , c'elt-à-dire , trois livres pelant ; mettez-les
dans un pot de terre vernilïé ; placez ce pot devant
un feu de charbon ; ajoûtez-y aufli-tôt un grain au
plus de graine de choiian : quand ce mélange bouil-
lira fortement , paffez-le par un tamis ferré , & re-
mettez cette première eau dans le même pot furie feu^
y ajoutant aufli-tôt deux gros de cochenille mefte-
que , & remuant le tout une fois avec une fpatule.
Quand ce nouveau mélange bouillira bien fort, ajoû-
tez-y un grain d'autour , & immédiatement enluite
huit grains de crème de tartre pilée , autant de talc
blanc, & autantd'alundeRome broyé ; laifTez bouil-
lir le tout pendant deux à trois minutes ; éloignez-le
enfuite du feu , & le laifTez refroidir fans y toucher,
julqu'à ce qu'il loit tiède, alors l'eau paroîtra plus
rouge que l'écarlate : pafTez la tiède au-travers d'un
linge net un peu fin , dans un plat de fayence ; laif-
fez le marc au fond du pot pour le pafièr & prefTer
à part dans un autre plat ; ce qui vous donnera le
carmin commun : laifTez repofer vos plats pendant
trois jours ; décantez-en l'eau , le carmin reft era au
fond des plats : faites-le lécher à l'ombre & à l'abri
de toute poufliere , & quand il fera fec, enlevez-le
avec une petite brofTe ; vous aurez dix-huit à dix-
neuf grains de beau carmin , fans compter le com-
mua ,
Obfervez que le talc blanc doit être purifié de la
manière fuivante pour l'opération qu'on vient de
dire. Prenez du talc , calcinez-le dans un bon feu ,
jettcz-lcs enfuite dans de l'eau , remuez & délayez
avec les mains ; quand l'eau paroîtra blanche , enle-
vez-la avec une tafle , & la pafTez par un tamis dans
un grand vaifleau , où vous la laifTerez repoler pen-
dant deux heures ; le talc fe précipitera au fond du
vaifleau : dont vous décanterez l'eau , faites fécher
ce fédiment, ce fera le talc dont vous employerez
huit grains au carmin.
Quoique les méthodes précédentes puifTent être
bonnes , nous confeillons au lecleur de donner la pré-
férence à celle qui fuit ; elle eft de Kunckel. Voici
comment cet auteur enfeigne à faire le carmin.
« Prenez, dit-il , quatre onces de cochenille, une
» livre d'alun, de laine bien fine & bien nette une de-
» mi-livre , de tartre pulvérifé une demi-livre, de
» fon de froment huit bonnes poignées ; faites bouil-
» lir le fon dans environ vingt-quatre pintes d'eau ,
» ou plus ou moins à volonté ; laifTez repofer cette
» eau pendant une nuit , pour qu'elle devienne bien
» claire ; & pour la rendre encore plus pure, filtrez-
» la : prenez un chaudron de cuivre afTcz grand pour
» que la laine y fait au large ; verfez deflus la moitié
» de votre eau de fon , & autant d'eau commune , à
» proportion de la quantité de laine que vous aurez
» à y faire bouillir ; mettez-y l'alun , le tartre , & la
» laine ; enfuite vous ferez bouillir le tout pendant
» deux heures , en obfervant de remuer la laine de
» bas en haut ou de haut en bas } afin qu'elle fe net-
toyé
CAP,.
» toye parfaitement ; mettez la laine , après qu'elle
» aura bouilli le tems r.éceffaire , dans un filet, pour
m la laiffer égoutter : prenez pour lors la moitié qui
» vous relie 2e votre eau de ion , joignez y vingt-
» quatre pintes d'eau commune , & faites-les bien
» bouillir; dans le fort de la cuiffon mettez-y la co-
» chenille pulvérifée au plus fin , mêlée avec deux
» onces de tartre ; il faut remuer fans celle ce mêlan-
» ge pour l'empêcher de fuir : on y mettra la laine,
» on l'y fera bouillir pendant une heure & demie ,
» en obfervant de la remuer, comme il a déjà été
» dit ; lorfqu'clle aura pris couleur , on la remettra
»> dans un filet pour égoutter ; elle aura pour lors une
» belle couleur écarlate.
» Voici la manière de tirer la laque ou le carmin
» de cette laine ainfi colorée. Prenez environ trente*
» deux pintes d'eau claire , faites-y fondre aviez de
»> pbtafïe pour en faire une lefîive fort acre ; purifiez
» cette lelîîve en la filtrant ; faites-y bouillir votre
» laine jufqu'à ce qu'elle ait perdu toute fa cou-
» leur , &c foit devenue toute blanche , & que la lef-
» five fe foit chargée de toute fa teinture ; prenez
» bien votre laine, & panez la lcfïïve parla chauffe;
» faites fondre deux livres d'alun dans de l'eau , ver-
>» fez cette folution dans la lefiive colorée ; remuez
» bien le tout ; par cette addition la lcfïïve fe cail-
» lera & s'épaiilira ; repaffez-la à la chauffe, elle for-
» tira toute claire & pure : fi elle étoiî encore char-
>■ gée de couleur, il faudrait la remettre bouillir,
» & y ajouter encore de l'alun diffous ; elle acheve-
» ra de fe cailler, & le carmin ou la laque ne paffe-
» ra point , mais réitéra dans la chauffe. On aura foin
» de verfer à plufieurs reprifes de l'eau fraîche par-
» diffus , pour achever d'en ôter l'alun ou les icls
» qui pourraient y être reliés : on fait fécher enfuite
» la couleur , qu'on réferve pour l'ufage , après l'a-
» voir réduite en une poudre impalpable. Si dansl'o-
» pération on trouvoit que l'eau fe fut trop diminuée
» par la cuiffon, il faudra bien fe garder d'y verfer
» de l'eau froide ; mais il faut dans ce cas n'y mettre
» que de l'eau bouillante ».
Si on. vouloit faire du carmin à moins de frais , &
fans fe donner la peine de commencer par teindre la
laine , il n'y aurait qu'à faire bouillir dans la leffive
fufdite de la bourre tontine de drap écarlate , & pro-
céder en toutes chofes de la manière qu'on vient de
décrire. Kunckcl dit avoir fouvent fait ces deux opé-
rations & toujours avec fuccès. Voye^ fes remarques
fur Van de la Verrerie d'Antoine Néri , liv. VII.
On contrefait le carmin avec du bois de Bréfil ou
de Fernambouc ; on les pile pour cet effet dans un
mortier, on les met tremper dans du vinaigre blanc ;
on fait bouillir ces matières , & l'écume qui en
vient donne une cl'pece de carmin : mais il n'appro-
che nullement de la beauté de celui que nous venons
d'indiquer. On tire auiii une couleur rouge des grains
de kermès & de la garance. Voye^Cart. Rouge. (— )
CARMIN A, (GJog.) île de l'Archipel , habitée
par des Grecs & des Turcs , qui ne s'occupent qu'à
la piraterie.
C ARMINACH , ou C ARMINI AH , ( Géog. ) ville
d'Ane , dans la grande Tartaric , dans la contrée de
Bochara. Lori«.^88. lat. .2$. 30.
CARMIN ATIF , adj. ( Méd. ) nom que l'on a don-
né à certains médicamens , qui ont la vertu d'expul-
fer les vents retenus dans la cavité de l'eliomac &c
des inteiiins. Quincy penfe que la promptitude avec
laquelle ces remèdes agiffent, les a fait nommer car-
minatifs , qu'il tire du mot Latin carmen , vers ; parce
que l'on loiioit en vers tout ce qui paroiffoit furpre-
nant, & tenant du charme ou de l'enchantement. On
explique leur aciion par la raréfaction de l'air arrêté
par une humeur vifqueufe , placée dans l'eliomac ou
dans les inteliins. Lorfque cette efpecc de digue cli
Tome II.
CAR
689
rompue par quelque remède atténuant , alors l'air
jort avec explofion & occafionne du bruit par haut
ou par bas. Rien n'eli plus capable de produire cet
effet que les femençes que l'on employé contre les
vents , & que l'on appelle carminatives : telles font les
femençes d'ar.is , de fenouil, de perfil , &c. les eaux
dillillées de ces mêmes plantes , l'infufion de leurs
fleurs , auxquelles on peut aioûter celles de camomil-
le ,de mélilot,de matricaireôc d'aneth. Leur nature
chaude les rend très-propres à raréfier l'air , & à faire
fur la membrane de l'eliomac & des inteliins , une
petite irritation , & un petit mouvement capable de
broyer ces humeurs vifqueufes , & d'en détruire la
ténacité. Voye^ Vent. (A")
C ARMONE , ( Géog. ) ville d'Efpagne , dans l'An-
daloufie. Long. 12. 32. lat. Jj. 24.
CARMONS ou CORMONS , ( Géog. ) petite vil-
le d'Italie , dans le Frioul, près de la rivière d'Indri.
* CAKNA , CA RNE, ou C A RDI NE A , f. f.
( Myth. ) Décile révérée chez les Pramains. Elle pré-
lidoit à la confervation de la fanté des parties inté-
rieures du corps , & à l'embonpoint des autres. On
lui lacrifioit le premier de Juin ; l'offrande étoit d'une
bouillie de farine & de lard. Il étoit encore de fon
miniilere d'écarter les efprits folets, qui tourmen-
toient les enfans au berceau. Voye^ Esprits.
CARNACIER , adj. ( Hift. nat.) épithete qu'on
donne aux animaux qui le nourriffent naturellement
de chair. Voyei Animal & Nourriture.
Les Phyficiens font en difpute fur la queliion , fi
l'homme eli ou n'eli pas naturellement carnacier : il
y en a qui prétendent que les fruits de la terre étoient
dciiinés feuls à le nourrir ; 6c que c'a été le befoin
dans quelques pays, & le luxe dans d'autres , qui les a
portés à le nourrir des animaux auxquels ils ont tant
de reffemblance. Pythagore & fes feciateurs regar-
doient cette aciion comme une grande impiété , Sa
s'en ablienoient rigoureulement d'après l'opinion où
ils étoient fur la métcmpfycofe ; & les Bramines leurs
fucceffeurs continuent encore à en faire autant au-
jourd'hui. Voye^ Abstinence , Brachmanes , &c.
La réflexion fur laquelle Gaffendi iniîlie le plus,
pour prouver que les hommes ne font pas naturel-
lement animaux çarnaciers ; c'eli la conformation de
nos dents , dont il y en a plufieurs d'incilives & de
molaires ; au lieu que nous n'avons de semblables aux
animaux çarnaciers , &c propres à déchirer la chair ,
que les quatre canines ; comme ii la nature nous avoit
dciiinés plutôt à couper des herbes , des racines ,
&c. Cette raifon paraît allez foiblc. Mais on peut ob-
ferver , que fi nous nous nourririons de viandes , ce
n'efi qu'après une préparation par cociion , & en la
mangeant , foit bouillie, ioit rôtie , &c. & qu'alors mê-
me, fuivant que l'obfervc le docieur Drake , elle cil
plus difficile à digérer que toutes les autres nourritu-
res ; ce qui fait qu'on la défend dans les fièvres & dans
d'autres indifpofitions : enfin que les enfans ont de
l'éloignement pour les viandes , jufqu'à ce que leur
palais ait été vicie par l'habitude ; & que la maladie
des vers à la quelle ils font fujets , ne vient que de ce
qu'on leur fait manger trop tôt de la viande.
Le docieur Wallis en apporte encore une autre preu-
cc : c'eli que les quadrupèdes qui broutent les plan-
tes , ont un long colum avec un cœcum à fon extré-
mité inférieure , ou quelque choie d'équivalant , qui
porte la nourriture de l'ciiomac en en-bas par un
chemin fort long & fort large , par où la nature pa-
rait avoir eu en vue de rendre le paffage des nour-
ritures dans les inteliins plus lent, ce de les y taire
arrêter plus long-tems ; au lieu que dans les animaux
çarnaciers , on ne trouve point de excum , mais on
trouve en fa place un boyau plus court 6c plus grêle ,
par 011 il cil évident que le paffage de la nourri-
ture doit fe faire plus promptement. Or le cœcum
SSss
690
CAR
eft très-viiible clans l'homme ; ce qui forme une forte
préfomption , que la nature qui agit toujours d'une
manière uniforme , ne s'eft pas propole d'en faire un
animal carnacier. Il cil vrai que le caecum n'eft que
fort petit dans les adultes , & qu'il femble n'y avoir
que fort peu d'ulage ou même point du tout : mais
il eft plus grand à proportion dans le fœtus ; & il eft
probable que les changemens que nous faifons dans
notre régime à mefure que nous devenons plus âgés ,
peuvent être la caufe de cette diminution. Voye{
Carnivore, CoLUiM , & Cœcum. (I)
CARNATION , f. f. fe dit au fimple de la couleur
des chairs , & au figuré de l'art de les rendre. Il s'é-
tend en Peinture à toutes les figures d'un tableau qui
font nues & fans draperie. II faut obferver que le mot
de carnation ne fe dit point d'une partie en particu-
lier ; ce feroit parler improprement que de dire ce bras
eft d'une telle carnation ; il faut dire , ce bras ejl de belle
chair, & non pas bien de chair, ainfi que quelques au-
teurs le prétendent ; bien de chair exprime les mol-
leffes de chair , & fe dit également des molleffes de
chair exprimées dans un deiTein , quoiqu'il n'y foit
pas queftion de la beauté des carnations. On dit en-
core, les carnations de ce tableau , font admirables. (/?)
Carnation, en terme deBlafon fe dit de toutes
les parties du corps humain , particulièrement du vi-
fage , des mains , & des pies , qui font repréientées
au naturel.
La viile de Trêves , d'argent à un S. Pierre de car-
nation , vêtu d'azur , tenant de la main droite deux
clés d'or paffées en fautoir. (^)
CARNAVAL, f. m. ( Hifi. mod. ) tems de fête &
de réjoiiiffance qu'on obierve avec beaucoup de
folennité en Italie , fur-tout à Venife.
Ce mot vient de l'Italien carnavale: mais du Cange
le dérive de carn-aval, parce qu'on mange alors beau-
coup de viande , pour fe dédommager de l'abfti-
nence où l'on doit vivre enfuite ; il dit en confé-
quence que dans la baffe latinité on l'a appelle car-
ne levamen, carnis privium ; & les Efpagnols carnes tol-
lendas.
Le tems du carnaval commence le lendemain des
Rois , ou le fept de Janvier , & dure jufqu'au carême.
Les bals , les feftins , les mariages, fe font principale-
ment dans le carnaval. (G)
CARNÉ , adj. {Jardinage) fe dit d'un oeillet dont
le blanc tire fur la couleur de chair ; ce qui eft re-
gardé comme un défaut dans un œillet. (K )
C ARNEAU , f. m. ( Marine ) les matelots donnent
ce nom à l'angle de la voile latine , qui eft vers la
proue. (Z)
CARNET, f. f. (Commerce*) c'eft un des noms
que les marchands , négecians , & banquiers donnent
à une forte de livre dont ils fe fervent pour connoître
d'un coup d'œil le tems des échéances de leurs dettes
actives & paffives ; c'eft-à-dire, des fommes qu'ils ont
à recevoir & de celles qu'ils ont à payer , afin qu'en
faifant la balance ou comparaifon des payemens à
faire , ou à recevoir , ils puiffent pourvoir aux fonds
néceffaires pour payer à point nommé , & dans le
tems des échéances.
Le carnet eft du nombre des livres auxiliaires ; on
le nomme encore bilan. Voye?^ Bilan, & Livres
AUXILIAIRES.
Carnet ,fe dit auffi d'une cfpece de petit livre
que les marchands portent dans les foires & mar-
chés , fur lequel ils écrivent, foit la vente , foit l'achat
qu'ils y font des marchandiies , & même leur recette
«k dépenfe journalière.
On appelle auffi quelquefois carnet , une forte de
petit livre dont fe fervent les marchands & négocians
de Lyon , lorfqu'ils vont fur la place du change , pour
faire le virement des parties ; mais fon nom le plus
ulité eft bilan. Voye^ Bilajn. (G)
CAR
C ARNî A , ( la ) ( Géog. ) province ou defpotat de
la Turquie en Europe , dans la baffe Albanie.
Carnta , ( la ) ( Géog. ) pays d'Italie , dans l'état
de la république de Venile , dans la partie feptentrio-
nale du Frioul , le long de la rivière de Tajamenta.
* CARNIEN , adj. ( Hifl. & Myth. ) furnom d'A-
pollon, & nom de fêtes inftituées en fon honneur,
fur-tout à Lacédémone , pour expier la mort du de-
vin Carnus. Les prêtres d'Apollon Carnien gouver-
nèrent pendant trente-cinq ans le royaume des Sy-
cioniens , après la mort de leur roi. Carnus , prêtre
d'Apollon , fut tué à coups de flèches par les Héra-
clides , à qui il prédifoit des fuites malheureufes de
la guerre qu'ils avoient contre les Athéniens ; mais
la pefte ayant fuccédé dans l'armée prefqu'immedia-
tement à la mort de Carnus, on ne manqua pas de la
regarder comme un effet de la colère célefte. On
éleva un temple à Apollon , & Ton inftitua les carnées.
* CARNIFICATION des os, ( Chirurgie & Med.)
maladie des os ainfi nommée par M. Petit. Dans cette
maladie la fubftance des os eft entièrement changée;
elle perd fa dureté , les fibres ne paroiffent plus fi-
bres offeufes ; les os ont la confiftance de chair , &c
Ton diroit qu'ils lont devenus chair, prenant ce mot
dans la lignification générale pour toutes les fubftan-
ces de notre corps qui font faignantes , quand on les
coupe , & fe laiffent couper avec facilité. V. Mémoi-
res de F Académie , IJ2.Z ,pag. 22,0 , pluiieurs obferva-
tions de MM. Petit & Morand , qui conftatent la cer-
titude de cette maladie.
CARNIOLE , ( Géog. ) province d'Allemagne ,
dans les états de la maifon d'Autriche , bornée par
la Carinthie &la Stirie , par l'Efclavonie & l'Iftrie ,
la Croatie & le Frioul. Laubach en eft la capitale.
CARNIVORE, adj. ( Hift. nat.) fe dit des ani-
maux qui vivent de chair. Dans les animaux carni-
vores , le colon eft fimple, & les excrémens liquides.
C'eft ce qu'on a obfervé dans le chat , dans le chien ,
dans le lion , dans l'ours. De plus , ils n'ont qu'un
eftomac membraneux, mou ; & il eft de même na-
ture dans les lélards , dans les poiffons , dans les fer-
pens , dans le veau-marin , &c. mais toutes les efpe-
ces d'oies , de poules , & d'autres oifeaux granivo-
res , dont le nombre eft immenfe, qui n'ont point de
dents & ne fe nourriuent que d'une farine végétale ,
enfermée dans des grains à double écorce , ont une
ftrufture différente. Au cou , au-deffus du fternum ,
l'œfophage fe dilate en un bulbe ou finus , appelle
communément jabot , rempli de glandes falivaires ,
qui verfent fur les grains une liqueur propre à les
amollir. Ces glandes font en grand nombre , rondes ,
oblongues , h'ftuleufes , diviiées fuivant leur lon-
gueur; elles paroiffent caves, 6c verfent un fuc blanc
un peu vifqueux. Dans les oifeaux de proie, on trou-
ve beaucoup de corps glanduleux. Malpighi remar-
que que dans l'aigle , non- feulement la partie fupé-
rieure de l'eftomac , mais encore l'œfophage , eft par-
femé de glandes ovales , & qu'on y voit par-tout de
petits tuyaux qui viennent de la tunique nerveufe ,
& qui fourniffent un fuc. Le jabot a été exactement
décrit par "Wepfer dans la cicogne , & par Grew dans
le pigeon. C'eft donc dans ce jabot ou premier ven-
tricule , que les matières féjournent, s'amolliffent , &
deviennent friables ; enfuite elles font pouffées au-
deffous du diaphragme dans l'abdomen , ou au lieu
d'un eiïomac mou & membraneux, comme celui de
l'homme & de tous les carnivores, elles ont à effuyer
l'acfion de deux paires demufeies , après avoir fouf-
fert celle des trois tuniques mufculeufes du jabot.
Ces mufcles ont à leur partie fupérieure , des glandes
rangées en anneaux qui defeendent de la membrane
mufculeufe , & font percées à leurs pointes ; comme
on le voit encore dans la poule & dans l'outarde.
Mais ce qu'il y a peut-être ici de plus lingulier & de
CAR
CAR
' -.
plus digne de remarque , e'cit qu'étant de figure eh-
liptique , ils laifient entr'eux une fente fort étroite ,
& font intérieurement incruftés d'une membrane for-
te , remplie de filions tranfverfaux , raboteufe , du-
re , calleufe , preique cartilagineufe ; de forte que
cette efpece de bouclier eft capable de moudre les
corps les plus durs : car fon action eft preique com-
parable à celle des dents molaires. Willis même ; é-
tend que les écrevifles ont de vraies dents dans le
ventricule. Les organes qui font réunis dans l'hom-
me , font donc féparés dans les oiièaux. Nous avons
dans l'eftomac la lalive qui amollit , & des fibres char-
nues qui broyent ; au lieu que les cifeaux diifolvent
dans un ventricule , avant que de broyer dans Tau-
ire ; & cette ftructurc leur étoit ablolument nécef-
iaire. Sans cette duplicité , qui fait que l'aéfion des
fibres charnues n'eft point énervée par un velouté
& par des humeurs , comment pourroient-ils digérer
des alimens auffi durs , que la maflication n'eût pas
préparés auparavant. 11 n'eft donc pas furprenant
qu'on trouve fi ibuvent dans les pigeons des matiè-
res friables dans le premier ventricule , & réduites
en bouillie dans le fécond : mais il y a des animaux
qui n'ont ni dents , ni d'autre infiniment qui leur en
tienne lieu. Pourquoi cela ? c'eft qu'ils ne le nourrif-
fent pas d'alimens durs ; d'ailleurs ce qui manque en
folide à quelques eftomacs > leur a été donné en li-
quide. Telle eft la variété qui s'obfcrve dans les efto-
macs des granivores ci des carnivores, ^oy^CARNA-
cier, Granivore, & Estomac. (L)
CARNOSiTÉ , i . f. terme Je Chirurgie , qui lignifie
une excroijfance charnue & fongueuie formée dans
l'urethre ou col de la vefiie , ou dans la verge , qui
bouche le paffage des urines.
Les carnojités font très-difficiles à guérir : on ne les
connoit guère qu'en introduifant la fonde dans le paf-
fage , où elle trouve en ce cas de la réfiftance. Elles
viennent ordinairement de maladies vénériennes né-
gligées ou mal guéries.
Les auteurs ne conviennent point unanimement de
l'exiftence des carnojités. Ils reconnoiflènt tous une
maladie dans le canal de l'urethre , qui occafionne
une difficulté d'uriner, laquelle conlifte en ce que le
jet de l'urine eft fort délié , fourchu & de travers.
Les efforts que font inutilement les malades pour pif-
fer , rendenr cette aftion fort douloureufe , & leur
fait rejetter fouvent les excrémens en même tems.
La vefiie , en ne le vuidant qu'imparfaitement , peut
s'enflammer & s'ulcérer par l'acrimonie que l'urine
contraire en léjournant dans la cavité de ce vifeere.
Cette maladie eft très-fâcheufe ; elle petit avoir plu-
fieurs fuites funeftes , telles que la rétention totale
d'urine , & l'impoiîibilité de pénétrer dans la vefiie
avec la fonde, ce qui met les malades dans le cas
d'une opération. Voye^ Rétention d'urine. Il
peut aulîi fe taire des crevalfcs à l'urethre , & en
conféquence une inondation d'urine dans le tifixi cel-
lulaire qui entoure la velue & le rectum : de là des
abcès gangreneux» fuivis de fiftules, &c.
M. Dionis attribue la caule de tous ces accidens à
des cicatrices qui fe font faites fur des ulcères durs &
calleux de l'intérieur de l'urethre. Il allure que quel-
que diligence qu'il ait faite en ouvrant des corpsqu'on
aceufoit d'avoir des carnojités , il n'en a jamais trou-
vé. Il traite d'erreur commune la perfualion de l'e-
xiftence des carnojités. Il ajoure que ccu\ qui préten-
doient avoir des remèdes particuliers pour les guérir ,
avoient intérêt de confirmer cette erreur plutôt que
d'en defabufer; d'autant plus que cette maladie ayant
été abandonnée des véritables Chirurgiens, etoit de-
venue le partage des charlatans ou diftributeurs de
fecrets.
Dionis rapporte à ce fujet l'exemple deJean-Bap-
lifte Loileau , maître Chirurgien de Bordeaux , qui
Tome II,
dans, un recueil d'obfervations chirurgicales ...
écrites , dit qu'il fut appelle pour traiter le roi Henri
IV. d'une carnojité; qu'il l'assoit panfé & guéri , 8£
qu'il en avoit été récompenfé par une charge de Chi-
Uirgien de fa Majefté, que le Roi lui donna. Dionis
tient cette hiftoire pour apocryphe : « elle ne prouve
» point , dit-ii , qu'il y ait des camofués; elle fait voir
» que ce M. Loileau fait le myftérieux , & tient du
» charlatan, en publiant ce qu'il a fait, fans dire ni
» les moyens , ni les remèdes dont il s'eft fervi. S'il
» avoit été vrai , continue-t-il, que le Roi eût eu
» une carnojité; il falloir qu'en écrivant cette hiftoi-
» rc , M. Loileau ne fit point un fecret ni de la nié-
» thode, ni des drogues qu'il avoit employées à une
» guérifon pour laquelle il avoit été li libéralement
» gratifié : ck puifqu'il fe tait fur l'eiTentiel , ajoute
» M. Dionis , je tiens ie tout pour apocryphe ». Ce
railonncment eft d un ami du genre humain : mais il
«1 n'eft pas concluant contre les ccrnojîtés.
Des praticiens poftérieurs à M. Dionis ont eflayé
dans la maladie dont eft queftion , de diiater peu-à-
peu le canal de l'urethre, en fe fervant d'abord de
fondes de plomb fort déliées, Se les augmentant en-
fuite julqu'à rétablir le diamètre naturel de ce con-
duit. D'autres , avec des bougies de cordes à boyau
qui fe gonflent par l'humidité , font parvenus à met-
tre en forme le canal de l'urethre ; ils ont en confé-
quence attribué le rctréciflèment de l'urethre au
gonflement du tifîù fpongieux de ce canal, en remet-
tant l'opinion des carnojités & des cicatrices.
Bénévole , Chirurgien de Florence , a cempofé en
1715 , un petit traité en langue Italienne, fur les ma-
ladies de l'urethre. ii n'eft d'aucune des opinions que
nous venons d'expofer : il penfe que la maladie fâ-
cheufe dont nous parlons , eft un effet de la tuméfac-
tion des glandes proftates en conféquence de leur
ulcération , puifque l'ulcère de cette glande eft tou-
jours le principe de ce qu'on appelle carnojité.
S'il m'étoit permis d'expofer mon fentiment après
celui de tous ces praticiens , je dirois librement qu'ils
ont erré en donnant pour caufe exclufive le vice que
quelques obfervations leur avoient fait apperce-
voir ; & je penfe qu'ils n'ont trouvé cette maladie li
rebelle, que pour avoir réglé leur méthode de trai-
ter invariablement fur la caufe qu'ils avoient recon-
nue , & qu'ils croyoient être unique.
Le rétréenfement de l'urethre par la préfence des
carnojités eft indubitable. La manière avec laquelle
M. Daran traite ces maladies , en eft une preuve. Il
fe fert de bougies , qui mettent en fuppuration les
obftacles de L'urethre. A mefure qu'ils difparoifient ,
l'urine reprend fon cours; & lorsqu'elle fort à plein
canal , & que les bougies d'une groifeur convenable
paiTent librement julque dans la vefiie, il cicatrife le
canal avec des bougies defliccatives. On voit que M.
Daran traite ces maladies comme onferoit un ulcè-
re à la jambe. On doit rendre juftiee à la vérité : on
ne peut difeonvenir des lucces de M. Daran ; Ion ap-
plication à cette forte de traitement , en lui faifant
honneur , en fait beaucoup à la Chirurgie , dont cette
maladie croit preique devenue l'opprobre. Les gué-
rifons qu'il a laites , ne font point comme quel-
ques perfonnes le penient, le fondement d'une nou-
velle théorie : elles rétablilTent la doflrine des an-
ciens; elles encouragent tous les Chirurgiens à ne
pas abandonner le traitement d'une maladie , & à ne
p. .s le rebuter par les difficultés qu'il préfente. M.
Daran pofiede un remède pour mettre les obfiaclçs
de l'urethre en fuppuration : il a apparemment de
raifons particulières pour en garder le fecret. Mais
il y a tant de perfonnes qui ont befoin d'un tel fe-
cours ! ce remède n'auroit-il point de lubftituts qu'un
habile Chirurgien pourroit employer? Ni. Goulard ,
eclebre Chirurgien de Montpellier, en a découver;
S S s s ij
692
C A R
un qui produit les meilleurs effets , & qu'il a commu-
niqué à la fociété royale de cette ville dont il eft mem-
bre. La connoiffance de la caufe de la maladie four-
nira toujours des vues efficaces à un praticien luffi-
famment éclairé. J'ai réuiîi à vaincre quelques obfta-
cles , &c à mettre l'urethre en fuppuration avec des
bougies, couvertes d'un mélange d'emplâtres de Vi-
go cum mercurio , & de diachylum cum gummis , par-
ties égales. Lorlque le conduit a été parfaitement li-
bre , j'ai procuré la cicatrice des ulcères avec des
bougies couvertes d'emplâtre de pierre calaminaire.
Aquapendente , au chap. xiv. du livre III. des Ul-
cères & Fiflules , décrit la méthode curative des car-
nofués de l'urethre. Les perfonnes de l'art ne liient
point ce qu'on en dit fans en tirer quelque fruit.
Les bougies fuppuratives ne font point capables
de détruire les cicatrices , & de remédier aux rétré-
ciliemens de l'urethre par le gonflement du tilfu fpon-
gieux. Dans quelques-uns de ces cas, il faut avoir re*
cours à Fufage des dilatans , & dans d'autres aux ca-
thérétiques ; remèdes dont l'application demande
beaucoup de prudence et de circonfpect ion. On trou-
ve un mémoire de M. Petit , dans le I. volume des Mé-
moires de l'académie royale de Chirurgie , oii l'on voit
comment ce grand Chirurgien a guéri des rétréciffe-
mens de l'urethre par l'ufage des médicamens , & par
opération.
Ambroife Paré , qui a fort bien traité des carnofités
dans les chap. xxiij. & Juiv. de fon XIX. livre , pro-
pofe des fondes tranchantes pour franchir l'obffacle
qu'apportent les cicatrices de l'urethre. M. Foubert
vient de rétablir & de perfectionner l'ufage de ces
fondes , que les modernes avoient méprilées. Une
perfonne qui avoit dans l'urethre un obftacle fur le-
quel les bougies de M. Daran n'agiffoient point ,
coniulta, de concert avec ce Chirurgien, plulieurs
maîtres de l'art. Oh ne put jamais parvenir à la fon-
der. M. Foubert qui fut appelle eniuite , examina at-
tentivement ce qui fe pafîbit lorlque le malade fai-
foit des efforts pour uriner : il tenoit l'extrémité de
fa fonde fur l'obftacle ; & tâtant extérieurement la
continuité de l'urethre , il oblerva que l'urine n'é-
toit retenue que par une cloifon. Il promit de fonder
le malade & de le guérir. Il demanda huit jours pour
combiner les moyens convenables. Il fît armer une
algalie d'une pointe de trocar , qui au moyen d'un
ftylet , pouvoit être pouffée hors de la fonde , ou y
refter cachée. M. Foubert introduifit cette fonde dans
l'urethre la pointe renfermée ; ayant pof é l'extrémité
de l'algalie fur l'obftacle, il pouffa le ftylet, fît fortir
la pointe du trocar , & perça le diaphragme contre
nature , qui bouchoit la plus grande partie du canal.
Il retira la pointe du trocar dans l'algalie , qu'il pouf-
fa enfuite très -facilement jufque dans la vcfïïe. Le
malade elt parfaitement guéri par la cicatrice qui s'eft
tormée pendant qu'on tenoit una fonde d'un diamè-
tre convenable dans le conduit de l'urine.
Les autres vices de l'urethre exigent des foins &
des opérations particulières. Vbyc{ Rétention
d'urine. (Y)
* C ARNUTES , f m. plur. ( Hift. anc. & Géog. )
anciens peuples des Gaules. On dit qu'ils habitoient
le pays Chartrain.
CARO FOSSILIS , ( Hifl. nat. & Minéralogie. )
M. Henckel, dans fes Opufcules minéralogiques , dit
qu'on appelle ainfi une elpece d'amiante , qui fe
trouve près de Dannemore en Norvège , qui a la
propriété de rougir au feu & d'en être pénétré ; ce
qui le diminue : mais il ne perd point pour cela la
vertu de faire feu avec l'acier , comme un caillou ou
une pierre à tîifil. (— )
CAROCHA , f. f. ( Hifl. mod. ) nom que les Es-
pagnols & les Portugais donnent à une efpece de
mitre faite de papier ou de carton, fur laquelle on
CAR
peint des flammes de feu«& des figures de démons ,
& qu'on met fur la tête de ceux qui ont été condam-
nés à mort par le tribunal de l'inquiiîtion. f^oyei In-
quisition. (6)
C .. AROLINE , f. f. ( Commerce. ) monnoie d'argent
de Suéde , fans effigie , ni cordon , ni marque fur
tranche ; ayant pour légende ,fi Deus pro nobis quis
contra : elle vaut , argent de France , dix - neuf fous
deux deniers.
Caroline , ( la ) Géog. contrée de l'Amérique
feptentrionale appartenante aux Anglois : on la cli-
viie en feptentrionale & méridionale : elle contient
fix provinces. Elle eft bornée au nord par la Virgi-
nie , au midi par la nouvelle Géorgie , à l'eft par la
mer, & à l'on eft par les monts Apalathes. Ce pays
eft très-fertile. La capitale eft Charleftown.
C AROLINS , adj. pris f. ( Hifl. eccléfl.') nom qu'on
donna à quatre livres compolés par l'ordre de Char-
lemagne en 790, pour réfuter le fécond concile de
Nicée.
Ce concile avoit fait plufieurs décrets contre les
Iconoclafîes fur le culte des images ; décrets très-ca-
tholiques , mais qui ayant été envoyés mal traduits
aux évêques affemblés à Francfort pour la même cau-
fe , & par ordre de Charlemagne , leur parurent
contenir une doctrine jufqu'alors inoiiie , &: qui ten-
doit à faire rendre aux images un culte fort appro-
chant de celui qu'on rend à Dieu même. Cette erreur
de fait engagea Charlemagne à faire compoler ces
quatre livres , qui contiennent cent vingt chefs d'ac-
eufation contre les Grecs. Ces livres furent envoyés
au pape Adrien I. à qui ils furent préfentés par Ân-
gilbert , abbé de Centule. Adrien récrivit à Charle-
magne pour foûtenir les décifions du concile de Ni-
cée : mais on perfifta en France à les rejetter , parce
qu'on ne les entendoit pas ; oppofition qui ceffa pour-
tant lorfqu'on eut démêlé la véritable penlée des
Grecs, & réduit à leur jufte fens des expreffions qui
avoient paru outrées , & révolter les efprits. Auflî
les prétendus réformés n'ont-ils jamais pu tirer au-
cun avantage réel , ni des décifions du concile de
Francfort , ni des livres carolins.
On a douté de la vérité & de l'antiquité de ces
livres, lorlque M. du Tillet, évêque de Meaux, les
donna pour la première fois en 1549 fous le nom
à'Eliaphilyra ; parce qu'on crut qu'ils avoient été fup-
poles par les nouveaux feefaires , dont ils paroiffoient
favorifer extrêmement les opinions. Quelques-uns
les attribuoient à Angilram , évêque de Metz ; d'au-
tres à Alicuin ; &c d'autres enfin à tous les évêques af-
femblés à Francfort : mais quoiqu'on n'en connoiffe
pas le véritable auteur , il eft certain qu'ils ont été
écrits du tems de Charlemagne, comme il paroît par
la réponfe du pape Adrien, parles conciles de Franc-
fort & de Paris , par le témoignage d'Hincmar , qui
les cite, &c par les divers manulcrits anciens qu'on en
a recouvrés. Dupin , Biblïoth. des auteurs eccléflafl. du
huitième Jiecle. ( Cr)
C ABSOLUS , f. m. ( Corn. ) ancienne monnoie de
billon de France frappée fous différens règnes, à diffé-
rent titre & valeur. Les premiers çarolus furent fa-
briqués fous le règne de Charles VIII. & valoient
dix deniers : ■ ils augmentèrent fous les règnes fui-
vans , revinrent à leur première valeur , puis ceffe»
rent d'avoir cours.
II y a eu beaucoup de différens carolus dans plu-
fieurs états de l'Europe , mais prefque tous ont été de
billon tenant argent au plus haut titre de cinq deniers
deux grains , & au plus bas de deux deniers , fi l'on
en excepte le carolus d'Angleterre, &c
Carolus , ancienne pièce d'oraffez groffe frap-
pée en Angleterre fous Charles I. dont elle porte
l'image & le nom ; fa valeur a été de vingt-trois f che-
lins , quoiqu'on dite qu'au tems où elle a été frappée
CAR
CAR
693
çlle ne valoit que vingt fchelins. Vôyer^ Monnoie.
(G)
CARON, (Ge'og. ) rivière d'Afie clans la Perfe,
qui fe décharge dans le golfe de Balfora.
CARONCULE , f. f- terme d' Anatomie , fignifie à
la lettre une petite portion de chair , étant un dimi-
nuai'du latin caro, chair. Voye^ Chair.
Mais ce terme s'applique d'une manière plus fpé-
ciale à quelques parties du corps en particulier.
Les caroncules lacrymales font deux petites emmen-
ées fituées , Tune à droite l'autre à gauche , chacune
au grand angle de l'oeil , & qui iéparent les deux
points lacrymaux.
Quelques auteurs n'appellent lacrymale que la ca-
roncule qui eft au grand angle ou angle interne , &
appellent celle qui eft au petit , innommée,
Galien avoit enfeigné qu'il y avoit dans l'œil deux
glandes qui verfent un lue , & cela dans les brutes ;
& cependant les modernes voulant les trouver dans
l'homme , ont imaginé que la caroncule filtroit les
lai mes ; & l'erreur n'a fait que parler , pour ainfi di-
re , de main en main jufqu'à Stenon ci Morgagni ;
l'un qui propofa de nouveaux conduits hygrophtal-
miques , & l'autre qui donna une anatomie plus exac-
te de la caroncule : c'eft une glande iebacée , conglo-
mérée , oblongue, tranfverialcmcntfituée dans 1 ap-
pendice de la fente de l'œil , pleine de follicules qui
donnent une cire qui fort par divers petits trous, lous
la forme de vers, pleine aufii fouvent de divers pe-
tits poils , comme on en voit prefque par-tout dans
les glandes febacées. Haller, Comment. Boerh.
11 eft facile de concevoir que cette glande empê-
che le lac, ainfi nommé par M. Petit, de fe defiécher.
Quand les bords des paupières font exactement joints,
elle diftend les points lacrymaux , afin qu'ils foient
libres,éminens,& comme attentifs à leur devoir : elle
retient dans les poils , les ordures de 1 œil ; enfin elle
fepare une partie de l'humeur febacée de Meibom.
Caroncules myrùformes , font quatre petites éminen-
ces charnues , environ de la grofièur d'une baie de
myrte , raifon pour laquelle on les a appeliées myr-
ùformes. Elles font fituées proche , ou pour mieux
dire, à la place même de l'hymen, aux parties géni-
tales des femmes.
Quelques-uns prétendent qu'elles font plus grof-
fes dans les filles , & qu'elles s'appetiifent de plus en
plus par le coït : mais d'autres, avec plus de vraiffem-
blance , veillent que ce foit le coit même qui leur ait
donné naiiTance , & qu'elles ne foient autre choie
que des portions de la membrane même de l'hymen
déchirée , qui fe font retirées. Voye{ HYMEN.
Les caroncules papillaircs ou mamillaires , iont de
petites protubérances en-dedans du baiîïnet des reins,
formées par l'extrémité des conduits qui portent la
férofité des glandes des parties extérieures au bafii-
net.
Elles ont été découvertes par Carpi , & ainfi ap-
peliées parce qu'elles reffemblcnt à un petit teton ou
une mamelle. Elles ont la figure d'une tête de gland ,
& font moins rouges & pins dures que la chair. Elles
font de la grofTcur d'un pois , mais elles font plus
groifes en-haut qu'en-bas : elles fe terminent en quel-
que forte en pointe , à l'endroit où elles font p
pour laiiîer pafler l'urine dans le baùinet. / oy< Rein,
i: \sslNET, &c. (I)
CAROTIDE , f. f. terme a" 'Anatomie , font deux
artères du cou placées l'une à droite l'autre à gau-
che , dont l'office eft de porter le fang de l'aorte au
cerveau & aux parties externes de la tête. Voyt^Us
Planches a" Anatomie , & leur explication. Voyt^ l'ar-
ticle Anatomie; voye^ aujji Artere,Sang, CER-
VEAU.
Elles naiftent l'une auprès de l'autre de la cour-
bure ou arcade de l'aorte. La droite prend ordinai-
rement ion origine de l'artère foûclaviere ; la gau-
che de l'aorte immédiatement. Elles font fituées très-
profondément, tk. défendues par la trachée artère à
côté de laquelle elles font placées : elles paiTent fans
fouifrir de compreflion , & fans prefque donner au-
cunes branches , jufqu'à ce qu'elles foient parvenues
environ à la partie fupéricure du larynx , où elles fe
divifent en deux groifes branches , dont on appelle
l'une carotide externe , & l'autre carotide interne.
La carotide externe eft antérieure , & V interne eft
poilérieure.
La carotide externe fe porte entre l'angle de la mâ-
choire inférieure & la glande parotide ; elle monte
devant l'oreille fur l'arcade du zygoma, & fe termine
fur les tempes en fe divifant ordinairement en trois
rameaux , un antérieur , un moyen , 6c un pofté-
rieur.
Dans ce trajet elle donne plufieurs branches , qui
fe diftribuent aux parties antérieures & poftérieures
du cou ; telles font l'artère laringée, l'artère fublin-
guale ou artère ranine, l'artère maxillaire inférieure,
l'artère maxillaire externe, l'artère maxillaire inter-
ne , l'artère maifeterique , l'artère occipitale, l'artère
auditive externe, &c. Voye?K chacune à leur article , La-
ringée, Sublinguale, &c
La carotide interne monte fans aucune ramification
jufqu'à l'orifice inférieur d'un produit de l'apophyfe
pierreuiè de l'os des tempes ; elle s'y coude fuivant
la conformation de ce canal ; & lorfqu'elle eft par-
venue à l'orifice interne, elle envoyé deux rameaux
à l'œil , dont l'un parte par la fente fphenoïdale , ce
l'autre par le trou optique , par lequel elle commu-
nique avec la carotide externe : elle le courbe enfuite
de derrière en devant à côté de la feile fphenoïdale :
elle vient enfin en fe repliant fur elle-même gagner
le côté de l'entonnoir , à la partie antérieure duquel
les carotides internes communiquent quelquefois au
moyen d'un petit conduit qui va de l'un à l'autre ;
elle ie divife alors en plufieurs branches , qui fe dif
tribuent au cerveau : la poftérieure de ces branches
communique avec l'artère vertébrale, l'oyc^ Cer-
veau , Vertébral, &c.
Hippocrate , & les autres anciens Médecins , pla-
çaient le fiége de raffoupiïfement dans ces artères;
ce qui leur a fait donner le nom de carotides, comme
qui diroit affoupijfantes: car le mot de carotide vient de
zapoV , affbupifiement. Par la même raifon on les a aulli
appellees léthargiques &. apoplectiques. ( £)
CAROTTE, f. f. ( Hift. nat. ) daucus , genre de
plante à fleur en rôle & en ombelle , compofée de
plufieurs pétales inégaux taits en forme de cœur , dil-
poiés en rond , & foùtenus par le calice qui devient
un fruit arrondi , compofé de deux lemences garnies
& entourées de poils difpofés en manière de iourcil.
Tournefort , Infl. ni herb. Voy «c Plante. ( / )
La carotte légumineuft eft une plante qui pouffe de
grandes feuilles velues , d'une odeur & d'un goût ;if-
lez agréable: fa tige qui s'eleve de trois pics, eft
, e dans (a fommité de parafols qui portent de
petites fleurs blanches à cinq feuilles, diîpofées en
fleur-de-lis: fa racine charnue, jaune ou blanche,
>uçâtre , eft emploj <l e dans les animes.
Elle ne fe multiplie que de graine s quife feméntau
mois d'Avril ou Mai fur planches : quand elles foui
trop drues on les eclaireit ; & pour les avancei . il
fuit à la mi-Aoùt couper tous les montans à un de-
mi-pié de terre. (A)
La carotte appe' . •"■ * Tourn. Infl.
30 J. eft d'ufage en Médecine; la femence infulée
dans le vin blanc eft diurétique , bonne pour préve-
nir le calcul , ec en diminuer la violence des accès;
elle ehafte le gravier , provoque les règles ôc l'urine,
694
CAR
CAR
6c fait beaucoup de bien dans les maladies de la ma-
trice , & dans les affeclions hyftériques.
Van-Helmont affûre qu'un jurifconfulte fut exempt
pendant plufieurs années des douleurs du calcul, en
buvant d'une infufion de la graine de daucus dans de
la bierre. (A7)
CAROU , {Géog!) province d'Afrique dans la Ni-
gritie , au royaume de Folgia , près des rivières de
RiojunkÔ: Arveredo.
CAROUBIER , f. m. ( Hiji. nat. ) arbre connu des
anciens ôc des modernes. Nos Botaniftes l'appellent
caroba fdiqua dulcis , y.tptnwla. ; les Arabes kernab ; ÔC
les Egyptiens. carub ou carnub , au rapport de Proi-
per Alpin qui en a donné une figure très-peu cor-
recte.
C'eft un arbre de moyenne grandeur , branchu ,
& garni de feuilles arrondies , nerveuies , d'un peu-
ce ou deux de diamètre , épailTes , lifies , verd ron-
ce , portées fur des queues a fiez courtes , ôc rangées
fur une côte à droite Ôc à gauche : fes fleurs font de
petites grappes rouges chargées d'étamines jaunâ-
tres : fes fruits , que nous nommons aujourd'hui ca-
rouges , ôc autrefois caroubes , l'ont des liliqucs ou
gouffes applaties , longues depuis un demï-pié jus-
qu'à quatorze pouces , fur un pouce Ôc demi de lar-
ge; eues font brunes en-deffous, courbées quelque-
fois , compofées de deux colles féparées par des mem-
branes en plufieurs loges qui contiennent des femen-
ces plates , approchantes de celles de la caffe.
Ces colles font remplies dans leur fubftance d'un
fuc épais, noirâtre, mielleux , douçâtre, qui ne s'é-
loigne pas beaucoup de celui de la moelle de caffe.
C'eil apparemment la figure courbée de cette goufTe
qui lui a fait donner en Grec ôc en Latin les noms
de keratia , keratcni.i , qui fignifient de petites cornes.
Le caroubier étoit autrefois fort commun en Grè-
ce , en Egypte , dans la Paleftine , & dans les mon-
tagnes de Judée.
Les Egyptiens, à ce que rapporte Profper Alpin,
chap. iij. tirent des filiques une efpece de miel fort
doux , qui tient lieu de lucre aux Arabes. Ils s'en fer-
vent pour confire les myrobolans , les tamarins , ôc
plufieurs autres fruits ; ils Femployent fréquemment
au lieu de miel dans les clyfteres , & le donnent aux
malades à deffein de leur rendre le ventre libre ; car
il produit autant d'effet que la pulpe de la caffe. Ils
en ufent encore extérieurement & intérieurement
pour les inflammations des reins , contre la toux &
Fafthrne.Tous ceux qui prétendent que ce fruit refler-
re, font dans l'erreur ; il efl certain qu'il relâche ôc
qu'il purge , comme la pulpe de caffe , quand il efl
mûr : c'eft ce que Bauhin confirme par des expérien-
ces qu'il en a faites quand il étoit à Venile.
Ce fruit eft fort commun en Italie , en Provence ,
en Barbarie : on le laiffe mûrir & lécher au foieil ;
les pauvres s'en nourriiTent , 8c on en engraiffe le bé-
tail. Autrefois on en tiroit une efpece de vin ou de
liqueur fermentée , d'un grand ufage dans la Syrie
& dans l'Egypte , ôc le marc fe donnoit aux porcs.
L'enfant prodigue , dit S. Luc chap.xvj. S. accablé
de mifere , ôc prelTé par la faim , auroit deiiré fe
raffafier des gouffes ( il faudroit traduire des carou-
ges~) dont les pourceaux fe nourriffoient. C'eft le
fentiment des plus habiles interprètes de l'Ecriture ,
de Bochart , Grotius, Hammond , le Clerc, ôc autres.
En effet le mot Grec xtfdria qu'employé S. Luc , fi-
gnifie des carouges , ou , ce qui revient au même , le
fruit du caroubier. Auifi MM. de Beaufobre & Len-
fant ont traduit avec railon le terme qu'employé
S. Luc par celui de carouges: mais quand ils ajoutent
dans leur note fur ce palfage de l'évangélifte , que
ce fruit vient dans des écofîes , ils ne fe font pas ex-
primés avec affez d'exaôitude ; ils dévoient dire que
le caroubier porte pour fruit des filiques, des goulles,
qui contiennent dans leur fubflance , dans leur folli-
cule, une efpece de pulpe douce , mielleufe , 6-c
Article, communiqué par M. le CHEVALIER DE Jau-
COURT.
CAROUGE ou CAROUBE, f. f. Voyt{ Carou-
bier.
CARPA, {Géog!) ville d'Afie dans l'Inde, au-de-
là du Gange , au royaume de Brama , fur la rivière
de Caipumo.
CARPARY, {Géog.) île de l'Amérique méridio-
nale dans la Guiane. Onl'appelle aufiilV/c des lapins.
C ARPATHIE , ( Géog. ant. & mod. ) ville de l'Ar-
chipel qui a donné fon nom à la mer Capathienne :
elle eft limée entre Rhodes & Candie. Il y fubfifte
encore des vertiges de villes anciennes , ôc d'autres
antiquités. C'eft aujourd'hui Scarpamo.
CARPE , xâf.Toç , f. m. ( terme d'Anatomie. ) le poi-
gnet , ou la partie qui eft entre la paume de la main
& la partie inférieure de i'avant-bras. Voye^Planchs
A nat. & leur explication. f,roye^ait£iy[\i's.
Le carpe eft compofé de huit os de figure ôc grof-
feur différentes, placés, en deux rangs , quatre à cha-
que. Le premier rang s'articule avec les deux os de
l'avant-bras , & le fécond avec les os du métacarpe.
Ces os font fortement liés enfemble par des ligamens
qui viennent du radius , ôc par le ligament annulaire,
par lequel paffent les tendons qui font mouvoir les
doigts. Quoique ce ligament paffe pour être unique,
il fournit une gaine à chaque tendon qu'il reçoit.
Les Arabes l'appellent rafeeta , ôc les Latins quel-
quefois carpifmus.
Les os du carpe font le feaphoïde , le femi-lunaire ,
le telocïde , le pifîforme ou hors de rang , le trapefe ,
le trapefoïde, le grand, & le crochu. Voye^ Sca-
pkoide , &c. {L)
Carpe , {Hiji. nat. Ichthiolog.) en Latin cyprinus,
poiffon d'eau douce fort commun , &fort connu.
Ceux qui ne font touchés que de la bonté des lan-
gues de carpe , n'ont pas befoin de lire cet article , &
ce n'eff pas pour eux qu'il eft tait ; c'eft pour des gens
moins curieux de la délicateffe du palais de ce poif-
fon, que de fon hilloire anatomique. On en eft re-
devable à plufieurs Phylîciens , & particulièrement
à M. du Verney l'aîné, & à M. Petit le Médecin,
qui l'ont donné dans les Mémoires de P Académie des
Sciences , avec les lumières & l'exactitude qui régnent
dans leurs recherches.
Ménage queBalfac difoit être infpiré pour les éty-
mologies , n'a pas eu befoin d'une révélation pour
dériver notre terme François carpe, du nom Latin
carpa , qui fe trouve dans Caffiodore. Ceux qui dé-
rivent carpe, de carpio , qui eft un poiffon qu'on trou-
ve dans un lac d'Italie ; doivent céder le pas à Mé-
nage ; car outre qu'ils fe trompent dans le tait , parce
que carpio déiigne un poiffon tout différent ; la per-
mutation des lettres eft bien plus grande , en tirant
carpe de carpio , que de carpa.
Les Grecs appellent ce poiffon tanrpiroç, d'où les La-
tins comme Pline , ont fait cyprinus.
On trouve la carpe dans les rivières , dans les
étangs , ôc dans les marais ; il y en a de plufieurs
grandeurs ; elle multiplie beaucoup , ôc parvient à
un âge fort avancé : mais je ne fais fi nous en devons
croire "SVillughby , qui dans fon hiftoire des poif-
fons , fait mention d'une carpe qui avoit vécu cent
ans. On fait qu'il y a des carpes mâles ôc des carpes fe-
melles ; que la carpe laitée eft le mâle., ôc l'eeuvée la
femelle : il y en a même d'hermaphrodites , comme
nous le dirons plus bas.
Les naturaliftes modernes n'ont pas manqué d'or-
ner leurs ouvrages de la figure de ce poiffon : celle
d'Aldrovandi , de Blalius, de Jonfton , tant dans la
première édition d'Allemagne , que dans celle d'Amjler-
dam , imprimes fous le nom du Ruijcli , ne font pas
CAR
exactes. Les uns n'ont pas repréfenté les mouftaches
qui l'ont au-deflus de la lèvre fupérieure , Se celles
qui font au coin des deux lèvres. Les autres n'ont
pas marqué les rayons qui font fur les écailles, ou
la ligne qui fe trouve dans toute la longueur du
corps fur les deux côtés de la carpe , ou encore la dif-
férence de la groiTeur du ventre des carpes laitées 6c
des carpes œuvées. La figure de Willughby eft fort
belle ; celle de Rondelet bien plus exacte , & celle
de M. Petit encore davantage.
Les écailles. Tous les poilions font revêtus de peau
ou d'écaillés , tant dans la mer & les rivières , que
dans les étangs & les lacs. La carpe eft peut-être celui
de tous les poiffons qui a de plus grandes écailles ,
à proportion de la grandeur. Dans la même carpe il
y en a de brunes , de jaunes , 6c de blanches ; la cou-
leur brune domine dans les plus grandes écaiiles ;
dans les moyennes c'eft la jaune cela dorée : on trou-
ve ces trois couleurs dans chacune des grandes écail-
les. En général plus les carpes font grandes, plus les
ëca lies lont brunes, quoi qu'en dile Rondelet.
Les plus grandes écailles occupent le milieu des
cotes de la carpe par rapport à la longueur ; plus elles
font près de la tête , plus elles îont petites.
Les écailles de moyenne grandeur font du côté de
la queue ; les plus petites lous le ventre , & lont d'au-
tant plus petites , qu'elles lont plus près de la tête.
Dans les carpes les plus communes , qui lont de
16 à i<i pouces de longueur tout compris, ou de
9 à 10 pouces entre œil & bas, c'eft-à-dire , entre
la tête 6c la queue ; les plus grandes écailles ont
7 lignes ~ julqu'à 8 lignes de longueur , ÔÇ 0 li-
gnes jufqu'à 6 lignes 6c ~ de largeur. Il s'en trouve
allez iouvent qui lont aura larges que longues ; elles
font épaifles de J ou ~ de ligne : en général, plus
elles lont petites , plus elles font allongées. Lorf-
qu'elles lont encore fur la carpe, il n'en paroît tout
au plus que le tiers qui elt coloré ; cette partie ex-
terne eft iouvent d'un jaune un peu rembruni , cou-
leur qui paroît être dans la propre fubftance de 1 é-
caîlle ; car on ne peut Fôter entièrement en raclant
l'écaillé , qu'on n'en enlevé une portion , hors un en-
droit qui appartient à la membrane qui attache les
écailles , 6c c'elt auilî l'endroit le plus brun fur l'é-
caillc ; il y a fur cette partie externe des lignes en
forme ce rayons.
Le délions de l'écaillé oppofé à cette partie ex-
terne , cil argenté au moyen d'une membrane ex-
trêmement une qui porte cette couleur , que l'on en-
levé facilement avec la membrane, & qui lailic l'é-
caille blanche en cet endroit.
Toutes les écailles tiennent cnfemble parle moyen
des membranes qui les enveloppent : mais tout cela
n'empêche pas qu'il n'y ait un peu de jeu dans les
i ■ . , les unes à l'égard des autres; fans cela la
carpe ne pourroit le courber vers les côtés , comme
elle fait dans les mouvemens. Ces membranes tien-
nent très-fortement à la membrane tcndineule qui
enveloppe tout le corps de la carpe , & en font une
continuité.
Si l'on examine bien la partie externe de la carpe ,
on remarque une ligne brune de chaque côté qui s'é-
tend depuis la tête julqu'à la queue. Cette ligne pa-
roît brune, parce que la membrane qui attache la
partie inférieure de l'écaillé , eft très-brune dans le
milieu ; quelquefois elle elt rouge.
On trouve dans la fubftance des écailles , où l'on
voit cette ligne , un canal Ion::; de deux lignes ou
deux lignes & demie, qui a err\ iron un quart a
de diamètre. On peut y introduire une petite épin-
gle de cette grofleur: mais elle y entre plus facile-
ment parla partie interne ec inférieure , que par la
partie externe 6v fupérieure de l'ccdlle. Ce canal va
CAR
695
de haut en bas de cette écaille , ou de bas en haut ,
& obliquement de dehors en dedans ; il fe conti-
nue d'une écaille dans l'autre fucceilivement depuis
la tête julqu'à la queue : il y a entre chaque écaille
un petit canal membraneux qui en fait la continuité.
Après avoir obiêrvé ce qu'il y a de plus fingu-
lier dans les parties externes de la carpe , il faut ve-
nir aux parties internes.
Divifîon de la carpe. On peut divifer la carpe en
quatre parties : i°. la tête, 2.0. la poitrine , 30. le
bas-ventre , 40. la queue. La tête fe prend depuis le
muleau jufqu'à l'extrémité des couverts des ouies ,
vis-à-vis deïquelles fe trouve la poitrine ; car il n'y
a point de cou entre la tête & le tronc de la carpe.
La poitrine eft féparée du bas-ventre par le diaphrag-
me ; elle renferme feulement le cœur , §t une partie
conhdérable des reins ; le bas-ventre contient les en-
trailles; la queue commence à l'anus, & eft toute
mufculcufe.
La tàe. La tête eft un compofé d'un nombre pro-
digieux d'os emboîtés enlemble avec un art admira-
ble : on y trouve entre autres un os pierreux allez
large, plat, triangulaire, blanc, placé au haut du
palais ; c'elt proprement l'os hyoïde. On prétend
qu'étant réduit en poudre lubtile, & donné depuis
un fcrupule julqu'à demi-drachme , il elt propre pour
arrêter les cours de ventre , pour exciter l'urine ,
pour atténuer les pierres des reins , pour l'épileplie.
C'elt l'opinion, des Schroders , des Boeclers , des
Lémerys : mais n'eft-cc point me rendre moi-mê-
me ridicule que de la rapporter ?
La mâchoire fupérieure de la carpe eft garnie de
fix dents molaires, rangées trois à trois. L'inférieure
a un os cartilagineux de la forme d'une olive ap-
platie; cet os lui lert peut-être pour appuyer & aider
à broyer les alimens.
Ses yeux font fort remarquables ; le cryftallin
dans fa partie centrale , a une fermeté qui appro-
che prefque de la dureté de la corne. Dans une car-
pe de quinze pouces de longueur, il fait par fa con-
vexité antérieure une portion de fphere qui a trois
lignes de diamètre, 6c la poftérieure deux lignes &
demie ; il a deux lignes & demie de largeur ou de dia-
mètre de fa circonférence , ôé deux lignes un tiers
d'axe ou d'epailîeur : il pelé deux grains ce demi.
Le iceur. Chacun lait que le cœur de tous les poif-
fons qui ne relpirent pas l'air, n'a qu'une cavité, èv
par conféquent qu'une oreillette à l'embouchure du
vailTeau qui y rapporte le iang ; celle du cœur de la
carpe eft appliquée au côté gauche.
Sa chair elt fort épaifTe , £c l'es fibres très-com-
pactes : mais il faudrait des figures pour bien expli-
quer la ftructure de cet organe : on en trouvera de
mnes dans les Mémoires de C Académie des Scien-
ces de Vannée 1699.
L'abdomen. Ce poifTbn a la cavité du bas-ventre
formée par les vertèbres du dos , & par des mufcles
qui font tous dirlerens de ceux dç, l'homme , cv des
animaux à quatre pies, lia de plus feize arrêtes de
chaque cote en tonne de cote, qui fortent de cha-
que vertèbre, depuis le diaphragme jufqu'à l'anus,
rmine le bas-ventre comme en pointe de cône.
L'anus. L'anus , que les mariniers appelle:
bilic , ou le fondement , a auiîi les fingulantés dans la
carpe. Il ne confifte pas feulement dans \\\\c ouverture
par où elle décharge les excrémens des boyaux : il
comprend encore (.\cux autres ou\ ei turcs ; l'une don-
ne paflage aux œufs dans les femelles, e< à la femen-
ce dans les mâles lorfqu'ils s'en déchargent; & l'au-
tre laifle palier rmine' tic la veffie : delortc que voi-
là trois conduits qui aboutiflent à cet endroit.
L'anus appelle padex par Rondelet, efl en quelque
manière triangulaire dans les carpes laitées , moins
clans les carpes am tes, & a environ quatre à cinq li-
696
CAR
gnes de diamètre. Si Ton pique cette partie dans les
carpes vives avec la pointe d'une aiguille , on n'y ap-
perçoit aucun mouvement , Se néanmoins elle le ré-
trécit infenfiblement de moitié.
VeJIomac. L'eftomac ou le ventricule prend fon
origine du tond de la gorge ; il paffe à travers le cen-
tre du diaphragme , & a la figure d'un boyau. Il a cinq
ou fix pouces de longueur , & s'étend le long de Yab-
domtn;yA fon extrémité du côté de l'anus, il le replie
pour former le premier boyau.
Cet eftomac eil enveloppé de tous côtés par les
boyaux & le foie ; dans l'endroit où il fe replie pour
produire le premier boyau , il n'y a ni pylore ni val-
vule à ce repli, comme dans le brochet & d'autres
poiffons.
Les inujlins. Les inteftins- au nombre de fix , n'ont
point de méfentere ; ils font liés enfemble par les
parties du foie , qui fe trouvent logées & attachées
entre les efpaces qu'ils laiffent entre leurs circonvo-
lutions.
Le foie. Le foie eft divifé en plufieurs parties , &
comme par appendices , qui ont peu d'épaiffeur. Il eft
aufli long que le paquet des boyaux, logé avec eux
entre les deux laites. Sa couleur eft d'un rouge de
chair mufculeufe , tantôt plus, tantôt moins pâle. Il
recouvre près de la moitié de la groffe véiicule aérien-
ne , avec laquelle il a une légère adhérence , & il eft
recouvert à les côtés par le paquet des œufs.
La. véjicule du fiel. La véficule du fiel fe trouve en-
châffée dans le milieu de la partie principale du foie ,
tout le long de la partie fupéricurc de l'eftomac.
Le canal cholidoque &le canal cyftique ne font
qu'un canal continu & de même diamètre, qui a deux
à trois lignes de longueur.
La véficule du fiel dans une carpe de dix-huit pouces
tout compris , eft longue d'environ quinze lignes , &
a fix à fept lignes de diamètre. La bile qu'elle con-
tient eft ordinairement verte & liquide. Lémery dit
qu'elle eft propre pour éclaircir la vue : mais on s'en
fervira bien plus utilement pour le dégraiflage.
La rate. La rate eft attachée au commencement de
l'eftomac , à cinq ou fix lignes du diaphragme ; fa fi-
tuation eft entre le paquet des boyaux Se la greffe
véficule aérienne vers le côté gauche ; fa longueur
dans une carpe de dix-huit pouces eft de trois ou
quatre pouces, fa longueur de y pouce , & fon épaif-
ieur de deux lignes. Cette partie varie très-fort clans
fes dimenfions ; elle eft d'un rouge foncé , comme du
fang caillé.
Les œufs. Les œufs de la carpe forment deux pa-
quets, un de chaque côté de Y abdomen ; ils s'étendent
depuis le diaphragme jufqu'à l'anus ; ils couvrent de
chaque côté le paquet formé par les inteftins Se le
foie, Se s'étendent entre ce paquet Se la veille aérien-
ne , qu'ils couvrent de part Se d'autre depuis la moi-
tié de la greffe véficule aérienne jufqu'à l'anus.
Ils font revêtus d'une membrane très-fine Se tranf-
parente , formant une capfule qui enveloppe entiè-
rement les œufs , auxquels elle eft très-peu adhéren-
te ; fi l'on fouffle dans cette capfule , elle fe fépare
facilement des œufs , & fe gonfle beaucoup.
Les deux caplules le réunifient en un feul canal ,
qui fe termine à la partie poftérieure de l'anus. Cette
capfule eft adhérente au péritoine, Se au paquet du
foie Se des boyaux , mais très-légerement.
Les œufs qu'elle contient font adhérens les uns aux
autres ; ils font ronds , ou à peu près ronds , Se ont
4 ligne jufqu'à \ de ligne de diamètre , ce qui eft rare.
Ils font d'un jaune très-léger , plus ou moins ;fi on
les fait bouillir , ils deviennent blancs : mais étant re-
froidis , ils redeviennent jaunes.
Leur quantité . M. Petit a été curieux de voir com-
bien il y avoit d'eeufs dans une carpe ; pour y parve-
CAR
nir, il a mis dans une balance très-fine, la quantité
d'eeufs qu'il falloit pour la pefanteur d'un grain , &
il a trouvé qu'il en talloit 7 1 ou 72. Les deux paquets
qu'en avoit une carpe de dix-huit pouces de longueur,
compris la tête & la queue , pefoient huit onces deux
gros, qui font 4752 grains, qui multipliés par 72,
font 342144 œufs, ou environ , que cette carpe coa-
tenoit.
Dans une autre carpe moins greffe , c'eft-à-dire de
feize pouces , les deux paquets d'œufs ne pefoient
que fept onces deux gros quarante-deux grains , & ne
contenoient que 303552 œufs. Dans une carpe de 14
pouces , le paquet d'œufs peloit fix onces quatre gros
quarante-deux grains , Se ne contenoit par confé-
quent que 262224 œufs. Les œufs de toutes ces car-
pes paroiffoient de la même groffeur. Il fuit de ces
obfcrvations , que plus les carpes font greffes , plus
elles contiennent d'œufs. Ce doit être un fait fort
rare de rencontrer jufte dans de pareilles opérations,
Se ce feroit bien peu de chofe de ne fe tromper que
de quelques centaines.
Leuvenhoeck , tom. 1. de fes Œuvres , ne donne
aux carpes que 21 1629 œufs , & quatre fois plus aux
morues , ajoutant que les œufs d'un poiffon d'un an ,
font aufli gros que ceux d'un poifiôn de vingt-cinq ans.
Il établit enfuite que la morue contient 9344000
(neuf millions trois cents quarante quatre mille)
œufs , ce qui fait non pas quatre fois plus d'œufs
que la carpe , comme il avoit dit auparavant , mais
quarante-quatre fois plus Se d'avantage. Il s'eft ap-
paremment gliffé quelque faute d'imprefîion dans les
chiffres du nombre des œufs de la morue ; car l'édi-
tion latine des ouvrages de cet habile artifte , pour
le dire en parlant , eft toute pleine de pareilles fau-
tes; Se il n'y a que l'édition originale de Leuwenhoeck
en Hollandois , qui foit bonne.
La laite. La laite que l'on nomme aufli laitance , eft
une partie dans les carpes mâles , compofée de deux
corps blancs , très-irréguliers : ce font les tefticules
dans lefquels fe filtre la femence ; ils font prefque
aufli longs que la cavité du bas-ventre. Le côté droit
eft quelquefois un peu plus long que le gauche , par-
ce qu'il commence un peu plus près du diaphragme ;
il recouvre par les côtés , le paquet des boyaux, la
veflie aérienne , Se la veflie urinaire.
Les véjîcules féminales. Chaque corps blanc ou tef-
ticule , eft compofé de deux parties. La première Se
la plus confidérable , qui prend fon origine près le dia-
phragme , eft le corps du tefticule qui eft uni & liffe
à fa iuperficie ; la féconde partie confifte dans les
vélicules féminales , qui font près de l'anus.
Ces véficules léminales paroiffent formées par des
petites véficules diftinguées les unes des autres. Pour
les voir avec facilité , il faut les preflèr doucement
avec le doigt en ramenant du côté de l'anus ; & par
ce moyen on en fait fortir par l'ouverture qui eft au-
defl'ous de l'anus, la femence qu'elles contiennent. Si
après cela on fouffle dans cette ouverture , on voit
gonfler ces véficules qui paroiffent très-diftinc~tes les
unes des autres à l'extérieur. Ces deux véficules fé-
minales fe réunifient en un canal commun , qui fe
termine au dehors comme l'anus à la partie pofté-
rieure duquel il eft fitué. Il eft long de quatre à cinq
lignes , & n'a qu'une ligne Se demie jufqu'à deux li-
gnes de diamètre. Si on ouvre ce canal , on y voit
l'ouverture de la veflie , qui ne paraît pas toujours
au-dehors dans les carpes laitées.
La vefjie aérienne. On trouve dans la carpe Se dans
la plupart des autres poiffons une veflie remplie d'air,
& qu'on peut appeller pour cela vejfîe aérienne. C'eft
pour la même raifon que quelques auteurs l'ont nom-
mée vefuula pneumatica , d'autres utriculus natatorius ,
parce qu'il paraît que les poiffons s'élèvent plus eu
moins
CAR
CAR
697
moins facilement vers la fuperficie de l'eau , félon
qu'elle Ce trouve plus ou moins remplie d'air.
Elle efl iicuée entre les reins & les œufs ou la laite.
Elle s'étend depuis le diaphragme jufqu'à la vefîie
urinaire.
Elle efr attachée légèrement par des fibres & des
vaiffeaux à toutes les parties qui la touchent , mais
elle tient très-fort à la baie d'un petit os qui refîem-
ble de figure à la partie antérieure d'une mitre. La
partie iupérieure de la membrane externe de cette
vefîie eft attachée ii fortement à cet os , qu'on ne
peut la féparer fans la couper ou la déchirer; il y a
même queiques-unes clos fibres de cette membrane ,
qui font continues avec le diaphragme.
Cette vefîie eft compolée de deux véficules. La
première efl la plus grolTe & la plus près du dia-
phragme ; elle a trois pouces ou environ de longueur,
& dix-huit à vingt lignes de diamètre à l'endroit où
elle a plus de grofleur ; elle forme une elpece d'o-
vale.
La féconde véficule qui efl plus petite en grofTeur
que la précédente, efi de deux ou trois lignes plus lon-
gue que la première ; mais elle n'a qu'environ douze
lignes de diamètre dans l'endroit oit elle a le plus de
grofleur.
Chacune de ces véficules a deux membranes , une
externe & une interne. La première tendineufe &
forte , eft double ; ce que l'on apperçoit très-bien en
la déchirant , principalement lorsqu'elle a été macé-
rée dans l'eau. On voit que chacune des deux lames
qui la compofent a des fibres , dont la direction eft
différente. Les fibres de la lame extérieure font plus
obliques que celles de l'intérieure.
La féconde membrane efl: très-fine : malgré cela,
on reconnoît par la macération , qu'elle efl double ;
elle renferme dans fa duplicature un mulcle dont
les fibres font tranfverfes , èc occupent toute la lon-
gueur de la véficule, ou peu s'en faut, & environ le
tiers de fa circonférence. Les fibres inférieures fe
croifent à angles droits , avec d'autres fibres char-
nues , qui font à la partie inférieure de la véficule.
La féconde véficule a les mêmes membranes : mais
les externes font plus fines que celles de la première
véficule. Elle a deux plans de fibres charnues & tranf-
verfes, un de chaque côté , qui régnent dans toute la
longueur de la véficule : mais chaque plan n'oc-
cupe qu'environ le quart delà circonférence.
Les deux véficules communiquent l'une à l'autre
par un petit canal qui a environ une ligne de dia-
mètre , & -y de ligne de longueur pour l'ordinaire. Il
n'y a point de valvule , &c l'air pafl'e librement de l'u-
ne à l'autre véficule.
Tout le monde connoît l'ufagc de la vefîie aérien-
ne ; félon qu'elle efl plus ou moins remplie d'air , elle
rend le corps du poiflbn plus ou moins pelant , & par
là propre à monter à la fuperficie de l'eau , ou à s en-
foncer plus ou moins dans l'eau.
Tout le monde connoît aufTi la nécefîité abfolue
de l'air, & même du renouvellement d'air pour la
vie des poifîbns. La machine du vuide a prouvé l'un
& l'autre depuis long-tems; &C c'ell fur la carpe que
les expériences en ont été faites le plus fouvent ,
ce poilfon étant fort commun.
Si l'on met une carpe mâle dans un vaifTeau plein
d'eau, placé fous le récipient de la machine pneuma-
tique , &c que l'on pompe l'air trois ou cjuatre fois,
la carpe commence à s'agiter; toute la fui lace de Ion
corps devient perlée ; il lui fort par la bouche & par
les otiies une infinité de bulles d'air foit gro
la région de la vefîie aérienne s'enfle conlidcrable-
ment. Si l'on recommence à pomper , les ou;es re-
commencent à battre, mais peu de teras cv
ment; enfuite la carpe demeure fans aucun mouve-
ment, & la région de la veiiie aérienne devient ii
Tome II.
gonflée & fi tendue , que la laite fort en s'éfîlant par
l'anus : enfin au bout d'une demi-heure ou environ ,
la carpe meurt ; fi on l'ouvre, on trouve d'ordinaire
la vefîie aérienne crevée.
Les reins. Les reins de la carpe font rouges-bruns t
mollaffes , ièmblables en quelque manie: 0 à ou feng
caillé : ils occupent la plus grande partie de la poi-
trine , & de-là s'étendent dans toute la longueur du
bas-ventre jufqu'à la vefîie; ils font adhérens au pé-
ritoine , auffi bien qu'aux ovaires , ou à la laite ; ils
fe grofiifTent en bofle triangulaire , & font logés en-
tre les deux véficules aériennes ; ils remplirent l'ef-
pace que ces véficules laiflenî entr'elles.
L'urine pafîe immédiatement de la fubflance des
reins dans les uretères, par le moyen des vaiffeaux
excrétoires qui s'y rendent. Les uretères font , com-
me l'on fait , des canaux qui tranfportent l'urine des
reins dans la vefîie. Ils font dans la carpe cachés en
partie dans la fubllance des reins, & principalement
dans la partie qui efl renfermée dans la poitrine.
La veffk urinaire. La vefîie urinaire efl une capfule
oblongue , arrondie , & qui étant gonflée, reffemble
à une petite cucurbite renverfée , dont l'embouchure
efl tres-étroite. Elle ne paroît compofée que d'une
feule membrane qui ell fort fine ; ton embouchure
efl tout près de celle du rectum , à la partie poflé-
rieure de l'anus dans les carpes auvées : mais dans les
carpes laitées , on ne la découvre point au-dehors ; on
la trouve dans le canal commun des véficules fémi-
nales.
Des carpes hermaphrodites. M. Morand a fait voir
à l'Académie des Sciences en 1737, les parties inté-
rieures d'une groffe carpe, où l'on voyoit diflincle-
ment d'un côté les œufs , & de l'autre la laite : elle
étoit donc véritablement hermaphiodite. A cette oc-
caiion, M. de Reaumur dit qu'il avoit obfervé plu-
fîeurs fois la même choie dans lé brochet ; & M. Mar-
chand dans le merlan. On y peut ajouter les moules ,
dont nous parleions : & voilà bien des poifions her-
maphrodites qui en feroient foupçonner beaucoup
d'autres. Que u'éclairciliemens à defîrer fur ce fujet !
Toute une efpece n'aura-t-elle que des hermaphrodi-
tes, ou ferait-elle mêlée? Plufîeurs hermaphrodites
ont le beloin ordinaire d'un autre animal de leur ef-
pece pour engendrer ; les moules engendrent toutes
feules. De quel genre feront ces nom eaux herma-
phrodites qui fe trouvent parmi les poifîbns ? ce font
tout autant de quetlions de M. de Fonu nelle.
De la rtfpiration de la carpe. Mais de quelque fexe
que fo:ent les carpes, auiees , lait ces , hermaphrodites,
elles ont toutes beloin de reipirer pour vivre.
M. Deiham dit , que pourvu qu'on les mette dans
un endroit frais & dans une pofïtion qui ne gene point
leur refpiration , elles peuvent vivie long-tems dans
l'air, &c hors de l'eau ; ce qu'il prouve d'après le
témoignage d'une perlonne tres-ifluflre & très-cu-
rieufe , par la manière dont on les engraifle en Hol-
lande, laquelle a aufîi été pratiquée en Angleterre.
On les fuipend à la cave, ou en tout autre lieu frais,
dans un petit filet , fur de la moufîe humide ; enforte
que la tête de la carpe forte hors du filet. On les nour-
cette manière de pain blanc qui a trempé dans
du lait.
Ce fait cil aifé à vérifier : il n'efl pas aufîi facile
de démontrer toutes les pièces qui fervent à la ref-
piration de ce poiflbn; elles montent à un nombre fi
f'urprenant, que l'imagination même en eft enraya j.
M. us lans entrer dans un détail que je ne faurois
faire par écrit , je me contenterai d'en donner le dé-
nombrement, que perfonne ne fera tâché de voir ;
&je ne donnerai point ce dénombrement eh chiffres,
de peur que quelqu'un ne loupçonne ici des fautes
d'impreflion.
Les pièces ofîcules font au nombre de quatre mille
T Tt t
693
CAR
trois cents quatre- vingts -frx : il y a foixante-neuf
mufcles.
Les artères des ouies , outre leurs huit branches
principales , jettent quatre mille trois cents vingt ra-
meaux; chaque rameau jette de chaque côté fur le
plat de chaque lame , une infinité d'artères capillai-
res tranfverfales , dont le compte ne feroit pas im-
poffible : il pafTe de beaucoup tous ces nombres en-
semble.
Il y a autant de nerfs que d'artères, les ramifications
des premiers fuivant exactement celles des autres.
Les veines ainfi que les artères , outre leurs huit
branches principales, jettent quatre mille trois cents
vingt rameaux , qui l'ont de fimples tuyaux , & qui à
la différence des rameaux des artères, ne jettent point
de vaiffeaux capillaires tranfverfatix.
Ce nombre prodigieux d'os , de mufcles , de vaif-
feaux , de nerfs , de veines , & d'artères , concourant
au même but , arrangés avec tant d'induftrie , mar-
quent fans doute la main du ibuverain artifte. Que
fes œuvres font admirables ! Et puifqu'il ne s'eft point
laffé de les produire dans les eaux comme fur la ter-
re , fuivant la remarque de Galien , les hommes peu-
vent-ils jamais fe laflér de les lire & de les étudier!
Que cette étude eft belle ! qu'elle eft intéreflante !
Etude de tout tems , de tous lieux , de tout âge ,
Que n épuiferont point lesjîecles à venir!
Je la propofe aux grands , je la propofe aufage .'
Par où faurois-j e mieux finir ?
Article communiqué par M. le CHEVALIER DE
Jaucourt.
La pêche de la carpe n'a rien de particulier.
* CARPÉE , f. m. ( Hijt. anc. ) efpece de panto-
mime ancienne , que les Athéniens & les Magnéfiens
peuples de Theffalie , avoient coutume de danfer de
la manière fuivante. Un des danfeurs mettoit bas fes
armes , fembloit labourer & femer , regardoit fou-
vent derrière lui , comme un homme inquiet. Un le-
cond danfeur imitoit l'aclion d'un voleur qui s'ap-
proche. Le premier reprenoit auffi-tôt fes armes , &
il y avoit entr'eux un combat autour de la charrue
& des bœufs : ce combat fe livroit en cadence &
au fon de la flûte. Le voleur remportoit la viftoire ;
lioit le laboureur , &£ emmenoit les bœufs ; quelque-
fois le laboureur étoit victorieux. Rien n'a plus de
rapport avec les ballets que le lieur Dehefîe ima-
gine avec tant d'efprit , & qui font fi bien exécutés
par nos comédiens Italiens.
On dit que cette danfe fut inftituée pour accou-
tumer les payfans à fe défendre contre les incurfions
des brigands.
CARPEN, ( Géog. ) petite ville forte de la haute
Hongrie dans le comté de Bars.
CARPENEDOLO , ( Géog. ) petite ville d'Italie
dans le Brefcian , aux Vénitiens.
CARPENTER-LAND ou CARPENTARIA,
( Géog. ) pays d'Ane de la nouvelle Guinée , dans la
nouvelle Hollande.
C ARPENTRAS , ( Géog. ) ville de France enPro-
vence, capitale du comté Venaifîin. Long. zzd. 421.
63". lat. 44*. 3'. 33".
* CARPE NTIZM, ( Hifl. anc. & antiq. ) char à
plufieurs ufages chez les Romains. Il étoit ordinaire-
ment employé à porter les matrones , & les impéra-
trices fous les empereurs. Il étoit tiré par des mules ;
il n'avoit que deux roues , rarement quatre ; il ne
fervoit pas feulement pour les femmes. Florus fait
mention d'un roi Gaulois qui fut pris combattant fur
un carpentum d'argent , & mené en triomphe fur le
même chariot.
CARPI , (Géog.) ville d'Italie en Lombardie dans
leModénois. Long. z8. Zà. lut, 44. 4a,
CAR
CarPi , ( Géog.) petite ville d'Italie dans l'état
de Venife au Veronois , fur l'Adige.
CARPIO , ( Géog. ) petite ville d'Efpagne dans
l'Andaloufie, fur le Guadalquivir.
CARPOBALSAMUM , ( Hijt. nat. bot. ) baie
ou fruit de l'arbre qui produit le vrai baume de Ju-
dée. Ce fruit n'a pas de nom François. Il eft fort fem-
blable en groffeur , en figure , & en couleur , à celui
du térébinthe. Ce mot vient de deux mots Grecs ,
na,f7Kç y f™11 > & Ca.Xtraip.oc , baume.
Le carpobalfamum eft une baie oblongue , avec un
petit calice & une écorce brune ridée , marquée de
quatre côtés , d'un goût & d'une odeur agréable.
On en trouve peu dans les boutiques. Il faut s'y con-
noître pour l'acheter. Il eft très -rare. Celui qu'on
vend d'ordinaire n'eft que du poivre de la Jamaïque.
D'autres y fubfiituent les çubebes ou les baies de ge-
névrier.
Le carpobalfamum entre dans la compofition de la
thériaque &c du mithridate : on voit par-là qu'il eft
regardé comme ftomachique , cordial , & propre à
fortifier. ( N )
CARPOBOLUS , f. m. ( Hifl. nat. bot. ) genre de
plante dont les individus paroifTent ronds lorfqu'ils
font renfermés dans leur enveloppe : mais dans la
fuite l'enveloppe & le corps qu'elle renfermoit s'ou-
vrent par le haut , de forte qu'ils reffemblent à une
cloche renveriée &c découpée par les bords. Il y a au
centre de la plante un fruit rond , recouvert d'une
membrane très -mince, compolé de femences très-
petites , & environné d'une certaine liqueur très-
claire. Cette liqueur n'eft pas plutôt évaporée , que
le carpobolus change de forme ; de concave qu'il étoit $
il devient convexe : ce changement fe fait en un inf-
tant , & avec tant de violence , que le reffort du fond
de la plante lance le fruit en haut. Auffitôt que le fruit
eft forti , le carpobolus perd une partie de fa conve-
xité ; une moitié s'afFaiflé & fe recourbe en-dedans.
Ces ôbfervations ne fe peuvent faire qu'à l'aide du
microfeope. Micheli , Nova pi. gen. Voye^ PLANTE.
(O
CARPOCRATIENS , f. m. pi. ( Hifl. eccléf. ) hé-
rétiques qui parurent dans le xi. liecle , & prirent
ce nom de leur chef Carpocrate , natif d'Alexandrie.
C'étoit une branche de la leéte des Gnoftiques , qui
renouvella les erreurs de Simon le Magicien, de Me-
nandre , de Saturnin, de Bafdide , &c
Les Carpocratiens reconnoifîbient un principe uni-
que & père de toutes choies , mais dont ils ne dif oient
ni le nom , ni la nature : cependant ils penfoient que
le monde avoit été créé par des anges ou des génies
bien inférieurs à ce premier principe. Ils nioient la
divinité de Jefus-Chrift, qui , difoient-ils , étoit fils de
Jofeph , né comme les autres hommes , mais favorifé
de dons extraordinaires , & diftingué par fa vertu.
Pour arriver à Dieu il falloit , félon eux , avoir ac-
compli toutes les œuvres du monde & de la concu-
pifeence , à laquelle il falloit obéir en tout ; préten-
dant qu'elle étoit cet adverfaire à qui l'Evangile or-
donne de céder', tandis que l'on eft avec lui dans la
voie ( Matth. v. verf. zô. ) : que l'ame qui réfiftoit à
la concupifcence, en étoit punie en pafîant après la
mort lucceffivement d'un corps dans un autre , juf-
qu'à ce qu'elle eût accompli toutes les œuvres de la
chair ; &C que par conléquent on ne pouvoit trop fe
hâter d'acquitter cette dette. De - là ces impudicités
en tout genre auxquelles ils fe livroient fans remords :
au moins pour leur impofer filence avoient-ils ima-
giné ce principe qui conduit aux derniers excès , qu'il
n'y a point d'adion bonne ou mauvaife en loi , mais
feulement par l'opinion des hommes. Ils déteftoient
le jeûne , recherchoient tous les plaifirs des fens , &
admettoient la communauté des femmes. Fleurv,
Hifl. eccléf. tom, I. liv. III. pag. 333.
CAR
CARQUOIS , f. m. {An. milit.) efpcce de boîte
<ou de fourreau , dans lequel les troupes qui fe fer-
vent d'arcs mettent leurs flèches. (Q)
CARRAVEIRA , (Géog.) ville de la Turquie , en
Europe, clans la Macédoine. Long. 40. lat^o.ZJ.
CARRE, qu'on nomme aufïi carfe, f. f. (Comm.~)
mefure de continence, dont on fe lèrt à Briare pour
mefurer les grains.
La carre pefe vingt livres ; & dix carres & ff de ces
carres font le feptier de Paris. foye{ Septier. Diclion.
de Commerce , tom. II. pag. lOZ- (G)
* C A R R É , qu'il lémblc qu'on devroit écrire
quarré , eftun adje&if dont on a tait un.fubffantif, qui
deligne dans les arts méchaniques & des initrumens
& des formes , où fe fait particulièrement remarquer
celle du quarré, c'eft- à-dire , de la figure à quatre
côtés perpendiculaires l'un à l'autre, & égaux en-
tr'eux. V. ces différentes acceptions dans les art. fuivans.
Carre, f. m. en terme de Bijoutier, c'eft propre-
ment le pilier qui fait l'angle d'une tabatière. Il le ti-
re au banc. ^oy^BANC À tirer.
Carré, Traîne ou Traîneau, (Corderie.j bâtis
de charpente en forme de traîneau , fur le devant du-
quel s'élèvent deux montans qui portent une traver-
ie dans laquelle panent les manivelles qui fervent à
tordre les torons , ou à commettre la corde. On char-
ge les carrés de poids , pour que les torons foient bien
tendus. Voye^L 'article CORDERIE & les figures.
Carré , ( Gravure & Monnoyage. ) morceau d'a-
cier fait en forme de de, dans lequel on a gravé en
creux ce qui doit être en relief dans une médaille.
Quand les carrés font bien trempés , l'on y frappe û
l'on veut des poinçons de même que l'on frappe des
carrés avec les poinçons : ces derniers carrés alors s'ap-
pellent matrices. Voye^ MATRICE. Voye7^ PL I. de la
Monnoie , fig. J. & 4.
CARRÉ de cuir , (Tanneur & Cordonnier.} c'eft ainfi
que les Tanneurs 6c autres qui font commerce de
gros cuirs, appellent des morceaux de cuir fort, cou-
pés par carrés : un carré contient jufte ce qu'il faut de
cuir pour faire une paire de fouliers: cette étendue
de cuir fe nomme aufïï tableau; & l'on dit des Cor-
donniers qui fe pourvoyent de cette manière , parce
ce qu'ils ne l'ont pas en état d'acheter des cuirs en-
tiers, qu'ils vont au tableau.
* CARREAU, f. m. {Architecture, .) terre moulée
de différentes formes & grandeurs, 6c cuite comme
la brique. Voye^ l'article Brique. Le carreau prend
différens noms : le quarré , grand de fix à fept pou-
ces, fert à parer les atres ; le grand carreau a fix pans
de fix à lept pouces ; le petit carreau a fix pans de qua-
tre pouces. Le premier de ces deux-ci s'employe quel-
quefois aux jeux de paume & grandes galeries; le fé-
cond , dans les tulles 6c les chambres ordinaires. Les
anciens appelloient ces carreaux à fix pans, A'o/, de la
rcllemblance qu'ils ont avec les panneaux des rayons
de miel; ceux ù trois pans trigona; les quarrés^wa-
drata ; ceux qui a voient la même baie & la même
hauteur, tejjera. Le carreau defayenct ou de Hollande ,
ordinairement de quatre pouces en quarré, fert à
.paver les l'allés de bains, les petits cabinets ou lieux
à foupapes , & autres endroits de cette nature. Il y a
des carreaux mi-parti& de différentes couleurs, avec
lelqucls on peut toi mer un grand nombre de defîéins
& de figures agréables. On trouve dans les Mém. de
l'Académie, année 1704. pag. Jù'j . un effai fur cette
matière , par le fameux P. Sebaltien. En cherchant ,
félon la méthode qu'il propofe, en combien de ma-
nières deux carreaux mi-partis chacun de deux mê-
mes couleurs, pourvoient s'all'embler, en les difpofant
toujours en échiquier, on trouve foixante-quatre ,
ce qui ne doit pas étonner. Deux lettres ou deux chif-
fres ne le combinent ordinairement que de deux fa-
çons , parce qu'ils ne changent de natation que pour
Tome IL
CAR
699
être mis l'un après l'autre fur une ligne, la bafe de-
meurant toujours la même : mais dans l'arrar
de deux carreaux , l'un des deux peut prendr
fituations différentes, dans chacune de
tre carreau peut changer feize fois, ce qui donne les
foixante-quatre combinions. ^'oye7_ , Plan
Carreleur, ces foixante-quatre combindifens.
Mais en examinant ces foixante-quatre comb'.nai-
fons, on y trouve un grand nombre de figures fem-
blables, & l'on voit qu'elles fe réduifent à trenl -
deux différentes ; parce que chaque figure efl :
deux fois dans la même fituation, & que le', e
blés ne différent les uns des autres, que par la tranf-
pofition du carreau le plus ombré. Tels font .
Planche, le premier 6c le troifieme; le fécond 6c le
quatrième ; le cinquième 6c le trente-unième ; le
me & le trente-deuxième ; le feptieme & le \ 1
neuvième ; le huitième & le trentième ; le net.
6c le quarante-troilieme; le dixième & le qua
quatrième ; le onzième & le quarante-unième ; I
zieme& le quarante-deuxième; le treizième & le cin-
quante-cinquième ; le quatorzième 6c le cinquante-
fixieme ; le quinzième 6c le cinquante-troifieme ; le
feizieme & le cinquante-quatrième; le dix-feptieme
& le dix-neuvieme ; le dix-huitieme & le vingtième ;
le vingt-unième 6c le quarante-feptieme; le vingt-
deuxième & le quarante-huitième ; le vingt-troifieme
6: le quarante-cinquième ; le vingt-quatrième & le
quarante-fixieme; le vingt-cinquième & le cinquan-
te-neuvième ; le vingt-fixieme 6c le foixantieme ; le
vingt-feptieme & le cinquante-feptieme; le vin gt-
huitieme 6c le cinquante-huitième; le trente-troilîe-
me 6c le trente-cinquième ; le trente-quatrième 6c le
trente-iixieme ; le treme-feptieme 6c le foixante-troi-
lieme;le trente-huitième & le foixante-quatrieme ;
le trente-neuvième & le foixante-unieme ; le quaran-
tième & le loixante-deuxieme; le quarante-neuviè-
me 6c le cinquante-unième ; le cinquantième 6c le cin-
quante-deuxième.
Il y a plus: fi l'on n'a point d'égard à la fituation
& au même point de vue , on apperçoit que ces tren-
te-deux figures différentes peuvent encore fe réduire
à dix iemblables. Telles font, même Planche, la pre-
mière, la troifieme, la dix-huitierne, la
la trente - troifieme , la trente -cinquième, la cin-
quantième, 6c la cinquante -deuxième: la féconde,
la quatrième, la dix-leptieme, la dix-neuvieme,
la trente - quatrième , la trente-iixieme, la qua-
rante-neuvième, ce la cinquante - unième : la cin-
quième, la trente-unième, la feizieme, la cinquan-
te-quatrième, la trente-neuvième, la loixanre -uniè-
me , la vingt -quatrième, 6c la quarante-fixieme:
la fixieme, la trente - deuxième , la treizième, la
cinquante-cinquième, la quarantième, la loixante-
deuxieme, la vingt-unième, & la quarante-feptie-
me: la feptieme, la vingt-neuvième, la quatorziè-
me, la cinquante-fixieme , la trente-leptieme, la foi-
xante-troifieme , la vingt-deuxième, &: la quarante-
huitième: la huitième , la trentième, la quinzième ,
la cinquante-troifieme , la trente-huitième, la foixan-
te-quatrieme, la vingt-troifieme, & la quarante-cin-
quième : la neuvième, la quarante-troifieme, la vingt-
huitième, & la cinquante-huitième: la dixième, la
quarante-quatrième , la vingt-cinquième , & la cin-
quante-neuvième : la onzième , la quarante-ui
la vingt-fixieme , & la foixantieme: la e
quarante-deuxième, la vingt-feptieme , & la cinquan-
te-feptieme.
Si l'on exclut de ces dix figures les variétés qui
naiffent de ce que les parties blanches fe trouvent à
Ta place des parties noires, & les noires à la
îles blanches, elles fe réduiront encore à quatre , où
ces parties fe voyent dans les unes à droite, comme
elles font dans les autres à gauche;ou en-haut comme
TTtt ij
700
CAR
elles font en-bas ; enforte que fi on les fuppofe tra-
cées fur un papier tranfparent , on verra les unes en
les regardant à travers le papier, comme on voit les
autres fur le papier même ; d'où il s'enfuit qu'à pro-
prement parler, leurs figures ne font pas différentes.
Telles font les 9e, 43% iS% 58% 10e, 44e, *5% *9%
11e, 41e, 26e, 60e, 11e, 41% 17e» & 57%Ie«6%
3i% i3% 55% 40% 62e, zie, 47% 8e, 30% 15%
53% 38% 64e, 23% & 45e; les 7% 29% 14% 56%
37% 63e, 22% 48e, 5% 3i% 16% 54% 39% 6l%
24% 46e; & les 2e, 4e, 17e, 19e, 34% 36% 49%
ïi%i«,3%rte,*>%33%35%ï°%5*\ , ..,
Peut-être qu'en cherchant quelque manière de dil-
pofer les combinaifons de ces carreaux fur le papier,
on eût rencontré quelque loi qui auroit difpenié de
rémunération précédente : mais c'eft ce que perfon-
ne n'a encore tenté , non plus que la combinaiion
de plufieurs carreaux , & moins encore la combinai-
fon de carreaux partis de plufieurs couleurs.
Si l'on s'occupe à former des deffeins & des com-
partimens avec ces figures jointes enfemble ck tou-
jours en échiquier , on en formera une multitude pro-
digieufe. Nous n'avons pas jugé à propos de les faire
graver; elles en paroîtront plus lurprenantes à ceux
qui les verront naître fous leurs yeux, loit par amufe-
ment, foit par utilité : mais pour les diriger dans cet-
te opération, nous allons leur indiquer & les car-
reaux & l'ordre dans lequel ils auront à les affembler
pour en former des tous agréables : ces exemples
pourront être de quelque commodité non-feulement
pour les Carreleurs , mais encore pour les ouvriers
en Marqueterie, en Tableterie , en Menuiferie, ck
autres ouvrages faits de pièces rapportées.
On voit , Planche du Carreleur, les foixante-quatre
combinaifons poffibles que l'on peut faire avec deux
carreaux mi-partis félon leur diagonale. Cette plan-
che eft divifée en quatre colonnes de haut-en-bas ;
chaque colonne eft partagée en cinq quarrés : dans
le premier quarré de chaque colonne on a figuré en
grand un feul carreau , qui eft différemment fitué clans
chacune , ainfi que l'on les voit par A, B, C, D, qua-
tre lettres qui marquent toujours les mêmes côtés du
carreau; A, D , les deux colores; B, C, les deux
blancs. Ainfi dans tous les quarrés de la première co-
lonne , le carreau le plus ombré eft toujours cenfé ap-
pliqué horifontalement au côté A ; dr.ns la leconde,
au côté B ; dans la troifieme , au côté C ; ck dans la
quatrième , au côté D.
Dans les quatre quarrés qui achèvent la première
colonne , & qui ont la lettre A au centre , on a figuré
les 16 combinaifons qui fe peuvent faire avec deux
carreaux ; l'un defquels qui eft le plus ombré , demeu-
re toujours horifontal fur le côté A. On a fuivi le mê-
me ordre dans les autres colonnes. Les quarrés de
chacune font marqués d'une même lettre : ainfi ils
ont au centre B à la féconde ; C , à la troifieme; D,
à la quatrième. On a féparé les combinaifons de qua-
tre en quatre, pour éviter la confufion : on auroit pu,
outre cet avantage , s'en propoier un autre , celui de
rencontrerquelqueloiqui donnât fans peine lesleni-
blables & les différens , ainfi que nous l'avons re-
marqué plus haut.
On aura un premier deffein régulier , fi l'on fait
une ligne de la combinaifon 2 , ck fous cette ligne une
autre ligne de même longueur , avec la même com-
binaifon 2, ck ainfi de fuite.
On aura un fécond deffein , fi l'on fait une pre-
mière rangée avec la combinaifon 2; une féconde
avec la combinaifon 34, & alternativement ainli de
fuite.
Un troifieme deffein, fi l'on fait la première ran-
gée de la combinaiion 6, & la ieconde de la com-
binaifon 40 , ck ainli de fuite alternativement.
Un quatrième , fi l'on fait la première rangée avec
CAR
la combinaifon 12, & la féconde avec la combinai-
fon 10, & ainfide fuite alternativement.
Un cinquième , fi l'on fait la première rangée avec
les deux combinaifons 24 & 14 , mifes alternative-
ment ; la féconde avec les deux combinaifons 22 &
16 alternativement ; la troifieme avec les deux com-
binaifons de la première , mais en mettant 14 avant
24 ; la quatrième avec les deux combinaifons de la
féconde, mais en mettant 16 avant 22, & ainfi de
fuite.
Un fixieme , fi l'on fait la première rangée avec
la combinaifon 24 , & la féconde avec la combinai-
fon 1 6 , ck ainfi de fuite alternativement.
Un feptieme , en faifant la première rangée avec
la combinaifon 42 ; la féconde avec la combinaifon
10 ; la troifieme comme la féconde ; ck la quatrième
& cinquième comme la première.
Un huitième , fi l'on fait la première rangée des
28 , 26 , ck 50 combinaifons mifes de fuite ; la fécon-
de des 26, 50 , & 28; & la troifieme , des combi-
naifons 50, 28 , & 26.
Un neuvième , fi l'on fait la première rangée des
deux combinaifons 10 & 12; ck la féconde ck troi-
fieme , des deux combinaifons 12, 10.
Un dixième , fi l'on fait la première rangée de la
combinaifon 14; la féconde, des combinaifons 40
& 8 ; la troifieme , des combinaifons 38 ck 6 ; ck la
quatrième , de la combinaifon 22.
Un onzième , en faifant la première rangée de la
combinaifon 24 ; ck la féconde , de la combinai-
fon 22.
Un douzième , en faifant la première rangée des
combinaifons 6 & 38 ; la féconde , des combinaifons
40 ck 8 ; la troifieme , des combinaifons 38 ck 6 ; ck
la quatrième , des combinaifons 8 & 40.
Un treizième , fi l'on fait la première rangée des
combinaifons 14 & 24; la féconde , des combinai-
fons 24 ck 14.
Un quatorzième , fi l'on fait la première rangée
de la combinaiion 24; ck la féconde , de la combi-
naifon 14.
Un quinzième , fi l'on fait la première rangée des
combinaifons 50 ck 2; ck la féconde , des combinai-
fons 18 ck 34.
Un feizieme , en faifant toutes les rangées de la
combinaifon 14.
Un dix-feptieme, en faifant toutes les rangées des
combinaifons 14 & 24.
Un dix-huitieme , en faifant toutes les rangées de9
combinaifons 28 ck 12.
Un dix-neuvieme , en faifant la première rangée
des combinaifons 10, 14, 10, ck 6 ; la leconde , des
combinaifons 16, 12, 8, & 12; la troifieme, des
combinaifons 14, 10,6, io;la quatrième , des com-
binaifons 12, 8, 12, 16; la cinquième , des combi-
naifons 10, 6, 10, 14; la fixieme, des combinai-
fons 8,i2,i6,8;la feptieme , des combinaifons 6 ,
10, 14, 10; ck la huitième , des combinaifons 12,
16, 12,8.
Un vingtième , en faifant la première rangée des
combinaifons 28 & 1 2 ; la féconde , des combinaifons
14 ck 22 ; la troifieme , des combinaifons 1 2 ck 28 ;
& la quatrième des combinaifons 22 ck 14.
Un vingt- unième, en faifant la première rangée
des combinaifons 10, 14, ck 12; la leconde, des
combinaifons 22, 34, 2; la troifieme , des combi-
naifons 14 , 12, 10 ; la quatrième , des combinaifons
34, 2, 22 ; la cinquième, des combinaifons 12, 10,
14 ; ck la fixieme, des combinaifons 2 , 22 , 34.
Un vingt-deuxième , en faifant la première rangée
des combinaifons 28 , 1 2 ; la leconde , des combinai-
fous 26 , 10 ; la troifieme , des combinaifons 10 , 26 ;
la quatrième , des combinaifons 1 2 , 28.
Un vingt-troifieme , en faifant la première rangée
CAR
des combinaifons 24, 16 ; &c la féconde , des combi-
naifons 26 , 10.
Un vingt - quatrième , fi l'on fait la première ran-
gée des combinaifons 28, 10; la féconde , des com-
binaifons 26 , 1 2 ; la troifieme , des combinaifons 1 2 ,
26 ; & la quatrième , des combinaifons 10 , 28.
Un vingt-cinquième , lî l'on fait la première rangée
de la combinaifon 1 2 , répétée deux fois de fuite ; &
de la combinaifon 28 , répétée auffi deux fois , en
continuant ainfi : la féconde , de la combinaifon 28,
répétée deux fois de fuite ; & de la combinaifon 1 2 ,
auffi répétée deux fois de fuite : la troifieme , de la
combinaifon 26 , répétée deux fois de fuite ; & de la
combinaifon 10, auffi répétée deux fois du fuite : la
quatrième comme la féconde ; la cinquième comme
la troifieme ; la fixieme , de la combinaifon 10 , répé-
tée deux fois ; & de la combinaifon 26 , auffi répétée
deux fois : la feptieme , de la combinaifon 1 2, répétée
deux fois de fuite ; & de la combinaifon 28 , répétée
auffi deux fois ; & la huitième comme la fixieme.
Un vingt -fixieme, en faifant la première rangée
de la combinaifon 14 , une fois ; la combinaifon 22 ,
une fois ; la combinaifon 14, deux fois ; & ainfi de
fuite pour cette rangée : la féconde , des trois com-
binaifons 12, 16 , 28 ; la troifieme , des trois combi-
naifons 10, 24, 26; la quatrième, des trois combi-
naifons 26, 16, 10; la cinquième , des trois combi-
naifons 28, 24, 12; la fixieme, de la 22 une fois ,
de la 14 une fois , de la 22 deux fois.
Un vingt-feptieme , en formant la première rangée
de la combinaifon 24 , deux fois ; & de 1 2 , 1 4 , 28 ,
une fois chacune : la féconde , de la 14 deux fois ; &
de 10 , 22 , 26 , chacune une fois : la troifieme , de
la 24 , deux fois ; & des 12, 16,28, chacune une
fois : la quatrième , des 8 , 40 , 28 > 24 , 1 2 , chacune
une fois ; la cinquième , des 6, 35,12,16,28, cha-
cune une fois ; la fixieme , de la 16, deux fois ; & des
28 , 24 , 12, une fois : la feptieme , de la 22 , deux
fois ; & des 26 , 14 , 10 , une fois : la huitième , de
la 16 , deux fois ; & des 28 , 22 , 1 2 , une fois : la neu-
vième , de la 22 , deux fois ; & de la 14, trois lois :
la dixième , de la 14, deux fois; & delà 22, trois fois.
Un vingt-huitième , en faifant la première rangée
de la 28 , une fois ; de la 12, deux fois ; de la 22 , une
fois , & une fois de la 28 : la féconde , de la 26 , une
fois ; de la 10 , deux fois ; de la 22 , une fois ; & de
la 26 , une fois : la troifieme , de la 1 8 , de la 34, 12,
16 , & 28, chacune une fois : la quatrième, des 28 ,
12, 10, 22, & 26, chacune une fois ; la cinquième,
des 12, 28, 26, 14, & 10, chacune une fois; la fi-
xieme , des 2 , 50 , 28 , 24 , & 1 2 , une fois chacune ;
la feptieme , de la 10 , une fois ; 26 , deux fois; 14 ,
& 10 , chacune une fois : la huitième , de la 12, une
fois ; de la 28 , deux fois ; de la 14 & de la 11, cha-
cune une fois : la neuvième , des 10 , 26 , 50 , 24 , &
a, chacune une fois: la dixième , des 26, 10, 34,
16 , & 18 , chacune une fois.
Un vingt-neuvième, fi l'on i.iitla première rangée
de la 26 , 22, & 10, chacune une tois ; la féconde ,
des 28 , 16, & 12, chacune une fois; la troifieme ,
des 12, 14, 28, chacune une fois ; la quatrième ,
des 28 , 22, 12; la cinquième , des 12 , 14, 28; & la
fixieme , des 10, 14,26.
Le trentième & dernier , de ceux que nous donne-
rons , fi l'on fait la première rangée avec les 16 &
8 , chacune une fois ; la 22 , deux fois ; les 40 &i 16 ,
chacune une fois ; la féconde avec les 34,6, ";o, 2,
38, & 18 , chacune une fois ; la troifieme , avec les
1 2 , 8 , 26 , 1 o , 40 , & 28 , chacune une fois ; la qua-
trième , avec les 28 , 6 , 10 , 26 , 3 8 , 1 2 , chacune
une fois ; la cinquième , avec les 5©, 8 , 34 , 18, 40 ,
2 , chacune une fois ; la fixieme , avec la 44 & la 3 2 ,
chacune une fois; la 14, deux fois; la 18 & la 24,
chacune une fois; la feptieme, avec les 22 5c 40,
CAR 701
chacune une fois ; la 16 , deux fois ; ck les S & 22 ,
chacune une fois: la huitième, avec les 2, 38, 18,
34, 6 , & 50 , chacune une fois ; la neuvième , avec
les 10, 40', 28 , 1 2 , 8 , 26 , chacune une fois ; la di--
xieme , avec les 26, 38, 12,28,6, & 10, de I
la onzième , avec les 1 8 , 40 , 2 , 50 , 8 , 34, de fuite;
enfin la douzième , avec les 14 & 38 , chacune une
fois; la 24, deux fois de fuite; les 6 & 14, cha
une fois.
Le P. Sébaftien a choifi ces trente deffeins fur plus
d'un cent ; & en effet ils font très-beaux , & fuffifent
pour introduire affez de variété dans les ouvrages
de Tableterie & de Menuiferie. Au relie il fera facile ,
en fuivant la même méthode , d'en former un "rand
nombre d'autres , même au-delà de la centaine que
le P. Sébaftien avoit trouvée.
Carreau , en Architecture, , fe dit d'une pierre qui
a plus de largeur au parement que de queue dans le
mur, & qui eft pofée alternativement avec la boutilî'e
pour faire liaifon. Voye^ Boutisse. ( P )
Carreau ou Carreaux, en Marine ; on donne
en général le nom de carreau à toutes les ceintes ou
préceintes : mais il fe donne auifi bien fouvent en
particulier à la liffe de vibord , qui eft la plus haute
de toutes les préceintes, & qui forme l'embelle. ^".
Ceinte, Préceinte , & Lisse de Viuord.
Carreau de chaloupe , (Marine.') ce font les pie-
ces de bois qui font le haut des côtés d'une chaioupe.
Voyei CHALOUPE , & la Plan. XT.fg. 1. le carreau 3
rP.6.fig.z.&fig.3.cotéi. (Z)
Carreau , ( Jardinage. ) c'eft une pièce de terre
oblongue , qui fait partie d'un parterre ou d'un pota-
ger. Le carreau de parterre eft ordinairement bordé
de buis nain , ôc garni de fleurs ou de galon. Le car-
reau de potager eft femé de légumes &c d'autres her-
bes , & n'elt féparé du relie que par des raies un peu
plus profondes.
Carreau vernissé , (Manège.) eft un grand
carreau plombé qu'on met dans les écuries au-deiuis
des mangeoires des chevaux , pour les empêcher de
, lêcherlemur. Voye^ Ecurie , Mangeoire. On fait
auffi du petit carreau vemijjé pour les compartimens.
CARREAU , en Menuiferie, c'eft un petit ais quar-
ré de bois de chêne , dont on prépare autant qu'il en
faut pour remplir la carcaffe d'une feuille de par-
quet.
Carreau , terme d'ancien Monnoyage: lorfque l'on
fabriquoit les efpecesau marteau, le métal ayant éré
moulé en lames, 6i battu fur l'enclume à peu près de
l'épauTeur de la monnoic à fabriquer, on coupoit
ces lames par morceaux quartes avec des cifoirs , en-
fuite on rechauffoit & l'on abattoit les pointes ou
angles de ces quarrés , qu'on appelloit enluite car-
reaux.
Carreau, ( en Rubantrie. ) Joyc- Effilé.
Carreau , infiniment ou partie du métier des étof-
fes de foie. On fe fert de carreaux de différentes cfpe-
ces ; il y en a de plomb , de fer , & de terre; on les
fait d'un poids proportionné.
Les carreaux pour les liftes de fatin à cinq 6vr A huit
liflcs font trop petits à trois livres, il leur en faut au
moins trois livres & demie ; mais l'ordinaire eft de
quatre : ils ont befoin de ce poids, non-feulement
pour faire bailler ou relever la liffe , mais encore
pour faire relever le calqueron & la marche , qui
font toujours un poids.
C.YRREAU, c'eft le nom qu'on donne en Serrure-
rie , Taillanderie , & autres arts en fer , à une forte de
groffes limes quarrees , triangulaires , ou méplates :
on s'en fert pour enlever au ter les inégalités de la
forge; ce qui s'appelle degroffir. La taille de ces li-
mes eft rude ; du refte elle elt la même qu'aux au-
70i
CAR
très. Ces fortes de limes font ordinairement de fer
trempé en paquet.
Il y a le derni-carreau ou carrela , qui n'a que la moi-
tié de la force du carreau , & qui fert pour les ouvra-
ges dont le dégroffiffage efl moins confîdérable. *
CARREAU , termede Tailleur& de B 'anchijfeufe , c'efl
un infiniment de fer dont les Tailleurs Se autres ou-
vriers en couture le fervent pour applatir leurs ren-
traitures, & d'autres parties des étoffes qu'ils ont cou-
fues enlemble, en l'appuyant & le pafiant par-demis
après l'avoir fait chauffer.
Cet infiniment efl de fer, d'environ dix pouces
de longueur , 6c deux de largeur par un bout , & le
termine en pointe par l'autre. Il a auffi un manche
de fer à un de les bouts en forme de queue , qui fe
reploye fur la maffe du carreau , & lui efl parallèle.
Le carreau des Tailleurs diffère de celui des Blan-
chifîèufes , en ce que le premier ell étroit , long , poin-
tu , & brut ; l'autre au contraire efl arrondi par fa
partie antérieure , & fa platine efl tort unie.
Il y a des carreaux de Tailleur & de Blanchiffeufe
de deux efpeces ; les uns foîides, les autres compolés
de ditférentes pièces qu'on affemble , & qui forment
une efpece de boîte , dans laquelle on peut enfermer
ou du feu , ou quelque corps chaud. Voye\ les Plan-
ches de Taillanderie & leur explication.
Carreau ; les Vitriers appellent ainfi une pièce
de verre quarrée ou d'une autre figure , mife en
plomb, ou retenue avec des pointes , ou du papier,
ou du maflic, dans les chaffis d'une fenêtre.
Franc-CARREAV , forte de jeu dont M. de Buffon
a donné le calcul en 1733 , avant que d'être de l'A-
cadémie des Sciences. Voici l'extrait qu'on trouve
de fon mémoire fur ce fujet , dans le volume de l'A-
cadémie pour cette année-là.
Dans une chambre carrelée de carreaux égaux , &
fuppofés réguliers , on jette en l'air un louis ou un
écu , & on demande combien il y a à parier que la
pièce ne tombera que fur un feul carreau, ou fran-
chement.
Suppofons que le carreau donné foit quatre ; dans
ce quarré inferivons-en un autre qui en foit dillant
partout de la longueur du demi-diametre de la pie-
ce ; il efl évident que toutes les fois que le centre
de la pièce tombera fur le petit quarré ou fur fa cir-
conférence , la pièce tombera franchement ; & qu'au
contraire elle ne tombera pas franchement , fi le cen-
tre de la pièce tombe hors du quarré inferit : donc la
probabilité que la pièce tombera franchement, efl à
la probabilité contraire , comme l'aire du petit quar-
ré ell à la différence de l'aire des deux quarrés.
Donc pour jouer à jeu égal , il faut que le grand
quarré foit double du petit ; c'eft-à-dire,que le diamè-
tre de la pièce étant 1 , & x le côté du grand quarré,
on aura *a : (x — i)2 : : 2 : 1 , d'où l'on tire facile-
ment la valeur de x , qui fera incommenfurable avec
le diamètre de la pièce.
Si la pièce , au lieu d'être ronde , étoit quarrée ,
& , par exemple , égale au quarré inferit dans la pie-
ce circulaire dont nous venons de parler ; il faute
aux yeux que la probabilité de tomber franchement
deviendroit plus grande : car il pourroit arriver que
la pièce tombât franchement hors du petit quarré :
le problème devient alors un peu plus difficile , à cau-
fe des différentes pofitions que la pièce peut pren-
dre ; ce qui n'a point lieu quand la pièce efl circu-
laire , car toutes les pofitions font alors indifférentes.
Voici dans un problème fimple une idée qu'on peut
fe former de ces différentes pofitions.
Sur un feul plancher formé de planches égales &:
CAR
parallèles , on jette une baguette d'une certaine lon-
gueur, & fuppofce fans largeur: on demande la pro-
babilité qu'elle tombera franchement fur une feule
planche. Que l'on conçoive le point du milieu de la
baguette à une diflance quelconque du bord de la
planche, & que de ce point comme centre on décrive
un demi-cercle dont le diamètre foit perpendiculaire
aux côtés de la planche ; la probabilité que la ba-
guette tombera franchement , fera à la probabilité
contraire , comme le fefteur circulaire renfermé au-
dedans de la planche efl au reile de l'aire du demi-
cercle ; d'où il efl aifé de tirer la folution cherchée.
Car nommant x la diflance du centre de la baguette
à l'un des côtés de la planche , A'Ie fefteur corref-
pondant , dont il efl toujours facile de trouver la va-
leur en x , & A l'aire du demi-cercle^ la probabilité
cherchée fera à la probabilité contraire , comme
fX d x efl kfdx ( A-X). Voy. Jeu , Pari. (0)
CARREFOUR , f. m. {Jardinage.} efl la rencon-
tre de quatre allées dans une forêt, dans un bois ; ce
qui imite l'iffue de quatre rues dans une ville , que
l'on nomme auffi carrefour.
On les peut faire circulaires ou quarrés : dans
cette dernière forme on en retranche les encoignures,
ce qui leur donne plus de grâce , & les aggrandit
confidérablement. (/Q
CARRELAGE , f. m. en Architecture , fe dit de tout
ouvrage fait de carreau de terre cuite , ou de pierre,
ou de marbre. (P)
CARRELER, v. a£l. c'efl paver une chambre,
une faile , &c. avec des carreaux. Ce travail s'exé-
cute au mortier & à la brique. On commence par ré-
pandre fur la furface à carreler une couche plus ou
moins épaiffe d'excellent mortier ; on applique le
carreau fur cette couche ; on enduit les côtés du car-
reau de mortier, afin qu'il fe lie bien avec le carreau
contigu; on en pofeainli une rangée entière; on s'afïïi-
re que cette rangée efl bien droite & bien de niveau,
par une longue règle , & par l'infirument appelle ni-
veau. L'étendue d'une chambre & la figure du carreau
étant données , il n'efl pas difficile de trouver le nom-
bre de carreaux qui y entreront ; il ne s'agit que de
chercher la furface de la chambre & celle du car-
reau , & divifer la première par la féconde. S'il s'a-
git de former un pavé dont l'afpeft foit agréable à la
vue , avec des carreaux mi-partis de deux couleurs,
Voye^ l'article CARREAU en Architecture.
* CARRELÉ , adj. pris fubfl. dans les Manufactures
en foie , efpece d'étoffe qui n'efl pas moins à la mode
aujourd'hui que le cannelé, furtout quand elle a du
fond, & qu'elle efl un peu riche.
Le carrelé & le cannelé font l'un & l'autre compo-
fés de quarante portées de chaines , un peu plus ou
un peu moins , & d'un pareil nombre de portées de
poil ; c'efl pourquoi nous joignons ici ces étoffes. La
chaîne efl montée , comme le gros-de-Tours, fur qua-
tre liffes pour lever , quatre de rabat , & de même
pour le poil. Pour faire le cannelé ordinaire par le
poil , on paffe trois coups à l'ordinaire , on broche
pareillement fans toucher au poil : le quatrième coup
on fait lever tout le poil , & baiffer la moitié de la
chaîne, en pafiant un coup denavettebeaucoup plus
fin que les trois premiers ; le poil fe trouve arrêté par
ce moyen. Ce même poil qui a demeuré trois coups
fans travailler , forme une longueur d'une ligne au
moins dans le travers de l'étoffe , avant que d'être
arrêté ; & quand il l'ell au quatrième coup , fa re-
paie forme le coup de cannelé ; après quoi on recom-
mence le courfe , & on continue.
CAR
î>émonJîraùon de C armure d'un cannelé.
s. 2. 3-4«
14-
•i}
-é
1 — O '\ z. IifTes de fond
w ] Q • ; . gros-de-Tour
(>-<>-
. IifTes de fond ou de
©
■0-z. IifTes de
;. rabat.
■ i. IifTes du
• i. poil qui
■ j. Forment le
.4. cannelé.
— 2. IifTes de
Lorfque la dorure & les nuances font liées dans le
cannelé , il Ce travaille comme le gros-de-Tours ; &
quand la dorure & les nuances font liées par la dé-
coupure , comme dans les fatins réduits , pour-lors
on fupprime totalement le liage.
On peut faire les candis à la marche & à la tire.
Les carrelés à la tire n'ont befoin d'aucune liffe de poil,
& font les plus ailés , parce que le defTein indique ôc
détermine la façon ; ce qui n'ell pas auffi commode
avec la marche , qui ne peut varier le carrelé dans le
fond , comme font le deffein Se la tire.
Pour faire un carrelez, la marche , il faut remettre,
c'ell-à-dire , pafTcr le poil dans les IifTes autre-
ment que pour les autres. On paffe 8 , 1 z , & même
16 fils de poil fur une même liffe , par exemple , fur
la première ; autant fur la féconde , autant fur la
troifieme , & autant lur la quatrième.
On paffe trois coups en failant lever deux IifTes
du poil en taffetas , c'ell-à-dire , une prife & une
laiffée , tandis que les deux autres repofent , leur poil
reliant ians travailler. Au quatrième coup on fait le-
ver les IifTes qui ont paffé trois coups fans travailler ,
& on laiffe repofer les deux autres pendant trois
coups auffi , après quoi on les fait relever ; ce qui
forme le carrelé. On voit au-deffous de l'armure du
carrelé fa figure : quant au refle du travail , c'ell le
même que pour le cannelé. Voici l'armure du carrelé.
CAR 7°3
bémonjlration de ï armure d'un carrelé à la marché
On a fait des carrelés dont le poil étoit compofé
d'un fil d'or ou d'argent : ces étoffes ne différent du
carrelé de foie , qu'en ce qu'on ne met fur chaque liffe
de poil qu'autant de fils que l'on en veut pour faire
la figure du carrelé: par exemple , û on ne met que
deux fils de fuite fur la même liffe , elle ne marquera
pas comme s'il y en avoit ou trois , ou quatre ; Se
ainfi du relie.
CARRELET, f. m. ( ffijl. nat. Ickthyol.) quadratu-
lus , poiiîbn de mer de la claffe des poiffons plats.
Bclon donne le nom de plie & de carrelet au même
poiiîbn : il rappclle/>//'c- lorlqu'il eft jeune, & carrelée
lorfqu'il eft vieux : mais Rondelet prétend que la plie
&C le carrelet font deux elpeces du même genre , qui le
reiîemblent beaucoup, mais qui différent cependant
en ce que la figure du carreler approche plus du qùar*
ré que celle de la plie ; c'ell d'où vient le nom de
currclct; &c que l'a face liipcrieure elt parfemée de
taches rouffes : il cil liffe ; fa chair elt blanche , mol-
le , & on le pêche en grand nombre dans l'Océan.
Rondelet, Willughby, Hijl.pijc. t'oye{ Plie , Pois-
son. ( / )
Carrelet , Cadre, ou Châssis, infiniment
dont le fervent les apothicaires : il eft compofé de
quatre tringles de bois uni , d'un pouce de laii.e, Se
d'un pié ou environ de longueur. Ces quatre trin-
pies font affcmblées en quarre p'airles extrémités avec
des clous dont les pointes paffent outre , & font def-
tinées à retenir les coins du torchon ou blanchet par
lequel on paffe quelque liqueur, f^oje- rJL.ANCiîLT.
CarRelet, cil une efpecc de grande aiguille à
quatre cornes ou angles , dont les Selliers , Bourre-
liers j Cordonniers, &c. le fervent pour coudre les
704
CAR
cuirs foibles & minces. Voye{ Aiguille À Sel-
lier.
CARRELET, infiniment de Chapelier, c'eft une ef-
pece de petite carde fans manche , dont les dents
font de fil de fer très-fin : on s'en fert pour donner
la façon que les ouvriers appellent tirer le chapeau à
poil. F. Chapelier , & lajîg. g. PL du Chapelier.
Carrelet à renverfer, eft une efpece d'aiguille
qui fert au Cordonnier à faire la trépointe du der-
rière du foulier ; elle eft un peu coudée ( Voye^la fi-
gure l5. PL du Cordonnier-Bottier} , au lieu que le
carrelet à coudre les ailettes aux empeignes eft droit.
Fbye[ Soulier.
Carrelet, ou demi-carreau j voyer^ CARREAU en
Serrurerie.
Carrelet, ( Pêche. ) efpece de filet pour la pê-
che : il doit avoir fix pies en quarré , & la maille af-
fez large; car plus la maille eneft grande, puis le
carrelet eft facile à lever de l'eau , commodité qui
n'eft pas à négliger ; car file carrelet fe tire lentement,
les gros poifîbns , & fur-tout les carpes , iauteront
par-defïus. Pour pêcher avec ce filet , il faut y met-
tre une bonne poignée d'achées ou vers de terre ,
qu'on enfilera par le milieu du corps , enforte qu'ils
remuent; ce qui attire le poiflbn. Voye^ Pêche.
C ARRELETTE, en terme d'Eperonnier, de Coutelier,
& autres ouvriers enfer , fe dit d'une lime plate moins
groffe que le carreau : au refte il y en a de plus ou
moins fortes , félon les befoins qu'on peut en avoir.
Ce font les Taillandiers qui travaillent toutes ces
limes.
* CARRELEUR , f. m. en Architecture ; il fe dit
autant du maître qui entreprend les ouvrages de car-
relage , que du compagnon qui pofe les carreaux.
Il faut avoir l'œil à ces ouvriers ; au lieu d'afieoir
leur carreau fur du plâtre , ils ne le pofent quelque-
fois que fur de la poulîîere ; ils employent du car-
reau mal cuit ; & quand on fe plaint de leur tra-
vail , ils difent que s'ils faifoient un lit de plâtre , ce
plâtre poufîeroit ; ce qui efl faux : il eft d'expérience
que le plâtre pur attache le carreau fi fortement ,
qu'il fe détache difficilement.
CARRET , f. m. ( Corderie. ~)fil de carret , gros fil
qui fert à faire les cordages. V. l'article Corderie.
Carret ,fil de carrer , ( Marine. ) eft encore un fil
tiré de l'un des cordons de quelque vieux cable coupé
par, morceaux. On s'en fert dans les vaifîeaux quand
on veut raccommoder quelque manœuvre rompue.
CARRETTO , (Géog.) petite ville d'Italie dans
la province d'Aqui, au duché de Montferrat.
CARRICK, {Géog.) province méridionale de
l'Ecoffe , dont la capitale eft Bargeny.
CARRIER , f. m. ( Art méch. ) ce font les ouvriers
qui travaillent à tirer les pierres des carrières.
Ils fe fervent pour cet effet de coins de différentes
figures & grofîeurs , & de marteaux qu'on appelle
mail, mailloche, pic, &c. & d'un grand levier que
Ton appelle barre ; quelquefois aufîi de poudre à ca-
non , pour détacher de grandes pièces de rocher, au
moyen d'une mine.
Les figures i.z. 3. 4. PL du Carrier, repréfentent
les coins ; celui marqué 1 efl tranchant par l'on extré-
mité inférieure ; les autres font obtus & de différen-
tes grofîeurs, pour fervir au beioin : on les fait en-
trer à grands coups de mail dans le vuide que le pre-
mier a pratiqué entre deux lits ou bancs de pierre. Le
mail eft repréfenté_/%. £)■ ^a pièce A B eft une «roile
barre de fer du poids d'environ 50 à 70 livres , per-
cée en ion milieu pour recevoir un manche long d'en-
viron 2 pies I ; la mailloche eft un marteau de même
groffeur, mais dont le fer eft beaucoup moins long ;
<?lle eft repréfentéej%\ y.
Après que le Carrier a introduit fes plus gros coins,
CAR
il arrive afTez fouvent que les pierres font encore
unies enfemble : pour achever entièrement de les fé*
parer , il prend la barre ou pince , fig. i5. par la
partie A qui fert de manche , & il met l'extrémité B
du bec CB , entre les deux lits de pierre qu'il faut
léparer; le crochet C , qui fert d'hypomoclion ou
point d'appui , tourne vers le lit inférieur ; il pefe en-
iuite fur l'extrémité A , & fépare ainfi ce que les
coins n'avoient pas pu léparer.
La mine que les Carriers font pour éclater de gros
morceaux de pierre , confifte en un trou cylindrique,
fig. 14 . d'environ un pouce & demi de diamètre , &C
allez profond pour atteindre le centre de la pierre :
on charge enfuite ce trou comme on charge un canon,
& on remplit le vuide que laifîe la poudre d'un cou-*
lis de plâtre , après cependant y avoir introduit l'ai-
guille de fer ,fig. iz. pour former la lumière. L'efpa-
ce occupé par la poudre eft la chambre de la mine :
il faut apporter un grand foin pour en bien boucher
l'entrée. Foye-: l'article MlNE.
La tarière eft repréfentée fig. /J. elle a deux poi-
gnées perpendiculaires à la tige : la première eft fixe,
& fert à tourner la tarière ; la féconde eft mobile
dans l'elpace d'environ un pié , où la tige eft arron-
die ; elle fert à appuyer la tarière fur l'endroit qu'elle
doit percer : il y a pour cet effet , à l'endroit où elle
eft traverfée par la tige , plufieurs rondelles de fer
ou de cuivre qui appuient fur deux chevilles qui tra-
verfent la tige.
CARRIERE , f. f . ( en Architecture ) c'eft un lieu
creufé en terre d'où l'on tire la pierre pour bâtir,
ou par un puits comme aux environs de Paris , ou
de plein pie le long de la côte d'une montagne , com-
me à S. Leu , Troci , Mallet , & autres endroits. Les
carrières d'où l'on tire le marbre , font appellées en
quelques endroits de France marbrière ; celles d'où
l'on tire la pierre , perrieres , & celles d'ardoife ardoi-
fieres , & quelquefois perrieres comme en Anjou. Le
mot carrière vient félon, M. Ménage, du latin quadra-
ria ou quadrataria , fait de quadratus lapis , pierre de
taille. fqye{ Carrier, Pierre, Marbre, & Ar-
doise. (P)
CARRiERE,(tt/vHi: de Manège} c'eft une place ren-
fermée d'une barrière où l'on court la bague. Voye^
Barrière.
On s'en fert aufîi pour marquer la courfe même des
chevaux, pourvu qu'elle ne loit pas de plus de zoo pas.
Dans les anciens cirques, la carrière étoit l'elpace
ou les biges ou quadriges , dévoient courir à toute bri-
de pour remporter le prix. ( P )
C ARRION , ( Géog. ) rivière d'Efpagne , qui prend
fa fource dans les Afturies, & qui fe jette dans celle
de Piluergia. Il y a au royaume de Léon, une ville
qu'on appelle Carrion de los Condes.
* CARROSSE, f. m. ( ouvrage de Sellier-Carroffîer,
de Charron , de Serrurier , &c. ) c'eft une voiture com-
mode &c même quelquefois très-fomptueufe , fufpen-
due à des foûpentes ou fortes courroies de cuir,
& montée de roues fur lefquelles elle fe meut. Voye^
Roue, Timon, Soupente, Avant-train,
Arriere-train, &c.
En France & dans le refte de l'Europe , les carof-
fes font tirés par des chevaux ; excepté en Elpagne où
l'on fe fert de mules : dans une partie de l'Orient, &
particulièrement dans les états du grand feigneur ,
on y attel* des bœufs , & quelquefois des rennes j
mais c'eft moins par ufage que par oftentation. Le
cocher eft ordinairement placé fur un fiége élevé fur
le train , au-devant du carrojfe : mais en Efpagne la
politique l'en a déplacé par un arrêt , depuis qu'un
comte duc d'Olivarès fe fut apperçû qu'un fecret
important , dont il s'étoit entretenu clans l'on carrojfe,
avoit été entendu & révélé par fon cocher ; en con-
féquence de cet arrêt , les cochers Efpagnols occu-
pèrent
CAR
fièrent la place qu'occupent les cochers dans nos car-
rojfes de voiture. Chambcrs.
Les carrojjcs font de l'invention des François , &
par conséquent toutes les voitures qu'on a imaginées
depuis à l'imitation des carrojfes. Ces voitures t'ont
plus modernes qu'on ne l'imagine communément.
L'on n'en comptoit que deux ions François I. l'une à
la reine ; l'autre à Diane , fille naturelle de Henri II.
Les dames les plus qualifiées ne tardèrent pas à s'en
procurer ; cela ne rendit pas le nombre des équipa-
ges fort considérable ; mais le faite y fut porté fi loin ,
qu'en 1563, lors de 1'cnregiftrement des lettres-paten-
tés de Charles IX. pour la réformation du luxe , le Par-
lement arrêta que le Roi feroit fupplié de défendre
les coches par la ville ; &C en effet , les confeillers de
la cour, non plus que les préfidens , ne fuivirent point
cet ufage dans fa nouveauté ; ils continuèrent d'aller
au Palais fur des mules jufqu'au commencement du
dix-fepfième fiecle.
Ce ne fut que dans ce teins que les carrojfes com-
mencèrent à lé multiplier ; auparavant il n'y avoit
guère que les dames qui s'en fuflent fervies. On dit
que le premier des feigneurs de la cour qui en eut un ,
fut Jean de Laval de Bois-Dauphin, que fa groffeur
exceiîive empêchoit de marcher & de monter à che-
val. Les bourgeois n'avoient point encore ofé fe met-
tre fur le même pie : mais comme cette voiture , ou-
tre fa grande commodité , diftingue du commun , l'on
parla bien-tôt par-deflus toute autre considération ;
d'autant plus qu'on n'y trouva aucun empêchement
de la part du prince ou des magiftrats. De-là vint
cette grande quantité de carrojjcs , qui fe firent pen-
dant les règnes de Louis XIII , de Louis XIV, & de
Louis XV. Il y en a , à ce qu'on croît , à peu près
quinze mille de toutes fortes à Paris feulement 5
au refte , on ne fera pas furpris de ce nombre, fi on
le compare à celui des feigneurs qui l'habitent , &
des riches citoyens qui y font établis , & à la faci-
lité d'y entretenir des chevaux par le bon ordre de
la police , qui y procure fans ceffe l'abondance des
grains & des fourages , & qui veille au dehors & au
dedans fur le prix des choies, & fur la conduite du
marchand & de l'ouvrier. Au refte M. l'abbé Gedoyn
dans un de les ouvrages, déplore fort cette multipli-
cité de carolfes , qu'il regarde comme une des princi-
pales caules de la décadance des lettres , par la faci-
lité qu'elle apporte à la diifipation.
Les carrojjcs ont eu le fort de toutes les nouvelles
inventions, qui ne parviennent que fuccelfivement
à leur perfection, Les premiers qu'on fit étoient ronds
& ne tenoient que deux perfonnes ; on leur donna
dans la fuite plus de capacité , on les fit quarrés , &
on s'y aiîcyoit quatre perfonnes ; ils étoient fermés
par devant , comme le font encore ceux de loiiage.
On peut dire qu'il ne manque plus rien aujourd'hui
foit à leur commodité , foit à leur magnificence ; ils
font ornés en dehors de peintures très-finies, &c ga-
ranties par des vernis précieux ; ils l'ont couverts en
dedans de velours.
Les parties de menuiferie font élégamment fculp-
tées ; celles du charronage ont des moulures & des
dorures ; le Serrurier y a étalé tout Ion favoir-faire
par l'invention des reflbrts doux, plians, ôi folides;
le Sellier n'y a rien négligé dans les parties en cuir.
On a publié quelques lois fomptuaires pour modérer
la dépenfe excemve de ces voitures : il a été déten-
du d'y employer l'or & l'argent ; mais l'exécution de
ces détentes a été néglij
On diftinguoit jadis deux fortes de carrojfes, les
uns à arcs de fer, les autres j'ans arcs: mais Pillage
des arcs a p.ili'e. Voye^ Arc de Charron.
Les parties principales du carro/Jc font Pavant-train ,
le train , le bateau , l'impériale , les quenouilles ,
les fonds, les portières, les maatelets , les gouttières,
Tome II,
CAR
705
les roues , le timon , l'arriére-train , &c.
Les carrojfes ont differens noms , eu égard à leur
ftructure ; il y a des carrojjes proprement dits , des
carrojjcs coupés , des calèches , des berlines , &c. ils en
ont aufîi d'autres , eu égard à leur ufage ; & il y a
des carrojfes de campagne , des carrojjes de voiture , des
carrojjes de louage, &c. Voye{ PI. du SelUer-CarroJfif.r^
des figures de la plupart de ces voitures.
Le carroffe proprement dit, eft à quatre places ; le
carrojj'e coupé n'a qu'un fond fur le derrière , & un
ftrapontin fur le devant. Si la voiture eft légère . a
des roues très-baffes , eft ouverte de toutes parts , à
un , à deux , à trois rangs de places 011 l'on eft aflis j
non le vifage tourné les Uns vers les autres, comme
dans les carrojjes ordinaires , mais pour ainfi dire de
front, chaque rang ayant l'on doflier ; on l'appelle
calèche. Il y a des chaifes de cent façons différentes.
Voye? Chaise. Il y a des carrojfes de voiture , qui fer-
vent à tranfporter les voyageurs d'une ville dans
une autre. Voye^ Coche.
Quelque grand que fut le nombre des carrojfes fous
Louis XIV. l'ufage en paroifioit encore relervé aux
grands & aux riches ; & ces voitures publiques , qui
lont maintenant à la dil'pofition des particuliers , n'é-
toient point encore établies. Ce fut un nommé Sau-
vage à qui cette idée fe préfenta ; fon entreprife eut
tout le lucces poffible : il eut bien-tôt des imitateurs.
Sauvage demeuroit rue S. Martin , à un hôtel appelle
S. Fiacre; c'eft de-là qu'eft venu le nom de Fiacre y
qui eft relté depuis & à la voiture de au cocher. En
1650, un nommé Fdlerme obtint le privilège exclu-
lit de louer à Paris , de grandes & de petites carioîes.
M. de Givri en obtint un pour les carrojjes : il lui fut
accordé par lettres-paternes du mois de Mai , de 1 65 y ,
de placer dans les carrefours , & autres lieux publics,
des carrojfes à l'heure , à la demi-heure , au jour , qui
meneroient jufqu'à quatre à cinq lieues de Paris.
L'exemple de M. de Givri encouragea d'autres per-
fonnes à demander de pareilles grâces ; & l'on
eut à Paris on nombre prodigieux de voitures de
toute elpece. Les plus en ufage aujourd'hui font les
carrojjes appelles fiacres , les brouettes , les chaifes
à porteur, Ôt les voitures pour S. Germain , Verfail-
les , & autres lieux circonvoifins de Paris , fans comp-
ter les voitures d'eau. Foyeç Coche de Terre,
Coche d'Eau , &c
Les fiacres ou carrojfes de place fe payent ici vingt-
quatre fous la première heure, & vingt fous les autres:
mais il me Pénible que la police de ces voitures pour-
roit être perfectionnée, en inftituant fur les places
un officier qui reçût leur falaire & qui les fit partir,
& en leur défendant de prendre perionne dans les
rues & de s'y arrêter ; par ce moyen , ils ne met-
troient pas le public à contribution , & ne voleroient
pas leurs maîtres. Ce font les commilTaires qui font
ici la police des fiacres ; ainli qu'à Londres où les
fiacres ont des numéros derrière , comme parmi
nous. Le prix qu'on doit leur payer le tems , a été
fixe par le quatrième fiatut de Charles II. confirmé par
d'autres de la cinquième Scfixieme année de Guillau-
me III. il leur elt du pour une journée entière de douze
heures j dix fois lterlin ; pour une heure feule, un
fous fix deniers; pour chaque heure après la premiè-
re , un fou : ils font obligés de mener à ee prix tous
cettt qui s'en fervent jufqu'à dix milles de Londres.
CARROSSIER,!', m. ouvrier qui fait & qui vend
des carroil'es ; il y a dans la ville de Paris une commu-
nauté conliderable de maîtres Carroffiers , qui font
plus connus fous le nom dé Selliers. Ils ont dans leurs
ltatuts la qualité de maîtres Selliers-Lormiers-c'jr-
roffiers. t'oyc; SELLIER.
" CARROUSEL, f. m. courfe de charriots & de che
vaux , ou fête magnifique que donnent des princes
ou des grands feigneurs dans quelque réjoùiflanc©
V V V Y.
jo6
CAR
publique ; elle confifte en une cavalcade de plufieurs
feigneurs fuperbement vêtus & équipés à la manière
des anciens chevaliers ; on fe divife en quadrilles ;
on lé rend à quelque place publique : là le font des
joutes , des tournois , & d'autres exercices conve-
nables à la nobleffe. Foye^ Joute & Tournoi.
Ce mot vient de l'Italien carofdlo , diminutif de
carro , cliarriot.
Tertullien attribue à Circé l'invention des carrou-
fels; il prétend qu'elle les inflïtua en l'honneur du fo-
leil , dont les Poètes l'ont fait fille ; de forte que quel-
ques-uns croyent que ce mot vient de carras jolis.
Les Maures y introduifirent les chiures & les li-
vrées dont ils ornèrent leurs armes & les houfles de
leurs chevaux , &c Les Goths y ajoutèrent l'ufage
des aigrettes & des cimiers <, &c
On diftinguoit dans les canoi/fils plufieurs parties ;
i°. la lice ou le lieu où devoit lé donner le combat,
terminé par des barrières à fes deux bouts , & garni
dans toute fa longueur de chaque côté d'amphithéâ-
tres pour placer fes dames &c les principaux fpefta-
teurs ; 2°. le fujet qui eft une repréfentation allégo-
rique de quelqu'évenement fameux pris dans la fa-
ble ou dans l'hiitoire , & relatif au prince en l'hon-
neur de qui le fait le carroufd; 30. les quadrilles ou
la divifion des combattans en plufieurs troupes qui
fe distinguent par la forme des habits & par la diver-
fité des couleurs , & prennent quelquefois chacune le
nom d'un peuple fameux : ainfi dans un carroufd
donné fous Louis XIV. il y avoit les quadrilles des
Romains , des Perlés , des Turcs , & des Mofcovi-
tes ; 40. l'harmonie foit militaire , foit douce , ufitée
dans ces fortes de fêtes ; 50. outre les chevaliers'qui
compolént les quadrilles , tous les officiers qui ont
part au carroufd , comme le mettre de camp & fes
aides , les hérauts , les pages , les eftafiers , les par-
rains & les juges ; 6°. la comparfe ou l'entrée des
quadrilles dans la carrière , dont elles font le tour en
ordre pour fe faire voir aux fpectateurs ; 70. enfin
les différentes efpeces de combats, qui font de rom-
pre des lances les uns contre les autres , de les rom-
pre contre la quintane ou figure de bois ; de courre
la bague , les tètes , de combattre à cheval l'épée à
la main , & de faire la foule , c'eft-à-dire , de cou-
rir les uns après les autres fans interruption. Ces
combats qui tenoient de l'ancienne chevalerie , fu-
rent introduits en France à la place des joutes &
tournois fous le règne d'Henri I V : il y en a eu quel-
ques-uns fous Louis XIV: mais ces diverfiffemens
ont ce île d'être de mode. (G)
* CARRUQUE, f. f.Çdntiq.yhat des Romains à
l'ufage des gens de qualité & du peuple : ceux-là
l'ornoient d'argent ; il étoit à quatre roues , tiré or-
dinairement par des mules ou des mulets. Le peuple
le faifoit garnir de cuivre ou d'ivoire ; l'empereur
Alexandre Severe ne permit les cantiques argentées
qu'aux lénateurs ; l'empereur Aurelien rendit la li-
berté à chacun d'avoir des cantiques telles qu'il les
defireroit ; & on en vit de très-hautes , dans lelquel-
les on fe faifoit promener en habits fomptueux.
CAP..S , ( Géog. ) ville forte d'Afie dans l'Armé-
nie , fur la rivière de même nom. Long. 60. 23. lut.
40. 20.
CARSCHI , ( Géog. ) grande ville d'Afie dans la
Tartarie , dans la grande Boucharie.
CARSO , ( Géog. ) partie du Frioul en Italie, qui
eft entre le comté de Gortz , le golfe de Venife , &C
Trielte , à la maifon d'Autriche.
CARSWICK , (Géog.) petite ville & port d'E-
coffe , dans file de Mula.
CAIiTA , f. f. ( Commerce.) nom ufité parmi quel-
ques marchands Provençaux & plufieurs négocians
étrangers, pour fignifier la page ou le folio d'un re-
giitre. Diclionn,di Commerce, tome 11, page il 5, (G)
CAR
* CAPiTAGER, v. neut. (Agriculture & (Economie
ruflique. ) c'elt donner à la vigne un quatrième la-
bour ; il ne faut pas l'épargner à celle où l'on aura
mis du fumier depuis la dernière vendange , & quand
l'année aura été pluvieufe ; le fumier & les pluies
fréquentes produifant des herbes qui ufent la terre ,
& empêchent le raifin de profiter & de mûrir. Les
Vignerons ne font point obligés à cette façon , à
moins que ce ne foit une condition du marché. Au
refte il vaut mieux la leur payer à part que de les y
obliger. Voye^ Vigne. Le mot canager eft princi-
palement d'ulage dans l'Orléanois.
CARTAHU , f. m. (Marine. ) c'eft une manœu-
vre qu'on paffe dans une poulie au haut des mâts ,
& qui fert à biffer les autres manœuvres , ou quel-
qu'autre chofe.
CARTAMA, (Géog.) petite ville d'Efpagne au
royaume de Grenade. Long. 13. 32. lut. 36. 32.
CARTA SOURA , ville d'Afie, capitale de l'île
de Java , & réfidence de l'empereur.
CARTAYER , v. neut. ( terme de Meffagerie. ) c'eft
conduire une voiture de manière que les roues loient
entre les ornières & les ruiffeaux , & non dedans , ce
qui facilite le roulement & foulage les chevaux.
CARTE, f. f. (Géog.) figure plane qui repré-
fente la furface de la terre , ou une de fes parties ,
fuivant les lois de la perfpective. Voyt{ Terre , 6*
Perspective.
Une carte eft donc une projection de la furface du
globe ou d'une de fes parties , qui repréfente les fi-
gures & les dimenfions , ou au moins les lîtuations
des villes , des rivières , des montagnes , &c. Foye^
Projection.
Cartes univerfelles , font celles qui repréfentent tou-
te la furface de la terre , ou les deux hémifpheres. On
les appelle ordinairement mappemondes, Foye^ Map-
PEMONDE.
Cartes particulières , font celles qui repréfentent
quelques pays particuliers , ou quelques portions de
pays.
Ces deux efpeces de cartes font nommées fouvent
cartes géographiques , ou cartes terreflres , pour les dis-
tinguer des hydrographiques ou marines , qui ne repré-
fentent que la mer , fes îles , & fes côtes.
Les conditions requifes pour une bonne carte , font
i°. que tous les lieux y loient marqués dans leur
jufte lîtuation , eu égard aux principaux cercles de
la terre , comme l'équateur , les parallèles , les méri-
diens , &c. 20. que les grandeurs de différens pays
ayent entr'elles les mêmes proportions fur la carte,
qu'elles ont fur la furface de la terre: 30. que les dif-
férens lieux foient refpeclivement fur la carte aux mê-
mes diftances les uns des autres , 6c dans la même
lîtuation que fur la terre elle-même.
Pour les principes de la conllruction des cartes , &
les lois de projection , voyei Perspective & Pro-
jection delà fphere. Voici l'application de ces prin-
cipes à la confruclion des cartes.
Conflruclion d'une carte , l'œil étant fuppofe placé
dans l'axe. Suppofons , par exemple , qu'il taille re-
préfenter l'hémifphere boréal tel qu'il doit paroître
à un œil fitué dans un des points de l'axe , comme
dans le pôle auftral , & en prenant le plan de l'équa-
teur pour celui où la repréfentation doit fe faire :
nous imaginerons pour cela des lignes tirées de cha-
que point de l'hémifphere boréal à l'œil , & qui cou-
pent le plan en autant de points. Tous ces derniers
points joints enfemble , formeront par leur affem-
blage la carte requife.
Ici l'équateur fera la limite de la projection ; le
pôle de la terre fe repréfentera ou fe projettera au
centre ; les méridiens de la terre feront repréfentés
par des lignes droites qui iront du centre de l'équa-
teur ou du pôle de la carte , à tous les points de l'é-
CAR
quateur ; les parallèles de latitude formeront de pe-
tits cercles , dont les centres feront le centre même
de l'équateur ou de la projection.
La meilleure manière de concevoir la projection
d'un cercle fur un plan, c'effd'imaginer un cône dont
le fommet placé à l'endroit oii nous fuppofons l'œil ,
foit radieux , ou envoyé des rayons dont la bafe foit
le cercle qu'il faut repréfenter , & dont les côtés
foient autant de rayons lancés par le point lumi-
neux : la repréfentation du cercle ne fera alors autre
chofe que la feelion de ce cône par le plan , fur le-
quel elle doit fe faire ; & il eft clair que félon les
différentes pofitions du cône , la repréfentation fera
une figure différente.
Voici maintenant l'application de cette théorie à
la pratique. Prenez pourpole le milieu P{Pl. de Géog,
fig. 2. ) de la feuille de laquelle vous voulez taire
votre carte ; & de ce point comme centre , décrivez
pour repréfenter l'équateur, un cercle de la grandeur
que vous voulez donner à votre carte. Ces deux cho-
fes peuvent fe faire à volonté ; & c'eft d'elles que
dépend la détermination de tous les autres points ou
cercles. Divifez votre équatcur en 360 parties, &
tirez des droites du centre à chaque commencement
de degré : ces droites feront les méridiens de votre
carte , & vous prendrez pour premier méridien celle
qui paffera par le commencement du premier degré
ou par zéro. Voyc{ MÉRIDIEN.
Conflruclion des parallèles fur la carte. Marquez par
les lettres A B , B C , CD , D A, les quatre quarts
de l'équateur , compris le premier depuis zéro jufqu'à
90 ; le fécond , depuis 90 jufqu'à 180 ; le troilieme ,
depuis 1 So jufqu'à 270 ; & le quatrième , depuis
270 jufqu'à zéro ; & de tous les degrés d'un de ces
quarts de cercle B C, comme aufîî des points qui mar-
quent 23e1 30' à 66d 30', tirez des droites occultes
au point D , qui marquent celui où ces lignes cou-
pent le demi-diamctie APC: enfin du point P com-
me centre , décrivez différens arcs qui pafTent par les
différais points de P C; ces arcs feront les parallèles
de latitude; le parallèle de 23d 30' fera le tropique
du cancer; & celui de 66d 30' fera le cercle polaire
arctique. Voyc^ Parallèle & Tropique.
Les méridiens & les parallèles ayant été ainfi dé-
crits , on écrira les différens lieux au moyen d'une
table de longitude &: de latitude , comptant la longi-
tude du lieu fur l'équateur , à commencer du premier
méridien , & continuant vers le méridien du lieu ;
& pour la latitude du lieu , on la prendra fur le pa-
rallèle de la même latitude. Il cil é\ ident que le point
d'interfection de ce méridien & de ce parallèle , re-
présentera le lieu fur la carte ; & on s'y prendra de
même pour y repréfenter tous les autres lieux.
Quant à la moitié de l'écliptique qui pâlie dans
cet hémifphere, ce grand cercle doit fe repréfenter
par un arc de cercle ; de façon qu'il ne s'agit plus
que de trouver fur la carte trois points de cet arc. Le
premier point , c'eft-à-dire celui 011 l'écliptique coupe
l'équateur, eft le même que celui où le premier mé-
ridien coupe l'équateur; & il fe distingue par cette
raifon , par le ligne à'Arics. Le dernier point de cet
arc de cercle, ou l'autre interfection de l'équateur 6c
d'écliptique , c'eft- à-dire la fin de Virgo , fera dans
le point oppofé de l'équateur à i8od le milieu de
l'arc , c'eft le point où le méridien de 90e' coupe le
tropique du cancer: ainfi nous avons trois points de
cet arc qui donneront l'arc entier. Voye^ Cercle &
Corde.
Les cartes de cette première projection ont la pre-
mière des qualité&requifes ci-deflus : mais elles man-
quent de la féconde & de la troifieme ; car les degrés
égaux des méridiens font repréfentés fur ces cartes
par des portions de ligne droite inégales.
On peut par cette méthode repréfenter dans une
Tome II,
CAR
707
carte prcfqiie toute la terre , en plaçant l'œil , par
exemple , dans le pôle antarctique , & prenant pour
plan de projection celui de quelque cercle voilin ,
par exemple , celui du cercle antarctique. Il ne faut
ici de plus qu'à la première projection , que conti-
nuer les méridiens , tirer des parallèles du côté de
l'équateur , & achever l'écliptique : mais ces cartes
feraient trop embrouillées & trop difformes pour
qu'on pût en faire ufagè.
On fe contente pour l'ordinaire de tracer les deux
hémifpheres féparément ; ce qui rend la carte beau-
coup plus nette & plus commode. Si on veut avoir
par le moyen de cette cartela diftance de deux lieux
^■>B ■> {fis- 3-n°- 2. Géog. ) fitués fous le même mé-
ridien P B , on décrira les arcs de cercle AE,B Z> ;
on verra combien la partie E D contient de divilîons
ou de degrés , & on aura le nombre de degrés depuis
E juiqu'en D. Or comme un degré de la terre con-
tient 25 lieues , il faudra prendre 25 fois ce nombre
de degrés pour avoir la diftance de A en B.
M. de Maupcrtuis a démontré dans fon difeours
fur la Parallaxe de la lune , que les loxodromiques
dans cette projection devenoient des fpirales loga-
rithmiques. Foyci LOXODROMIQUE , & SPIRALE
logarithmique. Suppolons donc que A G (fg.
3. n°. 4. Gcog. ) foit une portion de fpirale loga-
rithmique , ou projection de loxodromique, &: qu'on
veuille lavoir la diftance A G de deux lieux placés
fur le même rhumb , il eft certain que A G fera à
A B en raifon conftante , c'eft-à-dire dans le rapport
du finus total au cofinus de l'angle du rhumb , ou de
l'angle de la loxodromique avec le méridien : donc
connoiffant A B par la méthode précédente , &
fâchant de plus, comme on le fuppofe , l'angle du
rhumb, on connoitra A G ; c'eft-à-dire , on connoî-
tra de combien de lieues font éloignes l'un de l'autre
les deux endroits dont les points A , G , font la pro-
jection.
Cette projection cil la plus aifée de toutes : mais on
préfère pour l'ufage celle où l'œil eft placé dans l'é-
quateur. C'eft en effet de cette dernière forte qu'on
fait ordinairement les cartes. Au relie , comme la li-
tuation de l'écliptique , par rapport à chaque lieu de
la terre, change continuellement, ce cercle ne doit
point avoir lieu, à proprement parler, fur la furfa-
ce de la terre : maison s'en fert pour repréfenter,
conformément à fa fituation , quelques momens mar-
qués ; par exemple , celui où le commencement (.Va-
ries & de lïbra 1 croit dans l'interiection du premier
méridien & de l'équateur.
Confruclion des cartes , en fuppofint V càl placé dans
le plan de l'équateur. Cette méthode de projection ,
quoique plus difficile , eft cependant plus jufte . (lus
naturelle, & plus commode que la première. Pour
la concevoir, nous fuppoferons que la furface de la
terre foit coupée en deux hémifpheres parla circon-
férence entière du premier méridien ; nous propofant
de repréfenter chacun de ces hémifpheres dans une
carte particulière, l'œil fera placé dans un point de
l'équateur , éloigné de 90 '. du premier méridien , tk.
nous prendrons pour plan tranlparent où la repréfen-
tation doit le taue , celui du premier méridien. Dans
cette projection l'équateur devient une droite , aufu
bien que le méridien éloigné de 90 ' du premier:
mais les autres méridiens, ou parallèles aux Lijua-
teurs, deviennent des arcs de cercle , ami; que l'é-»
cliptique. Foye{ PROJECTION STÉRÉOGRAPHIQUI
1)1 I >. SPH1
Voici la méthode pour les conftruiré. Du point E
comme centre ( figure ,?. ) décrive/ un cercle de la
grandeur que vous voulez donner à votre carte , il
repréfentera le premier méridien , qui efl auffi le
même que celui de i8od; car tirant le diamètre Ê Ût
il partagera le méridien en deux demi-cercles, donc
V V v^ ij
708
CAR
ie premier B AD conviendra à zéro , & l'autre BCD
à i8od. Ce diamètre B D repréfentera le méridien
de t)Od ; ainfi le point B fera le pôle arctique , & le
point D , le pôle antarcliquc. Le diamètre A C per-
pendiculaire à B D , fera l'équateur. Divilez les
quarts de cercle A B , BC, C D , D A , en 90 de-
grés chacun ; & pour trouver les arcs des méridiens
& des parallèles , vous vous y prendrez de cette for-
te. Il faudra par la méthode donnée ci-deffus , & dé-
montrée à l'article Projection stéréographi-
QUE DE LA SPHERE, divifer l'équateur en fes de-
grés ; lavoir en 1 80 , parce que celui de la carte ne
repréfente en effet que la moitié de l'équateur. Par
ces différentes divifions & par les deux pôles , vous
décrirez des arcs de cercle B 10 D, B zo D , &
ces arcs repréfenteront les méridiens.
Pour décrire les parallèles , il faudra divifer de la
même forte le méridien B D en i8od, & par chacu-
ne de ces divifions , & les divifions correfpondantes
des quarts de cercle AB, B C, décrire des arcs de
cercle ; on aura de cette manière les parallèles de
tous les degrés , avec les tropiques , les polaires , &
les méridiens.
L'écliptique peut fe marquer de deux façons ; car
fa ûtuation fur la terre peut être telle que fes inter-
férions avec l'équateur répondent perpendiculaire-
ment au point E : en ce cas , la projection de ce de-
mi-cercle , depuis le premier degré du Cancer juf-
qu'au premier du Capricorne , fera une droite qu'on
déterminera en comptant un arc de 13 d 30' de A
vers B , & tirant par l'extrémité F de cet arc un dia-
mètre. Ce diamètre repréfentera l'écliptique pour la
fituation dont nous parlons ; & on pourra comme
ci-deffus , le divifer en degrés , & y marquer les nom-
bres , fignes , &c Mais fi l'écliptique eft placée de fa-
çon que fon interfeûion avec l'équateur réponde au
point A , fa projection fera en ce cas un arc de cer-
cle qui paffera par les points d'interfection A Sa C
de l'écliptique & de l'équateur , pris fur la droite qui
marque la projeûion de l'équateur ; èc par celui qui
marque l'interfeftion du tropique du Cancer , & du
méridien de c)Od pris fur la droite qui fert de pro-
jection à ce méridien. Ces points fuffifent pour dé-
crire cet arc de cercle.
Il ne refte plus pour rendre la carte parfaite , qu'à
prendre dans les tables les longitudes & les latitu-
des des différens lieux , & à placer ces lieux confor-
mément fur la carte ; ce qu'on fera félon qu'on l'a en-
feigné dans la conftruftion des cartes de la première
efpece. On pourroit dans cette projection repréién-
ter fur une feule carte prefque tout le globe de la ter-
re ; il ne faudroit pour cela que prendre pour plan
de projeftion , au lieu du plan du premier méridien ,
le plan de quelqu'autre petit cercle , parallèle à ce
premier méridien , & fort proche de l'œil ; car par
ce moyen on pourra décrire tous les méridiens &
les parallèles à l'équateur en entier , fans qu'ils for-
tent des limites de la carte. Mais comme cela rendrait
la carte confufe & embrouillée , on ne le fait que ra-
rement ; & il paroît plus à propos de repréfenter
les deux hémifpheres en entier fur deux cartes diffé-
rentes.
Un des avantages de cette proje&ion eft qu'elle
repréfente d'une manière un peu plus vraie que la
précédente , les longitudes & les latitudes des lieux,
leurs diftances de l'équateur & du premier méridien.
Ses inconvéniens font : i°. qu'elle rend les degrés de
l'équateur inégaux, ces degrés devenant d'autant plus
grands , qu'ils font plus près de D A B ou de fon op-
pofé BCD, ce qui fait que des efpaces inégaux fur
la terre font repréfentés comme égaux fur la carte ;
& réciproquement ; défaut qu'on n'éviteroit que
par d'autres, peut-être plus grands. 20. Que les dis-
tances des lieux ôc leurs Situations mutuelles ne
CAR
peuvent pas fe bien déterminer dans les cartes de ce-
te projection.
Conjlruclion des cartes fur le plan de Vhorifon , ou
dont un lieu donné quelconque à volonté doive être le
centre ou le milieu, Suppolons, par exemple, qu'on
veuille décrire la carte dont le centre foit la ville de
Paris , nous fuppoferons fa latitude de 48d 50' 10" ;
l'œil fera placé dans le nadir ; la carte tranfparente
fera le plan de l'horifon , ou quelqu'autre plan pa-
rallelle à celui-là , en fuppofant qu'on veuille repré-
fenter dans la cane plus qu'un hémifphere: prenez le
point E, fia, ^, pour Paris, & de ce point comme cen-
tre , décrivez le cercle A B C D pour repréfenter
l'horifon, que vous diviferez en quatre quarts de
cercle , & chacun d'eux en c)od. Que le diamètre B D
foit le méridien ; B , le côté du nord ; D , celui du
fud ; la ligne tirée de l'eft de l'équinoxe , à l'oueft de
Péquinoxe , marquera le premier vertical ; A le côté
de l'eft ; C celui de l'oueft , c'eft-à-dire , deux points
du premier vertical , éloignés de part & d'autre de
90 du zénith. Tous les verticaux font repréfentés
par des droites tirées du centre E , aux différens de-
grés de l'horifon. Divilez B D en 180 degrés par les
méthodes précédentes, & le point deE B qui repré-
fentera 48d 50' 10", à compter depuis B, fera la
projection du pôle boréal, que nous marquerons par
la lettre P. Le point de E D qui repréfentera 48e1,
50' 10" de l'arc D C, en allant de C vers D , fera
rinterfeâion de l'équateur avec le méridien de Pa-
ris , que vous marquerez par la lettre Q. De ce point
Q , en allant vers P , vous écrirez les nombres 1,1,
3 , &c. comme auiîi en allant de Q vers D , & en al-
lant de B vers P , il faudra marquer les degrés de
cette forte 48 , 47 , 46 , &c.
Vous prendrez enfuite les points correfpondans
des degrés égaux ; & de leur diftance prife pour dia-
mètre , vous décrirez des cercles qui repréfenteront
les parallèles ou cercles de latitude avec l'équateur ,
les tropiques & le cercle polaire. Pour les méridiens,
vous décrirez par les points A P C un cercle qui re-
préfentera le méridien de 90 degrés de Paris , & dont
le centre fera le point M, & P N le diamètre; &C
ayant divilé K L en degrés par les méthodes précé-
dentes , vous décrirez par les points P N , & par les
points de divifion de la ligne KL, des cercles dont
les portions renfermées dans le cercle B A D C re-
préfenteront les méridiens.
Les cartes recîilignes font celles oit les méridiens &
les parallèles font tout-à-la-fois repréfentés par des
droites , ce qui eft réellement impoffible par les lois
de la perfpective, parce qu'on ne peut point affigner
de pofition pour l'œil & le plan de projection, tel-
le , que les cercles de longitude & de latitude de-
viennent tous- à-la-fois des lignes droites. Dans la pre-
mière méthode que nous avons donnée ci-deffus , les
méridiens étoient des droites , mais les paralelles
étoient des cercles. Dans la plupart des autres efpe-
ces de projetions, les méridiens & les parallèles font
des courbes. Il y a une efpece de projeétion oii les
méridiens font des droites , &c les parallèles des hy-
perboles. C'eftlorfque l'œil feroit fuppofé placé dans
le centre de la terre , & que la projection fe feroit
fur un parallèle au premier méridien : mais cette pro-
jection eft plutôt de pure curiolité que d'ufage.
Conjlruclion des cartes particulières. Les cartes parti-
culières de grandes étendues de pays , comme les
cartes d'Europe , fe projettent de la même manière
que les cartes générales , obfervant feulement qu'il
eft à propos de faire choix de différentes méthodes
pour différentes pratiques: par exemple, l'Afrique
& l'Amérique par 011 paffe l'équateur, ne ie projet-
teraient pas convenablement par la première mé-
thode, mais par la féconde; l'Europe &c l'Afie fe
projetteraient mieux par la troifieme ; & les pays voi-
CAR
fins des pôles ou les zones froides , par la première.
Ainfi, pour commencer, tirez fur votre plan ou pa-
pier une droite , que vous prendrez pour le méridien
du lieu fur lequel l'œil eft imaginé placé, & divifez-
la comme ci-defîus en degrés , qui feront les degrés
de latitude : prenez enfuite dans les tables la latitu-
de des deux parallèles qui en terminent les deux ex-
trémités ; il faudra marquer dans le méridien ces de-
grés de latitude, & tirer par ces mêmes degrés des
perpendiculaires, qui ferviront à la carte de limite
nord & fud. Cela fait, il faudra tirer des parallèles
dans les différens degrés des méridiens, & placer les
lieux jufqu'à ce que la carte foit complette.
Des cartes particulières de moindre étendue. Les Géo-
graphes fuivent une autre méthode dans la conf-
truction des cartes qui doivent repréfenter une plus
petite portion de la terre. Premièrement on tire une
droite au bas du plan , qui puiffe repréfenter la longi-
tude , & qui ferve de bornes à la partie méridionale
du pays qu'on veut décrire. On prend dans cette li-
gne autant de parties égales que le pays comprend de
degrés de longitude ; au milieu de cette ligne , on lui
élevé une perpendiculaire dans laquelle on prend au-
tant de parties que le pays contient de degrés de la-
titude. On détermine de quelles grandeurs ces par-
ties doivent être par la proportion d'un degré de
grand cercle aux degrés des parallèles qui terminent
le pays dont on fait la carte. Par l'extrémité de cette
perpendiculaire, on tire une autre droite perpendi-
culaire ou parallèle à celle d'en-bas , fur laquelle les
degrés de longitude doivent le repréfenter comme
dans la ligne d'en-bas ; c'eft-à-dire , prefqu'égaux les
uns aux autres , à moins que les latitudes des deux ex-
trémités ne foient fort différentes l'une de l'autre ;
car li la parallèle la plus baffe eft fituée à une dif-
tance considérable du cercle équinodtial , ou que la
latitude de la limite boréale foit beaucoup plus gran-
de que celle de l'auftrale , les parties ou degrés de
la ligne fupérieure ne feront plus égaux aux parties
ou degrés de l'inférieure ; mais ils feront moindres
fuivant la proportion du degré de la partie fepten-
trionale , au degré de la partie méridionale. Après
qu'on aura ainfi déterminé foit fur la ligne fiipéfieu-
re , foit fur l'inférieure , les parties qu'on doit pren-
dre pour les degrés de longitude; on tirera par les
points de divilion de ces parallèles des droites qui re-
préfenteront les méridiens; & par les différens de-
grés de la perpendiculaire élevée au milieu de la pre-
mière ligne tranfvcrfale , on tirera des lignes paral-
lèles a cette première ligne tranfverfale , lefquelles
repréfenteront les parallèles de latitude. Enfin on
placera les lieux fuivant la méthode qui a été déjà
enfeignée, aux points dans lefquels les méridiens ou
cercles de longitude concourront avec les parallè-
les ou cercles de latitude.
Pour les cartes de province ou de pays de peu d'é-
tendue, comme de paroiffes, de terres, &c. on le fert
d'une autre méthode plus litre & plus exacte qu'au-
cune des précédentes. Les angles de pofition ou
ceux fur lefquels doivent tomber les lieux, y font
déterminés par des inftrumens propres à cet effet , &
rapportés enfuite fur le papier. Cela fait un art à
part qu'on appelle arpentage. Foy. ARPENTAGE , &c.
Le^fig. 10. & ll.de la Géographie représentent des
cartes particulières de quelque portion de la terre ; la
figure io eft la repréfentation d'une portion affe/ con-
lidérable , oii les méridiens, comme on le voit, font
des lignes convergentes. La figure n eft la rep
tation d'une portion peu étendue, où les méridiens
& les parallèles font des lignes droites fenliblcment
parallèles. L, K, /, font trois lieux placés fur la
carte. Si on connoit les lieux K, I , & leur diftance
au lieu L , on connoitra facilement la pofition du lieu
L; car il n'y a qu'à décrire des centres K , 1 , Ck des
CAR
709
diftances L K , L I , qu'on fuppofe données, deux
arcs de cercle qui fe couperont au point cherché L.
Voye^ Lever un plan.
L'ulage des cartes fe déduit facilement de leur conf-
truefion. Les degrés des méridiens & des parallèles
marquent les longitudes & les latitudes des lieux ; &
l'échelle des lieues qui y eft jointe, la diftance des
uns aux autres. La lituation des lieux les uns par rap-
port aux autres, comme auffi par rapport aux points
cardinaux, paroît à la feule infpecfion de la carte ,
puifque le haut en eft toujours tourné vers le nord ;
le bas vers le fud; la droite vers l'eft, & la gauche
vers l'oueft ; à moins que la bouffole qu'on met affez
fouvent fur la carte, ne marque le contraire.
Carte Marine , eft la projection de quelques
parties de la mer fur un plan , pour l'ufage des navi-
gateurs. /^'«{Projection.
Le P. Fournier rapporte l'invention des cartes mari-
nes à Henri fils de Jean roi de Portugal ; elles diffé-
rent beaucoup des caries géographiques terreflres , qui
ne font d'aucun ufage dans la navigation : toutes les
cartes marines ne font pas non plus de la même efpe-
ce ; il y en a qu'on nomme cartes planes ; d'autres
réduites ; d'autres , cartes de mercator $ d'autres , cartes
du globe , &c.
Les canes planes, font celles où les méridiens & les
parallèles font reprélentés par des droites parallè-
les les unes aux autres.
Ptolomée les rejette dans fa Géographie, à caufe
des erreurs auxquelles elles font fujettes , quoiqu'el-
les puilfent être utiles dans des .voyages courts. Leurs
défauts font, i°. que puifque tous les méridiens fe
rencontrent en effet dans les pôles , il eft abfurde de
les reprélenter , fur-tout dans de grandes cartes , par
des droites parallèles ; 20. que les cartes planes repré-
lentent les degrés des différens parallèles égaux k
ceux de l'équateur , & par conféquent les diftances
des lieux de l'eft à l'oueft , plus grandes qu'elles ne
font ; 30. que dans une carte plane , le vaiffeau pa-
roît, tant qu'on garde le même rhumb de vent , faire
voile dans un grand cercle du globe , ce qui eft pour-
tant très-faux.
Malgré ces défauts des cartes planes , elles font ce-
pendant affez exaûes , lorfqu'elles ne repréfentent
qu'une petite portion de la mer ou de la terre ; Se
elles peuvent être en ce cas d'un ufage fort limple
& fort commode.
Conjlruclion d'une carte plane. i°. Tirez une droite
comme AB {PI. de navigation ,fig. _o. ) , & divifez-
la en autant de parties «.gales , qu'il y a de degrés de
latitude dans la portion de mer qu'il faut repréfenter}
20. joignez-y-en une autre B C ii angles droits , & di-
vifez-la en autant de parties égales les unes aux au-
tres , & à la première , qu'il y a de degrés de longi-
tude dans la portion de mer que vous voulez repré-
fenter; 30. achevez le parallélogramme A B CD , &
partagez l'on aire en petits quarrés, & les droites
parallèles à A B, CD, lerontles méridiens, &les pa-
rallèles hADlkBC, les cercles parallèles ; 40. vous
y placerez, au moyen d'une table de longitudes & de
latitudes, les cotes , les iles , les bayes, les bancs de
fable, les rochers, de la manière qui a ete preferite
ci-deffus pour les cartes particuliers.
Il s'enfuit de-là i°. que la latitude & ta longitude
du lieu où eft un vaiffeau étant données , on pourra
alternent repréfenter fbn lieu dans la cane ; 1
tant donnés dans la carte , les lieux /"& G , d'où le
vaiffeau part , e< où il va ; la ligne FG , tirée de l'un
à l'autre, fait avec le méridien A B uh angle A 1 "G
égal à l'inclinaifon du rhumb; & puifque les por-
tions Fi , iz , lG , entre des parallèles équidiftans
font égales , «S: que l'inclinaifon de la droite FG à
tous les méridiens ou à toutes les droites parallèles
à A B . et! la même , la droite F G reprefente dont;
7îo CAR
le rhumb. On peut prouver de la même manière que
cette carte repréfente véritablement les milles de lon-
gitude.
Il s'enfuit de-là qu'on peut le fervir utilement des
taries planes pour diriger un vaiffeau dans un voyage
qui ne foit pas de long cours , ou même clans un voya-
oe aflez long , pourvu qu'on ait foin qu'il ne ie ghfTe
point d'erreur dans la diftance des lieux F &c G , ce
qu'on corrigera de la manière iuivante.
Conjlruclion d'une échelle pour corriger les erreurs des
dijlances dans les cartes planes. i°. Tranf portez cinq
degrés de la carte à la droite AB,fig. iO,&c divifez-les
en 300 parties égales ou milles géographiques; ac.dé-
crivezfur cette droite un petit cercle ACB, qu'il fau-
dra divifer en 90 parties égales : fi l'on veut lavoir en
conféquence , combien cinq degrés font de milles
dans le parallèle de cinquante , qu'on prenne au com-
pas l'intervalle A C égal à cinquante , & qu'on le
transporte au diamètre A B , fur lequel il marquera
le nombre de milles requis.
Il s'enfuit de-là que fi un vaiffeau fait voile fur nn,
rhumb à l'eft ou à l'oueft, hors de Féquateur , les
milles correfpondans aux degrés de longitude , le
•trouveront comme dans l'article précédent ; s'il fait
voile fur un rhumb collatéral , alors on peut fuppo-
fer toujours la courfe de l'eft à l'oueft dans un pa-
rallèle moyen entre le parallèle du lieu d'où le vaif-
feau vient, &c de celui où il va.
Il eft vrai que cette réduction par une parallèle
moyenne arithmétique n'eft pas exafte : cependant
ons'enfert fouvent dans la pratique, parce que c'eft
une méthode commode pour Pufage de la plupart
des marins. En effet , elle ne produira point d'erreur
considérable , fi toute la courfe eft divifée en parties
-dont chacune ne paffe pas un degré ; ce qui fait qu'il
eft convenable de ne pas prendre le diamètre du
demi-cercle ACB de plus d'un degré , & de le divifer
au plus en milles géographiques. Pour l'application
-des cartes planes à la navigation , voye^ NAVIGATION.
Carte réduite , ou carte de réduction : c'eft celle dans
laquelle les méridiens font repréiéntés par des droi-
tes convergentes vers les pôles, & les parallèles par
des droites parallèles les unes aux autres , mais iné-
gales. Il paroît donc parleur conftruction qu'elles
doivent corriger les erreurs des cartes planes.
Mais puifque les parallèles y devroient couper
les méridiens à angles droits , il s'enfuit auffi que ces
cartes font défechieufes à cet égard , puifqu'elles re-
préfentent les parallèles comme inclinés aux méri-
diens ; c'eft ce qui a fait imaginer une autre efpece
de cartes réduites ,' dans lefquelles les méridiens font
parallèles , mais les degrés inégaux ; on les appelle
cartes de Mercator.
Carte de Mercator : c'eft celle dans laquelle les mé-
ridiens & les parallèles font repréiéntés par des droi-
tes parallèles , mais où les degrés des méridiens font
inégaux , & croifient toujours à mefure qu'ils s'ap-
prochent du pôle dans la même raifon que ceux des
.parallèles décroiiîent fur le globe ; au moyen de quoi,
ils confervent entre eux la même proportion que fur
le globe.
Cette carte tire fon nom de celui de l'auteur qui l'a
propofée le premier , & qui a fait la première carte
de cette conftruction , lavoir de N. Mercator : mais il
n'eft ni le premier qui en ait eu l'idée (car Ptolomée
y avoit penfé quinze cents ans auparavant) ni celui
à qui on en doit la perfection ; M. Whright étant
le premier qui l'ait démontrée , & qui ait enfeigné
une manière ailée de la conftruire , en étendant
la ligne méridienne par l'addition continuelle des
fécantes.
Conjlruclion delà carte de Mercator. i°. Tirez une
droite , & divifez-la en parties égales , qui repréfen-
CAR
tent les degrés de longitude, foit dans Péquateur, foit
dans les parallèles qui doivent terminer la carte ; éle-
vez de ces différens points de divilion des perpendi-
culaires qui représentent les différens méridiens , de
façon que des droites puiffent les couper toutes fous
un même angle , & par conféquent repréfenter les
rhumbs ; & vous ferez le refte comme dans la carte
plane, avec cette condition de plus , que pour que les
degrés des méridiens foient dans la proportion con-
venable avec ceux des parallèles , il faut augmenter
les premiers ; car les derniers relient les mêmes à
caule du parallélifme des méridiens. Voye{ Degré.
Décrivez donc dans Féquateur CD , & de l'inter-
valle d'un degré, ( PL Navig. fig. 11, ) le quart
de cercle D L E , &c élevez en D la perpendiculaire
D G ; faites l'arc D L égal à la latitude, & par le
point L tirez CG ; cette droite C G fera le degré du
méridien propre à être tranfporté fur le méridien de
la carte ; le refte le fera comme dans les caries planes.
Suppofons qu'on demande dans la pratique de conf-
truire une carte plane de Mercator , depuis le quaran-
tième jufqu'au cinquantième degré de latitude bo-
réale , & depuis le iixieme julqu'au quinzième de-
gré de longitude ; tirez d'abord une droite qui repré-
iente le quarantième parallèle de l'équateur, & divi-
fez-la en douze parties égales , pour les douze degrés
de longitude que la carte doit contenir ; prenez enfui-
te une ligne de parties égales , fur l'échelle de la-
quelle ces parties foient égales à chacun des degrés
de longitude , & à chacune de fes extrémités élevez;
des perpendiculaires , pour repréfenter deux méri-
diens parallèles , qu'il faut divifer au moyen de l'ad-
dition continuelle des fécantes , lefquelles on démon-
tre croître dans la même proportion que les degrés
de longitude décroiffent. Foye?^ SÉCANTE.
Ainli pour la diftance de 4011 de latitude à 4id,
prenez 1 3 1 \ parties égales de l'échelle , qui font la
fécante de 40d 30' ; pour la diftance de 41 d à 42 d ,
prenez 1 3 3 { parties égales de l'échelle , qui font la
fécante de 41 d 30' , &c ainfide fuite jufqu'au dernier
degré de votre carte, qui contiendra 1 54 de ces par-
ties égales, lefquelles font la fécante de 49e1 30' , &C
doivent donner par conféquent la diftance du 49d de
latitude au 50. Par cette méthode les degrés de la-
titude fe trouveront évidemment augmentés dans la
proportion fuivant laquelle les degrés de longitude
décroiiîent fur le globe.
Le méridien étant divifé, il faudra y ajouter la bouf-
fole ou le compas de mer : choififfant pour cda quel-
qu'endroit convenable dans le milieu , on tirera par
cet endroit une parallèle au méridien divifé, laquelle
fera le rhumb de nord ; & au moyen de celle-ci on
aura les 3 1 autres points de compas : enfin on rap-
portera les villes, les ports , les cotes , les îles , &c.
au moyen d'une table de latitude & de longitud
& la carte fera finie.
Dans la carte de Mercator , l'échelle change à pro-
portion des latitudes : fi par conféquent un vaifléau
fait voile entre le 40 & le 50 de la parallèle de lati tu-
demies degrés des méridiens entre ces deux parallèles
devront fervir d'échelle pour mefurer le chemin du
vaifîeau ; d'où il s'enfuit que quoique les degrés de
longitude foient égaux en longueur fur la carte , ils
doivent néanmoins contenir un nombre inégal de
milles ou de lieues , & qu'ils décroîtront à mefure
qu'ils approcheront plus près du pôle , parce qu'ils
font en raifon inverfe d'une quantité qui croît con-
tinuellement.
Cette carte eft très-bonne , quoique fauffe en ap-
parence : on trouve par expérience qu'elle eft fort
exatte, & qu'il eft en même tems fort ailé d'en faire
ufage. En effet elle a toutes les qualités requifes pour
l'ufage de la navigation. La plupart des marins , dit
Chambers , paroiffent cependant éloignés de s'en
CAR
Je rvir , & aiment mieux s'en tenir à leur vieille carte
plane, qui eft, comme on Ta vu, très-fautive.
Pour l'ufage de la carte plane de Mercator dans la na-
vigation , voye\ Navigation.
Carte du globe. C'eft une projection qu'on nomme
de la forte à caufe de la conformité qu'elle a avec
le globe même , & qui a été propoiée dans ces der-
niers tems par MM. Senex, Wilfon, & Harris : les
méridiens y font inclinés , les parallèles à égales dif-
tances les uns des autres , & courbes ; & les rhumbs
réels font en fpirales , comme fur la furface du glo-
be. Cette projeclion eft encore peu connue ; nous
n'en pouvons dire cpie peu de chofe , jufqu'à ce que
fa conftruclion èc les ufages ayent une plus grande
publicité ; cependant M. Chambers en cfpere beau-
coup , puifqu'clle eft munie d'un privilège du roi
d'Angleterre, qu'elle paroît fous fa protection, qu'elle
eft approuvée de plufieurs navigateurs habiles , &
entr'autres du doûeur Halley , & qu'elle a fubi en
Angleterre l'épreuve d'un examen très-févere. M.
Cambers ajoute que la projeftion en eft très-con-
forme à la nature , & par conséquent fort aiféé à con-
cevoir ; & qu'on a trouvé qu'elle étoit exacte , mê-
me à de grandes diffances, où fes défauts , fi elle en
eût eu, auroient été plus remarquables, y. Globe.
Voye^ aujjl la Géographie de M. Wolf.
Ci ites compofées par rhumbs & dijlances. Ce font
celles où il n'y a ni méridiens ni parallèles , mais
qui ne montrent la fituation des lieux que par rhumbs,
ck par l'échelle des milles.
On s'en fert principalement en France , & fur-tout
dans la Méditerranée.
On les trace fans beaucoup d'art, & il feroit par
conféquent inutile de vouloir rendre un compte
exa£t de la manière de les conftruire ; on ne s'en
J'ert que dans de courts voyages. (O)
Carte ou Quarte , f. t. (Commerce.} mefure de
grains dont on fe fert en quelques lieux de la Savoie,
6c qui n'eft pas partout d'un poids égal.
La carte deConflans pe!e 3 5 livres poids de marc.
Celle de S.Jean deMaurienne, 21 livres auffi
poids de marc.
La carte de Faverge, 30 poids de Genève.
La carte de Miolans , S. Pierre d'Albigny , S. Phi-
lippe , vingt-cinq livres poids de Genève.
Celle de Modane , 24 livres auffi poids de Genève.
Voyet Livre , Marc , Poids. Dût. du Com. (G)
Carte-blanche , fe dit dans V^rt militaire pour
exprimer qu'un général peut faire ce que bon lui
femblc fans en avertir la cour auparavant. Ainli dire
qu'un général a carte-blanche , c'eft dire qu'il peut
attaquer l'ennemi lorfqu'il en trouve l'occalion , fans
avoir befoin d'ordres particuliers. (Q)
Carte ou Carde , infiniment dont fe fervent les
Perruquiers pour travailler les cheveux deftinés à fai-
re des perruques. C'eft une efpece dépeigne compo-
fi de dix rangées de pointes de fer de pies d'un pou-
ce & demi de hauteur , épaiffes de deux lignes , &
éloignées les unes des autres par la pointe , d'environ
trois lignes. Ces pointes font enfoncées dans une
planche de bois de chêne , afiujettic fur une table
par des clous , & rangées en lofanges.
Il y a des cartes ou cardes de plufieurs groffeurs, fur
lcfqucllcs on paffe les paquets de cheveux pour les
1 -t , en commençant par les plus groflès , &
fûcceflivement jufqu'aux plus fines.
* Cartes , f. f. ( Jeux. ) petits feuillets de carton
oblongs , ordinairement blancs d'un côté , peints de
l'autre de figures humaines ou autres , cv dont on
fe fert a plufieurs jeux , qu'on appelle par cette rai-
ion jeux de cartes. Voye{ LANSQUENET , BittLAND,
Pharaon, Ombre, Piquet, Bassettf, &c. En-
tre ces jeux il y en a qui font purement de hafard , &
d'autres qui ibnt de hafard & de çombinaùon. On
CAR
711
peut compter le Ianfquenet , le breland, le pharaon*
au nombre des premiers ; l'ombre , le piquet, le mé-
diateur, au nombre des féconds. Il y en a où l'éga-
lité eft très-exactement confervée entre les joueurs,
par une jufte compenfation des avantages &c des de-
lavantages ; il y en a d'autres où il y a évidemment
de l'avantage pour quelques joueurs , & du désavan-
tage pour d'autres : il n'y en a preiqu'aucun dont l'in-
vention ne montre quelqu'efprit ; & il y en a plu-
fieurs qu'on ne joue point fupérieurement , fans en
avoir beaucoup, du moins de l'efprit du jeu. V. Jeu.
Le père Méncftrier , Jéfuite , dans fa bibliothèque
curteufe & injlrutlive , nous donne une petite hiftoire
de l'origine du jeu de cartes. Après avoir remarqué
que les jeux font utiles , foit pour délafier , ioit mê-
me pour inftruire ; que la création du monde a été pour
L'Etre jupreme une ejpece de jeu ; que ceux qui mon-
taient chez les Romains les premiers élémens s'ap-
pclloient ludi magijlri; que Jefus-Chrift même n'a pas
dédaigné de parler des jeux des enfans: il diftribue
les jeux en jeux de hafard , comme les dés , voye{
Des ; en jeux d'efprit, commes les échecs, voye^
Echecs ; & en jeux de hafard & d'efprit, comme
les cartes. Mais il y a des jeux de cartes, ainfi que nous
l'avons remarqué , qui font de pur hafard.
Selon le même auteur , il ne paroît aucun veftige
de cardia jouer avant l'année 1391, queCharles VI.
tomba éh phrénefie. Le jeu de cartes a dû être peu
commun avant l'invention de la gravure en bois, à
caufe de la dépenle que la peinture des cartes eut oc-
cafionnée. Le P.Méneftrier ajoute que les Allemands,
qui eurent les premiers des gravures en bois, gravè-
rent auffi les premiers des moules de canes, qu'ils char-
gèrent de figures extravagantes : d'autres prétendent
encore que l'impreflion des cartes eft un des premiers
pas qu'on ait fait vers l'impreiiion en caractères gra-
ves fur des planches de bois , & citent à ce lu jet
les premiers effais d'Imprimerie faits à Harlem , 6c
ceux qu'on voit dans la bibliothèque Bodleyane. Ils
penient que l'on fe feroit plutôt apperçû de cette an-
cienne origine de l'Imprimerie , li Ton eût confidéré
que les grandes lettres de nos rrtanuferits de 900 ans
paroiffent avoir été faites par des Enlumineurs.
On a voulu par lejeude cartes ,àït\eP. Méneftrier,
donner une image de la vie pailible, ainfi que par le
jeu des échecs , beaucoup plus ancien , on en a vou-
lu donner une de la guerre. On trouve dans le jeu de
cartes les quatre états de la vie ; le cœur reprelente
les gens d'églife ou de chœur, efpece de rébus ; le
pique, les gens de guerre; le trejle , les laboureurs;
& les carreaux , les bourgeois dont les maifons font
ordinairement carrelées. Voilà une origine & des al-
lufions bien ridicules. On lit dans le père Méneflrier
que les Efpagnols ont reprelente les mêmes choies
par d'autres noms. Les quatre rois , David, Alexan-
dre, Céfar, Charlemagne, font des emblèmes des
quatre grandes monarchies , Juive , Greque, Romai-
ne, & Allemande. Les quatre dames, Rachel Judith,
Pallas, & Argine , anagrame de regina , ( car il n'y
a jamais eu de reine appellée Argme} expriment les
quatre manières de régner, par la beauté, par la pié-
té , par la fageiTe, & par le droit de la naiffance. En-
fin les valets repréfentoient les fervans d'an
nom de valet qui s'eft avili depuis , ne fe donnoit
alors qu'à des vafTaux de grands feigneurs, ou à de
jeunes gentilshommes qui n'étoient pas encore che-
valiers. Les Italiens on reçu le jeu de cartes les der-
niers. Ce qui pourroit faire foupçonner que ce jeu a
pris naiffance en France, ce font les fleurs-de-lis qu'on
a toujours remarquées furies habits de toutes le
res en cartes. Lahire, nom qu'on voit au bas du
de eceur, pourroit avoir ete l'inventeur des 1
& s'être fait compagnon d'Hector & d'Ogier le Da-
nois , qui font les valets de carreau & de pique , com-
712
CAR
me il femble que le Cartier le foit réfervé le valet de
trèfle pour lui donner l'on nom. Voyt{ V article Jeu.
