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Full text of "Essai sur le Porhoët: le comté, sa capitale, ses seigneurs"

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ESSAI 



SUR 



LE PORHOET 

LE COMTÉ — SA CAPITALE 
SES SEIGNEURS 

ACCOMPAONË D'UNE CARTE 



PAR 



Lb V* Hervé DU HALGOUET 







PARIS (vr) 

LIBRAIRIE ANCIENNE, HONORÉ CHAMPION, ÉDITEUR 
5, Quai Malaquais, 5 



10O6 



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ESSAI 



SUR 



LE PORHOET 

LE COMTÉ — SA CAPITALE 
SES SEIGNEURS 

JA.CCOMPAONË D'UNE CARTE 



PAR 



Lb V" Hbrvé du HALGOUET 



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PARIS (vr) 

LIBRAIRIE ANCIENNE, HONORÉ CHAMPION, ÉDITEUR 
5, Quai Malaqu aïs, 5 



1906 



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GC^ SUR LA BRETAGNE & LES PATS CELTIQUES 

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ESSAI SUR LE PORHOET 



ESSAI 



SUR 



LE PORHOET 

LE COMTÉ — SA CAPITALE 
SES SEIGNEURS 

ACCOMPAONÊ D'UNE CARTE 



PAR 

Lk V'« Hervé DU HALGOUET. 







PAKIS (VP) 

LIBRAIRIE ANCIENNE, HONORÉ CHAMPION, ÉDITEUR 
5, Quai Malaquais, 5 

10O6 



1 • . , V ■■.:k 

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AVANT- PROPOS 



En réunissant différents documents sur le Porhoët, 
nous nous sommes efforcés de montrer la place que 
tint en Bretagne cette ancienne Baronnie et le rôle 
joué par ses seigneurs, qui occupèrent de tous temps 
un rang supérieur dans la hiérarchie féodale de la 
province^ 

Nous avons cru intéressaiit de faire connaître 
d'abord ce que fut le vaste territoire qui donna so?i 
nom au Comtés ainsi qu'à un doyenné et à un archi* 
diaconé ; on se rendra mieux compte de Pimportance 
> originelle de ce grand fie f qui^ par suite de multiples 
- démembrements y se réduisit finalement à une seule 
châtelleine, celle de Josselin, 

Du culte que nous devons au sol natal^ Fétude de 
son histoire n'est pas une des moindres obligations ; 
nous devons moralement nous grandir et nous fortifier 

Jdes défaillances comme des gloires nationales, leurs 
leçons seules maintiendront intactes en nous les tra- 



2 AVANT- PROPOS. 

ditions de la race. Réagissons contre V oubli; la vie 
n'est pas toute dans le présent^ elle est dans le passée 
elle en dépend fatalement et y a ses plus profondes 
racines. 

Cependant les écrits, que le temps efface, ne suf- 
fisent pas à commémorer nos gloires ; la pierre et 
l'airain transmettent plus sûrement le souvenir aux 
générations futures. 

Pourquoi ne verrions-nous pas un jour Guéthenoç^ 
premier vicomte de Porhoët et fondateur de Josselin, 
revivre parmi nous ? 

De la promenade publique qui domine la ville, 
non seulement il verrait à ses pieds la forteresse dont 
il jeta les bases et le sanctuaire de la Vierge qui 
l'attira en ce lieu, mais encore son regard pourrait 
embrasser le vaste horizon de son ancien « royaume ». 

Dans cette courte étude^ nous n'avoiu eu d'autre 
règle que la chronologie^ dautre guide que les faits 
eux-mêmes. 

Il est inutile de citer ici nos sources; nous les avons 
énoncées en notes, La Bibliothèque Nationale nous 
a fourni les principaux matériaux^ et les archives 
municipales de la ville de Josselin nous ont particu- 
lièrement éclairés sur f époque révolutionnaire. 

A Trégranteur, le 15 mars 1906. 



ESSAI SUR LE PORHOET 

LE COMTÉ — SA CAPITALE — SES SEIGNEURS 



CHAPITRE PREMIER 

Les Origines et lk Pagus trans sylvam. — Le Pou- 
trocoét (ix* et x" siècles). — porho'êt juveignerie de 
Bretagne. — Fondation de Josselin. — Les premiers 
Seigneurs; de Guéthenoc a ëudon II (1008-1142). 



Aux premiers siècles de notre ère, le centre de 
la péninsule Armoricaine était occupé par de vastes 
forêts, coupées de terrains stériles, où Thonmie 
avait peine à trouver la substance nécessaire à sa 
misérable existence. 

Cette grande région centrale prit corps, sous le 
nom de Poutrécoët, et forma une division provin- 
ciale, ou Comté, qui s'étendait de TEst à TOuest sur 
une longueur de 25 à 30 lieues, depuis Guichen et 
Montfort jusqu'aux environs de Rostrenen, et du 



4 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Nord au Sud sur une largeur d'une douzaine de 
lieues (vers TOuest) entre Corlai et Camors, et 
même d'une quinzaine (vers TEst) de Miniac-sous- 
Bécherel à Saint-Ganton. Cet ensemble offrait diffé- 
rents aspects. La partie orientale, plus peuplée, 
avait dès le vr siècle des monastères, entre autres 
Saint'Méen et Penpont ; au ix® siècle, le Cartulaire 
de Redon nous y montre un certain nombre de 
plous (1) ; les rois de Bretagne, Judicaël, Erispoë, 
Salomon, y ont des résidences à Gaël, à Talensac^ 
à Plélan^ à Campel^ etc. Mais passé Tloërmel, dans 
toute la partie occidentale, le désert dominait. 

Compris dans les limites que nous venons d'indi- 
quer, le Poutrécoët faisait partie du domaine des 
anciens rois de Bretagne et fut possédé par leurs 
descendants jusqu'au ix*» siècle. Roiandrech, fille 
de Louvenan, issue de saint Judicaël, transporta 
en l'an 809 au roi Salomon tout ce qu'elle avait 
dans les paroisses de Miniac, Moréac et Maëlcat. 
Cette princesse avait épousé Combrit, dont elle avait 
eu un fils et deux filles. Ayant perdu son mari et 
son fils, elle se mit sous la protection du roi Salomon, 
lui légua tous les biens qu'elle avait dans le pays 
de Porhoët, avec les successions qui devaient lui 

(1) Plou en breton et plebs en latin, est à la fois la paroisse ecclé- 
Mastiqae et la tribu. 



CHAPITRE PREMIER. 5 

échoir, et le pria de regarder à Tavenir ses deux 
filles comme ses propres sœurs. En vertu de cette 
substitution, tous les biens de Roiandrech, situés 
en Porhoët et ailleurs, furent réunis au domaine de 
Salomon. Après sa mort, en 874, les comtes Gurwan 
et Pasqwiten partagèrent entre eux le royaume de 
Bretagne ; la partie septentrionale, dont Rennes 
était la capitale, échut à Gurwan et la partie méri- 
dionale, avec Vannes, tomba dans le partage de 
Pasqwiten. 

A qui allait passer le Poutrécoët ? Les opinions, 
sur cette question, ne s'accordent pas. D'Argentré 
nous indique Alain le Grand, successeur de son 
frère Pasqwiten, comme le premier seigneur attitré 
du Porhoët et le présente à l'histoire comme comte 
de Broërech (Vannes) et de Porhoët; tandis que 
Dom Morice, avec Du Paz, Laboureur, Gallet, fait 
remonter la lignée des Porhoët à Juthaël, fils pré- 
sumé de Conan le Tors, comte de Rennes. Cette 
contradiction s'explique par ce fait seul que l'un 
rattache le Poutrécoët au comté de Broërech ou de 
Vannes, l'autre au comté de Rennes. L'auteur de 
la Géographie féodale de la Bretagne fixe la vérité 
sur ce point obscur, en se ralliant à l'opinion de 
Dom Morice. Tout le Poutrécoët, après la mort de 
Salomon, demeura dans la maison de Rennes. 



6 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Les ravages des Normands, au x^ siècle, avaient 
nivelé la société comme le sol. L'occupation pro- 
longée du pays par ces pirates amena la ruine et 
le bouleversement de toutes les institutions anciennes. 
Avec Alain Barbe -Torte, la Bretagne se ressaisit et 
retrouva Tancienne division de ses Comtés. On 
revit, non seulement ceux de Rennes, Nantes, mais 
encore le Broërech, la Cornouaille et le Poher, 
l'antique Domnonée représentée par les comtés 
de Treguer et de Penthièvre, le Léon et le Pou- 
trécoët, qui bientôt sera appelé Porhoët. Cet 
immense territoire dut, à cette époque, subir une 
transformation ; l'étendue en rendait l'administration 
trop difficile. Dans la partie orientale, moins vaste, 
le comte de Rennes tailla trois seigneuries : Gaël, 
au Nord; Lohéac, au Sud-Est; Malestroit, au Sud- 
Ouest (1), et, entre les trois, il se réserva un beau 
domaine dont le chef-lieu était Ploërmel. Quant à la 
partie occidentale, où il n'y avait point à ménager le 

(1) Gaël parait vers -le milieu du xi« siècle; Lohéac avant 
1008; Malestroit seulement en 1119, mais doit néanmoins remonter 
au siècle précédent. — D. M., Preuves. 

La baronnie de Lohéac embrassait dans Torigine, très probablement 
deux chfttellenies qui plus tard s'en séparèrent, Bréal et Maure. La 
baronnie de Gaël, très certainement, dans sa constitution primitive, 
englobait d'un seul tenant tout le territoire partagé plus tard entre 
les seigneuries distinctes de Gaël, de Montauban, de Montfort et de 
Brécilien : le château de Montfort, fondé en Tan 1091, devint depuis 
lors le chef-lieu de ce vaste fief. 



CHAPITRE PREMIER. 7 

terrain, on était trop heureux de trouver quelqu'un 
pour prendre charge de gouverner, de défendre, de 
défricher, de repeupler cette solitude. Aussi n'en 
fit-on qu'un fief décoré exclusivement du titre de 
Comté ou Vicomte de Porhoët (on trouve l'un et 
l'autre), fief important (1) où s'épanouirent plus 
tard cent quarante paroisses et, dès avant 1008, 
concédé à un certain Guéthenoc, vicomte de Cha- 
teau-Thro, le premier dont les titres nous sont 
fournis par des actes authentiques, considéré par 
certains comme fils de Juthaël. 

Bien qu'il y ait contestation à ce sujet, nous 
n'hésiterons pas à affirmer que le fief de Porhoët 
fut un apanage du Comté de Rennes. Du Paz n'a point 
écrit les raisons qui lui faisaient regarder Juthaël 
comme premier Comte de Porhoët, mais ce pays 
ayant fait partie du comté de Rennes depuis l'an 874 
jusqu'à la fin du x* siècle, il ne peut en avoir été dé- 
membré que pour une inféodation ou par un partage. 
L'attention que Conan le Tors mit dès le commen- 
cement de son règne à recueillir toutes les portions du 



(1) N*a-t-il pas été qualifié même de royaume (I) 

Dans la charte de fondation de Sainte-Croix de Josselin il est dit 
que les bienfaits de Josselin et de son père envers le monastère de 
Redon sont les causes de la prospérité de leur « royaume >< : 
Regnttm ejus (Quetenoci). . . et regnum suum (Gosselini),.. fuisse 
muUiplicatum,., amplificatum, elc. 



8 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Domaine, qui avaient été usurpées par les seigneurs 
particuliers et même par les enfants naturels d'Alain 
Barbe-Torte, ne permet pas de croire quïl ait 
inféodé à un simple chevalier de sa cour une terre 
aussi considérable que Tétait alors le comté de 
Porhoët, tandis qu'il avait des frères et des enfants (1) 
à doter. Il est encore moins croyable qu'il ait permis 
& ce chevalier de prendre le titre de comte qui 
n'appartenait qu'aux souverains du pays et à leurs 
puînés. Le Poutrécoët n'a donc été démembré du 
comté de Rennes qu'en faveur d un cadet de cette 
maison. 

Le raisonnement précédent se trouve confirmé 
d'une façon absolue par les titres de vicomte de 
Rennes et de comte de Bretagne que les seigneurs 
de Porhoët ont constamment portés. 

Josselin 1", en effet, est qualifié de vicomte de 
Rennes dans la confirmation d'une donation à 
l'abbaye de Redon, en 1048, et plus tard dans une 
donation faite à l'abbaye de Marmoutiers, le jour 
que Conan II fut proclamé comte de Bretagne (2). 

(1) Conan le Tors, lorsqu'il mourut en 992, laissa plusieurs enfants, 
entre autres : Geoffroi, qui lui succéda; Juthaël, comte du Porhoët, 
d'après du Paz; Judicaël, évéque de Vannes, et Catuallon, abbé de 
Redon. 

(2; Facta sunt hxc in Rhedonensi civitate coram Conano Comité^ 
in die qud Cornes faclus est faventibus Goscelino Vicecomile RhC" 
donix et Roberto Vitriensium custode. Ces deux seigneurs étaient 



KXIA 




Cm4re^cci J^ Forfw^t~, 



Le Sceau de Porhobt 
(Tiré de Doni Morice). 



CHAPITRE PHEMIER. 9 

Ses successeurs portent également ce titre, comme 
l'attestent différentes pièces, en particulier le sceau 
d'Eudon III, de 1231, sur lequel on lit : Endo filitis 
Comitis Vicomes Rhedonennis, Ce sceau, qu'on 
retrouve aussi sur un autre acte de 1227, d'après 
M. Piéderrière, est très caractéristique. Sa repro-. 
duction figure dans le premier tome des Preuves de 
Dom Morice ; au dessous du sceau personnel du 
comte, se trouve le contre-scel de Porhoët chargé 
des plumes de paon traditionnelles de la maison 
de Rennes (au nombre de trois, suj>erposées deux 
et une). 

Mais encore étaient-ils Comtes de Bretagne, c'est- 
à-dire puînés de cette maison. Sans tenir compte 
des titres d'Eudon II qui pourraient paraître sus- 
pects par le fait des prétentions qu'il eut à la succes- 
sion de Conan 111, avant lui, Josselin est appelé 

venus à Rennes pcui* le couronnement du jeune Conan qui étail le 
chef de leur maison. Le consentement de Josselin n^était pas néces- 
saire pour valider cette donation ; mais il Tétait pour celle qu'Hervé 
de Martigné fit quelque temps après à la même abbaye, c^est pour- 
quoi le notaire qui en a passé Tacte ajoute : Hxc concessit Herveus 
assentientibuê Hliis et filiabus suis... ntc non et Goscelino Rhedo- 
nensium Vicecomite, ex cujus beneficio hxo tenebat. Ces paroles 
sont remarquables et prouvent deux choses : la première, que le 
vassal ne pouvait disposer de ses fonds en faveur des Eglises sans 
le consentement de son seigneur ; la seconde, que Josselin n était pas 
qu'un simple officier des comtes de Rennes, tels que sont les vicomtes 
eo Normandie, mais un seigneur propriétaire de la vicomte de 
Rennes et un apanager de cette maison. — (D. Morice, Hist.B.^i.X.) 



10 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Vicomte de Bretagne dans une charte de Geoffroy 
Martel, comte d'Anjou, en faveur de saint Nicolas 
d'Angers (1). Le frère de ce même Eudon, Alain de 
Porhoët, est dit Comte de Bretagne dans une charte 
du prieuré de Suaweffey, en Angleterre, de même 
qu'Eudon III dans une lettre écrite par Charles de 
Valois, comte d'Alençon (2). 

Il serait superflu d'ajouter ici d'autres preuves ; 
■?5elles-ci nous paraissent suffisantes pour montrer 
que les comtes de Porhoët étaient issus des comtes 
de Rennes qui régnèrent sur la Bretagne pendant 
la durée d'un siècle. Avec juste raison, ils s'enor- 
gueillirent de cette illustre origine et, comme nous 
le verrons, la qualité de premier prince du sang de 
Bretagne, reconnue aux Rohan, leur valut la pré- 
séance parmi les autres Barons du Duché et la 
présidence dès les premiers temps des Etats. 

Le Porhoët n'est donc point un nom de château (3) 



(1) G. Dbsbois. 

(2) DoM MoRicE, H. B., t. I. 

(3) D*après Gayot Delandre, Tétymologie la plus sérieuse décom- 
pose le nom de Porhoët en deux mots celtiques, Porlh (cour, château) 
et coët (bois, forêt), et le traduit par : Ghftteau au milieu des bois. 
Ge château fort, qu'il présume s'être élevé dans la paroisse de la 
Trinité-Porhoét et qui aurait été le berceau de la famille de ce nom, 
est malheureusement absolument imaffinair**. Aucun texte n'en fait 
mention ni même permet cette supposition. On trouve : [villa de) 
Trinilate, en 1251, ce qui prouve que le nom de Porhoët n*est qu'un 
déterminatif de la Trinité. 



CHAPITRE PREMIER. 11 

ni de terre particulière ; mais celui d'un pays con- 
sidérable, situé principalement au diocèse de Saint- 
Halo, couvert de forêts et de bois qui s'éclaircirent 
peu à peu sous la bâche des premières peuplades 
bretonnes venues occuper le centre armoricain. 

Cette région centrale fut appelée par les Venètes : 
Pagus trans sylvam^ qu'on traduisit communément 
en breton, Pou tre coet (1). « Peut-être, tout d'abord, 
avant de porter ce nom que les Bretons lui don- 
nèrent, en avait-il eu déjà un autre, car, dans un 
récit relatif à des faits du vi^ siècle, il est ainsi 
désigné : Inpago Placato, qui Trausilva dicebatur (2), 
le pagus Tranquille (tranquille par excellence, à 
cause de sa profonde solitude), qu'on appelait aussi 
Tro-coët (à travers bois). Peut-être Pagus Placatus 
était-il son premier nom avant les Bretons ; simple 
conjecture. » (3) 

Mais cbercbons la signification exacte de Pagus 
tram sylvam. Certains auteurs traduisent cette expres- 
sion par « Pays d'au-delà des bois », ce qu'ils expli- 
quent par la situation même de ce pays par rapport à 



(1) Pagus trans sylvam vel Poutrecoël,— (Cart. Red. 833).— Très 
eiactement, pagus se traduisait en breton par Prou, par altération, 
]')' disparut. 

(2) Vila S. Mevennif document très sérieux dont la rédaction est 
du xi« s; B. N. 

(3) La Bo&DRRie, HisL Bret., L. I. 



12 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Vannes, dont il était séparé par une longue chaîne 
de bois (D. M.). Cependant ici le sens précis de. 
trans ne paraît pas être « au-delà », mais « à tra- 
vers » (1). L'appellation signifierait donc : le Pays 
à travers bois. Pays sous bois, et justifierait ainsi 
Texistence ancienne de Timmense forêt centrale, la 
Brecilien primitive, dont les restes subsistent encore 
dans les forêts de Paimpont, Lanouée, Lorges, 
Loudéac, Quenécan, Camors, Tredion... etc. (2), 
qui s'étendait, non pas seulement sur la limite sud, 
mais sur toute Tétendue du territoire central. M. de 
la Borderie se prononce catégoriquement pour cette 
dernière interprétation : « Au xi* siècle, nous dit-il, 
la grande forêt avait été défrichée en partie, surtout 
vers TEst, et de ce côté se trouvent les plous 
(paroisses bretonnes) mentionnés dans le Carlulaire 
de Redon comme sis dans le « Pou tro coët ». 

Que cette traduction bretonne, qui pourrait au 
premier abord être considérée comme simple 
variante ne passe pas inaperçue ! On la retrouve 
dans les plus anciens textes, et dans la partie du 



(1) Trans est souvent employé dans ce dernier sens en latin et en 
français. 

(2) L'énorme forêt centrale se serait appelée toute entière Breceliea^ 
ou Brecilien. Ce nom, encore maintenant, a été relevé par la Borderie 
dans différents points extrêmes où s'étendait cette forêt. Les poètes 
du moyen âge en firent Brocéliente ou Broceliande. 



CHAPITRE PREMIER. 13 

Cartulaire de Redon relative au ix* siècle le même 
historien a relevé lui-même huit ou dix fois Pou/ro- 
coët contre une fois Pou/r^coet. Elle est intention- 
nelle et à n'en pas douter l'expression exacte de 
Pagus trans sylvam. En effet, dans une démonstra- 
tion philologique, M. Loth, le savant doyen de la 
Faculté des Lettres de Rennes, prouve de façon 
certaine que la forme ancienne du mot Porhoët a été 
Poutroscoët, la préposition trawo, tros, en gallois, 
répondant au breton actuel irexta^ à travers (1). 

PoHtrocoët devrait donc être, dans Tusage, subs- 
titué à Poutrecoët. 

La signification de Pagus prête moins ici à la 
discussion (2). Le Pagus ^ primitivement division de 
la Civitas, ne fut guère appliqué en Bretagne, à 
partir du v** siècle, qu'à une portion du pays souvent 
indéterminée et d'étendue variable. Si l'on trouve 
cette expression prise pour désigner la souveraineté 
d'un seigneur, comme dans pagus Gueroci^ pays de 
Guerech (chef du Vannetais occidental au vi« siècle), 
plus ordinairement, pagus est une dénomination 
topographique qui n'a qu'un sens vrai, celui de pays : 
Pagus Reuvisit^ pays de Rhuis ; pagus Ratensis^ pays 
de Retz. 

;l) Revue CeWque, t. XVII, 1896. 

(2) Bien qu'en général le sens en soit très variable. 



14 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Plus tard, Tram-Sylvam devient nom propre (1) 
(La Transylvanie); ce n'est déjà plus alors une 
région quelconque, c'est la division provinciale qui 
deviendra Comté. Poutrocoët ou Poutrecoët, ordi- 
nairement adopté au V siècle, a été adouci peu 
à peu, comme beaucoup d'autres noms bretons, et 
a dégénéré successivement dans ceux de Potrocoët, 
Porcoët, Porhoët (2), qui subsiste définitivement 
seul au XIII* siècle. Nous nous en tiendrons à cette 
orthographe consacrée par l'histoire. 

Le nom de Porhoët se conserva pendant tout le 
moyen Age, appliqué à trois circonscriptions impor- 
tantes formées sur le territoire même que la forêt 
avait couverte. L'une de ces circonscriptions était 
féodale, les deux autres ecclésiastiques. 

Nous avons déjà vu le comte de Rennes constituer 
la vicomte de Porhoët et tailler dans la partie orien- 
tale de l'ancien Poutrocoët divers fiefs. Ceux-ci : Gaëi, 
Montfort, Lohéac, Maure, Malestroit, Ploërmel, et tout 
le nord de la vicomte formèrent la partie méridionale 
de révêchéd'Alethquifutl'archidiaconé de Porhoët, 



(1) Facium est hoc in pago Trans-$ylvam in aula qux vocaiur 
campe — D. M., Pr,, 1. 1, 304. 

(2) Si l'on veut suivre Taltération complète, Ton remarquera encore 
Porrehoït, Podrohoït, Porehet, Poreeth, Porrehodlum, Porzenquoêt, 
Pourhouet, Porhoit, qui du reste sont employés souvent de pair avec 
Porhoët. 



CHAPITRE PREMIER. 15 

composé lui-même de quatre doyennés ecclésias- 
tiques : Lanouée, Montfort, Beignon, Lohéac (le 
premier seul faisait partie de la vicomte de Porhoët). 
La troisième circonscription était le doyenné de 
Porhoët du diocèse de Vannes, borné au nord par 
rOut (Oust), à l'ouest par le Blavet, au sud par la 
Claie et le Loch. A part cinq petites trêves ou 
paroisses, ce doyenné était entièrement compris 
dans le territoire de la vicomte de Rohan ou dans 
celui de la vicomte de Porhoët. 

Guéthenoc apparaît à l'histoire vers 1008 comme 
vicomte de Porhoët. Le prince voulant édifier un 
château digne du nom qu'il portait et sans doute 
aussi attiré par les vertus d'une statue de la Vierge, 
qui provoquait déjà la vénération des populations 
environnantes, résolut d'abandonner la paroisse de 
Guilliers, où il habitait la modeste demeure de 
ChAteau-Thro (1), pour descendre un peu au sud, 

(1)M. de ]a Borderie qualifie un peu irrévérencieusement Château - 
Thro de c Méchante bicoque ». 

M. Piéderrière écrit en 1872 que les ruines de Ghàteau-Thro sub- 
sistent encore, aujourd'hui on ne voit que les traces des douves. 

Le château s'élevait sur un promontoire qui s'avançait dans un 
étang. Assis sur un roc de 10 mètres de hauteur qui le rendait à peu 
près inabordable, il était défendu du côté de la terre par des fossés 
profonds. Naturellement depuis Guéthenoc le château fut reconstruit 
plusieurs fois, il avait donné son nom à une famille qui se retrouve 
jusqu'à la fin du moyen âge. 



16 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

sur les bords de l'Oust. Près de la chapelle 
même, où était vénérée cette Vierge, découverte 
dans un buisson de ronces, la nature avait dressé, 
à pic sur la rivière, un rocher inaccessible. C'est 
sur ce rocher que Guéthenoc jeta les bases de son. 
nouveau château. 

Rien ne révèle, avant cette époque, Texistence 
d'une ville en cet endroit. 

Une tradition, qui n'est soutenue d'aucun titre, 
porte qu'avant l'invention de l'effigie miraculeuse, 
cette paroisse qu'on baptisa plus tard, comme le 
château, du nom d'un de ses seigneurs, était dédiée 
à saint Léger. « Quoi qu'il en soit, nous dit Levot à 
propos de cette tradition, elle parait aussi ancienne 
que la ville même, dont l'origine se perd dans 
l'obscurité du x* siècle. » 

Nous n'avons aucune affirmation précise sur 
l'époque de la découverte de la Vierge, que, dit-on, 
un pauvre laboureur défrichant une terre inculte 
avait trouvée au milieu des ronces, pieux débris 
sans doute d'un sanctuaire depuis longtemps ruiné. 
L'auteur que nous citions tout à l'heure la fait 
remonter au x« ou au xi* siècle. Un carme du 
xvn« siècle, le Père I. de I. M. (1) qui a laissé un 

(1) Irénée de Joseph Marie, croit-on, qui vivait en 1660. 



CHAPITRE PREMIER. 17 

opuscule intitulé : Le lis fleurissant parmi les épines^ 
est moins vague et précise même Tannée, 808, 
« longtemps, dit-il, avant la fondation de Josselin. » 

il doit être sérieusement tenu compte de cette 
donnée. Le Père I. de I. est le plus ancien auteur 
qui se soit attaché à Fétude de cette dévotion, ses 
paroles nous paraissent dignes de foi, émanant d'un 
religieux et du reste aucun texte ne vient à Tencontre 
de ses dires. 

La tradition de saint Léger; la croyance à la 
Vierge du Roncier, remontant à la plus haute 
antiquité et j'ajouterai, le terme même de « Vêtus 
suburbium » employé par le comte Josselin dans la 
charte de Sainte-Croix nous font donc considérer 
comme certaine, l'existence, en ce lieu choisi par 
Guéthenoc pour devenir la résidence seigneuriale 
de Porhoët, sinon d'une ville, du moins d'un grou- 
pement plus ou moins considérable, peut-être même 
d'un plou. L'emplacement, pour ainsi dire à l'inter- 
section des deux grandes voies romaines : Sipia- 
Castelnoec et Vannes-Merdrignac et près de cette 
route naturelle, l'Oust, en était du reste tout indiqué. 

Nos ancêtres, imbus d'une foi vive et saine, consi- 
déraient que la Providence devait présider à tout 
acte important et que la protection d'£n-Haut, était 
une sauvegarde pour le présent et l'avenir. C'est 



18 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

pourquoi, Tan 1008, le vicomte de Porhoët en 
demandant aux religieux de Saint-Sauveur de Redon 
leur consentement pour fonder son château, parce 
que, dit-il : « a n'y a que les plantations faites par 
Dieu qui soient d'une attache solide au sol, » fit 
présent au monastère d'une table d'argent doré (1), 
se recommanda aux prières des moines, et choisit 
leur église comme lieu de sépulture ; il décida que 
le château qu'il allait construire serait soumis à 
l'autorité spirituelle de l'église de Saint-Sauveur de 
Redon, et qu'il paierait à cette dernière un cens 
annuel de cinq sous ; déclara enfin que si le 
nouveau château était dans l'avenir suffisamment 
agrandi pour recevoir un prieuré, ce prieuré ne 
pourrait dépendre que de l'abbaye de Saint- 
Sauveur (2). Toutes ces dispositions furent prises 
dans l'église de Saint-Sauveur et plus tard confirmées 
en présence du peuple. Le dimanche suivant l'on 
planta le premier pieu pour la construction, et 
l'emplacement même de la chapelle dont la fondation 
était promise à Saint-Sauveur fut désigné. 

Appuyée sur de telles garanties, la destinée de 
Josselin était assurée. Des fortifications inébran- 

(1) Autrement dit, d'unreUble ou devant d'autel en vermeil, comme 
le fameux autel d*or, donné par Tempereur Henri II à la cathédrale 
de Bâle, aujourd'hui au musée de Gluny. 

(2) Kxtraitdu Cartu^aire de Iledon. Dom Morxck^ Preuves, I, col. 361. 



\ 
\ 



CHAPITRE PREMIER. 19 

labiés comme le roc qui leur servait d'assises, ne 
tardèrent pas à jeter leur ombre menaçante sur le 
pays ; FOust, sous le calme apparent de son cours 
paisible, qui en baignait les pieds, constituait un 
nouveau défi à l'envahisseur et rendait ce côté inex- 
pugnable; et là, serfs et manants, chevaliers et 
soldats, prêtres et moines, vinrent chaque jour plus 
nombreux chercher aide et protection autour de 
la bannière de la Vierge et de l'étendard des 
Porhoët. 

Le seing de Guéthenoc se trouve sur plusieurs actes 
que nous a transmis Dom Morice. On le voit assister ] 
duc Geoffroy lors d'une cérémonie, à la cathédrale de^ 
Rennes, pour la ratification du droit de bouteillage 
accordé au chapitre de Saint-Pierre. La piété du 
prince s'affirme encore par la donation, aux moines 
du Mont-Saint-Michel, de plusieurs villas (fermes) 
situées dans les vigueries de Miniac et de Moron. 

Vers 1040, il meurt, laissant de son mariage avec 
Alarum de Cornouailles, sœur d'Alain Cagnard, 
trois fils : Josselin (1), Maingui et Tutgual. Suivant 
son désir, son corps fut inhumé dans l'église de 
Redon. 

C'est ce Josselin, l'alné des fils de Guéthenoc, qui 

,1) Guelhenocus et Gozolinus ejus filius (D. M., P., 1. 1, col. 962). 



^0 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

fit passer son nom à la postérité en le donnant au 
château dont il termina la construction : aux xi* et 
xii° siècles, on Ténonce eflFectivement, Castelhtm ou 
Castrum Goscelini et, en 1283, Ton voit pour la 
première fois dans les archives de Tabbaye de la 
Joie : Chastel Josselin. il ne se contenta pas d'ache- 
ver seulement la forteresse de son père. En témoi- 
gnage des bienfaits de Dieu et pour la gloire de sa 
nouvelle ville, il fonda le prieuré de Sainte- 
Croix. 

Vers 1059, il écrivit à Perennesius, abbé de 
Redon et successeur de Catuallon, le priant de se 
rendre auprès de lui. Quand l'abbé fut arrivé, on 
parla d'abord du monastère que Guéthenoc avait 
fait vœu de bâtir dans son château. L'emplacement 
qu'ils choisirent ne fut pas le château même, mais 
le lieu où quelques années auparavant Guéthenoc 
avait fait construire une chapelle en l'honneur du 
Sauveur du Monde. 

Le monastère ayant été dédié à la Sainte Croix, 
sous l'invocation de sainte Corneille et de saint 
Cyprien, martyrs, Josselin y fit don de tout « le 
vieux faubourg jusqu'au milieu de l'Out » et de tous 
les droits qu'il avait sur les habitants du lieu ; ajou- 
tant encore à cette libéralité plusieurs terres situées 
dans les diocèses de Saint-Malo et de Saint-Brieue 



CHAPITRE PREMIER. 21 

(en Lanouée, Guillac, Loyat, Guilliers, Mohon, Mé- 
néac, Plumieux, Loudéac, Noyai, Neuillac et Ploer- 
dut). En retour, les religieux s'obligèrent à recon- 
naître les comtes de Porhoët pour leurs fondateurs et 
à leur rendre hommage, tant pour les terres qu'ils 
venaient de recevoir, que pour celles qu'ils pourraient 
acquérir dans la suite. Un privilège spécial fut 
accordé par Perennesius, celui d'inhumer dans la 
chapelle du prieuré. L'acte de fondation fut dressé 
sous le règne de Conan II, en présence de Josselin, 
qualifié de Proconsul de Porhoët, et de ses en- 
fants (1). 

Certains auteurs prétendent que le jeune Conan, 
lors de son couronnement à Rennes, prêta serment 
entre les mains du comte de Porhoët, lequel, aidé 
des seigneurs de Vitré, de la Rouraie, de Taslé, 
l'avait arraché aux griffes de son oncle, le comte 
de Penthièvre, frère d'Alain III, et c'est en cette 
circonstance que le prince aurait accordé aux des- 
cendants de Josselin le droit de recevoir le serment 
des ducs au jour de leur couronnement. Quoi qu'il 
en soit de ce point historique dont les mémoires du 
temps ne fournissent aucune preuve, c'est un fait 
constant que les Rohan, puînés des Porhoët, étaient 

(1) Cariulaire de Redon. Bibl. Nat. M. fr. 22 330. 



22 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

en possession de cette prérogative dans le xv* siècle, 
et cela depuis un temps immémorial. 

Aussi ardent batailleur que tous les seigneurs de 
son époque, Josselin ne devait pas laisser échapper 
Toccasion d'aller guerroyer à la suite de Guillamne 
le Conquérant. Avec les comtes de Penthièvre et de 
Léon et une phalange d'autres braves, il prit part 
& cette brillante conquête de l'Angleterre par les 
Normands. L'on sait que les Bretons secondèrent 
activement les troupes normandes et qu'ils se dis- 
tinguèrent notamment & la fameuse bataille d'Has- 
tings, l'an 1066. Comme part de conquête, le comte 
de Porhoët recueillit de vastes domaines au pays 
d'Outre-mer. 

il eut pour enfants : Main ou Méen, évêque de 
Vannes, Roger, Ëudon et une fille consacrée au 
service de Dieu par son père en 1032 lors de la 
fondation de l'Abbaye de Saint-Georges de Rennes. 
Son corps fut transporté à Redon. 

Eudon succéda à Josselin comme vicomte de 
Porhoët en 1074. 11 hérita aussi de son humeur 
belliqueuse. Ayant eu des démêlés avec floël de 
Gornouaille, duc de Bretagne, il lui déclara la 
guerre en 1076 et se ligua contre lui avec les comtes 
de Penthièvre et de Rennes et Raoul de Montfort. 
Ceux-ci avaient engagé Philippe, roi de France, dans 



CHAPITRE PREMIER. 23 

leur parti et s'étaient cantonnés à Dol. Hoël, sou- 
tenu par le poi d'Angleterre, les assiégea dans leur 
forteresse pendant quarante jours. Le roi de France 
le força à lever le siège, mais le duc en se retirant 
fit des ravages sur les terres du comte de Porhoët, 
pour l'attirer au combat. 11 Tentraina dans un pays 
escarpé et aride où ses troupes souflFrirent beaucoup 
de la disette de vivres. Enfin Eudon, obligé de 
vaincre, ou de tomber entre les mains de son 
ennemi, anima ses troupes de la parole et attaqua 
Hoël avec tant de vigueur qu'il le défit et le fit 
prisonnier. Alain Fergent dut revenir à la charge 
pour délivrer son père. 

Ce fait, qui date de 1077, c'est-A-dire d'une époque 
où l'organisation féodale était complète, suffit à en 
montrer le vice fondamental : l'absence d'un pouvoir 
central vigoureux. 

A la mort de son épouse, la vicomtesse Anne, 
dite de Léon, il abandonna tous les biens de celle-ci 
au prieuré de Sainte-Croix. De leur union issirent : 
Josselin, vicomte de Porhoët, deuxième du nom ; 
Geoffroi, qui lui succéda ; Alain, premier seigneur 
de Rohan, Guéthenoc et une fille qui épousa 
Simon, seigneur de la Rochebernard. Il eut deux 
autres fils, d'un second mariage : Bernard et 
Robert. 



24 ESSAI SUR LE POHHOËT. 

L'acte le plus notoire de Josselin II, ou, comme 
on disait plus souvent, Jostho, fut la fondation en 
1105 du prieuré de Saint-Martin de Josselin en 
faveur des bénédictins de Marmoutiers (de Tours). 
Il poussa à Textrême la libéralité, donna aux moines 
tout ce qu'il pouvait leur octroyer de plein droit : 
meubles, bijoux, trésors ; finit par se donner lui- 
même et mourut sous le froc, en 1116, laissant à la 
tête de la vicomte ses deux frères Geoffroi et Alain, 
souvent désignés ensemble sous le titre de « Pro- 
consuls de Porhoët (1). » 

Geofiroi fut longtemps immobilisé par la maladie 
et, pour cette raison sans doute, semble être resté 
indiflférent aux luttes de son temps, soit entre divers 
princes de la maison de Penthièvre, soit entre 
Conan III et plusieurs de ses barons. Comme nous 
le verrons, le seigneur de Porhoët abandonna à son 
frère puîné une partie considérable de ses domaines. 
Il mourut en 1142, ayant pour enfants de son 
mariage avec la comtesse Havoise : Eudon, qui 
sera le grand homme de cette race virile; Josthon, 
Alain, Etienne, une fille, Amice, qui épousa Guil- 

(1) Tous deux sous ce titre figurent en particulier à la nouvelle 
bénédiction de l'Église Saint-Sauveur de Redon le 23 octobre 112/, 
faite par Hildebert, archevêque de Tours (qui avait sous sa direction 
administrative et religieuse tous les diocèses de Bretagne) et à laquelle 
assistèrent Conan III et les évéques de Bretagne. 



CHAPITRE PREMIER. 25 

laume de Montfort. Alain de Porhoët s'établit 
en Angleterre et fut la tige des seigneurs de la 
Zouche, d'Haringworth, de Pitton et de Codnor (1). 
Voici une charte de 1118 qui nous édifiera sur 
les sentiments de Geoflroi : « Sachent tous, présents 
et à venir, que Geoffroy, fils d'Eudon, affligé depuis 
longtemps, par ordre de Dieu, d'une infirmité et 
couché sur son lit dans son palais, sous le coup de 
la maladie, cependant ayant conscience de lui- 
même, appela à lui Rivallon, évêque d'Aleth, et 
Alain, vicomte, son frère, avec une grande partie 
des barons et des bourgeois ; et d'abord, pour le 
salut de son âme, ayant pris conseil de Tévêque et 
de ses clercs, par qui il fut nourri du saint Viatique, 
il se donna lui-même, à Dieu, à saint Martin et à 
ses moines pour qu'ils le fissent moine lui-même, 
dans le prieuré de Josselin, si la maladie qui le 
tourmentait le conduisait au tombeau ; en outre, il 
donna aux mêmes moines, soit qu'il mourût, soit 
qu'il vécût, toute sa part de la dîme de Guil- 
lac, c'est-à-dire la dîme de la moitié de cette pa- 
roisse, il fit ce don par les mains de Rivallon, 
évêque d'Aleth, dans celles du prieur Raoul, au 



(1) Dont la généalogie est rapportée par Dom Morice.— Depuis la 
conquête de 1* Angleterre, les seigneurs de Porhoët étaient restés en 
possession de grands domaines dans ce pays. 



26 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

moyen d'un certain bâton dont on se servait pour 
le défendre de l'importunité des mouches (l) ». 
Ce pieux Geofifroi guérit de sa longue maladie en 
1130. Probablement à titre de reconnaissance, 
quelque temps après (1132), il abandonnait aux 
mêmes moines de Saint-Martin diverses coutumes, 
telles que le droit d'Ost et le repas du Comte. 



(l) A cette époque, lors d'un abandon ou d*une concession quel- 
conque, Ton prenait n'importe quel objet pour représenter la dona- 
tion effective. 



CHAPITRE II 

La Villb de Jossexin au xii* siècle. — Le Porhoët 

ET SON DÉMEBIBREMENT, LA YlCOMTÉ DE ROHAN. — 
"EuDON II ET LA GFEBRE DE SUCCESSION. SoN FILS 

EuDON III (11421231.) 



Au milieu du xii* siècle, la ville de Josselin était 
déjà entièrement formée. La nouvelle capitale du 
Porhoët, grâce aux fondations religieuses et au 
développement croissant de la petite cour, grandit 
rapidement. Elle comprit tout d'abord une ville 
close, défendue par de puissantes murailles garnies 
de tours ; puis, vu Texiguïté de la forteresse, les 
habitations ne tardèrent pas à déborder de Tenceinte, 
différents faubourgs s'étendirent au dehors des 
murailles et même franchirent TOust. 

Le quartier de Sainte-Croix avait pris naissance 
ainsi de l'autre côté de la rivière. 

Son extension date surtout de la fondation du 
Prieuré. De nombreux moines y furent envoyés et 



28 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Téglise devint paroisse. Celle qui existe encore 
aujourd'hui a été construite au xi° siècle (1). C'est 
un édifice en forme de croix latine, dont le bras sud 
a été supprimé ; la construction est en petit appareil 
irrégulier; les contreforts sont peu saillants, les 
portes et les arcades en plein cintre ; les fenêtres, 
hautes et étroites, sont évasées à Tintérieur (2). 
Eudon I et Anne de Léon, son épouse, y furent 
inhumés la même année (1092). Ce seigneur de 
Porhoët, qui avait fait de nombreuses libéralités aux 
moines, obtint de Tévêque de Vannes l'autorisation 
d'y faire dire la messe, même en temps d'interdit 
général. L'église conservait une belle relique de la 
vraie croix qui s'y trouve encore. 

Il faut bien savoir, pour comprendre l'histoire de 
Josselin, qu'au moyen âge les divisions diocésaines 
ne concordaient pas avec la délimitation des grands 
fiefs et différaient le plus souvent des circonscrip- 
tions domaniales et judiciaires. Ces divisions sépa- 
raient parfois un fief en plusieurs tronçons. Les 
évêchés de Vannes et d'Aleth étaient séparés par 



(1) On retrouve sur un pilier la date rafraîchie de 1030, mais 
comme la fondation du prieuré est de 1(^9 environ, c*est bien plutôt 
1060 quMl aurait fallu mettre. Cette ioscription est sans aucun doute 
postérieure' à Tédification de Téglise et aussi inexacte que celle qui se 
voyait à Saint-Nicolas. 

(2) RosBNzwfiiG, Répertoire archéologique. 




o 



CHAPITRE II. 29 

rOust et par une ligne reliant approximativement 
Malestroit au Temple de Carentoir, et le Temple à 
Langon. Le diocèse d'Aleth, dont Tévêque avait une 
résidence d'été et une cour de regaires à Saint-Malo 
deBeignon (1), comprenait la plus grande partie 
dû pays connu sous le nom de Porhoët ; et c'est 
sans doute pour cette raison qu'on donnait fréquem- 
ment au ix° siècle à l'évêque d'Aleth la qualification 
d' « episcoptis in Poiitrecoet » (2). Mais, ce qui 
arrivait plus rarement, c'est que l'administration 
ecélésiastique vint, comme à Josselin, séparer en 
deux les intérêts religieux d'une même ville. L'Oust, 
en eftet, servant de limite entre les deux évêchés, 
Sainte-Croix était sous la dépendance de Vannes, et 
la ville proprement dite de Josselin se trouvait sur 
le territoire de l'év^ché d'Aleth. Qu'il s'agisse de 
Sainte-Croix ou d'une des autres paroisses de Jos- 
selin, tantôt c'est un évêque, tantôt l'autre qui 
intervient. Pour la même raison, le vicaire perpétuel 
de Sainte-Croix n'eut jamais droit de juridiction sur 

(1) Il pouvait donc, même avant le transfert du siège ôpiscopal 
à Saint-Malo -sur-Mer, prendre le titre d'évéque d'Aleth ou de Saint- 
Malo. — La vieille ville d*AIeth se confondit avec Saint-Servan. — 
Le Regaire est une seigneurie temporelle. 

(2) Comme il ressort de certaines chartes de Tabbaye de Redon : 
Erinor episeopus in Poutrecouet . . . 

In Aleia civitate Rethwalart episeopus in Potrocoêt. . . 
Les évéques d'Aleth se qualifièrent ainsi jusqu'au démembrement 
que fit Nominoë vers 847. 



30 BSSAI SUR LE PORHOËT. 

Notre-Dame. Cette division devait subsister jusqu'à 
la Révolution. 

Hors des murs, du côté du nord-ouest, Saint- 
Martin, nouvelle paroisse, couronnait le sommet de 
la pente qui dévale vers la rivière. Comme nous 
Tavons vu précédemment, Josselin II avait installé 
dans ce monastère des moines de Marmoutiers. Le 
prieur Raoul, en 1108, reçut du fondateur le quart 
de l'église de Notre-Dame du Roncier et en devint 
ainsi co-recteur. Benoit, évêque d'Aleth, ratifia ce 
don en 1110, et Guillaume, abbé de Marmoutiers, 
à la demande du vicomte de Porhoët, y transféra 
des reliques saintes prises au monastère abbatial, 
entre autres « les reliques de la Croix divine, et des 
ossements de saint Corentia, évêque ; Flavien, martyr, 
et des saints évêques Fulgence et Samson, et de 
saint Martin, abbé (1). » La cérémonie eut lieu 
Tannée 1112 en grande solennité. Les Porhoët, et 
même de simples ecclésiastiques, prodiguèrent les 
donations au prieuré de Saint-Martin, qui devint le 
plus florissant de la ville. Pour n'indiquer que les 
principales, signalons les dîmes et autres biens qu'il 
reçut graduellement à Credin (2), Guillac, à Rohan 
où le vicomte Alain, en 1127, concède aux moines 

(1)D. M. 

(2) Donation de l'Eglise, 1116. 



CHAPITRE II. il 

« le bourg situé devant la porte de son nouveau 
chAteau de Rofaan, à condition d'y faire une église 
et un cimetière » ; à Molac (1), la Perrière, Lante- 
nac(2), qui s'enrichit d'une abbaye créée par Eudon 
en 1149; à Ménéac (3), Lanouée(4), Guer (5)..., 
etc. Gonan, duc de Bretagne, leur abandonne, en 
1129, les droits qu'il perçoit à Ploërmel. Eudon II, 
de Porhoët, l'an 1 164, accorde aux mêmes religieux 
le droit de bouteillage dans le port de Vannes (6). 
Cette ville leur fournissait déjà une taxe sur la vente 
de l'avoine et de la volaille. 

Le zèle dont firent preuve les comtes de Porhoët 
pour multiplier les établissements religieux et sou- 
tenir leurs fondations ne doit pas nous surprendre. 
Les moines étaient les seuls éducateurs de cette 
population primitive. Par eux, en Bretagne, comme 
dans toute la France, se préparait le beau mouve- 
ment agricole, artistique et littéraire des xa* et 



(1) Don des églises de Saint-Cyr et de Sainte-Juliette, 1116. 

(2) Chapelles à la Perrière et à Lantenac. 

(3) Eglise. 

(4) Différentes terres, chapelle et église. 

(5) Chapelle de Saint Nicolas et un tiers de l'église donné par 
Donald, évéque d'Aleth, 1124 et 1131. 

(6) Le droit de bouteillage était d'un grand revenu. Il se levait sur 
la vente des vins et des autres boissons, telles que bière^ hydromelle, 
piment et cidre. Outre les vins que Ton tirait d'Anjou et des autres, 
provinces françaises, la Bretagne avait les siens. On en cultivait aux 
environs de Rennes, Montfort, Dol, Dinan, Fougères, etc. 



32 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

xiii« siècles. Les nombreux dons faits à Josselm 
prouvent combien les seigneurs de Porhoët s'inté- 
ressaient à la prospérité de leur nouvelle résidence. 
L'église de Saint-Martin, bâtie au xii* siècle avec 
de vastes proportions, avait la forme d'une croix 
latine avec quatre absidiales. 11 ne reste aujourd'hui 
que le bras sud et le chœur tronqué, mais les arra- 
chements de Tancienne nef permettent d'en mesurer 
la largeur. Les fenêtres sont hautes et étroites, 
légèrement évasées à l'intérieur ; les contreforts 
simples et peu saillants. 

C'est là que furent ensevelis le comte Eudon II 
(1180), plus tard son fils Eudon III (1231) et plusieurs 
membres de leurs familles. 

Le couvent touchait à l'église et renfermait un 
nombre respectable de religieux. Le Prieur était à la 
fois chef de la communauté et recteur du faubourg. 
Bien que la date de fondation de Saint-Nicolas 
nous soit inconnue, l'existence de ce prieuré est 
certaine, à l'époque qui nous occupe. Saint-Nicolas, 
situé dans le faubourg de ce nom, au sud-est de 
Josselin, dépendait de Tabbaye de Saint-Gildas de 
Rhuys. Le prieur ici également était chef de la 
communauté et du quartier. L'église était près du 
cimetière actuel de la ville, elle disparut au com- 
mencement du XIX* siècle. 



CHAPITRE H. 33 

Tels étaient donc les faubourgs extra muros, 
groupés en trois paroisses et dont les titulaires, à 
l*exception de Sainte-Croix, étaient revêius de la 
charge administrative, à tour de rôle et concurrem- 
ment avec le recteur, de l'église principale de Notre- 
Dame. 

Un édifice considérable et digne de l'importance 
toujours croissante de la population avait remplacé 
au xi« siècle la chapelle primitive de Notre-Dame 
du Roncier. Érigée en siège paroissial par Tévêque 
de Saint-Malo, cette église était nécessairement de 
style roman, comme toutes celles de cette époque. 
Il en reste encore quelques vestiges : à droite du 
chœur, on voit une petite fenêtre romane et à 
gauche quelques piliers et chapiteaux du même 
style. Le sanctuaire vénéré abritait la statue à 
laquelle on attribuait de nombreux miracles. 

Une chapelle était située avec Notre-Dame dans 
la ville close. Elle avait été offerte à l'Ordre de 
Harmoutiers. Vers 1130, Donald, évêque de Saint- 
Malo, donna aux moines de Saint-Martin le droit 
de « nommer un chapelain pour desservir la chapelle 
du château (1) ». D'abord sous le vocable de la 
Vierge, elle fut momentanément érigée en paroisse, 

{1; Cartulaire du Morbihan,. 



34 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

SOUS le nom de Saint-Michel, qui passa même à 
une rue. 

La tradition lui prête une origine assez vraisem- 
blable : la chapelle aurait été bâtie pour suppléer, 
pendant les guerres et les sièges, à Saint-Martin situé 
hors des murs. En s'y établissant, les moines lui 
ont communiqué le titre de prieuré ; mais les fonc- 
tions curiales n*y ayant été faites qu'en passant, le 
titre de paroisse n'y est pas resté. On possède, 
depuis le xvi'' siècle, les registres de baptêmes, de 
mariages et de sépultures des paroisses de Notre- 
Dame, de Sainte-Croix, de Saint-Martin et de Saint- 
ISicolas, mais rien de Saint-Michel : preuve incon- 
testable qu'il n'y avait pas de paroisse de ce nom 
au moins depuis ce temps. Si cette chapelle 
appartint primitivement à Saint-Martin, elle était 
desservie dans les derniers siècles par le clergé de 
Notre-Dame et jusqu'à la Révolution formait une 
dépendance de Saint-Jean des Prés. L'édifice pré- 
sente de petites fenêtres romanes, qui prouvent son 
antiquité ; il a subi quelques retouches pendant la 
période ogivale (l). 

Aux portes de la ville, en aval, sur la rive gauche 
de rOust, s'élevait un autre établissement religieux, 

(1) L'ancienne chapelle est transformée aujourd'hui en hangar et 
n'a malheureusement plus beaucoup d'apparence. 



CHAPITRE II. 35 

qui a subsisté jusqu'à la Révolution et dont les 
restes imposants sont parvenus jusqu'à nous. L'on 
n'a pu découvrir jusqu'à présent le véritable fonda- 
teur de l'abbaye des Chanoines réguliers de Saint- 
Jean des Prés (1), parce que les archives de cette 
maison ont malheui'eusement été détruites, mais il 
y a tout lieu de croire qu'elle doit son origine à un 
vicomte de Porhoët, probablement à Eudon II, qui 
commanda momentanément sur la Bretagne. Dom 
Taillandier, continuateur de Dom Morice, critique 
judicieusement ceux qui l'attribuent à Henri II, roi 
d'Angleterre, ou à Geoffroi, son fils, qui ruinèrent en 
1168 et 1175 la ville et le château de Josselin. Nous 
produisons à la fin de ce travail la série des abbés 
qui se succédèrent à Saint-Jean des Prés telle que nous 
l'a livrée un manuscrit de la Bibliothèque Nationale ; 
cette liste a malheureusement des lacunes impor- 
tantes. 

De cette abbaye dépendaient les paroisses de 
Guillac, La Croix Helléan, Guilliers, Mohon, Ménéac, 
Loyat, Pommeleuc, Coëtbugat et Saint-Michel de 
Josselin. L'abbé présentait des religieux pour des- 
servir ces paroisses et Tévêque diocésain les instituait. 
Chacun de ces prieurs recteurs percevait la dîme 

(1) Chanoines réguliers génovéfains de la congrégation de France. 



36 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

dans sa paroisse, prélevait ce qui lui était néces- 
saire et envoyait le reste, quand il y en avait, à la 
communauté. 

Nous n'avons aucun document nous permettant 
de conjecturer de la population de Josselin au 
milieu du xii* siècle. Cependant il nous reste acquis 
qu*à cette époque, Josselin, capitale du comté de 
Porhoët, avait une réelle importance. Aussi ne 
faut-il pas s'étonner que cette forteresse, qui 
incarnait pour ainsi dire la puissance de ses 
seigneurs, subit dès la guerre de Succession de 
nombreuses attaques. 

Le beau royaume de Guéthenoc, ainsi transformé 
sous rhabile direction de ses successeurs, devait 
être malheureusement horriblement mutilé , ou 
plus justement, scindé en deux. 

Geofifroi I", voulant donner un apanage à son frère 
Alain, lui céda, en Tan 1120, toute la partie du 
Porhoët située à Fouest de la rivière d'Oust, moins 
une douzaine de paroisses au sud de Josselin, qu'il 
se réserva, ainsi que toute la partie située à Test de 
rOust, entre cette rivière et les seigneuries de Gaël, 
Ploërmel, Malestroit (1). 



