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Full text of "Etudes archéologiques sur les eaux thermales ou minérales de la Gaule à l'époque romaine"

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EAUX 



THERMALES OU MINÉRALES 



DELA. GAULE 



A l'iPOgCB ROMAINB. 



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TIRÉ A 200' EXEMPLAIRES , 
DOHT LA HOITIÉ SKDUUEIIT B8T MISE EN ^ 



ÉIWJDES 

AHCHÉOLOGIQUES 

EAUX THERMALES 

ou HINÈRALEB 

DE LA GAULE 



PAR J. G. H. gREPPO, 

LTON.ITC., DSI^iaaiTi iontHME, ITC 




P^RIS. 

LELEVX, LIBRAIRE ÉDITEUR. 

Ri» PieirfSvruIn , B. 



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pC63 
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315938 



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DES 



EAUX THERMALES 



OU MINÉRALES 

DE LA GAULE 

A l'époque romaine. 



INTRODUCTION. 

C*EST dans le plus ancien des livres, le Pentateuque , 
dans la Vulgaie , du moins , que nous trouvons les 
eaux thermales mentionnées pour la première fois. II y 
est dit que l'Iduméen Ana, antérieur de beaucoup à Tâge 
de Moyse , rencontra dans le désert une source d'eaux 
chaudes : Isie est Ana qui invenit aquas calidas in 
solitudine, cumpasceret asinas Sebeonpairis sui (1). 
Je ne vois pas qu'il soit parlé d'autres sources sem- 
blables dans les livres saints, quoique Josephe signale 
celles A'Emmatis , bourg de Galilée (2) célèbre dans 
l'Evangile (3) , et celles de Callirhoe , auxquelles Hé- 

(1) Gènes, XXXVI , 24. C^e yersion a été controrersée à cause 
de l'obscurité du terme hébreu qu'elle rend par aquas calidas : elle 
a eu toutefois de savants défenseurs. 

(2) De BeL Jud. IV, 1, 3 ; cf. Plin. , Nat. hisl. V, 15. 

(3) Xwc.XXlV, 13. 

I 



(2) 
rode-le-Grand essaya de recourir , peu de temps ayant 
sa mort (1). 

Dans les âges anciens de la Grèce , Homère décrit 
les sources du Scamandre : Tune chaude , exhalant une 
fumée comparable à celle d'un feu ardent ; l'autre , 
aussi froide que la grêle, la neige ou Teau durcie par 
la gelée (2). A une époque ancienne aussi , mais indé- 
terminée, la connaissance de ce phénomène naturel 
nous est révélée chez les Hellènes, par le nom de ce 
défilé des montagnes thessaliennes sur lequel le dé- 
vouement des héros de Sparte répandit tant de gloire : 
les Thermopyles le devaient à une source chaude qui 
coulait en ce lieu (3). Dans la suite, des sources de 
même nature sont mentionnées par les écrivains grecs , 
et quelquefois aussi leurs vertus médicales. Hippocrate 
désapprouve comnoe boisson certaines eaux métalliques 
ou minérales (4). Aristote pose diverses questions gé- 
nérales sur ce sujet (5) ; et ailleurs il indique, à Scoiussa 

(1) Antiquit, XVII ,6,5. C'est de cette source que Pline a dit 

( y , 16 (15) ) : Calidus fons medicœ saitibritatis Callirhoe, aquarum 
gloriam ipso nomine prœf&rens, 

(2) niad. XXn, T. 147. Pline arait oublié ces cinq vers du 
ebantre d'Achille , lorsqu'il disait (XXXI , 6 (32) ) : Homerum 
talidorum fontium mentûmem non fecisie demiror, guum alioqui 
davari ealida fréquenter induceret, etc. 

(3) Je ne citerai que Tite-Llye (XXVI, il\). Hœc una militaris 
via est, dit- il , qua redtici exercitus , si non impediantur , possint, 
Ideo Pylœ, et ab aliis, quia calidœ aquœ in ipsis faucibus sunt, 
Thermopylœ locus appeUattiS, nobili Lcltxidaimoniorum adversus Persas 
morte magis memorabili, quam pugtm. 

(4) De aère, lod» et aquis ; edit. Gêner. 1657, tom. I, p. 284. 

(5) Problem. XXUI edit. Paris. 1619, tom. II, p. 791. 



( 3 ) 

en Thessalie ^ une source qui guérissait les blessures (1 ) . 
Enfin Pindare lui-même ^ chantant un vainqueur sici- 
lien , a célébré les eaux thermales d'Himera (2). 

Les Romains dépassèrent dé beaucoup les Grecs dans 
la connaissance et l'usage des sources médicinales. 
Parmi leurs écrivains , Sénèque (3) et Vitruve (4) en 
ont traité avec quelque détail ; mais Pline est celui qui 
s'en est occupé de la manière la plus suivie et la plus 
étendue ; car il leur a consacré presque tout le livre xxxi 
de son ouvrage. Il faut que j*en donne ici une sorte 
d'analyse , avant de passer à quelques particularités plus 
intéressantes , que j'emprunterai soit à lui , soit à beau- 
coup d'autres écrivains de l'époque romaine. 

Pline reconnaît une grande variété d*eaux minérales , 
sans employer , on le pense bien , les nomenclatures 
de la science moderne. Il en distingue de froides j de 
tièdes , de chaudes à divers degrés ; de sulfureuses , 
d^alumineuses , de salines , de nitreuses , de bitumi- 
neuses, d'acidulés, de ferrugineuses , de gazeuses, etc ; 
^autres où se combinent ces divers éléments. Quant 
à leurs vertus, médicales ou autres, on le trouve plus 
varié encore ; mais on a lieu de sourire plus d'une fois 
de la crédule bonhommie avec laquelle il raconte cer- 
tains effets merveilleux, dont je ne parlerai pas. Il 
indique des eaux purgatives ou dépuratives, de stoma- 
chiques , de fortifiantes ; d'autres efficaces dans les cas 
de goutte, de sciaiiques, de paralysie, de fractures, 

(1) De mirabiL auscult, tom. I, p. 1162. 

(2) Olymp. XII , v. 27. 

(3) Nat. quœst. HI. 

(4) De ArehUect. VIII , 3, 



(4) 

(le luxations , de blessures , d'ulcères ; d'autres puis- 
santes contre les fièvres , les douleurs de tête , les affec- 
tions des yeux, des oreilles, la pierre, la gravelle, les 
maladies cutanées, la stérilité des femmes, la dé- 
mence, etc. 

Les Romains paraissent avoir préféré de beaucoup 
les eaux thermales à celles qui étaient simplement mi- 
nérales , ce qui doit tenir à l'usage fréquent des bains 
chauds , qui faisait partie de leur vie domestiqué. Ce 
fait complexe, je ne vise pas à l'établir ici ; mais il ré- 
sulte , si je ne me trompe , de l'ensemble d'une foule 
de données , et notamment de tout ce qu'on verra dans 
le cours des présentes recherches. Ils savaient utiliser 
les eaux de diverses manières. Ainsi nous voyons qu'ils 
connaissaient les douches , celles du moins que l'on 
appelle descendantes; etsiquelques textes, que j'omets 
à dessein , ne paraissent pas aussi probants qu'on 
pourrait le désirer , du moins il n'est pas possible de 
les méconnaître dans ces deux vers d'Horace sur les 
eaux de Clusium, aujourd'hui San-Cassiano près de 
Chiusi (1) : 

Qui caput et stomdchum supponere fontibus audent 
Clusinis , Gabiosque petunt et firigida rura. 

Ils savaient également tirer parti de la vapeur qu'ex- 
halent les sources chaudes : Vapore quoque ipso aliquœ 
prosunly dit Pline (2). Celse, qui est moins concis sur 
ce moyen thérapeutique, nousuapprend qu'il était em- 
ployé notamment dans un établissement thermal de 

(1) EpisU 1 , 15 , V. 8. 

(2) JSaU hist. XXXI, 2. 



(S) 
Baies dont le nom nous est connu d'ailleurs. Siccus 
calor est et arenœ calidœ, et laconici, et clibani, et 
quarumdam naturalium sudationum , ubi a terra pro- 
fusus calidus vapor œdificio includitur , sicut super 
Baias in murtetis (sic) habemus (1). Nous voyons enfin 
que chez les anciens , comme de nos jours , la méde- 
cine trouvait un remède salutaire dans les boues que 
forment certaines eaux minérales : Utuntur, lisons-nous 
encore chez le naturaliste romain^ et cœno fontitmip- 
sorum utilitery sed ita, si illitum sole inarescat (2). 

C'est le cas de rappeler une phrase de Pline , qui n'est 
pas ici sans importance^ à raison des faits variés qu'elle 
résume^ et qui demande quelques développements. 11 
dit des eaux minérales^ qu'elles ont peuplé l'Olympe de 
nouveaux dieux , et la terre de villes nouvelles : Augent 
numerum deonim nominibus variis, urbesque con- 
dunt, sicut Puteolos in Campania, Slatyellas in Li- 
guria, Sextias inNarbonensi provincia(^). 

Pour commenter la première de ces deux observa- 
tions, reconnaissons d'abord le caractère essentielle- 
ment religieux que l'antiquité attribuait à ces eaux. Selon 
Aristote , on regardait comme sacrées toutes les sources 
thermales (4) ; et Sénèque dit aussi : coluntur aquarum 
calentium fontes (S). Athénée nous apprend qu'elles 
étaient consacrées à Hercule (6) ; et Strabon le dit en 

(1) De medic» II, 17 ; cf. Horat. Epist, 1, 15, v. 5 ; Senec. EpisL LI. 

(2) Nat. kist. XXXI, 6 f32). 

(3) Ibid. 2. • 

(4) Problem. XXIII, p. 791. 

(5) EpisL XL. 

(6) ncipn. XII, 512(6). 



(6) 
paitieulîer de celle qui donna son nom aux Thermo* 
pyles (1). Cette consécration est attestée encore par des 
inscriptions assez nombreuses (2). Quelquefois elles 
étaient consacrées à Apollon , comme il parait par un 
passage d'Euméne (3) ^ ainsi que par les noms A'Aquœ 
Apollinares (4) et A'Aquœ Solis (5). Les nympbes que 
leur nature attachait aux eaux n'en conservaient pas 
moins leurs droits :. c'est à elles que s'adressent le plus 
souvent les vœux des malades guéris, exprimés par 
des inscriptions qu'ils leur consacraient ; j'en aurai plus 
d'une à signaler : les noms des lieux y forment quel- 
quefois un surnom donné à ces nymphes (6). On peut 
rapporter au même culte les autels votifs dont la dédi- 
cace est ainsi formulée : aqyis, ou fontibvs , quelquefois 
avec des indications plus précises (7). Enfin, à une 
époque où le droit de divinité était accordé aussi faci- 
lement, au moins, que celui de bourgeoisie, la su- 
perstition avait singulièrement multiplié les dieux 

(1) Rer. geogr, IX , 428 , edît. ÀlmeloTeen , p. 655. 

(2) Comme ceUe-ci (Carjophili, De thermis HereulanU, etc. p. 29 ; 
OreUi> inseripU sel. , n. 1360 , tom. I, p. 304) : hbrctli. genio || 

LOCI. FONTIBVS || CALIDIS. GALPYR H NITS. IVLIAMVS || ▼. C. LSG. LBO. 
V. MAC. II LBG. ATG , PR. PR. MOES. i| Y. L. S. 

(3) Panegyr. veU, Orat. VI, 21. 

(4) Vet, Roman» itinerar,, ed Wesselîng., pp. 300 , 486. 

(5) Ibid. 

(6) Inf, à Griselum. 

(7) On connaît des inscriptions TOtiyes aux eaux qu'on appe- 
laitÂlbulœ, aqvis. albvlis. En Toîci une (Orelll, n. 1641, tom. I, 
p. 313 ; cf. 1642) : AQVIS ALBVLIS || sanc^^simis || vlpia. athbnais || 

H. VLPII. AVG. LIB. AB. EPISTV || LIS. VXOR || LIBENS || D. D. On Crott 

aussi pouvoir interpréter par À.quis Aponi les sigles A. a. d'inscrip- 
tions flbid. 1643, 1644, p. 313) trouvées à Padoue ; c'est-à-dire près 
des eaux de ce nom. 



(7) 

locaux, dont quelques-uns , sous divers noms , étaient 
les protecteurs spéciaux des sources chaudes. On en 
connaît plusieurs dans les Gaules^ par des inscriptions 
découvertes auprès de nos eaux thermales (1) ; et peut- 
être ailleurs beaucoup d'autres, révélés également par 
des marbres antiques , avaient-ils aussi de semblables 
attributions. Tout cela justifie pleinement l'assertion de 
Pline : Augent numerum deorum nominibus vuriis. 

Quant à ce qu'il ajoute, de villes que les eaux 
avaient fondées , les trois qu'il nomme à l'appui de ce 
fait ne sont assurément pas les seules. Dans cette belle 
Italie, 9i riche en ce genre encore aujourd'hui, les 
écrivains de Rome en ont mentionné un grand nombre 
où affluaient les baigneurs , et qui leur devaient au 
moins leur prospérité , peut-être leur existence. A la 
tête de ces lieux , il faut d'abord mettre Baïes , où , plus 
que nulle autre part , dit Pline , la nature se montrait 
libérale de tells dons : nusquam autem largius quam 
in Baiano sinu (2). Horace, qui aimait ce séjour, et 
se plaignait quand le médecin d'Auguste, Antonius 
Musa , l'adressait à d'autres nymphes (3) , avait exprimé 
la même pensée dans ce vers (4) : 

Nullus in orbe sinus Baiis prœlucet amcmis, 

et dans cet autre si pittoresque (5) : 

Seu liquidœ plcLcuere Baiœ 

(1) Inf. à Aquœ Borvonis^quœ Nisinm , Aquœ Onesiœ , etc. 

(2) mt. hist. XXXI , 2. 

(3) Epist. I, 15. 

(4) iWd. I, 1, V.83. 

(5) Carm. UI,4, y. 24. 



(8) 
Martial a dit principesque Baiœ (l), et ailleurs (2) : 

Littus beatœ Fenerîs aureum BaiaSj 
Baias superbœ blanda dona naturcBy etc. 

An dire de Pline , Baies possédait des eaux de na- 
tures fort diverses (3). Les auteurs anciens abondent en 
détails sur ses bains , ses palais , ses maisons de cam- 
pagne ^ sa magnificence et le concours immense de 
visiteurs qu'elle réunissait (4). Mais Strabon nous 
apprend 9 et cela s*accorde. avec une infinité d'autres 
données moins précises , que le plus grand nombre y 
étaient attirés bien plus par l'amour du luxe et des 
jouissances , l'habitude de l'imitation , le désir d'une 
vie molle et douce , que par les besoins de leur santé (5)* 

Naples avait les mêmes avantages naturels, dit 
Strabon ; mais avec moins de diversité, et le voisinage 
de Baies lui faisait tort à cet égard (6). Il n'en était pas 
ainsi de Pouzzoles que nous avons vu citée par Pline, 
.parmi les lieux qui devaient tout à leurs eaux ther- 
males; elle en possédait aussi une grande abondance, 
et son nom, Puteoli, semble venir des puits par lesquels 
sortaient les sources. On peut lui appliquer une grande 
partie de ce qui vient d'être A\i de Baies. 

Nous voyons souvent nommées les eaux Cutiliœ 

(l)JBptflfr. VI,42,T.7- 
(2) Ibid.Xl, 80, V. 1. 
(2;)Nai.hi8i.XXXl,2. 

(4) Strabon. Rer, geogr, V , 246 , edU. Àïmeloy., p. 378.— Dion. 
Cass. , Hwl. rom. XLVIII, 388 (51). — iose^fh. , Antiquit XVUI, 
7,2. — Senec. , EpisL LI , etc , etc. 

(5) Rer. geogr, V, 243, 246., edit. Almelor., pp. 373, 378» 
(ft)l6««.V, a46., p. 378. 



(9) 

près de Reate , aujourd'hui Rieti. Strabm) dit qu'on les 
prenait en bains et en boisson (1) ; Vitruye les range 
paraii les eaux nitreuses (2) ; Pline leur attribue uii froid 
aigu et mordant : Cutiliœ in Sabinis gelidissimœ, suctu 
quodam corpora itwadunt , ut prope morm» tideri. 
po8sit{Z). C'est par là qu'elles hâtèrent la mort de Ves- 
pasien^ qui les prit inopportunément^ et non pour 
la première fois, semble dire Suétone, dont le texte 
mérite d'être rapporté : ConstUatu suo nom, tent($tus 
inCampania motiunculis levibus(J^), ac proHnus Vrbe 
repetita, Cutylias (sic) ac Reaiina rura, ubi œstivare 
guotcmnis solebat, petiit. Hic, cum super urgentem 
valetudinem creberrimo frigidœ aquœ usu etiam in^ 
iesiina vitiassetj nec eo minus mùneribus imperatth 
riis ex consuetudine fungeretur, ut etiam legationes 
audiret cubans, alvo repente usque ad defectionem 
soMa, imper atorem ait stantem mori opportere. Dum- 
que eonsurgit ac nititur, ihter manus sublevantium ex* 
stihetus est, etc. (5). 

Capoue avait à ses portes des eaux célèbres , sortant 
de la montagne qui portait le nom pluriel de Tifaia, 
et près desquelles était un temple de Diane. Sylla vic- 
torieux y célébra solennellement un acte religieux rap- 
porté par Velleius Paterculus , le seul ancien qui parle 
de ces eaux. Post victoriam, dit-il, qua descendens 



(1) Rer.geogr. V , 228 , p. 349. 

(2) De architect. VIH, ^M 
(3)iVa<. Aw£. XXXI,2(6). 

(4) C'était apparemment de la goutte à larquelle il était sujet, au 
rapport de Dion , Bist. rom, LXVI , 753 (17). 

(5) Vespas. 24 ; cf. Dion. , loc, laud. 



( 10) 

■v 

moniem Tïfaia cum C. Norbano concurrerai SuUa, 
graies Dianœ , cujus numini regio illa sacrata est y 
êolvii ; aquus $alid>rUate medendisque corporibus no- 
biie^, agrosque omnes addixit Deœ. Hujus gratœ reli- 
gwnis menwriam et inscriptio templi adfixa posti 
hodieque, et tabtda testatur œrea intra œdem (1). Sur 
Ift carte de Peutinger^ on retrouve ce temple figuré par 
un petit édifice avec la légende Ad Diana (sic)^ et près 
de là un autre temple, à côté duquel on lit : Jovis Ti- 
fatinus (2). Des inscriptions découvertes à Capoue sont 
aussi relaiii^es à ce temple de Diane (3). 

Martial , qu'il faut citer souvent quand on traite de 
la vie domestique de ses contemporains , célèbre di- 
verses sources minérales de la Péninsule italique. Telles 
sont les eaux ô^Anxur, près desquelles il semble placer 
le séjour favori de Domitien (4) ; la {onidiine Apotius (5), 
aujourd'hui Abano près de Padoue, que le roi Théo- 
doric orna plus tard de somptueux édifices (6) , et qui 
sous les premiers empereurs n'était pas moins célèbre 
comme moyen de divination (7) ; les eaux qu'on appelait 
Albulœ, à présent Bagni di livoli, lesquelles guéris- 

(l) Hist. rom. II , 25. 

(2)Segmm.V, f; VI, d. 

{$) L'une (Orellî, ii.3053^ tom. U, p. 8) l'indique ainsi :ha6. 
FAN. DiAN. TiFAT. L'autre, plus importante (Ibid. n. 1460 , tom. I , 
p. 292] rappelle la donation de Sylla, sanctionnée par Auguste , et 
reconnue parVespasien : imp. cjssar. vespasiants || avg. cos. viii || 

FINES. LOCORVBI. DICATOR || DIAN^. TlFATINiB || COBNBLIO. SYLLA. BX|| 
FORMA. DIVl. AVG. ||RESTITVIT. ^ 

(4) Epigr.y, 1, v. 6 ; VI, 42, t. 7. 

(5) i6t<2.VI, 42, V. 7; cf. Claudian, EidyL VI. 

(6) Cassiodor., Variar. II, 39. 

(7) Sueton., Tiber. 14; Lucan.,ffear«a.VII, v. 202. 



( 11 ) 

saient les blessures (1), et qu'Auguste fréquentait pour 
soulager unie affection nerveuse (2). D'autreslieux meth 
tiennes par le poète sont plus difficiles à reooiiiiahre 
sous les périphrases qui pat^issent voiler leurs tioms^ 
On n'a rien dit de satisfaisant, que je sache, sur les fer- 
vidi fluctus Passeris (3) ; quant au Phœbi vada (4), on 
a pensé que ce pouvaient être les Aquœ Apollinare^ de 
l'itinéraire d'Antonin (5)« 

Sinuessa, aujourd'hui Mondragone, ville Campa*- 
nienne, qt^il appelle Sinmsm molli» (&), est moini» 
connue pour la puissance de ses eaux contre la stéri* 
lité (7), que pour des événements qui appartiennent à 
l'histoire. C'est là qu'Agrippine donna le poison au 
misérable Claude , qui se sentant fort malade , avait 
voulu recourir aux eaux* In tanta mole curommi, dit 
Tacite, Claudius valetudine adversa corripitur, refô- 
vendisque viribus mollitie cœli et salubritàte aquarum, 
Sinuessam pergit. Tum Agrippina sceleris olim certa, 
et oblatœ occasionis propera , nec ministrqrum egens, 
de génère veneni conêultavit, etc.(8). Suivant le même 
historien , c'est encore à ces eaux que Tigellin , appre- 
nant que le cri du peuple avait enfin obtenu l'arrêt de 
sa mort , se la donna lui-même , à l'aide d'un rasoir. 

(1) Epigr. 1 , 13 , V. 1.— Plin., Nat. hi$t. XXXI , 2 (6) — Vitruv. 
De archiîect. VIII , 3. 

(2) Sueton., AugusU 82. 

(3) JEpt|fr. VI,42,Y. 6. 

(4) Ihid.y T. 7. # 

(3) Vet, Roman, itinerar. , éd. Wessehng , p. 300. 

(6) Epigr. \l, 42, v. 5. 

(7) Ibid. XI , 7, T. 11. — Plin. mt. hisl. XXXI , 2 (6). 

(8) Annal. XU, 66. 



Tigellinm, accepta apud Sinuessanas aquas supremœ 
necessitatis nuntio , inter stupra concubinarum , ei 
oscula, et déformes moras, sectis novacula famibus, 
infamem vitamfœdavit etiamexitu sero et ihhonesto^l) • 
Un grand nom attache un Vif intérêt aux eaux qu'on 
appela Ciceronianœ, parce qu'on les vit sourdre dans 
cette villa près de Pouzzoles, que Ciceron avait illustrée 
du nom d'Académie. Il ne vivait plus alors ^ et son ha- 
bitation était possédée par Ântistius Vêtus ; mais TuUius 
Laurea , affranchi du grand orateur > célébra dans une 
pièce de dix vers ces eaux nouvelles , qu'on avait re- 
connu salutaires pour les yeux. Pline nous l'a conservée 
avec le récit dont j'extrais la substance (2). Je la donne 
ici sans hésitation, pensant avec lui quelle est bonne à 
lire, même loin de la source. 

Quod tua, romancB vhideœ clarissime linguœ, 

Sylva loco melius surgere jussa viret , * 

Mque Academiœ celebratam nomîne villam 

Nunc réparât cultu subpotiore Fétus ; 
Hic etiam apparent lymphœ non ante repertœ , 

Languida quœ tnfuso lumina rore levant» 
Nimirum locus if se sui Ciceronis konori 

Hoe dédit, hac fontes quum patefecit ope. 
Ut , quoniam totum legitur sine fine per orbem , 

Sint plures , oculis quœ medeantur aquœ. 

Je ne me suis point proposé de faire un tableau com- 
plet des sources minérales ou thermales de l'Italie an- 
cienne, je veux seulement kn mentionnner encore 

(1) Éist. î , 72. 

(2) Nat. hist. XXXI , 2. 



( 13 ) 

quelques-unes qui ont été moins souvent indiquées par 
les auteurs les plus connus ^ et qui cependant nous 
rappellent des souvenirs intéressants. Commençons 
par la ville de Gumes ; ses bains naturels l'ont rendue 
bien moins célèbre que sa Sibylle, chantée par le prince 
des poètes latins (1). Ils reçurent toutefois un consul 
dont le nom n'est pas sans éclat dans l'histoire , mais 
en faveur duquel leurs eaux furent impuissantes, et qui 
n'y arriva que pour mourir. Cn. Cornélius consul (2), 
dit Tite-Iive , ex monte Albano rediens concidit : el 
parte membrorum captus , ad Aquas Cumanas pro- 
feetuSy ingravescente morbo Cumis decessit (3). L'an- 
tique viUe étrusque de Cœre, aujourd'hui Cervetri 
avait aussi des thermes réputés fort salutaires. Jadis cé- 
lèbre et brillante, elle était déchue et presque ruinée au 
temps deStrabon, uniquement visitée, dit-il, parles 
malades qui venaient y chercher la santé (4). En Etrurie 
aussi , un taureau , disait-on , avait fait clécouvrir des 
sources chaudes excellentes , qui furent appelées pour 
cela Aquœ Tauri , et qui figurent sous ce nom sur la 
cane de Peutînger (5). Pline les indique en quelque 
sorte, quand il appelle les habitants de ce lieu Aquenses 
faurini (6). Le poète voyageur Rutilius leur a consa- 
cré quelques vers, et a vanté la pureté de leur goût. Je 

(i) JEneid. W, 

(2) L'an de Rome 576. arec Q. Petilius. 

(3) HisL XU , 16. • 

(4) Rer. geogr. V, 220 , edit. Almelor. , p. 337. 

(5) Segm. IV. f. 



( i4) 

ne citerai que ees quatre » où il rappelle l'histoire du 
taureau (1) : 

Credere sidignum famà , fragrantia iaurus y 

Invêstigato fonte , lavtura dédit; 
Vtwlet eûpctuitspugnamprœiudere glebis, 

StipUe ewm figtdo eomua prana terit. 

On peut placer encore dans la classe des eaux mi- 
nérales celles de la maison de campagne d'Horace. Lui 
seul en a parlé ; mais les expressions qu'il emploie leur 
attribuent évidemment des propriétés médicales. Qu'on 
en juge d'après ces vers (2) : • 

Fon$ etiam riw dare nomen idaneus, ut nec 
Frigidior JJiracmn, neepuriùr ambiat JBebrus* 
Jnfirmo capiti fluit wtUiê^ utili$ alvo. 

Cest apparemment la même fontaine qu'il nomme 
ailleurs Digentia (3) ; mais elle n'a rien de commun 

r 

avec celle de Bandusia (4) , laquelle coulait loin de là 
et dans la patrie du poète (5). 

H faut aussi que je cite Pline le jeune, et ce qu'il dit 
du lac appelé Vadimonisy aujourd'hui BagnacciOy dont 
les eaux étaient salutaires pour les fractures. iJac^^em/ 
prosocer wiews, écrivait- il, ut Amerind prœdia ma 
ihspicerem. Hœc perambulanti mihi ôstenditur sut- 

(1) lUnerar. I , v. 255. 

(2) Episi. 1 , 16 , V. 12. 

(3)/6id. 18, T. 104. ^ 

(4) Carm. IH , 13. 

(5) C'est le résultat de soigneuses recherches faites par le savant 
et modeste abbé Capmartin de Chaupy. On peut voir sa Découverte 
de la maUoH de campagne d* Horace, tom. II, p. 360 ; toin. m, p. 359. 



( i» ) 

jacens tacus nomine Vadimanis ; simut quœdam in- 
eredibilia narrantur.... Cotor coeruleo albidior, viri-- 
dior etpressior; siUphuris odor saporque medieainé; 
vis qtia frac ta 8olidai}tur,,eic. (1). Mais ces eaux n'eu- 
rent pas pour elles ce hasard capricieux qu'on appelle 
la mode , lequel n'est point exclusirement moderne et 
français : elles étaient, pour ainsi dire , inconnues aux 
habitants de la ville reine , comme elles l'avaient été 
k Pline lui-même, qui s'en étonne (2). 

Nous avons entendu Strabon dire que parmi les 
habitués des thermes de Baies, beaucoup recherchaient 
moins la santé que la mollesse et les plaisirs. J'ai du 
que cette assertion était confirmée par d'autres faits ; 
H j'aurais pu ajouter que tel est le résultat des nom- 
breuses données que nous possédons d'ailleurs, «tque 
cette (Nervation était assez applicable, alors aussi bien 
qu'aujourd'hui , à la plupart des eaux minérales ou 
thermales. Si l'on se rappelle ce qu'étaient les mœurs 
romaines à l'époque si corrompue et si corruptrice des 
empereurs , on pourra aisément se faire une juste idée 
de la vie qu'on menait dans ces lieux de réunion , où se 
rassemblaient les riches , les oisiCs , les hommes volup- 
tueux de la capitale de l'univers , et l'on n'hésitera pas 
à leur appliquer le jugement de Sénèque, qui rie parait 
jpas trop sévère lorsqu'il appelle la ville voluptueuse de 
la Gampanie un rendez-vous de tous les vices : Diverso^ 

(i)Epist.ym,20. • 

(2) Ibid, Ce lac avait cependant été nommé par Polybe {Hist. U, 
20) etpar Tite-Live {Hist. IX , 39) , à Toccasion de combats liyrés 
snrMS bord»; et ensuite par Sénèque (NaU qitœst. lU, 25)» etpar 
l'oncle même de Pline le jeune (Nat. hist, U, 95 (96) ). 



( 16 ) 
rium viliorum (1). Des mémoires du temps sur Iles 
thermes de l'Italie les plus fréquentés du beau monde de 
Rome eussent été bien curiieux, et nous auraient con- 
servé bien des anecdotes scandaleuses , tragiques ou 
ridicules. 

Ailleurs qu'à Baies, ils eussent pu dire, sans doute, 
avec le philosophe que je viens de citer : Illia sibi plu- 
rimum Ivxuria permittit ; illiCy tanquam licentia de- 
beaturloco, magis solvitur . . . . Videre ebrios per tittora 
errantes, et commissationes navigantium, etsympho- 
niarum cantibus perstrepentes lacusetalia,quœvelut 
soluta legibus luxuria non tantum peccat , sed pu- 
blicat (2). Ailleurs peut-être qu'à Sinuessa, ils nous 
auraient montré quelque gastronome peu soigneux du 
régime, arrosant sa chère délicate d'une boisson plus 
enivrante que les eaux , puis rentrant attardé et chan- 
celant, pour subir dans toute sa rigueur le sort auquel 
échappa le Philostrate de Martial (3) : 

A Simiessanis conmva Philostratus undis 
Conductum repetens , noctejubente larem , 

Pœne imitatus obit sœvis Elpenora fatis, 

Prœceps per longos dum mit usque gradus (k) . 

Non esset , Nymphœ , tam magna pericula passus 
Si potius vestras ille hibisset aquas. 

Enfin , plus d'une fois aussi ils nous auraient fait voir 
la fidélité d'une épouse, l'union d'un ménage, l'avenir 

(1) EpitU LI. • 

(2) Ihid, 

(3) Epigr. XI, 82. 

(4) Dans TOdyssée (X» y. 559), Elpenor iyre se brise la tète en 
tombant d'un toit. 



( 17 ) 

d'une famille heureuse détruits par une liaison cou- 
pable ^ que facilitait la licence de ces lieux ; car , à coup 
sûr, on ne peut regarder, comme chose bien rare, 
Taventure racontée dans cette petite pièce d'un poète 
trop souvent licencieux, mais toujours observateur 
et quelquefois moral, que j'ai déjà cité bien souvent (!)• 

Costa, nec antiquis cedens Lcevina Sabinis, 
Et quaravii tetrico tristior ipsa viro, 

Dummodo Lucrino, modo sepermittit Avemo, 
Et dum Bâtants sœpe fovetur aquis, 

Ineidit in'flammas, juvenemque secuta^ relicto 
Conjuge, Pénélope venit, abit Hélène. 

Voilà de bien longs détails , sans que j'aie encore 
abordé précisément le sujet essentiel de mes recherches . 
Il m'a paru que ces notions formeraient une introduction 
convenable à ce qui me reste à dire maintenant , sur 
les eatix minérales et thermales de notre patrie, à l'épo- 
que qui la vit une des provinces les plus distinguées 
du grand Empire. 

(1) Martial, JE:pt^r. 1,63. 



PREMIÈRE PARTIE. 



Lorsque les Romains étendirent leurs conquêtes après 
la ruine de Garthage , ils étaient loin d'avoir dépouillé 
la rudesse de leur caractère primitif, et en Asie, comme 
en Europe, ils avaient tout à gagner au contact de 
peuples plus polis et plus éclairés. Alors eut lieu ce qui 
s'est vu plus d'une fois dans des conditions semblables. 
Les peuples vaincus réagirent dans la paix sur ceux 
dont les armes les avaient soumis , et ceux-ci , par la 
force des choses et sans résistance possible , subirent à 
leur tour le joug intellectuel et moral de leurs nouveaux 
sujets. Plus tard, et sur un autre sol, les rôles étaient 
changés. Les habitants du nord de FEurope n'avaient 
pas, comme les Hellènes, pour compensation à la con- 
quête , l'ascendant d'une civilisation ancienne et supé- 
rieure. Ici les hommes civilisés étaient les conquérants ; 
et désormais, ils étaient appelés à devenir civilisateurs. 

Telle fut la mission des Rouahis dans notre patrie. 
Car, tandis que dans le midi de la Gaule le génie de la 
Grèce jetait un certain éclat sur les colonies des 
Phocéens et de leurs fils les Massaliotes, tout le reste 



( 19) 

des Gaulois végétait encore dans une sorte d'enfance 
sociale , lorsque ce peuple eut à subir les représailles 
du vœ victis de ses ancêtres. Mais aussi, une fois la 
soumission consommée, nulle part la civilisation ro- 
maine ne poussa en peu de temps d'aussi profondes, 
d'aussi vivaces racines : on eut dit que les enfants des 
vieux Celtes avaient senti que chez eux tout était à créer. 
En Grèce il y eut toujours des Grecs ; bientôt dans les 
Gaules il ne resta plus de Gaulois (1). Devenus Ro- 
mains , ils commencèrent de bonne heure à se faire 
aux habitudes, aux mœurs, à l'état social de leurs do- 
minateurs ; et , comme il est ordinaire dans un pareil 
progrès, les choses purement matérielles, le comfortable 
de la vie, dirions -nous aujourd'hui, le luxe même 
prirent le pas sur les lettres, les sciences et les arts. 
Il n'est pas facile, d'apprécier a quel point les Gaulois 
avaient su connaître et utiliser les sources minérales et 
thermales de leur patrie. Quelques indices de haute 
antiquité , observés près des sources de cette nature, 
dans des fouilles à une très grande profondeur, don- 
neraient lieu de soupçonner que ce moyen thérapeuti- 
que ne leur fut pas totalement inconnu. Quoi qu'il en 
soit, les Romains devaient être leurs maîtres à cet égard, 
eux pour qui l'usage de ces bains naturels était devenu 
un besoin. Aussi, et peu après la conquête, voyons- 
nous un grand nombre de sources fréquentées dans 

(1) Il faat excepter qoelcf^ss populations, et ceUes surtout du 
nord-ouest des Gaules , plus isolées dans leurs rastes forêts. Les 
habitants de la Celtique paraissent avoir été les plus saurages des 
Gfaulois^ et les plus opiniâtres dans leur résistance morale : le cbris-* 
tianisme seul devait les arracher à la barbarie. 



(20) 

totitei» les parties de ia Gaule ^ principalement dans les 
Pyrénées, les Vosges, les montagnes deSilnjerm^etc. 
Des restes d'antiquités romaines , et qui supposent par- 
fois une grande magnificence, attestent encore l'impor- 
tance qu'attachèrent les maîtres du monde , non-seule- 
ment à nos thermes les plus renommés aujourd'hui, 
mais à d'autres encore qui sont à peine connus. 

Des écrivains anciens , les itinéraires , la Carte de 
Peutinger , quelques inscriptions nous ont révélé les 
noms antiques d'un certain nombre de lieux désignés 
comme possédant alors de tels établissements , et par- 
fois aussi de rares données sur leur histoire. C'est de 
ceux-ci que je dois m'occuper d'abord, et cette première 
partie leur sera consacrée. Avec des éléments plus mul- 
tipliés pour la formation de cet ensemble , il eût été 
convenable et rationnel de s'astreindre à un classement 
régulièrement géographique. Mais dans l'état des don- 
nées acquises, la disposition par ordre alphabétique des 
noms m'a paru la plus naturelle, comme la plus facile. 

Au commencement de la Carte de Peutinger, c'est-à- 
dire à son extrémité occidentale , si l'on peut employer 
ici cette expression qui conviendrait ailleurs , on lit ce 
nom (1) accompagné d'un signe que je dois faire re- 
marquer, parce qu'il en sera#[uestion plus d'une fois. 
Cest un grand édifice de forme quadrangulaire qui ren- 
ferme une cour intérieure ; or , ce signe est joint à peu 

(1) Segm. 1 , d. 



(21 ) 

près constamment sur cette carte aux noms des lieux 
qui possédaient un établissement thennal , et il est censé 
en être la représentation. 

Quant au nom que le signe indicateur accompagne 
en cet endroit , il est difficile , ou plutôt impossiUe , 
d'en faire une application certaine à quelque lieu mo- 
derne. M. Walckenacr croit que ces eaux ne s(mt pas 
différentes des Aquœ Tarbellicee de Tltinéraire d'An- 
lonin (1) ; d'Anville préférait y reconnaître les Aquœ 
Conwnarum (2). Tout cela est peu satisfaisant^ ce me 
semUe , ces thermes antiques ayant leur dénomination 
spéciale^ qui leur est constamment donnée ailleurs. Il 
serait donc plus juste de penser que ces Aquœ ne por- 
taient pas d'autre nom (3), peut-être de les identifier 
avec des Aquœ Calidœ mentionnées dans ces contrées 
par le seul anonyme de Ravenne , qui les nomme après 
Huscinone (4). L'épithète Calidœ peut être ici un mot 
générique, et ne saurait faire une difficulté. 

Quoi qu'il en soit, une grande liberté sur la détermi- 
nation de leur emplacement est autorisée par la confor- 
mation si vicieuse de la carte antique qui a inscrit ce 
nom, laquelle ne pouvait être, comme on sait, qu'une 
sorte d'itinéraire. Avec sa forme si démesurément al- 
longée , on ne saurait fixer une position , même d'une 
manière approximative, toutes les fois qu'on n'y trouve 

(1) Géographie ancienne des GatUes, tom. I , p.^297. 
(2] Notice de Vancienne Gaule , p. 73. 

(3) Outre que la Carte dePeutinger est incomplète du commence- 
ment, il existe en cet endrffi une déchirure bien marquée i mais 
il ne parait pas qu'elle ait pu faire disparaître la seconde partie 
de ce nom , s'il y en avait une. 

(4) Degeogr.y, 8. 



i 



( 22 ) 

aucune indication de distances par rapport à d'autres 
lieux déjà connus ; or c'est le cas de ces Aquœ^ qui ne 
paraissent pas avoir été une mansion. Sans émettre ici 
une opinion positive , je puis dire que je n'oserais re- 
jeter celle d'un homme fort versé dans la topographie 
comparée des contrée3 pyrénéennes, qui pense retrouver 
ce lieu antique aux eaux d'Ax, dans l'Arriège. On y 
trouve, dit-on, des restes d'antiquité, sur lesquels, à 
mon grand regret , je ne possède aucune indication dé- 
taillée ; et l'antique dénomination Aquœ doit avoir été 
l'origine du nom moderne qui s'écrivait Aqs, à une 
époque où les oracles de notre langue n'avaient pas pour 
ses origines le dédain qu'ils professent maintenant. 

AQUJE. 

Nous retrouvons de nouveau ce nom dans une contrée 
fort différente. On le lit sur des pierres milliaires, con- 
servées encore sur les lieux même où elles furent dé- 
couvertes ; pour mieux dire , il y est inscrit en abrégé : 
AQ., KQuœ; ou c. A. AQ. , ce qu'on a suppléé par dvitas 
Qu colonia, xugusta ou xurelia AQuensis (1). Cest à 
Steinbach , dans le grand duché de Bade , que ces mo- 
numents ont été trouvés , et l'un deux indique une dis- 
tance de XVII lieues gauloises avec Strasbourg, ARcen- 
toratum : tel parait être le sens le plus naturel de 
l'inscription singulièrement construite, qui a été dis- 

(1) Freret, Mem, de V Académie âfê Inscript., tom. XIV, hist. 
p. 157.— Schœpflin, Alsat. illustrai,, tom. I, pp. 558-560.— OreUi, 
Inscript, lat, seL, tom. I, pp. 248, 249 ; nn, 949, 957.— Walckenaer, 
Géographie ancienne des Gaules, tom. II, p. 293. 



(23) 

cutée par Frèret (1). Ces indications conduisent à re- 
coïinaitre cette station Romaine à Baden, ville qui donne 
son nom au grand duchés et dont les eaux sont toujours 
en vogue. Un autre monument aurait suffi à lui seul 
pour constater cette identité : c'est une inscription qui 
existait dans le clocher de l'église paroissiale à l'époque 
où elle fut publiée pour la première fois , c'est-à-dire en 
1534 (2). Elle porte le nom de Caracalla et qualifie 
cette ville de vESvpublica AQwensis. 

M. AVBELIO. ANTONINO. GAES. 

IMP. DESTINATO. IMP. L. SEPTImI 

SEYERl. PERTINAGIS. AV6. FILIO. RESP 

AQV 

L'ancien collecteur qui donna le premier cette ins- 
cription y en ajouta une autre , en l'honneur de Sévère 
Alexandre (3) , laquelle pourrait bien être une portion 
de celle qui a été rapportée par Orelli (4). J'ignore 
quelles autres antiquités ont été retrouvées à Baden, et 
s'il y existe quelques restes de son ancien édifice ther- 
mal. A la rigueur 9 cette ville ne devait pas entrer dans 
le cadre de mes recherches , puisqu'elle appartenait à 
la Germanie; mais elle est si voisine du Rhin^ que l'éta- 

(1) Op. /atid., p. 158. 

(2) P. Apiani, JnacripU sacrosancUB vetustat,,^. 455.— OreUi, 
MmeripU lat. sel. , tom. l, p. 130 , n® 452. Ce sayant , après Freret 
(lœ. laud.J, signale Ferrear de beaucoup d'érudits, des Suisses sur» 
tout/ qui ont donné ce moi^ment à Baden en Àrgoyie ; chez nous, 
d'ÀnTÎlle (NoL de la Gaule, p. 76^) a partagé cette erreur, et de plus 
il a nommé Marc-Ànrèle an Ueu de Caracalla. 

(3) Ijoc. laud. 

(4) Op. laud., tom. I , p. 249, n» 957. 



(24) 

blissement formé en ce lieu par les maîtres du mmide 
peut être regardé comme une sorte de poste avancé de 
la Gaule ; et^ par exception, j'ai cru pouvoir en parler ici. 

AQVM AUSClOKVIdf 

Ce n'est qu'après une longue hésitation que je me 
détermine à inscrire ici ce nom , qui permet quelque 
doute. Il désignerait assez convenablement, à défaut 
de nom plus précis , des eaux que Strabon parait avoir 
mentionnées sur le territoire des. 4 wsc/L C'est ainsi, du 
moins, que des interprètes entendent ce que dit le géo- 
graphe, après qu'il a parlé des thermes et des eaux po- 
tables des Onesii : xaXyi ^à jcai vi tôv Àudxiwv (1); et 
cette interprétation parait en effet la plus naturelle, si 
Ton a égard aux antécédents (2). Toutefois, et dans ce 
sens même, il ne serait pas absolument certain qu'il 
fût ici question d'eaux minérales , quoique Strabon en 
parle à Toccasion de sources qui le sont évidemment. 
Si j'ai cru devoir indiquer ici ces Aquœ Ausciorum, 
comme pour mémoire , du moins je n'essayerai pas 
d'aborder à leur sujet le vaste champ des conjectures. 
La donnée première ne me parait pas assez certaine ; 
et puis c'est aux savants du pays qu'il appartient, de 
rechercher à qudle localité serait applicable cette in- 

(1) Rer. geogr, IV, 190; edît. ÀlmekT.> p. 290. 

(2) D'autres commentateurs Teulenl que ceci se rapporte au soU 
comme dans une phrase précédente, et qu'il s'agisse en cet endroit, 
de la fertilité des terres que possédaient les Àuscii, Ce rapport se- 
rait bien éloigné , et le sens fort peu clair. 



(28) 

dication du géographe grec : ils peuvent avoir des 
donntées que je ne possède point (I). 

AQUJE BtmMoms. 

Si je maintiens cette leçon de la Carte de Peutinger 
contre les doutes de d'Anville , qui cependant ne l'a pas 
rejetée , ce n'est point pour les raisons qu'il propose , 
lesqueBes ne sauraient avoir aujourd'hui la moindre 
valeur (2); mais parce que cette leçon étant autorisée 
par les n[K)numents , il n'y a pas lieu d'y rien changeri 

Sur cette isarte , les Aquœ Bormonis figurent avec 
rédifice carré que f ai signalé plus haut , et comme sta- 
tion d'une voie qui tend d'Augustodunum , Autun , à 
Avaricum, Bourges : elles y sont placées entre Siîillia 
ou Suillia, Thiel, eiDegena, Dédse(3). Sans entrer 
dans le co^iput et la comparaison des distances itiné- 
raires entre ces divers lieux , je me borne à constater 
le |ug!8m^t unanime de tous ceux qui ont traité de la 
géographie comparée des Gaules , jugement qui recon- 
naît f identité de cette antique mansion avec la petite 
vîile de Bourbon l'Ârchambault , Allier , dont les eaux 
diiermales sont encore fréquentées de nos jours (4). Son 
tiom moderne, sur lequel j'aurai occasion de revenir, 

(1) Je n'ai aucune indication archéologique sur les eaux de Bar- 
botan , et de Castera-Viyent , les seules dont je connaisse i'esistence 
'dans le département tlu Gers. 

(2) Ibid. # 

(3) Segm. I, c. 

(4) Valois , NotiL Galliarum , p. 104 , a. — D'ÀnyiUe , Notice de 
l'ancienne Gaule, p. 74. — Walckenaer , Géographie ancienne des 
Gaules, tom. I , p. 372 ; tom. III , p. 67. 



(26) 

dérive évidemment de celui que la Carte lui donne , et 
qui de bonne heure , au moyen-âge passa par une autre 
forme latine, Burbonium. On le trouve, en effet, chez 
un historien du roi Pépin cité par Sirmond (1), lequel 
dit de ce prince : Aquiîaniam ingressus, quœdam op- 
pida et castella manu cepit, in quibus, prœcipua 
fuere Burbonium , Cantillia, Clarusmons (2). 

Il paraît que Bourbon-rArchambault a conservé bien 
peu de monuments antiques , et que là, comme ailleurs, 
l'ignorance et l'incurie ont favorisé la destruction. Nous 
savons, du moins, qu'on y a retrouvé à diverses époques 
des indices marqués de la splendeur que ce lieu dut 
autrefois à la civilisation romaine. Voici ce qu'on peut 
recueillir à ce §ujet des historiens de la province , et des 
renseignements plus récents pris sur les lieux. 

Aux xYu"** et xviir* siècles , on y découvrit des restes 
d'aqueducs , ceux d'un amphithéâtre (3) , des colonnes 
en marbre ; des bains revêtus de la même matière , 
comblés de terre et de débris , mais bien conservés ; 
des tuyaux de plomb pour la conduite des eaux , et qui 
avaient sans doute appartenu à l'ancien établissement 
thermal : le nombre et la longueur de ces tuyaux étaient 
si considérables que leur poids total dépassait 400 livres. 
Il était arrivé plusieurs fois , dit-on , que des particu- 
liers avaient pu faire reconstruire leur maison avec les 

(i) Àd Sidonitmi. noU, p. 48. 

(2) Cette TÎlle fut surnommée FÀrcbambault , du nom de Fun de 
ses seigneurs. À son tour , elle donna #n nom à la plus illustre des 
branches de la famille de saint Louis , celle qui a fait le plus pour 
le bonheur, oo pour la gloire de notre patrie. 

(3) Ou peut-être d'un théâtre , car on a souvent confondu ce& 
deux genres d'édifices si différents. 



( 27 ) 

seules pierres de taille provenant d'antiques édifices^ 
qu'ils avaient trouvés sous le sol. Des murs entiers fu- 
rent reconnus, dont la démolition ne fut pas facile, et 
des pavés en marbre, tellement adhérents au staîumen 
qui leur servait de base, qu'on jugea plus simple de les 
briser que de les détacher. En général les marbres et le 
porphyre avaient été prodigués dans les édifices. 

Au commencement de notre siècle aussi, on a re- 
trouvé des bains en marbre et les traces d'une voie ro- 
maine. Je n'ai pu savoir ce qu'on fit des bains ; quant 
à la voie foulée par le peuple conquérant, elle est deve- 
nue sur plusieurs points la base d'un chemin de grande 
vicinalité. Il ne parait pas cju'on ait trouvé d'inscriptions 
à Bourbon-l'Ârchambault, ou qu'on ait su les conserver. 

AQUM BORVOmS. 

Non loin d'une voie conduisant $ Andomatunum , 
Langres , à Tullum , Toul , la Carte de Peutinger nous 
fait voir l'édifice indicateur des eaux thermales (1); 
mais ici aucun nom ne l'accompagne , et aucune éva- 
luation de distance ne tend à établir les rapports de ce 
lieu avec d'autres. Toutefois, on reconnaît, avec d'An- 
ville (2) , que ces eaux , si vaguement désignées , ne 
sauraient se retrouver qu'en Bourbonne-les-Bains, ville 
de la Haute-Marne, renommée encore pour son établis- 
sement thermal. Le nom &Aquœ Borvonis ne se lit chez 
aucun auteur ancien ; et s'il est regardé comme le nom 

(1) Segin. II, a. 

(2) Notice de la Gaule , p. 75. 



( 28) 

romain de Bourbonne , ce n'est que par une conjecture 
fort plausible , fondée sur deux monuments antiques 
découverts dans cette ville , qui ont fourni à M. Berger 
de Xivrey, le thème d'un ouvrage important , et d'une 
érudition consciencieuse (1). 

Le premier de ces monuments , déjà connu au xvi*" 
siècle, se voit aujourd'hui dans l'intérieur de la fontaine 
de la place. C'est un bloc fort mutilé , reste d'un autel 
votif, qui porte une inscription attestant la reconnais- 
sance d'un père pour la guérison de sa fille, inscrip- 
tion long-temps et diversement tourmentée par tous 
ceux , à peu près , qui essayèrent de la reproduire ou 
de la commenter. M. Berger de Xivrey, en donnant un 
dessin fidèle du monument, nous a mis à même de la 
lire avec exactitude : en voici la vraie leçon , où deux 
lettres seulement sont rétablies (2) : 

[B]ORVONI. T[A] (3) 
SIONÀE. C. U 
TINIVS. BO 
MANVS. IN (4) 

. G. PRO. SALV 
TE. COCILLÀE (») 
FIL. EX. VOTO 

(1) Lettre à M» Hase, sur une inscription latine du second siècle, 
trouvée à Bourhonne-les-Bains, etc. Pairis, 1833, in-^<>.€etoaTrage, 
que je citerai souTent , m'a épargné des recherches pénibles. 

(2) Op, laud. , pi. II , p. 127. 

(3) Pour DA , comme dans Tinscription suiyanic. 

(4) iNGenutM. 

(5) Le T me parait lié à Te , au commencement de la ligne. 



(29 ) 

Cette autre inscription ftit découverte en 1 833 , et 
sd conservation parfaite ne permet aucune hésitation ( 1 ) . 

DEO. APOL 
LÏNI.BORVONl 
ET. DAMONAE 
C. DAMINIVS 
FEROX.CIVIS 
LINGONVS.EX 
VOTO 

Comme on voit, c'est encore un monument votif; 
mais le nom d'Apollon y précède ceux qu'on a déjà re- 
marqués dans l'autre inscription (2) : ce monument est 
conservé avec soin chez M. le docteur Ath. Renard. 

Je ne dirai rien des dissertations sans fin auxquelles 
ont donné lieu les noms de Borvo et de Damona. Des 
savants, qui avaient la prétention de posséder la langue 
celtique, comme celle de leurs mères, ne se sont pas 
feit faute de triturer et manipuler des syllabes, sans 
obtenir autre chose que des résultats chimériques ou 
ridicules (3). Les hommes sensés et positifs se sont 
bornés à voir ici deux divinités protectrices des eaux : 
d'autres inscriptions qui passeront bientôt sous les yeux 
du lecteur, et le nom A'Aquœ Bormonis qu'il a déjà vu, 
donnent à cette conjecture un caractère de certitude (4). 

Le sol antique de Bourbonne parait avoir restitué de 
tout temps un grand nombre de monuments, ou de dé- 

(1) Op. laud., pi. I , p. ffiT. 

(2) À moins qu'on ne fasse de borvoni un surnom d'Apollon , 
ce qui me parait moins naturel. 

(3) Op. laud. , pp. 73—100. 

(4) Inf. à Aquœ Nisineii. 



(30) 

bris romains ; mais rarement ils ont été recueillis par 
des mains conservatrices, plus rarement décrits avec 
quelque exactitude archéologique. Les ouvrages publiés 
sur les eaux de cette ville, depuis bientôt trois siècles, 
indiquent vaguement, comme produits de fouilles suc- 
cessives, des pierres de taille, quelquefois ornées, 
des briques et tuiles romaines, des traces de pavés ou 
de chaussées, des médailles, des inscriptions, des bas- 
reliefs, des statues, dont quelques-unes en marbre 
blanc, etc. (1). Pour ce qurest des constructions qui 
peuvent avoir fait partie des thermes antiques, je laisse 
parler M. Ath. Renard cité par M. Berger de Xivrey. 

« Ce qu'il y a de certain , c'est qu'à l'occasion des 
» fouilles exécutées en 1763 jusqu'en 1783, au voisi- 
» nage de ses sources, on a trouvé certains vestiges 
» de travaux dont les plus anciens étaient situés à plus 
» de 1 5 mètres au-dessous du sol actuel. Une si grande 
» profondeur , qui ne peut être que le résultat des atté- 
» rissements produits par une longue suite de siècles, 
» autorise à penser que les eaux de Bourbonne étaient 
» connues et employées long-temps même avant l'in- 
» vasion des Romains. Cest à ces derniers que Ton 
» attribue la construction postérieure d'un aqueduc, 
» et de certains ouvrages en pierre et en briques , dé- 
» couverts à l'occasion des înêmes fouilles, et plus 
» élevés de 9 mètres environ. Du reste le nom du Bain 
» Patrice y sous lequel on désigne encore aujourd'hui 
» la source de l'hôpital militaS^ , et les débris d'un 
» ancien pavé de marbre que l'on a trouvé à 5 où 6 

(1) Op. laud.y pp. 128—136. 



(31 ) 

» pieds de profondeur, assis sur une couche épaisse 
» de ciment; permettent de supposer que les Romains 
» possédaient autrefois dans cet emplacement des ther- 
» mes dignes de leur magnificence (1). » 

Deux monuments plus récemment découverts peu- 
vent être signalés ici avec confiance, grâce à M. Renard, 
qui les a recueillis, et au savant académicien qui en a 
donné les dessins et la description (2). L'un, peu im- 
portant, mais bien conservé, est un petit bouc en bronze, 
comme on en connaît beaucoup. L'autre est un débris 
mutilé d'un monument orné de sculptures, qui fut le 
tombeau d'un acteur nommé Maronus , et surnommé 
RocabaiuSy peut-être de l'un de ses rôles. C'est ce que 
nous apprend l'épitaphe inscrite dans le tympan d'un 
fronton de mauvais goût : M. Berger de Xivrey la lit 
ainsi, en suppléant quelques lettres frustes ou in- 
complètes (3). 

MARONV[S] 

HISTRIO.ROCÀBÀ 

IVS.Dic[T.VIXï]T. 4NN.XXX 

Ce comédieii était-il venu en ce lieu pour y rétablir sa 
santé, ou pour y donner des réprésentations théâtrales? 
Cette deniière supposition est aussi vraisemblable que 
l'autre ; on sait d'ailleurs que les malades et les oisifs , 
réunis dans la saison des eaux, étaient fort avides de 
spectacles, comme d'autres plaisirs. Nous aurons bientôt 

(1) Bourhonne et ses eaux thermales. Vdxls , 1826, iii-18, pp. 
159,160. 

(2) Op. laud., pi. IV. et V, pp. 133—136. 

(3) Op. laud., p. 136. 



( 32 ) 

à remarquer un théâtre romain , dans un simple viens 
qui possédait des sources thermales; et déjà, dans 
Farticle précédent, j*ai répété une vague indication sur 
quelque chose de semblable. 

AQU^ CÂLTDAS, 

Ce nom est inscrit sur la Carte de Peutinger auprès 
du signe destiné à distinguer les eaux thermales (1). 
Mais la place qu'il y occupe, sans indication de dis- 
tance par rapport à d'autres lieux, a fait douter s'il se 
rattache à la voie de Segodunum, Rhodez, à Lugdu- 
nuniy Lyon; ou bien à celle qui tend aussi à la colonie 
dePlancus, en partant d'Augustonemeium, Clermont. 

De là deux opinions sur l'emplacement moderne 
qu'il faut assigner aux Aquœ Calidœ ; et ce sont les 
seules qui ne soient pas arbitraires. L'une, les rappor- 
tant à la première de ces voies romaines , prétend les 
retrouver à Chaudes-Âigues , Cantal , sur les confins du 
Rouergue : ainsi en ont jugé Savaron(2), Sirmond (3), 
Valois (4), et récemment M. Walckenaer (5). L'autre 
est celle de d'Anville , qui , adoptant une direction fort 
différente, pense que ces thermes romains apparte- 
naient à la voie d'Augusionemetum , et qu'il faut les re- 

(1) Segm. l, c. 

(2) Àd Sidon. uoU, p. 337. 

(3) Àd Sidon. not., p. 60. 

(4) Noiit. Galliar, p. 47 > b. ^ 

(5) Géographie des Gaules, tom. 111, p. 100. Par inadrertance, sans 
doute > le sayant académicien a écrit Àigaes-Chaudes , nom d'un 
TÎUage des Basses- Pyrénées , ayec des eaux thermales , qui s'écrit 
plus exactement Àigues-Caudes. 



(35) 

connaître au bourg de Yicliy, département de l'Allier (1 ) . 
Cette opinion, comme on voit, ne tient aucun compte 
des rapports de signification entre le nom ancien donne 
par la Carte, et Fappellation moderne de Chaudes-Aiguës; 
rapports qui ne furent peut-être pas sans influence sur 
l'esprit des devanciers de d'Anville, mais qui, au fait^ 
manquent ici de portée (2). 

Obligé d'adopter un sentiment sur cette question , je 
me range à celui du prince des géographes français , et 
cela pour plusieurs motifs. 1** A la simple inspection 
de la Carte de Peutinger, ces eaux par leur position , 
toute inexacte qu'elle doit être, paraissent se rapprocher 
de la voie d'Augustonemetum : à mes yeux , l'édifice 
thermal est même évidemment à cheval sur cette voie. 
2** Si je suis bien informé, dans les montagnes abruptes 
de la Haute-Auvergne , où , généralement parlant , les 
Romains ont laissé peu de traces de leur passage , les 
abords de Chaudes-Aigues , en particulier , ont toujours 
été fort difficiles , et l'on n'y a rien retrouvé qui ressem- 
blât au moindre vestige d'une voie romaine. 3** A peine 
ce lieu a-t-il produit quelque pauvre débris d'antiquité, 
tandis que Vichy, riche sous ce rapport, peut représenter 
dignement un établissement thermal qui devait être 
considérable et fréquenté, puisqu'il figure sur une carte 
itinéraire, quoiqu'il ne fût pas une mansion. Avec ces 
motifs, j'en ferais valoir un autre , s'il était plus certain 
que Vichy au moyen-âge se nommait Vicus Calidus : 

(1) Notice de la Gaule, p. 7'5^ 
, (2) Les anciens monuments géographiques indiquent d'autres 
lieux portant ce nom, qui convenait > du plus au moins, à toutes 
les eaux thermales. 



(34) 

il y aurait là une transition du nom romain au nom 
moderne. Mais j'ignore si cette indication , qui m'est 
communiquée, repose réellement sur des titres, ou s'il 
ne faut y voir qu'une conjecture ingénieuse. 

Je crois qu'on a peu écrit ex professa sur les anti- 
quités de Vichy, et que rien n'a été fait sur ce sujet par 
des hommes spéciaux : mon ignorance à/ leur égard 
serait complète , sans les notions dont je suis redevable 
à l'obligeance de M. le docteur Prunelle, inspecteur 
actuel de cet établissement thermal. Les connaissances 
ifort étendues qu'il possède, hors du cercle de sa profes- 
sion, me font regarder ses communications comme di- 
gnes de toute confiance ; et je leur emprunte, avec gra- 
titude, la plus grande partie des détails dans lesquels 
je vais entrer maintenant. 

Ce n'est point précisément au bourg moderne de 
Vichy qu'il faut chercher l'antique vicus , détruit fort 
anciennement par un incendie, dont les indices sont 
palpables : c'est en dehors de son enceinte , et dans les 
deux champs qui portent les noms de la Ville-aux-Juifs, 
et du Moùtiers. Là, le sol recèle et rend fréquemment, 
quand le fer le soulève, une multitude de fragments an- 
tiques et de petits monuments, presque toujours enlevés 
aussitôt qu'ils sont découverts , dans un pays où les 
étrangers passent en si grand nombre. On y rencontre 
communément des briques et des tuiles romaines (1) , 
des poteries , des médailles , partni lesquelles celles de 
Claude et de Néron sont les^nlus anciennes ; on y a 

(1) Ces débris sont si communs , qu*on les asouyent employés 
comme matériaux dans les constructions modernes. 



(35) 

découvert aussi de ces meules géminées en lave qu'on 
croit avoir servi de moulins domestiques , des lampes 
et des figurines en terre cuite , des statuettes en bronze, 
et , ce qui est le plus rare , des fragments de stuc ornés 
de pemtures, à la manière de Pompei. Mais l'existence du 
viens romain sur cet emplacement est indiqué plus po- 
sitivement par des débris que les voyageurs n'enlèvent 
pas : de -nombreuses substructions, des assises de co- 
lonnes , des blocs de pierre qui durent appartenir à 
des édifices considérables , des sépultures chrétiennes, 
dont l'âge paraît remonter aux premiers siècles de 
l'Eglise dans les Gaules. 

Je ne puis omettre la découverte d'une voie romaine, 
près de laquelle on retrouva des portions d'une mo- 
saïque : cette donnée n'est pas sans intérêt par rapport 
à la question de géographie comparée. Ce n'est pas à 
Vichy que les traces de cette voie ont été observées , 
mais sur la rive gauche de l'Allier , au delà du village 
de Vaisse : on les a reconnues sur plusieurs points , 
dans la forêt de Montpensier, et sur tout le trajet de 
Vaisse à Effiat, où le béton romain sert de fondement 
à la route moderne. On peut croire que c'est bien 1^ la 
voie marquée sur la Carte de Peutinger, qui condui- 
sait d'Augustonemetum à Lugdunum. Elle devait tra- 
verser YElaver, l'Allier, à Aquœ Calidœ, et une tradi- 
tion populaire parle d'un pont de César , qu'on y re- 
connaissait, dit-on, il n'y a pas encore un fort grand 
nombre d'années, ma j§ dont il ne subsiste plus rien 
aujourd'hui. 

Cest aussi à l'extrémité de ce même champ de la Villo- 
aux-Juifs , et vers la source Lucas , ainsi appelée du 



(36) 

nom d'un médecin inspecteur des eaux, qu'ont été re- 
trouvés les seuls restes conservés jusqu'à nos jours de 
Tantique établissement thermal ; ilâ ne consistent qu'en 
un seul puits en béton , sans aucun revêtement, mais^ 
qui est indubitablement de construction romaine. Ce 
puits fut reconnu, et l'on descendit même au-dessous 
en 1844, lorsque l'on exécuta des travaux entrepris 
pour dégager le passage de cette source , dont le'volume 
s'est accru considérablement depuis lors. Comme rien 
de semblable ne saurait exister aux autres sources do 
Vichy, qui sont au nombre de six, on pourrait en con- 
clure , ce semble , que celle-ci est la seule dont on au- 
rait fait usage à l'époque romaine (1). 

J'ai parlé de terres cuites recueillies dans cette loca- 
lité. Plusieurs représentaient Vénus- Anadyomène, et 
peut-être le culte de cette divinité n'était-il pas sans re- 
lation avec celui des eaux. Quelques autres figuraient 
des bras humains j et celles-ci méritent surtout d'être 
mentionnées. Outre les notions que nous pouvons glaner 
chez les auteurs anciens , une foule de petits monuments 
nous apprend encore mieux que les païens avaient cou- 
tume de consacrer à leurs dieux des têtes , des mem- 
bres , des figures entières en argile (2), semblables aux 

m 

(1) C'est Topinion vers laqueUe penche M. Prunelle , obserrateur 
attentif et judicieux de tous les détails topographiques : il réserve 
toutefois la possibilité que d'autres sources aient été comblées 
dans la suite , par l'incendie dont j'ai fait mention. 

(2) On peut voir l'ouvrage de Toisasini , De donariis et kMUs 
voiiviS'Viiol, 1639, in-4^.— Dansle tome I. de la Revue archéologique, 
pp. 458-461 , pi. 13, M. de Longpérier a donné le dessin et la des- 
cription d'un ex voto plus curieux que tout ce qui était connu en ce 
genre , et que j'indique volontiers ici. C'est une figurine en bronze 



( 37 ) 

offrandes en cire que .l'on voit appendues dans nos 
églises j près de quelque chapelle objet d'une dévotion 
plus populaire. Gomme celles-ci , c'étaient les ex vota 
des pauvres , tandis que des autels en marbre ou en 
pierre étaient ceux des personnes plus favorisée de la 
fortune. Trouvés près des sources minérales , les uns 
et les autres peuvent être des monuments de la recon- 
naissance des malades , qui avaient été guéris ou sou- 
lagés par leurs eaux. 

Je n'ai à citer qu'une inscription de Vichy , la seule 
peut-être que les fouilles y aient fait retrouver ; encore 
n'existe-t-elle pas sur les lieux mêmes , mais àCusset^ 
près de là , dans le cabinet d'un curieux dont j'ignore 
le nom. Elle n'appartient pas à la classe des autels 
votifs dont je viens de parler, mais à celle des pierres 
sépulcrales , bien qu'elle n'exprime aucune des formules 
funéraires. En voici la copie que je dois à M. Prunelle : 

D.ANTONIO 

D. F. TER 

VHBICO 

ARELAT 

Ce monument, inédit je crois, d'un habitant d'Arles 

d'un travail fortsoîgné> avec les jeux en argent, qui représente un 
borome assis sur un siège , les cuisses et les jambes enveloppées 
d'une longue draperie : la tète exprime la souffrance, le torse et 
les membres sont dans un ét|^ d'amaigrissement qui ne peut être 
que le résultat d'une longue et cruelle maladie. Ce petit monument 
d'origine grecque, ainsi que l'atteste Finscription gravée sur la 
draperie, a été trouvé dans l'Aisne. Le même savant rappelle à cette 
occasion un autre ex voio rapporté de la Grèce et fort singulier > 
une jambe de plomb suspendue à une chaine d'or. 



(3«) 
me parait offrir auprès de ces tliermes un intérêt qu'il 
n'aurait pas ailleurs, tl est permis de conjecturer que 
l'espérance de rétablir sa santé avait conduit aux eaux 
cet étranger, destiné à s'éteindre loin de sa belle pa- 
trie, laissant un cippe funèbre au lieu d'un autel aux 
nymphes. 

AQUuE CONVENARVM. 

Ces eaux prenaient leur nom d'un peuple qui habi-- 
tait le pays, appelé plus tard Comté de Comminges (1), 
Elles ne sont pas marquées sur la. Carte de Peutinger j 
mais elles n'ont pas été omises dans l'Itinéraire d'An- 
tonin , qui les place sur une voie tendant des Aquœ 
TarbellicoBy Dax, à Tolosa, Toulouse. Ce lieu y forme 
une station entre Oppidum novum, qui parait être 
Naye ou Nai^^, eiLugdunum Convenarum^ dont la posi- 
tion à saint Bertrand de Comminges ne saurait être 
l'objet d'un doute (2). 

M. Walckenaer croit reconnaître l'emplacement des 
Aquœ Convenarum à Bagnères-de-Bigorre (3). D'Anville 

(1) Les Convenœ paraissent avoir été appelé ainsi du yerbe 
cQUvenire , parce qu'ils s'^étaient formés de diverses populations de 
l'Espagne , réunies dans leur nouveau pays par Pompée. Voici ce 
qu'en dit saint Jérôme (Opp. tom. IV, part. 2, col. 232)» qui en fait 
un sujet de reproche à Vigilance, né dans ces cantons, à Calagorris .« 
yimirum respondet generi siu) , ut qui de latronum et Convenarum 
nattts est semine , quos Gn. Pompeius edomiia Hispania , et ad triumr' 
phum redire festinans, de Pyrenceijugif deposuit et m unum oppidum 
congregavH, unde et Convenarum urbs nomen accepii. Hucusque 
latrocinetur contra Ecchsiam Dei , et de Vectonihus , Arrebacis Cet-, 
tiberisque descendens , incurset Galliarum Ecclesias , etc. 