Bibl. cur. & infime}, p. 1 68.
Apres cette hilloire bonne oumauvaife de l'origi-
ne des cartes, nous en allons expliquer la fabrication.
Entre les petits ouvrages , il y en a peu où la main
d'œuvre ioit ii longue 6cû multipliée : le papier paiTe
plus de cent fois entre les mains du Cartier avant que
d'être mis en canes , comme on le va voir par ce
qui iuit.
Il faut d'abord fe pourvoir de la forte de papier
qu'on appelle de La main brune , veyes^ PAPIER ; on dé-
plie ion papier & on le rompt : rompre, c'eft tenir le
papier ouvert de la main gauche par le bas du pli,
de la droite par le haut du pli , de manière que les
deux pouces foient dans le pli , & faire gliffer les au-
tres doigts de la main droite tout le long du dos du pli,
en commençant par le bas ; ce qui ne peut fe faire
fans appliquer le haut du dos du pli contre le bas du
dos du pli , & paroitre rompre les feuilles Le but de
cette opération , qu'on réitère autant de fois qu'il eft
nécefîaire fur le même papier , c'eft d'en effacer le
pli du mieux qu'on peut.
Après qu'on a rompu le papier, on en prend deux
feuilles qu'on met dos à dos : fur ces deux feuilles on
en place deux autres miles auffi dos à dos : mais il
faut que ces deux dernières débordent les deux pre-
mières , foit par en-haut, foit par en-bas, d'environ
quatre doigts. On continue de faire un tas le plus
grand qu'on peut de feuilles prifes deux à deux , dans
lequel les deux 1,3,5,7,9, &c. fe correfpondent
exact ement, & font débordées d'environ quatre doigts
par les deux 2, 4, 6, 8, 10, &c qui par conféquentle
correfpondent auffi exactement. Cette opération s'ap-
pelle mêler. Dans les grolTes manufactures de cartes il
y a des perfonnes qui ne font que mêler. On donne lix
liards pour mêler deux tas; la rame fait un tas.
Après qu'on a mêlé , ou plutôt tandis qu'on mêle
d'un côté , de l'autre on fait la colle. La colle fe fait
avec moitié farine , moitié amydon : on met fur vingt
féaux d'eau deux boifîèaux de farine , & trente livres
d'amydon. On délaye la farine & l'amydon avec de
l'eau tiède : cependant il y en a qui chauffe fur le
feu : quand elle eft prête à bouillir, on jette dedans
le mélange de farine & d'amydon , en le paffant par
un tamis de crin médiocrement ferré. Tandis que la
colle fe cuit, on la remue bien avec un balai, afin
qu'elle ne fe brûle pas au fond de la chaudière : on
la laiffe bouillir environ une bonne heure ; on la re-
tire enfuite , & elle eft faite. Il faut avoir foin de la
remuer, jufqu'à ce qu'elle foit froide, de peur, dilènt
les ouvriers, qu'elle ne s'étouffe, ou devienne en
eau. On ne s'en fert que le lendemain.
Quand la colle eft froide , le colleur la pafTe par
un tamis , d'où elle tombe dans un baquet, & fe dif-
pofe à coller. Pour cet effet il prend la broffe à coller.
Cette broffe eft oblongue ; elle a environ cinq pou-
ces de large , & fa longueur eft de la largeur du pa-
pier : elle eft de foie de fanglier , & garnie en-delfus
d'une manique ou courroie de lifiere. On la voitP/.
du Cartier ,jig. g. le colleur la trempe dans la colle ,
ck la pafle lur le papier de la manière qui fuit : il l'ap-
plique au centre de la feuille , d'où il va à l'angle du
haut qui eft à droite , & de-là à l'angle du bas qui lui
eft oppofé à gauche : il remet fa broffe au centre ,
d'où il l'avance à l'angle du haut qui eft à gauche, la
ramenant de-là à l'angle oppofé du bas qui eft à droi-
te : il lui eft enjoint de réitérer huit fois cette opéra-
tion fur la même feuille.
Cela fait il enlevé cette feuille enduite de colle ,
& avec elle la feuille qui lui eft adoffée. Il fait la mê-
me opération fur la première des deux feuilles fui-
vantes,les enlevé toutes deux, & les place fur les
deux précédentes . Il continue ainii., collant une feuille
CAR
Se en enlevant deux , & reformant un autre tas , où
il eft évident qu'une feuille collée fe trouve toujours
appliquée contre une feuille qui nel'eftpas. Dans ce
nouveau tas les feuilles ne le débordent point ; on
les applique les unes furies autres le plus exact ement
qu'on peut.
Quand on a formé ce tas d'environ une rame &
demie , on le met en prelîe. La prefle des Cartiers
n'a rien de particulier ; c'eft la même que celle des
Bonnetiers & des Calendreurs. On prefie le tas légè-
rement d'abord ; au bout d'un quart-d'heure , on re-
vient à la prelTe, & on le ferre davantage. Si l'on don-
noit le premier coup de preffe violent, le papier qui
eft moite de colle , foible & non pris , pourroit s'ou-
vrir. On laiffe ce tas en preffe environ une bonne
heure ; c'eft à peu près le tems que le colleur em-
ployé à former un nouveau tas pareil au premier :
quand il eft formé , il retire de prefle le premier tas ,
& y fubftitue le fécond. Un bon ouvrier peut faire
quinze à feize tas par jour. Il a fix blancs par tas.
Quand le premier tas eft forti de preffe , on le tor-
che ; torcher , c'eft enlever la colle que l'adion de
la preffe a fait fortir d'entre les feuilles : cela- fe fait
avec un mauvais pinceau qu'on trempe dans de l'eau
froide , afin que ce fuperflu de colle fe iépare plus
facilement. Cette colle enlevée des côtés du tas ne
fert plus.
Ces feuilles qui fortent de deffous la preffe , col-
lées deux à deux, s'appellent étreffes ; quand les étref-
fes font torchées , on les pique. Pour cet effet on a
une perce ou un poinçon qu'on enfonce au bord du
tas , environ à la profondeur d'un demi-doigt : on en-
levé du tas un petit paquet d'environ cinq étreffes
percées , & on paffe une épingle dans le trou. L'épin-
gle des Cartiers eft un fil de laiton de la longueur &
groffeur des épingles ordinaires , dont la tête eft ar-
rêtée dans un parchemin plié en quatre , dans un bout
de carte, ou même dans un mauvais morceau de peau,
& qui eft plié environ vers la moitié , de manière qu'il
piiiffe faire la fonction de crochet. Le piqueur perce
toutes les étreffes , & garnit autant de paquets d'en-
viron cinq à lix qu'il peut faire , chacun de leur épin-
gle. Le colleur s'appelle lefervant du piqueur; celui-ci
gagne environ trente fous par jour.
Quand tous les paquets d'étreffes font garnis d'épin»
gles, on les porte lécher aux cordes. L'opération de
fufpendre les étreffes aux cordes par les épingles en
crochet, s'appelle étendre. Les feuilles ou étreffes de-
meurent plus ou moins étendues , félon la tempéra-
ture de l'air. Dans les beaux jours d'été , on étend
un jour , & l'on abat le lendemain. Abattre, c'eft la
même chofe que détendre. On voit que l'été eft la faifon
favorable pour cette partie du travail des cartes ; en
hyver , il faudroit un poêle , encore n'éviteroit-on
pas l'inconvénient du feu 3 qui mange la colle & fait
griper le papier. Ceux qui entendent leur intérêt fe
préparent en été de l'ouvrage pour l'hyver.
En abattant, on ôte les épingles , & l'on reforme
des tas ; quand ces nouveaux tas font formés, onfé-
pare : féparer , c'eft détacher les étreffes les unes des
autres , & les diftribuer féparément ; cette opération
fe fait avec un petit couteau de bois appelle coupoir.
Quand on a feparé, on ponce ; poncer , c'eft , ainfî
que le mot le défigne, frotter l'étreffe des deux cô-
tés avec une pierre ponce : il eft enjoint de donner
dix à douze coups de pierre ponce de chaque côté
de l'étreffe. Cet ouvrage fe paye à la groffe. On don-
ne cinq fous par groffe ; un ouvrier en peut faire fept
à huit par jour.
Cela fait , on trie; trier, c'eft regarder chaque étreffe
au jour , & en enlever toutes les inégalités , foit du
papier, foit de la colle ; ce qui s'appelle le bro. Le tria-
ge le fait avec une efpece de canif à main , ou grat-
toir , que les ouvriers nomment pointe,
L'étreffe
CAR
L'étreffe triée formera l'ame de la carte. Le papier
dont on fait les étreffes vaut cinquante à cinquante-
deux fous la rame. Quand l'étreffe eft préparée , on
prend deux autres fortes de papiers : l'une appcllée le
carder, qui ne fort qu'à l'ufage dont il s'agit ; il eft fans
marque ; il pefe vingt-deux liv. le paquet ou les deux
rames, & vaut environ quinze francs la rame: l'autre,
appellée \cpau , qui vaut à peu-près trois livres dou-
ze fols la rame. Le papier d'étreffe, le cartier, & le
pau , font à peu-près de la même grandeur, excepté
le cartier ; mais c'eft un défaut : s'ils étoient bien
égaux , il y auroit moins de déchet.
Ces papiers étant préparés , on mêle en blanc. Pour
cette opération , on a un tas de cartier à droite , &
un tas de pau à gauche. On prend d'abord une feuille
de pau , on place deffus deux feuilles de cartier ; puis
fur celles-ci deux feuilles de pau ; puis fur ces der-
nières deux feuilles de cartier, 6c ainli de fuite juf-
au'à la fin , qu'on termine ainfi qu'on a commencé ,
par une feule feuille de pau. Il faut obferver que le
nouveau tas eft formé de manière que les feuilles fe
débordent de deux en deux, comme quand on a mêlé
la première fois pour faire les étreffes ; ce nouveau
tas contient environ dix mains de papier.
Quand on a mêlé en blanc , on mile en étreffe ; mê-
ler en étrejje, c'eft entrelarder l'étreffe dans le blanc :
ce qui s'exécute ainfi. On enlevé la première feuille
de pau , on met deffus une étreïfe ; fur cette étreffe
deux feuilles de cartier ; fur les deux feuilles de car-
tier , une étreffe ; fur cette étreffe , deux feuilles de
pau , & ainli de luite : d'où l'on voit évidemment
que chaque étreffe fe trouve entre une feuille de car-
tier &c une feuille de pau. Les feuilles de cartier, de
pau , 8c les étreffes , doivent fe déborder dans le nou-
veau tas.
Après cette manœuvre , on colle en ouvrage. Cette
opération n'a rien de particulier ; elle fe fait comme
le premier collage; & confifte à enfermer une étreffe
entre une feuille de pau & une feuille de cartier.
Après avoir collé en ouvrage , on met en preffe, on
pique , on étend , & on abat , comme on a fait aux
étreffes , avec cette différence qu'on n'étend que deux
des nouveaux feuillets à la fois ; ces deux feuillets
s'appellent un double : avec un peu d'attention on
s'appercevra que les deux blancs ou feuilles de car-
tier font appliquées l'une contre l'autre dans le dou-
ble , Se que les deux feuilles de pau font en dehors ;
par ce moyen la defficcation fe fait fans que le papier
perde de la blancheur. Le cartier fait le dos de la
carte , &c le pau le dedans ; le Cartier qui entend fes
intérêts , conduira jufqu'ici pendant l'été fa matière
à mettre en cartes.
Loi (que les doubles font préparés , on a propre-
ment le carton dont la carte fe fait ; il ne s'agit plus
que de couvrir les fui faces de ces doubles , ou de têtes
ou de points. Les têtes , ce font celles d'entre les car-
tes qui portent des figures humaines ; toutes les au-
tres s'appellent des points.
. Pour cet effet, on a un moule de bois, tel qu'on
le voit , PI. du L'art, jîg. 3. il porte vingt figures à tête;
ces figures font gravées profondément ; voye^ 1' 'arti-
cle de la Gravure en Bois. Ce moule eft fixé fur
une table ; il eft compolé de quatre bandes , qui por-
tent cinq figures chacune ; chaque bande s'appelle
un coupeau.
On prend du papier de pau , on le déplie , on le
rompt , on le moitit ; moitir , c'ell tremper. Voyt\
Imprimerie. On le met entre deuxais: on le preffe
pour l'unir ; au fortir de la preffe , on moule.
Pour mouler , on a devant foi ou à côté un tas de
ce pau trempé ; on a aulfi du noir d'Ëfpagne qu'on a
fait pourrir dans de la colle. Plus il eft relié long-
tems dans la colle , plus il eft pourri , meilleur il eft.
Il y en a dont le pie a deux à trois ans, On a une
Tome l /,
CAR
7r3
broffe ; on prend de ce noir fluide avec la broffe ; on
la pafle fur le moule : comme ce font les parties fail-»
lantes du moule qui forment la figure , & que ces par-
ties font fort détachées du fond , il n'y a que leurs
traces qui fafTent leurs empreintes fur le papier , qu'on
étend fur le moule 6c qu'on preffe avec un froton ; le
froton cil: un infiniment compofé de plutieurs lifieres
d'étoffes roulées les unes fur les autres : de manière
que la bafe en eft plate & unie , & que le refte a la
forme d'un fphéroide allongé. Voye^Pl. duCart. fia.
13. On continue de mouler autant qu'on veut. Les
moules font aujourd'hui au bureau ; on y va mouler
en payant les droits : ils font d'un denier par cartes.
Ainfi un jeu de piquet paye à la ferme 32 deniers.
Après cette opération, on commence à peindre les
têtes, car le moule n'en a donné que le trait noir, tel
qu'on le voit jîg. 3. On applique d'abord le jaune , en-
luitelegris,puisle rouge, le bleu & le noir. On fait
tous les tas en jaune de luite , tous les tas en gris , &c.
Le jaune n'eft autre chofe que de la graine d'Avi-
gnon qu'on fait bouillir , & à laquelle on mêle un
peu d'alun pour la purifier; le gris , qu'un petit bleu
d'indigo qu'on a dans un pot ; le rouge , qu'un ver-
millon broyé 6c délayé avec un peu d'eau & de colle
ou gomme ; le bleu , qu'un indigo plus fort , délayé
aufii avec de la gomme ôc de l'eau ; le noir , que du
noir de fumée.
On fe fert pour appliquer ces couleurs,de différens
patrons ; le patron eft fait d'un morceau d' imprimure.
Les ouvriers entendent par une imprimure , une feuil-
le de papier qu'on prépare de la manière fui vante : lai-
tes calciner des écailles d'huîtres ou des coques d'eeufs;
broyez-les ôc les réduiiez en poudre menue. Mêlez
cette poudre avec de l'huile de lin , & de la gomme
arabique , vous aurez une compolition pàteine & li-
quide, dont vous enduirez le papier. Vous donnerez
fix couches à chaque côté ; ce qui rendra la feuille
épaiffe , à peu-près comme une pièce de 24 fous.
C'eft au Cartier à découper 1 imprimure ; ce qu'il
exécute pour les têtes avec une efpece de canif: pour
cet effet , il prend une mauvaife feuille de carte toute
peinte , il applique cette feuille fur rimprimure Ôcl'y
fixe ; il enlevé avec fa pointe ou Ion canif tou-
tes les parties peintes de la même couleur , oc de la
feuille & de rimprimure : puis il ôte cette imprimure
ôc en fubftitue une autre fous la même feuille , &
enlevé au canif tant de la feuille que de l'imprimu-
re , une autre couleur , ôc ainfi de fuite autant qu'il
y a de couleurs. La feuille peinte qui fert à cette
opération, sappcllefaute. Poye^fig. 6". un patron dé-
coupé , c'eit-à-dire , dont on a enlevé toutes les par-
ties qui doivent être peintes d'une même couleur en
jaune , fi c'eft un patron jaune. Comme il y a cinq
couleurs à chaque carte , il y a auffi cinq patrons. On
applique les patrons iucceflivement fur la même tête,
61 on paffe deilus avec un pinceau la couleur qui con-
vient ; il eft évident que cette couleur ne prend que
fur les parties de la carte, que les découpures du pa-
tron laiffent découvertes. Dans \ajig. 6. d^un patron
jaune , les parties couvertes font reprélentées par le
noir ; & les parties découpées , par les taches irrégu-
lieres blanches.
Voilà pour la peinture des têtes. Quant à celle des
points , les patrons ne font pas découpes au canif ,
mais à l'emporte-piece. On a quatre emporte-pièces
différens, pique , trèfle , cœur, ôc carreau, dont
on frappe les imprimurcs. Les bords de ces empor-
te-pièces font tranchans & coupent la partie de l'un*
pnmure fur laquelle ils font appliqués ; ces imprimu-
res ainli préparées fervent à faire les points , comme
celles des têtes ont fervi à peindre les figures : il faut
feulement obferver pour les têtes , que la planche en
étant divifée en quatre coupeaux , on pâlie le pinceau
à quatre repaies.
XX x x
7M
CAR
Quand tous les papiers ou feuilles de pau font
peintes , comme nous venons de dire , il s'agit de les
appliquer fur les doubles ; pour cet effet, on les mêle
en tas : une feuille peinte , un double ; une feuille
peinte , un double , & ainiï de fuite : de manière que
le double foit toujours enfermé entre deux feuilles
peintes. On colle , on preffe , on pique , on étend ,
comme ci-deffus. On abat , & l'on féparé les dou-
bles , ainfi comme nous avons dit qu'on féparoit les
étreffes. Ce nouveau travail n'a rien de particulier ;
il fait feulement parler l'ouvrage un plus grand nom-
bre de fois entre les mains de l'ouvrier.
Quand on a féparé , on prépare le chauffoir ; le
chauffoir eft tel qu'on le voit ,fig. y. c'eft une caiffe
de fer quarrée , à pié , dont les bords fupportent des
bandes de fer quarrées , paffées les unes fur les au-
tres , & recourbées par les extrémités. Il y en a deux
fur la longueur , & deux fur la largeur ; ce qui for-
me deux crochets fur chaque bord du chauffoir.
On allume du feu dans le chauffoir ; on paffe dans les
crochets ou agraffes qu'on remarque autour du chauf-
foir , une caiffe quarrée de bois qui fert à concentrer
la chaleur; on place enfuite quatre feuilles en dedans
de cette caiffe quarrée , une contre chaque côté , puis
on en pofe une deffus les barres qui fe croifent ; on
ne les laiffe toutes dans cet état, que le tems de faire
le tour du chauffoir. On les enlevé en tournant , on
y en fubftitue d'autres , & l'on continue cette ma-
nœuvre jufqu'à ce qu'on ait épuifé l'ouvrage ; cela
s'appelle chauffer.
Au fortir du chauffoir , le liffeur prend fon ouvra-
ge & le favonne par-devant , c'eft-à-dire du côté des
figures. Savonner , c'eft avec un affemblage de mor-
ceaux de chapeau confus les uns fur les autres à l'é-
paiffeur de deux pouces , & de la largeur de la feuil-
le (affemblage qu'on appelIeyivo/z«t:#r) emporter du
favon , en le paffant fur un pain de cette marchan-
dée , & le tranfporter fur la feuille en la frottant feu-
lement une fois. On favonne la carte pour faire cou-
ler deffus la pierre de la liffoire.
Quand la carte eft favonnée , on la liffe. La liffoire
eft un inftrument compofé d'une perche , dont on
voit une extrémité Planche du Cart. fig. 8. l'autre
bout aboutit à l'extrémité d'une planche , qu'on
voit dans la vignette de la même Planche , fixée aux
folives. Cette planche fait reffort. La figure M eft la
boîte de la liffoire ; la figure n en eft la pierre. Cette
pierre, qui n'eft autre choie qu'un caillou noir bien
poli , fe place dans l'ouverture qu'on voit à la partie
lupérieure de la boîte M. La pierre fe polit fur un
grès ; on la figure à peu-près en dos d'âne. On voit,
figure M n, la boite avec la pierre. On apperçoit à la
partie fupérieure de la figure M n de part & d'autre,
deux entailles circulaires. La langue iolide qui eft en-
tre les entailles , le place dans la fente de l'extrémité
de la perche 8. On apperçoit aux deux extrémités de
la boîte Ain, deux éminences cylindriques: ce font
les deux poignées avec lelquelles l'ouvrier appelle
liffeur , fait aller la liffoire fur la feuille de carte. Cette
carte k liffer eft polée fur un marbre. Ce marbre eft
fixé fur une table ; la pierre de la liffoire appuyée for-
tement contre la carte, fur laquelle l'ouvrier la fait
aller de bas en haut , & de haut en bas. Pour qu'une
feuille foit bien liffée , il faut qu'elle ait reçu vingt-
deux coups ou vingt-deux allées & venues! Un bon
ouvrier liffera trente mains par jour : il eft payé 30
fous. Son métier eft fort pénible ; & ce n'eft pas une
petite fatigue que de vaincre continuellement l'élaf-
ticité de la planche qui agit à un des bouts de la per-
che de la liffoire , & applique fortement la pierre con-
tre la feuille à liffer. On voit dans la vignette ,fig. j,
un liffeur ; figure 2. un ouvrier occupé à peindre des
points; &fig. 1, un ouvrier qui peint des têtes.
CAR
Quand la carte eft liffée par-devant , on la chauffe»
comme on a fait ci-deffus. Il faut oblerver que l'oit
en chauffant , foit en réchauffant , c'eft la couleur qui
eft tournée vers le feu. Le réchauffage fe fait comme
le chauffage. Après cette manœuvre , on favonne la
carte par-derriere, & on la liffe par-derriere.
Au fortir de la liffe , la carte va au cileau pour être
coupée. On commence par rogner la feuille. Rogner,
c'eft enlever avec le cileau ce qui excède le trait du
moule , des deux côtés qui forment l'angle fupérieur
à droite de la feuille. Pour fuivre ce trait exactement,
il eft évident qu'il faut que la face colorée foit en-
deffus , & puifl'e être apperçûe par le coupeur. Les
traits du moule tracés autour des cartes, & qui , en for-
mant pour ainfi dire les limites , en afîùrent l'égalité,
s'appellent les guides : c'eft en effet ces traits qui gui-
dent le coupeur.
Le coupeur a fon établi particulier. Il eft repré-
fenté dans la vignette ,Jig. 4. il eft compofé d'une lon-
gue table, fur laquelle eft Vejlo. L'efto eft un mor-
ceau de bois d'environ deux pouces d'épais , fur un
bon pié en quarré , bien équarri ôc affemblé le plus
fermement ôc le plus perpendiculairement qu'il eft
poffible avec le deffus de la table. On voit ,figure 12.
l'efto féparé Z, &_/zg. 4. de la vignette , on le voit af-
femblé avec la table par les tenons 4 , 4 , & fes clavet-
tes ou clés 5 , 5, fur la furface Z de l'efto ,fig. 12. on.
a fixé un litau 1 percé : c'eft dans le trou de ce litau
qu'on place la vis 12, dont l'extrémité a reçoit l'é-
crou b fur l'autre furface de l'efto. La corde qui paffe
par-deffus le bord fupérieur de l'efto , foûtient une
broche de fer à laquelle elle eft attachée , & qui fert
à avancer ou reculer la vis. On voit à l'extrémité de
la vis , deux arrêts circulaires 1,2, dont nous ne tar-
derons pas d'expliquer Tufage. On voit, fig.io. &11,
les cifeaux defaffemblés ; & dans la vignette ,fig. 4.
on les voit affemblés avec l'établi , & en fituation
pour travailler. Le bout d'une des branches 2 , fe
viffe dans le iolide de l'établi par le boulon taraudé,
& fon extrémité eft contenue entre les deux arrêts
circulaires de la vis ; eniorte que cette branche ne
peut vaciller non plus que l'autre , qui eft fixée à
celle-ci par le clou , comme on voit vignette , fig. 4.
Il s'enfuit de cette dil'polition , que pour peu que
l'ouvrier foit attentif à ion ouvrage, il lui eftimpolïï-
ble de ne pas couper droit & de ne pas fuivre les gui-
des. Quand il a rogné , il traverfe. Traverfer, c'eft fepa-
rer les coupeaux , ou mettre la feuille en quatre par-
ties égales. Quand il a traverfe , il ajufte : ajujler , c'eft
examiner il les coupeaux font de la même hauteur.
Pour cet effet , on les applique les uns contre les au-
tres , & on tire avec le doigt ceux qui débordent ;
on repaffe ceux-ci au cifeau. On doit s'appercevoir
que le cifeau eft tenu toujours à la même diftance
de l'efto , & qu'il ne s'en peut ni éloigner , ni appro-
cher. On a planté en 3, 3, furie milieu de l'efto, dans
une ligne parallèle au tranchant de la lame immobile
du cifeau , deux épingles fortes. On pofe le coupeau
à retoucher contre ces épingles en-deffous; on ap-
plique bien ion côté contre l'efto , & l'on enlevé
avec le cifeau tout ce qui excède. Cet excédent eft
néceffairement de trop , parce que la diftance du ci-
feau à l'efto eft précifément de la hauteur de la car-
te. Quand on a repaffé, on rompt. Rompre , c'eft plier
un peu les coupeaux , & leur taire le dos un peu con-
vexe. Après avoir rompu les coupeaux , on les mene-
au petit cileau. Le petit cifeau eft monté précifément
comme le grand ; tk. il n'y a entre eux de différence
que la longueur & l'uiage. Le grand fert à rogner les
feuilles tk. à les mettre en coupeaux; & le petit , à
mettre les coupeaux en cartes. On rogne , & l'on met
en coupeaux les feuilles les unes après les autres ; &
les coupeaux en cartes , les uns après les autres.
Quand les coupeaux i'ont divilés, on affortit. Affor*
CAR
tir, c'eft ranger les cartes divifees par deux rangs de
cartes, déterminés par l'ordre qu'elles a'voient iur le
moule ou fur les feuilles. Il y a entre la place d'une
carte fur la feuille & fa place dans le rang , une cor-
refpondance telle que dans cette diftribution ; toutes
les cartes de la même efpece , tous les rois , toutes
les dames , tous les valets , &c tombent enlémble :
alors on dit qu'elles font par fortes. Mifes par fortes ,
on les trie. Trier, c'eft mettre les blanches avec les
blanches, les moins blanches enfemble, & ôter les
taches , qu'on appelle le bro , comme nous avons
dit. On diftingue quatre lots de cartes relativement
à leur degré de fineffe : celles du premier lot s'ap-
pellent la fleur ; celles du fécond , les premières ; celles
du troifieme , les fécondes ; celles du quatrième & du
cinquième , les triards ou fonds.
Quand on a diftribué chaque forte relativement
à fa qualité ou fon degré de fineffe , on fait la cou-
che , oii l'on forme autant de fortes de jeu qu'on a de
différens lots ; enfuite on range & on complette les
jeux , ce qui s'appelle faire la boutée. On finit par plier
les jeux clans les enveloppes ; ce qu'on exécute de
manière que les jeux de fleur fe trouvent au-deflus
du fixain , afin que fi l'acheteur veut examiner ce
qu'on lui vend , il tombe nécelîàirement fur un beau
jeu.
On prépare les enveloppes exactement comme
les cartes , avec un moule qui porte l'enleigne du
Cartier. Mais il y a à l'extrémité de ce moule une
petite cavité qui reçoit exactement une pièce amo-
vible , fur laquelle on a gravé en lettres le nom de la
forte de jeu que l'enveloppe doit contenir , comme
piquet , fi c'eft du piquet ; médiateur ou comète , fi c'eft
médiateur ou comète : cette pièce s'appelle bluteau.
Comme il y a deux fortes d'enveloppes, l'une pour
les fixains , l'autre pour les jeux , il y a plusieurs mou-
les pour les enveloppes : ces moules ne différent qu'en
grandeur.
Les cartes fe vendent au jeu , au fixain , & à la gref-
fe. Les jeux fe distinguent en jeux entiers , en jeux
d'hombre , & jeux de piquet.
Les jeux entiers font compoies de cinquante-deux
tartes ; quatre rois , quatre dames , quatre valets ,
quatre dix , quatre neuf, quatre huit , quatre fept ,
quatre fix , quatre cinq , quatre quatre, quatre trois,
quatre deux , & quatre as.
Les jeux d'hombre font compofés de quarante car-
tes , les mêmes que ceux des jeux entiers , excepté
les dix , les neuf, & les huit qui y manquent.
Les jeux de piquet lont de trente-deux ; as , rois ,
dames , valets, dix , neuf, huit , & fept.
On diftingue les cartes en deux couleurs principa-
les , les rouges tk. les noires : les rouges repréfentent
un cœur ou un lofange ; les noires un trèfle ou un pi-
que* elles font toutes marquées depuis le roi julqu'à
l'as de cœur , trèfle , carreau ou pique.
Celles qu'on appelle roi, lont couronnées & ont
différens noms. Le roi de cœur s'appelle Charles;
celui de carreau , Cefar ; celui de trèfle , Alexandre ;
& celui de pique , David.
Les dames ont auffi leurs noms : la dame de cœur
s'appelle Judith ; celle de carreau , Rachd; celle de
trèfle , Argine ; & celle de pique , Patlas.
Le valet de cœur fe nomme Lahire; celui de car-
reau , Hector ; celui de pique, Hogier ; celui de trèfle
a le nom du Cartier.
Les dix portent dix points fur les trois rangées, qua-
tre ,deux , quatre ; les neut'lur le i trois rangées, qua-
tre , un , quatre ; les huit fur les trois i angees , trois ,
deux, trois; les fept Iur les trois rangées , trois, un,
trois; les fix fur les deux rangées, trois, trois; les
cinq fur les trois rangées , deux , un , deux ; les qua-
tre fur les deux rangées , deux , deux ; les trois fur
Tome II,
CAR
7M
une rangée , ainfi que les deux : l'as eft au milieu de
la carte.
S'il y avoit un moyen de corriger les avares , ce
feroit de les inftruire de la manière dont les choies
fe fabriquent : ce détail pourroit les empêcher de re-
gretter leur argent; & peut-être s'étonneroient-ils
qu'on leur en demande li peu pour une marchandée
qiti a coûté tant de peine.
On a mis de grands impôts fur les cartes, ainfi que
fur le tabac ; cependant je ne penfe pas que ceux
même qui ufent le plus de l'un, & qui fe fervent le plus
des autres , ayent le courage de s'en plaindre. Qui
eût jamais penfé que la fureur pour ces deux fuper-
fluités , pût s'accroître au point de former un jour
deux branches importantes des fermes ? Qu'on n'i-
magine pas -que celle des cartes foit un fi petit ob-
jet. Il y a tel Cartier qui fabrique julqu'à deux cents
jeux par jour.
Il y auroit un moyen de rendre cette ferme beau-
coup plus importante : je le publie d'autant plu. vo-
lontiers , qu'il ne feroit certainement à charge à per-
fonne ; ce feroit de taxer le prix des cartes au-delîous
de celui qu'elles ont. Qu'arriveroit-il de là ? qu'il y
auroit fi peu de différence entre des cartes neuves &c
des cartes recoupées , qu'on fe déterminerait aifément
à n'employer que des premières. Le Fermier & le
Cartier y trouveraient leur compte tous deux : ce
qui eft évident ; car les cartes fe recoupent julqu'à
deux fois , & reparoiffent par conféquent deux fois
fur les tables. Si en diminuant le prix des cartes neu-
ves , on parvenoit à diminuer de moitié la diftribu-
tion des vieilles cartes , celui qui fabrique & vend
par jour deux cents jeux de cartes , qui par la recou-
pe tiennent lieu de fix cents , en pourroit fabriquer
& \ endre trois cents. Le Cartier regagnerait fur le
grand nombre des jeux vendus , ce qu'on lui auroit
diminué fur chacun , & la ferme augmenteroit fans
vexer perfonne.
Il eft furprenant que nos François qui fe piquent
fi fort de bon goût , & qui veulent le mieux juique
dans les plus petites choies , fe foient contentés jufi-
qu'à préfent des figures maulTades dont les cartes font
peintes : il eft évident, par ce qui précède , qu'il n'en
coûterait rien de plus pour y reprélenter des fujèts
plus agréables. Cela ne prouve-t-il point qu'il n'ell
pas auifi commun qu'on le penfe, de jouer ou par
amufement , ou fans intérêt ? pourvu qu'on tue le
tems , ou qu'on gagne , on ne fe foucie guère que ce
foit avec des cartes bien ou mal peintes.
Carte , ( Artificier. ) ce mot lignifie en général le
carton dont le fervent les Artificiers. Ils en défignent
l'épaifieur par le nombre des feuilles de gros papier
gris dont il eft compolé : ainfi on dit , de la carte en
deux , trois , quatre , ou cinq, fans y ajourer le mot
de feuille, qui eft foufentendu chez eux 6c chez les
marchands qui les vendent.
On défigne les petites cartes en les appellant car-
tes àjoiiir ) &: le gros carton plus roide & moins pro-
pre au moulage , qui doit être flexible , s'appelle
cirte-iiffe.
CARTEL, f. m. ( Hift. mod. ) lettre de défi , ou
appel à un combat fingulier, qui étoit fort en ufage
lonqu'on décid< it des différends par les armes, & uni-
quement par elles , ainfi que certains procès. / 0} f{
Combat , Duel, Champion, &c. (G)
Cartel, ( Commerce. ) mefure de continence pour
les grains , èv qui eft en ufage à Rocroi , à M f
& autres lieux où elle varie pour la grandeur es; pi iur
le poids.
Le cartel de froment pefe à Rocroi trente-cinq li-
vres poids de mare , celui de meteil trente-quatre ,
& celui de feigle trente-trois.
A Mezieres le cartel de fromentpefe trente livres,
de meteil vingt-huit, de feigle vingt-lix livres.
X X x x ij
716
CAR
A Sedan le cartel de froment pefe trente- neuf li-
vres , celui de méteil une livre de moins ; le cartel de
feigle, trente fept, & celui d'avoine trente-cinq livres.
A Montmidi le cartel de froment pefe quarante-
huit livres & demie ; de méteil , quarante-fept; d'a-
voine , cinquante livres. Toutes les livres dont nous
venons de parler , doivent être priies poids de marc.
Dictionnaire du Commerce. ( (?)
CARTELADE, f. f. {Commerce. ) mefure en lon-
gueur dont on le fert dans l'arpentage des terres en
pluiieurs endroits de la Guicnne ; elle eft environ
de 1080 toifes.
CARTELLES , f. f . ( Commerce de bois. ) petites
planches de Fépaiffeur de deux , trois , quatre , cinq
pouces , dans lefquelles on débite les bois qui font à
l'ufage des Tabletiers , Ebcniitcs , Armuriers , &c
CARTERON , f. m. {terme de Tiferan. ) c'eft une
lame de bois d'un pouce de largeur, plate & d'en-
viron cinq pies de longueur , qui fe place derrière les
verges. Cette barre paiTe entre les fils de la chaîne,
qui fe croifent fur elle , c'eft-à-dire , qui palfent deux
demis & deux défions ; fon ufage cft de contenir les
fils de la chaîne , & les empêcher de fe mêler.
CARTÉSIANISME,!", m. Philofophie de De/cartes,
ainli appeliée du nom Latin Cartejîus de fon auteur.
René Defcartes naquit le 3 1 Mars 1 596 à la Haye ,
petite ville de la Touraine , de Joachim Defcartes, con-
seiller au parlement de Bretagne , & de Jeanne Bro-
ckard, fîlie du lieutenant général de Poitiers. On lui
donna le furnorn de du Perron , petite feigneurie
fituée dans le Poitou , qui entra enfuite dans fon
partage après la mort de fon père.
La délicateffe de fon tempérament , & lés infirmi-
tés fréquentes qu'il eut à foùtenir pendant fon enfan-
ce , firent appréhender qu'il n'eût le fort de fa mère ,
qui étoit morte peu de tems après être accouchée de
lui : mais il les furmonta , & vit fa fanté fe fortifier
à mefure qu'il avança en âge.
Lorfqu'il eut huit ans , fon père lui trouvant des
difpofitions heureufes pour l'étude , Si. une forte pai-
llon pour s'inftruire , l'envoya au collège de la Flè-
che. Il s'y appliqua pendant cinq ans & demi aux
humanités ; & durant ce tems , il fît de grands pro-
grès dans la connoilfance des langues Greque èc
Latine , & acquit un goût pour la Poëlïe , qu'il con-
ferva julqu'à la fin de fa vie.
Il pafTa enfuite à la Philofophie , à laquelle il donna
toute Ion attention , mais qui étoit alors dans un état
trop imparfait, pour pouvoir lui plaire. Les Mathé-
matiques auxquelles il confacra la dernière année
de fon féjour à la Flèche , le dédommagèrent des dé-
goûts que lui avoient cauiés la Philofophie. Elles eu-
rent pour lui des charmes inconnus , & il profita
avec empreffement des moyens qu'on lui fournit ,
pour s'enfoncer dans cette étude auffi profondément
qu'il pouvoit le fouhaiter. Le refteur du collège lui
avoit permis de demeurer long-tems au lit , tant à
caufe de la délicateffe de fa fanté , que parce qu'il
remarquoit en lui un efpiït porté naturellement à la
méditation. Defcartes, qui à fon réveil, trouvoit
toutes les forces de fon efprit recueillies , & tous fes
fens rafîls par le repos de la nuit , profitoit de ces
conjonctures favorables pour méditer. Cette prati-
que lui tourna tellement en habitude , qu'il s'en fit
une manière d'étudier pour toute fa vie ; & l'on peut
dire que c'eft aux matinées qu'il pafToit dans fon lit ,
que nous fommes redevables de ce que fon génie a
produit de plus important dans la Phiiofophie &; dans
les Mathématiques.
Son père , qui avoit fait prendre à fon aîné le parti
de la robe , fembloit deftiner le jeune du Perron à
cv-lni de la guerre : mais fa grande jeunelTe & la foi-
bleffe de fon tempérament ne lui permettant pas
de l'expofer li-tôt aux travaux de ce métier pénible ,
CAR
il l'envoya à Paris , après qu'il eut fini le cours diî
fes études.
Le jeune Defcartes s'y livra d'abord aux plaifirs ,
& conçut une paffion d'autant plus forte pour le jeu ,
qu'il y étoit heureux. Mais il s'en defabufa bientôt ,
tant par les bons avis du P. Merfenne , qu'il avoit
connu à la Flèche , que par fes propres réflexions. Il
fongea alors aie remettre à l'étude, qu'il avoit aban-
donnée depuis fa fortie du collège ; & fe retirant
pour cet eifet de tout commerce oifif , il fe logea
dans une maifon écartée du faubourg S. German ,
fans avertir fes amis du lieu de fa retraite. Il y de-
meura une partie de l'année 16 14, & les deux fui-
vantes prefque entières , fans en fortir , & fans voir
perfonne.
Ayant ainfi repris le goût de l'étude , il fe livra
entièrement à celle des Mathématiques , auxquelles
il voulut donner ce grand loiiir qu'il s'étoit procuré ;
& il cultiva particulièrement la Géométrie & l'Ana-
lyfe des anciens , qu'il avoit déjà approfondie dès le
collège.
Lorfqu'il fe vit âgé de zi ans, il crut qu'il étoit
tems de longer à fe mettre dans le lervice ; il fe ren-
dit pour cela en Hollande , afin d'y porter les armes
fous le prince Maurice. Quoiqu'il choisît cette école,
qui étoit la plus brillante qu'il y eût alors par le grand
nombre de héros qui le formèrent fous ce grand ca-
pitaine , il n'avoit pas deffein de devenir grand guer-
rier ; il ne vouloit être que lpe&ateur des rôlles qui
fe jouent fur ce grand théâtre , & étudier feulement
les mœurs des hommes qui y paroiffent. Ce fut pour
cette raifon , qu'il ne voulut point d'emploi , & qu'il
s'entretint toujours à fes dépens , quoique pour gar-
der la forme , il eût reçu une fois la paye.
Comme on joûifïbit alors de la trêve , Defcartes
paffa tout ce tems en garnifon à Breda : mais il n'y
demeura pas oifif. Un problème qu'il y réfolut avec
beaucoup de facilité , le fit connoître à Ijliac Beeck-
man , principal du collège de Dordrecht , lequel fe
trouvoit à Breda , & par fon moyen à plufieurs fa-
vans du pays.
Il y travailla auffi à plufieurs ouvrages , dont le
feul qui ait été imprimé , eft fon Traite de la Mufiquc.
Il le compofa en Latin, fuivant l'habitude qu'il avoit
de concevoir 6v d'écrire en cette langue. Après avoir
fait quelques autres campagnes fous différens géné-
raux , il le dégoûta du métier de la guerre , & y re-
nonça avant la fin de la campagne de 1621.
Il avoit remis à la fin de fes voyages à fe détermi-
• ner fur le choix d'un état : mais, toutes réflexions fai-
tes , il jugea qu'il étoit plus à propos pour lui de ne
s'affujettir à aucun emploi, & de demeurer maître
de lui-même.
Après beaucoup d'autres voyages qu'il fit dans
différens pays , la reine Chriltine de Suéde , à qui il
avoit envoyé fon Traité des paffions , lui fit faire ait
commencement de l'année 1649 , de grandes inflan-
ces pour l'engager à fe rendre à fa cour. Quelque
répugnance qu'il le fentît pour ce nouveau voyage ,
il ne pût s'empêcher de fe rendre aux deiîrs de cette
princeffe, & impartit fur un vaiffeau qu'elle lui avoit
envoyé. Il arriva à Stockolm au commencement du
mois d'O&obre , & alla logera l'hôtel de M. Chanuty
ambafîadeur de France , fon ami , qui étoit alors ab-
fent.
La reine , qu'il alla voir le lendemain , le reçut
avec une diftinction qui fut remarquée par toute la
cour , & qui contribua peut-être à augmenter la ja-
loufie de quelques favans auxquels fon arrivée avoit
paru redoutable. Elle prit dans une féconde vifite
des mefures avec lui , pour apprendre fa Philofophie
de fa propre bouche ; & jugeant qu'elle auroit be-
foin de tout fon efprit & de toute fon application
pour y réuffir , elle choifit la première heure d'après
C A ï
CAR
fcn lever pour cette étude , comme le tems le plus
tranquille & le plus libre de la journée , où elle avoit
l'efprit plus tranquille, & la tête plus dégagée des
embarras des affaires.
Defcartes s'affujettit à l'aller trouver dans fa bi-
bliothèque tous les matins à cinq heures , fans s'ex-
eufer fur le dérangement que cela devoit caufer dans
fa manière de vivre , ni fur la rigueur du froid , qui
elt plus vif en Suéde , que partout où il avoit vécu
jufques-là. La reine en récompenfe , lui accorda la
grâce qu'il lui avoit fait demander , d'être dilpenié
de tout le cérémonial de la cour, &c de n'y aller
qu'aux heures qu'elle lui donneroit pour l'entrete-
nir. Mais , avant que de commencer leurs exercices
du matin , elle voulut qu'il prît un mois ou fix lemai-
nes pour fe reconnoître , fe familiarifer avec le génie
du pays , & former des liailons qui puffent le rete-
nir auprès d'elle le refte de fes jours.
Delcartes drelfa au commencement de l'année
ï 6 50 les ftatuts d'une académie qu'on devoit établi; à
Stockolm, & il les porta à la reine le premier jour de
Février, qui fut le dernier qu'il la vit.
Il fentit à fon retour du palais des prefTentimens
de la maladie qui devoit terminer fes jouis ; & il fut
attaqué le lendemain d'une fièvre continue avec une
inflammation de poumon. M. Charnu oui fortoit d'une
maladie lemblable . voulut le faire traiter comme
lui : mais fa tête étoit fi embarrafiee , qu'on ne pût
lui faire entendre raifon , & qu'il réfuta opiniâtre-
ment la faignée , drfant , lorfqu'on lui en parloit :
MeJJieurs , épargne.-^ UJang François. Il conientit ce-
pendant à la fin qu'elle fe fit: mais il étoit trop tard;
& le mal augmentant fenfîblement , il mourut le 1 1
Février 1650 , dans fa cinquante-quatrième année.
La reine avoit deflein de le faire enterrer auprès
des rois de Suéde avec une pompe convenable , &
de lui dreffer un mauiolée de marbre : mais M. Cha-
nut obtint d'elle qu'il fût enterré avec plus de l'impli-
cite dans le cimetière de l'hôpital des orphelins, fui-
vant l'ulagedcs Catholiques.
Son corps demeura à Stockolm jufqu'à l'année
1666, qu'il en fut enlevé par les toins de M. d'Ali-
bert, thrclorier de France , pour être porté a Paris,
où il arriva l'année luivante. Il fut enterré de nou-
ver-.i en grande pompe le 24 Juin 1667 , dan
de Ste Geneviève du mont. Mém. dé Littéral, tom. Ji.
Quoique Galilée, Toriceiii, P. ifcâ , (oient
proprement les pères de la Phylique moderne, Del-
cartes , par la hardieffe & par l'éclat mérité qu'a
eu fa Philofophie , ell peut-être celui de .
favar.s du dernier lieeie à qui nous ayons le plus
d'obligation. Jufqu'à lui l'étude de la'nature d
ra comme engourdie par l'ufa . ; où étoiënt
les écoles de s'en tenu entoutauPéripatétifme. Del-
cartes , plein de guiie & le pénétration, (i
vuide de l'ancienne Philofophie; il la reprév
public fous les vraies couleurs, & jetta un ridicule
li marqué fur les prétendues connoifTances q
promettoit , qu'il difpofa tous les efpri . . cl
une meilleure route. Ii s'offrit lui-même à 1.
guide aux autres; & comme il employoit un
thode dont chacun le lentoit capable , là ci ri
réveilla par-tout. C'efl le premier bien que
la Philolophie de Delcartes; le goût s'en r«
bien-tôt par tout: on s'en faifôit honneur à I
& à l'armée. Les nations voifînes paruienr 1
à la France les progrès du Cartèjianifmt , à peu près
comme les fuccès des Efpagnols aux deux .
mirent tous les Européens dans le goût îles nou\ eaux
établiflemens. La Phylique Françpife, en excitant
une émulation univerfelle , donna lieu à d'autres en-
treprîtes, peut-être a de meilleures découvertes. Le
Newtonianilmc même en ell le fruit.
Nous ne parlerons point ici de la Géométrie de
717
Defcartes ; perfonne n'en contefte l'exce'lence , ni
rheureufë application qu'il en a faite à l'Optique :
& il lui eft plus glorieux d'avoir furpafie en ce genre
le travail de tous lesliecles précédens, qu'il ne I'eft
aux modernes d'aller plus loin que Delcartes. Voye{
Algèbre. Nous allons donner les principes de fa
Phiiolophie, répandus dans le grand nombre d'ouvra-
ges qu'il a mis au jour: commençons par fa méthode.
Difcoursfur la méthode. Defcartes étant en Alle-
magne , & fe trouvant fort defeeuvre clans i'inaftion
d'un quartier d'hyver, s'occupa plufieurs mois de fui-
te à faire l'examen des connoifTances qu'il avoit ac-
quifes foit dans fes études, foit dans fes voyages, &
par fes réflexions, comme par les fecours d'autrui :
il y trouva tant d'obfcurité & d'incertitude, que la
penfée lui vint de renverfer ce mauvais édifice , &
de rebâtir le tout de nouveau, en mettant plus d'ordre
& de liaifon dans fes connoifTances.
1. Il commença par mettre à part les vérités ré-
vélées ; parce qu'il penfoit , dilbit-il, qui pour entre-
prendre di les examiner & y réuffîr , il étoit befoin d'a-
voir qiulqu extraordinaire ajjijlance du ciel, & d'étnplus
qu homme.
2. Il prit donc pour première maxime de conduite,
d'obéir aux lois & aux coutumes de ion pays , rete-
nant conftamment la religion dans laquelle Dieu lui
avoit fait la grâce d'être inftruit des l'enfance , 6c fe
gouvernant en toute autre chofe félon les opinions
les plus modérées.
3. Il crut qu'il étoit de la prudence de fe preferire
par proviiion cette règle , parce que la recherche
iùccefTive des vérités qu'il vouloit lavoir, pouvoit
être très -longue; & que les actions de la vie ne
fouffVant aucun délai, il falloit fe faire un plan de
conduite; ce qui lui fit joindre une féconde maxime
à la précédente, qui étoit d'être le plus ferme & le
plus rclolu en fes actions qu'il le pourroit, & de ne
pas fuivre moins conftamment les opinions les plus
douteufes lorlqu'il s'y leroiî une fois déterminé , que
li elles enflent été tres-aflurées. Sa troifïeme maxime
fut de tâcher toujours plutôt de le vaincre que la for-
tune, & de changer plutôt les defirs que l'ordre du
monde. Piéfléchili'ant enfin fur les diverfes occupa-
tions des hommes, pour faire choix de la meilleure,
il crut ne pouvoir rien faire de mieux, que d'em-
ployer la vie à cultiver fa raifon par la méthode oue
nous alloii. expofer.
4. Defcarte s'etant afiîiré de ces maximes, & les
ayant miles à part, avec les vérités de foi qui ont
toujours été les premières en fa créance, jugea que
pour tout le îetïe de les opinions, il pouvoit libre-
ment entreprendre de s'en défaire.
« A caule , dit-il , que nos lens nous trompent quel-
» quefois, je voulus fuppofer qu'il n'y avoit aucune
•> cl ofe qui hit telle qu'ils nous la font imaginer j &C
» parce qu'il y a des hommes qui le méprennent en
anant, même touchant les plus fimples matie-
» res de Géométrie , c\i y tout des paralogifmes, ju-
» géant que j'étois lujet à faillir autant qu'un autre ,
» je rejettai comme faillies toutes les railonsque j'a-
vois pnles auparavant pour des demonftrations :
» & enfin considérant que toutes les mêmes peniees
» que nous avons étant éveillés, nous peuvent aufïï
» venir quand nous dormons , fans qu'il y en ait au-
» cune pour lors qui loit vraie, je refolus de teindre
» que toutes les choies qui m etoient jamais entrées
» dans l'efprit, n'étoient non plus vraies que les illu-
» lions de mes fonges. MaisaïuE-tôt api es je p
>• de que pendant que je voulois ainfi penfer que tout
" étoit faux , il falloit néceflairement que moi qui le
» penlois, fuffe quelque choie: ev remarquant que
» cette vérité , -, donc jejuîs , étoit fi ferme
» cV: li aflùrée, que tomes les plus extravagante, fup-
» pofitions des Sceptiques n'étoient pas capables ue
7i8
CAR
» l'ébranler , je jugeai que je pouvois la recevoir fans
» fcrupule pour le premier principe de la Philoibphie
» que je cherchois.
» Puis examinant avec attention ce que j'étois , &
» voyant que je pouvois feindre que je n'avois au-
» cun corps, & qu'il n'y avoit aucun monde , ni au-
» cun lieu où je fuffe; mais que je. ne pouvois pas
» feindre pour cela que je n'étois point, & qu'au con-
» traire de cela même, que je penfois à douter de la
» vérité des autres chofes , il fuivoit très-évidem-
» ment ÔC très-certainement que j'étois ; au lieu que
» û j'euffe feulement ceffé de penfer , encore que tout
» le refte de ce que j'avois jamais imaginé eût été
>» vrai , je n'avois aucune raifon de croire que j'euffe
» été : je connus de-là que j'étois une fubftance , dont
» toute l'effence ou la nature n'eft que de penfer , &c
» qui pour être n'a befoin d'aucun lieu , ni ne dépend
» d'aucune choie matérielle ; enforte que ce moi ,
» c'eft-à-dire , l'ame par laquelle je fuis ce que je fuis,
» eft entièrement diftincte du corps , & même qu'elle
» eft plus ailée à connoitre que lui , & qu'encore
» qu'il ne fût point, elle ne laifferoit pas d être tout
» ce qu'elle cil.
» Après cela je confidérai en général ce qui eftre-
» quis à une propoiition pour être vraie & certaine :
» car puifquè je venois d'en trouver une que je fa-
it vois être telle, je penfai que je devois auffi lavoir
» en quoi conlîfte cette certitude ; & ayant remar-
» que qu'il n'y a rien du tout en ceci , je penfe , donc
» je fuis , qui m'affûre que je dis la vérité , finon que
» je vois très-clairement que pour penfer il faut être,
» je jugeai que je pouvois prendre pour règle géné-
» raie , que les choies que nous concevons fort clai-
» rement & fort diftinctement font toutes vraies ».
5. Defcartes s'étend plus au long dans fes médita-
tions , que dans le difcours fur la méthode , pour
prouver qu'il ne peut penfer fans être : & de peur
qu'on ne luicontefte ce premier point, il va au-de-
vant de tout ce qu'on pouvoit lui oppofer , & trou-
ve toujours qu'il penfe, & que s'il penfe, il eft,
foit qu'il veille, foit qu'il fommeille , foit qu'un ef-
prit lupérieur ou une divinité puiffante s'applique
à le tromper. Il lé procure ainli une première certi-
tude ; ne s'en trouvant redevable qu'à la clarté de
l'idée qui le touche , il fonde là-delfus cette règle
célèbre , de tenir pour vrai ce qui cf. clairement contenu
dans Cidée qii 'on a d'une chofe ; & l'on voit par toute
la fuite de les raifonnemens , qu'il fous-entend &
ajoute une autre partie à fa règle , lavoir , de ne
tenir pour vrai que ce qui eft clair.
6. Le premier ufage qu'il fait de fa règle , c'eft de
l'appliquer aux idées qu'il trouve en lui-même. Il re-
marque qu'il cherche , qu'il doute , qu'il eft incer-
tain , d'où il infère qu'il eft imparfait. Mais il fait en
même tems qu'il eft plus beau de lavoir, d'être fans
foibleflé , d'être parfait. Cette idée d'un être par-
fait lui paroît enluite avoir une réalité qu'il ne peut
tirer du fonds de Ion imperfection : & il trouve cela
fi clair, qu'il en conclut qu'il y a un être louveraine-
ment parfait , qu'il appelle Dieu , de qui leul il a pu
recevoir une telle idée, f^oyci Cosmologie.
7. Il le fortifie dans cette découverte en conlidé-
rant que l'exiftence étant une perfection, eft renfer-
mée dans l'idée d'un être fouverainement parfait. II
fe croit donc auffi autorilé par fa règle à affirmer
que Dieu exifte, qu'à prononcer que lui Defcartes
exifte puifqu'il penfe.
8. Il continue de cette forte à réunir par plufieurs
conféquences immédiates , une première fuite de
connoiffances qu'il croit parfaitement évidentes , fur
la nature de l'ame , fur celle de Dieu , & fur la na-
ture du corps.
Il tait une remarque importante fur fa méthode ,
CAR
favoir que « ces longues chaînes de raifons toutes
» fimples & faciles , dont les Géomètres ont coùtu-
» me de fe fervir pour parvenir à leurs plus difficiles
>» démonftrations , lui avoient donné occafion de s'i-
» maginer que toutes les chofes qui peuvent tomber
» fous la connoiffance des hommes, s'entrefuivent
» en même façon ; & que pourvu feulement qu'on
» s'abftienne d'en recevoir aucune pour vraie qui ne le
»foit, & qu'on garde toujours l'ordre qu'il faut pour
» les déduire les unes des autres, il ri y en peut avoir
» de fi éloignées auxquelles enfin on ne parvienne . ni de
» fi cachées , qu'on ne découvre ».
10. C'eft dans cette efpérancc que notre illuftrc
Philofophe commença enluite à faire la liaifon de les
premières découvertes avec trois ou quatre règles
de mouvement ou de méchanique , qu'il crut voir
clairement dans la nature , & qui lui parurent fuffi-
fantes pour rendre raifon de tout , ou pour former
une chaîne de connoiffances, qui embraffât l'univers
& les parties , fans y rien excepter.
» Je me réfolus, dit-il, de laiffer tout ce monde-ci
» aux difputes des Philofophes , & de parler feule-
» ment de ce qui arriveroit dans un nouveau mon-
» de, fi Dieu créoit maintenant quelque part dans
» les efpaces imaginaires allez de matière pour le
» compofer , & qu'il agitât diverfement &c fans or-
» dre les diverles parties de cette matière, en lorte
» qu'il en compolât un chaos auffi confus que les
» Poètes en puiffent feindre , & que par après il ne
» fit que prêter fon concours ordinaire à la nature ,
» & la laiffer agir félon les lois qu'il a établies.
» De plus je ris voir quelles étoient les lois de la
» nature Après cela je montrai comment la plus
» grande partie de la matière de ce chaos devoit,
» enluite de ces lois, fe difpofer & s'arranger d'une
» certaine façon qui la rendroit toute lemblablc à
» nos cieux ; comment cependant quelques-unes de
» ces parties dévoient compofer une terre ; & quel-
» ques-unes, des planètes & des comètes; &r quel-
» ques autres , un foleil & des étoiles fixes De-là
» je vins à parler particulièrement de la terre ; com-
» ment les montagnes, les mers, les fontaines & les
» rivières pouvoient naturellement s'y former, &
» les métaux y venir dans les mines ; & les plantes
» y croître dans les campagnes ; & généralement
» tous les corps qu'on nomme mêlés ou compofès, s'y
» engendrer On peut croire, fans faire tort au
» miracle de la création , que parles feules lois de la
» méchanique établies dans la nature, toutes lescho-
» fes qui font purement matérielles , auraient pu s'y
» rendre telles que nous les voyons à prélent.
» De la defeription de cette génération des corps
» animés & des plantes , je paffai à celle des animaux,
» & particulièrement à celle des hommes ».
1 1. Defcartes finit Ion difcours fur la méthode , en
nous montrant les fruits de la fienne. « J'ai cru, dit-
» il , après avoir remarqué juiqu'où ces notions gé-
» nérales, touchant laPhylîque, peuvent conduire,
» que je ne pouvois les tenir cachées, fans pécher
» grandement contre la loi qui nous oblige à procu-
» rer, autant qu'il eft en nous, le bien général de
» tous les hommes. Car elles m'ont fait voir qu'il eft
» potable de parvenir à des connoiffances qui font
» fort utiles à la vie, & qu'au lieu de cette Philofo-
» phie fpéculative qu'on enfeigne dans les écoles ,
» on en peut trouver une pratique , par laquelle con-
» noiffant la force & les actions du feu , de l'eau , de
» l'air , des affres , des lieux , & de tous les autres corps
» qui nous environnent , auffi dijlinclement que nous con-
» noifjons les divers métiers de nos artifans , nous les
» pourrions employer en même façon a tous les ufages
» auxquels ils J ont propres , & ainfï nous rendre maîtres
& pojjejjeurs de la nature ».
Defcartes fe félicite en dernier lieu des avanta-
CAR
gc. qui reviendront de fa Phyfique générale à la Mé-
decine & à la fanté. Le but de ies connoiffances eft ,
de je pouvoir exempter d'une infinité de maladies, & mê-
me auffi peut-être de l'affàiblifiement de la vieillejfe.
Telle eft la méthode de Defcarus. Telles lbnt fes
promeuves ou fes efpérances. Elles font grandes Tans
cloute : & pour fentir au jufte ce qu'elles peuvent va-
loir , il eft bon d'avertir le leûeur qu'il ne doit point
fe prévenir contre ce renoncement à toute connoif-
fance fenfible , par lequel ce Philolophe débute.
On eft d'abord tenté de rire en le voyant hériter à
croire qu'il n'y ait ni monde, ni lieu , ni a\icun corps
autour de lui: mais c'eft un doute métaphyfique ,
qui n'a rien de ridicule ni de dangereux; & pour en
juger férieuiement , il eft bon de le rappeller les cir-
constances où Defcartes fe trouvoit. Il étoit né avec
un grand génie ; & il régnoit alors dans les écoles
un galimathias d'entités , de formes fubftancieiies ,
& de qualités attractives , répuliives , retentrices ,
concoclrices , expultrices , & autres non moins ri-
dicules ni moins obfcures , dont ce grand homme
étoit extrêmement rebuté. Il avoit pris goût de bon-
ne heure à la méthode des Géomètres , qui d'une vé-
rité inconteftable , ou d'un point accordé, condui-
fent l'efprit à quelqu'autre vérité inconnue ; puis de
celle-là à une autre , en procédant toujours ainfi ;
ce qui procure cette conviction d'où nait une fatis-
facuon parfaite. La penfée lui vint d'introduire la
même méthode dans l'étude de la nature ; & il crut
en partant de quelques vérités fimples , pouvoir par-
venir aux plus cachées , & enfeigner la Phyfique ou
la tormation de tous les corps , comme on enfeigne
la Géométrie.
Nous reconnoîtrions facilement nos défauts , fi
nous pouvions remarquer que les plus grands hom-
mes en ont eu de femblables. Les philofophes au-
roient fuppléé à l'impuiftance où nous fournies pour
la plupart de nous étudier nous-mêmes , s'ils nous
avoient laiffé l'hiftoire des progrés de leur efprit.
Defcartes l'a fait , & c'eft un des grands avantages
de fa méthode. Au lieu d'attaquer directement les
fcholaftiques , il repréfente le tems où il étoit dans
les mêmes préjugés : il ne cache point les obftaclcs
qu'il a eus à furmonter pour s'en défaire ; il don-
ne les règles d'une méthode beaucoup plus limple
qu'aucune de celles qui avoient été en ufage jufqu'à
lui , laifl'e entrevoir les découvertes qu'il croit avoir
faites , & prépare par cette adrefle les efprits à re-
cevoir les nouvelles opinions qu'il fe propofoit d'é-
tablir. Il y a apparence que cette conduite a eu beau-
coup de part à la révolution dont ce philolophe eft
l'auteur.
La méthode des Géomètres eft bonne , mais a-
t-elle autant d'étendue que Defcartes lui en donnoit?
II n'y a nulle apparence. Si l'on peut procéder géo-
métriquement en Phyfique , c'eft feulement dans
telle ou telle partie , & fans efperance de lier le tout.
Il n'en eft pas de la nature comme des mefures &
des rapports de grandeur. Sur ces rapports Dieu a
donné à l'homme une intelligence capable d'aller
fort loin , parce qu'il vouloit le mettre en état de
faire une maifon, une voûte , une digue , Se mille
autres ouvrages oii il auroit beloin de nombrer &
de mefurcr. En formant un ouvrier , Dieu a mis en
lui les principes propres à diriger les opérations :
mais deftinant l'homme à faire ufage du monde , &
non à le conftruirc , il s'eft contenté de lui en taire
connoitre feniiblement & expérimentalement les qua-
lités ufuclles ; il n'a pas jugé à propos de lui accorder
la vue claire de cette machine immenle.
Il y a encore un défaut dans la méthode de
Defcartes; félon lui il faut commencer par définit
les choies , &: regarder les délinitions comme des
principes propres à en faire découvrir les proprié-
CAR
719
tés. Il paroît au contraire qu'il faut commencer par
chercher les propriétés ; car , fi les notions que nous
fommes capables d'acquérir, ne font, comme il pa-
roît évident, que différentes collections d'idées fimples
que l'expérience nous a fait rafîembler fous certains
noms , il eft bien plu:, naturel de les former, en cher-
chant les idées dans le même ordre que l'expérience
les donne, que de commencer par' les définitions,
pour en déduire enfuite les différentes propriétés des
chofes. Defcartes méprifoit la feience qui s'acquiert
par les fens ; & s'étant accoutumé à fe renfermer
tout entier dans des idées intellectuelles , qui pour
avoir entr'elles quelque fuite , n'avoient pas en effet
plus de réalité , ii alla avec beaucoup d'efprit de mé-
prit e en méprife. Avec une matière prétendue homo-
gène , mife 6c entretenue en mouvement , félon deux
ou trois règles de la méchanique , il entreprit d'ex-
pliquer la tormation de l'univers. Il entreprit en par-
ticulier de montrer avec une parfaite évidence , com-
ment quelques parcelles de chyle ou de fane; , tirées
d'une nourriture commune , doivent former jufte &
précifément le tiffu, l'entrelacement, & la corref-
pondance des vailfeaux du corps d'un homme, plutôt
que d'un tigre ou d'un poiffon. Enfin il fe vantoit d'a-
voir découvert un chemin qui luijembloit tel, qu'on devait
infadliblement trouver la feience de la vraie Médecine en
le fuivant. Voye^ AXIOME.
On peut juger de la nature de fes connoiffances à
cet égard par les traits fuivans. Il prit pour un rhû-
matilme la plcuréfie dont il eft mort , & crut fe dé-
livrer de la fièvre en buvant un demi-verre d'eau-
de-vie : parce qu'il n'avoit pas eu befoin de la fai-
gnéedans l'efpacede 40 ans , il s'opiniâtra à refufer
ce fecours qui étoit le plus fpécifîque pour fon mal :
il y confentit trop tard, lorfque fon délire fut calmé
& di/fipé. Mais alors , dans le plein ufage de fa
raifon , il voulut qu'on lui infusât du tabac dans du
vin pour le prendre intérieurement ; ce qui déternfna
fon médecin à l'abandonner. Le neuvième jour de fa
fièvre , qui fut l'avant-dernier de fa vie , il deman-
da de lang froid des panais , & les mangea par pré-
caution , de crainte que les boyaux ne fe retrécifTent,
s'il continuoit à ne prendre que des bouillons. On
voit ici la diftance qu'il y a du Géomètre au Phyfi-
cien. Hijl. du Ciel , tome il.
Quoique M. Defcartes fe fut appliqué a l'étude de
la morale , autant qu'à aucune autre partie de la phi-
lof ophic , nous n'avons cependant de lui aucun traité
complet fur cette matière. On en voit les raifons dans
une lettre qu'il écrivit à M. Char.ur. » Meilleurs les
» régens de collège ( difoit-il à fon ami ) font il ani-
» mes contre moi à caufe des innocens principes de
» Phyfique qu'ils ont vu ; & tellement en colère de
» ce qu'ils n'y trouvent aucun prétexte pour me ca-
» lomnier , que fi je traitois après cela de la morale ,
» ils ne me laifleroienl aucun repos ; car , puilqu'un
» père Jéfuite a crû avoir allez de fujet pour m'accu-
» 1er d'être feeptique , de ce que j'ai réfuté les feep-
» tiques ; & qu'un miniftre a entrepris de perfuader
» que j'étois athée , fans en alléguer d'autres raifons ,
» finon,que j'ai tâche de prouver l'exiltence de Dieu :
» que ne diroient-ils point , li j'entreprenois d'exami-
» ner quelle eft la jufte valeur de toutes les choies
» qu'on peut defirer ou craindre ; quel fera l'état de
» l'amc après la mort ; jufqu'où nous devons aimer la
» vie, cv quels nous devons être pour n'avoir aucun
» fujet d'en craindre la perte! J'aurois beau n'a\o',r
» que les opinions les plus conformes à la Religion , e'c
» les plus utiles au bien de l'Etat, ils ne laillèroient
» pas de me vouloir faire croire que j'en aurois de
» contraires à l'un èv à l'autre. Ainli je penfe que le
» mieux que je puifle faire dorénavant, lera de m'abi-
» tenir de faire des livres : & ayant pris pour ma de-
» vile , illi mors guyis incubât, qui notus mmis ornai-
VIO
CAR
» bus , ig notas moriturfibi , de n'étudier phis que pour
» m'iniiruire ; & ne communiquer mes penlées qu a
» ceux avec qui je pourrai converkr en particulier ».
On voit par-là qu'il n'étudioit la morale que pour
fa conduite particulière ; & c'eft peut-être aux effets
de cette étude qu'on pourroit rapporter les delirs
qu'on trouve dans la plupart de les lettres, de confa-
crer toute fa vie à la lcience de bien vivre avec Dieu
& avec fon prochain , en renonçant à toute autre
connoiffance ; au moins avoit-il appris dans cette
étude à confidérer les écrits des anciens payens com-
me des palais fuperbes , qui ne font bâtis que fur du
fable. Il remarqua dès lors , que ces anciens dans leur
morale , élèvent fort haut les vertus, & les font pa-
roitre eftimables au-defîûs de tout ce qu'il y a dans
le monde ; mais qu'ils n'enléignent pas allez à les
connoître , & que ce qu'ils appellent d'un fi beau
nom , n'eft fouvent qu'infenlibilité , orgueil , & de-
fefpoir. Ce fut aufli à cette étude qu'il fut redevable
des quatre maximes que nous avons rapportées dans
l'analyfe que nous avons donnée de la méthode, &
fur lefquelles il voulut régler fa conduite : il n'étoit
efclave d'aucune des pâmons qui rendent les hom-
mes vicieux. Il étoit parfaitement guéri de l'inclina-
tion qu'on lui avoit autrefois infpirée pour le jeu ,
& de l'indifférence pour la perte de fon tems. Quant
à ce qui regarde la religion , il conferva toujours ce
fonds de pieté que les maîtres lui avoient infpirée à
la Flèche. Il avoit compris de bonne heure que tout
ce qui eft l'objet de la foi , ne fauroit l'être de la rai-
fon : il difoit qu'il feroit tranquille , tant qu'il auroit
Rome & la Sorbonne de fon côté.
L'irréfolution oii il fut affez long- tems touchant les
vues générales de fon état , ne tomboit point fur fes
aciions particulières ; il vivoit & agiffoit indépen-
damment de l'incertitude qu'il trouvoit dans les ju-
gemens qu'il failoit fur les Sciences. Il s'étoit fait une
morale limple, félon les maximes de laquelle il
prétendoit embralî'er les opinions les plus modérées ,
le plus communément reçues dans la pratique ,1e fai-
fant toujours allez de juftice , pour ne pas préférer fes
opinions particulières à celles des peribnnes qu'il ju-
geoit plus fages que lui. Il apportoit deux rail'ons qui
l'obligeoient à ne choifir que les plus modérées d'en-
tre plufieurs opinions également reçues.'" La premie-
»> re, que ce font toujours les plus commodes pour la
» pratique, & vraiffemblablement les meilleures, tou-
» tes les extrémités dans les actions morales étant or-
» dinairement vicieules ; la féconde , que ce feroit fe
» détourner moins du vrai chemin , au cas qu'il vînt
» à s'égarer ; & qu'ainfi , il ne feroit jamais obligé de
» paffer d'une extrémité à l'autre ». Difc.fur la Méth.
Il paroiffoit dans toutes les occalîons li jaloux de fa
liberté , qu'il ne pouvoit diifimuler l'éloignement qu'il
avoit pour tous les engagemens qui font capables de
nous priver de notre indifférence dans nos actions.
Ce n'eft pas qu'il prétendît trouver à redire aux lois ,
qui , pour remédier à l'inconfbnce des efprits foi-
bles , ou pour établir des fùretés dans le commerce
de la vie , permettent qu'on faffe des vœux ou des
contrats , qui obligent ceux qui les font à perfévérer
-dans leur entreprile : mais ne voyant rien au monde
qui demeurât toujours dans le même état , & fe pro-
mettant de perfectionner fon jugement de plus en
plus , il auroit crû offenfer le bon fens , s'il fe îiit
obligé à prendre une chofe pour bonne , lorfqu'elle
auroit ceffé de l'être , ou de lui paroître telle ; fous
prétexte qu'il l'auroit trouvée bonne dans un autre
tems.
A l'égard des aefions de fa vie , qu'il ne croyoit
point pouvoir fouffrir de délai ; lorlqu'il n'étoit point
en état de dif cerner les opinions les plus véritables,
il s'attachoit toujours aux plus probables. S'il arrivoit
qu'il ne trouvât pas plus de probabilité dans les
CAR
unes que dans les autres , il ne laifîbit pas de fe de**
terminer à quelques-unes , & de les conlidérer en-
fuite , non plus comme douteulès par rapport à la
pratique, mais comme très- vraies 6c très-certaines;
parce qu'il croyoit que la raiibn qui l'y avoit fait
déterminer le trouvoit telle : par ce moyen , il vint
à bout de prévenir le repentir , & les remords qui ont
coutume d'agiter les elprits foibles oc chancelans ,
qui fe portent trop légèrement à entreprendre , com-
me bonnes, les choies qu'ils jugent eniufte être mau-
vaifes.
Il s'étoit'fortcment perfuadé qu'il n'y a rien dont
nous puiiiions difpofer abfolument , hormis nos pen-
fées 6c nos delirs ; delorte qu'après avoir fait tout ce
qui pouvoit dépendre de lui pour les choies de de-
hors , il regardoit comme abiolument impoffible à
fon égard , ce qui lui paroiffoit difficile ; c'eft ce
qui le fit réfoudre à ne délirer que ce qu'il croyoit
pouvoir acquérir. Il crut que le moyen ue vivre con-
tent , étoit de regarder tous les biens qui font hors
de nous , comme également éloignes cie notre pou-
voir. Il dut fans doute avoir betoin de beaucoup
d'exercice, & d'une méditation fouvent réitérée, pour
s'accoutumer à regarder tout fous ce point de vue ;
mais étant venu à bout de mettre fon elpritdans cette
fituation , il fe trouva tout préparé à fouffrir tranquil-
lement les maladies 6c les diigraces de la fortune
par lefquelles il plairoit à Dieu de l'exercer. II
croyoit que c'étoit principalement dans cepoint , que
conliftoit le fecret des anciens philolophes , qui
avoient pu autrefois fe fouftraire à l'empire de fa
fortune , 6c malgré les douleurs 6c la pauvreté , dit—
puter de la félicité avec leurs Dieux. DiJ'coursjur la
Méthode ,pag. zj. 2£).
Avec ces difpofmons intérieures , il vivoit en ap-
parence de la même manière que ceux qui , étant li-
bres de tout emploi , ne longent qu'à paffer une vie
douce oc irréprochable aux yeux des hommes ; qui
s'étudient à léparer les plaiiirs des vices, & qui ,
pour joiiir de leur loifir lans s'ennuyer , ont recours
de tems en tems à des divertifiemens honnêtes. Ainfi ,
fa conduite n'ayant rien de fingulier qui fut capable
de frapper les yeux ou l'imagination des autres , per-
fonne ne mettoit obftacle à la continuation de lès
deffeins , & il s'appliquoit fans relâche à la recherche
de la vérité.
Quoique M. Defcartes eût réfolu, comme nous ve-
nons de le dire , de ne rien écrire fur la morale , il ne
put refufer cette fatisfaction à la princeffe Elifabeth ;
il n'imagina rien de plus propre à confoler cette prin-
ceffe philolophe dans lès difgraces , que le livre de
Seneque , touchant la vie heureufe , fur lequel il fît des
obfervations , tant pour lui en faire remarquer les
fautes , que pour lui faire porter fes penfées au-delà
même de celles de cet auteur. Voyant augmenter de
jour en jour la malignité de la fortune , qui commen-
çât à perfécuter cette princeffe , il s'attacha à l'en-
tretenir dans fes lettres , des moyens que la Philofo-
phie pouvoit lui fournir pour être heureufe Se con-
tente dans cette vie ; & il avoit entrepris de lui per-
fuader, que nous ne l'aurions trouver que dans nous-
mêmes cette félicité naturelle, que les âmes vulgai-
res attendent en vain de la fortune , tom. I. des Lett.
Lorlqu'il choilit le livre de Sineque , de la vie heu-
reufe, « il eut feulement égard à la réputation de l'au-
» teur, & à la dignité de la matière , fans fonger à la
» manière dont il l'avoit traitée »: mais l'ayant exa-
minée depuis , il ne la trouva point affez exacte pour
mériter d'être fuivie. Pour donner lieu à la princeffe
d'en pouvoir juger plus ailément , il lui expliqua d'a-
bord de quelle lorte il croyoit que cette matière eût
dû être traitée par un philolophe tel que Séneque,
qui n'avoit que la raifon naturelle pour guide ; en-
luite il lui fît voir « comment Séneque eût dû nous
» enfeigner
C A R.
» enfeigner toutes les principales vérités , dont la
» connoiffance eft requife pour faciliter l'ufage de la
» vertu, pour régler nos defirs & nos paffions, &
» jouir ainfi de la béatitude naturelle ?ce cpii auroit
» rendu Ion livre le meilleur & le plus utile qu'un
» philolophe payen eût lu écrire ». Après avoir mar-
qué ce qu'il lui fembloit que Séneque eût dû traiter
dans Ion livre , il examina dnns unefeconde lettre à
la princeffe ce qu'il y traite , avec une netteté & une
force d'elprit , qui nous fait regretter que M. Defcar-
tes n'ait pas entrepris de reftitierainfi les penlées de
tous les anciens. Les réflexions judicieufes que la
princeffe fit de fon côté fur le livre de Séneque , por-
tèrent M. Deicartes à traiter dans les lettres fui van-
tes,des autres queffions les plus importantes de la mo-
rale , touchant le fouverain bien , la liberté de l'hom-
me , l'état de l'ame , l'ufage de la raifon , Pillage des
pafîîons , les aefions vertueuies & vicieufés , l'ufage
des biens & des maux de la vie. Ce commerce de phi-
lolophie morale fut continué parla princeffe, depuis
fon retour des eaux de Spa , où il avoit commencé ,
avec une ardeur toujours égale au milieu des mal-
heurs dont fa vie fut traverfée ; & rien ne fut capable
de le rompre , que la mort de M. Deicartes.
En 1 64 1 parut en Latin un des plus célèbres ouvra-
ges de notre Philolophe , & celui qu'il paroit avoir
toujours chéri le plus ; ce furent fes Méditations tou-
chant lu première Philofophie , oh Von démontre Vexif-
tencedeDieu 6' l 'immortalité de Came. .Mais on fera peut-
être furpris d'apprendre, que c'eft à la confeience de
Deicartes que le public fut redevable de ce préfent.
Si l'on avoit eu affaire à un philolophe moins zélé
pour le vrai , & fi cette paffion fi louable & fi rare
n'avoit détruit les raiibns qu'il prétendoit avoir , de
ne plus jamais imprimer aucun de fes écrits , c'étoit
-fait de fes Méditations, auffi-bien que de fon Monde ,
de lbn Cours philosophique , de fa Réfutation de lafcho-
Lijlique, & de divers autres ouvrages qui n'ont pas vu
le jour, excepté les Principes, qui avoient été nom-
mément compris dans la condamnation qu'il en avoit
faite. Cette diftinctionétoit bien due aies Méditations
métaphyfîques. Il les avoit compofées dans fa retraite
en Hollande. Depuis ce teins- là , il les avoit laiffées
dans fon cabinet , comme un ouvrage imparfait , dans
lequel il n'avoit fongé qu'à fe fatisfaire. Mais ayant
confédéré enfuite la difficulté que plufieurs perfon-
nes auraient de comprendre le peu qu'il avoit mis
de métaphyfique dans la quatrième partie de fon D if-
cours fur la Méthode , il voulut revoir fon ouvrage ,
afin de le mettre en état d'être utile au public, 'en
donnant des éclairciffemens à cet endroit de fa Mé-
thode, auquel cet ouvrage pourroit lervir de com-
mentaire. Il comparait ce qu'il avoit fait en cette ma-
tière, aux démonftrations d'Apollonius, dans lelquel-
les il n'y a véritablement rien qui nefoit très-clair & tics-
certain , lorfquon confidere chaque point à part. Mais
parce qu'elles font un peu longues, & qu'on ne peut y
voir la néceffité de la conclu/ton ,fifonnejejouvicnt
exactement de tout ce qui la précède , à peine peut-on trou-
ver un homme dans toute une ville , dans toute une pro-
vince , qui fou capable de les entendre. De même , M.
Deicartes croydk avoir entièrement démontré l'e-
xiilence de Dieu de l'immatérialité de l'ame humai-
ne. Mais parce que cela dépendait de plufieurs rai-
fonnemens qui s'entrefuivoient , &: que li on en 011-
blioit la moindre circonltance il n'étoit pas ailé de
bien entendre la conclulion , il prévoyoit que fon
travail auroit peu de fruit, à moins qu'il ne tombât
heûreufement entre les mains de quelques perfonnes
intelligentes, qui prilfent la peine d'examiner lerieu-
fement fes raifons ; & qui difant fincerement ce qu'el-
les en penferoient , donnaflent le ton aux autres pour
en juger comme eux , ou du moins pour n'oier les
contredire fans raifon.
Tome II.
CAR ?2ï
Le Père Merfenne ayant reçu l'ouvrage attendu,
depuis tant de tems , voulut fatisfaire l'attente de
ceux auxquels il l'avoit promis, par l'activité $ç
l'induftrie dont il ufa pour le leur communiquer. Il
en écrivit peu de tems après à M. Defcartes , & il
lui promit les objeftions de divers théologiens & phi-
lofophes. M. Defcartes en parut d'autant plus fur-
pris, qu'il s'étoit perfuadé qu'il falloit plus de tems
pour remarquer exactement tout ce qui étoit dans
fon traité , & tout ce qui y manquoit d'effentiel. Le
P. Merfenne, pour lui faire voir qu'il n'y avoit ni
précipitation , ni négligence dans l'examen qu'il en
faifoit faire , lui manda qu'on avoit déjà remarqué
que dans un traité qu'on croyoit fait exprès pour
prouver l'immortalité de l'ame , il n'avoit pas dit un
mot de cette immortalité. M. Defcartes lui répondit
fur le champ , qu'on ne devoit pas s'en étonner ; qu'il
ne pouvoit pas démontrer que Dieu ne puifîe anéan-
tir l'ame de l'homme, mais feulement qu'elle eft du-
ne nature entièrement diftincf e de celle du corps , &
par conféquent qu'elle n'eft point fujette à mourir
avec lui ; que c'étoit-là tout ce qu'il croyoit être re-
quis pour établir la religion , & que c'étoit auffi tout
ce qu'il s'étoit propoié de prouver, f'our détromper
ceux qui penfoient autrement , il fit changer le titre
du lecond chapitre , ou de la féconde Méditation ,
qui portoit de mente hurnanà en général ; au lieu de-
quoi il fit mettre, dénatura mentis humanœ , quodipfi
Jit notior quam corpus, afin qu'on ne crût pas qu'il eût
voulu y démontrer fon immortalité.
Huit jours après , M. Defcartes envoya au P. Mer-
fenne un abrégé des principaux points qui touchoient
Dieu & l'ame , pour fervir d'argument à tout l'ou-
vrage. Il lui permit de le faire imprimer par forme
de lommaire à la tête du Traité , afin que ceux qui ai-
moient à trouver en un même lieu tout ce qu'ils cher-
choient , puffent voir en raccourci tout ce que con-
tenoit l'ouvrage , qu'il crut devoir partager en fix
Méditations.
Dans la première, il propofe les raifons pourlef-
quelles nous pouvons douter généralement de toutes
chofes , & particulièrement des choies matérielles ,
juiqu'à ce que nous ayons établi de meilleurs fonde -
mens dans les Sciences, que ceux que nous avons eus
jufqu'à préfent. Il fait voir que futilité de ce doute
gênerai conlilte à nous délivrer de toutes fortes de
préjugés ; à détacher notre efprit des fens , & à faire
que nous ne puiffions plus douter des chofes que
nous reconnoîtrons être très-véritables.
Dans la féconde , il fait voir que l'efprit ufant de
fa propre liberté pour fuppofer que les chofes de l'e-
xiftenec delquclles il a le moindre doute, n'exillent
pas en effet , reconnoit qu'il elt impolfible que ce-
pendant il n'cxilte pas lui-même : ce qui lert à lui faire
distinguer les chofes qui lui appartiennent d'avec cel-
les qui appartiennent au corps. Il lemble que c'étoit
le lieu de prouver l'immortalité de l'ame. Mais U
manda au P. Merfenne qu'il s'étoit contenté dans
cette féconde Méditation de faire concevoir Vamefans
le corps , fans entreprendre encore de prouver qu'elle
elt réellement difincle du corps ,• parce qu'il n'avoit pas
encore mis dans ce lieu-là les prémifjes , dont on peut
tirer cette conclulion , que l'on ne trouverait que
dans lafxicme Méditation. C'elt ainfi que ce philolo-
phe tachant de ne rien avancer dans tout fon Traité
dont il ne crût avoir des démonftrations exacles, fe
croyoit obligé de fuivre l'ordre des Géomètres, qui
ell de produire premièrement tous les principes d'où
dépend la propofition que l'on cherche , avant que
de rien conclurre. La première <Sc la principale cho-
ie qui ell requife félon lui pour bien connoître l'im-
mortalité de l'ame , cil d'en avoir une idée ou con-
ception très-claire & tres-nctte , qui foit parfaitement
dUUnfte de toutes les conceptions qu'on peut avoir
YYyy
7" CAR
du corps. Il faut favoir outre cela que tout ce que
nous concevons clairement & diftin&ement , eft vrai
de la môme manière que nous le concevons ; c'eft
ce qu'il a été obligé de remettre à la quatrième Mé-
ditation. Il faut de plus , avoir une conception dif-
tin£te de la nature corporelle ; c'eft ce qui fe trouve
en partie dans la féconde, & en partie clans la cin-
quième ëcfxieme Méditations. L'on doit conclurre de
tout cela , que les chofes que l'on conçoit clairement
& diftin&ement comme des fubftances diverfes , tel-
les que font l'efprit &c le corps , font des fubftances
réellement diftin&es les unes des autres. C'eft ce qu'il
conclut dans la. fxieme Méditation. Revenons à l'or-
dre des Méditations & de ce qu'elles contiennent.
Dans la troifieme , il développe allez au long le
principal argument par lequel il prouve l'exiftence
de Dieu. Mais n'ayant pas jugé à propos d'y em-
ployer aucune comparaison tirée des chofes corpo-
relles. , arin d'éloigner autant qu'il pourroit l'efprit
du lecleur de l'ufage & du commerce des fens , il
n'avoit pu éviter certaines obfcurités , auxquelles il
avoit déjà remédié dans fes réponfes aux premières
obje&ions qu'on lui avoit faites dans les Pays-Bas ,
& qu'il avoit envoyées au P. Merfenne pour être
imprimées à Paris avec fon Traité.
Dans la quatrième , il prouve que toutes les cho-
fes que nous concevons fort clairement & fort dif-
tinclement , font toutes vraies. Il y explique auffi en
quoi confifte la nature de l'erreur ou de la iaufleté.
Par-là il n'entend point le péché ou l'erreur qui le
commet dans la pourfuite du bien & du mal , mais
feulement l'erreur qui fe trouve dans le jugement &
le difeernement du vrai &c du faux.
Dans la cinquième , il explique la nature corpo-
relle en général. Il y démontre encore l'exiftence
de Dieu par une nouvelle raifon. Il y fait voir com-
ment il eft vrai que la certitude même des démonf-
trations géométriques dépend de la connoiflance de
Dieu.
Dans la fïxïeme, il diftingue l'a&ion de l'entende-
ment d'avec celle de l'imagination , & donne les
marques de cette diftinûion. Il y prouve que l'ame
de l'homme eft réellement diftin&e du corps. Il y
expofe toutes les erreurs qui viennent des fens , avec
les moyens de les éviter. Enfin il y apporte toutes
les raifons , defquelles on peut conclurre l'exiftence
des chofes matérielles. Ce n'eft pas qu'il les jugeât
fort utiles pour prouver qu'il y a un monde , que les
hommes ont des corps , & autres chofes femblables qui
n'ont jamais été mifes en doute par aucun homme de
bon fens ; mais parce qu'en les considérant de près ,
on vient à connoître qu'elles ne font pas fi évidentes
que celles qui nous conduifent à la connoiflance de
Dieu &c de notre ame.
Voilà l'abrégé des Méditations de Defcartes , qui
font de tous fes ouvrages celui qu'il a toujours le
plus eftimé. Tantôt il remercioit Dieu de fon tra-
vail , croyant avoir trouvé comment on peut dé-
montrer les vérités métaphysiques : tantôt il fe laif-
foit aller au plailir de faire connoître aux autres
l'opinion avantageufe qu'il en avoit conçue. « Aflïï-
» rez-vous , écrivoit-il au P. Merfenne, qu'il n'y a
» rien dans ma métaphyfique que je ne croie être ,
» ou très -connu par la lumière naturelle , ou démontré
» évidemment , & que je me fais fort de le faire en-
» tendre à ceux qui voudront & pourront y médi-
» ter, &c. » En effet, on peut dire que ce livre ren-
ferme tout le fonds de fa doctrine , tk que c'eft une
pratique très-exaâe de fa Méthode. Il avoit coutume
de le vanter à fes amis intimes , comme contenant
des vérités importantes , qui n'avoient jamais été bien
examinées avant lui, &c qui donnoient pourtant l'ou-
verture à la vraie Philofophie , dont le point princi-
pal confifte à nous convaincre de la différence qui fe
C A R
trouve entre l'efprit & le corps. C'eft ce qu'il a pré-
tendu faire dans ces Méditations par une analyf ,
qui ne nous apprend pas feulement cette différence ,
mais qui norîs découvre en même tems le chemin
qu'il a fuivi pour la découvrir. Voyei Analyse.
Defcartes , dans fon» Traité de la Lumière , tranf-
porte fon lecleur au-delà du monde dans les efpaces
imaginaires : & là il fuppoie, que pour donner aux
philofophes l'intejligence de la ftrufture du monde ,
Dieu veut bien leur accorder le fpeftacle d'une créa-
tion. Il fabrique pour cela une multitude de parcelles
de matières également dures , cubiques ou triangu-
laires , ou Amplement irrégulieres & raboteufes , ou
même de toutes figures, mais étroitement appliquées
l'une contre l'autre , face contre face , & fi bien en-
taflees , qu'il ne s'y trouve pas le moindre interftice.
Il foûtient même que Dieu qui les a créées dans les
efpaces imaginaires , ne peut pas après cela laifler
fubfifter entr'elles le moindre petit efpace vuide de
corps ; & que l'entreprife de ménager ce vuide , pâlie
le pouvoir du Tout-puiffant.
Enfuite Dieu met toutes ces parcelles en mou-
vement : il les fait tourner la plupart autour de leur
propre centre ; & de plus , il les pouffe en ligne di-
rede.
Dieu leur commande de refter chacune dans leur
état de figure, malle, vîteffe, ou repos , jufqu'à ce
qu'elles foient obligées de changer par la réfiftance ,
ou par la fracture.
Il leur commande de partager leurs mouvemens
avec celles qu'elles rencontreront , & de recevoir
du mouvement des autres. Defcartes détaille les
règles de ces mouvemens ck de ces communications
le mieux qu'il lui eft poflible.
Dieu commande enfin à toutes les parcelles mues
d'un mouvement de progreflion , de continuer tant
qu'elles pourront à fe mouvoir en ligne droite.
Cela fuppofé, Dieu, félon Defcartes, conferve
ce qu'il a fait : mais il ne fait plus rien. Ce chaos
forti de fes mains , va s'arranger par un effet du mou-
vement, & devenir un monde femblable au nôtre ;
un monde dans lequel , quoique Dieu n'y mette aucun
ordre ni proportion , on pourra voir toutes les chofes ,
tant générales qui particulières , qui paroiffent dans h
vrai inonde. Ce font les propres paroles de l'auteur ,
& l'on ne fauroit trop y faire attention.
De ces parcelles primordiales inégalement mues ,
qui font la matière commune de tout,' & qui ont
une parfaite indifférence à devenir une choie ou
une autre , Defcartes voit d'abord fortir trois éle-
mens ; & de ces trois élémens , toutes les maffes qui
fubliftent dans le monde. D'abord les carnes , an-
gles, & extrémités de parcelles , font inégalement
rompues par le frottement. Les plus fines pièces font
la matière fubtile , qu'il nomme le premier élément :
les corps ufés & arrondis par le frottement , font li
fécond élément ou la lumière : les pièces rompues les
plus groflieres , les éclats les plus mafiifs , & qui cpn-
fervent le plus d'angles, font le troifieme élément , ou
la matière terreftre & planétaire.
Tous les élémens mus & fe faifant obftacle les
uns aux autres , fe contraignent réciproquement à
avancer, non en ligne droite , mais en ligne circu-
laire, & à marcher par tourbillons , les uns autour
d'un centré commun , les autres autour d'un autre \.
de forte cependant que confervant toujours leur ten-
dance à s'en aller en ligne droite , ils font effort à
chaque inftant pour s'éloigner du centre; ce qu'il
appelle force centrifuge.
Tous ces élémens tâchant de s'éloigner du cen-
tre , les plus maflifs d'entre eux font ceux qui s'en
éloigneront le plus : ainfi l'élément globuleux fera
plus éloigné du centre que la matière fubtile ; &
comme tout doit être plein , cette matière fubtile le
CAR
rangera en partie dans les interfaces des globules de
la lumière , 6c en partie vers le centre du tourbillon.
Cette partie de la matière fubtile , c'eft- à-dire de la
plus fine pouffiere qui s'eft rangée au centre , eft ce
que Defcartes appelle un foleil. 11 y a de pareils amas
de menue pouffiere dans d'autres tourbillons com-
me dans celui-ci ; & ces amas de pouffieres font au-
tant d'autres foleils que nous nommons étoiles, 6c
qui brillent peu à notre égard , vu l'éloignement.
L'élément globuleux étant compofé de globules
inégaux, les plus forts s'écartent le plus vers les ex-
trémités du tourbillon ; les plus foibles fe tiennent
plus près du foleil. L'action de la fine pouffiere qui
compofé le foleil , communique Ion agitation aux
globules voifins, & c'eft en quoi confifte la lumière.
Cette agitation communiquée à la matière globu-
leulé, accélère le mouvement de celle-ci : mais cette
accélération diminue en raiibn de l'éloignement, 6c
finit à une certaine diftance.
On peut donc diviiér la lumière depuis le foleil
jufqu'à cette diftance , en différentes couches , dont
la vîteffe eft inégale, & va diminuant de couche en
couche. Après quoi la matière globuleufe qui rem-
plit le relie immenfe du tourbillon (blaire , ne reçoit
plus d'accélération du foleil: & comme ce grand rel-
ie de matière globuleufe eft compofé des globules les
plus gros 6c les plus forts , l'activité y va toujours
en augmentant, depuis le terme où l'accélération
caufée par le foleil , expire , jufqu'à la rencontre des
tourbillons voifins. Si donc il tombe quelques corps
mafiifs dans l'élément globuleux , depuis le foleil ,
jufqu'au terme où finit l'action de cet aftre , ces corps
feront mus plus vite auprès du foleil, &C moins vite
à mefure qu'ils s'en éloigneront. Mais li quelques
eorps maffifs font amenés dans le refte de la matière
globuleufe , entre le terme de l'action iolaire 6c la
rencontre des tourbillons voifins, ils iront avec une
accélération toujours nouvelle, jufqu'à s'enfoncer
dans ces tourbillons voifins ; &l d'autres qui s'écha-
peroientdes tourbillons voifins , & entreroient dans
l'élément globuleux du nôtre, y pourroient defeen-
dre ou tomber, & s'avancer vers le foleil.
Or il y a de petits tourbillons de matière qui peu-
vent rouler dans les grands tourbillons; & ces petits
tourbillons peuvent non -feulement être compotes
d'une matière globuleufe & d'une pouffiere fine , qui
rangée au centre, en faffe de petits foleils: mais ils
peuvent encore contenir ou rencontrer bien des par-
celles de cette groffe pouffiere, de ces grands éclats
d'angles brifés que nous avons nommés le troifieme
élément. Ces petits tourbillons ne manqueront pas
d'écarter vers leurs bords toute la groffe pouffiere ;
c'eft-à-dire, fi vous l'aimez mieux, que les grands
éclats , formant des pelotons épais & de gros corps ,
gagneront toujours les bords du petit tourbillon par
la fupériorité de leur force centrifuge : Defcartes les
arrête-là, 6c la choie eft fort commode. Au lieu de les
laifler courir plus loin par la force centrifuge , ou d'ê-
tre emportés par l'impulfion de la matière du grand
tourbillon, ils obfcurciffent le foleil du petit, 6c ils
encroûtent peu à-peu le petit tourbillon: 6c de ces
croûtes épaiffies fur tout le dehors, il fe forme un
corps opaque, une planète, une terre habitable. Com-
me les amas de la fine pouffiere font autant de foleils,
les amas de la groffe pouffiere font autant de planè-
tes & de comètes. Ces planètes amenées dans la pre-
iii .i e moitié de la matière globuleufe , roulent d'une
VÎteffe qui va toujours en diminuant depuis la pre-
miere qu'on nomme Mercure, jufqu'à la dernière
qu'on nomme Saturne. Les corps opaques qui l'ont jet-
tés dans la féconde moitié, s'en vont julqu(
les tourbillons voifins, 6c d'autres partent des tour-
billons voifins, puis descendent dans le nôtre vers le
foleil. La même pouffiere malîive qui nous a fourni
Tome II,
CAR
71?'
une terre , des planètes &c des comètes , s'arrange j
en vertu du mouvement , en d'autres formes, & nous
donne l'eau , l'atmofphere , l'air , les métaux , les
pierres , les animaux 6c les plantes ; en un mot tou-
tes les choies, tant générales que particulières , que ne us
voyons dans notre monde, organifées, & autres.
Il .y à encore bien d'autres parties à détailler dans
l'édifice de Deicartes : mais ce que nous avons déjà
vûcft regardé de tout le monde comme un afforti-
menî de pièces qui s'écroulent ; & fans en voir davan-
tage, il n'y a perfonne qui ne puiffe fentir qu'un tel
fyltême n'eft nullement recevable.
i°. II eft d'abord fort fingulier d'entendre dire que
D eu ne peut pas créer 6c rapprocher quelques corps
anguleux, fans avoir de quoi remplir exactement les
interftices des angles. De quel droit ole-t-on reffer-
rer ainli la fouveraine puifiance?
2°. Mais je veux que Deicartes fâche précifément
pourquoi Dieu doit avoir tant d'horreur du vuide ;
je veux qu'il puiffe très-bien accorder la liberté des
mouvemens avec le plein parfait ; qu'il prouve mê-
me la néceffité actuelle du plein : à la bonne heure*
L'endroit où je l'arrête, eft cette prétention que
le vuide loit impofnble. Il ne l'eft pas même dans fa
fuppofition. Car pour remplir tous les interftices, il
faut avoir des pouffieres de toute taille , qui vien-
nent au befoin fe glilfer à propos dans les interval-
les entre-ouverts. Ces pouffieres ne fe forment qu'à
la longue. Les globules ne s'arrondiffent pas en un
initant. Les coins les plus gros fe rompent d'abord j
puis les plus petits; 6c à force de frottemens, nous
pourrons recueillir de nos pièces pulvérilées de quoi
remplir tout ce qu'il nous plaira : mais cette pulvé-
rilation eft luccellive. Ainii au premier moment que
Dieu mettra les parcelles de la matière primordiale
en mouvement ; la pouffiere n'eft pas encore formée :
Dieu fouleve les angles ; ils vont commencer à fe
brifer: mais avant que la choie foit faite, voilà en-'
tre ces angles des vuides fans fin, & nulle matière
pour les remplir.
3°. Selon Deicartes , la lumière eft une maffe de
petits globes qui fe touchent immédiatement, en for-
te qu'une file de ces globes ne l'auroit être pouffée
par un bout, que l'impulfion ne le taife ientir en mê-
me tems à.l'autre bout , comme il arrive dans un bâ-
ton , ou dans une file de boulets de canon qui fe tou-
chent. M. Roemer & M. Picard ont obiervé , que
quand la terre étoit entre le foleil & Jupiter, les éclip-
fes de fes fatellites arrivoient alois plutôt qu'il n'eft
marqué dans les tables ; mais que quand la terre s'en
alloit du côté oppofé, & que le foleil étoit entre Ju-
piter 6c la terre, alors les eclipfes des latellites arri-
voient pluficurs minutes plus tard , parce que la lu-
mière avoit tout le grand orbe annuel de la terre à
traverfer de plus dans cette dernière lîtuution que
dans la précédente: d'où ils l'ont parvenus à pouvoir
affûrer que la lumière du foleil mettoit lept à huit
minutes à franchir les trente trois millions de lieues
qu'il y a du foleil à la terre. Quoi qu'il en foit au refte
fur la durée précité de ce trajet de la lumière , il eft
certain que la communication ne s'en fait pas en un
inftant; mais que le mouvement ou la preiiion de la
lumière parvient plus vite furies corps plus voilins,
& plus tard fur les corps plus éloignés : au lieu qu'une
file de douze globes , 6c une file de cent globes , s'ils
fe touchent, communiquent leur mouvement auliî
vite l'une que l'autre. La lumière de Deicartes n'eft
donc pas la lumière du monde. Voy. Aberration.
En voilà affez, ce me fcmble, pour faire fentir
les inconvéniens de ce fyftème. On peut, a-, s
de Fontenelle, féliciter le fiecle, qui, en nous don-
nant Deicartes, a mis en honneur un nouvel art de
raifonner, & commumqué aux autres feiences l'exac-
titude de la Géométrie, Mais on doit , félon fa judi-:
YYyy ij
7*4 CAR
cieufe remarque, « fentir l'inconvénient des fyftè-
» rr.es précipités, dont l'impatience de l'eiprit hu-
» main ne s'accommode que trop bien , & qui étant
» une fois établis , s'oppoient aux vérités qui fur-
» viennent ».
Il joint à fa remarque un avis falutaire, qui eft d'a-
mafier, comme font les Académies , des matériaux
qui le pourront lier un jour, plutôt que d'entrepren-
dre avec quelques lois de méchanique , d'expliquer
intelligiblement la nature entière & Ion admirable
variété.
Je lai qu'on allègue en faveur du fyfième de Def-
cartes , l'expérience des lois générales par lelquelles
Dieu conlerve l'univers. La coniervation de tous les
êtres eft, dit-on , une création continuée ; 6c de mê-
me qu'on en conçoit la coniervation par des lois gé-
nérales, ne peut-on pas y recourir pour concevoir,
par forme cie iïmple hypothefe, la création & tou-
tes l'es fuites ?
Raifonner de la forte eft à peu-près la même cho-
fe , que fi on aiiùroit que la même méchanique , qui
avec de l'eau , du foin cv de l'avoine , peut nourrir
un cheval , peut auiîi former un eftomac & le che-
val entier. Il eft vrai que li nous fuivons Dieu dans le
gouvernement du monde, nous y verrons régner
une uniformité lublime. L'expérience nous autorité
à n'y pas multiplier les volontés de Dieu comme les
rencontres des corps. D'une feule volonté , il a réglé
pour tous les cas 6c pour tous les fiecles , la marche
6c les chocs de tous les corps , à railbn de leur maf-
fe , de leur vîteiTe & de leur reffort. Les lois de ces
chocs 6c de ces communications peuvent être fans
doute l'objet d'une Phyfique très-fenfée 6c très-utile ,
furtout lorlque l'homme en fait uiage pour diriger ce
qui eft fournis à les opérations , 6c pour conftrui-
re ces diriérens ouvrages dont il eft le créateur fub-
alterne. Mais ne vous y méprenez pas : autre chol'e
eft de créer les corps , 6c de leur afîigner leur place &
leurs fonctions , autre choie de les conferver. Il ne
faut qu'une volonté ou certaines lois générales fidè-
lement exécutées pour entretenir chaque efpece dans
fa forme ipéciale, & pour perpétuer les vicifïïtudes de
l'oeconomie du tout , quand une fois la matière eft
créée. Mais quand il s'agit de créer , de régler ces for-
mes fpéciales, d'en rendre l'entretien fûr.& toujours
le même , d'en établir les rapports particuliers, &c la
correfpondance univerfelle ; alors il faut de la part
de Dieu autant de plans & de volontés fpéciales,
qu'il fe trouve de pièces différentes dans la machi-
ne entière. Hïji. du ciel, tome II.
M. Deicarîes compofa un petit traité des pafjîons,
l'an 1946 , pour l'ulage particulier de la princeffe
Eliiabeth. Il l'envoya manuferit à la reine de Sué-
de fur la fin de l'an 1647. Mais fur les inftances que
l'es amis lui firent depuis pour le donner au public , il
prit le parti de le revoir, & de remédier aux défauts
que la princeffe philofophe fa difciple y avoit remar-
qués. Il le fit voir enfuite à M. Clerfelier , qui le trou-
va d'abord trop au-deffus delà portée commune, &
qui obligea l'auteur à y ajouter de quoi le rendre in-
telligible à toutes fortes de perfonnes. Il crut enten-
dre la voix du public dans celle de M. Clerfelier, &
les additions qu'il y fit augmentèrent l'ouvrage d'un
tiers. Il le divifa en trois parties, dans la première
defquelles il traite des paffions en général , & par oc-
caiionde la nature de l'ame, &c. Dans la féconde,
des lix paffionsprimitives;&dans latroifieme, de tou-
tes les autres. Tout ce que les avis de M. Clerfelier
firent ajouter à l'ouvrage , put bien lui donner plus
de facilité & de clarté qu'il n'en avoit auparavant :
mais il ne lui ôta rien de la brièveté 6c de la belle fim-
plicité du ftyle, qui étoit ordinaire à l'auteur. Ce
n'ett point en Orateur , ce n'eft pas même en Philo-
fophe moral, mais enPhyficien, qu'il a traité ton
CAR
fujet ; et il s'en acquita d'une manière fi nouvelle ,'
que fort ouvrage fut mis fort au-deffus de tout ce
qu'on avoit fait avant lui dans ce genre. Pour bien
déduire toutes les pallions, & pour développer les
mouvemens du fangqui accompagnent chaque paf-
lion , il étoit néceffaire de dire quelque choie 1
nimal. Aufli voulut-il commencer en cet endroit à
expliquer la compofition de toute la machine du corps
humain. 11 y fait voir comment tous les mouvemens
de nos membres, qui ne dépendent point de la pen-
lée , fe peuvent faire en nous tans que notre ame y
contribue , par la feule force des eiprits animaux ,
& la difpoiition de nos membres. De forte qu'il ne
nous fait d'abord confidérer notre corps , que comme
une machine faite par la main du plus lavant de tous
les ouvriers , dont tous les mouvemens reffembient
à ceux d'une montre , ou autre automate , ne fe fai-
fant que par la force de fon refibrt , & par la figure
ou la diipofition de tes roues. Après avoir expliqué
ce qui appartient au corps , il nous fait ailement con-
clurre qu'il n'y a rien en nous qui appartienne à no-
tre ame, que nos penfées, entre lelquelles les pal-
lions font celles qui l'agitent davantage ; & que
l'un des principaux devoirs de la Philofophie eft de
nous apprendre à bien connaître la nature de nos paf-
fions , à les modérer, 6c à nous en rendre les maîtres.
On ne peut s'empêcher de regarder ce traité de M.
Defcartes, comme l'un des plus beaux & des plus
utiles de les ouvrages.
Jamais Philofophe n'a paru plus refpeclueux pour
la divinité que M. Defcartes ; il fut toujours fort fa-
ge dansfes difeours fur la religion. Jamais il n'a parlé
de Dieu qu'avec la dernière circonfpedion ; toujours
avec beaucoup de lageffe , toujours d'une manière
noble 6c élevée. Il étoit dans l'appréhennon conti-
nuelle de rien dire ou écrire qui hit indigne de la re-
ligion , & rien n'égaloit fa délicatefl'e lur ce point.
Voye^ tome premier & fécond des Lettres.
Il ne pouvoit fournir fans indignation la témérité
de certains Théologiens qui abandonnent leurs gui-
des , c'eft-à-dire , l'Ecriture 6c les Pères, pour mar-
cher tout feuls dans des routes qu'ils ne connoiffent
pas. Il blâmoit furtout la hardiefle des Philofophes
& Mathématiciens , qui paroiffenî fi décififs à déter-
miner ce que Dieu peut , 6' ce qu'il ne peut pas. « C'eft,
» dit-il, parler de Dieu, comme d'un Jupiter ou
» d'un Saturne , & l'affujettir au ftyx 6c au deftin ,
» que de dire qu'il y a des vérités indépendantes de
» lui. Les vérités mathématiques font des lois que
» Dieu a établies dans la nature , comme un roi éta-
» blit des lois dans fon royaume. Il n'y a aucune de
» ces lois que nous ne puiffions comprendre : mais
» nous ne pouvons comprendre la grandeur de Dieu,
» quoique nous la connoifîions , &c.
» Pour moi , dit encore ailleurs M. Defcartes, il
» me femble qu'on ne doit dire d'aucune choie ,
» quelle eft impojjible à Dieu. Car , tout ce qui eft
» vrai 6c bon dépendant de fa toute-puiffance , je
» n'oie pas même dire que Dieu ne peut faire une mon-
» tagne fans vallée , ou qu'un & deux ne faffent pas
» trois. Mais je dis feulement qu'il m'a donné un cf-
» prit de telle nature , que je ne faurois concevoir
» une montagne fans vallée , ou que l'aggrégé d'un
» & de deux ne faffent pas trois ». Foye^ tome II.
des Lettres. Cette retenue de M. Defcartes , peut-
être excefïïve, a choqué certains efprits, qui ont
voulu lui en faire un crime. Car , fur ce qu'en
quelques occaiions , il employoit le nom d'un ange
plutôt que celui de Dieu , qu'il ménageoit par pur
refpecl: ; quelqu'un ( Beecman ) s'étoit imaginé qu'il
étoit affez vain pour fe comparer aux anges. Il fe
crut obligé de repouffer cette calomnie. « Quant au
» reproche que vous me faites , dit-il , page 66 , 6 yy
» de m'être égalé aux anges , je ne faurois encore
CAR
» meperfnader que vous l'oyez fi perdu d'efprit,qïtê
croire. Voici fans doute , ce qui vous a donné
» occafion de me faire ce reprocha: c'eft la couiu-
■ ■ les Philofophes & même des Théologiens , tou-
» tes les fois qu'ils veulent montrer, qu'il répugne
» tout-à-fait à la raifon que quelque choie le raiie ,
» de dire que Dieu mime, ne kjauroit faire : ôc parce
» que cette façon de parler m'a toujours femblé trop
« hardie ; pour me iervir de termes plus modeftes.
» quand l'occafion s'en préiente , où les autres di-
. que Dieu ne peut faire une ckofe , je me con-
» teirte lculcment de dire qu'un ange ne la fauroit
y faire .... Je luis bien malheureux de n'avoir pu
. r le ioupçon de vanité en une choie , où je puis
» dire que j'aitectois une modeltie particulière ».
A l'égard de l'exiftence de Dieu , M. Delcartes
étoit fi content de l'évidence de la démonftration ,
qu'il ne faifoit point difficulté de la préférer à toutes
celles des vérités mathématiques. Cependant le mi-
nifire Voetius l'on ennemi , au lieu de l'acculer d'a-
voir mal réfuté les Athées, jugea plus à propos de
l'acculer d'Athéiime , fans en apporter d'autre
preuve , finon qu'il avoit écrit contre les Athées.
■ étoit aîtùrément nouveau: mais afin qu'il
r.j parut pas tel , Voetius trouva allez à tems l'e-
xemple de Vanini, pour montrer que M. Delcartes
n'auroit pas été le premier des Athées qui auroit écrit
en apparence contre l'Athéiime. Ce fut furtout l'im-
pertinence de cette comparailbn , qui révolta M.
Defcartes , & qui le détermina à jéfuter une ii ridi-
cule calomnie dans une lettre Latine qu'il lui écri-
vit. Quelques autres de lés ennemis entreprirent de
l'augmenter en l'acculant outre cela d'un fcepticifme
ridicule. Leurs aceufations fe réduifoient à dire
que M. Delcartes fembloit infinuer , qu il falloit nier
( au moins pour quelque tems ) qu'il y eût un Dieu;
que Dieu pouvoit nous tromper ; qu'il falloit révoquer
toutes c/iojés en doute ; que L'on ne devoit donner aucune
créance, aux fins; que le fommeil ne pouvoit fe difinguer
d, la veille. Al. Delcartes eut horreur de ces aceu-
fations ; & ce ne fut pas fans quelque mouvement
d'indignation , qu'il y répondit. « J'ai réfuté , dit-il ,
» tômi II. des Lettres , page ijo , en paroles très-ex-
» preffes toutes ces choies qui m'avoient été objec-
» tées par des calomniateurs ignorans. Je les ai ré-
» futées même par des argumens très-forts ; & j'ofe
» dire plus forts qu'aucun autre ait fait avant moi.
» Afin de pouvoir le faire plus commodément t>c
» plus efficacement , j'ai propofé toutes ces choies
» comme douteufes au commencement de mes Me?
» dilations. Mais je ne luis pas le premier qui les ave
» inventées ; il y a long tems qu'on a les oreilles bat-
» tues de iemblables cloutes propoiés par les Sccp-
» tiques. Mais qu'y a-t-il de plus inique , que d'at-
» tribuer à un auteur des opinions , qu'il ne propofe
» que pour les réfuter ? Qu'y a-t-il de plus imperti-
» nent que de feindre qu'on les propofe , & qu'elles
» ne font pas encore réfutées , &c par conféquent
» que celui qui rapporte les argumens des Athées.,
» eit lui-même un Athée pour un tems ? Qu'y a-t-il
» de plus puérile que de dire que s'il vient à mou-
» rir avant que d'avoir écrit ou inventé la démonf-
» tration qu'il ciperc , il meurt comme un athée ?
» Quelqu'un dira peut-être que je n'ai pas rapporté
» ces faillies opinions comme venant d'autrui , mais
» comme de moi : mais qu'importe ? puilque dans le
» même livre où je les ai rapportées , je les ai auifi
r> toutes réfutées ».
Ceux qui ont l'efprit jufte &£ le cœur droit , en
lifant les Méditations & les Principes de M. Defcartes ,
n'ont jamais héiité à tirer de leur lecture des conié-
quences tout oppofées à ces calomnies. Ces ouvrâ-
tes n'ont encore rendu Athée jufqu'aujourd'hui au-
cun de ceux qui çroyoient en Dieu auparavant ; au
CAR
725
contraire, ils ont converti quelques Athées. C'eft au
moins le témoignage qu'un Peintre de Suéde nommé
BeA , a rendu publiquement de lui-même chez M,
l'ambaffadeur de France à Stockolm. Voye^ tout
cela plus au long dans la vie de Delcartes , nar A.
Baillét. (C) * *
On peut voir dans un grand nombre d'articles de
ce Dictionnaire , les obligations que les Sciences ont
à Delcartes , les erreurs où il eit tombé , & les prin-
cipaux difciples. Yoycr Algèbre , Equation ,
Courbe, Mouvement, Idée, Ame, Percus-
sion , Lumière , Tourbillon , Matière sub-
tile , &c
Ce grand homme a eu des fectateurs illunres : on
peut mettre à leur tête le P. Malebranche , qui ne l'a
pourtant pas fuivi en tout. Voye^ Malebranchis-
me. Les autres ont été Itohaut , Régis, &c. dont nous
avons les ouvrages. La nouvelle explication du mou-
vement des Planètes , par M. Fillemot , curé de Lyon ,
imprimée à Paris en 1 707, eit le premier, & peut-être
le meilleur ouvrage qui ait été fait pour défendre
les tourbillons, t'oye? TOURBILLONS.
La Philoiophic de Delcartes a eu beaucoup de pei-
ne à être admile en France ; le parlement penia ren-
dre un arrêt contre elle : mais il en fut empêché par
la requête burlefque en faveur d'Ariftote, qu'on lit
dans tes œuvres de Dejpreaux, & où l'auteur lous pré-
texte de prendre la défenfe de la Phiiofophie péripa-
téticienne , la tourne en ridicule ; tant il eil vrai que
ridiculum acri , &c. Enfin cette Phiiofophie a été re-
çue parmi nous. Mais Newton avoit déjà démontré
qu'on ne pouvoit la recevoir. N'importe : toutes nos
univerfités & nos académies même y font demeurées
fort attachées. Ce n'eft que depuis environ 1 8 ans ,
qu'il s'eit élevé des Newtoniens en Francej mais ce
mal , fi c'en eu un ( car il y a des gens pour qui c'en
eit un ) a prodigieuiement gagné ; toutes nos aca-
démies maintenant font Nevtoniennes , & quelques
profefleurs de l'univerfité de Paris enieignent aujour-
d'hui ouvertement la Phiiofophie Angloife. Voyc^
Attraction , &c. Voyc^ auffi fur Defcartes & les
Carté/îens, notre Difcours préliminaire.
Quelque parti qu'on prenne fur la Phiiofophie de
Delcartes , on ne peut s'empêcher de regarder ce
grand homme comme un génie fublime & un Philo-
sophe très-conféquent. La plupart de fes feûateurs
n'ont pas été aui'Ii conféquens que lui ; ils ont adopté
quelques-unes de fes opinions , & en ont admis d'au-
tres , fans prendre garde à l'étroite liaiion que pref-
que toutes ont entre elles. Un Philofophc moderne,
écrivain élégant & homme de beaucoup d'elprit ,
M. l'abbé de Gamaches , de C Académie royale des
Sciences, a démontré à la tête de l'on Aflronomie phy-
fque, que pour un Cartéfien , il ne doit point y avoir
de mouvement abfolu , S: que c'eft une coniéquen-
ce néceflaire de l'cpinion de Delcartes , que l'éten-
due & la matière font la même choie. Cependant
les Cartéiiens croyent pour la plupart le mouvement
abfolu , en confondant l'étendue avec la matière.
L'opinion de Defcartes fur le machinifmc des bêtes
(Voye^ Ame DES BÈtes) eit très-favorable au dog-
me île la fpiritualité & de l'immortalité de l'âme ;
& ceux qui l'abandonnent fur ce point , Soi ■
moins avouer que les difficultés contre l'ame des
bêtes lont, linon infolubles, du moins très-grandes
pour un Philofophe chrétien. Il en eft de même de
plufieurs autres points de la Phiiofophie de ce grand
homme. L'édifice eft vafte, noble, & bien entendu:
c'eft dommage que le fiecle où il vivoit, ne lui ait
pas fourni de meilleurs matériaux. Il faut, dit M. de
Fontenelle , admirer toujours Defcartes, & le luivre
quelquefois.
Les perlécutions que ce Philofophe a efluyées pour
avoir déclaré la guerre aux préjuge; Se à l'ignorai*-
"726
CAR
ce, doivent être la confolation de ceux qui ayant le
même courage, éprouveront les mêmes traverfes. Il
eft honoré aujourd'hui dans cette même patne, ou
peut-être il eût vécu plus malheureux qu'en Hollan-
de. (0)
CARTÉSIENS , f. m. pi. eft le nom qu on donne
aux partifans de la philofophie de Defcartes. On ap-
pelle par cette raiibn cette philofophie , philofophie
Cartéjienne, ou Cartefianifme. Il n'eft prelque plus au-
jourd'hui de.Cartéhens rigides, c'eit-à-dire qui fui-
vent Defcartes exactement en tout; fur quoi voye^
la fin de l'article Cartésianisme.
CARTHAGE , dite la grandi , {Géog.) fut autre-
fois capitale d'un puùTant empire , & la principale
vil'e d'Afrique près de Tunis. Scipion le jeune la prit
&la ruina 146 ans avant J. C. Elle fat rebâtie lous
C. Gracchus, 1 23 ans avant J.C. & lesArabes la rui-
nèrent environ l'an 685. Elle étoit fituée dans une
langue de terre qui formoit une prefqu'ile , jointe à
l'Afrique par un iithme de vingt-cinq ftades , entre
Utique & Tunis. Toute la prefqu'ile avoit trois cents
foixante ftades de tour. Il ne relie de Carthage que
quelques vertiges. La prefqu'ile a retenu le nom de
promontoire de Carthage.
C ARTH AGENE , {Géog.) ville forte & port d'Ef-
pa^ne au royaume de Murcie , capitale du pays de
mime nom. Long. ij. 6. lat. zyd. 3 61 . j".
Carthagene ,(Géog. ) grande ville de l'Amé-
rique méridionale , capitale de la province de même
nom. Il s'y fait un commerce très-conlidérable. Son
port paffe pour le meilleur du Nouveau-monde. Lon.
301. 10. lat. ioA.3o'.z5".
CAKTHAGO , ( Géog. ) ville confidérable de 1 A-
mérique feptentrionale , dans le Mexique. Lon. 23 6".
iS.lat.g.â.
CAR&AGO , OH la NOUVELLE CARTHAGENE ,
( Géog.) ville d'Amérique dans l'audience de Santa-
fé , en terre ferme.
C ARTH AME ,f. m. ou SAFRAN BATARD , car-
thamus , ( Hijl. nat. bot. ) genre de plante dont la
fleur eft un bouquet à plulieurs fleurons découpés
en lanières , portés chacun fur un embryon , & ibû-
tenus par un calice écailleux garni de feuilles. Lorf-
que la fleur eft paffée , chaque embryon devient une
lemencefans aigrette. Tournefort , Infi. rei herb. Voy.
Plante. (/)
Le carthamus ojflcinarum flore croceo , Tourn. Injl.
45 7 , eft d'uiage en Médecine. Sa femence paffe pour
un violent purgatif; elle évacue la pituite par haut
Se par bas.
Etmuller dit qu'elle eft propre dans les cas où les
premières voies lbntfurchargées d'une mucofité épaif-
fe & vifqueufe , dans les maladies de la poitrine ,
dans l'afthme , ôt dans la toux, occafionnée par une
matière épaiffe & tenace : il la compte par cette rai-
fon parmi les remèdes qui évacuent le phlegme.
La meilleure façon de s'en fervir eft de la donner
enémulfion purgative, avec quelqu'eau aromatique,
telle que celle de fenouil ou d'anis ; on la mêle en-
fuite avec un lait d'amande. La dofe elt jufqu'à trois
gros. On fait avec cette femence des tablettes.
Tablettes diacarthami. Prenez du turbith choiii une
once & demie ; de la moelle de femence de carthame,
de la poudre diatraganth froid , des hermodactes ,
du diagrede , de chacun une once ; du gingembre de-
mi-once ; de la manne deux onces &c demie ; du
miel rofat , de la chair de coin confite , de chacun
deux gros ; du fucre blanc diffous dans l'eau, & cuit
, en éiectuaire folide, une livre fix onces. Faites -en
' félon l'art un éiectuaire folide & en tablettes.
Un oros de ces tablettes contient du turbith trois
grains ; des hermodactes ôt du diagrede , de chacun
deux grains ; de manne cinq grains. La dofe eft de-
puis un gros jufqu'à une once pour les tempéramens
forts.
CAR
Tous les purgatifs de cette efpece font très à crain-
dre , & ne doivent être employés qu'avec de gran-
des précautions. (-W)
CARTIER , f. m. aitifan ou marchand qui a le
droit de faire ÔC vendre des cartes à jouer. Voye^
Cartes.
Les Cartiers faifeurs de cartes à jouer , forment à
Paris une communauté fort ancienne : on les nom-
me aujourd'hui Papetiers-Cartiers : mais dans leurs
ftatuts ils ont le titre de maîtres du métier de Cartiers ,
faifeurs de canes , tarots , feuillets , & cartons ; ou Car-
tiers , Tarotiers, Feuilletiers , & Cartonniers.
Les ftatuts dont ils fe fervent encore à préfent ,
& qui ne font que des ftatuts renouvelles en confé-
quence de Ledit de Henri III. de 1 5 8 1 , ont été con-
firmés & homologués en 1 594 fous Henri IV. ils con-
tiennent vingt-deux articles , auxquels Louis XIII.
& Louis XIV. en ont encore ajouté quelques autres.
Le premier & le quatrième portent qu'aucun ne
pourra faire le métier de Cartier s'il n'eft reçu maître,
& s'il ne tient ouvroir ouvert fur la rue.
Les deuxième & troiiieme fixent l'apprentiffage à
quatre années , fuivies de trois autres de compagno-
nage , après lefquelles les afpirans font obligés de
faire le chef-d'œuvre, qui coniifte en une demi-groffe
de cartes fines , & de payer les droits aux jurés pour
être admis à la maîtriie.
Les cinquième & lixieme fixent le nombre des ap-
prentis à un , ou à deux fi le maître tient chez lui
cinq ou fix compagnons ; & défendent aux maîtres
de le tranfporter leurs compagnons fans en avertir
les jurés.
Les feptieme , huitième , neuvième , dixième , &
dix-huitieme , fixent les droits des fils , filles , & veu-
ves des maîtres.
Le feizieme enjoint aux maîtres d'avoir une mar-
que différente les uns des autres , fur laquelle doit
être détaillé leur nom , furnom , enfeigne , & de-
vife.
Les autres articles regardent l'élection des deux
jurés , & contiennent des règles de difeipline pour
les maîtres & les compagnons. Voye^ les réglemens des
arts & métiers.
Cartier , nom d'une forte de papier qui eft def-
tiné à couvrir les jeux ou les lixains de cartes à joiier.
Foyei Papier & Cartes.
CARTILAGE , enAnatomie , c'eft une des parties
folides du corps , blanche , polie , uniforme , flexi-
ble , & éiaftique , moins compacte qu'un os, mais
plus dure qu'aucune autre partie.
Les cartilages paroiffent être à peu près de même
nature que les os , puifqu'ils ont été cartilages , & que
d'ailleurs toutes les parties folides ne paroiffent dif-
férer que par le plus ou moins de confiitance. Voye^
Os, Ossification, & Solide.
Il y en a qui font très-durs , & qui même devien-
nent ofleux avec le tems ; comme ceux qui uniffent
les côtes au lternum , ceux du larynx , &c. Voye^
Sternum & Larynx.
D'autres font plus tendres , & fervent à donner à
certaines parties leur configuration ; comme ceux
du nez , des oreilles , &c qui doivent avoir un pe-
tit mouvement que produit l'élalticité de ces cartila-
ges , laquelle leur fait faire l'office de mufcles anta-
goniftes. Foye^ Nez , &c.
Il y en a d'autres plus mous encore , qui tiennent
quelque chofe de la nature des ligamens , & qui par
cette raifon font appelles cartilages ligamenteux. Foy.
Ligament.
Il y a des cartilages de différentes figures , auxquels
on donne différens noms tirés de ceux des chofes aux-
quelles ils reffemblent : l'un fe nomme fémi-lunaire ;
un autre xiphoïde , parce qu'il reffemble à la poin-
te d'un poignard ; un autre feutiforme , parce qu'il
CAR
a la figure d'un bouclier; & ainfides autres. Voye^
chacun de ces cartilages à leur article.
Les cartilages n'ont point de cavités qui contien-
nent de moelle , ni de nerfs ou de membranes qui
les rendent fufceptibles de fcnlations. Leur uiage eft
d'empêcher les' os de s'ofténier ou de fe blefier par
un froifiement continuel , de les joindre l'un à l'autre
par lynchondrofe , de contribuer à la conformation
de certaines parties-, comme le nez , les oreilles , la
trachée , les paupières , &c. (i.)
CARTILAGINEUX, EUSE, adj. qui eft de la
nature du cartilage , qui eft tompoié de cartilage :
ligament cartilagineux ;fymphife cartilagineuje.
* C ARTISANNE , en terme de houtonnier , de Paf
fementier , de Rubanier , Ôcc. c'eft un ornement com-
polé d'un tond de vélin ou de veau , recouvert de
foie , de milanoilé , d'or ou d'argent , &c. on coupe
d'abord l'on vélin ou l'on veau , tantôt par bandes
plus ou moins étroites , tantôt en pic , en l'abot , en
pompons > avec l'emporte-piece ; voye^ Pic, Sa-
bot , & Pompon ; enfuite on couvre ces bandes
ou découpures , les premières au rouet , les fécondes
à la bobine , avec de la foie de trame pour les car-
tifannes unie? , & de loie de grenade pour faire les
frilées. Les cartifannes peuvent être couvertes de
nouveau d'un trait d'or , quand les ouvrages qu'on
veut en faire font riches. La cartifanne s'employe au
lieu de mùanoile , de climmant , de cordonnet , &c
on en fait le^ feuilles d'une cocarde , d'une aigrette ;
on en recouvre en différens deiïeins des bandes dé*
corniche dans les appartemens , pour imiter des mor-
ceaux de lculpture. Le vélin s'employe comme il
vient de chez le Parcheminier ; le veau le prend chez
le Corroyeur , & on lui donne un apprêt qui eft un
fecret parmi les Boutonniers , pour le rendre dur &
ferme. Voy.fig. 14. Planche du Boutonnier, une pièce
de corps ouvragée en cartifanne; & dans la vignette de
la même Planche , des ouvriers qui s'occupent à cette
forte d'ouvrage. La figure là. repréfente leur établi.
* CAPiTON , f. m. ( Art mechaniq. ) le carton eft
un corps qui a beaucoup de furface & peu d'épail-
feur , compote par art avec des rognures de cartes ,
des rognures de reliures , &: de mauvais papier, à
l'ufage d'un grand nombre d'ouvriers ; mais lur-tout
des Relieurs mêmes. Il y a beaucoup de reflemblan-
ce entre la manœuvre du Papetier 6c celle du Car-
tonnier : le Papetier prend dans un moule le chifon
réduit en bouillie , pour en faire du papier ; le Carton-
nier prend dans un moule le papier même remis en
bouillie , pour en faire le canon.
Pour faire du carton , il faut ramaiTer dans un ma-
gafin une grande quantité de rognures de Pvelieur &
de Cartier , avec beaucoup de mauvais papier ;
flpnd on a la provifion faite de ces matières , on en
tranl porte ce qu'on en peut travailler relativement
au nombre d'ouvriers qu'on employé , dans un atte-
lier bien clos. Le pavé de cet attelier doit s'élever un
peu vers le fond , & l'attelier doit être garni d'auges
de pierre , larges & profondes, placées vers le côté
oppofé. Il faut qu'il y ait des trous à ces auges , Se
fous ces trous des pierres concaves , qui puifient con-
duire les eaux dans une rigole qui les évic; il (croit
aufïï à propos qu'il y eût un puits dans le même at-
telier , avec une pompe qui conduisît l'eau dans les
auges , & dans tous les autres endroits de la carton-
nerie où l'on en peut avoir befoin.
On jette au lortir du magaiin le mélange de papier ,
de rognures de papier, &c de cartes, dans les auges
del'attelicrque je viens de décrire , & qu'on appelle
celui du trempi ; on humecte ou moitit ces matières
avec de l'eau , & de-là on les jette fur le fond de l'at-
telicr , oit l'on en forme des tas conliderables. La
gomme , la colle , & les autres fubftances qui font
dans ces matières qu'on n'a eu garde de tiop humec-
CAR
727
ter, y élèvent peu à peu la fermentation , au bout de
quatre à cinq jours dans les chaleurs de l'été , & de
fix à lept ou huit , à l'approche de l'hy ver ; la fermen-
tation eft fi forte , qu'on a peine à fupporter la cha-
leur & l'odeur des tas : la quantité de papier dont ils
font formés , eft beaucoup plus confidérable que celle
de rognures de canes. Ce n'eft pas que plus il y a de
ces rognures , plus le carton ne loit fort & bon : mais
on les épargne , parce qu'elles font chères. Elles fe
vendent aujourd'hui jufqu'à fept livres dix fous le
cent. Afin que le travail ne foit point interrompu
dans une cartonnerie , c'eft la coutume de mettre en
fermentation autant de tas qu'on en met en travail ;
de manière que quand un tas eft à fa fin, une autre
puilîe être entamé.
Quand la matière des tas a fuffifammeàt fermenté,
ce qui la difpole à fe mettre en bouillie, on en prend
une quantité convenable qu'on porte dans un atte-
lier contigu , qu'on appelle Y attelier du moulin. Cet at-
telier eft partagé en deux parties ; d'un côté font des
auges, de l'autre le moulin. Les auges de cet attelier
s'appellent auges à rompre ; il y a au-deffus de ces au-
ges de gros robinets qui fournifient la quantité d'eau
dont en a befoin. Avant que de jetter les matières
fermentées dans les auges , on les ouvre &c on les
trie , ou rejette les grofles ordures qui s'y trouvent :
il feroit à fouhaiter que ce triage fe fît mieux ; il épar-
gnerait prefqu'une manœuvre , dont nous parlerons
dans la fuite, qu'on appelle Vépluchage.
A mefure que les matières font ouvertes & triées ,
on les laifie tomber dans les auges à rompre ; on lâ-
che les robinets , & on laifie bien imbiber d'eau les
matières ; enfuite on les remue , puis on les rompt :
les rompre, c'eft les battre avec des pelles de bois
qu'on y plonge perpendiculairement , & qu'on tour-
ne en rond. Des ouvriers vigoureux continuent ce
travail jufqu'à ce qu'ils s'apperçoivent que les ma-
tières font broyées , hachées & miles en bouillie, au-
tant qu'on peut le faire par une manœuvre aufli grof-
fiere ; alors ils prennent des fceaux qu'ils en remplif-
fent , &c qu'ils verfent dans le moulin qu'on voit PI.
du Cartonnier, vignette, fig. 1. La cuve AB , eft com-
pofée de douves épaifles , étroites , & bandées par de
larges cerceaux de fer. Il y a au fond de cette cuve une
crapaudine qui porte la pointe enfer de l'arbre CD ;
l'autre extrémité de cet arbre eft garnie d'un touril-
lon reçu dans une poutre : le milieu en eft percé d'un
trou quarré; ce trou reçoit le bras fupérieur de la tra-
verle d'un brancard EFG. Les parties E F 'du bran-
card afl'errtblées perpendiculairement avec latraver-
fe liipérieurc , lailfent entre elles l'efpace néceflaire
pour recevoir un cheval qu'on y attelé par Ion col-
lier, percé de deux trous où l'on infère des bouts de
cordes bouclés , qui pendent des extrémités des par-
ties E F du brancard , & qu'on arrête fur le collier
par deux clavettes. Le cheval fe meut autour de la
cuve , & fait tourner l'arbre qui eft garni à fa partie
inférieure de bandes de fer pliées en quarré , dont
deux bouts font fcellés dans l'arbre , qui forme un
des côtés du quarré, & dont un autre côté lui eft pa-
rallèle , ainii qu'on voit fig. 4. CD, l'arbre; EF ,
les tourillons; G H, bras du brancard; IK, LM,
autres parties du brancard ,no, pq, cordes & cla-
vettes ; rs , rs , rs, rs, bandes de fer pliées qu'on ap-
pelle couteaux. Ces couteaux achèvent de divilcr la
matière contenue dans la cuve , & de la difpoler à
être employée. La matière relie une heure & demie ,
deux heures , au moulin , félon que le cheval marche
plus ou moins vîte.
Quand la matière eft moulue , on la pafle dans un
nouvel attelier , qu'on peut appeller proprement la
cartonnerie. L'attelier de la cartonnerie eft divilé en
deux parties , le lieu de la prefi'e , & celui de la cu-
ve. Pour concevoir le lieu de la cuve . il faut imagi-
728
CAR
ner un grand évier entre deux auges , élevées à peu
près à ià hauteur ; l'auge de derrière reçoit la matière
au fortir du moulin ; celui de devant où travaille le
cartonnier s'appelle la cuve. Le cartonnier a une ta-
ble à droite , & fa preffe à gauche. Voye^fig. 2. le
Cartonnier travaillant ;JB,cAh cuve ; CD, le grand
évier , qu'on appelle égouttoir ; G , une forme ; F, le
tonneau du bout , (c'eft ion nom) , qui reçoit l'eau &
la matière qui defeendent de Pégouttoir par l'ouver-
ture E. On n'a point repréfente la table à droite dn
cartonnier, parce qu'il eft facile de l'y fuppofer, non
plus que l'auge de derrière , qui devroit être placée
en X , précifément comme on voit en AB , la cuve
ou l'auge de devant. ,
Lorfque la cuve AB eft pleine de matière prépa-
rée , comme nous venons de l'expliquer , 1 ouvrier
prend une forme ; on entend par.une tonne , un infini-
ment tel que celui que tient l'ouvrier de làfig. 2. dans
la vignette , ou quon voit en G pqfejur r égouttoir. Ce
font quatre morceaux de bois équarris tk aifemblés ,
renfermant un efpace de la grandeur du carton qu'on
veut faire. Le fond eft traverfé de plulîeurs tringles,
qui fortifient Paffcmblage de celles des côtés ; ces
côtés ont été percés de trous, & on y a travaillé un
tiffu ou crible fort ferré de fils de laiton; on apper-
çoit bien ce tiffu ou treillis de fils de laiton longitudi-
naux & tranfverfaux à la forme G. On applique fur
cette forme un chaiîis de bois qui l'embraffe exacte-
ment. On plonge dans la cuve la forme garnie de
fon chaffis , qui lui fait un rebord plus ou moins haut
à diferétion. La matière couvre le treillis de laiton ,
& y eft retenue par le chaffis. L'ouvrier pôle la for-
me couverte de matière jufqu'à la hauteur des bords
du chaffis , fur les barres qui traverfent Pégouttoir.
L'eau mêlée à la matière , ou plutôt la partie la plus
fluide de la matière , s'échappe par les petits trous du
treillis, tombe dans Pégouttoir, & le rend dans le ton-
neau du bout. La partie la plus épailTe & la plus grof-
fiere eft arrêtée, &c fe dépole fur le grillage. Pendant
que cette forme égoutte, l'ouvrier en plonge une autre
dans la cuve qu'il met enfuite fur Pégouttoir, puis il
reprend la première , en enlevé le chaffis , & renver-
fe la matière dépofée fur le grillage , ou plutôt la
feuille de carton , car c'eft elle-même , fur un mor-
ceau de molleton de fa largeur , placé fur le fond du
plateau de la preffe. On voit en L H Kl , ce plateau
chargé en partie. Il étend un nouveau molleton fur
cette feuille ; puis il remplit fa forme après avoir re-
mis fon chaffis , &c la met égoutter ; pendant qu'elle
égoutte , il reprend celle qui eft égouttée , ôte fon
chaffis , & la renverfe fur le molleton , qui couvre la
première feuille de carton. Il couvre cette féconde
feuille d'un molleton , & il continue ainfi Ion travail ,
verlant une forme , tandis qu'une autre s'égoutte , &c
enfermant les feuilles de carton entre des morceaux
de molleton , qui forment fur le plateau de la preffe
KL, une pille H I , qu'on appelle une preffée, quand
elle contient environ cent vingt feuilles doubles , ou
deux cents trente feuilles Amples , telles que celles
dont il s'agit ici. Il faut feulement obferver que le car-
tonnier peut fort bien travailler à deux formes avec
un feul chaffis ; & qu'il y a même à cela une épar-
gne de manœuvre & de tems. Quand une feuille eft
égouttée , il peut , en la laiffant fur Pégouttoir , ôter
fon chaffis, & le placer fur une autre forme, qu'il rem-
plira , &: mettra pareillement égoutter ; tandis que
celle-ci égouttera , il renverfera la première fur le
molleton. Le tems qu'il mettra à renverferiùffira pour
que la féconde forme foit affez égouttée , &: puiffe fe
paffer de fon chaffis, qu'il mettra fur celle qui eft vui-
de qu'il remplira & mettra à égoutter. Pendant que
cette dernière égouttera, il renverfera fur le molleton
celle qui eft reftée fur Pégouttoir fans chaffis , & ainfi
deiuite. Il faut encore obferver que le cartonnier a
CAR
foin de remuer fa cuve , & de la rebrouiller de trois
en trois formes , ce qui s'appelle cocher. L'inftrument
avec lequel on coche , eft une efpece de râteau àgriffe
de fer, qu'on voit, fig. 5. l'ouvrier le prend par fon
manche , &c le promené cinq ou fix fois d'un bout de
la cuve à l'autre , afin de ramener à la furface la ma-
tière qui le fera dépolée au fond. On fe doute bien
qu'il n'a garde de jetter les matières qui fe rendent
. de Pégouttoir dans le tonneau F. c'eft proprement la
gomme & la colle diflbutes , & par conféquent les par-
ties les plus propres à lier celles du carton , & à le
fortifier : auffi le cartonnier verfe-t-il dans fa cuve
avec un feau la matière qui le rend dans ce tonneau,
lorfqu'il en eft trop plein.
L'épaiffeur de la feuille de carton dépend de deux
chofes; de l'épaiffeur de la matière ,& de la hauteur
du chaffis : plus la matière fera épaiffe , le chaffis ref-
tant le même, plus il y aura de matière contenue fur
la torme : plus le chaffis fera haut , la matière reftant
la même , plus on en puifera à la fois.
La grandeur de la feuille dépend de la gran-
deur de la forme ; cela eft évident : mais il eft bon
de favoir qvPavec une grande forme capable , par
exemple , de former un carton de l'étendue de la
feuille in-folio de papier , on fait aifément à la fois
& fans augmenter la manœuvre , deux feuilles de
carton égales à la demi-feuille. Pour cet effet , on fe
iert d'un chaffis , divifé du haut en bas par une trin-
gle de bois qui entre & fe fixe par fes extrémités dans
Tes côtés d'en-haut & d'en- bas de la forme ; de ma-
nière qu'il ne s'en manque prefque rien qu'elle ne
s'applique exactement fur le grillage. Qu'arrive-t-il
de là ? c'eft que la matière puifée dans la cuve le
trouve partagée fur la forme en deux eipaces difté-
rens , dont chacun donne une feuille qui rt'eft que
la moitié de ce que feroit la feuille totale , fans la
tringle qui divife la forme, ou plutôt le chaffis de haut
en bas , & qui s'applique prefque fur le grillage.
Je dis , qui s'applique prefque fur le grillage : c'eft
qu'en effet la tringle , ou ne s'applique pas exacte-
ment fur le grillage ; ou le grillage fléchiffant un peu
fous le poids de la matière dont il eft chargé , fe ié-
pare de la tringle , & laiffe échapper entre la trin-
gle & lui, un peu de matière qui lie les deux feuil-
les , & n'en forme qu'une apparente : mais la join-
ture eft fi mince , c'eft une pellicule de carton ii dé-
liée , qu'on la rompt facilement ; elle fe rompt même
en partie , tout en renverfant la forme fur le lange.
Mais ce qu'on pourroit regarder comme un in-
convénient , devient par hafard une efpece d'avan-
tage : cette pellicule de carton qui ne joint pas affez
les deux feuilles pour n'en faire qu'une, fuffit pour-
tant pour qu'elles fe iéparent en même tems de la
forme quand on les renverfe fur le lange. Les 1^4-
ges font les mêmes , foit qu'on faffe une feule feuille
à la tois , foit qu'on en faffe deux.
Quand on ne veut pas que la feuille fe trouve fé-
parée en deux parties égales , mais qu'on fouhaite
que la feuille foit de toute la grandeur de la forme ,
il n'y a d'autre choie à faire qu'ôter du chaffis la trin-
gle qu'on y avoit arrêtée.
Quand le cartonnier a fait fa preffée , il met des
morceaux de bois fur les bords de la prefTe , & fait
monter fon plateau par ce plan incliné , entre les
montans , comme on le voit en A B. C'eft pour cet
effet qu'on a mis au plateau K L des anneaux. Lorf-
que la preffée eft entre les montans , on la couvre
de planches de chêne ; on place fur ces planches une
rangée de madriers ; fur ces madriers des planches ;
fur ces planches une autre rangée de madriers plus
forts que les précédens ; & fur ces derniers madriers
s'applique fais fupéneur de la preffe qui en fait par-
tie, qui fe meut à couliffe le long de fes montans , &C
qui agit également fur toute la preifée par le moyen
de
CAR
CAR
de la vis , de l'écrou , & de la lanterne. On paiîe un
levier dans les rufeaux de la lanterne ; on met une
corde à l'extrémité de ce levier : cette corde va s'en-
rouler fur un arbre ; cet arbre eft tourné par un bras
de levier auquel un homme s'applique. L'écrou étant
attaché fixement , la vis fait par bas l'effort le plus
violent contre la preffée. En coniéquence de cet ef-
fort) les feuilles prifes entre les molletons s'étendentj
leurs parties lâches & molles fe ferrent , s'appro-
chent, &c s'effuient. On reçoit dans un baquet 1 eau
qui s'en échappe par une ouverture pratiquée au
plateau : on conçoit aifément que cette eau n'eit pas
d'une qualité intérieure à celle du tonneau dvi bout;
auffi la conferve-t-on. Je ne doute pas même qu'é-
tant extrêmement chargée de farine , de gomme ,
de colle , il on s'en fervoit dans les trempis , elle n'en
rendît la fermentation beaucoup plus vigourcufe &
plus forte. On voit l'opération de la preffe fi clai-
rement, /'g. 3. & elle cil fi fimple , qu'il eft inutile
de la détailler davantage. Cette preffe n'a rien de
particulier, que fon plateau , fes madriers, & la grof-
îéur de toutes fes parties.
Le carton ne relie pas long-tems fous la preffe : ia
preffée , quand elle ne rend plus rien par le plateau,
eft envoyée dans un autre attelier.
Cet attelier s'appelle f 'épluchoir : là des filles ,
qu'on appelle éplucheufes , s'occupent à tirer les feuil-
les de car/on d'entre les molletons que les ouvriers ap-
pellent langes , &c à les vifiter les unes après les au-
tres pour en arracher les#groffes ordures. Ces greffes
ordures fe fentent facilement à travers la feuille mol-
le , quand on ne les voit pas. On les ôte ; on prelie
avec le doigt l'endroit déchiré , & il n'y paroît plus
qu'à l'inégalité d'épâiffeur. L'endroit reprend ; il eit
feulement plus mince.
Ou ces feuilles épluchées font deftinées à refier
fimples comme elles font , ou à former un canon plus
épais dont elles feront: parties : fi elles font deftinées
à refier (impies , on les rapporte dans l'attelier de la
preffe, ions laquelle on les remet, & on les équar-
j ir. Equarrit, c'ell en enlever les bords Scies rendre
plus quarrées ; ce qui s'exécute avec une ratifibire
ante. On conçoit bien qu'alors les feuilles ne
font pas entre les langes.
Si on les deftine à former un carton plus épais, il
y a des ouvriers qui ne les épluchent point, de peur
qu'elles ne le lèchent trop; elles parlent de délions
la prelie 011 on les a miles entre les langes pour la
première fois , au côté droit de l'ouvrier iur une ta-
ble : alors l'ouvrier remet proche de lui Ion plateau
vuide ; ôte de deffus la preffée mile fur fa table , le
premier lange qui la couvre, & l'étend au fond de fon
plateau ; il enlevé pareillement la première feuille
fimplc qui fe prélente : mais comme elle eft mollette ,
pour ne la point déchirer, il prend le lange , fur le-
quel elle eft pofée, par les deux coins d'en-bas ; il
corne ces deux coins ; puis il roule le relie de la main
droite, en allant vers la gauche, cv de la gauche en
allant vers la droite. Il porte en cet état la feuille
roulée en deux parties ;,\ ce le lange , fur le fond de
fon plateau. L'endroit des coins étant plus épais que
le relie, fait dérouler ; & la feuille, & fous cette
feuille le lange , font étendus en un moment fur le
fond du plateau. Cela fait, qu plutôt pendant cette
manœuvre , une forme de matière s'égoutte furl'é-
gouttoir; le cartonnier en ôte auffitôt le chaffis, le
met fur une féconde forme ; remplit celle-ci , la met
égoutter, & renverfe la première fur celle qu'il a
étendue fur le plateau.
Puis il retourne à la cuve ; ôte à la forme qui égout-
toit, fon chaffis ; le met à la foi me % uide ; la remplit,
& la met égoutter. Pendant qu'elle égoutte , il s'a-
vance vers la table ; enlevé de la preffée une autre
feuille avec la même précaution que ci-deffus, c'eft*
Tomc II,
ï*9
à-dae roulée dans fon lange, & étend ce lange 8t
cette feuille fur ion plateau ; puis il prend de ces deux
formes la première égouttée , celle qui n'a point de
chaiiis, & la renvcrle fur fon plateau , ou plutôt fur
la feuille de pre:
Il retourne à fa cuve ; ôte à la forme qui égoutte
fon chaffis; remplit la forme qu'il tient, âpres lui
avoir mis le chaffis qu'il a ôte à l'autre , cVla pôle
iur l'égouttoir, Tandis qu'elle égoutte, il enlevé dé
la preffée une feuille roulée dans ion lange , l'étend
fur le plateau avec fon lange deffous ; puis il prend
des deux formes qui égouttoient, celle qui n'a point
de chaffis , & la renverfe Iur le plateau , ou plutôt
fur la feuille de preffée. Il retourne enluite à la cu-
ve , & réitère toute la manœuvre que nous venons
d'expliquer, jufqu'à ce qu'il ait forme une nouvelle
preffée, qui ne différera de la première qu'en ce que
entre chaque lange il ne fe trouvoit qu'une feuil.e ;
au heu qu'ici il y en a deux , la feuille de la nouvelle
fabrique , & celle de la précédente.
Quand cette preffée eil taite , on remet le plateau
fous la preffe , & l'on preffe. L'effet de la manœuvre
| çécéftente & de celle- ci ? cil d'unir fi bien la pre*
m, ère feuille faite avec la fécondé , qu'elles n'enYai-
fent qu'une à peu-près double en épaiffeur , ce qui ne
manque jamais de réuffir ; la première feuille n'étant
pas lèche, la féconde étant toute molle & fluide , il
fe fait entr'ellés une dittribution égale d'humidité :
la feuille de deffous reçoit, pompe même ce que la
feuille de deffus en a de plus qu'elle ; de manière que
l'action de la preffe les identifie fans peine. D'où il
arrive que quand ces nouvelles feuilles paiî'ent à l'at*
telier des éplucheufes, elles font réellement doubles
d'épaiffeur , & c'ell: tout : mais leur corps & leur con-
liitance , iont auffi parfaitement uns que ii elles
avoient été moulées tout d'un coup.
Quand on veut avoir des cartons de moulage très-'
forts,onpeuten appliquer trois feuilles l'une Air l'au-
tre entre les mêmes langes , & n'en faire qu'une de
trois : mais cela ne va point jufqu'à quatre. Comme
ii faut que chacune foit moulée 6c preffée en parti-
culier , l'humidité a le tems de s'échapper pendant
ces opérations réitérées ; la feuille fe feche ; 5e cette
feu. Ile compofée déjà de trois autres , ou n'eit plus
allez molle pour pomper l'humidité d une quatrième
qu'on lui appliquerait , ou cette quatrième , qui eil
fimple , n'a pas affez d'humidité pour arrofet 6c amol-
lir celle qui eft compofée de trois , fur laquelle on l'é-
tend : ainli il arrive qu'elles ne peuvent plus fe lier
ce taire corps.
Quand la nouvelle preffée, foit fimple, foit dou-
ble , foit triple , fort de deffous la prelie , on l'éplu-
che ; on la rapporte fous la preffe ; on l'équarrit , Se
on l'em oye aux étendoirs.
Les étendoirs font de grands greniers ; les plus ai-
res font les plus propres ; par la railon contraire les
caves feroient les meilleurs endroits qu'on put choilïr
pour les trempis. Comme il n'y a plus de lan°cs en-
tre les feuilles de carton quand on les équarrit , il eft
évident qu'on en équarrit beaucoup plus à la fois
qu'on n'en preffe. La quantité qu'on équarrit à la
lois s'appelle une réglée : la réglée eit faite d'une
trentaine de poignées; cv la poignée d'une dixaine
de cartons doubles. On peut apprécier là-de: 1
réglées ce poignées des autres fortes : elles contien-
nent d'autant moins de feuilles , que les feuilles font
plus fortes.
Les réglées trouvent dans les étendoirs des mains
toutes prêtes à les employer : chacun le place devant
fa réglée, le poinçon à la main. Cet infiniment n'eit
autre choie qu'une efpece de pointe de 1er, aiguë ,
. . demie de diamètre au plus par le bas,
de quatre à cinq pouces de long , cv emmanchée com-
me une alêne de Sellier, Un enfonce cet ini'trumen;
ZZ 11
730
CAR
au bord de la réglée , à la profondeur de trois ou qua-
tre pouces ; ce qui s'appelle piquer. On enlevé les
feuilles piquées ou une à une , ou deux à deux , ou
trois à trois : lire à une , fi elles l'ont fort épaiffes ;
deux à deux , fi elles le font moins ; & trois à trois ,
fi elles font Amples : cela dépend auffi un peu 6c de
la faifon qu'il fait , & de Fefpace qu'on a pour ten-
dre. Il eft évident qu'il y a de l'avantage à étendre ,
quand on le peut , les feuilles une à une ; expolant
plus de furface à l'air , elles en fecheront beaucoup
plus vite. Quand on a piqué & féparé les feuilles
comme il convient , on a des bouts de fil d'archal ,
qu'on recourbe en S, de deux pouces de long ou en-
viron ; on paffe un des crochets de l'S dans le trou
de la feuille piquée , & on la fufpend par l'autre cro-
chet aux lattes du toicl , qui forment des efpeces d'é-
chelons en-dedans des greniers , comme tout le mon-
de fait. Les feuilles de carton reftent dix jours ^dou-
ze , quinze , trois femaines étendues , félon la lailbn ,
Se leur épaiffeur. Quand elles font lèches , on abat.
Abattre , c'elt détendre & ôter les aiguilles.
De ces feuilles ainfi préparées, les unes font ven-
dues aux relieurs , qui les achètent dans cet état
brut ; & les autres deftinées à d'autres ulages , font
partagées en deux portions , dont l'une revient de
l'étendoir dans l'attelier des liffeurs , & l'autre eft
portée dans l'attelier-des colleurs.
Celles qui paffent dans l'attelier des lifTeurs , y
font travaillées à la liflbire. La liflbire des carton-
niers fe meut précifément comme celle des cartiers ,
par un gros bâton appliqué par fon extrémité Supé-
rieure à une planche attachée par un bout à une pou-
tre, & qui fait reffort par l'autre bout , celui auquel
le bâton de la liflbire eft appliqué : ce bâton eft fendu
par fon extrémité inférieure ; cette extrémité eft en-
core arrondie circulairement. La langue L de la boîte
de la liflbire ,Jig. 6. entre dans la fente du bâton; &
les extrémités arrondies du bâton fe placent dans
les échancrures concaves M. Cette boîte le meut de
bas en haut , & de haut en bas de la feuille de car-
ton , par le moyen des mains N , N. Les feuilles ou
font placées les unes fur les autres en pile , ou fur un
bloc , & font applanies par le cylindre O O , placé
fous ia liflbire où l'on a pratiqué un canal concave
qui le reçoit à moitié. Ce cylindre eft de fer poli ;
& il fe meut fur deux tourillons reçus dans deux pat-
tes de fer , fixées aux deux bouts de la boîte de la
liflbire, comme on voit. Au fortir de la liflbire , on
peut les vendre. Il faut obferver que celles des feuil-
les qui viennent de l'étendoir pour être liflees , ne
doivent pas être bien feches ; fans quoi elles ne fe
lifferoient pas , & il faudroit les hume&er.
Celles qui paffent dans l'attelier des colleurs , font
ou collées les unes avec les autres, pour former du car-
ton plus épais , ou couvertes de papier blanc auquel
elles fervent d'ame : d'où l'on voit qu'il y a déjà trois
fortes de carton ; du carton de pur moulage , du carton
de moulage colle' , & du carton couvert , auquel le car-
ton de moulage fêrt d'ame. Il n'y a rien de particulier
fur la leco'nde efpece , celle de feuilles de carton de
moulage collées enfemble. On a de la colle de farine
à l'ordinaire , ou telle que celle des cartiers, voye^
Cartier ; on trempe une brofle dans cette colle ,
& l'on en enduit une feuille ; on pôle fur cette feuille
collée deux feuilles, dont celle de deflbus n'eït point
collée , mais celle de deflus l'eft ; on continue à pren-
dre les feuilles deux à deux , & à ne coller que celle
de deflus , & à en former des tas , dans lefquels les
feuilles le trouvent feulement collées deux à deux ;
on paffe ces tas fous la prefle ; on ôte avec une mau-
vaise brofle la colle que l'aftion de la prefle fait
fortir ; on fépare ces feuilles qui tiennent enfem-
ble un peu par les bords ; on les porte à l'étendoir,
ou on les fait fécher fans les piquer , parce qu'elles
CAR
font affez fortes pour fe foûtenir appuyées fans fe
courber.
On voit que pour faciliter le prompt collage de
ces feuilles, il eft bon d'en avoir préparé les tas au-
paravant. Cette préparation confilte à mettre le*
feuilles par échelle de deux en deux : pour cet effet
on prend une feuille , on la met fur une table ; on
prend deux feuilles qu'on pôle deflus cette première ,
de manière qu'elle les déborde de quatre doigts par
en bas ; fur ces deux , deux autres qui correfpondent
à la première , & qui font par conféquent débordées
par en-haut de quatre doigts par les deux premières ,
& ainlî de fuite : on finit le tas par une feule.
Si on veut ajouter une nouvelle feuille aux deux
précédentes , pour avoir un carton d'un tiers plus
épais , & compolé de trois feuilles , on facilitera
cette opération en prenant la même précaution ; je
veux dire , en mêlant les feuilles fimples & les feuil-
les doubles deux à deux de manière qu'elles foient
en échelle , & que fi deux débordent par en-haut cel-
les qui les précèdent , elles foient débordées par en-
bas par les deux qui les fuivront , & en ne collant
jamais que celle des deux qui eft deflus. Il elt évident
qu'on formera ainfi toujours des tas où les feuilles
ne feront collées que deux à deux.
On continuera la même manœuvre , mêlant , col-
lant , preffant & féchant autant de fois qu'on vou-
dra doubler les cartons : on parviendra de cette ma-
nière à en former qui auront un pouce d'épais , &
par-delà.
Quant aux cartons qu'on veut couvrir de beau pa-
pier, on ne fuivra pas une autre méthode ; il fuffit
de l'avoir indiquée.
Il y a , comme on voit, bien des fortes de carton .•
il y en a de trois fortes de pur moulage ; du fimple ,
du double , & du triple.
Il y en a de feuilles de moulage collées enfemble ^
de tant d'efpeces que l'on veut.
Il en elt de même de celui de moulage qui eft cou-
vert de papier blanc ; car on peut également cou-
vrir & celui qui eft de pur moulage, ce qui donner»
trois fortes de cartons couverts ; & celui qui eft fait
de feuilles de moulage collées , ce qui en ajoutera un,
grand nombre d'autres fortes.
Outre toutes ces fortes de carton , entre Iefquelles
il faut obferver que ceux qui font couverts d'un leul
ou des deux côtés reviennent à la lifle , & que pour
les bien lifler il eft fouvent à propos de les favonner
& chauffer auparavant , comme nous l'avons prel-
crit à l'article cartier (yoye\ Cartier); outre ces ef-
peces , dis-je , on en fait de pur collage ; celui-ci
eft beaucoup plus fin que l'autre. On commence par
lui préparer une ame de papier commun : on fait
cette ame plus ou moins épaifle à difcrétion , & on
la couvre de beau papier. Voye^ à l'article Cartier
la manière détaillée de faire ce carton ; car celui dont
on fait les cartes eft de cette efpece.
Il y a auffi des cartons de collage d'un grand nom-
bre de fortes, dont la finefie fediilingue par numé-
ros. Il y en a de couverts des deux côtés, d'un leul ;
de liffés des deux côtés , & d'un feul , &c.
On fait en France un commerce confidérable de
carton. J'ai vifité les atteliers des ouvriers , que
je n'ai pas trouvés auffi bien entendus que celui
que je viens de décrire : il m'a femblé qu'ils n'ap-
portent pas à leur ouvrage autant d'attention &
de propreté qu'ils y en pourroient mettre : ce n'eft
pas la feule occafion où j'ai remarqué que pourvu que
les choies fe filTent , on s'embarraffoit fort peu du
comment. On fe fert de carton pour relier les livres,
faire des porte-feuilles , des étuis à chapeaux, à man-
chons, &c.
Ce font les Papetiers-Merciers & les Papetiers-col-
leurs de feuilles, autrement dit Cartonniers , qui en
CAR
font le négoce ; avec cette différence que ces der-
niers fabriquent & vendent,au lieu que les premiers
ne peuvent pas fabriquer.
Carton , terme d Architecture, fe dit d'un contour
chantourné fur une feuille de carton ou de fer blanc,
pour tracer les profils des corniches, &c pour lever
les panneaux de deffus l'épure. ( P )
Carton , fe dit en Peinture d'un deffein qu'on fait
fur de fort papier , pour le calquer enfuite fur l'en-
duit frais d'une muraille , où l'on veut peindre à
frefque.
Carton fe dit auffi d'un deffein en grand , coloré
pour travailler en mofaïque , en tapifferie , &c. Voy.
Tapiss&rie.
Les cartons que l'on conferve à Hamptoncourt en
Angleterre, font des deffeins de Raphaël d'Urbin,
faits pour être exécutés en tapifferie. (J.V)
Carton; les Imprimeurs appellent ainfi une ma-
culature bien unie , fur laquelle ils collent des hauf-
fes pour remédier à l'inégalité du foulage , qui fe
rencontre à prcfque toutes les preffes. Ce carton fe
place entre le petit tympan & les Manchets. Chaque
ouvrage doit avoir fon carton particulier. Quand il
eft bien fait il y a peu de hauffes à mettre fur le tym-
pan ; & prefque toujours la perfection ou la dét'ec-
ruofité d'une impreffion en dépendent , tant il eft
utile &c de coniéquence de le bien faire. Voye^
Hausse, &c.
CARTON , terme de Libraire , de brochure , & de Re-
lieur , eft un ou plufieurs feuillets détachés d'une
feuille entière. Il y a pluiîeurs cas où l'on eft obligé
de mettre des cartons dans les livres. i°. Quand
après l'impreffion , foit d'un manuferit, foit d'un livre
déjà imprimé , il refte de la matière dont la quanti-
té ne fuffit pas pour faire une feuille entière , ni mê-
me une demi-feuille , ce relte s'imprime fur un ou
deux feuillets de papier féparés , & s'appelle carton.
z°. Quand pendant le cours de l'impreffion il s'eft
gliffé quelques fautes groffieres dans l'ouvrage , ou
quelque proposition hafardée relativement à la
religion , au gouvernement , aux mœurs , ou à la
réputation des particuliers , on a foin de déchirer
la partie de la feuille fur laquelle fe trouve ce qu'on
veut fupprimer , & l'on y fubftitue d'autres feuillets
purgés de ces fautes , & ces feuillets fe nomment
auffi cartons.
Le public à Paris eft tellement prévenu contre ces
cartons, qu'on a vu des ouvrages décrédités parce
qu'il y enavoit, quoiqu'ils y euffentété placés pour
la plus grande perfection de ces ouvrages.
Carton, partie du métier de Rubanier ; il eft attaché
d une part à la barre de la poitriniere , & d'autre au
premier travers de lames , au moyen de deux ficel-
les qui le tiennent fufpcndu un peu au-deffusde l'en-
fuple de devant: il fert à pofer les navettes & fabots,
lorfqu'il y en a plufieurs , pendant que l'ouvrier en
fait travailler une. On le voit très-diltindtement dans
les fi g. de paiement, f'oy. leur explication.
CARTONNER , parmi les Tondeurs , c'eft couvrir
chaque pli d'une pièce d'étoffe , d'un carton ou d'un
vélin , avant que de la preffer èv de la catir.
CARTONNIER , f. m. ( Art midi. ) ouvrier qui
a le droit de faire & vendre du carton. Voyer^ Car-
ton.
CARTOUCHE , en Architecture , cû un ornement
de fculpture , de pierre , de marbre , de bois , plâtre,
&c. compofé de membres d'Archite&ure , au milieu
duquel eft un efpace de forme régulière ou irrégu-
lierc, dont la furfacc eft quelquefois plane , conca-
ve , convexe , ou tous les deux enfemble. Ces car-
touches fervent ordinairement à annoncer le nom des
grands hôtels , ou à recevoir des inferiptions , des
chiffres, des armoiries, des bas-reliefs, pour la
décoration extérieure cv intérieure des éjliies ,
Tome II.
CAR
731
Communautés , ou pour la décoration des apparte-
mens. Ce mot vient de l'Italien cartoccio , qui ligni-
fie la même chofe.
On appelle auffi cartouche le deffein qu'on met au
bas des plans ou cartes de Géographie , & qui fert à
renfermer le titre ou le blafon de celui à qui on le
veut préfenter. Ces cartouches font fufceptibles d'at-
tributs ou d'allégories qui doivent être relatives à
celui à qui l'on préfente ces deffeins , ou à leur objet.
On appelle cartel les petits cartouches qui fervent
dans les décorations des frifes ou panneaux de me-
nuiferie , & généralement ceux qu'on employé dans
les bordures des tableaux aux couronnemens des
trumeaux , cheminées , pilaftres , &c.
En général il faut éviter le genre tourmenté & trop
pittorefque dans ces fortes de fculptures ; leur com-
pofition demande de la retenue , auffi bien que tou-
tes les autres productions analogues à l'Arehiteûure.
Voyc{ ce qui a. été dit aufujet des amortijjemens. (P)
Cartouche , (Peinture.') eft une efpace de bor-
dure d'ornemens peints ou fculptés , qui renferment
des tableaux , des bas-reliefs , des trophées, des inf-
eriptions ou devifes, &c.
On fait des cartouches de toutes fortes de formes ,
& on les compofe de tout ce que le caprice ou la mo-
de peut fuggérer : on les appelle cartouches , parce
qu'ils ont quelquefois des parties qui reffemblent à
des cartons roulés & entortillés. Aujourd'hui même
ils confervent encore quelques parties de ces cartons
qui leur ont donné nom , & dont ces ornemens ont
été compofés dans leur origine. (R)
Cartouche , en Jardinage, eft un ornement ré-
gulier en forme de tableau , avec des enroulemens ,
qui fe répète fouvent aux deux côtés ou aux quatre
coins d'un parterre ; le milieu fe remplit d'une co-
quille de galon , ou d'un fleuron de broderie. (/£)
Cartouches, Gargouges , Gargouches,
omGargousses: on fe fert prefque également de ces
mots dans f Artillerie , pour fignirïer une efpece de
boîte faite d'un parchemin ou d'un papier en plu-
fieurs doubles, ou d'une feuille de fer blanc, ou mê-
me de bois, qui renferme la charge de poudre & le
boulet , & quife met dans une pièce lorfque l'on eft
tellement preffé de tirer, que l'on n'a pas le tems de
s'ajulter.
Quand on n'y met pas de boulet, l'on y met des
balles de plomb , des clous , des chaînes , & de la mi-
traille de fer , afin que le coup écarte davantage.
Surtout les cartouches à grappes de raifin , qui font
des balles de plomb jointes avec de la poix , enfer-
mées dans une toile claire , & difpofées fur ime petite
planche en forme pyramidale autour d'un piquet de
bois qui s'élève du milieu de la planche , font d'une
grande utilité dans un combat ou dans une bataille.
Il y a des moules de bois dont on fe fert pour fer-
rer ces gargouges & cartouches , afin de pouvoir les
faire avec plus de propreté &i. de jufteffe.
On fait auffi des cartouches a moufquetaires , qui
portent la charge de poudre & la balle au bout , &
le loldat n'a autre choie à faire quand il veut char-
ger Ion fuiil ou Ion moulquct , que de déchirer avec
la dent cette cartouche , qui eft très-bien collée par-
tout , par le bout qui doit répondre à la lumière & au
baffinet du canon du tu fil ou du moufquet où il amor-
ce; & cette invention abrège beaucoup de tems.
Il faut encore obfervcr que quoique bien des offi-
ciers, & des auteurs même fort habiles , confondent
la cartouche avec la gargouge; il cil certain néanmoins
que L'ufage nous apprend que la gargouge ne doit s'en-
tendre que de ce qui renferme la poudre feule ; &
que la cartouche eft ce qui renferme les clous , chaî-
nes, balles de plomb , & autres mitrailles & ferrail-
les que l'on met dans la pièce au lieu de boulet, foit
fur une brèche ou fur un retranchement , toit lorf*
Z Z z i ij
732
CAR
\
que l'on fe trouve près des ennemis clans une batail-
le : on dit alors tirer à cartouche.
Les gargouges font de papier , parchemin , ou toi-
le : les meilleures & les plus fûres font celles qui font
faites de parchemin, parce que le feu ne s'y attache
point ; le parchemin ne fait que griller , fans s'atta-
cher à la pièce. Le papier & la toile ont cette incom-
modité , qu'ils laiffent prefque toujours quelque lam-
beau accroché au métal de Pâme de la pièce avec du
feu ; ce qui a fouvent caufé de fort fâcheux accidens,
& ordinairement ces malheurs arrivent quand on
eft près de l'ennemi & prefîe : car quand il faut fer-
vir une pièce, lescanoniers négligent d'écouviilon-
ner ; la nouvelle gargouge que l'on fourre dans la
pièce rencontrant ce papier ou cette toile allumée,
prend feu , & en reffortant de la pièce , brife avec la
hampe de la lanterne ou de l'écouvillon les bras &c
les jambes de ceux qui chargent , & les tue fort fou-
vent.
Lorfque l'on fera obligé de fe fervir de papier ou
de toile dans Poccafion, il ne faut pas oublier d'é-
couvillonner à chaque coup , & pour celles de par-
chemin , de trois en trois coups.
La longueur des gargouges fera de quatre calibres
de ki pièce où elles devront fervir , dont un demi-
calibre fervira à fermer le cul , & un autre pour fer-
mer le deffus quand la poudre y fera; cette poudre
doit être charge ordinaire. Celles de parchemin ne
feront qu'un tour , avec un peu plus de largeur pour
la couture : elles feront trempées dans le vinaigre ,
afin de les coudre plus facilement. A celles de toile
la largeur de la couture doit être en-dedans la gar-
gouge ; les ourlets feront froncés avec de la ficelle.
L'on pourra aux gargouges de toile laifTer deux ca-
libres de plus , au-deffus de ce qui fera froncé quand
elles feront pleines de poudre : cela fert à y mettre
des balles de plomb ou de la mitraille, le tout bien fer-
mé : l'on en pourra faire autant avec le parchemin ,
& alors elles fe nomment cartouches. Elles font bon-
nes pour tirer promptement & de près. Quand on
pourra avoir des cartouches de fer blanc , elles vau-
dront mieux ; elles portent plus loin : elles auront de
longueur un calibre demi-quart , le diamètre com-
me les gargouges , fermées par un bout de fer blanc
ainli qu'une mefure ; & lorfqu'on aura rempli la car-
touche de balles à la hauteur d'un calibre , l'on y fe-
ra entrer un tampon de bois long d'un demi-calibre,
fur lequel on attachera avec des clous les bords de
la cartouche. En les fourrant dans l'ame des pièces ,
il faudra prendre garde que le côté du tampon foit
mis le premier dans la pièce.
L'on fait encore des cartouches en pomme de pin :
c'eft un boulet de même fer que les autres , qui fait
le noyau de la cartouche : fa figure -cil: en pyramide
ronde ; la bafe eft égale au calibre d'un boulet pro-
pofé pour la pièce avec laquelle on voudra la tirer ;
la hauteur eft d'un calibre & demi. On le trempe dans
la poix goudronnée , enfuite on le roule fur des bal-
les de plomb ; & quand il eft bien couvert de balles
de plomb , on le trempe dans le même goudron ,
après quoi on peut s'en fervir , en pouffant le gros
bout devant dans la pièce.
Mais les cartouches de fer blanc valent mieux fur
terre , & coûtent moins de tems à faire : les pommes
de pin font bonnes pour tirer fur mer ; car outre que
les balles qui y font attachées en s'écartant bleffent
bien des gens fur le grand pont , le noyau fait enco-
re bien du fracas où il touche.
L'on peut auffi remplir les cartouches de fer blanc
de toutes fortes d'efpeces de ferraille. Si l'on man-
que de matières dans les occafions pour faire des
gargouges & cartouches , l'on pourra charger le canon
à l'ordinaire, & y mettre par-deffus le fourrage de
la ferraille , des balles de plomb , ou des petits bon-
CAR
lets , même jufqu'à de petits cailloux ronds : de cette
façon les pièces en fouffriront davantage ; mais dans
l'occafion le génie doit fuppléer au défaut de ce qui
manque. Mém. a"Arùl. de S. Remy. (Ç))
Cartouche : on appelle ainfi toutes fortes de
boîtes de carton , cubiques , fphériques , cylindri-
ques, ou mixtes , dans Icfquelles on renferme les
matières combuftibles des artifices, pour en déter-
miner & varier les effets ; les cylindriques font les
plus ordinaires. Ce mot eft mafeulin chez les Arti-
ficiers , & féminin pour les charges des armes à feu :
on dit dans l'exercice , déchire^ la cartouche avec les
dents.
On peut faire les cartouches de différentes matières ,
comme de bois , de toile , de parchemin , de carton ,
& de papier. Ceux de bois ne font plus en ufage , à
caufe des inconvéniens qu'on y a trouvés : premiè-
rement , tous les bois n'y font pas propres ; il faut en
choifir de lians , de doux , ôc de légers , comme le
tilleul , le faule , & autres f emblables : fecondement,
il faut des ouvriers accoutumés à les creufer & tour-
ner proprement , & d'une figure très-uniforme; ce
qu'on ne trouve point partout : troifiemement , ils
font fujets à fe fendre pendant qu'on les charge , ou
à crever lorfque l'artifice s'enflamme , deforte qu'ils
lancent des éclats qui peuvent bleffer les fpeftateurs.
Les cartouches de toile ne font propres qu'à renfer-
mer les artifices deftinés pour l'eau ; parce qu'on a
foin de les goudronner pour empêcher qu'elle ne
pénètre au-travers. Le parchemin feroit affez bon
pour faire les cartouches: mais c'eft une matière trop
chère , difficile à manier , & qui fe tourmente aifé-
ment ; il vaut donc mieux fe fervir de carton ou de
bon papier.
On trouve à Paris du carton pour les fufées , qu'on
appelle carte de moulage , dont les épaiffeurs font dé-
fignées par le nombre des feuilles du gros papier
collé dont il eft compofé, comme un , deux , trois ,
quatre, cinq , fix, jufqu'à huit; on acheté de gros
papier gris , qui eft très-commun ; on en colle deux'
ou trois feuilles enfemble , plus ou moins fuivant la
force &C l'épaiffeur qu'on veut donner au carton , eu
égard à l'emploi qu'on en veut faire. Pour les pe-
tits cartouches, celui de deux feuilles fuffit; pour les
plus gros , on en met trois , & même quatre , cinq ,
&fix.
Pour les coller, on prépare de la pâte de farine li-
quide qu'on fait un peu cuire , ayant foin de la bien
délayer, à laquelle on peut ajouter , fi l'on veut , de
la colle forte. On l'étend avec une broffe fur la pre-
mière feuille de papier , pour y en appliquer une
féconde ou une troiïieme qui forme la feuille de car-
ton ; on arrange enfuite toutes les feuilles de carton
qu'on vient de faire en une pile , comme celles d'un
livre , fur laquelle on met un bout de planche unie
qu'on charge d'un poids capable de les preffer & ap-
planir , afin que les feuilles ne laiffent aucun vuide
entr'elles , &: que la colle prenne également par-
tout.
Après avoir ainfi Iaiffé Les feuilles de carton en
preffe pendant quelques heures , on les difperfe dans
un lieu couvert pour les faire fécher doucement ; &
fuppofé qu'elles viennent à fe tourmenter , on les re-
met encore fous la preffe. De cette manière on a du
carton uni , & d'une épaiffeur convenable à la gran-
deur des cartouches qu'on veut faire.
Les cartouches les plus ufités font de figure cylin-
drique , parce qu'après la fphérique , il n'y en a point
de plus fimple , ni de plus propre à contenir les ma-
tières : elle a même cet avantage fur la fphérique ,
qu'on peut les y fouler autant qu'on veut , & d'une
égale comprcflîon ; ce qui eft néceffaire à la forma-
tion de la plupart des artifices.
Pour former ces fortes de cartouches, il faut avoir
CAR
un rouleau de bois tourné & également épais , fui-
vant la groffeur déterminée pour la pièce d'artifice
qu'on veut faire. Les rouleaux étant faits , on coupe
le carton ou le papier qu'on veut employer, de la
grandeur convenable à la pièce qu'on veut faire ,
& parce que le développement d'un cylindre eft un
parallélogramme ou quarré long ; il n'y a point de
façon dans cette coupe.
Les épaiffeurs des cartouches doivent être propor-
tionnées, non-feulement à la groffeur des artifices ,
mais encore à la force du feu que produifent les ma-
tières dont ils font remplis , laquelle vient de leur
qualité plus ou moins vive , & d'un volume de flam-
me plus ou moins grand. Premièrement , ils font plus
ou moins forts , fuivant la qualité & la force du pa-
pier ou du carton dont ils font faits. Secondement ,
ils dépendent encore d'une exade application de
chaque feuille dans toute l'étendue de la révolution
fur le rouleau qui fert à les former ; car lorfqu'elles
ne laiffent pas de vuide entr'elles , leur réliftance
n'eft pas divifée par parties interrompues , mais ré-
pandue fur toute la circonférence , enforte qu'elle
en devient plus grande.
Les cartouches étant bien faits , & en tel nombre
qu'on veut , on les range proprement fur une plan-
che , de manière qu'ils ne fe touchent pas , pour les
faire fécher doucement à l'ombre , parce qu'ils fe dé-
cèlent & fe courbent lorfqu'on les fait fécher trop
vite au foleil , ou trop près du feu : là on a foin de
les tourner de tems en tems, pour qu'ils fechent éga-
lement de tous côtés , & qu'ils ne fe défigurent pas.
Lorfque les cartouches font à peu près à moitié fecs,
il faut les étrangler par un bout , c'eft-à-dire , en
refferrer tellement l'ouverture, qu'il n'y refte qu'un
trou de grandeur à recevoir une branche de fer qui
iloit y entrer ; quelquefois il faut les fermer tout-à-
fait pour les remplir de matière combuftible.
Il n'y a qu'un tems propre pour cette opération ;
parce que ii les cartouches font trop humides , ils fe
chiffonnent &c fe coupent ; s'ils lont trop fecs , ils
font trop de réfiftance ; on ne peut les étrangler qu'a-
vec une grande force qui fait louvent caffer la corde
ou la ficelle dont on fe fert.
La manière ordinaire d'étrangler un cartouche, eft
de le comprimer fi fort par un tour de ficelle , que
le carton s'enfonce dans lui-même par de petits plis
rentrans qui en bouchent l'orifice ou en tout, ou en
partie , luivant l'ufage qu'on en doit faire.
Pour cet effet , on a une petite corde ou ficelle faite
exprès de groffeur proportionnée aux cartouches qu'on
veut étrangler , appdlée fiiagore , qu'on attache par
un bout à un poteau folide , à la hauteur de trois à
quatre pies; &C à l'autre bout on fait une boucle,
dans laquelle on introduit le milieu d'un bâton d'en-
viron dix-huit à vingt pouces de long, qu'on fait pal-
fer fous les feffes , comme fi l'on vouloit s'affeoir
deffus.
On frotte la filagorc de favon, & l'on prend d'une
main le cartouche dans lequel on a mis le rouleau juf-
qu'à un demi-pouce près du bout qu'on veut étran-
gler, plus ou moins fuivant la groffeur du cartouche,
& de l'autre on tient dans l'on orifice un bout de rou-
leau avancé feulement en-dedans de quelques lignes ;
enforte qu'il reltc un certain intervalle vuide entre
les deux bouts de bois, dans lequel le carton preffé
par la ficelle , puiffe s'enfoncer & refferrer en cet
endroit fon ouverture , ou tout-à-fnit , ou feulement
autant qu'il faut pour y introduire une broche de
fer de la groffeur convenable à la lumière par la-
quelle on doit donner le feu à l'artifice.
Sur cet efpace vuide , on fait paffer deux tours
de la ficelle qu'on tend fortement en fe reculant ,
comme pour s'affeoir fur le bâton dont en vient de
parler ; defortc qu'elle fait un tel effort fur le cartou-
CAR
73
cke , qu'elle l'enfonce & y grave fa trace : mais com-
me elle s'enfonceroit plus d'un côté que de l'autre
on a foin de tourner le cartouche pour expofer lùccef-
fivement fa circonférence au point où fe fait la plus
grande preffion de la ficelle ; par ce moyen , elle fe
grave également tout au tour , & il fe forme à l'ori-
fice une gorge fort régulière en façon d'écuelle. Lorf-
que l'orifice eft fermé au point qu'on le demande ,
on dégage le cartouche de la filagore , & on lui fubf-
titue auiîi-tôt un lien de plufieurs tours de °ros fil
ou de ficelle à paumier , qu'on arrête avec un nœud
coulant , pour empêcher que le reffort du carton ne
faffe rouvrir la partie étranglée. Ceux qui defireront
s'inftruire plus à fond fur cette matière, n'ont qu'à
confulter le Traité des feux d'artifice de M. Ffezier
où ils trouveront un détail qui n'eût aucunement
convenu à un Dictionnaire.
CARTULAIRES , f. f. pi. (Hijl. mod.) nom qu'on
donne aux papiers terriers des églifes ou des monaf-
teres, où font écrits les contrats d'acquifition, de
vente, d'échange , les privilèges , immunités , exemp-
tions, chartres, & autres titres primordiaux. Ces re-
cueils font de beaucoup poftérieurs à la plupart des
aftes qui y font compris ; on ne les a même inventés
que pour conferver des doubles de ces aûes. Ce qui
fait que les critiques foupçonnent ces acles de n'être
pas toujours authentiques, foit qu'on y en ait gliffé
de faux, foit qu'on ait altéré les véritables. (G)
CAR VI , f. m. ( Hijl. nat. bot. ) genre de plante à
fleurs en rofe , dilpolces en ombelles, 8c compofées
de plufieurs pétales faits en forme de cœur , inégaux ,
rangés en rond, & foûtenus par le calice, qui devient
un fruit compote de deux petites femences renflées
& cannelées d'un côté, & plates de l'autre. Ajoutez
aux caractères de ce genre que les feuilles font lé-
gèrement découpées , & rangées par paires le long
d'une côte. Tournefort, Inll. rei herb. Foyer Plan-
TE.(7)
Le carvi officinarum , C. B. Pin. i58. eft d'ufage en
Médecine ; la femence eft une des femences chaudes ;
elle eft ftomacale, carminative, bonne contre la co-
lique & la foibleffe d'eftomac ; propre pour aider la
digeftion, peur exciter l'urine, & augmenter le lait
des nourrices.
Ses préparations officinales font fa femence con-
fite avec du lucre , & l'huile qu'on en tire par la dil-
tillation.
L'huile cffentielle de carvi eft acre & fort péné-
trante ; on l'ordonne à cinq ou fix gouttes dans l'huile
d'amandes douces. Pour la furdité on en met quel-
ques gouttes dans de bon efprit-de-vin , que l'on in-
jecte dans l'oreille. (A')
CARULOM , (Ge'og.) petite rivière de Bulgarie,
qui tombe dans le Danube, près de Nicopoli.
CARUS , f. m. de xàf.cç ,Jbmmeil profond , terme de
Médecine, efpece de maladie léthargique qui confifte
dans un profond affoupiffement, avec privation fu-
bite du fentiment & du mouvement, Se accompagné
d'une fièvre aiguë.
Le carus diffère du coma , en ce que le malade af-
fligé du coma , répond lorfqu'on lui parle , ce que ne
fait pas celui qui eft affligé du carus. Voye? Coma.
11 diffère de la léthargie par la fièvre dont il eft ac-
compagné : au lieu cjue la léthargie eft fans fièvre ,
cv que de plus fi On agite ou qu'on pique la perfonne
en léthargie , le fentiment lui revient ; ce qui n'arri-
■\ c pas de même dans le carus. Vcyat Léthargie.
I! diffère de l'apoplexie propre, en ce qu'il laiffe
la refpiration libre : au lieu qu'elle ne l'eft jamais dans
l'apoplexie. Voye^ Apoplexie.
Il diffère de l'épilepfie, en ce que le malade n'cit
point agité dans le carus , Se n'écume pas comme il
fait dans l'épilepfie. Il diffère de la fyncope, en ce que
dans le carus le pouls eft élevé & le vil'age rouge ; au
34
CAS
/>
lieu que dans la fyncope le pouls eft bas & la face
cadavéreufe. Il diffère de la niffocation hyftérique ,
en ce que dans celle-ci le malade entend ce qu'on lui
dit 6c s'en fouvient, ce qu'il ne fait pas dans le carus.
Voyei Syncope, Epilepsie, &c (N)
* CARYATIDES , f. f. ( Architccl. ) Statues de
femmes fans bras , vêtues décemment , & placées
pour ornement ou pour foûtien aux architraves des
édifices. Vitruve en raconte l'origine de la manière
fuivante. Il dit que Carie dans le Péloponèfe ,
ayant été prife & ruinée par les autres Grecs ,
vainqueurs des Perfes avec lefquels les Cariâtes s'é-
toient ligués , les hommes furent paffés au fil de l'é-
pée , & les femmes emmenées en efclavage , où l'on
contraignit les plus qualifiées d'entre elles à garder
leurs longues robes & leurs ornemens ; & il ajoute
que dans la fuite , pour éternifer la mémoire de la
trahifon & du châtiment , les architectes fubftitue-
rent en plufieurs édifices publics , des figures de fem-
mes Cariâtes aux pilaftres & aux colonnes.
* C AR Y ATI S , ( Myth. ) furnom de Diane en
l'honneur de laquelle les jeunes filles de la Laconie
s'affembloient dans le tems de la récolte des noix, &
célébroient une fête appellée carya , c'eft-à-dire , la
fête de Diane des noix.
CARYOCOSTIN , ( électuaire) fe compofe de la
façon fuivante. Prenez clous de girofle, coftus blanc,
zédoaire, gingembre, femence de cumin, de chacun
deux gros ; hermodattes mondées , diagrede, de cha-
cun demi-once ; miel rofat cuit en confiftance d'é-
ledfuaire mou , trois fois la quantité du tout. Pulvé-
rifez le tout, à l'exception du diagrede que vous n'a-
jouterez qu'après avoir mêlé le refte avec le miel ro-
fat , au moyen d'une fpatule de bois ; faites un élec-
tuaire félon l'art.
Cette compofition eft bonne pour les gens robuf-
tes , forts , les pituiteux & les hydropiques : mais il
ne convient point aux perfonnes délicates. La dofe
eft depuis un gros jufqu'à fix.
On prétend que ce purgatif eft excellent dans les
maladies foporeufes , & dans la goutte.
On appelle cet éleftuaire caryocoflin , du nom de
deux des ingrédiens qui entrent dans fa compofition ,
qui font le coftus , & les clous de girofles , appelles
en latin caryophilli. (A^
C AS , f. m. ( terme de Grammaire ) ce mot vient du
latin cafus , chute , rac. cadere , tomber. Les cas d'un
nom font les différentes inflexions ou terminaifons de
ce nom ; l'on a regardé ces terminaifons comme au-
tant de différentes chûtes d'un même mot. L'imagi-
nation & les idées acceffoires ont beaucoup de part
aux dénominations , & à bien d'autres fortes de pen-
fées ; ainfi ce mot cas eft dit ici dans un fens figuré
& métaphorique. Le nominatif, c'eft-à-dire , la pre-
mière dénomination tombant, pour ainfi dire,en d'au-
tres terminaifons , fait les autres cas qu'on appelle
obliques. Nominativus Jlve reclus , cadens àfud termina--
tione in alias ,facit obliquos cafus. Prifc. liv. v. de cafu.
Ces terminaifons font auffi appellées définances ;
mais ces mots terminai/on , dtfinance , font le genre.
Cas eft l'ejpece , qui ne fe dit que des noms ; car les
verbes ont auffi des terminaifons différentes J'aime ,
j'aimois, j'aimerai , &c. Cependant on ne donne le
nom de cas , qu'aux terminaifons des noms , foit au
singulier , foit au pluriel. Pater ,patris , patri ,patrem ,
pâtre; voilà toutes les terminaifons de ce mot au fin-
gulier , en voilà tous les cas, en obfervant feulement
que la première terminaifon pater, fert également
pour nommer ck pour appeller.
Les noms Hébreux n'ont point de cas , ils font fou-
vent précédés de certaines prépoiitions qui en font
connoître les rapports : fouvent auffi c 'eft le fens ,
c'eft l'enfemble des mots de la phrafe qui , parle mé-
çharrifme des idées acceffoires ck parla confidération
CAS
des circonftances , donne l'intelligence des rapports
des mots ; ce qui arrive auffi en latin à l'égard des
noms indéclinables , tels qaefas & ne/as , cornu , &c.
Foye^ la Grammaire Hébraïque de Mafclef , tom, I. c.
Z. n. 6.
Les Grecs n'ont que cinq cas , nominatif, génitif, da-~
tif, aceufatif, vocatif: mais la force de l'ablatif eu. fou-
vent rendue par le génitif, & quelquefois par le da-
tif .Ablativi forma Grœci carent , non vi , quee genitivo &
aliquando dativo refertur. Canifii Hellenilmi , Part,
orat. p. S J.