(l) Les Rohaa eurent parfois des intérêts en dehors de leur 
Vicomte. Alain IV acquiert, en 1155, par voie d'échange, de Boyer 
de la Touche, différentes terres dans la paroisse de Plumieuc et le 



CHAPITRE II. 37 

Alain résida d'abord quelque temps sur le Blavet, 
à Castel Noëc (aujourd'hui Castennec en Bieuzi) (1), 
dans les ruines d'une vieille forteresse romaine ; 
puis il remonta au nord et vint, lui aussi, construire 
sur rOust sa nouvelle capitale, le château de Rohan, 
qui donna son nom au fief entier, célèbre dans 
notre histoire sous le titre de vicomte de Rohan, 
tandis que celui de comté de Porhoêt resta exclu- 
sivement attaché à la portion que s'était réservée 
Geofi&oi (2). Cette portion était moins étendue, d'un 
quart au moins, que l'apanage d'Alain (3), mais elle 
était plus fertile et plus peuplée ; c'est sous le 
gouvernement des Rohan que la région quasi 



prieuré de Bodieuc situés dans le domaine de Porhoët. — Quelques 
années plus tard (1221), le comte Kudon III donne à Alain IV, 
vicomte de Rohan, en récompense de services rendus, la paroisse de 
MohoD, Tusage du bois dans la forêt pour le château de Bodieuc et 
le pacage pour 100 porcs et 100 bœufs dans la même forêt. Au mo- 
ment des partages eu 1241, Mohon repassa aux mains du comte de 
Porhoét (alors Raoul de Fougères). 

(1) Les traces de l'enceinte sont reconnaissables encore maintenant. 
Le château fut bâti sur la position exacte de la station romaine appe- 
lée Sulis et dominait d'une façon formidable la vallée du Blavet. 
Castel Noëc ne resta guère que pendant trente ans la résidence de 
celui qui s'appela bientôt le vice^comes de Rohan, 

(2) D. M., P., I, 552, 553, 554. 

(3) Un « Mémoire du vicomte de Rohan u rédigé en 1479 attribue 
pour cette époque, à la vicomte de Rohan, 112 paroisses ou trêves et 
52 au comté de Porhoët. Diaprés la Borderie, des calculs faits par 
lui sur des aveux déposés à Nantes et sur d'autres titres anciens, 
donnent pour résultats deux chiffres un peu différents, soit 59 pour 
Porhoét et 81 seulement pour Rohan. 



38 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

déserte, située au-delà de TOust, s'est couverte de 
cultures et d'habitants. 

Les Rohan taillèrent eux-mêmes dans leur vicomte 
plusieurs fiefs considérables, un entre autres, fort 
important, vers l'angle sud-ouest, constitué dès le 
xii* siècle (1), appelé d'abord, du nom de son premier 
possesseur, Kemenet-Guégan, c'est-à-dire fief de 
(iuégan, puis Guémené-Guingan, et devenu enfin en 
1570 la principauté de Guémené. 

Au xv* siècle la vicomte de Roban était divisée 
en trois châtellenies : Roban, Goarec, Corlay. Cette 
dernière fut distraite le siècle suivant en faveur de 
la brancbe Roban Guémené ; on détacba encore 
dans le même but des portions considérables de 
Roban et de Goarec. Aussi, lorsqu'en 1603 la 
vicomte fut érigée en duché, lui annexa-t-on par 
compensation la chàtellenie de la Chèze, prise au 
comté de Porhoët (2). 

Alain, frère de Geoffroi, devait être la souche 
d'une illustre famille, qui fournit plus d'une gloire 



(1) D.M., P., I, 638. 

(2) La. Bordbrie, Géographie féodale de la Bretagne. 

Enfin au xviii* siècle, le duché de Rohan comprenait six membres 
ou juridictions particulières : Pontivy, Rohan, La Trinité P., La 
Chèze, Loudéac, Ooarec, renfermant 40 paroisses. 

Il était borné au sud par le ressort de la juridiction royale d'Auray, 
à Touest et au nord par la seigneurie de Rohan Guémené et le duché 
de Pentlièvre, à l'est par le comté de Porhoët. 



CHAPITRE II. 39 

à notre histoire et dont la lignée survit encore à 
tant de siècles. 



£udon, comte de Porhoët (depuis cette époque le 
titre de Comte prédomine) , deuxième du nom , 
neveu de Josselin II, avait épousé (1146) Berthe, 
fille et héritière de Conan 111 (1), veuve d'Alain 
le Noir, comte de Richemont. Cette alliance lui 
eût assuré le duché de Bretagne, si cependant 
Berthe, de son premier mariage, n'avait eu un 
fils. Dès la mort de son beau-père, Eudon établit 
ses prétentions à la succession. L'héritage lui 
fut tout d'abord contesté par Hoël, fils désavoué 
de Conan III, et le bâtard, malgré sa flétris- 
sure, appuyé par les villes de Nantes et de 
Quimper, marcha contre Eudon, que la majeure 
partie de la Bretagne, avec Rennes, avait reconnu 
comme duc. Les deux adversaires en vinrent aux 
mains et Iloël fut vaincu à la bataille de Rezé, 
en 1154. 

Le calme semblait rétabli lorsqu'un nouveau 
compétiteur, Conan, issu du premier mariage de 
Berthe, vint bientôt évincer les deux autres, se 
posant en prétendant légitime. 11 ne fut pas long à 

(1) Petite-fille également de Henri I, roi d'Angleterre. 



40 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

rallier un parti considérable. Mais Eudon, qui avait 
goûté de la souveraine puissance, ne voulut pas se 
dessaisir du pouvoir et refusa de reconnaître les 
droits de son beau-fils. Une lutte terrible s'en suivit, 
guerre de ruine et d'extermination qui jeta la Bre- 
tagne dans une révolution de plus d'un demi-siècle 
et dont la pire conséquence fut d'attirer sur la pro- 
vince la domination étrangère. Les seigneurs bretons 
se divisèrent en deux partis : Conan, trop faible 
pour se mesurer avec un aussi puissant rival que 
le comte de Porhoët, commit cette faute qui aurait 
dû à tout jamais le rendre indigne de l'appui des 
Bretons : il appela l'Angleterre à son aide. 

Henri II, prince aussi ambitieux que fourbe, ne 
tarda pas à entrer en lice. Dès cet instant, ne conçut- 
il pas le projet de rattacher à sa souveraineté cette 
jolie province, dont on lui offrait la conquête, et 
d'ajouter ce beau fleuron à sa couronne ! S'il ne 
put, comme il le rêvait, jouer lui-même jusqu'au 
bout le rôle du troisième larron, du moins réussit- 
il à unir l'un de ses fils à Constance, fille de Conan IV 
et héritière du duché. Geolïroi fut le premier étranger 
qui s'assit sur le trône de Bretagne. 

11 serait trop long d'entrer dans les détails de la 
lutte ; nous en indiquerons seulement les faits prin- 
cipaux. 



CHAPITRE II. 41 

Par suite de Tacte odieux de Conan, le comte de 
Porhoët devint le champion de la cause nationale. 
Pouvait-il s'agir de soutenir telle ou telle compéti- 
tion quand le sol breton était envahi par les Anglais ? 
Beaucoup de seigneurs bretons, en effet, tout en 
reconnaissant les droits de Conan, craignirent 
l'ambition de Henri II. Raoul de Fougères, qui 
se rangea du côté d'Eudon, fut de ce nombre (1). 

Les premières armes furent favorables au comte 
de Porhoët. Son adversaire, repoussé, dut se rendre 
lui-même en Angleterre afin d'en ramener des troupes 
fraîches. Plus heureux cette fois, Conan prend 
Rennes, fait prisonnier son rival et, fort du triomphe 
qu'il vient de remporter, se fait proclamer duc de 
Bretagne, sous le nom de Conan IV. 

Mais Eudon s'échappe de prison et se réfugie à la 
cour de France, où il sembla avoir fait le sacrifice 
de ses prétentions, puisqu'il n'y parait qu'à titre de 
comte de Porhoët. 

Dès qu'il vit les agissements d'Henri II qui 

(1) Il avait commencé par le combattre. Durant toute cette guerre, 
e rôle du comte de Fougères manque de franchise ; il changea plu- 
sieurs fois son arme de main, pour soutenir tantôt un parti, tantôt 
un autre. Du reste, à cette époque, cette versatilité d'humeur n'a rien 
d*extraordinaire. L'on passait rapidement d'un camp dans un autre, 
l'on combattait un jour avec autant d'acharnement le parti qu^on 
soutenait la veille. La trahison n'avait rien d'infamant. Les membres 
d'une même famille s'entre-tuaient avec une aisance merveilleuse. 



42 ESSAI SUR LE PORHOÈT. 

avait débarqué et qui, s'étant rendu maitre de 
Nantes, s'apprêtait à entrer au cœur du duché, il 
accourut et souleva le pays de Vannes et la Cor- 
nouaille contre son indigne parent. Sur les entrefaites, 
une querelle de seigneurs vint se greffer sur cette 
guerre nationale pour achever de mettre la Bretagne 
à sac et à sang. 

Eudon, veuf de la duchesse Berthe, ayant obtenu 
la main de Jeanne de Léon, fille de Guyomard, 
Tennemi le plus acharné de Conan, une forte ligue 
se forma. Trois héros, Eudon de Porhoët, Rolland 
de Dinan et Raoul de Fougères tinrent en échec les 
forces réunies de la Normandie et de T Angleterre. 
VjQ dernier se distingua particulièrement à la san- 
glante bataille de Combourg (1165). La chute de 
Dol aux mains d'Henri II amena la soumission de 
plusieurs barons. Le vicomte de Léon et le comte 
de Porhoët furent les derniers à se soumettre. Enfin 
celui-ci feignit la résignation et il se vit obligé de 
donner une de ses filles, Alix, en otage de sa 
fidélité (1168). 

La paix fut de courte durée ; la seconde phase 
de la lutte commençait quelques mois après. 

A peine le roi d'Angleterre eut-il quitté la Bre- 
tagne qu'Eudon reprit les armes et forma une 
nouvelle ligue approuvée par le roi de France. 



CHAPITRE lU 43 

Aussitôt qu'il apprit cette nouvelle, Henri II se vengea 
honteusement en déshonorant sa propre cousine 
germaine. « Rien n'égalait, disent les chroniqueurs, 
la beauté, la candeur, la grâce de cette fleur de la 
Bretagne » et « comme Thermine, qu'une tache fait 
mourir, Alix expira le jour même ». 

S'attaquant aux biens propres de son ennemi, 
Henri II, le fer et la flanmie à la main, envahit le 
comté de Porhoët, rasa le château de Josselin(1168), 
puis s'empara de Vannes, d'Auray et désola tout le 
pays depuis Dinan jusqu'à Saint-Malo. 

Louis VII, dont les Bretons avaient imploré l'appui, 
amena enfin Henri II à conférer avec lui et Eudon 
de Porhoët. Un traité fut signé à Montmirail (1169). 
Il en résulta le couronnement de Geoffiroi II à 
Rennes. Ce jeune prince n'avait que dix ans, et tous 
les barons bretons furent appelés à faire leur sou- 
mission. En réalité, ce fut Henri II qui gouverna. 
- Eudon, trop indépendant et trop fier pour courber 
la tête devant cet étranger, refusa l'hommage, pré- 
férant tout, même la misère, â l'esclavage. 

La réponse du roi d'Angleterre ne se fit pas 
attendre. Le Porhoët fut ravagé une seconde fois : 
<i le château de Josselin, nous dit la chronique de 
Montfort, fut incendié et ensuite détruit jusqu'aux 
fondements ; les habitants partirent pour l'exil et le 



4i ESSAI SUR LB PORHOËT. 

comte Eudon fut chassé de son duché. » Henri II 
assouvit ses rancunes jusqu'à faire condamner son 
adversaire comme rebelle, afin de le dépouiller de 
tous ses biens, tant en Bretagne qu'en Angleterre. 
Ceci se passait Tannée 1170. 

Le coup porté ne fit qu'aviver l'hostilité de l'infa- 
tigable guerrier, qui parvint à reconstituer des forces 
nouvelles, tant était vivace cette nationalité qu'il 
défendait si vaillamment. 

Henri II, qui était retourné en Angleterre, aussitôt 
informé, revint en Bretagne et obligea de nouveau 
Eudon à sortir du duché. A ce moment, Raoul de 
Fougères, le frère d'armes de celui-ci, reparaît sur 
la scène, gagne les garnisons de Dol et Combourg ; 
il ne peut malheureusement s y maintenir et capi- 
tule. 

Le parti des seigneurs bretons était, sinon anéanti, 
du moins gravement atteint. 

Le comte de Porhoët, après avoir réparé sa for- 
teresse de Josselin et relevé les ruines amoncelées, 
s'efforça de reprendre quelques-unes de ses anciennes 
places. Ses forces se brisèrent contre celles de 
Geoffipoi IL II perdit tout ce qu'il possédait dans le 
comté de Vannes et en Comouaille et fut réduit au 
seul comté de Porhoët. 

La Bretagne était épuisée et la lutte semblait 



CHAPITRE II. 45 

dès lors inutile ; physiquement et moralement 
affaibli, Eudon déposa les armes. 

Ses dernières années s'écoulèrent dans un repos 
bien mérité. En 1185, on le retrouve à la célèbre 
assemblée des Barons, connue sous le nom d'Assise 
du comte Geoffroi, dans laquelle il fut décidé que 
les héritages nobles ne seraient plus partagés 
entre les enfants, mais appartiendraient à Tainé. 
Le comte Eudon et Alain de Rohan y figurent 
comme témoins, une copie des actes leur fut dé- 
livrée. 

Au milieu de ses pérégrinations guerrières, il 
n'oublia pas de s'acquérir des mérites pour TEter- 
nité. On lui attribue la fondation de l'abbaye de 
Saint-Jean des Prés es Josselin et du prieuré de 
Lantenac (1149), plusieurs donations en faveur de 
Saint-Martin (1153 et 1164). Il eut une nombreuse 
progéniture : Geoffroi, l'aîné de ses fils, mourut 
jeune ; il eut ensuite Adélice, abbesse de Fontevrault ; 
Alix, qui épouse Guy Mauvoisin, seigneur de Rosny; 
Eudon, qui devait laisser tomber le Porhoët en 
quenouille ; enfin Henri ou Hervé. 

Le titre de Vicomte de ses prédécesseurs ne 
suffit pas sans doute à Eudon H, il prit celui de 
comte de Porhoët et, considérant Conan IV comme 
un usurpateur, se qualifia dans tous les actes de 



46 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

comte de Bretagne (1); mais, tout authentiques et 
brillantes que soient ses qualités, peut-il, dans 
rhistoire, s'enorgueillir d'un plus beau titre que 
celui de « dernier des Bretons » que lui décernèrent 
les anciens auteurs. 

Peu de choses nous sont restées d'Eudon III 
(appelé aussi Eon). Il figure, avec un grand nombre 
d'autres seigneurs, à la monstre que convoqua Phi- 
lippe-Auguste (1205) pour la conquête de la Nor- 
mandie, après la déchéance de Jean-sans-Terre. 
Pierre Mauclerc avait résolu de détruire ses deux 
ennemis, le clergé et la noblesse. Celle-ci, attaquée 
dans ses privilèges, se souleva en masse ; il se pro- 
duisit une véritable révolte qui ne prit fin que par 
un traité signé entre le Duc et le vicomte de Léon, 
mandataire de tous les seigneurs. Il n'est pas dou- 
teux que le comte de Porhoët prit les armes pour 
la défense de ses intérêts et fit cause commune, 
dans cette affaire, avec le vicomte de Rohan et les 
autres barons. 

Aux approches de la mort, l'année 1231, il fit 
don à Saint-Martin de Josselin « en pure et perpé- 
tuelle aumône, de son moulin de Taun, situé sur 

(l) Le titre de duc de Bretagne ne fut réellement adopté que plus' 
tard. Par exemple, on dit toujours : l'assise du comte Geofiroi. 

Philippe le Bel érigea la Bretagne en duché-pairie, et c'est de cette 
époque que les souverains bretons prirent le titre de duc. 



CHAPITRE 11. 47 

rOust, SOUS le château de Josselin, à charge de 
célébrer chaque année une messe anniversaire pour 
le repos de son âme. » 11 choisit en même temps, 
comme lieu de sépulture, la chapelle de ce prieuré. 

Eudon III devait être le dernier rejeton mâle de 
cette famille de Porhoët. 11 n'eut que des filles et 
mourut sans laisser de successeurs (1). Ce beau fief 
allait encore s'effriter et se disloquer davantage. 

Le nom restait au pays. Josselin passa en diffé- 
rentes mains, même étrangères à la Bretagne, et 
finalement les Rohan, tige cadette des premiers 
comtes, recueillirent la seigneurie de leurs ancêtres 
et relevèrent en même temps le nom de Porhoët 
qui rappela à la postérité leur glorieuse origine. 

(1) Nous ne savons de sa femme que le prénom de Marguerite. 



CHAPITRE III 

Lis PORBOËT TOMBE KN QUENOUILLE. — NOUVELLE DISLO- 
CATION AU COMMENCEMENT DU XIll' SIÈCLE. — Le CoMTÉ 
PASSE TOUR A TOUR AUX MAISONS DE FoUGÈRES, DB 

LusiGNAN ET DB France (1239-1370). — Deuxième 

GUERRE DE SUCCESSION. BlOIS ET MoNTFORT. C0MBA.T 

DES Trente (1351). 



Le comté de Porhoët, dans la première partie du 
XIII* siècle, va subir de nouvelles subdivisions 
nécessitées par les droits naturels de succession des 
trois filles d'Eudon III. 

Mathilde (ou Mahaud), Faînée, avait épousé, en 
1204, Geoflfroi, comte de Fougères ; il mourut de 
bonne heure (1222), laissant après lui un fils, Raoul, 
troisième du nom, qui devint dans la suite comte 
de Fougères et de Porhoët. Des deux autres filles, 
Tune, Aliénor, s'allia à Alain de Rohan en premières 
noces, ensuite à Pierre de Chemillé, seigneur de 
Brochesac ou de Brissac, oncle du duc de Bretagne ; 
l'autre, Jeanne, à 01i\der, sire de Montauban. 



CHAPITRE m. i9 

Or cette succession, ouverte en 1231, ne manqua 
pas de difficultés et ne fut réglée définitivement 
qu'en 1248 (1). 

Les héritiers naturels du comte étaient donc : 
1* Raoul de Fougères, représentant sa mère en sa 
qualité de fille ainée d*Eudon ; 2® Aliénor, devenue 
dame de Chemillé ; 3"* Jeanne, dame de Montauban. 
L'accord se fit difficilement entre les trois branches 
qui héritaient. Raoul de Fougères se montra, il 
semble, exigeant envers ses oncles et ses tantes. 
Vn premier partage fut conclu au mois de sep- 
tembre 1239 et, la même année, Raoul de Fougères 
rendit hommage au duc Jean le Roux pour ses 
terres de Porhoët ; puis un second en 1241 et enfin 
un dernier en 1248. D'après ces partages, qui ne 
diffèrent au fond que de bien peu de choses, Raoul 
de Fougères devint propriétaire des deux tiers du 
comté de Porhoët, y compris Josselin et son château, 
Lanouée et sa forêt avec la paroisse de Mohon« 
Aliénor et son époux reçurent les villes de la Trinité, 
de la Chèze avec son château, de Loudéac avec la 
forêt du nom, etc. Rien, dans les actes, n'indique 
les noms des propriétés échues à Jeanne de Porhoët 

(1) Toates les pièces ayant rapport à cette succession se trouvent à 
]a Bibliot Nat. Manuscrits fr. 22 330 (Titres Fougères et Porhoët). 
Elles figurent également, en grande partie, dans les Preuves de Dom 
Morice. 

4 



iSO ESSAI SUR LE PORHOÊT. 

et à son mari, qui cependant eurent leur moitié 
d'un tiers du comté. 

Jean I**", dit le Roux, confirma ces partages par 
une lettre datée de Ploërmel, février 1248. Ces dis* 
positions, comme nous le verrons, subirent dans la 
suite de nouvelles transformations. 

Aliénor, connue sous le nom de dame de la 
Chèze, choisit comme résidence le château de ce 
nom et y administra elle-même le patrimoine dont 
£lle venait d'hériter. Le château de la Chèze parait 
avoir été bâti par le comte Eudon, grand-père 
d'Aliénor, pour commander le bassin supérieur du 
Lié. M. Geslin de Bourgogne nous dit qu'il a été 
amené à cette opinion par cette considération surtout 
que ce prince fonda indubitablement l'abbaye de Lan- 
tenac (1), pendant qu'il était reconnu comme comte 
des Bretons. Or, toute l'histoire de la féodalité 
bretonne établit que chacune de nos abbayes, 
chacun de nos prieurés a été le complément néces* 
saire d'un castrum aux xu* et xiii'' siècles. C'était la 
force morale près de la force matérielle ; recevant 
protection, mais, en retour, enseignant l'obéissance 
et le respect, parfois même rendant la justice 
pour le seigneur. Les moines ont fait marcher de 

(1) Lanteoac, à l'extrémité de la forêt de Loudéac (par. de La 
Perrière). 



CHAPITRE m. 51 

front, outre renseignement des masses, une haute 
culture intellectuelle et une industrie importante. 
Les Bénédictins de Lantenac, à Tépoque des guerres 
de religion, furent expulsés de leur abbaye et 
subirent de cruelles vexations ; la Ville-Audren et 
la Magnanne tour à tour y régnèrent en oppresseurs 
et laissèrent le plus affreux souvenir dans la contrée. 

Voici dans quelle circonstance fortuite le même 
auteur, qui nous renseigne particulièrement sur 
Lantenac, découvrit la sépulture d'Aliénor de 
Porhoët : 

« Par une soirée de printemps, j^errais dans l'oasis 
créé par les moines au milieu des landes. Le soleil, 
après avoir fourni sa journée lourde et brûlante sur 
la bruyère, se laissait lentement glisser dans une 
splendide couche de nuages. L'abeille se taisait, sa 
laborieuse tâche finie ; quelques oiseaux seuls, près 
de leurs nids inachevés , semblaient continuer 
l'hymne du soir des disciples de saint Benoît. Tout 
dans la nature respirait l'harmonie, l'ordre, le 
calme, le repos paisible après le travail, comme au 
temps de la congrégation de Saint-Maur. Ce cadre, 
vide aujourd'hui, où se sont déroulés les labeurs 
des Mabillon, des Lobineau, des le Gallois, des Luc 
d'Achery, de tous ces hommes forts à qui la science 
et l'art doivent tant ; ce cadre, dis-je, sembla pro- 



52 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

tester contre les outrages de Tignorance moderne. 
Mon pied heurta un sarcophage portant Teffigie 
d*une femme dans le costume du tliu* siècle. Sous 
son manteau de mousse, je lus, en caractères 
presque eflfacés : Aliénor de Porhoët, dame de la 
Chèze (1). » 

Cette princesse, considérée comme orgueilleuse 
et dure, nous a laissé cependant des preuves de 
bonté et de justice. Nous avons d'elle un certain 
nombre de chartes intéressantes ; ici, elle fait une 
gratification à Fun de ses vassaux ; là, elle exempte 
les habitants du bourg de la Chèze d'une partie de 
la taille qu'ils lui doivent annuellement. Elle avait 
eu un fils de son premier mariage, Alain, héritier 
de la vicomte de Rohan, et de son second mari un 
autre fils appelé Thomas de Chemillé. Or, d'après 
l'assise du duc Geofiroi et les lois du temps, le fils 
aîné devenait l'héritier unique ou au moins principal 
de ses parents. Alain de Rohan devait donc être 
l'héritier de sa mère (2) ; c'est pourquoi, à la mort 
de celle-ci, il adjoignit la Trinité, Loudéac, la 

;l) Mémoires de la Société d'Émulation des Côtes du-Nord, 1876. 

\2) \\ convient de noter cependant que Thomas de Chemillé réclama 
une part d'héritage. Par accord de juin 1238, il reçut les terres de 
la Rivière, sises dans la paroisse de Plumieux; de la Ville-Samson et 
de la Ville-Hoéon, sises dans la paroisse de Brehant-Loudéac; plus 
1^ ville de la Trinité. A sa mort, ces biens étaient réversibles sur la 
tête d* Alain de Rohan. 



CHAPITRE III. 53 

Cbèze avec toutes les autres dépendances, au patri- 
moine de ses pères. Un accord, fait en t284 entre 
lui et son frère Thomas de Chemillé, en donne une 
nouvelle preuve (I). La vicomte de Rohan s'agran- 
dissait au profit du comté de Porhoët; un jour viendra 
où ce rejeton accaparera toute la vitalité de cette 
souche qui Tavait fait naître. 

Arrêtons-nous ici quelques instants. Qu'advint-il 
de ce territoire de la Chèze, comprenant Loudéac, 
la Trinité et leurs dépendances ? 

Pour éluder toute difficulté, Levot déclare sim- 
plement que ce démembrement fut réuni au trône 
par acquêt du connétable Olivier de Clisson. Cette 
affirmation est erronée en tous points ; il n'est pas 
même fait mention de la Chèze dans le contrat 
d'échange de 1370, entre le Connétable et les comtes 
d'Alençon et du Perche. De la lecture de différentes 
chartes, il ressort au contraire clairement que la 
seigneurie de la Chèze (Loudéac et la Trinité), tout 
en étant aux mains des Rohan, ne fut jamais 
détachée du Porhoët. Le duc de Bretagne ne nous 
Tapprend-il pas lui-même dans une déclaration du 
11 mai 1396 ayant rapport au rachat des terres du 
vicomte de Rohan : « Comme le territoire de la 

(1) D. M., t 1, col. 1072. 



54 BSSAl SUR LE PORHOËT. 

Ghëze est de la tenue et ressort de la Baronie de 
Pôrhoët... actuellement à notre très cher cousin 
Olivier, sire de Clisson... etc. » ? 

Dom Morice se prononce aussi dans notre sens en 
disant que la seigneurie de la Ghèze était membre ' 
dépendant du comté de Porhoët. 

Elle devint donc, pendant quelque temps, juvei- 
gnerie de Rohan, tout en restant dans la vassalité 
de Porhoët. Alain VIII de Rohan, qui épousa Béatrix 
de Glisson, en rapporta l'entière jouissance au titu- 
laire du comté. 

Jeanne de Porhoët et Olivier de Montauban dispa- 
raissent bientôt, du moins du cadre qui nous occupe. 
Ils ne gardèrent presque rien dans cette partie de 
la Bretagne. Enfin Ouy Mauvoisin, époux d'Alix, 
fille d'Eudon II, fit aussi valoir ses prétentions à la 
mort d'Eudon III. Le roi de France régla TafFaire. 
Guy reçut une somme de 2 500 livres tournois et 
une rente annuelle de 200 livres qui lui furent 
servies par Raoul de Fougères (1). 

Marguerite, veuve d'Eudon III, survécut de longues 
années à son mari. Ses enfants lui laissèrent pen- 
dant sa vie la terre du Plessis et le manoir de la 
Villejagu situé auprès des forges actuelles de 

(1) Accord do juÎQ 1238. Cartul. d'Alençon, D. M., t. I, col. 907. 



CHAPITRE m. 5Î) 

Lanoaée, dans la paroisse de Cambout. C'est dans 
cette résidence que furent signés les partages défi- 
nitifs de l'an 1248. 

Raoul III épousa Isabelle, fille d'Amaury, seigneur 
de Craon et de Sablé, dont il eut une fille unique, 
Jeanne de Fougères, qu'il maria (en 1253) à 
Hugues XII de Lusignan, comte de la Marche et 
d'Angouléme. A sa mort, survenue en 1256, les 
comtés de Fougères et de Porhoët passèrent dans 
la maison de Lusignan. Hugues XII, qui entra en 
possession de tous ces biens, laissa deux fils, Hugues 
et Guy, et une fille, Yolande. 

Hugues, deuxième du nom, seigneur de Fougères 
et de Porhoët (1282), apporta le contingent de ses 
farces au duc Jean II dans la guerre entre l'Angle- 
terre et la France. L'état de l'Ost du duc, convoqué 
en 1289 à Ploërmel, fournit, pour le diocèse de 
Rennes, Guy de Laval, seigneur de Vitré; le seigneur 
de Chateaubriant; le seigneur de Lohéac; les gens 
du comte de la Marche pour les fiefs de Fougères 
et de Porhoët... etc. et d'autres'seigneurs. Lui-même 
ne cessa de mettre son épée au service de la France ; 
la mort le surprit sur le champ de bataille de Cour- 
trai en 1302. Comme il ne laissait pas de postérité, 
Guy de Lusignan, son frère, lui succéda. Celui-ci 
prit le parti déshonorant de s'allier aux Anglais et 



S6 ESSAI SUR LE PORUOËT. 

de leur livrer Cognac et Mercins. Cité à la Cour des 
Pairs et condamné pour crime de félonie, tous ses 
biens lui furent confisqués par arrêt de Tan 1307 (1) . 

Philippe le Bel, roi de France, ne voulut pas 
cependant faire exécuter la sentence dans toute sa 
rigueur ; la jouissance de Fougères et Porhoët fut 
laissée, pendant toute sa vie, à Yolande de Lusi- 
gnan, sœur de Guy ; autorisation même lui était 
donnée d'en faire hommage au duc de Bretagne. 

Yolande conserva ces terres jusqu'en 1314, année 
de sa mort. Aussitôt le duc, feignant d'ignorer la 
clause de reversion à la couronne concernant les 
biens de Yolande, s'en saisit. Mais Philippe le Bel 
l'assigna à comparaître à sa cour pour venir expli- 
quer en sa présence les droits qu'il revendiquait et 
il dut sur-le-champ faire restitution (2). Philippe le 
Bel en donne alors l'investiture à Charles de France, 
son fils, comte de la Marche et de Bigorre, sire de 
Crécy (3). En devenant lui-même roi de France 
(1320), sous le nom de Charles le Bel, il transporta 
lesdites terres à Philippe de Valois, son oncle. 

De Philippe de Valois, ces propriétés allèrent à 

(1) II est doQc faux de prétendre qu'il légua bénévolement seB biens 
à Philippe le Bel. 

(2) Mémoires de Cagnard, D. M., P., t. 1, col. 1251. 

(3) Charles de France fit hommage de Fougères et de Porhoët au 
duc Jean en 1316. D. M., P., t. I, col. 1263. 



CHAPIfBE III. 57 

Jean, son fils, qui. Tannée 1328 en fit cession â 
Charles de France, comte d'Alençon. Ce dernier les 
conserva de 1328 à 1346. Marié à Marie d'Espagne, 
il en eut quatre fils : Charles, qui devint archevêque 
de Lyon; Philippe, qui fut archevêque de Rouen 
puis cardinal; Pierre, qui épousa Marie Chamaillard, 
comtesse de Beaumont, et Robert, comte du Perche. 
Fougères et Porhoët furent Tapanage des deux aînés ; 
puis finalement ceux-ci Tabandonnèrent vert^ J361 à 
leurs deux cadets. Ces fiefs devaient rester; entre 
leurs mains jusqu'en 1370. 

Mais voyons quelle était la situation intérieure 
de la province. 

La paix et la justice n'avaient cessé de régner 
sous le duc Jean III le Roux, mais dès sa mort tous 
les maux fondirent sur la Bretagne. Les revendica- 
tions de deux familles firent naître une nouvelle 
guerre de succession. 

Pendant vingt-quatre ans, de 1341 à 1365, la 
Bretagne fut le théâtre du plus héroïque et du plus 
douloureux spectacle que l'ambition des rois ait 
donné au monde. 

Tous deux doués d'un courage semblable, l'un 
des prétendants était un héros, l'autre un saint. 
« Tour à tour vainqueurs et prisonniers l'un de 



58 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Fautre, dit Pitre-Chevalier, aujourd'hui la couronne 
en tête, demain les fers aux pieds, les destins res- 
pectifs de leurs armes et les vicissitudes de leurs 
vies dépassent dans leur naïveté Tintérèt des fictions 
romanesques. Tous les prodiges que peuvent faire 
la bravoure et le patriotisme, tous les crimes que 
peut commettre la méchanceté, toutes les trahisons 
que peut méditer la perfidie, tous les dévouements 
que peuvent susciter l'amour chevaleresque, la piété 
conjugale et maternelle^ toutes les horreurs que la 
guerre traîne à sa suite furent les événements jour- 
naliers de cette incroyable histoire. » 

L'élite de la noblesse bretonne et même euro- 
péenne, les trois quarts de la population de la 
vieille Armorique, furent décimés par le fer, par 
l'eau ou par la flamme. Non seulement Bretons et 
Français, mais Anglais, Espagnols, Écossais, Fla- 
mands, se heurtèrent dans cette échauffourée meur- 
trière. Dès le début de la lutte, derrière Charles de 
Blois et Jean de Montfort, avaient surgi deux rivaux 
irréconciliables : le roi de France, prêt à saisir cette 
Bretagne désirée si vivement par ses pères et qui 
résistait seule à l'unité monarchique, et le roi 
d'Angleterre, convoitant non plus seulement la 
possession de son ancienne alliée, mais visant la 
conquête de la France entière. 



CHAPITRE III. 59 

Quel fut le sort du Porhoët et de ses seigneurs 
durant cette période désastreuse? 

Bien que l'histoire ne se soit pas attachée au rôle 
joué par le comte d'Alençon, il n'est pas douteux 
que dès le premier signal, les soldats de Porhoet 
se rallièrent aux couleurs de Charles de Blois, le 
protégé et Tallié de Philippe de Valois. 

D'un sang bouillant et généreux, et comme nous 
les avons déjà vus, ne marchandant pas les coups 
d'estoc et de hache, que de défis ils durent jeter 
par-dessus les murs d'Hennebont, à leurs vieux 
ennemis, les Anglais ; mais aussi quels ravages dans 
leurs rangs ne durent pas faire les sorties furieuses 
comme celles de Gauthier de Mauny et Robert 
d'Artois. « Là put-on voir, de part et d'autre, belles 
incursions, belles rescousses, beaux faits d'armes 
et belles prouesses à grand foison, dit le chroni- 
^jueur. » 

La perte de Vannes exaspéra le souverain anglais, 
qui pour se venger vint lui-même conduire la guerre. 
11 fit armer « grand amas d'hommes et de vaisseaux », 
prit terre à Brest, et allant droit au cœur du pays, 
saccagea Rohan, Pontivy, Ploërmel et Josselin, bien 
entendu. Le Porhoët, comme du reste toute la Bre- 
tagne, subit les ravages du fléau. 

Nous ne suivrons pas les gens du Porhoët dans 



60 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

cette longue chevauchée guerrière ; il faudrait 
retracer ici toutes les phases et les différents 
exploits de cette guerre. Qu'il nous suffise de savoir, 
partout où la défense du sol breton et la gloire des 
hommes les appelaient, que ce fût à la suite d'un 
capitaine d'armes ou du comte d'Alençon lui-même, 
jamais ils n'y manquèrent. 

Mais de toute la guerre, la plus belle page qui 
concerne Porhoët est celle du combat des Trente, 
que Beaumanoir sut écrire en lettres d'or sur le 
frontispice historique de JosseUn. 

Bembro, commandant pour Edouard et Montfort à- 
Ploërmel, ayant, au mépris des conventions et des 
trêves, porté le fer et le feu dans le pays, le 
Maréchal Jean de Beaumanoir (1), gouverneur de 
Josselin pour Charles de Blois (2) et qui joue 
dans toute cette histoire le plus noble rôle, se rendit 
à Ploërmel, pour parlementer avec le chef anglais* 
Aux reproches que fit Beaumanoir, à son rival, de 

(1) Et non Robert comme Pont écrit bon nombre d'anteurs anciens 
et modernes (Boissart, Pitre- Chevalier). Ce qui porta à confondre 
Tun et Tautre, ce fut q le tous deux devinrent maréchaux de Bretagne 
sous Charles de Blois, dont ils embrassèrent la cause. Mais Jean 
était neveu de Robert et succéda à son oncle dans la dignité de 
Maréchal. 

(2) Bien que Josselin fût alors château seigneurial et ne dépendant 
aucunement du duc. En qualité de place forte, cette ville pouvait 
en temps de guerre être occupée par un capitaine qui j tenait garnison 
au nom d*un des prétendants du duché. 



CHAPITRE m. 61 

batailler envers et contre tout, les affaires s'enve- 
nimèrent au point que le chef des Bretons jeta un 
défi à Bembro. 

Afin que le poids de la guerre ne fût porté que 
par des guerriers, il fut convçnu que trente Anglais 
viendraient s'aligner en face de trente Bretons et 
qu'ainsi entre hommes d'armes la querelle serait 
vidée en champ clos. 

Rendez-vous fut pris, près d'un chêne, sur les 
landes, à mi-voie entre Ploermel et Josselin. Chacun 
des capitaines choisit parmi ses compagnons les plus 
valeureux. Ceux de Beaumanoir furent les chevaliers 
de Tinténiac, Guy de Rochefort, Yves Charruel, 
Robin Raguenel, Huon de Saint-Yvon, Caro de 
Bodégat, Olivier Arrel, Geoffroi du Bois, Jehan 
Rousselot, Guillaume de La Marche et les écuyers 
Guillaume de Montauban, Alain de Tinténiac, 
Tristan de Pestivien, Alain de Keranrais, Olivier de 
Keranrais, Louis Goyon, Geoffroi de la Roche, 
Guy on de Pontblanc, Geoffroi de Beaucorps, Maurice 
du Parc, Jehan de Serent, de Fontenay, Hugues 
Capus, Geoffroi Poulard, Maurice et Geslin de Tre- 
siguidy, Guillaume de la Lande, Olivder de Monte- 
ville, Simon Richard, Geoffroi Mellon. 

Le jour dit, 27 mars 1351, en bons chrétiens, les 
Bretons remirent leur àme à Dieu. Voici du reste à 



62 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

ce scget, comment s'exprime rhistorien poète qui a 
narré en détail les péripéties de la lutte : 

Quand le jour fut venu 
Que rendre se devait, dessus le pré herbu 
Beaumanoir le vaillant, que Dieu croisse en vertu. 
Ses compagnoos appelle qu*ils vindrent tous à lui. 
Et leur fit dire messes ; chacun fu absolu, 
Prinrent leur sacrement en nom du roy Jehsu^ 
eu. 

Spectacle admirable, n'est-il pas vrai, que ces 
trente preux, pleins de foi et d'espérance^ allant, la 
paix au cœur, puiser à Tautel du sacrifice la force 
nécessaire pour mourir vaillamment (1). Aussi quelle 
fougue ils déployèrent contre les Anglais. Leur 
sang, d'avance, ils l'avaient offert à la Bretagne \ 
qu^avaient-ils à escompter de l'avenir, si la victoire 
ne devait pas leur échoir. 

Ce fut un combat héroïque ; Bretons et Anglais, 
dans un corps à corps terrible, rivalisèrent de fureur 
et de générosité pour l'honneur du nom. Au premier 
choc, les Bretons parurent fléchir, mais ils se 
reprirent promptement et, après une véritable héca- 
tombe, restèrent maîtres du terrain (2). 

(i) Les uns s*accordent à croire que c'est à Noire-Dame qu'eut lieu 
cette cérémoDÎe, les autres que ce fut à la chapelle Saint-Michel. 

(2) Ils revinrent à Josselin en chantant Gloire à la Vierge ! mais 
avant de quitter le champ de bataille les nobles vainqueurs avaient 
rassemblé tous les morts, Anglais et Bretons, et leur avaient accordé 




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CHAPITRE III. 63 

» Beaumanoir, bois ion sang! » le cri de Keranrais, 
reste la devise de Mi- Voie. Célébré par les poètes, 
chanté par les ménestrels, le combat devint si 
fameux qu'un siècle après, en parlant des plus 
belles batailles, on disait encore : On se battit 
comme aux Trente ! En souvenir de ce fait mémorable, 
unique même dans les annales de notre histoire, on 
éleva vers le xvi* siècle, après les guerres de la 
Ligue, une croix en pierre sur l'emplacement du 
chêne qui en 1351 régnait seul sur la lande. Elle 
fut abattue, une première fois, en 1775, mais les 
Etats de Bretagne la relevèrent et gravèrent sur 
sa base cette inscription : « A la mémoire perpé- 
tuelle de la bataille des Trente, que Monseigneur 
le Maréchal de Beaunianoir a gagnée en ce lieu le 
xxvu mars MCCCL, » La révolution de 1793, ce fléau 
de nos gloires anciennes, se flatta d'anéantir le 
souvenir des Trente, avec le signe qui la consacrait, 
Mais en 1819, il ressuscita dans l'obélisque que 
nous voyons actuellement. On y lit ces mots : Sous 
le règne de Louis XVIII, roi de France et de 
Navarre, le Conseil général du département du Mor- 
bihan a élevé ce monument à la gloire de XXX Bre- 



la paix et le repos éternel dans un ensevelissement commun, sous les 
dalles, dit la tradition, de la chapelle Saint^Maudé (en La Croix- 
Helléan), qui éuit le sanctuaire le plus rapproché. 



64 B8SA1 SUR LE PORHOÊT. 

tons. » La croix également fut rétablie; dans le 
support on enclava la vieille inscription. 

Si la victoire des Trente n'amena pas la paix, du 
moins elle donna enfin quelque repos à la Bretagne, 
et les Anglais ne vinrent de sitôt sur les chemins 
de Ploermel et de Josselin. 

Quelques années plus tard (1363), cette même 
lande qui avait servi de champ clos, pour vider la 
querelle nationale, fut assignée pour le rendez-vous 
des conférences entre Charles de Blois et Jean de 
Montfort, relativement au partage projeté de la 
Bretagne. Cette entrevue, qui peut-être eût épargné 
beaucoup de sang, n'eut pas lieu. 

La fin de la lutte cependant était proche ; la mort 
de Charles de Blois à Auray devait amener le 
dénouement de cette question fameuse de succession. 
Dans un suprême effort les deux rivaux groupèrent 
toutes leurs forces; Du Guesclin, Rohan, Léon, 
Dinan, Rieux s'armèrent. L'armée tout entière, 
dirigée au secours d' Auray, fut passée en revue à 
Josselin par Charles de Blois. 

L'on sera convaincu de l'importance du rôle de 
Beaumanoir et de l'autorité dont il jouissait parmi 
tant de chefs illustres, lorsqu'on saura que Charles 
de Blois arrêta son choix sur lui afin qu'il se rendit 
au camp de Montfort tenter avant la bataille un 



CHAPITRE m. 65 

dernier accommodement. « Messire Jean Chandos, 
dit le baron de Bretagne au général anglais, je 
vous prie pour Dieu que nous mettions d'accord no^ 
deux seigneurs ; car ce serait trop grande pitié si 
tant de bonnes gens comme il y a ici se navraient 
pour leur opinion soutenir. » Mais Chandos répondit 
qu'il était trop tard, que Montfort refusait la paix 
comme on la lui avait refusée, « qu'il voulait 
demeurer duc de Bretagne ou mourir en la place. » 
« Eh bien donc, que Dieu soit juge ! reprit Beau- 
manoir, car Monseigneur de Blois n'a pas moins 
grande volonté de combattre que Monseigneur de 
Montfort. » Malheureusement rien ne put endiguer 
les flots de sang qui allaient rougir la plaine d'Âuray . 
Le destin de la Bretagne se décida en faveur de 
Jean de Montfort. C'était un aSreux désastre pour 
les défenseurs du parti adverse (1364). 

Beaumanoir rendit service encore à la cause de 
Blois en représentant la malheureuse veuve au traité 
de Guérande. En secondes noces, il avait épousé 
Marguerite de Rohan, qui devait s'allier plus tard 
au connétable de Clisson. Le vainqueur des Trente 
mourut vers 1366. 



CHAPITRE IV 

Clisson, par voie d'échange, acquiert le Comté db 
PoRHOËT (1370). — Alix sa fille apporte ce fikf 

AUX ROHAN. — La famille de ROHAIf. — PoRHOËT AU 
MOTEN AGE. L'USANCE. DIVISIONS ECCLÉSIASTIQUES ET 
ADMINISTRATIVES. La COMMUNAUTÉ DE VILLE. 



Auray est le premier champ de bataille où Ton 
voit apparaître Olivier de Clisson. Il y combattit 
comme un lion, ouvrant de toutes parts les rangs 
ennemis à grands coups de hache. Ses qualités 
guerrières et sa vaillance devaient lui valoir, dans 
la suite, le titre de Maréchal, Dès qu'il avait eu la 
force de tenir une arme, il s'était jeté dans le parti 
Montfort pour venger la mort de son père décapité 
à Paris. Mais ses opinions changèrent bientôt. 

La mésintelligence entre Jean de Montfort et lui 
date de l'acquisition du Porhoët que fît Clisson, par 
voie d'échange, avec les comtes d'Alençon et du 
Perche. Le jeune duc vit en effet d'un œil défavo- 



CHAPITRS IV. 67 

rable un guerrier aussi puissant et redoutable 
s'établir dans son voisinage, au cœur même de la 
Bretagne, disson, qui paraissait déjà désapprouver 
son ami d'enfance, prit soudain parti contraire et 
rechercha l'appui de la France. 

Voici l'analyse de ce contrat d'échange : « Pierre, 
comte d'Alençon, et Robert d'Alençon, comte du 
Perche, font savoir qu'ils concèdent à Olivier de 
Clisson et à Béatrix de Laval, sa femme, leur châ- 
teau de Josselin avec tout son territoire, en échange 
de la terre de Tuit, que le sire de Clisson possède 
dans la vicomte de Falaise, en Normandie. Ce der- 
nier abandonne également aux comtes d'Alençon 
deux mille livres tournois de rentes sur la recette 
de Champagne. Les comtes d'Alençon choisissent 
comme procureurs, Robert de Beaumanoir, Henry 
de Plédran, P. du Bois-Helyon et Olivier de Val- 
cher qui remettront le fief de Josselin au pou- 
voir du duc de Bretagne, entre les mains duquel 
Olivier de Clisson prêtera hommage en prenant 
possession dudit fief. Donné à Paris le 14 mai 
1370 (1). » 

Dans un traité, signé le 21 juillet suivant avec le 
roi de France, Clisson s'engageait à ne livrer la 

. (1) Titre de Blein, D. M , P., t. T, col. 1639. 



68 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

place qu'à Charles V « au cas, disait-il, où mon dit 
seigneur, le duc de Bretagne, pour cause dudit 
châtel ainsi à moi baillé et délivré, serait adversaire 
du roy et tiendrait le parti de ses ennemis. » Cet 
acte, absolument contraire au droit féodal en Bre- 
tagne, dit M. Tabbé Lefranc, substituait à la suze- 
raineté ducale, la souveraineté royale sur une ville 
fortifiée, située au milieu du pays breton. C'était un 
véritable attentat contre les droits de l'ombrageux 
Jean IV. Charles V dut payer cette soumission de 
promesses certaines de protection et, pour ménager 
quelque peu les susceptibilités du duc de Bretagne, 
enjoignit à Olivier de Clisson de ne prendre posses- 
sion de Josselin qu'au 1" août 1371. En réalité, 
l'acquêt n'eut son plein eflFet qu'en 1373. 

Le pacte fameux de fraternité d'armes conclu 
(octobre 1370) entre du Guesclin et Olivier de 
Clisson (I), confirma la Bretagne dans un mouve- 
ment d'opposition déclarée contre Jean IV. Dès lors 
le nouveau seigneur du Porhoët se rua contre ses 
amis d'hier, aujourd'hui ses mortels. ennemis, les 
Anglais, avec cette rage sanguinaire qui lui valut 
de bonne heure le surnom de <( boucher ». 

Les campagnes qu'il entreprit concernent surtout 

(l) Les deux guerriers burent de leur sang mâle dans une coupe. 



CHAPITRE IV. 69 

Thistoire de la Bretagne et de la France ; mais, 
comme il avait fait de la forteresse du Porhoët son 
quartier général, on Ty retrouve à chaque instant 
et souvent aux moments les plus périlleux de la 
lutte, car les murs de Josselin, qu'il a fortifiés, 
sont pour lui le refuge inexpugnable, le bastion de 
la dernière défense. 

En 1381, Clisson et Rohan, dans leurs villes de 
la Chèze, JosseUn, Moncontour, aidés des garnisons 
et des gens du pays, tuaient beaucoup de monde 
aux Anglais et, tandis que le comte de Buckingham 
était forcé de se retirer sur Vannes, le connétable 
appelle à lui ses plus fidèles compagnons : le Barrois 
des Barres, le comte de la Marche, Ghastel Morant, 
un grand nombre de chevaliers et d'écuyers et les 
reçoit généreusement. L*on fit à Josselin « bombance 
et moult réjouissances ». « Or, dit l'historien de 
Clisson, la distraction préférée de tous ces batail- 
leurs consistait dans les tournois et les joutes. L'on 
se souvint qu'un défi avait été porté à trois cheva- 
liers français par trois chevaliers anglais, quand le 
comte de Buckingham traversait le Poitou. Les trois 
Anglais furent sommés de venir à Josselin, afin de 
tenir leurs engagements. Ils le firent volontiers et 
le tournoi eut lieu sous les yeux du connétable. 
Tout se passa loyalement, sans grandes blessures 



70 ESSAI SUR LB PORHOËT. 

de part et d'autre. Mais à leur tour les trois Français 
défièrent leurs adversaires et une nouvelle rencontre 
fut décidée. 

Le comte de Buckingham, informé du nouveau 
défi, voulait jouir lui aussi du spectacle et fit des 
instances pour que les champions se rendissent à 
Vannes. Le connétable reconnut que le désir de 
Buckingham était juste et envoya demander des 
sauf-conduits pour tous les chevaliers français qui 
voudraient aller de Josselin à Vannes. Une trentaine 
de gentilshommes profitèrent de la permission. 
Glisson ne fut pas de ce nombre, ne voulant pas 
sans doute se rencontrer avec Jean IV. 

Les champions français se couvrirent de gloire et 
revinrent bientôt à Josselin raconter au connétable 
les péripéties du tournoi. » 

Après la mort de la duchesse de Penthièvre, 
survenue en 1384, Jean, son fils, maintenu captif à 
Londres, nomma Clisson son lieutenant en Breta^e 
et en France. Jean IV, voyant dans un perpétuel 
cauchemar la couronne lui échapper, jura de se 
venger de Théritier de Charles de Blois en portant 
un coup criminel à son défenseur. C'est l'histoire 
de l'attentat de l'Hermine. Clisson dut la vie sauve 
aux remords du duc et sa liberté ne fut acquise 
qu'au prix de cent mille francs de deniers comptants, 



f 



CHAPITRE IV. 71 

des villes et châteaux de Josselin, Broon, Blain, le 
Guildo, Jugon et d'autres encore. 

Le premier usage qu'Olivier fit de cette liberté 
fiit de porter plainte au roi de France. Celui-ci pro- 
nonça une sentence, le 20 juillet 1388, par laquelle 
les cent mille francs devaient être restitués en cinq 
annuités, les places et châteaux ff)rts extorqués, resti- 
tués immédiatement. Une réconciliation, plus feinte 
que réelle, s'ensuivit naturellement ; trois ou quatre 
fois déjà, les deux rivaux s'étaient tendu la main 
pour mieux se déchirer ensuite. 

Olivier de Clisson trouvait bientôt d^autres ennemis 
non moins dangereux que le duc Jean dans les ducs 
de Berry et de Bourgogne, devenus régents après 
la catastrophe du Mans. 

Pourchassé par les troupes du duc de Bourgogne, 
qui avaient mission de l'emprisonner afin qu'il se 
justifiât de l'accusation, portée contre lui, de s'être 
enrichi illicitement, le connétable s'enfuit en hâte 
de Montmédy et chevaucha vers Josselin jusqu'à ce 
qu'il fût arrivé sans encombre dans son château fort, 
bien pourvu d'armes et de provisions. 

C'est là sans doute que lui arriva l'écho de l'arrêt 
du 19 décembre 1392 qui le déclarait déchu de sa 
charge de connétable et banni du royaume « comme 
faux et mauvais traître envers la couronne de France. » 



72 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Cette disgrâce de Glisson provoqua une véritable 
guerre civile en Bretagne. Jean IV, trop heureux 
de ce nouveau prétexte, porta le premier coup à 
Josselin, le cœur de la résistance de son ennemi. 
Ayant concentré précipitamment ime nombreuse 
armée, il se présenta soudain sous les murs de laf 
vieille cité du Porhoët. Mais Glisson en était sorti 
à temps. Seule, Marguerite de Rohan, son épouse, 
y restait enfermée. Le duc résolut de faire prison- 
nière Tancienne veuve de Beaumanoir et d'enlever 
la ville. 

Une furieuse attaque fut livrée contre les vieilles 
tours. « L'armée ducale était divisée en deux corps : 
le sire de Malestroit et le vicomte du Fou comman- 
daient les Bas-Bretons. Pierre de Craon dirigeait 
l'autre aile, où se trouvaient les Bretons Gallos» Les 
troupes de Craon devaient attaquer le côté Est de 
la ville, tandis que les Bas-Bretons, qui avaient de 
longues rangées de boutons à leurs habits, cam- 
paient à l'Ouest, sur les bords de l'Oust ; dans le 
pays, on appelle encore le lieu de leur séjour, le 
camp des Boutonnés. De part et d'autre, l'on montra 
à la lutte beaucoup d'acharnement. Les machines 
de guerre étaient si près des murailles que les 
assiégés y mettaient lé feu avec des torches enjQam- 
jnées. Le château fort était solide, mais les murs 



CHAPITRE IV. 73 

de la ville s'ébranlaient en plusieurs endroits. Là 
famine se fit bientôt sentir el les défenseurs de la 
place, trop peu nombreux, succombaient à la peine. 
Une nuit, un homme dévoué et résolu sortit et, 
traversant le camp du duc, avertit Clisson qu'il était 
temps d'aviser, s'il voulait sauver la ville et soii 
château de Josselin. Le vieux batailleur n'avait pas 
assez de soldats sous la main, il eut recours à la 
politique (1). » Il fit agir deux femmes influentes 
et le siège de Josselin fut levé, mais à quelles con- 
ditions ! Clisson renonçait à son privilège de ne 
pas comparaître pendant huit ans devant le duc; 
non seulement il abandonnait les quatre-vingt mille 
francs qui lui étaient encore dus par celui-ci, mais 
encore il avançait cinquante mille francs. Les clefs 
de Josselin devaient être présentées au duc par 
Robert de Beaumanoir, pour être ensuite remises 
aux mandataires de Clisson : les vicomtes de Rohan 
et du Fou. 

Jean IV s'étant éloigné, Clisson refusa de se rendre 
à la Chèze pour ratifier l'accord et il fallut, l'année 
suivante (1394), l'intervention du roi de France 
pour déterminer les deux adversaires à convenir 
d'une trêve. Les négociations ne purent aboutir et 

(1) Lkfranc, Histoire de Clisson, 



74 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

la guerre se ralluma plus active que jamais, mais^ 
cette fois, le duc abandonna le Porhoët pour porter 
son attaque vers le Penthièvre. 

Les querelles sanglantes du duc de Bretagne avec 
le connétable ne furent entièrement apaisées qu'en 
1396. Clisson, appelé à Vannes pour signer une 
paix définitive et complète, accepta le rendez-vous, 
i la condition seule, que le jeune héritier de Bre- 
tagne serait envoyé comme otage à Josselin, pendant 
la durée de l'entrevue. Jean IV parut enfin sincère 
et confia son jeune fils, âgé de sept ans, au vicomte 
de Rohan, le chargeant de l'aller conduire au chAtel 
Josselin. Devant cet acte généreux, Clisson oublia 
ses rancunes. Aussi grand seigneur que noble che- 
valier dans cette circonstance, il partit à la rencontre 
de l'héritier de Bretagne pour lui faire honneur, et 
le reconduisit lui-même à Vannes, où il le remit aux 
mains de son père. 