(2) Vet, Roman, itinerar. , ed Wesseling , p. 457. 

(3) Géographie anc. des Gauhs, tom lU, pp. lOS et 101>. 



(39) 

aussi parait avoir incliné d'abord vers celte identité ; 
mais il y avait renoncé, trouvant les eaux de Bagnères 
trop avancées dans l'intérieur de la Bigorre , ce sont 
ses expressions. Il s'était donc rejeté sur Capbem ou 
Capvern , village des Hautes - Pyrénées , qui a encore 
de nos jours des sources chaudes et un établissement 
de bains (1) ; toutefois il jugeait exagéré le chiffre de 
XVI , marqué dans l'Itinéraire comme évaluation de la 
Aisisjïce entre Lugdunum et les Aquœ Convenarum{^). 
Mais d'Anville se trompait , pour avoir vu des lieues 
gauloises dans les milles de l'Itinéraire. M. du Mège, 
qui a sur les géographes de cabinet l'avantage que peut 
donner une parfaite connaissance des lieux, avait admis 
il y a long-temps l'identité des Aquœ Convenarum avec 
Capvern , et justifié l'Itinéraire des reproches de d'An- 
ville (3). Des années d'études à ce sujet n'ont en rien 
modifié l'opinion du fondateur du musée de Toulouse, 
et dans une lettre qu'il a bien voulu m'adresser récem- 
ment pour quelques indications de localités, il termine 
ainsi ce qu'il me dit de Capvern : « Comme point géo- 
» graphique , on ne saurait rechercher ailleurs les 
» Aquœ Convenarum. » 

Toute cette contrée est une des plus riches en mo- 
numents romains. D'après ce que m'écrit M. du Mège, 
les environs de ce lieu conservent des vestiges de voies 
antiques et de retranchements ; à Capvern même on a 

(1) Notice de l'ancienne Gavle , p. 76 ; et encore p. 206 , au mot 
Casifwmagus. 

(2) Ibid. 

(3) Monuments religiettxdes Volces-Tectosages, Paris» 1814, iii-8<)« 
p. 99. 



(40) 

trouvé beaucoup de médailles romaines. Mais il ne 
parait pas qu'on y ait découvert dès inscriptions y non 
plus que des traces, des thermes antiques. Ces bains 
furent long-temps négligés, et il n'y a pas un grand nom- 
bre d'années qu'ils ont repris quelque faveur : on peut 
croire que tout ce qui appartenait à l'époque romaine 
a été complètement détruit. 

AQVM HELYBTICJE. 

A l'occasion de l'expédition de Cœcina contre les 
Helvétiens, Tacite mentionne, sans le nommer, un lieu 
de ces contrées très fréquenté et devenu considérable, 
à cause de ses eaux salutaires à la santé : Direptus 
tonga pace in modum municipii extructus locus 
amœno salubrium aquarum u$u frequens (1). Cesi 
celui que d'Anville a placé sur sa carte des Gaules avec 
le nom d^Aquœ Helveticœ (2). Mais cette désignation, 
que j'ai conservée ici pour éviter toute confusion , ne 
peut être considérée comme le nom authentique de ces 

(1) Hisi. i , 67. 

(2) Notice delà Gaule, p. 76.— D'autres l'ont appelé ÀquœUrlfigenœ, 
oa VerbigewB; étendant ainsi outre mesure , ce me semble , le terri, 
toîre du Pagia auquel César donne ce nom {De Bell. GalLl, 27) ; 
Ritter (Antiqtdtés de la Suisse, p. {f et non pas 3), cité mal à propos 
par Oberlin sur'cet endroit de César, a employé en effet passagère- 
ment cette désignation , mais sans la discuter , et surtout sans la 
justifier par des inscriptions , ainsi qi|^n Ta allégué. La chose eût 
été difficile. Un autel antique a bien été découvert à Soleure, avec 
la consécration : genio : : : yrbig. (Orelli » Inscript. HetveU, n.210y 
p. 67) ; et cela suppose que ce canton faisait partie àxkpagtts Vrbi- 
gmus; mais on ne connaît jusqu'à présent aucune inscription où 
se lise le nom des prétendues A^tœ Urbigenœ. 



(41 ) 

eaox dans l'âge romain ; un monument, le seul qui 
puisse nous instruire à cet égard , nous donne lieu de 
penser que ce nom était "simflemeni Aquœ, puisque 
les habitants y sont appelés Aqtienses. Ce nom se re- 
trouve traduit dans celiii du lieu moderne où l'on re- 
connaît généralement ces thermes antiques, Baden 
sur la Limât, dans le canton d'Argovie (1); car le mot 
Bdden en allemand désigne des baitis , de même que 
fa/Â en anglais (2^). - 

C'est en effet aux environs de cette ville , à WeUingen, 
qu'on a découvert l'inscription où se lit l'adjectif ethni- 
que aqvensi^. Celle-ci est de plus d'un grand intérêt > 
en ce qu'elle rappelle l'érection d'un temple à Isis par 
un magistrat de l'antique Baden, et la participation de 
sa femme et de sa fille à la décoration de cet édifice , pour 
une somme de cent deniers. Elle est ainsi conçue (3) : 

D£A£. ISmi. TEMPLV1I.À. SOLO 
L. ANNVSIVS. MAGIANVS 

DE. svo. posyrr. vm. ÀQVENs. B 

AD.CVIVS.TEMPLI. ORNAMEISTA 
ALPINIA. AIPINULA. CONÎVNX 
ET. PEtŒGRINA. FUL. XC. DEDE 
RVNT. L. D. D. Vie ANORVM (4) . 

(1) D'Anyille, loe. laud, — Walckenaer, (iéograpkie des Gauler , 
tom. I, p. 313. 

(2) Les eaux de Bath, rendez-rous célèbre du monde fashîonable 
de la Grande-Bretagne^ son^niyant toute apparence lesAqwpSolis 
de ritinéraire d'Antonin (éd. Wesseling^ p. 486) : on y a retrouvé 
de nombreuses antiquités romaines. 

(3) Orellî, Inscript, HelveU, p. 83, n^ 264 ; Inscript, sel,, tom. I^ 
p. 131 , nO 457, 

(4) Le savant et judicieux collecteur que j'ai cité propose à la 



(42) 

J'ignore si cette ville possède encore quelques restes 
reconnaissablesde ses anciens thermes, les seuls de l'Hel- 
vétie qui paraissent avoir été connus des Romains (1) ; 
mais on sait que beaucoup de monuments et de débris 
y ont été retrouvés. L'inscription que je viens de trans- 
crire n'est pas la seule qu'on y connaisse : on peut 
indiquer aussi une colonne milliaire qui porte le nom 
de Trajan , une inscription votive à Mithra , une autre 
où se lit le mot mercvrio , qui paraît être là le nom d'un 
homme, plutôt que celui du dieu fils de Maia (2). En 
fait de monuments d'une autre nature, Altmann men- 
tionne des patères , des figurines en bronze représen- 
tant divers animaux , des monnaies romaines , des 
pierres gravées, etc. (3). La découverte la plus singu- 
lière est celle d'un nombre prodigieux de ces dès à 
jouer qu'on appelait tesserœ lusoriœ, tous en os, mais 
la plupart fort au-dessous de la grosseur des nôtres, 
et de ceux que l'on trouve communément. Ces petits 
objets, qui ne s'étaient jamais vus en si grande quan- 
tité, ont fort occupé la curiosité des érudits de la 
Suisse (4). On ne peut s'étonner que les jeux de hasard 
servissent à occuper les loisirs de tant d'oisifs qui fré- 

3^ ligne rintercalation de vi avant tir , ce qui donnerait le titre 
d'un de ces magistrats locanx appelés seviri ; le b , fort usité en ce 
sens sur les médailles grecques, indiquerait.que Magianus en exerçait 
les foncjtions pour la seconde fois. 

(1) Àltmann , De Tesseris Badœ HelvéOùrum erutis, dans le JUtueum 
HelvetUmm, part. XXVI , p. 832. 

(2) Orelli , Jnscript. Helvet,, nn. 256-258., pp. 80 et 82 ; Inscript. 
seL, tom. I. p. 130, nn. 449—451. 

(3) Op. laud. , p. 333, 

(4) Altmann , op. laud. 



(43) 

quentaient les bains , et cela semble s'expliquer encore 
mieux dans des contrées qui touchaient à la Germanie 
par le territoire j et sans doute aussi par les mœurs (1). 



ÀQVM MATTIACjE. 

La nation' germaine des Catti avait pour capitale la 
ville de Mattium, dit Tacite : Cœsar incenso Mattiç 
(idgenti caput) aperta populatus vertit ad Rhenum(^). 
Ptolémée l'appelle MaTTtaxov (3) , et on lit dans une 
inscription civitatis, mattiacobvm (4). De là sans doute 
est venu le nom des Mattiaci, nommés plusieurs fois 
par le même historien (5), et dont le territoire parait 
s'être étendu depuis cette ville jusqu'au Rhin , vis-à-vis 
Moguntiacum , Mayence. 

Il existait chez ces peuples des eaux minérales , AqUœ 
Mattia^cœ comme les appelle Âmmien Marcellin (6). 
Mais cet historien ne donne aucun indice qui puisse 
nous aider à en déterminer la position précise. On ne 
trouve rien de plus à cet égard chez Pline, quoiqu'il 

(1) D'après Tacite {Germ,1\) les Germains paraissent le peuple de 
l'antiquité le plus adonné à la passion du jeu , maladie des sociétés 
modernes, et de notre siècle surtout. Aleam fquod mirerej , dit^il, 
sobrii inter séria exercent, tanta Ittcrandi perdendive temeritate, ut 
cum omnia defecerunt , extremo ac novissimo jactu de libertate et de 
corpore contendant, 

(2) 4nnaL 1 , 56. U parle de Gerraanicus. 

(3) Geograph. Il, ±0 (^. 

(4) Orelli, Inscript, lat, sel, tom. 11, p. 426, n. 4983, Les uns 
croient que c'est Marpurg ; d'autres ^ Kassel, 

(5) Hi«MV, 7; Germ. 20. 

(6) Rer. Gest.XXlX,^. 



( 44 ) 

parle avec quelque détail de ces sources thermales, des 
pierres ponces qui s'y formaient , et de la propriété 
singulière dont les eaux qu'on y puisaient étaient douées, 
celle de conserver leur chaleur trois jours durant : Sunt 
et Mattiaci in Germania fontes calidi trans Rhenum , 
quorum haustus triduo fervet. Cire a margines ver a 
pumicerfi faciunt aquœ (1). Les géographes modernes 
s'accordent assez à regarder ces eaux comme étant celles 
de Wisbaden dans l'état de Nassau (2) ; le principal 
motif de cette détermination est peut-être la difQculté 
de leur assigner une autre place. 

Si l'on en croit Fréret, cette ville serait entièrement 
dépourvue de monuments romains , ce qui lui parais- 
sait un motif pour ne pas admettre l'opinion commune 
sur la position des Aquœ Mattiacœ(^). J'ignore com- 
plètement si depuis la première moitié du xvnr® siècle, 
on y a fait des découvertes de quelque importance , et 
notamment quelques vestiges d'un antique édifice ther- 
mal. Seulement je rencontre dans un recueil une ins- 
cription exhumée à Wisbaden même , en 1778, et qui 
parait relative à des travaux d'utilité publique exécutés 
par la vnr* légion. Je la donne ici telle que je la trouve, 
sans aborder les difficultés que présentent les cinq pre- 
mières lettres, dont peut-être il faudrait accuser, en 
partie , l'inexactitude du copiste (4) : 

(1) iVal. Aw<. XXXI,2(17). 

(2) D'Ànville, Notice delà Gaule, ^. 21%rWalckenaer, Géographie 
des Gaules, tom. II , p. 294. 

(3) Mém, de V Académie des Inscriptions, tom. XIV. hist., p.l5S. 

(4) De Hupsch , Epigrammatograph,, part. I , p. 52, n. 28. 



(45) 

PEDNT. TBEYEROR 

VM. P. LXXXVI 

SVBCVR. AGENTE. CRES 

CENTINO. RESBECTO. C 

LEG. VUI. AVG 

D'Anville a mentionné ces eaux (1), bien qu'elles 
n'appartinssent pas proprement à la Gaule, mais aux 
établissements que les Romains avaient formés sur la^ 
rive orientale du Rhin , et qu'on ne sait guère comment 
classer. J'ai cru que je pouvais suivre en cela l'illustre 
géographe. 

AQUjE neriomàgienses. 

\ 

La Carte de Peutinger désigne ce lieu par l'abrévia- 
tion Aquœ Neri, et sans l'adjonction de l'édifice carré (2); 
circonstance exceptionnelle dont le manque d'espace 
peut seul rendre raison , puisque nous savons , et par 
ce nom même /et d'ailleurs encore, qu'il possédait des 
eaux minérales. 

Cette mansion y figure sur la voie qui conduisait 
(TAvaricum y Bourges, k Augustonemetum , Clermont, 
entre Mediolanum , que l'on croit être Chàteau-Meillant , 
et Canlilia, nommée par saint Sidoine Apollinaire (3), 
laquelle est bien certainement Chantelle-la-Vieille. Je 
ne suivrai pas. d'An vUle dans l'examen des mesures as- 
signées aux intervallespqui séparent ces diverses sta- 

(1) Notice de la Gaule , p . 211 . 

(2) Segm. I , b. 

(3) EpwMV, 13. 



(46) 

lions (1). J'aime mieux rapporter une inscription iti- 
néraire qu'il n'a fait qu'indiquer , et qui nous donne 
plusieurs noms locaux. Elle se lisait sur une colonne 
milliaire découverte à Alichamps, qui paraît avoir été 
un point intermédiaire de cette route romaine ; la voici 
telle que la donne Caylus (2) , incomplète de la première 
ligne, où se trouvaient les noms de l'empereur régnant : 

FEUCI.ÀVG.TRIB.P.COSJII 
P»P»PROCOS»AVAR.L.Xmi (3) 
MEDI.XILNERI.XXV 

De la direction de cette voie , des distances marquées , 
bien qu'elles présentent plus d'une difficulté, on a 
conclu que l'emplacement de cette mansion romaine se 
retrouve, comme son nom, àNeris, bourg du dépar- 
tement de TAllier, dont les eaux thermales conservent 
encore de nos jours leur ancienne célébrité (4). 

je reviens au nom antique de ce lieu. D'Anville a 
cru pouvoir substituer Aquœ Nerœ à YAquœ Neri de 
la Carte (5) : c'est à tort (6) , et de plus sans autorité , 

(1) Notice dé la Gaule, p. 77. 

(2) Recueil éH antiquités , tom. III ^ p. 371. Il mentionne encore 
(p. 374) une autre colonne trourée au même endroit, et qui avait 
dû être placée une lieue plus près de Bourges , mais dont Tinscrip- 
tion plus maltraitée ne laissait lire que ces mots : ayar. l.xiii. 

(3) Le mol procos doit avoir été mal lu. 

(4) D'Anville, Notice de la Gaule, loc. laud.^Walckenaer, Géa^ 
graphie ancienne des Gaules, tom. I , p. 372 ; tom. III, p. 66, etc. 

(5) Loc, laud* ^ 

(6) Il aurait dû dire au moins Neriœ , le nom de Nerius qui appar- 
tenait à une famille romaine , dont nous avons des médailles consu- 
laires, pouvant être celui du fondateur, du restaurateur ou du patron 
des thermes qui existaient en ce lieu. 



(47) 

puisque le nom de ce lieu ne se lit chez aucun auteur 
ancien. Seulement saint Grégoire de Tours nous donne 
plus tard Tadjectif ethnique : ad vicum Nereensem. . . 
Arehipresbyter Nereensîs vici (1); mais il était déjà 
altéré à cette époque. Il est certain que les habitants de 
ce lieu au temps de la domination romaine furent ap- 
pelés Neriomagienses , d'où Ton doit conclure que le 
vrai nom de ce viens était Neriomagus, ou Aquœ, 
Neriomagienses , et que le mot Neri de la Carte n'est 
qu'une abréviation, ainsi que je l'ai supposé. Tout cela 
résulte de cette importante inscription trouvée à Néris 
même , et qu'on y conserve encore 

" NVMINIBVS 

AVGVSTORVM 

ET.IVNONIBVS 

VICANI 

NERIOMAGIENSES 

(1) Vit. pair. IX , 2 et 3. 

(2) Baraîlon avait donné cette inscription, p. 142 de ses Recherches 
sur Vandenne ville romaine de Neris, qnî font partie (pp. 115—197) 
des Recherches sur plusieurs monuments celtiques et romains, Paris, 
,1806, in-8^. Ayant peu de confiance en cetéoriyain, celtomane, 
systématique et inexact dans ses citations , j'ai demandé des in- 
formations sur les lieux , et j'ai appris que ce monument trouré 
en 1776, et placé alors dans un mur du Prieuré, puis transporté au 
presbytère du lieu , existe aujourd'hui dans une petite yilla appelée 
lesBilloux, à quelques minutes du bourg de Neris. Plusieurs copies 
m'en sont parvenues de divers cotés : dans la plus soignée , que je 
dois à l'obligeance de M* le curé actuel de Neris , je vois que le t 
d'AVGVSTORVU dépasse en auteur les autres caractères et que les 
lettres ha de neriomagienses forment une ligature que la typo- 
graphie ne peut reproduire. 



(48) 

Ce monument ne doit pas être antérieur aux Àntonins , 
et plus vraisemblablement il appartient à l'époque de 
Septime Sévère. Quant au culte des Junones, qui étaient 
une sorte de génies femelles (1), attachés spécialement 
à certaines localités (2) , il se peut qu'il ne soit pas ici 
sans quelque l'apport avec celui des sources thermales. 

Ce lieu témoigne de son ancienne splendeur par le 
grand nombre et la variété des monuments, ou débris 
romains qu'il a restitué à diverses époques. Vers Kmi- 
lieu du siècle dernier , Caylus en a signalé plusieurs : 
des aqueducs , des médailles , des lampes , des urnes , 
des statuettes en bronze, des traces dévoies romaines, 
etc. (3). Mais le plus remarquable était un théâtre, à 
peu près ruiné de fond en comble, les pierres même 
des gradins ayant été enlevées pour servir de matériaux 
aux maisons du voisinage. Les restes, toutefois en 
étaient encore fort reconnaissables , ainsi qu'on peut en 
juger d'après le plan qu'en a donné l'illustre anti- 
quaire, et son hémicycle avait, suivant ses mesures, 
20 toises de rayon (4). Un tel édifice , dans un simple 
viens f devait surtout être destiné aux plaisirs des 
étrangers que ses thermes y réunissaient. 

Barailon, au commencement de ce siècle, a parlé des 
monuments de Néris avec plus de détails. On y avait 
trouvé , et l'on y trouvait fréquemment , dit-il , des 

(1) Gomme les Maires , Matronœ , Suleviœ , Campestres, 

(2) On lit dans quelques inscriptions : ivnonibu^ montanû — 
iVNONi. PAGi. FORTVNENSis ; etc. (Ore|^, Inscript. seL, nn. 1324, 
1325, lom.I, p. 277.) 

(3) Recueil tt antiquités , tora. IV, p. 369. 

(4) Jbid. pi. ex. , p. 367. 



( 49 ) 

tombeaux, des vases d'argile ou de verre, des médailles, 
des terres cuites , des meules de moulins domestiques , 
des ustensiles et des fragments en bronze, et, ce qui 
est plus rare , des morceaux de verres à vitres , 
etc. (1). Il indique aussi divers ouvrages de Tart anti- 
que : une mosaïque , des débris de peintures murales 
et des vases peints ; des pierres gravées , des figurines 
en bronze, notamment une Diane d'un mètre de hau- 
teur, et une autre statue assise représentant Flore , ou 
l'Abondance, mais en pierre et d'un travail grossier (2). 
Comme Caylus , il a signalé des vestiges de voies ro- 
maines; et de plus, quantité de débris de construction, 
des briques , des tuiles , des fragments de colonnes , de 
chapiteaux , de pilastres ornés , des naarbres de diverses 
espèces , et des restes de bâtiments , répandus sur un 
terrain dont l'étendue peut faire juger de l'importance 
de ce lieu (3). Tels sont ceux d'une tour, ceux d'un 
monument découvert en 1780', qu'on jugea être un 
temple , une cour entière pavée en pierres de taille , 
ceux enfin d'un édifice formé de deux rangs de petites 
cellules , avec un large passage qui les séparait : celui- 
ci paraît avoir appartenu à l'établissement thermal, 
quoique Barailon veuille en faire une caserne (4). 

En fait d'inscriptions, il a donné, je crois, tout ce qui 
existait à Neris ; c'est-à-dire , celle que j'ai rapportée 

(1) OpAaud.y nn. 2, 6, 37, 39, 43 , 46 , 63 , etc. 

(2) ibid,, nn. 6, 18, 46, a», 53. 
(3)i&trf., nn.84— 92. 

(4) Ihid,, nn.7, 21, 22, 23, 27, 33, U, 36, 87, 62, elc. 



(50) 

ci-dessus ; cette autre qui parait en être la répétition 
en sigles (1) : 

NBS. AGM. ET. IBS. VNL. NGS. 

et enfin quelques fragments , qu'on lisait sur des pierres 
trouvées dans les fouilles , et employées depuis à cou- 
vrir le grand aqueduc. Tout ce qu'on a pu déchiffrer 
sur ces débris, sans liaison apparente entre eux, con- 
siste dans ces mots , qu'il croit être des noms de divi- 
nités topiques : nennerio. — ovh. — vissv(2). 

Depuis cette époque, en 1820, si je ne me trompe, 
des découvertes fort importantes ont été faites à Nerîs. 
Comme on déblayait le sol pour la construction d'un 
nouvel établissement thermal , sous des atterrissements 
qui s'étaient singulièrement élevés depuis des siècles, 
on rencontra les anciens thermes revêtus de dalles en 
marbre blanc , des bains de vapeur semblables à ceux 
qu'on voit encore à Aix en Savoie , enfin tous les tra- 
vaux exécutés autrefois, par les dominateurs de la 
Gaule , pour l'utilité de ces eaux et l'embellissement des 
lieux. On crut même reconnaître une naumachie , ce qui 
n'était peut-être qu'un vaste bassin destiné pour la na- 
tation , comme on en voit auprès d'autres eaux therma- 
les (3). Il eut été facile, dit-on, de restaurer ces thermes 
romains, avec des frais bien inférieurs à ceux que coûte 
l'établissement moderne, qui n'est pas achevé. On aima 
mieux les détruire, ou les enfouir de nouveau sous le 

(1) Op. Laud,,, n. 57. 

(2) Bid., n. 58. On peut remarquer toutefois que les dernières 
lettres du premier fragment sont le commencement du nom du lieu. 

(3) Inf, à Aqiiœ Nisineii, 



( 51 ) 
bâtiment qu'on élevait. Cependant des restes assez nom- 
breux de ces richesses archéologiques échappèrent à 
la destruction : ce sont des fragments de statues, des 
portions de colonnes, des chapiteaux et autres orne- 
ments d'architecture , conservés aujourd'hui, soit dans 
l'édifice des nouveaux bains, soit au lieu appelé les 
Billoux, que j'ai déjà mentionné. 

AQUuE mSlNElL 

L'édifice carré se voit sur la Carte de Peutinger auprès 
de ce nom, qui peut être celui de quelque personnage 
distingué : il y désigne la première mansion après De- 
gêna y la Decelia ou Décida de l'Itinéraire, aujourd'hui 
Décise, sur une voie partant (TAvaricum , Bourges, pour 
arriver à Augustodunum y Autun (1). Quoique les éva- 
luations des distances puissent souffrir ici quelques 
difficultés dans leur application aux lieux modernes, 
les Aquœ Nisineii sont regardées généralement comme 
n'étant autres que les bains de Bourbon-Lancy , Saône- 
ct-Loire (2). 

Autun n'ayant point d'eaux thermales dans son en- 
ceinte ou ses alentours , c'est apparemment des sources 
de Nisineius qu'il faut entendre ce qu'Eumène disait à 
Constantin, en lui signalant chez les JEdui des eaux 
chaudes d'une pureté admirable : Miraberis profecio 
illam quoque numinis tuisedeiriy et calentes aquas sine 

m 

(1) Segm. I, d. 

(2) Valois, Nolii» Galliar,, p. 104, a.— D'Anville, Notice fie la 
Gaule, p. 78. — Walckenaer, Géographie des Gaules, toni. I , p. 372 ; 
tom. m, p. 68. 



(52) 

tdlo soli ardentis indiciOy quarum nulla tristitia est 
saporis aut halitus , sed talis hauslu et odore sinceri- 
tas y qualis fontium frigidorum (1). Dans un passage 
précédent , dont l'intention me semble une leçon assez 
impertinente au jeime prince , le rhéteur fait supposer 
qu'elles étaient consacrées à Apollon , qui par leur vertu 
punissait 9 disait-on, les parjures : Jam omnia te vocare 
ad se templa videantur , prœcipueque Apollo nos ter ^ 
cujus ferventibus aquis perjuria puniuntur , quœ te 
maxime opportet odisse (2). 

Des fouilles exécutées à Bourbon -Lancy en 1580, 
1602, 1608 et 1680 avaient fait reconnaître de nom- 
breuses traces des maîtres du monde, et des restes im- 
portants de l'établissement thermal dont ils avaient doté 
ce lieu .Voici quelques renseignements donnés parMorêri 
à ce sujet. « Les eaux sortent d'un rocher sur lequel 
» la ville est assise (3), et tombent dans des bassins dont 
» la structure est un ouvrage des Romains, qui fai- 
» saient grand cas des eaux minérales de Bourbon. 
» Quelque désordre que la suite des années ait pu ap- 
» porter aux édifices des fontaines et des bains de ce 
» lieu , on y voit encore de beaux restes qui font connaî- 
» vre la richesse de la matière et les ornements de l'ar- 
» chitecture romaine. Les bassins sont composés de gros 

(1) Panegyr. vei, , Oral. VI , 22. 

(2) Ibid. , 21. Il est à regretter qu'il ne donne aucun détail snr 
cette croyance superstitieuse , qui semble indiquer quelque chose 
de semblable à nos épréUves du moye||;âge. Ses commentateurs ont 
réuni quelques autres faits analogues. 

(3) Il s'agit de la yille moderne : la yîlle romaine était dans un 
vallon , et se fait reconnaître par des débris de tuiles , de briques , 
de pierres, etc., qu'on ne rencontre point à Bourbon même. 



(53) 

» quartiers de marbre blanc ; et leur pavé , aussi bien 
» que celui des bains ^ est de marbre gris. Toutes les 
» statues qui ornaient ces bains étaient aussi de marbre 
» blanc. Les murs, les marches, les niches et les autres 
» ouvrages d'architecture étaient revêtus de tables de 

» marbres de différentes couleurs Des cinq bains 

» qui sont à Bourbon , on en a déterré trois depuis peu 
» de temps, et parmi ces ruines, ainsi que dans celles 
» des bains qu'on avait fouillés auparavant, on a trouvé 
» plusieurs fragments de colonnes , de corniches , de 
ï» statues, de pavé à la mosaïque, et quantitt^ de mor- 
» ceaux de jaspe , de porphyre, de bronze et d'airain. 
» On eh a retiré une statue entière que le Roi a fait por- 
» ter au JLouvre , dans la salle des Antiques. Il s'y est 
» aussi trouvé diverses médailles d'or , d'argent et de 
» bronze , qui représentent les effigies de Jules-César , 
» d'Auguste et d'autres empereurs (1). » 

A ces données , je puis en ajouter de plus précises 
et plus récentes, dont je suis redevable à l'obligeance 
de M. le docteur Auguste Robert, qui, établi à Bourbon- 
Lancy depuis quelques années, s'occupe avec zèle et 
sagacité des monuments antiques de cette ville. Je citerai 
aussi, ou par extrait, ou par analyse, les lettres qu'il a 
bien voulu m'adresser. « Des trois bassins de construc- 
» tion romaine , me dit-il , découverts aux époques de 
» Catherine de Médicis et de Henri iv, il n'en reste 
» plus qu'un de forme ronde, pavé en marbre et servant 
» de réservoir pour #Rmenier les cabinets de bains. 
» Autrefois , il était couvert d'une voûte en forme de 

(1) Dict, hisL , au mot Bourbon-Lancy. * 



( U ) ■ 

» dôme , percée de plusieurs ouvertures , et entièrement 
» en marbres, porphyre, granit, etc. ; dans son intérieur 
» étaient douze niches à gradins, sur lesquels étaient di- 
» rigés des filets d'eau thermale formant douche. Les 
» deux autres bassins étaient de forme quadrangulaire 
D allongée , plaqués en marbre de diverses couleurs, re- 
» posant sur un béton fort épais: ils servaient aux bains 
» et à la natation. Sur leur emplacement , on a construit 
» les bâtiments qui existent aujourd'hui. Près du grand 
y> bassin sont plusieurs puits : le principal qui est cir- 
» culaire , de 4 m. environ de diamètre, est construit en 
» gros moellons de marbre et de granit disposés en gra- 
» dins, de sorte qu'à 4 m. de profondeur, l'ouverture 
» qui donne accès à la source n'a plus que 50 c. de 
» diamètre. . . Les autres fontaines sont carrées et moins 
» profondes. Les aqueducs de décharge méritent une 
» mention particulière à raison de leur hauteur , lar- 
» geur et longueur : la pierre avec laquelle ils ont été 
» construits ne se trouve pas dans le pays , et semble 
» provenir des carrières de Nevers : il y a des blocs de 
» près de 3 m. de longueur. . . On sait que douze statues 
» en marbre furent enlevées par Richelieu ; d'autres 
» furent envoyées plus tard aux musées de Paris et 
» d'Autun. Les marbres, les colonnes, les chapiteaux, 
» furent transportés à Màcon en 1804 , etc. » 

M. Robert m'indique un aqueduc encore subsistant 
dans la campagne et parfaitement conservé sur une 
longueur de près de 100 mètrcS^: il servait à conduire 
à Bourbon des eaux potables, et l'on a songé à lui 
rendre cette première destination. Il mentionne aussi, 
parmi les débris ou monuments que l'on trouve, plus 



(55) 

OU moins fréquemment, à Bourbon , des fragments de 
mosaïques en pierres variées, ou en pâte de verre, dont 
il a recueilli en une année plus de quarante échantillons 
différents ; des médailles nombreuses , des poteries si- 
gillées en terre rouge avec les noms des potiers , dont 
l'un est gravé à la pointe, particularité rare sur les vases 
romains ; des figurines en terre cuite , une statue en 
bronze de Mercure , de 2 à 5 pieds de hauteur , qui a 
été envoyée à Autun ; enfin un phallus en pierre dé- 
couvert tout récemment. 

Si les inscriptions exhumées à Bourbon ne paraissent 
pas avoir été bien nombreuses , celles que Ton connaît 
sont des plus intéressantes , et se rattachent au culte des 
eaux thermales, comme celles de Bourbonne avec les- 
quelles elles ont une parfaite analogie : deux seulement 
ont été puWiées. La première, depuis long-temps con- 
nue , ayant servi de seuil à une porte , est aujourd'hui 
dans le plus triste état de dégradation (1) : on n'y peut 
plus lire que les deux lignes du commencement, et 
quelques lettres isolées apparaissent seules aux deux 
suivantes. Mais Courtépée dit avoir lu très-bien ces deux 
lignes en 1774. La fin de l'inscription ayant déjà dis- 
paru alors avec la partie inférieure de la pierre , il sup- 
pléa une cinquième ligne d'après des analogies, par 
conséquent avec une extrême vraisemblance (2) ; et si 
l'on veut ajouter la formule la plus ordinaire, on pourra 
trouver l'inscription complètement restituée dans la 

(1) En 1833, ce monument venait d'être mis à l'abri de nouveaux 
outrages; j'apprends que depuis lors il a été transporté à Paris. 

(2) Descript, du duché de Bourgogt^e, lom. IV, p. 380. 



(56) 

leçon suivante, adoptée , avec quelques légères différen- 
ces, par^M. Bei^er deXivrey que j'ai cité plus haut(l). 

PORVONI. ET. DAMONÀE 

T. SEVERIVS. MO 

DESTVS. OMNIB 

HONORIBVS.ET.OFFICnS 

ÀPVD.AEDVOS.FVNCTVS 

V^ S. L. M 

L'autre, trouvée en 1792 dans les fondations du 
château , restait ignorée depuis dix ans , quand Millin 
la publia (2) : aujourd'hui elle n'existe plus sur les lieux. 
A en juger d'après la gravure qui accompagne cette pu- 
blication , les caractères , maigres et peu agréables à la 
vue , sont trop bien conservés pour qu'on puisse hésiter 
sur l'exactitude de sa copie que je transcris : 

C. ÏVLIVS. EPOREDmiGIS. F. MAGIWS 
PRO. L. IVLIO. CALENO. FIUO 
BORMONIEEDAMONAE (3) 
VOT. SOL 

Millin veut que cet Eporedirix soit le Gaulois célèbre 
des Commentaires de César (4). La chose n'est pas im- 
possible, mais seulement incertaine, car ses desccn- 

(1) Lettre à JKf. Hase, pi. ni, p. 112. L'auteur jugeant trop grands 
les înteryalles aux lignes 3 et 4 » met après modestts la letttre f 
i^ilius) précédée de celle qui indiquerait le prénom supposé du père , 
et il substitue atqye à et. ^ 

(2) Explication éCune inscription du fils d* Eporedirix, dans ses Mo- 
numents antiques inédits, tom. I> pp* 146—1^6. 

(3) EE pour ET. 

(4) Op. laud., pp. 151—153. 



(57) 

dants purent conserver ce nom illustre ^ alors même 
qu'ils prenaient le nom de famille et le prénom du con- 
quérant des Gaules. Dans cette hypothèse, le fils de 
Magnus pouvait être ce Julius Galenus, tribun dans 
une légion qui , d'après Tacite , avait suivi lé parti de 
Yitellius , et appartenait par sa naissance à la cité des 
Mdui (1). Quoi qu'il en soit, nous retrouvons ici deux 
noms déjà observés sur les monuments de Bourbonne, 
et que nous avons jugé être ceux de divinités tutélaires 
des eaux thermales. Mais dans la dernière inscription 
nous lisons la variante de borhoni, au lieu de borvoni, 
de même que dans le nom de Bourbon-l'Archambault 
sur la Carte de Peutinger , Aquœ Bormonis. Ces don- 
nées se confirment et s'expliquent réciproquement. 

-En 1835, c'esî-à-dire depuis la lettre de M. Berger 
de Xivrey, on a découvert à Bourbon-Lancy une troi- 
sième inscription fort tronquée, où plutôt un court 
fragment d'une inscription 'qui devait être longue , à en 
juger par l'absence d€ tout ce qui paraîtrait nécessaire 
pour lier entr'elles les lignes mutilées qui subsistent. 
Voici ce fragment lapidaire , que M. Robert a bien voulu 
me communiquer : 

• • . • A.» EjSt* sac ■ • . • 

SILICA. V 

. . . RVONI. ET 

Je ne tenterai pas la restitution de ce monument épi- 
graphique : elle serait^ifficile et hasardée. Je ne vois 
guère ce qu'on pourrait tirer de la première ligne ; la 

(l)HwMII,3S. 



(58) 

seconde parait mentionner une basilique, car il est 
assez naturel qu'on y lise [ba]silica. Quant à la troi- 
sième, je ne saurais hésiter un seul instant à lire [bo]r- 
voNi, de même qu'à suppléer après la conjonction et 
le nom de damonae : les notions fournies par des mo- 
numents analogues justifient assez une telle conjecture. 
Ce fragment, où se reproduisent pour la cinquième fois 
les noms des deux divinités thermales, est loin, comme 
on voit, d'être dépourvu d'intérêt , d'autant qu'il forme 
à lui seul la somme de ce que Bourbon possède main- 
tenant de monuments écrits. Peut-être serait-il la plus 
curieuse des inscriptions de ce genre , si l'on parvenait 
quelque jour à retrouver les morceaux qui le complé- 
teraient : on ne doit pas en désespérer , et je souhaite 
cette bonne fortune à M. le docteur Robert. 

C'est le cas de remarquer que pour ce lieu , comme 
pour son homonyme du département de l'Allier (1), 
comme pour Bourbonne-les-Bains (2), l'étymologie des 
noms se trouve évidemment dans celui de la divinité 
ihermsle Bormo f on Borvo : il serait ridicule d'en cher- 
cher une autre. Je veux aussi rappeler à mes lecteurs 
l'explication donnée par Millin au surnom de Lancy , 
laquelle est bien préférable à celle que d'Anville avait 
proposée (5). « Ce nom , dit Millin, ne pourrait-il pas 

(1) Sup., p. 25. 

(2) Sup., p. 29. 

(3) ce On croit, dit l'illustre Géographe {Op, laud,, p. 78), qu'il en 
» est du surnom qui sert à distinguer^Bourbon-rAnci , comme de 
» celui qui distingue Bourboir-rArcbembaut , et que c'est le nom 
» d'un seigneur , d'un côté comme de l'autre ; Ancellus , ou Anceau, 
» à Bourbon-l'Anci , de même qu'Erchmbaldus , à Bourbon , qui 
» est surnommé l'Arcbembaut. » 



(59) 

» venir de Nisineius, dont ce lieu avait pris le nom 

» A'Aquœ JSisineii ? Je le croirais d'autant plus volon- 

» tiers que Rabelais écrit Bourbonnensy (1), et que 

» Pasquier dit Bourbon-Nansy (2). Il a été facile de 

» faire Nansi de Nisineii, et de prononcer ensuite 

» Lancy » (3). 

AQVjE onesim. 

Telle est , je crois , la version la plus convenable du 
grec de Strabon , rà tôv Ovyiguov 0gp[x.à, puisque dans 
des noms analogues^ donnés à des lieux qui possédaient 
des eaux thermales , les écrivains latins disent cons- 
tamment Aquœ , jamais Thermœ (4). C'est chez les 
Convenœ , et après leur capitale Lugdunum , que le 
géographe fait mention de ces beaux thermes , qui four- 
nissaient aussi une eau excellente à boire (5). 

Des critiques ont voulu , bien légèrement , que le . 
texte fut fautif en cet endroit, et au mot Ovtigiwv, qu'on 
ne lit point chez d'autres auteurs , ils ont proposé de 
substituer le nom des Convenœ, que Strabon avait 
écrit quelques lignes plus haut, Kovouévwv. Valois s'est 
empressé d'admettre cette prétendue correction , et en 
conséquence , il n'a vu ici que les Aquœ Convenarum 

4 

(1) Rabelais, II, 33. 

(2) Pasquier, Lettres, l,^\, 

(3) Op. ;au(2., p. 156. 

(4) Il existe , si je ne me trompe , une obseryalion de Varron à 
ce sujet : je n'ai pas su la retrouver. 

(5) Rer.geogr,, IV, 190, edit. Àlmelor., p. 290. 



(60) 

de ritinéraire (1). Je ne saurais reconnaître aucun 
motif pour rien changer au texte, que les éditeurs les 
plus recommandables ont respecté , qui d'ailleurs n'est 
démenti, que je sache, par aucun manuscrit; et tenant 
pour bien légitime le nom ^Aquœ Onesiœ, je dois 
chercher maintenant à en faire l'application à des 
thermes connus dans les contrées pyrénéennes. Privés 
que nous sommes des indications que fournissent le 
plus souvent la Carte de Peutinger , ou les autres itiné- 
raires, il faut ici procéder d'une manière différente, 
pour arriver à un résultat, si non absolument certain, 
au moins d'une extrême probabilité. 

Ce que dit Strabon de l'excellence des eaux des 
Onesii , et de la grande beauté de leur établissement 
thermal, car tel paraît-être le sens de l'épithète xàXXicrTa, 
peut nous faire juger que ces bains jouissaient à son 
époque d'une réputation fort répandue , et qu'ils étaient 
des plus fréquentés parmi ceux de la Gaule romaine. 
Ainsi , naturellement on doit chercher à les reconnaître 
dans quelqu'un des lieux de ces contrées , dont l'état 
actuel présente les traces les plus évidentes et les plus 
nombreuses, soit d'habitations romaines, soit d'une 
affluence considérable de visiteurs auprès des sources 
thermales qu'on y connaît encore. Nulle part, assuré- 
ment, ces conditions ne sauraient mieux se rencontrer 

(1) Notit. Galliar,, p. 159, a. — Une autre correction a été pro- 
posée : la seule addition de la lettre h au commencement de ce nom, 
en Féloignant peu du texte , reproduisit celui des Monesi de Pline 
(IV. 19). Mais pourquoi ne ferait-on pas serrir plutôt la leçon de 
Strabon à corriger celle du naturaliste, dont le texte, générale- 
ment , a été bien autrement maltraité par les copistes que celui 
du géographe grec? 



(61 ) 

qu'à Bagnères-de-Luchon , petite ville du département 
de la Haute-Garonne , qui a dû appartenir au territoire 
des Convenœ , et dont les eaux thermales ont retrouvé 
de nos jours une brillante célébrité. C'est donc là que 
je crois devoir placer les Aquœ Onesiœ du -géographe 
grec. Cette opinion n'est pas nouvelle : Valois la men- 
tionnait déjà y mais pour la repousser du tgn le plus 
décisif et le plus méprisant (1). On va voir qu'elle est 
fondée sur les indications monumentales les plus frap- 
pantes , et qu'il y aurait lieu de s'étonner , si le nom de 
thermes aussi fréquentés que ceux-ci le furent incon- 
testablement, avait pu échapper à tous les auteurs an- 
ciens dont nous possédons les écrits. 

Tout le pays qu'habitèrent autrefois les Convenœ est 
semé encore d'antiquités romaines , à commencer par 
leur Lugdunum , Saint-Bertrand, qui a enrichi le musée 
de Toulouse d'un grand nombre d'inscriptions et autres 
monuments. La vallée pittoresque de Luchon a eu aussi 
une grande part à ce trésor antique ; et la portio n de 
Bagnères eût été bien plus considérable , si ce lieu , ses 
édifices , ses sources même, n'avaient été ensevelis sous 
un de ces éboulements de terre et de rochers, fréquents 
dans ces pays, que les habitants appellent lavanges. 
Ce fait a été conjecturé par le président d'Orbessan , 

(1) Loc, laud, — M. Walckenaer n'a pas suiyî Valois à tous égards, 
car il admet le textfB de Strabon et reconnaît un peuple nommé 
Onesii ( Géogr, des Gaules , toni. I , p^ 306 ; tom. II , p. 239 ) ; mais 
il les place aux enyirons d Aagnères-de-Bigorre, et yeut que leurs 
thermes soit les mêmes que lès Aquœ Convenarum, Quant à Ba- 
gnères-de-Luchon , les marbres antiques qu'on y a trouyés ne lui 
paraissent rien prouyer, pas même « l'existence d'un établissement 
» thermal antique dans cet endroit » ! 



(62) 

académicien de Toulouse (1) : je n'ai aucun motif de le 
^évoquer en doute ^ et il expliquerait l'oubli dans le- 
quel restèrent long-temps les eaux de Luehon. Mais à 
l'époque où il écrivait , elles avaient attiré depuis quel- 
ques années l'attention de personnages distingués, et 
alors commença pour elles une ère nouvelle, qui les vit 
sortir de leur obscurité, et fît connaître la célébrité dont 
elles avaient joui anciennement. L'auteur que je viens 
de citer semble indiquer vaguement des restes de l'an- 
tique établissement thermal (2). Il est certain qu'en 
construisant celui qui existe aujourd'hui, on en trouva 
des traces fort reconnaissables, notamment des bassins 
revêtus en marbre. M. du Mège, qui me confirme ces 
faits, dans une lettre toute récente, ajoute : « il y a peu 
» de mois que l'on a découvert en ce lieu un vaste 
» bassin , une baignoire revêtue en plaques de marbre 
» qui faisait partie des thermes romains. » 

Mais ce qui distingue surtout ces thermes antiques 
de tous ceux qui ont été reconnus dans notre Gaule et 
ailleurs, ce qui prouve, mieux que ne le ferait aucune 
autre donnée, à quel point ils furent fréquentés aux 
jours si brillants de la domination romaine, c'est le 
nombre surprenant des inscriptions votives qu'on y a 
découvertes , gravées sur la face antérieure d'autels en 
marbre blanc, ou en pierre plus commune, et dont 
plusieurs sont ornés, sur les faces latérales, de la patère 
et du prœfericulum ^ vases sacrés en usage dans les li- 
bations et les offrandes. Je conifois douze monuments 

(1) Dissertation sur les Bains de Bagnères-de-Ltichon , dans ses 
Mélanges historiques, critiques, eic, tom. II « p. 290. 

(2) Ktc{., pp. 289,29^. 



(63) 

de cette nature ; et je ne crois pas que ce soit la totalité 
de ceux qui ont revu le jour dans des fouilles succes- 
sives. D'Orbessan en avait fait connaître huit en 1768 
dans le mémoire que j'ai cité , et qu'il avait lu quatre 
ans auparavant à l'Académie de Toulouse (1) ; de ce 
nombre, six furent transportés à Auch, et placés dans 
la salle de l'Athénée , où Millin en copia cinq au com« 
mencement de notre siècle (2). Plus tard , M. du Mège, 
en reproduisant les huit inscriptions de d'Orbessan , en 
publia quatre nouvelles (3). Un de ces autels est dédié 
aux montagnes, un second à un Dieu topique, les autres 
aux nymphes. Tous sans exception peuvent être regardés 
comme appartenant à l'histoire de ces thermes ; car ce 
sont autant de témoignages solennels de reconnaissance 
envers les divinités des eaux secourables aux malades. 
Aussi je vais transcrire toutes leurs inscriptions , quoi- 
que la plupart ne diffèrent entr'elles que par les noms 
des personnes qui les leur consacrèrent. 

Voici d'abord celle que fait lire le plus grand des 
autels publiés par d'Orbessan (4) , le seul qui subsiste 
aujourd'hui sur les lieux, où on le voit dans le mo- 
derne établissement : 

NYiMPHIS 

AVG 
SACRVM 

(1) Op, laud., pp. 292— ^. 

(2) Voyage dans les départements du midi de la France^ tom. IV , 
pp. 470—473. 

(3) Monuments des Volces Tectosages , pp. 362 et 363 , nn. 78 , 80 , 
81 et 82. 

(4) O/). laud., p. 292; Du Mège, Op, laud,, p. 361, ii.75. 



(64 J 

Cest le seul aussi qui ne porte aucun nom , peut-être 
parce que c'était un/nonument public (1). Les quatre 
qui suivent sont à Auch (2) : 



2 

NYMPfflS 

C. RVTONIVS 

DEXTER 

V. S. L. 

3 
NYMPfflS 

AVG 
VALERIA 
HELLAS 
V.S.L.M 



k 

NYMPfflS 

LVCANUS 

ET. EROTIS 

V. S. L. M 

5 

NVMI. . . 

MANl . , » 

SACR/. . 

RVTAEN . . 

V. S, L 



Le n** 5 est mutilé à la fin de toutes les lignes; mais 
je ne doute pas qu'on ne dût lire nympAîs à la première , 
et que RVTAENa, à la quatrième, ne soit un adjectif 
ethnique , bien qu'il ne soit pas d'usage d'écrire de la 
sorte le nom des Ruteni. 

Une autre inscription est ainsi rapportée par d'Or- 
bessan (3) , et par Millin (4) : 

(1) Peut-être aussi était-ce un de ces monuments qu'on tenait 
d'avance à la disposition des acheteurs , sauf à y ajouter leurs noms 
et la formule Totiye. Cela serait d'autant plus probable qu'un autre 
autel sans inscription a été trouvé au même lieu , au rapport de 
M. du Mège (p. 343, n. 58] : on en connaît ailleurs de sembla- 
bles, et l'on a expliqué de même cette narticularité. 

(2) D'Orbessan, pp. 293 et 295 ; — iffillin , pp. 470—472 ; — Du 
Mège, pp. 336 et 362, nn. 49, 76, 77, 79. Millin n'a pas donné 
le nO 2. 

(3) Op. 2au(i., p. 294. 

(4) Op» laud., p. 471. 



(65) 

6 

NYMPHIS 

T, CAVDVS 

RVFVS 
V. S. L. M 

M. du Mège pense qu^il faut lire c/ayd^vs à la seconde 
ligne (1), leçon bien plus satisfaisante en effet, pour 
peu qu'elle soit autorisée par quelque apparence de 
ligature. Il conjecture encore que le rhéteur Ru fus, 
contre lequel Ausone décochait tant d'épigrammes (2), 
pourrait être le personnage qui consacra cet autel aux 
nymphes : ce rapprochement ne serait pas sans intérêt 
s'il était motivé par quelque donnée un peu positive (3). 
L'inscription suivante attache un intérêt plus positif 
à l'un des autels publiés par le même savant, et qui 
appartient à l'Académie de Toulouse (4) : 

(1) Op. lami., p. 363, n. 83. 

(2) Epigr, 45—52. Il lui reproche fréquemment un défaut peu 
ordinaire aux rhéteurs , celui d'être muet , comme dans celle-ci (46) : 

Elinguem quis te dicentis imagine pinxit? 
JH4i mihd, Rufe, iaces : nil tibi tam simile est. 

(3) Op. laitd,, p* 364, et not. 1. Ce sayant cite cette phrase d'un 
ouvrage écrit par un curé du pays , fort peu antiquaire à ce qu'il 
parait : a J'y ris encore (à Bagnères-de-Luchon ) un buste sur son 
» piédestal... avec cette inscription :cLAy dits, rtffys. » 11 me pa* 
ralt yraisemblable que ce buste , trouyé à Luchon , aura été placé 
alors sur l'autel dont il s'ajj^, et que le bon curé Vanra pris pour 
son piédestal, quoique les deux monuments n'eussent entr'enx au- 
cun rapport réel. 

(4) Op. îaud., p. 362 , n. 78. 

5 



(GG) 

7 

NYMPHIS 

CASSIA 

TOVTA 

SEGVSIAVUN 

V. S. L. M 

Le nom de tovta nous fait voir l'emploi de la syllabe 
ov, bien rare, hors le nom de la tribu owfentina qu'on 
lit sur un assez grand nombre de monuments (1). A la 
ligne suivante , je trouve un nom ethnique rare aussi ; 
car, autant qu'on peut faire une conjecture sur un 
marbre qu'on n'a pas vu , je crois qu'il faudrait y lire 
SEGvsiANA ; ce serait une malade venue de loin aux 
thermes des Onesii , bien qu'elle eût dans sa patrie les 
Aquœ Segete. C'est encore M. du Mège qui a fait con- 
naitre deux autels semblables provenant des mêmes 
thermes , et ponant des inscriptions fort maltraitées ; 
il les donne ainsi , avec quelque doute toutefois (2) : 

8 9 

NYMPHI NYM . . • 

EBEIO ANDEM . . 

FAB NAMRONI 

y.S.L.M 

V. S. L. M 

(1) Les médaHles nous la font lire anssi dans le nom de la famille 
Clotdia , et souyent encore dans celui de la famille Furia, On troure 
également chez Spon (MisceL erud, antiquit, , pp. 97 et 169 ) une 
inscription yotiye marti. olloydio , eiune autre qui porte le nom 

de CLOYSTRIA. SYAyiS. 

(2) Op. laud., p. 363 , nn. 80 et 82. 



( 67 ) 

J'ai dit que tous les monuments votifs de Luehon 
étaient relatifs au culte des eaux thermales : je n'en 
excepterai point l'autel qui est aujourd'hui à Auch, et qui 
fut dédié aux montagnes , comme nous l'apprend l'ins- 
cription suivante (1): 

10 

MONTI 
BVS. Q. G 
AMOBNVS 

S. V, s. L* M (2) 

Il paraît assez naturel , en effet , que l'on ait associé au 
culte des nymphes des eaux, les divinités des montagnes 
qui présidaient au berceau de ces sources salutaires. 
On pourrait trouver ailleurs plus d'une indication d'un 
culte semblable; mais ici même, c'est-à-dire à Luehon, 
nous en avons un témoignage certain, si je ne me 
trompe, sur un autre aiutel votif découvert par M. du 
Mège, et qui fait lire cette inscription (3): 

11 

NYMPfflS 
MONTAN 
MONTAN 

Ce savant pense que la dédicace de ce petit monument 
aux nymphes fut faite par un montants montan/ , c'est- 
à-dire fils d'un autre montants (4). Je ne saurais par- 

(1) D'Orbessan, p. 295 ;— MUlin, p. 473 ;— Du Mège, p. 307, n. 35. 

(2) Les sigles de cette^ormule Totîye» moins commune que 
d'autres , signifient : Stisceptum Yotum Solvit Libens Merito» 

(3] Op. laud., p. 363 , n. 81. 
(4) Loc, laud. 



(68) 

lager son opinion ; car , outre qu'on n'omettait pas or- 
dinairement l'abréviation fiuws, ou au moins la lettre f . , 
ainsi que faisaient les Grecs y qui indiquaient la filiation 
par le seul génitif, l'usage constant en pareil cas n'était 
pas de répéter le nom de famille, mais de faire précéder 
la lettre f du prénom du père. Ici je reconnais bien à la 
troisième ligne le nom de montants , qui était vraisem- 
blablement un surnom; mais à la seconde, je ne puis 
voir que l'épithètc montan/8 , donnée aux nymphes , et 
une nouvelle preuve de ce culte des divinités des monta- 
gnes, culte tout-à-fait en rapport d'ailleurs avec la loca- 
lité , et lié essentiellement à celui des nymphes des eaux. 
Je serais aussi tenté de soupçonner que celui qui consa- 
cra le monument ne fut pas fâché de jouer sur une allu- 
sion à son nom , et que, peut-être par ce motif, il sup- 
prima ceux qui auraient pu le précéder. 

Un autre autel avait été trouvé à Bagnères-de-Luchon, 
lors des premières fouilles dont les résultats furent pu- 
bliés par d'Orbessan : l'inscription de celui-ci était im- 
portante , comme révélant le nom d'une de ces divinités 
topiques que le paganisme avait multipliées à l'infini. 
Ce monument ne demeura pas long-temps sur les lieux 
où il avait revu le jour : il fut emporté par un cha- 
noine de Chartres , nommé Seguin (1) , et passa ensuite 
dans le cabinet du respectable et modeste abbé de 
Tersan . Beaucoup de personnes se souviennent encore 
de l'y avoir vu , et d'avoir pu relever l'erreur commise 
par d'Orbessan qui avait lu à la première ligne lixoni, 
pour iLixoNi (2). De ce nombre sont M. Walckenaer (5), 

(1) D'Orbessan, op, laud,, p. 295. 

{2)Ibid. 

(3) Géographie des Gaules, tom. II , p. 240. 



(69) 

et M, de Grazanncs^ qui me dit en avoir pris un dessin 
du vivant de son possesseur (3), Je ne puis doue faire 
mieux que de transcrire la copie qu'il a bien voulu me ^ 
communiquer : 

12 

ILIXONI 

DEC 

FÀB. FESTA 

V. S. L. M 

Ce dieu présidait-il spécialement aux sources thermales 
auprès desquelles son autel a été retrouvé ? Il me sem- 
ble qu'on peut le présumer fort vraisemblablement , ne 
fût-ce que par analogie avec ce qui a été dit du dieu 
Borvq ou Bormo , dont nous avons vu le nom répété 
bien des fois dans des lieux qui possèdent également des 
eaux thermales (4). Il est même naturel de conjecturer 
encore que le nom de ce nouveau dieu devint Torigine 
d'un nom nouveau , imposé plus tard aux thermes des 
Onesii. Cette origine paraissait mieux marquée, il est 
vrai , dans la leçon lixoni qu'on avait long-temps ad- 
mise ; toutefois elle est toujours reconnaissable dans le 
vrai nom ilixoni, et M. Walckenaer lui-même n'a pu 

(1) Bans le Catalogue des objets d* antiquités , etc.> defeuMA*abhé 
Campion de Tersan, Paris , 1819, ce monument est ainsi décrit, 
p. 12 , n. 61 : (c Autel votif sur lequel on lit : lixoni. deo. vJLnius 
» FesTÎNt^ Yotum solvit hibens uerito, etc. » On peut s'étonner d'une 
pareille erreur de la part de Grirand de la Vincelle, antiquaire 
qui n'était pas sans mérite , intimement lié arec l'arcbidiâcre de 
Lectoure, et chargé par lui de rédiger ce Catalogue. On ignore, je 
crois , où a passé le monument. 

(2) Sup,, pp. 25, 28, 29, 56, 57, clc. 



(70) 

se refuser à ce rapprochement (1), bien qu'il soit peu 
favorable , comme on a vu , à l'importance de ces bains 
antiques 9 dont il ne paraît pas avoir connu, à beau- 
coup près, tous les monuments. 

J'ai présumé que les douze inscriptions qui m'étaient 
connues, et que je viens de reproduire, ne composaient 
pas la totalité des monuments écrits qui avaient dû être 
retrouvés à Bagnères-de-Luchon. Je ne me trompais point 
en faisant cette conjecture ; seulement je n'avais qu'une 
faible idée de l'étendue des richesses en ce genre que 
les fouilles successives ont fait découvrir dans cette 
localité , et j'étais loin de me figurer que ce qui avait 
été publié jusqu'ici , ce que je connaissais du moins , 
n'en formait encore que la moindre partie. M. du Mège 
me frappe de surprise et d'admiration, en m'apprenant 
que le nombre des inscriptions votives qu'on a exhu- 
mées de ces thermes antiques dépasse le chiffre de 50. 
J'aurais désiré pouvoir en faire connaître quelques-unes 
encore à mes lecteurs. Mais ne pouvant suspendre l'im- 
pression de mon travail tout le temps nécessaire pour 
en obtenir des copies, je suis réduit à n'exprimer ici 
que mes regrets. Je puis du moins répéter avec une 
nouvelle intensité de conviction , s'il m'est permis de 
parler ainsi , ce que j'ai déjà dit des bains de Luchon : 
qu*ils durent avoir dans la Gaule romaine une bien 
grande célébrité; et que cet ensemble inoui de marbres 
épigraphiques , de vœux adressés aux nymphes des 
eaux, est un motif bien puissant, selon moi, pour qulon 
reconnaisse en ce lieu les thermes des Onesiiy vantés 

(1) Géographie des Gaules, tom. Il , p. 2^0. 



(71 ) 

par le géographe grec qui seul nous en a révélé Texis- 
lence et le nom. 

En 1814, après avoir exprimé cette opinion, qu'il 
ne tenait encore, toutefois, que pour une conjecture 
plausible , M. du Mège ajoutait : « On aurait même à 
» ce sujet des présomptions tris-fortes , s'il était bien 
» prouvé que la rivière qui coule dans la vallée de 
» Luchon portait anciennement le nom d'Owe ou 
» d'Onne (1), dénomination qui paraîtrait avoir un 
» rapport très marqué avec celui des T/iermes Oné-^ 
» siens (2). » Cette particularité philologique, sur la- 
quelle il hésitait encore à cette époque, parait avoir 
acquis depuis lors une entière certitude à ses yeux, et 
il m'écrit tout-à-fait dans ce sens. M. le baron de Cra- 
zanncs m'affirme également que le nom d'One est bien 
positivement celui de cette petite rivière, et il y re- 
trouve , comme M. du Mège , celui des Onesii de 
Sirabon. 

AQUjE segeste. 

Sur la Carte de Peutinger est tracée une voie qui 
part ^ Autissiodorum y Auxerre, pour aboutira Gend- 
hum y Orléans. C'est sur cette voie qu'est inscrit le nom 
iSiAquœ Segeste, auprès de l'édifice qui indique com- 
munément les eaux minérales, et entre les stations 
A'Agedincum, d'une part, de Fines , de l'autre, à la 
distance de xxn lieues gauloises de chacune d'elles (3). 

(1) Le savant archéologue citait en note à ce sujet Y Annuaire du 
département delà Haute-Garonne, par M. Faillon , p. 112. 

(2) Monuments des Volces-Tectosages , p. 103. 

(3) Segm., 1, c. 



-:^ 



(72) 

La ville de Sens représente incontestablement l'antique 
Agedincum. Quant au lieu appelé Fines, nom que Ton 
retrouve sur divers autres points de la Gaule, cette po- 
sition peut laisser quelque doute. D'Anville paraissait 
croire qu'il n'est pas loin du village de Sury-aux-Bois , 
aux limites de l'ancien diocèse d'Orléans, comme son 
nom latin l'indique (1) ; M. Walckenaer pense le re- 
trouver dans la forêt d'Orléans', entre les lieux peu 
connus qui portent aujourd'hui les noms de Cour-Dieu, 
et de Philissanet (2). 

J'ai fait tout ce que j'ai pu pour obtenir des rensei- 
gnements précis sur les localités de ces contrées qui 
possèdent encore des eaux minérales, ou thermales, es- 
pérant, à l'aide des données archéologiques, arriver à 
une détermination plus certaine de l'emplacement des 
Aquœ Segeste. Ces renseignements m'ont fait défaut, 
mécompte que j'ai éprouvé plus d'une fois aussi ailleurs, 
et je dois me borner à relater ici les principales opinions 
que je vois émises par les savants , sur cette question 
de géographie comparée : j'en remarque trois. D'Anville 
avait jugé en premier lieu que les Aquœ Segeste pou- 
vaient être Montbouis, village situé entre Châtillon-sur- 
Loing et Moniargis (5). Plus tard , il préféra la position 
de Ferrières, qui est aujourd'hui du même arrondis- 

(1) Notice de la Gaule, p. 79.— Il n'est pas inutile de rappeler que, 
d'après les obserrations de sarants géographes, notamment de 
M. Guerard (Essai sur le système des divisions territoriales de la Gaule, 
p. 87), nos anciens diocèses représente^^t , presque toujours avec 
exactitude, les antiques cités auxquelles ils succédèrent. 

(2) Géographie des Gaules, tom. III, p. 57. 

(3) Op. laud,y p. 78 ; Eclaircissements géographiques sur l'ancienne 
GaM/e,p.l90, 191. 



(73) 

sèment, celui de Montargis (1). Enfin, M. Walckenaer 
met cette station dans un lieu qu'il ne désigne que 
comme des ruines au nord de Sceaux (2). 

Aucune de ces trois opinions n'a été exposée avec 
assez de détails sur les conditions que réclament les 
indications fournies par la Carte : je veux dire la réu- 
nion d'eaux minérales et de vestiges d'antiquités. Ainsi, 
pour ce qui concerne Ferrières , d'Anville n'a pas man- 
qué de remarquer que ce lieu possède des eaux miné- 
rales ferrugineuses , qui ont pu être l'origine de son 
nom moderne (3) ; mais il ne fait point mention d'an- 
tiquités. Je n'ai rien pu découvrir à ce sujet dans tous 
les ouvrages que j'ai été à même de consulter, et, comme 
je l'ai dit, je n'ai point obtenu les renseignements que 
j'attendais des lieux même. Les ruines près de Sceaux, 
adoptées par M, Walckenaer comme emplacement de la 
station îi^Aquœ Segeste , sont apparemment romaines ; 
du moins ce savant m'apprend , que , l'an passé , un 
sous-préfet adressa au ministère un mémoire sur des 
médailles antiques , des débris de vases , et des frag- 
ments d'antiquités retrouvés en ce lieu. Resterait à sa- 
voir si l'on y connaît des eaux thermales , ou au moins 
minérales , comme sur beaucoup d'autres points de ces . 
contrées ; M. Walckenaer n'en a rien dit, et je n'ai pu 
l'apprendre d'ailleurs. 

Pour Montbouis, les antiquités ne manquent pas à 
ce village peu connu. Le P. Guillaume Morin, historien 

(1) Notice de la Gaule, p. 79. 

(2) Géographie des Gaules, tom. III , p. ^7. 

(3) Loc. laud. 



(74) 

de cette province, cité par d'Anville (1) et Caylus (2)> 
parle de découvertes importantes qu'on y fit en 1608, 
lorsqu'on travaillait au canal de Briare : « En creusant 
» les tranchées, dit-il, entre Montboui et Montcresson, 
» sur la rivière de Loing, en un lieu appelé Sévinière, 
» furent trouvés sur une colline plusieurs vestiges de 
» vieux bâtiments à la romaine, avec les ruines d'un 
» Amphithéâtre; et fouillant plus bas, furent trouvés 
» dans un champ, des pilr très et quantité de vieux 
» fondements ; et encore en ce champ se trouva un 
» lavoir à la mosaïque, et une très grande quantité 
» de médailles : Antonius Aug.Pius Cos. III, et d'autres, 
» Ani. Imperator (sic), et d'autres, Faustina Antonini 
» Imp. Uxor (sic), etc. (3). » Caylus a donné le plan et 
les coupes de cet amphithéâtre (4); Expilly est entré sur 
ce sujet dans de plus longs détails , auxquels je renvoie 
mes lecteurs (5). Enfin, Caylus a donné une lettre de 
l'auteur du plan qu'il a fait graver, et j'en citerai encore 
ce court passage : a A une très-petite distance de cet Am- 
» phi théâtre, on voit les ruines d'un château qui paraît 
» avoir été considérable , et dont la bâtisse est pareille 
» à celle de ce monument (6). » 

Ces restes importants de la grandeur romaine sem- 
bleraient tendre à étayer la première conjecture de 
d'Anville, adoptée aussi par Caylus (7). Le lavoir, 

i) Op. latid,y p. 78, 

2) Recueil d'antiquités , tom. III , p. 413. 

3) Histoire du pays du Gatinois, Serymois, etc, p. Hi. 

4) Recueil ^antiquités , tom. III , pi. CXIII. 

5) Dictionnaire géographique des Gaules^ au motMoNTBOUv. 

6) Op, laud., p. 414. 

7) Ibid., p. 412; cf. tom. IV, p. 369. 



(75) 

comme l'appelle le P. Morin, pourrait avoir appartenu 
à un établissement thermal ; et Famphithéâtre eût été 
très convenablement placé dans un lieu de réunion pour 
les étrangers. Je regrette d'ignorer s'il existe sur ce point 
quelques sources minérales. Peut-être serait-il permis 
de supposer que les travaux pour l'exécution du canal 
les auraient comblées, ou que leurs eaux auraient alors 
pris leur écoulement dans ce même canal . 

AQUJE SEGETE. 

Sur la Carte de Peutinger, on lit ce nom, inconnu 
d'ailleurs, auprès de l'édifice carré observé si souvent. 
Il y désigne une station de la voie tendant de Segodu- 
nuniy Rhodez, à Lugdunum, Lyon, station intermédiaire 
entre celles d'Icidmagus , et d'un Forum fautivement 
appelé Segustavarum (1). Ce lieu appartenait donc au 
territoire des Segusiani, et l'on ne peut le chercher 
aujourd'hui que dans le département de la Loire, qui 
représente le Forez. Il me paraît également certain que 
la petite ville de Saint -Galmier est la seule position 
moderne où l'on puisse le reconnaître. 

Tel n'est pas le sentiment de M. Walckenaer. Ce 
savant place les Aquœ Segete à Saint-Etienne, ville que 
l'industrie a porté de nos jours à un accroissement ra- 
pide, à une grande prospérité, mais qui ne fut long- 
temps qu'un pauvre lillage, dans un pays perdu, sans 
voies de communication, sans le moindre vestige d'an- 
tiquités, et dont les eaux, excellentes pour la trempe de 

(1) Segmm. , I, f; n, d. 



(76) 

Tacier, sont dépourvues de propriétés médicinales (1). 
Cette opinion tient à un système qui bouleverse la géo- 
graphie comparée de l'antique pays des Segusiani et 
de notre Forez, telle qu'on l'avait comprise jusqu'à ce 
jour, non sans motifs, pensait-on. Il provient de deux 
erreurs fondamentales. La première est d'avoir placé 
Icidmagus à Issingeaux (2) , erreur commise avant lui 
par d'Anville (3). L'autre, d'avoir voulu trouver le pré- 
tendu Forum Segustavarum à Farnay , village situé 
près de Rive-de-Gier, fort peu digne, à tous égards, de 
l'honneur dont on l'investit, au détriment de Feurs (4). 
Tout ceci m'impose la nécessité d'entrer ici dans les 
discussions géographiques plus avant que je ne l'ai fait 
jusqu'à présent, lorsqu'il a été question d'autres loca- 
lités, qui devaient m'être bien moins connues que la 
province où je suis né (5). 

(1) Géographie des Gaules f tom. III, p. 100. -—Nicolas Samson 
plaçait les Aquœ Segele à Saint-Jean-de-Bonnefond , près de Saint- 
Etienne. Je troure cette indication dans le Dictionnaire géographi- 
que de Bruzen de la Hartînière , qui cite des notes manuscrites da 
P. Sanadon. 

(2) Ibid., tom. I, p. 334; tom. III, p. 100. 

(3) Notice de la Gaule , pp. 80 et 377. 