Les latins ont fix cas , tant au fingulier qu'au plu-
riel , nominatif, génitif, datif, accufaùf, vocatif, abla-
tif. Nous avons déjà parlé de l'ablatif ëc de V aceufa-
tif; il feroit inutile de repéter ici ce que nous difons
en particulier de chacun des autres cas : on peut le
voir en leur rang.
Il fuffira de dire ici un mot du nom de chaque cas.
Le premier , c'eft le nominatif; il eft appelle cas
par extenfion , & parce qu'il doit fe trouver dans
la lifte des autres terminaifons du nom ; il nomme ,
il énonce l'objet dans toute l'étendue de l'idée qu'on
en a fans aucune modification ; Se c'eft pour cela
qu'on l'appelle auffi le cas direct , reclus : quand un
nom eft au nominatif, les Grammairiens difent qu'il
eft in recto.
Le génitif eft. ainfi appelle , parce qu'il eft pour ain-
fi dire le fils-aîné du nominatif, & qu'il fert enfuite
plus particulièrement à former les cas qui le fui-
vent ; ils en gardent toujours la lettre caraftériftique
ou figurative , c'eft-à-dire celle qui précède la ter-
minaifon propre qui fait la différence desdéclinaifons:
par ex. is , i , em ou im , e ou i , font les terminaifons
des noms de la troifieme déclinaifon des latins au fin-
gulier. Si vous avez à décliner quelqu'un de ces noms,
gardez la lettre qui précédera is au génitif : par ex.
nominatif rèx , c'eft-à-dire regs , génitif reg-is , enfuite
reg-i , reg-em , reg-e, & de même au pluriel reg-es9
reg-um , reg-ibus. Genilivus naturale vinculum generis
pojfldet ; nafeitur quidem à nominativo , générât autetrt
omnes obliquos fequentes. ( Prifc. liv. V. de Cafu. )
Le datif Tert à marquer principalement le rapport
d'attribution , le profit , le dommage , par rapport à
quoi , le pourquoi , finis cui.
h'accu/atifaccuft , c'eft-à-dire déclare l'objet , ou
le terme de l'acf ion que le verbe fignifie : on le conf-
truit auffi avec certaines prépofitions & avec l'infi-
nitif. Voye^ Accusatif.
Le vocatif {en à appeller ; Prifcien l'appelle auffi
falutatorius , vale domine j bon jour monfieur , adieu
monfieur.
L'ablatif fert à ôter avec le fecours d'une prépofi-
tion. Nous en avons parlé fort au long. Voye^ Abla-
tif.
Il ne faut pas oublier la remarque judicieufe de
Prifcien: «Chaque cas, dit-il, a plufieurs ufages ;
» mais les dénominations fe tirent de l'ufage le plus
» connu & le plus fréquent. » Multas alias quoque &
diverfas unufquifque cafus habet Jignificationes ,fed à no-
tïorïbus & frequentioribus acceperunt nominationem ,Jî-
cut in aliis quoque multis hoc invenimus. Prifc. /. f^.
de Cafu.
Quand on dit de fuite & dans un certain ordre
toutes les terminaifons d'un nom , c'eft ce qu'on ap-
pelle décliner : c'eft encore une métaphore ; on com-
mence par la première terminaifon d'un nom, en-
fuite on defeend , on décline , on va jufqu'à la der-
nière.
Les anciens Grammairiens fe fervoient également
du mot décliner, tant à l'égard des noms qu'à l'égard
des verbes : mais il y a long-tcms que l'on a conlacré
le mot de décliner aux noms ; & que lorfqu'il s'agit de
verbes , on dit conjuguer , c'eft-à-dire ranger toutes
les terminaifons d'un verbe dans une même lifte , Se
CAS
tous de fuite, comme fous un même joug; c'eft en-
tore une métaphore.
Il y a en Latin quelques mots qui gardent toujours
la terminaifon de leur première dénomination : on
dit alors que ces mots font indéclinables ; tels font
fas, nef as , cornu , au fingulier , &c. Ainfi ces mots
n'ont point de cas.
Cependant quand ces mots fe trouvent dans une
phrafe ; comme lorfqu 'Horace a dit , fas atquc ne/as
txiguofine libidinum difcernunt avidi. L. I. od. xviij. v.
i o. Et ailleurs : & peccare nef us , autpretium e/l mori. L.
III. od. iv. v. 24. Et Virgile : jam cornu petat. Ecl. ix.
v. 57. Cornu ferit ille , caveto. Ecl. XX. v. 25. alors le
fens , c'eft - à - dire l'enfemble des mots de la phrafe
fait connoître la relation que ces mots indéclinables
ont avec les autres mots de la même proportion , &
fous quel rapport ils y doivent être confidérés.
Ainfi dans le premier paffage d'Horace je vois bien
que la conftruûion eft , Uii avidi difcernunt fas & ne-
fas. Je dirai donc que fas & nefas font le terme de
l'afrion ou l'objet de difcernunt , &c. Si je dis qu'ils
font à l'accufatif, ce ne fera que par extenfion & par
analogie avec les autres mots latins qui ont des cas ,
& qui en une pareille pofition auroient la terminaifon
de l'accufatif. J'en dis autant de cornu ferit ; ce ne
fera non plus que par analogie qu'on pourra dire que
cornu eft là à l'ablatif; & l'on ne diroit ni l'un ni l'au-
tre , fi les autres mots de la langue Latine étoient éga-
lement indéclinables.
Je fais ces obfervations pour faire voir, i°.que ce
font les terminaifons feules , qui par leur variété
constituent les cas , & doivent être appellées cas :
enfortc qu'il n'y a point de cas , ni par conféquent
de déclinaifon dans les langues où les noms gardent
toujours la terminaifon de leur première dénomina-
tion ; & que lorfque nous difons un temple de marbre ,
ces deux mots de marbre , ne font pas plus un génitif
que les mots Latins de marmore, quand Virgile a dit ,
templum de marmore , G eorg. L. III. v. 1 3. ôc ailleurs :
ainfi à 6c de ne marquent pas plus des cas en François
que par , pour , en, fur , Ôcc. foye^ Article.
20. Le fécond point qui eft à confidérer dans les
cas, c'eft l'ufage qu'on en fait dans les langues qui
ont des cas.
Ainfi il faut bien obferver la deftination de cha-
que terminaifon particulière : tel rapport , telle vue
de l'efprit eft marquée par tel cas , c'eft-à-dire par
telle terminaifon.
Or ces terminaifons fuppofent un ordre dans les
mots de la phrafe , c'eft l'ordre fucceffif des vues de
l'elprit de celui qui a parlé ; c'eft cet ordre qui eft le
fondement des relations immédiates des mots de leurs
enchainemens & de leurs terminaifons. Pierre bat
Paul ; moi aimer toi , tkc. On va entendre ce que je
veux dire.
Les cas ne font en ufage que dans les langues où
les mots font tranfpoles , foit par la raifon de l'har»
monie , foit par le feu de l'imagination , ou par quel-
qu'autre caufe.
Or quand les mots font tranfpofés , comment puis-
jc connoître leurs relations ?
Ce font les différentes terminaifons , ce font les
cas qui m'indiquent ces relations ; & qui lorfque la
phrafe eft finie , me donnent le moyen de rétablir
l'ordre des mots, tel qu'il a été néceilairement dans
l'elprit de celui qui a parlé lorfqu'il a voulu énoncer
fa penfèe par des mots : par exemple ;
Frigidus agricolam fi quando continu irnber.
Virg. Georg. Lib. I. v. 259.
Je ne puis pas douter que lorfque Virgile a fait ce
a ei s , il n'ait joint dans fon cfprit l'idée Ac frigidus à
pelle A'imSer] puifque l'un eft le fubftantif, & l'autre
l'adjectif. Or le fubftantif 6c l'adjeftif font la çhofe
CAS
73 s
même ; c'eft l'objet' confidéré comme tel : ainfi 1%C*
prit ne les a point féparés.
Cependant voyez combien ici ces deux mots font
éloignés l'un de l'autre -.frigidus commence le vers ,
& imber le finit.
Les terminaifons font que mon efprit rapproche
ces deux mots, & les remet dans l'ordre des vues
de l'efprit , relatives à l'élocution ; car l'efprit ne
divile ainfi les penfées que par la nécefïité de re-
nonciation.
Comme la terminaifon de frigidus me fait rappor»
ter cet adjectif k imber , de même voyant qu'agrico*
lam eft à l'accufatif, j'apperçois qu'il ne peut avoir
de rapport qu'avec continet; ainfi je range ces mots
félon leur ordre fucceffif, par lequel feul ils font un
fens , fi quando imber frigidus continet domi agricolam.
Ce que nous difons ici eft encore plus fenlible dans
ce vers.
Aret ager , vitio , moriens ,fitit , aeris , herba.
Virg. Ecl. vij. v. 57.
Ces mots ainfi féparés de leurs corrélatifs , ne font
aucun fens.
Eflfec, le champ, vice, mourant , afoif, de l'air t
l'herbe : mais les terminaifons m'indiquent les corré-
latifs , & dès-lors je trouve le fens. Voilà le vrai
ufage des cas.
Ager aret , herba moriens Jitit pra; vitio aeris. Ainfi
les cas font les fignes des rapports , & indiquent l'or-
dre fucceffif , par lequel feul les mots font un fens.
Les cas n'indiquent donc le fens que relativement à
cet ordre ; & voilà pourquoi les langues, dont la fyn-
taxe fuit cet ordre , & ne s'en écarte que par des in-
versons légères ailées à appercevoir, ck que l'efprit
rétablit aifément; ces langues, dis -je, n'ont point
de cas; ils y feroient inutiles , puifqu'ils ne fervent
qu'à indiquer un ordre que ces langues fuivent ; ce
feroit un double emploi. Ainfi fi je veux rendre rai-
fon d'une phrafe Françoife ; par exemple de celle-ci ,
le Roi aime le peuple , je ne dirai pas que le Roi eft
au nominatif , ni que le peuple eft à l'accufatif; je
ne vois en l'un ni en l'autre mot qu'une fimple dé-
nomination , le Roi , le peuple : mais comme je fai
par l'ufage l'analogie & la fyntaxe de ma langue , la
fimple pofition de ces mots me fait connoître leurs
rapports & les différentes vues de l'efprit de celui
qui a parlé.
Ainfi je dis i°. que le Roi paroilTant le premier eft
le fujet de la propolition , qu'il eft l'agent , que c'eft
la perfonne qui a le fentiment d'aimer.
20. Que le peuple étant énoncé après le verbe , le
peuple eft le complément à' aime : je veux dire que
aime tout feul ne feroit pas un fens iùfTifant , l'efprit
ne feroit pas fatisfait. Il aime : hé quoi ? le peuple.
Ces deux mots aime le peuple , font un fens partiel
dans la proposition. Ainfi le peuple eft le terme du
fentiment d'aimer ; c'eft l'objet , c'eft le patient.
C'eft l'objet du fentiment que j'attribue au Roi. Or
ces rapports font indiqués en François par la place
ou polition des mots , & ce même ordre eft montré
en Latin par les terminaifons.
Qu'il me foit permis d'emprunter ici pour un mo-
ment le ftyle figuré. Je dirai donc qu'en Latin l'har-
monie ou le caprice accordent aux mots la liberté
de s'écarter de la place que l'intelligence leur avoit
d'abord marquée. Mais ils n'ont cette permiinonqu'à
condition qu'après que toute la propolition fera fi-
nie , l'efprit de celui qui lit ou qui écoute les remet-
tra par un fimple point de vue dans le même ordre
oii ils auront été d'abord, dans l'efprit de celui qui
aura parlé.
Amufons-nous un moment à une fiction. S'il plai-»
foit à Dieu de foire revivre Ciceron , de nous en don-
ner la connoùlunce , 6c que Dieu ne donnât à Cicé-
73<5
CAS
ron que l'intelligence des mots François , & nulle-
ment celie de notre fyntaxe , c'eft - à - dire de ce qui
fait que nos mots afiemblés & rangés dans un certain
ordre font un fens : je dis que fi quelqu'un difoit à
Cicéron : illujtre Romain , après votre mort Augufie
vainquit Antoine, Cicéron entcndroit chacune de ces
paroles en particulier , mais il ne connoîtroit pas
quel eft celui qui a été le vainqueur , ni celui qui a
été vaincu ; il auroit befoin de quelques jours d'ufa-
ge , pour apprendre parmi nous que c'eft l'ordre des
mots , leur poiition , & leur place , qui eft le ligne
principal de leurs rapports.
Or , comme en Latin il faut que le mot ait la ter-
minaifon deltinée à fa pofition , & que fans cette
condition la place n'influe en rien pour faire enten-
dre le fens , Augujlus vieil Anton-us ne veut rien dire
en Latin. Ainfi Augujh vainquit Antoine, ne forme-
roit d'abord aucun lens dans l'efprit de Cicéron;
parce que l'ordre fucçeffif ou fignincatif des vues de
l 'efprit n'eft indiqué en Latin que par les cas ou ter-
minaifons des mots : ainfi il eft indifférent pour le
fens de dire Antonium vicit Augujlus , ou Augujlus
vicit Antonium. Cicéron ne concevrait donc point
le fens d'une phrafe , dont la fyntaxe lui ferait en-
tièrement inconnue. Ainii il n'entendrait rien à Au-
itnquit Antoine; ce feroit-là pour liy trois mots
qui n'auraient aucun figne de rapport. Mais repre-
nons la fuite de nos réflexions fur les cas.
Il y a des langues qui ont plus de fix cas, & d'au-
tres qui en ont moins. Le P. Galanus , Théatin , qui
avoiî demeuré pluiieurs années chez les Arméniens ,
dit qu'il y a dix cas dans la langue Arménienne. Les
Arabes n'en ont que trois.
Nous avons dit qu'il y a dans une langue & en cha-
que déclinaiion autant de cas , que de terminaifons
différentes dans les noms ; cependant le génitit & le
datif de la première déclinaiion des Latins , font lem-
blables au fingulier. Le datif de la féconde eft auflî
terminé comme l'ablatif: ilfemble donc qu'il ne de-
vrait y avoir que cinq cas en ces déclinaifons. Mais
i°. il eft certain que la prononciation de Va au no-
minatif de la première déclinaiion , étoit différente
de celle de l'a à l'ablatif: le premier efl bref, l'autre
efl long.
z°. Le génitif fut d'abord terminé en ai , d'où l'on
forma ce pour le datif. In prima declinationc diclum
olim menfai , & bine deinde formatum in dativo meniae.
Perizonius in Sanclii Minervâ, L. I. c. vj. n. 4.
30. Enfin l'analogie demande cette uniformité de
fix cas dans les cinq déclinaifons , & alors ceux qui
ont une terminaifon femblable , font des cas par imi-
tation avec les cas des autres terminaifons , ce qui
rend uniforme la raifon des conftructions : cafus funt
non vocis , fed Jîgnificationis , nec non etiam Jlruclurœ
rationem fervamus . Prifc. L. V. de Cafu.
Les rapports qui ne font pas indiqués par des cas
en Grec , en Latin , & dans les autres langues qui
ont des cas , ces rapports , dis-je , font fuppléés par
des prépofltions, clam patrem. Teren. Hecy. Act. III.
fc. iij. v. 36
Ces prépofltions qui précèdent les noms équiva-
lent à des cas pour le fens , puifqu'elles marquent des
vues particulières de l'efprit ; mais elles ne font point
dcb cas proprement dits , car l'eflence du cas ne con-
fifte que dans la terminaifon du nom , deltinée à in-
diquer une telle relation particulière d'un mot à quel-
qu'autre mot de la propofition. (.F)
Cas irréductible du troi/îéme degré, ou Am-
plement CAS IRRÉDUCTIBLE (en Analyje) c'eft ce-
lui où une équation du troilieme degré a l'es trois
racines réelles, inégales & incommenfurables. Dans
ce cas , fl on réfout l'équation par la méthode ordi-
naire , la racine quoique réelle, fe prélente fous une
forme qui renferme des quantités imaginaires , &
C A S
l'on n'a pu jufqu'à préfent réduire cette ex'pfeflion à
une forme réelle , en chaffant les imaginaires qu'elle
contient. ^oye^RÉEL, Imaginaire, &c. Entrons
fur ce fujet dans quelque détail.
Soit xi -J- q x -f r =1 o une équation du troifleme
degré , dans laquelle le fécond terme eft évanoui.
Voye{ Evanouissement, Equation & Trans-
formation , &c. Pour la réfoudre , je fais x —y
-f- 1 , & j'ai xi =yl + 3 yyi+ 3 [yy + ^ = y>
+ 3J'îAr + î3 5 ^onc Xi ~ 3J\X~ ) ' — °- Cette
équation étant comparée terme à terme avec x> -\-qx
+ r = o , on aura , i°. - 3 y j = q , ou £= - X ;
2.°- Jî +& = - r, ou yl+rz= -j^ ; ou y* + ry\
_ V.
Cette équation , qu on peut regarder comme du
fécond degré, ( f^oyer Abaissement) étant réfolue
à la manière ordinaire, {Voye^ Equation) donne
ys — - -^ + \/( fj + -^ )• Donc à caufe de çî =
- r -yi, on aura # = - ^ + v/( {-y + -j ) ; donc
x ou y + i.= ^-it/(^TT) +
)/- — + V{ il + — ). Telle eft la forme de I»
valeur de x Cela pofé,
i°. Il eft évident que fi q eft pofitif, r étant po-
fitif ou négatif, cette forme eft réelle , puifqu'elle ne
contient que des quantités réelles. Or dans ce casy
comme on le verra à l'article Equation, deux des
racines font imaginaires. Ainfi la leule racine réelle
fe trouve exprimée par une formule qui ne contient
que des quantités réelles. Ce cas ne tombe donc point
dans le cas irréduBible , & n'a aucune difficulté.
20. Si q eft négatif, & que-^f- =-^- , alors l'é-
quation a deux racines égales , & il n'y a encore
aucune difficulté.
30. Si q eft négatif & -j- > -^ , il y a deux
racines imaginaires , & la racine réelle fe trouve
repréfentée par une formule toute réelle ; ce qui n'a
point de difficulté non plus.
40. Mais fi q eft négatif & que — < -£- , alorc
— y~ 1 -^- eft une quantité négative, & par con-
fisquent \/{j- | f" -r" ) eft imaginaire. Ainfi l'ex-
preffion de -v renferme alors des imaginaires.
Cependant on démontre en Algèbre , que dans ce
casles trois racines font réelles & inégales. On peut
en voir la preuve à la fin de cet article. Comment
donc peut -il le faire que la racine x fe préfente fous
une forme qui contienne des imaginaires ?
M. Nicole a le premier réfolu cette difficulté
(Mém. acad. zj7J^-) Il a fait voir que rexpreflion
de x , quoiqu'elle contienne des imaginaires , eft en
effet réelle. Pour le prouver, foit i/(— ~~ + — )
?
= b y/— 1 , & -f- = a , on aura x =z\/a-\-b j/— r.
-f ya — b \/—i. Il s'agit de montrer que cette ex-
preflion, quoiqu'elle renferme des imaginaires , re-
préfente une quantité réelle. Pour cela, foit formée
fuivantles règles données à l'article Binôme , une
férié qui exprime la valeur de V a + b y/— 1 ou
a-\-b v/— 1 ' & celle de a — /' \/— 1 3 , on trou-
vera après avoir ajouté enfemble ces deux fériés,
que tous les termes imaginaires le détruiront , &
qu'il ne reliera qu'une fuite infinie de termes com-
pofés de quantités toutes réelles. Ainfi la valeur de -v
eft en effet réelle, La difficulté eft de ibmmer cette
ferie;
CAS
férié ; c'eft à quoi on n'a pii parvenir jnfqu'à pré-
fent. Cependant M. Nicole l'a fommée dans quel-
ques cas particuliers , qu'il a par conléquent ibuf-
traits , pour ainii dire , au cas irréductible. Voye^ les
Mem. acad. IJ38, & fuiv.
Lorfque l'une des trois équations réelles & iné-
gales eft commenfurablc , alors l'équation n'eft plus
dans le cas irréductible , parce que l'un des divifeurs
du dernier terme donne la racine commenfurablc.
Voye^ Diviseur 6- Racine.
Mais quand l'équation eft incommenfurable , il
faut, pour trouver l'expreffion réelle de la racine ,
ou fommer la férié fufdite , ou dégager de quelqu'au-
tre manière l'expreffion trouvée, de la forme imagi-
naire qui la défigure pour ainfi dire. C'efl; à quoi on
travaille inutilement depuis deux cents ans.
Cette racine du cas irréductible , fi difficile à trou-
ver par l'Algèbre , fe trouve aifément par la Géo-
métrie. /^'«{Construction. Mais quoiqu'on ait
fa valeur linéaire , on n'en eft pas plus avancé pour
fon expreffion algébrique. ^.Incommensurable.
Cet inconvénient du cas irréductible vient de la
méthode qu'on a employée jufqu'ici pour réfoudre
les équations du troifieme degré ; méthode impar-
faite , mais la feule qu'on ait pu trouver jufqu'à pré-
fent. Voici en quoi confifte l'imperfeftion de cette
méthode. On fuppofe xz=.y-\-{, y & £ étant deux
quantités indéterminées ; enfuite on a tout à la tois
xi —}yix—yi =.0, àcxî -\-qx-{-r=.o. On com-
pare ces équations terme à terme , Se cette comparai-
fou terme à terme enferme une fuppofition tacite, qui
amené la forme irréductible fous laquelle x eft ex-
primée; à la rigueur on zqx-\-r=z — $_y £.v— y s— £Î;
voilà la feule conféquence rigoureufe qu'on puiife ti-
rer de la comparaifon des deux équations : mais ou-
tre cela on veut encore fuppofer que la première
partie de^x-f r, c'eft-à-dire^-vfoit égale à — ">>y{x,
première partie du fécond membre. Cette fuppofi-
tion n'eft point abfolue ni rigoureufement néccfTaire,
on ne la fait que pour parvenir plus aifément à trou-
ver la valeur de y & de {, qu'on ne pourroit pas
trouver fans cela ; d'ailleurs commej & \ font l'une
& l'autre indéterminées , on peut fuppofer — jy^x
= </ x&c —y s—^lzzr. Mais cette luppoiition même
fait que les deux quantités,/ & { , au lieu d'être réel-
les comme elles devroient, fe trouvent chacune ima-
ginaires. Il eft vrai qu'en les ajoutant enfemblc,leur
tomme eft réelle : mais l'imaginaire qui s'y trouve
toujours , & qu'on ne peut en chafler , rend inutile
l'expreffion de x qui s'en tire.
En un mot, l'équation x=y-±-i ne donne à la ri-
gueur que cette équation^ x -\-r= — }y{x—yl —£i
on qy + <,{ + r=-}yyi-lyii-yl-{l; &
toutes les tois que l'on voudra de cette équation en
faire deux autres particulières, on fera une fuppofi-
tion tacite qui pourra entraîner des inconvéniens îm-
poffibles à éviter, comme il arrive ici, où y & ? fe
trouvent forcément imaginaires.
Il faudroit voir fi par quelque moyen on ne pour-
roit pas couper l'équation fufdite en deux autres, qui
donnaient à y & à j une forme réelle & facile à trou-
ver : mais cette opération paroît devoir être fort dif-
ficile, fi elle n'eft pas impoffible.
J'ai fait voir dans les Mémoires de l'Académie des
Sciences de Pn/ffe de 1746 , que l'on pouvoit tou-
jours trouver par la trife£tion d'un arc de cercle,
une quantité f-fcj/ — 1 , égale à la racine cube de
<c -f b y/ — 1 ; & que fi c -f- e y/— 1 = y^a ■+• b y/ — *,
1
•n a y/a — b\/— 1 =c — e\/— 1. /'. Imaginaire.
D'où il s'enfuit que dans les cas où un arc de cercle
peut être divifé géométriquement, c'eft-ù-dire , par
Tome IL
CAS 737
la règle & le compas, en trois parties égales, on peut
afîigner la valeur algébrique de c & de e : ce qui pour-
roit tournir des vues pour réfoudre eh quelques oc-
casions des équations du troifieme degré qui tombe-
raient dans le cas irréductible. Voye{ le Mémoire que j'ai
cité.
Quoi qu'il en foit , la racine étant incommenfura-
ble dans le cas irréductible , l'expreffion réelle de cet-
te racine , quand on la trouveroit , n'empêcheroit pas
de recourir aux approximations. Nous avons donné
à l'article Approximation la méthode générale
pour approcher de la racine d'une équation , & nous
y avons indiqué les auteurs qui ont donné des mé-
thodes particulières d'approximation pour le cas ir-
réductible. Voye^ aiiffî CASCADE.
Puifque nous en fommes fur cette matière des équa-
tions du troifieme degré , nous croyons qu'on ne nous
faura pas mauvais gré de faire ici quelques remarques
nouvelles qui y ont rapport , &£ dont nos lecteurs
pourront tirer de l'utilité.
On fait que toute équation du troifieme degré a
trois racines. Il faudroit donc, pour réfoudre d'une
manière complctte une équation du troifieme degré ,
trouver une méthode qui tit trouver à la fois les trois
racines , comme on trouve à la fois les deux racines
d'une équation du fécond degré. Jufqu'à ce qu'on ait
trouvé cette méthode, il y a bien de l'apparence que
la théorie des équations du troifieme degré reftera.
imparfaite : mais la trouvera-t-on , cette méthode }
c'eft ce que nous n'ofons ni nier ni prédire.
Examinons préfentement de plus près la méthode
dont on te fert pour trouver les racines d'une équa-
tion du troifieme degré. On a d'abord une équation
du fixieme degré jy 6 , &c. telle qu'on l'a vue ci-def-
fus , & qui a par conléquent fix racines , qu'on peut
ailément prouver être toutes inégales : on a enfuite
une équation du troifieme degré {> = — y* — r ; 8c
comme yt a deux valeurs différentes à caufe de l'é-
quation y 6 + ryl , &c. == o , & que { eft élevé au
troifieme degré , il s'enfuit que cette équation doit
donner auffi fix valeurs différentes de j , trois pour
chaque valeur de y* ; or chacune des fix valeurs de ~
étant combinée avec chacune des fix valeurs de^y ,
on aura trente -fix valeurs différentes pour l+yî
donc .v paroît avoir trente-iix valeurs différentes.
Cependant l'équation étant du troifieme degré , a ne
doit avoir que trois valeurs : comment accorder tout
cela ?
Je réponds d'abord que les trente-fix valeurs pré-
tendues dey + { doivent fe réduire à dix-huit; en
effet, il ne tant pas combiner indifféremment chaque
valeur de { avec toutes les valeurs de_y, mais feu-
lement avec les valeurs de y qui corrcfpondent à
la valeur qu'on a fuppoféc àj-5. Par exemple, on
aj!="7 ±V(— ^ + ■£ )j d'où l'on tire ^ =
— ~ + l/( — Ij + ^jT ) i Ie rig"0 + qui précède le
figne radical dans la valeur de .y', répond au figne —
qui précède le figne radical dans la valeur de {', &
le figne — au figne + ; ce qui eft évident , puifque
lj = — r— y* : donc pour chacune des trois valeurs
de y qui repondent au figne -f- placé devant le figne
radical , il y a trois valeurs de 1 qui répondent au
figne — placé devant le figne radical , ce qui fait
neuf valeurs de y -f- { ; & en y ajoutant les neuf
autres valeurs pour le cas du figne — placé avant le
ligne radical dans l'expreffion dej ;, cela tait dix-
huit au lieu de 36 qu'on auroit eu en combinant
indifféremment les lignes. Mais ce n'eft pas tout.
Quoique chacune des valeurs de y & de ^ , em-
ployées & combinées comme on vient de le
crire , parouTe donner une valeur dej + - , il faut
encore rejetter celles dans lefquelles le produit { y
A A a a a
738
CAS
ne fera pas égal à — — ; car c'eft une des conditions
de la folution , comme on l'a vu plus haut, que
— 3 ~ y = q ; il eft vrai que les dix-huit valeurs de y
& i fatisfont à la condition que — 27 y* ^ —q*.
Mais cette condition — 27 y* {i = q'i elt beaucoup
plus étendue que la condition — 3 iy = q , quoique
d'abord elle paroifle la même. Par exemple , u= b
ne donne qu'une valeur de u : mais w? = £? donne
trois valeurs de u. Pour le prouver , foit u^ — bi = o,
& divifons par u — b , il viendra uu-\-bu-\- b b = o ,
ce qui donne u = + y/( — 3 — ) , ainfi iô = b^
donne u = b ,11 = bx ( — { + — — )& " = /'X ( — \
~ ). Donc quoique dans les dix-huit valeurs
dey +1 on ait 27J' {' = — q* , il ne faut prendre
que celles 011 3j{= — q. Cela pofé.
Soient ces quatre équations :
I.
II.
III.
IV.
^5=-T-v/(-^+^).
j" = --!-•(- ■£ + -£ )•
Et foit a -f-£ V^— 1 = à la racine cubique de -
+ V(r- y+ -7 ) > on aura a —b y/—i = à la
racine de — ^- _v/(_ g + 1! )} cc qui donnera :
Racines de la première équation.
1. j = a + * v/— 1.
2. y =(a + b y/-i) (_ 1±JÙZ± ).
Racines de la féconde,
l =1 a — b \/ — 1.
Racines de la troifieme.
Sont les mêmes que de la féconde.
Racines de la quatrième.
Sont les mêmes que de la première.
Donc , i°. la combinaifon des racines de la troi-
fieme équation avec celles de la quatrième, donnera
le même réfultat que celle des racines des deux pre-
mières.
20. Il ne faudra combiner enfemble que les va-
leurs de y & de \ , &c dont le produit fera == ■ — q-
c'eft- à-dire aa-\-bb ; car a-\-b \/ — 1 étant = à
) cka — b y/— 1 =
V_
■+V(
_îj
— £- + V{ ~ — —- ) , on aura a a + b b =
^ — -fr = |- • D'où il s'enfuit,
30. Qu'il faudra combiner la racine marquée (1)
avec la racine marquée (4), ce qui donnera j = za.
40. Qu'il faudra combiner la racine marquée (2)
avec la racine marquée (6) , ce qui donnera
50. Qu'il faudra combiner la racine marquée (3)
avec la racine marquée (5), ce qui donnera
—a — bVï-
Voilà les trois racines de l'équation , & il eft vifi-
ble , par les règles que nous avons établies , que tou-
tes les autres valeurs de y 4. £ donneraient des ex-
CAS
prefîîons faillies de la racine x ; Se que toutes les
trois racines font ici réelles.
On peut trouver aifément par la même méthode
les trois valeurs de x dans tout autre cas que le cas
irréductible. Par exemple , li q eft pofitif , ou fi q eft
négatif & < ou = T— , alors il faudra fuppofer
V
-T + •(-£ + -?-) = « + *
&
»/_ 4. _-j/(— ±L + -)=za — b; & l'on trou-
vera en ce cas une racine réelle & deux imaginaires,
ou une racine réelle & deux autres réelles , égales
entr'elles. C'eft ce qu'il eft inutile d'expliquer plus
en détail : il ne faut pour s'en convaincre , que faire
un calcul femblable à celui que nous avons fait pour
trouver les trois racines dans le cas irréductible. (O)
Cas , en terme de Palais , fe dit de certaines natu-
res d'affaires , de délits ou de crimes. Ainfi les cas
royaux font ceux dont les feuls juges royaux connoif-
fent : tels font en matière criminelle la fauffe mon-
noie , le rapt , le port d'armes , la fédition, l'infrac-
tion de fauve-garde, Se quelques autres. Pour le cri-
me de lefe-majefté , qui eft auffi un des cas royaux ,
la connoiffance en appartient exclufivement au par-
lement , du moins au premier chef. En matière civi-
le , le pofleiToire des bénéfices , les caufes du domai-
ne du Roi , les procès concernant les églifes de fon-
dation royale , & en général tous les délits où le Roi
a quelqu'intérêt en fa qualité de Roi , voye^ Royal;
voye^ auffi la Conférence des nouvelles ordonnances au
titre premier des matières criminelles , où plufieurs autres
cas royaux font rapportés.
Il y a auffi des cas qu'on appelle prevôtaux , d'au-
tres qu'on appelle cas privilégiés. Voye^ Prevotal
& Privilégié.
Il y en a enfin qu'on appelle eccléfiafliques , parce
nie les feuls juges d'églife en peuvent connoître.
Cas de conscience, (Morale.} Qu'eft-ce qu'un
cas de confeience ? c'eft une queftion relative aux de-
voirs de l'homme & du chrétien , dont il appartient
au théologien , appelle cafuife , de peler la nature &C
les circonftances , Se de décider félon la lumière de
la raifon , les lois de la fociété , les canons de l'E-
glife , & les maximes de l'Evangile ; quatre grandes
autorités qui ne peuvent jamais être en contradiction.
Foyei Casuiste.
Nous fommes chrétiens par la croyance des vé-
rités révélées , & par la pratique des maximes évan-
géliques. Nous faifons à Dieu le facrifîce de notre
raifon par la Foi , Se nous lui faifons le facrifîce de
nos penchans par la mortification : ces deux bran-
ches de l'abnégation de foi-même font également ef-
fentielles au Salut : mais l'infraftion n'en eft peut-
être pas également funefte à la fociété ; & c'eft une
chofe encore à favoir , fi ceux qui attaquent les dog-
mes d'une religion , font auffi mauvais citoyens que
ceux qui en corrompent la Morale.
Il femble au premier coup d'œil que le poifon des
Corrupteurs de la morale, foit fait pour plus de mon-
de que celui des impies. La dépravation des mœurs
eft un effet direft de celle des principes moraux ; au
lieu qu'elle n'eft qu'une fuite moins prochaine de
l'irréligion ; mais fuite toutefois prefqu'intaillible ,
ainfi qu'un de nos plus grands orateurs , le P. Bour-
daloue , l'a bien démontré. L'incrédule eft d'ailleurs
quelquefois un homme , qui las de chercher inutile-
ment dans les fources communes & les converiations
ordinaires , le rayon de lumière qui devoit rompre
l'écaillé de fesyeux , s'eft adreffé au public , en a re-
çu les éclaircifïerncns dont ilavoit befoin , a abjuré
fon erreur , & a évité le plus grand de tous les mal-
CAS
heurs , la mort dans I'impénitence : c'eft un homme
qui s 'eft expofé à nuire à beaucoup d'autres , pour
guérir du mal dont il étoit attaqué, foye^ l'article
Certitude. Mais celui qui défigûre'la morale tend
à rendre les autres médians, lans l'efpérance d'en
devenir lui-même meilleur.
Au refte , quel que foit le parti qu'on prenne dans
cette qucftion , l'équité veut qu'on diftingue bien la
perfonnede l'opinion, & Fauteur de l'ouvrage : car
c'eft bien ici qu'on a la preuve complète que les
mœurs & les écrits font deux choies différentes. La
foule des cafuiftes que Paical a convaincus de re-
lâchement dans les principes , en offre à peine un
feul qu'on puiffe accufér de relâchement dans la con-
duite : tous ne femblcnt avoir été indulgens que pour
les autres : c'eit au pié du crucifix , oii Ion dit qu'il
reftoit profterné des jours entiers , qu'un des plus fa-
meux d'entr'eux rélblvoit en Latin ces combinaifons
de débauches fi fingulieres , qu'il n'eft guère poflibie
d'en parler honnêtement en François. Un autre palîe
pour L'avoir difputé aux peres dudefertpar l'aultéri-
té de fa vie. Mais nous ne nous étendrons pas davan-
tage fur les mœurs des Cafuiftes : c'eft bien affez
d'avoir montré qu'elles n'a voient rien de commun
avec leurs maximes.
Cas RESERVES , dans la Difcipline eccléjiajlique ,
font certains péchés atroces dont les .Supérieurs ec-
cléfiaftiques fe réfervent l'abfolution à eux-mêmes ,
ou à leurs vicaires généraux. Il y a quelques cas rè-
fervés au pape , fuivant un ancien ufage ou conlente-
ment des Églifes : autrefois il falloit aller à Rome
pour en être abfous ; à préfent le pape en donne le
pouvoir par des facultés particulières , aux eveques
& à quelques prêtres.
Les cas réfervés au pape, fuivant le rituel de Paris,
font i°. l'incendie des églifes & celle des lieux pro-
fanes , fi l'incendiaire eft dénoncé publiquement ;
a°. la fimonie réelle dans les ordres &c les bénéfices,
& la confidence publique ; 3". le meurtre ou la mu-
tilation de celui qui a les ordres facrés ; 40. frapper
un évêqueou un autre prélat ; 5". fournir des armes
aux infidèles ; 6°. fallifîer les bulles ou lettres du pa-
pe ; 70. envahir ou piller les terres de l'Egide Ro-
maine ; 8°. violer l'interdit du faint-fiége.
Les cas réfervés à l'évêquefont 1". frapper nota-
blement un religieux ou un clerc infacris; 20. l'in-
cendie volontaire ; 30. le vol dans un lieu facré avec
effraôion ; 40. l'homicide volontaire; 50. le duel ;
6°. machiner la mort de fon mari ou de fa femme ;
70. procurer l'avortement ; 8°. frapper l'on père ou
fa mère ; 90. le fortilege ou empoisonnement, & la
divination ; io°. la profanation de l'euchariftie ou
des faintes huiles; 1 1°. l'cfFuSion violente de fang
dans Féglife ; ix°. la fornication dans l'églife ; 13".
abufer d'une religieuîé ; 140. le crime du confeffeur
avec fa pénitente ; 1 50. le rapt ; 160. l'incefte au
deuxième degré; 17e'. la Sodomie, & autres pé-
chés femblables; jS°. le larcin Sacrilège; 190. le
crime de faux , faux : _, fa 11 fié monnoie ,
falsification de lettres ecclefiaftiques ; 200. fimonie
&: confidence cachée; 210. fuppofition de titre ou de
perfonne à l'examen pour la promotion aux ordres.
Les réfervations font di .rentes fuivant l'ufagc
des diocefes, év elles font fort utiles pour donner
plus d'horreur des grands crimes , par la difficulté
d'en recevoir l'abfolution. Le prêtre pénitencier eft
établi principalement pour abfoudrede ces cas: mais
à l'article de la mort 1! n'y a ni refervation de cas ,
ni diltincYion de confcïTeur; tout prêtre peut abfou-
dre celui qui le trouve en cet état , pourvu qu'il ait
donné quelque ligne de pénitence. Fleury , Injlit. au
Droit eccléf. tome I. part, z- cluip. iv. page z88. &
Juiv.
Il y a aufîl dans les couvens des cas réfervés par les
Tome II.
CAS
739
chapitres , dont il n'y a que les Supérieurs qui ayent
droit d'abfoudre. (G)
CASAL , (Géog.) ville forte d'Italie , capitale du
Montferrat , avec une citadelle. Elle eft fur le Pô.
Long. z6. 4. lat. 43. y.
Casal-maggiore , petite ville forte d'Italie fi-
tuée fur le Pô, au duché de Milan. Long. zj. do.
lat. 4.5. 6.
CASALE-NUOVO , ( Géog.) petite ville d'Italie
au royaume de Naples , dans le pays d'Otrante.
Casale-pusturlengo , ( Géog. ) petite ville
d'Italie dans le duché de Milan , au territoire de
Lodi.
CASALMACH , ( Géog. ) grande rivière d'Afie
dans la Natolie , qui fe jette dans la mère Noire.
CASAMANCE , ( Géog. ) rivière d'Afrique au
royaume de Mandiga.
CASAN , (Géog.) ville confidérable d'Afie , ca-
pitale du royaume du même nom , dans l'empire
Ruffien , avec un château fort. Elle eft fur le Ca-
fanka. Sa long, efl 69. lat. 33. 38.
Le royame de Cafan eft fertile en fruits , grains ,
& légumes ; il s'y fait grand commerce de pellete-
ries & de bois pour conftruire les vaiffeaux.
CASANGAS , ( Géog. ) nation d'Afrique dans la
Nigritie , auprès de la rivière de Cafamance.
CASAQUE, f. f. (Hift. mod. ) efpece de furtout
ou d'habit long de delfus qui fe porte fur les autres
habits , qui eft fur-tout en ufage en Angleterre par-
mi les ecclefiaftiques , & que les laïques portoient
aufîî autrefois.
Ce mot lignifie habit de cavalier: d'autres le font
venir par corruption d'un habillement des Cofaqucs.
Covarruvias le fait venir de l'Hébreu cafack , qui li-
gnifie couvrir ; d'où a été tiré le Latin cafa, cabane ,
&C cafula , diminutif du premier. Enfin il y en a qui
veulent que ce mot, ainfi que la choie qu'il lignifie,
vienne de caracalla , efpece d'habit de deiîus qui pen-
doit julqu'aux talons. (G)
CASASA, ville & port d'Afrique en Barbarie,
dans la province de Garet.
CASAVA, (Commefcc. ) monnoie des Indes que
l'on écrit & que l'or/ prononce g.ifava. Voye^ Ga-
SAVA.
CASAUBON, (Geog.) petite ville de France dans
la province d'Armagnac , fur la rivière de Douze.
CASBA , ( Géog. ) ville d'Afrique au royaume de
Tunis.
CASBINoaCASVIN, grande ville de Perfe dans
l'Irac , proche de la montagne d'Eluend. Long. 6 y.
35. lat. 36.30.
CASCADE, f. f. ( Hydraul. des Jard.) eft une
chute d'eau qui tombe d'un lieu élevé dans un plus
bas.
On en diftingue de deux fortes ; la cafeade natu-
relle , & Vartijicielle.
La naturelle , occafionnée par l'inégalité du ter-
rein , fe nomme cataracte : telle eft la cafeade de Ti-
voli , de Terni , de Schat houle , c-v.
L'artificielle , due à la main des hommes , tombe
en nappes, comme la rivière de Mark- ; en roulettes,
comme on en voit dans les bofquets de S. C loud ; en
rampe douce , comme celle de Sceaux ; en buffets ,
comme à Trianon & Verfailles ; ou par chutes de
perrons , comme la grande cajeadt de S. Cloud.
On dit encore grande &pt - quife pla-
cent dans une niche de charmille ou de 1
dans le milieu d'un fer à cheval , foit à la tête d'une
pièce d'eau. (A')
Méthode des cqfcades, {Algèbre,') eft le nom que-
M. Rolle , géomètre de l'Académie des Sac;
donné autrefois à une méthode qu'il a\ oit imaginée
pour réfoudre les équations. ïi la . n 1690
dans fon traité d'Algèbre. Par cette méthode on ap-
A À a a a ij
740
CAS
proche toujours de la valeur de l'inconnue, par des
équations fuccefïives qui vont toujours en baillant
ou en tombant d'un degré ; ck de-là eft venu le nom
de cafcades. Voyei EQUATION.
On trouve dans YAnalyfe démontrée du P. Reyneau,
iiv. VI. une méthode par laquelle on approche des
racines d'une équation , en résolvant des équations
qui vont toujours en baillant d'un degré ; Se cette
méthode paroit avoir beaucoup de rapport à celle
de M. Rolle. En voici l'idée. Soit , par exemple , une
équation du troisième degré x 3 — px2 + q x -j- r
— o , dont les trois racines l'oient réelles ôc politi-
ves a , /> , c, a étant la plus petite , & c la plus gran-
de ; loit multipliée cette équation par les termes d'u-
ne progreffion arithmétique 3,1, 1,0; elle devien-
dra l'équation du iécond degré 3 x 2 — %p x + q = o,
dont les deux racines l'ont réelles , & l'ont telles que
la plus petite eft entre a & b, & la plus grande entre b
& c : ainiî cherchant les deux racines de cette équa-
tion du fécond degré , on aura les limites entre les-
quelles b eft renfermé; &c on pourra trouver enfuite
cette racine b par approximation : la racine b étant
trouvée , on connoitra les autres a , c.
Four démontrer cette méthode , foit* 3 — px 2 -f
qx + rz=.y , l'équation d'une courbe de genre para-
bolique. Voy. ce mot. L'équation 3 x2 — ipx-\- ç = o,
fera l'équation des points qui donneront les maxima
dey. Voye7^ Maximum. Et ces points , comme il eft
ailé de le voir, feront lîtués de manière qu'ils feront
l'un d'un côté , l'autre de l'autre côté du point qui
donnera la racine moyenne de l'équation xs—px*
-f q x + r =z o , c'eft - à - dire du fécond point où la
courbe coupera fon axe. Voye{ Racine; yoye{ auiîî
dans les Mètn. acad. 1J41. deux Mémoires de M.
l'abbé de Gua fur le nombre des racines , où il fait
ul'age des courbes de genre parabolique.
En voilà aifez pour faire fentir comment on par-
vient à trouver au moins par approximation les raci-
nes d'une équation , en changeant cette équation en
une autre d'un degré inférieur. On trouve dans le
livre VI. du P. Reyneau , tout le détail de cette métho-
de, qui eft extrêmement pénible, peu commode , ôc
très-imparfaite dans la pratique, fur - tout lorfqu'il
y a des racines imaginaires. Voye^ Limite. (O)
CASCAES, ( Géog.) petite ville du royaume de
Portugal , à l'embouchure du Tage , avec une bonne
rade.
CASCANES, f. f. en termes de Fortification, font
des trous ou cavités en forme de puits que l'on fait
dans le terre - plein , près du rempart , ôz c!"où l'on
pouffe une galerie foûterraine , pour découvrir &
éventer , ou couper ia mine des ennemis. Ce terme
n'eft plus guère d'ufage à préfent ; on fe lert plutôt
de celui de puits ou d'écoutes. Voye^vlTS & ECOU-
TES. (Q)
* CASCARILLE ou CHACRÏL , cafcarilla ou cha-
karilla , ( Hiji. nat. bot. ) Nous n'avons rien de mieux
fur cette production naturelle , que ce que M. Boul-
duc en a donné à l'académie des Sciences , année
1709.
La cafcarilh ou le chacril , dit M. Boulduc , eu une
écerce allez ligneufe , épaiffe depuis une ligne juf-
qu'à une ligne & demie , de la couleur à peu-près du
quinquina ordinaire , d'un brun pâle , moins com-
pacte., & plus friable, d'un goût amer, un peu ftyp-
îiqr.c , piquant la langue avec allez d'acrimonie , &
laùTant à la fin une impreffion d'amertume mêlée de
quelque choie d'aromatique. Cette écoice eft cou-
verte d'une pellicule blanchâtre , mince , infipidè ,
ridée , & frllonnée légèrement & en divers fens.
C'eft, ajoute M. Boulduc , l'écorce d'une plante du
Pérou, qu'on ne connoit point encore.
Sa refî'emblance avec le quinquina dont on distin-
gue fix efpeces , l'a fait compter pour ia Septième;
CAS
cependant la cafcarille eft plus amere que le quinqui-
na : elle eft aufîi plus acre & plus brûlante ; mais l'a-
mertume du quinquina eft -plus defagréable & plus
ftyptique.
La cafcarille brûlée donne encore une odeur aro-
matique agréable, que n'a point le quinquina. Allu-
mée à la bougie , elle jette une fumée épaifie , beau-
coup de fuliginolité , 6c pourréfiduun charbon raré-
fié , femblable à celui des réfines brûlées ; ce qui dé-
figne plus de refîne que le quinquina n'en contient
en pareil volume. Elle donne par l'efprit-de-vin plus
d'extrait réfineux qu'aucun végétal connu. Cet ex-
trait eft amer, piquant, aromatique, & d'une cou-
leur de pourpre. Lorfque le quinquina étoit rare en
France , on lui fubftituoit quelquefois avec fuccès la
cafcarille dans les fièvres intermitentes. M. Boulduc
dit qu'elle a cet avantage fur le quinquina , qu'elle
agit autant en plus petite doie , & n'a pas befoin d'ê-
tre continuée li long-tems.
Apemis , médecin & profeffeur à Aftorf , en a em-
ployé la teinture dans les fièvres épidémiques & ca-
tarrheufes , & la fubftance dans les fièvres ordinai-
res. L'illuftre Stahl en a étendu Pillage aux pleuré-
fies , aux péripneumonies , & aux toux connues fous
le nom de quintes. M. Boulduc en a éprouvé la vertu
dans les coliques venteufes & les affections hyftéri-
ques & hypochondriaques appellées vapeurs.
S'il ne s'agit que de iubftililer les liqueurs , la tein-
ture fiiffit ; s'il faut de plus rétablir le reffort , il faut
la fubftance. La fubftance réuffit auffi pour les hé-
morrhoïdes internes qui ont peine à fluer , pourvu
que le malade foit un peu replet. La cafcarille fît très-
bien dans les dyffenterics de 1719, foit qu'il y eût,
foit qu'il n'y eût point de fièvre ; i'ipecacuanha y
perdit fa réputation : mais il n'y a rien à conclurre
de là ; car d'une année à une autre , les maladies de
même nom font très-différentes.
M. Boulduc attribue à la cafcarille la propriété de
fortifier l'eftomac , que I'ipecacuanha débilite. Ce
remède pourroit bien réunir les vertus de fes deux
compatriotes , le quinquina & I'ipecacuanha, &les
porter chacune plus loin que l'un & l'autre.
CASCHGAR , ( le royaume de ) autrement
petite Baucharie ; pays d'Alie dans la Tartarie , borné
au nord par le pays des Calmouks, dont il dépend ;
à l'orient , par le Tibet ; au fud , par le Mogol ; à
i'oceident , par la grande Boucharie. Il a environ
160 lieues de long fur 100 de large. Il eft fertile Si
peuplé. On y trouve du mufe , des mines d'or , d'ar-
gent, 6c des pierres précieufes. Yarkan ou Yrken en
eft la capitale.
Caschgar , ville du royaume du même nom.
CASCIA , ( Géog. ) petite ville d'Italie en Om-
brie , dans l'état de TEglife , vers les frontières du
royaume de Naples. A deux milles de cette ville ,
il y en a une autre nommée Civita di Cafcia , près du
Cor no.
CASE ou CASSE d'' Imprimerie , eft une efpece de
table en deux parties , formant enfemble un quarré
de deux pies neuf à dix pouces de long fur deux pies
cinq à lix pouces de large. Chaque partie eft entou-
rée & traverfée dans l'a largeur de tringles de bois de
dix à douze lignes de large , fur un pouce &: demi de
hauteur, qui lont entaillées à certaines diftances pour
recevoir les extrémités de petites réglettes de bois
environ de deux lignes d'épaiffeur , & un peu moins
hautes que les tringles ; lesquelles en fe traverfant ,
forment fur le fond de la table nombre de caffetins
ou compaftimens , qui fervent à placer les différen-
tes lettres dont une fonte doit être affortie. La par-
tie inférieure appellée bas de café , eft partagée en
cinquante -quatre caffetins de différente grandeur,
deftinés pour les voyelles &: confbnnes minufcules ,
les ef'paces , les quadrats , les quadratins , &c. La
CAS
partie fupérieure , qu'on appelle haut de caffe , efl di-
vifée en 98 caffetins rous égaux , 49 de chaque côté ,
deftinés pour les capitales ou majufcules , les petites
capitales , les lettres accentuées , quelques lettres
doubles , &c. Quand on dreffe une caffe pour y tra-
vailler , on la pofe fur deux tréteaux , beaucoup plus
élevés fur leurs pies de derrière que fur ceux de de-
vant ; ce qui fait que la partie la plus baffe , qui con-
tient les lettres les plus courantes, efl; la plus proche
du compofiteur ; & la partie la plus éloignée efl: la
plus haute , & efl celle qui renferme les lettres les
moins fréquentes dans le difeours , comme les capi-
tales , les lettres accentuées , & lettres doubles. Voy.
lafig. !• PL III- de l'Imprimerie, qui représente une
café Françoife , dans laquelle les lettres font placées,
comme il eft d'ufage à Paris de les difpofer. Lafg. 2.
de la même Planche repréfente les caifeaux de romai-
nes ABDE, & d'italiques B CFE , qui font tou-
jours placés à côté l'un de l'autre fur la table inclinée
D E F d, portée par les quatre piliers K,K, K,K,
affemblés les uns avec les autres par le moyen de
pluiieurs traverfes , fur lefquelles pofe la planche
G H , qui fert au compofiteur à mettre la galée &
les pages déjà compolées , ck autres choies qui peu-
vent lembarraffer fur la cajfe.
La cajfe italique ne diffère point de la romaine par
la difpolition des lettres.
CASt ou CASSE , en termes d'Orfèvre , n'eft autre
choie qu'une plaque de fer quarrée de fonte , de dix
à douze pouces de diamètre. Elle efl concave dans
le milieu , afin que l'or ou l'argent venant à fe fon-
dre quand on les fait recuire , puiffe fe rafTembler
dans cette foffette. En ajoutant le ferre-feu à la café,
on en fait un fourneau commode pour fondre les pe-
tites parties du métal.
L'unige principal de la café efl de recuire les pie-
ces d'Orfèvrerie.
Case , au Trictrac , fe dit de deux dames pofées
fur la même iigne ou flèche , oii l'on joue. Voy. Tri c-
trac. S'il n'y a qu'une dame fur la flèche , elle fait
la demi-cd/ij.
On appelle café du diable , celle de la féconde flè-
che au grand-jan : on ne lui donne guère ce nom
que quand c'eil la feule qui foit à faire ; parce qu'il
ne refle alors dans le petit-jan que cinq dames, &
que tous les coups que Ton joue fans remplir , avan-
cent ces dames, les font même pafTer, & mettent
dans le cas ou de ne point faire Ion plein , ou de ne
pas tenir long-tems.
C ASENTINO , ( Géog. ) petit pays d'Italie , au
grand duché de Tolcane dans le Florentin , près de
la fource de l'Ame.
CASER, v. n. au Trictrac , c'efl accoupler deux
dames , ou les placer fur la même flèche.
* C A SERIE , f. f. ( Commerce. ) M. Savary dit ,
dans fort Dictionnaire du commerce , que les Arabes de
la Terre-Sainte nomment ainii , ce qu'on appelle ail-
leurs des chans ou caravanferas ; & qu'il y a à Rama
deux cajiries , ou grands enclos de murailles , ail-de-
dans deiquelles on trouve des magafins pour les mar-
chandées , & des écuries pour les chameaux. Voye?^
Chan ; voyei Caravans: rai.
CASERTA , (Géog. ) petite ville d'Italie avec
titre de duché , dans la terre de Labour , au pic du
mont dilata. Long. Ji. J>b'. lot. 41. 5.
* CASH , f. m. (Commerce.') efpece de potitc mon-
noie de cuivre , ufitée au royaume de Tunquin en
Afie , & la feule qui fe fafle dans ce pays ; encore
n'clt-il point décide qu'on ne la tire point de la Chi-
ne. Sa valeur varie; elle eit tantôt haute & tantôt
bafle , fuivant la quantité qui s'en trouve dans le
commerce. Mille cashs peuvent revenir à cinq livres
de notre argent.
CAS
741
CASHEL ou CASSEL , ( Géog. ) ville d'Irlande
au comté de Tipperary. Long. ci. 32. lat. 5z. 36.
CASIA , f. f. ( Hijl. nat. bot. ) genre de plante à
fleur fans pétale , compofée de quelques étamines ,
foûtenues par un calice découpé pour l'ordinaire en
trois parties. Cette ' fleur efl flérile. Les fruits font
produits par des efpeces de ce genre, qui ne portent
point de fleurs : ce font des baies , le plus fouvent
de figure fphérique , qui renferment un noyau , dans
lequel il y a une amande de même forme. Tourne-
fort, Injl. rci herb. corol. Voye^ PLANTE. ( / )
CAS1LIRMAR , ( Géog. ) rivière d'Afie en Nato-
lie , qui prend fa fource dans la province de Chian-
gare , & va fe perdre dans l'Euphrate.
CASILLEUX , adj. Les Vitriers appellent le verre
cafilkux , lorfqu'il fe caffe en pluiieurs endroits , en
y appliquant le diamant pour le couper. Cela arri-
ve , difent-ils , à caufe qu'il n'a pas eu affez de re:
cuit au fourneau , c'efl-à-dire qu'on l'a retiré trop
tôt. Celui qui efl bien recuit, fe coupe facilement,
& efl tendre au diamant.
CASIMIR , ( Géog. ) petite ville en Staroflie dans
la petite Pologne , au palatinat de Lublin , fur la Vif-
tule. Il y a encore une ville du même nom dans la
grande Pologne , au palatinat de Pofnanie.
CASIM AMBOUS , ( Géog. ) peuple ou tribu d'A-
frique dans l'île de Madagafcar , dans la province de
Matatane.
* CAS IUS, ( Myth. ) Jupiter fut ainfi appelle des
montagnes de ce nom , fur lefquelles il étoit honoré.
Il y en avoit une à l'entrée de l'Egypte ; une autre
en Syrie. Ce Jupiter étoit repréfente fous la forme
d'un rocher efearpé , avec un aigle a côté.
CASLEU , f. m. ( Hift. anc. ) neuvième mois de
l'année fâinte des Hébreux, & le troifieme fuivant
l'ordre civil tk politique. Il répond à peu près à notre
mois de Novembre , & a trente jours pleins. V. An.
Le feptieme jour de cafeu , les Juifs font un grand
jeûne en mémoire de ce que le roi Joachim perça
d'un canif le livre des prophéties de Jérémie , ck les
jetta fur du charbon allumé dans un réchaud. Le
quinzième du même mois, ils s'affligent devant le
Seigneur , à caufe qu'à pareil jour Antiochus Epi-
phancs profana le temple de Jérufalem , & y plaça
uneflatue de Jupiter Olympien. Le vingt-cinquicme
de cafleu, Judas Machabée purifia le temple , & en
fit de nouveau la dédicace , en mémoire de laquelle
les Juifs célebroient tous les ans une fête folemnelle-
nommée encénies. Voye^ Encénies & Dédicace.
On dit auffi que le trentième de ce mois Nehé-
mie omit un facrificc folemnel, & répandit fur l'hof-
tie de l'eau boûeuie qui avoit été trouvée au lieu où
l'on avoit auparavant trouvé le feu facré , & que
Dieu fit defeendre une flamme du ciel qui alluma le
feu fur l'autel. Dictionnaire de la Bibl. tome I. page
3SS.(G)
CASLONA , petite ville d'Efpagne dans l'Anda-
louûe , p rès du Cuadalquivir.
* CASMINAR, ou CASSUMMUNIAR , {HifL
nat. bot. ) on la nomme auffi ryfagon. C'efl une racine
qui croit aux Indes orientales ; elle eit de la groifeur
du pouce , raboteufe , coupée en travers ; elle mon-
tre des nœuds qui forment des efpeces de cercles ;
fa couleur extérieure eit brune v en dedans elle eit
jaunâtre ; fon goût efl amer , fon odeur eit aroma-
tique & fort pénétrante. Suivant M. Dale, elle
a beaucoup de rapport avec la racine du zédoar.
On lui attribue la vertu de fortifier les nerfs -, on en
tire une teinture avec de l'efprit de vin , qu'on dit
être un excellent anti-apople£fique & un bon remède
contre la paralyfie , le tremblement de nerf-, , & la
paffion hyitérique : on prétend qu'elle p. ut auffi fer-
vir de correctif au quinquina.
CASOAR, ou CASUEL,f. m.(ffijt. nat. 0-v. '..)
74i CAS
oiieau des Indes , qui eft auffi appelle emeu ou tmè,
par les naturels du pays. Voyt{ Plan. IX.fig. J. on
n'avoit point vu de cafoar en Europe avant l'an
1597, & aucun auteur n'en avoit Fait mention.
LesHollandois au retour de leur premier voyage ,
en rapportèrent un qui leur avoit été donné comme
une choie rare , par un prince de l'île de Java. Le
gouverneur de Madagafcar en acheta un des mar-
chands qui retournoient des Indes , & il l'envoya à
la ménagerie de Versailles en 1671. cet oiieau y
vécut quatre ans ; fa defcription eft dans les Mém,
de CAcad. royale des Sciences, Tome III. part. II.
Il avoit cinq pies &c demi de longueur depuis le
bout du bec juiqu'à l'extrémité des ongles ; la lon-
gueur des jambes étoit de deux pies & demi depuis
le ventre juiqu'au bout des ongles. La tête & le cou
avoient enfemble un pié & demi ; le plus grand des
doigts compris l'ongle , avoit cinq pouces de lon-
gueur , & l'ongle feul du petit doigt trois pouces &
demi. L'aile étoit fi petite , que les plumes du dos
la cachoient ; toutes les plumes reffembloient fort
à du poil , parce que leurs barbes étoient dures ,
pointues , & clair-femées. Cet oifeau n'avoit pas
comme ceux qui volent, des plumes de deux fortes ,
dont les unes fervent au vol, & les autres ne font
que pour couvrir le corps; il n'en avoit que de celles-
ci ; elles étoient doubles pour la plupart ; elles avoient
deux longues tiges qui ibrtoient d'un même tuyau
fort court attaché à la peau ; leur longueur étoit iné-
gale ; quelques-unes de celles du croupion avoient
juiqu'à quatorze pouces : on a trouvé de ces plumes
doubles dans un aigle & dans un perroquet. Voye^
Aigle , Perroquet. Mais celles du cafoar avoient
encore d'autres particularités ; les barbes qui garnif-
foient la tige , étoient depuis environ la moitié juf-
qu'à l'extrémité fort longues , & groffes comme du
crin de cheval , fans jétter aucunes libres ; fa tige
eft platte , noire , luifante , & par nœuds en-deflbus ;
il fort de chaque nœud une barbe : enfin les barbes
du bout des grandes plumes étoient parfaitement noi-
res , & vers la racine , elles étoient de couleur de
gris tanné , plus courtes, plus molles , & jettant de
petites fibres comme du duvet ; il n'y avoit que la
partie compofée de barbes dures & noires qui parût ;
l'autre partie compofée de duvet en étant recou-
verte , les plumes du cou & de la tête étoient fi cour-
tes &c fi clair-femées, que la peau paroiffoit à décou-
vert , excepté vers le derrière de la tête , où elles
étoient plus longues ; le croupion étoit extraordinai-
rement gros ; les plumes dont il étoit garni ne dif-
féroient des autres qu'en ce qu'elles étoient plus lon-
gues.
Les ailes dépouillées de leurs plumes n'avoient
pas trois pouces de longueur: il y avoit au bout cinq
piquans de différentes longueur & grofleur, courbés
en arc fuivant la figure du corps. Ils étoient creux
depuis leur racine jufqu'à la pointe , & remplis d'une
moelle à peu-près femblable à celle qui fe trouve
dans les plumes naiffantes des autres oifeaux. Ces
piquans étoient de longueur différente , félon la dif-
pofition & la proportion des doigts de la main ; le
plus long avoit onze pouces de longueur , & trois
lignes de diamètre vers la racine ; ils étoient tous
d'un noir fort luiiant ; il n'y a aucune apparence
que les ailes du cafoar lui aident à marcher ; il pour-
voit plutôt s'en fervir pour frapper comme avec des
houffines.
La tête paroiffoit petite , parce qu'elle n'étoit pas
garnie de plumes ; il y avoit au-deffus une crête hau-
te de trois pouces comme celle d'un cafque ; cepen-
dant cette crête ne couvroit pas tout le deffus de la
tête ; car elle ne commençoit qu'un peu au-delà du
milieu du fommet , & finiffoit au commencement
iu bec : le devant de cette crête étoit noirâtre , oc
CAS
le derrière & les côtés de couleur de cire ; partout
elle étoit polie & luifante ; le haut étoit mince ,
n'ayant pas plus de trois lignes , & la baie avoit un
pouce ; fa iubftance étoit fort dure , & de la nature
de la corne , étant compofée de pluficurs lames com-
me la corne des bœufs. Clufius & Bontius dirent que
cette crête tombe dans la mue : cependant c'eft une
partie du crâne , & elle n'eft point tombée pendant
quatre ans que Foifeau a été à Verfailles. La partie
iupérieure du bec étoit fort dure par fes deux bords
&l par le deffus , les entre-deux de chaque côté n'é-
tant garnis que d'une membrane , dans laquelle
étoient les trous des narines tout auprès de l'extré-
mité du bec , qui étoit refendue en trois comme un
coq Indien. Le bout de la partie inférieure étoit auffî
partagé en trois , & légèrement dentelé ; tout le
bec étoit d'un gris brun , à l'exception d'une marque
verte qui étoit de chaque côté de la partie inférieure
du bec , environ vers le milieu de l'œil. Il y avoit
une paupière interne qui fe cachoit vers le grand
angle : la paupière inférieure étoit la plus grande ;
on y voyoit quantité de poils noirs. Il ie trouvoit au
bas de la paupière Iupérieure un rang de petits poils,
& au-deffus un autre rang de poils noirs qui s'éle-
voient en forme de fourcil ; le trou de l'oreille étoit
fort grand , & environné feulement de petites plu-
mes noires ; les deux côtés de la tête autour de l'œil
& de l'oreille , étoient de couleur bleue , excepté le
milieu de la paupière inférieure qui étoit blanc.
Le cou étoit de couleur violette , tirant fur la cou-
leur d'ardoife ; il y avoit auffi du rouge par derrière
en plufieurs endroits, principalement vers le milieu;
ces endroits rouges étoient plus relevés que le refte
par des rides dont le cou étoit entre-coupé oblique-
ment. Vers le milieu du cou par-devant , il y avoit
à la naiffance des grandes plumes deux appendices
formées par la peau , rouges, femblables à celles qui
pendent à la partie inférieure du bec des poules ,
longues d'un pouce & demi, larges de neuf lignes ,
arrondies par le bout , & de couleur en partie rouge ,
& en partie bleue.
La peau qui couvre le devant du flernum étoit
dure , calleuie , & fans plumes , parce que Foifeau
s'appuie fur cette partie lorfqu'il fe repoie.
Les cuiffes & les jambes étoient couvertes de plu-
mes ; la partie qui tient lieu de tarfe & métatarfe ,
étoit extraordinairement groffe , forte , droite , &c
couverte d'écaillés de diverfes figures ; i! n'y avoit
que trois doigts; ils étoient auffi couverts d'écaillés;
celui de derrière manquoit; les ongles étoient d'une
fubftance dure &folide , noire en-dehors , & blanche
en-dedans. Mém. pour fervir à Phifl. des animaux } fé-
conde partie. Foye{ Oiseau. (/)
CASPE, {Géog. ) ville ou bourg d'Efpagne au
royaume d'Arragon , au confluant de FEbre & de la
Guadeloupe.
CASPIA , {Géog.) petite rivière de Lithuanie,
qui prend fa iource dans la principauté de Smolens-
ko, & va fe jetter dans la Duna.
CASPIENNE, {la mer) Géog. grande mer d'Afie,
entre la Tartarie , le royaume de Perfe , la Géorgie ,
& la Mofcovie. Elle n'a point de communication vi-
fible avec les autres mers ; on lui en croit une cepen-
dant avec le golfe Periique. La navigation y eft dan-
gereufe ; fa longueur eft du nord au f ud fuivant les
obfervations faites par ordre du Czar Pierre le grand.
Elle eft entre les 37 & 47 degrés de latitude , & entre
les 67 & 73 degrés de longitude. Ses eaux iont plusia-
lées vers le milieu que vers les côtes.
Caspiens, {monts) chaîne de montagnes qui s'é-
tendent du nord au fud , entre l'Arménie & la mer
Cafpienne.
Caspiens , ( Géog. ) anciens peuples de Scythie,
voifins de FHircanie, qui ont donné leur nom à la
CAS
mer' Cajpienne. Strabon rapporte que ces barbares
avoient coutume de renfermer dans un lieu étroit ,
& d'y laifler mourir de faim leurs pères & mères ,
quand ils avoient atteint l'âge de foixante ou foi-
te-dix ans.
CASQUE ou HEAUME , f. m. (Art milit.) arme
défenfive pour couvrir la tête & le cou.
Le mot cafquc vient de cajjïcum ou cajjlcus , dimi-
nutif de cajjîs.
Le cafque avoit une vifiere faite de petites grilles ;
elle fe baiffoit durant le combat, & fe relevoit pour
prendre l'air en rentrant fous le front du cafquc. Cette
armure étoit pefante, & devoit être forte pour être
à l'épreuve de la hache d'armes & de la maflue. Le
cafque étoit affez profond , & s'étrécifToit en s'arron-
diffant par en-haut , ayant prefque la figure d'un cô-
ne. Il avoit une mcntoniere dans laquelle entroit la
vifiere quand elle étoit baillée , & au-deflus comme
un collet de fer qui defcendoit jufqu'au défaut des
épaules. Il étoit féparé du cafque , & s'y joignoit par
le moyen d'un collier de métal.
Le Gendre a remarqué qu'autrefois en France les
gendarmes portoient tous le cafque. Le roi le portoit
doré ; les ducs & les comtes argenté ; les gentilshom-
mes d'ancienne race le portoient d'un acier poli,
& les autres de fer Amplement.
On trouve des cafques fur les anciennes médailles ,
& l'on y reconnoît leurs différentes façons à la Gre-
que & à la Romaine. C'eft le plus ancien habillement
de tête qui paroiffe fur les médailles & le plus uni-
vcrfel: c'eft par-là que les rois & les dieux mêmes fe
diftinguoient. Celui qui couvre la tête de la figure de
Rome , efl garni de deux ailes comme celui de Mer-
cure : celui de quelques rois eft paré des cornes de
Jupiter Ammon, ou iimplement de taureau & de bé-
lier , pour marquer une force extraordinaire. V. le P.
Jobert , feience des médailles.
Le cafque eft un ornement & une marque de no-
bleffe & de fiefs nobles ; il en fait voir les différens
degrés lclon fa nature & fa fituation, à plus ou moins
de vues fur les écus. Les rois & les empereurs le por-
tent tout d'or , broché , brodé & damafquiné , tarré de
front , la vifiere entièrement ouverte , fans aucune
grille ni barreaux.
Les princes , ducs & fouverains , le portent d'or ,
Se tarré de front, fans vifiere, mais un peu moins
ouvert , pour marquer une moindre dignité , & quand
il y a des barreaux, ils en mettent onze , &c. (Q)
* Casque , (Myth.) on dit que les Cyclopes , en
forgeant le foudre de Jupiter , firent en même tems
un cafque pour Pluton ; que ce cafque rendoit invifible
celui qui le portoit, & que Perlée l'emprunta pour
combatre Médufe.
Casque , en terme de Blafon , fignific la même cho-
fc que heaulme. Voye^ HEAULME, 6* BLASON.
CASSA, terme ufité parmi les Provençaux , pour
fignifier la caiffe ou coffre fort , dans lequel les mar-
chands, négocians, banquiers & gens d'affaires, ont
coutume d'enfermer leur argent comptant, pierre-
ries , papiers de conféquence , & autres effets les plus
précieux. Voyt^ Caisse. Dictionnaire du commerce ,
tom. II. pag. izj. (G)
CASSAGNETES , (Géog.) petite ville de France,
dans le Rouergue.
* C ASSAILLE , f. f. (Agriculture.*) c'eft ainiî qu'on
appelle le premier labour qu'on donne aux terres ,
ou après la moiffon aux environs de la S. Martin, ou
après la lemaille vers Pâques. Dans le premier cas
on fe propofe d'ouvrir la terre, & de détruire les
mauvaifes herbes. On dit faire la caffaille. Voye^ l'arti-
cle Agriculture.
CASSAN ou CACHAN, (Géog.) grande & riche
ville d'Aile du royaume de Perle, dans la province
CAS
745
d'Irac, fameufe par les étoffes de foie qui s'y fabri-
quent.
C ASS ANO , (Géog.) petite ville d'Italie , au duché
de Milan, avec un château fort.
Cassano ou Cossano , (Géog.) petite ville d'I-
talie, au royaume de Naples, dans la Calabre ciré-
rieure , à deux lieues du golfe de Tarente. Long,
34.5.lat.3ç).55.
CASSANT, adj. (Phyf) fe dit d'un corps dont la
dureté eft accompagnée de fragilité, efpece de dure-
té , qu'on fuppofe produite par l'engrenement mu-
tuel & facile à détruire, des parties du corps. Voyez
Dureté.
Caffant eft oppofé à ductile , malléable. Voye^Dvc-
TILITÉ, &C. (O)
CASSATION, f. f. terme de Palais, eft le juge-
ment par lequel on annulle un acte ou une procé-
dure.
Ce mot vient du Latin quafare, qui fignifie fecoicer
quelque chofe avec force.
On peut fe pourvoir au confeil d'état & privé, en
cajfation, contre un jugement d'une cour fou veraine,
fi ce jugement fe trouve être en contrariété avec un
autre rendu précédemment dans la même caufe &
contre la même partie ; s'il contient des difpofitions
directement contraires à celles des ordonnances ou
des coutumes; s'il a été omis quelqu'une des formali-
tés preferites par les ordonnances à peine de nullité.
Celui qui veut fe pourvoir en caffation, fait ligni-
fier fur les lieux à la partie ou à fon procureur , ou
au procureur général , fi c'eft en matière criminelle ,
ou qui concerne les droits & domaines de fa Majefté,
qu'il entend fe pourvoir au confeil en cajfation, &
leur donne copie de fa requête , & des pièces fur les-
quelles il entend foncier la caffation.
La requête en cajfation doit être fignifiée dans les
fix mois du jour de îa fignification de l'arrêt contre
lequel on entend fe pourvoir.
La voie de la caffation ne fufpend point l'exécution
du jugement contre lequel on fe pourvoit.
Le demandeur en caffation doit conligner une aman-
de de 450 livres, qu'il ne retire point s'il fuccombe
à fa demande. (H)
CASSAVE, ou CASSA VI , ou MANIHOT, ou
MAN1HOC, eft un genre de plante obfervée par le
P. Plumier ; lès fleurs font monopétales , en forme de
cloche découpée, & le plus fouvent ouverte. Le
piftil devient dans la fuite un fruit arrondi, qui ren-
ferme trois capfules oblongues, jointes enfemble,
dans chacune defquelles il y a un noyau oblong.
Tournefort, Infl. rei herb. ^oye^; Plante. (/)
* Celle qui eft défignée dansGafp. Bauhin lbus le
nom de manihot lndorum , feu yucca foliis cannabinis ,
dont on trouvera une defeription affez exacle dans
ceux qui ont écrit des Antilles , comme le P. du Ter-
tre , le P. Labat & autres, fournit plulieurs produits
dont la connoiffance peut piquer la curiolité. Sa ra-
cine mangée fans aucune préparation , eft un poifon
mortel : mais on parvient à en féparer la partie nui-
fiblc, &à conferver la portion nourriffante, dont on
fait un pain d'un ufage commun parmi les fauvages ;
& que les Européens, & même les dames les plus
délicates , préfèrent par goût au pain de froment.
Pour taire cette féparation , on s'y prend de la ma-
nière fuivante : lorfque la racine eft cueillie , on la
dépouille de fa peau ; il refte une fubftancc blanche
& pleine de fuc, qu'on râpe: pour cet effet, on a
de groffes râpes de cuivre, & non des moulinets à
bras , comme le dit le P. du Tertre. On met la rapure
dans des facs faits d'écorce d'arbre ; ccn lacs font por-
tés fous une preffe d'un méchanifme fort fimplc : c'eft
une branche d'arbre attachée au tronc, qui fait la
fonction de levier , en vertu d'un gros poids dont on
charge fon extrémité fourchue. V9yt\ les pi. Ihijh
744
CAS
&leurexpl.A tronc d'arbre; B branche fourchue ,
avec des pierres quipefent fur fon extrémité ; C facs
de jonc qui contiennent la rapure ; D ais mis entre
chaque lac ; E mafïïf de pierre. Il y a une rigole au
malîif, qui conduit le lue ou le lait de manihoc dans
la coupe de calebalfe F, ou petite terrine. Voilà une
forte de preflë , telle que la méchanique naturelle pou-
voit la fuggérer ; cependant ce n'eft pas celle qui eft
en ufage parmi les fauvages. Il y a dans la leur au-
tant de iimplicité & plus d'efprit. Ils ont une efpece
de fac long de fix à lépt pies & delà grofleur de la
jambe; il eft fait d'une forte de jonc d'un tifl'u très-
lâche, de manière que quand il eft rempli &c bien
ibulc, il prend beaucoup de largeur, & perd beau-
coup de la longueur; ce fac eft terminé par un cro-
chet : ils plantent deux morceaux de bois en fourche ;
ils parlent un bâton dans Tante du fac; ils placent les
deux bouts du bâton dans les fourches des deux pies ;
& ils mettent dans le crochet un vaiflëau à anfe fort
pefant, qui faifant en même tems la fonction de poids,
tire le fac avec force , en fait fortir le fuc de manihoc,
& le reçoit. Voye^ auffi Plan, d'hifi. nat.A B,àb, les
pies; CD le bâton; E F le fac; H \q vaiflëau ou
poids. Ce fuc ou lait contient toute la malignité; les
animaux qui en boivent , enflent & meurent en vingt-
quatre heures. Quand la matière eft vuide de fuc , &
bien defféchée , on la pafTe par un crible un peu gros ;
on la porte enfuite fur des poêles, ou plutôt lur des
platines de fonte , fous lefquelles on fait du feu ; c'eft
ide-là qu'on forme la cajfave ou la farine de manihoc.
Il n'y a de différence entre ces deux chofes que par
la forme. La farine eft un amas de grumeaux de ma-
nihoc defleché & divifé ; & la cajfave eft faite des
mêmes grumeaux liés & joints les uns aux autres par
la cuiflbn , ce qui forme des efpeces de galettes , lar-
ges & minces à peu près comme du croquet. Les fau-
vages la font plus épaifle ; mais & la farine & la
cajfave tiennent lieu de pain l'un & l'autre. Il ne s'a-
git que de les humecter avec un peu d'eau pure , ou
avec un peu de bouillon. On le lert d'eau ou de bouil-
lon félon que l'on eft plus ou moins friand.
Le fuc exprimé de la racine râpée n'eft pas rejet-
té comme inutile. Quoique ce foit un poifon , on
en obtient une fubftance blanche & nourriflante. Ce
lue eft blanc comme du lait d'amande , 8c en a à peu-
près l'odeur. On le reçoit dans des vafes , comme
nous avons dit ci-deffus; on l'y laifle repoler, & il
fe lépare en deux portions ; l'une eft une recule blan-
che qui le précipite; l'autre eft une eau qui fumage,
qui n'eft d'aucune utilité , qu'on décante & qu'on re-
jette. Quant à la fécule , on la lave avec de l'eau
chaude ; on la laifle enfuite fe précipiter dans cette
eau à chaque lavage; on la retire, & on la met lé-
cher à l'ombre. Cette fécule a l'apparence, la con-
fiftance & les propriétés de l'amydon. Cet amydon
s'employe au même ufage que le nôtre ; on l'appelle
moujfachi. On en fait encore des gâteaux qui reflem-
blent beaucoup à nos échaudés. Nous tenons ces dé-
tails de M. le Romain , qui nous les a donnés d'après
l'expérience , 8c dont nous avons fait mention entre
les perfonnes qui nous ont aidés de leurs lumières.
CASSE , l. f. cajjîa , ( Hifl. nat. bot. & mat. med. )
genre de plante dont la fleur eft le plus fouvent com-
pofée de cinq feuilles difpofées en rond : le piftil de-
vient dans la fuite une filique cylindrique ou appla-
tie , divifée en plufleurs loges par des cloifons tranf-
verfales , enduite d'une forte de moelle noirâtre
pour l'ordinaire : cette filique renferme des lemen-
ces arrondies & noires. Tournefort , Injl. ni htrb.
Foyei Plante. (/)
* La cajjefolutive eft une efpece de goutte différente
de la cajjejyrinx aromatique des Grecs, &c de la cajfe
ligneufe des modernes. Les Arabes ont connu les pre-
miers les propriétés de la cajfe folutiyt ; ç'cft un fruit
CAS
exotique , qu'on reconnoîtra à la defeription qui pré-
cède. Il y en a de deux fortes dans les boutiques;
l'une qui vient d'Egypte , & qu'on appelle cajfe orien-
tale ; & l'autre qui vient d'Amérique , & qu'on ap-
pelle cajfe occidentale : celle-ci n'eft pas la meilleure ;
Ion écorce eft plus épaifle , plus rude , & plus ridée,
& fa moelle acre & defagréable au goût : il faut lai
préférer l'orientale , ÔC prendre les goufles de celle-
ci , qui font pefantes , nouvelles , 6c pleines , dont
les graines ne réfonnent pas au-dedans , & qui a la
moelle grafle , douce, &c d'un noir vif; c'eft la feule
partie dont on faflê ufage : on la tire de la goufle ,
on la paflè par un tamis , & on l 'appelle fleur de ca(jcy
ou cajje mondée. L'arbre qui la produit s'appelle caf-
Jiajijlula alexandrina.
Le père Plumier dit que cet arbre reflemble allez
à notre noyer, quant à l'ordre de fes feuilles, & à
l'arrangement de fes branches ; qu'il a l'écorce du
tronc plus fine , plus polie , d'un gris cendré en-de-
hors , & ,de couleur de chair en-dedans ; que Ion bois
eft dur , noirâtre intérieurement , &c environné d'un
aubier pâle ; que les feuilles difpolées deux à deux
fur des côtes menues , vertes , longues d'environ un
pié 6c demi , & plus grolTes à leur origine , ont à
peu-près la forme , la couleur , & la conliftance de
celles du noyer; qu'il y a fouvent cinq ou fix conju-
gaifons de feuilles fur chaque côte , lans que cela
empêche qu'elles foient terminées par une feule feuil-
le ; que ces feuilles font plus unies en deflus , à caufe
de la petitefle de leurs nervures ; qu'elles ont à peu
près la figure d'un fer de lance de quatre à cinq pou-
ces de long fur deux de large ; qu'elles ont la poin-
te aiguë , & la baie arrondie ; que proche des côtes
il fort trois ou quatre pédicules un peu plus longs ,
chargés de fleurs ; que chaque fleur a fon pédicule
long d'environ deux pouces , fon calice concave >
& formé de cinq petites feuilles prefqu'ovales , d'un
verd jaunâtre , & de la grandeur au plus de la moi-
tié de l'ongle ; qu'il part de ce calice cinq pétales
placés en rond , d'un beau jaune , creufés & arron-
dis en cuilliere ; que des cinq il y en a deux un peu
plus grands que les autres;qu'aucun n'excède la gran-
deur d'un pouce ; qu'ils font veinés dans toute leur
étendue ; qu'il s'élève aufîi du calice dix petites éta-
mines , d'un jaune pâle, inégales , trois recourbées ,
& les autres droites ; qu'on voit au milieu d'elles un
piftil long , cylindrique , verdâtre , & recourbé en
crochet ; que ce piftil dégénère en une goufle cy-
lindrique , droite , longue d'un pié 8c demi , &z d'un
peu moins d'un pouce d'épaiflëur ; d'ime fubftance
ligneufe & mince , couverte d'une pellicule d'un noir
châtain, ridée tranfverfalement , excepté du côté
du ventre &c du dos , portant fur toute la longueur
une côte taillante , lifl'e &C unie , divifée en plulieurs
petites cellules léparées par des lames minces , li-
gneufes , orbiculaires , parallèles , 8c couvertes d'u-
ne pulpe moelleule, douce, blanchâtre, jaune enfui-
te , puis noire ; que chaque cellule contient une grai-
ne dure, arrondie , plate, à peu-près en cœur, d'u-
ne couleur voiflne du châtain , 8c attachée par un fil
délié aux parois de chaque cellule ; que l'arbre fleu-
rit en Mai &c en Avril dans les îles de l'Amérique ,
& qu'il eft fans feuilles quand il eft en fleur.
On confit des bâtons de cette cajfe , quand ils font
encore jeunes &c tendres ; on les appelle cannïjicium ,
cannefice. On en mange quand on veut fe lâcher le
ventre.
La moelle mondée s'aigrit quand on la garde : elle
contient beaucoup de phlegme , de fel eflenfiel , &
d'huile : elle purge doucement les humeurs bilieulès,
& échauffe peu ; mais elle eft venteufe , 8c donne
des vapeurs à ceux qui y font fujets. Pour lui ôter
cette qualité, on l'atténue ave le lel végétal ou au-
tre, 8c on la fait bouillir légèrement : la dofe eft de-
puis
CAS
CAS
pins demi-once jufqu'à une once & demie. Le quar-
teron en bâton équivaut à l'once en moelle. Geof-
froy , Mat. med.
Préparations de cajfe officinale. L'extrait de cajfe fe
fait en paftant la moelle à travers un tamis : après
l'avoir difîous dans une liqueur convenable , on l'a-
romatife avec la fleur d'orange , le fiicre , l'anis , le
fenouil ; on le fait évaporer pour lui donner la cqn-
filtance de bol , & l'on en donne dix gros.
La préparation appellée diacajfla cum rnantut ,
quoique de peu d'uîage , a Ion utilité en plufieurs
cas.
Pour la faire , prenez prunes de damas deux on-
ces ; fleurs de violette , une poignée & demie ; eau
de fontaine , une livre &c demie : faites bouillir le
tout jufqu'à diminution de moitié , & diffolvez dans
la colature , de la pulpe de cajfe , fix onces ; du fi-
rop violât , huit onces ; de la pulpe de tamarin , une
once ; de lucre candi , une once & demie ; de la
meilleure manne , deux onces : faites du tout un élec-
tuaire.
L'extrait de cajfe avec les feuilles de féné fe pré-
pare de la manière fuivante.
Prenez du diacajjia cum manna, deux livres ; feuil-
les de féné pulvérifées , deux onces ; femence de
carvi , une once ; firop violât , quantité fuffifante :
faites un électuaire.
La pulpe de caffe s'employe aufîi à l'extérieur dans
les cataplafmes réfolutifs & emoliiens. Quincy, Phar-
macop,
La caffe du Brefd eft une gonfle plus courte que
celle de la cajjc d'Egypte, un peu plus applatie, &
très-dure. L'arbre qui la porte s'appelle cajfia jiflula
Brafdiana : il eft grand & beau ; Ion tronc cil droit,
lifTe , & cendré ; il étend les branches au loin ; il eft
couvert de feuilles portées fur une côte de neuf pou-
ces , 6c attachées à de petites queues fort courtes :
elles font d'un verd clair, velues ; un peu inclinées,
traverfées longitudinalement d'une nervure rougeâ-
tre , & tranfverfalement de plufieurs autres qui s'é-
tendent des deux côtés , f e recourbant vers leurs ex-
trémités , & fe réunifiant au bord de la feuille. Les
fleurs naiffent de l'aiffelle des feuilles ; elles font dif-
pofées en forme d'épi fur des pédicules qui ont près
d'un palme 6c demi de long : chaque fleur a fon
pédicule propre , foible,velu, long d'un pouce. Les
boutons de ces fleurs rcffemblent à la câpre , & les
fleurs épanouies font plus petites que celles de la cajj'c
ordinaire : elles ont cinq pétales de couleur de chair;
le milieu en cil occupé par dix étamines recourbées,
garnies de longs fommets ; les trois inférieures en font
une fois plus longues que les fupéricures : il le trouve
parmi elles un ftyle en croiflant , long 6c velu ; ce
ltyle dégénère en une gonfle verte , puis noire , en-
fuite brune , pendante quand elle eft mûre , longue
d'environ deux pies, épaifle de cinq doigts, un peu
courbée, bordée d'un côté & clans toute la longueur
de deux côtes, 6c de l'autre, d'une feule côte qu'on
prendroit pour une corde collée fous l'écorce. L'é-
corce en elt rude en-dehors , ligneufe , 6c blanche
en-dedans; elle elt fi ferme, qu'on ne la peut caffer
qu'avec le marteau : l'intérieur en eft féparé en lo-
çcs , chacune de deux lignes ou environ d'épaiffeur,
6c contenant une graine de la grandeur & figure d'u-
ne amande, d'un blanc jaunâtre, luilante , lifTc ,
dure , & diviféc d'un côté dans toute ia longueur
par une ligne roufl'atre , dont l'intérieur elt blanc , &
d'une lubltancc de corne. Outre cela chaque cellule
renferme une pulpe gluante, brune ou noirâtre , pa-
reille à la cajj'c ordinaire, maisamere & defagréable:
cette pulpe eft tres-purgative , au jugement de Lobel
ix île Tournefort. Geoff. Mat. mcd.
La cajfe en bois , ca[]ïa lignca ojjîc. elt une écorce
roulée en tuyau , toui-ù-fait rcllcmblante par l'cxté-
Tomc U%
74*
neur à la canclle , dont elle a la couleur, l'odeur &
le goût , & dépouillée comme elle de fa pellicule
extérieure. On la diftingue de la canelle par la foi-
bleffede fon goût aromatique, & paruneghuinolité
qu'on hù trouve en la mâchant : elle elt tantôt jau-
•ne , tantôt jaune rougeâtre : la meilleure eft celle qui
décelé les qualités les plus voifines de la canelle.
L'arbre qui la donne s'appelle cinnamomum , ou ca-
nella Malabarica & Javcnfis : c'eft la même efpece de
plante que celle qui donne la canelle de Ceylan. On
fait peu d'ufage de cette cajjc. Geoffroy préfume
qu'elle a été connue des anciens. Elle palî'e pour aie*
xipharmaque 6c ftomachique. On la préfère à la ca-
nelle quand il s'agit de refferrer. On la confeille dans
l'althme , la toux , les diarrhées, & les dyffenteries.
On l'employé dans la thériaque,le mithridat, &c.
La cap giroflée , cajfui caryophillata off. elt auifi une
écorce comme la canelle, dont l'odeur de girofle
devient fi vive & fi forte , que la langue en eft affec-
tée comme d'un caultique léger; durefte ellereffem-
ble à la canelle : c'eft l'arbre appelle caninga qui la,
donne : il elt grand & haut ; fon tronc eft gros &.
brun ; fes feuilles , fembiables par la forme à celles
du canellier, font plus grandes: il eft commun dans
l'de de Cuba , & dans les contrées méridionales de
la Guyane. On attribue à l'écorce les propriétés du
girofle , auquel on la fubftitue dans les affaifonne-
mens. Geoffroy prétend que les anciens Grecs &
Arabes ne l'ont point connue. On la croit ftomachi-
que & alexipharmaque , mais dans un degré fort au-
deffous du clou de girofle. Geoff. Mae. mcd.
* Casse , f. m. ( Métallurgie. ) on donne ce nom
en général en plufieurs endroits à une grande poelle :
mais il défigne particulièrement à Sainte-Marie aux
mines , & en différentes autres ufines où l'on travadle
les mines de cuivre, de plomb, & d'argent, une ca-
vité préparée au-dehors des fourneaux d'afîinage ,
dans laquelle le métal fe rend au fortir du fourneau ,
par un trou pratiqué à fa partie inférieure. Foyt^
Cuivre.
Les Orfèvres & les Monnoyeurs donnent aufîi le
nom de cajjc à un vaiiîeau fait de cendres de leffive
& d'os de mouton calcinés , dont ils le fervent dans
l'affinage de For 6c de l'argent, ou lorlqu'il s'agit
d'affeoir le cuivre en bain.
Casse des Kubaniers , efpece de peigne qui fe fait
de la manière fuivante. On prend un morceau de
corne long de quatre jufqu'à fix pouces , large de
cinq à lix lignes , affez épais pour être coupé en deux ;
ce morceau de corne le refend dans toute fon épail-
leur, mais non pas dans toute la largeur, & cela à
peu près comme les Tablettiers retendent leurs pei-
gnes ; il elt enfuite fcié en deux dans fon épaiffeur,
ce qui donne deux parties dont les dentures font par-
faitement égales ; l'une forme le haut de la catfc, 6c
l'autre le bas : ces deux morceaux font enfuite aflem-
blés à queue d'aronde avec deux morceaux de bois
de pareille épaiffeur , & arrêtés 6c fixés enlemble par
les angles avec de la petite ficelle : ainli voilà un
quatre dont toutes les dentures lônt remplies cha-
cune d'une dent d'acier qui trouve fa place en haut
6c en-bas dans chacun des interltices de cette den-
ture. Quand toutes les dents font ainli placées, on
couche fur le devant de la denture Cv à plat une de
ces mêmes dents , que l'on lie par les bouts ; par ce
moyen toutes les dents font tenues dans leur lîtua-
tion : on garnit le defliis & le deffous d'une bande
de papier ou de carton , pour empêcher les dents de
s'échapper par les ouvertures des morceaux de cor-
ne. La cajfe fert ainli de peigne dans les forts ouvra-
ges, ou ies dents de canne feraient trop foibles, 6c
ne rélilteroient pas.
* Casses , C f. ( Commerce.} c'elt ainli qu'on ap-
pelle des mouffelines ou des toiles de coton blanches
1 BBbbb
74<5
CAS
& fines , qui viennent des Indes orientales , mais fur-
tout de Bengale : c'elt pour cette raiibn qu'on les ap-
pelle cafés Bengale*. Elles ont feize aunes de long ,
fur huit de large.
CASSEAU , f. m. on entend par ce terme dans
V Imprimerie , le diminutif d'une caffe : c'eft une ef-
pece de tiroir dont les caffetins ou compartimens
auquel
ordinairement de quarante-neuf, ou de fept en tout
fens , parce qu'il eft exactement quarré. Le cafeau
fert à mettre les lettres de deux points , ou les vi-
gnettes de fonte : on lui donne le nom du corps de
caractère qu'il renferme. Il y a le cafeau de deux
points de Gros-romain , celui de deux points de Saint-
Auguftin , & ainfi des autres corps de caraûeres.
* CASSEAU, f. m. {art de faire la dentelle) ; c'eft
un petit morceau de corne fort mince , teint en rou-
ge ou en autre couleur , d'un quart ou d'une demi-
ligne d'épais , de cinq à fix lignes de haut, d'un pou-
ce ou environ de large , replié de manière que fes
deux extrémités rapprochées & arrêtées par un fil ,
forment une efpece de petit étui dans lequel on met
la cafle du fufeau à faire la dentelle quand il eft char-
gé de fil , afin d'empêcher le fil de s'éventer. Lorfque
le fil eft éventé , il lé caflé facilement ; aufli eft-iî à
propos que celles qui font la dentelle travaillent à
l'ombre. Vcye^ Dentelle.
CASSE-ÂIGUILLE , f. m. ouvrier occupé dans
les falines. Voyei Aiguilleur , voyei Salines.
CASSEL, ville de France dans la Flandre, à qua-
tre lieues de S. Orner. Long. zo. _o. _o. lut. 3o. 4J.
64.
Cassel, belle & forte ville d'Allemagne , capi-
tale du Landgraviat de Heffe-Caffel. Long. zj. 10.
Ut. 5i. zo.
* CASSE-MOTTE , f. f. ( Agricult. ) infiniment
dont le nom indique allez l'ufage ; c'eft une mafïïie
de bois dur qu'on employé dans les terres fortes :
elle eft greffe comme la cuiffe. On la cercle de fer ,
& l'on y ajufte un manche d'environ quatre pies de
long. Voye{ cet instrument , PL d'Agriculture.
CASSENA , ( Géog. ) royaume d'Afrique , dans la
Nigritie , tributaire de celui de Tombut.
CASSENEUIL , ( Géog. ) petite ville de France
dans l'Açénois , fur la rivière de Lot.
CASSE-NOISETTE, f. m. {Hifi.nat. Ornithol.)
j>icus cinereus, fiera, oif eau qui a aufîi été nommé torche-
pot & grimpereau ; il eft un peu plus petit que le p inçon,
à peine pefe-t-il une once. Il afix pouces de longueur
depuis la pointe du bec jufqu'au bout des pâtes ; le
bec a fept huitièmes de pouce , depuis fa pointe juf-
qu'à l'angle de la bouche. Il eft triangulaire ; la pie-
ce du deffus eft noire , & celle du bas eft blanchâtre
à fa racine. Sa langue eft large & pas plus longue que
le bec ; elle eft dure à fon extrémité & déchiquetée.
L'ouverture des narines eft ronde & recouverte par
des poils ou foies roides ; la tête , le cou , & le dos
font cendrés. Les côtés du corps fous les ailes font
rougeâtres ; la gorge & la poitrine font d'un blanc
rouffâtre : les plumes du deffous de la queue font rou-
geâtres fur les côtés , & blanches dans le milieu. Il y
a une longue bande noire qui s'étend depuis le bec ,
jufque fur le cou en paffant fur les yeux. Chaque ai-
le a dix-huit grandes plumes : la première eft très-cour-
te & fort petite; les intérieures font cendrées, & les
extérieures font plus brunes : le tuyau de toutes ces
plumes eft noir. Il y a deux taches fur la face infé-
rieure des ailes ; l'une eft noire & affez grande fur la
côte de l'aileron ; l'autre blanche & plus petite au-
deffous de la noire fur la racine des grandes plumes
de l'aileron. La queue eft courte , elle a à peine deux
pouces de longueur > & elle eft compofée de douze
CAS
plumes, dont les deux du milieu font de couleur cen*
drée comme le dos. La plume qui fuit de chaque côté
eft de couleur cendrée dans le bas , & noire dans le
refte , à l'exception de la pointe qui eft cendrée , avec
un peu de noir au bout du tuyau ; la troiiieme plu-
me n'a prefque point de couleur cendrée dans le bas ,
mais ii y a une plus grande tache cendrée à la poin-
te.; au refte elle refiemble à la féconde. La quatriè-
me efi noire fur plus des trois quarts de fa longueur ,
& il y a à l'extrémité fupérieure une marque blanche
fur les barbes intérieures ; les barbes extérieures qui
font à la môme hauteur font cendrées ; la pointe de
la plume eft aufli de couleur cendrée , mais un peu
plus foncée : l'avant-derniere plume ne diffère de la
précédente qu'en ce que le blanc &c le cendré font
un peu plus étendus , & qu'en ce qu'il y a un peu de
blanc fur le côté extérieur au-deiious de la marque
cendrée ; les barbes extérieures du milieu de la der-
nière plume font entièrement blanches. Cette mar-
que occupe environ un tiers de la longueur de la
plume , & le trouve immédiatement au-deffous de la
couleur cendrée , qui eft au-defîus de la plume : au
refte cette plume refiemble aux deux précédentes ;
toute la différence qu'on y peut obierver , eft que la
marque cendrée du deffus & le blanc qui eft lur le
côté extérieur font plus étendus. Les pâtes font de
couleur de chair avec une légère teinte de brun. Les
ongles font bruns , longs , & crochus ; cet oifeau
n'a qu'un doigt de derrière qui eft égal à celui du mi-
lieu , fon ongle eft le plus long. Les doigts extérieurs
de chaque côté tiennent au doigt du milieu à leur
racine ; le doigt extérieur eft le plus petit : on trouve
dans l'eftomac de cet oifeau des icarabées. Il niche
dans des trous d'arbre ; 6c quand l'ouverture qui lui
fert de paflage eft trop grande , il la rétrécit en Ja
bouchant avec de la terre : il ne le nourrit pas feu-
lement d'infectes, il mange aulïï des noifettes ; il en
fait provilion pour l'hyver. La façon dont il les caffe
eft affez iinguliere ; il met une noilette dans une fen-
te pour l'affùrer en place , & enluite il frappe deffus
de toute fa force avec fon bec, jufqu'à ce qu'il ait
percé la coque, alors il lui eft facile de tirer l'amande
par le trou qu'il a fait. Willughby , omit. V. Oiseau.
CASSE-NoiX,f. m. {Hifi.nat. Omit.) cary ocataSes,
oifeau qui a environ un pié de longueur depuis l'ex-
trémité du bec , jufqu'au bout des pâtes ou des aîles ;
car les unes & les autres font également longues :
l'envergure eft d'environ un pié neuf pouces. Le bec
a près de deux pouces de longueur , depuis la pointe
jusqu'aux coins de la bouche ; il eft noir & fort : la
pièce fupérieure eft un peu plus avancée que l'infé-
rieure , ck elle n'eft pas pointue. La langue eft cour-
te , fourchue , & très-profondément découpée ; l'iris
des yeux eft de couleur de noifette : l'ouverture des
narines eft ronde & recouverte par de petites foies
blanchâtres. Tout le corps de cet oifeau eft de cou-
leur ronfle , mêlée de brun & parfémé de taches
blanches triangulaires par tout , excepté fur la tête.
Les taches de la poitrine font les plus grandes , & le
deffus de l'oifeau eft d'une couleur plus rouffe que
le refte du corps. Il y a du blanc entre le bec & les
yeux ; ôc les plumes qui font au-delà de l'anus fous
la queue font aufli très-blanches : les grandes plumes
des ailes font noirâtres. La queue a près de cinq pou-
ces de longueur ; elle eft compofée de douze plumes :
plus de la moitié des plumes extérieures de chaque
côté -eft blanche ; celles qui fuivent ont moins de
blanc , &c l'étendue de cette couleur diminue par
degrés dans chaque plume , jufqu'à celle du milieu
011 il n'y a prefque point de blanc. Les pâtes & les
ongles font noirs ; le doigt extérieur tient au doigt du
milieu par fa bafe. Cet oifeau mange des noix ; c'eft
pour quoi on l'a nommé cafe-noix, Willughby f omit,
Voye^ Oiseau. (/)
CAS
Casse-Noix. Voye^ Gros-bec.
* CASSENOLLE , f. f. ( Teint. ) c'cft ainfi que
ïes Teinturiers appellent la noix de galle, dont ils
font grand ufage. Voye^ Teinture.
CASSER , ( en terme de Palais ) c'efl: annuller , dé-
clarer nul un acfo , une convention , un contrat.
CASSER des troupes, lignifie les licencier, les ré-
former.
CASSER une charge, c'efl la fupprimer; caffer l'of-
ficier qui en efl pourvu , c'ell l'en dépofféder. ( H)
CASSER , (en terme de Raffineur de fucre) c'eft l'ac-
tion d'ouvrir les barrils en brilant les cerceaux à coups
de hache , pour en tirer plus aifément les matières.
CASSE MUS , (Muscle de) Anatom. mulcle du
marteau qui porte le nom de l'Anatomifle qui le dé-
couvrit ; voyt\ Oreille : cet Anatomifte rut difoi-
ple, rival , & fucceffeur d'Aquapendente. Il a écrit
de Organis vocis & auditus ; une nouvelle Anatomie
de Organis fenfuum. La bonne édition de les œuvres
efl de Venile , 1609. ( L )
CASSEROLLE, f. f. uflencile de cuifine à queue ,
en forme de baffin de cuivre rouge étamé , plus ou
moins profond à proportion de Ion diamètre.
CASSERON , voye{ CALMAR.
CASSETTE , f. f. eft fynonyme à un petit coffre ;
les cajfettes font deftinées à enfermer des choies qui
tiennent peu de volume.
Cassette, eft une efpece de boîte divifée en
quatre cafés , dans lefquellcs les Tailleurs mettent le
fil ck le poil de chèvre dévidés fur des pelottes , afin
de les avoir tout prêts fous leur main , & de pouvoir
s'en fervir dans le befoin.
Cette caffette fert aulfi de pié à leur chandelier ,
quand ils travaillent à la lumière. Voyt{ PL du Tail-
leur.
CASSIE , f. f. acacia , ( Hijl. nat. bot. ) genre de
plante à fleur monopétale , faite en forme d'enton-
noir, dans laquelle il y a quantité d'étamines raflem-
blées en touffe. Le piftil fort du fond de la fleur , ck
devient dans la fuite une filique qui efl diviiée en
plufieurs cellules , & qui renferme des lemences ar-
rondies. Tournefort , Injl. rei herb. Voye^ Plante.
(7)
C ASSIMERA , ( Géog. ) pays d'Alie dans les états
du grand - mogol , aux frontières de la grande Tar-
tarie.
* CASSIM-GHEURI , ( Hijl. mod. ) c'efl le nom
que les Turcs & les Grecs Levantins donnent à la
fête de S. Dcmetrius. Ce jour efl fort redouté par
les matelots & gens de mer , & ils n'oient jamais fe
hafarder à tenir la mer ce jour-là , &. font toujours
enlorte d'être dans le port dix jours avant que cette
fête arrive.
* CASSIN , f. m. partie du métier à étoffes de foie , à
gafe , tkc. c'efl un cadre de deux pies &: demi de
long fur vingt pouces de large , qui efl appuyé ou
porté par les deux eftalcs du métier , & qui foutient
un autre cadre en talud , appelle cage , garni de pe-
tites lames d'une ligne d'épaifleur , entre lefquellcs
font enfilées fur des verges de fer qui leur fervent
d'axe , les rangées de poulies fur lefquellcs les cor-
des de rame font paflees. Voye^ Estases , Rame,
& Velours ciselé. Le montant du caffm efl la
partie qui foutient la cage. VA du caffin efl la pièce
de bois qui tient les brancards & montans arrêtés.
C A s s 1 N volant, c'efl ainii qu'on appelle un
CiiJJin ordinaire , garni de tous l'es cordages , rame ,
femple , dont on fe fert pour la leclure des defleins,
tandis que les autres métiers travaillent. Une ai-
guille de plomb du poids de quatre onces , détend
la corde de rame , ck. par conféquent celle de fem-
ple. l'oyei Rame , Semple , & Velours.
* CASSINE ou THÉ df. la mfr du Sud , ( Hijl.
nat. bot. ) On lit dans Miller , que les Indiens de ces
Tome II.
CAS
747
contrées en font grand cas , & que c'eft prefque le
feul remède dont ils faflent ufage à la Caroline. Dans
un tems fixe de l'année , ils accourent de fort loin
fur les bords de la mer, dont le caffine n'eft jamais
éloigné. Ils prennent fa feuille , la mènent clans une
chaudière pleine d'eau, & la font bouillir fur le fou.
Quand Pinfufion ou la décoftion en efl fuffifamment
faite, ils s'affeyent autour de la chaudière, & chacun
en avale dans une grande tafle qui fait la rende. Ils
continuent l'ulage de cette infuîion pendant deux
ou trois jours. Elle a la propriété de les faire vomir
fans effort , fans douleur , ians tranchées , ck fans
qu'ils foient obligés de febaifier. Quand ils fe cro- ent
affez purgés , ils fe chargent tous d'une braflee des
mêmes fouilles, & s'en retournent dans leurs habi-
tations.
M. Frezier dit que les Efpagnols ufeht de ce re-
mède contre les exhalaifons des mines du Pérou ,
tk qu'on en fait grand ufage à Lima , 011 on l'apporte
foche & prefque réduite en poudre. On met fa fouille
dans une tafle de calcbafle, qu'on appelle mate; on
y ajoute du fucre , & l'on arrofe le tout d'eau chau-
de , qu'on boit fans donner le tems à l'inrufion de fe
faire. Pour ne pas avaler les feuilles , on fe fort d'un
chalumeau qui a une boule percée de trous à Ion ex-
trémité. Ce chalumeau fait la ronde. On remet du
fucre & de l'eau fur la feuille , quand la tafle eft
vuide. Au lieu du chalumeau , qu'on appelle bom-
billa , d'autres enlèvent les feuilles avec une petite
écumoire appellée apartador. Cette liqueur efl
rée au thé ; elle a un goût plus agréable. L'uiage en
eft fi commun , que les habitans les plus pauvres en
prennent le matin.
Le commerce s'en fait à Santa-Fé : on l'apporte
par la rivière de la Plata. On en diflingue deux ef-
peces ; l'une appellée yerba de palos , ck l'autre yer-
ba de camini : celle-ci qui vient du Paraguai , fe vend
la moitié plus cher que l'autre. On aflure qu'on en
tire tous les ans plus de deux cents cinquante mille
pelant. Voyelle Dicl. de Médecine.
CASSINOGOROD , {Géog. ) ville de l'empire
Ruffien dans la principauté de CaiTmo-»'. Long. 6z.
3. Lu. $j>. zo.
CASSINOIDE , f . f . ( Géom. ) courbe connue des
Géomètres fous le nom à'ellipfe de M. Cajfini, ou
tllipft Cajjinienne. Voye^ ELLIPSE. ( O )
C A S S I O P É E , f. f. ( Afironomie. ) c'efl une des
conflellations de l'hémifphere feptentnonal ; elle eft
fituée proche Céphée. foyc^ Constellation.
Il parut en 1571, une nouvelle étoile dans cette
conflellation , qui furpaflbit d'abord Jupiter en éclat
tk en grandeur: mais elle diminua peu- à -peu, &
difparut au bout de dix-huit mois. Elle exerça tous
les Aflronomes de ce tems. Elle fut la matière des
écrits de plufieurs d'entre-cux. Tycho-Brahé , Ke-
pler, Maurolycus , Licetus, Beze, le Landgrave de
Helîe , Rofa , &c. prétendirent que c'etoit une co-
mète ; d'autres ajoùtoient de plus que c'etoit la biêmâ
que celle qui avoit paru a la naiflanec de .lelus-Chrifl,
& qu'elle annonçoit fon fécond avènement. Tycho
les réfuta. Voye{ Comète & Étoile.
Caffîopée a 1 3 étoiles dans le catalogue de Ptolo-
mée; ib' dans celui de Tycho , & 56 dans Fl.un-
fleed , ou dans le catalogue Britannique. ( O )
CASSIS ou CASSIER, f. m. ( Hijl. nat. bot. ) eft
une des lîx efpeces de grofelier de Boerhaave , ou
des quatorze que compte Miller.
Le nom de caffier, ou plutôt île f.#», qui a pré-
fentement paffé en ufaj e , lui a été donne par les
Poitevins. Quelques-uns l'appellent trèi
ment poivrier. La dénomination de caffier efl équivo-
que ; celle de caffii ne méritoit guère de taiie for-
tune' On devroit nommer cet arbriffeau gmjelicr noir.
B B b b b ij
743
CAS
pe
En effet, c'eft le rites nigrum ou nigra , rites fruau
mgro, folio olente des Botaniftes. .
Ses feuilles font femblables à celles de la vigne ;
elles font larges, un peu velues en -défions d'une
odeur fétide , ainfi que fes fleurs qui naiffent du me-
: tubercule plufieurs enfemble , ramaffées en grap-
, & reffemblant à celles du grofelier blanc épi-
neux. Ses baies font oblongues , noires , acides, foit
qu'elles foient mûres , foit qu'elles foient vertes ,
d'une faveur peu agréable. Cette plante vient com-
munément dans le Poitou & la Touraine : elle eft
plus rare aux environs de Paris , ÔC on la trouve feu-
lement auprès de Montmorency.
On la cultive dans quelques jardins , mais très-ra-
rement, à caufe de fon peu d'efficace réelle en Mé-
decine. Sa principale vertu confifte à être apéritive
& diurétique : c'eft pourquoi quelques auteurs pref-
crivent le fuc exprimé de fes feuilles fraîches , leur
infuiion ou décoction , dans les douleurs de reins &C
de la vefîie.
On prépare dans plufieurs boutiques d'Apothi-
caires un lîrop , ou une conferve des feuilles ; &
dans quelques maifons une gelée du fruit , qui n'a ni
l'odeur, ni l'agrément de celle des grofeilles rouges.
Paul Contant a vanté fi fortement, fi pofitivement
les vertus du caffis pour la guérifon de l'hydropilie
& de la morfure des vipères , qu'il a trouvé bien des
gens qui lui ont ajouté foi. Cet Apothicaire de Poi-
tiers eft le premier qui a mis cette plante en réputa-
tion dans les provinces méridionales de France ; &
par une bifarrerie qui dépend peut-être de la mau-
vaife odeur de fes fleurs , de fes feuilles , &c du mau-
vais goût de fon fruit , elle a trouvé de tems en tems
des panégyriftes qui ont du moins refïïifcité la mé-
moire de fon nom.
On vit paroître en 1711 à Bourdeaux , un petit
traité intitulé Propriétés admirables du caffis , dans
lequel il eft vanté comme une panacée univerfelle
pour toutes fortes de maladies. Peu de tems après ,
M. Chauvelin , qui a été intendant de Touraine , en-
fuite de Picardie , confeiller d'état , mais qui n'étoit
pas médecin , s'engoiia des vertus du cafjïcr , &: ré-
pandit dans le public pour la guérifon de la rage une
compofition , qu'on difoit éprouvée , dont les feuilles
de cet arbriffeau étoient la baie.
Enfin il y a environ dix ans qu'on renouvella en
Guienne les anciens éloges qu'on avoit ci - devant
prodigués au caffis : mais comme nous donnons avec
vivacité dans les nouveautés réelles ou prétendues ,
nous nous en dégoûtons de même. Ces éloges tom-
bèrent l'année fuivante ; la compofition de M. Chau-
velin contre la rage , a fait place à d'autres ; & tou-
tes les vertus du caffis contre la morfure des vipères ,
l'hydropifie , la pierre , & le rhûmatifme, fe font éva-
nouies dans les pays où on les avoit refïïifcitées.
Article communiqué par M. le CHEV. DE JaUCOURT.
Cassis , ( Geog. ) petite ville de France en Pro-
vence , avec un petit port de mer.
CASSOLETTE , f. f. {Architecture.} efpece de
vafes iiblés de peu de hauteur , compofés de mem-
bres d'architecture ôc de fculpture , du fommet &
fouvent des côtés defquels s'exhalent des flammes
ou des parfums affeôés. Ils fervent fouvent d'amor-
tiffement à l'extrémité fupérieure d'une maifon de
plaifance , comme on voit au château de Marli ; ou
bien ils couronnent les retables d'autels : on les em-
ployé auffi dans la décoration des catafalques , des
CAS
arcs de triomphes , feux d'artifices , &c. ( P )
Cassolette , ( Parfumeur. ) on donne ce nom à
deux inftrumens deftinés au même effet , mais d'une
forme différente : l'un eft une efpece de réchaud fur
lequel on fait brûler des parfums ; l'autre eft une pe-
tite boîte d'or ou d'argent portative , dans laquelle
on les renferme.
On appelle aufîi cajfokttc la compofition odorifé-
rante. Il eft inutile de donner cette compofition. On
formera une cafjolettc de l'amas de tout ce qui rend
une odeur agréable , obfervant toutefois qu'il y ait
une certaine analogie entre les odeurs ; car il peut
arriver ou qu'elles foient rendues plus fuaves, ou
qu'elles fe corrompent par le mélange.
* CASSONADE , f. f. ( Hifl nat. ) efpece de fucre
que les Portugais du Brelîl ont les premiers apporté
en France ; & comme ils le livroient dans des caiffes
qu'ils appellent caffis , on lui a donné le nom de caf-
fonade. Voye? l'article SUCRE.
* CASSORORARI , (Hift. nat. lchthyolog.) petit
poiffon de mer de la grolfeur de Fanchois , &: beau-
coup plus recherché. Il fe pêche dans les mers des
Indes occidentales. On dit qu'il a deux prunelles à
chaque œil , à l'aide defquelles on ajoute qu'il voit
en même tems en-deffus & en-deffous.
CASSOVIE ou CASCHAU, ( Géog. ) ville fort*
de la haute Hongrie , capitale du comté d'Abanwy-
var. Long. 38. z8. lat. 48. 38.
CASSUBIE, (la) Géog. continent d'Allemagne
dans la Poméranie ultérieure , fur la mer Baltique.
Ses villes les plus confidérables font Colberg , Bel-
gard, & Coilin.
CASTAGNEDOLI , ( Géog. ) petite ville d'Italie
dans les états de la république de Gènes.
CASTAGNEDOLO , ( Géog. ) ville d'Italie dans
le Brefcian , dépendante de la république de Venife.
* CASTAGNETTES , f. m. pi. ( Mufiq. & Luth.)
infiniment de pereuffion en ufage chez les Maures ,
les Efpagnols , & les Bohémiens. Il eft compofé de
deux petites pièces de bois , rondes, féches, conca-
ves , & de la grandeur à peine d'un écu de fix livres.
On s'en fert pour accompagner des airs de danfe ;
les concavités s'appliquent l'une contre l'autre quand
on en joue. C'cft pour cet effet que les deux pièces
font attachées enfemble par un cordon paffé dans
un trou percé à une petite éminence laiffée au bord
de la caflagnette , & qui en eft comme le manche. Le
cordon fe tourne ou fur le pouce ou fur le doigt du
milieu ; s'il eft tourné furie pouce , c'eft le doigt du
milieu qui fait réfonner les concavités l'une fur l'au-
tre ; s'il eft tourné fur le doigt du milieu, ce font les
doigts libres de part & d'autre qui font la même fonc-
tion. Les caflagnettes marquent le mouvement , &
doivent au moins battre autant de fois qu'il y a de
notes dans la mefure. Ceux qui en jouent habile-
ment , peuvent doubler , tripler. Voye^ la figure de.
cet infrument Planche XI. de Luth. fig. zi.
La tablature des caflagnettes fe marque par des
notes de Mufique placées au-deffus & au-deffous
d'une même ligne. Celles qui font au-deffus font pour
la main gauche , & celles qui font au-deffous, font
pour la main droite. La ligne de la tablature doit
être tranchée de mefure en mefure par une ligne per-
pendiculaire , afin de diftinguer les mefures. II doit
y avoir auffi au commencement de la ligne une clé
&c le figne de la mefure. Exemple :
CAS
CAS
749
Frapper un coup Frapper un coup
de la M. G. des deux M.
k
Rouler de !a M-,
D. fans frapper.
Rouler ces deux
M.
u
+JVV
•ArtV
f
Frapper des deux M. cV
rouler enfuite des deux
M.
Frapper un coup Fouler de la M.
de la M . D. G. fans frap-
per.
M. fignifie main ; D. fignifie droite ; G. fignifie gauche :
celle de l'air qu'elles doivent accompagner.
CASTAGNEUX, f. m. mergus minimus fluviatilis ,
{Hift. nat. Omit?) oifeau aquatique qui marche très-
difficilement fur la terre , parce que les cuiffes fem-
blent être dans le ventre , & que les jambes font diri-
gées en arrière. Les ailes font fort petites ; il n'a ni
queue , ni croupion ; fes plumes font femblables à
celles d'un oifon nouvellement éclos. Cet oifeau cil
de la grolîeur d'une petite farcellc , & de couleur de
châtaigne , d'où il paroît que lui eft venu le nom de
caflagneux. Les doigts des pies ne font pas joints les
Uns aux autres par une membrane , cependant ils font
larges comme ceux de la poule d'eau ; le doigt pof-
térieur eft large comme les autres. Les pâtes font
cochées par - derrière comme une double feie. Le
ventre eft de couleur de lait ; il y a de ces oifeaux
qui l'ont de couleur de fouris. Le bec eft arrondi ,
petit, rougeâtre , & plus court que celui de la poule
d'eau. Cet oifeau a beaucoup de peine à s'élever hors
de l'eau : mais lorfqu'il eft une fois en l'air , il vole
pendant long-tems. S'il fe trouve dans un endroit où
il n'y ait que peu d'eau , il ne peut pas prendre fon
vol ; alors on peut le fatiguer au point qu'il le laiffe
prendre à la main. Il eft aulïi très-facile dans ce cas
de le prendre avec des gluaux. Le caflagneux vit dans
l'eau falée & dans l'eau douce : dans la mer il mange
des chevrettes, des melettes, &c. dans les rivières
il fe nourrit de petites écrevifles & de petits poifibns.
Il fait fon nid contre terre dans les marais , & il le
cache derrière quelque motte de terre. La chair de
cet oifeau a un goût de fauvage dans toutes les iai-
fons ; cependant il eft fort gras en hyver. Bclon ,
Hijl. de la nat. des oif. Voye{ OlSEAU. (/)
CASTAGNOLA , ( Géog. ) petite ville d'Italie du
Montferrat, dans le territoire de Cafal.
*CASTALIE,( Géog. & Myth. ) fontaine qui
coule au pié du mont Taurus dans la Phocide. Elle
ctoit confacrée à Apollon &: aux mules; & c'étoit
auparavant une nymphe qu Apollon métamorphofa ;
fes eaux en reçurent en même tems le don de rendre
poètes ceux qui en boiroient,ou même ceux qui
entendroient leur murmure. La Pythie en bûvoit
avant que de s'afTcoir fur le trépié. On fait dépendre
toute cette fable du mot Arabe cajlala , qui fignifie
bruit , murmure a" eau. On pourroit ailémenî lui trou-
ver une autre origine , & croire que les anciens nous
ont figuré par cette fable , que tous ceux qui portoient
en eux quelque étincelle tic l'efprit de la Poéfie , en
reflentoient particulièrement la préfence , loin du tu-
multe des cités , dans l'ombre èv le filence des torêts ,
au bruit de la chute des eaux , à l'afpcct des charmes
fecrets de la nature. Il ne faut que s'être égaré quel-
quefois au printems dans la forêt de Saint-Germain ,
pour adopter cette idée.
CASTAMENA , ( Géog. ) ville d'Afie dans la Na-
tolie & dans la province de Becfangil , lur la rivière
de Lime.
C ASTANET , petite ville de France dans le haut
Languedoc , proche du canal.
CASTANOWITZ , ( Géog. ) ville fortifiée de
Hongrie en Croatie , dans une île formée par la ri-
vière d'Unna.
CASTEL , (Géog. ) ville d'Allemagne dans le haut
Pulatinat.
: on écrit la tablature des cajlagnettes en partition fous
CASTELAMARE , ville du royaume de Naples ,
dans la principauté citérieure , avec un bon port.
Long. Ja. lat. 41. 40. Il y a encore une ville de ce
nom dans la vallée de Mazare en Sicile.
CASTEL-ARAGONESE, ville forte d'Italie, dans
l'île de Sardaigne , avec un bon port. Long. z6 . 3z.
lat. 40. 56.
CASTELAUN , ou CASTELHUN , ville & châ-
teau d'Alface, au cercle du haut Rhin , dans le Hunf-
ruck.
Castel-Baldo , (Géog.) petite place d'Italie
dans le Veronefe ,fur l'Adige. Long. zg. lat. 45. y.
Castel-Bolognese, petite ville d'Italie, dans
l'état cccléfiaftique, au Bolognefe.
Castel-Branco , ville de Portugal, dans la pro-
vince de Beyra , fur la rivière de Lyra.
Castel-del-Ovo, fort d'Italie, au royaume de
Naples.
Castel-de-Vide, place forte de Portugal , dans
l'Alentéjo. Long. 11. 10. lat. 3g. i5.
Castel-Durante , voyei Urbanea.
Castel-Foi!lit, place d'Efpagne dans la Cata-
logne , entre Lampredon Se Ampurias.
Castel-Gandolfe, place d'Italie dans l'état cc-
cléfiaftique, avec un château fur le lac du même
nom , à quatre lieues de Rome.
Castel-Geloux, petite ville de France en Gaf-
cogne, dans le Bazadois. Long. ly. 5o. lat. 44. z5.
Castel-Mayran, petite ville de France enGaf-
cogne, dans la Lomagne.
Castel-Moron, petite ville de France dans
l'Agénois, fur la rivière de Lot.
Castel-Moroux, petite ville de France dans
le haut Languedoc.
Castel-Novo , ville forte de Dalmatie, fur le
golfe de Cataro, avec un château. Long. 36. zo.
lat. jz- z5.
Castel-Novo de Carfagnagne, petite ville
d'Italie dans leModénois,avecune bonne fortereffe.
Castel-Rodrigo, (Géogr.) fortereffe du
royaume de Portugal , dans la province de Beira.
Castel S. Joanne , petite ville d'Italie , au du-
ché de Plaifance.
Castel-Sarrasin , ville de France dans le haut
Languedoc, au diocefe de Montauban.
CASTELHOLM , ( Géog. ) fortereffe de Suéde
dans l'ile d'Aland , vis-à-vis de Stockholm.
I \STELLANA , ( GJog.)viîlë d'Italie dans l'é-
tat de l'Eglife, à l'occident du Tibre, dans la Sabine.
( ASThLI ANE , ( Géog. ) ville de France en Pro-
vence, au diocefe de Senez. Lon. 2 4. 24- !■'■'■ -43-55.
CASTELLANNETE, petite ville d'Italie au
royaume de Naples , dans la terre de Lecce. Long.
34. 38. lat. jo. 50.
CASTELLANS , f. m. pi. (#/?• mod.) c'eft le
nom qu'en donne enPologne a;.-, (énateurs qui font
revêtus des premières dignités après les Palatins du
royaume; teurnombreeH fixé à quatre-vingts-deux^
Ils font chargés du loin des Cafteilanies , fubordon-
nés . n\ Palatins, & les chefs 6c les conducteurs de
la noblefi'e dans chaque Palatinat. Le premier de
tous eft le cajlcllan de Craeovie ; celui-ci a le droit
750
CAS
de précéder tous les Palatins , & tient après les évo-
ques le premier rang parmi les fénateurs laïques. On
divife les Cajlellans en grands & en petits ; les pre-
miers font au nombre de trente-trois , & les derniers,
au nombre de quarante-neuf, de la petite Pologne ,
de Mazovie , & de la Prufte Polonoile. Les grands
Cajldlans ont comme les autres lénateurs du royau-
me, féance dans les confeils & aux diètes qu'ils ont
le droit de convoquer ; ils administrent la juftice dans
leurs diftrifts , ont l'intendance fur les poids & me-
sures , fixent le prix des grains & denrées , & font
les juges des Juifs. Mais les petits Cajldlans n'ont ni
féance , ni voix délibérative dans les affaires d'é-
tat. (-)
CASTELLANI , & NICOLOTTI , ( Hift. mod. )
c'eft le nom de deux faftions toujours oppofées , qui
divifent la populace à Venife.
CASTELLANZA , ( Géog. ) ville d'Italie au du-
ché de Milan , fur l'Olana.
CASTELLAZZO , ( Géog. ) petite ville d'Italie
au duché de Milan , près d'Alexandrie , entre les ri-
vières de Bormida & d'Orta.
CASTELLE (le) Géog. petite ville de la Tur-
quie en Afie , en Natolie , dans la province de Bolli,
fur la côte de la mer Noire.
CASTELLETTO , ( Géog. ) il y a trois villes de
ce nom en Italie au duché de Montferrat , dans le
territoire d'Aqui : la première , eft près de Nice ; la
féconde , fur les frontières du marquifat de Spigno ;
la troifieme , fur celles du pays d'Albe.
Castelletto , ( Géog. ) petite ville d'Italie au
duché de Milan , fur le lac Majeur.
C ASTELLON D'AMPURIAS ,ÇGéog.) ville d'Ef-
pagne dans la Catalogne , fur la cote de la Méditer-
ranée , à deux lieues de Rofes.
C ASTELLOT , ( Géog. ) petite ville de Lorraine ,
dans le comté de Montbéliard.
CASTELLUCCIA , ( Géog. ) petite ville d'Italie
au royaume de Naples , dans la Calabre.
C ASTELN AU -de-Barbarens , ( Géog. ) petite ville
de France dans l'Armagnac , au comté d'Afbrac ,
fur le Rat.
Casteln AV-de-BraJJac , petite ville dans le haut-
Languedoc , au diocèfe de Caftres.
Casteln AV-de-Bretenous , petite ville de France
dans le Querci , fur la Cere.
CASTELN AV-d'£Jlreiefon , ou de Trigefon, petite
ville de France dans le haut-Languedoc , au diocèfe
de Touloufe.
Castelnau-</<;- Magnoac, petite ville de France
dans l'Armagnac , fur le Gers.
CASTELNAV-de-Montartier , petite ville de France
en Querci.
Casteln AV-de-Montmirail , petite ville de Fran-
ce dans l'Albigeois.
CASTELN AUDARY , ( Géog. ) ville confidéra-
ble de France dans le haut-Languedoc , capitale du
Lauraguais , à fix lieues de CarcafTonne. Long. ig.
38. lat. 43. i9. 4.
CASTELTOVN , ( Géog. ) petite ville de l'E-
coffe feptentrionale , au comté de Marr , fur la Dée.
^ CASTEN-VOGTEY ou AVOCATIE, (Jurifpr. )
c'eft le nom qu'on donne en Allemagne à un droit
particulier que quelques feigneurs ou fouverains de
l'Empire peuvent exercer fur les monafteres ou cha-
pitres finies dans leur voifinage , en vertu de celui
de protection qu'ils ont fur eux. La plupart des cou-
vents ont fouvent tâché de fecoiier ce joug , qui leur
étoit en plufieurs occafions plus onéreux qu'utile ,
& beaucoup y ont réuffi. Ce droit eft auffi ancien
en Allemagne que les monafteres & chapitres , & pa-
roît avoir été établi par les fondateurs eux-mêmes ,
ou par les empereurs. (— )
Les moines dans quelque pays que ce puilie être ,
CAS
étant fujets du prince & de l'état ainfi que les autres
habitans , il n'eft pas douteux que fuivant les princi-
pes du droit naturel, le prince & l'état n'ayent fur eux
un pouvoir , dont la prudence doit régler l'exercice.
C A S T E R , ( Géog. ) petite ville d'Allemagne
dans l'archevêché de Cologne , fur la rivière d'Erp.
CASTIGLIONE, {Géog.) ville forte d'Italie dans
la vallée de Carfagnana , appartenante à la républi-
que de Lucques.
Castiglione , ( Géog. ) ville d'Italie au royau-
me de Naples , dans la Calabre citérieure , avec ti-
tre de principauté.
Castiglione, ( Géog. ) ville d'Italie au grand
duché de Tofcane , dans le Siennois , fur le bord de
la mer.
Castiglione, (Géog.') ville d'Italie au Piémont,
dans la province de Chieti.
Castiglione- del-Stivere, petite ville forte
d'Italie dans leMantoiian, avec un château. Long.
Z8. 4. lat. 45. 2j.
CASTILLE , (la vieille) Géog. province d'Ef-
pagne , avec titre de royaume , bornée au fud par la
nouvelle Caftille , à l'orient paiTArragon & la Na-
varre , au nord par la Bifcaye & l'Afturie , & au
couchant par le royaume de Léon. Burgos en eft la
capitale.
CASTILLE , (la neuve) Géog. ou royaume de Tolè-
de , province d'Efpagne bornée au nord par la Caf-
tille vieille, à l'orient par les royaumes d'Arragon &
de Valence, au midi par celui de Murcie & par l'An-
dalouiîe, & à l'occident par le royaume de Léon.
Castille d'or , ( la ) Géog. grand pays de l'A-
mérique méridionale , dans la terre ferme, qui com-
prend huit gouvernemens. Il appartient aux Efpa-
gnols.
CASTILLON , ( Géog. ) ville de France dans la
Guienne, au Périgord , fur la Dordogne. Long. ij.
43. lat. 44. Sz.
Castillon , ( Géog.) petite ville de France en
Gafcogne , dans le Couferans.
CASTILLONES, (Géog.) petite ville de France
en Guienne , dans l'Agenois.
CASTINE , f. f. ( Hift. nat. Métallurgie. ) l'on
nomme ainli dans les grolfes forges de fer une pier-
re blanchâtre du genre des calcaires. On en met dans
les fourneaux où l'on fait fondre la mine de fer,
parce qu'elle a la propriété d'ablorberles acides du
foufre dont la mine de fer eft quelquefois entremê-
lée , & qui , comme on le fait , eft la matière la plus
ennemie du fer. ( — )
CASTINHERA , (Géog.) petite ville du royaume
de Portugal , fur le Tage.
C ASTIONE , ( Géog. ) petite ville d'Italie au du-
ché de Milan , fur la rivière d'Olone.
CASTLE, (Géog.) petite ville maritime & port
d'Irlande , dans la Momonie.
Castle-Rising,(G7o£.) petite ville d'Angleterr*
dans le duché deNorfblck. Long. iy. 5i.lat.Sz. 4a.
CASTOR , f. m. fiber , ( Hijl. nat. ) animal qua-
dmpede amphibie , qui a au plus trois ou quatre
pies de longueur , fur douze ou quinze pouces de
largeur au milieu de la poitrine , & qui pefe ordi-
nairement depuis quarante à foixante livres. Les ani-
maux de cette efpece font pour l'ordinaire fort noirs:
dans le nord le plus reculé de l'Amérique il y en a
auffi de blancs. La plupart de ceux de Canada font
bruns : cette couleur s'éclaircit à mefure que les pays
font plus tempérés ; car les cajlors font de couleur
fauve ; & même ils approchent de la couleur de
paille , chez les Illinois & chez lesChaoiianons. Ce-
lui dont on a fait la defeription dans les Mém. de lAca-
dém. roy. des Scien. tom. 1 IL. part. I. avoit été pris ea
Canada, aux environs de la rivière de Saint-Lau-
rent : fa longueur étoit d'environ trois pies &C demi ,
CAS
depuis le bout du mufeau jufqu'à l'extrémité de la
queue ; & fa plus grande longueur de près d'un pié :
il peloit plus de trente livres. 11 avoit du poil fur tout
le corps , à l'exception de la queue , ck ce poil étoit
de deux fortes mêlées enfemble ; l'une avoit environ
un pouce ck demi de longueur ; celui-là étoit gros
comme des cheveux, fort luifant, de couleur brune,
tirant un peu fur le minime ; il donne la principale
couleur au caflor j fa fubftance étoit ferme , & fi fo-
lide , qu'on n'y appercevoit aucune cavité avec le
microicope : cependant M. Sarralin, médecin du Roi
en Canada , dit qu'on y remarque clans le milieu une
ligne qui eft beaucoup moins opaque que les côtés ,
ck qui fait conje&urer que le poil eft creux. Mém.
de l'Ac. des Scienc. ann. iyo'4. L'autre forte de poil
n'avoit qu'environ un pouce de longueur ; il étoit
beaucoup plus abondant que le premier; il paroiffoit
auffi plus délié , & ii doux , qu'il reffembloit à de la
foie ; c'eft un duvet très-fin ce très-ferré , qui garan-
tit le cajlor du froid , & qui fert à faire des chapeaux
& des étoffes : il ne relie que ce duvet dans les peaux
qui ont fervi de vêtemens ck de couvertures de lits
aux fauvages : il eft le plus recherché , parce qu'é-
tant engraiffé par la matière de la tranfpiration , il fe
foule beaucoup mieux. Le duvet du cajlor eft garanti
de la boue par le poil le plus long , lorfque l'animal
eft en vie ck qu'il travaille.
Il y avoit cinq pouces & demi depuis le bout du
mufeau jufqu'au derrière de la tête, & cinq pouces
de largeur à l'endroit des os qui font l'éminence des
joues ; de forte que la tête étoit prefque quarrée : les
oreilles étoient rondes ck fort courtes , revêtues de
poil par le dehors , & prefque fans poil au-dedans.
Les yeux du cajlor font fort petits : l'ouverture des
paupières n'a qu'environ quatre lignes ; la cornée eft
ronde, & l'iris d'un bleu foncé. Les dents incifives ,
qui font au nombre de deux en chaque mâchoire ,
étoient tranchantes dans le cajlor dont la defeription
a été faite , comme celles des écureuils , des porcs-
épics , des rats , &c. celles d'en-bas avoient plus d'un
pouce de longueur ; celles d'en-haut n'a voient qu'en-
viron dix lignes ; elles glifToient au-dedans des autres
lorfqu'on fermoit la bouche de l'animal ; elles étoient
demi-rondes par-devant , & comme taillées en bifeau
de dedans en-dehors ; en-dedans leur couleur étoit
blanche , ck en-dehors d'un rouge clair tirant fur le
jaune ; les unes & les autres étoient larges d'environ
trois lignes au fortir de la mâchoire , & de plus de
deux lignes à leur extrémité ; il y avoit feize dents
molaires , huit de chaque cûté , quatre en haut ck
quatre en bas ; elles étoient directement oppofées
les unes aux autres.
Ce cajlor avoit cinq doigts à chaque pié ; ceux
des pies de derrière étoient joints enfemble par des
membranes , comme ceux d'une oie ; les pies de de-
vant avoient les doigts léparés , ck étoient faits com-
me la main d'un homme , excepté qu'ils étoient cou-
verts de poil , ck que les ongles étoient longs & poin-
tus ; les pies de devant avoient lix pouces & demi
de longueur depuis le coude jufqu'à l'extrémité du
plus grand doigt , ck trois pouces depuis le commen-
cement de la main jufqu'à cette extrémité du plus
grand doigt; les pies de derrière avoient fix pouces
depuis l'extrémité du talon jufqu'au bout du plus long
des doigts , qui étoit le fécond ; les ongles étoient
tailles de biais, & creux par-dedans comme des plu-
mes à écrire; il y avoit à la partie externe de cha-
que pié de devant & de derrière , un petit os qui fai-
foit une éminence, & qu'on auroit pu prendre pour
un lixieme doigt s'il uvoit été fépare du pie.
La queue avoit environ onze pouces de longueur,
deux pouces de largeur à la racine, & trois pouces
dans le milieu, le bout étoit terminé en ovale, l'é-
pauTeur étoit de près de deux pouces vers la racine,
CAS
-75«
d'un pouce dans le milieu , & de cinq lignes ck demie
à l'extrémité, fes bords étoient ronds, ck beaucoup
plus minces que le milieu : elle étoit couverte d'une
peau garnie d'écaillés jointes enfemble par une pelli-
cule, épaiffe comme un parchemin, longue au plus
d'une ligne & demie , d'un gris brun un peu ardoilé ,
& pour la plupart d'une figure hexagone irréguliere.
Il fortoit un , deux , ou trois petits poils d'environ
deux lignes de longueur , entre les écailles du deffous
de la queue. En corroyant la peau de ce cajlor, les
écailles de la queue tombèrent , mais leur figure y
demeura empreinte. La chair de la queue étoit affez
graffe , ck avoit beaucoup de conformité avec celle
des gros poiffons.
Les parties de la génération du cajlor no, font pas
apparentes au-dehors lorfqu'il n'y a point d'ére&ion ;
on ne voit dans le mâle ck dans la femelle qu'une ou-
verture , qui étoit iituée, dans le caflor dont nous fui-
vons la defeription, entre la queue & les os pubis.
Trois pouces & demi plus bas que ces os , pour re-
connoitre le fexe, il faut pincer plus que la peau qui
eft entre l'os pubis & cette ouverture ; on y lent cums
le mâle la verge qui eft dure , groife , & longue com-
me le doigt. L'ouverture avoit une figure ov\de, lon-
gue d'environ neuf lignes , & large de fept , elle fe di-
latoit ck fe refferroit aifément, non pas par le moyen
d'un fphin&er, mais fimplement comme une fente
qui fe ferme en s'allongeant. Les gros excrémens ,
l'urine , & même la verge , parlent par cette ouver-
ture ; parce que la verge eft renfermée dans un con-
duit qui eft couché fur le redum , ck qui aboutit à
l'ouverture commune , de même que le redum : le
vagin y aboutit auffi dans les femelles.
Il y avoit aux parties latérales du dedans de l'ex-
trémité du rectum , deux petites cavités , une de cha-
que côté ; ck on fentoit à-fravers la peau du dehors
deux éminences , qui font les poches ou veffies clans
lefquelles le cajloreum eft renfermé. Après avoir écor-
ché l'animal , on découvrit à l'endroit où on avoit
remarqué les éminences , quatre grandes poches li-
mées au -deffous des os pubis Les deux premières
étoient placées au milieu , & plus élevées que les deux
autres ; elles avoient toutes deux priles enfemble , la
forme que l'on donne à un cœur. Leur plus grande
largeur étoit d'un peu plus de deux pouces ; & la lon-
gueur depuis le haut de chacune de ces poches juf-
qu'à l'ouverture commune ck extérieure dans laquel-
le elles communiquoient , étoit auffi d'environ il^ux
pouces. Il y avoit au-dedans de ces poches une tuni-
que qui paroiffoit plus charnue que glanduleufe ; elle
étoit rougeâtre, ck avoit au-dedans plufieurs replis
femblables à ceux de la caillette d'un mouton. Ces
replis contenoient une matière grisâtre de fort mau-
x aile odeur, qui étoit adhérente : ces mêmes replis
s'étendoient dans les deux poches qui avoient com-
munication l'une avec l'autre vers le bas par une ou-
verture de plus d'un pouce, ck qui n'étoient fepa-
rées que par le tond. Au bas de ces deux premières
poches , il y en avoit deux autres , l'une à droite &
l'autre à gauche. Leur figure reffembloit à celle d'u-
ne poire longue & un peu applatie ; leur longueur
étoit de deux pouces oc demi , ck la largeur de dix
lignes. Ces deux poches inférieures étoient étroite-
ment jointes avec les luperieures vers l'ouverture
commune.
11 y a lieu de croire que la matière du caflorcum
paffe des premières poches dans les fécondes pour
s'y perfectionner: auffi ces fécondes poches étoient-
elles d'une ftructure différente de celle des premiè-
res ; elles étoient compolées de glandes qui toi moient
à l'extérieur des éminences rondes , dont les plus
grandes n'excedoient pas une lentille de grandeur
moyenne. Ayant ouvert l'une de ces lecondes po-
ghes parle fond, on y trouva une liqueur d'une odeur
75*
C A S
<îefagréable , jaune comme du miel , on&ueufe com-
me de la graiffe fondue , & combuftible comme de
la térébenthine : en comprimant la poche il ne le fit
aucun reflux de cette liqueur dans les poches fupé-
fieures ni dans l'ouverture commune des excrémens.
Après avoir vuidé la liqueur de cette féconde poche ,
on apperçut dans la partie inférieure une troilieme
poche longue d'environ quatorze lignes , & large de
4ix • elle étoit tellement attachée à la membrane de la
-féconde , qu'on ne put pas l'en féparer : elle aboutif-
foit en pointe à la partie latérale de l'ouverture com-
mune ; mais on ne découvrit aucune iffue dans les
cavités que l'on avoit obfervées clans cette ouver-
ture. Il y avoit fur la furface extérieure de ces troi-
sièmes poches, des éminencesfemblables à celles des
fécondes pdches , & on trouva dans leur cavité un
-fuc plus jaune & plus liquide que dans les autres ; il
avoit aufli une autre odeur & une couleur plus pâ-
le ; enfin toutes ces poches font très-différentes des
tefticules. Ainfi il eft bien prouvé que ce ne font pas
les tefticules qui contiennent le cajloreum; & par con-
séquent on ne fera plus tenté de croire que le cajlor
arrache fes tefticules lorfqu'il eft pourfuivi par des
chafleurs , afin de s'en délivrer en leur donnant le
cajloreum qui fait l'objet de leur pourfuite. Cette fa-
ble n'a jamais eu aucun fondement , puifque les tef-
ticules font cachés dans les aines , un peu plus haut
<que les poches du cajloreum , aux parties externes &c
4atérales des os pubis.
M. Sarrafin a remarqué trois membranes dans la
tifïure des premières boudes du cajloreum , qu'il ap-
pelle bourfes fupérieures. La première de ces membra-
nes eft fimple , mais très-ferme. La féconde eft plus
épaifle , moelleufe , & garnie de vaiffeaux. La troi-
fieme eft particulière au cajlor ; elle eft feche comme
un vieux parchemin, elle en a l'épaiffeur, & fe dé-
chire de même. Cette membrane forme des replis
dans lefquels la féconde membrane s'infère : ces re-
plis font en fi grand nombre , que la troifieme mem-
brane devient trois fois plus étendue lorfqu'elle eft
développée : elle eft inégale au-dedans , &c garnie
de petits filets , auxquels il adhère une matière réfi-
neufe qui eft le cajloreum , & qui s'épaiflit peu-à-peu
dans les bourfes , & y acquiert la confiftance d'une
réfine échauffée entre les doigts. Elle conferve fa
molleffe plus d'un mois après avoir été féparée de
l'animal ; elle fent mauvais dans ce tems-là , & elle
eft de couleur grisâtre en-dehors & jaunâtre en de-
dans ; enfuite elle perd fon odeur, fe durcit , & de-
vient friable comme les autres réfines, & en tout
tems elle eft combuftible. Lorfqu'on a découvert la
membrane qui enveloppe les bourfes inférieures, on
trouve de chaque coté, quelquefois deux, quelquefois
trois bourfes enfemble. Chacun de ces paquets eft
long de deux pouces & demi fur environ quatorze
ou quinze lignes de diamètre ; les bourfes font ar-
rondies par le fond, & diminuent infenfiblement de
groffeur en approchant de l'ouverture commune ,
que M. Sarrafin nomme cloaque. La plus grande de
ces bourfes occupe toute la longueur du paquet , &
n'a qu'environ huit ou dix lignes de diamètre; la fé-
conde n'a ordinairement pas la moitié du volume
de la première ; elle n'eft pas toujours plus grande
que la troifieme , qui cependant eft le plus fouvent
la plus petite de toutes. Les bourfes , tant fupérieu-
res qu'inférieures , n'ont point de communication
les unes avec les autres , leurs conduits aboutiffent
dans le cloaque.
On ne fait pas encore , ajoute M. Sarrafin, à quoi
fervent pour le cajlor les liqueurs contenues dans les
bourfes. Il n'eft pas vrai , félon cet auteur , qu'ils
en prennent pour exciter leur appétit lorfqu'il
eft languiffant , ni que les chafleurs l'employent ,
comme on l'a dit , pour attirer les cajlors ; mais on
CAS
frotte avec la liqueur huileufe les pièges que l'oit
drefle aux animaux carnaflîers qui font la guerre aux
cajlors , comme les martes , les renards , les ours , &
fur-tout les carcajoux , qui briient fouvent pendant
l'hyver les loges des cajlors pour les y furprendre.
Voye{ Carcajou. Les femmes des fauvages graif-
fent leurs cheveux avec cette même huile , quoi-
qu'elle ait une mauvaife odeur.
Les cajlors ne vivent dans les pays froids , & pen-
dant l'hyver, que de bois d'aune & de platane , d'or-
me , de frêne , & de différentes efpeces de peuplier.
Pendant l'été ils mangent de toutes fortes d'herbes ,
de fruits , de racines , fur-tout de celles de différen-
tes efpeces de nymphaea. On ne croit pas qu'ils vin
vent plus de quinze ou vingt ans.
M. Sarrafin ne s'en eft pas tenu à la defeription
du cajlor ; il a aufli rapporté plufieurs faits qui con-
cernent l'hiftoire de cet animal.
Les cajlors choififfent pour établir leur demeure
un lieu qui foit abondant en vivres, arrofé par une
petite rivière , &c propre à faire un réfervoir d'eau :
ils commencent par conftruire une forte de chauf-
fée, aflez haute pour retenir l'eau à la hauteur du
premier étage des cabanes qu'ils doivent faire. Ces
chauffées ont dix ou douze pies d'épaifleur dans les
fondemens , & deux pies feulement dans le haut ;
elles font conftruites avec des morceaux de bois gros
comme le bras ou comme la cuifle , & longs de 2,
4 , 5 ou 6 pies , que les caflors coupent & taillent
très - facilement avec leurs dents inciflves ; ils les
plantent tort avant dans la terre & fort près les uns
des autres ; ils entrelacent d'autres bois plus petits
& plus fouples , & ils rempliffent les vuides avec de
la terre glaife qu'ils amolliffent & qu'ils gâchent avec
leurs pies , & qu'ils tranfportent fur leur queue , qui
leur fert aufli comme une forte de truelle pour la
mettre en place & pour l'appliquer. Ils élèvent la
digue à mefure que la rivière grofllt , & par ce
moyen le tranfport des matériaux eft plus facile ;
enfin cet ouvrage eft aflez folide pour foûtenir les
perfonnes qui montent deflus. Les cajlors ont grand
foin d'entretenir ces chauffées en bon état, & pour
cela ils appliquent de la terre glaife dans la moindre
ouverture qu'ils y apperçoivenr.
Après avoir fait la chauffée , ils fondent leurs ca-
banes fur le bord de l'eau , fur quelque petite île ,
ou fur des pilotis ; elles font rondes ou ovales , &
débordent des deux tiers hors de l'eau : les murs font
perpendiculaires , & ont ordinairement deux pies
d'épaifleur. La cabane eft terminée en manière de
dôme au-dehors, & en anfe de panier en-dedans:
elle eft bâtie à plufieurs étages , que les cajlors ha-
bitent fucceflivement à mefure que l'eau s'élève ou
s'abaiffe : ils ne manquent pas d'y faire une porte
que la glace ne puiffe pas boucher ; ils ont aufli une
ouverture féparée de leur porte & de l'endroit où ils
fe baignent ; c'eft par cette ouverture qu'ils vont à
l'eau rendre leurs excrémens. Quelquefois ils éta-
blifîènt la cabane entière fur la terre , & creufent
autour des foffés de cinq ou flx pies de profondeur ,
qu'ils conduifent jufqu'à l'eau : les matériaux font
les mêmes pour les cabanes que pour les chauffées.
Lorfque la conftruclion eft faite , ils perfectionnent
leur ouvrage en coupant avec leurs dents , qui valent
des feies, tous les morceaux de bois qui excédent les
murailles , & ils appliquent avec leur queue au-de-
dans & au-dehors de la cabane une forte de torchis
fait avec de la terre glaife & des herbes feches. Une
cabane dans laquelle il y a huit ou dix caflors , a huit
ou dix pies de largeur hors d'œuvre 6c dix à douze
de longueur, fuppoié qu'elle foit ovale ; dans œuvre
elle a quatre ou cinq pies de largeur, &c cinq ou
flx pies de longueur. Lorfqu'il y a quinze, vingt, ou
même trente cajlors qui habitent la même cabane ,
elle
CAS
elle eft grande à proportion , ou il y en a plufieurs
les unes contre les autres. On dit qu'on a trouvé jul-
qu'à quatre cents cafiors dans différenres cabanes qui
commtiniquoient les unes avec les autres. Les femel-
les rentrent dans leurs cabanes pour y taire leurs pe-
tits , lorfque les grandes inondations iont parlées :
mais les mâles ne quittent la campagne qu'au mois
de Juin ou de Juillet, lorfque les eaux l'ont tout-à-
fait baffes ; alors ils réparent leurs cabanes , ou ils en
font de nouvelles ; &C ils en changent lorlqu'ils ont
confommé les alimens qui étoient à portée , lorfque
leur nombre devient trop grand, &£ lorlqu'ils lont
trop inquiétés par les chaffeurs.
Il y a des caflors qui le logent dans des cavernes
pratiquées dans un terrein élevé fur le bord de l'eau:
on les nomme cajîors terriers. Ils commencent leur
logement par une ouverture, qui va plus ou moins
avant dans l'eau , félon que les glaces font plus ou
moins épaiffes , Se ils la continuent de cinq ou fix
pies de longueur , fur une largeur fuffifante pour
qu'ils puiffent paffer ; cnitiite ils font un réfervoir
d'eau de trois ou quatre pies en tout fens pour s'y
baigner ; ils coupent un autre boyau dans la terre ,
qui s'élève par étages , où ils fe tiennent à fec fuc-
ceffivement lorfque l'eau change de hauteur. Il y a
de ces boyaux qui ont plus de mille pies de lon-
gueur. Les cajîors terriers couvrent les endroits oii ils
couchent, avec de l'herbe, & en hyver ils lont des
copeaux qui leur fervent de matelas.
Tous les ouvrages font achevés au mois d'Août
ou de Septembre, fur-tout dans les pays froids; alors
les cajîors l'ont des provifions pour l'hyver ; ils co"-
pent du bois par morceaux , dont les uns ont deux
ou trois pies de longueur , & d'autres ont juiqu'à
huit ou dix pies. Ces morceaux font traînés par un
ou plufieurs cajîors, lelon leur pefanteur : ils raf-
femblent une certaine quantité de bois qui flotte fur
l'eau , &c enluite ils empilent d'autres morceaux fur
les premiers, jufqu'à ce qu'il y en ait affez pour luf-
fire aux cajîors qui vivent enlemble. Par exemple , la
provision de huit ou dix , cil de vingt-cinq ou trente
pics en quarré , lur huit ou dix pies de profondeur.
Ces piles lont faites de façon qu'ils peuvent en tirer
les morceaux de bois à leur choix , 6i ils ne mangent
que ceux qui trempent dans l'eau.
On fait la chaffe des cafiors depuis le commence-
ment de Novembre jufqu'âu mois de Mars & d'A-
vril , parce que c'eft dans ce tems qu'ils font bien
fournis de poil. On les tue à l'affût, on leur tend des
pièges , & on les prend à la tranche.
Les pièges font lemblables aux quatre de chiffre
avec lclquels on prend des rats. On plante fort avant
dans la terre plufieurs piquets de trois ou quatre pies
de longueur, entre lefquels il y a une traverfe fort
pelante , élevée d'environ un pic & demi : on met
deffous une branche de peuplier longue de cinq ou
fix pies , qui conduit à une autre branche fort petite,
placée de façon que dès que le cajïor la coupe , la
traverfe tombe èv le tue. Ces animaux ne manquent
pas de donner dans ces pièges , en allant de tems en
tems dans les bois chercher de nouvelles nourritu-
res , quoiqu'ils ayent lait leurs provifions , parce
qu'ils aiment mieux le bois trais que le bois flotté.
Prendre les cajîors à la tranche , c'eft faire des ou-
vertures à la glace avec des inftrumens tranchans,
lorfqu'elle n'a qu'environ un pie d'épaifleur ; ces
animaux viennent à ces ouvertures pour refpirer,
& on les affomme à coups de hache. Il y a des chaf-
feurs qui remplifTent ces trous avec la bourre île L'épi
de typha, pour n'être pas vus par les cajîors, & alors
ils les prennent par un pie de derrière. S'il y a quel-
que ruiffeau près des cabanes , on en coupe la glace
en travers; on y tend un filet bien fort, enfui te on
détruit la cabane; les ca/lors en louent, èc le réfu-
Tome II,
CAS
753
gieit dans le ruiffeau où ils rencontrent le filet.
- On donne le nom de bievre au cafîor d'Europe. Ort
en a diflequé un à Metz qui avoit la queue beaucoup
plus petite, à proportion, que le cajîor de Canada ,
dont on vient de donner la defeription. Ses pies de
devant n'étoient pas faits comme des mains : mais il
avoit les doigts joints par des membranes comme la
loutre. Cependant P>.ondelet dit expreflément que le
bievre a les pies de devant lemblables aux pies d'un
finge. Mim. de l'Acad. roy. des Se. tom. lll. part. I.
<S* année IJ04. Rondelet , Hijl. des poiffons. fqye^
Quadrupède. (/)
Le cajîor fournit plufieurs remèdes à la Médecine ;
la peau de cet animal appliquée fur les parties affli-
gées de goutte, les déleni contre le froid.
On fe fert avec fuccès de l'axonge du cafîor pour
amollir les duretés ; elle eft très-efficace dans les trem-
blemens ck. les maladies des nerfs, la paralyfie, &c.
on en oint les parties affligées.
Le cajloreum atténue les humeurs vifqueufes, for-
tifie le cerveau , excite les règles , tk pouffe par la
tranfpiration ; on l'employé dans l'épilepfie, la para-
lyfie, l'apoplexie, & la furdité.
On brûle du cajîoreum , 6i on en fait refpirer l'o-
deur tétide aux femmes hyltériques dans le tems des
acci_s. La teinture du cajîoreum le fait comme il fuit.
Prenez une demi-once de cajîoreum & une demi-
livre d'efprit-de-vin ; mettez-les en digeftion pendant
quelques jours; décantez enfuite la liqueur, & la
gardez pour Pillage.
On ajoute quelquefois le fel de tartre à la dofe de
deux gros, dans le deffein de diviferle tiffu réfineux
du cajîoreum ; la dofe de cette teinture eft depuis lix
jufqu'à douze gouttes dans les cas où on employé le
cajloreum en fubfiance. Le cafîoreum entre dans plu-
fieurs comportions de la Pharmacopée de Paris. (A7)
Il fe fait un grand commerce de peaux de cajîor;
les marchands, dit M. Savary , les diltinguent en caj-
tors rieujs , cajîors Jccs , 6c cajîors gras. Les cajîors neufs
font les peaux des cajîors qui ont été tués à la chaffe
pendant l'hyver & avant la mue. Ce font les meilleu-
res & les plus propres à faire de belles fourrures.
Les cajîors Jccs, qu'on nomme auffi cajîors maigres ,
font les peaux de cajîors, provenant de la chaffe d'été,
tems auquel l'animal eft en mue, &: a perdu une partie
de l'on poil. Les cajîors J'ecs peuvent auffi être employés
en fourrures, quoique bien inférieures aux premiè-
res. Leur plus grand ufage eft pour les chapeaux.
Les cajîors gras font des peaux de cajîor, que les
fauvages ont portées fur leurs corps , 6c qui lont imbi-
bées de leur lueur: le cajîor gras vaut mieux que le
fec ; on ne s'en lert cependant que pour la fabrique
des chapeaux.
Outre les chapeaux & les fourrures auxquels on
employé le poil & les peaux de cajîor , on a tenté
d'en taire des draps. Cette entreprife méritoit bien
d'être tentée, & avoit pour but de rendre le poil de
cajîor d'une utilité plus étendue ; mais les draps or-
dinaires font préférables à ceux de cafîor. L'expé-
rience a fait voir que les étoffes fabriquées avec le
poil de cafior, quoique mêlé avec la laine de Segovie,
ne gardoient pas bien la teinture, & qu'elles deve-
noient lèches & dures comme du feutre.
Castor lignifie auffi un chapeau fait avec du
poil de cafîor feul. Un chapeau dcmi-cafîor cil celui
dans lequel on a mêlé une partie de poilde cajloravec
une partie d'autre poil. Voyc{ Chapeau.
Castor, en Afïronomic , eft le nom de la moitié
delà conftellatioii des gémeaux. Voyt^G\ meaux.
Castor 6-Polli X,< •' Métcw .' ,•.. ellun météore
igné, qui paroit quelquefois en mer s'attachera un des
côtés du vaiffeau , tous la forme d'une, de deux, ou
même de trois ou quatre boules de feu. Lorfqu'on
n'en voit qu'une, on l'appelle plus proprement He-
C C c ce
754
CAS
Une ; & lorfqu'on en voit deux, on les nomme Caflor
& Pollux. Muffch. Ejf. de Phyf. Voye{ Feu Saint-
ElME, & F article qui fuit.
* Castor & Pollux , (MythJ) fils de Jupiter Se
de Léda; ils furent élevés à Pallene, où Mercure les
porta aufii-tôt qu'ils turent nés. Ils s'illurtrerent dans
l'expédition de la toifon d'or : à leur retour ils net-
toyèrent l'Archipel descorfaires qui l'infeftoient. Ce
fervice, l'apparition de deux feux qui voltigèrent au-
tour de leur tête , & le calme qui luccéda , les firent
placer après leur mort, au nombre des dieux tuté-
laires des nautoniers. Ces feux continuèrent d'être
regardés comme des lignes de la prélence de Caf-
tor & Pollux. Si l'on n'en voyoit qu'un , il annonçoit
la tempête; s'il s'en montroit deux, on efpéroit le
beautems. Nos Marins font encore aujourd'hui dans
la même opinion ou dans le même préjugé ; & ils ap-
pellent feux S. Elme & S. Nicolas , ce que les payens
appelloientyJwx de Caflor & Pollux. Les deux frères
invités aux noces de leurs parentes Hilaire & Phcbé ,
les enlevèrent. Ce rapt coûta la vie à Caflor, qui pé-
rit quelque tems après de la main d'un des époux.
Pollux, qui aimoit tendrement l'on frère , demanda à
Jupiter la réfure&ion de Caflor, &c le partage entr'eux
de l'immortalité qu'il devoit à fa naiflance. Jupiter
l'exauça ; & l'un fut habitant des enfers , pendant que
l'autre fut citoyen des cieux. Cette fable eft fondée
fur ce que l'apothéofe de ces héros les a placés dans le
figne des Gémeaux , dont l'une des étoiles defeend
fous l'horifon quand l'autre y paroît. Pour célébrer
leurs fêtes , les Romains envoyoient tous les ans vers
leur temple , un homme couvert d'un bonnet comme
le leur , monté fur un cheval , & en conduifant un
autre à vuide. La Grèce les compta parmi fes grands
dieux : ils eurent des autels à Sparte & dans Athènes.
Les Romains leur élevèrent un temple par lequel on
juroit: le ferment des hommes étoit adepol , par le
temple de Pollux; & celui des femmes œcaflor, parle
temple de Caflor. Les deux dieux parurent plufieurs
fois au milieu des combats fur des chevaux blancs.
On les reprélentoit fous la figure de jeunes hommes,
avec un bonnet furmonté d'une étoile, à cheval, ou
en ayant près d'eux. Ils font connus dans les Poètes
fous le nom de Diofcures , ou fils de Jupiter, & de Tyn-
darides, parce que leur mère étoit femme de Tyn-
dare roi de Sparte. Ils fe distinguèrent dans les jeux
de la Grèce: Caftor , par l'art de dompter & de con-
duire des chevaux , ce qui le fit appeller dompteur de
chevaux; Pollux , par l'art de lutter , ce qui le fit re-
garder comme le patron des athlètes. V. M. l'ab. de
Clauftre.
CASTOREA, f. f. {Hifl. nat. bot.) genre déplan-
te , dont le nom a été dérivé de celui de Caftor Du-
rantes Médecin de Rome. La fleur des plantes de ce
genre eft monopétale , & faite en forme de mafque ,
dont la lèvre fupérieure eft relevée, & l'inférieure
divifée en trois parties : la partie moyenne eft divi-
fée en deux pièces. Le calice devient un fruit char-
nu, arrondi, compofé d'une feule capfule qui ren-
ferme quatre femences anguleufes. Plumier, nova
plant. Amer, gêner. Voye^ PLANTE. (/)
CASTOREUM. Voye^ Castor.
CASTOS, {Commerce?) nom qu'on donne dans le
Japon aux droits d'entrée & de fortie que l'on paye
pour les marchandifes qu'on y porte ou qu'on en ti-
re: ou plutôt ce font les préiens que les Européens
avoient coutume de faire tous les ans pour y être re-
çus, avant que les Hollandois fe fuffent emparés de
tout le commerce de ces îles ; ce qui leur tenoit lieu
de droits , & alloit beaucoup au-delà de ceux qu'ils
auroient pu payer. Diction, du Commerce. (G)
CASTRAMETATION, f. f. c'eft propreme nt l'art
de marquer le camp & d'en déterminer toutes les dif-
CAS
férentes proportions. Ce mot vient du latin caflrum,
camp, & de metiri , mefurer. foye^ Camp.
La Caflramétation , eft une partie fi importante
de l'Art militaire , qu'il doit paroître allez étonnant
qu'elle ait été abfolument négligée dans les auteurs
modernes qui ont écrit lur la guerre.
Polybe Se Végece font entrés dans un grand dé-
tail fur celle des Romains; & leurs écrits ont beau*-
coup fervi à l'établiffement de l'ordre & de l'arran-
gement de nos camps, quoiqu'ils différent à plufieurs
égards de ceux des Romains.
Du tems de Polybe les camps des Romains étoient
toujours quarrés : mais du tems de Végece , qui a
écrit plufieurs fiecles après , ils avoient différentes
figures relatives à celles des terrains que les armées"
dévoient occuper.
Le général fe campoit dans l'endroit du camp le
plus avantageux , pour découvrir tout ce qui s'y paf-
foit & pour envoyer fes ordres. Les troupes Romai-
nes Si celles des alliés étoient diftribuées en différen-
tes parties de cavalerie & d'infanterie , de manière
qu'elles avoient, pour ainfi-dire, chacune une efpe-
ce de quartier féparé ; ces camps étoient toujours en-
tourés d'un retranchement formé d'un foffé & d'un
parapet dont la terre étoit foùtenue par des pieux
ou paliffades que les foldats portoient avec eux pour
cet effet clans les marches.
Cette police des Romains étoit oubliée en Euro-
pe, lorfque le fameux Maurice, Prince d'Orange,
fongea à la rétablir , ou plutôt à l'imiter vers la fin
du xvi. & le commencement du xvne fiecle. On ne
peut douter que les troupes n'ayent toujours eu une
forte de camp pour fe mettre à l'abri du mauvais
tems, & fe repofer des fatigues militaires: mais le
lilence des Hiftoriens fur ce lujet, nous laiffe ignorer
abfolument l'ordre qu'on pouvoit y obferver.
Le Père Daniel , qui a fait de lavantes recherches
fur tout ce qui concerne notre milice ancienne &
moderne , croit que ce fut dans les guerres d'Italie
fous Charles VIII. & Louis XII. que nos généraux
apprirent à fe retrancher en campagne de manière
à rendre le camp inaccelTible à l'ennemi.
Le plus célèbre & le plus ancien que nous con-
noiffions eft celui du Maréchal Anne de Montmoren-
cy à Avignon. « Il le fit de telle forte , dit l'auteur
» qu'on vient de nommer, que l'empereur Charles V.
» étant defeendu en Provence, n'ofa jamais l'atta-
» quer, nonobftant la grande envie qu'il avoit d'en
» venir à une a&ion décilive ; & ce fut cette con-
» duite du Maréchal qui fauva le royaume ».
Dans les guerres civiles qui s'élevèrent en France
après la mort d'Henri II. on n'obfervoit, fuivant la
Noue dans les Difcours politiques & militaires , aucu-
ne règle dans le campement des armées. On diftri-
buoit les troupes dans les villages ou les petites villes
les plus voifines du lieu où l'armée fe trouvoit ; ou
bien on campoit en pleine campagne avec quelques
tentes qu'on plaçoit fans arrangement régulier. On
fe fortifioit avec les chariots de l'armée dont on fai-
foit une efpece de retranchement : mais les troupes
n'étoient pas dans cette forte de camp à portée de fe
mouvoir avec ordre pour s'oppofer aux attaques
imprévues de l'ennemi ; elles y manquoient d'ailleurs
de la plupart des commodités & des fubliftances né-
ceffaires : auffi ne campoient-elles de cette façon que
rarement Se pour très-peu de tems. L'attention des
généraux étoit de pouvoir occuper différens villages
allez proches les uns des autres , pour fe foùtenir ré-
ciproquement : mais comme il n'étoit pas ailé d'en
trouver ainfi lorfque les armées étoient nombreufes ,
il arrivoit fouvent que l'ennemi enlevoit ou déî-KÎ-
foit plufieurs de ces quartiers avant qu'ils puffent être
fecourus des autres plus éloignés.
Les Hollandois s'étajit fouftiaits à l'obéiflance de
CAS
la maiion d'Autriche vers Tan 1 566 , ce peuple qui
ne pouvoit par lui-même oppoler des armées égales
à celles que l'Efpagne étoit en état d'employer pour
le réduire , chercha à Suppléer au nombre des Soldats
par l'excellence de la discipline militaire : les princes
d'Orange s'y appliquèrent avec le plus grand fuc-
cès ; Se il paroît affez confiant qu'on leur doit le ré-
tabliffemcnt de cette discipline en Europe. Les camps
furent un des principaux objets de Maurice de NaS-
fau ; il voulut y faire renaître l'ordre Se la police des
Romains. Son camp , tel que le décrit Stevin dans
fa Cajlramitation , ctoit une efpccc de quarré ou de
quarré-long diftribué en différentes parties appellées
quartiers. Celui de ce prince en occupoit à-peu-près le
milieu ; l'artillerie Se les vivres avoient auifi le leur ,
de même que les différentes troupes ou régimens
dont l'armée étoit compoiée. L'étendue ou le front
de ces quartiers fe proportionnoit au nombre des
troupes qui dévoient les occuper ; pour leur profon-
deur , elle étoit toujours de 300 pies.
Une compagnie de 100 foldats occupoit deux
files de huttes ou petites baraques. Chaque file
avoit 200 pies de longueur Se huit de largeur ; elles
étoient féparées par une rue auifi de huit pies. Le
capitaine campoit à la tête de fa compagnie , Se les
vivandiers à la queue , comme ils le font encore au-
jourd'hui. Le colonel avoit pour logement un efpace
de 64 pies de front , au milieu du rang des tentes
des capitaines. Derrière cet efpace régnoit une rue
de pareille largeur , qui féparoit le régiment en deux
parties égales. La partie qui en reftoit après l'empla-
cement des tentes du colonel & de Ion équipage , fer-
voit à camper le miniftre , le chirurgien , &c,
La cavalerie campoit à-peu-près dans le même or-
dre que l'infanterie. Une compagnie de 100 chevaux
avoit deux files de huttes de 200 pies de profondeur
£>: de 10 de largeur, lefquelles étoient féparées par
*m efpace de 50 pies. Les chevaux formoient deux
files dans cet efpace , placées chacune parallèlement
Se à la diftance de cinq pies des huttes. Le capitaine
campoit à la tête de fa compagnie , Se le colonel au
milieu de fes capitaines , comme dans l'infanterie.
mp étoit entouré , ainfi que celui des Romains,
<i'un folie & d'un parapet. Cet ouvrage fc diftribuoit
à toutes les troupes de l'armée , & chaque régiment
en faifoitune partie proportionnée au nombre d'hom-
mes dont il étoit compofé. On obfervoit de laifler
un efpace vuide de 200 pies de largeur entre le re-
tranchement du camp &: fes differens quartiers, afin
d'y placer les troupes en bataille dans le beloin.
Cette dilpolition ou formation de camp pafla en-
fuite dans la plupart des autres états de l'Europe;
elle a fans doute été obfervée en France , car on la
trouve décrite dans plufieurs auteurs , notamment
dans le livre de la Doctrine militaire donné en 1667
par le fieur de la Fontaine , ingénieur du Roi , &
dans les Travaux de Mars par Allain Manetîbn Malet.
Il paroît cependant par plufieurs mémoires du rè-
gne de Louis XIII. Se de la minorité de Louis XIV.
que nos armées ne campoient pas toujours enfem-
ble , comme ces auteurs le prelerivent , mais en di£
férens quartiers fépàrés , qui portoient chacun le nom
de l'officier qui les commandoit. Il y a un grand nom-
bre d'exemples de ces fortes de camps dans la Vie de
M. de Turenne , les Mémoires de M. de Puyfegur , Sec.
Il en réfulte que li les règles dont on vient de parler
avoient d'abord été obfervées , on les avoit enfuite
négligées. Cette conjecture le trouve fortifiée par ce
que le P. Daniel rapporte dans fon Hifloire de la mi-
lice Françoi fe, au Sujet de l'arrangement régulier de
nos camps. Il y dit , que dans un mémoire qui lui a
été fourni fur le régiment du Roi, « on trouve que
m le fieur Martinet , qui tut lieutenant-colonel , puis
» colonel du régiment , commença à établir ou réta-
Tome II,
CAS
7 ) >
» blir la manière régulière de camper ». Ce qui fenv
ble indiquer aiTez clairement qu'on avoit précédem-
ment oblervé une méthode régulière qui n'étoit plus
d'ufage. Quoi qu'il en l'oit , cet officier faifoit divife*
le camp de fon régiment par des rues tirées au cor-
deau. Il le fit ainli camper aux Pays-Bas à la campa-
gne de 1667, & mettre en faifeeaux toutes les armes
à la tête des bataillons. Le Roi ayant trouvé cette
méthode fort belle , la fit , dit -on , pratiquer aux
autres troupes. Il eft vraiSTemblable que c'eft-là l'o-
rigine de la difpofition actuelle de nos camps , Si. que
comme elle ne s'eft apparemment établie qu'iruenfi»
blement dans les differens corps des troupes du Roi ,
l'auteur des Travaux de Mars n'en étoit pas encore
inftruit lors de la féconde édition de fon livre en.
1684, quoiqu'elle fût alors généralement fuivie ;
c'eft ce qui eft évident par le Traité de l'Art de la
Guerre de M. de Gaya , capitaine au régiment de
Champagne, imprime pour la première fois en 1679..
On y trouve à-peu-pres les mêmes règles qu'on ob-
ferve encore aujourd'hui dans le campement des ar-
mées : mais alors les foldats Se les cavaliers n'avoient
point de tentes ou canonieres. Cat auteur marque:
précifément qu'ils fe baraquoic-nt , Se il ne parle de
tentes que pour les officiers : ainli l'ufage des cano-
nieres pour les foldats & les cavaliers eft poftérieur à
1679. Il y a apparence qu'il ne s'eft entièrement éta-
bli que dans la guerre terminée par le traité de Rji-
wick en 1697.
Nos camps différent particulièrement de ceux de»
princes d'Orange , en ce que les troupes y font cam-
pées fur deux ou trois lignes , l'infanterie au centre
Se la cavalerie fur les ailes , & que la tête ou le front
du camp eft entièrement libre , pour que l'armée
puifle s'y mettre en bataille en fortant du camp. Les
officiers font placés à la queue de leur troupe ; l'ar-
tillerie eft affez ordinairement un peu en avant du
centre de la première ligne , Se les vivres , entre la
première & la féconde ligne vers le milieu de l'ar-
mée. Nos officiers généraux ne campent plus com-
me le failbient ces princes. Ils occupent les villages
qui le trouvent renfermés dans le camp , ou qui en
lont fort proches; ce qui eft regardé comme un in-
convénient par bien des gens , en ce que par là ils
fe trouvent quelquefois éloignés des corps qu'ils doi-
vent commander , Se qu'ils augmentent le nombre
des gardes de l'armée.
Pour le camp , il n'eft défendu ou fortifié que par
une efpece d'enceinte formée de différentes troupes
de cavalerie & d'infanterie, qu'on a fubftituée aux
retranchemens des anciens, quoique leur ufage en
cela , fuivant les plus habiles militaires , fut infini-
ment Supérieur au nôtre , non-feulement pour la fu-
reté du camp , mais encore pour diminuer la fati-
gue des troupes , dont il faut toujours avoir une
grande partie fous les armes pour être à l'abri des
entreprises de l'ennemi. Pre/ace des ejfais fur la Caf-
trametaiion , par M, le Blond. ( Q )
CASTRATION, 1". f. terme de Chirurgie, eft l'ac-
tion de châtrer, ou l'opération par laquelle on am-
pute & retranche les tefticules d'un animal mâle ,
qui devient par - là incapable d'engendrer. Voye%
Testicules.
I a caftration fe pratique communément en Aùc ,
Spécialement chez les Turcs, qui châtrent tous ceux
de leurs efclaves qu'ils employent à la garde de leurs
femmes , & à qui ils coupent non-feulement les tef-
ticules , mais Souvent même la verge. La caftration
le pratique auffi en Italie fur les muiieiens dont on
veut que la voix Se confine. Cette caftration n'eu
point une opération de Chirurgie , puisqu'elle n\i
pas le rétabliflèment de la faute pour objet. Voya^
Eunuque & Castrati.
La caftration eft aulîi une opération médicinale,
C C c c c ij
7)6
CAS
néceffaire en certains cas , comme dans la mortifi-
cation ou autres maladies des teiticules , & fingu-
lierement dans la farcocele & la varicocele. On l'a
quelquefois faite auiîi à des maniaques. Foye^ Sar-
COCELE , &C.
La caftration peut auffi le pratiquer fur les fem-
mes. Athénée dit que le roi Andramiris fut le pre-
mier qui fit châtrer des femmes. Hefychius & Sui-
das rapportent que Gyges fit la même choie. Galien
obferve qu'on ne les peut châtrer fans les mettre
en danger de la vie. Dalechamp , fur le paffage d'A-
thenée que nous venons de citer , dit qu'il ne faut
pas entendre là châtrer à la lettre , que ce n'étoit
que boucler.
Pour faire l'opération de la cajlration dans les ma-
ladies du tclticulc, qui n'ont pu fe guérir par les dif-
férens fecours qu'elles indiquoient, on fait coucher
le malade fur le dos ; on lui fait affujettir les jambes
& les mains par des aides. Le Chirurgien pince la
peau du ferotum fur la tumeur à l'endroit de l'an-
neau , avec les pouces & les doigts indicateurs de les
deux mains ; un aide prend le pli de peau que tenoient
les doigts de la main droite ; l'opérateur prend alors
un biftouri droit avec lequel il fend ce pli. Il conti-
nue l'incilion julqu'à la partie inférieure au moyen
d'une fonde cannelée & du billouri. Il fépare tout le
tiiïu cellulaire qui entoure le tefticule , foit en le cou-
pant , foit en le déchirant. On tend le mufcle cre-
maiter fuivant fa longueur , pour mettre le cordon
fpermatique ànud. On paffe par-deffous une aiguille
courbe , enfilée de quelques brins de fil ciré , afin
d'en faire la ligature. Voye^ Ligature. Quelques
praticiens veulent qu'on ne lie que l'artère. Si le cor-
don fpermatique elt gonflé juiqu'au-deffus de l'an-
neau , il faut débrider cette ouverture , & ne point
faire de ligature. On coupe le cordon ; & fi l'artère
donnoit du feng , on mettroit fur fon embouchure un
peu de charpie imbibée d'eau de rabel.
L'artère de la cloilon du ferotum donne quelque-
fois du lang : dans ce cas , on peut en faire la ligatu-
re, ou appliquer fur l'embouchure un petit bour-
donnet trempé dans l'elTence de rabel.
Après avoir extirpé le teiticule , on retranche avec
le bittouri les lèvres de la poche que forme le fero-
tum. On panfe la plaie avec de la charpie feche ,
foùtenue d'une compreffe en fer à cheval , & le tout
contenu par un ùifpenibire. Voye^ Suspensoire.
Il ne faut lever l'appareil qu'au bout de trois ou
quatre jours , lorfque la fuppuration le détache : on
peut feulement dès le lendemain humeder la char-
pie avec l'huile d'hypericum.
Les panfemens doivent être fimples , & ne de-
mandent pas d'autres attentions que la cure des ul-
cères. Voye^ Ulcère.
Il elt à propos de faire faigner le malade , & de lui
taire fur le bas-ventre des embrocations avec les hui-
les émollientes , pour relâcher le tiffu de toutes les
parties , & prévenir l'inflammation. ( Y)
CASTRAT l , f m. ( Hijl. mod. ) ce nom qui ell:
purement Italien , lé donne à ceux qu'on a fait eunu-
ques dans leur enfance pour leur procurer une voix
plus nette & plus aiguë. Les Caftrati chantent dans
les concerts la même partie que les femmes , ou def-
fus. Voyci Dessus , Chanteur. A l'égard de la
caufe phyfique pour laquelle les Caftrati ont la voix
grêle & aiguë ; il ne paroît pas plus facile de la trou-
ver , que d'expliquer pourquoi ils n'ont point de bar-
be. Mais le fait elt certain , & cela fuffit. ( O )
CASTRES , ( Géog. ) ville de France en Langue-
doc. Long. ig. 65. lat. 43à.3j'. 10".
CASTRO , ( Géog. ) petite ville maritime d'Ita-
lie au royaume de Naples, dans la terre d'Otrante.
Long. J6'. lat, 40. 18.
CAS
Castro , (Géog.) petite ville d'Italie dans îa
Campagne de Rome , fur le Garigliano , à deux mil-
les de Fondi , avec titre de duché. Long. 29. i5. lat,
42- 33-
Castro d'Airo , ( Géog. ) ville du Portugal
dans la province de Beira, entre les rivières de
Duero &c de Vouga.
Castro-Buon , (Géog. ) ville de Portugal dans
la province de Beira, fur la rivière de Coa.
Castro-Caltado , ( Géog. ) petite ville d'Italie
dans le grand duché de Tolcane , au territoire de
Sienne.
Castro-Franco , ( Géog. ) petite ville d'Italie
dans la marche Trévilane , aux Vénitiens.
C astro-Geritz , ( Géog. ) ville d'Eipagne dans
la vieille Caitille , au comte de Mendoza.
Castro-Marino , ( Géog. ) ville forte, & port
de mer du Portugal dans les Algarves.
Castro-Mento, (Géog.) ville de Portugal dans
la province de Beira , fur la rivière de Coa.
Castro-Novo , ( Géog. ) ville d'Italie en Sicile,
dans la vallée de Mazare , à la fource du Platani.
Long. 31. 30. lat. 3J. 40.
Castro-Reale , ( Géog. ) petite ville de Sicile
dans le val de Demona , à la fource du Razzolino.
Castro-del-Rey , ( Géog. ) ville forte d'Eipa-
gne , dans le royaume de Galice.
Castro-Verreyna , ( Géog. ) ville de l'Améri-
que méridionale au Pérou , fameufe par les mines
d'argent qui fe trouvent dans fon voitinage. Long.
30â. lat. mérid. 13.
Castro-Villare , ( Géog.) petite ville d'Italie
au royaume de Naples , fur les frontières de la Bafi-
licate , avec titre de duché.
Castro-de-Urdiales, (Géog.) petite ville d'Ef-
pagne dans la Bifcaye , avec un port fur l'Océan.
CASTROMA , ( Géog. ) rivière de l'empire Ruf-
lien , qui prend la fource dans la contrée de Kneef-
ma , & fe perd dans le Wolga.
Castroma , ou Kastrom , ( Géog. ) ville de
l'empire Ruflien dans le duché de Sufiïal , fur les
bords du "SVolga , ck. à l'embouchure de la rivière de
Caflroma.
CASUALITÉ , f. f. revenu cafuel. Voyc^ ci-def.
fous Casuel.
CASUEL , Voyc7^ CASOAR.
CASUEL, adj. (Jurifprudence.) fe dit de ce qui
échet fortuitement. Ainli un revenu cafuel elt celui
qui dépend d evenemens incertains qui arrivent ou
n'arrivent pas ; ou qui arrivent tantôt plus fouvent ,
tantôt plus rarement. Telle ell la portion des reve-
nus du roi, qui conflit e en aubaines, confiscations,
paillette , &c Telle eil encore celle des revenus des
iëigneurs , qui réfulte des mutations des fiefs & ter-
res qui relèvent d'eux , comme quints , requints , re-
liefs , lods & ventes , déshérences , amendes , &c.
Voye^ chacun de ces termes à leur rang.
On appelle cafuel Amplement , en fouf entendant
le terme de revenu, les profits d'une cure qui ne font
point fixes , comme font le baife-mains , les baptê-
mes , & enterremens. ( H)
* CASUISTE, f. m. (Morale.) Qu'eft-ce qu'un
Cafuifle? c'eft un Théologien qui s'eft mis en état par
une fongue étude des devoirs de l'homme & du
Chrétien, de lever les doutes que les fidèles peuvent
avoir fur leur conduite paifée , préfente &c future ;
d'apprécier la griéveté devantT)\cu Ht devant les hom-
mes , des fautes qu'ils ont commifes , & d'en fixer la
jufte réparation.
D'où l'on voit que la fonction de Cafulfle elt une
des plus difficiles par l'étendue des lumières qu'elle
fuppofe , ôv une des plus importantes & des plus
dangereufes par la nature de fon objet. Le Cafuijlt
tient , pour ainll dire , la balance entre Dieu & la
CAS
créature ; il s'annonce pour confervatcur du dépôt
facré de la morale évangélique ; il prend en main
la règle éternelle & inflexible des actions humaines ;
il s'impofe à lui-même l'obligation de l'appliquer
fans partialité ; & quand il oublie l'on devoir, il le
rend plus coupable que celui qui vend aux peuples
leur fubfiflance temporelle à taux poids & à faillie
mefure.
Le Cafuijîe efl donc un perfonnage important par
fon état &c par l'on caractère ; un homme d'autorité
dans Ifraël , dont par coniéquent la conduite & les
écrits ne peuvent être trop rj<raureufernent exami-
nés : voilà mes principes. Cependant je ne fai s'il
faut approuver la plaiianterie éloquente & redou-
table de Pafcal , & le zèle peut-être indiferet avec
lequel d'autres auteurs, d'ailleurs très-habiles & très-
retpeetables , pourfuivirent vers le milieu du liecle
dernier , la morale relâchée de quelques Cafuifles
obfcurs. Ils ne s'apperçurent pas fans doute que les
principes de ces Cafuifles recueillis en un corps , &
expofés en langue vulgaire , ne manqueraient pas
d'enhardir les pafTions , toujours difpofées à s'ap-
puyer de l'autorité la plus frêle. Le monde ignorait
qu'on eût ofé enfeigner qu'il efl quelquefois permis de
mentir , de voler , de calomnier , d'afjafflner pour une
pomme , &c. Quelle nécefiité de l'en inftruire ? Le
fcandale que la délation de ces maximes occafion-
na dans l'Eglife , fut un mal plus grand, que celui
qu'auroient jamais fait des volumes poudreux relé-
gués dans les ténèbres de quelques bibliothèques
monaftiques.
En effet , qui connoifToit Villalobos , Connink ,
Llamas , Achozier , Dealkofer , Squilanti , Bizo-
teri , Tribarne , de Graffalis , de Pitigianis , Strevef-
dorf, & tant d'autres , qu'on prendrait à leurs noms
& à leurs opinions pour des Algériens ? Pour qui
leurs principes étoient-ils dangereux ? pour les en-
fans qui ne lavent pas lire ? pour les laboureurs , les
marchands , les artilans , & les femmes qui ignorent
la langue dans laquelle la plupart ont écrit ? pour les
gens du monde qui lifent à peine les ouvrages de
leur état ; qui ont oublié le peu de Latin qu'Us ont
rapporté des collèges , & à qui une diffîpation con-
tinuelle ne laiffe prefque pas le tems de parcourir
Un roman ? pour une poignée de Théologiens éclai-
rés & décidés fur ces matières ? Je voudrais bien
qu'un bon Cafuijîe m'apprît qui cft le plus coupable
ou de celui à qui il échappe une propolition abliir-
de qui pafferoit fans conséquence , ou de celui qui
la remarque 6c qui l'étcrnife.
Mais, après avoir protejlé contre tout dejlr d'une liberté
qui s' exe recroit aux dépens de la tranquillité de l'état &
de la religion , ne puis-je pas demander fi l'oubli que
je viens de propofer par rapport aux corrupteurs
obfcurs de la morale Chrétienne, n'eft pas applicable
à tout autre auteur dangereux, pourvu qu'il ait cent
en langue Jkvante} Il me femble qu'il faut ou embraf-
fer l'affirmative, ou abandonner les Cafuijlcs, Car
pourquoi les uns piériteroient-ils plus d'attention que
les autres? Des Cafuijlcs relâches Ici oient-ils moins
pernicieux & plus méprifables que des inconvaincus?
Mais , dira-t-on , ne vaudroit-il pas mieux qu'il n'y
eût ni incrédules ni mauvais Cafuijlcs , & que les pro-
ductions des uns & des autres ne parujfent ni en Lingue
favantt , ni en langue vulgaire? Rien n'eu plus viai ,
de même qu'il ferait à fouhaiter qu'il n'y eût ni ma-
ladies ni méchanceté parmi les hommes- Maisc'efi
une nécefiité qu'il y ait des malades & des m ce lia ns,
ce il y a des maladies & des crimes que les remèdes
ne font qu'aigrir.
Et qui vous a dit , continucra-î-on , qu'il efl aufji
e qu'il y ait parmi nous des Cafuifles relu
des incrédules , que des médians & des malades
vons-nous pas des lois qui peuvent nous meure à (.ouvert
de l'incrédulité & du relâchement ?
C A T
Je ne prétens point donner des bornes aux 0l!1f_
fances eccléiiaftiques & civiles : perfonne ne refpmle
plus que moi l'autorité des lois publiées contre les au-
teurs dangereux ; mais je n'ignore pas que ces lois
exiftoient long-tems avant les Cafuifles relâchés &
leur Apologijle , & qu'elles ne les ont pas empêchés dé
penjer & d 'écrire.
Je fais auffi que par l'éclat de la procédure , les
lois civiles pourraient arracher des productions mi-
lérables à l'obfcurité profonde où elles ne deman-
deraient qu'à relier, & que c'eft-là précifément ce
qu'elles auraient de commun avec les lois ecclelhlti-
ques dans la cenfure de Cafuifles ignorés, qu'une déla-
tion maligne aurait fait connoître mal-à-propos.
Au relie, c'eli moins ici une opinion que je pré-
tens établir , qu'une queftion que je propofe. C'ell
aux fages magiftrats, chargés du dépôt des lois, 8&
aux illuftres prélais qui veillent pour le maintien de
la foi 6c de la morale évangélique, à décider dans
quels cas il vaut mieux ignorer que punir; & quel*
les font , pour me fervir de Pexpreffion d'un auteur
célèbre, les bornes précités de la nécefiité d
quelles il faut tenir les abus & les fcandales. F.C.KS,
Aius-Locvrius, & le J. de Trévoux, Nov. Ijâl.
CASZBEQUI , f. m. {Commerce.') monnoie de cui-
vre de Perlé, que l'on nomme plus communément
kabeski^. Voyt^ K.ABESKIZ.
CAT ou CATH , ( Géog. ) ville d'Afie, dans la
province de Khuarezm , fur le fleuve Oxus ou Gihom
Long. g5. lat. 41. 36.
CATABAPTÏSTE, f. m. (Kifl. eedef ) nom dont
on s'eit lervi quelquefois pour déligner en et '
tout hérétique qui nie la nécefiité du baptême , fur-
tout pour les enfans.