La réconciliation était sincère. Jean IV accorda 
l'exemption de rachat (1) au territoire de la Chèze, 
comme faisant partie du Porhoët qui déjà en était 

(1) Droits de rachat : ces droits, payables à la couronne par les 
héritiers des fiefs, correspondaient à ce que nous appelons aujourd'hui 
)es droits de mutation. Ils araient été institués par Jean le Roux 
pour remplacer le droit de bail. Les héritiers mineurs abandonnaient 
à leur suzerain direct (car les seigneurs exerçaient aussi ce droit dans 
leurs fiefs) une année de reTenu» sous prétexte de subvenir aux 
charges militaires dues par le fief. 



GHA.P1TRE IV. 75 

exempt « laquelle baronnie (1) de Porhoët, dit-il, 
tient de présent notre très cher cousin et féal Olivier, 
sire de Clisson. » Même, son suzerain lui confia, pen* 
dant son absence en 1396, la direction des affaires 
de Bretagne. 

Clisson, désormais, se mêla fort peu à la vie 
publique ; il vécut retiré à Josselin, s'occupant de 
l'administration de son immense fortune. Après 
avoir réparé et fortifié son château, il reconstruisit 
Téglise de Notre-Dame où il se réserva, pour lui et 
sa famille, une magnifique chapelle. « Pendant 
douze ans, dit Lefranc, Olivier demeura habituelle- 
ment à Josselin, s'occupant moins des choses de la 
guerre que de pnères et bonnes œuvres. » 

Un auteur ancien, digne de foi, Alain Bouchard, 
rapporte que Jean IV, en mourant, laissa la direc- 
tion politique de la Province, durant la minorité 
des enfants, au duc de Bourgogne et au sire de 
Clisson. En mars 1401 , à Rennes, devant la Bretagne 
réunie et au pied de l'autel, le fils de Jean IV fut 
armé chevalier par Olivier de Clisson. 

Agé de soixante-huit ans, le connétable retrouvait 
Ténergie de ses jeunes années pour lutter encore 
contre les Anglais, ses ennemis jurés ; mais, malgré 

(1) Terme qai, à cette époque, voulait aussi bien dire fief que comtés 



76 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

son ardeur guerrière, Clisson s^afTaiblissait de plus 
en plus. C'est Tannée suivante, qui est celle même 
de sa mort, qu'aurait été prononcée, à Ploërmél, la 
confiscation de tous ses biens et qu'aurait eu lieu 
une prise d'armes de Jean V contre Josselin. Cet 
épisode, qui repose sur un seul écrit découvert à 
Blain, par dom Lobineau, parait par trop sortir de 
la vraisemblance. Avant et après cette affaire, 
Jean V, au contraire, fait preuve d'un grand atta- 
chement et de beaucoup d'apiitié envers Clisson. 
La suite des dates, que nous ofErent les chroniqueurs, 
ne présente même pas le temps nécessaire à cette 
prétendue querelle. 

Le testament qu'il fit dans les premiers jours de 
1407 nous révèle son état d'esprit sur la fin de sa 
vie. La fougue de l'homme d'armes avait souvent 
étouffé en lui les sentiments de justice et de bonté ; 
il reconnaît les torts faits à Dieu et au prochain et 
s'efforce de les réparer en laissant de nombreux 
biens aux églises (t), en restituant les sommes dues 
à titre d'indemnités à ses vassaux, eh faisant des 



(1) Voici un passage concernant les dons faits à Téglise de Josselin : 
« huit marcs d*or pour en faire deux beaux galices et douce patènes 
à l'usage d'icelle église. Item, je laisse et donne à ladite église deux 
de mes bréviaires, lesquels seront enchaisnez sur la sépulture de 
madite compagne et de moy, pour Tusage des chapelains et clercs 
qui 7 viendront dire leurs heures. » 



CHAPITRE IV. 77 

1^ et dons à ses amis et serviteurs. Il demandait 
pardon des préjudices dont il s'était rendu coupable 
et implorait enfin le pardon de tous. 

Il mourut dans sa résidence préférée, le 23 avril, 
et fut inhumé dans Téglise Notre-Dame. Suivant 
sa volonté testamentaire un magnifique tombeau lui 
fut érigé ainsi qu'en l'honneur de Marguerite de 
Rohan, qui avait succombé quelques mois avant lui. 

Fier de sa race et fort de son épée, OUvîer de 
Clisson incame en sa personne le type du « Baron 
fépdal ». 11 ne reconnut jamais aucun maître, dit 
l'histoire. Mais quel reproche encourt-il ? Sa vie 
durant, il n'a cessé de servir cette belle devise qui 
était celle de son nom : Pour ce qu'il me plest ! 

Lorsqu'en 1375, le duc ayant été dépossédé, 
Clisson fut nommé Lieutenant du roi en Bretagne, 
pour le pays Gallo, il s'occupa de restaurer les 
anciennes fortifications de Josselin. Les épaisses 
murailles et les ouvrages extérieurs de défense, 
restés intacts jusqu'à nous, remontent à cette 
époque. Ils offrent le type de l'architecture militaire 
du moyen âge. Les douves entourant la ville forte 
et alimentées par l'Oust furent creusées et agrandies ; 
les tours augmentées et renforcées. Il construisit 
même sur le côté sud de l'enceinte du château un 



78 ESSAI SUR LB PORHOËT. 

donjon formidable par sa masse et son élévation, qui' 
formait l'Ame de la défense ; il avait, dit^n, 280 pieds 
de circonférence et autant de hauteur. 

L'écusson du connétable accolé A celui de Mar- 
guerite de Rohan, le tout assez fruste, se voit encore 
dans la cour du chAteau, au-dessus d'une des portes 
du rez-de-chaussée ; ainsi que des M couronnés 
représentant les initiales de la même épouse. 

L'église Notre-Dame conserve également l'em- 
preinte mise par le connétable. Il y fit faire différents 
travaux importants de reconstruction. Au sud de 
l'édifice se trouvait une chapelle particulière, où sa 
famille et lui venaient entendre la messe, quand il 
ne leur convenait pas d'y assister au chAteau. Elle 
était sous le vocable de sainte Marguerite, patronne 
de la dame de Porhoët. « Le caractère architec- 
tonique de cette chapelle, rapporte Cayot Delandre 
dans son ouvrage Le Morbihan, est certainement 
antérieur au xv» siècle, et d ailleurs sa dénomination 
traditionnelle, qui en attribue l'usage à Clisson, 
mort en 1407, suffirait seul pour fixer les idées à 
cet égard. Les murs, continue-t-il, sont couverts de 
fresques (1) qui paraissent se rapporter au xiv* siècle^ 
mais que le badigeon masque depuis longtemps. 

Cl) II écrit en 1847. 



CHAPITRE IV. 79 

Quelques parties seulement de ces peintures repa- 
raissent aujourd'hui. » On y voyait entre autres des 
Marguerites ; des M couronnés ; et la devise dé 
Clisson : Pour ce qu'il me plest, plusieurs fois, 
répétée ; la légende de sainte Marguerite et du 
dragon, Tentrée des rois mages à Bethléem ; im 
château féodal... etc. Des M se trouvent également 
dans les meneaux des claires-voies en pierre, qui 
forment séparation entre cet oratoire et le chœur. 

Une autre chapelle, située au nord et dédiée à 
sainte Catherine, remontait à Fépoque romane. 
Après avoir servi de décharge pour l'église dans le 
courant du xix« siècle, elle est aujourd'hui la chapelle 
de Notre-Dame du Roncier ; et malgré toutes les 
transformations qu'elle a subies, conserve encore 
les piliers romans qui l'ont toujours séparée du 
chœur. 

« Là, se trouve une peinture à fresque des plus 
curieuses, dit le même auteur; c'est une danse 
macabre à demi efiPacée, mais dont on distingue 
encore huit figures de grandeur naturelle, réunies 
deux à deux : la mort, sous la forme d'im squelette, 
entraînant dans sa ronde le personnage qu'elle est 
venue saisir à Timproviste au milieu des joies ou 
des misères de la vie. » Ce genre de peinture, qui 
représente d'une manière à la fois grotesque et 



80 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

terrible le symbole de Tégalité devant la mort fut 
autrefois très répandu ; c'était en quelque sorte 
une protestation cruelle et railleuse contre Tordre 
social, tel que Tavait fait le moyen âge. La repré- 
sentation de cette « danse macabre » aurait pris 
naissance en Allemagne vers la fin du xiv« siècle 
et serait apparue en France dans le cours du 
xv« siècle (1). 

Les fresques que nous signale Cayot Delandre 
ornèrent les chapelles latérales, sans doute à la fin 
des travaux efiPectués par Clisson. La reconstruction 
de Téglise dura environ un siècle. Le connétable 
commença en 1390 par le chœur, les chapelles, la 
nef. Ceci était terminé à sa mort ; en avant de 
Tautel, Ton mit son tombeau avec celui de sa 
seconde femme (2). Sur le sarcophage en marbre 
noir, surmonté de leurs statues couchées, on y lisait 
rinscription suivante en lettres gothiques : Chi gut 
noble et puissaiU seigfieur, monseigneur Olivier de 
Clisson, jadis connestable de France, seigneur de 
Clisson, de Porhoëi^ de Belleville et de la Garnache^ 



(1) L*inlérieur de la chapelle de Kermaria-*aa-Isquit (Gôtes-du* 
Nord) nous offre encore un exemple de ces curieuses danses 
macabres. On y compte Jusqu*à quarante personnages de tous les 
rangs de la société. 

(2j Deux dalles, portant les noms de Clisson et de Marguerite de 
Rohan, indiquent aujourd'hui remplacement primitif. 



CHAPITRE IV. 81 

gui trépassa en apvril le jour Saint Jorge^ tan 
M, ce ce et VIL Priez Dieu pour son âme. Amen. Ce 
monument à la gloire du connétable, œuvre remar- 
quable, fut honteusement mutilé en 1792(1). Restauré 
en 1856, il fut placé tour à tour, dans la chapelle nord 
et dans la chapelle sud, où il est exposé maintenant. 

Les Rohan continuèrent les travaux. On travaillait 
eftectivement au portail de l'ouest en 1461 et 1470, 
comme l'attestent deux inscriptions gothiques gravées 
sur les contreforts de chaque côté de la grande 
porte. La première, à droite, est ainsi conçue : 
Cesies chapelles fust comances le v" jour de octoubre 
M.IUI^ LXI ; au-dessus se trouve Técusson de Jean 
de la Bouère, abbé de Saint-Jean des Prés. La 
seconde, à gauche, porte ces mots : Cest pignon 
fut comence le xxix* jour de may fan M.CCCC LXX, 

Sur un contrefort du transept nord, c'est-à-dire 
de la chapelle de Notre-Dame, on lit : Cest pignon 
fut fait en tan CCCC. IIII". X/(I49I). A l'extrémité 
de ce transept se trouvait un enfeu correspondant 
à un autre qui se voit au sud. Sur Tintertransept 
devait s'élever un clocher central (2). 

(1) Ea même temps que furent violés deux cercueils en plomb 
trouvés dans un caveau, sous une des arcades entre le chœur et la 
chapelle Sainte-Catherine. 

(2) Les registres nous apprennent en effet que le 26 juillet 1651 eut 
lieu la bénédiction d'une cloche, à mettre dans le petit clocher entre 
le grand clocher et celui de l'horloge. 



82 ESSAI SUR LE PORHOËT. . 

Olivier de Clisson, de sa première femme, Cathe- 
rine de Laval (fille de Guy de Laval et de Béatrix 
de Bretagne) avait eu deux filles : Béatrix, l'aînée 
et principale héritière, qui épousa Alain VIII, 
vicomte de Rohan; puis Marguerite, qui le 20 janvier 
1388 se maria à Jean de Chatillon, comte de Pen- 
thièvre, fils de Charles de Blois. De son second 
mariage avec Marguerite de Rohan, veuve de Jeaa 
de Beaumanoir et fille d*Alain VII de Rohan, il 
n'eut pas d'enfants. 

Béatrix, appelée comtesse de Porhoët, eut en par- 
tage le fief paternel, dont elle portait le nom, et les 
Rohan, en recevant ce domaine au commencement 
du xv' siècle, deviennent seigneurs et maîtres de 
presque tout l'ancien Porhoet, qu'ils conservèrent 
ainsi jusqu'à la Révolution ; l'éclisse d'autrefois 
était aujourd'hui le fief principal. 

La fortune du nom de Rohan devait aller toujours 
en grandissant. Comme descendants directs des 
premiers comtes, ils furent reconnus princes de la 
Maison de Bretagne et à ce titre jouirent en France 
du rang et prérogatives de princes de naissance, 
de princes par définition d'État, de princes étran- 
gers. Moréri, La Chenaye Desbois dans son « Dic- 
tionnaire de la Noblesse » et d'autres ont fourni 
toutes les preuves concernant leur illustre origine. 



CHAPITRE IV. 83 

Bien que nous nous soyons déjà attachés à 
démontrer que Guéthenoc et ses successeurs ont été 
considérés comme issus de maison souveraine, il nous 
paraît intéressant d'appuyer cette affirmation de 
quelques témoignages indiscutables. 

Différentes controverses se sont élevées sur une 
charte de 1188, dans laquelle le comte de Bretagne, 
en présence des Etats assemblés à Nantes, aurait 
reconnu officiellement l'origine souveraine des 
Rohan, plutôt des Porhoët. Justification en serait 
faite par un acte de reconnaissance « qui se trouve 
aujourd'hui, dit Moréri (1), dans la Chambre des 
Comptes de Bretagne, et qui a été décïjaré authen- 
tique par le roi Louis XIV, séant en soiî conseil le 
I" avril 1692 (2). » Mais, ce qui est précis et n'ac- 
crédite aucun doute, ce sont les textes mêmes, qui 
nous révèlent sur ce point, l'opinion de nos ducs et 
des rois de France. Par exemple, dans des actes de 
1420, le duc Jean V déclare le vicomte de Rohan 
« issu des fils de la maison de Bretagne » et recon- 
naît Charles de Rohan, sire de Guémené, pour 
« être du sang et lignage des ducs de Bretagne ». 
Plus tard, en 1440, le duc François P' dit que le 



(1) Moréri écrit en 1732. 

(2) Les historiens modernes les plus documentés considèrent cette 
charte comme fausse et ne discutent même pas son authenticité. 



84 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

vicomte de Rohan « est issu le plus droitement de 
toute ancienneté de la ligne royale de Bretagne ; 
qu'il est descendu le plus près du sang et maison 
de Bretagne » et le qualifie « Prince de la maison de 
Bretagne ». Artus III, dans des lettres de 1457, 
reconnaît « la proximité de lignage et amour con- 
sanguin entre lui et le vicomte de Rohan ». Les 
Etats de Bretagne, eux-mêmes, dans un mémoire 
présenté au roi, en 1748, disent que les Rohan 
« sont issus des ducs de Bretagne, qu'ils sont princes 
de Bretagne et que, comme tels, ils possèdent un 
des premiers apanages du duché. » 

Les rois de France ne témoignèrent pas moins en 
leur faveur. Dans les titres d'érection de la terre de 
Guémené en Principauté (1547), vérifiés et enre- 
gistrés au Parlement en 15i9, Charles IX reconnatt 
« la maison de Rohan comme maison de Prince ». 
Henri III, dans les lettres patentes qui érigent le 
comté de Montbazon en duché-pairie, déclare que 
la « maison de Rohan descend des rois de Bretagne ». 
Même remarque à faire lors de l'érection de la 
baronnie de Frontenay en duché-pairie, pour Ben- 
jamin de Rohan, en 1626, et de la terre de Soubise 
en principauté, en 1667. Enfin, dans les provisions 
de Maréchal de France accordées au prince de 
Soubise en 1758, le roi Louis XV dit en propres 



CHAPITRE IV. 85 

termes : « que la maison de Rohan, tant par son 
origine que par ses alliances, non seulement avec la 
maison royale de France, mais encore avec toutes 
les maisons souveraines d'Europe ( 1 ) , a été jugée digne 
par les rois, ses prédécesseurs, et par lui, de jouir 
dans le royaume du titre, rang et qualité de prince 
et des honneurs dont jouissent les autres princes de 
maison souveraine en France (2). » 

L'acquisition du vieux fief familial, le comté de 
Porhoët, éleva la maison de Rohan à Tapogée de 
sa puissance en Bretagne. Qu'aurait-elle eu à envier 
aux souverains mêmes ? Son rang égalait celui des 
premiers princes du royaume ; son autorité s'éten- 
dait sur une grande partie du centre de la pénin- 
sule, l'ancien territoire des juveigneurs de Rennes, 
enfin dépouillé de ses forêts et entièrement peuplé. 
La légitime fierté des Rohan est toute dans cette 
devise : Roi ne puis, prince ne daigne , Rohan 

(1) Dès le XI* siècle, les Porhoët contractèrent différentes alliances 
avec la Maison régnante de Bretagne, et plus tard les Rohan furent 
considérés dignes des alliances les plus glorieuses. En 1377, Jean I, 
▼icomte de Roban, épousa en secondes noces Jeanne de Nayarre, 
fille de Philippe III, roi de Navarre, et de Jeanne de France. 11 
deyint ainsi beau-frère de Philippe de Valais, de Pierre d* Aragon et 
de Charles II, roi d« Navarre, et on lit, à Toccasion de ce mariage, 
dans les registres du Parlement de Paris, dans Tannée 1413, que r« la 
fille du roi de Nayarre fut mirablement mariée, le vicomte de Rohan 
étant moult grand seigneur en Bretagne, du lignage des rois de 
Bretagn*. » 

(2) Les preuves ci-dessus sont empruntées à La Chenaye Desbois. 



86 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

suisl (1), leurs hautes aspirations dans ces mots, 
écrits en lettres de granit sur le fronton de leur 
château seigneurial : A Plus (2). 

Le rôle de Josselin ne diminua pas d'importance 
avec de tels maîtres. Porhoët reste toujours pour 
eux le premier de leurs fiefs, ils en relevèrent le 
titre, et le château, dont ils firent une merveille de 
la Renaissance, fut leur résidence préférée. 

S'il faut en croire Moréri, les comtes de Porhoët, 
d'après un acte de 1092, auraient eu, dès cette 
époque, leurs propres barons comme les comtes de 
Champagne, de Flandre et autces souverains de 
leur temps. Leurs descendants augmentèrent encore 
les charges civiles et militaires dans leur entourage. 
Certeins de ces officiers étaient chargés des juridic- 
tions seigneuriales, les autres de la sûreté des villes, 
d'autres éteient occupés du service personnel du 
comte ; tous ceux-ci, joints aux principaux vassaux, 
composaient une cour nombreuse au titulaire du 
fief. Josselin, devenu le siège féodal des Rohan, fut 
un centre actif et florissant. 

Les domaines des Rohan, qui s'étendaient sur les 
*vêchés de Vannes, Saint-Malo, Saint-Brieuc, et 

(1) Réponse que fit l'un des leurs au roi Henri IV. 

(2) L'origine de ces mots fut le cri de guerre des premiers seigneurs 
«de cette famille : A Plus Rohan. 



CHAPITRE IV. 87 

formaient au milieu du duché une véritable province, 
avaient une coutume qu'on nommait TUsance de 
Rohan. Mais le Porhoët avait sa coutume particu- 
lière. Les petits seigneurs, inspirés de leurs suze- 
rains et jaloux de leur indépendance, dès les premiers 
temps, voulurent donner, suivant leurs moyens, la 
souveraineté à leurs seigneuries. Ils légifèrent en 
fixant des usances particulières à certaines villes et 
À certains territoires. 

Les comtes de Porhoët, dont les aïeux avaient été 
souverains eux-mêmes, ne manquèrent pas d'exercer 
le pouvoir législatif dans le territoire du comté, 
pour signaler la noblesse prééminente de cette sei- 
gneurie. 

Malgré les démembrements du comté de Porhoët, 
il y avait encore, au xvîi' siècle, cinquante-deux 
paroisses sujettes au guet du château de Josselin. 
Cette sujétion nous montre que les anciens comtes 
avaient le droit de faire la guerre, d'assembler leurs 
vassaux comme soldats nés, et de faire monter la 
garde chez eux comme de propres souverains. 
L'usance, croirait-on, devait s'étendre au moins à 
toutes les paroisses sujettes au droit de guet. Il 
n'en est rien. Du moins, si primitivement il en était 
ainsi, au xviii* siècle elle n'est en vigueur que dans 
les paroisses de Guégon et Coëtbugat, évéché de 



88 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Vannes, en ce qui relève des fiefs de Maugrenier 
et de Briend-Maillard, juveigneuries de Porhoët ; 
Helléan, la Croix-Helléan, Guillac, Lanouée, Mohon, 
La Grée Saint-Laurent, la Trinité, évêché de Saint- 
Malo ; et au village de la Villejégu, en la paroisse 
de Plemieur, évéché de Saint-Brieuc (1). 11 y a 
même certains villages, dans ces paroisses, qui ne 
suivent pas Tusance ; elle ne se pratique même pas 
dans les quatre paroisses de la ville de Josselin. 

Les singularités d'alors ne peuvent s'expliquer 
que par l'introduction lente de l'usage général du 
duché, là où, par suite de l'oubli et des boulever- 
sements de la guerre, la tradition ou la loi, si 
jamais elle fut écrite, se perdit. Elle ne subsista 
que dans de rares milieux. 

11 est impossible de connaître l'époque où fut 
fixée l'usance de Porhoët; vraisemblablement son 
introduction eut lieu, comme tant d'autres, avant la 
très ancienne Coutume de Bretagne qui parle des 
usements particuliers et qui en commande l'obser- 
vance. On eut soin de faire rédiger par écrit la 
Coutume Générale en 1330, mais on n'eut point la 
même attention pour les usements particuliers. Dans 

(1) A cettd nomenclature, il faudrait, semble-t-il, ajouter la Chèze. 
Dom Morice nous dit : « Dans les juridictions de Josselin, la Chèze 
et la Trinité, Ton suit Tusement de Porhoët ; dans celles de Pontivy, 
Gouarec, Rohan, Loudéac, Fusement de Rohan. 



CHAPITRE IV. 89 

ces conditions^ lorsqu'on était appelé à régler des dif- 
férends suivit ces usements, il fallait parfois avoir re- 
cours à des témoins qui pussent rappeler la tradition. 

Nous ne connaissons Fusance de Porhoét que par 
les arrêts de différentes époques. Ceux recueillis 
par Pierre Hevin en 1659 nous éclairent beaucoup 
sur ce sujet. En 1737, Duparc Poullain livra égale- 
ment au public une importante rédaction sur les 
vraies dispositions de cette usance. 

Telle est d'après celui-ci, dit l'auteur anonyme 
des « Observations sur le comté de Porhoët et sur 
t usance de ce même comté (I) », Tusance touchant les 
partages entre roturiers : « Entre personnes du 
Tiers Etat, en proche et arrière fief, pour le partage 
de leurs héritages roturiers situés auxdites paroisses, 
Tusement est que les enfants mâles et descendants 
d'eux, en quelque nombre qu'ils soient, prennent 
les deux tiers des terres du patrimoine de père et 
mère, même des acquêts appropriés par justice ou 
par laps de temps ; et les filles aussi en quelque 
nombre qu'elles soient, le tiers seulement du patri- 
moine et acquêts appropriés. Et pour le partage 
avantageux ci-dessus, il se fait trois lotties en quelque 
nombre que soient les enfants, l'une desquelles est 
choisie par les mâles, et après les filles ou la fille, 

(1) Manuscrit dû à l'obligeance de M. Tabbé Chauffier. 



90 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

une ou plusieurs choisissent une lottie des deux 
restantes et la troisième demeure audit mâle, sauf 
après aux uns et aux autres à subdiviser par 
entreux. » En un mot et suivant l'expression plus 
claire de Bourdot de Richebourg (1) : « Au partaçe 
des terres roturières entre roturiers en ligne directe, 
les cohéritiers masles, en quelque nombre qu'ils 
soient, emportent les deux tiers et les filles le tiers 
en quelque nombre qu'elles soient. » 

Le même auteur continue « En succession colla- 
térale entre personnes roturières et pour héritages 
de mesme qualité, les masles succèdent les uns aux 
autres auxdits héritages, à l'exclusion des filles et 
les filles pareillement succèdent les unes aux autres, 
à l'exclusion des masles. » Pour ce qui concerne les 
biens meubles et les biens nobles, ils sont partagés 
suivant la Coutume Générale ; ceux-ci, pour la raison 
que Tusance n'a d'expression, ni d'application que 
pour les terres et les héritages roturiers. 

Examinons maintenant quelle fut la constitution 
du Porhoët pendant tout le moyen âge au point de 
vue ecclésiastique, judiciaire et administratif. 

La disposition ecclésiastique en est fort com- 
pliquée. Par suite de sa situation au centre de la 

(1) Nouveau Coutumier Général, t. IV, p. 413. 



CHAPITRE IV. 91 

Bretagne, où convergent les différents diocèses, le 
Porhoét s'étend sur trois de ces diocèses, ceux de 
Saint-Malo, de Saint-Brieuc et de Vannes. L'Oust 
servait de limite entre le sud et le nord ; Vannes 
d*un côté et Saint-Malo, Saint-Brieuc de l'autre. Ces 
deux derniers étaient séparés par TArguenon et une 
ligne joignant Jugon au confluent de la Lié et de 
l'Oust. Nous ne parlerons de TArchidiaconé et du 
-doyenné de Porhoôt qu'en ce qui concerne spéciale- 
ment le fief qui nous occupe. 

Il faut rappeler tout d'abord que les diocèses 
étaient alors, ordinairement divisés en archidiaconats 
et ceux-ci en doyennés. Le doyenné était un grou- 
pement régulier de paroisses soumises à la direction 
d'un archiprêtre ou doyen (I). Quelquefois les archi- 
diaconats et doyennés subsistaient les uns sans les 
autres, comme Ton pourra s'en rendre compte sur 
la carte. L'époque où apparedssent ces institutions 
du clergé séculier reste ignorée ; elles sont en tout 
cas fort anciennes. Les circonscriptions diocésaines 
à limites fixes ayant été reconnues au ix^ siècle, 
l'organisation complète de leurs divisions peut donc 
être considérée comme remontant au x« ou xi" siècle. 

(1) Les attributions des archiprôtres consistaient à suryeiller les 
paroisses placées dans leurs circonscriptions et les prêtres attachés 
à. ces paroisses. Ils jouaient à l'égard de ces derniers le r6Ie de 
représentants^ de subdélégués de Tévéque. 



92 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

n est impossible d'établir la liste complète des 
subdivisions ecclésiastiques des anciens diocèses si 
l'on ne prend pas pour base ime époque déterminée. 
L'on comprendra aisément que dans un laps de 
temps aussi considérable, des modifications sans 
nombre se produisirent parmi les localités : « Les 
unes, simples villages ou frairies à l'origine, 
deviennent, avec le temps, trêves à l'approche de la 
Révolution ; il en est dont l'état se modifie jusqu'à 
trois ou quatre fois, par suite du déplacement de la 
population, de l'érection en paroisses des anciennes 
chapelles seigneuriales ou prieuriales, englobant à 
leur tour leurs paroisses primitives, de rivalités et 
de procès qui en résultaient et dont quelques-uns 
duraient encore en 1789. » L'on s'exposerait à de 
graves erreurs en essayant de composer un 
pouillé (1) à l'aide d'éléments de diverses époques. 

M. Rosenzweig, l'éminent archiviste du Morbihan, 
grâce aux importants travaux qu'il fit sur les docu- 
ments datant du xii*" au xviu* siècle, a réussi à 
établir un pouillé ^qu'il a rapporté, pour plus 
d'exactitude à une date fixe, l'année 1789. 

Le doyenné de Porhoët, diocèse de Vannes (2), 
dont le siège était à Saint-Servan, comprenait 

(1) État général des bénéfices ecclésiastiques d*une province. 

(2) Le diocèse de Vannes était partagé en neuf circonscriptions : 
les doyennés de Carentoir, de Porhoêt, de Guémené-Quingan... etc. 



CHAPITRE IV. 93 

trente-cinq paroisses. A part cinq petites trêves ou 
paroisses, elles appartenaient toutes à la vicomte 
de Rohan ou au comté de Porhoët (1). 
Voici celles comprises dans ce comté : 

Sainte-CSroix de Josselin, dont nous avons vu la 
fondation . 

Chiéhenno — appelé tour à tour Mouater-Guezenou en 
1260, Mousler-Guehenou en 1387, Mouzloir-Gnéhenno en 
1429 (2), enfin Guéhenno en 1501, eut une origine monas- 
tique comme Tindique le nom Moustoir. Ce Moustoir peut 
bien avoir existé au Moot (Mont Guéhenno où se trouvent 
actuellement les restes de deux chapelles), comme 
Tindique la tradition. 

Lu chapelle es Brières ou Notre-Dame des Briéres était 
une trêve de Guéhenno; après avoir été tout d^abord 
paroisse sous le simple nom de Capella (1387). 

Gmgael — dont le nom signifie : Tertre, petite butte , 
a été un démembrement de Guéhenoo. Les limites de 
celte dernière paroisse venaient à toucher pour ainsi dire 
Gruguel. Le château des Timbrieux et quatre ou cinq vil- 
lages circon voisins au cœur du territoire furent, jusqu*à 
la RévolutioD, de Guéhenno. G*est en 1258 qu'on trouve la 
première mention de Kreugel daas les archives du cha- 
pitre de Vannes. 

Billio^ sa trêve, ou plus justement sa paroisse sœur, doit 
son origioe aussi à un monastère, car son nom était jadis : 
Moustoir BUliou (1387. 1422). A l'établissement ruiné, peut- 
être par les Normands, succéda une petite paroisse (fin du 
X* ou commencement du xi^ siècle). Avant la fin du 

(1) Les trêves, du breton tref, étaient les églises succursales 
démembrées de la paroisse. On les appelait aussi fillettes ou feil- 
lettes. 

(2) Abb. de L^nvaux, Chap. Vannes, Chàc. de Talliouet, Saint- 
Martin de Josselin. 



94 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

XT« siècle, Billio fut réuni à Gruguel. Il y eut un desserrant 
pour les deux églises ; celui-ci finit par s*établir à Gruguel 
et conserva Billio comme trêve. 

Plumelec — qui signifie paroisse (Plou, Plu, traduction 
de « peuple ») de Saint-Melec. Très ancienne localité ; 
figure déjà dans la fondaiion du monastère de Locmaria 
mentionné en 1146 comme prieuré de femmes dépendant 
de rabbaye de Saint-Sulpice de Rennes (1). Sur le même 
territoire, un autre établissement religieux, maisd*hommes, 
était le prieuré de Saint-Julien de Cadoudal, appartenant 
aux Trinitaires (2). 

Saint' Aubin. — Sanclus AlbinxAS (1387) — considéré 
comme trêve bien qu'uni seulement (vers le milieu du 
xy^ siècle] à Plumelec, avait été paroisse indépendante 
depuis le xii« siècle environ (3). 

CdUac n*a jamais constitué une trêve, malgré son titre de 
« bourg de Callac ». Il fut toujours desservi par Plumelec. 

Saint^Jean-Brevelay. — Son église fut fondée par 
des émigrants bretons qui, au xp siècle, rapportèrent de 
Beverley, en AngU terre, des ossements de saint Jean, 
évêque d'York (72i). Sain^/ean 5et;er% devint Saint-Jean 
Brevelay. Au village de Moustoir existait sans doute un 
établissement monastique ruiné par l'invasion nor- 
mande (x« s.). 

Guégon. — Le style roman de certaines parties de son 
église révèle son antiquité. L'Abbaye de la Joie nous fait 
connaître Guezgon en 1283. 

Cette paroisse avait comme trêves : TregranteuTy qui 
s'écrivait jadis Tregarantec ou Tregarenteuc et était sans 

(1) Un vicomte de Porhoët fut le fondateur de Locmaria. Le 
prieuré rendait aveu au titulaire de la vicomte. 

(2) Saint Julien avait été fondé par un seigneur de Cadoudal et 
annexé, ou plutôt soumis à la maison de Rieux avant 1346. 

(3) Le motif de ces réunions de paroisses était le plus souvent 
une amélioration nécessaire à la situation du recteur. 



CHAPITRE IV. 95 

doute primitivement une simple chapellenie de la sei- 
gneurie de Tregranteur. L'étytnologie de ce nom breton 
serait : Treiz, passage ou pas ; garanlec, amoureux : Passage 
ou pas de l'amoureux. Ses registres depuis 1657 ont été 
conservés. — Coët-Bugat, voulant dire en breton : le bois 
de la lessive. Cette trêve remonte à un prieuré dépendant 
de Saint- Jean des Prés de Josselin. En 1387, elle avait le 
titre de paroisse, le prieur en était recteur. Malgré une 
interruption au xvi® siècle^ les chanoines réguliers con- 
servèrent ce bénéfice jusqu'à la Révolution. 

Lantillac — localité très ancienne qui donna son nom 
à une famille déjà éteinte en 1300. 

Quilly — ayant fait partie comme trêve, au xi^ siècle, de 
riœmense territoire de Seront [Quilir locus, — Cart. Red., 
1082) (i); fut érigé en paroisse dans le courant du 
xv* siècle. 

Le Roc Saint-André — ancienne trêve également de 
Serent ; ne fut érigée en paroisse qu'au commencement du 
xvu* siècle. 

Lizio — dont Tétymologie se rattache au vocable même 
de réglise dédiée à Notre-Dame du Lis. Détaché de Serent. 
Le nom d'un village. Le Temple, garde le souvenir d'un 
établissement de Templiers. La tradition leur attribue 
aussi l'ancienne chapelle Sainte- Catherine. 

Saint-Servan — qui semble avoir été choisie, lors de 
la restauration religieuse du xie siècle, comme cheMieu 
du doyenné de Porhoêt, à cause de l'hermitage et du tom- 
beau de saint Gobrien, très vénéré à cette époque (2). 

(1) La primitive paroisse de Serent comprenait comme trêves : 
Quilly, Saint-Ouyomard, Lizio, le Roc Saint- André. Le territoire 
propre de Serent dépendait de la seigneurie de Malestroit. 

(2) « En 717, saint Gobrien, évéque de Vannes, honoré par Dieu du 
don de guérir du mal des Ardents, quitta son siège et vint ici (près 
de Saint-Servan et sur les bords de POust} chercher une solitude 



96 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Peut-être môme le siège de la paroisse fut-il tout d^aèord 
au village qui s'éleva autour de Toratoire. 
Saint-Servant vient de SancttMS Servaeius (1387). 



De l'autre côté de TOust, les paroisses du Porhoêt, 
dépendant de Saint-Malo, étaient d'un doyenné qui 
avait son siège à Lanouée (1) et faisait partie de 
Tarchidiaconé de Porhoët. C'étaient : 

Les trois paroisses nord de Josselin : Notre-Dame 
du Roncier, Saint-Martin et Saint-Nicolas. 

Giiillac — remontant probablement au viii^' siècle. On 
en trouve trace plusieurs fois dans le courant du ix« siècle, 
sous le nom de GiUac ou Gtliac (Cart. Red.) son territoire 
était alors très étendu. L'appellation du Temple, laissée à 
un village, porte à croire que les moines cbevaliers eurent 
là une propriété, comme du reste TAbbaye aux Oies révèle 
la présence d*un établissement ayant probablement appar- 
tenu à Tabbaye de Redon. Saint-Jean des Prés de Josselin 
se trouve dans Guillac. On désignait aux xvii» et 
xviii« siècles, sous le nom de Glac, une étendue de pays 
comprenant le Bas-Glac (paroisse de Guillac) et le Haut- 
Glac (qui renfermait les paroisses de la Groix-Helléan et 
d'Helléan). 

Montertelot^ sa trêve depuis le xvi« siècle, avait été pri- 
mitivement paroisse. Son nom aurait été tiré de Mouster- 
SairU'Laur, Elle était du doyenné de Beignon, arcbidiaconé 
de Porboet. 



pour se préparer à la mort. Il y reçut les derniers sacrements de la 
main de son successeur, rendit son âme à Dieu le 3 novembre 725 et 
fut inhumé dans son territoire. » L. M. 

(1) Taupont était la seule paroisse du doyenné de Lanouée indé- 
pendante du Porhoët ; elle faisait partie de la seigneurie de Ploêrmel. 



CHAPITRE IV. 97 

La^ Groiz-Helléan — détaché ainsi qu'Helléan, de 
Guillac, coDserva jusqu'à la Révolution la dénomination 
de Haut-GlaOy tandis que Guillac était le Bas-61ac.G*étalt 
un prieuré- cure dépendant de Saint-Jean des Prés. 11 lui 
fut adjoint, vers le milieu du xviii» siècle, non comme 
trêve, mais comme paroisse unie, Helléan^ vieille paroisse 
dont les registres remontent au xvi* siècle. 

LAnouée — qui s'écrit Lanoés dés 820, puis Lannois 
(11)82), Lamioes (1239) (Gart. Red.), semble dériver de Lan, 
territoire, et noez, nu. Fut érif?é en chef-lieu de doyenné 
vers le xi« siècle. Eut comme trêve Pommeleuc. Le village 
des Forges n'eut de chapelle que vers 1750, peu après 
rétablissement des forges dues à Louis-Marie do Rohan 
Chabot. 

Pommeleac — primitivement Ponl-Meleuc ou Melec, 
où s'établirent des chevaliers de Saint-Jean de Jéru- 
salem, fut longtemps trêve de Lanouée, puis érigé en 
paroisse (1), desservie par un recteur, prieur de Saint-Jean 
des Prés. 

Mohon — qu'on trouve sous les noms de Muthon, en 
1055, Mochon, en 1019 (Gart. Red.), tire sa dénomination de 
Moh, porcs, et dériverait, selon Deric, de Moëhon, lieu des 
cochons (2). Sur son territoire, Bodieuc évoque le souve- 
nir d'un retranchement féodal connu sous le nom de camp 
des Rouets (une tradition veut même qne Bodieuc ait été 
jadis une ville qui portait le nom d'Alenczon). Deux 
prieurés : Tun, la Trinité de Bodieuc, de Tordre de Saint- 

(1) La paroisse de Pommeleuc n*a subsisté que Jusqu'à la Révolu- 
tion, aujourd'hui il D*y a qu^une simple chapelle. 

(2) Les habitants de cette région faisaient jadis un grand commerce 
des animaux quUls nourrissaient avec des glands de la forêt de 
Lanouée. En 1255, Caro de Bodégat Jouissait, par concession du 
vicomte de Porhoët, du droit d'envoyer soixante porcs paître dan« 
la susdite forêt. . . et il ne devait pas être seul à jouir de c^t avant^m^e, 

7 



98 ESSAI SUR LÉ PORHOËT. 

Jacut (1), mentionné en H99; l'autre, à Bodégat, appar- 
tenant à Saint- Jean des Prés. 

Mohon eut pendant un temps comme trêve, La Grée de 
Saint*Laurent et comme simple cbapellenie Saint-Malo 
des Trois-Fontaines (paroisse en 1846). 

La Grée Saint-Laurent — signifiant : hauteur de 
Saint-Laurent (Grée ou Créh : hauteur) ; vraisemblablement 
démembrement de Lanouée, fut longtemps trêve de Mohon 
avant d'être paroisse. 

Loyat — mentionné comme paroisse en 1055, dépendait 
de Saint- Jean des Prés et avait un prieuré, Saint-Thomas. 
L*orlhographe en a souvent varié ; on voit Loiat^ 1082 ; 
LouecU^ Louyeaty Lœat au xv« siècle. 

Sa trêve de dourhel eut un monastère, comme l'indique 
une charte de 1131 : Gurhel monasterium. 

Guilliers — autrefois, date du x* siècle, desservi par 
un chanoine régulier qui prenait le titre de prieur^recteur. 
Berceau des vicomtes de Porhoët qui eurent comme pre- 
mière résidence Ghâteau-Tro. 

Brignac — donné comme paroisse au xni^ siècle à 
rabbaye de Paimpont qui y fonda un prieuré sous le 
vocable de saint Barthélémy ; le prieur devint prieur- 
lecteur. 

Menéac — qui existait au commencement du xi« siècle 
{Miniac, Miniacum), reufermait deux prieurés : celui de Me- 
néac (appelé parfois de Montfort ou de Montsoucy) relevant 
de Saint-Martin de Josselin, et celui de Saint-Yguer ou 
Yguer, douné comme dépendance de Tabbaye du Mont- 
Saint-Michel, mais qui appartenait en 1789 à Tabbaye de 

(1) M. Piéderrière a trouvé, dans des titres du zi« siède, conflrma- 
lion de la fondation, par le comte de Porhoët, d'un prieuré élevé 
auprès des battes féodales de Bodieuc, en l'honneur de saint Clair, 
à raison de son passage dans cette région. 



CHAPITRE IV. 99 

Lantenac. Les propriétés religieuses, sur son territoîire, 
étaient nombreuses et son bénéfice très divisé (1). 

Sa trêve, Evriguet, simple chapellenie d*abord, érigée 
vers 1658. 

Merdrignac— sur remplacement d'une ancienne ville 
croit-on. En réalité, fondé à une époque reculée, par la 
maison seigneuriale du lieu, résidant au château de la 
Vieille-Cour (xi«, xii» siècle). Prieuré de Sainte-Brigitte, 
aux chanoines Génovéfains; donné à Paimpont en ilOO 
par Guy de Merdrignac. 

Gomené — d'origine très ancienne, comme Findique le 
nom lui-même, qui signifie Tête du Mené. L'église parois- 
siale est dédiée à la Vierge sous le vocable de Notre-Dame 
du Mené. 

Il convient de ne pas omettre Campénéac, seule 
localité du comté, avec la trêve de Montertelot, 
égarée dans le doyenné de Beignon, archidiaconé 
de Porhoët. 

Campénéac figure dès 840 dans le Cartulaire de Redon 
sous le nom de KempénlcLC. 

(1) Le bénéfice îles paroisses était le plus souvent très réduit par 
les affectations étrangères. C'est pourquoi, pour subvenir aux frais 
d^une cure, dut-on souvent réunir deux paroisses. Voici ce qui se 
passait pour partager les dîmes de Ménéac en 1679. « On prélevait 
d*abord vingt-quatre quartiers de huit boisseaux chacun et on en 
donnait quatre à Tabbaye de Saint-Jean des Prés, quatre à Fabbaye 
de la Joie, deux à la fabrique de Ménéac, quatre à la fabrique de 
Saint-Jean du Mené et dix à des seigneurs. Ces prélèvements faits, 
le reste des dîmes se partageait : un tiers au comte de Porhoët, un 
tiers à Tabbé de Lantenac et on ti«»r8 à répartir par portions égales 
entre Tablié de Saint-Jean des Prés, le prieur de Saint-Martin de 
Josselin et le recteur de Ménéac. » La part de ce dernier devait être 
a«sez réduite. 



2r.4G71B 



100 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Quant au diocèse de Saint-Brieue, que la rivière 
du Lié di\dsait en deux archidiaconés : Penthièvre 
et Goëllo, il formait une pointe avancée jusqu'au 
centre du comté. Langourla, Méiillac, Saint- Vran, 
situés dans ce diocèse (Archidiaconé de Penthièvre) 
se rattachaient aux paroisses que nous venons 
de mentionner en détail et cet ensemble formait la 
châtellenie de Josselin. 

Toute la partie du même évêché, au sud d'une 
ligne de jonction entre Saint-Gilles du Mené et Alli- 
neuc, constituait le territoire de la Chèze, la seconde 
châtellenie du Porhoët. Les principales dépendances 
de la Ghèze étaient : Uzel, Saint-Hervé, Grâce, 
Saint- Thelo, Trevé, la Motte, Saint-Sauveur le 
Haut, Le Preneaaaye, Lanrenet, Plemet, Loudéac, 
Cadillac, Saint- Barnabe, La Perrière, Plumieuc, La 
Trinité, Saint-Étienne du Ghié de Tlle, Saint-Maudan, 
Saint-Samson, Bréhan-Loudéac ; en tout vingt-et- 
une paroisses destinées à former l'appoint dont 
s'enrichira la vicomte de Rohan, lorsqu'on 1603 elle 
sera érigée en duché-pairie. Le vieux comté, ainsi 
dépouillé au profit de son fier rejeton, sera réduit 
alors à sa première motte, à la seigneurie mère, 
Josselin, avec au moins trente-cinq paroisses ou 
trêves. 

On peut juger par là que l'organisation ecclésias- 



CHAPITRE IV. 101 

tique manquait souvent d unité et de centralisation 
dans le domaine seigneurial. 

Les limites administratives et judiciaires coïnci- 
daient mieux avec les limites des fiefs. 

Lorsque le régime féodal se fut organisé, les 
seigneurs, ne pouvant suffire aux nombreuses fonc- 
tions qu'ils avaient à exercer dans leurs fiefs, se 
déchargèrent sur certains officiers, qu'ils appelèrent 
baillis ou sénéchaux, des soins de présider leurs 
assises, de percevoir leurs revenus, même de réunir 
et de conmiander sous eux leurs forces militaires. 
Dès que les souverains bretons purent exercer le 
pouvoir provincial, s'inspirant des seigneurs, ils 
eurent leurs baillis investis également des attribu- 
tions financières, judiciaires et militaires. Ceux-ci 
devinrent de véritables magistrats et officiers publics 
qui rendaient compte de leurs opérations au Parle- 
ment. Ce ne fut qu'au xv* siècle que leurs attribu- 
tions commencèrent à diminuer par le fait qu'elles 
furent divisées en deux fonctions distinctes, l'une 
civile, l'autre militaire. Depuis le xii° siècle jusqu'à 
cette époque, les baillis jouèrent un rôle important 
dans l'administration intérieure de la Province. 

La Bretagne était divisée en huit bailUes ou séné- 
chaussées : Rennes, Nantes, Ploermel, Broërec 
(Vannes), Penthièvre, Tréguier, Cornouaille, Léon. 



102 £SSA1 SUR LB PORHOËT. 

Ce n'est qu'accidentellement que, dans le livre des 
Ost du duc Jean, en 1294, celle de Ploênnel se 
trouve jointe à celle de Broërec ; elle en était abso- 
lument distincte, conmie le prouvent les aveux 
rendus à chacune de ces cours et qui sont aux 
archives de la Chambre des Comptes de Bretagne. 

Les sénéchaussées ducales (plus tard royales) 
avaient dans leur ressort toutes les cours seigneu- 
riales ayant droit de haute, moyenne et basse jus- 
tice ; leurs appels étaient portés, suivant les cas, 
suit aux présidiaux (I), soit au Parlement. 

En outre, Tévêque, le chapitre, les abbayes, les 
prieurés (2), les ordres militaires, avaient leurs juri- 
•dictions. « Dans le livre dH)st de 1294, le mot de 
baillie, dit la Borderie, a la signification d'une cir- 
'Conscription dans laquelle tous les fiefs et seigneuries 
relevant immédiatement du duc de Bretagne et 
compris dans cette baillie, portent et rendent leur 
honmiage au même siège de juridiction ducale qui 
•est la cour supérieure de toute cette circonscription. « 
Sien que cette monstre ne constitue pas un dénom- 

(1) Les présidiaux tenaient un rang intermédiaire entre le parle- 
•ment et les sénéchaussées. Leur création date du milieu du xvi« siècle. 

Leurs sièges étaient Rennes, Nantes, Vannes, Quimper. En un mot, 
la juridiction ordinaire comprenait : Le parlement, les présidiaux, 
les sénéchaussées royales et enfin les justices seigneuriales. 

(2) Josselin, en matières ecclésiastiques, comptait deux moyennes 
4«t basses juridictions : Sainte-Croix et Saint-Martin. 



CHAPITRE IV. 103 

brement complet de Tarmée bretonne, elle est cepen- 
dant particulièrement intéressante au point de vue de 
Tétat féodal de la province à la fin du iiii* siècle. 

Le territoire de la baillie de Ploôrmel n'était 
autre que Tantique Poutrocoët, d'avant le ix* siècle. 
Elle comprenait donc tous les fiefs qu'y avaient 
taillés les comtes de Rennes et les éclisses de ces 
mêmes fiefs : Gael, ainsi que Montfort, Montauban, 
Saint-Jouan de Tlsle (simple seigneurie), Saint- 
Méen, Brécilien, ses démembrements; Saint-Malo 
de Beignon (regaire de Saint-Malo) ; Maxent (fief 
de prieuré) ; Maure ; Bossac ; Renac ; Malestroit ; 
enfin Porhoet avec Rohan, Guémené-Guingan, le 
Bois de la Roche (1). Son siège avait été fixé à 
Ploôrmel, vieille ville bretonne, autour de laquelle 
les comtes de Rennes s'étaient réservé une sei- 
gneurie assez importante, qui fut plus tard incor- 
porée au domaine ducal (2). 

« En ce qui touche le comté de Porhoôt, les aveux 
et déclarations du xvi' et du xviii* siècle mentionnent 
comme juveigneries , les terres suivantes : La 



(1) Cette dernière seigneurie avait été détachée, sinon entièrement, 
du moins en partie, du Porhoët. Quilliers et Campénéac dans des 
déclarations du zv* et du zvii* siècle sont formellement qualifiés d» 
juveigneuries de Porhoët. 

(2) Seule, par suite de circonstances particulières, la seigneurie de 
Lohéac, extraite du Poutrocoët, fut rattachée à la baillie de Rennes^ 



104 .ESSAI SUR LE PORHOËT. 

VICOMTE DE LOYAT (1), la SEIGNEURIE DE GbATEAUNEUF 611 

Guéhenno, la vicomte de Cbateau-Tro en Guilliers et 
la SEIGNEURIE DE Gampénéac, ces deui dernières faisant 
partie de la seigneurie du Bois de la Roche (2). >i 

11 y avait cependant encore, comme juveigneries 
Haugrknier (ou Maugremieu), haute justice, en Goët 
Bugat (3), et Briend Maillard, en Guegon (4). De plus, 
il comptait comme principaux fiefs et mouvances : 

Les Aulnais Garadreuli, près Josselin, et la Grée 
Saint-Laurent, aux le Mintier. 

Le Broutai, en la Groix-Helléan^ depuis le milieu 
du ][iv^ siècle aux Quélen, qui obtinrent en 1656 son 
érection en vicomte. Dans la suite (1758) les Quélen 
devinrent pairs de France, sous les titres de princes 
de Garency et marquis de Baint-Mégrin. 

Bodégat, en Mohon, habité au xiii° siècle par la 

(1) Le nom de Pandonnet était, aux xvi* el xvii* siècles, accolé à celui 
de Loyat : « Terre el vicomte de Loyat et Pandonnet. >* II semble devoir 
être attribué particulièrement an château de cette seigneurie (Ros.). 

(2) La Bordbrib. 

(3) Le livre des Osts de 1294 mentionne parmi les grandes sei- 
gneuries du Porhoët celle de « La Motte », La Borderie croit qu'il 
peut s'agir là de la Motte Maugremien. C'était une seigneurie très 
ancienne, qui en 1400 était aux mains des Montauban, puis passa aux 
la Houssaye, aux Quélen, aux Bonin de la Villcbouquais. A titre de 
juveignerie de Porhoët, elle comportait droit d'enfeu dans Téglise 
Notre-Dame de Josselin. 

(4) Qu'il ne faut pas confondre avec le fief de ce nom eu Réguiny. 
Briend-Maillard, en Quégon, était, fin du xviu« siècle, aux Cintré 

(qui dans la même paroisse possédaient aussi Couesby); sa juridic" 
tion comportait sénéchal, procureur fiscal, notaire, etc. (Arch. départ.). 



\ 



CHAPITRE IV. 105 

famille du même nom, passe ensuite aux Tréal, aux 
Séyigné (1500). Bodégat est mentionné dans, les 
lettres de Madame de Sévigné. Au terrier de Bre- 
tagne de 1683 nous voyons figurer Charles de 
Sévigné, marquis de Bodégat. 

Bellouân (1),. en Ménéac, aux Gntré. Yâvcouleurs, 
dans la même paroisse, aux Derval. 

La seigneurie de Merdrignac, appartenant aux 
seigneurs de ce nom jusqu'en 1291, où elle passa 
dans la maison de Beaumanoir, par le mariage de 
Jean de Beaumanoir avec l'héritière de Merdrignac. 

LoRSEiL, en Saint- Vran. 

La seigneurie de Langourla, dont le chef-lieu, le 
château de Langourla, n'est pas en la paroisse de ce 
nom, mais dans celle de Saint-Vran. C'était une 
chàtellenie qui relevait simplement à titre d'obéis- 
sance et sans rachat du comté de Porhoet comme 
ancien apanage des souverains bretons. Avec des 
domaines très étendus, cette terre avait quatre 
poteaux patibulaires au lieu de sa juridiction, avec 
Sénéchal, alloué, etc. (2). Famille très ancienne du 
même nom (xii* s.). 

(1) Château et seigneurie appelés aussi la Porte-Bellouan. 

(2) Les poteaux de justice ou poteaux patibulaires sont les poteaux 
de pierre ou de bois sur lesquels reposait la traver5<e où Ton accrochait 
les corps des pendus. Us indiquent par conséquent pour le seigneur 
titulaire un droit de mort sur ses sujets, limité au nombre de poteaux. 



106 ESSAI SUR LE PORHOÊT. 

Callâc, en Plumelec; aux Callac d'abord, puis 
aux Forestier, aux Rogier qui obtinrent son érection 
en Baronnie, Tannée 1645. Aux Guémadeuc, aux 
Cleuz et enfin aux Marbœuf. 

Câdoudal (1), même paroisse ; à la famille de ce 
nom, plus tard aux Guémadeuc (vers 1584) et au 
marquis de Marbeuf en 1780. 

Lântu.la€ ; d'abord à la famille de ce nom, 
appartenait en 1300 à Robert de Beaumanoir, en 
1550 à Louis de Cléguennec, seigneur de Talhouei, 
puis aux Spinefort et aux La Landelle. 

GuEswoN et RouGEUL, en Mérillac, aux Saint- 
Pem. 

Les AuLNAis, aux Le Voyers, et La Garenne, aux 
La Vallée, en Gomené. 

Le Gué de lIsle (ou Saint-Etienne du Gué de 
risle, dit quelquefois le Gué de TIsle-la-Rivière pour 
le distinguer du Gué deTlsleNaizin), qui passa aux 
Rohan par le mariage de Théritière du Gué de Tlsle 
avec Ëon, fils d'Alain VI de Rohan (2), ensuite fut 
aux mains des Carcado. 



(1) Appelé aussi : La Coar de Cadoudal. 