(4) Géographie des Gaules , tom. I , p. 333-337 ; tom. m , pp. 100 
et 101. M. Walckenaerdit à ce sujet (p. 336) : «On obserrevSur toute 
» cette route directe tracée par la Table , entre Icidmagus , Issen- 
» geaux, et Lyon, des débris d'antiquités, etc. » L'auteur a eu ici des 
renseignements fort erronés. Si Ton en excepte la ligne d'acqueducs 
qui aboutit à £u^(2tinum, je ne connais pas de pays plus dépourvu de 
monuments romains que tout celui qui ^t traversé par cette route , 
depuis Briguais jusqu'à Saint-Etienne, et au-delà. Je doute qu'à 
Farnay , notamment , on ait jamais trouvé la plus mauvaise mé- 
daille de petit bronze. 

(5) Plusieurs données de détail , relatives à ces questions de géo- 
graphie, m*ont été fournies par une Lettre à iRf. Dossier, ancien maire 



(77) 

Pour établir, avec toute la certitude qu'on peut espé- 
rer, la position que j'assigne aux Aquœ Segeste, il 
importe de constater d'abord celles des deux stations les 
plus voisines, Icidmagus et Forum, au sujet desquelles 
j'ai le regret de ne pouvoir admettre les opinions de 
M. Walckenaer. Pour procéder logiquement, je crois de- 
voir partir de deux points opposés , mais aussi peu dis- 
tants que possible, dont l'identité avec tel et tel lieu 
moderne ne puisse faire l'objet d'un doute, et auxquels 
conviennent exactement les mesures itinéraires qu'on 
trouve indiquées sur la Carte de Peutinger, Le premier 
de ces deux points sera Revessio , qui fut une ville des 
Velauni ou Vellavi, dont Ptolemée a fait mention (1), 
et {[v^ Anicium , Le Puy , priva plus tard du premier 
rang (2) : nos géographes les plus célèbres, Valois (3), 
d'Anville (4-) , M, Walckenaer lui-même (5), la recon- 
naissent dans le lieu, fort déchu depuis des siècles , qui 
d'un apôtre de ces contrées a pris le nom de Saint-Pau- 
lien, qu'il porte aujourd'hui. Lugdunum, Lyon , où ve- 
nait aboutir la voie romaine dont il est question , sera 
le second de ces points ; et celui-ci est bien mieux en- 
core à l'abri de toute contestation. 

de Feurs^ insérée dans le Journal de Montbrison (23 et 30 mars 1844) 
et tirée aussi à part, ainsi que par ma correspondance avec son 
auteur > M. Aug. Bernard , jeune savant né dans le pays, qui en a 
étudié avec soin la géographie et les antiquités , et qui prépare sur 
ce sujet une publication importante, 

(1) Geo^r., II. 6 (7). 

(2) On peut voir sur ce lieu ce qu'a dit Valois (Notit, Galïiar., 
p. 589, 590) , qui est entré aans quelques détails sur son histoire. 

(3) Loc. latid, 

(4) Notice de la Gaule, p. 545. 

(5) Géographie des Gaules , tom. lïl , p. 100. 



(7S) 

Si maintenant , opérant de ces deux points , nous nous 
dirigeons d'abord vers Lyon , en partant de Saint-Pau- 
lien , le compas , ouvert autant que l'exige la première 
des distances évaluées par la Carte , nous conduira bien 
près d'Usson, sur les confins du Forez et de l'Auvergne. 
C'est là que dut être Icidmagus y suivant M. Bernard ; 
car la distance de ce lieu à Saint-Paulien peut être éva- 
luée entre le chiffre xvii, que donne l'édition de Scheyb, 
et celui de xiv , marqué dans la nouvelle édition de 
Leipsick (1); et l'identité des positions me paraît tout- 
à-fait justifiée par les antiquités trouvées en ce lieu , 
les restes d'un temple, des monuments funéraires, et 
principalement une borne milliaire, sur laquelle on lit 
une inscription fort mal traitée et mal interprétée par 
La Mure (2) , ainsi que dans un ancien Almanach de 
Lyon (3); mais dont cette restitution, que je hasarde , 
me paraît devoir exprimer parfaitement le sens : 

IMP.GÀESÀR 

[C. IVL. VER]VS. MÀXra[INVS] 

[PIVS] . Ï-ELIX. ÀVG. P. P. (4) 

PROCOS. Pttm 

ET. F.E. IVL. VERV[S. MÀXIMVS] 

NOBILISSIMVS. [CAES] 

PRINGEPS. IWENTV[T] 

V[IÀ]&. VETVSTÀT[E]. CON[LÀPS] (5) 

[i] Lettre à M. Dossier , p. 14. 

(2) Hist, du pays de Forez , pp. 130, 131. 

(3) Pour Fannée 17C0, p. 203. 

(4) L'Àlmanach de Lyon porte à la fl#de cette ligne p. u», au lieu 
de p. p. donné par La Mure , et qui est plus conforme à Tusage. 

(5) Je pense que les lettres vs peuvent être liées de manière à 
exprimer le mot vias, qui doit nécessairement se trouver ici. 



(79) 

RESTITVERVNT 

M. xim (1) 

Il faut remarquer que la distance indiquée par le 
chiffre XIV est précisément la leçon de la Carte que 
M. Walckenaer a ici préférée (2). Cette inscription itiné- 
raire serait donc précieuse et concluante , si ce chiffre 
y était appliqué à des lieues , et non à des milles , que 
désigne la lettre m qui le précède (3). Mais si l'on ad- 
mettait le chiffre xxini, que porte la copie donnée par 
TAlmanach de Lyon , ce nombre de milles ne différerait 
pas considérablement des xiv lieues romaines. Il est à 
regretter que nos copies soit si défectueuses, et qu'il 
règne tant d'incertitude sur le sort actuel de ce monu- 
ment, lequel, m'assure-t-on , n'est plus sur les lieux. 

Quant au Forum qui est la première station sur cette 
voie , lorsqu'on la remonte de Lugdunum , notre second 
point de départ bien certain , je ne saurais hésiter un 
seul instant à voir une erreur de copiste , bien facile à 
expliquer, dans le nom de Segustavarum que lui donne 
la Carte, à lire Segusianorum , et à reconnaître en ce 
lieu la ville principale des Segusiani, avant que la 

Bergier a donné (Histoire des grands chemins, tom. I, p. 71) une 
inscription quia quelque rapport ayec celliB-cî , et qu'on a jugé être 
la même. S'il en est ainsi , il n'en a connu que la fin , avec les lignes 
tout autrement disposées , Taddition de ponteh ayant tias , et au- 
tres variantes. La Mure et rAImanach de Lyon donnent cette 
absurde restitution : y^sonium iempîum tettstat6 cojisumpium, 

(1) D'après rAImanach (ib Ljon, on lirait bir. (peut-être u.P. ] 

XXIIII. 

(2) Géographie des Gaules, tom. UI , p. 100. 

(3) On lit sur la Carte de Peutinger à Lugdunum ( Segm. Il , a ) : 
Lugdune (sic) caput Galliarum, wqiie hic (sic) legas; cequîyeut 



( 80 ) 

tïolonîe de Ltigdunum fût établie sur leur territoire (1). 
€ette ville , dont Ptolemée a fait mention (2) , ne peut 
se retrouver qu'à Feurs , qui possède des restes impor- 
tants et nombreux d'antiquités romaines (3) , qui con- 
serve dans son nom moderne les traces les mieux 
marquées de celui qu'elle portait sous les conquérants 
de la Gaule , lequel , au reste , se lit encore , plus ou 
moins intégralement , sur quelques-uns de ses monu- 
ments écrits (4). Telle était, sur cette question de géo- 
dire que les milles Hsités dans le midi de la Gaale cessaient à Lug- 
dunum, et que de là on comptait par lieues gauloises. Les pierres 
milliaires que FonyoitàFeurs portent encore Findication de lieoes 
gauloises. Mais il parait que leur usage ne commentait qu'aux li- 
mites des Segusiani , et que , dans le cours de la roie depuis Revessio 
jusqu'à Icidmagus, on comptait toujours par milles. 

(1) Pline a dit fNaU hist,, IV, 18 (32) ) : Secusiani (sic) libeti , in 
quorum agro colonia Lugdunum. Cf. Strabon. jRer. geogr^, IV, 192 ; 
edit. Almeloy., p. 292. 

(2) Géogr, II , 7 (8). Les manuscrits présentent sur ce nom de 
nombreuses variantes. 

(3) Ces antiquités seront bientôt publiées par un jeune ecclé'^ 
siastique plein de talents > M* Tabbé Roux , vicaire de Feurs , qui 
a fait des découvertes intéressantes sur cette ville romaine. 

(4) On connaît depuis long-temps un poids de dix livres romaines 
trouvé à Feurs, avec cette inscription, dont les caractères sont in- 
crustés en argent : deae« seg^ p. x. (Spon. MisceU erud, antiquit, 
p. 109. — Catalogue des antiq, de Tersan. p. 26, n. 200). Une autre 
inscription d'un plus grand intérêt est celle qu'on voit encore strr 
les lieux , au chevet de Téglise , et dont je donne une copie prise 
récemment, sur l'exactitude de laquelle je puis entièrement comp- 
ter : NYMINI. AVgIIdEO.SILYANOIIfABRI. TIGNVARJJQVK FORO, SEGVS. 

||gonsistynt|{d.s.p.p. Mais je regarde comme plus importante en- 
core celle d^une tablette de bronze , tf^uvée -^ il y a quelques mois 
seulement , au village de Marclop près de Feurs» Il y aurait J3eau- 
coup à dire sur la forme du monument , sur la quatrième ligne , 
oubliée en premier lieu , et rétablie hors de sa place assez mala- 
<lroitement« Je laisse ces détails à M. Roux , qui s'en occupera ex 



(81 ) 

graphie comparée, l'opinion de Valois (1), celle de 
d'Anvillc (2), de Spon (3), etc. ; telle est encore, malgré 
l'autorité qui s'attache au nom de M. Walckenaer, celle 
de M. Aug. Bernard (4), et généralement, dans nos 
contrées , celle de tous les hommes qui ont fait une 
étude sérieuse des localités. Il est vrai que la distance 
marquée par la Carte de Peutinger entre Forum et 
Lugduniim est trop faible de beaucoup, si on l'appli- 
que à la route de Lyon à Feurs. Mais ici l'on doit re- 
connaître une de ces erreurs de chiffres , comme on 
en trouve bien d'autres dans les divers itinéraires, 
comme le savant secrétaire de l'Académie des Inscrip- 
tions en a signalé plus d'une. Un copiste aura mis un v 
pour un X ; et en rétablissant le chiffre de xxi lieues 
gauloises, au lieu de xvi, on retrouvera la distance 
exacte de Lyon à Feurs. 

Ces deux points ainsi déterminés, nous arrivons 

professa, et je me borne à Ggurer ici rinscription, en faisant remar- 
quer que le grayeur n'a pas terminé la lettre n du nom de se&y- 

SIANORMm : 

SEX. IVL. LVCANO. IIVIR 

CIVITAT. SEGVSIAYOR 

TITTIVS APPARITORKS. LIB. CETTINVS 

COCILLVS SACERDOTALl CASVRINVS 

ARDA ATTICVS 

Enfin , je ne dois pas omettre les médailles d'argent qui portent la 
Icgendok segysia. :leur attribution dM-s. Segusiani est généralement 
admise ; elle ne me parait pascependant entièrement certaine. 

(1) Notit, GalUar., p. 200. 

(2) Notice de la Gaule , p. 226. 

(3) Miscel. erud, antiquit,,!^, 109. 

(4) Lettre à M. Dossier, p. 13. 

6 



(82) 

tout naturellement à reconnaître les Aquœ Segesie à 
Saînt-Galmier. D'abord cette petite ville possède des 
eaux minérales, condition indispensable ici, comme 
l'indiquent le mot Aquœ et l'édifice thermal ; et de tous 
les lieux du Forez qui jouissent d'un tel avantage , c'est 
évidemment le seul auquel on puisse penser avec quel- 
que vraisemblance. De plus les mesures itinéraires peu- 
vent justifier positivement cette détermination ; car les 
xvii lieues gauloises que la Carte compte d'Icidmagm à 
Aquœ Segete, d'une part, les ix qu'elle marque entre 
Aquœ Segete et Forum Segusianorum , de l'autre, con- 
viennent tout-à-fait à Saint-Galmier, par rapport à Usson 
et à Feurs(l). 

Long-temps on n'avait connu à Saint-Galmier aucun 
reste d'antiquité , qui indiquât le moins du monde que 
ses eaux étaient connues des Romains. Tout doute à cet 
égard, s'il avait pu en exister, serait levé aujourd'hui 
par les découvertes importantes qu'on y a faites depuis 
quelques mois , et qui ont mis au jour, pour quelques 
moments, une portion des antiques bains. Je dis pour 
quelques moments , parce que le propriétaire du fonds 
a conçu et exécuté la malheureuse pensée de faire com- 
bler de nouveau les endroits fouillés, avant qu'on ait pu 
en lever un plan exact et satisfaisant. On avait décou- 
vert d'abord une seule piscine. Plus tard, on en retrouva 

(1) M. Bernard fait cette obserration importante (p. 14), que cette 
Yoie romaine passait la Loire à Saint-Rambert, où Ton foit encore des 
reçtes d'un pont antique. Ainsi faisaît^l n'y a pas fort long-temps 
encore, la route de Toulouse. Le nom d'un lieu entre Saint-Paulien 
et Usson , Pontimperat , semble réyéler aussi un pont romain , P(ms 
imperatoris. La route de ForumkAqtuB Segeste longeait la Loire, et 
l'on en a retrouvé des traces. 



(85) 

deux autres, et une portion dliypocauste , qui montrait 
assez que les Romains chaufîaient les eaux simplement 
minérales , pour les rendre artificiellement thermales , 
et que ce procédé avait été employé pour les Aquœ Se- 
geste (I). Le premier de ces bassins fut visité et mesuré 
par M. l'abbé Roux, que j'ai déjà nommé, et qui a eu 
l'obligeance de me donner les détails suivants : 

« La première piscine découverte est un réservoir en 
» parallélogramme, ayant une longueur de 4 m. et 1/2, 
» sur une largeur de 3 m . 40 c . ; sa profondeur sur deux 
» côtés est de 90 c. , et sur les deux autres de 56 c. 
» Au point de réunion des angles est placé un tore , ou 
» colonnette en ciment , ayant pour but , je pense , 
» d'empêcher l'action de l'eau sur les parois. Trois 
») marches, ayant 30 c. de largeur, sont inscrites 
» dans l'un des angles ; et les deux parois seulement 
» qui partent de ces degrés sont disposées en gradins. 
» La couche de ciment romain qui les revêt n'a guères 
» que 3 c. d'épaisseur : elle est formée de chaux vive et 
» de carreaux concassés. On a trouvé , en déblayant ce 
» réservoir , un aftias considérable de briques striées 
» dont les parois extrêmement minces , et les angles 
» rabattus indiquent des tuyaux de chaleur* Cette pis- 
» cine fut découverte à 1 m. à peu-près de profondeur. 
» Les murs ont approximativement 50 c. d'épaisseur : 
» il sont construits en petites pierres, et dans ceux qui 
» forment'gradins j'ai trouvé des tuiles à crochets. La 
» source de la Fontfoi#est à une vingtaine de mètres; 
» à SIX mètres plus loin est le pouvcau puits dont la 

(1) La source connue jusqu'à ce jour à Saint-Galmîer est froide, 
et celle qui vient d*étre découverte ne Test pruères moins. 



(84) 

» source est à une température plus élevée de deux 
» degrés, etc. » 

M. Roux n'avait point pu voir les trois bassins plus 
récemment découverts , et presqu'aussitôt comblés de 
terre. Je lui dois cependant quelques indications à leur 
sujet. « Voici maintenant, m'écrit-il, ce que j'ai pu re- 
» cueillir oralement touchant les piscines. Elles étaient 
» contiguës , et communiquaient entre elles par une 
» sorte de corridor : on,a cru se rappeler qu'elles avaient 
» toutes des marches aux angles. Dans la seconde appa- 
» raissait le reste d'un tuyau en plomb, dont on n'a pu 
» étudier la direction faute de temps. Après la quatrième 
» piscine, on a découvert une salle interrompue par un 
» mur de clôture , et sur l'aire de cette salle, des piliers 
» en briques au nombre de cinq : un conduit paraissait 
» en sortir, et se diriger sous le mur de séparation 
» entre la première piscine et la seconde. Enfin , au 
» dessus de toutes ces salles , et presque à fleur de terre , 
» un banc de sable peu profond semblait indiquer que 
» la destruction de ces bains antiques fut le résultat 
» d'une inondation de la Coise , petite rivière qui passe 
» à Saint-Galmier. » 

Si les travaux qui avaient donné lieu à cette impor- 
tante découverte eussent été continués, on pouvait 
espérer de nouveaux résultats, plus intéressants peut- 
être , plus riches surtout ; car , il faut bien le reconnaî- 
tre , les restes des thermes factices établis en ce lieu par 
ies Romains sont tout ce qu'on a^ouvé dans ce genre de 
plus simple, et même de plus pauvre, sur la surface de 
notre Gaule. Nul autre objet antique n'a été exhumé de 
ces excavations , si ce n'est un petit nombre de médailles 



( 83 ) 

romaines de divers âges , parmi lesquelles on m'en 
signale une d'Antonin , et une autre de Licinius. 

Je voudrais au moins pouvoir placer ici une réponse 
quelque peu satisfaisante à une question qui m'a été 
adressée sur le nom de Segete, lequel pourrait bien être 
le même que celui de Segeste ; je n'espère pas y réussir 
complètement, et je me bornerai à quelques faits, sans 
hasarder aucune conjecture. Il est évident que ces noms 
ne sont point des adjectifs féminins au pluriel : la preuve 
en est dans la manière dont ils sont construits sur la 
Carte de Peutinger , laquelle mettant souvent les noms 
des stations au datif, ne dit pas ici Aquis Segetis ou 
Aquis Segestis , comme elle a dit Aquis Calidis , par 
exemple ; mais Aquis Segete , Aquis Segeste , ainsi 
qu'elle fait lire ailleurs Aquis Nisineii, Aquis Bor mords. 
Ces génitifs, qui s'écriraient plus correctement Segetœ et 
Segestœ (I), à quelle sorte de noms propres doivent-ils 
appartenir? On connaît une déesse Segestaon Segetia, 
mentionnée par plusieurs écrivains anciens (2) , et qu'on 
A'oit figurée dans un temple, au revers d'une médaille 
d'argent de Salonine, avec la légende deae. segetïae. 
Mais elle présidait aux moissons, comme son nom l'in- 
dique ; et Ton n'aperçoit pas le rapport qu'elle pourrait 
avoir avec des eaux minérales (3). Peut-être serait-il 

(1) On sait que les inscriptions et les manuscrits offrent égale- 
ment de nombreux exemples de la diphtongue ae , négligée ainsi , 
et remplacée simplement par un e. 

(2) Plin. , NaL. hisL^Ylll, 2; — Macrob. , Satum. I, 16; — 
Augustin. , De Civit, Dei , IV , 8. 

(3) Si ma mémoire ne me trompe pas , des historiens de Lyon, ou 
du Forez ont touIu faire un rapprochement de la médaille de Sa- 
lonine avec le nom des Segusiani, C'est peut-être sur cela que s'est 



(8G) 

plus naturel de reconnaître ici une nouvelle divinité 
topique, protectrice des eaux médicinales, telle qu'on 
en connaît bien d'autres , et dont le nom , comme celui 
de Bormo ou Borvo, aurait admis des variantes. 



ÂQUJS SEXTL^. 

Sextius n'est pas pour nous un personnage obscur , 
comme Nerius et Nîsineius ; son nom, mentionné dans 
rhîstoire, ainsi que ses conquêtes dans les Gaules (I), 
est aussi gravé sur le marbre des Fastes, dans ces deux 
lignes tout-à-fait monumentales (2) : 

C. SEXTIUS. C. F. CALVIN. PRO COS 
DE. LIGVRIS. VOCONTIEIS. SÀLLWDEIS Q 

Quant à la ville qui fut comme un trophée de ces 
victoires, elle paraît avoir été la première ville romaine 
de notre patrie, la première qui porta le titre de co- 
lonie, qu'on trouve joint à son nom sur plusieurs mo- 
numents épigraphiques (3). Je ne citerai que l'inscrip- 
tion suivante, peu connue, et qui existe à Rome (4) : 

fondée TopinioD, fort incertaine, qui donne à Cérès un temple anti- 
qae dont les ruines subsistent encore près de Montbrison. 

(1) Liy., HisL , epit. lib. LXI ; — Patercul. , Hist, rom, I > 15 ; — 
Flor. EpiL m, 2 ;— Strabon. , Rer,geogr ; IV, 180 ; edil. Àlmelor., 
p. 272 ; — Diodor., Excerpt, de Virtut. et vit,, 377, edil. W^esseling., 
p. 603 , etc. 

(2) Gruler., Inscript, antiq, CCXCVIII, 3. 

(3) Orelli,' JtMcrtp^ lat. sel., tom. I, Jk. 370, n. 2156; tom. II, 
p. 59, n. 3217. — Estrangin , Descript. de la ville et Arles y p. 24. 
— Mérimée, Notes d'un voyage dans le midi de Idfrance, p. 333.; etc . 

(4) Rouard , Rapport sur le4 fouilles d^antiquités faites à Aix , en 
1843 et 1844, p. 61. 



(87) 

D. M. 

M. IVNTO. RVFO 

PYTfflONl 

AQMS. SEXTIS 

PÀTRONO. COLONIAE 

HOMINI. BONO 

ET. DISSERTO (1) 

La défaite des Teutons et des Cimbres sous les murs 
de la nouvelle colonie fut bientôt pour elle une autre 
illustration (2), dont un mont de ses alentours semble 
perpétuer le souvenir dans son nom de Sainte-Victoire* 
Un poète de la Gaule Ta célébrée dans ces vers, qui met- 
tent la Baies gauloise sur la même ligne , en quelque 
sorte , que l'antique Massilia (3) : 

Nuper quadrupedante cum citato 
Ires Phocida, Sexiiasque Baias , 
Illustres titulisque prœliisque 
Urbes , per duo consulum tropœa, 
Nam Martem tulit ista Julianum , 
Et Bruto duce nauticum furorem; 
Mt hœc Teutonicas cruenta pugnas, 
Erectum et Marium cddente Cimhro, 

Placée sur la voie Aurélia qui tendait de Rome à 
Arelate^ Arles (4), et d*oii partaient divers embranche- 
ments, la ville de Sextius est indiquée sur la Carte 

(1) Sic. 

(2) Plularcb., Jlfan./^dil. , Paris, 1624, tom. 1, p. 41{^.— Lîv.^ 
Hist. , epit. lib. LXVII. — Patercul. , Hist, rom. Il, 12. — Flor., 
Epit.lll, 3. 

(3) Sidon. Apollîn., Carm. XXUI, v. 13. 

(4) Vet. Roman, itinerar., éd. Wesseling., pp. 289, 296. 



(88) 

de Peutinger par le signe ordinaire des sources ther- 
males (1). Il en devait être ainsi , car Pline Ta comptée 
parmi celles dont l'existence était due aux eaux de 
leur territoire : Urbes condiint , disait-il des eaux mi- 
nérales, sicut... Sextias in Narbonensi provincia (2). 
Elles sont mentionnées en effet par la plupart des au- 
teurs qui ont rappelé la fondation de cette colonie , et 
ils semblent en faire la cause de la préférence que le 
vainqueur donna à cet emplacement, entre les autres 
sites du territoire des Salyes. Je ne citerai que Tite- 
Live : C Sextius proconsul, vicia Salluviorum génie , 
coloniam Aquas Sextias condidil, ob aquarum copiam 
e calidis frigidisque fonlibus , alqiie a nomine suo ita 
adpellalas (3). 

Ces eaux eurent de la réputation , peut-être avant la 
conquête , car ces contrées , voisines de la Phocée des 
Gaules , étaient bien plus avancées que les autres en 
civilisation ; et l'établissement thermal que les Romains 
y fondèrent fut assez long-temps célèbre. Mais Strabon 
nous apprend que, de son temps déjà, plusieurs de ces 
sources chaudes s'étaient refroidies (4), et Solin con- 
firme en ces termes l'observation du géographe grec : 
Aquœ qtioque Sexliliœ eo loco clanierunt , quondam 
hiberna consulîs , postea excultœ mœnibus; quarum 
calor olim acrior, exhalalus per tempora ev aporavil y 
necjam par est famœ priori (5). Ainsi le discrédit qui 

(1) Segm.II, d. , ^ 

(2) Nat.hist.,XXXl, 2 

(3) Hist, LXI, epit. 

(4) Rer. geogr, IV, 180; cdit. Almelov., p. 272. 

(5) Polyhist., 2. 



(8») 

a fait délaisser les eaux d'Aix en Provence , moins 
heureuse à cet égard que son homonyme de Savoie , 
paraît remonter à une époque bien ancienne. 

Je n'entreprendrai pas Ténumération des restes de 
son antique splendeur que la ville d'Aix a conservés , 
et d'autres , bien dignes de regrets , qui ont été détruits 
par les architectes, les plus barbares de tous les Van- 
dales modernes. Ce serait un travail trop étendu pour 
l'objet de cet ouvrage ; car Aix a possédé beaucoup de mp" 
numents romains, protégés et recueillis autrefois par des 
hommes distingués, dont elle s'honore d'avoir été le ber- 
ceau , les Peiresc , les Le Bret , les Saint- Vincens , les 
Méjanes, etc. (1) : son musée intéressant s'accroît cha- 
que jour , et de nombreux vestiges de constructions an- 
tiques subsistent encore dans les édifices modernes. 
Je renverrai pour ces objets aux ouvrages spéciaux qui 
en ont traité (2) : je dois me borner ici à rechercher les 

(1) lis ont laissé dans leur patrie des successeurs quicultÎTentayec 
un zèle couronné de succès l'étude de Tantiquité. M. le marquis de 
Lagoy, correspondant de l'Institut, a fait connaître ou attribué 
plusieurs pièces de sa riche collection numismatique, notamment 
des médailles importantes de yilles ou de peuples qui habitaient les 
contrées environnantes : celles des Ccenicenses et de Glanum , uni- 
ques jusqu'à ce jour , celles des Samnages, dont la légende corrige 
une fausse leçon de Pline , etc. Le savant conservateur de la biblio- 
thèque fondée par Mejanes , M. Rouard , a commenté les inscrip- 
tions métriques du Musée, et il rédige des rapports intéressants sur 
les fouilles faites à Aix, qui se publient depuis quelques années, par 
les soins d'une commission spéciale dont il est le secrétaire. Userait 
à souhaiter que de tels %emples trouvassent des imitateurs dans 
(les villes plus considérables , et non moins riches en antiquités. 

(2) On peut consulter le Voyage de Millin dans les départements du 
midi ; la Lettre de Gibelin sur les tours antiques qu'on a démolies à 
Aix; divers ouvrages de Saint-Vincens ; les Rapports de M. Rouard 



( 90 ) 

monuments qui se attachent à l'antique établissement 
thermal de la colonie de Sextius. 

On a dit que, pour utiliser de nos jours les thermes 
romains de cette ville , on n'avait eu qu'à changer les 
robinets. L'expression peut être piquante ; mais malheu- 
reusement, il s'en faut de beaucoup que le fait soit 
exact , et ce qui reste d'antique dans le moderne éta- 
blissement n'est qu'une portion bien minime de ce qui 
exista jadis. Les bâtiments actuels furent, dit -on, 
élevés sur des ruines anciennes qu'on ne peut plus 
apercevoir aujourd'hui: on n'a conservé que le réservoir 
d'où sortent les eaux , ouvrage évidemment romain , et 
qui paraît se rattacher à d'autres constiiictions situées 
de l'autre côté des remparts, dans l'intérieur de la ville. 
Suivant le président de Saint- Vincens, ce sont « les 
» restes de plusieurs bains bâtis par les Romains. La 
» bâtisse des murs et des voûtes en est considérable , 
» et peut faire juger de la manière solide dont les bâ- 
» timents étaient construits dans les i" , u"^ et in"® siè- 
» clés (1). » 

Des restes de même nature se rencontrent encore 
fréquemment dans des maisons particulières , et surtout 
dans la rue appelée des Etuves. « J'y ai vu il y a deux 
» ans, me dit M. le marquis de Lagoy dans une lettre 
» toute récente, une salle voûtée , sorte de piscine par- 
» faitement conservée , ayant tout autour des gradins 
» ( deux au moins, je crois ). Des traces laissées sur 
» les murs font juger que l'eau tli^rmale devait monter 

qae j'ai cités, etc., etc. Une notice da musée de cette yiUe est un 
ouvrage qui manque, et que Ton doit désirer. 

(1) Description des antiquités de la ville d^Aix, 1818 > p. 13. 



(91 ) 

» jusqu'au cou des personnes assises sur le dernier gra- 
» din. L'eau thermale n'y est plus amenée par des 
» conduites entretenues , elle s'échappe par des fis- 
» sures ; aussi fait-il très-chaud dans cette salle , qui 
» ne sert plus à aucun usage actuellement. Dans une 
» autre maison de la même rue , il y a d'autres cons- 
» tructions thermales antiques qui sont employées par 
» un teinturier. Dans d'autres quartiers de la ville, il 
» existe des ruines qu'on croit avoir fait partie de ther- 
mes, etc. » Parmi les vestiges que mon savant confrère 
indique dans cette dernière phrase, il faut compter 
ceux qui furent reconnus sur la place aux Herbes en 
1843 , et qui se composaient principalement de restes 
d'aqueducs et d'une salle voûtée (1). Ces constructions 
pouvaient avoir appartenu à un monument important , 
qu'on avait espéré de retrouver sur cette indication d'un 
ancien historien d'Aix cité par M. Rouard : « On n'a 
» pas fait la place aux fruits avec des degrés et on ne 
» l'a pas élevée par dessus la rue sans raison ; ça esté 
» pour conserver une cave faite en rond , laquelle est 
» au-dessous de la fontaine, et autour de laquelle il y a 
» seize sièges de marbre faits en forme de niches , et à 
» côté deux tuyaux, etc. (2). » On peut conclure de 
toutes ces données que la ville de Sextius possédait de 
nombreux établissements, publics ou particuliers, dans 
lesquels ses eaux chaudes étaient utilisées pour des 
bains. 

J'attache une certiine importance à tous les monu- 

(1) Rouard , Rapport sur les fouilles de 1843 et 1844, p. 22. 

(2) Pitton, Hist. de la ville â^Aix, p. 24. La salle antique décrite 
ici par cet auteur parait avoir été destinée à Tusage des douches. 



(92) 

inents votifs, qui peuvent aAoir été recueillis auprès de 
sources minérales ; et pour connaître les objets de cette 
nature qu'on aurait découverts à Aix, je m'étais adressé 
à l'obligeance de M. de Lagoy. Voici ce qu'il m'a ré- 
pondu sur ce point : « Je ne connais aucune inscription 
» votive qu'on puisse rapporter à nos eaux. On con- 
» serve dans le musée de la ville un assez bon nombre 
» à' ex voto en terre cuite , provenant du cabinet Saint- 
» Vincens. Il y a quelques figures entières, un enfant 
» au maillot, et des membres séparés, tels que tètes, 
» pieds, mains, oreilles, phallus, etc. Il est probable 
» que tout cela a été découvert dans le pays , mais ce- 
» pendant rien, que je sache, ne saurait établir aujour- 
» d'hui d'une manière certaine l'origine de ces petits 
» monuments. » 

irfaut bien que je parle encore, en finissant, d'objets 
dont la reproduction^ si fréquente aux époques païennes, 
'sans avoir eu toujours le but immoral qu'on lui attri- 
buerait aujourd'hui , blesse nos yeux, et fait rougir une 
pudeur chrétienne. Ce sont deux phallus sculptés sur 
la pierre , provenant de fouilles faites à Aix , et dans le 
voisinage des bains antiques. Le premier, qui se voit 
encore à l'intérieur des thermes actuels, mais très mu- 
tilé, et inscrit des lettres i. h. c, fut trouvé en 1705 (I). 
C'est en 1818 qu'on découvrit l'autre , conservé der- 
rière ces mêmes thermes, et au-dedans des murs de la 
ville (2). Je crois que ces bas-reliefs priapiques étaient 

(1) Lettre à Vahhé de Tricaud, à la suite de V Histoire naturelle 
des eaux chaudes d*Aix, par Lauthîer. — Rouard, Notice sur la Bi-^ 
bliothèque d*Aix, pp. 237, 238. 

(^ Saint-Vincens> Descript, des antiquités d^Aix, p. 12. 



(93) 

des monuments votifs ; et comme il ne parait pas que 
les anciens aient connu la maladie honteuse dont la 
Providence semble avoir fait plus tard le châtiment 
terrestre du libertinage, ils pourraient faire supposer 
aux sources thermales de Sextius quelque vertu sem- 
blable à celle dont les eaux de Sinuessa étaient douées, 
selon Pfine et Martial (1). Cest aussi la pensée du dis- 
tique, en latin moderne, qu'on lit à l'intérieur des bains, 
sous le phallus mutilé. 

ÂQU^ SICCM. 

L'Itinéraire d'Antonin établit ainsi l'emplacement de 
cette station, sur la voie qui conduisait A'Aqtiœ Tarbel- 
Hcœ, Dax, à Tolosa, Toulouse (2) : 



Calagorris 


• 

* 


Jquis Siccis 


M. P. XVI. 


Fernosole 


M. P. XV. 


Tolosa 


M. P. XV. 



Valois (3) , Wesseling (4), d'Anville (5) retrouvent la 
position comme le nom d'Aquœ Siccœ, dans un lieu 
peu considérable des environs de Toulouse qu'ils appel- 
lent Seiches, pour Seysses-Tolosanes qui serait plus 
exact (6). Mais d'Anville a fait le premier cette obser- 
vation, que ce lieu est bien plus rapproché de Toulouse 

(1) Sup., p. 11. 

(2) Vet, Roman, itinen^f,, éd. W^esseling, pp. 457, 458. 

(3) NotiL Galiiar,, pp. 158, b., 595, a. 

(4) Ia)c. laud., not. ad h. voc. 

(5) Notice de la Gaule, pp. 81, 82. 

(6) Du Mège, Monum. des Volces-Tectosages , pp. 83 et 111. 



(94) 

que La-Vernose (il dit mal Vernose), position dans la- 
quelle on i*econnaît généralement l'antique Vernosol ; 
que, par conséquent, l'Itinéraire intervertit ici l'ordre des 
mansions ; enfin , que l'une des distances est répétée 
mal-à-propos, et forme double emploi (I). L'identité 
des lieux et l'exactitude des rectifications qu'a proposées 
l'illustre géographe , me paraissent puissamment con- 
firmées par le témoignage de MM. du Mège et de Cra- 
zannes, qui ont étudié à fond la topographie de ces con- 
trées, et qui m'écrivent à ce sujet tout-à-fait dans le sens 
de d'Anville (2). Je ne saurais donc adopter l'opinion 
de M. Valckenaer, qui maintient toutes les dispositions 
de l'Itinéraire, et place les Aquœ Siccœ dans un lieu 
qu'il nomme Ayguas-Sec (3). Quelques détails topogra- 
phiques, que je dois à mes savants correspondants du 
Languedoc, sont pour moi un nouveau motif de m'en 
tenir à l'opinion qui reconnaît les Aquœ Siccœ dans le 
lieu modertie de Seysses. 

Leur nom ne se lisant que dans l'Itinéraire d'Antonin, 
cette circonstance laisse naturellement subsister un 
doute, que l'absence ou la présence de l'édifice qua- 
drangulaire aurait pu lever, si ce lieu eut été marqué 
sur la Carte de Peutinger. La dénomination d'Aquœ 
Siccœ présente, en effet, une réunion d'idées assez ex- 
traordhiaire pour qu'on soit porté à se demander quelle 
a pu être son origine ? Cette question en engendre plu- 

(1) Loc, laud, 

(2) On peut voir ce qu'a imprimé sur cfta M. du Mège, loc, laud. 
(8) Géographie des Gaules, tom. III , p. 108. — Ce nom , qui a la 

' même signification que celui de Seiches ou Seysses , pourrait bien 
désigner le même lieu. M. de Crazannes me dit qu'il est ainsi ap- 
pelé dans le patois du pays. 



(95 ) 

sieurs autres : y avait-il en ce lieu des eaux thermales 
ou minérales, dont les sources auraient été taries par 
quelqu'une de ces révolutions de la nature , qui ne sont 
pas rares près des grandes chaînes de montagnes ; au- 
rait-on exécuté en cet endroit de grands travaux de 
dessèchement, comme les Romains savaient en faire; 
enfin , le nom A'Aquœ Siccœ proviendrait-il d'un éta- 
blissement antique pour l'usage des douches , ou des 
boues minérales ? Telles étaient les questions que je 
m'adressais, étonné qu'aucun critique ne s'en fut oc- 
cupé, bien qu'elles ne soient pas sans intérêt. M. du 
Mège, à qui je les avais communiquées, a bien voulu 
y répondre en partie. Voici le plus essentiel de ce qu'il 
m'écrit à ce sujet : 

« Le lieu de Seysses ou Seiches n'a point d'eaux ther- 
» malcs ; mais de nombreuses fontaines sourdent de 
» son territoire. La pente jusqu'à la rive gauche de la 
» Garonne étant peu rapide, elles devaient ff former 
» autrefois des amas d'eaux assez considérables ; aussi 
» l'on y voit encore , à droite de la route actuelle , des 
» restes de travaux faits pour dessécher le sol. Un 
» bassin assez vaste , qui peut-être même a été réparé 
» lors de la construction de la nouvelle route du Com- 
» minges , et les restes d'un canal profond qui se dirige 
» vers la Garonne, et qui sert à l'écoulement des eaux, 
» telles sont les circonstances locales qui indiquent To- 
» rigine de la dénomination , en apparence contradic- 
» toire, de cette manmo. » M. de Crazannes qui a ob- 
servé les mêmes traces d'anciens travaux de dessèche- 
ment, me dit qu'on n'a trouvé en ce lieu aucun autre 
reste d'antiquités, bien moins encore des traces d'un 



(96) 

établissement iliernial , ou de fontaines minérales. 
M. du Mègc pense néanmoins que les Romains y avaient 
établi des thermes artificiels. 

Pour moi, j'en reviendrais volontiers à ma première 
idée de boues minérales , autant qu'il peut être sage de 
s'attacher à une conjecture fort incertaine encore. Mais 
nous savons que ce moyen curatif fut connu des maîtres 
du monde (1); et l'écoulement même des eaux, pro- 
curé par les travaux qu'on me signale , pouvait favoriser 
la formation de ces boues dans un lieu naturellement 
marécageux. 11 ne serait point étonnant que les sources 
qui leur communiquaient quelque propriété médicale , 
à un degré fort médiocre peut-être, aient vu plus tard 
leurs vertus s'affaiblir et s'annihiler : tel a été le sort de 
beaucoup d'autres. 

ÂQUyE TARBELLlCyE, 

Les Tarbelli ont été mentionnés par César, mais fort 
passagèrement , et sans qu'il ait rien dit de leurs eaux 
thermales (2). Beaucoup plus tard, nous trouvons leur 
capitale marquée dans l'Itinéraire d'Antonin sous le 
nom A'Aquœ Tarbellicœ^ comme une station commune 
à plusieurs voies qui s'y croisaient, en partaient, ou 
venaient y aboutir (3). D'An ville a discuté assez lon- 
guement les évaluations que donne l'Itinéraire, poui* 
les distances de cette ville à quelques-unes des man- 

(1) Plin., Nai. hist. XXXl, 6 (32). 

(2) De Bel, GalL, lll, 27. 

(3) VeL Rom, itinerar., od Wesselînjç, pp. 455, 430, 457. 



(97) 

sions voisines (I) ; M. Walkenaer est plus succinct (2). 
Mais ces deux illustres géographes, souvent divisés 
d'opinion , s'accordent ici à reconnaître que ces thermes 
antiques ne peuvent être retrouvés qu'à Dax , une des 
villes principales du département des Landes , dont les 
eaux chaudes, encore utilisées aujourd'hui pour divers 
besoins domestiques , sont à peu près délaissées par les 
baigneurs (3). Valois, avant eux (4), et bien d'autres 
encore en avaient porté le même jugement. Cette identité 
paraît en effet incontestable , et l'analogie du nom mo-^ 
derne avec l'ancien pourrait paraître à plusieurs un 
argument suffisant pour la constater. Il n'y a pas encore 
un fort grand nombre d'années que le nom altéré de 
Dax a prévalu exclusivement sur celui d'Aqs , qui con- 
servait bien mieux les traces du primitif latin Aquœ ; 
et celui-ci est plus reconnaissable encore dans le nom 
A'Aquise, que l'idiome des Basques continue de donner 
à cette ville. 

Sans la nommer précisément, Pline avait fait mention 
de ses eaux thermales et froides , parmi les sources 
nombreuses et variées que l'on connaissait de son temps 
dans les montagnes des Pyrénées. Emicant bénigne ^ 
disait-il , passimque in pluribus terris , alibi frigidœ , 
alibi calidœ y alibi junctœ , sicut in Tarbellis Aquita- 
nica gente , et in Pyrenœis montibus , te?iui intervallo 
discernente (5). Le naturaliste, on vient de le voir, 

(1) Notice de la Gaule, ja, 78; cf. id. ad vv. Carasa, p. 200; 
Benehamum , p. 149. 

(2) Géographie des Gaules, tom. I, pp. 290, 296, etc. 

(3) Locc. laudd, 

(4) mtit. Galliajr. , p. 31 , b. 

(5) Nat, hist,, XXXI, 2. 

7 



(98) 

comptait ,les Tarbelli dans la nation des AquUani ; et 
il avait dit ailleurs que celle-ci avait donné son nom à 
toute cette province de la Gaule : Aquitani y unde no- 
men provinciœ (1). D'Anville partant de là , juge pro- 
bable que le nom de la ville d'Aquœ Tarbellicœ , qui 
était une capitale , fut l'origine de cette dénomination 
A' Aquitani (2). Je croirais plutôt qu'elle provenait, en 
général, des eaux minérales et thermales de toute nature, 
dont l'abondance en ces contrées n'avait d'iégale nulle 
part dans les Gaules; et je vois que cette opinion était 
celle de Valois (3) . 

Strabon , qui nomme les Tarbelli , et mentionne les 
mines d'or de leur territoire (4) , ne dit rien de leurs 
sources thermales. Mais Ptolemée leur donne une ville 
dont le nom , t Jara AÙYou<yTa, est la traduction littérale 
du latin Aquœ Augustes (5). Cest bien évidemment la 
même ({M'Aquœ Tarbellicœ , qui ayant reçfi , comme 
bien d'autres villes, de notre Gaule, ce titre honorifique, 
devait ainsi s'appeler Aquœ Augustœ Tarbellicœ. Dans 
quelle circonstance lui fut donné ce titre, qu'on peut re- 
garder sans doute comme un témoignage de son impor- 
tance (6), et delà réputation de ses sources? Le géographe 
ne nous l'apprend pas ; et nous ne pouvons le savoir d'ail- 
leurs, puisqu'il est le seul qui en ait parlé. On peut toute- 

{i) Nai.hisL, lY, 19(33). 

(2) Loc. latid. 

(3) Notit, Galliar.y p. 31 , b. 

(4) Rer, geogr,, IV, 190, edit. Almeftv., p. 290. 

(5) Geoyr., Il, 6. (7). 

(6) Après la colonie de Sextius, la ville des Tarbelli parait avoir 
été le lieu le plus considérable de la Gaule, parmi ceux qui possèdent 
des eaux minérales. 



(99) 
fois le conjecturer avec quelque vraisemblance, d'après 
une donnée un peu vague, et rarement citée ce me sem- 
ble, sur laquelle je pense que se sont fondés les premiers 
des modernes qui ont rapporté, comme un fait positif^ le 
voyage d'Auguste dans cette ville. 

Nous avons en effet dans l'Anthologie grecque une 
épigramme qui porte le nom de Grinagoras de Mytilène , 
laquelle donnerait à entendre que ce prince visita quel- 
qu'une des sources thermales de ces contrées , peut-être 
même qu'il s'y baigna. Après avoir exprimé cette pensée, 
que la renommée suit Auguste en quelque lieu qu'il 
porte ses pas, le poète ajoute : « Les eaux des Pyrénées 
» en sont témoins (nupTfvviç S^ata (xapTupia) : les bu- 
» cherons du voisinage dédaignaient de s'y laver ; Au- 
»' guste en a fait les bains des deux continents (1)./ 
Quoique nous ne trouvions pas ici le nom des sources 
qui furent ainsi favorisées de la visite impériale, et lui 
durent cette grande vogue , il s'en faut que la donnée 
fournie par cette petite pièce soit pour nous sans intérêt 
et sans valeur. Car, si on les rapproche de cette nouvelle 
indication , le titre A'Augmtœ, que nous avons vu donné 
par Ptolemée aux eaux des Tarbelli, et la dénomination 
de Tarbella Pyrene, que Tibulle parait appliquer à leur 
capitale (2), deviennent autant de motifs plausibles de 
soupçonner , pour ne rien dire de plus positif, que 

(1) Hostein est le premier qui ait fait connaître cette épigramme, 
alors inédite [Not, et castigaB in Stepkan, ByzanL, p. 110, b. ) On 
la trouve aujourd'hui dans l'Anthologie de Cephalas, sous le n. 664, 
p. 117 de l'édition de Reiske. dans les Analecta de Bmnck, tom. H, 
p. 145 , etc. 

(2) Carm., l, 7, v. 9. 



•. ( 102 ) 

et répithète Caiemes pourrait à la rigueur se justifier (1 ) . 
Aper, à..(îui-la lettre de saint Sidoine est adressée, 
tenait par sît mère à une famille honorable parmi les 
Arwrnij quoiqu'il appartint aux ^dui par celle de son 
père', et que long-temps il eût délaissé la patrie mater- 
'• nelle, où il avait passé ses plus belles années : nous 
apprenons tout cela d'une lettre précédente de saint 
Sidoine, où il se faisait l'interprète des Arverni, pour 
rappeler le fugitif au séjour de son enfance (2). On peut 
supposer que leur voix ne s'était pas fait entendre vai- 
nement, car, à l'époque de la seconde lettre, celle qui 
donne lieu à ces recherches , l'ami du pieux pontife 
semble avoir résidé habituellement dans son diocèse, 
et même dans sa ville épiscopale ; c'est , du moins , ce 
qui mé parait indiqué dans la suite de cette lettre , où 
saint Sidoine exprime l'espoir de son prochain retour 
à la ville, pour la solennité des Rogations, alors nou- 
vellement instituée. Quicquid illud est, quod vel oiio , 
velnegotio vacas, inurbem tamen, ni fallimur, Ro- 
gationum contemplatione revocabere (3). 

Sirmond, 1614 et 1696, ainsi qae dans le recaeil de D. Bouquet. 
La seconde édition du savant jésuite , 1652 , porte Caienses , quoique 
dans sa noie il semble adopter la leçon Calentes; Caienses se lit aussi 
dans l'édition qui fait partie de la Biblioiheea maxima patrum , de 
Lyon 1677. Enfin on trouve Cdgienses dans un manuscrit de la bi* 
bîiotbèque de Glermont, du XI™® au XUJ^^ siècle, dont je dois la 
connaissance à son savant conservateur , M. Gonod. 

(1) Ce nom pourrait être formé du prénom Caitis , et pour peu 
qu'on voulût se livrer aux conjectures, il serait facile de lui sup- 
poser quelque rapport avec le monstre onuronné qui fut surnommé 
Caligula , mais que Thistoire et les médailles ne désignent que par 
son prénom et son titre , Caitu CcBsar. 

{fj EpisL iy.,2i. 

(3) Ibid.y, J4. 



( *os ) 

Je me suis arrêté à ces détails , parce qu'ils foumis- 
sent une première indication locale, et rendent pro- 
bable que les Calentes Aqtiœ ne doivent pas être cher- 
chées hors du pays des Arverni. Mais devant le silence 
des antiques monuments de la géographie /cette donnée 
reste bien vague, dans une contrée aussi riche que 
TAuvergne en eaux thermales (1). On pourrait donc 
s'attendre à rencontrer un grand nombre d'opinions di- 
verses sur l'emplacement moderne de ces thermes. 
Toutefois je n'en vois que deux qui puissent invoquer 
des autorités respectables. La première, la plus an- 
cienne , qui me paraît aussi la plus répandue , est celle 
de Valois (2) , de Savaron (3), et de Sirmond (4), qui 
mettent les Calentes Aquœ à Chaudes -Aiguës, et les 
identifient avec les Aquœ Calidœ. D'Anville n'a point 
confondu ces deux noms antiques. On a vu qu'ail re- 
connaît les eaux de Vichy pour les Aquœ Calidœ de la 
Carte (5) ; mais, ainsi que Valois et les éditeurs de saint 
Sidoine , c'est à Chaudes-Aiguës qu'il place les Calentes 
Aquœ (6). Il parait s'autoriser de ces expressions du 
texte cité, montana circum, etc. , lesquelles, suivant 
lui , ne conviennent qu'à la Haute-Auvergne : c'est un 
bien faible argument, ce me semble (7). 

(1) ccDansle seul département du Puy-de-Dôme, m'écrîtHI. Gonod» 
» il y a 54 communes qui possèdent des eaux minérales , et le 
nombre des sources dépasse 208. 
^ (2) Nota. Galliar., p. 47 , b. 

(3) Àd Sidon, not. , p. 337. 

(4) Àd Sidon, not. , p. 6^ 

(5) Sup. p. 32. 

(6) Notice de la Gaule , p. 191. 

(7) La forme de la phrase étant disjonetÎTe , le second membro 
fait opposition au premier bien plus qu'il n'en est la suite. £n deux 



( 104 ) 

Une autre opinion plus récente regarde les eaux du 
Mont-d'Or comme les anciens thermes dont parle saint 
Sidoine. Elle a été émise dans une monographie estimée 
sur ces eaux (1) ; et ce jugement d'un savant médecin 
connaissant bien les localités y a été pour moi la confir- 
mation de conjectures que je formais depuis long-temps. 
M. le docteur Bertrand déduit ses raisons du texte 
même de saint Sidoine. « Il suffit, dit-il, d'avoir vu 
» avec quelque attention les eaux du Mont-d'Or, pour 
» convenir que cette description caractéristique leur est 
» tout-à-fait applicable. Ainsi , en se dégageant de la 
» coulée , elles font entendre un bruit souterrain et en- 
» trecoupé, très-fort surtout au temps des orages; elles 
» naissent à travers des prismes dont les angles sont 
» aigus et la surface polie ; elles jouissent d'une an- 
» eienne célébrité contre les maladies de poitrine ; et 
» enfin, elles se trouvent dans un pays montagneux, où 
» de nombreuses cîmes sont couronnées de vieilles 
» ruines de châteaux (2). » Et plus loin : « Sous les 
» mêmes influences (atmosphériques), la source des 
» bains de César débouche avec un bruit plus fort que 
» de coutume, et fait entendre une sorte d'éructation 
» que l'on distingue à plus d'une vingtaine de pas. On 
» dirait qu'alors les colonnes d'eau sont entrecoupées 
» par de grosses bulles de gaz, qui font explosion dès 
» qu'elles cessent d'être comprimées dans les conduits 

mots , Fécrivain demande à son ami s'il prend les eaux , ou s'il yî- 
site les châteaux des montagnes. Le second mot de ce passage devait 
être num , plutôt que nunc, 

(1) Bertrand, Recherches sur les propriétés physiques , chimiques 
et médicinales des eaxAx du Mont-d'Or, Clermont , 1823 , in-S^. 

(2) Op. hud. p. 73. 



( 105 ) 

» souterrains. C'est VAqua... ructata cavernatim de 
» Sidoine Apollinaire (1). » 

Voilà des arguments fort plausibles, pour ne pas 
dire décisifs, et il en résulte qu'on peut, avec toute 
raison , reconnaître au Mont-d'Or les sources thermales 
fréqtientées par Aper, bien que depuis lors elles aient 
changé plusieurs fois de nom (2). On pourrait objecter 
sans doute que ces eaux ne sont point sulfureuses , et 
que les substances, volcaniques à la vérité, mais com- 
pactes et polies , qui leur donnent passage n'admettent 
guère, dans sa rigueur, Vespression pumicibus. Il y a 
à cela une simple réponse. Le saint évéque des Arverni, 
homme d'esprit et lettré , n'était vraisemblablement ni 
chimiste , ni géologue , et ses expressions peuvent bien 
manquer ici de l'exactitude scientifique. Mais il n'a pu 
se tromper de même sur la nature des maux pour les- 
quelles ces eaux étaiei^t alors recommandées ; et si l'on 
considère combien peu d'eaux minérales sont salutaires 

(1) Op, laud., p. 107. 

(2) Ayant qae ces eaux, long-temps oubliées, eussent recouyré 
leur renommée antique , ce qui est assez récent , le yîllage portait le 
nom de Saint-Pardonx; puis il futappelé snccessiyement : Les Bains , 
Les Bains-du-Mont-d'Or , et simplement Le Mont-d'Or. On a ayancé 
que dans l'antiquité le Mont-d'Or s'appelait DuramW; mais les deux 
seuls auteurs qui aient fait usage de ce nom, Ausone (Mosel, y. 
464), et saint Sidoine (Carm. XXll , v. 103), paraissent ne l'appliquer 
qu'au fleuye qui y prend sa source , et non à la montagne même. 
Aimoin est Fauteur le plus ancien chez qui Ton trouye le nom 
moderne ; il dit (Prœfat.H), en parlant de la Dordogne : Dordonia 
etiam qui ex monte qui Doj^diciiur, etc. Il résulte de tout cela qu'on 
peut regarder comme fort rationnelle l'orthographe de ceux qui 
écrivent Mont-Dor, ou Mont-Dore. Mais l'usage ne l'ayant pas 
encore consacrée , je n'ai pas osé l'adopter. 



( 106 ) 

dans les affections de poitrine, son phtisiscentibus 
languidis est ici une spécialité tout-à-fait caractéristi- 
que, comme vient de le dire Fauteur que j'ai cité (I). 

Les découvertes d'antiquités faites en ce lieu, à di- 
verses époques, paraissent justifier l'opinion qui place 
au Mont -d'Or les Calentes Aquœ, et font voir surtout 
que ces sources thermales étaient fréquentées plusieurs 
siècles avant l'écrivain ecclésiastique qui, seul, nous 
les a fait connaître. On y a trouvé, en effet, des débris 
splendides d'édifices romains, et, ce qui est ici plus, im- 
portant , des restes bien reconnaissables de thermes an- 
tiques appartenant à différents âges. 

A la fin du dernier siècle, Pasumot, savant estimable, 
décrivit ce qu'on connaissait alors des monuments an- 
tiques de ce lieu (2). Ce n'était guères que quelques par- 
ties des thermes romains , conservées dans l'édifice qui 
les remplaçait alors, et des débris d'architecture, char- 
gés d'une profusion d'ornements à laquelle l'art des 
bonnes époques antiques ne nous a point accoutumés. On 
peut juger ainsi des portions de colonnes, plus ou moins 

[i) M. Bertrand est moins heureusement inspiré lorsqu'il yeut 
appliquer également au Mont-d'Or le nom des Aquœ Calidœ de lu 
Carte de Peutinger ; il n'a pas réfléchi à la contradiction manifeste 
que cette synonymie impliquerait dans son système. On a bien pu 
en effet confondre ces deux dénominations pour les appliquer à 
Chaudes-Aiguës , ou à Vichy ; mais cela n'est pas possible pour le 
Hont-d'Or , ce lieu étant à l'ouest de Clermont , tandis que les Aquœ 
Calidœ sont dans des directions fort différentes , au midi ou à l'est , 
selon qu'on adoptera l'opinion de M. Walchenaer , ou qu'on s'en 
tiendra , comme je l'ai fait {sup. 33.) , à'Ielle de d'AnvîUe. 

(2) Son mémoire inséré dans les Annales des Voyages, tom. XII^ 
n. 36 , et dont il y a un tiré à part , a pour titre : Description de 
quelques monuments antiques qui existaient aux Bains du Mont-dOr. 



( 107 ) 

considérables, dessinées sur la planche de son opuscule, 
et dont les fûts, divisés en compartiments par des méan- 
dres, sont décorés de boucliers, de la louve romaine, 
de figures de génies , d'enfants , d'oiseaux et d'autres 
animaux, etc. (1). Le morceau le mieux conservé se 
voyait alors dans la cave d'une maison , et dans cette 
partie de construction on reconnaissait la naissance 
d'un arc ; des assises de semblables colonnes existaient 
sur divers points du village, où ils servaient de piédes- 
taux à des croix. On pense que ces débris sont des restes 
d'un vaste et magnifique édifice, sur lequel on a rien 
de positif, mais qui porte le nom de Panthéon dans les 
anciennes traditions du lieu, et dans quelques titres du 
xv*"* siècle (2). 

Des excavations pratiquées pour la construction d'un 
nouvel édifice thermal, en 1817 et 1818, firent dé- 
couvrir d'autres antiquités , qui furent publiées par M. le 
docteur Bertrand dans une notice spéciale (3) , et qui 
formaient l'ensemble presque complet des bains ro- 
mains. On découvrit d'abord à peu de profondeur une 
piscine , dont l'époque ne peut paraître que fort incer- 
taine ; puis , au-dessous de son pavé , des constructions 
évidemment exécutées à l'époque romaine. Elles consis- 
taient d'abord en une galerie spacieuse , et une grande 
salle quadrangulaire qui lui était contiguë, et dont les 
murs , revêtus d'une sorte ^opus reticulatum , étaient 
coloriés à l'intérieur d'une teinte rouge sur un crépis 
très-épais, et remarquable par son poli et son éclat. Le 

(1) Op. laud., pp. 6—11, pi., nn. VI, Vil et VIII. 

(2) Ibid., pp. 3 , 6 et 11 ; ef. Bertrand , Mémoire etc. , p. 26. 

(3) Mémoire sur l'établissement thermcU duMont-ct Or, et les antiquités 
que l'on vient d'y découvrir, Clermonl- Fèrrand , 1819 , in-8°. 



( 108 ) 

pavé en dalles de pierre qui s'inclinaient légèrement 
vers le milieu de la salle , et les gradins, aussi en pierre, 
qui régnaient sur les deux grands côtés la désignaient 
assez comme ayant servi de piscine. Une division pra- 
tiquée dans la cage d'un des escaliers , particularité di- 
gne d'attention , a fait penser à M. Bertrand que chaque 
sexe avait son passage réservé pour y descendre (I). 
Plus loin, on trouva une seconde galerie, avec deux salles 
pavées en briques et beaucoup moins grandes, où 
aboutissait un aqueduc : l'une d'elles était divisée dans 
sa longueur, et bordée en outre, des quatre côtés, par 
des rangées de petites colonnes, ou , pour mieux dire, 
de petits cylindres de 40 c. de hauteur sur une circon- 
férence du double, et construits en briques superpo- 
sées ; on l'a jugé destinée aux bains de vapeur (2) . Deux 
nouvelles sources furent découvertes alors ^l'une arri- 
vait par le milieu de la grande piscine ; l'autre , par un 
puits de forme octogone, qui a été conservé (3). De 
nombreux tuyaux en plomb , retrouvés au travers des 
ruines, durent servir à conduire dans la piscine princi- 
pale les eaux des diverses sources , et d'autres canaux 
encore s'étendaient sous des maisons qui ne furent pas 
fouillées (4). 

Toute celte portion des thermes des Romains, soli- 
dement établie et bien distribuée , était dépourvue tou- 
tefois des ornements et du luxe qu'on observe ailleurs 
dans les édifices destinés aux mêmes Usages qu'ils ont 
laissés sur le sol de notre Gaule. Mais bientôt des fouilles 

(1) Op. /atKi., pp. 18 et 19. 

(2) Ihid. pp. 20 , 21. 

(3) /Wrf. p. 23. 
Ihid. p. 24. 



( 109 ) 

ultérieures, décrites dans un autre mémoire de M. le 
docteur Bertrand (I) , ont fait voir qu'au Mont-d'Or 
aussi , les conquérants n'avaient pas mis en oubli leur 
magnificence habituelle. C'est ce qu'indiquent les riches 
débris d'architecture qu'on en a exhumés, notamment 
une frjse ornée de sculpture dont on parle avec admi- 
ration , et une mosaïque qui n'a pu être reconnue que 
dans une faible portion, le reste se trouvant engagé sous 
les maisons voisines (2). Là encore, on reconnut de 
nouveaux bains de vapeur, ainsi qu'une vaste salle, 
gous le pavé de laquelle était un réservoir revêtu en 
béton : l'absence de toute incrustation, de toute trace de 
dépôt sur les parois du réservoir et de son aqueduc , 
paraît indiquer que des eaux froides seulement y étaient 
amenées, et dans un but de réfrigération (3). 

Au-dessous de ces constructions romaines, qui occu- 
paient un vaste terrain, et, suivant toute apparence le 
dépassaient encore de beaucoup, on fit une autre dé- 
couverte importante, à laquelle on était loin de s'at- 
tendre, car rien n'avait pu la faire pressentir. Pour 
achever les travaux de l'établissement qtfon édifiait, il 
fut nécessaire d'extirper une masse rocheuse , d'un vo- 
lume considérable, sur laquelle existaient quelques por- 
tions des ouvrages romains. Attaquée et enlevée ,^ « elle 
» mit à découvert, dit M. Bertrand, une piscine qua- 
» drangulaire en madriers de sapins équarris, pouvant 
» admettre une quinzaine de personnes à la fois, et si 

(1) Note sur des antiquités découvertes au Mon^Or , Clermonl- 

Ferrand, l'844,.in-8*'. 

(2) Op. laud, , p. 12. 

(3) Op, laud. , pp. 12 et 13. 



( 110 ) 

» bien conservée qu'on aurait encore pu s'ybaigner(l).» 
Evidemment , le dépôt d'une des sources avait formé, 
couche par couche, cette masse, qui s'était moulée sur 
la piscine , en l'entourant d'abord dans sa partie infé- 
rieure, puis en s'élevant, et finissant par la combler et 
la couvrir. Même en se basant sur des phénomènes 
semblables dont on a pu observer la marche sur les 
lieux , il n'est pas possible de calculer quel laps de temps 
fut nécessaire pour une telle formation , que bien des 
causes accidentelles pouvaient accélérer ou ralentir. 
Mais du moins , il en résulte que cette piscine était de 
beaucoup antérieure aux thermes construits par les Ro- 
mains, puisque ceux-ci bâtirent sur la masse du dépôt 
qui l'avait ensevelie : c'est un puissant argument en fa- 
veur de l'usage des eaux thermales chez les Gaulois , 
avant l'invasion de leur patrie. 

Divers objets antiques ont été exhumés au Mont-d'Or 
lors des fouilles successives. Telles sont une intaille re- 
présentant un faune, un anneau d'or, des chaînettes 
de même métal , des fibules , des pinces à épiler , une 
quarantaine de monnaies romaines appartenant à plu- 
sieurs règnes , depuis les Vespasiens jusqu'aux Anto- 
nins (2). Plus tard on retira des décombres, un aigle 
aux ailes éployées à demi, une tête bien conservée, 
des fragments de la statue à laquelle elle avait appar- 
tenu, et une jambe de cheval qui indiquait une fîgun» 
équestre (3) ; enfin, à côté d'une nierre percée pour le 
passage d'une des sources, on trouva réunies douze 

(1) Op> laud. , pp. 4—7. 

(2) Bertrand , Mémoire , pp. 22 et 23. 

(3) Bertrand , Note, etc., p. 10. 



( *** ) 

médailles, d'une parfaite conservation, de la colonie de 
Nemaususy aux effigies d'Auguste et de son gendre. 
Agrippa. Si , comme le présume M. Bertrand , cette réu- 
nion n'était pas fortuite, si les médailles avaient été dé- 
posées en ce lieu , avec l'intention qui nous en fait placer 
encore dans les fondations des édifices publics, une 
date ancienne serait assignées par elles aux premiers 
ouvrages dont les Romains embellirent les thermes du 
Mont-d'Or(I). 

Ces thermes ont aussi restitué aux archéologues deux 
inscriptions qui ne sont pas sans intérêt. M. Gonod, à qui 
j'ai bien d'autres obligations, pour tout ce qui concerne 
les eaux minérales de l'Auvergne , m'a adressé une copie 
fidèle de la suivante, découverte en 1823 (2), et que des 
lettres liées rendent assez difficile à lire, quant au nom 
de la divinité à laquelle fut consacré cet autel votif : 

rVLIA. SEVE 

RÀ. SILV4NN[0] 
V. s. L. M. 

Cette autre était connue antérieurement : elle a été pu- 
bliée par Gault de Saint-Germain (3), et reproduite par 
M. Gonod (4) : 

(1) Note , etc. , p. 15. 

(2) Ibid. , p. 10. 

(3) Tableau de la ci-devant province d* Auvergne, p. 171. 

(4) Description statistique du Puy-de-Dôme, p. 59.— Gruter a doané 
(1,4) une inscription tout-à-fait identique , ayec ces indications : 
Castilione prope Mediolant^ , in templi fomice antiquo, marmoreo 
quadro , et au-dessous : Pighius a Studioso quodam accepit. Il y a eu 
sans doute ici quelque confusion de feuilles yolantes ; mais il en 
résulte que cette inscription était connue, au moins dès le com- 
mencement du XVII® siècle. 



(112) 

HERCVLl. MERCVRTO 

ET. SILVANO 

SACRVM. ET 

DIVO. PANTEO. EX. V 

Hercule, on Fa déjà vu, était une des divinités protec- 
trices des thermes (I). Il pouvait en être de même de 
Sylvain dans certaines localités. Mais ce qui est plus 
extraordinaire que la réunion de ces dieux et de Mercure 
dans un culte commun, ce sont les deux mots divo. pan- 
TEO (sic) que nous lisons ici (2); et je ne doute pas que 
cette inscription n'ait quelque rapport avec le nom de 
Panthéon, donné par la tradition à l'édifice religieux 
des Romains dont le Mont -d'Or possède encore des 
débris . « 

Je ne puis omettre, en terminant cet article, d'indi- 
quer encore des traces de voies antiques , qui existent 
sur plusieurs points de ces environs. Elleâ ont été re- 
connues par Pasumot (3) et par M. Bertrand (4) , aux- 
quels je renvoie. Ce dernier seulement à le tort de vou- 
loir les rattacher à la voie d'Augustonemetum à Lugdii- 
num tracée sur la Carte de Peutinger; et cela parce 
qu'il identifie, comme on l'a vu, les Calentes Aquœ de 
saint Sidoine avec les Aquœ Calidœ de la Carte. 

(1) Sup., p, 5. 

(2) On connait des dîyinités Panthées , c'est-à-dire portant les 
attributs de plusieurs dieux ; des statuettes et des médailles les re- 
présentent assez fréquemment ; une inscription de Gruter (1,6) 
mentionne la consécration d'une figure de ce genre signym. pan- 
THEYM. Mais il est rare de Yoîr une divinité spéciale désignée , 
comme ici , par ce nom. Deux inscriptions de Gruter (1 , 2 et 3 ) 
font lire : pantheo. sacrym. — pantheo. avg. sacryih , et une troi- 
sième (1,5) siGNYM. PANTHEi : Ici , uous BYons de plus le titre diyo. 

(3) Op, laud. p. 12. 

(4) Mémoire, p. 34 et 3S. 



(' H5 ) 



DIVONA. 

C'est le nom d'une fontaine qui coulait à Burdigald, 
et qui a été célébrée pompeusement par Ausone , danîi 
la petite pièce qu'il a consacrée à sa patrie, parmi les 
autres villes célèbres. Le poète l'élève aU-dessùs des 
sources les plus renommées, lui reconnaît un caractère 
sacré, comme au génie tutélaire de la cité, la divinise 
même, et vante surtout les vertus médicinales de la 
boisson pure que âes eaux fournissaient. C'est donc à 
juste titre, ce me semble, que j'ai cru devoir la compter 
parmi les eaux. minérales de la Gaule. Voici les vers 
qu'il lui adresse (I): 

Salve fons ighote ortu , saceTy aime , perennis , 
Fitree , glauce , profonde , sonore , illimis , opace. 
Salve urbis genius , medico potabilis hausiu , 
Divona Celtamm lingua, fons addite divis. 
Non Aponus potUy vitrea non luce Nemausttë 
Purior , œquoreo non plenior amne lïmavus^ 

Aujourd'hui , on ne saurait reconnaître à Bordeaux 
la fontaine qui inspirait Ausone : il est vraisemblable 
qu'elle aura disparu par quelque événement naturel ou 
fortuit , ce qui n'est pas rare , comme on sait , ou bien 
elle aura pris une autre direction (2). Au xvr* siècle 
on- crut retrouver une portion des ouvrages de cons- 

(1) Clar.urb. XIV, v. Jb. 

(2) Dans une des notes qui correspondent à ce passage, l'abbé 
Jaubert, traducteur d'Àusone » dit que presque toutes les fontaines 
des enyirons sont minérales. 

8 



( **4 ) 

iruction dont l'antiquité l'avait entourée et protégée» ; 
mais il parait qu'ils ne contenaient plus d'eau. Dans son 
savant commentaire sur Ausone, Vinet, qui avait habite 
long-temps Bordeaux, rapporte que vers 1 544, comme 
on creusait le sol près d'une porte de la ville , pour y 
établir des fortifications , on découvrit un canal de forme 
quadrangulaire (dans sa coupe apparemment), et d'un 
trjftvail évidemment romain (1). A son avis, il devait 
avoir été le lit de la fontaine d'Ausone ; et ces expres- 
sions du poète, fons ignote or tu lui paraissent trouver 
leur explication dans la nature même de ce conduit 
qui, mettant les eaux à couvert, les cachait ainsi mysté- 
rieusement, depuis leur source jusqu'au point où elles 
se répandaient dans la ville (2). 