Ce mot efl compofé de la prépofition greque zala^
qui en composition lignifie quelquefois contre ,. a l'en-
contre, & de /ïa^Tw, laver, baigner. Ainli catabaptifle
efl la même choie qu' oppofé au baptême, f'oye^ Bap-
tême. (G)
CATABIBAZON, en Aflronomie , elt le nœud des-
cendant de la lune, qu'on appelle auffi queue du dra-
gon. roye?QvEVL ou Dragon & A.nabibazov.
(P)
CATACAUSTIQUE , f. f. (Géom.) cft la caufli-
que formée par des rayons réiléchis. On la nomme
ainli pour la difringuer de la diacauRique. V. Cals-
tique, DiACAUSTIQUE, RÉFLEXION, CATOP-
TRIQUE, &c. (0)
CÀTACHRESE, f. f. (Rhét.) trope ou figure de
Rhétorique par laquelle on employé un mot impro-
pre à la place d'un mot propre.
Ce terme cil formé du Grec zaTarpa'.-^s; , f,
qui lui-même eit dérivé de xa-à, contre , 6c de ; :
fufe; c'elt-à-dire, j'ufe du mot contre fa fignifeation
propre & naturelle.
JJn employé donc la catachrefc lorfquc faute de
trouver un mot propre pour exprimer une penfée,
l'on abufe d'un mot qui en approche, comme lorf-
qu'on dit , <.' . ur un bâton , equitare in arun-
dine lor.g.i. La raifon rejette ces expreiiîons (
la nécefiité les exeufe ; & le fens qu'on y attache
fauve la contradiction qu'elles préfentent. i
ap< (G)
CAT.U LYSME , f. m. ttaTaxXvej ec qui
lignifie un déluge ou ino
CATACOM15E ou CATACUMBÏ , f. f. (7/
moJ.) fignifie des lieux ou des cavités foûterraines
pratiquées pour fervir à la fepulture des morts.
Quelques-uns dérivent ce mot de l'endroit où on
gardoit les vauTeaux, & que les Grecs & les Latins
modernes ont appelle combt; d'autres difent qu'on
s'etl fervi autrefois de c.:u pour ad , de forte que ca*
Dadin aflure en c
quçnçe qu'on a écrit anciennement catatumbasj d'au-
753
C A T
très tirent ce mot du Grec mt* &c de muCgç, creux ,
cavité, ou autre choie lemblable,
On nommoit auffi les catacombes, crypta & cœme-
teria.
Le mot catacombc ne s'entendoit autrefois que des
tombeaux de S. Pierre & de S. Paul; & M. Châtelin,
miniiîre proteftant, obferve que parmi les Catholi-
ques Romains, les plus habiles n'ont jamais appliqué
le mot catacombc aux cimetières de Rome ; mais leu-
lementà une chapelle de S. Sebaftien, où l'ancien
calendrier Romain marque qu'a été mis le corps de
S. Pierre , fous le confulat de Tuicus & de Baffus en
258-
Le mot catacombc eft particulièrement en ufage en
Italie, pour marquer un vafte amas de fepulchres
ibùterrains dans les environs de Rome, & principale-
ment dans ceux qui font à trois milles dexette.ville ,
dans la via appia ou la voie appienne. On croit que
ce font les fepulchres des martyrs ; on va en conlé-
quence les vifiter par dévotion , & on en tire les re-
liques qu'on envoyé maintenant dans tous les pays
catholiques , après que le pape les a reconnus fous le
nom de quelque laint. Foyar Saint, Martyr &
Relique.
Plufieurs auteurs difent que c'étoit des grottes où
fe cachoient & s'affernbloient les premiers Chrétiens,
& où ils enterroient leurs martyrs ; ces catacombes
font de la largeur de deux à trois pies, 6c de la hau-
teur de huit à dix pour l'ordinaire, en forme d'allée
ou de «alêne , communiquant les unes aux autres ,
& s'étendent fouvent jufqu'à une lieue de Rome ; il
n'y a ni maçonnerie ni voûte, la terre fe foûtenant
d'elle-même. Les deux côtés de ces rues, que l'on
peut regarder comme les murailles , fervoient de
haut-en-bas pour mettre les corps des morts ; on les
y plaçoit en long , trois ou quatre rangées les unes
fur les autres , & parallèlement à la rue ; on les en-
fermoit avec des tuiles fort larges & fort épaiffes ,
& quelquefois avec des morceaux de marbre , cimen-
tés d'une manière qu'on auroit peine à imiter de nos
jours. Le nom du mort le trouve quelquefois, mais
rarement , fur les tuiles : on y voit aufli quelquefois
une branche de palmier avec cette infeription pein-
te ou gravée, ou ce chiffre X P , qu'on interprète
communément pro Chrifio. Fcryesr Saint.
Plufieurs auteurs Proteftans penfent que les cata-
combes ne font autre chofe que les fepulchres des
payens, & les mêmes dont Fefius Pompeius tait men-
tion fous le nom de puticuli ; & ils foûtiennent en mê-
me tems que quoique les anciens Romains fuffent
dans l'ufage de brûler leurs morts, cependant ils
avoient auilî coutume , pour éviter la dépenfe , de jet-
ter les corps de leurs efclaves dans des trous en terre,
Se de les y laiffer pourrir; que les Romains Chré-
tiens voyant enfuite la grande vénération qu'on avoit
pour les reliques, Se délirant d'en avoir à leur 4il-
pofition, ils entrèrent dans les catacombes , qu'ils mi-
rent à côté des tombeaux les chiffres ou inicriptions
qu'il leur plut , & les fermèrent enfuite pour les ou-
vrir quand ils en trouveroient l'occafion favorable :
ceux qui étoient dans le fecret, ajoutent-ils, étant
venus à mourir ou à s'éloigner, on oublia ce ftrata-
gème jufqu'à ce que le hafard fit ouvrir les catacom-
bes. Mais cette opinion eft encore moins probable
que la première.
M. Moreau, dans les Tranfaclions Philofophiques ,
prend un milieu entre ces deux extrémités ; il fup-
pofe que les catacombes ont été originairement les
fepulchres des Romains, & qu'on les creufa en con-
féquence de ces deux opinions, que les ombres haif-
fent la lumière , & qu'elles fe plaifent à voltiger au-
tour des endroits où les corps font placés.
Il eft certain que la première manière d'enterrer
a été de mettre des corps dans des caves; £c il pa-
C A T
roîf que cette manière a paffé des Phéniciens chez
les nations où ils ont envoyé des colonies ; & que
l'ufage où nous lbmmes ou d'expofer les corps morts
à l'air, ou de les enterrer dans des églifes, a été in-
troduit d'abord par les Chrétiens. Lorfqu'un ancien
héros mouroit, ou qu'il étoit tué dans quelqii'expé-
dition étrangère, comme le corps étoit fujet à cor-
ruption , & par conléquent peu propre à être trans-
porté en entier, on avoit trouvé l'expédient de le
brûler pour en pouvoir rapporter les cendres dans
fa patrie , & obliger ainfi ies mânes à le fuivre ; en-
forte que le pays qui avoit donné naiffance aux
morts , ne fût pas privé de l'avantage de leur protec-
tion. C'eft ainfi que la coutume de brûler les corps
commença à s'introduire , que par degrés elle de-
vint commune à tous ceux qui en pouvoient faire la
dépenie, & qu'elle prit enfin la place des anciens
enterremens ; les catacombes celferent donc d'être d'u-
fage pour les Romains lorfque ceux-ci eurent em-
prunté des Grecs la manière de brûler les corps ,
& on ne mit plus en terre que les feuls efclaves. Foye^
Enterrement.
Ces lieux qui fe trouvoient ainfi tout préparés,
étoient fort propres aux aflémblées des premiers
Chrétiens : mais jamais ceux-ci n'auroient pu les
bâtir.
L'empire étant devenu chrétien , on les abandonna
encore jufqu'à ce que la lefture de quelques auteurs
y fit faire de nouveau attention. Quant au fameux
chiffre XP, on obferve qu'il étoit déjà en ufage long-
tems avant Jefus-Chrift. L'abbé Bencini dit qu'il étoit
compofé des deux lettres Greques X , p, fous lefquel-
les étoient cachés quelques feus myftiques : mais per-
fonne , dit Chambers, ne les explique.
L'auteur Anglois n'a rapporté cette opinion que
pour infirmer le premier lcntiment , qui veut que les
catacombes n'ayent fervi qu'à la fépulture des pre-
miers Chrétiens : il difiimule qu'outre le chiffre ^^
qui ne cache aucun myftere & qui n'eft que le mo-
nogramme de Jefus-Chrift , on a trouvé fur les pier-
res & tombeaux des catacombes des figures d'un bon
pafteur & d'un agneau ; ce qui ne peut convenir qu'à
des Chrétiens. On conclurroit mal de là , que tous
ces Chrétiens étoient faints : mais pour peu qu'on
fane attention aux mœurs dés Chrétiens de la primi-
tive Egliie , on en conclurra toujours avec une certi-
tude morale , que leurs offemens & reliques étoient
dignes de vénération. Chambers ne tait point un
crime aux payens de l'honneur qu'ils rendoient aux
cendres de leurs héros ; & il tâche de rendre fufpec-
tes les reliques des martyrs , afin d'attaquer indirec-
tement leur culte. Les papes ont été fi peu perfua-
dés que tous les offemens trouvés dans les catacom-
bes fuffent des reliques des faints , qu'ils ont toujours
été d'une extrême réferve à en accorder , 6c à les
faire conftater. ( G )
C AT ACOUSTIQUE , f. f. qu'on appelle aufïi
Cataphonique , eft la f cience qui a pour objet les fons
refléchis ; ou cette partie de l'Acouftiquequi coniide-
re les propriétés des échos ; ou en général des fons
qui ne viennent pas directement du corps fonore à
l'oreille , mais qui ne la frappent qu'après qu'ils y ont
été renvoyés par quelque autre corps. Ce mot Ca-
tacoujlique eft analogue au mot Catoptrique, qui figni-
fie la feience qui a pour objet les rayons de lumière-
réfléchis, & leurs propriétés : ainfi la Catacoujiiquc eft
à l'Acouftique proprement dite , ce que la Catoptri-
que eft à l'Optique. Foye^ Acoustique, Echo,
& Son.
* CATACTHONIEN, (Myth. ) c'eft ainfi qu'on
avoit furnommé à Opunte le fouverain pontife des
dieux de la terre & des enfers.
CATADIOPTR[QUE,adj.(0^«,;.) on donne
ce nom à ce qui appartient à la fois à la Catopcrique&c
C A T
à la Diop.rique , c'eft-à-dire à ce qtii appartient à la
théorie de la lumière refléchie Se de la lumière rom-
pue. Par exemple un infiniment ou lunette qui re-
fléchit &' rompt en même tems les rayons, elt ap-
pelle télefcope catadioptrique. Foyc^ TÉLESCOPE. (0)
CATADUPES , xaTaifWsi: les anciens donnoient
ce nom aux peuples qui habitoient proche des cata-
dupes ou catarades du Nil. On les repréfente tous
comme lourds , à caule du fracas que font continuel-
lement les eaux du fleuve en tombant, ^jy-j; Cata-
racte. (G)
CATAFALQUE , f. m. (Jrckitecl. ) de l'Italien
catafalco, lignine littéralement échaffaud ou élévation
faite ordinairement de charpente pour recevoir les
décorations d'Architedure , Peinture , & Sculpture ,
dreflées à l'occalion des pompes funèbres. ( P )
CATAGMATIQUE, adj. terme de Médecine , mé-
dicamens propres à fonder & à unir des os , en ac-
célérant la formation du calus. V. Calus, Frac-
ture, & Os.
Ce mot vient du Grec meUÂ-yfjut , qui fignifie frac-
ture.
Les principaux catagmadques font le bol d'Armé-
nie , la gomme adragant, l'oftéocolle , les noix de
cyprès , l'encens , l'aloès, l'acacia, &c. J^by. Con-
solidation. (A7)
* CATAGOGIES , f. f. pi. ( Mythol. ) fêtes infti-
tuées en l'honneur de Venus. Ceux d'Eryce en Sicile
faifoient une fête qu'ils appelloient Vanagogic , ou le
départ de Venus pour la Libye. Ce départ étoit fon-
dé parmi eux, fur ce qu'alors on ceflbit de voir des
pigeons. Ils imaginoient que ces oifeaux confacrés à
la déefle , lui lervoient d'eicorte. Elien qui raconte
toutes ces chofes comme un homme qui les auroit
crues, ajoute qu'après neuf jours d'abfcnce , il pa-
roiffoit fur la mer du côté de l'Afrique , une colom-
be purpurine, & beaucoup plus belle que les au-
tres : c'étoit l'avantcoureufe de Venus qui revenoit
accompagnée d'une nuée de pigeons ; alors ceux d'E-
ryce célébroient les catagogies , ou fêtes du retour.
CATALAJUD , (Géog.) petite ville d'Efpagne
au royaume d'Arragon , fur la rivière de Xalon , à
l'embouchure de celle de Xaloca.
CATALECTIQUE, adj. terme de la PoéJIe Greque
& Latine , ufité parmi les anciens pour défigner les
vers imparfaits , auxquels il manquoit quelques pies
ou quelques fyllabes , par oppolition aux vers aca-
tale'àiques , auxquels il ne manquoit rien de ce qui
devoit entrer dans leur ftrudure. Ce mot eft origi-
nairement Grec , & formé de xarà , contra , & de
Xtya , dejino , je finis ; c'eft-à-dire qui n'ejl pas termi-
né ou fini dans les règles. Voye?^ Acatalectique.
(G)
CATALEPSIE, 1. f. ( Médecine. ) maladie fopo-
reufe qui lailit tout-d'un-coup le malade , le fait ref-
ter dans la fituation où il étoit au moment de l'ac-
cès , & lui fait perdre le fentiment & le mouvement,
quoique la refpiration fublifte ainfi que le battement
des artères , qui à la vérité font moins torts que dans
l'état naturel. Il arrive alors une ceffation de mou-
vement du fang contenu dans les artères du cerveau ,
& du fluide nerveux , dont la fecrétion le fait dans
les glandes de cette partie, fans que ce mouvement
foit intercepté dans le cervelet : c'eft pourquoi
les fondions qui ne dépendent pas de la volonté ,
font exécutées , pendant que celles qui y font foù-
miles font fufpendues. On trouve par la diffedion
des cadavres de ceux qui font morts de cette mala-
die, que les vaiûeaux tant artériels que veneux du
cerveau , font remplis d'un fang épais & groffier
qui y elt engorgé. En conséquence de cet engorge-
ment , les eîprits animaux ne le féparent pas pour
palier dans les filets de nerfs qui partent du cerveau ,
C A T
759
& produire le mouvement mufculaire ; ce qui eft lt
vrai , que le malade refle dans la fituation où on l'a
mis ; h on lui levé un bras fur la tête , ce bras demeu-
re immobile à cet endroit ; li l'on élevé une paupiè-
re, elle ne s'abaiilè point d'elle-même ; enfin li l'on
lui fait fléchir un doigt ou plulîeurs , ils reflent fléchis
jufqu'à ce que l'on prenne foin de les étendre. On
peut voir à l'article Assoupissem ENTdeux oblerva-
tions fur cette maladie , tirées des Mém. de l'acad.
Cette maladie a plufieurs cauies , la mélancholie
portée au dernier degré, toutes fortes d'affedions vi-
ves de l'ame , furtout lorlqu 'elles font fubites, com-
me la perte inopinée d'une perfonne chère , d'un
procès, &c. Les méditations profondes & continuées
long-tems lur un même lujet , un travail forcé dans
le cabinet , &c. font aufli quelquefois caufe de cette
maladie , fur-tout lorlque l'on ne prend pas de nour-
riture convenable & proportionnée à la déperdi-
tion de fubltance. Les indications que l'on a à rem-
plir pour parvenir à la guérifon de cette maladie ,
font de tirer le malade de cette affedion foporeufe
par quelque chofe qui puifle l'affeder vivement ,
telle que le fon d'une cloche , le bruit d'un canon ,
l'odeur des fels volatils & pénétrans. Si ces moyens
ne iurrilent pas , il faut employer les véficatoires ,
les fearifications , St autres opérations femblables,
qui puiflènt exciter quelque douleur; & félon Boer-
haave , rien de mieux que de procurer au moyen des
fternutatoires une hémorrhagie abondante par les na-
rines, ou parles hémorrhoïdes au moyen de l'appli-
cation des languies, jointe à un régime humedant,
aux vomitifs, &c. Voyc^ Assoupissement. (A/)
CATALOGNE , ( la ) Géog. province d'Efpagne
avec titre de principauté. Elle eft bornée au nord
par les Pyrénées , au levant & au midi par la Médi-
terranée, à l'occident par le royaume d'Arragon Se
de Valence. Ce pays eft abondant en vin, grains,
fruits , huile , & lin. Il s'y trouve beaucoup de mi-
nes , tk. même des pierres précieufes ; la capitale eft
Barcelone.
CATALOGUE , f. m. (Littéral. & Librair.) eft unq
énumération ou lifte de noms d'hommes , de livres ,
& d'autres chofes difpofées fuivant un certain ordre.
Ce mot , lelon du Cange , étoit employé dans la baffe
latinité , pour lignifier collection , du Grec Kaildxoyoç
de x.ttja.xi-) a , recenfeo.
Nous n'entrerons point dans le détail des différen-
tes colledions auxquelles on a coutume de donner ce
nom. V. Cabinet, Etoile. Nous nous contenterons
de parler des catalogues de livres, parce que de toutes
les colledions c'eft en effet la plus intéreflante.
Ce qui exifte , ce qui arrive , ce qu'on peut dire,
faire , ou imaginer , tout enfin étant matière de li-
vres, la vie la plus longue, & l'étude la plus afli-
due , ne mettent que difficilement en état d'en ac-
quérir la connoiffance. Un homme de Lettres doit
cependant s'en taire un plan méthodique , afin defa-
voir caradérifer èV réduire à des clafïcs convenables
ce nombre prodigieux d'écrits qu'on a donnés &
qu'on donne tous les jours au public : autrement il
cil expofé à errer perpétuellement dans l'immenfité
de la Littérature, comme dans un labyrinthe plein
de routes confufes.
Ce fyftème ou plan méthodique confifte à divifer
Se fous-dh ifer en diverfes dalles tout ce qui tait l'ob-
jet de nos connoiflances; chacune des chiffes primi-
tives pouvant être confidérée comme un tronc qui
porte des branches , des rameaux , Se des feuilles. La
difficulté à lurmonter pour établir entre toutes ces
parties l'ordre qui leur convient, eft i°. de fixer fo
rang que les dalles primitives doivent tenir entr'el-
les ; 2°. de rapporter à chacune d'elles la quantité
immenfe de branches, de rameaux , Se de feuilles qui
lui appartiennent.
760
C A T
Ces divifions & fous-divifions une fois établies ,
forment ce qu'on nomme fyfëmt bibliographique, &
s'appliquent à l'arrangement des livres , l'oit dans une
bibliothèque, foit dans un catalogue. Un des avanta-
ges que l'on retire de ces divilions & fous-divilions
bien établies, elt de trouver avec facilité les livres
que l'on cherche dans une bibliothèque &C dans un ca-
talogue ; elles procurent auffi à l'homme de Lettres
le moyen de connoître affez promptement ce qu'on
a écrit de meilleur fur les matières qu'il étudie, ou
qu'il le propole d'étudier.
De favans Bibliographes & des Libraires habiles
ont donné différens l'yltèmes de catalogues : mais il
feroit inutile & trop long de les rapporter ici ; nous
nous contenterons d'indiquer les principaux que l'on
pourra conl'ulter. On a obligation à Lambecius du ca-
talogue des manui'crits de la bibliothèque de l'empe-
reur; Mettaire a fait celui de la bibliothèque Har-
leienne; Profper Marchand a luivi des routes qui lui
étoient particulières , & en a donné les râlions dans
la préface de Ion catalogue de Faultrier. Celui de tous
qui s'elt fait jufqu'à prélent le plus de réputation dans
ce genre de littérature , & qui en effet a mis le plus
d'ordre , d'intelligence , & de raifonnement dans les
divilions , & le plus d'inltrucf ions fur les livres ra-
res dans l'es notes , elf M. Martin , Libraire de Paris ;
aulîi Ion fyitème eif-il le plus généralement adopté.
Quoiqu'on le trouve dans tous les catalogues qu'il a
donnés au public, nous croyons devoir le rapporter
ici en faveur de ceux qui ne font point à portée de
fe les procurer.
Si le catalogue de la bibliothèque du Roi étoit ache-
vé , nous croirions n'avoir rien de plus agréable &c
de plus inftruclif à donner au public fur cette ma-
tière , que le fyltème que l'on y a adopté. Les divi-
fions générales font les mêmes que celles de M. Mar-
tin : mais on y a porté les divifions à un degré de dé-
tails qui ne le trouve dans aucun autre ouvrage de
cette nature. On elt redevable de ce travail immenfe,
& qui le continue , à M. l'abbé Sallier & à M. Melot.
Il ne falloit pas moins que le lavoir profond & le zèle
infatigable de ces deux illultres académiciens , pour
commencer & conduire à fa tin, à la fatisfaclion des
connoiffeurs , une entreprife auffi difficile & auffi
pénible.
M. Martin divife toute la Littérature en cinq claf-
fes primitives, & chacune de ces dalles comme il fuit:
La THEOLOGIE, la JURISPRUDENCE,
les SCIENCES & ARTS, les BELLES-
LETTRES, & U HISTOIRE.
LA THÉOLOGIE en
Ecriture Sainte, Conciles , Pères
d e l'E g lis e Grecs & Lati n s , &
Tue ologiens.
L'Écriture Sainte comprend les textes & ver-
rons de l'Écriture-fainte, leurs commentaires, expli-
cations, paraphrales , &c. les hiftoires de la Bible,
vies de J.C. & harmonies évangeliques extraites de
l'Écriture-iainte ; les critiques lacrées, & les liturgies.
Les Conciles font ou généraux ou particuliers.
Les Saints Pères le distinguent par l'ordre des
fiecles dans lefquels ils ont vécu.
Les Théologiens fe divifent en fcholaltiques ,
moraux, catechétiques ou inftru&ifs ; parénétiques ou
prédicateurs ; myltiques , polémiques , ou qui ont
écrit pour la défenfe de la religion chrétienne & ca-
tholique, hétérodoxes.
LA JURISPRUDENCE en
Droit Canonique & Droit civil.
Le Droit canonique renferme les canoniftes
anciens & modernes , le Droit eccléfialtique Fran-
çois , le Droit eccléfialtique étranger , le Droit ecclé-
fialtique des moines 6c des îé^uliers.
C A T
Le Droit civil renferme le Droit naturel , pu-
blic , & des gens ; le Droit Romain , le Droit Fran-
çois , le Droit étranger.
LES SCIENCES & ARTS en
Philo sophie, Médecine, Mathématiques,
& Arts tant Libéraux que Mèc h aniqu es .
La Philosophie comprend les philofophes an-
ciens & modernes avec leurs interprètes &: fecla-
teurs , les traités de la Philofophie univeriélle ,
Logique & Dialeclique , Morale, (Economie, Poli-
tique , Métaphylique , Phyfique , Hiftoire naturelle.
La Médecine comprend les Médecins anciens
& modernes , les traités particuliers de Médecine ,
l'Anatomie , la Chirurgie, la Pharmacie & la Chi-
mie , la Philofophie ou Médecine Hermétique , Para-
celfique ou Alchimie.
Les Mathématiques fe divifent en traités gé-
néraux de Mathématiques, Arithmétique , & Algè-
bre , Géométrie , Aftronomie , Gnomonique ou feien-
ce des Cadrans lolaires , Hydrographie ou feience
de la Navigation, Optique, Mulique, Méchanique ,
Alhologie , &c.
Les Arts fe divifent en art de la Mémoire ; art
de l'Ecriture ; l 'art de l'Imprimerie , l'art du Deflein ,
de la Peinture, de la Gravure & de la Sculpture;
l' Architecture ; l'art Militaire ; la Pyrotechnie ou l'art
du Feu , de la fufion des Métaux , des Feux d'arti-
fice , de la Verrerie ; les divers Arts méchaniques ;
la Gymnaltique qui comprend l'art de manier & de
traiter les chevaux ; l'Elcrime, la Danle, les exer-
cices du corps.
LES BELLES-LETTRES en
Grammaire, Rhétorique , Poétique^
Philologie, Polygraphes.
La Grammaire comprend les traités généraux
de Grammaire , Inftitutions , Grammaires , & Dic-
tionnaires de diverfes langues.
La Rhétorique renferme les traités de I'art
Oratoire , & les Orateurs anciens & modernes.
La Poétique comprend les traités de l'art de
verlïfîer , les Poètes anciens & modernes , la My-
thologie , les poéiies prolifiques ou facéties , plai-
fanteries , contes , nouvelles , romans , &c.
La Philologie renferme la Critique, qui con-
fiif e en critiques anciens & modernes , fatyres , apo-
logies , & diifertations critiques , allégoriques , en-
jouées, &c. les gnomiquesoulentences, apophtheg-
mes , adages, proverbes, &c. & les hiéroglyphiques
ou emblèmes & deviles.
Les Polygraphes le divifent en auteurs anciens
& modernes , qui ont écrit divers traités fur différens
fujets , dialogues & entretiens fur différens fujets,
épiltolaires ou lettres écrites fur différens fujets.
L'étude de l'Hiftoire demandant la connoiffance
de la Géographie & de la Chronologie ; les livres qui
traitent de ces deux feiences font à la tête de cette
claife , & fe divifent, lavoir
La Géographie en Colmographie ou defeription
de l'Univers, géographes anciens & modernes, ou
defeription du globe terreitre , deferiptions & cartes
particulières , voyages &c navigations.
La Chronologie en Chronologie technique , Chro-
nologie hiftorique ou l'hiltoire réduite & divilée par
tables & divilions chronologiques , hiltoires univer-
felles. &c
L'HISTOIRE en
Histoire Ecclésiastique,
Hl S T O I RE PRO FANE.
L'Histoire Ecclésiastique fe divife en Hif-
toire eccléjiaji'njue proprement dite } ou Hiltoire ecclé-
fialfique
C A T
fiaftiqne ancienne & nouvelle , Judaïque & Chré-
tienne. Il y a des hiftoires eccléfiaitiques univer-
selles, &: des hiftoires eccléfiaitiques particulières;
on les divife en hiftoire catholique , pontificale ,
hiftoire monaftique, hiftoire fainte, hiiloire eccléfiaf-
tique des héréfies & des hérétiques.
L'HiJloire catholique & pontijicale renferme l'hif-
toiredes conciles, générale & particulière , l'hiftoire
& les vies des papes & des cardinaux.
L'HiJloire monaftique comprend l'hiftoire des or-
dres monalUques & religieux , avec les vies des inf-
tituteurs , fondateurs, iaints & perlonnages illuiîres
de chaque ordre , 6c de plus l'hiftoire des monalte-
res ; elle renferme auïfi. l'hiftoire des ordres militaires
& de chevalerie.
L'HiJloire Sainte comprend les martyrologes &
vies des faints & des perlonnes illuiîres en piété ,
l'hiftoire des lieux Iaints ,des églifes, cimetières, &c.
des reliques des faints , des faintes images , des mira-
cles, &c.
L'HiJloire eccléjîafliqui des héréjîes & des hérétiques
fe divile en hiiloire ancienne des héréfies jufqu'au
XII. lïecle , hiiloire des nouvelles héréfies depuis le
Xiu. ficelé jufqu'à préfent, hiftoire des inquiiitions
contre les hérétiques & contre d'autres.
L'Histoire profane fe divife en hiftoire an-
cienne , hiiloire moderne , hiiloire généalogique &
héraldique , antiquités , hiiloire des lolennités 6c des
pompes ; hiiloire littéraire, académique, & biblio-
graphique ; vies des perlonnages illuiîres, 6c traits
historiques.
L'HiJloire ancienne ou des anciennes monarchies ,
comprend les hiftoires des Juifs , des Chaldéens, des
Babyloniens, des Alîyriens, &c. hiiloire de la mo-
narchie des Perles; hiiloire Greque, Romaine, By-
zantine ou de l'empire de Conftantinople.
L'HiJloire moderne ou des monarchies qui fubjîjlent
aujourd'hui , fe divile en deux parties. La première
renferme les monarchies de l'Europe : la ieconde les
monarchies hors de l'Europe.
Dans la première partie font comprifes les hiltoi-
res d'Italie , de France , d'Allemagne, des Pays-Bas,
de Lorraine , des Suilfcs 6c des peuples leurs confé-
dérés , d'Efpagne , de la Grande-Bretagne , des pays
Septentrionaux.
Dans la féconde partie font comprifes l'hiftoire
Orientale générale, celle des Arabes, des Sarrafins
& des Turcs; l'hiftoire Aliatique , l'hilloire d'Afri-
que , l'hiftoire de l'Amérique ou des Indes occiden-
tales.
L'HiJloire généalogique & héraldique comprend les
traités généraux & particuliers de la feience héroï-
que , de la nobleile , des nobles , de leurs titres , pré-
rogatives , &c. & des choies qui leur font propres ;
les traités héraldiques ou qui appartiennent à la feien-
ce du BlaFon ; les hiftoires généalogiques des familles
illuiîres.
Les antiquités renferment les rits , ufages & coiV
tûmes des anciens; hiftoire métallique ou médailles,
monnoies , &c. divers monumens de l'antiquité ; def-
criptions & traités finguliersdes édifices publics, des
amphithéâtres , obéliiques , pyramides , &c. divers
antiquités , pierres gravées , cachets , lampes, & au-
tres choies qui nous relient des anciens ; mélanges
d'antiquités contenant des collections mêlées , des
diftertations, des delcriptions de cabinets d'anti-
quaires , &c,
L'HiJloire des. Solennités & des Pompes comprend
les réjoiiillances publiques, entrées, mariages , &e,
Hiiloire cies Pompes funèbres.
h' Hiftoire littéraire, académique & bibliographique ,
comprend l'hiftoire des lettres & des langues , des
feiences & des arts , ou il ell traité de leur origine
èc de leur progrès ; hiftyue des académies , écoles ,
Tome II,
C A T
J6t
univerfités , collèges & fociétés de gens de lettres ;
bibliographie ou hiiloire & defeription des livres.
Vies des pzrfonnages illufires divifées en vies des
îlluitres perlonnages anciens, Grecs & Romains, en
général 6c en particulier ; vies des hommes illuiîres
& modernes enfemble , ou des derniers tems feule-
ment ; vies des hommes illuiîres dans les feiences ôc
dans les arts , anciens 6c modernes.
Extraits hifioriques , font les diverfes collections
tirées & extraites des hiftoriens anciens & moder-
nes ; les monumens , actes & écrits hiftoriques, pie-
ces du tems , &c. traités de paix , de confédération ,
d'alliance , de trêve , &c. entre les princes ; enfem-
ble les pièces, recueils , diftertations , ôc autres cho-
ies concernant les négociations de ces traités ; les
dictionnaires hiftoriques, &c.
Ceux qui voudront mettre en pratique le préfent
fyfteme, pourront confultcr pour les détails de cha-
que partie quelques-uns des catalogues de M. Mar-
tin , comme ceux de MM. Bultcau , Dufay , comte
Hoym , de Rothelin , & Bellanger.
Il a été trouvé dans les manuicrits de feu M. l'ab-
bé Girard, de l'Académie Françoife, un fyfteme de
Bibliographie , où il règne un ordre fort différent de
ceux que l'on a connus jufqu'à préfent. Comme on
ne le propofe pas de le publier en particulier, nous
avons crû devoir le placer ici , pour ne pas priver le
public de ces nouvelles lumières fur une matière
vraiment intérefiante. M. l'abbé Girard y rend*
compte en Philofophe des raifons qui l'ont déter-
mine dans le choix 6cle rang de l'es divifions.
D'abord il conlidere l'homme dans la naiiïanec
du monde , foible & inquiet fur fa deftinée , agité par
la crainte & par d'autres fentimens qui lui inipirent
la défiance de lui-même , & le portent à chercher un
protecteur puiftant. Conduit par degrés à la connoif-
fance d'un Dieu , il met tous lés foins à fe le rendre
propice par le culte qu'il croit lui être le plus agréa-
ble ; c'eit ce qu'on nomme religion chez tous les peu-
ples. Ce qui la concerne foit dans le général , (bit
dans le particulier , foit pour la maintenir , foit pour
la combattre, fait le premier chef de ce plan fous le
titre de THEOLOGIE.
L'homme ifolé fentit de nouveaux befoins , 8c
chercha dans la protection de fes égaux & de les
voihns , un appui à fa portée ; cela forma la fociété
dont les commencemens n'eurent d'autres motifs que»
les lecours mutuels & les fervices réciproques; mais
dont les progrès formèrent des patries, des états, &
des empires ; produilirent des lois & des coutumes ,
<Sv. Tout ce qui regarde la fociété , les formes , fes
intérêts, fes lois, 6c les ufages, tait le fécond chef
de ce fyfteme fous le titre de SOMOLOGIE.
Quoique le culte 6c la police remédient aux hor-
reurs de la folttude par les liaifons qu'ils établirent
entre les hommes , peu fatisfaits du petit volume de
leur pérfonrte , & de la courte durée île leur éviden-
ce , iis travaillent à vivre dans l'idée d'autrui , 6C
forment fur le pian de cette image une manière d'ê-
tre , à laquelle ds donnent le nom de gloire &C de re-
nommée. Ce goût rend les hommes jaloux de leur
honneur, fenfibles à l'efHme des autres, eVr curieux
de ce qui les regarde ; de façon qu'ils s'occupent des
actions & des éveneméns ; qu'ils travaillent à s'en
initaiire & a les publier. De-là l'origine d'un troi-
Geme objet d'ciudition fous le titre ^HISTORIO-
GRAPHIE.
Le fpeclacle pompeux de l'uni vers, & les merveil-
les de la nature , frappent allez pour attirer des re-
gards curieux. L'efprit humain a\ ide de connoiflan-
ces , animé par fes premières découvertes , ai
l'expérience, de l'analyte» & du raifonnement, fe
livre à ces recherches prorondes qui font ce qu'on
nomm$ proprement Scien^ss , objet auHngué formant
DDddd
■JÔ2
C A T
dans ce fyftème le quatrième chef fous le nom de
PHILOSOPHIE.
C'eft fans doute par l'acquifition des connoiffan-
ces & par l'amas des vérités, que l'efprit s'enrichit :
mais ici comme ailleurs , il faut faire ufage de ce que
l'on poffede pour en tirer fatisfaâion. Cet ufage ne
fe trouve que dans la communication avec les au-
tres êtres de notre efpece ; & cette communication
ne pouvant fe faire par une voie plus naturelle ni
plus commode que par le moyen de la parole , il en
réfulte dans les hommes un penchant vif à vouloir
briller , flatter , 6c amufer par le difeours. L'on ne
doit donc pas être furpris s'ils fe font appliqués à cul-
tiver le langage , & fi quelques-uns préférant les
amuiémens du bel efprit au travail pénible des re-
cherches favantes , fe font attachés à l'éloquence , à
la poëlie , à la critique , à la pureté des expreifions ;
enfin à tout ce qui dépend du ïqu de l'imagination ,
& à ce qui concerne les règles & les grâces de la
parole , compris fous le titre de PHILOLOGIE.
Le bonheur étant le but que tout être ieniible &
intelligent envifage , il eft naturel que l'homme ne
néglige rien de tout ce qu'il croit être propre à le
jendre heureux. C'eft par ce defir du bien être, 6c
par la néceffité de pourvoir à lés befoins réels ou
imaginaires, que l'on induftrie a été excitée ; qu'en
étudiant ce qui plaît aux fens comme ce qui orne
l'efprit , il a donné naiffance aux Arts. Ce qui les re-
garde fait le fixieme & dernier chef de ce fyftème
ious le titre de TECHNOLOGIE.
M. l'abbé Girard divife donc toute la Littérature
en fix genres qui font :
THEOLOGIE , NOMOLOGIE , HISTORIO-
GRAPHIE , PHILOSOPHIE , PHILOLO-
GIE , TECHNOLOGIE.
Cette première divifion, toute fimple qu'elle eft,
répond à toute l'étendue de la Littérature, n'y ayant
.aucun ouvrage que l'on ne puiffe rapporter à ces fix
chefs : mais quoique jufte , elle eft encore trop gé-
nérale pour démêler les différences de tout ce qui efl
écrit , 6c y établir un ordre parfait. M. l'abbé Gi-
rard entre donc dans un plus grand détail , 6c divife
chacun de ces fix genres en fix clafTes , 6c chaque
clafie en deux ordres.
THÉOLOGIE.
Textes, Commentateurs , Dogmatiques ,
Prédicateurs, Mystiques; Liturgiques.
Ce premier genre de Littérature ne fe borne pas
dans le fyftème de l'érudition générale , comme dans
celui de l'érudition fcholaftique , à ce qui regarde
feulement la religion Chrétienne. D'une bien plus
vafte étendue, il embraffe toutes les religions de l'u-
niyers préfentes & paffées, qui fe rapportent toutes
à fix elpeces générales ; favoir, Chriftianifme , Ju-
daïfme , Mahométifme , Paganifme , Déifme , &
Athéifme.
La religion Chrétienne fe divife en trois commu-
nions principales ; Romaine , Greque , 6c Protef-
tante.
La Théologie Juive a produit difFérens partis : le
premier de tous les fchifmes y fut une fuite des fac-
tions de l'état ; la deiunion des tribus forma de l'an-
cien Ifraëlite le Juif 6c le Samaritain. Enfuite paru-
rent dans le fein du Judaïfme les Efféniens, Phari-
fiens, 6c Saducéens, dont les Caraïtes ont pris la
place. Ces derniers font parmi les Juifs ce que les
Réformés font parmi les Chrétiens.
Dans le Mahométifme il y a deux fecles ; celle
d'Omar , & celle d'Haly.
Le caractère du Paganifme eft la pluralité des
dieux : tous les livres écrits fur ces fix différentes
elpeces de religions font, comme nous l'avons dit,
C A T
l'objet de la Théologie confidérée comme portioa
d'unfyfième bibliographique. Nous allons prélënte-
ment rendre compte des fous-divifions en deux ordres
de chacune des fix clafTes.
Les Textes , ce font les écrits qu'on regarde dans
chaque religion comme dépositaires authentiques de
la croyance & du culte qu'on y profefië ; ils font ou
facrés ou eccléfiaftiques.
Les Textes facrés partent des Légiflateurs , & font
refpectés comme divins : tels font chez les Chrétiens
les livres de l'ancien 6c du nouveau Teftament ; chez
les Juifs , la Bible ; chez les Mahométans , l'Alcoran ;
chez les Chinois, les ouvrages de Confucius ; & dans
l'ancien paganifme , les oracles des Sibylles , &c. Les
Textes facrés, en langues qui ont été ou qui font
d'ufage dans les églifes, fe nomment verjîons : ceux
qui font en langues vulgaires , ôc qu'on lit Ample-
ment dans le particulier , font nommés traductions.
Les Textes tccléfiajliques font les décifions ou conf-
titutions faites par le concours des principaux chefs
d'une religion , reçues 6c acceptées comme lois éma-
nées d'une autorité fainte, 6c comme règles indil-
penfables de foi & de conduite. Tel eft parmi les Juifs
le Thalmud , & tels font parmi nous les conciles divi-
fés en généraux , nationaux & provinciaux.
Les Commentateurs font ou des interpréta-
tions ou des differtations fur les Textes.
Les Dogmatiques fedivifent en Docteurs & en
Cafuiftes.
Les Docteurs font ceux qui enfeignent méthodique-
ment la doclrine divine. Ceux dont les opinions ont
acquis de l'authenticité, font appelles Pères de F Eglife,
Grecs 6c Latins , 6c font regardés comme dépositai-
res de la doftrine divine à laquelle on donne le nom
de tradition. Les Docteurs modernes font appelles
fcholafliques.
Les Cafuifles s'attachent à marquer la diftindtion
précife de ce qui eft permis ou défendu par la loi Ôc
la morale du fyftème reçu dans la fociété.
Les Prédicateurs fe divilënt en orthodoxes Si-
en fe&aires.
Les Mystiques font ou contemplatifs ou afiétiques.
Les contemplatifs ne présentent dans leurs écrits
que des réflexions fpéculatives ou épanchemens de
cœur pour nourrir la dévotion , faire aimer 6c efti-
mer les chofes divines préférablement aux tempo-
relles.
Les afiétiques, perfuadés que la feule contempla-
tion ne fuffit pas pour attacher l'homme à Dieu , s'oc-
cupent à écrire des maximes 6c des règles de condui-
te ; à propolër certaines pratiques de prières & de
mortification, &c.
Les Liturgiques traitent de ce qui concerne le
fervice divin, & la pratique du culte extérieur, d'où
le forment les rituels 6c les eucologies.
Les rituels règlent l'ordre 6c le cérémonial de l'of-
fice, & des fondions eccléfiaftiques, conformément
aux ufages de chaque églife.
Les eucologies n'ont pour objet que la prière, foit
publique , foit particulière.
NOMOLOGIE,
Discipline , Droit civil, Corporologie^
ethicologie , thesmologie,
Praxeonomie.
Ce genre embraffe tout ce qui traite de l'avanta-
ge que les hommes trouvent à être réunis en corps
de fociété , dont la confervation eft indifpenfable-
ment attachée à l'obfervation des lois. Ce.s fix clafTes
font diftinguées par la diverfité des liens qui atta-
chent ou affocient les hommes les uns aux autres.
Ces liens font ou églife, ou patrie, ou congrégation,
ou mœurs , ou ulages , ou actions communes.
La Discipliné dans ce fyftèrne généraj de Litté-
C A T
rature, ne fe borne pas comme dans nos écoles, au
fcul gouvernement de Féglife Catholique , elle em-
brafie toutes les lois &c tous les reglemcns faits pour
gouverner les fociétés fondées fur les liens de culte
& de religion, & peut fe divifer en dilcipline chré-
tienne , & en difeipline héteronome.
La difeipline chrétienne varie félon les différentes
communions qui partagent l'Eglife univerfelle : mais
toutes ces diverfités peuvent être réduites fous les
communions Romaine, Greque & Protcflante.
La difeipline héteronome renferme tout ce qui con-
cerne le gouvernement des églifes non Chrétien-
nes, telles que celles des Juifs, des Mufulmans , &c
des Gentils idolâtres.
Le Droit civil: de tout tems les hommes fe
font réunis pour fe fortifier contre leurs ennemis , &
veiller avec plus de fureté à leur mutuelle conierva-
tion, ce qui a formé des patries d'où le Droit civil a
pris naiflance. Il fe partage allez naturellement en
deux efpeces, Politique &: Jurifprudence.
La Politique a pour objet le Droit public ; c'eft-à-
dire, qu'elle regarde les intérêts, la gloire, la puif-
fance , la forme &L l'adminifiration des états ; d'où
les actes conventionnels , les manifefles, les mémoi-
res de négociations , &c.
La Jurisprudence veille aux intérêts des particu-
liers , décide leurs différends , &c. d'où les lois , les
jugemens rendus, lesJunfconfultes, les Praticiens,
&c.
Corporologie : au milieu des fociétés généra-
les que forme l'églile ou la patrie , il s'en élevé de
particulières qui peuvent fe divifer en cenobitiques
& affociations.
La cénobitique comprend les règles clauflrales &
les autres écrits qui concernent le gouvernement des
communautés religieufes.
Les af ouations renferment toutes les fociétés aux-
quelles la conformité de profeffion, d'emploi où
d'occupations, donne naiflance dans le corps civil
de l'état. Telles font les académies , les ordres de che-
valerie, les compagnies, les corps & métiers, &c.
leurs flatuts, leurs reglemcns, ck le\irs uiages parti-
culiers.
L'Ethicologie : outre les fociétés fondées fur
des lois authentiques , il en efl une libre cv naturelle
que l'humanité infpire, & que la raifbn approuve;
c'efl ce qu'on nomme commerce ordinaire de la vie Les
mœurs en font le lien, & font l'objet de l'éthicolo-
gie. Les livres qui appartiennent à cette claffe font
distingués par la forme que les auteurs ont donnée à
leurs ouvrages; ce lont ou des traites ou des carac-
tères.
Les Traités de morale font ou des difeours fuivis ou
méthodiques, adrefles au public ou à quelques per-
fonnes particulières, par forme de leçons.
Les Caractères ne font précifément que mettre les
mœurs en tableau par des deferiptions, qui fans at-
taquer les perfonnes, tracent neantmoins tous les
traits perfbnnels.
La Thesmologie comprend les livres qui trai-
tent des ufages reçus dans les fociétés ; ces ujages te
diiîinguent par le cérémonial & les modes. ^»
La Praxéonomie traite des fociétés particuliè-
res & momentanées, de leurs règles, de leurs for-
mes, &c. & fe divife en aetiologie & ludicrologie;
Vaetiologie embrafle les pratiques familières & do-
meftiques.
La ludicrologie comprend les jeux de hafard,d'a-
drefle ou de conduite.
HISTORIOGRAP HIE,
Notices , Histoires , Persoxologies, Lit-
terologie, Fictions , Collections.
Les Notices font des ouvrages purement émi-
To me II,
C A T
75}"
mératifs, ou des liftes méthodiques, tantôt nlunici-
pales, tantôt nominales.
Les notices municipales ont pour objet les offices '
charges , emplois , fiéges & tribunaux ; elles fer\ eût
à taire connoître la puiflance, ainfl que la forme dès
états & des corps civils.
Les notices nominales expofent les noms des per-
fonnes, foit des membres qui compofent les differen
tes fociétés , foit des têtes qui étendent & foûtien-
nent les familles , foit de ceux qui forment l'ordre
& la durée des fucceflions*fur les thrones & dans U s
places diflinguées.
Les Histoires narrent les évenemens qui tou-
chent le corps général de quelque f ociété , foit que
cette fociété forme une patrie, ou une fimple con-
grégation ; ce qui divife cette clafle en hifloires na-
tionales & congrégationales.
Les hifloires nationales ont pour objet toutes les fo-
ciétés politiques d'état & de nation.
Les congrégationales ont les autres fociétés particu-
lières , telles que celles de religion.
Les Personologies font, ainfi que l'étymologie
de la dénomination le fait/entendre, unelortc d'hiito-
riographie qui a pour objet les perfonnes en particu-
lier. Cette forme, comme les autres, a deux ordres
fous les noms de vies t& de voyages. Sous le nom de
vies eft compris tout ce qui porte le titre de mémoires.
La Littérologie a pour objet les faits & les
évenemens littéraires , & fe divile en doctrinologie,
bibliographie.
La doclrinologie fait l'hifloire des Sciences & des
Arts ; c'efl-à-dirc , qu'on y prend foin de faire con-
noître le tems &c les circonflanccs de leur origine ,
ainfi que le cours de leurs progrés.
La bibliographie inflruit des écrits, que la plume,
conduite par le talent de l'cfprit, a donnés au public ;
ce qui fe fait ou par des extraits & des analyfes , ou
par des catalogues.
Les Fictions, enfans de la feule imagination, l
& faites pour amufer, fe mafqiient d'un faux aird'hif-
toire par une narration fuivie , & le divifént en ro-
mans & en contes.
Les Collections comprennent tous les ouvra-
ges hifloriographiques faits de diverfes pièces d'af-
femblage fans aucun enchaînement d'e\ enemens &
de circonflanccs; elles peuvent fe réduire à deux ob-
jets diiiérens , les antiquités év les compilations.
Les antiquités raffcmblent ce qui regarde les monu •
mens que la main des hommes a fabriqués , & que les
tems n'ont pas détruits, tels que les bâtimens, les
i'nfcriptions , les médailles, les Chartres, & autres
choies pareilles.
Les compilations ramaflent les différens faits indé-
pendans les uns des autres, tels que les mémoriaux
6v les dictionnaires hiftoriques.
PHILOSOPHI 1 .
Mathématiques , Cosmographie, Physiu-
graphie, physiql f , medecine ,
SpiRITOLOGIE.
La nature préfente une multitude d'êtres contenus
dans un cfpace , d'où naît l'envie de calculer les uns,
es; de mefurer l'autre ; de façon que le nombre & la
grandeur de viennent une occupation d'efprit, & lonr
vei itablement des connoiflances préliminaires 6e no~
ceffaires à l'étude de la nature.
Un regard enfuite plus attentif fait qu'on regarde
le monde comme un \ aile pays ou l'on voudroit voya-
ger, & dont Ta totalité le diflrihuc en deux partie ,
le ciel &; la terre. C e lent deux objets nouvea:
traiter.
A l'idée oenér.ile des régions doit naturellement
fuccéder celle d'habitation ; on y rencontre une mul-
titude d'êtres fucceûryement produits & renouvel
D D d d d ij
764 C A T
lés, ou par voie de génération, ou par voie de vé-
gétation. Leur defcription t'ait le travail des Natu-
ralises.
Le travail conftant & infatigable de la nature la
fait envisager dans un état d'action, dont la connoil-
fance devient intéreffante par le defir de dévoiler
fes myfteres; de-là l'étude de la Phyfique.
L'étude de la nature en aftion conduit néceffaire-
ment à celle de l'état de vie. Une curiofité bien pla-
cée par l'intérêt qu'on prend & qu'on doit prendre
à fa confervation , détermine l'homme ftudieux à ap-
profondir la machine animale, pour l'avoir en quoi
confifte la vie ; quels en font les refforts; ce qui en
fait la bonne ceconomie & la fanté , & pour décou-
vrir auifi les caufes & les règles de fa deftruction ou
de fa langueur; d'où la Médecine.
Après avoir confidéré la nature foiu fes différen-
tes faces , il n'étoit pas naturel d'oublier le plus ad-
mirable de fes afpects ; celui où s'appliquant & cher-
chant à connoitre, elle paroît toute fpirituelle. L'ef-
prit humain fe repliant iouvent lur lui-même & iur
fes opérations , s'étudie & travaille fur l'on propre
fonds , non-feulement pour fe comprendre ainfi que
tout ce qu'il imagine être comme lui au-deffus de la
fphere corporelle , mais encore pour fe faire une mé-
thode de penl'er & de raifonner , qui ferve à le con-
duire au vrai &au bon. Voilà les raiions fur lefquel-
les font fondées les divilîons de la Philol'ophie , dont
nous allons rendre compte en particulier.
Les Mathématiques ayant pour objet le nom-
bre & la grandeur, fe divifent en Arithmétique &
Géométrie ; fous le nom à' Arithmétique eft compris
l'Algèbre.
La Cosmographie fe divife en Aftronomie &
Géographie.
La Physiographie s'attache à faire connoître
les productions de la nature , &C fe divife en Pi'yco-
logie &*Végétologie.
La Pfycologie conlidere les êtres produits par voie
de génération , &c doués de vie; c'eft-à-dire, des ani-
maux de toute elpece.
La Végétologie comprend tout ce qui eft produit
par l'action continuelle de la nature, tels que font les
plantes , les fruits , les métaux , les minéraux , les co-
quillages, &c.
La Physique eft ou fpéculative ou pratique.
Lajpéculative renferme les lyftèmes , & la pratique
les expériences.
La Médecine a pour but ce qui concerne la vie
& la fanté de l'animal : fes deux branches font la
Phyfiologie & Pathologie.
La Phyfiologie confidere la conftitution , les fonc-
tions , & toute l'eeconomie des parties qui compo-
fent le corps animé.
La Pathologie étudie les altérations qui peuvent
troubler cette machine vivante; comment on peut
prévenir ces accidens , & y remédier : ce qu'on nom-
me diète & thérapeutique qui , ainfi que la Chirurgie &
la Pharmacopée , appartiennent à ce dernier ordre.
La Spiritologie fe divife en Métaphyfique ôc
Logique.
La Métaphyfique cherche à connoître ce que c'eft
que l'efprit 6c la penfée, les propriétés & les opéra-
tions de l'ame railonnable. Elle pouffe même fes re-
cherches jufqu'à la divinité.
La Logique s'applique à conduire l'efprit humain
dans les routes de la vérité par des règles sûres & lu-
mineufes. C'eft à elle qu'appartient tout ce qui re-
garde la direction du railonnement , foit dans la polî-
tion des principes ; l'oit dans la déduction des confé-
quences.
C A T
PHILOLOGIE.
Lexicologie, É lo ç>u en c e , Poèmes}
Théâtres , Lettres, Critiqle.
Les avantages que procurent les grâces du dis-
cours , à ceux qui les poffedent , font que les hom-
mes fe portent avec ardeur à ce qui peut perfection-
ner leur langage, & leur valoir la réputation de bel
efprit. De-là une foule d'ouvrages caraclérilés par
un goût particulier pour l'art de la patoie , & par
les tournures 6c les idées fingulieres d'une imagina-
tion ingénieufe. Le mot de Philologie caractérile par-
faitement ce genre de littérature, qui le dïviie com-
me les autres en fix claffes.
La Lexicologie embraffe tout ce qui concerne
les langues , foit pour en donner l'intelligence , en
conferver la pureté , en faire connoître le génie. Les
auteurs de cette claffe font ou grammairiens ou vo-
cabuliftes.
Les grammairiens établiffent des règles & des prin-
cipes , difeutent la nature des mots pour en connoî-
tre les divers accidens , &c. ils traitent aulli de l'or-
thographe 6c de la ponctuation.
Les vocabulijhs font des obfei vations fur la pureté
du langage, en diftinguent le bon uiage du mauvais.
Ils travaillent enfin à bien reprélenter la valeur ou
la fignification des mots , 6c font ce qu'on nomme
dictionnaire.
L'Éloquence a pour objet les embelliffemens
du difeours : tantôt elle enleigne les règles de Ion
art , tantôt elle les met en œuvre ; ce qui diftingue
fes écrivains en rhéteurs 6c en orateurs.
Les rhéteurs donnent des préceptes fur les figures
du langage , la conftruction des périodes , &c.
Les orateurs font uniquement appliqués à l'exécu-
tion. Les oraifons funèbres , les dilcours académi-
ques , les éloges des hommes illuftres , &c, compo-
îent cet ordre.
Les Poèmes , par leur grande diverfité , ne font
pas d'une divilion auffi facile dans l'arrangement
d'une bibliothèque , que dans un traité de poëfie. Il
faut donc chercher dans le génie même de la poëfie
quelque différence affez grande pour que les poètes
qui le font attachés à une elpece le loient rarement
attachés à l'autre , 6c que par conséquent on puiffe
fonder là-delius un partage convenable au lyfteme
bibliographique. Mr l'abbé Girard trouve dans la
verve poétique deux âmes qui vont peu enfemble :
l'une élevée & l'érieufe , qui frappe vivement l'ima-
gination par la force des images ; l'autre voluptueu-
fe , qui flate ou amufe par l'agrément ou la douceur
de la mélodie : de façon qu'il diftingue les poèmes
en épimétriques 6c lyriques.
Les épimétriques s'adreffent à l'efprit ; ils narrent ,
peignent , railonnent ou font parler ; tels lont les
poèmes épiques ou héroïques , les odes , les élégies ,
les latyres, les éclogues, les idylles , les madrigaux ,
les épigrammes, &c.
Les lyriques font faits pour les organes de la voix
& des oreilles ; ce lont les chanfons.
Le Théâtre. M. l'abbé Girard en fait une claffe
à part 6c diitihguée des poèmes , parce qu'il n'y re-
garde la verlification que comme un accefioire qui
ne fert point à caraftériier cette forte d'ouvrages,
étant manifeftement marqués à un coin très-diiîeient
de celui de la cadence & de la mefùre des exprel-
fions. Ceux qui ont confacré leurs talens aux pièces
de théâtre fe diftinguent en tragiques & en comiques.
Les Lettres. Il n'eft ici queftion que des lettres
amufantes : celles qui traitent de dévotion ou de po-
litique appartiennent à d'autres claffes. Dans celle-
ci on les divife en ingénieufes & galantes, lelon que
l'efprit & le cœur y ont part.
La Critique examine, juge & met au creufet
C A T
tous les ouvrages. Elle fe divife en poîygraphîque
&C monographique.
La poly graphique s'attache indifféremment dans un
même ouvrage à plufieurs objets & de toutes fortes
d'efpeces.
La monographique n attaque qu'un ouvraa^^B
qu'un auteur en particulier , par un écrit deltiné à
ce feul liijet & fait exprès pour l'examiner d'un bout
à l'autre.
TECHNOLOGIE,
Civiques , académiques , Gymnastiques ,
Plastiques, Nutritifs, Mystériques.
Il eft fi naturel à l'homme de penfer à fes befoins ,
qu'il n'eft pas douteux que les arts n'ayent été d'a-
bord l'unique objet de lbn travail. Mais quoiqu'il
les ait mis au premier rang de fes occupations, il ne
leur a pas confacré les prémices de les écrits , laif-
fant à la pratique le foin de les conferver. Quoique
l'on ait écrit un peu tard fur cette matière , elle a
produit un fort grand nombre d'ouvrages, qui peu-
Vent auffi fe partager en fix claffes.
Les Arts civiques font ceux que la politique
adopte par préférence dans la conilitution du gou-
vernement. Ils font fouvent cultivés par les citoyens
du premier rang. Les uns ont pour but la force 6c la
gloire de l'état ; les autres la richefTe , 6c fe divifent
en célèbres 6c pécuniaires.
Les Arts célèbres méritent ce nom , parce qu'ils of-
frent de la réputation à ceux qui en font proteffion ,
& rendent célèbres ceux qui s'y diftinguent : tels font
l'Art militaire , la Navigation.
Les Arts pécuniaires iont moins nobles , mais ils
font utiles, tels que le Commerce & la Finance.
Les Arts Académiques font caraâérilés parle
génie , dont l'étude a deux principaux objets, le def-
fein 6c les forces mouvantes. L'un renferme les arts
iconographiques ; les autres font le fondement de
ce qu'on nomme méchanique.
Les Arts iconographiques représentent, peignent &
conftruilent : ainfi l'Ecriture , l'Imprimerie , la Pein-
ture, la Gravure, l 'Architecture, &c. compofent cet
ordre.
La Méchanique enfeigne à distribuer fagement & à
appliquer à propos les forces mouvantes , d'où naif-
fent la pyretique, l'hydraulique , la pullative, la ita-
lique 6c Télatérique.
Les Arts gymnastiques ont pour objet ce que
l'homme eft capable d'exécuter par les mouvemens
réglés & compallés de fes organes & de fes mem-
bres. Ils font ou fymphoniques ou dextériques.
Les fymphoniques embraffent le Plain-Chant , la
Mufiqwe & la Déclamation.
Les dextériques font enfans de l'action & de l'exer-
cice. La Danfe , la Lutte, l'Art de monter à cheval ,
àe taire des armes, & tout ce qui dépend de l'adrefTe
Cv de l'agilité font de cet ordre.
Les Arts plastiques travaillent la matière
pour en faire des ouvrages de conliftance. La diffé-
rente façon de la manier t'ait ou des manufacturiers
ou des manœuvriers.
Les manufacturiers forment, c'eft-à-dire qu'ils don-
nent à ce qu'Us employent un nouvel être, par la
fulion , la compofition ou le tillu.
Les manœuvriers adaptent lîmplement , c'eft-à-dire
qu'ils font leurs ouvrages en coupant, taillant, joi-
gnant , &c. les matériau* dont ils le lervent.
Les Arts nutritifs fe partagent en ruraux &
condimentaires.
Les Arts ruraux embraffent le labourage , la cul-
turc des jardins, des vignes, des prairies ; la pêche,
la chaffe , & les autres occupations de la campagne.
Les Arts condimentaires affailonnent les ahmens
pour les rendre agréables & en varier le goût. La
C A T
j«1
Boulangerie , la Cuifine , l'Office , &c, font de ce
nombre.
Les Arts mystériques marchent fous le voile
du fymbole 6c dans l'obfcurité de la divination , ce
qui les diftingue en fymboliques & judiciaires.
Lesjymbo/iques comprennent tout ce que les hom-
mes ont imaginé pour produire leurs idées par des
figures & des allulions : tels font le blalon , les em-
blèmes , les devif es , les hyeroglyphes , les énigmes ,
les logogryphes , la fteganographie , &c.
Les Arts judiciaires , qu'on pourroit à jufle titre
nommer illujoires , font tous les Arts magiques , en-
fans de l'oiliveté , de la malice ou du dei \
de l'imagination.
Ceux qui feroient curieux de connoître un plus
grand nombre de lyftemes bibliographiques , pour-
roient encore conlulter Garnerii (yfkma bibliothe-
cœ collegii Parijîenfis Societatis Jefu , & les autres dont
nous avons parlé au commencement de cet article.
La diverfité des opinions fur l'ordre 6c les divifions
d'un fyfteme bibliographique , fëmble prouver que
c'ell une choie affez arbitraire : cependant il doit y
en avoir un vraiment conforme à la railbn , & je
penfe que c'eft celui» oii les matières font rangées
dans le même ordre que l'efprit humain en a acquis
la connoiffance ; il elt vrai qu'il faut beaucoup de
philofophie pour failir cet ordre & le fuivre. Mais
je ne craindrai point de dire que le fyfteme figuré
des connoiffances humaines que l'on trouve au com-
mencement du premier Volume de cet Ouvrasse ^
peut fervir d'introduction & de modèle à ce travail.
Quiconque voudra prendre la peine de l'étudier 6c
de le comparer aux autres fyftemes, après les avoir
comparés entr'eux & en avoir bien obfervé les dif-
férences , pourra pouffer les divifions plus loin , &
dreffer un plan méthodique ou fyfteme , qui ne lai£>
fera plus rien d'indéterminé , & qui fauvera l'incon-
vénient de trouver quelquefois le même livre dans
plufieurs claffes différentes.
Qu'on me permette , à l'occafion du mot catalo-
gue , d'annoncr ici un ouvrage imprimé depuis peu
en Allemagne, fous le titre de Bibliothèque cuneufe,
hiflorique & critique , ou Catalogue raijonné des livres
difficiles à trouver , par David Clément. Cet ouvra-
ge , dont il n'y a encore que deux Volumes in-jf . 6c
qui doit en avoir un plus grand nombre , elt rempli
de recherches fort favantes & fort curieufes. Les
matières y font rangées félon l'ordre alphabétique
des noms des auteurs, & m'ont paru bien propres à
fatisfaire la curiolité des amateurs de livres.
Cet article a été fait par M. David Famé , un des
Libraires ajfociés pourTJLncyclopédie , fur un des ma-
nu] crits légués parfit M. 'l'abbé Girard à M. le Breton ,
fon imprimeur & fon ami. Ce manuferit ejl intitulé Bi-
bliothèque générale ou Effai de Littérature univer-
felle. On voit par cet ouvrage que M. l'abbé Girard , fi
connu par fes préceptes de la Langue Françoife , & fur-
tout par fes Synonymes , joignait à la connoifance des
lignes , une connoijance tus-etendue des chojes.
CATALOTIQUES, adj. (Medec.) c'ell ainfi qu'on
appelle des remèdes dont l'effet eft d'applanir éc de
diffiper les marques groffieres des cicatrices qui pa-
rodient fur la peau. (A)
C A T A N A N C E , f. f. ( Hifl. nat. bot. ) genre de
plante, dont la fleur elt un bouquet à demi-rleurons,
portés chacun fur un embryon, & foûtenus parmi
calice compolé de plufieurs feuilles en écailles. Cha-
que embryon devient dans la faite une lemence gar-
nie d'une couronne de poils, & renfermée dans le
calice. Tournefort, Injl. m bab. Vayt^ Plante. (/)
CATANE ou CATAXEE, (Geog.) ville de S.ci-
le , fur un golfe de même nom , dans une vallée
qui s'appelle ruUét de datant.
j66
C A T
CATANZARO , (Gépg.) ville d'Italie , au royau-
me de Naples, dans la Calabre ultérieure , dont elle
ell capitale.
CATAPACTAYME ,{.f. ( Hift. mod. ) fête que
les peuples du Pérou célebroient avec grande iolem-
nité au i--,ois de Décembre qu'ils appellent bayme ,
& qui eft le commencement de leur année. Cette
fête eft consacrée aux trois liâmes du loleil , nom-
mées apointi , churiunti, & intiaquacqui , c'eft-à-dire,
au loleil père , au loleil fils , & au loleil frère. Lin-
chollan , Hift. des Indes occid. (G)
CATAPANS, f. m. pi. (Hift.) nom des gou-
verneurs que les empereurs de Conitantinople en-
voyoient dans la Pouille & dans la Calabre en Italie.
Quelques favans tirent l'origine de ce mot de mt-Hirâ.-*
rv , dont les Byfantins fe fervoient pour marquer un
homme d'autorité, chargé du commandement : d'au-
tres croyent que c'eit un abrégé de xarx ^avTixpaTofct,
après l'empereur , ou lieutenant de l'empereur, comme
nous diions viceroi. M. Ducange a donné une lifte
exacte de ces catapans , qu'il dit être néceffaire pour
l'intelligence de l'hiftoire Byfantine , & en fait mon-
ter le nombre à foixante-un , depuis Etienne iurnom-
mé Maxence, nommé le premier catapan fous Bafile
le Macédonien , qui commença à régner en 868 , juf-
qu'à Etienne Patrian, qui occupa le dernier cette
dignité en 1071 , tems vers lequel les Grecs furent
chafies de la Calabre ôc de la Pouille par les Nor-
mands.
Aujourd'hui on donne encore le nom de catapan
au magiftrat de la police à Naples. (G)
CATAPASME , f. m. (Med. & Pharm.) «lœ^,
médicament fec compolé de fubllances pulvérifées ,
Se dont on laupoudre quelque partie du corps.
Ce mot vient du Grec x.a.tà ou »*to, & t«9-«/c,
faupoudrer.
Il y a des catapafmes de différentes fortes : les uns
odoriférans qui fervent de parfuns : tels font les dif-
férentes efpeces de poudre dont on fe fert pour les
cheveux ; d'autres font fortifians: on en applique de
cette efpece fur l'ellomac , le cœur ou la tête ; d'au-
tres, efearotiques , & propres pour conlumer les
chairs mortes. (A7)
,* C ATAPELTE , f. f. (Hift. anc.) nom d un infini-
ment de fupplice. Le favant Père Montfaucon con-
jecture que c'étoit une efpece de chevalet , autrement
appelle equuleus : d'autres difent que c'étoit une pref-
fe compofée de planches, entre lefquelles on met-
toit & l'on ferroit le patient jufqu'à la mort. Suidas
qui a fait mention de la catapelte , n'éclaircit rien ni
fur fa conllruclion ni fur fon u|age.
* C ATAPHRACTES , f. m. pi. (Hift. anc.) on ap-
pelloit ainfi dans les armées Romaines des cavaliers
armés de toutes pièces ; ils étoient couverts de fer
eux & leurs chevaux ; pour les chevaux c'étoient des
lames de fer , attachées & rangées comme des plu-
mes fur une toile. Tite-Live fait mention des cata-
phracles , d'où le Père Montfaucon conclut que cette
forte de. cavalerie étoit ancienne. Il ajoute qu'alors
elle failoit la force des armées. Il y avoit du tems de
l'empereur Confiance dans l'armée Romaine, des
cataphrahT.es. Ammien Marcellin dit que les Perles les
appelloient clibanaïres. Ils portoient des cuiraffes &
des ceintures de ter ; & vous les euffiez pris , ajoute
le même auteur, plutôt pour des llatues de fer faites
de la main de Praxitèle , que pour des hommes vi-
vans. Les lames de fer qui compofoient les vêtemens
militaires des cataphracles , étoient affemblés avec
tant d'art , que ce vêtement confervoit toujours la
même grâce dans tous les mouvemens , tk ne laiffoit
aucune partie du corps expofée. Il y avoit dans l'ar-
mée d'Antiochus , marchant contre Scipion l'Aiiati-
que , trois mille cataphracles à la droite des phalangi-
C A T
tes. Les Grecs en avoient auffi dans leurs troupes.
*CataphRactes, (Hft. anc.) Les Grecs & les
Romains ont donné ce nom à des vaiffeaux de guer-
re du nombre de ceux qu'on appellent vaijjeaux longs.
Ils avoient des ponts ; les vaiffeaux fans ponts fe nom-
MUÙtnt aphracles. Les cataphracles font auffi appelles
rafTes auteurs conftratœ naves ; on en attribue l'inven-
tion auxThaliens.Thucydide, parlant de la guerre de
Troye , dit qu'alors les Grecs n'avoient point de vaif-
fea» cataphracles ; mais que leurs navires étoient
équipés à la manière des pirates.
CÂTAPHRYGES ou CATAPHRYGIENS , f. m;
pl. ( Hift. ecclcf. ) hérétiques qui s'élevèrent dans le
II. fiecle de l'Eglife, & qu'on nomma de la forte,
parce que leurs chefs étoient de Phrygie , province
de l'Afie mineure.
Leurs erreurs confiftoient moins dans le relâche-
ment en fait de dogmes, que dans l'excès oppolé >
c'eft-à-dire , dans une lévérité outrée , & une mora-
le extrêmement aullere, à laquelle répondoit mal la
corruption de leurs moeurs : ils regardoient Montan
& les deux prétendues prophéteffes Prifcilla ScMaxi-
milia, comme les feuls oracles qu'il failoit confulter
en matière de religion , fe perfuadant que le S. Eiprit
avoit abandonné l'Eglife, ou qu'il ne ladirigeoit plus
que par l'organe de ces fanatiques. Voye^ Monta-
NISTES. (G)
C ATAPINA , (Géog.) petite ville de l'île de Can-
die, fur la rivière de Cartero.
CATAPLASME, f. m. (Med. & Pharm.) remède
qu'on applique fur quelques parties du corps. Le ca-
taplafme doit être d'une confillance molle comme de
la bouillie : les ingrédiens du catdplafme font les pul-
pes de différentes parties des plantes , les grailles &
huiles de certains animaux ; on laupoudre auffi les ca~
taplafmes avec les gommes pulvérilées , les farines de
diverfes efpeces ; on y fait auffi entrer différentes ef-
peces d'onguens ; le tout fuivant les indications que
l'on a à remplir : de-là vient la divilîon des cataplas-
mes enanodyns, émolliens, réiolutifs, fuppuratifs,
digeftifs , &c.
Le cataplajme compofé avec la mie de pain bien
écralée , & bouillie dans le lait avec le fafran pulvé-
rilé , elt plus en ufage , quand il ell queftion d'appai-
fer les douleurs & d'amollir; lorfqu'il ne iuffit pas,
on fubftitue à la mie de pain & au lait la pulpe des
herbes émollientes. Lorfque l'on a intention de réfou-
dre quelques tumeurs, & qu'il en eft tems ; on ajoute
à cette pulpe la farine de graine de lin , de iénugrec ,
& la poudre de fleurs de camomille.
Quoique les cataplaftiies foient des remèdes exté-
rieurs, leur application n'eflpas fans danger ; & l'on
a fouvent vu des tumeurs devenues skirrheufes, &c
dont il a été impoffible de procurer la réfolution ,
pour avoir été traités avec impéritie : d'autres font
venues à fuppuration fans néceffité; ce que l'on auroit
pu éviter, fionn'avoit pas mis en ufage des cataplaf-
mes peu appropriés. Ainfi il eft toujours bon de con-
fulter un Médecin lorfqu'il ell queflion d'appliquer
un cataplajme de quelque efpece qu'il foit. Voye-^
Topique. (A7)
Cataplasme, (Maréchaleris.) Voye^ Charge,
Emmiélure, Rémolade.
CATAPHORE, f. f. utfapopa, terme de Médecine ,
forte de léthargie ou affoupiflement : c'efl la même
choie que le coma. Voye^ CoMA.
Ce mot eft compofé de la prépofition xdlù, ou
y.dreo , en-bas , & de <p;p«, /« porte.
CATAPUCE, i. f. (Hift.nat.) plante médicinale,
qu'on appelle communément petite iithymale: Elle
purge par haut & par bas avec tant de violence ,
qu'il y a peu de Médecins qui ofent haiarder de l'or-,
donner, Voyt{ Ti T H y m ale ,
C A T
CATAPULTE, f. f. (Hifi. anc. & Art. mllu.) ma-
chine dont les anciens le fervoient pour jetter de
groffes pierres , & quelquefois des dards & des jave-
lots de douze ou quinze pies de long fur les ennemis.
Ce mot eft originairement Grec KttJearî^rtK , formé
On prétend que la catapulte eft de l'invention des
Syriens. Quelques auteurs 'la représentent femblable
à la balifte ; d'autres veulent qu'elle l'oit différente.
Voye^ Baliste & Onagre.
Le propre de la balifte étoit de lancer des traits
d'une groffeur extraordinaire, & quelquefois plu-
sieurs enfemble , dans une gargoufié ; & la catapulte
lançoit des pierres & des traits tout ensemble , & en
très-grand nombre. Folard, Attaque des places des an-
ciens. Voici la deicription d'une catapulte, fuivant cet
auteur.
On fait un chaftîs ou bafe compofée de deux gref-
fes poutres , Planche XII. de fart millt. 2,3; leur
longueur eft de quinze diamètres des trous des cha-
piteaux : leur largeur de deux diamètres & quatre
pouces, & leur épaiffeur tout au inoins d'un diamè-
tre & quatre pouces, le plus n'y fait rien. On prati-
quera v ers les deux extrémités de chaque poutre de
doubles mortoiles pour recevoir les huit tenons des
deux traverfans ,4,5, chacun de quatre diamètres
de longueur fans les tenons, oblervant d'en marquer
exactement le centre par une ligne creufo 6 ; le tra-
verfant 5 doit être courbe ou moins épais que l'au-
tre, où l'on pratiquera au milieu une entaille arron-
die pour donner une plus grande courbure à l'arbre
ou bras dont nous parlerons bientôt.
On prendra le centre des deux poutres (1, 3) au
fixieme diamètre de leur longueur, où l'on pratiquera
au milieu de chacune à l'on épaiiîéur, un trou 8 par-
faitement rond de feize pouces de diamètre oppofés
julte, Hc vis-à-vis l'un de l'autre. Ils s'élargiront vers
l'intérieur du chaffis , percés en forme de pavillon de
trompette; c'eft-à-dire, que les deux trous oppofés
qui ont chacun leize pouces de diamètre du côté des
chapiteaux, en auront dix-fept & demi à l'ouvertu-
re intérieure. Il faut en adoucir l'entrée que Vitruve
appelle peritretos, & en abattre la carne tout au tour.
Paffons maintenant à la deicription des chapiteaux,
qui font comme la glande pinéale de la machine, &
qui fervent à tortiller & bander les cordages qui
iont le principe du mouvement.
Les chapiteaux ( 9) font de fonte ou de fer, com-
pofés chacun d'une roue dentée ( 10 ) de deux pou-
ces & demi d'épaiffeur. Le trou doit être de onze pou-
ces trois lignes de diamètre , parfaitement rond , &
les carnes abattues. Le rebord intérieur ( 1 1 ) eft de
quatre pouces de hauteur ; ion épaiffeur d'un pouce :
mais comme il fe trouve plus large d'un pouce par
cette épaiffeur que le trou pratiqué dans l'extérieur
des deux poutres , on fera une entaille arrondie ( 1 1)
de quatre pouces de profondeur, pour l'introduire
jufte dans l'entaille. Comme il y auroit un trop grand
frottement lï les chapiteaux appuyoient de plat con-
tre les poutres , par l'extrême tenlion des cordages
qui les ferrent contre , on peut remédier facilement
à cet inconvénient par le moyen de fix roulettes ( 1 } )
d'un pouce de diamètre iur quatorze lignes de lon-
gueur, pofées circulairemcnt, & tournant fur leurs
axes contre la poutre , comme on voit en A , & la
roulette féparée B.
Ces roulettes ou petits cylindres de cuivre fondu ,
doivent être tournés au tour, & égaux à leur diamè-
tre , pour que les chapiteaux portent par tout égale-
ment.
Sur cet affemblagc de cylindres , on appliquera
les chapiteaux ( 9 ) de telle forte , que les cylindres
ne débordent pas vers les dents de la roue , qui doi-
vent recevoir un fort pignon (14) , par le moyen du-
C A T
767
quel on fait tourner la roue pour le bandage , & où
l'on applique la clé ( 1 5) , où l'on pratiquera un cre^
chet d'arrêt (16) ; & pour plus grande sûreté , on en
mettra- un autre , pour empêcher que rien ne iâche
par l'extrême & violent effort du bandage des cordes
entortillées. On ufe de ces précautions à caufe des
■roulettes , qui ôtant tout le frottement des chapiteaux
& facilitant le bandage , font que les chapiteaux font
plus faciles à lâcher par l'extraordinaire tenlion des
cordes , qui eft à peine concevable : elle doit l'être
encore moins dans une catapulte qui chaffe un corps
de quatre cents pelant & au-delà. On doit alors em-
ployer les roues multipliées ; & pour plus grande
précaution , l'on mettra un fort crochet d'arrêt à
chaque roue.
On fait pour les petites catapultes depuis dix li-
vres jufqa'à vingt ou trente , un cercle de fer en, ma-
nière de rebord , qui s'élève au-deflùs du bois de trois
ou quatre lignes. Ce cercle doit être appliqué fur le
bois & retenu par le moyen de huit fortes pointes ;
le chapiteau appuyant deffus comme fur pluiieurs
points , aura beaucoup moins de frottement pour le
bandage, que s'il portoit tout entier fur le bois, ob-
fervant d'abattre les carnes du rebord qui doit aller
en arrondiffant. Paffons maintenant à la pièce capi-
tale qui foùtient tout l'effort & toute la puiffance du
bandage.
Cette pièce eft un bouton ou un travers plat (17)
de fer battu à froid , qui partage en deux également
le trou des chapiteaux à leur diamètre, & qui s'en-
châfîe dans une entaille quarrée d'environ un pouce
de profondeur dans l'épaiffeur des chapiteaux. Ce
travers doit être de deux pouces quatre lignes dans
fa plus grande épaiffeur d'en-haut ( 1 8) , qui doit être
arrondie & polie autant qu'il fera poliible , pour que
les cordes qui paffent & repaffent deffus , ne foient
pas endommagées & coupées par les inégalités du
ter. La hauteur de cette pièce doit être de huit pou-
ces, allant en diminuant depuis le milieu jufqu'en
bas ( 19) , qui ne doit avoir qu'un pouce. Cette pièce
doit entrer jufte dans les trous des chapiteaux : cette
hauteur donne plus de force , & empêche qu'elle ne
plie par l'effort du bandage. Pour moi je crois, dit
M. de Folard, qu'il feroit plus iur de fondre les cha-
piteaux avec le travers , ou le faire de même métal j
je voudrais m'en tenir là.
Après avoir appliqué les deux chapiteaux contre
les trous des deux poutres , tous les deux dans une
égale fituation , & pofé les deux pièces traverfantes
& diamétrales , fur lefquelles paffe le cordage ; on
paffe un des bouts de ce cordage à - travers de l'un
des trous d'un chapiteau & de la poutre ; on amarre
ce bout à un clou planté dans l'intérieur de la pou-
tre , de telle forte qu'il ne lâche point ; on prend en-
fuite l'autre bout delà corde , qu'on paffe à-travers
du trou de la poutre 6c du chapiteau oppofé , & on
file ainfi ce cordage paffant & repaffant fur les deux
travers de fer qui partagent les trous des chapiteaux,
la corde formant un gros échcveau(zo) qui doit rem-
plir entièrement toute la capacité des deux trous :
alors on lie le premier bout de la corde avec !c der-
nier. La tenlion doit être égale , c'eft-à-dire que les
différens tours de la corde paffés & repaffés , doivent
être tendus à force égale , & li près-à-près l'un de
l'autre , qu'il n'y ait aucun intervalle entre chaque
tour de corde. Dès que le premier tour ou lit de cor-
de aura rempli l'efpace de fer diamétral , on paffera
un autre lit par-deffus le premier , 6c ainli les uns fur
les autres , & toujours également tendus jufqu'à ce
qu'il ne puiffe plus rien entrer dans les deux trous,
& que l'écheveau les rempliffe totalement ; obler-
vant de frotter de tems en tems le cordage avec du
favon. On peut encore paffer & repaffer la corde par.
les deux bouts, en prenant le centu'.
768
C A T
C A T
A trois ou quatre pouces derrière l'écheveau des
cordes , s'eleve un fort montant (21) , compolé de
deux poteaux équarris de bois de chêne de quatorze
pouces de grofl'eur , & des trois trayerfans à- tenons
& à mortoifes. Comme ce montant le trouve à deux
ou trois pouces derrière le gros écheveau de corde ,
il eft néceflaire qu'il foit pol'é obliquement vers l'é-
cheveau , de telle forte que le bras (22) enfermé
par ion bout d'en-bas , au milieu & au centre d'en-
tre les cordes de l'écheveau , dont une moitié l'em-
brafTe d'un côté & de l'autre ; il eft nécelTaire , dis-
je , qu'il foit baille de telle forte que le bras appuie
un peu obliquement fur le couffinet (23), qui doit
être mis au centre du traverfant (24)- La hauteur
du montant ( 2 1 ) eft de fept diamètres & demi &
trois pouces , appuyé derrière par trois forts liens
ou contre-fiches (25 ), aflémblées par le bas dans
l'extrémité des deux poutres (2,3), & celle du
milieu ( 26 ) , au traverfant ( 24 ) , avec tenons &
mortoiles. Les poteaux & les traverfans doivent être
embralTés par de doubles équerres larges de quatre
pouces , & épailTes de trois lignes , aiïurées par des
boutons arrêtés par une goupille pour les tenir fer-
mes.
On obfervera de mettre le couffinet (23) au cen-
tre , comme je l'ai dit , & qu'il foit couvert de cuir
de bœuf palïé & garni de bourre ; car c'eft contre
ce couffinet que le bras va frapper avec une très-
grande force.
Lorfqu'on vouloit mettre la catapulte en batterie
& en état de jcîter des pierres , on mettoit le bout
d'en-bas de l'arbre ou du bras, dans l'entre deux &
au centre de l'écheveau de corde. Ceci eft d'autant
plus important, que s'il ne le rencontroit pas dans
ce jufte milieu , la tenfion fe trouveroit inégale ; &C
ce qu'il y a de cordages plus d'un côté que de l'autre,
fe cafferoit infailliblement dans la tenfion : ce qui mé-
rite d'être obfcrvé. Pour n'être pas trompé dans une
chofe fi importante , on peut mettre un morceau de
bois en formant l'écheveau de la grolTeur du bout
d'en-bas du bras. Ce morceau de bois fervira pour
marquer le centre des cordes , en les palTant & re-
payant dans les trous des chapiteaux.
Le bras ou ftyle , comme Ammien Marcellin l'ap-
pelle , doit être d'excellent bois de frêne , & le plus
iain qu'il fera poiîible de trouver. Sa longueur eft de
quinze à feize diamètres du trou des chapiteaux. Le
bout d'en-bas engagé dans le milieu de l'écheveau ,
eft de dix pouces d'epaiffeur , &c large de quatorze ;
c'eft-à-dire qu'il doit être plus étroit dans la première
dimenlion que dans la féconde , pour lui donner plus
de force , & empêcher qu'il ne plie ; car fi on s'apper-
cevoit que le bras pliât, il raudroit lui donner plus
de largeur.
On doit lailTer ces dimenfions au bout d'en-bas
que les cordes embraiTent , en rabattre les carnes ;
car lans cette précaution ^elles couperoient ou écor-
cheroient les cordes qui font de boyau. Le relie du
bras doit être taillé en ellipfe , moins épais d'un pou-
ce que le bout enchâffé dans l'écheveau , & de la
même largeur jufqu'à l'endroit où il vient frapper le
couffinet , qui doit être plus épais , mais plat , de peur
que la violence du coup ne le coupât en deux. C'eft
en cet endroit que le bras doit être un peu plus cour-
be. Pour fortifier davantage le bras ou l'arbre, dont
l'effort eft tout ce qu'on peut imaginer de plus vio-
lent , on doit le garnir tout autour dans une toile
trempée dans de la colle forte , comme les arçons
d'une ieiie , & rouler autour une corde goudronnée
de deux lignes de diamètre , fi ferrement 6c li pres-à-
près, qu'il n'y ait aucun intervalle entre les tours.
On doit commencer cette liure hors du gros bout
d'en-bas. La figure fuftit de refte pour le faire com-
prendre. Traité de l'Attaque des Places des anciens , par
M. le chevalier Folard.
Les effets des catapultes étoient confidérables. On
lançoit avec ces machines des poids de plus de 1 200
livres. Elles étoient encore en ufage en France clans
le xii. & le xni. fiecle. Le P. Daniel, dans YHif-
toire de la Milice Françoife , cite un paffage de Froif-
fart , qui fait voir la force furprenante de ces for-
tes de machines. Il nous apprend qu'au fiége de Thyn-
Lévêque aux Pays-Bas , le duc Jean de Normandie fit
charrier grand foifon d'engins de Cambray & de Douay,
& entre autres fix fort grands, qu'il fit lever devant la.
forterejje , lef quels j ettoient nuit & jour groffes pierres &
mangonneaux , qui abattoient les combles & hauts des
tours , des chambres , & des/aies : tellement que les com-
pagnons qui gardoient la place , n'ofoient demeurer que
dans les caves & les felliers. Ceux de Vofl leur jettoient
encore plus par leurs engins des chevaux morts , & autres
charoignes infectes pour les empuantir là-dedans , dont
ils étoient en grande détrejfe ; & de ce furent plus con-
traints que de nulle autre chofè , parce que mime il fai-
foit chaud comme en plein été , &c.
C'étoit , dit M. de Folard que nous copions ici ,
une très - grande incommodité que ces chevaux lan-
cés dans une place affiégée ; rien n'étoit plus capa-
ble d'y mettre la pefte , ou du moins d'occuper une
partie de la garnifon pour les enterrer & fe délivrer
de l'infedlion de ces cadavres.
L'hiftoire de Ginghiican & de Timur-Beg nous
fournit une infinité d'exemples de la force &c de la
puifTance de ces fortes de machines. Les catapultes
dont ces conquérons le fervoient étoient li énormes,
qu'elles chaflbient des meules de moulin & des maf-
fes affreufes ; qu'elles renverfoient tout ce qu'elles
rencontraient avec un fracas épouvantable. Ces ma-
chines paroiffent avoir fubfifté jufqu'à l'invention de
la poudre. L'ulage du canon qui les détruifoit facile-
ment, les fît difparoitre : cependant M. le chevalier
de Folard croit qu'elles feroient encore aujourd'hui
fupérieures à nos mortiers.
Les effets en font à-peu-près les mêmes pour jet-
ter des corps pefans , capables d'écrafer par leur
poids les édifices les plus folides : la catapulte a mê-
me quelque avantage en cela fur le mortier. 11 faut
bien moins de dépenfe pour le tranfport des choies
nécefîaires à la conftruction de la première , que
pour le tranfport du dernier.
Ce que l'on doit le plus confidérer dans la cata-
pulte, dit toujours le chevalier Folard , c'eft la cer-
titude de ion effet & la juileiîe de les tirs différens.
« On eft affiiré de jetter les pierres où l'on veut ; car
» il n'y a point de raifon qui puiffe faire qu'elle chafîe
» plus ou moins loin , ou plus ou moins jufte en un
» tems qu'en un autre furies mêmes degrés d'éléva-
» tion & de bandage. Il n'en eft pas ainli de nos mor-
» tiers , à caufe des différens effets ou des différentes
» qualités de la poudre ; car quoiqu'elle foit de mê-
» me nature en apparence , elle ne l'eft pas en effet.
» Un barril n'eft jamais femblable à un autre barril ;
» la poudre n'eft jamais égale en qualité ec en force ,
» &c. »
Il eft vrai, comme l'obferve M. de Folard, que
les effets de la poudre font fort irréguliers : mais le
reiîort des cordes de la catapulte qui en fait toute
la force , feroit à-peu-près fujet aux mêmes varia-
tions à caufe des différentes impreffions de l'air : ainli
il n'v a cruere d'apparence que le coup de la catapulte
puiffe être beaucoup plus lùr que celui du mortier;
mais cette machine paroît avoir un avantage très-
évident lùr le pierrier.
« La portée la plus grande des mortiers -pierriers
» de quinze pouces de diamètre à leur bouche , ne va
» guère au-delà de cent cinquante toifes. Les caillous
» çhafTés par une catapulte } parcourront un plus
» grand
C A T
» grand efpace , & écarteront beaucoup moins. Cet
» avantage elt beaucoup plus grand qu'on ne penle ;
» car lorsqu'il en peut tomber une plus grande quan-
» tité dans un logement, dans une batterie, dans les
» fapes , dans un ouvrage , & dans un chemin cou-
» vert , quel defordre ! quelle exécution ces fortes
» de machines ne feront-elles pas ? En jettant fi jui-
» te , foit des pierres ou des bombes , il n'y a point
» de batterie qui ne puiffe être démontée , ni de lo-
» gement qu'une grêle de caillous ne faffe abandon-
» ner ». Folard , Traite de l'Attaque des Places des
anciens. ( Q )
CATAFALQUE, fub. m. {Hijl. mod. & Peint.)
échaffaud ou élévation : c'eft une décoration d'Ar-
chitedure , de Peinture , & de Sculpture , établie fur
ime bâtifîe de charpente, pour l'appareil & la repré-
fentation d'un tombeau que l'on élevé pour les pom-
pes funèbres des princes & des rois. Ce mot vient de
l'Italien catafalco , qui fignifîe proprement un échaf-
faud , & fe trouve abfolument confacré à l'ufage que
nous venons de rapporter. (/? )
'* C ATAPP AS , (Hifl. nat. bot.) c'en le nom d'une
elpece d'amandier qui croît communément aux In-
des orientales , & fur-tout dans l'île de Java. Comme
fes feuilies font très-grandes , & fourniflent beaucoup
d'ombrage , les habitans du pays ont foin d'en plan-
ter autour de leurs jardins , pour les mettre à cou-
vert des gros vents & des rayons brûlans du foleil.
Cet arbre donne une fleur d'un blanc tirant fur le
/aune ; l'on fruit elt verd au commencement , & con-
tient un noyau oblong , d'une couleur blanche , qui
refTemble à une grofïe amande.
* C AT ARACT AIRES, f. m. plur. {Hijl. anc.) il
paroît que c'en: ainfi qu'on appelloit anciennement
les geôliers ou gardes-portes des priions , 6c les gar-
des des prifonniers.
CATARACTE D'EAU, {Phyfiq.) chute ou pré-
cipice dans le canal ou lit d'une rivière , qui a pour
caufe des rochers ou autre chofe qui arrête le cou-
rant , & fait tomber l'eau avec bruit & une grande
impéttiofité.
Ce mot vient du Grec carappaWw, cum impetu dc-
-cido , je tombe avec impétuofité ; lequel eft compoié
tle wi», en •■//-fuis , & de paW«, dejicio, je jette en-bas.
M. de Maupertuis , dans la relation curieufe &
intérefl'ante de Ion voyage au Nord, parle des cata-
ractes du îleuve de Torneao , & de la manière dont
les gens du pays les franchilîent dans des nacelles
fort minces. On peut voir auflî dans le tome 1. de
fhijtoire ancienne de M. Rollin , la description abré-
gée des cataractes du Nil , &C de l'intrépidité avec la-
quelle les peuples du pays s'y expofent.
Strabon appelle auflî cataractes, ce qu'on appelle
aujourd'hui cafeade ; & ce que nous appelions pré-
ferttement cataracte , les anciens l'appelloient catadu-
pes. Voye{ CASCADE & CATADUPES.
Dans prefquc tous les fleuves , dit M. de Buffon ,
la pente va en diminuant jufqu'à leur embouchure
d'une manière allez infeniible : mais il y en a dont
la pente cfl très-brufque dans certains endroits , ce
qui forme ce qu'on appelle une cataracte , qui n'elt
autre choie qu'une chute d'eau plus vive que le cou-
rant ordinaire du fleuve. Le Rhin , par exemple , a
deux cataractes; l'une à Bilefeld, & l'autre auprès de
Schaffoulè. Le Nil en a plulieurs, &; entr'autres deux
qui font très-violentes & qui tombent de fort haut
entre deux montagnes : la rivière Vologda , en Mol-
coviè, a auflî deux cataractes auprès de Ladoga : le
Zaïre, fleuve de Congo, commence par une forte
cataracte qui tombe du haut d'une montagne : mais la
plus fameufe cataraBt eft celle de la rivière Niagara ,
en Canada; elle tombe de cent cinquante-lîx pies de
hauteur perpendiculaire comme un torrent prodi-
gieux, & elle a plus d'un quart de lieue de largeur ;
Tome II.
C A T
7Ô9
la brume ou le brouillard que l'eau fait en tombant
fe voit de cinq lieues , & s'élève jufqu'aux nues ; il
s'y forme un tres-bel arc -en -ciel lorfque le foleil
donne deffus. Au-deflbus de cette cataracte il y a des
tournoyemens d'eau fi terribles , qu'on ne peut y na-
viger jufqu'à ûx milles de diltance ; & au-deflus de la
cataracte la rivière efl beaucoup plus étroite qu'elle
ne l'eft dans les terres fupérieures. Voye^ Tranfact.
philofoph. abr. vol. FI. part. II. pag. 11 Cf. Voici la
deicription qu'en donne le Père Charlevoix : « Mon.
» premier loin fut de vifiter la plus belle cafeade qui
» foit peut-être dans la nature: mais je reconnus d'a-
» bord que le baron de la Hontan s'étoit trompé fur
» la hauteur & fur fa figure, de manière à faire juger
» qu'il ne l'avoit point vue.
» Il eft certain que fi on mefure fa hauteur par les
» trois montagnes qu'il faut franchir d'abord, il n'y
» a pas beaucoup à rabattre des fix cents pies que lui
» donne la carte de M. de l'Ille , qui fans doute n'a
» avancé ce paradoxe que fur la foi du baron de la
» Hontan & du P. Hennepin : mais après que je fus
» arrivé au fommet de la troifieme montagne , j'ob-
» fervai que dans l'efpace de trois lieues que je fis
» enftiite jufqu'à cette chute d'eau , quoiqu'il faille
» quelquefois monter, il faut encore plus defeendre,
» & c'eft à quoi ces voyageurs paroifîent n'avoir pas
» fait allez d'attention. Comme on ne peut appro-
» cher la cafeade que de côté , ni la voir que de pro-
» fil , il n'elt pas ailé d'en mefurer la hauteur avec
» les inftrumens : on a voulu le faire avec une lon-
» gue corde attachée à une longue perche, &c après
» avoir fou vent réitéré cette manière, on n'a trouvé
» que cent quinze ou cent vingt pies de profondeur :
>» mais il n'elt pas pofîible de s'aflurer fi la perche
» n'a pas été arrêtée par quelque rocher qui avan-
» çoit ; car quoiqu'on l'eût toujours retirée mouillée
» aufîi-bien qu'un bout de la corde à quoi elle étoit
» attachée , cela ne prouve rien , puifque l'eau qui
» fe précipite de la montagne réjaillit fort haut en
» écumant. Pour moi , après l'avoir confideree de
» tous les endroits d'où on peut l'examiner à fon
» aile , j'eftime qu'on ne fauroit lui donner moins
» de cent quarante ou cent cinquante pies.
» Quant à fa figure , elle elt en fer à cheval , &
» elle a environ quatre cents pas de circonférence ,
» mais précifément dans fon milieu elle elt partagée
» en deux par une île fort étroite & d'un demi-quart
» de lieue de long, qui y aboutit. Il eft vrai que ces
» deux parties ne tardent pas à fe rejoindre ; celle
>► qui étoit de mon côté , &C qu'on ne voyoit que
» de profil, a plulieurs pointes- qui avancent: mais
» celle que je découvrois en face me parut fort unie.
» Le baron de la Hontan y ajoute un torrent qui
» vient de l'ouelt : û faut que dans la fonte des nei-
» ges les eaux fauvages viennent fe décharger là par
h quelque ravine, cvc. ». pag. JJz. &c. tom. III.
Il y a , continue M. de Buffon, une cataracte à trois
lieues d'Albanie , dans la nouvelleYorck, qui a en-
viron cinquante pies de hauteur ; & de cette
chute d'eau il s'eleve auflî un brouillard dans lequel
on apperçoit un léger arc-en-ciel, qui change de
place à mefure qu'on s'en éloigne ou qu'on s'en ap-
proche. Voye{ Tranf. phil. abr. vol. VI. pag. 119.
En général dans tous les pays où le nombre d'hom-
mes n'elt pas aflez confidérable pour former des io-
ciétés policées, les terrains font plus irréguliers &
le lit des fleuves plus étendu, moins égal , Cv rem-
pli de cataractes. Il a fallu des fiecles pour rendre le
Rhône & la Loire navigables ; c'eit en contenant les
eaux, en les dirigeant èv en nettoyant le tond des
licu\ es qu'on leur donne un cours allure. Dans tou-
tes les terres où il >' a peu d'habitans , la nature eft
brute & quelquefois difforme. Hijl. nat. de MM. de
Buffon 6c Daubcnton , tom. I.
ÉEeee
770
C A T
Il eft dit clans la Genefe , à l'occafion du déluge ,
que les cataractes du ciel furent ouvertes. Il y- a appa-
rence que le mot de cataractes en cet endroit , ligni-
fie un grand réfervoir d'eau.
M. Newton a donné le nom de cataracte à la courbe
que décrivent, iéion lui, les particules d'un fluide
qui s'échappe d'un vafe par un trou horiibntal. Voy.
Hydrodynamique. (O)
CATARACTE , f. f. {HijI. nat. Ornith.~) catarracla
Aid. oifeau qui approche beaucoup du gannet , voy.
Gannet. Le defîous du corps , les ailes , & le dos,
font d'une couleur brune roufsâtre mêlée de blanc
& de jaune ; toute la face fupérieure eft de couleur
blanche mêlée de brun roufsâtre : il a la bouche
grande & large ; le bec cil très-gros, pointu , cro-
chu & fort, il eft épais d'un pouce , & de couleur
noire : le cou eft un peu allongé ; les ailes s'éten-
dent jufqu'à l'extrémité de la queue , qui eft de la
longueur d'un palme & de couleur noirâtre : les
cuiffes font couvertes de plumes jufqu'à la jambe :
les pâtes , les doigts , & la membrane qui joint les
doigts enfemble, lontde couleur cendrée : les ongles
font noirs , crochus , &C petits. La cataracte diffère du
gannet par la petitefle du corps & des ongles ; ce-
pendant Willughby foupçonne que ces deux noms
devroient être rapportés au même oifeau , parce qu'il
croit qu'Aldrovande a fait fa defeription lur une re-
préfentation & non pas fur l'oifeau naturel. Aldro-
vande , Willughby , Omit. Foye{ OlSEAU. (/)
* Cataracte, f. f. (Hifl- anc) c'eft ainfi que les
anciens appelloient ces défenfes que nous plaçons à
l'entrée des villes de guerre , & que nous appelions
herfe. Voyei HERSE.
Cataracte , ou Suffusion , ( Chirurgie. ) fui-
vant l'opinion des anciens, eft une membrane ou
pellicule qui nage dans l'humeur aqueufe de l'œil ,
& qui fe mettant au-devant de la prunelle , empêche
la lumière d'y entrer. Voye{ Vue.
Ils croyent que la cataracte eft formée par la con-
denfation des parties les plus vifqueufes de l'humeur
aqueufe entre la tunique uvée & le cryftallin ; quoi-
que quelques-uns penfent que cette pellicule eft dé-
tachée du cryftallin même , qui n'eft qu'un compofé
de plufieurs petites pellicules appliquées les unes fur
les autres. Voye^ Crystallin.
Il y a deux fortes de cataractes , la vraie & la faufle :
la vraie a plufieurs degrés & plufieurs noms diffé-
rens : d'abord le malade voit des efpeces de brouil-
lards , d'atomes , de mouches , &c. fur les objets ex-
pofés à fa vue. Jufques-là la cataracte eft appellée
imaginaire, parce qu'il n'y a encore à l'œil aucun
changement feniible dont d'autres perfonnes que le
malade piaffent s'appercevoir. A mefure que \zfuf-
fujion augmente , la prunelle commence à prendre
une couleur de verd de mer , ou quelquefois celle
d'un air rempli de brouillards ; & alors la cataracte
s'appelle chute d'eau. Lorfque le mal eft arrivé à fon
plus haut période , & que la matière eft fuffifamment
coagulée , le malade perd tout-à-fait la vue ; la pru-
nelle cefte d'être tranfparente , mais devient blanche
ou brune , ou de quclqu'autre couleur ; & c'eft en
cet état que le nom de cataracte convient proprement
à cette maladie.
Voilà la théorie commune fur les cataractes, à la-
quelle quelques Médecins & Chirurgiens modernes ,
tels que Heifter , Briffeau , Maître-Jan, &c. en op-
pofent & en fubftituent une nouvelle. Ils penfent que
la membrane ou pellicule qui s'oppofe au paffage
des rayons de la lumière , n'eft autre chofe que le
cryftallin même qui a été ainfi condenfé , & qui a
perdu fa tranfparence , & qu'alors au lieu de fervir
d'inftrument à la viiîon, il y fert d'obftacle , en empê-
chant les rayons de pénétrer jufqu'à la rétine. Cette
altération dans fa tranfparence eft accompagnée
C A T
d'un changement de c-oulcur : il devient quelquefois
verdâtre ; & c'eft pour cela que les Grecs ont appel-
lé cette indifpolition de l'œil glaucome. Ainfi dans le
fentiment de ces auteurs , le glaucome & la cataracte
font la même chofe ; quoique dans l'autre hypothefe
ce foient deux maladies fort différentes , dont l'une,
à lavoir la première , paffe pour incurable , & non
pas l'autre. Voye^ Glaucome.
La principale preuve qu'on ait apportée en faveur
de cette féconde hypothefe, à l'académie royale des
Sciences où elle a été propofée , eft qu'après qu'on
a abaiffé la cataracte , la perfonne ne peut plus voir
qu'à l'aide d'un verre lenticulaire. Or fi on n'avoit
rien tait qu'enlever une pellicule de devant le cryf-
tallin , il feroit après l'opération dans le même état
qu'avant la formation de la cataracte , & feroit les
mêmes réfractions ; & il ne feroit pas befoin de verre
lenticulaire : au lieu qu'en fuppofant que c'eft le cryf-
tallin qui a été enlevé , on conçoit qu'il faut un verre
lenticulaire pour fuppléer à fa fondion.
A cela on répond , qu'il y a eu des perfonnes qui
ont vu après l'opération fans le fecours d'aucun ver-
re ; & il eft du moins très-conftant , qu'immédiate-
ment après l'opération , bien des perfonnes ont vu
très-diftinctement ; & quoiqu'il ait fallu bientôt après
un verre lenticulaire , les premiers inftans pendant
lefquels la perfonne a pu s'en palier , fuffifent pour
prouver que ce n'ètoit point le cryftallin qu'on avoit
rangé.
M. de la Hire, en preuve de l'ancien fyftème ,
apporte pour railbn de la néceflité du verre lenticu-
laire après l'opération , que le vice qui a produit la
cataracte eft encore fubliftant dans l'humeur aqueufe ,
qui étant trouble & épailfe , ne laifle paffer que peu
de rayons ; inconvénient à quoi on remédie par le
verre lenticulaire qui en réunit un plus grand nom-
bre fur la rétine. Il ajoute quelques expériences fai-
tes fur des yeux de bœufs , d'oii il réfulte que le
cryftallin ne fauroit être rangé entièrement au fond
de l'œil , mais qu'il en refte toujours aflez pour em-
pêcher le paflage d'une grande partie des rayons ,
tant à caufe de ion volume , que parce qu'il eftfoû-
tenu par l'humeur aqueufe & vitrée. Il obferve de
plus que dans l'opération delà cataracte, l'aiguille
pourroit égratigner la furface antérieure du cryftal-
lin , & ouvrir la membrane qui lui fert d'enveloppe ;
d'où s'enfuivroient des rides qui rendroient les ré-
fractions irrégulieres , & changeroient la direction
des rayons qui fe rencontreroient tous au même
point ; au moyen de quoi la repréfentation des ob-
jets fe feroit d'une manière imparfaite. Il prétend
enfin que fi c'étoit le cryftallin qui tut dérangé , la
perfonne ne verroit plus du tout , parce que les ré-
fractions néceflaires pour la vifion , ne pourroient
plus fe faire du tout. Voye^ Crystallin & Vi-
sion.
M. Antoine rapporte, en faveur du fentiment oppo-
fé , qu'en difféquant le corps d'une perfonne à qui on
avoit fait l'opération de la cataracte aux deux yeux ,
il avoit trouvé les deux cryftallins actuellement cou-
chés & rangés au fond , entre l'humeur vitrée & la
tunique uvée, où l'aiguille les avoit laifTés, & que la
perfonne néanmoins après cette opération , n'avoit
pas laiffé de voir ; d'où il infère que le dérangement
du cryftallin eft pratiquable , & peut ne pas détruire
la vifion. En effet , on peut fuppofer que l'humeur
vitrée & aqueufe , après qu'on a écarté le cryftallin,
eft venue remplir la cavité , qu'elle a pris la forme
de fon moule , & a produit les réfractions que l'hu-
meur cryftalline produifoit elle-même ; car il eft
confiant par l'expérience que l'une & l'autre de ces
deux humeurs produit les mêmes réfractions, Voye^
Œil.
Cependant pour faire voir qu'il y a des cataractes
C A T
diftinétes des glaucomes, M. Littre a montré à la
fociété royale de Londres, l'œil d'un homme qui
n'avoit point vu pendant les vingt-deux dernières
années de fa vie, où il yavoitune cataracte ou pelli-
cule très-diftinûe qui couvroit l'ouverture de la pru-
nelle. 1roye{ Pupille , Vision , &c
Feu M. de la Peyrohic , premier Chirurgien du
Roi , penfoit qu'il pouvoit y avoir des cataractes
membraneufes ; il croyoit que la membrane qui cou-
vre la partie antérieure du cryftallin, & qui forme
en partie la capfule de ce corps, pouvoit perdre la
tranf parence , le féparer peu à peu du cryftallin , &
devenir adhérente au cercle de l'iris ; dans ce cas ,
on pourroit abattre le cryftallin, fans pour cela dé-
truire la cataracte.
On dit q\i'on ne doit faire l'opération que lorfque
la cataracte eft bien mûre : les fignes de maturité lont
i°. que la couleur enfoit égale en toutes fes parties*;
caries cataractes marbrées font ordinairement caféeu-
fes; elles n'ont pas une confiftance égale dans tous
leurs points , ce qui eft indiqué par la couleur va-
riée ; ces fortes de cataractes ne font point afl"e°z. fer-
mes pour fôûtemr l'aftion de l'aiguille , & le parta-
gent en différentes parties , ce qui rend fort fouvent
l'opération infructueule : 2°. que les malades n'ap-
perçoivent plus qu'une foible lueur; qu'ils ne faifent
qu'appercevoir les ombres des corps opaques que
l'on parlé devant leurs yeux ,'&C qu'ils ioient affeûés
par le grand jour.
Lorlque dans cet état l'iris ou cercle de la pru-
nelle le dilate à l'obfcurité , & fe refferre au grand
jour ; on peut entreprendre l'opération après avoir
préparé le malade parles remèdes généraux.
Pour faire l'opération , on fait mettre le malade
fur une chaile pofée vis-à-vis des fenêtres , à une
diftance convenable & un peu dé biais, afin que la
lumière ne frappe point à plomb le vifage du mala-
de. On choilit pour cela un jour bien ferein : mais
il faut prendre garde qu'un rayon de foleil ne puiffe
vciif frapper les yeux du malade. Le Chirurgien
s'affied fur une chaife un peu plus haute , afin d'o-
pérer commodément étant plus élevé que le malade.
S'il n'y a qu'un oeil d'incommodé, on applique fur
le fairi une comprefle en plufieurs doubles avec une
bande pofée obliquement ; un aide qui eft debout
derrière le malade , lui appuie fermement la tête
fur la poitrine. Voye^ Planche XXIV. fig. 4.
L'opérateur prend alors une aiguille convenable ,
yoyei Aiguille , tk. prie le malade de tenir l'on œil
ouvert , & de le tourner comme s'il vouloit regarder
le bout du nez. Il lui recommande de le tenir aufîi
ferme qu'il pourra dans cette fituation. Il pôle enfuite
le doigt index de fa main droite , fi c'eft l'œil droit
fur lequel il opère , au-deiTous du fourcil , & le pouce
fur la pommée. e de la joue , pour tenir les paupières
ouvertes par Pécartement de ces deux doigts. Quel-
ques praticiens fe fervent d'un inftrument nommé
fpeculum oculi , pour écarter les paupières & tenir le
globe de l'œil à découvert. Voy. Spéculum oculi.
Alors le Chirurgien reçoit de la main gauche , fi c'eft
l'œil droit fur lequel il opère , & de la main droite ,
fi c'eft l'œil gauche , l'aiguille qu'un aide lui préfen-
te : il la tient par le milieu du manche avec le pouce,
le doigt index & celui du milieu , à-peu-pres com-
me on tient une plume pour écrire. Il appuie le petit
doigt &; l'annulaire fur la tempe , pour empêcher fa
main de vaciller, & pique hardiment le globe île l'œil
du coté du petit angle , a deux lignes du cercle exté-
rieur de l'iris , & fur la ligne qu'on imaginerait être
tirée d'un angle à l'autre, f < :■ & 5. Plan.
XXIV. Il perce la conjonctive , la cornée opaque ,
& Tuvée. Quand il a pénétre l'uvée, il couche un
peu le manche de ion aiguille du cote de la tempe ,
cv la poulie doucement pour en porter la pointe vers
Tome II,
C A T
771
la partie fupérieure de la cataracte ; & en l'appuyant
un peu vers le bas de l'œil, il l'abbailTe , la détache
du lieu qu'elle occupoit , & il la met enfin au-dclTous
de la pupille. S'il y avoit quelques adhérences autour
du chaton , on coupe avec le tranchant de l'aiguille
les portions de la membrane capfulaire , qui fontobf-
tacle à la précipitation de la cataracte. Lorfqu'elle eft
abaiiléc , le Chirurgien la tient en cet état pendant
un peu de tems , 6c relevé enfuite la pointe de Ion
aiguille : fi la cataracte refte abaiffée , l'opération eft
faite : fi elle remonte & fait le pont-levis , il appuie
defTus , & I'abailTe un peu plus que la première fois ,
& la contient ainfi pendant un peu plu* de tems, Il
relevé encore la pointe de fon aiguille ; & fi la cata-
racte remonte encore, quelques praticiens la piquent
& tournent leur aiguille en rond pour la rouler , tk.
la rangent enfuite au côté externe de l'intérieur de
la cavité de l'œil , en retirant leur aiguille avec la
précaution de bander le manche.
Lorfque l'opération eft faite , on ferme les paupiè-
res , & on applique fur tout l'œil une comprefle en
plufieurs doubles , trempée dans un collyre fait avec
l'eau de rôle , l'eau de plantain, tk. un blanc d'œuf ,
battus cnfemble : on bande l'œil fain de même que
le malade ; parce que les mouvemens des yeux étant
réciproques , l'œil malade feroit fatigué par l'aclion
du fain. Le bandage fe nomme ail-double. Voye^ ce
mot.
On faigne le malade , s'il furvient inflammation :
il eft toujours prudent de le faire pour la prévenir.
Cette opération préfente beaucoup de difficulté, dont
il faut s'inftruire dans les livres des maîtres de l'art;
& en les fuivant dans la pratique , la réuffite peut
dépendre des précautions avec leiquel'es ons'expofe
aux impreffions de la lumière. Une femme de foi-
xante ans, aveugle depuis fix , me pria de voir fes
yeux : je reconnus deux cataractes , dont je lui fis l'o-
pération aux deux yeux dfc fuite avec lucces. Il n'y
furvint point d'accidens Je lui pei misJe dixième jour
d'avoir les yeux ouverts une heure le matin & autant
le foir. Je ne voulois lui accorder l'i i yeux
que par degrés. La fatistadtion de voir lu: fit négliger
mes avis. Le dix-feptieme jour , après avoir >.
minée par plufieurs Chirurgiens de Paris qui avoient
affilié à l'opération, & qui en jugèrent fort avanta-
geufement , cette femme fatigua beaucoup la ^ fie , &
devint aveugle l'après-dinéc en regardant quelqu'un
à une lumière fort vive. L'iris qui le contracloit & fe
dilatoit fort bien lorfque L'œil étoit plus ou moins
expofé à la lumière, eft actuellement immobile et
fort dilatée , comme dans la goutte -fereine. Cette
grande dilatation lailie appercevoir à un des yeux
une portion de la cataracte , qui déborde la partie
inférieure du cercle de la prunelle.
Une perfonne à qui on a abattu la cataracte , ref-
femble à ces hommes qui fortant tout-à-coup d'une
caverne obfcure , ne peuvent fupporter l'éclat du
grand jour : il faut que des gradations infenfibles de
lumière préparent la vue à en recevoir les rayons ;
faute de ce ménagement , on rifquc de perdre tout-
à-fâit l'organe. ( J")
CATARRHE , 1. m. (McJ.) fluxion ou cliftilla-
tion qui , félon Hippocrate , fe fait de la tète dans la
bouche, & delà fur la trachée-artere & le poumon.
Le liège de cette maladie eft dans les finus de la baie
du crâne, & les glandes de la membrane phuitaire
qui tapuTe ces linus. Cette humeur étant en plus gran-
de quantité qu'elle ne doit être, & devenant acre ,
occalionne les fymptomes fuivans: une chaleur ck
une fécherefiè insupportables dans le gofier&le nez,
dans la bouche & la gorge ; l'engorgement de
féaux de ces parties, d'où naifient la roideur dans
les mufcles du cou, la tenfion des tegumens, l'en-
çhifrenement , l'écoulement involontaire d'une hu-
E E e e e ij
77i
C A T
meur féreufe & acre par les narines ; ce qui carac-
térise ce que l'on appelle vulgairement rhume de
cerveau.
Lorfque cette humeur ne fe fixe pa^ fur ces par-
tics, & qu'elle occupe les glandes du poumon, elle
irrite les parties nerveufes des bronches , & occa-
sionne l'enrouement & la toux : lorfque ces parties
par l'irritation qu'elles ont effuyée le trouvent en-
gorgées , il s'enfuit oppreffion , râllement , & au-
tres accidens funeftes : lorfque l'humeur bronchiale
eft retenue long-tems dans ces glandes par le reffer-
rement qui y a été occafionné , on doit craindre l'in-
flammation du poumon & la fièvre. Un rhume léger
d'abord peut devenir en le négligeant très-dangereux
pour le malade ; car alors les vaifTeaux capillaires
du poumon cèdent à la force de la toux , fe rom-
pent , d'où fuit le crachement de fang ; accident que
Hippocrate a regardé comme décilit pour le mala-
de , puifqu'il s'eft expliqué ainfi à ce fujet : à fan-
gui nisfputo , puris fputum j à puris fputo tabès ; à tabe
mors.
Les caufes éloignées du catarrhe font tout ce qui
peut occafionner la Surabondance de l'humeur des
glandes dont j'ai parlé ci-demis ; comme la fuppref-
lion ou la diminution de la tranfpiration ; en iortant
d'un endroit chaud & parlant Subitement dans un
lieu froid ; en s'expofant à un vent violent , foit à
pié , foit à cheval ; en chantant ou en criant dans
un lieu expofé au grand air.
Le traitement de cette maladie confifte dans le
rétablifTement de la tranfpiration , par les boitions
abondantes d'infufions ou de décoctions de plantes
légèrement fudorifïques. La boiffon abondante d'eau
tiède Suffit quelquefois pour parvenir à ce but : on y
meie cependant quelques cuillerées de firop , com-
me celui de capillaire , de guimauve , év autres de
cette efpece.
Lorfqu'il y a fièvre & inflammation confidérable ,
la Saignée elt très-bien indiquée ; car par ce moyen
l'on vient à bout de faire ceifer l'engorgement actuel
& d'en prévenir un plus grand ; & c'eft très-mal-à-
propos que la plupart des gens enrhumés , & qui font
dans le cas dont il eft queftion ici , craignent la fai-
gnée , dans l'idée que le rhume leur tomberoit fur la
poitrine : ils penferoient autrement , s'ils l'avoient
d'où «vient la toux ; & que c'eft le feul moyen de la
diminuer & d'en prévenir les mauvais effets. Voye^
PÉRIPNEUMONIE & TOUX.
Il y a encore une efpece de catarrhe que l'on ap-
pellejiiffôq uant; parce que tout-à-coup la maladie fe
jette lur le larynx & Fépiglotte , & que le malade eft
en danger de Suffoquer , s'il n'eft promptement fe-
couru. Ces parties ibnt dans un il grand relTerre-
ment , que l'air a très-grande peine à entrer & Sortir.
Il eft donc queftion de procurer à l'inftant même , par
les iaignées copieuies & réitérées , quelque relâche-
ment ; de détourner par les lavemens , les vélicatoi-
res , & autres remèdes de cette efpece , l'humeur qui
eft la caufe de ce mal , auquel le malade i'uccombe-
roit en très-peu de tems. (A7)
CATAR.THIQUE, adj. (Médecine.) médicament
qui a la vertu d'évacuer les humeurs par les Selles : il
eft tiré du mot Grec y.md^iç,purgation.
Quoique ce terme Semble Signifier généralement
toute forte d'évacuations , foit naturelles foit artifi-
cielles , par quelque voie que ce foit, comme la bou-
che , l'anus , la matrice , le pafîage des urines ou les
pores de la peau ; cependant on a donné le nom de
catarthiques Seulement à ceux qui agiflant fur la mem-
brane interne des inteftins, occaiionnent par-bas une
évacuation copieufe d"humeurs : on a nommé ces re-
mèdes purgatifs. Voye{ PURGATIFS. (À7)
CATASTASE, f. f. enPoéfe; c'eft , Selon quel-
ques-uns , la troisième partie du poème dramatique
C A T
chez les anciens , dans laquelle les intrigues nouées
dans l'épitafe Se Soutiennent, continuent, augmen-
tent julqu'à ce qu'elles le trouvent préparées pour le
dénouement, qui doit arriver dans la cataltrophe,
ou à la fin de la pièce. Pqy -eç Epitase 6* Catas-
trophe. Quelques auteurs confondent la cataf afe
avec l'épitafe , ou ne les distinguent tout au plus
qu'en ce que l'une elt le commencement , & l'autre
la Suite du nœud ou de l'intrigue.
Ce mot eft originairement Grec , zstsç-ïî-iç , conf-
titution; parce que c'eft cette partie qui forme com-
me le corps de l'action théâtrale , que la protafe ne
fait que préparer, & la cataltrophe que démêler.
Foyei Drame, Tragédie. (G)
* CATASTE , f. f. ( Hifl. anc. ) ce terme a , dans
les anciens auteurs, différentes acceptions: il Signifie
ou un échafjaud à degrés où l'on failbit les exécutions ;
eu les entraves qu'on mettoit aux efclaves , de peur
qu'ils ne s'enfuiilent quand on les expolbit en ventes
ou un infrument de torture , dont la forme eft incon-
nue. Il y avoit une Sorte de cataf c qu'on appelloit en-
core- cyphon. Foye{ CYPHONISME.
CATASTROPHE , f. f. en Poéfie; c'eft le change-
ment ou la révolution qui arrive à la lin de l'aclion
d'un poème dramatique , & qui la termine, l'oyez
Drame & Tragédie.
Selon Scaliger , la cataflrophe étoit la quatrième Se
dernière partie des tragédies anciennes, où elle luc-
cédoit à la cataltafe : mais ceux qui retranchant celle-
ci, ne comptent que la protafe , l'épitafe , & la cataf-
trophe , appellent cette dernière la troijleme. Voye^_
Catastase.
La cataflrophe eft ou flmple ou compliquée : ce qui
fait donner auffi à l'a£tion l'une ou l'autre de ces dé-
nominations. Voye-^ Fable.
Dans la première , on ne fuppofe ni changement
dans l'état des principaux perfonnages , ni recon-
noiSTance , ni dénouement proprement dit ; l'intrigue
qui y règne n'étant qu'un Simple pafTage du trouble
& de l'agitation à la tranquillité. Cette elpece de ca~
tafrophe convient plus au poème épique qu'à la tra-
gédie , quoiqu'on en trouve quelques exemples dans
les anciens tragiques : mais les modernes ne l'ont pas
crue allez frappante , & l'ont abandonnée. Dans la
féconde, le principal perfonnage éprouve un chan-
gement de fortune , quelquefois au moyen d'une re-
connoiSTance , & quelquefois Sans que le poète ait
recours à cette fituation.
Ce changement s'appelle autrement péripétie ; &
les qualités qu'il doit avoir , font d'être probable &C
néceffaire. Pour être probable , il faut qu'il rélulte de
tous les effets précédens ; qu'il nailîe du fonds même
du fujet , ou prenne la lource dans les incidens , &
ne paroille pas mené ou introduit à deffein , encore
moins Sbrcément. La reconnoillànce fur laquelle une
cataf rophe elt fondée , doit avoir les mêmes qualités
que la cataflrophe ; & par conféquent pour être pro-
bable , il faut qu'elle nailîe du Sujet même ; qu'elle
ne Soit point produite par des marques équivoques ,
comme bagues , bralielets , &c. ou par une Simple ré-
flexion , comme on en voit plusieurs exemples dans
les anciens & dans les modernes. .
La cataf rophe , pour être néceffaire , ne doit ja-
mais laiSSer les perfonnages introduits dans les mê-
mes fentimens , mais les faire palier à des lentimens
contraires ; comme de l'amour à la haine , de la co-
lère à la clémence , &c. Quelquefois toute la cataf-
trophe ou révolution conlilte dans une reconnoillàn-
ce : tantôt elle en eft une fuite un peu éloignée, &C
tantôt l'effet le plus immédiat & le plus prochain ;
& c'eft , dit-on , là la plus belle elpece de cataflrophe ,
telle qu'eft celle d'CEdipe. foye^ Péripétie & Re-
CONNOISSANCE.
Dryden penle qu'une cataflrophe qui réfulteroit du
C A T
C A T
fnnple changement de fentimens Se de réfoiutiôris
d'un perfonnage , pourroit être affez bien ma-
niée pour devenir extrêmement belle, & même pré-
férable à toute autre. Le dénouement du Cinna de
Corneille, eft à -peu -près dans ce genre. Augufte
avoit toutes les raifons du monde de le vanger , il
le pouvoit ; il pardonne , & c'eft ce qu'on admire :
mais cette facilité de dénouer les pièces, favorable
au poète , ne plairoit pas toujours au fpectateur , qui
veut être remué par des évenemens furprenans Se
inattendus.
Les auteurs qui ont traité de la poétique ont mis
en queftion, li la catajlrophe doit toujours tourner à
l'avantage de la vertu ou non ; c'eft-à-dire , s'il eft
toujours néceffaire qu'à la fin de la pièce la vertu
foit récompeniée , Se le vice ou le crime puni. La
raifon Se l'intérêt des bonnes mœurs femblent de-
mander qu'un auteur tâche de ne préfenter aux fpec-
tateurs que la punition du vice & le triomphe de la
vertu : cependant le fentiment contraire a tes défen-
feurs ; & Ariftote préfère une catajlrophe qui révolte
à une catajlrophi heureufe ; parce que l'une , félon
lui , eft plus propre que l'autre à exciter la terreur
& la pitié , qui font les deux fins de la tragédie, Voy.
Passions & Tragédie.
Le P. le BofTu , dans fon Trahi du Poème épique ,
divife la catajlrophe ( au moins dans l'épopée ) en dé-
nouement Se fin , Se fait réfulter cette dernière partie
de la première. Il la fait confifter dans le paffage du
héios d'un état de trouble & d'agitation , en un état
de tranquillité : cette révolution , félon lui , n'eft
qu'un point fans étendue ou durée , en quoi elle dif-
fère du dénouement , qui comprend tout ce qui le
trouve après le nœud ou l'intrigue formée. Il ajoute
que dans un même poëme il y a plusieurs dénoue-
mens , parce qu'il y a plufieurs nœuds qui nailfent
les uns des autres. Ce qu'il appelle^ eft le point oit
fe termine le dernier dénouement. Voye^ Nœud , In-
trigue, Fable. {G )
CATAY , CATH AY , ou KATAY ; voyei l'article
Chine.
* CATÉ , ( Hijl. mod. Comm. ) cfpccc de gâteaux
ou de tablettes , que les Indiens préparent avec le
lue qifils favent tirer d'un arbre épineux qu'ils nom-
ment hacchic , dont le bois eft dur, compacf & pc-
fant. Il porte des feuilles qui rcfl'emblent à celles de
la bruyère. Lorfqu'on a tiré ce lue , on le mêle avec
une graine réduite en farine , qu'on appelle nachani ,
qui a à-peu-près le même goût que l'orge , Se dont on
peut au m* faire de fort bon pain : on y joint encore
d'un bois noir réduit en une poudre très-fine. On fait
de ce mélange des petits gâteaux ou tablettes que l'on
feche au loleil ; ils font amers Se aftringents : on les
regarde comme un moyen sûr pour affermir les gen-
cives ; on l'employé auffi dans la diarrhée , Se pour
lécher les humeurs.
C A T E A D E R E S , f. m. ( Chimie. ) c'eft le nom
qu'on donne , au Potoiï, à ceux qui vont à la décou-
verte deb minéraux : ce font des gens qui parcou-
rent les terres d'un pays pour y trouver les indices
des mines. ( M )
CATEAU-CAMBRESIS , ( Géog. ) petite ville de
France dans les Pays-Bas au Cambrelis.
CATECHESE,!', t. mot tiré du GrecxtfnxnvK,
qui lignifie injlruclion de vive voix : c'eft un courte Se
méthodique inftruction des myfteres de la religion,
laquelle le fait de bouche; car on n'enfeignoit pas
anciennement ces myileres par écrit , de peur que ces
écrits ne vinffent à tomber entre les mains des infi-
dèles, qui les auroient tournés en rifée, faute de les
bien entendre. C'eft d'où eft venu le nom de i
te, pour marquer celui qui enleigne ces myfteres ;
Se celui de catéjchifmt , pour lignifier aulii cette inf-
773'
truction. L'origine des catechefes vient de Jefus-Cbrift
même , lorfqu'il envoya les difciples pour enfeigner
Se baptifer toutes les nations, joignant la doctrine au
baptême , comme en effet elle l'a toujours précédé
dans la primitive Eglife : il nous a auffi donné l'exem-
ple de cette fainte inftruaion, lorfqu 'entre fes difci-
ples il examina Se inftruifit Philippe ; entre fes audi-
teurs, Marthe & la Samaritaine; entre les affligés,
l'aveugle né ; entre les étrangers, le Samaritain ; en-
tre les grands du monde , Nicodeme ( pour faire con-
noitre le progrès qu'ils avoient fait dans la foi, Se les
y inftruire davantage). Les Apôtres ont fuivi l'exem-
ple de leur maître , comme on voit en divers endroits
du livre des acles , S. Pierre ayant été envoyé à Cor-
neille pour ce fujet, ch. x. Se Philippe à l'eunuque de
la reine de Candace , ch, xvij. L'Apôtre des Gentils t
i. cor. ch. xiv. parlant d'inftruire les autres , fe fert
du mot de catéchi/èr, comme le porte l'original. Les
Pères ont de même imité les Apôtres , comme
Saint Cyrille de Jénilalem , dont nous avons un ou-
vrage intitulé catéchefe. S. Auguftin a écrit un traité
de la manière de catéchifer les ignorans ; S. Grégoire de
Nylîè a compofé un difeours catechétique ; & plufieurs
autres nous ont laiffé de femblables inftructions. Et
afin qu'on ne s'imagine pas que quelque tems après
la mort des apôtres & de leurs difciples , cette loua-
ble coutume de cathéchifer ait été négligée ou inter-
rompue, Eufebe , liv. VI. ch. iij. témoigne que Deme-
trius, évêque d'Alexandrie, avoit commis Origenc
pour cette fonction, de laquelle Pantenus Se Clé-
ment s'étoient acquîtes avant lui. Au refte la charge
de catéchifte étoit une des plus importantes Se des
plus honorables dans PEglife. Jean Gerfon, chance-
lier de l'univerfité de Paris, faifoit gloire parmi les
grandes occupations, d'inftruire les enfans, Se de les
catéchiler , répondant à ceux qui lui confeilloient de
s'appliquer à des emplois plus conlidérables , qu'il
ne croyoit pas qu'il y en eût de plus nécefiaire Se.
de plus glorieux que celui-là. Gerfon , I. partie de Jes
œuvres.
CATÉCHISTE, y-ennyic-ii?, officier eccléfiaftique,
dont la fonction étoit d'enleigner aux catéchumènes
le fymbole Se les premiers élémens de la religion.
Voye{ Catéchèse & Catéchumem .
On choiliflbit quelquefois les catéchifles parmi les
lecfeurs; on les appelloit quelquefois ravro^o-} a , nau-
tologi , par allulion à ceux qui dans les vaiffeaux re-
cevoient des paflagers le prix du tranfport , & leur
expliquoient les conditions du péage, parce que les
catéchifles enfeignoient aux catéchumènes les condi-
tions néceffaires pour entrer dans l'Eglife, que les
Pères &c les Écrivains eccléliaftiques comparent fou-
vent à une barque ou à un navire. Leur fonction étoit
donc de préparer les catéchumènes au baptême par de
fréquentes inftructions qu'ils leur tailoient, non pas
publiquement , ni dans les egliies, du moins dans les
premiers fiecles à cauie des peiïécutions, mais dans
des écoles particulières, qu'on bâtit enluite à côté
des églifes. La plus célèbre de ces écoles a été celle
d'Alexandrie, & l'on y trouve une fuite de ce
tes célèbres dans l'antiquité eccléfiaftique; favoir,
Pantene établi par l'apôtre S. Marc ; à Pantcne fuc-
céda Clément d'Alexandrie ; à Clément, Origenc ; à
Oricene , Heraclas; à celui-ci Denys: quelques-uns
aji >utent Athenodore , Malchion , S. Athanaie &c Di-
d\ nie : d'autres rapportent qu'Anus, avant que de
tomber dans l'héréfie , étoit chef de cette école. Il y
en avoit de femblables à Rome, à Cefarée , à Antio-
che, & dans toutes les grandes églifes. Bingham,
Orig. eccl. tom. II. liv. III. ch. x/.
On donne encore aujourd'hui le nom de catéchifles
aux clercs & aux prêtres charges dans chaque paroil-
fe par le cure , de faire les inftructions publiques aux
enfans, pour leur enfeigner les principaux points du
774
C A T
dogme & de la morale chrétienne , & les préparer
à la première communion.
CATÉCHUMÈNE, ««tm^^Voî, f. m. (Hifl. eccl.)
afpirant an baptême , ou qui Te difpole à recevoir ce
facrement.
Dans la primitive Eglife on donnoit ce nom à ceux
des Juifs ou des Gentils que l'on inftruilbit pour rece-
voir le baptême. Car xarnx^ en Grec lignifie enfei-
gncr de vive voix, & xa.T»xoului>'°Çi Ci^ul qu°n infruit de
■vive voix. D'autres prétendent que ce nom vient de
Ka.TcLx.iu> , prêter une oreille attentive à des difeours , les
catéchumènes étant cenfés donner une attention parti-
culière aux initruclions que leur failbient les caté-
chises. Voye^ Catéchiste.
» Celui qui étoit jugé capable de devenir chré-
» tien, dit M. Fleury, étoit t'ait catéchumène par l'im-
» pofition des mains de l'évêque ou du prêtre , qui
» le marquoit au front du figne de la croix , en priant
» Dieu qu'il profitât des inltru&ions qu'il recevroit ,
» & qu'il fe rendit digne de parvenir au faint baptê-
» me. Il alfiitoit aux lermons publics où les infidèles
» mêmes étoient admis. Le tems du catéchumenat
» étoit ordinairement de deux ans : mais on l'allon-
» geoit où on l'abrégeoit luivant le progrès du caté-
» chumene. On ne regardoit pas feulement s'ilappre-
» noit la doctrine , mais s'il corrigeoit les mœurs , &
v on le laiflbit en cet état jufqu'à ce qu'il fût entiere-
» ment converti. Mœurs des Chrét. tit. v.
Les catéchumènes étoient dillingués des fidèles non-
feulement par le nom , mais encore par la place qu'ils
occupoient dans l'églife : ils étoient avec les péni-
tens fous le portique , ou dans la galerie antérieure
de la bafilique. On ne leur permettoit point d'affilier
à la célébration des laints mylleres ; mais immédia-
tement après l'évangile , le diacre leur crioit à haute
voix : ite catechumeni , mijja ejl : retirez-vous , catéchu-
mènes , on vous ordonne de fortir. Cette partie mê-
me de la m elfe s'appelloit la mejje des catéchumènes. Il
paroît par un canon du concile d'Orange, qu'on ne
leur permettoit pas de faire la prière avec les fidèles,
quoiqu'on leur donnât du pain béni qu'on nommoit
le pain des catéchumènes , 6c qui étoit comme un lym-
bole de la communion à laquelle ils pourroient être
un jour admis.
Il y ayoit plufieurs ordres ou degrés de catéchumè-
nes : mais on n'a rien de bien précis fur le nombre de
ces ordres , ni fur les noms par lefquels on les dilïin-
guoit. Les auteurs Grecs qui nous ont tranfmis les an-
ciens canons, n'en font ordinairement que deux claf-
fes , l'une des catéchumènes imparfaits , & l'autre des
catéchumènes parfaits ; c'eft-à-dire , de ceux qui ne fai-
foient que d'entrer dans le rang des catéchumènes , &
de ceux qui étoient en état d'être admis au baptême,
à quoi quelques-uns ajoutent que les premiers étoient
encore regardés comme payens. D'autres défignent
ces deux clafîes de catéchumènes par les noms à'écou-
tans , audientes, & & agenouillés , genufleclentes ; les
premiers , dilent-ils , ne reltoient dans l'églife que
pour affilier au lermon & à la leclure des écritures ;
les autres affiltoient aux prières , &: fléchiflbient les
genoux avec les fidèles. M. de l'Aubépine , évêque
d'Orléans , dans Ion IL livre d'obfervationsfur les an-
ciens rits de ï Eglife , en ajoute un troifieme ordre
qu'il appelle orantes , prions , mais qui paroît être le
même que celui des agenouillés ; d'autres enfin y
ajoutent les competens , compétentes ; c'eft-à-dire, ceux
qui demandoient le baptême. Maldonat fait encore
une claïïe à part de ceux qu'il appelle pénitens , pœni-
tentes , parce que , dit-il, ils étoient fous la correction
& la cenfure de l'Eglife. Le cardinal Bona ne recon-
noît point de catéchumènes de cette elpece : mais il en
marque quatre autres degrés, les écoutons , les age-
nouilles, les competens, & les élus , audientes , genu-
jLUenteSy compétentes t & elecli, Bingham, dans l'es an-
C A T
ùquités eccléfiaftiques , diflingue auflî quatre clalîes de
catéchumènes. Sa divilion elt différente de celle du
cardinal Bona , en ce qu'il ne fait des competens &c
des élus qu'une feule & même claffe , & qu'il comp-
te pour les premières les catéchumènes qu'on inltrui-
foit hors de l'églife , tandis qu'on permettoit aux au-
tres d'y entrer; difïinûion qui paroît fans fondement.
M. Fleury n'en diltingue que deux , les auditeurs 8c
les competens. D'autres les réduilent à trois degrés :
le premier étoit celui des écoutans, qui n'étoient re-
çus qu'à entendre les inltrutïions fur la foi & fur les
mœurs : le fécond , celui des élus qui étoient admis
pour recevoir le baptême : le troifieme comprenoit
les competens, ou ceux qui, parfaitement infrruits du
lymbole & de la do&rine chrétienne , étoient en
état d'être baptilés.
Quoi qu'il en lbit de ces divers fentimens, on rece-
voit les catéchumènes par l'impofition des mains & par
le figne de la croix. On y joignoit dans plufieurs égli-
fes les exorciimes, le iouffle fur le vifage; la falive
appliquée aux oreilles & aux narines , & Fond iori
fur les épaules & à la poitrine : on leur mettoit du
fel dans la bouche : cérémonies qui fe pratiquent en-
core aujourd'hui dans l'adminifh ation du baptême,
& qui le précédoient autrefois de quelques jours
quand on ne bapthoit qu'aux fêtes les plus lolem-
neiles. On donnoit auffi du lait & du miel aux caté-
chumènes lprlqu'ils étoient prêts d'être baptif es, com-
me des fymboles de leurs renaifîance en Jefus-Chrift,
& de leur enfance dans la foi ; ce n'eft qu'en ce fens
général que S. Augullin donne à cette cérémonie le
nom de lacrement. Le catéchumenat a été pratiqué
dans l'Eglife d'Orient & d'Occident tant qu'il y a eu
des infidèles qui fefont convertis à la religion ; c'eft-
à-dire, en Occident juf qu'au vin. fiecle. Depuis ce
tems on n'en a plus obfervé fi exactement les céré-
monies à l'égard des adultes qui demandoient le bap-
tême. Morin,<& Pœnit. L'Aubépine , Ob/erv. fur les an-
ciens rits de l'Eglife. Bingham, Antiq. ecc/ej. Fleury,
mœurs des Chrct. & Hifl. ecclef. ( G )
CATECHUMENAT, 1. m. catechumenatus, état des
catéchumènes pendant qu'ils alpii oient au baptême;
ce qui comprend la conduite que l'Eglife tenoit avec
eux depuis leur première réception jufqu'à leur bap-
tême, & celle qu'ils étoient eux-mêmes obligé? de
tenir dans les divers degrés par leiquels on lesfailoit
pafièr. Voyei CatÉchlmene.
La durée du catéchumenat n'a jamais eu de règles
fixes & univerfelles ; on voit par les acles des apôtres,
que l'adminiftration du baptême fuivoit de près l'inf-
truftion : mais quand le nombre des fidèles fe fut ac-
cru , l'on craignit & avec railon qu'un peu trop d'em-
preffement ne fit entrer dans l'Eglife des fujets vi-
cieux ou mal affermis , qui l'abandonneroient au
moindre péril. C'eft pourquoi le concile d'Elvire fixa
à deux ans le tems d'épreuve des catéchumènes. JufU-
nien en ordonna autant pour les Juifs qui voudroient
fe convertir. Cependant le concile d'Agde n'exige
d'eux que huit mois. Les conititufions apolloiiques
demandent trois années de préparation avant le bap-
tême : quelques auteurs ont cru que le tems du carê-
me fuffiloit. Dans des circonftances prefîantes on
abiéc,eoit encore ce terme; car Socrate, parlant de
la converfion des Bourguignons, dit qu'un évêque
des Gaules fe co/itenta de les inftruire pendant fept
jours. Si un catéchumène fe trouvoit fubitement en
danger de mort, on le bapthoit fur le champ. Il eft
facile defentir que quelque féveres que fufTent com-
munément les règles, les'évêques en difpenfoient
fuivant leur prudence, les circonltances, le zèle ou
le beloin urgent des catéchumènes. Bingham, Orig.
ecclef. tom. IK lib. X. chap. j. §. 5. {G)
CATÉGORIE, f. f. (Log.) ce mot fignifie une
claffe d'êtres, ou de manières d'être. Quoique l'on
C A T
pût fort commodément diltinguer toutes nos idées ,
en idées de fubitances, idées de modes , & idées de
relations , Ariiîote jugea à propos de former dix clal-
fes, dont la première ex-prime la fubftance, & les au-
tres les accidens ; favoir, la quantité , la qualité , la
relation , l'action , la paffion , le lieu , le tems , la fi-
ruation , &c enfin l'habillement. Toute cette nomen-
clature a été tirée par Arifîote du tour &c du génie
de la langue Greque ; & ce philolbphe a facrifié ici
la juiteffe de fon génie à l'envie de rendre fa doctri-
ne agréable à fes compatriotes, en leur indiquant de
quoi fournir à leur babil. C'eft à cette complaifance
que l'on doit le livre où il explique fort au long ces
dix claffes , & les diverfes difî:inctions dont elles font
fufceptiblcs. Cette divifion de termes plutôt que
d'idées , a trop long-tcms occupé les Philolophes ,
<jui l'ont enrichie de leurs éclairciilemens. Porphyre
iurtout s'eft fignalé dans cette futile carrière par
fon traité de prœdicabilibus Jîve univerfalibus. Il y
parle aufîi des idées des genres & des efpeces , fur
lefquelles on ne trouve rien aujourd'hui dansArif-
totc. Diogene Laerce témoigne pourtant qu'il avoit
écrit fur cette matière. Le P. Rapin fait à cette occa-
sion la remarque fuivante ; favoir , que Gaffcndi n'au-
roit peut-être pas jugé la Logique d'Ariilote im-
parfaite, par le fupplément de Porphyre, qu'il a cru
néceffaire pour y fervir d'introduction, s'il eût fait
réflexion que ce traité qui a été mis à la tête de la
Logique d'Arifîote , eft pris de fa Métaphyfique d'où
Porphyre l'a tiré ; & qu'il y a apparence que ce fup-
plément eût été inutile , s'il ne le fût rien perdu des
livres de la Logique d'Ariftote, dont Diogene Laer-
ce fait mention.
Il n'y a pas long-tems qu'on efî revenu de ces fot-
tifes : encore a-t-il bien fallu combattre pour les dé-
truire. On a repréfenté d'abord qu'elles n'étoient pas
à leur place dans la Logique, puifqu'il s'y agit des
relations des êtres univerfels , qui font du reflbrt de
l'Ontologie. On a ajouté que les dillinctions expri-
mées dans les catégories , étoient frivoles , &c qu'on y
difeernoit la différence du propre , tandis qu'on omet-
toit la dillinction entre l'effence 6c l'accident. M. le
Clerc a fort bien remarqué que les catégories ne nous
apprennent autre chofe, finon quelles étoient les
claffes d'idées dans la tête d'Ariilote , & non ce
qu'elles font dans la nature des choies , & qft'ainii
cen'eit pas la peine de donner tant de tems à les étu-
dier. Si pourtant quelqu'un defire une conviction
pleine & entière de l'inutilité des catégories , il peut
encore recourir à Y Art de penfer , partie première ,
chap. iij. & à M. Crouzaz dans la deuxième partie de
fa Logique. ( X)
* CaTEIA, {Antiquité ) cfpccc de trait ou de ja-
velot fort pelant dont les anciens Gaulois ce les Ger-
mains fe fervoient à la guerre ; fon poids le rendoit
difficile à lancer, mais le faiibit pénétrer plus pro-
fondément. Il étoit garni d'une chaîne, avec laquelle
on le retiroit pour le darder une féconde fois. Il y en
a qui le regardent comme une cfpccc de coin miiiil.
C AT ERG I , ftibit. m. {Hijl. mod.) c'eft le nom
qu'on donne aux voituriers clans les états du grand-
feigneur. Ils ont cela de fingulier , qu'au lieu qu'en
France, &c prcfquc par-tout ailleurs , ce font les mar-
chands ou voyageurs qui donnent des arrhes à ceux
qui doivent conduire eux , leurs hardes & marchan-
difes, les voituriers Turcs en donnent au contraire
aux marchands & autres, comme pour leur repon-
dre qu'ils feront leurs voitures, ou qu'ils ne partiront
point fans eux. Dici. de Connu, tom. 11. p. iji. (C7)
CATERLAGH , (GéogA ville d'Irlande , capitale
du comté de même nom, dans la province de Leinl-
ter , fin le Barrotr.
CATEUX , adj. {terme de Droit coùtumier , ujtté
Jînguïierctnent en Picardie. ) le dit de certains biens ,
C A T
775
qui , félon l'état où ils fe trouvent, font meubles ou
immeubles. Par exemple , on y appelle les blés bien
cateux , parce que jiilqu'à la mi-Mai, n'étant point
comptés entre les fruits , on les met au rang des im-
meubles ; & depuis ce tems-là ils font réputés meu-
bles. (H)
CATHARES, f. m. pi. {Hifl. eccléf.) nom fameux
qu'ont ufurpé plufieurs feues d'hérétiques en diffe-
rens tems : ce mot lignifie purs ; ck les premiers qui
commencèrent à fe l'appliquer furent les Apotacli-
ques ou Renonçans , branche des Encratites , dont le
chef étoit Tatien ; voye^ Encratites. Quelques
Montaniftes fe firent enfuite appeller cathares , pour
exprimer par un terme qui fignifie pureté , qu'ils n'a-
voient point de part au crime de ces malheureux qui
renioient la foi dans les tourmens , mais qu'au con-
traire ils refufoient de les recevoir à faire pénitence.
Ils portoient pour cela des robes blanches , afin, di-
foient-ils , que leur vêtement convint à la pureté de
leurs confcicnces : ils nioient aufîi que l'Eglifc eût le
pouvoir de remettre les péchés. Sur quoi S. Auguf-
tin faifant allulion au mot Latin mundus , qui fignifie
pur , dit qu'ils dévoient plutôt prendre le nom de
mondains que de purs ; f nomen fuum voluijjent agnof-
cere , mundanos potius quam mundos vocaffent. Eulebe
parle aufîi de ces hérétiques. Novatien donna le mê-
me nom de cathares à fa féete , & fouvent les anciens
ne la défignent point autrement. Enfin , on a donné
par ironie le nom de cathares aux Paretans, Patariijs
ou Patrins, aux Albigeois, ck aux Coteraux, diverfes
fectes d'errans, qui s'élevèrent dans le xn. fiecle,
& qui s'etoient formées de celles des Henriciens , de
Marfille, de Tendeme , & de diverfes autres. Le troi-
fieme concile de Latran, tenu l'an 1 179 , fous Ale-
xandre III. les condamna. Les Puritains d'Angleterre
ont renouvelle ce nom magnifique, par celui qu'ils
ont pris. Eufebe , lib. VI. cap. xxxv. Socrate, /. VI,
c. xx. S. Auguflin, de Agon. chrifl, c. xxj . S.Epiph.
LXI. c.j. Baronius, A. C. 264. n° 106. 10J. Troi-
fieme concile de Latran , au c. xxvij. Sanderus, hœr,
14J. Baronius, A. C. nç). Turrecremata , lib. IV,
fomm. part. II. c. xxxv. Reinaldi &c Sponde, &c. (Cr)
CATHARINENBERG, (Géog.) petite ville du
royaume de Bohême , prés les frontières de la Saxe.
CATHARINENBERG , (G^og.) petite ville d'Alle-
magne , en Mifnie, appartenante à l'électeur de Saxe.
CATHARISTES ou PURIFICATEURS, f. m. pi.
{Hijl. eccléf.) Iccïe de Manichéens , fur laquelle. ces
hérétiques tachoient de rejetter les ordures abomi-
nables & les horribles impiétés qui entroient dans la
prétendue confécration de leur Euchanfrie. S. Au-
gultin , Hœr. cap. xlvj. S. Léon , Epijl. VIII,
CATHARRE. Voye^ Catarrhe.
CATHARTIQUÈ. Voyei Catarthique.
CATHEDRALE, l'ub. f. (Hi/L eccléf.) On entend
par ce mot Véglife épifeopak d'un lieu. Ce nom lui a
été donné du mot cathedra , ou fiége épifcopal. On
tire l'origine de ce nom , de ce que les prêtres , qui
compofbient l'ancien presbyterium avec leur évêque y
étoient aflis dans des chaires à la manière des Juifs
dans leurs conlittoires, & que l'evêque préfidoit dans
un liège plus c!o é ; d'«ù vient qu'on célèbre encore
préfentement les fêtes de la chaire de faim Pierre k
Rome & à Antioche. Il ne faut pas confondre ces an-
ciennes cathédrales avec les églifes qu'on nomme au-
jourd'hui cathédrales , parce que ce mot à'églifit ne li-
gnifioit en ce tems-là qu'une affemblée de Chrétiens
& non des temples , comme ils font bâtis aujour-
d'hui , & que les Chrétiens n'ont point eu la liberté
ir ces terni- ■ l'empereur < Onftandn.
Néanmoins plufieurs auteurs 1 Ifpagnols qui ont écrit
de l'antiquité de leurs églifes cathédralei3 afiùrent
qu'il y en a eu d es le rems des apôtres :
mais tout ce qu'on du de ces anciennes cathédrales
776
C A T
eft fabuleux. Quant au nom Séglifi cathédrale , il
n'eft pas fort ancien. On appelloit l'églife principale,
celle où Févêque célébroit ordinairement , la grandi
églife , Y églife épifcopale , l'églife de la ville. Le nom de
cathédrale n'a été en ufage que dans l'éghie Latine ,
& depuis le x. fiecle. ' .
CATHEDRATIQUE , adj. {Hijl. ecclef.) droit
eu'avoient les évêques d'exiger une certaine lomme
d'argent en vilitant les paroïlTes de leur diocelé , &
cela à cauié de leur dignité épifcopale , propter cathe-
dram epifcopaltm. Il en eft fait mention d'abord dans
le concile de Brague , puis dans le vu. concile de
Tolède. Cette fomme étoit de deux fous d'or ; &
les évêques de France la percevoient fous le règne
de Charlemagne , & des autres rois de la féconde
race. On appelloit encoie ce droit fynodatique, parce
qu'on le payoit au fynode. Depuis , fe nom de auhé-
dratique a été étendu aux droits affeûés aux archi-
diacres & aux doyens ruraux dans leurs vifites. Tho-
maffin, Dijdplin. de rêghf. part. III. liv. II. ch. xv.
6-ch.xxxi/. & xxxiv. (G)
CATHERETIQUES , adj. (Medec. ) le dit de re-
mèdes qui rongent & confument les chairs fongueu-
fes ou baveufes des plaies , des ulcères , ou autres
femblables.
Ce mot eft tiré du Grec KadwptTiJW , dérive de
x*S-«/pfi>, qui fignifie purger , émonder ; ou de K<tw &
àipia , enlever , emporter.
On appelle auffi ces mêmes remèdes farcophages,
c'eft-à-dire qui mangent les chairs : tels font le pré-
cipité rouge , l'alun bridé , le cuivre brûlé , le vitriol
bleu, 6c. (A/)
CATHERINE (l'Ordre de Ste), Hijl. moder.
c'eft un ordre de Ruffie , qui ne le donne qu'à des
dames de la première qualité de la cour ; il fut fondé
en I7i4par la czarine Catherine, époufe de Pierre
le grand, en mémoire du bonheur lignalé qu'eut ce
prince d'échapper aux Turcs en 1 7 1 1 , iur les bords
duPruth.Cette princeffe, pleine de tendrefle pour fon
époux , eut le courage de le fuivre dans cette expé-
dition , où toute l'armée Ruffienne le trouva dans un
péril imminent ; dans une conjoncture fi fâcheufe ,
la czarine prit le parti d'envoyer un courier au
grand-vifir qui commandoit l'armée Ottomane , lui
promettant une fomme très-confidérable s'il vouloit
entrer en négociation avec le czar ; le vilir y con-
fentit : en conféquence il envoya des députés dans
le camp des Rulliens , leur recommandant iur-tout
de ne pas manquer de voir la czarine , parce qu'il ne
pouvoit fe perfuader qu'une femme eût eu allez de
courage & de tendrefle conjugale , pour s'expofer
à un danger auffi grand. Ce fut afin de conferver le
fouvenir d'un événement fi remarquable , que le
czar voulut que cette princeffe fondât un ordre qui
portât fon nom, & dont elle fut grande-maîtreffe. Les
marques de cet ordre font une croix rouge , tenue
par une figure de Sainte Catherine; on la porte atta-
chée à un cordon ponceau , bordé des deux côtés
d'un petit liféré d'argent , fur lequel on voit le nom
de Ste Catherine & la dévife PRO FlDE ET Pa TRIA.
Dans la fondation il ne doit y avoir que fept da-
mes aggrégées à cet ordre : mais la czarine en aug-
mente le nombre fuivant fa volonté. (— )
CATHERINE {chevaliers de Sainte Catherine du mont
Sinai ) , Hijl. moder. ancien ordre militaire , formé
pour affifter & protéger les pèlerins qui alloient vi-
fiter par dévotion le corps de Ste Catherine , vierge
d'Alexandrie , diftinguée par fon lavoir , & qu'on
dit avoir fouffert le martyre fous Maximien.
Le corps de cette vierge ayant été trouvé fur le
mont Sinai, il s'y fit un fort grand concours de pèle-
rins ; & ce pèlerinage étant devenu dangereux par les
courfes des Arabes, on établit en 1063 un ordre de
chevalerie , à l'imitation de celui du S. Sepulchre &
C A T
fous la protection de Su Catherine. Les chevaliers
s'engageoient par ferment à garder le corps de cette
lainte , à pourvoir à la lùreté des chemins en faveur
des pèlerins, à fuivre la règle de S. Bafile, & à obéir
à leur grand-maître. Ils portoient un habit blanc , fur
lequel étoient repréfentés les inftrumens du martyre
de leur patrone, c'eft-à-dire une demi-roue armée
de pointes tranchantes , & traverfée par une épée
teinte de lang. (G)
CATHETE , f. f. ( Architecl. ) c'eft une ligne per-
pendiculaire qu'on fuppole palier au milieu d'un
corps cylindrique , comme une colonne , un pilier ,
&c. mais communément cette ligne s'appelle axe ,
ou cffîeu. On entend auffi par cathete , la ligne per-
pendiculaire qui palle dans l'œil de la volute ioni-
que à plomb du fut inférieur de la colonne , & du
bas du tailloir du chapiteau ; cette ligne ainli ap-
pellée fait donner à l'œil de cette volute le nom de
cathete. Foye?^ CHAPITEAU, IONIQUE.
Cathete , en Géométrie , le prend plus généra-
lement qu'en Architecture ; & c'eft une ligne qui
tombe perpendiculairement fur une autre ligne , ou
fur une lùrface. Voye^ Perpendiculaire.
Les deux petits côtés d'un triangle rectangle font
deux cathetes. Voye{ RECTANGLE.
Ce mot eft principalement en ufage dans la Ca-
toptrique , ou dans la partie de l'Optique qui conli-
dere les propriétés des rayons de lumière réfléchis.
Ainfi ,
Cathete à' incidence , en Catoptrique , eft une
ligne droite tirée du point radieux , ou de l'objet ,
perpendiculairement au miroir. Si le miroir eft fphé-
rique , la cathete d'incidence eft une ligne droite tirée
de l'objet au centre du miroir ; car cette ligne eft
perpendiculaire au miroir. Voye^ Incidence.
Cathete de réflexion ; c'eft une ligne droite ti-
rée de l'œil , ou de tout autre point d'un rayon ré-
fléchi , perpendiculairement au miroir. Cette ligne
palîe par le centre du miroir , fi le miroir eft fphéri-
que. /^oyq RÉFLEXION.
Cathete d obliquité eft une ligne droite tirée du
point d'incidence perpendiculairement au miroir ;
dans la figure $4 de t 'Optique , fi on fuppole que G F
foit un miroir plan, D l'objet , E l'œil & Cle point
d'incidence , c'eft-à-dire le point où le rayon D C
tomrJê pour fe réfléchir fuivant CE, la ligne D G fera
la cathete d'incidence , la ligne E F la. cathete de réfle-
xion , & la ligne C H la cathete d'obliquité.
Dans les miroirs plans, l'image de l'objet eft vue
dans le concours du rayon réfléchi avec la cathete
dincidence. Plufieurs auteurs , entr 'autres le P. Tac-
quet , fondés fur cette expérience , en ont tait une
régie générale de Catoptrique & de Dioptrique fur
le lieu de l'image vue dans un miroir courbe , ou
par un verre : mais ces auteurs font dans l'erreur.
Voye-^ Apparent , Miroir , Dioptrique. (O)
CATHETER , f. m. terme de Chirurgie , eft une
fonde creule & courbe qui eft ordinairement d'ar-
gent , qu'on introduit par l'urethre dans la veffie ,
pour faciliter l'écoulement del'urine , quand le parta-
ge eft bouché par une pierre , par du gravier , des
caroncules ou autre choie.
Ce mot vient de xabni^i ou naMtfuu , mettre dedans^
on l'appelle auffi algèlie ou fonde creufe. V. Algalie.
Quelques auteurs font dans l'ufage de donner plus
particulièrement le nom de cathéter à une fonde can-
nelée , qui a la même configuration que l'algalie k
long bec. Cette fonde doit être d'acier ; fon corps
eft lolide & cannulé comme les algaiies. Elle a fur
toute la convexité de fa courbure une rainure d'une
bonne ligne de large , qui doit être fermée à Ion ex-
trémité le plus quarrément qu'il eft polîible. Cette
fonde fort à conduire le lithotome dans l'opération
de la taille. Foyer Lithotomie.
Ce
C A T
■Ce cathéter eft repréfenté Planche VIII. f«. 2. &
k* fig- 8. montre la cannelure & la conftruction or-
dinaire de la tête de cet infiniment. La manière de
s en fervir eft expliquée au mot CATHETÉB
CATHETERISME, f. m. opération de Chi
qui confîfte à introduire une iondc dans la veffie ,
pour s'informer de l'état de ce vifeere , tirer l'urine
ou le pus qui y léjourne , ou pour y injecter quelque
liqueur.
Les fondes avec lefquelles on pénètre dans la vef-
fie fe nomment algalies. Voye^ AlgàLIE.
Quand on fonde un malade pour la rétention d'u-
rine , il faut le fonder dans fon lit, couché fur le
dos , la poitrine un peu élevée, les genoux un peu
fléchis & écartés. Si on le fonde pour connoître s'il
a la pierre , il faut , autant qu'il cil pofîible , le fon-
der debout , afin que la pierre qui , dans cette atti-
tude , tombe prefque toujours fur l'orifice de la vef-
fie , étant entraînée avec l'urine, foit plus facile-
ment rencontrée par le bout de l'algalie. Souvent on
n'a pas reconnu la pierre faute .de cette précaution.
Si l'on n'a pu fe difpenfer de fonder le malade dans
fon lit, il faut quand la fonde fera dans la veffie ,
le faire tourner & affeoir fur le bord du lit, fi fon
état lui permet de faire ces mouvemens.
La principale condition pour bien fonder cft d'a-
voir une parfaite connoiffance de la figure & de la
courbure du canal de Furethre ; il faut en outre de
l'adrefie & de l'habitude pour y réuffir.
Il y a deux manières de fonder les hommes ; l'une
qxi'on appelle par-dej/'us le ventre ;& l'autre ,parletour
de maître. Pour fonder nar-deffus le ventre, le Chi-
rurgien placé au côté gauche du malade , tenant le
manche de avec la main droite, introduit
le bec de cet infiniment dans Furethre , la verge
étant renverfée iiir le ventre , & tenue par la main
gauche du Chirurgien. Dans ce cas, il ne s'agit que
de fuivre doucement la route du canal pour entrer
dans la v cilié en relevant le manche de la fonde , 8e
baillant la verge lôrfque l'extrémité antérieure , ou
bec de l'initrument , doit palier lbip l'os pubis : l'al-
galie doit être graiflee d'huile afin de couler plus ai-
fément dans Furethre.
Pour fonder par le tour de maître, le dos de la
fonde regarde le ventre , ck fon manche eft tourné
du côté des genoux du malade ; le Chirurgien doit
être placé à droite ; il foutient la verge av«c trois
doigts de la main gauche à l'endroit de la couronne
du gland , é\ itant de comprimer Furethre , qui eft
placé fous le corps caverneux. 11 prend fa fonde bien
graiffée,& l'ayant conduite doucement jufqu'à la ra-
cine de la verge , il lui fait taire un demi-tour en
la penchant conjointement avec la verge vers l'aine
droite , & en conduiiant le manche fur le ventre ;
il le baifle enfuite pour que le bec puifîe palier fous
l'os pubis & pénétrer dans la vellie. Dans ces diffé-
rens mouvemens, l'algalie doit être pouffée dans la
verge , ce la verge doit être tirée fur l'algalie ; il
faut qu'il y ait un concert entre les deux mains du
Chirurgien pour réuffir à cette opération.
Si , la fonde étant prête crentrer dans la veffie , on
fent quelqu'obftacle , il ne faut rien forcer de crain-
te de faire de 1 >utes , qui rendent enfuite
l'introduction de la fonde fort difficile , ce quelque-
fois même impoflible : mais il faut retirer la fonde
de la largeur d'un travers de doigt . ce la repoiuTer
enfuite doucement pour tacher de trouver la vraie
route.
Si la difficulté de fonder % enoit de l'inflammation,
une ou deux
cette opération ; je n'ai fouvent réuffi à fonder qu'a-
prés avoir nie de ce moyen. Si les obftacles font in-
i'urmontables ,011 fait la ponction à la veffie, > vyt\
Ponction.
Tome II,
C A T
777
La difficulté d'introduire la fonde dans toute la
continuité du canal de Furethre eft un figne d'obfta-
cle dans ce conduit, Voye^ CarnoSITÉ»
Il eft plus facile de fonder les femmes , que les
hommes , parce que le conduit de l'urine eft plus
large , fort court & prefque droit ; il faut écarter les
lèvres ce les nymphes , tk introduire la fonde à fem-
me dans l'orifice de Furethre ; le bout qui eft légère-
ment recourbé étant tourne du coté du pubis , on
la pouffe doucement dans la veffie. J'ai eu occafion
pendant mon féjour à l'hôpital de la Salpêtriere ,
de fonder un grand nombre de femmes, ou j'ai ob-
fen é quelques difficultés. La plus commune vient
de la defeente de matrice : pour peu que cet organe
foit un peu plus bas qu'il ne doit être naturellement,
la veffie entraînée par fon adhérence au vagin, for-
me un pli qui empêche l'introduction de la fonde ;
il ne faut clans ce cas qu'étendre un peu les parties
en introduifant le doigt index de la main gauche
dans le vagin ; la fonde entre alors avec facilité.
C'eft une petite attention fans laquelle néanmoins on
peut fe trouver dans l'impoflibilité de ne foulagcr
une perfonne qui fouffre cruellement , qu'en em-
ployant des moyens douloureux tels que la ponc-
tion. ( Y)
• CATHOLICITÉ ,f.f.( Théologie. ) eft un des ca-
ractères de la vraie Eglife , c'eft-à-dire fon univerfa-
lité à tous les tems , à tous les lieux , & à toutes for-
tes de perfonnes.
La catholicité de FEglife fe tire , félon nos Théo-
logiens , de quatre chefs principaux : i°. de l'uni-
verfalité des lieux dans lefquels FEglife eft répan-
due : 20. de l'univerfalité des tems dans lefquels elle
a fubfifié , & de ceux où elle fubfiftera : 30. de l'u-
niverfalité de la doctrine qu'elle aenleignée fans mé-
lange 6c fans altération : 40. enfin de l'univerfalité
des perfonnes de tout fexe , de tout âge , de toute
condition, qui font entrées dans fonfein.
On a prouvé contre les Proteftans , que FEglife
Romaine avoit toujours eu ces quatre marques. (. e-
pendant lorfqu'on parle de fa catholicité ou de fon
univerfalité en tous lieux & à toutes fortes de per-
fonnes , on convient que ce terme ne doit pas s'en-
tendre d'une univerfalité phylique èc abfolue , mais
d'une univerfalité morale ce relative , enforte que la
fociété des Catholiques Romains a toujours contenu
& contient encore infiniment plus de perfonnes , &
s'étend en beaucoup plus de lieux qu'aucune de s lec-
tes cpii fe font féparées d'elle.
Catholicité fe prend auffi quelquefois pour la
doctrine catholique ce Fattachemenl d'une perfonne
à cette doctrine. Un véritable fidèle doit toujours
être prêt à donner des preuves non fufpcctcs de la ca-
tholicité. /<nr- Orthodoxie. (6')
CATHOL1CON ( Pharmacie. ) epitbete de cer-
tains électuaires anciens qu'on regardoit comme uni-
verfels , ou comme purgeant toutes les humeurs.
Voye{ ÉLECTUAIRE.
On trouve dans les auteurs différentes deferip-
tions de ces électuaires : voici celui dont on donne
la defeription dans la Pharmacopée Je Paris, fous le
nom de catholicon double de rhubarbe, qu'on ..
ordinairement) as. Prenez racine de pol
par petits morceaux , une demi-
livre ; racine de chicorée , deux onces ; feme
fenouil, une once CC demie; feuilles d'aigremoine
fcolopendre , de chacune tri
laites bouillira petit feu dans huit livres d'eau
ites à moitié , paflez en prcllant , &
s le tout en confiftance d'élecruaire
rez-le du feu & y ajoute/ enfuite pulpe de calié 6c
de tamarins, de 'chacune quatre onces. Joignez en-
fuite peu à peu la poudre de rhubarbe à la quantité
de quatre onces : de feuilles de fené mondé' , de le-
^ FFfff
778
C A T
menées de violette , de chacune deux onces ; de ra-
cine de régliffe ratifiée, une once ; des quatre femen-
ces froides , une demi-once. Faites du tout un élec-
tuaire félon l'art.
La dofe de cet élechiaîre eft d'une demi-once dans
quelque véhicule approprié.
On s'en fert fur- tout dans les diarrhées , & après
les dysenteries , lorfque l'inflammation des vifeeres
eft calmée.
Nota. Que les anciens nommoient ainfi les médi-
camens purgatifs qu'ils croyoient capables de pur-
ger toutes les humeurs enfemble , parce qu'ils pen-
ioient que les uns purgeoient le phlegme , les autres
la bile , d'autres enfin l'humeur mélancholique , &c
ce qu'ils jugeoient par la couleur des felles du ma-
lade : mais on eft , avec raifon , revenu de ces fortes
de préjugés.
Le catholicon qu'on employé pour les ely Itères, dif-
fère de celui dont j'ai donne ci-deffus la elefeription,
en ce qu'il n'y entre point de rhubarbe , & qu'au lieu
de fucre , on le fert de miel commun. ( N )
CATHOLICON, f. m. c'eft, en terme de Layetler ,
en général une boîte de quinze pouces de long , dix
de large , & huit à neuf de haut.
CATHOLIQUE , adj. ( Théolog. ) univtrfel. On
attribue à l'Eglife le nom de Catholique , pour mar-
quer qu'elle eft répandue par toute la terre ; & c'eft
un de les caractères diftin&ifs pour la difeerner des
fedes qui fe font féparées d'elle. V. Catholicité.
Quelques auteurs ont prétendu que Théodofe le
grand avoit le premier introduit ce terme dans FE-
glife , ordonnant par un édit qu'on attribuât par
prééminence le titre de Catholiques aux églifes qui
adhéroient au concile de Nicée. Voflîus penfe que
ce mot n'a été ajouté au fymbole que dans le troi-
fieme fiecle : mais l'une & l'autre prétention eft éga-
lement infoûtenable ; car dans la lettre des fidèles
de Smyrne rapportée par Eufebe , lib. IV. chap. xv.
il eft fait mention de l'Eglife catholique , & des priè-
res que fit S. Polycarpe pour toute Féglife catholique;
& M. de Valois dans les notes fur le VII. livre de
Vhijloire eccléjlafique d' Eufebe , remarque que le nom
de Catholique a été donné à l'Eglife dès les tems les
plus voilins de ceux des apôtres, pour la diftinguer
des fociétés hérétiques qui s'étoient féparées d'elle.
Avant même S. Polycarpe, S. Ignace avoit dit dans
fon épître à ceux de Smyrne, Ubi fut rit J refus-CliriJlus ,
ibi eji ecclejîa catholica. Théodofe a pu délîgner avec
raifon les églifes attachées à la foi de Nicée par le
nom de Catholiques , fans avoir été l'inventeur de ce
titre déjà ufité près de 200 ans avant lui. S. Cyrille
& S. Auguftin oblèrvent que les hérétiques & les
fchifmatiques mêmes donnoient ce nom à la véri-
table églile dont ils s'étoient féparés , & les ortho-
doxes ne la diftinguoient que par le nom de catholi-
que tout feul , catholica.
On a auffi anciennement donné le nom de Catho-
liques à des magiftrats ou officiers , qui avoient foin
de faire payer & de recevoir les tributs dans les pro-
vinces de l'empire , comme il paroît par Eufebe ,
Théodoret, & Phiftoire Byzantine. Les patriarches
ou primats d'orient ont encore pris le titre de Catho-
liques ; on diibit le Catholique d'Arménie , pour délî-
gner le patriarche d'Arménie ; titre qui revenoit à ce-
lui à! œcuménique , qu'avoient pris les patriarches de
Conftantinople. Voye^ Œcuménique.
Les rois d'Efpagne ont pris le titre de Roi Catho-
lique ou Majejlé Catholique. Mariana prétend que le
roi Reccarede après avoir détruit l'Arianifme dans
fon royaume , reçut ce titre , & qu'il fe trouve dans
le concile de Tolède de l'an 589. Vafcé en fixe l'o-
rigine à Alphonfe en 738 , & les Bollandiftes préten-
dent qu'Alexandre VI. en le donnant à Ferdinand
Se Ifabelle , ne fît que renouveller une prérogative
C A T
acquife aux anciens rois Vifigoths qui avoient do-
miné en Efpagne. L'opinion commune eft que les
fouverains de cette partie de l'Europe n'ont com-
mencé à le porter que fur la fin du xv. fiecle, après
que Ferdinand & Ifabelle en eurent entièrement
chalîe les Maures. Froiffart rapporte que les ecclé-
fiaftiques donnèrent le même titre à Philippe de Va-
lois , pour avoir défendu les droits de l'Eglife. (C7)
CATHURS , f. m. (Marine. ) ce font des vaif-
feaux de guerre de Bantam , qui font courbés & ai-
gus par les bouts, & qui portent une voile tiflue
d'herbes & de feuilles d'arbres. (Z)
CATI , ou CATTI , f. m. ( Commerce. ) poids de
la Chine , particulièrement en ufage du côté de
Canton.
Le cad fe divife en feize taels , chaque tael faifant
une once deux gros de France ; de manière que le
cati revient à une livre quatre onces poids de marc.
Il faut cent catis pour faire un pic , qui eft un gros
poids de la Chine, femblable à cent vingt livres de
Paris, d'Amfterdam , de Strasbourg, & de Befan-
çon. Voyei PJC> Diclionn. du Commerce , tome II.
page 132.
Cati , eft auffi le feul poids du Japon : on s'en fert
pourtant à Batavia & dans d'autres endroits des In-
des , où il pefe plus ou moins, félon qu'il contient
plus ou moins de taels ; le cati , par exemple de Java,
valant jufqu'à vingt taels, & celui de Cambaye juf-
qu'à vingt lept. Die. du commerce , ibid. Voy. Tael.
Cati, eft encore un petit poids dont les Lapidaires
de l'Orient fe fervent pour pefer les émeraudes : ce
cati ne pefe que trois grains. Idem. ibid. ( G )
* CATICHE, f. f. (flz/2. nat) c'eft ainfi qu'on
appelle les cavernes ou trous pratiqués, fort dans
les eaux , foit aux bords des rivières & étangs par
des animaux amphibies : ainfi on dit les catiches du
loutre. Voye^ Loutre. Cet animal les établit fous
les crones où il a occafion de faire un grand dégât
de poiffons. Voye^ Crones.
CATIF , ( Gépg. ) ville d'Afie dans l'Arabie heu-
reufe , près du golfe Perfique.
CATILINETTES , f. f. (Jard.) Uucanthemum ,
fleurs qu'on appelle auffi marguerites d'Efpagne ;
elles jettent une tige qui fe partage en plufieurs bran-
ches chargées de boutons marquetés , qui étant ou-
verts préfentent de petites boules rouges. Ces fleurs
demandent un grand foleil , une bonne terre , &
beaucoup d'eau. ( K )
CAT1MARON , voye^ Cantimaron.
CATIN , f. m. ( Chimie. ) eft une efpece de baffin
fitué au pié du fourneau où l'on fond les mines.
Il y a le grand & le petit catin : le grand eft un
peu plus élevé que le petit. Le grand catin fert à re-
cevoir d'abord la mine fondue qui coule du four-
neau ; & le petit catin qui communique avec le grand
par une rigole , reçoit le métal fondu qui coule du
grand catin , dans lequel relient les feories.
Ces catins font garnis en-dedans d'une efpece de
mortier compofé de terre à four & de charbon en
poudre , délayés enlemnle avec de l'eau. (-Af )
CATIR, v. au. Les Tondeurs fe fervent de ce
terme pour lignifier une forte d'apprêt qu'ils donnent
aux étoffes de laine fous une prefle , pour les rendre
plus fermes & leur donner un plus bel œil.
Il y a deux manières de catir les étoffes ; l'une à
froid , & l'autre à chaud.
La première manière de catir les étoffes qu'on
appelle à froid , lé fait de cette forte. Après que
l'étoffe a eu toutes lès façons, on la plie quarrément
par plis égaux, en obfervant de mettre entre chaque
pli une feuille de vélin ou de carton bien fin, ou bien
liffe , & par-deflùs le tout un plateau ou une plan-
che quarrée ; puis on la place fous une prefle que
C A T
Pon ferre bien fort par le moyen d'une vis que l'on
fait defcendre perpendiculairement fur le milieu du
plateau à force de bras & de leviers. Lorfquc l'étoffe
ell reliée un tems fuffifant fous la preffe, 6c qu'on en a
ôté les cartons ou vélins , l'on y fait quelques points
d'aiguille avec de la menue ficelle ou du gros fil
pour arrêter le manteau , c'ell-à-dire , le côté du
chef qui fert comme d'enveloppe ou de couverture
à toute la pièce pour empêcher qu'elle ne le déplie.
11 faut remarquer que quelques-uns ne fe fervent
point de preffe à vis pour cacir à froid , fe conten-
tant feulement de mettre l'étoffé fur une table folide
après l'avoir pliée & cartonnée ; enfuite ils mettent
deffus le tout un plateau qu'ils chargent d'un poids
plus ou moins fort.
Pour caùr à chaud ; quand l'étoffe a reçu toutes
fes façons , on la mouille , ce qui s'appelle donner une
eau en Languedoc &c dans quelques autres provin-
ces ; on l'arrofc avec de l'eau un peu gommée que
l'on lbuffle deffus avec la bouche du coté de l'en-
droit ; enfuite on la plie 6c on la cartonne com-
me pour catir à froid ; 6c de fix en fix plis , & au-
delfus du tout, on met une plaque de fer ou d'ai-
rain que l'on a bien fait chauffer dans un fourneau
fait exprès : après cette opération , on met l'étoffe
fous une prelîe, & l'on fait defcendre deffus avec
violence par le moyen d'une longue barre de bois
une vis lemblable à celle d'un preffoir à vin. On
met fous cette preffe jufqu'à cinq ou lix pièces d'é-
toffe à la fois toutes cartonnées , èv garnies de pla-
ques de fer ou d'airain chaudes. Lorfquc ces plaques
lont refroidies , on retire les pièces de deffous la pref-
fe polir en ôter le carton , les plaques , & les poin-
ter, ce qui le fait de la même manière qu'en catijfant
à froid.
Cette dernière manière de catir les étoffes efttout-à-
faitmauvaife 6c pérnicieûfe, n'ayant été inventée par
les Manufacturiers & ouvriers que pour couvrir les
défauts de leurs étoffes, 6c s'exempter de leur don-
ner ions les lainages &c les teintures qui leur feroient
néceffaires pour les rendre parfaites & d'une bonne
qualité : aulfi a-t-elle toujours été détendue par les
ordonnances de nos rois.
Celle de Louis XII. donnée à Rouen le 20 Octobre
1 508 , art. 6. porte que les draps ne feront preffés ni
à fer , ni airain.
Celle de Charles IX. donnée aux états d'Orléans
en 1 560, art. 14J , défend de prclTer à fer d'airain.
Celle de Henry IV. donnée à Fontainebleau le 8
Juin 1601, faitdéfenfe de fe fervir de preffe à fer.
Enfin l'arrêt du Confeil d'état du 3 Décembre
1697, fur ce que le règlement général des manufactu-
ras du mois d'Août 1669 s ne rappelloit pas l'éxécu-
tion de ces anciens reglemens , a ordonne
feroient exécutés, & faitdéfenfe aux màni u-
riers, tondeurs, &(* d'avoir chez eux aucunes pref-
fés à fer , airain , & à feu , 6c de s'en fervir pour pref-
fer aucune étoffe de laine ; 6c aux marchands de
commander & d'expofer en vente aucunes !
prefiees à chaud, fous les peines portées par ledit
arrêt. Voyc^ l'article Draperie.
L'opération de catir cil d'ufage chez les Bonnetiers
6c chc/. d'autres ouvriers en laine.
C AT 1 R , en terme Je Doreur , c'eft appliquer l'or
dans les filets comme ailleurs , au moyen du catilloir
qu'on appuie fur du coton ou du linge très-fin.
CAT1SSOIR , 1". m. (en terme de Doreur. ) c'cll un
petit couteau fans tranche, qui fert à enfoncer I or
dans les filets avec du coton ou du linge très-fin,
( ■ CATIR , & lafig. 12. PL du Doreur.
< àTISSOIRE, f. f. fé dit d'une petite poêle à
mettre du feu, qui cil à l'ufage des Bonnetiers ec
autres ouvriers en laine , & qui n'a rien de particu-
lier que fon nom. f'oy, BONNETERIE C>DRAPERIE.
Tomî H,
C A T I79
* CJTIL7S, ou CAUTUS, (Mytkj&eu qui 1 en-
doit les hommes fins & prudens : on l'im
chez les Romains pour en obtenir ces qualités.
CATON-BELLE, (Géog.) rivière d'Afrique
la baffe Ethiopie , au royaume de Bènguele , qui
prend fa foUree près du royaume d'Angola.
CATOPTRIQUE , f. f. ( Ord-e encychp. Entende
ment.RaiJon. Philofopni eou Science. Science de la Natu-
re. Mathématiques. Mathématiques mixtes. Optique. Ca-
toptrique. ) la Icience de la vifion refléchie, ou la par»
tie de l'Optique , qui enfeigne les lois que fuit la hi-
miere réfléchie par les miroirs. Voy. Miroir & Riz-
flexion; voyeiauffi Vision, Lumière, & Or -TI-
QUE : vous trouverez à ces articles les principes ce
les lois de la Catoptrique. Ce mot vient du Grec ,.a-
foirrpov ,fpeculum ; formé de y.cnd & otrrofieu , video ,
je vois.
La Catoptrique traite non feulement de la réflexion
des rayons de lumière , & des lois que fuit cette ré-
flexion ; elle traite aulli des phénomènes qui en ré-
fultent par rapport à h vifion , & cette partie ell
extrêmement curieulè. Cependant les principes n'en
font pas encore bien développés , lurtout par rap-
port à ce qui concerne le lieu de l'image, 6c fa gran-
deur apparente. Sur quoi voyc^ l'article Apparent.
Les principaux auteurs qui ont traité de la Catop-
trique , font parmi les anciens, Euclide avant J.C. Al-
hazen& Vitelliondansle xi. &xn.fiecles; & parmi
les modernes, le P.Tacquetj le P.Fabri , dans fon livre
intitulé Synopfis Optica ; Jacques Gregory , dans Ion
Opticapromota,6z lurtout le célèbre Ifaac Barrow dans
fes Leçons optiques : ce dernier ouvrage ell fans con-
tredit le meilleur ; l'auteur lemble y avoir démontré
les lois de la Catoptrique par des principes plus exacls
& plus lumineux que les auteurs qui l'ont précédé ;
cependant il ne traite que des propriétés des miroirs
fphériques , loit concaves , loit convexes ; & il ne dit
rien des miroirs plans. Les propriétés de ces derniers
miroirs font démontrées fort au long dans le /. livré
de la Catoptrique du P. Tacquet , imprime dans le re-
cueil de les oeuvres , in-folio. M. Smith dans fon Op-
tique , a aufïï traité avec beaucoup d'étendue des lois
de la Catoptrique.
Catoptrique fe prend aufli adjectivement pour ce
qui a rapport à la Catoptrique , ou ce qui s'exécute
par des rayons refléchis : ainh ,
Cadran CATOPTRIQUE, c'eil un cadran qui re-
préfente les heures par des rayons réfléchis. Voyt^
Cadran.
Télefeope CATOPTRIQUE , c'ell un téltffcope
qui reprélentc les objets par reflexion. / bj 1 - Paruclt
Télescope.
Boite ou caijje catoptrique, ell une machi-
ne qui reprélente les petits corps comme très-
6c ceux qui l'ont proches comme très - grands , cv ré-
pandus dans un grand efpace. On y voit auiîi beau-
coup de phénomènes amufans , par le moyen de
divers miroirs qui font difpofés fuivant les règles de
la Catoptrique, dans une cl'pece de e
Il yen a de différentes efpeces, fuivant les diffé-
rentes intentions de celui qui les conflruit ; les unes
multil lient les objets ; d'autres les rendent diffor-
'alitres les grofliffent, &e. Nous allons don-
ner la conftrucHon de deux , ce qui fufnra pour taire
imme il taudroit s'y prendre pour en faire une
infinité d'autres.
Manière de faite une caiffe catoptrique qiù reprèfent»
tefimation. ky&. une boîte ou caif*
le polygone de la figure du prifme multilatere-rf.BC
D }■: F , ( Pi. Opt.jig. 1$. »°. i<&z.) & divitez fa
cavité par les plans diagonaux EB , F C. DA , qui
fe coupent les uns les autres dans l'axe , & tonnent
par-là amant de petites loges triangulaires que le po-
lygone a de côtés» Doublez les plan; ..xavec
/a FFfffij
780
C A T
des miroirs plans , & pratiquez clans les plans laté-
raux des trous ronds , à-travers lefquels vous puii-
fiez regarder dans les cellules de la caiffe ; remplif-
fez ces trous de verres plans ; placez dans les cellu-
les les différens objets dont vous voulez voir les
images ; &C enfin couvrez le deffus de la caiffe de
quelque membrane fine ou tranfparente , ou de par-
chemin qui donne paflàge à la lumière , & la ma-
chine fera achevée.
Car les lois de la reflexion enfeignent que les ima-
ges placées dans les angles d'un miroir font multi-
pliées , & doivent paraître les unes plus éloignées
que les autres; d'où il s'enfuivra que les objets pla-
cés dans une cellule , paroîtront remplir plus d'ei'pa-
ce que la caiffe entière : ainfi regardant par un des
trous, on verra les objets de la cellule correfpon-
dante multipliés &c répandus dans un efpace beau-
coup plus grand que la boîte entière; & par conlé-
quenî chaque trou donnera un nouveau fpectacle.
Voyz^ Anamorphose & Miroir.
On rendra tranfparent le parchemin dont on doit
couvrir la machine, en le lavant plulieurs fois dans
une leffive fort claire, puis dans de belle eau , & en
l'attachant bien ferré , oc l'expofant à l'air pour fé-
cher. Si on vouloit jetter quelque couleur fur les ob-
jets , on en viendrait à bout en donnant cette cou-
leur au parchemin. Zhan confeille le verd de gris
mêlé dans du vinaigre , pour le verd ; la décochon
de bois de Brefil , pour le rouge : il ajoute qu'il faut
vernir le parchemin , fi on veut donner de l'éclat aux
objets. Wolf. élément de Catoptrique.
Manière de faire une caiffe captoptrique , qui repré-
sente les objets qu'on y aura placés , fort multipliés , &
répandus dans un grand efpace. Faites une boîte ou
caiffe polygone comme ci - deffus , mais fans divifer
la cavité interne en plans, Planches d'Optiq.fig. ig.
n°. 2. doublez les plans latéraux CB HI, BHLA,
A LMF , de miroirs plans , &c. &t dans les trous ou
ouvertures , enlevez l'étain & le vif-argent qui cou-
vre la furface intérieure du miroir , de façon que
l'œil puiffe voir au-travers ; mettez enfuite dans la
caiffe un objet , par exemple un oifeau en cage , &c.
L'œil regardant par le trou h i , verra l'objet au
fond prùdigieufement multiplié , & les images pla-
cées à une diftance inégale les unes des autres. Si on
pratiquoit donc dans le palais d'un prince une gran-
de chambre polygone , qu'on tapifsât de grandes gla-
ces qui fuffent ouvertes en quelques endroits , où on
adapteroit des verres plans tranlparens pour lui don-
ner du jour , il eft évident que ces glaces y ferpient
voir une grande variété d'objets, foye^ Miroir,
Réflexion, &c.
Comme les miroirs parallèles font ceux de tous
qui multiplient davantage les objets , la forme qui
convient le plus à ces fortes d'appartemens , eft la
forme exagone ; parce que les miroirs y feront tous
parallèles deux à deux , & en affez grand nombre
pour donner un fpeclacle agréable fans confufion :
mais il faut avoir foin que les miroirs foient bien pa-
rallèles, & de plus que leur furface foit bien plane
& bien unie ; autrement le nombre réitéré de refle-
xions pourrait rendre les images difformes. On voit
encore aujourd'hui dans plufieurs châteaux des fal-
les ainfi remplies de glaces , qui produifent un très-
bel effet : c'eft fur-tout la nuit aux lumières , que ces
fortes de fpeftacles forment le plus beau coup d'œil.
Tous ces phénomènes s'expliquent par les propriétés
des miroirs plans combinés , que l'on peut voir à
l'article Miroir. Wolf, ibid. (O)
CATOPTROMANCIE, f. f. divination dans la-
quelle on fe fervoit d'un miroir pour y lire les éve-
nemens à venir.
Ce mot eft formé de wéwwipa» , fpeculum t miroir ,
& àe /.lamîot. 7 divination.
C A T
Il paraît par les anciens, qu'il y avolt diverfes for-
tes de catoptromancie. Spartien rapporte de Didius
Julianus , qui ayant fuccédé à Pertinax par la brigue
des Prétoriens, de qui il acheta l'empire, ne régna
que deux mois & cinq jours ; que dans toutes les oc-
casions importantes il confultoit les magiciens ; &
qu'une fois entr'autres , après des enchantemens &
des facrifices magiques , il ufa de la divination où
l'on fe fert d'un miroir, qu'on préfente , non pas de-
vant les yeux , mais derrière la tête d'un enfant à
qui l'on a bandé les yeux ; & l'on raconte , ajoûte-
t-il , que l'enfant vit dans le miroir que Julien def-
cendoit du throne , & que Severe y montoit.
Paufanias, dans fes Ackaiqucs , parle d'une autre
efpece de catoptromancie. Il y avoit , dit-il , à Patras
devant le temple de Cerès , une fontaine féparée dû
temple par une muraille ; &z là étoit un oracle véri-
dique , non pour tous les évenemens , mais feule-
ment pour les maladies. Ceux qui en étoient atta-
qués & en péril , faifoient defeendre dans la fon-
taine un miroir fufpendu à un fil , enforte qu'il ne
touchât que par fa bafe la furface de l'eau. Après
avoir prié la déeffe & brûlé des parfums , ils fe re-
gardoient dans ce miroir ; & lclon qu'ils fe trouvoient
le vifage havre & défiguré , ou de l'embonpoint , ils
en concluoient que la maladie étoit mortelle , ou
qu'ils en réchapperaient.
On fe fervoit encore des verres & des miroirs
pour connoître l'avenir, mais d'une autre manière,
qu'on nommoit gafromancie. f^oye? Gastroman-
CIE. (G)
CATOTÉRIQUES , adj. ( Med. ) c'eft ainfi qu'on
appelle les remèdes évacuans , défîmes à purger les
reins , le foie , la vefîie : tels font le lirop de pomme
compofé, & le firop de rôle pâle.Lemery, Phannacop,
(N)
* CATRACA, ( Hifl. nat. Zoologie. ) oifeau de
l'Amérique, très-commun fur-tout dans les petites
îles defertes du golfe de Mexique. Il eft de la grof-
feur d'une poule , mais beaucoup plus élevé fur fes
pattes : fon cou eft long , fa tête petite , fon bec de
moyenne grandeur, & l'œil vif; le plumage du cou
eft d'un bleu tirant fur l'ardoife ; celui du refte du
corps eft gris mêlé d'un peu de plumes noires. Cet
oifeau fe tient fur les bords de la mer & dans des
rochers efearpés , d'où en l'entend faire fon cri de
catraca , qui lui a fait donner fon nom. Sa chair eft
délicate & très-bonne à manger à différentes fauces :
elle a beaucoup de rapport avec celle dufaifan.
CATRUMNA , ( Géog. ) ville d'Afie dans l'île de
Ceyîan.
CATTARO, ( Géog. ) ville de Dalmatie fur le
golfe de même nom , près des frontières de l'Albanie
aux Vénitiens.
CATTEGAT , (la) Géog. golfe de la mer Balti-
que , entre les côtes orientales du Jutland Se la côte
de Suéde. On l'anpeile auffi Schager-Rack.