(2) Cette branche de Rohan-Gué de Tlsle est la première tige qui 
soit sortie du tronc principal de la maison de Rohan — (La terre 
du Gué de l'Isle s'étendait aux paroisses de Plumieux, Brehant ; la 
château était situé sur la rive gauche du Lié, en aval de La Ghèze) 
— elle-même donnera naissance aux Rohan-Poulduc (seigneurie 



CHAPITRE iV. 107 

Le Camboct , en Plumieux, berceau des Coislin 
dont le nom patronymique est du Cambout; en 
dernier lieu aux princes de Lembesq. 

CoBTLOGON, même paroisse, aux Coêtlogon (posses- 
seurs également de Loyat), puis aux Carné. 

La Peillék, en Loudéac. 

La seigneurie d'UzEL, en 1280 à Guillaume Budes. 
Elle passe de cette puissante famille aux La (Iha- 



dépendante du Porhoët, située dans la paroisse de Saint-Jean 
Brevelay). 
Voici un aperçu généalogique de ces différents rameaux : 

ALAIN VI, Vicomte de Rohan. 

I 



Olivbr 11^ Bon DE ROHAN 

Vicomte de Rohm. • (6* fils), 

époose Aliette du Gué db l'Islb. 

OUTlttrDE ROHiLN-QXTÉ DE L'ISLE, 

épOOM HlTOlse DB LA GHATAIGNBIIAIB . 

Olivib» n DE R.-6. 1., 

épooM Marie db Rostrbnbii, 

t en 1463. 

Ghaklbs W, Jean DE R. -G.I.. Yolandb. 

tgr époase épouse Guillaume Lb Sbn*chal 

d« Rohan^GiiMiimié. Gilelte db Roghefort, db Carcado. f eo 1505, 

t en 1493. d'où, les Marquis de Carcado. 

Pramcois db R.-G. I., Jean, 

épouse Jeanne db Pbu^lag. époose Françoise Laurbns, 

Idame da Pooldoc. 
Tige des Rohan-Pooldiio. 

JbaR db R.-G. I., CTFfUBNNB, 

sans postérité. dane du Gué de l'Isle, 

épouse François db la Feill£s, 
t en 1554. 

Au milieu du xvii* siècle, le Gué de Tlsle est aux Carcado. Anne 
le Sénéchal (né en 1649) est qualifié de seigneur, son fils Louis René, 
de châtelain du Gué de Tlsle. 



108 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

taignerais, aux Malestroit et tombe dans la maison 
de Coetquen. En 1488 le roi Henri III Térige en 
vicomte, en faveur du chef de cette maison, le 
marquis de Coetquen. La dernière héritière la porte 
aux Duras. 

TaÉGESsoN,en Campénéac; qui passe des Trécesson 
aux Camé (milieu du xv» s.). Ceux-ci rebâtirent le 
château tel qu'il est aujourd'hui et obtinrent régu- 
lièrement l'érection de la terre en comté (1681). 

CoKTBY, aux du Val, aux Talhoet de Kéravéon, 
aux Talhouet de Brignac et aux Cintré. 

Tregranteur, aux Tregranteur, Quelen, Bonin de 
la Villebouquais. 

Quelen, aux ducs de J^avauguyon, après avoir 
donné naissance à la famille de ce nom. 

Ces trois terres, dans la paroisse de Guégou. 

Toutes ces seigneuries avaient haute, moyenne et 
basse justices. Elles se groupaient, comme nous 
l'avons vu, en deux châtellenies et juridictions, 
Josselin et La Chèze (1). 



(1) Les justices seigneuriales, qui occupaient le dernier échelon des 
juridictions en Bretagne, présentaient parfois un «nchevétremenl 
inextricable. Souvent le môme territoire dépendait de deux ou trois 
juridictions ; d'autres fois une ville, une paroisse, comptait plusieurs 
seigneurs hauts, bas et moyens justiciers. « Il était quelquefois plus 
difficile de trouver son juge, dit M. du Boitiez, que de se faire 
rendre justice. » 



CHAPITRE IV. 109 

Il y avait à Loudéac (châtellenîe de la Chèze) un 
siège de juridiction pour la vicomte de Rohan, à 
cause de la forêt de Loudéac et le territoire qui en 
dépendait, car bien qu'enclavée dans le comté de 
Porhoet, cette forêt était de la vicomte de Rohan. 

Par suite sans doute de sa situation au centre 
d'une région encore très boisée, JosseUn avait une 
maîtrise particulière des eaux et forêts, dite maîtrise 
de Porhoet, qui était rattachée à Vannes; elle était 
composée d'un lieutenant particulier, d'un procureur 
fiscal et d'un greffier. 

La capitale du Porhoét, constituée en communauté 
de ville, s'administrait elle-même en dehors du 
seigneur et de sa cour de justice. Le plus impor- 
tant privilège des communautés de ville fut la 
délégation aux États de la Province (1). 

w II est impossible, dit Pitre-Chevalier, de fixer 
au juste Tépoque où les délégués des communes 
entrèrent au Parlement. Nous les trouvons désignés 
pour la première fois aux Etats de 1309 sous 



(l) Dans Torigine, on ne vit aux Parlements que les possesseurs de 
fieCs ecclésiastiques et laïcs. Bientôt les évéques et les abbés y 
siégèrent en 'vertu de leur dignité même, y formèrent un ordre à 
part et s'octroyèrent sur les autres une vertu qu'on ne leur enleva 
jamais. Puis les villes furent appelées à se faire représenter. Ainsi se 
constitua aux États la réunion de trois ordres. 



110 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Arthur II et depuis sans interruption ; mais cela ne 
démontre pas qu'ils en fussent exclus avant le 
xiY* siècle ; en tout cas, même antérieurement, les 
communes bretonnes étaient représentées par les 
seigneurs de qui elles relevaient, et avec d'autant 
plus d'efficacité que leur droit de s'administrer 
elles-mêmes n'eût pas permis de négliger impuné- 
ment leurs intérêts. » 

Le nombre des villes que l'histoire nous montre 
députant à ces Etats a varié plusieurs fois, mais 
JosseUn y a toujours compté et se trouvait des vingt- 
trois qui figurent d'abord. Peu importait le nombre 
des députés du Tiers Etat, chaque ville n'ayant du 
reste, comme chaque chapitre, qu'une voix délibé- 
rative. Rennes, Nantes, Saint-Halo, Vannes, Horlaix 
envoyèrent ordinairement deux députés ; Josselin 
n'eut pas de règle fixe. En 1450 et 1451 à Vanoes, 
elle était représentée par un seul député. En 1591 
(Vannes) par deux élus, Pierre Bostechair et Pierre 
Moro. En 1593 Josselin, ainsi que Guérande, Henne- 
bont, Roscoff, a négligé de se faire représenter ; 
l'année suivante, au contraire, Josselin et même La 
Chèze sont là. Les troubles de la Ligue motivaient 
ces perturbations ; mais en temps normal, Josselin 
comptait un seul représentant. 

Vers le milieu du xvii« siècle le roi intervint pour 



I 



CHAPITRE IV. 111 

régler la députation aux États de Bretagne. L'arrêt 
du 6 juin 1667 fixe définitivement le nombre des 
villes et ordonne que toutes les communautés de la 
Province ne pourront envoyer plus d'un député dans 
chaque tenue, excepté celles de Rennes et de Nantes. 
Parfois cependant on vit adjoindre aux députés, des 
agrégés ayant voix consultative. Nous voyons le cas 
se produire pour JosseUn en 1762 et 1764. 

Voici la liste des députés de la communauté de 
Josseliû pour le xviii* siècle : 

Tenues. 
1717, De Kerandren, syndic. 



1734, Robin. 

1736, Hardouin, Sénéchal. 

1738, Robin. 

1740, Commandoux. 

1741, Elie. 

1742, Robin. 
1744, Elie. 

1746, De Kérangal. 
(Extraordinaire) 1748, Elie. 

(Ordinaire) 1748, Le Campion. 

1749, De la Noe Campion. 



112 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

1750, De la Noë Campion. 

1752, Martin, 

1754, Martin. 

1756, Martin. 

1758, Ozon. 

1762, Robin, maire (député) :, Mar- 
tin d'Aumonl, de Saint- 
Léon, Le Normand, de 
Paimpoulle (agrégés). 

1764, Elie de la Primaudais, maire 
(député); Martin d'Aumont, 
de Saint- Léon (agrégé). 

Les communes rurales, elles, n'avaient pas droit 
d'élection et se reposaient sur le dévouement de 
leurs seigneurs ; elles n'en étaient du reste que 
mieux défendues; nous savons quelle communauté 
d'intérêts ou plutôt de propriété le régime congéable 
établissait entre le titulaire du fief et les colons. 

Comme les autres villes du moyen âge, Josselin 
prit de bonne heure des armoiries. Au xvii* siècle, 
d'après d'Hozier, elle portait : de gueules à neuf 
macles dor, trois trots et trois écartelé <ïor à trois 
chabots de gueules, mis en pal, deux en chef et un 
en pointe ; sur le tout de gueules à un lion d'argent, 
couronné, lampassé et armé d'or partie cousu de 




Les Armes de la Ville de Josselin 
(D'après d'Hozier). 



CHAPITRE IV. 113 

gueules à un château d'or et un franc quartier 
d'hermine. Ce qu'on peut lire : Rohan, Chabot, 
Clisson, Josselin, Bretagne (1). A cette époque les 
différentes corporations de la ville avaient toutes 
leurs armoiries. 

Ce n'est qu'au xix** siècle qu'on vit apparaître les 
armoiries actuelles : d'Azur au Coq d'or, auquel on 
ajoute parfois un franc canton chargé d'une fleur de 
lys et la devise, Semper vigilat ! 

L'écu des Rohan, seigneurs de Porhoet, portait : 
de gueules à neuf macles dor (2), quelquefois mi- 
parties ou simplement croisé de V hermine de Bre- 
tagne. Les Rohan Chabot écartelèrent de Chabot. 

(1) Clisson portait comme armoiries : de gueules au lion dVgent 
armé, lampassé et couronné d*or. 

(2) C'est du sol même de la Bretagne que sont sorties les armoiries 
des Rohan. Les macles sous forme de losanges nettement dessinées 
et incrustées dans des cailloux schisteux, jonchent les bords de l'étang 
des Salles, paroisse de Perret, vicomte de Rohan, où s^éleva un de« 
plus anciens ch&teaux de cette famille suzeraine. Des ruines impor- 
tantes subsistent encore. 



CHAPITRE V 

1407-1527. 

Les Rohan-Porhoet (1407-1527). — Alain VIII. — 
Alain IX. — La Querelle de préséance. — Jean II 

ET SES PRÉTENTIONS AU DUCHÉ. 



Marguerite de Clisson, comtesse de Penthièvre, 
voulut mettre à profit la forte situation laissée par 
son père et tenter de rétablir la souveraineté des 
Pcnthièvre. Elle avait un fils, Olivier de Blois, 
marié à la fille de Jean sans Peur, et rêvait de le 
voir un jour sur le trône de Bretagne. 

Le parti du nouveau compétiteur eut toutes les 
raisons de croire à la réussite de son plan ; par 
supercherie Jean V fut fait prisonnier et amené à 
la capitulation de Chantoceaux, le 6 août 1420. Mais 
la guerre qui s'ensuivit fut fatale aux vainqueurs du 
premier moment. Olivier de Blois et les siens furent 
accablés par une ligue forte de plus de cent qua- 
rante-cinq seigneurs enrôlés par le duc. 



CHAPITRE V. 116 

Le vicomte de Rohan, dit Lobineau, était à la 
tête de tous ces seigneurs. Il avait été nommé par 
la Duchesse son lieutenant général, avec les sires 
de Rieux et de Chateaubriant sous lui, pour com- 
mander les troupes, et reçut du prince, après sa 
captivité, les terres des seigneurs de la vicomte qui 
avaient refusé de prendre les armes en sa faveur. 
L'ambition injustifiée de Marguerite de Penthièvre 
avait donc retourné contre elle, même ses plus 
proches parents. La condamnation prononcée contre 
elle et son fils, aux États de Vannes de 1421, 
porta le dernier coup à l'illustre maison dont elle 
s'était flattée de rétablir la puissance. 

Un complot cependant, tramé par les débris du 
parti de Blois, vint menacer la fin du règne de 
Jean Y. Celui-ci saisit cette occasion de s'assurer 
de la fidélité de tous les seigneurs, chevaliers, 
écuyers de Bretagne, dont les serments furent con- 
signés dans les Actes de Bretagne, Ce document 
forme le tableau le plus complet de la noblesse de 
cette époque (xv* siècle). Au ressort de Rohan et 
de Porhoët, l'on y voit : H. de Malestroit, E. de 
Pengreal (1), J. de Coëtlogon, J. de Villeaudren, 
G. de Lindereuc, 0. de Timadeuc, G. de Launay, 
G. du Tertre, 0. Le Moenne, 0. de L'Avauchaie, 

(1) Branche cadette de la famille de Trégranteur. 



116 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

E. Boisfeillet, J. Chezant, 0. le Corgne, 6. des 
Desers, E. de Blelin, J. Ralo, J. du Pont, G. Baulon, 
J. Thomas, G. des Buais, J. de la Tousche, G. le 
Grio, 0. Quellent, 0. Hasart, P. Belangier, L. Jen- 
chin, P. de Plumaugat, L. de Couellan, A. Jouet- 
Passe, G. de Kerbu, E. du Boches, J. du Booth, J. 
Guiheno, E. de Brehant, 6. Fleuryn, 0. de la Châ- 
taigneraie, 0. de Bonabbe, G. de Coetuhan, A. 
Destrer, J. du Quengo, G. d'Estuer, G. Gouvo, P. 
Daen, G. Guite, J. de la Vallée, Ydouart-le-Venour, 
Eon-Hury, P. Georges, R. Chausse, P. Le Clerc, 
G. de Poulens, J. de la Tronchaye, 0. Le Moenne, 
0. de Coetuhan, L. le Vistre, J. Pierres, J. Henry, 
J. des Desers, G. Penerel, J. Tuai, J. le Corgne, 
A. le Tixier, J. Faramus, T. de Cadellac^ J. de la 
Villeaudren, E. de Lindereuc. 

C'est du vivant d'Alain VIII, en 1419, que Josselin 
reçut la prédication de saint Vincent Ferrier, le 
fameux apôtre du diocèse de Vannes. Le comte lui 
fit le plus religieux accueil, lui ofûrit même l'hospi- 
talité dans son château, mais la modestie du saint 
prédicateur lui fit préférer un tort moins somptueux 
et où, pensait-il sans doute, la prière lui serait plus 
facile. Pendant tout son séjour à Josselin, il demeura 
au prieuré de Saint-Martin. « Le prieur et ses reli- 
gieux, émerveillés de la sainteté de leur hôte. 



CHAPITRE V. 117 

eurent la curiosité de savoir ce qu'il faisait la nuit 
dans sa cellule. Ils pratiquèrent des trous dans la 
cloison et se mirent en devoir d'observer. Ils cons- 
tatèrent d'abord que le saint missionnaire ne cou- 
chait pas dans un lit, qu'il veillait presque toute 
la nuit et que la cellule était toute lumineuse, bien 
qu'il n'y eût ni feu ni flambeau allumé. Sur les 
instances du prieur, le vicomte de Rohan envoya 
Alain de Govennec et plusieurs autres de ses amis voir 
le prodige ; tous ont également affirmé que la cellule 
de Messire Vincent était resplendissante de lumière. 
On pense si le bruit s'en répandit rapidement en ville 
et si les conversations allaient leur train. Bref, on 
ne tarissait pas sur les vertus et la sainteté du mis- 
sionnaire. Les huit jours écoulés, Vincent céda aux 
prières du vicomte de Rohan et prêcha encore trois 
jours, puis il partit dans la direction de Ploërmel (1) . » 

Le souvenir de son passage dans la capitale du 
Porhoët se perpétua bien longtemps après sa mort, 
il y fit plusieurs miracles qui furent consignés dans 
le procès-verbal de canonisation. 

Nous retrouvons un grand nombre d'actes de 
Jean V (2), contresignés d'Alain VIII qui se montra 
toujours, ainsi que son fils, au rang des plus dévoués 

(1) Le Lys de Notre-Dame ^ an. ]904. 

(2) Les archives du temps de Jean V. Bibliophiles Bretons. 



118 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

serviteurs du prince et des plus fidèles défenseurs 
de sa cause. 

A la signature du traité d'Angers, le 2 juillet 1417, 
entre le duc de Bretagne et le dauphin Charles 
« pour la partie du seigneur de Bretagne sont pré- 
sents : Richard, Mgr son frère, les comtes de Pen- 
thièvre et de Porrohoët, le maréchal de Bretagne, 
etc. . . » Le lendemain, 3 juillet, le sire de Porhoet 
assiste au contrat de mariage entre Louis, duc 
d'Anjou, et Isabelle de Bretagne, fille de Jean V, 
et y appose son sceau. 

C'est encore là, comme le plus souvent, le titre 
de Porhoët qui prévaut, non qu'il fût le plus glorieux,, 
les Rohan venant d'acquérir celui de vicomte de 
Léon ; du moins c'était le plus ancien de la famille. 

La descendance directe des seigneurs de Léon 
s'étant éteinte (1363) avec Hervé VIII, dernier 
vicomte de Léon, les biens de cette maison passèrent 
à Alain YIII, héritier de Jeanne de Léon, sœur 
aînée d'Hervé VIII, mariée vers 1349 à Jean I, 
Ticomte de Rohan. 

La vicomte de Léon, telle qu'elle était à la fin du 
II v« siècle (1), vint donc augmenter la richesse des 



(1) Les biens en faisant partie étaient considérables. Le Comté, 
ancien domaine des comtes de Léon, roi des Bretons, avait 
compris primitivement la plus grande partie du Finistère de nos 



CHAPITRE V. 119 

Rohan-Porhoët ; elle fut érigée en prinoipaaté 
Tannée 1572 et ne sortit pas de cette maison jusqu'à 
la Révolution. Le titre nominal a heureusement 
survécu et reste encore Tapanage de l'héritier prin- 
cipal des ducs de Rohan. 

Alain YIII mourait en 1429, laissant un fils por- 
tant le même nom que lui. Béatrix de Clisson, sa 
veuve, dut consentir, par contrainte, à payer au duc 
de Bretagne le rachat du Porhoet. Celui-ci n'ayant 

iours. Mais au zii« siècle, il avait été sciodé par l 'habile diplomatie 
d*un prince étranger, voulant briser dans sa base cette force léo- 
naise qui s'était si énergîquement dressée contre l'invasion que lui-même 
ayait conduite. Geofifroi II (Plantagenet) fit passer sur la tête d^un 
cadet les seigneuries de Daoudour, Landerneau, Coatméal en Léon, 
celles de Oaoulas, Crozon, Porzai, Quemenet, dans la Gornouaille. 
La Vicomte ainsi constituée devait survivre au Comté qui s'abîma 
tristement cent ans plus tard dans une ruine définitive consacrée 
par Hervé V, le dissipateur, t Avec ce malheureux prince, dit Levot, 
finit cette lignée de nobles barons qui avaient tenu Pépée et le sceptre 
de la Bretagne dans ses jours les plus difficiles, qui avaient été le 
rempart de cette indépendance contre les rois francs, ses défenseurs 
contre les Normands barbares, contre ceux non moins terribles de la 
race des Plantagenet, et les plus fidèles soutiens des vieux droits et 
de la nationalité du pays. Leur chute, malheureusement indigne de 
si glorieuses destinées, fat un grand pas vers l'unité de la puissance 
souveraine qui acheva plus tard de s'élever sur les ruines des mai- 
8on.s de Penthièvre et d'Avaugour. » 

Cependant la branche cadette était là pour l'honneur du nom. EUe 
vécut fastueusement, s'enrichit même par héritage de nouveaux 
domaines, ceux de Guémené-Théboë (ou Heboi) dont Henoebont 
était le chef-lieu. Ce fief considérable fut divisé et il en advint trois 
seigneuries : La Roche Moisan, les fiefs de Léon et de Pontcallec. 
Ces deux premières furent annexées à la châtellenie de Guémené 
lorsqu'elle fut érigée en principauté en faveur d'un Rohao, par 
Charles IX, en 1571. 



120 ESSAI SUB LE PORHOËT. 

plus à craindre le bras redoutable du Connétable, 
ne recula pas devant la lâcheté de reprendre à sa 
fille la parole qui avait été donnée quelques années 
auparavant, que le comté serait maintenu dans le 
privilège de n'être pas sujet au rachat. 

Une discussion sur ce sujet était engagée depuis 
longtemps. Par sentence prononcée à Ploërmel, les 
terres de Porhoët, avec les juveigneuries de Cam- 
pénéac et Guilliers, étaient déclarées soumises au 
rachat. Plus tard, en 1437, intervient un accord entre 
les deux requérants. Le duc, alors plus conciliant, 
fait remise à Béatrix et à son fils, le vicomte de 
Rohan, de Tamende qu'ils ont encourue pour avoir 
omis de dire dans leur aveu que leur fief de Porhoet 
était sujet au rachat et, reconnaissant les bons ser- 
vices du vicomte de Rohan, accorde la franchise 
« du premier rachat qui écherra en ladite terre de 
Porhouet », c'est-à-dire à la mort de Béatrix, dame 
de Porhoët. Il nomme même comme capitaine de la 
place de Josselin, Jean de Keradreux, qui aura 
pour mission de prendre possession pour lui du 
ch&teau pendant vingt-quatre heures seulement (1). 

Alain IX prit le titre de comte de Porhoët, 
vicomte de Rohan et de Léon. 

(1) Archives *\t la Seine-Inférieure, série E. 



CHAPITRE V. 121 

Comme dans la lutte des Armagnacs et des Bour- 
guignons, la Bretagne n'hésita pas à fournir d'im- 
portants contingents au roi de France, quand l'An- 
gleterre déversa son flot envahisseur sur le royaume. 
L'année 1449, conduits par le duc et Richement, 
par Laval, Lohéac, Guémené, Rohan, la Bellière, 
Quintin, Rostrenen, Lannandaye, les Bretons tom- 
bèrent avec fureur sur l'ennemi, qui était déjà maître 
de la Normandie, et lui reprirent un grand nombre 
de places. 

Avec Pierre II, revint le calme, son règne fut un 
règne de paix pour la Bretagne. Cependant, une 
querelle fameuse allait s'ouvrir dans les rangs de 
la haute noblesse du duché. 

La réunion de l'Assemblée tenue à Vannes en 
1451 donna lieu à de violentes discussions entre 
les deux premiers seigneurs du duché qui se 
disputaient la préséance à ces États : le vicomte de 
Rohan, qui toujours jusqu'ici avait occupé le pre- 
mier rang, comme premier prince de Bretagne, et 
le baron de Vitré qui, fort des droits du nom qu'il 
portait, prétendait supplanter son rival. 

Cette querelle, commencée au milieu du xv' siècle, 
ne devait point avoir de fin, elle allait se perpétuer 
avec les descendants de ces illustres familles 
Rohan et Vitré qui, de temps à autre, faisaient 



122 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

naître de circonstances fortuites de nouveaux élé- 
ments de disputes. 

Il paraît certain que, dès les premiers temps des 
Etats, la préséance et la présidence parmi les 
Barons (1) réunis en Assemblées générales étaient 
dues aux vicomtes de Rohan, regardés comme 
premiers princes du sang de Bretagne. Alain IX et 
les autres représentants de cette maison, dans la 
défense qu'ils eurent à soutenir, alléguèrent tout 
d'abord leur titre de comte de Porhoët et ensuite 
de vicomte de Léon. 

Les prétentions des barons de Vitré semblèrent 
d'abord injustifiées, puisqu'en 1486 la préséance 
resta aux Rohan. Jean II, vicomte de Rohan, se 
trouve qualifié de premier baron de Bretagne dans 
le béguin du roi Charles VIII. 

La perte des anciens registres des Etats ne nous 



(1) Le titre de baron, qui fut donné en Bretagne tout d'abord par 
les souverains et les grands seigneurs à leurs premiers vassaux et 
aux gentilshommes de leur service, à partir du xv« siècle, ne fut plus 
appliqué qu'aux grands vassaux de la couronne, aux pairs du duché. 
Ces pairs étaient au commencement de ce siècle : Pierre comte 
d'Alençon baron de Fougères, Olivier de Blois comte de Penthièvre, 
Olivier de Clisson comte de Porhoët et baron de Ponlchateau, 
Alain VIII vicomte de Rohan et de Léon, Gui comte de Laval 
baron de Vitré, Jean de Rieux maréchal de France et baron d*An- 
cenis, Charles de Dinan baron de Châteaubriant, Raoul de Montfort, 
baron de la Rochebemard, et Gui de Laval seigneur de Blaison, 
baron de Rais (D. M.). 






CHAPITRE V. 123 

permet pas de retracer toutes les phases de la lutte. 
Enfin, en 1651, deux siècles après TAsseinblée du 
duc Pierre, un arrêt vint trancher d'une manière 
diplomatique, une question aussi difficile ; on décida 
de la présidence alternative des Rohan et des 
Vitré. 

La rivalité de ces deux maisons amena naturelle- 
ment des vilenies de toutes sortes. Alain IX fut 
arrêté subrepticement par le duc Pierre et enfermé 
an château de Nantes, accusé d'avoir trempé dans 
le meurtre de René de Keradreux, tué au château 
de Josselin. Il fut heureusement reconnu innocent 
et relâché. Le bruit courut que les amis du baron 
de Vitré, très embarrassé lui-même par l'affaire de 
préséance, avaient suscité cette arrestation. 

Alain IX mourut le 20 mars 1461, après avoir 
été marié trois fois. En 1407, il avait épousé Mar- 
guerite de Bretagne, quatrième fille de Jean V et 
de Jeanne de Navarre, dont il eut quatre enfants : 
Alain, comte de Porhoët, qui épousa en 1443 lolande 
de Laval et mourut sans enfants en 1454; Jeanne, 
Marguerite et Catherine. 

Puis il s'allia à Marie de Lorraine. Celle-ci laissa 
un fils, Jean, qui à la mort de son frère aîné devint 
l'héritier de Porhoët. Enfin, il prit en troisièmes 
noces Perronelle de Maillé. 



124 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Alain VIII et Alain IX, premiers seigneurs de 
Porhoët, de la lignée des Rohan, ont su laisser à 
Josselin l'empreinte ineffaçable de leur nom, en 
même temps qu'un souvenir d'art qui égale en 
richesse les beautés les plus pures de la renaissance. 
Nous leur devons en effet cette merveille architec- 
turale qui est la façade nord du château de Josselin. 
La preuve de l'époque de la construction apparaît 
d'une manière certaine quoique allégorique dans la 
façade même : « En effet, dit Cayot Delandre, le 
chiffre d'un A et d'un V entrelacés, qui se trouve 
répété plusieurs fois dans la devise des Rohan 
A PLUS, et dans les autres ornements de la façade, 
révèle le nom d'Alain VllI, vicomte de Rohan ; 
mais la supposition qu'il est l'auteur de cette cons- 
truction ne peut être admise qu'à la condition d'en 
attribuer une part à son fils Alain IX, comme le 
font supposer les macles et hermines souvent 
répétées dans l'intervalle des ornementations et qui 
ne sont autres que les armes Rohàn-Breta^ne 
d'Alain IX » (son mariage avec Marguerite de Bre- 
tagne lui permit en effet de réunir les armes de 
ces deux maisons). Voici, d'après le même auteur, 
TexpUcation de cette allégorie. « Alain IX épousa 
Marguerite de Bretagne en 1407, l'année même où 
mourut Clisson, son grand-père. Alain VIII devint 



f 




CHAPITRE V. 125 

donc à cette époque propriétaire du château de 
Josselin, du chef de sa femme, Béatrix de Clisson, 
et il put entreprendre, en continuation des travaux 
du Connétable, la reconstruction de la façade inté- 
rieure^ Il mourut en 1429 et son fils, Alain IX, dut 
achever ce grand et beau travail, sur lequel il mit 
son écusson. 11 faut donc placer cet achèvement 
dans la période de 1429 à 1462. » 

Louis XI, qui en 1461 avait remplacé Charles VII 
sur le trône de France, avait juré de porter un 
coup fatal aux survivants de la féodalité. Mes deux 
cousins de Bourgogne et de Bretagne tomberont les 
premiers, s'était-il dit. Mais étouffer l'indépendance 
bretonne n'était pas chose aussi facile qu'il pensait. 
Nous avons déjà vu quelle énergie cette vieille 
province montrait dans la défense de ses intérêts et 
de ses aspirations nationales. La levée générale 
des boucliers ne se fit pas attendre. Derrière leur 
duc François II, tous les grands chefs se levèrent. 
U y avait naturellement le jeune comte de Porhoët, 
Jean II; Oudon de la Rochebemard, du Faouet, 
Gouyou du Quelenec, Beaucorps, Malestroit, les 
seigneurs de Maure, de Derval et cent autres. 
Bouillants d'impatience, ils ne purent de pied ferme 
attendre l'ennemi et s'avancèrent le long de la 



126 ESSAI SUR LE PORHOET. 

Loire avec rintention audacieuse d'atteindre Paris. 

Le roi de France, menacé jusqu'au cœur du 
royaume, ne se troubla cependant pas; il eut recours 
à ses moyens habituels : par fourberies et par ruse, 
il s'efforça de diviser les partis. 

Dans un moment de désespoir, la Bretagne se 
voyant jouée, dut même rechercher l'alliance de 
l'ennemi juré de sa race, l'Angleterre. La lutte 
qui s'engagea fut longue. Mais ce qu'il y eut de 
plus pénible à constater, c'est que malgré tant de 
courage déployé sur les champs de bataille, le 
sentiment national s'évanouissait. La querelle entre 
le duc et ses vassaux qui avait si souvent ensanglanté 
la Bretagne, allait renaître et absorber toutes les 
forces vives, incapables alors de s'unir dans un élan 
chevaleresque, pour chasser hors du duché le 
Français envahisseur qui voulait à tout prix faire 
brèche dans cette dernière forteresse féodale. Traités 
signés avec la France, tantôt par un parti, tantôt 
par un autre ; paroles données, serments violés ; 
trahisons et mensonges de tous côtés jetèrent la 
Province dans un désarroi complet, et lorsque l'élé- 
ment étranger se fut introduit partout à la Cour et 
dans le camp du duc; lorsque les compétitions 
s'élevèrent pour la main de la princesse Anne, fille 
de François II, la versatilité des seigneurs et le 



CHAPITRE V. 127 

manque de sens patriotique de leur chef précipita 
la déchéance. L'œuvre de déséquilihrement général 
poursuivie par Louis XI avait pleinement réussi. 
Son iSls en recueillit le fruit. 

Jean II n'eut guère une conduite plus brillante 
qae la plupart des autres seigneurs ; après avoir 
suivi François II, il le quitta soudain pour aller 
grossir les forces confédérées, et bientôt après il 
s'érigeait en chef de parti, briguant même la cou- 
ronne que le duc laissait choir. 

Le vicomte de Rohan, comte de Porhoët, avait 
épousé en 1461 Marie de Bretagne, fille du duc 
François P' et par là même belle-sœur de François II. 
Cette alliance le rapprochait évidemment de la cou- 
ronne puisqu'il était, par sa femme, l'un des héritiers 
de François I". Le duché tombant en quenouille 
avec la princesse Anne, ce prince, sur l'instigation 
du maréchal de Rieux et avec l'appui des seigneurs 
unis dans une foi commune pour la conservation de 
leurs libertés, se présenta comme l'un des compé- 
titeurs. Le sire d'Albert, le prince d'Orange et lui 
ne cessèrent d'intriguer et de remuer sourdement la 
Bretagne. Il s'armait, justement du reste, de l'exclu- 
sion prononcée par son beau-père et consacrée par 
trois règnes, contre l'avènement des filles et se 
disait issu en droite ligne par les comtes de Rennes, 



128 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

du premier roi Gonan de Mériadec. Sa naissance, 
ses qualités, les charmes de sa personne et de sa 
fortune (1) le rendaient digne du trône, mais ses 
prétentions ne furent pas jugées suffisamment 
fondées, comme celles du reste de ses rivaux. 

Le duc ne montrait de complaisances que pour 
les étrangers ; ceux-ci s'érigeaient en maîtres aussi 
bien à Farmée qu'à la Cour. Ces agissements exas- 
pérèrent les seigneurs bretons, à un tel point, 
qu'une désertion antinationale se produisit au détri- 
ment du souverain de la Bretagne. L'armée royale 
trouva pour auxiliaires : Rohan, Rieux, Laval, 
même le baron d'Avaugour, fils naturel du duc. 

La délivrance de Nantes par un groupe de fidèles 
amena une suspension d'armes. Si la Bretagne 
échappait encore une fois à la domination, elle 
n'échappait pas à la vengeance des Français. Les 
armées françaises et bretonnes se retrouvèrent en 
présence à Saint-Aubin du Cormier, le 25 juillet 
1488, jour à jamais fatal pour l'indépendance bre- 



(1) Disons en passant qu'il eut cent mille écus d^or neufs, 23 sols 
11 deniers la pièce, pour la dot de sa femme, somme énorme pour 
Tépoque, et à la mort de son beau-père il lui fut adjugé le comté de 
Montfort, la seigneurie de Neaufle et les baronnies de Chantocé, 
d'ingrandes, de Fougère:, etc. — outre la moitié de tous les 
meubles de la maison du duc qui lui étaient communs avec Mar- 
guerite, sa belle-sœur — (Mor&ri). C'était donc un puissant per- 
sonnage. 



CHAPITRE V. 129* 

tonne. La victoire coûta cher à Tarmée du roi, mais 
elle extennina le parti ducal. 

François II, incapable! de se relever, se déclara 
sujet du roi de France et signa la déchéance de son 
pays le 20 août 1488 (1). 

La réunion de la Bretagne à la couronne de 
Charles VIII mit fin à la lutte et apaisa les dissen-^ 
timents intérieurs (1491). L'antique royaume de 
Nominoe n'était plus qu'une province française ! Le 
comte de Porhoët semble dès lors avoir cherché 
dans l'administration de ses domaines la consolatioa 
de n'avoir pu sauver l'indépendance du duché en 
prenant la couronne. Il mourut en 1516, laissan;t 
quatre enfants : Jacques, premier du nom, qui 
recueillit le Rohan et le Porhoet ; Claude, qui fujt 
évêque de Comouaille et vicomte de Rohan aprèb 
la mort de son frère aîné ; Anne, mariée à un de ses 
cousins, Pierre de Rohan, seigneur de Frontenai et 
de Gié, et Marie, mariée également à un parent, 
Louis de Rohan, quatrième du nom, seigneur du 
Guémené. 

Jean I" de Rohan, comte de Porhoôt, avait épousé 

(Il Après la mort de François II qui survint en 1489, la dot de la 
duchesse Anne fut l'objet de convoitises encore plus ardente que par 
le passé ; si bien qu*elle se vit menacée tout à la fois d'élre enlevée 
par les Bretons pour Jean de Rohan, par les Français pour la Cour 
de France et par les Anglais pour le sire d^Albret. 

9 



1^0 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Françoise de Daillou, fille de Jean, comte de 
Lude, maïs il n'eut pas de progéniture et mourait 
tans héritier direct Fan Ifia?. Il était le dernier 
rejeton de la branche aînée de Rohan. Un partage 
s*en suivit, mais les deux fiefs de famille, Porhoet 
et Rohan, se retrouvèrent sur la même tête, quel- 
ques années plus tard. Claude de Rohan, évêque 
de ComouaiUe, eut donc la vicomte de son nom, 
tandis que sa sœur aînée reçut le Porhoët, qu'elle 
abandonna à son fils René (1). La branche cadette 
des Rohan-Gié (2) succéda ainsi à la branche aînée. 

(1) La comtesse Anne mourut peu de temps après ce partage. Elle 
tomba maJade au cbAteau de Josselio, où elle fit son tesument le 
72 mars 1528. Elle ordonna que son corps fût inhumé dans l'église 
Notre-Dame, auprès de la sépulture d*01ivier de Clisson. Comme 
•on travaillait alors à Tagrandissement de cette église, le corps fut 
déposé en attendant dans la chapelle qu'elle avait fondée (Ooéb). 

(2) Les Gié étaient une branche cadette des Rohan Quémené. 
L'auteur de cette branche, dit : le maréchal de Gié, eut de son 

mariage avec Françoise de Porhoët trois fils ; le, premier, Charles, 
continue la branche aînée ; le troisième, Pierre, commença la branche 
cadette de Rohan-Gié; ce même Pierre eut deux fils, dont René W. 



CHAPITRE VI 

1627-1638. 

Les Guerres de religion et la Ligue. — Formation du 
Duché de Rohan. — Le Comté de Porhoët réduit 

A LA CHATELLENIE DE JoSSËLIN (1603). — HeNRI II 
DUC ET PAIR. 



L'union était à peine consommée, qu'un terrible 
incendie, allumé au fond de l'Allemagne par le 
moine Luther, se déchaîna sur la France et se 
répandit jusqu'aux confins de la vieille Armorique, 
couvrant de cendres et de ruines son sol encore 
épuisé par tant de luttes intestines. 

Dès l'apparition des nouvelles doctrines, l'étin- 
celle avait jailli au cœur du vieux comté ; sa famille 
souveraine, électrisée par le mouvement à peine 
naissant, embrassa la lutte avec fureur. IN 'avait-elle 
pas, il est vrai, été nourrie au sein même de la 
réforme ; Henri I", René II et Henri II ne furent-ils 
pas appelés à chauffer leurs juvéniles ardeurs au 



132 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

foyer le plus ardent de la propagande calviniste : 
la cour de Navarre ? Imbus de ces principes, ils en 
jurèrent le triomphe, et ayant appris de leurs an- 
cêtres que, quelles que fussent les circonstances, une 
seule place était digne de leur nom, ils s'érigèrent 
en champions de la cause calviniste, non seulement 
en Bretagne, mais encore dans toute la France. 

Isabeau d'Albret, épouse de René P' de Rohan- 
Gié-Porhoët, dès sa jeunesse avait été prédisposée 
par sa belle-sœur, Marguerite de Navarre, à embras- 
ser la religion réformée ; elle s'était contenue du 
vivant de son mari, mais à sa mort, déterminée 
vraisemblablement par les conseils de sa famille 
du Béarn, elle montra un penchant de plus en plus 
l^rononcé pour la réforme et finit par abjurer vers 
1558. Blain, sa résidence ordinaire, devint le quartier 
général du nouveau culte que, malgré la rigueur 
des édits, elle obtint la permission de pratiquer 
ainsi que ses gens. Là se donnaient rendez-vous les 
gentilshommes calvinistes venant de tous les points 
de la Haute-Bretagne. 

Henri I", fils dlsabeau, qui était né à Blain, y 
mourut également Tannée 1575. La cruelle maladie 
qui le tortura sa vie durant Tempêcha de prendre 
une part militante aux troubles de son temps. Son 



CHAPITRE VI. 133 

frère René II et lui appliquèrent principalement 
leur activité à la propagande en Bretagne. Le fana- 
tisme porta les deux partis à beaucoup d'atrocités, 
mais à vrai dire, en dehors des villes où les ministres 
recrutaient assez facilement des adeptes, le Porhoët 
comme le Rohan résistèrent énergiquement dans 
cette lutte morale. Le catholicisme, battu vigou- 
reusement en brèche pendant près de quarante ans, 
triompha sans que le calvinisme laissât même une 
trace de son passage. 

Malgré les efforts de ses seigneurs, Josselin ne 
fut que partiellement atteint par l'hérésie ; la majeure 
partie de la population resta fidèle à la foi antique. 
Les habitants même, pour s'assurer le libre exer-r 
cice de leur culte, s'emparèrent de la nomination 
de plusieurs bénéfices, conférés jusque-là par les 
seigneurs, et la ville conserva ces bénéfices jusqu'à 
la Révolution. 

Il est à conjecturer que c'est vers 1560 que les 
Rohan chassèrent les bénédictins du prieuré de 
Saint-Martin de Josselin et firent pendant quelque 
intervalle un temple de leur église; le bâtiment 
qui en est voisin, et qu'on appelle la Huguenoterie (1), 
semble confirmer cette affectation. Les guerres 
civiles et religieuses ayant pris fin, l'abbaye de 

(1) OOÊK. 



134 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Marmoutiers rentra en possession des revenus de 
cette maison ; le couvent fut supprimé et les moines 
remplacés uniquement par un prêtre séculier à 
portion congrue. D'autres couvents furent saisis et 
livrés aux protestants ; Tabbaye de Lantenac devint 
la proie de la Ville Âudrain, terrible huguenot qui 
a laissé de cruels souvenirs dans la contrée. 

Le prosélytisme des Rohan n'eut de cesse qu'un 
ministre protestant fût établi dans les principales 
villes de leurs domaines ; Josselin, Rohan, Pontivy, 
subirent les prêches d'un apôtre luthérien. Trois 
synodes calvinistes se tinrent à Ploërmel, en 1562, 
1563, 1565, et le ministre Âubri s'y soutint à la 
tête d'une petite église protestante jusqu'en 1580. 
Josselin n'eut rien à envier à Ploërmel, elle eut les 
siens en juin 1563 et juillet 1583 (1). 

Le comte de Porhoët, René II (2), nommé par 
Jeanne d'Albret son lieutenant général dans tous 
les pays soumis à son obéissance, jusqu'à la majorité 
de Henri IV, reçut plus tard du roi lui-même la 
confirmation de ces pouvoirs. Condamné à périr 
sous la vengeance du parti royaliste, il allait suc- 

(1) Ce dernier se lint au château et oq y élabora une ordonnança 
'interdisant toutes sortes de danse. 

(2) Henri 1er, de son mariage avec Françoise de Tournemine, n'avait 
ipas laissé de postérité. Les biens et titres passèrent à son frère 
Aené. 



CHAPITRE VI. 135 

comber dans le massacre de la Saint-Barthélémy 
avec les principaux chefs Huguenots sll n'avait été 
prévenu à temps de ce qui se tramait contre sa 
cause. Dans le Poitou et la Saintonge, où il avait 
des biens considérables, il défendit le protestantisme 
les armes à la main et mourut encore jeune à la 
Rochelle, en 1586. Sa bravoure lui survécut dans 
Catherine de Parthenay (fille et héritière de Jean 
de Parthenay, seigneur de Soubise), sa veuve, qui 
se montra en véritable héroUne lors du fameux siège 
de la Rochelle en 1627. Nourris d'un tel exemple, 
ses fils, Henri de Rohan-Porhoët, deuxième du 
nom, et Benjamin de Soubise, ne devaient pas 
laisser éteindre les vertus guerrières de leur race. 
La France ne compta jamais de plus terribles 
batailleurs. 

Entretenu par la faiblesse ou la violence des der- 
niers Valois, l'incendie se serait éteint avec ceux-ci, 
si le premier Bourbon n'eût été calviniste. A la 
guerre du catholicisme et du protestantisme succéda 
alors la Ligue formée contre le Béarnais Henri lY, 
laquelle se traduisit par une révolte, colorée du 
beau nom de religion, contre l'autorité royale. 

En Bretagne, la Ligue prit de suite un caractère 
politique et national. Saisissant la guerre religieuse 
comme une circonstance fortuite qui s'o&ait à elle 



A26 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

de se détacher du royaume, pour ressaisir son 
ancienne indépendance, notre province se redressa 
fièrement à l'appel d'un héritier de la maison de 
Blois, le duc de Mercœur. 

, Le nom de Penthièvre trouva écho dans beaucoup 
de cœurs (1), son souvenir fit sortir du fourreau 
les épées encore rougies du sang d'Auray et de 
Chantoceaux. Presque tous les centres, à Texception 
de Rennes, Vitré, Saint-Halo, Chateaubriant, Mont- 
fort, Josselin, Ploërmel, Malestroit, Brest, Quimper, 
Guérande, soulevés par Tespoir de reconquérir cette 
indépendance, l'objet constant des rêves d'avenir, 
furent bientôt à lui. Rennes, resta la capitale bre- 
tonne soumise au roi, tandis que Nantes fut toujours 
fidèle à Mercœur. Chaque parti se crée un Parle- 
ment et fait de sa ville principale le siège de son 
gouvernement. Saint-Malo s'érige en république; 
Hennebont et Quimperlé sont pris et repris ; le 
pays de Tréguier mis à feu et à sang, et la Bretagne, 
hélas ! devient encore la proie d'une double occu- 
pation étrangère (2). 

(1) Le moment pouTait sembler favorable pour revendiquer les 
droits de la famille de Blois au duché de Bretagne ; car à l'oxiinction 
de la postérité masculine des Valois, Henri de Bourbon devenait 
bien Thériticr légitime du trône de France, mais non du duché, vu 
qu*i} De descendait ni de Jeanne de Penthièvre, ni d'Anne de Bretagne. 

(2) Mercœur sappuyant sur les Espagnols, et le roi de France sur 
les Anglais. 



CHAPITRE VI. 137 

En 1589, Sébastien de Rosmadec, capitaine de la 
ville de Josselin, prévoyant le danger qu'il y avait 
à laisser la ville sans défense, résolut de reconstruire 
toutes les fortifications qui, un siècle auparavant, 
avaient été en partie démantelées sur Tordre du 
duc François II (1). Les troupes du duc de Mercœur 
ne lui en laissèrent guère le temps; de Vannes, 
elles marchèrent subitement sur Josselin ; la ville 
surprise ne put résister et tomba aux mains des 
ligueurs presque sans coup férir; peu s'en fallut 
qu*ils ne saisissent même le gouverneur, qui n'eut 
que le temps de sortir de l'église et de se réfugier au 
château. Là il opposa une belle résistance, mais 
faute de ressources finit par se rendre à Saint- 
Laurent, le célèbre lieutenant de Mercœur. Le duc 
fit de Josselin une de ses principales places d'armes, 
n en tira quelques mois après (5 nov. 1590) « une 
force considérable en artillerie » qui fit brèche à 
Hennebont et décida de la capitulation. Le jeune 
prince de Dombes, du tac au tac voulut répondre à 
Mercœur; de Vannes avec ses royaux il accourut 
menacer Josselin, mais tenta en vain de s'en emparer 
le 2 mai 1590 et dut s'en aller camper du côté de 
Malestroit. 

(1) En 1488 le duc François II avait ordonné de démanteler celte 
yille,, poar n*étre pas obligé d'y tenir une garnison qui eût affaibli 
son armée. 



138 ESSAI SUB LE POKHOËT. 

Le maréchal d'Aumont ressaisit enfin, pour le 
roi, le pouvoir que le prince était incapable à main- 
tenir ; et Tabjuration de Henri IV allait détruire la 
Ligue dans sa racine, si l'ambition de Mercœur 
n'avait été plus forte que le souci des intérêts de 
sa patrie. Mais il ne put soutenir la lutte bien 
longtemps ; peu à peu, ses partisans l'abandonnaient ; 
l'Armada espagnole envoyée à son secours fut 
engloutie dans une épouvantable tempête; Quimper, 
Crozon, Saint-Malo, puis Vannes firent leur sou- 
mission. Le roi, vainqueur des derniers rebelles 
d'Amiens, venait en personne donner le coup de 
grâce aux ligueurs bretons ; reçu à Nantes avec 
enthousiasme, il y signa le fameux édit qui réglait 
le sort des protestants en France. 

L'année suivante, les États lui fournirent l'occasion 
de porter le coup fatal aux débris de la féodalité 
en Bretagne. Sollicité par eux, il ordonna la démo- 
lition des fortifications des villes et des châteaux 
particuliers de la province, afin de prévenir le 
retour de la guerre civile. L'édit parut en 1599, et 
bien que Josselin y figure, l'ordre royal ne fut 
exécuté à son égard que trente ans après. Les habi- 
tants résistèrent en effet à cette condamnation le 
plus longtemps possible. Que de souvenirs se ratta- 
chaient â ces vieilles murailles ! Que d'assauts elles 



CHAPITRE VI. 139 

avaient subis, que d'héroïsme elles avaient abrité ! 
£n 1614 ils obtinrent des États réunis à Nantes, la 
permission de lever pendant six ans, 60 sous par 
pipe fi) de vin et 30 sous par pipe de cidre pour 
réparer encore les murs. Mais enfin, la grosse tour 
du château dut tomber sous le coup d'un nouvel 
édit contre les places fortes, cette fois de Richelieu. 
« On rabattit au mois de mai 1629 ; elle tenait 
deux cent quatre-vingts pieds de murailles en rond 
et autant de hauteur. La partie du soleil levant 
tomba la première, environ un tiers, le 7 mai ; le 
côté vers la ville le 14 mai ; puis le côté vers le 
pont le 19 mai (2) ». La grosse tour, ou autrement 
dit, la tour de Clisson, était située sur le côté sud de 
Fenceinte du château. 

Elle entraîna dans sa chute le moulin à vent qui 
la surmontait et qui maintes fois avait servi à 
moudre le grain des assiégés. 

C'est vraisemblablement à cette époque, dit Ogée, 
qu'il faut rapporter la ruine entière des remparts 
de Josselin. 11 serait plus juste de dire, que les 
ouvrages de défense, bastions, tours et tourelles 
furent alors rasés ; l'enceinte et les fossés, il est 
vrai, très endommagés par suite de l'abandon, 

(1) La pipe était un petit tonneau contenant deux barriques. 

(2) Cayot Dblandrb. 



140 5SSAI SUR LE PORHOËT. 

subsistèrent. Nous verrons à Tépoque révolutionnaire 
les habitants de la ville appelés par l'autorité 
municipale à réparer et à entretenir leurs murailles ; 
elles arrêtèrent plus d'une incursion à main armée, 
et c'est contre elles que se brisa l'élan de Tinténiac, 
qui avait voulu surprendre la garnison républi- 
caine. 

La capitale du Porhoët et le pays qu'elle com- 
mandait étaient restés aux mains des ligueurs 
jusqu'à la fin des hostilités. Coetlogon Kerbério 
commandait encore en 1596 la ville et le château 
pour Mercœur. 

Le comte Henri, trop jeune pour disputer lui- 
même ses biens à ce chef intrépide, faisait ses 
premières armes sous l'égide du roi Henri IV, son 
cousin. Celui-ci n'avait pas d'enfant de la reine 
Marguerite et le considérait comme son successeur 
éventuel au trône de Navarre, en sa qualité de 
petit-fils d'Isabeau d'Albret, fille de Jean de Navarre. 
La paix rétablie, Henri employa vingt mois à visiter 
les principales cours d'Europe. Partout sa naissance, 
son esprit, son caractère, ses formes aimables, lui 
valurent un accueil flatteur. 

A son retour, le roi le créa Pair de France et 
érigea sa vicomte de Rohan en Duché-Pairie. 

Les divers démembrements ayant notablement 



CHAPITRE VI. 141 

réduit rétendue originelle de cette vicomte (1), on ne 
la trouva pas en 1603 d'assez belle taille pour faire 
honneur à son nouveau titre; aussi, pour en relever 
rimportance, on démembra du comté de Porhoët 
les 21 paroisses de la châtellenie de la Chèze et on 
les annexa au duché de Rohan, dont elles ont tou- 
jours fait partie depuis lors. Le duché ainsi com- 
posé fut divisé en six châtellenies : Rohan, Pontivj^ 
Gouarec, La Chèze, Loudéac, La Trinité ; les trois 
dernières répondant à Tancien territoire de la 
Chèze. Dans chacune des châtellenies, il y eut un 
siège de justice, et celui de Pontivy étant tribunal 
d'appel à Tégard des cinq autres, cette ville devint 
par là même, capitale du duché de Rohan (2). Nous 
avons vu précédemment quelles étaient les limites 
du duché ainsi constitué (3). C'est là le dernier 
démembrement du Porhoët, le comté même ne 
comptera plus désormais qu'une châtellenie impor- 
tante, celle de Josselin. 

La mort du roi Henri IV rejeta naturellement le 
jeune duc, né protestant, dans le parti des réformés, 

(1) A Toccasion de Térection de la seigneurie de Guémené on 
principauté, l'année 1570. Corlai et Plourai en avaient été détachés. 
Plus anciennement les seigneuries de Plugrilfet, Le Gué de Tlsle, 
Naiïin, Kergrois, Baud, Kerveno en étaient sortis à la suite de par- 
tages. 

(2) La BoaDBRiB. 

(3) Page 20, note 4. 



142 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

qui étaient menacés de perdre les garanties que 
leur avait accordées l'Édit de Nantes. Ses talents 
militaires en eurent bientôt fait le chef du parti en 
France. Pendant dix-neuf ans, de 1610 à 1629, il 
dirigea la guerre civile et religieuse avec tant d'acti- 
vité et d'intelligence que le génie de Richelieu fut 
plus d'une fois obligé de plier devant lui. Les évé- 
nements auxquels il présida alors sont uniquement 
du domaine de l'histoire de France; malgré tout 
leur intérêt, nous ne nous y arrêterons pas. 

La Bretagne put se féliciter d'être oubliée mo- 
mentanément de ce fougueux rejeton ; elle resta 
heureusement à l'écart des sanglantes querelles. 
La paix signée, Henri de Rohan rentra dans les 
bonnes grâces de Louis XIII ; mais cependant, con- 
sidéré un peu comme un objet de défiance, il fut 
tenu constamment éloigné de la cour, soit comme 
ambassadeur en Suisse, soit comme général au 
pays des Grisons et dans la Valteline, et même 
comme exilé à Venise. On a de lui une foule d'ou- 
vrages sur l'art militaire, des mémoires, des discours, 
des traités de tous genres, qui le rangent parmi les 
meilleurs écrivains de l'époque. 

« Une rare vigueur de corps et d'esprit ; vigueur 
telle, a-t-on dit, qu'il pouvait travailler quarante 
heures sans se reposer, en avait fait un homme 



CHAPITRE VI. 143 

aussi propre à concevoir qu'à exécuter les projets 
les plus hardis. Par son courage et son habileté 
stratégique attestée par ses campagnes et ses écrits, 
il est digne d'être proposé pour modèle aux hommes 
de guerre ; et aucune restriction ne viendrait se 
mêler aux éloges qu'il mérite, si des motifs d'intérêt 
personnel, ou des prétextes de religion, ne l'avaient 
entraîné à provoquer ou à entretenir la guerre 
civile dans sa patrie. Comme Condé et Turenne, il 
en fut puni par l'insuccès et, comme eux, il ne fut 
jamais plus grand que quand il servit son pays 
contre l'étranger. » Tel est le jugement porté sur 
lui par Levot ; il s'accorde du reste avec cet éloge 
que lui fit Voltaire : 

Avec tous les talents, le ciel Tavait fait naitre ; 
Il agit en héros, en sage il écrivit ; 
Il fut même un grand homme en combattant son maître» 
£t plus grand quand il le servit (1). 

Ce comte de Porhoët, le plus éminent de ceux de 
sa lignée, eut une fin digne de lui ; à soixante- 
dix ans, il combattait encore à Reinfeld (1638), 
lorsqu'une blessure le conduisit au tombeau. Son 
corps fut transporté à Saint- Pierre de Genève. 



(1) Henri Martin dit, à son propos, que Richelieu ne désespéra 
jamais de tourner au profit de TÉtat cette puissante activité qui avait 
ébranlé TÉtat. 



i44 E3SAI SUR LE PORHOËT. 