Je crois devoir faire grâce à mes lecteurs de toutes 
les belles choses que les prétendus celtologues ont dé- 
bitées, avec une assurance merveilleuse, au sujet du 
mot Divona, qui se lit Duiona dans quelques manus- 
crits, et qui fut aussi le nom de l'antique capitale des 
Cadurci. 



FONS TUNGBOnUM. 



Les Tungri , peuple d'origine germaine , ou dont quel- 
que branché s'était établie en Germanie, habitaient cette 
partie de la Gaule Belgique, que les Eburones avaient 

(1) Not. ad h. loc, -^ L*abbé Jaubert , qai parle plus brièTement 
encore qae Vinet, de ce ciinal antique, indique la localité d'une 
manière plus précise rc an Sablonnât près le moulin des Arcs. » 

(2) Loc, laud. 



( H5 ) 

occupée précédemment. Sur leur territoire existaient 
des eaux ferrugineuses et gazeuses , dont on vantait Tef* 
fieacité pour la guérison des fièvres tierces et des maladies 
ealculeuses. C'est à Pline que nous sommes redevables 
de ces notions , et H est le seul auteur ancien chez qui 
il soit question de cette source. Tungri, dit-il, civiias 
Galliœ fontem habet insignem, plurimis bullis stil^ 
lantem , ferruginei saporis > quod (psum nonnisi in fine 
poius intelligitur . Purgat hic corpora ^ tertianus febres 
discutit y calculorumqiie vida ( 1 ) . 

Le mot civitas étant évidemment ici pour désigner 
le peuple , non sa capitale , et toute indication plus précise 
nousmanquantd'ailleurs au sujet de la localité qui possé- 
dait cette source , on conçoit qu'il n'est pas facile de résou- 
dre avec certitude la question de géographie comparée que 
soulève le texte de Pline. D'Anville met à Spa le Fqm 
Tungrorum (2), opinion, du reste , bien antérieure au sa- 
vantgéographe français (3). C'est aussi cellequi me parait 
admise le plus généralement, et que semblerait autoriser 
la nature d'ujie des sources de Spa , à laquelle les carac- 
tères attribués par le naturaliste à celle des Tungri con- 
viennent, dit-on, avec la plus parfaite exactitude. 

Mais un lieu si célèbre et si fréquenté à l'époque ro- 
maine devrait, ce semble, montrer encore au moins 
quelques débris antiques , iraces du passage du grand 
peuple. Si, comme je le crois, nulle antiquité romaine 
n'a été découverte à Sna, ne serait-on pas mieux fondé à 

(1) NaLhistXKXl, 2(8). 

(2) Notice de la Gaule, p. 317. 

(3). Ortelius, Itinerar, in fionntdlas Belgicœ partes , Antuerpîap, 

1584, în-8", p. 23. 



( 116 ) 

chercher le Fons Tungrorum dans cette petite ville qui , 
privée depuis long-temps de son antique siège épiscopal y 
et fort déchue à tous égards, a toujours conservé, et 
porte encore , comme une protestation , le nom de Ton- 
gres? Elle a des eaux minérales, aussi bien que Spa, et si 
elles ont moins de réputation , les caprices du monde 
qui donne le ton y ont peut-être plus de part que Tin- 
fériorité de leurs vertus. Elle possède aussi, de plus que 
Spa , elle possédait du nK)ins vers les dernières années 
du xvr* siècle, des restes de s(hi antique splendeur, si 
tristement éclipsée. On y voyait alors des ruines d'édi- 
fices considérables, sur une grande étendue de terrain ^ 
on y trouvait fréquemment des poteries , des médailles, 
des pierres gravées; on y avait même découvert, plus 
rarement, des statues, des bas-reliefs, et des inscrip- 
tions, monuments sur lesquels je voudrais pouvoir 
donner des détails plus précis (1). Aussi, remarque 
Ortelius, à qui ceux-ci sont empruntés, les habitants de 
Tongres regardaient-ils la source qui coulait parmi ces 
ruinés comme étant celle dont le savant romain avait 
décrit les propriétés physiques et médicales (2). 

Telle est l'opinion qui me parait la plus vraisemblable , 
du moins tant que la découverte de quelques objets 
romains ne justifiera point les prétentions de Spa à pos- 
séder cette source , qu'un nom trop vagué ne nous dé- 
signe que comme le Fons Tungrorum. 

(1) OpAaud. p. 22. ^ 

(2) Ihid. 



( H7) 

GniSELUM» 

On connaissait depuis long-temps un fragment lapi- 
daire, partie inférieure d'un autel antique, sur lequel 
était gravé un reste d'inscription , qui avait été lu comme 
il suit, par Peiresc, dit-on, puis par Spon (1) et par 
beaucoup d'autres : 

XI 

NYMPHIS 

ORTSEUCIS 

La leçon était erronée , quant aux caractères qu'on avait 
pris pour le chiffre xi, exprimant, pensait-on, le nom- 
bre des nymphes honorées jadis au lieu où l'on avait 
découvert l'autel votif qui leur était dédié. Ce lieu était 
Gréoulx , village appartenant aujourd'hui au départe- 
ment des Basses'-Alpes, dont les eaux thermales jouis- 
sent encore de quelque réputation (2). Dans l'adjectif 
ethnique gbiselicis, on retrouvait donc son nom ro- 
main , qui devait être , ou Griselum , comme on le 
suppose communément , ou , mieux peut-être , Grise-- 
Hcum. C'était une découverte intéressante pour la géo- 
graphie ancienne de la Gaule ; car ce nom , dont les 
éléments sont assez reconnaissables dans l'appellation 
moderne, ne se lisait ni sur la Carte de Peutinger, ni 
dans les autres itinéraires , ni enfin chez aucun écri- 
vain de l'antiquité. 

(1) Miscel, erud. antitftit. , p. 94. 

(2) Récemment , elles ont été honorées de la visile d'un illustre 
exilé : le roi Charles V y a séjourné quelques semaines , pour en 
prendre les hains. 



( H8) 

En 1806 , on retrouva par hasard d'autres fragirïents 
qui venaient compléter, à peu de chose près, le monu- 
ment votif avec son inscription , remplacer par le mot 
vxoR les caractères dans lesquels on avait cru voir le 
chiffre xi , et nous apprendre que cet autel fut consacré 
aux nymphes de ces thermes , vers la fin du II"'' siècle, 
par une matrone romaine distinguée, femme de Vitra- 
sius Pollio, consul jwur la seconde fois (1). Ce témoi- 
gnage de reconnaissance envers les divinités thermales, 
pour une santé recouvrée apparemment par la vertu 
de leurs sources, prouverait que ces eaux d'un petit 
lieu de la Gaule n'étaient pas alors sans renommée, 
puisque de Rome même, des personnages illustrés et 
puissants, venaient leur demander la guérîson, que les 
thermes nombreux et célèbres de l'Italie n'avaient pas 
été jugés dignes, ou capables, de leur procurer. 

Peu d'années après cette nouvelle découverte, M. Mar- 
cellin de Fonscolombe d'Aix publia et commenta l'ins- 
cription dans le recueil périodique rédigé par Millin, 
dont les colonnes étaient toujours ouvertes à de sem- 
blables travaux d'érudition (2). Dans la même année, 
ce journal avait déjà donné un rapport sur ce sujet, fait 
à l'Académie de Marseille, par M. Rostan (3). Depuis 
lor^ M. Henry en a donné le dessin, dans un ouvrage 
intéressant sur l'archéologie de cette partie de la Pro^ " 
vence (4) ; et M. le docteur Honnorat , de Digne, ï'a fait 

(1) Avec M. Flavius Aper , l'an de Rome 920 » 176 de notre èr«. 

(2) Notice sur une inscription découverte à Gréoulx , d ans le Magasin 
encyclopédique , septembre 1811 , tom , V ,^. 56 — 81 , et tiré aussi 
à part. 

(3) Ihid. , 1811 , juin , tom . Ill , pp. 257 -- 261. 

(4) Recherches sur la géographie ancienne et les antiquités du dé- 



\ 119 ) . 

graver de nouveau sur une feuille isolée. Entre ces co- 
pies , il existe des variantes , Tinscription , plutôt ébau- 
* chée que gravée, sur une pierre de mauvaise nature, 
écornée , mutilée et brisée en quatre morceaux , présen- 
tant plus d'une lacune, et donnant lieu à plus d'un doute. 
Cependant , confrontation faite avec soin de ces leçons 
diverses , je pense que je hasarderai peu en la rétablis- 
sant comme il suit, après avoir fait observer à mes lec- 
teurs que je regarde Finscription comme incomplète de 
la première ligne , laquelle devait être tracée sur une 
pierre superposée, formant la corniche de l'autel. Je 
place entre crochets les lettres absentes ou douteuses : 



FJL. FÀVSTINI 

T. VITRASI. POLL 

[l](]^NIS. COS.n. PRAE 

fTORlS]II. IMP. PONTI[F] 

[PROGjOS. ÂSIAE 

VXOR 

NYMPHIS 

GRISËLIGIS 

On voit que je ne saurais admettre l'opinion de MM. de 
Fonscolombe, Rostan, Henry (1) et autres, qui veu- 
lent trouver dans la première des lignes conservées le 
nom de la personne qui consacra cet autel , et lisent 
EiLia ou EEua, pour AEua, et même par une extrême 
licence A^ma, en ajoutant le nom de favstina, quand 
le monument porte intbntestablement faystini. Je pense 

partement des Basses-Alpes , Deuxième édition, Digne 1842, pi. 
IV, n. 7,pp, 162 — 167. 

# (1) Locc, laudd. 



( 120 ) 

qu'on ne peut voir dans cette ligne que le nom de son 
père et le degré de filiation , filî» favstini (1) : les noms 
de la femme de Pollion devaient remplir la ligne qui , 
par cette raison même, m*a paru manquer, et qu'on ne 
pourrait entreprendre de suppléer que par une suppo- 
sition entièrement gratuite. 

M. Henry m'apprend qu'on a trouvé à Gréoulx quel- 
ques autres débris romains. Tels sont des restes^ de 
constructions antiques , mis à découvert à la suite dhin 
éboulement de terres , et qu'on croit avoir appartenu à 
l'antique édifice thermal (2). Tel est encore ce court 
fragment d'inscription , exhumé de ces mêmes ruines : 

BALIVEÀ. VI 
CORPORÀ. SA 

Cest, dit M. Henry, « la première partie d'une inscrip- 
» tion que les Romains avaient l'habitude de placer 
» dans tous les établissements thermaux ; » et il pro- 
pose de suppléer ainsi ce qui manque (3) : 

BALNEA. vma, \enus corrumpunV corpora noslra. 
CORPORA. sAwa dabunt, balnea, vina. Venus. 

Je ne saurais dire jusqu'à quel point est fondée l'as- 
sertion, bien générale, de M. Henry, ni s'il lui serait fa- 
cile d'en apporter un seul exemple. Toutefois, et en 
supposant le monument tout-à-fait authentique , je suis 
loin de rejeter cette interprétation ingénieuse ; car je 

(1) C'est aussi l'opinion de Millin , dans une noie ajoutée au 
rapport de M. Rostan , p. 264 ; et celle d'Orelli , Imcript laU seL : 
tom. II» n. 3421, p. 94. 

(2) Op. laud., p. 167. 

(3) Tfttrf. 



( 121 ) 

trouve quelque chose de peu différent dans une inscrip- 
tion funéraire, en partie métrique, où le premier vers 
se lit en entier (1). 

INDESINA ? 

• 

C'est comme simple indication que je mets ici ce nom 
douteux, qui nous est fourni par la seule Carte de Peu- 
tinger (2). Il a été lu ainsi par Scheyb, comme on le voit 
dans la table alphabétique des noms de lieux qu'il a 
jointe à son édition de la Carte ; on pourrait encore le 
lire autrement , et c'est évidemment un nom tronqué. 
Nous n'avons rien de plus certain relativement au 
chiffre xvi , marqué près de là, comme évaluation d'une 
distance itinéraire, sans qu'on puisse reconnaître à 
quelles stations il se rattache. Mais je ne saurais omettre 
de signaler l'édifice thermal figuré à peu près en cet en- 
droit de la Carte, c'est-à-dire au-dessus de Tullum, et se- 
lon toute apparence dans le territoire des Leuci. Il nous 
révèle des sources médicinales , auxquelles on a donné 
jusqu'ici peu d'attention, et c'est une singulière fatalité 
que nous ignorions tout à la fois , et le nom antique du 
lieu, et ses i*apports avec d'autres, qui auraient pu nous 
aider à en retrouver la position sous un nom moderne (3) . 

(1) Gruter., Inscript. aniiqu,, dcxv. ii. Ferreti, JMTw*. lapid., p, 106. 
Voici la partie qui rappelle Tinscriptionde Gréoulx; je supplée ce qui 
complète trois sicles. baigne a tinta, vents || corrthptnt corpora || 
NosTRA. SET (sic) TiTAH. •ACiYNTl|Ba/nea Vtfui Venti«. 

(2)Segm., II, a. 

(3) Je n'ai pu étudier l'édition de la Carte donnée à Munich , sur 
laquelle M. Walckenaer me dit que les choses sont moins confuses ; 
mais il reste toujours la difficulté de rendre compte de la distance 
marquée XTi. 



( 122 ) 
L uxo vimi ou LIXO vil M. 

m 

Le nom de ce lieu , qui dut appartenir aux Sequani 
ne se lit ni dans les itinéraires , ni chez aucun écrivain 
dé l'antiquité. Le plus ancien auteur qui, sous ce nom, 
ait fait mention de Luxeuil et de ses eaux thermales est 
l'abbé Jonas , à qui nous devons Une vie de saint Co- 
lomban , moine Irlandais , qui vint établir sur le conti- 
nent plusieurs monastères , dont les plus célèbres fu- 
rent : dans les Gaules, celui de Luxeuil, et en Italie , celui 
de Bobbio , bien plus renommé encore, pour les trésors 
littéraires qu'il nous a conservés (I). Ce biographe qui 
fut un des premiers successeurs du saint abbé , à peu 
près son contemporain, et qui écrivait au commence- 
ment du vu"* siècle , parle ainsi du lieu ou Colomban 
vint former cet établissement religieux : Invènit autem 
castrum olim fuisse munimine cultum ... : quem lo- 
cum Luxovium prise a tempora nuncupaverant. Ibi 
aquœ calidœ cul tu eximio constructœ habebantur, ibi 
imaginum lapideanim densitas vicina -saltus densa- 
bat y qua& cultu miserabili rituque prophano, vetusta 
paganorum tempora honorabant, quibusque exécra- ' 
biles cœremomas litabant (2). 

Mais le nom de Luxovium ou Lixovium avait été 
gravé sur la pierre à des époques de beaucoup anté- 
rieures à celles de saint Colomban , et lorsque ce lieu 
étalait au sein de la Gaule toute la splendeur romaine : 

(1) Notamment, plusieurs des palimpsestes publiés, dans ces 
derniers temps , par le Cardinal Àngelo Mai. 

(2) Vit. S. Columbani , IX ; ap. Surium ad. 21 novembr. , p. 270. 



(-123) 

c'est ce qu'attestent plusieurs inscriptions historiques 
ou votives, qu'on y a retrouvées en divers temps. Les 
deux plus connUes^sont celles qui ont été données par 
Caylus, et sur lesquelles l'illustre antiquaire a jeté quel- 
que discrédit,. pçir les doutes qu'il a exprimés sur l'au- 
thenticité de ces monuments (1). Ces doutes pouvaient 
être réellement fondés par rapport à la seconde de ces 
inscriptions, que personne aujourd'hui ne se souvient • 
d'avoir jamais vue , et qui n'est connue , m'écritron de 
cette ville, que pour avoir été transcrite dans un anciai 
manuscrit de l'abbaye : il faut convenir aussi que le 
mélange bisarre de caractères qu'on avait- adressé à 
Caylus n'était pas de nature à inspirer pour cette copie 
une bien grande confiance (2). Mais je pense, après un 
mur examen , et des informations recueillies avec soin , 
qu'il ne peut en. être de même de la première qui est 
ainsi conçue : 

LIXOVII. THJIRM. 

REPAK. LABIENVS 

IVSSV. C. IVL. CAES 

IMP. 

La découverte de celle-ci est constatée dans les ar- 
chives de Luxeuil par un procès-verbal régulier signé 
d'honorables citoyens (3) ; et le monument est. conservé 

• 

(1) Recueil étanHq,, tom. III, pp, 362— 368, pi. XCIX. 

(2) D'après la copie informe envoyée à Caylus (Op.laud., pi. XCIX , 
2) , je ne puis la reprodnire aue de cette manière et sans divisions 
de lignes : lvxotio. et. brixiab. C. ivl. firman. v. s. l. m. 

(3) Ce procès-verbal encore existant aujourd'hui , me dit-on^ doit 
être celui que mentionne Caylus {Op. laud,, p. 363) , etdont il donne 
le précis. • ^ 



( 124 .) 

encore à l'hôtel-de-ville , où aacun des savants qui Foin 
vu n'a eu la pensée , m'écrit-on , d'en suspecter l'authen- 
ticité. On a jugé peu vraisemblable qile César, occupé 
dans les Gaules à une guerre sérieuse qui réclamait tous 
ses soins, ait eu iassez de loisirs pour songer à un 
établissement thermal. Mais si l'on veut bien faire la part 
de l'importance des bains dans la vie romaine , si l'on 
• suppose , comme il est fort naturel , que des thermes 
pouvaient être utiles à la santé des soldats malades ou 
blessés , peut-être une telle pensée de la part du conqué- 
rant de la Gaule paraîtra plus simple qu'on ne le jugerait 
de prime abord, et au point de vue moderne. Quant à 
la forme littéraire de l'inscription , et au mot lŒVAnatis 
censuré par Caylus , on peut citer plusieurs exemples 
analogues des meilleurs temps de la langue latine, soit 
chez des auteurs estimés , soit dans les inscriptions des 
monuments publics (1). 

Cette inscription , ainsi justifiée contre les soupçons 
de l'illustre antiquaire , reste donc , ce me semble , un 
nxonument d'une grande importance , non pas seulement 
comme la plus ancienne mention du nom romain de 
Luxeuil , mais surtout comme preuve nouvelle de ce 
fait, que les Gaulois surent utiliser les sources chaudes, 
sans l'avoir appris des Romains. Cela résulte en effet du 
texte de inscription , qui signale ici , à l'époque même 
de la conquête , l'établissement thermal de ce lieu , non 

(1) Je me borne à rappeler une inscription de Gruter, (cliii , 9 )» 
ou celle-ci, qui est peut être la même ,%ais qui était à Montpellier 
du temps de Bergier qui la donne {HisL des grands chemins, tom. I , 

p. 50] : IMP. DIVYS. CLAYDITS || DRTSI. F. CAES. AyG 1| GERM. PONT.. 
MAX II TRIB. POT. X. COS. IIII. IMP ll XI. ITER. REPARAYIT^ 



.{ 125 ) 

comme une création de César , mais comme une simple 
restauration. Cette donnée est tout-à-fait en rapport avec 
les découvertes faites à Bourbonne et au Mont-d'Or (1). 
Le nom de cette ville parait avoir été aussi celui d'une; 
divinité locale avec une différence dans la terminaison , 
car le dieu devait s'appeler Lixovius ou Luxovius, et 
c'est de lui sans doute qu'un nom semblable avait été 
donné à la localité. Cette double application du nom ré- 
sulterait de l'inscription réprouvée par Caylus , et que 
j'ai rapportée dans une note précédente. Le marbre rela- 
tif à la restauration des bains par Labienus admettrait 
sans difficulté une telle interprétation , et dans ces mots 
Lixovii. therm/^^ on pourrait entendre les thermes du 
dieu Lixovius , aussi bien et mieux peut-être que les 
thermes de Lixovîum. Des indications, ou plus sures 
ou plus évidentes, sont fournies par deux autres monu- 
ments épigraphiques découverts aussi à Luxeuil , sur 
lesquels ce même nom se présente de nouveau , avec 
des formes un peu variées, mais toujours reconnaissable. 
Le premier de ces monuments est l'inscription suivante 
qui n'existe plus sur les lieux , mais que l'on me com- 
munique comme très légitime , et citée dans un mé- 
moire de M. Guin , qu'on ne me fait pas connaître 
autrement (2) : 

(!) Sup.f pp. 30 et 109. 

(2) D'après les notes de Fantlquaire que l'on me cite, Tinscrip- 
tion aurait été décourert^n 1780. C'est alors, peut-être, qu'on 
trouya aussi une inscription, à laquelle quelques' Habitants de 
Luxeuil paraissent avoir attaché une grande importance ; elle por- 
tait seulement ces sigles en deux lignes :c. o. s H c. i. c. Je ne sau- 
rais y mettre le même intérêt , regardant ici toute interprétation 
comme gratuite et hasardée. 



( 126 ). 

D. NICARINO 
D. UXVl. 

Je cite Tautre inscription plus volontiers, et avec une 
confiance plus entière , parce qu'elle existe encore au- 
jourd'hui à Luxeuil , où on peut la voir chez M. le colonel 
de Fabert habitant de cette ville , possesseur d'un cabinet 
d'antiquités formé dans le pays même , qui se conserve 
et s'accroît depuis trois générations. Mais je dois faire 
observer que les premières lettres pourraient laisser 
quelque doute , à en juger d'après la copie qui m'est 
adressée, la syllabe li, que j'ai placée pour cela entre 
crochets , aurait peut être disparu par suite d'une brè- 
che de la pierre, et le caractère s qui suit, ponctué 
dans cette transcription, doit être peu apparent sur le 
monument original : 

[LI]SS010 

ET. BRICIAE 

DIVIXTI 

VS.CONS 

TANS 
V. S. L. M 

11 serait difficile de rien dire de satisfaisant au sujet 
de NicarinuSy nom qui se présente ici pour la première 
fois , et qui doit être celui d'un dieu topique. Quant au 
nom de Bricia, qui est écrit Brixia dans l'inscription 
communiquée à Caylus, on peut penser, avec d'An- 
ville (1), et les hommes éclairés llu pays, qu'il désigne, 
en le divinisant, un ruisseau nommé aujourd'hui Breu- 

• 

(1) Dans une note communiquée à Caylus qui la rapporte , Op» 
laud, , p. 366 ; cf. Notice de la Gaule , p. 420. 



( i270 

ehin^ et que le biographe de saint Coloniban appelle 
Brisca (1). Lixovius, Luxovius, Lissovius, etc., doit 
avoir été une divinité des eaux thermales, comme Bormo 
on Borvo, Damona, Ilixo. Ce dernier" nom semblerait 
avoir quelque affinité avec celui de Lixovius ; mais 
bornés, comme nous le sommes, à un nombre infini- 
ment petit de données positives sur les idiomes des 
Gaulois, il serait tout-à-fait gratuit et extravagant de 
prétendre en rendre compte. • 

Luxovium parait avoir éprouvé de grandes dévasta- 
tions dans les siècles malheureux du Bas-Empire. On 
les attribue généralement au farouche Attila^ sans qu'on 
ait à cet égard des données contemporaines. Ihi moins, 
je pense qu'on doit entendre des résultats de quelque 
invasion des Barbares ce que dit Jonas , en termes un 
peu poétiques peut-être, de la dépopulation des lieux , 
lorsque saint Colomban y arriva : Solœ ibi bestiœ et 
ferœ ursorum, bubcdorum, luporum multorum fre-- 
quentabant (2). Toutefois les dévastateurs ne purent dé- 
truire entièrement tout ce que les Romains avaient laissé 
de traces de leur magnificence; et Luxeuil serait encore 
une des villes de notre France les plus importantes sous 
le rapport archéologique, si l'on avait conservé ou 
laissé à découvert tout ce qu'on y a retrouvé de restes 
des thermes antiques. Voici ce que me dit à ce sujet 
un obligeant correspondant, M. l'abbé Brésarol, pro- 
fesseur de géologie au petit séminaire de cette ville : 
« Le canal d'égout d^ eaux des bains est encore en 
» grande partie le travail des Romains. Une très-grande 



(1) Op, laud,, X, ap. Sur. p. 471. 

(2) /6td.. IX, p. 470. 



( 128 ) 

» partie de l'ouvrage souterrain de nos bains modernes 
» est aussi de construction romaine. On a trouvé 
» même, à différentes époques, cinq belles salles de 
» bains, pavées en albâtre (1) et voûtées en tuf. Plu- 
» sieurs d'entre elles ont sans doute été détruites par 
» les architectes modernes. Les autres sont encore en- 
» fouies sous le sol , et les constructions nouvelles ne 
» permettent pas de faire les fouilles nécessaires pour 
» les mettre au jour. » 

Ces restes de bains, si maladroitement enfouis, au 
lieu d'être utilisés pour l'établissement moderne , ne 
sont pas les seules constructions romaines qu'on ait 
retrouvées à Luxeuil. On a cru y reconnaître les vestiges 
de temples et d'autres édifices publics ; et bien plus 
ordinairement , on a eu à observer des débris d'habi- 
tations privées. Des ornements d'architecture, des tron- 
çons de colonnes, des chapiteaux, des morceaux de 
frises, etc. appartenaient sans doute aux premières de 
ces constructions, et de nombreux débris de briques et 
de tuiles romaines ont pu faire partie des unes et des 
autres. Nous avons vu que Jonas parle de statues en 
grand nombre : plusieurs, me dit-on, ontété retrouvées, 
qui devaient appartenir à la décoration des bains anti- 
ques, ou des autres édifices; maisjenepuis donner aucun 
détail à cet égard. La seule que je connaisse est la statue 
équestre , ou pour mieux dire , le groupe dont le dessin 
fut envoyé à Caylus (2) , ouvrage des bas temps , si j'en 

(1) Ce paré en albâtre, substance fon tendre, me paraît une cir- 
constance singulière ; mais je ne puis rien objecter contre un fait > 
s'il est certain. 

(2) necuaU cTantiquiUs, t. ÏO, pi. XCIX, 3, p. 367. 



( iW ) 

sdtiÉimales cte là pr^iène fwpl^tion , fft cette p^te me 
parait {leu re^ttable 4 

Dé plus petits ^et$ d'a^tiqu^é pwt été reistitu^ ))m 
plÉ6 fréquemii^ent par h^ lE^uUl^ f^tes à luxem) ^ oif 
l'Ofi Be peut Érmiâev le leftniD 4?^ J'e^ç^iotç de la vi)Ie 
antique sans raBseqeràlft^mrfeeQ qpi^qif^STaQPume^ 
on fragments romaîtls. Xels soiat 4is$ yikfie9 et u^tiBnsiles 
en bronze (1)-, des staitiaeiUeâ 4jQ même v^é^l , en as^^ 
graad tiombre et {dtis o» mc^ins remçtf i(}ii9^1ei^ , des fa- 
rines en terrç cuite , dopt qi|6lqiues-unes ont pu être de^ 
ex voto, comm6.on en yoit dqins tous )es cabinets ^ mai^s 
auxquelles une telle provenance attache ici un ifx^rèi 
spécial. Quant aux m^afDes gauloises op romiaines ^ en 
or , en argent , m bronzée de iOQs jk^ modules , ce sol 
fertile les a rq[>roduites eo grande quantité* Des col- 
lections con^dérables en avaient été formas avant la 
révolution^ sok à l'abbayë, smt dbez des particuliers : 
elles sont aujourd'hui presque entièrement dispersées. 

J'ai encore à signaler quelques traces de voies anti- 
ques, constatées sur divers points aux environs de cette 
ville : s^s doutée x^'étaient cdles qui aboutissaient à ces 
thermes i*pma^^ fréqp^entésj, lesquelles ne sont point 
indiquées d^n^ 1^ diivers itinéraires. Enfui le sol de 
r^que lj^09)ium renferme a^ssi un grand nombre 
de mopfuApnts fu^è^re^, pj^in^einent chargés d'ins- 

(1) M. le cololiél <ie Fâbérf , qc^ aieia Tobligeance de me foor- 
nir divers renseignementi^ m'indique^ dans cette classe de petits 
monumeuts , une patèrë fort curiënàe à raison de l'inscriptton yo- 
tive gravée ànr son manche, et qu'il tiëdotme ainsi rv. nv [| mv- 
piLLA. iNOc.. Il T. s. t. it. n est à regretter que la première ligne 
soit à peu près inintelligible pour nous. 



( 130 ). 

criptions^ et souvent ornés de sculptures. li serait trop 
long de rapporter ici le petit nombre de ces épitaphes 
romaines qui sont venues à ma connaissance ; je me 
contente^ pour donner une idée de ce genre de ri- 
chesses , de citer encore ce passage fl'une lettre de H. Bré- 
sarol : « Les monuments funéraires abondent dans cette 
» ville. Au mois de novembre 1 845 , un coup de pioche, 
» donné au hasard dans la cave d'une maison, amena 
» la découverte de plus de vingt monuments de ce 
» genre, et du plus haut intérêt. Ces objets, dessinés 
» par M. le colonel de Fabert, paraîtront probablemem 
» bientôt , accompagnés d'une notice historique et des<- 
V criptive (1). » 

Tout ceci fait voir quelle importance les Romains atta- 
chaient aux bains de Luxeuil. Cet établissement aurait 
conservé sans doute sa réputation et sa vogue, si le voi- 
sinage des eaux de Plombières, préconisées par la mode,, 
n'avait constitué une rivalité redoutaUe. 

NEHÊAVSVS. 

Ce nom, inscrit dans l'histoire, mentionné par les 
géographes, gravé sur les marbres antiques, et sur des 
médailles nombreuses et variées de différentes époques, 
fut celui d'une des villes romaines de notre Gaule qui 
portèrent avec le plus d'éclat le titre de colonie. II est 
trop célèbre pour qu'il puisse être nécessaire de rap- 

(1) M. de Fabert me dit que la plupart de ces monuments fu- 
nèbres portent simplement les noms des défants , amints, censo- 
siNi> TAsciLLA, etc. grarés au bas de leurs eflSgies sculptées en 
relief. 



' ( 131 ) 

peler ici les écrivains et les moQUineats qui nous Tont 
fait connaître. L^ ville moderne de Nîmes, la {dus riche 
de notre patrie en édifices roniiains bien conservés , 
montre encore avec orgueil les tén^ins de son antique 
magnificence ; sa maison carrée , ses arènes, sontemirie 
de Diane , sa tour Magne , et à quelque distance de son 
enceinte, Taqueduc imposant qui venait ajouter de 
nouvelles eaux à celles de son territoire (!)• Son musée 
riche surtout en inscriptions , s'accroît chaque jour par 
de nouvelles découvertes , et chaque maison , pour ainsi 
dire, renferme ou étale quelque débris de Page romain. 
Il existe à Nîmes des eaux nnnérales qui ne sont pas 
exploitées , à ce que je crois , sans doute parce qu'elles 
ne possèdent que de médiocres vertus. Aucun auteur 
ancien n'en a fait mention d'une manière précise, et en 
termes qui ne puissent être contestés. Ausone seul pa- 
raîtrait les avoir indiquées dans ce vers (2) : 

Non Jponuè poiu, vitrea non luce Nemausus 
Purior, etc. 

Il serait peu vraisemblable que dans une ville embellie 
par tant de travaux des Romains , des eaux douées de 
quelque vertu médicinale eussent été méconnues, où né- 
gligées par ces maîtres du monde, que nous voyons par 
tout si soigneux de les rechercher, et d'en faire usage. 
Nous ne connaissons pas toui ce qui se rattachait aux 
réservoirs qu'on appelle aujourd'hui à Nîmes, la Fon- 
taine, et dont la d«tination serait difficile à com- 

(1) Le Pont-du-Gard n'était primitivement qu'un aqueduc à 
triple étage : la partie qui sert de pont pour traverser la vallée a 
été ajoutée en avant dans les temps modernes. 

(2) Clar. «ré., XIV, v. 33. 



X 132 ) 

prendre : on a beaucoup détruit pour en exécuter à 
grands fraiâ les ouvrages modernes^ dont le résultat 
est assez peu satisfaisant. Mais des monuments romains 
découverts dans cette ville pourraient, avec vraisem- 
blance , être considérés comme des indiceâ de l'emploi 
de ces eaux sous la domination des conquérants. 

Le premier est lin autel portant cette inscription 
qu'on a jugé consacrée à trois divinités aquatiques , 
dont l'une pouvait avoir sous sa garde tutélaire quelque 
source minérale. Ce monumetit fut trouvé au commen- 
cement du dernier siècle, près des restes d'un ancien 
aqueduc, et publié par Maffei (1) et Bimard de la 
Bâtie (2). Je me borne à faire remarquer que la première 
ligne, en plus petits caractères, a été ajoutée après coup. 

SYLIG. COSMVS. REST 

LÀRIBVS. AVG 

SACRVM. ET 

MINERVAE 

NEMAVSO 

VRNIAE # 

AVICANTO 
T. CASSIVS. T. L 
/ FELICIO. EX S 

VOT 

Le. vers d'Ausone semblerait autoriser à re^rder le 
Dieu Nemaususy connu par d'autres inscriptions (3), 

(1) Galliœ antiquit., p. 27. 

(2) In Murât. Prolegom., col. 54. 

(3) OrelU, InscripU laU sel,, tom. I, p. 356, n9 2032 ; toin< II, 
p. 255, n^ 4220. Ce collecteur a aussi donné la première (tom. I , 
p. 356, nO 2033). 



( 133 ) 

comme le protecteur d'une fontaine minérale ou autre ; 
et c'était l'opinion du commentateur Vinet (1). S'il y 
avait erreur de la part du poète bordelais , comme le 
pense Bimard (2), Urnia et AvicantuSy noms inconnus 
avant la découverte de cet autel , laisseraient encore aux 
conjectures un assez vaste champ. 

Ménard a parlé de thermes trouvés à Nîmes lorsque 
Ton construisit l'hôpital : il en restait des vestiges des 
murs qui entouraient les salles, des pavés en mosaïque, 
et cette courte inscription indiquant l'âge et l'auteur de 
cet établissement (3) : 

M. AGRIPPA. L. F. C. 

Des bains furent aussi reconnus dans l'emplacement de 
la fontaine. On en a conservé un fragment de frise or- 
née de rinceaux , une colonne , des chapiteaux et des 
bases ; et en 1 840 , on exhuma cette inscription (4) : 

NYMPHIS 

AVGVSTIS 

^ACRVM 

TERTIVS. BAEBI. F 

L. DECVMIVS. DECVMANVS 

L. POMPIENVS. MARTIAUS 

L. ANNIVS. AIXOBROX 

DE. SVO 

Je laisse mes lecteurs juger jusqu'à quel point ces 

(1) Not. adh.vers. 

(2) £oc. laud* 

(3) JETûf. de JSimes, ci^ par M. Perrot , p. 122 de son extrait. 

(4) Perrot, Histoire des antiq. de NUnes, p. 121. — Une antre 
inscription donnée dans le même ouvrage ( p. 146, n0 38) , consiste 
en ce seul mot, ntbiphis. 



( 134 ) 

décottVBi'tes pourraient se rattacher à des sources mi- 
nérales eonnues des Romains; et je termine cet article , 
he m'étant pas proposé de m'étendre sans nécessité sur 
les monuments de cet âge qui sont restés en si grand 
nombre dans l'antique Nemausus. 



VCETIA, 



Cest l'ancien nom d'une autre ville des Volcœ Are- 
comiciy dans laquelle les géographes modernes recon- 
naissent Uzès (1); quoique tous n'admettent pas , comme 
Valois, l'identité de ce lieu avec le Vindomagus de Pto- 
lemée(2). Le$ Notices de l'Empire ne sont pas le seul 
monument géographique qui nous ait conservé ce nom ; 
il se fait remarquer à une époque bien antérieure sur 
un marbre écrit , d'une haute importance pour la géo- 
graphie de ces contrées, qui fut publié d'abord par 
Ménard (3) , et que Ton voit aujourd'hui au musée de 
Nimes (4). Voici ce qui reste de cette inscription qui 
ne se compose que de noms de lieux : M. Walckenaer 
la regarde comme une sorte d'Itinéraire gravé sur une 
borne (5). 

(1) Valois, NoiiL Galliar. . p. 611. — D'Anvîlle, Notice de la 
Gaule, p. 681. — Walckenaer, Géographie des GatUeSy tom. II, 
p. 183. 

(2) Geogr., Ih9{i0). 

(3) HisL de Nimes , tom. I , p. 22. 

(4) PeiTOt, Mist. des êntiq. de Ntme^Q^, 147, n. 41. 

(â) Plasîettfs de ces noms étaient déjà eonniis d'ailleurs : pour 
lef autres» on peut consulter M. Walckenaer, op, Imtd., iam, II , 
pp. 183--185. 



(155) 

ANDVSIA 

BRVGETIA 

TEDVSIÀ 

VÀTRVTE 
VGERNI 

SEXTANT 

BRIGINN 

STATVMÀE 

VIRINN 

VCETIAE 
SEGVSTVM 

Uzès possède aujourd'hui des eaux minérales à peine 
connues. Le furent-elles davantage à Tépoque romaine? 
Aucun écrivain ancien ne nous mettrait à même de 
résoudre cette question , puisque tous ont gardé le si- 
lence et sur ces eaux, et même sur ce lieu. Je crois 
cependant ne pas me hasarder inconsidérément en y 
répondant par l'affirmative. La preuve en est à me& 
yeux dans une inscription en vers fort curieuse, décou- 
verte à Uzès , qui mentionne une édicule élevée aux 
nymphes par le propriétaire d'un fonds sur lequel cou- 
laient des eaux bienfaisantes , salutaires à la vieillesse 
comme au jeune âge. Ce marbre a souffert des mutila- 
tions qui ont atteint l'inscription rapportée par Gruter ( 1), 
etparBimard (2). Je supplée quelques lettres , évidem- 
ment indiquées, que je place entre crochets : vouloir res- 
tituer la lacune de la première ligne serait une entreprise 
plus arbitraire. , 

(1) Inseript,antiq,,X(M\, 9. 

(2) In Murât. Prolegom,, col. 88. — Lancelot (Mémoires de r Aca- 
démie des Inscriptions , tom. VII , bist. pp. 238—243, donne beau- 
coup d'autres inscriptions trourées à Uzès. 



' ( l''>c ) 

[SE]X. POMPEIVS COGNOMINE. PÀNDVS 

QVOIVS. ET. HOC. AB. AVIS. CONTIGIT. ESSE. SOLVM 

[AE]DICVLAM,HANC.NYMPfflS,POSVIT.QVIA.SAEPIVS,VSSVS 
HOC. SVM, FONTE. SENEX. TAM, BENE, QVAM, ï WENIS {%) , 



VICUS ÂQUENSIS, 

Nî la Carte de Peutinger, ni les autres itinéraires 
romains ; ni enfin aucun des auteurs dont l'antiquité 
nous a légué les écrits ne mentionnent le nom de ce 
lieu; et U nous serait demeuré totalement inconnu s'il 
ne nous eût été révélé par un marbre antique ^ devenu 
ainsi important, comme beaucoup d'autres, pour la 
géographie de la Gaule. Il nous donne, sinon précisé- 
ment le nom antique de ce lieu, du moins, ce qui est 
ici tout-à-fait équivalent , l'appellation ethnique vicani 
AQVENses, par laquelle étaient alors désignés ses habi- 
tants, au nom desquels le monument fut érigé. Déplus 
la localité où il a été découvert a fait reconnnaitre sans 
contestation que ce vicus romain occupait alors le site , 
pittoresque et sévère tout à la fois , ou s'élève aujour- 
d'hui, dans le département des Hautes-Pyrénées, la pe- 
tite ville de Bagnères-Adour, ou Bagnères-de-Bigorre , 
célèbre encore de nos jours pour ses sources therma- 
les (2). C'est là, en effet, qu'existe l'inscription sui- 

(i) l\ faat remarquer à la fin de la ligne 3 , vssvs, pour tsts , et 
surtout au commencement de la ligne fi qtoits , pour cvits^ 

(2) D'AnyilIe , Notice de la Gaule , p. 82,— Walckenaer > Géogra- 
phie des Goulet, tom. I, p. 293. 



( 157 ) 

vante , connut^ depuis plus de deux siècles (1) ^ que 
Millin y copia de nouveau au commencement de celui- 
ci (2) : elle est gravée en beaux caractères sur un cippe 
en forme d'autel y surmontant le massif de la fontaine 
de construction moderne , qui fournit d'eau commune 
toute la ville de Bagnères : 

■ s 

NVMINI. AVGVSTl 

SACRVM 

SECVNDVS, SEMBEDO 

ms. m. NOBfmE 

VICANORVM. AQVEN 
SIVM. ET. SVO. POSVIT 

Si dans le mot avgvsti de cette inscription, on était 
suffisamment autorisé à reconnaître le nom du premier 
des empereurs , plutôt que le titre qui devint commun 
aux successeurs de sa puissance , nous aurions ici la 
preuve que cet établissement thermal remonterait à upe 
époque assez voisine de la conquête des Gaules , à supr 
poser qu'il n'eût pas existé sous les habitants indigènes. 
On pourrait alors supposer que ce prince l'aurait em- 
belli de constructions ,plus splendides, s'il ne l'avait 
pas créé ; et le monument religieux élevé par les mcani 
pourrait être regardé comme un témoignage public et 
solennel de leur reconnaissance. Tout cela peut pa- 
raître incertain , mais n'a rien que de vraisemblable en 
3oi : le voyage d'Auguste mentionné dans l'épigramme 
grecque de Crinagoras , et le nom A'Augustœ donné aux 

(1) Gruter, inscript, aniiq. CXU, 7. — Maratori, Nov.thes^^ 
tom. I« cm, 7, etc. 

(2) Voyage dans le midi de la France , tom. IV, p. 490. 



(140) 

Onê8iœ(l), comme à Luxbvium (2), etc., les sources 
thermales reconnaissaient spécialement , outre les nym- 
phes, une divihité tutélaire qui leur était propre ; c'est 
ce qu'on peut présumer, d'après des inscriptions votives 
à un dieu évidemment topique, dont le nom était A^Ao^ 
lesquelles furent découvertes auprès de Bagnères. Il y 
a lieu de croire aujourd'hui qu'elles ont disparu de leur 
terre natale ; mais elles nous ont été conservées par 
Oihenart (3) , et reproduites par Dom JMartin (4) , et 
Bimard de la Bâtie (5). Voici le texte de la première cpii 
était intacte : 

AGHONI 

DEC 
LABVSIVS 
V. s. L. M 

La seconde au contraire est fort mutilée , mais on y 
reconnaît aisément le nom du même dieu, incomplet 
d'une seule lettre, que la donnée précédemment acquise 
nous met à même de suppléer ; voici ce qui en est resté : 

• 

DEC 
. . GHONI 
. . AVLINI 
. . AVRim 
V. S. L. M 

Bimard a pensé qu'il faut voir ici une divinité thermale ; 
et la vraisemblance de cette opinion ne saurait être 

(1) Sup., p. 69. 

(2) i&ûl., p. 123,126. ^ 

(3) Op. laud,, p. 507. 

(4) Religion dei Gaulois , tom. Il ^ p. 36. 

(5) Op. laud. , col. 56. 



( Ul ) 

compromise par la pauvreté des arguments , et le peu 
de valeur des étymologies auxquels il a recours , pour 
Tappuyer (1). J'en ferai grâce à mes lecteurs, me bor- 
nant à leur rappeler avec lui.ce mot de Pline déjà cité , 
et que nous avons vu justifié dans la Gaule seule par des 
faits analogues asse2 nombreux : Augent numerum deo- 
mm nominibus variis (2). 



tîSSUBWM. 

L'Itinéraire d'Antonin fait de ce lieu une station sur 
la voie de Burdigala, Bordeaux, à Aginnum, Agen , 
entre Sirione d'une part, et Fines de l'autre (5). Le 
même emplacement lui est assigné sur la Carte de Peu- 
tinger , mais sous le nom altéré de Vesubio (4-) , et avec 
quelque différence de chiffres dans l'évaluation des dis- 
tances (5). Je ne m'arrêterai pas à les discuter : la ques- 
tion n'est pas là pour moi. Je puis de même me dispen- 
ser de prendre parti entre d'Anville , qui met Ussubium 
à Urs, près de la Réole (6), et M* Walckenaer, qui le 
reconnaît à Useste dans le même département de la Gi- 
ronde (7) ; je remarque seulement que , dans un ouvrage 

(1) Loc. tattd, 

(2) Nat. hist. , XXXI, 2* 

(3) Vet» RomJan, itinerar., éd. Wesseling, p. 461. 

(4) L'inscription que je apporterai bientôt jastiGe la leçon de 
l'Itinéraire , contre celle de la Carte , si soureat fautive > comme on 
sait , pour les noms des lieux. 

(5) Segm. I , a. 

{&) Notice de ta Gaule, y. t2li. 

(7) Géographie des Gaules, tom. III > p. 96. 



( 142 ) 

dont je vais pariep, H. de Crazannes^ qui a beaucoiip 
étudié ces contrées , se proiK)nce pour le sentino^aAt de 
d'Anville. 

Cest à cet hmorable confrère que je dois la connais- 
sance du mmument d'un haui intérêt qui me fait mettre 
ici le nom d' UsstAium , et qui lui a fourni le sujet d'une 
intéressante notice (1). Mais ce m(Hmment , qui provient 
certainement d'Ussubium, ne se trouve ni à Urs, ni à 
Useste , où il aurait tranché la question de géographie 
comparée relative à cette station romaine. Il existe, il 
existait du moins il y a peu d'années, à une certaine dis- 
tance de là , au Mas-d'Agenais , département de Lot-et- 
Garonne , servant de support à un cadran solaire dans 
le jardin de la maison curiale. Cest un joli autel de 
forme cylindrique , sur lequel l'inscription suivante est 
gravée dans un encadrement , en caractères d'un beau 
style , mais avec quelques ligatures : 

TVTELÀE. AVG. 

VSSVBIO. LABRVM 

SILVINVS. SCI 

PIONIS. F. AN 

TISTES.D. 

Nous avons ici un nouveau dieu topique , vssvbivs , 
comme nous avons vu ailleurs ilixo , uxovivs , etc ; et 
ici, comme ailleurs encore, nous remarquons une com- 
munauté de nom entre la divinûé et le lieu. Je crois, 
de plus, que cette divinité avait spécialement sous sa 

(1) pissertation sur un autel votif et sur son inscription , dans les 
Mémoires de la Société archéologique du midi de la France, lom. I , 
P[K 253—267. 



(143 ) 

protection quelque source thermale , minérale , médi- 
cinale en un mot ^ dont ce monument me parait constater 
l'existence dans le lieu appelé de son nom Ussubium. 
Cest en effet, ce me semble , la seule explication plau- 
sible qu'on puisse donner à cette consécration d'un bain , 
lABRYM , dont cet autel était destiné à perpétuer le sou- 
venir. Ne serait-elle pas étrangère à tout ce que nous 
connaissons des usages des anciens , si Ton n'admet pas 
que le dieu Ussubius avait, par ses attributions recon- 
nues , un rapport intime avec les eaux qui étaient des- 
tinées à l'emploi du bain qu'on lui consacrait ainsi? Il 
en sera tout autrement dans l'hypothèse que je viens 
d'établir; et c'est dans la persuasion qu'elle est fondée, 
que je place la station d' Ussubium parmi les lieux de la 
Gaule dont les sources furent exploitées sous la domi» 
nation des conquérants. Si j'avais été aitratné trop loin 
par une préoccupation naturelle, peut-être quelques-uns 
de mes lecteurs me sauraient gré encore de leur avoir 
signalé un monument curieux et peu connu. 



SECONDE PARTIE. 



Je crois avoir mentionné tous les lieux de la Gaule ou 
des autorités écrites» géographes, historiens, poètes, 
marbres anûques , ont pu constater Texistence de sources 
n^inérali^s fréquentées au temps de la domination ro- 
maine. Il en est d'autres dont les noms anciens nous sont 
connus également par de semblables témoignages , et 
que nous voyons encore aujourd'hui en possession d'eaux 
minérales , mais sans que des autorités de même nature 
nous apprennent qu'elles aient été exploitées dans les 
siècles antiques. Ceux-ci doivent à leur tour être men- 
tionnés dans cet ouvrage, quand cette supposition est 
rendue probable , soit par d'autres indicés , soit simple- 
ment par leurs noms anciens, et par la certitude qu'ils 
ont été habités par les conquérants de la Gaule. Ils 
occuperont cette seconde partie, bien moins étendue que 
la première, et toujours dans l'onlre alphabétique, que 
j'ai suivi jusqu'à présent. 



( **5 ) 



ALBA. 



C'était le nom de la capitale des Helvii, peuple de la 
Gaule mentionné par César (1) , et qui occupait dans la 
province romaine le territoire montagneux dont s'est 
formé le Vivarais : à cet égard , il n'y a pas de contesta- 
tion. Pline la nomme simplement Alba (2) ; mais d'après 
un passage de Ptolemée, erroné du reste sous d'autres 
rapports, il paraîtrait qu'elle avait reçu un surnom em- 
prunté au nom d'Auguste, et qu'elle s'appelait ainsi Alba 
Augusta (3). 

Je crois que cette ville antique est celle qui prit plus 
tard le nom de Vivariay ou Vivarium (4-) , Viviers ; nom 
dont se forma aussi celui de la contrée , Pagus Viva- 
riensis, mais dont l'origine nous est demeurée inconnue. 
Cette opinion était celle de- Valois, à qui je renvoie pour 
de plus amples détails (5) ; et long-temps elle a été gé- 
néralement admise. Aujourd'hui elle a contre elle l'au- 
torité de Lancelot (6), de d'Anville (7), de M. Walcke- 
naer (8) , et de bien d'autres , qui prétendent recon- 

(1) De bel. GaW., VII,8. • 

(2) Nat. hist, , m y Ji (5). 

(3) Geogr., Il, 9(10). 

(4) EUe portait déjà ce nom au VI™° siècle : Saint Grégoire de 
Tours [Hisi, Franc, , X, 23) l'appeUe Vivariensem urbem, 

(5) Notit. Galliar., pp. %i4 , 245. 

(6) ilfem. de l'Académie des JnscriptUmSj tom. VU , hlsU, pp. 235— 
237. 

(7) Notice de la Gaule , p. 44. 

(8) Géographie des Gaules, tom. I, p. 275. 

10 



( 146 ) 

naître Alla dans un petit village appelé Aps, et situé à 
trois lieues de Viviers. Lancelot , qui s'est le plus étendu 
sur ce point , et dont le témoignage est invoqué par les 
savants géographes qui l'ont suivi, se fonde en premier 
lieu sur des restes considérables de constructions ro- 
maines , d'aqueducs , de mosaïques , sur des colonnes de 
marbre , des frises , de nombreuses médailles et deux 
inscriptions funéraires qu'il reproduit (1); il s'appuye 
encore sur les traditions conservées chez les habitants 
du pays , qui racontent sur tout cela mille choses sin- 
gulières (2). On sait ce que valent de telles traditions, 
lorsqu'on ne leur connaît aucun fondement positif. Quant 
aux antiquités de ce lieu, elles prouvent assurément 
que les Helvii eurent sur son emplacement une ville de 
quelque importance ; mais il ne s'ensuit pas que cette 
ville dût être Alba Augusla. 

Viviers possède aussi des restes d'antiquités, dont 
Lancelot n'a pas fait mentjion, mais dont Millin a si- 
gnalé les plus importants. Il y fait connaître plusieurs 
inscriptions : non seulement des épitaphes chrétiennes 
des bas temps, dont l'une d'un lecteur, lectvr (sic), 
est intéressante pour l'histoire de la discipline ecclésias- 
tique (3) ; mais d'autres encore d'un âge bien antérieur, 
notamment celle-ci (4) : 

(1) Millin qui les a rapportées ( Voyage dans le midi de la Ffance , 
tom. 11^ pp. 110 et 114) y en donne aussi (p. 112) une troisième 
qui était inédite. 

(2) Loc, laud, 

(3) Op, laud. , p. 106 ; cf. , p. 107. ^ 

(4) iWd.,pp. 106, 111. 



( 147 ) 

D. M 

CASTRIGIAE 

SECVNDÀE 

DOMITIVS 

LICINIANVS 

MÀTRI 
KARISSIMÀE 

Il donne aussi les inscriptions de plusieurs colonnes 
milliaires ^ que Seguier avait copiées dans les environs 
de Viviers^ et qui offriraient plus d'intérêt si l'on connais- 
sait les lieux dont elles indiquent les distances (1). Enfin 
le même voyageur mentionne d'autres objets antiques 
découverts sur les lieux ^ deux petits vases de bronze^ 
et une mosaïque , qui représente un faune tenant le 
pedum et couronné de lierre (2). 

le me suis arrêté à ees détails pour en venir enfin à 
des ^aux minérales qui coulent h Viviers , mais qui soDt 
à peine connues , et encore moins fréquentées. Les mor 
numei^ts antiques dont je viens de parler, etx[ui nous 
révèljE^t à Viviers une ville romame, tendent ajmssi ^ 
faire présumer qu'elles ne furent pas û^connues aux do- 
minateurs des Gaules , bien qu'ils n'y aient pas laissé 
d'ouvrages de construction qui puissent le constater 
d'une manière plus positive. Je n'ai pas besoin de faire 
observer que cette conclusion ne subsisterait pas moîna, 
avec toute sa vraisemblance , quand même on recon- 
naîtrait Aps pour l'antiflue Alba des Helvii, puisqu'il 
resterait toujours prouvé que Viviers était alors un lieu 
d'habitation romaine. 

(1) Op. laud. , pp. 108 et 109. 

(2) Ibid. p. 105. 



( 148 ) 



ÂLESIÂ. 



Le bourg de Sainte-Reine sur le penchant du Mont- 
AuxoiS; dans le département de la Côte-d'Or, possède 
• des eaux minérales qui ont dû fort probablement êtte 
connues au temps de la domination romaine. Car le 
lieu peu considérable, qui porte aujourd'hui ce nom (f ), 
et le village d'Alise qui en dépend , occupent incontesta- 
blement la place de l'antique Alesia , sur le territoire 
des Mandubii (^) . Or, Alesia ne fut pas sans importance 
aiix. époques gauloise et romaine. 

On sait assez que César en a fait mention plus d'une 
fois, et que la relation du sié*ge de cette place, défendue 

. par Vercingetorix, remplit plusieurs pages dans les mé- 
moires dd conquérant (3) . Il ne dit pas qu'il l'ait détruite ; 
et son silence sur ce point peut être opposé à l'assertion 
de Florus (4) , qui écrivait deux siècles plus tard , et 

. qui a commis plus d'une erreur en ce qui concerne cette 
guerre.* Si ce qu'A rapporte est vrai, du moins elle ne 

(1) Ce nom est celui d'une yierge chrétienne qui souffrît le martyre 
sur les lieux mèm^s. On ne s'aurait en préciser l'époque , les actes 
de sa passion qui nous ont été conservés étant , dit-on , peu dignes 
dexonfiance. Mais elle est nommée dans les plus anciens marty- 
rologes > et son culte dans le pays est attesté par des titres plus an- 
ciens peut-être. 

(2) Tous les géographes sont d'accoijf sur cette identité. On peut 
Yoîr surtout VExplication topographique du siège d* Alesia , par d'An- 
yille et l'àbbé Belley , dans les Eclaircissements géographiques sur 
Vandenne Gaule , pp. 466—497. 

(3) De bel. Gall. VII , 68—77. 

(4) Epit, rer. rom. III , JO. 



( 149 ) 

larda pas à se relever de ses ruines. Pline , avant Florus, 
Tavait citée pour son industrie dans Fart d'argenter au 
feû (1) ; et c'est , je pense , la seule fois qu'on la trouve 
nommée après la guerre des Gaules. Mais les monu- 
ments qu'on y a retrouvés en grand nombre attestent son 
existence à diverses époques de l'âge romain, et l'im- 
portance dont elle jouissait. J'emprunte quelques détails , 
archéologiques à un travail très-bien fait de M. Mail- 
lard de Chambure , qui m'en fournirait bien d'autres 
encore, si je pouvais en faire usage (2). 

L'enceinte de l'antique Alesia a été étudiée avec soin, 
et reconnue en grande partie : elleétait fort étendue. On 
a retrouvé des portions considérables de ses murs, une 
porte; et dans Fintérieur, parmi des masses énormes 
de débris , des restes plus ou moins conservés d'édifices 
publics ou privés. Les plus remarquables «sont : un 
temple tetrastyle (3), des vestiges de constructions 
demi-circulaires, qui paraissent révéler un théâtre (4), 

(1) NaU hist. XXXÏV, 17 (48). Voici le passage de Pline, notion 
intéressante pour Thistoirei des arts dans la Gaule. Deinde , dit-il , 
après avoir parlé des étamures qui se fabriquaient chez X^sBitu- 
riges, argentum incoquere simili modo ecepere, equorum mcucime or^ 
namentis, jumsniorumque jugis inÂlesia oppido : etc. 

(2) Rapport sur les fouilles faites à Alise en 1839 , dans les Jlfê- 
moires de la commission des antiquités du département de la Côte-d'Or , 
1839 , pp. 101—127. En 1813 , M. Baudot aine avait inséré dans le 
Magasin encyclopédique, n<> de juin, une Notice sur quelques objets 
d^ antiquités , trouvés dans l'emplacement d*Âksia Hiandtùnorum. 
Les objets les plus curieux décrits dans ce mémoire étaient en fer ; 
l'un paraissait avoir été un ustensile de cuisine ; d'autres , au juge- 
ment de l'auteur, pouvaiRit avoir servi de ferrure , ou, pour mieux 
dire , de chaussure à des mulets. 

(3) /6»d. , p. 126. 
(4) Ibid, , p. 124. 



( 150 ) 

uti columbarium y dont malheureusement les niches 
étarent vides ; et les inscriptions enlevées (1), etc. Le^ 
mëdâilles romaines^ dont on y a trouvé une quantité 
prodigieuse (2)^ formaient une suite sans interruption 
notable depuis Tibère jusqu'à Théodose et au delà ; 
seulement; leur rareté après les Antonins et la position 
de celles de Sévère-Alexandre, découvertes au-dessus 
d^une couche de charbon, font supposer un incendie 
viers cette époque (3). 

Des ornements d'architecture , des frises sculptées , 
des chapiteaux, des bas-reliefs, des statues en mart)re 
ou en pierre , des portions de pavés en mosaïque , des 
débris nombreux de placages en marbres variés, etc. , 
peuvent donner une idée de la richesse des édifices. On 
y a retrouvé encore d'autres objets d'art ou de luxe de 
moindre dimensions, des bustes, des statuettes en 
^nze, quelques bijoux en or, une coupe aussi en or, 
avec un vâse en argent, et de plus un grand nombre 
d'ustensiles de tout genre dont un des plus remar- 
q^bles était un beau candélabre en bronze , et ce qui 
est digne d'une attention spéciale , divers ornements en 
fer plaqués en argent, dont quelques-uns avaient du 
être destinés pour un char , découverte qui justifiait 
complètement le passage de Pline que j'ai cité (4). 
. À différentes époques, et sur plusieurs points, les 
fouilles ont fait reconnaître des ouvrages d'une autre 
nature attestant aussi à leur manière l'importance de ce 

• 

(1) Op. laud., p. 12«. ^ 

(2) On trouya en une seule fois ( 1804 ) des médailles en or de Va- 
lentînien à Justînien, pour une râleur de 45000 francs ; ibid. p. 114. 

(3) Ihid. , p. 107, 
(4) /6«, , p. 118. 



( 151 ) 

lieu. Je veux parler de portions bien conservées de voies 
romaines qui se croisaient à Alesia. On a pu étudier le 
tracé et la direction de ces routes , qui ne sont indiquées 
ni sur la Carte de Peutinger, ni dans les autres itiné- 

m 

raires : elles paraissent avoir été au nombre de quatre. 
M. de Chambure en a signalé quelques parties (1) ; plus 
de notions sur leur ensemble avaient été recueillies 
par d'Anville et Belley, en premier lieu (2) , puis par 
Grivaud de la Vincelle (3). 

Je ne vois indiqué qu'un petit nombre d'inscriptions, 
mais toutes singulières ou intéressantes. Telle est 
d'abord celle qui fut trouvée en 1652, et qui fait lire 
le nom unique ici de Moritasgus, nouvelle divinité 
locale (4) ; en voici le texte d'après M. de Chambure (5) : 

TI. (X. PROFESSVS. NIOEB. OMNIBVS 

HONORIBVS. APVB. ÀEDVOS. ET 

LINGONAS. FVNCTVS. DEO. MORITASGO 

PORTICVM. TESTAMENTO. PONI 

IVSSIT. SVO. NOMINE. IVLIAE 

VIRGVLINAE. VXORIS. ET. FILIARVM. CLAVDIAE 

PROFESSAE. ET. IVLïANAE. VIRGVLINAE 

« 

IVUA. VIRGVLA, FILÏA. HOERENS. POSVIT 

(1) Op. laud. , pp. 103 , 104, 113. 

(2) Eclaircissements géographiques , pp. 482— 485. 

(3) BectteU de monuments antiques, tom. I, pp. 241 — 247. 

(4) Reines., Syntag. 189. GLXXVI.. — Spon, J^IisceUan. erud, qntiq, 
p. 109.— MoDgault, JUém.c^a VAcad, des Inscript, tom. I^ p. 459, etc. 

(5) Op. /atid.,p.lll. Il donne nnehuitième ligne queje ne lis point 
ailleurs. Je conclus de fl que le monument existe encore, et qu'il 
Ta eu sous les jeux. Je regrette de n'aroir pu consulter la dissertation 
spéciale que M. de Chambure a publiée en 1822 , in-8^ , sons ce 
titre : Mémoire sur le dim Moritasgus , et Vinscription trouvée en 1652, 
dans les ruines é^ Alise, 



( iS2 ) 
En 1784, on découvrit cette inscription votive (1) 



[D]EAE. VIÇTORIAE 

ARGVTVS 

SÀBINII 

LVPI.SEPT 

V. S. L. M 

et en 1 822 , cette autre gravée sur Une pierre qui avait 
appartenu à un grand monument (2) :'la formule votive 
en est singulière , et je ne connais rien d'analogue : - 

MARTI. Et. BELLONAE 

SBSTIVS. NIGRINVS 

V.S.ViV.E 

Enfin les fouilles ont produit en 1839 une inscrip- 
tion qui semblait promettre un grand intérêt^ mais 
dont des ligatures et des signes insolites rendent l'étude 
bien difficile, et que je ne saurais reproduire avec les 
seuls caractères de la typographie : on peut voir le des- 
sin que M. de Chambure en a donné (3). La plupart 
des noms dont elle se compose me paraissent être géo- 
graphiques, comme par exemple le mot vcvete, et 
vcvETiN., qui doit en être le dérivé ethnique. Un autre 
nom qui a ici plus d'intérêt est celui ^Alesia même : 
on lit fort distinctement à la dernière des ûH lignes du 
monument : m. . . . alisua. 

Je ne vois pas qu'on ait trouvé à Alise aucun reste 
d'antiquité qui présente un rap]urt certain avec la 

(1) Op. ktud. , p. 112. 

(2) Ibid. , p. 118. 

^ (3) Ibid,, p. 126^ et plan B, n. 6. 



• ( 153 .) 

source minérale , à moins qu'on ne veuille y rattacher 
quelque partie des aqueducs , ou des tuyaux en terre ou 
en plomb qu'on y a signalé en assez grand nombre (1); 
ce qu'une étude approfondie des localités permettrait 
peut-être de faire. 



ÂQU^ ALLOBROGVM. 

m 

Le second mot de ce nom composé n'est mis ici que 
subsidiairement; si je puis m'exprimer ainsi, et comme 
d'Anville et autres ont employé YépiiheieHelveticœ^ pour 
distinguer les Aquœ que nous avons retrouvées à Ba- 
den (2) . Le mot Aquœ me paraît fournir l'origine évidente* 
du nom moderne d'Aix-les-Bains dans leduchédeSavoie> 
et avoir formé au moins une partie de son nom anti- 
que (3). Cette dérivation n'est pas moins marquée ici 
que dans les noms successifs d'Aix en Provence ; mais là 
s'arrête toute conformité entre ces thermes homonymes. . 
Nous connaissons l'origine de l'épithète illustre de Sex- 
tiœ y et les faits historiques nous rendent compte de la 
fondation d'une colonie romaine auprès des eaux des 

(1) Op. lauà. , pp. 112 , 120 , 121. 

(2) Stfp.,p.40. 

(3) Suivant M. C. Despine ( Manuel de ¥ étranger aux eaux étÂix\ 
p. 41 , Dût. 1 ) , de Pingon aurait publié une inscription qui don- 
nerait aux habitants d'Aix le nom d*Âquenses. Si le fait est exact , 
il serait une donnée intCTessante. Il est fâcheux que M. Despine 
n'ait pas rapporté l'inscription , ou mieux cité sa source : je l'ai 
cherchée vainement dans ce que je possède des ouvrages de cet 
écrivain sans critique et sans exactitude. Au reste , on verra quelque 
chose d'équivalent dans une inscription que je donnerai bientôt* 



( *^* ) 

Salyes (1). On n'a rien de semblable relativement à 
celles des Allobroges : ni le nom du lieu, ni l'existence 
de ces sources thermales ne sont mentionnés dans les 
documents historiques, ou géographiques, que nous te- 
nons des anciens ; et Ton ne saurait à cet égard former 
une conjecture ultérieure qui ne fût complètement ar- 
bitraire (2). 

Mais si les écrivains de l'antiquité ont gardé le silence, 
les monuments parlent ; et ces témoins en grand nombre 
attestent hautement l'importance dont la petite ville 
d'Aix a joui sous les conquérants des Gaules. On a dé- 
couvert, en effet, soit aux environs, soit dans la ville 
même, des restes fort variés d'antiquités romaines, dont 
quelques-uns méritent une attention spéciale. Tels sont 
d'abord deux édifices d'un ordre à part, et d'un grand 
intérêt. Le premier, fort maltraité par le temps, mais 
dont la masse et quelques détails sont encore recon- 
naissables, est une construction d'assez bon goût, qui 
parait avoir été , non un temple comme on l'appelle 

(1) Sup, , p. 86. 

(2) On a fait plus cependant à ce sujet , et bien des conjectures 
sans fondement ont été débitées» et reçues comme des Caits certains. 
Ainsi, pour ne citer que la plus accréditée, l'empereur Gratîen, dont 
le nom donné à la yille de Cularo forma celui de Graiianopolis , 
aurait construit les tbermes antiques d'Âix , qui auraient été ap-^ 
pelés pour cela AqiuB GratUmœ, Suivant Millîn ( Voyage en Savoie , 
etc. tom. I, p. 35 )> cette fable pourrait être l'effet d'une fausse 
lecture du nom de clarianys , qui se lit fréquemment sur de grandes 
briques à Àix , comme à Lyon , et sur dlNrers points du midi de la 
France. Cette explication est assez probable. Aujourd'hui peut-être 
un partisan de cette tradition chercherait à l'étajer de ce fragment 
d'inscription donné par M. C. Despine ( Op. laud, , p. 24 de l'appen- 
dice) : VAL. «r.IIav. 



( 155 ) 

pompeusement ûmÈ h pays (1)^ ïnm une édicule ou 
chapelle > eomme m dirait aujourd'hui : les propor^ 
lions de ce petit édifice ne permettent pas de lui donner 
un autre nom. Dans un ouvrage aussi dépourvu d'exac- 
titude que dé bcmne érudition , et dont les planches 
foftt à peu près tout le mérite, Albanis de Beaumont à 
donné le deissiti de cet édifice et de la tour, appartenant 
au château des Marquis d'Aix, dont il formait le sou- 
bassement (2). 

L'autre édifice plus apparent et plus connu est celui 
qu'on appelle Arc de Campanus du lïom de celui qui 
le fit élever et que rappelle cette inscription gravée sous 
l'ar^trâve : 

L. POMPEIVS. CAMPANVS. VIWS. FECIT. 

Ce monument^ bien mieux conservé que l'édicule, est 
aussi représenté sur u«e planche d'Aibanis de Beau- 
mont (5) , et Millin l'a illustré dans une dissertation 
spéciale (4). On a fort diss^té sur sa desiina«km, sur 
laquelle, -eependtot, je »6 vois pas qu'il puisse y avoir 
de doute fmdé : quelque étrange ^e cela puisse pa- 
raître à raison de te ferme 4e l'édîficè, il dût être un 
monument funéraire. Cela est assez démontré par ces 
mots de l'inscription que je viens de citer ,.viws fecit, 
de même que par les petites niches de la frise, qui rap- 

(1) On i*appeUe Tempfe ite Biane : fl it'ést ^às besoin de^lnre^ue 
cette attribution est toat-à4ait basardée. 

(2) Description des Alpe^grecques et cottiennes, atlas, -pi. VIC. 

(3) J6td. , pi. VI. 

(4) Observations sur le monument sépnkkrai'êefompeiiss Campanus, 
à Aix en Savoie, dans le Magasin enJDyeh>pédiqi»e , tnaf 1814 : Il y a 
un tiré à part. 