C ATTEROLLES , f. f. ( Chaffe. ) c'eft ainfi qu'on
appelle les lieux foùterreins où les lapines font leurs
petits ; & qu'on dit qu'elles rebouchent tous les jours
jufqu 'à-leur première fortie.
* CATTU-SCHÎRAGAM , ( Hifl. nat. bot. ) ar-
briffeau qui croît au Malabar ; il eft de la hauteur de
l'homme. On le trouve dans les lieux brûlés du fo-
leil. Sa racine eft courte , petite , & amere au goût ;
fon tronc rond & d'un pouce de diamètre ; fon écor-
ce d'un verd d'eau ; fon bois rouge ; fa feuille lon-
gue , étroite, très -pointue , & amere au goût; fa
fleur petite , ferrée en bouquet , d'une couleur de
pourpre pâle fans odeur ; & fa femence contenue
en grande quantité dans des têtes feuillues , eblon*
gue, cannelée, & pointue par fa partie inférieure
qui s'infère dans la bafe de fa tête, garnie au fom-
met d'une touffe de filarnens blanchâtres, jaunâtres
C A V
Se longs , du milieu defquels fort une petite fleur fur
un pédicule verdâtre. Cet arbriffeau porte du fruit
une fois l'an. On lui attribue beaucoup de proprié-
tés médicinales : on dit que broyé &c bouilli dans
l'huile , il ell bon en fomentations pour les pullules ;
que fon fuc exprimé calme les fièvres bilieufes de
ceux à qui on en frotte la tête ; & que fa graine
pulvérifée & prife dans l'eau chaude , guérit la toux ,
chaffe les vents , tue les vers, provoque les urines ,
appaife la colique ; & que les fomentations qu'on en
fait , foulagent dans les rhûmatifmes &c la goutte.
CATURI , CATHURI , {Marine. ) voye^ Almà-
DIE.
* CATURS, ( Hijl. mod. ) nom que les habitans
du royaume de Bantam en Afie donnent à leurs vaif-
feaux de guerre , dont la proue efl recourbée &
pointue , & les voiles font faites d'herbes ik de feuil-
lages entrelacés.
CATZENELLEBOGEN , ( Gêog. ) comté d'Al-
lemagne dans le pays de Hcffe ; il le divife en haut
£c bas , &c efl partagé par l'éleclorat de Mayence.
Sa capitale porte le même nom , &c efl lituée fur la
Lohn.
CAVA , ( Géog. ) ville d'Italie au royaume de
Naples dans la principauté citérieure.
C AVACHI , (Géog.) province du Japon clans
File de Niphon , entre le golfe de Méaco &c les pro-
vinces de J amato , Idumi , & Vomi. La capitale porte
le même nom.
* C AVADA , ( Commerce. ) mefure ulitée en Por-
tugal. La cuvada contient quatre quartas ou livres ,
& fait la douzième partie d'un almuda. Six cavadas
font un àfquier ou un cantaro.
CAVADO, (le) Géog. rivière de Portugal qui
a fa lource aux frontières de Galice.
CAVAILLON , ( Ge'og. ) petite ville de France au
comtat Venaiffin fur la Durance , à quatre lieues
d'Avignon.
CA-VA-LA-HAUT, (Chaffe.) manière de parler
aux chiens quand ils c'nalfent.
CAVALCADE , f. f. ( Hift. mod. ) marche pora-
peufe de cavaliers, d'équipages, &c qu'on fait ou
pour le montrer , ou dans une cérémonie , ou pour
orner un triomphe , dans une entrée publique , ou
dans d'autres occalions femblables. foye^ Car.ou-
sel , Tournoi, Quadrille, &c (G)
CAVALCADOUR; vov^Ecuyer.
CAVALERISSE, f. f. (Manège.) ce mot eft dé-
rivé de l'Italien : il fut employé en François pour li-
gniiier une perfonne favante dans fart de dreffer
& de gouverner les chevaux ; il fut d'autant plus
exprefîif , que le mot écuyer a une fignification toute
différente en France : mais il n'elt plus d'ufage. (V)
CAVALERIE, f. f. (Art. milit.) corps de'gens de
guerre deilinés à combattre à cheval, eauitatus.
La cavalerie Françoife cil diltinguée en compagnies
d'ordonnance, comme gardes du corps, gendarmes,
chevaux-legers, &c. ôc enrégimens qui font comman-
des par des mcltres de camp. Ce font ces régimens
qui forment ce qu'on appelle la cavalerie-legere.
Les compagnies d'ordonnance tiennent lieu de ce
qu'on appelloit autrefois en France la gendarmerie , qui
étoit compoléc du corps de la noblcfle armée de pied-
en-cap, 6t les régimens de cavalerie des gens de che-
val armes à l.i légère, dont on fe fervoit pour pour-
fuivrerennemi, lorfqu'il avoitété rompu par le
darmes,& l'empêcher de fe rallier. Cette diflinenon
ne peut aujourd'hui avoir lieu ; les compagnies d'or-
donnance & les régimens lont armés, & combat-
tent de la même manière.
La cavalerie-legere Françoife n'étoit guère citimee;
c'étoit la gendarmerie qui faiioit toute la force de
l'armée, tant par la bonté de les armes, que par la
force de les chevaux, qui etoient des delhicrs, dextra-
C A V
?8r
m; ceft-à-dire, des chevaux de bataille. Une an-
• demie chronique dit que cent hommes de gendar-
merie fuffiloient pour battre mille autres cavaliers
non armés, c'efl-à-dire , armés à la légère; parce
que les armes des gendarmes étoient prelque impé-
nétrables, & que leurs grands & forts chevaux cul-
butaient dès le premier choc ceux de cette cavalerie
légère.
La cavalerie-ligcrc de France a été compofée de dif-
férentes efpeces de troupes qu'on n'y trouve plus au-
jourd'hui , comme des ejlradiots, ou Jiradiots, des ar*
goulets , des carabins, &c.
^ Les efîradiots furent une milice dont les François
n'eurent connoiffanec que durant les guerres d'Italie
fous Charles VIII. comme Comines le remarque»
Leur nom efl Grec, Hcfiradiot vient de ^a.~iii»; , qui
ftgmRc/bldat. Auffi étoient-ils Grecs ou des environs
de la Grèce. On les appelloit auffi cavalerie Albanoife ,
la plupart étant de l'Albanie, & des places que les
Vénitiens poffédoient dans la Morée. Ils combat-
toient à pié & a cheval; & leur principale arme offen-
five étoit Var^egaye, forte de long bâton ferré par les
deux bouts , ck. qui avoit environ dix à douze pies de
long: un de leurs principaux exercices étoit de bien
fe lervir de cette arme , &c à toutes mains , en don-
nant tantôt d'une pointe , & tantôt d'une autre.
Pour les argoulets , voici comment en parle M. de
Montgommery : « Les argoulets, dit-il, étoient armes
» de même que les elîradiots, excepté la tête où ils
» mettoient un cabazet qui ne les empêchoit point
» de coucher en joue. Leurs armes offenfives étoient
» l'épée au côté, la malle à l'arçon gauche, &: à
» droite une arquebufe de deux pies & demi de long
» dans un fourreau de cuir bouilli, &c. ». On reçar-
doit ces troupes comme la partie la moins confidera-
ble de la cavalerie légère.
Les carabins ne faifoient point un corps féparé
dans les troupes de France fous le règne d'Henri IV.
un certain nombre étoit comme incorporé dans une
compagnie de chevau-légers, ou plutôt y étoit joint
fans être du corps: leurs armes dérenfives étoient
une cuiraffe échancrée à l'épaule droite, afin de-
mieux coucher en joue; un gantelet à coude pour
la main de la bride ; un cabazet en tête : & pour
armes offenfives , une longue efeopette de trois pies
& demi pour le moins, & un pillolet.
Leur manière de combattre étoit de former un pe-
tit efeadron plus profond que large , à la gauche de
Pefcadron de la compagnie des chevau-légers; d'a-
vancer au lignai du capitaine jufqu'à deux cens pas
d'un efeadron de lances de l'ennemi , Cv à cent, li c'é'
toit un efeadron de cuiraffiers ; de faire leur déchar-
ge rang à rang l'un après l'autre, 6v de fe retirer à
la queue de leur efeadron : ii les ennemis avoient
auffi des carabins, ils dévoient les attaquer, non pas
en gros, mais en les eicai mouchant , pour les empê-
cher de faire feu fur les chevau-légers dans le tems
que ceux-ci marc noient pour charger. Ils étoient inf-
titués, ajoute l'auteur, pour entamer le combat,
pou;- les retraites , & pour les efearmouches.
Il en ell fouvent parle dans Vhijloire du règne d'Htm
ri H . mais il y en avoit avant le règne de ce prince.
II en ell parle dans Y Extraordinaire des guerres dès
le tems d'Henri II. L'hifloricn Dupleix prétend que
ceux qu'on appelloit carabins de ion tems, etoient
ceux-là même auxquels fous le règne d'Henri II. on
donnoif le nom d'itrgoulets ,• & Daubigné dit que ce
ne fut que fous Henri III. que le nom de carabin com-
mença A être bien en ufage pour cette efpece de mi-
lice. M '[far, dit-il, commandait dans les carabins de
Mets, defquels le nom a été depuis plus familier: ce
qu'il y a de certain , c'eft que le fervice des argoulets
ce des carabins étoit fort lemblable.
Cette milice fubfiftoit du tems de Louis XIII. conv
782
C A V
C A V
me nous l'apprenons du fieur de Belon qui écrivoit
fous le règne de ce prince. Il décrit ainii l'armure des
carabins. « Ils auront la cuirafTe ou un pot de falade
» fans autres armes défenfives , & pour armes offen-
» fives , une grofle arquebufe à rouet , de trois pies
» ou un peu plus , ayant gros calibre , & l'épée au
» piftolet court. C 'eft, ajoùte-t-il , comme le Roi lui-
» même les a inititués ».
Il fe trompe s'il entend par-là que le roi Louis XIII.
eût créé cette milice ; mais il veut dire apparemment
que ce prince avoit ainfi réglé leur armure.
Il continue: « ils porteraient , fi l'on vouloit, les
» cafaques & les gamâches, pour mettre mieux pied
» à terre au befoin : étant ainii armés & montés , ils
» peuvent combattre à pie 6c à cheval, Se fe mêler
» avec la cavalerie ».
Les carabins qui, fous le règne d'Henri IV. ne fai-
foient point un corps féparé , mais étoient joints aux
compagnies de cavalerie légère , fous le commande-
ment des capitaines de ces compagnies , ne formè-
rent des régimens entiers que fous Louis XIII. Il s'en
trouve dans l'état de l'armée de l'an 1643 » juiqu'à
douze régimens étrangers. On fit fous ce règne pour
les carabins, ce qu'on fit fous celui de Louis le grand
pour les carabiniers : on les iépara de la cavalerie-lé-
gère pour- les mettre en corps : de même que de tou-
tes les compagnies de carabiniers qui étoient dans les
régimens de cavalerie légère , on forma le régiment
des carabiniers commandé aujourd'hui par M. le
Prince de Dombes. Voye{. Carabiniers.
Les plus fameux carabins du règne de Louis XIII.
forent les carabins dArnaut, qui étoit mettre de
camp d'un de ces régimens. Ce régiment étoit de on-
ze compagnies, gens déterminés, comme le turent
depuis les dragons de la Ferté. Alors , félon le même
état de 1643 , la garde des généraux d'armées étoit
ordinairement de carabins. Il eit marq'ué que le ma-
réchal de la Meilleraye avoit pour fa garde trente
carabins ; le maréchal de Chatillon autant; le duc
d'Angoulême , qui commandoit en Picardie , autant.
M. du Hallier lieutenant général, en avoit vingt; le
duc d'Enguien en avoit auffi.
Il y avoit une charge de général des carabins; elle
fubfifta même depuis la fupprefiion des carabins , qui
ne fe fit que plufieurs années après la paix des Pyré-
nées ; car il eft fait encore mention de carabins dans
une ordonnance de LouisXIV. du mois de Novembre
de l'an 1665.
M. le comte de TefTé , depuis maréchal de France,
acheta cette charge du comte de Quincé l'an 1684;
la fit fupprimer par le Roi , & obtint en même tems
peur lui la charge de meftre-de-camp général des
dragons.
La charge de général des carabins étoit la même
que celle de meftre-de-camp général des carabins ,
dont il eit parlé dans l'ordonnance de Louis XIII. du
26 de Mars 1626. Il prenoit fon attache du colonel
général de la cavalerie, & étoit de fa dépendance.
C'eit pourquoi M. de BafTompierre, dans fa critique
de f/iijloire de Dupleix , le reprend aigrement à fon
ordinaire, de ce qu'il avoit appelle le fieur de Gié
colonel général des carabins. « Cet ignorant , dit-il, ne
» fait pas que les carabins font du corps de la cava-
» lerie, & que ce n'étoit que leur meftre-de-camp.
» Art. tiré de VHifl. de la mil. Franc, du P. Daniel»
La cavalerie dans une armée rangée en bataille , fe
place ordinairement iur les ailes , & l'infanterie au
centre ; elle y forme toujours difterens corps appelles
efeadrons. Voye^ ESCADRON.
La cavalerie eit abfoiument utile à la guerre pour
les détachemens , les efeortes , Se pour combatti e en
plaine : mais le trop grand nombre peut être nuiii-
ble; car la grande confommation de fourrage qu'il
exige , peut iôuvent obliger un général de changer
de camp ou de pefition, lorfqu'il eft dans un porte
avantageux , pour trouver le moyen de faire fubfif-
ter fa cavalerie. M. Folard prétend que le grand nom-
bre de cavalerie ne vient que du détaut de difeipline
& d'intelligence militaire. (Q)
CAVALIER , f. m. {dans C Art. milit.) eft un foldat
qui combat à cheval ; on l'appelle auffi maître: on dit
indifféremment une telle compagnie étoit de quarànu
cavaliers ou de quarante maîtres.
Ce mot vient du Latin cahallus : on trouve cabal*
larius & cavallarius dans la baffe Latinité.
Un bon cavalier eit celui qui a bien foin de fon
cheval & de fon équipage ; qui fe tient propre 6c qui
obierve exactement les ordres qu'on lui preferit. Il
doit avoir toujours dans fes befaces du crin pour rem-
bourcr fa felle , qu'il doit vifiter toutes les fois qu'il
deicend de cheval, Se voir fi rien n'y manque.
Quand il eit commandé, il ne doit jamais quitter
fa troupe fans la permiifion de fon officier; il- doit
auifi toujours avoir de quoi tirer , 6c fes armes en
bon état.
Quand il eft dans un pofte , & qu'on lui a configné
un ordre, il ne doit point faire difficulté de tirer fur
ceux qui y contreviennent , même fur un général ,
tout comme fur un autre ; & il doit avertir les offi-
ciers de ce qui fe pafTe aux environs de fon pofte.
Un cavalier qui va au fourrage ne doit jamais ou-
trer fon cheval à force de courir: il doit s'en tenir à
celui qu'il peut prendre le plus aifément , Se ne pas
s'imaginer que le fourrage le plus éloigné feit le meil-
leur.
CAVALIER, en terme de Fortification , eft une élé-
vation de terre qu'on pratique fur le terre-plein du
rempart pour y placer des batteries qui découvrent
au loin dans la campagne, 6c qui incommodent l'en-
nemi dans fes approches.
Ils fe conftruifent le plus ordinairement dans le
milieu des battions pleins. En ce cas ils ont la même
figure que le baftion. On obierve que le côté exté-
rieur de leur rempart foit éloigné de trois ou quatre
toiles du côté intérieur du parapet ou faces du baf-
tion, Se de quatre ou cinq toiles de celui de fes flancs.
On place auiïi des cavaliers fur les courtines : mais
alors ils font ronds ou quarrés. il y a plufieurs villes
comme Landau 6c Luxembourg où l'on en trouve
en-dedans' la place dans le voiiinage du rempart;
mais ces fortes de cavaliers ne peuvent être d'ufage
que dans les premiers jours de fiéges.
Lorfqu'une place fe trouve commandée , on y éle-
vé auffi quelquefois des cavaliers , comme M. de Vau-
ban l'a fait à Maubeuge , pour féparer des comman-
demens. Les cavaliers tiennent lieu dans ce cas de
traverfes. Voyt^ Traverse.
Les avantages qu'on tire des cavaliers peuvent fe
réduire à quatre principaux.
i°. A garantir, comme on vient de le dire, de l'en-
filade.
20. A obliger l'affiégearit d'ouvrir la tranchée à une
plus grande diltanec de la place, pour ne pas fe trou-
ver ious le feu du cavalier.
30 A découvrir le dedans ou l'intérieur des tran-'
chées , Se à les enfiler par des coups plongés.
40. A doubler le feu des baitions fur lefquels les
cavaliers font conitruits.
Cavalier de tranchée, eft dans t attaque-
des places une élévation de gabions , de faicines, Se
de terre, que l'aifiégeant pratique à la moitié ou
aux deux tiers du glacis , vers fes angles faillans ,
pour découvrir Si enfiler le chemin couvert.
Le parapet des cavaliers de tranchée eft de 8 ou 9
pies plus élevé que le glacis. On y pratique trois
banquettes : le foldat placé fur la fupérieure , le trou-
ve fufnfamment élevé pour plonger dans le chemin
couvert. Lorfque cet ouvrage a toute fa perfeÉUon,
C A V
il eft bien difficile que l'ennemi puifTe fe montrer
clans le chemin couvert ; il s'y trouve trop expofé
au feu des cavaliers ; mais ils ne peuvent fe conftrui-
re qu'autant qu'ils font protégés de batteries à rico-
chet qui enfilent exactement le chemin couvert. Le
Blond, Attaque des places. Voyer^ leplan & le profil d'un
Cavalier de tranchée , PI. XVI. de V Art milit. fig. J .
(Q)
Cavalier , f. m. en terme de manège , fignifie
un homme qui eft bien à cheval, qui le manie bien,
qui entend les chevaux. On dit auffi un bel homme de
cheval.
Cavalier, f. m. ( Commerce.} monnoie d'argent
qui fe fabriquent autrefois en Flandre dans la forme
des bajoirs , (voyez Bajoir) du titre de neuf deniers
onze grains ; le cavalier vaut argent de i rance, une
livre iépt fous deux deniers.
CAVALLE (la) (Géog.) ville de Grèce en Ma-
cédoine, au bord de l'Archipel.
Cavalle, on appelle ainfi la femelle du che-
val. Voyei Jument & Cheval.
CAVALLERIE (la) (Géog.) petite ville de Fran-
ce en Rouergue, vers les frontières des Cévenes.
CAVALLOS, f. m. (Commerce.} monnoie de bil-
lon , frappée en Piémont en 1 6 1 6 , à un denier vingt-
un grain de fin. Ce nom lui vient d'un cheval qu'elle
avoit pour écuiTon ; une croix étoit Ion effigie : le
cavallos vaut neuf deniers un huitième.
CAVAN ou CAVON-, (Géog.) contrée d'Irlande,
avec titre de comté , clans la province d'Ulfter , dont
la capitale porte le même nom.
CAVAN , (Commer.) mefure dont on fe fert dans
quelques-unes des îles Philippines , & fur-tout à Ma-
nille , pour mefurer les grains & les légumes , & en-
tr'autres le riz. Le cavan de riz pefe cinquante livres
poids d'Efpagne. Diclionn.de Commerce, tom. II. pag.
134- {G)
CAUB, (Géog.') petite ville d'Allemagne, fur le
Rhin, vis-à-vis de Bacharach , dans le duché de Sim-
itiern.
CAUCALIS HERISSONNÉE, fnb. f. (ffift. nat.
bot.) genre de plante à fleurs en rofe, difpofees en om-
belles , & composées de plufieurs pétales inégaux £z
foutenus par le calice , qui devient un fruit compofé
de deux femences oblongites , voûtées par le dos ,
cannelées profondément dans leur longueur en feuil-
lets dentelés &c hérhTés de piquans : ces femences
font plates du cote par oii elles fe touchent. Tour-
nefort , Infi. rei herb. Foye^ Plante. (/ )
* CAUCASE, f. m. (Myth. & Géog.) chaîne de
montagnes , qui commence au-defïus de la Colchide
èv finit à la mer Cafpiennc. C'cft là que Promcthee
enchaîné eut le foie déchiré par un vautour ou par
un aigle. Les habitans de cette contrée prenant , fi
l'on en croit Philoftrate , cette fable à la lettre , fai-
foient la^uerre aux aigles, dénichoient leurs petits,
& les perçoient avec des flèches ardentes; ou l'in-
terprétant , félon Strabon , de la condition malheu-
reufe des humains, ils fe mettoient en deuil à la naif-
fance des enfans, 6c le réjoiïilîoient à leurs funérail
les. Il n'y a point de Chrétien vraiment pénétre dei
vérités de fa religion, qui ne dût imiter l'habitant du
caucafe , & fe féliciter de la mort de les enfans, La
mort aflure à l'enfant qui vient de naître une
éternelle , ce le fort de l'homme qui paroîl .i\ oir vé-
cu le plus faintement eft encore incertain. Que notre
i eligion eft tout à la fois terrible & confolante !
CAUCHEMAR , f. m. (Med.) nom populaire que
l'on a donne à une incommodi les mé-
decins Grecs ., hialtes, ce par les Latins incubus.
Ceux qui ont coutume de dormir fur ';.
charger leur eftomac d'alimens lourds & difficiles à
digérer , font fort lujcrs à cette incommodité.
C A V
783
Pendant le fommeil ils croyent avoir la poitrine
chargée d'un poids conlidérable , & ils ont fouvent
l'imagination frappée d'un fpe&re ou d'un phantô-
me qui leur coupe la refpiration.
Cette incommodité ne vient point , comme on fe
l'étoit imaginé autrefois , de vapeurs épaules qui
remplifîent les ventricules du cerveau , mais plutôt
d'une trop grande plénitude de l'eftomac , qui s'op-
pofe au mouvement du diaphragme , & par confé-
quent à la dilatation de la poitrine , fans laquelle on
ne peut refpirer que difficilement. Cependant d'au-
tres prétendent que cette incommodité fi pénible eft
occafionnée par une convullîondesmufcles de la ref-
piration.
Etmuller obferve que les Arabes appellent cette
incommodité une épilepjïe nocturne , parce ou'étant
portée à un certain degré, elle dégénère en épilep-
fie ; & en effet , le cauchemar eft le prodrome de l'é-
pilepfie dans les jeunes gens, comme il eft l'avant-
coureur de l'apoplexie dans ies perfonnes d'un âge
avancé. (A')
CAUCAUBARDITES, fub. m. pi. (Hift. eccléf.)
fecte d'hérétiques dans le vi. liecle, ainfi nommés
d'un certain lieu où ils firent leurs premières aiTem-
blées ; ils fuivoient les erreurs de Severe d'Antioche
& des Acéphales. Nicephore, liv. XVII I. chap. xlix.
Baronius , A. C. 535. (G)
CAUDA LUCIDA, (AJlron.) la queue du lion,
eft une étoile de la première grandeur. Sa longitude
efl de 16 y °, 53' > fa latitude de iz° , 16' , fon afctn-
Jïon droite IJ3°, Cj'. Voye^ LlON. (O )
CAUDATAIRE , f. m. (Hifi. eccléf.) eft un clerc
ou aumônier qui porte le bas de la chappe du pape
ou d'un cardinal. (H)
CAUDÉ , adj. en terme de Blafon , fe ditdesétoi-
les & des comètes qui ont une queue. (V)
CAUDEBEC , f. m. forte de chapeau fait de laine
d'agnelin, de poil, ou de duvet d'autruche, ou de poil
de chameau. On les nomme ainfi du nom de la ville
de Caudebec , en Normandie , 011 il s'en fabrique une
grande quantité. Voye- Chapeau.
Caudebec , (Géog!) ville de France , en Norman-
die, capitale du pays de Caux, remarquable par les
manufactures de chapeaux.
CAUDES-COSTES, (Géog.) petite ville de
France , dans l'Armagnac , à une lieue de la Garonne.
CAUDETE, (Géog.) petite rivière d'Efpagne,
dans la nouvelle Caftille , qui fe jette dans le Xucar.
* CAUDIC AIRES, fub. m. pi. (H:jl. atte.) c'eft
ainfi que les Romains avoient nommé les bateliers
de la communauté infatuée pour la navigation du
Xibre. Ce mot vient de codices , an'emblages de plu-
fieurs planches de bois. Parmi les caudicaires il y en
avoit un certain nombre d'emplovés à charger les
grains au port d'Oftie & à les conduire à Rome. V.
l'article Boulanger.
CAUDIEZ, (Géog.) petite ville de France, en
Languedoc, au pic des Pyrénées, fur les frontières
du Rouffillon.
t AL DROT ou COUDROT, (Géog.) petite ^ ille
de France , en Guienne, dans le Bazadois, à l'endroit
où le Drot le jette dans la Garonne.
CAVE, fub. f. en Architecture , elt un lieu \
dans l'étage louterain, qui fert à mettre du vin , un
bois , & autres chofes pour la pro\ ifii n d'une mai-
foi] , d'un hôtel, &c du Latin cm ta, Yitru\ e a]
■ ■; tous les lieux voûtés Ions terre.
: , dans une églife , eft un lieu foùtcrrain ,
i & deftiné à la fépulture. (P)
C yves. On a cru long-tems que ies caves & les au-
tres lieux foùtcn ains etoient plus froids en ete qu'en
. ;>arcc qu'en effet en hyver l'air y paraît beau-
cou > plus chaud que l'air extérieur , <N: qu'en ete il
y paroit plus froid. De grands phylicicns avoient
c
A V
i 11 V
même trouvé des railons allez plaufiblcs de ce phé-
nomène ; car rien n'e/t plus facile que de rendre rai-
ion de tout avec des explication s vagues. Mais de
plus grands phylîciens ont trouvé depuis que le fait
n'étoït pas vrai. Le moyen de s'en alïùrer eft de fuf-
pendre un thermomètre dans une cave pendant toute
une année , on trouvera que la cave eft plus chaude
en été qu'en hy ver , mais qu'il n'y a pas une grande
différence entre le plus grand chaud 6c le plus grand
froid. Il s'enfuit de-là que, quoique les caves nous
femblent être plus froides en été , elles ne le font
pourtant pas, & que cette apparence eft trompeufe.
Voici la raifon qu'en donne M. Muffchenbroek.Enété
notre corps fe trouvant expofé au grsnd air devient
fort chaud , le lang acquiert une chaleur de 92 ou 94
es ; la chaleur du grand air eft auffi alors de 70
à ùo degrés , au lieu que l'air qui fe trouve dans ce
tems-là renfermé dans les caves n'a qu'une chaleur
de 4$ à 50 degrés, de forte qu'il eft beaucoup plus
froid que notre corps & que Pair extérieur : ainfi ,
dès qu'on entre dans une cave lorfqu'on a fort chaud ,
on y rencontre un air beaucoup plus froid que l'air
extérieur , ce qui fait que la cave nous paroit alors
froide. En hyver au contraire lorfqu'il gelé , le froid
de l'air extérieur eft depuis o jufqu'à 32 degrés , au
lieu que la chaleur de l'air de la cave fe trouve en-
core de 45 degrés ; ainli nous trouvant d'abord ex-
pofés à l'air froid extérieur , qui fait impreffion fur
•notre corps ce qui le refroidit en effet , nous n'en-
trons pas plutôt dans une cave , que nous y fentons
un air beaucoup plus chaud, qui ne manque pas de
réchauffer auffi notre corps ; ce qui eft cauie que
l'air de la cave nous paroit alors chaud. Cependant
nous ne pouvons pas lavoir , ni juger par la feule
impreffion que l'air fait fur nous , s'il eft effective-
ment alors plus chaud qu'en été ; ce n'eft qu'à l'aide
du thermomètre , que nous pouvons être allures li
l'air eft plus chaud en été qu'en hyver. Muflch. Eff.
de Phyfiqiu. ( O )
Cave , adj. ( Lune. ) Chronol. On appelle lune cave
un mois lunaire de 29 jours. V. Mois & Lune. (O)
Cave , en Anatomie , eft le nom de deux grofles
veines qui fe déchargent dans l'oreillette droite du
cœur ; on dit ordinairement la veine-cave en général :
alors on confidere la réunion de ces deux veines
comme une feule veine. Voye^ Cœur & Oreil-
lette.
La veine-cave fe divife en afeendante & défendante :
'.wtc eft ceile qui vient des parties inférieures.
Elle c'a ainfi appellée , parce que le fang qui vient
au cœur par cette veine , monte : la défendante eft
celle qui vient des parties fupérieures : elle eft ;
appellée , parce que le lang qu'elle apporte de la tête
& autres parties fupérieures , defeend. Foye^ Sang
& Circulation.
Il y a des auteurs qui donnent le nom de veine-
cave J'upérieure à la dej et ridante , & de veine-cave infé-
rieure à V afeendante.
La veine-cave fupérieure eft formée par la réunion
des deux veines* loûclavieres , environ vis-à-vis &
derrière le cartilage de la première vraie côte du
côté droit. Elle fe porte enfuite obliquement vers la
gauche , & entre dans le péricarde où elle eft placée
au côté droit de l'aorte , & occupé la longueur de
deux doigts environ ; après quoi , elle entre dans
l'oreillette droite. A'oyêçSoûcLAviERE, Péricar-
de , &c
La veine-cave inférieure , eft cette groffe veine qui
paroit formée de la réunion des deux veines ilia-
ques ; elle monte de la partie fupérieure de l'os fa-
crum fur les vertèbres des lombes ; elle s'incline un
peu à droite , vient palier derrière le foie par fa
grande échancrure ; elle peice le diaphragme, entre
dans le péricarde , & après un trajet d'environ trois
C A V
à quatre lignes , elle entre dans l'oreillette droite du
cœur. Foyei ILIAQUE , DIAPHRAGME , OREIL-
LETTE , &C.
Elle reçoit dans tout ce trajet les veines facrées ^
les veines lombaires , les veines Ipermatiques , les
veines rénales , les veines adipeufes , les veines hé-
patiques , les veines diaphragmatiques inférieures ,
ou veines phréniques. Voye^ Spermatique , Adi-
peux , HÉPATIQUE , &C. (L )
Cave , (parmi les Confifeurs} eft une pièce porta-
tive, en manière de caille faite de 1er blanc , avec
quatre ou fi'x pots de même métal , tenant chacun
une pinte , & qui s'emboîtent toujours dans la caille ;
il» font retenus par un petit rebord qui eft au fond.
On s'en lert pour glacer toutes fortes d'eaux & de
crèmes. Voye^ GLACE , & la PI. du Confifeur. La fi-
gure 4. repréfente le corps de la cave qui contient
les pots ; 3 eft le couvercle général ; 2 eft le
couvercle d'un des pots qui font dans la cave. On
entoure les pots de glace pêle-mêle avec du fel am-
moniac , au défaut de fel ordinaire ; on couvre aulîi
de ce mélange les couvercles des pots & le couver-
cle de la cave : ce qui produit un froid fi grand , que
les liqueurs contenues dans les pots font glacées en
peu de tems.
On donne le même nom de cave , à un coffret au-
dedans duquel on a pratiqué foit en marqueterie ,
foit en carton & velours , ou autrement , des loges
oii font placés des flacons pleins de différentes eaux
odoriférantes.
Cave , ( Géog. ) une des îles Orcades, au nord
de l'EcoiTe.
* CAFE A , f. f. ( Wift. anc. ) c'eft ainfi qu'on ap-
pelloit les loges fouterraines où l'on gardoit les bêtes
de l'amphithéâtre ; l'amphithéâtre même s'appella
cavea ; & l'on défigna auffi par le même terme les
plus hauts degrés du théâtre que le peuple occu-
poit. Foyei Amphithéâtre & Théâtre.
CAVEAU , crypta, f. m. {Hifl. anc. & mod. ) ef-
pece de voûte foùterraine , conftruite principalement
fous une églife , & deftinée à la lépuîture de quel-
ques familles ou perfonnes particulières. Foyei
Tombe.
Ce mot fe dit en Latin crypta , qui eft formé du
Grec KpvTna , abfcondo , je cache; d'où eft venu le-
mot iipwTTTi) , crypta.
S. Ciampini , dans la defeription qu'il nous a
donnée des dehors du Vatican , parle des caveaux ou
catacombes de S. André, de S.Paul. Voye^ Cata-
combe.
Vitruve fe fert du mot crypta, pour exprimer la
partie d'un bâtiment qui répond à notre cellier :
Juvenal s'en lert pour exprimer une cloaque.
De-là eft venu crypto-porticus , qui fignifie un lieu,
foùterrain voûté , qui fert comme d'une efpece de
mine ou de palîage dans les vieux murs.^Le même
mot le dit encore d'une décoration mife à l'entrée
d'une grotte. Voye{ Grotte.
Crypta , eft auffi en ufage chez quelques-uns de
nos anciens écrivains , pour lignifier une chapelle, ou
un oratoire fous terre. (/* )
CAVEÇON , f. m. ( terme de Manège. ) efpece de
bride ou de muferolle qu'on met fur le nez du che-
val , qui le ferre , le contraint , & lert à le dompter,
le dreffer , <k le gouverner. Ce mot vient de l'Eipa-
gnol cabeca, tête.
Les caveçons qui fervent à dreffer les jeunes che-
vaux , font ordinairement de fer , & faits en demi-
cercle de deux ou trois pièces affemblées par des
charnières. Il y en a de tors & de plats, d'autres
creux dans le milieu & dentelés comme des Icies ,
qu'on appelle mordans ; mais ces derniers font au-
jourd'hui abfolument bannis, des académies. Les ca-
yeçom
C A V
C A V
78?
veçohs de corde & de cuir, fervent à faire paffei
les chevaux entre deux piliers.
CAVELAN , ( Géog. ) royaume d'Afie dans les
Indes , tributaire de celui de Pégu.
CAVELIN , f. m. ( Commerce. ) on nomme ainfi
à Amfterdam ce que nous appelions en France un
lot en termes de commerce.
Dans les ventes au baffin qui fe font à Amlter-
dam , c'eft-à-dire , dans les ventes publiques où les
marchandifes fe crient en prélènce des vendu-meel-
ters ou commiffaires députés des bourguemeftres ;
il y a certaines lbrtes de marchandifes dont le ven-
deur fait les cavdins aulîi grands ou auffi petits qu'il
le juge à propos , par rapport ou à leur valeur ou à
la quantité qu'il en veut vendre ; &c d'autres dont
les cavelins font réglés par l'ordonnance du bourgue-
meftre.
De la première forte font la cochenille , les foies,
l'indigo , le poivre , le caffé , le lucre de Brefil , les
prunes , & plufieurs autres : de la féconde font les
Vins , les eaux-de-vie , le vinaigre. Ces cavdins fe
règlent par balles, cailles, ferons, pièces, demi-
pièces ; & ceux des liqueurs , par tonneaux , ban-
ques , bottes , pipes , aams , avec tant de plokpenin,
c'cll-à-dire de denier à Dieu , par cavelin. Voye^-en
le détail dans le Diclionn. du commerce , tome II. page
CAVENTENIER , f. m. ( terme de Corderie. ) eft
une petite corde compofée defix, neuf, douze , ou
dix-huit fils : cette forte de aulîiere fe fabrique à trois
torons ; par exemple , fi on veut faire un caventenier
de douze fils , on en forme trois torons de quatre fils
chacun ; on leur donne au moyen du roiiet le tors
convenable , & enfuite on commet enfemble les
trois torons.
C AVER , verb. neut. ( en Efcrime. ) eft le contrai-
re (Toppofer. Voye^ Opposition. C'eft par confé-
quent s'expofer à recevoir un coup d'épee dans le
même tems qu'on le porte.
On appelle improprement quarte fur lesarmesyYzc-
tion de caver dehors & fur les armes ; car pour caver,
il faut porter une eftocade de tierce , ayant le bras
& la main droite placés & tournés comme pour pa-
rer en quarte , ou porter une eftocade de quarte ,
ayant le bras &C la main droite placés & tournés
comme pour parer en tierce.
CAVERNE , f. f. ( Hifl. nat. & Phyfiq. ) réduit
obfcur & foùtcrrain d'une certaine étendue.
Les cavernes fe trouvent dans les montagnes , &
peu ou point du tout dans les plaines : il y en a beau-
coup dans les îles de l'Archipel , & dans plufieurs au-
tres îles ; & cela parce que les îles ne font en géné-
ral que des deiî'us de montagnes. Les cavernes fe for-
ment, comme les précipices, par l'afTaifl'ement des
rochers, ou comme les abyfmes, par l'action du feu ;
car pour faire d'un précipice ou d'un abyfme une
caverne , il ne faut qu'imaginer des rochers contre-
butes èvfaifant voûte par-deflùs; ce qui doit arriver
très-fouvent lori qu'ils viennent à être ébranlés &
déracinés. Les cavernes peuvent être produites par
les mêmes caufes qui produiient les ouvertures , les
ébranlemcns , & les affaiffemens des terres ; èc ces
caufes font les explorions des volcans , l'action des
vapeurs foùterraincs , & les tremblemens de terre ;
car ils font des boulevcrfemcns & des éboulemcns
qui doivent néceffairement former des cavernes & des
ouvertures de toute efpece. ) ;. eçV< lcan , &c.
La caverne de faine Patrice en Irlande n'eft pas auffi
coniidérable quelle cil fameufe; il en eft de même
de la grotte du chien près de Naples , & de celle qui
jette du feu dans la montagne de Beni-gua/eval, au
royaume de Fez. Dans la province de Darby en An-
gleterre, il y a une grande caverne, tort coniidérable,
& beaucoup plus grande que la fameufe cavt
Tome II.
Bauman auprès de la forêt Noire , dans le pays dé
Brunfwick. On a appris par une perfonne auffi ref-
peclable par l'on mérite que par l'on nom ( Mylord
comte de Morton ) que cette grande caverne, appel-
lée DivïCs-hole ( trou du diable ) préfente d'abord une
ouverture fort confidérable , comme celle d'une très-
grande porte d'églife ; que par cette ouverture il
coule un gros ruilleau ; qu'en avançant , la voûte de
la caverne le rabaiffe fi fort , qu'en un certain endroit
on eft obligé , pour continuer fa route , de fe mettre
fur l'eau du ruiffeau dans des bacquets fort plats , où
on fe couche pour paffer fous la voûte de la caver-
ne , qui eft abaiffée dans cet endroit au point , que
l'eau touche prefqu'à la voûte: mais, après avoir
paffé cet endroit , la voûte fe relevé , & on voyage
encore fur la rivière jufqu'à ce que la voûte fe ra-
baifié de nouveau , & touche à la luperficie de l'eau ;
& c'eft-là le fond de la caverne , & la fource du ruif-
feau qui en fort. Il groffit confidérablement dans
de certains tems , & il amené & amoncelle beau-
coup de fable dans un endroit de la caverne qui for-
me comme un cul-de-fac , dont la direction eft diffé-
rente de celle de la caverne principale.
Dans la Carniole , il y a une caverne auprès de
Potpechio , qui eft fort fpacieufe , & dans laquelle on
trouve un grand lac foûterrain. Près d'Adeliperg , il
y a une caverne dans laquelle on peut faire deux milles
d'Allemagne de chemin , & oîi on trouve des préci-
pices très-profonds. Voye^Acl. erud. Lipf.an. 1689.
page 558. Il y a auffi de grandes cavernes 6c de bel-
les grottes fous les montagnes de Mendipp , dans la
principauté de Galles ; on trouve des mines de plomb
auprès de ces cavernes , & des chênes enterrés à 1 5
braffes de profondeur. Dans la province de Glocef-
ter, il y a une très-grande caverne qu'on appelle Pen-
park-hole , au fond de laquelle on trouve de l'eau à
3 1 braffes de profondeur ; on y trouve auffi des fi-
lons de mine de plomb.
On voit bien que la caverne de Devil's-ho!e , &
les autres dont il fort de groffes fontaines ou des ruif-
feaux , ont été creufées & formées par les eaux qui
ont emporté les fables & les matières divifées , qu'on
trouve entre les rochers & les pierreà ; & on auroit
tort de rapporter l'origine de ces cavernes aux ébou-
lemens & aux tremblemens de terre.
Une des plus Ûngulieres &: des plus grandes caver-
nes que l'on connoille , eft celle d'Antiparos , dont M .
de Tournefort nous a donné une ample defeription.
On trouve d'abord une caverne ruftique d'environ 30
pas de largeur, partagée par quelques piliers natu-
rels ; entre les deux piliers qui font fur la droite , il
y a un terrein en pente douce , & enfuite julqu'au
tond de la même caverne une pente plus rude d'envi-
ron 20 pas de longueur : c'eft le partage pour aller à
la grotte ou caverne intérieure; & ce paffage n'eft
qu'un trou fort obfcur , par lequel on ne fauroit en-
trer qu'en fe baiffant , 6c au fecours des flambeaux.
On defeend d'abord dans un précipice horrible, à
L'aide d'un cable que l'on prend la précaution d'at-
tacher tout à l'entrée ; on fe coule dans un autre bien
plus effroyable , dont les bords font fort gliiî'ans , &
répondent fur la gauche à des abyfmes profonds. On
place fur les bords de ces gouffres une échelle, au
moyen de laquelle on franchit, en tremblant, un
rocher tout- à - fait coupé à plomb ; on continue à
glifier par des endroits un peu moins dangereux:
mais dans le tems qu'on fe croit en pays praticable ,
le pas le plus affreux vous arrête tout court , 6c on
s ) cafleroit la tête, fi on n'étoit a\ ertj ou an
les guides. Pour le franchir, il faut le couler lui le
dos le longd'un gros rocher . cv delcendre une échelle
qu'il faut porter exprès ; quand On eft arrive au bas
de l'échelle , on fe rouie quelque tems encore fur des
rochers , 6c enfin on arrive dans la grotte. On compttf
GGggg
786
C A V
trois cents brafles de profondeur depuis la furface de
la terre ; la grotte paroît avoir 40 brafles de hauteur
fur 50 de large ; elle eft remplie de belles & grandes
ftalaftites de différentes formes , tant au-deflus de la
voûte , que fur le terrein d'en bas. Voye?^ le Voyait
du Levant , pag. 188. &fuiv.
Dans la partie de la Grèce appellée Livadie ,
( Achaia des anciens ) il y a une grande caverne dans
une montagne qui étoit autrefois fort fameufe par
les oracles de Trophonius , entre le lac de Livadie
& la mer voifine , qui , dans l'endroit le plus près ,
en eft à quatre milles : il y a 40 paflages foûterreins
à travers le rocher , fous une haute montagne par
011 les eaux du lac s'écoulent. Voye{ Géographie de
Gordon , édit. de Londres Ij33-P<igc IJ9-
Dans tous les volcans , dans tous les pays qui pro-
duifent du foufre , dans toutes les contrées qui font
fujettes aux tremblemens de terre , il y a des caver-
nes. Le terrein de la plupart des îles de l'Archipel eft
caverneux prefque par-tout ; celui des îles de l'Océan
Indien, principalement celui des îles Moluques, ne
paroît être foûtenu que fur des voûtes &c des conca-
vités ; celui des îles Açores , celui des îles Canaries ,
celui des îles du cap Verd, & en général le terrein
de prefque toutes les petites îles , eft à l'intérieur
creux & caverneux en plufieurs endroits ; parce que
ces îles ne font , comme nous l'avons dit , que des
pointes de montagnes où il s'eft fait des éboulemens
confidérables , foit par l'aclion des volcans , foit par
celle des eaux, des gelées, & des autres injures de
l'air. Dans les Cordelières au Pérou, où il y a plu-
fieurs volcans, & où les tremblemens de terre font
fréquens , il y a aufli un grand nombre de cavernes ,
de même que dans le volcan de File de Banda, dans
le mont Ararat, qui eft un ancien volcan, &c.
Le fameux labyrinthe de l'île de Candie n'eft pas
l'ouvrage de la nature toute feule. M. de Tournefort
allure que les hommes y ont beaucoup travaillé, &
on doit croire que cette caverne n'eft pas la leule que
les hommes ayent augmentée ; ils en forment tous
les jours de nouvelles , en fouillant les mines & les
carrières ; & lorfqu'elles font abandonnées pendant
un très-long efpace de tems , il n'eft pas fort ailé de
reconnoître fi ces excavations ont été produites par
la nature, ou faites de la main des hommes. On con-
noît des carrières qui font d'une étendue très-confi-
dérable : celle de Maftricht , par exemple , 011 l'on
dit que 50000 perfonnes peuvent fe réfugier, & qui
eft foûtenue par plus de 1000 piliers , qui ont 20 ou
24 pies de hauteur ; l'épaifleur de terre Se de rocher
qui eft au-deffus , eft de plus de 25 brafles : il y a dans
plufieurs endroits de cette carrière de l'eau & de pe-
tits étangs, où on peut abreuver du bétail, &c. V. Tr.
Phil. abr. vol. II. page 46 3. Les mines de fel de Po-
logne forment des excavations encore plus grandes
que celle-ci. Il y a ordinairement de vaftes carrières
auprès de toutes les grandes villes : mais nous n'en
parlerons pas ici en détail ; d'ailleurs les ouvrages
des hommes , quelque grands qu'ils puiflent être ,
ne tiendront jamais qu'une bien petite place dans
l'hiftoire de la Nature.
Les volcans & les eaux qui produifent des caver-
nes dans l'intérieur , forment aufli à l'extérieur des
fentes , des précipices & des abyfmes. A Cajétan en
Italie , il y a une montagne qui autrefois a été fépa-
rée par un tremblement de terre , de façon qu'il iem-
ble que la divifion en a été faite par la main des
hommes. Les eaux produifent , auflî - bien que les
feux foûterreins , des afïaiflemens de terre confidéra-
bles , des éboulemens , des chûtes de rochers , des
renverfemens de montagnes dont nous pouvons don-
ner plufieurs exemples.
» Au mois de Juin 17 14 , une partie de la monta-
« gne de Diableret , en Valais , tomba lûbitement
C A V
» & tout-à-la-fois entre deux & trois heures après
» midi , le ciel étant fort lerein ; elle étoit de figure
» coniqife ; elle renverfa cinquante -cinq cabanes
» de payfans , écrafa quinze perfonnes , 8c plus de
» cent bœufs & vaches , & beaucoup plus de menti
» bétail , & couvrit de fes débris une bonne lieue
» quarrée ; il y eut une profonde obfcurité caufée
» par la poufliere ; les tas de pierres amafites en bas
» font hauts de plus de trente perches , qui font ap-
» paremment des perches du Rhin , de dix pieds ;
» ces amas ont arrêté des eaux qui forment de nou-
» veaux lacs fort profonds. Il n'y a dans tout cela
» aucun veftige de matière bitumineufe , ni de fou-
» fre , ni de chaiix cuite , ni par conféquent de feu
» foûterrein : apparemment la baie de ce grand ro-
»• chers'étoit pourrie d'elle-même & réduite en pouf-
» fiere». Hijl. de C Acad. des Scienc.pag 4. ann. Ijl5.
On a vu un exemple remarquable de ces affaifle-
mens dans la province de Kent , auprès de Folkfto-
ne : les collines des enviions ont baille de diftance
en diftance par un mouvement infenfible ôc fans au-
cun tremblement de terre. Ces coilincs font à l'inté-
rieur de rochers de pierre & de craie ; par cet affaif-
fement elles ont jette dans la mer des rochers & des
terres qui en étoient voifines : on peut voir la rela-
tion de ce fait dans les Tranjaclions philofophiqu.es s
abreg. vol. IV. pag. zSg .
En 1 6 1 8 , la ville de Pleurs , en Valteline , fut en-
terrée fous les rochers au pié defquels elle étoit fi-
tuée. En 1678 , il y eut une grande inondation en
Gaicogne , caufée par l'affaifiement de quelques mor-
ceaux de montagnes dans les Pyrénées , qui firent
fortir les eaux qui étoient contenues dans les caver-
nes foûterraines de ces montagnes. En 1680, il en
arriva encore une plus grande en Irlande , qui avoit
aufli pour caufe l'arfaiflement d'une montagne dans
des cavernes remplies d'eau. On peut concevoir aifé-
ment la caule de tous ces effets ; on fait qu'il y a
des eaux foûterreines en une infinité d'endroits ; ces
eaux entraînent peu à peu les fables & les terres à
travers lelquels elles paflent , 6c par conféquent elles
peuvent détruire peu à peu la couche de terre fur
laquelle porte cette montagne ; & cette couche de
terre qui lui fert de bafe venant à manquer plutôt
d'un côté que de l'autre , il faut que la montagne fe
renverle : ou fi cette bafe manque à peu près égale-
ment par-tout , la montagne s'affaifle fans fe renver-
fer. Cet article appartient tout entier à M, de Buffon ,
Hijloire naturelle , tome 1. page 544 , &C
CAVERNEUX ( corps ) terme d'Anatomie , qui li-
gnifie la même choie que corps nerveux & corps fpon-
gieux , font deux corps plus ou moins longs & gros,
dont la partie la plus confidérable de la verge eft
compofée. Voye^ Planche Anat. Splanch. fig. 8. lett.
aa , bb & tt.
Leur fubftance interne eft rare & fpongieufe ; &
lorlquelie vient à s'emplir de fang & d'elprits , elle
s'entle & fe dilate , & c'eft ce qui fait la tenfion ou
éreftion de la verge. Voye^ Érection.
Ils font attachés à la branche des os pubis , & à
celle des os ilehion ; ils vont en augmentant de grofi
feur jufqu'à ce qu'ils rencontrent le corps caverneux
de l'urethre , où ils fe joignent en un , ec'font retenus
par le moyen de la cloilon compofée de leurs tuni-
ques externes , & recouverts à l'extrémité par le
gland. Voye^ Gland.
Le corps caverneux de l'urethre eft un troifieme
corps fpongieux de la verge , ainfi appelle parce
qu'il enferme l'urethre, c'eft-à-dire , le canal qui fert
au paffage de l'urine.
Sa figure , contraire de celle des deux corps ca-
verneux , a plus de groffeur aux extrémités , & moins
au milieu ; fa partie fupérieure eft au périnée , &
s'appelle bulbe à caufe de fa figure. Sa membrane ex-
C A V
terne eft mince , & divifée en longueur par une cloi-
fon. Le milieu de ce corps eit à peu près cylindri-
que. Le paffage de l'urine n'eft pas fitué précifément
au centre , mais un peu incliné vers fa partie fupé-
rieure , près du corps du pénis ; fon extrémité inté-
rieure forme en fe dilatant ce qu'on appelle le gland.
Voyt^ Gland.
Les corps caverneux du clitoris font deux corps
nerveux ou fpongieux femblables à ceux du pénis ,
qui prennent leur origine des deux côtés de la par-
tie inférieure de l'os pubis, & s'uniffant enfemble ,
forment le corps du clitoris comme dans l'homme ils
forment celui de la verge. Voye^ Clitoris.
Il eit vrai que le clitoris n'elt pas percé au milieu
• comme le pénis , mais les corps caverneux ont une
cloifon ou léparation membraneufe qui règne tout
du long entre deux, & qui les divife depuis le gland
jufqu'à l'endroit voifin de l'os pubis , oii ils fe parta-
gent en deux branches qu'on appelle branches du cli-
toris , crura clitoridis.
hcsjînus caverneux de la dure-mere Ou finus laté-
raux de l'os fphénoide , font des réfervoirs litués aux
parties latérales de la felle fphénoidale qui , outre le
fang qu'ils contiennent , renferment encore des vaif-
feaux & des nerfs. Voye^ Vaisseau & Nerf. ( L )
CAVERNIECK , ( Gêog. ) petite ville de la Prune
Polonoife , dans la province de Michelow , près de la
rivière de Dribcntz.
* CAVESCO , ( Commerce ) mefure dont on fe
fert en Elpagne , qui répond aux environs de dix-
fept de nos livres.
CAVESSE DE MAURE. Voye^ Cap de Maure
& ROUHAN.
C A VET, f. m. ( Architecture*) du latin cavus ,
creux ; c'eft une moulure concave faifant l'effet con-
traire du quart de rond : cette moulure a meilleure
grâce dans les cimailes intérieures des corniches que
dans les fupérieures, malgré l'exemple du théâtre de
Marcellusoù on l'a employée dans l'ordre dorique :
quelquefois on prend pour cette moulure , l'arc qui
etl foûtenu par un côté du triangle équilatéral inl-
crit , quand on veut qu'elle foit moins reffentie que
le quart du rond ; au relie le goût fait varier fa pro-
fondeur à diferétion.
* CAVIAR , ( Antiquité. ) L'on nommoit ainfi une
longe de cheval que Ton offroit tous les cinq ans pour
le collège des prêtres. On ne nous dit point à quelle
divinité. On faifoit un pareil facrifice tous les ans au
mois d'Octobre au dieu Mars; la victime étoit un
cheval que l'on nommoit October equus. Le rit exi-
geoit que la queue de ce cheval fut tranfportée avec
tant de vîteffe du champ de Mars , oii on la coupoit ,
jufqu'au temple du dieu , qu'il en tombât encore des
gouttes de fang dans le reu , quand on y arrivoit.
Vo\ <.'£ Fefius , Caviares hofliœ.
* CAVIARI SCKARI, (Commerce) c'efl le nom
que l'on donne en Ruffie à des œufs d'elturgeon , que
l'on y prépare de la manière iuivante ; on ote de def-
fus la pellicule qui les enveloppe; on les laupoudre
de tel, & on les huile pendant huit jours dans cet
état ; au bout de ce tems,on y mêle du poivre 6c des
oignons coupés en petits morceaux : on laiiie fer-
menter ce mélange. Les Italiens en tont venir une
grande quantité ; ils le regardent comme un manger
fort délicat : mais on prétend qu'il eit très-mal fain
6c fiévreux.
CAVILLONE, poijfon. Voye^ SURMULET.
CAVIN, f. m. ( Fortification ) eit un lieu creux pro-
pre à couvrir un corps de troupes , & à favorifer les
approches d'une place.
Les cavins qui le trouvent auprès d'une place af-
fiégée font d'un grand a\ antage aux affiégeans; puil-
cpie par leur moyen lis peuvent ouvrir la tranchée ,
C A U
787
çonuruire de* places d'armes, mettre à couvert la
cavalerie , fans être expolés au feu des affrétés. (O)
CAVIN AS , ( Les ) ( Géog. ) peuple de ï'Améri-
que méridionale , dans la province de Charcas.
C A U L E T , ( Géog. ) rivière de France dans le
Languedoc, qui prend fa fource au dijcefe de Caf-
tres.
CAUMONT , ( Géog. ) petite ville de France en
Guienne , dans le Bazadois , fur la Garonne.
CAUNE , ( la ) ( Géog. ) petite ville de France ,
au haut Languedoc , au diocefe de Caftres , fur les
confins du Rouergue. Il y a dans cette province une
autre ville de ce nom , au diocefe de CarcaiTonne.
CAVOLA., {Géog. ) fortereffe d'Italie , dans l'é-
tat de la république de Venife , fur la rivière de
Brente.
* CAURIS , ( Hifl. mod. commerce) efpece de pe-
tites coquilles , qui tient lieu de monnoie dans quel-
ques endroits des Indes orientales.
CAURZIM , ( Géog. ) ville de Bohème , dans le
cercle de même nom , entre Prague & Czallaw.
CAUS*E, 1. f. ( Métaphyf.') En voyant tous les
jours changer les chofes , & en coniïdérant qu'elles
onteu un commencement, nous acquérons 1'
ce qu'on nomme caufe ck effet. La caufe eft tout ce par
l'efficace de quoi une choie eit; & effet, tout tc qui
eft par l'efficace d'une caufe. Toute caufe , par cela
même quelle produit un effet, peut-être appellée
efficiente : mais comme il y a différentes manières de
produire un effet , on diftingue diverfes fortes de
caufes. Il y a des caufes phyfiques , des caufis morales ,
& des caufes infirumen taies. J'appelle caufes phj
toutes celles qui prodiiifent immédiatement par elles-
mêmes leur effet. Je nomme caufes morales" t celles qui
ne le produifent que dépendamment d:-
J:que,de laquelle il émane immédiatement. Les cau-
fes infrumentales ont cela de commun avec le
morales, qu'elles ne produifent pas par elles-mêmes
leur effet , mais feulement par l'intervention d'une
caufe phyfique ; & c'elt pourquoi on donne aux unes
6c aux autres le nom de caufes occafrcnnelles : mais
ce qui met entr'elles beaucoup de différence , c'eft
que, fi les premières ne iont que caufes morales dans
les effets qu'elles produifent occajionnellement , du
moins elles font caufes phyfiques de l'effet par lequel
elles deviennent caufes occafionmlles d'un autre effet;
au lieu que les caufes purement infrumentales n'étant
douées d'aucune force ni d'aucune activité , demeu-
rent toujours renfermées dans la iphere de caufes pu-
rement occasionnelles : telle eft , par exemple , la ma-
tière, qui d'elle-même eit brute, infenfible & in;<cti-
ve. Il n'en eit pas de même des efprits , dont la na-
ture eft d être actits, & par conféquent d'être caufes
phyfiques : il mon ame n'eft que caufe occafionnelle des
divers mouvemens qu'elle tait naître dans l'ame de
ceux avec qui je m'entretiens, du moins elle eit cauft
phyfque de les déterminations particulières.
C'eft ici le lieu d'examiner ( manière l'ame
agit fur le corps : eft-elle c..-;. .
que caufe occafionnelle des divers mouvemens qu'elle
lui imprime? Ici les fentimens des philofophc
partagés ; & l'on peut dire que dar.s e.
les derniers efforts de !.i philofophie pourroient bien
s'épuifer inutilement pour la réfoudre! : s
de l'Harmonie préétabli . ! -
auteur, tranche tout d'un coup la difficulté .
mage que ce fyftème détruife la liberté , ex. qu'il ren-
de douteufe lexiftence du monde corporel. •
cet article , ou nou^ avons démontré l'un & l'autre. Le
fyftème ancien de l'influence réelle de l'ame fur le
corps , détruit par notre Défi
branche fon fi ï( e difciple , ie trou -
neurparlep ni que lui prête ird'hûi
les philolophes Ang!o;s. Dieu, '.^ .me, a
GGbSS 'J
788
C A U
renfermé l'efficace qu'il communique à l'ame en la
créant , dans les bornes du corps organilé auquel il
l'unit ; l'on pouvoir eft limité à cette petite portion
de matière , ôv même elle n'en jouit qu'avec certai-
nes reftrictions qui font les lois de l'union. Ce fyftè-
me moins fubtil , moins rafiné que celui des caufès oc-
cajîonnelles , plaît d'autant plus à la plupart des ef-
prits, qu'il s'accorde affez bien avec le lentiment na-
turel, qui admet dans l'ame une efficace réelle pour
mouvoir la matière: mais ce fyftème qu'on nous don-
ne ici fous le nom radouci dejentiment naturel, ne lé-
roit-il point plutôt l'effet du préjugé ? En effet , ce
pouvoir d'un efprit fini fur la matière , cette influen-
ce qu'on lui fuppofe fur une fubftance fi diffemblable
à la lienne , & qui naturellement eft indépendante de
lui , eft quelque choie de bien oblcur. Les elprits
étant des fubftances actives , & ayant inconteftable-
ment le pouvoir de fe mouvoir ou de fe modifier eux-
mêmes , il eft fans doute plus raifonnable de leur
attribuer une pareille influence fur la matière , que
d'attribuer à la matière , être paffif & incapable d'a-
gir fur lui-même , un vrai pouvoir d'agir fur l'efprit ,
& de le modifier. Mais cela même que je viens d'ob-
ferver eft un fâc*heux inconvénient peur ce fyftème;
il ne peut dès-lors être vrai qu'à moitié. S'il explique
en quelque forte comment le corps obéit aux volon-
tés de l'ame par l'es mouvemens , il n'explique point
comment l'ame obéit fidèlement à Ion toyr aux im-
preffions du corps : il rend raifon de l'action ; il n'en
rend aucune de la fenfation. Sur ce dernier point on
eft réduit à recourir aux caufis occafîonnelks , & à l'o-
pération immédiate de Dieu fur l'ame. Qu'en coûte-
t-il d'y avoir auffi recours pour expliquer l'efficace
des deiîrs de l'ame ? le fyftème entier n'en fera que
plus fimple & mieux afforti.
Ce fyftème, dit -on, n'eft nullement philofophi-
que , parce qu'il remonte droit à la première caufe ;
&c que fans apporter de raifons naturelles des phéno-
mènes qui nous embarraffent , il donne d'abord la
volonté de Dieu pour tout dénouement. Autant nous
en apprendra , dit-on , l'homme le plus ignorant ,
s'il eft confulté ; car qui ne fait que la volonté divine
eft h première caufe de tout? Mais c'eft une caufe unl-
verfelU: or ce n'eft pas de cette caufe qu'il s'agit. On
demande d'un philofophe qu'il affigne la caufe particu-
lière de chaque effet. Jamais objection ne fut plus mé-
prifable. Voulez-vous, difoit lep. Malebranche,qu'un
philofophe trouve des caufes qui ne font point ? Le
vrai ufage de la Philofophie, c'eft de nous conduire
à Dieu , & de nous montrer par les effets mêmes de
la nature , la néceffité d'une première caufe. Quand les
effets font fubord.onnés les uns aux autres , & fournis
à certaines lois , la tâche du philofophe eft de dé-
couvrir ces lois , & de remonter par degrés au pre-
mier principe , en fuivant la chaîne des caufes fécon-
des. Il n'y a point de progrès de caufes à l'infini; &
c'eft ce qui prouve l'exiftence d'un Dieu , la plus
importante ce la première des vérités. La différence
du payfan au philofophe , qui tous deux font égale-
ment convaincus que la volonté de Dieu fait tout ,
c'eft que le philofophe voit pourquoi elle fait tout ,
ce que le payfan ne voit pas ; c'eft qu'il fait difeerner
les effets dont cette volonté eft caufe immédiate , d'a-
vec les effets qu'elle produit par l'interveation des
caufes fécondes , & des lois générales auxquelles ces
caufes fécondes font foûmifes.
On fait une féconde objection plus confidérable
que la première : c'eft , dit-on , réduire l'action de la
divinité à un pur jeu tout-à-fait indigne d'elle , que
d'établir des caufes occaflonnelles . Ces caufes feront en
même tems l'effet & la règle de l'opération divine ;
l'action qui les produit leur fera foûmife. Tant que
cette objection roulera fur les lois qui règlent la com-
munication des mouvemens entre les différentes par-
C A U
ties de la matière , on ne peut nier qu'elle n e folt plan
fible. En effet , fi les corps n'ont aucune activité par
eux-mêmes , les lois du mouvement , dans le fyftème
du P. Malebranche,femblent n'être qu'une jeu : mais
de cet inconvénient ne fubfifte plus dès qu'on appli-
que le fyftème à l'union du corps & de l'ame. Quoi-
que l'ame n'ait aucune efficace réelle fur les corps ,
il fuffit qu'elle ait le pouvoir de fe modifier , qu'elle
foit caufe phyfque de fes propres volontés , pour ren-
dre très-fage l'étabiiffement d'une telle ame comme
caufe occafionnelle de certains mouvemens du corps.
Ici , comme l'utilité de l'ame eft le but, la volonté
de l'ame eft la règle. Cette volonté étant une caufe
phyfique de fes propres actes , eft par-là diltinéte de
la volonté de Dieu même, & peut devenir une re-*
gle & un principe dont la iageffe divine tait dépen-
dre les changemens de la matière. Les volontés d'un
efprit créé , dès-là qu'elles font produites par cet ef-
prit , font une caufe mitoyenne entre la volonté de
Dieu & les mouvemens des corps , qui rend raifon
de l'ordre de ces mouvemens , & qui nous difpenfe
de recourir , pour les expliquer , à la volonté immé-
diate de Dieu : & c'eft , ce lemble, le feul moyen de
diftinguer les volontés générales d'avec les particu-
lières. Les unes & les autres produilent bien immé-
diatement l'effet : mais dans celles-ci la volonté n'a
de rapport qu'à cet effet fingulier qu'elle veut pro-
duire ; au lieu que dans celle-là on peut dire que Dieu
n'a voulu produire cet effet , que parce qu'il a voulu
quelqu'autre chofe dont cet effet eft la conféquen-
ce. C'eft bien une volonté efficace de Dieu qui
me fait marcher : mais il ne veut me faire marcher
qu'en conféquence de ce qu'il a voulu une fois pour
toutes , que les mouvemens de mon corps fuiviffent
les defirs de mon ame. La volonté que j'ai de mar-
cher , eft une caufe mitoyenne entre le mouvement de
mon corps & la volonté de Dieu. Je marche en vertu
d'une loi générale. Mon ame eft vraie caufe des mou-
vemens de mon corps, parce qu'elle eft caufe de fes
propres volontés , auxquelles il a più au Créateur
d'attacher ces mouvemens. Ainfi les actions corpo-
relles avec toutes leurs luites bonnes ou mauvaises ,
lui font juftement imputées ; elle en eft vraie caufe
félon l'ufage le plus commun de ce terme. Cauje ,
dans le langage ordinaire , lignifie une raifon par la-
quelle un effet eft diftingué d'un autre effet , &C non
cette efficace générale qui influe dans tous les effets.
Pour rendre les hommes refponfables de leurs ac-
tions , il importe fort peu qu'ils les produifent ou non
par une efficace naturelle , par un pouvoir phyfique
que le Créateur ait donné à leur ame en la formant,
de mouvoir le corps qui lui eft uni : mais il importe
beaucoup qu'ils foient caufes morales ou libres ; il im-
porte beaucoup que l'ame ait un tel empire fur fes
propres actes , qu'elle puiffe à ion gré vouloir ou ne
vouloir pas ces mouvemens corporels qui fuivent
néceffairement fa volonté. Oftez toute action aux
corps , & faites mouvoir l'univers par l'efficace des
volontés divines, toujours appliquées à remuer la
matière , les lois du mouvement ne feront point un
jeu , dès que vous conferverez aux eiprits une véri-
table efficace , un pouvoir réel de fe modifier eux-
mêmes , & dès que vous reconnoîfrez qu'un certain
arrangement de la matière à laquelle Dieu les unit ,
devient pour eux , par les diverfes feniations qu'il y
excite , une occaiioh de déployer leur activité.
Outre les caufes phyfîques , morales , & inflrumenta-
lee, on en diftingué encore de plufieurs iortes ; la-
voir , la caufe matérielle , la caufe formelle , la caufe
exemplaire , la caufe finale. La caufe matérielle eit le lu-
jet fur lequel l'agent travaille, ou ce dont la chofe
eit formée ; le marbre , par exemple , eft la caufe ma-
térielle d'une ftatue. La caufe formelle, c'eft ce qui dé-
termine une chofe à être ce qu'elle eit , ce qui la dif-
C AU
lingue de toute autre : la caufie formelle s'unifTant à la
matérielle , produit le corps ou le compofé. La caufi
exemplaire , c'eft le modèle que fe propofe l'agent ,
6c cpii le dirige dans ion action : ce modèle eft ou
intrinfeque , ou extrinfeque à l'agent ; dans le pre-
mier cas , il fe confond avec les idées archétypes ,
voye^ Idée ; dans le fécond cas , il fe prend pour
toutes les riches productions de la nature , & pour
tous les ouvrages exquis de L'ART, foy, ces deux arti-
cles. Pour ce qui regarde les caufies finales , conful-
tez l'article fuivant. (AT)
Causes finales. (Métaphyf.) Le principe des
caufies finales confifte à chercher les cauj'es des effets
de la nature par la fin que Ion auteur a dû fe pro-
pofer en produifant ces effets. On peut dire plus
généralement , que le principe des cauj'es finales con-
fifte à trouver les lois des phénomènes par dès prin-
cipes métaphyhques.
Ce mot a été fort en ufage dans la Philofophie
ancienne , où l'on rendoit raifon de plufieurs phéno-
mènes , tant bien que mal , par des principes méta-
phyfioues aufîi tant bons que mauvais. Par exem-
ple on difoit : Peau monte dans les pompes , parce que
la madère a horreur du vuide ; voilà le principe mé-
taphyfique abfurde par lequel on expliquoit ce phé-
nomène. AuiTile chancelier Bacon , ce génie lubli-
me , ne paroît pas faire grand cas de l'ufage des
caufies finales dans la Phyfique. Caufi.irum finalium ,
dit-il , invefiigatio fierilis ejl , & tanquam virgo Deo
confecrata , nil parie. De augm. fcitnt. lib. III. c. v.
Quand ce grand génie parloit ainfi , il avoit fans
doute en vue le principe des confies finales , employé
même d'une manière plus raisonnable que ne l'em-
ployoicnt les fcholalliques. Car l'horreur du vuide ,
par exemple , cil; un principe plus que ftérile , puis-
qu'il eit abfurde. Bacon avoit bien fenti que nous
voyons la nature trop en petit pour pouvoir nous
mettre à la place de ion auteur; que nous ne voyons
que quelques effets qui tiennent à d'autres, & dont
nous n'appercevons pas la chaîne ; que la fin du
Créateur doit prefque toujours nous échapper , &
que c'eiî s'expofer à bien des erreurs que de vouloir
la démêler , & fur-tout expliquer par là les phénomè-
nes. Defcartes a fuivi la même route que Bacon ,
& fa philofophie a proferit les caufies finales avec la
fcholaftique. Cependant un grand philofophe mo-
derne , M. Leibnitz , a eflayé de reflufeiter les caufies
finales, dans un écrit imprimé , Act.erud. i68z ,
fous le titre de Unicum Optiez , Catoptrica , & Diop-
tries principium. Dans cet ouvrage M. Leibnitz le
déclare hautement pour cette manière de philofo-
pher , tk. il en donne un eifai en déterminant les
lois que fuit la lumière.
La nature , dit-il , agit toujours par les voies les
plus iimples 6v les plus courtes ; c'en pour cela qu'un
rayon de lumière dans uu même milieu va toujours
en ligne droite tant qu'il ne rencontre point d'ob-
ftaclc : s'il rencontre une furface folide , il doit fe re-
fléchir de manière que les angles d'incidence & de
reflexion foient égaux ; parce que le rayon obligé
de fe refléchir , va dans ce cas d'un point à un autre
par le chemin le pin-, court qu'il cil poihble. Cela
tê trouve démontré partout. Voye^ Miroir & Ri-
fraction. Enfin ii le globule lumineux rencontre
une furface tranfparente , il doit fe rompre de maniè-
re que les finus d'incidence cv de réfraction foient en
ration directe des vîtefles dans les deux milieux;
parce que dans ce cas il ira d'un point à un autre,
dans le teins le plus court qu'il eil poihble.
M. de M. Leibnitz , s'étoit fervi de
ce même principe pour déterminer les lois de la ré-
fraction ; & il ne faudrait peut-être que ce que nous
venons de dire , pour démontrer combien l'uTage des
caufies finales eit dangereux.
C A U
789
En eftèt , il eft vrai 9.1e dans la réflexion fur les
miroirs plans & convexes , le chemin du rayon eil
le plus court qu'il eft poffible : mais il n'en eft pas
de même dans les miroirs concaves ; & il eft aifé de
démontrer que ibuvent ce chemin, au lieu d'être le
plus court , eft le plus long. J'avoiie que le père
Taquet, qui a adopté dans fa Catoptrique ce princi-
pe du plus court chemin, pour expliquer la réfle-
xion , n'eft pas embarraiTé de la difficulté des miroirs
concaves. Lorfque la nature , dit-il , ne peut pas
prendre le chemin le plus court , elle prend le plus
long ; parce que le chemin le plus long eft unique 6c
déterminé , comme le chemin le plus court. On peut
bien appliquer ici ce mot de Ciceron : Nihil tam ab-
fiurdum excogitari potefi , quod diclum non fit ab aliquo
philofophorum.
Voilà donc le principe des caufies finales en défaut
fur la reflexion. C'eft bien pis fur la réfraction ; car
en premier lieu , pourquoi dans le cas de la réflexion ,
la nature fuit-elle tout à la fois le plus court chemin
6c le plus court tems ; au lieu que dans la refraction ,
elle ne prend que le plus court tems , & laiffe le plus
court chemin ? On dira qu'il a fallu choilir ; parce
que dans le cas de la réfraction , le plus court tems
&c le plus court chemin ne peuvent s'accorder en-
femble. A la bonne heure : mais pourquoi préférer
le tems au chemin? En fécond lieu , fuivant MM. Fer-
mat & Leibnitz , les fmus font en raifon directe des
vîtefTes , au lieu qu'ils doivent être en raifon inver-
fe. Voye^ Réfraction & Action. ReconnoifTons
donc l'abus des caufies finales par le phénomène mê-
me que leurs partifans fe propofem d'expliquer à
l'aide de ce principe.
Mais s'il eft dangereux de fe fervir des caufies fina-
les à priori pour trouver les lois des phénomènes ; il
peut être utile , & il eft au moins curieux de faire
voir comment le principe S accorde
avec les lois des phénomènes , pourvu qu'on ait
commencé par déterminer ces lois d'après des prin-
cipes de méchanique clairs ôc incontestables*. C'eft
ce que M. de Maupertuis s'eft propole de faire à l'é-
gard de la réfraction en pai an m • oire
imprimé parmi ceux dt Facaa 'mie des Sciences , ZJ44.
Nous en avons parlé au mot Action. Il tait à la fin
& au commencement de ce m< toi e,des réflexions
très-judicieufes & très-pb tes fur les caufies
finales. Il a depuis étendu ces rciiexions , & porté
plus loin leur ufage dans les Mémoires de l'Académie de
Berlin, IJ46 , & dans fa Cofmologie. Il montre dans
ces ouvrages l'abus qu'on a fait du principe des cau-
fies finales , pour donner des prêt ;.ftencc de
Dieu par les effet-, le-, moins importans de la nature ;
au lieu de chercher en ■ tind des preuves de cette
vérité fi inconteftable. Cosmologie.
Ce qui appartient à 1 < r, ditM.de
Fontenelle , femble ê pins au-deffus de no-
tre foible portée, que ce qui appartient à l'a pu,
ce. Elo«c de M. Leibnit^. Vbye^ aulfi des reflexions
très-fages de M. de Mairan OIT le principe des caufies
finales^ dans les Mém. acad. 1 7Zj- (°)
Cause , en .V. « tique 6- cnP:\ù.j:ie, fe dit de
tout ce qui produit du changement dans l'état d'un
corps , c'eft-à-dire , qui le met en mouvement ou qui
l'arrête , ou qui altère Ion mouvement.
C'eft une loi générale de la nature . que tout corps
perfifte dans Ion état de rep< s ou de m
julqu'à ce qu'il furvienne qu«
cet état. *%■;- Pro.u ctiij- , c- L o 1 s de la
Nature.
Nous ne connoiffons que C^.u\ fortes
pablesde produire ou d'altérer le mouvement dans
les corps ; les unes viennent -
les corps exercent les uns fur les autres à raifon de
leur impénétrabUité : telles font Pimpulfion èc les ac-
790
C A U
tions qui s'en dérivent , finmc la tracYion. Voyt{
ces Jeux mots. En effet , loriqu'un corps en pouffe un
autre , cela vient de ce que l'un & l'autre corps font
impénétrables ; il en eft de même lorfqu'un corps en
tire un autre : car la tra&ion , comme celle d'un che-
val attaché à une voiture , n'eft proprement qu'une
impullion. Le cheval pouffe la courroie attachée à
ion poitrail ; & cette courroie étant attachée au
char , le char doit fuivre.
On peut donc regarder l'impénétrabilité des corps,
comme une des caufes principales des effets que nous
obfervons dans la nature ; mais ii eft d'autres effets
dont nous ne voyons pas auffi clairement que l'impé-
nétrabilité foit la caufe : parce que nous ne pouvons
démontrer par quelle impullion méchanique ces effets
font produits ; & que toutes les explications qu'on
en a données par l'impulfion , font contraires aux
lois de la méchanique , ou démenties par les phé-
nomènes. Tels font la pefanteur des corps , la force
qui retient les planètes dans leurs orbites, &c Voy.
Pesanteur, Gravitation, Attraction, &c.
C'eft pourquoi , fi on ne veut pas décider abfolu-
ment que ces phénomènes ayent une autre caufe que
Fimpuîiion , il faut au moins fe garder de croire &
de foûtenir qu'ils ayent l'impulfion pour caufe ; il eft
donc néceffaire de reconnoître une claffe d'effets, &
par conféquent de caufes dans lefquelles l'impulfion
ou n'agit point , ou ne fe manifefte pas.
Les caufes de la première efpece , favoir celles qui
viennent de l'impuliion , ont des lois très-connues ; ck.
c'eft fur ces lois que font fondées celles de \apcrcuj-
fion , celles de la dynamique , &c. Voye{ ces mots.
Il n'en eft pas de même des caufes de la féconde
efpece. Nous ne les connoiffons pas ; nous ne lavons
donc ce qu'elles font que par leurs effets : leur effet
feul nous eft connu, & la loi de cet effet ne peut être
donnée que par l'expérience , puifqu'elle ne fauroit
l'être à priori , la caufe étant inconnue. Nous voyons
l'effet, nous concluons qu'il a une caufe : mais voilà
jufqu'où il nous eft permis d'aller. C'eft ainfi -qu'on
a découvert par l'expérience la loi que fuivent les
corps pefans dans leur chute , fans connoître la cau-
fe de la pefanteur.
C'eft un principe communément reçu en Mécha-
nique , & très-ulité , que les effets feont proportionnels à
Iwrs caufes. Ce principe pourtant n'eft guère plus
utile Se plus fécond que les axiomes. Voy. Axiome.
En effet je voudrais bien lavoir de quel avantage il
peut être.
i°. S'il s'agit des caufes de la féconde efpece , qui
ne font connues que par leurs effets , il ne peut ja-
mais fervir de rien. Car fi on ne connoît pas l'effet ,
on ne connoîtra rien du tout ; & fi on connoît l'effet ,
on n'a plus befoin du principe ; puifque deux effets
différens étant donnés , on n'a qu'à les comparer im-
médiatement fans s'embarraffer s'ils font proportion-
nés ou non à leurs caufes.
2 . S'il s'agit des caufes de la première efpece,
c'eft-à-dire des caufes qui viennent de l'impulfion ,
ces caufes ne peuvent jamais être autre choie qu'un
corps qui eft en mouvement , & qui en pouffe un
autre. Or , non - feulement on a les lois de l'impul-
fion & de la perculîion indépendamment de ce prin-
cipe : mais il ferait même poffible , fi on s'en fervoit ,
de tomber dans l'erreur. Je l'ai fait voir , article ng
de mon traité de dynamique , & je vais ie répéter ici
en peu de mots.
Soit un corps M qui choque avec la vîteffe u un
autre corps en repos m ; il eft démontré ( voye- Per-
cussion) que la vîteffe ommune aux deux corps
après le choc fera M,~w Voilà , fi l'on veut, l'effet ;
la caufe eft dans la malle M, animée de la vîteffe u.
Mais quelle fonction de M & de u prendra-t-on pour \
C A U
exprimer cette caufe ? fera-ce Ma , ou Muu , on
M z u , ou M u 3 , etc. & ainfi à l'infini ? D'ailleurs ,
laquelle de ces fondions qu'on prenne pour expri-
mer la caufe , la vîteffe produite dans le corps m va-
riera à mefure que m variera , & ne fera point par
conféquent proportionnelle à la caufe , puifque M &c
u reftant conftans , la caufe refte la même. On dira
peut-être que je ne prends ici qu'une partie de l'ef-
fet , favoir la vîteffe produite dans le corps m , &
que l'effet total eft j^-t~ + u\m ' c'e^ " >d ' ^ire *a
fomme des deux quantités de mouvement , laquelle
eft égale & proportionnelle à la caufe Mu. A la bon-
ne-heure. Mais l'effet total dont il s'agit , eft com-
polède deuxquantités de mouvement, qu'il faut que
je connoiffe léparément ; & comment les connoî-
trai-je.avec ce principe, que Y effet efe proportionnel à
fa caufe ? Il faudrait donc divifer la caufe en deux par-
ties pour chacun de deux effets partiels : comment fe
tirer de cet embarras ?
Il ferait à fouhaiter que les Mëchaniciens recon-
nuffent enfin bien diftinftement que nous ne con-
noiffons rien dans le mouvement que le mouvement
même , c'eft-à-dire l'efpace parcouru & le tems em-
ployé à le parcourir , & que les caufes mètaphyfiques
nous font inconnues ; que ce que nous appelions cau-
fes , même de la première efpece, n'eft tel qu'impro-
prement ; ce font des effets defquels il refaite d'au-
tres effets. Un corps en pouffe un autre , c'eft-à-dire
ce corps eft en mouvement , il en rencontre un au-
tre , il doit néceffairement arriver du changement à
cette occafion dans l'état des deux corps , à caufe de
leur impénétrabilité ; l'on détermine les lois de ce
changement par des principes certains , & l'on re-
garde en conféquence le corps choquant comme la
caufe du mouvement du corps choqué. Mais cette
façon de parler eft impropre. La caufe mètaphyfiquc ,
la vraie caufe nous eft inconnue, foye^ Impulsion.
D'ailleurs quand on dit que les effets font propor-
tionnels à leurs caufes, ou on n'a point d'idée claire de
ce qu'on dit , ou on veut dire que deux caufes , par
exemple, font entr 'elles comme leurs effets. Or, fi
ce font deux caufes métaphyfîques dont on veut par-
ler, comment peut-on avancer une telle affertion ?
Les effets peuvent fe comparer , parce qu'on peut
trouver qu'un efpace eft double ou triple , &c. d'un
autre parcouru dans le même tems: mais peut -on
dire qu'une caufe mètaphyfiquc , c'eft-à-dire qui n'eft
pas elle-même un effet matériel , & pour ainfi dire
palpable , foit double d'une autre caufe mètaphyfiquc
C'eft comme fi on difoit , qu'une fenfation eft double
d'une autre ; que le blanc eft double du rouge , &c.
Je vois deux objets dont l'un eft double de l'autre :
peut-on dire que mes deux fenfations font propor-
tionnelles à leurs objets ?
Un autre inconvénient du principe dont il s'agit ,
c'eft le grand nombre de paralogilmes dans lequel
il peut entraîner , lorfqu'on fait mal démêler les cau-
fes qui fe compliquent quelquefois plufieurs enfem-
ble , pour produire un effet c;ui paraît unique. Rien
n'eft fi commun que cette mauvaife manière de rai-
fonner. Concluons donc que le principe dont nous
parlons eft inutile , & même dangereux. Il y a beau-
coup d'apparence que fi on ne s'étoit jamais avifé
de dire que les effets font proportionnels à leurs 'cau-
fes , on n'eût jamais dilputé fur les forces vives. V^oy.
Force. Car tout le monde convient des effets. Que
n'en reftoit-on là ? Mais on a voulu fubtililer , & on
a tout brouillé au lieu d'éclaircir tout. ( O )
Cause pp.OCATARCTIQUE , en Médecine , figni-
fîe la caufe ou l'occalion originale , primitive , ou
préexiftante d'un effet.
Ce mot vient du Grec , Trâona-Tetf ••''<■".'; , qui eft for-
mé du verbe <Epozcncîf>xa>> je préexifee , je vais .:
Telle eft , par exemple 3 une maladie qui s'unit &:
CAU
coopère avec quelque autre maladie dont elle eft
•fuivie. Ainfi lorfque la colère ou la chaleur du cli-
mat dans lequel on vit , donne aux humeurs une dif-
pofition qui produit la fièvre , cette dilpohtion elt la
caufe immédiate de la fièvre ; & la colère ou la cha-
leur en elt la caufe procatarclique.
Cause CONTINENTE , en Médecine , fe dit de
celle dont la maladie dépend fi immédiatement ,
•qu'elle ne fauroit cefTer tant qu'elle fublifte. Voye^
Maladie.
Une caufe continente de la fupprcfïïon d'urine, clt
le calcul qui fe trouve dans la veffie. Voy. Calcul.
Fièvre continente ou continue, efî celle dont la crife
fe fait fans intermifîîon ou rémifîion. V. Fièvre. (AQ
Cause , en terme de Pratique , elt la conteftation
qui fait l'objet d'un plaidoyer ; & quelquefois le
plaidoyer même. On dit plutôt procès , quand il s'a-
git d'une affaire qui s'initruit par écritures.
On appelle caufes d'appel , les moyens que l'ap-
.pellant entend alléguer pour foùtenir la légitimité de
l'on appel. ( H)
CAUSES MAJEURES, dans la difeipline ecclefiafli-
yue, font toutes les questions importantes qui con-
cernent foit le dogme , foit la difeipline , & particu-
lièrement les a£tions intentées contre les évêques ,
dans des cas où il peut y avoir lieu à la dépofition.
Suivant l'ancien droit , ces caufes étoient jugées
dans le concile de la province , du jugement duquel
le ieptieme canon du concile de Sardique , tenu en
347 , permet d'appeller au pape , pour examiner de
nouveau l'affaire : mais il en réierve toujours le ju-
gement aux évêques de la province voifine.
Suivant le droit nouveau , c'eit-à-dire Y introduction
des Décrétâtes, comprifes dans le recueil d'If dore , c'elt -
à-dire depuis le IX. ficelé , le concile de la province
peut bien initruirc & examiner le procès : mais la
déciiion doit être réfervée au faint fiége. Toutes les
caufes majeures depuis ce tems ont été cenfées appar-
tenir au pape feul en première inftance : & voici ce
que les canoniftes lui attribuent. Déclarer les arti-
cles de foi : convoquer le concile général : approu-
ver les conciles , & les écrits des autres docteurs : di-
vifer & unir les évêchés , ou en transférer le fiége :
exempter les évêques ôc les abbés de la juriidiction
de leurs ordinaires : transférer les évêques : les dé-
pofer , les rétablir: juger lbuverainement , enforte
qu'il n'y ait point d'appel de les jugemens.
Voilà ce qu'on entend communément par caufes
majeures. La pragmatique - fanction a reconnu que
les caufes majeures , dont rémunération expreile le
trouve dans le droit , doivent être portées immédia-
tement au laint-fiége ; & qu'il y a des perfonnes dont
la clcpolition appartient au pape : enl'orte que s'ils
font trouvés mériter cette peine , ils doivent lui être
renvoyés avec leur procès inltruit.
Le concile de Trente , feff. XXIV. c. v. ordonne
que les caufes criminelles contre les évêques , li elles
iont affez graves pour mériter dépofition ou priva-
tion, ne feront examinées & terminées que par le
pape ; que s'il elt néceffaire de les commettre hors
de la cour de Rome , ce lera aux évêques ou au mé-
tropolitain que le pape choilira par commillion 1 pé-
dale fignéede la main ; qu'il ne leur commettra que
la feule connoiffanec du tait , oc qu'ils feront obligés
ivoyer l'uulruction au pape , à qui le jugement
définitif elt réfervé. Onlaiffe au concileprovinci.il
les moindres caufes.
Mais l'églile Gallicane a conferve l ancien droit ,
fuiyant lequel les évêques ne doivent être jw
par les évêques de la province afiemblés en i
en y appellunt ceux îles provinces voiiines iulqu'au
nombre de douze , laut l'appel au pape fuivant le
concile de Sardique. C'elt ce que le clergé de Fran-
ce a arrêté , tant par l'a proteltation faite dans le tems
CAU
91
contre le décret du concile de Trente , que par celle
qu'il fît en 1650 , au lu jet de ce qui s'étoit pâlie d'ir-
régulier & de contraire à fes droits dans l'inltruction
du procès de Pévêque de Léon , en 1632. Fleury,
In (lit. au Droit ecclif tom. II. Part. III. ch. xviij.pag.
l69.&fuiv. (G)
CAUSSADE , (Gêog.) petite ville de France
dans le bas Quercy , près de l'Avcyrou.
CAUSTIQUE , adj. pris fublt. ( Chimie. ) Ce nom
a été donné à certains diffolvans, dont on a évalué
l'action par leur effet fur le corps animal, qu'ils af-
fectent à peu-pres de la même façon que le feu , ou
les corps actuellement ignés ou brûlans. Cette ac-
tion elt une vraie diffolution ( Voye^ Menstrue);
car les caujliques proprement dits, l'ont de vrais dif-
folvans des lubltances animales. Les alkalis fixes ,
lur-tout animés par la chaux (Voye^ Pierre à cau-
tère), les alkalis volatils, la chaux vive, atta-
quent ces fubltances très-efficacement, & fe combi-
nent avec elles. Les acides minéraux concentrés, &
les fels métalliques furchargés d'acide ( comme le
fublimé corrofif, le beurre d'antimoine, le vitriol >
les cryftaux de lune , &c.s) les attaquent & les décom-
pol'ent. Voye^ Lymphe.
Quelques lues réfineux, comme ceux de quelques
convolvulus , du toxicodendron , des tithymales , &
quelques baumes tres-viiqueux , comme la poix de
Bourgogne , les huiles effentielles vives, ne lont pas
des caujliques proprement dits. Ces fubltances n'agif-
ient iur l'animal vivant que par irritation ; elles peu-
vent enflammer les parties , les mortifier même allez
rapidement : mais c'eft comme lenfîbles que ces par-
ties font alors affectées, & non pas comme lolublcs.
C'elt appliquer un cautère fur une jambe de bois,
dit-on communément pour exprimer l'inutilité d'un
fecours dont on ellaye. Un médecin diroit tout auf-
fi volontiers , & plus lavamment , fur la jambe d'un
cadavre, puifque la bonne doctrine fur l'action des
remèdes elt fondée fur le jeu des parties , lur leur
mobilité , leur fenfibilité , leur vie ; les remèdes n'o-
péreroient rien lur le cadavre , dilent la plupart des
auteurs de matière médicale. Ces auteurs ont rai-
fon pour plufieurs remèdes , pour la plupart même :
mais ils fe trompent pour les vrais caujliques. On fe-
rait aurïï-bien une elearre fur un cadavre que lur
un corps vivant.
L'opération par laquelle on prépare ou tane les
cuirs, n'elt autre choie que l'application d'un caujti-
que léger à une partie morte , dont il dili'out & t
les fucs lymphatiques, les humeurs, en épargnant
les fibres ou parties folides ; mais qui détruiri
lolides même à la longue , ou li on augmentoit la
dofe, ou l'intenlite du diliolvant.
La préparation des mumies d'Egypte ne différait
de celle de nos cuirs , que par le diuolvant que les
embaumeurs Egyptiens employoient. Nos Taneurs
fe fervent de la chaux; c'eroit le natron qu
en ufage chez les Egy^
moire de M. Rouelle fur les mumies , là a .
Nique de l'A. . ts du mois ..
IJÔO. dans le Mercure Je Janvier ijàl, [ Cet article
elt de M. l'end. ]
L'ulagc des caufliques , en Médecine , elt de rr
les chairs fongueufes & baveufes ; lis pénétrent mê-
me dans les corps dm s ,\ c , fondent les hu-
meurs, èv; lont d'un ufage pan ■■"• abfcès
& les apoftumes, pour confumei a matière qui elt
en fuppuration, & \ donner une ne; iv l'en eut aulîi
quelquefois à foire une ouverture aux parties, dans-
ou l'incilion lerou difficile à pratiquer ou dan-
gereule.
Les principaux medicamens de cette clafie lont
l'alun bnile , l'éponge , les cantharides ce autres \ é-
licatoires , l'orpiment , la chaux-vive , le vitriol , les
7S^
C A U
cendres de figuier , le frêne , la lie de vin , le fel de
la leflive dont on fait le favon , le mercure fublimé ,
le précipité rouge, &c Vtye{ chacune de ces fubjlances
à leur article propre.
Les cryftaux de lune & la pierre infernale , com-
pofés d'argent & d'efprit de nitre , deviennent cauf-
tiques par ce mélange. Voye^ Crystal, Argent ,
CAUSTIQUE , f. f. dans la Géométrie transcendante ,
eft le nom que l'on donne à la courbe que touchent
les rayons réfléchis ou réfractés par quelqu'autre
courbe. Voye^ Courbe. Si une infinité de rayons
de lumière infiniment proches tombent fur toute
l'étendue d'une furface courbe, & que ces rayons
foient fuppofés réfléchis ou rompus luivant les lois
de la réflexion & de la réfraclion , la fuite des points
de concours des rayons réfléchis ou rompus îotini-
ment proches , formera un polygone d'une infinité
de côtés ou une courbe qu'on appelle caujiique ;
cette courbe eft touchée par les rayons réfléchis ou
rompus , puiique ces rayons ne font que le prolon-
gement des petits côtés de la caujiique.
Chaque courbe a les deux caujliques , ce qui fait
divifer les caujliques en catacaujhques & diacaujhques;
les premières font formées par réflexion , 6c les
autres par réfra&ion.
On attribue ordinairement l'invention des caujli-
ques à M. Tfchirnhaufen ; il les propofa à l'académie
des Sciences en l'année 1682; elles ont cette pro-
priété remarquable, que lorfque les courbes qui les
produilént font géométriques , elles font toujours
re£hfiables.
Ainfi la caujiique formée des rayons réfléchis par
un quart de cercle , eft égale aux{ du diamètre. Cet-
te rectification des caujliques a été antérieure au cal-
cul de l'infini , qui nous a fourni celle de plufieurs
autres courbes, f^oy. Rectification. L'académie
nomma un comité pour examiner ces nouvelles cour-
bes; il étoit compote de MM. Cafiini, Mariotte, 6c de
la Hire , qui révoquèrent en doute la defeription ou
génération que M. Tfchirnhaufen avoit donnée de
la caujiique par réflexion du quart de cercle : l'auteur
refufa de leur découvrir fa méthode , & M. de la
Hire perfifta à ioûtenir qu'on pouvoit en foupçon-
ner la génération defaufleté. Quoi qu'il en foit, M.
Tichirnhaufen la propofoit avec tant de confiance ,
qu'il l'envoya aux aftes de Leipiic , mais fans dé-
monftration. M. de la Hire a fait voir depuis dans
fon traité des Epicycloides , que M. Tfchirnhaufen
s'étoit effectivement trompé dans la defeription de
cette caujiique. On trouve dans VAnalyJe des infini-
ment petits de M. le marquis de VHopital , une métho-
de pour déterminer les caujliques de réflexion & de
rétraôion d'une courbe quelconque , avec les pro-
priétés générales de ces fortes de courbes , que le
calcul des infiniment petits rend très-aifées à décou-
vrir & à entendre.
Le mot caujique vient du Grec y^iw , je brûle ;
parce que les rayons étant ramaffés fur la caujiique
en plus grande quantité qu'ailleurs , peuvent y brû-
ler, fi la caujiique eft d'une fort petite étendue. Dans
les miroirs paraboliques , la caijlique des rayons pa-
rallèles à l'axe eft un point , qu'on nomme le joyer
de la parabole.
Dans les miroirs fphériques d'une étendue de 20
330 degrés , la caujiique des rayons parallèles à l'axe
eft d'une très-petite étendue , ce qui rend les miroirs
fphériques & paraboliques capables de brûler. Voyei
Ardent, Parabole, Foyer, &c
Si plufieurs rayons partent d'un point, & tombent
fur une furface plane , les rayons refléchis prolongés
fe réuniront en un point ; & pour trouver ce point, il
n'y a qu'à mener du point d'où les rayons partent
une perpendiculaire à la furface plane , prolonger
C A U
cette perpendiculaire jufqu'à ce que la partie pro-
longée lui foit égale , 6c le point cherché fera à l'ex-
trémité de cette partie prolongée. Voye^ Miroir.
Cette propofition peut faire naître fur les cauflU
ques une difficulté capable d'arrêter les commençans^
6c qu'il eft bon de lever ici. On fait que dans la Géo-
métrie des infiniment petits , une p*>rtion de courbe
infiniment petite eft regardée comme une ligne droi-
te, dont la tangente eft le prolongement. Suppofons
donc un petit côté de courbe prolongé en tangente,
& imaginons deux rayons infiniment proches , qui
tombent fur ce petit côté ; il lemble , d'après ce que
nous venons de dire , que pour trouver le point de
concours des rayons réfléchis , il fuffile de mener dn
point d'où les rayons partent, une perpendiculaire à
cette tangente, & de prolonger cette perpendiculaire
d'une quantité' égale. Cependant le calcul & la mé-
thode de M. de l'Hôpital font voir que l'extrémité
de cette perpendiculaire n'eft pas un point de la caufi
tique. Comment donc accorder tout cela ? le voici.
En conlidérant la petite portion de courbe comme
une ligne droite , il faudroit que les perpendiculaires
à la courbe , tirées aux deux extrémités du petit
côté , fuffent exactement parallèles , comme elles le
feroient ii la furface totale au lieu d'être courbe étoit
droite ; or cela n'eft pas : les perpendiculaires con-*
courent à une certaine diftance , & forment par leur
concours ce qu'on appelle le rayon de la développée.
Voye^ DÉVELOPPÉE. Ainfi il faut avoir égard à la
polition de ces perpendiculaires concourantes pour
déterminer la pofition des rayons réfléchis , & par
coniéquent leur point de concours, qui eft tout au-
tre que fi la furface étoit droite. En confidérant une
courbe comme un polygone , les perpendiculaires à
la courbe ne doivent pas être les perpendiculaires
aux côtés de la courbe ; ce font les lignes qui divi-
ient en deux également l'angle infiniment obtus que
forment les petits côtés ; autrement au point de con-
cours de deux petits côtés il y auroit deux perpendi-
culaires , une pour chaque côté. Or cela ne fe peut,
puifqu'à chaque point d'une courbe il n'y a qu'une
perpendiculaire polTible. Les rayons incidens & ré-
fléchis doivent faire avec la perpendiculaire des an-
gles égaux. D'après cette remarque fur les perpen-
diculaires , on peut déterminer les caujliques en re-
gardant les courbes comme polygones; & on ne trou-
vera plus aucune abfurdité ni contradiction apparen-
te entre les principes de la Géométrie de l'infini. V.
Différentiel, Infini, &c (O )
CAUTE, (Géog.~) rivière confidérable de l'Amé-
rique , dans l'île de Cuba , où il fe trouve beaucoup
de crocodiles.
CAUTELE , f. f. dans quelques anciens Jurijconjul-
tes , eft fynonyme à ruje ou fineffè : mais il eft vieilli
en ce fens ; on ne l'employé plus qu'en Droit cano-
nique , où il eft fynonyme à précaution ; c'eft en ce
iens qu'on dit une abjoludon à cautele , pour lignifier
une abjolution provijbire qu'on donne à un prêtre ap-
pellant d'une fentence qui l'excommunie ou l'inter-
dit , afin qu'il lui foit permis d'efter en jugement pour
la pourfùite de l'appel; encore conferve-t-on lbuvent
Pexpreffion Latine ad cautelam , fans la franciler : &
l'on dit une abjolution ad cautelam. (//)
CAUTEN , (Géog.~) cap 6c rivière de l'Amérique
méridionale.
CAUTERE , f. m. ( Chirurgie. ) médicament qui
brûle , mange ou corrode quelque partie folide du
corps.
Ce mot vient du grec xavrnp , ou zeurnpiw , qui li-
gnifie la même chofe , & eft dérivé du verbe y.mu ,
brûler.
Il y en a de deux fortes ; le cautère actuel , & le
cautère potentiel.
Le cautère actuel eft celui qui produit {on effet en
un
C A U
un moment , comme le feu , ou un fer rougi au feu ;
on fe fervoit anciennement de cette efpece de cautè-
res dans la fiftule lacrymale , après l'extirpation du
cancer , l'amputation d'une jambe , ou d'un bras ,
&c. pour arrêter l'hémorrhagie , & produire une fup-
puration louable. On en applique encore quelque-
fois fur des os cariés , fur des abfcès & des ulcères
malins.
Les cautères actuels font des inftrumens compofés
d'une tige de fer dont l'extrémité poftérieure eft une
mitte, du milieu de laquelle s'élève une foie tournée
en vis , afin qu'un même manche de bois garni d'un
écrou puifTe lervir à monter des cautères de différen-
te figure. Il y en a qui , par leur partie antérieure ,
forment un bouton fphérique; d'autres l'ont olivaire ,
les uns fe terminent par une plaque quarrée , &c.
Voyei les figures 5 , 6 , J , 8 , Q , 10 & Il , PL XV IL
On peut changer les cautères , & leur faire donner tel-
le configuration qu'on voudra , félon le befoin qu'on
en aura , afin de les rendre conformes aux endroits
ou on doit les appliquer. Peye{ Cautérisation.
M. Homberg dit que la médecine des habitans de
Java , & de la plupart des autres peuples Orientaux,
confifte en grande partie à brûler les chairs , ou à y
appliquer des cautères actuels ; & qu'il y a peu de
maladies que ces différens peuples ne guériiTent par
cette méthode.
Le cautère potentiel eft une compofition de remè-
des cauftiques , où entrent ordinairement de la chaux-
vive , du favon & de la fuie de cheminée. Voye[
Caustique. On s'en fert pour l'ouverture des ab-
cès. Foye^ Abcès.
Ambroife Paré enfeigne la compofition d'un cauf-
tique qu'ii nomme cautère de velours , ainli appelle
parce que ce remède ne caufe point de douleur , ou
parce qu'il avoit acheté le fecret fort cher d'un Chi-
mifte. L'auteur dit : ... « à iceux je donnerai le nom
» de cautères de velours à raifon qu'ils ne font douleur,
» principalement lorfqu'ils feront appliqués fur les par-
ties exemptes d'inflammation ôc de douleur,& auiii
» parce que je les ai recouvrés par du velours». Le
cautère eft auffi un ulcère qu'on procure exprès dans
quelque partie faine du corps pour fervir d'égoùt aux
mauvaises humeurs. Foyc^ Fonticule & Séton^
Les cauter'esi'c font communément à la nuque, entre
la première & la féconde vertèbre du cou ; à la par-
tie fupérieure du bras, dans une petite cavité qui fe
forme entre le mufcle deltoide & le biceps ; & à la
partie interne du genou , un peu au-deffous de l'atta-
che des fléchilleurs de la jambe.
Pour bien appliquer un cautère, on commence par
faire un emplâtre rond de la grandeur d'un écu , &
troué par le milieu ; il doit être fort emplallique afin
qu'il s'attache fortement à la peau, pour empêcher
que l'efcarre ne faffe plus de progrès qu'on ne le dé-
lire. On met cet emplâtre fur l'endroit deftiné au
cautère ; on applique une pierre à cautère fur la peau
qui eft découverte au centre de l'emplâtre ; on la
recouvre d'une autre emplâtre plus grand que ce-
lui qui eft percé ; on applique enfuite une COmpref-
fe tk. un bandage circulaire qu'on ferre un peu afin
que l'appareil ne change pas de place.
Il faut que le Chirurgien connoiffe l'activité du
cauftique dont il fe fert , pour ne le laitier qu'un teins
fuffifant pour faire efearre à la peau ; on penfe l'ef-
carre , on en procure la chute par Pillage des remè-
des luppuratifs , & on entretient enfuite la luppura-
tion de l'ulcère , en tenant un pois dedans , qu'on a
foin de renouvellcr tous les jours.
Les cautères font d'une grande utilité dans nombre
de maladies. Il y en a même plulieurs qu'on ne lau-
roit guérir fans cautère lorfqu'elles font enracinées
ou obftinées : telles font l'ophthajniie , les anciens
Tome II,
C A U
9?
maux de tète , les fluxions fréquentes , les ulcères in*-
vétérés , &c. Voye{ SÉTON.( Y)
C ALTERIS ATION , f. f. terme de Chirurgie, appli-
cation d'un fer rougi au feu , fur les parties du corps.
On appelle cautères actuels les inftrumens qui y fer-
vent. Voye7v Cautère.
L'ufage des cautères actuels eft de confirmer la ca-
rie des os , d'empêcher la vermoulure que cette ma-
ladie peut occafionntr en faifant des progrès. L'ap-
plication des cautères , en defféchant l'humidité ou
la fanie qui exude des os cariés , procure l'exfolia-
tion } & fait obtenir une guérifon folide de l'ulcère,
par une bonne cicatrice, foye^ Exfoliation.
Pour faire l'application des cautères actuels , ort
fait rougir leur extrémité antérieure dans un feu ar-
dent. Pour garantir leslevres delà plaie de Pattiondu
feu , quelques auteurs confeillent de les cacher avec
deux petites plaques de fer fort mince qu'on fait te-
nir par deux ferviteurs. Je crois qu'on doit préférer
la méthode que décrit M. Petit dans fon Traité des
maladies des os , à f article de la carie. Il confeille de
garnir les chairs voifines de la carie avec des linges
mouillés pour les garantir du feu. Il faut que ces lin-
ges foient bien exprimes, parce que l'eau qui en dé-
couleroit , refroidirait les cautères , qui doivent être
le plus rouges qu'on pourra, afin qu'ils puifTent brû-
ler, quoiqu'on les applique légèrement.
Lorfqu'on a cautérifé tout ce qu'on fe propofoit ,
ce qu'il eft expédient de faire quelquefois à plulieurs
reprifes ; on panfe la carie avec la charpie féche. Si
le malade fentoit beaucoup de chaleur , on imbibe-
roit la charpie d'efprit-de-vin : le refte de l'ulcère fe
panfe à l'ordinaire.
La carie profonde demande une application plus
forte des cautères , qu'une carie fuperficiellc ; parce
que pour en tirer le fruit qu'on en attend , il faut brû-
ler jufqu'âux parties faines , afin de deffécher 6c ta-
rir les vaiffeaux d'où viennent les férofités rongean-
tes. Voye{ Carie.
Les anciens cautérifoient les parties molles pour
les fortifier ou pour procurer un égoût aux matières
impures de la maffe du fang : mais l'horreur que fait
cette opération l'a fait rejetter depuis long-tems. y*
Cautère cvSéton. ( I)
CAUTION , f. f. en Droit , fureté que l'on donne
pour l'exécution de quelque engagement : en ce fens
il eft fynonyme à cautionnement. Voye?^ CAUTION-
NEMENT.
Caution fignifie aufîï la perfonne même qui cau-
tionne ; & en ce fécond fens , il eft fynonyme à />/«'-
ge , qui eft moins ulité. Voye^ Pleige.
Par l'ancien droit Romain , le créancier pouvoir
s'adrefTer directement a la caution , & lui faire pa\ ér
le total de la dette , fans être obligé à faire aucunes
pourfuites contre le débiteur ; & s'il y avoit plulieurs
cautions , elles étoient toutes obligées lolidairement.
Mais l'empereur Adrien leur accorda premièrement
le bénéfice de divilion , & dans la fuite Juftinien leur
accorda celui d'ordre ou de difcufîion. Voye^ Divi-
sion «S- Discussion.
La caution ne peut pas être obligée à plus que le
principal obligé ou débiteur : mais elle peut être obli-
gée plus étroitement ; ainli l'obligation de la fi
fublifte , quoique celle du principal obligé mineur
foit éteinte par la reftitution en entier. De même la
peut hypothéquer les immeubles, quoique la
débiteur n'ait pas obligé les Gens.
Les cautions entr'elles , n'ont aucune action l'une
contre l'autre ; de forte que s'il y avoit plulieurs cau-
tions, & que l'une en conlequence de l infolvabilité
du débiteur paye le tout , 1.: caution qui a été obligée
de payer n'a aucun recours contre les autres , ii elle
n'a pas eu la précaution d'obliger le créancier à lui
céder les droits , parce que les cautions n'cr.î pa*
HHhhh
794
C A X
contracté Tune avec l'autre , mais feulement avec le
principal débiteur.
Caution judiciaire. Voye^ Judiciaire.
CAUTION juratoire. Voye{ Juratoire. (H)
Caution bourgeoife ; répondant qui a fbn domi-
cile , qui eft établi , qui a des biens apparens dans un
lieu , dans une ville.
Caution banale , fe dit au contraire d'un homme
fans bien, qui , n'ayant rien à perdre , eft toujours
prêt à cautionner telles perfonnes qui lé préfentent,
& pour telles fommes qu'on veut.
11 y a une efpece de caution de cette forte aux eon-
fuls de la ville de Paris , qui , pour une Tomme très-
modique , s'oblige pour l'exécution de toutes les fen-
tences qui portent cette clauié li ordinaire , en don-
nant caution. Dictionnaire du Commerce , tom. 11. pag.
CAUTIONNEMENT , aftion de celui qui cau-
tionne. Il lignifie aulli l'acte qu'on drefie chez le no-
taire ou au greffe.
CAUTIONNER , fe rendre caution , répondre
pour quelqu'un , foit par a£le public , foit fous feing
privé , foit par un fimple engagement verbal, idem ,
ibid. ( G )
COUWO ou COUVA , ( Géog. ) rivière de l'A-
mérique.
CAWROORA ou COURVO, ( Géog. ) rivière
de l'Amérique , à huit lieues de Cayane.
CAUX,(/« pays de) contrée de Fiance, fituée
entre la Seine £z l'Océan , la Picardie , le pays de
Bray, & le Vexin-Normand. La capitale eft Caude-
bec , où l'on fabriquedes chapeaux de ce nom (Voye7^
Chapeau) : ce pays produit du chanvre , du lin , &
efî très-fertile.
CAXA , f. m. (Commerce?) petite monnoie des In-
des , fabriquée à Chinceo , ville de Chine , qui n'a
cours que depuis 1 590. Cette monnoie eft très-min-
ce & fort cafuelle ; c'eft un mélange de plomb Se
d'écume de cuivre ; elle a un trou au centre pour
pouvoir être enfilée dans un cordon appelle feanta.
Quand on eft obligé d'en recevoir , il ne les faut
compter que pour un feizieme de denier.
CAXAMALCA ( Géograp. ) ville & petit pays de
l'Amérique méridionale, au Pérou j fertile en mines
d'or & d'argent , & qui produit beaucoup de laine.
^ CAXEM ou C AYEM , ( Géog. ) ville d'Afie dans
l'Arabie heureufe , avec un bon port.
CAYA , ( Géog. ) petite rivière d'Efpagne , dans
l'Eltramadure , fur les frontières du Portugal , qui
fe jette dans la Guadiane à Badajoz.
CAYAKA, ( Géog. ) petit pays d'Afrique , dans
la Nigritie , au nord de la rivière de Gambie.
CAYAS , f. m. (Commerce,') petite monnoie de cui-
vre qui a cours dans les Indes ; elle eft empreinte
d'une efpece de griffon ; elle vaut les cinq lïxiemes
d'un denier argent de France.
CAYEMITÈS , ( Géog. ) petites îles de l'Améri-
que , à l'occident de l'île Efpagnole.
* CAYES , ( Navigation. ) ©n appelle ainfides ro-
ches fous l'eau , peu éloignées des côtes , & fouvent
fur des hauts fonds de fable ; lorfqu'il fe rencontre
des cayes dans les rades ou dans les ports, les vaif-
feaux font obligés de prendre des précautions pour
éviter d'en être endommagés.
* CAYEU , ( Hifi. nat. Zoolog. ) petit poiffon qui
fe trouve abondamment dans les mers de l'Améri-
que ; quelques-uns l'appellent fardine ( à caufe de la
rellemblance qu'il a avec ce poiffon.
CAYEUX , f. m. ( Jardinage. ) ce font de petits
oignons qui naiffent autour des gros ; ils fe fortifient
quand ils reftent trois ans de fuite en terre , & ils
portent dans l'année qu'on les replante : lorfque l'on
tire les oignons tous les ans , les cayeux ne font point
C A Y
afiez forts , & ils fe mettent dans une planche en pé»
piniere , dont on levé de tems en tems des oignons
qui font en état de fleurir. Les cayeux dans les ané-
mones changent de nom ; ils s'appellent pattes : dans
les renoncules, ce font des griffes. Les cayeux con-
fervent feuls les plus belles efpeces de fleurs , fans
dégénérer. (K)
CAYLAR , ( le ) Géog. petite ville de France ,
dans la province de Languedoc.
C AYLUS , ( Géog. ) petite ville de France dans le
bas Quercy , fur les frontières du Rouergue.
CAYMAN , ( Géog. ) il y a trois îles de ce nom
dans l'Amérique feptentrionale , au midi de l'île de
Cuba , & à l'occident feptentrional delà Jamaïque ;
elles font inhabitées.
* CAYMÏTTE , {Hifi. nat. bot.) fruit de l'Amé-
rique , qui a à peu près la forme & la groffeur d'une
pomme de rambour ; il renferme une lubftance blan-
che, molle, & un peu vifqueufe , d'un goût fucré ,
mais fade : l'arbre qui le produit eft grand , bien
garni de feuilles qui reffemblent allez à celles de l'o-
ranger , hormis qu'elles font moins grandes ; leur
forme eft ovale ; elles font liffes & polies , d'un beau
vert par-dedans & le dehors fatiné , ôc d'une couleur
d'un brun rougeâtre comme la canelle.
CAYNO , ou C ANO , ( Géog. ) petite île de l'A-
mérique méridionale dans la mer du Sud , à l'extré-
mité de la province de Cofta-rica.
C AYONNE , ( Géog. ) rivière de l'Amérique dans
l'île de S. Chriftophle.
CAYOR, ou CAHIOR, (Géog. ) petit royaume
d'Afrique en Nigritie , entre le Sénégal & le Cap-
verd.
CAYPUMO , ( Géog. ) rivière de l'Afie dans l'In-
de , au-delà du Gange.
CAYR.AC , (Géog.) petite ville de France en
Guyenne dans le Quercy , fur la rivière du Lot.
CAZ , f. m. ( Commerce. ) monnoie des Indes ; c'eft
ainfi qu'en langue Malaye on appelle le caxa. Voye^
Caxa.
CAZALLA , ( Géog. ) petite ville d'Efpagne en
Andaloufie , dans la Sierra-Morena.
CAZAN, ou comme d'autres l'écrivent, HAZAN,
f. m. (Hifi. mod. ) officier des fynagogues Juives ,
établi pour entonner les prières que chantent ceux
qui s'y affemblent , à peu près comme les chantres
ou choriftes dans l'Eglife Romaine. Le caran eft
placé fur un fiége plus élevé que les autres , & qui
fèrt auffi de chaire au rabbin quand il prêche. Ce
nom fe trouve dans S. Epiphane pour fignifier un
officier de la fynagogue : mais ce père n'explique
point quelle étoit alors fa fonction. Les Juifs moder-
nes l'ont établi pour avoir inlpe&ion fur tout ce qui
fe paffe dans leurs lieux d'affemblée , & furtout
pour veiller à la décence dans la lecture de la loi &
la récitation des offices ; mais malgré les précautions
qu'il prend , il y règne toujours beaucoup de préci-
pitation & de cacophonie. (G)
CAZBAT , ( Géog. ) ville ancienne d'Afrique au
royaume de Tunis.
C AZELLES, f. f. (Fileur d'or.) font des efpeces de
bobines fur lefquelles l'ouvrage le dévide après avoir
été filé. Elles ont des crans à un bout qui vont tou-
jours en diminuant comme ceux de la fufée , pour
augmenter le mouvement quand les cailles font vui-
des , & pour le diminuer quand elles font prcfque
pleines. Foye{ Fileur d'or.
C AZEM ATE , f. f. ( en terme de Fortification. ) eft
une efpece de voûte de maçonnerie pratiquée dans
la partie du flanc du baftion proche la courtine , &
qui fait une petite retraite , ou un enfoncement vers
la capitale du baftion. On y place le canon qui fert
à défendre la face du baftion oppofé , & à balayer le
fonddufofle. Voye^ Bastion.
C A Z
C E
795
Ce nom vient d'une voûte qui fervoit autrefois à
féparer les plate- formes des batteries hautes & baffes
que les Italiens appellent cafa armata , & les Efpa-
gnols cafamata : mais d'autres dérivent ce mot de
cafa à matù , mai (on à fous : Covarruvias de cafa èc
mata , maifon baffe.
La casemate eft quelquefois compofée de trois pla-
te-formes l'une au-deffus de l'autre, le terre-plain
du baftion étant la partie la plus élevée : mais l'on
fe contente quelquefois de placer la dernière au-de-
dans du baftion.
On donne auffi à la ca7emate le nom de place baffe
ou de flanc bas, parce qu'elle cft placée au pié du
rempart près du foffé; quelquefois celui de flanc re-
tiré , parce qu'elle eft la partie du flanc qui efl; la
plus proche de la courtine , & qui forme le centre
du bafHon : on la couvrait autrefois d'un épaule-
ment ou d'un corps de maçonnerie rond ou quarré
qui mettoit à couvert les batteries , ce qui Ta tait ap-
pellera/se couvert.
On met aujourd'hui rarement les casemates en ufa-
gc , parce que les batteries de l'ennemi peuvent en-
levelir les pièces de canon qu'elles contiennent, fous
les ruines de leurs voûtes , outre que la fumée dont
elles fe rempliffent les rend infupportables à ceux
qui fervent à l'Artillerie. C'eft ce qui fait que les In-
génieurs modernes les font à découvert , & fe con-
tentent de les munir d'un parapet.
Les places baffes & hautes doivent avoir au moins
huit toifes d'enfoncement ; fa voir trois pour le para-
pet , & cinq pour le terrein ; deforte que s'il y a deux
places l'une devant l'autre , elles doivent avoir leize
toifes d'enfoncement.
Les places baffes ont les defavantages fuivans.
i°. Qu'il eft très-difficile de fe fervir en même
tems des unes & des autres , à cauie des éclats 6c
des débris qui tombent continuellement.
2°. Qu'elles deviennent prefque inutiles quand la
demi-lune eu prife , par le commandement qu'elle a
fur elles.
3°. Que la quantité des débris qui tombent des
places hautes , prépare une montée fort douce à l'en-
nemi pour monter à l'affaut.
Lorfqu'on a des places baffes , il cft important que
le flanc foit couvert par un orillon qui les mette à
l'abri du commandement de la demi-lune. Les meil-
leurs flancs bas font ceux qui forment une efpece de
fauffe craie au flanc, à la diftance de dix ou douze
toifes ; ou fi l'on veut les tenailles du foffé de M.
de Vauban qui en tiennent lieu. V'oyc^ Tenaille ,
C AZERES , (Géog.} petite ville de France en Gaf-
cogne , fur la Garonne. Il y a une autre ville de mê-
me nom en Gafcogne, fur l'Adour.
CAZERN, (Géog.) ville & fortereffe de Pologne,
dans la baffe Podolie , fur le Nieller.
CAZERNES,f. f. ( Art. milit. ) font de grands
corps de logis confiants entre le rempart & les mai-
fons d'une ville fortifiée, ou même furie rempart,
pour loger les foldats , à la décharge «Se au foulage-
ment des habitans. l 'oyc^ Garnison".
Il y a pour l'ordinaire deux lits dans chaque cham-
bre , &£ trois foldats couchent dans le même lit. (Q)
C AZEROM ou CAZERON , (Gcog.) ville d'Afie ,
au royaume de Pcrfe , capitale de la province deSa-
pour,qui fait partie de la l'erfc proprement duc, en-
tre les rivières de Bofchavir 6c de Bendemir.
* CAZIMI , (sl/lronom.) ce mot Arabe cil employé
par les Aftronomes de ce pays pour marquer le dif-
que du foleil; lorfqu'ils dilent qu'une telle planète ejt
en cu^irni ; c'eft comme s'ils voûtaient dire qu'elle ne
paroît point éloignée de leize minutes du centre du
foleil , le demi-diametre de cet allie étant de }i\
Tome II.
C AZM A , ( Gèog. ) bon port de l'Amérique méri-
dionale, au Pérou.
CAZZICHI, (Géographe) petite rivière de l'île de
Candie, qui le jette dans la mer près de Spinalonga,
C E
Ce , ces ; cet , cette ; ceci , cela ; czltù , celle ; ceux }
celles ; celui-ci, celui-là; c: lles-ci, celles-là.
Ces mots répondent à la fmtation momentanée où
fe trouve Fefprit, lorfqtie la main montre un objet
que la parole va nommer; ces mots ne font donc
qu'indiquer la perfonne ou la chofe dont il s'agit ,
lans que par eux-mêmes ils en excitent l'idée. Ainfi
la propre valeur de ces mots ne confilte que dans la
delignation ou indication, & n'emporte point avec
elle l'idée précife de la perfonne ou de la chofe indi-
quée. C'ell ainfi qu'il arrive fouvent que l'on fait
que quelqu'un a fait une telle action , fans qu'on fâ-
che qui ele ce quelqu'un là. Ainfi les mots dont nous
parlons n'excitent que l'idée de l'exiftence de quel-
que fubllance ou mode , foit réel, foit idéal: mais
ils ne donnent par eux-mêmes aucune notion déci-\
dée & précife de cette fubflance ou de ce mode.
Ils ne doivent donc point être regardés comme des
vice-gerens , dont le devoir confifle à figurer à la place
d un autre , & à remplir les fonctions de fubflitut.
Ainli au lieu de les appeller pronoms , j'aimerois
mieux les nommer termes métaphyflques , c'eft-à-dire ,
mots qui par eux-mêmes n'excitent que de fimples
concepts ou vues de l'efprit, fans indiquer aucun in-
dividu réel ou être phyfique. Or on ne doit donner à
chaque mot que la valeur précife qu'il a ; & c'eft à
pouvoir faire & à fentir ces précisons métaphyliques,
que confifle une certaine jufteffe d'efprit où peu de
perfonnes peuvent atteindre.
Ce, ceci, cela, font donc des termes métaphyfi-
ques , qui ne font qu'indiquer l 'évidence d'un objet
que les circonllances ou d'autres mots déterminent
enfuite fingulierement & individuellement.
Ce, cet, cette , font des adjectifs métaphyfiques qui
indiquent l'exiftence, & montrent l'objet: ce livre,
cet homme, cette femme , voilà des objets préfens ou
prclentés. « Ce , adjectif , ne fe met que devant les
» noms mafeulins qui commencent par une conlon-
» ne, au lieu que devant les noms mafeulins qui com-
» mencent par une voyelle, on met cet , mais devant
» les noms féminins , on met cette ►> , foit que le nom
commence ou par une voyelle ou par une confon-
ne. Grammaire de Buffier, pag. l8£).
Ce, défigne un objet dont on vient de parler, ou
un objet dont on va parler.
Quelquefois pour plus d'énergie on ajoute les par-
ticules ci ou là aux fubftantifs précèdes de l'adjectif
ce ou cet; cet état-ci , ce royaume-là; alors ci tait con-
noître que L'objet eft proche, Cv Ai plus éloigné ou
moins proche.
Ci eft fouvent fubilantif, c'eft le hoc des Latins;
alors, quoi qu'en difent nos Grammairiens, ce cil du
genre neutre; car on ne peut pas dire qu'il foit maf-
culin, ni qu'il foit féminin, j'entais ce que vous dues,
<d. Ce fut après unfolemntl & magnifia ue faeri-
fice, que, ècc. Flechier, or. fin. C. , c'ei dire, la
ckoft que je vais dire arriva après, &c.
Dans les interrogations, ce fubfhntif eft mis après
te eft. Qui e/i-ce qui vous fa du, dont la conf-
truction eft ce, c'elt-à-dire, celui eu celle qui vous fa
dit eji quelle perfonne ?
Ct lubftantif fe joint à tout genre &: à tout nombre.
Ce font des Philofophes , (Sec. ce font les paffwns ; cefl
V amour ;c efl la i:
La particule ci Cs: la particule là ajoutées au fubf-
tantif ce, ont form 9t. cela. Ces mots indiquent
ou un objet ample , comme quand on dit cela cft bonf
H H h h h ij
79<>
C E A
ceci eft mauvais: ou bien ils fe rapportent à un fens to-
tal , à une action entière ; comme quand on dit ceci
va vous furprendre , cela mérite attention , cela cfl fâ-
cheux.
Au refte ceci indique quelque chofe de plus immé-
diatement préient que cela. Ecoute^ceci , ave^-vousvû
cela? Vous étes-vous apperçu de cela? Vene^ voir ceci.
Ceci , cela, font auflî des fubftantifs neutres ; ces
mots ne donnent que l'idée métaphyftque d'une lubf-
tance qui eft enfuite déterminée par les circonstan-
ces ou idées acceflbires; l'eiprit ne s'arrête pas à la
lignification précife qui répond au mot ceci ou au mot
cela , parce que cette fignifîcation eft trop générale ;
mais elle donne occafion à l'eiprit de confidérer en-
fuite d'une manière plus diftin&e & plus décidée l'ob-
jet indiqué.
Ceci veut dire chofe préfente ou qui demeure; cela
fignifie chofe préfentée & déjà connue. Vos ijîhœc in-
tro auferte. Emporte^ cela au logis, dit Mde Dacier,
Ter. And. acl. I. fc.j. vers i. Ainfi il faut bien distin-
guer en ces occafions la propre fignifîcation du mot,
& les idées acceflbires qui s'y joignent & qui le dé-
terminent d'une manière individuelle.
Il en eft de même de il m'a dit ; la valeur de il eft
feulement de marquer une perfonne qui a dit , voilà
l'idée préfentée : mais les circonftances ou idées ac-
ceflbires me font connoître que cette perfonne ou ce
// eft Pierre; voilà l'idée ajoutée à il, idée qui n'eft
pas précifément fignifiée par il.
Celui & celle font des fubftantifs qui ont befoin d'ê-
tre déterminés par qui ou par de ; ils font fubftantifs
puifqu'ils fubfiftent dans laphraie fans le fecours d'un,
îiibftantif, & qu'ils indiquent ou une perfonne ou
une chofe. Celui qui me fuit , &c. c'eft-à-dire , Xhom-
me , la perfonne ; le difciple qui, &c. D. Quel eft le
meilleur acier dont on fe ferve communément en
France ? R. C'eft celui d'Allemagne , c'eft-à-dire, c'eft
l'acier d'Allemagne : ainfl ces mots indiquent ou un
objet dont on a déjà parlé, ou un objet dont on va
parler.
On ajoute quelquefois les particules ci ou là à ce-
lui & à celle, & au pluriel à ceux & à celles; ces par-
ticules produifent à l'égard de ces mots-là le même
effet que nous venons d'obferver à l'égard de cet.
Ceux eft le pluriel de celui, & en ajoutant un s à
celle, on en a le pluriel. Voye* Pronom. {I")
CE, ( Géog.~) ville de la Chine dans la province
de Xanfl , où elle eft la troifieme entre les grandes
cités.
C E A , ( Géog. ) rivière d'Efpagne , au royaume
de Léon , qui prend fa fource près des Afturies , &c fe
jette dans le Carrion.
CEAUX, Géog. ) rivière de France dans le Gati-
ricis, qui fe jette dans leLoing.
* CEBI-PIRA , ( Hift. nat. bot. ) arbre du Brefll
dont l'écorce amere & aftringente entre dans les
bains, & les fomentations ordonnées dans les mala-
dies caufées par le froid , les tumeurs du ventre &
des pies , & les douleurs de reins, que les Portugais
appellent curi- mémos. Au refte on ne nous donne
point d'autre description de cet arbre, que la phrafe
botanique fuivante : arbor Brafilienfis , floribus fpecio-
fis ,fpïcatis , pericarpio ficco , fur laquelle on ne con-
noîtra fùrement pas le cebipira.
CEBU ou ZEBU , ( Géog. ) île d'Afle , l'une des
Philippines , dans la mer des Indes.
CECERIGO ou CERIGOTTO , ( Géog. ) petite
île de l'Archipel , entre celles de Cerigo & de Candie.
CECHIN , f. m. ( Commerce. ) c'eft ainfl que dans
le Levant on appelle le fequin d'or , qui a cours à
Venife. Voye{ Sequin.
CEC I M B R A ou CERIMBRA , ( Géog. ) petite
ville de Portugal , dans l'Eftramadure , fur le bord
de l'Océan,
CED
CECIN A , ( Géog. ) rivière d'Italie , dans la Tof"
cane , entre Livourne & Piombino. Elle a fa fource
dans le Siennois , & fe jette dans la Méditerranée.
* CECRYPHALE, f. f. ( Hift. anc. ) forte de vête»;
ment à l'ufage des femmes Greques , dont nous n'a-
vons aucune connoiflance.
CED ANT, adj. pris fubft. dans le Commerce , celui
qui cède , qui tranfporte quelque fom'me , quelque
droit , quelque effet à un autre.
Un cédant peut quelquefois , &c fuivant fes con-
ventions , céder fans garantie ; cependant il eft tou-
jours garant de fes faits , c'eft-à-dire que la chofe cé-
dée exifte, qu'elle lui appartienne , ou du moins qu'il
ait été en droit d'en dilpofer.
Appeller un cédant en garantie , c'eft l'aflîgnef
pardevant les juges pour fe voir condamner à ga-
rantir ce qu'il a cédé , conformément aux claufes de
fon acïe de ceflïon. Diclionn. de Comm. (G)
CED ATAIRE , f. f. terme de Droit fynonyme à cé-
dant. Voyei CÉDANT. ( H)
CEDER, verbe act. ( Commerce. ) tranfporter
une chofe à une autre perfonne , lui en donner la
propriété , l'en rendre le maître. Ainfl un marchand
cède fa boutique, fon magafin, fon fonds. Un ac-
tionnaire cède , ou quelques - unes des aûions , ou
toutes les a Étions qu'il a dans une compagnie. JDicf,
du Commerce. ( G )
CEDILLE , f. f. terme de Grammaire ; la cédille eft
une eipece de petit c , que l'on met fous le C, lorf-
que par la raiion de l'étymologie on conferve le c
devant un a,iino, ou un u, & que cependant le
c ne doit point prendre alors la prononciation dure ,
qu'il a coutume d'avoir devant ces trois lettres a ,
o, u ; ainfl de glace , glacer , on écrit glaçant , glaçon ;
de menace, menaçant ; de France, François ; de rece*
voir, reçu, &c. En ces occafions, la cédille marque
que le c doit avoir la même prononciation douce
qu'il a dans le mot primitif. Par cette pratique le dé-
rivé ne perd point la lettre cara&ériftique , & con-
ferve ainfl la marque de fon origine.
Au refte , ce terme cédille vient de l'Efpagnol ce-
dilla , qui lignifie petit c ; car les Efpagnols ont aufll,
comme nous , le c fans cédille , qui alors a un fon dur
devant les trois lettres a , o , u ; & quand ils veulent
donner le fon doux au c qui précède l'une de ces
trois lettres , ils y fouferivent la cédille , c'eft ce qu'ils
appellent c cor. cedilla, c'eft-à-dire c avec cédille,
Au refte , ce caractère pourrait bien venir du fîg-
ma des Grecs figuré ainfl Ç ', comme nous l'avons
remarqué à la lettre c ; car le c avec cédille fe pronon-
ce comme Y s au commencement des mots f âge ,fe~
cond ,fi , fobre ,fucre. ( F )
* Le c avec cédille s'appelle , foit en Fonderie de
caraéleres , foit en Imprimerie , c à queue.
CEDMONEEN , adj. ( Géog. ) eft fynonyme dans
l'écriture à oriental. C'eft ainfl qu'elle appelle les haf
bitans de l'Arabie deferte , que la Terre-fainte avoit
à l'orient.
CEDOGNA , ( Géog. ) ville d'Italie au royaume
de Naples , dans la principauté ultérieure au pié de
l'Apennin. Long JJ. 8. lat. 41. 5.
* CEDRA, f. m. {Hift. nat. & Diftill.) efpece de ci-
tronnier. Voye^ Citronnier. On donne le même
nom aux fruits de cet arbre. On fait de ces fruits une
confiture liquide & une confiture feche ; ils font en-
tiers dans la liquide, & par quartiers dans la feche;
On en tire une liqueur très-eftimée : pour cet effet,
on les cueille avant leur entière maturité ; on en en-
levé des zeftes ; on prefle ces zeftes , & l'on en reçoit
l'écoulement fur un morceau de verre , d'où il def-
cend dans un vaifleau. On a de l'eau-de-vie cam-
frée ; on la coupe avec le jus des zeftes de cedra , &
on diftille le tout. L'eau de cedra entre , à ce qu'on
dit, dans la compofltion de celle des barbades,
C E D
CEDRE , cedrus , f. m. ( Hift. nat. bot. ) genre de
plante qui porte des chatons compofés de plulieurs
petites feuilles qui ont des fommets. Ces chatons
ibnt ftériles. Les fruits ou les haies renferment des
noyaux anguleux , dans chacun defquels il y a une
femence ohlongue. Ajoutez aux caractères de ce gen-
re , que les feuilles de ces efpeces font femblables à
celles du cyprès. Tournefort, lnjl. rei hcrb. Voye^
Plante. (/)
* Le Ctdn eft un arbre très -fameux. On en
compte plufieurs efpeces. Les fentimens des Botanif-
tes font aflez partagés à l'on fujet , cependant tous
s'accordent à donner le premier rang au cèdre du Li-
ban , que l'on nomme aufii grand cèdre ; les relations
tics voyageurs portent qu'il ne s'en tro.ive plus gue-
res fur le Liban ; elles varient fur leur grandeur : les
unsdifent que les cèdres du Liban font les plus grands
arbres que l'on connoiflé , 6c prétendent qu'il y en
a qui s'élèvent jufqu'à 1 20 ou 130 pies de hauteur,
& que leur groflèur y cil proportionnée ; d'autres fe
contentent de dire que les cèdres du Liban font de la
taille des plus grands chênes : les uns dilent que les
feuilles reflemblent à celles du pin , hormis qu'el-
les font moins piquantes que celles de cet arbre ;
d'autres prétendent qu'elles font femblables à celles
du romarin. Son écorce eft polie &c liife. Les bran-
ches les plus proches de la terre s'étendent confide-
rablement , & elles diminuent à mefure qu'elles ap-
prochent du fommet , ce qui donne à cet arbre
une figure pyramidale ; les touilles demeurent tou-
jours vertes ; elles font petites & étroites. Son bois
eft tougeâtre & très-odoriférant, 6c plus dur que celui
de toutes les autres efpeces de cedres;\\ produit des
pommes femblables aux pommes de pin , qui con-
tiennent de la femence. On dit que dans les grandes
chaleurs il en coule , fans incifion , une gomme ou
ixline blanche que l'on nomme cedria. Voye^ cet article.
Au refte , le cèdre du Liban doit être rangé dans la
clafie du melcze , voye^ Meleze. Son bois pafle pour
incorruptible , & Ton prétend que les vers ne s'y
mettent jamais ; c'elï un fait qui cil cependant dé-
menti par quelques voyageurs. On fait que le temple
■mon étoit bâti de bois de cèdre, qui lui fut
fourni par le roi Hiram.
Il croit dans toutes les parties de l'Amérique une
grande quantité de cèdres qui s'élèvent aufli a une
hauteur prodigieufè : mais on prétend que le bois
n'en eft point li dur ni fi ferré que celui des cèdres du
Liban. M. Laurence , lavant Anglois , qui a donné
un traité fur la culture des arbres , le plaint de la né-
gligence des Européens , de ne point rendre plus
communs parmi eux des arbres que la nature iem-
ble avoir voulu rendre prcfqu'immortels , d'au-
tant plus qu'il n'y a point d'arbre, félon lui, qui
croiffe avec plus de facilité que le cèdre : en effet , on
le trouve fur les plus hautes montagnes du nouveau
monde , aufli-bien que dans des endroits bas & maré-
cageux ; on le rencontre dans les provinces les plus
froides , auffi-bien que dans celles oii la chaleur eft
la plus forte.
Il cite , outre cela , l'exemple d'un curieux qui
îivoit planté une allée de cèdres près de fa mai Ion de
campagne en Angleterre , qui en peu d'années étoient
parvenus à une groflèur très-conlîdérablc. On dit
qu'il fe trouve aulli beaucoup de cèdres en Sibérie.
L'on fait plulieurs ouvrages de tabletterie év de mar-
quetferie avec le bois de cèdre ; dans les pays où il
eft commun l'on en fait de la charpente. Les Efpa-
gnols, dans le tems de la découverte de l'Amérique,
s'en font fervis avec fuccès pour la conftruction de
leurs vaifléaux. On fait en Angleterre des efpeces
de petits barrils dont les douves (ont moitié de bois
de cèdre , Se moitié de bois blanc fort artiftement tra-
vaillés ; on y laifté féjourner pendant quelque tems
CED 79?
du punch , ou d'autres liqueurs fortes , elles acquiè-
rent par-là une odeur très-agréable , & qui en rele-
vé le goût. Il y a encore une clpece de cedre,que l'on
nomme cèdre de Phénicie ou de Lycie , qui reffemble
beaucoup au genévrier , & porte des grains ou baies
rouges. Voyer^ Oxycedre.
* CEDRIA , f. f. ( Hift. nat. bot. ) c'eft ainfi qu'on
appelle tantôt la poix , tantôt la reline du grand cè-
dre. Il y en a qui diftinguent le cedrium de la cedria :
félon eux , la cedria eft la larme crue de l'arbre , & le
cedrium en eft une huile de confiftance plus fluide ;
cependant on fe fert indiftindtement des deux termes
cedrium & cedria pour déiigncr la réfine ou l'huile.
On nomme aufli la réfine cedrœleum & Y huile de cade;
On dit que la meilleure eft épaiiîe , blanche , tranf-
parente , d'une odeiir forte : on lui attribue la pro-
priété de corrompre les corps vivans , & de confer-
ver les corps morts. Quoi qu'il en foit, il eft conftant
quec'étoit un des principaux ingrédiens des embaii-
memens Egyptiens ; c'eft , félon Diolconde , un re-
mède fouverain pour les maux d'yeux , de dents, &
la morfure des ferpens & animaux venimeux.
CEDRIN , oifeau. Voye^ Slrin.
CEDRO , ( Geog. ) rivière de l'île de Sardaigne ^
qui le jette dans la mer , près d'un petit golfe de mê-
me nom.
CEDULE , f . f . ( Jurifprud. ) fignifie en général
toute lorte d'actes ou d'obligations taites fous figna-
ture privée , & même les brevets d'actes paffés par-
devant notaires , qu'on garde pardevers foi.
CEDULE évocatoire. Poye^ ÉVOCATOIRE. (#)
Cedule , 1. 1. ( Commerce. ) parmi les marchands,'
banquiers , nég'ocians , fignifie fouvent le morceau
de papier (m lequel ils écrivent leurs promefles , let-
tres de change, billets payables au porteur, referip-
tions & autres engagemens femblables qu'ils pren-
nent entr'eux par actes fous feing privé , pour le fait
de leur négoce , & particulièrement pour le paye-
ment de l'argent.- Ils appellent aufii porte-cedule , le
porte-feuille dans lequel ils renferment ces fortes de
papiers. Diction, de Commerce.
Cedules détachées , eft le nom qu'on donne en
Hollande , dans le bureau du. convoi & licenten , aux
expéditions qu'on délivre aux marchands pour jufti-
fier du contenu aux déclarations qu'ils ont faites de
leurs marchandées, ou du payement des droits. C'eft
fur ces cedules , que les commis aux recherches doi-
vent faire leurs vilites. ldémi ibid.
CEER , f. m. ( Commerce. ) poids tout enfemble.
& mefure dont on fe fert fur la côte de Coromandel.
Cinq céers font le bifi , huit bilis un man , &c deux
mans un candi.
Comme le candi eft inégal , & qu'en quelques en-
droits il n'eft que de trois cents vingt livres de Hol-
lande , & en d'autres de cinq cents , le céa eft à pro-
portion plus ou moins pelant, fuivant les lieux. Le.
céer contient vingt-quatre tols. Voytt Tol. Diction,
du Commerce. ( 6 : )
CEFALON1E ou CEPHALONIE , ( Gêog. ) île
confidérablc de la Grèce, au fud de l'Albanie, fort
abondante ; la capitale porte le même nom. Longitude
38. 20. lat. 38. 30.
CEFALU ou CEFALEDI , ( Gêog. ) ville de Sici-
le , dans la vallée de Demonc. Long. 3t. J3. lat,
38. à.
C E G A , ( Gêog. ) petite rivière d'Efpagne , au
royaume de Léon \ qui fe jette dans le Duero.
CEGISUS , f. m. ( Afir. ) cil une étoile fixe de
la troilieme grandeur , dans l'épaule gauche du Bou-
vier ; l'a latitude eft de 49d > 33' > fa déclinailbn de
39ll,27/. (O)
CEIBA , f. m. ( H'ft- njt- l'or- ) genre de plante
dont la fle'ur eft en rôle , quelquefois compolce de
phtiieurs pétales dil'polés en rond , quelquefois mo^
79s
C E I
rropétaîe câmpanlforme. Il s'élève du calice un pil-
til qui. devient dans la fuite un fruit en forme de
flacon , qui s'ouvre d'un bout à l'autre en cinq par-
ties , & qui eft rempli de femences rondes revêtues
d'un duvet fort doux , & adhérentes à un placenta
de figure pyramidale à cinq côtés. Plumier , nova
riant. Amer, gêner. Voyt^ PLANTE. ( /)
CEILAN , ZEYLAN ou CEYLON , ( Géog. ) île
très-confidérable d'Afie , dans la mer des Indes ; les
Hollandois en poffedent prefque toutes les côtes , &C
le roi de Candi eft maître de l'intérieur du pays ,
qui contient fept royaumes ; les infulaires fe nom-
ment Chingulais ; ils font idolâtres. Leurs mariages
fe font d'une manière allez extraordinaire ; c'eft la
fille qui choifit un mari , &c qui fait enfuite part de
fon choix à fes parens , qui, lorfqu'ils l'approuvent,
préparent un grand repas. Le fiancé va avec les amis
chez fa fiancée ; ils fe lient les pouces enfemble , &
vont enfuite fe coucher ; ou l'homme tient un bout
du linge de la femme , & le met autour de lés reins ,
la femme tient l'autre bout , on leur verlé de l'eau
fur la tête & fur le corps ; cela fait , ils vivent en-
femble aufli long-tems qu'ils s'accordent. La premiè-
re nuit des noces eft au mari , la féconde eft pour
fon frère , & s'il a un troifieme ou quatrième frère ,
jufqu'au leptieme, chacun a fa nuit ; de cette ma-
nière une femme fuftit pour une famille entière. Les
Chingulais ont un foin extrême de ne jamais le mé-
fallier , & ils pouflént le fcrupule fi loin fur leur no-
bleflé , qu'ils ne prendroient point la moindre choie ,
pas même un verre d'eau , chez un homme d'un
rang inférieur au leur ; un homme du commun n'a
pasla permilhon même de frapper à la porte de Ion
fupérieur. Les femmes qui font convaincues d'avoir
eu commerce avec quelqu'un au-deffous d'elles , font
punies de mort. L'île de Ceilan eft fort abondante en
canelle, gingembre , ivoire , pierres précieules, cam-
phre , 6-c. c'eft la Taprobane des anciens.
CEINTES, PRECE1NTES, PERCEINTES ,
CARREAUX , LISSES , ( Marine. ) ce font de lon-
gues pièces de bois qu'on met bout à bout l'une de
l'autre , en manière de ceinture , dans le corps du
bordage d'un vaifîeau , pour faire la liaifon des mem-
bres & pièces de charpente dont le corps du bâti-
ment eft formé. Les ceintes font pofées les unes pa-
rallèles aux autres. Les matelots y trouvent une com-
modité , lorfqu'ils veulent monter dans le vaifleau ,
ou le nettoyer. foye£t Hanche 1. la lettre o , dont on
marque les ceintes telles quelles paroiffent fur le corps du
vaijjeau.
Il y a des Charpentiers qui mettent quelques dis-
tinction entre ces différens cordons ou ceintes ; car ils
appellent préceintes les trois plus baffes ceintes , &
nomment carreaux ou lijfes , celles qui font au-deffus,
& la liffe de vibord eft la plus élevée.
Les ceintes font ordinairement de trois ou quatre
pièces affemblées en écarts. Vqyc^ Plane. Vl.fig. J8.
la forme de cette pièce de bois. Le plus fouvent il y a
deux préceintes au-deffous des fabords , & deux au-
deffus. Quelquefois il y en a deux au-deffous , ians
qu'il y. en ait au-deffus.
Les ceintes font le même effet en dehors du vaif-
feau , que les ferre-gouttieres font en dedans ; les
unes & les autres fervent à lier & affermir le bâti-
ment ; les vaiffeaux qui ont beaucoup d'acaftillage ,
ont plus de ceintes que les autres : en général le nom-
bre des ceintes lé règle fur la grandeur du bâtiment.
Voye\ dans la figure qui repréfente la coupe a" un vaijfeau,
la difpofition des ceintes , Planche V. fig. première ,
première préceinte cottée 163 ; féconde préceinte, n°.
1 64 ; troifieme préceinte ,n°.i 65 ; quatrième préceinte,
n°. 166.
La plus baffe préceinte doit avoir d'épaiffeur la
moitié de l'étrave, 6c de largeur, l'épaiffeur entie-
C E I
fe de l'étrave. Les ceintes qui font pofées plus hauî
diminuent un peu par proportion : mais lorfque les
vaiffeaux ont 1 70 pies de long de l'étrave à l'étam-
bord, & au-deffus de 170 pies , on tient les préceintes
de deux pouces plus minces que la moitié de l'étrave.
D'autres Charpentiers proportionnent les ceintes
fuivant la longueur du vaifleau, en leur donnant dou-
ze pouces de large quand le vaifleau a cent pies de
long. Par chaque dix pies que le bâtiment a au-def-
fous de cent pies , ils ôtent aux ceintes un pouce &
demi de largeur ; & par chaque dix pies que le bâ-
timent a au-deffus de cent pies, ils ajoutent aux cein-
tes un demi-pouce de largeur.
Pour leur épaiffeur , ils la font de la moitié de la
largeur , ou un peu moins.
Ces dimenfions ne font point invariables ; chaque
conftrutteur peut les changer , fuivant fes lumières
ou fes principes : mais celles que nous venons de
rapporter font en général affez fuivies.
Prefque tous les grands vaifléaux ont deux cou-
ples , ou quatre pnceintes au-deffous des fabords ,
fous ia belle , c'eft- à-dire à l'endroit où le vaifleau
eft le plus bas. La plus baffe préceinte le doit trouver
autant au-deflous du gros du vaifleau , qu'elle a de
largeur ( félon le fentiment de quelques-uns ) & la
féconde doit être placée au-deffus de cette première
à la diftance d'une ceinte & demie. Les fermures qui
font entre ces préceintes , & dans lelquelles les da-
lots font preique toujours percés , doivent avoir la
même épaifleur que le franc bordage qui eft au-def-
fous. Que li le vaifleau a trois balles préceintes , com-
me cela fe pratique quelquefois , la troifieme doit
delcendre aufli bas fous la féconde , que la premiè-
re eft élevée au-deffus , & la première peut bien être
un peu moins épaiffe que la féconde. Quand on laiffe
trop de diftance entre les préceintes , ôc que les cou-
ples font fort larges , cela fait un effet defagréable.
(Z)
CEINTRE ou CINTRE, f. m. {Architecl. & coupe
des pierres. ) du mot cinclus , a deux lignifications ,
Fune pour la charpente , l'autre pour le contour de
la voûte qui a été formée fur la charpente. Dans la
Charpenteric il fignifie un affemblage de pièces de
bois qui foûtiennent les ais & dolles fur lefquels
on conftruit une voûte avec des briques ou du
moilon ou des pierres de taille , jufqu'à ce qu'étant
fermée elle puiffe fe foûtenir fans ce fecours. Dans
la coupe des pierres , il lignifie le contour arrondi de
la furface intérieure d'une voûte. Les cintres con-
fldérés par rapport à leurs figures font de trois for-
tes : plein-cintre , c'eft un demi-cercle entier; anfe.
de panier ou fur-baiffé , voyei SUR-BAISSÉ ; & fur-
haufé, voyei SUR-HAUSSÉ. (D )
Ceintre, outil de Charron , c'eft une règle ou
une barre de bois plate , qui lert aux Charrons pour
mettre les roues à la hauteur qu'elles leur font com-
mandées. Cet outil n'ayant rien de particulier, il
n'eft pas néceffaire d'en faire la defeription.
CEINTRÉ , adj. en termes de Blafon , fe dit du
globe ou monde impérial , entouré d'un cercle ÔC
d'un demi-cercle en forme de cintre.
Regard en Savoie , d'azur au globe d'or cintré 8c
croilé de gueules. (A")
* CEINTURE , f. f. (JTift. anc. & mod.) lifiere de
foie, de laine , de cuir ou d'autres matières, que l'on,
attache autour des reins. L'ufage en eft ancien. Chez
les Juifs , Dieu ordonna au grand-prêtre d'en porter
une. Les Juifs étoient ceints lorfqu'ils célébraient la
pâqùe , fuivant l'ordre qu'ils en avoient reçu. Dès
ce tems la ceinture fervoit aufli de bourfe. L'ampli-
tude des habits Grecs & Romains en rendit l'ufage
néceffaire chez ces peuples. Ceux qui difputoient
dans les jeux olympiques_/ê ceignoient : mais vers la
trente-quatrième olympiade la ceinture leur fut inter-
C E I
dite, Se ils fe dépouillèrent pour courir. La défenfe
de porter la ceinture , fut quelquefois chez les anciens
une tache d'ignominie Se la punition de quelque fau-
te ; d'où il s'enfuit que cette partie du vêtement mar-
quoit quelque dignité parmi eux. La ceinture n'étoit
pas moins à l'ulage des femmes que des hommes ;
elles s'en fervoient foit pour relever leurs robes , foit
pour en fixer les plis. Il y avoit de la grâce à loùte-
nir à la hauteur de la main le lais du côté droit , ce
qui laiffoit le bas de la jambe découvert ; Se une né-
gligence outrée à n'avoir point de ceinture & à laitier
tomber fa tunique ; de-là les exprefîions Latines dif-
cincli , alth cincli , pour défigner un homme indolent
ou alerte. Mécène ayant témoigné peu d'inquiétude
fur les derniers devoirs de la vie , perfuadé que la
nature prend loin elle-même de notre fépulture , Se-
neque dit de lui , alte cinclum dixijfe putes , vous croi-
riez que celui qui a dit ce mot portoit fa ceinture tien haut.
Gardez-vous , dit Sylla en parlant de Céfar , d'un
homme dont la ceinture eft trop lâche. Il y avoit chez
les Celtes une ceinture qui fervoit, pour ainfi dire,
de mefure publique de la taille parmi les hommes.
Comme l'état veilloit à ce qu'ils fullent alertes , il
puniffoit ceux qui ne pouvoient la porter. L'ufage
des ceintures a été fort commun dans nos contrées :
mais les hommes ayant cédé de s'habiller en long, &
pris le julte-au-corps Se le manteau court , l'ulage
s'en elt reltraint peu-à-peu aux premiers magiltrats,
aux gens d'églile, aux religieux, Se aux femmes. En-
core les femmes n'en portent-elles prefque plus, au-
jourd'hui, que les paniers Se les robes lâches font de-
venues communes , malgré les eccléfialtiques , qui fe
récrièrent beaucoup contre cette mode , qui laiflant
aux femmes , à ce qu'ils croyoient , la liberté de
cacher les fuites de leurs fautes, prognolUquoit unac-
croilTement de diflolution. Nous avons jadis attaché ,
ainfi que les anciens , une marque d'infamie à la pri-
vation de la ceinture. Les banqueroutiers & autres
débiteurs infolvables étoient contraints de la quitter.
La raifon de cet ufage elt que nos ancêtres attachant
à leur ceinture une bourfe, des clefs, &c. la ceinture
étok un fymbole d'état ou de condition , dont la
privation de cette partie du vêtement indiquoit
qu'on étoit déchu. L'hilîoire rapporte que la veuve
de Philippe premier duc de Bourgogne , renonça
au droit qu'elle avoit à fa fucceifion , en quittant fa
<einture fur le tombeau du duc. foy. Investiture.
La diftinction des étoffes & des habits fubiifta en
France jufqu'au commencement du XV. fiecle. On a
un arrêt du parlement de 1420, qui détend aux fem-
mes proltituées la robe à collet renverfé, la queue,
les boutonnières, & la ceinture dorée : mais les fem-
mes galantes ne le fournirent pas long-tems à cette
défenfe ; l'uniformité de leur habillement les confon-
dit bientôt avec les femmes lages; Se la privation ou
l'ulage de la ceinture n'étant plus une marque de dit
tinttion , on fit le proverbe , tonne renommée vaut
mieux que ceinture dorée.
L'ulage des ceintures parmi nous n'étant point paf-
fé , mais feulement reitreint , comme nous l'avons
dit , nous avons une communauté de Ceinturicrs.
Les Ceinturicrs s'appelloient autrefois Courroyers.
Voye^ Ceinturiers.
Ceinture de virginité des anciens: c'étoit la
coutume chez, les Grecs Se les Romains , que le mari
dénouoit la ceinture de la femme le premier loir de
l'es noces.
Homère, Uv. XI. de [on Odyjfée , appelle cette
ceinture swtaSWm! Çmw , ceinture virginale.
Felhis rapporte qu'elle étoit de laine de brebis ,
Se que le mari la délioit lorfqu'il étoit dans le lit
avec fa femme. Il ajoute qu'elle étoit nonce d'un
nœud fingulier, qu'on appelloit le noeud d'Hercule ,
CEI 799
Se que le mari le défaifoit comme un préfage qui lui
promettoit autant d'enfans qu'Hercule en avoit laiffé
en mourant.
Les poètes donnent à Venus une efpece de cein-
ture appelléc ce/lus , à laquelle ils attribuent le pou-
voir d'infpirer de l'amour. Voye{ Ceste. ((S)
* Ceinture de virginité des modernes; elle n'a
rien de commun avec celle des anciens. Chez les an-
ciens l'époux ôtoit à fa femme la ceinture virginale la
première nuit de lés noces ; & chez les modernes
c'elt un prêtent qu'un mari jaloux lui fait quelque-
fois dès le lendemain. Cette ceinture elt compofée
de deux lames de fer tres-fléxibles , affemblées en
croix : ces lames font couvertes de velours. L'une
de ces lames fait le tour du corps au-detïïis des reins ;
l'autre patîe entre les cuifles , & fon extrémité vient
rencontrer les deux extrémités de la première lame ;
elles font toutes trois tenues réunies par un cadenat,
dont le mari feul a le fecret. F. Cadenat. La lame
qui palTe entre les cuiffes elt percée de manière à
allïïrcr un mari de la lâgeffe de fa femme , fans gê-
ner les autres fondions naturelles. On dit que cet
infiniment fi infâme, fi injurieux au fexe , a pris
naiffance en Italie ; c'elt peut-être une calomnie :
ce qu'il y a de certain , c'elt que l'Italie n'eft pas le
feul pays où l'on en ait fait ufage.
Chrétien de la ceinture. Molaraekkel , dixième ca-
life de la famille des Abalfides , ordonna l'an 235
de l'hégyre , de Jefus-Chrift 856 , aux Juifs & aux
Chrétiens de porter une grande ceinture de cuir pour
marquer leur profefïïon , ce qu'ils pratiquent encore
aujourd'hui dans tout l'orient. Depuis ce tems-là les
Chrétiens d'Afic , & fur-tout ceux de Syrie & de la
Métbpotamic , qui font prefque tous Nettoriens ou
Jacobites , font appelles Chrétiens de la ceinture. {G)
Ceinture de la reine, {Hifi. mod. ) ancien
impôt ou taxe qu'on levé à Paris de trois ans en trois
ans, fur le pic de trois deniers pour chaque muid de
vin , Se de lix pour chaque queue , pour l'entretien
de la maifon de la reine. On l'a depuis augmenté Se
mis lur quelques autres denrées ou provifions , com-
me le charbon, &c. On l'appelloit aufTî la taille du
pain & du vin , comme il paroît par des regittres de la
chambre des comptes. Vigenere fuppofe que le nom
de ceinture a été donné à cet impôt, parce qu'autre-
fois la ceinture fervoit de bourfe. Mais il ajoute qu'on
levoit il y a deux, mille ans, enPerfe, une pareille
taxe Se fous le même nom , & cite pour le prouver
l'Alcibiade de Platon , Cicéron , Se Athénée.
Il y a en Angleterre , pour la même deltination ,
un impôt à-peu près (emblable, qu'on appelle aurum
reginœ , or de la reine , (qucen-gold ) ; c'étoit origi-
nairement un l'on qui le raifoit librement & fans être
exigible. On en a tait depuis une dette, au payement
de laquelle les particuliers font contraints. (//)
CFINTURE DE vif ARGENT, terme de Médecine ;
c'elt une efpece de ceinture couverte Se remplie de
mercure. Voye^ Mercure.
Elle elt de cuir, de linge , de drap , de coton , ou
d'autre étoffe, qui enveloppe du mercure préparé
ou éteint avec la lalive d'une perlonne à jeun, de la
graille ou autre matière, qui en amortit la trop gran-
de \ ivacité. On l'attache en forme de topique autour
des reins , quelquefois avec tuccès , quelquefois aulïï
au préjudice du malade ; car elle elt fouvent dange-
reufe aux pcrlonnes qui font d'un tempérament toi-
ble ou fujettes aux convulfions : on s'en fert pour
guérir la gale, pour tuer la vermine, &c, (A )
CEINTURE du four , en terme de Boulanger, & d'au-
tres ouvriers; c'elt le tour intérieur du four , ou la par-
tie du mur qui le forme , Se fur laquelle la voûte elt.
appuyée.
Cfintuue ou Peignon ; vo> ^Peignon & Cor-
DERIE,
8oo
C E I
CEINTURIER , f. m, {Art méchaniqut. ) on ap-
pelle ainfi celui qui fait ou qui vend des ceintures.
La communauté des marchands Ceinturiers de la
ville de Paris eft d'un très -ancien établiffement , &
étoit autrefois une des plus confidérables de cette
capitale.
Le nom de Ceinturiers epe les maîtres prennent au-
jourd'hui , eft afTez moderne. Avant le milieu du xv.
fiecle , ils fe nommoient maîtres Courroyers , du mot
courroie; parce qu'on faifoit alors les ceintures avec
du cuir , à la relérve de ceux de mouton ôc de ba-
zane , qu'il étoit défendu d'y employer.
Cette communauté s'eft foûtenue tant que les rob-
bes & les habillemens longs ont été en ufage en Fran-
ce : mais la mode des habits courts que les hommes
prirent après le règne de Henri III. ne la fît pas pour-
tant tout-à-fait tomber. Cet étalage afTez bilarre de
demi-ceints chargés de tant de bourfes , demis , &c
d'autres bagatelles , dont les femmes , fur-tout parmi
la bourgeoifîe , fe font parées jufque allez avant dans
le xvi. fiecle, fuffit afTez long-tems pour occuper
près de deux cents maîtres de cette communauté.
Toutes ces modes étant à la fin paffées , les bau-
driers & les ceinturons de toutes fortes, foit de ve-
lours ou d'autres étoffes , foit de diverfes efpeces de
cuirs piqués d'or , d'argent , &c de foie , les ceintures
& gibecières pour les grenadiers, les porte-carabines
pour la cavalerie , les fournimens & les pendans à
bayonnette pour l'infanterie , enfin les ceintures d'é-
toffe ou de cuir brodées , font reliés le partage des
maîtres de cette communauté.
Chaque maître ne peut avoir qu'une boutique &
qu'un apprenti , obligé au moins pour quatre ans.
Les enfans de maîtres font apprentifîage chez leur
père , & ne tiennent point lieu d'apprentis.
Aucun n'eft reçu à la maîtrife qu'il n'ait fait chef-
d'œuvre , qui anciennement étoit une ceinture de
velours à deux pendans , à huit boucles par le bas
des pendans ; la ferrure de fer à crochet , limée & per-
cée à jour , à feuillages encloiiés , & reparée deffus
& deffous , les clous avec leur contre-rivet , le tout
bien poli. Mais depuis que ces ceintures ne font plus
d'ufage , le chef-d'œuvre eft de quelqu'un des ouvra-
ges que font les Ceinturiers modernes. Voye^ le Dicl.
du Commerce.
CEINTURON , f. m. ( Art milit. ) ceinture de bu-
fle avec une boucle , des barres , & des pendans. Le
foldat fe l'attache fur les reins , & l'épée eft fufpen-
due aux barres & aux pendans. La partie des pen-
dans dans laquelle elle pafTe, s'appelle le baudrier. On
a pratiqué au baudrier une efpece de boutonnière ,
<!ans laquelle entre le crochet du fourreau de l'épée.
Il y a des ceinturons de foie ; il y en a de maroquin ,
de veau , &c. pour les officiers & autres perfonnes
qui portent l'épée. Les Ceinturiers font les ceinturons
de bufle , de maroquin , & de veau : mais ils font
faire ceux de foie , qui ne peuvent être vendus que
par eux. Voye^ Ceinturier.
* CELADON , adj. qu'on prend quelquefois fub-
tantivement , ( Teinture. ) couleur verte tirant fur le
blanc. Il eft ordonne par les reglemensde la Teinture
"& les ftatuts des Teinturiers , que les foies teintes en
céladon feront alunées , voye{ Aluner ; puis gau-
-dées , voyt{ Gauder ; enf'uite paffées fur la cuve
d'inde : que les laines de cette couleur feront gau-
dées & pafîees en cuve , fans être brunies avec le
bois d'inde, voye{ BRUNIR ; & que les fils céladons
feront d'abord teints bleus ; puis rabattus avec le
bois de campeche & le verdet , & achevés avec la
gaude. Voye^ Varticle TEINTURE.
CELAM A , ( Géog. ) ville d'Afie aux Indes , dans
l'île de Banda, l'une des Molucques.
CELANO , ( Géog. ) petite ville d'Italie au royau-
C E L
me deNaples, dans l'Abruzze ultérieure. Long, jt
30- lat. 42.
CELEBES , (isle des) grande île d'Afie dans la
mer des Indes , fous l'équateur au midi des Philippi-
nes , & à l'orient de celle de Bornéo : on la nomme
Macafjar. La capitale fe nomme Celebes. On prétend
que le hafard feul a décidé de la religion que pro-
feffent les Celebes ; ennuyés d'être idolâtres , ils en-
voyèrent des députés aux Chrétiens qui demeuroient
dans leur voifinage , & ils en envoyèrent en même
tems d'autres au roi d'Achem qui étoit Mahométan ,
dans la réfolution de prendre la religion de ceux qui
leur envoyeroient les premiersdes apôtres. Les Chré-
tiens furent prévenus par les Mahométans , dont en
conféquence ils embrafferent la feefe.
* CELEBRE , ILLUSTRE , FAMEUX , RENOM-
MÉ , fynonymes , ( Gramm. ) termes relatifs à l'o-
pinion que les hommes ont conçue de nous , fur ce
qu'ils ert ont entendu raconter d'extraordinaire. Fa-
meux ne déligne que l'étendue de la réputation , foit
que cette réputation foit fondée fur de bonnes ou de
mauvaifes actions ; & fe prend en bonne & en mau-
vaifè part : on dit un fameux capitaine , & un fameux
voleur. Illuflre marque une réputation fondée fur urt
mérite accompagné de dignité & d'éclat ; on dit les
hommes illuflres de la France ; & l'on comprend fous
cette dénomination & les grands capitaines , & les
magiftrats diftingués , & les auteurs qui joignent des
dignités au mérite littéraire. Célèbre offre l'idée d'u-
ne réputation acquife par des talens littéraires , réels
ou fuppofés , & n'emporte point celle de dignité.
Renommé feroit tout- à -fait fynonyme à fameux ,
s'il fe prenoit en bonne & en mauvaife part : mais
il ne le prend qu'en bonne , & n'eft relatif qu'à l'é-
tendue de la réputation. Peut-être marque- 1- il une
réputation un peu moins étendue que fameux. Fa*
meux, célèbre, renommé, fe difent des perfonnes & des
choies. Illuflre ne fe dit que des perfonnes. Eroftrate
& Alexandre fe font rendus fameux , l'un par l'incen-
die du temple d'Ephele , l'autre parle ravage de l'A-
fie. La bataille de Canne illuflra les Carthaginois.
Horace eft célèbre entre les auteurs Latins. La pour-
pre de Sidon étoit auffi renommée chez les anciens ,
que la teinture des Gobelins parmi nous. Voye{ les
Synonymes de M. l'abbé Girard.
CELEF , ( Gcog. ) rivière d'Afrique au royaume
d'Alger , qui tombe dans la mer à trois lieues d'Alger.
* CELENO , ( Mytholog. ) c'eft le nom d'une des
Pleyades ; voye{ Pleyades : c'eft auffi celui de la
principale des harpies. Elle prédit aux Troyens dans
les îles Strophades, qu'en punition du mauvais trai-
tement qu'elle en avoit reçu , ils ne s'établiroient en
Italie qu'après que la faim les auroit contraints à
manger leurs tables. Qu'on me permette d'obferver
en partant , que quelqu'intéreflant que pût être pour
les Romains l'épiiode des harpies , il eft allez ridi-
cule , & que la prédief ion des tables mangées eft une
puérilité fans efprit , fans agrément , & fort au-def-
fous même du cheval de Troie. Quelle différence
entre cette partie de la machine de l'Enéide , & l'a-
mour fubftitué au petit Afcagne , entre les bras de
Didon !
CELERES , f. m. pi. (Hifl. anc.) c'étoit chez les
Romains une troupe choifie , ou régiment deftiné à
la garde du roi. Romulus inftitua ce corps, compoié
de trois cents jeunes gens tirés des plus illuflres fa-
milles de Rome , Se approuvés par les fuffrages des
curies de Rome , dont chacune en fourniffoit dix.
Leur nom vient de celer, prompt, aftif; parce que
cette troupe exécutoit avec promptitude les ordres
du prince : d'autres prétendent qu'ils le tiennent de
leur premier tribun nommé Celer, qui fut d'un grand
fecours à Romulus dans le combat contre Ion frère
Remus, tué, dit-on, par ce même Celer. On con-
f<~ .-i
C E L
fond encore les celeres avec les foldats nommés trop
fuli , parce qu'ils emportèrent d'emblée la ville de
Troffulum en Etruric.
Outre l'honneur de gardera Rome la pcrfonne du
roi quand on étoit en campagne , les celtres faifoient
J.'avant-garde de l'armée , chargeoient les premiers,
& formoient l'arriere-garde dans les retraites. Ils ref-
fembloient à nos dragons , puiiqu'ils combattoient
quelquefois à pié, quoiqu'ils fuflent d'ailleurs mon-
tés &c compris dans la cavalerie. Ils étoient divifés
en trois efcadrons de cent maîtres chacun , fous un
capitaine ou centurion ; & leur commandant en chef
fe nommoit tribunus ou prcefcclus celerum. On le regar-
doit comme la féconde pcrfonne de l'état.
Plutarque aflïïre que Numa fupprima ce corps :
mais il fut rétabli fous les rois l'es fuccefleurs; puit-
qu'il eft certain que le fameux Brutus qui chafia de
Rome Tarquin le fuperbe , avoit été tribun des ce-
leres. (G)
CÉLERI , f. m. apium dulce , (Jard. ) eft une cf-
pece d'achc , dont les feuilles font déchiquetées ,
dentelées , & d'un vcrd luifant , mais dont les tiges
font d'un goût moins fort, & plus agréable que Ta-
che des marais. Ces tiges fe blanchiflent , & devien-
nent tendres en les buttant de terre & de fumier jus-
qu'au haut des feuilles , dont on coupe l'extrémité.
Le céleri fe mange en falade , & fert à plufieurs ra-
goûts. Cette plante ie multiplie de graine qui eft fort
menue , & que l'on feme fur couche au mois d'Avril.
On la replante enfuitc en pleine terre au mois de Juin
fur une planche terrotée de quatre pies de large , &c
à trois pouces l'une de l'autre fur cinq rayons , ayant
foin de l'arrofer fouvent, èc toujours de la butter.
Foyei Ache. (K)
CELERIN, f. m. membradas, (Hi(i. nat. Ichth. )
poilfon de mer du genre des aphyes. Il a le corps
blanc & la tête de couleur d'or , & il reflemble aux
fardines.
Cilcrïn erica , poiffon qui fe trouve fouvent dans
les lacs de Savoie. On lui a donné le nom de célcrin ,
parce qu'il reffemble beaucoup aux célerins de mer.
Il eft auflî fort reflemblant à la fardine : c'eft pour-
quoi on l'appelle en Italie fardanella. Ses écailles font
fort menues & luifantes comme de l'argent: elles
tombent aifément. La bouche eft grande ; les ouver-
tures des ouies font découpées. Ce poiffon eft fort
gras. On en prend une grande quantité au printems.
On fale les petits , parce qu'ils fe gardent mieux que
les grands. Rondelet, foye^ PoiSSON. ( /)
CELERITE , f. f. ( Mèchunique. ) eft proprement
la vîtefle d'un corps en mouvement, ou cette affec-
tion du corps en mouvement , par laquelle il eft mis
en état de parcourir un certain efpace dans un cer-
tain tems. y 'oye^ Vitesse , Espace ; voyej auffïMov-
VEMENT.
Ce mot s'employe prcfque toujours dans un fens
figuré. On fe fert rarement du mot de célérité pour
exprimer la vîtefle d'un corps en mouvement : mais
on s'en fert fouvent dans l'ufage ordinaire ; lorfqu'on
dit, par exemple , qu'une telle affaire demande ex-
pédition & célérité , &c. Ce mot vient du latin célé-
rités , qui lignifie la même chofe. ( O )
* CELESTE , f. f. (Myt/i.) déeffe adorée à Car-
thage &: dans toutes les contrées feptentrionales de
l'Afrique. Elle étoit représentée affile fur un lion , &
furnommée la reine du ciel. Eliogabale qui avoit pris
le titre de prêtre du foleil , enleva l'idole de Célefh de
Carthage , avec toutes les richefles de fon temple ;
la maria avec fon dieu, & contraignit les fujets de
l'empire à célébrer les noces , 6c à lui faire des pré-
ions. Conftantin détruilit le temple que CiUJii ■ ,
a Carthage.
CELESTINS, f. m. pi. {Hift. eccléf.) ordre reli-
gieux , ainfi nommes du pape Céleftin V. qui avant
Terne II,
C E L
80 1
que d'être élevé fur la chaire de faint Pierre -, & ne
portant encore que le nom de Pierre de Moron , éta-
blit une congrégation de religieux réformés de l'or-
dre de Saint-Bernard. Il commença en 1 144 ; fut ap-
prouvé par Urbain IV. en 1 264 , & confirmé dix ans
après par Grégoire X. au II. concile général de Lyon.
D'Italie il parla en France l'an 1 300 , fous le règne
de Philippe-le-Bel ; & en 1 3 18 , félon du Breuil dans
fes antiquités de Paris, fut fondée la maifon qu'ont
en cette capitale les Célejlins. Elle eft en France le
chef de l'ordre , qui conlïfte en vingt-trois monafte-
res ; ils font gouvernés par un provincial, qui a pou-
voir de général en France , & qui eft élu tous les
trois ans. ( G - )
* CÉLEUSME , f. m. ( Hift. anc. ) c'eft le nom
du cri par lequel on exhortoit chez les Grecs les ra-
meurs à redoubler leurs efforts. Ce cri étoit , félon
Ariftophane , rhippapé ou 00p. Voye^ Cri. Le ce-
leufme étoit auffi à l'ufage des gens de mer , chez les
Romains. Les commandans avec leurs celeufmes , dit
Arrien, ordonnoient aux rameurs de commencer ou
de ceffer ; & les rameurs répondant par un cri , plon-
geoient tous à la fois leurs rames dans le fleuve.
* CELEUSTE , f. f. ( Hift. anc. ) nom d'une des
danfes boufonnes des Grecs. On n'en fait rien de
plus.
* CÉLIBAT , f. m. ( Hift. anc. & mod. & Morale.}
eft l' état d'une perfonne qui vit fans s'engager dans le
mariage. Cet état peut être confidéré en lui-même
fous trois afpecls différens : i°. eu égard à l'efpcce
humaine ; z°. à la fociété ; 30. à la fociété chrétien-
ne. Mais avant que de confidérer le célibat en lui-
même , nous allons expofer en peu de mots fa fortu-
ne , & les révolutions parmi les hommes. M. Morin,
de l'académie des Belles-lettres , en réduit l'hiftoire
aux propolîtions fuivantes. Le célibat eft auflî ancien
que le monde ; il eft auflî étendu que le monde : il
durera autant & infiniment plus que le monde.
Hiftoire abrégée du célibat. Le célibat eft auflî an-
cien que le monde , s'il eft vrai , ainfi que le préten-
dent quelques auteurs de l'ancienne & de la nou-
velle loi , que nos premiers parens ne perdirent leur
innocence qu'en ceffant de garder le célibat ; Se
qu'ils n'auroient jamais été chafles du paradis , s'ils
n'enflent mangé le fruit défendu ; action qui dans le
ftyle modefte 6c figuré de l'Ecriture, ne deligne autre
chofe, félon eux, que l'infraftion du célibat. Ils ti-
rent les preuves de cette interprétation grammatica-
le, du lentiment de nudité qui luivit immédiatement
le péché d'Eve & d'Adam; de l'idée d'irrégularité
attachée prelque par toute la terre à Fade charnel ;
de la honte qui l'accompagne ; du remors qu'il caule ;
du péché originel qui fe communique par cette \ oie :
enfin de l'état où nous retournerons au lortir de cette
vie , où il ne fera queftion ni de maris ni de femmes ,
& qui fera un célibat éternel.
Il ne m'appartient pas , dit M. Morin , de donner à
cette opinion les qualifications qui lui conviennent ;
elle eft finguliere : elle paraît oppofée à la lettre de
l'Ecriture ; c'en eft aile/ pour la rejetter. L'Ecriture
nous apprend qu'Adam cv Eve vécurent dans le pa-
radis, comme trere cv fœur ; comme les anges vivent
dans le ciel ; comme nous y vivrons un jour: cela
lùflît ; & voilà le premier & le parfait célibat. Savoir
combien il dura , c'eft une queftion purement cu-
rieufe. Les uns difent quelques heures ; d'autres quel-
ques jours : il y en a qui , tondes fur des raifons myf-
tiques , fur je ne fai quelles traditions de Tégfife
Greque, fur l'époque de la nailî'ancc de Caïn, poul-
fent cet intervalle (ufqu'à trente ans. _
Ace prenv ■ les doâeurs Juifs en fbntfuc-
céderun autre qui dura bien davantage; car ils pré-
tendent qu'Adam & Eve , confus de îeur crime , en
firent pénitence pendant cent ans, fans avoir aucun
II iii
802
C E L
commerce enfemble ; conjecture qu'ils établilTent fur
la naiffance de Seth , leur troifieme fils , que Moyfe
ne leur donne qu'à l'âge de cent trente ans. Mais à
parler jufte, il n'y a qu'Abel à qui Ton puiffe attri-
buer Thonneur d'avoir gardé le célibat pendant toute
la vie. Savoir fi ion exemple fut imité dans les géné-
rations fuivantes ; fi les fils de Dieu qui le lailierent
corrompre par les filles des hommes , n 'étoient point
une efpece de religieux , qui tombèrent dans le de-
fordre , c'eft ce que l'on ne lauroit dire ; la choie n'eft
pas impofîible. S'il efl vrai qu'il y eût alors des^ fem-
mes qui affectoient la ftérilité , comme il paroît par
un fragment du prétendu livre d'Enoch , il pouvoit
bien y avoir eu aufTi des hommes qui en fiffent pro-
feffion : mais les apparences n'y font pas favorables.
Il étoit queftion alors de peupler le inonde ; la loi de
Dieu & celle de la nature impofoient à toutes for-
tes de perfonnes une efpece de nécefhté de travailler
à l'augmentation du genre humain ; & il eft à préfu-
mer que ceux qui vivoient dans ce tems-là , le fai-
foient une affaire principale d'obéir à ce précepte.
Tout ce que l'hiftoire nous apprend, dit M. Morin,
des Patriarches de ces tems-là, c'efc qu'ils prenoient
& donnoient des femmes ; c'eft qu'ils mirent au
monde des fils & des filles, & puis moururent , com-
me s'ils n'avoient eu rien de plus important à faire.
Ce fut à peu prés la même choie dans les premiers
fiecles qui fuivirent le déluge. Il y avoit beaucoup à
défricher , & peu d'ouvriers ; c'étoit à qui engen-
drerait le plus. Alors l'honneur , la nobleffe , la
puifîance des hommes coniiftoient dans le nombre
des enfans ;' on étoit fur par-là de s'attirer une grande
conlîdération , de fe faire refpecter de les voilins,
& d'avoir une place dans l'hiftoire. Celle des Juifs
n'a pas oublié le nom de Jàïr, qui avoit trente fils
dans le fervice ; ni celle des Grecs , les noms de Da-
naiis & d'Egyptus , dont l'un avoit cinquante fils , &
l'autre cinquante filles. La ftérilité pallbit alors pour
une efpece d'infamie dans les deux lexes , & pour une
marque non équivoque de la malédiction de Dieu;
au contraire , on regardoit comme un témoignage
authentique de fa bénédiction , d'avoir autour de la
table un grand nombre d'enfans. Le célibat étoit une
efpece de péché contre nature : aujourd'hui, ce n'eft
plus la même chofe.
Moyfé ne laiffa guère aux hommes la liberté de fe
marier ou non. Lycurgue nota d'intamie les célibatai-
res. Il y avoit même une folemnité particulière à La-
cédémone , où les femmes les produiioient tous nuds
aux pies des autels , Se leur iaifoient taire à la natu-
re une amende honorable, qu'elles accompagnoient
d'une correction très-fevere. Ces républicains pouf-
fèrent encore les précautions plus loin , en publiant
des reglemens contre ceux qui le marioient trop tard,
àfiyajxia , & contre les maris qui n'en ufoient pas
bien avec leurs femmes, matayttfiûà..
Dans la fuite des tems , les hommes étant moins
rares , on mitigea ces loix pénales. Platon tolère dans
fa république le célibat jufqu'a trente-cinq ans : mais
paffé cet âge , il interdit feulement les célibataires des
emplois , & leur marque le dernier rang dans les cé-
rémonies publiques. Les lois Romaines qui lucce-
derent aux greques, furent auffi moins rigoureufës
contre le célibat : cependant les cenfeurs étoient char-
gés d'empêcher ce genre de vie folitaire , préjudicia-
ble à l'état , cœlibes ejfe prohibante). Pour le rendre
odieux , ils ne recevoienî ies célibataires ni à tefter ,
ni à rendre, témoignage ; & voici la première quef-
tion que l'on faifoit à ceux qui le préléntoient pour
prêter ferment : ex ariuni tui-Jaitenùà , m equum ha-
bes , tu uxorem habes ? à votre ame & conlcience , avez-
vous un cheval , avez-vous une femme ? mais les
Romains ne le contentoient pas de les affliger dans
ce monde, leurs Théologiens, les menaçoient aiifîi de
C E L
peines extraordinaires dans les enfers. Extrema om-
nium calamitas & impieias accidit illi qui abj'que filiis à
vita dijeedit , & dczmonibus maximas dat pœnas pojl obi-
tum. L'eft la plus grande des impiétés, & le dernier
des malheurs , de lortir du monde fans y biffer des
enfans ; les démons font fouifrir à ces gcns-là de-
cruelles peines après leur mort.
Maigre toutes ces précautions temporelles & fpi-
rituelles , le célibat ne laiffoit pas de taire Ion che-
min ; les lois mêmes en font une preuve. On ne s'a-
vife pas d'en faire contre des delordres qui ne fub-
fiftent qu'en idée ; favoir par où & comment celui-ci
commença , l'hiftoire n'en dit rien : il eft à préfumer
que de fimples railons morales , & des goûts parti-
culiers , l'emportèrent fur tant de lois pénales , bur-
fales , infamantes , & fur les inquiétudes de la conl-
cience. Il fallut fans doute dans les commencemens
des motifs plus preffans , de bonnes railons phyfi.-
ques ; telles étoient celles de ces tempéramens heu-
reux & fages , que la nature difpenle de réduire en
pratique la grande règle de la multiplication : il y en
a eu dans tous les tems. Nos auteurs leur donnent
des titres flétriffans : les Orientaux au contraire les
appellent eunuques du foleil , eunuques du ciel , faits par
la main de Dieu , qualités honorables , qui doivent
non-feulement les confoler du malheur de leur état ,
mais encore les autorifer devant Dieu & devant les
hommes à s'en glorifier , comme d'une grâce fpécia-
le , qui les décharge d'une bonne partie des follicitu-
des de la vie, ck les tranfporte tout d'un coup au
milieu du chemin de la vertu.
Mais lans examiner férieulément fi c'eft un avan-
tage ou un defavantage , il eft fort apparent que ces
béats ont été les premiers à prendre le parti du céli-
bat : ce genre de vie leur doit fans doute ion origine,
& peut-être fa dénomination ; car les Grecs ap-
pelloient les invalides dont il s'agit xdAo/3m , qui n'eft
pas éloigné de cœlibes. En effet le célibat étoit le feul
parti que les hoAo.Sc/ euffent à prendre pour obéir aux
ordres de la nature, pour leur repos, pour leur hon-
neur , & dans les règles de la bonne foi : s'ils ne s'y
céterminoient pas d'eux-mêmes , les lois leur en in-
poibient la néceliité : celle de Moyfe y étoit exprcl-
le. Les lois des autres nations ne leur étoient guère
plus favorables : iî elles leur permettoient d'avoir
des femmes, il étoit aulîi permis aux femmes de les
abandonner.
Les hommes de cet état équivoque & rare dans
les commencemens , également mépriles des deux
lexes , le trouvèrent expofés à plulieurs mortifica-
tions , qui les réduiûrent à une vie obicure & reti-
rée : mais la nécefhté leur fuggéra bientôt différens
moyens d'en fortir, & de le rendre recommandables:
dégagés des mouvemens inquiets de l'amour étran-
ger & de l'amour-propre , ils s'affujettirent aux vo-
lontés des autres avec un dévouement fingulier ; &
ils lurent trouvés fi commodes , que tout le monde
en voulut avoir : ceux qui n'en avoient point , en fi-
rent par une opération hardie & des pius inhumai-
nes: les pères, les maîtres, lesfouverains, s'arrogè-
rent le droit de réduire leurs enfans, leurs cklaves,
leurs fujets , dans cet état ambigu ; & le monde en-
tier qui ne connoiffoit dans le commencement que
deux lexes , fut étonné de le trouver inieniîblement
partagé en trois portions à peu près égales.
A ces célibats peu volontaires û en luccéda de li-
bres, qui augmentèrent coniidérablement le nombre
des premiers. Les gens de lettres & les philosophes
par goût , les athlètes , les gladiateurs , les muiieiens,
pur raiion d'état, une infinité d'autres par libertina-
ge , quelques-uns par vertu , prirent un parti que
Diogene trouvoit ii doux, qu'il s'étonnoit que l'a ref-
- fource ne devînt pas plus à la mode. Quelques pro-
feflions y étoient obligées , telles que celle de tein-
C E L
dre Crt écarlate , baphiariï. L'ambition & la politique
groffirent encore le corps des célibataires : ces hom-
mes bifarres furent ménagés par les grands mêmes ,
avides d'avoir place dans leur teltament ; & par la
raifon contraire , les pères de famille dont on n'eipé-
roitrien , furent oubliés, négligés, méprifés.
Nous avons vu jufqu'à préfent le célibat interdit ,
eniuite toléré , puis approuvé, enfin préconiié : il ne
tarda pas à devenir une condition eflentielle dans la
plupart de ceux qui s'attacherait au fervice des au-
tels. Melchifedech fut un homme fans famille & fans
généalogie. Ceux qui fe deitinerent au fervice du
temple & au culte de la loi , furent difpenfés du ma-
riage. Les filles curent la même liberté. On allure
que Moyfe congédia fa femme quand il eut reçu la
loi des mains de Dieu. Il ordonna aux facrificateurs
dont le tour d'officier à l'autel approcheroit, de le
iéqueftrer de leurs femmes pendant quelques jours.
Après hii les prophètes Elie , Elifée , Daniel & les
trois compagnons, vécurent dans la continence. Les
Nazaréens , 6c la plus faine partie des Elïeniens , nous
font repréfentés par Jofephe comme une nation mer-
vcilleufc , qui avoit trouvé le fecret que Metellus
Numidicus ambitionnoit , de fe perpétuer fans ma-
riage, fans accouchement, & fans aucun commerce
avec les femmes.
Chez les Egyptiens les prêtres d'Ifis , &c la plu-
part de ceux qui s'attachoient au fervice de leurs di-
vinités , faifoient profeflîon de chalteté ; & pour plus
de fureté ils y étoient préparés dès leur enfance par
des chirurgiens. Les Gymnofophiltes, les Brachma-
nes , les Hiérophantes des Athéniens , une bonne
partie desdilciples de Pythagore, ceux deDiogene,
les vrais Cyniques , ôc en général tous ceux 6c tou-
tes celles qui le dévoùoient au fervice des déeiTes , en
ufoient de la même manière. Il y avoit dans laThra-
ce une fociété conlîdérable de religieux célibataires ,
appelles ji-nç-eù ou créateurs, de la faculté de le pro-
duire fans le fecours des femmes. L'obligation du
célibat étoit impolée chez les Pcrfes aux filles desti-
nées au fervice du foleil. Les Athéniens ont eu une
mailon de vierges. Tout le monde connoit les vefta-
les Romaines. Chez nos anciens Gaulois , neuf vier-
ges quipaffoient pour avoir reçu du ciel des lumières
& des grâces extraordinaires, gardoient vn oracle fa-
meux dans une petite île nommée S crié, iur les côtes de
l'Armorique. Il y a des auteurs qui prétendent même
que l'île entière n'étoit habitée que par des filles ,
dont quelques-unes faifoient de tems en tems des
voyages fur les cotes voifines , d'où elles rappor-
toient de petits embryons pour conlerver l'eipece.
Toutes n'y alloient pas : il elt à préfumer , dit M.
Morin , que le lort en décidoit , & que celles qui
avoient le malheur de tirer un billet noir , étoient
forcées de defeendre dans la barque fatale qui les ex-
poloit fur le continent, Ces filles confacrées étoient
en grande vénération : leur mailon avoit des privi-
lèges linguliers, entre lefqucls on peut compter ce-
lui de ne pouvoir être châtiées pour un crime , fans
avoir avant toute choie perdu la qualité de fille.
Le célibat a eu les martyrs chez les payens , &
leurs hiltoires 6k leurs fables (ont pleines de tilles qui
ont généreufement préféré la mort à la perte de
l'honneur. L'aventure d'Hippolite elt connue , ainfi
que la rélurrcction par Diane, patzone des c<
res. Tous ces laits , & une infinité d'autres , étoient
foûtenus par les principes de la croyance. Les Grecs
regardoicntla chalteté commeune grâce liunaturel-
le; les facrifices n'étoient point cenlés complets, fans
l'intervention d'une vierge; ils pouvoient bien être
commencés, libarc : mais ils ne pouvoient être con-
fommés lans elles , lit are, Ils avoient fur la virginité
des propos magnifiques , des idées fublimes , des fpé-
culations d'une grande beautc ; mais en approfôo-
Tomc II,
C E L
S03
diffant la conduire fecrete de tous ces Lèt'tbiùalhs, Se
de tous ces virtuofes du paganifme , on n'y décou-
vre , dit M. Morin , que delordres , que forfanterie,
& qu'hypocrifie. A commencer par leurs déeffes ,
Velta la plus ancienne étoit reprél'entee avec un en-
fant ; où l'avoit-elle pris ? Minerve avoit pai devers
elle Erichtonius, une aventure a> ec X uleain , 6c des
temples en qualité de mère. Diane avoit fbn cheva-
lier Virbius, &c l'on Endimion : le plaiiir qu'elle pre-
noit à contempler celui-ci endormi , en dit beaucoup,
& trop pour une vierge. Myrtilus accule les mules
de complaifances fortes pour un certain Mégalion ,
& leur donne à toutes des entans qu'il nomme ncm
par nom. C'elt peut-être pour cette raifon que l'abbé
Cartaud les appelle , les filles de C opéra de Jupiter.
Les dieux vierges ne valoient guère mieux que les
déciles , témoins Apollon & Mercure.