Marguerite de Béthune, son épouse, fille du célèbre 
ministre, lui avait donné quatre fils et autant de 
filles ; de tous ces enfants, une seule fille lui sur- 
vécut. Son nom était Marguerite de Rohan, et d'elle 
devait sortir la branche des Rohan-Chabot. 



CHAPITRE VII 

1638-1700. 

Là princesse Marguerite. — Le xyii^ siècle. — Période 

DE CALME EN BrETAGNE. — FONDATIONS RELIGIEUSES A 

JossELiN. — La Dévotion a N.-û. du Roncier. — 
Les Rohan-Charot. 



L'héritage entier d'Henri de Rohan fut longtemps 
et vivement contesté à sa fille Marguerite. Le 
plus grave reproche que put lui faire sa mère, fut 
son mariage avec un gentilhomme d'un rang, sinon 
moins honorable, du moins inférieur quelque peu 
au sien et avec un catholique. Assister au transfert 
de l'illustre nom de Rohan sur la tête d'un gentil- 
honmie qui n'était ni prince, ni pair ; et voir passer 
des biens immenses (1) aux mains d'un rival poli- 
tique, c'en était trop ! L'année même du mariage de 

(1) Margueriu» de Rohan était princesse de Rohan, de Fontenay 
et de Léon, comtesse de Porhoët, dame de Blain, etc. (cette dernière 
terre ne fut élevée au marquisat qu^en 1660). Elle avait successive- 
ment refusé trois princes souverains. 

10 



146 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Marguerite avec Henry Chabot, seigneur de Saînt- 
Aulaire (1645), Marguerite de Bétbune présenta 
soudainement au monde un fils, nommé Tancrëde, 
né en 1630, qu elle avait caché depuis ce temps, par 
crainte, disait-elle, que Richelieu le lui enlevât. 
Elle put le reconnaître dans les formes légales, 
d'autant plus facilement qu'Henri II était mort 
depuis sept ans. Celui-ci, sa vie durant, n'avait 
jamais considéré sa fille que comme l'unique héritière 
de son nom et de sa fortune. Sa femme s'était tenue 
loin de lui pendant toute la période de son absence 
à l'étranger, et la légèreté de caractère de Margue- 
rite de Béthune était notoire. 

Le roi Louis XIV n'ajouta pas foi un instant à 
ses protestations. 11 appuya Marguerite de Rohan 
de toute son autorité en confirmant son contrat de 
mariage, dans lequel il était stipulé qu'elle appor- 
tait à son époux la communauté de tous ses biens 
et de tous ses titres à la condition expresse que les 
enfants qui naîtraient porteraient le nom et les armes 
des Rohan. Des lettres patentes furent délivrées le 
19 septembre 1646, homologuant la transmission 
des biens et des titres ainsi que la condition relative 
au nom et aux armes. Et comme la pairie s'éteignait 
par la mort, sans enfant mâle du titulaire, de nou- 
velles lettres d'érection intervinrent en 1648, réta- 



CHAPITRE Vil. 147 

blissant le duché-pairie de Rohan en faveur de 
Tépoux de la comtesse de Porhoët. Tancrède mourut 
aux armées Tamiée suivante : avec lui prit fin la 
légende de sa naissance, mais non les jalousies de 
la branche Rohan-Guemené contre celle de Rohan- 
Chabot. 

Maintenant que nous venons de fixer sur Henri 
Chabot et ses descendants Théritage du Porhoët, 
voyons quelle fut la physionomie du pays au 
XVII* siècle. 

A Josselin d'abord, ce fut un retour à la foi, un 
élan de piété admirable, véritable réaction qui suc- 
cède habituellement à la persécution. 

Ce mouvement se manifesta par plusieurs fonda- 
tions pieuses. La Ville, d'elle-même, appelle les 
Carmes, qui s'y établissent le 10 avril 1626. Le 
nombre des religieux était fixé à six, et la madson, 
définitivement établie dans le haut de la ville, au 
laubourg Saint-Martin, près de ce qui est aujour- 
d'hui la promenade, relevait du couvent de Saint- 
Fol de Léon (1). Leur mission principale était de 

(1) Ed 1627, les religieux font acquisition à Isabeau Rolland, dame 
des Clos, pour leur installation provisoire, d'une maison avec cour et 
jardin, appelée la maison du Chapeau Rouge, et d'une autre appelée 
la maison Hervo ou de la Rivière, < situées au faubourg Saint-Martin, 
dans le fief temporel du prieuré dudit Saint-Martin , noble et discret 



148 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

s'occuper d'exercices pieux et de prêcher dans les 
paroissses environnantes. 

Plus tard, une sainte fille des Ursulines de Dinan, 

Messire Alain Bonia (de la Villebouquais) lors titulaire dudit 
prieuré ». Deux ans plus tard, se préoccupant de la construction 
d'une chapelle et d'un couvent définitif, après avoir obtenu de la 
communauté de ville, la cession de la moitié de ses octrois sur le 
vin et le cidre pendant neuf ans, ils abandonnent à Guillemette de 
Saint-Pern, clame de la Villebouquais et de Penmené, leurs maisons 
du Chapeau Rouge et de Hervo, contre les maisons et les terres de 
la Carrière, contenant quatre journaux trois quarts. C'est dans cette 
propriété de la Carrière que, le 5 août 1640, on posa, au milieu d*an 
grand concours de fidèles, la première pierre de l'église et du cou- 
vent. Voici rinscription que portait cette pierre : L'an du salut 1610, 
le 5 août, siégeant le pape Urbain VIII, régnant le roi Louis XIII, 
cette première pierre a été bénite et posée par Tillustrissime Achille 
de Harlay de Sancy, évéque de Saint-Malo, abbé de Saint-Méen, 
conseiller du roi, en présence de noble homme Jean de Nourquer 
du Camper, sénéchal du comté de Porhoet, représentant la très 
excellente princesse Marguerite, duchesse de Rohan, princesse de 
Léon, comtesse de Porhoët, lequel, au nom de la ville de Josselin. 
posa cette pierre avec ledit évéque, pour édifier l'église et le monas- 
tère des Frères Carmes réformés de la province de Tours, sous le 
titre et l'io vocation de saint Joachim, père de la glorieuse Vierge 
Marie ; présent aussi et consentant, noble Alain Bonin, recteur^ 
prieur de Saint-Martin, avec le concours de nobles hommes Jacques 
Moro, alloué; Jean Farault, lieutenant; Yves Qatechair, procureur 
fiscal; Yves Touzé, procureur syndic; g^ftce à la munificence des 
habitants de Josselin [Le Mené, BulUlin de la Société Polytna" 
Ihique du Morbihan). 

L'église qu^on y construisit était fort simple (en 1670, elle avait 
deux chapelles prohibitives, l'une réservée à Marguerite de Rohan, 
l'autre à Alain Bonin de la Villebouquais) et la maison ne pouvait 
guère contenir qu^une dizaine de religieux. Le couvent fut approuvé 
par lettres patentes du roi Louis XIV, le 8 septembre 1655. 

Les Bonin de la Villebouquais, que nous voyons revenir maintes 
fois dans les annales de Josselin aux xvu* et xviii* siècles, habitaient 
la seigneurie de Tregranteur et Josselin même. Ils avaient qualité 
de juveigneurs de Porhoët et droit d'enfeu à Notre-Dame. 



\ 



CHAPITRE VII. 149 

Hélène Mîngart, n'a qu'à manifester la pensée d'ins- 
taller dans sa ville natale une communauté de son 
ordre, pour qu'aussitôt elle en obtienne le consen- 
tement (1639). Malheureusement, l'agrément de la 
suzeraine, Marguerite de Rohan, encore mineure, 
fut plus long à obtenir ; il fallut attendre jusqu'en 
1646 pour envoyer de Dinan les cinq religieuses 
chargées de la création. Elles s'établirent non loin 
des Carmes et sur la même paroisse (1). 

En 1677, c'est dame Suzanne du Guémadeuc, 
ancienne prieure de Locmaria en Plumelec, qui 
installe, à la sortie du faubourg Saint-Nicolas, un 
prieuré de l'Ordre de Saint-Benoît, connu depuis, 
sous le nom d'établissement du Mont Cassin. La très 
illustre princesse. Madame Marguerite, duchesse de 
Rohan, à titre de comtesse de Porhoët, appose sa 
signature à l'acte de fondation et autorise par là 
dame du Guémadeuc à « faire édifûer et construire 
ladite église et le couvent à ses frais et dépans », 

(1) Elles descendirent d'abord dans une maison qui servait d'hos- 
pice aux Carmes, située vis-à-vis Tune des portes de la ville, dans le 
faubourg Saint-Martin ; puis les bases du nouveau monastère Turent 
jetées à l'est de la maison appelée le Chapeau Rouge, et au nord de 
la promenade actuelle. L'église fut dédiée à Notre-Dame sous le 
titre de l'Ave Maria. Le tout, avec un jardin situé au nord, formait 
un enclos respectable {Lb Mbnb, Bulletin delà Société Polymathique 
du Morbihan), 

L'importance du monastère grandit rapidement. Des lettres royales 
furent enregistrées au Parlement de Rennes en 1639. 



150 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

« au lieu proche la ville et le faubourg Saint-Nicolas, 
nommé Longueraye, acquis depuis peu par Messire 
Sébastien du Guémadeuc, conseiller du roi, seigneur 
évêque de Saint-Malo, abbé de Saint-Jean des Prés 
et de la Noë ». Le nom du Longueraye fut changé 
en celui du Mont Cassin du Guémadeuc, et le roi 
donna son approbation. Ce prieuré fut érigé en 
abbaye en 1682. Le monastère comprenait église, 
maison, cours, jardins, etc. (1). 

Trois abbesses se succédèrent de 1682 à 1739 : 
Suzanne du Guémadeuc, la fondatrice, sœur de 
Tévêque de Saint-Malo ; Eléonore du Guémadeuc, 
nièce de celle-ci, et Thérèse de Faramus. Le titre 
abbatial fut supprimé en 1739 et la maison devint 
simple prieuré comme à l'origine . 

Des prédicateurs étrangers se firent entendre du 
haut de la chaire ; un de ceux-ci organisa à Sainte- 
Croix (1637) une confrérie du Rosaire à laquelle 
s'inscrivirent des frères et des sœurs en grand nombre. 

Il n'est donc pas extraordinaire que, pour accroître 
la vitalité d'une foi si intense, la Vierge, déléguée 
par la Providence, ait daigné se révéler à JosseUn, 
dans la plénitude de ses grâces ; elle fit des pro- 
diges. Aux cris de repentir et d'amour, elle répondit 
par des effets tangibles : des miracles. 

(1) Le Mené, Bulletin de la Société Polymalhique du Morbihan. 



CHAPITRE Vil. 151 

La dévotion à Tîmage sainte, découverte jadis 
dans un buisson épineux, devint de plus en plus 
florissante. Tout le Porhoët vint chaque année se 
jeter à ses pieds. Une procession, d'une pompe 
solennelle, avait lieu le mardi de la Pentecôte. Voici, 
d'après Ogée, en quels termes la décrit le Carme 
Irenée de Jésus -Maria, qui écrit en 1666 : 
« Marchaient d'abord six compagnies de bourgeois 
et habitants de la ville et des faubourgs, commandées 
par un gentilhomme. Puis une compagnie de deux 
ou trois cents Léonnais, demeurant à Josselin, pour 
apprendre le français et faire le commerce. Ils 
étaient vêtus de bleu, bonnet sur la tête, galant 
sur l'oreille, avec leur chupanne et leurs grandes 
chausses à la Suisse, l'épée au côté et la hallebarde 
en main, commandés par un bourgeois. Entre les 
compagnies de Josselinais et celles de ces bas- 
bretons, un homme coiffé, vêtu et armé à la turque, 
rendait ses hommages à celle qui, suivant l'exprès- 
sion de l'auteur, est aussi bien la dame de l'empire 
Ottoman que de l'empire Chrétien. Venait ensuite 
une troupe de vierges innocentes, dont plusieurs 
choisies parmi les pensionnaires des Ursulines. 
D'autres filles représentaient les trois Marie; une 
autre, la princesse Ursule, couverte d'un manteau 
royal à franges d'argent, accompagnée de deux 



152 ESSAI SOR LE PORHOËT. 

petits anges faisant Toffice de pages, et suivie 
de ses onze mille filles d'honneur. Celle qui la 
représentait, dit le bon Père, en conduisait à la 
vérité beaucoup moins (onze probablement). Lie 
clergé régulier et séculier (entre autres les curés des 
quatre paroisses), le corps de justice, une bande 
nombreuse de pèlerins de Saint-Jacques, relevaient 
encore l'éclat de cette procession qui s'avançait 
majestueusement au concert des tambours, des 
trompettes, des violons, des bombardes, des musettes 
de Poitou, et recevaient en chemin plusieurs salves 
de mousqueterie. Quatre prêtres, revêtus d'aubes 
et de dalmatiques, portaient l'image de Notre-Dame 
sur un brancard richement orné ; elle était accom- 
pagnée de quatre filles parées qui tenaient des 
cierges blancs à la main. 11 y avait des assistants 
des neuf évêchés de Bretagne et même des extra- 
provinciaires. Comme une grande partie des cin- 
quante-deux paroisses (1) du comté de l^orhoët 
accourait avec empressement à cette grave et joyeuse 
solennité. Ton y comptait trente à quarante ban- 
nières, outre plusieurs membres de diverses con- 
fréries portant des torches vertes, jaunes et rouges, 



(1) Dans ces cinquante-deux étaient comprises celles de la chAtel- 
lenie de la Chèze qui, Tauteur ne semble pas s'en douter, faisaient 
alors partie du duché de Rohan. 



CHAPITRE Vil. 153 

chacune de dix-huit pieds de hauteur et du poids de 
cent livres (1). » 

Les papes attachèrent des indulgences à cette 
admirable dévotion ; le peuple et les seigneurs 
enrichirent le sanctuaiire d'objets d'art remarquables. 
Citons entre autres un calice que le même Carme 
regarde comme un don royal, de Louis XIII proba- 
blement. « 11 est massif, d'argent doré, pèse dix- 
huit marcs, a quatorze pouces de hauteur, un pied 
et demi de circonférence et contient plus d'un pot 
de roi. Le nœud est très artistement travaillé. Les 
images du Sauveur et des douze apôtres y sont tel- 
lement finies qu'on les distingue facilement les unes 
des autres, avec l'instrument de leur martyre, dans 
leurs niches séparées, avec leurs chapiteaux. La 
patène a trois pieds de tour. On remarque au milieu 
l'image de Notre-Seigneur et de la Vierge, et 
autour celle des quatre évangélistes. L'empreinte 
des armes, sous le pied du calice, fait présumer 
que c'est le vœu d'un de nos rois. » 



(1) Au XVII* siècle, il n^est pas encore question d'aboyeuses. Elles 
ne font leur apparition qu'en 1727, suivant un procès-verbal réguliè- 
rement rédigé. Trois enfants du bourg de Camors furent les premiers 
atteints de ce mal. Depuis cette époque, il y eut à Josselin des 
aboyeuses presque sans interruption. La science n'a su se prononcer 
sar le caractère de cette étrange maladie qui survient inopiné- 
ment et dont les crises s'apaisent au contact des reliques de la 
Vierge. 



154 ESSAI SDR LE PORHOËT. 

Voici encore un objet de grande valeur, offert 
par les nobles bourgeois et les habitants de la ville ; 
c'est une croix en argent, a Elle a deux branches 
comme toutes les autres croix de cette église ; son 
poids est de 36 marcs ; sa hauteur de quatre pieds ; 
sa largeur de deux ; la pomme a près de deux pieds 
de tour, et Ton y voit les images de Notre-Seigneur 
et des douze apôtres avec les attributs de leur passion, 
dans leurs niches et sous des chapiteaux séparés. 
Au milieu de la croix est le crucifix, d'un pied de 
hauteur et au revers la figure de Notre-Dame du 
Roncier. Sur le bras de la croix, sont d'un côté les 
quatre évangélistes et de l'autre un aigle et un 
pellican, un agneau et un bœuf, un lion avec des 
ailes et un ange bien travaillés (I). » Clisson, par tes- 
tament, avait légué mille livres de huit marcs d'or, 
pour faire deux calices et deux patènes, ainsi q[ue 
la plus belle croix qu'il avait dans son château avec 
les reliques qu'elle renfermait. Hélas ! tout ce 
magnifique trésor devait disparaître dans la tour- 
mente révolutionnaire, c'eût été crime pour les 
féaux du pontife de l'Être suprême d'épargner ce 
musée de notre histoire. 

Authentique, ou non, au-dessus de l'image mira* 
culeuse était accroché encore au xvii<^ siècle, le 

(1) Irenée de Jésus-Maria. 



CHAPITRE VII. 155 

iaucillon qui fit jour à la statue, et pour rendre 
hommage aux vertus de celle-ci, au moins cinq cents 
ex-votos en cire, outre les suaires, chemises, 
annilles, etc. étaient pendus tout autour. 

Cette époque fut non seulement un triomphe pour 
la foi, mais aussi une ère de paix et de prospérité, 
La Breia^e se relevait de ses ruines, pansait ses 
blessures et recouvrait sa force. La soumission était 
un fait définitivement accompli, non qu'il n'y eût 
plus ombre de mauvaise humeur ; de temps à autie, 
au xvii* comme au xviii" siècle, certains mouvements 
d'indignation survinrent à la suite d'imposition de 
taxes trop lourdes, ou déterminées par l'effet d'un 
bras trop rude ou maladroit ; mais ce ne furent que 
courtes velléités, soulèvements vite réprimés. 

L'œuvre de centralisation s'était accomplie rapide- 
ment et la Province resta à l'abri de toute agitation 
sérieuse, sous la tutelle de sa sœur aînée. La 
direction provinciale, rassemblée dans la main du 
Gouverneur, et les querelles de succession et de 
voisinage enfin terminées, les chefs de la noblesse 
féodale se sentirent désœuvrés ; ils déléguèrent 
leurs pouvoirs dans leurs domaines aux officiers 
civils et militaires et s'en furent à la cour, attirés 
par l'éclat des fêtes et les faveurs qui rejaillissaient 



156 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

sur tous ceux qui savaient approcher nos rois. Ce 
n'est pas qu'ils sacrifiassent, sur ce nouveau chancip 
de bataille, leurs ambitions et Torfçueil de leur 
race ; mais là au moins ce ne furent que querelles 
de tabourets, rivalités inoffensives de titres et 
d'honneurs. La Bretagne y gagna la paix ; la France 
de vaillants défenseurs et de fiers conquérants. 
Pour ne porter nos regards que sur l'illustre famille 
des Rohan, comtes de Porhoôt, nous y voyons une 
suite de maréchaux de camp et de lieutenants 
généraux. 

Pendant ce temps, les titulaires de seigneuries 
vassales n'étant plus astreints aux droits d'ost et de 
harelle, quittèrent le mousquet pour la charrue et 
employèrent leur activité à l'exploitation de leur 
sol, ainsi qu'à l'amélioration du sort des colons (I). 
Nous ne dirons pas certes, que les moissons dorées 
se répandirent d'un bout à l'autre du Porhoôt ; cette 
assertion serait démentie par l'aspect réel du 
pays ; même, nous devons à la vérité historique de 
ne pas dissimuler que la situation du Porhoet et 
de sa capitale ne fut jamais bien brillante. Ogée, 
qui écrit vers 1780, dit qu'une fabrique de très 
gros draps et de chapeaux fait vivre une partie du 

(1) M. de la Vaissiôre nous a retracé le véritable rôle du gentil- 
homme campagnard aux xyip et xvm« siècles. 



CHAPITRE VII. 157 

peuple de Josselîn, mais ne renrichitpas. En réalité, 
le principal commerce de la ville portait sur les 
blés et sur les bestiaux. 

« Quant à Texploitation du territoire qui l'envi- 
ronne, ajoute-t-il, elle est chétive et languissante, 
excepté pour le blé noir. On y récolte un peu de 
seigle et de froment ; ce dernier jouit d'une répu- 
tation qui fait désirer qu'on en perfectionne et 
qu'on en augmente la culture. Le chanvre y réussit. » 
La grande quantité de terrain perdu en landes lui 
fait désirer des plantations ; l'idée est excellente, 
mais il est pessimiste en pensant que les forges de 
Lanouée épuiseront sensiblement la forêt (1). 

Toutefois, grâce aux encouragements de nos 
gentilshommes campagnards, un grand progrès se 
réalisa dans la culture et chacun, petit et grand, 
put trouver sous son toit, sinon la richesse, du 
moins un certain bien-être inconnu jusqu'alors. 

Forcément, avec les obligations auxquelles ils 
étaient assujettis par leur rang à la cour, les sei- 
gneurs du Porhoët eurent peu de temps à consacrer 

(1) Le minerai de fer a toujours été abondant dans le territoire du 
Porhoët. Roch Le Baillif, médecin de René II, découvrit plusieurs 
sources minérales. M. Baudouin de Marattes fit, en 1835, à T Aca- 
démie des sciences, an rapport très intéressant sur les perturbations 
subies par l'aiguille aimantée dans la vallée de TOust, phénomène 
qu*il explique par la présence dans le lit de la rivière de sahle ferru- 
gineux aimanté. 



1K8 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

à radministration suzeraine de leurs terres ; cepen- 
dant ils y exercèrent une surveillance continuelle et 
les intérêts mêmes de l'ancien duché trouvèrent 
toujours en eux leurs plus fidèles défenseurs. Nous 
avons vu quel prix ils attachaient à la présidence 
de la noblesse aux Etats ; nous n'en voulons encore 
pour preuve que le geste de Marguerite de Rohan 
souffletant d'un coup de pantoufle le maréchal de 
la Meilleraye, qui osait émettre devant elle des 
prétentions injustifiées (1651). Le Maréchal, pour se 
venger, la fit assiéger dans sa demeure par ses 
canonniers, mais ne put empêcher l'arrêt de la 
même année, qui trancha définitivement la question 
par l'alternative (1). Bien rarement les Rohan firent 
défaut aux Etats de Bretagne. 

Voici, à titre de généalogie des comtes de Porhoët, 
quels furent les descendants d'Henri Chabot jusqu'à 
la Révolution. Celui-ci était mort en 1655 (2), laissant 
pour ^lui succéder Louis de Rohan-Chabot (3) qui 
épousa en 1678 Marie-Elisabeth du Bec-Crespin. 

(1) Kntre les ducs de Rohan et de la Trémoïlie ; ceux-ci étant les héri- 
tiers des barons de Vitré qui les premiers avaient soulevé le différend. 

(2) La princesse Marguerite mourut après lui, le 9 avril 1684. 

(3) Louis de Rohan-Chabot fut dès sa naissance à l'apogée des 
honneurs. Il avait été baptisé dans la chapelle du Louvre à Paris, 
par Tévéque de Meaux, premier aumônier du roi, et avait été tenil 
sur les fonts par Louis XIV et la reine régente Anne d'Autriche. 



r 



CHAPITRE VII. 159 

Louis, duc de Kohan et pair de France, fît en juin 
1708, à Toccasion du mariage de son fils aîné Louis 
Bretagne, un acte important relatif à la transmission 
de ses biens et de ses titres. Telle est la substance 
de cet acte : une substitution perpétuelle à Finfinl 
est faite du duché de Rohan, de la principauté de 
Léon, du marquisat de Blain et du comté de 
Porhoët, en faveur de son fils aîné et de sa postérité 
masculine, et à son défaut en faveur de ses puînés ; 
au défaut des mâles de toutes les branches, en 
faveur des filles de la branche aînée, à condition 
que celle qui sera appelée à cette substitution 
épousera un gentilhomme de la première noblesse, 
et que son mari et toute la postérité devront 
prendre le nom et les armes de Chabot comme 
premier et principal nom (1). 

Cette pièce fut confirmée par des lettres patentes 
données à Fontainebleau, le même mois de juin 
1708, enregistrées au Parlement de Paris et à la 
Chambre des Comptes de Bretagne en juillet suivant. 
Guy Auguste, second fils de Louis, fut Tauteur de 
la deuxième branche des ducs que nous trouverons 
plus tard. 

Louis Bretagne (Louis II) prêta serment et prit 
séance au Parlement, en qualité de pair, le 12 août 

(1) Sandret, La Maison de Chabot. 



160 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

1728, une année après le décès de son père. 
Françoise de Roquelaure, fille et héritière du duc 
de Roquelaure, maréchal de France, lui donna deux 
fils, dont Louis-Marie Bretagne, né le 17 janvier 1710. 
Bien que celui-ci (Louis III) se tînt habituellement 
éloigné de la cour, le roi Louis XV récompensa ses 
services à l'armée en l'élevant au grade de lieute- 
nant général en 1781 et il lui accorda un brevet 
(6 juin 1764) confirmant en sa faveur et ceUe de ses 
descendants mâles et femelles leur droit à être 
traités de cousins de sa Majesté. Il mourut à Nice 
en 1791, après avoir perdu tous ses enfants (1). 

(1) Louis -Marie Bretagne avait épousé en premières noces 
Charlotte-Rosalie de Chatillon, fille unique du comte de ChatilloQ 
(1735) et en secondes noces : Charlotte- Emilie de Grussol d'Uzès, 
fille du duc d'Uzès (1758). 



f 



CHAPITRE VIII 

XVIII* siècle. 

Organisation administrative kt judiciaire. — Anciennes 
COUTUMES. — Ce qu'étaient devenus josselin et ses 
PRIEURÉS. — Piété des habitants. — La fin du 
Comté de Porhoët. 



Un des principaux facteurs de Tordre et de la 
tranquillité à l'intérieur, aux xvii« et xviii« siècles, 
fut Torganisation administrative des campagnes et 
des villes. Celles-ci avaient toutes une communauté 
de ville et un gouverneur. 

A Josselin, le gouvernement royal fut créé assez 
tard, en 1767 ; M. le chevalier du Moulin du Brossay, 
lieutenant-colonel de cavalerie et chevalier de Saint- 
Louis, en est le premier titulaire. Mais comme 
nous l'avons déjà vu, la communauté datait de loin 
et avait droit de députer aux Etats ; ses obligations 
étaient multiples, vu qu'elle avait charge de tous 
les intérêts de la ville. 

Une foule d'affaires, en effet, incombait à ce corps 

11 



162 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

de ville, composé de la plus « saine » partie, comme 
on disait jadis, de la population ; ses membres 
veillaient et pourvoyaient à tout, avec des ressources 
le plus souvent fort restreintes, sous le contrôle du 
gouverneur et de l'intendant de la Province. Encore, 
était-on souvent obligé de former des commissions 
spéciales. « Sans parler des devoirs imposés parti- 
culièrement au syndic ou maire, il n'était pas de 
travaux, pas d'acquisition, pas de procès, qui ne 
fussent confiés à la diligence de xîommissîons 
spéciales, choisies soit parmi les membres de la 
communauté , soit en dehors ; d'autres étaient 
chargées de vérifier les comptes du syndic, ou du 
miseur ; d'autres encore étaient déléguées, vers les 
hauts personnages de passage sur les lieux ou dans 
les environs, pour présenter les respects de la ville 
et offrir leurs services ; aux Etats ou au Parlement, 
pour demander des secours ou déposer un vœu ; 
vers les gouverneurs, commandants ou intendants 
de la Province nouvellement nommés, pour solliciter 
l'honneur de leur protection. C'étaient les membres 
du corps de ville qui répartissaient les impôts de 
tout genre et qui en désignaient les receveurs, qui 
élisaient les officiers de la milice bourgeoise et au 
besoin se mettaient à sa tête (1). » 

(1) RosBNSWKio, Archives du Morbihan. 



CHAPITRE VIII. 163 

Quant aux simples paroisses rurales, comme 
toutes celles qui composaient le Porhoët, en 
Tabsence de la communauté de ville, elles étaient 
administrées chacune par le « Général » formant 
le corps politique ou la fabrique de la paroisse, 
sous la présidence du curé ou du recteur. Cette 
assemblée jouait également le rôle de corps de ville. 
Indépendamment de Tentretien des églises et des 
chapelles, de Tadministration des biens et revenus 
paroissiaux, elle était chargée des travaux, des 
impôts, milices, etc. (1). 

La Sénéchaussée seigneuriale, dont Josselin est le 
siège, se trouve composée, à la fin du xviii* siècle, 
d'un sénéchal, d'un alloué, d un lieutenant, d'un 
procureur fiscal, d'un greffier, de douze procureurs, 
d'un nombre indéfini de notaires et de trois arpen- 
teurs. Elle connaît les matières ecclésiastiques et 
bénéficiales au temporel et ressortit au siège royal 
de Ploërmel. 

(1) De plus, au point de vue de radiuinistralion royale (particulière- 
ment pour la levée des impôts), les paroisses étaient groupées en 
subdélégations. Le Morbihan actuel et la portion de la province 
occupée par Tancien diocèse de Vannes renfermait 19 subdélégalions, 
dont celle de Josselin, qui comprenait les paroisses suivantes : Brehan- 
Loudéac, Buléon, La Croiz-Helléan, Lantillac, Menéac, Mohon, 
Notre-Dame du Roncier, Pleugriffet, La Gré«-Saint-Laurent, Guégoii, 
Quillac, Piumelec, Pommeleuc, Radenac, Reguiny, Saint-Allooestre, 
Sainte-Croix de Josselin, Guilliers, Helléan, Lanouée, Saint-Martin 
et Saint-Nicolas de Josselin, Saint-Samson, Saint-Servan, La Trinité 
Porhoét. La Bretagne composait une Qénéralité ou Intendance. 



164 ESSAI SUR LB PORHOËT. 

Certaines coutumes anciennes existaient encore à 
cette époque. Le droit de guet, très répandu en 
Bretagne, s'était maintenu, mais en subissant une 
transformation due à révolution des temps. Ce qui 
à Torigine était un service de défense commune, 
nécessitée par Tétat d'insécurité du moyen ftge, 
devint un droit naturel, payable en argent. Les 
chAteaux des seigneurs, étant primitivement l'asile 
de la population des campagnes environnantes, 
celle-ci, en temps de trouble ou de guerre, s'était 
bénévolement soumise à faire pendant le jour ou la 
nuit, la garde de la forteresse qui les abritait. Il 
paraît même vraisemblable, que ceux des vassaux 
qui, pour une raison ou pour une autre, s'exemptaient 
de ce service, devaient se racheter ou payer le prix 
de leur remplacement. La transition parait venir 
d'elle-même et elle se fit tout naturellement, 
lorsqu'à l'extinction du devoir féodal, le guet n'eut 
plus de raison d'être. L'abstention de tous au guet 
décida de sa conversion en une redevance pécuniaire. 

Le duc de Rohan exerça toujours ce droit de guet 
à Josselin et dans les autres terres de la seigneurie 
de Josselin ; il n'était que de 4 sous par an, dans la 
paroisse de Lanouée, mais de 5 dans les autres et 
se levait sur tous les contribuables aux fouages et 



CHAPITRE VIII. 165 

tailles imposés au moins à 20 sous par an. Les 
filles, les veuves, les mineurs de 18 ans, et les 
honmies %és de plus de 60 ans en étaient exempts. 
Le parlement a confirmé cet usage aux comtes de 
Porhoët par arrêts des 5 et 28 septembre 1593, 
!•' juillet 1681 et 2 avril 1692 (1). 

Un des usages les plus curieux était le « saut de 
carpe », autrement dit, le saut des poissonniers. 

Après les rigueurs du Carême, le peuple, dans la 
joie d'être débarrassé du régime maigre impatiem* 
ment supporté, s'amusait à jeter à l'eau les mar- 
chands de poissons qui avaient si longtemps forcé 
les fidèles à s'approvisionner à leurs étaux. 

Le dimanche de la Quasimodo, grande réunion 
populaire se faisait donc, sur les bords de TOust' 
près du pont Sainte-Croix. Mais la vengeance envers 
les poissonniers était réglementée par le droit féodal 
et voici comment : <' MM. les juges se rendent en 
robe, au bord de la rivière, dans un lieu fixe, et là, 
il est fait appel de tous les vassaux qui ont vendu 
du poisson pendant le carême ; ils doivent y com- 
paraître pour faire le « saut de carpe » jambes 
nues dans la rivière, ou le faire faire par quelqu'un 



(1) (Ooéb). — Le Ouet et toates les coutumes qui vont suivre sont 
également énoncés dans le Terrier de Bretagne de 1679. Archiv. 
Nation. Sénéch, de Ploirmel, vol. 7 (P. 1685). 



166 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

de bonne volonté ou payé ad hoc, sous peine de 
3 livres 4 sous d'amende (1). » 

Quelles clameurs de joie devaient soulever les 
plongeons de ces malheureux poissonniers ! 

M. Tabbé Guillotin de Corson, dans son étude 
« Vieux usages du pays de Châteaubriant » nous 
apprend que la même coutume existait à Château- 
briant, et que dans cette ville, l'amende était de 
deux chapons de Cornouailles et soixante sols 
monnoie » et il ajoute spirituellement : remarquez 
cette ironique fourniture de bons chapons bien gras 
exigée des vendeurs de morue ! 

C'était avant tout une réjouissance publique, car 
sans doute le comte de Porhoët comme le baron de 
Châteaubriant était tenu après le plongeon de sécher 
les poissonniers et de les réconforter d'une pièce de 
bœuf et de nombreux pots de vin. 

Il en était autrement du droit de « fumage », 
également ancien, mais qui ne s'exerçait qu'aux 
environs de Josselin et non dans la ville. Chaque 
vassal roturier qui fait « feu et fumée » devait par 
an un boisseau d'avoine et une poule. 

Mais voici encore un droit seigneurial qui régle- 
mentait un jeu. C'était le droit de « soûle ». Écoutons 

(1) GoÉB.— Au XVII» siècle en tout cas, l'amende n'était que de 60 sols 
20 deniers. Apch. Nat., P. 1685 



CHAPITRE VIII. 167 

ce qu'en dit rhistorîen que nous venons de citer : 

« De tout temps, les Bretons ont aimé le jeu de 

soûle, l'un des plus violents divertissements du 

peuple. Non seulement en Basse-Bretagne, mais 

encore dans la Haute, la soûle est demeurée jusqu'au 

xix« siècle très usitée parmi les jeunes gens. On dit 

qu'au moyen âge, le monopole du droit de soûle 

fut attribué aux seigneurs, par mesure de police : 

ce jeu étant très dangereux, il ne fut plus permis 

de se livrer à ses ébats qu'à certains jours et 

dans certaines conditions. C'était ordinairement les 

jours qui suivaient la fête de Noël, très souvent le 

jour saint Etienne, par rapprochement peut-être 

entre le martyre de ce bienheureux, lapidé par les 

Juifs, et les violences du jeu de soûle (1). » 

La soûle était un gros ballon de cuir, que deux 
partis, composés souvent des habitants de deux 
paroisses ou de deux fiefs voisins, armés de bâtons 
recourbés appelés crosses ou quillards, se disputaient 
avec fureur. Au seigneur était réservé l'honneur de 
lancer en l'air le ballon, ce qui était le signal de 
la lutte. Il s'agissait de faire parvenir la soûle à un 
certain but. Mais pour gagner cette victoire, que 
de coups de crosses et de horions il fallait essuyer ; 
que de mêlées il fallait soutenir ! Trop souvent de 

(1) Guillotin de Corson. 



168 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

graves accidents s'en suivaient et c'est pourquoi le 
duc de Rohan, Louis-Marie Bretagne, suspendit 
l'exercice de ce droit, considérant ses conséquences 
comme trop dangereuses. 

Le « Papegault » avait aussi une grande vogue & 
Josselin. C'était un tir, institué au ivi« siècle, dans 
le but de former la jeunesse aux exercices militaires. 

« On appelait indifféremment papegault ou papegai 
un oiseau en bois, peint en vert comme un perro- 
quet ou en blanc comme un pigeon )). L'oiseau était 
une cible pour tous les tireurs, soit, à l'arc et à 
l'arbalète, soit à l'arquebuse ou au fusil, qui se 
présentaient. Il ne suffisait pas d'elléger le perroquet 
d'un membre, aile ou cuisse, le prix n'était décerné 
qu'à celui qui abattait l'animal jusqu'au dernier 
morceau. Le vainqueur, outre la récompense promise 
et divers privilèges, était décoré du titre de « roi du 
papegault. » 

Ceci nous montre qu'autrefois la force et l'adresse 
étaient deux qualités très estimées et dont nos 
compatriotes aimaient à se glorifier. Les luttes 
corps à corps, qui ont encore lieu dans certaines 
régions de la Bretagne, évoquent le souvenir de 
ces vieux usages. Ne faut-il pas regretter que tous 
ces jeux populaires aient complètement disparu du 
Porhoët? 



r 



CHAPITRE VIII. 169 

La ville, où se maintenaient ces curieuses cou- 
tumes, avait bien conservé aussi son cachet moyen- 
âgeux. Nombreuses maisons de bois, des xv«, xv!** et 
XVII* siècles bordaient les rues étroites et escarpées. 
L'enceinte était toujours debout; évidemment les 
murailles abandonnées s'effritaient, les pierres des 
créneaux glissaient, çà et là quelques brèches 
s'étaient bien produites, mais l'aspect en était tou- 
jours sévère et imposant. Les Josselinais, avides de 
jardinage, avaient malheureusement envahi les 
fossés, qu'ils s'étaient partagés, et s'étaient créé là 
de minuscules exploitations légumières ; de sorte que 
décombres et végétation contribuèrent également 
à l'œuvre de comblement. 

Les trois faubourgs nés dans le courant du 
XII' siècle s'étaient peuplés et avaient pris de 
l'extension . Saint-Martin principalement, depuis 
longtemps déjà, avait fait la tache d'huile et couvrait 
toute la colline nord. A une de ses extrémités se trou- 
vait l'hôpital, connu sous le nom de saint Jacques. 
Mentionné dès 1424, il avait été temporairement trans- 
formé en chapellenie et décoré sans raison du nom 
de prieuré ; puis, rendu à sa première destination en 
1728. Trois Sœurs de la Providence en eurent la direc- 
tion jusqu'à ce qu'il passa aux filles de la Sagesse. 



170 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Un autre petit hôpital situé au bout de la rue du 
Val d'Oust, sur le bord de la rivière, était, avec une 
chapelle dédiée à saint Jean, l'ancien établissement 
des Hospitaliers de Saint- Jean de Jérusalem. Ce 
bien, tombé en commende, fut longtemps possédé 
par les recteurs de Notre-Dame, à la charge d'une 
messe par semaine, puis disparut sous le pic en 1T73. 

Mais qu'étaient devenus tous les prieurés qui 
avaient assuré le développement de la ville pendant 
les premiers siècles ? 

Sainte-Croix depuis le xiv* siècle n'avait plus de 
moines ; le prieur avait conservé la dlme et s'était 
substitué un vicaire perpétuel à portion congrue, pour 
le service de la paroisse. A Saint-Nicolas et Saint- 
Martin, même transformation, par suite de l'abandon 
des religieux ; mais tandis que le bénéfice de Sainte- 
Croix restait à l'abbaye de Redon, ces deux derniers 
prieurés furent perdus pour les religieux et donnés 
en commende à des prêtres séculiers (1). Disons 



(1) Voici un aperçu des revenus des anciens prieurés : Le dernier 
prieur de Sainte-Croix avait affermé en 1785 tous les revenus de son 
bénéfice pour la somme nette de 4800 livres. Toutes les charges 
laissées en plus aux fermiers étaient évaluées à 1700 livres. — Le 
revenu du prieur commendataire de Saint-Nicolas en 1730 était de 
540 livres ; il avait dîmes en plusieurs lieux, droit de foire à la fêle 
de saint Nicolas. — Le prieur de Saint-Martin en 1580 affermait tout 
le revenu du prieuré moyennant 3090 livres pour lui, et Tobligation 
des charges pour les fermiers (il avait entière juridiction sur les 



CHAPITRE VIII. 171 

pour mémoire que les commendes s'introduisirent 
en Bretagne à partir du xvi* siècle ; tous les bénéfices 
d'une maison religieuse étaient attribués à un vicaire 
séculier, de sorte qu'il y avait deux abbés, l'un 
chargé d'assurer le service du culte, l'autre com- 
mendataire, à qui était dévolu le soin de recueillir 
la plus grande part des bénéfices. 

Saint-Martin, que nous avons vu envahi par les 
partisans de la réforme, tomba en commende au 
XVI* siècle et fut occupé séculièrement ; mais en 
1722 le bénéfice du prieur fut uni à la mense capi' 
tulaire de Marmoutiers et les commendataires 
cessèrent d y être nommés. 

Les trois paroisses extra muros subsistaient donc 
comme par le passé, mais au lieu d'être desservies 
par des recteurs prieurs, elles l'étaient par des 
abbés séculiers, à portion congrue. 

Lies traitements étaient habituellement fort exigus ; 
le vicaire perpétuel de Saint- Martin en 1730 touchait 
environ 362 livres ; celui de Saint-Nicolas 100 livres, 
et celui de Sainte-Croix, vers la même époque 
(1756) 425 livres. C'est ce qui fait dire à Ogée : En 
général le clergé travaillant à Josselin est fort mal 



sujets du couvent, droit de corvée, de moulio, de pèche, chasse, 
colombier, etc.). En 1730, les revenus de Saint-Martin étaient 
évalués à 8000 livres, mais les charges montaient à 7000 livres. 



172 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

à son aise, et très éloigné de toucher une rétribution 
proportionneUe à ses exercices et au nombre ae 
nécessiteux qu'il devrait secourir. Les richesses 
ecclésiastiques passent à de gros décimateurs ou 
bénéficiers qui ne résident guère dans la province, 
encore moins dans le canton. 

La chapelle Saint-Michel qui, accidenteUement, 
avait joui des fonctions curiales, était desservie par 
le clergé de Notre-Dame. 

Un quartiernouveau,nésans doute de l'accroisse- 
ment même de la ville, s'étendait maintenant à l'ouest 
du château, le long de la rivière, dans la direction de 
Pontivy. C'était plutôt une longue rue, qu'une agglo- 
mération compacte ; elle s'appelait la rue Glatinier. 
Flanquée dnsi de ses quatre faubourgs, la ville 
close, ou paroisse Notre-Dame, était restée comme 
figée dans ses murs séculaires. Le grand clocher de 
l'église, fortement ébranlé par le temps, s'était 
écroulé en 1705; on le répara tant bien que mal, 
mais en t731 il fallut le reconstruire à neuf. Sa 
forme en voûte demi-sphérique permit d'y monter 
un bourdon énorme baptisé Françoise Ollive (1781) 
pesant 2900 livres (1). 

(1} Le 8 octobre 1744, après la reconstruction avait eu lieu déjà une 
bénédiction solennelle de trois cloches nouvellement fondues. 

Le poids du gros bourdon de Josselin était surpassé dans la région 
par celui seulement de Noyal-Pontivy, qui pesait 3000 livres. 



CHAPITRE VlII. 173 

La piété des habitants de Josselin ne se démentit 
jamais. Non contents d'avoir donné à la Vierge du 
Roncier ce beau cortège de religieux : Carmes, 
Ursulines, Bénédictines, Chanoines, ils se cotisèrent 
Tolontairement pour prendre part aux frais d'ins- 
tallation d'une maison de charité. L'initiative en 
avait été prise par M. Alain, recteur de Notre-Dame, 
et M"' de Chassonville . « Les États, par déli- 
bération du 5 décembre 1776, dit Ogée, ont accordé 
300 livres pour encourager cet établissement exem- 
plaire qui enlève à Toisiveté et à la mendicité une 
trentaine d'adolescents des deux sexes, pris dans 
les plus pauvres familles de la ville et de la banlieue. 
Sous l'inspection de plusieurs dames charitables 
qui font alternativement leur semaine, ils reçoivent 
l'éducation de leur état et sont exercés à de gros 
ouvrages de laine dont le produit contribue en 
partie à leur habillement et à leur subsistance. » 

L'œuvre des retraites eut aussi sa place à Josselin, 
mais sa durée fut bien courte. 

Les archives paroissiales sont souvent fort intéres- 
santes; elles nous montrent entre autres la faveur que 
le public de la ville et de la campagne accordait aux 
missions et l'affluence qui répondait à l'appel du 
prêtre. Les jésuites prêchent à Guégon en 1701 ; le 



174 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Père Gabrier, supérieur capucin, à Notre-Dame en 
1712 ; de nouveau les jésuites à Guégon en 1715. Autres 
prédications à Pleugriffet en 1776 ; Saint-Servan 
1783; Helléan et la Croix-Helléan 1760, etc., etc. Cer- 
taines de ces missions duraient quinze jours, un mois ; 
parfois la foule des pénitents était si grande qu'on 
était obligé d'improviser autour des églises des abris 
en branchages qui tenaient lieu de confessionnaux. 

Le 30 mai 1735, une fête solennelle clôture, à Notre- 
Dame, la mission prêchée par quatorze pères capu- 
cins, « tous gens choisis et distingués par leur savoir 
et leur piété, où présidait le R. Père Angélique de 
Dinan, gardien du couvent de Vannes ». Elle avait 
duré un mois entier, entretenue par les soins des rec- 
teurs et du public. Sans doute que ces quatorze pères 
étaient avec peine arrivés au bout de leur tâche, 
car en 1776, ce sont vingt-deux recteurs et prêtres 
du diocèse, conduits par M. de Grandclos-Meslé, 
archidiacre de Saint-Malo, qui arrivent à Josselin. 

L'abbaye de Saint-Jean des Prés avait, hélas ! dans 
le courant du xviii* siècle, périclité peu à peu, faute 
de ressources. Depuis 1507, tous les abbés furent 
conmiendataires et ceux-ci naturellement absorbaient 
le gros des revenus de la conmiunauté (1) ; si bien 

(1) Le revenu de Tabbé commendataire de SainUJean en 1790 était 
évalué à 2 192 livres, en déduisant les charges qui étaient de 2618 livres, 
11 ne restait à la communauté que 1 531 livres net. 



CHAPITRE VIII. 175 

qu en 1788, ce vaste établissement, assis aujourd'hui 
morne et solitaire aux bords de l'Oust, ne comptait 
plus que deux chanoines. 

Peu de temps après, quand la révolution vint 
interrompre la prière de ces humbles, le Mont 
Cassin abritait dix huit Bénédictines, y compris les 
converses ; les Carmes trois pères et les Ursulines 
vingt-sept religieuses. L'orage les dispersa tous. 

Il nous paraît digne d'intérêt d'enregistrer ici, à 
propos de Saint- Jean des Prés, le certificat de 
M. Busson, docteur régent de la Faculté de méde- 
cine, traitant des qualités de la source minérale de 
cet endroit. 

L'efficacité de ses eaux est notoire, beaucoup de 
malades, paraît-il, s'en sont mieux trouvés que d'au- 
tres eaux jouissant d'une grande réputation. 

Le procès-verbal de l'analyse avait été signé à 
Saint- Jean le 15 octobre 1767 par différents méde- 
cins et le prieur. Voici ce que dit M. Busson : 
« J'ai lu avec la plus grande attention, par ordre 
de M. le duc d'Aiguillon, le rapport de l'analyse 
très bien faite des eaux minérales de Saint-Jean- 
des-Prés-les-Josselin. Il me paraît démontré qu'elles 
contiennent les principes énumérés dans ce rapport, 
et en conséquence je les regarde comme très salu- 
taires dans toutes les maladies qui dépendent de 



176 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

rengorgement des viscères abdominaux, du vice 
des digestions, des sécrétions difficiles ou retardées 
et de Tacrimonie de la lymphe en général et parti- 
culièrement de la lymphe cutanée ; je crois qu'elles 
sont d'une nature analogue aux eaux de Dinan et 
de Lannion et qu'on peut les substituer à ces der- 
nières. Je pense même qu'elles méritent la préfé- 
rence, dans le cas où l'on a moins besoin d'un prin- 
cipe martial très développé que d'un principe volatil 
très pénétrant qui se manifeste sensiblement dans 
ces eaux, quelqu'en soit la nature et qui constitue 
leur principale efficacité dans plusieurs maladies 
chroniques, mais ces cas ne peuvent être déterminés 
que par un médecin attentif à suivre l'effet de ces 
eaux. A Rennes, 15 janvier 1768. » 

Malgré son caractère d'ancienneté, la capitale du 
Porhoôt n'était pas insensible aux embellissements. 

En 1760, la ville acquérait un terrain dépendant 
du couvent des Carmes, afin d'y créer une nouvelle 
promenade et vers la même époque un plan d'ali- 
gnement et d'élargissement des rues était fixé ; les 
cimetières de Notre-Dame et de Saint-Martin situés 
proche de ces églises étaient supprimés pour être 
reportés plus loin, etc., etc. 

Le château perdait malheureusement de sa force 
et de sa majesté ; la forteresse petit à petit se désa- 



CHAPITRE VIII. 177 

grégeaii. Après là démolition de la tour de CUsson 
à laquelle nous avons assisté en 1629, le duc de 
Rohan, jugeant de l'inutilité désormais certaine de 
la défense, prit le parti de faire raser deux autres 
tours qui flanquaient la première porte et le pont- 
levis (1760). Celles qui se tenaient encore debout, 
du côté de l'Est, s'écroulèrent bientôt d'elles-mêmes, 
de sorte qu'à la fin du xvni® siècle il n'en subsistait 
plus que quatre , en comptant celle qui reste 
aujourd'hui, séparée du corps du château par toute 
la largeur de la cour. On fit de cette solitaire une 
prison et on y trouva le logement pour le greffe de 
la Juridiction seigneuriale. 

La place forte de Josselin, dont l'isolement au 
centre de la province était une garantie, eut souvent 
la garde de prisonniers de guerre. Après Camaret 
(1694) et Saint-Cast (1758) on y envoya des Anglais, 
douze cents y furent dirigés à la suite de cette der- 
nière bataille. 

Le comté de Porhoët disparut avec toutes les 
autres divisions seigneuriales dans le creuset révo- 
lutionnaire. Son existence s'était prolongée à travers 
neuf siècles et depuis le xi'' siècle, à un court inter- 
valle près, cette terre n'était point sortie de la 
famille de Guéthenoc. Certes il avait perdu beau- 

12 



t78 ESSAI SUR LE PORHOÊT. 

coup d'importance et était réduit* à une petite por- 
tion de ce qu'avait été le territoire primitif, mais le 
cœur battait toujours avec énergie et tous les 
démembrements n'en avaient pas diminué la vitalité. 

Sous prétexte d'achever TuniGcation de la France, 
TAssemblée Constituante voulut « faire disparaître 
toutes les petites nationalités qui en formaient l'os- 
sature et qui, sans nuire à sa cohésion, lui donnaient 
tant de force de résistance et tant d'originalité ( I ) » ; 
d'un trait elle supprima en 1790 toutes les divisions 
séculaires de notre vieux duché et subdivisa la 
Bretagne en départements et districts. Le Porhoët 
fut scindé en deux ; le nord fit partie des Côtes-du- 
Nord ; le sud, à partir de Ménéac et Brignac, passa 
au Morbihan. Ce département comptait neuf dis- 
tricts, dont celui de Josselin, qui comprenait huit 
cantons et vingt-deux municipalités (2). 

On ne s'en tint pas là ; une nouvelle loi du 
28 Pluviôse an VIII remplaça les districts par des 
arrondissements communaux ou sous-préfectures. 



(1) Le Président de TAssocialion Bretonne — Séance d'ouver- 
ture, 19(fô. 

(2) Le district dont Josselin était le chef-lieu comprenait : Bignan, 
Billio, Bréhan, Bulléon, Credin, la Croix-Helléan, Cruguel, Evri- 
guet, La Grée, Guégon, Guchenno, Gueltas, Helléan, Lanouéc, Lan- 
tillac, Ménéac, Mohon, Pleugriffet, Plumelec, Quily, Radenac, 
Keguiny, Rohan, Saint-Allouestre, Saint-Gouvry, Sainte ean Brevelay, 
Saint-Samson, Saint-Servan, La Trinité-Porhoët. 



CHAPITRE VIII. 179 

Le Morbihan fut alors divisé en quatre arrondis- 
sements ; le district de Josselin réuni à Ploërmel 
forma un arrondissement dont le siège fut fixé dans 
cette dernière ville. Enfin un arrêté du 3 Brumaire 
an X groupa les communes en cantons et Josselin 
devint ville cantonale. 

En réalité, Thistoire du Porhoët et de ses sei- 
gneurs prend fin en 1790 ; mais après avoir cherché 
à retracer les différents épisodes qui intéressent 
rhistoire de ce coin de terre bretonne, nous ne 
pouvons nous arrêter au seuil de la révolution et 
nous retenir de jeter seulement un coup d*œil sur 
les événements qui se sont déroulés jusqu'en 1815 
dans le territoire de Tancien comté. 



CHAPITRE IX 

ÉPOQUE RÉVOLUTIONNAIRE 
i780-i8i6. 

La Persécution rhligieuse soulève les câmpàanes. — 
L'oeuvre de spoliation. — La chouannerie dans 

L ANCIEN PORHOËT. — L'aFFAIRE DE COLLÉDO. — 
JOSSELIN GRENIER ET PLACE d'aPPUI. — L'aTTAQUE DE 
TlNTÉNIAC. — CoMRAT DE LA YaCHEGARE. — DERNIERS 
MOUVEMENTS INSURRECTIONNELS. — Le ChATEAU PENDANT 

l'Époque révolutionnaire. — Les Rohan perdent 

LEURS BIENS EN BrETAGNE. 



La Constitution civile du clergé fut la cause déter- 
minante de tous les troubles qui agitèrent la Bretagne 
au début de la période révolutionnaire. 

Cette alteinte à la liberté religieuse souleva Tin- 
dignation, bien plus que Tantipathie éprouvée pour 
le régime qui constituait alors, sous l'autorité royale, 
la consécration des privilèges et de l'inégalité sociale. 
La suzeraineté protectrice des ducs de Rohan n'avait 
jamais pesé aux habitants des campagnes et de la 



CHAPITRE IX. 181 

ville ; Texistence et les biens de ceux-ci avaient la 
plus sûre garantie dans la députation qu'ils 
exerçaient et dans le rang même qu'occupait aux 
États le comte de Porhoët. 

Aussi, partant de cette situation acquise de paix 
intérieure, ne devons-nous pas nous étonner de voir 
qu'en 1788, les députés de Jos^elin aux Etats parti- 
culiers réunis à Rennes se séparèrent carrément 
de leurs collègues des quarante-deux villes qui 
demandaient, dans leur cahier commun de réclama- 
tions, l'égalité d'impôts, celle du Tiers aux deux 
autres ordres et le vote par tête. 

Mais le bouleversement dans la discipline et la 
hiérarchie religieuse qu'amena le serment civique 
blessa au vif les sentiments les plus intimes de ces 
Bretons croyants et poussa parfois leur irritation 
jusqu'au paroxysme de la fureur. 

A de très rares exceptions, tout le clergé du Por- 
hoét refusa le serment ; la plupart des recteurs ou 
desservants se cachèrent, et avec l'aide de la popu- 
lation, parvinrent à échapper à la vengeance du 
Directoire départemental ; mais ceux qui, traqués de 
trop près, (1) furent saisis, durent monter à l'écha- 

(1) « Traqués > n'est pas trop fort et doit être pris à la lettre puis- 
que Prieur ordonnait le 16 Brumaire an II : c Les troupes devront 
servir à faire la chasse générale aux prêtres réfractaires et aux nobles 
eoDJaratenrs », Archiv. Nat.ÂF ii. 