( 136) 
pellent celles des Columbaria^ et par ce qu'on peut lire 
des autres inscriptions gravées au-dessous^ et dans l'at- 
tique (1). 

Je ne m'étendrai pas sur les poteries ^ les fragments 
d'architecture, les médailles , etc., qu'on a trouvés en 
grand nombre à Aix. Je ne ferai qu'indiquer quelques 
ouvrages d'art, des mosaïques, des fragments de bas- 
reliefs et de statues , un gnomon ou cadran solaire fort 
curieux. Je m'arrêterai davantage aux inscriptions, dont 
je ne rapporterai toutefois que quelques-unes des plus 
intéressantes. Je commence par celle qu'on voit près 
des bains romains , et qui est importante, "parce qu'elle 
doniie l'adjectif ethnique dans lequel se révèle l'ancien 
nom du lieu (2) : 

D. M 

D. T. DOMITIANT. POSSESSOR. AQVENSIS 

ET. TITIVS, DOMITIVS. PÀTRI 

Cette autre se voit au bain royal (3). Elle est votive, 
et le premier mot de la dernière ligne exprime sans 
doute le nom de la divinité. Je crains que les noms 
n'aient pas été transcrits avec exactitude (4) : 

GVLILIVS 

CVRÏCVS 

BOMV. V. S. L. M 

(1) M. C. Despine les a données ( Op. laud. , pp. 35 et 36 ) , appa- 
remment d'après des notes anciennes , car elles sont peu lisibles 
aojoard'hai. ^ 

(2) Despine, Ibid,, append., p. 24. 

(3) C. Despine > Jbid., p. 1. 

(4) AJbanis de Beaumoot (pi. XIX, 9 ) lit : qvrmiv8||cviicvs|| 
BONUH. M. A mon grand regret , je n'ai pu yériûer par moi-même. 



(157) 

Une autre, votive également, qui était à l'entrée du 
château, a été transportée en Piémont depuis peu d'an- 
nées. Fort curieuse, comme témoignage d'un culte qui 
nous est peu connu , elle avait été donnée par Spon (1), 
qui l'avait copiée lui - même ; et sa copie est plus 
exacte , pour la disposition des lignes , que celle de 
M. Despine (2) : 

COMEDOVIS 

AVGVSHS 

M. HELVIVS. SEVERI 

FIL. IVVENTIVS 

EX. VOTO 

Enfin je rapporte cette inscription funéraire, quoiqu'elle 
ne provienne pas de la ville d'Aix, mais de ses environs : 
elle me parait intéressante à cause de l'éloge exprimé 
par la dernière ligne (3) : 

T.ÀTnivs 

PRISCIANVS 

RVFINVS 

MÀTRI 

PIISSIMAE. ET 

VNICI. EXEMPLT 

Les restes des thermes antiques sont ici l'objet le plus 
important par rapport au but de mon travail. Ils sont 
en fort grand nombre dans la ville, et sont dispersés sur 

(1) Miscellan. erud. antiquité , p. 97. — Qn peut croire qu'il s'agît 
ici d'une sorte de génié^» d'une nature seçiblable à celle des SiUe- 
vice , des Campesires , etc. 

(2) Op, ktiid. , p. 25. Àlbanis de Beaumont, qui a mal lu (pi. yi , 
27 ) , a disposé les lignes comme Spon. • 

(3)J6»d.,pl. V,f^. 



( iS8 ) 

plusieurs points, ce qui tendrait à prouver^ ou Ym- 
mense étendue de ces ouvrages , ou la muhiplioité d^ 
bains, soit publics, soit privés* Mais um descripiiw 
complète de ce qu'on en connaît dépasserait de \^m^ 
coup les bornes que je dois me prescrire , et des plsm$ 
seraient nécessaires pour la rondre parfaitem^t mV^h 
ligible (1). Je m'en tiendrai aux indications qui mep^ 
raissent les plus essentielles. 

Il faut mentionner d'abord le bain auquel on donne 
vulgairement le nom de César , et qui est assurément 
le plus remarquable. De forme octc^one, il parait avoir 
servi de piscine ; et son pourtour est garni de gradins 
revêtus en marbre blanc, qui servaient de sièges au^ie 
baigneurs. Une sorte de piédestal orné d'un pareil re- 
vêtement, et placé contre la paroi orientale, peut avoir 
supporté une statue, ou quelque vase richemejit sculpté. 
Le sol s'incline sensiblement dans cette direction, et 
une ouverture pratiquée au bas du piédestal doit avoir 
servi pour l'écoulement des eaux. Toute cette salle est 
soutenue par de nombreux piliers, autour desquels rè- 
gne un corridor, dont le plafond donne passage à des 
conduits en terre cuite de forme rectangulaire, destinés 
à introduire la chaleur, ou la vapeur, dans la partie 
supérieure (2). Plusieurs autres bains, moins bien con- 
servés ou moins considérables , ont été reconnus dans 
les environs du premier > sous la maison Périer , et 
ailleurs (3). 

(1) Albanis de Beaumont ( pi. XVII) a donné un plan général ; un 
autre plus réduit est grayé dans l'ouycage de M* C. Despine , pi. IX. 

(2) C. Despine, Op. laud, , pp. 30 et 31 , pi. IX , 63. 
•(3) Jbid. , pi. IX , 64 , 65. 



< 159 ) 

Je dois indiquer encore les bains de vapeur dont 
Albanis de Beaumont a donné le dessin (1) : ils sont 
fort remarquables par leur solidité^ comme par Tintel* 
ligence qui a présidé à leur construction ^ et assez bien 
conservés pour qu'on puisse se former une juste idée de 
ce qu'ils furent autrefois. On trouve chez le même au- 
teur le plan d'une grande piscine romaine , et d'une 
portion du canal qui devait y conduire les eaux (2) : 
J'ignore si tout cela subsiste encore aujourd'hui ; mais 
le travail des Romains se reconnaît dans d'autres con- 
duits souterrains qui ont servie ou servent aictuellement, 
au même usage. Des tuyaux de plomb^ ayant eu évidem- 
ment une destination semblable , ont été retrouvés éga- 
lement sur divers points : l'un deux, signalé par M. le 
docteur Despine, faisait lire le nom du fabricant, 
NioNis (3). En général, la magnificence romaine s'était 
déployée dans toutes ces parties des thermes antiques, 
comme l'annoncent le nombre et la variété des frag- 
ments de marbres qu'on y retrouve partout. C'est une 
nouvelle preuve de l'importance que les Romains atta- 
chaient aux eaux thermales , même dans des lieux obs- 
curs dont l'antiquité ne nous a pas conservé le nom. 



AQUAH GRANNI. 

Aix-la-Chapelle ne joue un certain rôle dans l'histoire 
qu'à répoque des emj^reurs français , et sa splendeur 

(1) Op. ktud., pK XIX. 

(2) Op. laud. , pi. XVIll. 

(3) Op. laud,, append.^ p. 25. 



( 160 ) 

commence au règne de Charlemagne , qui lui accorda de 
grandes faveurs , et Torna d'édifices magnifiques sur 
lesquels les historiens se sont étendus avec admiration. 
Mais ce n'est pas à lui que cette ville dut son existence. 
Un chroniqueur cité par Valois (1) en fait mention au 
temps du roi Pépin , et je ne doute pas que son origine ne 
soit beaucoup plus ancienne ^ et qu'elle n'ait été un lieu 
habité à l'époque romaine. 

Son nom , en effet , qui doit avoir subi une légère 
altération quand il devint Aquisgramm, me parait 
évidemment romain ; et quoique j'aime peu les étymo- 
logies, telles que de prétendus savants les imaginent et 
les exploitent , je suis fort porté à croire avec Valois (2) , 
avecEckhart (3), avec Bimard de la Bâtie(4), que ce nom 
dérive , non point de celui de ce fabuleux Granus^ qu'un 
poète légendaire du moyen âge donne pour frère à Néron, 
mais du surnom de Grannm donné au dieu Apollon par 
quelques inscriptions de . la Germanie , de la Gaule 
Belgique, etc. (5). Je ne rapporterai que la suivante qui 
a été trouvée en Alsace (6) : 

APOLLINI 

GRÀN 

NO. MOGOVNO. ARÂM 

Q. LÏCINIVS. TRIO. D. S. H. 

(1) Notit. Galliar, , p. 28« a. 

(2) Op, laud., p. 27, b. 

(3) Je regrette de ne poayoîr citer arec connaissance de cause la 
dissertation in-4^ de cet auteur : eUe ^"t intitulée : Dissettatio de 
Apolline Granno Mogouno. Viceburgi. , s. ^. 

(4) In Murât. , Prolegom. , col. 59. 

(5) Orelli, Inscript, lat. sel. , tom. I , p. 353 ; nn. 1997—2001. 

(6) Ibid. , n. 200. 



( 161 ) 

Bimard cite le savant allemand^ qui yoitici Apollon 
vénéré comme divinité protectrice des eaux thermales de 
ce lieu, et de celles de Moffuntiacum, Mayence : pour lui 
tout en doutant , avec raison, de cette manière d'inter- 
préter le dernier nom , dans* lequel il préfère voir celui 
d'un nouveau dieu , il adopte pleinement celle du mot 
GRANNo par rapporx aux eaux d'Aix-la-Chapelle (1). Nous 
voyons que celles-ci , qui sont encore fréquentées de nos 
jours, étaient connues du temps de Charlemagne, que ce 
prince en faisait ses délices , et qu'elles furent la cause 
déterminante de tout ce qu'il exécuta en faveur de ce 
lieu (2). Il est peu vraisemblable qu'elles aient été incon- 
nues aux conquérants de la Gaule Belgique. Des monu- 
ments romains reconnys à Aix-la-Chapelle donneraient à 
cette conjecture un caractère de certitude. Je crois qu'on 
y en a découvert, notamment des inscriptions, si ma 
mémoire ne me trompe pas ; mais , privé des rensei- 
gnements que j'espérais obtenir sur les lieux mêmes, je 
ne puis rien dire de plus positif et de plus précis. 



ARELATE. 



Connaissait-on sous la domination romaine la fon- 
taine minérale peu célèbre qui coule aux portes d'Arles, 

(1) Loc. laud. 

(2) Delectabatur etiam, Ait Eginhard, vaporibusciqtiarumnatura- 
liter calentium , frequenti nataiu corpus exercens , cuju% adeo peritus 
fuit , ut nuUus ei juste potuerit prœferri : ob hoc etiam Aquisgrani 
regiam extruxit , ibique extremis vitœ anr^istuquecut obitum continua 
habitavit : etc. 

n 



( 162 ) 

à l'entrée de la plaine de la Crau (1)? L'opinion affir- 
mative peut paraître probable, quand on a obserfé le 
goût marqué des conquérants , non pas seulement pour 
les sources thermales , mais aussi pour les eaux miné- 
rales froides , qu'ils prenaient comme nous en boisson , 
et qu'ils savaient utiliser encore d'une autre manière en 
les chauffant pour les bains. On peut croire en général , 
ce me semble, que fort peu d'eaux minérales de notre 
Gaule leur demeurèrent inconnues , et il y a plus d'un 
motif pour penser que celles SArelate ne furent pas de 
ce nombre. 

Je ne prendrai pas occasion de cette source pour 
retracer un tableau de l'histoire et des antiquités de cette 
ville : le sujet serait trop vaste pour les bornes étroites 
dans lesquelles je dois ici me restreindre. Mais tout ce 
que nous lisons chez les anciens sur cette illustre colo- 
nie (2), qui fut le siège du Prétoire des Gaules-, et joua 
surtout un si grand rôle dans les derniers siècles de 
l'empire en Occident, tout ce qu'Arles possède aujour- 
d'hui de monuments antiques , ses vastes arènes si bien 
conservées , les ruines si riches encore de son magnifi- 
que théâtre , ce qu'on a retrouvé de son hippodrome , 

(1) Millln, Voyage dans le midi de là France, tom. III , p. 641. 

(2) Cette colonie était surnommée lYLia paterna. Sur un cippe 
donné par Millin fibid,, 494) , on lit : col. itl. pat, ar. ; une ins- 
cription publiée d'abord par Caylus (Recueil d^antiq, , tom. VIT , 
p. 263 ) et reproduite par M. de Lagoy fDescripL de q. med. inédites 
deMàssilia, etc., p. 19 )> le seul monument épigraphique qui 
donne le nom de Tantique Glanum , faiftire : c. i. patbr. arbl. ; 
enfin une troisième inscription que Spon donna le premier (MisceL 
erttd. antiq,, p. 16tf ), contient le dernier surnom en toutes lettres : 

COL. lYLw PATERNA. ARELATB. 



' ( *63 ) 

de son palais impérial^ de son forum, de ses thermes^ 
son cimetière des Champs-Elysées si fertile en tombeaux 
de tous les âges , les débris de constructions dont son sol 
est semé sur tous les points^ les nombreuses inscrip- 
tions , les ouvrages de Fart antique qu'on y a recueillis , 
tout cela prouve assez que cette riche et puissante ville 
était en quelque sorte une seconde Ronie , GalMa Roma 
Arelas y comme Fappelle Aumône (1); tout cela rend 
probable que ses citoyens, habitués au genre de vie des 
maîtres du monde, ne durent pas négliger chez eux un 
bienfait de la nature que ceux-ci exploitaient partout 
ailleurs avec tant de soins. 

Il est à regretter qu'aucune découverte archéologique 
quelque peu imjportante, auprès de la fontaine de la 
Grau, ne vienne donner plus de consistance à ces pré- 
somptions. Après tant de conjectures seniblables que j'ai 
proposées, c'est à peine ^i j'ose émettre le soupçon qu'on 
a retrouvé peut-être le nom de cette fontaine divinisée 
dans celui d'une divinité locale gailabvs, mentionné 
ainsi sur un monument votif conservé à Arles (2) , et 
qui est curieux à tous égards : 

EX. IMPERIO 
T. ATTIVS. QVARTVS 
CAILARO. V. S. L. M 

(1) Clar. trrô., Vni , V. 2. 

(2) MiUîn , Op, laud., tom. III, p. 2(6$. 



( 164 ) 



AMGENTORÀTVM. 

Cette ville est mentionnée par Ptolemée (1); et plus 
tard, à l'occasion d'une victoire de Julien l'apostat sur 
les. Allemanni, elle est nommée par ce prince lui- 
même (2), et par AmmienMarcellin (3). Elle figure aussi 
dans l'Itinéraire d'Ântonin (4) , et sur la Carte de Peu- 
tinger (5), comme centre de plusieurs voies. Quoiqu'elle 
né paraisse pas avoir été la capitale des Tribocci (6) , 
eHe fut considérable, surtout dans les derniers temps de 
l'Empire , époque où les Notices y placent une manu- 
facture d'armes , fabrica armorum omnium , et lui 
donnent un comte qu'on appelait Cornes Argentora- 
iensis. On peut juger encore de son importance par les 
traces d'antiquités qu'on a reconnues à Strasbourg, dont 
l'identité avec Argentoratum n'a pas besoin d'être dis- 
cutée après un témoignage aussi positif que celui de 
Saint Grégoire de Tours, qui lui donne eii même temps 
les deux Qoms : ad Argentoratensem urbem, quam nunc 
Strateburgum vocant (7). 

(1) Geogr., Il, 8 (9). , 

(2) Ad, 5. P. Q, Athen.; éd. Spanheim, p. 279. 

(3) Rer. gesL, XV, 11; XVI, 12. 

(4) VeL Roman, itiner,; éd. Wesselîng., pp. 3S0, 354, 372, 374. 

(5) Segm. ir, c. 

(6) n semble qu'on pourrait le conclure avec d'ÀuTÎHe [fwt, 
p. 96) de ce qu'elle ne prit pas, par la »uite, le nom du peuple, comme 
les autres capitales. ^ 

(7) HisL Franc, , X , 19. Ce nouveau nom , radicalement latin 
avec une terminaison barbare , venait évidemment de Strata , et 
rappelait une des grandes voies de Tempire. Il y avait peu de là 
à celui de Strazburg , qu'on trouve déjà au IX™® siècle. 



( 165 ) 

J'ai peu de données nouvelles sur les antiquités de 
Strasbourg. On peut citer comme importantes une figure 
militaire en bas-relief avec le nom de le[p]ontivs, sui- 
vant Oberlin qui l'a donnée après Schoepflin (1), et 
une statue d'Hercule mentionnée parM. Schweighseuser, 
et qu'on voit encore à l'extérieur de la cathédrale près 
de la tour (2). Un bronze remarquable à plus d'un égard 
est. sans doute la grande patère que Grivaud de la Vin- 
celle a publiée, sur laquelle est représenté Hercule com- 
battant le lion de Némée (3). En fait d'inscriptions je 
n'ai à citer que la suivante accompagnée d'ornements 
d'assez bon goût, et donnée encore par Oberlin (4).v 

T. FLAVIVS. T. F 
OFFENTINA 

PEREGRINVS 

HEDIOLAI^I 

MIL. LEG. Vni , 
AVG.CENTVKU 
M. I. GELERINI 

VIX. AN. XXV 

STIPENDIO. ira 

F.H,F.C. 

Un monument curieux pour sa singularité, était un 
tombeau que Schoepflin a illustré (5) : il se composait 
de huit belles briques à rebords, formant une sorte de 
toit incliné des deux côtés , sous lequel était abritée 

(1) Mtis, Schoepflin, ^,2i. 

(2) Ménwire sur les arMquités ro^naines de la vUlede Strasbourg , 
p. 32. 

(3) Recueils de monuments antiques, pi. VIU , 4, tom. II, p. 72i 

(4) Mus. Schoepflin, , tab. II , 2 , p. 31. 

{H) Mém, de l'Àcad. des inscriptions, tom. X, p. 457—464. 



( 166 ) 

l'tirne funéraire^ accompagnée de lampes et d'autres 
vases de verre ou d'argile. Ces briques étaient l'ouvrage 
de la vm'' légion^ que nous savons d'ailleurs avoir été 
oantonnée près d'Argenloratum (l) ; car on y lisait, 
comme sur d'autres; retrouvées aussi dans le pays : LECé 

VIII. AVG. 

Mais ce qu'on a retrouvé le plus fréquemm,ent à 
Strasbourg ce sont des ruines considérables de cons* 
tractions romaines, dans lesquelles se trouvaient mêlés 
dés débris d'architecture indiquant quelque luxe, des 
briques portant des noms de légions, des médailles en 
grande quantité, et de tous les âges de l'Empire, des 
débris d'inscriptions ayant servi de matériaux à bâtir, 
des tombeaux, des urnes. On a découvert plusieurs 
cimetières, des murs d'enceinte, des ouvrages de forti- 
fication , et ce qu'on a jugé être des vestiges de l'anti- 
que fabrique d'armes. D'après un calcul donné par 
M. Schweighseuser, à qui j'emprante ces détails, le ré- 
sultat de leur ensemble serait, que Vwncien Argentora- 
/t/m pourrait avoir eu de superficie environ 240,000 
mètres carrés (2). 

Je ne vois mentionnée à Strasbourg aucune décou- 
verte d'antiquités qui , paraissant se rattacher aux eaux 
minérales que l'on connaît dans cette ville , tende par 
là à prouver qu'elles furent aussi connues et employéeé 
au temps de la domination romaine. Une grande con- 
naissance de la localité et le souvenir, s'il s'est conservé 
en détail, des divers points qul^ ont été fouillés avec 
succès, pourraient conduire à ce résultat. On conçoit 

(1) Plolem., Geogr., II, 8 (9). 

(2) Op. laud.,^. i2. 



( 167 ) 

que je dois être privé de ces moyens d'étude, et néan-> 
moins le fait dont ils pourraient fournir la preuve me 
parait fort vraisemblable. 



AVARICUM^ 

Cette ville , la principale des Bituriges, dont elle finit 
par prendre le nom , joue un rôle dans Thistoire dès le 
temps de César, qui la nomme plusieurs fois (1), et en 
parle comme d'une place très-forte (2). Elle avait alors 
ses médailles en bronze avec la légende avarico (3). Plus 
tard Piolemée est le seul écrivain connu qui en ait fait 
mention (4). Mais elle est nommée aussi dans l'Itinéraire 
d'Antonin (5), ainsi que sur la Carte dePeutinger (6) ; 
et l'on peut observer qu'elle s'y trouve placée sur un 
grand nombre dévoies militaires, plus ou moins im- 
portantes. 

Mes notions sur les antiquités de Bourges , qui est 
bien incontestablement VAvaricum Gaulois et romain , 
sont trop bornées pour que je puisse citer quelque dé- 
couverte en rapport avec l'exploitation , dès l'âge romain, 
des eaux minérales peu renommées que je vois indiquées 
à Bourges (7). Le fait du moins me parait des plus 
vraisemblable, ici comme en bien d'autres lieux, par cela 

(1) De bel, GalL^Yll, 29—32, 47. 

(2) Ibid. , 13. 

(3) Mionnet, Desciipt^de médailles, etc., tom. I, p. 63. 

(4) Geo^rr., 11,6(7). 

(t5) VeU Roman, itinerar, , p. 460. 

(6) Segm.I,b. 

(7) Pâtissier , Manwl des eaux minérales, p. HM, 



( *68 ) 
seul que je vois une ville romaine considérable , où les 
jouissances de la vie étaient devenues partie nécessaire 
des mœurs de ses habitants. Cest moins ^ peut-être, 
pour appuyer cette vraisemblance que pour ôter quel- 
que chose de sa sécheresse à une observation déjà ré- 
pétée, et devenant une sorte de lieu commun, que je 
rappellerai ici un petit nombre de monuments romains 
découverts à Bourges. 

Reinesius a donné cette inscription votive, gravée sur 
le piédestal d'une statue, et que rendent intéressante un 
nom ethnique , et le nom d'une divinité qu'on ne trouve 
pas ailleurs (1) : 

FLAVIA. CVBA. FIRMANI. FILIA 
COSOSO. DEC. MARTI. SVO. HOC 
SIGNUM. WCAVIT. AVGVSTO (2) 

C'est, je crois, au P. Chamillart qu'on doit la première 
publication d'un monument funéraire fort remarquable 
par sa décoration , formant une niche cintrée soutenue 
par deux pilastres que surmonte un fronton , dans la- 
quelle était debout une statue de femme drapée, versant 
l'encens sur un autel allumé, et tenant de la main gauche 
un vase, ou Yacerra. Aux deux côtés de la niche étaient 
représentés quelques objets d'usage domestique , autant 
qu'on peut en juger d'après la gravure ; au dessus on 
lisait cette inscription (3) : 

(1) Syntag. inscript., 121, LXXXIV. 

(2) CososYS était apparemment un nom local donné à Mars. Celui 
de CYBA rappelle que deux peuples de la Gaule portaient le nom de 
Biturige^, et qu'on les distinguait comme Bituriges Cubi, ou ft- 
iurigès Vihisd : ces derniers avaient pour capitale Burdigala,. 
Bordeaux. 

(3) Dissertation sur plusieurs médaUîes, etc., p. 77 « 



( i69 ) . 

I 

D. M. 

ET. MEMORUE. IVLUE. PAVLLINAE 

TENAT. MARTIN VS. CONIVGI. AN. L 

Une troisième inscription, qui fut découverte dans 
la même ville en 1687, mérite aussi d'être citée; car 
elle est curieuse en ce qu'elle donne le nom d'une nou- 
velle divinité locale, soumara. Elle serait plus intéres- 
sante encore si quelqu'autre donnée venait appuyer 
cette conjecture , assez probable, que la divinité qu'elle 
nous révèle pourrait être une de celles qui présidaient 
aux sources minérales. Elle est ainsi ct)nçue (1) : 

SOLIMARAE 

SACRVM 

AEDEM. CVM. 8VIS 

ORNAMENTIS 

FIRMANA- C. ORRICI. F 

MATER 

D. S. D. 

Si j'indique encore un petit sanglier en bronzé dessiné 
et décrit par Caylus (2), ce n'est pas pour l'importance 
de cet objet fort ordinaire, mais parce qu'il rappelle un 
type des médailles A'Avaricum. On. peut citer coSmme 
remarquable un monument d'un âge postérieur, que 
l'on conservait avant la première révolution dans le"^ 
riche trésor de l'église métropolitaine de Bourges. Je 
veux parler du beau diptyque consulaire en ivoire, qui 
avait été sans doute par la suite un diptyque ecclésias- 

(1) Rimard, In Murat^ Prolegiym.y col. 64; — Orelli, Jnseript. 
lat, seL, tom. 1, p. 358, n. 2050. 

(2) Recueil ctantiquités , lom. I , pi. XCIII , 2, p. 237. 



( 170 ) 

tique 9 et qu'on regardait comme la pièce la plus in- 
téressante de ce trésor (1). 



AVGVSTÀ. 



Le bourg d'Âouste^ dans le département de la Drôme, 
a des eaux minérales (2) ; et l'on peut présumer qu'elles 
étaient connues à l'époque romaine. Ce lieu parait en 
effet avoir été assez considérable alors , et on le trouve 
mentionné comme station dans les itinéraires romains , 
qui le mettent entre Valentia, Valence, et Dea Vocon- 
Horum, Die. L'Itinéraire d'Antonin lui donne le nom 
d'Augusta (3) , de même que celui de Bordeaux à Jéru- 
salem (4) : mais il est appelé Augustum sur la Carte de 
Peutinger (5) , et l'anonyme de Ravenne en a fait An- 
gmton (6). 

Âouste avait conservé quelques restes d'antiqujtés 
romaines , mais dont la plupart ont été enlevés à leur 
patrie, ainsi qu'il arrive trop souvent. Le seul, je 
crois , qui soit resté sur les lieux est une inscription 
sépulchrale , que je transcris ici , comme sorf titre 
principal (7) : 

(1) Voyage littér, de deux religieux bénédictins , tom. I , p. 24. 

(2) Pâtissier, Manuel des eaux minérales, p. 555. La Statistique 
delaJDrôme n'en parle pas> mais Fauteur avait dit (p. 240) qu'il ne 
mentionnait que les eaux qui ont le plus de réputation. 

{3) Vet. Bomfm, itinerar, , ed, W^esselnîg , p. 358. 
(4)/6id.,p. 354. 

(5) Segm. U , d. 

(6) De Gco^fr. , IV ; 26 , 27. 

(7) Statistique de fa Drôme, p. 426. 



(171 ) 



D. Mf. 

ET. QVIETI. AETER 

SEGYDIAE. MAXI 

MILLAE. FRONTIA 

MARGUNA. FIL 

ET. CL. PRIMA 

NYS. GÊNER 

PONENDVM 

CVRAVERVNT 

ET. SYR. ASGIA 

DEDICAVERVNT 



ÀUGVSTODUnUS. 

Ce lieu marqué sur la Carte de Peutinger (1) est re- 
gardé par M. Walckenaer comme ayant occupé l'em- 
placement de Bayeux (2) , dont le nom moderne vient 
assez évidemment de celui du peuple de ces contrées 
mentionné par Pline, Baiocasses, Badiocasses, etc. (5), 
nom qui devint plus tard celui de la ville même. J'i- 
gnore si Bayeux a conservé des monuments de l'âge 
romain, ou si l'on y a découvert des restes de construc- 
tions appartenant à cette époque. Je n'ai remarqué dans 
les recueils d'inscriptions ou d'antiquité aucun objet 
saillant qui provint de ce lieu ; et je ne saurais indi- 

(1) Segm. I, b. ' 

(2) Géographie des Gaules , tom. I , pp. 385 , 395 ; tom. III, p. 61 . 

(3) Nat hisL, IV, 18 (32) : les maouscrits offireitt de nombreuses 
Tariantes. 



( 172 ) 

quer qu'une figurine en albâtre , avec un vase de même 
matière, publiés par Gaylus (1), et une découverte de 
sépultures faite dans les environs , laquelle mit au jour 
divers ornements antiques à l'usage des défunts : celle- 
ci est mentionnée par dom Martin (2). 

Si l'on admet la détermination géographique adoptée 
par M. Walckenaer , qui parait la mieux fondée (3) , 
ces indications archéologiques, quelque bornées qu'elles 
soient, peuvent suffire pour faire conjecturer que l'on 
connut à l'époque romaine les eaux minérales qui exis- 
tent aujourd'hui à Bayeux (4). 



AVGVSTOMAGVS. 



Suivant d'Ânville, ce serait à Senlis, capitale du pays 
des Sylvanectes, dont elle avait pris le nom, qu'il fau- 
drait placer la station d'Augustomagus (5), mentionnée 
,par l'Itinéraire d'Ântonin (6). M- Walckenaer est peut- 
être mieux fondé à la reconnaître chez les Bellovaci , 
et dans le village moderne de Verberie , près de Com- 

(1) ttecueil â^ antiquités , tom. III, pi. CV, pp. 382-386. 

(2) Religion des Gaulois , tom. II « p. 343. 

(3) C'est aussi ropînion de M. Aug. Leprevost^ qui a étudié spé- 
cialement la géographie et les antiquités de cette prorince. Je la 
troQTe exprimée brièvement dans les Mémoires de la société des ar^ 
tiqtuiiresde Normandie , 11™^ série « tom. I , p. !• D'Ânville , qui est 
fort obscnt sur ce nom (Not., p. 123) , fartant, ce me semble , de 
fausses données , met Bayeux à Àrœgenus ( p. 82 ). 

(4) Pâtissier, Manuel des eaux minérales, p. tfM. 

(5) Notice de la Gaule, p. 124. 

(6) Vet. Roman, itinerar,, éd. Wesseling., p. 380. 



' ( 175 ) 

piègne^ dans le département de TOise (1) ^où il y a 
des eaux minérales ^ assez célèbres à Paris, dit- on, 
avant la découverte des eaux de Passy (2). En admet- 
tant cette dernière opinion , je puis ici donner place à 
ce lieu , me fondant uniquement sur ce qu'il était une 
station romaine ; car j'ignoise complètement si l'on y 
conserve, pu si l'on y a découvert quelques restes 
d'antiquités. 

, ÀUGUSTONEMETUM. 

Cette ville , capitale des Arverni , tient un rang impor- 
tant dans la géogi*aphie de la Gaule sous la domination 
romaine ; et il serait bien inutile , je pense , d'entrer dans 
les détails qui peuvent constater sa position , c'est-à-dire 
son identité avec Clermont-Ferrand , laquelle est recon- 
nue sans conteste (3). Je ne vois rien de positif sur l'ori- 
gine du nom qu'elle porta long-temps à cette époque ; 
mais il est évident qu'il lui venait d'Auguste , comme 
ceux de bien d'autres lieux dans les Gaules. 

Clermont a conservé quelques restes matériels de sa 
splendeur ancienne. Des ruines de constructions romai- 
nes considérables ont été retrouvées sur divers points de 
la ville, et dans ses alentours les plus rapprochés : il en 
est qu'on a jugé avoir pu appartenir à des temples. On y 
a découvert également plusieurs mosaïques d'une bonne 

(1) Géographie des GatdSf, tom. III , pp. 55 et 56. 

(2) Pâtissier , Op, laud,, p. 372. 

(3) D'Ànyille, Notice de la Gaule, p. 125. ^ Walckenaer , Géo^ 
graphie des Gaules , toin. I , p. 53. 



( 174 ) 

exécatioQ , ei d'autres ouvrages d'an moins importants ; 
peut-être exlmmera-^t-on quelque jour la fameuse statue 
colossale de Mercure, exécutée en bronze, à ce qu'il 
paratt, par Zénodore, statuaire qui florissait sous le 
règne de Néron , et que Pline a mentionné (1). Enfin des 
fouilles entreprises au point culminant de la ville ont 
rendu au jour d'énormes blocs de granit, dont plusieurs 
portaient des inscriptions. Pour ne pas pousser trop 
loin ces détails, dont je suis redevable à l'obligeance de 
M. Gonod , je ne rapporterai que celle qui est la plus 
entière, et aussi remarquable par la beauté de ses ca- 
ractères que par leurs dimensions. Elle présente d'au- 
tant plus d'intérêt que l'emplacement où ces fouilles 
furent exécutées était présumé, avec quelque apparence, 
être celui du temple célèbre appelé Vasso par saint Gré- 
goire de Tours (2) , et que le nom du Mars gaulois , 

(1) NaU hist, , XXXIV, 7 (18). Celte donnée , intéressante pour 
l'histoire de Fart antique dans notre Gaule, m'autorise à citer au 
moins une partie du texte de Pline. Verum , dit-il , omnem amplttu- 
dinem stattiarùm eji*s gmeris vicit œtate nostra Zenodonts , MereUrio 
facto in dvitate Galliœ Arvemis per annos decem, H-S.CGCC mani- 
pretio, etc. Ce dieu paraîtrait avoir été vénéré aussi ailleurs , à en 
juger d'après cette inscription, trouvée, ditGruter (LUI,, 11), in 
ditione Juliaeenai : mekcvbio. ABVBaNo|I vicim. v. v... 

(2) HisL Franc. , 1 , 30. Voici le paSsage curieux qui fait mention 
de cet édifice , à l'occasion des ravages exercés dans les Gaules par 
Chrocus, roi ou chef des Àlamanni , au III»»® siècle. VeniensveroAr- 
vertiôs^ ddubrum illudqttod Gallica lingua Vasso Galatœ vocant in- 
cendit , diruii , atqw subvertit. Miro enim opère factùm fuit atque fir- 
matum, eujus paries duplex erat.Ab intus enim de minute lapide ; 
a foris vero quadris scalptis fabriçatum^it. Habuit enim paries ille 
crassitudinem pedes triginta, Jntrinsecus vero marmore ac musivo 
variatum$rat. Pavimentum quoquê œdis marmore stratum , desuper 
vero plumho tectum. 



( *78 ). 

Camulusy qu'elle fait lire, pourrait appuyer ia œnjee- 
lure de ceux qui ont regardé Vasso comme un autre 
nom du même dieu (1). L'inscription , telle qu'cm Ta re- 
trouvée j ne se compose que de ces deux lignes , de ces 
deux mots : 

CAMVLO • • 

VIROMANDVO 

Glermont possède plusieurs sources minérales, no- 
tamment celle de Sâint-Allyre , que des travaux faits en 
1789, pour une route nouvelle, ont rejeté plus au nord 
delà porte Saint-Pierre, près de laquelle elle coulait 
auparavant. Nous n'avops pas la preuve que les eaux 
A' AugustonemetumdXeîni été employées par les Romains, 
dont tous les écrivains se taisent à ce sujet. Mais on 
peut présumer fort naturellement qu'elles ne leurs furent 
pas inconnues ; et cette conjecture est peut-être devenue 
plus probable depuis une découverte faite il y a vingt 
ans, celle de bains de construction évidemment ro- 
maine, retrouvés à peu de distance du lieu où coulait 
alors la fontaine de Saint-Allyre. 



AVTRICVM. 



On a vu déjà dans cette seconde partie plusieurs noms 
de lieux figurer seulement par suite d'assez vagues con- 
jectures, et en quel^lie sorte comme pour mémoire. 

Celui-ci se trouve encore dans les mêmes conditions. 

. ' ■ ■. . . , ^ 

(1 ) D. Martin , Religion des GaïUois , tom. I , p. 502. 



N 



.(176 ) 

Nous le voyons mentionné par Ptolemée , comme l'une 
des deux villes principales desCamutes (1) , desquels 
plus tard elle emprunta un nouveau nom. Il y a grande 
apparence encore, ainsi que le pense M. Walckenaer (2), 
qu'il faut lire sur la Carte de Peutinger le nom A'Autri- 
eum y au lieu de celui de Mitricum , inscrit par erreur 
comme station , ou pour mieux dire point de départ , 
d'une voie qui passait immédiatement à Durocasses, 
Dreux (3) . Il est certain aussi , de l'aveu des plus savants 
géographes, que Chartres est l'ancien Carnutum, le plus 
ancien Autricum (4). Des eaux minérales sont connues 
encore dans cette ville, quoiqu'elles aient ailleurs fort 
peu de célébrité (5). A cela se borne tout ce que je puis 
dire de Chartres, l'une des villes de France qui ont con- 
servé le moins de monuments antiques , parmi celles qui 
jouissaient d'une certaine importance dans l'âge romain . 



BELICENSIS VICVS. 



Ce nom, qu'on ne trouve chez aucun des auteurs 
anciens, parait avoir été le nom antique de Belley (6) , 

(1) Geogr., Il, T [s). 

(2) Géographie des Gaules, tom.I, p. 400. 

(3) Segm. I, b. 

(4) J)'ÀiiTÎlle, Notice de la Gaule, p. 132. — Walckenaer , Op. 
laud., tom. I, pp. 57, 58, 398—400 ; tom. III, p. 60, etc. 

(5) Pâtissier, manuel des eaux minérq^esy p. 400. 

(6) Mon exemplaire du Muséum Veronense est celui de d'Ansse 
de ViUo^n , qui Ta enrichi de notes autographes. Dans Tune d'elles, 
à l'occasion de i'arc de Suze , il cite un manuscrit du président 
Bouhier , où le Myant dijonnaîs reconnaît les peuples de Belley sous 



(177) - 

ancienne ville épiscopale (1), et aujourd'hui chef4ieu 
d'arrondissement <ians le département de l'Ain. On le 
voit indiqué dans une inscription connue depuis long- 
temps (i), et qui existe encore sur les lieux. Elle n'en 
donne, il est vrai, que les initiales ; mais les noms de 
Belica, de Civitas Belicensium, d'Ecclesia Belicenr 
sis, que l'on trouve constamment au moyen-àge (S), 
peuvent faire adopter avec quelque confiance l'interpré- 
tation de M. Orelli , qui supplée ainsi la fin de cette 
inscription : TEStamentoi:RGavitYicanisBELicensibus{if). 
Voici le texte entier de la consécration gravée sur un 
autel votif ; ayant pu la copier moi-même , je la donne 
plus exactement que ceux qui m'ont précédé : 

MÀTRI. BEVM 

ET.ATTINI 

CVPIDINES 

II. APRONIVS 

GEMELLINVS 

TES. LEG 

Vie. BEL 

HER. PON. C 

le nom des bblaci mentionnés, arec d'autres cités, dans Tinscription 
de ce monument célèbre. M. Walckenaer (Géogr, des Gaules, tom. n, 
p. 29] 7 Toît des habitants d'un lieu de la yallée de Suze. 

(1] On fait remonterauIV"^®'siècle rétablissement do siège épis- 
copal de Bellej. 

(2) Guichenon , Hist, de Bresse et de Bugey, p. 9. — Reines. , 
SyfUag. Inseript.; 208, CCXVI.— OreUi, InsetipU laUsel,, tom. I, 
p. 340, no 1898. 

(3) Valois, qu'on peut consulter (NotiU âlo/^r., p. 79, b.], cite 
notamment ce passage singulier d'une ancienne Notice de la Gaule : 
Civitas Belicensium, qt*œ antea Castrum Argentariense vœabatur 
{ut faUo additur, obsenre Valois). 

(4) Loc. laud, 

12 



( 178 ) 

Beitey û^éiiievMfkfmi unlieil antique dont l'existence 
doit remonter^ pour le moins^ aux premiers empereurs. 
L'occfupdtion romaine y a laissé des traces marquées^ de 
même que dans tous les environs , et notamment des 
monuments épigraphiques en grand nombre. Telle est 
en particulier rinscription suivante également votive, et 
consacrée aussi à la mère des dieux ; on ignore aujour- 
d'hui ce qu'elle est devenue , et je ne puis la rapporter 
que d'après Cuichenon, qui n'est pas toujours très- 
exact (1), et qui a été copié ici par Reinesius (2) : 

MÂTRI. DEVM. [ET. ÀTTINl] 

TALBIVS. ATTIVS. ÀRAM 

CREPIDINES. COLVMNAS 

TECTVrt. PRO 

Quoique simplement funéraire , une autre inscription 
mérite aussi d'être citée , non pour son importance , 
mais pour la beauté des caractères qui me semblent in- 
diquer une bonne époque. Donnée par Guichenon (3), 
par Reinesius (4) , et , plus exactement depuis , par 
M. de Moyria (5), elle est aujourd'hui au petit sémi- 
naire de Belley : 

(1) Op, lavid,, p. 9. L'inscription n'est pas entière : les mots et. 
ATTiNi, que j'ai restitués, sont assez indiqués par l'inscription pré- 
cédente , et par beaucoup d'autres. 

(2) Syniag., inscript. 209^ CCXVI. 

(3) îbid. 

(4) Op. lattd*, 209 , C€XVn. 

(5) Monument» romaine du départemmt de fAin ; Bourg , 1836 , 
in.4®, p. 21. 



(179) 

D. m 

MEMORIAE 

AETERNÀE 

MARCELLINAE 

* FTPI.FilXUK 

SEXTILIYS 

œmvGi, IN 

ÇOM?ARÀ«l 

LI, FAÇIEND 

VM. CVRAVIX 

ET. SVB. ASÇIA 

DEDIÇÀVIT 

Je rapporterai encore irois fragments d'inscriptions^ 
peu importants par eux-mêmes ^ mais plus remarqua- 
bles par Félégance et la grandeur des lettres, qui accu- 
sent aussi les beaux jours de l'art ; ils semblent d'ailleurs 
se rapporter à des édifices considérables dont les inscrip- 
tions devaient orner la frise. Celui-ci se voyait encore, 
il y a peu de temps, dans le cloître de la cathédrale, ser- 
vant de jambage à une porte ; il a été donné inexacte^ 
ment par Guichenon (1) : 

EX . TESTAMENTO . F AC . 

Deux autres furent exhumés, il y a quelques années, 
lorsque l'on creusait les fondations pour les construç^ 
tions nouvelles de la cathédrale, et malheureusement 
replacés presque aussitôt dans la maçonneriç , au mé- 
pris de recommandations réitérées. On lisait sur l'un, 

CLAVDIA. 

(1) Op, laud,, p. 9. 



( t80 ) 
sur l'autre , 

REGINAE. 

Gomhie les deux blocs de pierre , portant les mêmes 
moulures , avaient évidemment fait partie (f une même 
frise, ils pourraient faire supposer l'existence d'un 
temple consacré à Junon, qu'on voit assez souvent 
nommée avec l'épithète de regina sur les médailles des 
^impératrices, et même dans les inscriptions (1). Les 
colonnes antiques de pouding conservées dans l'an- 
cienne architecture de la cathédrale pourraient avoir 
appartenues à ce temple, aussi bien qu'à celui de Cy- 
bèle qu'on prétend avoir existé à Belley, tradition qui 
n'a peut-être d'autre fondement que les deux inscrip- 
tions rapportées en premier lieu. 

Des monuments d'un autre ordre ont été fréquem- 
ment retrouvés à Belley, mais bien souvent dispersés 
presqu'aussitôt, personne alors ne s'attachant à les re- 
cueillir. Depuis plus de vingt ans que j'habite cette ville , 
j'ai vu déterrer , et j'ai conservé un certain nombre 
d'objets de ce genre. Je puis citer de nombreuses mé- 
dailles romaines de tous les âges et de tous les métaux, 
des débris de poteries et quelques vases entiers, des 
tuiles, des briques, des figurines en terre cuite, une 
pierre gravée, dés meules domestiques en lave, des 
fragments et de petits ustensiles en bronze , la jambe 
d'une statuette de même métal qui parait avoir été un 
pocillator, et dont la hauteur d^ait s'élever de deux 
à trois pieds. 

(1) On peut voir Orelli , Inscript, laU sel. tora. I , pp. 116 , 218 , 
232, 272, 275, 276, nn. 339 , 947, 1046, 1276, 1306 — 1309, 
1315. 



( 181 ) 

Tout ceci constate Texistence d'une habitation ro- 
maine assez florissante^ sur le sol qu'occupe aujour- 
d'hui la petite ville de Belley. Tout ceci encore peut 
rendre vraisemblable cette conjecture , que les maîtres 
du monde auraient connu les sources minérales dont 
les eaux coulent sur le territoire de l'ancien vicus ro- 
main^ mais qui sont aujourd'hui peu connues^ même 
sur les lieux ^ et dont on peut croire que les anciennes 
vertus se seraient fort affaiblies, ainsi qu'il est arrivé à 
beaucoup d'autres, notamment à celles d'Aix en Pro- 
vence (1). 

La première de ces sources n'était guères connue 
que des Ursulines qui avaient un couvent à Belley , sur 
les dépendances duquel elle s'était fait un passage. Lors 
du tremblement de terre de 1 822 , qui fut très-sensible 
dans cette ville , on la vit sourdre subitement dans le 
puits de l'acquéreur d'une portion de l'emplacement de 
cette maison religieuse, mais mêlée d'eau commune, 
et perdant ainsi de ses propriétés naturelles. Aujour- 
d'hui ses eaux sulfureuses sortent sans mélange connu, 
par un puits ancien, mais non antique, dont le proprié- 
taire a retrouvé l'ouverture. A défaut de constructions 
qui indiquent son emploi dans l'âge romain, on pour- 
rait être tenté de chercher dans cette source l'expKca- 
tion d'un monument unique conservé dans la cour de 
la sous-préfecture, et de reconnaître sa divinité tutélaire 
sous le nom de la déesse blanda, qui se lit sur un joli 
autel , avec cette ia§cription votive que Guichenon n'a 
pas donnée (2) : 

(1) Sup, , p. 88. 

(2) Je crois bien me rappeler que cet autel a été découTert 



( 182 ) 

t). blÀNDE 

tlÀESIÂ* RV 

TiSk. î»RO. SA 

EX. V. 

 trois kilomètres àe Belley, maïs tôiqours sur àôlft 
territoire, une source ferrugineuse coule d'une élévation 
qu'on appelle la côte de €hâtillon, nom qui a été donné 
aussi à ces eaux, de même que celui d'eaux de Thoy 
emprunté à un village dont elles ne sont séparées que 
par un pont jeté sur la rivière de Purens (1). Je ne crois 
pas qu'on ait trouvé aucun vestige d'antiquités lorsque 
Ton construisit le bâtiment mesquin destiné aux buveuf S, 
durant la faveur éphémère dont cette source jouît , il y a 
quelques années. Mais les environs de ce lieu> du côté 
opposé à Belley, ont reproduit des traces fort marquées 
du séjour des dominateurs de la Gaule. Dans la icotn- 
mune d'Arbignieux , dont le village de Thoy fait partie, 
on a reconnu plus d'une fois des masses considérables 
de briques et de tuiles antiques , annonçant des cons*- 
tructions considérables; on y trouve assez fréquemment 
des médailles romaines , et des fragments ou de petits 

Bellej ; mais je û^ai pu , comme je l'aurais désiré pour m'en assurer 
darantage^ retrourer sous ma main lesnotes de M. Bruant, ancien 
sous-préfet, qui avait commencé la formation, au chef-lieu, d'un 
it/àsée lapidaire. S'il y avait erreur de ma part, toes lecteurs tee 
sfiurkiient gré toujours de leur feîre'con||^tre<mi monument inté- 
ressant. 

(1) La Statistique de l'Ain publiée en 1808 leur donne ce nom : 
p. 49, et vante leurs qualités d'après un rapport de Guy ton de 
Morrau. 



( 185 ) 

usiensites en bvmze^ il y a yin^*€inq ms, myééem- 
vrit plusieurs tombeaux en pieite^ ,et des yases 4e ^'lerre 
de Qouleiir^ qui furent brisés par les paysans. Eiifin ., iee 
fui est plus intéressant que tout le reste, ony a netreiiyé 
lies années dernières un bloc ayant service flaudelion^ans 
un mur, et portant la moitié d'une insc^riptim «qui men-^ 
tionne un temple en ce lieu. On lit ce qui suit sur ce 
fragment, que je possède : 



C. SVLP. I 

AEDEM. .... 
S. P. . 

Ces trois Kgnes pourraient, je cmis, isi fffles étaient 
complètes, im)us donner la totalité de rins<»ip^Soii. H 
manque à la fin de la première 'le surnom de #v*Lp/ctws ; 
à la seconde, après le mot aedem , devait se lire le nom 
de la divinité ; enfin, latroièième se terminait parla^ettre 
R on par la lettre p. , indiquant avec les deux autres to 
formule connue : ma vecimiu ^e&tiHità,im9osgiivi. 



BmOWERA. 



Ce nom jie se trouve que A^m des^aotes dont le plus 
ancien est du vr^ :siècle : il y désigne ]a .petite yilleîdu 
département de la Manche qui porte depuis long-temps 
le nom de Saint-Lô (1). M. Walckenaer, qui cite Tacte 

(1) c'est réyèquë saint Lô, lui-même, qni s'exprime, ainsi dans 
cette pièce recueillie par les savants auteurs du GaUia ChrisUana 
(tom. XI, col. 864] : Laulo, in Christi nomine episcopus eoâlmœ 
Conslantinœ , seu Brioverensis» 



( 184 ) 

en question , parait regarder ce lieu comme déjà ancien 
à cette époque (1) : s'il en est ainsi ^ ce que la tournure 
même du nom semble rendre probable , il peut avec 
vraisemblance être placé ici. Saint-Lo possède en effet 
des eaux minérales (2) ; mais je ne saurais dire si Ton 
y a découvert quelques restes d'antiquités. 



CjESÀROMAGUS. 



Â-t-on ^ connu dans l'âge romain les sources miné- 
rales que possède aujourd'hui la ville de Beauvais(3)? 
Les données suivantes , sans le démontrer positivement, 
tendent du moins à le rendre fort probable. 

Beauvais est bien certainement l'antique Cœsaro- 
magusy mentionné par l'Itinéraire d'Antonin (4), et 
marqué sur la Carte de Peutinger (5) : sur ce point de 
géographie comparée^ il n'y a pas deux opinions. Cette 
ville avait assurément une certaine importance; car 
elle était la capitale des Bellovaci, bien avant qu'elle 
prit leur nom, et c'est la seule ville que Ptolemée 
mentionne chez ce peuple (6). Beauvais a aussi ses 
monuments de l'antiquité romaine, mais peu nom- 
breux, si je ne me trompe. Je ne puis citer qu'un bas- 
relieC singulier et curieux, bien qu'il ne fut pas entier, 

(1) Géographie de$ Gauler ^ tom. l, p. 387. 

(2) Pâtissier, Manuel des eattx minéraiêi , p. 5tf6» 

(3) Ibid. , p. 3tt8. 

(4) VeL Roman, itinerar., éd. WesseliDg, p. 380. 
(tf) Segm.IyC. 

(6) G^gr.,U,S(9). 



( 185 ) 

qu'on y découvrit en 1 695 , et dont la description et le 
dessin ont été donnés par dom Martin (1 ) . H représente , 
dans une niche, ou édicule, un Mercure à mi-corps , vêtu 
d'une sorte de sagum, barbu, et remarquable encore 
pour quelques autres particularités. La partie supérieure 
du monument se termine par une espèce de fronton , 
dans lequel on lit cette inscription votive : 

SACRVM 

BfERCVRIO. AVGVSTO. 

C. IVLIVS. HEÂLISSVS. V. S. L. M 



CONSTANTIÂ. 

Ce nom, qui parait ancien, quoiqu'il ne commence à 
se montrer que dans les actes ecclésiastiques, est bien 
certainement le nom de Goutances : on a supposé qu'il 
venait de Constance Chlore, ou de quelque membre de 
sa famille (2). Peut-être ne doit-on pas regarder comme* 
également certaine l'identité de cette ville du dépar- 
tement de la Manche avec Fantique Cossedia, mentionné 
par ritinéraire (3) et par la Carte de Peutinger (4). Du 
moins elle n'est pas reconnue par M-. Walckenaer (5), 
contrairement à l'opinion de Belley (6). Qiioi qu'il en 
soit , Coutances est incontestablement une ancienne 

(1) Religion des Gaulois, tom. I, p. 343. 

(2) Fontena , Mém, dA'Acad, des Inscriptions, tom. XVI . p. 126. 

(3) Vet, Roman, itinerar. , éd. Wesseling, p. 386. 

(4) Segin.I,a. ^ 

(5) Géographie des Gaules, tom. , I, p. 184. 

(6) Mém, de V Académie des Inscriptions, tom. XLI , pp. 568> 579. 



( 186 ) 

habitauon romaine , qui fut ^ ou plutôt y ou plus tard , 
la capitale des ViMi (1). Elle a conservé quelques 
antiquités, notamment un aqueduc décrit par Fon* 
tenu (2). Sms examiner si ee monument à quekpe 
rappmt aux eaux minérales qui existent dans cette 
ville (3) 9 ee qu'une étude sérieuse des localités pourrait 
seule mettre à même de recœmaitre , on peut, je crois > 
présumer fort vraisemblablement qu'elles furentconnues 
des conquérants de la Gaule. 



CORIALLUM. 



Les eaux connues aujourd'hui à Cherbourg (4) ne 
durent pas être inconnues à l'époque romaine. Car cette 
ville , qui dans le cours des âges a changé plusieurs fois 
d'aspect , parait avoir été un lieu romain , l'antique 
Coriallum de la Carte de Peutinger (5) : ainsi en ont 
' jugé Belley (6), M. Walckenaer (7), etc. On y a découvert 
quelques antiquités, notamment un tombeau creusé 
dans le roc, qui renfermait une urne de forme singulière, 
remplie de cendres et de médailles des Ântonins , une 
ceinture en or, etc. (8). 

(1) W^alckenaer, Géographie des Gaules, loc. laud. 

(2) Mém. de V Académie des Inscriptions ,iom, XVI, pp. 122-130. 

(3) Pâtissier , Manuel des eaux miriércUes., p. 556. 
{A)lbid. m 

(5) Segm. I, a. 

(6) Mém, de l'Àcad, des Inscriptions, tom. XLÏ, p. 579. 

(7) Géographie des Gaules, tom. I , p. 385 ,396 ; tom. il, p. 259. 
(iB) AXem, de VÀcad. des Inscriptions y tom. H^VI, hist. p. 131. 



( 187 ) 



DEA vocoNTiomm. 



Cette antique ville romaine^ que remplace aiyourd'hui 
un cheWieu d'arrondissement de la Drôme^ Die(l), 
est mentionnée par la Carte de Peutinger (2), ritinéraire 
d'Ant(Miin (3)^ et celui du pèlerin de Jérusalem (î): 
elle formsôi une station sur la voie de Vapincvm, Gap^ 
à Valentia, Valence. Mais aucun autre écrivain ancien 
n'en a parlé ; et Ton est d'autant mieux fondé à s'en 
étonner, qu'elle parait avoir été un lieu considérable. 
On peut en juger d'après le surnom d'Augusta dont 
elle fut honorée, comme nous l'a^pprend l'inscription sui- 
vante, qui a été souvent reproduite (5) : Je la donne 
d'après Bimard, qui l'avait copiée lui-même (6), et qui a 
été suivi par M . Orelli (7) : 

BIS. htaNib. 
Q. caêtroivÏ.q.filI 

VOLT. iTItVLLI. VETER 
COfl.VT. PR. LOCO.Îf.Vm. PON 

(1) Valois, NoHt. Gàlliat., p. 169.— D'Anville, Notice de la Ùaule , 
p. 263.— W^alckenaer , Géographie des Gaules, tom. I, p. 256. 
(2)Segiii. lï, d. 
(8) VeL Roman, ^inercar. , éd. Wesselîng. , p. 857. 

(4) IWrf. , p. «54. ^ 

(5) Spon, M^eel.trud, antiquiU,^. 1^.— Mémoires de l*Aead. des 

InscripL, tom. VII , p. 267 , etc. 

(6) Ad Murator. Prolegom,, col. 15. 

(7) InscripU laU sel* , tom. II, p. 215 , n. 4025. 



( i88) 

TIF. COL. AVG. ARIM. PRAEF 

PAGI . EPOT . FLAM . AVG . ET 

MYNER. PVBLIGI. GYRA 

AD.DEAM. AYG.VOG 

HERED. EX. TEST (1) 

Les monuments antiques découverts à Die dans tous 

• 

les temps prouvent encore mieux son importance à Té-' 
poque romaine. Ils ne se bornent points comme dans 
d'autres villes plus célèbres, à quelques médailles, et 
à ces débris de diverse nature qu'on recueille partout 
sous les pas du grand peuple ; ils sont fort nombreux 
et d'un haut intérêt. De riches fragments d'architecture, 
des chapiteaux, des frises, des colonnes entières, no- 
tamment celles en granit employées à la décoration du 
clocher de la cathédrale et à son péristyle , annoncent 
la magnificence des antiques édifices de la capitale des 
Vocontii ; une des portes de la ville moderne est un 
arc triomphal d'un bon style ; une autre est formée des 
restes de bâtiments romains ; et des constructions près 
d'un rempart, révèlent parleur forme demi-circulaire 
l'existence, en cet endroit, d'un antique théâtre (2). En 
creusant des fondations , on a reconnu plus d'une fois 
des mosaïques d'un beau travail, qui malheureusement 
n'ont pas été conservées; et des bas-reliefs , ou autres 

(1) Il j aurait bien des choses à signaler dans cette curieuse ins- 
cription. Je ferai observer seulement qu'elle enrichit la géographie 
ancienne de la Gaule : on croît que le nom abrégé bpot. , qui se Ht 
à la ligne 6 , désigne Upois, lieu distant d'une lieue de Yentayon 
près de Gap , où le monument a été trouré. 

(2) Statistique de la Drame, pp. 479 > 480. 



(189) 

sculptures 9 dans un état plus ou moins entier se voient 
à Textérieur de plusieurs maisons (1). 

C'est surtout par ses monuments écrits que Die 
appelle Tattention et Fintérêl des archéologues. Je ne 
dirai rien des inscriptions sépulcrales gravées sur des 
• tablettes ou sur des cippes , dont plus de trente sont 
données comme existant encore dans cette ville (2) , 
outre bien d'autres qui ont été publiées ; mais|e signalerai 
un petit nombre de monuments votifs qui me paraissent 
plus importants. De cinq autels^ avec les insignes tau- 
roboliques ^ qui sont encore à Die ^ deux portent des 
inscriptions : la plus remarquable est bien connue : je 
la reproduis néanmoins (3). 

D. M. 

PRO. VAL. IMPER. TÀVR. FEC. TIT. L. MAR 

CELLIN. ET. VAL. DECVMILLA. LV. VOLO 

SACERB. LV. ATTIO. ATTIANI. FIL. D[EN] 

Voici un vœu à Mercure , une des divinités dont le culte 
fut le plus répandu dans les Gaules (4) : 

MERGVRIO 
N0VELLV3 
lOVINCATI 
V. 8. L. M 

(1) Op, laud. , p. 480. 

(2) ièû;., pp. 483— 493. 

(3) Ibid, y p. 477. Je ne jaîs s'il ne faudrait pas lire au commen- 
cement PRO. SAL : ce serait du moins plus conforme à Fnsage. 

(4) Ihid, , p. 484. 



(190) 

Les trois incriptions suivantes sont consacrées à une 
divinité locale (1) : 



DEAB. AV6 
ANDARTAE 

M« FOMP 
PRIMITIWS 

EX. YOTO 



BEAE. AV6 

ANDARTAE 

h. GARISIVS 

àERENYS 

IlUlI. YIR, AYG 

V* S« L« M 



DEAlg. AVG 
ANDARTAK 
T. DEXIVS 
ZSOZIMVS 



Deux autres inscriptions votives à la même divinité 
existaient autrefois à Die^ au rapport de Gruierj, qui 
les a données d'après Scaliger (2), Les voici : 



DE. AVG 

ANDARTAE 

M. IVL. ANTO 

wmvs 



DE. AVG 

ANDARTAE 

M. IVLIVS 

THEODORVS 



Il est fâcheux que nous manquions de données au sujet 
de cette déesse Andarta. Rien n'est plus hasardé que 
l'opinion de dom Martin, qui veut qu'elle ne soit autre 
que la Victoire (3). Cet ensemble de monuments en 
son honneur dans le même lieu atteste du moins un 
culte fort répandu ; et je serais porté à croire qu'elle 
était la divinité protectrice des Vocontii, et que de là 
serait venu le nom de Dca donné à leur capitale , plutôt 
que du culte de Livie, comme l'a pensé Valois (4), ou 

(1) Op. laud. , pp. 488 , 489 ,491, * 

(2) inscripU antiq., LXXXVTO, 9, 10. 

(3) Religioti des Gaulois., tom. II , p. 12. 

(4) Nota. Galliar., p. 169, a. 



( *9* ) 

de cehii de la mère dés dieux, aii^i que d'antres. l'ont 
présumé, se fondant sur le grand nombre de monu- 
ments tauroboliques retrouvés sur ce territoirei 

On pourrait même la regarder comme présidant aux 
eaux minérales ; car, pour en venir à la particularité 
locale qui motive la place donnée ici à la ville des Yo- 
coniii, je lis qu'il y a des eaux minérales à Die (1 ) ; et tout 
ce que j'ai dit de ses antiquités, rend fort probable queces 
eaux étaient connues à une époque où les usages gaulois, 
devenus tout-à-fait romains,, attachaient un grand prix 
à de tels bienfaits de la nature. Mais le fait semble tirer 
une sorte de certitude de monuments dont on voit en- 
core hors de la ville des vestiges fort reconnaissables . 
Ce sont évidemment des aqueducs ; et leur direction a 
fait juger qu'ils étaient destinés à conduire à Die les, 
eaux de Romeyer, qui sont sulfureuses et que l'on em- 
ploie, dit-on, avec succès dans les maladies cutanées (2) . 



DimA. 



Nous savons que Digne fut une ville romaine. C'est 
une donnée certaine qui nous est fournie par Pline et 
par Ptolemée, à cela près, que celui-ci la donne aux 
Sentit (3) ; et Pline aux Bodiontici : Adjecity dit ce der- 
nier, formulée Galba imper ator ex Inalpinis Avanticos, 

è 

(1) Pâtissier, Manuel des eaux minérales , p. 555. 

(2) Statistique de la Drame, p. 4S0 ; tf. p. 240. 

(3) Geogr. U, 9 {iO). 



( 192 ) 

atqtêe Bodionticos , qtunrum oppidum Dinia (1). C'était 
donc une capitale ^ et lin lieu considérable ; mais il lui 
reste aujourd'hui bien peu de souvenirs de son impor- 
tance ancienne. < La disette en ce genre est même telle ,. 
» dit M. Henry^ que si Pline ne constatait aussi positive- 
» ment son ancienneté , on ne pourrait jamais soupçon- 
» ner qu'il y ait eu dans ces quartiers une ville connue 
> des Romains (2). > D'après le même auteur , tout ce 
qu'on peut reconnaître d'antiquités romaines dans cette 
ville ne consiste qu'en un autel sans inscription appa- 
rente , et en un tronçon de colonne en granit gris (3). 
Il n'est pas nécessaire d'ajouter qu'on ne voit rien 
d'antique dans le vallon où sont les thermes modernes^ 
qui attirent encore à Digne quelques baigneurs , et que 
rien n'a été découvert auprès des sources , qui puisse 
indiquer, même d'une manière éloignée, l'existence d'un 
établissement thermal en ce lieu durant l'époque ro- 
maine. Le nom ancien de la ville des Bodiontici autorise 
donc presque seul cette conjecture, que ses eaux chaudes 
ne furent pas inconnues aux conquérants de la Gaule. 



DVROCORTORUM^ 

I 



Cette capitale des Rémi, qui plus tard prit le nom du 
peuple , suivant l'usage d'alors , a été mentionnée en 

(1) NaU hiiU » III , 4 (5) ; cf. , Walckenaer , Géogr, des Gaules , 
tom. II, p. 42. <- 

(2) Recherches sur la géographie et les antiquités du département des 
Basses-Alpes, p. 94. 

(3) Ihid. , p. 9tt. 



( *93 ) 
premier lieu par César (1)^ puis par plusieurs géographes 
anciens (2) ; elle figure aussi'dans ritinérairé d'Anttv 
nin (3), et sur la Carte de Peutinger (4). C'est le cas de 
rappeler la remarque de d'Anville. « On lie voit point de 
» ville dans la Gaule , où il se rende uh plus grand 
» nombre de voies militaires (5). » Ajoutons que lés 
lettres étaient cultivées dans cette ville, et qu'on la 
regardait comme une seconde Athènes , suivant ce mot 
de Fronton, le grand orateur, rappelé par un ancien 
grammairien , P. Consentius , qui altère le nom du lieu : 
et illœ vestrœ Aihenœ Dorocorthoro (6). 

Reims a conservé des restes d'antiquités romaines > 
dont plusieurs modernes font mention. On y connaît 
deux arcs de triomphe richetnent décorés , qui étaient 
encore dans un état satisfaisant lorsqu'ils furent décrits 
par Bergier (7) : ils ont servi de portes à la ville, et 
deux voies antiques y avaient leur point de départ (8). 
On cite encore comme monuments d'une certaine impor- 
tance un bas-relief représentant une chasse, appelé 
communément tombeau de Jovin, ou de Jovien (9) , et 
une frise en marbre ornée de rinceaux d'un effet assez 

(i)DeheL GalLyi,U. 

(2) Strabon. , Rer. geogr. , IV, 194; éd. Almelor. , p, 297, — 
Ptolem« , Geogr, ,8(9). 

(3) Vet, Roman, itinerar, , ed« Wesselîng, pp< 362, 379, 381. 
(4)Segiii.I, c. 

(5) Notice de la Gaule , p. 280. Bergier , qui a fait la même obser^ 
vation, en ayait reconQu neuf (Hist. des grands chemins, tom. I, 
pp. 518—529.) dont deA. ne sont pas indiquées parles itinéraires* 

(6) Fragm., éd. Ang. Mai, Rom», p. 334. 

(7) Hisi, des grands chemins , tom. I , pp. 301 — 305. 

(8) Ibid. 

(9) Caylus, Recueil d'antiq, , tom ÏV, p. 390, pi. CXÏX, 1. 

13 



C «94 ) . 

agréable 9 avec des figures de génies et d'animaux (1). 
Enfin , Gaylus a donné ciivers ustensiles , et de petits 
objets en bronze qu'oii y avait trouvés , entr'autres des 
couteaux, un buste, etc. (2). 

Reims a des eaux minérales, qui sont bien peu 
réputées (3) ; l'antiquité de cette ville , et les données 
archéologiques que je viens de mentionner permet- 
traient de les compter, avec beaucoup de vraisemblance, 
au nombre des sources de cette nature que l'on connut 
dans tes Gaules au temps de la domination romaine « 
Cette conjecture me semble singulièrement confirmée, 
pour ne rien dire de plus, par une belle et curieuse ins- 
cription relative à des thermes construits par Constan- 
tin II, dans la ville des Rémi. Je la rapporte intégra- 
lement , quoiqu'elle soit un peu longue (4) : 

IMP. CAES. FL. CONSTANTINVS. MAX, AVG. SEMPÏ 

TERNVS . DIVI . CONSTANTINI . AVG . F . TOTO 

ORBE, YIGTORIIS. SVIS. SEMPER. AC. FELICITER. CELEBRANDVS 

THERMAS . F16CI . SVÏ , SVMPTV 

A , F VNDAMENTIS . CEPTAS . AC . PERACTAS 

CI VITATI . SVAE . REMORVM . PRO . SOLITA 

LIBERALITATE. LARGÏTVS. EST 

• 

(1) Caylus, Recueil d^antiq., tom. III , p. 432 , pi. CXIX , 1. 

(2) Ibid. pp. 432 —435 , pi. CIX et CXX. 

(3) Pâtissier , Manuel des eaux minérales, p. 369. 

(4) OreUi , Inscript. laU sel. , tom. I , p. 241 , n. 1096. Les collec- 
teurs qui Tout publiée en premier lieu donnent quelque sujet de 
douter si ce marbre existait à Reims, on à Rome» ce qui serait a» 
reste peu important ici. Mais dans ce dernier cas , il est clair que 
le monument aurait été enlevé à sa patrie. 



( 195 ) 



IIS GENA. 



Cest le nom que donne Ptolemëe à la capitale des 
Abrincatui (1); et^ette donnée assurément n'est pas à 
mépriser, quoique le géographe ait commis une erreur 
fort grave par rapport à la position de ce peuple , en le 
rejetant beaucoup trop vers l'intérieur (2). L'aM)é Belley 
identifie ce nom avec celui de Legedia (3) , inscrit dans 
ces cantons sur la Carte de Peutinger (<4), nom dans 
lequel M. Walckenaer croit reconnaître celui de Le- 
zeau (5). Quoi qu'il en soit de cette identité, on pourrait 
difficilement, ce me semble, se refuser à admettre, 
avec d'Anville (6), avec Belley (7), etc. , que cette ville 
des Abrincatui n'est autre qu'Avranches , dont le nom 
moderne révèle assez positivement son ancienne origine. 
Je ne saurais dire quelles antiquités elle peut posséder^ 
toutes mes recherches sur ce point ayant été vaines ; 
mais sa seule exil^tence , comme ville et capitale dans 
l'âge romain, permet, je crois, de présumer avec quelque 
probabilité qu'on connut à cette époque les eaux miné- 
rales que j'y vois signalées aujourd'hui (8). 

(1) Geogr.îï,7[S). 

(2)md. 

(3) Mém, de VAcad, des Inscript. , tom. XLl, p. 376. 

(4)Segm.I,a. * 

(5) Géographie des' Gaules , tom. III, p. 39. 

(6) Notice de la Gaule , p. 384. 

(7) Loc. laud. 

(8) Pâtissier , IHanuel des eaux minérales , p. 336. 