Les prêtres , lans en excepter ceux de Cybele ,"
ne pafîoient pas dans le monde pour des gens d'une
conduite bien régulière : on n'enterroit pas vives tou-
tes les verbales qui péchoient. Pour l'honneur de leurs
philolbphes, M. Morin s'en tait, & finit ainfi l'hiltoire
du célibat, tel qu'il étoit au berceau,dans l'enfance, en-
tre les bras de la nature; état bien didérent du haut de-
gré de perfection oii nous le voyons aujourd'hui :
changement qui n'eft pas étonnant ; celui-ci ell l'ou-
vrage de la grâce & du Saint-Efprit ; celui-là n'etoit
que l'avorton imparfait d'une nature déréglée, dépra-
vée, débauchée, trille rebut du mariage cV de la \ b>
ginité. Voye^ les Mémoires de C Académie d.s In/ cap-
tions y tome IF. page 308. Hijl. critiq. du cdib.it. Tout
ce qui précède n'eft abfolument que l'analyle dé ce
mémoire : nous en avons retranche quelques en-
droits longs ; mais à peine nous fommes-nous accor-
dé la liberté de changer une feule exprciîion dans ce
que nousenavons employé: il en fera de même dans
la fuite de cet article : nous ne prenons rien lur
nous ; nous nous contentons feulement de rapporter
fidèlement , non-feulement les opinions , mais les
difeours même des auteurs, & de ne piuler ici que
dans des fources approuvées de tous les honnê-
tes gens. Après avoir montré ce que l'hiltoire m nu
apprend du célibat, nous allons maintenant envifa-
ger cet état avec les yeux de la Philofophie , 8e
expofer ce que dirFereru> écrivains ont pcnle fur ce
fujet.
Du célibat confidéré en lui-même. i°. Eu égard à fef-
pece humaine. Si un hiltorien ou quelque voyageur
nous faifoit la defeription d'un être perdant , parfai-
tement ilole , lans Supérieur, fans égal, fans inté-
rieur, à l'abri de tout ce qui pourroit émouvoir les
pallions , leul en un mot de Ion efpece ; nous di-
rions fans héfiter que cet être finguiier doit être plongé
dans la mtlancholie : car quelle confolation pourroit-il
rencontrer dans un monde qui ne ferait pour lui qu'une
vajle Jblitudc ? Si l'on ajoùtoit que malgré les appa-
rences il jouit de la vie, lent le bonheur d'e\iiter, &
trouve en lui-même quelque félicité; alors nous pour-
rions convenir que ce n'e/i pas tout-à-fau un nu
& que relativement a lui-même fa con/litutiou n\
entièrement abfurde : mais nous n'irions jamais
dire qu'il cjl bon. C epeinlant û l'on inûfioit , Si qu'on
11 qu'il elt partait dans Ion genre, & confë"
quemment que nous lui refluons à tort l'épithete de
bon ; car qu'importe qu'il ait quelque choie ou qu'il
n'ait rien à démêler avec d'autres? il fàudroit bien
franchir le mot, 6c reconnoître que cet 1
s'il tjl pojfiblt toutefois qu'il 1
1.: .' 1 .. 1 oir aucun rapport , uul .-. -
dans lequel il ejl p
Mais fi l'on venoit à découvrir à la longue quel-*
que fyltèmc dans la nature dont l'ei, . 1 tomate
en quelVion put être confidéré comme failant par-
tie ; li l'on entrevoyoit dans la uruchu e des lient qui
J 1 1 1 1 ij
8o4
CEL
C E L
Tattachaflcnt à des êtres femblables à lui ; n fa con-
formation indiquent une chaîne de créatures ^ utiles ,
qui ne put s'accroître & s'étemifer que par l'emploi
des facultés qu'il auroit reçues de la nature ; il per-
drait incontinent le titre de bon dont nous l'avons
décoré : car comment ce titre convienclroit il à un
individu , qui par ion inaûion 6c fa folitude tendroit
aufïï directement à la ruine de fon efpece ? La con-
fervation de l'efpece n'eft-elle pas un des devoirs ef-
fentiels de l'individu ? & tout individu qui raifonne
& qui eft bien conformé , ne fe rend-t-il pas coupa-
ble en manquant à ce devoir , à moins qu'il n'en ait
ijoute , a moins qui
qiL 'autorité fupérieure à celle de la nature , afin qu'il foit
bien clair qu'il ne s'agit nullement ici du célibat con-
facré par la religion ; mais de celui que l'imprudence,
la mifanthropie , la légèreté, le libertinage, forment
tous les jours ; de celui où les deux fexes le corrom-
pant par les fentimens naturels mêmes , ou étouffant
en eux ces fentimens fans aucune nécefïïté,tuient une
union qui doit les rendre meilleurs , pour vivre , foit
dans un éloignement ftérile , foit dans des unions qui
les rendent toujours pires. Nous n'ignorons pas que
celui quia donné à l'homme tous fes membres , peut
le difpenfer de l'ufage de quelques-uns , ou même lui
défendre cet ufage , & témoigner que ce facrifîce lui
eft agréable. Nous ne nions point qu'il n'y ait une
certaine pureté corporelle , dont la nature abandon-
née à elle-même ne fe feroit jamais avifée , mais
que Dieu a jugée néceffaire pour approcher plus di-
gnement des lieux faints qu'il habite , & vaquer d'u-
ne manière plus fpirituelle au miniilere de fes autels.
Si nous ne trouvons point en nous le germe de cette
pureté , c'eft qu'elle eft , pour ainfi dire , une vertu
révélée & de foi.
Du célibat confidéré z°. eu égard à lafociété. Le cé-
libat que la religion n'a point fanftifîé, ne peut pas
être contraire à la propagation de l'efpece humaine ,
ainli que nous venons de le démontrer , fans être nui-
fible à la fociété. Il nuit à la fociété en l'appauvrif-
fant & en la corrompant. En rappauvrijfant ^ s'il eft
vrai , comme on n'en peut guère douter , que la plus
grande richeffe d'un état conlîfte dans le nombre des
lujets ; qu'il faut compter la multitude des mains en-
tre les objets de première néceiïïté dans le commer-
ce ; & que de nouveaux citoyens ne pouvant deve-
nir tous foldats , par la balance de paix de l'Europe ,
& ne pouvant par la bonne police , croupir dans l'oi-
iiveté, travailleroient les terres, peupleroient les
manufactures, ou deviendroient navigateurs. En la
corrompant , parce que c'eft une règle tirée de la na-
ture , ainfi que Villufïre auteur de fejprit des lois l'a
bien remarqué , que plus on diminue le nombre des
mariages qui pourroient fe faire , plus on nuit à ceux
qui font faits ; & que moins il y a de gens mariés ,
moins il y a de fidélité dans les mariages , comme
lorfqu'il y a plus de voleurs, il y a plus de vols. Les
anciens connoifibient fi bien ces avantages , & met-
toient un fi haut prix à la faculté naturelle de fe ma-
rier ôc d'avoir des enfans, que leurs lois avoient pour-
vu à ce qu'elle ne fût point ôtée. Ils regardoient cette
privation comme un moyen certain de diminuer les
reffources d'un peuple, &d'y accroître la débauche.
Aufïï quand on recevoit un legs à condition de gar-
der le célibat , lorfqu'un patron faifoit jurer fon af-
franchi qu'il ne fe marieroit point, & qu'il n'auroit
point d'enfant , la loi Pappienne annulloit chez les
Romains & la condition & le ferment. Ils avoient
conçu que là où le célibat auroit la prééminence , il
ne pouvoit guère y avoir d'honneur pour l'état du
mariage ; & conféquemment parmi leurs lois , on
n'en rencontre aucune qui contienne une abrogation
exprefTe des privilèges & des honneurs qu'ils avoient
accordés aux mariages &l au nombre des enfans.
Du célibat conjîdéré J°. eu égard à lafociété chrétien'
ne. Le culte des dieux demandant une attention con-
tinuelle & une pureté de corps & d'ame fingulierc ,
la plupart des peuples ont été portés à faire du cler-
gé un corps féparé ; ainli chez les Egyptiens , les
Juifs & les Perles , il y eut des familles confacrées
au fervice de la divinité & des temples. Mais on ne
penfa pas feulement à éloigner les ecciéliaftiques des
affaires & du commerce des mondains ; il y eut des
religions où l'on prit encore le parti de leur ôter l'em-
barras d'une famille. On prétend que tel a été parti-
culièrement l'efprit duChriftianifine, même dans fon
origine. Nous allons donner une expofition abrégée
de fa difeipline , afin que le lecteur en puiffe juger
par lui-même.
Il faut avouer que la loi du célibat pour les évêques,
les prêtres, & les diacres , elt aufïï ancienne que l'E-
gliie. Cependant il n'y a point de ioi divine écrite qui
défende d'ordonner prêtres des perfonnes mariées, ni
aux prêtres de fe marier. Jefus-Chrift n'en a fait aucun
précepte ; ce que S. Paul dit dans fes épîtres à Timo-
thée & à Tite fur la continence des évêques &c des
diacres , tend feulement à défendre à l'évêque d'a-
voir plufieurs femmes en même tems ou fuccefïïve-
ruent ; oportet epifeopum ejfe uni us uxoris virum. La pra-
tique même des premiers ficelés de l'Egliie y eft for-
melle: on ne faifoit nulle difficulté d'ordonner prê-
tres & évêques des hommes mariés ; il étoit feule-
ment défendu de fe marier après la promotion aux
ordres , ou de pafîer à d'autres noces , après la mort
d'une première femme. Il y avoit une exception par-
ticulière pour les veuves. On ne peut nier que l'ef-
prit & le vœu de l'Egliie n'ayent été que fes princi-
paux miniftres vécuflent dans une grande continen-
ce , & qu'elle a toujours travaillé à en établir la loi ;
cependant l'ufage d'ordonner prêtres des perfonnes
mariées a f iibiifté & fubfifte encore dans FEglife Gre*
que, & n'a jamais été pofitivement improuvé par
l'Egliie Latine.
Quelques-uns croyent que le troifieme canon du
premier concile de Nicée, impolè aux clercs ma-
jeurs , c'eft-à-dire , aux évêques , aux prêtres , & aux
diacres , l'obligation du célibat. Mais le P. Alexandre
prouve dans une difiertation particulière , que le con-
cile n'a point prétendu interdire aux clercs le com-
merce avec les femmes qu'ils avoient époufées avant
leur ordination ; qu'il ne s'agit dans le canon objeclé
que des femmes nommées fubimroduclx & agapetœ, &
non des femmes légitimes ; & que ce n'eft pas feule-
ment aux clercs majeurs, mais aufïï aux clercs infé-
rieurs que le concile interdit la cohabitation avec les
agapetes : d'où ce lavantThuologien conclut que c'eft
le concubinage qu'il leur défend , & non l'ufage du
mariage légitimement contracté avant l'ordination. II
tire même avantage del'hiftoire de Paphenuceiî con-
nue, & que d'autres auteurs ne paroiffent avoir re-
jettée comme une fable , que parce qu'elle n'eft au-
cunement favorable au célibat du clergé.
Le concile de Nicée n'a donc , félon toute appa-
rence , parlé que des mariages contractés depuis l'or<
dination , & du concubinage : mais le neuvième ca-
non du concile d'Ancyre permet expreflément à ceux
qu'on ordonnerait diacres , & qui ne feraient pas ma-
riés, de contracter mariage dans la fuite, pourvu
qu'ils enflent proîefté clans le tems de l'ordination,
contre l'obligation du célibat. Il eft vrai que cette in-
dulgence ne fut étendue ni aux évêques ni aux prê-
tres, 8c que le concile de Neoccefarée tenu peu de
tems après celui d'Ancyre, prononce formellement:
presbyterum yJï uxorem acceptrit , ab ordine deponendum ,
quoique le mariage ne fut pas nul, félon la remar-
que du P. Thomafîin. Le concile W Trullo tenu l'ao
C E L
o&ï.j confirma dans fon xiii. canon Pufage do l'Eglife
Greqae , & l'Egliie Latine n'exigea point au concile
de Florence qu'elle y renonçât. Cependant il ne faut
pas celer que plufieurs des prêtres Grecs font moi-
nes, & gardent le célibat; & que l'on oblige ordinai-
rement les patriarches & les évêques de faire pro-
fefïïon delà viemonaftique, avant que d'être ordon-
nés. Il eft encore à propos de dire qu'en Occident le
célibat fut prefcrit aux clercs par les décrets des pa-
pes Sirice & Innocent; que celui du premier eft de
l'an 385 ; que S.Léon étendit cette loi aux foûdia-
cres; que S. Grégoire l'avoit impolée aux diacres de
Sicile; & qu'elle fut confirmée par les conciles d'El-
vire fur la fin du 111e fiecle, canon xxxiii. de To-
lède, en l'an 400; de Carthage, en 419, canon 111.
& iv. d'Orange, en 441 , canon xxn. & xxm. d'Ar-
les, en 452; de Tours, en 461 ; d'Agde, en 506;
d'Orléans, en 538; parles capitulaires de nos rois,
& divers conciles tenus en Occident ; mais principa-
lement par le concile de Trente ; quoique fur les re-
préfentations de l'Empereur, du duc de Bavière , des
Allemands, &c même du roi de France , on n'ait pas
laide d'y propoler le mariage des prêtres, & de le
foiliciter auprès du pape, après la tenue du concile.
Leur célibat avoit eu long-tems auparavant des ad-
versaires : Vigilance & Jovien s'étoient élevés con-
tre fous S. Jérôme : Wiclef, les Pluffites , les Bohé-
miens, Luther, Calvin, &c les Anglicans, en ont
fecoùé le joug ; & dans le tems de nos guerres de re-
ligion , le cardinal de Chatillon, Spifame , évéque de
Nevers, & quelques eccléfiaitiques du lecond ordre,
oferent le marier publiquement; mais ces exemples
n'eurent point de iuite.
Lorfque l'obligation du célibat fut générale dans
l'Eglife catholique , ceux d'entre les ecclélîaftiques
qui la violèrent , furent d'abord interdits pour la
vie des fondrions de leur ordre , & mis au rang des
laïques. Juftinicn , leg. 46. cod. de epifeop. & cler. vou-
lut enfuite que leurs enfans fufTent illégitimes, & in-
capables de fuccéder & de recevoir des legs : enfin il
fut ordonné que ces mariages feroient caftes , & les
Farties miles en pénitence ; d'où l'on voit comment
infraction eft devenue plus grave, àmefure que la
loi s'eft invétérée. Dans le commencement s'il arri-
voit qu'unprêtre le mariât , il étoit dépofé , & le ma-
riage fubfiftoit ; à la longue , les ordres furent confi-
dérés comme un empêchement dirimant au mariage :
aujourd'hui un clerc fimple tonfuré qui fe marie , ne
jouit plus des privilèges des eccléfiaitiques, pour la
juril'diciion & l'exemption des charges publiques. Il
eft cenfé avoir renoncé par le mariage à la cléricature
& à les droits. Fleury , Injl. au Droit eccléf. ton. 1,
sine. & nouv. difcipline de l'Eglife du P. Thomafîin.
Il s'enfuit de cet hiftorique, dit feu M. l'abbé de
S. Pierre, pour parler non en controverlifte. mais
en fimple politique chrétien, & en fimple citoyen
d'une lociete chrétienne, que le célibat des prêtres
n'eft qifun point de dilcipline; qu'il n'eft point ef-
fentiel à la religion chrétienne; qu'il n'a jamais été
regardé comme un des fondemens du fchilme que
nous avons avec les Grecs 6e les Proteftans ; qu'il ;i
été libre dans l'Eglife Latine: que l'Eglife ayant le
pouvoir de changer tous les points de dilcipline d'inl-
titution humaine; ft les états de l'Egliie catholique
recevoientde grands avantages de rentrer dans cet-
te ancienne liberté, fans en recevoir aucun dom-
mage effeûif, il feroit à fouhaiter que cela rut; &
que la queftion de ces avantages eft moins théolo-
gique que politique, & regarde plus les fouverains
que l'Egliie , qui n'aura plus qu'à prononcer.
Mais y a-t-il des avantages à reftituer les ecclé-
fiaitiques dans l'ancienne liberté du mariage? C'cftun
fait dont le Czar fut tellement frappé, lorlqu'il par-
courut la France incognito, qu'il ne concevoir pas
C E L
80
que clans un état où il rencontrait de fi bonnes lois
& de li fages établiflemens , on y eût laiftè lùbfifter
depuis tant de fiecles une pratique , qui d'un côté
n'importoit en rien à la religion , & qui de l'autre
préjudicioit fi fort à la fociété chrétienne. Nous ne
déciderons point fi l'étonnement du Czar étoit bien
fondé ; mais il n'eft pas inutile d'analyfer le mémoire
de M. l'abbé de S. Pierre > & c'eft ce que nous allons
faire.
Avantages du mariage des prêtres. i°. Si quarante
mille curés avoient en France quatre-vingt mille
enfans , ces enfans étant fans contredit mieux éle-
vés , l'état y gagnerait des fujets & d'honnêtes
gens , & l'églife des fidèles. z°. Les eccléfiaftiques
étant par leur état meilleurs maris que les autres
hommes , il y aurait quarante mille femmes plus
heureufes & plus vertueufes. 30. Il n'y a guère
d'hommes pour qui le célibat ne foit difficile à obier-
ver ; d'où il peut arriver que l'églife fouffre un grand
fcandale par un prêtre qui manque à la continence ,
tandis qu'il ne revient aucune utilité aux autresChré-
tiens de celui qui vit continent. 40. Un prêtre ne
mériterait guère moins devant Dieu en fupportant
les défauts de fa femme & de fes enfans , qu en réfif-
tant aux tentations de la chair. 50. Les embarras du
mariage font utiles à celui qui les fupporte ; & les
difficultés du célibat ne le lont à perionne. 6°. Le
curé père de famille vertueux , feroit utile à plus
de monde que celui qui pratique le célibat. y°. Quel-
ques ecclélîaftiques pour qui l'obfervation du célibat
eft très-pénible , ne croiroient pas avoir fatisfait à
tout , quand ils n'ont rien à fe reprocher de ce côté.
8°. Cent mille prêtres mariés formeraient cent mil-
le familles ; ce qui donnerait plus de dix mille habi-
tans de plus par an ; quand on n'en compteroit que
cinq mille , ce calcul produirait encore un million
de François en deux censans.D'ouii's'eniiiit quelans
le célibat des prêtres,on aurait aujourd'hui quatre mil-
lions de Catholiques de plus , à prendre feulement
depuis François I. ce qui formerait une fomme
conlidérablc d'argent; s'il eft vrai, ainfi qu'un An-
glois l'a fupputé , qu'un homme vaut à l'état plus de
neuf livres fterling. 90. Les maifons nobles trouve-
raient dans les familles des évêques , des rejettons
qui prolongeraient leur durée , 6v. Voye% les ouvra-
ges poli tiq. de AI. l'abbé de S. Pierre, toir.e II. p. 1 46 .
Moyens de rendre aux eccléjïafliques la liberté du ma-
riage. Il faudrait i^. former une compagnie qui mé-
ditât fur les obftacles & qui travaillât à les lever. z°.
Négotier avec les princes de la communion Romai-
ne , ce former avec eux une confédération. 3". Né-
gotier avec la cour de Rome ; car M. l'abbé de S.
Pierre prétend qu'il vaut mieux ufer de l'interven-
tion du pape , que de l'autorité d'un concile natio-
nal; quoique, félon lui, le concile national abrégeai
fans doute les procédures , ce que lelon bien des
Théologiens , ce tribunal lut fuffiiant pour une affai-
re de cette nature. Voici maintenant les objections
que M. l'abbé de S. Pierre le propofe lui-même con-
tre fon projet , a\ ec les réponfes qu'il \
Première ob/eélion. Les évêques d'Italie pourraient
donc être maries , comme S. Ambroifc ; 6c les cardi-
naux 6v le pape, comme S. Pierre.
Ki pons] . Aflùrément: M. l'abbé de S. Pierrene
voit ni mal à fun re ces exemples , ni inconvénient
à ce que le pape & les cardinaux a\ ent d'honnête*
femmes, des enfans vertueux , èv une famille bien
réglée.
Second* objetbon. I e peuple a une vénération d'ha-
bitude pour ceux qui gardent le célibat, M qu il eft
à propos qu'il conferve. ,
RÉPONSE. Ceux d'entre les pafteurs Hollandois
& Anglois qui font vertueux, n'en font pas moins
refpectes du peuple , pour être nu
•So6
CEL
Troijîeme objection. Les prêtres ont dans le célibat
plus de teras à donner aux fondions de leur état ,
qu'ils n'en auroient fous le mariage.
Réponse. Les minières Proteitans trouvent fort
bien le tems d'avoir des enfans, de les élever, de
gouverner leur famille , & de veiller fur leur paroif-
fe. Ce ferait offenfer nos eccléfiaitiques, que de n'en
pas préfumer autant d'eux.
Quatrième objection. De jeunes curés de trente ans
auront cinq à iix enfans ; quelquefois peu d'acquit
pour leur état , peu de fortune , &c par conféquent
beaucoup d'embarras.
Réponse. Celui qui fe préfente aux ordres , eft
reconnu pour homme lage & habile ; il elt obligé d'a-
voir un patrimoine ; il aura Ion beneiice ; la dot de fa
femme peut être honnête. Il elt d'expérience que ceux
d'entre les curés qui retirent des parens pauvres ,
n'en font pas pour cela plus à charge à FEglife ou
■à leur paroitTe. D'ailleurs quelle nécefïité qu'une
partie des eccléfiaitiques vive dans l'opulence , tan-
dis que l'autre languit dans la milere ? Ne feroit-il
pas poffible d'imaginer une meilleure diitribution
des revenus eccléfiaitiques ?
Cinquième objection. Le concile de Trente regarde
le célibat comme un état plus parfait que le mariage.
Réponse. ïl y a des équivoques à éviter dans les
mots d'état , de parfait , ^obligation : pourquoi vou-
loir qu'un prêtre foit plus parfait que S. Pierre ? l'ob-
jection prouve trop , & par conféquent ne prouve
rien. Ma thelé , dit M. l'abbé de S. Pierre, elt pure-
ment politique , & conlilte en trois propofitions :
i°. Le célibat elt de pure difeipline eccléiialtique
que l'Eglife peut changer ; z°. il feroit avantageux
aux états Catholiques Romains que cette difeipline
fût changée; 30. en attendant un concile national
ou général , il elt convenable que la cour de Rome
reçoive pour l'expédition de la difpenfe du célibat ,
une fomme marquée payable par ceux qui la de-
manderont.
Tel elt le fyltème de M. l'abbé de S. Pierre que
nous expofons , parce que le plan de notre ouvrage
l'exige , & dont nous abandonnons le jugement à
ceux à qui il appartient de juger de ces objets im-
portans. Mais nous ne pouvons nous difpenfer de re-
marquer en parlant que ce philolophe citoyen ne s'elt
propofé que dans une édition de Hollande faite fur
une mauvaife copie , une objection qui fe préfente
très-naturellement , & qui n'elt pas une des moins
importantes : c'elt l'inconvénient des bénéfices ren-
dus héréditaires ; inconvénient qui ne fe fait déjà
que trop fentir , & qui deviendrait bien plus géné-
ral. Quoi donc faudra-t-il anéantir toute rélignation
& coadjutorerie , & renvoyer aux fupérieurs la col-
lation de tous les bénéfices ? Cela ne feroit peut-être
pas plus mal , & un évêque qui connoît fon diocefe
& les bons fujets , elt bien autant en état de nom-
mer à une place vacante , qu'un eccléiialtique mori-
bond , oblédé par une foule de parens ou d'amis in-
térefTés : combien de fimonies & de procès feanda-
leux prévenus !
Il nous réitérait pour compléter cet article , à par-
ler du célibat monajiique : mais nous nous contente-
rons d'obferver avec le célèbre M. Melon , 1°. qu'il
y aurait un avantage infini pour la fociété & pour
les particuliers , que le prince usât ltriftement du
pouvoir qu'il a de faire obfcrver la loi qui défen-
drait l'état monaltique avant l'âge de vingt-cinq
ans ; ou , pour me fervir de l'idée & de l'expreifion
de M. Melon , qui ne permettrait pas d'aliéner fa
liberté avant l'âge où l'on peut aliéner l'on bien.
Voyt{ le rejle aux articles MARIAGE , Moine , Vir-.
GinitÉ , Vœux , &c. 2^. Nous ajouterons avec
un auteur moderne , qu'on ne peut ni trop lire , ni
jrop louer, que le célibat pourrait devenir nuilible à
CEL
proportion que le corps des célibataires feroit trop
étendu, & que par conféquent celui des laïques ne le
ferait pas allez. 3y. Que les lois humaines faites pour
parler à l'eiprit , doivent donner des préceptes &
point de conieils ; &c que la religion faite pour parler
au cœur , doit donner beaucoup de conieils, & peu
de préceptes : que quand , par exemple , elle donne
des règles , non pour le bien , mais pour le meilleur ;
non pour ce qui elt bon , mais pour ce qui elt par-
fait ; il elt convenable que ce loient des conieils , &
non pas des lois; car la perfection ne regarde pas
l'univerfalité des hommes ni des choies : que de plus,
fi ce font des lois , il en faudra une infinité d'autres
pour faire obferver les premières : que l'expérience
a confirmé ces principes ; que quand le célibat qui
n'étoit qu'un conléil dans le Chriitianiime , y devint
une loiexprefîe pour un certain ordre de citovens, il
en fallut chaque jour de nouvelles pour réduire les
hommes à l'obfervation de celles-ci ; & conféquem-
ment, que le législateur fe fatigua & fatigua la lbcié-
té , pour faire exécuter aux hommes par précepte ,
ce que ceux qui aiment la perfection auroient exé-
cuté d'eux-mêmes comme conleil. 40. Que parla
nature de l'entendement humain , nous aimons en
fait de religion tout ce qui fuppofe un effort , comme
en matière de morale nous aimons fpéculativement
tout ce qui porte le caractère de févérité ; & qu'ainli
le célibat a dû être , comme il elt arrivé , plus agréa-
ble aux peuples à qui il fembloit convenir le moins,
& pour qui il pouvoit avoir de plus fâcheufes fuites;
être retenu dans les contrées méridionales de l'Eu-
rope , où par la nature du climat , il étoit plus diffi-
cile à obferver ; être proferit dans les pays du Nord,
où les palfions font moins vives ; être admis où il y
a peu d'habitans , & être rejette dans les endroits
où il y en a beaucoup.
Ces obfervations font fi belles & fi vraies , qu'elles
ne peuvent fe répéter en trop d'endroits. Je les ai
tirées de l'excellent ouvrage de M. le préfident de
M . . . ; ce qui précède elt ou de M. Fleury , ou du
père Alexandre , ou du père Thomalfin ; ajoutez à
cela ce que les Mémoires de V académie des InJ'criptions
& les ouvrages politiques de M. l'abbé de S. Pierre &
de M. Melon m'ont fourni , & à peine me reltera-t-il
de cet article que quelques phrafes , encore font-elles
tirées d'un ouvrage dont on peut voir l'éloge dans le
Journal de Trévoux , an. iy^.6. Fév. Malgré ces auto-
rités, je ne ferais pas étonné qu'il trouvât des criti-
ques Ôc des contradicteurs : mais il pourrait arriver
aulfi que , de même qu'au concile de Trente , ce fu-
rent, à ce qu'on dit, les jeunes eccléfiaitiques qui
rejetterent le plus opiniâtrement la propolition du
mariage des prêtres, ce loient ceux d'entre les céliba-
taires qui ont le plus befoin de femmes, & qui ont la
moins lu les auteurs que je viens de citer , qui en blâ-
meront le plus hautement les principes.
CELICOLES, f. m. pi. c'elt-à-dire , adorateurs du
ciel ; {Hijt. eccléj'.} certains hérétiques que l'empereur
Honorius , par des referits particuliers , condamna
vers l'an 408 avec les payens & les hérétiques. Com-
me ils font mis dans le code Théodolien fous le titre
des Juifs, on croit qu'ils étoient des apoltats , lelquels
de la religion Chrétienne étoient pâlies dans le Ju-
dailme , lans en prendre le nom , qu'ils favoient être
odieux à tout le monde. Ils n'étoient pas pourtant
fournis au pontife des Juifs : mais ils avoient des lu-
périeurs qu'ils nommoient majeurs ; & lans doute ils
dévoient avoir aufîi des erreurs particulières. Les
Juifs avoient aulîi été appelles célicoles , parce que
quelques-uns d'entr'eux étant tombés dans l'idolâ-
trie du tems des prophètes , ils adoraient les allies
du ciel & les anges. C'elt pour cela que S. Jérôme
donne dans ce fentiment , étant confulté par Algafie
fur le paflage de S, Paul aux. Çolçfuens, c, ij. v. 18.
CEL
Que perfonnc ne vous féduife , en affectant de paroitre
humble , par un culte fuperjlitieux des anges. Ii répond
que l'apôtre veut parler de cette erreur des Juifs,
& prouve qu'elle étoit ancienne parmi eux , & que
les prophètes l'avoient condamnée. Clément Ale-
xandrin reproche les mômes erreurs aux Juifs; 6c
S. Epiphane dit que les Phariiiens croyoient que les
cieux étoient animés , & les confidéroient comme
le corps des anges. /. XII. cod. T/icod. v. iG. c. Jujl.
dejujl. & cœlic. Baronius , A. C. 408. Deuteronom.
c. xvj. v. 3. IV. Liv. des Rois , c. xvij. v. 16 . c. xxj.
v. 3. & ~>. &c. S. Jérôme , ep. i5i. qu. 10. Clément
Alexandrin , lib. VI. des Tapijf. S. Epiphane , lib, I.
paneg. c. xvj. (G )
C ELL, ( Géog. ) petite rivière d'Allemagne , en
Souabe , qui fe jette dans le Danube.
Cell , (Géog.) petite ville d'Allemagne , dans l'é-
leftorat de Trêves , fur la Mofele.
CELLAMARE, (Géog.) petit pays d'Italie, au
royaume de Naples.
CELLERAGE, f. m. (Jurijprud.)xlroit feigneurial
qui fe levé fur le vin lorlqu'il eft dans le cellier. En
quelques endroits on l'appelle chantelage , à calife
des chantiers fur lefquels on place les tonneaux &
pièces de vin dans les caves 6c celliers. Diciionn. de
Commerce. (G)
CELLERFELD , (Géog.) ville d'Allemagne, dans
le Hartz, fur la rivière d'Inncr, près de Goflar, re-
marquable par les fonderies ck (es mines.
CELLERIER , f. m. (terme d'office dans les ordres
monafliques. ) c'elt un religieux qui prend foin du
temporel de l'abbaye , & qui a fous lui d'autres of-
ficiers qui partagent les fonctions. Voyer^ DiSH.
CELLES ou SELLES en Berry , (Géog.) ville &
abbaye de France , aux confins du Blaifois , fur le
Cher. Long. 79. i5. lat. 47. /3.
CELLIER , fub. m. (en Architecture.) c'elt un lieu
voûté dans l'étage foûterrain, compofe de plufieurs
caves , qui étant deftinées à ferrer le vin , fe nomme
cellier , du Latin cella vinaria.
On entend par cellier plus communément un lieu
moitié fous terre & moitié hors terre, qui n'elt point
voûté , mais qui cft formé par un plancher avec foli-
ves apparentes, & fort indiftinâement à divers ufa-
ges ; en Latin cellarium. (P)
* CELLITES, f. m. pi. (Hijl. cccléft nom que l'on
donne aux religieux d'un ordre dont il y a des mai-
fons, fur-tout en Allemagne & dans les Pays-Bas.
Leur fondateur étoit un Romain nommé Meccio ,
c'elt pourquoi les Italiens les appellent Mecciens. Us
fuivent la règle de S. Auguftin , & Igur inftiiut fut
approuvé par le pape Pie IL qui leur accorda une
bulle. Ils s'occupent à foigner les infirmes, fur-tout
ceux qui (ont attaqués de maladies contagieufes ,
comme la pefte, &c. à ente; 1er les morts, 6c à fer-
i fous : ils ont beaucoup de rapport à nos Frères
de la Charité.
CELLULAIRE, adj. ( en Anatomle. ) fe dit d'un
tiffu compofé de plulieurs loges ;>ius ou moins dis-
tinctes, qui paroît féparer toutes les parties du corps
humain jufque dans leurs plus petits élémens. Voyer^
Élément.
Le tiffu cellulaire eft comnpfé de fibres & de lames
toutes lblides , fans cavité , & qui ne font point vaf-
culeufcs , quoiqu'il foit colore par les vailleaux qui
s'y diftfibuent. Voici quelles font ies variétés prin-
cipales : dans un endroit il eft lâche , conij
lames longues & diftinôés les unes des autres ; dans
un autre il eft minée & compofé de libres courtes-;
il efi très-court entre la (clérotique & la choroïde ;
entre la membrane arachnoïde du . la pie-
mere , il eit délicat, mais cependant plus ienfible
entre chacune des deux membrane .les in-
rcltins , de Peftomae , de la veine, des uretères, fous
CEL
807
la peau de la verge , du front , dans le poumon ou
on l'appelle véficïtfe. Celui qui fous le nom de gaine
fuit la diilributicn des vaiïTeaux dans les vifeeres ,
6c fur-tout dans le l'oie & dans les poumons , eft en-
core compofe de fibres plus longues; fon ufage prin-
cipal eft de réunir les membranes 6c les libres voi-
fines , en leur biffant toutefois la liberté de fe mou-
voir fuivant leur ceiiination. Ce tiffu cellulaire ne
contient prefque jamais de graiffe : mais ii eft arrofé
par une vapeur aqueufe , gélatmeufe , & graiffeufe ,
qui s'exhale des artères, 6c qui elt reptile par les
veines. On s'affûre de ce fait par une injection faite
avec l'eau, la colle de poiffon, l'huile, 'dans toutes
les parties du corps. Cette vapeur étant détruite, les
fibrilles le réunifient, & les membranes voilines s'ir-
ritent avec perte de mouvement, Le tiffu cellulaire
qui lépare les fibres mufeulaires & les diftingue juf-
que dans leurs derniers élémens, eft lâche & paroît
plutôt compofé de petites laines que de fibres, le
tiffu cellulaire qui accompagne librement les vau-
feaux ce les enchaîne, oc celui qui fe trouve dans les
cavités des os , 6c qui eft compofé pareillement de
lames ofleufes 6c membraneules , font un peu plus lâ-
ches : & enfin le tifiû cellulaire placé fur la fuperficie
du corps entre les mufcles ci: la peau , Ut le plus lâ-
che de tous. Les petites aires vuides de ce tifiû font
d'abord prefque toutes remplies dans le fœtus d'une
humeur gélatineufe , & à inclure que le corps croît ,
elles fe remplifî'ent ù'unc graille grumeleufe , qui en-
fin fe réunit en mafte Uqui le , inlipide, inflamma-
ble , qui expoiée à l'air froid prend quelque confifi-
tance, 6c le coagule. Lile le neuve lui-: . :
virons des reins des animaux qui vivent dï
taux ; 61 elle eft en moindre quantité da
parties, 6c dans les animaux qui vivent
pendant la vie defquels ce liquide approche plus de
la nature du fluide.
Les vaiïTeaux fanguins rampent c
tout dans le tiffu celli es ar-
térioles y dépofent Ce
par les veines ; le cher
adipeufes elt fi proe \
qu'il y ait de phlS
lent être introduits ie mercure, l'air , l'eau , l'hu-
meur gélatineufe év l'huile, qui dans l'animal vivant
elt toujours dans l'inaction. v. . fe n'elt pas
féparée par quelque long conduit particulier : mais
elle découle de toute part dans toute l'étendue de
l'artère , de forte qu'il ne le trouve aucune partie
du tifiû cellulaire qui l'environne, qui ne foit humec-
tée. Lorlqu'on remplir l'artère d'eau , il s'en fait
promptement un amas , comme on peut l'oblerver
dans l'etnbompoint que l'on reprend en peu de tems
après les maladies aiguës : mais nous l'avons qu'elle
elt repompee par ies veines au moyen du m
ment mufculaire , qui eft li propre .: diminuer la
graille, fur-tout dans les amr
le trouve en trop grande quant
par les fièvres qui connurent la gi . la gué-
rifon de l'hydropiue, telle l'eau eft répandue
dans le tiflû cellulaire 6:
comme ii elle eu & enfin par
ment qui le tait a travers
qu'on l'a remplie d'i m d'huile 01
nerfs le dilhibuent-ii d. u peufes ? Il
eft certain qu'ils y p 11 par-
tout en des filamens fi petits, qu'il u'eft pas polhbie
nivre plus loin par la Mais pour-
quoi, demande-t-on , la graine eft-elle mler.
Les intervalles ( es lames du tiffu - ■ t ou-
verts de tous côtés , & les cellules communiquent
toutes les une - ■
ties du corps : c'eft ce que nous (ont vo
chers qui , en inllnuant de l'air pai .mire
8o8
C E L
faite à la peau , la bourfoufflent dans toute l'étendue
du corps ; l'emphyfème par lequel l'air s'introduit par
les crevaffes de la peau , & après s'y être arrêté ,
occafionne un bourfoufflement général dans toute
la circonférence du corps , & enfin les maladies dans
lefquelles tout ce tifiu cellulaire eft rempli d'eau ; le
hafard , qui nous a fait voir que l'air s'eft introduit
dans l'humeur vitiée , même à la fuite d'un emphyfè-
me.La maladie dans laquelle l'humeur gélatineufe de
l'hydropifie s'eft répandue dans les corps caverneux
de la verge , démontre qu'aucune partie de ce tifiu
n'en eft exceptée. On reconnoîtra l'importance de ce
tifiu , fi l'on fait attention que c'eft de lui que dépend
la fermeté & la folidité naturelle de toutes les artè-
res , des nerfs , des fibres mufculaires , & par consé-
quent celles des chairs & des vifeeres qui en font
compofés ; & de plus la configuration des parties
& les plis , les cellules , les courbures , viennent du
feul tifiu cellulaire , plus lâche dans certaines parties,
& plus ferré dans d'autres ; il compofe tous les vif-
eeres , tous les mufcles , les glandes , les ligamens
oc les capfules de concert avec les vaifleaux , les
nerfs , les fibres mufculaires & tendineufes , dans la
compofition defquelles ils entre néanmoins en gran-
de partie , puifqu'il eft certain que c'eft à lui feul ,
c'elt-à-dire , à là différente longueur , à fon plus ou
moins de tenfion , à fa plus ou moins grande quan-
tité & à fa proportion , qu'on doit rapporter la di-
verfité des glandes & des vifeeres : enfin la plus gran-
de partie du corps en émane ; car le corps n'eft pas
entièrement compofé de filamens cellulaires. La graif-
fe a différens ufages ; elle facilite le mouvement des
mufcles , en diminue le frottement , les empêche de
devenir roides ; elle remplit l'efpace qui fe trouve
entre les mufcles , & les parties voifines des vifeeres,
de forte qu'elle cède lorfqu'ils font en mouvement ,
èv qu'elle foûtient les parties qui font dans l'inaftion ;
elle accompagne les vaiffeaux & les garantit ; elle
étend également la peau , lui fert de couffin , & pare
fa beauté ; peut-être même fe mêle-t-elle avec les au-
tres liqueurs pour "tempérer leur acrimonie ; elle eft
la principale matière de la bile ; elle fuinte des os
au-travers les couches cartilagineufes , &c le mêle
avec la finovie ; elle s'exhale du méfentere , du me-
focolon , de l'épiploon , autour des reins ; elle en-
duit pendant la vie la fuperficie des vilceres d'une
vapeur molle ; & enfin , le plaçant entre les parties ,
elle s'oppoiè à leur concrétion. Haller , Phyfwl. Voye^
Graisse. ( L )
CELLULE ,(.£.( Hijî. éccléf. ) petite maifon ,
chambre ou appartement qu'habitent les moines &
les religieux : ce mot ne fe dit proprement que des
chambres des monafteres.
Quelques auteurs le dérivent du mot Hébreu H12 ,
prifon , ou lieu deftiné a renfermer quelque chofe.
On dit qu'un dortoir eft divifé en vingt , trente ,
quarante cellules. Foye^ Dortoir.
Les chartreux ont pour cellule chacun une maifon
féparée , compofée de plufieurs pièces , & accompa-
gné d'un jardin. Voye^ Chartreux.
La ialle où fe tient le conclave eft divifée par des
cloifons en plufieurs cellules occupées par les cardi-
naux. Voye?^ Conclave. ( G )
CELLULES adipeujes , terme d? Anatomie , font les
petites loges ou capfules qui contiennent la graifie
dans un corps qui a de l'cmbompoint. Voye^ Grais-
se & Adipeux.
Elles s'oblèrvent dans toutes les parties du corps ,
dans ceux qui font amaigris ; ces cellules , n'étant
point remplies de graifie , reffemblent à une mem-
brane flafquc & tranfparente. V. Graisse & Cel-
lulaire. ( L )
* CELOCES , f. m. ( HiJl. anc. ) vaifleaux fans
pont , ou plutôt petites barques qui n'ont point à la
C E L
proue ces éperons appelles rojlra , dont on frappait
dans le combat les vaiffeaux ennemis pour les per-
cer , & les couler à fond. Elles alloient à deux rames
ou plus. On apperçut , dit Tite-Live , xxxvij. zj. que
c'étoient des bâtimens propres à la piraterie , des
celoces & des lembes, voyq; Lembe , qui voyant de
loin la flotte , prirent la fuite. Ils la furpafierent en
vîteffe , parce qu'ils étoient légers , & faits exprès
pour la courie. Le celoce paffe pour être de l'inven-
tion des Rhodiens.
CELORICO ou SELERICO , ( Gêog. ) petite vil-
le du royaume de Portugal , dans la province de
Beira , fur le Mondego.
CELTES (Philofophie des). Sous ce nom il faut
comprendre non-feulement les philofophes Gaulois,
mais encore tous ceux qui ont anciennement fleuri
en Europe , foit dans les iles Britanniques , foit par-
mi les Germains & les Ibères , foit dans l'Italie. Bur-
net , dans fes Origines philofophiaues , dit qu'il eft fort
vraiflemblable que les Germains & les Bretons in-
fulaires , ont eu des druides , moins favans peut-être,
& moins reipeefés que ceux des Gaulois , mais au.
fond imbus de la même doftrine , & fe fervant de
la même méthode pour la faire connoître.
L'hiftoire de la philofophie des Celtes ne nous of-
fre rien de certain ; & cette obfcurité qui la couvre,
n'a rien de furprenant ; tant les teins où elle fe ca-
che font éloignés de notre âge , & de celui même
des anciens Romains. Nous ne trouvons rien , foit
dans nos mœurs & nos ufages , foit dans le témoi-
gnage des auteurs Latins , qui puiffe fixer nos dou-
tes fur ce qui regarde ces peuples. Ce qui pourroit
nous procurer des connoiflances certaines , & nous
infiruire de leur religion , ce feroit les écrits , ou au-
tres monumens domeftiques qu'ils nous auroient
laiflés : mais tout cela nous manque , foit que le tems
les ait détruits entièrement , loit qu'ils ayent voulu
les dérober à ceux qui n'étoient pas initiés dans leurs
myfteres , foit enfin , ce qui eft le plus vraiffembla-
ble , qu'ils n'écrivifTcnt point leurs dogmes , & qu'ils
fuffent dans Fufage de les tranfmettre par le canal
de la tradition orale & vivante. Les fables qui défi-
gurent leur hiftoire , & qui ont été compilées par So-
ïin , Pline , Pomponius Mêla , Aulu-gelle , Hérodote ,
& Strabon , montrent affez quel fond nous devons
faire fur les écrivains , tant Grecs que Latins , qui
fe font mêlés de l'écrire. Céfar lui-même, vainqueur
des Gaules , tout curieux obfervateur qu'il étoit des
mœurs & des ufages des nations qu'il avoit vaincues,
ne nous dit que très-peu de chofe des Celtes ; & en-
core le peu qu'il en dit eft-il noyé dans un amas de
fables. D'ailleurs , ce qui a contribué beaucoup à
répandre de l'obfcurité fur cette hiftoire , c'eft le mé-
lange de tous ces peuples , auxquels on donnoit le
nom de Celtes , avec les différentes nations qu'ils
étoient à portée de connoître ; par-là s'introduifit né-
ceffairement dans leurs mœurs, & dans leurs dogmes,
une variété étonnante. Par exemple , du tems de
Céfar & de Tacite , les Gaulois différaient beau-
coup des Germains , quoiqu'ils euffent une même
origine. Les Germains étoient extrêmement grofîiers
en comparaifon des Gaulois , qui , au rapport de Juf-
tin , avoient adouci leurs mœurs par le commerce
des Grecs , qui étoient Venus s'établir à Marfeille ,
& avoient puifé chez eux quelque teinture de cette
politeffe qui leur étoit comme naturelle. Les Grecs
& les Latins n'ont bien connu que les derniers tems
de l'hiftoire des Celtes ; & l'on peut dire que les pre-
miers ont été pour eux couverts de nuages.
Quand nous parlons des Celtes , il ne faut pas fe
repréfenter des peuples polis à la manière des Grecs,
& des Romains , & cultivant avec le même foin les
Arts &c les Sciences. Cette nation étoit plus guerriè-
re que lavante , oc plus exercée à chafler dans fes
vaftes
CEL
Vafres forêts , qu'à diffcrter avec fubtilité fur des
queftions métaphysiques. Ce qui caracïérife princi-
palement cette nation , c'eft qu'elle avoit une ex-
cellente morale , & que par-là du moins , elle étoit
préférable aux Grecs & aux Latins , dont le talent
dangereux étoit d'obfcurcir les choies les plus clai-
res à force de fubtilités. Son mépris pour les Scien-
ces n'étoit pourtant pas û exclufif, qu'elle n'eût aufîi
des favans & des fages , qui étoient jaloux de répan-
dre au loin leur Philofophie , quoique fous une for-
me différente de celle des Grecs & des Romains.
Ces favans & ces fages s'appelloient druides , nom
fameux dans l'antiquité , mais très-obfcur quant à
fon origine. L'opinion la plus probable dérive ce
nom du mot chêne ; parce que , félon la tradition
confiante , les druides tenoient leurs affemblées dans
un lieu planté de chênes , & qu'ils avoient beaucoup
de vénération pour cette cfpece d'arbre qu'ils regar-
doient comme facre. La conformité de leur doctrine
avec celle des Mages 6c des Perfes , des Chaldéens
de Babylone , des Gymnofophiftes des Indes , prou-
ve qu'ils ont été en relation avec ces Philofophes.
On ne peut mieux connoître quelles étoient les
fondions , l'autorité , & la manière d'enfeigner des
druides , que par ce qu'on en lit dans les commen-
taires de Jules Céfar. « Les druides , nous dit ce gé-
» néral inltruit , préfident aux chofes divines, règlent
» les facrifïces tant publics que particuliers, inter-
» prêtent les augures & les arufpices. Le concours
» des jeunes gens qui fe rendent auprès d'eux pour
» s'inftruire , eft prodigieux ; rien n'égale le refpeér.
» qu'ils ont pour leurs maîtres. Ils fe rendent arbi-
» très dans prefque toutes les affaires , foit publiques ,
» foit privées ; & fi quelque meurtre a été commis ,
» s'il s'élève quelque difpute fur un héritage , fur les
» bornes des terres , ce font eux qui règlent tout ; ils
» décernent les peines 6c les récompenfes. Ils inter-
» dii'ent les facrifïces , tant aux particuliers qu'aux
» perfonnes publiques, lorfqu'ils ont la témérité de
» s'élever contre leurs décrets : cette interdiction
» palfe chez ces peuples pour une peine très-grave ;
» ceux fur qui elle tombe font misau nombre des im-
» pies 6c des fcélérats.Tout le monde les fuit 6c évite
» leur rencontre avec autant de foin que s'ils étoient
» des pelriférés. Tout accès aux honneurs leur eft
» fermé , & ils font dépouillés de tous les droits de
» citoyens. Tous les druides reconnoiffent un chef,
» qui exerce fur eux une grande autorité. Si après l'a
» mort il fe trouve quelqu'un parmi eux qui ait un
» mérite éminent , il lui fucccdc : mais s'il y a plu-
» fieurs contendans , c'clt le fuffrage des Druides qui
» décide de l'élection ; il arrive même que les brigues
» font quelquefois fi violentes 6c li impétueules ,
» qu'on a recours à la voie des armes. Dans un cer-
» tain tems de l'année, ils s'affemblcnt près des con-
» tins du pays Chartrain litué au milieu de la Gaule ,
» dans un lieu confacré , où fe rendent de toutes
» parts ceux qui font en litige ; & là leurs dédiions
>» font écoutées avec relpect. Les druides font
» exempts d'aller à la guerre; de payer aucun tri-
» but : en un mot ils joùiffent de tous les droits du
>► peuple fans partager avec lui les charges de l'état.
» Ce lont ces privilèges qui engagent un grand nom-
» bre de perfonnes à le mettre fous leur difeipline ,
» & les parens à y foùmettre leurs enfans.On dit qu'on
» charge leur mémoire d'un grand nombre de vers
» qu'ils font obligés d'apprendre avant d'être incor-
v pores au corps des druides: c'clt ce qui fait que
»> quelques-uns , avant que d'être inities , demeurent
>> \ ingt ans fous la difeipline. Quoiqu'ils l'oient dans
» Pillage tle le lervir de l'écriture qu'ils ont apprife
» des Grecs, tant dans les affaires civiles que politi-
» ques , ils croiraient faire un grand crime s'il l'em-
p ployoient dans les choies de religion ». On YOJt
Tome II.
CEL
809
par ce long morceau que je viens de tranferire , que
les druides avoient une grande influence dans tou-
tes les délibérations de l'état; qu'ils avoient trouvé
le moyen d'attirer à eux la plus grande partie du
gouvernement, laiffant au prince qui vivoit fous leur
tutele , le feul droit de commander à la guerre. La
tyrannie de ces prêtres ne pouvoit être que lunette
à la puiffance royale : car je fuppofe qu'un roi s'é-
chappant de leur tutele, eût eu allez de force dans
l'efprit pour gouverner par lui-même fans daigner
les confulter , il efî évident qu'ils pouvoient lui in-
terdire les facrifïces, lancer contre lui Panathème de
la religion , foûlever l'efprit de leurs difciples aveu-
glément dociles à leurs leçons , & les menacer du
courroux de leurs dieux , s'ils ne refpeftoient pas
l'excommunication dont ils l'avoient frappé. Dans
les druides je ne vois pas des philofophes, mais des
impolteurs , qui uniquement occupés de leur inté-
rêt , de leur gloire , 6c de leur réputation , travail-
loient à affervir leur imbécillc nation fous le joug
d'une honteufe ignorance. Si l'on en croit les anciens
écrivains , ces prétendus philoibphes étoient vêtus
magnifiquement , & portoient des colliers d'or. Le
luxe dans lequel ils vivoient faifoient tout leur mé-
rite , 6c leur avoit acquis parmi les Gaulois une gran-
de autorité.
Les druides étoient partagés en plufieurs claffes :
il y avoit parmi eux , félon Ammien Marcellin , les
Bardes, les Eubages , 6c ceux qui retenoient propre-
ment le nom de druides. Les Bardes s'occupoient à
mettre en vers les grandes actions de leurs héros ,
& les chantoient fur des inlb/umens de mufique.
Les Eubages abyfmés dans la contemplation de la
nature , s'occupoient à en découvrir les fecrets.
Mais ceux qu'on appelloit druides par excellence ,
joignoient à l'étude de la nature la feience de la
morale , & l'art de gouverner les hommes. Ils
avoient une double doctrine ; l'une pour le peu-
ple, 6c qui étoit par conféquent publique ; l'autre
pour ceux qu'ils initruifoient en particulier, & qui
étoit lecrette. Dans la première, ils expoloient au
peuple ce qui concernoit les facrifices , le culte de
la religion , les augures , & toutes les efpeces de di-
vinations: ils avoient foin de ne publier de leur doc-
trine que ce qui pouvoit exciter à la vertu, & for-
tifier contre la crainte de la mort. Pour la doctrine
qu'ils enfeignoient à ceux qu'ils initio.ent dans leurs
myfteres, il n'elt pas poffible de la deviner: c'eût
été la profaner que de la rendre intelligible à ceux
qui n'avoient pas l'honneur d'être adeptes ; & pour
infpirer à leurs difciples je ne l'ai quelle horre;:r fa-
cree pour leurs dogmes , ce n'étoit pas dans les villes
ni en pleine campagne qu'ils tenoient leurs affem-
blées lavantes , mais dans le lilence de la folitude ,
6c dans l'endroit le plus caché de leurs fombres fo-
rêts : aufîi leurs dogmes etoient-ils des myfteres im-
pénétrables pour tous ceux qui n'y étoient pas ad-
mis. C'eft ce que Lucain a exprimé d'une manière
li énergique par ces vers :
Solis nojje dcos , & cceli numina vobii ,
Aut Jolis nefeire datum : nemora a/ta remotis
Incolitis lucis.
Après cela elt-il furprenant que les Grecs & les
Romains ayent avoue leur ignorance profonde lur les
dogmes caches des druides ? Le feul de ces dogmes
qui ait tranfpiré, & qui ait percé les (ombres voi-
les fous lefquelsils enveloppoientleur doctrine , c'clt
celui de l'immortalité de l'ame. On favoit bien en
gênerai que leurs infbucHons leetettes rouloient fur
l'origine 6c la grandeur du monde , fur la nature des
choies , fur l'immortalité c< la puiffance des dieux :
mais ce qu'ils penfoient lur tous ces points , etoit ab-
folument ignore. En divulgant le dogme de l'immor-
talité des èïpriti, leur intention étoit, félon Po.u-
krvhkk
8io
C E L
ponhis Mêla , d'animer le courage de leurs compa-
triotes , & de leur infpirer le mépris de la mort ,
quand il s'agiroit de remplir leur devoir.
Les Celtes étoient plongés dans l'idolâtrie ainfi que
les autres peuples de' la terre. Les druides leurs prê-
tres , dont les idées fur la divinité étoient fans doute
plus épurées que celles du peuple, les nourriffoient
dans cette folle fuperftition. C'eft un reproche qu'on
peut faire à tous les légiflateurs. Au lieu de détrom-
per le peuple fur cette multitude de dieux qui s'ac-
corde fi mal avec la faine raifon, ils s'appliquoient
au contraire à fortifier cette erreur dans les efprits
grofîïers , prévenus de cette faufle maxime, qu'on ne
peut introduire de changement dans la religion d\in
pays , quand même ce feroit pour la réformer, qu'on
n'y excite des féditions capables d'ébranler l'état
jufque dans fes plus fermes fondemens. Les dieux
qu'adoroient les Ce/tes étoient l heutates , Hefus ,
& Taranès. Si l'on en croit les Romains , c'étoit Mer-
cure qu'ils adoroient fous le nom de Theutates , Mars
fous celui & Hefus , & Jupiter fous celui de Taranès.
Ce fentiment eft combattu par de favans modernes ;
les uns voulant que Theutates ait été la première di-
vinité des Celtes ; les autres attribuant cet honneur
à Hefus, dans lequel cas Theutates ne feroit plus le
Mercure des Romains , ni Hefus leur dieu Mars ,
puifque ni l'un ni l'autre n'a été chez les Romains
la principale divinité. Quoi qu'il en foit de cette di-
verlité d'opinions , qui par elles-mêmes n'intéreffent
guère , nous fournies alïûrés par le témoignage de
toute l'antiquité , que la barbare coutume de tein-
dre de fang humain les autels de ces trois dieux ,
s'étoit introduite de tout tems chez les Celtes , &
que les druides étoient les prêtres qui égorgeoient
en l'honneur de ces dieux infâmes des vi&imes hu-
maines. Voici comme Lucain parle de ces facrifkes.
Quibus immitis placatur fanguine diro
Theutates , liorrenfque feris altaribus Hefus ,
Et Tarants Scythicce non mitior ara Dianœ.
S'il eft permis de fe livrer à des conjectures où la
certitude manque , nous croyons pouvoir avancer
que l'opinion de cette ame univerfelle qui fe répand
dans toutes les parties du monde & qui en eft la di-
vinité (opinion qui a infetté prefque tout l'univers) ,
avoit pénétré jufque chez les Gaulois. En effet , le
culte qu'ils rendoient aux aftres , aux arbres , aux
pierres , aux fontaines , en un mot à toutes les par-
ties de cet univers ; l'opinion ridicule où ils étoient
que les pierres même rendoient des oracles ; le mé-
pris & l'horjeur qu'ils avoient pour les images & les
ftatues des dieux : toutes ces choies réunies prou-
vent évidemment qu'ils regardoient le monde com-
me étant animé par la divinité dans toutes fes par-
ties. C'eft donc bien inutilement que quelques mo-
dernes ont voulu nous perfuader , après fe l'être per-
fuadé à eux- mêmes, que les premiers Gaulois avoient
une idée faine de la divinité ; idée qui ne s'étoit al-
térée ôc corrompue que par leur commerce avec les
autres nations. Après cela je ne vois pas lurquoi
tombe le reproche injurieux qu'on fait aux anciens
Celtes d'avoir été des Athées : ils ont été bien plu-
tôt fuperftitieux qu'Athées. Si les Romains les ont
regardés comme les ennemis des dieux , ce n'eft que
parce qu'ils retuloient d'adorer la divinité dans des
ftatues fabriquées de la main des hommes. Ils n'a-
voient point des temples comme les R.omains, parce
qu'ils ne croyoient pas qu'on put y renfermer la di-
vinité. Tout l'univers étoit pour eux un temple , ou
plutôt la divinité le peignoit à eux dans tous les êtres
qui le compofent. Ce n'eft pas qu'ils n'euffent des
lieux affectés , comme les bois les plus fombres & les
plus reculés , pour y adorer d'une manière particu-
lière la divinité. Ces lieux étoient propres à frapper
d'une fainte horreur les peuples, qui fe reprélentoient
C E L
quelque chofe de terrible , appellant Dieu ce qu'ils
ne voyoient point, ce qu'ils ne pouvoient voir.
Tant aux joibLs mortels , il eft bon d'ignorer
Les dieux qu'il leur faut craindre , & qu'il faut adorer.
Brebceuf.
Ou comme le dit plus énergiquement l'original :
Tantùm terroribus addit ,
Quos timeant , non nofje dcos.
Les Gaules ayant été fubjuguées par les Romains
qui vouloient tout envahir , & qui opprimoient au
lieu de vaincre , ce fait une néeelîîté pour les peuples
qui les habitoient , de fe foùmettre à la religion de
leurs vainqueurs. Ce n'eft que depuis ce tems qu'on
vit chez eux des temples tk. des autels confacrés aux
dieux à l'imitation des Romains. Les druides perdi-
rent infenliblement leur crédit : ils furent enfin tous
abattus fous les règnes de Tibère & de Claude. Il y
eut même un décret du lénat oui ordonnoit leur en-
tière abolition , foit parce qu'ils vouloient perpétuer
parmi les peuples qui leur étoient fournis l'ufage
cruel des viûimes humaines , foit parce qu'ils ne cef-
foient de les exciter à confpirer contre les tyrans de
Rome , à rentrer dans leurs privilèges injuftement
perdus,. & à fe choiiir des rois de leur nation.
Les druides fe rendirent fur -tout recommenda-
bles par la divination , foit chez les Gaulois , foit
chez les Germains. Mais ce qu'il y a ici de remar-
quable , c'eft que la divination éîoit principalement
affectée aux femmes : de là le r-efpecl extrême qu'on
avoit pour elles ; refpeû qui quelquefois alloit juf-
qu'à l'adoration ; témoin l'exemple de Velleda &
Ôl Aurinia qui furent miles au nombre des déeffes ,
félon le rapport de Tacite.
C'eft allez l'ufage des anciens de ne parler de l'o-
rigine des choies qu'en les perfonifiant. Voilà pour-
quoi leur cofmogonie n'eft autre chofe qu'une théo-
gonie. C'eft aulii ce que nous voyons chez les an-
ciens Celtes. A-travers les fables , dont ils ont défigu-
ré la tradition qui leur étoit venue de la plus haute
antiquité , il eft ailé de reconnoître quelques traces
de la création ôi du déluge de Moyie. Ils reconnoif-
loient un être qui exiltoit avant que rien de ce qui
exifte aujourd'hui eut été créé. Qu'il me foit permis
de palier fous lilence toutes les fables qui s'étoient
melces à leur cofmogonie : elles ne font par elles-
mêmes ni allez curieufes , ni allez inftructives pour
mériter de trouver ici leur place. II ne paroît pas que
la métempfycofe ait été une opinion univerfellement
reçue chez les druides. Si les uns failoient rouler
perpétuellement les âmes d'un corps dans un autre ,
il y en avoit d'autres qui leur afîignoient une de-
meure fixe parmi les mânes ; foit dans le tartare , où
elles étoient précipitées lorfqu'elies s'étoient fouil-
lées par des parjures, des affaffinats , & des adultè-
res; foit dans un féjour bienheureux , lorfqu'elies
étoient exemptes de ces crimes. Ils n'avoient point
imaginé d'autre iupplice£>our ceux qui étoient dans
le tartare, que celui d'être plongés dans un fleuve
dont les eaux étoient empoifonnées , & de renaître
fans ceffe pour être éternellement en proie aux cruel-
les morfures d'un lerpent. Ils diftinguoient deux fé-
jours de félicité. Ceux qui n'avoient que bien vécu ,
c'eft-à-dire ceux qui n'avoient été que juftes & tem-
pérans pendant cette vie , habitoient un palais plus
brillant que le foleil , où ils nageoient dans un tor-
rent de voluptés : mais ceux qui étoient morts gé-
néreufement les armes à la main pour défendre leur
patrie , ceux-là avoient une place dans le valkalla
avec Odin , auquel ils donnoient le nom à' Hefus, &
qui étoit pour eux ce que le dieu Mars étoit pour les
Latins. On diroit que Mahomet a imaginé fon para-
dis d'après leval/ialla des Celtes feptentrionaux , tant
il a de reffemblance avec lui. Solin , Mêla, & d'au-
tres auteurs rapportent que les nations hyperbeu-ées
C E L
fe précipitoient du haut d'un rocher pour éviter une
honteule captivité , & pour ne pas languir dans les
infirmités de la vieilleffe. Ceux qui Te donnoient ainfi
librement la mort , avoient une place diftinguée dans
le valhalla. De-là cette audace que les Celles por-
toient dans les combats, cette ardeur qui les préci-
pitoit dans les bataillons les plus épais , cette fer-
meté avec laquelle ils bravoient les plus grands dan-
gers , ce mépris qu'ils avoient pour la mort. Nous fi-
nirons cet article , en remarquant que les Celtes ne
s'étoient endurcis & accoutumés à mener dans leurs
forêts une vie fi dure & fi ennemie de tous les plai-
iirs , que parce qu'ils étoient intimement perfuadés
du dogme de l'immortalité des efprits. De-là naif-
foit en eux ce courage , que les Romains ont fi fou-
vent admiré dans ces peuples ; ce mépris de la mort
qui les rendoit fi redoutables à leurs ennemis ; cette
paillon qu'ils avoient pour la guerre , & qu'ils infpi-
roient à leurs enf'ans ; cette chafieté , cette fidélité
dans les mariages fi recommandée parmi eux ; cet
éloignement qu'ils avoient pour le faite des habits &c
le luxe de la table : tant l'efpoir d'une récompenfe
dans une autre vie a de pouvoir fur l'efprit des hom-
mes ! Il eft fâcheux qu'une nation auffi refpeetable par
fes mœurs & par les fentimensque l'étoit celle des
Celtes , ait eu des druides pour miniftres de fa reli-
gion. ( X)
* CELTIBERIENS , f. m. pi. ( Géog, & Hifi. )
peuples de l'ancienne Gaule qui s'établirent en El-
pagne le long de l'iber : leur nom eft compofé de Cel-
te, celui de leur origine , & libériens , celui des peu-
ples avec lefquels ils s'allièrent. Ils fe répandirent
dans F Aragon & la Caftille. Florus les appelle la
force de VEj'pagne.
CELTIQUE , ( Géog. ) c'eft ainfi qu'on appella
la colonie des Celtes ou des Celtiberes , qui s'établi-
rent en Efpagne depuis le Douron jufqu'au promon-
toire Celtique , qu'on préfume être le cap Finilterre.
Voyei Celtes 6- Celtiberes. On donna auffi le
nom de Celtique à la partie de la Gaule qu'occupoient
les Celtes.
CEMENT , f. m. ( Chimie. ) c'eft une composition
ou un mélange de différentes matières falines , ter-
reufes , ou phlogiftiques , en forme de poudre ou de
pâte , avec lefquelles on ftratifie , ou dont on entou-
re certains métaux dans la cémentation. f^oye^ Cé-
mentation. Cet article eft de M. Venel.
Cément ROYAL , ( Chimie. ) c'eft le cément defti-
né à la purification de l'or : il tire l'on nom de la qua-
lité de roi des métaux , par laquelle les Chimiftes dé-
fignent fouvent l'or. Le cément royal le plus limple ,
6c qui eft décrit dans de très-anciens ouvrages, étoit
compofé de deux parties de fel commun , 6c d'une
partie de poudre de brique , farina laterum , empâ-
tées avec de l'urine.
On trouve beaucoup d'autres recettes de ciment ,
qui portent auffi le titre de royal ; c'eft toujours du
nitre ou du fel commun , avec du vitriol calciné , de
la brique pulvéfifée, des bols, quelquefois de la
pierre haematite , oc du verd-de-gris. On a trouvé
un ufage à ces deux dernières matières : on prétend
qu'elles exaltent la couleur de l'or. Article deM. Ve-
nel.
CEMENTATION ,(.f.( Chimie. ) la cémentation
prite dans le fens le plus étendu , eft l'opération chi-
mique par laquelle on applique à des métaux enfer-
mes dans un creufet, dans une boîte de ter, ou mê-
me dans une cornue , & ftraniies avec des fels fixes,
avec différentes matières terreftres , & quelquefois
phlogiftiques , un feu tel , que ces métaux rougifiént
plus ou moins, mais fans entrer aucunement en tu-
iion.
On voit d'abord par cette définition , que les mé-
taux qui coulent ayajit derougir, i'etuinCk le plomb,
Tome H,
C E M
811
ne fauroient être comptes parmi les fujefs de cette
opération.
La cémentation eft un des moyens employés , fur-
tout par les ouvriers qui travaillent l'or & l'argent ,
pour vérifier la pureté de ces métaux , ou pour l'ob-
tenir ; 6c c'cft-là même le principal ufage de cette
opération. Mais des obfervatiqps répétées ont appris
qu'elle étoit infuffifante pour l'un & pour l'autre ob-
jet; c'eft-à-dire que les cemens ordinaires n'enle-
yoient pas exactement à l'or & l'argent les métaux
étrangers qui conftituoient leur impureté , & qu'ils
enlevoient une partie du fin. Kunckel aobfervé que
le fel commun employé aux cémentations répétées de
l'argent , fe chargeoit d'une quantité allez conlidé-
rable de ce métal , qu'on en retiroit facilement par
la fufion.
Geber compte la cémentation parmi les épreuves
que devoit foùtenir fon magifere , pour être réputé
parfait.
L'ufage des cémentations eft trés-familier aux Al-
chimiftes , foit comme opération fimplement prépa-
ratoire , ou entrant dans la fuite de celles qui com-
pofent un procédé ; foit comme produisant immé-
diatement une amélioration , nobilitado. C'eft l'ar-
gent pur ou les chaux d'argent , c'eft-à-dire, l'argent
ouvert ou divilé par des menftrues, fur lequel ils
ont principalement opéré. ^oy^PARTicuLitR.
Bêcher décrit plusieurs de ces particuliers ou pro-
cédés , dans fa Concordance chimique ; & il n'eft prêt
qu'aucun des fix mille auteurs d'Alchimie qui n'en
célèbre quelqu'un.
La trempe en paquet , ou cette opération par la-
quelle les Arquebufiers , les Taillandiers , & quel-
ques autres ouvriers durcilTent ou convertiflent plus
ou moins profondément les lames en acier ou cou-
ches extérieures de certains ouvrages , comme de
prcfque toutes les pièces des platines des armes à
feu, les lames d'épée, les bonnes cuiraffes , les ha-
ches, les limes , les boucles appellées cY acier, &c.
cette opération, dis-je , eft une efpece de cémenta-
tion, l'oye^ F£R«
Les matières des cémens pour l'or & pour l'ar-
gent, font premièrement le nitre , la plupart de
neutres marins , le fel commun , le fel gemme , le
fel ammoniac , le fublimé corrolif, & même une
fubftance faline qui contient l'acide \ égétal , le i .-
det ; fecondement les vitriols calcinés, les bols, la
farine ou poudre de brique, &c.
On prend une ou plufieurs matières de la première
claffe, & quelques-unes de celles de la féconde, dans
des proportions convenables : par exemple, prenez
du (cl marin décrépite , une once ; de la poudre de
brique , demi-once ; du vitriol calcine au rouge , une
once : ou de nitre , de fel ammoniac , de verdet , de
bol d'Arménie , de poudre ou farine de brique, de
chacun parties égales : féchez ce pulvérifez l
vos matières , & mêlez-les exactement. Quelques
auteurs, principalement les anciens , les empâtent
avec l'urine.
On cémente auffi l'argent avec le fel commun feul.
Ver) c- Argent.
Le modus ou manuel de l'opération , eft celui-ci :
prenez un creufet de grandeur convenable ; mettez
au fond , de votre cernent environ la hauteur d'un
pouce ; placez delius une couche de \ Otre nierai ré-
duit en petites plaques très-minces; courre
plaques d'une féconde couche de ccinent, à peu pies
de la même hauteur que la première, cv rempliffez
altern;:ti\ ement votre creufet de cément & de lames
1 ; finùTez par une couche de cément . firî la-
quelle VOUS pouvez en mettre une autre de chaux
poudre, félon l'ufage de quelques Chimiftes j
fermez votre creufet avec un couvercle cxaâentcnt
luté , nuis percé d'un petit trou à pafler une aiguille ;
Kkkk.
Sl2
C E M
C E M
placez-le dans un fourneau à grille ordinaire ; don-
nez le feu peu-à-peu, afin que vos matières s'échauf-
fent lentement ; pouffez-le enfiike jufqu'à les rougir
médiocrement ; lbûtenez ce dernier degré de feu pen-
dant environ trois heures , &C votre opération eft fi-
nie. Les anciens Chimiftes , les Phiioiophes que les
longs travaux n'eifrayoient pas , foûtenoient le der-
nier degré de feu pendant vingt-quatre heures , &
même pendant trois jours entiers. Il deyoit leur en
coûter beaucoup , fans doute , pour tenir pendant fi
long-tems leur métal dans un degré d'ignition fi voi-
fin de la fufion , fans le laiffer tomber dans ce der-
nier état : circonftance effentielle , & toujours re-
commandée par les plus anciens maîtres de l'art, par
Geber lui-même. Les cémentations alchimiques font
continuées pendant des mois entiers : mais elles le
font à un degré de feu un peu moindre.
La théorie de la cémentation de l'or Se de l'argent
dans les vues ordinaires de purification , paroît affez
fimple : tous les céments employés à cet ufage con-
tiennent des fiels neutres , & des précipitans de leur
acide, c'eft- à-dire, des intermèdes qui en procurent le
dégagement : ainfi le mélange du nitre ou du lel com-
mun avec le vitriol , doit laiffer échaper les acides
des premiers fels. Les terres bolaires ou argilleufes
dégagent auffi les mêmes acides , félon un fait an-
ciennement connu , mais peu ou point expliqué. La
poudre de brique peut être inutile au dégagement
des acides nitreux & marins ; elle peut fort bien aufii
avoir retenu , malgré l'altération que la terre ar-
gilleufe dont elle eft formée a effuyée dans le
feu , elle peut avoir retenu , dis-je , la propriété de
les dégager, dont joiiit l'argille crue. Ce fait n'a pas
été examiné , que je fâche. Ainfi félon qu'on employé
l'un ou l'autre de ces premiers fels , ou les deux en-
femble, avec une ou plulieurs des dernières matiè-
res , on a un efprit de nitre , un efprit de fel , ou une
eau régale , qui félon le degré de rapport de chacun
de ces menftrues avec l'or , avec l'argent , & avec
les différens métaux qui leur font mêlés , peuvent at-
taquer quelques-uns de ces métaux , & épargner les
autres. Ainfi de l'acide nitreux dégagé dans une cé-
mentation d'or, eft cenfé attaquer l'argent & le cui-
vre qu'il peut contenir , & ne pas toucher à l'or mê-
me : l'efprit de fel produirait apparemment le même
effet. L'eau régale dégagée dans une cémentation d'ar-
gent , doit. agir fur les métaux imparfaits , fans enta-
mer le métal parfait , comme l'acide nitreux ou le
marin dans le cas précédent.
Mais nous n'avons pas affez d'obfervations pour
évaluer exactement l'aclion des menftrues dans la
cémentation : la circonftance d'être divifés , de n'être
point en aggrégation ou en maffe , & celle d'être
appliqués à des métaux actuellement ignés , & avec
le degré de feu que fuppofe cet état , porte fans
doute des différences eflèntielles dans leur aclion.
Des analogies exactement déduites de plufieurs faits
connus , juftifient au moins le doute , la vue de re-
cherche. D'ailleurs nous ne connoiffons pasaftezles
fels neutres comme menftrues; & peut-être penfons-
nous trop généralement qu'ils ne peuvent agir que
par un de leurs principes , foit dégagé , foit furabon-
dant.
Il eft au moins fur que cette cémentation eft une ef-
pece'de diffolution. Voye^ Menstrue.
Les Alchimiftes peuvent bien ne pas retirer de
leurs longues cémentations tout l'avantage que leurs
oracles leur annoncent; au moins doit-on leur accor-
der que cette opération eft dans les bons principes
de fart , &l qu'elle a tout le mérite de la digeftion tant
célébrée , & avec tant de raifon , par les plus grands
maîtres. Voye^ Digestion.
La cémentation du fer , ou la trempe en paquet ,
diffère beaucoup par l'on effet de la cémentation puri-
fie ative de l'or &c de l'argent dont nous venons dé
parler ; elle reffemble beaucoup plus à la cémentation
amélioraîive , tranimutative ? ou augmentative , en
un mot alchimique , fi cette dernière produilbit l'ef-
fet attendu , qui eft de porter dans fon fujet la terre
mercurielle , ou même le feufre folaire ou lunaire.
On regarde l'effet de la cémentation fur le fer comme
une cipece de réduction , ou plutôt de furréduéhon ,
s'il eft permis de s'exprimer ainfi ; c'eft-à-dire , d'in-
troduclion furabondante de phlogiftique. ^jc'-Fer.
Cet article ejl de M. Venel.
CEMEInTATOIRE , ( eau) (Hijl. nat. & Miné-
ralogie ) aqua ccementatoria ; en Allemand, cernent waf-
fer. L'on nomme ainfi des fources d'eau très-chargées
de vitriol de Venus , que l'on trouve au fond de plu-
fieurs mines de cuivre ; on en voit fur-tout en Hon-
grie , près de la ville de Neufol , au pié des monts
Krapacks. On leur attribue vulgairement la proprié-
té de convertir le fer en cuivre , quoique pour peu
que l'on ait-de connoifïance de la Chimie , il foit fa-
cile de voir cpi'il ne fe fait point de tranfmutation ,
mais feulement une fimple précipitation caufiée par
le fer que l'on trempe dans cette eau. Voici com-
ment on s'y prend pour faire cette prétendue tranf-
mutation.
Veau cémentatoire eft très-claire & très-limpide
dans fa fource ; l'on fait des réfervoirs pour la rece-
voir, afin qu'elle puifîe s'y rafiémbler : l'on fait en-
trer l'eau de ces réfervoirs dans des auges ou canaux
de bois , qui ont environ un pié de large & autant
de profondeur. Quant à leur longueur elle n'eft point
déterminée ; on la pouffe aufii loin que l'on peut,
quelquefois même jufqu'à 100 ou 1 50 pies ; on appel-
le ces auges ou canaux cementers , liiivant M. Schlut-
ter , on les remplit de vieille ferraille autant qu'il
yen peut tenir; l'on fait enfuite entrer l'eau cémen-
tatoire dans ces auges : elle couvre le fer, le diffout,
& le détruit , &c met en fa place le cuivre dont elle
eft chargée ; il prend la figure & la forme que la fer-
raille avoit auparavant , de forte qu'en trois mois de
tems , plus ou moins , fuivant la force de l'eau vitrio-
lique , tout le fer fe trouve coniommé & détruit , &
le cuivre eft entièrement précipité. La raifon pour
laquelle le cuivre précipité prend la même figure
qu'avoit le' ter, c'eft que l'acide vitrio'ique ayant
plus d'affinité avec le fer , lâche le cuivre qu'il te-
noit en diflolution pour s'y attacher; il arrive de-là
qu'il le précipite préciiément autant de cuivre , qu'il
f e diffout de 1er ; de façon que l'un prend la place de
l'autre , & qu'il le met toujours une particule de cui-
vre à la place de celle de fer , qui a été mile en dif-
folution. Voyc^ Vallerius, Hydrologie , p , Gz. §. 2j.
Voilà la manière dont on s'y prend pour obtenir à
peu de frais & fans grande peine , une quantité quel-
quefois très-confiderable de cuivre très-bon , & que
l'on dit même plus duchle & plus malléable que ce-
lui , qui par des fontes réitérées a été tiré de fa mine.
Ce cuivre eft mou & femblable à du limon tant qu'il
eft fous l'eau ; mais il prend de la confiftance , & fe
durcit aufii-tot qu'il vient à l'air.
Les deux plus fameulès fources d'eau de cémenta-
tion de la Hongrie, font celles de Smolnitr & des He-
regrund ; l'on affùre que la première peut fournir tous
les ans, jufqu'à 600 quintaux de cuivre précipité de
la manière qui vient d'être décrite ; ce qui vient de
la grande abondance de cette fource , & de la pro-
dis;ieufe quantité de vitriol de Venus dont elle eft
chargée : outre cela le fer que l'on y met tremper,
fe trouve entièrement diffous en trois femaines de
tems , Si le cuivre a pris fa place ; au lieu que dans
d'autres fources , il faut trois mois , & même quelque-
fois un an, pour que cette opération fe faffe.
L'on trouve en Hongrie plufieurs autres fources
qui ont les mêmes propriétés ; il y en a de pareilles
C E N
en Allemagne , près de Goflar , en Suéde , &c. L'on
attribue la même qualité à une fouree que l'on voit
à ChiefTy , dans le Lyonnois. Voye^ E. Schweden-
borg, tom. III. pag. .49. &fuiv. Henckel nous expli-
que , dans Ta Pyritologie , p.ig. J64 , la caufe de ces
phénomènes, favoir, que les eaux qui compofent
ces fources , venant à parler iur des pyrites cuivreu-
fes , qui ont été décompofées dans les entrailles de
la terre , en détachent les parties vitrioliques qui s'y
font tonnées, & les entraînent avec elles.
C'étoit une tranfmutation femblable à celle qui
vient d'être décrite , que produifirent, il y a quelques
années , des perfonnes qui avoient trouvé le fecret
d'obtenir un privilège exclufif, pour convertir le ter
en cuivre dans toute l'étendue du royaume ; l'on fut
rrès-flatté de l'idée de pouvoir le parler du cuivre de
l'étranger , & de pouvoir en produire autant que
l'on voudrait. Tout le fecret confifïoit dans une eau
vitriolique , où en faifant tremper du fer , il fe fa if bit
une précipitation du cuivre tout-à-fait femblable à
celle que nous venons d'expliquer dans cet article :
mais comme ces convertiiTeurs de métaux n'aveient
point à leur difpofition, une fouree d'eau vitriolique
auffi abondante que celle de Smolnitz, qui pût four-
nir long-tcms à faire leur prétendue tranfmutation,
la fraude fe découvrit, & le public fut en peu de tems
delà bu le. (— )
CÉNACLE, f. m. {Architecture ) du latin cana-
culum , lieu oii l'on mange ; c'étoit chez les anciens
une falle à manger : elle étoit appellée triclinium ,
c'efî-à-dire , lieu à trois lits ; parce que , comme les
anciens avoient coutume de manger couchés , il y
avoit au milieu de cette falle une table quarrée lon-
gue , avec trois lits en manière de larges formes , au
devant de trois côtés ; le quatrième côté reliant vui-
de , à caufe du jour & du fervice. Ce lieu chez, les
grands, étoit dans le logement des étrangers, pour
leur donner à manger gratuitement. Il le voit à Ro-
me , près de Saint-Jean de Latran, les relies d'un tri-
clinium ou cénacle , orné de quelques mofaïques , que
l'empereur Conflantin avoit fait bâtir pour y nourrir
des pauvres. ( P )
Cénacle , ( fhéolog.) Notre Sauveur , la veille
de fa paflîon , dit à l'es difciples de lui aller préparer à
Couper dans Jérufalem , & qu'ils y trouveroient un
grand cénacle tout difpofé , caenaculum grande ftratum,
une falle à manger, avec les lits de table à l'ordinai-
re. On a montré à Jérufalem, dans les ficelés polté-
rieurs , une falle , qui fut enfuite convertie en églife
par l'impératrice Hélène , où l'on pretendoit que
notre Sauveur avoit fait Ion dernier fouper , & avoit
inftitué l'Euchariftie ; mais on a raifon de douter que
cette falle fe foit garantie de la ruine de Jérufalem
par les Romains. Calma , Diction, de la Bibl. (G)
* CENCHRUS , ( Hift. nat. Zoolog. ) elpece de
ferpent dont il fe trouve une grande quantité dans
les îles de Samos Ik de Lemnos ; il a ordinaire
trois pies de long , eit d'une couleur jaune tirant fur
le verd, & moucheté de taches de différentes cou-
leurs. Ce ferpent eft très-dangereux ; il s'attael
bétail, à qui il ou\ jour en fucer le
fang : fa morfure cil morcelle. On peut le préparer
de même que l'on fait les vipères ; cet animal con-
fient beaucoup de ici \ olatil , & fa chair excite la
tranfpiration.
CENDRE aufing. ou CENDRES au plur. f. f.
( Chimie.) Ce corps terreux , fec , & pulvérulent , que
tout le monde connoît fous le nom de cendre , eft le
rendu, ou la partie fixe des matières détruites par la
combujiion à l'air libre , ou par M inflammation. >
Calcination.
Les cendres font donc toujours • • d'une
fubltancc à la ton laquelle concouroit le
phlogillique > ou le feu , 6c ordinairement d'un corps
C E N
8i?
ôrgahhe , ou de ceux que no:-s connohTons , dans la
doctrine deStahl , fous le nom de c . c'eft-
à-dire drun végétal, ou d'un anima!. Voye^ 1
On a rangé aufE lbus le nom générique de cendre ,
les fubflances métalliques privées de phlogiftique ;
c'efi ainfi qu'on ad . ésain , cendre de plomb ,
<kc. Hz qu'on trouve, fur-tout dans les anciens au-
teurs , diverfes calcinations de fubflances métalliques
es par le nom d'incinération ou cinération : mais
les chaux métalliques différent affez eûentiellement
des cendres végétales & animales , pour qu'il foit
plus exact de ne pas confondre les unes & les autres
tous la même dénomma 1 Chaux métal-
lique.
Un végétal ou un animal n'efl, peurun Chimffte,
qu'une elpece d'édifice terreux cimenté par un maf-
tic ou gluten inflammable , & dilrribue en difféi
loges , ou vaiffeaux de diverfes capacités , qui
tiennent des compojés de pluficurs efpeces , tous in-
flammables ; car nous ne confidérons ni dans les vé-
gétaux , ni dans les animaux, relativement à leur
analyfe ou décompofition réeilc , nous ne confidé-
rons point, dis-je , le véhicule aqueux , qui étend &
diflribue (dans le vivant ) la matière de la nutrition
& des fecretions. Voye\ Végétale. (Analyse. )
C'etf aux ruines de cet édifice , de la baie terreu-
fe , du foûtien (hypoflafis ) de nos tijjus, qu'eu: due la
portion la plus conlidérable de la matière propre ,
de la terre de leurs cendres. L'autre portion (infini-
ment moindre) de cette terre, cil fournie par les com-
pofés terreux détruits par l'inflammation, & même
par quelques mixtes qui n'ont pu échapper à fon ac-
tion. Voye{ Végétale. (Analyse. )
Outre la terre dont nous venons de parler, les cen-
dres végétales contiennent prcfque toutes (on a dit
toutes , mais on peut raifonnablement douter que ce
produit de l'analyfe des végétaux foit abfolument gé-
néral , je dis des végétaux même non épûifés par des
extractions) du iel fixe, alkali fixe ou lixiviel, ck or-
dinairement des tels neutres. Le tarlre vitriolé & le
fel marin font les lèuls que l'en ait obfervés jufqu'à
nt.
Les fels fixes des < nt point en-
core, malgré l'autorité de pluficurs ChimiiU
pectables, des êtres dont l'exigence fort gén(
ment admife en Chimie. Ces fels , s'ils exiftoient , fe-
roient fans doute fort analogues à ceux qu'on a tant
cherchés dans la chaux ; 1
devrais fels d fur lefquels il s'en faut bien
qu'on ait jufqu'à prêtent des notions al'. 1
Les cendres, tant les végétales que les anin
contiennent affez généralement du fer. M. ( i
a propolé dans le: c Se. en
IJ05. le problème fuivant : trouver des cendres qui nt
1 parcelles de ft ; ce n'elt que des
cendres ^ont il parle. Ce problème n'a pas
encore été réfolu, que ulieurs Chimilles
e ., entr'autres M. Henckel. & M. Lemery le
fils, ont cor . ■ ment qui en
fuppofe dans tous les végétaux. Le bleu
qu on peut retirei es , que
les foudes fur-tout fbumifTent ordinairement t
grande abondance, eit un f . . .
ce métal , du fer •
La cendre ne diffère du charbon que par le phlo-
giitiqu tes partie ■ lieu du
.
irbon, enl '■ qui ne
féaux termes, comme ne donnera
La et qui relie de la dcllruc'
Vf
8i4
C E
C E N
dérable de leur tout. Cent livres de différens bois
neufs, très-fecs, brûlés avec le loin néceffaire, pour
ne perdre que la terre qui eft inévitablement entraî-
née dans la fumée , n'ont laiffé que trois livres dix-
onces de cendres calcinées , à peu-près un trentième
de leur poids. Ce produit doit varier coniîdérable-
ment félon que le corps qui le fournit eft plus ou
moins terreux, plus ou moins denfe, plus ou moins
épuifé de fes lues , &c. C'eft ainfi que les écorces en
général, & fur-tout les écorces des vieux troncs , doi-
vent en fournir beaucoup plus qu'une plante aqucu-
fe, ou un fruit pulpeux; les plantes abondantes en
extrait amer, beaucoup plus que les plantes réfineu-
fes: un os beauco'up plus qu'un vifcere, &c II eft
tel* plante aqueule dont on peut féparcr parla fim-
ple defîîccation , jufqu'à rês de fon poids, qui par
conféquent dans cet état de fechereffe , étant luppo-
fée , toutes chofes d'ailleurs égales , d'une denfité pa-
reille à celle du bois dont nous avons parlé , ne don-
nerait que le rjôâ de fon poids de cendre. Ceux qui
feront curieux de connoître avec détail le rapport
du produit dont il s'agit, au corps dont il faiioit par-
tie , peuvent confulter les analylës des premiers Chi-
miftes de l'académie royale des fciences , & celles de
la matière médicale de M. Geoffroy.
La cendre ou la terre végétale & la terre animale
confervent chacune inaltérablement un caractère ,
& comme le fceau de leur règne refpeftif. La terre vé-
gétale , félon l'obfervation de Bêcher , porte toujours
dans le verre à la compofition duquel on l'employé ,
une couleur verte, ou tirant foiblement fur le bleu.
» Viridis vcl fubcœruleus , indehbilem fui regni aflerif-
» cum fervans , nempe vegetabilem viriditatem expri-
.*> mens ». Et la terre animale une couleur de blanc
de lait. C'eft à la fuite de cette obfervation que le
même Bêcher forme très-férieufement ce louhait fin-
«ulier : « O utinam ita confuctum foret, & amicos habe-
» rem qui ultimam ijlam opcllam , Jiccis , & multis labo-
» ribus exhaujlis oflibus rneis , aliquando prczjlarent , qui
» inquam eam in diaphanam illam , nullis fœculis cor-
» ruptibilem fubfantiam rédigèrent , fuavifflmum fui ge-
» neris colorent, non quidem vegetubilium \irorem,tre-
» muli tamen narcifjuli ideam lacleam prafcntantem ,
» quod paucis quidem horis Jieri pofet . . . Piût à Dieu
» que ce fût un u'age reçu , & que j'euffe des amis
» qui me rendiffent ce dernier devoir , qui , dis-je ,
•» convertiffent un jour mes os fecs, & épuilés par
» de longs travaux , en cette fubftance diaphane ,
» que la plus longue fuite de fiecles ne fauroit alté-
» rer , & qui conlerve fa couleur générique , non la
» verdure des végétaux, mais cependant la couleur
» de lait du tremblant narciffe ; ce qui pourroit être
» exécuté en peu d'heures , &c ».
M. Pott oblerve dans la Lithogeognofle , des différen-
ces réelles &£ caraclériftiques dans les terres calcai-
res & alkalines tirées des trois règnes, & même parmi
les différentes terres du même règne , comme entre
la craie & la marne , entre l'ivoire , la corne de
cerf, les écailles d'huîtres, &c. foit pour le degré de
fufibilité , foit pour le plus ou le moins de facilité à
être portées à la tranfparence. Apparemment qu'on
trouveroit auffi des différences effentielles entre les
cendres leflivées de divers végétaux.
Ces obfervations prouvent fuffifamment que les
terres des cendres végétales ou animales, ne font pas
des corps fimples, ou qu'on n'eft pas encore parvenu
à les réduire à la fimplicité élémentaire , pas même
à la fimplicité générique des terres alkalines ou cal-
caires , dans la claffe defquelles on les range ; claffe
dont, pour le dire en paffant, le caractère propre
n'exifte feul dans aucun fujet connu , ou qui eft tou-
jours modifié dans chacun de ces fujets par des qua-
lités particulières (qualités qui , dans la doûrine Chi-
mique , font toujours des fubftaaçes ou des êtres phy-
siques ( Voye?^ Chimie ) fi intimement inhérentes \
qu'on n'a jamais pu jufqu'à préfent Amplifier les dif-
férentes terres calcaires , au point de les rendre exac*
tement femblables, comme on peut amener à cette
reffemblance parfaite les eaux tirées de*'différentes
plantes , ou même celles qu'on tire des différens rè-
gnes , les phlogiftiques des trois règnes , &c. Vcye^
Terke.
La fameufe opinion de la réfurrection des plantes
& des animaux de leurs cendres , qui a tant exercé
les favans fur la fin du dernier fiecle, & au commen-
cement de celui-ci , ne trouveroit à préfent fans dou^
te des partifans que très-difficilement. Voye-^ Palin-
GENESIE.
La terre des cendres entre très-bien en fufion , &
fe vitrifie avec différens mélanges, mais fur-tout avec
les terres vitrifiables & les alkalis fixes. C'eft par
cette propriété que les cendres végétales non lefïï-
vées , comme les cendres de fougère , les cendres de
Molcovie , celles du varec , la loude , &c. font pro-
pres aux travaux de la Verrerie. Voye^ Verre.
Les cendres leflivées fourniffent aux Chimiftesdes
intermèdes & des inftrumens , tels que le bain de
cendre, & la matière la plus ufitée des coupelles.
Foye{ Intermède & Coupelle.
Le fel lixiviel ou a'kali fixe retiré des cendres des
végétaux, eft d'un ufage très-étendu dans la Chimie
phyfique , & dans différens arts chimiques. Vcye^ Sel
LIXIVIEL.
C'eft à ce dernier fel que les cendres doivent leuf
propriété de blanchir le linge, dô dégraiffer les étof-
fes, les laines, &c. Voye^ Blanchissage, Sel li-
xiviel, & Menstrue. C'eft parce que la plus gran-
de partie , ou au moins la partie la plus faline de la
matière qui fournit ce fel dans Vif ion, a été enle-
vée par l'eau , au bois flotté , que les cendres de ce
bois font prefque inutiles aux blanchiffeuiës. Voye^
Extrait.
Les cendres non leflivées font employées aufti dans
la fabrication du nitre, mais apparemment ne lui four-
niffent rien le plus fouvent, contre l'opinion com-
mune. Voye^ NlTRE. Cet article efl de M. Venel.
* Cendres , (Agriculture.) les cendres font un fort
bon amendement, de quelque matière & de quelque
endroit qu'elles viennent, foit du foyer, foit de lef-
five , du four à pain , à charbon , à tuile , à chaux ,
& d'étain ; elles conviennent allez à toutes fortes de
terre. On les mêle avec le fumier, pour qu'il s'en per-
de moins. Quand un champ eft maigre, il eft affez
ordinaire d'y mettre le feu , & de l'engraiffer des cen-
dres mêmes des mauvaiies herbes qu'il produit, fi
elles font abondantes : on le laboure auffi-tôt. On en
ufe de même quand on a des prés ftériles & ufés; ou
bien on en enlevé la furface qu'on tranfporte par
pièces de gafons dans d'autres terres, oii on les brû-
le. Voyei Engrais des terres & Agriculture.
CENDRE, pluie de cendres, ( Phyfique.') Dans les
Tranfaclions philofophiques il eft fait mention d'une
ondée ou pluie de cendres dans l'Archipel, qui dura
plulîeurs heures , & qui s'étendit à plus de cent lieues.
Foyei Pluie. Ce phénomène n'a rien de furprenant,
puilqu'il eft tres-pofîible que lorfqu'il y a quelque
part un grand incendie, ou un volcan, le vent pouf-
fe les cendres , ou peut-être la poufïiere de cet endroit
dans un autre , même affez éloigné. (O)
* Cendre de cuivre, (Métallurgie.) c'eft une efpe-
ce de vapeurs de grains menus que le cuivre jette en
l'air dans l'opération du rafinage. On peut recevoir
cette vapeur en retombant , en paffant une pelle de
fer , à un pié ou environ au-deffus de la furface du
cuivre qui eft alors dans un état de fluidité très-fub-
tile. Voye{ l'article Cuivre.
Cendres gravelées , (Chimie.) elles fe font
avec de la lie de vin ; voici fuivanj. M. Lenicry la
C E N
façon dont on s'y prend. Les Vinaigriers féparëht
par expreffran la partie la plus liquide de la lie de
vin , dont ils le lervent pour faire le vinaigre ; du
marc qui leur refle, ils forment des pains ou gâteaux
qu'ils font lécher ; cette lie ainlî léchée le nomme
ou gravelée : ils la brûlent ou calcinent à feu
découvert dans des creux qu'ils font en terre, &c
pour lors on lui donne le nom de cendres gravclêcs.
Pour qu'elles foient bonnes , elles doivent être d'un
blanc verdâtre , en morceaux , avoir été nouvelle-
ment faites , & être d'un goût fort acre &c fort cauf-
tique. L'on s'en fert dans les teintures pour prépa-
rer les laines ou les étoffes à recevoir la couleur qu'on
veut leur donner. Voye^ Teinture. On les em-
ployé aufli à caufe de leur cauflicité dans la compo-
sition de la pierre à cautère , qui le fait avec une par-
tie de chaux vive , 6c deux parties de cendres grave-
lées. foye{ Cautère.
Suivant M. Lemery , la cendre grave/Je contient un
fel alkali qui relfemblc fort au tartre calciné : mais
il eft chargé de plus de parties terreflres que le tar-
tre , 6c ne contient point autant de fel volatil que
Lui ; ce qui ne paroît point s'accorder avec ce que
le même auteur dit dans un autre endroit, que le fel
qui je tin des cendres gravelées , efl beaucoup plus péné-
trant que r autre tartre , & par conféquent plus propre à
faire des caujliques.
La plupart des auteurs s'accordent à dire que les
cendres gravelées s'appellent en Latin cineresclavellati ;
fur quoi l'on a cru devoir avertir que le célèbre
Stahî , & généralement tous les Chimiffes Allemands,
par cineres clavellati , ont voulu défigner la potaiTe ,
qui n'efl point de la lie de vin brûlée comme les cen-
dres gravelées que Ton vient de décrire dans cet arti-
cle. Il efl vrai que la potaiTe & la cendre gravelée ont
beaucoup de propriétés qui leur font communes ;
l'une 6c l'autre contiennent du fel alkali , & peuvent
s'employer à peu de chofe près aux mêmes ufages ;
mari ces raifons ne paroiflênt point furrifantes pour
autorilér à confondre ces deux lubflances.
Si l'on a raifon de dhtinguer la cendre gravelée , qui
efl: produite par l'uftion de la lie de vin , d'avec le
vrai tartre calciné ; doit-on mettre moins de diffé-
rence entre cette même lie de vin brûlée , 6c des
cendres d'arbres telle qu'efl la potafle ? Voye^ Po-
TASSE. Le Mifcdlanea chimica Leydenfia appelle ci-
neres clavellati, les cendres de farmens de vigne brû-
lés en plein air. Autrefois l'on donnoit airfli ce nom
aux cendres de barrils ou tonneaux que l'on brûloit :
mais comme il étoit difficile d'en retirer de cette ma-
nière autant que l'on en a voit beloin , on a préféré
de fe fervir de la potafle que l'on pou voit avoir en
plus grande abondance. ( — )
<■ : ndre Bleue. Voyat Bleu.
Cendres VERTES, (Hift- nat, & Minéralogie.}
le nom de cendres a été donne fort improprement à
cette fubfiance , qui efl une vraie mine de cuivre,
d'une confiftance terreufe , dont la couleur efl d'un
verd tantôt clair, tantôt fonce ; on l'appelle en La-
tin aru^o nutivaterrea. \cle VERD DE MON-
TAGN1 . ( — )
CENDRES de roquette , (Chimie & Art de la Ver-
) on les nomme auffi poudre d: roquetf; , cen-
Sirie ou du Le\ Feri dit dans fon Art de
.-■ , que la roquette efl la cendre d'une plante
qui croît abondamment en Egypte & en Syrie , fur-
tout près des bords de la mer. Cette plante n'eftau-
fe que le kali; on la coupe vers le milieu de
l'été lorfqu'elle efl dans ,'i plus grande force ; on la
. lier au foleil ; i bes que l'on
entafle les unes fur les autres, & que l'on brûle en-
fuite pour en avoir le i dres : ce font ces cendres
que l'on nous envoyé du Levant, ce furtoutde s.
Jean d'Acre ce de Tripoli ; les Verriers èv les Savon-
C E N
8i
5
niers s'en fervent ; elles font chargées d'un fel très-
acre & très-fixe que l'on en retire par la méthode
ordinaire des lefhves & des cryftallifations , ou en-
en faifant évaporer la leflive à iïccité. On faifoit au-
trefois un très-grand cas du fel rire de ces cendres ;
foit qu'on lui attribuât plus de force qu'à d'autre , à
caufe du climat chaud qui le produit, foit que l'é-
loignement du pays d'où l'on tiroit cette marchan-
dée contribuât à en rehauflèr le prix : mais Kunc-
fcel nous avertit dans fes notes fur l'Art de la Verre-
rie de Neri , que la fonde , la potafle , ou toutes fortes
de cendres fourniflent un fel auffi bon pour les ufa-
ges de l'art de la Verrerie , que celui que l'on peut
tirer de la roquette, pourvu que ce fel air été con-
venablement purifié par de . , folutions ,
évaporations , & calcinations. ( — )
* Cendres, (Hifl. anc.) refle des corps morts
brûlés , félon l'ufàge des anciens , Grecs & Romains :
on comprend aifement qu'ils pouvoient reconnoî-
tre les oflemens ; mais comment leparoient-ils les
cendres du corps d'avec celles du bûcher? Ils avoient,
dit le lavant père Montfaucon , plufieurs manières
d'empêcher qu'elles ne le confondiffent ; l'une def-
quelles étoit d'envelopper le cadavre dans la toile
d'amiante ou lin incombuflible , que les Grecs ap-
pellent asbeflos. On découvrit à Rome en 1701 dans
une vigne, à un mille de la porte majeure, une gran-
de urne de marbre , dans laquelle étoit une toile d'a-
miante : cette toile avoit neuf palmes romains de
longueur , ce fept palmes de largeur ; c'efl environ
cinq pies de large, fur plus de f;x & demi de long.
Elle étoit tiflue comme nos toiles ; fes fils étoient
gros comme ceux de la toiie de chanvre
ulée 6c falle comme une vieille nappe de d ;
mais plus douce à manier & plus pliable qu'une étoffe
de ioie. On trouva dans cette toile, des oflemens ,
avec un crâne à demi-brûlé. On avoit mis fans doute
dans cette toile le corps du défunt, aiin que les cen-
dres ne s'écartalient point , 6c ne le mêlaffent pas
avec celles du bûcher, d'où on les retira pour les
tranfportcr dans la grande tombe. On je:.
dans le feu, oit elle relia long-tëms fans
ni endommagée. Le père Montfaucon qui
promettre plufieurs manières e les cendres du
mort de celles du bûcher , n
celle-ci. On rapportait lésa ù mou*
roient au loin , dans Ici:.
d'enfermer I. mes dans
une même urne. Vo iLLES,
Urne , Tome
CENDRÉ , adj. terme qui
reffemblent à de - cen res, fur :
couleur & à la confiflance ; : : corti-
cale du cerveau ,
/ \>\ .■- ( . itii ; i
mie fe dit de
terie, dans les en :enterie &
CENDRÉE , f. f. (Cl . ) c'efl ainli
que Ton nomme la cendre que IV '.
formation des « n en diflir
-
les effais en grand , lorfqu'i
une grande quantité de métal
. m le fert de ce
prend pas la peine de leffiver ou
tant de foin que pour la peti :
un peu de briques réduites s ■
enfuite la forme dans des moules de terre,
\u\ anneau de ter, ou
fourneau à raffine
La /-. demande beaucoup plus i
paration , l'on prend pour cela des
8i6
C E N
fent réfifter au feu le plus violent fans fe vitrifier &
fans entrer en fufion avec les matières que le verre
de plomb met dans cet état ; l'on n'a rien trouvé qui
répondit mieux à ce deffein , que les os des animaux
calcinés ; les meilleurs font ceux de veau , de mou-
ton , de bœuf, &c aufli-bien que les arrêtes des
poiffons. Avant de les calciner , il eft à propos de les
faire bien bouillir, afin d'en féparer toute partie
gratte & onftueufe ; on les calcine enfuite à un feu
découvert très-violent , ÔC l'on fait durer la calcina-
tion pendant plulieurs heures , en prenant garde
qu'il n'entre ni cendres ni charbons dans le creufet
où font les os que l'on veut calciner. La marque que
l'opération eft bien faite , c'eft lorique en caflant les
os , l'on n'y remarque rien de noir. Quand ils font à
ce point , on les pde dans un mortier , & l'on verfe
par-deffus de l'eau chaude ; on a foin de bien remuer
le tout, afin que l'eau emporte toutes les parties iali-
nes qui pourroient s'y trouver ; l'on réitère plufieurs
fois ces édulcorations ; l'on fait enfuite lécher la
poudre qui refte ; on la réduit en une poudre très-
fine ; on la palfe par un tamis ferré ; on la rebroye
de nouveau fur un porphyre , jufqu'à ce qu'elle de-
vienne impalpable. M. Cramer préfère aux os &
aux arrêtes calcinés une elpece de lpath particulier
qui , lorfqu'on l'a calciné dans un creulet fermé ,
devient mou & friable , Se ne demande point de pré-
paration ultérieure; mais toute forte de ipath n'eft
point propre à cet ufage. Celui dont M. Cramer
parle, eft fans doute l'ei'pece de fpath que M. Pott
appelle alkalin , pour le diftinguer du ipaihfujîble.
Lorfqu'on a befoin de beaucoup de coupelles ,
l'on a recours aux cendres des végétaux pour taire
la cendrée : mais de peur que le fel dont ces cendres
font chargées ne faite vitrifier les coupelles , l'on a
foin de les préparer de la manière fuivante. On prend
une cendre de bois, blanche, légère, & tendre ; on
la paffe par un tamis, en verfant de l'eau par-deffus
pour en féparer la pouiîiere de charbon qui pourroit
y être mêlée ; fur la cendre qui a pailé , Ton verfe de
l'eau chaude , on remue la cendre avec un bâton ;
on lui donne un peu de tems pour retomber au fond ,
& l'on décante cette première eau , qui eft toujours
trouble ; on reverfe de nouvelle eau chaude fur la
cendre , que l'on décante encore après avoir remué
& laiffé retomber la cendre ; on continue la même
chofe jufqu'à ce que l'eau ne contracte plus ni cou-
leur ni goût. Quand les chofes en lont à ce point ,
l'on verfe de nouvelle eau fur les cendres , on la re-
mue, & l'on décante l'eau toute trouble, en don-
nant cependant le tems au fable & aux parties ter-
reftres qui y font mêlées de retomber au fond : l'on
fait la même choie tant qu'il refte des cendres dans
le vaiffeau où s'eft faite l'édulcoration. Quand toute
la cendre fera parlée , on la laiflera repofer & tom-
ber au fond du nouveau vaiiTeau où on l'aura mile ;
l'on en décante l'eau , & la cendre qui reliera lera
dégagée de tout fel & de toute partie graflé , & in-
variable au feu. Pour la rendre encore meilleure ,
l'on en formera des boules que l'on fera calciner au
fourneau ; on la lave enfuite de nouveau , & pour
lors elle devient d'une blancheur égale à celle des
os calcinés. L'on mêle cette cendre, ainii préparée,
avec les os calcinés , pour en faire les coupelles. V,
l'article COUPELLE. {—)
CENDRÉE, en terme de Fondeur de petit plomb , eft
la plus petite efpece de plomb qui ié faffe , c'eft pour
cela qu'on n'en fait qu'à l'eau. Voye^ à l'art. Plomb ,
fonte de petit plomb.
CENDRIER, f. m. {Chimie & Métallurgie.) l'on
nomme ainfi l'endroit d'un fourneau , qui eft immé-
diatement fous le foyer, dont il n'eft iéparé que par
une grille. Il eft deftiné à recevoir les cendres qui en
tombent ; il a une ouverture qui communique à l'in-
C E N
teneur, faite non-feulement pour retirer les cendre?,
mais encore pour que l'air extérieur paille y entrer
& faire aller le feu lorique cela eft néceffaire ; cette
ouverture eft garnie d'une porte , qui fe ferme lorf-
que l'air ne doit point y être admis. La grandeur &
les diiférentes dimenlions du cendrier varient à pro-
portion de la grandeur du fourneau, ou plutôt à pro-
portion de la quantité de cendres que donne la ma-
tière dont le feu eft compofé. (— )
* CENDRURES , f. f. pi. mauvaife qualité de l'a-
cier, voye-r l'article Acier; elle confifte dans de pe-
tites veines , qui , quand elles fe trouvent au tran-
chant d'un inftrument , ne lui permettent pas d'être
fin , mais le mettent en groffe feie. Voye^ Veine.
CÈNE, f. f. {Hijl. eccléf.) cérémonie ufitée dans
l'églife pour renouveller & perpétuer le fouvenir de
celle où Jefus-Chrift inftitua le facrement adorable
de l'Euchariftie. C'eft une grande queftion parmi les
théologiens, de favoir fi dans cette dernière ce'neje-
fus-Chrift célébra la pâque ; fur cela les fentimens
font partagés: nous renvoyons à l'artide Pâques la
décifion de cette célèbre difpute ; nous y difeuterons
les divers fentimens des théologiens ; tk nous prou-
verons, conformément à l'Ecriture, que Jefus-Chrift
a , fuivant la loi de Moyiè , célébré la pâque la der-
nière année de fa vie. Voye^ Pasque.
CENEDA, {Géog.) ville d'Italie , dans l'état de
la république de Veniiè , dans la Marche Trévifane.
Long. 2<). 60. lat. 4.6.
CENEUS , {Myth.) furnom de Jupiter ; il fut ainfi
appelle du temple qu'Hercule lui éleva dans l'Eubée,
fur le promontoire de Cenie , après avoir ravagé
l'Œxhalie.
CENIS (le mont) , Géog. montagne la plus
haute des Alpes , fur la route de France en Italie.
Cents, {Géog.) rivière de l'Amérique lèptentrio-
nale , dans la Loùiiîane , qui fe jette dans le golfe de
Mexique.
Cents {les) , peuple fauvage de l'Amérique fep-
tentrionale , dans la Loùiiîane , vers la iburce de la
rivière de Cenis.
CENOBITE , f. m. {Hijl. eccléf.) religieux qui vit
dans un couvent ou en communauté ious une cer-
taine règle , différent en cela de l'hermite ou ana-
chorète, qui vit dans la folitude. Voyr^ Hermite
& Anachorète.
Ce mot vient du Grec nonoç , communis , 8c@oiç,
vita , vie.
Caflien prétend que le couvent eft différent du
monaftere , en ce que ce dernier eft l'habitation d'un
feul religieux ; au lieu que couvent ne ié peut dire
que de plufieurs religieux qui habitent enièmble &
qui vivent en communauté : mais on confond affez
ces deux mots. Voyei Couvent & Monastère.
L'abbé Piammon parle de trois différentes fortes
de moines qui fe trouvoient en Egypte : les Céno-
bites, qui vivoient en communauté ; les Anachorètes ,
qui vivoient dans la folitude ; & les Sarabaites , qui
n'étoient que de faux moines & des coureurs. Voye^
Anachorète.
Il rapporte au tems des apôtres l'inftitution des
Cénobites , comme un refte ou une imitation de la vie
commune des premiers fidèles de Jéruialem : S. Pa-
come paffe cependant pour l'inftituteur de la vie
cénobitique , parce que c'eft le premier qui forma des
communautés réglées, Foye^ Règle & Moine.
Dans le code Théodoiien, Lib. XI. tit. xxx. de.
Appellat. leg. 5j '. les Cénobites font appelles fynoditœ?
terme qui lignifie proprement des hommes vivans en
communauté , & non les domeftiques des moines ,
comme l'ont imaginé fauffement quelques gloffa-
teurs. Bingham , orig. eccléf. tom. III. lib. Fil. c. ij.
§■3- (G)
CENOMANS , f. m. pi. {Géog. & Hift. une.) peu-
ples
C E N
pics de la Gaule Septicjue , qui habitoient le Maine ,
& dont il paffa en Italie une colonie qui conferva
le même nom.
CENOTAPHE , f. m. tombeau vuide ou monu-
ment qui ne contient point de corps ni d'ofiemens ,
& dreffé feulement pour honorer la mémoire de quel-
que mort. Foye{ Tombeau & Monument.
Ce mot ell formé du Grec nwot , vuide , &c to.çoç ,
■tombeau. (G )
CENS , cenfus, f. m. (Hifl. anc. & mod.') parmi les
Romains c'étoit une déclaration authentique que les
citoyens faifoient de leurs noms , biens , réfidence ,
&c pardevant des magistrats prépofés pour les en-
regiftrer, & qu'on nommoit à Rome cenfeurs, & cen-
seurs dans les provinces &C les colonies.
Cette déclaration étoit accompagnée d'une énu-
mération par écrit de tous les biens , terres, hérita-
ges qu'on poffédoit , de leur étendue , iituation , quan-
tité, qualité, des femmes, enfans, métayers, domef-
îiques , beftiaux , efclavcs , &c. qui s'y trouvoient.
Par un dénombrement fi exa£t , l'état pouvoit con-
noître aifément fes forces & fes reffources.
Ce fut dans cette vue que le roi Servius inftitua le
cens , qui fe perpétua lous le gouvernement républi-
cain. On le renouvelloit tous les cinq ans , & il em-
braffoit tous les ordres de l'état fous des noms dirïé-
rens. Celui du iénat lous le titre de leaio ou recollec-
tio ; celui des chevaliers qu'on«appelloit recenfo & re-
cognicio ,• à celui du peuple demeura le nom de cen-
fus ou de lujlrum , parce qu'on terminoit ce dénom-
brement par un. iacrifice nommé lujlrum , d'où la
révolution de cinq ans fut aurîi appellée lu/Ire.
De-là le mot de cenfus a été auffi en ufage pour
marquer une perfonne qui avoit fait fa déclaration
aux cenfeurs , par oppofition à incenfus , c'eft à-dire
un citoyen qui n'a fait enregistrer ni fon nom ni fes
biens. Dans la loi Voconia , cenfus fignifîe un homme
dont les biens font portés fur le registre des cenfeurs
jufqu'à la valeur de cent mille i'eiterces. (G7)
Quoique dans la démocratie, dit l'illuflre auteur
de YEj'prit des Lois, l'égalité foit l'ame de l'état , ce-
pendant comme il eSt prefqu'impoSîible de l'établir ,
il fuffit qu'on établifTe un cens qui réduiie ou fixe les
différences à un certain point ; après quoi c'eft à des
lois particulières à tempérer cette inégalité, en char-
geant les riches & Soulageant les pauvres.
Le même auteur prouve , tiv. XXX. ch. xv. qu'il
n'y a jamais eu de cens général dans l'ancienne mo-
narchie Françoife, & que ce qu'on appelloit cens ,
étoit un droit particulier levé fur les ferfs par les
maîtres. (O )
Cens , f. m. (Jurifp. ) eft une rente foncière due
en argent ou en grain , ou en autre choie , par un hé-
ritage tenu en roture au feigneur du lie! dont il re-
levé. C'eft un hommage & une reconnoilî'ance de la
propriété directe du feigneur. Le cens elt impreferip-
lible & non rachetable ; feulement on en peut pref-
crire la quotité ou les arrérages par 30 ou 40 ans.
Le cens , dans les premiers tems , égaloit prefque
la valeur des fruits de l'héritage donné à cens, com-
me font aujourd'hui nos rentes foncières ; de forte
que les ceniitaires n'étoient guère que les fermiers
perpétuels des feigneurs , dont les revenus les plus
confidérables conliltoient dans leurs cenuves. <■ c oui
en tait à prêtent la modicité , c'clt l'altération des
monnoics , qui lors de l'étabuflement des cenûves
étoient d'une valeur toute autre.
Le cens cilla première redevance qui ell impofée
par le feigneur direct, dans la conccllion qu'il lait de
ion héritage. Toutes les autres charges impofées de-
puis n'ont pas le privilège du cens.
Le cens reçoit diverles dénominations , comme de
champart, terrage, agrier, avenage , carpot , com-
plant, èv autres; droits qui tous , quelque nom qu'ils
Tome II.
C E N
817
portent, entraînent avec eux celui de Iods & ventes,
s'ils ont été impofés lors de la première concefîîon ,
& qu'il n'y ait point d'autre charge impofée fpéciale-
ment à titre de cens.
La plupart des coutumes prononcent une amende
faute de payement du cens , au jour & lieu qu'il efl
dû , fans préjudice de la faiiîe que le feigneur peut
faire des fruits pendans fur l'héritage redevable du
cens , qu'on appelle arrêt ou brandon. Voye{ Arrêt
& Brandon.
Les héritages fîtués dans la ville & banlieue de
Paris font exempts de cette amende : mais le fei-
gneur, faute de payement du cens, peut procéder
iiir les meubles , étant en iceux par voie de faifie^.
gageric, pour trois années ou moins; car s'il a laifl'é
amaffer plus de trois années , il n'a que la voie or-
dinaire de l'action. Voye^ Gagerie. (# )
CENSAL , f. m. {Commerce.*) terme en ufage fur
les côtes de Provence & dans les échelles du Levant.
Il fignifîe la même choie que courtier. V. Courtier.
Les marchands & négocians payent ordinairement
un demi pour cent au cenfal pour fon droit de cenfe-
rie ou de courtage. Voyc{ Courtage.
La plupart des cenfals du Levant , mais particuliè-
rement ceux qui font la cenferie ou courtage au grand
Caire , font Arabes de nation. Dans les négociations
qui fe font entre les marchands Européens & ceux
du pays , ou pour l'achat ou la vente des marchan-
difes , tout fe palTe en mines & en grimaces ; & c'eft
fur-tout une comédie quand le cenfal veut obliger le
marchand Européen de payer la marchandée de fon
compatriote à fon premier mot, ou du moins de n'en
guère rabattre.
Lorfque l'Européen a fait fon offre , toujours au-
deffous de ce que le vendeur en demande , le cenfal
Arabe fait Semblant defe mettre en colère, hurle &
crie comme un furieux , s'avance comme pour étran-
gler le marchand étranger , fans pourtant lui toucher.
Si cette première kene ne réunît pas , il s'en prend
à lui-même , déchire fes habits , fe frappe la poitrine
à grands coups de poing , fe roule à terre , & crie
comme un delelperé , qu'on infulte un marchand
d'honneur , que la marchandife n'a point été volée
pour en mefotfrir lî extraordinairement. Enfin le né-
gociant d'Europe accoutumé à cette burlefquc négo-
ciation , reliant tranquile & n'offrant rien de plus , le
cenfal reprend aufîi fa tranquillité, lui tend la main ,
& l'embraftc étroitement en ligne de marché conclu,
& finit la pièce par ces mots halla quebar, halla quebir,
Dieu ell grand & très-grand , qu'il prononce avec au-
tant de fens-froid qu'il a marqué auparavant de vé-
hémence & d'agitation. Diclionn. du Cornm. (£)
CENSE , f. f. (Juri/prud. ) cil une petite métairie
qu'on donne à ferme, & quelquefois à rente ; ce qui
s'appelle àcenfer une métairie. ( H)
CENSERIE, f. f. ( Commerce. ) fe dit de tout ce
qui fignifîe courtage , & quelquefois de la profefïîon
même du cenfal , & du droit qui lui ell du. Poyeç
Censal 6- Courtage. (G7)
CENSEUR, f. m. ( Hift. anc. ) l'un des premiers
magiflrats de l'ancienne Rome , qui étoit charge de
faire le dénombrement du peuple , 6v la répartitioa
des taxes pour«lgque citoyen. Ses fonctions avoient
encore pour ofjlfc la police , & la réformation des
mœurs dans tous les ordres de la république.
Le nom de cenfeuryient de cenfere, eftimer , éva-
luer , parce que cet officier évaluoit les biens de cha-
cun , enregiftroit leurs noms , & diftribuoit le peu-
ple par centuries. Selon quelques auteurs, ce terme
ell dérivé de l'infpecHon que les cenfeurs avoient fui
les mœurs & fur la police.
Il y avoit à Rome deux cenfeurs. Les premiers fu-
rent créés en 3 1 1 , c'étoient Papirius & Sempronius.
Le fénat oui voyoit que les ionJuls étoient alTez oc-
1 LL111
8i8
C E N
cupés du militaire , & des affaires du dehors , imagi-
na cette nouvelle dignité pour veiller à celles du de-
dans , & tira de fon corps ceux qui en furent revê-
tus : mais depuis que les plébéiens eurent été admis
au confulat , ils afpirerent auffi à la cenfure , & par-
vinrent au moins à faire remplir une des deux pla-
ces de ccnfeur par un fujet tiré du corps du peuple.
Il y eut fur cela une loi de portée en 414 , & elle fut
en vigueur jufqu'en 622 , qu'on nomma deux cenfeurs
plébéiens ; ils partagèrent toujours cette charge avec
les patriciens , jufqu'au tems des empereurs , qui la
réunirent en leur perfonne.
L'autorité des cenfeurs étoit fort étendue , puifqu'ils
avoient droit de reprendre les citoyens les plus éle-
vés en dignité ; auffi cette charge ne s'obtenoit-elle
qu'après qu'on avoit paffé par toutes les autres. On
trouva étrange que Crafrus en eût été pourvu avant
que d'avoir été ni coniul ni préteur. L'exercice de
la cenfure duroit d'abord cinq ans : mais cet ulage ne
dura que neuf ans ; le dictateur Marnerais ayant por-
té , l'an de Rome 420 , une loi qui réduifit le tems de
la cenfure à dix-huit mois i ce qui fut dans la fuite
obfervé à la rigueur.
Outre les fonctions des cenfeurs , dont on a déjà
parlé , ils étoient fpécialement chargés de la fur-in-
tendance des tributs , de la défenfe des temples , du
foin des édifices publics , de réprimer le libertinage,
& de veiller à la bonne éducation de la jeuneffe. Si
quelque fénateur déshonorait par fes débauches l'é-
clat de cet illuftre corps , ils avoient droit de l'en
chaffer ; & l'hiitoire fournit des exemples de cette
févérité. Ils ôtoient aux chevaliers leur cheval , &
la penfion que leur faiibit l'état , s'ils ié comportaient
d'une manière indigne de leur rang ; & quant au me-
nu peuple , ils en faifoient defcendre les membres
d'une tribu diftinguée dans une plus baffe , les pri-
voient du droit de fuffrage , ou les condamnoient à
des taxes & des amendes.
Cette autorité n'étoit pourtant pas fans bornes,puif-
que les cenfeurs eux-mêmes étoient obligés de rendre
compte de leur conduite aux tribuns du peuple , &
aux grands édiles. Un tribun fit mettre en prifon les
deux cenfeufs M. Furius Philus, & M. Attilius Regu-
lus. Enfin , ils ne pouvoient pas dégrader un citoyen
fans avoir préalablement expofé leurs motifs , & c'é-
toit au fénat & au peuple à décider de leur vali-
dité. (G)
A Lacédémone , dit l 'illuftre auteur de FEfprît des
Lois , tous les vieillards étoient cenfeurs. Le même
auteur obferve que ces magiftrats font plus néceffai-
res dans les républiques , que dans les monarchies
& dans les états defpotiques. La raifon en eft facile
à appercevoir.
La corruption des mœurs détruifûla cenfure chez
les Romains ; cependant Céfar & Augufle voyant
que les citoyens ne fe marioient pas , rétablirent les
cenfeurs qui avoient l'œil fur les mariages. (0 )
Censeurs de livres , ( Littérature. ) nom que l'on
donne aux gens de lettres chargés du foin d'exami-
ner les livres qui s'impriment. Ce nom eft emprunté
des cenfeurs de l'ancienne Rome , dont une des fonc-
tions étoit de réformer la police & les mœurs.
Ces cenfeurs ont été établis clans les différens états
pour examiner les ouvrages littéraires ; & porter leur
jugement fur les livres qu'on fe propofe d'imprimer ,
afin que rien ne foit rendu public , qui puiflé féduire
les elprits par une fauffe doftrine , ou corrompre les
mœurs par des maximes dangereufes. Le droit de ju-
ger des livres concernant la religion , & la police
eccléfiaftique , a toujours été. attaché en France à
l'autorité épifcopale : mais depuis l'établilTement de
la faculté de Théologie , il femble que les évêques
ayent bien voulu fe décharger de ce foin fur les doc-
teurs , fans néanmoins rien diminuer de leur autorité
C E N
fur ce point. Ce droit de juger des livres concernant
la foi , & l'Ecriture fainte , a été pluiieurs fois con-
firmé à la faculté de Théologie , par arrêt du parle-
ment de Paris , & fingulierement à Poccaiion deshé-
réfies de Luther & de Calvin , qui produifirent une
quantité prodigieufe de livres contraires à la religion
Catholique. Ce jugement devoit être porté, non par
quelques docteurs en particulier , mais par la faculté
affemblé.e. L'ufage étoit de préfenter à la faculté ce
qu'on vouloit rendre public ; elle nommoit deux doc-
teurs pour l'examiner ; & fur le rapport qu'ils en fai-
foient dans une afiémblée , la faculté , après un mûr
examen des raiions pour ou contre , donnoit fon ap-
probation à l'ouvrage , ou le rejettoit. Les prélats
même n'étoient point diipenfés de foùmettre leurs
ouvrages à l'examen de la faculté de Théologie , qui,
en 1^34, réfuta ion approbation au commentaire du
cardinal Sadoiet , évèque de Carpentras , furi'épitre
de faint Paul aux Romains, & qui, en 1542 , cen-
fura le bréviaire du cardinal Sanguin , évéque d'Or-
léans. Le parlement de Paris , toujours attentii à la
confervation de la religion Catholique dans toute fa
pureté , autorifa , par arrêt de la même année 1 542,
la faculté de Théologie à examiner les livres qui ve-
ndent des pays étrangers ; cet arrêt fut occalionné
par le livre de X lnfitution chrétynne , que Calvin
avoit fait imprimer à Baie.
Les livres s'étant confidérablement multipliés au
commencement de l'année 1600 , le nombre des doc-
teurs chargé de les examiner fut augmenté ; il en ré-
fulta différens abus , ces docteurs fe difpenferent du
rapport qu'ils étoient obligés de faire à la faculté af-
femblée , & approuvèrent des livres qu'elle trouva
repréhenfibles. Pour remédier à cette elpece de de-
fordre , la faculté publia un décret par lequel elle
défendit à tous doûeurs de donner inconfidérément
leur approbation , fous peine de perdre pendant iix
mois l'honoraire & les privilèges attachés au doc-
torat , & pendant quatre ans le droit d'approuver les
livres : elle fit encore plufieurs autres reglemens ,
mais qui ne firent qu'aigrir les efprits. Enfin en 1623
l'harmonie ceffa tout-à-fait dans la faculté à l'occa-
fion d'une queftion de Théologie , qui partagea tous
les docteurs ; il s'agiffoit de décider fi l'autorité du
pape eft fupérieure ou inférieure à celle des conci-
les. Chacun prit parti dans cette affaire , chacun écri-
vit pour foûtenir fon opinion ; le docteur Duval ,
chef de l'un des deux partis , craignant de fe voir
accabler par les écrits multipliés de fes adverfaires ,
obtint du roi des lettres patentes , en 1624, qui lui
attribuèrent , & à trois de fes confrères , à l'exclu-
fion de tous autres , le droit d'approuver les livres ,
avec une penfion de 2000 livres à partager entr'eux.
Ces lettres de création chagrinèrent la faculté , qui
fe voyoit dépouiller d'un droit qu'elle croyoit devoir
lui appartenir toujours. La penfion d'ailleurs accor-
dée aux quatre nouveaux cenfeurs , lui parut desho-
norante pour des gens confacrés par état au main-
tien de la faine doctrine. Elle fit remontrances fur
remontrances , & ne ceffa de demander avec inltan-
ce la révocation de ces lettres : mais elle ne put l'ob-
tenir ; le roi au contraire les confirma par de nou-
velles, dans lefquelles il étoit dit que par la fuite ces
quatre cenfeurs créés par lettres patentes , feroient
pris dans la maifon de Sorbone , & élus à la plura-
lité des voix dans une afiémblée à laquelle feroient
appelles deux docteurs de la maifon de Navarre. Cet-
te efpece d'adouciffement ne fatisfit pas encore la fa-
culté ; elle continua , mais inutilement , les follicita-
tions. La difeorde régna plus que jamais parmi les
docteurs , & pendant plus de trois ans , les nouveaux
ci ■■ eurs eifuyerent tant de defagrémens de la part de
, que Duval , en 1626 , prit enfin le
parti de fe démettre en pleine affemblée de fes fonc-
C E N
tions de cenfeur. On ne fait pas bien positivement fi
après cette démiffion de Duval , les lettres patentes
gui avoient été données fingulierement en fa faveur,
furent fupprimées ou non : mais il paroît par diffé-
rens décrets des années i6z8 , 163 i & 1641 , que !a
faculté recommença , comme par le pafic , à charger
des docleurs de l'examen des livres , &c qu'elle prit
les précautions les plus fages pour empêcher les ap-
probations inconlidérées. Son honneur & fes inté-
rêts le demandoient : cependant tous fes foins furent
inutiles ; il s'éleva dans l'Eglife des difputes fur la
grâce , qui donnèrent naiffance à une prodigieufe
quantité d'écrits de part & d'autre : chacune des
deux partis fit approuver fes livres par les doc-
teurs qui lui éfoient favorables , & ces docteurs
donnèrent leurs approbations fans avoir été commis
par la faculté. Ces irrégularités durèrent jufqu'en
1653. Pour y mettre fin, M. le chancelier Seguier fe
détermina à ôter encore une fois à la faculté le droit
d'approuver les livres ; il créa quatre nouveaux cen-
feurs , mais fans lettres patentes , & fans autre titre
que la feule volonté du roi , avec chacun 600 livres
de penlîon. Depuis ce teins , le nombre des cenfeurs
a été confidérablement augmenté ; il v en a pour les
différentes matières que l'on peut traiter : le droit de
les nommer appartient à M. le chancelier , à qui ils
rendent compte des livres dont il leur confie l'exa-
men , Se fur leur approbation efi accordé le privilè-
ge de les imprimer. Il arrive quelquefois que le grand
nombre de livres qu'ils font chargés d'examiner , ou
d'autres raifons , les mettent dans la defagréable né-
ceffité de réduire les auteurs ou les libraires qui at-
tendent leur jugement, à l'état de ces pauvres âmes
errantes fur les bords du Styx , qui prioient long-
tems Caron de les paffer.
Stabant orantes primi tranfmittcre curfum ,
Tendebantque manus ripœ ulterioris amorc.
Navita fed triflis mine hos mine accipit ïllos :
Afl alïos longe fummotos areet arena.
CENSIER , f. m. ( Jurifprud. ) fe dit d'un feigneur
qui a droit de cens fur les héritages tenus en roture
dans retendue de fa feigneurie. Voye^ Cens, Cen-
sitaire , Censive.
Censier , eft auffi quelquefois fynonyme à eenfi-
taire; ainfi on dit en ce fens, il eflle cenfier d'un tel
feigneur. ( //)
CENSITAIRE, f. m. ( Jurifprud. ) eft un vaffal qui
poffede en roture un ou plufieurs héritages dans l'é-
tendue de la cenfive d'un feigneur, à la charge du
cens. Voye^ Cens.
Dans les commencemens de l'établifTemcnt des cen-
fives , il n'étoit pas permis au eenfitaire de vendre l'hé-
ritage qui lui a voit été baillé à cens, fans avoir le con-
fentement du feigneur ; & pour avoir l'on contente-
ment , on lui payoit une certaine ibmme : ce qui a
depuis paffé en droit commun. Il efi aujourd'hui per-
mis au eenfitaire de vendre l'héritage chargé de cens ,
en payant au feigneur un droit qui eft réglé par les
coutumes , & qu'on appelle communément lods &
rentes. foye^Lovs & Ventes. (//)
CENSITE , f. f. (Jurïfprud. ) terme de droit coû-
tumier peu uiité , fynonyme à eenfitaire. Colombet a
donné un traité des perfonnes de main-morte , eenfi-
tes & taillables , qu'il a intitulé, Colonia CchieaLu-
crofa. (H)
CENSIVE, f. f. (Jurïfprud. ) eft retendue du fief
d'un feigneur cenner , c'eft-à-dire , à qui il eft dû un
cens ou redevance foncière par les propriétaires qui
poffedent des terres dans l'étendue de ton fief. C'eft
auffi le droit même de percevoir le cens.
L'origine des etnfivts eft auffi ancienne que celle
des fiefs. Les feigneurs qui avoient une trop grande
étendue de domaine , en donnoient une partie en i\ci ,
Tome if.
C E N
8i<>
à la charge du fervice militaire ; & une autre par-
tie à cens , avec amende faute de payer le cens au
jour de l'échéance. Voye^ Cens. ( H)
CENSURE ,Cf.( Droit canoniq. ) fe prend ordi-
nairement pour un jugement , par lequel on condam-
ne quelque livre , quelque perfonne ; & plus particu-
lièrement pour une réprimande faire par un fupé-
rieur , ou une perfonne en autorité. (H)
Censures ecclésiastiques, lont des mena-
ces publiques que l'Eglife fait , d'infliger les peines
qu'on a encourues , pour avoir defobéi à fes ordres,
ou plutôt encore ces peines ou ces punitions elles-
mêmes. Le Droit canonique en reconnoît de trois
fortes, qui lbnt l'excommunication, la fufpenlé, &
l interdit. Voye^ chacun de ces mots à leur ran<*.
Jufqu'au tems de la prétendue réforme , les rois
d'Angleterre ont été fournis aux cenfures de l'églife
de Rome : mais les François s'en font toujours main-
tenus exempts. En effet il n'y a point d'exemple d'ex-
communication d'aucun roi de la première race , juf-
qu'à celle de Lothaire , par le pape Nicolas I. pour
avoir répudié fa femme Tetberge ; c'eft la première
brèche qui fut faite aux libertés de l'églife Gallicane :
cependant le pape n'ofa hafarder fon excommunica-
tion de fa propre autorité ; il la fit confirmer par l'af-
femblée des évêques de France.
Les autres papes ont pris dans la fuite les mêmes
précautions : mais depuis ce tems-là , les rois ont
mieux foûtenu leur privilège : car l'anti-pape Benoît
XIII. ayant prononcé des cenfures contre le roi Char-
les VI. & mis le royaume en interdit ; le parlement
de Paris, par Arrêt de 1408 , ordonna que la bulle
fût lacérée. Jules IL ayant auffi lancé l'excommu-
nication contre Louis XII. l'aiTemblée générale te-
nue à Tours , cenfura les cenfures du pape. Voye?
Excommunication.
Les Canoniftes diftinguent deux fortes de cenfures :
l'une de droit , à jure ; l'autre de fait ou par fentence ,
qu'ils appellent ab homine.
Les premières font générales & perpétuelles : il
n'en eft pas de même des fécondes ; mais auffi elles
font toujours réfervées.
On divife les cenfures par rapport à l'effet qu'elles
produifent , en celles qu'on appelle latte fentennee , &
celles qu'on nomme ferendœ fententiœ ; c'eft-à-dire en
cenfures encourues par le feul fait , ipfo facto , par vertu
du jugement qui les a prononcées, fans qu'il (bit be-
foin d'un nouveau ; & en cenfures comminatoires , qui
ne s'encourent pas fans une nouvelle fentence du
juge.
U n'y a que les fupérieurs cccléliaftiqucs qui joiiif-
fent de la jurifdi&ion extérieure , qui puiffent porter
des cenfures ; ainfi les curés n'ont pas ce droit. ( H}
Censure délivres oudepropofitions,c,cù.une note ou
une qualification, qu'on donne à tout ce qui bleffe la
vérité , foit dans un livre, (bit dans une proposition.
La venté , fi on peut parler ainiî, eft une fleur ten-
dre ; on n'y peut toucher qu'on ne l'altère , & qu'on
n'en ternifl'e l'éclat. La note dont on marque un livre
ou une propolition , eft d'autant plus fletriffante , que
l'un ou l'autre s'éloigne plus de la vérité ; car il y a
différentes nuances dans l'erreur. La note de Vkérejîe
eft la plus infamante de toutes ; parce que Vhérefie eit
de toutes les erreurs celle qui s'éloigne le plus de la
vérité. En effet , elle contredit formellement l'cxpref-
fe parole de Dieu, & fe révolte contre l'autorité de
L'Eglife qui l'interprète; la fletriffure de V erreur eft:
moinsforte que celle quilance l'anathème contre Yhè-
. ( nmie la vérité que ['erreur attaque eft en par-
tie fondée fur l'Ecriture , & en partie lur la raifon,
fon crime eft moindre, parce qu'elle fe révolte moins
directement contre l'autorité de Dieu. On note com-
me f entant Fkéréju, tout livre ou toute propolition,
qui préfente d'abord à l'efprit un fens hérétique, quoi-
LL111 ij
Siô CEN
que l'un ou l'autre ait un fens plus caché qui renferme
la vérité. Il y a beaucoup d'analogie entre ce qui
Jent Vhéréfie , & ce qui eft captieux ; elle eft la même
que celle qui le trouve entre Vhéréfie & Yerreur. Ainft
toute propofition chargée de termes compliqués,
obfcurs & embarrafles , eft ou captieu/e ou /entant
Vhéréfie; captieu/e , û c'eft feulement une erreur
qu'elle infinue ; /entant Vhéréjîe, fi c'eft une héréfie
qu'elle préfente d'une manière indirefte. Il n'eft
pas aifé ci'affigner les limites qui féparent une propo-
fition mal/onnante dans la/oi d'avec celle qui/ent V hé-
réfie ; peut-être que toute la malignité de l'une con-
fifte dans les termes durs qui énoncent une vérité ,
& qui la rendent odieufe à ceux qui Fécoutent : tan-
dis que la malignité de l'autre en veut à la vérité ,
quoique fous des termes plus doux & plus mitigés.
Ainli la note d'une propofition mal/onnante dans la/oi,
n'eft pas fi forte que la note d'une propofition/è/zw/«
Vhéréfie. On qualifie d'opinion dangereu/e celle qui
embarraffe fi fort le dogme catholique dans les in-
certitudes des fyftèmes théologiques , que cette opi-
nion entraîneroit la ruine du dogme avec celle des
fyftèmes. Rien n'eft fans doute plus dangereux,
pour la foi, que de la faire dépendre d'une opinion
humaine , fujette par fa nature à l'examen critique
de tout homme qui voudra l'attaquer. La note de
témérité tombe fur une propofition qui leroit balan-
cée par une grande autorité ; ce n'eft pas tant le
nombre des fcholaftiques que leurs raifons , qui doi-
vent faire autorité fur Fefprit d'un Théologien. Il y
a eu un tems où toutes les écoles , & même toutes les
univerfités de Théologie,foûtenoient avec chaleur le
probabili/me ; cette nuée de Théologiens , qui for-
nioient pour lui un puiffant parti , lui donnoit-elle plus
de poids 6c d'autorité ? non fans doute. Il y a eu auffi
un tems où c'eût été un crime en Théologie , de foû-
tenir Vintention extérieure ; c'eft aujourd'hui une opi-
nion foùtenue publiquement fur les bancs : tel eft le
fort des opinions théologiques. Ce que de graves
docteurs ont proferit comme téméraire dans leur jeu-
nefle , ils le voyent quelquefois foùtenir fur leurs
vieux ans , comme une opinion tres-vrai/femblable :
témoin la fameufe queftion des ordinations Anglica-
nes , fur laquelle on a fait autrefois tant de bruit.
L'exemple du concile de Trente , qui a laiffé tant de
queftions indécifes , ne voulant point interpoler fon
autorité où il voyoit différentes opinions , nous
apprend combien on doit être circonfpeft , quand il
eft queftion de flétrir un livre ou quelques propofi-
tions extraites. Ce qui a été une fois cenfuré par l'E-
glife , foit difperfée , foit affemblée dans un concile ,
l'eft irrévocablement; aufti la cen/ure ne tombe pas
fur toute expreffion ou toute propofition, qui fe
reproduit dans l'Eglife , après y avoir été dépen-
due quelque tems , à caufe de l'abus qui pouvoit en
naître. Tels font , par exemple , le terme à'omoufios ;
& cette propofition , unus e trinitate pajjus ejl. Il y a
donc cette différence entre les propoiitions que l'E-
glile cen/ure , & celles qu'elle dé/end feulement ; que
les premières contenant en elles-mêmes quelque faut
fêté , Méfieront toujours par quelque endroit la vé-
rité , qui eft la même dans tous les tems ; au lieu que
les fécondes n'étant mauvailès que par l'abus qu'en
fait l'erreur , reprendront leur premier fens avoué
par la vérité , quand l'erreur qui lui en donnoit un
forcé & mauvais , le précipitera dans l'oubli. Foye^
Note & Qualification. (5f)
CENT , ( Commerce. ) nous exprimons communé-
ment les quantités , la proportion des chofes , & les
profits qui fe font dans le commerce , par cent ; ils
exigent deux & demi par ou pour cent , pour remet-
tre de l'argent en telle ville : l'intérêt légitime de
l'argent eft cinq pour cent. Voyei CHANGE, Remise,
Intérêt.
C E N
Cent eft auflî en ufage en fait de mefure , pour li-
gnifier certaine quantité ou nombre.
Les planches de fapin font à fix vingt le cent ou le
grand cent , qui eft de 112 livres.
Les lattes & les pieux de cinq pies font à cinq fois
vingt , & ceux de trois à fix fois vingt le cent , le
poids de cent ou le grand cent. Voye\ Quintal.
Cent fignifie auffi la perte ou le profit qui fe ren-
contre fur la vente de quelque marchandife : ainlt
quand on dit qu'il ya eu dix pour cent de gain , ou dix
pour cent de perte fur une marchandife , c'eft-à-dire,
que l'on y a profité ou perdu dix francs chaque fois.
Cent fe dit encore par rapport aux traites &: remi-
fes d'argent que l'on fait d'une place fur une autre
place : ainfi l'on dit , il en coûtera deux &C demi pour
cent pour remettre en une telle ville.
Le tant pour cent qu'il en coûte pour les traites &
remifes d'argent , eft ce que l'on appelle le prix du
change. Voyc^ CHANGE.
Dans les écritures -de marchands le tant pour cent
fe met ainfi en abrégé ( 2. p. ~ ) c'eft-à-dire , deux
pour cent. Dicl. du Comm. (G)
* CENTAURES , f. m. pi. (My th.) monûres de
la fable moitié hommes & moitié chevaux : elle les a
fait naître d'Ixion & d'une nuée. Ceux qui préten-
dent trouver un fens à toutes les vifions de la crédule
antiquité , difent que les centaures étoient des peuples
qui habitoient la contrée de la Theffalie voifine du
montPélion,qu'ils domptèrent les premiers chevaux;
& que comme avant eux l'on n'avoit point encore
vu d'homme à cheval , on prit l'homme & le cheval
fur lequel il étoit monté,pour un feul & même animal.
Quoi qu'il en foit de cette explication, il eft certain que
le centaure Chiron, précepteur d'Achille,n 'étoit qu'un
excellent écuyer. Ceux des centaures qui affilièrent
aux noces de Pirithoùs & de Déidamie s'y querellè-
rent avec les Lapithes , qu'Hercule vengea en chaf-
fant les centaures de la Theffalie. Y a-t-il eu vraiment
des centaures , ou ces monftres lont-ils fabuleux ?
c'eft ce qu'il n'eft point facile de décider. Plutarque
dit qu'on en préfenta un qui venoit de naître d'une
cavale , aux fept fages ; Pline , qu'il en a vu un qu'on
avoit apporté d'Egypte à Rome , embaumé à la ma-
nière du pays ; S. Jérôme , que S. Antoine rencontra
un hippocentaure dans le delert , &c. Si l'on veut dé-
cider la queftion par l'hiftoire naturelle , on trouve-
ra dans un grand nombre d'animaux qui proviennent
du mélange de deux efpeces, des raiions fuffifantes
pour admettre la poflibilité des centaures , des/au-
nes , &c. Quant à la manière fabuleufe dont ils na-
quirent d'Ixion & de la nuée , on la raconte de plu-
fieurs manières différentes : les uns prétendent qu'I-
xion devenu amoureux de Junon à la table de Jupi-
ter , ofa déclarer fa paffion à la déeffe ; & que Jupi-
ter loin de s'offenfer de cette témérité , offrit aux em-
braffemens d'Ixion une nuée formée à la reffemblan-
ce de Junon , de laquelle naquit un centaure : d'autres
difent qu'Ixion ayant engagé par l'efpoir de la récom-
penfe , de jeunes Theffaliens d'un village voilu» 'e la
montagne appellée Nephele ou Nuée, à combattre
des taureaux qui ravageoient la campagne autour
du mont Pélion , le nom de la montagne, &le fuccès
des jeunes gens contre les taureaux , donnèrent lieu
à la fable d'Ixion & des centaures: enfin Tzetzes al-
lure que le Jupiter dont Ixion aima la femme , étoit
un roi de Theffalie qui eut la condefeendance pour
la paffion d'Ixion, non de lui céder fa femme , mais
de lui fubftituer une de fes filles d'honneur appellée
Nephelé , de laquelle naquit un fils appelé Imbrus , &
furnommé dans la fuite centaure , de jttvrm , piquant ,
& de cvpà, queue. D'autres donnent pour étymologie
y.tvltîv toÙç Tdupovç, pungere tauros , parce que , dit-on,
les centaures étoient des gardes du roi de Theffalie,
qui ramenèrent à l'étable des taureaux qui s'étoient
enfuis & effarouchés.
'C E N
CENTAURE, centaurus, cnAflronomic , conftella-
tion de l'hémilphere méridional , repréfentée par
une figure moitié homme 6c moitié cheval , & qui
d'ordinaire le joint au Loup. t^oyerLovp. (0)
Les étoiles de cette conftellation l'ont au nombre
de dix-neuf dans le catalogue de Ptolemée ; au nom-
bre de quatre , dans celui de Tycho, &c au nombre
de treize dans le catalogue Anglois.
CENTAURÉE , (Grandi) f. f. Hifl. nat. bot. cen-
taurium majus , genre de plante dont la fleur eft un
bouquet à plufieurs fleurons découpés , portés cha-
cun par un embryon, 6c feùtenus par un calice écail*
leux & fans épine : les embryons deviennent dans la
fuite des femences garnies d'aigrettes. Ajoutez aux
caractères de ce genre la grandeur des fleurs qui le
rend différent de la jacée. Tournefort , Injl. ni herb.
Foyei Plante. ( / )
Le centaurium ma jus folio helenii incano , Tourn.
Injl. 443- a la racine defficcative , aflringente, apé-
ritive , tortiflante : on en fait ufage dans la cure des
plaies. Elle doit fon nom, félon Pline, au centaure
Chiron , qui fe guérit par fon ufage d'une bleffure
qu'il avoit reçue d'une des flèches d'Hercule. On en
fait peu d'ufage. ( N )
Centaurée , [petite ) f. f. Hifl. nat bot. centau-
rium minus , genre de plante à fleur monopétale faite
.en forme d'entonnoir , & découpée : il fort du calice
un piftil qui perce le fond de la fleur , 6c qui devient
dans la fuite un fruit prefque cylindrique ou oval ,
qui s'ouvre en deux parties, qui cil partagé en deux
loges, &c qui renferme des lemcnces ordinairement
aflez menues. Tournefort, lnfl. reiherb. Voye^ Plan-
te. (/)
La petite centaurée eft très-amere au goût; elle eft
apéritive, détérfîve ; elle levé les obftructions du foie
& de la rate , provoque les règles & les urines , fou-
lage dans la jaunilfe & clans les fièvres intermitten-
tes , fortifie l'eftomac , 6c tue les vers. On s'en fert
à l'extérieur en fomentation dans les enflures.
L'extrait que l'on en tire eft la feule préparation
officinale qu'elle fournilTe.
La vertu fébrifuge de cette plante vient d'un fel
amer, analogue à celui de la terre ; il eft mêlé avec
du foutre 6c de la terre , de façon que le fel ammo-
niac y eft plus dégagé que les autres principes : ain-
fi la petite centaurée a beaucoup de rapport avec l'a-
loès, le quinquina, & l'ipccacuanha.
Dans les fièvres on peut ordonner fon infufion dans
du vin blanc : mais comme elle eft fort amere , il eft
plus à propos de joindre l'extrait de petite centaurée
avec autant de quinquina en poudre. L 'ufage de l'in-
fufion de fleurs de petite ccnu:uicc prife en guil'e de
C E N
821
thé le matin à jeun , foulage la migraine. (A7)
^ CENTENIERS , f. m. pi. (Hifl. moi. ) officiers de
l'ancienne monarchie Françoile fubordonnés aux
comtes , & chargés de mener à la guerre les hommes
libres du bourg , ou leurs centaines. Voye{ Efp. des
Lois , liv. XXX. chap. xvij . (O)
^ CENTIEME -DENIER, eft un droit que le Roi
s'eft attribué parl'édit du mois de Décembre 1703 ,
fur tous acquéreurs d'immeubles à quelque titre que
ce foit : c'eft la centième partie du prix de l'acquili-
tion. (H)
* CENTOBRIGUES, f. m. pi. (Géog.) ancienne
ville des Celtibériens en Efpagne. Les machines de
Métellus qui l'affiégeoient ayant renverlé un pan de
muraille , les habitans expoferent fur la brèche les
enfans de Réthogene qui s'étoit rendu dans fon camp :
Métellus aima mieux lever le fiége , que de faire pé-
rir la famille du brave Celtibénen , qui exhortoit à
continuer l'attaque. Cette action toucha tellement
les affiégés , qu'ils ouvrirent leurs portes aux Ro-
mains.
CENTON , f. m. en Poejîe , pièce de vers com-
pofée en entier de vers ou de paflages pris de côtés
& d'autres , foit dans le même auteur , foit dans dif-
férens écrivains, & difpofés feulement dans une
nouvelle forme ou un nouvel ordre qui compofe un
ouvrage , 6c donne à ces lambeaux un fens tout dif-
férent de celui qu'ils ont dans l'original.
Ce mot eft Latin , cento , & lignifie à la lettre un
manteau fait de pièces rapportées : il vient du Grec
Ktirpoi', qui veut dire la même chofe. Les foldats Ro-
mains dans les fiéges le fervoient de cernons , ou de
vieilles étoffes rapetaffées , pour fe garantir des traits
de l'ennemi ; & l'on couvrait auffi au même deflein
les machines de guerre , les galeries , & autres chofes
néceffaires aux approches , de peaux de bêtes fraî-
chement écorchées , que les auteurs appellent cen-
tons. Voye^ Centonaires.
Aufone a donné des règles de la compofition des
cernons ; & lui-même en a fait un très-obfcene tiré
des vers de Virgile : il faut prendre , dit-il , des mor-
ceaux détaches du même poète, ou de plufieurs : on
peut prendre les vers entiers, ou les partager en
deux , èv lier une moitié empruntée d'un poète à la
moitié qu'un autre aura fournie : mais il n'eft pas
permis d'inférer deux vers de fuite , ni d'en prendre
moins que la moitié d'un.
Proba Falconia a écrit la vie de Jefus-Chrift en
cernons tirés de Virgile , auffi bien qu'Alexandre Rof-
fo , & Etienne de Pleurre chanoine régulier de Saint-
Victor de Paris. Voici un exemple de ces centonsdans
l'adoration des Mages. V. Chamb. & le Dicl, ic Trh .
VI.
iEncïd.
V.
M5«
II.
iEneïd.
v.
694.
V.
jEneïd.
V.
5z6.
VIII
JEneid.
V.
330.
I.
Georg.
V.
416.
VII.
yEneïd.
V.
98.
n.
jEneid.
V.
3 33-
m.
iEncïd.
V.
464.
IX.
iEneïd.
v.
659.
1.
Georg.
V.
410.
VI.
JEneid.
V.
16.
A D O R A T I O M A G O R U M. Mattk. 2.
Ecce autan primi fub luminafolis , & ortus ,
Stella fiiccm iucens , multd cum lucc cucurrit.
Signavitque viam * cœh in rtgiont ferena :
Tum reges * ( credo qu u fît iivinitus il lis
Ingenium & rerum fato prudentia major)
Ex terni veniunt * quœ cuiqut efl copia , laù ,
Munera portantes * molles fua thura Sabiii
Dona iehinc auro gravîa * myrrhaqut madentes ,
Agnovt/e Deum regem * regumque parement,
itt vias * ; perfeclifque ordinc votis,
Infuetum per ittr * J'patia influa qui/que receflflt.
Mil
jEneid.
V.
51S.
I.
Georg.
V.
415.
V.
JEneid.
V.
100.
I.
Georg.
V.
57-
XII.
JEneid.
V.
100.
VI.
y£ncid.
V.
548.
X.
vEneïd.
V.
54»-
XII
JEneid.
V.
116.
CENTONAIRES , f. m. pi. ( Hift. une. ) officiers
dans les armées Romaines, qui avoient foin de four-
nir les étoffes que l'on appelloit centones , ce qui fer-
voient à couvrir les tours cv les autres machines de
guerre dans les fiéges, pour les défendre des traits
ou du feu des ennemis. Vegece, tiy, W. parlant d'u-
ne galerie couverte qui fervoit à faire les approches ,"
dit que par dehors, clepeurqu'on n'v mit le feu .elle
étoit revêtue de cuirs traichement ecorchés, &: de
tentons , centonibus ■ c'eft- à-dire de quelques vieilles
étoffes , qui étant mouillées pouvoient ou réftfter an
feu , ou amortir les armes ue trait. Cefar, c . . .
822
C E N
Commentaires & dans le livre de la Guerre civile , ch.
xliv. rapporte que les foldats le fervoient auffi de
cernons pour le garantir des traits de l'ennemi , com-
me on Fait encore aujourd'hui de gabions &C de facs
à laine. Les centonalres étoient Couvent joints aux den-
drophores ou charpentiers , & autres ouvriers lui-
vans les armées , comme il paroît par d'anciennes
inf'criptions. Rofin , Antiquités Romaines. ( G )
CENTRAL , adj. ( Méckanlque. ) fe dit de ce qui
a rapport à un centre. Voye^ Centre.
C'eft ainfi que nous dilbns êclipft centrale ,feu cen-
tral, force centrale , règle centrale, &C. Voye^ les arti-
cles Feu, Éclipse, &c
Forces centrales, font les forces ou puiflances par
leiquelles un corps mû tend vers un centre de mou-
vement , ou s'en éloigne.
C'eft une loi générale de la nature , que tout corps
tend à fe mouvoir en ligne droite ; par conféquent
un corps qui fe meut fur une ligne courbe , tend à
chaque inftant à s'échapper par la tangente de cette
courbe : ainfi pour l'empêcher de s'échapper fuivant
cette tangente , il faut néceffairement une force qui
l'en détourne & qui le retienne fur la courbe. Or
c'eit cette force qu'on appelle/o/ce centrale. Par exem-
ple un corps A (fîg. 24. Médian.) qui fe meut fur le
cercle BEA , tend à fe mouvoir au point A fuivant la
tangente A G, & il fe mouvroit effectivement fuivant
cette tangente , s'il n'avoit pas une force centrale qui
le pouffe vers le point C, & qui lui feroit parcourir
la ligne A M dans le même tems qu'il parcourrait
A D ; de forte qu'il décrit la petite portion de cour-
be A E.
Remarquez qu'il n'eft pas néceffaire que la force
centrale foit toujours dirigée vers un même point :
elle peut changer de direction à chaque inftant ; il
fuffit que fa direction foit différente de celle de la
tangente , pour qu'elle oblige le corps à décrire une
courbe. Voye{ Centre de mouvement ; voy. auffi
Force.
Les forces centrales fe divifent en deux efpeces , eu
égard aux différentes manières dont elles font diri-
gées par rapport au centre , lavoir en centripètes &
en centrifuges, foye^ ces mots.
Lois des forces centrales. Le célèbre M. Huyghens
eft le premier qui ait découvert ces lois. Mais outre
qu'il les a données fans démonftration , il ne s'eft ap-
pliqué qu'à déterminer les lois des forces centrales dans
le cas où le corps décrit un cercle. Plulieurs auteurs
ont démontré depuis les lois données par IVL Huyg-
hens , & le célèbre M. Newton a étendu la théorie
des forces centrales à toutes les courbes polîibles.
Parmi les auteurs qui ont démontré les propor-
tions de M. Huyghens , perfonne ne l'a tait plus clai-
rement & d'une manière plus l'impie , que le marquis
de l'Hôpital dans les Mémoires de l'Académie de ijoi.
i°. Il commence par enfeigner la manière de com-
parer la force centrale avec la pefanteur ; & il donne
îà-deffus la règle générale fuivante , qui renferme
toute la théorie des forces centrales.
Suppofons qu'un corps d'un poids déterminé fe
meuve uniformément autour d'un centre avec une
certaine vîteffe , il faudra trouver de quelle hauteur
il devrait être tombé pour acquérir cette vîteffe ;
après quoi on fera cette proportion : comme le rayon
du cercle que le corps décrit elt au double de cette
hauteur , ainfi fon poids elt à fa force centrifuge.
Il eft vifible que par cette propofition on peut tou-
jours trouver le rapport de la force centrale d'un corps
à fon poids ; & que par conléquent on pourra faci-
lement comparer les forces centrales entre elles. Mais
ii on veut fe contenter de comparer les forces centra-
les entre elles fans les comparer avec la pefanteur ,
on peut fe fervir de ce théorème , que les forces cen-
*alts d e deux corps font entre elles comme les pro-
C E N
duits de leurs maffes , multipliés par les quarrés dfi
leurs vîteffes , & divifés par les rayons ou par les
diamètres des cercles qu'ils décrivent. On peut dé-
montrer cette propofition fans calcul , d'après M.
Newton , de la manière fuivante. Imaginons les cer-
cles que ces corps décrivent comme des polygones
réguliers femblables , d'une infinité de côtés ; il elt
certain que les forces avec lefquelles chacun des
corps frappe un des angles de ces polygones , font
comme les produits de leurs maffes par leurs vîtef-
fes. Or dans un même tems ils rencontrent d'autant
plus d'angles qu'ils vont plus vite , & que le cercle
elt d'un rayon plus petit : donc le nombre des coups
dans un même tems, eft comme la vîteffe divilée
par le rayon ; donc le produit du nombre des coups
par un feul coup, c'eft-à-dire la force centrale, fera
comme le produit de la maffe multiplié par lequarré
de la vîteffe , & divilé par le rayon.
Donc fi deux corps M, m, décrivent les circonfé-
rences de cercles C, c avec des vîteffes V, u pendant
les tems T , t, & que les forces centrales de ces corps
foient F,f, & les rayons des cercles qu'ils décrivent
R , r , on aura, .F:/ : : — ^- — : -7-» déplus, on
a , V: u : : -~- : - '• '■ -^ •' - • donc on aura encore F;
/M R a m r
'■'■ Tt: 77*
20. Il eft aifé de conclurre de là , que fi deux corp$
de poids égal décrivent des circonférences de cer-
cles inégaux dans des tems égaux , leurs forces centra-
les feront comme les diamètres A B & H L ( Plane,
de Médian. fig. 24.) ; car fi m =M & t=z T, on aura
F :f; ; R: r ; &C par conléquent fi les forces centrales
de deux corps qui décrivent des circonférences de
deux cercles inégaux , font comme leurs diamètres ,
ces corps feront leurs révolutions dans des tems
égaux.
30. La. force centrale d'un corps qui fe meut dans
une circonférence de cercle , eft comme le quarré
de l'arc infiniment petit A E , divifé par le diamètre
A B ; car cet arc infiniment petit décrit dans un inf-
tant , peut repréfenter la vîteffe , puifqu'il lui eft pro-
portionnel. Ainli puifqu'un corps décrit dans des tems
égaux , par un mouvement uniforme, des arcs égaux
A E , la force centrale par laquelle le corps eft pouffé
dans la circonférence du cercle , doit être constam-
ment la même.
40. Si deux corps décrivent par un mouvement
uniforme différentes circonférences , leurs forces cen-
trales feront en raifon compofée de la doublée de leur
vîteffe , & de la réciproque de leur diamètre ; d'où
il s'enfuit que fi les vîteffes font égales , les forces cen-
trales feront réciproquement comme les diamètres ;
& fi les diamètres A B & H L font égaux , c'eft-à-
dire li les mobiles le meuvent dans la même circon-
férence , mais avec des vîtelîes inégales , les forces
centrales feront en raifon doublée des vîteffes.
Si les forces centrales de deux corps qui fe meuvent
dans des circonférences différentes , font égales , les
diamètres A B 6c H L leront en raifon doublée des
vîteffes.
50. Si deux corps qui fe meuvent dans des circon-
férences inégales lont animés par des forces centrales
égales , le tems employé à parcourir la plus grande
circonférence fera au tems employé à parcourir la
plus petite , en raifon foûdoublee du plus grand dia-
mètre^/ B, au moindre HL: c'eft pourquoi on aura
T1 : t1 : : D : d ; c'eft-à-dire que les diamètres des
cercles dans les circonférences deiquels ces corps
font emportés par une même foret centrale , font en
raifon doublée des tems.
Il s'enfuit auffi de là, que le tems que des corps
pouffes par des forces centrales égales employent à
parcourir des circonférences inégales, lont propor-
tionnels à leurs vîteffes,
C E N
Les forces centrales font en raifon compofée de la
directe des diamètres & de la réciproque des quarrés
des tems employés à parcourir les circonférences
entières.
6°. Si les iems dans lefquels les corps parcourent
les circonférences entières ou des arcs fémblables ,
font comme les diamètres des cercles , les forces cen-
trales feront alors réciproquement comme ces mêmes
diamètres.
7°. Si un corps fe meut uniformément dans la cir-
conférence d'un cercle avec la vîteffe qu'il acquiert
en tombant de la hauteur A F, nous avons dit que
la force centrale fera à la gravité comme le double
de la hauteur A F eft au rayon C A ; & par con-
fcquent li on nomme G la gravité du corps , la for-
ce centrifuge fera — ç ~-, Par là on connoltra quel-
le doit être la force centrifuge & la vîteffe d'un corps
attaché à un fil , pour qu'il ne rompe point ce fil en
circulant horilontalement: car fuppofons qu'un poids
de trois livres , par exemple, rompe le fil , & que le
poids du corps loit de deux livres , on aura G égal à
deux livres , & c * ' devra être plus petit que
trois livres , d'où l'on tire A F < -2 — - : ainfi la vî-
tefië que le corps doit avoir pour ne point rompre
le fil , doit être plus petite que celle qu'il acquer-
roit en tombant d'une hauteur égale aux \ du rayon.
Si le corps circuloit verticalement , il faudroit que
— ç-fl— + G fut < trois livres.
8°. Si un corps grave fe meut uniformément dans
îa circonférence d'un cercle , & avec la vîteffe qu'il
peut acquérir en tombant d'une hauteur égale à la
moitié du rayon , la force centrale lera alors égale à la
gravité ; réciproquement fi la force centrale eft égale à
la gravité , le corps fe mouvra dans la circonférence
du cercle avec la même vîteffe qu'il auroit acquiié
en tombant d'une hauteur égale à la moitié du rayon.
9°. Si la force centrale eft égale à la gravité , le tems
qu'elle employera à faire parcourir Ja circonférence
entière, fera au tems dans lequel un corps grave tom-
berait de la moitié du rayon , comme la circonfé-
rence eft au rayon.
io°.Si deux corps fe meuvent dans des circonféren-
ces inégales & avec des vîteffes inégales, de forte que
les vîteffes foient cntr'elles en raifon réciproque de
la foûdoublée des diamètres , les forces centrales fe-
ront en raifon réciproque de la doublée des diftances
au centre des forces.
1 1°. Si deux corps fe meuvent dans des circon-
férences inégales avec des vîteffes qui foient entre
elles réciproquement comme les diamètres, les forces
centrales leront en raifon inverfe des cubes de leur
diftanec au centre des forces.
12°. Si les vîteffes de deux corps qui fe meuvent
dans des circonférences inégales , font en raifon in-
verfe de la foûdoublée des diamètres , les tems qu'ils
emploieront à faire leur révolution entière ou à par-
courir des arcs fémblables , feront en raifon inverfe
de la triplée des diftances du centre des forces : c'eft
pourquoi fi les forces centrales font en raifon inverfe
de la doublée des diftances du centre , les tems que
les corps employeront à faire leur révolution entière
ou a parcourir des arcs fémblables , feront en raifon
inverfe de la triplée des diftances.
i 30. Ces différentes lois font ailées à déduire de la
formule que nous avons donnée dans l'art, i. pour la
COmparaifon des forces centrales entre elles. Or pour
comparer les forces centrales fur des courbes autres
que des cercles, il faut prendre au lieu des rayons
des cercles , les rayons dï loppée de ces cour-
bes qui changent à chaque point , cv qu'on trouve
par des méthodes géométriques : d'où l'on voit que
quand un corps décrit une courbe autre qu'un cer-
C E N
823
cle , la valeur de la. force centrale change à chaque inf-
tant ; au lieu qu'elle eft toujours la même , quand le
corps décrit un cercle. Il faudra de plus divifer la
quantité trouvée par le rapport du finus total au co-
finus de l'angle que la direction de la force centrale
fait avec la tangente.
140. Si un corps tend à fe mouvoir fuivant AD
(Fig. 23.), & qu'il foit en même tems follicité par
une force centripète vers un point fixe C, placé dans
le même plan , il décrira alors une courbe dont la
concavité fera tournée vers C, 6c donc les différen-
tes aires comprifes entre deux rayons quelconques
A C &c C B , feront proportionnels aux tems em-
ployés à parcourir ces aires , c'eft-à-dire à parvenir
de l'extrémité d'un de ces rayons à l'extrémité de
l'autre. Car fans la force centrale qui pouffe fuivant
BF, le corps parcourroit dans des tems égaux BD
= AB : mais à caufè de la force centrale, il décrira
la diagonale BE du parallélogramme FBDL dans le
même tems qu'il a décrit AB. Or le triangle CE A
=: CBD, à caufe de BD= AB ; & à caule des pa-
rallèles DE , FB, on a CBE = CBD. Donc CBE
=.CAB. Donc, &c. «
1 50. Quelque différentes que foient des forces cen-
trales dans des cercles, on pourra toujours les com-
parer enfemble : car elles feront toujours en raifon
compofée de celle des quantités de matière que con-
tiennent les mobiles , de celles de leur diftance au
centre , & enfin de l'inverfe de la doublée des tems
périodiques. Si l'on multiplie donc la quantité de ma-
tière de chaque mobile par fa diftance du centre, &
qu'on divile, le produit par le quarré du tems pério-
dique , les quotiens qui réfulteront de ces opérations
feront entre eux dans la raifon des forces centrales :
c'eft une fuite de l'article 1.
160. Si les quantités de matières font égales, il
faudra divifer les diftances par les quarrés des tems
périodiques , pour déterminer le rapport des forces
centrales.
1 70. Lorfque la force par laquelle un corps eft fol-
licité vers un point , n'eft pas par-tout la même , mais
qu'elle augmente ou diminue à proportion de la dii-
tance du centre ; cette nouvelle condition tait décri-
re alors au mobile différentes courbes plus ou moins
compolées. Si la force décroît en raifon inverfe des
quarrés des diftances à ce point, le mobile décrira
alors une elliple , qui eft une courbe ovale , dans la-
quelle fe trouvent deux points qu'on nomme foyers t
dont l'un eft alors occupé par le point T, vers le-
quel fe dirige la force dont nous parlons ; de façon
qu'à chaque révolution le corps s'approche une fois
de ce point, & s'en éloigne une tois. Le cercle ap-
partient autîi à cette efpece de courbe ; de forte que
dans ce cas le mobile peut auffi décrire un cercle. Le
mobile peut auffi , en lui fuppofant une plus grande
vîteffe, décrire les deux autres fections coniques, la
parabole , & l'hyperbole ; lelquelles ne retournent
point fur elles-mêmes. Si la force croit en même tems
que la diftance, & en raifon de la diftance même, le
corps décrira encore une elliple : mais le point vers
lequel fe dirigera la force, fera alors le centre de
Pellipfe , & le mobile à chaque révolution s'appro-
chera deux fois & s'éloignera deux fois de ce point.
Il peut arriver encore en ce cas, que le corps le
meuve dans un cercle. 'i;iï; Orbite , Planète,
Trajectoire & Projectile. Voye^auffi les Prin-
cipes mathém. de M. Newton , liv. I. £> les Elcmcns de
Mickan. de Volf.
Les courbes peuvent être confidérées , ou comme
courbes rigoureufes, ou comme polygones infinis ;
or l'expreffion de la force centrale efl différente dans
les deux cas : ce paradoxe fingulier fera expliqué à
l'article Courbe.
Régit centrale , c'eft une règle ou une méthode qui
8a4
C E N
a été découverte par Thomas Baker , géomètre An-
glois ; au moyen de laquelle on trouve le centre &
le rayon du cercle qui peut couper une parabole don-
née dans des points , dont les abfciftes repréfentent
les racines réelles d'une équation du troifieme ou
du quatrième degré qu'on le propofe de conftruire.
Voye{ Construction.
La règle centrale eft fur-tout fondée fur cette pro-
priété de la parabole ; que fi on tire dans cette
courbe une perpendiculaire à un diamètre quelcon-
que , le reftangle formé des fegmens de cette ligne ,
cil égal au redangle fait de la portion correipon-
dante du diamètre, & du paramètre de l'axe.
La règle centrale eft préférable , félon Baker, aux
méthodes de Defcartespour conftruire les équations,
en ce que dans cette dernière on a befoin de prépa-
rer l'équation , en lui ôtant le fécond terme ; au lieu
que dans celle de Baker on n'a point cet embarras ,
puifqu'elle donne le moyen de conftruire, par l'in-
terfection d'un cercle & d'une parabole , toute équa-
tion qui ne pané pas le quatrième degré, fans en faire
évanouir ni changer aucun terme. Voy. Tranfaclions
Philofopkiq. n°. i5j. Mais il eft très-facile , en fui-
vant l'efprit de la méthode de Defcartes , de conf-
truire par le moyen du cercle & de la parabole ,
toutes les équations du troifieme & du quatrième
degré, fans en faire évanouir le fécond terme. Voye^
lafolution de ce problème dans l'article j86. des Sec-
tions coniques de M. de l'Hôpital. (0)
CENTRE, f. m. (Géométrie.') dans un fens général
marque un point également éloigné des extrémités
d'une ligne, d'une figure, d'un corps, ou le milieu
d'une ligne , ou un plan par lequel un corps eft divi-
fé en deux parties égales.
Ce mot eft Grec, jtw-jpw, q1" ngnifie originairement
un point , qui eft formé du verbe %vniïv , pungere , pi-
quer.
Centre d'un cercle, c'eft le point du milieu du
cercle, fitué de façon que toutes les lignes tirées de-
là à la circonférence, font égales. Voye^ Cercle.
Euclide démontre que l'angle au centre eft double de
celui de la circonférence , c'eft-à-dire , que l'angle
qui eft fait de deux lignes qui font tirées des deux ex-
trémités d'un arc de cercle au centre, eft double de
l'angle que font deux lignes tirées des extrémités d'un
même arc , & qui aboutiflent à la circonférence.
Voye^ Circonférence & Angle. (£)
Centre d'une feciion conique , c'eft le point où con-
courent tous les diamètres. Voye^ Diamètre, voyei
auffi Sections coniques. Ce point eft dans l'ellip-
pfe en-dedans de la figure, & dans l'hyperbole au-
dehors. Voye^ Ellipse & Hyperbole.
Centre d'une courbe d'un genre plus élevé , c'eft le
point où deux diamètres concourent. V. Diamètre.
Lorfque tous les diamètres concourent en un mê-
me point, M. Newton appelle ce point centre général.
Foye{ Courbe. M. l'Abbé de Gua, dans^-s Vfages de
Vanalyfe de Defcartes, a donné une méthode pour
trouver les centres généraux des courbes , & des re-
marques importantes fur la définition des centres gé-
néraux donnée par M. Newton.
M. l'Abbé de Gua appelle centre général d'une cour-
■be un point de fon plan, tel que toutes les droites qui
y paflent ayent de part & d'autre de ce point des
portions égales terminées à la courbe ; & il obferve,
i°. que cette définition convient affez à l'acception
ordinaire du mot centre. x°. Que la définition de M.
Newton eft comprife dans la lienne. 30. Que ce n'eft
qu'en fe fervant de fa définition , qu'on peut parve-
nir aux conditions que M. Newton a alignées pour
les courbes, qui ont, félon ce grand Géomètre, un
centre général ; d'où il paroît s'enfuivre que M. New-
ton a eu en vue plutôt la définition de M. l'abbé
de Gua , que la fienne propie , lorfqu'il a déterminé
C E N
ces centres. Voye^ V ouvrage cité de M. l'abbé de Gua ,
pag. iy. & fuivantes.
M. Cramer, dans fon Introduction à l'analyfe des
lignes courbes , donne une méthode très-exacle pour
déterminer les centres généraux. Dans l'extrait que
le Journal des S av ans de ij 40. a donné de l'ouvrage
de M. l'abbé de Gua, on trouve à la fin une remarque
aflez importante fur la méthode de cet habile Géo-
mètre pour trouver les centres généraux.
Centre d'un cadran , c'eft le point dans lequel le
gnomon ou ftyle qui eft placé parallèlement à Taxe
de la terre , coupe le plan du cadran , & d'où toutes
les lignes horaires font tirées : fi le plan du cadran
étoit parallèle à l'axe de la terre , il n'auroit point du
tout de centre, mais toutes les lignes des heures de-
viendroient parallèles au ftyle, & les unes aux autres.
Voye{ Cadran.
CENTRE de gravitation ou d'attraction , {enPhyJîq.')
c'eft le point vers lequel une planète ou une comète
eft continuellement pouffée ou attirée dans fa révo-
lution par la force de la gravité. Voye^ Gravita-
tion & Attraction.
Centre de gravité , (en Méchaniquc.') c'eft un point
fitué dans l'intérieur du corps , de manière que tout
plan qui y parle, partage le corps en deux legmens
quife font équilibre , c'eft-à-dire, dont l'un ne peut
pas faire mouvoir l'autre.
D'où il s'enfuit que fi on empêche la defeente du
centre de gravité , c'eft-à-dire , fi on fufpend un corps
par fon centre de gravité , il reftera en repos. Voye^
Mouvement & Repos.
La gravité totale d'un corps peut être conçue réu-
nie à Ion centre de gravité ; c'eft pourquoi on fubfti-
tue ordinairement dans les démonftrations le centre
de gravité au corps.
Les droites qui parlent par le centre de gravité s'ap-
pellent diamètres de gravité; ainii l'interfection de deux
diamètres de gravité détermine le centre. Voye^ Dia-
mètre.
Tout plan qui parle parle centre de gravité, ou ce
qui eft la même chofe , dans lequel ce centre fe trou-
ve , s'appelle plan de gravité; & ainfi l'interfe&ion
commune de deux plans de gravité , eft un diamètre
de gravité.
Dans les corps homogènes qui peuvent fe divifer
en parties égales & femblables , le centre de gravité
eft la même chofe que le centre défigure, ou le point
de milieu du corps ; c'eft pourquoi fi on coupe une
droite en deux parties égales , le point de feûion fe-
ra le centre de gravité.
• Centre commun de gravité de deux corps, c'eft un
point fitué dans la ligne droite qui joint les centres de
gravité de ces deux corps , de manière que s'il étoit
foûtenu, le fyftème des deux corps refteroiten repos,
& la gravité de l'un de ces deux corps ne pourroit
prévaloir fur celle de l'autre ; ainfi le point de fuf-
peniion clans la balance ordinaire ou dans la romai-
ne, c'eft-à-dire, le point fur lequel les deux poids
font équilibre, eft le centre commun de gravité des
deux poids. Voye^ Romaine.
Lois du centre de gravité : i°. Si on joint ( PI. mé-
dia ni q. fig. ij. u° . J. ) les centres de gravité de deux-
corps A & C , par une droite A B , les dijiances B C &
C A du centre commun de gravité C aux centres particu-
liers de gravité B & A , feront entr 'elles en raifon récipro-
que des poids. Voyei BALANCE & Levier.
Et par conléquent fi les poids A & B font égaux,
le centre commun de gravité C fera dans le milieu de
la droite A B. De plus puilque ^eft à B comme B C
eft à A C, il s'enfuit que A x A C— BxB C,ce qui
fait voir que les forces des corps en équilibre , doi-
vent être eftimées par le produit de la malle & de la
diftance du centre de gravité , ce qu'on appelle ordi-
nairement moment des corps. Voye^ MOMENT.
De
C E N
De plus, puîfque A : B : \ B C : A C , on en peut
conclurreque^H-i?: A\ \B C-\-A C: B C; ce qui fait
voir que pour trouver le centre commun de gravité C
de deux corps, il n'y aura qu'à prendre le produit de
l'un de ces poids par la &\i\àncc- AB des centres parti-
culiers de gravité AB, Se le diviier par la fomme des
poids A Se B. Supposons, par exemple, A=iz, B
~4, A Bz=. 24, on aura donc B C = — -j^1- = 18 :
"fi le poids A eft donné , ainfi que la diftance A B des
centres particuliers de gravité, & le centre commun de
gravité C, on aura le poids de B = — *-c — , c'eft-à-
dire , qu'on le trouvera , en divilant le moment du
poids donné par la diltance du poids qu'on cherche ,
au centre commun de gravité: iuppolànt^= 11, B
C=z 1 8 , A C- 6 , & on aura B- ^g-= ^7 = 4.
%° . Pour déterminer le centre commun, de gravité de
plujîeurs corps donnés a , b , c , d , (Jig. ij. n°. J.) trou-
vez dans la ligne A B le centre commun de gravité des
deux premiers corps a Se b que je fuppoferai en P ;
concevez enfuite un poids a-\-b appliqué en ?,&
trouvez dans la ligne P E , le centre commun de gra-
vité des deux poids a-\-b, Se c que je fuppoferai en
G ; enfin fuppofez un poids a -f b + c appliqué en G ,
égal aux deux poids a-\-bSe c, Se trouvez le centre
commun de gravité de ce poids a -\- b~\- c Se de d, le-
quel je fuppolerai en H, Se ce point H fera le cen-
tre commun àc. gravité de tout le fyftème des corps
a-\-b-\-c-{-d; Se on peut trouver de la même ma-
nière le centre de gravité d'un plus grand nombre de
corps tel qu'on voudra.
3 °. Deux poids D &E (Jig. 14.} étant fufpendus par
une ligne CO qui ne paffe point par leur cintre commun de
gravité, trouver lequel des deux corps doit emporter Vautre.
11 faudra pour cela multiplier chaque poids par fa
diftance du centre de fufpenfion, celui du côté du-
quel fe trouvera le plus grand produit , fera le pré-
pondérant ; Se la différence entre les deux fera la
quantité dont il l'emportera fur l'autre.
Les momens des poids D Se E , fufpendus par une
ligne qui ne parte point par le centre de gravité ,
étant en raifon compofée des poids D Se E , & des
diftances du point de fufpenfion , il s'enfuit encore
que le moment d'un poids fufpcndu précilément au
point C, n'aura aucun effet par rapport aux autres
poids D & E.
40. Soient plujîeurs corps a, b, C, d, (Jig. zi.) fuf-
pendus en C par une droite C O qui ne pajje point par
leur centre de gravité , on propofe de déterminer de quel
côté fera la prépondérance , & quelle en fera la quantité.
On multipliera pour cela les poids c Si. d par leur
diftance CE Se C B du point de fufpenfion , & la
Comme fera le moment de leur poids ou leur mo-
ment vers la droite : on multipliera enfuite leur poids
a Se b par leurs diftances A C & CD , Se la fomme
fera le moment vers la gauche ; on fouftraira l'un
de ces momens de l'autre, 8c le refte donnera la pré-
pondérance cherchée.
<j°. Un nombre quelconque de poids a , b , c , d , étant
fufpendus en C par une ligne CO qui ne paffe point par
leur centre commun de gra\ ne , & la prépondérance étant
vers la droite, déterminer un pointY , où la fomme de tous
les poids étant fufpendue , la prépondérance continuerait
à cire la mime que dans la première filiation.
Trouvez le moment des poids c & d , c'eft-à-dire
cxCE Sedx CB ; & puifque le moment des poids
fufpendus en F doit être précifément le même , le
moment trouvé des poids c & d fera donc le produit
de C\F par la fomme des poids; Se ainfi ce moment
étant divîfé par la fomme des poids, le quotient don-
nera la diftance CF, à laquelle la fomme des poids
doit être fufpenduc, pour que la prépondérance con-
tinue a être la même qu'auparavant.
Tome II,
C E N
825
6°. Trouver le centre de gravité d'un paralléloaramme
& d'un parallélépipède.
Tirez la diagonale A D Se E G (Jig. 16. ~), ainfi
que C B Se H F ; Se puifque chacune des diagonales
AD Se CB divifent le parallélogramme ACDB en
deux parties égales Se femblables , chacune d'elles
paffe donc par le centre de gravité : donc le point
d'interfe&ion / eft le centre de gravité du parallélo-
gramme.
De même puifque les plans CBFH Se A D G E
divifent le parallélépipède en deux parties égales Se
femblables , ils paflent l'un & l'autre par fon centre
de gravité ; & ainfi leur interfedtion / K eft le dia-
mètre de gravité , Si. le milieu en eft le centre.
On pourra trouver de la même manière le centre
de gravité dans les prifmes Se les cylindres , en pre-
nant le milieu de la droite qui joint leurs bafes op-
pofées.
Dans les polygones réguliers , le centre de gravité
eft le même que celui du cercle circonferit ou inferit
à ces polygones.
70. Trouver le centre de gravité d'un cône & d'uni
pyramide. Le centre de gravité d'un cône eft dans
Ion axe AC (Jig. ij.f, fi l'on fait donc AC—at
CD — r, p la circonférence dont le rayon eft r,
A P = x, Pp=dx, le poids de l'élément du cône
fera idL—JL Se fon moment fera ^-~.~ ; & par
conféquent l'intégrale des momens — ^- } laquelle
divifée par l'intégrale des poids r^*- , donne la dif-
tance du centre de gravité de la portion A MU au
fommet A, = ~dLrJ-—lx=Ll j[p; ^'q^ [[ s'en^
fuit que le centre de gravité du conc entier eft éloi-
gné du fommet des \ de A C ; Se on trouve de la mê-
me manière la diftance du centre de gravité de la py-
ramide au fommet de cette pyramide — -AC.
8° . Déterminer le centre de gravité d'un triangle BAC
(figure 18.). Tirez la droite AD au point milieu D
de BC ; & puifque le triangle B AD eft égal au
triangle BAC, on pourra donc divifer chacun de
ces triangles en un même nombre de petits poids,
appliqués de la même manière à l'axe commun AD>
de façon que le centre de gravité du triangle BAC
fera fitué dans AD. Pour déterminer le point pré-
cis, {ohAD = a, BC = b;AP=x, MN=y, & on
aura Ap:MN :: A B: BC, • , h»
.. .. l ce qui donnera j-= — j
d'où il s'enfuit que le moment yxdx — — j— &
f y x d x — — — , intégrale qui étant divifée par
l'aire AMN du triangle, c'eft-à-dire , par —*-j- donne
la diftance du centre de gravité au fommet = , ** . * . ■ ,
= jx ; Si ainfi fubftituant a pour r, la diftance du
centre total de gravité au fommet fera =)a.
90. Trouver le centre dt la portion de pa-
rabole S AH (Jig. io.) : fa diftance du fommet A fe
trouve être ,; A E par les méthodes précédentes.
1 0°, Le centre de gravité d'un are Je cercle , eft éloi-
gné du centre de cet arc , d'une droite qui eft troi-
sième proportionelle à cet arc , .1
rayon. La diftance du centre de gra\ ité d'un feâeur
de ce cercle, efl À la diftance du
centre de gra\ ité de l'arc au même centre, comme 1
efi à 3.
Pour trouver les centres de gra\ ité des fegmens des
es, des paraboloïdes, des fphéroïdes
nés tronques, &c. comme ce font des cas plus diffi-
ciles, e< qui en méme-tems ne fe préfentent que plus
rarement, nous renvoyons là-deftus au traité .AAVolf,
d'où Chambtn a tiré une partie de cet article.
M M m m m
8i6
C E N
1 1°. Déterminer méchaniquement le centre de gravité
d'un corps ; placez le corps donné H I {fig. 20.) lur
une corde tendue ou fur le bord d'un palme trian-
gulaire F G, ce avancez-le plus ou moins , jufqu'à
ce que les parties des deux côtés foient en équilibre :
le plan vertical paffant par K L , paffera par le
antre de gravité : changez la lituation du corps &c
avancez-le encore plus ou moins lur la corde ou lur
le bord du prifme , jufqu'à ce qu'il relie en équilibre
fur quelque ligne M N ; &c l'interfeclion des deux
lignes M N Se KL déterminera lur la baie du corps
le point O correfpondant au centre de gravité.
On peut faire la même chofe en plaçant le corps
fur une .table horifontale , & le laifant déborder
hors de fa table le plus qu'il fera polîible fans qu'il
tombe , & cela dans deux polirions différentes en
longueur & en largeur : la commune interfecuon des
lignes , qui dans les deux fituations correfpondront
au bord de la table , déterminera le centre de gra-
vité : on peut auffi en venir à bout , en plaçant le
corps fur la pointe d'un ftyle, jufqh'à ce qu'il relie
en équilibre. On a trouvé dans le corps humain que
le centre de gravité eit fitué entre les felTes &c le
pubis , de façon que la gravité du corps eft ramaffée
en entier dans l'endroit où la nature a placé les par-
ties de la génération ; d'où M. Wolf prend occalion
d'admirerla fagefle du Créateur, qui a placé le mem-
bre viril dans l'endroit qui eil le plus propre de tous
à la copulation ; réflexion auiii fauffe qu'indécente ,
puifque certe loi n'a point lieu dans la plupart des
animaux.
1 1°. Toute figure fuperficielle ou folide, produite
par le mouvement d'une ligne ou d'une furlàce , eft
égale au produit de la quantité qui l'engendre , par
la ligne que décrit fon centre de gravité. Foye[ l'art.
Centrobarique.
Ce théorème eft regardé comme une des plus bel-
les découvertes qu'on ait faites dans les derniers
tems , &C il eft le fondement de la méthode centrobari-
que ; Pappus en a eu , à la vérité , la première idée :
mais c'eft le P. G'uldin , Jéfuite , qui l'a portée à fa
perfection. Leibnitz a prouvé que cette propofition a
encore lieu , fi l'axe ou le centre changeoient conti-
nuellement durant le mouvement. On en tire trop
de corollaires , pour qu'il foit polîible de les rappor-
ter tous ici en détail. Foye^dans les Mémoires de l'A-
cadémie de 1J14, un écrit de M. Varignon/àr cefujet.
Lorfque plufieurs corps fe meuvent uniformément
en ligne droite, foit dans un même plan, foit dans des
plans difïérens, leur centre de gravité commun le
meut toujours uniformément en ligne droite, ou de-
meure en repos ; & cet état de mouvement ou de re-
pos du centre de gravité, n'eft point changé par l'ac-
tion mutuelle que ces corps exercent les uns fur les
autres. On peut voir la démonftration de cette pro-
pofition dans le traité de Dynamique, à Paris IJ 43 ,
part. II. ch. ij. L'auteur de cet ouvrage paroît être le
premier qui ait donné cette démonftration d'une ma-
nière générale & rigoureufe. Jufqu'alors on ne con-
noiffoit cette vérité que par une efpece d'induftion ;
c'eft principalement dans le cas où les corps agiffent
les uns fur les autres , & décrivent des courbes , que
la propofition eft difficile à démontrer : car quand ils
fe meuvent uniformément en ligne droite dans un
même plan, ce cas a été démontré par M. Newton,
dans le premier livre de fes principes ; & quand ils
fe meuvent uniformément en ligne droite dans des
plans différais , ce cas a été démontré par les pères
le Seur &c Jacquier dans leur Commentaire fur les
principes de Newton. Au relie la démonftration don-
née dans le traité, de Dynamique déjà cité , eft géné-
rale pour tous ces cas , ou peut très -facilement y
être appliquée.
Centre de mouvement; c'eft un point autour du-
C E N
quel tournent un ou plufieurs corps pefans , qui ont
un même centre de gravité. Par exemple , li les poids
p & q { Table de Médian, fig. 21.), tournent autour
du point A'', de façon que quand/- defeend , q monte,
Niera dit alors le centre du mouvement. Foye^ Mou-
vement.
Centre d'ofcillation; c'eft un point dans la ligne
de fufpenlion d'un pendule compofé, tel que li toute
la gravité du pendule s'y trouvoit ramaflèe , les of-
cilîations s'y feroient dans le même tems qu'aupa-
ravant. Voye{ Oscillation.
Sa diftance du point de fufpenfion eft donc égale
à la longueur d'un pendule limple , dont les ofcilla-
tions feroient ifochrones à celles du pendule com-
pofé. Foye^ Pendule 6- Isochrone.
Lois du centre d'ofcillation. Si plufieurs poids B, F,
H, D {Planche de Médian, fig. 22.), dont la gravité
eft fuppofée ramaffée aux points D ,F,H, B , con-
fervent conftamment la même diftance entr'eux &c
la même diftance du point de fufpenfion A, & que le
pendule ainfi compofé faffe fes olcillations autour du
point A , la diftance O A du centre d'ofcillation O au
point de fufpenfion , fe trouvera en multipliant les
différens poids par les quarrés des diftances , &c di-
vifant la fomme par la fomme des momens des poids.
Pour déterminer le centre d'ofcillation dans une
droite AB {fig. 23.) , foit AB = a, AD = x, la
particule infiniment petite DP fera égale dx, & le
moment de Ion poids xdx, par conléquent la dif-
tance du centre d'ofcillation dans la partie A D au
point de fufpenlion A , fera = f. ^-v— = \— = jx •
qu'on fubftitue maintenant a au lieu de x , & la dif-
tance du centre d'ofcillation dans la droite totale AB
fera = y a ; c'ell ainfi qu'on trouve le centre d'ofcilla-
tion d'un fil de métal qui ofcilie fur l'une de fes ex-
trémités.
Pour le centre d'ofcillation dans un triangle équila-
téral C AB {fig. z#. ) qui ofcilie autour d'un axe
parallèle à fa bafe CB , ia diftance du fommet A fè
trouve égale au \ AD, hauteur du triangle.