182 BSSAI SUR LB PORHOËT. 

faud, comme le chapelaiii des Forges et le vicaire de 
Guégon, Bertrand Carel, ou ne purent se soustraire 
à la déportation : le recteur de Trégranteur fut 
envoyé en Espagne, celui de Guéhenno à la Guyane, 
celui de Ménéac à Tlle de Ré, etc. Bien peu aban- 
donnèrent le pays pour s'enfuir en Angleterre 
comme le firent le doyen de Lanouée et tous ses 
vicaires. 

Les prêtres jureurs, qui s'étaient assuré une sécu- 
rité relative d'un côté, la perdirent de l'autre ; les 
chouans ne voulaient pas parmi eux de schisma- 
tiques. Le prieur recteur de Brignac, qui eut la fai- 
blesse de prêter le serment, fut tué trois ans après. 
En revanche, les paysans entendaient conserver 
leurs pasteurs fidèles et savaient au besoin les 
défendre au péril de leur vie. M. le Méé, recteur 
de Ménéac, avait été supplanté par un intrus. Celui- 
ci, devant la réprobation universelle, dut démission- 
ner; aussitôt le Conseil municipal, sur le vœu de 
la population, demanda au Directoire le retour de 
ses anciens prêtres, et comme il ne recevait aucune 
réponse, les rappela de lui-même, endossant toutes 
conséquences de cet acte courageux. Il s'en suivit 
le blâme, la cassation du Conseil municipal, mais 
rien ne fit varier les sentiments des gens de Ménéac ; 
le recteur et les vicaires, quoique condamnés de 



CHAPITRE IX. 183 

nouveau à l'exil, furent cachés par la population qui 
leur était si dévouée (1). 

« En 1791, M. AUain, recteur de Notre-Dame et 
député du Clergé à TAssemblée Nationale (2), refusa 
le serment de la Constitution civile et fut imité par 
MM. Grumelec, de Sainte-Croix; Marcour, de Saint- 
Martin; Chantrel, de Saint-Nicolas, et les curés ou 
premiers vicaires de ces paroisses. Le 2 août de 
cette année on ferma officiellement les églises de 
Sainte-Croix, de Saint-Martin et de Saint-Nicolas ; 
on ne conserva au culte que celle de Notre-Dame 
du Roncier, qui fut livrée à un intrus, pendant que 
le pasteur légitime émigrait en Espagne (3). » 



(1) Nous reproduisons aux pièces justificatives une liste des prêtres 
du district de Josselin, poursuivis comme réfractaires. Ils y figurent 
au nombre de cinquante-quatre. 

(2) M. Allain, originaire du diocèse de Saint-Malo (né le 16 février 
1743), avant d'être recteur de N.-D. du Roncier (1774) était entré 
dans la Compagnie de Jésus ; il en sortit lors de la suppression. L'es- 
time publique le désigna au Clergé du diocèse, qui en fit son représen- 
tant aux États généraux. Pendant la Révolution, la déportation fut 
prononcée contre lui, et il se rétugia en Angleterre. Plus équitable 
à son égard que les autres gouvernements, Napoléon nomma le véné- 
rable recteur à Tarchevéché de Toarnay lors de la publication du 
Concordat en 1801, et pendant une partie de l'année 1801 son nom 
figura sur la liste des nouveaux évêques , mais il finit par refuser 
cette dignité et n'accepta que le titre de vicaire général de Vannes. 
Il en remplit les fonctions pendant sept ans et mourut dans cette ville 
en 1809. 

(3) Lb MsNi, Diocèse de Vannes, 



184 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Ce fut dès lors le vol et le pillage organisés par 
les révolutionnaires. Car hélas ! à Josselin comme 
ailleurs, il y eut aussi un parti révolutionnaire, com- 
posé, il est vrai, à l'honneur des habitants, d'un 
grand nombre d'étrangers. 

Le débordement des passions ne connut plus de 
frein, les vandales se jetèrent sur tout ce qu'il y 
avait de plus sacré : le trésor de Notre-Dame fut 
pillé et saccagé, le tombeau remarquable de Clisson 
brisé à coups de marteau, les cloches fondues, la 
statue miraculeuse de la Vierge jetée au feu dans 
un corps de garde. La Providence heureusement 
veillait et permit que certains fragments fussent 
sauvés, afin de perpétuer jusqu'à nous la dévotion 
de nos ancêtres (1). 

La horde soldatesque envahit les établissements 
religieux, transformant les couvents en casernes et 
les églises en écuries. Ceux jugés défavorables à 
cet emploi ou inutiles furent vendus, ainsi que tous 
les autres biens ecclésiastiques. La Nation, après 
avoir dispersé les possesseurs, avait, sans aucune 
autre forme de procès, fait main basse sur tous 
leurs biens (2). Les églises paroissiales de Josselin 

(1) Ce sont ces fragments que contient le reliquaire de la nouvelle 
statue exposée aux regards des fidèles. 

(2) Les Archives de la ville renferment des liasses entières concer^ 
nant la vente des biens ecclésiastiques et des propriétés de la noblesse. 



CHAPITRE IX. 185 

perdirent toutes leurs dépendances; Sainte-Croix 
même fut vendue, ainsi que la chapelle Saint-Michel; 
le Mont Cassin, les Carmes, les Ursulines, la 
Retraite subirent le . même sort. Cette spoliation 
s'étendit aux donations de toutes les chapellenies 
fort nombreuses du Porhoôt et à toutes les commu- 
nautés dispersées dans les paroisses. 

Le régime terroriste régnait en maître à Josselin ; 
comme ailleurs, les mécréants n'étaient qu'une poi- 
gnée, mais l'énergie et la violence qu'ils déployèrent 
en toute occasion assurèrent le triomphe de leur 
œuvre tyrannique. La Convention y délégua deux 
commissaires ; en son nom JuUien et Gucrmeur se 
chargèrent « d'épurer >> et de « réorganiser » la société 
populaire de la ville (1). Dès 1791, une société dite 
« des amis de la Constitution » s'était organisée et 
s'afBliait aux autres sociétés semblables. Elle 
adopta vite le programme rénovateur des Jacobins 
et montra dans l'accomplissement de sa tâche un zèle 
si intense qu'un compatriote, membre du tribunal 
militaire de Lille, lui écrivait le 3 Ventôse an II : 
« Républicains, mes frères, c'est une jouissance bien 
grande pour moi d'apprendre les progrès rapides 
de mes concitoyens dans la carrière de la Révolu- 

(1) Aux plus purs sans-culottes qui prétendirent régénérer le pays 
de Josselin, il nous faut ajouter le digne Laumailler. 



186 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

tion, grâces je vous en rends, généreux sans^ulottes, 
qui suppléant au nombre par votre énergie avez 
tenu les aristocrates en brides et ramené les fana- 
tiques au temple de la Raison » (1). La Vierge du 
Roncier bannie de son temple fit place effectivement 
à la déesse Raison. 

Mais en réalité ce fanatisme n'altéra guère les 
sentiments de la masse de la population; nous 
retrouvons tout le cœur de celle-ci dans une pétition 
des habitants, datée de Tan V, à l'administration de 
Vannes pour obtenir la liberté de deux de leurs 
prêtres, Blanche et Le Portz, détenus à Vannes (2). 
Si quelques-uns s'égarèrent, comme il arrive toujours 
en temps de troubles, la mentalité resta saine et 
intacte. 

Les campagnes n'endurèrent point aussi pacifi- 
quement les rigueurs du parti Jacobin. Si les 
mesures de persécution religieuse exaspérèrent les 
Bretons, la mort du roi, la loi du 24 février 1793 
prescrivant une levée immédiate et les étranges 
procédés appliqués pour assurer cette réquisition, 
vinrent mettre le feu aux poudres. 

11 faut lire la remarquable et consciencieuse étude 

(1) Archives de Josselin. 

(2) Id. 



CHAPITRE IX. 187 

de M. Bliard(l) pour se faire une idée de la répres- 
sion que Prieur de la Marne, le délégué du Comité 
de Salut Public dans le Morbihan, et ses agents, 
surent appliquer en cette circonstance. Guermeur, 
secondé par le général Gillibert, fut principalement 
chargé d^opérer dans la région de Saint-Jean-Bre- 
velay, Guéhenno, Bignan et communes adjacentes. 
Comme pour s'emparer des prêtres insermentés et 
des émigrés, des battues furent oganisées de tous 
côtés. « La nuit on enveloppait de troupes les vil- 
lages où Ton soupçonnait la présence de quelque 
réfractaire, puis les fouilles commençaient minu- 
tieuses et brutales » (2). Il fallait, à quelque prix que 
ce fût, découvrir les récalcitrants et en imposer aux 
populations ; aussi, à défaut de recrues, emprison- 
nait-on les parents. Rien ne fut épargné, on alla 
jusqu'à tenter, par Tenlèvement de tous les grains, 
d'aJSamer la commune de Bignan. 

Les Morbihannais se bornèrent d'abord à répondre 
à la réquisition par les cris de : Vive le roi ! Au 
diable la Nation ! comme le firent les jeunes gens 
de Lanouée (3), ou à menacer du bâton les gen- 

(1) Prieur de la Marne en Mission dans VOitestt 4793-1794 . 
. (-2) PiKRKR Bliard, p. 164. 

(3) Cet iocident survint le 24 Brumaire an II (14 nov. 1793) et fit 
Tobjet d^une dénonciation adressée de Josselio au chef terroriste. 
Les malheureux gars de Lanouée furent terriblement châtiés de leur 



188 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

darmes dans les foires et les assemblées; mais 
bientôt les querelles s'envenimèrent, on en vint aux 
balles et aux coups de sabre, cela arriva à Mangole* 
riant, et à Locmaria en Plumelec. Cette émeute 
de Locmaria survenue le 13 octobre 1792 eut un 
certain retentissement, deux ou trois gendarmes 
trépassèrent des suites de coups, et pour chercher les 
séditieux, trois cents hommes, conduits par deux 
commissaires, arrivèrent le lendemain de Vannes. 

Dans le département, la première attaque qui 
mérite véritablement ce nom fut celle de CoUédo, 
motivée par l'arrestation de Tabbé Le Clerc, curé 
de Saint-Jean-Brévelay. Le 8 octobre 1893, un déta- 
chement de quatre-vingts bleus, qui, de Josselin, avait 
été cueillir à son presbytère le curé de Saint-Jean, 
regagnait sa garnison, quand à la hauteur du bois 
de Collédo, ou plutôt entre ce bois et la chapelle 
de Kerlen, trente hommes surgissant d'un fourré se 
précipitent sur les troupes^ les mettent en fuite et 
délivrent le prêtre. 

Pierre Guillemot était l'auteur de ce coup de 



franchise de langage. Prieur, le lendemain, prencrivit : n II faudra 
requérir le tribunal criminel de 8*y transporter (à Josselin) et d'ins- 
truire le procès de ces scélérats, qui ne doit durer .que vingt- quatre 
heures. » Arch. Dép. Morb. 

Toujours la persuasion par les armes ! elle triompha parfois des 
répugnances, mais ne réussit jamais à calmer les esprits. 



CHAPITRE IX. 189 

main. A la nouvelle de l'arrivée des bleus, vite il 
avait rassemblé une poignée de braves et, sans réflé- 
chir au désavantage du nombre et des armes, il 
s'était jeté en travers de la route pour tirer le 
prêtre des mains où il était tombé. Ce coup d'au- 
dace eût relevé le caractère et l'esprit de décision 
de Guillemot, s'il n'avait été déjà distingué des 
chefs qui, dès le commencement des agitations, 
avaient cherché à grouper en Bretagne les forces 
du parti contre-révolutionnaire. La Rouerie avait 
formé dans chaque évéché des cantons de huit ou 
dix paroisses qui avaient à leur tête un chef, sous 
les ordres directs du commissaire (1). Guillemot, 
qui jouissait d'une certaine influence parmi les gars 
de Bignan, avait été alors nommé chef du canton 
de ce nom. Son mérite et sa bravoure l'avaient de suite 
placé en haute estime près des commissaires royaux, 
et il ne cessa de jouer un rôle aussi actif qu'intel- 
ligent dans toute la région de l'ancien Porhoët. 

Lorsque, pour donner plus d'unité et d'ordre au 
mouvement insurrectionnel, on forma les divisions 
de la réunion de deux ou trois cantons, Guillemot 
fut désigné chef de division (2). Avec ses paysans, 

(1) M. de la Bourdonnaie de Coatcandec avait été nommé com- 
misssaire parla Rouerie. * 

(2) La dÎTision fut formée des cantons de Bignan, Sérent et Pieu- 
griffet. 



190 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

il poussa Tofiensive à outrance, harcelant radversaire, 
lui dressant des embuscades et le poursuivant à 
travers champs. 

Les bleus le baptisèrent du titre de « roi de 
Bignan » et ce nom seul était pour les uns le ral- 
liement, répouvante pour les autres. 

« Quant à Guillemot, dit un historien de la 
Chouannerie, il ne laissait guère passer de jours 
sans attaquer les détachements républicains. Mal- 
heur aux garnisons des villes et des gros bourgs 
qui se hasardaient en pleine campagne ; les chouans 
du cant(m de Bignan, de plus en plus aguerris sous 
la sévère discipline de leur chef, les avaient bien- 
tôt décimés et refoulés dans leurs cantonnements. » 
Dans tout le Morbihan, sauf Georges Cadoudal, il 
n'y eut pas de plus terrible batailleur, de plus 
vaillant défenseur du trône et de Tautel, c'était le 
Jean Cottereau, l'invincible Jean Chouan de la 
contrée. 

Le pays était particulièrement favorable à cette 
guerre d'embuscades et de surprises ; l'inaccessibilité 
même en était une défense naturelle. Dans ce dédale 
inextricable que nous connaissons, de vallons et de 
coteaux, coupés de ruisseaux parfois profonds et peu 
guéables, des chemins étroits, ravinés, encaissés, 
se croisaient et s'entrecroisaient, formant ainsi les 



CHAPITRE IX. 191 

mailles perfides d'un piège. Grâce au couvert épais 
de certaines régions, les chouans purent en toute 
tranquillité opérer leurs groupements. Un de leurs 
principaux camps retranchés se trouvait être au 
centre de la forêt de Lanouée ; c'est là qu'ils 
réunirent leur cavalerie et qu'ils assemblèrent leurs 
approvisionnements. Dans un cercle plus éloigné, 
les bois de la Hunaudaie, de Beignon, de Saint- 
Méen, leur oflfraient également des asiles sûrs. 

En dehors de Bignan, l'ancien territoire du 
Porhoet fournit un grand nombre de volontaires à 
la chouannerie Le mouvement se déclara dans 
toutes les paroisses, pendant l'année 1794. A Plu- 
melec un soulèvement général fournit deux com" 
pagnies sous les ordres de Joseph Aubin et Pierre 
Barron ; à Saint-Servan, l'abbé Nayl entraîne de 
ses exhortations les derniers hésitants ; à Tregran- 
teur Louis Picaud enrôle à sa suite tous les hommes 
valides ; du côté de Mohon, la Trinité, les mécon- 
tents, pour faire la chasse aux bleus, marchent 
derrière Gandin et Boulainvilliers ; Ménéac se dis- 
tingue encore par un nouveau trait d'héroïsme. 
Voyer de la Salle, qui se cachait dans la commune, 
ayant été arrêté comme émigré, la population se 
soulève, attaque la troupe pour le délivrer et y 
réussit; la répression ne se fit pas attendre long- 



192 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

temps : l'église fut occupée, les cloches descendues, 
le château de la Salle incendié, mais ces violences 
ne firent qu'exciter les esprits et déterminèrent la 
population à donner son concours à la chouannerie. 

Non contents de porter atteinte au caractère sacré 
du clergé, les bleus, dans leur fureur contre les 
Bretons et leur haine de la religion, s'attaquaient 
même aux édifices, renversaient les croix qui se 
dressaient aux bords des chemins, se ruaient le 
marteau à la main sur la pierre destinée à commé- 
morer la foi bretonne aux générations futures. C'est 
ainsi que dans le courant d'avril 1794, ces vandales 
se portent au bourg de Guéhenno, mettent le feu à 
l'église et brisent les pièces du calvaire. Mais ils 
n'eurent pas le temps d'emporter le produit de 
leurs vols, les hommes de Bignan et de Pleugriffet 
avec leur chef habituel, ceux de Billio et de Cruguel, 
commandés par Lantivy de Portcamus, tombèrent 
sur eux et les dispersèrent. 

A quelques jours d'intervalle, de nouveaux enga- 
gements, toujours heureux pour les chouans, avaient 
lieu au Resto, au bourg même de Bignan, à Guéhenno, 
à Colpo. 

Josselin, transformé en grenier et en place d'appui 
par le gouvernement départemental, était menacé 




Photo Neurdein frères. 



Lb Calvaire de Gubhbnno érigé par Quillonic en 1550 
(Mis en pièces sous la Révolution et restauré en 1853). 



CHAPITRE IX. 193 

de la famine. En plus de Tapprovisionnement que 
la ville devait fournir à toutes les troupes de 
passage, elle devait encore nourrir la garnison qui 
y était établie et une quantité considérable de pri> 
sonniers. La tour solitaire en regorgeait littérale- 
ment, si bien qu'on dut aiSecter une partie du 
château à Toffice de maison d'arrêt; suspects de 
tout rang et de toute condition, prêtres, nobles, 
roturiers, vieillards, femmes et enfants y furent jetés 
pêle-mêle, entassés dans une promiscuité affreuse. 

Les religieuses de la commune, les premières, 
eu eurent les honneurs (27 pluviôse an II) (1) et 
bientôt le district seul n*y compta pas moins de 
quarante-trois détenus. Le flot dès lors ne cessa de 
monter, de monter toujours, jusqu'à l'envahissement 
complet du chftteau. 

Comme dans l'ensemble du département, les 
arrestations se multipliaient avec une rapidité 
extraordinaire et que dans certaines villes les 
prisons n'avaient qu'une place limitée, Prieur, sans 
même s'inquiéter de savoir s'il y avait encore des 



(1) Les administrateurs de Josselin écrivaient au républicain Qiquel, 
président du Comité de surveillance : « Le conseil assemblé vient de vous 
assigner le ci-devant château de cette ville, où vous trouverez sulB- . 

samment d'appartements pour les loger toutes (les religieuses) 

ne tardez pas an instant à mettre en exécution la loi contre ces 
réfractaires etc. » signé Elie, Ârch. dép, Morb. L. 1166. 



194 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

locaux inoccupés, décréta que le trop -plein des 
prisons de Vannes, Pontivy et Ploënnel serait 
évacué immédiatement sur Josselin. « En toute cette 
affaire, dit M. Bliard, Prieur faisait preuve d'une 
impardonnable légèreté. Dès le mois de février 
précédent, on l'avait prévenu, en efifet, que les. 
trente-huit malheureux enfermés dans cette maison 
d'arrêt remplissaient tous les appartements habi- 
tables, et qu'on avait été forcé de mettre les derniers 
arrivés dans les greniers. Malgré cet avertissement, 
quatre-vingt-quatorze inculpés, dont quarante 
prêtres, arrivaient de Vannes à Josselin le 27 floréal. 
La plupart étaient infirmes : les uns goutteux, 
lépreux (sic) (1). Dans les jours suivants, d'autres, 
ecmvois pareils se succédèrent, en sorte que près de 
trois cents de ces infortimés se trouvèrent bientôt 
réunis dans le vieux château. » 

Les réclamations qui se firent entendre à l'envi 
n'étaient, hélas ! que trop justifiées. Chandor, le 
médecin de la prison, au risque de faire douter de 
son civisme, ne craignit pas de reconnaître officiel- 
lement le bien-fondé de celles-ci. Il nous a laissé 
un document du plus haut intérêt et qui met au 
point la situation des malheureuses victimes ; nous 

(1) Arch. dép. Morb. — L. 1458. 



CHAPITRE IX. 195 

lavons placé in extenso aux Pièces justificatives* 
C'est le procès-verbal d'une visite à la maison 
d'arrêt faite sur l'ordre de l'administration du 
district afin de « vérifier les faits allégués par les 
détenus. » Il ressortait du rapport, que les détenus, 
au nombre de 250 (1), dont quatorze malades, 
s'étouffaient dans de véritables cloaques d'infection. 
Copie en fut adressée à l'exécuteur des hautes 
œuvres, à Vannes ; les membres du district 
l'accompagnaient des lignes suivantes : « Nous 
t'adressons, citoyen représentant, les pièces relatives 
aux prisonniers de notre ville ; nous pouvons assurer, 
après vérification du commissaire que nous avons 
cru devoir envoyer avant de te participer les récla- 
mations, que ces individus sont exposés à périr de 
faim, ayant à peine de vivres pour les habitants de 
Josselin. Nous espérons que tu voudras bien prendre 
en considération l'himianité sou&ante (2). » 

Au milieu de tant de misères, la maladie multiplia 
vite ses ravages. Le 11 messidor an II (29 juin 1794), 
c'est-à-dire neuf jours plus tard, le citoyen Vander- 
grachf est chargé, par ses collègues de l'adminis- 
tration, d'une nouvelle visite ; il trouve cette fois 

(1) Encore n'était-il pas question dans ce chifire des prisonniers 
criminels enfermés dans la tour. — Voir les noms des détenus aux 
Pièces justificatives. 

(2) Arch. dép. Morb. — L. 1166. — P. Blurd. 



196 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

quarante-cinq malades, atteints la plupart de fluxions 
de poitrine, de fièvre putride bilieuse et de phtisie 
pulmonaire. Son rendu compte(l) est une l'édite du 
rapport Ghandor ; dans les sous-sols Tair était vicié, 
par Fencombrement des captifs et Fodeur infectante 
des latrines, sous les toits ces malheureux avaient à 
subir toutes les rigueurs de la température. La 
nourriture y était absolument insuffisante et Teau 
qu'on leur donnait était empoisonnée par les lavages 
que faisaient sur les bords du puits les militaires 
cantonnés dans le château (2). 11 n'est, certes, pas 
étonnant^ que tout ce monde imprévu amenât une 
baisse rapide des ressources de la ville, et volontiers 
nous ajoutons foi aux dires des autorités locales^ 

Ce qui aggravait surtout la situation de Josselin 
en tant que grenier à vivres, c'était le refus d'une 
partie des communes du district, malgré un ordre 
supérieur, d'approvisionner le marché par quantitési 
différentes de grains désignées. La municipalité 
s'émut de cette situation critique ; les lettres qu'elle 
adressa à ce sujet à Prieur de la Marne en déplace- 

(1) Arch. de Josselio. 

(2) Fatigué par les plaintes des uns et les instances des autres. 
Prieur consentit, après de bien longues tergirersations, à réintégrer 
à Vannes une partie des prisonniers qui en étaient sortis (le. 29 
fructidor — 15 septembre — cent-deux détenus, dont 16 prêtres et 
63 frmmes, quittaient enfin le chftteau) et petit à petit les suspects 
furent rappelés dans leurs districts respectifs. 



CHAPITRE IX. 19Î 

ment à Nantes (1), nous révèlent ses craintes d'une 
véritable famine. Elle commença par demander 
l'envoi des troupes dans les communes récalcitrantes 
pour vaincre leur insubordination et les contraindre 
à fournir l'apport de grains. Mais les troupes étaient 
occupées ailleurs. 

Ces appels de secours sont chaque jour plus 
pressants et d'autant plus qu'ils ne trouvèrent 
d'abord aucun écho. Chaque jour aussi, l'épuisement 
du marché se fait de plus en plus menaçant ; les 
rebelles des campagnes ont sans aucun doute juré 
d'affamer la ville, car protestations ou prières, rien 
n'y fait, les communes restent inébranlables. 

Déjà le 3 floréal an II, le peuple, n'ayant plus 
trouvé de grains sur le marché, s'était précipité en 
foule à la municipalité, et le maire débordé avait 
dû livrer aux habitants les clefs des magasins des. 
subsistances militaires ; des ordres sont instamment 
demandés pour obtenir l'autorisation de puiser une 
nouvelle fois dans cette réserve. La municipalité va 
jusqu'aux supplications désespérées, l'état affligeant 
de la ville semble pour elle gros de conséquences 
et pourrait amener des complications funestes. 

Le 24 floréal an II, le Conseil général de la com- 

(1) Archives de Josselin. 



198 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

mune écrivait au citoyen Devisme, commissaire 
du Comité de Salut public à Vannes : « Viens 
citoyen le plus tôt possible au secours des habitants 
de notre commune qui manqueront sous peu de 
pain; ce qu'il y avait de grains existant par le 
résultat du recensement achevé le 3 floréal est sur 
le point d'être consommé ; la grande consommation 
qui s'est faite depuis cette époque, est occasionnée 
par celui que nous avons été obligé jusqu'à ce jour 
de faire délivrer pour le pain et subsistance de la 
troupe, à tous les passages fréquents et répétés dans 
notre ville et par le grand nombre de prisonniers 

<qui s'y trouvent 

Nous te demandons citoyen, et nous te prions 
instamment, de vouloir bien au reçu de la présente, 
■donner des ordres pour que les grains nécessaires 
pour l'étape et la subsistance des troupes de passage, 
-soient pris et délivrés du magasin des subsistances 
militaires par le citoyen Solan, garde magasin à 
JosseUn. Citoyen, notre demande est si tellement 
fondée, que nous devons vous instruire, que par un 
arrêté de l'administration de ce district, du 20 ger- 
minal dernier, les communes de son ressort étaient 
assujetties à l'approvisionnement du marché ; cet 
arrêté leur a été adressé et notifié différentes fois 
•avec l'ordre de s'y conformer, ce qu'elles n'ont pas 



CHAPITRE IX. 199 

fait et elles sont récalcitrantes. Jugez de la crise 
efirayante dont nous sommes menacés. » 

Enfin satisfaction est donnée à la demande, 
mais cette mesure n'assurait que l'approvisionne- 
ment de la troupe et non des habitants ; aussi quel- 
ques mois plus tard, nouvelle disette, les appels de 
secours recommencent : « L'idée de la triste situa- 
tion des habitants de la ville est inquiétante ; vous 
le croirez facilement, puisque vous avez délivré déjà 
du seigle du grenier des subsistances militaires, et 
sans ce secours les habitants seraient affamés. » 
Après les grains, ce fut le fourrage qui manqua. 
L'approvisionnement du marché était évidemment 
rendu très difficile par la fréquence des passages 
de troupes. Dans les lettres de la municipalité (1), 
pour une question ou pour une autre, il est sans 
cesse fait mention de ces troupes qui épuisent les 
ressources du pays, amènent parfois le désordre 
dans la ville par leurs vexations et leurs tracasse- 
ries, et qu on a toutes les peines du monde à loger. 
Aussi, lorsque le général Canuel, qui commandait à 
Vannes, décida d'établir un camp près de Josselin, 
les habitants protestèrent énergiquement et mena- 
cèrent d'en communiquer au (Comité de salut public, 

(1) Archives de Josselin. 



200 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

jugeant cette mesure non seulement inutile, mais 
encore impolitique et dispendieuse. Canuel ne se 
laissa pas intimider pour si peu, se retrancha der- 
rière Prieur de la Marne et ajouta que le camp 
projeté n'était du reste pas destiné à soutenir une 
attaque, mais bien à garder des prisonniers. 

Le château et les bâtiments annexes qui, en outre 
des détenus, abritaient des troupes, de bonne heure 
ne suffirent plus à celles-ci; la municipalité fut 
obligée de racheter les bâtiments de la Retraite et 
des Carmes, qu'elle avait d'abord vendus, et ces 
établissements furent dès lors continuellement 
occupés. Les chevaux trouvèrent abri dans l'église 
de Saint-Martin et dans la chapelle des Carmes. 

Vu cette affluence et l'état de guerre dans lequel 
se trouvait le pays, il fallut créer un hôpital mili- 
taire à côté de l'hôpital civil ; malgré ces deux hôpi- 
taux, l'an m, il y avait tellement de malades et de 
blessés que, pour parer à l'encombrement, le géné- 
ral Champeaux proposait de faire évacuer toutes les 
salles basses du château, où se trouvait ramassé le 
grain, afin d'y placer des malades. Un atelier impor- 
tant de chaussures de troupe existait à Josselin. 

L'on sait le suprême effort des émigrés pour 
débarquer à Quiberon, Ton connaît trop aussi les 



CHAPITRE IX. 201 

dissensions des chefs, qui paralysèrent le généreux 
mouvement des troupes royales et catholiques, des 
émigrés et des chouans venus sur ce coin de pres- 
qu'île se tendre la main dans le sentiment et Tes- 
poir communs de la victoire finale. Cruelle et ter- 
rible responsabilité, que celle d'un chef qui n'eut pas 
le courage de sacrifier son orgueil et ses intérêts 
privés à la grandeur de la cause ! Ses inquiétudes, 
ses défiances, ses hésitations, amenèrent, hélas ! un 
désastre affreux, aussi fatal aux chouans qu'aux 
émigrés. Ces derniers furent annihilés, sacrifiés aux 
mânes de leurs rois, mais les braves paysans de nos 
campagnes, les plus désintéressés et les plus héroï- 
ques des soldats, furent démoralisés à jamais. 
L'énergie et la force qu'ils avaient puisées au pied 
de Tautel et dans le plus profond de leurs cœurs 
ne purent se maintenir longtemps ; Tantagonisme 
qui s'était montré parmi les chefs ne tarda pas à 
se faire sentir chez les soldats mêmes ; il y eut des 
découragements, des mécontentements. 

Tinténiac, qui de Quiberon avait reçu l'ordre de 
Puisaye d'opérer un mouvement tournant avec la 
division d'Auray, une partie de celle de Vannes et 
un détachement du Royal Emigrant, afin de prendre 
à dos l'armée de Hoche, crut devoir, au reçu de 
dépèches du comité de Paris, ou sur sa propre ini- 



202 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

tiative(l), abandonner le plan de cette attaque et, 
après avoir traversé Elven, Plaudren, se dirigea 
le 16 juillet sur Josselin. Il n'ignorait pas Taffai- 
blissement de la garnison en faveur de Tannée 
des côtes et pensait, sans doute, saisir une occasion 
favorable pour s'emparer de cette place. 

A son approche la garnison fit sortir un détache- 
ment qui se rencontra avec les Morbihannais, près 
de Saint-Jean des Prés. Ce détachement fut refoulé, 
ainsi qu'un second envoyé pour le soutenir. Les 
forces de Tinténiac, qui au total comprenaient bien 
six ou sept mille honmies, prenant de l'avance, 
occupèrent aussitôt les faubourgs, mais, au pied 
des vieilles murailles, une résistance sur laquelle 
elles n'avaient guère compté, les attendait : « Arrivé 
là, raconte Rohu(2), le général me fit entrer dans 
un chemin étroit en face de la tour où la garnison 
était située et d'où les balles nous arrivaient comme 
grêle. Obligés de traverser un petit pont, nous le 
trouvâmes couvert de chapeaux et de sabots de ceux 



(1) On n'a jamais connu exactement les motifs qui détournèrent 
Tinténiac des ordres qu'il avait reçus de Puisaye, c»r la mort le sur- 
prit le lendemain. Les divergences continuelles entre le comité de 
Paris et les conseils des départements font supposer que durant la 
marche de la colonne il reçut des prescriptions contraires à celles 
qu'il avait reçues au départ. 

(2) Jean Rohu, lieutenant-colonel de la deuxième division de 
Tarmée du Morbihan, dite division d'Auray. 



CHAPITRE IX. 203 

qui nous avaient précédés, et les rejetant des deux 
côtés, nous le traversâmes l'arme au bras, sans 
sourciller et même sans avoir reçu de blessure. 
Rendus sur une place au centre de la ville, nous 
reçûmes une décharge de coups de fusils d'une 
maison voisine qui blessa deux hommes et en tua 
deux autres à côté de moi, mais dont aucun n'était 
des miens. Je fis briser les portes et mettre le feu 
dans la maison, qui était occupée par la gendar- 
merie; m'occupant ensuite de faire enlever les 
blessés, je reçus l'ordre d'évacuer la ville par la 
route de Ploërmel. » 

Tandis que Tinténiac, absolument dépour>'u d'ar- 
tillerie, voyait tous ses efforts échouer, les insurgés, 
presque invulnérables derrière leurs murs protec- 
teurs, faisaient brèche dans les rangs des chouans. La 
surprise de Rohu n'ayant pas réussi, dans la cir- 
constance actuelle, il était inutile d'insister. « Tin- 
téniac somma en vain les républicains de se rendre ; 
en vain, le feu fut-il mis à une maison occupée par 
des gendarmes et qui était à la porte Saint-Martin, 
cette porte résista ; et inutilement aussi les chouans 
prodiguèrent leur temps et leurs cartouches contre 
les tours et les murs (1) ». Ploërmel venait, par une 

[l) La vie de Georges Cadoudal, par son neveu, du môme nom. 



204 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

attaque sur les derrières de la division de Georges 
Cadoudal, au secours de Josselin ; le général chouan 
se retira vers six heures du soir, emportant une 
assez grande quantité de blessés. L'action s'était 
engagée vers une heure de l'après-midi, elle avait 
donc duré cinq heures. 

« Notre faible garnison et notre garde nationale 
se sont comportées en cette occasion en vrais répu- 
blicains, leur conduite est au-dessus de tout éloge 
et leur zèle est en quelque sorte augmenté, » disait 
le rapport du commandant de Josselin. L'officier 
demandait des armes pour remplacer les fusils de 
chasse des gardes nationales, fusils qui, en grand 
nombre, avaient « crevés dans les mains des habi- 
tants ». Les munitions étaient épuisées et il fallait 
également, au plus tôt, au moins 20000 cartouches et 
un millier de pierres à feu pour 500 hommes qui 
composaient la garnison (1). 

De Josselin, l'armée rouge, on appelait ainsi la 
colonne de Tinténiac, prit la route des Côtes-du- 
INord ; mais à la Trinité-Porhoët, elle fut rejointe 
par le général Champeaux, qui, avec 300 hommes, 
surveillait la campagne. L'action fut vive et opi- 
niâtre ; à la fin les troupes républicaines cédèrent 

(1) Archives de Josselin. 



CHAPITRE IX. 205 

le terrain. Après cet avantage, Tinténiac se crut 
libre de reprendre sa direction de marche, vers le 
Nord-Ouest, et fît étape dans un endroit couvert, à 
Coetlogon en Piumieux, où se trouvait un château, 
habité par des dames (1)^ Quel ne fut pas Téton- 
nement des chouans déjà installés en bivouac, de 
voir une nouvelle colonne ennemie, conduite par le 
général Oublier, tomber soudainement sur eux ! 
Après un certain moment employé à se ressaisir, la 
défense fut vite organisée et les bleus, incapables 
de soutenir le choc, se débandèrent à travers bois. 
Les chouans eurent malheureusement à déplorer 
une perte cruelle. Dans la poursuite, Tinténiac, leur 
général si estimé, avait été atteint d'un coup de 
feu ; il succomba quelques instants plus tard. 

Pontbellanger, le nouveau chef, conduisit l'armée 
rouge à la prise de Quintin et de Chatelaudren, 
mais arrivé non loin de Saint-Brieuc, le bruit du 
désastre de Quiberon parvint aux oreilles des sol- 
dats. Irrités contre ceux qui étaient venus semer le 
désarroi dans l'armée bretonne (2) et amener la 
défaite inconnue jusqu'alors, les chouans mena- 
Il) H»* et M"« de Guernisac et M^e Quintin de Kercadiou qui, 
disait-on» étaient affiliées au comité de Paris. 

(2) « — Les monstres auraient dû être engloutis dans la mer avant 
d'arriver à Quiberon 1 » s^était écrié Cadoudal, ne pouvant contenir 
fa colère contre d*HerviIfy et son parti. 



206 ESSAI SDR LE PORHOËT. 

cèrent de jeter bas les armes et de partir en 
désordre. Il fallut les engager à rentrer dans leurs 
foyers, et prononcer le licenciement pour un laps 
de temps assez considérable. 

Avec les secours en argent et en armes de FAn- 
gleterre et sous Fimpulsion de chefs tels que Georges 
Cadoudal (1) et Mercier la Vendée, l'ordre se réta- 
blit, les divisions se reformèrent et la lutte peu à 
peu recommença. 

A cette époque (octobre 1795), Guillemot avait 
sous ses ordres une division importante, composée 
de 57 paroisses et formant quatre beaux bataillons; 
elle s'étendait depuis le Roc Saint-André jusqu'à 
Kergrist, quinze lieues de longueur, et depuis Pont- 
Augan sur le Blavet jusques et y compris Josselin, 
douze lieues de largeur (2). Cette division, la plus 
forte des armées royales de l'Ouest, se montra 
toujours digne du roi de fiignan. 

En 1796, la paix fut signée entre Georges 
Cadoudal et le général Hoche (Scépeaux et d'Auti- 
champ avaient .déjà donné leur signature). Elle ne 



(1) Cadoudal était à ce moment général du Morbihan, et Puisaye, 
lieutenant-général . 

(2)£n novembre 1795, elle fut agrandie de trois cantons (Locminé, 
Noyal-Pontivy, Baud} sur lesquels soufflait un léger esprit d'insubor- 
dination et qui avaient besoin d*un commandement t«l que celui de 
Guillemot pour entrer dans Tordre. 



CHAPITRE. IX. 207 

fiit pas de longue durée. Les vexations du Gouver- 
nement Directorial motivèrent une reprise d*armes 
en août 1799. La substitution, qu'on fit alors, du 
nom de légion à celui de division, et du nom de 
bataillon à celui de canton, ne changea rien à l'or- 
ganisation primitive. L'ancienne division de Guil- 
lemot devint la première légion, dite de Bignan, qui 
eut pour chefs : Guillemot, chef de légion ; Gomez, 
lieutenant-colonel; Mathurin le Goesble, major; 
Yves le Theïs, Guillôme, Joseph Benard, Michel, 
chefs de bataillons. 

Dans le Morbihan, pendant que Cadoudal s'empare 
de Sarzeau; Jacques Andra, de Muzillac; Desol de 
Grisolles, de Pont-Château et de la Roche-Bernard, 
le chef de la légion de Bignan, après une lutte 
acharnée, déloge la garnison républicaine de Loc- 
miné. 

Impressionné par ce succès (Locminé au centre 
du Morbihan était considéré comme place sérieuse 
et utile), le colonel Bouté sortit de Lorient avec un 
bataillon de grenadiers pour se porter au secours 
de la garnison, et en rassembla les débris alors dis- 
persés dans la campagne. 11 reprit Locminé et mar- 
chait vers Josselin, lorsque arrivé sur la lande de la 
Vachegare, vaste plaine d'une lieue de longueur 
située dans la paroisse de Buléon, il fut tout à coup 



208 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

vigoureusement attaqué. Guillemot, qui avait été 
informé à temps de la direction que prenait Tennemî, 
s'était embusqué sur le bord de cette lande, non 
loin de la route, en avant de Kerjeanno, et avait 
laissé toute la colonne s'avancer à sa hauteur pour 
la prendre par le flanc. Celle-ci fît halte sans quit- 
ter la grand'route et se mit en bataille. Mais, mal- 
gré son feu nourri, les chouans chargèrent avec une 
telle impétuosité, qu'elle fut culbutée et coupée en 
deux. Une partie des bleus s'enfuit vers Josselin; 
l'autre, avec le colonel Bouté, rétrograda, traversa 
Locminé et Baud pour rentrer à Lorient. 

Le général Georges, à la nouvelle de la sortie de 
Lorient, devina que les grenadiers se portaient 
contre Locminé. Il rallie aussitôt ses forces, court 
tendre la main à Guillemot ; il ne peut malheureu- 
sement arriver à temps pour écraser les bleus à la 
Vachegare; le hasard voulut cependant qu'il leur 
portât un coup terrible. « Les quatre cents hommes 
qui s'étaient sauvés de la lande de la Vachegare, 
dit M. J. Guillemot (I), ayant appris la position de 
mon père sur la route de Pontivy, et pensant par 
conséquent se rendre â Vannes par Guéhenno, avaient 
pris cette direction avec une partie de la garnison 

(1) UUres à mes neveux. 



CHAPITRE IX. 209 

de Josselin ; ils se trouvèrent bientôt en face de la 
légion d'Auray (celle de Cadoudal) qui brûlait du 
désir de combattre. Les bleus voulurent se faire un 
passage et soutinrent la charge assez longtemps, 
mais enfin ils furent battus ; les braves gars d'Âuray 
les poursuivirent au-delà du Mont (1) et firent plu- 
sieurs prisonniers qui furent tous fusillés, sans 
excepter l'officier qui les commandait. » Cette sévé- 
rité n'était qu'une légère riposte aux cruautés des 
contre-chouans. 

Devant ces attaques incessantes, la force armée 
qui occupait Josselin gardait une attitude de sur- 
veillance défensive, et l'autorité municipale pre- 
nait toutes les mesures nécessaires pour parer 
aux éventualités d'un nouveau mouvement contre 
la ville (2). La garnison est renforcée, les cloches 
transformées en munitions, des corps de garde éta- 
blis à chaque porte (de Saint-Nicolas, de Saint- 
Martin, du Lion d'Or ou de Pontivy), les murs de 
l'enceinte réparés et consolidés. Ce travail devient 
un service commandé et toute la population y prend 
part ; voici une de ces réquisitions datée du 20 ger- 
minal an IV : Tous les habitants, compris dans 

(1) Cette affaire fat désignée sous le nom du Mont Guehenno. 

(2) Archives de Josselin. 

14 



210 KS8A1 SUR LE PORHOËT. 

Tenceinte de la ville et ceux du faubourg Saint- 
Nicolas, sont requis de se rendre demain aux huit 
heures précises du matin et après déjeuné avec 
pelles, pioches, ruches et autres instruments néces- 
saires aux travaux des fortifications de la place. 
Tout individu qui s'y refuserait serait regardé comme 
ennemi de la liberté et traité comme tel, conformé- 
ment à Tordre du citoyen Falba commandant mili- 
taire de l'arrondissement. — L'Administration muni- 
cipale à Josselin. 

Quelques jours après, c'est le tour de tous les 
citoyens des faubourgs Glatinier et Sainte-Croix. 
L'année suivante (30 pluviôse an V), le Commissaire 
du Directoire Exécutif établi à Josselin écrit aux 
administrateurs municipaux : « La guerre civile 
parait totalement finie, mais il faut avoir devant les 
yeux cette maxime : La sûreté publique dépend des 
précautions. 

Ma remontrance vous intéresse plus que moi, 
vous demeurez dans l'enceinte et mon patriotisme 
m'a fait dès le commencement de la révolution 
acheter le cidevant presbytère de Saint-Martin où je 
demeure, il est isolé et en quelque sorte hors des 
fortifications. Vos fortifications se démolissent insen- 
siblement, les pierres des petites portes, celles des 
jardins de toutes les douves qui avaient été maçon- 



CHAPITRE IX. 211 

nées ont été et sont arrachées une à une, vos grandes 
portes de ville ne pourront bientôt plus se fermer ; 
vous serez en un mot, aussi peu à Tabri dans peu de 
temps, qu'avant la Révolution. 

Quel est citoyens, le but de ces démolitions sui- 
vies? Je l'ignore, mais je l'appréhende. Votre ville 
s'est couverte de gloire le 28 Messidor an III. Votre 
ville a par conséquent tout à craindre de la vengeance 
liberticide ; votre ville ne peut donc trop se précau- 
tioaner et vous devez veiller sans cesse et prendre 
tous les moyens d'assurer la tranquillité de vos 
administrés. Il faut nommer des commissaires pour 
faire la visite de vos fortifications et sur leur 
rapport vous prendrez toutes les mesures pour 
leur rétablissement. Les réparations faites, des 
patrouilles empêcheront leur démolition, et la puni- 
tion des fauteurs pris maintiendra les mal inten- 
tionnés. » Signé Elii:;. 

Pour rappeler encore le respect que les Josseli- 
nais doivent à leurs murailles d'enceinte, des ban- 
nies sont faites plus tard, an VIII, dans ces termes : 
Le Maire de la conmiune, informé qu'il s'est commis 
des dégradations aux fortifications et aux ouvrages 
de défense de la ville, fait défense à tout citoyen 
d'y porter atteinte, sous peine d'être traduit devant 
les tribunaux. Les pères et les mères seront res- 



212 ESSAI SUR LE POBHOËT. 

ponsables des dégradations commises par leurs 
enfants. — 

Au dehors, afin de dégager les voies de commu- 
nications et éviter toute surprise, ordre est donné 
d'abattre les arbres, bois, hayers et fossés, à la 
distance de cent toises des routes. Au dedans les 
portes de la ville sont fermées à huit heures, le por- 
tillon ou petite porte des piétons restant cependant 
libre jusqu'à dix heures ; mais à partir de cette 
heure tout passage est formellement interdit, de 
même qu'il est défendu, sauf raison urgente, de 
circuler la nuit dans les rues. Les patrouilles 
doivent arrêter toute personne trouvée dans la ville 
après dix heures ; les consignes sont formelles à 
cet égard et rigoureuses. 

Du reste, les malheureux habitants devaient plutôt 
éviter de sortir de chez eux, non tant par crainte 
des rondes militaires que des patrouilles de malfai- 
teurs. Tantôt ce sont les brigands qualifiés de contre- 
chouans qui saisissent des personnes sortant de la 
ville pour affaires; tantôt ce sont les soldats 
mêmes de la garnison qui se postent au-delà des 
portes afin de dévaliser les braves gens venant 
s'acquitter de leurs contributions (1). 

(1) Archives de Josselin. 



CHAPITRE IX. 213 

La police n'est donc pas trop sévère, et quant 
aux vrais chouans, imagination ou réalité, les rap- 
ports signalent toujours leurs bandes aux aguets, 
non loin de la ville ; Michel, Villebourgou, Dujar- 
din, sont les chefs de ces petits groupes, qui sans 
doute épient dans la brousse les sorties des troupes 
républicaines. 

Entre temps, les fonctionnaires publics et la 
Municipalité se livraient aux cérémonies offi- 
cielles (1) : fête de la Jeunesse, le 10 germinal, où 
le maire donne « Faccolade fraternelle » à tous les 
élèves de Técole primaire ; fête des Époux, 3 floréal, 
« pour honorer le mariage » et rappeler ses trois 
objets : le bonheur des époux, l'éducation des 
enfants et la conservation de la société ; anniver- 
saire de la prise de la Bastille qui se célèbre en 
grande pompe. Nous avons retrouvé le programme, 
qui fut exécuté Tan VII, à l'occasion de cette solen- 
nité. Le cortège formé de toutes les troupes en gar- 
nison alors dans la place et dans l'ordre suivant : 
chasseurs du IQ'' régiment, canonniers à cheval du 6«, 
garde nationale, gendarmerie à cheval marchant à 
côté du maire, gendarmerie à pied escortant les 
autorités civiles, infanterie de ligne, enfin les pièces 

(1) Archives de Josselin. 



214 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

d*artillerie, monta de la mairie à la promenade, où 
un discours fut prononcé. Le canon ne cessa de se 
faire entendre. Un concours de tir et une course 
vint distraire les assistants, puis dans le même 
ordre, le cortège sortant de la promenade descendit 
jusqu'à la place de la Liberté. Là, les troupes ran- 
gées en bataille formèrent le cercle autour des 
autorités et, second discours, le maire prit la parole 
pour féliciter les troupes de ligne et les canonniers 
de la bravoure déployée par eux aux armées ; il 
termina, en remettant une branche de laurier aux 
chefs de corps en témoignage de reconnaissance. 

C'est qu'en eiSet, si les armées républicaines 
subissaient des échecs dans l'Ouest, sur les fron- 
tières, en Suisse, en Egypte, elles triomphaient 
partout et se couvraient de gloire. L'avènement de 
Bonaparte au Consulat (8 nov. 1799), la paix suivie 
de mesures d'ordre et de conciliation, le rétablisse- 
ment du culte, calmèrent les esprits et attirèrent au 
premier consul un grand nombi*e de partisans 
jusqu'en Bretagne. D'autre part, le manque de 
ressources, Téloignement des princes et leurs vaines 
promesses de débarquement affaiblirent l'énergie 
des combatifs. La lutte en Bretagne et en Vendée 
ne pouvait dans ces conditions se soutenir bien 
longtemps. 



CHAPITRE IX. 215 

La légion de Bîgnan se distingua encore le 
21 janvier 1800, à Taffaire de Locmaria (Pont du Loc), 
mais ce fut le dernier chapitre de ses exploits. 
Avant la fin de cette même année, Georges Cadoudal ■ 
entraîné par l'exemple de tous les chefs de la 
Vendée, fit sa soumission. Disons à l'honneur du 
chef de la légion de Bignan que, se considérant 
engagé sa vie durant, tant qu'il n'aurait pas attein^ 
le but qu'il s'était proposé, le rétablissement de la 
royauté et du christianisme, il refusa de déposer 
les armes ; son bras était loin d'être abattu, son 
Ame était trop fière pour traiter avec un gouver- 
nement, dont il ne voulait reconnaître la puissance 
de droit. Tous les officiers supérieurs et plusieurs 
officiers subalternes de la même légion, comme 
Guillemot, refusèrent de se soumettre. Cet exemple 
fut suivi ailleurs et jamais la soumission de la Bre- 
tagne ne fut complète. 

Bonaparte, qui reconnaissait la religion comme 
une garantie indispensable de l'ordre social, laissa 
les prêtres petit à petit sortir de leurs caches ; dans 
l'ombre d'abord, puis au grand jour, le culte fut 
rétabli, alors les Bretons purent chanter victoire 
aux pieds de cette croix qu'ils avaient si vaillamment 
défendue et pour laquelle ils avaient noblement 
versé leur sang. Cette lutte héroïque du paysan 



216 ESSAI SUR LB PORHOËT. 

pour sauver ses vieilles croyances, ses libertés, et 
le principe de la légitimité, mérite d'être inscrite 
aux fastes de l'histoire des peuples. Le mot de 
Napoléon « la guerre de Géants ! » n'est pas trop 
fort ; dans ses résultats comme dans ses causes elle 
fut sublime, car elle grandit la religion et consacra 
À jamais Fhonneur et la gloire du nom breton. Ne 
donne-t-elle pas non plus le plus bel exemple, après 
la persécution Néronienne, de l'immortaUté du Chris- 
tianisme ? Dieu, n'est-il pas vrai, se rit des persécu- 
tions humaines ! Vingt siècles de foi assurent son 
triomphe ; l'éternité de son règne se joue des injus- 
tices et des mensonges. Le monde s'abîmera dans 
le néant et le Créateur prodiguera encore ses récomr 
penses aux lois dictées par la justice ttla conscience. 
Georges Cadoudal au fond du cœur n'avait pas 
non plus désarmé ; la conspiration dont il se fit le 
chef, fut la dernière tentative de la cause royale. 
Son arrestation fut suivie de celle d'une cinquan- 
taine de royalistes impliqués dans cette même 
affaire, dont douze subirent la peine de mort; 
parmi ceux-ci figurait Jean-Marie-Joseph Picot ou 
Picaud, originaire de Josselin. 

Le retour du pouvoir légitime fut acclamé en 
Bretagne. Les chouans depxiis longtemps étaient 



CHAPITRE IX. 217 

retournés à la charrue, mais leurs convictions 
n'avaient jamais changé; ils le prouvèrent en 1815, 
dès que le débarquement de Bonaparte fut connu. 
La province de nouveau se leva dans un élan spon- 
tané ; Desol de Grisolles ayant été appelé à prendre 
le commandement dans le Morbihan ; la légion 
de Bignan reçut pour chefs, le Theïs, Tancien 
compagnon d'armes de Guillemot, et la Goublaye 
comme lieutenant-colonel, pour chefs de batail- 
lons . François Guillemot, fils du roi de Bignan, 
Mathurin Gambert et de Castel. Les chouans 
occupèrent aussitôt les principaux centres, et les 
populations les reçurent partout avec enthou- 
siasme. Le 30 mai, l'armée principale, sous les 
ordres du général Desol, marchant sur Pontivy, 
s'empara de Ploërmel, et prit la route de Jos- 
selin. « Les jeunes gens sachant qu'ils y seraient 
reçus à bras ouverts, ils s'y rendirent à la course. 
Le soir la ville fut illuminée, et sur l'invitation des 
habitants l'armée y séjourna le 31 (1). )) La paix 
dans l'Ouest, heureusement ne fut que menacée; 
l'ordre se rétablit de lui-même après la ruine des 
ambitions du héros Napoléonien, qui au prix de 
tant de vies humaines n'avait su donner à la France 
qu'une gloire éphémère. 

(1) GuiLLUMOT, Lettres à mes neveux. 



218 ESSAI SUR LE PORHOËT. 



Les droits féodaux abolis, les Rohan perdirent 
toutes les prérogatives attachées au titre de comte 
de Porhoet et dépendant de leur suzeraineté sur 
cette vieille terre de famille. La propriété cependant 
resta un droit respectable, à condition toutefois 
qu'il ne fût exercé par un émigré. Aussi, le duc de 
Rohan, Louis- Antoine- Auguste , qui n'était point 
sorti de France depuis 1791, tenta-t-il de se faire 
indemniser de Faccaparement de son château de 
Josselin par la Nation. 

A Tépoque des premiers troubles (mars 1793), 
les administrations du district et de la municipalité 
s'étaient installées dans certains appartements, 
abandonnant le reste à une affectation très variable. 
Des locaux furent réservés aux suspects que la tour 
solitaire ne pouvait abriter, et même, nous avons 
assisté à un envahissement temporaire par des 
détenus étrangers ; les grandes salles servirent de 
casernement aux troupes de passage ; les greniers 
furent transformés en magasins d'approvisionne- 
ments militaires. 

Le citoyen Gaillard, agissant pour le duc de 
Rohan, remontra aux citoyens municipaux que 



I 



CHAPITRE IX. 219 

tout le château au début de la révolution, était 
en parfait état, même jusqu'aux quatre jardins 
<c bien tenus, engraissés, semés, plantés de beaux 
espaliers avec leurs palissades, de pommiers, de 
poiriers en éventail, trois carrés d'asperges, un 
d'artichaux, etc. » Le tout valait au moins 2000 livres 
de revenus ; les halles et auditoires qui avaient été 
pris, pouvaient être estimés à 800 livres ; et le four 
était affermé à 150 livres. Au total : 2950 livres de 
revenus contre le droit et par le bon vouloir de la 
municipalité (1). 

Le Préfet du Morbihan, considérant la pétition 
comme justifiée, par lettre du 18 nivôse an IX, 
donna satisfaction à la requête, en décidant qu*il 
serait établi un procès-verbal estimatif de la valeur 
annuelle du loyer, depuis que le château était 
employé aux diiSérents services publics. 

Le maire qui, en particulier, avait été consulté 
au sujet de la pétition par le sous-préfet, traita 
la question en défail. « La loi du 17 frimaire 
de l'an II, dit-il, était en tous points applicable 
au citoyen Chabot comme père d'émigré (2). En 



(1) Archives de Josselin, comme du reste ce qui suit, concernant 
le château. 