( 196 ) 



LUTEVA, 



Je vois des eaux minérales indiquées à Lodève (1)* 
Elles purent être connues au temps de la domination 
romaine, puisque cette ville de l'Hérault occupe , au ju- 
gement des géographes les plus célèbres (2), l'empla- 
cement de la ville antique indiquée par Pline dans le nom 
de ses habitants , Lutevani (3), et nomméeJjOteva sur 
sur la Carte de Peutinger (4). Je regrette de ne pouvoir 
citer aucun monument de cette ville, à l'appui de ma 
conjecture : un souvenir vague me dit seulement qu'on 
y en a trouvé plus d'un. 



MEDIOLÀNim. 



Plusieurs lieux ont porté ce nom à l'époque romaine ^ 
eh diverses parties delà Gaule. Celui dont il est ici ques- 
tion n'eut jamais, sans doute, l'importance de la ville des 
SantoneSf Saintes, ou de celle des Aulerci Eburovices, 
Evreux; et cependant il réclame quelque intérêt. Nous le 
voyons marqué comme mansion sur la voie qui tendait 
d'Augustonemetum , Clermont, à Lugdunum, Lyon; 

(1) Pâtissier , Manuel des eaux minéralem, p. 555. 

(2) D'Anyille, Notice de la Gaule, p. 429 ;— Walcke»aer, Géogra- 
phie des Gaules, tom U , p. 182 , etc. 

(^) Nat. hist. , m , 4(5). 
(4) Segra.I, e. 



( i97 ) 

mansion que la Carte de Peu tinger place entre Roidumna ^ 
ou Rhodumna , comme l'appelle Ptolemée (1 ) , et Forum 
Segustavarum ^ ou plutôt Segusianorum , dont il a déjà 
été question (2). Les distances itinéraires indiquées par 
la Carte sont, XXII par rapport à la première de ces 
deux stations , et XIV à l'égard de la dernière (3). 

D'Anville a cru reconnaître Mediolanum au village 
obscur, et sans aucun reste d'antiquité, qui porte aujour- 
d'hui le nom de Mey (4). Dans aucun cas cette déter- 
mination ne saurait être admise , puisque ce point est 

(1) Geogr. Il, 7 (8). 

(2) Sup, , p. 75. Je saisis yolontîers Toccasion de reyenîr sor ce 
nom, au sujet duquel deux inscriptions que j'ai citées m'ayaient 
fiiit long-temps hésiter : ceUe de Cassia Touta trouyée à Bagnères* 
de-Lucbon ( Sup, , p. 66 ), et la tablette de bronze déconyerte plus 
récemment à Marclop ( Ibid. , p. 81 ). Je deyaîs la connaissance de 
celle-ci à M. Au g. Bernard , et en écbange , je lui ayais indiqué la 
première. En ayant reçu une empreinte de M. du Mège , conser- 
vateur du musée de Toulouse, ce jeune sayant, dans une nouyelle 
Lettre à itf. Dossier, insérée dans le Journal de Montbrison ( ayril et 
mai derniers) , et dont il a bien voulu m'adresser le tiré à part, n'bésite 
pas à prendre le parti devant lequel j'avais reculé , c'est-à dire à 
reconnaître ( p. 17 ) que la vraie leçon doit être Forum Segusiavorum, 
Il serait bien à désirer qu'une nouvelle inscription vint décider 
pleinement ceHe question philologique, tranchée peut-être un peu 
prématurément. 

(3) Segm. I , f. 

(4) Notice de la Gaule, ^. 444. Dans l'article Insubres (p. 384), le 
même savant veut que le peuple de ce nom qui fonda Milan fût sorti 
du pays des Segusiani, et eût cherché dans le nom de la nouyelle ville 
un souvenir de sa patrie. Il fonde cette conjecture , qui serait une 
gloire pour notre Mediolanum, sur ce passage de Tite-Live [Hist. 
V , 34 ) : Fusisque acie Juscis , haud proctU Ticino flumine , quum in 
quo consederant , agrum Insubrium appellari audissent , cognomine 
Insubribuspago Mduorum , ibi , omen sequentes loci, condidere urbem : 
Mediolanum appellarunt. 



( 198 ) 

plus rapproché de Lyon que Vmrs , et beaucoup trop 
éloigné de Roidumna, qui est Roanne. M. Walckenaer 
Ta cherché ailleurs, mais toujours en suivant le système 
qui met à Farnay le Forum Segustavarum. Le village 
de Meylieu-Montrond, aussi dépourvu.que Mey de tout 
vestige de monuments romains , satisfait aux distances 
marquées, et montre dans son nom moderne, quelque 
affinité avec celui deMediolanum : c'est là que M. Wal- 
ckenaer a placé cette station (1). Ayant établi ailleurs que 
le Forum Segustavarum de la Carte n'est autre que le 
Forum Segusianorum de Ptolemée , et qu'on ne peutle re- 
trouver qu'à Feurs (2) , je ne saurais admettre une telle dé- 
termination, qui change tout-à-fait la direction reconnue 
de cette voie romaine. Mais il me parait démontré, ainsi 
qu'à M. Aug. Bernard (3), que le bourg de Moingt réunit 
toutes les conditions géographiques et archéologiques 
qui peuvent nous le désigner comme représentant, dans 
le moderne département de la Loire , l'antique Mediû- 
lanum des Segusiani. 

D'abord, ainsi que cet écrivain l'a remarqué (4), 
les XXII lieues gauloises que la Carte compte de Roi- 
dumna kMediolanum conviennent parfaitement à la dis- 
tance qui sépare Roanne de Moingt. Il n'en est pas de 
même, il est vrai, des XIV lieues marquées entre Medio- 
lanum et Forum : ce chiffre excéderait de V l'intervalle en 
ligne directe entre Moingt et Feurs, qui équivaut à VIIII 
lieues gauloises. Pour rendre raison de cette évaluation 

(1) Géographie des Gaules, tom. I, p. 334; tom. III, p. 101. 

(2) Sup. p. 79. 

(3) Lettre à JJf. Dossier , pp. 12 et 13. 

(4) Jbid. 



( 199 ) 

fautive, M. Aug* Bernard fait une observatimi essen- 
tielle : c'est que les V lieues que nous avons ici de trop sont 
précisément ce que nous avons ajouté à une autre éva- 
luation de la Carte , quand nous avons changé de XVI 
à XXI le chiffre marqué entre Forum et Lugdunum (1) ; 
en sorte que^ si on les retranche ici , comme cela doit 
être, le chiffre total reste toujours XXX (2). La Carte 
et les autres itinéraires offrent plus d'une fois ainsi un 
chiffre exact quant au total de plusieurs distances addi- 
tionnées , bien qu'il y ait erreur sur quelques-unes des 
distances partielles. 

Dans le nom moderne de Moingt , on peut reconnaître 
quelques traces du nom antique deMediolanum^suriom 
si Ton conserve l'orthographe Moindt, qui est, me dit-on, 
la plus ancienne. Ce qui a une toute autre importance, 
c'est que ce lieu possède encore des ruines romaines 
. considérables. On doit regarder comme telles des restes 
d'un temple antique, que l'on suppose, assez gratuitement 
je pense , avoir été consacré à la déesse des moissons (3), 
et bien plus encore , des constructions dont la forme de- 
mi-circulaire ne pouvait convenir qu'à un vaste théâtre. 
Tout récemment, M. Aug. Bernard, que j'aime à citer 
pour ces détails de localité , y a reconnu la scène , une 
porte , les trous destinés à recevoir les poutres qui por- 
taient la charpente (4), etc. On m'assure que de petits 
objets et des fragments antiques ont été trouvés plus 

(1) Sup. p. 81. 

(2) Lettre à M» Dossier, p. 12. 

(3) C'est celui dont j^Sii fait mention plus haut à l'article Aquœ 
Segete, ^. S^,noU3. 

(4) Seconde Lettre à M. Dossier, p. 15. 



( 200 ) 

d'une fois dans ce sol évidemment romain , mais pas 
d'inscriptions. 

De même qu'en divers autres lieux du Forés , il y a 
à Moingt des sources minérales peu fréquentées , et qui 
sont mieux connues, hors du pays, sous le nom de Mont- 
brison, cheMieu du département, et dont ce petit bourg 
est fort peu distant (1). Quoique parmi les monuments 
conservés à Moingt , rien ne paraisse indiquer positive- 
ment, comme à St-Galmier, les traces d'un établissement 
thermal , l'antique existence de Mediolanum , l'impor- 
tance dont il parait avoir joui, les restes de l'époque ro- 
maine qu'on y retrouve, et surtout son théâtre, nous au- 
torisent assez à présumer que les conquérants des Gaules , 
amateurs si prononcés de toutes les eaux médicinales, 
connurent celles-ci et surent en faire usage. C'est la 
vraisemblance de cette opinion qui m'a déterminé à placer 
ici le nom de cette mansion romaine , -et à discuter en- 
core une des questions de géographie comparée qui 
intéressent ma province natale. 



NOVIOJÏÏÀGUS. 



On s'accorde aujourd'hui , contre l'opinion de Va- 
lois (2) , à reconnaître Lisieux dans cette ville ro- 
maine (3), qui fut la capitale des Lexovii, peuple de la 

(1) Pâtissier, Manuel des eaux minérales,, p. 308. 

(2) NotiU Gatliar., p. 27», h. 

(3) D'Anville, Notice de la Gaule , p. 492 ; — Walckenacr , Géo^ 
graphie des Gaules , tom. I , p. 394 , etc. 



( 201 ) 

Gaule Lyonnaise^ fréquemment nommé par les auteurs 
anciens (1). Il n'est pas aussi souvent question de leur 
ville : et sous le nom de Noviomag'us, qui lui est com-i 
mun avec d'autres lieux de la Gaule (2), on la trouve 
mentionnée seulement par Ptolemée (3) , et dans l'Iti- 
néraire d'Antonin (4). Dans les Notices, et plus tard ^ 
elle est désignée simplement par l'appellation de Civi- 
tas Lexoviorum. Cette identité, en effet, ne saurait 
être contestée. M. Walckenaer (5) en voit une preuve 
très-forte dans « une colonne milliaire trouvée à Fré- 
» nouville, à dix kilomètres de la ville de Caen, vers 
» l'est, et sur la route de Lisieux, avec le chiffre de 
» XXV, qui démontrait, par l'exactitude de ses dis- 
» tances avec Lisieux, qu'elle était restée jusqu'alors à 
» son ancienne place (6), etc. » Mais il allègue un fait 
qui constitue un argument bien autrement démonstra- 
tif (7), et sur lequel je dois entrer dans quelques 
détails. 

Ce que je viens de dire , de l'identité de Noviomagus 
avec Lisieux, ne doit pas être pris dans le sens lé plus 
rigoureux des termes. Ce n'est pas, en effet, dans l'en- 
ceinte même du Lisieux moderne qu'on peut retrouver 

(1) Cœsar, DeheL GalLlU, 11 , 17 ; — Plin. , Nat. hisL IV , 18 (32) ; 
— Ptolem. , Géogr. H , 7 (8) , etc. 

(2) C'est Tancien nom de Nojon , de Nimègue , de Spire , etc. 

(3) Loc. laud. 

(4) Vei» Roman, ilinerar, ; éd. Wesseling, p. 385. 
(o) Op. laud. , p. 396. 

(6) Voici cette inscription, teUe qu'elle est donnée par M. deGer* 
ville ( Des villes et des voies romaines en Basse-Normandie, p. 64 ) : 

HffP.NERYAE.TRAIANO.DlIlTI.NERyAE. F. CAES. ATG. GBR|tP. H. TRB. 
POT. P. P. COS. IllJN. M. P. XXV. 

(7) Op. laud. y p. 39o. 



( 204 ) 



ROTOMÀGUS, 



Cette ville était la capitale des Vellocasses , ou Velio- 
casses, peuple connu d'ailleurs (1)^ qui occupait dans la 
Gaule Lyonnaise une portion des contrées dont se forma 
par la suite la province de Normandie. Dans les temps 
anciens de l'occupation romaine , Ptbiemée est le seul 
auteur qui en fasse mention (2). Plus tard on retrouve 
son nom chez Ammien Marcellin , qui le met au pluriel , 
Rotomagi (3) , comme on fit sous le Bas-Empire pour 
beaucoup de villes qui avaient pris les noms des peuples; 
il figure aussi dans l'Itinéraire d'Antonin (4)^ et sur la 
Carte de Peutinger (5). Au commencement du V"'' siècle, 
saint Paulin en parlait comme d'une église illustre entre 
celles de la Gaule (6). Chercher à établir l'identité de 
l'antique Roiomagus avec la ville de Rouen , si célèbre 
au moyen-àge , si florissante dans les temps modernes^ 
serait ici chose fort inutile : ce point de géographie 
comparée n'a jamais , que je sache , été mis en question . 
Il est plus important de dire un mot sur les antiquités 
de Rouen. 

Les plus anciens monuments de cette ville doivent 

(1) Caesar. , De bel. GalL II , 4 , — Plin. , Nat. hisU , IV , 18 (32) ; 
— Ptolem. , Geogr. II. , T (8). 

(2) Loc, laud, 

(3) Rer.gest. XV, 11. 

(4) VeL Roman, itinerar. ; éd. Wcsseling , p. 382. 
(^) Segm. I, a. 

(6) EpisU XVIII , 8. 



( 205 ) 

être ses médailles^ qui sont en bronze , avec la légende 
RATuiifAGos(l). Mais dans l'âge romain elle porta assuré- 
ment l'empreinte du luxe et de la magnificence que te 
peuple dominateur de l'univers semait partout sur ses 
pas. Aujourd'hui à Rouen, ainsi que dans la plupart des 
grandes villes , tant de bouleversements matériels ont 
eu lieu dans le laps des siècles , qu'on reconnaîtrait bien 
difficilement les traces des édifices qui durent l'embellir 
aux jours de la splendeur romaine , et que tout ce qui 
n'a pas été détruit est enfoui dans le sein de la terre , pour 
être mis à découvert dans de trop rares occasions. On 
pourra s'en faire une juste idée en lisant ces lignes que 
m'adresse mon savant confrère, M. de Gaumont, corres- 
pondant de l'Institut. « Il serait long d'indiquer les objets 
» antiques trouvés à Rouen. On en a découvert un assez 
» grand nombre depuis un siècle , et la ville actuelle 
» recouvre évidemment un sol romain ; mais il n'y a 
» plus rien d'apparent , et c'est en fondant des maisons 
» que l'on découvre le sol antique . Dernièrement encore, 
» on a découvert une chambre ornée de peintures, en 
» détruisant des fondations pour te percement d'une rue 
» nouvelle. Le musée de la ville renferme des tombeaux, 
» des urnes , des objets en bronze provenant de diverses 
» trouvailles faites à plusieurs époques, etc. » 

Je n'ose citer la colonne milliaire portant le nom, bien 
rare sur les marbres, du jeune Tetricus (2). Ce monu- 
ment, qu'on voyait, il y a plus d'un siècle, dans le mur 
d'une maison de Rouen, avait, dit -on, été envoyé 

(1) Mionnet, Descript, de médaillée, tom. I, p. 82, nn. 219 — 
223 ; SuppL I, p. 149, n. 154. 

(2) Mém,de V Académie des Inscriptions, tom. III, hist. , p. 255. 



( 206 ) 

d'Italie (1). Si le fait est exact; c'est qu'assurément il y 
avait été transporté de France ; car son origine est ass^ 
prouvée y soit par le nom d'un tyran de la Gaule ^ soit 
par l'indication de la lieue comme mesure itinéraire (2). 
Mais il n'est pas certain que cette borne provint des lo- 
calités où elle est revenue par une sorte de restitution à 
sa patrie : il est bien plus vraisemblable ^ au contraire, 
qu'elle avait été enlevée à quelqu'une des parties méri- 
dionales ^es Gaules, où avaient régné les deuxTetricus. 
On est fondé à croire que les habitants romains de 
Rotomagus ont dû connaître les eaux minérales qui 
sourdent encore de nos jours à Rouan (3) ; mais on en a 
pas découvert de preuves positives , et l'on ne saurait 
s'étonner que toute trace de travaux propres à le cons- 
tater ait disparu depuis long - temps , avec les autres 
ouvrages romains qui ornèrent jadis cette grande ville. 



SÀltiÀROBRIVA, 



César a fait mention de cette ville , où il tint une 
assemblée générale des Gaulois (4) ; son nom se lit deux 
fois dans les lettres de Cicéron (5) ; et Ptolemée en parle 

(1) Mémoires de V Académie des Inscriptions, p. 239. 

(2) Voici tout ce qu'on lisait de cette inscription , incomplète de 
deux lignes et tronquée dans deux autres : c. p.. estbio. tetrigo|| 

NOBILISSIMO. CAES. || . . . 1| || P. F. AVG . . . I| L. I. 

(3) Pâtissier, Manuel des eaux minérales , p. 369. 

(4) De 6e/. Gall, V,24. ' 

(5) Ad. famil. VII , 11 et 16. 



( 207 ) 

comme de sa capitale des Ambiani (1). L'Itinéraire 
d'Antonin (2), et la Carte de Peutinger (3) donnent, avec 
son nom , l'indication relative de son emplacement. 
Âmmien Marcellin, sous sa nouvelle dénomination 
d'Ambiant, la désigne comme une ville importante (4) ; 
et sous cette même dénomination encore , la Notice de 
l'Empire y mentionne une fabrique de diverses armes , 
fabricœ Ambianensis spatariœ et scutariœ. Des actes 
du martyre de saint Firmin , évêque d'Amiens , cités 
avec confiance par Valois (5) , peuvent l'être ici égale- 
ment^ pour quelques détails de localité qui ne sont pas 
sans intérêt, à raison de l'époque à laquelle ils se rat- 
tachent (6). Ils nous apprennent qu'il y avait dans cette 
ville des temples dédiés à Jupiter et à Mercure , un 
théâtre, et une porte appelée Clypiana^ nom qui semble 
se rapporter à la fabrique de boucliers indiquée par la 
Notice. 

Tout ceci peut bien autoriser à croire que les Romains 
connurent les eaux minérales qu'Amiens possède au- 
jourd'hui (7). Des monuments antiques retrouvés dans 
cette ville peuvent tendre plus ou moins à confirmer cette 
conjecture. Je n'en saurais citer qu'un petit nombre , 

(l)G?%r.n,8(9). 

(2) YeU Roman, itinerar» ; éd. Wessding , p. 380. 

(3) Segm. I , b. 

(4) Huic, dit-il [Rer, Gest. XV, 11 ), parlant de la première Bel- 
gique , adnexa secunda est Belgica ,■ qua Ambiani sunt , urbs inter 
alias eminens, 

{t5>)NotiL Gcdliar., p. 539, a. 

(6) Ce premier érêque des Amhiani fat martyrisé , à ce qoe Ton 
■croit, vers l'an 287. 

(7) Pâtissier, Manuel des eaux minérales , p. 559. 



( 208 ) 

quoiqu'il en existe beaucoup ; et je ne pourrais hésitei' 
à mettre en premier lieu une inscription votive fort cu- 
rieuse, (^ns laquelle se lit le nom d'une divinité to- 
pique , unique ici , et qui peut fort bien n'avoir pas 
été sans rapport avec les eaux minérales de Samaro- 
briva (1). En voici le texte d'après la leçon qui me 
semble la meilleure (2) : 

PRO. SALVTE. ET 
VICTORIA. L. XX. G (3) 
APOLLINI. ET. VER 

IVGODVMNO 
TRÎBVNALU.DVA (4) 
SETVBOGGIVS. ESVGGI 
F. D. S. D. 

Beaucoup de petits monuments romains ont été trou- 
vés à Amiens, dont plusieurs furent publiés dans di- 
vers recueils d'antiquités. De ce nombre j'indiquerai 
trois gros anneaux d'or massif donnés par Caylus (5) : 
dans le premier était enchâssée une médaille quinaire 
de Maximin , en or également ; chacun des deux au- 
tres , destinés à servir de cachets , était enrichi d'une 
intaille sur onyx, l'une représentant un lion, l'autre 

(1) On a pu remarquer que beaucoup de monuments épigraphî- 
ques où se lisent les noms de diyînités topiques ont été découverts 
dans des lieux oà il y a des sources minérales. 

(2) Spon, Miscellan, erud. antiquit, , p. 109; — Muratori , Nov, 
thés,, tom U, MCMLXXXVI, 7, etc. 

(3) Gannegieter , cité par M. Orelli ( tom. I , p. 359 , n. 2062 ) , lit 
ainsi» c'est-ànlire hegionis xx. oeminœ, au lieu de exxc , qui n'offre 
aucun sens. 

(4) Sic. 

(5) Becueil tt antiquités , tom. V, pi. CXIl, p. 313. 



( 209 ) 

chargée des trois lettres initiales q. r. h. Cest aussi à 
Amiens , ou tout près de cette ville , qu'on découvrit 
une figurine en bronze , dessinée et décrite dans la col- 
lection de Grivaud de la Vincelle (1). Enfin, la ban- 
lieue d'Amiens a restitué aussi à l'archéologie la plus 
curieuse de toutes les représentations priapiques con- 
nues jusqu'à ce jour, laquelle fut trouvée dans un tom- 
beau avec d'autres objets aussi en bronze, des poteries, 
un vase de verre, etc. , et sauvée de la destruction par 
le chapitre d'Amiens, qui fit l'acquisition de toutes ces 
antiquités. Je ne m'arrêterai point sur ce monument 
singulier de la licence des mœurs païennes : j'aime 
mieux renvoyer mes lecteurs au texte de l'ouvrage de 
Grivaud , et aux planches qui représentent, sous tous 
ses aspects, ce bronze remarquable (2). 



STÀBATIO. 



Cette station est marquée sur la Carte de Peutinger 
entre Brigantio , Bnw[içon , et Durotincum, le Villard 
d'Arène (3). D'Anville la reconnaît à Monestier (4), et 
M. Walckenaer, assez près de là , auxFontenils(5). Or, 
Monestier a des eaux thermales d'une température assez 
élevée^6). On peut donc présumer qu'elles ne furent pas 

(1) Reetteil de monuments antiqws, tom. II, p. 69 pi. VIII, 1 et 2. 

(2) Op. laud. , tom. II, pp. 86—89, pi. X, 1—5, XI, ». 

(3) Segm. II, b. 

(4) Notice de la Gaule , pv»613* 

(5) Géographie des Gaules , tom. III , p. 43. 

(6) Pâtissier , Manuetdes eaux minérales , p. 446. 

14 



( 210 ) 

ignorées des Romains, et qu'elles servirent piusd'uile fois 
à délasser, de leurs fatigues, les voyageurs qui pas- 
saient le sommet des Alpes Ck)ttiennes que nous appelons 
le Mont-Genèvre , pour descendre ensuite à Culàra, 
Grenoble, ou à Vigenna, ou Vienna^ Vienne, fignore 
toutefois si cette conjecture, au moins fort vraisemblable, 
peut-être conftPffîée par quelque monument romain re- 
trouvé sur les lieux mêmes ; je sais seulement qu'on en 
a découvert sur divers points des environs, notam- 
ment une inscription à Briançon, élevée à Salonin par les 
citoyens notables de cette ville, ordo. vKiGantinus (1), 



svim. 

Je soupçonne que ce nom n'est pas complet , et qu'il 
pourrait avoir quelque rapport avec celui de la déesse 
Solimara mentionné dans un article précédent (2), et 
avec celui du vicus de Solimariaca que nous connais- 
sons ailleurs dans la Gaule romaine (3) ; d'Ahville parait 
ravoir regardé comme Faccusatif de Sulis, et c'est sous 
cette forme nominative qu'il le reproduit (4). Quoi qu'il 
en soit, on le trouve inscrit sur la Carte de Peutin^ 

(1) Orelli , Inscript, lai. sel. , tom. I , p. 228 , n. it)l2. 

(2) Sup. p. 169. 

(3) L'Itinéraire d'Àntonin (éd. Wesseling, p. 385) le place 
comme station inteiinédiaire entre Mosa et Tullum : on croit (pie 
c'est Soulosse , où Ton a troayé cette inscription (Muratori , tome II , 

HLXXXII, 2) : lOYI. Op[tIBI0,HAXIM0] Il YICÀNI. SOLIMARICENSBSllFÂ- 
CIENDYM. CYRÀYERYNTllM. ED. EX.' YOTa. GNATYS || ÂTBGNIÀ. V.F. ET. 

SBYERYS||SILYANI. LIBBRTYS. 

(4) Notice de la Gaule, p. 622. 



ger (l)x chez le peuple des Veneii, à ce qu'il parait. 11 
ne saurait être déplacé ici, si Ton doit admettre l'opi* 
nion de M. Walckenaer, qui retrouve Femplacement 
de cette station romaine à Hennebon (2). Ce lieu du 
Morbihan possède, en effet, des eaux minérales (S); 
mais j'ignore complètement si l'on y à reconnu quel- 
ques restes d'antiquités romaines. 



TVLLVM. 

Les Leuciy peuple de la Gaule Belgique, nommé déjà 
par César (4) , et souvent depuis par bien d'autres au- 
teurs (5) , avaient deux villes principales , au rapport 
de Ptolemée , Tullum et Nasium (6). Celle-ci , dont on 
reconnaît à Naix moderne l'emplacement, comme le 
nom, est célèbre chez les antiquaires pour le grand 
nombre de monuments romains qu'on y a retrouvés, 
notamment plusieurs cachets de médecins oculistes (7)^ 
La première , mentionnée aussi dans l'Itinéraire d'An* 

(1) Segm. I , a. 

(2) Géographie d^ Crauhs, tom. IH, p. 58. 

(3) Pâtissier , Manuel des eaux minérales , p. 5£|7* 
l^) De bel, GalL 1,^0. 

(5) Strabon> Rer, Geogr. IV, 193 ; edit. Àlmeloy., p. 295 ;— Plin. , 
Nat. hist.iy, 17 (31) ; ^Tacit., HiiM, 63 et64;— Ptolem., Geogr. 
11,8(9). 

(6) Loc, laud, 

(7) Tôchon, Dissertation sur l'inscription grecque iaconoc àtkion, 
et sur des pierres antiqiœs qui servaient de cachets aux médecins œu^ 
listes, pp. 69— -71. Sur 30 monuments de cette classe qui étaient 
connus lorsque Tôchon publia son mémoire ( en 1816 ) , 7 ayaient 
été trouvés à Naix. 



( 212 ) 

tonin (1)^ et sur la Carte de Peutinger (i), a quelque 
droit à figurer ici ; car il est bien reconnu qu'elle n'est 
autre que Toul (3), ville fort déchue aujourd'hui, mais 
où l'on connaît des eaux minérales (4) ; et l'on peut pré- 
sumer , avec beaucoup de vraisemblance , que les Ro- 
mains n'eurent garde de les négliger. Je crois me sou- 
venir que plus d'une fois des objets antiques ont été re- 
trouvés à Toul; mais j'ai à regretter de ne pouvoir don- 
ner à ce sujet d'indications plus précises. 



URA. 



Un monument singulier du musée lapidaire de Lyon 
donne lieu à cet article , qui aurait pu être placé dans la 
seconde partie de cet ouvrage , si je m'étais déterminé 
plutôt à en faire mention ; mais j'avais d'abord hésité , 
n'ayant pas la certitude que la source qu'on y voit nom- 
mée fût minérale , et fort entrepris d'ailleurs pour dé- 
terminer, même approximativement, son emplacement 
géographique.. Je serai peut-être plus heureux aujour- 
d'hui par rapport à ce dernier point ; et quant au premier, 
s'il reste quelque doute fondé, j'aurai du moins la 
satisfaction de faire connaître à mes lecteurs un marbre 
antique intéressant , que je regarde comme inédit. 

Ce monument , qui provient du cabinet Artaud , est 

(1) VeU Roman, Itinerar. , cd. Wesselîng. , p. 365 , 385. 

(2) Segm. n,a. 

(3) D'Anville, Notice de la Gaule, p. 662.-VV^alckenaer, Géographie 
des Gaules , tom. I , p. 532. 

{4) Pâtissier, Manuel des eaux minérales, p. 557. 



( 213 ) 

un autel en calcaire blanc sur lequel est représentée une 
figure en toge sacrifiant , c'est-à-dire , faisant une liba- 
tjon, avec la patère qu'elle tient de la main droite. Au- 
dessus de la figure on lit , en caractères d'une exécution 
médiocre , ces deux lignes : 

AVGVS 
LARIBVS 

au-dessouS; ces deux autres lignes sont tracées en carac- 
tères d'un plus mauvais style , ou pour mieux dire , 
plus petits , plus serrés , et presque cursifs : 

CVLTORES. VR4E 
rONTIS 

Nous trouvons sur ce marbre une particularité re- 
marquable par rapport au culte des fontaines , et qu'on 
ne connaissait pas, ce me semble, pour d'autres que pour 
celle que désigne ici le nom d'vRA. C'est le mot cvltores , 
indiquant que les adorateurs de cette source formaient 
un collège, ou ce que nous appellerions aujourd'hui une 
confrérie ; car ici on ne saurait entendre d'une autre 
manière cette expression consacrée , qu'on trouve sou- 
vent ailleurs dans le même sens , bien qu'appliqdée à 
d'autres divinités. Ainsi, diverses inscriptions connues 
font lire : cvltores. iovis (1); cvltores. silvani (2); 

LOCVS. SEPVLTVRAE. CVLTORVM. HERGVLIS. DEFEN80RI8 (5) ; 

MEDiGis. TAYKinensibm cvurombus asclepi. et hy- 

(1) Donati, Novissim, thés,, tom. t, p. 94 , 4. 

(2) Gruter, Inscript, aniiq,, CCXLV, 7. 

(3) Ibid. , CCCXV , 7. 



(214) 

GUB (1) ; cvwreg lAUim vY^corum qoLomee (2) ete« On 
trouve même des associations composées de femmes > 
sous une semblable qualification : cvltricbs. collbgi. 

FTLGINIAE (3), 

Si le culte des fontaines fut géfiéralement adopte par- 
tout dans les religions païennes , ainsi qu'il a été dit 
ailleurs (4) , nous voyons toutefois qu'il eut toujours 
quelque chose de plus marqué , de plus solennel pour 
les divinités bienfaisantes des sources thermales , miiné- 
raies, ou autres dont les eaux pouvaient être de quelque 
manière favorables à la santé : de nombreuses données 
historiques ou archéologiques nous en ont fourni jus- 
qu'ici des preuves assez frappantes. Il est donc assez 
naturel de conjecturer que la fontaine Ura^ divinisée 
dans notre inscription , possédait quelque vertu de ce 
genre, qui lui valut le culte plus spécial, plus assidu 
constaté par la même inscription. 

Mais quelle était cette fontaine à laquelle ce monument 
curieux attache un grand intérêt , et dont le nom ne se 
trouve pas , que je sache , chez les écrivains de l'anti- 
quité ? La provenance de cet autel pouvait seule fournir 
quelque lumière pour répondre h, cette question impor- 
tante ici ; et j'ai, du chercher à m'assurer de toutes les 
circonstances locales qui pouvaient me conduire à la 
reconnaître : j'y ai réussi en partie. Je me suis adressé 
à M. Gommarmônd , conservateur du musée où existe 
aujourd'hui le monument de M. Artaud , soupçonnant 

(1) Maflei , Mus. Veron., CCX , 7. 

(2) Orellî , Inscript, lat. seL, tom. I, p. 316, n. 1669. 

(3) Muralori , Nov. ihes. , tom. I, CLXXXI, 4. 

(4) Sup,, p. tf. 



( 215 ) 

simplement qu'il avait dû être apporté du midi de la 
France , mais espérant que son premier possesseur aurait 
laissé à ce sujet quelque note écrite. Voici ce que me 
répond M. Gommarmond^ après m'avoir assuré que 
j'étais exact dans la description que j'ai donnée du mq* 
nument. « Maintenant sur le lieu de sa découverte , je 
» n'ai point de notes de M. Artaud ; mais je tiens de sa 
» propre bouche qu'il vient de Nimes , et qu'il l'acheta de 
» l'exécuteur des hautes œuvres , auquel il fit de grandes 
9 politesses^ ignorant complètement à qui il avait 

» affaire Je ne puis vous dire , si ce cippe a été dé- 

» couvert à Uzès ou à Nîmes , etc. » 

Il est donc constant , on vient de le voir , que l'autel 
votif du musée de Lyon a été transporté de Nlme^ ; il est ^ 
on ne peut plus probable qu'il a été trouvé dans les en- 
virons de cette ville , au moins dans le département du 
Gard. Or, cette donnée nous met sur la voie pour arriver 
à reconnaître la fontaine désignée sur notre monument. 
Il existe en effet dans ce département un ruisseau qui 
porte aujourd'hui le nom d'Eure, comme la rivière, 
bien éloignée de là, dont l'appellation est devenue celle 
de l'un des départements de l'ancienne Normandie ; et ce 
nom, mentionné par plusieurs modernes, notamment 
par Millin (1), retrace assez littéralement l'antique nom 
diUra. On croit que ses eaux étaient autrefois amenées à 
Nîmes, avec celles de la fontaine d'Airan, par l'aqueduc 
romain dont le Pont-du-Gard était la partie la plus re- 
marquable. Elles n'y arrivent plus aujourd'hui, car 
rinterrupti(m de ce grand aqueduc, rompu ou détruit 

(1) Voyage dans le midi de la France, tom. IV, p. 208. 



( 216 ) 

sur tant de points , a dû nécessairement rendre la liberté 
à ces ondes, captives du grand peuple^ et leur permettre 
de suivre le cours que les pentes naturelles devaient leur 
donner. Voici ce qu!on lit au sujet de ces deux ruisseaux 
dans l'ouvrage qui donne le plus de détails, surlePont- 
du-Gard et sur son ancienne destination : 

« Nous ne pouvons terminer le chapitre relatif à la 
» description du Pont-du-Gard , sans dire un mot de 
» l'immense aqueduc dont il faisait partie , et qui, par- 
» tant du fond de la vallée d'Uzès , allait distribuer aux 
» habitants de Nîmes les eaux des fontaines d'Eure et 
» d'Airan. Ces deux belles sources coulent aujourd'hui 
» dans la vallée d'Uzès , et après avoir alimenté un grand 
9 nombre de moulins et d'usines, elles se jettent dans 
» le Gardon , au-^dessus du pont du Gard, et fournissent 
» en été le plus grand volume des eaux de cette rivière , 
» qui est souvent à sec dans la partie supérieure à 
» l'embouchure des eaux du vallon d'Uzès. Un aqueduc 
» particulier recevait les eaux de chaque source d'Eure 
» et d'Airan , qui se réunissaient bientôt dans le grand 
» aqueduc , dont plusieurs parties considérables existent 
» encore en très bon état , entre Uzès et le village de 
9 Saint-Maximin (1). » 

De tout ce qui précède, il résulte, si je ne me trompe, 
que la provenance du mwument , les données topogra- 
phiques , aussi bien que la conformité presque entière 
des noms , autorisent suffisamment à supposer que la 
fontaine Ura de l'inscription ne peut-être autre que le 
ruisseau d'Eure , et je ne pense pas qu'on puisse se refu- 

(1) Grangent, Durand, et Durant, Description des monuments 
antiques du midi de la France, tom. I, p. 110. 



. ( 217 ) 

ser à admettre cette identité comme à peu près cer- 
taine (1). Quant aux qualit^és de ces eaux^ quoique 
j'ignore ce qu'elles sont aujourd'hui^ le culte indiqué par 
l'autel du musée de Lyon, avec une particularité qui n'est 
pas ordinaire, me porterait à présumer qu'il était fondé 
sur l'opinion qu'on avait alors des vertus de cette fon- 
taine pour la guérison des maladies. Nous avons vu , et 
nous verrons encore dans notre Gaule, des sources qui 
Jurent également honorées ou divinisées à l'époque ro- 
maine pour leurs vertus curatives, et auxquelles les 
modernes ne reconnaissent aucune propriété médici- 
nales , soit que réellement elles n'en aient jamais pos- 
sédé , soit que le temps , ou des circonstances parti- 
culières, qui ne sont pas rares parmi les phénomènes 
physiques , en aient sigulièrement modifié la nature. 

(1) Bimard de la Bâtie (In Murator. iVo^e^. , col. 54.). prétend 
trouTer le nom de TEure dans celui d^yaNiA , qu'on lit dans une. ins- 
cription découyerte à Nîmes, et que j'ai rapportée plus haut (p. 132.) 
Si sa conjecture était fondée , il faudrait que cette fontaine eût eu 
deux noms. 



TROISIEME PARTIE. 



Je suis arrivé au terme de mes recherches sur les 
lieux de notre Gaule qui , avec des noms antiques bien 
reconnus^ possèdent encore de nos jours des eaux miné- 
râles ou thermales. Là devait s'arrêter mon travail^ tel 
qu'il avait été conçu d'abord ; mais je ne tardai pas à 
reconnaître que , réduit à ces limites , il demeurerait 
beaucoup trop incomplet , et qu'il réclamait encore un 
complément indispensable. En effets ces lieux ^ les plus 
intéressants sans doute ^ et à tous égards ^ ne sont pas à 
beaucoup près les seuls en France dont on puisse re- 
garder les sources médicinales comme ayant été connues 
et utilisées dans les siècles antiques. Il en est d'alitres^ 
favorisés par la Providence des mêmes bienfaits , aux- 
quels nous ne connaissons d'autres noms que ceux qu'ils 
prirent au moyen-âge ou dans les temps modernes , et 



( 219 ) 

dans lesquels y cependant j des débris d'antiquités re^ 
trouvés fréquemment, indices assurés d'habitations 
romaines, rendent extrêmement probable l'exploitation 
de leurs eaux minérales sous la domination du grand 
peuple qui vint civiliser notre patrie ; il en est d'autres 
encore, où des ouvrages de construction auprès des 
sources, des inscriptions et divers monuments votife, 
surtout les restes plus ou moins conservés d'un antique 
établissement thermal, donnent à un tel fait la plus 
entière certitude. 

Les lieux qui sont dans de telles conditions forment , 
si je ne me trompe , un nombre bien autrement consi- 
dérable que ceux dont les noms antiques ont pu nous 
être conservés ; et , si l'on avait à leur sujet des indi- 
cations aussi complètes qu'il serait désirable , la classe 
spéciale qu'ils constituent pourrait assurément occuper 
une place fort étendue dans ces recherches. Il est rare, 
en effet , et on l'a souvent observé , que des fouilles 
sérieusement exécutées auprès de sources minérales 
nouvellement reconnues, ou revenant en faveur après 
un long oubli , ne mettent à découvert de nombreux 
vestiges de l'époque romaine échappés aux ravages de ce 
grand destructeur qu'un poète appelait edax rerum (l) , 
et à la barbarie des siècles qui suivirent l'âge romain. 
C'est ici que j'ai lieu de reconnaître surtout combien mon 
travail laissera a désirer. Beaucoup de lieux possédant 
des eaux minérales , les plus intéressants souvent sous 
le rapport archéologiques, sont des villages ou de simples 
hameaux, qui n'ont pas eu d'historiens, qui n'ont guère 

(1) Orid. , mtam. XV , T. 234, 



( 220 ) 

été étudiés que dans un intérêt médical j ou peut-être 
sous les rapports pittoresques et artistiques y s'ils ont la 
bonne fortune d'être fréquentés par des personnes d'un 
monde un peu distingué. Il en est beaucoup aussi dont 
les sources , peu renommées , ne sont connues que des 
habitants du pays , et dont les noms même ne se lisent 
pas sur les tableaux des eaux minérales de France qui 
ont été publiés dans quelques ouvrages (1). J'en ai 
sans doute ignoré plus d'un; sur d'autres, les rensei- 
gnements m'ont fait défaut, et j'ai dû me résigner à de 
nombreux mécomptes , à peu près inévitables. 

Les documents que les livres ont pu me fournir, ou 
que j'ai été assez heureux pour me procurer autrement, 
composeront cette troisième et dernière partie , dans 
laquelle je continuerai à suivre l'ordre alphabétique, en 
l'appliquant d'abord aux départements auxquels appar- 
tiennent les eaux dont j'aurais à parler. Ce sera peut-être 
un moyen de rendre moins fréquentes certaines répéti- 
tions bien difficiles à éviter, et qui, je puis l'assurer, ne 
sont pas moins pénibles à l'auteur qu'à ceux qui le lisent. 
Ici, pour des lieux devenus étrangers à ce qui nous reste 
des écrits de l'antiquité, doivent cesser nécessairement 
et les téndoignages des auteurs anciens , et les questions 
de géographie comparée , qui ont pu attacher aux re- 
cherches précédentes un intérêt spécial pour un certain 
nombre de lecteurs. Peut-être en seront-ils dédommagés 
par l'importance ou la singularité des monuments dé- 
couverts dans quelques-unes de ces localités de notre 
Gaule , qui aujourd'hui ont à peine un nom parmi nous, 

(1) Nolamment dans celui de M. le docteur Pâtissier, que j'ai 
cité souTciit et que je citerai bien des fois encore. 



( 221 ) 

mais qui , à en juger d'après les ruines antiques qu'ils 
conservent encore , occupèrent assurément un rang bien 
plus distingué aux jours glorieux de la splendeur 
romaine. 



AIN. 



Césèriat. — Ce village du Revermont , cheWieu de 
canton dans l'arrondissement de Bourgs est le seul lieu 
du département que j'aie à mentionner, aprè? avoir parlé 
de Belley sous son nom dinùque de Belicensis vicus (\) ; 
mais je ne le fais que par occasion, et parce qu'on a 
voulu donner à ce lieu une importance historique et 
archéologique , à laquelle ses droits sont on ne peut plus 
contestables.il possède des eaux minérales , qui pour- 
raient , dit-on , obtenir une certaine renommée si elles 
étaient patronées par la mode, reine du monde, en 
France, bien plus que l'opinion (2). Mais leur. exploita- 
tion à l'époque romaine ne saurait-être prouvée par des 
médailles, qui sont de tous les monuments antiques 
ceux qui ont le moins d'autorité dans les questions loca- 
les, ayant pu si facilement se déplacer, se disperser, ou 
se perdre. Quant à l'étymologie du nom de Césèriat, 
qu'on a voulu dériver de celui du conquérant des Gaules, 
c'est une conjecture gratuite , comme tant d'autres de 
même nature ; et je crois qu'il n'en est pas autrement du 

(1) Sup,, p. 176. 

(2) Statistique de l^Ain, p. 52. 



( 222 ) 

Mont-Juli , et du camp romain , dont on a cru y recon- 
naître les traces (1). 



ALPES (Basses-). 



Manosque. — Ce lieu peut-être considéré comme une 
ville romaine , bien qu'il ne soit pas aussi riche en monu- 
ments que d'autres lieux de ces contrées. On y a trouvé 
des médailles et des objets antiques de petites dimen- 
sions. Je puis citer aussi un sarcophage chrétien dans le 
même genre que ceux de Rome et d'Arles. Il représente 
les Apôtres^ les jeunes hébreux dans la fournaise^ Adam 
et Eve auprès de l'arbre autour duquel s'enroule le scr^ 
peut (2). Ce monument^ qui appartient aux premiers 
siècles du christianisme^ est assez ancien pour qu'on 
puisse le rattacher à une époque vraiment romaine , et 
il tend ainsi à prouver l'antiquité de ce lieu. Je crois 
donc qu'on peut avec quelque vraisemblance faire re- 
monter . à l'âge romain la connaissance des eaux miné- 
rales que possède Manosque (3) • ■ ' 

(1) On peut Yoîr Delandine» Dissertations historiques sur deranti^ 
quités de Bresse et de Lyon , pp. 5 — 59, bien que ce soît un paayre 
ourrage d'un homme qui n'était nullement antiquaire. 

(2) Henry, Recherches sur la géographie et les antiquiitis deê 
i^ci#«M~^(pM, pp. 146 — 150. 

(3) Pâtissier, Manuel des eauip minérales , p. 553. 



( 223 ) 



ARDÉCHE. 



Ce départeinentestricheensoureesminérales(l)^ dont 
les plus célèbres sont celles de Vais y auprès desquelles 
on ne trouve, me dit-on, aucun objet d'antiquité. Après 
ce que j*ai dit de Viviers sous le nom Sklha (2), les lieux 
suivants sont les seuls sur lesquels je puisse donner 
quelques indications archéologiques. 

Bourg-Saint-Andéol.-^ Je vois cette petite ville citée 
comme possédant des sources minérales (3) ; et quoique 
sur les lieux on les connaisse à peine, et qu'on n'en fasse 
aucun usage sous le rapport médical, je crois pouvoir les 
mentionner ici, parce que Saint-Andéol a été incontes- 
tablement une habitation romaine. On y voit de nos jours 
quelques monuments antiques , et l'on y a trouvé des 
médailles et d'autres débris. Outre le beau sarcophage, 
primitivement païen comme l'atteste l'inscription où 
fut déposé le corps du saint martyr qui donna son nom 
à ce lieu (4), il conserve encore cette autre inscription 
funéraire qui mérite d'être citée pour une expression peu 
commune (5) : 

(i) Pâtissier , J|fanu«l de* eatio; tntn^alef, pp. 5IS3 , 554. 

(2) 5Mp. p. 145. 

(3) Pâtissier, Jlfanue/ ({et wxax minérciks , p. 553. 

(4) MilUn , Voyage dans le midi de la France, tom. II » pp. 120— 
122,pl.XXVin,4et5. 

(5) Jbid. , p. 123. 



( 224 ) 

IFÀBIVS. ZOILYS. SIBI. ET 
CONSVÀDVLLIÀE. PRI[MITI] 
VÀE. MÀRITÀE. CÀRIS[SI]M ^ ^ 
. . . HÀBEREMVS. FECIT 

On y voit aussi un bas-relief mithriaque , représentant 
les figures ordinaires (1) ; au-dessous ^ sur une tessère, 
est gravée l'inscription suivante, fort peu lisible aujour- 
d'hui , mais qtie Millin rétablit d'après une note du 
savant Seguier (2) : 

D. s. INVf. MITHRÀE. MÀXS 

MÀNNI. F.VIS.MON.ET 
T. MVRSrVS. MEM. D. S. P. P. 



Celles, ou Selles. — Ce village, de la commune 
de Rampon , est à peine distant de 2 kilomètres de la 
Voulte, lieu célèbre pour ses établissements métallur- 
giques y et dont l'église fut élevée , dit-on , sur un temple 
antique en grande vénération au temps du paganisme (3) . 
Celles a des sources minérales qui prennent faveur 
depuis quelques années , mais qui étaient à peine con- 
nues précédemment. Cette indifférence, toutefois, n'a- 
vait pas toujours existé, et il parait certain que les 

(1) Millîn , Voyage dans le midi de la France , p. 116—118 , 
pi. XXVIII , 2. 

(2) Ibid. , p. 117. 

(3) On cite en preaye.une ouyertare qa'on voyait il n'y a pas en- 
core fort long-temps dans les cayes du château^ et qui était destinée, 
disait-on , à receyoir les os et les entrailles des yictimes immolées 
dans ce temple. Il parait certain , du moins , qu'on y a trouyé une 
grande quantité d'ossements , les uns exfoliés en partie , les autres 
à demi-pétriGés , et tous appartenant à l'espèce boyine. 



( 225 )' 

Romains avaient su apprécier les eaux de ces (Sources ^ 
qui sont aujourd'hui au nombre de six (1) , et qu'ils y 
avaient formé un établissement. Des travaux entrepris 
il y a peu de temps, pour déblayer Tune .d'elles, ont fourni 
la preuve matérielle de ce fait; car, au fond de la vallée, 
sous des atterrissements formés successivement, durant 
un laps de temps considérable, on a découvert des 
restes assez importants de constructions antiques , ruines 
des ouvrages romains dont ces sources furent jadis 
entourées. 

Desaignes.- Cette commune du canton delaMastre, qui 
fut, dit-on, une ville de quelque importance au moyen- 
âge , possède , avec des eaux minérales (2) , des monu- 
ments romains qui attestent leur antique exploitation , 
et notamment les ruines d'un temple qu'on donne con> 
munément à Diane , et que d'autres tout aussi sûrs de 
leur fait revendiquent pour Hercule. Je laisse les savants 
du pays disputer sur ce point : je me contente de cons- 
tater une donnée archéologique intéressante, et qui 
pourrait suffire pour autoriser à croire que ces eauxî 
d'une réputation peu brillante aujourd'hui, furent néan- 
moins connues et fréquentées au temps de la domination 
des Romains dans les Gaules. Mais la chose est mise hors 
de doute par de nouvelles découvertes d'antiquités, qui 
orit fait reconnaître les traces bien marquées d'un éta- 
blissement de bains d'origine romaine. 

J'aurais désiré plus de détails sur ces monuments 
antiques , et sur les petits objets que les fouilles ont pu 

(1) Pâtissier/ ManueH des eaum minérales ', p. 341. 

(2) Ibid. , p. 553. 

15 



( 226 ) 

mettre à découvert; j'aurais aimé surtout à pouvoir 
donner à mes lecteurs quelques inscriptions : malheu- 
reusement; les indications que j'ai pu obtenir ne s'éten- 
dent point au delà de ce que je viens de rapporter. 



AtDE. 



Aleth. — S'il est certain, ainsi qu'on me le dit, ailleurs 
que sur le^ lieux il est vrai , qu'pn ait trouvé en divers 
temps des objets antiques dans cette ville, dont les 
sources minérales et thermales ne sont pas sans répu- 
tation (1), son nom n'occupera pas ici une place usur- 
pée. Mais je ne crois pas que ses antiquités soient fort 
importantes ; et je ne saurais en rien dire de plus. 

Retînes-les-Bains. — Les eaux qui portent ce nom sont 
toute la vie du village qui les possède ; elles sont au- 
jourd'hui en grande faveur (2). 11 est vraisemblable 
aussi qu'elles seules, autrefois, avaient attiré dans cette 
gorge , d'un aspect fort triste , les conquérants dont les 
pas y ont laissé des empreintes marquées. 

Les monuments romains qu'on y retrouve le plus 
fréquemment, quand le sol est soulevé par les instru- 
ments aratoires, sont quelques médailles consulaires 
et un grand nombre d'impériales, des fragments de 
tuiles, des amphores, des débris de poteries diver- 

(1) Pâtissier , Manuel des eaux minéralei , p. 3^6. 

(2) Ibid., pp. 319 et 551. 



( 227 ) 

ses (1), etc. On m'indique^ dans une classe d'objets plus 
intéressants, deux statuettes représentant Jupiter, et 
une autre de Mercure. Cest là aussi que furent décou- 
vertes les belles roues en bronze, restes précieux d'un 
char antique, qui sont conservées au musée de Tou- 
louse (2) ; plus tard , on y a retrouvé un timon qui doit 
avoir appartenu au même char. Sur divers points du 
village, on a reconnu des restes de constructions évi- 
demment romaines qui paraissent avoir fait partie de 
maisons privées (3). Enfin, on voyait autrefois, à 
Rennes, une inscription qui n'y existe plus aujourd'hui, 
mais dont M. Gros , membre de la société des Anti- 
quaires du midi de la France , m'a communiqué cette 
copie , qu'il me dit avoir puisée à de bonnes sources. 

(1) Parmi les objets en- terre cuite, on peut remarquer uue an- 
téfixe, et un fragment de lampe dont M. le docteur Louis Pech , de 
Narbonne , a bien voulu m'enyojer le dessin. Sur ce joli débrifi 
est figuré Hercule enfant^ étouffant deux serpents dans ses mains ; 
cet antiquaire croit y voir un symbole de la yertu des eaux mi- 
nérales , pensée ingénieuse sans doute , maisquimeparaitdémentie 
par la fréquente reproduction de ce même type aiillenrs, notamment 
sur des médailles de Crotone, d'Heraclée, de Thèbes, etc. 

(2) Mém. de l'acad, de Toulouse, tom. II , p. 180 > pi* V ; — Millin , 
Voyage dans le midi de la France, tom. IV, p. 444, pi. LXXV, 4. 

(3) c( J'ai constaté moi-même , en 1841 , sur la rire gancbe 
» du torrent > me dit M. Louis Pech, remplacement d'une habi- 
)) tation romaine , qu'une énorme table de rochers , détachée de la 
» montagne , avait autrefois écrasée , et qu'en glissant plus bas , 
» elle venait alors de montrer comme pulvérisée. Là , parmi des 
» cendres, des charbons, des briques, et du verre pilé ; parmi des osse- 
» mentsdelapins et de volailles, et au milieu d'un grand tas d'huitres 
» de la Méditerranée , j'ai ramassé beaucoup de ces longs clous, de 
» fabrique incontestablement antique , et un assez considérable 
» fragment de vitre épaisse et verdàtre, pareil à ceux qu'on a 
» retirés des fouilles de Pompei. » 




Mais ce qui oiïi'e le plus d'intérêt ici, c'est l'aïuiquc 
établissement tliernml, dont les restes ont été reconnus 
en ce lieu avec la plus entière certitude. On m'avait 
parlé avec tant d'exagération de ces thermes romains, 
de leur conservation parfaite, de leur magnificence, etc., 
que la réalité est devenue pour moi un désappointement. 
Ce qui existe aujourd'hui à Rennes est plus que sulTisant 
comme document historique , comme témoignage irré- 
cusable de l'antique exploitation de ses sources , mais 
n'est pas, à beaucoup près, tout ce qui pourrait flat- 
ter l'avide curiosité des archéologues. La partie la plus 
considérable de ces bains d'un autre âge est enfouie , 
assure-t-on , sous les bâtiments modernes : il en reste 
de visible seulement une grande piscine quadrilatèrf, 
située tout près et au-dessus du bain dit de la Reine, 
et une muraille qui longe la rivière , destinée , selon 
toute apparence , à soutenir un aqueduc, dont on re- 
connaît encore les vestiges. Ce bassin paraît avoir été 
revêtu en marbre blanc : on y voyait encore quelques 
dalles au commencement du siècle dernier,- et plus nj- 
ccmment , on en a retrouvé encore des fragments ornés 
de moulures. 

A cela se bornent les renseignements que je possède 
sur les antiques bains de Rennes : j'en suis redevable 
à MM. Gros et Pech que j'ai déjà nommés, ainsi qu'à 
M. le docteur Cazaintres , inspecteur des eaux , et j'ai 
Heu de croire que rien d'essentiel n'a été omis. 



( 229 ) 



AVEYRÔN. 



Sylvanès.— On me dit que divers objets antiques ont 
été trouvés en ce lieu ; mais je ne consigne point ce fait, 
comme en étant parfaitement assuré. S'il était constant 
que Ton dût regarder Sylvanè& comme ayant été une 
habitation romaine, non-seulement on serait fondé à 
croire que ses eaux furent connues dans les temps 
antiques ; mais on pourrait conjecturer encore , sans 
invraisemblance, que le nom de ce lieu dériverait de 
celui du dieu Sylvain, que nous avons vu ailleurs honoré 
spécialement auprès de sources minérales (1). 



CALVADOS. 



Les noms d'un assez grand nombre de lieux de ce 
département figui*ent dans les tableaux des eaux miné- 
rales delà France (2). Les villes deBayeuxetdeLisieux 
occupent une place dans la seconde partie de cet ou- 
vrage, sous leurs antiques noms d'Augustodurus et de 
Noviomagus (3) ; mais je manque d'indications archéo- 
logiques qui puissent m'autoriser à placer ici aucun des 
autres noms qui composent cette liste. Les seules eaux 
minérales que je puisse indiquer encore comme ayant 

(1) Sup„ pp. 111, 112. 

(2) Pâtissier , Tableau des eaux f^inérales , p. âo4. 
{3) Sup., pp. 171 , 200. 



( 230 ) 

été utilisées dans l'àgc romain, existent dans une localité 
qui n'est point ciiée sous ce rapport, et dont je ne con- 
nais l'existence que par une publication spéciale sur 
ses antiquités (1). 

ViTON. — C'est un village qui touche à la [iciiie ville de 
Falaise , à laquelle il est antérieur de beaucoup : Falaise 
devint la ville normande, Vaton avait éié vraisembla- 
blement la ville romaine. Des débris de tuiles à robord, 
de briques, de poteries diverses, annonçaient dans ces 
quartiers l'existence antique d'un lieu considérable , et 
faisaient désirer des fouilles, do nt le réstdtat semblait 
devoir être des découvertes intéressantes. Elles furent 
entreprises au commencement de 1854, dirigées avec 
intelligence, et les espérances que l'on avait conçues ne 
furent pas trompées. 

Apres avoir découvert successivement sur plusieurs 
points des vestiges divers de constructions, appartenant 
toutes à l'âge romain , on arriva à reconnaître en ce 
lieu de la manière la plus certaine , l'ensemble et les 
détails d'une antique villa , telle que nous connaissons 
les maisons romaines , soit d'après les descriptions que 
les auteurs anciens nous ont laissées, soit d'après les 
données plus palpables que nous fournissent les décou- 
vertes de Pompeï. Toutes ses parties étaient encore 
parfaitement indiquées ; son portique soutenu par des 
colonnes, son vestibule, de vastes salles communiquant 
entr'clles , les murs d'eneeinie d'un jardin , autaniqu'on 
peut le présumer, et tout ce qui constitue l'établisse- 

(I) Lstlres lur les antiquiléi romaina trouvées à Vaton en 1834. 
rtr. pur M. Fréd. Galeron , Falaise 1S3i. În-S". 



( 2,31 ) 

meHt de bains assez considérables é Les petits objets 
exhumés de ces ruines n'étaient pas fort importants ; 
c'étaient quelques médailles impériales , de nombreux 
fragments en fer ^ entr'autres une lame de poignard /des 
débris en verre, des poteries ornées, mais brisées 
malheureusement , un ornement de bronze , détaché 9; 
suivant toute apparence, de quelque lambris, un sceau 
singulier du BaS-Empire , ayant pour type une tête de. 
loup, avec cette légende gravée à Fentour : cezàrvs. an. ' 
Yi. xxn. 

« Cette maison , dit M. Galeron , n'offrait point un 
» luxe extraordinaire , puisque l'on n'y retrouve ni re- 
)» vêtement de marbre, ni mosaïques, ni débris de 
» vases riches et recherchés ; mais qe n'était pas non plus 
» une habitation commune , comme on peut le recon- 
» naître à son développement de plus de 100 pied$ide 
» façade , à son large péristyle orné d'une colonade , à 
» ses doubles appartements , à sa belle salle de bains, à 
» ses enduits si bien conservés encore, à ses restes de, 
» délicates peintures, à son parc bien enclos (1). » Ce qui 
attache un intérêt spécial à cette découverte, et lui donne 
ici une certaine importance, c'est que, non-seulemejit^ 
il existe dans le vallon des eaux très-belles et très-abon- 
dantes , mais qu'une source minérale coule à quelques 
pas de la maison romaine (2). On peut présumer avec 
une grande vraisemblance que ses eaux furent employées . 
à ces bains antiques , soit qu'on ne reconnaisse en ce 
lieu qu'une villa privée, soit qu'on veuille y voir un 

(1) Op. laud, , p. 8. 
(2) /6td. , p. 9. 



( 232 ) 
éiablissement ouvert au public par s|iécuiaiioii , re qui 
est fort souienablc. 

M. de Caumonime parle de plusieurs i')7/(P semblables 
découveries en Normandie, dont quelque- unes ont 
renda à la lumière des mosaïques , des débris de dé- 
corations en marbre, et d'autres indicesd'une plus grande 
magnificence; j'aurais eu lieu de les mentionner en 
particulier, sielles avaient offert, comme celle de Vaton, 
la circonstance , essentielle ici , de l'exisience de sources 
minérales dans leurs alentours (1). 



Ghaudeb-Aigues. — Les sources thermales du village 
qui poric ce nom sont bien certainement les plus célè- 
bres, entre toutes les eaiL\ minérales que ce département 
possède en fort grand nombre ; et si l'on voidait arguer 
rigoureusemetu et d'une manière exclusive du sens de 
ce nom, il pourrait justifier en quelque sorte les opi- 
nions des savants qui ont voulu y reconnaître , ou les 
Aquœ Calidœ de la Carte de Peutinger, ou les Catenles 
Agtiœ de saint Sidoine Apollinaire, ou les unes et les 
autres , en identifiant ces deux noms anciens à signi- 
fications tout-à-fail équivalentes. 

J'ai répondu sufûsammeni, je crois, à ceux qui 
soutiennent encore ces déterminations (géographiques. 



(1) M. Gflleron (ibid.J 
gcaëraux , des dccouvcrlp 



( 233 ) 

Mais si les Aquœ Calidœ doivent être reconnues à Vi- 
chy (1), et les Calentes Aquœ, au Mont-d'Or (2) , on n'en 
est pas moins fondé d'ailleurs à présumer que les sour- 
ces de Chaudes-Aiguës ne furent ni inconnues , ni né- 
gligées au temps de la domination romaine. On peut en 
trouver un indice dans les débris d'antiquités qui ont 
été découverts en ce lieu. Il est vrai que, suivant des 
ohservateurs éclairés, ces débris sont peu considérables 
et peu nombreux : ils ne consistent guère , disent-ils , 
qu'en restes de tuiles et de briques , en un petit nombre 
de médailles , en quelques petits objets ou fragments de 
nul intérêt. Mais ces données sont bien suffisantes pour 
constater à Chaudes-Aiguës une ancienne habitation 
romaine ; et cela posé , il serait peu vraisemblable que 
les conquérants eussent mis en oubli des eaux remar- 
quables parune des qualités qu'ils semblent avoir le plus 
appréciées. Elles sont en effet, si je ne'me trompe, les 
plus élevées par leur température des eaux que la France 
connaît aujourd'hui , et du nombre de celles dont Pline 
disait, obsonia quoque percoquunt (3); c'est ce que savent 
fort bien les habitants du village, qui ont soin de les em- 
ployer à une foule d'usages industriels et domestiques (4). 
Il y aurait plus , et si l'on s'en rapporte à un auteur 
qui a écrit sur ce département , et qui semble avoir dû 
le connaître , ce lieu aurait conservé des vestiges re- 
connaissables d'un établissement thermal d'origine ro- 
maine. « Dès qu'on fouille à Chaudes-Aiguës , dit- il , 

(1) Sup,, p. 32 , seq. 

(2) Sup,, p. 101, seq. 

(3) NaU hUt, , XXXI , 2. 

(4) Je lis dans le Manuel des eaux minérales de M. Pâtissier 



(23*) 
» un reiicoiurc à une petite prorondeiir des ruines roti- 
" sidérables, des piscines soni enfouies sous la place 
" publique , et on y a trouvé des voùies souterraines , 
" des baignoires et des cabinets d'étuvcs. Ces ruines, 
" qui portent toutes un caractère romain , viennent à 
Il l'appui d'une tradition populaire, qui voudrait que, 
» peu de temps après la conquête des Gaules , une colo- 
» nie romaine se fut établie dans ces lieux (1). » 11 n'est 
pas nécessaire de faire obser\"er combien peu de valeur 
ont de semblables iraditious, lorsque rien ne les con- 
lirmc d'une manière plus positive; et celle dont il est 
question ici à pour objet un fait si important qu'il devrait 
avoir laissé quelques traces dans l'histoire. Quant aux 
thermes mentionnés par l'écrivain que j'ai cité, je dois 
dire qu'il parait être le seul qui en parle ; ce qui n'est 
point toutefois un motif suriisani pour faire rejeter son 
témoignage. 

( p. 437). «Od se sert des eaux de la gracile source du Par pour 
Il tremper la sonpe , pour Ikire cuire les œufs , cl pour préparer les 
Il alimenls sans combustible ; elles dégraîisent parrnitcmeni la 
» laine, à laquelle elles donnent une blancheur éclalaolej mais 
» elles sont principalement employées du i" novembre à la Bn 
i> d'avril, à chauffer, au mojen de eanaui înjfénïcu sèment prati- 
i> qnés , tes rez-de-chnussées îles maisoui appelées maison eaoudo . 
» maisons chaudes..,. M. Uerthier fait remarquer, arec raison , 
i> ijue les eaui thermales de Chaudes-Algues lienncnt lieu à ses 
Il habitants d'une Torét de cbéncs qui aurait au moins cinq cents 
•> quarante hectares. Ces eaui sont d'aulnnt plus précieuses que le 
" combustible est très cher dans le pays. M. Felgérc les a ntiliséea 
Il pour produire l'incubation BrliRcielle , et ses résultais ont été si 
Il heureux que la Société d'encouragement lui a décerné une mé- 
» daille. 

(t) £d. I.aforce, Eiiaiiur la slatutîqueda département du Canlal, 

p.«M; ■ ■ ■. .. I V 



( 235 ) 

Ides, ou Ydes. — Cest encore un de ces lieux peu 
renommés aujourd'hui pour leurs eaux minérales (1), 
où nous voyons toutefois que les dominateurs de la Gaulé 
n'eurent garde de laisser i^utile ce bienfait de la nature. 
Un membre de la société des antiquaires de France, 
M. Déribier, après avoir traité une première fois de 
quelques antiquités trouvées en ce lieu et dans les en- 
virons (2) , nous ai fait connaître dans une seconde notice 
des découvertes plus importantes qu'il y a faites, et qui 
se rattachent plus essentiellemeat à mes recherches. Je 
le citerai textuellement. 

« Quoique j'aie déjà donné dans un premier rapport 
» divers détails sur les habitations romaines du pays, 
» et sur leur construction , les découvertes nouvellement 
» faites m'ont fourni d'autres preuves qui me persuade 
» de plus en plus que les Romains ont eu, dans ces 
» cantons, sous les premiers empereurs, des établis- 
» sements en grand nombre et importan ts , vu la solidité 
» des murs et ciments. Les vestiges trouvés à Ides dans 
» les premières fouilles le prouvent. Je les fii conti- 
» nuées , et le résultat de mon travail est indiqué à la 
» planche iv, fîg. 1. 

» Tout me porte à croire que ce bâtiment , qui se liait 
» avec plusieurs autres , dont les vestiges se découvrent 

(1) Pâtissier , Manuel des eaux minérales , p. 5I$4. 

(2) Mém, de la société des antiquaires de France , tom. V, pp. 309- 
326. Les principaux objets décrits dans ce trayail , comme troayés 
à Ides même , étaient , outre lés briques et tuiles romaines , quelques 
médailles impériales, des poteries^ dont quelques fragments étaient 
dorés, des canaux, qui doivent se rattacher aux découyertes posté- 
rieures, etc. 



( 256 ) 
" ilniis le hoiirg d'Iiics, c'taitdestiiu'aux bains: l°paivc 
" que la rue de t'y Bagneyras, ou des Baignoires, esi 
•> un chemin au midi du bourg, qui conduit à ces rui- 
)i tics, et aux prés voisins, du même nom ; 2° parles 
i> espèces de fourneaux que j'y ai observés, point f, il 

> parait qu'un plancher à ciment de 20 centimètres 

> d'épaisseur, supporté à la hauteur de deux pïcds ou 
B 70 centimètres, par des piles en briques carrées, à la 
B distance d'un pied ou 33 centimètres l'une de l'autre, 
» était chauffé par dessous, et donnait une chaleur douce 
B qui se communiquait à toutl'appartement. J'ai extrait 
• des tables fort larges de ce plancher, d'une solidité 
« extraordinaire. Les piles étaient encore droites , por- 
» tant sur un [Kiyé à ciment , tout couvert d'une terre 
» noire, onctueuse, mais sans aucun vestige de char- 
. bon (1). . 

Un peu plus loin l'auteiu-, après avoir jugé sur ces in- 
dices que ce bâtiment devait être fort vaste, mentionne 
une découverte semblable « au lieu des Penlons, près 
» Cousan (Vebrci) » et entre à ce sujet dans quelques 
détails de même nature (2). 



Vic-en-Cauladès. — L'auteur que je viens de citer écri- 
vait dans un autre ouvrage en 1 824 : « Tout ie monde 
connaît les eaiLx minérales de Vie , très-estimées et 

B agréables à boire avec le vin Il semlile qu'elles 

» étaient coimues des Romains, puisqu'on 1660 on y 



(1) AfémoiVei di la locici 
pp. 160, 161. 

[2)ftirf..pp. ICI, 162. 






■s lie Franee, lom. VIII , 



( 237 ) 

» découvrit dix-huit médailles, et des vestiges d'habi- 
» tations romaines (1) ». Je lis ailleurs que les fontaines 
de Vie ayant été fouillées et reconstruites eri 1829 , ces 
travaux amenèrent de nouvelles découvertes de médailles 
impériales (2). Enfin, après avoir mentionné comme 
M. Déribier des médailles d'Auguste, de Claude, de 
Vespasien , de Dioclétien et de Maximien , ainsi que des 
ruines importantes trouvées lorsque Ton découvrit les 
eaux dans le seizième siècle (mieux peut-être dans le 
dix-septième), un ouvrage publié en 1836 semble indi- 
quer d'une manière plus positive Texistence en ce lieu 
d'un antique établissement thermal (3). 



COTE-D'OR. 



Saint-Seine. — Une découverte dés plus importantes 
et qui n'est pas étrangère à l'objet de cet ouvrage, a 
été faite récemment en ce lieu, oii sont, comme chacun 
sait, les sources du grand fleuve qui, de l'intérieur de la 
Bourgogne , va arroser la capitale de la France , avant de 
se perdre, au nord de notre patrie, dans l'immense Océan. 
JTen trouveàl'instantla première notion dans un excellent 
recueil périodique ; et, ne pouvant avoir encore le rap- 
port plus étendu dont il fait mention , je ne saurais rien 
faire de mieux que de transcrire l'article bien court qu'il 
donne à ce sujet. 

(i) Dictionnaire statistique du dépt. du Cantal, au mot Vie, p. 388. 