Pour celui d'un triangle équilatéral CA B , ofcil-
lant autour de fa bafe C B , fa diftance du fommet A
fe trouve = \ A D , hauteur du triangle.
Dans les Mém. de CAcad. IJ35. M. de Mairan re-
marque que plufieurs auteurs fe font mépris dans les
formules des centres d'ofcillation, entr'autres M. Car-
ré , dans fon lïvrejur le calcul intégral. Foye^ Oscil-
lation.
Centre de pereuffion dans un mobile, eft le point
dans lequel la perculîion eft la plus grande , ou bien
dans lequel toute la force de pereuffion du corps eft
fuppofée ramalîee. Foye^ Percussion. En voici les
principales lois.
Lois du centre de pereuffion. i°. Lorfque le corps
frappant tourne autour d'un point fixe , le centre de
pereuffion eft alors le même que celui d'ofcillation, &
il fe détermine de la même manière , en conlidérant
les efforts des parties comme autant de poids appli-
qués à une droite inflexible, deftituée de gravité,
c'eft-à-dire , en prenant la fomme des produits des
momens des parties , par leur diftance du point de
fufpenfion , & divifant cette fomme par celle des
momens , de forte que tout ce que nous avons dé-
montré fur les centres d'ofcillation , a lieu auffi pour
les centres de pereuffion, lorfque le corps frappant
tourne autour d'un point fixe. 20. Lorfque toutes les
parties du corps frappant le meuvent parallèlement,
& avec une égale vîteffe , le centre de pereuffion eit
alors le même que celui de gravité.
Centre de converfiîon , en Méchanique , eft le centre
ou point autour duquel un corps tourne ou tend à
tourner lorfqu'il eft pouffé inégalement dans fes dif-
ïérens points , ou par une puiflance dont la dire&ion
C E N
ne paiTe pas par le centre de gravité de ce corps. Si
par exemple on frappe un bâton par Tes deux extré-
mités avec des forces égales , & en fens contraire ,
ce bâton tournera fur fon centre ou point de milieu ,
qui fera alors le centre de converfion. Voye^ Centre
SPONTANÉE de rotation , qui fuit.
Centre spontanée de rotation, eft le nom que
M. Jean Bernoulli donne au point autour duquel
tourne un corps qui a été en liberté , &c qui a été
frappé fuivant une direction qui ne parle pas par
fon centre de gravité. Ce terme eft employé par
M. Bernoulli dans le tome IF. du recueil de fes œu-
vres, imprimé en 1743 àLaufanne.
Pour faire entendre bien clairement ce que c'eft
que le centrtfpontanée de rotation , imaginons un corps
G A D F , \fig. 43. Méchan. ) dont le centre de gra-
vité foit C , & qui foit pouffé par une force quel-
conque fuivant une direction A B qui ne paffe pas
par ion centre de gravité. On démontre dans la Dy-
namique que le centre de gravité C doit en vertu de
cette impulfion fe mouvoir fuivant C O , parallèle à
A B , avec la même vîteffe que û la direction A B
de la force impulfive eût paffe par le centre de gravi-
té C ; ôc on démontre de plus , qu'en même tems que
le centre de gravité C avance en ligne droite fuivant
C O , tous les autres points du corps G A D F doi-
vent tourner autour du centre C , avec la même vî-
teffe Si dans le même fens qu'ils tourneroient autour
de ce centre , fi ce centre étoit fixement attaché , &C
que la puiffance ou force impulfive confervât la mê-
me valeur & la même direction A B. La démonftra-
tion de ces propoiîtions feroit trop longue & trop
difficile , pour être inférée dans un ouvrage tel que
celui-ci : ceux qui en feront curieux pourront la trou-
ver dans le Traité de Dynamique , imprimé à Paris en
1743 , art. 1 38. & dans les Recherches fur la préceffwn
des équinoxes du même auteur , Paris 1749. Cela pofé,
il eft certain que tandis que le centre C avancera iui-
vant C O , les différens points H , I, &c. du corps
G AD F, décriront autour du centre C des arcs de
cercle H h , li , d'autant plus grands , que ces points
H, I , &c. feront plus loin du centre ; enforte que le
mouvement de chaque point du corps fera compofé
de fon mouvement circulaire autour de C, & d'un
mouvement égal & parallèle à celui du centre C fui-
vant C O ; car le centre C'en fe mouvant fuivant CO,
emporte dans cette dirc&ion tous les autres points ,
& les force , pour ainli dire , de le fuivre : donc le
point /, par exemple , tend à le mouvoir fuivant IM
avec une vîteffe égale & parallèle à celle du centre
C fuivant C O ; & ce même point / tend en même
tems à décrire l'arc circulaire li avec une certaine
vîteffe plus ou moins grande , félon que ce point /
eft plus ou moins près du centre C : d'où il s'enfuit
qu'il y a un point 1 dont la vîteffe pour tourner dans
le fens 1 i , eft égale & contraire à celle de ce même
point pour aller fuivant IM. Ce point réitéra donc
en repos , & par conféquent il fera le centre de rota-
tion du corps G A D F. M. Bernoulli l'appelle_//w2-
tanée, comme qui diroit centre volontaire de rotation,
pour le diftinguer du centre de rotationforcé.Le point
de fufpenfion d'un pendule , par exemple , eff un cen-
tre de rotation forci, parce que toutes les parties du
pendule font forcées de tourner autour de ce point,
autour duquel elles ne tourneroient pas , fi ce point
n'étoit pas fixe & immobile. Au contraire le centre de
rotation /eft un Centrtfpontanée , parce que le corps
tourne autour de ce point quoiqu'il n'y ioit point at-
taché. Au relie il eft bon de remarquer que le centre
fpontanit de rotation change à chaque inffant : car ce
point eft toujours celui qui fe trouve , i°. fur la ligne
GD perpendiculaire à A B ; z°. à la diffance Cl du
centre C ; c'eft pourquoi le centre Jpontanée de rotation
fe trouve fuccelîîvement fur tous les points de la cir-
Totm II.
C E N
827
•conférence d'un cercle décrit du centre C, &du rayon
CI.
II n'y a qu'un cas où le centre fpontanée de rotation
ne change point : c'eft celui où ce centre eft le même
qtie le centre de gravité du corps : par exemple, une
ligne inflexible chargée de deux poids inégaux , à
qui on imprime en fens contraire des vîteffes en rai-
ion inverle de leurs ma (Tes , doit tourner autour de
fon centre de gravité , qui demeurera toujours fans
mouvement.
On peut remarquer aufli qu'il y a des cas oii le
centre I de rotation doit fe trouver hors du corps G A
D F ; cela arrivera lorfque le point /, dont la vîteffe
fuivant / i doit être égale à la vîteffe fuivant / Af ,
fe trouvera à une diffance du point C plus grande
que C G ; en ce cas le corps G AD F tournera autour
d'un point placé hors de lui.
Centre des corps pefms , eft dans notre globe le
même que le centre de la terre , vers lequel tous les
corps graves ont une efpece de tendance. Il eft ce-
pendant bon de remarquer que les corps graves ne
tendroient véritablement vers un centre , que dans le
cas où la terre feroit parfaitement fphérique : mais
comme elle eft un fphéroïde applati vers les pôles,
ainli que la théorie &c les oblervations le démon-
trent , les corps pefans ne iauroient tendre vers un
même point à la rigueur ; il n'y a donc point à la
rigueur de centre des corps pefans : cependant comme
la terre diffère peu de la figure fphérique , il s'en faut
peu que les corps pefans ne tendent tous vers un mê-
me point ; & on prend dans le difeours ordinaire le
centre de la terre , pour le centre commun de tendance
des graves. Voye^ Antipodes 6* Terre.
CENTRE d'équilibre, dans un fyftème de corps, eft
le point autour duquel ces corps feroient en équili-
bre ; ou, ce qui eft la même choie, un point tel que li
le fyftème étoit fufpendu ou foûtenu par ce feul point,
il refteroit en équilibre. Le point d'appui d'un levier
eft fon centre d'équilibre. Voye\_ Appui & Levier.
A cette occafion nous croyons devoir annoncer
ici un principe d'équilibre trouvé par M. le marquis
de Courtivron , de l'Académie des Sciences , & dont
la démonftration a été lue à l'Académie le 1 3 Juin
1750. Voici ce principe. De toutes les iîtuations que
prend fucceffivement un fyftème de corps animés
par des forces quelconques , & liés les uns aux au-
tres par des fils , des leviers , ou par tel autre moyen
qu'on voudra i'uppofer ; la iituation où le fyftème a
la plus grande fournie de produits des maffes par le
quarré des vîteffes , eft la même que celle où il au-
roit fallu d'abord le placer pour qu'il reliât en équi-
libre. En effet, une quantité variable devient la plus
grande , lorfque fon accroiffement , & par confé-
quent la caufe de fon accroiflement = o : or un fyf-
tème de corps dont la force augmente continuelle-
ment, parce que le réfultat des preffions agiffantes
fait accélération , aura atteint fon maximum de forces
lorfque la fomme des preffions fera nulle ; & c'eft
ce qui arrive lorfqu'il a pris la fituation que deman-
de l'équilibre.
L'auteur ne s'eft pas borné à cette démonftration,'
qui quoique vraie îx exacte , eft un peu metaphyfi-
que , & pourroit être chicanée par les adverfaires des
forces vives. V. Force. Il en donne une autre plus
géométrique, & abfolument rigoureufe : mais il faut
renvoyer ce détail important à fon mémoire même,
qui nous paroît digne de l'attention des Géomètres.
CENTRE de Céq'uant, dans fAftronomie ancienne, eft
un point dans la ligne de l'aphélie , qui cil auffi loin
du centre de L'excentrique vers L'aphélie , que je foleil
l'eft du centre de l'excentrique vers le périhélie. Ce
terme cil prefque oublié depuis que les excentriques,
les équans, & tous ces fatras de cercles différens ,
font bannis de l'Ailronomie.
M M m m m ij
Si8
C E
Centre phonique, dans t Acoufiqut , c'eft le lieu
où celui qui parle doit fe placer clans les échos arti-
culés qui répètent plufieurs fyllabes. Voyei Echo.
Centre phonocamptique , c'eft le lieu ou l'objet
qui renvoyé la voix dans un écho. Voye\ Echo. (O)
Centre d'un Bastion eft le point où les cour-
tines ie rencontreroient fi elles étoient prolongées
dans le baftion ; ou, ce qui eft la même choie, le iôm-
met de l'angle du centre du baflion. Voye{ Angle DU
CENTRE DU BASTION. ( Q )
Centre d'Un Bataillon , c'eft le milieu du
bataillon quarré. C'eft aufii quelquefois un grand
efpace vuide qu'on laifle dans le bataillon. Voye^
Bataillon à centre vuide. ( Q )
Centre OVALE , ( en Anaiomic. ) nom d'une con-
vexité médullaire beaucoup plus petite que la con-
vexité générale ou commune de tout le cerveau ,
mais conforme à cette grande convexité. On la trou-
ve en emportant adroitement par plulieurs coupes
félon la convexité du cerveau , toute la fubftance
corticale avec les lames médullaires dont elle eft en-
tremêlée. ( L )
Centre tendineux , ( Ânat. ) eft la partie
dans laquelle les queues des mulcles du diaphragme
fe rencontrent : ce centre eft troué vers (a droite pour
donner partage à la veine cave ; & vers fa gauche en
arrière , la partie charnue donne partage à l'cefo-
phage, au tronc descendant de l'aorte, au canal the-
rachique , & à la veine azygos entre ces deux piliers.
Voyei Diaphragme. (£)
* CENTRER un verre , ( Lumtier. ) c'eft faire en-
forte que la plus grande épaiffeur de ce verre fe
trouve au -centre de la figure , quand le verre fera
travaillé.
Pour cet effet , on commencera à former le verre
fuivant la figure qu'on veut lui donner ; diminuant
peu à peu une partie , fuivant qu'on juge qu'elle eft
plusépaiffe qu'une autre. Lorlqu'un côté du verre
fera entièrement achevé & poli , on le démaftiquera
& on l'examinera pour connoître l'endroit le plus
épais , fi le verre ne l'eft pas également par-tout. On
connoitra cet endroit , en y traçant d'abord un dia-
mètre , dans lequel une ligne claire ou noire ne pa-
roifle point multipliée ; ce qui fe peut toujours trou-
ver. Si dans tous les diamètres , cette ligne ne paroît
point doublée , on eft afiuré que le verre eft bien
centré , & qu'on le peut travailler également de l'au-
tre côté, pour lui donner fon entière perfeftion.
Cette méthode de M. de la Hire eft fondée fur un
phénomène aflez fréquemment obfervé; c'eft que des
glaces multiplient les objets d'autant plus que leurs
furfaces antérieures & poftérieures font moins pa-
rallèles ; & d'autant moins que les épaiffeurs corref-
pondantes en font plus égales en tout fens ; ce qui
donne une manière sûre de reconnoître la moindre
inégalité clans l'épaiffeur , & de déterminer en quel
fens & de quel côté elle y eft. Pour cet effet , il ne
s'agit que d'expolér au verre un objet linéaire , fi on
peut s'exprimer ainrt ; c'eft-à-dire long & menu : cet
objet linéaire fera repréfenté dans le verre taillé , &
fa repréfentation en pourra être le diamètre ; fi ce
diamètre ne paroît point multiplié fur le verre ; & fi
en tournant le verre , tous les autres diamètres ne fe
multiplient point , le verre fera bien centré.
- M. Cartini dans les Mémoires de V Académie des
Sciences de IJIO , fait voir la néceflité de bien cen-
trer les verres des lunettes ; l'inconvénient qui ré-
fulteroit d'un verre de lunette mal centré, eft facile
à démontrer. Quand l'objectil & l'oculaiie d'un té-
iefeope font bien centrés , c'eft-à-dire quand l'axe de
ces deux verres & leurs foyers font dans la même
ligne , l'œil placé dans l'axe de la lunette , verra les
objets dans cet axe : il en fera tout autrement fi l'un
des deux verres eft mal centré; car alors l'image ne
C E N
fera plus vue dans l'axe ; deforte que la diftanec ap-
parente entre deux aftres obfervée avec deux lu-
nettes, dont l'une a fon objeft if bien centré , & l'au-
tre a ion objectif mal cenré, ne fera pas leur diftanec
véritable.
CENTRIFUGE , adj. ( Méch. ) : force centrifuge ,
c'eft celle par laquelle un corps qui tourne autour
d'un centre , fait effort pour s'éloigner de ce centre.
C'eft une des lois conftantes de la nature,que tout
mouvement eft par lui-même rectiligne, (voye^ Mou-
vement) & qu'un mobile ne s'éloignera jamais de
la direction re&iligne de fon premier mouvement ,
tant qu'il n'y fera pas obligé par quelque nouvelle
force imprimée dans une direction différente : après
cette nouvelle impulfion , le mouvement devient
compofé ; mais il continue toujours en ligne droite,
quoique la direction de la ligne ait changé. Voye^
Composition.
Pour qu'un corps fe meuve dans une courbe , il
faut qu'il reçoive à chaque moment une nouvelle
impuliion , & dans une direction différente de la
fienne, parce qu'une courbe ne peut ie réduire à des
lignes droites , à moins qu'elles ne foient infiniment
petites; par conféquentfiun corps attiré continuelle-
ment vers un centre , eft lancé outre cela dans une
direction qui ne paflé point par ce centre , il décrira
alors une courbe , dans chaque point A de laquelle
( PL de Méch. fi g. 24. ) il tâchera de s'éloigner de la
courbe, & de continuer fon mouvement dans la
tangente AD; ce qu'il feroit en effet fi rien ne l'en
empêchoit : enforte que dans le même tems qu'il dé-
crit l'arc AE , il s'éloigneroit par fa force centrifuge
de la longueur de la ligne D E perpendiculaire à A
D ; ainfi en fuppofant l'arc AE infiniment petit, la
force centrifuge eft proportionnelle à la ligne DE per-
pendiculaire à la ligne AD.
Un corps obligé à décrire un cercle , le décrit le
plus grand qu'il peut; un plus grand cercle étant en
quelque forte moins circulaire , moins courbe , ou
moins différent de la droite qu'un plus petit. Voye^
Courbure. Un corps fouffre donc plus d'altération
dans fon mouvement , & exerce plus vivement fa
force centrifuge lorfqu'il décrit un petit cercle, que
lorfqu'il en décrit un grand , c'eft-à-dire que la force
centrifuge eft toujours proportionnelle , toutes cho-
ies d'ailleurs égales, à la courbure du cercle dans la-
quelle le corps eft emporté.
Il en eft des autres courbes comme des cercles ;
car une courbe quelle qu'elle puirte être , peut être
regardée comme formée d'une infinité d'arcs de cer-
cle infiniment petits, décrits de différens rayons, de
façon que les endroits où la courbe eft le plus courbe,
font ceux oii la force centrifuge eft plus grande , tout
le refte d'ailleurs égal ; & ainfi dans une même cour-
be la force centrifuge du corps qui la décrit , varie fui-
vant les différens points où il fe trouve.
On peut voiries lois & la théorie des forces centri-
fiiges expofées plus en détail dans l'article des For-
ces CENTRALES , ail mot CENTRAL
CENTRIPETE, adj. {Méch.); force centripète, c'efî
celle par laquelle un mobile poufîé dans une droite
A G, (fig. 24.) eft continuellement détourné de ion
mouvement rect iligne , & follicité à fe mouvoir dans
une courbe.
Ainfi en fuppofant l'arc A E infiniment petit, la
force centripète eft proportionnelle à la droite DE,
perpendiculaire à A D ; d'où il s'enfuit que la foret
centripète ou centrale & la force centrifuge font
égales, foye^ Carticle CENTRAL.
CENTROBARIQUE , méthode centrobarique , (en
Mcchanique.) c'eft une méthode pour méfurer ou dé-
terminer la quantité d'une furface ou d'un folide ,
en les confidérant comme formés par le mouvement
d'une ligne ou d'une furface , Se multipliant la ligne
C E N
*>u la furface génératrice par le chemin parcouru par
ion centre de gravité. Cette méthode eft renfermée
dans le théorème fuivant , & fes corollaires.
Toute furface plane ou courbe , ou tout folide produit
par le mouvement ou d'une ligne ou d une furface , efl
égal au produit de cette ligne ou furface, par le chemin du
centre de gravité , c'eft-à-dire par la ligne que ce centre
de gravité décrit. Voye{ CENTRE DE GRAVITÉ. Voici
la démonstration générale que certains auteurs ont
crû pouvoir donner de ce théorème.
Supposons le poids de la ligne ou furface généra-
trice ramafle dans fon centre de gravité ; le poids
total produit par fon mouvement , fera égal au pro-
duit du poids mû par le chemin du centre de gravi-
té : mais lorfque les lignes & les figures font regar-
dées comme des corps pefans homogènes , leurs poids
font alors entre eux comme leur volume ; & par con-
séquent le poids mû devient alors la ligne ou figure
génératrice , & le poids produit eft la grandeur en-
gendrée : la figure engendrée eft donc égale au pro-
duit de la ligne ou de la figure qui l'engendre par le
chemin de fon centre de gravité. Il ne faut pas être
bien difficile à fatisfaire en démonftration , pour fe
payer d'une preuve fi infuffifanre & fi vague , qu'on
trouve néanmoins dans M. "Wblf, d'où Chambers a
tiré une partie de cet article.
Pour mettre nos lecteurs à portée d'en trouver
une meilleure preuve , confidérons un levier char-
gé de deux poids, & imaginons un point fixe dans
ce levier prolongé ou non : on fait ( Foye% Centre
& Levier ) que la fomme des produits faits de cha-
que poids par fa difiance à ce point , eft égale au pro-
duit de la fomme des poids par la diltance de leur
centre de gravité à ce point ; donc fi on fait tourner
le levier autour de ce point fixe , il s'enfuit que les
circonférences étant proportionnelles aux rayons ,
la fomme des produits de chaque poids par le che-
min ou circonférence qu'il décrit , eft égale au pro-
duit de la fomme des poids par la circonférence dé-
crite par le centre de gravité. Cette démonftration
faite par deux poids , s applique également 6c faci-
lement à tel nombre qu'on voudra.
- Corollaire I. Puifqu'un parallélogramme A B C D
( PL de Méth.fig. z6.) peut être regardé comme
produit par le mouvement de la droite A B toujours
parallèlement à elle-même le long d'une autre droite
AC , 6c dans la direction de celle-ci , & que dans ce
mouvement le chemin du centre de gravité eft égal
à la droite E F, perpendiculaire à C D , c'eft-à-dire
à la hauteur du parallélogramme; fon aire eft donc
ésralc au produit de la bafe CD, ou de la ligne qui
décrit le parallélogramme par la hauteur EF. Voye^
Parallélogramme.
Ce corollaire pourrait faire naître quelque foup-
eonfur la vérité & la généralité de la règle précéden-
te : car on pourrait dire que la ligne CD fe mouvant
le long de A C , le centre de gravité de cette ligne ,
qui eft fon point de milieu , décrit une ligne égale 6c
parallèle à ^C;&qu'ainfi l'aire du parallélogramme
A CD B eft le produit de C D par A C: ce qui feroit
faux. Mais on peut répondre que --/ c n'clt point pro-
prement la directrice de CD, quoique C 2) fe meuve
le long de AC; que cette directrice elt proprement
la ligne E F , qui melure la diftance de A B à CD ;
& que le chemin du centre de gra\ ité par lequel il
faut multiplier la ligne décrivante CD, n'efl point
le chemin abfolu de ce centre , mais l'on chemin elti-
mé dans le ions de la directrice , ou le chemin qu'il
fait dans \n\ fens perpendiculaire à la ligne décri-
vante. Cette' remarque ett n.eeeli'aire pour prévenir
les paralogilmes dans lefquels on pourrait tomber ,
en appliquant fans précaution la règle précédente à
la melure des furfaces & des folides.
. Coroll, IL On prouvera de la même manière que
C E N
819
la folidité de tout corps décrit par un plan qui def-
cend toujours parallèlement à lui-même le long de
la droite A C, 6c fuivant la direction de cette droite ,
doit (e trouver en multipliant le plan décrivant par
fa hauteur. Voyt{ Prisme & Cylindre.
Coroll. III. Puifque le cercle fe décrit par la ré,-
volution du rayon CL (fg. zj.) autour du centre
C, & que le centre de gravité du rayon CL eft dans
fon milieu F, le chemin du centre de gravité eft donc
ici une circonférence d'un cercle X décrit par un
rayon foûdouble ; & par conféquent l'aire du cercle
eft égale au produit du rayon CL, par la circonfé-
rence que décrirait un rayon foûdouble de C F ; ce
qu'on fait d'ailleurs. Voye^ Cercle.
Corol. IF. Si un redangle A B C D (PI. de Méck.
fg. z8. ) tourne autour de fon axe A D , le rectan-
gle décrira par ce mouvement un cylindre, & le côté
B Cla furface de ce cylindre : mais le centre de gra-
vité de la droite B C , eft dans fon milieu/'; 6c le
centre de gravité du plan qui engendre le cylindre ,
elt dans le milieu G de la droite £ F. Ainii le chemin
de ce dernier centre de gravité eft la circonférence
d'un cercle décrit du rayon E G ; 6c celui du pre-
mier, la circonférence d'un cercle décrit du rayon
E F: donc la furface du cylindre eft le produit de la
hauteur B C , par la circoniurence d'un cercle décrit
du rayon E F; & la folidité du cylindre eft le pro-
duit du rectangle A B CD, qui fert à fa génération ,
par la circonférence d'un cercle décrit du rayon EG
foûdouble de E F , demi-diametre du cylindre.
Suppofons , par exemple , la hauteur du plan qui en-
gendre le cylindre , & par conféquent celle du cylin-
dre B C=a, le diamètre de la bafe D C— r, on
aura donc E G =z ^ r; & fuppofant que le demi
diamètre foit à la circonférence comme 1 eft à m , la
circonférence décrite par le rayon { r fera ■=.- m r~
d'où il s'enfuit que multipliant \ m r par l'aire du rec-
tangle A C=a r , on aura la folidité du cylindre =
\ m ar- ; mais \m a r* = \rXmrXa: or \mr r=z
l'aire du cercle décrite par le rayon E G. Il ett donc
évident que le cylindre eft égal au produit de fa bafe
par fa hauteur, ce qu'on fait d'ailleurs.
De même, puifque le centre de gravité de la droi-
te A B ( PI. de Mcch.fig. ij.) eft dans fon milieu
M, 6c qu'on décrit la furface du cône en faifant mou-
voir le triangle ABC autour d'un de fes côtes A B
pris pour axe , on en peut conclurre que li P M =
~ BC, la furface du cône fera égale au produit de fon
côté A B par la circonférence du cercle décrit du
rayon P M, c'eft-à-dire d'un rayon foûdouble du
demi-diametre de la baie B C.
Suppofons , par exemple , B C= r, A B = a , le
rayon étant à la circonférence , comme 1 eft à m ;
on aura donc P M=\r,6c la circonférence dé-
crite de ce rayon =z\ m r; & ainlî multipliant { m r
par le cote A B du cône , le produit qui lera \ a m r
devra repréfenter la furface du cône : mais \ a m r
eft auffi le produit de { a par m r ; donc la furface du
cône eft le produit de la circonférence de Li bafe par
la moitié de fon cote , c^ qu'on lait d'ailleurs.
.'. / . Si le triangle ACB ( PI. de Méchan.
i'.g. zç. ) tourne autour d'un axe , il décrit un cône :
m. lis li on coupe C B en deux également au point D%
qu'on tire la droite AD, & que A O — \ A D , il eft
démontré que le centre de gravité fera alors litue
en O ; donc la folidité du cône efl égale au pro-
duit du triangle C A B par la circonférence du cercle
décrit du ràvon P O. Or A D eft à A 0 , comme
B n efl à O P ■. d'ailleurs ./ O = -. A O, & D B =
{ CB, donc O P = \ D B = £ C B. Suppofons , par
exemple , C B = r , A B = a , & la raifon du rayon
à la circonférence celle de 1 à m , on aura donc O P
= { r, la circonférence décrite de ce rayon = [»f,
le triangle A c ' B ~ \ j r, 6c par conféquent la foli-
830
C E N
C E N
dite du cône = | r X « X y ro=£* rarS mais j a m r*
s= - r x m r X -Ça , ou le produit de la baie du cône
par le tiers de fa hauteur, ce qu'on lait d'ailleurs
Ce théorème fi général & ii beau fur le centre de
gravité , peut être mis au nombre des plus curieulés
découvertes qu'on ait faites en Géométrie. Il avoit
été apperçû il y a long-tems par Pappus : mais le P.
Guldin , Jéfuite , eft le premier qui l'ait mis dans tout
fon jour, & qui en ait montré Fufage dans un grand
nombre d'exemples.
Plufieurs autres Géomètres s'en font fervis aufii
après Pappus & Guldin , pour mefurer les folides &
les furfaces produites par une rotation autour d'un
axe fixe , fur-tout avant qu'on eût les fecours que le
calcul intégral a fournis pour cela ; & on peut l'em-
ployer encore à préfent dans certains cas où le cal-
cul intégral feroit plus difficile.
M. Leibnitz a obfervé que cette méthode feroit
encore bonne, quand même l'axe ou le centre chan-
geroit continuellement durant le mouvemeht.
M.Varignon a donné dans le volume de r Académie
de IJ14- un mémoire qui a pour titre , Réflexions fur
Vufage que la Méchanique peut ûvoir en Géométrie. Il y
démontre la propriété du centre de gravité , dont
nous avons parlé dans cet article , & plufieurs autres
propriétés encore plus générales & aulîi curieulés.
On peut fe fervir utilement de ces propriétés pour
réfoudre avec plus de facilité certains problèmes de
Méchanique. Par ex. fi on demande quelle figure
doit avoir une courbe G A H \fig. zà. Géom. n°. 2.)
pour qu'en tournant autour de l'axe G H elle pro-
duife une furface courbe plus grande que celle que
produiroit en tournant autour de G H toute autre
ligne courbe qui pafferoit par les mêmes points G, H,
& qui feroit de la même longueur que la courbe
qu'on cherche ; on trouveroit lans aucun calcul, en
fe fervant du théorème précédent , que la courbe
G A //qu'on demande- doit être celle que prendroit
une chaîne chargée d'une infinité de petits poids , &
qu'on attacheroit aux points G &cH: car une chaîne
qui eft ainfi attachée , doit fe difpofer de manière que
le centre de gravité des poids qui la compolent , c'eft-
à-dire le centre de gravité de la courbe même , def-
cende le plus bas qu'il eft poffible ; d'où il s'enfuit
que la courbe formée par cette chaîne aura fen cen-
tre de gravité plus éloigné de l'horifontale G H que
toute autre ligne courbe de la même longueur , &
parlant par les mêmes points : par conféquent le cer-
cle décrit par le centre de gravité de la courbe for-
mée par la chaîne , lorfque cette courbe tourne au-
tour de G H , eft plus grand que le cercle décrit par le
centre de gravité de toute autre courbe de même lon-
gueur ,& parlant par les mêmes points G, H; donc la
furface du folide produit par la première courbe , eft
plus grande que toute autre. On voit donc que le
problème fe réduit à trouver la courbe formée par
la chaîne ; courbe connue par les Géomètres fous
le nom de chaînette , & dont ils ont donné la conf-
truftion il y a long-tems. Voye^ Chaînette.
Le mot centrobaiique eft formé des mots Ktvrpov,
ccnzrum , centre , & Pa.pk , poids , pefanteur. (O)
. CENTRINE , poijfon; voye^ PORC.
* CENT-SUISSES, f. m. pi. {Hifl. mod.) partie de
la garde du Roi commandée par un capitaine qui a
fous lui deux lieutenans , l'un François, & l'autre
Suiffe. Dans les jours de cérémonie leur capitaine
marche devant le Roi , & le capitaine des gardes du
corps derrière. Au facre le capitaine & les lieutenans
font vêtus de fatin blanc , avec de la toile d'argent
dans les entaillures , & les fuiffes ont des cafaques
de velours. Cette milice a des juges de fa nation ,
& jouit des mêmes privilèges que les fujets nés du
royaume : elle eft exempte de toute impofition; èc
ce privilège s'étend aux enfans &i aux veuves. Voici
l'ordre de fa marche. 1. Le capitaine; 2. les deux
lieutenans; 3. le premier lergent; 4. quatre trabans
pour ladéfenfe particulière du capitaine; 5. les ca-
poraux ; 6. les anfpeffades ; 7. les tambours ; 8. les
moufquetaires; 9. deux trabans pour la défenfe de
l'enfeigne ; 10. deux tambours ; 1 1 . l'enfeigne ; 1 2.
les piquiers ; 13. les moufquetaires de la féconde
marche ; 1 4. les ious-lieutenans à la queue de la com-
pagnie; 15. les autres fergens fur les ailes. Ils font
appelles cent-fuijjes , parce qu'ils forment une com-
pagnie de cent hommes. Le P. Daniel prétend que
cette compagnie eft une garde militaire du Roi. En
effet , les cent-juiffes vont à la tranchée dans les liè-
ges que le Roi fait en perfonne : alors au lieu de la
hallebarde , leur arme ordinaire , ils prennent le fu-
fil. Les Suijjes commencèrent en 148 1 à être à la fol-
de du Roi , à la place des francs-archers établis par
Charles VII. Louis XI. les retint à la recommanda-
tion de ion père , & en prit une compagnie pour la
garde ordinaire de fa perfonne. Cette compagnie fut
confirmée dans cette fonction par Charles VIII. en
1496 : le capitaine qui la commande a le titre de ca-
pitaine-lieutenant. Poyei l'Etat de la France , l'Hijhirc
de la Milice Françoije par le P. Daniel , &C YAbrégî
chronologiaue de M. le prélident Hénaut.
CENTÛMVIRAT , f. m. ( Hifl. anc.) tribunal ou
cour chez les Romains , ainii nommée du nombre
des cent magiftrats qui la compofoient , & qui déci-
doient les différends des particuliers. On les nom-
moit antumvirs , & leur dignité centumvirat. (G)
* CENTURIATEURS de Maldebourg. V. Cen-
TURIE.
^ CENTURIE ,{.f.( Hifl. anc. ) ce mot fignifîe en
général une diftribution des parties d'un tout par cen-
taine. Foyei Cent.
Dans les tems que le peuple Romain s'aflembloit
pour créer des magiftrats , ou pour établir des lois t
ou pour délibérer des affaires publiques, il étoit di-
viié par centuries ; & afin que l'on pût recueillir plus
facilement les fuffrages , on opinoit par centuries : ces
aiïemblées fe faifoient dans le champ de Mars , Se
elles s'appelloient comitia centuriala.
Les cohortes de Rome étoient divifées par décu-
ries , commandées par des décurions , & par centu-
ries, commandées par des centurions : chaque cohor-
te étoit compoiée de iix centuries ; & une légion , de
foixante centuries. Voye^ Cohorte , DÉCURION ,
& Centurion. {G)
Centurie oujiecle , en Chronologie , c'eft l'efpace
de cent ans. L'Hiftoire eccléfiaftique compte princi-
palement par iîecles, à commencer de l'incarnation
de notre Seigneur. Voye^ Siècle.
On dit dans ce fens la première centurie ou premier
flecle. Mais ce mot, beaucoup plus ufité en Anglois
qu'en François , ne s'employe gueres que dans le cas
iuivant.
Centuries de Magdebourg , ( Hifl. eccléf. ) c'efî
un corps d'hiftoire eccléfiaftique que quatre miniftres
de Magdebourg commencèrent en l'année 1 560. Ces
quatre miniftres font Matthias Flaccius , furnommé
Illyricus , Jean Wigand , Matthieu Lejudin , Bafile
Fabert , & auxquels quelques-uns ajoutent Nicolas
Gallus , & d'autres André Corvin. Illyricus étoit ce-
lui qui conduifoit l'ouvrage , & les autres travail-
loient fous lui. Il a été continué jufqu'au xin. fiecle.
Chaque centurie contient toutes les chofes remar-
quables dans un fiecle , & eft partagée en feize cha-
pitres. Le premier eft un fommaire de ce qui va être
dit ; le fécond eft du lieu & de l'étendue de l'Eglife ;
le troifieme , de la perfécution & de la paix de l'E-
glife ; le quatrième , de la do£trine ; le cinquième ,
des hérélies ; le lixieme , des cérémonies & des rits ;
le feptieme , de la police & du gouvernement ; le
huitième, du fchifmej le neuvième , des fynodçs 9
C E P
le dixième , des vies des évoques des grands fiéges ;
le onzième , des hérétiques ; le douzième , des mar-
tyrs ; le treizième, des miracles ; le quatorzième, de
ce qui regarde les Juifs; le quinzième, des religions
féparées de l'Eglife ; le feizieme , des rnonumens &
changemens politiques des états. Cet ouvrage eft
une compilation qui a demandé beaucoup de tra-
vail , mais qui ne peut point paflér pour une hiftoire
bien écrite , exafte , & parfaite. Le but que les cen-
turiateurs femblent s'être propofé , étoit d'attaquer
Féglife Romaine, & d'établir la réforme ; & le car-
dinal Baronius entreprit fes annales eccléfiaftiques ,
pour les oppofer aux centuries.
CENTURION , f. m. ( Hift. anc. ) parmi les Ro-
mains , officier d'infanterie qui commandoit une cen-
turie ou cent hommes. Voyc-^ Centurie.
Le premier centurion de la première cohorte de
chaque légion s'appeiloit primtpilus , primopilus , ou
primi-pili-centurio , & quelquefois primas centurio. Il
n'étoit fous le commandement d'aucun tribun , à la
différence des autres , & il commandoit quatre cen-
turies. Il gardoit l'étcndart 6c l'aigle de la légion.
C'eft de-là qu'on l'appelloit primi-pilus \
CEP , f. m. (Agricult. ) le dit d'un pic de vigne.
Voyci Vigne.
Cep ou Ceb , ( Hijl. nat. Zoolog.) on appelle de
ce nom les finges qui ont des queues , 6c qui font de
plufieurs couleurs, foye* Singe. ( / )
CEPE AU , f. m. ( Monnayage. ) c'étoit le billot
dans lequel étoit arrêtée la pelle ou matrice d'écuf-
fon , lorfqu'on frappoit les monnoies au marteau.
Voyc l MONNOYAGE.
* CÉPÉES , f. f. pi. ( Commerce & exploitation des
bois. ) ce terme défigne quelquefois une certaine
étendue de buiffons , mais plus fouvent ce qui re-
pouffe des louches d'un bois tailiis : l'ordonnance
défend de les abattre , foit à la ferpe foit à la feie ,
mais feulement à la coignée. Cépées fc dit aufïï des
fouches mêmes. La coupe des têtes & des cepces des
failles , marfaux , frênes , aulnes , appartient au fer-
mier actuel , lorfque c'étoient des fruits réglés dont
le fermier précédent joiiiffoit, à moins que le pro-
priétaire ne le la foit refervée.
* CENTUSSIS , ( Antiquité. ) c'étoit d'abord au-
tant que centam njjès : mais as Se iibra étant lynony-
mes , le centuffis valoit cent livres de cuivre, éva-
luées en argent à dix deniers. Dans la fuite le cen-
tuffis ne fut plus compté que pour cent fextans , puis
pour cent onces , & enfin pour cent demi-onces, f^oy.
Monnoies anciennes.
♦CEPENDANT, POURTANT, NÉANMOINS,
TOUTEFOIS, fynonymes, (Gramm.) M. l'abbé Gi-
rard dit que pourtant a plus d'énergie , affirme avec
plus de fermeté ; que cependant cil moins abfolu , &
affirme feulement contre les apparences ; que néan-
moins indique deux choies oppolées , dont Ton affir-
me l'une fans nier l'autre ; c*à^e toutefois marque
une exception à une règle aflR générale : ce qu'il
confirme par les exemples fuivans , ou d'autres lein-
blables. Que tous les critiques s'élèvent contre un
ouvrage , qu'ils le pourfuivent avec toute l'injultice
& la mauvaife volonté pollible, ils n'empêcheront
pourtant pas le public d'être équitable , & de
ter s'il eft bon. Quelques écrivains ont répandu dans
leurs ouvrages les maximes les plus •
morale chrétienne ; d'autres ont publié les f]
les plus contraires à lés dogmes ; cependant '
6c les autres ont été bons pa i
toyens même , li oi\ leur pardonne la f.. . I
commife en qualité d'auteu S. doue a de la
féchereffe ; néanmoins il fut célèbre parmi les •
teurs de fontems ? On dit que certains journaliftes ne
louent que ce qu'ils foui . ■ ils ont loué l'Hil-
toire naturelle , 6c d'autres cxccllcas ouvrages qu'ils
n'out pas faits.
CEP
831
CEPHALALGIE, f. {.(Médecine.) douleur de tête
violente. Ce mot vient du Grec xtp*> Si , tête , ôc
d «à~g£ , douleur.
Cette efpece de douleur a des caufes différentes
dans différens fujets : les différions de perfonnes mor-
tes à la fuite de cette maladie, nous en indiquent deux
principales ; favoir , i°. l'engorgement des vaiffeaux
des membranes qui fervent développes au cerveau,
que l'on nomme la dure & la pie-mere ; 20. le dépôt
d'une lymphe acre épanchée fur la fubftancc même
du cerveau , ou fur les parties nérveufes de la tête ,
qui y occafionnent une irritation & une douleur vio-
lente. Lorfque cette douleur eft permanente & fans
interruption , elle prend un autre nom , 6c on l'ap-
pelle céphalée : alors lesfymptomes font bien plus vio-
lens; ce n'eft plus, comme dans la céphalalgie, un
mal léger , & qui n'occupe qu'une partie de la tête ;
il devient durable , 6c difficile à guérir ; le malade a
peine à fupporter le moindre bruit ; la lumière lui
devient infupportable ; toutes les membranes & les
parties nérveufes font dans une tcnlion fi violente ,
que la douleur occupe toute la tête.
On peut encore divifer la céphalalgie en migraine,
que les Latins ont appellee hemicrania , parce qu'il
n'y a qu'un côté de la tête d'affecté; & en clou, cla-
ms , état dans lequel le mal n'excède pas la largeur
de la tête d'un clou , & où il femble à la perfonne
malade que ce foit un clou qu'on lui ait planté dans
quelque partie , mais fur-tout au lbmntet de la tête :
cet accident arrive particulièrement aux femmes
hyliériques. Foye^ Passion hystérique.
Les caufes éloignées de la céphalalgie font , com-
me on le peut voir par les fymptomes qui l'accom-
pagnent, la trop grande abondance du fang , qui ne
pouvant par cène raifon circuler avec facilité dans
les vaiffeaux, s'arrête dans les capillaires du cer-
veau , diftend 8c occafionne une fenfation doulou-
reufe dans toute l'étendue de la tête , ou dans cer-
taines parties feulement.
Le fang qui abondera en férofité acre, occafion-
nera auffi par l'irritation des parties nérveufes la cé-
phalalgie : enfin tout ce qui peut altérer la lymphe,
comme la vérole, le feorbut , &c autres maladies de
cette efpece , font autant de caufes de cet accident ,
qu'on vient à bout de détruire en corrigeant la cau-
fe : elle cédera donc aux remèdes mei curiels , lors-
qu'elle fera produite par la vérole, cV_ aux antilcor-
butiques , lorfque le feorbut y aura donne lieu.
L'excès dans le commerce des femmes , dans l'é-
tude &: le travail, dans les c\ aérations , foit par les
faignées, les vomiffemens, les purgations, font au-
tant de caules de la céphalalgie , qui eft auffi produi-
te affez louvent par un amas de crudités dans l'efto-
mac , d'on provient un chyle de mauvaife qualité ;
par des fueurs trop abondantes; enfin par une trop
grande tranfpiration , ou par la tranfpiration même
fupprimée tout-à-coup.
Le pronoftic que l'on peut tirer de la et /> .il algie ,
c'eft qu'elle n'efl jamais fans danger : li les membra-
nes du e tte maladie , il y a
lieu de craindre la firénéfie ; lorsqu'elle eft oc(
ne e par un embarras dans les parties internes , qu'elle
eft accompa ttiée de tintemen
de pe. ' : . & d\\^c pulfation \ iolente dans
les vaiffeaux : de la tête, elle d eilementen
manie , fur-tout dans les < idriaques: lorfque
la céphalaigit efl fume de foibleffe dans les articu-
lations , d'étourdiffemens , d'< dans la lan-
. dans ta prononciation, on
comme Pavant-coureur de l'a] e& el
enfin lorfque les jeunes gens font fujets à la cU
pe, ils font mena.
Il efl ailé de voir par la différence des caufes delà
céphalalgie , qu'elle doit erre traitée de chverfes ma-
832
CEP
nieres ; les faignées doivent être employées dans cer-
tains cas; dans d'autres les délayans, les fudorifî-
ques légers, enfin les cinétiques ; le tout dirigé par
les conleils d'un médecin , qui connoiffant la caufe,
V approprie le traitement , fur lequel il n'eft point
poffible de donner de règles générales.
Une obfervation faite par Covper fur une cépha-
lalgie, prouvera la vérité de ce que j'avance. Ce la-
vant médecin guérit un malade attaqué de céphalal-
gie, en perçant par l'alvéole d'une dent molaire le
iinus maxillaire ; cette opération procura l'évacua-
tion d'une quantité de pus qui occafionnoit ce mal.
Drak rapporte deux faits femblables. Sans être
médecin , on ne peut pas parvenir à la connoifîance
de caufes aulfi fmgulieres. ( N)
CÉPHALIQUE , adj. (en Anatomie.) fe dit d'une
veine fituée à la partie externe du bras. Voye^ Bras.
La veine ciphaliqut eft une branche de l'axillaire ;
elle s'unit peu après fa naiflance avec la petite cépha-
lique qui defeend de la veine foûclaviere ou de la ju-
gulaire externe ; elle paffe entre les tendons du mui-
cle deltoïde & grand pectoral, & defeend tout le
long du bord externe de la portion externe du biceps.
Foyei Jugulaire, Deltoïde, &c. (L)
CÉPHALIQUE, adj. (Médecine.') remède propre
pour les iraladies de la tête. Ce mot eft tiré du Grec
x.i$<&\h , tête.
On donne ordinairement ce nom aux remèdes qui
font propres à calmer la trop grande vivacité du lang,
l'irritation & la tenfion des fibres , d'où proviennent
l'irrégularité dans la diftribution des eiprits , le déli-
re , les fpafmes , les convulfions , la fréneiie , Se au-
tres accidens de cette efpece.
On met au rang des céphaliques tous les remèdes
qui tempèrent l'agitation des eiprits par leurs exha-
laifons agréables ; tels font les fleurs de primevère ,
de tilleul , de fureau , de violettes , de lis des vallées ;
enfin les fubftances balfamiques dont on a donné l'u-
fage en infufion , en décoction , ou en poudre.
Lorfque l'on fait prendre les céphaliques en fternu-
tatoires, on a defTein d'irriter légèrement une bran-
che de la cinquième paire des nerfs , qui unie avec
une pareille branche de la fixieme , fe répandent dans
toutes les cavités de la face , & font humectées par
la membrane pituitaire ; cette efpece de convullion
excite l'évacuation de la mucolité qui s'y fepare , &
foulage par ce moyen dans les cas où fon trop grand
épaifîiffement ou fa trop grande quantité eft nuiiï-
ble. f^oyei Sternutatoire. (A7)
CÉPHALOPHARINGIEN, terme a" Anatomie, eft
le nom de deux mufcles de l'orifice de l'œfophage ,
qu'on appelle pharynx. Voyc^ Muscle.
Ils viennent de la face inférieure de l'apophyfe ba-
filaire de l'occipital vers fa partie moyenne , & s'é-
panoùiffent fur la partie fupérieure & poftérieure du
pharynx, qu'ils tirent en-haut ÔC en arrière, f^oye^
Pharynx. (L)
CÉPHÉE , f. m. (en Agronomie.) c'eft une des conf-
tellations de l'hémifphere feptentrional : elle a treize
étoiles dans le catalogue de Ptolomée ; onze dans ce-
lai de Ticho ; quarante dans Hevelius ; & dans le ca-
talogue Britannique cinquante -cinq. (O)
* CEPHISE , f. m. (Géog. & Mythol.) fleuve de la
Phocide , qui prend fa fource dans la Doride , pafle
dans le voifinage du Parnaffe, traverfe la Béotie &
le lac de Copaïs appelle aujourd'hui Lago dijlivo , &
fe jette dans l'Euripe , ou le détroit de Ncgrepont.
Ce fleuve eft aujourd'hui connu fous le nom de Cef-
fijfo. L'oracle de Themis que Deucalion & Pyrrha
confulterent , avoit fon temple fur fes bords.
* CEPITES, (Hifl. nat.) efpece d'agate , qui félon
toute apparence, a été ainfi nommée à caufe du grand
nombre de raies que l'on y remarque , qui la font
reflembler à un oignon ( en latin cèpe ) que l'on
C E R
auroit coupé en deux. Voye7^ C article A GATE.
CERAM on CEIRAM, ( Géog. ) ile confidérable
d'Alie, dans la mer des Indes, l'une desMoluques,
dont la plus grande partie eft aux Hollandois ; le refte
dépend du roi deTernate.
* CERAMES, f. m. pi. (Hijl. anc.) vafes de terre
cuite dont on fe fervoit dans les repas. Jufqu'au tems
des Macédoniens , dit Athénée , on fe fervoit de va-
fes de terre cuite ; le luxe s'étant fort accru parmi les
Romains , Cleopatre, la dernière des reines d'Egypte,
voulut les imiter : mais pour ne pas changer l'ancien
nom , elle appella cérames ou vafes de terre cuite , les
coupes d'or & d'argent qu'elle faifoit diftribuer aux
convives lorfqu'ilsfe retiroient. Ces préfens qu'on fai-
foit aux convives s'appelloient aufli apophoretes, voy.
Apophoretes. C'étoit un ufage établi dont on trou-
ve plulieurs exemples ; celui de donner des coupes
d'orfic d'argent étoit d'une dépenfe excefïive , qu'ap-
paremment on ne répétoit pas fouvent , & n'étoit pas
afiïïrément du tems où l'or étoit fi rare , que Philippe
de Macédoine, père d'Alexandre, cachoit toutes les
nuits lbus fon chevet , une petite phiole d'or qu'il
avoit , de peur qu'on ne la lui volât.
* CERAMICIES , f. f. pi. ( Hifl. anc.) fêtes Athé-
niennes , dont on ne fait autre chofe , finon qu'elles
étoient ainfi nommées du céramique ou de l'endroit où
elles fe célébraient. /'oyrç Céramique & Fêtes.
* CÉRAMIQUE, f. m. (Hifl. anc.) Il y avoit dans
Athènes deux lieux célèbres qui portoient ce nom ,
qui fignifie en Grec tuileries. L'un s'appelloit le céra-
mique du dedans ; c'étoit une partie de la ville , ornée
de portiques, & une des principales promenades.
L'autre , le céramique du dehors ; c'étoit un faubourg
où l'on faifoit des tuiles , & oii Platon avoit fon aca-
démie. Meurfms prétend que ce dernier étoit aufîi le
lieu de la fépulture de ceux qui étoient morts pour
la patrie; qu'on y faifoit des oraifons funèbres à leurs
louanges , & qu'on leur y élevoit des ftatues ; au lieu
que le premier étoit un quartier de la ville bâti de
briques ou de tuiles ; ce qui le fît appeller céramique ,
habité par les courtifaues.
CERASTE, cerafles , fiib. m. (Hifl. nat. Zoolog.)
ferpent ainfi nommé , parce qu'il a fur la tête deux
éminences en forme de cornes pareilles à celles du
limaçon , quoique plus dures ; ils ont aufîî deux tu-
bercules qui font femblables à des grains d'orge, 6c
que l'on prendrait pour des cornes plus petites que
les deux autres : ce ferpent a les dents comme la vi-
père , il eft vivipare ; il fe pafle de boire plus long-
tems que tout autre ferpent. On le trouve en Libye
& en Arabie, près de la ville de Suez. Bellon, Obf.
liv. II. ch. Ijv. Voye{ SERPENT. (1)
La morfure de ce ferpent caufe une tumeur fem-
blable à la tête d'un clou ; il en fort une fanie rou-
geâtre de la couleur du vin , ou noirâtre , fur-tout
par les bords ; ainfi qu'il arrive dans les bleftures qui
ont pour caufe des ç^psou contulions.
Eile cil iiiivie d'aCfcidens pareils, & demande des
remèdes femblables à ceux dont on ufe contre la mor-
fure de la vipère ; le malade n'en meurt qu'au bout
de neuf jours , mais il eft plus cruellement tcurmenté
que s'il avoit été mordu par une vipère.
Lemery qui a tiré d'Aétius ce qu'il dit du cerafles,
ajoute qu'il peut fournir les mêmes préparations mé-
dicinales que. la vipère ; qu'il contient beaucoup de
fel volatil & d'huile ; qu'il eft fudorifique ; qu'il ré-
iïfte au poifon ; qu'il purifie le fang , & qu'il eft bon
dans la petite vérole , la pefte , & la gratelle. (iV)
*CER ASTIS, (Géog. anc.) nom que portoit an-
ciennement file de Chypre ; il lui vint du grand nom-
bre de fes montagnes , dont les pointes reffemblent
à des cornes , ou, ainlî que les Mythologiftes le pré-
tendent , de peuples cruels appelles cerafles ou porte-
cornes , que Venus changea en taureaux.
*CERASUS.
CER
*CERASUS, ( Giog. anc. & mod.} aujourd'hui
ChiriJJbnda ou Emid , ou Omidi, ancienne ville de
Cappadoce, d'où l'on prétend que Lucullus apporta
lesterifes en Italie; foit que le ceriiier ait donné le
nom à la ville > ou l'en ait reçu.
CER AT, f. m. {Pharmacie.} onguent dont la cire
fait la baie. Les modernes préparent leur cirât avec
des fubftances grafles 6c huileufes , des gommes , des
réfines, des baumes, & des poudres, unis ensem-
ble par une quantité fuftifante de cire, à laquelle ils
ajoutent quelquefois des mucilages & différentes for-
tes de lues; en forte que la compofition foit plus
épaifle qu'un onguent, ck plus molle qu'une emplâtre.
La règle preferite par les auteurs , cil de prendre
huit parties d'huile , de graille ou de fuc , quatre de
cire , & deux de poudre ; d'autres prennent trois on-
ces d'huile , une demi-once de cire , tk trois dragmes
de poudre.
Mais comme les fubftances huileufes tk onchieu-
fes font plus fluides dans les tems chauds que dans
lestems froids, c'eft une circonftance à laquelle il faut
avoir égard.
C É R a t blanc : prenez huile d'amandes douces ,
cinq onces; cire blanche, deux onces ; blanc de ba-
leine le plus fin , une once ; cérufe lavée dans l'eau-
rofe , une once & demie ; camphre , une demi -on-
ce : faites fondre fur le feu les ingrédiens fufibles ;
remuez-les tandis que vous y répandrez les poudres ,
jufqu'à ce que le mélange loit froid.
Quelquefois on préparc un cirât avec huit parties
d'un onguent fur deux ou trois parties de cire ; d'au-
tres fois, c'eft. en amolliffant la matière d'une emplâ-
tre par une addition d'une quantité fuffifante d'huile.
On étend le cirai fur un linge ,tk on l'applique fur
la partie affligée.
On fe propofe de produire avec les cérats un grand
nombre d'effets différens, comme de rélâcher, amol-
lir, digérer, cicatrifer, attirer, &c.
Ainfi on peut faire des chats defïïccatifs , deter-
fifs , fondans ; on les applique fur les différentes par-
ties du corps, & clans différentes occalions. On em-
ployé les remèdes en confiflance de cirât, pour ne
pas offenfer les parties, tk occuper moins de place.
Cirai jaune dtjjïccaùf: prenez réfine jaune, une de-
mi-livre; fuif de mouton, quatre once s ; huile d'o-
live , cinq onces; térébenthine de Yeniie, trois on-
ces; turbith minéral, quatre gros : faites-en un cirât
félon les règles ci-de(îus.
Cirai de Galien : prenez cire blanche , deux onces ;
huile rofat, cinq onces: mclez-les lelon l'art, ce rai-
tes-en un cirât. {N)
CERATIAS , f. m. {A/lrortom.) feipn certains au-
teurs , eft une comète cornue, qui paroit foiuent
barbue, & quelquefois avec une queue. Ils préten-
dent que quelques-unes de ces comètes reiiemblcnt à
la figure de la nouvelle lune : celles qui ont des
queues, les ont crochues & recoin becs ou vers le
haut OU irevS le bas; d'autres ont des queues d'une
cl, île largeur qu épaifleur , èvc. Hauts,
i CERÀTION , C f- ( Chimie. ) ce mot lignifie deux
choies différentes.: il a une iignificaiion figurée , &
il en a une naturelle ; il a aulfi deux etymologies
différentes.
Dans le fens figuré , ciration , en Grec y.:\'r:\u; , de
KMfioc , ccra , cire, fignifie l'action par laquelle on rend
UO corps naturellement difficile à fondre , comme
eft l'argent , fufible comme qe la cire , tel qu'ail 1 ar-
gent penétljé de l'acide du fel commun, & qui dans
cet état eil nommé lime cornée. Ce changement des
corps ( [U ils etoient.i fondre, devien-
nent fufibles comme de la cire , eft telon les Alçbi-
miftes > ■ 1er , une propriété eifentielle de la
pierre •■' ilpfpphalé.
(.'..'..''• • , Naît auliïdire l'action d"cn\ Jopper ..-u
Tome II,
CER
83 3
• de pénétrer de cire un corps, comme la toile : c*èil
incération , inctratio , uitimeç.
Ceration dans une lignification naturelle, veut dire
manipulation, l ,:-,-': 1; ,incheratio , inchération eu
inkeration, £«psf/{, ckerdtio , chération ou kération,
& improprement ciratlon, àéxùf, mania, main. (M)
CE RAT IU M , antiquité: c'étoit une y.
monnoie de cours parmi les Grecs ; elle valoit le
tiers d'une ololé; on prétend qu'elle répondoit au
filiqua des Latins. Voye^ Ojjole &Siliqva.
CERATOÏDES, f. f.(-%2. nat. b t.) genre dé-
plante à fleur fans pétales & ftèrile ; les fruits naif-
fent fur la même plante féparérhent dés fleurs; ils
font applatis , divifés en cleu . , & termines
par des prolongemens en forme de cornes , & ils
renferment des femences. Toufnefort , Injt. r.
corol. Foyei Plante. (/)
CERATOGLOSSE , adj. m. pris fubft. {en Ana-
tomie. ) nom d'une paire de mufclesde la [an ;ue , qui
viennent de la partie fûpéfiëure de la grande corne
de l'os h)-oide, & fe terminent à la partie poftérieure
& latérale de la langue. (/.)
CERATO-SPERMUM, {Hifl. nat. bot. ) genre
de plante qui diffère de l'agaric, en ce que fes femen-
ces font en forme de croifiant. Michcli , Nov. pi. gen.
Voyei Plante. (/)
* CERAUNE, f. m. {Hifl. anc. ) furnom qu'on a
donné à quelques princes qui fe font diftingués par
leur valeur : ainfi l'on a dit Ptolomie Ceraum , Seleu-
cus Ceraune , &c. comme nous difons foudre de guerre.
* CERAUNIENS, (Monts.) Les Grecs ont
donné ce nom à plufieurs chaînes de montagnes ; les
unes étoient fituéeslur les confins de l'Epire , où la
mer Ionienne commence à s'appcller mer Adriatique ;
d'autres faifoient partie du Caucafe : il y avoîl
des monts Ceraumens en Afrique. On pourroit même
dire en général qu'on a donné ce nom à la plupart
des montagnes que leur hauteur expofôit A lafoudfe.
* CER AiJNQ f OPION , f. m. ( Hifl. anc. ) par-
tie du théâtre des anciens : c'étoit une mach;-
vée & veriatile de la forme d'une guérite , d'où Jupi-
ter lançoitla foudre , dans les pièces où .
étoit néceffaire. Pqye{ Tjîi'aTRE. '
* CERBERE , f. m. ( fttylHofegte: ) nom qi
Poètes ont dorme à un chien
gueules, qu'ils ont fait naitre . 'ichid-
na, & qu'ils ont placé à la pi ils ra-
content qu'il carène les âmes e^u 1 j
qu'il empêche d'en fortir celles qui v i
dues , &: qu'il en éloigne les \ i\ ans ; il
qu'Hercule l'enchaîna ce s'en lit fn:\ re. (
piquent de trouver du fens à toutes les fabfes, 1
que cer!\re eft un fymbole de la terre c;'.;; abforbe
tout , ou du tems à qui rien ne rci.it
les l'ont , le prelént , le patte, èc l'avertir. D .
font de cerBere un ferpeht habitant du T. . .
rpontoire de la Lacome.qu'il ravageoit; ce comme il
yavoîtj me endroit une ça 1 'l'en-
trée pafloit pour une des portes de l'enfer ; il-
terent que ce monftré croit le v . Phitori. La
vicloiie qu'Hercule remporta fur lui , eft fuivant
•riede l'empire que ce' '
fur ("es pajfipns , Om^riale & Déjaniré I
ARE (le) Giog. petiij
'.teiT.uK e,furla çi
.
! J. m.( Fam
appelle les pennes du boi aX de
les faucons,! .iont
qu,i n . & les ëpérvîers
.
,in de l'autre, maisne
s!applati« au 1
834
CER
lui fait prendre à la main la forme extérieure du bou-
ton fur lequel il fe jette. Voyt{ Jetter. Il y a des
cerceaux unis, dedécoupés, Se de gravés. V. Battre ,
Découper, & Graver. Les cerceaux ne font d'ufage
parmi les Boutonniersque dans les boutons façonnés.
Cerceau, {en terme de Cirier. ) c'eft un cercle
garni de petits crochets ou de cordons de difïance
en diftance , auxquels on fufpend la bougie , &c. foit
en l'accrochant , foit en la colant aux cordes ; ce qui
ne fe fait que pour les bougies de table qui ne font
pas encore couvertes. Voye{ Couvrir. Voye^ auffi
la Planche du Cirier , figure z.
Cerceau , c'eft un lien de bois qui fe plie faci-
lement , & dont les Tonneliers le fervent pour relier
les tonneaux, cuves , cuviers , baignoires, &c. Les
meilleurs cerceaux font ceux de châtaignier , parce
qu'ils pourriffent moins vite : on en fait auffi d'au-
tres bois , comme de coudre , de frêne , de bouleau ,
dont on fend les branches par le milieu. On les ap-
porte en moles ou bottes compoiées de plus ou moins
de cerceaux , fuivant leur efpece. Voye^ Mole.
Lorfque les cerceaux font reliés , on leur donne dif-
férens noms , fuivant l'endroit de la futaille auquel
on les place. Le premier du côté du bord le nomme
le talus; le fécond eft double & s'appelle hfommier;
le troifieme & le quatrième font connus fous les noms
de colla & fous-collet, ou de premier & fécond collet.
Après ces quatre cerceaux , il y en a d'autres qui n'ont
pas de nom particulier, à l'exception du dernier,
c'efl-à-dire de celui qui eft le plus proche du bondon ,
qu'on appelle le premier en bouge.
CERCELLE , oifeau , voye^ Sarcelle.
CERCIF1 ou SALSIFI , f. m. {Jardinage. )fcor^o-
nera : cette plante a des feuilles comme le poireau ;
la fleur de couleur purpurine , & la racine , font très-
eftiméespourla cuiline ; elles rendent unfuc laiteux.
Elle eft une efpece du tragopogon , en François
barbe-de-bouc.
Les falfifis communs fe cultivent comme ceux d'Ef-
pagne , à l'exception qu'on ne les feme qu'au prin-
tems, Se qu'ils fe cueillent au carême. (Â)
* CERCIO , {Hiji. nat.) efpece d'oifeau des In-
des de la grandeur d'un étourneau , dont le plumage
eft de différentes couleurs fort vives ; il remue con-
tinuellement la queue ; l'on dit qu'il apprend à parler
avec plus de facilité qu'un perroquet : il n'eft point
bon à manger.
CERCLE , fub. m. ( en Géométrie. ) figure plane ,
renfermée par une feule ligne qui retourne fur elle-
même, & au milieu de laquelle eft un point fitué
de manière que les lignes qu'on en peut tirer à la cir-
conférence font toutes égales, ^oye^ Centre.
A proprement parler, le cercle eft l'efpace renfer-
mé par la circonférence, quoique dans l'ulage vul-
gaire on entende par ce mot la circonférence feule.
Foyc{ Circonférence.
Tout cercle eft fuppofé divtfé en 360 degrés , que
l'on marque ainfi 3600 ; chaque degré fe divife en
60 minutes ainfi marquées ' , chaque minute en 60
fécondes marquées par " , chaque féconde en foi-
xante tierces ainfi marquées '". On a divifé le cer-
cle en 360 parties, à caufe du grand nombre de di-
vifeurs dont le nombre 360 eft lufceptible. Vqy. De-
gré , Minute , &c. Diviseur.
On trouve l'aire d'un cercle en multipliant la cir-
conférence par le quart du diamètre , ou la moitié
de la circonférence par la moitié du diamètre. On
peut avoir l'aire , à peu près , en trouvant une qua-
trième proportionnelle à 1000 , à 785 , & au quarré
du diamètre. Voye{ Aire.
Les cercles & les figures femblables qu'on peut y
inferire, font toujours entr'eîles comme les quarrés
des diamètres ; ou , comme les Géomètres s'expri-
ment, les cercles font entr'eux en raifon doublée des
CER
diamètres , & par conféquent auffi des rayons.
Le cercle eft égal à un triangle , donc la bafe eft
la circonférence, Se la hauteur le rayon. Les cercles
font donc en raifon compolée de celle des circon-
férences* & de celle des rayons.
Trouver la proportion du diamètre du cercle à fa cir-
conférence. Trouvez en coupant continuellement les
arcs en deux, les côtés des polygones inferits , juf-
qu'à ce que vous arriviez à un côté qui foûtende
un arc fi petit que vous voudrez le choifîr. Ce côté
étant trouvé , cherchez le côté du polygone cir-
conferit femblable ; multipliez enfuite chacun de ces
polygones par le nombre de fes côtés, ce qui vous
donnera le périmètre de chacun d'eux : la raifon
du diamètre à la circonférence du cercle fera plus
grande que celle du diamètre à la circonférence du
polygone circonferit , mais moindre que celle du dia-
mètre au polygone inferit.
La différence des deux étant connue , on aura ai-
fément en nombres très-approchés , mais cependant
non exatts, la raifon du diamètre à la circonférence.
Ainfi , Volfius la trouve la même que celle de
100 000 000 000 000 00 à 3. 141 591653 589 7932.
Archimede a donné pour raifon approchée celle de
7 à 22 ; Ludolphe de Ceulen a porté cette recher-
che à une plus grande exactitude , & il trouve qu'en
prenant l'unité pour diamètre , la circonférence doit
être plus grande que 3 . 141 592653 589 793 238
462 643 383 879 50, mais moindre que ne devien-
droit ce même nombre fi l'on changeoit feulement
le zéro qui le termine en l'unité.
Metius nous a donné la proportion la meilleure de
toutes celles qui ont paru jufqu'à prélent exprimées
en petits nombres. Il fuppofe le diamètre de 1 1 3 par-
ties , Se la circonférence doit être à moins d'une uni»
té près 355, fuivant ion calcul.
Circonfcrire un cercle à un polygone régulier donné.
Coupez deux des angles du polygone E & D ( PI.
de Géom. fig. 2#.) en deux également : du point de
concours F des lignes E F , D F, pris pour centre ,
& du rayon £ F, décrivez un cercle; ce fera celui que
vous cherchez.
Inferire un polygone régulier donné dans un cercle :
Divilèz d'abord 360 par le nombre des côtés , pour
parvenir par -là à connoitre la quantité de l'angle
E F D ; cela étant fait , appliquez la corde E D de
cet angle à la circonférence autant de fois que vous
le pourrez , & vous aurez par-là inferit le polygone
dans le cercle.
Par trois points donnés A, B, C, qui ne font point
en ligne droite (Jig. J7.) décrire un cercle.
Des points A Se C, Se d'un même intervalle pris
à volonté , décrivez deux arcs de cercle qui fe cou-
pent en D Se E ; Se pareillement des points C &cB,
décrivez-en deux autres qui fe coupent en G & H ;
tirez enfuite les droites D E , G H : le point de leur
interiedlion / fera le centre du cercle : par-là on peut
venir à bout, en prenant' trois points dans la circon-
férence d'un cercle ou d'un arc donné , de trouver le
centre de ce cercle ou de cet arc , Se de continuer l'arc
fi ce n'eft pas un cercle entier, foye^ CENTRE.
Donc fi trois points d'une circonférence convien-
nent ou co-incident avec trois points d'une autre-cir-
conférence, les deux circonférences co-incideront en
entier , Se les cercles ièront égaux.
Donc auffi tout triangle peut être inferit dans un
cercle. Foye^ Tr I AN G LE .
On démontre en Optique qu'un cercle, s'il eft fort
éloigné de l'œil , ne peut jamais paroître véritable-
ment cercle , à moins que le rayon viluel. ne lui loit
perpendiculaire Se ne pafTe par Ion centre. Dans tous
les autres cas le cercle paroît oblong ; & pour qu'il pa-
roiffe au contraire véritablement circulaire , il faut
qu'il foit en effet oblong. Voye{ Perspective.
CER
CER
S35
Les cercles parallèle^ ou concentriques font ceux qui
font également éloignés les uns des autres clans tou-
tes leurs parties , ou qui font décrits d'un même cen-
tre ; & par oppofition , ceux qui font décrits de cen-
tres différens font dits excentriques l'un par rapport à
l'autre. V. Concentrique, Excentrique, &c
La quadrature du cercle ou la manière de faire un
quarré dont la furface foit parfaitement & géométri-
quement égale à celle d'un cercle , eft un problème
qui a occupé les mathématiciens de tous les fiecles.
Voye^ Quadrature.
Plufieurs foûtiennent qu'elle eft impofïible ; elle
eft du-moins d'une difficulté qui l'a fait palier pour
telle jufqu'à préfent. Archimede cil celui des anciens
Géomètres qui a approché le plus près de la quadra-
ture du cercle.
C .rchs des degrésfupérieurs; ce font des courbes dans
lefquelles A Pm : P Nm : : PN : P B , ou APm : PNm
: : PN" : PB*. (PL d'Analyfe ,fig.Q.)
Au relie , ce n'eft que fort improprement que ces
courbes ont été appellées cercles ; car on eft convenu
d'appeller cercle, la feule figure dont l'équation eft
A P xP B = P N1 : mais on peut imaginer des cer-
cles de plufieurs degrés comme des paraboles de plu-
fieurs degrés , quoique le nom de parabole ne con-
vienne rigoureufement qu'à la parabole d'Apollo-
nius. Voye^ Parabole.
Coroll. I. Suppofons A P = x, PN =y , A B = af
& nous aurons BP—a—x, &par conféqnent xm
: ym : ly : a — x, ce qui nous donne une équation
qui détermine les cercles des degrés fupérieurs à l'in-
fini ; lavoir , y m+ T = a xm — xm + ', & on pour-
roit avoir d'une manière à peu près lemblable cette
f . m J— ji * -\ n m
autre équation y T = (a — x) x .
Coroll. II. Si wz= 1, nous aurons _y 2 = a. v— xx,
& par conféquent il n'y aura plus que le cercle ordi-
naire ou celui du premier degré qui foit alors com-
pris fous l'équation.
Si m = 2 , on aura j3 = a X* — xi , équation qui
appartient au cercle du fécond degré ou du fécond
ordre.
Cercles de la fphere ; ce font ceux qui coupent la
fphere du monde, & qui ont leur circonférence dans
fa furface. Voyc{ Sphère.
On peut diftinguer les cercles en mobiles tk immo-
biles. Les premiers font ceux qui tournent , ou font
cenfés tourner par le mouvement diurne , de ma-
nière que leur plan change de fituation à chaque
inftant, tels font les méridiens , &c Voyei Méri-
dien , &c.
Les autres ne tournent pas, ou tournent en reliant
toujours dans le même plan ; tels font l'écliptique,
l'équateur & fes parallèles, &c fqy^EcLiPTiQiT.
De quelque manière qu'on coupe une fphere , la
feftion eft toujours un cercle dont le centre eft dans
le diamètre de la fphere , qui eft perpendiculaire au
plan de fe&ion.
Donc i°. le .diamètre d'un cercle qm pane par le
centre de la fphere eft égal à celui du cercle par la
révolution duquel on peut concevoir que la fphere
a été formée : z°. le diamètre d'un cercle qui ne pafle
pas par le centre de la fphere , eft feulement égal à
une des cordes du cercle générateur ; & comme le dia-
mètre eft d'ailleurs la plus grande île toutes le s cor-
des , ces confidérations fourniflent une aune dis ifion
des cercles de la fphere en grands & petits.
Grand cercle de la fphere ; ç'eft celui qui divile la
fphere en deux parties égales ou en deux hémifphe*
rcs,&: dont le centre eo-incide avecce lui de la fphere.
Il s'enfuit de là que tous les grands cercles font égaux ,
oc qu'ils fe coupent tous en portions égales, ou en
demi-cercles.
Les grands cercles de la fphere font l'horifon , l C-
Tome II.
quateur , le méridien , l'écliptique , les deux colures ,
& les azimuts. Voye7^ chacun en fon lieu , HoRlSON j
MÉRIDIEN, ECLIPTIQUE, &C.
Petits cercles de la fphere ; ce font ceux qui ne divi-
fant pas la fphere également , n'ont leur centre que
dans l'axe, & non pas dans le centre même de la
fphere : on les défigne d'ordinaire par l'analogie
qu'ils ont avec les grands cercles auxquels ils font
parallèles ; ainfi l'on dit les parallèles à Céquateur.
f^oyei Parallèle.
Les cercles de hauteur , qu'on nomme autrement al-
mucantaraths , font des cercles parallèles à l'/iorifon, qui
ont le zénith pour pôle commun , & qui diminuent
à mefure qu'ils approchent du zénith. Voye\ Al.ml-
CANTARATH.
On les appelle de la forte par rapport à lcurula-
gc , ou parce qu'ils fervent à marquer la hauteur d'un
aftre fur l'horifon. Voye^ Hauteur.
Cercles de déclinaifon ; ce font de grands cercles qui
fe coupent dans les pôles du monde. Voye^ Décli-
naison.
Les cercles diurnes font des cercles immobiles, qu'on
fuppofe que les différentes étoiles & les autres points
des cieux décrivent dans leur mouvement diurne au-
tour de la terre , ou plutôt qu'ils paroiffent décrire
dans la rotation de la terre autour de fon axe. Voye{
Diurne.
Les cercles diurnes font tous inégaux , l'équateur eft
le plus grand. Voye^ Equateur.
Cercles d'excurjion ; ce font des cercles parallèles à
Pe'clip tique, & qui ne s'étendent qu'à une diftance
fufniàntc pour renfermer toutes les excurlions des
planètes vers les pôles de l'écliptique ; exclurions
qu'on rixe ordinairement à dix degrés au plus. Voyeç.
Sphère, Sphérique.
On peut ajouter ici que tous les cercles de la fphe-
re dont nous venons de faire mention , fe tranfpor-
tent des cieux à la terre , & trouvent par là leur
place dans la Géographie , auffi bien que dans l'Af-
tronomie : on conçoit pour cela que tous les points
de chaque cercle s'abaiffent perpendiculairement fur
la furface du globe terreftre , & qu'ils y tracent des
cercles qui confervent entre eux la même polition &C
la même proportion que les premiers. Ainli l'équa-
teur terreftre eft un cercle tracé fur la lurtace de la
terre , & qui répond précifément à la ligne équinoc-
tiale , que le folcil paroit tracer dans les cieux ; &
ainfi du relie. Voye^ Equateur , &c.
Les cercles horaires , dans la Gnonomique , font des
lignes qui marquent les heures fur des cadrans, &
qu'on nomme de la forte , quoique ce ne foient point
des cercles , mais des droites qui font la projection des
méridiens. Voye\ Cadran & Horaire.
Les cercles de latitude , ou les cercles fecondaircs de
l'écliptique, l'ont de grands cercles perpendiculaires
ail plan de l'écliptique, & qui partent par les pôles,
ainfi que par l'étoile ou planète dont ils marquent
la latitude.
On les nomme de la forte , parce qu'ils fervent à
melurer la latitude des étoiles , laquelle n'eft autre
choie que l'arc de ces cercles intercepte entre l'étoile
ex L'écliptique. Voye\ Latitude.
Les cercles de longitude font plufieurs petits cercles
parallèles à l'écliptique., lelquels diminuent à propor-
tion qu'ils s'en éloignent.
( 'cil fur les degrés des cercles de longitude que le
compte la longitude des étoiles. Payez Longitude.
le d'apparition perpétuelle ; c'eftun péril
parallèle à l'équateur , décrit du point le plus fep-
tentrional de l'horifon, & que le mouvement diurne
emporte avec lui.
Toutes les étoiles renfermées dans ce cercUt ne
fe couchent jamais , mais font toujours préfentes lur
l'horifon,
N N n n n 11
83<s
C E R
Cercle d'occultation perpétuelle ; c'eft un autre cercle
à pareille diftance de l'équateur , décrit du point le
plus méridional de Phorifon , & qui ne contient que
des étoiles qui ne font jamais vilibles fur notre hémif-
phere. Voye{ Occultation.
Les étoiles fituées entre ces deux cercles , fe lèvent
& fe couchent alternativement à certains momens
de la révolution diurne. Voye^ Étoile , Lever ,
Coucher, &c
Cercles polaires ; ce font des cercles immobiles pa-
rallèles à l'équateur , & fitués à une diftance des
pôles , égale à la plus grande déclinaifon de l'éclip-
tique. Voye^ Polaire.
Celui qui eft proche du pôle boréal s'appelle arc-
tique , & celui qui eft près du pôle méridional s'ap-
pelle antarctique. Foye^ Arctique & ANTARCTI-
QUE.
Cercles de pojition y ce font des cercles qui partent
par les interfections communes de Phorifon & du
méridien , & par un certain degré de l'écliptique ,
ou par le centre de quelque étoile , ou par un autre
point quelconque des cieux. Les aftrologues s'en for-
vent pour découvrir la fituation ou la pofition des
étoiles , &c Foye^ Position.
On en trace ordinairement fix , qui partagent l'é-
quateur en douze parties égales. Les Aftrologues
nomment ces parties de l'équateur maifons célejles ;
ce qui a fait appeîler aufTi ces cercles , cercles des mai-
fons célejles. Ils ont été proferits avec Paftrologie.(O)
Cercles d'afcenflon droite , & cercles d'afcenflon obli-
que : les premiers paflènt par les pôles du monde , &
coupant l'équateur à angles droits , déterminent l'afi-
ceniion droite des aflres. On les nomme cercles d'af-
cenfion droite , parce que parlant par les pôles du mon-
de , ils fervent d'horiton à la fphere droite , à laquelle
les afcenfions droites des affres fe rapportent. Le
premier de ces cercles eft le colure des équinoxes , où
un aftre fe trouvant , n'a point d'afceniîon droite.
Foye{ Ascension droite.
Le cercle d'Afcenfion oblique eft unique , c'eft-à-dire
qu'on n'en peut concevoir plus d'un pour chaque
élévation de pôle , puifqu'il n'eft autre chofo que
Phorifon de la fphere oblique ; lequel ne paflant pas
les pôles du monde , & étant déterminé par rapport
à une élévation particulière de pôle , ne peut être
que foui ;'au lieu qu'on peut s'imaginer une infinité
de cercles d'afceniîon droite, à caufe qu'ils paffont
tous par les mêmes pôles qui font ceux du monde ,
& qu'ainfi on peut les prendre pour des méridiens.
En effet , les afcenfions & defcenlions des aflres ou
des degrés de l'écliptique qui fe font dans ce cercle ,
font nommées obliques , à caufe qu'elles font faites
dans la fphere oblique ; de même que les afcenfions
droites font ainfi appellées , parce qu'elles fe font
en la fphere droite ; c'eft pourquoi Phorifon dans la
fphere oblique peut être nommé cercle d'afcenflon
oblique. Foye^ ASCENSION OBLIQUE.
Nous devons à M. Formey cet article fur les cer-
cles d'afcenflon droite.
Cercle d'arpenteur , infiniment dont on fe fort
dans l'arpentage pour prendre des angles. Foye^ An-
gle & Arpentage.
Ce cercle eft un infiniment très-fimple , & cepen-
dant fort expéditif dans la pratique. Il confifie en
un cercle de cuivre & un index , le tout d'une même
pièce. Foye^ fa figure à la PI. d'Arpentage ,fig. icf.
Ce cercle eft garni d'une bouffole, divifo en 360
degrés , dont la méridienne répond au milieu de la
largeur de l'index. Sur le limbe ou la circonférence
du cercle eft foudé un anneau de cuivre , lequel avec
un autre qui eft garni d'un verre , fait une efpece
c!c boîte pour mettre l'aiguille aimantée. Cette ai-
guille eft fufpendue fur un pivot au centre du cercle.
Chaque extrémité de l'index porte une pinnule. Foy,
Pinnule & Boussole.
C E R
Le tout eft monté fur un pi* avec un genou , afin
de le mouvoir ou de le tourner avec facilité. Foye^
Genou.
Prendre un angle avec cet infiniment. Suppofons
qu'on demande l'angle EK G (Planche d'Arpentage ,
fig. 20. ) placez l'initrument quelque part en K, la
fleur-de-lis de la bouflble tournée vers vous ; dirigez
enfuite les pinnules jufqu'à ce que vous apperceviez
le point E à-travers , tk obfervez à quel degré ré-
pond l'extrémité méridionale de l'aiguille : fuppo-
fons que ce foit 196 degrés , vous tournerez alors
Pinftrument , la fleur- de -lis reftant toujours vers
vous , & vous dirigerez les pinnules vers G , mar-
quant encore le degré auquel répondra l'extrémit*
auftrale de l'aiguille que nous fuppofons être 182.
Après cela fouftrayez le plus petit nombre 182
du plus grand 296, le refte 1 14 fera le nombre de
degrés de l'angle E KG.
Si ce refte fe trouvoit plus grand que 1 80 degrés ,
il faudrait le fouftraire de nouveau de 360, & le der-
nier refte qui proviendrait de cette féconde opéra-
tion , ferait la quantité de l'angle cherché.
Manière de lever avec cet infiniment le plan d'un
champ , d'un bois , d'un pure , &c. Soit ABCDEFGK
(fig. 21.) un enclos dont on veut lever le plan.
i°. Placez Pinftrument en A; & la fleur -de -lis
étant tournée vers vous , dirigez les pinnules vers B :
fuppofons que l'extrémité auftrale de l'aiguille tombe
alors fur 191 degrés , & que le fofle , la muraille ou
la haie mefurée à la chaîne , contienne dix chaînes
75 chaînons ; ce que vous écrirez , afin de vous en
reflbuvenir. foye^ Chaîne.
20. Placez Pinftrument en B , & dirigez comme
ci-defliis les pinnules vers C, fuppolànt que l'extré-
mité auftrale de l'aiguille tombe, par exemple, à
279 degrés , & que la ligne B C contienne fix chaî-
nes 8 3 chaînons , vous les marquerez comme ci-def-
fus : tranfportez enfuite Pinftrument en C; tournez les
pinnules vers D , & mefurez C D.
Procédez de la même manière aux points D ,E ,'
F, G , H, & enfin au point K , marquant toujours
les degrés de chaque ftation ou angle , & les lon-
gueurs de chacun des côtés.
Ayant ainfi fait le tour du champ , vous aurez la
table fuivante.
A 191 • 00 10 75
B 279 00 6 85
C, &c. 216 30 7 82
Stations. Degrés. Minutes. Chaînes. Chaînons^
Au moyen de cette table , vous lèverez ou trace-
rez le plan du fcrrein propofé , fuivant la méthode
enfoignée aux mots Lever un Plan , Rappor-
teur , &c
Comme dans ces fortes d'opérations il eft pref-
que toujours plus important d'être exa£t qu'expédi-
tif , il eft à propos , pour vérifier fon travail , de voir
fi Pinftrument tranfporté , par exemple en B , la pin-
nule dirigée vers A , donnera le même angle qu'é-
tant en A , la pinnule dirigée vers B ; & ainfi des
autres ftations. F. Graphometre & Planchet-
te . ( E )
Cercle ou Anneau magique, eft un phéno-
mène qu'on voit allez fouvent dans les campagfles ,
&c. qui eft une efpece de rond que le peuple luppo-
foit autrefois avoir été tracé par les fées dans leurs
danfes.
Il y en a de deux fortes ; les uns ont fept ou huit
toiles de diamètre , & contiennent un galon pelé à
la ronde de la largeur d'un pie , avec un gafon verd
au milieu ; les autres font de dijférentes grandeurs ,
& font entourés d'une circonférence de gafon beau-
coup plus frais & plus verd que celui qui eft dans fe
milieu.
M, Jeflbp èc M. Walker , dans les Tranfaclions
C E R
Philofophlques , attribuent ce phénomène au tonner-
re : ils en donnent pour railon , que c'ell le plus lou-
vent après des orages qu'on apperçoit ces cercles.
D'autres auteurs ont prétendu que ces cercles ma-
giques étoient formés par les fourmis ; parce qu'on
trouve quelquefois ces infedles qui y travaillent en
troupes : mais quelle qu'en foit la caufe , il eft cer-
tain qu'elle efl naturelle & non magique , comme le
peuple fe l'imagine. Chambers.
Cercle , ( Chimie'). Les artiftes en Chimie fe fer-
vent d'un cercle de fer pour cofipcr les cous de cer-
tains vaiffeaux de verre ; ce qu'on fait de cette forte.
Cet infiniment étant échauffé, on l'applique à la
partie du vaiffeau de verre qu'on veut couper , 6c
on l'y tient jufqu'à ce que le verre foit échauffé :
on jette enfuite deffus quelques gouttes d'eau froi-
de, où on fouffle deffus $l froid ; & cette partie du
vaiffeau s'en fépare : c'eft ainfi qu'en coupe les cous
des cornues , des cucurbites.
Les Chimiftcs employent encore une autre ma-
nière de couper le verre : elle confilte à lier une
corde imbibée d'huile de térébenthine, ou une mè-
che de foutre , autour de l'endroit oii on veut faire
la fraûure ; enfuite on met le feu à la corde ; & lorf-
qu'après cela on jette un peu d'eau froide fur le mê-
me endroit , le verre fe fêle précifément à l'endroit
où la corde avoit été liée 6c bridée.
On peut auffi avec une pierre à fefil tracer un an-
neau fur la partie dtr verre qu'on veut couper ; en-
fuite approcher doucement de la lumière d'une chan-
delle la partie tracée , & lorfqu'elle eft chaude , y
porter avec le bout du doigt un peu d'eau froide, qui
fera cafTer le verre dans la partie du vaiffeau , qu'on
a tracée avec la pierre à fufil. Il faut pour bien opé-
rer, mettre la lumière entre le vaiffeau & foi, &
avoir à un de fes côtés de l'eau froide dans un vaif-
feau. (A/)
C rr.ES GOUDRONNÉS ; ce font dans Y artillerie,
de vieilles mèches ou de vieux cordages poiffés 6c
trempés dans le gaudron ou goudron , comme difent
quelques-uns , qui font plies & tournés en cercles. On
les met dans des réchaux pour éclairer dans une ville
affiégée. (Q)
C ER c C ES de hune , (Marine.) ce font de grands
cercles de bois qui font le tour des hunes par en-haur ;
autour des hunes on voit des cercles qui fervent à af-
lûrer les matelots pendant qu'ils font leurs manœu-
vres fur les hunes , où ils en ont beaucoup affaire ; 6c
fans ces cercles ils pourraient facilement tomber. On
tient les cercles plu* bas vers l'avant qu'aux autres en-
droits , afin qu'Us ne vaguent pas les cordages , & n'u-
fent pas les voiles ; & pour empêcher cela , on met
encore des fangles, ou tiffus de bitord tout autour.
Dans la Planche I. qui repréfente un vaiffeau, les
hunes cotées 14. font repréfentées de façon qu'on
peut y diitinguer afle? aiiement les cercles de hune.
/^oy^HuNE.
CERCLES de boute-hors , (Marine.) ce font des cer-
cles doubles de 1er, qu'on met à l'endroit des ver-
gues où l'on paffe les boute-hors, qui fervent à met-
tre les voiles d'étui.
Cercles ^c7.î,7;/"-j.'<. , (Marine.) c'eft
un cercle de fer autour du él ambraie , par où
le cabeftan paffe 6c tourne. (Z)
CERCLE à la corne, (Maicch.ilerie.) c'clt ou une
avulure, yoyeir Avaluri , ou bien des bourrelets de
cornes qui entourent le fabot , & qui marquent que le
cheval a Le pie trop feç , ec que la corne le dellé-
chant, fe retire, & ferre le petit pic. Cercle ou rond
fignirient la même choie que volte. V. \ 01 te. (/")
Cercies , efpece de cerceaux dont le fervent les
Tonnelliers. Ils ne différent des cerceaux ordinaires
que par leur grandeur. C'efl avec les cercles qu'on
relie les cijves, cuviers, 6c les bai-noires. Les cer-
C E R
837
ceaux ordinaires ne fervent que pour les. muids , fu-
tailles, barrils, &c. Les cercles fe vendent à la mole
comme les cerceaux ; mais la mole en contient moins.
Voyc^ Mole.
Cercles, (Hijl. mod.) dans l'empire d'Allema-
gne; ce font des efpeces de généralités ou diftridts ,
qui comprennent chacune les princes, les abbés, les
comtes , 6c les villes, qui peuvent par leur voifinage
s'affembler commodément pour les affaires com-
munes de leurs diltricts ou provinces.
Ce fut Maximilicn I. qui en 1500 établit cette di-
vifion générale des états de l'Empire en fix parties ,
fous le nom de cercles: fa voir, en ceux de Franconie,
de Bavière , de Suabe , du Rhin , de Weflphalie , &
de baffe-Saxe ; il y ajouta en 1 5 1 z ceux d'Autriche ,
de Bourgogne, du bas -Rhin, & celui de la haute-
Saxe ; difpofitions que Charles V. confirma à la dicte
de Nuremberg tenue en 1 ^zz. La Bourgogne n'avoit
pourtant pas fait jufques-là partie de l'Empire : mais
les empereurs de la mailoTi d'Autriche , qui étoient
alors en poffeffion des états de celle de Bourgogne ,
furent bien-ailes de l'y annexer , afin d'intérefîcr tout
l'Empire à leur défenfe & confervation. Charles V.
fit même pour ce fujet une bulle en 1 5 48 : mais Con-
ringius remarque que la branche d'Autriche établie
en Èlpagne, n'ayant jamais accepte cette bulle, le
cercle de Bourgogne n'a jamais été non plus vérita-
blement de l'Empire , 6c qu'il ne foui niffoit ni ne
payoit aucun contingent. On ne lai£e pas que de le
compter parmi les cercles, dont voici les noms tels
qu'ils font écrits dans la matricule de r Empire , quoi-
que le rang qu'ils y tiennent n'ait jamais été bien ré-
glé, & que la plupart d'entr'eux, fur-tout celui du
bas-Rhin qui comprend quatre électeurs , ne convien-
nent pas de l'ordre que leur affigne cette matricule :
Autriche, Bourgogne, Bavière, bas-Rhin, haute-Saxe ,
Franconie, Suabe, haut-Rhin, Weflphalie , ba^j-
Dès la première inftitution des cercles, pour y main-
tenir une police uniforme, on établit dans chacun ,
des dire&eurs ou chers choilis entre les plus puiffans
princes, foit ecclcliaitiques, foit féculiers , membres
de ce cercle, auxquels on attribua le droit de convo-
quer, quand la néceffité le requerroit, l'affemblée
des états de leur cercle ou province ; on établit auffi un
colonel , des capitaines , 6c des affeffeurs , afin que de
concert avec eux , les direct eurs puffent régler les af-
faires du cercle; ordonnefdes importions , 6c les re-
partir; veillera la tranquilke commune Cv particu-
lière; mettre à exécution les confftutionsdes diètes,
les décrets de l'Empereur, 6c ceux du coni'eil aulique
& de la chambre impériale; avoir infpection fur les
tribunaux, les monnoies, les péages , ce d'autres par-
ties du gouvernement. Outre ces reglemens généraux,
6c qui regardoient le bien de tout l'Empire, on en
fit de particuliers pour chaque cercle, 6c principale-
ment pour la manière dont les colonels 6c les affel-
i'eiirs , de la participation 6c de l'aveu des directeurs,
auraient a en uler dans chaque cercle , 6c menu
gard les uns des autres pour leur commune conler-
vation.
Les cercles font cnfemblc des affociations pour leur
fureté , 6c les princes étrangers envoyent à leurs af-
femblees des mun'i réfident ou
d'envoyé. En qualité de membre de l'Empù
payent deux fortes de taxe : l'une ordinaire, que cha-
que cercle fournit en deux termes égaux mus [<
pour l'entretien de la chambre impériale; & l'autre
extraordinaire, qui le paye par mois, & qu'on nom-
me mois Romains. Voy. Mois & Ci I . (6)
CERCLÉ , adj. en terri » fe dit des ton-
neaux relies de cercles.
Barillon en Anjou, de gueulles à trois barillets cou-
chés d'< ■ (O
CERCLER , v. ad. c'clt mettre les cercles ou cer-
838 C £ R
ceaux à un tonneau, une cuve. Voyei Cercler-
Cerceau.
* CERCOPES , f. m. pi. ( Mythologie. ) peuple de
de l'île Pithecufe , qu'Ovide dit avoir été transformes
en linges par Jupiter, pour les punir de leurs dé-
bauches.
* CERCOPITHIQUE , (Myth. ) efpece de linge
auquel les Egyptiens rendoient les honneurs divins :
on le repréléntoit avec un croiflant fur fa tête, & un
gobelet à la main.
* CERCURE , f. m. (Hift. anc.) petit vaiffeau de
pirate , inventé par les Cypriots : on croit que c'étoit
la même chofe que ce qu'on appelloit Yhcmioli. Voy.
Hemioli. .
CERDAGNE (la) , Géog. petite province d El-
pagne , dans la Catalogne , féparée du Rouflillon par
les Pyrénées ; une partie appartient à la France.
* CERDEMPORUS , {Myth.) l'urnom de Mercu-
re ; il fut ainli appelle de 't^opos , commerçant , parce
qu'il étoit le dieu des commerçans.
CERDONIENS , fub. m. pi. (Hift. ecclèf.) héréti-
ques qui parurent dans le fécond fiecle , & qui foû-
tenoient les erreurs de Cerdon leur maître, qui les
avoit empruntées de Simon le magicien.
Ce Cerdon , natif de Syrie , vint à Rome fous le
pape Hygin , & y féjourna long-terns, enléignant fes
erreurs tantôt en cachette, tantôt ouvertement. Il
feignit même de fe réunir à l'Eglife , & de faire pé-
nitence : mais il%n fut enfin abfolument chaffé. Il ad-
mettoit deux principes , l'un bon , & l'autre mau-
vais : ce dernier , félon lui , avoit créé le monde , &
étoit l'auteur de l'ancienne loi : l'autre qu'il appelloit
le principe inconnu, étoit le père de Jefus-Chrift. Cer-
don ajoùtoit que Jefus-Chrift n'étoit point né d'une
vierge, & qu'il n'avoit point fouffert réellement. Il
admettoit la réfurreftion de l'ame , & non celle de
la chair ; rejettoit tous les livres de l'ancien Tefta-
ment , & de ceux du nouveau ; il ne recevoit qu'une
partie de l'évangile de S. Luc. Tel étoit le patriarche
des Cerdoniens, dont les dogmes furent adoptés par
fon difciple Marcion. ^ov^Marcionites. (G)
CEREALIA , ( Hijl. anc. ) fêtes de Cerès, infti-
tuées par Triptoleme, fils de Celéus, roi d'Eleufine,
dans l'Attique , en reconnoiffance de ce que Cerès ,
qu'on croyoit avoir été fa nourrice , lui avoit appris
l'art de cultiver le blé & d'en faire du pain.
On célebroit à Athènes cleux fêtes de cette déefle ;
l'une nommée Eleujînes , & l'autre Thefmophories.
Voye{ Eleusines & Thesmophories.
Toutes deux , & en général toutes les folennités
de Cerès avoient cela de commun , qu'on les céle-
broit avec beaucoup de religion & de tempérance ,
jtifques-là qu'on s'abflenoit du vin & de tout com-
merce avec les femmes pendant ce tems-là , pour ho-
norer une divinité qui s'étoit diftinguée par la chaf-
teté tk. fa fobriété. Quelques critiques ont même pré-
tendu qu'en mémoire de ces deux vertus, on n'of-
froit point de vin à la déefle dans fes facrifices, &
que les libations s'y failoient feulement avec du mul-
J'um, forte de mixtion de vin & de miel bouillis en-
lemble ; & que c'efl: ce que Virgile appelle miti bac-
cho, du vin adouci: cependant Caton aflïïre expref-
fément qu'on s'y fervoit de vin : d'autres croyent
que Cerès feule n'étoit pas honorée dans ces fêtes ,
qu'on y révéroit encore Bacchus & Hercule, en
leur facrifiant des porcs ou des tmies avec du mul-
fum , à caufe que ces animaux caufent beaucoup de
dégât aux biens de la terre, dont Cerès & Bacchus
étoient regardés comme les divinités tutéiaires.
Ces fêtes paflerent des Grecs aux Romains , qui
les célebroient pendant huit jours, à compter depuis
le cinquième des ides d'Avril. Les dames feules vê-
tues de blanc , y faifoient l'office de prêtreffes ; & les
hommes habillés de la même couleur, celui de lim-
C ïl R
pies fpectateurs. Toute perfonne en deuil ou qui
avoit affilié à des funérailles , étoit exclue de cette
folennité : & après la bataille de Cannes, comme tou-
te la ville étoit dans un deuil univerfel , on fut obligé
de remettre à une autre année les fêtes de Cerès : en-
tre les autres cérémonies , celle-ci étoit remarquable ,
on ne mangeoit que le foir après foleil couché , par-
ce que Cerès en avoit fait de même en cherchant fa
fille Proferpinc enlevée par Pluton. On y couroit en-
core çà & là avec des flambeaux, pour repréfenter
les courfes inquiètes" de cette mère alarmée. On y
portoit en pompe , félon Macrobe , un œuf, ovum in
cerealis pompez apparatu numerabatur primum ; & cet
œuf, dit-on repréfentoit le monde ou la terre , que
Cerès avoit enrichie par le blé. Au facrifîce fuccé-
doient des feftins , fuivis de combats de gladiateurs ,
& de courfes de chariots dans le cirque. Les prêtres
de Cerès chez les Grecs étoient nommés Eumolpides,
d'Eumolpe fils de Triptoleme ; on les appelloit en-
core taciti myjîœ , parce qu'il ne leur étoit pas permis
de divulguer les myfteres de la déefle. (G)
* CEREIBA , (Hijl. nat. bot.) petit arbre du Bré-
fil , femblable au faille : on dit que quand le foleil
donne fur fes feuilles , il s'y amafle un fel qui le dil-
fout en rofée pendant la nuit, ou lorfqu'il y a du
brouillard. Si cette propriété eft particulière au cereU
ba, & qu'elle foit bien réelle, voilà un arbrifleau fuf*
fifamment défigné. On n'attribue au cereiba aucune
propriété médicinale.
CEREMONIAL, f. m. (Police.) c'efl l'afTembla-
ge des règles introduites dans l'ufage de la vie, &
auxquelles l'on eft obligé de fe conformer pour l'ex-
térieur , le maintien , les difeours , les habillemens ,
&c
On peut prendre ce mot dans un fens plus étroit ,'
& entendre par-là les ulages introduits , ou par des
ordres des fupérieurs , ou tellement établis par une
longue coutume , que l'on eft obligé de les regarder
comme des lois , & les refpect er : dans ce fens l'on
trouve que chez toutes les nations du monde on a
pratiqué de certaines cérémonies , tant pour le culte
de la divinité que pour les affaires civiles , dans les
mariages, enterremens , &c. Voye^ Cérémonie.
L'on entend en troilîeme lieu par cérémonial , la
manière dont les fouverains ou leurs ambaffadeurs
ont coutume d'en ufer les uns envers les autres ; ce
qui n'eft qu'une convention ou règlement établi en-
tre les princes, ex paclo , confuetudine & pojfeffione ,
fuivant lequel ces princes , ou leurs repréientans ,
doivent fe conduire les uns envers les autres lorf-
qu'ils fe trouvent enfemble , afin que l'on ne donne
à chacun ni trop ni trop peu.
Il y a des gens qui prennent le cérémonial dans un
fens encore plus étendu , & comptent trois occafions
où le t-tiV<;'/7zo«itf/eftnéceflaire;i0.lorfque les fouverains
s'aflèmblent en perfonne ; 2°. lorfqu'ils s'écrivent;
3°. lorfqu'ils s'envoyent des ambaffadeurs les uns
aux autres. Cette efpece de cérémonial vient de l'am-
bition , & de la fupériorité que l'un a cru avoir fur un
autre ; on lui a donné le nom de prérogative ou de pré-
Jéance : c'eft une fotirce inépuifable de difputes entre
les fouverains , qui ne font point dans la difpolition
de céder les uns aux autres ; & quoique fouvent on
ait travaillé à affigner à chacun un rang dont il put
être content, l'on n'a jamais pu y parvenir , fur-tout
en Allemagne.
Les moyens d'accommodement qui ont été pro-
polés , font l'arbitrage & le compromis : mais ils ont
été fouvent inutiles : la pofleffion ôc la force ont tou-
jours prévalu. (— )
* CEREMONIES , f. f. pi. (Hift. civ. & eccléf.) les
cérémonies font en général des démonflrations exté-
rieures & Symboliques , qui font partie des ulages de
la police ôf du culte d'une fociété. Voye^ Police &
C E R
ÇvLTe. Laiffant à d'autres le foin de chercher la vé-
ritable étymologie du mot ceremonia, & de décider
s il vient de Cereris mania , ou de Cœre munia , ou du
verbe Grec X'-r"'-, nous obferverons d'abord qu'il y
a , félon notre définition , trois fortes de cérémonies ;
des cérémonies politiques , telles que le couronnement
d'un prince , l'introduction d'un ambaffadeur , &c.
des cérémonies religieufes , telles que l'ordination d'un
prêtre , le facre d'un évêque , le baptême ou la béné-
didion d'une cloche, &c. des cérémonies politico-reli-
gieujes , c'ett-à-dire , où les mages du peuple fe trou-
vent mêlés avec la discipline de l'Eglife , telles que
la cérémonie du mariage prile dans toute ion étendue.
11 y a deux chofes principales à examiner fur les
cérémonies ; leur origine ,foit dans la fociété, foit dans
l.i religion , 6c leur néceffité dans la religion : quant
au premier point, il paroit que chaque cérémonie dans
la fociété a l'on origine particulière, relative à quel-
que fait primitif 6c aux circonliances de ce fait, 6c
qu il en eïl de même de l'origine de chaque cérémo-
nie dans la religion ; avec cette différence qu'on peut
rechercher ce qui a donné lieu à celles-ci , qui for-
ment tantôt unfyftème fage 6c raifonné, ou qui ne
font d'autres fois qu'un affemblage d'extravagances ,
d'abfurdités & de petiteffes, fans motif, lansliaifon,
fans autorité.
Il elt donc à propos dans cette recherche de dif-
tribuer les cérémonies religieufes en deux claffes; en
cérémonies pieufés & faillies , & en cérémonies fuperfli-
tieujcs & abominables.
Il n'y a eu de cérémonies religieufes pieufes & fain-
tes fur la furface de la terre, 1°. que le petit nombre de
celles qui accompagnèrent le culte naturel que les
premiers hommes rendirent à Dieu en pleine cam-
pagne , dans la fimplicité de leur cœur & l'innocen-
ce de leurs mœurs , n'ayant d'autre temple que l'u-
nivers , d'autre autel qu'une touffe de galon , d'au-
tre offrande qu'une gerbe , d'autre victime qu'un
agneau, & d'autres facrifîcateurs qu'eux-mêmes, 6c
qui ont duré depuis Adam jufqu'à Moyfe; x°. les cé-
rémonies qu'il plût à Dieu de prelcrire au peuple Juif,
par fa propre bouche ou par celle de les pontifes &
■de les prophètes , qui commencèrent à Moyfe , &
que Jefus-Chritt a abolies; 3°. les cérémonies de la re-
ligion Chrétienne, que fon divin inltituteur a indi-
quées , que les apôtres 6c leurs fucceffeurs ont infir-
mées, qui font toujours fanctifiées par l'ciprit des mi-
niltres qui les exécutent, & des tidi.ies qui y affû-
tent, & qui dureront jufqu'à la tin '.les ficelés.
L'origine de ces cérémonies elt fondée fur l'Hiffoi-
re, & nouseft tranlmile par des livres lur l'authenti-
cité delquels il n'y a point de doute. Elles furent
chez les premiers hommes des mouvemens de la na-
ture inlpirée ; chez les Juifs , une portion des lois
d'un gou vernement théocratique ; chez les Chrétiens,
des !\ mboles cle toi, d'elpérance, & de charité ; &il
ne peut y avoir lur elles deux ientimens.Loin donc de
nous les idées de Marsham 6c de Spencer ; c'elt pref-
qu'un blafphème que de déduire la cérémonies du Lé-
vitique , des rites Egvpticns.
Mais il nen elt pas de même des cérémonies fuperfli-
tieufes : il femble qu'à l'exception de ce que les fain-
1 I eritures nous en apprennent, le relie foit ei>
fièrement abandonné aux difputes de la Philolophie ;
6c voici en peu de mots ce qu'elle nous luggere de
plus railonnable. Elle réduit les cauies de l'idolâtrie
à la flatterie, à l'admiration, à la tcmlrclle , à la
crainte, a l'efpérance , mal entendues; voya^ IDO-
LATRIE-: coniéquemment il paroit que toute-- les cé-
rémonies fupcrjliricufes ne (ont que (les exprelîions de
ces différens lentimens, variées lelon l'intérêt, le
caprice, & la méchanceté des prêtres idolâtres. Fai-
tes une combinaifon des pallions qui ont donné naif-
fance aux idoles , avec celles de leurs minuties, &
C E R
839
tous les monttres d'abomination & de cruauté qui
noirciffent les volumes de nos hiltoriens & de nos
voyageurs ; vous les en verrez fortir , fans avoir re-
cours aux conjectures d'Huet, de Bochart, de Yol-
fius , & de Dicklnfon, où l'on remarque quelquefois
plus de zèle que de vraisemblance.
Quant à la queftion de la néceffité des cérémonies
pour un culte , fa folution dépend dune autre ;
lavoir, fi la religion elt faite pour le feul philo-
fophe, ou pour le philofophe & le peuple : dans le
premier cas , on pourroit peut-être foûtenir que les
cérémonies font fuperflues, puifqu'elles n'ont d'autre
but que de nous rappeller les objets de notre foi &
de nos devoirs , dont le philofophe fe fouvient bien
fans le fecours des fignes fcnlibles : mais la reli-
gion eft faite indistinctement pour tous les hommes,
comme il en faut convenir ; donc , comme les prodi-
ges de la nature ramènent fans ceffe le philofophe à
l'exiltence d'un Dieu créateur; dans la religion Chré-
tienne , par exemple , les cérémonies ramèneront fans
ceffe le chrétien à la loi d'un Dieu crucifié. Les re-
prélentations fenlibles, de quelque nature qu'elles
foient , ont une force prodigieule fur l'imagination
du commun des hommes : jamais l'éloquence d'An-
toine n'eût fait ce que fit la robe de Céfar. QuoJ lit-
teratis efl feriptura , hoc idiotis prœflat piclura , dit laint
Grégoire le grand , in. IX. épie. ix.
CERENZA , ( Géog. ) ville d'Italie au royaume
de Naples,dans la Calabre citérieure. Long. 34.
ào. lat. 39-23-
* CERÈS, (Mytk.) fille de Saturne & de Cybele,
&: déeffe de l'agriculture. Lorlque Piuton eut enle-
vé fa fille Proferpine , elle le mit à la chercher nuit
6c jour : cependant la difette de grains deioloit la
terre privée de les dons. Les dieux etoient très -in-
quiets de fon abfence , lorlque Pan la découvrit* Les
Parques député-espar Jupiter l'attendrirent, & la ra-
menèrent en Sicile , où elle rendit à la terre la ferti-
lité. On la représente avec beaucoup de gorge , la
tête couronnée d'epis , & des pavots dans la main ,
ou entre deux petits enfans tenant chacun une cor-
ne d'abondance. On lui donne un char attelé de
ferpens ailés , avec une torche allumée. Le myrte
6c la narciffe étoient les feules fleurs dont on le cou-
ronnât dans les fêtes. On lui attribue une aventure
dont la fin efl affez fcandaleule. On dit que pour
éviter les pourfuites amoureufes de Neptune fon frè-
re , elle fe métamorphola en jument ; ce qui d 'empê-
cha pas le dieu de le latisfaire lous la forme d'un
cheval ; il en eut Arion & un cheval. Le:. Phigaliens
adorèrent une Ceres à tête & crinière de jument , d'où
fortoient des dragons & d'autres monltres. Cette lia-
nte ayant ete incendiée par accident, les Phigaliens
oublièrent le culte de la déeffe, qui s'en \
par une grande lechereffe qui les au: oit conduits jut-
qu'à manger leurs propres entans, s'ils ne l'ayoient
arrêtée en rétabliffant le culte de Cens la noire, car
c'elt ainli que leur Çeris s'appelloit. Quoi qu'il en foit
de toutes ces extravagances , Jes Mythologrftes pré-
tendent que Ceris tut une reine de Sicile qui mérita
îles autels, par l'invention de l'agriculture qu'elle
communiqua à tes peuples. Voyt{ U DÏ3 de
CERET , ( Géog. ) petite ville de France dans le
Rouffillon, fur la rivière de Tec. Long. 20.
42- 13-
L ERF, cenulùs , (Mft. anc. c- mod.) elpcce de
jeu ulite parmi les payens, èv dont l'ulage s étoit au-
trefois introduit parmi les», lire:;,
fe traveltir au BOUVel an fous la fon - rs ani-
maux. Les eedéfiaftiques '■■- -
l'on contre un abus li indigne
ne fut point fans peine qu'us pan inrent a i<. ... cir
ner. / Ducànga
* Cerf, f. m. ( Hift. rut. e tniraal
84o C E R
quadrupède , ruminant , qui a le pie fourchu , les
cornes branchues, non creufes, & tombant chaque
année : voilà les cara&eres généraux fi» leiquels on a
établi le genre d'animaux qui portent le nom de cerf,
cervinum genus : ce genre comprend le cerf, le dain,
l'élan, le renne, le chevreuil, la giraffe , &c. Voye{
ces derniers à leurs articles.
Le cerf proprement dit eil de la grandeur d'un
petit cheval ; l'on poil eft de couleur fauve rougeâ-
rre ; fes cornes font longues, & d'une coniiftance
très-dure ; le devant de la tête eft plat ; les yeux font
grands ; les jambes longues & menues , & la queue
courte.
On prétend que les cerfs vivent très-long-tems :
on a dit que la durée de leur vie s'étendoit à plu-
fieurs fiecles : on a même avancé jadis qu'ils vivoicnt
quatre fois aufïï long-tems que les corneilles , à qui
l'on donnoit neuf fois la durée de la vie de l'homme.
On peut juger de cette fable par le réfultat , qui affi-
gneroit aux cerfs trois mille fix cens ans de vie.
Pline a affûré qu'on en avoit pris un plus de cent
ans après la mort d'Alexandre , avec un collier d'or
chargé d'une infeription , qui marquoit que ce col-
lier lui avoit été donné par ce prince. On en raconte
autant de Céfar. On dit aufii que l'on trouva la bi-
che d'Augufte plus de deux fiecles après fa mort. On
fait l'hiftoire du cerf chaffe par Charles VI.
On connoît la vieillerie, mais non l'âge des cerfs ,
aux pies & à la tête , ainfi qu'aux allures. Ils ont à
fept ans leur entière hauteur de corps èc de tête.
On raconte de leurs courfes , de leurs repofées , de
leur pâture , reffûi , diète , jeûnes , purgations ,
circonfpeûion , manière de vivre , fur tout lorfqu'ils
ont atteint l'âge de raifon , une infinité de choies
merveilleufes , qu'on trouvera dans Fouilloux , Sal-
novt , &c. qui ont écrit de la chaffe du cerf en enthou-
fiaftes , &c.
Age & difinction des cerfs. Depuis qu'un cerf eh1 né
jufqu'à un an paffé , il ne porte point de bois , &
s'appelle faon. En entrant dans la féconde année, il
pouffe deux petites perches qui excédent un peu les
oreilles; on appelle ces perches dagues, & ces jeunes
erfs , daguus. La troifieme année les perches qu'ils
pouffent fe femerrf de petits andouiilers , au nombre
de deux à chaque perche. Les quatrième & cinquiè-
me année , la tête prend 8 , 10 , 12 pouces de long.
La iixieme , dans laquelle le Cirr/s'appclle cerf dix cors
jeunement , la tête prend 12 à 14 pouces. La feptie-
me, dans laquelle il s'appelle csifde dix cors , elle
prend 16, 18, 20, & 24 pouces. La huitième an-
née , il prend le nom de grand c;f; Se la neuvième ,
celui de grand vieux cerf.
Du rue des cerfs. Les v'uux cerfs , les cerfs de dix-
cors , & ceux de dix cors jeunement , entrent en cha-
leur au commencement du mois de Septembre ,
quelquefois plutôt ou plûtard de fept à huit jours : il
leur prend alors une mélancholie qui dérange confi-
dérablement la faoeffe de leur conduite. Ils ont la
'tète baffe ; ils marcheat jour èv nuit , ce qui s'appelle
rnufer ; ils deviennent furieux ; ils attaquent l'hom-
me, &c cet état dure cinq ou fix jours, au bout
defquels ils entrent dans la forte chaleur du rut,
beuglent , ce qui s'appelle raire , ou réer, cherchent
les biches , les poursuivent , èk: les tourmentent,
, le rut de ces cerfs, commence celui des jeu-
nes, qui s'emparent des biches en i'abfence des vieux,
& fe contentent de leurs refies.
Le fort du rut eft depuis quatre heures du foir juf-
qu'à neuf heures du matin : Ils ont alors e.nîr'eux
des combats oii il y en a de blefies , & même de
tués : leurs cornes s'entrelacent ; ils relient pris tête
contre tête , & font dévorés des loups. Ceux qui
voudront lire des merveilles de leurs combats amou-
reux , pourront confulter les auteurs que nous avons
cités plus haut.
C E R
Le rut des grands cerfs dure trois fcmaines,'dans
lefquelles ils ont quinze à feize jours de forte chaleur ;-
le rut des jeunes cerfs dure douze à quinze jours : ainfi
le tems du rut en général eft d'environ cinqfemaines.
Alors la chaffe en eft dangereufe , & pour les chaf-
feurs & pour les chiens : le «//"répand , dit-on , dans
le rut une odeur fi forte & fi puante , que les chiens
refufent quelquefois de le chaffer.
Le rut de la biche eft plus tardif que celui des
cerfs ; un cerf en faillit jufqu'à quinze ou feize.
La biche eft plus petite que le cerf; elle n'a point
de cornes ; fes mamelles font au nombre de quatre,
comme celles de la vache ; elle porte pendant huit
mois &: n'a qu'un faon , qu'elle garde jufqu'au tems
du rut.
Charles I. roi d'Angleterre , dont Harvey étoit
Médecin, lui abandonna toutes les biches de fes
parcs : ce fut au-dedans de ces animaux qu'il cher-
cha à découvrir le myftere de la génération. Harvey,
dit M. de Maupertuis , dans fa Venus phyfique ropuf-
cule 011 l'eiprit &c les connoiffances fe font re-
marquer également , immolant tous les jours quel-
que biche dans le tems 011 elles reçoivent le mâle ,
Se difiequant leurs matrices , n'y trouva jamais de
liqueur îéminale du mâle , jamais d'eeuf dans les
trompes , jamais d'altération à l'ovaire prétendu ,
qu'il appelle comme d'autres Anatomiftes, le tefdcuh
de la femelle. Les premiers changemens qu'il apper-
çût dans les organes de la génération furent à la ma-
trice; il trouva cette paiîie enflée & plus molle qu'à
l'ordinaire. Dans les quadrupèdes elle paraît dou-
ble , quoiqu'elle n'ait qu'une feule cavité ; ion fond
forme comme deux réduits qu'on appelle cornes ,
dans lefquelles fe trouve le fœtus. Ce furent ces
endroits qui lui parurent les plus altérés ; Harvey y
obferva plufieurs excroiffances fpongieuies , qu'il
compare au bout des tétons des femmes. Il en cou-
pa quelques-unes qu'il trouva parfemées de petits
points blancs enduits d'une matière viiqueuie ; le
tond de la matrice qui formoit leurs parois, jétoit gon-
flé & tuméfié comme les lèvres des enfajis , lorf-
qu'elles ont été piquées par des abeilles , oc telle-
ment moliaiîe, qu'il parodioit d'une confiftance fem-
blabîe à celle du cerveau.
Pendant.les mois de Septembre & d'Oftobre, tems
auquel les biches reçoivent le cerf tous les jours , &
par des expériences de plufieurs années , Harvey ne
parvint jamais à découvrir dans toutes les matrices
des biches , une feule goutte de liqueur iérr.inale.
Au mois de Novembre , la tumeur de la matrice
étoit diminuée , & les caroncules fongueufes deve-
nues fiafques : mais ce qui fut un nouveau fpectacle
pour l'obiervateur , des filets déliés, étendus d'une
corne à l'autre de la matrice , formoient une efpece
de réfeau femblabie aux toiles d'araignée, & s'infi-
nuant entre les rides de la membrane intérieure de
la matrice , ils s'entrelaçoient autour des caroncules,
à peu près comme on voit la pie-mere fuivre ôcem-
brali'er les conteurs du cerveau.
Ce réfeau forma bientôt une poche dont les de-
-hors étoiènt enduits d'une matière fétide , le dedans
lùie & poli contenant une liqueur fembiable au blanc
d'eeuf, dans laquelle nageoit une. autre enveloppe
fphérique, remplie d'une liqueur plu:, claire & çryf-
talline ; ce fut dans cette liqueur qu'il uppercut un
nouveau prodige. Cène tu: pointun animal tout or-
ganifé , comme on le devoit attendre ; ce fut k p:m-
cipe d'un animal, un point viivc/y/'Kc..: jul':;<s.
On le vit dans la liqueur cryliai, .'c bat-
tre, tirant ion accroiffement dune veine qui fe perd
dans la liqueur où il nage.
Les parties du corps viennent bienu't s'v joindre»
mais en différent ordre & en différent tems ; i_ ;
d'abord qu'un .mucilage di-. i/é, Qfl d^jj ^ - 3JEtfes mafr
CER
fes, dont l'une forme la tête, l'autre le tronc. Vers
la fin de Novembre le fœtus eft forme ; & tout cet
admirable ouvrage, lorfqu'il paroît une fois com-
mencé , s'achève promptement : huit jours après la
première apparence du point vivant , l'animal eft tel-
lement avancé , qu'on peut diftinguer fonfexe. Mais
cet ouvrage ne le fait que par parties ; celles du de-
dans font formées avant celles du dehors ; les vifcc-
res & les inteftins, avant que d'être couverts du tho-
rax & de l'abdomen ; & ces dernières parties defti-
nées à mettre les autres à couvert , ne paroiffent
ajoutées que comme un toît à l'édifice. Voy. la Venus
Phyflque de M. de Maupertuis.
Nous avons rapporté ici toutes ces particularités
fur la formation du faon ; parce que la génération
pourroit bien s'exécuter autrement dans un autre
animal , quoique Harvey ait voulu généralifer fes
expériences fur les biches , & les étendre à tous les
autres quadrupèdes.
Retraite. Après le rut , le cerf maigre , décharné ,
&c. fe retire au fond des forêts où il vit de gland ,
de feuilles, de ronces , de la pointe des bruyères, de
creffbn , &c.
Attroupement. Au mois de Décembre les cerfs s'at-
troupent ; les vieux cerfs , ceux de dix cors, quelques-
uns de dix cors jeunement, (e mettent enfemble. Ceux
qui font un peu au-deffous de cet âge , forment une
autre troupe ; les daguets &C ceux du fécond bois , ref-
tent avec les biches. Il n'eft pas donné à tout le
monde d'appercevoir l'exactitude de ces diftribu-
tions : mais quoiqu'il en foit, il ertconftant que plus
l'hyver eft rude , plus les troupes font grandes. Ces
animaux fe placent fort près les uns des autres à la
repolée afin de s'échauifer.
Changement de pays & de viandis. Les cerfs chan-
gent pluiîeurs fois l'an de pays & de viandis ;
ils gardent le fond des bois en hyver , & y vivent ,
comme on a dit plus haut ; au printems ils vont aux
buifibns , bois coupé d'un an , feigle , blé , pois , fè-
ves , &c. Ils gardent les buifibns tout l'été , & vian-
dent aux mêmes endroits : en automne , ils fe rap-
prochent des grands bois , & vivent du regain , des
chaumes , des avoines , des prés.
Séparation , mue , & chute des têtes. Vers la mi-Fc-
vrier , ou au commencement de Mars , les cerfs fe fé-
parent ; ils ne reftent que deux ou trois enlemble
pour aller aux buifibns mettre bas leur tête. Il ne
s'agit ici que des cerfs de dix cors, de dix cors jeun ement,
& vieux cerfs ; les autres fe contentent de s'éloigner
feulement du milieu de la forêt.
Au printems ils muent ; &c il s'engendre fur eux
entre cuir & chair des puftules ou ulcères , dans lef-
quels il fe forme des vers qui leur fortent par le go-
fier , la gueule , les narines ; quelquefois ils en meu-
rent : on dit que leur fang fe purifie par cette voie.
C'eft encore à des vers qu'on attribue la chute de
leur tête ; on dit que cette vermine fe gliffant le long
du cou entre cuir & chair , fe place entre le maf-
facre & la tête, cernent tout cet endroit, chagrinent
le cerf , oc lui font agiter les cornes lî violemment ,
qu'elles fe détachent : les deux cornes ne tombent
point toujours en même tems ; ce qui fait qu'on n'en
trouve allez fouvent qu'une dans un même endroit.
Il y en a qui prétendent que lorfqu'un cerf a perdu
fon bois, il s'enfonce dans la forêt, s'y cache, &
n'ofe paroître. Quoiqu'il en foit, pende tems après
cette chute , il fe forme fur le mxjfiicre, ou L'endroit
que les cornes ou la tête couvraient , une peau dé-
liée garnie de poils gris de fouris, fous laquelle les
meules craifient & fe gonflent. On entend par meules,
la tige des cornes. L'accroifiément Se le gonflement
des meules fe font en cinq ou lix jours. Les vieux
cerfs , cerfs de dix cors , ce cerfs de dix cors jeunement ,
mettent bas les premiers , &c pielque tous en même
Tome II,
CER
841
tems. Quand la peau a couvert les meules , la tête
poulie ; & quinze jours après elle a un demi-pié , &
les premiers andouillers ont quatre doigts : au bout
de quinze autres jours, elle croît d'un autre demi-
pié & davantage , & les féconds andouillers ont trois
doigts ; les premiers font augmentés d'autant ; l'ac-
croifiement continue : à la mi-Mai, les cerfs de dix
cors , & de dix cors jeunement , ont pouffe leur tête à
demi , & toutes entières à la fin du mois de Juillet.
Les jeunes au huitième & dixième d'Août feulement,
quoiqu'ils ne mettent bas que trois femaines après les
cerfs de dix cors : quand les cerfs ont pouffé leur tête,
& qu'elle eft dure , ils en ôtent la peau velue qui la
couvre en fe trottant au bois ; on nomme cette peau
moufj'c , & frayoir la trace qu'ils font au bois : elle
fert aux chafièurs à reconnoître non-feulement la
préfence du cerf, mais encore fon âge. On dit que le
cerf mange avidement toutes ces particules de peau,
dont il débarrafle fa tête nouvelle.
Connoiffance de la tète. Les meules font adhérentes
au majfacre : cette fraife en forme de petit rocher ,
qui eft plus haut & qui les entoure , s'appelle pier-
rure : ce qui s'élève du rocher , perche ou mairin ■ ce
qui part des perches , andouillers. Les andouillers les
plus près des meules fe nomment maures andouillers ,
les luivans s'appellenty£<rcW5, troifiemes , & quatriè-
mes andouillers & fur-andouillers. Les fur-andouillers
partent de Yempaumùre. On entend par une empau-
mûre , une largeur placée à l'extrémité de la tête aux
cerfs de dix cors , car les jeunes n'en ont point. Cette
largeur a la forme de la paume de la main , & les fur-
andouillers en partent comme des doigts ; le grain du
bois s'appelle perlure , &c les deux maîtreffes rainu-
res , dont le fond eft liffe , & qu'on voit pratiquées
entre la perlure , s'appellent gouttières.
Connoiffance de l'âge du cerf par le pie & l'allure. Il
eft ailé de confondre les grofies biches brehaines &
les biches pleines avec les cerfs , fur-tout jeunes ; ce-
pendant les pinces de la biche font plus oblongues &
moins rondes. Plus un cerf eft jeune , plus il a l'ongle
petit & coupant. Quant aux allures , le jeune cerf 'met
ion pié de derrière dans celui de devant , n'en rom-
pant que la moitié ; celui de dix cors jeunement , met
le pié de derrière fur le bord du talon du pié de de-
vant; celui de dix cors, à un doigt près de celui de
devant ; &ile vieux cerf, à quatre doigts. Il n'y a point
de règles pour les biches. Cet article eft beaucoup
plus étendu dans les traités de Chafje. Voye^ Salnove,
Fouillou, & les dons de Latone.
Des fientes ou fumées. Les fumées peuvent auffi fer-
vir à diftinguer le «//'d'avec la biche , & le jeune
cerf du vieux cerf; elles changent félon les faifons :
en hyver elles font dures , lèches , & en crottes des
chèvre; en Mai elles deviennent molles, en bouzes ,
plattes , rondes & liées : en Juin , rondes , en maffes ,
mais commençant à fe détacher : fur la fin de Juin ou
au commencement de Juillet, en torches, ou demi
formées & féparées : fur la fin de Juillet, longues, du-
res , aiguillonées ou martelées. Quand les cerfs les
ont en boules , les biches brehaines les ont maffives,
aiguillonées, martelées, ridées, ce qui leur dure
tout l'ete.
Des portées. On entend par portées , l'effet que le
«reproduit contre les branches des arbres, par le
frottement de l'on corps & le choc de fon bois. Les
cerfs de dix cors commencent à faire des portées à la
mi-Mai, & les jeunes cerfs en Juin, leur tête étant
alors à demi pouffée & allez haute. 11 faut que Jes
portées foient à la hauteur de 6 pies, pour être d'un
cerf de dix cors. La largeur y fait peu de choie.
De la chaffe du cerf. Cette partie de notre article
feroit immenle, fi nous voulions l'épuifer. Nous al-
lons feulement en parcourir fuccinctemcnt les points
principaux : tels font 1j qutu9 le rendez-vous } Le.
O Oooo
842
C E R
C E R
choix du cerf, la meute , les relais , le laiffê-courre , le
lancer, la chaffe proprement dite , les ru/es, le forcer, la
mort , la curée , & la retraite.
Des quêtes. Après ce que nous avons dit des chan-
gemens de pays & de viandis , on fait en quel lieu
les quêtes doivent être faites , félon les différentes
faiions. Lorfque l'on fe propofe de courre un cerf,
on va au bois les uns à cheval fans limiers , les au-
tres à pié avec les limiers. On fépare les cantons ,
on diftribue les quêtes ou les lieux dans lefquels cha-
cun doit s'affûrer s'il y a un cerf ou s'il n'y en a point ,
ce qui fe fait à l'aide d'un limier qu'on conduit au
trait. Lorfque le limier rencontre , on l'arrête par le
trait , on examine fi c'eft un cerf, fans l'effrayer ni
le lancer , ce qui le feroit paffer d'une quête dans
une autre. Quand on s'eft bien affûré de fa préfen-
ce, on fait des brifées. On en diftingue de deux for-
tes ; les hautes & les baffes. Faire des brifées hautes ,
c'eft rompre des branches 6c les laiffer pendantes :
faire des brifées baffes , c'eft les répandre fur fa rou-
te , la pointe tournée vers l'endroit d'où le cerf vient,
& le gros bout tourné où le cerf va. Alors le cerf eu.
ce qu'on appelle détourné , & les brifées baffes fer-
vent à conduire le chaffeur à la répofée du cerf le jour
deftiné pour le courre.
Du rendez-vous. C'eft ainfi qu'on appelle un lieu
indiqué dans la forêt , où tous les chaffeurs fe raffem-
blent & d'où ils fe féparent pour la chaffe. Il faut le
choiiir le plus commode qu'il eft poffible.
Du choix du cerf. Lorfqu'il fe trouve du cerf dans
plufieurs quêtes , il faut préférer celle qui n'a qu'une
refuite à celle qui en a deux (on entend par refuite ,
le lieu par lequel le cerf a coutume de fortir); celle
où il n'y a qu'un feul cerf, à celle où il y en a plu-
fieurs ; attaquer au buiffon plutôt qu'au grand bois ,
& préférer le cerf de dix cors au jeune cerf.
Il y en a qui diftinguent trois efpeces de cerfs , les
bruns , les fauves , ôc les rougeâtres. Les bruns paf-
fent pour les plus forts & les plus vîtes ; les fauves
pour avoir la tête haute & le bois foible ; les rou-
geâtres pour jeunes & vigoureux. On eftime fur-tout
ceux qui ont fur le dos une raie d'un brun noir. La
règle eft de n'attaquer que les cerfs de dix cors.
De la meute. Une meute eft au moins de cent
chiens ; alors on la divife en cinq parties. Les vingt
qui donneront les premiers , s'appellent chiens de
meute; les vingt du premier relais , vieille meute ; les
vingt du fécond relais, féconde vieille meute ; le der-
nier relais , relais dejix chiens ; le nombre en eft ce-
pendant beaucoup plus grand , & il eft à propos de
réferver les meilleurs. On a encore quelquefois un
relais volant. Ce relais fe tranfporte 6c fuit la chalie ,
au lieu que les autres l'attendent.
Des relais. C'eft un proverbe parmi les chaffeurs,
qu'un cerf bien donné aux chiens eft à demi-pris. Il
eft donc à propos que ceux qui ont la conduite des
relais connoiffent les lieux 6c foient entendus dans
la chaffe , foit pour les placer convenablement, loit
pour les donner à tems. Il faut auffi des relais de che-
vaux ; il faut placer les meilleurs coureurs au pre-
mier relais.
Du laiffê-courre. On donne ce nom au moment 6c
au lieu où on lâche les chiens , quand on eft arrivé à
l'endroit où le cerf a été détourné. Lorfque les relais
font placés , on fuit les brifées & l'on s'avance juf-
qu'aux environs de cet endroit ; enfuite on lâche
quelques-uns des meilleurs chiens. Ceux qui doivent
faire chaffer les chiens fe nomment piqueurs ; il eft
effentiel de les avoir excellens. Leur talent principal
eft de favoir animer les chiens du cor & de la voix ,
& avertir exactement les chaffeurs des mouvemens
du cerf.
Du lancer. On lançoit jadis avec les limiers , au-
jourd'hui on découple dans l'enceinte ; & le lancer
eft proprement le premier bond du cerf 'hors de fa re-
polée. Le piqueur l'annonce en criant gare ; il crie
vaucelet^ s'il voit la répolée , 6c tayau s'il voit l'ani-
mal.
De la chaffe proprement dite : elle commence à ce
moment , & confifte à fuivre le même cerf ians relâ-
che , malgré les rufes , & à le forcer.
Des rufes : on en raconte une infinité ; tantôt le
cerfchailé en fubftitue un autre à fa place , tantôt i!
fe jette dans la harde ou troupe des biches , fe mêle
â des beftiaux , revient fur les pas , tâche à dérouter
les chiens par des bonds , fuit un courant, &c. mais
il y a des chiens auxquels il ne donne jamais le chan-
ge. Le piqueur doit les connoître , 6c s'en tenir à ce
qu'ils indiquent.
On a remarqué qu'un cerf bleffé aux parties géni-
tales ou châtré dans la jeuneffe , ne porte point de
bois , refte comme une biche , & devient feulement
plus fort de corps ; que fi l'accident lui eft arrivé
après avoir déjà porté Ion bois , il continue de poul-
fer mais avec peine, & ne parvient jamais à fa per-
fection ; 6c que fi Ion bois étoit à fa perfection il ne
le perd plus.
Mort du cerf. Lorfque le cerf eft forcé , le piqueur
crie halali , lui coupe le jarret & fonne la mort. Ce-
pendant un autre lui enlevé le pié droit de devant ,
& va le préfenter au grand veneur. On met le refte
fur un chariot , oc on le porte au lieu deftiné pour la
curée.
De la curée. Les valets de chien mettent le cerfiwr
le dos & le dépècent. Ils commencent par couper les
daintiers , puis ils ouvrent la nappe ou peau , la fen-
dant fous la gorge julqu'où étoient les daintiers. Ils
prennent le pié droit , dont ils coupent la peau à l'en-
tour de la jambe , & l'ouvrent julqu'au milieu de la
poitrine ; ils en font autant aux autres pies , & ils
achèvent la dépouille. Cela fait, ils ouvrent le ven-
tre, & l'on diftribue l'animal par morceaux. On en-
lèvera la panlè, qui fera vuidée & lavée; le membre
génital ; l'os ou cartilage du cœur ; une partie du
cœur , du foie , 6c de la ratte , que les valets de li-
miers diftribueront à leurs chiens ; les épaules , les
petits filets ,, le cimier, les grands filets , les feuillets,
6c les nombres. On a conlervé le fang ; on a deux ou
trois féaux de lait ; on coupe la panie 6c les boyaux-
nettoyés avec le refte de la ratte & du foie ; on mêle
le tout avec le fang , le lait, & du pain : en hyver
qu'on a peu de lait , on y fubftitue du fain-doux. On
verie la moiiée fur la nappe , on la remue , alors la
curée eft prête. Refte le coffre du cerf & les petits
boyaux qu'on appelle le forhu. On met le coffre fur
une place herbue à quelque diftance de la moùée ,
6c le forhu fur une fourche de bois émouffée. Enfin
on abandonne les chiens à la moùée , &i enfuite au
coffre , puis au forhu , non fans avoir fonné toutes
ces manœuvres. On fonne en dernier lieu la retraite.
Nos ayeux exécutoient toutes les parties , tant de la
chaffe que de la curée , avec autant 6c plus de céré-
monies qu'on n'en fait dans aucune occafion impor-
tante. Ils chaffoient un cerf "à peu près comme ils at-
taquoienr une femme , & il étoit prefqu'auffi humi-
liant pour eux d'échouer dans l'une de ces entrepri-
fes que dans l'autre. Le goût de la chaffe du cerf s'eft
augmenté parmi nous ; quant au cérémonial qui l'ac-
compagnoit , il a prefqu'entierement difparu , 6c la
chaffe ne s'en fait pas plus mal.
La partie la meilleure à manger du cerf, eft le cou
avec les trois côtes qui en font les plus proches; le ref-
te eft dur 6c indigefte. Les petits cerfs , laclantes , font
les meilleurs ; puis ceux d'un an , adolefcentes ; enfuite
ceux de deux ans, juvenes} paffé ce tems ils font durs
6c mal-fains. On dit auffi que leur chair eft un mau-
vais aliment pendant l'été , parce qu'ils fe nourriffent
de ierpens 6w de reptiles, ce que peu de gens cioyent.
C E R
Propriétés médicinales. Le «//contient dans toutes
fes parties beaucoup de fel volatil & d'huile : les meu-
les & cornes nouvelles prifes en gelée facilitent l'ac-
couchement : fes grandes cornes Te râpent ; cette ra-
pure entre dans les tifannes , les gelées , les bouillons
&c plufîeurs poudres & éleduaircs ; elle eft bonne
pour arrêter le cours de ventre & le flux hémorrhoi-
dal ; elle fortifie & reftaure : on la diftille & on en tire
un fel &c une huile volatile. On la prépare philofo-
phiquement.
L'os ou cartilage du cœur a pafTé pour un cordial
aléxitere & bon dans les crachemcns de fang. On em-
ployé la moelle de cerf en Uniment dans les rhuma-
tifmes, la goutte fciatique, & les fradures. Sa graif-
fe eft émolliente, nervale , & réfolutive : fon fang eft
litdorifique : on le donne defféché &C en poudre à la
dole d'un demi-icrupule. Le pnape excite, dit-on,
la femence St. foulage dans la dilTenterie ; on l'ordon-
ne dans l'un & l'autre cas depuis un demi-fcrupule
jufqu'à une drachme. La veflîe appliquée guérit la
teigne. Au refte , fi ces remèdes ont quelque effica-
cité , elle dépend uniquement du fel volatil &c de
fhuile.
L'huile volatile de corne de cerf eft. fétide : on la
re&ifie par plufîeurs cohobations ; & lorfqu'elle eft
claire & lans mauvaife odeur , on l'employé dans les
affections nerveufes , les foulures , les paralylies , en
Uniment fur l'épine & l'origine des nerfs. On fait en-
trer le fel volatil dans les potions cordiales , fiidori-
fiques , & anti-épileptiques , à la dofe d'un fcrupule. Il
palTe pour antifpafmodique , & on l'applique fous le
nez dans la catalepfie , le carus , & autres maladies ,
tant foporeufes que convullîves.
Ettmuller &c Ludovic vantent l'efprit volatil de
corne de cerf comme un grand alexipharmaque , Se le
recommandent dans les affe&ions malignes.
Ufages de quelques parties du cerf dans les Arts. On
travaille fa peau; & au fortir des mains du Chamoi-
feur & du Mégilfier , après qu'elle a été paflee en
huile , on en fait des gants, des ceinturons , &c. Les
Fourreurs en font aufti des manchons. Les Selliers le
fervent de la bourre ou du poil que les Mégiffiers &
Chamoifeurs ont fait tomber de la. peau , pour en
rembourrer en partie des felles & des bâts. Les Cou-
teliers refendent la corne à la feie , &C en tirent des
manches de couteau. On fait beaucoup plus de cas
du bois de «//enlevé de delïus la tête de cet animal
tué , que de celui qu'il met bas quand il eft vivant ,
& qu'on ramalTo fur la terre.
On trouve dans les forêts de Bohème des cerfs qui
ont au cou de longues touffes ou floccons noirs : ils
palïcnt pour plus vigoureux que les autres.
On dit qu'il ne fe trouve point de fiel à fon foie ;
Se l'on préfume à la couleur & à l'amertume de la
queue , que c'eft-là qu'il le porte.
Il y a un li grand nombre de cerfs au royaume de
Siam, qu'on en tue plus de cent cinquante mille par
an, dont on envoyé les peaux au Japon.
Il y a aux Indes occidentales des troupeaux de
cerfs privés , que des bergers mènent paître dans les
champs comme des moutons. Les habitans de ces
contrées font des fromages de lait de biche.
Il y a plufîeurs efpeces de cerf. Celle qui mérite le
plus d'être remarquée à caule île la petitelic , eft dé-
signée clic/ les Naturaliiles par ces mots , zervusper-
pufîllus,ju\cncus, Guincenfis , & le trouve en Guinée
ainfi que la phrafe l'indique. / "<n '*{ Seba , tom. I.pagt
JO. & nos Planches d'Iii/ioirc Naturelle , Plane. III.
fg. J. f-'oye^ aufft fa corne en A , même Planch. Il n'a
pas plus d'un demi-pié de hauteur , prile depuis l'ex-
trémité de ion pié de devant jufqu'au - deffus de fa
tète. Cette hauteur prile du pié de derrière julqu'au-
deflus de la croupe , n'a guère plus de quatre pouces;
ÔC il n'en a pas cinq de la queue au poitrail. 11 a la
Tome II.
C E R
843
tête fort grofle & les oreilles fort larges , relative-
ment au refte de fon corps ; fes jambes font très-me-
nues. Sa corne a plus de deux pouces de long fur un
demi-pouce de large à la bafe : elle va toujours en
diminuant & fe recourbant un peu. Elle paraît creu-
fe, &C porter cinq à fix rainures circulaires placées
les unes au-deffiis des autres , qu'une longue gout-
tière qui part prefque du bout de la corne vient tra-
verfer. Il a l'œil grand , & à en juger par la figure de
Seba , le poil un peu hérifle. Il a deux mouftaches ,
& quelques poils de barbe fous la mâchoire inférieu-
re. Voilà tout ce que fa figure indique , & l'hiftoire
ne nous en apprend pas davantage. On voit dans
Seba , la patte d'un cerf, plus petit encore que celui
que nous venons de décrire.
CERF de Canada, {Hifl. nat. Zoolog.} celui qui
a été décrit dans les Mém. de CAcad. royale des Se.
étoit fort grand : il avoit quatre pies depuis le haut
du dos julqu'à terre. La longueur de fon bois étoit
de trois pies : les premières branches que l'on appelle
andouillers avoient un pié ; les fécondes branches dix
pouces, Si les autres à proportion. Ces branches
étoient au nombre de fix à chaque bois , c'eft-à-dire
à chaque corne. Les cornes étoient recouvertes d'u-
ne peau fort dure & garnie d'un poil épais & court
de couleur fauve un peu obfcure , comme le poil du
corps. Celui des cornes étoit détourné en forme d'e-
pi en plufîeurs endroits , &c la peau avoit une grande
quantité de veines & d'artères remplies de beau-
coup de fang ; & la corne étoit creufée en filions ,
dans lefquels ces vaifleaux rampoient. On n'obferva.
dans ce cerf de Canada rien de différent de nos cerfs
ordinaires.
On a joint à cette defeription celle de deux bi-
ches de Sardaigne. Leur hauteur étoit de deux pies
huit pouces depuis le haut du dos jufqu'à terre. Le
cou avoit un pié de longueur; la jambe de derrière
depuis le genou julqu'à l'extrémité du pié , deux pies
de longueur, & un pié jufqu'au talon. Le poil étoit de
quatre couleurs , fauve , blanc , noir , & gris : blanc
fous le ventre 6c au-dedans des cuiffes & des jam-
bes ; fauve-brun lur le dos; fauve - ifabelle lur les
flancs ; l'un Si l'autre fauve au tronc du corps , étoit
marqué de taches blanches de différentes figures. Il
y avoit le long du dos deux rangs de ces taches en
ligne droite ; les autres étoient parlemées fans ordre.
On voyoit de chaque coté une ligne blanche fur les
flancs. Le cou & la tète étoient gris. La queue etoit
blanche par-defl'ous & noire par-dellus, le poil avant
fix pouces de longueur. Tome III. Part. II. t'oye^
Quadrupède. ^
Cerf-volant, lucanus , (Hifl. nat.~) infecle du
genre des fearabées. On lui a donné le nom de cerfvo-
lant , parce qu'il a deux grades cornes longues , bran-
chues , & faites en quelque façon comme celles du
cerf On l'appelle aulii taureau volant , parce qu'il eft
très-gros en comparaison des autres infeéres de fon
genre. 11 eft noir , ou d'un noirrougeàtre , principa-
lement fur les faunes ailes 6c fur la poitrine. Ses deux
cornes font quelquefois auffi longues que le petit
. elles font égales, femblables l'une à l'autre,
èv mobiles ; leur extrémité eft divilee en deux bran-
. elles ont un rameau cv des dentelures fur leur
cote intérieur. Les yeux font durs , preeminens ,
blanchâtres , & places à côté des cornes : il y a en-
tre-elles deux autres petites cornes ou antennes fai-
tes en tonne de mall'ue , ce placées au milieu du
front , Si deux autres plus longues entre les grandes
cornes Se les veux. Il a fix pattes, dont les deux
premières font les plus longues Se les plus grades.
La tête eft plus large que la poitrine. Ces mledes
ferrent affez fortement ce qu'ils ont laili avec leurs
groflès cornes. Ils vivent encore long-tems après
qu'on a fêpaxé la tète du refte du corps. Il y a d'au-
O O o o o ij
qu
844
C E R
très cerfs-volans femblables aux précédens , quoique
plus petits. Leonicerus a crû que les plus grands
ëtoient les mâles ; & Mouffet affûre au contraire
que ce font les femelles. Thcat. infect. Aldrovande,
de Infeclis. Voye{ SCARABÉE , INSECTE. ( 1 )
Cerf-volant , c'eft un nom que les Tanneurs
& autres artifans qui travaillent aux gros cuirs don-
nent aux cuirs tannés à fort-fait , & dont ils ont ôté
le ventre. Voye{ Cuir.
Cerf , mal de cerf, en termes de Maréchal , eft un
rhùmatifme qui tombe fur les mâchoires & les par-
ties du train du devant d'un cheval : ce mal l'empê-
che de manger , & fe jette quelquefois fur les parties
du train de derrière. Jambes de cerf V. Jambe. (V)
CERFEUIL , f. m. chcerophyllum , {Hijï. nat. bot.)
genre de plante à fleurs en rofe , difpofées en om-
belle & compofées de plusieurs pétales inégaux , foû-
tenues par le calice qui devient un fruit compofé de
deux femences reffemblantes à des becs d'oifeaux ,
renflées d'un côté & plates de l'autre : ces femences
font liffes dans quelques efpeces , & rudes dans d'au-
tres ; mais elles ne font jamais cannelées. Tourne-
fort , Inji. rei herb. Voye?^ PLANTE. (/)
Le chœrophyllum fativum, C. B. Pitt. liz. eft bon
pour réfoudre le fang coagulé : on l'employé avec
fuccès dans les bouillons pour aider l'expectoration
dans l'afthme ; il eft vulnéraire , réfolutif , diuréti-
que , emmenagogue, apéritif, atténuant; il entre
dans les bouillons & apofemes altérans.
Le cerfeuil mufqué ou myrrhis perennis femine flria-
to , alba , major, odorata , Boer. Ind. bot. 69. reffem-
ble à la fougère , d'où lui eft venu le nom de fougère
mujquée , eft plus connu dans les cuifines que dans
les boutiques ; approche beaucoup de la nature du
cerfeuil ; eft compofé de parties ténues & chaudes,
& bon pour les perfonnes qui ont l'eftomac froid &
rempli de vents , pour lever les obftructions du foie
& de la rate , & pour exciter l'urine. Miller , Bot.
off. (N)
CERIGO , ( Géog. ) île de l'Archipel au midi de
la Morée , & au nord occidental de celle de Candie ;
c'eft la même que celle qui a été tant chantée par
les poètes fous le nom de Cythere.
CERIN , oifeau. Foye^ SERIN.
CERINES , (Géog.) ville de l'île de Chypre avec
un bon port. Long. 5i. 10. lat. 36. 22.
CERINTHIENS , f. m. pi. (77//?. eccléf. ) anciens
hérétiques qui nioient la divinité de Jefus-Chnft, &c
qui tirèrent leur nom de Cerinthe leur chef, fameux
héréfiarque du premier fiecle , & contemporain de
l'apôtre S. Jean.
Cerinthe étoit extrêmement zélé pour la circon-
cifion & autres obfervances légales ; & S. Epiphane
affûre qu'il fut chef du parti qui s'éleva à Jerufalem
contre S. Pierre , parce qu'il avoit communiqué avec
les Gentils. Son héréfie approchoit fort de celle des
Ebionites. Voye{ EbiONITES.
Il avançoit entre autres chofes, que ce n'étoit pas
Dieu qui avoit fait le monde , mais une certaine
vertu féparée & très-éloignée de la vertu fouverai-
ne , & qu'elle l'avoit fait à fon infû. Que le Dieu
des Hébreux n'étoit pas le Seigneur, mais un ange.
Que Jefus étoit né de Jofeph & de Marie comme les
autres hommes : mais que comme il les furpaffoit
tous en vertu & en fageffe , le Chrift ( c'eft- à-dire
une vertu particulière ) envoyé par le Dieu fouve-
rain étoit defeendu en lui après fon baptême , en fi-
gure de colombe ; qu'il lui avoit manifefté le Père in-
connu jufque-là , & fait opérer des miracles. A la fin ,
félon lui , le Chrift s'étoit envolé , & s'étoit retiré
de Jefus -Chrift dans le tems de fa paftion ; enforte
qu'il n'y avoit que Jefus qui avoit fouffert & qui étoit
reffufeité : mais le Chrift étant fpirituel , étoit de-
meuré immortel &c impafîible. Cerinthe publioit une
C E R
prétendue révélation contenant des images monf-
trueufes , qu'il difoit lui avoir été montrées par des
anges ; & affûroit qu'après la réfurreclion générale ,
il y auroit un règne de Jefus-Chrift fur la terre pen-
dant mille ans? & qu'alors dans Jerufalem les hom-
mes joiiiroient pendant ce tems de tous les plaifirs
de la chair. On croit que Cerinthe bornoit la béati-
tude à ce règne terreftre. Ses difciples foûtenoient
toutes ces virions ; quelques-uns d'entre eux nioient
la réfurreclion , & plufieurs avançoient que Jefus-
Chrift n'étoit pas encore reffuicité. Ils rejettoient
tout le nouveau Tcftament , à l'exception de l'évan-
gile de S. Matthi'èu , où l'hiftoire de la circoncifion
de Jefus-Chrift leur paroiffoit une preuve démonf-
trative de la néceffité de cette cérémonie dans le
Chriftianifme. Quelques anciens ont attribué à Ce-
rinthe l'Apocalypfe de S. Jean , & fous ce prétexte
l'ont rejettée comme un livre apocryphe , trompés
par la reffemblance du titre que Cerinthe avoit don-
né à un de fes ouvrages. Voy. Apocalypse & Apo-
cryphe. ( G )
CERISAYE, f. f. {Jardinage. ) eft un lieu planté
en cerifiers. Voye^ Cerisier.
CERISE , f. f. fruit du cerifier. Voye^ Cerisier.
Ce fruit eft tres-bon. On le mange crud quand il eft
mûr; ou on le cueille un peu avant la maturité , 6c
on le met en compote. Pour faire la compote , on en
coupe la queue par la moitié ; on fait bouillir du fu-
cre dans une poelle ; on prend une demi-livre de fit-
cre , pour une livre de fruit. Quand le fucre bout ,
on y jette les cerifes ; on remue ; on écume ; on pouffe
l'ébullition jufqu'à ce que le fucre foit en firop : après
quoi on laiife refroidir , & la compote eft prête.
La confiture de cerife n'a rien de particulier. Voye^
celle ^'Abricot. On tire à l'alembic une eau-de-
vie de cerife qui eft très- violente.
CERISIER , f. m. cerafus , ( Hift. nat. bot. ) genre
d'arbre à fleur en rofe compofée de plufieurs pétales
difpofés en rond. Le piftil fort du calice , 6V devient
dans la fuite un fruit charnu prefque rond , ou en
cœur, qui renferme un noyau de la même forme ,
dans lequel il y a une femence. Ajoutez au caractère
de ce genre le port de fes efpeces. Tournefort, Infl.
rei herb. Voye{ PLANTE. (7)
Le cerifier fe diftingue en bigareautier & en merifier.
Le bigareautier a les mêmes feuilles & le même
bois que le cerifier: fon fruit eft quarré , plus ferme ,
plus croquant , & d'un goût plus agréable , mais
moins fondant que la cerife : il eft prefque blanc ,
mêlé d'un peu de rouge.
Le guinier a aufli le même bois & la même feuille
que le cerifier : c'eft un fruit précoce qui vient avant
les autres efpeces. La guine eft rouge , blanche ,
cendrée , moins ronde que la cerife , la chair moins
ferme & plus fade.
Le merifier eft un arbre fauvage. Voy. Merisier.
Le griottier a de plus beau fruit que les autres.
Foyei Griottier.
On appelle tous ces fruits des fruits rouges.
Les belles cerifes à courte queue font bonnes à
confire , & elles croiffent dans la vallée de Montmo-
rency, où on les appelle cerifes coulardes.
Il y a encore une cerife appellée royale ou d'^/z-
gleterre , qui revient à celle de Montmorency ou à
la griotte.
Les cerifiers fe multiplient par leurs noyaux germes
& par des rejettons à leur pié : mais on les greffe or-
dinairement fur le merifier rouge , qui eft le plus abon-
dant en fève. Quand ces rejettons font grands , on
greffe deffus de grojfcs griottes, qui réuffiffent mieux
que fur le merifier. (7£)
Il y a deux efpeces de cerifiers dont le fruit eft d'ufa-
ge en Médecine : le cerafus fativa ,fruàu rotundo , ru-
broj & acido, Tourn, Infl, Sa gomme paffe pour lithon-
CER
'trîptique , & fes cerifes pour plus rafraîchilTantes
que les noires; elles calment la foif; elles fontbien-
faiiantes àl'eftomac, &aiguifent l'appétit. La gom-
me du cerifier paffe pour lithontriptique.
Leur fuc eft très-réfolutif ; lorlqu'on les a fait bouil-
lir, & qu'on en fait un ufage fréquent , elles peuvent
guérir plufieurs maladies chroniques , & emporter
par la diarrhée la matière qui faifoit obftruction.
Le cerafus nigra , Offic. Germ. 1323. Ses ceri-
fes font cordiales, céphaliques & ialutaires dans
toutes les maladies de la tête & des nerfs , comme
les épilepfies, les convulfions, les paralyfies, Vau-
tres maladies femblables.
L'eau diftillée eft. d'un grand ufage dans les affec-
tions fpafmodiques. (A7)
CERISIN , oifeau ; voyc{ Serin.
_ * CERITES , f. m. pi. (H,ft.) peuple d'Italie , ha-
bitans de Ceré, à qui les Romains accordèrent le
droit de bourgeoifie, en reconnoiflance de l'afyle
qu'ils avoient accordé aux Veftales à l'arrivée des
Gaulois. Comme ils n 'avoient point le droit de fuf-
frage dans les affemblées, on difoit d'un citoyen
Romain privé de ce fuffrage , qu'il étoit in cer'uum ta-
bulas relatus.
CERNAYf/z Dormois, (Géograph.j petite ville de
France en Champagne, à huit lieues de Rheims.
CERNIN , (Saint) Géog. petite ville de France ,
dans le Rouergue.
CERNINUM, f. (Hift. anc.) habit de femme dont
il eft fait mention dans Plaute ; mais dont on ne con-
noît que le nom.
CERNOPHOROS, f. f. ( Hift. anc. ) nom d'une
des danfes furieules des Grecs.
CERNU , (Géog.) petite ville d'Afrique, au royau-
me de Maroc, clans la province de Duqueia.
CERNY , ( Gcog. ) petite ville de l'île de France ,
dans la généralité de Paris.
CERO,f. m. (Hift. nat. Ichth.) poifîbn de mer du
genre des tourds ; on le nomme cero en Provence &
principalement à Amibe. Il a en Languedoc jufqu'à
une coudée de longueur, &c il eft marqué de diver-
ses couleurs : le dos eft de couleur d'or & moucheté
de verd; le ventre eft blanc, &C parfemé de traits
courbes de couleur rouffe ; les lèvres font vertes; les
couvercles des ouies de couleur de pourpre ; enfin
la queue & les nageoires font bleues pour la plus
grande partie. Rondelet. Voyc{ Poisson. (/)
CEROUExNE ou CIROUENE, (Chirurgie. ) nom
que le vulgaire donne à des emplâtres réfolutives &
fortifiantes, qu'on applique fur la peau , à la fuite des
chûtes pour les douleurs & contulions qu'elles cau-
fent. On fait communément ces emplâtres avec de
la térébenthine & du bol d'Arménie. ( T)
CER O MA , (HiJIoirc ancienne.) lieu des anciens
thermes ou bains dans lequel les athlètes fe faifoient
oindre: Plirje, liv, XXjLV. ch. ij . s'eft fervi de ce
terme en ce fens : iidem palceftras athlctarum imagini-
bus & ccromatafua exornant : mais on prend plus com-
munément ce nom pour un onguent dont les athlè-
tes fe faifoient frotter, & que nous appelions cérat.
On le compofoit d'une certaine quantité d'huile &
de cire mêlées & fondues enlcmble. Il fervoit non-
feulement à rendre les membres des lutteurs gluTans ,
cV moins fujets à donner prife à leurs adverfaires;
mais encore à leur procurer plus de fouplcile & d'a-
gilité dans leurs mouvemens. (G)
CEROMANTIE , f. f. divination qui fe faifoit par
le moyen de la cire, & qui étoit en ufage chez, les
Turcs, au rapport de Delrio: elle confiftoit à faire
fondre de la cire , 6c à la verfer goutte à goutte dans
un vafe plein d'eau; Cv félon la figure que tormoient
les gouttes , on en tiroit des prélages heureux ou mal-
heureux.
Le même auteur comprend fous le titre de cero-
CER
845
mande, une fuperftition ufitée de fon tems en Alface.
» Lorfque quelqu'un eft malade, dit-il, & que les
» bonnes femmes veulent découvrir quel faint lui a
» envoyé fa maladie, elles prennent autant de cier-
» ges du même poids qu'elles foupçonnent de f aints,
» en allument un en l'honneur de chaque faint, &
» celui dont le cierge eft le premier confumé , pafTe
» dans leur cfprit pour l'auteur du mal. Delrio, lib,
» IK pag. 553 ». Ce mot eft formé du Grec infoe»
cire, & de //.aiTÈ/a , divination. (G)
CERON, f. m. (Commerce.) que l'on nomme plus
communémentyK/wz, forte de ballot de marchandi-
fe, couvert de peau de bœuf fraîche, dont le poil eft
en-dedans. Voye^ Suron. Diction, de Corn. (G)
* CERQUEMANNEUR, f. m.(JurifFrud. ) c'eft
ainfi qu'on appelle dans la Flandre &: dans la Picar-
die , des experts & maîtres jurés qu'on appelle , foit
pour planter, foit pour raffeoir les bornes. Ils ont
uneefpece de jurifdiétion fommaire pour ces fortes
de différends qui font très fréquens , & qui feraient
ruineux en juftice réglée.
CERRITO, (Géog.) petite ville d'Italie , au royau-
me de Naples, dans la province de Labour.
CERS, (Géog.) petite île de l'Océan , fur les cô-
tes de France, à l'orient de celles de Grenezey.
CERTIFICAT , f. m. témoignage qu'on donne par
écrit pour certifier la vérité d'une chofe.
Certificat de franchife; c'eft un afte qui décla-
re certaines marchandifes franches & exemptes des
droits de fortie du royaume , pour avoir été achetées
& enlevées pendant le tems de la franchife des foi-
res. A'oy^AcQUiT de Franchise. Diclion. du Com-
merce, tom. II. pag. i5o. (G)
CERTIFICATEUR, f. m. terme de Pratique, eft
celui qui répond en juftice de la folvabilité d'une cau-
tion judiciaire, & eft même tenu fubfidiairement de
la fomme pour raifon de quoi la caution a été exi-
gée , au cas que par l'événement la caution fe trou-
ve infolvable. Or pour conftater fon infolvabilité , il
faut la difeuter avant d'attaquer le certificateur Voy*
Caution.
CERTIFICATION, f. f. terme de Palais, eft l'at-
teftation que donne le juge du lieu, que des criées
ont été faites avec les folennités S: les formalités re-
quit es par les ordonnances.
Il lignifie aufîi Yatteftation que quelqu'un donne en
juftice, qu'une caution eft folvable ; &: par cette at-
teftation , le certificateur devient lui-même caution
de la caution, f^oye^ ci-devant Certificateur. (H)
CERTIFIER , v. act. lignifie répondre d'une caution
après avoir atteflé fa folvabilité. (G )
♦ CERTITUDE , f. f. ( Logique , Mêtaphyftque ,
if- Morale. ) c'eft. proprement une qualité du jugement
qui emporte l'adhéfion forte & invincible de notre efprit A
la propofttion que nous affirmons.
On peut prendre le mot de certitude en diftlrcnsfcns :
ce mot s'applique quelquefois à la vérité ou a la propofî'
tion même à laquelle V efprit adhère ; comme quand on
dit la certitude de telle propolition , &c. Quelquefois
il fe prend , comme dans la définition que nous en
. , pour l'adhéfion même de F efprit à la propofttion
qu'il regarde comme certaine.
On peur encore diftinguer , comme M. ..'"./• embert l'a
fait dans le Difeours préliminaire, Vè\ ■■' certi-
tude , endifani que l'évidence appartient proprement aux
idées dont V efprit apperçoit la liaifon tout d'un coup , &
la certitude à cet les dont il n' apperçoit la liaifon que par
le fecours d'un certain nombre d'idées interne
Ainft , par exemple , le tout eft plus grand que fa par-
tie , eft une propofttion évidente par elle-même , parce que
f efprit apperçoit tout d'un coup & fans aucune idée in-
termédiaire la liai/on qui eft entre les idées de tout & de
plus grand , départit & a'e plus petit y mais cette propoft-
tion , le quarre de l'hypoténufe d'un triangle rectan-
846
C E R
gle eft égal à la fomme des quarrés des deux côtés ,
ejl une propojition certaine & non évidente par elle-même,
parce qu'il faut plufieurs propofitions intermédiaires &
confécutives pour en appercevoir la vérité. Dans ce cas ,
on peut dire que la certitude réfulte d'un nombre plus ou
"moins grand de propofitions évidentes qui fi f lavent im-
médiatement , mais que l'ejprit ne peut embrafer toutes à
7a fois , & qu'il tft obligé d'envifager & de détailler J'uc-
ceffvement.
D'où il s enfuit i°. que le nombre des propofitions
pourroit être fi grand , même en une dîmonfl ration géo-
métrique , qu elles en jeroient un labyrinthe , dans lequel
le meilleur cjprit venant à s'égarer , ne feroit point con-
duit à la certitude. Si les propriétés de la fpirale n'a-
vaient pu fe démontrer autrement que par la voie tor-
tueufe qu Archimede a fuivie , un des meilleurs Géomè-
tres du fiecle paffê n'eût jamais été certain de la décou-
verte de ces propriétés. J'ai là plufieurs fois , difoit-il , cet
endroit d 'Archimede , & je n'ai pas mémoire d'en avoir
j amais fend toute la force : Et memini me nunquam
vim illius percepifle totam.
2°. Delà il s' enfuit encore que la certitude en Mathé-
matique , naît toujours de t évidence , puifquelle vient de
la liaifon apperçùe Juccejfivement entre plufieurs idées
confécutives & voijines.
Chambers dit que l'évidence ef proprement dans la liai-
fon que l'efprit apperçoit entre les idées , & la certitude
dans le jugement qu il porte fur ces idées : mais il me
femble que c'efl-là Je jouer un peu des mots ; car voir la
liaifon de deux idées , & juger , c'ejl la même chofe.
On pourroit encore, comme on l'a fait dans le Difcours
préliminaire , difinguer l'évidence de la certitude , en
aifant que l'évidence appartient aux vérités purement fpé-
culatives de Métaphyfque & de Mathématique ; & la
certitude aux objets Phyfiques , & aux faits que fon
obferve dans la nature , & dont la connoiffance nous
vient par les Cens. Dans cefens , il feroit évident que le
quarrê de l'hypotênuj'e ef égal aux quarrés des deux
■côtés dans un triangle rectangle ; & il feroit certain que
F aimant attire le fer.
On difingue dans l'Ecole deux fortes de certitude ;
l'une dejpéculation, laquelle naît de l'évidence de la cho-
fe; t autre d'adhéfion, qui nait de l'importance de la chofe.
Les Scholafliques appliquent cette dernière aux matières
de foi. Cette diflinclion paroît affe^ frivole : car l'adhc-
jion ne nait point de l'importance de la chofe , mais de
l'évidence; d'ailleurs la certitude dejpéculation & l'ad-
héfion font proprement un J'eul & même acte de l'ejprit.
On difingue encore , mais avec plus de raifon , les
trois efpeces fuivantes de certitude , par rapport aux
trois degrés d'évidence qui la font naître.
La certitude métaphyfque ef celle qui vient de l'é-
vidence métaphyfque . Telle ef celle qu'un Géomètre a de
cette propofition , que les trois angles d'un triangle font
égaux à deux angles droits , parce qu'il ef métaphyfi-
quement , c'ef -à-dire , abfolument auffi impoffible que cela
nefoit pas , quill'efl qu'un triangle foit quarré.
La certitude phyfique ef celle qui vient de l'évidence
phyfique: telle ejl celle qu'a une perjonne , qu'il y a
du feu fur fa main , quand elle le voit , & qu'ellefefent
brûler ; parce qu'il ejl phyfiquement impoffible que cela
ne foit pas , quoiqu abfolument & rigoureusement par-
lant , cela pût ne pas être.
La certitude morale , ef celle qui ef fondée fur l'évi-
dence morale : telle ef celle qu'une perfonne a du gain
ou de ta perte de fon procès , quand Jbn Procureur ou J'es
amis le lui mandent , ou qu'on lui envoyé copie du ju-
gement ; parce qu'il ejl moralement impoffible que tant
de perfonnes fe rêuniffent pour en tromper une autre à qui
elles prennent intérêt , quoique cela ne foit pas ri<*oureu-
fement & abfolument impoffible.
On trouve dans les Tranfactions Philoibphiques ,
un calcul algébrique des degrés de la certitude morale ,
qui provient des témoignages des hommes dans tous les
caspojfibUs,
C E R
L' auteur prétend , que fi un récit pûffe avant que de
parvenir jufqu'à nous par dou^e perfonnes fuccejfives ,
dont chacune lui donne \ de certitude , il n'aura plus
que \ de certitude après ces dou^t récits ; de façon qu'il
y aura autant à parier pour la vérité que pour la fauffeti
de la chofe en quefion ; que fi la proportion de la certi-
tude ef de \~-° , elle ne tombera alors à -^ quaufoixante-
dixieme rapport ; & que fi elle n'ef que ~~ , elle ne tom-
bera alors à \ quaufix cents quatre - vingts - quinzième
rapport.
En général, foit r la fraction qui exprime la certitude
que chacun donne au récit , ce récit paffant par deux té*
moins , n'aura plus , félon l'auteur dont nous parlons ±
que g-g de certitude; & paffant par n témoins , la cer-
titude fera l Cela ef aifé à prouver par les règles des
combinaifons . Suppofons , comme ci-defjus , la certifia
de = •£ & deux témoins fuccefjifs ; il y a donc , pour
ainfii dire , un cas où le premier trompera , cinq où il dira
vrai ; un cas où le fécond trompera , & cinq où il dira
vrai. Il y a donc trente-fix cas en tout , & vingt-cinq cas
où ils diront vrai tous deux : donc la certitude ejl |-t
= (£) , & ainji des autres. Voye^ COMBINAISON
& Dés.
Quant aux témoignages qui concourent ,fi deux per-
fonnes rapportent un fait , & qu'ils lui donnent chacun
en particulier | de certitude, le fait aura alors par et
double témoignage j| de certitude , c ef -à-dire , fa pro-
babilitéjira à fa non-probabilité dans le rapport de trente-
cinq à un. Si trois témoignages fe réunijfent , la certi-*
tude fera de ■—. Le concours du témoignage de dix per-
fonnes qui donnent chacune \ de certitude , produira
~y\ de certitude par la même raifon. Cela ef évident :
car il y a trente-fix cas en tout , & il n'y a qu'un cas où
elles trompent toutes les deux. Les cas où l'une des deux
tromperoit , doivent être comptés pour ceux qui donnent
la certitude : car il n'en ef pas ici comme du cas précé-
dent , où les deux témoins Jbnt fuccefffs , & où l'un re-
çoit la tradition de l'autre. Ici les deux témoins Jbnt jup-
pof es voir le fait & le connoitre indépendamment l'un de
l'autre : ilfujfit donc que l'un des deux ne trompe pas j
au lieu que dans le premier cas , la tromperie du premiet
rend le fécond trompeur , même quand il croit ne tromper
pas , & qu'il a intenfon de dire la vérité.
L'auteur calcule enfuite la certitude de la tradition
orale , écrite & tranfmife fuccejfvement , & confirmée pat
plufieurs rapports fuccefjifs. f". l'art. PROBABILITÉ,
& fur-tout la fuite de celui-ci , où la valeur de ces calculs
& des raifonnemens abfurdes fur lejquels ils font fondés,
ejl appréciée ce quelle vaut. C'ef une dijfertation de M.
l'abbé de P rades , dejlinée à fervir de difcours prélimi-
naire à un ouvrage important fur' la vérité de la religion.
ATous Peuf/ions peut-être analyjée , fi nous n'avions craint
d'en altérer la force. L'objet d'ailleurs en ejl fi grand ;
les idées fi neuves & fi belles ; le ton fi noble ; les preu-
ves fi bien expofèes , que nous avons mieux aimé la rap-
porter toute entière. Nous efpérons que ceux à qui l'inté-
rêt de la religion efl à cœur nous enfauront gré , & quelle
jera très-utile aux autres. Au refle , nous pouvons affûrer
que fi la fonction d'éditeur de V Encyclopédie nous a ja-
mais été agréable , c efl particulièrement dans ce moment.
Mais il ef tems de laiffer parler l'auteur Lui-même:
jbn ouvrage le louera mieux que tout ce que nous pour-
rions ajouter.
LePyrrhonifme a eu fes révolutions , ainfi que tou-
tes les erreurs : d'abord plus hardi & plus témérai-
re , il prétendit tout renverfer ; il pouffoit l'incré-
dulité jufqu'à fe remfer aux vérités que l'éviden-
ce lui préfentoit. La religion de ces premiers tems
étoit trop abfurde pour occuper l'efprit des philofo-
phes : on ne s'obltine point à détruire ce qui ne pa-
C E R
roîtpas fondé ;& la foibleffe de l'ennemi a fouvent
arrêté la vivacité des pourfuites. Les faits que la re-
ligion despayens propolbit à croire , pouvoicnt bien
iatisfaire l'avide crédulité du peuple : mais ils n'é-
toient point clignes de l'examen férieux des Philolo-
phes. La religion Chrétienne parut .-par les lumières
qu'elle répandit , elle fît bientôt évanouir tous ces
phantômes que la luperftition avoit jufque-là réali-
ïés : ce fut fans doute un fpedfacle bien furprenant
pour le monde entier , que la multitude des dieux
qui en étoient la terreur ou l'cfpérance, devenus
tout-à-coup fon joiiet 6c Ion mépris. La face de Puni-
hivers changée dans un fi court efpace de tems , at-
tira l'attention des Philofophes : tous portèrent leurs
regards fur cette religion nouvelle , qui n'exigeoit
pas moins leur loûmilfion que celle du peuple.
Us ne furent pas long-tems à s'appercevoir qu'elle
étoit principalement appuyée fur des faits , extra-
ordinaires à la vérité, mais qui méritoient bien d'être
difcutés par les preuves dont ils étoient foûtenus. La
difpute changea donc ; les Sceptiques reconnurent les
droits des vérités métaphyfiques & géométriques fur
notre efprit , & les Philof bphes incrédules tournèrent
leurs armes contre les faits. Cette matière depuis fi
long-tems agitée , auroit été plus éclaircie , fi avant
que de plaider de part & d'autre , l'on fût convenu
d'un tribunal où l'on pût être jugé. Pour ne pas tomber
dans cet inconvénient, nous dilons aux Sceptiques :
vous reconnoiffez certains faits pour vrais; l'exiftence
de la ville de Rome dont vous ne fauriez douter, fùffi-
roit pour vous convaincre , fi votre bonne foi ne nous
affûroit cet aveu : il y a donc des marques qui vous font
connoître la vérité d'un fait ; & s'il n'y en avoit point ,
que feroit la fociété ? tout y roule , pour ainfi dire ,
fur des faits : parcourez toutes les fciences , & vous
verrez du premier coup d 'ce il, qu'elles exigent qu'on
puiffe s'affûrer de certains faits : vous ne feriez jamais
guidé par la prudence dans l'exécution de vos def-
leins; car qu'eft-ce que la prudence, linon cette pré-
voyance qui éclairant l'homme fur tout ce qui s'eft
pafie & fe pafie actuellement , lui fuggere les moyens
les plus propres pour le fuccès de Ion entreprife , &
lui l'ait éviter les écueils où il pourroit échouer ? La
prudence , s'il cft permis de parler ainfi , n'efi qu'une
conféquence dont le préient & le pafie font les pré-
mifles : elle efi donc appuyée fur des faits. Je ne dois
point inlifter davantage fur une vérité que tout le
monde avoue ; je m'attache uniquement à fixer aux
incrédules ces marques qui caradtérilentun fait vrai ;
je dois leur taire voir qu'il y en a non-feulement pour
ceux qui arrivent de nos jours , 6c , pour ainfi dire,
fous nos yeux ; mais encore pour ceux qui fe pafient
dans des pays très-éloignés , ou qui par leur antiquité
traverfent l'efpace immenfe des fiecles : voilà le
tribunal que nous cherchons , & qui doit décider fur
tous les faits que nous préfenterons.
Les faits fe pafient à la vue d'une ou Je pluficurs
perfonnes : ce qui efi à l'extérieur, 6c qui frappe les
i'ens , appartient au fait ; les conléquences qu'on en
peut tirer font du relfort du philofophe qui le fuppofe
certain. Les yeux font pour les témoins oculaires
des juges irréprochables , dont on ne manque jamais
de fuivre la décifion : mais fi les faits fc patienta
mille lieues de nous , ou fi ce font des évenemens
arrivés il y a pluficurs fiecles , de quels moyens nous
fervirons-nous pour y atteindre ? D'un côté, parce
qu'ils ne tiennent à aucune vérité néceffaire, ils fe dé-
robent à notre efprit ; 6c de l'autre , foit qu'ils n'c\i(-
tent plus , ou qu'ils arrivent dans îles contrées fort
éloignées de nous , ils échapent à nos lens.
Quatre choies fe préfentent à nous ; la dépofition
des témoins oculaires ou contemporains, la tradition
orale , Phifioire, & les monumens : les témoins ocu-
laires ou contemporains parlent dans rhiltoùe j la
C E R
847
tradition orale doit nous faire remonter jufqu'à eux;
6c les monumens enchaînent, s'il efi permis de par-
ler ainfi , leur témoignage. Ce font les fondemens
inébranlables de la certitude morale : par-là nous pou-
vons rapprocher les objets les plus éloignés, peindre'*
& donner une efpece de corps à ce qui n'efi plus
vifible , réalifer enfin ce qui n'exifte plus.
On doit idiftinguer foigneufement dans la recher-
che de la vérité fur les faits, la probabilité d'avec
le fouverain degré de la certitude , & ne pas s'ima-
giner en ignorant que celui qui renferme la proba-
bilité dans fa fphere , conduife au Pyrrhonifme , ou
même donne la plus légère atteinte à la certitude. J'ai
toujours crû , après une mûre réflexion , que ces
deux chofes étoient tellement féparées , que l'une
nemenoitpointàl'autre.Sicertainsauteiirsn'avoient
travaillé lur cette matière qu'après y avoir bien ré-
fléchi , ils n'auroient pas dégradé par leurs calculs
la certitude morale. Le témoignage des hommes efi la
feule fource d'où naifient les preuves pour les faits
éloignés; les différens rapports d'après lelquels vous
le conlidére/., vous donnent ou la probabilité ou Incer-
titude. Si vous examinez le témoin en particulier pour
vous allûrer de fa probité, le fait ne vous deviendra
que probable ; & fi vous le combinez avec pluficurs
autres , avec lefquels vous le trouviez d'accord , vous
parviendrez bien-tôt à la certitude. Vous me propo-
fez à croire un fait éclatant & intérefl'ant ; vous avez
pluficurs témoins qui dépofent en fa faveur : vous
me parlez de leur probité & de leur fincérité ; vous
cherchez à defeendre dans leurs cœurs , pour y voir
à découvert les mouvemens qui les agitent ; j'ap-
prouve cet examen : mais fi j'aflùrois avec vous quel-
que chofe fur ce feul fondement, je craindrois que ce
ne fût plutôt une conjecture de mon efprit , qu'une
découverte réelle. Je ne crois point qu'on doive ap-
puyer une démonfiration fur la feule connoiffanec du
cœur de tel & tel homme en particulier : j'ofe dire qu'il
eft impoflible de prouver d'une démonfiration morale
qui puiffe équivaloir à la certitude métaphyûquc , que
Caton eût la probité que fon fiecle & la pofterité lut
accordent : fa réputation eft un fait qu'on peut dé-
montrer; mais fur fa probité, il faut malgré nous nous
livrer à nos conjectures, parce que n'étant que dans
l'intérieur de fon cœur, elle fuit nos fens, & nos
regards ne lauroient y atteindre. Tant qu'un homme
fera enveloppé dans la fphere de l'humanité , quelque
véridique qu'il ait été dans tout le cours de fa vie , il
ne fera que probable qu'il ne m'en impofe point fur
le fait qu'il rapporte. Le tableau de Caton ne vous
préfente donc rien qui puifl'e vous fixer avec une
entière certitude. Mais jettes les yeux, s'il m'eff permis
de parler ainfi, fur celui qui repréfente l'humanité en
grand , voyez-y les différentes paflîons dont les hom-
mes font agites, examinez ce contrafle frappant:
chaque paliion a fon but, & prélente des vues qui
lui font propres : vous ignorez quelle eft la pafiîon
qui domine celui qui vous parle ; & c'eft ce qui rend
votre foi chancelante : mais fur un grand nombre
d'hommes vous ne (auriez douter de la diverfite des
partions qui les animent ; leurs foibles mêmes & leurs
vices fervent à rendre inébranlable le fondement
OÙ vous devez affeoir votre jugement. Je fais que les
apologifies de la Religion chrétienne ont principa-
lement infifté fur les caractères de fincérité & de
probité des apôtres; & je fuis bien éloigné de taire
ici le procès à ceux qui le contentent de cette preu-
ve ; mais comme les Sceptiques de nos jours lont
très-difficiles fur ce qui cohfHtue la certitude des
faits, j'ai cm que je ne liiquois rien d'être encore
plus difficile qu'eux fur ce point , perfuadé que les
ta us évangéliques font portés à un degré de cem*
tude qui brave les efforts du Pyrrhonifme le plus
outré,
848
C E R
Si je pouvois m'alîurer qu'un témoin a bien vît, &
qu'il a voulu médire vrai, fon témoignage pour moi
deviendrait infaillible : ce n'eu: qu'à proportion des
degrés de cette double afîïïrance que croît ma per-
fuafion ; elle ne s'élèvera jamais jufqu'à une pleine
démonftration , tant que le témoignage fera unique ,
&que je confidérerai le témoin en particulier ; par-
ce que quelque connoiflance que j'aye du cœur hu-
main , je ne le connoîtrai jamais allez parfaitement
pour en deviner les divers caprices , ôi tous les ref-
forts myftérieux qui le font mouvoir. Mais ce que je
chercherois envain dans un témoignage , je le trouve
dans le concours de plufieurs témoignages, parce
que l'humanité s'y peint ; je puis , en conféquence
des lois que fuivent les efprits , afTùrer que la feule
vérité a pu réunir tant de perfonnes , dont les inté-
rêts font fi divers , & les parlions fi oppofées. L'er-
reur a différentes formes , félon le tour d'efprit des
hommes , félon les préjugés de religion & d'éduca-
tion dans lefquels ils font nourris : fi donc je les vois,
malgré cette prodigieufe variété de préjugés qui dif-
férencient fi fort les nations , fe réunir dans la dépo-
fition d'un même fait, je ne dois nullement clouter de
fa réalité. Plus vous me prouverez que les parlions
qui gouvernent les hommes font bifarres , capricieu-
ies , & déraifonnables , plus vous ferez éloquent à
m'exagérer la multiplicité d'erreurs que font naître
tant de préjugés difterens ; &C plus vous me confir-
merez, à votre grand étonnement , dans la perfua-
fion où je fuis , qu'il n'y a que la vérité qui puifle
faire parler de la même manière tant d'hommes d'un
cara&ereoppolé. Nous ne faurions donner l'être à la
vérité ; elle exifte indépendamment de l'homme :
elle n'eft donc fujette ni de nos pallions ni de nos
préjugés : l'erreur au-contraire qui n'a d'autre réa-
lité que celle que nous lui donnons , fe trouve par fa
dépendance obligée de prendre la forme que nous
voulons lui donner : elle doit donc être toujours par
fa nature marquée au coin de celui qui l'a inventée ;
aufli eft-il facile de connoître la trempe de l'elprit
d'un homme aux erreurs qu'il débite. Si les livres de
morale , au lieu de contenir les idées de leur auteur,
n'étoient, comme ils doivent être , qu'un recueil
d'expériences fur l'efprit de l'homme , je vous y
renvoyerois pour vous convaincre du principe que
j'avance. Choififiéz un fait éclatant & qui intérefle ,
& vous verrez s'il eft poffible que le concours des té-
moins qui l'attellent puiiTe vous tromper. Rappellez-
vous la glorieufe journée de Fontenoi ; pûtes-vous
douter de la viftoire fignalée remportée par les
François , après la dépofition d'un certain nombre de
témoins ? vous ne vous occupâtes dans cet inllant ni
de la probité ni de la fincérité des témoins ; le con-
cours vous entraîna, & votre foi ne pût s'y refufer.Un
fait éclatant & intérelTant entraîne des fuites après
lui : ces fuites fervent merveilleufement à confirmer
la dépofition des témoins ; elles font aux contempo-
rains ce que les monumens font à la pollérité: com-
me des tableaux répandus dans tout le pays que vous
habitez , elles repréfentent fans celle à vos yeux le
fait qui vous intérefle : faites-les entrer dans la com-
binaifon que vous ferez des témoins enfemble , &
du fait avec les témoins ; il en réfultera une preuve
d'autant plus forte , que toute entrée fera fermée à
l'erreur ; car ces faits ne fauroient fe prêter aux paf-
fions & aux intérêts des témoins.
Vous demandez , me dira-t-on , pour être allure
d'un fait invariablement , que les témoins qui vous
le rapportent ayent des pallions oppofées & des in-
térêts divers : mais fi ces caradleres de vérité , que je
ne defavoue point , étoient uniques , on pourroit dou-
ter de certains faits qui tiennent non-feulement à la
religion, mais qui même en font la baie. Les apôtres
n'avoient ni des pallions oppofées ni des intérêts di-
C E R
vers ; votre combinaifon, continuera-t-on , devenant
par-là impolfible , nous ne pourrons point nous aflïï-
rer des faits qu'ils attellent.
Cette difficulté feroit fans doute mieux placée ail-
leurs , où je dilcuterai les faits de l'évangile : mais il
faut arrêter des foupçons injulles ou ignorans. De
tous les faits que nous croyons, je n'en connois au-
cun qui foit plus lufceptible de la combinaifon dont
je parle , que les faits de l'évangile. Cette combinai-
fon eft même ici plus frappante, & je crois qu'elle
acquiert un degré de force , parce qu'on peut com-
biner les témoins entr'eux & encore avec les faits.
Que veut-on dire lorfqu'on avance que les apôtres
n'avoient ni des pallions oppofées ni des intérêts di-
vers^ que toute combinaifon par rapporta eux eft
impolfible ? A Dieu ne plaife que je veuille prêter ici
des pallions à ces premiers fondateurs d'une religion
certainement divine; je fai qu'ils n'avoient d'autre in-
térêt que celui de la vérité : mais je ne le fai que par-
ce que je fuis convaincu de la vérité de la religion
Chrétienne ; & un homme qui fait les premiers pas
vers cette religion peut, fans que le Chrétien qui tra-
vaille à fa converfion doive le trouver mauvais , rat-
ionner fur les apôtres comme fur le relie des hom-
mes. Pourquoi les apôtres n'étoient-ils conduits ni
par la paillon ni par l'intérêt? c'eft parce qu'ds dé-
fendoient une vérité, qui écartoit loin d'elle & la paf-
fion & l'intérêt.Un Chrétien inllruit dira donc à celui
qu'il veut convaincre de la religion qu'il profefle : Il
les faits que les apôtres rapportent n'étoient point
vrais , quelqu'intérêt particulier ou quelque pafllon
favorite les auroient portés à défendre fi opiniâtre-
ment l'impollure , parce que le menfonge ne peut de-
voir l'on origine qu'à la paflion & à l'intérêt : mais ,
continuera ce Chrétien , perfonne n'ignore que fur
un certain nombre d'hommes il doit s'y trouver des
pallions oppofées & des intérêts divers ; ils ne s'ac-
corderoient donc point s'ils avoient été guidés par
la paillon & par l'intérêt : on eft donc forcé d'avouer
que la feule vérité forme cet accord. Son raifonne-
ment recevra une nouvelle force, lorfqu'après avoir
comparé les perfonnes entr'elles, il les rapprochera
des faits. Il s'appercevra d'abord qu'ils lônt d'une
nature à ne favoriler aucune pafllon , & qu'il ne
fauroit y avoir d'autre intérêt que celui de la vé-
rité qui eût pu les engager à les atteller. Je ne dois
pas étendre d'avantage ce raifonnement ; il fuffit
qu'on voie que les faits de la religion Chrétienne
font fulceptibles des caraderes de vérité que nous
allignons.
Quelqu'un me dira peut-être encore: pourquoi
vous obllinez-vous à féparer la probabilité de la cer~
titude ? pourquoi ne convenez-vous point avec tous
ceux qui ont écrit fur l'évidence morale, qu'elle n'eft
qu'un amas de probabilités ?
Ceux qui me font cette difficulté , n'ont jamais
examiné de bien près cette matière. La certitude eft
par elle-même indivifible : on ne fauroit la divifer
lans la détruire. On l'apperçoit dans un certain point
fixe de combinaifon, & c'eft celui oii vous avez aflez
de témoins pour pouvoir aflurer qu'il y a des paf-
fions oppofées ou des intérêts divers, ou fi l'on veut
encore , lorfque les faits ne peuvent s'accorder ni
avec les pallions ni avec les intérêts de ceux qui les
rapportent ; en un mot, lorfque du côté des témoins
ou du côté du fait on voit évidemment qu'il ne fau-
roit y avoir d'unité de motif. Si vous ôtez quelque
circonllance néceflaire à cette combinaifon , la cer-
titude du fait difparoîtra pour vous. Vous ferez obli-
gés de vous rejetter fur l'examen des témoins qui
relient , parce que n'en ayant pas aflez pour qu'ils
puiflent repréfenter le caraclere de l'humanité, vous
êtes obligés d'examiner chacun en particulier. Or voi-
là la différence eflèntielle entre la probabilité & la
certitude z
C E R
certitude ; celle-ci prend fa fource dans les lois géné-
rales que tous les hommes fuivent , & l'autre dans
l'étude du cœur de celui qui vous parle ; Tune eft
fufceptible d'accroiflement, & l'autre ne l'eft point.
Vous ne feriez pas plus certain de l'exiftence de Ro-
me, quand même vous l'auriez fous vos yeux ; votre
certitude changerait de nature, puisqu'elle feroit phy-
fiquc : mais votre croyance n'en deviendroit pas plus
inébranlable. Vous me préfentez plufieurs témoins ,
& vous me faites part de l'examen réfléchi que vous
avez fait de chacun en particulier; la probabilité fera
plus ou moins grande félon le degré d'habileté que je
vous connois à pénétrer les hommes. Il eft évident
que ces examens particuliers tiennent toujours de la
conje&ure; c'efl: une tache dont on ne peut les laver.
Multipliez tant que vous voudrez ces examens ; fi vo-
tre tête retrécie ne faifltpas la loi que fuivent les ef-
prits, vous augmenterez, il efl: vrai , le nombre de vos
probabilités : mais vous n'acquerrez jamais la certi-
tude* Je fens bien ce qui fait dire que la certitude n'eft
qu'un amas de probabilités ; c'eit parce qu'on peut
paffer des probabilités à la certitude ; non quelle en
foit , pour ainli dire , compofée , mais parce qu'un
grand nombre de probabilités demandant plufieurs
témoins , vous met à portée , en huilant les idées
particulières , de porter vos vues fur l'homme tout
entier. Bien loin que la certitude réfulte de ces proba-
bilités , vous êtes obligé , comme vous voyez , de
changer d'objet pour y atteindre. En un mot , les
probabilités ne fervent à la certitude , que parce que
par les idées particulières vous parlez aux idées gé-
nérales. Après ces réflexions il ne lera pas difficile de
fentir la vanité des calculs d'un Géomètre Anglois ,
qui a prétendu fupputer les différens degrés de certi-
tude que peuvent procurer plufieurs témoins : il fuf-
fira de mettre cette difficulté fous les yeux pour la
faire évanouir*.
Selon cet auteur, les divers degrés de probabilité
nécefl'aires pour rendre un fait certain , font comme
un chemin dont la certitude feroit le terme. Le pre-
mier témoin , dont l'autorité eft allez grande pour
m'a flurer le fait à demi, enforte qu'il y ait égal pari à
faire pour & contre la vérité de ce qu'il m'annonce,
me fait parcourir la moitié du chemin. Un témoin
aufli croyable que le premier, qui m'a fait parcourir
la moitié de tout le chemin , par cela même que fon
témoignage efl: du même poids, ne me fera parcourir
que la moitié de cette moitié , enforte que ces deux
témoins me feront parcourir les trois quarts du che-
min. Un troilieme qui furviendra ne me fera avancer
que de la moitié fur l'efpace reliant, que les deux au-
tres m'ont laifle à parcourir; fon témoignage n'ex-
cédant point celui des deux premiers , pris ferme-
ment, il ne doit comme eux me faire parcourir que
la moitié du chemin quelle qu'en foit l'éten
voici la raifon fans doute , c'elt que chaque témoin
peut feulement détruire dans mon eipritia moitié des
raifons qui s'oppofent à l'entière certitude du foit.