(2) Son fils, Alexandre-Louis- Auguste, avait effectivement quitté 
la France, en 1790. 



220 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

exécution de cette loi, le séquestre fut établi sur 
toutes les propriétés de ce citoyen et comme tel, 
le chÂteau de cette ville fut saisi et les revenus 
séquestrés. Soit que l'Etat disposât de cette propriété 
pour rappliquer à un ou plusieurs services publics, 
soit qu'il Tafifermât pour en percevoir les jouissances, 

son droit était indifféremment le même 

C'est à rinstant où ce citoyen a purgé l'hypothèque 
nationale qui existait sur ses biens, par suite de 
l'émigration de ses enfants, qu'il a recouvré les 
droits de propriétaire, qui sont demeurés suspendus 
en sa personne jusqu'à l'époque de son partage 
avec la République ; cette époque se compte du 
11 brumaire de l'an VII, jour que le citoyen Chabot 
a effectué devant le département de la Seine le 
partage de la succession anticipée, en conformité 
de la loi du !> floréal an III. A partir de ce jour, la 
jouissance du château a dû être perçue par ce 
citoyen, et c'est de cette époque que la demande, 
qu'il fait en payement de loyer de sa maison, devient 
admissible et légitime. » Il continue en indiquant 
quel est le moyen de statuer avec justice sur la 
demande et rapporte l'estimation faite sur l'ordre 
du Préfet. Quelle que soit la valeur exacte de la 
monnaie d'or à cette époque, l'estimation semble 
quelque peu rigoureuse. Location annuelle : 






CHAPITRE IX. 221 

Appartements occupés par les bureaux 
de la municipalité et du district. ... 40 livres. 

Greniers pour les grains de TÉtat 60 — 

Casernement dû par le ministre de la 

guerre 500 — 

Tour servant de maison d'arrêt 100 — 

Remise (en face du château, dans la 
cour) occupée par le logement des 
pièces de canon de la commune, 
caissons, etc 5 — 

Total 705 livres. 

Le château servit encore longtemps à loger les 
troupes ; le 14 thermidor an XI (1802), le citoyen 
Janzé, devenu propriétaire, formule au lieu et place 
du duc de Rohan une nouvelle pétition « afin qu'on 
procède à Testimation de la valeur locative de la 
portion dudit château, occupée comme caserne 
depuis le 1**' vendémiaire an VIII jusqu'à ce jour. » 

C'est cette sorte d'abandon qui fit supposer au 
maire, exerçant les pouvoirs à Josselin l'an 1804 
que le nouveau propriétaire n'avait que faire du 
château et que dans ce beau corps d'habitation, on 
pourrait aisément installer un dépôt d'étalons. 
Certes, l'idée était originale et n'eût pas germé 
dans un cerveau quelconque. C'était un génie, cet 



222 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

élu des Josselinais ; mais n'importe, Clisson dut 
frémir d'indignation et de colère, et sentir tout le 
poids du sarcophage q\ii l'empêchait de courir sus 
à ce brigand d'un siècle barbare. 

Le projet est on ne peut plus séduisant. « De 
vastes écuries, dit le rapport, peuvent être pratiquées 
dans les appartements qui composent le rez-de- 
chaussée de cet édifice et une modique dépense peut 
le rendre susceptible de loger plus de 200 chevaux^ 
tous placés dans le même local, sous les yeux de 
leurs conducteurs et des hommes chargés de leur 
surveillance. » Sa description s'étend longuement. 
Au-dessus des écuries on aménagerait le logement 
de tous les chefs et agents subalternes ; d'immenses 
greniers « les plus vastes et les plus beaux qui 
soient en Bretagne » serviraient aux fourrages ; 
l'eau serait toujours en abondance avec la proximité 
de rOust et la présence même « d'un puits intarris- 
sable de 20 pieds de diamètre et dont l'architecture, 
ainsi que celle du château, rappelle la richesse et la 
puissance des hommes qui en furent les fonda- 
teurs (1). » Des prairies seraient faciles à trouver; 
enfin rien ne devait manquer à cet Eden de la race 



(1) Cette description porterait à faire croire que le puits de la cour 
du chftteau fut autrefois agrémenté d'une ornementation architec- 
turale rappelant celle du ch&teau. 



CHAPITRE IX. 223 

chevaline. Le maire perspicace ajoute que le château 
appartenant à un particulier, loin d'être profitable 
et d'un revenu certain à celui-ci, ne lui offre qu'un 
bien onéreux et de peu de rapport ; il a la certitude 
que le particulier en question consentirait à la 
vente, à un prix très modéré. En un mot, pour 
50000 livres le Gouvernement pourrait s'en rendre 
acquéreur, ainsi que des accessoires nécessaires à 
l'établissement proposé. La location pourrait être 
de 3000 livres. 

Le citoyen maire était quelque peu trop affir- 
matif. Il ne soupçonnait pas évidemment que 
Janzé couvrait le duc de Rohan, resté en réalité le 
véritatle propriétaire, malgré l'acte de vente qui 
avait fait passer tous les biens de la famille de 
Rohan à une main étrangère, et que le château de 
leurs ancêtres tenait à cœur, plus que tout, aux Rohan. 

Louis-Antoine-Auguste de Rohan, après la mort 
de son cousin Louis-Marie, duc de Rohan (1791) (I), 
avait, par suit^ de l'acte de substitution de 1708, 
hérité de tous les titres et biens que comportait 
cette transmission (Duché de Rohan, Principauté de 
Léon, Marquisat de Blain, Comté de Porhoët)(2). 

(1) Toas deux étaient petits-enfants de Louis l*' de Roban-Chabot, 
duc de Rohan. 

(2) Avant cet héritage, il n*avait personnellement que la terre de 
Kerguenneck (Kergueheunec, en Bignan). 



224 ESSAI SUR LB POHHOËT. 

Nous n'avons pas à rechercher les causes déter- 
minantes de la catastrophe financière à laquelle 
Auguste de Rohan fut amené, qu'il nous suffise de 
savoir que Théritier des Rohan- Porhoôt, tout au 
commencement du m* siècle, se trouva dans une 
situation très critique. Après avoir loué d'abord 
la totalité de ses biens (1800), moyennant une 
redevance annuelle, à M. Henri Janzé, déjà son 
locataire pour les forges de Lanouée(l), il sévit 
dans rol)ligation de chercher acquéreur. M. Janzé 
ayant proposé à M. de Rohan un prix supérieur 
aux ofiFres que celui-ci avait reçues jusqu'alors, le 
contrat de vente fut signé le 25 août 1802. 

Dans cet acte passé à Paris, par-devant Péan 
de Saint-Gilles notaire, et enregistré au bureau du 
Luxembourg, le 16 fructidor an X, figuré au cha- 
pitre 3 de la vente (2), la « Terre de Porhoêt », 
composée des immeubles ci-après : « Un château, 
cour, jardins et dépendances, commune de JosseUn; 



(1) C^est pourquoi, dans une requête adressée au maire de Josselin, 
Henri Janzé dit qu'avant lacquisition (11 vendémiaire an XI) du 
château, il en était « fermier général » aux fins du bail.. . etc. 

(2) La vente comportait les chapitres suivants : Terre de Ker- 
guenneck, Terres de Pontivy et dépendances, Terre de Porhoét, 
Domaine ci-devant principauté de Léon, Terre de Blain (comprenant 
Plessé et Fresnay), Forges des Salles, Forêt de Quénécan, Forêt et 
Forges de Lanouée, Forêt de Loudéac et terrains en dépendant, 
Forêt de Branguilly, Bois des Débats. Le tout était obtenu moyennant 
le prix de 1 461 728 1* équivalents à 1 480000 livres tournois. 






CHAPITRE IX. 225 

les halles dudit lieu et le four, un moulin à fouler 
le drap, même situation et en très mauvais état. 
Les prés de Penfrat, commune de Mohon, même 
département ». La forêt et les forges de Lanouée 
étaient l'objet d'un chapitre spécial. Bâtiments des 
forges, maisons d'habitation, fours, magasins, for- 
maient un tout important et la forêt elle-même 
contenait7192 arpents (1) (3660 hectares). C'était là 
tout ce qui restait en propriété aux Rohan de leur 
Comté de Porhoët, après la Révolution. 

Bien que la vente ne fasse mention d'aucune 
restriction, le jour même, ce contrat fut suivi d'une 
contre-lettre, portant promesse de rétrocession en 
faveur du prince de Léon, fîls du duc de Rohan, 
« de quelques châteaux, halles et prisons, biens d'un 
médiocre revenu, mais que les Rohan tenaient à 
conserver, comme se rattachant à leur position 
d'anciens seigneurs ». M. Janzé (2) consentait en 
même temps, à garder ces biens sous son nom et à 
les administrer comme siens, jusqu'au jour où le 
prince de Léon, qui avait émigré, voudrait et 
pourrait en reprendre ostensiblement la propriété. 
Il les conserva pendant douze ans, jusqu'au 

(1) 7 192 arpents, dont 1192 de terres vagues, 5812 de terres 
cultivables, etc. 

(2) Le même, M. Louis-Henri Janzé, fut anobli quelques années 
plus tard; créé baron par Napoléon !•% puis comte par Charles X. 

15 



226 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

22 novembre 1814, époque à laquelle une vente 
fictive permit au prince de Léon, Alexandre-Louis- 
Auguste, de les reprendre sous son nom. Les 
châteaux de Pontivy et de Josselin furent ainsi 
sauvés du naufrage. 

De leurs immenses possessions en Bretagne, il ne 
resta donc alors aux Rohan que ces deux bribes, 
qui n'étaient hélas ! que le souvenir des grandeurs 
du passé. 

Après ces revers, le prince de Léon, devenu duc 
de Rohan, ne se trouva sans doute pas le goût de vivre 
en Bretagne, car il établit sa résidence à Paris (1). 
Le château de Josselin restait donc livré à la soli- 
tude et à l'abandon, quand une intervention presque 
providentielle vint, dans les dernières années de la 
Restauration, le sauver peut-être de la destruction 
irrémédiable. Voici comment M. Baille, dans son 
ouvrage « Le Cardinal de Rohan », retrace Fépisode 
du passage de' la duchesse de Berry à Josselin : 
« La duchesse de Berry, qui faisait une tournée en 
Bretagne pour Tinstruction de sa fille Louise, arriva 
à Ploërmel et demanda s'il n'y avait pas dans la région 
quelques monuments curieux à visiter. On lui cita 
le château de Josselin, qui appartenait au duc de 

(1) A partir de 1815, il y fut retenu, par sa charge de premier 
gentilhomme de la chambre. 



CHAPITRE IX. 227 

Rohan(l). Une belle ruine appartenant à son cousin 
Rohan, c'était plus qu'il n'en fallait à la duchesse 
pour la décider à affronter une course de trois lieues 
par des chemins impraticables. Ce que découvrit 
la princesse la dédommagea de ses peines ; elle fut 
aussi émerveillée de la pure beauté du monument 
que contristée du délabrement voisin de la ruine, 
où elle le trouvait. De retour à Paris, elle fit appe- 
ler Auguste de Rohan et lui exposa^ avec l'ardente 
énergie qu'elle mettait à ce qui lui tenait à cœur, 
quelle responsabilité il encourait à l'égard du pays, 
en abandonnant plus longtemps un pareil chef-* 
d'œuvre à un écroulement certain. La mise en 
demeure de la princesse ne fit d'abord éprouver à 
Rohan qu'un profond étonnement : il savait vague- 
ment que, dans son domaine de Bretagne, il y avait 
nne ruine qui s'appelait Josselin ; mais que le patri- 
moine du pays pût être intéressé à ce débris, c'est 
ce dont il ne revenait pas. Toutefois, comme il ne 
discutait jamais les injonctions de ses princes, il 
entreprit sans délai et continua tant qu'il vécut les 
travaux de consolidation et de préservation. » 

(1) Le duc de Rohan dont il s'agit ici était Louis-François-Auguste, 
fils d* Alexandre-Louis-Auguste. Il habita d'abord Paris et le château 
de la Roche-Guyon, puis étant entré dans les ordres, fut nommé arche- 
vêque de Besançon. Le titre ducal passa à son frère Fernand, qui est 
le grand-père du duc actuel. 



228 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Depuis, le travail a été repris ; le duc de Rohan 
actuel, guidé par un goût éclairé et par le respect 
dû à ime œuvre incomparable, consacre chaque 
année temps et fortune à la restauration de la 
demeure seigneuriale de ses ancêtres ; on peut même 
dire qu'aujourd'hui le château est rétabli dans son 
ancienne splendeur. Il représente pour le iv* siècle 
l'équivalent de la relique historique, qu'est devenu 
le château de Pierrefond pour le xiv*. Le temps, 
ce maître du beau et du bien, ne fera que sanc- 
tionner la valeur artistique de ce monument de 
notre histoire, qui perpétuera â travers les âges le 
souvenir de la puissance des Comtes de Porhoët. 



PIÈCES JUSTIFICATIVES 

{Nous nous en sommes tenus au minimum^ pour les 
pièces justificatives,) 



I 

I 



Fondation da Château de Josselin. 

(Traduction littérale.) 



« Le monde étant encore florissant et la foi vivace, un Vers 
homme d*une ^ande noblesse et d*une profonde sagesse, Tannée 
Guéthenoc, vicomte de Ghâteau-Thro , désirant changer 1008. 
son château de place, ouït dire que toute plantation qui 
n*a point été plantée par le Père céleste doit être arrachée- 
Inspiré par Tesprit divin, Il se rendit au monastère du 
Christ à Bedon, lequel possède la prééminence sur les 
autres couvents de cette région et prit le conseil des 
moines pour savoir quel jour, à quelle heure et sur quelles 
fondations il devait édifier son château. Or, ceux-ci lui 
répondirent que le Christ est le fondement de tous les biens 
et que tout ce qui repose sur lui ne peut être détruit. 
Ayant entendu ces paroles, le vénérable proconsul honora 
le saint lieu d*un magnifique présent ; il fit apposer sur 
Tauiel du Sauveur une table d'argent élégamment dorée ; 
Il se recommanda, lui et tous ses biens, aux prières des 
moines, et leur demanda de lui accorder, après sa mort, 
ainsi qu*à ses héritiers, Thonneur d*étre ensevelis dans 
leur église, comme c*est la coutume pour les seigneurs de 
Bretagne. En outre, il plaça le château qu'il devait cons- 
truire sous la juridiction du Christ et de l'église de Redon 
et constitua en faveur des moines un cens annuel de cinq 
sous grevant ledit château ; il s'engagea de plus, au cas 
où son château serait un jour suffisamment agrandi pour 
recevoir un prieuré, de ne donner ce dernier à aucune 
église, sinon à Tabbaye de Saint-Sauveur ; il prit soin de 
corroborer ces dispositions par une sentence de malédic- 
tion inéluctable contre ceux de ses descendants qui tente- 
raient de les violer en connaissance de cause. Cet acte fut 
passé en Téglise du Sauveur, avec l'attestation de Dieu et 



232 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

de tous les saints. Or le dimaDche suivant, à la première 
heure, le proconsul planta, selon la coutume, le premier 
pieu pour Tédification de son château, fonda une chapelle 
en rhonneur du Saint Sauveur et confirma Tensemble de 
ses dispositions en présence de tous ses sujets. » 

[Carlulaire de Redon, éd. de Courson, p. 24t.) 



Fondation du Prieuré de Sainte-Croix de Josselin. 

(Tradaction littérale.) 



« Le noble et sage proconsul Guéthenoc étant mort fut Vers 
enseveli dans Téglise capiiulaire de Redon ; il eut pour Tannée 
successeur son très noble et très sage fils Goscelin. Celui- 1059. 
ci voyant qu'à la suite d'une donation faite par son père 
au Dieu-Sauveur, les possessions paternelles s'étaient ac- 
crues, résolut d'augmenter la dite fondation et par là 
même d'augmenter ses biens. Il fit donc venir auprès de 
lui Perennesius, vénérable abbé do Redon, désirant accom- 
plir les vœux faits jadis par son père pour l'agrandisse- 
ment de son château, avec la protection de Dieu. Il cons- 
tatait en efiet, et telle était sa ferme conviction, que non 
seulement son château mais encore son fief en entier 
avaient été pour eux agrandis de toute part ; c'est pour- 
quoi il fit don à la sainte église de Redon d'une habitation 
voisine de son château et propre au logement des moines, 
à savoir : le prieuré de Sainte-Croix et des saints martyrs 
Corneille et Cyprien, avec l'ancien faubourg et le territoire 
s'étendant jusqu'au milieu de la rivière d'Onlt, y compris 
ses revenus et sa juridiction tels que lui-même les possé- 
dait pour son château. Et pour jouir en tous temps du 
conseil desdits moines, il leur donna par la même charte 
les terres suivantes éparses dans diverses paroisses ; 
t Crannam et TinseJio v ^ur le territoire desquelles est bâ- 
tie l'église de Sainte-Croix ; « Plucgaduc in Keminet » ; la 
quatrième partie des redevances de la saint Michel; «Tossat 
et Criât in Lannois » : « Rerhennam in Gillac » ; » Treublen 
in Loiat » : « Corrinbuhucan in Quilir » ; « Rerloern in 
Mutbon » ; f Keridlven in Miniac » ; « Kermoil in Plu- 
miuc » ; « Kermelennan in Locduiac » ; a Tresmes iu 
Nuial » ; < Coidan in Pluhuduc » ; « Choitmesun in Nui- 



234 ESSAI SUR LE PORHOËÎ. 

liac (I) ». De leur côte Tabbé et les moines considérant la 
dévotion du vénérable proconsul accordèrent à ladite éf^lise 
de Sainte-Croix le privilège et Tbonneur de servir de sépul- 
ture, pouvoir que la sainte église de Redon a reçu du 
Pape ; ils donnèrent en outre toutes les terres qu'ils possé- 
daient sous la suzeraineté dudit château, car il est écrit 
dans leurs chartes qu'ils ne doivent posséder ces biens 
qu'à la condition de les tenir en fiefs desdits vicomtes. Du 
présent acte sont témoins : le proconsul lui-même comme 
suzerain du bénéfice ; son fils, Tévéque Maen^is, et ses 
deux autres fils, Roger et Eudon ; Donuallon ; Joël, notaire ; 
Hervé, prêtre ; Robert, fils de Roger ; Roger, fils de Gue- 
nealon ; Theholus» Garnier, Etienne, fils de Kaledan ; 
Guillaume et plusieurs autres moines de Saint-Sauveur : 
Perennesius, abbé ; Almodus, prieur; Jehan, moine; Hervé, 
prêtre ; Heloir, prêtre ; Helogon, Declu, Hugolin de Ploiar- 
mel ; Morwethenus. 

{Carlulaire de Redon. Biblioth. Nat. man. fr. 22330 et éd. 
de GOURSON, p. 242-43.) 

(1) On reconnait là un grand nombre des anciennes paroisses du 
Porhoët : Lanouée, Ouiilac, Loyat. Quilly, Mohon, Plumieuz, 
Loudéac, Noyai . . . , etc. 



Fondation du Prieuré de Saint-Martiu de Josselin. 

(Traduction littérale.) 



Si quelqu*uu désire connaître plus à plein la donation de Année 
la chapelle du château de Josselin, que Josselin, vicomte, 1112. 
fils de rillustre vicomte Eudon^ a faite pour le repos de 
son âme et de celles de ses ao ce très, à Dieu, à Saint-Martin 
et â nous, moines de Marmoutiers vivant sous la discipline 
de Tabbé Guillaume, la première année de l'abbatiat de 
ce dernier, c*est à savoir Tan de Tlncarnation de N. S. 
1105; si quelqu'un, dis-je, souhaite connaître entièrement 
celte donation, qu'il se reporte à l'acte ci-dessous intitulé : 
« Gyrographe au sujet du château de Josselin fait entre 
nous et lui et conservé dans les archives de notre monas- 
tère pour rinstruction de la prospérité (1). » Pour Tinstant 
nous avons seulement pris soin de désigner les reliques 
que messire Guillaume, abbé, a transférées de notre monas- 
tère dans ladite chapelle à la demande du susdit vicomte 
Josselin, et de désigner l'époque de ce transfert, à savoir 
Tan de Tlncarnation de N. S. 1112 à la d^* indiction, sous 
le pontificat du pape Pascal, le règne de Louis, roi de 
France, et d'Alain comte de Bretagne, sous Tépiscopat 
de Benoît évéque d'Aleth et le gouvernement du vicomte 
Josselin déjà cité, enfin la cinquième année de Tabbatiat 
de notre abbé Guillaume. Messire Tabbè Guillaume ouvrit 
lui-même les reliquaires de notre monastère et en retira 
ces restes si précieux ou plutôt inestimables qui sont les 
saintes reliques de la Croix divine et les ossements des 
saints Gorentin, évéque, Flavien, martyr, des saintsévéques 
Fulgences et Samson, et de saint Martin abbé ; cette céré- 
monie eut lieu sous les yeux de nos moines, du prieur 

(l) Cet acte n^est pas reproduit dans Dom Morice. 



236 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

Guillaume, d'André de Gomez. d'Hervé prieur de Gamors, 
de Pierre Baile, etc. Après avoir réuni lesdites reliques 
avec le plus grand soin, messire Tabbé les transporta en 
Bretagne et les déposa dans ladite chapelle. 

(Extrait du Cartulalre de Marmoutiers, Dom Moricb, 
Preuves, t. I, col. 5U.) 



Principal accord sur le partage des biens 
dTudon III de Porhoët. 



(Traduction littérale.) 



A tous ceux qui ces présentes lettres verront, Jean, duc Année 
de Bretagne, comte de Ricbemond, salut en N. S. Sachez 1241. 
que, constitués en notre présence, Raoul de Fougères 
d*une part et Pierre de Chemille et Ollivier de Montauban 
d'autre part, agissant en leur nom et en celui de leurs 
épouses comme héritiers d*£udon, fils de comte, au sujet 
de rhéritage qui leur était échu en commun duditEudnn, 
ont conclu en notre présence un accord sous la forme sui- 
vante : à savoir que dudit héritage qui leur est échu 
comme il a été annoncé, ledit Raoul possédera et aura à 
perpétuité deux parts et mémement lesdits Pierre et 
Ollivier et leurs femmes posséderont et auront à perpétuité 
la tierce part : sous telle condition cependant que dans la 
part dudit Raoul il restera audit Raoul la ville et le châ- 
teau de Josselin, la forêt de Lannois et la paroisse de 
Mohon comme elle se comporte, sauf les exceptions ci- 
dessous écrites et selon la prisée qui sera faite par messires 
Bonab de Rogey, Men de Derval, Jean de J^Jaurre et 
Georges Villageois, chevaliers. De même, auxdits Pierre 
et OlUvier et à leurs femmes resteront la forteresse et la 
ville de la Chèze, la ville de la Trinité et la forêt de Lou- 
déac, en leur part et selon la prisée qui sera faite par 
lesdits chevaliers. Tous les autres biens qui leur sont 
échus par ledit héritage où qu'ils se trouvent : bois, 
fermes, prés et eaux seront appréciés et estimas par lesdits 
chevaliers ; et, si par cette appréciation et estimation on 
trouve que ledit Raoul possède à présent au-delà de deux 
parts dudit héritage, lesdits chevaliers remettront auxdits 
Pierre et Ollivier et à leurs femmes la partie qui leur est 



238 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

due à choisir parmi les territoires qui leur seront les plus 
accessibles et les plus commodes, sauf sur les lieux déjà 
mis hors de cause : la même clause sera appliquée audit 
Raoul si lesdits Pierre et Ollivier possèdeat présentement 
au-delà de la tierce part. Pour ce qui concerne la ville de 
la Trinité, à savoir les biens que ledit Raoul y possédait, 
ce dernier acceptera un échange équitable proposé par 
lesdits chevaliers ; lesdits Pierre et Ollivier et leurs femmes 
resteront en saisine de ces biens jusqu'à ce que la prisée 
eu ait été complètement terminée. Le présent accord a été 
conclu en réservant le droit d'aînesse dudit Raoul que ce 
dernier pourra faire valoir quand il voudra : lesdites parties 
sont tenues de faire venir de leurs terres tous les témoins 
que les susdits chevaliers demanderont pour procéder à 
la prisée, nous avons même accordé auxdits chevaliers le 
pouvoir de se faire envoyer nos propres sujets s'il en est 
besoin. Ainsi ledit héritage sera divisé entre les parties 
par ces chevaliers de telle sorte que Raoul aura deux parts 
en fief et en domaine et Pierre et Ollivier et leurs femmes 
la tierce part susdite ou que rechange sera fait aux condi- 
tions ci- dessus énoncées au sujet de la ville de la Trinité, 
s'il arrive que les chevaliers fassent à Raoul restitution de 
quelque bien en la possession actuelle de Pierre, d'OUivier 
et de leurs femmes. Pour procéder de bonne foi entre les 
parties à cette appréciation, estimation, échange et divi- 
sion, lesdits chevaliers ont prêté serment corporel et 
lesdites parties se sont engagées par serment verbal à se 
soumettre à leurs décisions. Donné à l'abbaye du Mellerai 
l'an du Seigneur mil deux cent quarante-et-un, le lundi 
lendemain de la fête des saints Tiburce et Valérien. 

[Cartulaire ctAlençon, Bibliot. Nat. Titres Fougères et 
Porhoët, man. fr. 22330.) 



Contrat d'échange du comté de Porhoët avec la 
baronnie de Tuit en Normandie. 

(Copie textuelle.) 



< Nous Pierre Conte d^ÂIeoçon, et nous Robert d*Alençon Année 
Conte du Perche, faisons sçavoir à tous présens et avenir, 1370. 
que nous bien avisiez, pourveuz et conseilliez pour noire 
der et évident proufQt avons eschangé, quittié, cessié, trans- 
porté, et délaissié, et par la teneur de ces présentes lettres 
baillons, quictons, cessons, transportons et délaissons par 
nom de pur, vray et loyal eschange fait but à but sans 
aucunes soltes d'argent à nostre très chier et bien amé 
Messire Olivier Sire de Giiçon et à Madame Béatrix de Laval 
sa femme, pour eulx, pour leurs hoirs, et pour leurs 
successeurs, et pour ceulx, qui auzront cause d^eulz à 
toujoursmais, nostre chaslel, ville et chastellenie de 
chasteau Jocelin en Bretaigne avec toute les terres, boys, 
prez, rivières, estans, manoirs, moulins, fiez, arriesreôez, 
hommes, hommages, et toute jurisdiction, et justice 
haute, moyenne et basse, et autres noblesses, cens, renies, 
revenus, prouffits et émolumens, et autres appartenances 
quelconques en quelconques choses et valeur que elles 
soient pour la Baronnie, chastellenie, et toute la terre du 
Tuit, que ledit Sire de Giiçon tient de son héritage séant 
en la vicomte de Faloise en Normendie avecques les bois, 
prez, riviéres> estans, fiez, arriesfiez, hommes, hommaiges, 
et toute jurisdiction haute, moyenne et basse, et autres 
noblesses, cens, rentes, revenus, et tous autres prouffiiz 
et émolumens, si comme ledit Sire de Cliçon les a tenu et 
tient; et pour deux mille livres tournois de rente que 
iceux Sire de Cliçon et sa femme prennent à héritage à 
cause de ladite Dame sur la renpte de Ghampaigne ; 
lesquelles Baronnie, chastellenie et terres, et deux mil 
livres tournois de rente à héritage iceulx Sire de Cliçon et 
sa femme nous ont transportez, quittiez et délaissiez pour 
nous et pour nos hoirs et successeurs et ceulx qui auront 



240 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

cause de nous à toujoursmais parmi ledit eschange, et nous 
eu tenons pour bien contens. Et pour nous désaisir el 
desmettre de la foy et homage desdits chastel, ville, et 
cbaslellenie, et appartenances de chaatel Jocelin en U 
main de noslre très-cher et très amé cousin le Duc de 
Breiaigne, de qui y sont tenus et meuvent, nous avons 
constitué et estably, et par la teneur de ces présentes 
constituons et eslablissons nos Procureurs Messire Robert 
de Beaumanoir, Messire Henry de Plôdran, Messire P. du 
Bois-Helyou, et Messire Olivier de Yalcler et chascun 
deulx pour le tout. Prions et requérons nostredil cousin le 
Duc que ladite desaisîne et démission vueille prendre et 
recevoir et prandre aussi et recevoir le dit Sire de Giiçon 
en sa foi et bornage dlceulx au tiltre dessus dit, promettons 
que contre cest présent eschange ne vendrons ne venir 
ferons par nous ne par autres, mais le tendrons et ferons 
tenir et accomplir de point en point. Et les cbastel, 
chastellenie et appartenances de chastel Jocelin dessus 
diz nous délivrerons où ferons délivrer, et garantirons et 
dépendrons envers toulz et contre touz ausdit Sire de 
Cliçon et sa femme et à leurs hoirs et successeurs, et 
ceulx qui auront cause d*eulx à tousjoursmais à nos propres 
couz et despens; et paierons et ferons paier tous couz, 
despens et interestz, se aucus avoient ou soutenoient par 
defTaute de délivrance de garantie ou de deffense. Et quant 
à ce obligeons nous et nos hoirs et successeurs, meubles 
et non meubles et de nosdits hoirs et successeurs, meubles 
et non meubles présens et avenir ou que ils soient, 
renonçons en ce fait à la toute erreur, fraude, lésion et 
decevance, à toutes grâces, privilèges, donnés et à donner, 
et à tout ce qui valoir et profiter nous pourroit à venir ou 
faire encontre cest présent eschange en quelque manière. 
Et que ce soit ferme chose et estable à toujours mais avons 
fait mettre nostre sceaux à ces lettres Donné à Paris le 
XIV» jour de May Tan de grâce MGGGLXX. 
Cl Titre de Blein ». 

(Dom MORICE, Preuves, t. I, col. 1639-40). 



Déclaration du Duc de Bretagne concernant 
la Châtellenie de la Chèze. 

■ (Analyse.) 



Jehan, duc de Bretagne, à tous ceux qui ces présentes Année 
lettres verront, salut. Nous venons d'entrer en composi- 1396. 
tion avec notre très cher cousin, Alain Vicomte de Rohan, 
au sujet du droit de rachat qui nous était dû par lui sur 
la Vicomte de Rohan et sur le territoire delaChéze, du fait 
de la mort de son père, Jehan, Vicomte de Rohan; ledit 
Vicomte Alain se libérera à notre égard par le paiement 
d'une somme de trois mille livres. Mais comme le terri- 
toire de la Chèze est de la tenue et ressort de la baronnie de 
Porhoet, laquelle est actuellement en la possession de 
notre très cher cousin Olivier, sire de Glisson, et comme 
ledit sire de Glisson prétend que sa baronnie de Porhoêt 
est exempte du droit de rachat, nous déclaions que les 
conventions faites entre nous et le Vicomte de Rohan 
au sujet du territoire de la Ghèze, ne porteront aucune 
atteinte au privilège d'exemption de rachat dont ledit sire 
de Glisson jouit pour sa baronnie de Porhoêt. Fait à 
Quimperlé, le jeudi 11 mai 1396. Par le duc, de son com- 
mandement; G. ESGHALASTRB. 

(Archives du château de Nantes. Dom Morigb, Preuves^ 
t. II. col. 666.) 



16 



Prêtres réfractaires qui sont au district 
de JosseliD (1). 



Gaillard, ex-vicaire, Jos- 
selin. 

Le Portz, prêtre habitué, 
Josselin. 

André, prêtre habitué, Jos- 
selin. 

Blanche , prêtre habitué , 
Josselin. 

Picard, prêtre habitué, Jos- 
selin. 

Marcour, prêtre habitué, 
Josselin. 

Barbier, chapelain (Ursu- 
lines), Josselin. 

Chantrel, ex-curé, Josselin. 

Grumelec, ex-curé, Josselin. 

Monterein, ex-vicaire, Jos- 
selin. 

Giquello, ex-vicaire , Gué- 
gon. 

llerlet, vicaire, Guégon. 

Gautier, curé, Saint-Servan. 

Olivier, vicaire. Saint-Ser- 
van. 



Emmery, chapelain, Saint- 
Servan. 
Orio, vicaire, Trégranteur. 
Le Breton, curé, Quilly. 
Perrotin, chapelain (Castel), 

Quilly. 
Carel, vicaire, Ghapelle-és- 

Briéres. 
Dénouai, curé, Lanouée. 
Jouan, vicaire, Lanouée. 
Le Verger, chapelain (des 

Forges), Lanouée. 
Couepei , prêtre habitué « 

Lanouée. 
Teffainne, curé, La Grée 

Saint-Laurent. 
Gaillard, curé remplacé, La 

Croix Helléan. 
Marot , vicaire remplacé , 

Mohon. 
Macé, curé, La Trinité. 
Cochon, vicaire, La Trinité. 
Le Pioufie, curé, Breban- 

Loudéac. 



(1) Archives départementales, L 1166. 

Vis-à-vis de chaque nom, se trouvent à Toriginal, des observations 
qui sont Texpression d*uii fanatisme tellement grossier, que nous 
ne nous sommes pas permis de les reproduire. 



PIÈCES JUSTIFICATIVES. 



243 



Le Bot, curé, Saint-Gouvry. 
Le Gentil, curé, Credin. 
Dréan, curé, Pleugrifiet. 
Rivière, curé, Lantillac. 
Ropert, curé, Radenac. 
Després, curé remplacé, Ré- 

fçuiny. 
Tanguy, prêtre habitué, Ré- 

guiny. 
Gudon, Latis, le Portz, curé, 

vicaire, Plumelec et Ga- 

doudal. 
Jouchet , chapelain (Loc - 

maria), Plumelec. 
Picard, vicaire, Radenac. 



Gayet, vicaire, Saint-Aubin. 

Noury, Jeffredo, curé, vi- 
caire, Bignan. 

Raveno, leTellier, Largouet, 
prêtres habitués. Bignan. 

Danielo, curé, Saint-Jean- 
Brevelay. 

Le Bouleis, curé. Saint- 
AUouestre. 

Le Breton, vicaire, Buléon. 

Moisan, chapelain (Sainte- 
Anne de Buléon). 

Garo, vicaire, Billio. 

Éon, curé, Gruguel. 

Légal, vicaire, Guehenno. 



Nous administrateurs composant le directoire du dis- 
trict de Josselin, certifions le présent état conforme à la 
plus exacte vérité. 

Fait au directoire, à Josselin, le 23 juin 1792. 



Robin, 



GOONÉB, 

Secret. 



Lb Bonhelbt fils, 
Lbchard. 



Procès -Verbal de la Visite faite, par le 

chirurgien Chandor, à la maison d'arrêt de Josselin, 

ci-devant Château, le 20 Juin 1794 (1). 



(Reproduction textuelle) (2). 



LIBERTÉ ÉGALITÉ UNITÉ 

Lan deux de la République Française une et indivisible, 
le duodi de la première décade du mois messidor. 



Nous Charles Amable Robin Gh\ndor , chirurgien 
major du 3« Ba^^ de Loir et Cher, en garnison à Josselin, 
certifions quand vertu de Tarrêté de Tadministration 
du district de Josselin en datte de ce jour, nous nous 
sommes transporté, accompagné du citoyen Vandbr- 
GRAGHF administrateur du même district, et du citoien 
Mahé administrateur commissaire du district de Vannes, 
j'usqu*en la maison d*arrét du dit Josselin, ci devant 
château, pour, au désire de la commission du citoien 
Mahé, en date du 28 Prairial, et de Tarrèté du district 
de Josselin, vérifier les faits allégués par les détenus 
en la ditte maison d*arrêt et qui ont été transférés de 
celle du district de Vannes, rapporter procès verbal de 

(1) Cette pièce se trouve aux Archives de Josselin et aux Archives 
départementales L 1166. Nous avons pris texte de celle-ci, les signa- 
tures y étant plus complètes. 

(2) L^orthographe du copiste en sera une preuve facilement con- 
vaincante. 



PIÈCES JUSTIFICATIVES. 



245 



rétat de la ditte maison et des personnes qui y sont 
détenues, ou étant, nous avons en présence des dits 
commissaires, procédé comme il suit : 



i i 

s I 


NOMBRE 
d«ft 

LITS 


m 
W « 

CD * K 

g S 

a. 


OBSERVATIONS 


1" 

1 ^ 

i 

6 
7 

ft 

9 

to 

10 
10 

11 


9 à terre. 
5 

5 montés. 
5 

5 


10 
5 

5 
5 

5 


Latrines à côté du dit appartement répan- 
dant une odeur infecte. 

Même odeur par les croisées lorsqu'elles 
sont ouvertes, occasionnée par les mias- 
mes qui sont portés des latrines de la 
chambre des ci-devant prêtres, qui 
sont posées sur les crénauz du dit 
cidevant château. 

Même odeur que ci-dessus, latrines à 

côté du dit appartement. 
Une cheminée qui fume et même odeur. 
Inabitable. 

Impossibilité de passer librement entre 
les lits. 

Même odeur que cy-dessus à cose des 
latrines. 


8.. 5à terre. 

10 

5 
3 

2 à terre. 

1 

7.. 2 à terre. 

8 à terre. 


14 

13 

8 
3 

3 

1 
7 

9 


Infirmes; n'étant qu*uo petit cabinet ou 
apeine, il est impossible d'entrer pour 
si coucher, recevant par les croisées la 
même odeur des latrines des ci-devant 
prêtres. 


Petit cabiiiet, même odeur. 

Une malade de rumatises; couvertures en 
bois donnant beaucoup de froid de 
toutes parts, plusieurs meurtrière» ou- 
vertes et des latrines à côté donnant la 
même odeur. 

Étant obligés de passer les pots de nuit 
du n« 5 pour les porter dehors; une 
malade de fièvre billieuse depuis 3 se- 
maines. 



246 



ESSAI SOR LE PORHOËT. 



lit 


NOMBRE 

d0t 

LITS 


NOMBRE II 

dot 1 


OBSERVATIONS 


13 

13 

14 
15 
16 
17 

18 

19 

20 

22 

24 
25 

26 

28 
29 

30 
31 

27 

28 


5 

1 . 

4. 
2 




6 

1 

5 
3 


Sous la charpente et lardoise, sans lambri 
n*i croisées, ayant été malade toutes 
depuis qu'elles y sont. 

Petit cabinet ou Ton mettait autrefois du 
charbon, sans porte et sans croisée, les 
latrines dans la chambre. 

même odeur de latrioe. 

chambre mal seine, sans croisée. 

Inabitable. 

Même odeur de latrines; une personne ftgée 
de 73 malade depuis 60 jours. 

Chambre trop petite pour tant de moade; 
même odeur; la cheminée bouchée. 

chambre inhabitable, sans croisée; une 
poude (poutre) soutenue par une corde; 
terrassée en poussière, et même odeur. 

deux malades de fiènres putrine; appar- 
tement presque sans lambry, sans voiet 
n*y croisée et absolument à Tétroil. 

Grenier sans lambry, sous Tardoise et 
point de croisées. 

coiidor. 

grand grenier sans lambry, sous Tar- 
doise, communication par les guibes 
aux chambres des prêtres et aux latrioes 
point de croisées ; un malade avec fièv^re 
continue. 

continuation du même grenier, sous lar- 
doise, même odeur et une malade. 

Espèce de tour sans croisée, deux malades. 

tour sous lardoise sans croisée et ter- 
rassée en poussière. 

malade de lièvre maline. 

même odeur de latrines. 

sans cheminée. 

Une malade de maladie de nerf ayant 
besoin de plus grand secours de l'art. 






3 

5. 

1. 

10, 

6J 




3 

6 

1 

10 
6 




i terre. 
i terre. 


13 à 

9 

9 

2: 

1 

4. 
3i 
4.. 


i terre. 

ï terre. 

ï Urre. 
i terre. 


15 

9 

11 
2 

1 

4 
4 
4 


Uerre. 
.2àterre. 



PIÈCES JUSTIFICATIVES. 



247 



lii 

M 


NOMBRE .: 
des 

LITS 


(0 

ÛC K 

i ■ 

0. 


OBSERVATIONS 


29 


3 


5 


cuisine basse, fort malceine, sans vitrage, 
et les latrines à côté de la porte d'entrée. 


^ 


6 à terre. 


6 


même odeur; directement au-dessous des 
latrines des ci-devant prêtres, ne pou- 
vant souvrir sans recevoir uae odeur 
insuportable — un malade. 


26 


point de lit. 


14 


sur la paille, même incommodité pour 
lodeur des latrines. 


34 


25 à terre. 


25 


ci-devant prêtres; les latrines donoant 
dans la chambre, 3 croisées sans vitrage, 
3 malades avec fièvre et presque tous 
sexagenêre et infirmes. 


34 


10.. 8 à terre. 


14 


apartemeut trop petit et contigu à celui 
ci-dessus, même réparation à faire et 
même odeur. 


35 


1 


1 


Point de porte, ouverture sur la rivière, 
sans croisées (1). 


Total. . 


251 




Total dbs malades 14 



Il résulte d'après le tableau ci-dessus montant au 
nombre de deux cent cinquante personnes, dont quatorze 
malades et les observations faites à côté de chaque numéro 
que non seulement les détenus, sont très pressés dans les 
difiérents appartements qu'ils occupent; que ceux qui 
sont sous Tardoise, sont exposés tant à la grande chaleur, 
qu'au grand froid, ce qui ne contribue pas peu à leur 
donner des incomodités journalières qui altère leur santé ; 
que daillieur les appartements du cldevant château 



(1) D'après un devis fait à cette époque, les administrateurs 
demandaient 6 360 livres (au moins le double aujourd'hui) pour 
assainir les latrines. 



248 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

communiquant presque tous les uns dans les autres et 
leurs croisées donnant du côté de la rivière, ils ne peuvent 
jeter leurs vidanges de nuit par les croisées, rapport aux 
sentinelles qui sont posés pour surté de leurs personnes, 
que par conséquen ils sont aubligés de passer tous les 
pots de nuit dans les appartemens communicant d'une 
chambre à Tautre, ce qui ne contribue pas peu à les 
rendre malades; qu'en outre, les 150 hommes qui sont 
campés dans la cour du cidevant château donnent une 
augmentation de personnes qui épuisent l'air que peuvent 
respirer dans un aussi petilte espace, une aussi grande 
quantité d'individus, il n'en peut résulter que de très 
grands maux. Nous avons en outre observé que la citerne 
qui existe dans le milieu de la cour, ne peut fournir 
qu'une eau mal seine, et dans la qu'elle plusieurs nous 
ont rapportés avoir trouvés des vers, cette citerne ayant 
diminué d'environs 20 pieds depuis que les détenus 
habitent ce local. 

Nous pouvons encor observer, avec vérité, que une des 
tours dans la même cour est remplie d'uu nombre 
considérable de prisoniers criminelles, pour lesquels le 
consierge de la tour est aubligé de puiser l'eau, tant pour 
leurs boissons que pour vider les baquets dans lesquels 
les prisonniers font leurs vidanges, éta'nt encore obligé de 
passer les dits baquets dans la même cour pour aller les 
vider dans les latrines éloignées, n'ayant point de latrine 
dans cette cour. 

, Nous observons enfin, que bien qu'il fut pas possible 
de changer les détenus, nous ne pourrions leur donner 
les secours nécessaires dans leurs maladies n'ayant pas 
d'apoticaires à Josselin et ne pouvant nous procurer les 
remèdes nécessaires pour les soulager. 

En foi de quoi uous avons rapportés le présent Procès 
verbal n'ayant d'autre chirurgien sur les lieux pour le 
rapporter, avaloir et servir ce que de raison, sur les soins 
des dits citoyens tel que Vandegrachf et Mahé admi- 
nistrateurs et le notre ; sur et au dit lieu, le tridy de la 



PIÈCES JUSTIFICATIVES. 249 

première décade da mois de messidor, et dont nous avons 
laisser copie au district de Josselin et Toriginal remis au 
citoyen Mahé commissaire*/. 

Pour copie conforme à roriginal, 
Robin Ghandor. 



Nous sous signés, maire et municipaux de la commune 
de Josselin certifions que la signature Chandor cidessus 
apposée est celle du citoyen Chandor, Officier de Santé> 
au troisième Bataillon de Loir et Cher et que foi doit-y 
être ajoutée en justice et hors justice. 

Fait à la maison commune, ce jour 5 messidor Tan deux 
républicain. 

(Illisible) (Grée sans doute). Quillio, 



agent, nat. 




Becreliire. 


Le Tourneur, 


Guillaume, 


ROUSSIN, 


off m*>. 


maire. 


off m*». 



Nous membres composant la commission administrative 
du District de Josselin, attestons que les signatures ci- 
dessus sont celles des maires et officiers municipaux de 
la dite commune. 

Fait en Directoire à Josselin le 5 messidor, an deux 
républicain. 

Lahorib, Trevedy, Nogrkt, Tréogat. 



Nous avons recherché avec soin les noms de ces détenus» 
suspects de tous rangs : prêtres, religieuses, ex-nobles, 
cultivateurs, négociants, anciens administrateurs, etc., 
dont il est question au procès- verbal de Ghandor ; les dos- 
siers concernant la police générale et administrative du 



!Î50 



ESSAI SDR LE PORHOËT. 



district de Josselin (1) nous en ont fourni une liste, sinon 
complète, du moins très Importante. Ce sont les occupants 
du château même, sans comprendre les criminels enfermés 
dans la tour. 

Voici un appel sans date, mais que Ton peut présumer 
avoir été dressé vers le 15 floréal, an U (4 mai 1794). 



ce Liste des détanni en la maison d'arrest, an ci-deTant 
châtean de Jotsalin. Scavoir : 



Noms des détenus 

DU DISTRICT DE J0SSBL1N(2). 



Alexis Thamaret de Bosset. 

(Arrestation le 8 floréal.) 
(de) Trepezec, père, 
de Trepezec, réponse. 
François de Vossey (3). 
Françoise de Vossey, sa 

sœur. 
Dumoulin (du Moulin) (4). 
Couesson, père, 
la femme Kerpedron (de 

Kerpedron). 
la fille le Voyer. 
du Camper, mère. 
Agathe du Camper. 



Jeanne Norquer (Nourquer), 

V^« Vossey (de). 
Augustin • Marie Lescouet 

(de). 
Marie-Céleste (V^«) de Les- 

couet- 
Caradec de Lescouet. 
Marie Nocquer (Nourquer), 

yve Kerpedron (de). 
Françoise Perchappe. 
Geneviève Perchappe. 
Marie Perchappe. 
Roberte, femme Lanseigle 

ou lesec (de Leisségues). 
Rosalie Lanseigle ou lesec 

(de Leisségues). 
Désirée Lanseigle ou lesec 

(de Leisségues). 



(1) Arch. dép. L. 1165, 1166, 1167. 

(2) Nous avons cru devoir rétablir l'orthographe de certains noms 
propres. 

(3) Vieillard de 75 ans, affligé d'une maladie des yeux et de nom- 
breuses blessures de guerre. 

(4) Lieutenant-colonel de cavalerie, habitant Josselin. Sans doute 
l'ancien gouverneur de la ville. 



PIÈCES JUSTIFICATIVES. 



251 



Marie Dréan, femme Legofif. 
René-Jean de Lesquin (de 

Lesquen)(l). 
Marie-Joseph du Rocher. 
Matburiae Gicquel, femme 

Audran. 
Suzanne Perret, Y^^Mariono. 
Jacques Caro. 
Olivier Martin. 
Joseph le Guerson. 
femme Ghassonvilie (du 

Moulin V^c de). 
Mathurin Ghenerion, domes- 
tique. 
V'«» le Breton (Anne- Bel- 

lamy). 
Hyacinthe du Camper. 
Marguerite Mahieux, sœur 

de rhôpital. 
Marie-GatherineMoin, sœur 

de l'hôpital. 
Marie Mauheux, sœur de 

rhôpital. 
V^« Boulé. 
Moisan. 
Dumorquer (Nourquer) du 

Gamper. 
Perret, père. 
Perret, femme. 
Françoise le Guenec de Tré- 

véran. 

Au total 43(2) 



Suite des détenus, 

EN LA Maison d'arrest 

A Saint-Martin. 



Elie, juge,arrest. le 3 floréal. 
LeGuevel,juge, id. 
Ghaye, id. 

Jouaust, id. 

Munier, id. 

Guyot, id. 

Au total 6 



Suite dbs détenus, 
dans leurs maisons 

A JOSSBLIN. 



Deslande. 

Elie, arrestation le 3 floréal. 



Soyer, 


id. 




Bonnefoy, 


id. 




Trevelot, 


id. 




Boussard, 


id. 




Oneill, 


id. 




Lors, 


id. 




Baulouet, 


id. 




Au total . . . 




. ft 




En arrestation 


à la 


Trinité, 


le Roy. 







(1) Vieillard de 78 ans, sou£frant de la goutte et d'autres infirmités. 

(2) D'après une autre liste, à ces détenus du district de Jossolin, 
il faudrait ajouter : Pierre Audran, Jeanne et Catherine Qicqual, 
Mathurine Tiieurio, Joseph le Guern et sa fille, la femme du Bot. 



252 



ESSAI SOR LE PORHOËT. 



En arrestation à Mohon^ 


DÉTENUS DU DISTRICT 


AUiot. 


DE Vannes. 


DÉTENUS DU DISTRICT 


(Envoyés le 44 Floréal, an II), 


DE PlOÊRMBL. 


du Bot de Villeneuve. 




femme du Bot de Villeneuve. 




femme le Blanc. 


(Arrêtés U S floréal an II, et 


de Robien. 


envoyée à Josselin, à cette date). 


fille Bec de Lièvre (de Bec- 




delièvre). 


Du Bois, père(l). 


femme Quelo. 


id. mère. 


une fille le Blanc. 


id. fils aîné. 


une fille le Blanc. 


id. fils cadet. 


une fille le Blanc. 


id. fille aînée. 


femme Desgré (des Grées). 


id. fille cadette. 


une fille Sénan. 


la fille Tranchant. 


une fille Sénan. 


Forcan père (de Forsanz). 


Dondel. 


Forcan mère. 


La veuve Boutoulic. 


La Haye, fille. 


une fille Boutoulic. 


Courson (de?). 


une fille Boutoulic. 


Perret. 


une fille Boutoulic. 


Chaignard. 


veuve la Bédoliaire (de la 


Keronant. 


Bedoyère) (3). 


Le Blaye. 


veuve du Coidic (du Coué- 


Theval. 


dic). 


Ducbene. 


veuve Lesquein (de Les- 


Billy, père. 


quen). 


Biliy, mère. 


veuve Kermoisan (de Ker- 


Au total 19 (2) 


moisan). 


fille Kermoisan — sa sœur 




restée malade à Vannes. 



(1) On trouve dubois et du Bois. 

(2) Sur une autre liste figurent : Furard, La Jossin. 

(3) Elle signe : Francheville la Bedoyère. 



PIÈGES JUSTIFICATIVES. 



253 



Jeanne Lescly. 

une fille Lescly. 

une fille Lescly. 

une fille Lescly. 

Desgré de Loup (des Grées 

du Loup). 
fille Desgré de Loup, 
fille Desgré de Loup — une 

autre sœur restée malade 

à Vannes . 
femme Boquizel (ailleurs 

Bocozel) (1). 
Duplesi Grénédan (du Pies- 
sis de Grénédan). 
femme Grénédan. 
femme Gouyon (de Gouyon 

deCoipel)(2). 
une fille Gouyon, 
une fille Gouyon. 
une fille Gouyon. 
femme Kerdeval (ailleurs 

Kerdiaval). 



Malville. 

femme Dupourpris (du Poul- 
pry). 

Jorgelin. 

fille d*Eli88e (ailleurs De- 
lys). 

femme Charpentier. 

Charpentier Lesnevau (ail- 
leurs, Lesnevaux). 

Charpentier Eerhonic (ail- 
leurs, Queronic). 

femme Forçan (de Forsanz). 

femme du Breton. 

femme Malville. 

fille du Bot. 

fille Bolcouart. 

fille de Forges (des Forges 
de la Gaudinais) . 

une fille Grénédan (du P. de 
Grénédan). 

Au total 51 (3) » 



Le 26 Floréal (16 mai), c'est-à-dire quinze jours après la 
première fournée, Prieur de la Marne fit de nouveau partir 
pour JossellU) transformé en dépôt central, un convoi, 
fort cette fois de 41 prêtres et 54 autres prisonniers. Les 
noms suivent : 



Prétrbs. 

« Charles Thomas. 
•Louis Guyomard, 



Augustin Foulon. 
Jacques François le Dridon 

(ailleurs Cedridon). 
Guillaume Godart. 



(1) Elle signe : le Gouvello Bocozet. 

(2) Elle signe : Foacher Gouyon* 

(3) Ailleurs sur cette même liste on trouve encore : deux filles du 
Couêdic. 



254 



ESSAI SUR LE PORHOËT. 



Jean le Dagot(a. Gedagaud). 

Vincent Louis Launay. 

Magnette. 

Guyomard Lazariste. 

Jean le Eaire (ail. le Glaire). 

Froger. 

Torin. 

Faut. 

Breton. 

Guillaume. 

Darty. 

Erdeven. 

Le Joubioux. 

Jean Menée (ail. Mennec). 

Le Verger. 

Jiquello. 

Gbauvet. 

Jean. 

André Bonable. 

Tbomas. 

Pierre Dero. 

Le Maigre. 

Josepb Roland. 

Jacques Teissand (ailleurs, 

Telland). 
Micbel Robin. 
Etienne Couespel . 
Le Prince. 
Lamour. 

Jean-François Pucelle. 
Gombant. 
Ropert. 

Louis Philippe. 
Hellard. 



Maurice Robic 
Bonable. 
Guyomard Prerre. 

Autres prisonniers. 



Baudoux. 

Bosseray (ailleurs Gosseret). 

Vilandre. 

Gascouin . 

Bigarré. 

La Glosmadeux (Julie de 

Glosmadeuc). 
Rivaland. 
Guyot. 
Ledos. 
SebUot. 

femme Herbet. 
Maillard. 
Girard. 

Goysit et sa femme : 2. 
Brenugat. 

Duraquet (du Raquet). 
Couestan. 
Lantelier. 

Les trois Monnier filles : 3. 
V^o Lebard et son fils : 2. 
Eervaille (ailleurs Eenrait). 
Feruardaverat. 
femme Monnier. 
femme Ducordit. 
Y^^ la Ghasse (1) et sa fille 

(delaGbasse?) : 2. 



(1) Elle signe : Legris, V^e la Chasse. 



PIÈCES JUSTIFICATIVES. 



255 



fille du Roy. 

V^ Eermoisan et sa fîlle (de 

Eermoisan) : 2. 
fille Coquerel. 

La Borde [ailleurs Laborde). 
Robin. 
Perrière et sa sœur (de la 

Perrière ?) : 2. 
V^ Rouzic. 



Kerveno (de Kerveno). 
V^« la Rive et cinq filles (de 

la Rive ?) : 6. 
femme Bily (1) et son fils : 2. 
Oilllc, apoticaire. 
Robert, libraire, 
fille Autier. 