(2) Pâtissier y Manuel des eaux minérales, p. 301. 

(3) Laforce, Essai sur la statistique du dépt. du Cantal, p. 100. 



( 258 ) 

« Les rcsies (l'un monuincnlgalio-roniaiii ont été mis 
" à découvert, près des sources de la Seine, sur la 
Il lisière du bois communal de Saint-Seine ; les fouilles 
n commencées en 183G, ont été continuées jusqu'en 
" 1 843, sous la direciion de la commission desanlîqui- 
» tés delaCôte-d'Or. D'après le rapport deM. H. BaudOl, 
" président de la commission, ce temple aurait été élevé 
» au fleuve de la Seine, dont les eaux passaient pour 
u avoir la propriété de guérir certaines maladies (i), 
» opinion qui parait démontrée par la nature desobjets 
« trouvés au milieu des ruines. Plusieurs ex vota, 
« découpés dans des fouilles de bronze et d'argent, et 
" représentant, d'une manière grossière, différentes 
" parties du corps afTectées de maladies, furent trouvés 
>i dans un vase de terre. Le plan des fondations mises 
" à jour offre un quadrilatère de 57 mètres de longueur, 
1 sur une largeur encore indéterminée. La quantité 
» d'objets d'ornement, la dimension des fragments de 
" statues et de colonnes, leur perfection de travail peu- 
» vent donner une idée de la décoration somptueuse de 
l'édifice. Au milieu du temple de la Seine étaitunesalle 
» contenanLia source sacrée, qui s'écoulait parune rigole 
■) taillée dans la pierre et recouverte de dalles. A droite 
" de la souree, tarie aujourd'hui, s'élevaient quatre 
1- colonnes d'ordre dorique, dont on a retrouvé des frag- 
u ments et les bases encore à leur place. Deux marches 
" donnaient entrée à une chapelle, où probablement se 

(1] Je ne tronve point cette opinion énoncée chex les auteurs 
anciens qui ont parié de la Sequana ; mais, comnie le remarque 
fort bien l'auteur de l'article que je cite, elle parait être le résulta I 
de la découverte dont il rend compte. 



( 259 ) 

» trouvait la statue de la Seine , assise en face de la source 
» principale. Quant à Page du monument, M. Baudot, 
» se fondant principalement sur la pureté des chapiteaux 
» et des autres fragments retrouvés , croit pouvoir en 
» faire remonter la fondation au règne d'Auguste. Pour 
» fixer répoque de sa destruction , il fait remarquer que 
» la plus récente des médailles trouvées dans les fouilles 
» est de Magnus Maximus , mort Tan 388 de notre ère , 
» époque du triomphe de la religion chétienne dans la 
» Gaule, et d'où il conclut que le temple de la Seine 
» subit le sort de presque tous les monuments du culte 
» païen , renversés sur l'ordre des évèques par les néo- 
» phytes (1). » , 



CREUSE. 



EvAux. — Cette petite ville, dont les eaux, depuis la 
création récente d'un établissement thermal bien orga- 
nisé, obtiennent une faveur qui ne peut qu'aller en 
croissant (2), aurait droit ici à une place distinguée 
pour son importance archéologique, et je voudrais bien 
ne rien omettre d'intéressant en ce qui concerne ce qui 
lui est resté de monuments antiques. Mes démarches 
pour obtenir des renseignements à cet égard n'ont pas 
eu tout le succès que j'avais Cru pouvoir espérer ; et 
mon indigence sur ce point serait extrême, si la bonté 

(1) Revtie archéologique IIF année , p. 192. 

(2) Pâtissier, Hïanuel des eaux minérales, pp. â^S , 552. 



( 240 ) 

d'une personne qui habile ces contrées, sans s'occuper 
d'arcliéologie , ne ni'eûl procurô quelques indicaiions , 
que je suis licureu\ de pouvoir ajouter à ce que j'ai glanc^ 
ailleurs. 

Je ne dirai rien de certaines étymologies , supposées 
au nom d'Evaux par ({uelques personnes trop Gdèlcs 
au culte de celte malencontreuse langue des Celtes, qu'il 
leur plaisait de croire miracuteusemeni retrouvée, sans 
livres et sans inscriptions. On peut traiicr plus sérieu- 
sement les traditions qui attribuent l'éiablissement des 
thermes de ce lieu à Duraiius , gaulois célèbre et puissant 
que nous voyons mentionné par César, comme l'ami ei 
l'allié des Romains (1). Ce n'est pas , au reste , le seul 
édilice antique de cette partie des Gaules dont on ait fait 
honneur à sa munificence, ou à ses soins : à Limoges, des 
ruines dont il subsistait encore quelque chose , il y a un 
siècle et demi , sont désignées par plusieurs historiens 
du pays comme le Palais de Duratius , et on lui attri- 
buait également la construction d'un théâtre et d'un 
arapliiibéàtre (2). Mais malheureusement, toutes ces 
traditions, relatives à des faits qui n'offrent en eux- 
mêmes rien de naturellement invraisemblable, sont 
fondées uniquement sur la foi d'écrivains beaucoup trop 
récents pour qu'ils puissent avoir la plus légère autoriuj 
relativement aux âges antiques. 

Toute la contrée dont Evaux fait partie parait être 
semée de restes d'antiquités romaines dans tous les 

(1) De bel. Gall. VIU , 26. 

(2] Allou, Deicripîion des monumentu obiervii dans h liéparlement 
lie la Haule-Vicnne , pp. 49, fil, S2. 



( 241 ) 

genres : en 1 806 , un auteur que j'ai cité ailleurs , 
Barailon, en indiquait un assez grand nombre en di- 
verses localités (1) ; et la petite ville d'Evaux n'était pas 
oubliée dan§ cet ouvrage , auquel j'ai dû mes premières 
notions archéologiques sur ce lieu. Il signalait déjà y 
comme trouvés dans ce sol romain , des débris de po- 
teries plus ou moins fines ^ des tuiles antiques , de petits 
carreaux de marbre, un tombeau en pierre, etc., et, en 
fait de constructions, des restes de murailles, des sou- 
terrains , des aqueducs, le puits d'eau minérale auquel 
on donne le nom de César , quelques traces de voies 
romaines > etc. (2). 

Mais les travaux exécutés depuis quelques années, 
pour l'édification d'un établissement thermal devenu 
indispensable , ont mis à découvert de nouvelles par- 
ties des thermes romains , et fait connaître bien mieux 
tout ce qui en composait l'ensemble. Ici on a eu le 
bon esprit de respecter ce que les architectes sont si 
pressés de détruire ailleurs ; c'est-à-dire que l'on a su 
sauver, en l'utilisant, tout ce qui pouvait entrer dans 
les dispositions modernes. Ainsi c'est sur des fonda- 
tions romaines qu'on a construit le nouvel édifice. Plu- 
sieurs puits également romains servent encore de dé- 
bouchés aux sources ; et les portions qui s'élèvent à 
l'extérieur reposent sur le béton antique dont avaient 
été revêtues les parties intérieures et souterraines : de 
ce nombre est le puits de César, qu'on a vu plus haut 
indiqué par Barailon. Les piscines, de formes ronde 
^ ou quadrilatère, paraissent être ce qui subsiste aujour- 

(1) Recherches sur les peuples Càhbioticbnses , pp. 1 — 114. 

(2) Ibid. , nn. 75 , 76 , 78 , 106 , 108 , etc. 

16 



( 242 ) 

d'hiii de plus entier dans son état primitif : elles re- 
çoivent, comme autrefois, le trop plein des puits, et 
servent au mélange et au refroidissement des eaux. En 
nettoyant ces l)assins antiques, on y trouva des mé- 
dailles ; mais elles étaient en fort petit nombre, et ap- 
partenaient aux seuls règnes de Vespasien , de Trajan , 
d'Hadrien, d'Antonin le pieux, et de Septime-Sévère. 
Près de là aussi, dans un sol formé de remblais, qui 
parait recouvrir des constructions antiques fort consi- 
dérables, on découvrit deux tuyaux évidemment desti- 
nés à la conduite des eaux : Tun était en plomb, comme 
on en rencontre communément ; l'autre, en bronze, ce 
qui est infiniment plus rare (1). 

L'âge romain attacha donc un grand intérêt aux 
sources thermales d'Evaux. C'est ce que prouvent aussi 
les travaux exécutés dans ce ravin abrupte pour pré- 
parer l'établissement des bains qu'on y a retrouvés ; 
car il fallut couper et niveler des rochers sur une éten- 
due considérable. Cesi ce que prouverait encore mieux 
le luxe déployé dans leur, décoration , si le temps avait 
conservé aux modernes les mosaïques , les peintures 
murales , les revêtements de marbre précieux dont les 
édifices reconnu sa Evaux furent jadis embellis. On peut 
' du moins s'en former une haute idée, d'après les débris 
magnifiques que les fouilles successives ont mis, dit-on, 
à découvert. Ces fouilles se continuent, et l'on peut es- 

(1) An sujet des détails qae je riens de rapporter , je ne puis 
citer que YAncUyse chimique de Veau mimrale naturelle des sources 
et Evaux , par M. Ossian Henry ^ Paris, 1843-1844, ouvrage qui 
m'a été gracieusement envoyé d'Evaux, mais qui est peu étendu 
Sur les antiquités. 



; ( 243 ) 

pérer qu'elles feront retrouver de nombreuses richesses 
archéologiques , peut-être des chefs - d'œuvre de Fart 
antique, et des monuments de la classe la plus impor- 
tante, parce qu'elle est la plus instructive, les inscrip- 
tions : j'ai à regretter de n'avoir pu rien en dire ici , 
ignorant même si le sol antique d'Evaux en a restitué 
quelqu'une. 



DROBlEi 



AuRELé— S'il est vrai , comme le dit Chorier , que sur 
la montagne de ce nom , les Romains exploitèrent jadis 
une mine d'or (1), et, comme d'autres l'assurent, qu'on y 
voyait encore , il y a soixante ans , les traces des fosses 
ouvertes par eux pour cette exploitation, on pourrait 
être fondé à croire qu'ils connurent aussi les eaux mi- 
nérales , asse2 estipiées dans le pays , qu'on retrouve 
aujourd'hui dans le village nommé de même (2). Mais 
je crains fort que le fait admis par Chorier n'ait d'autre 
fondement que l'affinité de ce nom avec les mots liatins 
aurum et auraria , et qu'il ne soit ainsi qu'une de ces 
conjectures auxquelles il n'était pas rare, dii temps de 
cet écrivain, qu'on se livrât aisément, sous d'aussi 
pauvres indices (3) . Pour ce qui est des traces apparentes 

(1) Hist, du Daupkiné, tom. I, pp. 34 > 69. 

(2) Statistique de la Drôme, p. 240. 

(3) Je lis dans la Statistique de la Drôme ( p. 380 ) , c( qà'il n'j a 
)) ni tourbières, ni mines d'or, ni mines d'argent, comme on Tayait 
)> cru pendant long-temps dans quelques localités. » 



( 244 ) 

de l'exploitation d'une mine y de quelque nature qu'elle 
fût^ je crois que^ dans tout état de chose , il serait 
difficile d'en déterminer l'époque y même de la manière 
la plus large. Le voisinage rapproché de la ville de Die ^ 
si riche en monuments romains^ et qui tint autrefois un 
rang distingué parmi les cités de la Gaule (1), pourrait 
être, ce me semble, un meilleur argument en faveur 
d'Aurel. 

MoNTELiMAR. -r— Ce u'cst pas sans hésitation que 
j'inscris ici le nom de cette ville dauphinoise. Ses eaux 
minérales sont connues, bien qu'elles soient peu ce- 
lèbres (2) ; mais son origine romaine n'est pas fondée sur 
des titres aussi certains qu'on pourrait le désirer. Des 
écrivains qui pourraient être suspects, parce qu'ils sont 
du pays , ont voulu reconnaître dans cette ville moderne 
l'antique station éiAcunumy mentionnée sur la Carte de 
Peutinger (3) , et dans l'Itinéraire du pèlerin de Jéru- 
salem (4). Cette détermination ne parait fondée en 
aucune manière; et il est bien généralement admis 
aujourd'hui que l'emplacement A'Acunum doit se re- 
trouver, comme son nom , dans le lieu du même dépar- 
tement appelé Ancone (5). Toutefois M. Walckenaer 
accorde à Montelimar une fiche de consolation (6) , en 

(1) Sup.,p. 187. 

(2) Pâtissier y ^anu6/ des eaux minérales, p. 555. 
(3)Segm.II,d. 

(4) VeL Roman. Uinerar, ; éd. Wesseling, p. 553. 
(5)D'AjiTiUe, Notice de la Gaule, p. 31 ; — Walckenaer > Géo- 
graphie des Gaules , tom. Il, p. 204. 
(6) Op. laud. , p. 209. 



( 245 ) 

y reconnaissant rict^^ton^ o\iAcusiumydePuAemée(l); 
bien que d'Anville (2) , Holstein (3) et autres placent 
aussi ce lieu à Ancone^ Fidentifiant avec Acunum. 

Pour ce qui est des monuments antiques qui pour^ 
raient indiquer à Mohtelimar un lieu d'habitation ro- 
maine, j'ignorais jusqu'ici toute découverte faite dans 
cette ville ; mais je viens d'y voir mentionnée une 
colonne milliaire retrouvée sur les lieux, et trans- 
portée depuis à Valence (4) ; je transcris la seule copie 
que je connaisse de l'inscription dont elle est chargée (5), 
bien qu'elle me laisse quelque doute par rapport à la 
dernière ligne, et que je ne puisse y voir ce qui a fait 
considérer cette inscription comme itinéraire, si elle a 
été donnée exactement. 

IMP. GÂES 

L. DOMITIO 

ÀVRELIÀNO 

P.F.I.AVG.P.M 

M* S. M* 



GARD. 



Alais. — Cette ville possède certainement deux sources 
d'eaux minérales (6). On m'assure également que son 

(1) Geogr. n, 9 [10). 

(2) Loc. laud. 

(3) Annotât, in Ortel, p. 3. 

(4) Statistique de la Drame , p. 554. 

(5) Ibid, p. 622. 

(6) Pâtissier , Manwl des eaux minérales , p. 356. 



( 246 ) 

sd a reproduit de petits monuments d'antiquités, et 
cette assertion est d'accord avec de plus anciens iiou- 
venirs , conservés vaguement dans une mémoire qui 
était sûre autrefois , mais sur laquelle aujourd'hui je ne 
puis compter avec la même confiance. J'inscrirais ici le 
nom d^Âlais.avec une confiance plus entière, si des 
renseignements obtenus sur les lieux me mettaient à 
même d'indiquer quelque chose de plus positif et de 
plus précis : toutefois je n'ai pas cru devoir l'omettre. 



GARONNE (Haute-), 



Encausse. — N'ayant à indiquer aucun resté d'anti- 
quité que je puisse rapporter au territoire sur lequel 
coulent ces eaux , peu fréquentées de nos jours , quoi- 
qu'on y trouve un établissement thermal assez soi- 
gné (1) , je me bornerai à citer M. du Mège , à qui je suis 
redevable déjà de bien d'autres renseignements plus 
positifs , et qui, habitant ces contrées, en a étudié spé- 
cialement les localités sous le point de vue archéologique. 
Voici ce que me dit, sur Encausse, le savant conservateur 
du musée de Toulouse : « Ce lieu a une vieille réputa- 
» tion ^ qui n'est plus en rapport avec celle d'aujourd'hui . 
» J'ai fait de nombreuses découvertes de monuments 
9 antiques dans les lieux voisins , mais je n'y ai point 
» trouvé d'inscriptions consacrées aux nymphes ..... Les 
» inscriptions , les urnes en marbre trouvées dans les 

(1) Pâtissier, Manuel des eaux minérales, p. 276. 



. ( 247 ) 

» lieux qui environnent Encausse me portent à croire 
» que ses eaux ont été connues des Romains , etc. » 

Labarthe-de-Rivière. — Les eaux thermales que pos- 
sède ce village sont bien peu réputées aujourd'hui (1), 
comparativement surtout avec d'autres sources de ces 
contrées, particulièrement avec celles de Bagnères-de- 
Liichon , dont j'ai parlé longuement sous leur nom an- 
tique A'Aquœ Onesiœ (2) ; cependant on peut croire 
qu'elles furent connues des Romains. Ce fait du moins 
peut paraître indiqué suffisamment par des antiquités 
qu'on y a découvertes ; non-seulement des médailles et 
quelques débris , mais deux autres monuments d'une 
nature plus importante, qui ont été signalés par M. du 
Mège, et qu'on voyait encore à l'entrée du village, lors- 
qu'il écrivait son premier ouvrage sur les antiquités de 
ces contrées (3). C'étaient des massifs de constructions 
en forme de tours, terminés pyramidalement à leur 
sommet , et dans lesquels on avait ménagé des niches 
destinées, selon toute apparence, à recevoir des statues. 
En creusant au pied d'un de ces monnments , on dé- 
couvrit une cuisse et une main en marbre , de propor- 
tions colossales et d'un beau travail (4) : il y a lieu 
de croire que c'étaient des débris de la statue qui avait 
occupé la niche pratiquée dans ce massif. 

Le même savant mentionne encore en ce lieu des traces 
fort marquées d'une voie romaine, qui devait être vrai- 

(1) Pâtissier. Manuel des eaux minérales, p. 488. 

(2) Sup, , p. 59. 

(3) Monuments des Volces Tectosages, p. 114 , pi. V> 3 el 6. 

(4) Ibid. 



( 248 ) 

semblablement celle de Tolosa , Toulouse , à Lugdunum 
Convenarum, Saint-Bertrand de Comminges, tracée 
dans les itinéraires. Sur plusieurs points de cette voie, 
il indique des bornes milliaires , ou d'autres objets 
d'antiquité (1). 



HÉRAULT. 



Balaruç. — On sait que la source thermale de ce 
village , d'une température très-élevée , jouit d'une an- 
cienne réputation qui tend encore à s'accroître (2) ; et il 
serait fort naturel de présumer que les Romains la con- 
nurent et l'utilisèrent. Mais les monuments antiques que 
l'on y a découvert font de cette conjecture vraisemblable 
un fait à peu près certain : car quel autre motif que celui 
de recourir à ses vertus salutaires eût pu attirer les 
conquérants de la Gaule dans ce lieu d'un aspect si 
sauvage , et lui créer ainsi l'importance secondaire que 
ces monuments semblent révéler ? On en jugera sur les 
détails suivants dont je suis redevable à' Astruc , à la 
Statistiqtie du département et aux communications 
obligeantes de M. le baron de Grazannes. 

On a découvert à Balaruc, on y retrouve fréquem- 
ment encore tout ce qui constate l'origine romaine d'une 
localité : des médailles nombreuses en argent et en 

(1) Op. laud. , pp. 111 et 115. 

(2) Pâtissier, Manuel des eaux minérales t p. 378 



• (249) 

broiize (1) , des vases entiers , et des débris de poteries 
diverses (2) , des tombeaux en pierre , des restes bien 
marqués de constructions antiques. Ceux-ci se re- 
trouvent surtout dans le lieu appelé lous Mazès, ce qui 
veut dire les maisons. Plusieurs indiquaient des maisons 
particulières, et Tune, plus distinguée, se composait de^ 
cinq pièces pavées de mosaïques des plus simples , mais 
produisant un effet agréable à l'œil : la pièce la plus 
grande était un parallélogramme fort allongé , car elle 
avait 1 3 mètres en longueur, sur une largeur de 4 et 1/2 
seulement. D'autres débris indiquaient une certaine 
magnificence dans les édifices de ce lieu : tels sont surr 
tout des restes de colonnes, de bases, de chapiteaux, en 
marbre ou en pierre , et le bras d'une statue également 
en marbre. 

Mais les fouilles faites à diverses époques à Balaruc , 
jamais avec beaucoup de soin ni de persévérance , n'ont 
pas fourni seulement la preuve que ce lieu était habité 
à l'époque romaine ; elles ont mis toutrà-fait hors de doute 
un fait plus important , je veux dire l'exploitation des 
sources à cette époque, et l'existence d'un établissement 
thermal. On doit y rapporter un double canal formé 
de trois fortes murailles parallèles, distantes de deux 
mètres environ entr'elles : par deux ouvertures basses, 
ce canal communique avec un aqueduc d'un mètre de 

(1) M. de Crazannes me signale une découyerte de 400 médailles ; 
on en trouye de tous les âges depuis Auguste jusqu'à Constantin. 

(2] M. le marquis de Lagoy , qui est auprès de moi pendant que 
j'écris ces lignes, me dit y ayoir recueilli lui-même de semblables 
fragments ayec des noms de potiers , et me communique notamment 
celui de silvin. 



( 250 ) 

largeur (1). Cet aqueduc , couvert jadis par une voûte 
dont on voit encore les premières aiâsises , se dirigeait 
vers un puisard , qu'on a retrouvé à une autre époque 
dans le voisinage. Près du canal existe aussi un autre 
reste important des anciens thermes romains : c'est un 
bassin de forme ellyptique^ autour duquel on a reconnu 
des sièges à hauteur d'appui faisant partie des gradins 
destinés aux baigneurs. Nul doute qu'il ne faille voir une 
indication de thermes antiques , dans la rencontre fré- 
quente de conduits en terre cuite de diverses formes, 
comme on en trouve pour l'ordinaire dans les lieux où 
ont existé des établissements de bains d'origine romaine. 
Parmi quelques détails fournis par Astruc et inutiles 
à répéter (2) , il est important de rappeler qu'il donne 
deux inscriptions. L'une, qui déjà de son temps n'existait 
plus sur les lieux, n'était qu'un monument funéraire 
peu remarquable. Mais il y a bien plus d'intérêt dans 
l'autre, dont malheureusement les lignes supérieures 
lâanquent. Voici tout ce qui en reste , et que je rapporte 
revu avec soin : 



ITEM. TRIB. LEG. H 

GEMELLI. PROC 

NEPTVNCET.N.. 

Sans que je m'arrête à des commentaires inutiles, il suffît 
de reconnaître ici un monument votif à Neptune, réuni 
assez naturellement aux nymphes , ses filles , dont le nom 

(1) Des traces d'un aqueduc différent, autant que je puis croire» 
me sont signalées sur d'autres points. 

(2) Mém, 8. rhist, nat, du Languedoc, pp. 312 et 3i3. 



^ ( 251 ) 

incomplet n'^st plus indiqué aujourd'hui dans Tinscrip- 
don que par la lettre n. C'est sans doute un souvenir de 
reconnaissance , laissé en ce lieu par le tribun militaire 
dont le nom à disparu aussi , et qui croyait leur devoir 
la guérison de ses blessures. 



ISÈRE 



Ce département est riche en eaux minérales dont 
l'antique exploitation est prouvée par les monuments 
romains retrouvés sur les lieux. Des renseignements 
exacts et circonstanciés, dont je suis redevable à Tobli- 
geance de M. H. Gariel , bibliothécaire adjoint de la ville 
de Grenoble , me mettront à même de rapporter^ d'une 
manière bien plus complète que je n'ai pu le faire pour 
beaucoup d'autres lieux, tout ce qui recommande ceux- 
ci sous le rapport archéologique. Je lui dois même quel- 
ques détails sur des établissements de bains romains 
observés sur divers points de cette province , dans des 
lieux où l'on ne connaît pas aujourd'hui l'existence 
d'eaux minérales. Avant d'en venir aux eaux dont les 
vertus médicinales sont plus certaines, je donnerai 
quelques-unes des notions intéressantes qui me sont 
fournies si obligeamment , lesquelles d'ailleurs sont loin 
d'être entièrement étrangères au sujet de mes recherches. 

M. Gariel m'indique le lieu appelé les Thermes, au 
village de la Buisse, près de Grenoble : ainsi que son 
nom l'indique, on y a reconnu les ruines d'un établisse- 



( 252 ) 

ment de bains romains , sans toutefois qu'on y connaisse 
aujourd'hui des eaux minérales ou thermales. Il en est 
de même à Morestel, chef-lieu du canton de l'arrondis- 
sement de la Tour-du-Pin : en 1838 on y trouva, avec 
diverses antiquités , plusieurs tuyaux en plomb destinés 
à conduire les eaux, et sur lesquels était tracée , dit-on , 
cette inscription qui me parait avoir été mal lue : c. sacid. 
siLViN. AVG. F. (1). A Barraux , on a trouvé également, 
avec des vestiges de bains romains , des conduits sur 
lesquels le nom du plombier était inscrit ainsi , me dit- 
on, CAivs LiBERTvs? Enfin à la Tronche, commune 
située à un kilomètre seulement de Grenoble , on a re- 
connu un bassin demi-circtilaire , de dimension à pou- 
voir contenir une dizaine de baigneurs , les restes d'un 
canal, un fragment de mosaïque, et d'autres objets 
antiques, parmi lesqjiels je dois mentionner des médailles 
d'argent des II"'' et Iir*" siècles , en nonlbre considé- 
rable, car le poids total s'élevait à 7 kilogrammes. II 
n'est pas impossible que dans quelques-uns des lieux où 
ces restes de bains ont été retrouvés , il y ait eu autrefois 
des eaux minérales , quoiqu'on n'y en connaisse point 
aujourd'hui : après les avoir mentionnés brièvement, 
je passe à ceux dont les sources sont encore connues et 
employées de nos jours. 

ÂLLEVARD. — Les baîus de ce village jouissent aujour- 
d'hui d'une faveur assez marquée, mais fort récente (2), 

(1) On a proposé de lire acq. , pour aq. , apparemment au Heu 
d'AVG. ; mais cette leçon ne me parait pas. meilleure. 

(2) L'établissement thermal actuel ne date , je crois , que de 1821. 



( 233 ) 

ou succédant au moins à un long oubli , si elles furent 
connues et utilisées dan& l'antiquité ou dans les âges 
subséquents. La chose reste dauteuse ; car les seuls 
monuments qu'on y ait découverts sont des médailles 
romaines. On pourrait cependant, je crois, tirer quel- 
ques conséquences de cette donnée , si de telles décou- 
vertes ont été faites fréquemment, sur plusieurs points, 
etc. : on ne m'a rien appris à cet égard. 

La Motte-les-Bains. — Les bains de ce lieu, qui se 
sont élevés depuis quelques années à une grande pros- 
périté , sont connus depuis bien plus long-temps , et 
l'on peut , sans hésiter , en faire remonter l'usage au 
moins à la domination des conquérants de la Gaule , 
dont le passage a laissé des traces dans les ruines 
évidemment antiques auxquelles on donne, dans le 
pays, le nom de Bains-Romains. Elles ne consistent, il 
est vrai , qu'en restes assez mal conservés de cons- 
tructions, et leur disposition ancienne serait difficile à 
reconnaître aujourd'hui ; « mais, me dit M. Gariel, 
» elles suffisent à constater l'exploitation des eaux de 
» la Motte par les Romains ; car^ il est impossible de 
» supposer qu'ils aient construit, dans le lieu où coulent 
» les sources, pour une autre destination. L'aspect de 
» cette gorge sauvage est là , pour qu'il ne soit pas be- 
» soin d'autres preuves. » 

On a voulu rattacher ces eaux thermales, d'une haute 
température , à un de ces phénomènes naturels qu'on 
appelait autrefois les sept merveilles du Dauphiné , et 
que la science juge aujourd'hui beaucoup moins mer- 



( 234 ) 

yeiileux. Je veux parler de celui qui e$t connu sous le 
nom de Fontaine ardente (1); et sans prétendre discu- 
ter ses relations fort vraisemblables avec les eaux de la 
Motte 9 qui n'en sont distantes que de deux lieues , je 
saisis volontiers cette occasion de le mentionner ici , 
parce qu'il parait certain qu'il n'était pas ignoré de 
l'antiquité. 

La Fontaine ardente est , suivant la description de 
M. le docteur Eymard , à qui j'emprunte quelques dé- 
tails y « un feu de cinq à six pieds de diamètre , dont 
» les flammes légères^ bleuâtres et fort vives ^ sortent 
» à travers les interstices d'un sol gras et ardoisé. Les 
» vieillards du pays disent leur avoir vu former, il y 
» a cinquante ou soixante ans, une colonne flam- 
» boyante qui s'élevait à plus de six pieds de haut. A 
» cette époque , le cratère était placé à une centaine de 
» pas au-dessous du lieu où il est situé actuellement. 
» Sa surface , naturellement plane et un peu concave , 
» servait de bassin aux eaux pluviales , qui, bouillon- 
» nant avec force quoique froides , semblaient être con- 
» fondues avec les flammes qui voltigeaient au-dessus 
» d'elles. C'est à cette alliance singulière de deux corps 
» ordinairement incompatibles, que le volcan en ques- 
» tion doit le nom de Fontaine qui brûle ^ ou de Fqn-- 
» taine ardente,... Les choses étaient encore en cet 
» état, il y a dix ou douze ans (2), mais depuis lors, la 
» déviation du torrent voisia et l'éboulement des terres 

(1) Sylvain Eymard, Album duDauphiné, tom. II, p. 109. 

(2) Ceci s'imprimait en 1S37. 



( 235 ) 

» supérieures ont beaucoup changé la disposition des 
» lieux, etc. (1). » 

J'ai dit que la Fontaine ardente fut connue des an- 
ciens; et l'on n'en sera pas surpris si l'on veut bien se 
rappeler comme ils recherchaient soigneusement tous 
les phénomènes qui leur semblaient merveilleux , et 
avec quelle complaisance leurs écrivains aiment à les 
signaler. Saint Augustin fait mention d'une fontaine 
qui avait la propriété d'éteindre les flambeaux allumés , 
et de les rallumer lorsqu'ils étaient éteints : qui cum sit 
contrée tanlibus frigidus , et facèm sicui alii fontes 
exstinguat accensam, dissimiliter tamen atque mira- 
biliter idem ipse aecendit exstinetam (2). M. le doc- 
teur Aymard a pensé que ce devait être la Fontaine qui 
brûle (3), et cela un peu légèrement, ce me semble, 
car ici le saint évéque d'Hippone n'indique en aucune 
façon la Gaule. Mais nous avons une meilleure preuve 
que cette fontaine, ou, pour mieux dire, ce volcan 
était connu bien avant saint Augustin ; c'est l'inscrip- 
tion d'un autel votif découvert sur les lieux, et dédié à 
Vulcain, dieu du feu , dont le nom a formé celui des 
volcans dans plusieurs des langues modernes : elle est 
ainsi conçue (4) : 

(1) Op, laud. , p. 87. 

(2) De Civii. Dei, XXI, 7, 1. 

(3) Op. laud. , p. 88. 

(4) Ma mémoire me fait défaut au sujet de la première publication 
du monument, et je ne puis citer l'inscription que d'après M. le 
docteur Eymard, qui doit l'avoir rapporté exactement ( Op. laud. , 
p. 90. ) 



( 256 ) 

L. MATERNVS. OPTATVS 

WLCANO. ÀVG 

SÀCRVM 

P 

Pont-de-Be AU VOISIN. — Je vois cette petite ville in- 
diquée comme possédant des sources minérales (1); 
d'autre part , on me dit sur les lieux mêmes qu'elles ne 
consistent que dans quelques filets d'une eau ferrugi- 
neuse, qui coulent des coteaux voisins y mais quf sont 
sans vertus. Si l'on voulait toutefois donner quelques 
indices de leur exploitation aux jours de la domina- 
tion romaine ; on les retrouverait dans des monuments 
de cette époque, exhumés du sol de cette ville, qui dut 
avoir quelque importance. « On voit clairement, ditCay- 
» lus, par les médailles et les monuments qu'on y dé- 
» couvre tous les jours, que ce lieu a été autrefois 
» considérable, ou du moins fort habité (2). » Cependant 
il ne donne qu'une petite figurine en bronze assez jolie 
et bien conservée , représentant une femme assise, qui 
porte des fleurs et des fruits dans un bassin posé sur ses 
genoux , et dont il fait une Flore (3) . Je puis citer aussi 
l'inscription suivante qu'on me communique, laquelle 
fut trouvée en 1818 dans un mur de l'église paroissiale 
qu'on démolissait, mais malheureusement brisée pres- 
que aussitôt par les ouvriers : 

(1) Pâtissier « Manuel des eaux minérales , p. ^5^. 

(2) Recueil â^ antiquités, tom. V, p. 134. 

(3) Ihid, , p. 133 , pi. CXX , 1 et 2. 



( 257 ) 

MARTI. AVG 
C. BETVTIVS. HERMES 
Iml.VIR.AVG (1) 
T. P. I (2) 

Saunay. — Les eaux d'une source qui coule en ce lieu , 
et qui furent long-temps un objet de dévotion pour les 
habitants du pays , paraissent avoir des propriétés mi- 
nérales , ou de toute autre manière médicinales ; et c'est 
comme telles apparemment qu'elles furent employées 
dans l'âge romain. Voici ce qu'en dit Chorier dont l'ou- 
vrage fut publié en 1661 : 

« Le comté d'Anjou est à quatre lieues de Vienne. En 
» l'une de ses paroisses qui à le nom de Saunay, naist 
» aussi une fontaine que le peuple nomme en son lan- 
» gage vulgaire la Saint-Font, à cause des bienfaits et 
» des grâces qu'il en reçoit. Ses eaux sont un remède 
» efficace à la jaunisse. Les Romains^ qui ne connurent 
» jamais d'épargne où il s'agissait de la décoration ou de 
» l'utilité publique y les avaient conduites en des bains 
» qu'ils avaient dédiés à Hercule. Ils ont laissé à une 
» paroisse voisine le nom d'Arcole. Un pavé de mar- 
» quéterie, des pièces de marbres blancs , et des degrés 
» assez entiers en furent alors arrachés, et aujourd'hui 
» rien n'en paraît (3). » 

Les eaux de Saunay ne sont point exploitées aujour- 
d'hui ; et je ne vois pas qu'on ait retiré de cet emplace- 

(1) On me donne la leçon lîûl. tir. , et non Iiiiil. tir , comme il 
est ordinaire. 

(2) Testamento Pont lussil. 

(3) Hist. du Dauphiné , tom. I , p. 36. 

17 



• 



( 258 ) 

ment aucun objet antique , depuis le temps où Chorier 
écrivait les lignes que je viens de citer. 

Uriage. — Ces eaux furent long-temps négligée^, 
quoiqu'elles fussent bien connues dans la province (1). 
Quelques débris de constructions près du lieu où coulent 
les sources, et la découverte de conduits, soit en briques, 
soit en plomb , y faisaient présumer l'ancienne existence 
d'un établissement de bains ; mais par je ne sais quelle 
préoccupation, c'est aux Sarrasins qu'il était attribué (2). 
En 1820, des guérisons éclatantes opérées sur des ha- 
bitants du lieu devinrent l'origine de la réputation 
qu'elles ont aquise , et qui est due , en effet , à l'énergie 
de leurs vertus. C'est alors que le propriétaire conçut 
le projet de former un établissement thermal , et que 
commencèrent les fouilles qui, continuées ou reprises en 
divers temps , ont amené les découvertes les plus in- 
téressantes. C'est sur elles que M. Gariel m'adresse une 
notice suivie, que je regrette de ne pouvoir donner en 
entier, faute d'espace, mais qui me fournira, par analyse 
ou par extraits, de nombreux et importants détails. 

a Ces fouilles, me dit-il, mirent d'abord en évidence, 
» et la source dispersée par des éboulements (3) , et de 

(1) A telles enseignes qu'on a touIu dériyer ce nom d'urentes 
aquœ, bien que ces eaux ne soient pas très-chaudes. 

(2) Beaucoup de constructions sont attribuées vulgairement aux 
Sarrasins, qui sont èyidemment romaines. Je crois quebien souvent 
ce nom ne veut dire que païens. Les croisés , les pèlerins de la terre 
sainte appelaient communément païens les Sarrasins et les Turcs , 
et réciproquement» ils purent donner aux païens la qualificatioa de 
Sarrasins. C'est la seule explication plausible de cette erreur tradi- 
tionnelle. 

(3) Uriage possède deux sources : l'une est ferrugineuse, l'autre* 



( 259 ) 

» vastes ruines, qui venaient témoigner hautement de 
» Tancienne importance de ces eaux . C'est à cette époque, 
» en se livrant aux travaux pour réunir les eaux, que 
» l'on détrliisit un aqueduc voûté , enduit à l'intérieur 
» d'un stuc tellement solide que le marteau le brisait à 
» peine. On brisa également plusieurs piscines. Il en 
» existe cependant encore une assez bien conservée. 
» Elles étaient construites avec un béton composé de 
» chaux, de Jbriques pilées et de petits cailloux, et 
» avaient environ deux pieds de hauteur , quatre de 
» largeur et douze de longueur. Une de ces piscines 
» avait son plancher en béton , soutenu par deux rangs 
» de petites colonnes , et présentait sur deux de ses faces 
» cinq gradins en pouzzolanne d'un beau poli. A cette 
» même époque , on trouva un grand nombre d'objets 
» romains , des tronçons de colonnes , des fragments 
» considérables de tuyaux en terre cuite , non point 
» cylindriques, mais de forme parallélipipède , et por- 
» tant Je nom de clarianus. . . . (1). J'ajouterai que la 
» piscine conservée à Uriage a la plus grande ressem- 
» blance avec celle que l'on voit à Aix en Savoie, dans 
» la cave de M. Périer. » 

Pour compléter ce qui concerne les constructions des 
anciens bains d'Uriage, je rapporterai encore une partie 
des notions données par le propriétaire actuel de l'éta- 
blissement et du château, M. de Saint-Ferrîol , sur une 

salfareuse et saline. C'est cette dernière qui a acquis depuis quel- 
ques années une si grande réputation. 

(1) Parmi ces objets , il faut compter un petit nombre de médailles 
en bronze , appartenant à divers règnes , depuis Vespasien jusqu'à 
Constantin. 



( 260 ) 

découverte faite en 1 844 , mais en supprimant les détails 
qu'on ne pourrait comprendre parfaitement^ sans avoir 
sous les yeux le plan dont il a bien voulu me commu- 
niquer un calque, par l'entremise de M. Gariel : « Ce 
» chauffoir, dit-il, se composait essentiellement d'une 
» grande pièce d'environ dix mètres de longueur sur 
» huit de largeur, dans le milieu de laquelle était un 
» bassin circulaire de 4 mètres 70 centimètres de dia- 
» mètre, où l'on descendait par deiix gradins... Ce 
» bassin circulaire avait pour fond un plancher en ci- 
» ment... encore parfaitement visible sur les bords... 
» Le plancher était suspendu au-dessus du vide par des 
» piliers en briques . . . , dont quatre seulement subsistent 
» en partie... Le vide situé au-dessous de ce plancher 
» recevait l'action de la flamme , ainsi que le prouvent 
» avec évidence le noircissement des portions encore 
» conservées, et les cinq cheminées. . . . L'eau chaude 
» s'écoulait par un tuyau en plomb de huit centi- 
» mètres de diamètre , placé à un décimètre en contre- 
» bas du fond du bassin, et se rendait dans un canal en 
» maçonnerie. Ce canal la distribuait dans une série de 
» petites piscines revêtues en ciment, dont, comme on 
» l'a déjà dit, plusieurs ont été détruites dans les fouilles 
» de 1820 à 1823, et dont une seule est actuellement 
» visible, etc. » (1), 

(1) L'équivalent delà description que j'abrège se trouve dans ce 
passage de Vitruve ( V, 10, 74 ), qui donne les principes pour ce genre 
de construction : Suspensurœ vellarum ita sunt faciendœ, utipri- 
mum sesquipedcUibus teyulis solum stematur , inclinatum ad hypo- 
causim , uH pila cum mittatur, non posait intro resistere , sêd rursus 
redeat ad prœfurnium ; ipsa per se ita flamrna faciliiis pervagabilur 



( 261 ) 

Après avoir mentionné encore une chambre de bains 
de trois mètres de longueur, sur mie larçeur de moitié, 
laquelle ne m'est indiquée que fort brièvement, et deux 
vases plats en granit, ayant trois pieds environ de dia- 
mètre , je passe aux objets plus petits qu'on a découverts 
à Uriage, dans diverses fouilles. Ce ne sont pas les moins 
curieux, et plusieurs sont d'une nature telle, que leur 
singularité et leur nouveauté attachent un intérêt tout 
spécial au lieu qui les a restitués à la science archéolo- 
gique. Il faut mentionner d'abord trois jolies statuettes 
en bronze, adhérentes à des socles de même matière, 
et dont la hauteur totale est de 32 à 40 centimètres; 
M. de Saint-Ferriol a bien voulu m'en communiquer les 
lithographies. La première, légèrement drapée d'un 
vêtement court et fort étroit, jeté sur l'épaule, est celle 
d'un jeune homme , tenant de la main droite un objet à 
peu près globuleux, qui pourrait bien être une éponge, 
comme on l'a soupçonné; la gauche, dont une partie 
a été cassée , annonce par sa disposition , aussi bien 
que le bras, qu'elle s'appuyait sur la haste, et semble 
ainsi révéler une divinité. Les deux autres sont entiè- 
rement nues. L'une représente un adolescent aux che- 
veux bouclés , ayant au sommet du front cette masse 
relevée en forme de flamme qu'on voit ordinairement 
* aux figures de génies, et quelquefois hEros ouCupidon ; 
mais l'objet qu'il tient de la main droite, et qui ne peut 

sub sttspensione : supraque laterculis bessalibus pUœ struantur Ua 
dispositœ, uii bipedales tegulœ possint supra esse coUocaiœ, Altitudi- 
nem autem pilœ habeant pedum duorum , eœque struantur argilla 
cura capUlo subacta : supraque collocentur teyulœ bipedales , qu(e 
sustineant pavimentum. 



( 262 ) 

être qu'une bourse^ semble le désigner comme un Mer- 
cure jeune, bien que, ni sa tète, ni ses talons ne portent 
de traces des ailes, qui forment d'ordinaire l'attribut le 
plus caractéristique de ce dieu : un pareil type est 
assurément rare, s'il n'est pas tout-à'fait nouveau. Tout 
l'ensemble de la troisième figure, et notamment ses 
longs cheveux , lui donnent un grand rapport avec les 
représentations d'Apollon : mais un caractère distinctif 
ici est le strigilis qu'il tient de la main droite. Cet 
attribut convient on ne peut mieux au dieu tutélaire d'une 
source thermale , soit qu'on veuille y voir une divinité 
spéciale et topique , soit qu'on y retrouve Apollon lui- 
même, que nous avons vu ailleurs reconnu comme 
tel (1). 

La plupart des autres monuments de petites propor- 
tions trouvés dans les fouilles d'Uriage, sont en plotnb, 
et Ton sait que les objets antiques en cette matière ne 
sont pas très communs ; parmi ceux d'une importance se- 
condaire, on ne m'en désigne spécialement qu'un seul, 
représentant un cerf. Il y a quelque chose de bien plus 
curieux et de tout-à-feit nouveau, si je ne me trompe, 
dans la découverte d'un nombre considérable de petits 
marteaux, de sept à huit pouces de longueur, également 
en plomb, et qui n'ont pu être que des ex voto. La 
manière la plus vraisemblable d'expliquer la rencontre 
de tels objets, en si grande quantité, auprès des sources 
d'Uriage, serait de les considérer comme représentant 
un des attributs de Vulcain, le dieu forgeron, le dieu 
du feu , le dieu des mines qui pouvait très-naturellement 

(1) Sup, , pp. 29 , 82. 



( 263 ) 

aussi être le dieu des sources minérales et thermales^ 
lesquelles ont tant d'affinité , soit avec les métaux, soit 
avec les volcans et le feu. Je ne vois même pas qu'on 
pût autrement rendre raison de la présence de ces mar- 
teaux, qui ne paraissent pas avoir dû être d'aucune 
utilité dans les procédés connus des arts et métiers chez 
les anciens. 

Le plomb est encore la matière de deux monuments 
écrits, retrouvés dans les mêmes lieux, et qui ne re- 
semblent à rien de ce que Ton connaît en ce genre : ce 
sont deux tablettes de forme très-alIongée et très-étroite , 
dont les inscriptions sont exécutées en relief. La pre- 
mière, en une seule ligne, est ainsi conçue : 

L. 8CRI. MARTmVS. ÀC. F 

Le nom inscrit en abrégé parait être celui d'une famille 
romaine bien connue, et devoir se lire ^cmbonius. Les 
sigles qui terminent la ligne ne sont pas aussi faciles à 
interpréter. On a proposé de les rendre par xcquœductus 
récit ; mais une telle orthographe est trop insolite pour 
être admise facilement, et toutefois je serais fort embar- 
rassé pour proposer quelque chose de mieux. 

L'autre tablette porte cette inscription qui n'a aussi 
qu'une ligne : 

M. RVF. MÂRCIAN. V F 

à celle-ci pourrait se rattacher un ornement de même 
métal en bas-relief, composé de deux griffons en regard 
et séparés par un trépied. Ce sont, comme on sait, des 
symbolesassez usités du culte d'Apollon ; etiispourraient 



( 264 ) 

ici confirmer ce que j'ai dit plus baut^ sur rattribution 
probable de l'une des statuettes en bronze. Mais Vuleain 
aurait eu aussi sa mention tacite sur ce monument. J'ai 
sous les yeux les dessins lithographies de l'inscription et 
du bas-relief; or, si ces deux objets évidemment frag- 
mentés ont été autrefois réunis , ce qui parait vraisem- 
blable , c'était assurément par deux marteaux de ceux 
que j'ai déjà signalés. La tête de l'un d'eux est fort re- 
connaissable au-dessous du bas-relief; et au-dessus de la 
bande plus longue et plus étroite où se lit l'inscription, on 
retrouve deux parties saillantes assez déformées, mais qui 
peuvent avoir été le bas des manches de ces marteaux. 
Ainsi 9 l'ornement , superposé autrefois à la tablette 
écrite, formait avec elle un monument fort curieux, qui 
ptait certainement votif. Cela serait prouvé par les deux 
lettres qui terminent l'inscription, et qu'on a rendues par 
yoium vecit : je ne vois nulle part cette formule, ni rien 
de semblable, et cependant je ne saurais trouver une 
autre interprétation. Quant aux deux noms, je n'ai pas 
besoin de dire qu'ils ne sont autres que kvyus MARCiANt^^. 
J'ajouterai, en finissant cet article, qu'on peut espérer de 
retrouver aux mêmes lieux de nouvelles inscriptions 
semblables : ce serait pour les études archéologiques une 
découverte des plus intéressantes. 



LOIR-ET-CHER, 



Saint-Denis-sur-Loire. — Si quelque chose peut 
autoriser à nomriier ici les eaux„ à peine connues,. 



( 265 ) 

de cette localité (1), ce n'est que sa position fort rap- 
prochée de Blois^ qui dut être une ville romaine. Son 
nom , il est vrai , est effacé de Thistoire ; mais elle fut 
considérable assurément ^ comme l'attestent les restes 
qu'elle conserve encore d'un bel aqueduc antique. 



LOIRE. 



On compte dans ce département un grand nombre de 
sources minérales (2) , dont celles de Saint-Alban sont 
aujourd'hui les plus fréquentées (3), mais tout-à-fait dé- 
pourvues , m'assure-t-on , des moindres vestiges d'an- 
tiquités romaines. Celles de Saint-Galmier et de Moingt 
ont été mentionnées sous leurs noms antiques ^Aquœ 
Segete et de Mediolanum (4). Une source appelée Fon- 
taine des Quatre n'a d'autre titre à l'être ici que sa po- 
sition à un kilomètre de Feurs , qui fut une ville ro- 
maine importante. Sail-sous-Ck)uzan a-t-il des monu- 
ments antiques ? les uns me le nient positivement , 
d'autres me parlent de quelques médailles. Les eaux 
dont les noms suivent sont les seules sur lesquelles je 
puisse donner, avec certitude, de courtes et rares indi- 
cations archéologiques. 

(1) Pâtissier, Manuel des eaux minérales , p. 5î$6. 

(2) Ihid, , p. 556 ; — Richard de la Prade , Analyse et vertus des 
eaux minérales du Forée , etc. Lyon, 1778, in-12. 

(3) Pâtissier, Op. laud, , pp. 278, 552. 
(^)Sup., pp. 75,1%. 



( 266 ) 

Sail-lez^hateaumoiut«d. — Ce lieu situé presque à 
l'extrémité du département ^ au delà de Saiiit-Martiii- 
d'Estraux, possède deux sources thermales d'une tem- 
pérature assez élevée (1), et Ton ne peut douter qu'elles 
n'aient été connues et utilisées aux jours de la* domi- 
nation romaine. Cest ce qui résulte des fouilles qu'on 
y fit, il y a un an, pour l'exécution de quelques travaux. 
On y trouva alors divers débris antiques, ainsi que des 
médailles aux effigies de Vespasien et de Commode ; 
et l'on y constata l'antique existence d'un établissement 
thermal , dont on avait découvert des vestiges bien mar- 
qués. Il est fâcheux que l'extrême laconisme de mon 
correspondant me prive de donner ici à mes lecteurs, 
quelques détails un peu plus circonstantiés sur ces 
ruines romaines. 

Salt-en-Donzy. — Hors de la contrée, on connaît à 
peine aujourd'hui le nom de ce lieu, distant de Feurs 
de quatre kilomètres , et qui possède une source légè- 
rement thermale (2). II est vraisemblable qu'elle l'était 
davantage autrefois ; il est certain du moins qu'elle 
n'avait pas échappé aux recherches des conquérants de 
la Gaule. Voici ce que m'écrit sur cette source, M. l'abbé 
Roux, vicaire de Feurs, que j'ai déjà cité plus d'une 
fois : a Je l'ai visitée , j'ai bu de ses eaux ; et malgré 
» son mélange avec des sources froides , elle a cons- 
» tamment une température sensiblement élevée. Non 

(1) Pâtissier, Op. laud,, p. 556 ;— Richard de la Prade, Op. laud., 
pp. 94 , 145. 

(2) Richard de la Prade , Op. taud. , pp. 96 , 146. 



( '267 ) , 

» loin de cette source, sont les ruines d'une enceinte 
» romaine constniite en très petit appareil. On a trouvé 
» à Sait des poteries, des médailles, des tombeaux. » 



LOIRET. 



Fontaine-de-l'Etuvée. — Cette fontaine, qui a une 
certaine célébrité dans les traditions du pays , et qui 
a été chantée par d'anciens poètes français , coule sur 
une petite élévation à peu de distance d'Orléans, l'an- 
tique Genabum , ville qui tint un rang assez distingue 
dans la Gaule romaine (1), et dont le sol a restitué plus 
d'un monument antique. Le projet d'amener à Orléans 
les eaux de cette source ayant fait faire des fouilles sur 
les lieux à diverses reprises, les dernières en 1823 (2) , 
on y découvrit d'abord un grand bassin de forme qua- 
drilatère, puis un canal destiné à la conduite des eaux , 
enfin un puisard formé de pièces de charpente, que l'on 
retrouva presque toutes charbonnées (3). Il serait dif- 
ficile d'assigner une époque précise à l'exécution de ces 
anciens travaux ; mais des débris évidemment romains 
turent recueillis dans cette même localité , soit dans le 
grand bassin , soit aux environs. 

C'étaient quelques restes de constructions , une quan- 

(1) ])*Anyinc , Notice de la Gaule , p. 345. 

(2) Jollois , Notice sur les nouvelles fouilles entreprises dans rem- 
placement de la fontaine l'Etuvée, et sur les antiquités qu'on y a dé- 
couvertes, Orléans , 1825 , in-4®. 

(3) Op, laud, , pp. 4 et 5. 



( 268 ) 

tité considérable de grandes tuiles plates y et aussi 
quelques-unes de ces tuiles creuses que les romains 
employaient pour en recouvrir la jonction; beaucoup 
de fragments de poteries grisâtres , d'une pâte grossière , 
ainsi que d'autres bien plus fines ^ de couleur rouge ^ 
chargées d'ornements et revêtues d'une couverte d'un 
beau poli : quelques vases furent retrouvés à peu près 
entiers. A cela il faut ajouter : la meule inférieure en 
lave d'un moulin domestique ^ une de ces petites 
haches , ou mieux peut-être de ces coins en nlex aux- 
quels on attribue communément une origine celtique , 
un crochet en bronze, destiné apparemment à être fiché 
dans un mur pour qu'on pût y suspendre quelque chose : 
la forme de ce dernier objet était celle d'un bras humain , 
et il était couvert de la plus belle patine (1). 

Un autre monument, d'une bien plus grande impor- 
tance, était un bloc de pierre qui avait dû faire partie 
d'un des murs de quelque édifice ; retourné , il laissa 
lire cette inscription (2) : 

AVG. ACIONNAE 

SACRVM 

CAPILLVS. ILLIO 

MARI. F. PORTICVM 

ÇVM. SVIS. ORNA 

MENTIS. V. S. L. M 

Le nom gaulois du père, et celui du fils qui parait ro- 
main , ont fait penser à M . Jollois , que l'âge de ce marbre 
devait être fixé à la transition de l'époque gauloise à l'èpo- 

(1) Op, laud,, pp. 9— 13, pi. H. 
(2)/6irf. , p. 13, pi. 1,2. 



( 269 ) 

que romaine , c'est-à-^ire à un temps qui suivit defort près 
la conquête (1) ; et le style des caractères ne semble pas 
exclure une telle détermination , bien qu'ils présentent 
quelques ligatures. Mais la particularité la plus remar- 
quable est assurément le nom de la déesse acionna , que 
Ton ne connaît point ailleurs ; évidemment , c'est celui 
d'une divinité topique , et , selon toute apparence , de 
celle qui présidait aux eaux de la fontaine , comme bien 
d'autres que nous avons rencontrées ailleurs. 

Il résulte des découvertes qui viennent d'être men- 
tionnées , que cette fontaine était connue dans l'âge ro- 
main , peut-être même auparavant ; et le culte qu'on 
lui rendait, attesté par l'inscription, et par la construc- 
tion de l'édifice religieux qu'elle rappelle, peut faire 
présumer , avec beaucoup de vraisemblance , que ces 
eaux passaient alors pour être douées de quelque pro- 
priété médicinale , bien qu'il ne soit plus question au- 
jourd'hui d'une telle vertu ; car elle a pu s'affaiblir ou se 
perdre, soit par la dispersion d'une partie de ces eaux, 
soit par leur mélange subséquent avec des eaux com- 
munes. 



LOZÈRE. 



Bagnols. — Tout fait croire que les eaux minérales 
de ce village, très fréquentées de nos jours (2) , le furent 

(1 ) pp. laud. , p. 14. 

(2) Pâtissier, Mànwl des eaux minérales , p. 551. 



( 270 ). 

aussi au temps de la domination romaine. On en a 
un premier indice dans la grande quantité de monu- 
ments antiques retrouvés sous le sol des lieux environ- 
nants. De nombreuses inscriptions de ce pays ont été 
publiées par Lancelot (1) , et quelques-unes étaient si 
rapprochées de Bagnols qu'on peut les regarder comme 
appartenant à ce lieu même. Je ne rapporterai que 
celle-ci qui est funéraire , mais qui avait , au dire de ce 
savant , le mérite de remonter à une bonne époque (2) : 

D. M. 

LVCI. LITVCI 

SECVNDÏ 

LITVCCFA 

SECVNDA 

FRATRI 

PIISSIMO 

Au lieu même où sont les eaux, divers monuments 
romains ont été découverts, notamment, dans des 
fouilles faites pour des réparations aux sources, des 
vestiges bien marqués de l'antique établissement ther- 
mal. Tout ce qu'on m'écrit à ce sujet, c'est qu'on re- 
connut alors des couches de béton romain et les pierres 
de taille qui avaient servi à fonder. Je lis ailleurs que, 
pour arriver dans le vaste bassin qui les reçoit, les eaux, 
qui sourdent au bas du village , ont encore à traverser 
des voûtes que l'on croit faire partie des ouvrages exé- 
cutés autrefois par les conquérants de la Gaule (3). Je 

(1) Mém, de VAcad» des Inscriptions, tom. VII , hist. , pp. 243-245. 

(2) Ibid. , p. 245. 

(3) Pâtissier^ Manuel des eaux minérales, p. 173. 



( 271 ) 

regrette de n'avoir pas sur ces restes intéressants les 
données plus détaillées et plus précises que j'aurais 
désirées, 

Javols. — Dans cette commune , où coulent des eaux 
minérales fort peu connues (1), on découvrit en 1829 
des antiquités assez importantes pour fairejuger que ces 
eaux ne durent pas être ignorées des anciens ; je ne puis 
donner, à mon grand regret, que des indications bien 
succinctes. C'étaient, me dit-on, des médailles impé- 
riales en grand nombre, depuis Auguste jusqu'à Claude- 
le-Gothique ; des poteries en terre grise ou rouge , avec 
des ornements en relief; divers ustensiles en bronze, 
et quelques figurines de ce même métal , des débris de 
marbres variés, et des vestiges de constructions consi- 
dérables, évidemment aussi d'origine romaine. Parmi 
ces dernières, on avait surtout remarqué les murs d'une 
enceinte circulaire assez étendue , dans laquelle on vou- 
lut reconnaître un cirque ; peut-être était-ce simplement 
un grand bassin, destiné anciennement à recevoir les 
eaux minérales. Cependant, je lis que dans cette en- 
ceinte, fut trouvée une colonne portant une inscription 
en l'honneur de Postume. On ne la donne pas, et je 
crains fort qu'il n'y ait erreur sur ce point, comme sur 
beaucoup d'autres , dans un ouvrage peu digne d'être 
cité, et qu'on n'ait fait confusion avec la colonne mil- 
liaire, bien anciennement connue, dont l'inscription fut 
publiée par le P. Sirmond (2). 

(1) Pâtissier^ Manuel des eaux minérales, p. 556. 

(2) Ad Sidon, not., p. 164. Voici le texte de rinscriplîon, d'autant 



( 272 ) 

Ici se présente une question de géographie comparée , 
discutée à une époque déjà ancienne , et qui tirait un 
nouvel intérêt de la récente découverte : l'identité de l'an- 
tique Anrfm/wm, ville principale des Gabali (1), avec le 
lieu subitement illustré par l'apparition de ces monuments 
romains. Si d'Anville a cru devoir l'admettre (2), M. Wal- 
ckenaer a prouvé surabondamment, ce me semble, dans 
un mémoire spécial, qu'AwrfenVwm doit être cherché ail- 
leurs (3) . Mais une autre opinion , mitoyenne en quelque 
sorte , veut retrouver à Javols la ville qui prit plus tard 
son nom de celui des Gabali , et que l'on croit avoir 
été différente d'Anderitum (4). Dans un ouvrage pos- 
térieur, M. Walckenaer modifiant un peu son opinion 
primitive, n'est pas éloigné d'admettre celle-ci (5). J'ai 
cru devoir m'abstenir de prendre un parti sur ce der- 
nier point , et j'ai préféré inscrire ici cette localité sous 
son nom moderne , au lieu de la placer dans ma pre- 
mière partie sous un nom romain qu'on peut fort bien 
lui contester. 

plas intéressante que le nom de Postame est rare sur les monuments 
lapidaires : iiip. caes|| m. cas. lat H postybio || p. f. atg. cos || m. 

p. GABALL. T. 

(1) Ptolem., Géogr. II, 6 (7) ; — Jo6. Peutitiger., segm. I, f. 

(2) Notice de la Gaule , p. 67. 

(3) Mém, de VAcad. des InscripL (nonreaux), tom. V, pp. 386— 
418. 

(4) Valois, Nota. Galliar.,p, 214, b. 

(5) Géographie des Gaules, tom. I , pp. 347, 348. 



( 273 ) 



MARNE. 



Sermaise. — La source minérale de ce lieU (1) porte 
le nom vulgaire de Fontaine des Sarrasins , et c'est uni- 
quement pour cela que je la mentionne ici. Comme 
on ne saurait supposer une invasion des Sarrasins dans 
cette contrée, il est naturel de penser que là, comme 
ailleurs bien souvent, leur nom est synonyme de païens, 
c'est-à-dire de Romains. On peut donc soupçonner que 
ceux-ci auraient laissé près de la source quelque cons- 
truction , qui aurait perpétué sur les lieux leur souve- 
nir. J'ignore toutefois si des découvertes d'antiquités 
viendraient appuyer cette présomption. 



MEURTHE. 



Nancy. — On sait que des eaux minérales coulent 
dans cette ville au pied d'un bastion (2). Il est certain 
aussi que Nancy a fourni des antiquités , au sujet des- 
quelles je ne puis rien préciser ; mais je ne saurais me 
tromper quand je me rappelle y avoir vu quelques 
objets romains exhumés de ce sol, il y a bien des 
années, à une époque où j'habitais la Lorraine. M. Wal- 



(1) Pâtissier, Manuel des eaux minérales, p. 556. 

(2) Ibid,, p. 366. 



18 



( 274 ) 

ckenaer reconnaît cette ville dans YIndesina de la Carte 
de Peutinger (1), détermination que je n'avais pas re- 
marquée, lorsque j'ai mentionné ce nom avec une com- 
plète incertitude , dans la première partie de cet ou- 
vrage (2). Au reste le savant géographe, n'exprimant 
cette opinion que dans son analyse des itinéraires, n'a 
pu en exposer ni discuter les motifs. 

PoNT-A-MoussoN. — C'est encore un de ces lieux dont 
les eaux minérales sont bien peu connues (3) ; mais 
elles peuvent très probablement l'avoir été des Romains, 
qui ont laissé dans cette partie de la contrée des Leuci 
des traces fort marquées de leur habitation. Les monu- 
ments antiques les plus importants de ceux qui ont 
été trouvés à Pont-à-Mousson sont, sans contredit, les 
deux autels votifs qu'on y consacra autrefois à Hercule ; 
il y porte le surnom de Saxanus^ dont je ne yois pas 
qu'on ait pu rendre raison jusqu'ici d'une façon positive, 
mais que l'on a trouvé aussi ailleurs (4). Lepremiei;de 
ces autels, découvert en 1721 , conservé au cabinet des 
antiques de la Bibliothèque royale , est en marbre , et 
assez remarquable par ses ornements ; on y lit l'inscrip- 
tion suivante, rapportée par plusieurs collecteurs (5) : 

(1) Géographie des Gaules , tom. ni , p. 90. 

(2) 5tip.,p. 121. 

(3) Pâtissier . Manuel des eaux minérales , p. 557. 

(4) Orelli, InscripU lai. sel.; tom. I, p. 354, nn. 2006-2011, etc. 

(5) Montfaucon , Antiq, expliq. , tom. II du suppl. , pi. X ; — 
D. Martin , Religion des Gaulois, tom. II , p.- 31 * ; — Caylus , Re- 
cueil d^antiq,, tom. V, p. 325 ; — Orelli , Op. laud., n. 2011. 



( 275 ) 

I. O.M.ET.HER 
CVLI. SAXA 

SACRVM 

P. TALPIDIVS 

CLEMENS. 7 

LEG. VIII. AVG 



CVM. MIL. LEG. EIVS 
V. S. L L. M 



L'autre autel découvert beaucoup plus tard, en 1 749, 
fait lire cette inscription plus curieuse, soit par ses 
formes , soit par la date que lui assignent les noms des 
princes dont elle fait mention (1) : 



HERCVU. SAXSANO. ET 

IMP. VESPASIANO 

AVG. ET. TITO. IMP. ET 

DOMITrANO. CAESARI 

M. VIBIVS. MARTIALIS 

7 LEG. X. GEM. ET. COMMrLI 

TONES. VEXILLÏ. LEG. EIVSD 

QVI. SVNT. SVB. CVRA. EIVS 

V. S. L. M 



MOSELLE. 



Saint- AvoLD. — Les eaux minérales que possède ce 
lieu (2), et dont on ne connaît guère que le nom , fu- 

(1) Cajlus, Recueil d'anliq,, tom. V, pi. CXIX, pp. 328^332 ; 
-^ OrelU, Op. laud., n. 2008. 

(2) Pâtissier, Manwl des eaux minérales, p. 557. 



( 276 ) 

rent-elles plus fréquentées dans l'antiquité ? On peut le 
présumer, en se fondant sur des monuments qui pa- 
raissent désigner Saint-Avold comme un lieu d'habita- 
tion romaine. Je n'indiquerais que d'une manière gé- 
nérale des antiquités sur lesquelles j'ai peu de notions, 
si je ne pouvais signaler à jnes lecteurs , comme pro- 
venant de cette localité , un objet digne d'un intérêt 
spécial . 

Je veux parler d'un marbre votif qui faisait partie 
du cabinet de Schoepflin, et qu'Oberlin a publié (1). 
On ne saurait le décrire que comme un parallélipipède, 
surmonté d'une sorte de niche de forme très-capri- 
cieuse , de même que le buste de la déesse qu'elle con- 
tient. Sur la partie qui forme le soubassement qua- 
drangulaire du monument , on lit cette inscription 
dédicatoire : 

DEAE.DEIRONAE 

MÀIOR. MA 

GIATI. FILIVS 

V. S. L. M 

C'est le seul monument OÙ se lise le nom de deirona, 
déesse qu'on ne trouve mentionnée chez aucun des 
auteurs anciens. On a prétendu, il est vrai, qu'elle 
n'est point différente de la déesse sirona, nommée assez 
souvent sur les monuments écrits (2). Je ne saurais 
voir de motifs solides pour reconnaître cette identité , 
et pour confondre deux noms dont la terminaison me 

(1) Mus. Schoepflin, p. iïi, tab. I, n. 2. 

(2) OTe\\i,InscriptJat.sel., lom. I, pp. 353, 387, 358, n. 2001, 
2047—2049. 



. ( 277 ) 

parait former le seul point de ressemblance. Quoi qu'il 
en soit , je ne doute pas qu'on ne doive regarder Dei^ 
rona comme une nouvelle divinité topique ; et de plus, 
j'admettrais volontiers qu'elle présidait aux eaux du 
lieu où ce monument a été découvert. On a porté , au 
reste , le même jugement sur la déesse Sirona (1). On 
pourrait répéter ici ce qui est admis dans l'école cel- 
tique sur la terminaison ona, désignant de l'eau^ à ce 
que disent ces Messieurs : faute de science et de foi , je 
dois m'abs tenir. 



NIÈVRE. 



On sait que ce département possède plusieurs sour- 
ces d'eaux minérales (2) : je me félicite de pouvoir 
donner quelques notions sur celles auprès desquelles 
des antiquités romaines ont été découvertes. Ces notions 
m'ont été transmises , sur la recommandation bien- 
veillante de Mgr. l'Evéque de Nevers, par M. Crosnier, 
ecclésiastique distingué de ce diocèse , qui en a étudié 
à fond l'histoire et les antiquités. 

Saint-Honoré. — Ces eaux thermales estimées (3) 
sont situées sur une des nombreuses voies romaines 
qui traversent le Nivernais ; et l'on y a découvert 

(1) DaDS le Btdletin monumental, tom. IX, p. 99, on peatroîr 
une lettre à ce sujet par M. de Florencourt, de Trêves. 

(2) Pâtissier, Manuel des eaux minérales, p. 357. 

(3) Ihid, , p. 477. 



( 278 ) 

beaucoup d'antiquités, notamment des restes consi- 
dérables d'un établissement de bains élevé par les con- 
quérants de la Gaule , mais qui parait avoir subi de 
grands ravages à une époque difficile à préciser. Us ont 
été reconnus surtout lors des fouilles exécutées en 
1 804, pour réunir dans un seul bassin les eaux éparses, 
et depuis que le nouveau propriétaire , qui en fit l'ac- 
quisition en 1836, s'est occupé, avec un zèle aussi 
heureux que constant , à découvrir et à conserver ces 
restes précieux de la splendeur romaine. « Les bas- 
» sins et les puits, me dit M. Crosnier, sont parfai- 
» tement conservés ; lés parois et le dallage sont en 
» marbre blanc , qui provient , à ce qu'on pense , des 
» carrières de Champrobert, peu distantes de Saint- 
» Honoré. Outre quantités de fragments de tuiles ro- 
» maines, de briques à rebords, de vases, on y a 
» trouvé des statuettes, et des médailles d'or, d'argent 
» et de bronze ; les plus nombreuses sont celles d'An- 
» tonin-le-Pieux , de (Commode, d'Alexandre -Sévère, 
» de Philippe , de Gallien , de Dioclétien , de Ck)nstan- 
» tin-le-Grand. » 

Saint-Parize. — « Ces eaux minérales sont situées, 
» m'écrit M. Crosnier, dans l'angle formé par l'embran- 
» chement de la voie romaine allant sur Nevers, et 
» joignant à Bug la grande voie d'Autun à Bourges. » 
On croit que l'ouverture de la source est le cratère d'un 
volcan, et le nom de Fonte-Bouillante, qu'on lui donne 
vulgairement, peut faire présumer qu'elle était chaude 
autrefois , à moins qu'on ne l'explique par le pétille- 



( 279 ) 

ment de ses eaux qui sont gazeuses. J'apprends encore 
que le village le plus voisin s'appelle Puits-de-Meaus , 
nom que l'on croit venir de Puteus malorum (1), 

En 1811, le bassin étant obstrué par la vase , on 
entreprit de le nettoyer ; et ces travaux , assez mal 
conduits , amenèrent cependant une découverte fort 
curieuse. A 16 ou 17 pieds de profondeur, on trouva 
une grille en bois, et trois bassins , en bois également , 
ayant la forme de baignoires ; aujourd'hui encore , ces 
objets sont visibles à certaines époques, lorsque les 
eaux ont plus de limpidité. Peut-être aurait-on lieu 
d'hésiter sur l'époque probable de ces constructions. 
Mais ce que l'on a vu d'analogue découvert aux bains 
du Mont-d'Or (2) rendrait rationnelle et vraisemblable, 
à mon avis, la conjecture qui les rapporterait à une 
haute antiquité, les bois à Saint-Parize, comme au Mont- 
d'Or , ayant pu être conservés par suite de quelque 
circonstance particulière , qui tiendrait , selon toute 
apparence, aux propriétés de la source minérale. 