Le Géomètre Anglois, comme on voit , examine
chaque témoin en particulier, puifqu'il évalue le té-
moignage de chacun pris féparément ; il ne fuit donc
pas le chemin que j'ai tracé pour arriver à la certitu-
de. Le premier témoin me fera parcourir tout le che-
min , fi je puis m'aflïucr qu'il ne s'efl point trompé ,
& qu'il n'a pas voulu m'en impofer fur le fait qu'il
me rapporte. Je ne faurois , je l'avoiïe, avoir cette
auurance: mais examinez-en la raifon, & vous vous
convaincrez que ce n'eft que parce que voir. :
vez pas connoitre les pallions qui l'agitent, ou l'inté-
rêt qui le fait agir. Toutes vos vues doivent donc fe
tourner du côte de cet inconvénient. Vous panez à
l'examen du fécond témoin , ne d_
appercevoir que devant raifonner fur ce fécond té-
moin comme vous avez fait fur le premier, la même
Tome II,
C E R
849
difficulté refte toujours? Aurez- vous recours à l'exa-
men d'un troifiemc , ce ne feront jamais que d;.
particulières : ce qui s'oppofe à votre ce,
le cœur des témoins que vous ne connoiffez pas :
cherchez donc un moyen de le faire paraître , pour
ainli dire à ves yeux ; or c'efl: ce que procure un
grand nombre de témoins. Vous n'en connoiffez au-
cun en particulier ; vous pouvez pourtant aiïùrer
qu'aucun complot ne les a réunis pour vous trom-
per. L'inégalité des conditions , la diflance des lieux,
la nature du fait, le nombre des témou*, vous font
connoitre , fans que vous puiffiez en douter , qu'il y
a parmi eux des paflions oppofées & des intérêts di-
vers. Ce n'eft que lorfque vous êtes parvenu à ce
point , que la certitude fe préfente à vous ; ce qui eft ,
comme on voit , totalement fouftrait au calcul.
Prétendez -vous, m'a -t- on dit, vous fervir de
ces marques de vérité pour les miracles comme pour
les faits naturels ? Cette queflion m'a toujours fur-
pris. Je répons à mon tour: eft- ce qu'un miracle
n'eft pas un fait ? Si c'eft un fait , pourquoi ne puis-je
pas me tenir des mêmes marques de vérité pour les
uns comme pour les autres ? Seroit-ce parce que le
Je n'eu pas compris dans l'enchaînement du
cours ordinaire des choies ? Il faudrait que ce en quoi
les miracles différent des faits naturels", ne leur per-
mit pas d'être fufceptiblcs des mêmes marques de vé-
rité , ou que du moins elles ne pûffcnt pas faire la
même impreiïïon. En quoi different-ils donc ? Les uns
font produits par des agens naturels , tant libres que
nécellàircs ; les autres par une force qui n'eft point»
renfermée dans l'ordre de la nature. Je vois donc
Dieu qui produit l'un, & la créature qui produit l'au-
tre ( je ne traite point ici la queftion 'des miracles ) ;
qui ne voit que cette différence dans les caufes ne
iuirît pas pour que les mêmes caraûeres de vérité ne
puiffent leur convenir également ? La règle invaria-
ble que j'ai affignée pour s'aflïirer d'un fait, ne re-
garde ni leur nature , c'eft-à-dire s'ils font naturels
ou furnaturels , ni les caufes qui les produifenî. Quel-
que différence que vous trouviez donc de ce c<
elle ne iauroit s'étendre jufqu'à la règle qui n'y tou-
che point. Une fimple fuppolition fera ientir com-
bien ce que je dis cil vrai : qu'on fe repréfente un
monde où tous les évenemens miraculeux qu'on voit
dans celui-ci , ne foient que des fuites de l'ordre éta-
bli dans celui-là. Fixons nos regards fur le cours du
foleil pour nous fervir d'exemple : (iippofons que
dans ce monde imaginaire le foleil fufpendant fa
courfc au commencement des quatre différentes fai-
fons de L'année, le premier jour en foit quatre fois
plus long qu'à l'ordinaire. Continuez à faire jouer
votre imagination, & tranfportcz-y les hommes tels
qu'ils font , ils lieront témoins de ce fpeclacle bien
nouveau pour eux. Peut-on nier que ians changer
leurs organes ils fuflent en état de s'aihirer de la lon-
gueur de ce jour ? Il ne s'agit encore , comme on voit,
que des témoins oculaires , c'efl- à-dire fi un homme
peut voir aufli facilement un miracle qu'un fait na-
turel; il tombe également tous les fens : la difficulté
eft donc levée quant aux témoins oculaires. Or ces
témoins qui nous rapportentun fait miraculé:,
ils plus de facilité pour nous en impofer que fur tout
autre fait? & les marques de vérité que nous avons
ennent-elles point avec toute leur
: Je pourrai combiner également les témoins
enfemble ; je pourrai connoitre ri quelque paillon ou
quelque intérêt commun les fait agir; il ne faudra,
en un mot, qu'examiner l'homme, & conf'ulter les lois
générales qu'il mit : tout cil égal de part & d'autre.
Vous allez trop loin , me dira-t-on , tout n'cll point
égal ; je fai que les caractères de vérité que vous avez
s ne font point inutiles pour les faits miracu-
leux : mais ils ne fauroient faire la même impreflion
P P p p p
85o CER
fur notre efprit. On vient m'apprendre qu'un hom-
me célèbre vient d'opérer un prodige ; ce récit le
trouve revêtu de toutes les marques de vente les plus
frappantes, telles^ en un mot, que je n'héliterois pas
un inftant à y ajouter foi li c'étoit lin fan naturel ;
elles ne peuvent pourtant fervir qu'à me faire dou-
ter de la réalité du prodige. Prétendre, continuera-
t-on , que par-là je dépouille ces marques de vérité
de toute la force qu'elles doivent avoir fur notre ef-
prit, ce feroit dire que de deux poids égaux mis dans
ileux balances différentes, l'un ne peferoit pas autant
que l'autre, parce qu'il n'emporteroit pas également
le côté qui lui eft oppofé , fans examiner fi tous les
deux n'ont que les mômes obftacles à vaincre. Ce qui
vous paroît être un paradoxe va fe développer clai-
rement à vos yeux. Les marques de vérité ont la mê-
me force pour les deux faits : mais dans l'un il y a un
©bftacle à iùrmonter,& dans l'autre il n'y en a point ;
dans le fait furnaturel je vois l'impoffibilité phyfique
qui s'oppofe à l'impreffion que feroient fur moi ces
marques de vérité ; elle agit li fortement fur mon el-
prit qu'elle le laiffe en fulpens ; il fe trouve comme
entre deux forces qui fe combattent : il ne peut le
nier , les marques de vérité dont il eft revêtu ne le
lui permettent pas ; il ne peut y ajouter foi , l'impol-
-iibilité phyfique qu'il voit l'arrête. Ainli, en accor-
dant aux caraûeres de vérité que vous avez affignés,
toute la force que vous leur donnez , ils ne fuffilcnt
pas pour me déterminer à croire un miracle.
Ce raifonnement frappera fans doute tout hom-
.me qui le lira rapidement fans l'approfondir : mais le
'plus léger examen fuffit pour en faire appercevoir
tout le faux ; femblable à ces phantômes qui paroif-
■fent durant la nuit , & fe diffipent à notre appro-
che. Defcendez jufques dans les abyfmes du néant,
vous y verrez les faits naturels & furnaturels con-
fondus enfemble , ne tenir pas plus à l'être les uns
que les autres. Leur degré de poffibilité , pour fortir
de ce gouffre & paroître au jour , eft précifément le
même ; car il eft. plus facile à Dieu de rendre la vie
à un mort , que de la conferver à un vivant. Pro-
fitons maintenant de tout ce qu'on nous accorde.
Les marques de vérité que nous avons affignées font ,
dit-on , bonnes , & ne permettent pas de douter d'un
fait naturel qui s'en trouve revêtu. Ces caractères de
vérité peuvent même convenir aux faits furnaturels ;
deibrte que s'il n'y avoit aucun obftacle à furmon-
<er , point de raifons à combattre , nous ferions auffi
affûrés d'un fait miraculeux que d'un fait naturel. Il
ne s'agit donc plus que de favoir , s'il y a des raifons
dans un fait furnaturel qui s'oppolent à l'impreffion
que ces marques devroient faire. Or j'oie avancer
qu'il en eft précifément de même d'un fait furnatu-
rel que d'un fait naturel ; c'eft à tort qu'on s'imagi-
ne toujours voir l'impoffibilité phyfique d'un fait mi-
raculeux combattre toutes les raifons qui concou-
rent à nous en démontrer la réalité. Car qu'eft-ce
que l'impoffibilité phyfique ? C'eft l'impuiffance des
caufes naturelles à produire un tel effet ; cette im-
poffibilité ne vient point du côté du fait même, qui
n'eft pas plus impoffible que le fait naturel le plus
• fimple. Lorlqu'on vient vous apprendre un fait mi-
raculeux , on ne prétend pas vous dire qu'il a été
produit par les feules forces des caufes naturelles;
î 'avoue qu'alors les raifons qui prouveroient ce fait ,
feroient non-feulement combattues , mais même dé-
truites; non par l'impoffibilité phyfique , mais par
une impoffibilité abfolue : car il eft ablolument im-
poffible qu'une caufe naturelle avec les feules for-
ces produife un fait furnaturel. Vous devez donc,
lorlqu'on vous apprend un fait miraculeux , joindre
la caufe qui peut le produire avec le tait même ; &
alors l'impoffibilité phyfique ne pourra nullement
»"oppofer aux raifons que vous aurez de croire ce
CER
fait. Si plufieurs perfonnes vous difent qu'elles vien-
nent de voir une pendule remarquable par l'exacti-
tude avec laquelle elle marque julques aux tierces ;
douterez-vous du fait , parce que tous les ferruriers
que vous connoiffez ne lauroient l'avoir faite , &C
qu'ils font dans une efpece d'impoffibilité phyfique
d'exécuter un tel ouvrage .; Cette queftion vous iur-
prend fans doute , & avec raifon : pourquoi donc ,
quand on vous apprend un fait miraculeux <, voulez-
vous en douter , parce qu'une caufe naturelle n'a pu
le produire ? L'impoffibilité phyfique , où fe trouve la
créature pour un fait furnaturel , doit-elle faire plus
d'impreffion que l'impoffibilité phyfique où fe trou-
ve ce ferrurier d'exécuter cette admirable pendule?
Je ne vois d'autres raifons que celles qui naiffent d'u-
ne impoffibilité métaphylique , qui puiffent s'oppo-
fer à la preuve d'un fait; ce railonnement fera tou-
jours invincible. Le fait que je vous propofe à croire
ne préfente rien à Pefprit d'abfurde & de contradic-
toire : ceffez donc de parler avec moi de fa poffibi-
lité ou de fou impoffibilité , & venons à la preuve
du fait.
L'expérience , dira quelqu'un, dément \rotre ré-
ponfe ; il n'eft perfonne qui ne croye plus facilement
un fait naturel qu'un miracle. Il y a donc quelque
choie de plus dans le miracle que dans le fait natu-
rel ; cette difficulté à croire un fait miraculeux prouve
très-bien , que la règle des faits ne fauroit faire la mê-
me impreiïion pour le miracle que pour un fait na-
nurel .
Si l'on vouloit ne pas confondre la probabilité
avec la certitude , cette difficulté n'auroit pas lieu.
J'avoue que ceux qui peu fcrupuleux fur ce qu'on
leur dit n'approfondiffent rien , éprouvent une cer-
taine réiiftance de leur efprit à croire un fait mira-
culeux , ils fe contentent de la plus légère probabi-
lité pour un fait naturel ; & comme un miracle eft
toujours un fait intéreffant , leur efprit en demande
davantage. Le miracle eft d'ailleurs un lait beau-
coup plus rare que les faits naturels : le plus grand
nombre de probabilités doit donc y fuppléer ; en
un mot , on n'eft plus difficile à croire un fait mi-
raculeux qu'un fait naturel , que lorlqu'on ie tient
précifément dans la fphere des probabilités. Il a
moins de vraisemblance , je l'avoue ; il faut donc
plus de probabilités , c'eft-à-dire , que li quelqu'un or-
dinairement peut ajouter foi à un fait naturel , qui
demande fix degrés de probabilité ; il lui en faudra
peut-être dix pour croire un fait miraculeux. Je ne
prétens point déterminer ici exactement la propor-
tion : mais li quittant les probabilités , vous paffez
dans le chemin qui mené à la certitude, tout fera égal.
Je ne vois qu'une différence entre les faits naturels &C
les miracles : pour ceux-ci on pouffe les chofes à la
rigueur , & on demande qu'ils puiffent foùtenir l'exa-
men le plus féverc ; pour ceux-là , au contraire , on
ne va pas à beaucoup près li loin. Cela eft fondé en
raifon , parce que , comme je l'ai déjà remarqué , un
miracle eft toujours un fait très-intéreffant : mais cela
n'empêche nullement que la règle des faits ne puiffe
fervir pour les miracles, auffi -bien que pour les
faits naturels ; & fi on veut examiner la difficulté
préfente de bien près , on verra qu'elle n'eft fondée
que fur ce qu'on fe lèrt de la règle des faits pour exa-
miner un miracle , & qu'on ne s'en fert pas ordinai-
rement pour un fait naturel. S'il étoit arrivé un mira-
cle dans les champs de Fontenoi , le jour que ie don-
na la bataille de ce nom ; fi les deux armées avoient
pu l'appercevoir ailément ; ii en coniéquence les mê-
mes bouches qui publièrent la nouvelle de la bataille
l'avoient publié ; s'il avoit été accompagné des mê-
mes circonftances que cette bataille , & qu'il eût eu
des fuites , quel feroit celui qui ajoûteroit foi à la
nouvelle de la bataille , & qui douteroit du miracle ?
C E R
ici les deux faits marchent de niveau , parce qu'ils
font arrivés tous les deux à la certitude.
Ce que j'ai dit jufques ici Suffit fans cloute pour
repouffer aifément tous les traits que lance l'auteur
des Penfées Plulofophiqu.es , contre la certitude des
faits furnaturels : mais le tour qu'il donne à fes pen-
fées les préfente de manière , que je crois nécef-
faire de nous y arrêter. Ecoutons-le donc parler
lui-même , & voyons comme il prouve qu'on ne
doit point ajouter la même foi à un fait furnaturel
qu'à un fait naturel : « Je croirais fans peine , dit-il,
» un feul honnête homme qui m'annonceroit que
» Sa MajeSté vient de remporter une viftoire com-
» plette fur les alliés : mais tout Paris m'aflureroit
» qu'un mort vient de reffufeiter à Pafly , que je n'en
» croirois rien. Qu'un historien nous en impoSe ou
» que tout un peuple le trompe , ce ne font pas des
» prodiges ». Détaillons ce fait. Donnons-lui toutes
ks circonstances dont un fait de cette nature peut
être fufceptible ; parce que , quelques circonstances
que nous Suppofions, le fait demeurera toujours dans
l'ordre des faits furnaturels , & par conséquent le rai-
sonnement doit toujours valoir , ou ne pas être bon
en lui-même. C'étoit une perfonne publique , dont
la vie intéreiïbit une infinité de particuliers , & à la-
quelle étoit en quelque façon attaché le fort du royau-
me. Sa maladie avoit jette la consternation dans tous
les eSprits , & fa mort avoit achevé de les abattre ; la
pompe funèbre fut accompagnée des cris lamenta-
bles de tout un peuple , qui retrouvoit en lui un père.
Il fut mis en terre , à la face du Peuple , en prélence
de tous ceux qui le pleuroient ; il avoit le vifage dé-
couvert Se déjà défiguré par les horreurs de la mort.
Le roi nomme à tous les emplois, &c les donne à un
homme , qui de tout tems a été l'ennemi implacable
de la famille de l'illuStre mort ; quelques jours s'écou-
lent , & toutes les affaires prennent le train que cette
mort devoit naturellement occafionner : voilà la pre-
mière époque du fait. Tout Paris va l'apprendre à
1 auteur des Penfées Phiiofophiques , & il n'en doute
point ; c'eSt un fait naturel. Quelques jours après, un
homme qui fe dit envoyé de Dieu , Se préfente, an-
nonce quelque vérité ; & pour prouver la divinité de
fa légation , il aSTemble un peuple nombreux au tom-
beau de cet homme , dont ils pleurent la mort fi
amèrement. A Sa voix , le tombeau s'ouvre , la puan-
teur horrible qui s'exhale du cadavre , intecle les
airs. Le cadavre hideux , ce même cadavre , dont la
vue les fait pâlir tous , ranime Ses cendres froides , à
la vue de tout Paris /qui Surpris du prodige recon-
noît l'envoyé de Dieu. Une foule de témoins oculai-
res , qui ont manié le mort reSfufcité , qui lui ont par-
lé pluSieurs fois, attellent ce fait à notre Sceptique ,
& luidilentque l'homme dont on lui avoit appris la
mort peu de jours avant, cil plein de vie. Que re-
pond à cela notre Sceptique , qui eft déjà afîûré de
la mort ? Je ne puis ajouter foi à cette rélurrcOion ;
parce qu'il eft plus poffiblc que tout Paris le Soit
trompé , ou qu'il ait voulu me tromper , qu'il n'eft
poifible que cet homme Soit reffufeité.
Il y a deux choies à remarquer dans la réponfc de
notre Sceptique : i°. la poSfibilité que tout Paris le
foit trompé: i°. qu'il ait voulu tromper. Quant au
premier membre de la réponfc, il efl évident que la
réfurrection de ce mort n'eitpas plus impoflible , qu'il
l'cSt que tout Paris Se Soit trompé; car L'une &: l'au-
tre impossibilités Sont renfermées dans l'ordre phyli-
que. En effet, il n'eft pas moins contre les lois de la
nature , que tout Paris croye voir un homme qu'il ne
voit point; qu'il croye l'entendre parler, cv ne l'en-
tende point ; qu'il croye le toucher, 6c ne le toache
point, qu'il l'efl qu'un mort refïuleite. Oleroit-on
nous dire que clans la nature il n'y a pas des lois pour
les Sens > êc s'il y en a, comme on n'en peut douter,
Tome II,
C E R
8ji
n'en eft-ce point une pour la vue , de voir Un objet
qui eSt à portée d'être vu? Je fai que la vue, comme
le remarque très-bien l'auteur que nous combattons,
eSt un lens Superficiel ; auffi ne l'employons-nous que
pour la iuperficie des corps, qui feule fuffit pour les
faire distinguer. Mais fi à la vue & à fouie nous joi-
gnons le toucher, ce Sens philoSophe & profond,
comme le remarque encore le même auteur, pou-
vons nous craindre de nous tromper ? Ne faudrait-il
pas pour cela renverlèr les lois de la nature relati-
ves à ces fens ? Tout Paris a pu s'aSTîtrer de la mort
de cet homme , le Sceptique l'avoue : il peut donc de
même s'aSTùrer de fa vie , & par conséquent de fa ré-
furreefion. Je puis donc conclurre contre l'auteur des
Penfées Philofophiques , que la réSurreôion de ce mort
n'elt pas plus impoSTible, que l'erreur de tout Paris
fur cette réfurrection. ESt-ce un moindre miracle d'a-
nimer un phantome , de lui donner une reSTemblance
qui puiffe tromper tout un peuple, que de rendre la
vie à un mort ? Le Sceptique doit donc être certain
que tout Paris n'a pu Se tromper. Son doute , s'il lui
en reSte encore , ne peut donc être fondé que Sur ce
que tout Paris aura pu vouloir le tromper. Or il ne
lera pas plus heureux dans cette Seconde SuppoSition.
En effet , qu'il me Soit permis de lui dire : « n'avez-
» vous point ajouté foi à la mort de cet homme fur
» le témoignage de tout Paris , qui vous l'a apprife *
» il étoit pourtant poSTible que tout Paris voulût vous
» tromper (du moins dans votre Sentiment) ; cette
» poSfibilité n'a pas été capable de vous ébranler».
Je le vois, c'eSt moins le canal de la tradition, par
où un fait paSSe jufqu'à nous , qui rend les déiStes Si
défians tk fi Soupçonneux, que le merveilleux qui y
eSt empreint. Mais du moment que ce merveilleux eir.
poSfible, leur doute ne doit point s'y arrêter, mais feu-
lement aux apparences & aux phénomènes qui , s'in-
corporant avec lui, en atteftent la réalité. Car voici
comme je railonne contr'eux en la perlbnne de no-
tre Sceptique: « il eSt aulîi impoffible que tout Paris
» ait voulu le tromper Sur un fait miraculeux, que
» lur un tait naturel ». Donc une poSfibilité ne doit
pas faire plus d'impreSSion fur lui que l'autre. Il eft
donc auSfi mal fondé à vouloir douter de la réSurrec-
tion que tout Paris lui confirme, Sous prétexte que
tout Paris aurait pu vouloir le tromper, qu'il le Se-
rait à douter de la mort d'un homme , Sur le témoi-
gnage unanime de cette grande ville. Il nous dira
peut-être : le dernier fait n'elt point impoSSible phy-
siquement ; qu'un homme foit mort , il n'y a rien là
qui m'étonne : mais qu'un homme ait été reffufeité ,
voilà ce qui révolte & ce qui effarouche ma raifon ;
en un mot voilà pourquoi la poifibilité que tout Pa-
ris ait voulu me tromper lur la reuirrection de cet
homme , me tait une miprelîion dont je ne Saurais me
défendre : au heu que la poSfibilité que tout Paris ait
voulu m'en impofer lur la mort, ne me frappe nul-
lement. Je ne lui répéterai point ce que je lui ai déjà
dit, que ces deux faits étant également polfibles, il
ne doit s'arrêter qu'aux marques extérieures qui l'ac-
compagnent , & qui nous guident dans la connoiSTan-
ce des evenemens : en lbrte que li un tait Surnature!
a plus de ces marques extérieures qu'un fait naturel ,
il me deviendra des-lors plus probable. Mais exami-
nons le merveilleux qui effarouche fa raiion, & rai
lbns-le difparoître à les yeux. Ce n'elt en effet qu'un
fait naturel que tout Paris lui propofè à croire: Sa-
voir, que cet homme elt plein de vie. Il efl vrai qu'é-
tant déjà afluré de fa mort , ù vie préfente fuppofe
une relurreétion. Mais s'il ne peut douter de la vie
de cet homme fur le témoignage de tout Pans, puis-
que e'elt un fait naturel, il ne Saurait donc douter
de Sa refurrecV.on , l'un efl lié néceffairement avec
l'autre. Le miracle fe trouve enferme entre deux faits
naturels , lavoir , la mort de cet homme ce fa vie pre-
P P p p p ij
85i
CER
fente. Les témoins ne font afïïïrés du miracle de la
réfurreûion , que parce qu'ils font aflïïrés du fait na-
turel. Ainfi je puis dire que le miracle n'eit qu'une
conclufion des deux faits naturels. On peut s'aflïïrer
des faits naturels , le fceptique l'avoue : le miracle
eit une fimple conféquence des deux faits dont on
elt fur : ainTi le miracle que le fceptique me con-
teite fe trouve , pour ainfi dire , compofé de trois cho-
ies , qu'il ne prétend point me difputer , fa voir, la cer-
titude de deux faits naturels , la mort de cet homme ,
& fa vie préfente , & d'une conclufion métaphyli-
que , que le fceptique ne me conteite point. Elle' con-
fine à dire : cet homme qui vit maintenant étoit mort
il y a trois jours ; il a donc été rendu de la mort à la
vie. Pourquoi le fceptique veut-il plutôt s'en rap-
porter à fon jugement qu'à tous fes fens ? Ne voyons-
nous pas tous les jours que fur dix hommes , il n'y en
a pas un qui envifage une opinion de la même fa-
çon? Cela vient, medira-t-on, de labifarrerie de ces
hommes, & du différent tour de leurefprit: je l'a-
voue : mais qu'on me fafTe voir une telle bifarrerie
dans les fens. Si ces dix hommes font à portée de voir
un même objet, ils le verront tous de la même fa-
çon, & on peut affùrer qu'aucune difpute ne s'élè-
vera entr'eux fur la réalité de cet objet. Qu'on me
montre quelqu'un qui puiffe difputer fur la pofiibiiité
d'une choie quand il la voit. Je le veux, qu'il s'en rap-
porte plutôt à Ion jugement qu'à les lens : que lui dit
ion jugement fur la réfurrection de ce mort? Que cela
eit poifible : fon jugement ne va pas plus loin ; il ne
contredit nullement le rapport de fes fens , pourquoi
veut-il donc les oppofer enlemble ?
Un autre raifonnement propre à faire fentir le foi-
ble de celui de l'auteur des Penfées phllofophiques ,
c'eit qu'il compare la pofiibiiité que tout Paris ait
voulu le tromper , à l'impolïïbilité de la réfurrection.
Entre le fait & lui il y a un vuide à remplir , parce
qu'il n'eit pas témoin oculaire : ce vuide, ce milieu
eit rempli par les témoins oculaires. Il doit donc com-
parer d'abord la pofiibiiité que tout Paris fe foit trom-
pé avec la pofiibiiité de la réfurrection. Il verra que
ces deux pofiibilités font du même ordre, comme je
l'ai déjà dit. Il n'a point enfuite à raifonner fur la ré-
furrection , mais feulement à examiner le milieu par
oîi elle parvient jufqu'àlui. Or l'examen ne peut être
autre que l'application des règles que j'ai données ,
moyennant lefquelles on peut s'afiïirer que ceux qui
vous rapportent un fait , ne vous en impotent point ;
car il ne s'agit ici que de vérifier le témoignage de
tout Paris. On pourra donc fe dire comme pour les faits
naturels : les témoins n'ont ni les mêmes pafiions , ni
les mêmes intérêts ; ils ne fe connoifient pas ; il y en a
même beaucoup qui ne le font jamais vus : donc il ne
iauroit y avoir entr'eux aucune collufion. D'ailleurs
concevra-t-on ailément comment Paris le détermi-
neroit, fuppofé le complot pofiible , à en impofer à
un homme fui un tel fait ; & feroit-il pofiible qu'il
ne tranlpirât rien d'un tel complot ? Tous les raiibn-
nemens que nous avons faits fur les faits naturels re-
viennent comme d'eux-mêmes fe préienter ici, pour
nous faire fentir qu'une telle impofture eit impofii-
ble. J'avoue au iceptique que nous combattons , que la
pofiibiiité que tout Paris veuille le tromper, eit d'un
ordre différent de la pofiibiiité de la réfurrection.
Mais je lui foûtiens que le complot d'une aufîi gran-
de ville que Paris , formé fans raifon , fans inté-
rêt , fans motif, entre des gens qui ne fe connoifient
pas , faits même par leur naiffance pour ne pas fe
connoître , ne foit plus difficile à croire que la réfur-
reclion d'un mort. La réfurreclion eit contre les lois
du monde phylique ; ce complot eit contre les lois
du monde moral. Il faut un prodige pour l'un comme
pour l'autre, avec cette différence que l'un feroit
beaucoup plus grand que l'autre. Que dis-je? l'un,
CER
parce qu'il n'eit établi que fur des lois arbitraires,
6c dès-là foûmiiès à un pouvoir fouverain , ne répu-
gne pas à la fagefle de Dieu ; l'autre , parce qu'il eit
fondé fur des lois moins arbitraires , je veux dire cel-
les par lefquelles il gouverne le monde moral , ne iau-
roit s'allier avec les vues de cette fagefle fuprème ;
& par conféquent il elt impofiible. Que Dieu refluf-
cite un mort pour manifefter fa bonté , ou pour icel-
ler quelque grande vérité ; là je reconnois une puif-
fance infinie , dirigée par une fagefle comme elle in-
finie : mais que Dieu bouleverié l'ordre de la focié-
té ; qu'il fufpende l'action des caufes morales ; qu'il
force les hommes , par une impreflion miraculeufe ,
à violer toutes les règles de leur conduite ordinaire ,
& cela pour en impofer à un fimple particulier , j'y
reconnois à la vérité fa puiffance infinie , mais je
n'y vois point de fagefle qui la guide dans fes opé-
rations : donc il eit plus pofiible qu'un mort refluf-
cite, qu'il n'eit polîible que tout Paris m'en impofe
fur ce prodige.
Nous connoiflbns à préfent la règle de vérité qui
peut fervir aux contemporains , pour s'aflïirer des
faits qu'ils fe communiquent entre eux de quelque
nature qu'ils foient , ou naturels , ou furnaturels.
Cela ne lufnt pas : il faut encore que tout abyfmés
qu'ils font dans la profondeur des âges , ils foient
préiens aux yeux de la poitérité même la plus recu-
lée. C'eit ce que nous allons maintenant examiner.
Ce que nous avons dit jufqu'ici , tend à prouver
qu'un fait a toute la certitude dont il eit fufceptible ,
lorfqu'il le trouve atteité par un grand nombre de
témoins , & en même tems lié avec un certain con-
cours d'apparences 6c de phénomènes qui le fuppo-
fent comme la feule cauie qui les explique. Mais fi
ce fait elt ancien , 6c qu'il fe perde pour ainii dire ,
dans l'éloignement des fiecles , qui nous aflïirera
qu'il foit revêtu des deux caractères ci-deflus énon-
cés , lefquels par leur union portent un fait au plus
haut degré de certitude ? Comment faurons-nous qu'il
fut autrefois atteité par une foule de témoins oculai-
res , & que ces monumens qui fubiiitent encore au-
jourd'hui , ainii que ces autres traces répandues dans
la fuite des fiecles , s'incorporent avec lui plutôt
qu'avec tout autre ? L'hiitoire & la tradition nous
tiennent lieu de ces témoins oculaires qu'on paroît
regretter. Ce font ces deux canaux qui nous trans-
mettent une connoiffance certaine des faits les plus
reculés ; c'eit par eux que les témoins oculaires font
comme reproduits à nos yeux , & npus rendent en
quelque forte contemporains de ces faits. Ces mar-
bres , ces médailles , ces colonnes , ces pyramides ,
ces arcs de triomphe , font comme animés par l'hif-
toire 6c la tradition , & nous confirment comme à
l'envi ce que celles-là nous ont déjà appris. Com-
ment , nous dit le fceptique , l'hiitoire & la tradi-
tion , peuvent-elles nous transmettre un fait dans tou-
te fa pureté ? Ne font-elles point comme ces fleuves
qui grofliflent & perdent jufqu'à leur nom à mefure
qu'ils s'éloignent de leur fource? Nous allons fatis-
faire à ce qu'on nous demande ici : nous commence-
rons d'abord par la tradition orale ; de-là nous paffe-
rons à la tradition écrite ou à l'hiitoire, & nous fini-
rons par la tradition des monumens. Il n'eit pas pof-
fible qu'un fait qui fe trouve comme lié & enchaîné
par ces trois fortes de traditions , puiflé jamais fe per-
dre , & même fouffrir quelque altération dans l'im-
menfité des fiecles.
La tradition orale confifte dans une chaîne de té-
moignages rendus par des perlonnes qui fe font iuc-
cédées les unes aux autres dans toute la durée des
fiecles , à commencer au tems où un tait s'eit pafle.
Cette tradition n'eit iùre & fidèle que loriqu'on peut
remonter facilement à fa fource , & qu'à-travers une
fuite non interrompue de témoins irréprochables , on
C E R
arrive aux premiers témoins qui font contemporains
clés faits: car fi l'on ne peut s'affûrer que cette tradi-
tion , dont nous tenons un bout , remonte effective-
ment jufqu'à l'époque affignée à de certains faits , &c
qu'il n'y a point eu , fort en deçà de cette époque ,
quelque impoffeur qui fe foit plù à les inventer pour
abufer la poftérité ; la chaîne des témoignages , quel-
que bien liée qu'elle foit , ne tenant à rien , ne nous
conduira qu'au menfonge. Or comment parvenir à
cette affûrance ? Voilà ce que les Pyrrhoniens ne peu-
vent concevoir , & furquoi ils ne croyent pas qu'il
foit poffible d'établir des règles , à l'aide defquclles
on puiffe difcerner les vraies traditions d'avec les
fauffes. Je ne veux que leur oppofer la fuivante.
On m'avouera d'abord que la dépofition d'un grand
nombre de témoins oculaires , ne peut avoir que la
vérité pour centre : nous en avons déjà expolé les
raifons. Or je dis que la tradition, dont je touche ac-
tuellement un des bouts , peut me conduire infailli-
blement à ce cercle de témoignages rendus par une
foule de témoins oculaires. Voici comment : plufieurs
de ceux qui ont vécu du tcms que ce fait eff arrivé ,
& qui l'ayant appris de la bouche des témoins ocu-
laires , ne peuvent en douter , parlent dans l'âge fui-
vant , & portent avec eux cette certitude. Ils ra-
content ce fait à ceux de ce fécond âge , qui peu-
vent faire le même raifonnement que firent ces con-
temporains , lorfqu'ils examinèrent s'ils dévoient
ajouter foi aux témoins oculaires , qui le leur rappor-
toient. Tous ces témoins , peuvent-ils fe dire , étant
contemporains d'un tel fait , n'ont pu être trompés
fur ce fait. Mais peut-être ont-ils voulu nous trom-
per : c'eff ce qu'il faut maintenant examiner , dira
quelqu'un des hommes du fécond âge , ainfi nommé
relativement au fait en queflion. J'obierve d'abord ,
doit dire notre contemplatif, que le complot de ces
contemporains peur nous en impofer , auroit trou-
vé mille obffacles dans la diveriité de parlions , de
préjugés , &c d'intérêts qui partagent l'efprit des
peuples & les particuliers d'une même nation. Les
hommes du fécond âge s'alïûreront en un mot que
les contemporains ne leur en impofent point , com-
me ceux-ci s'étoient allures de la fidélité des témoins
oculaires : car par-tout où l'on luppofe une grande
multitude d'hommes , on trouvera une diverfité pro-
digieule de génies &c de caractères , de pallions &
d'intérêts ; & par conléquent on pourra s'affûrer ai-
fément que tout complot parmi eux eff impoiîîble.
Et fi les hommes font féparés les uns des autres par
l'interpolition des mers & des montagnes , pourront-
ils fe rencontrer à imaginer un même fait , &c à le
faire fervir de fondement à la fable dont ils veulent
amufer la poftérité ? Les hommes d'autrefois étoient
ce que nous fommes aujourd'hui. En jugeant d'eux
par nous-mêmes , nous imitons la nature, qui agit
d'une manière uniforme dans la production des hom-
mes de tous les tems. Je fai qu'on dilhngue un iîecle
de l'autre à une certaine tournure (l'efprit , & à des
mœurs même différentes ; enforte que li on pouvoit
faire reparoître un homme de chaque iiecle , ceux
qui feraient au fait de l'hiltoire , en les voyant, les
rangeroient dans une ligne , chacun tenant la place
de l'on Iiecle fans fe tromper, \i.us une chofe en quoi
tous les fiecles font uniformes , c'elt la diverfité qui
règne entre les hommes du même tems : ce qui furfit
pour ce que nous demandons, & pour affiner ceux
du fécond âge , que les contemporains n'ont pu con-
venir entre eux pour leur en impofer. Or ceux du
troilieme âge pourront faire , par rapport à ceux du
fécond âge qui leur rapporteront ce fait , le même
raifonnement que ceux-ci ont fait par rapport aux
contemporains qui le leur ont appris : ainfi on tra-
verlera facilement tous les fiecles.
Pour faire fentir de plus en plus combien eff pur
C E R
353
le canal d'une tradition qui nous tranfmet un fait pu-
blic & éclatant ( car je déclare que c'eff de celui-là
feul dont j'entends parler , convenant d'ailleurs que
fur un t'ait fecret & nullement intereffant , une tra-
dition ancienne & étendue peut être fauffe ) , je n'ai
que ce feul raifonnement à faire : c'eff que je défie
qu'on m'affigne dans cette longue fuite d'âges un
tems où ce fait auroit pu être fuppoié , & avoir par
conléquent une fauffe origine. Car 011 la trouver
cette iource erronée d'une tradition revêuie de pa-
reils caractères ? fera-ce parmi les contemporains ?
il n'y a nulle apparence. En effet , quand auroient-
ils pu tramer le complot d'en impofer aux âges fui-
vans fur ce fait ? Qu'on y prenne garde : on paffe d'u-
ne manière infentible d'un Iiecle à l'autre. Les âges
fe fuccedent fans qu'on puiffe s'en appercevoir. Les
contemporains dont il eft ici queltion , fe trouvent
dans l'âge qui fuit celui où ils ont appris ce fait , qu'ils
penfent toujours être au milieu des témoins oculai-
res qui le leur avoient raconté. On ne paffe pas d'un
âge à l'autre , comme on feroit d'une place publi-
que dans un palais. On peut , par exemple , tramer
dans un palais le complot d'en impofer fur un pré-
tendu fait, à tout un peuple raffemblé dans une place
publique ; parce qu'entre le palais & la place publi-
que il y a comme un mur de féparation , qui rompt
toute communication entre les uns & les autres.
Mais on ne trouve rien dans le paffage d'un âge à
l'autre , qui coupe tous les canaux par où ils pour-
roient communiquer enfemble. Si donc dans le pre-
mier âge il fe fait quelque fraude , il faut néceffaire-
ment que le fécond âge en toit inffruit. La raifon de
cela , c'elt qu'un grand nombre de ceux qui com-
polentle premier âge entrent dans la compofition du
fécond âge , & de plufieurs autres fuivans , Se que
prefque tous ceux du fécond âge ont vu ceux du
premier ; par conléquent plufieurs de ceux qui fe-
roient complices de la fraude forment le fécond âge.
Or il n'en pas vraiffemblable que ces hommes qu'on
fuppofe être en grand nombre , & en même tems
être gouvernés par des pallions différentes , s'accor-
dent tous à débiter le même menfonge , &c à taire la
fraude à tous ceux qui font feulement du fécond âge.
Si quelques-uns du premier âge , mais contemporains
de ceux du fécond , fe plaifent à entretenir chez eux
l'illufion , croit-on que tous les autres qui auront vécu
dans le premier âge , & qui vivent actuellement dans
le fécond , ne réclameront pas contre la fraude ? II
faudroit pour cela luppoler qu'un même intérêt les
réunît tous pour le même menfonge. Or il eit cer-
tain qu'un grand nombre d'hommes ne fauroient
avoir le même intérêt a déguiicr la vérité: donc il
n'eit pas poffible que la fraude du premier âge paffe
d'une voix unanime dans le fécond , lans éprouver
aucune contradiction. Or fi le fécond âge clt inffruit
de la fraude, il en inlbuira le troilieme, & ai:
fuite , dans toute l'étendue des fiecles. Des-là qu'au-
cune barrière ne répare les âges les uns des autres ,
il faut neceffairement qu'ils le la tranfmettent tour
à tour. Nul âge ne fera donc la dupe des autres, 6.'
par conléquent nulle fauûe tradition ne pourra s'e-
tablir fur un fait public èv éclatant.
Il n'y a pas de point fixe dans'le tems qui ne ren-
tenue pour le moins loixante ou quatre-vingt géné-
rations A la fois, à commencer depuis la première
enfance jufqu'à la vieiileffe la plus avancée. Or ce
mélange perpétue) de tant de générations enchaînées
les unes dans le'S autres, rend la fraude împoffiblcfur
un fait public Se intercff.mt. Voulez-vous pour vous
en convaincre (uppofer que tous les hommes âj
quarante ans , 6e qui répondent à un point détermi-
ne du tcms , eonfpirent contre la polterite pour la lé-
duire fur un fait ? Je veux bien vous accorder ce com-
plot poffible , quoique tout m'autorife à le rejetter,
854
C E R
CER
Penfez-vous qu'en ce cas tous les hommes qui compo-
sent les générations depuis quarante ans julqu'à qua-
tre-vingts , & qui répondent au même point du terns ,
ne reclameront pas , qu'ils ne feront pas connoitre
î'impofture ? Choififfez fi vous voulez la dernière
génération , & fuppolèz que tous les hommes âgés
de quatre-vingts ans forment le complot d'en impo-
fer fur un fait à la poftérité. Dans cette fuppofition
même , qui eft certainement la plus avantageufe
qu'on puifTe faire , I'impofture ne fauroit li bien le
cacher qu'elle ne foit dévoilée ; car les hommes qui
compofent les générations qui les fuivent immédia-
tement, pourroient leur dire : Nous avons vécu long-
tems avec vos contemporains ; & voilà pourtant la
première fois que nous entendons parler de ce fait :
il eft trop intéreffant , & il doit avoir fait trop de
bruit pour que nous n'en ayons pas été inftruits plu-
tôt. Et s'ils ajoùtoient à cela qu'on n'apperçoit au-
cunes des fuites qu'auroit dû entraîner ce tait, &
plufieurs autres chofes que nous développerons dans
la fuite, feroit-il poffible que le menlonge ne fut
point découvert ? &c ces vieillards pourraient-ils ef-
pérer de perfuader les autres hommes de ce menlon-
ge qu'ils auraient inventé? Or tous les âges le ref-
femblent du côté du nombre des générations ; on ne
peut donc en luppofer aucun où la fraude puiffe pren-
dre. Mais fi la fraude ne peut s'établir dans aucun
des âges qui compofent la tradition , il s'enfuit que
tout fait que nous amènera la tradition , pourvu qu'il
foit public & intéreffant , nous fera tranfmis dans
toute fa pureté.
Me voilà donc certain que les contemporains d'un
fait n'ont pas pu davantage en impofer fur la réalite
aux âges fuivans , qu'ils ont pu être dupés eux-mê-
mes fur cela par les témoins oculaires. En effet ,
( qu'on me permette d'infifter là-deffus ) je regarde
la tradition comme une chaîne, donttous les anneaux
font d'égale force ; & au moyen de laquelle , lorlque
j'en faiiis le dernier chaînon , je tiens à un point hxe
qui eft la vérité , de toute la torce dont le premier
chaînon tient lui-même à ce point fixe. Voici fur
cela quelle eft ma preuve : la dépolîtion des témoins
oculaires eft le premier chaînon; celui des contem-
porains eft le fécond ; ceux qui viennent immédia-
tement après , forment le troifieme par leur témoi-
gnage , & ainfi de fuite , en defcendant jufqu'au der-
nier , que je faifis. Si le témoignage des contempo-
rains eft d'une force égale à celui des témoins ocu-
laires , il en fera de même de tous ceux qui fe fui-
vront, & qui par leur étroit entrelacement , forme-
ront cette chaîne continue de tradition. S'il y avoit
quelque décroiffement dans cette gradation de té-
moiçmaçes qui naiffent les uns des autres , cette rai-
fon aurait auffi lieu par rapport au témoignage des
contemporains , confideré refpedivement à celui des
témoins oculaires ; puilque l'un des deux eft fondé
fur l'autre. Or que le témoignage des contemporains
ait par rapport à moi autant de force que celui des
tcmoins ocidaires , c'eft une chofe dont je ne puis
douter. Je ferais auffi certain que Henri IV. a fait la
conquête de la France , quand même je ne le faurois
que des contemporains de ceux qui ont pu voir ce
grand &c bon roi , que je le fuis que fon throne a été
occupé par Louis le Grand , quoique ce fait me foit
attefté par des témoins oculaires. En voulez-vous
favoir la raifon ? c'eft qu'il n'eft pas moins impoffi-
ble , que des hommes fe réunifient tous , malgré la
diftance des lieux , la différence des efprits , la variété
des pallions , le choc des intérêts , la diveriité des re-
ligions , à foûtenir une même tauffeté , qu'il l'eft que
plufieurs perfonnes s'imaginent voir un fait, que
pourtant elles ne voyent pas. Les hommes peuvent
bien mentir , comme je l'ai déjà dit ; mais je les défie
tic le faire tous de la même manière. Ce ferait exi-
ger que plufieurs perfonnes , qui écriraient fur les
mêmes Injets , penfaffent & s'exprimaffent de la
même façon. Que mille auteurs traitent la même ma-
tière , ils le feront tous différemment , chacun félon
le tour d'efprit qui lui eft propre. On les diftinguera
toujours à l'air, au tour, au coloris de leurs pen-
fées. Comme tous les hommes ont un même fonds
d'idées , ils pourront rencontrer fur leur route les
mêmes vérités: mais chacun d'eux les voyant d'une
manière qui lui eft propre , vous les repréfentera fous
un jour différent. Si la variété des efprits lufht pour
mettre tant de différence dans les écrits qui roulent
fur les mêmes matières ; croyons que la diveriité des
parlions n'en mettra pas moins dans les erreurs fur
les faits. Il paroît par ce que j'ai dit jufqu'ici , qu'on
doit raifonner fur là tradition comme fur les témoins
oculaires. Un fait tranfmis par une feule ligne tra-
ditionelle , ne mérite pas plus notre foi , que la dé-
polîtion d'un feul témoin oculaire ; car une ligne tra-
ditionelle ne reprélente qu'un témoin oculaire ; elle
ne peut donc équivaloir qu'à un feul témoin. Par où
en effet pourriez-vous vous affùrer de la vérité d'un
tait qui ne vous ferait tranfmis que par une feule li-
gne traditionelle ? Ce ne ferait qu'en examinant la
probité & la lincérité des hommes qui compoferoient
cette ligne ; dilcuffion , comme je l'ai déjà dit , très-
difficile , qui expolé à mille erreurs , & qui ne pro-
duira jamais qu'une fimple probabilité. Mais fi un
tait , comme une fource abondante , forme différens
canaux , je puis facilement m'affûrer de fa réalité.
Ici , je me 1ers de la règle que fuivent les efprits,
comme je m'en luislervi pour les témoins oculaires.
Je combine les différens témoignages de chaque per-
lonne qui reprélente là ligne ; leurs mœurs différen-
tes , leurs paffions oppolees, leurs intérêts divers,
me démontrent qu'il n'y a point eu de collufion en-
tre elles pour m'en impofer. Cet examen me fuffit ,
parce que par-là je fuis affùré qu'elles tiennent le
tait qu'elles me rapportent de celui qui les précède
immédiatement dans leur ligne. Si je remonte donc
julques au tait fur le même nombre de lignes tradi-
tionelles , je ne laurois douter de la réalité du fait,
auquel toutes ces lignes m'ont conduit ; parce que je
ferai toujours le même raifonnement fur tous les
hommes qui reprélentent leur ligne dans quelque
point du tems que je la prenne.
Il y a dans le monde , me dira quelqu'un , un fi
grand nombre de fauffes traditions , que je ne fau-
rois me rendre à vos preuves. Je fuis comme invefti
par une infinité d'erreurs, qui empêchent qu'elles ne
puinent venir julqu'à moi ; & ne croyez pas , conti-
nuera toujours ce Pyrrhonien, que je prétende parler
de ces fables , dont la plupart des nobles flattent
leur orgueil ; je fais qu'étant renfermées dans une
feule famille , vous les rejettez avec moi. Mais je
veux vous parler de ces faits qui nous font tranfmis
par un grand nombre de lignes traditionelles , &
dont vous reconnoifîez pourtant la fauffeté. Telles
font par exemple , les fabuleufes dynafties des Egyp-
tiens , les hiftoires des dieux & demi - dieux des
Grecs ; le conte de la louve qui nourrit Remus &
Romulus : tel eft le fameux fait de la papeffe Jeanne,
qu'on a cru prelque univerlellement pendant très-
long-tems , quoiqu'il fût très-récent ; fi on avoit pu
lui donner deux mille ans d'antiquité , qui eft-ce qui
aurait oie feulement l'examiner ? Telle eft encore
l'hiftoire de la lainte ampoule, qu'un pîgeon apporta
du ciel pour lervir aufacre de nos rois ; ce fait n'eft-
il pas univerfellement répandu en France, ainli que
tant d'autres que je pourrais citer ? Tous ces faits
fuffifent pour faire voir que l'erreur peut nous venir
par plufieurs lignes traditionelles. On ne lauroit
donc en faire un caractère de vérité pour les faits
qui nous font ainli tranfmis.
C E R
Je ne vois pas que cette difficulté rende inutile ce
que j'ai dit : elle n'attaque nullement mes preuves ,
parce qu'elle ne les prend qu'en partie. Car j'avoue
qu'un tait quoique taux , peut m'être attelle par un
grand nombre de perfonnes qui représenteront dif-
férentes lignes traditionelles. Mais voici la différen-
ce que je mets entre l'erreur & la vérité : celle-ci ,
dans quelque point du tems que vous la preniez, fe
Soutient ; elle eft toujours détendue par un grand
nombre de lignes traditionclies qui la mettent à l'a-
bri du Pyrrhonifma, & qui vous conduiient dans des
lentiers clairs jufques au tait même. Les lignes, au
contraire , qui nous tranfmettent une erreur , font
toujours couvertes d'un certain voile qui les fait ai-
fément reconnoître. Plus vous les fuivez en remon-
tant , & plus leur nombre diminue ; 6c , ce qui eft le
caractère de l'erreur, vous en atteignez le bout fans
que vous foyez arrivé au fait qu'elles vous tranf-
mettent. Quel fait que les dynafties des Egyptiens !
Elles remontoient à plusieurs milliers d'années : mais
il s'en faut bien que les lignes traditionelles les con-
duifilfent jufque- là. Si on y prenoit garde , on ver-
rqit que ce n'efl point un fait qu'on nous objecte ici ,
mais une opinion, à laquelle l'orgueil des Egyptiens
avoit donné naiflance. Il ne faut point confondre ce
que nous appelions fait , & dont nous parlons ici ,
avec ce que les différentes nations croyent fur leur
origine. Il ne faut qu'un l'avant , quelquefois un vi-
fionnaire , qui prétende après bien des recherches
avoir découvert les vrais fondateurs d'une monar-
chie ou d'une république , pour que tout un pays y
ajoute foi ; furtout fi cette origine flatte quelqu'une
des pallions des peuples que cela intéreiîe : niais
alors c'eft la découverte d'un lavant ou la rêverie
d'un vifionnaire , &c non un fait. Cela fera toujours
problématique, à moins que ce favant ne trouve le
moyen de rejoindre tous les différens fils de la tra-
dition , par la découverte de certaines hiftoires ou
de quelques inferiptions qui feront parler une infi-
nité de monuinens, qui avant cela ne nous diloient
rien. Aucun des faits qu'on cite , n'a les deux condi-
tions que je demande ; lavoir un grand nombre de
lignes traditionelles qui nous les tranfmettent ; enfor-
te qu'en remontant au moins parla plus grande par-
tie de ces lignes, nous puiifions arriver au tait. Quels
font les témoins oculaires qui ont dépolé pour le fait
de Remus & de Romulus ? y en a-t-il un grand
nombre, & ce fait nous a-t-il été tranlmis fur des li-
gnes fermes , qu'on me permette ce terme ? On voit
que tous ceux qui en ont parlé , l'ont fait d'une ma-
nière douteufe. Qu'on voye fi les Romains ne
croyoient pas différemment les actions mémorables
desScipions? C'étoitdonc plutôt une opinion ehez
eux qu'un fait. On a tant écrit lur la papeffe Jeanne,
qu'il (eroit plus que iuperflu de m'y arrêter. 11 me
fiiffit d'oblerver que cette table doit plutôt 1 m ori-
gine à Pefprit de parti , qu'à des lignes rraditu
ck qui cil-ce qui a cru l'hiftoire de la fainte ampoule?
Je puis dire au moins que li ce lait a été tranlmis
comme vrai, il a été tranlmis en même tems comme
faux ; deforte qu'il n'y a qu'une ignorance groffiere ,
qui puilTc faire donner dans une pareille luperlli-
tion.
Mais je voudrais bien favoir fur quelle preuve le
Sceptique que je combats regarde les dynalhes lies
Egyptiens, comme fabuleules, & tous les autres
faits qu'il a cités ; car il faut qu'il puifle le tranf-
porterdans les tems oii ces différentes erreurs occu-
poient l'efprit des peuples ; il faut qu'il le rende ,
pourainli dire, leur contemporain*, afin que partant
de ce point avec eux , il puifle voir qu'ils lui\ ent un
chemin qui les conduit infailliblement à l'erreur , &
que toutes leurs traditions font faulTes : or je le défie
d'y parvenir fans le lècours de la tradition ; je le dé-
C E R
35î
fie encore bien plus de faire cet examen , & de por-
ter ce jugement, s'il n'a aucune règle qui puiffe lui
faire difeerner les vraies traditions d'avec les fauf-
fes. Qu'il nous dife donc la raifon qui lui fait pren-
dre tous ces faits pour apocryphes ; &i il fe trouvera
que contre ion intention il établira ce qu'il prétend
attaquer. Me direz-vous que tout ce que j'ai dit peut
être bon, lorfqu'il s'agira de faits naturels , mais que
cela ne Iauroit démontrer la vérité des faits miracu-
leux ; qu'un grand nombre de ces faits , qt*bique
faux, paffent à la poitérité fur je ne fai combien de
lignes traditionelles ? Fortifiez li vous voulez 'votre
difficulté par toutes les folies qu'on lit dans l'Alco-
ran , & que le crédule Mahométan reipecte ; déco-
rez-la de l'enlèvement de Romulus qu'on a tant fait
valoir ; diltillez votre fiel fin toutes ces fables pieu-
fes, qu'on croit moins qu'on ne ks tolère par pur
ménagement : que conclu irez- vous delà ? qu'on ne
fauroit avoir des règles qui puiffent faire difeerner
les vraies traditions d'avec les faillies fur les mira-
cles ? •
Je vous répons que les règles font les mêmes pour
les faits naturels & miraculeux: vous m'oppofez des
faits , & aucun de ceux que vous citez n'a les condi-
tions que j'exige. Ce n'elf. point ici le lieu d'examiner
les miracles de Mahomet, ni d'en faire le parallèle
avec ceux qui démontrent la religion Chrétienne.
Tout le monde fait que cet impoli eur a toujours opé-
ré fes miracles en fecret : s'il a eu des vilions , per-
fonne n'en a été témoin : li les arbres par relpcct de-
venus feniiblcs s'inclinent en fa préience , s'il fait
defeendre la lune en terre, & la renvoyé dans fon or-
bite ; fcul préfent à ces prodiges , il n'a point éprou-
vé de contradicteurs : tous les témoignages île ce
fait fe réduifent donc à celui de l'auteur même de la
fà^-berie ; c'ell-là que vont aboutir toutes ces lignes
mHitionclies dont on nous parle : je ne vois point
là de foi raifonnée , mais la plus luperltitieufe cré-
dulité. Peut-on nous oppofer des faits fi mal prou-
vés , & dont Fimpoilure (e découvre par les règles
que nous avons nous-mêmes établies.' Je ne penfe
pas qu'on nous oppofe férieulement l'enlèvement
de Romulus au ciel, ce ion appantion à Proculus:
cette apparition n'efl appuyée que fur la dépofition
d'un le-ul témoin, t,e it le fcul pci.;.!c fut
la dupe ; les fénateurs rirent à et égard ce que leur
politique demandoit: en un mot je défie qu'on me
cite un fait qui dans fon origine le trouve revêtu des
caractères que j'ai aiîignés , qui ioit tranlmis à la
poilérité fur plulieurs lignes collatérales qui com-
menceront au li.it même, &: qu'il le trouve pourtant
faux.
Vous avez raifon, dit M. Craig; il eft impoifible
qu'on ne connoiffe la vérité d^ . . .ts , des
qu'on elt voifin des tems où ils font arrivés : les ca-
ractères dont ils font empreints font li frappans & li
clairs, qu'on ne Iauroit s'y méprendre. Mais la durée
des tems obfcurcit& efface, pour ainfi dire, cese i-
ractercs : les laits les mieux confiâtes dans certains
tems, fe trouvent dans la fuite réduits au niveau de
L'impofture & du menfonge ; & cela parce que la
force îles témoignages va toujours ruant;
baut degré de certitude eft produit
par la \ ne même des faits ; le fécond , par le rap
de ceux qui les ont vus ; le troifieme , par la l'impie
déppfition île ceux qui les ont feulement i
ter aux témoins des témoins ; - ■ - fuite à l'in-
fini.
Les faits de Céfar& d'Ale\ ;nt pour dé-
montrer la vanité des calculs d e A-iJois :
car nous fommes auiii conva ellement de
l'exiftence de ces deux grands capù " :i !'e-
toit il y a quatre cents ans ; ce la raifon en cù bien
(impie ; c'eft que nous avons les mêmes preir .
856
CER
ces faits qu'on avoit en ce tems-là. La fuccefïïon qui
fe fait dans les différentes générations de tous les fie-
cles , relfemble à celle du corps humain , qui poiïe-
de toujours la même effence , la même forme , quoi-
que la matière qui le compofe à* chaque inftant fe
diffipe en partie , & à chaque inftant foit renouvcl-
lée par celle qui prend fa place. Un homme eft tou-
jours un tel homme , quelque renouvellement im-
perceptible qui fe foit fait dans la fubftance de fon
corps , parce qu'il n'éprouve point tout à la fois de
changement total : de même les différentes généra-
tions qui fe fuccedent doivent être regardées comme
étant les mêmes , parce que le paffage des unes aux
autres eft imperceptible. C'eft toujours la même fo-
ciété d'hommes qui conferve la mémoire de cer-
tains faits ; comme un homme eft auffi certain dans
fa vieillefle de ce qu'il a vu d'éclatant dans fa jc-u-
neffe , qu'il l'étoit deux ou trois ans après cette ac-
tion. Ainfi il n'y a pas plus de différence entre les
hommes qui forment la fociété de tel & tel tems ,
qu'il y a entre une perfonne âgée de vingt ans , &
cette même perfonne âgée de foixante : par confé-
quent le témoignage des différentes générations eft
auffi digne de foi , & ne perd pas plus de fa force ,
que celui d'un homme qui à vingt ans raconteroitun
fait qu'il vient de voir , & à foixante , le même fait
qu'il auroit vu quarante ans auparavant. Si l'auteur
Angl'ois avoit voulu dire feulement que l'impreffion
que fait un événement fur les efprits , eft d'autant
plus vive &c plus profonde , que le fait eft plus ré-
cent , il n'auroit rien dit que de très-vrai. Qui ne
fait -qu'on eft bien moins touché de ce qui fe pafle
en récit , que de ce qui eft expofé fur la feene aux
yeux des fpe&ateurs ? L'homme que fon imagina-
tion fervira le mieux à aider les aûeurs , à le trom-
per fur la réalité de l'a£tion qu'on lui repféfente ^ÊÊ
ra le plus touché &c le plus vivement ému. La îaF
glante journée de la faint Barthélémy, ainfi que l'af-
iaffinat d'un de nos meilleurs rois, ne fait pas à beau-
coup près fur nous la même impreffion , que ces deux
évenemens en firent autrefois fur nos ancêtres. Tout
ce qui n'eft que de fentiment pafle avec l'objet qui
l'excite ; & s'il" lui furvit, c'eft toujours en s'affoi-
bliiiant , jufqu'à ce qu'il vienne à s'épuifer tout en-
tier : mais pour la conviction qui naît de la force des
preuves , elle fub lifte univerfellement. Un fait bien
prouvé paiTe à travers Pefpace immenfe des fiecles ,
fans que la conviction perde l'empire qu'elle a fur
notre efprit , quelque décroiffement qu'il éprouve
dans l'impreffion qu'il fait fur le cœur. Nous fommes
en effet auffi certains du meurtre de Henry le grand,
que l'étoient ceux qui vivoient dans ce tems-là : mais
nous n'en fommes pas fi touchés.
Ce que nous venons de dire en faveur de la tra-
dition , ne doit point nous empêcher d'avouer que
nous faurions fort peu de faits, fi nous n'étions inf-
truits que par elle ; parce que cette efpece de tradi-
tion ne peut être fidèle dépofitaire , que lorfqu'un
événement eft afTez important pour faire dans l'efprit
de profondes impreffions , & qu'il eft affez fimple
pour s'y conferver aifément : ce n'eft pas que fur un
fait chargé de circonftances , & d'ailleurs peu inté-
reffant , elle puiile nous induire en erreur ; car alors
le peu d'accord qu'on trouveroit dans les témoigna-
ges nous en mettroit à couvert : feule elle peut nous
apprendre des faits iimples & éclatans ; & fi elle
nous tranfmet un fait avec la tradition écrite , elle
fert à la confirmer : celle-ci fixe la mémoire des hom-
mes , & conferve jufqu'au plus petit détail , qui fans
clic nous échaperoit. C'eft le fécond monument pro-
pre à tranfmettre les faits , & que nous allons main-
tenant développer.
On diroit que la nature , en apprenant aux hom-
mes l'art de conferver leurs penfées par le moyen
CER
de diverfes figures , a pris plaifir à faire palier dans
tous les fiecles des témoins oculaires des faits qui
font les plus cachés dans la profondeur des âges,
afin qu'on n'en puiffe douter. Que diroient les Scep-
tiques, fi par une efpece d'enchantement, des témoins
oculaires étoient comme détachés de leurs fiecles ,
pour parcourir ceux où ils ne vécurent pas , afin de
fccllerde vive voix la vérité de certains faits? Quel
refoect- n'auroient-ils point ^our le témoignage de
ces vénérables vieillards!pourroient-ils douter de ce
qu'ils leur diroient ? Telle eft l'innocente magie que
l'hiftoire fe propofe parmi nous : par elle les témoins
eux-mêmes femblent franchir l'efpace immenfe qui
les fépare de nous ; ils traverfent les fiecles , & at-
teftent dans tous les tems la vérité de ce qu'ils ont
écrit. Il y a plus ; j'aime mieux lire un fait dans plu-
fieurs hiftoriens qui s'accordent , que de l'appren-
dre de la bouche même de ces vénérables vieillards
dont j'ai parlé : je pourrois faire mille conjectures fur
leurs pallions , fur leur pente naturelle à dire des
chofes extraordinaires. Ce petit nombre de vieillards,
qui feroient doiiés du privilège des premiers patriar-
ches pour vivre fi long-tems , fe trouvant néceffai-
rement unis de la plus étroite amitié , & ne craignant
point d'un autre côté d'être démentis par des té-
moins oculaires ou contemporains , pourroient s'en-
tendre facilement pour fe joiier du genre humain ;
ils pourroient fe plaire à raconter grand nombre de
prodiges faux , dont ils fe diroient les témoins , s'i-
maginant partager avec les fauffes merveilles qu'ils
débiteroient , l'admiration qu'elles font naître dans
l'ame du vulgaire crédule. Ils ne pourroient trouver
de contradiction que dans la tradition qui auroit palTé
de bouche en bouche. Mais quels font les hommes
qui n'ayant appris ces faits que par le canal de la tra-
dition , oferoient difputer contre une troupe de té-
moins oculaires , dont les rides d'ailleurs vénéra-
bles feroient une fi grande impreffion fur les ef-
prits ? On lent bien que peu -à -peu ces vieillards
pourroient faire changer les traditions : mais ont-ils
une fois parlé dans des écrits, ils ne font plus libres
de parler autrement : les faits qu'ils ont , pour ainfï
dire , enchaînés dans les différentes figures qu'ils ont
tracées , palTent à la poftérité la plus recuke. Et ce
qui les jultifie, ces faits , & met en même tems l'hif-
toire au-deiius du témoignage qu'ils rendroient ac-
tuellement de bouche , c'eft que dans le tems qu'ils
les écrivirent ils étoient entourés de témoins oculai-
res & contemporains, qui auroient pu les démentir fa-
cilement s'ils avoient altéré la vérité.Nous joiufîbns,
eu égard aux hiftoriens , des mêmes privilèges dont
joiiiifoient les témoins oculaires des faits qu'ils racon-
tent: or il eft certain qu'un hiftorien ne fauroit en im-
pofer aux témoins oculaires & contemporains. Si quel-
qu'un fail'oitparoitre aujourd'hui une hiftoire remplie
de faits éclatans & intéreffans arrivés de nos jours , &
dont perfonne n'eût entendu parler avant cette hif-
toire ; penfez-vous qu'elle paifât à la poftérité fans
contradiction ? le mépris dans lequel elle tomberoit
fuffiroit feul pour preferver la poftérité des impoftu-
res qu'elle contiendroit.
L'hiftoire a de grands avantages, même fur les
témoins oculaires : qu'un feul témoin vous apprenne
un fait ; quelque connoifTance que vous ayez de ce
témoin , comme elle ne fera jamais parfaite , ce fait
ne deviendra pour vous que plus ou moins probable;
vous n'en ferez affûré que lorfque plufieurs témoins
dépoferont en fa faveur, & que vous pourrez , com-
me je l'ai dit , combiner leurs paffions & leurs inté-
rêts enfemble. L'hiftoire vous fait marcher d'un pas
plus affùré : lorfqu'elle vous rapporte un fait éclatant
& intéreflant , ce n'eft pas l'hiftorien feul qui vous
l'attefte , mais une infinité de témoins qui fe joignent
à lui, En effet, l'hiftoire parle à tout fon iîeçle : ce n'eft
pas
C E R
pas pour apprendre les faits intéreflans que les con-
temporains la lifent , puifque plufieurs d'entr'eux font
les auteurs de ces faits ; c'efl. pour admirer la liaifon
des faits , la profondeur des réflexions , le coloris
des portraits , & fur-tout fon exactitude. Les hiftoires
de Mainbourg font moins tombées dans le mépris
par la longueur de leurs périodes , que par leur peu
de fidélité. Un hiflorien ne fauroit donc en impofer
à la poftérité, que fon fiecle ne s'entende, pour
ainfi dire, avec lui. Or quelle apparence ? ce com-
plot n'eft-il pas aufli chimérique que celui de plu-
sieurs témoins oculaires? c'efl préciiément la même
chofe. Je trouve donc les mêmes combinaifons à
faire avec un feul hiflorien qui me rapporte un fait
intéreflant, que fi plufieurs témoins oculaires me l'at-
tefloient. Si plufieurs perionnes pendant la dernière
guerre étoient arrivées dans une ville neutre , à Liè-
ge , par exemple , & qu'elles enflent vu une foule
d'officiers François , Anglois, Allemands , & Hollan-
dois , tous pêle-mêle confondus enfemble ; fi à leur
approche elles avoient demandé chacune à leur voi-
rai de quoi on parloit, & qu'un officier François leur
eût répondu , on parle de la vicloire que nous rempor-
tâmes hier fur les ennemis , où les anglois fur-tout fu-
rent entièrement défaits ; ce fait fera iàns doute pro-
bable pour ces étrangers qui arrivent : mais ils n'en
feront abfolument allures que lorfque plufieurs offi-
ciers le feront joints enfemble pour le leur confirmer.
Si au contraire à leur arrivée un officier François éle-
vant la voix de façon àfe faire entendre de fort loin,
leur apprend cette nouvelle avec de grandes démonf-
trations de joie , ce fait deviendra pour eux certain;
ils ne fauroient en douter, parce que les Anglois , les
Allemands, &c les Hollandois qui font prélens, dé-
pofent en faveur de ce fait , dès qu'ils ne reclament
pas. C'efl: ce que fait un hiflorien lorfqu'il écrit ; il
élevé la voix , & fe tait entendre de tout fon fiecle ,
qui dépofe en faveur de ce qu'il raconte d'intéreflant
s'il ne reclame pas : ce n'eft pas un feul homme qui
parle à l'oreille d'un autre , & qui peut le tromper ;
c'efl un homme qui parle au monde entier , &c qui ne
fauroit par conléquent tromper. Le filence de tous
les hommes dans cette circonflance les fait parler
comme cet hiflorien : il n'efl pasnéceflaireque ceux
qui font intérefles à ne pas croire un fait , &c même
à ce qu'on ne le croye pas, avouent qu'on doit y
ajouter foi , & dépoient formellement en fa faveur ;
il fuffit qu'ils ne dilent rien , Ôt ne laiflent rien qui
puiflé prouver la fauiieté de ce tait : car fi je ne vois
que des raifonnemens contre un lait , quand on au-
roit pu dire ou laifier des preuves invincibles de l'im-
poAure, je dois invariablement m'en tenir à l'hiflo-
rien qui me l'attelle. Et croit-on, pour en revenir à
l'exemple que j'ai déjà cité, que ces étrangers fefuf-
fent contentés des dikours vagues des Anglois fur la
fupériorité de leur nation au-deflus des François ,
pour ne pas ajouter foi à la nouvelle que leur difoit
d'une voix élevée & ferme l'officier François , qui
paroiflbit bien ne pas craindre des contradicteurs ?
non fans doute ; ils auroient trouvé les difeours dé-
placés , & leur auroient demandé li ce que difoit ce
François étoitvrai ou faux-, qu'il ne falloit que cela
à prêtent.
Puifqu'un feul hiflorien efl d'un C\ grand poids fur
des faits intereflans, que doit-on penler lorfque plu-
fieurs hifloriens nous rapportent les mêmes faits ?
pourra-t-on croire que plufieurs perionnes fe (oient
données le mot pour attefter un même menfonge &
fe faire mépriler de leurs contemporains ? Ici on
pourra combiner & les hifloriens enfemble , & ces
mêmes hifloriens avec les eontemporains qui n'ont
pas réclamé.
Un livre , dites - vous , ne fauroit avoir aucune
autorité , à moins que Ton ne foit lùr qu'il cil authen-
Tomc II.
C E R
857
tique : or qui nous aflurera que ces hifloires qu'on
nous met en main ne font point fuppofées , 6c qu'el-
les appartiennent véritablement aux auteurs à qui
on les attribue ? Ne fait on pas que l'impoflure s'efl
occupée dans tous les tems à forger des monumens ,
à fabriquer des écrits fous d'anciens noms , pour co-
lorer par cet artifice , d'une apparence d'antiquité ,
aux yeux d'un peuple idiot & imbécille , les tradi-
tions les plus faufles & les plus modernes ?
Tous ces reproches que l'on fait contre la fuppo-
fition des livres font vrais , on en a fans doute fup-
polè beaucoup. La critique févere &c éclairée des
derniers tems a découvert l'impoflure ; & à-travers
ces rides antiques dont on arrècfoit de les défigurer ,
elle a apperçû cet air de jeunefle qui les a trahis.
Mais malgré la févérité qu'elle a exercée a-t-elle tou-
ché aux commentaires de Céfar, aux poéiies de Vir-
gile & d'Horace ? comment a-t-on reçu le fentiment
du P. Hardouin , lorfqu'il a voulu enlever à ces deux
grands hommes ces chefs-d'œuvre qui immortali-
lent le fiecle d'Augulle? qui n'a point lenti que le
filence du cloître n'étoit pas propre à ces tours fins
& délicats qui décèlent l'homme du grand monde ?
La critique , en faifant dilparoître plufieurs ouvra-
ges apocryphes & en les précipitant dans l'oubli , a
confirmé dans leur antique pofleflion ceux qui font
légitimes , 6c a répandu fur eux un nouveau jour. Si
d'une main elle a renverlé , on peut dire que de l'au-
tre elle a bâti. A la lueur de fon flambeau , nous pou-
vons pénétrer jufque dans les fombres profondeurs
de l'antiquité , & difeerner par les propres règles les
ouvrages fuppofés d'avec les ouvrages authentiques.
Quelles règles nous donne-t-elle pour cela ?
i°. Si un ouvrage n'a point été cité par les contem-
porains de celui dont il porte le nom,qu'on n'y aj per-
çoive pas même fon caraftere , & qu'on ait eu quel-
que intérêt, foit réel , foit apparent à la fuppi
il doit alors nous paroître fulpect : ainli un Ârl
un Mercure Tnfmégifle , 6c quelques autres 1
de cette trempe , cités par Jofèphe,] : .'ie,&
par George Syncelle , ne po-tert point le cara
de payens , 6c des - là ils po; , >-t leur
propre condamnation. On a eu le même intérêt à
les fuppofer, qu'à fuppofer Année 6c ics Sib) lies ;
lefquelles, pour me iervir des termes d'un homme
d'elprit , ont parlé ii clairement de nos myfletes , que
les prophètes des Hébreux , en comparailon d'elles ,
n'y entendoient rien. 1'. Un ouvrage porte avec lui
des marques de là luppolition , lorfqu'on n'y voit pas
empreint le caractère du liecle où il pafle pour avoir
été écrit. Quelque difierence qu'il y ait dans tous les
elprits qui compolent un même liecle , on peut pour-
tant dire qu'ils ont quelque chofe de plus propre que
les elprits des autres liecles, dans l'air, dans le tour,
dans le coloris de la penféc , dans certaines compa-
raifons dont on le fert plus fréquemment, Se dans
mille autres petites choie-, qu'on : . marque alternent
lorfqu'on examine de près les ouvrages. 3 . I ne au-
tre marque île fuppoûtion , e'eit qi nd un livre lait
allulion à des ufages qui n'étoient pas encore connus
au tems où l'on dit qu'il a ete écrit ; ou qu'on v re-
marque quelques traits de fyftèraes poftérieurement
inventés , quoique caches & , pour ainfi dire . -
lès fous un flyle plus ancien. Ainfi les ouvr;
Mercure Trifmégifle ( je ne parle pas de ceux qui
turent fuppofés par les Chrétiens : j'en ai tait men-
tion plus haut ; mais de ceux qui le furent par les
payens eux-mêmes, pour fe dérendre contre les at-
taques de ces premiers ) . par cela même qu'ils tort
teints de la doctrine îubnle èc raffinée des Grecs, ne
font point authentiques.
S'il efl des marques auxquelles une critique judi-
cieulè reconnoit la luppolition de certain. 1
ties il en efl d'autres aufli qui lui fen ent , pour ainfi
QOqqq
858
C E R
dire , de bouffole , & qui la guident dans le difcerne-
ment de ceux qui font authentiques. En effet , com-
ment pouvoir foupçonner qu'un livre a été fuppofé ,
lorique nous le voyons cité par d'anciens écrivains,
& fondé fur une chaîne non-interrompue de témoins
conformes les uns aux autres , fur-tout h cette chaîne
commence au tems où l 'on dit que ce livre a été écrit
& ne finit qu'à nous ? D'ailleurs , n'y eût-il point
d'ouvrages qui en citaffent un autre comme appar-
tenant à tel auteur, pour en reconnoître l'authenti-
cité, il me fuffiroit qu'il m'eût été apporté comme
étant d'un tel auteur , par une tradition orale , foù-
tenue , fans interruption depuis fon époque jufqu'à
moi , fur pluheurs lignes collatérales. Il y a outre
cela des ouvrages qui tiennent à tant de choies , qu'il
feroit fou de douter de leur authenticité. Mais , fé-
lon moi , la plus grande marque de l'authenticité d'un
livre, c'eff lorique depuis long -tems on travaille à
faper fon antiquité pour l'enlever à l'auteur à qui
on l'attribue , & qu'on n'a pu trouver pour cela que
des raifons fi frivoles , que ceux même qui font fes
ennemis déclarés , à peine daignent s'y arrêter. Il
y a des ouvrages qui intéreffent plniîeurs royaumes ,
des nations entières, le monde même , qui par cela
même ne fauroient être fuppofés. Les uns contien-
nent les annales de la nation & fes titres ; les autres,
fes lois & fes coutumes ; enfin il y en a qui contien-
nent leur religion. Plus on accule les hommes en
général d'être fuperftitieux &c peureux , pour me fer-
porté au tems de Mahomet , s'il avoit été écrit long-
tems après fa mort. C'eit que tout un peuple ne fau-
roit ignorer l'époque d'un livre qui règle la croyan-
ce , & fixe toutes fes efpérances. Allons plus loin :
en quel tems voudroit-on qu'on put fuppofer une
hiftoire qui contiendrait des faits très -intéreffans ,
mais apocryphes ? ce n'eft point lans doute du vivant
de l'auteur à qui on l'attribue , & qui démafqueroit
le fourbe ; &c ii l'on veut qu'une telle impollure puiffe
ne lui être pas connue , ce qui comme on voit eft'
prefque impoiîible , tout le monde ne s'infcriroit - il
pas en faux contre les faits que cette hiffoire con-
tiendroit ? Nous avons démontré plus haut , qu'un
hiftorien ne fauroit en impofer à fon fiecle. Ainii un
impolteur , fous quelque nom qu'il mette fon hiffoi-
re, ne fauroit induire en erreur les témoins oculai-
res ou contemporains ; fa fourberie paiferoit à la pof-
térité. Il faut donc qu'on dife que long -tems après la
mort de fauteur prétendu , on lui a fuppofé cette hif-
toire. Il fera néceffaire pour cela qu'on dife auffi ,
que cette hiffoire a été long-tems inconnue , auquel
cas elle devient fufpecte fi elle contient des faits inté-
reffans , &c qu'elle foit l'unique qui les rapporte : car
ii les mêmes faits qu'elle rapporte font contenus dans
d'autres hiftoires , la fuppofition eft dès-lors inutile.
Je n'imagine pas qu'on prétende qu'il foit r' ffible de
periuader à tous les hommes qu'ils ont v*. ce livre-là
de tout tems , Si qu'il ne paroît pas nouvellement.
Ne fait-on point avec quelle exactitude on examine
un manufcrit nouvellement découvert, quoique ce
manufcrit ne foit fouvent qn'une copie de plufieurs
autres qu'on a déjà? Que feroit-on s'il étoit unique
dans fon genre ? Il n'elt donc pas pofîible de fixer un
tems où certains livres trop intéreffans par leur na-
ture ayent pu être fuppofés.
Ce n'eft pas tout , me direz-vous : il ne fuffit pas
qu'on puiffe s'affùrer de l'authenticité d'un livre , il
faut encore qu'on foit certain qu'il eft parvenu à
nous fans altération. Or qui me garantira que l'hif-
toire dont vous vous fervez pour prouver tel fait ,
foit venue jufqu'à moi dans toute fa pureté ? la diver-
iité des manuicrits ne femble-t-elle pas nous indiquer
C E R
les changemens qui lui font arrivés ? après cela quel
fonds voulez - vous que je fafle fur les faits que cette
hiftoire me rapporte ?
Il n'y a que la longueur des tems & la multipli-
cité des copies qui puiffent occafionncr de l'altéra-
tion dans les manuicrits. Je ne croi pas qu'on me con-
tefte cela. Or ce qui procure le mal , nous donne en
même tems le remède : car s'il y a une infinité de
manuicrits , il eff évident qu'en tout ce qu'ils s'ac-
cordent , c'eff le texte original. Vous ne pourrez
donc refufer d'ajouter foi à ce que tous ces manui-
crits rapporteront d'un concert unanime. Sur les va-
riantes vous êtes libre , & perfonne ne vous dira ja-
mais que vous êtes obligé de vous conformer à tel
manufcrit plutôt qu'à tel autre, <l<:s qu'ils ont tous
les deux la même autorité. Prétendrez - vous qu'un
fourbe peut altérer tous les manuferics ? Il faudroit
pour cela pouvoir marquer l'époque de cette altéra-
tion : mais peut-être que perionne ne Ce fera apper-
çû de la fraude ? Quelle apparence , fur-tout ii ce li-
vre eff extrêmement répandu , s'U intéreffe des na-
tions entières , fi ce livre fe trouve la règle de leur
conduite , ou fi par le goût exquis qui y règne , il
fait les délices des honnêtes gens ? Seroit-il poiîîblo
à un homme , quelque puiffance qu'on lui fuppofé ,
de défigurer les vers de Virgile , ou de changer les
faits intéreffans de l'hiftoire Romaine que nous liions
dans Tite-Live &c dans les autres hiftoriens ? Fût-on
affez adroit pour altérer en fecret toutes les éditions
&C tous les manuicrits , ce qui eft impoiîible ; on dé-
couvrirait toujours l'impofture , parce qu'il faudroit
de plus altérer toutes les mémoires : ici la tradition
orale défendrait la véritable hiffoire. On ne fauroit
tout d'un coup faire changer les hommes de croyan-
ce fur certains faits. Il faudroit encore de plus ren-
verier tous les monumens , comme on verra bientôt :
les monumens affinent la vérité de l'hiffoire , ainfi
que la tradition orale. Arrêtez vos yeux fur l'Alco-
ran , & cherchez un tems où ce livre aurait pu être
altéré depuis Mahomet jufqu'à nous. Ne croyez- vous
pas que nous l'avons tel , au moins quant à la fubi-
tance , qu'il a été donné par cet impolteur ? Si ce
livre avoit été totalement bouleverfé , & que l'al-
tération en eût fait un tout différent de celui que
Mahomet a écrit, nous devrions voir auffi une autre
religion chez les Turcs , d'autres ufages , 6c même
d'autres mœurs ; car tout le monde fait combien la
religion influe fur les mœurs. On eft furpris quand
on développe ces chofes - là , comment quelqu'un
peut les avancer. Mais comment ofe-t-on nous faire
tant valoir ces prétendues altérations ? Je défie qu'on
nous faffe voir un livre connu & intéreffant qui foit
altéré de façon que les différentes copies fe contredi-
fent dans les faits qu'elles rapportent, fur- tout s'ils
font effentiels. Tous les manuicrits & toutes les édi-
tions de Virgile , d'Horace , ou de Ciceron , fe ref-
femblcnt à quelque légère différence près. On peut
dire de même de tous les livres. On verra dans le
premier livre de cet ouvrage, en quoi confifte l'al-
tération qu'on reproche au Pentateuque , & dont on
a prétendu pouvoir par là renverfer l'autorité. Tout
fe réduit à des changemens de certains mots qui ne
detruifent point le fait , & à des explications diffé-
rentes des mêmes mots : tant il eft vrai que l'altéra-
tion effentielle eft difficile dans un livre intéreffant ;
car de l'aveu de tout le monde , le Pentateuque eft
un des livres les plus anciens que nous connoiflions.
Les règles que la critique nous fournit pour con-
noitre la fuppofition & l'altération des livres , ne
fu'Kfent point , dira quelqu'un ; elle doit encore nous
en fournir pour nous prémunir contre le menibnge ii
ordinaire aux hiftoriens.L'hiftoire , en effet , que nous,
regardons comme le regiftre des évenemens des ne-
clespaffés , n'eft le plus fouvent rien moins que cela*
CER
Au lieu de faits véritables , elle repaît de fables notre
folle curiofité. Celle des premiers fiecles cft couverte
de nuages ; ce font pour nous des terres inconnues
où nous ne pouvons marcher qu'en tremblant. On
fe tromperait, fi l'on croyoit que les hiftoires qui
fe rapprochent de nous , l'ont pour cela plus certai-
nes. Les préjugés , Pefprit de pal ti , la vanité natio-
nale , la différence des religions , l'amour du merveil-
leux ; voilà autant de fources ouvertes , d'où la fable
fe répand dans les annales de tous les peuples. Les
hiftoriens , à force de vouloir embellir leur hiftoire
& y jetter de l'agrément, changent très-fouvent les
faits; en y ajoutant certaines circonftances , ils les
défigurent de façon à ne pouvoir pas les reconnoî-
tre. Je ne m'étonne plus que plufieurs, fur la foi de
Cicéron & de Quintilien , nous difent que l'hiltoire
eft une pocjie libre de la vcijîfication. La différence de
religion S: les divers fentimens , qui dans les derniers
fiecles ont divifé l'Europe , ont jette dans l'hiltoire
moderne autant de confufion , que l'antiquité en a
apportée dans l'ancienne. Les mêmes faits , les mê-
mes évenemens deviennent tous différens , fuivant
les plumes qui les ont écrits. Le même homme ne
fe reffemblc point dans les différentes vies qu'on a
écrites de lui. Il fuffit qu'un fait foit avancé par un
Catholique , pour qu'il foit auffitôt démenti par un
Luthérien ou par un Calvinifte. Ce n'eft pas fans rai-
fon que Bayle dit de lui , qu'il ne lifoit jamais les
hiftoriens dans la vue de s'inftruire des choies qui
fe font paffées , mais feulement pour favoir ce que
l'on difoit dans chaque nation 6c dans chaque parti.
Je ne crois pas après cela qu'on puiffe exiger la foi
de perfonne fur de tels garants.
On aurait dû encore groffir la difficulté de toutes
les faillies anecdotes & de toutes ces hiltoriettes du
tems qui courent , & conclure de-là que tous les faits
qu'on lit dans FHiftoire Romaine font pour le moins
douteux.
Je ne comprends pas comment on peut s'imaginer
renvei 1er la foi hiftorique avec de pareils raiionne-
mens. Les paflîons qu'on nous oppofe font précifé-
ment le plus puiffant motif que nous ayons pour
ajouter foi à certains faits. Les Profeftans font extrê-
mement envenimés contre Louis XIV : y en a-t-il
un qui , malgré cela , ait ofé dcfavoùer le célèbre
paffage du Rhin ? Ne font-ils point d'accord avec les
Catholiques fur les victoires de ce grand roi ? Ni les
préjugés , ni Pefprit de parti , ni la vanité nationale,
n'opèrent rien fur des faits éclatans &: intéreffans.
Les Anglois pourront bien dire qu'ils n'ont pas été
fecourus à la journée de Fontenoi ; la vanité natio-
nale pourra leur faire diminuer le prix de la victoire,
& la compenfer , pour ainfi dire , par le nombre :
mais ils ne defavoùeront jamais que les François
l'oient refiés victorieux. Il faut donc bien diflinguer
les faits que PHiftoire rapporte d'avec les réflexions
de l'hiftorien : celles-ci varient félon lès pallions 6c
fes intérêts ; ceux-là demeurent invariablement les
mêmes. Jamais perfonne n'a été peint li différem-
ment que l'amiral de Coli^ni & le duc de Guife : les
Proteftans ont chargé le portrait de celui-ci de mille
traits qui ne lui convenoient pas ; 6c les Catholiques,
de leur côté, ont reflue à celui-là des coups de pin-
ceau qu'il méritoit. Les deux partis fe font pourtant
fervis des mêmes faits pour les peindre ; car quoi-
que les Calviniftes difent que l'amiral de Coligni
rand homme de guerre que le duc de
Guife, ils avouent pourtant que Saint Quentin, que
l'amiral défendoit, fut pris d'allant, & qu'il y tut lui-
même fait priibnnier; 6c qu'au contraire le duc de
Guife fauva Met/, contre les efforts d'une armée
liombreufe qui Paffiégeoit , animée de plus par (a pré-
fence de Ch.iiles-Quint : mais, félon eux , l'amiral
fit plus de coups de maître, plus d'avions de çceur,
Tome II,
CER
859
d'efprit,& de vigilance,pour défendre SaintQuentin,
que le duc de Guife pour défendre Metz. On voit
donc que les deux partis ne fe féparent quelorfqu'il
s'agit de raifonner fur les faits , &: non fur les faits
mêmes. Ceux qui nous font cette difficulté , n'ont
qu'à jetter les yeux fur une réflexion de l'illuftre
Monlieur de Fontenelle, qui , en parlant des motifs
que les hiftoriens prêtent à leurs héros , nous dit :
« Nous favons fort bien que les hiftoriens les ont de-
» vinés , comme ils ont pu , & qu'il eft prefque im-
» poffible qu'ils ayent deviné tout-à-fait jufte. Ce-
» pendant nous ne trouvons point mauvais que les
» hiftoriens ayent recherché cet embeiliffement, qui
» ne fort point de la vraiffemblance ; & c'eft, à caufe
» de cette vraiffemblance , que ce mélange de faux
» que nous reconnoiffons , qui peut être dans nos hif-
» toires , ne nous les fait pas regarder comme des
» fables ». Tacite prête des vues politiques & pro-
fondes à fes perfonnages , où Tite-Live ne verrait
rien que de fimple & de naturel. Croyez les faits
qu'il rapporte , & examinez fa politique ; il eft tou-
jours ailé de diltinguer ce qui eft de l'hiftorien d'a-
vec ce qui lui eft étranger. Si quelque paffion le fait
agir , elle fe montre , cV auffi-tôt que vous la voyez ,
elle n'eft plus à craindre. Vous pouvez donc ajouter
foi aux laits que vous liiez dans une hiftoire , fur-tout
fi ce même fait eft rapporté par d'autres hiftoriens ,
quoique fur d'autres choies , ils ne s'accordent point.
Cette pente qu'ils ont à fe contredire les uns les au-
tres , vous affùre de la vérité des faits fur lelquels ils
s'accordent.
Les hiftoriens , me direz-vous , mêlent quelque-
fois fi adroitement les faits avec leurs propres refle-
xions auxquelles ils donnent l'air de faits , qu'il cft
très-difficile de les diftinguer. Il ne fauroit jamais
être difficile de diftinguer un fait éclatanj 6c interef-
fant des propres réflexions de l'hiftorien ; 6c d'abord
ce qui cft précifement rapporté de même par plu-
fieurs hiftoriens , eft évidemment un fait ; parce que
plufieurs hiftoriens ne fauroient faire précifement ta
même réflexion. Il faut donc que ce en quoi ils fe ren-
contrent ne dépende pas d'eux, 6c leur foit totale-
ment étranger : il cft donc facile de diftinguer les
faits d'avec les réflexions de l'hiftorien , dès que plu-
fieurs hiftoriens rapportent le même fait. Si vous li-
fez ce fait dans une feule hiftoire, confultez la tradi-
tion orale ; ce qui vous viendra par elle ne fauroit
être à l'hiftorien ; car il n'auroit pas pu confier à la
tradition qui le précède, ce qu'il n'a penlé que long-
tems après. Voulez-vous vous affûrer encore davan-
tage ? Confultez les monumens , troifieme cfpece de
tradition propre à faire paffer les faits à la poftérité.
Un fait éclatant & qui intereffe , entraîne toujours
des fuites après lui ; fou changer la !
toutes les affaires d'un très-grand pays : les peuples
jaloux de tranfmettre ces laits à la pofterite , em-
ployent le marbre 6c l'airain pour en perpétuer la
mémoire. On peut dire d'Athènes 6c de Rome ,
qu'on y marche encore aujourd'hui fur (.les monu-
mens qui confirment leur hiltoire : cette efpecc de
tradition, après la tradition orale, cft la plus ancien-
ne ; les peuples de tous les tems ont été très-attentifs
à conlcrvcr la mémoire de certains faits. Dans CCS
premiers tems voifins du cahos , un monceau de pier-
res brutes avertiffoit qu'en cet endroit d s'étok parte
quelque choie d'intereffant. Après la découverte des
Ans , on vit élever des colonnes & des pyramides
pour immortalifer e • dans la fuite le»
ent pus particulièrement:
l'invention des letl ' ' mémoire , 6c l'aida
à porter le poids de tant de Faits qui l'auraient enfin
accablée. On ne cefl t point
monumens . c < Fen ■' lc Pll,s écrit, font
ceux où l'on a fait les plus beaux monumens de toute
Q Q q q q ij
S<5o
C E
R
efpece. Un événement intéreffant qui fait prendre la
plume à l'hiftorien , met le cifeau à la main du Sculp-
teur , le pinceau à la main du Peintre ; en un mot ,
échauffe le génie de prefque tous les Artiftes. Si l'on
doit interroger l'hiftoire pour favoir ce que les mo-
numens représentent , on doit auffi confulter les mo-
numens pour lavoir s'ils confirment l'hiltoire. Si quel-
qu'un voyoit les tableaux du célèbre Rubens , qui
font l'ornement de la galerie du palais du Luxem-
bourg ; il n'y apprendroit , je l'avoue , aucun fait dù-
tinft ; ces tableaux l'avertiroient feulement d'admirer
les chefs-d'œuvre d'un des plus grands Peintres; mais
ii après avoir lu l'hiltoire de Marie de Médicis , il le
tranfportoit dans cette galerie, ce ne feraient plus
de fimples tableaux pour lui : ici il verroit la céré-
. monie du mariage de Henri le Grand avec cette prin-
ceffe : là cette reine pleurer avec la France la mort
de ce grand roi. Les monumens muets attendent que
l'hiftoire ait parlé pour nous apprendre quelque cho-
ie ; l'hiltoire détermine le héros des exploits qu'on
raconte , & les monumens les confirment. Quelque-
fois tout ce qu'on voit fous fes yeux lert à atteftcr
une hiftoire qu'on a entre les mains : paffez en orient,
& prenez la vie de Mahomet ; ce que vous verrez &£
ce que vous lirez, vous inltruiront également de la
révolution étonnante qu'a fouffert cette partie du
monde ; les églifes changées en mofquées vous ap-
prendront la nouveauté de la religion Mahométane ;
vous y diltinguerez les relies de l'ancien peuple de
ceux qui les ont alfervis ; aux beaux morceaux que
vous y trouverez , vous reconnoîtrez aifément que
ce pays n'a pas toujours été dans la barbarie oii il eft
plongé : chaque turban, pour ainfi dire, fervira à
vous confirmer l'hiftoire de cet impofteur.
Nous direz-vous que les erreurs les plus grolfieres
ont leurs monumens , ainii que les faits les plus avé-
rés , & quele monde entier étoit autrefois rempli de
temples , de ftatues érigées en mémoire de quelque
action éclatante des dieux que la fuperftition adoroit ?
Nous oppoferez-vous • encore certains faits de l'hif-
toire Romaine, comme ceux d'Attius Navius, &de
Curtius ? Voici comme Tite-Live raconte ces deux
faits. Attius Navius étant augure ,Tarquinius Prilcus
voulut faire une augmentation à la cavalerie Romai-
ne ; il n'avoit point confulté le vol des oifeaux, per-
fuadé que la foibleffe de fa cavalerie qui venoit de
paraître au dernier combat contre les Sabins , l'inf-
truifoit beaucoup mieux fur la néceiiité de l'on aug-
mentation que tous les augures du monde. Attius
Navius , augure zélé , l'arrêta &c lui dit , qu'il n'étoit
peint permis de faire aucune innovation dans l'état,
qu'elle n'eût été délignée par les oifeaux. Tarquin,
outré de dépit , parce que , comme on dit , il n'ajoû-
toit pas beaucoup de foi à ces fortes de chofes : eh
bien, dit-il à l'augure , vous qui connoiffez l'avenir ,
ce que je penfe eft-il poffible ? Celui-ci après avoir
interrogé l'on art , lui répondit que ce qu'd penfoit
étoit poiftble. Or, dit Tarquin , coupez cette pierre
avec votre rafoir ; car c'étoit-là ce que je penfois.
L'augure exécuta fur le champ ce que Tarquin déli-
rait de lui : en mémoire de cette action , on érigea
fur le heu même oii elle s'étoit paffée , à Attius Na-
vius une ftatue , dont la tête étoit couverte d'un voi-
le , & qui avoit à fes pies le rafoir & la pierre , afin
que ce monument fît paffer le fait à la poftérité. Le
fait de Curtius étoit aufii très-célebre : un tremble-
ment de terre , ou je ne fais quelle autre caufe , fit
entr'ouvrir le milieu de la place publique , & y forma
un gouffre d'une profondeur immenle. On confulta
les dieux fur cet événement extraordinaire , & ils
répondirent, qu'inutilement on entreprendroit de le
combler ; qu'il falloit y jetter ce que l'on avoit de
plus précieux dans Rome , & qu'à ce prix ce gouffre
fe refermerait de lui-même. Curtius, jeune guerrier.
C E R
plein d'audace & de fermeté , crut devoir cefacrificc
à fa patrie , &C s'y précipita ; le gouffre fe referma à
Finftant, Se cet endroit a retenu depuis le nom du
lac Curtius , monument bien propre à le faire paffer
à la poftérité. Voilà les faits qu'on nous oppofe pour
détruire ce que nous avons dit fur les monumens.
Un monument , je l'avoue, n'eft pas un bon ga-
rant pour la vérité d'un fait , à moins qu'il n'ait été
érigé dans le tems même où le fait eft arrivé , pour
en perpétuer le fouvenir : fi ce n'eft que long tems
après , il perd toute ion autorité par rapport à la vé-
rité du fait : tout ce qu'il prouve , c'eft que du tems
où il fut érigé la créance de ce fait étoit publique :
mais comme un fait, quelque notoriété qu'il ait,
peut avoir pour origine une tradition erronée , il
s'enfuit que le monument qu'on élèvera long tems
après ne peut le rendre plus croyable qu'il l'eft alors.
Or tels font les monumens qui rempliffoient le mon-
de entier, lorfque les ténèbres du paganifme cou-
vroient toute la face de la terre. Ni l'hiftoire , ni la
tradition , ni ces monumens ne remontoient jufqu'à
l'origine des faits qu'ils repréfentoient ; ils n'étoient
donc pas propres à prouver la vérité du fait en lui-
même ; car le monument ne commence à fervir de
preuve que du jour qu'il eft érigé : l'eft -il dans le
tems même du fait, il prouve alors fa réalité , parce
qu'en quelque tems qu'il foit élevé , on ne iauroit
douter qu'alors le fait ne paffât pour confiant": or un
fait qui paffe pour vrai dans le tems même qu'on dit
qu'il eft arrivé , porte par-là un caradere de vérité au-
quel on ne fauroit fe méprendre, puifqu'il ne fauroît
être faux , que les contemporains de ce fait n'ayent
été trompés , ce qui eft impoffible fur un fait pu-
blic & intéreffant. Tous les monumens qu'on cite de
l'ancienne Grèce & des autres pays ne peuvent donc
fervir qu'à prouver que dans le tems qu'on les érigea
on croyoit ces faits , ce qui eft très-vrai ; & c'eft ce
qui démontre ce que nous difons , que la tradition
des monumens eft infaillible lorfque vous ne lui de-
mandez que ce qu'elle doit rapporter , lavoir la vé-
rité du fait , loriqu'ils remontent jufqu'au fait même ,
& la croyance publique fur un fait , lorfqu'ils n'ont
été c; igés que long-tems après ce fait. On trouve , il
eft vrai , les faits d'Attius Navius & de Curtius dans
Tite-Live ; mais il ne faut que lire cet hiftorien , pour
être convaincu qu'ils ne nous font point contraires.
Tite-Live n'a jamais vu la ftatue d'Attius Navius , il
n'en parle que fur un bruit populaire ; ce n'eft donc
pas un monument qu'on puiffe nous oppofer, il fau-
drait qu'il eiit fubfifté du tems de Tite-Live : & d'ail-
leurs qu'on compare ce fait avec celui de la mort de
Lucrèce , & les autres faits inconteftables de l'hif-
toire Romaine ; on verra que dans ceux-ci la plume
de l'hiftorien eft ferme & affûrée , au lieu que dans
celui-là elle chancelle , & le doute eft comme peint
dans la narration [ Id quia inaugurât) Romulus fece-
rat, neg avit Attius Navius, inclitus ed tempejlatc augurt
neque mutari neque novum conflitui , niji aves addixif-
fent , pojfe. Ex eo ira régi motâ eludereque arum ( ut
firunt~) agindum , inquit , divins tu, inaugura, fort
ne pofjlt quod nunc ego meftte concipio ? cum ille in au-
gurio rem expertus proficlo futur am dixiffet ; atqui hxc
animo agitavi , te novaculà cotem difcifjurum : cape hœc
& perage quod aves tuœfieri pojfe portendunt. Tum il-
lum haud cuncianter difcidijfe cotem ferunt. Statua Attii
pofita capite velato , quo in loco res acîa ejl , in comitto,
in gradibus ipfîs ad lœvam curiœ fuit ; cotem quoque eo-
dem loco fitam fuiffe memorant , ut effet ad pofleros mi-
raculi ejus monumentum. Titus Liv. lib. I. Tarq. Prii.
reg.] . Il y a plus , je crois que cette ftatue n'a jamais
exifté ; car enfin y a-t-il apparence que les prêtres
& les augures , qui étoiénf fi puiffans à Rome , euf-
fent fouffert la ruine d'un monument qui leur étoit
fi favorable ? 6v fi dans les orages qui faillirent à en-
C E R
gloiitir Rome ce monument avoit été détruit , n'au-
roient-iis pas eu grand loin de le remettre iur pic
dans un tems plus calme & plus ferein ? le peuple
lui-même, fiiperftitieux comme il étoit, l'auroit de-
mandé. Cicéronqui rapporte le même fait, ne parle
point de la ftatue , ni du rafoir , ni de la pierre qu'on
voyoit à l'es pies ; il dit au contraire que la pierre
& le rafoir furent enfouis dans la place où le peu-
ple Romain s'aflembloit. Il y a plus , ce fait eft d'une
autre nature dans Cicéron que dansTiteLive: dans
celui-ci Attius Navius déplaît à Tarquin , qui cher-
che à le rendre ridicule aux yeux du peuple, par une
queftion captieufe qu'il lui fait: mais l'augure, en
exécutant ce que Tarquin demande de lui , fait fer-
vir la fubtilité même de ce roi philofophe à lui faire
refpecler le vol des oileaux qu'il paroilfoit méprifer.
T Ex quo faclum efi , ut tum ( Attium Navium ) ad Je
rex Pri feus accerfiret. Cujus cum tentant Jcientiam au-
gurants , dixit eife cogitare quiddam : id pofjet ne fieri
confuluit. Ille , inaugurio aclo , pojfe rejpondit : Tarqui-
nius autem dixit Je cogitajfc cotem novaculà pojfe prœ-
cidi. Tum Attium juffijje experiri , ita cotem in comitium
allatam , inspectante & rege & populo , novaculà ejfe dij-
cijjam. In eo evenit ut & Tarquinius augure Attio Na-
vio uteretur , & populus dej'uis rébus ad eum referret. Co-
tem autem illam & novaculam defoffam in comitio , fu-
praque impofuum puteal accepimus. Cicer. de Divinit.
lib. 1.] Dans celui-là Attius Navius elt une créature
de Tarquin , & l'inft ruinent dont il lé fert pour tirer
parti de la luperftition des Romains. Bien loin de lui
déplaire en s'ingérant dans les affaires d'état , c'étoit
ce roi lui-même qui l'avoit appelle auprès de fa per-
fonne fans doute pour l'y faire, entrer. Dans Cicé-
ron , la queftion que Tarquin fait à l'augure n'eft:
point captieufe , elle paroît au contraire préparée
pour nourrir & fomenter la luperftition du peuple.
Il la propofe chez lui à Attius Navius , & non dans
la place publique en prélence du peuple , fans que
l'augure s'y attendît. Ce n'eft point la première pier-
re qui tombe fous la main dont on fe fert pour latis-
faire à la demande du roi , l'augure a foin de l'appor-
ter avec lui : on voit en un mot dans Cicéron , Attius
Navius d'intelligence avec Tarquin pour jouer le
peuple ; l'augure & le roi paroiffent penfer de même
iur le vol des oifeaux. Dans Tite Live au contraire,
Attius Navius elt un payen dévot qui s'oppoiè avec
zèle à l'incrédulité d'un roi , dont la philofophie au-
roit pu porter coup aux fuperllitions du paganifme.
Quel fond peut-on faire fur un fait fur lequel on va-
rie tant , & quels monumens nous oppofe-t-on? ceux
dont les auteurs qui en parlent ne conviennent pas.
Si on écoute l'un , c'eft une ftatue ; fi on écoute l'au-
tre , c'eft une couverture. Selon Tite Live le rafoir
ik. la pierre fe virent long-tems, & félon Cicéron on
les enfouit dans la place [ Cura non deejfet , fi qua ad
verum via inquirentem ferret , mine famd rei uni Jlandum
cil , ubi certain derogat vetujlasjidem ; & licus nomen ab
hue recentiore infignituis fabula cjl. Tit. Liv. lib. VII.
q. ferv. L.]. Le fait de Curtius ne favorife pas davan-
tage les Sceptiques ; Tite Live lui-même qui le rap-
porte, nous fournit la réponfe. Selon cet hiltorien,
il feroit difficile de s'aflurer de la vérité de ce fait G
on vouloit la rechercher ; il lent qu'il n'a point affez
dit, car bien-tôt après il le traite de fable. C'elldonc
avec la plus grande injuftice qu'on nous l'oppofe,
puifque du tems de Tite Live , par qui on le fait, il
n'y en avoit aucune- preuve ; je dis plus , puifque du
de cet hiltorien il pailbit pour fabuleux.
Que le Pyrrhonien ouvre donc enfin les yeux à la
lumière , év qu'il reconnoiiié avec nous une règle de
vérité pour les laits. Peut-il en nier l'exiftence , lui
qui cil forcé de reconnoitre pour vrais certains faits,
quoique la vanité , Ion intérêt , toutes lès pallions en
un mot paroilient çonipirer cnfemble pour lui en de-
C E R
85i
guifer la vérité ? je ne demande pour jugé entre lui
6c moi , que fon fentiment intime. S'il effaye de dou-
ter de la vérité de certains faits , n'éprouve-t-il pas
de la part de fa raifon la même réfift ance que s'il ten-
toit de douter des propofitions les plus évidentes: &
s'il jette les yeux fur la foeiété , il achèvera de fe con-
vaincre , puifque fans une règle de vérité pour les
faits elle ne fauroit fubfifter.
Eft-il affùré de la réalité de la règle , il ne fera pas
long-tems à s'appercevoir en quoi elle confifte. Ses
yeux toujours ouverts fur quelqu'objet , & fon juge-
ment toujours conforme à ce que fes yeux lui rap-
portent , lui feront connoître que les fens font pour
les témoins oculaires la règle infaillible qu'ils doi-
vent fuivre fur les faits. Ce jour mémorable fe pré-
fentera d'abord à fon cfprit , où le monarque Fran-
çois , dans les champs de Fontcnoi , étonna par fon
intrépidité & fes fujets & fes ennemis. Témoin oculai-
re de cette bonté paternelle qui fit chérir Louis aux
loldats Anglois même, encore tout fumans du fang
qu'ils avoient verfé pour fa gloire , fes entrailles s'é-
mûrent & fon amour redoubla pour un roi , qui , non
content de veiller au falut de l'état, veut bien def-
cendre julqu'à veiller fur celui de chaque particulier.
Ce qu'il lent depuis pour fon roi, lui rappelle à cha-
que inftant que ces fentimens font entrés dans fon
cœur fur le rapport de fes fens.
Toutes les bouches s'ouvrent pour annoncer aux
contemporains des faits fi éclatans. Tous ces diffé-
rens peuples , qui malgré leurs intérêts divers , leurs
pallions oppofées, mêlèrent leur voix au concert de
louanges que les vainqueurs donnoient à la valeur,
à la fageffe, & à la modération de notre monarque,
ne permirent pas aux contemporains de douter des
faits qu'on leur apprenoit. C'eft moins le nombre des
témoins qui nous affûre ces faits , que la combinaifon
de leurs cara&eres tk. de leurs intérêts , tant entr'eux
qu'avec les faits mêmes. Le témoignage de liv An-
glois , fur les viefoires de Melle & de Lauffeld , me
fera plus d'impreffion que celui de douze François.
Des faits ainfi confiâtes dans leur origine , ne peu-
vent manquer d'aller à la poftérité : ce point d'appui
elt trop ferme , pour qu'on doive craindre que la
chaîne de la tradition en foit jamais détachée. Les
âges ont beau fe fuccéder , la foeiété relie toujours
la même , parce qu'on ne fauroit fixer un tems où
tous les hommes puiffent changer. Dans la fuite des
fieclcs , quelque diftance qu'on lùppofe , il fera tou-
jours ailé de remonter à cette époque , où le nom
flateur de Bien-aimè fut donné à ce roi , qui porte la
couronne , non pour enorgueillir fa tête , mais pour
mettre à l'abri celle de les fujets. La tradition orale
conferve ces grands traits de la vie d'un homme ,
trop frappans pour être jamais oubliés : mais elle
laine échapper à travers l'efpace immenlè des lîe-
cles mille petits détails & mille circonitances , tou-
jours intéreffantes lorlqu'elles tiennent à des faits
éclatans. Les vicloires de Melle, de Raucoux & de
Lauffeld pafferont de bouche en bouche à la pofté-
rité : mais fi l'hiftoire ne le joignoit a cette tradition,
combien de circonftances , glorieules au grand gé-
néral que le Roi charge?, du deftin de la France, fe
précipiteroient dans l'oubli ! On le fouviendra tou-
jours que Bruxelles fut emporté au plus fort de l'hy-
ver ; que Berg-op-zoom,ce fatal écucilde la gloire
des Requefens, des Pannes & des Spinolas, ces hé-
ros de leur liecle , fut pris d'allant; que le liège do
Maftreieh termina la guerre : mais on ignorerait fans
le lecours de l'hiftoire , quels nouveaux fecrets de
fart de la guerre fuient déployés devant Bruxelles &
Berg-op-zoom ,& quelle intelligence lublime difper-
l'a lès ennemis rangés autour des murailles de Maf-
treieh , pour ouvrir à travers leur armée un pallage
à la notre , afin d'en faire le liège en fa prélence.
862
CER
La poftérité aura fans doute peine à croire tous
ces hauts faits ; & les monumens qu'elle verra , fe-
ront bien ncceffaires pour la raffiner. Tous les traits
que l'hiftoire lui préfentera fe trouveront comme
animés dans le marbre , dans l'airain & dans le bron-
ze. L'école militaire lui fera connoître comment dans
une grande ame les vues les plus étendues &c la plus
profonde politique fe lient naturellement avec un
amour fimple & vraiment paternel. Les titres de no-
blette , accordés aux officiers qui n'en avoient enco-
re que les fentimens, feront à jamais un monument
authentique de fon eftime pour la valeur militaire.
Ce feront comme les preuves que les hiftoriens traî-
neront après eux , pour dépofer en faveur de leur fin-
cérité, dans les grands traits dont ils orneront le ta-
bleau de ieur roi. Les témoins oculaires font afiùres
par leurs fens de ces faits qui caradérifent ce grand
monarque ; les contemporains ne peuvent en douter,
à caufe de la dépofition unanime de plulieurs témoins
oculaires, entre lefqnels toute collufion eft impofïï-
ble, tant par leurs intérêts divers , que par leurs pal-
lions oppofées ; & la poftérité qui verra venir à elle
tous ces faits par la tradition orale , par l'hiftoire &
par les monumens , connoitra aifément que la leule
vérité peut réunir ces trois caractères.
* Cejlainjîqu,il convient de défendre la religion. Voilà
ce qu'on peut ap piller prendre fon ennemi corps à corps, &
l'attaquer par les endroits les plus inacccffibles. Ici tout ejl
rempli de fins & d'énergie , & il n'y a pas la moindre
teinture de fiel. On n'a pas craint de laiffir à fon anta-
gonifie ce qu'il pouvait avoir d'adreffe & cTejprit , parce
qu'on étoitjùr d'en avoir plus qui lui. On L'a fait pa-
roitre fur le champ de bataille avec tout Part dont ilétoit
capable , & on ne l'a point furpris lâchement , parce qu'il
it qu'il je confejjat lui-même vaincu , & qu'on pou-
voitj'e promettre cet avantage. Qu'on compare cette dif-
Jèrtation avec ce qu'on a publié juj'qu à préfent de plus
fon fur la même matière , & l'on conviendra que fi quel-
qu'un avoit donné lieu à un fi bel écrit, par les ob-
jections qu'on y réfout , il auroit rendu un fin ice impor-
tant à la religion, quoiqu'il y eût eu peut-être de la té-
mérité à les propofer , Jurtout en langue vulgaire. Je dis
peut-être , parce que C évidence eft jure d'obtenir tôt ou
tard un pardi triomphe fur les prefùges du fophifme. Le
menfonge a beau fouffLer jur le flambeau de la vérité ,
loin de l'éteindre, tous Jes efforts ne j'ont qu'en redoubler
l'éclat. Si l'auteur des Penjées philofophiques aimoit un
peu fon ouvrage , il feroit bien content de trois ou quatre
auteurs que nous ne nommerons point ici par égard pour
leur çcle & par refpecl pour leur caufe : mais en revan-
che, qu'il feroit mécontent de M. L'Abbé de Prades, s'il
n' aimoit infiniment la vérité! Nous invitons ce dernier
àjuivrefa carrière avec courage , & à employer fies grands
talens à la définfe du feul culte fur la terre qui mérite un
dèfehfeur tel que lui. Nous difons aux autres & à ceux qui
firoient tentés de les imiter : fâchez qu'il n'y a point d 'ob-
jections qui puiffent faire à la religion autant de mal
que les mauvaifes réponfes : fâchez que telle eft la
méchanceté des hommes , que fi vous n'avez rien
dit qui vaille, on avilira votre caufe, en vous fai-
fant l'honneur de croire qu'il n'y avoit rien de mieux
à dire.
CERVAISON , fub. f. (Vénerie.) on appelle de ce
nom le tems où le cerf eft en embonpoint.
C ER VAR A, ( Géog. ) petite ville du Portugal ,
dans la province de Tra-los-montes , près du Minho.
CERVARO, {Géog.) rivière d'Italie, au royau-
me de Naples, dans la Capitanate.
CERVEAU, f. m. (Anatom.) ou ce qu'on appelle
vulgairement la cervelle, eft le nom qu'on a donné
en général à toute la maffe molle , en partie grifâ-
tre , en partie blanchâtre , qui eft renfermée dans le
crâne, laquelle eft la fource de nos fens, ôc où l'on
C ER
prétend que l'ame réfide d'une manière particulière.
Foye^ Crâne & Ame.
Quand on a ouvert le crâne, on trouve une maffe
qui en occupe toute la cavité, & qui eft enveloppée
de différentes membranes: la première qui fe pré-
fente c'eft la dure-mere , qui revêt les os en-dedans,
& leur fert de périofte : elle divife le cerveau en dif-
férentes parties au moyen de fes différens replis ,
dont les principaux font la faux & la tente , &c. Sous
cette membrane il s'en trouve une autre qui s'enfon-
ce dans les an 'Ta&uofités du cerveau , & qu'on appel-
le pie-mere. C'eft dans les duplicatures qu'elle forme,
en s'enfonçant dans les anrractuofités , que font ren-
fermés les vaifTeaux du cerveau. Vayt[ Membrane,
Dure-mere , &c. voye{ aufji nos PI. d'Anatomie.
Ces membranes levées , on voit la lubftance du
cerveau , qui forme une infinité de plis profonds ,
dont les circonvolutions imitent à peu-près celles des
inteftins : fi on coupe allez profondément quelques-
uns de ces plis, on obferve qu'ils font compofés d'u-
ne fubllance de deux couleurs différentes , dont la
partie externe eft de couleur de cendre, & a été en
conféquence appellée Jubjiance cendrée ou fabftance
corticale ; elle eft glanduleufe fuivant quelques au-
teurs ; mais l'analyfe de ces parties eft li difficile ,
qu'on ne peut rien avancer là-deffus que de conjec-
tural. La partie interne des différens replis eft blaiv
châtre, & fe nomme Jubjiance médullaire. Voyc?^ V ar-
ticle Cendrée.
On divife le cerveau en trois parties principales ,
favoir, le cerveau ftriclement pris , le cervelet, & la
moelle allongée. Foye{ Cervelet & Moelle,
voye^ auffi nos Plamlies.
Le mot cerveau pris dans un fens plus particulier,
fignifie donc cette partie fuperficiellement grifâtre,
qui occupe toute la portion fupérieure de la cavité
du crâne , & dont la figure eft une convexité ovalai-
re affez approchante de la moitié d'un œuf qu'on au-
roit coupé en deux parties égales par le même dia-
mètre, fans les éloigner l'une de l'autre; la groffe
extrémité de la convexité ovalaire eft fituée pofté-
rieurement; la petite antérieurement.
La fiffure dans laquelle rampent les artères, lon-
gue , plus profonde que les autres filions du cerveau,
& qui s'appelle fifure de Sylvius, lepare le cerveau en
lobes antérieurs 8t pollérieurs ; mais comme le cer-
veau conlidéré dans fa partie inférieure, paroît de
chaque côté diftingué en trois parties , on leur a don-
né à chacune le nom de lobe. Voye^ Lobe.
En éloignant un peu ces deux portions du cen eau
l'une de l'autre, on obferve la fùrface d'un corps
blanc nommé corps calleux. Voye^ Corps Cal-
leux.
Si on enlevé adroitement de chaque portion tous
les filions mélangés de la lubftance tant cendrée que
médullaire , jufqu'à ce qu'on n'obferve plus que la
médullaire , on formera fur les parties latérales du
corps calleux deux convexités médullaires de figure
ovalaire , qu'on nomme centre ovale: en coupant ces
convexités tout le long du corps calleux, & à quatre
ou cinq lignes de diftance de ce même corps , on dé-
couvre deux cavités , une de chaque côté , nommées
ventricules antérieurs, féparées l'une de l'autre par
une membrane médullaire qui règne tout le long de
la partie moyenne de la face inférieure du corps cal-
leux , & à laquelle on a donné le nom defeptum luci-
dum. Voyei CENTRE, VENTRICULE, &C.
Les deux lames médullaires dont lejéptum lucidum
eft formé , finiffent antérieurement par deux produc-
tions qui font fort près l'une de l'autre , & en arrière
par deux autres plus fenfibles qui s'écartent vers les
côtés , en formant de petites bandelettes fur un corps
qui a la figure d'un ver à foie en nymphe , & qui
luit la corne inférieure des ventricules ; on ies nom-
CER
C E R
me cornes d'ammon, Se la partie du ventricule dans
laquelle ils fe rencontrent ,finus bonbycinus , ou/i/ius
du vers àjbie. Voyc^ CORNE & SlNUS.
Toute l'étendue du bord inférieur àwfeptum luci-
dum, porte le nom de voûte à trois piliers, Voy Voû-
TE.
La furface inférieure du plancher triangulaire for-
mé par la voûte à trois piliers , eft toute remplie de
lignes médullaires , tranfverfes & raillantes. Les an-
cien: ont donné le nom de pfalloides & de lyre à cet
efpace , à caufe de ces fibres. Le plexus choroïde eft
fous la lyre , & fuit les cornes d'ammon.
Cette voûte étant levée avec le plexus choroïde ,
on trouve quatre éminences dans les ventricules la-
téraux ; antérieurement on en voit deux en forme de
cône ou de larme de Hollande, on les nomme les
corps cannelés ; les deux autres éminences font les
couches des nerfs optiques ; ces couches fe touchent ,
mais de façon qu'elles biffent un trou antérieurement
& poftérieurement ; l'antérieur a été appelle vulva ,
& le poftéi ieur , Yanus : en écartant les couches des
nerfs optiques, l'un & l'autre de ces deux trous dif-
paroiffent , & on apperçoit dans le fond le troilîeme
ventricule, Voye^ Corps cannelés, Vulva, &c.
Derrière le troifieme ventricule fe trouve un petit
corps glanduleux , nommé glande pincale ; & au-def-
fous de cette glande les tubercules quadri-jumeaux,
dont les fupérieurs ont été appelles nates , & les in-
férieurs te/les. Voy. Glande pinéale, Nates , &c
Dans le troifieme ventricule eft l'ouverture de Yin-
jundibulum , ou de l'entonnoir qui va à la glande pi-
tuitaire ; pofhérieurement l'aquéduc de Sylvius,qui
aboutit au quatrième ventricule , dans la partie in-
férieure duquel eft une feiflure parallèle à l'axe : fous
les nates & tejîes eft la grande valvule du cerveau, qui
eft de fubftance médullaire. V. Infundibulum ,
Aqueduc , &c
Quatre gros troncs d'artères , les deux carotides
internes &c les deux vertébrales , fe diftribuent au
cerveau , & font voir dans leur diftribution , dans
leur direction, & par leurs fréquentes communica-
tions , combien la nature a pris de menues pour que
rien ne s'oppofât à la réparation d'un fluide, que
les fondions nobles auxquelles il eft deftiné font re-
garder comme le plus fubtil ; c'eft le fuc nerveux.
Voyez Carotide, Vertébrale, & Nerveux.
Voyez^ aujji nos Planches d"1 Anatomie.
Le fang eft rapporté du cerveau par des veines qui
prennent naifTance de plufieurs petites artérioles rou-
ges du cerveau , & fe réunifiant en de plus gros ra-
meaux enveloppés par la pie-mere , viennent s'ou-
vrir de différentes façons dans les finus de la dure-
mere , pour paffer dans les jugulaires , & dans beau-
coup d'autres petites veines qui s'y rendent de même.
Tous les Anatomiftes en général conviennent que
l'homme a plus de cerveau , proportion gardée , que
tous les autres animaux , que le bœuf, le cheval ,
&c.
L'imagination voulant fuppléer à ce qu'on ne pou-
voit appercevoir , a enfanté divers fyftemes fur la
ftructure du cerveau , fur-tout celui de Malpighi &
celui de Ruifch.
Malpighi croyoit que la fubftance corticale étoit
compoféc Je glandes , que la petiteffe & la na-
ture muqueufe & tranfparentc du cerveau ont dé-
robées aux microfeopes mêmes de Marthall , qu'il
préféroit à tous ceux de Leirwenhocck ; & c'eft par
leur fecours qu'il voyoit cette fubftance élevée en
petites éminences. Quand ou fait cuire un cerveau,
fa fubftance s'élève en molécules femblables à des
glandes : on découvre , par le moyen de l'encre qu'on
jette fur la fubftance corticale , de petites élévations
iéparéespar de petites fentes. Le cerveau pétrifié pré-
fente une furface couverte de petits globules ; il fort
863
par les ouvertures qu'on fait au crâne une matière
fongucule , qui a quelque chofe de la glande : les par-
ties externes du cerveau fe changeât par une hvdro-
pilie en de petites lpheres ; toutes ces raifons ne prou-
veroient-eilespas que la fubftance du cerveau efteian-
duleufe ? b
Ruifch n'a cependant pas été convaincu par ces
preuves que la fubftance corticale foit glanduleufe ;
il a cru au contraire que tout le cervetù n'eft qu'une
continuation des artères qui fe replient diverfement,
& qui vont enfuite former les nerfs par leurs extré-
mités.
Ces deux auteurs différent donc en ceci : Malpighi
admet entre l'extrémité des vaiffeaux qui forment
la fubftance corticale , & l'extrémité de ceux qui
forment la médullaire, des follicules glanduleux :
Ruifch au contraire prétend que les extrémités des
vaiffeaux de la fubftance corticale font continues
aux extrémités des vaiffeaux de la médullaire : mais
ni l'un ni l'autre fyfleme n'eft appuyé d'affez fortes
raifons pour nous faire décider en faveur de l'un plu-
tôt que de l'autre : nous renvoyons à l'article Dv-
RE-mere, la fameufequeftionïur ion mouvement
& fur celui du cerveau; & à l'article Esprit , celle
des efprits animaux.
Quoi qu'il en foit , les Philofophes regardent le
cerveau comme l'organe de nos penfées. M. Aftruc
va plus loin : il prétend rendre raifon des phénomè-
nes du raifonnement & du jugement, par l'analogie
qu'il fuppofe entre les libres du cerveau &c celles des
inftrumens de mufique. Selon lui, c'eft un axiome
que chaque idée iïmple eft produite par l'ébranle-
ment d'une fibre déterminée ; & que chaque idée
compofée eft produite par des vibrations iiochrones
de plufieurs fibres ; que le plus grand ou le moindre
degré d'évidence fait le plus grand ou le moindre
degré de force de l'ébranlement des fibres.
Mais toutes ces chofes font fi peu démontrées ,
qu'il paroît inutile de s'y arrêter : il n'en eft cepen-
dant pas moins vrai que ce qu'on peut entrevoir dans
les nerfs & dans la ftruénire du cerveau , nous pré-
fente par-tout une induftriemerveiiieuie. Je ne crain-
drai donc point de déplaire à mon lecteur, en ajou-
tant ici l'explication des différens phénomènes qui
font liés au détail que nous allons donner fur les vues
de la nature.
i°. Le cerveau & le cervelet font les refervoirs où
fe filtre la matière qui porte le mouvement par <ous
nos membres ; & voici des expériences qui prou-
vent que le fentiment & le mouvement ont leur prin-
cipe dans la fubftance médullaire.
i°. La moelle du cerveau comprimée par quelque
caufe que ce puiffe être , par le fang , par la leroiité,
par des hydatides , par l'applatiffement méchanique
des os du crâne , par la concuffion , par la commo-
tion, &c. on tombe en apoplexie; 1". la moelle du
cerveau piquée, déchirée , donne des convuliïons hor-
ribles ; 30. Ja moelle du cerveau &i celle de l'épine
produifent la paralyfie des parties qui leur font infé-
rieures , foit que ces fubftances foicr.t bieffées, cou-
pées ou comprimées ; par conféquent il étoit de
ncceffité ablolue qu'il n'arrivât point de compref-
lïon dans ces endroits ; c'eft pour cela que le an
eft divifé en deux parties , qui font foûfenues par
la faux , quand nous fournies couches , & quand la
tête reçoit quelque mouvement iatéral ; de même
les lobes pofterieurs font foûtenus par la fente , afin
qu'ils ne tombent point fur le cervelet. Les 1 entricu-
les fervent encore à empêcher les comprenons ; le
cerveau preffé d'un coté, peut céder du cote de ces
cavités qui font toujours arrofées d'un : liqueur qui
fe filtre dans le plexus coroïde : la nature, dans cette
vue , a formé une boîte ronde pour enfermer le cer-
veau ; cette figure fait que le crâne ne peut s'enfon-
864
C E R
C E R
ccr que difficilement. Quant à la moelle de l'épine ,
elle a un rempart dans le canal des vertèbres.
20. Les veines n'accompagnent point les artères,
de peur qu'elles ne foient comprimées par ces artè-
res lorfqu'elles fe gonflent dans les grands mouve-
mens. Les réfervoirs veineux font d'une ftru&urefin-
guliere , & leur feâion préfente en général une fi-
gure curviligne : ils font formés & creufés entre les
deux lames de la dure-mere , qui leur donne une for-
te gaine ; ils font outre cela renforcés par différens
moyens : c'eft ainfî qu'il y a dans leur cavité des fi-
bres tranfverfales qui font l'office de poutres , joi-
gnent les parties oppofées, &C renflent à leur diften-
fion. Voyez combien de précautions la nature a pri-
fes pour que les veines du cerveau ne fe rompifTent
point toutes les fois que le fang s'arrête , comme en
retenant fon haleine , en faifant de grands efforts , en
touffant , en éternuant , en riant , &c. Les artères &
les veines du cerveau ont des directions différentes ,
& communiquent toutes les unes avec les autres , les
artères avec les artères, les veines avec les veines ,
un nombre infini de fois ; parce que dans le premier
cas il eût été dangereux qu'elles ne fe formaffent un
obftacle mutuel en paffant par le même trou ; Se
dans le fécond , que le fang ne pût trouver d'iflue ,
fa route direcle étant embarraffée.
3°. Les nerfs qui fortent du côté gauche , vont ou
paroiffent aller du côté droit , & ceux qui fortent du
côté droit , fe distribuent ou paroiffent fe diftribuer
au côté gauche ; & ce n'eft que par ce moyen qu'on
peut expliquer pourquoi le cerveau étant vivement
affe&é d'un côté , les parties de l'autre côté corref-
pondantes à celles auxquelles les nerfs de cette per-
tie affeftée du cerveau fe diftribuent , fe trouvent pa-
ralytiques.
4°. Si l'on comprime le cerveau , ou qu'on le cou-
pe jufqu'à fa fubftance médullaire , l'adion volon-
taire des mufcles eft interrompue , la mémoire & le
fentiment s'éteignent , mais la refpiration & le mou-
vement du cœur fubfiftent. Quant au cervelet , fi
l'on fait la même chofe , la refpiration & le mouve-
ment du cœur ceffent : de-là il s'enfuit que les nerfs
deftinés au mouvement volontaire partent du cer-
veau, & que les nerfs d'où dépendent les mouvemens
fpontanés fortent du cervelet : il eft donc en fureté
de toutes parts , de même que les artères vertébrales
qui lui fourniffent du fang, parce qu'elles montent
par les trous des apophyfes tranfverfes du cou.
5°. Les maladies de la tête dépendent toutes de la
compreffion & de l'irritation : la douleur de la tête
eft caufée par le fang qui ne peut paffer librement ,
& qui par-là caufe un grand battement dans les ar-
tères ; auffi trouve-t-on dans les différions des ca-
davres de ceux qui ont été fujets à ces maux , les
vaiffeaux extrêmement diftendus , & remplis d'un
fang noirâtre : fi le gonflement s'augmente jufqu'à
caufer une grande compreffion , l'apoplexie furvien-
dra ; car alors le fuc nerveux ne pourra plus être
pouffé dans les nerfs qui fervent au mouvement vo-
lontaire ; tandis que cette preffion ne s'étendra plus
jufqu'au cervelet , la refpiration & le mouvement
du cœur fubfifteront. Pour l'épilepfie , elle ne diffère
dans fa caufe de l'apoplexie , qu'en ce que la preffion
nefefait pasde mêmeffuppofons qu'une artère forme
unanévrifme, cette artère gonflée battra extraordi-
nairement , & par fes battemens fera couler avec
force le fuc dans les nerfs ; il furviendra donc des
convulfions extraordinaires. La même chofe peut
arriver par des varices ; car ces varices comprime-
ront les artères voifines , qui par-là fe gonfleront ,
& battront fortement. On voit de-là que l'apople-
xie pourra fuccéder à l'épilepfie. La paralyfie fuit
fouvent les maladies dont nous venons de parler :
mais elle peut avoir encore d'autres caufes , comme
on le peut voir à l'article Paralysie.
6°. Dans ceux qui font morts de ces maladies ;
on trouve beaucoup de férofité extravaf ée dans le cer-
veau.
7°. On voit que les nerfs qui font les canaux du
cerveau , fe diftnbucnt dans les mufcles pour y por-
ter le mouvement ; mais il y a plus de branches à
proportion dans les plexus qui luivent les artères ,
parce qu'ils ont befoin d'un grand mouvement pour
pouffer le fang.
8°. Enfin , les nerfs font les feuls corps fenfibles :
mais d'où vient que le cerveau dont ils fortent ne l'elt
point , ou ne l'en que très-peu ? Comme cela dépend
des lois de l'union de l'ame avec le corps , on n'en
peut donner aucune raifon. Voye^ Nerf, Anatomie
d'HeiJL avec des Ejf. de Phyf. &c.
Quant au fiége de l'ame , les auteurs fe font ac-
cordés à la placer dans une feule partie du cerveau ,
de peur qu'un fiege à chaque lobe ne fuppolât une
double feniation : ainfi les uns ont mis l'ame , c'eft-
à-dire, le premier principe de nos fenfations & de
nos penfées , dans la cloifon tranfparente ; Deicar-
tes & fes fe&ateurs ont voulu qu'elle habitât la glan-
de pinéale ; Lancifi l'a placée dans le corps calleux ;
Vieuffens a adopté cette opinion ; Poffidonius parmi
les anciens, "Willis chez les modernes , ont diflribué
les diverfes facultés de l'ame en différentes parties
du cerveau propres à chacune : mais rien jufqu'icin'a
pu nous découvrir où font ces prétendus départe-
mens. Le cerveau qui peut être confidérablement blef-
fé, fans beaucoup perdre de l'ufage des fens , mon-
tre bien quelle eft l'étendue du jenj'orium commune.
Certaines obfervations femblent laiffer en doute
û le cerveau eft une partie abfolumentnéceffaire à la
vie. Il y a plulieurs exemples anatomiques d'animaux
qui ont furvécu à la perte de cette partie. Nous
avons l'hiftoire d'un enfant qui naquit à terme dans
la ville de Paris , qui n'avoit ni cerveau ni tête , & au
lieu de ces deux parties il avoit une maffe de chair
de couleur femblable au foie. M. Denys rapporte un
autre exemple d'un enfant qui naquit en i 573 , qui
étoit affez bien formé , à l'exception de la tête qui
n'avoit ni cervelle, ni cervelet, ni moelle allongée,
ni aucune cavité propre à les contenir : le crâne , fi
on peut l'appeller ainfi, étoit folide, & n'avoit au-
cune liaifon avec les vertèbres ; de forte que la moelle
de l'épine n'avoit aucune communication avec la tê-
te. M. Leduc donne un troifieme exemple en 1695 ,
d'un fu jet qui fut trouvé fans cerveau , fans cervelet,
fans moelle allongée, & même fans moelle de l'épine ;
la cavité qui auroit dû les contenir étant extrême-
ment petite , & remplie d'une fubftance livide , blan-
châtre , & femblable à du fang coagulé : il ajoute
que c'eft le troifieme fùjet qu'il avoit trouvé de cette
façon. M. Duverney croit que cette fubftance étoit
une moelle de l'épine , quoiqu'elle n'en eût point la
confiftance : en un mot il la regarde comme un cer-
veau même, femblable à celui qui eft dans le crâne ,
plus nécefiaire à la vie , & plus fenfible que le cer-
veau & le cervelet ; puifqu'une blefTure ou une com-
preffion dans la moelle épiniere eft toujours mortel-
le , & qu'il n'en eft pas de même du cerveau, comme
il paroît par les obfervations rapportées par MM.
Duverney & Chirac ; le premier defquels ôta le cer-
veau & le cervelet d'un pigeon , qui malgré cela vé-
cut ,' chercha fa nourriture , & s'acquitta de toutes
fes fondions. M. Chirac a ôté la cervelle de la tête
d'un chien , qui vécut , mais qui mourut dès qu'on
lui eut ôté le cervelet : cependant il remarque qu'en
foufflant dans les poumons de l'animal , il le fit vi-
vre pendant une heure après la perte de cette der-
nière partie. Le même obferve qu'après avoir fé-
paré la moelle allongée de la moelle épiniere d'un
autre chien , & après lui avoir ôté la cervelle &
le cervelet, l'animal vécut en lui foufflant dans les
poumons.
C E R
poumons. On peut ajouter à cela divers exemples
rapportés par M. Boyle , non-feulement d'animaux
qui ont vécu après la féparation de leurs têtes d'a-
vec leurs corps , mais même de la copulation &c de
l'imprégnation de plufieurs infectes après ces diffé-
rentes circonftances : d'où il s'enfuivroit que la moel-
le épiniere feroit fuffifante pour la fenfation , le mou-
vement , & la fecrétion des efprits animaux , &c.
Le cerveau a différentes proportions dans divers
animaux. Il n'eft pas grand dans les oifeaux à pro-
portion du corps : cette proportion eft beaucoup plus
petite dans le bœuf & dans le cheval. Le finge , ani-
mal rufé tk. adroit, a un grand cerveau. Les animaux
ruminans en ont moins que l'homme , mais plus que
les autres brutes ; comme on le voit en comparant
les cerveaux de la chèvre , de l'élan , avec ceux du
lion & du linx. Il eft petit dans les animaux qui fe
battent ; car ils ont des mufcles temporaux fort épais
qui étrécifient leur crâne , en comprimant fous la
forme d'un plan incliné & cave , les côtés que nous
avons ronds & faillans en-dehors. On a donc raifon
de dire qu'un petit cerveau eft la marque non de l'im-
bécillité, mais de la férocité. Ce vifeere eff beaucoup
plus petit dans les poiiTons que dans les quadrupèdes ;
le requin qui pefe trois cents livres , n'a pas trois
onces de cervelle : elle eft copieufe dans les efpe-
ces qui paroiffént plus rufées, telle que le veau ma-
rin. C'eft ii peu de choie dans les inleftes , qu'on ne
peut favoir ce qui fait le cerveau : on ne voit que la
moelle de l'épine feule , qui paroit dégénérer uni-
quement dans les nerfs optiques : dans l'éphémère,
l'efcarbot , l'abeille , le cerveau n'eft au plus qu'une
petite particule pas plus grofTe qu'un ganglion de la
moelle épiniere , comme dans la chenille , dans l'her-
mite , dans les vers à foie. L'homme le plus prudent
des animaux a le plus grand cerveau ; enfuite les ani-
maux que l'homme peut inftruire ; Se enfin ceux qui
ont très-peu d'idées & des aclions de la plus grande
iimplicité , ont le plus petit cerveau. Mais eft-on ro-
bufte , eu égard à la quantité du cervelet ? cela eft
vraiffemblable : l'expérience nous manque cepen-
dant ici ; ce qu'il y a de certain , c'eft que l'homme
fait pour avoir tant d'idées , n'eût pu les contenir
dans un plus petit cerveau. ( Z)
Cerveau , terme de Fondeur de cloches: Le cerveau
d'une cloche eft la partie fupérieure à laquelle tien-
nent les anfes en-dehors , & l'anneau du battant en-
dedans. Cette partie de la cloche a la forme à-peu-
près femblable à celle de la partie de la tête des ani-
maux qui renferme la cervelle. C'eft la raifon pour
laquelle on lui a donné le nom de cerveau.
La largeur du cerveau dépend de la longueur du
diamètre de la cloche. La règle eft de lui donner
fept bords & demi de diamètre , c'eft-à-dire la moi-
tié du diamètre de l'ouverture inférieure de la clo-
che. A l'égard de fon épaifleur , elle eft ordinaire-
ment d'un corps ou d'un tiers de l'épaiflèur du bo'd.
Mais afin que les anfes foient plus folides , on forti-
fie le cerveau par une augmentation de matière , qui
a auffi un corps d'épaifièur, & qu'on appelle Monde
ou la calotte. Voye^ la figure i. de la Fonderie des clo-
ches , & l'article FONTE DES CLOCHES.
CERVELAT , f. m. ( Chaircuiterie. ) Le cervelat or-
dinaire fe fait avec du porc maigre , du veau , du
lard , force épices , hachés enfemble & entaflés dans
un boyau de porc , qu'on divife enfuite avec des ti-
en plufieurs portions, félon la longueur qu'on
Veut donner à chaque cervelat. Le boyau eft étranglé
en deux endroits par la ficelle ou le fil ; & cet inter-
valle eft un cervelat. On fait cuire ce boyau rempli
avant que de le manger , ou même de le vendre. Les
cervelats de Milan font fort vantés : Oll les tait, à ce
qu'on dit , avec le porc maigre , le lard , le Ici , 6c le
poivre. On met lur lix livres de porc une livre de
Tome il
C E R
865
lard quatre onces de fel, une once de poivre. On
hache bien le tout enfemble ; on arrofe le mêlante
avec une pinte de vin blanc , & une livre de fan»
de porc ; on ajoute une demi-once de canelle & de
girofle piiés enfemble ; on tire de la tête du porc
de gros lardons , qu'on faupoudre bien d'épices. On
répand ces lardons dans le mélange précédent qu'on
entafie dans le boyau du pose ; on lie le boyau par
les deux bouts quand il eft bien plein , & on le fait
cuire: quand il eft cuit, on le laine lécher à la fu-
mée jufqû'à ce qu'il foit e-arèmement ferme & dur.
CER\ ELET, f. m. terme d'Anatomie, eft la partie
poitérieure du cerveau. Voyï{ nos Plane. d'Arut. &
leur explic. Foye^ auft l'article Cerveau.
Le cervelet eft en quelque façon une forte de petit
cerveau lui-même , comme l'exprime fon nom , qui
eft un diminutif du mot cerveau.
Il eft logé dans la partie poftérieure & inférieure
du crâne , au-deffbus de la partie poftérieure du cer-
veau. Il y communique par en bas : mais par en haut
il en eft féparé par le replis de la dure-mere. Sa fi-
gure reffémble à une boule applatie, plus large que
longue.
Sa fubftance eft plus dure , plus feche , & plus foli-
de^que celle du cerveau : mais elle eft cependant de
même nature , étant compofée de même , d'une fubf-
tance corticale & glanduleufe , & d'une médullaire ;
les branches de cette dernière fubftance iont difpo-
fées à-peu-près comme celles d'un arbre , fe rencon-
trant au milieu , & formant uneefpece de tige qui rè-
gne tout du long. La couleur du cervelet eft jaunâtre j
au lieu que celle du cerveau eft plus blanche.
Sa furface eft inégale & fillonnee , mais moins
que celle du cerveau : il femble plutôt qu'elle foit
divifée par lames ou par écailles. Les cercles du mi-
lieu font plus larges & plus profonds; & dans les en-
tre-deux des lames , entrent les replis de la pie-mere.
Le devant & le derrière du cervelet font terminés par
des apophyfes qu'on appelle vermiformes , parce qu VI
les ont la figure d'un ver. II fe joint à la moelle allon-
gée par deux procès , que Villis appelle pedunculei
ou cuififesdu cervelet. Voy. PEDUNCLLES & CUISSES.
Outre ces deux peduncules , il y a deux ou trois
autres avances médullaires, qui parlant en travers
de la moelle allongée , forment une arche ou arca-
de, qu'on a appcllée du nom de celui qui i'a décou-
verte, pont de Parole. Voye\ Pont de VAROLE.
Les vaifiéaux fanguins du cerveau font les mê-
mes que ceux du cervelet ; Se fon ufage eft le même
auffi , favoir de féparer le fiic nerveux du fang , 6V
de le porter dans les différentes parties du corps.
Willis met cependant de la différence entre les
fondions du cerveau & celles du cervelet ; vou-
lant que le premier foit le principe des mouvemens
& des actions volontaires ; & l'autre, le principe
des adions involontaires, telles que font la refpira-
tion , le mouvement du cœur , &c. Foye^ Mouve-
ment.
Il paffe pour confiant que la moindre lelion à la
fubftance corticale ou à la moelle du cervelet, eft mor-
telle ; ce qui n'eft pas de même au cerveau , dont on
a quelquefois retranché une partie fans qu'il en foit
arrivé d'accident. Il eft pourtant vrai qu'il y a des
exemples de gens qui ont vécu non -feulement tans
cerveau , mais même tans cervelet. Voyt~ Cerveau.
w
CERYERA, ( Géog. ) canton & petite ville d'Ef-
pagne dans la Catalogne, fur une rivière de même
nom qui te jette dans la Segra au-delîus de Lerida,
Long. 18. 44. lut. 41. zS-
CERVI , ( Géog. ) de de l'Archipel au midi de la
Moree , près de file île CerigO.
CERVIA , ( Géog, ) ville d'Italie dans la Roma-
R R r r r
S6S
C E R
C E R
gne , fur le golfe de Venife , entre les rivières de
Savio & de Pifatello. Long. jo. lat. 44. 16.
CERVICAL , adj. en Anatomie , fe dit de quelques
parties relatives à la partie poftérieure du cou , qu'on
appelle en Latin cervix. Voye-^CERVix.
Ligament cervical. Voye^ LIGAMENT.
Les artères cervicales l'ont des rameaux de la foû-
claviere qui rampent en - devant & en - arrière du
COU. Foyer^ SoÛCLAVIERE.
Cervicaux defeendans , de Diemerbroek , font
une paire de mufcles antagoniftes aux facrolombai-
res , qui prennent leur origine de la troiiieme , qua-
trième , cinquième , & lixieme vertèbre du cou.
La plupart des auteurs , mais mal-à-propos , les
regardent comme une production & une partie du
facrolumbus. ^ov^Sacrolumbaire ; c 'eft le petit
traniverlaire du cou, ainli nommé par M. "Wini-
low.
Les nerfs cervicaux font au nombre de fept paires.
La première parle entre la première & la féconde
vertèbre du cou : elle communique avec le nerf fous-
occipital , avec le nerf intercoftal , avec la féconde
paire cervicale , & le diftribue aux mulcles porté-
rieurs de la tête : elle jette antérieurement un filet ,
qui après avoir communiqué avec le nerf intercof-
tal , avec la féconde paire cervicale , avec le nerf lin-
gual , va fe diftribuer aux mufcles fterno-hyoïdien ,
thyro-hyoidien , 6-c.
La féconde paire cervicale pafTe entre la féconde
& la troifieme vertèbre du cou : elle communique
en-devant avec le premier ganglion cervical du nerf
intercoftal ; en haut avec la première paire cervicale,
en bas avec la troifieme : elle jette différens rameaux
dont les uns communiquent avec le grand hypoglof-
fe , d'autres avec la portion dure du nerf auditif. Un
de fes rameaux s'uniflant avec un autre de la troi-
fieme paire cervicale , concourt à la formation du
nei f diaphragmatique. Voye^ Diaphragmatique.
La troifieme paire cervicale paffe contre la troiiie-
me & la quatrième vertèbre du cou , &c communi-
que en haut avec la féconde paire , en bas avec la
quatrième , en-devant avec le nerf intercoftal , le
grand hypoglofie , & la paire vague. Elle communi-
que encore avec le nerf accefibire : après cela elle
jette plufieurs branches. Parmi les branches anté-
rieures , il y en a une qui en s'uniffant avec un ra-
meau de la féconde paire verticale , forme une partie
du nerf diaphragmatique.
Tous les nerfs cervicaux envoyent une infinité de
branches aux mufcles & aux autres parties de la
tête , du cou , & des épaules.
Les quatre dernières paires cervicales partent entre
les portions du mulcle fcalene , & font en général
plus groffes que les trois premières, & forment avec
une partie de la troifieme paire cervicale , & la pre-
mière paire dorfale , les nerfs bronchiaux. Voye^
Eronchial. (Z)
CERVIER , voyei Loup cervier.
CERVIX, terme dy Anatomie , eft un mot latin qui
lignifie la partie pofiérieure du cou, auquel nous n'avons
aucun mot en François qui réponde parfaitement.
Il eft oppofé à la partie antérieure qu'on appelle la
gorge ou le gofier. Voye^ Cou.
Le cervix ou cou de la matrice eft ce canal ou paf-
fage oblong , fitué entre les orifices interne &c exter-
ne de la matrice, qui reçoit & emboîte la verge com-
me une gaine ou un fourreau , ce qui fait qu'on lui
a donné le nom de vagin. Voy . Matrice & Vagin.
Le cervix ou cou de la matrice dans les filles eft
fort étroit , fi ce n'eft dans le tems de leurs règles ;
car dans les tems ordinaires à peine eft-il affêz lar^e
pour qu'on y puiffe introduire une plume d'oie. Son
extrémité intérieure s'appelle orifice interne : & il eft
comme fcellé par une forte de matière glutineulè qui
fort des glandes circonvoifines. Voy. MATRICE. (Z.)
CERUMEN, en Anatomie ; voye^ ClRE DES
OREILLES.
CERUMINEUSE , adjeft. ( en Anatomie. ) fe dit
des glandes jaunes prefque rondes ou ovales , fuivant
Duverney & Vieufféns , qui percent de petits trous
la peau du conduit auditif dans la partie de ce con-
duit collée aux tempes , tk. dans les fiftures , & de-
puis la partie qui eft couverte d'un cartilage , juf-
qu'àla moitié du canal, félon Morgagni, fur la con-
vexité fupérieure de la membrane où rampe un ré-
feau réticulaire, celluleux, fort, fait d'aréoles qui
les renferment. C'ert par ces orifices que fort cette
efpece de cire jaune , huileufe, amere , & qui prend
feu lorfqu'eile elt pure & fort épaifTe. Faute de ce
fuc, dont l'abondance peut cependant nuire, on de-
vient lourd, ce qui arrive fouventpour cette raifon
dans la vieilleffe , comme le racontent Valfalva ,
Morgagni & Duverney ; & à dire vrai , les Chirur-
giens empiriques qui ignorent combien les caufes de
la vraie furdité font profondement cachées dans cet
organe, ne guériffent que celle-là. Haller, Comment.
Boerhaav. (Z)
CERVOISE, f. f. vieux mot qui fignifîe la bierre.
Voyer^ BlERRE.
CERVOISIERS, f. m. pi. marchands de bierre ou
Braffeurs. Voye^ Brasseurs.
* CE RUS , f. m. (A/y^o/.) dieu du tems favora-
ble chez les Grecs, ou de l'occarton chez les Ro-
mains. Calliftrate l'avoit reprélenté fous la figure
d'un jeune homme, beau, ayant les cheveux épars
& flottans au gré du vent , & tenant un rafoir à la
main. Phèdre l'a décrit dans les fables , avec des ai-
les , des cheveux par devant, & chauve par derriè-
re. L'allégorie de la figure de Calliftrate , eft que l'oc-
cafion s'échappe avec tant de rapidité , qu'elle pour-
roit marcher fur le tranchant d'un rafoir; & celle de
la fable de Phèdre , que l'on ne retrouve plus l'occa-
fion quand elle eft une fois échappée. L'idée d'un
Poète qui a appelle Xoccafwn le plus jeune des enfans
de Saturne , eft belle. Les Eléens avoient confacré un
autel à Ccrus.
CERUSE, voyei /' article BLANC DE PLOMB.
* CERYCES, f. m. pi. {Hifl. anc.~) gens occupés
chez les Athéniens, à fervir dans les facrifices. C'é-
toient des efpeces de crieurs publics qui annonçoient
au peuple les choies civiles & facrées ; on en faifoit
deux , l'un pour l'aréopage , l'autre pour l'archonte ;
leur fonction étoit encore d'affbmmer les taureaux ,
& de préparer les victimes. Ils étoient appelles a-
ryces, d'un certain Ceryx fils de Mercure & de Pan-
drofe , & le premier de la famille Athénienne de la-
quelle ces dertervans dévoient être tirés.
CESANO, (le) Géog. rivière d'Italie , dans l'état
de l'Eglife, au duché d'Urbin, qui fe jette dans le
golfe de Venife.
CÉSAR , f. m. {Jîifl.anc^) a été long-tems employé
chez les Romains, pour fignifier l'héritier préfomp'1
tif ou défigné à l'empire , comme l'eft aujourd'hui
le titre de roi des Romains dans l'empire d'Allemagne.
Foyei Héritier.
Ainii Confiance Chlore & Galère furent pro-
clamés cèfars par Dioclétien & Maximien; Licinus*
par Galerius ; Conftantin le grand, parConftantius ;
Conftantin le jeune, Conitantius & Conftans, par
Conftantin leur père; Junius Gallus tk. Julien, par
Conftantius.
Les cèfars étoient des efpeces d'adjoints ou artbciés
à l'empire , participes imperii : ils portoient le manteau
impérial, la pourpre & le diadème, & marchoient
avec toutes les autres marques de la dignité fouve-
raine. Ils étoient créés cèfars comme les empereurs,
par l'endoffement de la robe de pourpre.
La dignité de cèfariuX toujours la féconde de l'em-.
CES
pire, jufqu'au tenis d'Alexis Comnené, qui en in-
vertit Nicéphore de Melife en conféquence de la
convention faite entre eux ; & comme il falloir néces-
sairement qu'il conférât Une dignité fiîpérieure à Ion
frère Ifaac , il le créafebajlocrator, lui donnant en cet-
te qualité la prefféance fur Nicéphore , & ordonna
que dans toutes les acclamations Ilaac feroit nom-
mé le fécond , & Nicéphore le troifieme.
L'origine de ce titre fut le furnom du premier em-
pereur, C. Julius Céfar, que le fénat ordonna par un
décret exprès que tous les empereurs porteraient
dans la fuite : mais fous fes fucceffeurs le nom d'Au-
gure étant devenu propre aux empereurs , celui de
céfar fut communiqué à la féconde perfonne de l'em-
pire , fans que l'empereur ceffât pour cela de le por-
ter. On voit par-là quelle eft la différence entre céfar
purement & amplement, & céfar avec l'addition
d'empereur angufle.
Les auteurs font partagés fur l'origine du mot cé-
far, furnom de la maifon Julia. Quelques-uns d'après
Servius le font venir de cœfaries, cheveux, chevelu-
re , prétendant que celui qui le porta le premier étoit
remarquable par la beauté de la chevelure ; & que
ce fut pour cela qu'on lui donna ce furnom. L'opi-
nion la plus commune eft que le mot céjar vient à cœ-
fo matris utero ; de ce qu'on ouvrit le flanc de fa mère
pour lui procurer la naiffance. V. Césarienne.
D'autres font venir ce nom de ce que celui qui le
porta le premier avoit tué à la guerre un éléphant,
animal qui fe nomme céfar dans la Mauritanie. Birc-
herodius confirme cette opinion par l'autorité d'une
ancienne médaille fur laquelle eft reprélcnté un élé-
phant avec le mot céfar.
Depuis Philippe le fils , les céfars ajoûtoient à leur
titre de céfar , celui de mbiliffime , comme il paraît
par plufieurs médailles anciennes; &les femmes des
céfars partageoient avec eux ce dernier titre , com-
me celles des empereurs portoient le nom d'auguf-
tes. (G)
CÉSARÉE , f. f. (Géog. anc. & mod.) ville de Pa-
leftine, d'une fituation très-avantagèufe le long de
la mer , auparavant appellée la tour de Straton ; dans
la fuite Flavie Augujh Céfarée. Long. 66. l5. lat. J2.
20.
C É S A R É È , ville de Cappadoce , anciennement
Maiaca, & antérieurement Edeffe la Parthienne; fé-
lon quelques-uns Apamia ; félon d'autres ou YErfe-
ron, ou le Jifaria, ou le Caifaire d'aujourd'hui.
Césarée de Philippe, auparavant Paneas , au pié
du mont Liban, vers les fources du Jourdain, & les
confins de la Cœlefyric, aujourd'hui Behnc , ou
Bolbec.
CÉSARÉE fur la mer, ancienne capitale de Mauri-
tanie ; il en refte des ruines fort étendues : on croit
que c'eft la Jol de Pline , de Ptolomée , év de Pompo-
nius Mêla.
CÉSARIENNE (Opération) ou SECTION, eft
une opération de Chirurgie , qui connfte à tirer le fœ-
tus de la matrice par une ouverture faite à Y abdomen
de la mère, morte ou vivante. Voyc^ Accouche-
ment. Les Grecs appellent cette opération ûçiprnpw
T0Kia.OUvc-if.CT0/ULi*. ^oye- NAISSANCE, UTERUS , &C.
II eft conftaté par l'expérience que les plaies des
mulclcs de l'épigaltre du péritoine, tk celles de la
matrice, ne font pas mortelles ; enforte qu'il y a des
cas où l'on peut hafarder d'ouvrir Vabdomen de la mè-
re, pour donner paffage à L'enfant. Ceux qui naiflént
de cette manière l'ont appelles cafarts ou cœfones , à
tœfo matris utero, tels qu'ont été C . Julius ( éfar , Sci-
pion l'Africain , Manlius, & Edouard VI. roi d'An-
gleterre, f'oye- CÉSAR.
Cette opération fe pratique dans deux circonflan-
ces différentes : i°. lorsqu'une femme meurt par quel-
qu'accident dans le cours de fa groiïeffc ; il n'y a point
Jonu II,
CES
867
alors d'inconvénient à la mettre en ufage, puifque
c'eft la feule voie de fauver l'enfant. Il n'y a point de
conteftation fur ce point ; tous les auteurs en en con-
venant, affùrent qu'il ne faut pas perdre de tems,
& que l'on ne peut trop fe hâter de faire l'opération
céfarienne.
x°. Lorfque la femme eft vivante, on ne doit dans
ce cas fe déterminer à lui faire cette opération , que
lorfqu'on eft fur de l'impoffibilité ablblue de l'accou-
chement par les voies ordinaires avec les fecours
auxiliaires qu'on peut employer dans différens cas.
Foye{ Accouchement.
Les caufes de cette impoffibilité viennent de là
mauvaife conformation des os du baffin de la mère ,
qui rend le paffage trop étroit ; les tumeurs skirrheu-
les du vagin , & les exoftofes des ifchions peuvent
produire le même effet. Quelques auteurs y joignent
la groffeur extraordinaire du fœtus & fa conforma-
tion monftrueufe. Quand l'impoffibilité de l'accou-
chement vient du défaut naturel ou contre nature
des organes de la mere , il faut nécessairement , pour
lui fauver la vie & à fon enfant , faire une incilion à
la matrice pour tirer celui-ci. Les mauvaifes raifons
de quelques auteurs contre une opération fi utile ,
tombent par les faits qui en affùrent la poffibilité.
On trouve dans le premier volume des Mémoires de
l'académie royale de Chirurgie , des recherches de M.
Simon lur l'origine de X opération céfaiiennt , il rap-
porte les différentes difputes qu'elle a occafionnées ,
& les autorités & les faits qui font juger du fuccès
qu'on peut en attendre. Il n'oublie pas de faire ufage
d'une obfervation de M. Soumain qui a fait cette opé<-
rationen 1740, en préfence des plus habiles accou-
cheurs de Paris, à une femme âgée de trente-fept
ans, qui n'a que trois pies & un pouce de hauteur.
L'étroiteffe du baffin &c fa conformation irréguliere
ont déterminé tous les confultans à propofer i
tion qui a eu tout le fuccès poilible.
L'opération céfarienne eft néceffaire dans un cas par-
ticulier dont on a quelques exemples ; c'eft la chute
de l'enfant dans le ventre par la rupture de la matri-
ce. Un Chirurgien certain de la groffeffe d'une fem-
me, fe décidera fort aifément iur ce cas lorfqu'il fe
fera allure que l'enfant n'eft plus dans la matrice.
Saviàrd , Chirurgien en chef de l'Hôtel-Dieu de
Paris, donne un exemple de cet accident ; 1
taon vingt-cinquième. On en trouve de pareilles
dans les Mémoires de L'académie royale des Sciences.
Les fuccès démontrés de Y opération cefuienne, ont
fait croire qu'il falloir la mettre en ufage dans toutes
les circonstances où l'enfant ne pouvoit fortir ; ce-
pendant fi la difficulté vient de ion volume extraor-
dinaire ou de la conformation monltrueule bien re-
connue , il femble qu'il feroit plus à propos , lorfqu'on
eft allure de la mort, de faire ufage des crochet- , qui
bien dirigés, mettent moins e la vie de la
mere, que Vopèrab .. ( eu la pratique la
plus iuivie. foyer Crochet.
Pour faire Y opération céfariauu, il faut coucher la
femme fur le dos , la tête ce la poitrine plus (
que le relie du corps ; elle fera lur le bord de Ion lit.
On préférera d'opérer fur le cote qui paraîtra le plus
éminent; il faut taire l'incifion longitudinalement le
long du bord extérieur du mufcle droit, ou ce qui eft
plus facile à fixer, entre l'ombilic ce l'épine anté-
rieure 6c fupérieure de l'os des îles, l'ir.ciiion 1 doit
environ fix à fepi pi ucej de longueur fuiyant
les fujets.On recommande un biftou préfère
un biftouricourbetranchantfurfacon#xité: m
avons fait remarquer lesavantages au m< ••.
I 'iiu'ilion intérefle la peau, la graifie, les mufcles
obliques &.- tranfverfes du bas-ventre, & le péritoi-
ne. H faut incifer avec précaution lorfqu'on coupe le
péritoine, de crainte de Méfier les inteftins,que les
1 R R r r r ij
fo8
CES
C E
S
cris de la fouffrante pouffent vers la plaie : fi les in-
térims fe présentent , on a loin de les faire contenir
par un aide avec une compreffe trempée dans du
vin chaud. L'opérateur inciié alors la matrice anté-
rieurement au milieu de l'a partie latérale. Dès qu'il
a pénétré dans fa cavité, il aggrandit fuffifamment
la plaie avec un billouri , ou des cifeaux conduits
.par le doigt, ou une fcnie cannelée; il ouvre en-
fuite les membranes , dont il tire l'enfant , & déta-
che l'arriere-faix. Il faut ouvrir la matrice avec beau-
coup de précaution s'il y a long-tems que les eaux
foient écoulées , parce que dans ce cas la matrice &
les membranes font exactement collées fur le fœtus ,
qu'on rifqueroit de bleffer fi l'on prcnoit peu de me-
ïure.
Lorfqu'on a fait l'extraction de l'enfant & du pla-
centa , on lé fert d'une éponge fine trempée dans du
vin tiède &c fuffifamment exprimée , pour pouvoir
enlever le fang & les humeurs épanchées. On aban-
donne la matrice, qui par fa contraction diminue
considérablement de volume.
L'appareil conlîife en comprennes & en un banda-
ge unifiant ; les auteurs confeillent la gaftrcraphie
ou future du ventre : mais ce moyen cft très-doulou-
reux ; le bandage peut fuffire pour la réunion des lè-
vres de la plaie ; l'affaillèment du ventre contribue
à la facilité de cette approximation. On fait iur le
ventre des fomentations émollientes& anodynes, &
on employé tous les moyens capables de prévenir
l'inflammation.
L'opération , comme nous venons de le rapporter,
eft dans un lieu d'élection ; elle le peut faire dans un
lieu de nécelïïté : nous avons des exemples de fœtus
conçus hors de la matrice , ou qui en font fortis , Se
qui ont produit des abfcès qu'on a ouverts dans le
lieu où ils fe font manifeités , & dont on a tiré heu-
reufement & fans mauvaife fuite les débris d'un en-
fant. Voye{ Bartholïn de ïnjoiitis partus vitiis. (.T)
CESENE , ( Géog. ) ville d'Italie de l'état de L'E-
glife , dans la Romagne , fur le Savio. Long. Z9.46.
lat. 44. 8.
CESSARES , ( Géog. ) peuple de l'Amérique mé-
ridionale , dans la terre Magellanique , à l'orient de
la Cordillera de los Andes.
CESSE , ( Géog. ) rivière du duché de Luxem-
bourg, qui fe précipite dans un abîme près de Ham,
& après avoir coulé une lieue fous la terre, reparoit
de nouveau ; ce qui mérite bien d'être vérifié.
Cesse , ( Géog. ) petite rivière de France dans le
Languedoc , qui fe perd dans l'Aude.
CESSENON , ( Géog. ) petite ville de France dans
le bas Languedoc.
* CESSER , DISCONTINUER , FINIR ,(Gram.
Synon. ) termes relatifs à la durée fucceffive d'une
action. On finit en achevant; on cejje en abandon-
nant ; en ai/continue en interrompant. Pour finir l'on
difeours à propos , il faut prévenir le moment où l'on
ennuyeroit : on doit ccjfier fa pourfuite, quand on s'ap-
perçoit qu'elle elt inutile ; il faut dijeontinuer le tra-
vail , quand on eft fatigué. Voyc\ les Syn. Franc,
CESSIBLE, adj. ( terme de D roit.~) fe dit de tout
ce qui peut être cédé ou tranfporté d'une perfonne
à une autre : ainiî l'on dit que le droit de retraire féo-
dalement eft ceffïUe , &c.
CESSION , f. f. (en Droit. ) le dit en général de
tout acte par lequel quelqu'un , propriétaire d'un
effet ou d'un droit , le tranfporté à un autre. Dans
l'ufage ordinaire il lignifie la même chofe que tranf-
port. J-'oye* Transport.
Pour les autres manières de tranfporter à quel-
qu'un la propriété d'un bien , d'un effet , ou d'un
droit, voyei Vente , Echange , Donation,
Legs , Subrogation , &c
Cession , dans un iens plus particulier , eft un
abandonnement qu'on fait de tous fes biens en juftr*
ce à fes créanciers pour éviter la contrainte par
corps.
Le débiteur ne peut être admis au bénéfice de
ceffion , qu'en vertu de lettres du Prince , entérinées
en jultice contradictoirement avec les créanciers ; &
pour l'obtenir, il faut qu'il ne lui relie aucune ref-
lource pour payer , & qu'on ne puifle pas lui repro-
cher de friponnerie ou de fraude.
La cejjïon emporte note d'infamie , "& obligeoit à
porter un bonnet verd en tout tems ; faute de quoi, le
débiteur pris fans l'on bonnet , pouvoit être conftitué
prifonnier. Ce bonnet étoit un emblème qui fignifioit
que celui qui avoit fait cejffion de biens étoit devenu
pauvre par fa folie : cet ufage ne s'obferve plus.
Voye-^ Bonnet.
Il faut feulement afin que la ceffîon foit notoire , lt
c'ell un marchand qui eft ceffionnaire , qu'elle foit
publiée à la jurifdiction confulaire , ou à l'hôtel-de-
ville s'il n'y a pas de juges-confuls dans le heu de fon
domicile , &c inférée dans un tableau public. Quel-
ques coutumes même veulent qu'elle foit publiée
dans la paroiffe du ceffionnaire.
A Lucque , c'eftun bonnet jaune qu'on porte après
avoir fait ceffîon, au lieu d'un verd.
Les Jurifconlùltes Italiens nous ont confervé une
manière de faire ceffîon , inftituée par Céfar , qui con-
filloit à fe frapper trois fois le derrière à cul nud en
prélénee du juge fur une pierre qu'on appelloit la-
pis vituperii ; parce qu'après cette cérémonie , le cef-
fionnaire étoit inteltable & incapable de rendre té*
moignage.
Autrefois on faifoit quitter en juftice la ceinture
& les clés à ceux qui faifoient ceffîon ; les anciens
ayant coutume de porter à leur ceinture les princi-
paux inftrumens avec lefquels ils gagnoient leur vie :
comme un homme de plume , fon écritoire ; un mar-
chand , fon efcarcelle , &c. Voyt^ Banquerou-
tier & Ceinture.
Voici encore une manière dont fe faifoit la ceffîon
chez les Romains & les anciens Gaulois : celui qui
faifoit cejjïon , ramalïbit dans l'a main gauche de la
pouffiere des quatre coins de la maifon ; après quoi ,
fe plantant fur le feuil de la porte , dont il tenoit le
poteau de la main droite , il jettoit la pouffiere qu'il
avoit ramaffée par-deiTus les épaules ; puis fe dé-
pouillant nud en chemife , & ayant quitté fa ceintu*
re & fes houfeaux , il fautoit avec un bâton par-
deffus une haie ; donnant à entendre par-là à tous les
affiltans , qu'il n'avoit plus rien au monde , & que
quand il fautoit , tout lbn bien étoit en l'air. Voilà
comment fe faifoit la ceffîon en matière criminelle :
mais en matière civile , celui qui faifoit cejjïon , met-
toit feulement une houffine d'aune , ou bien un fétu,
ou une paille rompue fur le feuil de la porte , pour
marque qu'il abandonnoitfes biens. Cette cejjïon s'ap-
pelloit chrenecruda per durpillum & jejlucam , ceffion
par le feuil & par le fétu. Voye^ Investiture.
Il y a plufieurs dettes pour leiquelles on ne peut
pas être reçu à faire cejjïon de biens ; telles font celles
qui ont pour caufe un dépôt de deniers , foit publics
ou particuliers, & généralement toutes celles qui
font accompagnées de dol & de perfidie de la part du
débiteur. On exclut auffi du bénéfice de ceffion celui
qui eft condamné en une amende , ou des dommages
& intérêts pour crime de délit ; les marchands qui
achettent en gros pour vendre en détail ; les étran-
gers, les maîtres pour les ialaires de leurs lerviteurs,
les proxénètes , les ftellionataires , les débiteurs de
fermages ou de deniers royaux , 6c pluiieurs autres ;
enforte que le bénéfice de ceffîon eft devenu prefque
inutile depuis l'ordonnance qui a déchargé des con-
traintes par corps.
La ceffîon de biens ne libère pas le débiteur j de«
C E'S
forte que s'il acquiert de nouveaux biens , fes créan-
ciers les peuvent faire failir pour être payés ; feule-
ment ils font obligés de lui laifîer de quoi vivre. (AT)
CESSION , (en Droit canon. ) eft la vacance d'un
bénéfice provenant d'une forte de réfignation tacite,
6c qui fe préfume lorfque le bénéficier fait quelque
action ou entreprend quelque charge incompatible
avec le bénéfice dont il étoit pourvu , & cela fans
difpenfe.
La vacance d'un bénéfice par l'élévation du béné-
ficier à I'épifcopat , au lieu de s'appeller ceffion , s'ap-
pelle création : ainfi dans ce cas , on dit que tel béné-
fice eft vacant par création. Voyc^ Création. (//)
Cession , terme, de Librairie : Quand un Libraire
ou tout autre particulier a obtenu le privilège du Roi
pour l'impreffion d'un ouvrage, il peut tranfporter
fes droits en tout ou en partie fur ce privilège , &
ce tranfport s'appelle ceffion. Une cdjîon pour avoir
la même authenticité qu'un privilège , doit fuivre
les mêmes lois , 6c être enregiilree à la chambre
royale & fyndicale des Libraires.
Le droit que l'on acquiert par une telle cejjion eft
abfoiument le même que celui donné par le privilè-
ge , & peut lui-même être transporté & foùdivifé à
l'infini.
II eft de loi ou d'ufage que les cefions foient impri-
mées dans les livres à la fuite du privilège.
CESSIOxMNAIRE , f. m. ( Commerce. ) celui qui
accepte & à qui on fait une ceffion ou tranfport de
quelque chofe. Foye^ Cession & Transport.
Cifflonnaire fe dit encore d'un marchand ou autre
perfonne qui a fait ceffion ou un abandonnement de
tous fes biens , foit volontairement , ioit en juftice.
Voyc^ Cession.
Les biens acquis par un ceffionnaire judiciaire de-
puis fa ceffion , foit par fucceffion , donation , ou au-
trement , font toujours affectés & obligés à fes créan-
ciers jufqu'à concurrence de ce qui peut leur être dû
de relie , fans toutefois qu'ils puilîènt exercer aucune
contrainte par corps contre lui.
Lorfqu'un ceffionnaire a entièrement payé fes det-
tes, il peut être réhabilité par des lettres du prince.
Mais jufque-là il eft inhabile à poiléder ou exercer
aucune charge publique. Dictionnaire de Commerce ,
tom. II. pa«. zj3. (G)
CESTE , f. m. ( Hijt. anc. ) étoit un gros gantelet
de cuir , garni de plomb , dont les anciens athlètes
fe fervo'ient dans leurs exercices, foyer Athlètes ,
& nos Planches a" Antiquités , avec leur explication. On
l'appelloit ainli à cœdendo , je bats , je frappe.
Calepin a cru que c'étoit une maflite , de laquelle
pendoient des balles de plomb attachées par des mor-
ceaux' de cuir. Il le trompe , car c'étoit feuleméntuné
longe de cuir garnie de clous , de plomb, ou de fer ,
dont on entouroit la main , en forme de liens croifés ,
& même le poignet & une partie du bras , pour em-
pêcher qu'ils ne fuffent rompus ou démis , ou plutôt
afin de porter des coups plus vioîens. Scaliger fon-
dé fur l'autorité de Scrvius , a prétendu que le cefte
couvroit une partie des épaules : mais dans tous les
anciens monumens , les difFérens contours des cour-
Toics dont la main des lutteurs eft armée , ne pa-
roiflent pas monter plus liant que le co
Les Grecs défignoient cette forte d'armes par qua-
tre noms difFérens ; favoir i/xa.mç , pv
x«.i , & <rS'j,7fxi. Le plus ordinaire étoit celui
f - . qui ligmiie à la lettre des courroies ; ils
faits de cuir de bœuf non corroyé , defieché , & par
conlèquent très-dur. On a voit donné ai
tic fjivp/My.ti, non que les armes euffent aucune ref
femblance avec la figure des fourmis ( jui-tuwic ) ,
mais parce qu'on fentoit dans les parties qui en
étaient frappées des picotemens tout pareils à ceux
CES 869
que caufent ces infeftes. La troifieme cfpece , ou les
mtiltques , étoit la plus ancienne chez les Grecs : c'é-
toit un fimple lacis de courroies très- déliées , qui
enveloppant uniquement la main dans le creux de
laquelle on les attachoit , laiffoient le poignet & les
doigts à découvert. On conjecture que la quatrième
efpcce étoit moins un gantelet, qu'une pelote que les
athlètes ferroient dans leurs mains , & qtii n'étoit
en ufage que dans les gymnafes , pour tenir lieu du
ce/le qu'on employoït dans les combats , à-peu-près
comme dans nos falles d'armes on fe fert de fleurets
au heu d'épées. Mém. de V Ac. des B. L. t. III. (G)
* Ceste , (Mytli. ) ceinture myftérieufe dont l'i-
magination d'Homère a faitpréfentà Venus. Ses deux
eflets les plus merveilleux étoient de rendre aimable
la perfonne qui la portoit aux yeux de ceux mêmes
qui n'aimoient plus. L'hymen , le plus grand ennemi
de la tendrefle , n'étoit pas à l'abri de Yon preftige ;
ainfi que Jupiter s'en apperçut bien fur le mont Ida.
Mercure fut acculé de l'avoir volée. Le mot cefh
vient du Grec ntç-iç, ceinture, ou autre ouvrage fait à
l'aiguille ; & de cep on fait incefle , qui fignifie au {im-
pieceinture déliée ; & au figuré, concubinage ou forni-
cation en général. On a reftreint depuis ce terme à la
fornication entre perfonnes alliées par le fan». Fuyez
Inceste. ° j l
* C'EST POURQUOI , AINSI , (Gramm. Syn. )
termes relatifs à la liaifon d'un jugement de l'efprit
avec un autre jugement. C eft pourquoi, dit M. l'abbé
Girard , dans fes Synonymes François , renferme dans
fa lignification particulière un rapport de caufe 6c
d effet ; & ainfi ne renferme qu'un rapport de pré-
milles & de conféquence.Les femmes font changean-
tes ;c' eft pourquoi les hommes deviennent incon
nous leur donnons la liberté , ainfi nous pan
les eftimer plus que les Orientaux qui les enferment.
C eft pourquoi fe rendrait par cela ej >our la-
quelle j 6c ainfi, par cela étant. La dernière dec
prenions n'indique qu'une condition. L'exemple fui-
vant où elles pourroient être employées toutes deux,
en fera bien fentir la différence. Je puis dire
avons quelqu affaire à la campagne , ainli nous p.
demain s' il fait beau; ou c'eft pourquoi /
demain s'il fait beau. Dans cet exemple , ainfi ic rap-
porte à s'il fait beau, qui n'eft que la condition du
voyage ; 6c c'eft pourquoi , fe rapporte .-.
quelqu affaire , qui eft la caufe du voyage.
* CESTROSPHENDOXUS , ( ffift. a
de trait fort femblable a une flèche, compote d'un
fer pointu, mis au bout d'un manche de bois d'une
demi-coudée de longueur. Les premiers furent in-
ventés par les Macédoniens, qui s'en fervirei
fuccès dans la guerre de Perlée contre les Romains ,
6c les incommodèrent considérablement.
CESURE, f. f. ( Gram. ) ce mor vient du Latin
çœfura, qui dans le lens propre lignifie incifwn , cou-
rt , couper . tailler ; au lupin
..Ce mot n\ , parmi
nous que par allufion & par ligure, quand on parle
de la méchanique du \ c
La cefurt eft un repos que l'on prend dans :
nonciation d'un vers après un . tàin nombre de
fyllabes. Ce repo . -
une cadence agréable à l'oreille : ce font ces deux
motifs qui ont introduit la c
cilité pour la prononciation .
pour l'oreille.
La cifure fépare le vers en deux parties , dont cha-
cune eft appellée hàmJBche , c'eft- à-dilt
moitié de vers : ce mot cil Grec. • • WISTI-
: Alexandrin.
En Latin on donne auffi le nom
labe après laquelle eft le repos, 6c cette û ilabe eâ
870
CES
CET
la première du pié fuivant :
Arma varumque cano . . Troji qui primus ab oris.
La fyllabe no eft la céfure t & commence le troifieme
pié.
En François la céfure ou repos eft mal placée en-
tre certains mots qui doivent être dits tout de fui-
te , & qui font enfemble un fens inféparable , ielon
la manière ordinaire de parler & de lire ; tels font la
prépofition & fon complément-: ainfi le vers luivant
eft défectueux.
Adieu , je m en vais à . . . Paris pour mes affaires.
Il en eft de même du verbe eft qui joint l'attri-
but & le fujet , comme dans ce vers.
On fait que la chair eft . . .fragile quelquefois.
Par la même raifon , on ne doit jamais difpofer
le fubftantif & l'adjectif de façon que l'un finiffe le
premier hémiftiche , 8c que l'autre commence le le-
cond , comme dans ce vers.
Iris dont la beauté . . . charmante nous attire.
Cependant fi le fubftantif faifoit le repos du pre-
mier hémiftiche , & qu'il rut fuivi de deux adjedtits
■qui achevaffént le fens , le vers feroit bon , comme :
Il eft une ignorance . . . & fainte &falutaire. Sacy.
Ce qui fait voir qu'en toutes ces occafions la gran-
de règle , c'elt de confulter l'oreille , Se de s'en rap-
porter à fon jugement.
Dans les grands vers , c'eft-à-dire dans ceux de
douze fyllabes , la céfure doit être après la fixieme
fyllabe.
Jeune & vaillant héros . . . dont la haute fageffe.
1 13456 7 8 9 10 11 12
Obfervez que cette fixieme fyllabe doit être une
fyllabe pleine ; qu'ainfi le repos ne peut le faire fur
une fyllabe qui finiroit par un e muet : il faut alors
que cet e muet fe trouve à la feptieme fyllabe , &
s'élide avec le mot qui le fuit.
Et qui feul fans miniflre . . . à l'exemple des dieux
123456 7
Soutiens tout par toi-même. . . & vois tout par tes jeux,
113456 7
Dans les vers de dix fyllabes , la cêfure doit être
après la quatrième fyllabe.
Ce monde-ci . . . n'eft qu'une œuvre comique
1 , 2 3 4
Où chacun fait , . . fes rôles différens. Roufleau.
1 2 3 4
Il n'y a point de céfure preferite pour les vers de
huit fyllabes , ni pour ceux de fept ; cependant on
peut obferver que ces fortes de vers font bien plus
harmonieux quand il y a une céfure après la troifie-
me ou la quatrième fyllabe dans les vers de huit fyl-
labes , & après la troifieme dans ceux de fept.
Au finir . . . de ta main puiftante ,
Grand Dieu que l'homme étoit heureux !
La vérité toujours préfente
1 } 34
Le livroit a fes premiers vœux.
1 2 3
Voici des exemples de vers de fept fyllabes.
Qu'on doit plaindre une bergère
} • 2, , 3
Si facile à s'allarmer :
1 2 3
Pourquoi du plaiflr d'aimer
Faut-il fe faire une affaire ?
Quels bergers . . . en font autant
Dans l'ingrat. . .fiecle oit nousfbmm.es ?
Achante qu'elle aime tant
Eft peut-être un inconftant
Comme tous les autres hommes. Deshoulieres.
C'eft ce que l'on pourra encore obferver dans U
première fable de M. de la Fontaine.
La cigale . . . ayant chanté
Tout fêté ,
Se trouva . . . fort dépourvue.
Pas un feul . . . petit morceau
De mouche ou . . . de vermiffeau.
Elle alla . . . crier famine
Che^ la fourmi fa voiflne ,
La priant . . . de lui prêter
Quelque grain . . .pourfubfïfter, &C.
Au refte je ne parle ici que des vers de douze , de
dix , de huit , & de fept fyllabes ; les autres font
moins harmonieux , & n'entrent guère que dans le
chant ou dans des pièces de caprice. ( F)
CETACÉE , adj. ( Hift. nat. Ichth. ) on donne ce
nom aux poiffons qui refpirent par le moyen du pou-
mon , qui s'accouplent , qui conçoivent , qui mettent
bas leurs petits , & qui les alaitent comme les ani-
maux quadrupèdes. Tels font le dauphin , le veau-
marin , la baleine, &c. Willughby, Hift.pifc. Voye^
Poisson.
CETERAC,f. m. afplenium , (Hift. nat. bot. )
genre de plante dont le cara&ere eft déterminé par
la figure des feuilles qui font découpées en ondes.
Tournefort , Inft. rei herb. Voyc{ PLANTE. (/)
* Le ceterac adoucit les humeurs acres par ion mu-
cilage ; tonifie les parties par fon aftri&ion , & réta-
blit le ton des vifeeres rélâchés ; c'eft pourquoi il paf-
fe pour pectoral & apéritif. 11 eft bon dans la toux ,
l'allhme, la jaunifle, le gonflement de rate, la fup-
preflion des urines ; macéré dans le vin , ou bouilli
toit dans de l'eau , foit dans du bouillon. Mathiol dit
que la pouffiere dorée lur le revers de fes feuilles,
prife avec le fuccin blanc réduit en farine, dans le
lue de pourpier ou de plantain , foulage dans la go-
norrhée. On fait fréquemment ufage de cette plante
avec les autres capillaires, dans les décodions & les
bouillons.
CETINA, ( Géograph. ) rivière de Dalmatie , qui
prend fa fource dans laËofnie, & le jette dans le
golfe de Venife.
CETONA, (Géog.) ville d'Italie, dans le' territoi-
re de Sienne.
* CETRA, (Hift. anc.) c'éto'it le nom qu'on donnoit
à une efpece de petits boucliers ronds de cuir, dont
les Efpagnols, & les anciens Africains, le fervoient
à la guerre. On employoit pour les faire la peau de
l'animal appelle orix, ou luivant d'autres celle de
l'éléphant ; ces boucliers étoient fort légers ; ils
étoient d'ufage tant dans la cavalerie que dans l'in-
fanterie.
CETRARO, (Géog. ) petite rivière d'Italie, au
royaume de Napl'es, dans la Calabre citérieure.
CEU, (Géog.) ville de la Chine, dans la provin-
ce de Chanton ou Xantung.
CEVA, (Géog.) ville forte d'Italie, dans le Pié-
mont, au comté d'Alti, fur le Tanaro. Long. zà.
40. lat. 44. zo.
* CEVADILLA, (Hift. nat.) les Efpagnols don-
nent ce nom à une efpece de graine qui croît en
Amérique , dans la nouvelle Elpagne ; elle reffemble
beaucoup à de l'orge , hormis qu'elle n'elt que de la
grandeur de la graine de lin. La cevadilla vient fur un
épi qui eit tout femblable à celui de l'orge ; on la re-
garde comme très-échauffante & cauftique , aulîi ne
la prend-t-on point intérieurement; on l'applique
extérieurement fur les plaies & ulcères gangreneux,'
C E U
afin de ronger & brûler les chairs mortes. On dît qu'el-
le produit cet effet auffi bien que feroit du fublimé.
CEURAWATH,f. m. (Hifi. mod.) nom d'une
feue de Benjans , dans les Indes , fi infatués de l'opi-
nion de la métempfycofe , qu'ils refpe&ent les moin-
dres infe&es. Leurs bramines ou prêtres ont toujours
la bouche couverte d'un voile, de peur d'avaler quel-
que mouche ; &c ils ont également loin en allumant
de la chandelle ou du feu dans leurs maifons, que
nul papillon ou moucheron ne vienne s'y brûler ,
& de faire bouillir l'eau avant que de la boire , de
peur quelle ne contienne quelques infe&es. Du
refte il n'admettent ni peines ni recompenfes après
cette vie, dont les évenemens, félon eux, ne dé-
pendent point de Dieu. Ils brûlent les corps des vieil-
lards , & enterrent ceux des enfans décédés au-def-
fous de trois ans. Leurs veuves ne font point obli-
gées de fe brûler avec leurs maris , fuivant l'ufage du
pays, pourvu qu'elles gardent une viduité perpé-
tuelle. Tous ceux qui font profeffion des fentimens de
cette fette , peuvent être admis à la prêtrife , même
les femmes , pourvu qu'elles ayent atteint l'âge de
vingt ans; car pour les hommes on les y reçoit dès
celui de neuf. Ceux qui font ainfi engagés dans le fa-
cerdoce , doivent faire vœu de chafteté , porter un
C E Z
871
haht particulier ,& pratiquer des auftérités incroya-
bles. Tous les autres docteurs Indiens ont beaucoup
de mépris & d'avcrfion pour cette feue , qui ne de-
meure pas apparemment en refte avec eux , & dé-
fendent à leurs auditeurs d'avoir communication avec
les Ceurawath, qui ne donnent pas fans doute à ceux
qui les écoutent, bonne opinion du commerce de
leurs adverfaires. Les mêmes pallions produilent par-
tout les mêmes effets. (G)
CEUTA, (Géog) ville forte d'Afrique, fur la côte
de Barbarie, au royaume de Fez, dans la province
de Hasbate, appartenante aux Efpagnols ; elle a foû-
tenu un fiége déplus de cinquante ans contre les Mau-
res. Long. iy. 10. lat. 33.36.
CEZAR, {Géog.) rivière de l'Amérique méridio-
nale, dans le gouvernement de Sainte Marthe, qui
fe perd clans celle de Sainte Madeleine : on la nom-
me auffi Pompa tas.
CEZE , (la) (Géog.') petite rivière de France en
Languedoc , qui roule des paillettes d'or avec lbn
fable.
CEZIMBRA, (Géog.) ville & port de Portugal ,
dans la province d'Eftramadure , à l'embouchure de
la rivière de Zedaon,
& 1 n dv Tome Second.
£3* ^n Couvera à la fin du dernier Volume le Privilège du Roi , & les Approbations de la Théologie , de la Philofopliie
de la Jurifprudence , de la Médecine, & des autres parties de cet Ouvrage.
De l'Imprimerie de Le Breton, Imprimeur ordinaire DU ROY.
NOMS DES AUTEURS,
Avec la marque de leurs articles.
NOUS avons déjà dit , & nous !e répétons encore ici ,
que chaque Auteur eft garant de l'article qui porte ion
nom , ou fa marque.
Les articles dont l'Auteur n'eft ni nommé ni déligné , font
de M. Diderot , ou de plutîeurs Auteurs qui en ont fourni
les matériaux , ou de différentes perlonnes qui n'ont pas vou-
lu être connues , ou qui font nommées dans le Dilcours Pré-
liminaire.
Voici maintenant les autres marques.
* au commencement de l'article, M. D i D E R ot.
, N , , r , „ . , Ç la Perfonne dont il eft parlé
(-) a la fin de 1 article , \ dans r Avertiffement.
(B) M. DE Cahusac,
(O M. l'Abbé Pestré.
(D) M. Gou ssier.
(E) M. l'Abbé DE LA CHAPEIIKi
(jFJ M. du M a r s a i s.
(G) M. l'Abbé Mail et.
H) M. Toussaint.
/ ) M. Daubentos.
K) M. D'A RGEN V IL LE,
L) M. T A R I N.
M) M. M A L O U I N.
N) M. DE VandenessE.
O) M. d'Alembert.
P) M. BlONDEl.
Q) M. le Blond.
R) M. L A N D O I S.
5 ) M. ROUSSEAU,^ Genève.
T) M. le Roy.
V) M. É i d o u s.
X) M. l'Abbé Yv on.
Y) M. L d u I s.
Z) M. B E L L I N.
ERRATA pour le fécond Volume.
A L'article BAGUETTE DIVINATOIRE , ligne anlcpenul-
**■ tieme , au lieu de Rhabdomancie , lifii Abaris.
A [article BALLET , ligne f. à compter d'en-bas y au lieu de
en Grèce , life^ à Rome.
A (article BARRIERE , ligne tt. au lieu de BARRIERE ,
Traité de la Politique , lifeir Barrière ( Traité de la ) en
Politique.
L'article Bec-DE-CoRBIN ejl défectueux, en ce que les gen-
tilshommes de ce nom ne fubfiftent plus.
A l'article BOURRE ( rouge de ) ligne ;. au lieu de acide ,
iifii alkali.
A l'article BOUSSOLE , à la fin , ajoûteç , qui les a tirés
du fpe&acle de la nature , tom. 4.
A l'article BRACIIYGRAPHIE , ligne dernière , au lieu de
Mabillon , life\ Manillon.
A l'article BROC , ligne 2. au lieu de Mazoire , life[ Ma-
zovie.
A l'article C A D R A N , pag. s 1 8 . col. I . ligne dernière , ail lieu
de BlON , ///è^Bion, dtfcription des infirumens de Mathématique.
A l'article C , au lieu de Canilii , lijèr Caninii ; il faut de mê-
me mettre Caninii pour Caniùi dans un endroit de l'article Cas.
A l'article CABALE , vers la fin , immédiatement avant la let-
tre ( C ) ajoûtei ; cet article eft extrait de l'hiftoire des Juifs
de Bafnage.
A l'article CAMERLINGUE , ligne antépénultième , au lieu
de Alexandre t H/é{ Annibal ; ce Cardinal vient de mourir.
M. Daubenton nous a fait tenir Y Errata fuivant des articles
d'Hiftoire naturelle , qu'il n'a pu pouffer que jufqu'à la page
612 j parce que l'on n'a pu lui envoyer le refte des feuilles ;
on en donnera la fuite dans le troiliéme Volume.
Pa<>e 23 col. 1 Ug. 63 côtes , fi/êj côtés.
6 $ au commencement de la ligne , ajoute^.
la queue.
73 2 69 Borbata , Ufat Barbota.
73 gluant , life[ eft gluant.
74 1 7 au lote , lijesr à la lote.
181 2 16 les corps , lifei leur corps.
16 M. Barre , life{ M. Barrere.
r 186 1 « la chair , lifii la couleur de chair.
187 2 46 Becharn , fi/êç Becharu.
196 z 48 courvrent , lifiç courrent.
207 1 55 56 palette , life patelle.
294 2 23 au-deflus , life^ au-deflbus.
367 z 61 a , lifez y a.
369 1 39 de même , /i/ëf de même que.
387 2 J2 le deffbus du bec , & , lijei & le
deflbus du bec.
4 ? t 2 26 côtes , li/eç côtés.
473 1 43 dans , lijeç que dans.
471 ï 1 5 & que les , fi/êç les.
503 1 29 lix pouces , life^ (ix pies.
586 2 2 il a, lije\ il y a.
622 2 10 des,/i/f{de.
Pag. 850 , première col. ligne 40 , 0 eft plus facile , &C li/ei
il eft auffi.
Faute cTimpreJfion confidérable , omlfe dans /'Errata du premier Volume,
Page 36S. col. 2. ligne 41. ne peuvent , Uft\ ne veulent.
CE Volume a un peu moins de feuilles qu'on n'en a promis , pour que la lettre CH ne foit point coupée;
Quelqu'un des Volumes fuivans en aura davantage.
Il eft facile de féparer dans ce Volume la lettre B de la lettre C ; on en ufera de même dans tous le?
autres.
Les Libraires ont fait faire des doubles de chaque Dcffein , pour ne point retarder la Gravure,
«^Twersitas
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