Paulard et sa fille (Polar) : 2. 
fille Micbel. » 



Le lecteur remarquera parmi ces victimes du terrorisme 
la proportion extraordinaire des femmes et des enfants, la 
plupart jeunes filles; les bommes trop souvent n'étaient 
que vieillards, infirmes ou malades (2). 



(1) Signé : femme de Bily. 

(2) Çà et là, au bas de protestations et au cours de rapports, on 
relève encore d'autres noms : Orieulx, Josse, Langourla aine, femme 
Couisson, Harcouet et beau-frère, Boulainvilliers, Voyer de la Salle, 
V^« ViJlegouan et 3 filles, etc. 



LES ABBAYES DU PORHOET 



17 



L*Abbaye de Lantenac. 

(La Perrière, près la Cbèie.) 



L*abbay6 de Lantenac, de TOrdre de Saint-Benoit, fut 
fondée en Fhonneur de Notre-Dame et de tous les Saints 
par Eudon II, vicomte de Porhoêt, vers Tan 1149. Nous 
avons pu retrouver à la Bibliothèque Nationale (ms. fr. 
22.319, fo 225) une copie de la charte même de cette fonda- 
tion. En voici le texte, traduit du latin : 

< Sachent tous, présents et à venir, que je, Eudon, Comte, 
ai donné et concédé en aumône pour Tamour de Dieu et 
en Fhonneur de la sainte et toujours glorieuse Vierge 
Marie, et remis pour le salut de mon âme, de celles de 
mes père et mère et de tous mes ayeux, entre les mains de 

Tabbé pour y construire une abbaye, toute ma terre 

de (Lantenac), tant en champs, qu'en bois; je lui ai 

donné en outre toute ma terre de Lodeac (Loudéac), et 
j'ai autorisé les moines habitant Tabbaye à y prendre 
dans la forêt tout le bois sec et le bois vert et Therbe dont 
ils auront besoin pour en faire du foin et pour faire paître 

le bétail, avec les pâturages de ; je leur ai donné en 

outre mon droit de past(l) à Lodeac et en outre mon 
moulin et mon pré de c Tremusson », la ferme de Judicaél 
à < Lempigne et Lecluso, » la terre de c Gorchen m, Tile de 
c Trêve », cent q'iarterons de seigle de la dîme de Menac. 
la quatrième partie d'une ferme et la moitié d'une autre 
à Eergu et enfin la moitié de la ferme pour le siège 

(1) LIb droit de pa*t ou paiason correspond k un droit de pâture. 
— VioUet, dans ses Institutions, considère le past comme un droit de 
prendre en un lieu la nourriture des chevaux et bétes de somme. 
Nous croyons au moins ici à Tacception plus générale de « parcours » 
dans la forêt. 



260 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

abbatial ; je prends Dieu a témoin, de cette donation ; en 
sont également témoins Geoffroy, évéque de Saint-Brieuc ; 
Jehan évéque de Saint-Malo ; Joston et Alain frères du 
Comte ; Alain vicomte de Montfort ; Judicael de Malestroit ; 
Alain chapelain et plusieurs autres* » 

Dans la suite, les successeurs d'Ëudon se montrèrent 
aussi prodigues envers Lantenac, qu'envers les autres 
établissements religieux de leur Comté. 

Nous ignorons pourquoi la « Gallia Christiana » ose 
avancer que Lantenac fut longtemps un humble monas- 
tère. A rencontre de ceci, qu'il nous suffise de rappeler 
refibrt que firent les Bénédictins pour introduire dans la 
vallée de Lié et lancer dans toute cette contrée deshéritée, 
la culture du lin. M. de Geslin nous apprend qu'il a trouvé 
la preuve que dès le xni' siècle, les religieux de Lantenac 
étaient parvenus dans les plaines avoisinant leur monas- 
tère et abritées de la forêt, à produire le lin que nous ne 
pouvons plus guère obtenir que sur le littoral. Même ils 
le transformaient en fil et en étoffe. Sans le secours de la 
mécanique ils obtenaient ces merveilleux tissus que notre 
industrie moderne n'a pas encore surpassés par la beauté 
et la durée. A vrai dire, ils ont été les promoteurs de cette 
industrie des toiles qui fut si longtemps florissante et 
resta la fortune de Loudéac jusqu'à la fin du xvui« siècle. 

En l'an 1565, le monastère ayant été envahi par les 
hordes armées du prince de Rohan, les moines en furent 
chassés. La Ville Audreu, précepteur du fils d'Isabeau de 
Navarre, s'y installa et après lui le Comte de la Magnanne. 
L'intransigeance politique et religieuse entraîna ces deux 
hommes aux pires vexations vis-à-vis des populations. 
Celles-ci restèrent inébranlables et eussent été en droit 
d'espérer la paix définitivement rétablie, après le retour 
de leurs anciens éducateurs. Il n'en fut rien, les moines 
avaient encore à essuyer un second désastre, en éprouvant 
la fureur des confédérés. 

En 1615, l'abbaye fut occupée parles Pères de la Société 
Bretonne et en 1646 par les Bénédictins de Saint-Maur. 
Le plan, que nous joignons ici et sorti des Archives Natiô* 



LES ABBAYES DU PORHOËT. 261 

nales (1) se rapporte précisément à roccupation des béné- 
dictins de Saint-Maur, puisqu'il est daté de 1659. Il nous 
révèle l'importance du couvent, et la physionomie de l'en- 
semble de l'abbaye à cette époque. Vraisemblablement 
les moines durent entreprendre d'importants travaux de 
restaurations pour réparer l'abandon dont le monastère 
avait eu à souffrir ; ils songèrent même à créer toute une 
basse-cour avec les bâtiments nécesaires à une exploitation 
agricole. 

Un autre plan représentant le second étage nous indique 
qu'au-dessus des salles A et B se trouvaient un fruitier, 
une bibliothèque, un chaufloir. Les dortoirs étaient situés 
au-dessus du réfectoire et des cuisines ; en F était l'infir- 
merie et au-dessus des salles des étrangers, les chambres 
réservées aux mêmes. 

Une galerie surmontait le cloître. 

Tout ceci o£fi-ait un ensemble très complet. 

Huit moines habitaient les bâtiments conventuels Tannée 
1680 ; mais dans la suite les revenus de l'abbaye furent 
tellement diminués qu'ils pouvaient à peine suffire à la 
subsistance de trois moines ; aussi ces derniers furent- ils 
transférés dans un autre couvent du même ordre par édit 
de 1767. Toutefois cet édit resta lettre morte, si bien qu'en 
1790, il y avait encore deux moines habitant Lantenac (2). 

Il ne nous a pas été possible d'établir la liste complète 
des abbés de Lantenac, cependant voici un essai que nous 
avons tenté avec l'aide de la Gallia et du manuscrit 22-319 : 

Robertf apparaît en l'an 1248 au chapitre général tenu à 
Hambye. 



(1) Gôtes-du-Nord. N. III, n» 2. 

(2) De TAbbaye, il ne reste plus rien aujourd'hui (sinon : un four, 
des écuries et des clôtures qui permettent de reconstituer le plan). 
L'Église et la partie ouest du couvent subsistaient encore il y a 
quelques années ; le propriétaire actuel, après avoir sacrifié ces der- 
niers souvenirs, édifia une petite chapelle destinée à abriter les 
vieux saints protecteurs de Lantenac. 



262 



ESSAI SUR LE PORHOËT. 



Jean I^ conclul un accord avec Alain de Rohan au i 
de différents revenus, le samedi avant les Gendres 1271. 

Guillaume I^ Guinon, mentionné le 15 mars 1^ 
Vivait encore le 27 octobre 1380. 

Pierre P' rend aveu au Vt« de Rohan en 1394, 
et 1412. 

Pierre II conclut une transaction avec Alain de Rôti 
le 46 octobre 1446. 

Geoffroy Guitton, mentionné en 1469. Assista en 1476 i 
synode de Redon, dans lequel furent axés les honorai] 
des recteurs de campagne. Mourut Tannée 1495. 

Jean II Combe, cité dans un ancien catalogue en 149 
(Selon d'autres auteurs, Tabbé aurait été à cette époqii 
Pierre de Loyre ou de la Grée.) 

Alain de Lescouet rend aveu en 1508. Disputa Tabbayel 
Yvon de Toumenlly et obtint le 21 sept. 1S21 des letti 
confirmant son élection. 

En 1529, Yvon de Toumenlly obtient une sentence el{ 
revendique Tabbaye pour son compte. Il n*est pas probable 
qu*il l'obtint, car Alain conserva jusqu'à sa mort le \ 
d'Abbé et peut par conséquent être considéré comme le j 
dernier régulier. 

Michel de Coëtlogon, premier abbé commendataire, 1534. | 

César de la Barre, en Tan 1540. 

Jean III le Veneur, cardinal, évéque de Lisieux, 
mentionné en 1542. Mort en 1543. 

Louis I^ de Botderu, en 1547. 

Renaud Soudan, qui prête serment de fidélité au roi 
Tannée 1558. 

Jean IV Fabri, 1561. Chassé en 1565 par la Ville 
Audren qui lui substitue son fils, Claude de Kerangor. 
Bientôt après, les moines eux-mêmes sont obligés de fuir. 



rs. 



2.C.1 



LES ABBATES DU PORHOËT. 263 

Hivoir de Kerdesiguenf mentionné le 16 avril 1571. 

Antoine Charbonnier, en 1575. 

Matbwrin Denecbaux, mentionné en 1582 et 1600. 
De 1601 à 1610, Tadministration de Tabbaye est confiée 
à des procureurs. 

Guillaume II Dupont (ou du Pont), ea 1612. 

Etienne Dupont, chapelain de la Louviére et proto- 
notaire apostolique, succéda à son oncle Tannée 1641. 
On le trouve à l'assemblée de Saint-Brieuc en 1677. 

Mollis II Fernon, maître de chapelle du roi, succéda à 
Etienne. Se maria en 1706. 

Augustin Giry de Monteliaud, nommé le l^^" novemb. 
1706. Mourut en février 1730. 

Louis III Alexandre Marin de Kerbringal, chanoine 
de Quimper. Créé abbé sept. 1731. Tint la crosse pen- 
dant cinquante- cinq ans. 

N, de Barrai, archidiacre de Troyes, 1786. Était encore 
abbé de Lantenac en 1790. 



L'Abbaye de Saint-Jean-des-PréB-les-Josselin. 



Le Père des Hayes, qui a dressé le catalogue des abbés 
de Sainl-Jean-des-Prés, d'après les mémoires du P. Le 
Large, commence par ces mots (i) : « Albert, évèque de 
Saiot-Malo, qui autorisa la fondation de Beaulieu et qui 
donna quelques églises à cette abbaye^ ne fut pas moins 
zélé pour Tordre canonique établi dans Tabbaye de 
Josselin ou de Saint-Jean-des-Prés près Josselin, au dio- 
cèse de Saint-Malo. Si nous avions pu recouvrer les pre- 
miers titres de cette maison, nous rendrions un compte 
plus exact des motifs de la fondation de cette abbaye, de 
la qualité de ses différents fondateurs et de ses anciens 
abbés. Mais il faut nous retrancher aux anciens mémoires 
et la tradition de Josselin qui disent que Henri II roy 
d'Angleterre, restaurateur du prieuré de Locmaria, avait 
fondé ou rétabli l'abbaye de Saint-Jean-des-Prés située au- 
dessous du château de Josselin. » 

Tout porte à croire en effet que Saint-Jean-des-Prés date 
du xii* siècle. Mais arrèlons-nous sur cette pensée 
qu'Henri liait rétabli seulement l'abbaye, un seigneur de 
Porhoôt en ayant jeté le preihier les fondements. S'il est 
constant qu'en 1159, 1163 et 1172 il y avait des abbés por- 
tant le nom d' c abbé de Josselin » et qu^après 1173, ce 
titre est remplacé par celui d' « abbé de Saint-Jean-des- 
Prés » il ne paraît pas invraisemblable certainement, 
qu^après les dévastations de Porhoët et les ruines succes- 
sives de Josselin (1168-1173), Henri II d'Angleterre ait 
voulu réparer le tort qu'il avait causé aux églises du 
Comté et qu'il ait ainsi fait renaître l'abbaye de ses 
cendres, c Ce prince, dit le P. des Hayes, avait une dévo- 

(1) Biblioth. Nat. ms. fr. 22-358 fo- 55-58. 



LES ABBAYES OU PORHOËT. 265 

tion particulière à saint Jean rÉvangelisle et estimait 
beaucoup Tordre canonique ; c'est pour ces deux motifs 
quMl fit dédier sous le titre de l'apôtre saint Jean, les 
enlises de Melinais en Anjou, de Thôpital d'Angers, de 
rii^pital de Gaen et de Saint-Jean-des-Prés, toutes de Tor- 
dre des chanoines réguliers. » 

A vrai dire Tobscurité s'étend sur Saint-Jean-des Prés 
jusqu'au commencement du xiii« siècle. On y trouve alors 
des chanoines de Tordre de Saint- Augustin. Une dizaine 
de paroisses en dépendaient, malgré cela ce fut toujours 
un très petit bénéfice. Le faible revenu explique le petit 
nombre des chanoines qui résidèrent; Ogée n'en mentionne 
que deux en 1779. 

En juillet 1663, Tabbaye avait reçu la réforme Génové- 
faine. 

Voici la liste des Abbés d'après l'auteur que nous avons 
déjà cité, elle correspond à peu de chose près à celle que 
présente la Gallia. 

Jud... {ïcaël)f abbé du château de Josselin, vivait 
en 1159. Il était un des huit abbés qui assistèrent de leur 
conseil, les évèques Jean de la Grille et Guillaume de 
Passavan, lorsqu'ils jugèrent comme délégués du Pape 
Adrien IV, la contestation de Tévèque de Nantes et des 
moines de Tournus. 

Guy, abbé du château de Josselin. Fut témoin d'une 
donation faite en 1163, à Tabbaye de Montfort, par Pierre de 
Lohéac, et d'une autre faite au monastère de la Trinité de 
Gombourg, par Albert, évèque de Saint-Malo. 

A , mentionné dans une charte de Paimpont, datée 

de 1199 et qualifié abbé de Saint-Jean-des-Prés. 
Lacune importante. 

NioolaSf abbé de Saint-Jean-des-Prés, qui donna son 
adhésion à la sentence portée en 1303 contre Benoît VIII. 
D'après un ancien nécrologe de Montfort, il mourut le 
17 janvier. 



266 ESSAI SUR LB PORHOËT. 

Mathieu, abbé de Saint-Jean-des-Prés, mort en 1354. 

Pierre Debart (ou Le Bert), abbé de Saint-Jean-des- 
Prés; qualifié ainsi dans an ancien acte de cette abbaye, 
dont la date ne paraît plus. Mentionné également dans des 
lettres dlnnocent VI (2 mai 1354.) 

Bobert L'Escuyer, abbé de Saint^Jean-des-Prés, en Tan 
1400. Fit bâtir le cloître en 1405 et soutint plusieurs pro- 
cès pour la défense des droits de son abbaye. Il vivait en- 
core en 1447. 

Guy de Coëtlogon, abbé en Tannée 1450 suivant plu- 
sieurs acles et un aveu daté de cette année. Il fut pourvu 
de l'abbaye de Paimpont, après la mort d*01ivier Guitro, 
survenue le 25 janvier 1452. Guy de Goetlogon mourut à 
Paimpont en 1472. 

Jean de la Bouëre, abbé régulier. Succéda à Guy de 
Goetlogon en 1452. Il fut grand vicaire de Jean TÉpervier, 
évéque de Saint-Malo, et vivait encore en 1471. 

Bobert de Brade, succéda à Jean de la Bourre, suivant 
une charte non datée. 

Pierre Bihoulier, abbé de Saint-Jean de 1476 à 1492. 

Mathurin de Lorme (ou Delorme), chanoine et pro- 
cureur de Saint-Jean, fut élu abbé par ses confrères, après 
la mort de Pierre Bihoulier. Mais le Pape Alexandre VI, 
prétendant que la nomination lui appartenait, y nomma 
Jean Bohier, natif d* Auvergne. Le procès des deux con- 
tendants fut porté à Rome et Télection des chanoines de 
Saint-Jean ne fut pas confirmée. Jean Bohier, qui était 
encore pourvu de Tabbaye de Saint-Gildas de Ruys, 
céda ses droits sur Tabbaye de Saint-Jean à Gilles de 
Goetlogon, qui les fit valoir, comme on va le voir. 

Gilles de Coëtlogon, chanoine régulier de Montfort et 
licencié en droit canon, fut pourvu en Gour de Rome de 
rabbaye de Saint-Jean, le 9 novembre 1495. Les bulles 
d'Alexandre VI lui confèrent tous les droits d'un abbé ré* 
gulier, mais ne lui donnent cependant Tabbaye qu'en 



LES ABBAYES DU PORHOËT. 267 

commende.Il reçut du Pape en 1501 le privilège personnel 
de bénir les églises, de conférer les ordres mineurs, et 
d*officier avec la mitre et les ornements pontificaux. Gilles 
de Coetlogon mourut en 1506. 
Désormais tous les abbés furent commendataires. 

GnilltLume Grimaud, d^une famille ancienne et dis- 
tinguée en Bretagne, obtint Tabbaye en conmiende Tan 
1507. Jacques, vicomte de Bohan, le désigna en 1526 pour 
être un de ses exécuteurs testamentaires. Le pape Clé- 
ment Vil, Fan 1532, lui accorda les bulles de coadjuteur 
en faveur de son neveu, Louis Grimaud. 

Louis Grimaud, neveu du précédent, prit possession 
de Tabbaye de Saint-Jean-des-Prés l'an 1536. 

Louis de Pommeleuc, fut abbé commendataire de 
Saint-Jean en 1540 et 1541, comme nous rapprennent les 
statuts de Guillaume Le Gouverneur, évéqrie de Saint-Malo. 
Il signait en ces termes : Louis, commendataire. 

Antoine de Sénecterre^ sorti d*une illustre maison 
d'Auvergne, était abbé de Saint-Jean en 1545. Il nomma 
pour son grand vicaire Sébastien Thomé, trésorier de 
l'église-cathédrale de Rennes et abbé de Rillé. M. de Sé- 
necterre était en même temps abbé d'Aurillac et de 
Saint-Théoffroy au diocèse du Puy-en-Velay. Il devint 
évéque du Puy. 

Jean de Sénecterre obtint l'abbaye de Saint-Jean par 
la cession que lui en fit son frère. Il prêta serment de fi- 
délité au roi en 1561. 

Martin de Beaune succéda à Jean de Sénecterre et 
prit pour grand vicaire Pierre FouUé de Marzy. Cet abbé 
était de la maison de Semblançay et frère de Renaud de 
Beaune, archevêque de Bourges et de Sens, grand aumô- 
nier de France. Il eut la jouissance de cinq abbayes dont 
il se démit peu à peu. Saint-Jean, lors de sa mort, était 
occupé par Pierre Foullé. 

Pierre Foullé de Marsy aumônier ordinaire de la 
Reine, fut abbé de Saint-Jean en 4567. On le voit avec ce 



268 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

titre aux États de Bretagne de 1577, 1580 et 1588. Il mourut 
à Paris en 1594 et fut enterré dans Téglise Saint-Séverin. 

Samuel Cyrano fut nommé par la Reine à Tabbaye de 
Saint-Jean ; mais il se démit en faveur de son successeur* 

Pierre Pigray était de Paris et agent du Clergé. Il 
prit possession de Tabbaye en 1595, assista aux États tenus 
à Vannes Tan 1603 et à ceux de Rennes en 1608. Pierre 
Pigray mourut dans son abbaye et y fut enlerré en 1619. 

Claude Blondeau^ agent du Clergé et aumônier ordi- 
naire du Roi, eut la jouissance de Sainl*Jean, de 1620 
à 1643. II était encore abbé d^Oigny et doyen de Gage au 
diocèse de Troyes. 

Octave de Blaacbefort, archidiacre de Sens, reçut l'éco- 
nomat de Tabbaye de Saint-Jean en Tan 1643, dans l'espé- 
rance d'avoir ses bulles de Rome. Il les obtint en 1644, 
mais céda de bonne heure ses droits à son successeur. 

Sébastien de Quémadeuc prit possession de Tabbaye 
de Saint-Jean en 1650. Il en a joui 52 ans et y éiablit, 
en 1663, au mois de juillet, les chanoines réguliers de 
Sainte -Geneviève, qui depuis leur entrée réparèrent 
réglise, rétablirent tous les lieux réguliers et mirent 
Tabbaye en étal d'y pouvoir entretenir huit religieux. Cet 
abbé, depuis évèque de Saint-Malo, mourut à Beignon 
le 4 mars 1702. 

Jean^Ernestf comte de Louveinstein, prince souverain 
de Ghassepierre, chanoine capitulaire de Téglise de Stras- 
bourg et de Cologne, neveu du cardinal de Furstemberg, 
fut nommé par le Roy le 16 avril 1702 et prit possession le 
28 novembre 1703. Il mourut en 1731, après avoir été évo- 
que de Tournai (1713). 

René de Brissac, fils de messire Pierre de Brissac, 
premier président du Parlement de Bretagne, fut nommé 
par le Roi à l'abbaye de Saint-Jean-des-Prés au mois de 
novembre. Tan 1731. Il la posséda jusqu'en 1784. 

Esprit Jacquelot de Boisrouvray, trésorier de l'église 
de Vannes, fut dépossédé en 1790. 



L'Abbaye du Mont-Cassin, près Josselin. 



Noas ne citerons que pour mémoire 1* Abbaye des Béné- 
dictines du Mont-Gassin, sur la fondation de laquelle nous 
nous sommes suffisamment étendu dans le cours de notre 
essai sur le Porhoët. Son régne fut de courte durée 
puisque Térection en abbaye date de 1682 et elle retomba 
en prieuré Tannée 1739. Mgr Sébastien du Guémadeuc, 
qui reçut du roi la nomination des deux premières 
abbesses, choisit d'abord sa sœur Suzanne, la fondatrice 
de la. maison et, pour lui succéder, Ëléonore, nièce de 
celle-ci. 

La liste ici sera plus facile à compléter que pour les 
deux autres abbayes. 

ABBESSES 

Suxanne du Guémadeuc, 1682-1711. 
Éléonore du GuéwadeuCf 1711-1716. 
Sébastienne de Faramus, 1716-1739. 



PRIEURES 

Anne Hervieu, 1739-1779. 
... de Vaucouleurs, 1779-1785. 
Angélique Honeix, 1785-1790. 



NOTES COMPLÉMENTAIRES 



Notes complémentaires concernant 

la ville de Josselin et les seigneurs de Porhoët 

tirées de la Rétormation du domaine de 1679. 

(Archiv. Nai. - Ptoamwi, Vol. VII (P. 1685).) 



Au chapitre de Josselin, après avoir parlé du château 
« avec ses tours, parapets, mâchicoulis, fossés, grand et 
petit ponts levis et dormants » dans lequel la châtelaine 
d'alors, Princesse Marguerite, duchesse de Rohan, prin- 
cesse de Léon, comtesse de Porhoët, marquise de Blain(l), 
etc., et ses prédécesseurs « ont de tous temps immémorial 
mis et établi capitaine, concierge et portier >, le Com- 
missaire royal entre dans renoncé des églises, chapelles, 
prieurés de la ville et dans la description quelque peu 
détaillée de Notre-Dame. 

« Dans laquelle église de Notre-Dame et au cbœur 
d'icelle il y a un tombeau de marbre blanc et noir élevé 
de trois pieds, sur lequel sont embosséés les représenta- 
tions de feu Mgr Ollivier de Glisson et de défunte 
Mn>« Béairix de Laval, son épouse (2) ; dans lequel cbœur 
il y a, du côté de TEvangile, un banc accoudeur, armorié 
d*un écusson couronné, mi-partie des armes de Rohan et 
de la Hunaudaie. 

Et au côté dudit chœur, vers le Nord, est une chapelle 
de Sainte-Catherine dans laquelle et en partie sous la 
voûte, plus haute proche la sacristie, est un charnier en 
terre auquel se voit quelques corps des anciens seigneurs 
comtes dudit Porhoôt ou d'autres de leur maison. 

(1) La veuve d^Henry Chabot, duc de Rohan. 

(2) Le tombeau que nous voyons maintenant dans la chapelle S^'- 
Marguerite était effectivement à cette époque en face du maltre- 
autel, à remplacement des dalles qu'on y voit aujourd'hui. 

13 



Notes complémentaires concernant 

U Ville de JosseUn et les seigneurs de Porhoét 

tirées de la Réformation du domaine de 1679. 

(Archlv.N... -/>«<-«-'• vol. VII (>>. !«»)•) 



AU Chapitre de JosseUn. après avoir parlé du château 
il is tours, parapeu. mâchicoulis, fossés, grand et 
* Tnoals evi? et dormants, dans lequel la châtelaine 
ÏÏ rp'i-- Marguerite, duchesse de Rohan, prin- 
cesse de Léon, comtesse dePorhoët. marquise de Blam(.), 
eic et ses prédécesseurs * ont de tous temps immémorial 
mis et établi capitaine, concierge et portier », le Com- 
missaire royal entre dans l'énoncé des églises, chapelteK. 
prieurés de la ville et dans la description quelque jm 
détaillée de Notre-Dame. 

< Dans laquelle église de Notre-Dame et an c 
d'icelle il y a un tombeau de marbre blanc ei wu- 
de trois pieds, sur lequel sont embosséef te jrarïsi 
tiens de feu Mgr Ollivier de OisMai «: « 
11"»» Béairix de Laval, son épouse (2 : dmf »-« 
il y a, du côté de l'Evangile, un banc ancfiia^ 
d'un écusson couronné, mi-partie d«s ta^ 
de la Hunaudaie. 

El au côté dudit choeur, t«s '* %r-T ^ 
de Salnle-i::atberine daB> lafode a 
voûte, plus haute pracbeJfti ■'•- 
terre auquel se «ft fwii 
comtes dudit Porbeitm 





274 E6SAI SUR LE PORHOËT. 

Et du côté da midi est une autre chapelle nommée Sainte- 
Marguerite, dauB laquelle autrefois Ton inhumait les offî- 
eiers et domestiques des anciens seigneurs comtes dudit 
Porhoët. » 

Pour séparer cette chapelle du chœur « il y a une basse 
voûte dans Tépaisseur de la muraille avec une grande 
grille de fer du côté de la chapelle Sainte-lCarRuerite et 
du côté du chœur. » On reconnaît aisément là Toratoire 
des seigneurs suzerains. 

« Et dans les principales vitres dudit chœur, des cha- 
pelles Sainte-Catherine, Sainte-Maiguerite et Saint-Jean 
(fonts baptismaux), sont les armes de la maison de Rohan 
avec les alliances d*hermines de Bretagne et d'un lioa 
d*argent, couronné, armé et lampassé d'or. . . (i). » 

A l'extérieur de Téglise, gravés dans la pierre, outre les 
armoiries citées plus haut, on trouvait aussi des écussons 
« mi-parties de trois chabots de gueule en champ d'or et de 
neuf macles d'or en champ de gueule et des armes de Bre- 
tagne en alliance >. Les armoiries des Rohan, sous une 
forme ou sous une autre, figuraient du reste sur tous les 
autres sanctuaires de la ville. Saint-Laurent, la chapelle 
des Caquins, elle-même, en était ornée. 

C'est à l'ezirémité du faubourg Sainte-Croix que se 
trouvait le quartier des Caquins^ qu'on appelait eucore 
Cacouœ ou Caqueux* 

« Ceux-ci, descendants des lépreux ou des ladres du 
moyen âge, inspiraient au reste des habitants une répul- 
sion dont les eflets subsistèrent bien au delà de la Révo- 
lution et qui se traduisaient par certaines vexations contre 
lesquelles les arrêts du Parlement de Bretagne et les 
remontrances de. la partie éclairée de la population cher- 
chait en vain à lutter (2) j» Toujours groupés ensemble 
dans des villages situés à quelque distance des bourgs ou 
villes, dont les uns ont conservé le nom primitif de Mala- 
drerie, ils étaient relégués et mis pour ainsi dire hors la 

(1) On se souvient que Clisson portait un lion d'argent, 

(2) ROSENSWKIG. 



NOTES COMPLÉMENTAIRES. 275 

loi commune. Ils ne pouvaient contracter mariage qu'entre 
eux ; leurs enfants, sur les registres paroissiaux, étaient 
confondus avec les bâtards. A Téglise, obligation leur était 
imposée de se tenir dans la partie inférieure ou même 
dans un bâtiment contigu ayant son enirée spéciale (la 
chapelle Saint-Gobrient, en SaintrServan, nous en ofire 
un exemple), de ne se présenter que les derniers pour 
baiser la paix et les reliques, de recevoir dans la main le 
pain béni qu'ils ne pouvaient prendre eux-mêmes. . . etc. 
Leur occupation particulière était la fabrication des cordes 
et cordages, si bien qu'au xviii« siècle on ne les désignait 
plus guère que sous le nom de cordiers. 

« Les Caquins, dit le commissaire de 1679, contre le 
droit de foire dont ils jouissent, sont tenus de fournir les 
cordages nécessaires pour lier et exécuter les condamnés 
à mort, au fouet ou autres peines afïlictives et corporelles 
qui sont exécutées dans le Comté, à la poursuite du pro- 
cureur fiscal et outre de fournir licols et liens pour les 
chenaux de nos Seigneurs les Comtes. » 

La foire dont il est question ici se tenait le 10 août, près 
du quartier Saint-Laurent. Du reste voici c les foires 
dépendantes dudit comté de Porhoet, lesquelles et autres 
se tiennent, tant en ladite ville que faubourgs d'icelle et 
autres lieux dans ledit comté, par an, où toutes espèces 
de bestiaux comme chevaux, bœufs, vaches, porcs, brebis, 
moulons et autres s'exposant et vendant en un lieu à ce 
destiné. » 

Pour les foires de la ville, qui suivent, et dont la jouis- 
sance était réservée au titulaire du Porhoêt, ce lieu s'appe- 
lait « le fresche de Saini-Martin », dans le faubourg de ce 
fkom. 

« 1® La Grande fove^ autrement dit la première foire • 
Le 6 knai. — On rappelle aussi la foire franche parce qu'elle 
est exempte de tous droits. 

29 La foire fleurie. Le mardi suivant le dimanche de la 
'Quasimodo. 

3^^ La foire de la Guehenaie, 1 4 septembre. 



276 ESSA.I SUR LE PORHOËT. 

Foires données aux prieurs des faubourgs : 

!• Foire de Sainte-Croix^ au prieur de Sainte-Croix, le 
3 mai, délaissée depuis 50 ans. 

2^ Foire SairU^Jacques, au prieur au chapelain de Saint- 
Jacques, le 25 juillet. 

3» Foire de Saint- [Murent y appartenant aux caquins aux 
malades de la maladrerie et hospitalisés de Saint-Laurent, 
le iO août. 

4<> Foire de la décollation de Saint-Jean^Baptisle à l'abbé 
de Saint-Jean-des-Prés, 29 août. 

5» Foire de Saint Nicolas, au prieur de Saint-Nicolas, 
le 6 décembre. 

Autres foires, hors la ville et les faubourgs : 

!• La foire de Saint-Maudé^ au village de ce nom 
(en La Croix Helléan], le 19 mai. 

2« La foire du Mont-Guehenno, en ce lieu, le 29 septembre, 
appelée aussi la foire de Saint-Michel (1). 

3» La seconde foire de Saint-Maudé^ le 18 novembre. » 

Comme actuellement, les marchés avaient lieu tous 
les samedis. 

Le droit d'étalage et de mesurage sur les marchandises 
appartenait au seigneur; comme également le droit de 
bouteillage, c'est-à-dire, la retenue d*une pinte sur chaque 
charretée de vin ou boisson quelconque amenée en ville 
pour être vendue. 

Dans cet ordre d'idées citons encore quelques servitudes 
et obéissances dues aux comtes de Porho^t, par les 
habitants de Josselin ou des environs. 

Les habitants de Saint-Nicolas étaient obligés de 
c porter leurs grains à moudre et leurs draps à fouler au 
moulin Beaufort, dessous le château, et de payer le droit de 
mouture et le foulage à la coutume, à cause et parceque 
les prieurs n'avaient point droit de bâtir moulins. » 

(1) Cette foire existe encore aujourd'hui et est une des plus impor- 
tantes de la contrée. 



NOTES COMPLÉMENTAIRES. 277 

Il y avait aussi la servitude du four, qui concernait la 
Tille entière : c tous les hommes et vassaux en proche fief 
dudit Porhoët, étant en la ville et faubourgs sont tenus 
de porter ou faire porter leurs pastes de seigle et froment 
à cuire et d'en payer pour devoir de cuisson deux sols 
loorDois par boisseau de seigle et quatre sols tournois 
par boisseau de froment en petit pain. » 

Comine autre coutume curieuse, les habitants de Glac, 
Haut et Bas (1), lorsque les seigneurs allaient de Josselin 
à BlaiD, ou inversement, étaient chargés du transport de 
leurs bagages durant le trajet Josselin-Redon; ils devaient 
aussi c aider a prendre les loups chevaux de haras et 
autres bestes en la forêt de la Nouée (2) r> lorsquUls en 
étaient avertis. Ceux de Lanouée, eux étaient tenus à la 
fourniture du bois de chauffage pour les comtes et les 
capitaines du château. 

Pour être exact, ajoutons que les paroisses ainsi grevées, 
bénéficiaient alors d'une réduction de la taille qu'elles 
avaient à payer annuellement. 

(1) Paroisses de Guillac, Helléan, La Croix Helléan. 

\2) Ce texte nous apprend qa*à Lanouée (comme dans beaucoup 
d*autres forâts à cette époque) les seigneurs de Porhoët faisaient 
Télevage du cheval, abandonnant un certain nombre de ces animaux 
à eux-mêmes, leur recommandant de croître et de se multiplier. 
Si Ton avait besoin de ces chevaux, pour un service ou pour un autre, 
il fallait naturellement organiser une sorte de battue. 



LA CARTE DU PORHOÉT 



Nous avons établi cette carte pour permettre 
d'embrasser d'un coup d'œil, toutes les phases par 
lesquelles a passé le Porhoôt. Tandis que nous 
n'avons fait qu'indiquer d'un trait rapide les diffé- 
rents démembrements qui morcelèrent ce grand 
territoire, nous nous sommes plus particulièrement 
arrêtés au comté, tel qu'il fut après la généreuse 
donation du prince Geoffroy à son frère (1120). 

Par un effet tout naturel, petit à petit, les habir- 
tations éparses se groupèrent, les paroisses se for- 
mèrent ; l'autorité ecclésiastique les réunit en 
doyennés, l'autorité seigneuriale en châtellenies. Le 
Porhoêt forma deux châtellenies : la Chèze et 
Josselin, et subsista ainsi jusqu'à l'érection de la 
vicomte de Rohan en duché. 

C'est un aveu de 1471, dont l'original existe à 
Nantes, aux archives de l'ancienne chambre des 
comptes de Bretagne, qui, le premier, nous révèle 
cette subdivision en deux membres principaux. 



280 ESSAI SUR LE PORHOËT. 

L'acte est d'autant plus intéressant qu'il donne les 
paroisses de chacune des chAtellenies. C'est sur lui, 
et sur les déclarations qui ont servi à la réformation 
du domaine en 1679, que nous avons tablé, pour 
dresser notre carte. Les paroisses à cet intervalle 
de deux siècles, sont les mêmes, et le nombre n'en 
diffère pas. 

La chàtellenie de la Ghèze comportait 21 paroisses 
ou trêves ; toutes faisant partie de Tévêché de 
Saint-Brieuc : 

Usel. Cadillac. 

Saint-Hervé. Saint-Bamabé. 

Grâce. La Ghèze. 

Saint-Tbelo. La Perrière. 

Trevé. Plumieux. 

La Motte. La Trinité. 
Saint-Sauveur Le Haut. Saint-Ëtienne. 

La Preneseaye. Saint Ifaudan. 

Lanrenan. Saint- Samson. 

Plemet. Brehan-Loudéac. 
Loudéac. 

Quant à la chàtellenie de Josselin, elle était ainsi 
composée. 
Trois paroisses de Tévêché de Saint-Brieuc : 

Langourla, Saint-Vran, MérUlac. 

Plus, dans le même évécbé, toute la seigneurie de 
Bodegat avec ses dépendances en Plumieux (La Yille- 
Badio, la Barre, Renefort, avec baillages s'étendaot à 



LA CARTE DU PORHOËT. 281 

difTérents villages), en la Chéze et la Trinité. Plus égale- 
ment, la terre de la Ville Jegu, en Plumieux. 

Vingt paroisses ou trêves de Tévêché de Saint- 
Malo: 

Merdrignac. La Orée-Saint-Laurent. 

Gomené. Loyat et Grourhel. 

Brignac. Gampénéac. 

Menéac et Evriguet. Helléan. 

Gnilllers. La Croix Helléan. 

Mohon. Josselin (3 paroisses). 
Lanouée et Pommeleuc. GuiUac et Montertelot. 

Seize paroisses ou trêves de Tévêché de Vannes. 
Cette portion prenait nom de fief de Quemenet, 
autrement d'Outre Feau : 

Sainte-Croix de Josselin. 

Ghiégon avec Tregranteur et Coët-Bugat. 

Saint-Servan. 

Qnily. 

Gruguel. 

Ghiehenno avec La Chapelle es Briéres. 

Billio. 

Saint- Jean Brevelay, toute la partie a qui est deçà la 
rivière la Claie vers ledit bourg » (entre autres les fiefs de 
Brenelo, du Poulduc, de Eerangat, de la Forest) (1). 

Plmneleo et Saint-Aubin. 

Le Roc et Lixio, dites dans le terrier de 1679, fillettes 
ou trêves de Serent. 

Serent était tributaire du Porhoôt, pour toute la sei- 
gneurie de la Chapelle qui s'étendait même dans Caro et 
Bohal(2). 

(1) Le reste de Saint-Jean firevelay était de la vicomte de Rohan. 

(2) La paroisse de Serent était de Malestroit. 



^ 



ture 



282 ESSAI SUR (.B PORHOËT. 

Lantillac. ~ La seigneurie de Laotillac, comme c 
Tavons déjà vu, aussi ancienne qu'importante, s*éten 
hors des limites de la paroisse de ce nom. Tout ce{ 
dépendait d'elle, en Reguiny, Radenac et Moréac, rele 
naturellement du Porhoët. 

Du reste, une notable partie de Reguiny était c dani 
bornes et estendue dudit comté > : le fief même et roU n)^ 
Reguiny s'étendant aux maisons nobles de Pornan 
Goeldrigan, du Rogouet; la seigneurie du Resto et ce 
en a été détaché; le fief de Briend Maillard. 

Quand la chfttellenie de la Ghëze fut détachéi 
1603, elle passa à la vicomte voisine, avec l'ap 
de toutes paroisses que nous avons vues ; il ne n 
dès lors que le territoire de Josselin, nord et 
de rOust, pour constituer l'élément propre du coi 



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TABLE DES MATIERES 



Paok« 
Atant-Propos 1 



CHAPITRE PREMIER 

I^es Origines. — Le Pagus trans sylvam. — Le Poutrocouët 
(ix« et z« siècles). — Porhoët, juveignerie de Bretagne. — 
Fondation de Josselin. — Les premiers Seigneurs. De 
Guéthenoc à Eudon II (1008-1142) 8 



CHAPITRE II 

I^a ville de Josselin au xii* siècle. — Le Porhoët et son démem- 
brement, la vicomte de Rohan. — Eudon II et la guerre 
de succession. Son fils Eudon III (1142-1281) 27 



CHAPITRE III 

Le Porhoët tombe en quenouille. — Nouvelle dislocation au 
commencement du xiu* siècle. — Le comté passe tour à 
tour aux maisons de Fougères, de Lusignan et de France 
(IS8d-1370). — Deuxième guerre de succession. Blois et 
Montfort. Combat des Trente (1351) 48 



CHAPITRE IV 

Clisson par voie d'échange acquiert le comté de Porhoët (1^0). 
— Alix, sa fille, apporte ce fief aux Rohan. — La famille 
de Rohan. ' — Porhoët au moyen âge. L*u8ance. Divisions 
ecclésiastiques et administratives. La Communauté de ville.. 66 



284 TABLE DBS MATIÈRES. 



CHAMTRE V 

(1407.1627) 

FACE A 

Les Rohan-Porhoët (1407-1527). — Alain Vlll. - Alain IX. — 
La Querelle de préséance. — Jean II et ses prétentions au 
d uché 114 



CHAPITRE VI 

(1527-1638) 

Les guerres de religion et la Ligue. — Formation du duché de 
Rohan. — Le comté de Porhoët réduit à la châtellenie de 
Josselin (1603). — Henri II, duc et Pair 131 



CHAPITRE VII 
(1638-1700) 

La princesse Marguerite. — Le xvii* siècle. Période de calme 
en Bretagne. — Fondations religieuses à Josselin. — Sa 
dévotion à Notre-Dame du Roncier. — Les Rohan-Chabot. 155 



CHAPITRE Vm 
(XVm* «iède) 

Organisation administrative et judiciaire. — Anciennes cou- 
tumes. — Ce qu'étaient devenus Josselin et ses prieurés. 
Piété des habiUnts. >- La fin du comté de Porho<it 161 



' 



s DE Rj 

JÉTHEf^ 

; Josselin 

SOUAILLES 

>t, ....-10^ 



iV 



évêque I 



N II, 

-Martio 

t, i092-lll6, 

te-Croix). 



11«*' 



ise. 

RNARD . 



ans (1146), 

OD, 

iion, 
42-1180. 

rtîn). 



SM OU Hervé. 



2* mariage. 



Bernard el Robert. 



i 



'*...• 



TABLE DES MATIÈRES. 285 



CHAPITEIE IX 



ÉPOQUE RÉVOLUTIONNAIRE 
(1789-1815) 



PàGfUI 



La Persécution religieuse soulève les campagnes. — L'œuvre 
de spoliation. — La chouannerie dans rancion Porhoët. — 
L'affaire de Collédo. — Josselin grenier et place d^appui. 
— L'attaque de Tinténiac. — Combat de la Vachegare. — 
Deroiers mouvements insurrectionnels. — Le chftteau 
pendant l'époque révolutionnaire. — Les Rohan perdent 
leurs biens en Bretagne 180 

Pièces justificatives 229 

Les Abbayes du Porhoët 257 

Notes complémentaires 271 

La Carte du Porhoët 279 

Gknéalogies des Comtes de Porhoët. 



Maison DE FRANCE 

Philippe LE BEL 

Confisque pour crime de félonie les biens de Guy de Lusignan. 

Après la mort de Yolande, 1314, à qui il avait laissé la jouissance du Porhoël, 

il donne l'investiture de ce comté à son fils Charles de France, 

comte de la Marche. 



Charles DE FRANCE (le Bel), 

comte de Porboët et de Fougères, 

de 1314 à 1320, date de son érection au trôoe. 

A celte époque il cède les tttrres 

de Porboët et de Fougères à sou oocle. 



Philippe DE VALOIS (Philippe VI), 
les^ donne à son fils. 



Jean DE VALOIS (Jean II le Bon), 
en 1328 en fit cession à son oocle. 



Charles DE FRANCE, 

comte d'AIeoçon. 

Reste titulaire de Porboët et Fougères 

de 1328 à 1346, 

éponse Marie d*Espaqnb. 



Charles, Philippe, Pierre, Robert, 

rcbevéque de Lyon. arcbevéque de Rouen. comte dWlençon, comte du Percbe. 

épousa 

Marie Cha maillard, 

comtesse de Beau mon t. 

Les Comtés de Fougères et Porhoët furent l'apanage des d'*ux 
aînés; ceux-ci les abandonaérent en 1361 à leurs cadets, qui en res- 
tèrent possesseurs j usqu'en 1370, date de Tacquisition par Clisson. 



Les ] 



han; 



UBRITB, 

DB ChATILLON, 

Penthièvre. ■ 



DB Blois. 



vicomte de R<j,ylj^gt 

Epoui , 
f en 



(Br. d 



Annb, 
3 Pierre DE ROHAN, 

eur de Frontenai et de Gié^ 

son cousiD, 
te de Porhoët eu 1527. 



RENÉ ler, 
le Rohan et le Porhoët, 

se Isabeau d*Albrbt (1534). 
tué à Melz, 1552. 



Marib, 

épouse Louis db Rohan 

GUBMBNÉ (IV). 



rhoët, 



RENÉ II, 
vicomte de Rohan, comte de Porhoët, 

épouse CaLherioe db Parthbnay, 

héritière de Soubise , 

t en 1586. 



HENRI II, 
duc de Rohan, comte de Porhoët, 

épouse Marguerite db Bbtuunb, 
t en 1638. 



Benjamin db Soubise . 



re flls et trois filles 
neurent en bas âge. 



Marqubritb, 
épouse Henri Chabot. 



Maik 

[.enay, ma 
30T, seign 
|pair de 1 

Loi 

Duc de Rolii 
É 
Sps t 
Louis XIV, 
dé 



mberghen. 



Charlottb. 



cinq autres filles 

religieuses 

(en tout onze enfaoLs). 



Comte de ( 

Hérite 

et reçoit 1 



i 

vuste DE 

'1761, f en 
JO à 1800, 
. I premier ce 
KVIII. ^ 

lONTMORBNCY 



rernand 

Premier d 
tur du duc 
P camp, 182; 
tle Roban (1 

• DR GONTAUT 



RLES-GUY-Fl 

omte de Cbi 



faots. 



RENNES 

IMPRIMERIE BRETSTÉE FRANCIS SIMON 



— Ghrestomathie bretonne. Paris, i890, gr. io-S» f O rr. 

— Lezicoo Cornu- Britannicum. Br. ia-S» t fr. 

B Er.'vault : Petite grammaire bretonne avec des notiooi sur Thisloire 

de la langue H sur la verRiflcation. In-16 cart t fr. 

— Notes d'étymologie bretonne. S br. \;r. in-S» S fr. 

— Etudes d'étymologie bretonne. Gr. in-S» t fr. SO 

— Sur rétymologie bretonne In-S» S fr. «O 

— Glossaire moyen breton. Paris. 1895-96. 2 vol. gr. in-8o... SO fr. 
Whitlby StOkrs : Tbe colloqny of tbe two Sages. Br. 1ti-8« — S fr. 

— Togail Bmidne Da'Derga with irunslation an<l glosi^Arial index, lir. 
io-8o 8 fr. 

Adolphe Orai.i : Contes du Pays Gallo. Forl vol. in-12 br... S fr. S» 

A. Chatton : LOYr bugale mari. 1896, in- 18 cart t fr. SO 

Colloques français bretons ou nouveau vocabulaire. 1898, in-12. 

M 9S c. 
Conversations (nouvelles) en breton et on français Iii-i8.. » 95 c. 
DoTTiK (Georges), Manuel pour servir à l'étude de rAntiquité Celtique. 

Paris, 1906, in-12 br S fr. 

Du riusQOBG : Dictionnaire français -breton. 1883-1886, gr. in -80 

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Griffith RoBgRTs : A Welsb grammar and otber tracts. Paris, 1870- 

1883, in-18, pap. vergé IS fr. 

IGrammiire galloiscj. 
Kerbbuzsc : Cojou-Breis, poèmes, contes et légendes bretonnes. Pariit, 1896, 

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Lb Gonidbc : Vocabulaire français- breton. 1888, in-18 i fr. tS 

— Vocabulaire breton-français. 1888, ln-18 f fr. tS 

— Dictionnaire français-bretou. 1847. in-4« br f S fr. 

— Dictionnaire breton-français. 1850, in-4o br I S fr. 

RosTnsNKN : Dictionnaire français celtique ou français breton. 183 i, 

2 vol. in-8« br lO fr. 

Paul Parfouro, ancien iirchivisie (rille-et-Vilnine : Les dépenses de Pierre 
Botherel, vicomte d'Apiané, 1647-48. Avec 2 plancbes, in-80 de 
112p t fr. 

— Inventaire des arcblves de la paroisse Saint-Sauveur de Rennes. 
I11-80 de 82 p • fr. SO 

-• LeUres du peintre L.-J. de Launay (1721-1726). In 8*. 38 p. I fr. SO 

— Les délégués d« l'archevêque de Tours en Bretagne (1570-1790). In-8*, 
70 p t fr. 

— Une mutinerie d*écoliers au collège de Rennes en 1629. ln-8*, 
12p i fr. 

— Une révolte d'écoliers au collège de Vannes (xvut« siècle). In-8o. t fr. 
^ Anciens livres de raison de familles bretonnes, io-80 d^ 78 p. S fr. 

— Les comptes d'un évèque et les anciens manoirs épiscopauz de 
Rennes et de Bmz au xviii* siècle, ln-80, 47 p. et pi • fr. 

— La torture et les ezéeutions en Bretagne aux xvti* et xyiii» siècles. 
In-8«, 38 p • fr. 

• Les aneiennes tapisseries du palais de justice de Rennes, ln-80, 
.32 p. et pi • fr. 

— Utto rize à Loeronan pendant la procession de la Troménie (1 i jutU 
lel 1737). ln-8- de 11 p I fr. 

— Capture d*un corsaire espagnol près de Perroe-Ouirec par des babi- 
tâjits â" Lannion, 26 août 16i8. In-8«, 8 p i fr. 

-*»Les Irlandais en Bretagne (xv* et xviii* siècles). In-8* de 1*2 p. t fr. 
_ Une course de quintaine d'Availles eo 1507. In-S», 14 p.... I fr. 

— Une saisie de navires marchands anglais à Nantes en 1587. In -d* de 
47 p i fr. SO 

Un chouan. Le général du Boisguy. Fougères, Vitré, Basse Norroamlie 

fi frontière du Maine 1793-1800, par le Vte ou Bbeil db Poktbhiand. 

Volume in-8 de 476 p. avec carte ï fr. SO 

Les FOèmes de Taldir, par Barzaz Taldir. Préface de Lb Gofpic et «le 

Le &RAZ. In-12, portrait S fr. SO 

Nobiliaire et armoriai de Bretagne ; 3« et dernière édition, par Pol Potier ob 

CouRCY. 4vot. n-4 y comprifl les planches contenant 6750 blasons. ftSfr. 



La Révolution en Bretagne. — Notes et Documents. Audrein (Tfu- 
Marie, Député du Morbihan à l'Assemblée législative et à />« Conven- 
tion nationale, évéque constitutionnel du Finistère (1741-1800), par 
P. Hémox. Fort vol. in-8 6 fr. ^ 

— Les Chouar« dans ^'îs Cdtes-du-Nord, par U même. Iii-S. Q Tr. B9 

— Le comt3 du Trévou, par le même. în-8 • fr. >• 

La Condition des paysans dans la sénéchaussée de Rennes, par 

Dopo.1T. ln-8 br 4 fr. 

Catalogue des gentilshommes oui ont pris part ou envoyé lenr pro- 
curation aux Assemblées de la Noblesse, en 1789, pour la nomma- 
tiun dfs défiutés des ÉlaU-(îénéraux. Publié d'après les docnraenls offl- 
ci*'is, par MM. L. db la Roqur et de Barthélémy. Prix du catalogu'*, 

X fr. ; par pO:5te • fr. t5 

Bretagne. — - Gompo$tition des Étals-Généraor de la noblesse de Brclagn*» en 
4746, 17ft4. 178U. Eint militaire, Parlemeni, Chambre dc^ Comples en 17^. 

Les vieux papiers d'une vieille maison à Quimperlé, 1575-187Ô, par 

A . DK Brémoxd d'Ans, lfi-8 de 19 p. i fr. M 

— Les marins français dans les derniers combats livrés aux Anglais 
sur les côtes de Bretagne, janvier 1761 Épisode de la guerre de 
Sept ans, par le même, i» p i fr. &• 

Étude historique et biographique sur la Bretagne à la veille de la 
Révolution, a propos n'une correspondance inédite (1782-1790), parJ. 

B\rr.nY. 2 vol. in-8, H46 et 482 p ' It fr. 

Livrequi esl un»» vériuble publicaiion d^archives tnëdiles. Il intéresse presqoe 
toutes IfS familles brelo mes ; Pauteura rédige sur chaque personnage nommé 
dct notBjk biographiques copieuses. C'e^t un vérit ible taoliau de la société 
bret'inne à Va fin de l'ancien régime. Tables aboadantes (70 pages). 

La Bretagne & l'Académie française au XVIII" siècle. Études sur l^s 
Ai-aiiéiiiiciens bretons ou d'origine bretonne, par Kkrvilbr. ln-8 br. f O fr. 

— Essai d'une hio -bibliographie de Chateaubriand et de sa famille. 
ln-8 (presque épui.*^é), par le même S fr. 50 

Itinéraire de Paris à Jérusalem, par Juliex. domestique de M, de ckà- 
teaubriand. Pu(>iié d'après le manuscrit original avec une iutroducUoo 
et des notes, par Edouard Champio.i. Élégant vol. in-16 carré, accompagaé 
de fiicsimilés S fr. M 

Contes irlandais, traduits du gaélique, par G. Dotti5. In-8 S fr. 

La Bretagne et les pays celtiques. — L*Ame bretonne, par Charles 

Le LioFFic, nouvell-^ édition revue etaugmeolée. la-12 de 405 p. . • fr. *• 
II. Bretons de Lettres, par Louis Tibrcelin. Fort vol. in -12 de 317 p. avec 

fac-similés d'autographes S fr. 5# 

La Noblesse bretonne aux XV« et XYI* siècles. Kéformatioos et 
montres, par le O* dk Laioub. ln-4. 

Evéché de Vannes, 2 volumes S4 fr. 

î?ousori|)lion à l'ouvrage complet, le volume lO fr. 

[A paraître successivement Irs aitres évêciiés bretons). 
La Course et les Corsaires du port de Nantes. Armements, combats. 

prises, pirateries, etc., par La NicoLLiÈRS-TBijamo 1 fr. 

La Légende de la mort chez les Bretons armoricains, par Anatole Le 
Braz. Nouvelle édition avec des notes sur les croyances analogues chez 
U'^aul'es peuples celtiques, pf»r Georges Dottin, professeur adjoint à l'Oni- 
versité do R^-oues. Deux forts volumes iu-12, lxz-3'i7-456 p lO fr. 

— Vieilles histoires du Pays breton, l. Vieilles histoires bretonnes. II. Aui 
wiile.ps lie Noiîl. III. Récit des passants par le même, i^ort volume in-12, 
;> é.iition S fr. SO 

— Au Pays des Pardons In-8 br S fr. M 

— Tryphina Kéranglaz, par le même. Poème, in-12 

— Cognomerns et sainte Tréfine. Mystère breton en deux journées. Texte 
et traduction par le Tnèiiie, xliv-183 pages 4 fr. 

— Textes bretons pour servir à l'histoire du théâtre celtique, par Je 

mèuv\ In-8 i fr. 

La révolte dite du papier timbré ou les Bonnets ronges en Bretagne, 
en 1675, p;ir Jean Lemoink. Fort vol. in-8, épuisé iO fr. 

Impriniurie polyglolle Fr. Simoîi, Renne» (HKW-06), /C'L- r_ L 



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