Fontaine-des-Vertus. — Au sujet de cette source , je 
transcris textuellement les indications qui me sont four- 
nies par M. l'abbé Crosnier. 

« La Fontaine-des-Vertus , de même nature que h 
y> Fonte-Bouillante , est placée à 3 kilomètres environ 
» de la source dont on vient de parler ,. sur la grande 
» voie d'Autun à Bourges , nommée Chemin Brunichou 

(1) Si l'ancieDoeté de ce nom latin est bien établie, elle peut 
indiquer une fort ancienne exploitation des eaux de Sain(-Parize. 

(2) Sup., p. i09. 



( 280 ) 

» ( Brunichildis ) . Lorsque j'ai visité cette fontaine ^ 
9 c'était en été , le bassin était rempli d'une masse de 
» vase infecte qui bouillonnait. Depuis cettç époque y 
» on y a fait quelques déblais^ et on a découyeit un 
» puits en forme d'entonnoir quadrangulaire , ou de 
» pyramide renversée (1). Il eut été à désirer qu'on 
9 continuât les travaux. Près des deux sources dont on 
» vient de parler , sont les bois de Petit-Bourg et de 
» Grand-Bourg , où l'on rencontre fréquemment d'an- 
» ciennes fondations , et qui semblent confirmer une 
» tradition du pays , qui indique ce lieu comme l'em- 
» placement d'une ancienne ville qui aurait été brûlée. 
» Quand saint Patrice vint évangéliser le pays au vi* 
» siècle j il se nommait le Bourg des Gentils y Pagus 
» Gentilicus : il est dit dans sa légende qu'il se retira 
» dans un lieu peu éloigné de ce bourg, et qu'il y cons- 
» truisit une église. Quel était ce Bourg des Gentils ? 
» J'ai fait un travail assez étendu pour démontrer que 
» c'était la Gergovia Boiorum dont il est parlé dans 
» César ; et c'est bien en effet cette contrée que d'Anville 
» assigne aux Boiens. i> 

Il est surprenant que dans aucun des lieux de la 
Nièvre dont il vient d'être question , on n'ait retrouvé 
quelque inscription romaine : M. Crosnier m'assure qu'il 
n'en connaît aucune. 

(1) Ce puits doit être cerlaincmenl d'origine romaine. J'en ai 
mentionnés de semblables (Stip*, p. 5i ) à Bourbon-Lancy. 



( 281 ) 



N(mD. 



Saint-Amand. — Cette ville, plus célèbre pour ses 
boues minérales que pour ses eaux (1) , doit son nom 
actuel, comme son existence, à saint Amand, évêque de 
Tongres, qui vint au vu™* siècle fonder un monastère de 
bénédictins dans ce lieu, sauvage alors et couvert de 
bois, auquel on donna d'abord le nom &ElnOy mais qui 
prit plus tard celui de son fondateur (2). Rien dans sa 
vie n'indique en aucune manière que Ton connût à cette 
époque ni les eaux, ni les boues situées auprès de la 
ville actuelle , mais à une demi-lieue dans une plaine 
marécageuse. Néanmoins ce fait est suffisamment attesté 
par des témoins irrécusables, les monuments. Ceux-ci 
nous apprennent que les Romains avaient su apprécier 
les avantages dont la nature avait doté ce lieu, et que, 
pour les mettre à profit, ils y avaient exécuté des travaux 
importants et magnifiques. Une notice historique de 
M. Bottin me fournit à ce sujet la plupart des indications 
que je vais résumer (3). 

C'est une chose prodigieuse que la quantité d'objets 
antiques retrouvés à Saint-Amand, toutes les fois qu'on 
y a ouvert le sol , ou soulevé la vase : il est à regreter 

(1) Pâtissier, Manuel des eaux minérales, p. 452. 

(2) On peut Yoir sa yie écrite par Baudemond , dans le recueil 
de Surîus au 6 féyrier. 

(3) Mémoires de la société des antiquaires de France, tom. It 
pp. 353—379. 



( 282 ) 

que la plupart aient totalement disparu • On y a mentionné 
à diverses époques , des médailles en grand nombre et 
de tous les métaux , des poteries portant des noms d'ou- 
vriers , et notamment des fragments de vases en terre 
très-fine, avec des figures et d'autres ornements en re- 
lief ; des statuettes en bronze de Mercure , de Gupidon , 
de Pan ; un petit autel orné de bas-reliefs , également 
en bronze; des miroirs de métal, des armes, des 
lampes et autres ustensiles ; des tombeaux en pierre , 
et une inscription qu'on ne rapporte pas, et qui peut-être 
fut détruite ou employée avec des matériaux à bâtir , 
comme il arrive trop souvent. 

Outre une grande quantité de tuiles et de briques 
romaines , on a trouvé encore quelques vestiges de cons- 
tructions ayant certainement la même origine , et dont 
plusieurs attestent éviden^ment l'existence en ce lieu d'un 
antique établissement , destiné à l'exploitation des eaux 
ou des boues minérales. Telle est en particulier une 
suite de constructions , toute composée de petites loges 
souterraines en grand nombre. D'après leur diposition 
et l'emplacement qu'elles occupaient près de la fontaine, 
il ne paraît guère possible de douter que ces substructions 
n'aient fait partie d'un édifice thermal , élevé par les 
conquérants de la Gaule. 

Mais une autre découverte fut bien plus extraordi- 
naire ; et l'on n'hésiterait point à la juger fabuleuse , 
si elle n'était pas attestée par plusieurs écrivains qui 
disent en avoir été les témoins oculaires , et dont l'un 
fut long-temps le médecin inspecteur des eaux. C'est celle 
qui eut lieu en 1698, de deux cents statues colossales , 
ensevelies dans le bassin de la fontaine , et dont la p^u- 



( 285 ) 

part avaient été tellement altérées par leur séjour au 
sein des eaux, que les traits en étaient presque en- 
tièrement déformés. Je renvoie à la notice de M. Bottin , 
pour de plus amples détails sur cette découverte sin- 
gulière , dont il ne parait pas qu'aucune trace se soit 
conservée jusqu'à nos jours (1). Quoi qu'il en soit,, 
on peut présumer que ces statues, si elles étaient 
vraiment antiques , avaient fait partie de la décoration 
donnée par la magnificence romaine à l'édifice thermal 
de ce lieu. 



ORNE. 



Fontaine-de-la-Herse. — Cette source peu fréquen- 
tée (2), située dans la forêt de Belesme , arrondissement 
de Mortagne, mérite d'être distinguée sous le rapport 
archéologique , à cause des deux inscriptions romaines 
qu'on y a découvertes , et dans lesquelles , ce me semble , 
on doit reconnaître la preuve de son antique exploitation. 
Connues depuis long-temps , elles ont été illustrées par 
Baudelot (3) ; et la première a été cent fois citée (4) ; 
en voici le texte : 



(1) Op. laud, , pp. 364—368. 

(2) Pâtissier^ Manuel des eaux minérales , p. 338. 

(3) Mém, de VAcad. des Inscript. , tom. ICI, hist. p. 232. 

(4) M. de Caumont m'assure que l'inscription existe encore sur 
les lieux. 



( 284 ) 

DUS. INFERIS 

VENERl 

MARTI. ET 

MERCVRIO 

SACRVK 

Il y aurait à dire beaucoup plus que ne Ta fait Baudelot 
au sujet de cette inscription , monument d'un culte spé- 
cial dont on en connaît assez peu^ et remarquable d'ail- 
leurs par les noms des divinités qu'elle associe aux 
dieux infernaux^ et que nous ne sommes point habitués 
à mettre de ce nombre, si ce n'est Mercure, considéré 
quelquefois comme conducteur des âmes, et surnommé 
alors Psychopompe. Mais ce n'est pas ici le lieu d'entrer 
dans l'examen de ces détails. 

L'autre inscription est beaucoup plus simple , et ne 
contient qu'une seule ligne , composée de ce seul mot : 

APHRODISIVM 

Est-elle entière dans cet état , ou bien ne serait-ce qu'on 
fragment ? c'est ce que je ne trouve indiqué nuHe part. 
Quoi qu'il en soit, l'inscription est curieuse. On peut 
interpréter diversement le mot Aphrodisium, tout 
grec dans sa forme, et synonyme de Venereum. Dans 
le sens de ce dernier mot, il pourrait désigner un de ces 
lieux infâmes , qu'on appelait moins honnêtement lu- 
panar , prostibuluniy etc. Mais Aphrodisium , qu'on 
trouve ici pour la première fois sur un marbre antique, 
parait employé par Pline pour désigner un temple près 
A'Aniium consacré à Vénus (1). On peut plus convena- 

(1) Nat. hist.,\\l, 5(9). 



( 285 ) 

blement supposer dans la forêt de Belesnie, et aux en- 
virons de la source, l'existence d'un temple, d'une 
édicule , ou de tout autre monument religieux en l'hon- 
neur de cette déesse, déjà nommée, on vient de le voir, 
dans l'autre inscription du même lieu. 



PUY-DE-DOME. 



Ce département est un de ceux qui possèdent le plus 
de sources minérales , dont beaucoup n'ont qu'une ré- 
putation médiocre , et dont la plupart, à peine connues 
dans le pays, ne figurent pas dans les tableaux publiés. 
Au point de vue archéologique, aucun des lieux qui les 
possèdent ne saurait être comparé au Mont-d'Or, dont 
j'ai parlé sous le nom de Calenies aquœ (1). Je ne doute 
pas néanmoins que plusieurs de ceux que j'omets n'eu- 
sent pu être mentionnés ici , mais les suivants sont les 
seuls sur lesquels j'ai obtenu quelques renseignements: 
j'en dois une partie encore à l'obligeance du savant bi- 
bliothécaire de Glermont. 

La BouRBOULE. — Cette appellation , dans laquelle 
on croit trouver une onomatopée , donne , me dit-on , 
une idée assez juste du bruit que produisent les eaux 
lorsqu'elles sortent des tufs par lesquels elles ont à 
passer, et semblerait ainsi rappeler Vaqua... ructata 
cavernatim que décrivait saint Sidoine à ses Calentes 

(1) 5wjp., p. 101. 



N 



( 286 ) 

Baiœ (1). Ce ne serait pas, au reste, un motif suffisant 
de les reconnaître ici ; et j'ai donné de meilleures raisons 
pour placer ces thermes antiques au Mont-d'Or. Cepen- 
dant les eaux de la Bourboule passent pour avoir été 
connues au temps de la domination romaine , et sans 
doute cette assertion est fondée sur quelque reste d'an- 
tiquité retrouvé sur les lieux. Mais rien de spécial n'a 
été indiqué ; on m'écrit d'Auvergne qu'on y connaît ni 
ruines d'édifices , ni inscriptions, ni monuments votifs 
d'aucune sorte , et que les antiquités découvertes sur ce 
territoire ne peuvent être que des médailles, ou quelques 
débris. 

Chateauneuf. — Ce village de l'arrondissement de 
Riom possède de nombreuses sources thermales , long- 
temps négligées , mais qui prennent faveur .aujour- 
d'hui (2). Il paraît qu'elles furent aussi connues et em- 
ployées par les Romains. Mes motifs pour le penser se 
trouvent dans les lignes suivantes d'une publication ré- 
cente : « Il existe peu de documents sur ces thermes , 
» qui sont, à n'en pas douter, d'origine ou de construction 
» romaine. Aucune tradition ne fait savoir qu'ils aient 
» été connus jadis , et pourtant , en creusant une des pis- 
» cines, on a trouvé des médailles, ou des pièces de mon- 
» naie de fabrication romaine , provenant des colonies 
» d'Aix et de Marseille (3) . La découverte faite récemme n t 

(1) Epist. V, 14. 

(3) Pâtissier , Manuel des eaux minérales, p. 262. 

(3) Tout ceci est on ne peut pas plus inexact» et fait voir avec 
queUe réserve il faut accueillir les indications de cette nature , 
quand elles proviennent d'hommes étrangers aux études arebé^o- 



( 287 ) 

» de baignoires de briques parfaitement cimentées, 
* prouve qu'ils ont été abandonnés , après avoir été fré- 
» quentés pendant un temps plus ou moins long (i). » 

PoNT-GiBAUD. — Je n*aî aucune indication archéo- 
logique au sujet de cette petite ville , où coulent deux 
sources d'eau gazeuse (2). Mais le sol de ce canton est 
tellement fécond en débris d'antiquités , qu'il me paraît 
difficile de ne pas admettre , comme une conjecture fort 
probable , que ces eaux furent connues dans l'âge romain . 
Quelques-unes des découvertes sur lesquelles je la fonde 
sont mentionnées dans une notice spécialede M. Bouyon, 
habitant du pays, sur les antiquités de ce canton (3). 

Saint-Mart. — La commune de Royat possédait déjà 
depuis long-temps un établissement portant le nom de 
Bains de César ; je ne saurais dire jusqu'à quel point 
il pourrait avoir droit à ce nom, qui indiquerait une ori- 

gîques. Marseille n'était point colonie > mais yille autonome; et la 
colonie d'Àix , Aquœ Sextiœ , ne nous a point laissé de médailles. 
Je pense qu'il s'agit de médailles de la colonie de Nîmes , arec les 
têtes d'Auguste et d'Àgrippa , les plus communes de toutes les co- 
loniales dans notre Gaule» et de petites médailles grecques de 
Marseille en argent , qui ne sont pas plus rares. Le commerce de 
cette yiUe les répandait partout , au point que dans le département 
que j'habite , on troura à Bourg » il j a une quarantaine d'années , 
une masse de ces petites pièces pesant plusieurs livres. 

(1) Salneure, Essai sur les eatix minérales de Châteauneuf; Gannat» 
1834 , p. XII. 

(2) Pâtissier, Manuel des eatix thermales, p. 307. 

(3) Mémoires de la société des antiquaires de France, tom^ V, 
pp. 220—225. 



( 2.88 ) 

gine romaine , ni sur quels monuments antiques un tel 
droit serait fondé. 

Mais en 1843, au lieu où sont les sources qui por- 
tent le nom de Saint-Mart , et que de nombreux débris 
romains indiquaient comme un sol antique, des fouilles 
amenèrent une découverte assez importante pour démon- 
trer que les maîtres du monde connurent autrefois et 
utilisèrent ces eaux, car elle mit au jour une partie des 
ouvrages dont se composait leur établissement thermal. 
Parmi les constructions qu'ont fait reconnaître ces exca- 
vations , on trouva d'abord une piscine carrée de quatre 
mètres sur chacun de ses côtés, et divisée en deux par 
une séparation intérieure. Bientôt on reconnut une 
seconde piscine. Celle-ci était plus remarquable par ses 
détails : plus grande que la première d'un demi-mètre en 
tous sens, elle formait , comme elle , une enceinte qua- 
drangulaire ; mais dans cette enceinte était inscrit un 
bassin hexagone construit en pierre de grès, formant des 
sièges et des gradins. Plus tard on découvrit encore un 
canal , que la roule moderne recouvrait , et l'on arriva à 
une chambre voûtée , où l'on retrouva des pavés et pla- 
cages en marbre de couleur, ainsi qu'un fut de colonne 
en marbre blanc. 

Les travaux en étaient là lorsque fut publié l'opuscule 
intéressant auquel j'emprunte ces données (1). Ils ont 
dû être continués, mais j'en ignore les résultats ; sans 
doute ils ont donné lieu , ou donneront lieu encore , 
à d'autres découvertes , et l'on peut espérer de reconnaître 

(1) E. T. Royat, ses eaux et ses environs; Clermont , 1843> pp. S- 
15. 



( 289 ) 

quelque jour^ dans son ensemble, cet établissemem 
thermal des Romains au sein des montagnes des Arverni. 

Vic*LE-CoMXE. — On me dit que ce lieu, comme son 
homonyme du Cantal , possède quelques restes d'anti- 
quités j ou du moins en a reproduit. Cette assertion est 
d'accord avec quelques souvenirs un peu confus; mais 
n'ayant rien de plus précis à donner à mes lecteurs , je 
ne la consigne ici qu'en hésitant. 



PYRÉNÉES (Hautes-). 



Nulle partie du sol de l'ancienne Gaule n'est pFus 
abondamment pourvue de sources thermales, ou miné- 
rales, que les contrées pyrénéennes. Et cependant, elles 
n'occupent pas une grande place dans cette partie de mon 
travail, la pénurie des renseignements laissera ici, je le 
crains , de nombreuses lacunes. Je manque tout-à-fait de 
notions archéologiques sur les eaux des Basses-Pyrénées, 
trois noms seulement figureront parmi celles des Pyré- 
nées-Orientales, et pour les Hautes-Pyrénées, le peu que 
j'ai à dire ne vaudra guères plus que le silence. 

Cauterets. — Ces eaux , si réputées de nos jours , 
passent pour très-anciennement connues , et même pour 
avoir été exploitées aux jours de la domination romaine. 
Les hommes instruits du pays partagent celte opinion 
reçue, et l'on m'écrit tout-à-fiit dans ce sens. Je vou- 

19 



( 290 ) 

drais qu'où put Tétayer au moins de quelques débris 
antiques, nftais on n'indique rien de tel, et je soupçonne 
qu'elle n'est fondée que sur la tradition qui donne le 
nom de Céssu* à l'un des bains de l'établissement (1). 
Le lecteur peut juger si cette base est suffisamment 
solide. 



PYRÉNÉES-ORIENTALES. 



Bains-d'Arles. — Cet établissement qui voit s'accroître 
sa prospérité , a aussi une grande distinction au point 
de vue archéologique , car il possède des restes fort 
considérables des thermes qui furent construits près de 
ses sources à l'époque romaine. 

Ne connaissant sur ces eaux que le petit nombre de 
lignes que leur a consacré M. Mérimée (2) , j'ai eu re- 
cours à l'obligeance de M. Jaubert de Passa, corres- 
pondant de rinstitut, qui a fait une étude profonde des 
monuments de son pays , et je lui suis redevable de la 
plupart des indications que je vais mettre sous les yeux 
de mes lecteurs. Elles se rapportent presque uniquement 
aux antiques constructions thermales ; car, à l'exception 
d'une découverte récente et d'un grand intérêt, laquelle 
se lie essentiellement au culte des eaux , j'aurai tout dit 
sur le reste, en rappelant que ce département possède 
d'abondantes richesses en ruines romaines , en inscrip- 

(1) Pâtissier, Manuel des eaux minéraleê, p. 126. 

(2) Notes éPun voyage dans l&nUdi de la France, p. 417. 



( 291 ) 

tions^ sarcophages et monuments de tout genre , çtqu'à 
Arles, en particulier, on trouve fréquemment sous des 
constructions modernes , ou dans les champs , divers 
débris antiques, et des médailles puniques, celtibé- 
riennes, gauloises et romaines. Voici les restes des 
thermes antiques qui me sont signalés par mon savant 
et respectable correspondant. 

1° La grande piscine, bien remarquable encore, 
mais qui le serait davantage si les architectes^ modernes 
n'avaient point passé par là. « C'est un vaste parallé- 
» logramme, me dit M. Jaubert de Passa, avec une 
» belle voûte à plein ceintre^ percée vers le milieu 
» pour offrir un dégagement à la vapeur. Trois faces 
» étaient à demi percées de niches semi- circulaires, 
» au pied desquelles étaient des bassins pour les bai- 
» gneurs : ils ont été comblés plus tard. Les trois quarts 
» de la surface de la salle étaient creusés à 7 ou 8 pieds. 
» de , profondeur , et formaient la piscine, pavée de 
» briques posées sur champ, opus spicalum; au be- 
» soin c'était aussi un bassin de natation. On l'a com- 
» blç depuis 1840, on a pavé le sol en mosaïque et 
» entouré la salle de 30 à 36 cabinets pour les bai- 
» gneurs. La nef de cette piscine est fort belle. Les 
» baigneurs l'admirent, mais les artistes regrettent l'an- 
» cien bassin. » 

2° La petite piscine ,^ que M. Mérimée avait décrite 
antérieurement aux travaux exécutés pour les bains 
nK)dern6s (1), et que sa destination actuelle a^éservé 
des architectes de nos jours. « Elle n'a subi aucune dé- 

(1) Loc, laud. 



( 292 ) 

» gradation^ me dit encore 'M. de Passa ^ si ce n'est 
» qu'on a enterré la partie que Teau occupait au pied 
» des degrés placés sur chaque face du bassin. C'est 
» aujourd'hui l'église paroissiale. Elle est dans la di- 
» rection du grand aqueduc^ et l'un et l'autre longent 
» un petit torrent, qui protégea les thermes au moyen- 
» âge. » 

y Le grand aqueduc à arcades. « Il est construit en 
» briques romaines, continue M. de Passa, avec un 
» angle échancré. Il recevait les eaux de la source prin- 
» cipale par un aqueduc refait à plusieurs époques , et 
» les versait dans les deux piscines, et probablement 
» dans d'autres qui sont enfouies sous les maisons du 
» village. » Il existe aussi des aqueducs souterrains 
destinés à l'évacuation des eaux. Ceux-ci passent sous le 
village , et viennent aboutir à la petite rivière de Mon- 
doni. 

4® On peut encore rapporter aux thermes romains 
des cavités taillées dans les rochers qui bordent la rive 
gauche de la rivière , et dont l'une forme aujourd'hui un 
bassin de natation pour les nouveaux thermes. M. de 
Passa pense que ces excavations pouvaient être dans 
l'antiquité les bains des pauvres. Il faut mentionner 
aussi un fort barrage en maçonnerie placé entre deux 
rochers, et en travers de la rivière, pour amener aux 
thermes les eaux froides. Aujourd'hui, il sert encore à 
alimenter les fontaines publiques. On ne saurait dire 
comment cet ouvrage antique est attribué vulgairement 
à Hannibal , et appelé de son nom. 

On me dit aussi que plusieurs maisons du village 
conservent encore des restes de constructions antiques , 



( 293 ) 

qui ont dû faire partie des thermes romains. De ceci , 
et de tout ce qui précède , on peut donc conclure que 
cet établissement 9 dans un petit village des Pyrénées, 
couvrait une étendue de terrain considérable , et qu'il 
était fort important. 

Il me reste à parler de la découverte que j'ai an- 
noncée plus haut , laquelle donne à ces bains romains 
un caractère tout spécial, en nous révélant diverses 
particularités du culte qu'on y rendait aux divinités 
des eaux, et nous faisant connaître une classe de mo- 
numents votifs auxquels rien de connu ne ressemblait 
jusqu'à présent. Je vais donner les détails essentiels sur 
l'objet et les circonstances de cette découverte récente ; 
j'en suis redevable à l'obligeance de M. Henry, de 
Perpignan , archiviste de Toulon , qui a bien voulu me 
communiquer aussi les calques des dessins fac simile 
pris sur les lieux. 

Le propriétaire de l'établissement thermal , voulant 
ajouter au volume d'une des sources , eut recours à un 
escarpement pratiqué dans la roche granitique d'où elle 
s'échappe. Il eut un plein succès, et la force du jet de la 
source s'étant accrue, comme la masse de ses eaux, 
expulsa de l'intérieur quelques petits objets antiques 
qu'il recelait. De ce nombre étaient : des médailles en 
bronze , de coin romain , A'Emporium et de la colonie 
de Nîmes , mais très frustes et à peine reconnaissables ; 
deux objets en plomb, .ayant la forme de boutons 
bombés, comme ceux de notre cavalerie légère, et dont 
l'un était assez petit pour avoir pu servir à un usage 
analogue, de petits disques en» métal couvert de cristaux 
grisâtres , qui , des empreintes qu'on croyait y voir, ne 



( 294 ) 

conservèrent , quand on voulut les nettoyer de la couobe 
ertstalline, qu'une poussière noire impalpable; enfin 4t 
petites lames de plomb très-minces ^ pliées en trois ou en 
quatre , comme nous ferions aujoiird'hui d'une feuille 
de papier. Ces derniers monuments font tout l'intérêt 
de cette découverte , car ils sont chargés de caractères 
gravés à la pointe , malheureusement fort altérés en 
quelques parties par les plis faits aux feuilles , et par 
l'oxidation qu'elles ont subie. 

Quoique j'aie entre les mains les calques de toutes ces 
inscriptions encore inédites , je n'ai point l'intention de 
hasarder l'entreprise difficile de les lire et de les pu- 
blier. Ces calques ont été confiés à un de nos savants les 
plus distingués , versé spécialement dans ce genre d'é- 
tudes.; et l'on est en droit d'attendre de lui qu'il en tiré, 
avec la sagacité éclairée qui le distingue , tout le parti 
possible (1). Pour moi, je dois me borner ici à quelques 
simples observations. 

Ces feuilles sont écrites en caractères cursifs fort iné- 
galement tracés ; elles présentent quelquefois un singu- 
lier mélange des lettres grecques avec les lettres latines. 
Dans mes essais de lecture, peu suivis il est vrai, je n'ai 
point réussi encore à déchiffrer un certain nombre de 
mots que je puisse lier ensemble, pour former un sens. 
Néanmoins, au premier aspect, on reconnaît facilement 
quelques noms romains : j'ai lu sur la même lame ceux 
de NVMENE MAXisfiE et MA. . iMiNA. Une autre inscription , 

(1) M. Henry les a remis entre les mains de M. Letronne , et il 
espère que cet habile philologue ne tardera pas à faire paraître, dans 
la Rerue archéologique, les résultats de ses études sur ces monu- 
ments curieux. 



( 295 ) 

qui présenté beaucoup de caractères grecs , commence 
parie mot katîta, et ce pourrait bien être le nom d'une 
divinité invoquée : nimfa, si je ne me trompe, est le 
commencement d'une troisième. Si je lis bien ailleurs 
les mots BOGT. vt, auquel cas on peut voir dans le pre*- 
mier Tabbréviation de rogat, cet^e expression me sem- 
blerait autoriser ma conjecture, que quelques-unes de 
ces feuilles écrites contiennent des prières. Enfin sur 
deux de ces plombs, le motRosAH ne saurait être contesté r 
je crois qu'il en est de même de lunos sur un autre ;^ et 
les trois premières lettres de ce mot apparaissent encore 
sur un quatrième. Ceci peut faire présumer qu'on ho- 
norait les nymphes, ou leg divinités thcijmales de ce lieu, 
par des (Grandes de rameaux et de roses. 

Quoi qu'il en soit de ces conjectures , il parait certain , 
du moins, que là on jetait dans le sein des eaux des 
inscriptions surplomb, pliées, en quelque sorte, comme 
des lettres , et qui ne pouvai^t être que votives : cette 
coutume, qui a un côté fort poétique, est pour nous une 
chose toute nouvelle (1); et je crois pouvoir en dire 
autant de la forme donnée à ces lames de plomb (2). Si 

(1) On ne trbure rien de semblable chez les écrivains de Tantî- 
quité , quoiqu'ils fassent souvent mention d'offrandes singulières 
jetées ainsi dans les eaux de la mer , des lacs, ou des fontaines. 

(2) Les auteurs anciens signalent sourent encore des liyrês écrits 
sur plomb , dont le plus célèbre est , sans doute , celui d*Hésîode 
qu*on Tojait encore du temps de Pausanias , ( Bœot (IX), 31) près 
de la source d'Hypocrène. Les modernes ont retrouvé aussi quelques 
inscriptions antiques gravées sur ce métal , mais rien de semblable 
à ce que nous voyons ici. Ce qui offrirait le plus d^analogie , à* là des- 
tination près, serait, sans contredit, celles dont parle Boldetti(Cifnf- 
terideiSS. Martiri, p. 324 ) comme trouvées dans des tombeaux des 
Catacombes, et que Ton pensait être des actes de martyrs: mais dont 



( 296 ) 

une telle pratique était communément suivie en ce lieu , 
ce que de nouveaux travaux aux débouchés des sources 
pourront quelque jour nous mettre à même de mieux 
constater 9 il serait curieux de connaître par quelle voie 
ces suppliques^ ou ces actions de grâces , étaient adres- 
sées aux divinités aquatiques. Il est de toute évidence 
qu'on ne pouvait se servir à cette fin de Foriflce par lequel 
s'échappent les sources ; leur impulsion eût rejeté toute 
oiFrande faite ainsi à leurs nymphes. Il fallait donc qu'on 
employât pour cela quelque ouverture, naturelle ou 
factice, existant alors sur un poiùt plus élevé du rocher^ 
et qui aujourd'hui serait inconnue , ou aurait été fermée 
après la chute 4p paganisme. Gela étant, je ne serais 
pas éloigné de croire qu'ail y avait en ee lieu un puits 
sacré, orné convenablement, et renfermé dans un temple 
ou dans une édicule , où l'on pouvait arriver par des 
chemins praticables aux baigneurs. Des recherches dans 
les rochers qui dominent les sources pourraient seules 
confirmer cette conjecture ; et il serait désirable queles 
archéologues du pays voulussent s'en occuper sérieuse- 
ment. 

EscALDAs.— Ce village, voisin de la frontière d'Espagne, 
a deux établissements pour l'administration de ses eaux 
thermales , qui sont assez fréquentées par les habitants 

on a jamais pu reconnattre les caractères , parce qu'elles se brisaient 
comme du verre , dît Boldetti , lorsqu'on voulait tenter de les dé- 
rouler. Car ces feuilles différaient encore de celles d'Arles en ce 
qu'elles étaient roulées , comme les rolumes des anciens ; on peut 
en juger par le dessin qu'il donne (Tav. H^ 3 ) de Tune d'eUes, 
qu'il avait retrouvée lui-même. * 



( 297 ) 

des environs ; et surtout par les Catalans (1). Son nom, 
qui a la même signification que celui ^Aqum Calidœ, 
lui vient peut-être de Tantiquité. Il est certain , du moins^ 
que ses eaux ont été connues des Romains , et qu'ils y 
avaient formé un établissement. Il n'en existe plus rien 
d'apparent : là encore, les architectes ont fait leur métier, 
qui semble être de détruire ; et tout ce qui appartenait 
à ces thermes antiques a été , ou renversé de fond en 
comble , ou enfoui sous l'ouvrage des maçons modernes. 
Mais M. Henr}' m'assure avoir vu encore, il y a une tren- 
taine d'années , des restes fort bien caractérisés de ces 
bains regrettables. 

Vernet, — Ce lieu thermal pittoresque, et intéressant , 
dit-on , pour le naturaliste (2) , devra peut-être, à l'en- 
gouement de la mode, une vogue nouvelFe, depuis que 
ses bains ont reçu la visite d'un grand prince de l'Orient. 
11 parait qu'il jouissait d'une certaine splendeur, il y a 
quelques siècles. « L'arc gothique de la salle de la piscine, 
» me dit M. Henry, moins grande que celle d'Arles, en 
D assigne la construction au moyen-àge , et de quelques 
» données historiques , j'avais pu déduire que cet éta- 
9 blissement devait son origine aux rois de Majorque. » 

Cette notion n'est certainement pas dépourvue d'ih- 
térêt ; mais, comme elle est par elle-même en dehors de 
l'époque dont je m'occupe, je ne l'eusse pas transcrite 
ici, si je n'avais pensé y voir un motif assez fort de re^ 
monter plus haut. Il me parait probable, en effet, que 

(1) Pâtissier, ManvLel des eaux minérales, p. 148. 

(2) Op. laud. . p. 151. 



( 298 ) 

dans ces siècles où l'on faisait peu de créations en ce 
genre , les rois de Majorque durent moins fonder que 
restaurer, et qu'un établissement romain existait déjà à 
Vemet. J'ignore si cette conjecture pourrait s'appuyw 
encore sur quelques débris antiques. 



RHIN (Bas-). 



NiEDERBRONN. — Dc touic FAlsacc, c'est le seul lieu 
dont j'ai à parler ici, quoique les départements formés 
de cette province possèdent, l'un et l'autre, des eaux 
minérales en assez grand nombre (i) ; pour le reste, les 
renseignements m'ont fait défaut, et je crains fort de 
commettre quelque omission. 

Près de ces eaux, qui sont incontestablenient les plus 
célèbres de l'Alsace (2) , on retrouve non-seulement des 
débris de peu d'intérêt, indices toutefois d'un lieu d'ha- 
bitation romaine, mais des vestiges plus importants et 
plus significatifs. Des restes de constructions ont été 
observés dans les alentours de ces bains modernes ; deux 
bassins hexagones fort remarquables, qui servent encore 
aujourd'hui à recueillir les eaux des sources, passent 
pour avoir été primitivement l'ouvrage des Romains : 
en un mot , me dit-on trop brièvement , tout y respire 
l'antiquité , tout annonce qu'il exista autrefois en ce lieu 

(1) Pâtissier, Manuel des eaux minérales, p. 558. 

(2) Ibid. , p. 488. 



( 299 ) 

un grand établissement thermal y digne des maîtres du 
monde. 

On a trouvé à Niederbronn, à la fin du xvi"* siècle, 
un ancien pavé et une multitude de médailles romaines ; 
au commencement du xvni""®, on y découvrit un cha- 
piteau de colonne , et un autel quadrilatère , où étaient 
représentés Mercure , Apollon, Minerve et Hercule. De 
ce sol provenaient encore quelques monuments du ca- 
binet de Schoepflin, qui ont été décrits par Oberlin. 
Tels sont deux bas-reliefs en pierre , de petites propor- 
tions, dont l'un peut représenter une Minerve (1); 
l'autre, figure un cavalier entraînant un captif (2). Tel 
est encore un fragment, qui fut la partie inférieure d'un 
autel votif, consacré, on ne sait à quelle divinité, par 
des militaires de Ja vnr^ légion , sous le consulat de 
Caracalla et de Geta (3) ; c'est tout ce que nous appren- 
nent ces quatre lignes , les seules qui aient été con- 
servées (4) : 

LEG. Vin. AV. . 

V.S.LL.M 

IMP. ANTONINO 

II. ET. : • : : : C. COS 

Ce fragment avait été trouvé sur une montagne , près 
du bourg de Niederbronn. C'est là aussi, me dit M. de 
Golbery , correspondant de l'Institut , que dut exister 

(1) Mus. Schoepflin, p. 20, tabl. I, 4. 

(2) Ibid,, p. 22, lab. Il, 1. 

(3) Le nom de Geta a été effacé à dessein , comme sur d'antres 
monuments , ,méme sur des médailles. 

(4) Op. laud. > p. 35 , tab. II > 3. 



( 300 ) 

un édifice en briques eonsacré à Mercure , attbgia te- 
GVLiciA (1), que mentionne cette inscription décou- 
verte au même lieu (2) : 



DEO.MERCVRIO. ATTEGI 
AM. TEGVUCLàM. COMP 

OSITAM. SEVERimVS 

SATVLLINVS. C. F. EX. VO 

TO.POSVIT.L.L.M. 



RHONE. 



.f 



Charbonnières. — Le voisinage de la grande ville de 
Lugdununiy qui porte sur la Carte de Peutinger le titre de 
Capul Galliarum (3) , pourrait faire présumer que l'àgc 
romain n'ignora pas ces eaux peu réputées denosjours^ 

(1) L'adjectif teguliciiu dérivé de teyula , n'est pas connu chez les 
< auteurs, ni sur d'autres monuments; mais il n'a pas besoin d'être 

expliqué. Quant au mot attegia, qu'on ne trouve peut-être que 
dans ce vers de Jurenal ( Sat, XIV, r. 196), * 

Dirue Maurorum attegias , cMtella Brigantum , 

il parait sîgniûer une cabane , une hutte , et Forcellini lui donne 
une origine arabe. Ces deux mots, appliqués ici à Mercure, doivent 
désigner une sorte d'édicule rustique, ou bâtie en tuiles, ou n'ayant 
qu'un toit supporté par des piliers, en bois suivant toute apparence. 

(2) Schoepflin , Alsat. illiMtr. , tom. I^p. 445 ; — Orelli , Jnscript. 
lat. sel.y tom. I , p. 285. » n. 1396. 

(3) Segm. II, a. 



( 301 ) 

bien qu'elles aient un médecin inspecteur (1). Je ne 
connais pas d'autre argument qui milite pour elles : 
quelques médailles sont les seuls monuments antiques 
découverts, que je sache, dans ce village. 

Quoique lyonnais , j'ignore absolument toute donnée 
archéologique concernant les eaux minérales, bien 
moins connues encore, qui coulent dans quelques autres 
lieux du département du Rhône (2). 



SEÏNE-INFÉRIEURE. 



Forges. — Les lignes suivantes de M. Fernel, anti- 
quaire du pays, donneront tous mes motifs pour inscrire 
ici le nom de ces eaux assez peu fréquentées (3). « Près 
» du bourg de Forges, le long de la grande route de 
» Paris à Dieppe , et seulement à 200 pas de cette route , 
» en face des eaux minérales, on remarque un lieu élevé, 
» maintenant planté d'arbres, nommé le Donjon. La 
» mémoire n'a rien conservé sur cet établissement. . . 
» Je découvris à l'aide de quelques tranchées , et je mis 
» au jour en plusieurs endroits , et particulièrement du 
» côté du chemin longeant le Donjon , non loin de la 
» grande route actuelle , une quantité remarquable de 
» fragments de tuiles romaines , même de briques . . . Des 
» habitations se grouppaient autour de cet établisse- 

(1) Pâtissier, Manuel des eaux minérales ^ p. 549. 

(2) Ihid. y p. 558. 

(3) Ihid, , p. 327 , 



( 302 ) 

y» ment. . . Tout fait croire que là fut le premier éiablis- 
» sèment romain dans cette contrée, où plus tard, non 
» loin de là, s'établirent des forges, qui donnèrent leur 
» nom, Forgiœ, au village (1). » 

Sainte-Marguerite. — Il y a bien plus de positif dans 
les indices que ce lieu fournit, et d'une habitation ro- 
maine , et d'un antique établissement destiné à l'exploi- 
tation des eaux peu célèbres qui coulent sur son sol (2). 
Là , des monuments importants , et d'une nature non 
douteuse, attestent le passage du peuple éminemment 
civilisateur. Ce sont surtout des constructions de divers 
genres, liées entre elles, et composant l'ensemble d'un 
vaste édifice , qu'on a regardé comme une villa : il pour- 
rait bien avoir fait partie d'un établissement thermal ; 
mais dans l'un ou l'autre cas, il aurait toujours un rap- 
port plus que probable avec les eaux minérales, ce que 
paraissent prouver les restes considérables d'hypocaustes 
qu'on y a découverts. De plus on a reconnu des cours, 
des portiques, un escalier, des galeries, des salles de 
diverse^ grandeurs, dont une en hémicycle, etc. Un 
grand nombre de pièces étaient pavées en mosaïques ; 
et la richesse des décorations est attestée d'ailleurs par 
des bases et des fragments de colonnes , des débris de 
peintures murales et de placages en marbres variés. Je 
ne dis rien des sépultures fort singulières découvertes à 
l'extérieur de l'édifice , et au pied d'un des murs : elles 
paraissent d'un âge postérieur, bien certainement du 

(1) Mémoires de la société des antiquaires de Normandie , 2™* série , 
tom. I, pp. 175 , 176. 

(2) Pâtissier , Manuel des eaux minérales , p. 559. 



( 505 ) 

moins, elles n'appartiennent point à la population ro- 
maine, ou gallo-romaine, de Fépoque qui vit élever ces 
constructions (1). 



SOMME. 



ABBEviLLE.-^Quand je place ici le nom de cette ville, 
en supposant que les eaux minérales qu'on y connaît de 
nos jours (2) purent aussi être connues dès l'âge ro- 
main , je n'ai point à citer en preuve quelque construc- 
tion importante , thermale ou autre , qu'on puisse faire 
valoir pour l'établir avec une entière certitude. Je puis 
seulement rappeler à mes lecteurs que de petits monu- 
ments recueillis fréquemment, soit dans son enceinte, 
soit dans ses environs les plus rapprochés, tendent à 
la faire reconnaître comme ville romaine , bien que 
son nom ancien soit tombé en oubli. Il serait long de 
rechercher , dans les recueils d'antiquités , tous les pe- 
tits objets de fabrique romaine que le sol d'Abbeville a 
rendus aux études archéologiques. Je me bornerai à 
mentionner quelques-uns des plus remarquables, entre 
ceux qui ont été publiés par Grivaud de la Vincelle. On 
peut assurément qualifier ainsi les deux statuettes en 
bronze représentant le dieu des combats , mais , sui- 
vant l'opinion de cet antiquaire, avec les traits du ty- 

(1) Feret , Lettre sur les fouilles de Sainte-Marguerite , dans le Bul- 
letin monumental, tom. IX > p. 92 — 97. 

(2) Pâtissier « Manud des eaux minérales, p. 559. 



( 304 ) 

ran Postume^ qui usurpa l'empire des Gaules sous le 
règne faible et honteux de Gallien (I). L'une est entiè- 
rement nue , à là réserve du casque dont la tête du 
dieu est couverte ; l'autre nous le montre complètement 
armé du casque, de la cuirasse, et de plus, des cnémi- 
des ou jambières, armure qui ne se voit communément 
que dans les ouvrages des Grecs. On peut placer plus 
haut encore le groupe, également en bronze, de deux 
jeunes lutteurs, dans lequel Grivaud , à tort je le croi- 
rais , veut reconnaître la lutte d'Hercule avec Antée et 
le moment de son triomphe (2) : quelque opinion que 
l'on adopte sur la signification de. ce monument, on le 
considérera , sans aucun doute , comme un des plus 
beaux bronzes qui aient été découverts dans notre 
Gaule. 



VOSGES. 



Sans trop m'écarter de mon sujet, je crois pouvoir 
rappeler à mes lecteurs que la chaîne des montagnes 
qui ont donné leur nom à ce département est riche en 
antiquités romaines , et qu'on y a trouvé notamment 
un grand nombre d'autels votifs , élevés à des divi- 
nités communes ou locales. Celui qui mérite le plus 
d'être cité, le seul que je citerai spécialement ici, est 

(1) Rectieil de monuments antiques , tom. II , pp. 164 — 169 , 
pi. XVII, 4, 5 et 6, pi. XVIII, 1 et 2. 

(2) Ibid. , p. 188-190, pi. XX, I, pi. XXI, I. 



( 305 ) 

celui qui fut coiisdcré au dieu de ces montagnes ^ appelé 
de leur nom Vosegus, et non Vogesus, comme on a Iti 
plus d'une fois , notamment dans ce vers deLucain (1) : 

Castraque Vosegi curvam super ardua rupem. 

Cest la leçon correcte , comme le remarque Orelli , de 
l'inscription suivante gravée sur cet autel (2) : 

VOSEGO 
MAXSII 
MINVS 

V* s» L* Lk 

Je suis persuadé que beaucoup de lieux de ce départe- 
ment possèdent aussi des antiquités ^ plus ou moins 
importantes, parmi ceux qui figurent sur les tableaux 
des eaux minérales de France (3). Mais il n'en est qu'un 
dont je sois à même de parler ici. 

Plombières^ — Mes démarches pour obtenir des ren- 
seignements complets sur les monuments de ces thermes 
si renommés , n'ont pas eu à beaucoup près tous les 
résultats que j'en attendais ; et les livres ont été à peu 
près nuls pour moi sur ce point. On m'a raconté des 
traditions fabuleuses sur l'origine de ces bains, qui pa- 
raissent admises dans le pays avec une bonne foi admi- 
rable ; mais on ne m'a donné que bien peu de notions 
positives et précises , soit sur la partie antique de l'éta- 
blissement actuel, soit sur les autres antiquités qui 
existent à Plombières, ou y ont été retrouvées. 

(1) PharscU , I , T. 397. 

(2) Inscript. laL seL, tom. I, p. 360, n. 2072. 

(3) Pâtissier > Manwl des eaux minérales, p. 559. 

20 



( 306 ) 

II parait certain du moins : l"" que des constructions 
romaines y ont été reconnues , qu'il en existe des vestiges 
sous des maisons particulières, qu'on a trouvé fré- 
quemment des débris de briques et de tuiles antiques ; 
2** que quelques portions des thermes actuels sont 
primitivement un ouvrage romain; 3** enfin que des 
monuments de diverse nature, médailles, poteries, 
ornements d'architecture, inscriptions, etc. ont été dé- 
couverts à différentes époques (1). ' 

Mais quels sont précisément les restes des thermes 
romains qu'on peut reconnaître avec certitude au milieu 
des ouvrages modernes ? C'est ce qui parait difficile à 
constater, et l'on peut être de l'avis de dom Galmet, qui 
regarde comme fort douteuses beaucoup d'opinions 
reçues au sujet de ces bains antiques (2). Dans un autre 
ouvrage, cependant, il avait donné cette inscription, que 
son orthographe bizarre lui paraissait placer aux bas 
temps de l'Empire (3) : 

DEAEO. NEPTVN 

lOVTISSIA 

VESTINÀ 

V. s. L. M. 

On m'indique deux autres inscriptions qui existent en- 
core sur les lieux : la première est sépulcrale, et n'offre 
rien de saillant ; l'autre ne m'a pas été communiquée. 

(1) On me dit que plusieurs monuments troiiTés à Plombières 
sont conservés au musée d^pinal. 

(2) Notice de la Lorraine , tom. Il , p. 203. 

(3) Traité des eaux de Plomhièreê, p. 36. 



( 307 ) 



YONNE. 



Ce département a quelques eaux minérales fort peu 
connues (!)• Ne possédant aucune indication sur les 
antiquités qu'on peut y avoir découvertes, je cherche 
à remplir, en quelque sorte, cette lacune , en rapportant 
une inscription qui atteste le culte rendu autrefois à la 
rivière du pays, ITonne, dont le nom latin était Icath 
nus (2). Ce monument fut trouvé à Auxerre, en 1721, 
et a été publié par Caylus (3), dont je reproduis la copie ; 

ÀVG. SÀCR. DEÀB (4) 
ICAVNI 
T. TETRICIVS. AFRICAN 
D. S. B. B. 

On peut présumer, comme je Fai fait ailleurs, comme 
des exemples analogues autorisent à le faire (S), que 
quelque vertu médicinale était attribuée aux eaux de 
cette rivière, qui ne me paraissent pas avoir aujourd'hui 
aucune réputation de celte nature. 

(1) Pâtissier, Manuel des eaux minérales, p. 559. 

(2) Ce nom ne se trouve que dans les écriyains des bas siècles ; le 
géographe de Ravenne ( IV, 26 ) donne le nom à*Egona. 

(3) Recueil ^antiquités, tom. VII, p. 290, pi. LXXXffl, 1, 

(4) Bimard (AdMurator. Prolegotn., col. 58) lîtDEAB, d'Autres, 

DEAB. 

(5) Notamment ce que j'ai rapporté (Sup., p. 237) sur les décou- 
vertes faites aux sources de la Seine. 



( 508 ) 



PRUSSE -RHÉNANE. 



RoiSDORFF. — Ces eaux sont situées près de Bonn et du 
Rhin, dans l'ancienne seigneurie d'Alfter j appartenant 
encore aujourd'hui à M. le prince de Salm-Dyck* Ce lieu 
était donc compris à l'époque romaine dans le territoire 
de la Gaule Belgique y comme j dans des jours plus 
glorieux pour la France , il fit partie de notre départe- 
ment de la Rôer. 

J'avais lu, sans autres détails, dans un ouvrage du 
respectable docteur Allibert, que ces eatix avaient été 
connues des Romains. Pour avoir des renseignements 
plus positifs, je me suis adressé à M. le Prince de Salm, 
et je reproduis littéralement les indications qu'il a bien 
voulu me donner à ce sujet , sans omettre les lignes 
étrangères à l'objet de cet ouvrage , parce qu'elles peu- 
vent intéresser quelques lecteurs : « On n'y a jamais 
» trouvé des traces d'anciens thermes , ni de construc- 
» tions romaines; mais bien, et encore récemment, 
» lorsque la source a été nettoyée jusqu'au fond (elfe 
» a près de 20 pieds de profondeur ) , des débris de 
» poterie romaine. Il y a dans ce lieu deux sources 
» minérales de nature différente, sans compter une 
» troisième d'eau non minérale , presqu'à côté de l'une 
» et de l'autre. La première (la seule exploitée) est 
^ toute semblable à celle de Selters , et à exactement 
» les mêmes qualités. La seconde est ferrugineuse. » 

(1) N(mveauxfiémmtsdetlUrapmtiqm^XomA\iy^.^92r* 



(309 ) 



SAVOIE. 



Menthon. — On m'avait parié vaguement de ce lieu 
situé près du lac d'Annecy , de ses eaux minérales , et 
des restes de constructions romaines qu'on y voyait 
encore. Mgr. l'Evêque d'Annecy, prélat aussi distingué 
par sa science que par son zèle, m'a fourni, avec une 
extrême bienveillance, tous les renseignements que je 
pourrais désirer ; et je ne saurais rien faire de mieux que 
de donner à mes lecteurs cet extrait de la lettre qu'il m'a 
fait l'honneur de m'adresser. 

« Au bord du lac, au pied d'une charmante colline, 
» et sous des arbres séculaires , se trouvent des ruines 
» qui maintenant dépassent à peine le niveau du sol. 
» Heureusement, sur une partie des vieux murs un 
» paysan a placé des poutres sur lesquelles repose le 
» chaume qui l'abrite. Sans cela peut-être le gazon, qui 
» recouvre les neuf dixièmes d'un grand édifice, en 
» aurait caché l'existence à la curiosité des archéologues. 
» Les murs , les assises , le ciment , tout est romain . Les 
» piscines parfaitement dessinées, au nombre de quatre,. 
» les aqueducs pour l'arrivage et le départ des eaux, 
» tout indique de la manière la plus évidente que 
» c'était un établissement de bains. La difficulté est de 
» savoir où l'on prenait les eaux. Tout près de là, et au- 
» dessus, se trouve une source d'eau fortement sulfu- 
» reuse , mais si peu abondante, qu'felle en fournit à peine 
» deux ou trois litres par heure. Sa température ne dé- 
passe pas celle des sources ordinaires. A moins. que la 



( 510 ) 

» source ne se soit perdue , ce n'est pas elle qui alimentait 

» les bains (1). Près de là encore, coule abondamment un 

» ruisseau qui descend de la colline. J'aime à croire que 

» les Romains , qui comptaient l'usage des bains comme 

» l'un des premiers besoins de la vie, se contentaient 

> de ces eaux, qui ne sont ni thermales ni minérales. 

» Peut-être qu'un habile archéologue saurait retrouver 

» dans les masures qui restent, la place où existaient les 

)> chauffoirs. » 



GRAND DUCHÉ DE BADE. 



Badenviller. — Comme je l'ai fait ailleurs pour un 
petit nombre de lieux , je crois pouvoir placer ici ces 
eaux, quoiqu'elles n'appartinssent point à la Gaule, mais 
aux établissements romains de la frontière, sur la rive 
droite du Rhin. Au reste, n'ayant pas à ma disposition les 
savants ouvrages qui en ont parlé avec détail (1), je ne 
fais que mentionner brièvement cette petite ville, située 
tout près du grand fleuve et au pied du Blauen. Je me 
bornerai à dire qu'on y trouve de nombreuses antiquités, 
et qu'elle possède des restes précieux des thermes 
élevés par les Romains : les bassins notamment sont 
dans un état de conservation qui ne laisse rien à désirer. 

(1) Il me parait plus probable que les eaux minérales se seront 
dispersées, ou mêlées arec d'autres, ce qui est fort ordinaire ; mais 
qu'elles pouTaient autrefois alimenter les bains romains. 

(2) Je n'ai pu consulter, ni YHtstoria Nigrœ Sylvœ de Gerbert, ni 
le Supplément de M. de Golbery à ses Antiquités de V Alsace, 



(SU ) 

C'est sur la montagne qui domine Badenviller y qu'on 
a trouvé un autel consacré à Diane surnommée Aôwofta^ 
du nom même de la montagne (1) , ainsi que l'atteste 
cette inscription qu'on y lisait (2) : 



IN. H. D. D. 

DEÂNAE. AB 
NOBAE. GASSIA 

NVS. CASATI 

V, S. L. L. M 
ET. ATTFANVS 

FRATER. FAX 

CON. ET. CLARO 

CCS 



CONCLUSION. 



J'arrive enfin au terme d'un travail qui a été plus 
d'une fois ingrat et décourageant. Le lecteur sera indul- 
gent pour les imperfections que j'y reconnais moi- 
même , s'il peut se faire une juste idée des peines et 
des désappointements que j'ai éprouvés dans mes dé- 
marches , pour obtenir sur les lieux les renseignements 
nécessaires. J'eusse été trop heureux de trouver toujours 
des correspondants aussi éclairés et aussi bienveillants 
que ceux dont j'ai cité les noms, et bien d'autres encore, 

(1) Plio. , NaU hisu,\y, 12 (24) ; — Tacit., Grnn., I. 

(2) OreUi ^iMcripU laUseL, tom. I, p. 351, n. 1986. 



( 312 ) 

auxquels j'offre ici l'assurance d'une sincère gratitude. 
Mais il s'en faut que j'aie rencontré partout ce bon es- 
prit et cette obligeance ; et j'ose à peine dire que plus 
d'une lettre confiante et polie n'a reçu d'autre accueil 
qu'un silence que je m'abstiens de qualifier. De là tant 
de notions incomplètes , tant d'incertitudes ^ et sans 
doute aussi de nombreuses lacunes. J'aime à espérer 
qu'il me sera donné quelque jour de faire mieux. 

Après cette apologie de mes fautes , déplacée peut- 
être ici, je veux donner encore à mes lecteurs , instar 
coronidis , comme aurait dit un ancien , l'inscription 
suivante qu'un ami me communique , et qui doit être 
peu cQnnue. J'ai lieu de croire qu'elle a été trouvée en 
Allemagne , il y a un petit nombre d'années , auprès 
de quelque source minérale : du moins elle se rattache 
au culte des divinités des eaux , dont j'ai parlé si sou- 
vent dans ces études. 

NYMPHIS. ÀVG 

SACRVM 

PRO. SAL. C. IVL. 

SVPERI. PROC 

AVGG 

PROV. SICILIAE 

IVL. ARISTIAN 

LIBERIA 



( 313 ) 



ADDITIONS. 



Page 25. — A ranicle Aquwy j'ai mentionné quelques 
inscriptions conservées à Baden. J'ignorais alors ce que 
m'apprend un rapport de M. de Gaumont (1) , qu'il existe 
en cette ville un petit musée , qui a recueilli un certain 
nombre de monuments romains, des bas-reliefs, des 
autels, divers fragments, et plusieurs autres inscrip- 
tions : je citerai les suivantes qui sont votives , et dont 
la première donne à Mercure un surnom inconnu : 

IN. H. D. B. 

DEO. MERCVR. 

ERCPRVSO 

IN.H.D.D. 

D.NEPTVNN 

CONTVBÉRNIO 

NAVTARVM 

CORNELIVS 

AWQVAOTVS 

D.S.D 

?• 45. — Je n'ai connu qu'une seule inscription 
trouvée à Wisbaden , où Frèret dit qu'il n'existe rien 
d'antique. Depuis l'impression de l'article Aquœ Mat- 
tiacœ, le basard m'a fourni encore celle-ci en l'honneur 
d'Apollon , avec un surnom qui paraît gaulois (2) : 

(1) Bulletin monufnenial, tom. IX, pp. 257, 258. 

(2) OreUi, JnscripL lat. sel , tom. l, p. 359, n. 2059. 



( 314 ) 

« IN.H.B.B. 

ÀPOLLINI. TOV 

TIORIGI 

L. MÀRINIVS 

MAEimA 

NTS. ^. LEG. VIT. GEH. [ÂL]EXAN 

D[RI] ANAE. VO 

TI. COMPOS 

P. 187. — Dans l'inscription de Junius Rufus à 
Rome, j'ai copié une erreur de M. Rouard. M. le mar-, 
quis de Lagoy me met à même de la rectifier, en m'ap- 
prenant que les sigles funéraires d. m. ne se lisent point 
sur le monument. On pourrait donc regarder l'inscrip- 
tion comme honorifique, ce qui lui donne plus d'intérêt. 

P. 196. — L'article suivant a été complètement ou- 
blié à sa place naturelle, qui doit être avant Luteva. 

JVLIOMAGUS. 

C'était la capitale du peuple de la Gaule Lyonnaise que 
César appelle Andes (1), Lucain , Andi (2) , Pline, et 
Tacite , Andecavi (3) , et dont les médailles d'argent 
et de bronze portent aussi la légende andeg. (4). Elle 
est mentionnée comme telle par Ptolemée (5), et sur 
la Carte de Peutinger (6). Son identité avec Angers est 

(1) De bel. GaîL , n. 35 ; III , 7 ; VH , 4. 

(2) Pharsal. , I , t. 439. 

(3) Plin., NaL kisL, IV, iS (32) ; — Tacit., Annal. » IH , 41. 

(4) Mionnet , Descripi. de médailles , tom. 1 , p. 80 , nn. 204 , 205. 

(5) Geogr.Uy7[S). 
(6)Segin. I>b. 



( 515 ) 

un point de géographie coïnparée à Tabri de toute con- 
testation (1). 

Cette ville possède, ou a possédé, de nombreuses anti- 
quités, sur lesquelles, à défaut d'histoires locales, 
on peut consulter des recherches spéciales faites par 
M. Bodin (2). Ce ne sont pas seulement, comme ailleurs, 
des médailles, des poteries, des débris peu importants; 
mais encore des bijoux d'or, une urne en porphyre , des 
fragments de colonnes^ des chapiteaux, des frises, des 
sarcophages, des inscriptions funéraires, des restes, 
plus ou moins importants, de constructions romaines. 
On a mentionné des murs d'enceinte, un amphithéâtre, 
un théâtre, des thermes, dont une grande salle , pavée 
en mosaïque, fut découverte au commencement du 
xvii"** siècle. Il y a assurément, dans tout cela, bien des 
motifs pour penser que les eaux minérales qu'on connaît 
aujourd'hui à Angers (3) , furent autrefois connues et 
exploitées par les habitants romains de Juliomagus. 

P. 243. — Mon article d'Evaux venait d'être tiré^ 
lorsque j'ai reçu de M. le docteur Darchis , inspecteur 
adjoint de cet établissement, une lettre pleine de ren- 
seignements sur les antiquités romaines de ce lieu, 
accompagnée d'un plan pour en faciliter l'intelligence. 
Je suis encore à temps de mettre à profit cette obli- 
geance , en donnant à mes lecteurs quelques-unes des 
notions les plus intéressantes qui me sont fournies par 
M. Darchis , et dont voici le résumé. 

(1) D'AnTille, Notice de la Gaule , pag. 393 ; — V^alckeiiaer> 
Géographie des Gaules, tom. I, p. 375. 

(2) Mém. de la société des antiq, de France , tom. III , pp. 219-241. 

(3) Pâtissier > Manuel des eaux minérales ^ p. 556* 



( 316 ) 

Jusqu'en 1831^ on n'avait connu à Evaux ique denx 
piscines romaines et quelques autres indication^ des 
thermes antiques. Depuis la formation d'une société 
qui en est devenue propriétaire, les fouilles ont été 
poussées beaucoup plus loin , et ont donné lieu à de 
nouvelles découvertes. Aujourd'hui le nombre des pis- 
cines me parait être au moins de sept, y compris un 
grand bassin circulaire, entouré d'une banquette échan- 
crée et pourvue de degrés, aux points qui donnent issue 
aux sources. Trois de ces piscines sont aussi munies de 
sièges en forme de gradins ; trois n'ont pas de sources 
propres , mais étaient alimentées par les puits supé-^ 
rieurs. « Toutes ces piscines, me dit mon correspon- 
» dant , sont fondées sur béton et revêtues de marbre 
» blanc , ou de calcaire du Berri ; à l'exception de celle 
» n*' 19 qui a été taillée dans le roc... Toutes parais- 
» sent avoir été voûtées , ainsi que l'indiquent les por- 
» tions de murs restées debout , et quelques fragments 
» de mosaïques , assez considérables pour faire f econ- 
» naître une forme cintrée, devant s'adapter à une 
» voûte. » Quant aux puits romains de forme ronde 
ou carrée , tous construits en béton , le plan qui m'a 
été envoyé parait en indiquer neuf. 

On peut mentionner, comme se rattachant aux ther- 
mes antiques : deux baignoires en marbre blanc de 
forme et de grandeur ordinaire ; un objet en plomb de 
forme quadrangulaire, ayant de côté 20 centimètres, et 
creux au-dedans , qu'on a présumé avoir servi à une 
pompe; l'embouchure d'un conduit en plomb, et plu- 
sieurs tuyaux en cuivre ; une salle pavée en marbre , à 
l'entrée de laquelle on s'est arrêté , pour ne pas nuire 



( 317 ) 

aux constructions modernes ; des restes d'une voix ro- 
maine de 8 à 9 mètres de largeur, bordée dans une 
partie de son cours par deux murailles. Je laisse encore 
parler M* Darchis pour quelques particularités cu-^ 
rieuses. « Le n** 15 présente à son extrémité supérieure 
» une espèce d'auge , d'une longueur de 3 à 4 mètres , 
» sur un mètre de large , et dont les côtés ont une hau- 
» teur de 35 à 40 centimètres : elle portait dans la 
» contrée le nom de Bain de César.... La piscine n"" 3 
» est entourée de 3 côtés d'un mur où ont été pratiquées 
» des embrasures, pareilles à celles que nous laissons 
» aujourd'hui pour former les placards, et qui proba- 
•» blement avaient la même destination , c'est-à-dire 
» servaient de vestiaire... Quant aux eaux froides..., 
» on retrouve dans leur distribution le même caractère 
» de grandeur et de prévoyance : de larges conduits 
» d'un mètre carré , creusés sur les flancs des deux 
» côtés , amenaient celles qui étaient nécessaires , et 
» qui étaient prises à des distances considérables, ou 
» détournaient celles en excès , etc. (1). » 

Parmi les débris antiques retrouvés dans ces fouilles^ 
nul doute que plusieurs avaient servi à la décoration 
des antiques thermes, et en annonçaient la magnificence. 
Tels sont : des portions de colonnes, de chapiteaux, de 
frises en marbre ou en calcaire blancs; un fût de co- 
lonne en marbre vert ; des tablettes plus ou moins mu- 
tilées en granit bleu, en porphyres vert et rose, en 

(1) On a retrouTé iWiOce d^un aqaecïuc à plein cintre, creusé 
clans le roc , mais obstraé aujourdliai , et qui ne donne passage qu'à 
un mince filet d'eau ; on a reculé devant les fouilles nécessaires pour 
le désobstruer, et permettre de le reconnaitre. 



(^18 ) 

marbres de diverses couleurs , ayant été employées 
évidemment à des placages ; des fragments de mosaï- 
ques grossières^ etc. On peut citer encore : des médailles 
frustes^ des vases brisés, un petit mortier à trois anses 
en calcaire veiné de bleu , une petite colonne en terre 
cuite; deux statuettes en calcaire du Berri, l'une brisée 
par le bas , l'autre y dont il ne restait au contraire que 
la partie inférieure ; un petit buste de femme en terre 
fort blanche , qui pourrait bien avoir été un ex voto de 
quelque baigneuse guérie par la vertu des eaux. On 
doit regreter une inscription sur marbre , dont on n'a 
trouvé que des fragments portant une lettre ou deux, et 
qu'il a paru impossible de rajuster et de déchiffrer. 

J'ajoute, en finissant, une observation importante de 
M. Darchis sur l'ensemble de cet établissement romain, 
et sur les travaux considérables qu'il nécessita. « Le plan 
» sur lequel s'élevaient les thermes d'Evaux, me dit-il, 
» est un carré de plus de 200 pieds, dont les côtés 
» sud -est et nord -ouest ont été nivelés et élargis aux 
» dépens d'une roche quartzcuse, sur une hauteur 
»> moyenne de 6 à 8 mètres. » 



TABLE. 



INTRODUCTION. Page 1 


Augustodurus. Page 


171 


PREMIÈRE PARTIE. 


18 


Augustomagus. 


172 


Aquœ, 


20 


Augmstonemetum, 


173 


AqtuB. 


22 


Autricum, 


178 


Aquœ Àttsciorum ? 


24 


Belicetisis Vicus, 


176 


Aquœ JBormonis. , 


25 


Briovera. 


183 


Aquœ Borvonis. 


27 


Cœsaromagus, 


184 


Aquœ Caîidœ. 


32 


Constantia. 


188 


Aquœ Convenarum, 


38 


Coriallum, 


186 


Aquœ Helveticœ, 


40 


Dea Vocontiorum, 


187 


Aquœ Matliacœ. 


43 


Dinia. 


191 


Aquœ Neriomagienses» 


45 


Durocoriorum. 


192 


Aquœ Nisineiû 


81 


Ingena. 


198 


Aquœ Onesiœ. 


89 


Luteva. 


196 


Aquœ Segeste» 


71 


Mediolanum, 


ib. 


Aquœ Segete. 


78 


Noviomagus, 


200 


Aquœ Sextiœ, 


86 


Rotomagus. 


204 


Aquœ Siccœ» 


93 


Samarobriva. 


206 


Aquœ Tarbeîîicœ» 


96 


Stahatio. 


209 


Calentes Aquœ. 


101 


Sulim, 


210 


Divona. 


113 


Tullum. 


211 


Fons Tungrorum, 


114 


Ura. 


212 


Griselum, 


117 


TROISIÈME PARTIE. 


218 


Indesina ? 


121 


Ain. 


221 


Luxovium ou Lixovium. 


122 


Césériat. 


ib. 


Nemausus. 


130 


Alpes ( Rasses- ). 


222 


Ucetia. 


134 


Manosque. 


*. 


Vicus Aquensis. 


136 


Ardèche. 


223 


Ussubium. 


141 


Rourg-Saint-Andéol 


ib. 


SECONDE PARTIE. 


144 


Celles ou Selles. 


224 


Alba. 


14.8 


Desaignes. 


228 


Alesia, 


148 


Aude. 


226 


Aquœ Allobrogum. 


183 


Aleth. 


ib. 


Aquœ Granni. 


189 


Rennes-leS'Rains. 


ib. 


Arelate, 


161 


AVETRON. 


229 


Argentoraium 


164 


Sylyanès 


ib. 


Avaricum, 


167 


Calvados. 


ib. 


Augtuta, 


170 


VatoD. 


230 



'AL. Page 


232 


NiftYREk Page 


1 277 


^haader-Aîgaéf. 


%h. 


Saint-Honôréi 


ih. 


Ides on Ydes. 


235 


Saînt-Parîze, 


278 


Vic-en-Carladès. 


236 


Fontaine-des-Yetiàs . 


279 


CuTE-D'OR. 


237 


Nord. 


281 


Saint-Seiùe. 


ih. 


Saint-4inand. 


ih. 


tiatBUSE. 


239 


Orne. 


283 


Evaux. 


%b. 


Fontaine-d&^la-Hetse. 


t^. 


611E. 


243 


PuT-DE-DÔME. 


28^ 


Àurel. 


ib. 


La Bourboule. 


ih. 


Montelimar^ 

■ 1 


244 


Châteauneuf. 


386 




245 


Pont-Gibaud. 


287 


s. 


ih. 


Saint-Mart. 


ib. 


iXE (Haute-). 


246 


Vic-le-Comté. 


289 


causse. 


ib. 


Pyrénées (Hautes-). 


ih. 


ibarthe-de-RÎTièreb 


247 


CaatereU. 


ib. 


^1 

.AULT. 


248 


Pyrénées-Orientales . 


290 


BalaraCk 


ih. 


Bains-d' Arles. 


ib. 


IcËRE. 


251 


Escaldas. 


296 


Allerard. 


252 


Vernet. 


297 


La Motte-les-BainSé 


253 


Rhin (Bas-). 


298 


Pont-de-BeàuToisin» 


256 


Nierderbronii. 


ib. 


Saunaj. 


257 


Rhône. 


300 


Uriage 


258 


Charbonnières. 


ib. 


^.ôir-bt-<]her. 


264 


Seine-Inférieure . 


301 


SainUBenis-sur-Loire . 


ib. 


Forges. * 


ib. 


lOIRE. 


265 


Sainte^M argnerite . 


302 


Sail-lez-Châteaumorand. 266 


Somme. 


303 


Salt-en-Donzj* 


ih.^ 


AbbeTÎUe» 


ib. 


.OIRET. 


267 


Vosges. 


304 


Fontaine-Kle-rEtuTée» 


ib. 


Plombières» 


305 


«OZËRE. 


269 


Yonne. 


307 


Bagnols. 


ib. 


Prusse Rhénane» 


308 


Javols. 


271 


Roisdorff. 


ib. 


('Iarne. 


273 


Satoie. 


309 


Sermaise. 


ib. 


Menthon. 


t6. 


Meurthe. 


ib. 


Grand duché de Bade. 


3ie 


Nancy. 


ih. 


Badenyiller. 


ib. 


Pont-à-Mousson. 


274 


Conclusion. 


311 


^fOSELLE. 


275 


Additions. 


313 


Saint-ÀTold. 


ih. 


Juliomagus. 


314 







UBRARY 



<^7 



DATE DUE 





































































































STANFORD UNIVERSITY UBRARIES 
STANFORD, CAUFORNIA 9430i